L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le jeudi 13 avril 1995 - Vol. 34 N° 27

Étude des crédits du ministère de l'Emploi et de la ministre d'État à la Concertation


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Volet main-d'oeuvre

Volet concertation

Volet emploi

Adoption de l'ensemble des crédits


Autres intervenants
M. Gérald Tremblay, président
M. Michel Bissonnet
Mme Lyse Leduc
M. Robert Kieffer
M. Michel Côté
*Mme Diane Bellemare, SQDM
*M. Pierre Laflamme, Secrétariat à la concertation
*M. Jean-Marc Boily, ministère de l'Emploi
*M. Normand Gauthier, idem
*M. Jacques Henry, idem
*M. Yves Dulude, Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre
*M. Jean-Guy Rivard, CNT
*M. Jean-Claude Riendeau, RBQ
*M. André Ménard, CCQ
*M. Pierre Shedleur, CSST
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures huit minutes)

Le Président (M. Tremblay): Alors, je constate que nous avons quorum. Je déclare la séance ouverte.

Je voudrais rappeler le mandat de la commission, qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère de l'Emploi et de la ministre d'État à la Concertation, pour l'année financière 1995-1996.

Tel que convenu entre les parties, jusqu'à 11 heures, nous allons terminer l'étude des crédits en ce qui concerne la main-d'oeuvre et nous allons, à 11 heures, voter ces crédits, et aussi l'intention de permettre à la ministre des remarques finales, ainsi qu'au critique de l'opposition. Par la suite, de 11 heures à midi, la Concertation; donc, des remarques préliminaires de la ministre et des remarques du critique de l'opposition en matière de concertation, un échange. Et, par la suite, nous voterons ce programme. À midi, nous allons discuter du programme concernant l'Emploi avec la critique officielle, la députée de Saint-François, et la ministre de l'Emploi.

Alors, je demanderais à la secrétaire d'annoncer les remplacements.

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon) remplace Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata); et M. Charbonneau (Bourassa) remplace M. Gobé (LaFontaine).

Le Président (M. Tremblay): Alors, M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, à ce moment-ci, je voudrais vous dire que mon collègue, le député de Jeanne-Mance, aurait une question bien particulière à poser sur un programme, et, ensuite, nous pourrons reprendre certains des éléments de discussion en cours depuis hier.

(10 h 10)

Le Président (M. Tremblay): Alors, M. le député de Jeanne-Mance.


Volet main-d'oeuvre


Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre (SQDM) (suite)


Programme d'adaptation pour les travailleuses et travailleurs âgés

M. Bissonnet: Merci, M. le Président. Mme la ministre, je vous en ai déjà parlé un peu à l'Assemblée. Moi, les questions que j'ai à vous poser, c'est sur le Programme d'adaptation pour les travailleuses et travailleurs âgés. Je remarque que, dans les crédits pour l'année 1994-1995, il y avait 18 000 000 $, et je note que les prévisions sont de 10 000 000 $. Je remarque également qu'au niveau des collectivités la plupart des fermetures d'usines sont souvent reliées au textile. Lorsqu'on parle de collectivités, quand une usine ferme dans votre comté, les critères pour le nombre d'employés licenciés requis sont de 100, et, si l'usine est située dans ville d'Anjou, qui est une population entre 20 000 et 40 000, les critères sont de 40 employés. Alors, ce qui arrive, c'est que, comme nous sommes tous sur la Communauté urbaine de Montréal, alors, je crois que lorsque des entreprises sont situées dans les limites de Montréal ou qu'elles sont dans Montréal-Nord ou dans ville d'Anjou ou Saint-Léonard, ces usines-là ne sont pas traitées avec équité, et je crois que le nombre d'employés minimum requis cause souvemt des préjudices à beaucoup de travailleurs.

Il y a également les critères où le programme dit que c'est 55 ans d'âge et qu'il faut avoir 15 années de service. Il y a des personnes qui, lorsqu'il y a une fermeture, ont peut-être 54 ans, ou 53 ans, mais ils ont plus de 35 années de service. Je ne sais pas s'il est possible, Mme la ministre, d'étudier la possibilité que le critère d'âge et le nombre minimum d'années de service... Mais est-ce que vous pourriez penser à la possibilité, pour quelqu'un qui n'a pas 55 ans, qui est entre 50 et 55 ans et qui a plus de 30 années de service, de modifier ce programme?

Je sais que c'est un programme conjoint, mais, moi, dans mon comté, j'ai plusieurs cas où les gens ont 54 ou 53 ans, avec plus de 35 années de service, et ils ne sont pas éligibles, ils ont de la difficulté, surtout lorsqu'ils sont dans le textile, de se trouver d'autres emplois. Je ne sais pas où vous en êtes rendue dans les négociations avec le gouvernement fédéral sur ce sujet. J'ai sensibilisé le député fédéral de mon comté à plusieurs reprises sur les critères de ce programme, et j'aimerais vous entendre là-dessus, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, je remercie le député de Jeanne-Mance de sa question. Ça va me permettre de faire le point avec les membres de la commission sur le dossier concernant les travailleurs âgés de 55 ans et plus qui sont licenciés. Comme l'a signalé le député de Jeanne-Mance, en vertu des ententes fédérale-provinciales signées il y a déjà six ans par le précédent gouvernement et renouvelées il y a maintenant de cela, je crois, deux ans, le partage des coûts se fait 70 % à la charge du fédéral et 30 % à la charge des provinces. Et les critères qui sont élaborés pour l'attribution de cette allocation de retraite, en fait, suite à un licenciement, suite à la fermeture d'une entreprise de travailleurs âgés, eh bien, ces critères tiennent compte de la taille des municipalités. À maintes occasions, M. le Président, j'ai eu l'occasion, ici même dans ce parlement, dans cette enceinte, de dire à quel point ce critère de la taille des municipalités était discriminatoire puisqu'à Montréal, dans une ville de plus de 300 000 habitants, l'entente préalablement signée suppose une mise à pied de plus de 100 employés pour qu'il y ait admissibilité au Programme d'adaptation pour les travailleuses et travailleurs âgés, particulièrement, et le député de Jeanne-Mance l'a signalé, dans le secteur de l'habillement, dans le secteur du textile, où la majorité des ateliers, c'est-à-dire plus de 92 % des ateliers, comptent en moyenne 42 employés, je crois. C'est donc dire que si, sur papier, il y a un programme d'aide aux travailleurs âgés, dans la réalité, il ne s'applique pas dans des secteurs complets, notamment l'habillement, ou encore dans les secteurs qui sont à franchise, comme les Magasins M ou les magasins Steinberg, puisque les critères sont à l'effet de ne considérer que le magasin franchisé et non pas l'ensemble de l'entreprise qui interrompt ses opérations et ferme ses portes.

Alors, j'ai écrit à mon homologue fédéral, et je lui ai proposé de renouveler le partage 70 %-30 %, mais de renégocier les modalités. Entre-temps, cependant, M. le Président – et je crois que ça va réjouir le député de Jeanne-Mance; j'ai vraiment pour lui une bonne nouvelle aujourd'hui – à défaut, là, de pouvoir obtenir la participation financière d'Ottawa, comme le précédent gouvernement l'avait demandée vainement à partir de décembre 1991, suite à la publication du plan stratégique du Grand Montréal par le ministre responsable à l'époque et président du Conseil du trésor et l'actuel chef de l'opposition, qui avait réclamé une révision des normes du programme PATA et qui avait annoncé son intention d'inclure les licenciements dans les entreprises montréalaises de 20 employés et plus dans le secteur de l'habillement, et qui avait également annoncé y consacrer 5 700 000 $ à la condition que le fédéral y injecte sa contribution de 70 %, qui équivalait à 13 500 000 $, selon les modalités de partage dont je vous ai parlé tantôt, 30 %-70 % prévues dans l'entente PATA. Alors, depuis décembre 1991, à défaut, donc, d'une participation financière d'Ottawa, le gouvernement du Québec avait laissé tomber les bras.

Alors, compte tenu de l'engagement que nous avions pris à l'occasion de la campagne électorale, la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre a choisi d'assumer le financement d'une phase I, d'une première phase, là, d'une mesure spéciale d'adaptation qui va couvrir les licenciements de 20 employés et plus dans les industries de vêtements à Montréal, et, au total, c'est 4 000 000 $ de plus que le gouvernement du Québec a accepté de verser à 397 travailleuses – quelques travailleurs, mais c'est particulièrement des travailleuses – du secteur de l'habillement qui ont été mis à pied entre 1986 et fin 1991, je crois. Ça, c'est la phase I. Et nous projetons une phase II à négocier avec le gouvernement fédéral, pour la présente année.

Alors, nous pensons que ça va d'abord mettre un terme au traitement discriminatoire dont ces travailleuses et travailleurs ont été victimes. D'autre part, nous réalisons l'annonce qui avait été faite par le précédent gouvernement. Nous respectons également notre propre engagement, et nous pensons que ça pourra servir d'incitation au gouvernement fédéral pour ne pas résister à notre proposition qui est de partager la phase II pour ces travailleuses et travailleurs.

