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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mercredi 1 décembre 1993 - Vol. 32 N° 72

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et modifiant d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Onze heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Joly): Alors, bonjour. Il me fait plaisir de vous accueillir dans la maison de la démocratie et de vous souhaiter la bienvenue, et ceci, dans le cadre de consultations particulières. En fait, le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi 142, qui est la Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et modifiant d'autres dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. MacMillan (Papineau) remplace M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine); M. Fradet (Vimont) remplace M. Leclerc (Taschereau) et M. Dufour (Jonquière) remplace M. Jolivet (Laviolette).

Le Président (M. Joly): Et M. Parizeau remplace M. Blais. Merci.

Alors, je vous fais lecture de l'ordre du jour. Aujourd'hui, nous entendrons la Commission de la construction du Québec, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ-construction), le Conseil du patronat du Québec, le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international) et l'Association de la construction du Québec.

D'entrée de jeu, je suis prêt à reconnaître M. le ministre, qui aura sûrement des remarques préliminaires, suivi par M. le député de Jonquière qui aura aussi des remarques préliminaires, jumelé avec M. le député de Joliette. Alors, à chacune des deux formations j'accorde 20 minutes. Et, aussi, M. le député de Drummond aura 20 minutes de remarques préliminaires et tout autre parlementaire qui voudra bien s'exprimer sous forme de remarques préliminaires.

Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

Remarques préliminaires M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. On entreprend aujourd'hui des travaux pour le projet de loi 142. On va échanger avec les partenaires. Depuis le dépôt du projet de loi, M. le Président, je me suis restreint d'intervenir. Ce n'est pas parce qu'on n'avait rien à dire, ce n'est pas parce qu'on ne pouvait pas répondre, mais c'est tout simplement que je n'ai pas voulu ajouter au climat qui dessert, dans un premier temps, la cause de la construction et, deuxièmement, c'est une tache à ce qu'on souhaite que soit notre Québec. (11 h 40)

Avant d'entendre les partenaires de l'industrie, il me semble essentiel qu'on rectifie certaines déclarations qui ont été véhiculées depuis le dépôt du projet de loi et qui rendent extrêmement difficile la qualité de débat qu'en requiert un comme celui d'un projet de loi dans l'industrie de la construction. C'est déjà difficile par lui-même; l'industrie de la construction et certains autour de cette table peuvent en témoigner. Ça dure depuis fort longtemps. Il me semble qu'on ne devrait pas en ajouter en interprétant ou en véhiculant des choses qui sont contraires à la vérité.

Dans un premier temps, M. le Président, j'aimerais rappeler que le projet de loi 142, dans le secteur de la construction, fait suite à deux projets de loi, 185 et 186, projets de loi qui ont été respectivement adoptés en juin 1992 et décembre 1991, auxquels s'ajoute 142, auxquels s'est ajouté le Sommet. Tout ça, c'est un tout quand on traite de l'industrie de la construction. Donc, tenter d'«isoler», à partir de 142, que les parties n'ont rien en main pour s'adresser au problème du travail au noir dans l'industrie de la construction, c'est faire abstraction de l'ensemble des outils que l'Assemblée nationale a mis à la disposition des parties.

Et vous vous souviendrez que, de ces deux projets de loi là, 18 outils — et c'est comme ça que je les ai qualifiés — sont dans les mains des parties, tant à la Commission de la construction du Québec qu'à la Régie du bâtiment du Québec, qui sont les deux organismes, un du côté, bien sûr, de tout l'aspect, là, des travailleurs de la construction, la Régie du bâtiment, les entrepreneurs, les licences et tout ça. C'est un tout, ça.

Qui siège à la Commission de la construction du Québec? Qui siège à la Régie du bâtiment? En d'autres mots, qui utilise les outils que le législateur a mis à leur disposition pour contrer le travail au noir? Un très grand nombre des partenaires qu'on va entendre aujourd'hui.

Certains légers consensus au sommet de la construction. Mais certains voulaient s'adresser au travail au noir en disant: Gouvernement, là, avant qu'on vous dise pour une dernière fois: Mêlez-vous donc de vos affaires — parce que, ça, ils sont forts pour nous dire: Mêlez-vous donc de vos affaires, au gouvernement — mais, avant ça, par exemple, ils ont dit: N'oubliez pas de donner plus de pouvoirs aux inspecteurs de la CCQ, n'oubliez pas de nous donner un crédit d'impôt de 10 %. N'oubliez pas! Mais, avant de vous mêler de vos affaires, par exemple, donnez-nous encore des outils de plus.

J'ai pensé qu'il était tout à fait normal, comme

responsable de celui qui a présenté, piloté ces législations-là, qui sont 185 et 186, dans lesquelles, je répète, il y a 18 outils permettant de contrer le travail au noir, de demander aux parties: Qu'est-ce que vous en avez fait, de ça? Comment avez-vous coordonné l'activité des organismes sur lesquels vous siégez? Qu'est-ce que vous avez fait pour coordonner les inspections? Comment avez-vous utilisé ça depuis les dates que j'ai données tantôt?

Parce que, ça, ça me semble essentiel aussi. Parce que, autrement, comme législateur, c'est tout ce qu'on avait à faire. C'est de dire: Oui, on va vous donner des nouvelles législations, oui, on va vous donner des nouvelles lois, oui, on va vous donner de nouveaux droits, sans s'occuper de quelle façon ils utilisent les outils qu'on a mis à leur disposition. Je pense qu'il est important comme législateur, surtout, de regarder ces choses-là. Il y a 19 mesures. Le projet de loi 142 propose une saine compétition dans la légalité et amorce l'adaptation au marché.

On a également tous entendu la situation concernant les avantages sociaux dans l'industrie de la construction. On a entendu des affirmations qui disaient qu'en déréglementant le résidentiel, tel qu'il est proposé, on prive 25 000 salariés de ces avantages-là. M. le Président, quand plusieurs de ces salariés-là, et je vais prendre les chiffres qu'ensemble on a entendus soit lors de la prolongation du mois d'avril ou celle du mois de juin, ou même dans les lois auxquelles je viens de référer, 185 et 186, quand les parties elles-mêmes sont venues nous dire qu'elles estimaient qu'entre 25 000 000 et 35 000 000 d'heures étaient effectuées au noir dans l'industrie de la construction — je vais reprendre leurs chiffres à eux, puis je vais prendre leur proposition la plus minimum, 25 000 000 d'heures — est-ce qu'on pourrait reconnaître qu'une partie de ces 35 000 000 — j'en prends 25 000 000 — sont effectuées par des entrepreneurs dans l'industrie de la construction et exécutées par des travailleurs de l'industrie de la construction?

Quand ils acceptent d'exécuter 25 000 000 d'heures — et si c'est moins je vais y aller, mais je pense qu'à 25 000 000 on joue de façon, là, prudente — quelle est la préoccupation de ces travailleurs-là quand ils acceptent d'exécuter 25 000 000 d'heures au travail au noir? Quelle est leur préoccupation de leurs avantages sociaux? Il faut se la poser, cette question-là, parce qu'il est trop facile de toujours viser le gouvernement, quel qu'il soit. C'est un dossier difficile, le secteur de la construction, on le sait tous. S'ils sont conscients qu'ils privent la collectivité québécoise d'une qualité de vie, qu'ils mettent en péril des acquis sociaux — parce qu'on répète ça souvent, nous tous qui sommes législateurs — et qu'ils privent les avantages sociaux de leur régime d'environ 80 000 000 $ par année...

On va en parler, aujourd'hui, de la situation financière, des avantages sociaux dans l'industrie de la construction. Puis quelle est la réalité des avantages sociaux dans l'industrie de la construction? Il faut s'en parler aussi. en 1992 — et ça, c'est toutes des informations que j'ai obtenues de la commission, qui sera le premier témoin devant nous aujourd'hui — il y a 97 447 salariés qui ont contribué, parce que la loi les oblige. donc, ils ont inscrit des contributions. mais, de ces 97 447 salariés qui ont contribué, et eux et leur employeur, il y en a 40 166 qui n'ont pas réussi à accumuler 500 heures en 1992, ce qui signifie que 42 % des travailleurs n'étaient pas éligibles au régime d'assurance, pourtant, auquel ils ont contribué.

Au deuxième semestre de 1993, il y avait seulement 17 600 des 34 000 salariés ayant enregistré au moins une heure dans le résidentiel en 1992 qui étaient assurés. Autrement dit, la moitié ne sont pas éligibles parce qu'ils n'ont pas accumulé suffisamment d'heures. Puis, si je prends les salariés qui ont enregistré des heures dans le résidentiel seulement, ils sont 23 000, puis seulement 12 200 étaient admissibles au régime, soit environ la moitié. Puis je le répète, ces chiffres m'ont été fournis par la Commission de la construction. Donc, il y a lieu de se questionner puis de ramener le problème dans sa véritable dimension. De dire qu'on fait perdre des droits à 25 000 quand les chiffres nous indiquent qu'il y en a 50 % seulement qui ont pu se qualifier... Il faut dire les choses telles qu'elles sont, autrement on ajoute à la difficulté du secteur de la construction.

Il y a lieu de préciser qu'au niveau du régime d'assurance, même s'il y a déréglementation partielle du secteur résidentiel à compter du 1er janvier 1994, les salariés demeureront assurés jusqu'au 30 juin 1994, puisque c'est à cette date que les certificats d'assurance deviennent renouvelables. Donc, pour les six prochains mois, tous ceux qui ont accumulé des heures en 1993 vont voir renouveler leur carte pour les six prochains mois. Donc, dire qu'on fait perdre tout ça à tout le monde demain matin, ce n'est pas dire la vérité. Entretemps, la carte MEDIC, les soins dentaires, les lunettes, l'assurance-vie, l'assurance-salaire, l'assurance-voyage vont demeurer les mêmes acquis jusqu'en juin 1994.

Concernant le régime de retraite, ce qui a été acquis avant le 1er janvier 1994 le reste. Le salarié pourra continuer de contribuer pour les heures faites dans le secteur réglementé et continuer d'accumuler une rente. Le salarié qui ne voudra plus travailler dans le secteur assujetti, après deux ans, pourra retirer sa contribution — «actuariellement», tout ça est comptabilisé, avec les intérêts accumulés — et, par exemple, l'investir dans un REER. On a beaucoup de déclarations alarmistes qui, il me semble, là, ne collaient pas à la réalité. (11 h 50)

Au niveau de la qualification, M. le Président, on a dit: C'est le retour à la jungle. N'importe qui va pouvoir oeuvrer dans le secteur de la construction sans qualification. Dans un premier temps! Le régime licence d'entrepreneur, il est maintenu tant dans le secteur assujetti que dans le non assujetti. Ce n'est pas vrai que, parce que le secteur résidentiel devient désassujetti,

quiconque peut s'installer entrepreneur demain matin. Ça prendra toujours une licence émise par la Régie du bâtiment.

La qualification est maintenue pour les électriciens et les plombiers. Elle se fera auprès de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre plutôt que de la Commission de la construction. Pour les autres métiers, les diplômes du ministère de l'Éducation serviront de référence de qualification, comme c'est le cas pour la plupart des autres secteurs d'activité au Québec puis ailleurs dans le monde.

Les détenteurs actuels de certificats de compétence compagnon puis des certificats de compétence occupation pourront les conserver et les renouveler auprès de la CCQ, comme le prévoit la réglementation actuelle, et pourront retourner quand ils le veulent dans les secteurs assujettis. Par exemple, à chaque année, on se dit toujours: Bon, il y a 120 000 et quelque détenteurs de cartes, on en élimine 25 000 ou 30 000 parce qu'ils n'ont pas déclaré d'heures. Mais, comme ils sont compagnons, ils n'ont qu'à en faire la demande à la Commission de la construction du Québec, et leur carte leur est automatiquement renouvelée. Et ça, c'est année après année. Et pourquoi c'est nécessaire? Parce qu'un tas de gens qui oeuvrent pour les villes, pour les commissions scolaires, pour les institutions privées ont ces exigences-là pour postuler ou pour remplir des emplois. Donc, ils renouvellent leur carte, qui est enregistrée à la CCQ, mais pour laquelle ils n'enregistrent pas d'heures, année après année.

Ça, ça se passe, là... Ce n'est pas nouveau de cette année. C'est de même. Parce que les premières préoccupations que j'ai eues comme ministre du Travail il y a trois ans, je me disais: Comment ça se fait que vous dites qu'il y a 120 000 gars dans la construction, puis que, quand on renouvelle les cartes, on en renouvelle rien que 80 000, 81 000? Où ils sont, les autres? Et c'est l'explication qu'on m'a donnée. Et sur demande, une fois que vous avez déjà détenu cette carte-là, sur demande, même si vous ne rapportez pas une heure à la Commission de la construction, votre carte vous est renouvelée.

Les détenteurs actuels de certificat de compétence apprenti pourront conserver leur certificat en enregistrant une heure à la Commission de la construction au cours des 14 prochains mois. Les apprentis qui accumulent des heures dans le secteur hors construction pourront éventuellement faire reconnaître cette expérience acquise pour être admis aux examens de qualification de la CCQ.

Une autre affirmation qui a été véhiculée: Avec la déréglementation, on va se retrouver au salaire minimum. À ce que je sache, dans la rénovation, qui, elle, a été déréglementée depuis 1988, comme citoyen québécois, quand on fait appel pour des travaux de rénovation chez nous, à ce que je sache, je ne me souviens pas encore d'un citoyen québécois qui m'ait dit: Moi, j'ai payé au salaire minimum. Et pourtant, c'est déréglementé depuis 1988. Et on sait, on sait tous que les travaux qui sont exécutés au noir ne sont pas payés au salaire minimum non plus. Il est urgent que l'industrie s'adapte à ses marchés, puis à la capacité de payer des consommateurs, puis des donneurs d'ouvrage.

Concernant le consensus du Sommet, on a affirmé que le ministre ne respecte pas les consensus du Sommet. Tant lors de la consultation qu'au Sommet lui-même on a répété qu'il était urgent d'adapter l'industrie au marché. On a invité les parties. Parce que c'étaient des mises au jeu, le Sommet. C'est comme ça qu'on l'a présenté. C'est la première fois qu'il y avait un sommet depuis 25 ans dans l'industrie de la construction. Donc, ce n'était pas un sommet traditionnel où les gens s'étaient entendus d'avance, et on arrivait là, et tout ça était, là, comme on dit... tous les fils étaient attachés. Ce n'était pas ça, cette sorte de sommet là. C'étaient des mises au jeu importantes qu'on voulait faire. On voulait voir les véritables intentions en public des parties. Vous regarderez dans le cahier de propositions. On a parlé de déréglementer des secteurs comme l'installation de balayeuses centrales, l'installation de gouttières, les paysagistes, les systèmes d'alarme. Quel a été le vote là-dessus? 15-15.

Bien sûr, bien sûr, ceux qui ont assisté au Sommet pourront en témoigner. Quand on a parlé du travail au noir, on a fait référence aux propositions que je vous ai dites tantôt: Que le gouvernement fasse ci, que le gouvernement fasse ça. Mais des parties autour de la table, qui se plaignent amèrement d'en souffrir énormément, je n'ai entendu aucune solution concrète pour dire: Voici ce que, nous, nous sommes prêtes à faire. Et pourtant, je l'ai dit au Sommet et je le répète, quand il y a des travailleurs qui exécutent des travaux au noir, c'est parce qu'il y a des employeurs qui acceptent de les payer.

Le découpage de l'industrie en quatre secteurs. La proposition du Sommet, c'était trois. Certains ont proposé cinq, d'autres ont proposé quatre. Donc, ce qu'on retrouve dans le projet de loi, c'est quatre secteurs. Une ou plusieurs conventions? Ceux qui ont assisté au Sommet, encore une fois, pourront le dire. Il s'est pris des votes, mais, dans les minutes qui ont suivi la prise du vote sur celui auquel il est référé le plus souvent, les parties ont dit: Houp! On s'est trompés, ce n'est pas comme ça qu'on aurait dû voter. Si c'était à reprendre, on se reprendrait autrement. Le lendemain, sur un débat identique — parce qu'on scindait les motions — sur ce même débat identique, il y avait unanimité contre. Il y a même eu une proposition avec un porte-parole unique pour les quatre secteurs, et il n'y a eu que le proposeur et le secondeur de cet organisme-là qui l'ont soutenue, tout le monde» était contre.

Et, dans les remarques de fermeture du Sommet — il est important de le dire — chacun des organismes a dit: Je veux bien clairement indiquer que je veux assumer la responsabilité de mener la négociation dans mon secteur. Et pourtant, ils oeuvrent dans des secteurs diversifiés, comme on dit aussi. Mais pour eux il est extrêmement important qu'ils assument cette responsabilité-là.

Alors, il me semble que ça aussi, c'est important de le dire, parce que, autrement, on se base, pour faire des discussions dans un sujet difficile, à partir de données qui ne collent pas à la réalité.

On a entendu des affirmations — il faut que je termine bientôt, M. le Président — qu'on retrouve avant le rapport Cliche: La violence va réapparaître. Pour la violence, je ne ferai que dire qu'une industrie qui est incapable de se discipliner autrement que par la violence mérite-t-elle une protection de l'État? Puis je m'explique. Avant le dépôt du projet de loi 142, selon un bulletin de l'AECQ, Paramètres, daté du 12 novembre 1993: Relations avec les syndicats, climat sur les chantiers. Sur les relations de travail, si le climat des relations de travail s'est amélioré depuis 15 ans sur les chantiers de construction au Québec, le résultat du sondage indique que les situations de violence sont encore présentes. Ceux qui sont le plus souvent confrontés à ces situations sont les employeurs ayant effectué plus de 50 000 heures en 1992, et ce, quel que soit le secteur d'activité où ils oeuvrent. une forte majorité de grandes entreprises disent faire face à des grèves illégales, au chantage, à l'intimidation puis au vandalisme. notons que ces grandes entreprises embauchent la majorité des salariés de l'industrie — et j'ai une, deux, trois, quatre, cinq — et que 60 % des grandes entreprises disent avoir déjà vécu des situations de grève illégale, 74 % des grandes entreprises disent avoir déjà vécu des situations de chantage, 38 % disent avoir vécu une situation de voies de fait, 73 %, des situations d'intimidation et 71 %, des situations de vandalisme. alors, quand on dit, là, que depuis cliche tout ça s'est assaini, il faut regarder la façon dont ça se faisait et maintenant. (12 heures)

En conclusion, il est important de remettre certaines dispositions du projet de loi dans leur juste perspective: le maintien d'une approche que considère l'industrie de la construction comme un champ d'activité unifié, puis en réunissant ses différents intervenants qui sont les entrepreneurs, les associations représentatives, les salariés selon leurs intérêts communs et leurs spécificités; responsabiliser les parties, une incitation au développement de l'emploi, de la productivité en réduisant le fardeau administratif des entreprises; bien sûr, avec le retrait de l'article 51, diminuer le rôle de l'État; une valorisation du travail licite, laquelle constitue un élément essentiel de la relance de l'industrie; un encouragement à la mobilité des entrepreneurs puis des travailleurs de l'industrie tout en maintenant l'exercice de la liberté syndicale.

En terminant, M. le Président, je rappellerai que ceux qui étaient au Sommet sur l'industrie de la construction se souviendront que j'ai déclaré que le défi dans l'industrie de la construction — c'était au Sommet, et il est aussi vrai aujourd'hui — le défi des partenaires de l'industrie de la construction, c'est de placer les intérêts supérieurs de l'industrie au-delà du corporatisme de certaines de ses composantes. C'est ça, le véritable défi. Au cours de ces deux jours de consultation, il est important que soit établi un juste partage entre les intérêts des participants et ceux de l'industrie de la construction.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. le ministre.

Je vais maintenant reconnaître M. le député de Jonquière, s'il vous plaît.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Oui. M. le Président, j'écoute attentivement, depuis le début des audiences, le ministre du Travail concernant le climat qui existe dans l'industrie de la construction actuellement. Le diagnostic posé décèle certainement une étude exhaustive des problèmes, mais le résultat, les conclusions sont exactement très différentes puisque, s'il y a une situation explosive, il faut dire que ça a été amené en grande partie par l'attitude et le fonctionnement que le gouvernement a adoptés depuis la fin de la dernière convention collective, du dernier décret. Rappelons-nous qu'à deux occasions il y a eu des audiences pour écouter les parties et qu'à deux occasions le ministre a prolongé le décret en repoussant vers l'avant la conclusion de ce décret-là. À la deuxième reprise, il a été un peu plus loin en disant: On tiendra un sommet.

Lorsqu'il y a une situation explosive, lorsqu'il y a des problèmes, moi, je pense qu'il est peut-être un peu tard pour décider qu'il y aura des sommets, puisque déjà les germes de dissension sont en place.

Ce Sommet, il faut carrément avouer que ça s'est fait très rapidement et, en même temps, que les intervenants n'ont pas eu plus de temps qu'il n'en faut pour pouvoir se prononcer sur la question. On tient un sommet et le ministre, par ses propos, vient de nous avouer carrément qu'il y avait de l'improvisation, puisque le lendemain les intervenants voulaient changer d'idée et changer d'opinion. Donc, on peut déduire que le Sommet a été fait sous pression puis a été improvisé. Il me semble qu'on aurait eu le temps pour des choses aussi poignantes, aussi vraies puis aussi complexes. On aurait pu prendre le temps de donner au temps de trouver ces réponses, puis en même temps aux intervenants de bien réagir et de bien s'assurer que c'était ça.

On fait le Sommet, le consensus sur quelques questions, mémoire au Conseil des ministres, et, lorsqu'on regarde puis qu'on examine le projet de loi, ce n'est plus la même chose. C'est quoi qui se passe entre la fin du Sommet, les consensus, puis le mémoire au Conseil des ministres du ministre du Travail et les consensus qui ont été dégagés? On a en main le mémoire du Conseil des ministres. On sait les propositions que le ministre a faites concernant ce sommet. On parle de régime de négociation, de division de l'industrie en secteurs, et on parle que les entreprises ont des problèmes, de la capacité de payer des consommateurs, on parle des entreprises, de la main-d'oeuvre, des litiges

avec les autres provinces, donc de la mobilité, du statut de l'entrepreneur, du travail au noir. Est-ce que vraiment, actuellement, ce qu'on nous propose va changer ou va améliorer la situation du travailleur?

Parce que, en dehors des conventions collectives, en dehors des entrepreneurs et des syndicats, il y a aussi des employés. Est-ce que les employés... Est-ce qu'on peut se poser la question, ce matin: Est-ce que les employés y trouvent leur compte? Est-ce que les syndiqués trouvent leur compte?

Je vais vous dire que j'essaie de ne pas en rajouter. Je pense que le ministre s'est plaint, à un certain moment, qu'on ne lui posait pas de questions, mais je trouve qu'il y en a pas mal qui lui sont posées puis qu'il n'a pas beaucoup de réponses à donner. Vis-à-vis de l'ensemble des syndiqués, est-ce qu'ils trouvent leur compte dans le projet de loi qu'on a? Moi, je vais vous dire carrément, avec mon statut qui a été déjà celui d'un travailleur pendant de nombreuses années, je serais inquiet du projet de loi qui est proposé et je m'interrogerais sincèrement sur les résultats. Est-ce qu'on crée de l'emploi supplémentaire, est-ce que c'est de nature à donner du travail? Parce que c'est ça, la vraie question. Les employés, pourquoi ils manifestent? C'est parce qu'ils n'ont pas de travail. Il y a plus de 50 % des employés qui ne travaillent pas.

Ce matin, je regardais la Banque de Montréal qui, elle, sait que le projet de loi est déposé. Elle connaît les tenants du projet de loi. Qu'est-ce qu'elle dit? L'industrie de la construction résidentielle au Québec a connu, en 1993, sa pire année en 10 ans. Et, pour cette année, la Banque de Montréal voit peu de progrès dans la construction.

La Société canadienne d'hypothèques et de logement, qu'est-ce qu'elle dit, elle, par rapport à ça? Elle aussi connaît le projet de loi. Voici ce qu'elle dit: Ni la construction résidentielle ni les reventes des maisons existantes ne connaîtront d'amélioration marquée en 1994. Société centrale d'hypothèques. Donc, qu'est-ce qu'on nous propose actuellement? Pas d'amélioration dans la construction. Donc, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas.

Le travail au noir. Est-ce que vous pensez qu'on a trouvé une réponse au travail au noir? Vous l'avez dit, en 1980, la loi 186 était là. Quand elle a été présentée, c'était en fonction justement de contrer une partie du travail au noir. On regarde dans votre mémoire, les mesures ne sont pas encore appliquées. Après un an, les mesures pour contrer le travail au noir ne sont pas appliquées. Pourquoi on fait des lois? Est-ce que c'est pour se donner bonne conscience? Est-ce que c'est pour dire aux gens: Vous voyez, on travaille? C'est pour se donner un simulacre d'engagement, là, vis-à-vis de la population? Je vous dis, lorsqu'il y a un projet de loi, ou les lois, on les applique, ou on les enlève, ou on les change. Mais ce n'est pas ce qui s'est produit. Ce sont des lois nouvelles. Et on ne les applique pas.

Moi, je trouve qu'à ce moment-là on a erré quelque peu, parce que, dans votre mémoire, vous parlez de favoriser le développement de l'emploi et la compétitivité, vous me parlez de maintenir la paix sociale et industrielle. Je pense qu'on est mal partis, M. le ministre, au moment où on se parle. On parle de valoriser le travail au noir et la relance de l'industrie.

Parlons donc des quatre conventions collectives que vous nous proposez ou que vous proposez par votre projet de loi. Le consensus, à ce que je sache, était à l'effet qu'il y ait une convention collective principale avec quatre sous-tables pour négocier chaque secteur différemment. On ne retrouve pas ça dans votre projet de loi. On enlève la table centrale, puis on dit: C'est quatre sous-tables, puis vous donnez le rôle à l'AECQ de jouer le chef d'orchestre. Autrement dit, aucune responsabilité. Et vous dites: Ça va coûter moins cher aux entreprises. Quand on sait que non seulement elles vont payer leur syndicat particulier, mais qu'en plus elles vont payer pour faire partie de l'AECQ, donc elles vont payer en double. Est-ce que vous pensez que ça va coûter moins cher? Est-ce que vous pensez que ça va coûter moins cher en négociations? Ça va augmenter les coûts. Ils vont travailler doublement et triplement. (12 h 10)

Et qu'est-ce qui va arriver si vous faites ça? Vous allez changer complètement les règles du jeu. Et vous ferez appel à un cinquième syndicat, tout à l'heure, qui sera sur place, qui, lui, ira réglementer ce que vous voulez déréglementer. Et tantôt il y aura un cinquième syndicat, et qu'est-ce qu'il va faire, le cinquième syndicat? Il va cloisonner sa partie, et vous verrez, voir. J'invite les gens qui seront sur le secteur industriel, sur le secteur commercial, à aller sur la petite construction résidentielle, si vous persistez dans ce que vous nous proposez. À moins de faire fi ou d'être méconnaissant complètement du domaine syndical, du syndicalisme, moi, je ne vois pas de quelle façon ça n'arrivera pas à ces conclusions-là. Vous nous en promettez des très belles et des dangereuses, parce que ça va être difficile à vivre. Parce que tantôt on a besoin d'un certificat pour travail, puis tantôt vous nous dites: Bien, ce sera l'accréditation du ministère. Ça fait qu'on va chevaucher d'un bord à l'autre, puis tout va être beau, tout le monde va être gentil, puis tout le monde va être parfait. Mais il n'y a pas plus de travail pour autant. Donc, si la proposition nous avait été apportée à un moment où la construction avait été florissante, où il y avait eu beaucoup de travail, je ne sais pas jusqu'à quel point le projet de loi que vous nous proposez aurait apporté des changements aussi profonds puis aussi grands vis-à-vis de l'attitude que les partenaires, actuellement, ont.

Il n'y a pas beaucoup de monde qui applaudit à votre projet de loi. Est-ce que ça va augmenter la construction, la déréglementation? Vous nous dites, et des gens prétendent, parce que vous avez été sur ce terrain-là, que la construction résidentielle devrait, en principe, baisser de 4000 $. Si on examine la situation comme telle, une construction résidentielle, c'est 100 000 $ à 125 000 $, une petite construction normale. Ça, ça comprend les coûts de construction, les coûts de

terrain, les profits de l'entrepreneur, les matériaux, les coûts des professionnels, et le reste, et le reste. Qu'est-ce qu'on contrôle? Parce qu'il faut penser, là, que les gens qui font des affirmations, on va peut-être avoir l'occasion de leur poser la question, puis ils vont nous répondre à quelque part. Ça veut dire que, si on ne contrôle pas les coûts des matériaux, si on ne contrôle pas le coût des terrains, si on ne contrôle pas les coûts du travail professionnel, si on ne contrôle pas les permis, il nous reste une place — puis on ne contrôle pas non plus le profit de l'entrepreneur — il nous reste une chose qu'on peut contrôler, c'est le travail de l'employé.

Donc, si on se fie aux chiffres avancés, 20 % du coût de la construction, donc le travail de l'employé, c'est à peu près 20 000 $. Baissez le coût de la maison de 4000 $, c'est sur 4000 $. C'est le seul point qu'on peut contrôler, un cinquième, ce qui veut dire que le salaire du salarié, de l'ouvrier, bien, il faut qu'il baisse absolument de 20 % si on veut atteindre les 3000 $ à 4000 $ avancés par des gens, là, qui se prétendent dignes de foi, qui prétendent protéger le consommateur. On peut peut-être vouloir protéger le consommateur, mais au détriment de qui? Mais ça, c'est la question. C'est une question de fond. Le travailleur, il a le droit de gagner sa vie. Et, si le travailleur ne gagne pas suffisamment d'argent pour payer ses avantages sociaux puis ses fonds de pension, qui est-ce que vous pensez qui va prendre la relève? Le gouvernement du Québec! Parce que, en bout de ligne puis en bout de course, c'est le gouvernement qui est, en fait, le dispensateur des besoins ou qui répond aux besoins de la population. Et il n'y a rien de prévu, dans ce projet de loi, qui nous permette de penser que le gouvernement va prendre la relève.

La formation des travailleurs. On parle souvent de la déréglementation. Le ministre Tremblay serait ici, le ministre de l'Industrie et du Commerce, que ce serait le fun de l'entendre parler un peu puis de venir nous exposer la situation, lui qui fait beaucoup de bulles en disant: Ça prend de la formation, puis il faut aller sur le marché mondial. Bien, les entrepreneurs, savez-vous, là, qu'actuellement c'était le seul endroit, dans l'industrie de la construction, où l'entrepreneur puis les employés payaient leur formation? Il s'en faisait. Mais, là, en déréglementant, qu'est-ce qu'il advient de ces gens-là? On les laisse pour compte. Plus de formation! Et, si on en fait, qui va payer pour? Certainement pas l'employeur. C'est les autres. Donc, c'est encore le gouvernement.

Dans les bénéfices sociaux, la CSST et tous les grands ensembles, Commission de construction, sont tous en déficit. Qui va être les cotisants de tout ça? Il n'y en aura plus, parce qu'on est en train de les enlever! Il y a des questions de fond.

Et, moi, je ne suis pas surpris de voir l'attitude des gens sur le terrain. Je déplore, bien sûr, qu'il y ait de la violence. Moi, je ne pense pas que je serais une personne violente. Je n'essaie pas de créer des problèmes, des psychoses. Mais il y a une chose certaine, c'est qu'il faut se mettre dans la peau des gens. On a tendance, des fois, lorsqu'on est élu, à oublier les gens qui nous ont élus. Les gens qui nous ont élus, normalement, c'est les gens qui sont sur le terrain, c'est des gens ordinaires, puis malheureusement, aujourd'hui, il y en a peut-être 20 % à 25 % qui ne travaillent pas, avec le taux de chômage qui existe. Ces gens-là, moi, j'essaie de ne pas les oublier. C'est pour ça qu'à toutes les semaines je force pour m'en aller dans mon comté, pour aller rencontrer mon monde. Puis ce monde-là, il nous donne des messages, puis ils nous dit ce qui ne va pas. Ça fait que ce qui ne va pas, c'est ça: il n'y a pas d'emplois, ça va mal, les gens, ils paient trop de taxes, puis on utilise mal leurs taxes. Et là on arrive dans un climat où tout est en place pour faire ce qui se produit là.

Est-ce que vous trouvez qu'il y a quelque part, actuellement, dans le système, qui fonctionne? Si les gens entendent parler de coupures dans la santé, de coupures dans l'éducation, d'augmentation des coûts, de rationalisation, ce message est transmis. Ce message-là qu'on dit là, on l'applique au gouvernement. Mais ce message-là, comme responsables, on sait bien que tout ce qui bouge sur le terrain, il le reçoit, lui, ce message-là: contrebande, travail au noir. Tous les gens voient tout ça et tous les gens deviennent inquiets puis deviennent avec une position ou une attitude qui devient agressive, parce que les gens, ils ne peuvent pas en prendre plus qu'ils en ont. Ils en ont par-dessus les oreilles. Puis on répète ça, nous autres aussi. On fait partie du problème, des fois, on ne fait pas partie de la solution.

Moi, je vous dis, M. le ministre, qu'avec le projet de loi que vous avez là vous avez tout en main pour tout changer les règles, mais briser ce qui existe actuellement. Moi, ce que je pense, s'il y avait quelque chose que vous vouliez faire... La mobilité de la main-d'oeuvre, il y a eu une espèce de proposition du Conseil du patronat. Est-ce que celle-là, on devrait la retenir puis l'arranger comme il faut? On pourrait peut-être l'examiner. Il y a vraiment un problème de frontières, ça, je l'admets, de ce côté-là. Il n'y a personne ici, autour de la table, qui va le nier. Ça pourrait être ça.

Mais, quant aux autres parties de votre projet de loi, qui est mal ficelé, qui ne semble pas répondre aux interrogations puis aux problèmes existants, je pense qu'on devrait se remettre au travail sérieusement, faire une étude beaucoup plus adéquate, puis s'entendre pour que dans un certain temps... Là, après ça, on pourrait réagir, mais en fonction de ce que les partenaires nous disent. Pas en fonction de tenir une commission parlementaire, d'écouter, d'entendre, mais de ne jamais mettre en place ce qu'on pense. Dans le fond, le diagnostic est bon, mais les solutions qu'on propose ne sont pas adéquates.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Jonquière.

Je vais maintenant reconnaître M. le député de Joliette, s'il vous plaît.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Ce n'est pas en cinq minutes que je pourrai dire tout ce que j'aurais à dire, ha, ha, ha! mais je vais essayer de situer le débat dans un contexte, en tout cas, où mon expérience m'a aidé à le situer.

Quand l'industrie de la construction brasse, vous remarquerez que c'est toujours dans les moments où le travail se fait rare. Quand vous avez 50 % de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction qui ne travaillent pas, donc, 50 % des travailleurs qui essaient de se partager quelques jobs additionnelles qui se créent et que le gouvernement vient vous dire: Bien, vous pourrez être plus à vous chicaner pour la même job, demandez-vous pas pourquoi ça brasse. Je suis surpris qu'on n'apprenne pas des expériences passées puis qu'on ne profite pas, justement, d'un moment où on a suffisamment un plancher d'emploi extraordinaire pour procéder à certaines formes de déréglementation. Mais, quand on vient justement ajouter le nombre qui a à se disputer un emploi puis qu'on vient en ajouter, demandez-vous pas pourquoi des individus se mobilisent facilement. Ça, c'est premièrement.

Deuxièmement, il me semble qu'on aurait des leçons du passé à retirer. Vous vous rappellerez qu'on avait recommandé de façon très claire, il y a quelques années, la planification des travaux de l'État, et ça, ça n'a jamais été fait, la planification des travaux des sociétés d'État, des gouvernements pour maintenir un plancher de l'emploi qui a de l'allure. Ça n'a jamais été fait. On n'a jamais fait non plus ce qu'on recommandait d'instituer, un genre de régime. Il y a eu beaucoup de promesses, Sexton-Picard, par exemple. À quoi on a abouti avec ça? Des grandes promesses, de grandes envolées, mais jamais du concret qui aboutit. Et ça, à mon point de vue, on ne peut pas continuer à faire des promesses, puis à ne jamais les réaliser puis à faire autrement que de ne pas créer de la frustration.

Moi, M. le Président, je me demande bien pourquoi le gouvernement ne retire pas simplement ce projet de loi là, carrément, puis qu'il ne dit pas: Écoutez, on va adopter une mécanique pour forcer ces gens-là à se parler. Parce que c'est drôle qu'ils se parlent. Ils réussissent même à signer des documents. Et, à leur grande surprise, le ministre en donne plus que le client en demande.

Je prends l'APCHQ, qui n'en demandait pas tant que ça, qui a même signé des documents en demandant moins que ça. Je ne sais pas ce qu'on vise, à ce moment-là, comme gouvernement, si ce n'est pas à mettre le feu aux poudres et, après ça, à faire de grandes envolées pour les appels au calme. À attiser le poêle, il ne faut pas se surprendre que la flamme monte de temps en temps! On ne comprend pas où vous allez.

Par exemple, dans un mémoire au Conseil des ministres, le ministre dit: Ça va être effrayant comme ça va être difficile à accepter que l'ensemble des salariés, là, pour les régimes d'avantages sociaux... Après qu'il a écrit ça: Pas de problème, on déréglemente pareil. Lui, il dit que ça va créer un problème majeur à ce niveau-là. Il faudrait être un petit peu cohérent. Il faudrait avoir un discours. Pas parler des deux côtés de la bouche. (12 h 20)

Moi, je pense que le ministre a une belle occasion. Je pense que les parties sont conscientes de l'état explosif dans lequel on se retrouve présentement et qu'il pourrait fort bien, à mon point de vue, fixer un échéancier, un calendrier où il ne serait pas là — justement, parce qu'à chaque fois que le ministre s'en mêle c'est pire — pour dire aux parties: Vous avez un échéancier, sinon voici ce qui va s'appliquer. Mais vous avez un échéancier pour vous entendre, coordonner, ordonner les actions.

Quand le ministre, par exemple, dit à l'AECQ, comme petit suçon ultime: Vous serez les grands coor-donnateurs de la négociation, ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire qu'il a écouté Omer Rousseau, puis qu'Orner Rousseau, qui n'aime pas l'AECQ, a décidé qu'elle ne serait plus dans le décor. Mais, pour ne pas avoir l'air trop fou vis-à-vis de l'AECQ, il dit: Bon, bien, vous coordonnerez. Ce n'est pas de même que ça marche, ça! Ce n'est pas de même que ça marche, ça, dans la vraie vie.

Quand on a décidé de vous recommander, à l'enquête Cliche, qu'il y ait un porte-parole unique, justement pour ne pas que les patrons se couillonnent les uns et les autres, c'était pour mettre de la coordination dans les relations de travail au niveau patronal. Qu'il ne vienne pas chialer, aujourd'hui, qu'ils disent qu'il déblatère contre les syndicats qui ne s'entendent pas, c'est pareil pour le patron. S'il y a quelque chose, c'est pire. Donc, moi, je suis bien à l'aise de vous dire que ce n'est pas avec votre projet de loi 142 que vous allez régler les problèmes.

Je vous en donne un petit exemple. Dans mon milieu, moi, ils vont aller syndiquer le plus gros entrepreneur dans le domiciliaire, puis les autres, ils ne les syndiqueront pas du tout. Qu'est-ce qui va arriver avec le plus gros entrepreneur dans le domiciliaire? Il va craquer! C'est la loi de la jungle qui va revenir. C'est pour ça que je l'ai dit quand j'ai parlé sur la loi 142. Vous avez des recettes qui ne cadrent pas avec la réalité de l'industrie.

Je suis prêt à collaborer en autant que le ministre soit ouvert. S'il n'est pas ouvert, bien, il en paiera le prix.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Joliette.

Maintenant, M. le député de Drummond.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Oui. Merci M. le Président. M. le Président, d'entrée de jeu, mes remarques et mes propos vous paraîtront probablement, à l'occasion, comme — je vais utiliser le terme à la mode — «politically non

correct». Mais, d'entrée de jeu, le premier constat que je fais, M. le Président, et j'ai eu l'occasion à deux reprises, sur deux bâillons, de le dénoncer, à un moment donné, c'est la mainmise de l'exécutif sur le législatif, puis faire en sorte qu'on prenne les gros bras pour passer des lois de cette Assemblée nationale. J'ai eu l'occasion à plusieurs reprises, M. le Président, de dire aussi que la journée où on perd le respect de nos institutions, qu'elles soient parlementaires, qu'elles soient corporatives, qu'elles soient syndicales, eh bien, à ce moment-là, il y a un endroit où les citoyens frustrés, lorsqu'ils ne voient pas d'issue de leurs porte-parole, vont régler les problèmes. Et on les voit aujourd'hui, M. le Président.

Je déplore la violence qui a été faite aux élus, parce qu'il faut connaître notre système ici, M. le Président, pour savoir que les députés d'une formation ministérielle sont les porte-parole seulement. Et un vieil adage dit, M. le Président, qu'on ne tire jamais sur le messager qui apporte des mauvaises nouvelles. Alors, je demanderais, moi, à ce moment-ci, et on le voit à la lecture des journaux encore ce matin, que tout le monde, tous les dirigeants en appellent aujourd'hui au calme et au respect. Mais le respect va passer aussi, M. le Président, par le respect des institutions.

Mon premier constat: j'aurais souhaité, moi, dans la foulée de ce à quoi on s'était engagés, une commission parlementaire, ici, en 1990, alors que j'étais l'adjoint au ministre du Travail du temps, tenir une commission parlementaire itinérante pour être capables de saisir les vrais besoins de la construction, alors qu'on avait une période d'accalmie, parce qu'on voyait déjà poindre à l'horizon les problèmes auxquels on aurait à faire face. Alors, on n'a pas eu cette commission-là. Alors, le premier constat, M. le Président: je déplore qu'en tant que membres de la commission de l'économie et du travail on n'ait pas été invités à titre d'observateurs au niveau du sommet de la construction. Ça nous aurait permis peut-être de mieux saisir les différentes facettes de cette industrie.

Deuxième constat, M. le Président, le problème auquel on fait face aujourd'hui dans cette industrie, et je regardais ce que j'avais dit dans le Journal des débats lors de la commission parlementaire du 30 avril: On a une industrie, et le ministre a raison, qui est compliquée, qui est ardue, et ce n'est pas facile de faire, à cause de la nature de la fonction, à cause de la nature, aussi, du travail et du climat dans lequel on a à vivre, et à cause de la force physique aussi qui est demandée.

Lorsque, et je le soutiens et je l'ai soutenu, on fait accroire à des travailleurs que par régler le travail au noir on va régler le problème de l'industrie, c'est un leurre, M. le Président. Je me suis fait leurrer en tant que parlementaire pendant longtemps. J'y ai cru, comme de bonne foi les parties patronale et syndicale probablement aujourd'hui le reconnaissent. Alors, deuxième constat, M. le Président: on manque d'un plan de gestion intégrée, ici, du domaine de la construction.

J'ai l'impression, aujourd'hui, à la lecture des événements et du dépôt de la loi 142, qu'on essaie de lever la maison, de faire le solage, de demander à quelqu'un de poser le placoplâtre, de faire les joints puis de poser la brique. C'est ça qu'on demande aux gens de la construction. Alors, je pense, M. le Président, que c'est complètement incompatible avec le milieu.

Alors, je m'attendrais, moi, M. le Président, dans les plus brefs délais, et je me serais attendu, avant le dépôt et avant la tenue du Sommet, au dépôt d'un livre — appelons-le beige, vert, jaune, rouge, la couleur que vous auriez aimée — où on aurait pris chacune des facettes du domaine de la construction, M. le Président.

La première facette, je l'ai élaborée. On a un problème démographique qui fait en sorte que, plus on avance dans le temps, plus le domaine du logement locatif va être à la baisse d'ici l'an 2000. Lorsque je regarde les statistiques que mon collègue de Jonquière citait, je pourrais rajouter celles du Mouvement Desjardins qui nous prévoit la même chose, parce que le vieillissement de la population fait en sorte, M. le Président, qu'il n'y a plus de place avant l'an 2000 pour un «accroît» de locatif. On s'en va en décroissance.

Si on regarde le périmètre d'âge qui avance, M. le Président, les baby-boomers à un état avancé, il n'y a plus de place pour le résidentiel à partir de 1995, et, d'ores et déjà, on prévoit des réductions. Alors, je me serais attendu, moi, à avoir le premier volet, un portrait démographique montrant les besoins de chacune des couches de la société à donner aux partenaires du milieu de la construction.

Deuxièmement, et mon collègue de Joliette lui a touché, M. le Président, j'étais un de ceux, depuis les cinq dernières années, qui disaient qu'il faudrait essayer de prendre tous les donneurs d'ouvrage au niveau des institutions, au niveau gouvernemental, au niveau municipal; être capables de faire un portrait de l'industrie. Je me serais attendu — et je pense qu'on a raison d'espérer aujourd'hui, avec les mécaniques que nous avons, avec les mécaniques de prévision que nous pouvons avoir, M. le Président — à prévoir d'ici les 10 prochaines années quels vont être les donneurs d'ouvrage au niveau gouvernemental.

Parce que, si j'étais un travailleur de la construction, aujourd'hui, je serais drôlement inquiet, moi, lorsque je regarde l'Environnement, où on a joué avec des budgets qui sont allés jusqu'à 650 000 000 $ par année d'infrastructures. Aujourd'hui, on parle plutôt d'entre 100 000 000 $ et 170 000 000 $. Donc, nécessairement, ça va être une perte d'emplois. Lorsque je regarde les besoins au niveau du ministère de l'Éducation, au niveau des écoles, même chose, M. le Président. Lorsque je regarde les grandes infrastructures routières, même chose, M. le Président. Alors, je pense, moi, qu'on a été capables de prévoir nos grandes infrastructures au niveau des 10 premières années et de «tabler» ce portrait-là, M. le Président.

Troisième tableau et troisième constat, dans cette même veine, M. le Président, dans un plan de gestion intégrée, je me serais, moi, attendu qu'on fasse le

portrait de la main-d'oeuvre. Elle est vieillissante à bien des égards, notre main-d'oeuvre. Il est important qu'on dresse le portrait pour deux aspects: pour être capables de planifier nos besoins à moyen et long terme et nos besoins de formation professionnelle. Parce que ça aura un effet, M. le Président, au niveau du ministère de l'Éducation, pour être capables de planifier aujourd'hui, au niveau de chacune des commissions scolaires, les cours que nous aurons besoin de donner. Et ça ne sert à rien de leurrer les jeunes, de leur faire accroire qu'il y en aura, du marché de l'emploi, lorsqu'on peut voir d'ores et déjà que dans les prochaines années on n'en aura pas. Et ça, ça aurait été un outil de travail qu'on aurait pu donner aux décideurs de la construction.

Aussi, M. le Président, puis c'est une réalité de la vie qu'il faut constater, avec la perte d'emplois un peu partout, les centrales syndicales ont des problèmes, à l'heure actuelle, majeurs au niveau de leur appartenance, au niveau du nombre de cotisants chez eux. Ça, c'est une réalité, aussi, qu'ils ont des remises en question, des réajustements au même titre que ceux auxquels les milieux économiques auront à faire face. On aurait été capables de prévoir aussi, M. le Président. Alors, je me serais attendu, M. le Président, à un plan de gestion intégrée. Je me serais attendu aussi à voir les effets du libre-échange, de la libre circulation des biens, des personnes, des capitaux et des services.

M. le Président, bref rappel. Le 7 juillet, dans un document où 10 partenaires étaient réunis, on n'a pas été capables de s'entendre. On a dit: On réglera ça plus tard. Le 23 août 1992, à Charlottetown, on a fait le même constat. Aujourd'hui, M. le Président, on voit ce qui est la pomme de discorde. Et je peux comprendre, moi, le député de Papineau de se battre pour sa région, parce qu'il dit: Je m'en viens avec un problème de main-d'oeuvre chez moi. Puis il est logique qu'il le fasse pour représenter ses gens, M. le Président. Eh bien, ce problème-là, M. le Président, n'est pas résolu par le projet de loi.

Et vous allez dire: Pourquoi le député de Drummond en fait un cas? J'ai des entreprises, chez moi, M. le Président, qui oeuvrent au niveau des textiles, au niveau du tapis. Et, dans une lettre, ici, qui était adressée, M. le Président, le 2 novembre 1993, par les donneurs d'ordre au niveau du «housing» public, on a fait amendement, qui s'appelle l'amendement 6.5.3, qui disait: Submit with the bid form a letter verifying that no materials or labour included in the bid submission originate from Québec. Et là c'est la libre circulation des biens qui est en jeu, M. le Président. Je ne pense pas que le projet de loi va le régler, parce que d'ores et déjà le milieu ontarien a dit qu'il rejetait ce qui était avancé comme épreuves. Donc, le projet de loi ne réglera pas, même, la mise en danger d'emplois chez moi, M. le Président.

Autre constat, M. le Président: lorsqu'on est législateur, on se doit de s'assurer aussi qu'on a une vision de l'avenir, parce qu'un projet de loi doit être porteur de solutions, doit être porteur d'encadrement pour régler notre vie démocratique et notre vie de société. J'ai le projet de loi 142 devant moi et j'ai aussi un autre projet de loi, M. le Président, qui a été déposé, qui s'appelle le projet de loi 116. (12 h 30)

Dans le projet de loi 142, M. le Président, on dit qu'on va limiter les conventions collectives à trois ans, dans le domaine de la construction, avec une date d'échéancier, le 31 décembre. Lorsque je regarde le projet de loi 116, moi, il est dit que le projet de loi modifie le Code du travail, puis qu'on va permettre des projets de longue durée. Est-ce que 116 aura préséance sur 142 ou 142 sur 116? Voici une autre interrogation que j'aimerais voir réglée à un moment donné, M. le Président.

M. le Président, on arrive à un domaine où il va falloir s'asseoir, où on va être obligés de trouver des solutions pour être capables de mettre un peu d'ordre. Et je souscris, moi, qu'à ce moment-ci on devrait mettre un temps d'arrêt au projet de loi 142, le laisser un peu de côté, M. le Président, avec les mécaniques que nous avons, pour être capables de dresser un vrai portrait de chacun des paramètres du domaine de la construction, être capables de les déposer et de dire maintenant aux partenaires: Voici l'image de votre industrie pour les 10 prochaines années. Parce qu'à l'heure actuelle M. le ministre va me répondre: Oui, elle existe en pièces détachées ici et là. Et, lorsqu'on fait la négociation, et je reconnais M. le ministre comme étant un expert, souvent aussi les règles du jeu font qu'on garde un paramètre qui nous avantage face à eux autres.

Mais ça a aussi pour effet, M. le Président, si on met ce portrait global là, de dire aux travailleurs et aux travailleuses: On a maintenant à gérer la décroissance au moins pour les huit à 10 prochaines années. Ça met beaucoup de réalité. Si on a été capables, avec les parties patronale et syndicale, d'arriver, pour la création d'emplois, pour la sauvegarde des emplois, avec des contrats sociaux qui se sont étendus sur plusieurs années, bien, moi, je fais encore confiance au gros bon sens et à la sagesse populaire, lorsqu'on aura tablé toutes les données sur la table, M. le Président, pour qu'on soit capables d'arriver à régler les problèmes.

Je vais écouter aussi, M. le Président, avec ouverture ceux qui viendront témoigner devant nous, au cas. Puis je ne prétends pas et je n'ai jamais prétendu que j'avais le monopole de la vérité. Je suis encore perméable et je suis encore ouvert pour accepter, M. le Président, des idées nouvelles. Et j'espère aussi, parmi les autres paramètres, que j'entendrai aussi, dû au vieillissement de l'industrie... Peut-être qu'il faudrait innover, M. le Président, et regarder un plan de mise en retraite, aussi, accéléré. Autrefois, on avait PATA, qui a été remplacé par un nouvel organisme.

Une autre chose, M. le Président, un autre constat que je fais: je mets en garde d'utiliser le levier de créer, surtout au niveau du résidentiel type bungalow, entre deux guillemets, d'essayer d'utiliser ce volet-là pour accélérer, parce qu'on a fait Mon taux, mon toit, oui, il y a eu des avantages, M. le Président, mais, à

cause de la situation que je vous signalais, du vieillissement de la main-d'oeuvre, on est en train de créer une «débalance» au niveau de la revente de la maison de deuxième main. Alors, si on accélère davantage la maison neuve, il y a un danger, M. le Président, et on doit le prévoir en tant que législateurs, essayer d'imaginer des impacts sur la maison de deuxième vente, parce que, encore là, lorsque je regarde tous les grands indices, il y a un marasme à l'heure actuelle. Dans le jargon de leur métier, on dit: C'est un marché d'acheteurs maintenant.

Mais, M. le Président, on se doit d'être minutieux avant d'ouvrir cette valve-là. Et j'espère qu'il y aura une étude approfondie, parce qu'on ira toucher la maison de revente, avec le vieillissement de la population de ceux et celles qui ont cumulé leurs biens. Et leur seul bien-être qu'ils ont réussi à mettre de côté est cette propriété qu'ils ont réussi à payer, M. le Président. Et si, lorsque la revente viendra, elle est telle que les indices nous le prévoient, à savoir qu'il y aura encore un marché d'acheteurs, à partir de 1995, qui sera plus bas, bien, on met en danger les revenus accumulés de ces catégories de citoyens et de citoyennes. Alors, il va falloir être minutieux si on veut user, M. le Président, de cet outil-là.

Un autre outil, M. le Président, est celui du contrôle du travail au noir. Comme je vous le dis, je ne pense pas avoir le monopole de la vérité. Mais, moi, une chose qui m'étonne en 1993, avec tous les domaines de l'informatique que nous avons, c'est qu'on ne soit pas capables de prendre nos jeunes mathématiciens, nos jeunes informaticiens, puis de nous dire à l'heure actuelle... À partir d'un permis qui est obligatoire dans la plupart des villes du Québec, on n'est pas capable de prendre ce permis-là. Puis, lorsque je regarderai tous les intervenants qui viendront aujourd'hui, on va me décortiquer le nombre d'heures par catégorie d'emplois pour construire une maison, qu'elle soit unifamiliale ou qu'elle soit de deux, ou trois ou quatre logements, et même la construction industrielle.

Lorsque j'étais un industriel, M. le Président, j'exigeais des soumissions, et de les avoir détaillées. Je ne peux pas comprendre, moi, qu'on ne puisse pas faire une relation entre le permis émis et la valeur et entre les statistiques accumulées, puis qu'on soit capables, M. le Président, de dire au donneur d'ouvrage: Maintenant, tu es responsable de payer les dus pour la CSST, les dus pour les fonds de pension, les dus syndicaux et tous les retraits, que ce soit au niveau de la santé... Je ne peux pas concevoir qu'on ne soit pas capables, M. le Président, avec ce qu'on connaît aujourd'hui de l'informatique, de la faire, cette chose-là, puis de dire au donneur d'ouvrage: Tu es maintenant responsable.