Et le député de Jeanne-Mance a raison de dire qu'un très grand nombre de personnes – je l'ai vérifié personnellement – habitent à Saint-Léonard. Je ne dirais pas que c'est le tiers, mais ce sont en fait des travailleuses souvent d'origine immigrante qui travaillaient dans le secteur du textile à Montréal. Donc, on va de l'avant avec la phase I, et c'est pour ça que, dans les crédits, vous retrouvez des dépenses de 18 000 000 $. En fait, les dépenses ont été majorées de 8 000 000 $ à l'égard de ce qui avait été voté l'an dernier, qui était de 10 000 000 $. Alors, le montant de 8 000 000 $ de plus se répartit ainsi: ce PATA Habillement, que Québec finance à 100 %, et également un programme de retraite anticipée dont j'ai parlé hier, ici, à cette commission en faveur des travailleurs âgés de MIL Davie.

Alors, c'est donc la situation dans laquelle on se retrouve, mais je recevais, le 5 avril dernier, une lettre du ministre fédéral responsable du programme PATA, Lloyd Axworthy, qui me faisait part de l'intention du gouvernement fédéral de réduire de 15 % le budget fédéral alloué au programme PATA. Alors, c'est donc près de 15 000 000 $ de moins dont le programme PATA pourra disposer au niveau fédéral pour la prochaine année.

Alors, je veux assurer le député de Jeanne-Mance que notre intention est de faire tout notre possible dans le contexte, cependant, où nous croyons qu'Ottawa doit aussi faire sa part dans ce programme.

(10 h 20)

M. Bissonnet: Quand vous dites: dans Montréal, est-ce que c'est seulement la ville de Montréal ou la Communauté urbaine de Montréal? Quand vous dites que la phase I que vous allez mettre en opération, ça va être à Montréal, est-ce que c'est l'île de Montréal? Parce que, vous savez, quand on est à Montréal, qu'on soit à Saint-Léonard, qu'on soit à Anjou ou à Montréal-Nord, ces usines-là sont réparties sur le territoire. Donc, quand on parle de Montréal, j'aimerais mieux que vous parliez de la Communauté urbaine de Montréal, puisque, pour être éligible à votre programme phase I, les employés qui ont travaillé soit dans des usines à ville d'Anjou, où les critères sont moindres... Vous allez noter qu'ils sont moindres. Ils sont à 40 %, parce qu'ils sont à 40 000 de population. Mais peut-être regarder que ce programme, en phase I, s'applique à toute l'île de Montréal.

Ma question, surtout, la deuxième question, et j'y reviens, vous savez, dans une entreprise, quelle qu'elle soit, en moyenne, une personne qui a 32 ans de service ou 35 ans de service, elle obtient sa pension. Alors, pour des travailleurs qui sont entrés dans une entreprise de textile à l'âge de 16, 17 ans, lorsque l'entreprise ferme, ils se retrouvent – plusieurs travailleurs, pas une quantité nombreuse – entre 51 et 55 ans; ils n'ont pas 55 ans. Il y en a qui ont même jusqu'à 38 ans de service. Et, lorsque l'entreprise ferme, le travailleur a 54 ans et huit mois. Donc, lui, de se relocaliser dans le même domaine, c'est difficile. Je ne sais pas s'il pourrait y avoir un critère dans le programme PATA, le critère d'âge de 55 ans et 15 années de service ou plus de 32 ou de 35 ans de service dans la même entreprise. Je pense que c'est des cas limites, là, mais il y en a quelques-uns. Et ces gens-là ont de la difficulté à retrouver un emploi dans le même domaine où ils travaillaient.

En tout cas, je sais que j'en ai plusieurs cas comme ça, moi. Ils ne sont pas éligibles parce qu'il leur manque trois semaines, deux semaines. Alors, c'est un critère de justice équitable, là, que je suggérerais d'ajouter aux critères d'années de service et d'âge.

Je ne sais pas si ce serait ou 32 ans ou 35 ans de service. Vu que c'est un programme pour travailleurs âgés, ils sont sur la limite, mais, à cause de leur âge et à cause de leurs nombreuses années de service, dans la plupart des programmes, on veut mettre les gens en préretraite, souvent, à l'âge de 50 ans ou 55 ans.

Mme Harel: Alors, monsieur...

M. Bissonnet: En politique, vous savez, on est jeune, à 53 ans ou à 56 ans, mais, dans l'habillement, quand on a fait plus de 35 ans de service... En tout cas, je pense qu'un critère pourrait être ajouté pour couvrir certains employés qui sont entre 50 et 55 ans, mais de plus de 32 ans de service.

Le Président (M. Tremblay): M. le député de Jeanne-Mance, est-ce que certains travailleurs, par exemple, de l'entreprise Irving Samuel, seraient dans une situation comme celle-là?

M. Bissonnet: J'ai rencontré des travailleurs de la compagnie Irving Samuel. Je les ai rencontrés à plusieurs reprises. Je ne sais pas si le couturier veut reprendre ça, là. Je ne les ai pas revus depuis deux semaines, mais je vais les voir la semaine prochaine. Je sais qu'il y en a qui sont éligibles au programme PATA, mais je ne sais s'il y en a qui sont entre 50 et 55 ans, parce que la compagnie Irving Samuel, ça fait à peu près 25 ans qu'elle est en opération. Je ne sais pas, là. Alors, ça ne couvrait pas ces employés-là. Alors, Mme la ministre, qu'est-ce que vous allez faire pour ces bons citoyens-là qui ont de l'espoir en vous?

Mme Harel: Vous êtes bien gentil, je vous remercie. J'espère d'abord ne pas les décevoir en tentant de négocier pour eux, peut-être avec l'appui de votre voisin, le député de Bourassa également, qui pense que c'est facile de négocier avec le fédéral. Mais je vous dis simplement, à votre première question, le PATA Habillement, que le gouvernement du Québec va financer à 100 % dans sa phase I, c'est un PATA Habillement qui s'adresse à toutes les fermetures d'entreprises de 20 employés et plus. Alors, c'est donc sans limite territoriale, là. Cependant, je comprends que ça couvre essentiellement les ateliers qui ont fermé dans la ville de Montréal, puisque, comme vous le mentionniez, dans les villes de l'île qui sont de taille, donc, de population moindre, le critère était diminué. Et vous avez donné l'exemple d'Anjou, où c'est une mise à pied de 40 personnes qui rend admissible au programme PATA, tandis que, juste sur la rue à côté, si c'est dans les limites territoriales de la ville de Montréal, c'est une mise à pied de 100 personnes qui rend les travailleurs âgés admissibles au programme PATA. Donc, dès qu'il y a eu mise à pied de plus de 20 employés, où que cette mise à pied se soit produite, alors, ça n'est donc pas l'adresse civique de la personne évidemment mise à pied, mais celle de l'entreprise qui a fermé. Donc, pour la plupart, à ma connaissance, c'est sur le territoire de la ville, mais ça n'exclut aucune fermeture, y compris à Outremont, parce que je sais qu'il y en a eu également sur le territoire de la ville d'Outremont, mais le critère n'étant que celui d'une mise à pied, de 1986 à la fin 1991, de 20 employés et plus dans le secteur de l'habillement.

M. Bissonnet: Est-ce que c'est possible de déposer la liste de ces entreprises-là, de nous faire parvenir les...

Mme Harel: Certainement, certainement.

M. Bissonnet: Si c'est possible.

Mme Harel: Absolument. On peut vous faire parvenir, y compris, si vous le souhaitez aussi, la liste. D'ailleurs, c'était entendu que chaque député allait recevoir copie de la lettre – chaque député, surtout de l'île de Montréal, parce que je pense que, principalement, pour ne pas dire à 98 %, les personnes concernées se retrouvent à habiter sur l'île. Alors, il était entendu que chaque député de l'île de Montréal allait recevoir copie de la lettre qui confirmait l'admissibilité au programme, mais on peut vous faire parvenir, définitivement, la liste des entreprises.

M. Bissonnet: En ce qui a trait au caractère de l'âge, de 55 ans et plus, et vis-à-vis des années de service, est-ce que vous avez quelque chose à nous dire là-dessus?

Mme Harel: Oui. Effectivement, suite à la correspondance échangée avec le ministre fédéral, ce dernier, comme je vous le mentionnais tantôt, m'écrivait ceci, et je vais citer: «Par conséquent, dans le contexte d'une révision de programme, je vous invite à me faire part de votre point de vue concernant l'aide aux travailleurs âgés, dans le futur, et la nature du partenariat fédéral-provincial concernant le PATA.»