M. le Président, on le fait déjà au ministère du Revenu. Si vous êtes un travailleur autonome, on vous exige à tous les trois mois de faire des remises. Or, si le donneur d'ouvrage, M. le Président, est responsable, avec un modèle qui a été évalué, de dire: Voici ce de quoi tu es responsable, puis, lorsque je mets par informatique, moi, ton permis de construction émis sur ta maison, il n'y a rien de payé en lieu des redevances, tu es le propriétaire qui a donné l'ouvrage, tu es le contrac-teur, tu paies; tu es la municipalité, tu paies, qui que ce soit qui ait donné l'ouvrage, M. le Président...

C'est sûr et certain que ce ne sera pas facile. Il va falloir être imaginatif, mais je pense qu'on a les outils modernes, aujourd'hui, pour être capables de se les donner.

Là, ça va être la première pièce, M. le Président, qui va être hors de tout doute pour essayer de regarder. Puis M. le ministre a raison parce que, lorsque je regarde — et, moi aussi, je suis un peu familier et non un expert en construction, mais un peu familier, et j'ai un milieu aussi qui est dynamique au niveau de la construction — alors, lorsque je regarde les salaires payés, moi, entre quelqu'un qui travaille au noir et quelqu'un qui travaille avec un contracteur, règle générale, c'est la partie qui n'est pas payée. Ce serait peut-être la meilleure manière d'être capables de garder nos grands acquis de société avec un système de cette façon-là, qui serait peu coûteux à administrer, où on aurait simplement, par législation, à dire aux municipalités et à ceux qui sont des donneurs d'ouvrage: Vous êtes obligés de prendre le permis de construction et de le donner à un organisme. Est-ce que l'organisme devrait être la CCQ ou quelque chose d'autre? Je ne m'enfargerai pas avec ces détails-là, M. le Président. Mais je pense qu'on aurait un moyen de contrôle qui ferait en sorte aussi qu'on ne mettra pas en danger, à court et moyen terme, tous les acquis au niveau de la CSST, les acquis qu'on a au niveau social.

En ce qui a trait au projet de loi en tant que tel, d'un façon plus spécifique, M. le Président, en tant que législateurs aussi, on est obligés de prévoir l'avenir. Je peux d'ores et déjà prévoir, lorsqu'on ôte la carte de compétence comme matière d'entrée... Et, quant à moi, si on veut assurer une qualité totale dans un monde de compétition, la carte de compétence est l'outil fondamental d'entrée dans quelque profession que ce soit. C'est le certificat universitaire, c'est le certificat collégial. Dans les cas de métiers de la construction, c'est la carte de compétence qui se doit d'être entrée. Parce que ce qui va nous arriver, M. le Président, parce qu'on parle de formation professionnelle, il nous arrivera que dans trois, quatre ans d'ici un travailleur ou une travailleuse des métiers de la construction qui n'aura pas été chercher ces acquis-là ne sera plus capable de se qualifier, avec les changements technologiques qu'on peut d'ores et déjà prévoir dans ce domaine-là. Et qui en paiera la facture finalement? On repellette en avant des frais de «reformation», de reclassification à des gens qui, jouant les règles du jeu, se seront introduits dans le domaine.

Alors, moi, je dis que la carte de compétence... On peut déréglementer, M. le ministre, mais en gardant un atout d'entrée: c'est la carte de compétence. On pourrait déréglementer, en tant que législateurs, le secteur de la médecine. Je pense qu'il ne viendrait à l'idée d'aucun des parlementaires ici de dire: On va ôter en

même temps le certificat universitaire pour pratiquer la médecine. Bien, moi, je m'attends, dans un contexte de gestion de qualité totale, dans un monde qui est en changement, qui est en évolution technologique... Écoutez, on est devant une industrie dont on parle aujourd'hui, puis vous l'avez déjà prévu dans vos exemptions. On parle de domotique. La maison de demain qui existera ne sera pas la maison d'aujourd'hui. Le type de construction de demain ne sera pas celui d'aujourd'hui. Il y aura des grandes parties qui seront assemblées par modules, de plus en plus à l'intérieur, pour être capables de minimiser les coûts et de nous ramener ces produits-là ici, M. le ministre.

Alors, la carte de compétence est la clé si on veut être capables de garder une main-d'oeuvre qui va être qualifiée, finalement, qui va être capable, en bout de piste — ce qui est la raison d'être de tout le monde — de donner un produit de qualité à des citoyens et à des citoyennes et des produits de qualité qu'on peut payer.

Ceci étant dit, M. le Président, j'ai fait un bref tour du tour de piste. Moi, j'espère, M. le Président, que dans un premier temps — puis je vous offre mon support pour qu'on reconduise le décret, parce qu'on a encore le moyen de le reconduire, le décret, d'ici le mois de mai — je souhaite, moi, que d'ici la fin janvier on puisse avoir un portrait de chacun des paramètres de la construction, les mettre sur la table. Et je vais faire le pont avec mon collègue de Joliette, à ce moment-là, pour dire: Entre le 1er février et le 1er mai, on vous a remis dans les mains un portrait de votre industrie, de chacun des paramètres, et je sais qu'on peut les trouver facilement, parce qu'ils existent. Ils existent en pièces détachées ici et là. Alors, qu'on dise aux partenaires maintenant: On vous a donné les outils, nous, les législateurs. On reviendra puis on regardera, après mai 1994, les moyens qu'il faudra donner à nos partenaires de la construction pour être capables, M. le Président, de bâtir une industrie où, de plus en plus, ce ne sera plus les bras de nos travailleurs et travailleuses qui seront nécessaires, ça va être les cerveaux, parce qu'on s'en vient dans une industrie qui est de plus en plus automatisée. (12 h 40)

Alors, moi, je vous tends la main, puis ma collaboration dans cette ligne, pour être capables d'apporter tous les moyens correctifs nécessaires. Prenons un temps d'arrêt, rassoyons-nous, refaisons tous ensemble nos devoirs, réabordons cette problématique-là avec ouverture d'esprit, puis je suis convaincu, M. le Président, comme mon grand-père disait, et je vais conclure avec ce qu'il me disait, que, s'il y a quelqu'un, un jour, qui est assez stupide pour faire une erreur, un autre humain peut s'asseoir calmement et la corriger. Et j'espère que ce sera ce qu'on sera capables de faire, tous les partenaires, gouvernemental, patronal et syndical, au bénéfice de la collectivité. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Drummond.

Compte tenu que le temps ne nous permettra pas d'entendre la Commission de la construction du Québec et que M. le ministre...

Il vous reste quelques minutes, je peux vous reconnaître.

M. Normand Cherry

M. Cherry: O.K. Bien, merci, M. le Président.

Bien rapidement, tout simplement pour rappeler à mon collègue qui tentait de faire une relation entre le projet de loi 116 et le projet de loi 142, simplement pour lui rappeler que, si ma mémoire est bonne, c'est la loi 290, déposée par Maurice Bellemarre, ministre du Travail en 1968, qui a placé de façon particulière le secteur de la construction à l'extérieur du Code du travail qui s'applique à l'ensemble. Donc, ça fait déjà depuis quand même fort longtemps.

Vous avez également fait un commentaire sur... Vous auriez souhaité avoir une invitation. Puis j'espère que je cite bien votre propos, là. Vous auriez souhaité avoir une invitation pour assister au sommet de la construction. Dans un premier temps, je vous dirai qu'il y a tout près de 400 personnes qui ont assisté au sommet de la construction, et la très vaste majorité y sont venus parce qu'ils ont témoigné leur intérêt, ont demandé à être présents à titre d'observateurs; et, à ma connaissance, je ne l'ai refusé à personne, personne, au contraire. Il y a eu tout près de 400 personnes qui pendant les trois jours... On a même des sessions qui ont duré jusqu'à vers 22 heures le soir, et il y avait quelques centaines de personnes qui restaient là présentes.

Donc, tout simplement pour vous dire — je l'ai déjà dit en Chambre, en réponse à mon collègue et ami de Jonquière — que, dans ma tête, il m'avait demandé s'il pouvait venir, puis je lui avais dit oui. Il ne m'a pas envoyé une lettre, je ne lui ai pas renvoyé de lettre, j'ai fait mettre son nom sur la liste des invités. Bon. C'est ça qui est arrivé.

Dans votre cas, je suis convaincu que, si vous aviez voulu témoigner de l'intérêt, si vous aviez voulu être présent, vous auriez été accommodé de la même façon que presque les 400 personnes qui étaient là, dans lesquelles, et je tiens à le dire, à le souligner, il y avait des élus de la province de l'Ontario, il y avait des gens, des hauts fonctionnaires de l'Ontario, il y avait des gens du Nouveau-Brunswick, pas à qui on a envoyé des invitations, mais parce que, eux, ils croyaient qu'il y avait là un intérêt, ils ont demandé d'être enregistrés, l'ont été et ont été présents durant les journées de session.

Ça termine mes remarques, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup. M. le ministre.

J'aimerais, pour les divers intéressés ici, vous communiquer l'ordre de la Chambre qui, en fait, nous amène à suspendre nos travaux dans quelques minutes,

là, de 13 heures à 15 heures. Donc, à 15 heures, nous reprendrons dans la même salle, et ce, jusqu'à 18 heures, et ce soir nous reprendrons nos travaux de 20 heures à 24 heures. Alors, pour ceux qui ont à planifier soit du transport ou de l'hôtel, j'ai cru bon de vous communiquer ces informations.

Donc, nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi, dans ce même salon. Je vous remercie.

(Suspension de la séance à 12 h 44)

(Reprise à 15 h 5)

Le Président (M. Joly): Alors, la commission reprend ses travaux.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Joly): M. le député...

M. Chevrette: ...bref, oui...

Le Président (M. Joly): ...de Joliette, s'il vous plaît, oui.

M. Chevrette: .. .vous me permettez, je voudrais faire une proposition au ministre, proposition qui m'a été faite sur l'heure du lunch et que je trouve intéressante et intelligente, et je voudrais vous en faire part. Le ministre pourrait y penser durant quelques minutes et, à la fin, peut-être, du premier groupe, nous dire ce qu'il en pense. Étant donné que, dans une heure, on a à peine le temps de poser une ou deux questions à des groupes, là, tout dépendant du temps qu'ils prennent, on ne vide pas un sujet. Ce que je vous suggérerais, puisque les quatre groupes syndicaux, CSD, CSN, FTQ-Construction et Conseil provincial des métiers, accepteraient de se regrouper dans un bloc de quatre heures, ce qui nous permettrait de poser toutes les questions sur la dimension syndicale. Ça m'ap-paraît être une formule intéressante, intelligente, et d'autant plus que les parties en cause acceptent de le faire. Et là les parlementaires pourraient vraiment vider le sujet du côté... Si on peut faire pareil avec le patron après, on le fera. Mais je trouve que ça serait une méthode plus intelligente de fonctionner que de questionner, deux, trois questions, et c'est fini; tu ne peux même pas vider une question de fond. Et je le propose au ministre, sachant qu'il m'a dit qu'il avait une grande ouverture d'esprit, je vais lui demander d'en avoir une petite.

Le Président (M. Joly): M. le ministre, la question est lancée. Moi, je n'ai pas d'objection à administrer la formule qui sera entendue et convenue entre les parlementaires. Alors, je me sens très à l'aise.

M. Cherry: Ce qu'on va faire, c'est qu'on va entendre le premier groupe...

Le Président (M. Joly): Oui.

M. Cherry: ...et on va y réfléchir...

Le Président (M. Joly): Bon, alors, vous...

M. Cherry: ...pendant ce temps-là.

Le Président (M. Joly): ...si je comprends bien, vous réservez votre réponse pour après...

M. Cherry: Bien sûr, bien sûr. Auditions

Le Président (M. Joly): ...l'audition du premier groupe. Donc, j'appelle maintenant les gens qui représentent la Commission de la construction du Québec à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

Alors, je connais M. Fournier, qui est président-directeur général. Malheureusement, je n'ai pas le bonheur de connaître ceux qui vous accompagnent. Alors, j'apprécierais beaucoup si vous pouviez identifier les gens qui vous accompagnent, de façon à ce que, au niveau des interventions et au niveau des galées, ces gens-là puissent être clairement identifiés.

Commission de la construction du Québec (CCQ)

M. Fournier (Alcide): Alors, M. le Président, j'ai le plaisir de vous présenter, à ma droite, M. Gilles Lemire, qui est directeur général adjoint, finances, et aussi responsable des avantages sociaux. M. Lemire est également actuaire. À mon extrême gauche, M. Jean Ménard, qui est avocat et directeur du contentieux de la Commission de la construction, et M. Jean-Luc Pilon, qui est directeur de recherche et organisation et économiste.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Alors, vous avez tous remarqué qu'il y a quatre membres au lieu de trois. Je demande aux membres de la commission si vous êtes d'accord à ce que quatre membres au lieu de trois soient présents à la table de comparution.

M. Chevrette: C'est un heureux précédent, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, merci. Alors, je vous rappelle les règles du jeu: vous avez une vingtaine de minutes pour exposer votre mémoire et, par après, la balance du temps, soit environ 40 minutes, le temps est réparti de façon égale entre les parlementaires des deux formations. Alors, M. Fournier, je vous reconnais.

M. Fournier (Alcide): Alors, je vous remercie, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, nous avons déposé un document. Alors, principalement, dans le préambule, je vais tenter de le résumer

plus rapidement. Étant donné le rôle central que joue la Commission de la construction du Québec dans l'application de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, permettez-moi, en guise de préambule, de vous la présenter.

La Commission de la construction du Québec regroupe, au sein de son conseil d'administration, les représentants des différentes associations de salariés et d'employeurs, de même que des représentants gouvernementaux, faisant de cet organisme un lieu de rencontre privilégié où les gens du milieu et le gouvernement peuvent ensemble contribuer à définir des politiques favorables au développement de l'industrie de la construction. En somme, la CCQ est le forum permanent de cette industrie.

Rôle de la CCQ. Premièrement, la Commission doit veiller à l'application de la convention collective ou du décret régissant les conditions de travail dans la construction. Ce mandat implique le maintien d'un service d'inspection de chantiers, l'exercice de tous les recours qui naissent du décret en faveur des salariés, le maintient de 12 bureaux régionaux pour servir adéquatement le territoire du Québec, la perception et la remise bi-annuelle d'indemnités de vacances, la perception des cotisations patronales et syndicales, l'administration d'un fonds de qualification de soudage, l'administration d'un fonds spécial d'indemnisation.

Deuxièmement, la Commission doit administrer les régimes complémentaires d'avantages sociaux, ce qui implique l'administration des régimes d'assurance-vie, d'assurance-salaire, d'assurance-maladie pour 65 000 salariés de la construction et dont profitent environ 200 000 bénéficiaires, l'administration d'un régime de retraite qui compte 40 000 prestataires et dont l'actif, géré par la Caisse de dépôt et de placement du Québec, s'élève à près de 4 000 000 000 $, se classant ainsi au 14e rang au Canada, la signature de quelque 250 ententes de réciprocité avec d'autres régimes canadiens ou américains. (15 h 10)

Troisièmement, la Commission doit veiller à l'application de la loi et des règlements se rapportant à la gestion de la main-d'oeuvre, dont le contrôle de la compétence des travailleurs oeuvrant sur les chantiers de construction. Ce mandat implique la délivrance et le renouvellement des certificats de compétence à près de 125 000 salariés et employeurs, la surveillance du respect des critères de priorité d'embauché régionale, l'émission de licences aux agences syndicales de placement, le maintien d'un service de référence des salariés disponibles aux employeurs.

Quatrièmement, la Commission doit veiller à l'application de mesures et programmes relatifs à la formation professionnelle de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Ce mandat, confié à la Commission en janvier 1987, implique l'élaboration et la mise en oeuvre d'un système intégré de formation et de qualification professionnelles, l'évaluation annuelle des besoins quantitatifs et qualitatifs de la main-d'oeuvre de l'industrie de la construction.

Depuis le 1er avril 1993, la CCQ assure la gestion du régime d'apprentissage en chantier, soit le suivi du carnet d'apprentissage des 28 000 apprentis, l'administration de 5 000 examens de qualification annuellement.

Cinquièmement, la Commission doit organiser périodiquement le vote d'adhésion syndicale pour établir le degré de représentativité de chaque association.

Finalement, la Commission doit également effectuer pour la Régie du bâtiment du Québec l'inspection concernant la détention des licences d'entrepreneur. Soulignons que le financement de la CCQ est assuré par les salariés et les employeurs de l'industrie de la construction.

Abordons maintenant le sujet principal de cette commission parlementaire. Le projet de loi 142 modifie de façon substantielle la Loi sur les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Le rôle de la Commission étant d'appliquer cette loi et ses règlements, il s'ensuit des impacts sur son administration et sur les services qu'elle rend à l'industrie. En effet, plusieurs activités que je viens de mentionner seraient modifiées ou abolies, alors que d'autres s'ajouteraient à nos mandats.

Nous voulons donc apporter aujourd'hui aux membres de cette commission parlementaire un éclairage basé sur notre expertise de la gestion du régime de relations de travail dans l'industrie de la construction. J'élaborerai davantage sur la déréglementation du résidentiel, l'assujettissement de la machinerie de production et la mobilité de la main-d'oeuvre.

La déréglementation du résidentiel. Le projet de loi 142 propose de déréglementer les unités résidentielles construites dans un bâtiment de huit logements et moins. Sur la base des statistiques de 1991 et 1992, 85 % des unités de logement neuf seraient ainsi déassujetties. En valeur, ce pourcentage atteint 90 % de la construction résidentielle neuve.

Le projet de loi prévoit également que les travaux de réparation, d'entretien, de modification et de rénovation dans les immeubles locatifs de huit unités de logement et moins seraient désassujettis. Sur la base du stock de logements locatifs, on estime à au moins 60 % le volume de travaux de rénovation qui ne serait plus assujetti.

En termes de valeur de travaux, la construction résidentielle représente globalement environ 8 000 000 000 $ dont 4 500 000 000 $ sont actuellement assujettis. De cette somme, 3 800 000 000 $, soit 85 % de la construction résidentielle assujettie actuellement, seraient déréglementés. Pour l'ensemble des investissements en construction, soit 20 000 000 000 $, seulement 10 000 000 000 $ sont actuellement assujettis. La modification législative retrancherait donc environ 3 800 000 000 $ de travaux, soit 38 % du champ d'application actuel.

En termes d'heures travaillées, déclarées à la CCQ, la perte est évaluée à 12 000 000 d'heures sur les 15 000 000 que représente le secteur résidentiel. Ainsi, au maximum 3 000 000 d'heures resteraient assujetties dans le secteur résidentiel, soit 5 % de l'ensemble de l'industrie. les salariés et les employeurs. si on applique aux salariés du secteur résidentiel le pourcentage de déréglementation de 85 %, on estime, selon les données fournies à la ccq par les rapports mensuels des employeurs pour l'année 1992, que, dans la construction de l'immeuble de huit logements et moins, 29 000 salariés — 30 % — y travaillaient au moins une fois; 25 000 salariés y oeuvraient de façon majoritaire, soit 26 % des salariés assujettis au décret de la construction; 20 000 salariés y oeuvraient de façon exclusive; 10000 — 10 % — travaillaient dans ce secteur, mais aussi dans d'autres secteurs. quant à l'impact sur les employeurs, avec la même base de 85 %, on estime que, dans la construction d'immeubles de huit logements et moins, 8400 entreprises — 47 % — y oeuvraient au moins une fois; 8000 entreprises — 44 % — y travaillaient majoritairement et seraient en grande partie désassujetties. compte tenu que les employeurs n'enregistrent pas tous les changements de secteur au rapport mensuel, il s'agit donc d'impacts minimums, autant pour les salariés que pour les employeurs.

Les régimes d'avantages sociaux. Voyons maintenant les effets de la déréglementation du secteur résidentiel sur les régimes complémentaires d'avantages sociaux. À titre d'administrateur de ces régimes, il me faut tout d'abord soumettre à votre attention un certain nombre d'éléments.

Il y a déjà quelques dizaines d'années, le législateur a confié l'administration de ces régimes à la Commission de la construction du Québec afin de s'assurer qu'ils soient organisés, structurés et intégrés aux régimes de relations de travail de l'industrie de la construction. Ces régimes s'inscrivent ainsi dans un principe fondamental en matière d'avantages sociaux, celui de faire partie intégrante d'une convention collective ou d'un contrat de travail. Ainsi, que ce soient les régimes d'assurance ou de retraite ou les indemnités de vacances, les avantages sociaux existant dans l'industrie de la construction ont été conçus en fonction du régime de relations de travail de l'industrie de façon à répondre à ces caractéristiques. D'ailleurs, les heures travaillées et déclarées à la CCQ sont la base des régimes. Ceci comporte un certain nombre d'avantages qu'on ne peut passer sous silence.

Premièrement, la participation à ces régimes est un incitatif, pour le salarié, à l'exercice d'un travail légal. En effet, plus un salarié rapporte ses heures, plus 11 contribue à cumuler des crédits de rente à son régime de retraite et des indemnités pour ses congés obligatoires et de vacances. il favorise également son admissibilité aux régimes d'assurance-maladie, vie, salaire pour lui et sa famille.

Deuxièmement, plus les salariés participent et contribuent à des régimes privés tels que ceux-ci, plus le gouvernement évite un fardeau social à leur endroit qu'il devrait autrement assumer. En effet, tous les travailleurs cumulent, dès leur entrée dans l'industrie, de l'argent pour s'assurer une retraite plus confortable, favorisant le désengagement de l'État à cet égard. De même, ces salariés se protègent, ainsi que leurs proches, en cas de maladie, mortalité, invalidité, etc., puisqu'ils se sont donné des régimes d'assurance répondant à leurs besoins et entièrement financés par l'industrie, réduisant ainsi, de ce fait, la charge de l'État.

Cela dit, la déréglementation proposée du secteur résidentiel aurait évidemment des répercussions sur les salariés y oeuvrant principalement ou exclusivement, de même que sur les régimes d'avantages sociaux actuels. Pour les quelque 29 000 salariés oeuvrant dans le secteur désassujetti, cela signifierait la terminaison de l'accumulation de crédits de rente dans le régime de retraite pour ceux qui y oeuvrent exclusivement, soit environ 20 000 travailleurs, avec le droit d'obtenir des prestations de départ après deux ans, comme tout autre salarié qui quitte l'industrie, une accumulation ralentie de crédits de rente pour les 10 000 qui oeuvrent partiellement dans les autres secteurs et une accessibilité aux prestations de retraite rendue plus difficile, puisque, pour profiter d'une pleine retraite à 55 ans, il faut avoir cumulé 35 000 heures.

Cela signifie également une perte d'admissibilité aux régimes d'assurance après au maximum deux ans pour 15 000 salariés et 45 000 bénéficiaires. Cela signifie, finalement, un dernier versement d'indemnités de vacances en juin prochain pour les 20 000 salariés oeuvrant exclusivement dans le secteur désassujetti, dans l'éventualité où la déréglementation serait en vigueur dès le 1er janvier 1994. un autre point important que je tiens à signaler en matière d'avantages sociaux concerne l'indemnisation de salaires à la suite de faillites d'employeurs. en 1992, la ccq a versé près de 300 000 $, soit 25 % des indemnités totales, à des travailleurs du secteur résidentiel. (15 h 20)

Maintenant, quels seraient les impacts de la déréglementation sur les régimes actuels et sur les salariés demeurant assujettis? Premièrement, le coût des améliorations apportées au régime de retraite et les montants liés à l'amortissement du déficit actuariel du régime d'assurance devront être réévalués à la hausse, compte tenu de la diminution de l'activité initialement prévue. Les travailleurs désassujettis du résidentiel transféreraient leur responsabilité à l'égard du déficit du régime d'assurance aux travailleurs demeurant assujettis. Les coûts des régimes d'assurance seraient haussés au cours des prochains mois, puisque les travailleurs qui ne pourraient plus en bénéficier sur une base des conditions régulières tenteraient de profiter au maximum des dispositions du régime. Les travailleurs du secteur résidentiel étant moins âgés, la déréglementation aurait pour effet

d'augmenter la moyenne d'âge des autres travailleurs, entraînant une hausse des coûts du régime de retraite en raison de l'augmentation de l'âge moyen des participants actifs.

La formation et la qualification professionnelles. Tout d'abord, la détention d'un certificat de compétence ne serait plus nécessaire, sauf pour les métiers d'électricien et de tuyauteur. À toutes fins pratiques, on vient d'éliminer toute forme de formation et de qualification professionnelles pour un bassin important de travailleurs. En effet, les caractéristiques de ce secteur, à savoir la petite taille des entreprises, le roulement élevé et la règle du plus bas soumissionnaire, font en sorte que les entreprises ne peuvent individuellement consacrer des investissements en formation.

De même, les travailleurs déjà qualifiés ou en apprentissage de ce secteur seraient laissés à eux-mêmes et fortement concurrencés par une main-d'oeuvre abondante et disponible mais non qualifiée. Actuellement, un régime d'apprentissage s'applique à tous les travailleurs, et il est à la charge de l'industrie. Ce régime permet l'accès à de nombreux jeunes finissant des programmes scolaires, le suivi de leur apprentissage et l'attestation de leur compétence par un examen de qualification. en ce qui a trait à l'accès des jeunes à des emplois, soulignons que l'industrie de la construction a accueilli, entre 1989 et 1992, près de 6000 nouveaux apprentis par année dont 50 % étaient diplômés par le ministère de l'éducation. comme la construction résidentielle est celle qui utilise proportionnellement le plus d'apprentis, un bon nombre y détenaient alors un accès privilégié.

La collaboration entre le ministère de l'Éducation et la CCQ a été fructueuse depuis 1988. Des programmes d'études pour chaque métier ont été élaborés, des écoles des métiers ont été mises sur pied, une carte des enseignements a été préparée et des ententes visant à intégrer les diplômés ont été négociées.

Le conseil d'administration de la CCQ devrait sans doute revoir toutes ces ententes, puisque les besoins de nouveaux travailleurs seraient quasi nuls. En effet, le bassin des salariés compétents et désirant dorénavant intégrer le secteur assujetti serait suffisant pour bon nombre d'années. Plusieurs des investissements de la part du ministère de l'Éducation seraient ainsi compromis.

Finalement, un mot concernant la qualification professionnelle des employeurs. La Commission vérifie actuellement la détention des licences d'entrepreneur délivrées par la Régie du bâtiment du Québec sur les chantiers de construction. En 1992, nous avons signalé à la Régie quelque 6200 constats d'infraction. Comme la CCQ ne serait plus présente sur les chantiers résidentiels et qu'un nombre important d'employeurs s'y trouvent, la Régie devrait y consacrer des ressources.

Le travail au noir. Lorsqu'on parle de travail au noir, le secteur de la construction résidentielle est souvent mentionné comme étant parmi les plus touchés. Si, comme plusieurs l'affirment, 25 000 000 d'heures sont travaillées au noir à l'égard du décret de la construction, nous avons déjà évalué que cela impliquait, en 1991, des pertes annuelles de l'ordre de 420 000 000 $ pour les gouvernements et les organismes publics.

Une révision de la réglementation des relations du travail dans le secteur résidentiel est souvent vue comme un moyen de réduire le travail au noir. Or, s'il est certain que la déréglementation de la construction résidentielle éliminerait, par définition, le travail au noir à l'égard du décret, il est moins évident que cela réduirait le travail au noir à l'égard du fisc, de l'assurance-chômage ou de la CSST. Plusieurs considèrent que l'exemple de la rénovation résidentielle n'a pas démontré que c'était le cas. L'industrie de la construction est de par sa nature un terrain fertile au travail au noir, qu'il y ait ou non décret de la construction. Dans la course à la plus basse soumission, une vive concurrence prévaut dans cette industrie, et l'on compte de multiples entreprises, souvent de petite taille et difficiles à surveiller non seulement dans leur application du décret, mais aussi dans celle des charges sociales ou fiscales.

Le haut taux de chômage qui prévaut dans l'industrie, actuellement, combiné à la pression des travailleurs en chômage dans les autres secteurs économiques, accentue la pression sur les salaires et la tentation de l'évasion fiscale. Avec l'augmentation des charges sociales et fiscales des dernières années et l'acceptation sociale du travail au noir, il est devenu encore plus attrayant de s'y adonner. En fait, l'inspection de la CCQ relative à l'application du décret permet de limiter le travail au noir dans le secteur résidentiel. Ce qui est rapporté à la CCQ l'est vraisemblablement aussi au fisc.

Le Président (M. Joly): M. Fournier, s'il vous plaît. Veuillez conclure, s'il vous plaît.

Une voix: Non.

Le Président (M. Joly): Oui? On peut laisser déborder puis empiéter sur le temps...

M. Cherry: Ça me tente de laisser aller, oui. Le Président (M. Joly): Parfait. Merci.

M. Fournier (Alcide): Je m'excuse, je ne pensais pas que le temps passait si vite. Ha, ha, ha! Je vais essayer de...

Alors, je vais plutôt ajouter un mot sur le financement de la CCQ. Je pense que la déréglementation... Lorsqu'on sait qu'il y a environ 15 200 000 heures déclarées dans le secteur résidentiel, on estime qu'il y en a 12 100 000 qui seraient désassujetties, ce qui veut dire, pour fins de financement, si on prend le prélèvement, la tarification, les pénalités, etc., une perte d'environ 6 000 000 $ pour la Commission de la construction, qui est déjà dans une situation financière précaire.

Au niveau de la machinerie de production, le

projet de loi 142 propose un élargissement de l'assujettissement de la machinerie de production. De façon résumée, on peut dire que, de la façon que l'article est rédigé, il laisse beaucoup de questionnements, particulièrement au niveau de la définition du mot «distributeur», qui est une notion nouvelle qui est introduite dans l'article.

Au niveau de la mobilité de la main-d'oeuvre — je passe rapidement, comme vous pouvez le constater — l'objectif est de faire entrer ou de permettre à certains travailleurs d'autres provinces de venir travailler au Québec. Ce qu'on propose dans le projet de loi, c'est de faire choisir aux 125 000 travailleurs du Québec une région de priorité d'embauché. La priorité se dessinerait de la façon suivante, ou les trois priorités qui sont prévues: c'est, un, celui qui a choisi la région et qui y réside, ceux qui ont choisi la région sans y adhérer, et les autres salariés.

Alors, au cours des prochaines années, il est probable que la disponibilité de main-d'oeuvre compétente demeure élevée, très élevée, même, si le secteur résidentiel est désassujetti. Seule la priorité numéro un risque donc d'être utilisée. En conséquence, tous les travailleurs auraient intérêt à choisir leur propre région. On maintient essentiellement les dispositions actuellement en vigueur. Les travailleurs de l'extérieur n'auraient, dans les faits, jamais accès, parce qu'ils deviennent priorité deux, et les salariés québécois seraient pénalisés puisque, en déménageant, leur choix de priorité régionale ne serait pas pour autant modifié. Les salariés du Québec ayant choisi une autre région seraient quasiment interdits dans leur propre région, alors que les travailleurs de l'extérieur ne subiraient aucun préjudice, d'où iniquité de traitement.

Le cas de la Baie James, compte tenu du peu de résidents, est particulier. Les mesures proposées en feraient l'objet d'une véritable loterie. Le salarié devrait-il la choisir s'il anticipe y avoir un emploi, au détriment cependant de sa priorité de sa propre région de domicile? Si peu de salariés la choisissaient, les employeurs seraient obligés de les embaucher en priorité, une obligation qui limiterait également le choix de l'employeur. (15 h 30)

Par ailleurs, sur le plan administratif, la Commission se verrait obligée de recenser 125 000 détenteurs de certificats pour permettre l'adhésion ou l'entrée de peut-être 500 ou 1000 travailleurs venant des autres provinces. Nous, en tout cas, sur le plan administratif, nous proposons que la règle soit inversée, c'est-à-dire que le recensement ou que la formalité de choix de la région soit exercé par le salarié venant de l'extérieur du Québec et qu'on maintienne le régime actuel pour les salariés de la construction. D'autant plus que le régime actuel, selon les dispositions de la loi, est un régime transitoire qui va prendre fin dès qu'une nouvelle convention va être signée.

Alors, M. le Président, je vais conclure là-dessus, et je vous remercie. Je peux répondre aux questions.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Fournier. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je peux apprécier la difficulté du rôle que vous avez à jouer ici aujourd'hui. Vous m'avez déjà indiqué, d'ailleurs, que ce n'est pas facile pour vous, et les informations dont on avait besoin, ça explique aussi pourquoi ce n'est pas facile. Il faut bien comprendre que vous devez gérer avec les parties, tant patronales que syndicales, et je peux apprécier la situation difficile dans laquelle vous êtes. Et je ne tenterai pas d'en profiter, bien au contraire. Je pense qu'il est important qu'on fasse ça comme il faut.

À la page 10 de votre mémoire — puis je vais aller là directement — dans le troisième paragraphe, vous dites: «Premièrement, la participation à ces régimes est un incitatif pour le salarié à l'exercice d'un travail légal. En effet, plus un salarié rapporte ses heures, plus il contribue à cumuler des crédits de rentes à son régime de retraite et des indemnités pour ses congés obligatoires...» puis tout ça. Puis je ne mets pas ce que vous écrivez là en doute, mais j'ai besoin d'une explication de votre part.

Au nom du même organisme.... Puis là je ne me rappelle pas si c'est la loi 185 ou 186, mais c'est vous qui nous aviez dit que, en moyenne, je pense qu'on pouvait parler entre 30 000 000 et 35 000 000 d'heures qui étaient faites au noir dans l'industrie de la construction. Il y a des gens qui véhiculent 25 000 000, d'autres véhiculent 35 000 000, mais je vais prendre 25 000 000. Face à ce que vous décrivez là, avec lequel, en théorie, je n'ai pas de difficulté à être d'accord — plus les gens rapportent des heures, plus ça améliore leurs avantages sociaux, leur caisse de retraite, leurs congés — comment pouvez-vous expliquer que 25 000 000 d'heures — je vais prendre le chiffre le plus bas des trois qui est véhiculé — sont acceptées d'être exécutées au noir sur 35 000 000 par des gens qui, en vaste majorité, sont des travailleurs permanents de l'industrie de la construction? Vu que ce que vous décrivez, qui est écrit ici, contribue à leurs avantages, et en ne le faisant pas, contribue à leurs désavantages, dans un premier temps, comment expliquez-vous qu'il y ait 25 000 000 d'heures qui puissent être faites au noir par ces mêmes travailleurs là dans ce même secteur là?

M. Fournier (AJcide): D'abord, on indique bien, dans le paragraphe, que c'est un avantage pour le travailleur. On n'a pas parlé de l'employeur. Deuxièmement, lorsqu'on parle du 25 000 000 d'heures au noir, nous, on n'a pas fait d'évaluation de la quantité d'heures au noir. Ce qu'on a fait, c'est un tableau démontrant les pertes de revenus des organismes publics, du gouvernement, etc., par million d'heures qui ne seraient pas rapportées. Alors, on a — et je l'ai ici — fait un tableau par 1 000 000, 5 000 000, 10 000 000, 15 000 000, 20 000 000, 25 000 000, 30 000 000 et 35 000 000. On

a arrêté là. Je pense que l'analyse de 25 000 000 d'heures a été produite par l'AECQ. En tout cas, ils pourront confirmer si c'est exact. Mais nous, comme tel, on n'a pas fait d'estimé du nombre de millions d'heures au noir. Et c'est pour ça que, dans le mémoire, on dit: Si on prend pour acquis le chiffre de 25 000 000, ça donne une perte de 420 000 000 $.

Finalement, pour revenir à l'intérêt du travailleur, il est bien évident que le travailleur a tout intérêt à cumuler le plus d'heures, par exemple, dans son régime de retraite, parce que, pour avoir une retraite avec pleine compensation à partir de l'âge de 55 ans, il doit avoir travaillé 35 000 heures dans l'industrie de la construction. Donc, il a intérêt, évidemment, à y déclarer le plus d'heures.

Également, au niveau de son régime d'assurance, le régime d'assurance, s'il fait au moins 600 heures par période de six mois, il n'a pas besoin de payer des contributions complémentaires pour être assuré, et les bénéfices s'appliquent à lui et à sa famille. Donc, c'est sûr que, pour lui, il a intérêt à déclarer ses heures. Et je pense que c'est ça qu'on voulait démontrer, l'intérêt du travailleur à déclarer les heures. Ça n'explique pas, cependant, tout le travail au noir et pourquoi les gens, finalement, sacrifient leurs bénéfices marginaux pour avoir un emploi. J'ai toujours essayé de ne pas faire de jugement de valeur, et je ne voudrais surtout pas m'em-barquer dans ce domaine-là. Je pense que les associations patronales et syndicales vont pouvoir vous dire pourquoi les gens font ça.

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Cherry: Alors, moi qui vous connais maintenant depuis bientôt trois ans, je sais que vous avez l'habileté à ne pas vous embarquer. C'est une de vos qualités prédominantes.

M. Fournier (Alcide): Ha, ha, ha!

M. Cherry: En page 13 de votre document, vous avez parlé, par exemple, de tous les actifs que fait la CCQ concernant la formation puis la qualification professionnelles. Si je m'adressais à vous en m'adressant de façon particulière aux frais directs à la formation professionnelle, les frais de cours, là, les professeurs, toutes ces choses-là. En santé et sécurité, par exemple, c'est 30 heures pour tout le monde. Il y en a que ça prend 60 heures pour d'autres sortes d'activités. Quels sont les frais directs, là, auxquels la CCQ contribue ou est-ce que ces frais-là sont déjà à la charge de l'État?

M. Fournier (Alcide): La plupart de... Les frais de dispensation de cours sont à la charge de l'État. Que ce soit le ministère de l'Éducation ou que ce soit par les programmes de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, la dispensation des cours est à la charge de l'État. Ce qui est aux frais de l'industrie, c'est la gestion du carnet d'apprentissage et le suivi des examens, ces choses-là. Notre tâche a consisté, depuis 1988, principalement, à refaire tous les cours de formation pour chacun des métiers et spécialités dans l'industrie de la construction. Il y a 28 métiers et spécialités, et il y a plusieurs occupations, là, comme monteur de ligne, soudeur, etc., qui désirent avoir des cours.

On a également monté des cours de perfectionnement, c'est-à-dire que, dans certains métiers, les travailleurs désirent avoir ce qu'on appelle des cours pointus de formation, par exemple, fibre optique pour l'électricien, etc., robotique, ces choses-là. Donc, le rôle de la Commission de la construction, c'a été de consulter la partie patronale et syndicale dans des comités professionnels de métiers pour d'abord définir ce qu'était le métier et, à la suite de ça, demander au ministère de l'Éducation d'élaborer des programmes de cours. Alors, c'est la partie de la Commission.

Il est sûr que le ministère de l'Éducation, et je dois le souligner, a consenti des investissements importants pour la formation des métiers dans l'industrie de la construction, entre autres par la mise sur pied de centres spécialisés de formation pour l'industrie de la construction. Il y en a un à Québec, il y en a un à Montréal, il doit y en avoir un sur la rive sud de Montréal, et il y a des projets pour d'autres centres. Alors, la contribution du ministère de l'Éducation a été très grande là-dessus.

Le dernier commentaire que je ferais, et c'est ce qu'on dit un petit peu dans notre mémoire, que c'est une des conséquences de la déréglementation, c'est que la plupart des programmes de subvention à la formation sont dirigés vers les entreprises et non pas vers un secteur économique d'activité. La petitesse des entreprises dans l'industrie de la construction va rendre très difficile l'obtention, je ne dirai pas l'obtention, mais la gérance de subventions pour fins de formation, et, aussi, le problème de mobilité de la main-d'oeuvre, lorsqu'on sait que les travailleurs changent très régulièrement d'employeurs, ça va être un problème pour le secteur résidentiel.

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Cherry: O.K. Donc, pour répondre à ma question de façon plus spécifique, là, ce que vous avez souligné, la collaboration du ministère de l'Éducation... Parce que ma question était sur les frais directs. Là, vous avez dit: II a fallu mettre sur pied, en collaboration avec... Vous avez parlé du contenu des cours. Il y en a 28. Bon. Ça, ce travail-là est fait. Ma question, c'est: Les profs, les matériaux, qui fait ça? Est-ce que c'est la CCQ? Est-ce que c'est sa responsabilité ou, une fois qu'elle a défini c'est quoi le contenu du cours, cette responsabilité-là est transférée au ministère de l'Éducation puis dans les écoles auxquelles vous vous êtes référé? Est-ce que j'ai bien compris?

M. Fournier (Alcide): C'est exactement ça.

M. Cherry: Bon. O.K., dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, M. Fournier, vous étiez présent, ce matin, et les chiffres que j'ai cités sont ceux qui me viennent de l'organisme chez vous. Le système qu'on a, des avantages sociaux, qui en est un, d'après l'opinion de certains, très généreux, on me dit qu'il était basé sur une perception de revenus d'un nombre d'heures assez imposant qui ne semble plus cadrer avec ce qui est la réalité présentement et dans un avenir prévisible, indépendamment de la déréglementation ou pas du secteur résidentiel, indépendamment de ça. (15 h 40)

Je vous avoue que j'ai eu une réaction de nombre de mes collègues, puis je pense que ça va terminer mes questions, parce que d'autres veulent vous en poser aussi. Je déclarais ce matin, suite à des informations qui m'ont été données par votre organisme, que dans certains secteurs, comme par exemple celui du résidentiel, vous avez environ 50 % des travailleurs qui ne réussissent pas à accumuler suffisamment d'heures pour bénéficier des avantages, donc aucune forme de couverture, et pourtant, eux et leurs employeurs ont contribué, pour chacune des heures qu'ils ont travaillées, au maintien, bien sûr, des programmes que j'ai décrits tantôt.

Dans votre expérience et le nombre d'années que vous êtes là... Parce que ça, c'est quand même l'organisme qui gère ça. Vous relevez de celui qui vous parle comme responsabe gouvernemental, mais le paritarisme s'installe là et c'est là que ça se fait. Plutôt que d'avoir un régime, entre guillemets, généreux, mais qui ne serait accessible qu'à environ 50 % des travailleurs dont les heures sont suffisamment enregistrées pour leur permettre d'avoir accès, est-ce que vous n'avez pas pensé, d'abord, établir un régime de base qui serait sûrement moins généreux, mais qui, au moins, assurerait une protection minimum à un plus large éventail possible des travailleurs de l'industrie de la construction? Je vous avoue que ça me semble, à cause de mon passé, être quelque chose qui devrait être un réflexe instinctif quand on parle de représenter le plus possible et de protéger le plus possible de gens et leur famille.

Le Président (M. Joly): M. Fournier, s'il vous plaît.

M. Fournier (Alcide): Les chiffres que vous avez cités ce matin sont exacts. Si on regarde les salariés dont les heures sont effectivement ou strictement situées dans le secteur résidentiel, il y en a 12 200, selon le chiffre que vous citiez ce matin, qui sont assurés. Je pense qu'il faut tenter de mettre ces chiffres-là dans le contexte. Si on regarde l'évolution des cycles économiques dans l'industrie de la construction, en 1982, on a vécu une crise économique. On est remontés et là on est redescendus. On espère être au plus bas de la crise économique. La moyenne d'heures, durant ces années-là, a varié, je dirais de 1200 à 734 cette année, moyenne d'heures par salarié, et dans le secteur résidentiel, autour de 550. Actuellement, la moyenne d'heures dans le résidentiel est de 550. Le nombre d'assurés également a varié de la même façon. On est passés de 50 000 à près de 90 000 assurés, et là on est rendus à 68 000 assurés à cause du déclin économique.

C'est sûr que les parties également, ont prévu, dans le régime, qu'il y ait des possibilités, pour celui qui fait moins d'heures à cause des périodes économiques difficiles, de payer une contribution supplémentaire pour conserver leurs bénéfices d'assurance. Évidemment, la condition, c'était d'être un travailleur de la construction. Et ces bénéfices-là, ou ces possibilités-là, ont été prévus dans le régime. C'est sûr que l'adéquation n'est pas nécessairement parfaite et ne suit pas nécessairement toute la tendance et la moyenne d'heures dans l'industrie de la construction, mais il y a quand même possibilité, pour le travailleur qui fait moins d'heures, de s'assurer par le biais d'une cotisation supplémentaire, et c'est prévu au régime, cette partie-là.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Fournier. Avant de reconnaître M. le député de Vimont, il y a une chose que je tiens à souligner. C'est que pour assurer, premièrement, le bon déroulement de la commission, il y a deux choses que je ne tolère pas: ceux qui peuvent fumer et, nécessairement, les téléphones cellulaires, par trois occasions. Si on veut que les parlementaires s'acquittent de leur charge publique, il faudrait peut-être limiter ça, fermer les téléphones cellulaires. Autre chose, M. Fournier, si vous voulez peut-être juste écourter les réponses, un peu, de façon à ce que le temps d'échange puisse permettre plus de questions. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Vimont, s'il vous plaît.

M. Fradet: Merci, M. le Président. M. Fournier, vous dirigez un organisme dont le conseil d'administration est partagé entre la partie syndicale et la partie patronale, c'est bien ça?

M. Fournier (Alcide): Et les représentants gouvernementaux.

M. Fradet: Et les représentants gouvernementaux. Je voudrais vous poser une question. Est-ce que le gouvernement a donné à la CCQ des outils pour combattre le travail au noir dans l'industrie de la construction?

M. Fournier (Alcide): Certainement. Nous, on fait ça à plein temps. Tous nos inspecteurs, ils ne font que ça, vérifier les chantiers, vérifier les livres des employeurs, tenter de vérifier si le décret est respecté, faire des réclamations pour les salariés, prendre des poursuites pénales contre les employeurs qui utilisent une main-d'oeuvre non qualifiée, etc. On ne fait que ça.

M. Fradet: Alors, il est faux de prétendre, de la part de certains membres de cette assemblée et d'autres, que le gouvernement n'a pas donné d'outils aux organismes qui oeuvrent dans le domaine de l'industrie de la construction pour combattre le travail au noir. Alors, si

le gouvernement a déjà donné des outils, et vous me dites que vous avez des inspecteurs qui font le tour des chantiers de construction pour vérifier les livres... Et vous êtes au courant que le travail au noir dans l'industrie de la construction se fait, entre autres, par ceux et celles qui travaillent dans l'industrie à des heures autres que du 9 heures à 16 heures ou du 9 heures à 15 heures dans la semaine, du lundi au vendredi. Est-ce que vous envisagez la possibilité d'avoir des inspecteurs le soir et les fins de semaine, là où le vrai travail au noir se fait, si vous avez un rôle en tant qu'organisme pour combattre le travail au noir?

Le Président (M. Joly): M. Fournier, s'il vous plaît.

M. Fournier (Alcide): D'abord, on doit dire, effectivement, qu'on a des outils. Je ne peux pas dire qu'on a tous les outils. Si je pense aux pouvoirs, par exemple, du ministère du Revenu, on n'a pas ces pouvoirs-là. On n'a pas le pouvoir, par exemple, d'arrêter les travaux lorsqu'on constate que ça peut se faire illégalement, etc. Lorsqu'on dit qu'on a des outils, effectivement, on a des outils. On n'a peut-être pas le plus gros coffre, mais, en tout cas, on a les outils qu'on a.

Sur l'autre aspect de votre question, la vérification de livres peut être faite à toute heure du jour. Nous, ce qu'on tente de faire, c'est l'adéquation. On appelle ça maintenant l'inspection proactive. C'est d'abord d'avoir toute l'information pertinente relative au chantier du donneur d'ouvrage, à savoir qui est l'entrepreneur, combien d'heures, à peu près, l'entrepreneur devrait faire sur ce chantier-là, s'il y a des sous-traitants, quelle est la valeur du contrat, etc. Lorsque l'inspecteur va au chantier, il vérifie ces faits-là. Après ça, on fait une inspection de livres et, là, on valide. Est-ce que ce qui se fait sur le chantier est conséquent avec les déclarations faites dans le rapport mensuel? Si ce n'est pas conséquent, à ce moment-là, on pousse plus loin notre vérification, on va voir...

M. Fradet: Mais, M. le Président... M. Fournier...

M. Fournier (Alcide): Oui.

Le Président (M. Joly): Brièvement, s'il vous plaît, M. le député.

M. Fradet: ...juste une question précise. Avez-vous l'intention d'envoyer des inspecteurs sur les chantiers à l'extérieur des heures pendant lesquelles vous les envoyez présentement, pour trouver et combattre le travail au noir qui se fait, M. Fournier, de 16 heures à minuit, le soir, dans la semaine et les fins de semaine?

M. Fournier (Alcide): Oui, on a d'ailleurs... M. Fradet: Parce que c'est ce qu'on nous reproche, sur le terrain, et c'est votre responsabilité en tant qu'organisme.

M. Fournier (Alcide): D'abord, au niveau des contraintes financières, on a limité au maximum le temps supplémentaire. On a autorisé du temps supplémentaire uniquement pour fins d'inspection les fins de semaine. On a fait des blitz dans différentes fins de semaine.

M. Fradet: Sans pour autant faire du temps supplémentaire, il y aurait peut-être une distribution de la plage horaire des travailleurs qui pourrait se faire.

M. Fournier (Alcide): On a une convention collective. On a tenté de s'entendre avec le syndicat là-dessus, le syndicat qui représente les employés, et on n'a pas réussi.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Fournier. M. le député de Salaberry-Soulanges, vous avez fait mention que vous aviez une question.

M. Marcil: Merci beaucoup. M. Fournier, je regardais le régime des avantages sociaux des gens dans l'industrie de la construction, on sait que c'est partagé par l'employé et par l'employeur. Je regardais... Ce que M. le ministre disait tantôt, on parlait d'un régime assez riche, mais, ça, c'est la décision, dans le fond, des travailleurs et des employeurs de se doter comme ça. Si je prends un briqueteur-maçon où le compagnon paie 1,55 $ l'heure, de même que l'employeur va payer, lui, peut-être 1,75 $ l'heure, ça fait quasiment un total de 3,30 $ l'heure d'enregistré pour un régime. On sait que le nombre d'heures diminue au niveau de la construction, ce qui fait que plusieurs employés, plusieurs travailleurs ne réalisent plus leurs 600 heures pour se qualifier à ce régime-là, ce qui fait que vous avez un déficit, je pense, actuariel, je ne sais pas de combien, mais on m'a dit que la CCQ avait pris la décision d'aller piger dans les surplus des fonds de pension des employés pour pouvoir combler un déficit au niveau des avantages sociaux. (15 h 50)

Je veux dire, il y a une différence entre un régime d'avantages sociaux qu'on peut modifier en négociant avec les employés et les employeurs, mais les fonds de retraite des employés, qui accusent peut-être un surplus, on me dit qu'on aurait accepté, à la CCQ, unanimement, d'aller emprunter, je ne sais pas, moi, une trentaine de millions de dollars dans les surplus des fonds de retraite des employés, pour pouvoir combler le déficit au niveau des avantages sociaux. Et, au train où ça va, ça voudrait quasiment dire, selon les actuaires, que le déficit actuariel des avantages sociaux, on nous dit, selon des chiffres, qu'il dépasserait, dans quelques années, 80 000 000 $, ce qui veut dire, ça, si on applique toujours la même formule, que la CCQ sera, à tous les ans, obligée d'aller piger dans les surplus des fonds

de retraite des employés pour pouvoir combler un déficit d'avantages sociaux. Et j'aimerais ça qu'on me l'explique, si c'est véridique ou pas.

Le Président (M. Joly): M. Fournier, s'il vous plaît.

M. Fournier (Alcide): Alors, d'abord, c'est en application des articles 8 et 14 du règlement des avantages sociaux qu'une contribution supplémentaire de 0,20 $ l'heure a été prise de la contribution du régime de retraite — contribution future — et a été transférée au régime d'assurance. D'ailleurs, l'article 14 prévoit que, s'il y a des surplus dans le régime d'assurance, ces surplus-là seront également transférés au régime de retraite. C'est une forme de réciprocité.

Deuxièmement, le déficit est de 36 000 000 $, pour le préciser. Et, troisièmement, les actuaires qui sont à faire l'évaluation, ou qui nous ont fait l'évaluation, nous ont fourni également un certificat de solvabilité des régimes. Alors, lorsqu'on dit que les régimes ne sont pas solvables, bien, à mon avis, là, nos actuaires, en tout cas, nous disent que le régime, compte tenu des dispositions prises, c'est-à-dire, un, l'application de l'article 8 et ce 0,20 $ là, deux, la diminution de certains bénéfices dans le régime de retraite et, trois, modification des conditions d'éligibilité dans le régime, le régime, maintenant, est solvable.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Fournier. Malheureusement, c'est tout le temps qui vous était imparti. Alors, je vais maintenant reconnaître M. le chef de l'Opposition et député de L'Assomption. S'il vous plaît, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, je pense que nous sommes tous conscients que ce qui se passe à l'heure actuelle autour des discussions de ce projet de loi commence à tourner, dans certains milieux, au drame. Je pense que nous n'avons, aucun d'entre nous, intérêt à faire quelque déclaration qui, à l'heure actuelle, pourrait pousser dans ce sens-là. Au contraire, si nous avons une responsabilité quelconque, j'imagine que c'est d'essayer de calmer les esprits un peu, puis de comprendre, puis de chercher à trouver un moyen pour s'en sortir.

Je voudrais limiter mon intervention, cet après-midi, à obtenir des renseignements qui me paraissent extraordinairement pertinents à la situation, que j'ai cherché à obtenir quand j'étais ministre des Finances, à l'occasion du programme de Corvée-Habitation, et que, tout ministre des Finances que je sois, je n'ai jamais pu obtenir à ce moment-là. Alors, je m'essaie à nouveau, parce que je pense que c'est assez pertinent aux problèmes que nous avons.

M. Fournier nous a expliqué — à juste titre, d'ailleurs — à quel point, quand le nombre d'heures inscrites tombe, ça a des conséquences très rapides sur ceux qui sont admissibles — des ouvriers de la construction — à des fonds de pension et à la progression de leur pension, pour ceux qui en gardent un. Il nous expliquait à quel point la réduction des heures a aussi des conséquences sur la valeur des assurances de ces ouvriers de la construction. Il y a donc entre le nombre d'heures inscrites puis la valeur des pensions, puis la valeur des autres bénéfices marginaux un rapport direct. Et là il nous dit aujourd'hui: Si on déréglemente la construction domiciliaire, il va y avoir une chute de 12 000 000 d'heures. Mais il nous dit aussi: Le travail au noir, ça pourrait représenter 25 000 000 d'heures. Bien, donc, si le travail au noir était considérablement réduit, le nombre des heures augmenterait et, donc, les pensions augmenteraient, puis le nombre de pensionnés augmenterait, puis les bénéfices marginaux augmenteraient.