Ce que nous avons renouvelé, c'est, pour tout de suite, l'arrangement financier du partage des coûts 70 %-30 %. Mais, pour le reste, c'est à être négocié. Donc, il est de notre intention de revoir tous ces critères, en vous signalant que la modification introduite lors de la deuxième signature, à savoir, la diminution de 15 à 13 ans du nombre d'années d'expérience requises, dans les 20 dernières années, pour rendre admissible un travailleur ou une travailleuse de plus de 55 ans au PATA, a augmenté de façon sensible la représentation des femmes, disons, au bénéfice du programme. Mais ça reste encore un tiers-deux tiers pour les travailleurs masculins. Parce qu'on sait, souvent, que les travailleuses n'ont pas pu accumuler, dans les 20 dernières années, 15 années d'expérience de travail et, par le passé, n'arrivaient pas à se qualifier, au chapitre de secrétaires, d'années d'expérience. Alors, en diminuant à 13 années, ça a eu une augmentation assez intéressante. Je vous réfère à l'onglet 13, à la question 13 de l'opposition, dans les renseignements particuliers qui ont été transmis à l'opposition. Et vous retrouverez à cet onglet 13 l'ensemble des tableaux qui vous donnent le portrait de la situation des secteurs économiques et du critère du sexe, également, quant aux bénéfices du programme PATA.

Cependant, pour avoir un portrait complet, j'ajoute ceci. Bon an mal an, depuis la signature du programme PATA, qui est intervenue à l'automne 1986, depuis lors, le Québec allait chercher environ 50 % du budget fédéral, qui était de l'ordre de 54 000 000 $ à 56 000 000 $. Alors, la part du Québec a varié entre 27 000 000 $ à 28 000 000 $ depuis donc déjà bientôt sept ans – un peu plus.

Et, pour l'année 1995-1996, le budget fédéral étant amputé de 15 %, donc passant de 54 000 000 $ à environ 40 000 000 $, alors, c'est évident qu'il y a là une baisse substantielle dans ce que le Québec peut souhaiter et espérer aller chercher.

Je vous fais part qu'il y aura donc des difficultés, compte tenu des coupures déjà annoncées par le gouvernement fédéral dans le partage du programme d'aide aux travailleurs âgés licenciés.

M. Bissonnet: J'ai pris bonne note que, évidemment, c'est passé de 15 à 13, mais, prenez une travailleuse qui travaille pour une entreprise x, ça fait 37 ans qu'elle travaille et elle a 54 ans. Elle n'est pas éligible au programme PATA. Ne croyez-vous pas qu'il pourrait y avoir certains changements pour reconnaître les années d'expérience dans un... je parle surtout dans le textile, où, à 54 ans, là, avec 38 ans d'expérience, on a extrêmement de difficultés à se trouver un autre endroit. Alors, il n'y a rien pour ces personnes-là. Je parle des cas qui sont «borderline», qui sont sur la limite. C'est sur ça que je voudrais que vous puissiez réfléchir.

Mme Harel: Alors, vous nous donnez l'exemple de travailleuses qui ont moins de 55 ans...

M. Bissonnet: Une dame qui a commencé à 16 ans; l'usine est fermée, elle a 54 ans et 10 mois. Ça prend 55 ans puis 13 années de service. Elle a ses 13 années; elle n'a pas 55 ans, malheureusement. Mais il faut trouver l'espace pour reconnaître les années de service. C'est pour ça que je vous dis que ça peut être plus de 35 ans, ça peut être plus de 32 ans, où les gens ont, en moyenne, entre 50 et 55 ans, puis il faut qu'ils aient été dans la même usine. Donc, ça veut dire que... C'est ces cas-là, j'en ai quatre ou cinq, moi, que je pourrai vous transmettre. Ils vont voir le député fédéral, le député provincial, sauf qu'ils ne sont pas éligibles puis ils sont dans des entreprises qui ont plus de 100 employés, en plus, quand ils sont dans Montréal, mais, à cause de l'âge, le critère de l'âge, on ne reconnaît pas le critère des années de service.

(10 h 30)

Et, dans tous les programmes de conventions collectives, il y a toujours la reconnaissance de l'ancienneté, des années de service, mais, dans le programme PATA, on a une petite clientèle, là, qui peut être à peu près une trentaine, parce que ceux qui ont travaillé plus de 35 ans dans la même entreprise, dans le textile en particulier, c'est assez rare. Mais il y en a quand même.

C'est ce côté-là, moi, le côté humain auquel je vous sensibilise ce matin.

Mme Harel: En fait, vous souhaiteriez qu'il y ait, j'imagine, une addition...

M. Bissonnet: Le critère 55 et 13 ans ou plus de 30 ans, disons 32 ans de service.

Mme Harel: Une combinaison des deux...

M. Bissonnet: Oui, c'est-à-dire...

Mme Harel: ...c'est-à-dire à la fois l'âge et les années d'expérience additionnés.

M. Bissonnet: ...55 ans et 13 ans de service.

Mme Harel: Oui.

M. Bissonnet: Parce que, 13 ans de service, vous parlez à des gens qui entrent dans l'entreprise à 42 ans. Et, à ce moment-là, le critère... ou plus de 32 ans de service, ou de 35 ans. Mais on donne une chance aux gens qui sont là depuis qu'ils ont 17, 18 ans d'être éligibles à ce programme-là.

Ce n'est pas un gros changement à apporter, mais on rend justice à des femmes et à des hommes qui travaillent là depuis l'âge de 17 ans. Ça, c'est ce critère-là qui pourrait être ajusté. Je pense qu'on ne couvre pas beaucoup de gens avec ça, mais, ceux qu'on couvre, les gens qui seraient couverts, on leur rendrait une justice équitable par rapport à tous les employés dans cette entreprise-là.

Mme Harel: M. le député de Saint-Léonard, en fait, vous plaidez... Oh! mon Dieu, de Jeanne-Mance, excusez-moi.

M. Bissonnet: Vous savez, je n'ai pas de problème avec ça, moi.

Mme Harel: Ha, ha, ha! Est-ce que l'un est l'autre, ou presque? L'un correspond à la population de l'autre, ou à peu près?

M. Bissonnet: Moi, j'ai deux tiers de mon comté dans la belle ville de Saint-Léonard et j'ai... Non, j'ai trois quarts dans Saint-Léonard, un quart dans Montréal, et je tiens à vous dire que la section que j'ai, la paroisse Saint-René-Goupil, je suis dans le comté de Hochelaga-Maisonneuve. On va se comprendre.

Mme Harel: D'accord. Je connais le secteur dont vous parlez. Alors, je comprends que ce que vous souhaiteriez, c'est qu'on revienne à la combinaison qui existait avant 1986 dans le programme d'aide aux travailleurs âgés et qui combinait d'exiger un test de 80, en fait, l'âge et les années d'expérience. Alors, ça, c'est le fédéral qui a choisi de mettre ça de côté en 1986, lorsque le programme PATA tel qu'on le connaît maintenant a été signé pour remplacer le programme précédent. Alors, vous nous dites souhaiter que l'on puisse réintroduire ce critère-là dans les négociations?

M. Bissonnet: Un autre critère.

Mme Harel: C'est intéressant, parce que c'est un critère qui est plus équitable, celui qui combine à la fois l'expérience et l'âge. C'est d'ailleurs ce critère, je pense, généralement, qui est utilisé dans les régimes de retraite privés, publics aussi.

M. Bissonnet: Mais je voudrais que le critère maximum soit l'âge, qu'en haut de 55 ans on ne puisse pas l'additionner, parce qu'ils sont automatiquement éligibles. Bien, c'est-à-dire qu'à 55 ans ils sont éligibles s'ils ont plus de 13 ans. Mais si vous avez un critère d'âge plus les années de service qui arriverait, par exemple, à 85, alors on serait au moins avec 30 années de service, là.

Mme Harel: Alors, là, il faut comprendre que, bon an mal an, c'est environ 700 demandes qui sont examinées par le comité conjoint Québec-Ottawa sur l'application du programme PATA, environ 700 demandes suite à des licenciements. Ça signifie à peu près 700 licenciements. On voit bien que, surtout dans certains secteurs, il y a eu des années de restructuration qui ont vraiment fait connaître beaucoup, beaucoup d'ébullition à certains secteurs, notamment dans l'habillement, mais vous avez aussi la liste de tous les secteurs économiques, depuis octobre 1988. Vous vous rendez compte que certains, vraiment, ont été plus en demande. Je pense en particulier aux secteurs des produits électriques et électroniques, au matériel de transport, de fabrication des produits métalliques, etc. Vous l'avez à l'onglet 13c.

Alors, on comprend qu'il faudrait à la fois améliorer l'admissibilité, en regard de l'accès, indépendamment de la taille de la municipalité; à la fois améliorer l'admissibilité en regard du nombre d'années d'expérience même si l'âge de 55 ans n'est pas atteint, et on comprend également que le budget est réduit pour la partie qu'Ottawa partage, c'est-à-dire 70 %.

C'est évident que, dans ce contexte de rareté, on ne pourra pas nécessairement rêver d'en faire beaucoup dans le contexte de PATA, et c'est pourquoi la SQDM travaille sur une politique du vieillissement qui pourra, si vous voulez, suppléer, vraisemblablement. Évidemment, ça va supposer de l'ensemble de tous les partenaires patronaux, syndicaux également, un soutien à une telle politique, mais on comprend que dans le cadre normatif de PATA, même en le modifiant, étant donné les budgets déjà coupés par le fédéral, on va quand même être bien limités.

Le Président (M. Tremblay): Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Leduc: Oui, M. le Président, je vous remercie. Alors, la question de mon collègue de Sauvé... En fait, Mme la ministre a répondu quand même à plusieurs de mes interrogations. Je voudrais quand même...

Mme Harel: Ha, ha, ha! Là, vous l'appelez «de Sauvé», il est de Jeanne-Mance.

Mme Leduc: De Jeanne-Mance, Jeanne-Mance.

Une voix: Il faut arrêter de le...

Mme Leduc: Est-ce qu'on est dans la même région?

M. Bissonnet: Il manque juste le pont, là. Vous savez, le fameux pont? Il manque le pont Bélisle pour aller vous rejoindre.

Mme Leduc: C'est ça.

Mme Harel: Il est près de Saint-Léonard, mais pas de Sauvé. Ha, ha, ha!

Mme Leduc: O.K. Elle a quand même répondu à plusieurs de mes interrogations, mais je voudrais quand même faire un commentaire pour dire que je suis d'accord avec sa préoccupation, parce que ça concerne... Évidemment, lorsqu'il y a eu les ententes de libre-échange Canada-Québec, malgré les vertus de cette entente-là, c'était évident qu'on savait qu'il y aurait aussi des licenciements qui seraient causés par ces ententes-là, particulièrement dans le secteur de l'habillement et du vêtement à Montréal.

À ce moment-là, on avait eu l'assurance des deux gouvernements, soit fédéral ou provincial... il y avait eu le comité de Grandpré qui avait été mis sur pied pour mettre en place des mesures qui répondraient aux besoins de ces travailleurs et travailleuses qui subiraient des préjudices.

Alors, ma question était... Dans le fond, je voulais m'interroger, dans le cadre des négociations que vous nous dites vouloir entreprendre avec M. Axworthy pour le programme PATA, si vous allez aussi un peu élargir ces négociations pour, pas seulement l'habillement, mais aussi l'ensemble des travailleurs et des travailleuses qui auraient été touchés par des licenciements dûs à l'Accord de libre-échange, et quels seraient les programmes qui pourraient être mis en place?

Et mon autre question, vous y avez répondu un peu: Advenant le cas qu'on ne s'entende pas, qu'est-ce que le Québec envisageait de prévoir? Là, vous avez dit qu'il y avait une politique du vieillissement que vous étiez en train de mettre en place. Alors, c'est un peu dans ce sens-là que je voulais faire mon intervention, mais je comprends qu'il y a eu quand même des réponses qui ont été données précédemment, suite à la question du député de Jeanne-Mance.

Mme Harel: Je rappelle, M. le Président, que, pour tout de suite, on a, à l'étude des crédits, un budget de 10 000 000 $, je pense, 10 000 000 $ et quelque chose, là, pour le programme PATA; 10 900 000 $, en fait, à peu près 11 000 000 $, et que c'est dans ce cadre-là que nous pourrons manoeuvrer en souhaitant, possiblement, pouvoir faire comme l'année passée, c'est-à-dire utiliser des crédits périmés pour bonifier en fin d'année les critères du programme, si tant est qu'on ne puisse pas obtenir qu'Ottawa y contribue par sa juste part.

(10 h 40)

Le Président (M. Tremblay): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Merci, M. le Président. Ma première question ce matin, c'est...

Mme Harel: M. le Président, est-ce que le député de Bourassa souhaiterait qu'on réponde aux questions qu'il a posées hier?

M. Charbonneau (Bourassa): Oui.

Mme Harel: J'inviterai Mme la présidente-directrice générale de la SQDM à lui donner les réponses sur les programmes Soutien à l'emploi autonome et autres, si tant est que c'est à ce moment-ci qu'on doit le faire.

Le Président (M. Tremblay): Le député de Bourassa souhaiterait également, avec la permission des membres de la commission, d'amputer le volet concertation de 20 minutes pour discuter davantage de main-d'oeuvre. Donc, on pourrait peut-être aller jusqu'à 11 h 20 sur la main-d'oeuvre, et par la suite au niveau de la concertation.

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Tremblay): Alors, Mme la présidente.


Renseignements sur certains programmes

Mme Bellemare (Diane): Alors, il y avait une question concernant le programme PAI, le Programme d'aide aux individus, à l'effet de savoir comment il se faisait que, pour Montréal, le nombre de participants n'était pas très élevé. Alors, c'est une erreur. Le problème est qu'on a comptabilisé les données avec le système informatique, et il y a eu des données qui n'ont pas été saisies. Après vérification, les objectifs prévus pour le PAI, à Montréal, étaient de 10 565 participants, et on a atteint, au 28 février 1995, 9 154; donc, c'est 9 154 qui doit remplacer dans le cahier, là, les 5 000 et quelques.

En ce qui concerne les stages en milieu de travail, également, la saisie avait été mal faite, et, après vérification, la région de Mauricie–Bois-Francs a accordé des services pour 161 stages, et ceci, c'est au 31 mars 1995; donc, le zéro doit être remplacé par le 161.

Maintenant, si vous voulez vous référer au tableau concernant SEA, en ce qui concerne les chiffres, là, le tableau qui était difficile, effectivement, à interpréter, c'est le tableau qui est à l'onglet 4. Alors, de la façon dont il faut lire, d'abord, le tableau, là, dans la section Phase démarrage, il faut lire le total; pour chacune des régions, ce sont les chiffres en caractères gras qui sont importants à regarder. Pour bien comprendre, si on prend, par exemple, la région de la Côte-Nord, bon, les chiffres en caractères gras nous indiquent qu'il y a eu 15 entreprises qui ont été créées.

Dans le cadre, donc, des entreprises créées, il y a eu 16 participants à la mesure qui étaient des prestataires de la sécurité du revenu, donc, et zéro, autres. Les 15 entreprises ont créé, au total, 29 emplois, donc, 29 emplois pour 27 prestataires de la sécurité du revenu et pour deux personnes autres, qu'on nous a dit être dans la catégorie à faible revenu. O.K.?

Il y a aussi une erreur à corriger au tableau en ce qui concerne l'Outaouais. Les gens dans la région avaient mal interprété la question, et le zéro pour les emplois créés devrait être remplacé par 11 emplois créés. Donc, au total, dans la région de l'Outaouais, il y a eu 11 entreprises de créées, et donc des entreprises où ce sont des personnes autonomes qui auraient créé leur propre emploi. Ces 11 entreprises auraient généré 11 participants, et ce sont tous des prestataires de la sécurité du revenu, et il y aurait eu, au total, 11 emplois de créés pour 11 prestataires de la sécurité du revenu. Donc, dans la colonne «Emplois créés», ça devrait être remplacé par 11-0-11.

M. Charbonneau (Bourassa): Et pour Laurentides?

Mme Bellemare (Diane): Pour Laurentides, ça doit être la même chose. On n'a pas eu de confirmation, mais probablement que l'interprétation qui a été faite de la commande a été faite... Dans l'Outaouais, ce que les gens ont pensé, c'est qu'en inscrivant les participants ils n'avaient plus besoin de parler d'emplois créés, d'accord? Donc, ça doit être la même chose pour Laurentides.

Mme Harel: C'est un programme qui a connu énormément de succès, beaucoup, beaucoup d'engouement. Encore, hier soir, j'ai eu l'occasion, ici, à Québec, sur la rue Saint-Jean, d'assister à l'ouverture d'une boutique, d'un atelier de confection, de réparation de linge, de vêtements usagés, transformés, recyclés, juste au coin de la rue, et c'était suite à deux projets combinés de Soutien à l'emploi autonome.


Enquête sur les caractéristiques de la demande de main-d'oeuvre

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, je voudrais aborder une question relative à l'enquête sur les caractéristiques de la demande de main-d'oeuvre au Québec. En relisant les notes que vous nous avez données hier, dans votre rapport d'activité pour les six derniers mois, cela m'a permis de me rappeler qu'il y avait ce projet sur la table, et j'ai constaté aussi que le conseil d'administration laissait tendre à ratifier à l'unanimité l'entente qui avait été négociée à ce moment-là entre le fédéral et le provincial, sous la présidence de l'association précédant la vôtre, précédant l'actuelle présidente. Et, dans les attendus du protocole en question, j'aimerais en citer au moins un. Il y en a une douzaine, mais au moins un:

«Attendu que le ministère du Développement des ressources humaines Canada, la SQDM et le ministère de l'Éducation du Québec ont besoin d'un système intégré de connaissance du marché du travail pour une meilleure planification et pour le développement de programmes mieux arrimés aux besoins et la mise en oeuvre plus efficace de leurs interventions respectives.» Donc, c'est un attendu qui souligne le besoin d'une coopération soutenue et de systèmes intégrés en matière de connaissance du marché du travail entre les deux ordres de gouvernement. C'est un attendu qui en précède un autre qui est très bref, mais très clair: «Que cette entreprise revêt un caractère d'urgence.»