Alors, là, je voudrais avoir des renseignements sur comment on inscrit les heures, comment on inspecte l'inscription des heures, qui fait ça. Et c'est là où j'arrive à un certain nombre de questions. Comment dire, il ne faut pas y voir plus que simplement ce que je veux y mettre. Ça a une telle importance, le nombre d'heures inscrites, qu'il faut quand même d'abord se poser la question de l'inspection. Je reviens un peu à ce que le député de Vimont, tout à l'heure, disait, je vais aller un peu plus loin encore. Combien avez-vous d'inspecteurs?

M. Fournier (Alcide): On en a 198.

M. Parizeau: Ce qu'ils inspectent, ces inspecteurs, c'est quoi? Quand ils arrivent sur un chantier, qu'est-ce qu'ils posent comme questions et à qui les posent-ils? Qu'est-ce qu'ils posent comme questions aux travailleurs, sur ce chantier-là, en arrivant pour inspecter?

M. Fournier (Alcide): Bon. D'abord, il doit vérifier quel est l'employeur, le nom de l'employeur et s'il a sa licence d'employeur. Lorsqu'il rencontre les salariés, il vérifie s'ils ont les cartes de compétence et il demande aux salariés s'ils sont payés conformément au décret. Il demande le métier, vérifie l'identité, etc., pour quel employeur ils travaillent, toutes ces choses-là. Il essaie, dans le fond, de vérifier l'ensemble des activités et l'identité des gens sur le chantier. Alors, c'est la première chose.

M. Parizeau: Est-ce qu'on demande le numéro d'assurance sociale?

M. Fournier (Alcide): On demande la carte de compétence, ça, c'est certain, et je pense, aussi... Je ne pourrais pas vous... Mais je pense qu'on peut l'avoir, effectivement, parce qu'il est sur la carte de compétence.

M. Parizeau: M. le Président, ce que je cherche à savoir, au fond, c'est d'abord et avant tout, j'allais dire de nature fiscale. La première des choses qu'on peut demander en arrivant sur un chantier, c'est: Quel est votre nom? Quel est votre numéro d'assurance sociale? Merci, monsieur. Puis ensuite, bien, on s'assure de

voir qu'il y a un ordinateur quelque part qui a enregistré qu'un M. Untel avec tel numéro d'assurance sociale travaillait ce jour-là ou qu'il y a eu des heures de rapportées ce jour-là. S'il n'y en a pas, il y a quelque chose qui ne va pas. Ce sont des démarches simples comme celles-là que je n'arrive pas... Ça fait maintenant 10 ans que je cherche à savoir pourquoi des démarches simples comme ça ne sont pas appliquées. Maintenant, avec les ordinateurs, ça ne devrait pas poser beaucoup, beaucoup de problèmes de demander le nom, le numéro d'assurance sociale, d'inscrire la date puis l'heure, puis de voir si l'organisme qui inscrit les heures, bien, une semaine, un mois plus tard, il y a eu un rapport de fait.

M. Fournier (Alcide): Oui, ça...

M. Parizeau: Est-ce que des démarches aussi simples que ça peuvent être faites?

M. Fournier (Alcide): Oui, oui. Ça, c'est fait. M. Parizeau: Est-ce qu'elles sont faites?

M. Fournier (Alcide): Si vous me permettez, je pourrais peut-être juste expliquer un peu comment fonctionne l'inspection, puis je pense que ça pourrait peut-être vous inspirer d'autres questions, peut-être une meilleure approche.

L'inspecteur, lorsqu'il arrive sur le chantier, normalement, nous, ce qu'on appelle l'inspection proactive, il y a d'abord le site du chantier, le propriétaire du chantier, l'entrepreneur, les sous-entrepreneurs, le montant des travaux, quelle est la nature des travaux pour chaque employeur, si c'est de l'électricité, etc. Bon. L'inspecteur arrive sur le chantier, et lorsque, dépendamment de la phase du chantier, il rencontre, je ne sais pas, l'électricien, là, il vérifie le nom de l'entrepreneur électricien, le nom du salarié, son numéro d'assurance sociale, sa carte de compétence, etc. Il prend le nom de chacun des salariés sur le chantier qui y oeuvrent. Ensuite de ça, on fait une comparaison avec — et on note la date, évidemment — le rapport mensuel de l'employeur.

Il faut dire que l'employeur, lui, nous fait un rapport à tous les mois, et ce rapport-là n'est pas nécessairement par chantier. Il rapporte l'ensemble des heures de l'ensemble de ses salariés, quel que soit le chantier, que ses employés ont faites durant le mois. Et là on peut faire la concordance pour savoir si l'importance du rapport mensuel correspond à l'importance des travaux effectués sur chantier. Et là ça nous permet de voir si, effectivement, il n'y a pas une vérification plus approfondie à faire au niveau des livres. Et, souvent, ça nous mène à une vérification de livres approfondie.

M. Parizeau: Comment choisissez-vous ou vos inspecteurs choisissent-ils les chantiers? Sur quels critères ils se basent pour dire: Ce matin, je m'en vais sur tel chantier plutôt que sur tel autre chantier? Comment les choisissent-ils?

M. Fournier (Alcide): Mais là on a une assignation. Chacun des bureaux régionaux maintient un inventaire de l'ensemble des chantiers actifs dans sa région, et tous les chantiers, autant que possible, doivent être visités. Alors, le chef inspecteur va assigner les inspecteurs sur les différents chantiers actifs dans sa région. (16 heures)

M. Parizeau: On ne se sert pas des permis de construction?

M. Fournier (Alcide): Ah oui, oui. C'est-à-dire que, là, il faut distinguer entre la détection de chantier et l'assignation de chantier. Au niveau de la détection de chantier, on a la collaboration, par exemple, de la Communauté urbaine de Montréal, du ministère des Transports, de différents donneurs d'ouvrage. Et c'est une information qu'on maintient à jour dans chaque région. On va voir la municipalité pour les permis de construction, etc. Ça, c'est une information qu'on obtient par différentes sources. Il y a aussi la presse spécialisée, comme le journal Constructo. Il y a des publications qui nous disent: Bon, bien, le contrat a été donné à telle entreprise, pour une valeur de tant, pour faire tel travail, etc. On obtient, à ce moment-là, du donneur d'ouvrage les informations complémentaires.

M. Parizeau: Est-ce que le ministère du Revenu a des inspecteurs sur les chantiers pour les heures travaillées?

M. Fournier (Alcide): Je ne pourrais pas dire oui, je ne pourrais pas dire non, je ne le sais pas.

M. Parizeau: Les renseignements que vos inspecteurs ont ramassés sont-ils communiqués au ministère du Revenu?

M. Fournier (Alcide): Non.

M. Parizeau: Est-ce que le ministère du Revenu s'intéresse à les demander, des fois?

M. Fournier (Alcide): Je n'en ai pas eu connaissance, à date. On a eu certains cas au fédéral, on me dit.

M. Parizeau: Dans certains cas au fédéral? M. Fournier (Alcide): Oui. M. Parizeau: Bon.

M. Fournier (Alcide): Je ne pourrais pas certifier, là, que... Écoutez, à ma connaissance, il n'y en a pas. Ça se peut qu'à la connaissance des bureaux régionaux il y en ait eu. Il faudrait que je vérifie l'information, mais à ma connaissance, il n'y en a pas.

M. Parizeau: Je voudrais aller un petit peu plus loin dans le sens d'une question que posait le député de Vimont tout à l'heure. Est-ce que j'ai bien compris que la convention collective ne permet pas aux inspecteurs d'aller inspecter à d'autres heures que celles qui sont prévues dans la convention? C'est ça?

M. Fournier (Alcide): Elle le permet en payant du temps supplémentaire.

M. Parizeau: Ah oui?

M. Fournier (Alcide): Et comme on est en restriction budgétaire très sévère, on a limité le temps supplémentaire au maximum.

M. Parizeau: Bon. Si je comprends bien, M. le Président, c'est quelque chose qui n'a pas évolué depuis, donc, 11 ans; il y a 11 ans, c'était la même chose. Donc, en pratique, faire des inspections le samedi, ça ne se fait pas.

M. Fournier (Alcide): Oui, oui, on en fait. Comme j'ai dit tout à l'heure, on a autorisé du temps supplémentaire de façon particulière. Pour l'inspection les fins de semaine, on a organisé des blitz dans les différentes régions et on a fait de l'inspection les fins de semaine.

M. Parizeau: Revenons à la question des permis de construire. Vous parliez tout à l'heure de collaboration avec la Communauté urbaine, avec de grands organismes comme ceux-là. En fait, il est assez notoire que pour un bon nombre de municipalités, même d'assez petites, l'observance de la nécessité d'acquérir un permis de construction est assez généralement correcte. Il n'y a pas vraiment de grosses surprises là-dedans. Est-ce qu'il y a quelque chose qui... Si je comprends bien, systématiquement, vous n'utilisez pas les permis de construire municipaux pour, comment dire, préparer les plans de l'inspection.

M. Fournier (Alcide): Oui...

M. Parizeau: Vous le faites à l'occasion, mais ce n'est pas systématique.

M. Fournier (Alcide): Ce que je veux dire, c'est qu'on les utilise. Les municipalités nous les donnent lorsqu'elles le désirent. Elles n'ont pas nécessairement d'obligation de nous donner accès. Elles n'ont pas d'obligation de nous les envoyer automatiquement, et il faut aller les requérir à la municipalité. On va les chercher à la municipalité, et, là, on fait le tri, parce qu'il peut y avoir des permis de construction pour fins de rénovation qui ne nous intéressent pas, et on prend les permis qui nous intéressent. Mais il n'y a pas de communication systématique entre les municipalités et la Commission, il n'y a pas de transmission systématique des permis de construction.

M. Parizeau: II n'y a à peu près plus... Vous parliez tout à l'heure des contrats de rénovation. Effectivement, tout ce qui a trait aux permis municipaux de rénovation, vous laissez ça de côté, ce n'est plus dans le décret maintenant, ça a été déréglementé.

M. Fournier (Alcide): C'est ça.

M. Parizeau: Donc, il n'y a plus d'heures inscrites à la Commission pour des travaux de rénovation?

M. Fournier (Alcide): II n'y en a pas, non. M. Parizeau: C'est terminé.

M. Fournier (Alcide): C'est terminé depuis 1988, sauf pour le commercial, le locatif, les blocs d'appartements, là, pour ceux qui ne sont pas propriétaires occupants, si on reprend la formule qui est dans la loi, c'est ça.

M. Parizeau: Bon, bien, alors, M. le Président, moi, comment dire, je pense que j'ai des réponses. Je pense qu'il serait peut-être... Ce n'est peut-être pas possible, compte tenu du fait que le programme des audiences ou des témoignages a été fixé, mais ça aurait été probablement assez intéressant de pouvoir discuter avec le ministère du Revenu des mêmes questions que celles que nous avons abordées avec M. Fournier. Si tant est que l'évaluation approximative de M. Fournier, que le trésor public perd au-delà de 400 000 000 $ à cause du travail au noir, je comprend que ça veut dire que le gouvernement n'a sans doute pas, comment dire, un intérêt aussi personnalisé que la perte de pensions ou d'avantages sociaux par les travailleurs dans un projet comme celui que nous avons devant nous, mais disons que son intérêt est néanmoins certain: si on perd 400 000 000 $, il faut quand même les remplacer par des impôts ailleurs.

Alors, moi, j'en termine là, M. le Président. Je remercie M. Fournier des réponses qu'il nous a données. Je ne peux pas dire que ça m'enchante. Je comprends que nous ne pourrons pas entendre le ministère du Revenu, étant donné que le programme de témoignages, encore une fois, a été fermé d'ici à demain soir, mais je souhaite que nous puissions pousser cette question bien plus loin si on veut vraiment mettre un frein, au moins un minimum au travail au noir et à ses conséquences. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le chef de l'Opposition. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Jonquière.

M. Dufour: M. le Président, le ministre, ce matin, dans son exposé, nous disait que, pour la formation du travailleur ou les qualifications, il s'en remettait un peu aux licences des entrepreneurs, il surveillait par les licences des entrepreneurs si les travaux seraient bien

faits ou pas. Je regarde à votre page 15, où vous dites: «Nous avons signalé à la Régie du bâtiment 6200 constats d'infraction.» Et, là, vous dites: Bien, on ne sera plus sur les chantiers, il faudra mettre des ressources autres. Moi, mon interrogation, c'est si vous n'êtes pas là, qui va signaler les poursuites? Et, si on est obligé de mettre un autre mécanisme en marche, comment peut-on s'assurer, nous, que les gens vont être protégés pour la qualité de la construction?

M. Fournier (Al ci de): C'est un domaine qui relève de la Régie du bâtiment, alors, j'imagine que c'est la Régie du bâtiment qui devra y affecter les ressources nécessaires.

M. Dufour: Oui, mais, s'il y a autant d'infractions que vous le signalez à la Régie, donc, ça veut dire qu'il faut qu'elle mette des ressources supplémentaires, et ce n'est pas une garantie, la licence du contracteur. Si on n'est pas sûrs, chaque fois qu'il y a un chantier, que tout est fait selon les normes, qui va nous assurer de la qualité des travaux?

M. Fournier (Alcide): Je ne voudrais pas entrer dans ce sujet-là plus qu'il faut, mais il faut quand même rappeler qu'il y a, au niveau de la construction résidentielle, des plans de garantie de maisons neuves, il y a l'obligation de détention de la licence. Je pense que le projet gouvernemental prévoyait rendre ces plans de garantie obligatoires. Mais, ça, ça relève plus de la Régie du bâtiment que de la Commission de la construction.

M. Dufour: En quoi, selon votre point de vue, est-ce de nature à augmenter la construction? Est-ce que vous voyez, dans le projet de loi qui vous est présenté — je vous demande une opinion, mais, dans votre exposé, il y a des coûts qui sont exprimés... Est-ce que vous croyez qu'il pourrait y avoir une relance de la construction, d'après votre expérience?

M. Fournier (Alcide): Là vous me demandez une opinion... Évidemment, je ne suis pas économiste. Je pense que, actuellement en tout cas, on constate une certaine reprise dans l'industrie de la construction. Nous, on prévoit une amélioration des heures rapportées à la Commission de la construction pour 1994 et 1995. On aurait atteint, semble-t-il, le bas-fond du dérapage, si on peut dire, des heures dans l'industrie de la construction, et il semble se dessiner des temps un peu meilleurs. Ce n'est pas encore les années 1975, 1976, mais ça semble être mieux. (16 h 10)

Évidemment, pour nous, le fait de déréglementer le résidentiel, comment je dirais, l'euphorie de l'augmentation des heures disparaît du même coup, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas une amélioration des travaux ou de la quantité de travaux dans l'industrie de la construction. On prévoit qu'il y aura une certaine augmentation d'heures. L'impact de la loi 142, je ne pourrais pas vous dire si ça va aider, si ça va nuire, je ne pourrais pas vous dire. Je pense que, sur le plan économique, de façon générale, il y a une reprise très, très lente des travaux.

Le Président (M. Joly): Je vais reconnaître une dernière courte question et une dernière courte réponse.

M. Dufour: On a parlé beaucoup de travail, c'est-à-dire de la mobilité de la main-d'oeuvre. Dans votre exposé, vous dites: C'est pratiquement inapplicable dans le contexte actuel, et ça prendrait des accommodements pour améliorer le système. Est-ce que vous avez des formules spécifiques ou est-ce que vous croyez qu'il est possible d'améliorer ce volet-là?

M. Fournier (Alcide): Je pense que oui parce que nous, on pense... Administrativement d'abord, on a 85 000 cartes à renouveler pour le 1er mars. Informer tous ces travailleurs-là qu'ils ont maintenant à choisir leur région, faire imprimer les dépliants d'information, imprimer les cartes, etc., on n'arrivera probablement pas au 1er mars.

Deuxièmement, on pense que c'est faire beaucoup d'efforts, dépenser beaucoup d'efforts pour arriver au résultat actuel qui dit que c'est celui de la région qui a priorité dans sa région. On revient au même.

Troisièmement, c'est qu'il y a certains travailleurs, en particulier ceux de l'extérieur, qui seraient un peu avantagés par rapport aux travailleurs du Québec. Je vais vous donner un exemple. Un travailleur de Montréal et un travailleur d'Ottawa choisissent la région de la Côte-Nord. Bien, celui de Montréal, lui, ne peut plus travailler dans sa région parce qu'il devient deuxième priorité, tandis que celui d'Ottawa peut garder sa priorité dans sa région parce qu'il n'est pas assujetti, dans sa province, à cette réglementation-là.

Quatrièmement, on peut avoir celui qui est dans sa région, qui a choisi une autre région, mais qui se trouve une job dans sa région. Lui, il travaillerait illégalement dans sa région. Je ne sais pas comment le Procureur général aimerait prendre une poursuite là-dessus, et j'aimerais entendre un juge prononcer la sentence, parce qu'il va trouver un peu anormal qu'un gars dans sa région, dans le chantier en face de chez lui, ne puisse pas travailler là où il travaille illégalement.

Le Président (M. Joly): Merci. C'est malheureusement tout le temps qui nous est consenti. J'ai déjà largement débordé. Alors, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: Bon, bien rapidement, je veux remercier... Je sais qu'on ne vous a pas donné grand temps, mais, quand même, on réalise que parfois vous êtes capables de faire des choses rapidement. Merci de votre présence.

Le Président (M. Joly): M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: Je veux remercier M. Fournier et les gens de la Commission pour les renseignements qu'ils nous ont apportés cet après-midi.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. M. Fournier, au nom des membres de la commission, à mon tour de vous remercier et aussi remercier les gens qui vous accompagnent. Je vous remercie beaucoup.

Nous allons maintenant recevoir l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Alors, je demanderais, d'une façon la plus rapide possible, à ces gens de bien vouloir s'approcher, s'il vous plaît. Nous allons suspendre deux minutes environ.

(Suspension de la séance à 16 h 14)

(Reprise à 16 h 16)

Le Président (M. Joly): Alors, il me fait plaisir d'accueillir l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Bienvenue à cette commission. J'apprécierais que tous ceux qui ont des choses à se dire puissent peut-être le faire à l'extérieur de cette Chambre si ce n'est pas pertinent avec les travaux de la commission, s'il vous plaît.

Alors, vous connaissez déjà sans doute les règles du jeu. Au départ, bien, je vous explique que vous avez 20 minutes environ pour nous exprimer ce que vous avez déjà dans la présentation de votre mémoire. Si c'est moins, ça donne plus de temps aux parlementaires pour échanger avec vous. Deuxièmement, c'est que la balance du temps qu'il nous restera sera impartie de façon égale entre les deux formations, et s'il y a des choses particulières, il va me faire plaisir d'essayer d'y répondre. Alors...

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre a réfléchi à ce que je lui ai proposé? Parce que ça suppose un réaménagement de temps, là, ou de groupes.

M. Cherry: Dans un premier temps, évidemment, vous m'avez demandé d'y réfléchir, puis je vous ai dit oui, mais, bien sûr, j'ai porté attention, comme vous, à ce qui a été dit ici. Je vous avoue que même si je n'ai pas arrêté ma décision, je voudrais vous indiquer les réserves que j'aurais à ce moment-ci concernant votre proposition.

On vient de sortir d'un sommet de la construction, et vous auriez dû voir les chicanes qu'il y avait entre les parties pour qui avait cinq votes, qui avait quatre votes, qui avait trois votes, qui était assis à gauche, qui était assis à droite. Je viens juste de vivre ça, les pressions qu'on avait, même dans la consultation pré-Sommet, juste pour s'assurer de ça, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, j'aimerais ça qu'on les traite de façon séparée parce qu'il me semble qu'on a peut-être des questions bien distinctes à poser à des organismes en particulier. Mais je vous dis que, après qu'on ait vécu un sommet et l'importance que ces gens-là attachaient à l'aspect de représentativité, leur temps de parole et tout ça, je vous avoue que j'ai des réserves, là. Je ne veux pas vous donner un non catégorique à ce moment-ci, je préfère encore peut-être prendre un peu de temps puis en discuter avec mes collègues, mais je vous donne déjà mon indication et les réserves que j'en ai.

M. Chevrette: J'ajoute un argument pour l'aider à réfléchir, M. le Président, c'est que c'est un front commun demandé par eux. Vous n'aimez pas ça les voir tout le monde ensemble? C'est eux autres qui se sont regroupés de façon unique, puis c'est eux autres qui nous demandent ça de façon unique, sans chicane, sans chinoiserie. Il me semble que vous devriez être heureux, pour une fois qu'ils veulent être ensemble.

Le Président (M. Joly): Alors, s'il vous plaît, je me dois de débuter les travaux de la commission. M. le ministre, vous aurez sûrement le loisir de continuer de cogiter sur le sujet et de nous rendre la décision par après. Alors, nous avons avec nous M. Couillard, M. Olivier et M. Brown. C'est bien ça?

M. Couillard (Reynald): Exact, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Alors, je vois ici M. Brown, à ma droite, donc, et...

M. Couillard (Reynald): M. Brown et M. Olivier ici, à...

Le Président (M. Joly): ...M. Olivier qui est là, clairement identifiés. Alors, je vous reconnais le droit de parole, M. Couillard.

Association des entrepreneurs en construction du Québec (AECQ)

M. Couillard (Reynald): Merci, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, Mme la députée, MM. les députés, mesdames, messieurs, la première chose, j'aimerais à tout le moins vous expliquer c'est quoi l'AECQ, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. C'est l'association qui représente l'ensemble des employeurs dans l'industrie de la construction, la totalité des employeurs dans l'industrie de la construction, à des fins de négociation de conventions collectives uniquement. Évidemment, c'est une association qui a été formée en 1976, et j'y reviendrai tout à l'heure. (16 h 20)

Nous désirons d'abord vous remercier de nous donner l'opportunité de participer à cet important débat. L'AECQ est un joueur important dans l'industrie de la

construction, et c'est à ce titre que nous désirons témoigner, mais, plus précisément, nous sommes ici... Excusez-moi. Permettez-moi de recommencer.

L'AECQ est un joueur important dans l'industrie de la construction, et c'est à ce titre que nous désirons témoigner. Mais, plus précisément, nous sommes ici parce qu'il n'y a pas eu d'entente avec la coalition syndicale à la conclusion d'une nouvelle convention collective en raison de l'entêtement de la coalition syndicale de ne pas reconnaître que notre décret ne colle plus à la réalité de nos marchés, de plus, parce que nous n'avons pas été en mesure de régler le fléau que constitue le travail au noir, en raison du refus de la coalition de s'attaquer à la source majeure que constitue celle du coût de la main-d'oeuvre.

Je voudrais vous donner un bref historique de l'AECQ. L'AECQ a été créée suite à une recommandation de la commission d'enquête sur l'exercice de la liberté syndicale dans la construction, mieux connue sous le nom de la commission Cliche. Cette commission avait été créée suite aux saccages et à d'autres actes de violence commis à la Baie James en 1974. L'objectif de cette recommandation était d'établir un juste équilibre entre la partie patronale et la partie syndicale en raison du déséquilibre qui existait entre la force syndicale et la faiblesse des employeurs. Or, depuis la création de l'AECQ, la construction au Québec a connu une période de paix relative, et l'équilibre a ainsi été rétabli.

À ceux qui prétendent que l'AECQ n'a jamais réussi à conclure de convention collective, il est important de rappeler que notre association est parvenue à s'entendre à cinq reprises, en huit négociations, depuis sa création. Ces ententes ont par la suite fait l'objet de décrets, procédure strictement technique, afin qu'elles puissent s'appliquer à l'ensemble des travailleurs de l'industrie et non seulement aux travailleurs membres des syndicats signataires de la convention collective.

Le rôle de l'AECQ est de négocier une convention collective au nom des 18 000 employeurs de l'industrie. Idéalement, pour pouvoir plaire aux 18 000 membres, il nous faudrait 18 000 conventions collectives. Vous conviendrez avec nous que nous ne pouvons rencontrer les attentes individuelles de tous nos membres, comme vous ne pouvez satisfaire chacun des 7 000 000 de Québécois que vous représentez.

Certains font allusion au manque de représentativité de l'AECQ. Rappelons certains faits. Les statuts et règlements de l'AECQ prévoient un conseil d'administration qui garantit une représentativité en fonction des régions, des tailles des entreprises et des secteurs d'activité. Ainsi, le conseil d'administration de l'AECQ est composé de 30 employeurs, dont 12 des différentes régions, huit des différents secteurs et 10 selon la taille des entreprises. De plus, chaque mandat exécuté par l'AECQ est le résultat d'un processus de consultation qui confirme la volonté des membres. Il convient de rappeler que l'AECQ a une responsabilité envers ses membres employeurs et non à l'égard des associations d'entrepreneurs. Nos 50 000 interventions annuellement en témoignent éloquemment. Lorsque l'AECQ fait des représentations ou va défendre un employeur sur un chantier, ce n'est pas à la demande d'une autre association traditionnelle ou d'employeurs, c'est à la demande d'un employeur, d'une entreprise.

Quels sont les principaux enjeux? Le mandat très clair confié par les employeurs à l'AECQ est de conclure une convention collective rationalisée, c'est-à-dire qui tient compte de la capacité de payer de nos marchés. Cette convention collective rationalisée permettra de s'attaquer à une source majeure du travail au noir, c'est-à-dire le coût de la main-d'oeuvre. De plus, cette convention collective permettra une meilleure organisation du travail, assurant une compétitivité saine entre les employeurs du Québec et ceux des autres provinces.

Quant à la formation, l'AECQ en a fait un mandat important, même prioritaire. En plus, nous devons changer l'image de l'AECQ que projette notre... dans notre industrie en assurant d'une façon permanente un professionnalisme qui incitera nos jeunes à y faire carrière.

Comment l'AECQ réagit devant le projet de loi? Nous nous réjouissons de la proposition à l'effet d'assujettir à la loi l'installation, l'entretien et la réparation de la machinerie de production. Cette proposition comporte cependant des embûches du fait qu'elle exclut la machinerie de production dans le secteur génie civil et qu'elle exclut les travaux effectués par les distributeurs du fabricant. Nous sommes également d'accord avec le gouvernement dans la démarche pour régler le dossier de la mobilité interprovinciale de la main-d'oeuvre et des entreprises, en souhaitant qu'un amendement soit apporté pour permettre au détenteur d'un sceau rouge d'obtenir une demande d'un certificat de compétence. Nous nous interrogeons, d'autre part, sur l'objectif du gouvernement de modifier les règles de priorité régionale d'embauché, qui viennent compliquer davantage le présent système, d'autant plus que ces modifications sont introduites à titre transitoire.

Quoiqu'il en soit, le sondage effectué pour le compte de l'AECQ par la firme CROP en août 1993 a reconfirmé la volonté des employeurs d'éliminer toutes les règles de priorité d'embauché régionale, lesquelles vont à rencontre du droit de gérance de l'employeur. En ce qui a trait aux agences de placement, l'AECQ a, depuis sa création, prôné leur abolition, d'ailleurs recommandée par la commission Cliche, et nous maintenons cette même politique à l'égard de la proposition gouvernementale de transformer les agences de placement en agences de référence. L'AECQ ne peut donc souscrire à toute mesure qui maintiendrait d'une façon ou d'une autre l'existence des bureaux de placement syndicaux. Il serait tout aussi inadmissible que les législateurs ne prévoient pas des dispositions qui garantiraient à l'employeur le libre choix de sa main-d'oeuvre.

Notre surprise fut grande d'apprendre la proposition de désassujettissement du secteur résidentiel de huit logements et moins. Nous comprenons que le gouvernement souhaite désassujettir ce secteur face à la partie

syndicale qui est intransigeante et s'entête depuis plus d'un an à ne pas vouloir s'adresser aux vrais problèmes de l'industrie de la construction, tel que le travail au noir, et surtout à un décret qui ne colle plus à la réalité des marchés.

Par ailleurs, le projet de loi comporte une contradiction fondamentale. Contrairement au consensus arrêté entre les parties patronales et syndicales au sommet de la construction, lequel Sommet était régi par des règles établies par le ministre du Travail lui-même, en effet, le projet de loi 142 prévoit l'existence de quatre conventions collectives, alors que les parties avaient convenu d'une seule convention collective prévoyant des clauses dites sectorielles. Mmes, MM. les membres de la commission, à cet égard, l'AECQ ne comprend vraiment pas, mais vraiment pas. Et j'ajouterai que, malgré les explications du ministre ce matin, je ne comprends vraiment pas. en conclusion, les employeurs considèrent capital de maintenir une association unique à des fins de relations du travail. d'ailleurs, un sondage crop effectué auprès de nos 18 000 membres en août dernier confirme que ceux-ci, de façon majoritaire, «priorisent» une association unique en matière de relations de travail. de plus, 75 réunions tenues au cours des dernières semaines à travers la province reconfirment cette volonté, ainsi que 3000 lettres adressées par des employeurs au ministre du travail, qui lui ont été remises au moment du sommet, représentant plus de 56 % des heures déclarées dans l'industrie de la construction. (16 h 30)

II me semble que c'est clair. Il me semble que ça n'est pas le voeu d'un directeur général dans son bureau, ni d'un président qui a rêvé une nuit. C'est la volonté des gens, après une recherche, une volonté exprimée par eux-mêmes de vouloir avoir une association, un représentant unique à des fins de négociation, un porte-parole unique à des fins de négociation. Ce n'est pas anodin comme situation. C'est essentiel pour un employeur dans l'industrie de la construction. C'est même primordial; en dépend l'existence même de son entreprise. Nous avons besoin d'une association forte, présente, autonome pour nous donner l'ensemble des services de relations de travail, services qu'un seul employeur ne pourrait s'offrir mais qui sont une nécessité quasi quotidienne.

Une appréciation d'ensemble du projet de loi 142 nous oblige à reconnaître que le gouvernement était probablement bien intentionné dans sa volonté d'apporter des correctifs à certains éléments de notre régime de relations de travail. Mais, force nous est de reconnaître qu'à bien des égards les solutions avancées n'auraient pas les effets escomptés et, plus encore, elles engendreraient plus de problèmes qu'elles n'en régleraient. Nous visons plus particulièrement certaines dispositions relatives au processus de négociation, la division de l'industrie en quatre secteurs, le concept des trois négociateurs patronaux, les règles de priorité d'embauché et de placement.

Nous applaudissons évidemment les améliorations introduites par le projet de loi, dont plus particulièrement l'abolition de l'article 51 de la Loi sur les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Il ne nous reste qu'à souhaiter que le gouvernement acceptera de modifier le projet de loi pour rencontrer les attentes légitimes des employeurs, et ainsi procurer aux parties un environnement propice aux relations de travail harmonieuses. Plus particulièrement, nous espérons une correction qui maintiendra le concept d'une association patronale unique de relations de travail et qui permettra la négociation sectorielle de la convention collective. Ainsi, dès janvier 1994, nous pourrons poursuivre la négociation selon ce nouveau mode et, dans ce cadre, nous demandons au gouvernement de ne pas prolonger le décret de la construction qui expire le 14 décembre 1993. Nous vous le répétons, nous voulons négocier librement notre convention collective et nous faisons appel à la partie syndicale pour réagir positivement à nos propositions d'une convention collective qui soit le reflet de la situation économique et de la capacité de payer du marché et des consommateurs.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Couillard. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre. S'il vous plaît, M. le ministre.

M. Cherry: Merci. Dans un premier temps, avant que je l'oublie, vu que vous venez de parler de la négociation, puis que la dernière prolongation va être à échéance le 14, donc une prolongation de six mois pour vous permettre de négocier, est-ce qu'il y a eu des activités de négociation dans les six derniers mois?

M. Couillard (Reynald): M. le ministre, comme vous le savez, suite au sommet de la construction, mon discours de fermeture était un appel aux syndicats de venir négocier. En plus d'être un appel, il y a un document qui leur est parvenu, qui est une proposition amendée des demandes patronales, avec possibilité de rencontre, avec trois dates. À ce jour, M. le ministre, on n'a eu aucune réponse.

M. Cherry: Mais, entre le 14 juin et la date du Sommet... Parce que, là, vous venez de couvrir la période de l'ouverture que vous aviez faite dans votre remarque, et je me souviens, vous disiez: On devrait profiter de l'enthousiasme et du momentum du Sommet, et je lance un appel aux parties syndicales pour qu'on puisse se rencontrer pour les négociations. Mais, entre la dernière prolongation, du 14 juin à la première journée du Sommet, est-ce qu'il y a eu, durant cette période-là, des rencontres de négociation?

M. Couillard (Reynald): Disons qu'il y a eu quelques rencontres de négociation, et les rencontres de négociation se sont butées à une fin de non recevoir de la FTQ, dans un premier temps. Et, en plus de l'incapacité, je dirais, de la partie syndicale de s'asseoir

honnêtement à une table et de discuter des vrais problèmes dans l'industrie de la construction, ces vrais problèmes qu'on discute ensemble pour une troisième fois cette année qu'on est en commission parlementaire... Ce même enthousiasme que, j'espère, d'autres gens ont pu ressentir au moment de ce Sommet, il ne semble pas s'être reflété dans la vraie vie. Je pense que l'enthousiasme, peut-être, de certains agents syndicaux, c'est peut-être d'affaiblir la partie patronale pour atteindre leurs objectifs, peut-être plus négatifs que positifs pour notre industrie.

M. Cherry: Merci. Comme je l'ai indiqué précédemment, et je vais le faire tout le long de cette commission parlementaire, M. le Président, comme j'ai des collègues qui souhaitent poser des questions, je n'utiliserai pas tout notre temps, pour leur permettre de contribuer. Ils ont quand même formé un groupe de travail, les députés qui vous ont rencontrés, et ils souhaiteraient...

La dernière fois qu'on s'était rencontrés comme groupe, dans un premier temps, je pense que vous conviendrez que, les trois dernières années où j'ai assumé la responsabilité de ministre du Travail, ma disponibilité envers le secteur de la construction, j'y ai consacré de nombreuses heures. Avec l'AECQ, bien sûr, à cause du rôle que vous y avez joué, on a fait beaucoup d'efforts, on y a consacré beaucoup de temps. Ma disponibilité a été là.

Lors de la dernière rencontre qu'on a eue, vous vous souviendrez, vous aviez réuni une vingtaine d'entrepreneurs. Vous êtes venus me rencontrer à mes bureaux, si ma mémoire est bonne, le 9 ou le 10 novembre, et on avait fait un tour de table. Tout le monde s'était exprimé. Ça avait duré au-delà d'une bonne heure, et je n'avais entendu presque uniquement que des louanges de l'AECQ: il fallait la maintenir, c'était important, c'était essentiel, un peu reprenant les arguments que vous invoquez aujourd'hui. Et j'avais dit que c'était !a première fois que j'entendais, en trois ans, parler aussi bien de l'AECQ que cette journée-là. Parce que je vous ai déjà dit, à vous — et je m'adresse à vous parce que vous êtes président de l'AECQ, vous le savez — combien de rencontres j'ai eu à avoir avec des entrepreneurs. Et, là, je ne parle pas des porte-parole d'associations, parce que je suis capable de faire la distinction entre des porte-parole d'associations, qu'ils soient de l'ACQ, de l'APCHQ, ou des gens des grands travaux, et des gens qui disent: Nous, on est des entrepreneurs. On voudrait vous rencontrer, M. le ministre, on voudrait vous parler de nos problèmes particuliers. Et, ça, là, c'était dans les trois dernières années, à de nombreuses reprises. Et à chaque fois, que ce soient des gens des grands travaux comme ceux d'autres secteurs, ils se sont plaints que l'AECQ ne les représentait pas bien. Ils avaient toujours une série de plaintes à décider contre vous autres. C'est pour ça que j'étais content, au moins, pour une fois, de dire: J'ai entendu parler en bien de l'AECQ, là, la dernière fois, pour une première fois. Et, très souvent, pour ne pas dire presque à chaque fois — mais je dis «très souvent» au cas où j'en oublierais une ou deux — ces réunions-là d'entrepreneurs se terminaient toutes de la même façon: Mais, M. le ministre, on vous demande une faveur: cette réunion-là n'a pas eu lieu. Il ne fallait pas en parler. Je trouve difficile de régler des problèmes quand il ne faut pas en parler. Donc, c'est pour ça que j'ai suggéré à des gens: Si on faisait un sommet, est-ce que ces problèmes-là sortiraient? Je ne veux pas faire d'autres commentaires sur la tenue du Sommet.

Autre, et c'est ma dernière question: Vous vous souviendrez que l'AECQ a proposé un sixième amendement qui a eu pour effet de modifier l'ensemble de la partie A, et la proposition: On suggère de maintenir l'AECQ comme porte-parole patronal unique aux fins de négociation collective, de modifier les statuts de l'Association pour y prévoir un conseil d'administration formé de 37 membres représentant les régions sectorielles, et qui fera place aux associations traditionnelles, et enfin de mettre en place un comité de travail mandaté pour jeter les bases nécessaires à la mise sur pied d'une association unique, laquelle dispenserait tous les services. Ce dernier volet ne fait pas partie intégrante de l'amendement proposé. Il a été proposé par un membre de la délégation de l'AECQ, il a été secondé par un membre de la délégation de l'AECQ. Et, quand on a pris le vote, il y a les quatre votes pour qui étaient les quatre votes de l'AECQ, et il y a eu unanimité des 26, autour de la table, contre l'AECQ. Comment expliquez-vous le comportement de l'ensemble des autres associations d'entrepreneurs qui, par la loi, sont toutes membres chez vous? Et, quand vous avez proposé d'être le porte-parole unique, à l'exception des quatre votes autour de la table, qui représentaient l'AECQ, les autres... Je ne veux pas m'adresser à la partie syndicale, là. Vous pourriez me dire: Ce n'est pas la partie syndicale qui va décider de la structure des entrepreneurs, et vous avez raison. Mais, là, je parle, là... Il y avait quand même là 15 votes d'entrepreneurs. Comment expliquez-vous qu'à l'exception des quatre mandataires de l'AECQ tous les autres ont voté contre votre proposition qui avait pour objectif de faire de vous le porte-parole unique?

Le Président (M. Joly): M. Couillard, s'il vous plaît. (16 h 40)

M. Couillard (Reynold): M. le ministre, comme je l'ai exprimé dans mon exposé, les relations de travail, ce n'est pas quelque chose de facile. Je l'ai déjà exprimé ici, en commission parlementaire, que de faire des relations de travail, pour un employeur, ce n'est pas quelque chose de facile. On a tous la sensation qu'on va avoir notre propre convention collective, à nous autres. Avant d'être président de l'AECQ, j'ai été aussi de l'autre côté de la clôture, et j'ai été un employeur, et à chaque fois qu'une convention collective se signait, je disais: Comment se fait-il qu'ils n'ont pas réglé mon problème, à moi?

Cette idée-là, M. le ministre, elle fait boule de neige. Je vous exprimais tout à l'heure qu'il y a 18 000 membres dans l'AECQ; pour être capable de satisfaire tout le monde, ça prendrait 18 000 conventions collectives. Au même titre, pour satisfaire les 7000 habitants de la province de Québec, ça prendrait 7000... des millions, possiblement bien des millions ou une fiscalité différente, possiblement, pour chacun.

Au-delà du fait, M. le ministre, que de faire des relations de travail, c'est faire des compromis, c'est vivre une fédération d'idées des 18 000 membres, que vous ayez pu entendre exprimer par d'autres employeurs un mécontentement, je ne l'ai jamais nié et je l'ai même accepté. Mais est-il plus important d'accepter une critique de la part d'autres employeurs? Et, là, à ce moment-ci, peut-être que je qualifierais aussi d'autres associations. Est-ce que c'est plus important de prendre note de ces récriminations-là versus d'avoir un représentant... Parce que l'objectif premier de l'AECQ est d'être le représentant face à une partie syndicale dans un monopole syndical au Québec. Parce qu'il n'y a quand même pas des leviers épouvantables au Québec entre la partie syndicale et la partie patronale. Il y a un monopole syndical. Est-ce qu'il est plus important d'accepter ces critiques-là et détruire l'AECQ et affaiblir les patrons que de tenter de corriger des situations? Je pense que cette partie-là a commencé à être corrigée.

L'autre partie, quand vous me dites qu'il y a eu vote, quatre à je ne sais pas quoi, de quatre à 26, à zéro, moi, j'ai compris, selon certaines explications, qu'au moins deux corporations n'ont pas voté pour parce qu'elles ne voulaient pas négocier une convention collective. L'APCHQ a voté contre. J'aurais été vraiment très surpris si elle avait voté pour, M. le ministre. Je pense que vous-même vous seriez tombé en bas de votre chaise et, je vais utiliser une boutade, vous auriez été obligé de parler. Ha, ha, ha!

Les autres associations, Robert a fait plus de tours avec ces deux associations-là; je lui demanderais peut-être juste de compléter le pourquoi ces deux associations-là n'ont pas voulu voter pour.

Le Président (M. Joly): M. Brown, en complément de réponse.

M. Brown (Robert): Merci. Je vais y répondre en deux volets. Pour ce qui est des votes des associations traditionnelles lors du Sommet, effectivement, M. le ministre, ça avait l'air curieux. Ça avait l'air curieux que les employeurs — et aussi les syndicats, mais on va juste parler des employeurs — aient appuyé la contreproposition de l'AECQ à l'effet d'avoir une convention collective avec des clauses dites sectorielles. Par la force des choses, est-ce qu'on pouvait s'imaginer qu'un nombre x d'associations se seraient vu négocier une seule et même convention collective? Ça aurait fait assez curieux comme scénario. Donc, je dois vous dire qu'on a été au moins aussi surpris que vous. Et les membres du comité, les députés qui ont été témoins de ça, ils ont dû se poser la question: Elles s'en vont où avec leurs skis, les associations patronales? On s'est posé la même question.

Je veux revenir quand même sur ce que le président a mentionné, et probablement que ces associations-là vont venir confirmer ce qu'on vient de mentionner. Et, si elles ne veulent pas le faire, c'est leur droit, et on le reconnaît. Les deux corporations, qui représentent quand même 5500 employeurs au sens de la loi dans notre industrie, ont dit: Nous, on ne veut même pas siéger sur le conseil d'administration de l'AECQ, on veut un porte-parole unique. Et la contreproposition que nous avons faite prévoyait des places aux deux corporations, parmi les autres associations, sur le conseil d'administration. Elles n'ont pas dit qu'elles ne voulaient pas le porte-parole unique. Elles ont dit: On ne veut même pas siéger sur votre conseil d'administration. Il me semble que la nuance est importante. Les corporations n'ont pas eu l'opportunité d'expliquer leur vote, comme on n'a pas eu l'opportunité d'expliquer un certain nombre de votes. Et je vais vous dire que j'aurais aimé avoir l'opportunité de le faire, entre autres en réaction à M. MacMillan, qui n'est pas ici présentement; la procédure ne nous le permettait pas.

Pour ce qui est de l'APCHQ, je reviens. Écoutez, le seul objectif de l'APCHQ, c'était de profiter d'un des assujettissements. Vous ne pouvez pas leur demander de supporter le concept d'un porte-parole unique. Quand même, ils ont une qualité, l'APCHQ, c'est qu'ils sont constants avec leurs positions. Pour ce qui est de l'ACRGTQ, je ne qualifierai pas leur intervention, sauf qu'ils vont probablement être obligés de vous dire qu'ils ont eu récemment une assemblée du conseil d'administration et, lors de cette assemblée du conseil d'administration, il y a eu un vote majoritaire à l'effet de supporter le concept du porte-parole unique qui est l'AECQ. Alors, comment est-ce qu'on peut expliquer leur réaction lors du Sommet? Je vais les laisser répliquer. Mais je dois vous dire qu'ils ont adopté une résolution il y a, je pense, deux semaines, dans ce sens-là.

Pour ce qui est de l'ACQ, évidemment, je sais que c'est très déplaisant pour des gens d'entendre ce commentaire, sauf que vous posez la question, on est obligés de vous répondre. À partir du moment où on a biaisé une partie du discours et du débat lors du Sommet en prévoyant que les associations traditionnelles visées dans votre proposition, M. le ministre, pouvaient profiter d'un régime patronal obligatoire, évidemment, pour une association en particulier, qui a de sérieuses difficultés financières, il y avait un problème d'aller... Il n'y a personne qui va prêcher contre la vertu, et c'est ce que l'AECQ a fait. Alors, c'est ma réponse, premier volet, M. le ministre, à votre question.

Deuxième volet...

Le Président (M. Joly): Juste pour permettre un échange plus libre avec tous les parlementaires, essayez peut-être de restreindre ça. Si vous prenez huit, 10 minutes pour répondre...

M. Brown (Robert): Je vais faire de sérieux efforts, M. le Président.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît. Merci.

M. Brown (Robert): Alors, pour ce qui est des plaintes que vous avez pu recevoir d'employeurs, ça, là, je ne mets pas ça du tout en doute. comme le président l'a mentionné, satisfaire 18 000 employeurs, c'est assez difficile. de la même façon, dans le régime politique qu'on connaît, vous pouvez avoir au moins trois partis; ça peut permettre à un gouvernement d'être élu même pas par 50 % de la population. alors, ça, nous, ça ne nous impressionne pas du tout.

Ce que je dois vous dire, c'est qu'on considère, même si ça vient de la bouche du président de l'AECQ, quand il vous dit qu'il y a des résultats d'un sondage... Et je présume que la firme CROP est une firme réputée. C'est un sondage indépendant. Quand la firme CROP vient dire que la majorité des employeurs préfèrent, de tous les systèmes, le concept d'un porte-parole unique, moi, je n'ai pas de problème à aller me présenter devant vous et à l'affirmer. Les lettres qu'on vous a envoyées, M. le ministre, évidemment, c'est académique, ça fait partie des moyens traditionnels utilisés par les gens. Mais, si vous vous donnez la peine de regarder les signataires de ces lettres, vous allez voir que ce sont ceux qui vivent des problèmes de relations de travail.

Donc, ce que nous vous disons, en résumé, c'est que, oui, il y a des gens parmi les 18 000 qui ne sont pas satisfaits de la façon dont les choses se font, c'est de bonne guerre. Mais il y a une majorité d'employeurs, et nous parlons en leur nom, qui disent: Nous, on veut avoir un porte-parole unique.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. Brown. Une courte question, M. le député de Vimont, s'il vous plaît.

M. Fradet: Merci, M. le Président. Je trouve ça dommage, moi, d'entendre l'AECQ aujourd'hui venir nous dire que la majorité des entrepreneurs disent: N'affaiblissez pas la partie patronale, laissez un agent négociateur de la partie patronale unique. Pour les membres du comité, en tout cas, qui ont siégé, à tout le moins, on a rencontré l'ensemble de ces représentants patronaux qui sont venus nous dire, il n'y a pas si longtemps: L'AECQ ne nous représente pas — pour reprendre les termes du ministre. Alors, nous, on est là, on entend les doléances des entrepreneurs. Vous nous dites — parce qu'à l'AECQ c'est une obligation d'être membre, en tant qu'entrepreneur, de l'AECQ — qu'il y a des cotisations qui se font dans d'autres associations, sous une base volontaire. Et vous nous dites que la majorité — selon le sondage CROP et selon ce que vous avez eu comme réunion — des entrepreneurs décident d'avoir un agent négociateur unique. Et nous autres, ce qu'on nous dit quand on vient nous rencontrer, c'est totalement l'inverse.

Alors, le seul commentaire que je ferais, je vous dirais: En tant que patrons — parce que vous êtes les mêmes patrons, à l'AECQ, qui se retrouvent dans d'autres associations patronales — parlez-vous et entendez-vous sur un discours. Et, lorsque vous venez rencontrer... Et ne vous en faites pas, on va rencontrer les autres associations plus tard, aujourd'hui ou demain, et on va leur poser la même question. Mais, si vous venez nous voir en nous demandant: On n'est pas représentés par l'AECQ, on veut être davantage représentés par notre association patronale sectorielle, et que vous, de l'autre côté, vous dites que vous avez fait un sondage, que vous avez consulté et que ce n'est pas ça qu'ils disent, il y a un problème entre les patrons. Je pense que, ça, ça va être la première chose à régler de votre côté, parce que le même gars qui cotise à l'AECQ ou la même femme qui cotise à l'AECQ en tant qu'entrepreneur cotise soit à l'AECQ, soit dans les autres associations respectives. Alors, je pense que, ça, c'est un gros problème que vous devez régler.

La question que je vous poserais, en terminant: Le projet de loi actuel ne vous empêche pas — si vous contrôlez ou si l'ensemble des entrepreneurs sont d'accord avec votre point de vue — de donner le mandat, en tant qu'entrepreneurs, à un agent négociateur qui s'appelle l'AECQ. Il n'y a rien qui vous empêche là-dedans, que ce soient des membres de l'ACQ, des membres des autres associations, de dire: Nous autres, en tant que patrons, on veut qu'il y ait un agent négociateur du côté patronal et on veut que ce soit l'AECQ. Alors, il n'y a rien qui vous en empêche aujourd'hui. Et, si vous me dites qu'effectivement la majorité des entrepreneurs pensent comme celui-là, vous n'avez aucun problème. Alors, pourquoi votre principal point de vue dans le projet de loi 142, c'est de dire: Ce n'est pas bon, ce que vous faites en tant que gouvernement; nous autres, on veut un agent négociateur. Alors, moi, je pense qu'il va falloir que vous discutiez davantage et consultiez peut-être davantage les entrepreneurs pour avoir une position unique, à tout le moins, ou un consensus unique.

Le Président (M. Joly): Aimeriez-vous réagir, M. Couillard, brièvement, s'il vous plaît?

M. Couillard (Reynald): Oui. M. le député Benoît...

Le Président (M. Joly): Fradet.

M. Couillard (Reynald): Mallette...

Le Président (M. Joly): Le député de Vimont.

M. Fradet: Mes amis m'appellent Benoît.

Des voix: Ha, ha, ha! (16 h 50)

M. Couillard (Reynald): J'ai toujours de la

difficulté, en tant que président d'une association, à dénigrer d'autres associations. Je trouve d'autant plus déplaisant que l'objet essentiel d'un projet de loi ou une masse essentielle dans un projet de loi soit de traiter le problème d'une association patronale que, depuis trois ans, notre industrie vit dans un marasme épouvantable. On a des difficultés, des millions d'heures disparaissent ou diminuent constamment chaque année dans l'industrie de la construction, et, là, on est en train de se chicaner toute la même gang dans le parc. O.K. Je trouve ça déplaisant d'être obligé d'en parler, et c'est peut-être pour ça que j'ai passé la parole à Robert, tout à l'heure.

Mais, au-delà que ça peut être déplaisant d'en parler, il faut faire la distinction, et c'est la raison pour laquelle, dans la présentation, je vous ai parlé d'un sondage, je vous ai parlé de lettres, je vous ai parlé de consultations, je vous ai parlé de réunions. Il y a même eu une réunion le 4 octobre, où il y avait les conseils d'administration de toutes les associations et, à cette réunion-là, majoritairement, les gens étaient d'accord avec une association unique. D'ailleurs, ils ont rencontré le ministre. Il y a des gens qui l'ont même dit au ministre.

Mais, ceci dit, en faire un débat qui va durer une heure de temps pour vous dire que, les autres associations, c'est des ci, c'est des ça, je trouve ça déplaisant. Quand, dans un document, je vous exprime que, l'ensemble des employeurs, c'est ça qu'ils désirent, une association unique, c'est un voeu exprimé avec une consultation, avec un sondage CROP, avec des lettres, avec un paquet de choses. Quand les autres vous diront d'autres choses, peut-être que vous pourrez leur demander la même chose. Mais, ceci dit, ce n'est pas le fait de faire la chicane entre les associations que vous allez régler les problèmes dans l'industrie de la construction.

Le Président (M. Joly): Parfait.

M. Couillard (Reynold): O.K.? Mais, par contre...

Le Président (M. Joly): Très, très brièvement, s'il vous plaît...

M. Couillard (Reynald): Oui, je veux juste conclure.

Le Président (M. Joly): ...parce qu'on a déjà dépassé le temps. Alors, sans doute que vous pourrez élaborer davantage sur le temps de l'Opposition, aussi. Oui, s'il vous plaît?

M. Chevrette: M. le Président, n'incitez personne à prendre notre temps.

Le Président (M. Joly): Non, non, mais j'imagine que, dans les compléments de réponse, il y a des choses comme ça qui vont ressortir.

M. Chevrette: Ah! Je comprends.

Le Président (M. Joly): Je ne fais aucune suggestion. D'ailleurs, M. Couillard a dit que les choses agréables, c'est lui-même qui les livrait; les choses désagréables, il les faisait livrer par M. Brown.

Une voix: À toi, Robert. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Alors, je vais reconnaître M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Oui, M. le Président. Dans le fond, ce qui nous réunit ici, c'est parce qu'il y a un projet de loi qui a été déposé par le gouvernement. Et, pour vous, est-ce que le projet qui est devant nous améliore ou change quoi que ce soit? Vous avez constaté, depuis six mois, qu'on a fait le même cheminement. On a eu deux commissions parlementaires, vous avez vécu un sommet en supplément, et, là, on arrive avec le projet de loi. Est-ce que vous croyez honnêtement que ça répond aux problèmes qui ont été soulevés: manque d'emploi, travail au noir, mobilité de la main-d'oeuvre et, en fait, tout ce que le projet de loi touche? Est-ce que vous croyez que ça va diminuer, par exemple, les coûts aux entrepreneurs? Est-ce que vous croyez que ça va améliorer les relations de travail?

Le Président (M. Joly): Est-ce que c'est M. Couillard ou M. Brown qui répond?

M. Couillard (Reynald): Oui, je vais répondre en partie, M. Brown aussi.

Le Président (M. Joly): Ha, ha, ha!

M. Couillard (Reynald): II y a aussi des bonnes et des mauvaises choses.

Le Président (M. Joly): Ha, ha, ha!

M. Couillard (Reynald): M. Dufour, il y a un élément majeur dans le projet de loi, c'est la possibilité, s'il n'est pas amendé, d'affaiblir la partie patronale. C'est l'élément essentiel que, moi, j'y retrouve dans ce projet de loi là, et c'est celui qui fait boule de neige, pour moi, avec l'expérience que j'ai dans l'industrie de la construction. Ça fait plusieurs années que je suis dans la construction, et revivre des relations de travail comme on en a déjà vécu, je n'y tiens pas. Il y a M. Chevrette qui est ici, qui a été membre de la commission Cliche, qui l'a vécu, ce que c'était, les déchirements qui existaient entre les patrons avant 1976, avant la création de l'AECQ. Et ces mêmes déchirements sont soulevés encore aujourd'hui, et je trouve ça désagréable d'être obligé, encore une fois, d'en parler. C'est l'élément, quant à moi, important dans le projet de loi, qu'il ne faut pas mettre en place.

II y a aussi d'autres éléments sur lesquels j'aimerais peut-être que Robert réponde.

M. Brown (Robert): Alors, juste pour déjouer mon président, je vais vous parler de choses positives, M. le député.

Le Président (M. Joly): M. Brown, s'il vous plaît.