Ce protocole, également, a été mis au point après la consultation des partenaires du marché du travail. J'aimerais savoir si ce protocole a été signé officiellement, entériné officiellement par le gouvernement du Québec, à ce moment-ci. Quoique j'aie quelques raisons de croire que le projet est en bonne voie de réalisation, néanmoins, qu'est-ce qui fait qu'il y ait retard à signer ce protocole qui est un bel exemple de la collaboration fédérale-provinciale en train de réussir? Qu'est-ce qui fait qu'on n'en parle point et qu'on ne le signe point à ce moment-ci?

Le Président (M. Tremblay): Mme la présidente, Mme Diane...

Mme Bellemare (Diane): Bellemare.

Le Président (M. Tremblay): Pour le procès-verbal, c'est Mme Diane Bellemare, qui est la présidente de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre

Mme Bellemare (Diane): Merci, M. le Président. Oui. Au sujet de cette enquête, je peux assurer M. Charbonneau que tout est en bonne voie de se compléter, le questionnaire est déjà fait et là le protocole devrait être signé. Il est signé, je pense. Tout est correct, tout se fait selon l'échéancier prévu.

M. Charbonneau (Bourassa): Est-ce que Mme la présidente de la SQDM me dit que le protocole est maintenant signé, au niveau gouvernemental ou ministériel, entre les deux ordres de gouvernement? C'est ce qu'elle m'annonce ce matin?

Mme Harel: Écoutez, je crois comprendre que c'est en vigueur, là, mais je peux vérifier. Moi, de mon côté, j'avais communiqué avec le ministre des Finances, de qui relève peut-être cette question, et on me signalait que c'était en voie de réalisation. Alors, je peux vérifier, cependant, cette enquête pour laquelle il y a eu quand même des fonds importants qui ont été consacrés par la SQDM. Alors, j'aimerais peut-être que Mme Bellemare réponde.

Mme Bellemare (Diane): Oui. On m'apprend que tout est en bonne voie d'être réalisé. Les formulaires sont là, il y a une signature ou deux à être ajoutées. En ce qui concerne l'activité en soi, avec le comité aviseur, Statistique Canada, le Bureau de la statistique du Québec, l'activité est en bonne voie, tout est selon l'échéancier prévu. En ce qui concerne le protocole, le décret n'est pas passé encore, mais tout est dans la machine.

(10 h 50)

M. Charbonneau (Bourassa): Alors, M. le Président, je suis heureux d'entendre confirmer que la réalisation de l'activité, elle, n'est pas en péril, mais j'aurais aimé entendre que tout est bien attaché en haut lieu et que les budgets seront bien là, de la part du gouvernement du Québec, dans le prochain exercice financier, ou je ne sais plus où. Mais c'est très important, il y a un engagement de 400 000 $, Québec, partagé entre la SQDM et le ministère de l'Éducation, et il y a un engagement du même ordre du fédéral. C'est un bel exemple de coopération, un bel exemple d'une affaire qui marche et qui est considérée comme indispensable par les deux ordres de gouvernement pour fonder les nouvelles interventions en matière du marché du travail. J'aimerais bien entendre la ministre confirmer qu'elle a de l'intérêt pour cette question et qu'elle a bien hâte d'y apposer sa plume.

Mme Harel: Je ne crois pas que j'aie besoin, M. le député de Bourassa, d'ailleurs, de signer quoi que ce soit. Je comprends que tout est en marche présentement. Avec l'adoption des crédits, là, d'aujourd'hui, les budgets seront alloués, tel que prévu. Alors, je pense que c'est en bonne voie de réalisation.

M. Charbonneau (Bourassa): Alors, où est-ce que...

Mme Harel: Et je rappelle qu'il s'agit, en fait, du Bureau de la statistique du Québec, avec Statistique Canada, alors, qui vont s'échanger des informations.

M. Charbonneau (Bourassa): Alors, est-ce qu'on pourrait savoir, M. le Président, où est-ce dans le budget? Dans les crédits que vous nous présentez, où peut-on comprendre qu'il y a cette provision?

Mme Bellemare (Diane): C'est dans le budget de la vice-présidence, intervention sectorielle. C'est dans le budget qui va à l'intervention sectorielle.

Mme Harel: Peut-on, M. le Président, pour les fins de compréhension des membres de la commission – parce que j'ai peur que ça reste un peu ésotérique, étant donné que, déjà, je pense, le député de Bourassa est bien au fait, là, de ce projet et compte tenu de ses activités professionnelles antérieures – peut-on demander à Mme la présidente-directrice générale de la SQDM d'expliquer, pour le bénéfice des membres de la commission, de quoi il s'agit exactement et à quelles fins se fera cet échange d'informations?

Le Président (M. Tremblay): Mme la présidente.

Mme Bellemare (Diane): Oui. En fait, c'est une étude qui émane d'une demande du conseil d'administration, en particulier, de l'Association des manufacturiers du Québec, M. Le Hir. À l'origine, bon, il y avait un débat public, à savoir les postes vacants versus le chômage. Alors, les gens disaient: Il y a beaucoup de chômeurs, mais il y a quand même beaucoup de postes vacants.

Mme Harel: En pénurie.

Mme Bellemare (Diane): En pénurie; c'est ça, des postes qui ne sont pas comblés. Et quand on regardait de plus près la nature des données, il y avait un chiffre de 600 000 postes vacants, en tout cas, à l'époque, qui circulait.

Mme Harel: Pour le Canada.

Mme Bellemare (Diane): Oui, pour le Canada. Et quand on regardait de près d'où venait cette statistique-là, elle était basée à partir de l'index de publication des espaces dans les journaux qui était engagé pour annoncer les postes vacants. Alors, c'était une statistique qui était produite, en particulier, par le Centre canadien du marché du travail et de la productivité. Statistique Canada avait, à l'origine, une enquête sur les postes vacants, qu'elle a cessée dans les années soixante-dix.

Alors, compte tenu du manque d'information sur la nature des postes vacants, il y a eu entente, à la demande du conseil d'administration, de procéder à une analyse plus poussée des besoins en main-d'oeuvre et d'essayer d'identifier où sont les postes vacants au Québec et avoir une vue d'ensemble plus micro du marché du travail. C'est à la suite de cette demande-là qu'il y a eu des discussions avec le Bureau de la statistique du Québec et, ensuite, Statistique Canada. On a convenu d'une entente entre ces deux organismes-là pour réaliser une enquête spéciale. Et, bon, le comité aviseur se réunit.

Le conseil d'administration de la SQDM tient beaucoup à ce que cette enquête se fasse et se poursuive. Et, là, pour l'instant, en tout cas, tout est beau.

Le Président (M. Tremblay): Je vais juste, Mme la présidente, vous dire que c'est vrai que c'était 600 000 pour le Canada, mais le chiffre qui circulait il y a quelques années, mentionné à plusieurs reprises par le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie d'alors, c'était 83 000 emplois. Et c'est ce même ministre qui avait demandé aux représentants de l'Association des manufacturiers du Québec, de façon très claire, de nous dire où se trouvent ces emplois.

Et ce que je trouve de plus en plus remarquable, c'est que depuis qu'on a commencé à véhiculer un chiffre – et j'admets avec vous, là, que le fondement du chiffre était difficile à établir – on s'aperçoit que, dans certaines régions du Québec, on fait maintenant l'adéquation entre les emplois disponibles et la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. On a vu récemment – il y a eu au moins deux articles dans les journaux – dans la Beauce, on a dit qu'il manque au moins une centaine de travailleurs spécialisés dans certains secteurs. Alors, dans un contexte où on a un taux de chômage totalement inacceptable au Québec, il y a sûrement des efforts considérables à faire pour rapprocher, au niveau des différentes régions du Québec, les gens d'affaires avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre pour créer une adéquation dynamique entre les besoins des entreprises et les cours de formation qui sont donnés par la société québécoise de formation de la main-d'oeuvre.

Mme Harel: M. le Président, me permettez-vous de vous dire que vous avez entièrement raison? Parce que, dans Le Soleil de mercredi dernier, paraissait un article avec le titre suivant: «600 postes à combler». Et on pouvait y lire ceci: «Pour répondre à ses besoins de main-d'oeuvre à court terme, la région de Saint-Georges de Beauce a quelques 600 postes à combler. C'est ce que M. Serge Roy, président du Conseil économique de la Beauce, a révélé lors de l'assemblée annuelle de l'organisme, pour révéler qu'un sondage mené auprès de 60 entreprises de Beauce lui indique qu'il y a 600 emplois disponibles dans la région en ce moment.»