M. Brown (Robert): Pour ce qui est du régime de négociation, évidemment, on ne partage pas les propositions ou les vues du gouvernement pour ce qui est du concept de quatre conventions, plusieurs porte-parole, sauf qu'il y a quand même des éléments là-dedans qui répondent aux besoins non seulement des employeurs mais également des syndicats. Je présume pour ce qui est des syndicats.

Le gouvernement répond aux besoins des parties en éliminant l'article 51. Tout le monde a prôné: le rapport de forces, c'est un mauvais choix de termes. Le gouvernement nous donne cette opportunité-là. On va assumer nos responsabilités, ce qu'on n'a pas fait de part et d'autre depuis 1974, quand le ministre Cournoyer de l'époque avait introduit l'article 51 pour justifier sa rétroactivité de 0,85 $.

Nous, on voit quand même d'un bon oeil que le gouvernement veuille modifier une certaine, je dirais, cuisine du processus de négociation. Nous avons, nous aussi, lors du Sommet, avant même le Sommet, proposé un certain nombre d'éléments que j'appellerais de cuisine. Évidemment, ça fait partie du mémoire qu'on vous a déposé, et on souhaiterait que certains amendements soient apportés pour tenir compte de nos recommandations qui ont l'avantage d'inciter la partie syndicale et patronale à négocier de bonne foi. Alors, ça, c'est carrément apolitique, c'est carrément de la technique. La reconnaissance des secteurs, ça aussi, ça répond à nos aspirations, pas dans le sens de: «secteurs» égale différentes conventions collectives, mais clauses sectorielles à l'intérieur d'une convention; on embarque là-dedans.

Moi, ce qui me réjouit le plus, et ce n'est peut-être pas le problème le plus important de l'industrie de la construction, mais c'est quand même un problème sérieusement emmerdant, si vous me permettez l'expression, c'est le chantage que fait la province d'Ontario à l'égard du Québec. S'il y a une organisation qui a défendu le dossier du Québec — et mon commentaire est totalement apolitique — c'est bien l'AECQ. Nous, on n'a pas accepté que le gouvernement Ray fasse de la politique sur le dos de la réglementation québécoise. Tout ce qu'ils ont cherché à faire, je pense que vous en conviendrez avec nous, ça a été de faire des gains politiques. Moi, ce qui me réjouit, c'est que nonobstant le consensus auquel les parties sont arrivées... Je dois vous dire que le consensus prévoyait que le comité devait faire un rapport au plus tard le 30 mars; je m'en souviens, c'est mon anniversaire de naissance, en passant,

M. le ministre. Alors, ce que le consensus prévoyait, c'est un rapport au plus tard le 30 mars. Nous avons voté en faveur de cette proposition-là tout simplement pour éviter une proposition qui prévoyait un rapport déposé plus tard. Nous, on est heureux que le gouvernement ait décidé de proposer immédiatement — et je considère que ce sont des mesures transitoires — des dispositions qui vont au moins s'attaquer immédiatement à la question de l'immobilité de la main-d'oeuvre et des entreprises. Dans ce sens-là, nous, on considère que c'est quand même positif. On ne s'en vient pas ici demander de retirer le projet de loi. On vient dire: Ce qui est bon, il faut l'appliquer, ce qui est moins bon, on va le modifier, on souhaite que vous le modifiiez puis, s'il y a des choses qui sont carrément inacceptables, on va tenter de vous convaincre de les éliminer. Nous, on pense que, ça, ce sont des éléments positifs.

M. Dufour: Oui, mais vous dites, d'autre part, que vous êtes heureux qu'on retire l'article 51; mais, en même temps, je me souviens, lors des précédentes rencontres, vous n'étiez pas favorable à ce qu'il y ait négociation parce que vous trouviez qu'il n'y avait pas assez de balises, si je ne me trompe pas. Parce que les syndiqués nous l'ont demandé. Les syndicats, à ce que je sache, ont demandé que l'article 51... Ils étaient prêts à négocier, à jouer le jeu de la négociation, mais complète. Là, actuellement, vous dites qu'on pourrait peut-être le jouer, on est contents, mais à la condition qu'il y ait des balises contenues dans la loi.

M. Brown (Robert); Ce qu'on avait dit, M. le député, c'était qu'à cause de l'existence des dispositions de 51 — puis, ça, là, si quelqu'un veut venir prétendre le contraire, il est carrément malhonnête — nous ne planifions pas nos stratégies, comme la partie syndicale le faisait, en fonction d'une possibilité d'une intervention gouvernementale, d'une probabilité d'une intervention gouvernementale, et l'histoire des relations de travail dans la construction au Québec le confirme. Là, je ne dis rien que vous ne connaissiez pas déjà. Ce que nous disons, c'est, oui, comme association de relations de travail, on ne peut pas s'objecter à négocier librement. Là, vous diriez: L'AECQ, vous n'avez plus d'affaire là. Vous auriez raison. Nous, on dit qu'on accepte de négocier dans un contexte de rapport de forces. Sauf qu'il ne faut pas, au nom de l'intérêt public, permettre à l'industrie de la construction, qui est une industrie provinciale, qui est une industrie d'importance, de vivre le marasme ou de vivre des problèmes parce qu'on pourrait faire durer la négociation pendant x mois. Il n'y a pas un gouvernement le moindrement responsable qui va permettre ça.

Ce qui est important, ce n'est pas juste de permettre le rapport de forces; c'est très académique. C'est d'introduire des mesures, des mécanismes de négociation qui vont nous inciter à négocier de bonne foi. C'était le sens de notre recommandation quand on parlait d'un conseil de médiation et non pas d'une médiation. Le fait

que le rapport du conseil de médiation devait être obligatoirement soumis par l'AECQ à ses membres et, par les syndicats, à leur assemblée générale aussi pour obliger nos membres respectifs à se prononcer sur ce qu'on pourrait considérer un projet de convention collective, si, ça, ce n'est pas incitatif auprès des syndicats et des employeurs à négocier de bonne foi, je ne sais pas ce que c'est. Alors, dans ce sens-là, on ne peut pas dire: On veut le «free for all», permettez-moi l'expression. Ce qu'il faut dire, c'est qu'on veut être capables de négocier librement, mais avec un minimum d'encadrement. Sinon, là, c'est l'anarchie totale.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Brown. M. le député de Joliette, s'il vous plaît. (17 heures)

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Moi, M. le Président, dans un premier temps, je voudrais faire un commentaire. C'est exact que c'est au patron à se donner des structures et non pas aux syndicats à le faire pour vous. Ça, c'est clair. Les syndicats pourraient même vouloir négocier individuellement, effectivement. Mais avez-vous pensé, par exemple, qu'il y a des expériences valables qui se font dans les secteurs public et parapublic présentement, puis qui ont une expérience — ça résiste même au temps — où on négocie des avantages, un tronc commun, par exemple? Moi, je trouve inconcevable, par exemple, qu'on se mette à négocier des fonds de pension différents d'une table sectorielle à une autre. C'est fou comme balai, ça! Dans l'industrie de la construction, je pense que ça n'aurait pas de bon sens. Il y a un cadre normal qui peut se négocier très bien à une table centrale, avec un «listing», une liste de sujets qui pourraient être négociés à des tables sectorielles. À ce moment-là, toute l'agressivité, par exemple, d'une APCHQ, qui est prête à se cotiser pour vous faire disparaître, est-ce que ça ne disparaîtrait pas, ça, si, sur une liste, un tronc commun, au niveau national, pour les avantages sociaux, les congés, les vacances, l'assurance, le fonds de pension. Puis, on pourrait mettre d'autres choses, là. Puis, tu arrives... et après ça, les problèmes spécifiques, très spécifiques à chacun des secteurs, ça se fait à une table sectorielle. Comment vous réagiriez à cela?

M. Brown (Robert): On réagit d'une façon très positive. D'ailleurs, la proposition qu'on a déposée dans le cadre du Sommet était justement dans ce sens-là. Ce que nous disions, et nous reconnaissons que, quand des employeurs se plaignent du contenu du décret — présumons que ce sont des gens qu'on identifie par secteur, et l'exemple le plus facile, c'est dans le secteur résidentiel — ils disent: J'aurais donc aimé avoir des clauses particulières qui tiennent compte — et c'est le discours traditionnel, mais combien vrai — des clauses qui correspondent à la capacité de payer du marché.

Dans le secteur industriel, ça pourrait être dans un autre sens. Eux autres disent: On en a, mais on en a peut-être un peu trop. Puis on commence à les trouver lourdes. En tout cas, c'est ce que le donneur d'ouvrage pense. Nous, on dit: II est légitime, pour les employeurs et les différents marchés, d'avoir des conditions particulières. Les critiques à l'égard du contenu — peut-être un peu trop uniforme, même s'il y a des clauses particulières du décret — c'est des critiques qui se défendent bien. C'est dans ce sens-là, M. le député, que nous avons proposé, même dans le cadre d'une convention collective, qu'il se fasse une négociation par secteur.

M. Chevrette: Et si on vous disait... M. Brown (Robert): Très clairement.

M. Chevrette: m. brown et m. le président, si on vous disait: vous avez x semaines — vous vous écrasez entre vous — pour bâtir un cadre où le principe d'une négociation sectorielle est reconnu, puis le principe d'un tronc commun national est reconnu. pour les objets, vous allez faire une liste, et on va confronter la liste des objets du tronc commun que désire le monde syndical, puis la liste du tronc commun que désire le monde patronal. il peut y avoir un, deux, trois, quatre, cinq sujets qui peuvent être en discussion. mais peut-être que, sur le... moi, je suis convaincu qu'à 80 % vous allez même vous entendre sur les objets du tronc commun, puis, après ça... ii me semble que l'agressivité, puis tout le pompage — pardonnez-moi l'expression, mais... — d'organismes qui veulent avoir... parce qu'il y en a qui font des «power trip» là-dessus, c'est évident. on sait ce que c'est. ils font une crise de pouvoir, puis ils se voient... ils seront les premiers à venir demander au ministre du travail, probablement, et au gouvernement d'intervenir par la suite, parce qu'ils ne se sentent pas corrects ou assez confortables sur, par exemple, un secteur qui touche un peu plus la masse des travailleurs.

Vous n'avez pas pensé de proposer ça, ce genre de moratoire? Demander au ministre, là: Retire donc ton affaire, puis on va aller s'écraser avec les patrons. Puis, on va travailler, nous autres, sur un tronc commun, puis sur une liste d'objets sectoriels. Puis, on va demander aux syndicats de faire pareil. On va peut-être arriver à des formules positives, à ce moment-là, au lieu de vivre la confrontation qu'on vit, présentement.

M. Brown (Robert): On pense que c'est ce que nous avons fait, M. Chevrette, lors du Sommet, lorsque nous avons fait notre contreproposition sur le concept d'une convention versus x conventions. Ce qu'on a annoncé très clairement — et on a déposé des documents à cet effet-là — c'est que, non seulement on négociait des clauses particulières pour chacun des quatre secteurs, mais ce qui est intéressant, c'est que ce sont les employeurs — et le même principe s'appliquerait aux travailleurs — des secteurs concernés qui voteraient en faveur de la ratification ou du rejet du projet de convention collective. Donc, vous auriez des employeurs et des travailleurs du secteur génie civil qui négocient... un, qui donneraient le mandat — on va parler juste de

l'AECQ — qui donnent le mandat à l'AECQ, le mandat de négociation, qui suivent le processus et l'évolution de la négociation de par notre comité de négociation du secteur...

M. Chevrette: Oui.

M. Brown (Robert): ...et ce sont les employeurs du génie civil qui se prononceraient sur — on va rêver — le projet de convention...

M. Chevrette: Ne faites pas...

M. Brown (Robert): ...collective du secteur génie civil.

M. Chevrette: M. Brown, ne faites pas le procès du passé. J'essaie d'envisager le futur, là. Je me dis très clairement, puis je vous le dis à vous. Vous ne pensez pas que, s'il y avait une directive, par exemple, ou une décision ministérielle vous disant: Écoutez, moi, j'analyse ça. Je veux sortir. Le ministre, tout d'un coup qu'il aurait un élan de générosité ou encore un éclair qui le frapperait et qui lui dirait: Je serais peut-être mieux d'arrêter mes folies et de changer ça. Puis, qu'il décide de vous donner un délai x. Mais, dans le délai, il émet clairement une volonté politique qui serait la suivante: Vous allez vous entendre entre patrons pour me faire une suggestion très concrète, mais mes orientations politiques sont dans le sens suivant... Et qu'il dise aux syndicats la même chose. Puis: Vous allez me bâtir un tronc commun avec... Croyez-vous, par exemple, qu'Orner Rousseau, s'il entendait, demain matin, une volonté ministérielle claire... Je comprends qu'Orner il ne peut pas faire autrement qu'être heureux, le ministre lui en a donné plus qu'il n'en demandait. Il est tout à fait heureux. Mais prenez... Au lendemain du Sommet, l'APCHQ allait signer un document avec la FTQ. L'ACQ a signé aussi — ils en ont eu le regret, mais il paraît qu'ils n'étaient pas mandatés. Les grands travaux, ils ont dit: Nous autres, on ne signe pas, parce qu'il faut aller voir nos instances avant. C'est un peu ça le décor par tronc.

Vous êtes arrivés ici en état... complètement échevelés, et vous venez plaider chacun votre part, alors que moi je prétends qu'on pourrait, comme parlementaires, se rendre utiles et vous indiquer des pistes de réflexion et une volonté politique puis vous donner un délai pour vous brancher. Sinon, le Parlement agira à ce moment-là. Mais là tout le monde est en réaction avec le Parlement, alors que, pour moi, le Parlement, dans un premier temps, doit être un instrument pour rapprocher, pour vous rapprocher et pour vous indiquer des pistes très précises. Si vous ne vous rangez pas, bien, vous hériterez de ce que le Parlement vous donnera. Mais vous donner l'occasion de vous rebrancher, de réfléchir, de parler à vos partenaires et de bien dire aux associations d'employeurs qui vont défiler devant nous la même affaire qu'on vous dit: Moi, je n'ai pas honte, je vais dire la même affaire à tout le monde. Mais il me semble que vous démontreriez... Si vous acceptiez les recommandations et les suggestions du genre, vous placeriez le ministre dans une situation... Peut-être qu'il va être le gars le plus heureux au monde, parce que vous allez lui enlever un gros poids. Vous allez peut-être arriver avec quelque chose qui serait fantastique.

M. Brown (Robert): Théoriquement, M. le député...

Le Président (M. Joly): Bien, excusez. La réponse peut être très longue ou très courte. Je la souhaiterais très courte, s'il vous plaît.

M. Brown (Robert): Je suis ici pour satisfaire vos souhaits.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, et merci.

M. Brown (Robert): Puisque vous qualifiez beaucoup votre question, M. le député, je suis obligé, malheureusement, de qualifier aussi ma réponse. Si vous me posez la question: Théoriquement, est-ce que ce serait possible? Théoriquement, je vous dirais: Oui. Malheureusement, on vit la réalité de tous les jours, puis on est les gens du milieu. Moi, je vous dirais que... et c'est pour ça que je vous ai dit que vous avez qualifié votre question. Vous m'avez dit: Est-ce qu'Orner Rousseau accepterait de... Ma réponse à cette partie de question là est: Non, carrément...

M. Chevrette: Je l'ai doublée. M. Brown (Robert): ...non.

M. Chevrette: Je l'ai doublée d'une directive du ministre.

M. Brown (Robert): O.K. À ce moment-là...

M. Chevrette: J'ai bien compris votre affaire, mais j'ai pris la précaution de dire: doublée d'une volonté politique ministérielle claire. Ça, dans ce sens-là...

M. Brown (Robert): Oui, oui. Vous avez...

M. Chevrette: Je comprends que, si Omer Rousseau n'a pas d'indications, il va attendre que le ministre se branche, surtout qu'il a une mosus de bonne raison d'attendre que le ministre se branche. Le même ministre lui en a donné plus qu'il n'en demandait. Mais, si le ministre changeait d'idée pour le mieux-être du secteur de la construction et qu'il décidait de vous placer face à vos responsabilités, mais avec une volonté politique claire et des orientations politiques claires, je ne suis pas sûr qu'Orner Rousseau ne changerait pas d'idée, moi.

M. Brown (Robert): II y a deux prérequis, finalement. Il faudrait qu'Orner Rousseau soit d'accord. Moi, je suis dans la construction depuis 23 ans; ça fait 23 ans que je suis les activités de l'APCHQ. Je répète ce que j'ai mentionné tantôt. Ils ont une qualité, c'est la constance de leur discours; je veux au moins leur donner ça.

La deuxième partie ou le deuxième prérequis, M. Chevrette, c'est qu'il faut qu'il y ait une volonté de la part de la partie syndicale. Moi, le bout qui me trouble beaucoup — et je pense que le ministre l'a, au moins par la bande, indiqué tantôt — c'est que, après le Sommet, nous avons lancé une invitation à la partie syndicale, et nous avons soumis un cahier de demandes patronales. Ça fait curieux de parler de même, mais c'est la réalité économique, un cahier de demandes amendées. Nous avons réajusté nos demandes, et je peux vous dire qu'on a diminué un peu nos demandes. Quand le projet de loi a été déposé, on s'est dit: Finalement, la partie syndicale va nous croire. Quand on leur disait, au cours des dernières négociations — pas juste la dernière — quand on leur disait: Les gars, on n'a jamais été aussi près du désassujettissement du secteur résidentiel. Si on n'assume pas nos responsabilités, puis qu'on ne ramène pas le décret à la réalité de ce marché-là...

Je vous dis, M. le député, que notre invitation à renégocier s'est faite au moment où la partie syndicale était consciente qu'ils pouvaient perdre 25 % de leur «membership». On n'a pas eu d'accusé de réception. Alors, pour moi, c'est la façon de vous dire: Est-ce que c'est suffisant pour convaincre les représentants syndicaux de la nécessité de. Il ne semble pas que ce soit suffisant, malgré que j'aie reçu plusieurs demandes de la part d'agents d'affaires qui, eux, se disent prêts à rationaliser. Mais il ne semble pas que ça soit la consigne des centrales syndicales. C'est...

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup.

M. Brown (Robert): ...plus des initiatives personnelles.

Le Président (M. Joly): Merci. Je vais reconnaître maintenant M. le député de Drummond. S'il vous plaît.

M. St-Roch: Oui. Merci, M. le Président. Je vais suivre votre message et je vais être bref dans mon exposé. (17 h 10)

Dans la loi 142, un des objectifs, c'est qu'on fait disparaître la carte de compétence dans le secteur résidentiel. Est-ce que vous êtes d'accord, oui ou non?

M. Brown (Robert): II existe déjà... Puis là je vous le dis par reconnaissance sur le tas, si vous me permettez l'expression. Dans d'autres provinces canadiennes — je vous dirais, dans la majorité des provinces canadiennes — les travaux de construction dans le secteur résidentiel ne sont pas régis par un minimum de lois, que ce soient conventions collectives, règles de qualification d'entreprises ou de salariés ou autres. Évidemment, un discours qui est souvent utilisé... Je vous rappelle que ce n'est pas un employeur qui vous parle. À ce que je sache, les maisons ne sont pas de moindre qualité dans les autres provinces canadiennes. Donc, si vous me dites: Est-ce que ça va avoir un effet quelconque du fait qu'il n'y aurait pas de carte de qualification? En tout cas, ma première réaction, c'est que je ne croirais pas que, demain matin, tous les travailleurs qualifiés de la construction, qui travaillent dans le résidentiel, n'y seraient plus actifs. Je ne le croirais pas. Les travailleurs vont se rendre là où il y a du travail. Au moment où on se parle, il y en a très peu. Alors, est-ce qu'effectivement ça va avoir un impact? C'est difficile à évaluer, mais je ne pense pas que ce soit... En tout cas, à mon avis à moi — je vous le rappelle, je ne suis pas un employeur — je ne pense pas que ça devrait être une préoccupation majeure, compte teja» de l'expérience qui est vécue dans d'autres provinces.

Le Président (M. Joly): Malheureusement, c'est tout le temps que nous avons. Alors, M. le ministre, s'il vous plaît, en conclusion.

M. Cherry: Tout simplement, rapidement, j'aimerais vous remercier de votre présence, et vous remercier de la franchise avec laquelle vous avez répondu aux questions. Je sais que vous n'êtes pas dans une situation facile, mais j'apprécie personnellement la façon avec laquelle vous l'avez fait. Merci.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Donc, au nom des membres de cette commission, à mon tour de vous remercier.

Je demanderais maintenant aux membres de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ-construction) de bien vouloir s'avancer s'il vous plaît.

Alors, la commission reprend ses travaux. S'il vous plaît. Il me fait plaisir d'accueillir les membres de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ-construction): M. Lavallée, accompagné de M. Yves Paré et de M. Laurian Carrière. Alors, bienvenue. Vous connaissez un peu la procédure. Vous avez une vingtaine de minutes pour nous livrer votre mémoire. Par après, la balance du temps est impartie de façon égale entre les deux formations.

Alors, je vous reconnais, M. Lavallée. S'il vous plaît. Vous avez la parole.

Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ-construction)

M. Lavallée (Jean): M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, mesdames et messieurs. C'est avec tristesse que nous nous présentons devant cette commission, aujourd'hui, et un peu avec la

rage au coeur. Non pas que j'approuve les mouvements de violence, loin de ça. Nous dénonçons la violence qui peut exister. Je l'ai fait à plusieurs occasions et mon confrère Paré l'a fait aussi. Mais, la rage au coeur, parce qu'on déchire la convention collective de 25 000 à 30 000 travailleurs de l'industrie de la construction, convention collective qui a été gagnée de batailles et de problèmes dans l'industrie de la construction.

Je vais vous faire un bref historique avec la loi 290 qui a vu le jour en 1968. À ce moment-là, le secteur domiciliaire n'était quasiment pas syndiqué. Nous avions des conventions collectives dépendamment des métiers que nous représentions. Dans le cas des électriciens, c'étaient 160 conventions collectives. Dans le cas des plombiers, ça pouvait être différent. Finalement, le législateur, à ce moment-là, avait convenu de mettre sur pied des conditions et des décrets qui feraient en sorte que les gens arrêteraient de se chicaner entre eux autres. On a, au fil des ans, réussi à uniformiser les salaires. Vous vous rappellerez des années soixante-douze. À ce moment-là, les régions criaient après les autres régions et le Grand Montréal métropolitain. Je me rappellerai toujours des Îles-de-la-Madeleine, de Louis-Philippe Lacroix, qui disait: Ça n'a pas de bon sens que les travailleurs de la construction des îles, qui paient la livre de beurre le même prix que les travailleurs ou les travailleuses de Montréal et d'autres régions, aient jusqu'à 2 $ l'heure de différence d'une région à l'autre. Donc, au fil des ans, on a réussi à rattraper le salaire de base. Pendant que le Grand Montréal métropolitain récupérait 0,25 $ l'heure d'augmentation, par année, les régions, pour rattraper le Grand Montréal métropolitain, avaient jusqu'à 1,80 $ et 2 $ l'heure. Ça, c'était à peu près dans toutes les régions.

Le rattrapage fait, par la suite, on a établi un salaire de base. Dans la construction, il n'y a pas uniquement le salaire du domiciliaire. Il y a l'industrie lourde, et, par ricochet, aussi, le secteur industriel.

Ensuite, est venue la commission Cliche. La commission Cliche, ils ont dit une chose qui était importante pour les travailleurs: Vous devriez mettre un régime de sécurité du revenu. Il y a trop de travailleurs, et les gens se chicanent aux portes des chantiers pour les emplois qui sont disponibles. On a mis en vigueur... de mettre les syndicats en tutelle. On a mis en vigueur l'unification des employeurs dans une association unique. La partie qui aurait aidé les travailleurs, on n'y a pas touché. C'est la sécurité du revenu, qu'on n'a jamais réussi à avoir.

Par la suite, est venue Corvée-Habitation. À ce moment-là, tout le monde au gouvernement, que ce soit l'Opposition ou le parti au pouvoir du temps, était très fier de voir que les travailleurs de la construction avaient initié un projet important, qui avait contribué, à ce moment-là, à la relance. On avait investi des millions et des millions de notre régime de retraite. Je pense que c'est 25 000 000 $ de chaque côté. Les résidus de Corvée-Habitation ont été mis — je pense que c'est de l'ordre de 12 000 000 $ — dans Mon taux, mon toit.

Tout ça pour vous dire que, si le secteur avait été morcelé, comme on est en train de le faire en désassujettis-sant le résidentiel de huit logements et moins, on n'aurait jamais réussi à amener une mesure qui aurait fait en sorte que l'on puisse mettre sur pied Corvée-Habitation. Viennent ensuite les avantages sociaux: 4 000 000 000 $ à la Caisse de dépôt. Voilà pas longtemps, on a réussi à ramener l'âge de la retraite à 55 ans, moyennant de travailler 35 000 heures. Tout à l'heure, M. Marcil... Je pense que c'est le député de Beauharnois? C'est ça?

M. Marcil: Salaberry-Soulanges.

M. Lavallée (Jean): Salaberry-Soulanges. Je ne suis pas familier avec les comtés, mais je connais bien votre nom. Vous posiez la question, à savoir...

M. Marcil: II y en a d'autres qui le connaissent.

M. Lavallée (Jean): On trouve qu'il y a beaucoup d'argent qui va dans le régime de retraite. Écoutez, si on veut faire de la place aux jeunes, il faut quand bien même, lorsqu'on atteint l'âge de 55 ans, avoir un régime de retraite qui est décent. À ce moment-là, on ne sera pas à la charge de l'État. Les premières années, quand on a mis sur pied notre régime de retraite aux électriciens et dans d'autres secteurs, on remettait 0,05 $ l'heure. Imaginez-vous! Quand bien même on aurait travaillé 2000 heures par année, à 0,05 $ l'heure, ça fait 100 $. On ne se bâtit pas un régime de retraite important avec ça.

Donc, notre but, ça a été de mettre sur pied un régime de retraite assez intéressant, qui va faire en sorte qu'un travailleur, rendu à 55 ans, en autant qu'il puisse faire des heures, à ce moment-là, va prendre sa retraite et va faire de la place aux jeunes. C'est dans le but... Notre but, c'est de faire de la place aux jeunes aussi. Je pense que la commission a amplement expliqué ce qui arriverait en désassujettissant un groupe important pour les avantages sociaux. Ça mettrait en péril le régime de retraite dans bien des cas, les conditions des bénéfices sociaux, notre système de carte MEDIC. Vous savez, quand tu es 70 000 ou 80 000 pour payer un montant qui va contribuer à l'ensemble, et que tu le réduis de 30 %, bien, à ce moment-là, par ricochet, notre régime va être affecté. (17 h 20)

Le travail au noir. Tout à l'heure, j'écoutais les questions qui étaient posées à la commission. Je pense que ce n'était pas le rôle de la commission de répondre à ça. Le ministre posait la question, à savoir: Comment ça se fait que les travailleurs ne déclarent pas 25 000 000 d'heures? M. le ministre, je n'aurai pas à vous convaincre. Les travailleurs, au moment où on se parle... On en a déjà discuté en privé. On en a déjà discuté aussi au sommet économique. Avec un taux de chômage de 55 %, comme on a présentement, et dans certaines régions, à 80 %, le Saguenay—Lac-Saint-Jean,

entre autres... Je vous ai remis, d'ailleurs, une fiche avec les taux de chômage qui sont très bien définis, de chacun des membres qu'on représente. Vous savez, la personne qui vient de perdre sa maison, la personne qui vient de divorcer, la personne qui est rendue sur le bien-être social, la personne à qui il manque deux ou trois timbres, qu'est-ce qu'elle va faire? Elle va aller voir l'employeur. Qu'est-ce que tu veux, employeur? Tu veux me payer 32 heures par semaine. Paie moi, c'est ça que je veux. Au moins, je vais aller récupérer mes timbres.

Les salariés, au moment où on se parle, par rapport au taux de chômage, sont pris à la gorge. Ils sont pris à la gorge. Les entrepreneurs véreux et vicieux peuvent utiliser, à ce moment-là, ce moyen qu'ils ont à leur — je ne dis pas que c'est tous les entrepreneurs, mais il doit y en avoir un bon paquet; il y a 25 000 000 d'heures pas déclarées — disposition. Ils ont les travailleurs à leur merci.

La question des inspecteurs. Vous posiez la question à la CCQ tout à l'heure. Les inspecteurs n'ont pas de pouvoirs. Vous savez qu'en vertu de la loi, lorsqu'ils arrivent sur un chantier, il faut qu'on voit la personne avec son tournevis ou son «pipe wrench» travailler. Le gars a juste à laisser ses outils et ils ne peuvent pas faire de cause. Vous vérifierez ça avec la commission. Donc, c'est clair que la loi ne favorise pas les inspecteurs de la construction pour pouvoir permettre d'arrêter les gens qui font du travail au noir. C'était un des points sur lesquels on était unanimes au sommet économique, et vous ne l'avez pas mis en vigueur à ce moment-là.

Moi, je pense que le problème qu'on vit présentement... D'ailleurs, l'APCHQ a tenu un congrès dans l'Outaouais, je pense, et c'est le Mouvement Desjardins, M. Bel and, qui disait: Le problème qu'on a, c'est un problème économique. À tous les jours... C'est devenu quasiment... À tous les jours, on entend dire qu'une journée c'est tant de postes qui disparaissent; une autre journée, c'est une autre compagnie qui ferme. Je voyais, aujourd'hui... C'est MLCP, je pense, qui va couper des emplois, par rapport à une restructuration. À tous les jours, des gens perdent leur emploi. De temps en temps, on a une petite nouvelle qu'il y en a 250 qui viennent de partir, qu'ils vont engager, par rapport qu'ils vont faire des patins. Pour une fois qu'on en a une qui n'est pas pire. La première depuis, peut-être, un mois. Depuis ce temps-là, ils ont peut-être coupé 25 000 jobs. Quand on entend qu'une compagnie — c'est Philip Morris, qui va en couper 14 000 — ferme 40 usines...

Donc, les travailleurs qui perdent leur emploi, à ce moment-là, n'achètent pas de maison. Ceux qui l'ont encore sont inquiets. Combien de temps qu'ils vont la garder? C'est ça qu'on a comme problème. On a un problème de surtaxation. Tout le monde essaie, à cause qu'on est trop taxé, de s'en sortir le mieux qu'ils peuvent. Ils n'ont pas confiance dans l'économie, et ils font en sorte de travailler au noir. Je pense qu'il va falloir regarder très sérieusement tout le système de taxation.

D'ailleurs, notre centrale, la FTQ, a déjà fait des représentations auprès du gouvernement à ce sujet-là.

Au niveau du mouvement de la main-d'oeuvre, je vais laisser mon confrère en parler. Vous savez, au moment où on se parle, n'essaye pas d'amener un travailleur de Chicoutimi à Aima, ils vont le sortir. Puis, n'essaye pas d'amener un travailleur de Sept-îles travailler à Baie-Comeau, ils vont le sortir, même si c'est de la même centrale syndicale. Il y a tellement peu d'emplois que le travailleur qui demeure dans une région veut le travail dans sa région. Donc, je ne vois pas le matin où il va arriver des travailleurs des autres provinces. Puis, d'ailleurs, je n'ai rien contre les autres provinces, mais c'est la même chose qui se passe dans les autres provinces aussi. Tant que le local n'est pas vide, tu ne peux pas aller travailler là. Je vais laisser mon confrère pouvoir continuer là-dessus.

Machinerie de production: celle-là, elle est bonne. Vous me dites: O.K., la machinerie de production, qu'est-ce que vous faites avec ça? C'est sûr que, la machinerie de production, c'est bon de l'inclure, mais on nous met tellement de conditions. On dit: C'est pourquoi la proposition à assujettir plus large serait conditionnelle à l'entrée en vigueur de mesures aptes à restreindre, et que plusieurs entrepreneurs et investisseurs qualifient de clauses improductives, soit celle relative à la définition des métiers, les ratios apprentis-compagnons, la durée de l'apprentissage et différentes clauses financières du décret de la construction. Donc, on nous dit: La fois où vous aurez tout réglé ça, là, à ce moment-là, par décret, on vous le donnera peut-être l'assujettissement de la machinerie de production.

Donc, moi, pour conclure... Tout simplement, M. le ministre, on vous demande de retirer le projet de loi. Soyez assuré qu'on devrait être en mesure de pouvoir régler nos problèmes dans l'industrie de la construction.

Le Président (M. Joly): M. Paré, voulez-vous compléter immédiatement ou via les questions? Oui.

M. Paré (Yves): Non, immédiatement, si vous me le permettez.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, allez, M. Paré. Je vous reconnais.

M. Paré (Yves): II me reste encore une dizaine de minutes?

Le Président (M. Joly): Ah, non. Vous avez 5 min 30 s.

M. Paré (Yves): Bon, mon président m'a volé mon temps!

M. le Président, le discours...

Le Président (M. Joly): C'est une accusation que vous faites, là?

M. Paré (Yves): Pardon? Ha, ha, ha! Non, je parle de mon président à moi.

Le Président (M. Joly): Ah bon, O.K.

M. Paré (Yves): Le discours d'ouverture du ministre, ce matin, m'a extrêmement surpris. Il diffère, en tous les cas, du discours de clôture du Sommet. J'ai eu l'impression, dans votre discours, ce matin, qu'on avait été presque une bande de singes à ce Sommet, qu'on avait discuté d'à peu près rien, qu'il n'y avait à peu près rien sorti de là de concret. M. le ministre, j'ai été très surpris de ce discours. Quand on a terminé, je pense que les paroles que vous avez prises, c'étaient des paroles de félicitations, qu'il y avait eu des discussions, que vous aviez pris note de beaucoup d'arguments. Même s'il n'y avait pas eu de consensus sur toutes les résolutions, vous aviez quand même de bonnes indications qui vous permettaient de travailler.

Jamais, M. le ministre, à ce Sommet, il n'a été question de déréglementation du secteur résidentiel de l'industrie de la construction. Si on n'en a pas discuté, M. le ministre, c'est parce que les documents qui ont été préparés par le ministère n'ont pas fait état de cette déréglementation. Le fait de ne pas accepter, dans une discussion, de déréglementer les gouttières d'une maison ne fait pas en sorte qu'on n'était pas prêts à discuter des problèmes du secteur résidentiel. On était très ouverts, M. le ministre, à discuter de ça. Je pense qu'on l'a démontré au Sommet. On est sortis du Sommet avec enthousiasme, espérant qu'on venait de prendre en main l'industrie de la construction. on s'aperçoit que ce n'est pas ça du tout. vous tenez le discours que la loi 142 va permettre une saine compétition dans l'industrie de la construction, au résidentiel, une adaptation au marché. le discours est tenu que ça va créer de l'emploi, que ça va faire une relance de l'industrie de la construction. le même discours que vous avez tenu, comme gouvernement en 1988, lors de la déréglementation du secteur rénovation, dans le secteur résidentiel. exactement le même discours. il faut régler le problème du travail au noir. déréglementons. les gens vont rapporter leurs heures. il n'y aura plus de travail au noir. ça va relancer l'industrie de la construction. vous en avez fait le constat, ce matin. dans le secteur de la rénovation domiciliaire, je ne pense pas que le travail au noir a été réglé, bien au contraire. on pourrait dire aujourd'hui: au lieu d'être 30 %, il y a peut-être 80 %, 90 %, qui se fait en-dessous de la table.

Les coûts de la main-d'oeuvre n'ont pas diminué pour le consommateur. Indépendamment de ce qu'on peut faire croire, les pleines pages dans le journal La Presse, venant du document de l'APCHQ, qui dit: Pour faire rénover votre maison, ça va coûter 49 $ pour un charpentier-menuisier. Pourtant, ce n'est plus couvert par le décret de la construction. C'est faux de prétendre que les coûts de la main-d'oeuvre engendrent le chaos dans l'industrie de la construction. On pense qu'il y a des problèmes, oui, d'application et de conventions... travail du secteur résidentiel. On était prêts à faire un bout.

Ce qu'on pense? C'est l'anarchie dans l'emploi. Il n'y a pas d'emplois disponibles dans l'industrie de la construction, actuellement. Le gouvernement, tout ce qu'il trouve à faire, plutôt que d'essayer de trouver une solution de création d'emplois, c'est d'augmenter le nombre de citoyens qui vont pouvoir venir oeuvrer sur ces chantiers. C'est tout ce que vous trouvez à faire. Vous rapetissez la tarte des heures disponibles dans l'industrie de la construction et vous augmentez le nombre de travailleurs. Ces travailleurs, qui ne seront plus assujettis, qui ont des cartes de compétence, tout à l'heure, ils vont vouloir aller travailler dans le secteur commercial, industriel et institutionnel. Pour pouvoir le faire, parce que le nombre va maintenant augmenter, la tarte étant diminuée, ils vont faire exactement le même système qu'ils ont fait dans le résidentiel, à des conditions moindres. Donc, le dessous de table, le travail au noir, le cancer va se transposer du résidentiel au commercial, institutionnel et industriel. Vous n'avez rien changé, mais pas du tout!

Dans le secteur résidentiel, vous allez permettre à qui que ce soit, probablement à des chômeurs aussi, qui recherchent un emploi, qui viennent d'une industrie qui vient de fermer, probablement des travailleurs de la construction qui vont essayer aussi de gagner leur vie, en tout cas, décemment, si on peut dire que ça va être décemment. Contrairement à ce que vous dites, M. le ministre, ça va être non pas la loi du marché, mais la loi du salaire minimum, parce qu'il va y avoir dix travailleurs encore disponibles pour faire un emploi. Ce n'est pas ça, une relance de l'économie. Je ne pense pas que c'est une création d'emplois.

Donc, tout le système que vous mettez en place, c'est l'anarchie. Quand on parle de violence... Je ne pense pas que ça va se battre comme ça s'est déjà battu — on ne pense pas — mais vous allez faire crever des gens de faim parce qu'ils vont être à la merci de tout un chacun des entrepreneurs qui voudront bien donner de l'ouvrage à ces travailleurs.

Quand on parle des policiers, des pompiers, des chauffeurs de taxi et des professeurs d'école qui ont deux mois et demi de congé durant l'été, ils vont pouvoir venir dans l'industrie de la construction. On ne charrie pas, M. le ministre. On ne charrie pas, on pense que c'est ce qui va se produire, parce qu'il va se construire, en 1994, 35 000 unités de logements au Québec. Je pense que les prévisions de la Société centrale d'hypothèque, de la Commission de la construction, d'à peu près tout le monde, c'est qu'on parle de 35 000 unités de logements; 35 000 unités de logements devraient se faire par 35 000 travailleurs, indépendamment des conditions de travail. Mais ça ne se fera pas par 75 000 travailleurs, ça va se faire par 35 000 travailleurs, qui vont oeuvrer à peu près 1000 heures chaque, en moyenne. Il y en a qui vont faire 1400, d'autres vont faire 300 heures. Ces gens-là vont devoir accepter les conditions que le marché et les employeurs vont vouloir leur donner.

Vous n'aidez pas non plus les petits entrepreneurs. Indépendamment de tout ce qu'on peut véhiculer, vous n'aidez pas ces petits entrepreneurs, qui n'auront aucune base pour se donner... comme comment compéti-tionner l'autre contracteur. Parce que, aujourd'hui, on peut bien être dans la même association de l'APCHQ, mais, quand on sort de notre assemblée, comme entrepreneurs, on devient des compétiteurs. (17 h 30)

Et sur quelle base, moi, je vais soumissionner pour construire la maison du ministre? Est-ce que je dois payer mon briqueteur 17 $ l'heure, 14 $? Comment est-ce que l'autre va soumissionner? Il n'y en aura plus, de base. Ça va être — et je vais employer le terme — le «free for all». puis ne pensez surtout pas, m. le ministre, qu'on va demeurer inactifs. on a embarqué dans le système imposé par le gouvernement depuis 1968, on a embarqué dans ce système-là, et ce n'est pas nous autres, m. le ministre, qui avons fait les lois et les règlements qui existent depuis ce temps-là. ça a toujours été les gouvernements qui ont imposé ce système-là. on aurait peut-être préféré, depuis 1968, marcher sur le système d'accréditation comme en ontario. c'est tellement facile de comparer, aujourd'hui, après un constat d'échec. et je ne suis pas d'accord que le constat d'échec doive être assumé par les parties patronale et syndicale. vous avez été, comme gouvernement, la cause dans 90 % des échecs qui étaient intervenus entre les parties: imposition de décrets, imposition de lois. et ça, m. le ministre, il va falloir qu'on le dise. quand on dit: on n'est pas d'accord que le ministre intervienne dans nos conditions de travail, juste un exemple que je veux vous donner...

Le Président (M. Joly): En conclusion, s'il vous plaît, M. Paré.

M. Paré (Yves): Oui. Juste un exemple. Il y a quelques années, un an ou deux, on a eu une entente, là, unanime, patronale-syndicale, 90 % des syndicats, pour mettre un petit 0,20 $ l'heure. La loi ne nous permettait même pas de pouvoir mettre en application notre convention collective de travail qu'on venait de signer avec l'Association des entrepreneurs et les syndicats.

Alors, quand il y a le chaos, M. le ministre, on ne l'a pas cherché, le chaos, il nous a été imposé depuis 1968, et en partie depuis 1975, quand le ministre du Travail, M. Cournoyer, s'est donné des pouvoirs d'intervenir dans chacune, toutes et chacune des activités des relations de travail dans l'industrie de la construction. On pensait que c'était fini, ce système-là, avec le Sommet, ce qui n'est pas le cas, on s'en aperçoit. Et je peux vous dire une affaire, on regrette énormément d'avoir collaboré et de s'être concertés avec le gouvernement. On s'est fait — excusez l'expression, monsieur — fourrer. Merci.

Le Président (M. Joly): M. Paré, je vous remercie.

M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: O.K. Concernant la proposition qui ferait qu'on aurait quatre secteurs ou trois — en tout cas, il y en avait trois de proposés, il y en a eu cinq, on s'est entendus sur quatre finalement, là — comment, vous autres, vous pensez qu'un système comme celui-là de quatre négociations sectorielles, ça faciliterait la négociation et ça permettrait plus d'en arriver à des ententes qu'en vertu du système actuel? Là je ne parle pas de 51, je vais vous en parler après.

Dans un premier temps, j'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Paré (Yves): M. le ministre, juste le fait de donner la responsabilité à des associations d'entrepreneurs qui n'ont eu comme rôle, depuis les 20 dernières années, que de critiquer, le jour où ils vont prendre cette responsabilité-là, j'ai l'impression que les relations de travail vont être différentes. Il est très facile, comme organisation patronale, quand il y a une association patronale unique qui est l'AECQ, et où on ne s'entend pas, parce qu'il y a des fois où on s'est entendus, contrairement à ce que mon ami Robert disait... Ce n'est pas cinq fois. Je pense qu'on a eu deux conventions collectives de travail réellement signées depuis 1976.

Mais, indépendamment, il y a eu des ententes, par exemple, en 1982, et là il y a eu un tollé de protestations de la part de l'APCHQ. Les employeurs acceptaient, les syndicats se sont entendus, l'APCHQ a pa-queté l'assemblée contre l'AECQ, ça a été rejeté, donc le ministre a imposé l'entente qui avait été faite.

Donc, si on responsabilise cette association-là qui est l'APCHQ, tout à l'heure ils vont devoir prendre un vote, ils vont devoir prendre une décision: Est-ce qu'on accepte cette clause-là ou si on la rejette? Quand ils auront à prendre cette responsabilité-là, on a l'impression que le discours va changer. C'est ce qu'on pense. On peut peut-être se tromper, mais deux secteurs, trois secteurs, on pense qu'ils pourraient peut-être prendre des décisions, et à ce moment-là ils ne seraient pas sur la place publique à ne faire que de la critique. Ils auraient une responsabilité à prendre, et on pense que ça va, à notre esprit, donner la meilleure idée des conditions particulières.

Il y en a, dans le décret, des conditions particulières actuellement, sauf qu'elles sont cachées, et tout le monde a l'impression que c'est les mêmes conditions dans l'industriel que dans le résidentiel, alors que c'est faux, parce qu'on a un décret qui est ça d'épais. Mais on pense que, s'il y a un secteur résidentiel, puis deux, ou trois ou quatre secteurs, on est capables de vivre avec ça, et ça va responsabiliser les associations patronales.

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: O.K. Une autre question, puis je réfère, là, au président de votre organisme quand il

parlait des différences des avantages sociaux, puis il commençait à élaborer en disant: Avec 0,05 $ l'heure, on ne pourrait pas aller bien loin. Dans le décret de la construction, à l'heure actuelle, ça varie entre quoi et quoi, la contribution et des travailleurs et des employeurs versus, par exemple, les caisses de retraite? Est-ce que c'est uniforme pour tout le monde?

Je pose la question, là, mais je voudrais vous entendre. Je sais que chez vous, par exemple, à la FIPOE, les électriciens, il y a fort longtemps que vous avez décidé d'investir plus dans ce sens-là. Mais, en d'autres mots, ce que j'aimerais qu'on entende, à la commission, c'est: Est-ce que c'est parce qu'il y a un décret ou quatre décrets? Est-ce qu'il n'est pas vrai que dans le décret, à l'heure actuelle, vous avez des différences importantes, dépendamment des secteurs d'activité puis des métiers à l'intérieur du même décret, par exemple concernant la caisse de retraite?

M. Lavallée (Jean): Dans le décret actuel, il y a un régime de base qui s'applique à tous les salariés de l'industrie de la construction et, par la suite, des ententes sont intervenues aux différentes tables, dépendamment des métiers. Il y a des métiers qui mettent plus d'argent que d'autres. Mais, dans l'ensemble, excepté quelques groupes, les conditions sont de beaucoup supérieures au régime de base, ce qui fait en sorte que ce qu'on a besoin de faire, c'est des heures de travail. À 750 heures par année, on ne peut pas se bâtir un régime de retraite intéressant. Le régime donne environ... Je pense que c'est 385 $ par 1000 heures de travail. Donc, ce n'est pas énorme. Ça veut dire: si tu travailles 1000 heures dans une année, ça va te donner 385 $ de rente pour l'année. Ça veut dire que ça en prend, des heures, si on veut, un matin, arriver avec un régime adéquat.

Mais c'est là raison pour laquelle il y a plusieurs travailleurs qui ont décidé de mettre des sommes additionnelles pour pouvoir prendre leur retraite avec un régime décent.

M. Cherry: Voulez-vous nous donner un ordre de grandeur, par exemple? Le programme uniforme pour tout le monde, c'est quoi? Et ça peut aller jusqu'à quoi l'heure?

M. Lavallée (Jean): Ça va de 1,80 $ à 3 $ l'heure.

M. Paré (Yves); À peu près ça.

M. Lavallée (Jean): Dans l'ordre de grandeur.

M. Cherry: Ça, c'est l'ensemble des contributions employeur-employés ou...?

M. Lavallée (Jean): Le régime de base.

M. Paré (Yves): C'est à peu près 1,80$, le régime de base. À peu près, là.

M. Lavallée (Jean): II faudrait que je regarde le livre...

M. Paré (Yves): II est à peu près à 1,80 $, puis, avec des complémentaires pour certains, ça va à 2,83 $, 3,20 $ à peu près. Ça varie entre ça.

M. Cherry: Mais ma question, c'est que le 1,80$ qui semble être le minimum, est-ce que ça, ça constitue la contribution et de l'employeur et de l'employé ou uniquement d'un des deux, là?

M. Paré (Yves): Les deux.

M. Cherry: «C'est-u» 0,90 $ chacun de base et, après ça, disons, des décrets successifs où il y a eu une expression des parties pour dire: Nous autres, on voudrait qu'il y ait plus d'argent mis là-dedans?

M. Paré (Yves): Dans le système comme il est basé, c'est que l'employeur paie la partie assurance-vie, santé, salaire, plus une partie dans le régime de retraite. Bon, mettons, ils mettent 0,60 $ dans le régime de retraite, plus 0,50 $ et quelques dans le régime d'assurance, à peu près, là — je vous donne les chiffres à peu près — et le salarié, selon le régime de base, paie, mettons, 0,75 $ dans son régime de pension. Et là il y a des métiers qui disent: Bon, bien, au lieu d'être 0,75 $, mettons, c'est 1,25 $ qu'il met. Ou l'autre: C'est 1,90 $, mais toujours dans le régime de retraite, parce que c'est l'employeur qui paie la partie assurance.

M. Cherry: O.K. Une dernière question, parce que je sais que j'ai des collègues qui veulent le faire. Lors de la commission Cliche, en 1976, on parlait dès ce moment-là du problème du travail au noir dans l'industrie de la construction, et, à l'époque, les parties y référaient comme un problème. Bon. En 1992-1993, on y réfère maintenant comme un fléau, puis vous avez tantôt utilisé le mot «cancer». C'est à ça que vous avez référé tantôt. On décrit présentement la situation en disant: C'est parce qu'il y a une diminution de l'activité économique dans, ce secteur-là, donc il y a eu une augmentation. Mais on a connu, de 1976 à 1993, quand même des périodes intenses d'activité économique, et pourtant, il me semble que l'activité, elle, du travail au noir n'a pas disparu pour autant. Mais, bien sûr, par rapport au volume d'heures qui était... Ou peut-être qu'on s'en occupait moins ou qu'on s'en préoccupait moins. Mais il me semble que ça n'a jamais disparu parce que, dans les 13 dernières années, ça a été une constante. De problème, c'est devenu cancer ou fléau aujourd'hui.

M. Paré (Yves): Oui. Mais il faut dire une chose! Il y a toujours eu et il y aura toujours 5 %, 7 %, 8 %, 10 % de travail au noir qu'on ne pourra pas contrôler. Il y a ce qu'on appelle des gamiques patronales

avec des travailleurs. Ça, c'est clair, il y a des gami-ques. Il y a des entrepreneurs pour qui la seule façon de «compétitionner» leur chum, à côté, qu'ils voudraient écraser, c'est en coupant des conditions de travail. Donc, il va toujours y en avoir un petit peu.

Quand il y a de l'ouvrage, quand les travailleurs sont un peu indépendants de l'emploi que l'employeur offre, ils n'acceptent pas ces conditions-là. Mettons, le boss va dire: Moi, je ne te rapporte pas tes heures à la Commission de la construction, parce que, bon... Tu vas en travailler 40, je vais t'en payer 32. Il n'acceptera jamais ça, parce que l'employeur, à côté, il est prêt à l'engager à 40 heures par semaine. Donc, qu'est-ce qui amène ça? C'est le manque d'emplois.

Aujourd'hui, le père de famille, M. le ministre, qui se présente à un emploi où le patron lui dit: Moi, je vais' t'engager, je vais te faire faire 40 heures, je vais t'en payer 28, tu vas ramasser ton gros timbre pareil, puis après ça on va s'arranger, quand tu vas retirer ton chômage, tu viendras me voir, je vais te donner deux 50 $... Vous êtes père de famille, vous n'avez plus rien de revenu. Vous faites quoi? C'est ça ou bien donc: Laisse faire, j'en ai 20 qui sont prêts à la faire, la job. (17 h 40)

II y en a qui sont à l'emploi aujourd'hui. L'employeur, et ça, ce n'est pas sur des chantiers résidentiels... Je vais vous parler de... sur la rive sud, là, de l'Agence spatiale. L'Agence spatiale, alors qu'un entrepreneur... Puis ça, ce n'est pas un entrepreneur de manoeuvres; d'électriciens. Le samedi, mon bonhomme, tu rentres, puis c'est bénévole. Si tu ne rentres pas, lundi, laisse faire, j'en ai en masse. J'en ai d'autres.

Je suis allé à Chicoutimi la semaine dernière. Vous regardez le «board». Le «board», ça, c'est où on place les travailleurs. Et là vous regardez: sur 300 noms, BS, pas de chômage, pas de chômage, pas de chômage, manque deux timbres, BS, BS. Vous avez 300 travailleurs électriciens sur un «board» de même. Posez-vous pas de question! Quand l'entrepreneur dit: Viens me voir, tu vas travailler 40 heures, je vais t'en payer 28. C'est quoi que vous faites? C'est ça qui est le noir. Quand le salarié pourra dire: Non merci! je ne le fais pas! il n'y en aura pas, de noir. Pas plus compliqué que ça.

Vous nous avez dit ce matin: Vous avez 17 façons de contrer le travail au noir. Il y en a eu une, et là je pense que c'était patronal-syndical, à l'unanimité. On a dit, au Sommet: On va donner le pouvoir aux inspecteurs de fermer un chantier lorsqu'il sera prouvé qu'il est illégal. Et ça, des entrepreneurs comme Hervé Pomerleau, qui sont prêts à faire ça, c'est parce qu'ils sont rendus au même problème que nous autres: ils ne contrôlent plus rien de leur compétition. C'est la raison pour laquelle on dit qu'on n'a pas les outils pour le faire.

Les poursuites, ce n'est plus la Commission qui les fait, c'est le ministère de la Justice. Vous ne nous avez pas donné, M. le ministre, les outils, mais pas du tout. On nous a enlevé les outils. On nous donne des semblants de gestes qu'on peut poser, mais c'est tout. On ne peut faire que de donner un ticket de vitesse au gars qui travaille au noir. Tout le monde le sait, mais il continue à travailler. Puis, quand il passe en cour un an et demi après, il a une amende de 250 $. Il s'en «fiche-tu», des 250 $? Il est mort de rire, parce qu'il a volé la job d'un autre travailleur qui, lui, est légal.

Pas parce qu'on veut dire qu'un citoyen est mieux que l'autre! Mais, avec votre loi 142, vous ne faites que faire choisir qui va être en chômage: «c'est-u» le père ou si c'est le garçon? C'est tout ce que vous faites. Il va y avoir une job de disponible, puis il y a deux gars pour la faire. Alors, le ministre ne fait que choisir qui va avoir le droit de la faire.

Et le noir va toujours continuer, mais pas dans les proportions alarmantes qu'on a aujourd'hui, si on est capable de relancer l'industrie de la construction. On a fait des suggestions. Elles ont peut-être l'air niaiseuses. Si on disait demain matin, comme création d'emploi, si le ministre disait: Tout le temps supplémentaire dans l'industrie de la construction, il est interdit, sauf si c'est dans des cas d'urgence et si c'est dangereux — il se déclare à peu près 3 000 000 d'heures en temps supplémentaire par année, alors, je veux dire qu'il s'en fait à peu près 5 000 000 — ça voudrait dire, M. le ministre, qu'on créerait 5000 jobs demain matin. C'en «est-u», une solution de création d'emplois, ça? On permettrait à 5000 nouveaux travailleurs de faire 1000 heures. 5 000 000 d'heures, ça fait 5000 gars qui rentrent à l'ouvrage.

M. Lavallée (Jean): En complément, monsieur...

M. Paré (Yves): Juste ça! Trouvons donc des solutions plutôt que de déréglementer. C'est ce qu'on proposait au Sommet, puis on pensait avoir été entendus. On a été écoutés, mais on n'a pas été entendus.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le député...

M. Lavallée (Jean): En complément, deux secondes, M. le Président, s'il vous plaît, si vous me permettez...

Le Président (M. Joly): Je vous permets très brièvement, parce qu'il y avait deux, trois autres questions, là...

M. Lavallée (Jean): O.K.! Rapidement, vous disiez, tout à l'heure, M. le ministre, qu'il y avait 17 ou 18 moyens à notre disposition pour contrer le travail au noir, sauf que, dans la loi 186, on n'a pas mis la réglementation en place qui pourrait faire en sorte que des entrepreneurs qui sont pris à engager, à employer des travailleurs au noir puissent avoir des amendes sévères allant avec un système de points de démérite qui pourrait aller jusqu'à la perte des licences. On l'a mis dans la loi 185. Moi, dans le temps qu'il y avait des petites amendes, là,

sur la route, qu'on n'avait pas de risque de perdre nos licences, je peux vous dire, ce n'était pas long, monter à Québec. Mais aujourd'hui on respecte les limites de vitesse à cause qu'on sait qu'au bout de la ligne on perd notre licence. il manque de dents. il manque de dents pour qu'on puisse contrer le travail au noir. le ministère du revenu: tout simplement une dénonciation disant que le ministère, maintenant, va s'occuper des chantiers de construction puis des employeurs de la construction. à partir de là, 30 % des heures vont augmenter facilement. on dirait qu'on ne veut absolument pas régler le travail au noir.

Mon confrère Paré parlait de pouvoir créer 5000 emplois. Il va falloir qu'on fasse quelque chose. La tarte est grande de même. On vient de voir des pays qui viennent de réduire automatiquement la semaine de travail à 28 heures. Pourquoi? Il n'y en a plus, d'ouvrage. Bien, c'est des choses qu'on est prêts à regarder très sérieusement pour créer de l'emploi.

Une voix: Puis, nous autres, on est encore à 60 heures par semaine, dans bien des...

Le Président (M. Joly): M. le député de Papineau, s'il vous plaît.

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Depuis le Sommet, on entend parler beaucoup de l'Outaouais. Vous êtes au courant qu'on a un problème. Vous aviez dit: On a eu plusieurs rencontres avec le comité des députés. Tantôt, j'écoutais l'AECQ. On a mentionné que je n'étais pas ici, mais j'étais dans mon bureau avec des gens de mon comté, mais quand même. L'AECQ suggère le sceau rouge avec une carte de compétence pour ces gens-là qui peuvent travailler sur un bord, la mobilité. La CCQ: très déçu d'entendre qu'ils disent, eux autres, qu'il ne faut pas changer les règles parce que c'est juste l'Outaouais qui a des problèmes. Pas trop fort, en passant.

Est-ce que vous avez des suggestions pour les trois... Vous parlez de gens qui travaillent ou qui ne travaillent pas, vous parlez de 4000, 5000 créations d'emplois. Chez nous, dans l'Outaouais, on a parlé de 5000. Je pense que c'est un peu élevé, là, mais mettons-le à 3000 employés qui travaillent du côté de l'Ontario, qui ne sont pas syndiqués mais qui travaillent depuis nombre d'années sur la construction résidentielle.

Alors, nous, on a fait certainement des pressions sur notre gouvernement pour essayer de trouver des solutions. Au Sommet, vous aviez décidé de former un autre comité pour l'étudier, pour amener des solutions. J'étais d'accord que le comité se forme pour trouver des solutions. Mais est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu, une minute, deux minutes? Parce que ces gens-là, pour nous, quand même que la CSN, n'importe qui, viendrait nous brasser ou n'importe qui, faire de la violence, il y a une affaire: on a des gens qui demeurent au Québec qui ne sont pas syndiqués mais qui travaillent depuis 15, 25, 30 ans du côté de l'Ontario, puis là il y en a qui veulent les bloquer. Est-ce que vous avez une solution pour aider nos travailleurs?

Le Président (M. Joly): M. Paré, s'il vous plaît.

M. Paré (Yves): D'abord, je voudrais faire juste une mise au point: on n'a pas l'intention d'aller brasser. Mais je vais vous faire remarquer une chose, par exemple. Je dois vous dire qu'il y a une association de travailleurs illégaux, et qui se déclarent illégaux, qui travaillent au noir, qui sont supportés par vous, M. le député, en passant.

M. MacMillan: Non. Un instant!

M. Paré (Yves): Et, soit dit en passant, il y a des représentants de la Commission de la construction qui ont mangé des claques sur la gueule aussi par ces illégaux-là, puis ils ont été pas mal brassés.

M. MacMillan: Est-ce que je peux...

M. Paré (Yves): Mais, pour répondre à votre question...

M. MacMillan: M. le Président...

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît!

M. MacMillan: Question de privilège. Je veux dire, ces gens-là, à date, que vous mentionnez, sont venus me voir, moi, ils étaient 50, 60, ils sont venus me brasser. J'ai dit, moi, que j'étais pour faire des interventions auprès du gouvernement du Québec pour essayer d'améliorer les gens qui n'ont pas leur carte de compétence pour qu'ils puissent continuer à travailler. C'est de ça que je suis en faveur.

M. Paré (Yves): Mais, alors, ils n'ont pas d'autre choix que de travailler illégalement.

Mais, en tout cas, peu importe, juste pour faire une mise au point, oui, on est conscients qu'il y a un problème frontalier. Peut-être que la proposition qu'on avait faite, et c'est la proposition qu'on avait faite, de faire un comité, ce n'était pas pour pelleter en avant. On s'est donné un délai très restreint. Ce qu'on avait l'intention de faire, c'était de partir un groupe syndical-patronal, d'aller rencontrer les syndicats de l'autre bord.

Les travailleurs, les syndicats de l'autre bord disaient: Comment est-ce qu'on peut trouver une façon de se chevaucher un petit peu? Puis je pense qu'on aurait sûrement trouvé quelque chose d'ici au mois de mars 1994, qui n'est pas aux calendes grecques, soit dit en passant, qui était relativement court. S'il y avait eu le suivi du Sommet immédiatement après, on aurait embarqué. J'étais un de ceux, M. le député, qui étaient très ouverts.

Oui, on pense que vous avez un problème, comme

on pense que la région de la députée, ici, de Kamouraska a aussi un problème frontalier. On est prêts à regarder ça. Mais où on s'enfarge dans cette proposition-là, c'est que, pour trouver une solution à peut-être 2000, 3000 travailleurs là puis peut-être 1000, 1200 de l'autre bord, on enfarge 125 000 travailleurs. On ne peut pas fonctionner. Le système proposé ne réglera rien, indépendamment, M. le député, des frontières qui vont être mises, indépendamment, mettez-en, mettez-en pas.

M. MacMillan: Mais, M. Paré, ces gens-là qui travaillent...

Le Président (M. Joly): Brièvement, M. le député de Papineau, parce que j'ai une autre intervention, puis, déjà, je déborde.

M. MacMillan: La dernière. Ces gens-là qui travaillent du côté de l'Ontario, ça ne veut pas dire qu'ils veulent être syndiqués, ça, par exemple.

M. Paré (Yves): Non, mais... Oublions le... On a l'impression qu'on veut tout le temps poigner tout le monde à la gorge, soit les syndiqués. On veut que les travailleurs au Québec travaillent d'abord. Ça, c'est...

M. MacMillan: Moi, aussi.

M. Paré (Yves): ...le principe fondamental, priorité régionale. Ça, on le veut, autant pour l'Outaouais que pour la Côte-Nord. Ça, on veut ça. À travail disponible, n'importe quel Canadien. Et c'est le principe qui est établi en Ontario. La différence en Ontario: plutôt que d'avoir un règlement gouvernemental, ils ont dans leur convention collective l'embauche des salariés par l'entremise du syndicat. On nous dit, nous autres, ici, dans le projet de loi, que le règlement de placement serait aboli, qu'on pourrait discuter de la mobilité de la main-d'oeuvre, mais qu'il nous serait interdit de discuter, par exemple, de l'embauche. Donc, on essaie de nous donner les règles. On nous compare à l'Ontario, on nous donne des règles de l'Ontario, mais qui ne sont pas applicables au Québec, ici, parce qu'on n'a pas la même structure et patronale et syndicale. Donc, on ne peut pas toujours comparer l'Ontario puis comparer le Québec. On le fait du côté monétaire. On dit, par exemple: Les travailleurs québécois, là, gagnent plus cher que les travailleurs ontariens. Dans 90 % des domaines, c'est faux. On pourrait dire, nous autres: Les députés québécois gagnent plus cher que les députés ontariens, il y a 11 000 $ de différence. Mais ce n'est pas un argument. On essaie de dire: Chacun devrait d'abord trouver son pain chez lui.

Le Président (M. Joly): Le message est passé. Le message est passé.

M. Paré (Yves): Trouvons notre pain chez nous d'abord.

Le Président (M. Joly): Le message est passé, M. Paré...

M. Paré (Yves): Excusez. Excusez-moi. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Le message est passé. Ce que je trouve le plus dur, en tant que président, c'est d'administrer une formule de temps quand ce sont et des parlementaires et des syndicalistes...

M. Paré (Yves): Mon président a le même trouble que vous.

Le Président (M. Joly): ...parce que ce sont des gens excessivement volubiles et convaincus.

Alors, je vais reconnaître M. le député de l'Acadie, s'il vous plaît.

M. Bordeleau: M. le Président, disons juste une question très brève. M. Paré, tout à l'heure, dans votre exposé, vous faisiez référence au fait que, dans un contexte de déréglementation du résidentiel, la règle du jeu, au fond, ça serait éventuellement le salaire minimum. En même temps, vous disiez que dans la publicité de l'APCHQ on promettait une baisse, au fond, du prix des maisons. Et vous dites: C'est faux parce que, du côté de la rénovation, depuis 1988, ça existe et les tarifs n'ont pas baissé tant que ça. Alors, pourquoi, dans le contexte de la rénovation résidentielle, où il y a un libre marché, les tarifs n'ont pas baissé tant que ça, et que vous prétendez que dans le contexte de la déréglementation du résidentiel, de la construction résidentielle, ça va être le salaire minimum qui va devenir la base? Alors, il me semble qu'il y a une contradiction entre les deux situations. (17 h 50)

M. Paré (Yves): Non.

Le Président (M. Joly): Bonne question.

M. Paré (Yves): Pas du tout. Je dis que la base des négociations pour un entrepreneur sera le salaire minimum. Je n'ai pas dit que les salaires payés aux travailleurs, c'est les mêmes que le décret. Je dis: Le salaire que l'employeur...

Prenez le téléphone demain matin. Moi, là, je l'ai fait. J'ai appelé à l'APCHQ. J'ai dit: Demain matin, je voudrais faire faire des travaux dans ma salle de bain. Je suis propriétaire de ma maison. Je voudrais faire descendre ma salle de bain au sous-sol. C'est quoi que je devrais payer pour le plombier, pour l'électricien puis pour le charpentier-menuisier? On est revenu, on a dit: Charpentier-menuisier, c'est à peu près 47 $ l'heure que ça vous coûterait; un plombier, c'est 49 $ l'heure, puis un électricien, 49 $ et quelque chose. Mais j'ai dit: Est-ce que c'est couvert par le décret? Non, mais c'est ce que normalement un entrepreneur vous chargerait. Alors...

Je n'ai pas demandé: Est-ce que le gars qui va faire la job, lui, il a 22 $ l'heure? Je suis persuadé qu'il ne l'a pas. Mais le contracteur... Puis faites la recherche vous-mêmes, appelez, ce n'est pas compliqué. Je n'ai pas fait d'enquête Jobidon. J'ai juste téléphoné. C'est ce qu'on m'a dit. Le prix suggéré pour un entrepreneur qui fait de la rénovation, c'est 49 $, 47 $, 50 $. Alors, c'est ça que j'ai compris.

Le Président (M. Joly): Merci.

M. Paré (Yves): Mais, pour moi, ce que je veux dire, s'il y a trois personnes demain matin.... Vous, vous êtes entrepreneur — excusez, M. le Président, deux secondes — vous êtes entrepreneur, vous avez besoin d'un briqueteur, vous en avez quatre devant votre porte.

Le Président (M. Joly): Vous charriez.

M. Paré (Yves): Allez-vous dire: Je te paie 22 $? Si vous êtes capable de l'avoir à 8 $, 9 $, allez-vous le payer 9 $? Parce que vous en avez quatre qui veulent la job, que vous avez besoin d'un briqueteur, vous allez payer le plus bas prix possible. Vous ne donnerez pas, parce qu'il a des beaux yeux...

Le Président (M. Joly): Merci. M. Paré (Yves): ...22 $ l'heure.

Le Président (M. Joly): M. le député de l'Acadie, est-ce que ça vous satisfait comme réponse?

M. Bordeleau: Juste un commentaire pour dire que le contracteur a aussi une obligation de livrer un produit de qualité et qu'il ne prendra pas nécessairement la soumission qui est la plus basse. Il va prendre un ouvrier qui est compétent, qui peut faire le travail, sur qui il peut se fier pour ne pas avoir de retour par la suite. Et je ne suis pas certain que ce soit la personne qui gagne 5 $ l'heure qui soit la plus compétente.

Le Président (M. Joly): Alors, parfait! C'était un commentaire de la part du député...

M. Paré (Yves): O.K. Il y aurait peut-être...

Le Président (M. Joly): ...alors vous viendrez en réaction éventuellement.

Alors, M. le député de Jonquière, s'il vous plaît.

M. Dufour: Oui. Je voudrais juste dire que la CCQ nous a bien rapporté qu'il y a 6200 causes ou 6200 cas qui étaient en contravention avec les règlements de construction de la part des entrepreneurs qui ne détenaient pas de licence, ou des licences incomplètes. Donc, je pense que le problème, il n'est pas tout à fait réglé de cette façon-là.

Pour revenir au coeur, un peu, du projet de loi, ils nous ont dit quelque part, là, ils nous présentent qu'on va avoir quatre conventions à l'avenir. Il semble, tout à l'heure, que vous avez dit... J'ai cru bien comprendre, là, que trois conventions, vous pourriez vous entendre sur les grands travaux, puis sur les conventions collectives des secteurs industriel, institutionnel et commercial. Mais il en reste une qui est possible, qui est potentielle, c'est la quatrième: on parle de résidentiel, mais le résidentiel de neuf et plus. Comment vous vous arrangez, là, dans l'impasse qui est créée actuellement par rapport à vos explications? Le projet de loi est là. Est-ce qu'on peut s'en sortir ou pas? C'est quoi, votre position?

M. Paré (Yves): Bien, moi, je vais être bien honnête.

Le Président (M. Joly): M. Paré, s'il vous plaît.

M. Paré (Yves): Je vais être bien honnête de dire: Est-ce qu'il devrait continuer à rester un secteur résidentiel? Je me pose la question moi-même. Si on déréglemente le huit-logements et moins, passé ça, là, à moins que le consommateur qui se fait bâtir un douze-logements, ce soit un pauvre petit chômeur... Moi, je pense que c'est un homme d'affaires. Un gars qui se fait construire un douze-logements, là, un seize-logements, d'après moi, ce n'est pas un pauvre petit consommateur, c'est un bon businessman. C'est un bon fonds de pension qu'il se bâtit. Donc, est-ce que c'est du commercial? Il restera aux linguistes de juger. Moi, je pense que c'est commercial, parce que, si j'avais les moyens de me construire un seize-logements...

M. Chevrette: Là-dessus, je suis bien obligé d'être d'accord.

M. Paré (Yves): ...peut-être que je ne me battrais pas de même.

M. Dufour: Oui. Mais est-ce que vous pensez qu'on pourrait déréglementer le résidentiel quelque part, dans la vraie vie, là, de tous les jours?

M. Paré (Yves): Toute forme de réglementation... Moi, j'avais compris du Sommet que ce que l'APCHQ recherchait, c'était d'avoir des conditions particulières pour le résidentiel. Je pense que j'avais compris ça, moi, au Sommet, à l'après-Sommet, puis, quand on avait discuté et qu'on avait déposé un document, auquel vous avez fait allusion, le 9 novembre, au ministre, j'avais pris pour acquis que l'APCHQ voulait être le porte-parole de tout ce qui s'appelait construction résidentielle de six étages et moins. C'était ça. Et, moi, je pensais que, l'APCHQ se prenant en main, on aurait trouvé des solutions aux problèmes que madame, souvent, critique dans le cas de Kamouraska, que l'autre, là, Rivière-au-Renard, dont on entend parler depuis cinq

ans à chaque commission parlementaire... on pensait qu'avec l'apchq on aurait réglé ces problèmes-là. mais non! l'apchq, tout bonnement, au lendemain ou au surlendemain du dépôt d'un document où on demandait au ministre de les mettre en application, s'aperçoit qu'elle vient d'avoir le plus beau cadeau qu'elle n'a jamais même espéré avoir. on a dit: malgré tout ça, on va vous garder même une place comme négociateur du secteur résidentiel, puis on vous en enlève 85 %. êtes-vous contents?

Je peux vous dire une affaire, s'il y a des anciens représentants, au gouvernement, de l'APCHQ, ils ont fait leur job. Je peux vous dire ça. Parce que, moi, je pense que le résidentiel n'a plus besoin de cette définition-là maintenant.

Le Président (M. Joly): M. le député de Jonquière, s'il vous plaît.

M. Dufour: Là, ce qu'on dit bien, puis on se comprend bien par rapport à ça, c'est que le secteur résidentiel, neuf logements en montant, ça pourrait être couvert par des travaux différents. Ça peut être institutionnel ou autrement.

M. Paré (Yves): Commercial.

M. Dufour: Mais ce que vous comprendriez, comme secteur résidentiel, serait huit logements et moins, là? Ça, vous dites: On devrait avoir des conditions particulières?

M. Paré (Yves): On allait plus loin que ça. On disait: De six étages... On était d'accord...

Nous autres, la définition, là, est-ce que c'est résidentiel ou si c'est commercial? En autant que ça demeurait dans le décret de la construction et qu'on négociait, la définition du secteur résidentiel ou commercial n'avait d'importance que pour l'APCHQ et l'ACQ. Si, moi, je suis négociateur dans le secteur résidentiel, bon, qui comprend six étages, quatre étages, deux étages, huit logements, je vais négocier en conséquence de la définition. Et, pour l'autre, commercial, je suis encore porte-parole là, à moins que je disparaisse demain matin. On va continuer à négocier. Donc, la définition du résidentiel ou du commercial n'a pas d'autre intérêt que mettre la ligne entre la chicane de l'APCHQ puis l'ACQ. Parce que, soit dit en passant, on nous dit souvent qu'on se chicane du côté syndical, mais ça va se chicaner tantôt du côté patronal. Puis où est-ce qu'on va tracer la ligne, là?

Et puis je voudrais juste faire une remarque au ministre. On n'a pas cassé des portes puis on n'a pas chialé trop, trop. Oui, on voulait avoir une structure, au Sommet, bon, de représentativité. Mais il n'y a pas eu de grosses, grosses chicanes, M. le ministre. On vous l'a demandé, vous ne l'avez pas mis. Bon! On ne vous en a pas tenu rancune. On espérait arriver avec des conclusions. Mais, soit dit en passant, on pense qu'on était prêts à négocier le secteur résidentiel avec n'importe qui. Dites-nous: C'est l'APCHQ, on va négocier. Dites-nous: C'est l'ACQ, on va négocier. On ne veut pas choisir les personnes en face de nous autres. Tout ce qu'on demande, c'est qu'eux autres ne choisissent pas qui va être en face d'eux autres non plus. Puis ce qu'on ne voudrait pas, c'est que ce soit le ministre qui nous impose encore nos conditions de travail. Ça fait 20 ans, puis là on en a jusque-là. On marche de même pour ne pas en répandre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: O.K. Là, je pense avoir bien compris votre position, ha, ha, ha! C'est que, que ce soit une partie avec un tronc commun, comme disait mon collègue de Joliette, avec des particularités, avec des sous-tables, ça pourrait être une méthode qui vous serait acceptable...

M. Paré (Yves): Oui.

M. Dufour: ...mais différemment, là...

M. Paré (Yves): Le tronc commun me fait peur. Le tronc commun me fait peur juste pour une raison, rien que pour une raison. Si le ministre met dans la loi qu'on a le droit de négocier, par exemple, la clause d'ancienneté, le précompte des cotisations syndicales, point à la ligne. Si, demain matin, je veux négocier d'autres choses, il faut que je revienne voir le ministre, dire: Pourrais-tu modifier ta loi? C'est rien que ça. Moi, si le ministre me dit, là: Le tronc commun, vous mettez ce que vous voulez dedans, je n'ai pas de problème, parce que je ne veux pas vivre l'expérience des 0,20 $ où, selon la loi, il n'était pas permis au ministre de mettre en application l'entente qu'on avait signée. Ce n'était pas écrit dans l'article 62 de la loi. Alors, moi, j'ai été découragé.

Et je me dis, si le ministre commence à énumérer ce que j'ai le droit d'avoir, bien, ça va vouloir dire que demain matin, si je veux ajouter d'autres choses, il faut que j'aille le voir, puis ça, ça me fatigue, parce que c'est long, des amendements.

Le Président (M. Joly): M. le député de Joliette. M. Chevrette: Mais...

M. Paré (Yves): Ah, qu'il nous laisse la liberté, on va s'organiser avec ça.

M. Chevrette: Je comprends vos appréhensions, M. Paré, mais ça présuppose que c'est tout un projet de loi, là. Il ne faut pas dénaturer ce que je propose. Ça suppose que dans le projet de loi il y a des clauses, comme il y en a dans le secteur public. La loi 37, si ma mémoire est fidèle... Oublions la numérotation. Il y a des temps x pour définir ce qu'est le tronc commun, puis c'est entre employeur et syndicat que...

M. Paré (Yves): Ah! Bien, excellent!

M. Chevrette: ...ça se fait et non pas par l'intervention...

Moi, je suis d'accord sur un point fondamental avec vous autres, puis même avec les employeurs là-dessus. C'est que trop longtemps les parties se sont fiées à l'intervention ministérielle dans le domaine de la construction et, automatiquement, à la fin de course... Je ne sais pas lequel. Je n'ai pas à faire le procès de l'une ni de l'autre des parties, mais, effectivement, ça bloque souvent la compromission ou les compromis de dernière minute qui pourraient se faire si on n'avait pas l'intervention gouvernementale, chacun se sentant fort pour venir influencer le ministre du Travail.

M. Paré (Yves): Jamais le côté syndical n'y a gagné aux impositions de décret. Jamais! Monétairement parlant, peut-être. Peut-être qu'en 1982 le 10-10, alors qu'on était dans une récession, peut-être qu'on y a gagné. Mais le problème du décret de la construction, M. le Président, ce n'est pas le salaire, la page 292. Le problème, il n'est pas là. Le problème, il est dans l'application quotidienne de ma sécurité d'emploi. Quand vous dites qu'un travailleur, ça fait 22 ans qu'il travaille pour Jos Bleau Construction, là, puis que demain matin il n'a plus de job, ils lui donnent 48 heures d'avis, n'importe où au Québec, après sept, huit, 10 ans, il faut qu'ils lui donnent 10 semaines d'avis. (18 heures)

Donc, on a des problèmes de langage dans notre convention collective qui ne sont pas du maudit salaire! Nos travailleurs seraient prêts à accepter un salaire gelé moindre si on était capables de garantir une sécurité d'emploi minimale à nos travailleurs, ce qu'on ne peut pas avoir, parce que, chaque fois qu'on veut discuter d'une clause qui est non pas coûteuse, là, mais qui est normative — parce que tous ceux qui négocient connaissent ça, une clause normative puis une clause monétaire — c'est une fin de non-recevoir de la part des entrepreneurs, et jamais on n'y a gagné, d'une imposition, sauf du côté monétaire. Notre langage du décret de la construction, il date des années trente. On n'a jamais pu modifier du langage.

Et l'exemple que je vous donne d'une mise à pied d'un gars, là, c'est exactement ce qui se produit. Donc, on aurait des choses à changer dans le décret qui ne sont pas la page des salaires. Je veux être clair là-dessus, et on avait des choses qu'on était prêts à régler pour le secteur résidentiel. Le ministre nous a donné l'espoir qu'après le Sommet on pourrait le faire. On vient de nous couper les jambes, et on ne l'accepte pas. Je veux juste ajouter — je termine là-dessus — que le ministre, quand il sera à sa retraite en Floride, à son condo, il se souviendra qu'il a déchiré la convention de 25 000 travailleurs. Je pense que c'est inhumain, ce qui se fait là, et je pense que le ministre devrait revenir sur sa décision puis dire: On va donner aux parties la possibilité, avec la structure que je vais mettre sur pied, de s'entendre puis de régler des bons dieux de problèmes dans l'industrie de la construction, sinon on verra ce qu'on va faire. Ça, si le ministre faisait ça, je l'applaudirais.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Paré. Une voix: Une petite ..., M. le Président.

Le Président (M. Joly): Non. Vous viendrez sur le temps d'un autre.

Là, premièrement, je me dois de demander le consentement des membres de cette commission afin qu'on puisse déborder.

Une voix: C'est beau.

Le Président (M. Joly): Bon. Parfait. Maintenant, je reconnais le député d'Ungava, s'il vous plaît.

M. Claveau: Merci, M. le Président.

Une voix: Tantôt, on va avoir des questions à vous poser, M. Chevrette.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Auriez-vous deux petites minutes?

Le Président (M. Joly): M. le député... Ah, vous l'enlevez au député d'Ungava...

M. Chevrette: Bien sûr! Bien sûr!

Le Président (M. Joly): ...mais, s'il y a consentement des membres là-bas, moi, je n'ai pas d'objection.

M. Dufour: Ça va.

M. Lavallée (Jean): M. Chevrette, tout à l'heure, moi, je parlais de la commission Cliche. Vous étiez là, à la commission Cliche, en 1974. Au moment où on se parle aujourd'hui, on est 122 000 dans l'industrie de la construction, puis il y a à peine de l'ouvrage pour 50 000. C'est ça, notre problème qu'on vit. Il va falloir mettre les recommandations en application. Personne n'en reparle, de ça, ce que M. Cliche a dit, puis vous comme commissaire, avec M. Mulroney: Les travailleurs de la construction ont besoin d'une sécurité d'emploi. Qu'est-ce que vous faites avec ça comme...? Si vous étiez le ministre du Travail, demain matin, là, qu'est-ce que vous feriez avec ça puis ce projet de loi 142 là?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lavallée (Jean): Là, je viens de vous nommer ministre...

M. Dufour: C'est une question hypothétique, puis tu n'es pas obligé de répondre.

Une voix: Tu aurais été mieux d'aller fumer,.. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): M. le député de Joliette, s'il vous plaît!

M. Chevrette: Alors, M. le Président, je ne ferais sûrement pas ce que le ministre actuel fait.

M. Lavallée (Jean): Ah! O.K.

M. Chevrette: Donc, tout d'abord, moi, je pense que les vrais problèmes de la construction, au Québec en particulier, c'est qu'il n'y a pas de planification de travaux entre les sociétés d'État et les gros donneurs d'ouvrage. Vous le savez, vous l'avez demandé vous-mêmes. Ce que le ministre fait présentement, par exemple, en disant aux travailleurs: Vous choisirez annuellement vos bassins, ça va faire que vous allez avoir des troubles, ça va être épouvantable, parce que, si on déclare des travaux, par exemple à Québec — supposons le Colisée, le Centre des congrès et Gaz Métropolitain qu'ils veulent bâtir ici — ils vont se ramasser avec un bassin épouvantable. Ça ne sera pas gérable, vous le savez très bien. Ça va être pareil avec SM 3 à Sept-îles s'il n'y a pas d'autres travaux, si ce n'est pas planifié pour avoir une répartition ou un plancher d'emploi le plus équitable. Ça, c'est une première des choses.

La deuxième des choses, c'est le chapitre aussi du revenu. Effectivement, on s'est penchés longuement puis on a fait travailler, à partir d'une étude qu'on avait faite dans les ports nationaux et puis qui a été reprise par M. Sexton, de l'Université Laval, qui lui-même a été choisi par le gouvernement actuel sur la commission Sexton-Picard, qui a créé beaucoup d'espoirs au niveau des travailleurs de la construction, mais qu'on n'a pas appliquée...

Et, deuxièmement, si j'étais ministre du Travail, je ferais également... J'ai fait pointer un peu, tantôt, ce que je ferais. Je déclarerais mes volontés politiques claires et je vous donnerais un délai très précis, dans le temps, avant d'agir dans la conjoncture actuelle. Ça m'apparaîtrait plus sage que de passer le bulldozer, de légiférer quand on sait que ça ne tiendra pas, et en particulier dans le domaine domiciliaire.

Je vais vous donner un exemple, je suis persuadé que dans le domaine domiciliaire vous allez très rapidement aller syndiquer les plus gros entrepreneurs. Je vous connais, je connais la CSN, puis je connais la FTQ. Puis qu'est-ce que vous allez faire? Vous allez syndiquer quelques employeurs; les autres, vous ne pourrez même pas les prendre. Et la concurrence va devenir tout à fait déloyale dans certains milieux, dans certaines villes, dans certaines régions, et l'économie de nos lois, nous, dans le domaine, là où on ne peut pas avoir un décret uniforme... Ça fait 70 ans qu'on a la loi des décrets au Québec, et c'est à partir de cette tradition-là qu'on a toujours bâti quelque chose, puis au moins, même si sa clochait, au moins on ne se trouvait pas dans un système de concurrence tout à fait déloyale parce qu'il y avait des syndiqués et qu'il n'y avait pas de syndiqués.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Joliette.

Alors, je vais maintenant reconnaître un député qui semble déçu de ne pas avoir plus de temps, M. le député d'Ungava. Je vous reconnais pour une question, peut-être deux, dépendamment de la longueur de la réponse ou de la volée oratoire qui va nous être servie. Alors, c'est à vous, M. le député d'Ungava.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Claveau: Je vous remercie, M. le Président. Je vais essayer quand même d'être bref dans ma façon de présenter les choses.

Vous avez reconnu, tout à l'heure, dans vos exposés, qu'il y avait des problèmes spécifiques à des régions comme l'Outaouais, comme le Bas-Saint-Laurent, problèmes frontaliers. Il y a des problèmes aussi très spécifiques sur la Basse-Côte-Nord, avec l'isolement de certains villages, des chantiers dans ces coins-là. Mais, moi aussi, j'ai des problèmes un peu spécifiques dans la région que je représente, c'est-à-dire la région nord du Québec, qui correspond à 52 % du territoire global du Québec et dans laquelle on ne retrouve à peu près pas de travailleurs de la construction, malgré le fait que la plupart des grands chantiers, actuellement, au Québec, se fassent chez nous. Il doit y avoir pour à peu près 500 000 000 $ de travaux qui se font, actuellement, dans les environs immédiats des municipalités de mon comté. Et pourtant, on ne réussit pas à placer du monde, malgré le fait qu'on ait 50 % de la population qui soit sur le chômage ou sur l'aide sociale, pour toutes sortes de raisons économiques.

Je veux bien croire qu'il y a des problèmes spécifiques dans l'industrie de la construction et que vous êtes là pour défendre les gens de l'industrie de la construction. Mais, nous aussi, on a de sérieux problèmes à confronter dans nos régions très éloignées, et on est là aussi pour défendre les gens. Moi, je suis élu comme député à l'Assemblée nationale d'abord et avant tout pour défendre les intérêts des gens que je représente et pour travailler dans le sens du voeu de l'ensemble, de la majorité de ces gens-là. Et, quand on a des consensus comme ceux qui existent actuellement sur mon territoire de comté, entre le milieu syndical, le milieu patronal et l'ensemble des intervenants d'une industrie, pour un certain nombre de choses, eh bien, je sens l'obligation et le devoir d'aller dans le même sens que tout ce monde-là demande.

Ça, ça m'amène à parler de la nécessité, en ce qui nous concerne, de regarder un jour ou l'autre la

définition des bassins de la construction, d'autant plus que, si on parle maintenant de mobilité entre les bassins, eh bien, là, ça veut dire que des régions comme la nôtre, des régions comme celle de mon collègue sur la Côte-Nord, des régions comme la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine, c'est des régions dans lesquelles il n'y aura pratiquement plus aucune possibilité pour des nouveaux intervenants d'entrer dans le milieu de la construction.

J'aimerais savoir ce que vous en pensez et comment vous voyez une façon de régler ce genre de problème là qui consiste en la nécessité de trouver le moyen de faire en sorte que les gens de nos régions éloignées puissent aussi avoir droit au moins à quelques miettes du gâteau de l'industrie de la construction. Vous savez, il y a des enjeux nationaux, mais je pense que les enjeux nationaux sont d'abord et avant tout la somme des enjeux locaux et que, lorsque l'on aura réussi à trouver des moyens pour régler les enjeux locaux un peu partout, eh bien, la solution nationale, elle apparaîtra d'elle-même.

Le Président (M. Joly): M. Lavallée, s'il vous plaît.

M. Lavallée (Jean): Oui. M. Claveau, je sais que c'est un problème qui peut arriver dans les régions éloignées aussi, mais par contre, nous, on représente l'industrie de la construction. On a tendance à traiter l'industrie de la construction comme une poubelle, et n'importe qui peut oeuvrer dans ça, dépendamment de l'humeur de l'économie ou pas. Les travailleurs de la construction, ce sont des professionnels. Ils ont le droit, comme d'autres industries, d'avoir une sécurité. Quand tu veux rentrer à la General Motors, tu vas rentrer s'il y a des emplois disponibles. Quand tu veux rentrer au gouvernement, ils ont la sécurité d'emploi, tu vas rentrer s'il y a des emplois de disponibles. Quant tu veux travailler à Marine industrie, il faut qu'il y a ait des emplois disponibles. Quand tu veux rentrer dans une mine, tu ne peux pas rentrer dans la mine, à cause qu'ils ont des sécurités d'emploi. Quand la mine ferme, on nous fait des problèmes puis des pressions comme on nous a faites à Chibougamau, par rapport à la route du Nord. Là, les mineurs veulent s'en venir travailler dans la construction, mais ils ne veulent pas que, nous autres, on puisse aller travailler dans leur mine tant qu'ils ont du monde à pied.

C'est ça, le problème. C'est qu'on nous traite comme des gens qui passent à l'occasion, puis, à chaque fois que dans une région il y a un problème économique, si c'est sur la Côte-Nord par rapport à Iron Ore, il y a du monde mis à pied, et ils voudraient venir travailler dans la construction.

Je pense qu'il va falloir qu'on nous traite comme des professionnels de la construction et qu'on ait le droit, comme tout le monde, d'avoir un minimum de sécurité du revenu. On est rendus à 700 heures par année, M. Claveau.

M. Claveau: Oui...

Le Président (M. Joly): Merci, M. Lavallée. Très brièvement, là, parce qu'on fait toujours une forme de déclaration ministérielle avant d'en arriver à la question, alors malheureusement je ne peux pas consentir le débat davantage et puis empiéter sur la liberté des parlementaires aussi.

Très brièvement, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Je voudrais juste dire que, quand il y a des mines qui ouvrent, quand il y a des scieries qui ouvrent, les cartes de la construction ne sont pas une entrave pour avoir des emplois dans ces secteurs-là non plus. Il y a plein de gens de la construction qui travaillent dans d'autres domaines, puis, quand ça ne fait pas, quand il n'y a plus d'ouvrage dans ces domaines-là, ils retournent sur la construction, alors que le contraire n'est pas valable.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député d'Ungava. Brièvement, M. le député de Drummond. (18 h 10)

M. Paré (Yves): Juste une mise au point. À Sept-îles, par exemple, il s'est sorti je ne sais pas combien de carnets d'apprentissage lors de la construction de l'aluminerie, là; peut-être 200, 300 carnets d'apprenti pour des jeunes. L'usine, là, elle est construite. Qu'est-ce que vous pensez qu'ils font, ces carnets d'apprentissage là? Le gars, il n'a plus d'ouvrage à Sept-îles, il prend son char puis il s'en vient rester à Montréal. Donc, on vient d'avoir 200 emplois de plus qui ont été générés dans une région, donc il n'y a plus d'ouvrage. Le problème qu'on a, pour quelle raison qu'à chaque trois, quatre ans on réduit le nombre de travailleurs à 90 000, trois ans après, on se ramasse à 125 000, 130 000, 140 000 travailleurs avec des cartes dans leurs poches? On n'est pas capables de les faire vivre. Pourquoi en donner d'autres? Ça va donner quoi au gars d'avoir une belle carte dans ses poches?

C'est comme le gars qui a un permis de conduire. Il n'a pas de char. Ça lui donne quoi? Je veux dire, nous autres, on lui donne une carte: Oui, tu es un apprenti électricien, mon ami. Tu vas être chanceux si tu en trouves une, job. Il n'est pas capable d'en trouver, il n'y en a pas!

Le Président (M. Joly): Merci.

M. Paré (Yves): Alors, ça va donner quoi à qui? Zéro!

Le Président (M. Joly): Merci, M. Paré. M. Paré (Yves): Je m'excuse!

Le Président (M. Joly): M. le député de Drummond, s'il vous plaît, une courte question.

M. St-Roch: Oui. Merci, M. le Président. Comme vous pouvez voir, je vais être, pas au salaire minimum, mais aux questions minimums. Un bref commentaire, M. le Président, si vous me le permettez. Oui, moi, je peux comprendre la frustration des travailleurs. On va dire «travailleurs», parce qu'il n'y a pas beaucoup de travailleuses. Mais c'est un peu ce que Maslow nous a appris avec la pyramide: Lorsqu'un besoin fondamental n'est pas comblé, on ne pense pas à se réaliser ou à appartenir à l'équipe.

Alors, l'aspect du travail est important. Puis ce qui est encore plus dramatique dans le cas des travailleurs de la construction, à cause des habiletés qu'ils ont développées, c'est qu'ils ont réussi à améliorer tellement leur propriété à très peu de frais qu'ils ne sont même plus capables d'avoir de l'aide sociale, parce que ia propriété les disqualifie complètement.

Alors, ceci étant dit, moi, je pense, puis je vais vous demander votre aide, là, ça va être oui ou non, qu'on maintient la carte de compétence. Ça, je pense que c'est évident, à vous écouter, là. Ça, c'est le prérequis.

Le Président (M. Joly): Oui ou non?

M. Paré (Yves): On maintient assujettis tous les travaux de l'industrie de la construction. Le ministre permet aux parties de se prendre en main, de négocier des conditions particulières pour les secteurs, et on s'en va dé l'avant. C'est ce qu'on demande au ministre. On le supplie de mettre en application l'orientation que tous et chacun avaient comprise au Sommet, qu'on avait une orientation et une prise en charge...

Le Président (M. Joly): Mais...

M. Paré (Yves): ...par l'industrie de la construction.

Le Président (M. Joly): Non. Je m'excuse, M. le député de Drummond...

M. Paré (Yves): ...ni les cartes de compétence.

Le Président (M. Joly): ...malheureusement, j'ai déjà débordé largement. J'ai été, je pense, assez généreux avec le système, avec tout le monde. Ce qu'on fera, c'est que vous vous entendrez avec les deux formations et négocierez peut-être un petit peu plus de temps, et ça me fera plaisir de vous reconnaître.

Alors, M. le ministre.

M. Cherry: Bien, en conclusion, je ne veux pas empiéter sur le temps des gens. Merci de votre participation, puis on va faire comme on fait d'habitude, on va se tenir en contact.

M. Paré (Yves): On vous supplie, M. le ministre, de...

Le Président (M. Joly): Merci!

M. Paré (Yves): ...retirer ça, on vous en supplie.

Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de la commission, MM. de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, de la construction, je vous remercie beaucoup. Merci.

Donc, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures, dans ce même salon. Je vous remercie.

(Suspension de la séance à 18 h 13)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Joly): II nous fait plaisir de vous accueillir et de vous souhaiter la bienvenue. Je remarque que, déjà, le Conseil du patronat du Québec, très discipliné comme à l'ordinaire, comme à l'accoutumée, est déjà présent. Alors, M. Dufour, j'apprécierais si vous pouviez nous introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. Alors, je vous présente mes deux collègues, de six que nous devions être, pour être certains qu'on vous donnait une vision complète des problèmes que nous allons vous soumettre.

À ma gauche, M. André Duchesne, qui est président et directeur général de l'Association des industries forestières du Québec. À ma droite, Me Pierre Comtois, qui est directeur général des services juridiques et affaires publiques chez General Motors.

Le Président (M. Joly): Merci. Je ne crois pas devoir insister sur la règle de procédure; vous la connaissez déjà sûrement, depuis le temps que vous êtes ici en commission. Donc, un 20 minutes environ pour le mémoire, et, par après, les parlementaires auront le privilège d'échanger avec vous. Alors, je vous reconnais, M. Dufour, s'il vous plaît.

M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. De toute façon, compte tenu des délais qui nous ont été donnés pour fabriquer notre mémoire, nous ne ferons pas 20 minutes, ce qui nous permettra d'avoir un échange plus long avec les parlementaires.

Nous avons pris connaissance, donc, avec grand intérêt, du contenu du projet de loi 142 déposé par le ministre du Travail à l'Assemblée nationale en novembre 1993. À l'occasion des auditions particulières de la présente commission, nous voulons discuter essentiellement de deux volets du projet de loi, laissant aux parties patronales plus directement concernées à l'intérieur du secteur de la construction le soin de commenter l'ensemble du projet de loi. Il s'agit, d'une part, du remaniement du

champ d'application de la loi qui aurait pour but d'y assujettir, de façon automatique, l'installation, la réparation et l'entretien de la machinerie de production dans le secteur industriel, sauf lorsque ces travaux sont effectués par des salariés permanents du fabricant, de son distributeur ou de l'utilisateur.

Deuxième préoccupation: le découpage de l'industrie de la construction en quatre secteurs aux fins des négociations, et, de façon très particulière, la création d'un nouveau secteur, le secteur industriel. C'est ainsi que le secteur industriel, qui n'a pas été partie aux décisions du sommet de la construction, se retrouve aujourd'hui confronté à des dispositions législatives qui le concernent au plus haut point.

Regardons donc, d'abord, notre première préoccupation, qui est le champ d'application de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Je vous rappellerai, M. le Président, que depuis sa fondation, en 1969, le Conseil du patronat s'est toujours opposé à l'élargissement du champ d'application de la loi qui régit les conditions de travail dans l'industrie de la construction au milieu industriel, et plus particulièrement en matière de réparation et d'entretien de la machinerie de production, que ces travaux soient effectués par des salariés permanents du fabricant, du distributeur ou de l'utilisateur, mais surtout — parce c'est ce qui va nous intéresser dans notre discussion — par des sous-traitants. Toutes les associations patronales du secteur de la construction qui sont membres du CPQ — elles le sont toutes — sont bien au fait de cette position que nous avons, d'ailleurs, reprise il y a quelques mois à peine devant le comité Laberge-Lavallée.

Pour le CPQ, il est donc difficile, M. le Président, de soutenir la proposition du projet de loi 142 qui vise à assujettir l'installation, la réparation, l'entretien de toute machinerie de production dans le secteur industriel à la loi qui prévaut dans le secteur de la construction, lorsque ces travaux sont effectués par des sous-traitants. En outre, et je le dis en tout respect pour les auteurs du projet de loi, il est surprenant de constater ici une certaine contradiction dans le discours gouvernemental. Alors qu'il déréglemente le secteur résidentiel, notamment pour des raisons de coûts, il réglemente une partie importante du secteur industriel, ce qui pourrait accroître les coûts de ce secteur qui, déjà, on le sait tous, est gravement atteint par la récession. (20 h 10)

Rappelons d'ailleurs à ce sujet que le comité Laberge-Lavallée, mis sur pied par le ministre du Travail actuel, justement pour étudier le champ d'application de la loi, n'a pu s'entendre sur ce point précis. Je rappelle que le rapport Laberge-Lavallée a présenté une opposition en deux volets: celle de M. Laberge, qui était favorable à l'assujettissement — M. Laberge étant Louis, venant du secteur de la construction — et Gilles Lavallée étant d'Alcan, le porte-parole du secteur industriel.

Quoi qu'il en soit, cependant, des motifs du gouvernement, nous nous opposons à un tel assujettissement pour plusieurs raisons. Nous en avons retenu cinq dans le document que nous vous avons déposé. La première: l'installation, la réparation, l'entretien de la machinerie de production ne sont pas des travaux de construction, même si, dans les faits, l'installation est souvent faite par des travailleurs de la construction, mais ce n'est pas là une obligation légale.

Deuxièmement, dans bon nombre de secteurs industriels, les installations de production sont complexes, et, dans bien des cas, leur mise en place, leur entretien et leur réparation requièrent une main-d'oeuvre spécialisée et compétente. Au cours des ans, les entreprises ont eu recours à des sous-traitants formés à grands frais pour effectuer ces travaux. Des spécialistes assurent maintenant l'entretien des équipements de pointe, qu'il s'agisse d'automates, de robots, de contrôle électronique ou d'autres outillages sophistiqués. Les dispositions du projet de loi 142, à ce chapitre, viendront chambarder complètement toute cette organisation.

Troisièmement, les salariés de la construction ne possèdent pas toujours les compétences techniques nécessaires à l'accomplissement de tous ces travaux, notamment les travaux d'entretien et de réparation.

Quatrièmement, les entreprises perdraient la stabilité et la permanence des compétences actuelles. Lorsque les entreprises ont recours à des sous-traitants pour exécuter les travaux d'entretien et de réparation, elles sont assurées d'une certaine stabilité au sein du personnel. Or, si ces travaux se trouvaient automatiquement confiés à des salariés de la construction, cette stabilité serait compromise.

Cinquièmement, les entreprises seraient confrontées, par définition automatique, à un accroissement des coûts et à une baisse possible de la productivité. Elles risqueraient même — et je pourrai vous citer des témoignages, si nécessaire — de se trouver parfois dans l'obligation de payer les salariés de la construction pour leur présence, tout en faisant exécuter les travaux par d'autres.

Nous recommandons donc, M. le Président, pour ces raisons et d'autres qu'on pourra développer en cours de route, le maintien des dispositions actuelles relatives à l'installation, à la réparation et à l'entretien de la machinerie de production, sachant pertinemment, par ailleurs, qu'un certain modus vivendi s'est établi au cours des ans, et qu'il se maintiendra. Mais, au moins, M. le Président, au moment où on veut déréglementer, on ne l'aura pas imposé par voie législative.

Deuxième préoccupation: la création d'un secteur industriel. Le projet de loi 142 propose le découpage de l'industrie de la construction en quatre secteurs, dont le secteur industriel. Le secteur industriel, c'est l'ensemble des grandes entreprises manufacturières, c'est les pétrolières, c'est les minières, c'est les papetières. Donc, un secteur industriel serait créé aux fins de la négociation des conventions collectives de travail, les quatre que propose le projet de loi.

Qu'est-ce que ça donne? Ça donne qu'en pratique une association patronale du secteur de la construction, quelles que soient ses qualités et ses compétences — parce qu'il ne s'agit pas de discuter de qualités et de compétences, et c'est vrai de l'ACQ, qui négocierait pour le secteur industriel — mais il s'agit d'une association qui est formée pour la défense des intérêts du secteur de la construction. Et c'est cette association-là qui négocierait les conditions de travail applicables aux grands donneurs d'ouvrage, sans que ces derniers, selon les structures proposées, aient voix au chapitre.

Vous nous permettrez, M. le Président, de poser un certain nombre d'interrogations quant à l'orientation. Si, en effet, il est assez facile de cerner des notions comme celles de secteur résidentiel, secteur du génie civil — donc, on s'entend assez facilement — secteur institutionnel, hôpitaux, écoles, secteur commercial, celle du secteur industriel est beaucoup plus difficile à définir. Le projet de loi 142 nous suggère une définition. On va la lire ensemble: «le secteur de la construction de bâtiments, y compris les installations et les équipements physiquement rattachés ou non à ces bâtiments et qui en assurent l'utilité, réservés principalement à la réalisation d'une activité économique par l'exploitation des richesses minérales et des diverses sources d'énergie, la transformation des matières premières et la production de biens. »

Tous ceux qui suivent actuellement le débat avec l'Union des municipalités, le ministre Ryan et le secteur industriel, quant à la définition de l'article 65. 1 sur l'évaluation foncière, où les municipalités viennent d'être renversées par la Cour suprême dans leur interprétation, comprendront le problème que l'on peut soulever avec une définition de sept lignes de cet ordre. Depuis 1979 qu'on essaie de définir, aux fins de l'impôt foncier, ce que c'est, justement, que tous ces mots que l'on utilise, pour avoir, il y a à peine trois mois, une définition de la Cour suprême qui a complètement renversé toutes les interprétations qui ont été données depuis 1979. On nous propose, pour l'essentiel, à peu près la même chose.

Deuxième interrogation: un tel découpage ne provoquera-t-il pas une pression à la hausse sur les coûts de la construction, le secteur industriel étant plus souvent qu'autrement considéré — à tort, bien sûr — comme toujours capable de payer? Lorsqu'on parle d'une grande entreprise, c'est toujours capable de payer, créant ainsi une forme de «pattern bargaining» — je m'excuse de l'expression anglaise, mais, en relations de travail, c'est l'expression — créant un «pattern bargaining» pour l'ensemble du secteur de la construction, rejoignant ainsi le domiciliaire de huit unités et plus, que vous gardez sous le décret de la construction.

Est-il alors opportun de scinder le secteur de la construction en quatre branches aux fins de la négociation des conventions collectives de travail, comme l'avait proposé l'AECQ? On reconnaît que cette proposition au sommet, qui avait été faite par l'AECQ, appuyée par l'ACQ... Mais, M. le Président, avec une distinction majeure: lorsque l'AECQ a fait cette proposition-là, appuyée par l'ACQ, il n'était question que d'une seule et unique convention collective. On voit toute la différence, évidemment, que prend le projet face à la proposition qui avait été faite au sommet de la construction.

Mais ce que nous disons, sans prendre position sur les mécanismes de négociation que le législateur retiendra, c'est que les secteurs industriel, institutionnel et commercial, qui ont toujours été regroupés depuis la loi 290, devraient continuer de l'être. Ça n'a pas créé de problème tellement dans le passé; ça ne devrait, quant à nous, ne former qu'un seul secteur aux fins des négociations.

Troisième et dernière suggestion, M. le Président. Bien que le CPQ ait choisi, dans le cadre des débats que vous faites sur le projet de loi 142 — choix précis — de limiter ses commentaires au champ d'application de la loi et à là création d'un quatrième secteur, laissons aux parties syndicales et patronales du secteur le soin de débattre des grands enjeux du projet de loi — et Dieu sait s'ils sont débattus actuellement. Il tient toutefois à faire une suggestion qui lui apparaît primordiale dans le dossier des barrières commerciales entre le Québec, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick. En effet, au chapitre de la mobilité des entrepreneurs, le projet de loi abolit l'obligation d'avoir une place d'affaires au Québec pour obtenir une licence d'entrepreneur. Cette disposition est heureuse, M. le Président, nous en félicitons le ministre. Elle fait d'ailleurs l'unanimité et pourrait contribuer grandement à désamorcer le conflit actuel en matière de relations commerciales interprovinciales. (20 h 20)

Quant à nous, il est essentiel de donner suite rapidement à cette disposition — une petite phrase importante — quoi qu'il arrive du projet de loi 142. N'y aurait-il pas lieu que le législateur fasse même de cette disposition, je le rappelle, agréée à l'unanimité, l'objet d'un projet de loi spécial, s'assurant ainsi de son adoption dans les plus brefs délais? Ce qui donnerait, notamment, à M. Gérald Tremblay, un outil de négociation dont il a absolument besoin, actuellement, avec M. Rae, qui prend des dispositions à rencontre des intérêts du Québec, actuellement.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. Dufour. Maintenant, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Je vous assure, d'entrée de jeu, que je ciblerai uniquement mes questions en fonction du mémoire qui est présenté, même si votre vaste expérience pourrait nous être utile dans d'autres aspects. Je me maintiendrai à ceux que le Conseil a bien voulu soulever de façon plus particulière dans son mémoire.

À la page 2, quand il est question de formation

professionnelle de la gestion de la main-d'oeuvre, vous vous attachez... parce que vous le répétez à quelques reprises, il semble que l'utilisation, ou par des sous-traitants, et vous avez trouvé justifié de le souligner dans votre mémoire... Et, là, je ne veux pas remettre en question le fait que vous dites: Bon, depuis 1969, le CPQ — genre de question de principe — on s'est toujours objecté à... Mais, par rapport à l'utilisation des sous-traitants, qu'est-ce que ça cause, pour vous autres, c'est quoi les difficultés ou les utilisations particulières qui peuvent être faites là-dedans? Et peut-être qu'il y a des exemples différents, peut-être dépendamment de secteurs d'activité. Mais j'aimerais que vous puissiez nous éclairer là-dessus.

M. Dufour (Ghislain): Tout à fait, M. le ministre. Je veux juste réagir à la position depuis 1969. Ça a toujours été purement pour une question de coûts, dans le fond, parce que les salaires de la construction ont toujours été élevés, plus élevés, par définition, que les salaires des sous-traitants, qui peuvent réaliser des salaires meilleurs à partir d'une économie d'échelle.

Sur des exemples concrets, parce que c'est, dans le fond, ce à quoi vous voulez qu'on recoure, alors, j'ai deux personnes, ici, qui le vivent. Vous l'avez dans le paragraphe deux de la page 3, quand on parle d'automates, de robots, de contrôle électronique, etc. Alors, voici, dans le cas de Me Comtois, ce que ça peut donner. Je vais demander ensuite à M. Duchesne d'y aller d'exemples concrets.

Le Président (M. Joly): Me Comtois.

M. Comtois (Pierre): Bien le bonsoir! Il est important de noter des exemples, peut-être, sans rentrer dans des pièces d'équipement précises, des situations dans lesquelles les manufacturiers doivent faire appel, soit directement ou indirectement, à des sous-traitants.

Vous avez, par exemple, des situations où le manufacturier a acheté une pièce d'équipement d'un fournisseur, et ce fournisseur-là est à l'étranger; il n'a pas sur place un distributeur ou des employés. À l'occasion, lorsqu'on est un gros acheteur, on peut, à ce moment-là, le justifier. La pièce d'équipement est grande. Les travailleurs vont pouvoir venir au Québec et rendre le service d'appoint qui est prévu dans le contrat d'achat de l'équipement, parce que nous avons une période, un contrat qui donne un service, des fois, de clé en main, et un service après-vente pour l'entretien de l'équipement. Ce fabricant-là n'est pas toujours en mesure de le faire. Il peut le déléguer à un sous-traitant qu'il a choisi lujgnême et que l'on tient responsable toujours — le fabricant de l'équipement — pour la garantie. À ce moment-là, le sous-traitant vient chez nous et fait faire le travail sur l'équipement du manufacturier. Actuellement, on peut le faire. Avec le projet de loi 142, le manufacturier de l'équipement ne pourra utiliser que son propre personnel permanent, mais ne peut pas faire affaire avec un sous-traitant.