Alors, on en est à ce paradoxe, à cette contradiction de société où il y a 600 postes à combler dans la Beauce, où Bombardier doit mettre des annonces dans les journaux de l'Estrie pour en combler 900 au mois d'avril, et où, finalement, on se rend compte que, à moins de connaître un voisin ou un parent, on ne sait pas à quel saint se vouer pour se placer dans notre société, et on voit la prolifération des agences de placement. C'est évident, là, qu'il faut sérieusement se poser la question, là, du placement de la main-d'oeuvre, de l'arrimage entre l'offre et la demande dans notre société.

Le Président (M. Tremblay): Et peut-être un autre commentaire: Souvent, on a eu l'impression, lorsqu'on parlait d'une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée, que c'était dans le secteur de l'aérospatiale, dans le secteur pharmaceutique, dans le secteur des technologies de l'information, mais ce dont on s'aperçoit de plus en plus, c'est dans des secteurs qui avaient été identifiés dans le passé comme étant des secteurs traditionnels. Par exemple, il y a des manufacturiers de chaussures en Estrie qui sont à la recherche de personnes compétentes. Il y a des rembourreurs de meubles qui sont à la recherche de personnes spécialisées dans le rembourrage. Il y a tout le secteur du vêtement, et ça s'explique par les nouvelles technologies. Par exemple, la conception, le dessin, la fabrication assistés par ordinateur.

Alors, toutes ces nouvelles technologies ont rendu les connaissances d'un trop grand nombre de travailleurs et de travailleuses désuètes. C'est un défi de taille, et je pense qu'il y a un rôle d'éducation important à faire au niveau de la formation de la main-d'oeuvre pour s'assurer que les travailleurs réalisent l'importance de la formation continue pour se préparer, justement, à faire face à une économie ouverte sur le monde et de nouvelles contraintes au niveau des nouvelles technologies. Alors, M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui. Merci beaucoup de cette information et de cette confirmation dans la poursuite de cette enquête qui est absolument stratégique, d'une importance stratégique, actuellement. C'est une enquête sans précédent, d'envergure, sans précédent et auprès de 21 000 ou 25 000 entreprises, donc, ça va susciter aussi la mobilisation du milieu des entreprises autour de cet enjeu.


Programme d'analyse de métiers et de professions

J'aurais une question dans un domaine qui est assez connexe, ma foi, c'est relativement au programme d'analyse de métiers et de professions. On retrouve des données dans le cahier des renseignements généraux, à l'onglet 6, à ce propos. On fait état d'une trentaine d'études, commandées en 1994-1995, pour un montant probablement de l'ordre de 700 000 $. Je voyais aussi, dans le document que vous nous avez donné hier, qu'on fait état de 35 études. En tout cas, c'est une moyenne, j'imagine, de 30, 35 études par année, dans ces eaux-là, avec une somme importante d'argent à l'appui.

(11 heures)

L'étude des métiers et des professions, l'étude des caractéristiques des métiers et des professions qui sont en développement dans le Québec, c'est une pièce au dossier très importante dans une stratégie de formation, d'adaptation de la main-d'oeuvre, de développement de l'emploi. Mais j'aimerais entendre la ministre quant à son évaluation du bien-fondé de chacune de ces études; il y en a une trentaine. J'aimerais savoir si la ministre peut nous dire d'après quels critères on accepte de faire une étude, d'investir 30 000 $ ou 40 000 $ sur un métier plutôt que sur un autre, et surtout entendre la ministre quant au suivi donné à ces études. Où ces études aboutissent-elles une fois qu'elles sont faites, les plans d'intervention qui concluent chacune de ces études? Les plans d'intervention, les plans d'action sont repris par qui, ensuite? Qui donne suite à ça, et dans quel délai? Comment, ça, ça s'intègre aux priorités de la SQDM telles que définies dans son plan stratégique? En quoi celles-ci, ces études, sont-elles reliées aux priorités de la SQDM de manière concrète?

Mme Harel: M. le Président, la presque totalité de toutes ces études a été réalisée avant que je ne sois moi-même chargée du dossier ou que la présidente soit elle-même nommée. Alors, nous nous sommes posé les mêmes questions, et je souhaiterais que Mme Bellemare puisse faire part de ses réflexions sur cette question.

Mme Bellemare (Diane): Oui, moi-même, je suis surprise de l'ampleur des études, que j'ai été à même de constater à la lecture des renseignements généraux. On est actuellement, à la SQDM, à revoir toute la problématique de l'intervention sectorielle. Comme vous le savez, le conseil d'administration veut faire de l'intervention sectorielle une intervention concrète, opérationnelle, qui donne un impact... opérationnelle au niveau des secteurs et au niveau des régions. Alors, on est à revoir l'ensemble des activités et du budget de l'intervention sectorielle.

En ce qui concerne l'analyse des métiers, tout ça, c'est une question, éventuellement, sur laquelle on va se pencher, parce que c'est des sommes importantes. Dans le contexte des ressources financières plus rares, des choix devront être faits. Alors, de cette manière-là, je pense que je peux répondre à M. Charbonneau au niveau de l'intervention sectorielle.


Études et évaluation des programmes en matière d'intervention sectorielle

M. Charbonneau (Bourassa): Plus particulièrement, j'aimerais échanger avec la ministre ou la présidente de la SQDM sur le suivi de ces études. Il y aura toujours besoin d'un certain nombre d'études de ce genre. Que ce soit 10 ou 35, que ce soit tel métier ou tel autre, j'imagine qu'on a besoin d'étudier à longueur d'année les réalités; ce sont des réalités en mouvance, de toute façon.

Mais, une fois l'étude conclue et une fois dressé un plan d'intervention, est-ce que c'est le ministère de l'Éducation qui prend le tout en relais? Est-ce que vous considérez qu'il devrait y avoir un autre changement de ce côté-là et que ça devrait être la SQDM qui prenne la suite? Parce que, là, ça risque de tomber sur une tablette. Le plan d'intervention est là, le ministère de l'Éducation, peut-être, avec tentation de reprendre les études aussi, quand on change de ministère, et tentation de reconsulter les partenaires – ça s'est déjà vu, il y a plein de dossiers comme ça – reprendre l'étude, reprendre les consultations.

Arrive le temps, ensuite, d'élaborer les programmes consécutifs au plan d'intervention, d'élaborer le matériel didactique. Arrive le moment aussi où il faut évaluer tout ça. Parce que, là, on est souvent rendu à deux ans ou trois ans du point d'origine, de la demande initiale; deux ans, trois ans plus tard. Ça s'est déjà vu. Est-ce que la ministre est sensibilisée à ce genre de circuit que risquent de prendre ou qu'ont déjà pris ces études? Est-ce qu'elle entend impulser un nouvel élan là aussi?

Mme Harel: M. le Président, comme la question du député de Bourassa concerne l'intervention sectorielle, j'inviterais les membres de la commission à ouvrir le document intitulé «SQDM, principales réalisations, exercice 1994-1995», à la page 4. Mme Bellemare complétera la réponse à la question du député de Bourassa, mais, précisément sur la question de l'intervention sectorielle, il y a donc en place actuellement, de façon extrêmement dynamique, des comités sectoriels de main-d'oeuvre. Et c'est la poursuite des travaux de ces comités sectoriels de main-d'oeuvre, avec les partenaires du secteur privé, qui est prévue, notamment, dans les secteurs mentionnés. Je ne les énumère pas, mais ils sont intéressants. C'est la mise en place de nouveaux comités sectoriels de main-d'oeuvre dans les secteurs des métiers d'art, des auteurs, créateurs et interprètes du secteur culturel, de la sidérurgie, et puis des portes, fenêtres, armoires de cuisine et bois ouvré.

C'est donc dans le cadre, souvent, des travaux de ces comités sectoriels que les études sont demandées. Et Mme Bellemare est à revoir l'intervention sectorielle, à la demande des partenaires. Alors, elle pourra peut-être compléter la réponse, et je reviendrai sur la perspective qu'ouvre la contribution de 1 % en matière d'intervention sectorielle.

Mme Bellemare (Diane): Comme Mme la ministre vient de le souligner, ces études-là sont commandées généralement par les comités sectoriels eux-mêmes, bon, qui devraient normalement faire le suivi des résultats de ces études-là. Mais elles servent, comme le député de Bourassa le disait bien, généralement aussi à l'Éducation, dans le cadre des programmes.

La révision que l'on fait de l'intervention sectorielle actuellement porte non seulement sur le financement des comités sectoriels, mais porte aussi sur les mandats de ces comités-là, et quels sont donc leur mandat au niveau de la SQDM? Qu'est-ce qu'on veut que ces comités sectoriels fassent? Et quels sont les liens qu'on veut établir entre les comités sectoriels et les régions? Parce qu'actuellement, bon, les comités sectoriels sont un lieu d'analyse, de diagnostic du secteur, et chacun des comités sectoriels a un petit peu sa problématique propre et se développe de façon autonome.

Sans vouloir faire du mur-à-mur dans les comités sectoriels et implanter une problématique qui soit uniforme, on veut quand même baliser le mandat, avoir une structure souple qui permette d'identifier, pour chacun des secteurs, une problématique au niveau du développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi et un plan d'action qui pourra être opérationnalisé ensuite avec les programmes qui sont opérés en région.

Compte tenu de la révision qu'on veut faire de l'intervention sectorielle – on veut en faire une activité beaucoup plus opérationnelle – c'est évident que l'allocation des budgets qu'on avait habituellement, qui était davantage connaissance, diagnostic, bon, est à revoir. Je pense que la connaissance du marché du travail sectoriel demeure importante, mais il y a probablement toute une révision à faire là-dessus. Moi, j'en suis convaincue, en tout cas, depuis que je suis arrivée. C'est une chose sur laquelle on se penche actuellement, là; on est à l'étude. Il y a un comité ad hoc du conseil d'administration, composé de MM. Dufour, Charland, M. Larose et M. Massé, qui participent, avec les gens à l'interne, ici, à redéfinir toutes les balises de l'intervention sectorielle.

Alors, on pourra fournir en temps et lieu les résultats de toute cette réflexion-là, qui devrait faire l'objet d'une discussion au conseil d'administration prochain, du 27 avril, et possiblement faire l'objet d'un mémoire avec des propositions bien précises, au conseil d'administration du 27 avril.

Le Président (M. Tremblay): Est-ce que c'est sur le même sujet ou si c'est un autre sujet? Parce que le député de Groulx m'a demandé la parole? Alors...

M. Charbonneau (Bourassa): C'est peut-être un volet qui a déjà été mentionné dans ma question et sur lequel il serait intéressant d'entendre un complément de réponse, c'est l'intégration de l'évaluation à tout ce processus-là. Parce qu'on peut mettre en chantier un tas de choses, mais, si jamais on y revient de manière systématique...

Je regardais, dans la fiche que vous nous avez donnée sur l'évaluation, hier, dans les documents complémentaires... Au programme de l'évaluation, il y a eu un certain travail de fait, mais je ne vois rien qui soit relié, sauf erreur de ma part, aux interventions sectorielles en termes d'évaluation, et vous nous annoncez des chambardements, des changements qui ont l'air sympathiques tels qu'énoncés, mais sur quelle évaluation rigoureuse reposent ces changements? Je ne vois pas de trace de ça, M. le Président, dans les documents au chapitre de votre travail en évaluation. Je sais pourtant que la SQDM a fait des efforts importants depuis un an et demi pour mettre sur pied une unité évaluation. Vous partagez nos préoccupations quant à l'orientation relative aux interventions sectorielles, mais je ne vois pas de fondement à partir de votre stratégie d'évaluation pour aboutir à ça.

(11 h 10)

Mme Harel: M. le Président, je rappelle au député de Bourassa que l'évaluation des programmes qu'il retrouve dans ces documents est celle du bilan de l'année 1994-1995 et non pas celle à venir en 1995-1996. Alors, je laisserai Mme Bellemare compléter, mais je veux qu'il sache que l'intervention sectorielle est considérée comme le levier très important, notamment en matière de régime d'apprentissage, de redéploiement, là, de tout le régime d'apprentissage, et en matière, également, d'utilisation du 1 %.

Le scénario sur lequel nous avons consulté les partenaires tant patronaux que syndicaux est à l'effet de favoriser l'accréditation des comités sectoriels comme des comités paritaires, également, là, d'accréditer, donc, ces comités aux fins de pouvoir recevoir les contributions du 1 %, laissé, bien évidemment, au choix de l'entreprise. Mais ces accréditations permettraient l'élaboration de plans de formation sectorielle qui pourraient recevoir le financement qu'une entreprise choisirait d'y consacrer.

Mme Bellemare (Diane): Est-ce que je peux rajouter? En ce qui concerne...

Le Président (M. Tremblay): Très bien. Mme la présidente.

Mme Bellemare (Diane): En ce qui concerne l'évaluation en tant que telle, c'est une fonction sur laquelle les ressources vont être investies cette année, à la demande du conseil d'administration, parce qu'on revoit, finalement, notre programmation dans le but de se donner des objectifs de résultats concrets, quantifiables, qui vont nous permettre par la suite une évaluation rigoureuse de nos interventions.

Alors, actuellement, dans le pipeline, il y a des analyses, il y a des évaluations qui sont faites des programmes concrets qu'on opère. En ce qui concerne l'intervention sectorielle, qui demeure, comme je le disais tantôt, là, une intervention qui n'est pas opérationnelle pour l'instant, ou elle est opérationnelle, en bout de piste, mais ce n'est pas égal d'un secteur à l'autre, l'évaluation dont on dispose n'est pas une évaluation concrète. Vous le savez, vous étiez là avant moi, bon, il n'y avait pas d'études de faites là-dessus, mais les partenaires, actuellement, évaluent, compte tenu des résultats des comités actuels, que ces comités-là pourraient être des leviers encore plus importants. Donc, c'est une évaluation du milieu qui nous amène à revoir l'intervention sectorielle; c'est vraiment le milieu qui sent qu'il y a des besoins importants non satisfaits et qui demande de revoir, donc, l'intervention sectorielle.

Le Président (M. Tremblay): Alors, M. le député de Groulx.

M. Kieffer: M. le Président, deux choses. Premièrement, un aspect plus technique, je pense, qui faciliterait à tous et à toutes la compréhension du dossier. Mme la ministre l'a mentionné tantôt, mais je reviens, là. On connaît évidemment l'expertise du député de Bourassa quant au dossier de la SQDM, ce qui n'est pas le cas des autres députés membres de la commission. Et là je parle vraiment pour les deux côtés de la table; j'observe mon confrère d'en face, qui est à peu près aussi perdu que moi.

Serait-il possible, lorsqu'on pose une question, de clairement mentionner le chapitre ou la question, le livre, etc., pour que nous puissions, nous, à notre tour, évidemment, plonger et suivre le dialogue entre le député et la ministre?

Ceci étant dit, j'ai suivi attentivement les interventions du député de Bourassa depuis le début de la commission, ce matin, et, c'est de bonne guerre, M. le député a choisi de discuter d'un certain nombre de points ou de questions où, effectivement, il y a eu possibilité d'avoir des ententes spécifiques entre notre gouvernement et celui d'Ottawa. Est-ce une nouvelle approche qui pourrait nous permettre, à moyen terme – et c'est un peu la question que je pose à Mme la ministre – à force d'accumuler à la pièce chacune de ces petites ententes-là, d'en arriver à un rapatriement global de la formation de la main-d'oeuvre ou si ce n'est qu'un épiphénomène d'une situation, de toute façon, qui est bloquée et qui était bloquée – et, ça, je l'ai fait remarquer au député de Bourassa; évidemment, il le sait – au moment où le dernier gouvernement était en poste, c'est-à-dire son parti.

J'aimerais que la ministre puisse nous faire un bilan d'où en est la question de la formation de la main-d'oeuvre, du rapatriement de cette formation-là, s'il y a eu des négociations, l'impact du plan Axworthy et, évidemment, du budget de M. Martin, sur toute la question de la main-d'oeuvre. Je sais que c'est une question globale, mais j'aimerais pouvoir me situer par rapport aux affirmations de mon bon ami d'en face, qui dit qu'il y a lieu d'en arriver à des ententes, que la ministre devrait se réjouir, à toutes fins pratiques, de la bonne foi et de la bonne volonté du gouvernement fédéral. Alors, j'aimerais que la ministre nous informe, effectivement, si on est devant une nouvelle situation qui va permettre de faire débloquer le dossier ou bien si on n'est pas plus loin qu'on l'était l'an dernier, l'année d'avant ou l'année d'avant. Mme la ministre.

Le Président (M. Tremblay): Mme la ministre.

Mme Harel: Écoutez, M. le Président, je vais proposer au député de Groulx de réserver sa question pour le moment où nous aborderons le Secrétariat à la concertation, qui s'occupe des négociations pour le gouvernement du Québec à l'égard du dossier fédéral. Alors, je réserve votre question, j'y reviendrai. Si vous permettez, on va peut-être terminer sur la main-d'oeuvre, mais on y reviendra, ne vous inquiétez pas.

M. Kieffer: Donc, on va toucher à formation de la main-d'oeuvre, là?

Mme Harel: Oui.


Corporations de développement économique et communautaire (suite)

Le Président (M. Tremblay): J'aurais peut-être juste une dernière question – c'a été abordé hier, sur les corporations de développement économique et communautaire – j'ai dû m'absenter pour aller à la commission de la culture. Alors, très brièvement, je voudrais profiter de la présence de la présidente de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre pour qu'elle puisse me confirmer certaines informations.

Les corporations de développement économique et communautaire font de la concertation – on va en discuter bientôt – de l'employabilité, mais également du développement économique orienté vers la création d'emplois. La contribution du gouvernement fédéral semble avoir été confirmée pour une période d'un an. La contribution de la ville de Montréal semble avoir été confirmée pour une période d'un an. La Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, selon l'information qui m'a été soumise, vous avez réservé 190 000 $ par année pour une période de trois ans, et, l'élément manquant, il semblerait que le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie a décidé de couper les agents de développement économique.