Un autre exemple possible: ce même fabriquant nous vend la machinerie, on l'utilise pendant quelques années, et ce fabricant fait faillite, ou encore diversifie sa production et n'est plus dans cette ligne d'équipement. On n'a plus de source de notre fabricant pour faire le service qui était prévu. On doit aller chercher un spécialiste qui, parfois, n'est pas dans l'industrie de la construction. Et, ça encore, c'est une des circonstances.

Autre situation où un manufacturier peut faire appel: nous utilisons notre propre main-d'oeuvre le plus souvent qu'on peut. Mais il arrive, à un moment donné, à cause des cédules de production, des calendriers, qu'on a utilisé nos mécaniciens, on a utilisé nos électriciens, nos plombiers, etc., au maximum. Il arrive une fin de semaine: on a besoin de main-d'oeuvre supplémentaire. On peut devoir faire appel, à ce moment-là, à des services extérieurs pour faire ce genre de travaux. Encore une fois, le projet de loi 142 vient changer la situation actuelle et va empêcher ce genre de pratique qui, actuellement, ne pose pas de problème.

Ce qui est important de noter, c'est qu'actuellement l'industrie de la construction n'est pas exclue de ces genres de travaux là. Et, la preuve, c'est que chez nous on les utilise très souvent pour faire des travaux où ils ont l'expertise. Un exemple précis: si on vous met un convoyeur qui est de la machinerie de production, si, à un moment donné, on doit faire de l'excavation pour installer un convoyeur, etc., on va aller chercher l'expertise où elle est. Et, dans ce cas-là, elle est dans l'industrie de la construction, parce qu'ils ont fait des travaux semblables. Alors, ce que l'on demande, actuellement, c'est de préserver la situation qui est là, actuellement, c'est-à-dire que nous avons besoin de cette flexibilité-là.

M. Dufour (Ghislain): C'est un exemple typique du secteur manufacturier. Un secteur plus particulier: les pâtes et papiers.

Le Président (M. Joly): M. Duchesne, s'il vous plaît.

M. Duchesne (André): Les pâtes et papiers ou le sciage, M. le Président, le problème est similaire. Dans le secteur papetier on a, vous le savez, des équipements qui ne sont pas toujours très jeunes. Il y en a à la fine pointe de la technologie: le distributeur est disponible; d'autres, le distributeur est disparu depuis longtemps. La plupart de ces équipements-là ont besoin d'entretien spécialisé, et, ce qui se produit très souvent, c'est que les compagnies font appel à ces PME, qui se sont développées dans la Mauricie ou dans le Bas-Saint-Laurent, pour servir plusieurs usines, pour accélérer le processus d'entretien au moment d'arrêts qui sont cédulés dans la production. On va se retrouver avec des travaux de soudure, des travaux de réfection de structures de moteurs, par exemple, qui vont devoir être faits pendant l'arrêt temporaire. Quand on pense que le personnel en place n'est pas suffisant pour faire tout le travail dans l'arrêt qui est prévu, on embauche à l'extérieur.

Alors, il y a une multitude de petites entreprises comme ça qui sont spécialisées dans la mécanique des usines papetières, dans la mécanique des scieries, et qui vont faire ce genre de travail là de façon très régulière pour les entreprises. Des travaux qui, parfois, sont très similaires à ce qui se fait dans la construction, et, parfois, très différents. Et, encore une fois, comme vous le disait M. Comtois, il n'y a pas d'allergie de la part de l'industrie à employer des entrepreneurs de construction quand il y a des travaux qui sont propres à ça. S'il s'agit de reconstruire une base de machine, c'est bien évident que l'expérience se retrouve au niveau de quelqu'un qui sait couler du ciment, et ce sont des entreprises spécialisées en construction qui vont avoir les contrats à ce moment-là.

Je vous disais que ça s'appliquait aussi bien dans le sciage que dans les papetières. Il y a un exemple que vous connaissez certainement, dans le sciage, de fabricant d'équipement qui est disparu, et c'est Forano. Qu'est-ce qu'on fait avec les... La moitié des scieries du Québec, je pense, sont équipées avec de l'équipement de Forano. Il y a des spécialistes qui sont capables de fournir les services pour entretenir cet équipement-là. Et je vous signale que c'est avantageux pour l'industrie, parce que ces gens-là, qui vont opérer très souvent les fins de semaine, le font avec la bénédiction des syndicats en place, qui, dans le cas du sciage, en particulier, où on opère très souvent sur cinq jours, sont bien contents de pouvoir s'en aller chez eux tranquilles pour la fin de semaine et de revenir avec un entretien, voire des améliorations à l'usine, qui ont été faites pendant la fin de semaine, et qui sont prêtes à opérer à 7 heures, lundi matin.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Duchesne. M. Dufour...

M. Dufour (Ghislain): M. le Président, c'est une très longue réponse, mais, je veux dire, on touche le coeur de notre présentation, là, des exemples très concrets. Si on avait été cinq, je vous aurais fait donner des exemples du genre dans les alumineries et dans les mines. Et je réfère à la page 4, quand on dit: «Nous recommandons [...] le maintien des dispositions actuelles relatives à l'installation, à la réparation [...] à l'entretien de la machinerie de production, sachant pertinemment, par ailleurs, qu'un certain modus vivendi qui s'est établi au cours des ans se maintiendra.» Notamment, au niveau de l'installation. Mais on s'oppose à ce qu'on l'impose par voie législative, pour les raisons qui viennent d'être mentionnées. (20 h 30)

M. Cherry: Je présume...

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Cherry: ...je présume, par exemple, chez GM, quand vous faites un changement majeur, vous arrêtez la ligne de production, là. Bon, c'est bien sûr que, là, vous avez besoin des centaines de travailleurs. Et je suis convaincu qu'un très grand nombre de ces gens-là sont des métiers que vous retrouvez venant de l'industrie de la construction.

M. Comtois (Pierre): Effectivement, M. le ministre, dans ces situations-là, on fait appel à l'industrie de la construction dans à peu près la majorité des cas. Pourquoi? Tout simplement parce qu'à ce moment-là on a une disponibilité des ressources; l'expertise que l'on recherche se retrouve chez ces entrepreneurs de la construction, et ils ont la capacité de nous le livrer de la façon dont on le désire. Sauf qu'il faut quand même, à l'occasion, être réaliste. Quand l'industrie de la construction va bien au Québec et que vous avez des projets à gauche et à droite, à tous les coins de la province, des fois, on n'a pas accès à la disponibilité au sein de l'industrie de la construction parce que les travailleurs sont bien utilisés. C'est sûr que, dans les périodes actuelles où les projets sont moins nombreux, la disponibilité est grande. Mais, dans d'autres circonstances, on doit faire, à ce moment-là, appel à d'autres que des gens de l'industrie de la construction. Et, pour répondre spécifiquement à votre question, dans les travaux majeurs d'installation, ou lors de fermetures d'usines, en plus d'utiliser notre personnel, on va et on fait appel souvent à l'industrie de la construction.

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Cherry: Quand je veux faire, par exemple, un changement majeur qui peut... C'est quoi? Le dernier, ça a duré quoi, neuf, 10 mois, un an?

M. Comtois (Pierre): On peut calculer l'ensemble des travaux sur plus d'un an.

M. Cherry: Plus d'un an où des centaines de travailleurs...

M. Comtois (Pierre): Effectivement.

M. Cherry: ...dont la grande majorité originent de l'industrie de la construction... À ce moment-là, leur taux de rémunération, c'est celui qu'ils ont normalement, issu de leur décret, ou est-ce qu'il se négocie d'autres choses? C'est le sous-traitant? Comment est-ce que ça fonctionne, là?

M. Comtois (Pierre): Actuellement, lorsque les entrepreneurs de la construction viennent travailler chez nous, ils sont payés et rémunérés par leurs employeurs aux taux du décret et conformément au*'termes et conditions du décret.

M. Dufour (Ghislain): M. le ministre...

Le Président (M. Joly): M. Dufour, s'il vous plaît.

M. Dufour (Ghislain): ...c'est ce avec quoi on est d'accord, d'ailleurs. Il faudrait faire toutes les distinctions que ne fait pas le projet entre l'installation, l'installation de grands projets comme celui-là avec le montage, la réparation, l'entretien. Et on ne sait même pas ce que vous voulez dire parce que vous dites que ça va être défini par règlement. Alors, on ne le sait pas, mais c'est une distinction à faire.

Il y a une distinction à faire aussi entre un gros projet comme celui auquel on réfère, celui de GM, et les entreprises beaucoup plus petites qui ont aussi le même problème d'installation. Parce que, là, vous couvrez tout, là. Dans les appareils de production, vous vous trouvez à couvrir autant la PME que la grande multinationale par cette définition-là. Et voilà la raison même de notre objection, sachant pertinemment que, même dans les alumineries, quand il s'agissait de l'installation des gros équipements, ça a été fait par des travailleurs de la construction. Mais, après, quand arrive le montage, etc., ce n'est pas nécessairement fait par les travailleurs de la construction.

M. Cherry: Même si le projet de loi vous permet d'utiliser vos employés normalement, qui sont les vôtres, si je vous ai bien compris, M. Comtois, vous dites qu'il y a quand même une limite à ça. On ne peut pas prendre tout ce qu'on a comme électriciens, comme plombiers, comme «millwrights» et tous les concentrer sur ce changement-là, majeur. Il faut quand même que le reste de l'usine continue à fonctionner quand c'est dans le quotidien, si je vous ai bien saisi. Donc, dans des occasions comme celle-là, vous faites appel où est la compétence, où vous la trouvez.

M. Comtois (Pierre): Effectivement.

M. Cherry: Si c'est une fondation, vous allez la chercher dans la construction. Si c'est de l'entretien ordinaire, c'est le fabricant ou son représentant, enfin, celui qui vous a assuré la garantie de l'installation et celui auquel, en cas de bris ou d'entretien, vous devez «référer à», si j'ai bien...

Le Président (M. Joly): M. Comtois, s'il vous plaît.

M. Comtois (Pierre): Vous avez effectivement bien compris, M. le ministre. Le seul ajout que je pourrais faire, c'est que, des fois, encore là, ce n'est pas seulement nous qui avons le problème, c'est notre fabricant, le fabricant de l'équipement qui peut avoir le problème où il ne peut pas encore, lui aussi, pour les mêmes raisons, utiliser ses propres employés et il doit faire, lui, appel, à ce moment-là, à un sous-traitant. Ce fabricant-là peut encore, et nous l'avons vécu, faire appel tant à des gens de l'industrie de la construction que hors de l'industrie de la construction pour faire ces services, principalement après l'installation et pour l'entretien par la suite, et même, à l'occasion, lors de l'installation.

M. Cherry: Oui. Je me souviens avoir vécu des expériences où, pour le maintien de la garantie, le fabricant exigeait que ce soit son personnel ou les gens que lui a recrutés qui puissent en faire l'installation, et ce n'était qu'à cette condition-là seulement qu'il pouvait en garantir l'installation, la qualité; il se rendait responsable s'il y avait quelque chose. Je me souviens d'avoir vécu des expériences de cette nature-là, et c'est dans ce sens-là que je dirige mes questions pour voir si vous ajoutez à ça ou si, ça, ça cerne bien ce qu'on tente de comprendre de cet aspect-là de votre mémoire.

M. Comtois (Pierre): C'est définitivement un des volets et c'est effectivement ce que le projet de loi 142, tel que libellé actuellement, empêcherait pour l'ensemble des manufacturiers, des fabricants d'équipement. La seule autre variante qu'on avait donnée, c'est l'exemple qui a été donné: lorsque le fabricant lui-même fait faillite ou disparaît, à ce moment-là, on ne peut plus faire affaire avec le distributeur ou le fabricant. On doit se trouver un sous-traitant qui a l'expertise ou qui peut acquérir l'expertise de l'entrepreneur disparu. Et, à ce moment-là, on contracte directement avec cette personne-là pour prendre la relève.

Il faut faire attention aussi aux concepts de machine de production. Des fois, vous pouvez imaginer quelque chose qui est très simple, qui est très clair. Un convoyeur... On peut peut-être dire: C'est quoi, un convoyeur? Mais, lorsqu'on parle de machinerie de production de nos jours, imaginez tout un système de vision, de lecteur au laser intégré à un convoyeur pour identifier lorsqu'un véhicule passe sur une ligne de montage. C'en est, ça, de l'équipement de production. Maintenant, vous avez des systèmes qui sont hautement programmés et, à ce moment-là, vous avez toute une expertise, dans ce domaine-là, qu'il faut aller chercher où elle est.

Tout ce que, finalement, nous demandons, c'est la flexibilité actuelle qui est dans la réglementation actuelle, qui n'exclut pas l'industrie de la construction mais qui nous permet d'aller où on peut aller chercher de l'expertise lorsqu'on en a besoin et quand on en a besoin.

M. Cherry: Et j'ai bien compris aussi que... M. Dufour a bien pris la peine de spécifier que l'objection qui date du tout début... Vous avez dit: C'est à cause des coûts qui sont notoirement — je ne veux pas vous mettre des paroles dans la bouche — qui sont, règle générale, plus élevés dans le secteur de la construction par rapport à nos employés ou aux sous-traitants qu'on pourrait utiliser.

M. Dufour (Ghislain): C'est un élément, M. le ministre, qui est un élément important mais, à entendre

les deux collègues, vous réalisez aussi qu'il n'y a pas toujours l'expertise dans le secteur de la construction. On parle maintenant de contrôles électroniques, de robots, d'automates. De plus en plus, les sous-contractants se spécialisent là-dedans, et il y a une ressource là qui n'est pas toujours disponible dans l'industrie de la construction.

Et, si vous me permettez d'aller au niveau du principe, c'est qu'on s'oppose à une réglementation additionnelle. Au moment où on déréglemente, où le discours — de Gérald Tremblay, hier, et de M. Bourassa — est un discours axé sur la déréglementation, où on va créer un comité de gestionnaires pour essayer de déréglementer, vous venez nous réglementer davantage. Alors, à ça, au plan des principes, il y a une opposition de fond.

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: Sur un dernier sujet, M. le Président...

Le Président (M. Joly): Sur un dernier point, s'il vous plaît, oui.

M. Cherry: ...un dernier point. Vous avez fait lecture de votre mémoire, mais je sais que de vos membres ont fait des représentations auprès de l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale concernant la situation pour la mobilité des entrepreneurs et certains problèmes que ça vous pose. Et je termine avec ça, là. Souhaiteriez-vous être un peu plus explicite sur la nécessité pour vous... Quelle sorte de problèmes ça représente pour vos gens, et leur impact?

Le Président (M. Joly): M. Dufour. (20 h 40)

M. Dufour (Ghislain): On ne touche pas à ça. On touche à un problème qui est le siège social demandé actuellement à un entrepreneur d'une autre province pour faire des affaires au Québec. On dit: II y a unanimité dans l'industrie de la construction. Je prends à témoin un peu le sous-ministre. Au Sommet, tout le monde était d'accord pour dire: Voilà une déréglementation qui est souhaitable de la part de tout le monde. Tout le monde est unanime. Je ne connais pas la position de l'Opposition là-dessus, là, mais, chez les intervenants, tout le monde est unanime.

La seule chose que l'on dit sur ce sujet précis, je sais que ce n'est pas votre question, mais sur ce sujet précis on dit qu'étant donné l'unanimité, étant donné qu'on peut débattre encore peut-être une couple de semaines le projet de loi 142, bien, prenons ça, mettons ça dans un projet de loi immédiatement, qui va donner du «bargaining power», finalement, à notre ministre de l'Industrie et du Commerce vis-à-vis de M. Rae, qui prend des mesures de rétorsion contre le Québec qui sont inacceptables et tout le monde en convient.

Sur votre question de mobilité des entrepreneurs avec leur personnel, c'est un tout autre débat. Là, vous m'amèneriez à discuter d'un fondement important du projet de loi 142, mais on a convenu, vous et moi, qu'on n'embarquerait pas là-dedans.

M. Cherry: Ça termine mes questions, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre, M. Dufour. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Joliette. S'il vous plaît, M. le député.

M. Chevrette: Moi, je ne connais pas, M. le Président, les «deals» qui peuvent exister entre le ministre et le président du Conseil du patronat.

M. Dufour (Ghislain): Si je peux me permettre, c'est parce que, M. Chevrette, c'est M. Cherry qui a dit ça au début.

M. Chevrette: Ah!

M. Dufour (Ghislain): Vous étiez absent.

M. Chevrette: Bien, moi, vous savez que je suis un type souverain de nature.

M. Dufour (Ghislain): Souverain? Ah oui! Le Président (M. Joly): Alors, monsieur...

M. Chevrette: Je n'ai pas l'intention de me laisser influencer et impressionner par vos ententes. J'ai l'intention de vous parler du projet de loi 142 et, si vous prenez la peine de venir, on a sûrement le droit, à ce moment-là, de questionner sur l'ensemble du projet de loi 142.

Vous portez un jugement, en bas de la page 2. «...il est surprenant de constater ici une certaine contradiction dans le discours gouvernemental; alors qu'il déréglemente le secteur résidentiel, notamment pour des raisons de coûts, il réglemente un partie importante du secteur industriel, ce qui pourrait accroître les coûts de ce secteur déjà gravement atteint par la récession.» Est-ce à dire que vous êtes en désaccord avec la déréglementation du résidentiel?

M. Dufour (Ghislain): Ce n'est pas un jugement sur ce volet précis du projet de loi, M. le Président. C'est qu'on constate qu'on déréglemente le résidentiel alors qu'on réglemente en partie — comprenons-nous bien, en partie — le secteur industriel. Alors, ce n'est pas une position. Et je vais vous dire, M. le député de Joliette, pourquoi on ne débattra pas, quant à nous, de l'ensemble du projet, pour un certain nombre de raisons. Je peux vous comprendre de poser des questions, mais vous nous comprendrez de ne pas y répondre. Au Sommet sur la construction, le secteur industriel a été invité,

mais simplement comme observateur. On n'avait pas le droit de proposer, on n'avait pas le droit de seconder, on n'avait pas le droit de vote. Alors, tous ces débats-là se sont faits en l'absence du secteur industriel.

M. Chevrette: Vous êtes plus chanceux que nous autres, vous avez été au moins observateurs. Vous avez été invités.

Une voix: Vous aviez la chance d'être invités. M. Chevrette: Non.

Une voix: Voyons, voyons! Il ne faut pas charrier, là.

M. Chevrette: Non, non, non!

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît! Merci. Merci.

M. Chevrette: Non, non, non, ne vous essayez pas à faire vos petits sparages.

Une voix: Non, non, non.

M. Chevrette: N'essayez pas de faire vos sparages, on n'était pas invités.

M. MacMillan: On n'était pas invités et on y a été pareil.

Le Président (M. Joly): M. le député de Joliette, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Ceci dit, M. le Président, c'est moi qui ai la parole, s'il vous plaît.

Le Président (M. Joly): Oui, c'est pour ça que je vous reconnais.

M. Fradet: On vous a envoyé un faire-part.

M. Chevrette: Je voudrais demander à M. Dufour ceci: Vous avez quand même des patrons qui font partie du CPQ.

M. Dufour (Ghislain): Oui.

M. Chevrette: Vous avez sans doute des associations patronales. Vous avez suivi les débats depuis une vingtaine d'années, vous, dans le domaine de la construction au Québec. Je fais donc appel à vos connaissances personnelles pour vous demander s'il est logique de déréglementer un secteur et de ne pas déréglementer les autres?

M. Dufour (Ghislain): Vous faites appel à une réaction personnelle que je pourrais vous donner. Je suis porte-parole, ce soir, du Conseil du patronat qui a convenu de vous faire une présentation sur ces aspects très particuliers qui sont majeurs pour le secteur industriel. Et vous savez très bien, vous savez très bien, M. Chevrette, qu'être porte-parole dans un dossier comme celui-là c'est prendre position pour l'AECQ ou l'APCHQ, qui sont toutes membres, toutes des associations patronales membres du CPQ. Il y a des porte-parole dans ces associations-là, qui vont vous exprimer des points de vue qui sont souvent très divergents. Nous avons des collègues ici qui ne sont pas des gens du secteur de la construction. Donc, je sais que vous allez essayer longtemps, mais vous ne l'aurez pas, la réponse. Nous, on va être ici pour débattre du mémoire qu'on vous a soumis, et j'espère que vous allez respecter les volets qu'on regarde.

M. Chevrette: Mais, M. Dufour, on vous connaît comme un homme qui répond spontanément aux questions que vous adresse la presse, et sans pour autant que vous ayez le temps, sans doute, de consulter toutes vos structures vu le nombre de fois que vous faites des déclarations et de façon très spontanée. Des fois, quelques minutes, même, après un discours du budget, vous vous prononcez allègrement; quelques minutes, des fois, après le dépôt d'un document d'envergure, vous vous prononcez allègrement.

Ce que je vous demande, étant donné que tout le monde fait partie de votre regroupement, les patrons, est-ce que vous considérez qu'ils doivent arriver en état dispersé pour le bien de la partie patronale dans le domaine de la construction ou s'ils doivent s'afficher comme ils s'affichent présentement?

Le Président (M. Joly): M. Dufour.

M. Dufour (Ghislain): M. le Président, je trouve torturantes, pour le moins, ces questions du député de Joliette, sachant pertinemment que je suis ici non pas à titre de spécialiste des questions de relations de travail, que j'ai beaucoup discutées avec M. Chevrette, notamment au moment de la commission Cliche, mais, ce soir, je suis porte-parole d'un groupe qui a décidé de concentrer ses réactions sur ce sujet-là. S'il veut entendre que l'AECQ n'est pas d'accord avec l'APCHQ, il n'a pas besoin de me l'entendre dire, il le sait. Et que l'APCHQ n'est pas d'accord avec l'AECQ, il le sait. Alors, qu'est-ce que je peux ajouter de neuf?

M. MacMillan: Vous n'avez pas posé la question, par exemple.

M. Chevrette: Pardon?

Le Président (M. Joly): Excusez. S'il vous plaît!

M. Chevrette: M. le Président, je pense que le député était dans son bureau avec les citoyens de son comté quand j'ai posé les questions, donc...

M. MacMillan: J'écoutais, j'écoutais.

M. Chevrette: Je m'excuse! J'ai posé la question à l'AECQ.

Le Président (M. Joly): Vous avez toujours la parole, M. le député de Joliette. S'il vous plaît!

M. MacMillan: Vous n'avez pas posé la même question.

M. Chevrette: II était dans sa salle de quilles. Ce n'est pas ça.

M. MacMillan: Ah, ah, ah! Aïe! «T'es» cochon! «T'es» un cochon!

M. Chevrette: Donc, M. le Président, je voudrais continuer, M. le Président, à poser la question. C'est moi qui ai la parole.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. MacMillan: Je ne pensais pas que tu étais de même, Guy.

Le Président (M. Joly): M. le député de Papineau, s'il vous plaît!

M. Chevrette: M. le Président, j'ai bel et bien, cet après-midi, posé la question à l'AECQ. Et j'ai même parlé de la chicane avec l'APCHQ.

M. Dufour (Jonquière): Bien oui, c'est évident.

M. Chevrette: Donc, je l'ai sorti, M. le Président.

M. Dufour (Jonquière): M. le Président, il faudrait peut-être avoir un point d'ordre, là...

Une voix: Vous pouvez lui demander de retirer ses paroles.

M. Dufour (Jonquière): ...il y a peut-être des mots qu'on ne dit pas ici, en commission parlementaire.

M. Chevrette: Non, non, non. Ça le caricature bien. Moi, je n'ai rien contre ça.

Le Président (M. Joly): Alors, je m'excuse. Ça allait bien jusqu'à il y a trois minutes. Alors, si c'est la façon dont vous voulez qu'on continue le débat, bien, moi, à ce moment-là, je vais prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'on continue dans l'ordre, tel que souhaité, de façon à ce que nos débats continuent d'avancer.

Alors, M. le député de Joliette, s'il vous plaît, je vous reconnais la parole.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Donc, M. Dufour, je prends acte que vous ne voulez pas vous prononcer sur le fond de la loi 142, à toutes fins pratiques. Vous venez exclusivement nous dire que, pour un groupe d'intérêts spécifique, vous avez une position, mais que vous n'en avez pas sur le fondement même de la loi, à toutes fins pratiques.

Ce n'est qu'un élément de la loi. Je suis convaincu que vous relevez une contradiction. Il y en a beaucoup, de contradictions, dans ça, dans le fond. Vous en relevez une, mais vous ne relevez que le volet qui est favorable à un groupe alors que, quand on a à se prononcer sur une législation, c'est un ensemble d'éléments qui forment un projet de loi. C'est la structure patronale, c'est la structure de négociation globale, c'est la structure unique, ou bien avec des sous-secteurs, c'est l'intervention ou pas du ministre du Travail. C'est une philosophie. J'espère que le Conseil du patronat a une philosophie de pensée vis-à-vis des lois du travail et que le Conseil du patronat ne vient pas nous implorer exclusivement pour un secteur visé, un secteur d'intérêts, et que vous avez une philosophie de pensée sur l'ensemble des structures.

Quand vous vous présentez devant les groupes parlementaires, M. Dufour, à chaque année, vous venez nous parler, par exemple, de la loi antiscab, vous nous parlez de la CSST, vous parlez avec une philosophie patronale qui vous est propre, à laquelle vous avez droit. Et, là, c'est une philosophie de gestion des relations de travail dans l'industrie de la construction, et , tout ce que vous venez nous dire, c'est... Vous venez nous implorer de ne pas toucher à un secteur.

M. Dufour (Ghislain): Monsieur...

M. Chevrette: Alors que je pensais que la commission parlementaire...

M. Dufour (Ghislain): Je ne suis pas d'accord...

M. Chevrette: ...était pour questionner précisément ceux qu'on acceptait d'inviter sur l'ensemble du projet de loi, ses tenants, ses aboutissants, que ce soit pour le côté patronal, syndical, la structure de négociation, la structure de gestion des relations de travail dans l'industrie de la construction. Pour moi, vous me permettrez de vous dire que c'est décevant.

Le Président (M. Joly): M. Dufour, vous avez droit de réplique.

M. Dufour (Ghislain): Alors, vous pouvez être déçu, ce n'est pas mon problème. Mais je ne peux pas comprendre qu'avec toute votre expérience parlementaire, M. Chevrette, vous nous disiez ces propos. J'ai comparu moi-même devant vous lorsque vous étiez ministre, débattant de problèmes très particuliers à l'intérieur

d'une loi. C'est comme ça que ça se passe dans une commission parlementaire, voyons donc!.

Nous avons choisi de représenter ici un point de vue qui n'était pas présent, je l'ai dit tout à l'heure, au sommet de la construction. Nous serons à peu près les seuls intervenants, avec l'AMQ, sur ce dossier-là qui concerne les manufacturiers du Québec, et vous dites qu'à ce moment-là on ne vous véhicule pas un message important. (20 h 50)

Moi, je pense que votre responsabilité, à l'inverse, est beaucoup plus de nous dire comment vous, de l'Opposition, vous vous situez par rapport à une préoccupation fondamentale qui vous est livrée par le secteur manufacturier. Et, là-dessus j'aimerais vous entendre.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Joly): M. Chevrette.

M. Chevrette: Si M. Dufour veut questionner, il n'a qu'à se faire élire, faire comme moi, venir s'asseoir à ma place...

M. Dufour (Ghislain): Bon, alors, je constate que le député ne veut pas me répondre.

M. Chevrette: ...et puis questionner les témoins. Non, je m'excuse, M. le Président. Le témoin, là, je pense qu'il va nous écouter. Je l'ai laissé parler, puis sans l'interrompre.

Le Président (M. Joly): Moi, je suis prêt à reconnaître tous les intervenants, à tour de rôle.

M. Chevrette: Ce que je veux dire à M. Dufour: Quand vous voudrez questionner, M. Dufour, vous ferez comme nous. Vous vous présenterez, vous vous ferez élire puis vous viendrez questionner les témoins. Mais, quand on accepte de témoigner, un parlementaire a le droit de questionner sur l'ensemble du projet de loi, et vous le savez très, très bien, on le fait couramment. On dit même aux témoins qui viennent témoigner, très souvent: Vous ne parlez pas de tel sujet, pourquoi? Vous ne traitez pas de telle dimension du projet de loi, pourquoi vous l'ignorez? Cela arrive très fréquemment qu'on fasse ça dans les mémoires des individus. Vous pouvez demander au ministre, demander à n'importe quel parlementaire ici. Ils vont vous dire que bien souvent les parlementaires s'interrogent sur le pourquoi, par exemple, du silence d'un groupe sur des volets complets d'un projet de loi. Donc, ne me dites pas que ça ne se fait pas, ça se fait très régulièrement, ce que j'ai fait. Essayer d'avoir votre point de vue sur la structure patronale alors que vous êtes le Conseil du patronat, il me semblait que ça se posait, comme question, ça, à un Conseil du patronat, ce qu'il pense de la structure patronale déposée dans le projet de loi 142.

Quelle est votre perception, votre conception?

Est-ce que ça a des chances de donner de la force à la partie patronale en négociation? Est-ce que ça a des chances d'harmoniser les relations, par exemple, entre groupes d'employeurs aux intérêts un peu divergents? Et, ça, on fait ça couramment, demander à des experts qui oeuvrent exclusivement dans le champ du monde patronal de nous donner leurs impressions sur la structure des négociations patronales. Ça m'apparaît quelque chose de très normal. Moi, je suis surpris que vous vous offusquiez que j'essaie d'arracher de votre bouche des idées que vous pouvez avoir là-dessus. Il me semble que c'est le propre du parlementaire d'aller chercher les omissions des témoins. C'est le propre du parlementaire d'aller chercher ce que le plus grand responsable au Québec des relations patronales-syndicales, le Conseil du patronat, pouvait nous sortir. Moi, j'aurais aimé ça que vous nous éclairiez.

M. Dufour (Ghislain): M. le Président... Le Président (M. Joly): M. Dufour.

M. Dufour (Ghislain): J'ai l'impression qu'on perd notre temps. Il y a des questions fondamentales qu'on a apportées ce soir aux parlementaires, et je souhaiterais qu'on en débatte. Bien sûr, on peut poser le pourquoi, mais j'ai répondu au pourquoi. J'ai dit pourquoi on n'était pas au Sommet, que le mandat qu'on a n'est pas le mandat de débattre devant la Chambre de la loi 142.

Mais, si vous me permettez, M. le député de Joliette, moi, je suis toujours venu ici en commission parlementaire où on échangeait, on posait des questions pour comprendre un peu, voir quelles étaient les réactions. Vous bloquez face à ça. Alors, je vous le redemande: C'est quoi, votre réaction quant au champ d'application, quant à la création d'un quatrième secteur? Je vous prends comme spécialiste, et j'aimerais ça que vous le disiez, là, face au secteur industriel qui se pose des questions là-dessus, ce que vous vous en pensez. Si vous ne voulez pas répondre, pas de problème.

Le Président (M. Joly): M. le député de Joliette, s'il vous plaît.

M. Chevrette: M. le Président, nos opinions, on va les donner tout au cours du projet de loi article par article. Mais, moi aussi, je trouve personnellement inconcevable qu'on déréglemente et qu'on réglemente. Ça, c'est clair.

M. St-Roch: ...

Le Président (M. Joly): Écoutez, il reste cinq minutes, donc quelques minutes pour le député de Jonquière, et aussi, sur la fin, M. le député... Parce que, ce qui arrive, M. le député de Drummond, c'est que vous n'avez négocié aucun temps de parole avec les deux partis. Donc, si vous m'arrivez à la fin...

M. St-Roch: ...

Le Président (M. Joly): Non, je m'excuse. Si vous m'arrivez à la fin et qu'il ne reste plus de temps dans t'enveloppe, je ne peux pas administrer ce que je n'ai pas. Donc, si vous voulez, on va s'entendre avant le prochain groupe. On va s'entendre sur le temps dont vous avez besoin; sachant à l'avance ce dont vous avez besoin comme temps pour intervenir, je vous reconnaîtrai avec grand, grand plaisir.

Oui, M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Oui, c'est une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Joly): L'article 132, monsieur...

M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président. Pour sauver quelques secondes, 132, je ne l'avais pas énumé-ré.

M. le Président, hier, lorsqu'on a lu la motion à l'Assemblée nationale et lorsqu'on me l'a présentée, vous savez comme moi que le député de Drummond aurait pu refuser son consentement et on ne serait même pas ici ce soir. J'ai porté à l'attention de votre leader que dans la répartition du temps, contrairement au niveau des remarques préliminaires, il y avait 40 minutes et on parlait seulement de répartir le temps entre les ministériels et l'Opposition. Et, à ce moment-là, j'ai dit qu'il avait toujours été coutume au niveau de nos travaux ici qu'il y ait les dernières cinq minutes, lorsque je désirais les prendre; et, lorsque ce n'était pas nécessaire, l'Opposition les prenait. Alors, j'ai demandé: Est-ce que je suis obligé de le faire? On m'a dit que non, que les procédures étaient pour être respectées.

Le Président (M. Joly): Bon. Regardez-bien, M. le député de Drummond...

M. St-Roch: Alors, je demande juste que les procédures soient respectées.

Le Président (M. Joly): M. le député de Drummond, si vous levez la main à la toute fin, moi, de façon à être juste, autant avec le parti ministériel qu'avec le parti d'Opposition, je me dois de le savoir avant, parce qu'autrement je favorise d'emblée le parti ministériel, parce que je les laisse écouler leur période de temps, qui est de 20 minutes, et, par après, nécessairement, je reconnais le parti de l'Opposition. Si vous levez la main à fa toute fin, malheureusement, je me dois d'amputer l'enveloppe de temps du député du parti de l'Opposition, et je trouve que c'est une forme d'injustice. Alors, j'apprécierais que vous me le disiez à l'avance, avant que les gens ne se présentent. Et, comme je n'étais pas présent à la rencontre avec les leaders, je pense que M. le député Chevrette aurait quelque chose à rajouter sur ce point.

M. Chevrette: Non. Moi, ce que je voudrais dire: C'est la coutume; vous avez raison, je crois que vous avez raison, M. le Président...

Le Président (M. Joly): Oui, il a raison, il a raison.

M. Chevrette: ...de souligner la coutume. Quand le député indépendant veut intervenir, il vous avise et, là, ordinairement, c'est vous, la présidence, qui dites: Bon, bien, je peux prendre deux minutes chez vous, deux, trois minutes là, là...

Le Président (M. Joly): Oui.

M. Chevrette: ...et il y a un équilibre. Mais il faut qu'il soit avisé d'avance; autrement, effectivement, ce serait toujours la même formation politique qui y perdrait.

Une voix: ...

M. Chevrette: Ah, mais, ça, je ne savais pas, moi.

Le Président (M. Joly): Ça, je peux l'administrer automatiquement, facilement, en autant que je le sache à l'avance. Alors, ce n'est pas de la mauvaise volonté de ma part, et j'imagine que ce n'en est pas non plus de la vôtre. Donc, partant de là, si on peut s'entendre, moi, je vais le faire avec grand, grand plaisir. M. le député de Vimont, vous avez quelque chose à ajouter?

M. Fradet: Bien, sur la même question de règlement, M. le Président. Il n'est pas stipulé directement dans l'ordre de la Chambre qu'un député indépendant membre d'une commission doit avoir un moment, un temps de réservé. Je pense qu'il est stipulé dans l'ordre de la Chambre que, parmi les 40 minutes...

Le Président (M. Joly): C'est ça.

M. Fradet: ...il y a 20 minutes pour les députés de la formation ministérielle et il y a un 20 minutes pour les députés de l'Opposition. Ceci étant dit, bien entendu, nous avons toujours été cléments envers les députés indépendants, et, si le député indépendant demande à la présidence une intervention et qu'il l'avertit d'avance, je suis convaincu que la formation ministérielle sera en mesure de laisser quelques minutes au député indépendant pour s'exprimer.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Vimont. J'imagine, M. le député de Drummond, que pour les prochaines séances, pour les prochaines auditions, j'imagine que vous allez vous permettre d'enregistrer votre temps...

M. St-Roch: Monsieur...

Le Président (M. Joly): ...à l'avance.

M. St-Roch: M. le Président, je vais être plus clair: Ce matin, avant le début de nos travaux, j'ai pris la peine d'aller vous adresser la...

Le Président (M. Joly): Oui, oui.

M. St-Roch: ...parole et de vous dire de réserver cinq minutes, qui était la tradition, et que, si je ne jugeais pas nécessaire, à ce moment-là, de vous avertir, vous répartiriez les cinq minutes, là, ce qui aurait été résiduel. Alors...

Le Président (M. Joly): Donc, si je comprends bien...

M. St-Roch: ...ça, c'est toujours...

Le Président (M. Joly): Si je comprends bien, M. le député de Drummond, vous aimeriez que, pour les prochaines interventions, nous prenions pour acquis que vous prendrez votre temps de parole et que, si vous ne le prenez pas, nous répartirons le temps entre les deux formations.

M. St-Roch: Exact...

Le Président (M. Joly): C'est ça?

M. St-Roch: ...M. le Président.

Le Président (M. Joly): Parfait, parfait, bien saisi. Alors, M. le député de Jonquière.

M. Dufour (Jonquière): Oui, M. le Président. Je remarque qu'à la page 6 vous dites: «II est donc essentiel d'y donner suite rapidement, quoi qu'il arrive du projet de loi 142», tout en parlant du conflit qui existe dans les relations interprovinciales. Donc, est-ce que vous laissez supposer... Parce que je suis obligé de lire le texte tel que vous le libellez à l'effet que vous mettez en doute quelque part, là, que le projet de loi 142 pourrait être bloqué, pourrait ne pas passer. À ce moment-là, vous dites: II y a un problème de fond, réglez-le, M. le ministre. Est-ce que je vous comprends bien, et est-ce que vous me donnez raison?

M. Dufour (Ghislain): Bon. Je trouve votre question d'un ordre tout à fait différent de la question de M. Chevrette parce que, là, vous ne nous amenez pas sur le fond, vous nous amenez sur un élément...

M. Dufour (Jonquière): Bien...

M. Dufour (Ghislain): ...et il y en a un paquet avec lesquels on est d'accord. Ce que nous, on dit, c'est qu'on ne connaît pas le désir politique du gouvernement; il l'a affirmé, mais jusqu'où il ira aux fins de la passation de sa loi? Dans le fond, c'est une question au minis- tre. Mais, si on est pour retarder, pour des considérations x, y, z, ce projet de loi là, voici un élément excessivement positif, notamment pour les gens de l'Outaouais, aussi bien le régler. J'ai vu ça, moi, dans certaines situations, M. le député, qu'on sorte un élément ou deux d'un projet de loi, sachant pertinemment que ça peut prendre plus de temps pour l'ensemble du projet de loi, les sortir, dans le temps qu'on avait les lois omnibus, par exemple, en fin de session, puis régler ce genre de problème là. Pour nous, c'est un problème fondamental, c'est un élément de négociation important.

Ce qui se passe actuellement entre l'Ontario et le Québec, c'est dramatique, on le sait. Alors, on dit: Si — mais on n'est pas le pouvoir politique, là — ce projet de loi là est pour traîner un certain temps en débats, bien, réglons au moins un problème sur lequel tout le monde est d'accord.

M. Dufour (Jonquière): Bien, si je comprends bien ce que vous dites, c'est: Dans le projet de loi, même s'il y a des parties très importantes, la plus importante à vos yeux, c'est cette partie qui touche la mobilité de la main-d'oeuvre. (21 heures)

M. Dufour (Ghislain): Ce n'est pas parce qu'elle est plus importante par rapport à d'autres, c'est parce qu'elle fait consensus. Alors, à ce moment-là, au moins, réglons les questions qui font consensus.

M. Dufour (Jonquière): J'ai remarqué que le désassujettissement — ce n'est pas facile — de la machinerie industrielle ou des appareils industriels ne fait pas votre affaire. De l'assujettir. En fait, c'est le contraire, on l'assujettit. Ce n'est pas à votre demande, à ce que je sache. Le ministre, dans ces questions... Je ne sais pas si c'est à vous, M. le ministre, que j'adresse la question: Qui l'a demandée, cette partie-là?

M. Cherry: Ça a fait l'objet d'un consensus au Sommet, unanime.

M. Dufour (Jonquière): Bien, là, est-ce que j'ai mal compris? Là, il faudrait que je comprenne.

M. Dufour (Ghislain): Est-ce que je peux réagir à ça?

Le Président (M. Joly): M. Dufour, sûrement, vous avez la parole.

Une voix: Ça a fait l'unanimité. M. Dufour (Ghislain): Ça a fait... Le Président (M. Joly): Excusez!

M. Dufour (Ghislain): Ça a fait un consensus, bien évidemment, entre patrons et syndicats de la construction; le secteur industriel n'y était pas.

M. Dufour (jonquière): mais je pense qu'il y a un point que vous ave? soulevé... peut-être à cause de ma formation ou à cause de mes expériences... concernant l'article 65. 1, il me semble que, si le ministre persiste à vouloir garder ça à l'intérieur de la loi, il va falloir qu'il éclaircisse puis qu'il s'assoie avec le ministre des. affaires municipales. parce que, moi, je. vais vous dire que ce n'est plus vivable dans ce domaine-là.

Ça a fait l'objet depuis 13 ans au moins... Moi, je vous dis que c'est depuis 20; ans, que ce problème-là n'est pas réglé: C'est quoi une machinerie industrielle, puis comment ça... Si on veut aller de ce côté-là, on va s'amuser longtemps, et puis je vous passe un papier que c'est loin d'être clair.

Est-ce que vous croyez, M. Le président du Conseil du patronat, que le projet de loi, actuellement, dans sa forme, dans sa teneur, est susceptible de maintenir la paix sociale dans l'industrie? Là, je parle de l'industrie générale.

M. Dufour (Ghislain): M. Chevrette a déteint sur vous.

Sur la première question, moi, j'aime bien le témoignage du député parce qu'il a été ministre des Affaires municipales... président de l'Union des municipalités et a bien connu ce problème-là. Nous, à l'intérieur-même du patronat, avec l'UMQ, les principales associations sectorielles, on débat depuis deux mois de ce dossier-là, essayant de s'entendre entre patrons sur ce qu'est une définition, justement, de la machinerie de production. Et on ne s'entend pas. Alors, ce n'est pas vrai que dans un paragraphe on va régler ce problème-là définitivement.

Quant à savoir, votre deuxième question, si le projet de loi réglera le problème de la construction, c'est un secteur qui est excessivement complexe, le secteur de la construction. Les seuls mécanismes de négociation, c'est très complexe. Alors, ce sera comme tout projet de loi, si éventuellement il est adopté, il n'aura sûrement pas réglé tous les problèmes.

M. Dufour (Jonquière): Merci.

Le Président (M. Joly): Alors, je vous remercie, M. le député de Jonquière.

M. le député de Drummond, avec toute la force de négociation qu'on vous connaît.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Vous allez comprendre que je peux sympathiser avec vous lorsqu'on se fait imposer des choses et lorsqu'on n'est pas partie prenante.

Il y a un volet, moi, que j'aimerais retoucher avec vous, M. le président, c'est toute cette problématique de libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services. Vous n'étiez pas présent ce matin, mais dans mes remarques préliminaires j'ai mentionné que le 7 juillet, à 10, on ne s'était pas entendus lors d'une fameuse rencontre entre le fédéral et les autres provinces. C'était le point 6, d'ailleurs, de leurs recommandations. Le 23 août, à Charlottetown, le même point 6 a été laissé en suspens, puis on a laissé ça à des tables futures, à venir. Alors, je peux comprendre votre source de préoccupations, d'autant plus que, dans un premier temps, on a eu une limitation des services, des personnes au niveau de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. Maintenant, de la part de l'Ontario, on en est rendu maintenant à restreindre la libre circulation des biens.

J'ai cité des compagnies de chez moi qui font affaire, au niveau des produits d'approvisionnement du secteur manufacturier, au niveau du «public housing» de l'Ontario dans deux cas bien particuliers où est-ce qu'on refuse les produits du Québec. Je suis tenté de souscrire avec vous: ce qui fait urgence, à l'heure actuelle, pour essayer d'apaiser cette chose-là — parce que c'est des emplois, puis Dieu sait qu'on en a besoin, ici, au Québec — il faudrait peut-être ressortir cette pratique et en faire un projet de loi le plus «urgemment» possible. Et j'espère que M. le ministre aura entendu. C'est quelque chose qu'on peut régler très rapidement à l'Assemblée nationale lorsqu'on donne notre consentement.

Mais j'aimerais, d'une façon un petit peu plus globale, M. le président, vous entendre parce que ça a un effet sur le domaine de la construction, mais aussi un peu plus loin. Cette urgence-là, qu'est-ce qu'il adviendrait et quels sont les contacts que vous avez? J'imagine que le Conseil du patronat n'est pas en vase clos, a des contacts avec sa contrepartie ontarienne devant ce vaste réservoir. On parle de milliards de dollars de transactions possibles.

Quel est le contact que vous avez avec l'Ontario, et qu'est-ce qui arriverait si on ne réussissait pas à régler cette question de libre circulation des personnes et des biens?

M. Dufour (Ghislain): C'est un problème majeur. On pensait qu'on avait connu des problèmes avec le Nouveau-Brunswick, mais comme notre commerce avec le Nouveau-Brunswick est loin d'être aussi prononcé qu'avec l'Ontario, au moment où on applique vraiment en Ontario la mesure de rétorsion vis-à-vis le Québec, c'est très pénalisant. Je pense qu'il n'y a pas un député qui, dans son comté, n'a pas eu à un moment donné une intervention d'une entreprise, surtout manufacturière, pour lui faire saisir ce problème-là. Ce qu'on sait déjà, nous, actuellement, et c'est très malheureux, c'est qu'il y a des entreprises québécoises qui, pour avoir accès au marché ontarien, transfèrent de la production dans leurs usines des États-Unis. Et voilà des emplois qui ne seront pas créés ici. Ils transfèrent l'emploi aux États-Unis pour avoir accès au marché ontarien, comme c'a été le cas cet été avec le Nouveau-Brunswick dans une série de secteurs que vous connaissez bien et que je n'identifierai pas. Donc, voilà pourquoi, même si l'Ontario n'a pas respecté sa signature — parce que, il faut le dire, il y avait une entente entre les ministres de

l'Industrie qu'on ne faisait rien avant la fin juin 1994 — même si je pense qu'il faut négocier, nous, on a entrepris une campagne auprès de nos entreprises membres qui ont des activités importantes en Ontario pour qu'elles interviennent auprès du premier ministre ou des ministres concernés.

Exemple, l'AIFQ, avec ses papetières, a entrepris ce genre de lobby pour être certain qu'on va faire sauter ça le plus rapidement possible.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Dufour. M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Parfait.

Le Président (M. Joly): Parfait? Merci. M. le ministre, peut-être, en conclusion.

M. Cherry: Alors, merci de votre présence, et encore une fois on prend bonne note des commentaires que vous nous avez faits.

Le Président (M. Joly): M. le député de Jonquière.

M. Dufour (Jonquière): Je pense bien que, même si je rajoutais des choses, ce n'est que les remerciements pour la partie du mémoire qu'ils nous ont présenté concernant leurs points particuliers, mais qui ne nous éclaire pas nécessairement sur l'ensemble du projet.

Le Président (M. Joly): Donc, au nom des membres de cette commission, il me fait plaisir de remercier M. Dufour, M. Duchesne et M. Comtois. Merci beaucoup.

M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. Je suis convaincu qu'on sera en contact avec le député de Joliette pour lui faire saisir l'importance de défendre la non-extension du champ d'application.

M. Chevrette: M. le Président, je n'avais pas à être convaincu de ce bout là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Merci. Alors, je demanderais maintenant aux personnes représentant le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction de bien vouloir s'avancer, s'il-vous-plaît.

Alors, la commission reprend ses travaux. S'il vous plaît! (21 h 10)

Alors, bienvenue à cette commission. J'apprécierais, M. Pouliot, que vous nous introduisiez les membres qui vous accompagnent. Je vois que nous avons une règle d'exception que, j'imagine, nous n'aurons pas de problème à faire accepter: vous êtes quatre au lieu de trois. J'imagine que chacun a quelque chose à dire. Alors, M. Pouliot, s'il vous plaît nous introduire les membres qui vous accompagnent.

Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international)

M. Pouliot (Maurice): Sûrement. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire, pour débuter, je voudrais vous présenter les gens qui m'accompagnent: le confrère Normand Tousignant, gérant d'affaires de l'Union internationale des journaliers, local 62; Gérard Cyr, gérant d'affaires des plombiers, local 144; Fran-cine Legault, agente d'information du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international).

Le Président (M. Joly): Alors, je vous rappelle les règles. Vous avez une vingtaine de minutes pour nous livrer votre mémoire, vos remarques ou vos impressions et, par après, nous échangerons avec vous.

M. Pouliot (Maurice): D'accord, M. le Président. D'abord, je dois déplorer les événements qui sont survenus au cours des derniers jours, mais il faudrait aussi comprendre le peu d'espoir qu'avaient les travailleurs de l'industrie de la construction; avec une petite reprise, le projet de loi 142 est finalement en train de tout leur enlever le peu d'espoir qu'ils avaient en voulant déréglementer un gros secteur de l'industrie de la construction.

Quant à moi, je n'ai pas l'intention de reprendre les chiffres que nous a soumis ce matin la Commission de la construction du Québec; je pense que les chiffres sont là et ça ne me donne rien de reprendre ça, et aussi certains arguments des collègues de la FTQ-construction.

Par contre, je voudrais faire une correction concernant la mauvaise information de l'APCHQ ce matin relativement au régime d'avantages sociaux chez les travailleurs de l'industrie de la construction. C'est à la page 32, entre autres, du Journal de Montréal. Je sais qu'on parle beaucoup d'avantages sociaux, ça a l'air d'intriguer beaucoup de gens. Je dois vous mentionner que, lors du conseil d'administration du 30 septembre 1993, la Commission de la construction du Québec a pris position et a réglé le problème du déficit d'assurance-santé—salaire—maladie du régime collectif. Donc, il y avait effectivement un déficit dans notre régime d'assurance, et je pense qu'il faut faire une différence entre le régime de l'assurance-santé—salaire—maladie et le régime de retraite qui, effectivement, administré par la Commission, est géré par la Caisse de dépôt et placement. Je tiens à vous rappeler qu'on n'est pas tellement favorables à ce que la Caisse de dépôt et placement place notre 4 000 000 000 $. Qu'ils placent leur argent et on pourrait placer notre argent.

Ce que mentionne l'article dans le Journal de Montréa), c'est qu'en 1987 les crédits, un moment donné, que retiraient les travailleurs de la construction étaient de 375 $ du 1000 heures travaillées et enregistrées à la Commission de la construction du Québec. Évidemment, avec les années, en 1993, le montant est augmenté à 469 $. Donc, il est clair qu'avec l'argent nouveau, avec le rendement, avec l'ajustement des rentes, il est évident qu'il faut que le montant remonte. On ne peut pas dire que le régime est effectivement mal en point, il est en santé. La solvabilité du régime a effectivement été corrigée. D'ailleurs, on a pris les positions qu'on devait prendre, encore une fois, au conseil d'administration.

Les travailleurs de l'industrie de la construction, je pense qu'avec Corvée-Habitation, le chef de l'Opposition en a parlé ce matin, à savoir que, bon, oui, on a fait une très large contribution à Corvée-Habitation: on a payé 27 000 000 $ de notre argent à même le régime de retraite. Ça, l'APCHQ ne semble pas en parler tellement. Et pas satisfait de ça, il y avait un surplus. Et là, au lieu de nous redonner le surplus, de le renvoyer dans notre régime de retraite, on a créé Mon taux, mon toit.

Je voudrais aussi vous mentionner que, effectivement, l'APCHQ, le président de l'APCHQ a un employé à son service. Donc, c'est plutôt des brokers que des entrepreneurs, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec. On pourra sûrement parler par la suite de leur plan de garantie qui a été dénoncé, je pense, à plusieurs occasions. Donc, évidemment, je pense qu'on se devait de revenir à la réalité.

Évidemment, le déficit a été causé aux avantages sociaux. Pourquoi? Parce qu'à peu près tout le monde embarquait dans le régime sur une base volontaire. Le gouvernement du Québec a obligé ou a laissé, si on veut, la porte ouverte sur des cotisations volontaires. Donc, les travailleurs, les employeurs, les entrepreneurs autonomes enregistraient le minimum d'heures, faisaient une contribution volontaire et étaient éligibles pour une période de six mois. Ça, la Commission de la construction du Québec, on a pris position puis on a dit: On va arrêter ça. On a majoré le régime qui coûtait avant 100 $ pour être assuré pour six mois, pour avoir la carte MEDIC puis tout ce que ça couvre, le régime d'assurance, et on a augmenté ça à 270 $. Pas nécessairement le Conseil provincial, mais le conseil d'administration de la CCQ. Je pense qu'il faut placer les choses à leur place.

Évidemment, le Conseil provincial représente 35 000 travailleurs de l'industrie de la construction. On est sûrement représentés dans le secteur industriel. Il y a plusieurs des députés et des gens qui pensent qu'on est juste dans l'industriel. On a des travailleurs dans tous les secteurs d'activité, les quatre secteurs: tant les secteurs résidentiel, commercial, institutionnel, le génie civil et la voirie. Donc, en ce qui nous concerne, notre pourcentage le plus élevé est dans l'industriel, mais les plombiers, en pourcentage très élevé, sont au Conseil provincial et, évidemment, ils travaillent dans la construction résidentielle.

Donc, lorsqu'on a pris connaissance du projet de loi 142, on a été extrêmement déçus. On aurait cru que le ministre du Travail aurait amené des formules. Il aurait pu retenir certains consensus qui étaient survenus lors du Sommet sur l'industrie de la construction. Il y en a eu quelques-uns et, dans le projet de loi, on ne retrouve pas les consensus.

Évidemment, la loi, dans l'industrie de la construction... Contrairement à ce que disait M. Dufour, il y a eu un consensus sur le champ d'application, mais ce n'est pas les mêmes définitions qu'on retrouve dans le projet de loi 142 lorsqu'on parle du distributeur.

Dans la loi des relations de travail dans l'industrie de la construction, actuellement, il y a un paragraphe qui assujettit les travaux de l'industrie de la construction et il y en a 18 paragraphes, à l'article 19, qui excluent les travaux de l'industrie de la construction. Donc, évidemment, c'est une loi, à mon avis, qui n'a pas beaucoup de sens. On devrait retenir que, nous, on a l'intention de construire des usines. Je sais que le ministre du Travail a déjà travaillé à Canadair. On n'a pas l'intention de construire des avions — les gros Boeing, on va laisser ça aux employés de Canadair — mais peut-être qu'on pourrait construire l'usine. Et, lorsque l'usine va être construite, les travailleurs de l'industrie de la construction vont se retirer.

Il est aussi faux de prétendre que, évidemment, dans l'industrie de la construction, les travailleurs gagnent plus cher que dans les autres secteurs. Je pense que les chiffres, les rapports du ministère du Travail — le rapport Baril, entre autres — nous prouve le contraire.

Ce que veut faire, à notre avis, le projet de loi 142, il fait exactement ce que fait le projet de loi 31, adopté en 1988. On est en train de légaliser l'illégalité. D'ailleurs, j'écoutais le député de Saint-Maurice qui disait exactement ça. On est rendus: On n'est pas capable de régler le problème? Ce qu'on fait, on dit: Bien, écoute, tout va se faire au noir.

Disons qu'il y a 50 % des heures, actuellement, dans le résidentiel, qui sont faites au noir. En Ontario, ils appellent ça le «black market» ou ils appellent ça «underground». Bon. Au Québec, on appelle ça le travail au noir. Parce que ça existe aussi, dans les autres provinces que le Québec, le travail au noir. On aurait aimé que le ministre tienne compte aussi de la planification des travaux dans l'industrie de la construction. Ça fait suite au rapport Picard-Sexton. Le ministre va sûrement se rappeler qu'il y a eu une rencontre, voilà quelques mois, en présence de M. Daniel Johnson, je pense, qui va être nommé premier ministre prochainement, et on devait avoir d'autres rencontres. Puis ce n'est pas des rencontres privées, ce sont des rencontres avec la CCQ, les administrateurs. Puis, là, il semblait que M. Johnson apprenait beaucoup de choses. Mais, depuis ce temps-là, ça n'a pas bougé tellement. On n'a pas eu d'autres rencontres, il n'y a pas de planification des travaux dans l'industrie de la construction, puis on veut rentrer du monde à pleine porte. (21 h 20)

Donc, on est extrêmement déçus du projet de loi 142 et, évidemment, notre position est de demander le retrait du projet de loi. On a la nette impression que la déréglementation dans le résidentiel n'aurait pas comme conséquence, effectivement, de protéger le consommateur. Au contraire, les maisons vont être bâties beaucoup plus croches. Et si on veut essayer de nous vendre ça avec le plan de garantie de l'APCHQ ou de l'ACQ, quant qu'à nous, on n'a pas effectivement à acheter ça pour l'instant; on n'est pas d'accord avec ça.

L'abolition des cartes de qualification, quant à nous, il n'en est pas question. Les cartes de qualification, on pense que ça devrait effectivement demeurer, ça prend des travailleurs qualifiés. Pour être un charpentier-menuisier, à titre d'exemple, il faut avoir travaillé environ six ans pour pouvoir passer l'examen de charpentier-menuisier. Et, ça, c'est dans les bonnes années, lorsque la moyenne des heures est d'environ 1000 heures par année. Donc, il ne faut pas nous faire accroire qu'on va tout déréglementer ça et que tout le monde va rentrer dans l'industrie de la construction, plus de carte de compétence, et que les maisons vont baisser. si on prend le coût d'une maison, la main d'oeuvre, c'est environ... disons, sur une maison de 100 000 $, c'est à peu près 20 000 $ que sont les coûts de la main-d'oeuvre pour construire une maison unifami-liale. actuellement, on sait qu'il y en a à peu près 50 % qui n'est pas déclaré et l'autre 50 % est déclaré. donc, il y a tout de même un certain nombre d'heures qui est enregistré à la commission de la construction du québec.

Ce matin, je sentais... À un moment donné, vous posiez des questions au président de la Commission. Je pense qu'on n'a pas donné, effectivement, les outils à la Commission de la construction du Québec. Les peines pénales, la Commission de la construction fait tout le dossier et elle remet ça au ministère de la Justice qui, lui, prend des poursuites. Puis, des fois, c'est un avocat qui vient de défendre une cause, un chasseur qui n'avait pas de permis de chasse, puis, après ça, le dossier de la construction. Ce qu'on a demandé depuis longtemps, c'est un tribunal de la construction. Et, ça, ça n'a pas été retenu, malheureusement.

Le ministre est en train de nous dire: II va y avoir des choses dans votre convention collective, ça doit tenir ça, le tronc commun, les clauses qu'on appelle communes. Par contre, il nous dit: Le régime d'assurance, on pourra y voir. Bien, c'est justement les parasites qui ont siphonné notre régime qui nous ont amené le déficit et on ne veut pas se faire imposer des choses semblables. On aurait aimé, effectivement, pouvoir décider.

On parlait du régime d'avantages sociaux. La moyenne, dans le régime d'avantages sociaux — et, ça, c'est le régime de retraite, et l'assurance-santé—salaire-maladie — le régime de base est de 2,55 $ l'heure. Donc, le travailleur de la construction paye 0,80 $ l'heure et l'employeur paye 1,75 $ l'heure. Évidemment, pour l'assurance, c'est 0,70 $ l'heure. C'est le choix des parties, dans l'industrie de la construction, de se doter d'un régime semblable, et c'est aussi le choix de le bonifier et de le modifier. C'est ce qu'on a fait et à rabais. Et l'imputation, une large partie doit être au gouvernement: le désengagement de l'État des régimes de santé. Donc, automatiquement, le régime, la carte MEDIC, la CCQ l'absorbe. Donc, c'est une des raisons. Évidemment, il y a toute l'augmentation des médicaments et de ce qui s'ensuit.

Au niveau du champ d'application — je sais qu'il ne me reste pas grand temps — on n'est pas d'accord, d'aucune façon, avec le libellé du projet de loi 142, on est d'accord avec l'interprétation qu'en fait la Commission de la construction du Québec. Ce n'est pas des heures de plus qu'on va donner aux travailleurs de l'industrie de la construction, c'est une clause à interprétation. J'ai parlé au ministère du Travail pour savoir: le mot «distributeur» veut dire quoi? Bien, là, on m'a donné comme information: Bien, ça, c'est une zone grise. Bien, avant de me prononcer pour ou contre, j'aimerais bien que la zone grise devienne blanche, à savoir si, effectivement, on est en train de nous changer, à un moment donné, une souris pour un éléphant. Il se passe quoi dans le champ d'application?

Quant à nous, le champ d'application de la loi doit couvrir l'industrie de la construction. On est des bâtisseurs de l'industrie de la construction. Nos travailleurs de l'industrie de la construction ont besoin de travailler et, effectivement, je pense que les recommandations qui découlent de la commission Cliche ou du rapport Picard-Sexton et ainsi de suite n'ont jamais été retenues. L'industrie de la construction est peut-être l'industrie la plus mal connue. Je pense qu'on devrait s'efforcer de faire connaître l'industrie de la construction.

En ce qui concerne la position de l'International, évidemment, on l'a toujours mentionné, on est d'accord avec l'abolition du règlement de placement des travailleurs de l'industrie de la construction, mais il faut aussi comprendre qu'on veut accorder une priorité régionale aux travailleurs québécois, chacun dans une région, et, par la suite, les travailleurs des autres régions pourront venir travailler au Québec. Actuellement, tel que libellé, le règlement de placement empêche les travailleurs d'une région à l'autre. Donc, on est pour la mobilité de la main-d'oeuvre à travers le Canada et l'Amérique du Nord, de par nos structures, tout en respectant le travailleur au Québec avec ses cartes de compétence ou de qualification de la Commission de la construction du Québec. Donc, ce sont des éléments...

On aurait aimé que le gouvernement donne des pouvoirs à la Commission de la construction du Québec. Il serait peut-être bon que la commission parlementaire soit informée qu'en 1992 il y a eu 41 500 constats d'infraction par la CCQ concernant les violations des lois ou règlements dans l'industrie de la construction. Le

gouvernement du québec est même celui qui donne te plus mauvais exemple. souvent, il ne respecte même pas le décret de l'industrie de la construction. h y a tout le problème de la sous-traitance. on prend un contrat, on le donne en sous-traitance à un autre et l'autre le donne encore en sous-traitance et, à un moment donné, il y a quelqu'un qui fait de l'argent avec ça. mais on s'en prend aux travailleurs de l'industrie de la construction, c'est toujours la faute des travailleurs de la construction. on ne parle pas qu'il y a eu une augmentation du bois de 4000 $; ça, on oublie d'en parler. la spéculation sur les terrains, ça on n'en parle pas; juste quand c'est un scandale, à part ça, on ne veut pas en parler.

Le Président (M. Joly): Je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

M. Pouliot (Maurice): J'en aurais beaucoup à conclure...

Le Président (M. Joly): Oui, j'imagine, d'ailleurs on va vous donner l'occasion d'échanger avec les parlementaires. C'est pourquoi je vais reconnaître M. le ministre.

M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Pouliot (Maurice): Pourtant, j'étais bien parti.

Le Président (M. Joly): Vous allez reprendre.

M. Cherry: Oui. Merci, M. le Président. Première question. Vous êtes un des membres qui siégez au conseil d'administration de la CCQ. Ça a été soulevé ce matin, à partir de données qui nous ont été fournies par la Commission de la construction. Lorsqu'ils sont passés, ils ont soutenu que, effectivement, les chiffres qu'on avait avancés étaient vraiment ceux qu'ils nous ont fournis, qui ont été maintenus.

En l'espace de quoi, 18, 20 mois, vous êtes passés à la situation actuelle, à laquelle vous avez référée. Vous avez dit: On vient de corriger ça lors de l'assemblée du mois de septembre. C'était un déficit de quoi, 32 000 000 $? Des gens disent 32 000 000 $, d'autres 36 000 000 $.

M. Pouliot (Maurice): De 34 000 000 $. C'est 34 600 000 $.

M. Cherry: C'est 34 600 000 $. Et ça, là, c'est dans quelle période de temps qu'on est arrivé à ça?

M. Pouliot (Maurice): C'est dans une période de deux ans qu'on est arrivés à ça.

M. Cherry: Deux ans. M. Pouiiot (Maurice): Oui.

M. Cherry: O. K. Vous avez décrit la situation, vous avez dit: Ça, c'est à cause des parasites. J'aimerais ça que vous nous décriviez comment ça fonctionne pour arriver à des parasites là-dedans.

M. Pouiiot (Maurice): Les parasites, ce sont, dans bien des cas, les entrepreneurs autonomes qui, sur une base volontaire, peuvent participer au régime d'avantages sociaux de l'industrie de la construction. Et, ça, c'était prévu, effectivement, par la loi. Lorsqu'on a un minimum d'heures, bien, avec 300 heures, on peut contribuer à une cotisation volontaire qui est de 100 $ pour six mois. C'est eux autres qui ont le crayon, donc, ils mettent le minimum et, évidemment, souvent, ils collectent le maximum. Donc, ce sont eux qui ont exploité le système au super maximum et les chiffres de la Commission de la construction du Québec sont très révélateurs sur le régime d'assurance.

Évidemment, il faut faire une différence entre le régime d'assurance et le régime de retraite. Ce matin, vous avez parlé, M. le ministre, du régime de retraite. C'est évident que, si le travailleur quitte, il est déréglementé, il peut s'en aller avec sa part après deux ans. Ça, c'est un bout de la réponse. Peut-être que, l'autre partie, vous ne l'avez pas donnée; elle serait peut-être bonne à dire. L'argent que le patron a payé dans le régime de retraite, si le travailleur quitte, l'argent demeure dans le fonds pour ceux qui vont demeurer dans le secteur réglementé. C'est le règlement, si le travailleur n'a pas 7000 heures ou plus enregistrées à la Commission de la construction du Québec. Donc, c'est une grosse différence avec ce qui a été mentionné. (21 h 30) effectivement, pour répondre à votre première question, une des causes du déficit, encore une fois, qui a été réglé... et ce n'est pas 60 000 000 $, comme le mentionne... je pense que l'apchq devrait faire corriger ses textes, parce que cette page-là est toute croche et c'est donner de la fausse information. c'est une des causes et, évidemment, les autres que je vous ai mentionnées: la baisse d'heures dans l'industrie de la construction, que les travailleurs sont souvent forcés de travailler au noir, et on ne s'en cache pas et on le sait. ils n'ont pas le choix. ils sont obligés de travailler au noir ou bien ils prennent la porte. et, ça, c'est aussi dans un fort pourcentage. et les travailleurs, aujourd'hui, souvent on en retrouve... il y a un minimum de 50 % de nos travailleurs qui sont en chômage; ils n'ont pas bien, bien le choix. si un travailleur de la construction a du chômage, il est chanceux. la grosse majorité, ils sont rendus sur le bien-être social. et c'est ça qu'il faut, à un moment donné, expliquer. puis ce n'est pas en déréglementant qu'on va repartir, qu'on va relancer l'industrie de la construction, c'est archifaux en ce qui nous concerne.

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: J'ai fait un commentaire ce matin, puis j'aimerais le refaire devant vous. Je sais que vous allez me donner une réponse à ça. La situation fait, avec la sorte de réglementation, que, pour pouvoir se qualifier pour avoir accès aux avantages sociaux, à l'excellente couverture, vous me permettrez de dire, qui est offerte aux travailleurs de la construction qui réussissent à se qualifier, le résultat fait que, par exemple, vous avez 50 % des gens, ou à peu près, dans le secteur résidentiel qui ont contribué et leur part et celle de l'employeur. Mais parce qu'ils n'ont pas fait 500 ou 600 heures, là, ils n'ont accès à aucune forme de couverture.

Par contre, ceux qui ont fait plus d'heures, ceux-là ont accès à l'ensemble de la qualité des avantages et des services. Comme la nature de votre industrie en est une qui est cyclique, avec des hauts puis des bas, vous ne pensez pas que — en tout cas, je vous soulève ça, là, à cause de ce que j'ai fait auparavant — vous ne pensez pas que, dans un premier temps, pour assurer un minimum de couverture à un plus large pourcentage, on n'aurait pas pu l'aborder de cette façon-là? Est-ce que c'a déjà été pensé dans le passé? C'est quelque chose qui est envisageable pour l'avenir?

M. Pouliot (Maurice): C'est sûrement envisageable, M. le ministre. Premièrement, le régime d'assurance est payé en totalité par l'employeur. C'est 0,70 $ de l'heure qui est payé par l'employeur. Donc, le travailleur paie pour le régime de retraite, puis, l'autre partie, c'est l'employeur. Et c'est sûrement... Mais c'est très récent, et on aurait espéré que, lors des négociations qu'on devait avoir cette année, ça aurait pu être réglé, le déficit, par un 0,20 $ ou un 0,25 $ de l'heure, ce qui n'a pas été, malheureusement, le cas.

Mais, lorsqu'on a vu la situation s'aggraver de cette façon-là, les actuaires de la Commission de la construction du Québec nous ont recommandé, en vertu des articles 8 et 14 — on n'avait pas le choix — de modifier le règlement no 14 et, effectivement, d'amener certaines coupures, parce que, le régime, il a eu des coupures. Les médicaments de tablettes qu'on pouvait obtenir, bon, ça, c'a été enlevé. La cotisation volontaire a aussi été augmentée et le nombre d'heures pour être eligible, ça... les barèmes ont tous changé.

Donc, le problème a été corrigé. Donc, il est faux de prétendre ce qu'a écrit, en blanc et noir, là, l'APCHQ dans les journaux, ce matin. C'est archifaux.

M. Cherry: O.K. Et est-ce que je dois comprendre que, lors de votre dernière intervention en commission parlementaire, lors de la dernière prolongation, quand vous m'invitiez à m'assurer que, dans une prolongation éventuelle du décret — on est au mois de juin — je m'assure d'ajouter des sommes d'argent additionnelles pour couvrir le déficit auquel vous avez dû faire face et pour lequel vous avez dû prendre les dispositions auxquelles vous venez de référer... Si ce geste-là avait été posé... En d'autres mots, si j'avais dit aux employeurs: Je prolonge de six mois, mais, en même temps, là, mettez donc 0,25 $ ou 0,30 $ de l'heure là-dedans ou 0,35 $, à ce moment-là, vous n'auriez pas eu à être obligés de prendre les décisions que vous avez prises là, puis ça aurait continué bien beau, bien bon, jusqu'à temps qu'on arrive à une prochaine négociation. Celle pour laquelle, «by the way», il n'y en a pas eu de négociations dans les six derniers mois.

M. Pouliot (Maurice): Vous avez, M. le ministre, entièrement raison; c'était ça. Si on ne pouvait pas s'entendre... On vous a demandé, si vous imposez le décret, de régler le problème des avantages sociaux. Et on n'avait pas besoin de l'APCHQ pour nous dire ça. On était conscients de ça, ceux qui négociaient ou tentaient de négocier le renouvellement de notre convention collective.

M. Cherry: Merci.

Le Président (M. Joly): Merci. Mme la députée de Kamouraska-Témiscamingue, s'il vous plaît.

Mme Dionne: Témiscouata, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Témiscouata. Excusez. Je m'excuse, madame. À cette heure-ci, j'espère que vous me pardonnez.

Mme Dionne: C'est à l'autre bout complètement du Québec.

Le Président (M. Joly): Oui, oui.

Mme Dionne: C'est pour ça que je trouve ça grand comme comté, là.

Le Président (M. Joly): D'ailleurs, j'ai un grand coeur, comme vous voyez.

Mme Dionne: C'est ça. M. le Président, j'aurais quelques questions à poser à nos invités. On a parlé des avantages sociaux tout à l'heure. J'ai écouté le commentaire qui disait: C'est un peu cocasse qu'on parle que nous... on pose des questions sur les avantages sociaux. Et, moi, j'aimerais dire que, s'il y a une question qui a été posée par les travailleurs que j'ai rencontrés dans mon comté, c'est effectivement, là, ce qu'ils ont accumulé, leur fonds de pension, ces choses-là. Donc, c'est important que, nous, en tant que parlementaires, on en discute, de ce dossier-là, qui est, je pense, le nerf de la guerre. C'est de l'argent qu'ils ont ramassé eux-mêmes en travaillant, je pense, assez dur, merci.

Alors, moi, je voudrais savoir... Il y avait déjà eu des ententes particulières à la CCQ qui avaient été amenées pour tenir compte d'un secteur déréglementé, soit la rénovation. Je sais que ça n'a pas été utilisé tant que ça, mais, quand, tout à l'heure, M. Pouliot, vous avez parlé des entrepreneurs autonomes — et vous les avez appelés, entre guillemets, des parasites — est-ce qu'il n'aurait pas

pu y avoir des ententes particulières pour, justement, tenir compte de ces entrepreneurs-là autonomes, pour ce qui est des avantages sociaux, qui auraient peut-être évité d'avoir des trous que vous avez connus dans le fonds? De un. Deuxièmement, est-ce que c'est possible que, pour le secteur résidentiel, advenant une déréglementation comme on a dans le projet de loi, des ententes particulières interviennent et qu'on le fasse à la CCQ?

Le Président (M. Joly): M. Pouliot, s'il vous plaît.

M. Pouliot (Maurice): Effectivement, pour répondre à votre question, oui, c'est possible. C'est même prévu dans le règlement de la Commission de la construction du Québec. Lorsqu'une personne quitte l'industrie de la construction, qu'elle a un droit acquis, elle peut continuer, sur une base volontaire, d'enregistrer des heures pour le régime de retraite et le régime d'assurance. Bon, ça, c'est possible, et on l'a. Mais le problème qu'on avait à la Commission de la construction du Québec, c'est lorsque, je vous l'ai expliqué, celui qui a le crayon marquait le nombre d'heures minimum puis il collectait le maximum. Et, ça, on ne pouvait pas empêcher ça parce que c'est à l'intérieur de la loi qu'on obligeait la Commission de la construction du Québec à accepter ces montants d'argent là. J'avais mentionné à ce moment-là qu'on devrait créer un petit fonds pour les artisans puis les entrepreneurs autonomes, qu'ils aient leur petit régime tout seuls... Je n'avais pas d'objection, puis je n'ai encore pas d'objection à ça. S'ils en veulent un, un petit régime, ils peuvent en avoir un; puis, s'ils veulent envoyer leur argent à la Caisse de dépôt sur une base volontaire ou obligatoire, ils le feront. Mais ils n'ont pas d'affaire dans le régime des travailleurs de l'industrie de la construction. Mais, pour les travailleurs de l'industrie de la construction, ça se fait, c'est prévu, avec un maximum d'heures de 60 heures, que peuvent rentrer les travailleurs de l'industrie de la construction. Il faut bien comprendre, si vous déréglementez 85 % de l'industrie de la construction dans le résidentiel, qu'il faut payer 2,55 $ de l'heure... Et, si le travailleur tombe sur le salaire minimum, qui est 5,85 $, il ne lui restera plus grand argent pour vivre à toutes les semaines, parce qu'il va avoir 2,55 $ qui s'en vont là, il va lui rester 3 $ et quelques, à peu près 140 $; c'est moins que l'assu-rance-chômage. Donc, il faut comprendre ça aussi.

Mme Dionne: O.K.

M. Pouliot (Maurice): Je comprends, vous pouvez nous dire qu'on charrie avec le salaire minimum, mais c'est ce qui va arriver si vous déréglementez le secteur résidentiel.

Mme Dionne: O.K. De toute façon, non, mon point, c'était de dire: Ça existe déjà et ça peut être un régime particulier. C'est prévu dans les règlements à la CCQ pour le moment.

M. Pouliot (Maurice): Ce n'est pas un régime particulier, je m'excuse.

Mme Dionne: Ou une entente particulière, ce sont les termes.

M. Pouliot (Maurice): C'est le même régime pour l'ensemble des travailleurs et des travailleuses de l'industrie de la construction qui ont un droit acquis. Ils peuvent contribuer sur une base pour des gens qui sont déréglementés ou qui travaillent sur des accréditations en vertu du Code du travail. Ça existe actuellement.

Mme Dionne: O.K. D'accord. Mon autre question, M. le Président. Tout à l'heure ou un peu plus tôt aujourd'hui, on a parlé — et je pense que c'est l'AECQ qui a amené cette idée — en parlant de médiation... Parce qu'on sait que le processus de négociation, en tout cas, d'après ce que j'ai vu depuis huit ans, il n'est pas toujours facile. On parlait de médiation, et l'AECQ avait apporté l'idée d'avoir un conseil de médiation, et, l'idée que j'en retenais, c'était de dire qu'il y aurait des votes. Alors, les travailleurs autant que les entrepreneurs, tous ceux qui sont inscrits, pourraient voter. Alors, moi, j'ai trouvé ça assez intéressant parce que, au niveau de la démocratie, c'est ce qu'il y a de plus pur, d'aller jusqu'à la base, tant des entrepreneurs que des syndiqués. Est-ce que c'est une idée qui vous plaît?

M. Pouliot (Maurice): Non. Je pense que, la démocratie, c'est 50 % plus un.

Mme Dionne: Du vote. Le droit de vote.

M. Pouliot (Maurice): Le droit de vote, c'est ça. Pour former le gouvernement du Québec, ça prend la majorité des députés, qui est 50 % plus un. Et, quant à nous, c'est la position qu'on défend.

Mme Dionne: Mais, moi, j'ai dit: C'est d'avoir le droit de voter et non le 50 % plus un; je pense que toute le monde s'entend là-dessus, pour la majorité. Là-dessus, donc, vous n'êtes pas d'accord avec le droit de vote sur une convention quelconque qui pourrait être amené à tous les travailleurs ou tous les entrepreneurs parties prenantes d'un secteur.

M. Pouliot (Maurice): Non. Au niveau des unions ou des syndicats, c'est la majorité en ce qui nous concerne. Et, si on veut être seuls à négocier la convention collective dans un secteur donné, il faut qu'on ait une majorité, qui est 50 %. Et c'est ça, la démocratie, en ce qui nous concerne. (21 h 40)

Mme Dionne: Sur l'industriel. Je pense que l'International est un des syndicats, je pense, ou le syndicat le plus impliqué au niveau de l'industriel d'après

ce que j'ai pu comprendre. Et, tout à l'heure, le Conseil du patronat est arrivé puis a présenté ses réserves quant à avoir un secteur industriel tel que défini dans la loi 142, O.K.? Alors, qu'est-ce que vous en pensez de ce qu'ils ont dit, que vous êtes déjà dans le secteur industriel, de toute façon, sans être là de façon officielle, sans que ce soit encadré comme c'est là, et de la façon dont ils parlent, de dire: Bon, c'est comme ça déjà, pourquoi le spécifier?

M. Pouliot (Maurice): Ce n'est pas comme ça déjà. Actuellement, il y a un décret provincial qui s'applique pour l'ensemble des 18 000 employeurs puis des quelque 120 000 travailleurs de l'industrie de la construction. À l'intérieur, il peut y avoir des clauses qui ont un aspect, comme ça existe depuis 1982, des clauses particulières dans le résidentiel et le huit logements et moins, et ainsi de suite, mais on ne partage pas, d'aucune façon, l'idée du Conseil du patronat et, quant à nous, je l'ai mentionné, le texte du Sommet n'est pas ce qu'on retrouve dans la loi, et, avec une négociation par secteur, on pense qu'il pourrait y avoir des ententes qui pourraient être signées. Et on pense que l'échec lamentable de la loi 290... Et on n'a pas changé d'idée: elle est malade. Il faut, à un moment donné, qu'il y ait des choses, mais ne pas arriver avec l'article 1 de la loi, de désassujettir le résidentiel sur le prix de dire qu'on va vous donner un petit nanane. À ça, on dit au ministre: Non.

Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Salaberry-Soulanges. S'il vous plaît, M. le député.

M. Marcil: M. Pouliot, dans le projet de loi comme tel, il y a quand même trois éléments fondamentaux. D'abord, il y a le nouveau régime de négociation qui rejoint, en partie, le document, je pense, que vous aviez déposé au ministre Cherry, en compagnie de i'APCHQ de même que... où on définissait quatre secteurs, et puis il y avait peut-être juste la date du renouvellement des conventions pour laquelle vous n'êtes pas nécessairement d'accord. Il y a la mobilité des salariés et des entrepreneurs. Vous avez dit également qu'au niveau de la mobilité vous étiez capable de faire un bon bout de chemin et, concernant aussi l'allégeance syndicale, lorsqu'on parle de l'International, on n'est pas limité uniquement sur un territoire; vous êtes quasiment ouverts à l'Amérique du Nord. Et on parle de déréglementation du secteur résidentiel, et, là, je voudrais revenir au mois de juin 1993, en commission parlementaire. Et, nous aussi, nous vous avions posé la question, et je pense que c'est M. Dufour, à l'époque, excusez, le député de Jonquière, qui avait posé la question vous demandant... Bon, on parlait du Sommet, puis vous avez répondu, à ce moment-là: Quant à moi, tout peut être remis en question dans le secteur de la construction. Et, si on parle de déréglementation, quant à nous, si on veut déréglementer, on peut tout déréglementer et on va revenir sur le Code du travail avec une formule d'accréditation. Ça, on est ouvert à ça.

Ça, ce sont vos commentaires, et je voudrais savoir, quand vous parlez qu'on peut tout déréglementer, revenir au Code du travail et fonctionner par accréditation, qu'est-ce que vous vouliez signifier, à ce moment-là?

Le Président (M. Joly): M. Pouliot.

M. Pouliot (Maurice): Bien, c'est de revenir à l'ancienne formule, avant la loi 290, revenir avec les formules de décret de conventions collectives, telles qu'elles existaient. Donc, ce sont les accréditations par employeur avec une convention collective, puis il pourrait y avoir des décrets régionaux, et c'est une déréglementation complète dans l'industrie de la construction. Ce que les gouvernements sont en train de faire, qui nous a enlevé une partie de notre travail en disant qu'on va déréglementer des travaux d'entretien, de réparation et de rénovation, puis on a rajouté, aussi, des travaux mineurs... Bien, là, on essaie de savoir c'est quoi la définition de travaux mineurs, puis je vous dis que les gens, tant le commissaire de la construction, la Commission de la construction du Québec, ils ont des problèmes à nous dire c'est quoi travaux mineurs. Pour la compagnie Kruger, peut-être que, travaux mineurs, ça peut être 1 000 000 $; peut-être que, pour M. Marcil, travaux mineurs, c'est peut-être 1000 $. Donc, c'est très difficile d'application. Mais, si on est en train de tout vouloir laisser échapper le secteur de l'industrie de la construction avec les autonomes, avec ce qu'on a déjà déréglementé, puis qu'on nous arrive avec le huit logements et moins, bien, il va rester quoi, dans l'industrie? Puis la machinerie de production, qu'on nous dit: Bien, ça, ce ne sont pas les travailleurs de l'industrie de la construction. Moi, j'aimerais que le ministre ou le sous-ministre me dise c'est quoi les travaux de l'industrie de la construction, c'est quoi le gâteau qui nous reste, effectivement, à partager, pour les 120 000 travailleurs de l'industrie de la construction?

M. Marcil: O.K., mais je vais vous poser une question...

Le Président (M. Joly): Une bien courte question, M. le député, s'il vous plaît.

M. Marcil: ...la dernière, puis bien précise. Dans le domaine manufacturier, il se négocie des conventions collectives par secteur, et, à l'intérieur de la convention collective, on détermine, en plus des tarifs horaires, les avantages sociaux, les fonds de pension. C'est négocié à l'intérieur d'une convention collective. Est-ce que, dans la proposition qui est avancée par le projet de loi 142, lorsqu'on parle de déréglementer le secteur résidentiel à huit logements exclusifs et moins, est-ce qu'il est possible pour des unités syndicales ou des centrales syndicales de négocier des conventions

collectives dans le secteur résidentiel dans lesquelles on pourrait retrouver également tous ces avantages sociaux là? Est-ce que c'est possible d'après vous?

Le Président (M. Joly): M. Pouliot, s'il vous plaît.

M. Pouliot (Maurice): Sûrement, M. le Président. Si on me demande si c'est possible, oui, c'est possible. Mais on sait que 85 % des entrepreneurs ont, à un moment donné, moins que cinq employés. Et je l'ai mentionné, le président de l'APCHQ a un employé. Je ne sais si on pourrait syndiquer sa compagnie. Mais on pourrait aller accréditer les compagnies une par une et on sait que ça va faire beaucoup de conventions collectives. Mais, pour répondre à votre question, oui, on pourrait aller chercher les accréditations, et c'est effectivement ce qui va arriver. Il n'y en aura pas quatre conventions collectives; il va y en avoir peut-être 195. Il y a peut-être des entrepreneurs en construction, des petits, qui vont être obligés de fermer parce qu'on va leur négocier la convention collective lorsqu'on va avoir eu l'accréditation qu'on veut. Puis elle peut être supérieure à ce qu'il y en a qui pensent.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. Pouliot. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Jonquière, s'il vous plaît.

M. Dufour: Oui. Au sommet de la construction, on avait émis certains doutes au mois de juin lorsque le ministre nous avait conviés à ce grand rendez-vous historique. Il semblerait que, selon certains intervenants, c'était un pas dans la bonne direction. Pour vous autres, qui avez été partie prenante de ce projet du ministre et le projet de loi, c'est quoi votre opinion, votre impression par rapport à tout ça? Est-ce qu'il est arrivé des choses que vous ne pouvez pas contrôler? Est-ce qu'on a floppé ce grand sommet là? C'est quoi, votre impression?

M. Pouliot (Maurice): Je pense qu'on a floppé ce grand sommet là, d'autant plus que, le peu de consensus, je l'ai expliqué au début, on ne le retrouve pas dans le projet de loi 142. On est en train de discuter. Moi, j'appelle ça le sommet de 500 000 $ parce qu'il y avait tellement de monde là-dedans puis peu de consensus, puis on se retrouve je ne sais pas trop où.

Il faudrait remarquer que, lorsqu'il y a eu deux commissions parlementaires, la position du Conseil provincial a été de demander au ministre du Travail de laisser le vide juridique, de laisser le rapport de force s'exercer, et c'est encore ce qu'on lui demande. Effectivement, on n'a pas changé d'idée. Il y en a qui accusent du monde de changer d'idée, mais le ministre a décidé de prolonger deux fois le décret. Ça a été la décision du gouvernement. On était contre et on est encore contre.

M. Dufour: Vous avez... Puis, là, le monde parle un peu puis beaucoup du travail au noir. Qu'est-ce que vous proposez, vous autres, pour contrer ce phénomène-là? On n'a pas, dans le projet de loi... À ce que je sache, il n'y a rien qui est très fort là-dessus. Mais, vous autres, avez-vous une proposition quelconque?

M. Pouliot (Maurice): On a beaucoup de propositions, entre autres, celle que le ministère du Revenu... La suggestion de M. Parizeau, ce matin, c'est une très bonne suggestion. D'ailleurs, ça fait partie d'un consensus du Sommet, que le ministère du Revenu puisse surveiller ça de très près. Aussi que les permis de construction, lorsqu'une municipalité donne un permis pour construire, que l'information soit transmise automatiquement à la Régie du bâtiment du Québec ou à la Commission de la construction du Québec. Et, ça, ça faisait partie des discussions lors de l'adoption du projet de loi 119 par M. Paradis en décembre 1986. Et, ça, on ne retrouve pas ça. On dit: II peut y avoir des ententes. Donc, il faudrait que ce soit par la législation qu'on force les municipalités à donner l'information.

Et, là, les inspecteurs de la Commission de la construction du Québec, évidemment, il faudra leur donner réellement des pouvoirs parce que là, comme l'a mentionné le président ce matin, ils n'ont pas les pouvoirs qu'ils devraient avoir, la Commission de la construction du Québec. Et il y a beaucoup de choses qu'on a. Les crédits d'impôt, on pourrait inciter des gens à rapporter des heures à la Commission de la construction du Québec. Et, ça, ça fait partie du peu de consensus qui est survenu au Sommet de la construction. Mais on ne les retrouve pas, effectivement, dans le projet de loi. (21 h 50)

Donc, évidemment, il y a un paquet de choses: les amendes devraient être augmentées; la perte de licence; puis il devrait y avoir des contacts entre la Régie du bâtiment et la Commission de la construction du Québec. Et les projets de loi 185 et 186, tel que l'a mentionné le ministre... Évidemment, on mentionne que, 142, c'est le suivi de ça. Mais il y a beaucoup d'articles à l'intérieur de la loi 186 qui ne sont pas encore en application. Ils sont en train de regarder ça, le conseil d'administration de la RBQ.

M. Dufour: Vous parliez tout à l'heure que, pour contrer le travail au noir, vous aviez des gens... Oui? Vous vouliez répondre, madame? Excusez.

Mme Legault (Francine): Francine Legault. Le Président (M. Joly): Mme Legault.

Mme Legault (Francine): Je voulais juste ajouter une précision. Lors du Sommet, il y a eu huit propositions concernant le travail au noir qui ont été adoptées. C'étaient différentes mesures qui visaient à le contrôler et on n'en retrouve aucune à l'intérieur du projet de loi 142.

Le Président (M. Joly): Merci, madame.

M. Dufour: Merci. Vous parlez des inspecteurs, puis il y a un certain contrôle que... M. Parizeau a soulevé certaines questions intéressantes par rapport au travail au noir, mais il y a la question des inspecteurs à la CCQ, et vous en faites partie, de la Commission de la construction du Québec. Ils nous ont parlé des inspecteurs et ce qu'ils faisaient sur le chantier: ils prenaient des noms, etc. Ça arrive des fois que les plaintes ne sont pas bonnes. Les inspecteurs, qu'est-ce qu'ils font avec ça? Ils font juste cueillir des données? Mais, si on ne les applique pas, ça fait quoi?

M. Pouliot (Maurice): Non. Le travail de l'inspecteur de la Commission de la construction du Québec est à deux volets: premièrement, les inspecteurs vont vérifier des livres sur les compagnies, donc, avec l'inspection qu'a mentionnée le président ce matin, et on va aussi vérifier sur les chantiers. Souvent, la Commission va sur les chantiers de construction sur plainte, parce qu'ils ne savent pas qu'il y a un chantier de construction à telle et telle place. Donc, avec l'information que pourraient donner les municipalités sur les permis de construction, ça leur donnerait une bonne indication. Et, si ça s'avère que la plainte est non fondée, bien, ça finit là, la plainte est non fondée. La CCQ n'est pas là pour empêcher les gens de travailler, c'est là pour faire respecter les lois et règlements du Québec. Donc, c'est leur mandat principal qu'ils ont à faire. Donc, c'est de la façon... Mais, la loi telle que rédigée, il faut que les inspecteurs de la Commission de la construction du Québec prennent sur le fait les travailleurs à travailler dans un métier où ils n'ont pas de carte de compétence ou qu'ils n'ont pas le bon taux de salaire. Et on sait qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs qui ont deux sets ou trois sets de livres. Ça existe, ça.

Vous savez, quand ils voient l'inspecteur de la Commission, ils sortent le... Tout est bien beau. Mais l'autre livre est caché, puis souvent il y en a qui se font prendre. D'ailleurs, les chiffres que je vous ai mentionnés... Et la Commission, parmi les 200 inspecteurs au niveau de la province de Québec, ils ont tout de même eu 41 000 infractions qu'ils ont constatées.

M. Dufour: Mais je pense qu'à chaque fois qu'on questionne des témoins on est toujours pris un peu avec le temps, on fait juste effleurer. Moi, ça fait la troisième commission parlementaire sur le travail, la troisième où on ne peut pas aller au fond des choses. En fait, on vit avec ça, mais je ne continuerai pas à en poser, je sais qu'il y a des collègues qui veulent le faire, mais il y a une question qui m'intéresse et que je voudrais vous poser: Vous avez parlé de la mobilité de la main-d'oeuvre. Vous semblez être indifférents ou vous êtes favorables plutôt que défavorables vis-à-vis de la mobilité de la main-d'oeuvre? Je pense qu'il y a des collègues, en tout cas, au point de vue du travail, qui ne partagent pas nécessairement la même opinion. Moi, je pense qu'à chaque fois qu'un groupe... Quand l'AECQ nous présente une position et que tous ses intervenants s'en vont sur le terrain, vous ne facilitez pas le travail du législateur. Là, vous nous dites: Nous autres, ça nous laisse indifférents ou ça ferait notre affaire, puis les autres sont un peu un problème. C'est quoi votre position par rapport à la mobilité de la main-d'oeuvre? Je comprends que c'est plus facile pour vous autres de vivre avec ça que d'autres. Mais, au point de vue de la solidarité, là, comment vous pouvez vivre avec ça sans que vous ne voyiez certains problèmes ou que vous en indiquiez?

M. Pouliot (Maurice): Je pense, M. le Président, qu'il y a beaucoup de problèmes, puis on n'est pas indifférents, loin de là. On a une structure différente, on est une union internationale, une union comme les appellent les Américains. Mais il reste que les travailleurs québécois, quant à nous, doivent avoir une priorité chez eux. Ce qui ne doit pas empêcher les autres d'aller travailler. Et, au Sommet, on avait eu un consensus, là. Bon. Et on devait s'entendre à l'intérieur des conventions collectives... Jusqu'au 30 mars pour s'entendre. Et, ça, le Conseil provincial a donné son accord là-dessus lors du Sommet. Et ça fait l'objet, je pense, d'un consensus de dire: On va régler le problème de la mobilité de la main-d'oeuvre. Et c'est encore notre position.

Le Président (M. Joly): Je vais reconnaître M. le député de Joliette pour cinq minutes, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Moi, je voudrais faire un commentaire au départ sur la syndicali-sation par accréditation. Tout le monde dit: Bien, ils en ont une, possibilité. Mais il faut savoir comment ça marche, ça, puis comment c'est rentré dans la culture québécoise, cette histoire-là, au niveau des relations de travail. Aller syndiquer des chantiers par accréditation, vous savez très bien que, par rapport aux autres qui ne seront pas accrédités, c'est une concurrence tout à fait désordonnée. L'individu qui va être syndiqué et qu'il sera obligé de payer 25 $, 30 $ de l'heure, je ne sais pas, à cause... Et puis imaginez-vous l'autre qui ne le sera pas, à côté. Comment voulez-vous que l'autre vive longtemps? C'est pour ça qu'au Québec on en est arrivé à avoir des décrets tenant lieu de conventions collectives pour des secteurs industriels, pour des secteurs complets, pour qu'il n'y ait pas de concurrence déloyale entre individus. Ça fait partie de notre culture, ça, en relations de travail.

Ce qu'on fait présentement, c'est qu'on brise complètement ça. On dit: Demain matin, le secteur résidentiel, il ne sera plus syndiqué en vertu du décret ou d'une loi spécifique des relations de travail dans l'industrie de la construction, il le sera en vertu du Code du travail. Quand on a dit ça, on vient de recréer exactement ce que l'on a combattu dans ce secteur-là spécifiquement parce qu'il y a trois, quatre, cinq employés — difficilement syndicables dans bien des cas

parce que l'employeur travaille avec eux, même — alors que, celui qui en aura 25, 30, lui, sera syndicable. Et vous verrez les soumissions après.

Ceux qui se plaignent, là... Moi, je suis sûr qu'il y a des travailleurs, il y a des employeurs que ça ne fera pas un an qu'ils auront la syndicalisation par unité d'accréditation qu'ils vont venir nous supplier de revenir à un mode de relations de travail qui enlève cette concurrence disproportionnée. Voyons! C'est le gros bon sens, ça! Je me demande comment ça se fait qu'un ex-leader syndical, d'ailleurs, ne pense pas à ça. Franchement, là, ça me dépasse! Et, ça, je suis sûr de ça. Ce n'est pas une question de même discours, c'est une question de pragmatisme dans la vie. Quelqu'un qui vit sur le terrain, là, et qui sait comment ça marche, les relations de travail en vertu du Code du travail et qui connaît le domaine de la construction un tout petit peu, il sait bien qu'on s'en va vers un cul-de-sac dans cette affaire-là. Et les mêmes personnes qui vont vous applaudir, M. le ministre, aujourd'hui, sont celles qui vous supplieront à genou de redéfaire ce que vous voulez faire, parce que ce sera une concurrence complètement déloyale, en plus d'avoir fait perdre des avantages extraordinaires à une multitude de travailleurs.

C'est pour ça qu'on est contre le projet de loi, nous. C'est clair. C'est le gros bon sens, la pratique, le vécu dans ce secteur-là qui nous force, comme formation politique, à être contre, puis tous contre à part de ça. Il n'y a pas de gêne. Il y en a qui nous demandaient: Mais qu'est-ce que vous proposez? On propose, dans le filon que je donnais cet après-midi, un tronc commun, des tables sectorielles puis un temps, un délai pour que le monde s'assoie et se parle. Je suis convaincu que c'est là qu'on arriverait à quelque chose de positif. Si les employeurs avaient la conviction que le ministre sait exactement où il s'en va puis qu'il veut une structure ordonnée, puis qu'il veut des sous-tables qui traitent des secteurs spécifiques pour régler les problèmes particuliers, je suis persuadé, moi, qu'ils ne se fieraient plus sur le ministre pour qu'il en accorde plus qu'il en demande à certains secteurs. Je suis convaincu de ça. Puis, si les syndicats savaient que le ministre, par exemple, il a une volonté de pluralisme syndical, qu'il a une volonté de ci, de ça puis qu'il disait: C'est dans ce chemin-là et dans ce canal-là que vous vous acheminez, il y aurait beaucoup moins de discussions. Mais, tant et aussi longtemps qu'on va laisser percevoir ces choses-là, qui, à mon point de vue, vont déboucher sur des confrontations inutiles... Prenez l'employeur qui sera déréglementé, puis qui dira à ses employés: Moi, chez nous, si tu veux rester ici, c'est déréglementé; tu n'as plus de fonds de pension, je ne t'en paie plus; tu n'as plus d'assurances, je ne t'en paie plus; tu vas travailler à 8 $ l'heure parce que, moi, je ne marche plus, puis que, deux ans après, vous allez être obligés de rebrousser chemin, puis vous allez faire perdre des avantages extraordinaires... Analysez-le dans ce contexte-là, puis vous allez voir qu'il y a peut-être de l'importance à ce qu'on se ressaisisse un peu puis qu'on dise, là: C'est quoi, le gros sens pratique de ce secteur de travail qui est très névralgique? On ne peut pas syndiquer un chantier quand ça prend 500 heures: juste pour avoir l'accréditation, c'est 1500. Il va y avoir trois maisons de bâties, puis ça ne sera peut-être pas les mêmes. Ça ne marche pas de même; ce n'est pas une usine où tu rentres 24 heures par jour, puis que tu vas chercher du monde, puis que tu as le temps de l'accréditer, puis de faire venir un inspecteur, un commissaire-enquêteur et vérifier sur place. Vous le savez très bien, je peux bâtir une maison à Saint-Félix-de-Valois, moi, avec deux travailleurs, puis je vais aller à Saint-Paul en bâtir une autre avec deux autres travailleurs. Puis je peux en avoir une à Sainte-Mélanie avec deux autres travailleurs. Puis, au bout de 500 heures, c'est fini. Puis, quand il a su que la CSN ou la FTQ frayait auprès de ses deux de Saint-Paul, il ne les engage plus. (22 heures)

Voyons, c'est de même que ça va marcher. Vous le savez que c'est ça dans la vie courante. J'espère que vous n'êtes pas naïfs. Puis, moi, c'est ça, je trouve qu'on ne traite pas des vrais problèmes, dans le fond, depuis le début de la commission. C'est ça qu'il faut régler, ces choses-là. C'est le fondement même de votre projet de loi, M. le ministre.

Je m'excuse d'avoir pris du temps du conseil des métiers, mais je croyais important qu'on situe la position de l'Opposition officielle pour ne pas qu'on s'interroge où est-ce qu'on loge. On sait où est-ce qu'on loge et on le dit.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Joliette.

M. le député de Drummond, s'il vous plaît.

M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président. J'aimerais échanger avec vous, M. Pouliot, sur une problématique. La loi 142 telle qu'elle est là, réglerait le problème facilement, je crois, des 3000 artisans, parce que, là, on voit réapparaître les 3000 artisans dans le décor. En assumant que M. le ministre retire le projet de loi 142, quelle place faites-vous dans ce processus-là des 3000 artisans qui se sont regroupés?

M. Pouliot (Maurice): Les entrepreneurs autonomes existent en vertu du projet de loi 185, et leur champ d'activité est encore le même. C'est des milliards de dollars, ça, qui sont encore, qui ont un champ qui leur appartient en quasi-exclusivité. Et ça a été mentionné: le consommateur n'a absolument rien gagné. Ce qu'on a fait en déréglementant le secteur des travaux d'entretien, de rénovation et de modification, on a simplement légalisé l'illégalité et ces gens-là n'ont plus à se cacher. Ils ne rapportent plus une heure nulle part, ne paient pas d'impôt provincial, d'impôt fédéral. C'est ce qu'on a fait avec le projet de loi. Mais ils ont encore leur place au soleil, en ce qui nous concerne, les entrepreneurs autonomes. Si on retire le projet de loi 142, là, ils ne se trouvent pas, demain matin, sûr le BS, eux autres, là. Il

y a encore une marge de manoeuvre très, très large. Et ce qui a été mentionné, que les plombiers, que ce soient des travaux assujettis ou non, puis les électriciens, puis la majorité des métiers, on charge pareil le gros prix. Donc, celui qui s'est fait avoir dans cette législation-là, c'est le gouvernement, par le truchement de ses taxes. Et je pense que le ministère du Revenu devrait surveiller ça de plus près.

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): M. le député de Drummond, merci.

Alors, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: Alors, merci de votre présence, de votre contribution, et à la prochaine.

Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de cette commission, c'est mon tour de vous remercier.

Et, maintenant, je demanderais aux personnes représentant l'Association de la construction du Québec de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît, et prendre place.

La commission reprend ses travaux. Il me fait plaisir de vous accueillir à cette commission. M. Lafontaine, j'apprécierais si vous pouviez nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Association de la construction du Québec (ACQ)

M. Lafontaine (René): M. le Président, nous vous remercions de votre invitation. Je vous présente, à ma gauche, M. Richard Di Muro, Forages Sainte-Marie, vice-président; et, à ma droite, Me Jean Ratté, directeur des services juridiques à l'ACQ.

Le Président (M. Joly): Vous avez environ une vingtaine de minutes pour nous présenter votre mémoire et, par après, nous aurons l'occasion d'échanger avec vous.

M. Lafontaine (René): Merci, M. le Président. L'Association de la construction du Québec, au cours de la dernière semaine, a eu l'occasion de souligner la détermination et le courage du ministre du Travail. Avec les événements des derniers jours entourant le projet de loi 142, je crois qu'il est opportun de souligner à nouveau votre courage politique. Le projet de loi 142 a fait l'objet de nombreux reportages et de nombreuses manifestations sur un des éléments qui est la déréglementation du secteur résidentiel comprenant huit logements et moins.

L'intervention de l'ACQ à cette commission parlementaire embrassera l'ensemble des sujets visés par le projet de loi 142. Il faut se rendre à l'évidence, que cela fasse plaisir ou pas, l'industrie de la construction n'a plus les moyens de se payer le statu quo. Si nous pensons tous que l'industrie va bien, que la législation, la réglementation sont adéquates, que le régime de négociation favorise le règlement de conflits, si nous pensons tous que l'industrie de la construction est une industrie innovatrice, performante et qualitative, alors nous pouvons retirer le projet de loi 142... sauf, telle n'est pas la réalité.

Je voudrais ici, si vous me le permettez, rappeler quelques éléments de mon discours d'ouverture, lors des travaux du Sommet sur l'industrie de la construction. L'industrie de la construction croule sous le poids législatif, réglementaire ou bureaucratique qui lui est imposé. Notre industrie et ses conditions de travail s'éloignent dangereusement des normes de compétitivité, de productivité, de mobilité et de la capacité de payer de nos clients. Nos marchés se ferment. Notre champ d'activité se rétrécit continuellement, si bien qu'en 1991 le tiers des travaux de construction étaient réalisés par des entreprises non principalement engagées dans la construction. Et je n'ai pas parlé du travail au noir. nous vivons un taux catastrophiquement élevé d'analphabétisation. les chiffres sont à frémir: 14 % des travailleurs sont analphabètes, 37 % sont en dessous des compétences du milieu. l'accès facile des petites entreprises dans l'industrie de la construction fait en sorte que nous assistons à une concurrence excessive, déloyale et suicidaire. plus de 70 % des entreprises ont une durée de vie de moins de quatre ans, une meurt, deux naissent.

Nous sommes dans un secteur qui nous condamne à rester petits. Les deux tiers des entreprises ont deux employés et moins, 22 % en ont trois, quatre ou cinq.

Notre industrie se situe au haut de l'échelle quant au travail au noir, au taux de faillite et à la sous-capitalisation des entreprises. Pour chaque dollar investi par les propriétaires, les créanciers en ont investi 2,87 % fois plus. Les petites comme les grandes entreprises du Québec sont en mauvaise position dans le contexte actuel et leur fragilité les rend vulnérables. Le contexte légal les maintient dans cette position. (22 h 10)

Le système public d'octroi des contrats, le système des retenues, le transfert inéquitable des responsabilités des propriétaires et des professionnels sur le dos de l'entrepreneur de construction créent et perpétuent cet état de sous-capitalisation. L'industrie est à bout de souffle, les entreprises souffrent d'une carence en formation, en recherche et développement, en main-d'oeuvre qualifiée, en innovation technologique. Nous vivons dans une industrie ou l'on utilise à 85 % les méthodes traditionnelles de construction. Nous sommes dans une industrie qui génère 8 000 000 000 $ en coûts de non-qualité, ce qui représente environ 35 % du volume d'affaires, dont 40 % sont reliés aux erreurs de conception et 30 % à la non-qualification de la main-d'oeuvre. On est obligés de demander aux propriétaires des grands projets de fragmenter les contrats pour permettre aux entreprises de pouvoir y soumissionner. Nos entreprises doivent s'associer au capital étranger pour réaliser les

grands projets d'ici. Les programmes d'assurance-qualité demandés par les grands donneurs d'ouvrage sont considérés, par plusieurs, comme des clauses abusives parce que nos entreprises ont des difficultés énormes à rencontrer ces nouvelles exigences dans le contexte légal actuel.

Voilà en résumé les grands défis que doit relever l'industrie de la construction. Bien évidemment, le projet de loi 142 ne répond pas à tous les besoins de l'industrie de la construction. Ce n'est pas la panacée à tous les problèmes ou à tous les maux de l'industrie, mais il constitue, à plusieurs égards, une base solide qui va nous permettre d'insuffler un vent de dynamisme et de modernisme au sein de notre industrie.

Dans un premier temps, le projet de loi 142 vise à retirer l'intervention ministérielle dans le domaine des relations de travail de l'industrie de la construction. Ce retrait est souhaité par tous. À cet égard, le projet de loi livre la marchandise promise.

Nous devons constater aussi que le gouvernement du Québec, dans son projet de loi 142, donne suite à la volonté des parties d'éliminer les irritants législatifs en matière de commerce interprovincial par l'élimination de l'obligation de posséder une place d'affaires ou une résidence au Québec, selon que l'on est entrepreneur ou travailleur.

Quant au nouveau régime de négociation qui est proposé dans le projet de loi 142, celui-ci est basé sur l'approche sectorielle de l'industrie de la construction telle qu'exprimée par les participants au Sommet. Le ministre a même intégré un quatrième secteur industriel conformément à la volonté exprimée à ces travaux. L'ACQ appuie donc le gouvernement dans sa volonté de développer l'industrie de la construction axée sur l'approche sectorielle.

Nous avons toujours prétendu qu'il est temps, même urgent, que l'industrie de la construction soit perçue sous un angle autre que les seules relations de travail, un seul secteur ou un seul métier. Ces trois orientations — relations de travail, habitation, un seul métier — ont conduit l'industrie là où nous sommes aujourd'hui, dans un cul-de-sac simplement parce qu'elle repose sur des sous-ensembles. Ces éléments doivent être considérés dans une perspective plus globale de développement de l'entreprise de l'industrie et être en interrelation avec les autres préoccupations d'entreprises, tels le développement des marchés, l'obtention des contrats, la réalisation des ouvrages, la qualité du produit, la certification des entreprises, la productivité, l'innovation technologique, les normes de construction, le partenariat entre les professionnels, les centres de recherche, les manufacturiers et les entrepreneurs. Les sujets sont nombreux et embrassent tous une partie de la réalité de la vie de l'entreprise.

En effet, nous avons eu l'occasion de présenter, d'expliquer ces principaux énoncés aux membres de la commission de l'économie et du travail lors des travaux de la commission parlementaire sur les projets de loi 185 et 186. L'approche sectorielle de l'industrie de la construction répond à l'un des énoncés politiques ex- primé par l'ACQ dans cette même salle, un soir de décembre 1991.

Cela étant dit, M. le Président, l'ACQ rappelle que les trois associations sectorielles indiquées dans le projet de loi 142 ont toutes déclaré, lors de leur discours de clôture du Sommet, qu'elles acceptent de coordonner, d'administrer et de diriger ensemble l'organisme de coordination établi aux fins de la convention collective. Le projet de loi 142 répond intégralement à cette volonté patronale exprimée par les associations sectorielles visées. Si l'on fait le décompte, nous sommes donc rendus à quatre sur quatre pour le projet de loi 142. Jusqu'à présent, on peut dire un score parfait et cela explique notre appui au projet de loi 142.

Cependant, nous devons souligner qu'en ce qui concerne le champ d'application de la loi l'ACQ est partagée entre une satisfaction et une inquiétude. D'abord, pour ce qui est de l'assujettissement des travaux d'installation, de réparation et d'entretien de la machinerie de production dans le secteur industriel, l'ACQ appuie ce nouvel assujettissement à l'exception de l'extension du droit du fabricant au distributeur, lequel assujettissement répond aux demandes patronales et syndicales de la construction. L'assujettissement de ces travaux aura un effet positif sur la qualité des travaux exécutés désormais par des entrepreneurs et des travailleurs qualifiés.

Cette décision aura également pour effet de contrer le phénomène de la syndicalisation par entrepreneur et par chantier actuellement en cours, une pratique ayant comme seul but d'échapper aux dispositions de la convention collective régissant l'industrie de la construction. Le troisième avantage de cet élargissement du champ d'application sera d'augmenter de plusieurs millions le nombre d'heures déclarées à la Commission de la construction du Québec pour ce type de travaux. L'an dernier, le nombre d'heures déclarées se situait à environ 6 000 000.

Quant au deuxième aspect du champ d'application, soit la déréglementation du secteur résidentiel de huit logements et moins, à ce chapitre M. le Président, l'ACQ n'a d'autre choix que de s'inscrire en faux contre l'article 11, paragraphe 1°, du projet de loi 142. Cette position de l'ACQ n'a absolument et d'aucune manière rien à voir avec les événements que nous connaissons depuis quelques jours. Le gouvernement, le ministre du Travail, les membres de cette commission et nos partenaires, tant patronaux que syndicaux, savent depuis toujours que l'ACQ a développé au fil des ans différents principes ou énoncés qui guident son action politique. Ces énoncés politiques sont le résultat de nombreuses consultations effectuées au fil des ans auprès des entrepreneurs opérant dans différents secteurs, auprès des entrepreneurs oeuvrant dans le secteur résidentiel et autres secteurs, auprès des entrepreneurs localisés dans différentes régions du Québec et auprès d'entreprises de différentes tailles.

Nous avons eu l'occasion de présenter, d'expliquer ces principes, lors de différents travaux, notamment

au cours des travaux de la commission parlementaire de mai 1988 sur le projet de loi 31, de la commission parlementaire Picard-Sexton à l'été 1989, de la commission parlementaire de décembre 1991 sur les projets de loi 185 et 186, et plus récemment encore lors des travaux du comité Laberge-Lavallée et du comité Audet.

En 1988, contrairement à certain représentants patronaux et contrairement aussi à certains syndicats, l'ACQ s'est opposée au retrait des travaux de rénovation de l'industrie de la construction. Depuis ce temps, l'ACQ proclame sur tous les toits que tous les travaux de construction doivent être effectués par des entreprises et des travailleurs dûment qualifiés.

Encore récemment, nous avons eu l'occasion, dans une correspondance adressée au ministre, de souligner la sagesse dont il avait fait preuve à l'effet de maintenir dans l'industrie de la construction tout le secteur de construction de logements neufs. Cette correspondance, je vous fais remarquer, faisait suite aux propositions ministérielles présentées lors du Sommet sur l'industrie de la construction, et non après le projet de loi 142.

Nous avions prévu une industrie en quatre secteurs, dont le secteur résidentiel. Dans cette approche, l'ACQ en partenariat avec l'association sectorielle reconnue dans le projet de loi 142 pour le secteur visé, et en partenariat avec la partie syndicale, a conclu une entente, laquelle s'inscrivait toujours à l'intérieur de l'industrie de la construction.

L'un des objectifs visés par l'ACQ est l'assouplissement, l'allégement du fardeau administratif de l'entreprise. Or, la déréglementation du secteur résidentiel telle que proposée, tout en maintenant un secteur résidentiel assujetti, ne nous incite pas à croire à un assouplissement du fardeau administratif de l'entreprise parce que la même entreprise dans ce même secteur d'activité serait désormais sujette non pas seulement à deux conventions collectives mais d'abord à deux régimes de négociation différents: l'un en vertu du Code du travail et l'autre en vertu de celui de l'industrie de la construction.

Pour diminuer l'impact négatif de cette déréglementation, l'ACQ suggère différentes hypothèses de solution. Lorsque les groupes de pression populaires et la population réclament des programmes d'aide à l'habitation et d'accès à la propriété, il ne nous semble pas que l'on vise des édifices aussi larges que prévus dans le projet de loi 142. L'ACQ a toujours pensé que ce que les gens visaient par le secteur résidentiel était la maison unifamiliale, le duplex ou la maison semi-détachée. Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à penser de cette manière car l'ACQ fait sienne la définition du Parti libéral du Québec telle qu'arrêtée par son comité spécial lors de sa réunion du 8 septembre 1993 et qui définit le secteur résidentiel comme comprenant une maison unifamiliale, un duplex ou une maison semi-détachée.

L'ACQ propose donc au ministre de réintroduire tous les travaux de rénovation dans le secteur de la construction; de maintenir tous les travaux du secteur résidentiel dans l'industrie de la construction à l'intérieur du secteur résidentiel; de maintenir la définition du secteur résidentiel proposée par le Parti libéral, à savoir la maison unifamiliale, le duplex et la maison semi-détachée.

Si les propositions 1, 2 et 3 ne sont pas acceptées, que le secteur résidentiel soit défini en fonction de la partie 9 du code national du bâtiment, intitulée «Maison et petit bâtiment» qui se lit comme suit: «tout bâtiment de trois étages et moins ayant une superficie de 600 m2 et moins». (22 h 20)

Si aucune des quatre propositions précédentes n'est acceptée, et que l'on maintient que le secteur résidentiel comprend huit logements et moins, que tous les autres travaux doivent être considérés comme du commercial pour diminuer l'impact du chevauchement de secteurs à l'intérieur du même secteur résidentiel, soit le non-assujetti et l'assujetti, ainsi que l'impact du double régime de négociation.

L'ACQ, M. le Président, qui n'a jamais réclamé le retrait du secteur résidentiel pour ce qui est du huit logements et moins, n'a bien évidemment jamais réclamé non plus et jamais demandé l'abolition des avantages sociaux des travailleurs de l'industrie. Nous voulons un assouplissement du secteur de la construction, un allégement du fardeau économique, nous devons trouver les moyens ou la mécanique pour ne pas pénaliser les travailleurs.

Le projet de loi 142 ne répond pas à toutes les attentes de l'industrie de la construction, mais a le mérite de proposer un nouveau régime de négociation, ce qui devrait être l'objectif premier du projet de loi 142. Merci.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. Lafontaine.

Maintenant, M. le ministre, s'il vous plaît, à vous la parole.

M. Cherry: Merci, M. le Président.

Première question: Au tout premier paragraphe de la page 7, vous soulevez un aspect là: «Cette décision aura également pour effet de contrer le phénomène de la syndicalisation par entrepreneur et par chantier actuellement en cours, une pratique ayant comme seul but d'échapper aux dispositions de la convention collective régissant l'industrie de la construction.» Est-ce que vous avez des exemples à nous citer là-dessus? Et essayez de nous expliciter ça, là.

M. Lafontaine (René): Ce sont nos entrepreneurs sur les chantiers industriels qui nous font rapport que des ententes se signent entre le donneur d'ouvrage et le syndicat et les entreprises.

M. Cherry: O.K. Bon! M. le Président, je voudrais vous indiquer que j'ai des collègues qui souhaiteraient intervenir et qu'on utilise notre temps.

Le Président (M. Joly): Oui, sûrement.

M. Cherry: Donc, je reviendrai plutôt, mais je voudrais m'assurer, là, que je respecte le désir exprimé par...

Le Président (M. Joly): Parfait! Alors, je vais reconnaître M. le député de Vimont, s'il vous plaît.

M. Fradet: Merci, M. le Président. Ma première question, ce serait juste pour préciser des affirmations que vous venez de faire. Vous avez dit qu'un comité du Parti libéral du Québec, le 8 septembre dernier, aurait statué sur le résidentiel comme étant le bungalow deux étages. J'aimerais savoir quel comité. Unifamilial, résidence unifamiliale, bungalow, comme on l'entend, ou «cottage», là.

M. Lafontaine (René): C'est une définition que nous avons prise, M. le Président, dans... Je ne puis me rappeler sûrement si c'était dans un compte rendu d'un journal ou quelque chose comme ça, des journaux, d'une définition qui avait été retenue par le Parti libéral. Peut-être pas par le gouvernement...

M. Fradet: Alors, il faudrait peut-être préciser tout de suite. Ce n'est pas une définition qui a été retenue ni par le parti ni par la commission politique. C'est peut-être une définition qui faisait partie d'un article à l'intérieur d'un journal. J'étais moi-même membre d'un comité ou de la commission politique qui a analysé le dossier de la construction et je peux vous dire qu'il n'y a aucun membre, et le comité n'a pas non plus statué sur la définition du secteur résidentiel. Mais c'était juste pour faire une petite correction, là, pour ne pas laisser l'impression que ça avait été fait. Alors, moi, je vous poserais une question.

M. Lafontaine (René): Je m'excuse de notre...

M. Fradet: Ah! Il n'y a pas de quoi. Bon! Vous avez, j'imagine, suivi les débats cet après-midi. Nous avons écouté l'AECQ qui nous a rencontrés cet après-midi, et pour avoir rencontré d'autres entrepreneurs, moi, je voudrais qu'on clarifie, là, face aux gens qui nous écoutent et ceux et celles qui sont intéressés par le domaine de la construction. Premièrement, vous étiez venus nous rencontrer aussi et on n'a pas à discuter ou à élaborer sur les positions que vous nous avez données à huis clos, mais, quand même, il y a des associations patronales qui étaient d'accord avec le fait de séparer les secteurs et vous nous disiez ou certaines associations nous disaient qu'elles ne se sentaient pas bien représentées par l'AECQ. L'AECQ, ce matin, est venue nous voir en nous disant: Ils ont fait un sondage et l'ensemble des entrepreneurs, au Québec, veut avoir un agent négociateur unique, du côté patronal. Moi, ce que je veux savoir... Ceux et celles qui cotisent à l'AECQ parce qu'ils sont obligés et qui cotisent chez vous par une mesure volontaire, c'est les mêmes entrepreneurs, qu'on nous a dit, de toute façon. Alors, est-ce que c'est réel de croire que la position que vous défendez n'est pas la position de vos membres ou s'il y a quelqu'un d'autre qui se trompe à part vous?

Et on a entendu juste une autre chose — je vais vous laisser parler après — que peut-être votre association aurait des difficultés financières et aurait avantage à avoir une obligation d'adhésion au lieu d'être une adhésion volontaire. Je vous laisse sur ces deux questions-là.

M. Lafontaine (René): Pour la question financière, je vais laisser M. Richard Di Muro, vice-président finances, vous répondre.

Le Président (M. Joly): M. Di Muro, s'il vous plaît.

M. Di Muro (Richard): D'abord, j'aimerais situer que, collectivement, l'ACQ a un surplus d'au-delà de 3 000 000 $. C'est une fédération et ce n'est pas ce que les gens prétendent librement, de dire que l'ACQ est en difficulté. Collectivement, il y a 3 000 000 $ de surplus et c'est une valeur comptable, en plus. Comprenez qu'il y a des valeurs dépréciées, donc la valeur réelle est peut-être plus importante que ça.

Le Président (M. Joly): M. Ratté, s'il vous plaît.

M. Ratté (Jean): À cela, il faudrait rajouter que l'ACQ possède un plan de garantie et que le plan de garantie est surveillé par des actuaires, par la RBQ, par la Société canadienne d'hypothèques et de logement et qu'elle vaut plusieurs centaines de milliers de dollars. Alors on comprend mal, disons, la position de certaines personnes qui manifestent, peut-être, leur mésentente, leur mécontentement de notre position.

M. Fradet: En fait, on ne s'étendra pas plus longtemps sur la situation financière de l'ACQ, ceci étant dit. Mais, sur le fond, sur le fond de ce qu'on nous a dit, puis de ce que d'autres associations patronales vont nous dire, est-ce que, de un, vous représentez vraiment les membres qui font partie de votre association? Et, si oui, où est le problème?

Di Muro (Richard): J'aimerais répondre. Je suis d'abord entrepreneur avant d'être membre de l'Association. On siège aussi avec des gens, on a un centre de la construction qui représente plusieurs sphères d'activité dans l'industrie et les gens veulent vraiment la proposition telle qu'articulée.

Il y a eu des réunions qui ont laissé présager qu'on voulait une AECQ avec... la maintenir dans sa situation actuelle. Il y a eu même des rencontres où on a même proposé qu'il y ait une seule association unique dans l'industrie pour représenter toute l'industrie dans

toutes ses sphères d'activité. Je ne pense pas que l'on erre dans le champ quand on dit qu'on veut, on endosse la proposition du ministre, à savoir qu'il y ait de la représentativité, en fonction de quatre secteurs d'activité, avec une unité de négociation telle que proposée dans le document. Je ne sais pas pourquoi l'AECQ se sent tant menacée par cette proposition-là. Je le comprends très mal.

M. Fradet: Je ne voudrais, non plus, juste personnaliser l'AECQ, parce qu'il y a des entrepreneurs qui sont venus nous voir, aussi.

M. Di Muro (Richard): ...ouvert la porte assez facilement. C'est vous qui m'avez dit que...

M. Fradet: Non, non, je suis d'accord avec vous.

M. Di Muro (Richard): ...c'est leurs propos. Ça fait que je réponds à leurs propos parce qu'ils viennent de votre bouche à vous.

M. Fradet: Ils vous ont mentionnés, de toute façon, quand ils sont passés ici. Je vous poserais une autre question.

Le Président (M. Joly): C'est ce qu'on appelle un libre échange, là. Je n'ai pas d'objection, si... Simplement respecter, peut-être, le droit de parole de l'un, puis, par après, en réplique. De cette façon-là, c'est difficile de bien saisir quand les deux parlent en même temps. S'il vous plaît.

Di Muro (Richard): Moi, j'ai terminé, là, il n'y a pas de problème.

M. Fradet: J'avais compris que monsieur avait terminé. Alors c'est pour ça que...

Le Président (M. Joly): Non, non, moi, je ne lance pas d'accusation. Mise en garde.

M. Fradet: Je vous poserais une autre question, messieurs. M. Paré et M. Lavallée, de la FTQ-construction, sont venus nous dire, tout à l'heure, qu'eux autres attendent juste de savoir avec qui ils vont négocier. Puis, dans leur cas, il n'y a aucun problème sur le côté syndical. Et ce qu'on nous dit, nous autres, d'un autre côté, pas de leur part mais de la part de certains entrepreneurs, c'est qu'on va affaiblir, dans ce projet de loi là, la partie patronale et que ça pourrait être très dangereux pour ceux et celles qui font partie de la partie patronale et qui négocieront, éventuellement, des conditions de travail des travailleurs.

Alors, je comprends, de votre intervention, que vous êtes en total désaccord avec cette perception-là, si vous désirez agir comme agent négociateur dans vos secteurs respectifs.

M. Lafontaine (René): On ne peut parler de la position des autres mais c'est notre position, et on croit qu'on ne s'affaiblira pas dans ce cas-là.

M. Ratté (Jean): En quoi...

Le Président (M. Joly): M. Ratté, oui, s'il vous plaît.

M. Ratté (Jean): En quoi on pourrait s'affaiblir lorsque c'est divisé en quatre secteurs? En quoi on peut s'affaiblir lorsque les gens d'un secteur vont se prononcer sur ce secteur-là, alors qu'anciennement c'était l'ensemble des secteurs qui se prononçait sur l'ensemble des problèmes? En quoi? Bien au contraire, je pense que chacun des secteurs peut y tirer profit. Aussi bien résidentiel, qui demande des conditions spéciales. Aussi bien commercial, industriel. Aussi bien travaux de génie, la même chose. Remarquez bien que, les trois associations traditionnelles, ce sont des associations qu'on peut dire naturelles. Vous avez l'APCHQ. On n'a jamais été contre l'APCHQ. Nous étions contre le fait de retirer le résidentiel... c'est-à-dire de l'ensemble de l'industrie. (22 h 30)

Après ça, vous avez l'ACQ qui touche un peu au résidentiel, un peu aux grands travaux mais qui touche surtout le commercial, l'industriel, l'institutionnel. Et vous avez les grands travaux, l'ACRGTQ. Alors, c'est naturel qu'eux autres connaissent... Et, en plus, ils ont un désir de travailler en fonction de l'industrie et dans laquelle vous voyez les relations de travail seulement comme une partie de l'industrie, et non pas comme actuellement où tout le monde voit les relations de travail partout. C'est ça qu'on veut dans l'industrie.

Le Président (M. Joly): M. le député de Vimont.

M. Fradet: Merci. Certains prétendent qu'il serait mieux pour l'industrie d'avoir une convention collective et quatre secteurs. Ce qui est proposé, c'est quatre secteurs, quatre conventions collectives. Qu'est-ce que vous en pensez? Est-ce que vous préférez cette formule à l'autre? Est-ce que vous avez des commentaires là-dessus?

M. Di Muro (Richard): La formule proposée, je pense qu'il y a un tronc commun, quand même une partie en tronc commun avec quatre conventions collectives. Nous, initialement, on préconisait trois secteurs avec trois conventions collectives. Il y a eu le Sommet, il y a eu quand même entente sur la façon de procéder. Je pense que ce qui avait été proposé, c'est encore le moindre mal, puis, de cette façon-là, nous, on peut y adhérer. C'était le sens de notre intervention. Et aujourd'hui, je pense que le projet, tel que présenté, est une situation satisfaisante pour répondre à l'industrie.

M. Fradet: Merci. M. le Président, je pense que Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata...

Le Président (M. Joly): Oui, Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata. Mme la députée, s'il vous plaît.

Mme Dionne: Oui, M. le Président. Une seule question; il y a peut-être la définition du résidentiel, les huit logements et moins, et tout ça là. Je sais qu'en Ontario, et vous devez avoir sûrement des collègues en Ontario, vous échangez sûrement avec d'autres organisations patronales, ils n'ont peut-être pas les huit logements et moins, on parle du «high rise» et du «low rise» en termes de définition. Ici, au Québec, on parle que l'APCHQ serait l'organisme négociateur patronal, d'après ce qui est défini dans l'article. Pour vous, ce qui se fait en Ontario et au Nouveau-Brunswick, selon la partie patronale seulement, est-ce que vous avez des échanges? Est-ce que le fait d'avoir des similarités, ça va aider l'industrie, ça va aider tant les entreprises que les travailleurs, ou non? Est-ce que vous avez eu des échanges à ce niveau-là?

Une voix: Je ne crois pas.

Des voix: Non.

Mme Dionne: Pas du tout?

M. Ratté (Jean): Non, bien, des échanges... Des entrepreneurs vont travailler quelquefois en Ontario ou au Nouveau-Brunswick, mais on ne peut pas dire que... dans le résidentiel, c'est une politique courante, ça.

Mme Dionne: O.K. Mais vous n'avez pas eu d'échanges, aucun.

Des voix: Non.

Mme Dionne: Alors, donc, avec le projet de loi, vous venez d'être nommé, si on veut, nouveau négociateur de la partie patronale dans trois secteurs d'activité, à tout le moins deux secteurs d'activité.

Une voix: Deux secteurs.

Mme Dionne: O.K. Là, vous commencez à zéro, parce que, avant ça, les services que vous avez donnés à vos membres comportaient bien des domaines, sauf la négociation et les relations de travail.

Une voix: Oui.

Mme Dionne: Alors, je reviens à ça, parce que la question est la suivante. Du côté syndical, on sait que, d'après, en tout cas, les chiffres qu'on a jusqu'à maintenant, il y a deux associations syndicales dans tout ce domaine-là en force: la FTQ et l'international. Du côté patronal, le fait d'en avoir trois maintenant, ça ne vous cause aucun problème, et vous êtes prêts dès demain matin à commencer la négociation, vous avez tous les outils.

M. Di Muro (Richard): Je pense que les outils existent déjà. Le projet de loi offre l'unité de négociation, le mécanisme est là, les gens sont déjà en place, c'est juste la façon dont s'est dirigé et que c'est commandé, en fait. Si on regarde ça, on n'inventera rien demain matin, parce que, demain matin, l'ACQ ou l'ACRGTQ ou l'APCHQ vont se retrouver avec un mandat. Je pense que le document explique très, très bien le mécanisme tel qu'il doit être. Il me semble que c'est très clair.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Di Muro. M. le député de Salaberry-Soulanges, une courte question?

M. Marcil: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Ça me fait plaisir.

Une voix: ...

Le Président (M. Joly): Pardon?

M. Chevrette: M. le Président, peut-être...

Le Président (M. Joly): M. le député de Joliette, est-ce que vous aviez...

M. Chevrette: Moi, je suis prêt à parler, si vous...

Le Président (M. Joly): Non, mais c'est parce qu'il reste encore un peu de temps à la formation ministérielle...

M. Chevrette: C'est parce que je voudrais savoir ce que c'est, le tronc commun qui est proposé.

M. Marcil: O.K.

Le Président (M. Joly): ...puis j'avais reconnu le député de Salaberry-Soulanges.

M. Marcil: Ce ne sera pas long.

Le Président (M. Joly): Par après, on pourra élaborer sur votre question. M. le député.

M. Marcil: Au niveau de la négociation des quatre conventions collectives, est-ce que vous voyez qu'il y a une partie qui intervient au niveau des quatre conventions collectives avec des membres de l'association en cause? Je donne un exemple. Si on parle d'un tronc commun à l'intérieur de... Et on parle, justement,

que l'AECQ aurait un rôle de coordination ou de support au niveau de la négociation. Au niveau du tronc commun, est-ce que c'est possible que l'AECQ, parce qu'elle représente l'ensemble des employeurs également du Québec, négocie les grandes choses et qu'au niveau sectoriel les mesures qui touchent uniquement le résidentiel ou uniquement l'industriel ou le commercial soient négociées par les associations sectorielles, si on peut les appeler comme ça?

M. Lafontaine (René): Voulez-vous parler en principe ou selon la loi?

M. Marcil: En principe, ce que vous voyez, vous.

M. Lafontaine (René): Nous, ce qu'on voit, c'est qu'il y a un tronc commun qui va négocier ce que les trois représentants des secteurs vont bien vouloir lui faire négocier. On ne fera pas table rase demain matin de tout ce qu'il y a à l'AECQ, du «know-how», et ainsi de suite. Et les parties pourront même aller confier plus que le tronc commun, si vous voulez, en autant que leur secteur va payer pour.

M. Marcil: O.K. J'ai un cas pratique: un entrepreneur, chez nous, un employeur qui oeuvre en partie dans le résidentiel, plus particulièrement commercial-industriel, puis même intervenir au niveau des grands travaux. À l'heure actuelle, lorsqu'il y a un grief sur un chantier, on réfère à l'AECQ pour régler le grief. C'est un service juridique. Est-ce que, de la façon que vous voyez la structure, chacune des associations patronales reconnues va développer un service juridique pour régler les griefs? Est-ce que moi, comme entrepreneur, si j'ai un grief dans le résidentiel, je vais aller voir l'APCHQ; si j'ai un grief dans l'institutionnel, je vais aller voir l'autre; puis si j'ai un grief dans le commercial, je vais aller vous voir? C'est ça que j'essaie de voir, de simplifier le plus...

M. Di Muro (Richard): Étant des entrepreneurs puis n'ayant pas gros d'argent, on va certainement utiliser les forces en place. Je pense que le mécanisme de griefs, le mécanisme pour régler des choses de même, s'il y a déjà des gens en place à l'AECQ, ces services-là vont continuer à être contrôlés par les mêmes personnes à un seul bureau. On demande au gouvernement de faire un guichet unique. On serait un peu bêtes d'aller faire le contraire.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. Di Muro. Je vais reconnaître M. le député de Joliette. M. le député, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Moi, je reconnais que votre mémoire a au moins une grande logique. Je vous dis ça en partant. Je ne suis pas nécessairement d'accord avec tout, mais au moins c'est cohé- rent par rapport à votre position globale, en ce sens que vous êtes contre tout désassujettissement — c'est très dur à dire, mais on va le dire, on va le pratiquer assez pendant quelques semaines pour l'apprendre. Puis je pense que je partage surtout avec vous le point de vue de l'accréditation syndicale à partir du Code du travail. Je pense, comme vous, que ce serait absolument incompatible. Vos propres employeurs s'en trouveraient, à mon point de vue, pénalisés énormément. Et c'est le cas, d'ailleurs, déjà, dans la rénovation, pour ceux qui respectent le décret par rapport à ceux qui ne le respectent pas. Il n'y a à peu près pas moyen de compétitionner celui qui marche au noir, en dessous de la couverte, par rapport à ceux qui respectent les standards qu'ils ont développés chez eux, dans leur propre entreprise. Je comprends la logique de votre document là-dessus.

J'ai également lu un petit document qui était intitulé «Propositions de structure sur les relations de travail dans l'industrie de la construction», où je reconnais votre nom, M. Lafontaine. L'ACQ a bel et bien signé. Des rumeurs nous disaient que vous et votre secrétaire aviez eu maille à partir pour avoir signé ce document-là. Est-ce que c'est vrai?

Une voix: ...

M. Lafontaine (René): Non, c'est moi qui vais l'expliquer, mon cher.

Le Président (M. Joly): M. Lafontaine, s'il vous plaît.

M. Lafontaine (René): Effectivement, M. le député, ce sont des rumeurs. C'est impossible de contrôler les rumeurs, vous le savez. Dans les partis politiques, il s'en sort régulièrement. C'est la même chose chez nous. Si vous lisez ce document-là, vous vous apercevrez qu'il y a un item qui n'est pas dans nos propositions, positions depuis tout temps, c'est lorsque M. Di Muro et moi avons signé, qui était présent, l'entente sur le six étages parce que ça restait... c'est la seule chose pour laquelle on n'avait pas le mandat, et on l'a dit, qu'on va aller le faire approuver. Dans le restant, nous avions le mandat, et ce n'est pas une position de deux personnes, c'est la position d'une association.

M. Chevrette: Vous êtes au courant que l'AECQ a rendu public cet après-midi, déjà il y a quelque temps aussi, je crois, un sondage scientifique qui a été fait auprès des entrepreneurs et qui révèle que la majorité des entrepreneurs considèrent qu'il doit y avoir une seule association patronale pour négocier pour et au nom de la partie patronale. Qu'est-ce que vous répondez à cela? (22 h 40)

M. Lafontaine (René): Que pouvons-nous répondre lorsque les entrepreneurs, depuis des années, disent qu'ils sont insatisfaits de telle et telle forme de négociation et qu'il y a un sondage qui a des réponses? Je suis

d'accord, si vous posez la question avant... Si ma mémoire est fidèle, le sondage a eu lieu quelques mois avant le dépôt du projet de loi, je crois, et dans quel esprit... Si on avait demandé, on avait su, dans le temps: Est-ce que vous préférez ça plutôt que par secteur? est-ce que la réponse aurait été la même? Je ne peux pas le dire.

M. Ratté (Jean): Je compléterais, si vous permettez, M. Chevrette...

Le Président (M. Joly): M. Ratté, s'il vous plaît.

M. Ratté (Jean): ...que, suite à ce sondage-là, nous n'avons pas fait une étude scientifique de ce sondage. Mais, comme disait M. le président, nous avons rencontré non pas seulement notre C.A. concernant le Sommet, nous avons fait pratiquement une tournée provinciale concernant le Sommet et nous avons rencontré plusieurs entrepreneurs aussi bien spécialisés que généraux. Si la position est contraire aux sondages, eh bien! c'est que ça reflète... on peut vous dire, c'est-à-dire, que ça reflète réellement l'esprit au sein de nos membres.

M. Chevrette: Vous vous rappelez qu'il y a une quinzaine d'années, une vingtaine d'années, si des personnes ont été appelées à recommander la structure patronale unique au niveau au moins d'un tronc commun très important, c'est précisément parce qu'il y avait de la division profonde du côté patronal et qu'il était difficile d'en arriver à avoir, comme dans plusieurs secteurs, d'ailleurs... une partie syndicale forte va aller voir le groupe le plus faible, va aller chercher le maximum, puis, après ça, il va l'étendre aux autres. J'ai fait ça dans l'enseignement, moi. Il n'y a pas de cachette dans ça. Quand tu es négociateur, puis tu peux être de très bonne foi, puis tu as à négocier un contrat, qu'est-ce que je faisais, moi? J'allais dans ma commission scolaire où je pensais que je pouvais avoir le meilleur contrat et, après ça, je retendais aux autres. Et c'était tout à fait correct, tout à fait honnête de le faire, et personne ne pouvait nous traiter, parce que tu ne négociais pas correct... C'était normal que ça se fasse de même. Et l'employeur qui était l'État, parce que l'agent payeur, c'était l'État, il a décidé, en bout de course, de dire: Bien, écoutez, vous ne défoncerez pas le plus faible pour, après, m'étendre le fruit ou le résultat du plus faible à l'ensemble de l'industrie ou à l'ensemble du secteur que je négociais. Ce n'est plus vrai aujourd'hui, ça? Vous êtes tous forts, vous avez tous des muscles, vous êtes tous des muscles?

M. Lafontaine (René): Je pense qu'on n'est peut-être pas tous forts aujourd'hui, M. le député, mais il y a une chose que nous savons. Si nous regardons aller les négociations actuellement dans les diverses entreprises et industries au Québec, je ne crois pas que le climat soit dans cette forme. Lorsqu'on voit les patrons et les syndicats s'asseoir pour essayer de sauver leur peau à chacun, je pense que, dans l'industrie de la construction, c'est le même cas aujourd'hui. On n'est peut-être pas à plat ventre encore, mais laissez-moi vous dire que la cravate commence à traîner sur le plancher. Alors, si des situations comme ça perdurent dans l'industrie de la construction, avec des mentalités comme ça, bien, je suis d'accord avec vous que ça va sauter. Mais je ne crois pas que personne, tant les ouvriers que les patrons, ait les moyens de se payer des guerres comme ça aujourd'hui.

M. Chevrette: Est-ce que vous reconnaissez que dans certains secteurs d'activité où les relations de travail sont globales, comme dans le vôtre — je pense à la santé, je pense à l'éducation, où on a des systèmes globaux de négociation; dans la majorité des cas, puis ça a fait ses preuves assez fortement, je pense, dans le milieu de la santé en particulier où il y a beaucoup de tables sectorielles; dans l'éducation, on fait de même, même des tables... On négocie un fort tronc commun qui est aspect monétaire ou encore... ou a plutôt l'aspect monétaire, et tout ce qui est le particularisme de chacun des secteurs est négocié à une sous-table de négociation. Ça ne vous paraît pas être un modèle qui pourrait rallier les gens, qui pourrait faire en sorte que ce soit un compromis heureux? Parce que vous pourriez vous retrouver à une table sectorielle pour vos problèmes très particuliers et avoir un tronc commun qui, véritablement, touche l'ensemble des salariés, avec l'effort qu'il y a à l'article 61.1 ou article 48. Est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir un réaménagement de cela puis faire un tronc commun monétaire — je ne sais pas, peut-être que vous auriez des idées, peut-être, additionnelles — mais que le spécifique, ce qu'on appelle le spécifique au secteur, ce soit négocié véritablement dans le cadre de ce que vous dites?

M. Lafontaine (René): Je ne crois pas que, dans la loi, on soit empêchés d'agir. Le tronc commun va négocier ce que les trois secteurs vont vouloir lui donner, puis on n'est pas assez, assez peu intelligents pour aller à rencontre du bien de nos entrepreneurs. Je crois que, pour une fois, il y a trois associations qui vont être assises au moins à une table, non dans un climat de confrontation mais plutôt pour en arriver à une entente sur quelque chose. Et, à partir de là, on va pouvoir bénéficier de ce qu'il y a de bien à l'heure actuelle dans les connaissances, le «know-how», comme je disais tantôt, de l'AECQ.

M. Chevrette: Mais êtes-vous en train de me dire que... Quand vous allez vous asseoir à une table sectorielle, c'est un texte juridique qui prévaut.

M. Lafontaine (René): Oui.

M. Chevrette: Vous êtes d'accord avec ça?

M. Lafontaine (René): Oui.

M. Chevrette: Le texte juridique, il ne dit pas: «un tronc commun à être défini»... Si j'ai bien compris le projet de loi — le ministre pourra me reprendre, ça ne me dérangera pas, on est ici pour éclairer nos... antennes — le tronc commun qui est suggéré, il est bien clair, il est spécifique. Il ne touche que des objets bien précis. C'est marqué «doivent». Ce n'est pas «peut». Donc, l'ouverture n'est pas faite au «peut». C'est marqué «doivent». Et sur le plan législatif, quand c'est «doit», c'est clair et, quand c'est «peut», c'est moins clair. Et je n'ai pas l'impression qu'entre vous c'est un mariage d'amour. Ça va plutôt être un mariage de raison qui va vous réglementer.

Une voix: Un mariage forcé.

M. Chevrette: Est-ce que je fais erreur?

Le Président (M. Joly): M. Ratté.

M. Ratté (Jean): Je vous dirais qu'à l'article 48 ou 61.1, comme vous le mentionnez, c'est vrai qu'on dit «doivent». «Doivent», on l'interprète comme un minimum, ça. Ce n'est pas un maximum, ça. Alors, ce qui permet aux associations de donner à l'association de coordination certains autres pouvoirs. C'est comme ça que l'on comprend ça.

M. Chevrette: Mais l'ACQ, si j'ai bien compris, l'ACQ, vous allez être une table sectorielle avec ce projet de loi là.

M. Ratté (Jean): Oui.

M. Chevrette: On se comprend bien? L'APCHQ va là. Correct?

Une voix: Pardon?

M. Ratté (Jean): Oui, oui.

M. Chevrette: On se comprend toujours. L'APCHQ ne sera plus là.

M. Ratté (Jean): Elle va être là. M. Chevrette: II est déréglementé.

M. Ratté (Jean): Non, non, non. Je m'excuse, là...

M. Di Muro (Richard): ... qui est non réglementé et qui est non déréglementé, qui est...

M. Chevrette: Oui, mais vous savez très bien que c'est l'infime partie.

M. Di Muro (Richard): Ils sont là quand même.

M. Ratté (Jean): Ils sont là.

M. Chevrette: D'accord. L'APCHQ, à toutes fins pratiques, qui va regrouper la très grande partie déréglementée...

Une voix: Bien, si...

M. Chevrette: ...pensez-vous qu'elle a intérêt à négocier avec vous à une table sectorielle pour sa partie réglementée?

M. Lafontaine (René): Non, non.

M. Chevrette: Vous jouez sur les deux tableaux, vous autres.

M. Lafontaine (René): Excusez, ce n'est pas ça qu'on dit, M. le député. On ne dit pas qu'on va négocier avec l'APCHQ.

M. Chevrette: Non, mais vous coordonnez quel avantage? Je m'excuse, je me suis peut-être mal exprimé. Quel avantage vous avez si vous ou votre table sectorielle est réglementée, en très grande partie, puis que eux ont un pouvoir de négocier pour leur secteur où ils sont déréglementés en grande partie? Pourriez-vous m'expliquer quelles affinités vous allez avoir ensemble pour coordonner vos actions en haut? J'aimerais ça que vous m'expliquiez ça.

M. Di Muro (Richard): De toute façon, si on regarde le dossier tel que présenté par l'ACQ, d'abord, on ne propose pas la partie désyndicalisée. Ça, c'est notre position à nous.

M. Chevrette: Non, non, je comprends. Non, non. Je ne parle pas de la cohérence de votre texte. Je suis d'accord.

M. Di Muro (Richard): D'ailleurs, c'est pour ça que dans le texte on dit que si jamais il y avait un secteur d'activité non syndiqué, on dit que tout ce qui est en haut de huit logements devrait devenir du commercial, et, comme vous avez dit tantôt, là, si ça se passait comme tel, automatiquement vous auriez seulement deux parties à l'entente et non trois parties. L'autre n'aurait même pas à négocier quoi que ce soit, elle serait non réglementée. Ça fait que cette...

M. Chevrette: Non, mais vous me dites que l'APCHQ — je ne peux pas savoir quel nombre, je ne l'ai pas — l'APCHQ va demeurer, pour un petit nombre de ses membres, réglementée. Est-ce qu'on se comprend?

M. Di Muro (Richard): Bien, c'est-à-dire que si le projet de loi passe intégralement...

M. Chevrette: Passe tel quel.

M. Di Muro (Richard): Là, c'est d'autres choses.

M. Chevrette: Oui. M. Di Muro (Richard): C'est ça. M. Chevrette: S'il passe tel quel... M. Di Muro (Richard): Oui.

M. Chevrette: ...ils vont rester réglementés pour une infime partie.

M. Di Muro (Richard): Exact.

M. Chevrette: Donc, dans le résidentiel, ils vont avoir un mot à dire.

M. Di Muro (Richard): Absolument.

M. Chevrette: O.K. Si le ministre ne décide pas que c'est commercial, comme vous le demandez, comment vous allez vous retrouver, vous, dans le domaine résidentiel, pour les quelques employeurs de chez vous qui font du résidentiel par rapport aux quelques de l'APCHQ qui font du résidentiel? Comment vous allez vous retrouver dans ça? Je veux vous montrer le ridicule de la loi, en fait.

M. Lafontaine (René): S'ils sont dans le résidentiel, M. le député, c'est bien simple, ils vont être régis par la convention du résidentiel. Ce n'est pas nous autres qui allons négocier pour eux autres.

M. Chevrette: Donc, l'APCHQ peut se retrouver à une table sectorielle, si je comprends bien, pour représenter à peine quelques employeurs.

M. Di Muro (Richard): Au niveau de son champ d'application, oui.

M. Lafontaine (René): Au niveau de son champ d'application à lui.

M. Di Muro (Richard): Hé oui!

M. Chevrette: J'ai bien compris la loi. Et vous autres, vous allez avoir du monde qui va être couvert par la convention négociée par l'APCHQ, parce que vous avez un certain petit nombre de vos entrepreneurs qui oeuvrent dans le résidentiel, et qui seront donc couverts par la partie négociée par l'APCHQ pour quelques individus.

M. Lafontaine (René): Exactement. (22 h 50)

M. Chevrette: Et vous trouvez ça brillant? M. Lafontaine (René): C'est le lot de la loi.

M. Chevrette: Mais ce n'est pas ça que je vous demande. Trouvez-vous ça intelligent?

M. Lafontaine (René): Bien, à l'heure actuelle, est-ce que c'est mieux être régi dans le résidentiel par une convention qui ne fait pas leur affaire? Ils ont le même problème que nous autres.

M. Chevrette: Donc, vous allez être deux groupes frustrés?

M. Lafontaine (René): Pourquoi deux groupes frustrés?

M. Chevrette: Bien oui, mais, écoutez, vous savez très bien que ça ne représentera plus quasiment de monde. Puis on est en train de créer des tables sectorielles. Dans le fin fond, là, avec le projet de ioi comme il est là, vous allez avoir une minorité chez vous qui va être complètement déboussolée parce qu'ils n'auront pas un mot à dire dans une convention collective qui sera négociée par un groupe qui, très majoritairement, est déréglementé. C'est ça qui va arriver.

M. Lafontaine (René): Mais la majorité est faite par le gars du résidentiel, ce n'est pas nous qui avons la majorité.

M. Chevrette: Non, non, mais... M. Lafontaine (René): Alors...

M. Chevrette: ...si on déréglemente jusqu'à huit logements, M. Lafontaine, combien il va rester d'entrepreneurs de l'APCHQ qui vont être couverts? Moi, c'est le gros pratique que je veux regarder.

M. Lafontaine (René): C'est pour ça qu'on dit que le résidentiel ne devrait pas être sorti du décret.

M. Chevrette: Non, non, je vous comprends dans votre logique. Mais ce que je voulais démontrer, à toutes fins pratiques, et je pense que vous m'avez suivi, c'est que vous allez vous retrouver avec une troisième convention collective pour à peu près pas de monde dans l'APCHQ et un petit peu de monde chez vous qui va faire négocier une convention collective par une APCHQ qui ne représente à peu près pas de monde. Donc, on va avoir deux conventions collectives, à toutes fins pratiques.

M. Di Muro (Richard): Mais il reste quand même le choix des entrepreneurs; ils auront le choix d'adhérer à l'association qu'ils voudront. S'ils savent

que le poids de leur travail est négocié par une association, je pense que les jeux vont changer un peu. Ce qui se fait aujourd'hui, c'est une chose. Ce qui va se faire demain, je pense que ça va être d'autres choses. Si les gens savent que leurs heures enregistrées, pour avoir le droit de vote au niveau des relations de travail, doivent être enregistrées à la même place, je pense que nos entrepreneurs au Québec ont un petit peu d'intelligence pour savoir où aller à ce moment-là. Je présume au moins.

M. Chevrette: Oui, surtout si la représentativité est basée sur le nombre d'heures et non pas sur le nombre de personnes.

M. Di Muro (Richard): Exact.

M. Chevrette: Et vous pourriez donc vous retrouver avec une association patronale contrôlée par quatre gros donneurs d'ouvrage qui déclarent beaucoup d'heures, au détriment d'une multitude de petits qui en déclarent peu? C'est ça, la situation.

M. Di Muro (Richard): Mais là il y a...

M. Chevrette: Je vous remercie de m'avoir donné l'exemple.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Joliette. Maintenant, M. le député de Drummond, s'il vous plaît.

M. St-Roch: oui. merci, m. le président. m. lafontaine, dans la même foulée que mon collègue de joliette pour bien comprendre votre mécanique et ce que vous proposez... à l'heure actuelle, avec la loi 142 telle qu'elle existe, si je comprends bien, il y a 85 % du résidentiel qui sort. or, il reste 15 % qui va être assujetti entre vous et l'apchq. je suis correct jusqu'ici?

M. Di Muro (Richard): Si le jeu d'adhésion à une association demeurait le même, si demain matin la loi passe, puis les gens ont...

M. St-Roch: ...

M. Di Muro (Richard): C'est ça. Ça va être quoi les modalités de choisir son association? On ne le sait pas.

M. St-Roch: Si j'accepte votre proposition et si je prends votre définition telle que proposée là, que «résidentiel», c'est «unifamilial, duplex ou une maison semi-détachée», si on dit: Bon, ça, ça va être encore... On parle de combien de pour cent à ce moment-là? Est-ce que vous l'avez figuré?

M. Di Muro (Richard): Bien, c'est sûrement 70 %, 75 % de ce qui se fait dans l'habitation.

M. St-Roch: alors, à ce moment-là, si c'est 70 %, 75 %, la partie patronale, à ce moment-là, c'est l'apchq?

M. Di Muro (Richard): Absolument. M. Lafontaine (René): Oui.

M. Di Muro (Richard): Oui, au niveau de l'habitation, c'est correct, ça. C'est bien beau. On ne veut pas faire une guerre d'associations, là.

M. Lafontaine (René): Ce n'est pas une guerre.

M. Di Muro (Richard): On veut régir une industrie par secteur d'activité. C'est l'opportunité qu'on a dans le projet de loi, et je pense que c'est une façon de faire qui est, d'après moi, sûrement intelligente. Ce n'est pas une bataille d'associations.

M. St-Roch: Puis, lorsque vous mentionnez de réintroduire tous les travaux de rénovation...

M. Di Muro (Richard): Oui.

M. St-Roch: ...c'est tout, j'imagine que c'est tout ce qui requiert un permis dans une municipalité.

M. Ratté (Jean): Oui, mais c'est plus que ça. Il faut retourner en 1988, lorsqu'on a désassujetti la rénovation. Lorsqu'on a désassujetti, monsieur, la rénovation, le ministre Paradis d'alors nous avait parlé de menus travaux ou encore... c'était succinct, c'était petit, et là on élargissait à l'ensemble de la rénovation sans prévoir que la rénovation allait prendre tellement d'ampleur que ça allait surpasser le résidentiel neuf. On se souvient de 1988, alors que nous étions la seule association à dire: On veut que ça se maintienne dans la construction, parce que vous commencez déjà à désassujettir et ça va avoir un effet d'entraînement. Et aujourd'hui, on s'aperçoit qu'il peut y avoir un effet d'entraînement, et que c'est dangereux. Aussi bien on a enlevé la compétence, la qualification des entrepreneurs ou la compétence des travailleurs, etc., dans la rénovation, eh bien! on a encore des problèmes, on voit qu'on a des problèmes avec l'Office de la protection du consommateur, surtout dans la rénovation. Et le danger, c'était l'effet d'entraînement. Puis là ils progressent. À savoir jusqu'où ça va arrêter, on ne le sait pas. Mais ça tient de la philosophie que nous sommes tannés, si vous voulez, des exclusions qu'on nous met à tous les deux ans ou cinq ans dans la construction. On rétrécit le champ d'activité des entrepreneurs puis, après ça, on nous parle de planification, de stabilisation.

M. St-Roch: Est-ce que je suis logique d'assumer... Si on dit: Tous les travaux de rénovation dans le secteur de la construction... si j'étends ça, moi, parce

qu'il va falloir contrôler ça quelque part... Si je dis: C'est ce qui va requérir... Si je regarde les règlements d'urbanisme, avec les unions municipales puis l'UMRCQ, ça a tendance à s'uniformiser, ça, les règles d'urbanisme. Alors, si on dit: C'est tout ce qui requiert un permis d'une municipalité qui va être inclus là, c'est ça qu'on va prendre comme définition, d'être inclus dans les travaux de rénovation, est-ce que ce serait acceptable?

M. Lafontaine (René): Ça pourrait être ça. M. St-Roch: Ça pourrait être ça?

M. Ratté (Jean): Oui, la Régie a même les pouvoirs actuellement, la Régie, sauf que ce n'est pas mis en application. Mais elle a le pouvoir de prendre des ententes avec les municipalités. Le malheur, c'est un pouvoir de prendre des ententes et non pas une obligation envers des municipalités de donner à la RBQ les émissions de permis qu'elle a.

M. St-Roch: Merci.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Joliette pour une très courte question.

M. Chevrette: Oui, une très courte question sur le placement, c'est-à-dire la mobilité de main-d'oeuvre et de placement. Vous savez que les travailleurs auront à choisir leur région. Comme les grands travaux, ce n'est pas nécessairement planifiés du tout présentement, je prends un exemple. Québec peut avoir le Colisée en même temps que Gaz Métropolitain puis en même temps que le palais des congrès, par exemple. Il y a à peu près 75 000 travailleurs, parce qu'il n'y a pas d'autres travaux ailleurs, qui choisissent la région de Québec. Qu'est-ce qui va arriver? Est-ce qu'on va remettre de l'ordre dans l'industrie de la construction en faisant ça, en donnant une affluence, par exemple, vers une région, alors qu'on ne l'a pas, cette planification de travaux, vous le savez, malgré les recommandations du rapport Cliche à l'époque et tout? Et on peut anticiper que des travaux, ça se télégraphie deux, trois ans d'avance, des grands travaux. Ce n'est pas: Demain matin, je bâtis une maison. C'est soumissions publiques, c'est promesses, c'est engagements, puis, tout d'un coup, cette même année, tu vas avoir trois immenses constructions dans une ville. Si les gens d'ailleurs... Qu'est-ce qui va arriver? Vous n'anticipez pas de difficultés, vous?

M. Lafontaine (René): Je crois que c'est prévu, M. le député, que, même si la personne qui vient de l'Abitibi-Témiscamingue, qui n'a pas d'ouvrage et qui s'en va dans la région de Joliette parce qu'il y a de l'ouvrage, il est prévu qu'elle passe après ceux de la place.

Une voix: C'est ça, en deuxième.

M. Lafontaine (René): Elle passe en deuxième et, en passant en deuxième, peut-être qu'elle pourrait être pénalisée parce que ce sera à elle de vivre avec ses choix. Mais ce n'est pas parce qu'elle va avoir donné son nom, si j'ai bien compris la loi, ce n'est pas parce qu'elle a donné son nom dans la région de Joliette qu'elle va être engagée automatiquement, elle va passer après les gens de la région de Joliette.

M. Chevrette: Mais si je m'inscris à Joliette...

Le Président (M. Joly): M. le ministre aimerait apporter, je pense, un éclaircissement à cette question

M. Chevrette: C'est beau.

M. Cherry: Si ça pouvait aider. Il s'agit, évidemment, de rappeler aux gens, et on semble l'oublier là, on semble penser que ça va être une procédure qui va durer de façon permanente. Il faut bien convenir qu'il s'agit d'une mesure transitoire qui va être en vigueur uniquement tant que chacun des secteurs n'aura pas négocié sa convention collective, à l'intérieur de laquelle on va trouver ça, plutôt que de la réglementation, puis se faire accuser, par ailleurs, que c'est le gouvernement qui décide. Ça va se faire comme ça se fait. Je donne l'exemple en Ontario. On va retrouver ça à l'intérieur de chacune des conventions collectives. Et, au moment où tu auras eu une première convention collective qui aura décidé de ça, la mesure transitoire prend fin. Donc, ce n'est pas quelque chose qui va se répéter, choisir à chaque fois. Pour être bien précis, et je pense que M. Lafontaine répondait très bien à ça, même si quelqu'un d'une région autre décidait de venir travailler, pour prendre votre exemple, à Québec, les gens qui ont priorité d'embauché, c'est ceux qui habitent déjà la région de Québec et qui veulent travailler là et, ensuite, ceux des autres régions.

M. Chevrette: Mais je suis votre raisonnement, M. le ministre, et je vais m'adresser au ministre...

Le Président (M. Joly): J'aimerais que ce soit assez court, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Oui, mais on s'entend bien là, M. le Président?

Le Président (M. Joly): Oui, ça va bien. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Pour une fois qu'on s'entend pas pire. (23 heures)

Le Président (M. Joly): C'est parce que les membres... Ha, ha, ha!

M. Chevrette: J'ai une question à poser au ministre. Supposez qu'une convention collective... le placement, ce n'est pas à l'article 61 et à l'article 48... ce n'est pas marqué que le placement dans l'industrie de la construction relève d'un tronc commun. Est-ce que c'est possible, par exemple, que les gens qui auront négocié un régime de placement différent, d'une convention à une autre... Qu'est-ce que vous faites avec ça?

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Cherry: Ce que vous soulevez, est-ce que, techniquement, c'est quelque chose de possible?

M. Chevrette: Bien, je vous donne un exemple. Supposons que l'APCHQ, pour donner un exemple, négocie la priorité absolue sans 12-12, sans aucune mobilité interrégionale, même pas pour les hommes clés. C'est possible, ça, qu'ils s'entendent entre eux autres, puis ils disent: Oui, vous avez bien raison...

M. Cherry: C'est possible.

M. Chevrette: ...nous autres, dans une région, on prendra...

M. Cherry: Pour répondre à votre question, oui, c'est possible.

M. Chevrette: Et l'autre convention collective, parce qu'il y en a qui se chevauchent, l'autre convention collective, sur le plan théorique, c'est possible que, moi, j'aie un système de placement basé, par exemple, parce que je m'entends bien avec les syndicats, pour faire appel exclusivement aux bureaux syndicaux pour le placement?

M. Cherry: Évidemment, là, je sais que vous ne l'avez pas mentionné, mais vous savez aussi que, quand on s'adresse à ces gens-là, on parle des mêmes centrales présentes avec lesquelles ils négocient aussi.

M. Chevrette: Oui, mais je parle...

M. Cherry: C'est les mêmes partenaires l'autre bord de la table, là.

M. Chevrette: Oui, mais je parle de trois...

M. Cherry: C'est du monde qui recherche des solutions pratiques, ils veulent que ça marche.

M. Chevrette: Non, non.

M. Cherry: Donc, en théorie, vous avez raison: Est-ce que c'est possible? Mais en pratique, ça me semblerait peu plausible, là...

M. Chevrette: Non, non. L'ACQ sera...

M. Cherry: ...que les mêmes intervenants, même dans des secteurs différents, négocient des choses juste pour se créer des problèmes.

M. Chevrette: Non, non, M. le ministre. L'ACQ, elle ne sera pas à deux tables. Elle va être à une table.

M. Cherry: Mais les syndicats sont les mêmes. C'est ça que je dis.

M. Chevrette: Écoutez bien. Si je gagne une clause de placement basée sur mes bureaux syndicaux dans les grands travaux routiers, pensez-vous que je vais tenir compte du fait que l'ACQ ne me veut pas à sa table? Voyons! Si je suis le syndicat, je vais me battre pour aller chercher le maximum à chacune des tables. Voyons, M. le ministre! C'est pour ça que, depuis le début, il y a quelque chose qui accroche.

M. Cherry: Non, c'est parce que tu ne peux pas négocier l'exclusivité. Il y a quand même des choses que tu ne peux pas négocier. La loi, elle le dit là.

M. Chevrette: Champ d'application... Vous n'êtes plus là comme ministre, vous. Vous parlez d'un tronc commun. Mais tout le reste d'une convention collective, c'est négociable, sinon, ça veut dire quoi, votre loi? Ce n'est pas marqué qu'on doit exclure tel objet de négociation.

M. Cherry: II y a des interdits. Il y a des interdits, c'est marqué dans la loi. Il y a des choses que tu ne peux pas négocier.

M. Chevrette: En tout cas, vous me prouverez ça...

M. Cherry: Non, mais c'est marqué dedans.

M. Chevrette: ...quand on étudiera article par article.

M. Cherry: O.K. «Fine». Parfait.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Je tiens juste à souligner, de façon à ce qu'il n'y ait pas de doute, que j'ai accordé 15,25 minutes au côté ministériel et 21 minutes au côté de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, soyez-en remercié.

M. Cherry: Bon! Encore une fois!

Le Président (M. Joly): Alors, j'imagine qu'on prendra ça en considération si jamais je me trompe de 20 ou 25 secondes.

Une voix: Considérez-vous comme remercié.

Une voix: Six minutes de plus.

M. Cherry: Six minutes de plus à l'Opposition.

M. Chevrette: On «peut-u» vous voter un vote de félicitations, M. le Président?

M. Cherry: Bon! Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Non, ça ne donnerait pas grand-chose. Alors, M. le ministre...

M. Cherry: Merci beaucoup.

Le Président (M. Joly): Merci.

Une voix: On vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de la commission, je tiens à remercier les gens de l'Association de la construction du Québec. Nous ajournons nos travaux à demain, jeudi, le 2 décembre, après les affaires courantes, et ce, selon l'horaire des commissions parlementaires. Bonsoir. Merci.

(Fin de la séance à 23 h 4)

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