J'aimerais juste qu'on me confirme si c'est bel et bien la situation et, est-ce que votre contribution de 190 000 $ par année pour les trois prochaines années est conditionnelle à la participation des autres partenaires économiques?

Mme Harel: Alors, ça me fait plaisir, M. le Président, de répondre à cette question. Je sais que la CDEC Côte-des-Neiges est extrêmement importante pour le développement de votre secteur, comme la CDEC l'est dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Alors, c'est avec un souci constant, soyez-en assuré, que je vois à ce qui se passe dans ce dossier.

La Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre a participé, avec ses partenaires, à un comité d'harmonisation de Montréal qui a effectué une évaluation et qui a donc mis en place, l'an passé, tout un plan d'évaluation et qui a conclu, d'ailleurs, à l'unanimité, à la pertinence de l'intervention des corporations en matière de développement local.

Je comprends que la Ville de Montréal avait fait savoir l'été passé qu'elle était prête à renouveler pour une durée de cinq ans. Je comprends que le fédéral a renouvelé pour une durée d'un an, comme vous le mentionniez, mais a fait connaître son intention de ne pas financer le développement de nouvelles corporations et, donc, s'en tient strictement au financement des corporations déjà existantes.

D'autre part, la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, le conseil d'administration de la SQDM a décidé de reconduire pour un an le budget qui totalise plusieurs millions?

(Consultation)

Mme Harel: Alors, le budget de fonctionnement, on me dit qu'il est de 1 072 000 $. On me fait part que le financement des programmes, sur trois ans, est de 12 000 000 $.

Le Président (M. Tremblay): Oui. Mme la ministre, mes collègues m'ont informé qu'hier vous avez donné sensiblement cette information-là. Mais, de façon très concrète, est-ce que vous avez fait des représentations au ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie pour que les corporations de développement économique et communautaire ne soient pas amputées de leur agent de développement économique? C'est bien beau de faire de la concertation, de faire de l'employabilité, mais il faut créer des emplois. Et, sans agent de développement économique, il est peu probable qu'on crée des emplois permanents de qualité.

(11 h 20)

Vous avez reçu des lettres du réseau, vous avez reçu des lettres de la majorité des directeurs généraux des corporations de développement économique et communautaire. Alors, de façon très précise, parce que le temps sur la main-d'oeuvre est presque terminé, est-ce que vous avez fait des représentations à votre collègue, le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, pour le convaincre que, 350 000 $ sur un budget de 516 000 000 $, c'est peu pour permettre à des assistés sociaux, à des chômeurs chroniques, à des personnes qui sont considérées comme les démunis de la société d'avoir au moins la chance d'accéder un jour à un emploi de qualité, dans des régions qui sont très défavorisées de l'île de Montréal?

Mme Harel: M. le Président, j'ai fait des représentations auprès de mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, et je comprends qu'une rencontre doit avoir lieu cette semaine entre le ministre et les représentants et porte-parole des sept corporations à Montréal. Je souhaite, bien évidemment, que le règlement intervienne dans le sens que vous mentionniez.

Par ailleurs, précisément à l'égard de la CDEC Côte-des-Neiges, qui, jusqu'à maintenant, n'a pas pu bénéficier de la présence d'un agent de développement économique – je vous rappelle que l'ensemble des autres CDEC, depuis cinq ans, ont pu profiter de la présence d'un agent de développement économique – j'ai confirmé de vive voix, mais je le ferai par écrit – me dit-on, la lettre est prête pour ma signature, peut-être aujourd'hui – je confirmerai par écrit ce que j'ai déjà dit de vive voix au porte-parole de la CDEC Côte-des-Neiges vendredi dernier, à savoir qu'ils seront autorisés à utiliser, à même les budgets de fonctionnement, le surplus des budgets de fonctionnement de la SQDM, les montants requis pour s'assurer au moins pendant la présente année de la présence d'un agent de développement économique.

Le Président (M. Tremblay): Oui. Mais je voudrais également profiter de cette occasion... Je suis bien conscient qu'il y a cinq des corporations de développement économique et communautaire qui ont déjà un agent de développement économique; il y en a deux qui n'en ont pas présentement, les CDEC Côte-des-Neiges et Notre-Dame-de-Grâce. Mais au même titre que le précédent gouvernement avait accepté les représentations des députés de toutes les régions du Québec pour les corporations de développement économique, il me semble que vous vous êtes toujours fait une grande... Vous avez toujours défendu les intérêts des plus démunis de la société, notamment dans l'est de Montréal et le sud-ouest de Montréal.

Si nous ne sommes pas capables, au-delà du discours, de répondre aux attentes légitimes de ces personnes, il me semble qu'avec des budgets, pour le ministère de l'Industrie et du Commerce, de l'ordre... Je ne fais aucun reproche à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, et encore moins à la ministre, qui, dans son comté d'Hochelaga-Maisonneuve, vit ces préoccupations tous les jours. Je veux juste m'assurer qu'on souffle très fort dans l'oreille du ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, comme vous l'avez fait dans mon oreille lorsque j'étais ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Vous avez eu une réponse positive, et j'espère que le ministre va comprendre que l'est de Montréal... Il nous a dit qu'il venait de l'est de Montréal et qu'il connaissait bien l'est de Montréal. C'est très, très, très important que ces personnes aient accès, éventuellement, à des services d'une personne compétente pour leur permettre de réintégrer le marché du travail.

Je voudrais maintenant... Est-ce qu'on peut procéder immédiatement à la Concertation et faire des remarques préliminaires à la fin, sur les deux volets main-d'oeuvre et concertation, et voter le tout dans un même bloc ou vous préférez faire immédiatement les remarques finales sur la main-d'oeuvre?

M. Charbonneau (Bourassa): Oui.

Le Président (M. Tremblay): Alors, M. le député de Bourassa, pour des remarques finales sur le volet de la main-d'oeuvre.

M. Charbonneau (Bourassa): Merci, M. le Président. Il y a quelques demandes d'information qui ont été laissées en suspens, vous aurez sans doute l'occasion de nous envoyer ces documents complémentaires plus tard.

Mme Harel: J'apprécierais que vous nous précisiez lesquels.

M. Charbonneau (Bourassa): Bien, par exemple, les notes du dernier conseil d'administration de mars dernier. Le budget ventilé. J'ai une certaine ventilation, mais, au-delà de ça, c'est encore des chiffres agglomérés: 138 000 000 $, 41 000 000 $. Je demandais la ventilation derrière ça. Je comprends que ce n'est pas facile de produire ça instantanément, là, mais...

Mme Bellemare (Diane): Le problème qu'on a...

M. Charbonneau (Bourassa): Autrement dit, le budget tel qu'adopté au conseil d'administration.

Mme Bellemare (Diane): Oui. Le problème que l'on a avec les documents du conseil d'administration, actuellement... On vous a donné hier une partie des documents qui ont été déposés au conseil d'administration, mais pour ce qui est du procès-verbal et tout ça, il n'a pas été adopté encore; donc, on a un problème de rendre public le procès-verbal comme tel. Par contre, dans le document que vous avez eu, vous avez eu une ventilation des chiffres, des données du budget tel qu'il a été adopté par le conseil d'administration.

Vous aviez demandé également une ventilation, pour 1993-1994 et 1995, des dépenses de fonctionnement et des dépenses de programme. Est-ce que vous l'avez eu, cette feuille? Non. Je pense qu'on peut vous transmettre immédiatement cette ventilation, tel que demandé.

Mme Harel: Et je vais ajouter, M. le Président, des informations concernant le crédit d'impôt remboursable pour la formation. Alors, les chiffres qui permettent de comprendre qu'après cinq ans c'est à peine 2 % des entreprises qui réclament un remboursement pour des investissements en formation, avec le crédit d'impôt.


Remarques finales


M. Yvon Charbonneau

M. Charbonneau (Bourassa): Enfin, M. le Président, à ce stade-ci de la discussion, on ne peut plus prendre beaucoup de temps pour vérifier certaines données. Dans les demandes de renseignements, la page est restée en blanc dans les documents de renseignements généraux, à la question 18, c'est-à-dire la liste du personnel constituant la suite sous-ministérielle. C'est une appellation d'ordre général. On sait que lorsqu'il s'agit d'un organisme, c'est la suite du bureau du P.D.G. dont il est question. La page est restée en blanc. Je ne veux pas nous attarder à ce moment-ci, ça nous aurait permis de mesurer l'évolution de l'équipe qui constitue le bureau de la P.D.G. par rapport à l'équipe antérieure, et ça nous aurait permis de questionner l'impact que peut avoir le grossissement d'un bureau de la présidence par rapport à l'équipe de gestionnaires qui est en place dans une société. Mais, faute de données, on ne pourra pas aller beaucoup plus loin là-dessus. Il y aura d'autres manières de discuter de ces questions.

En concluant, M. le Président, vous m'avez, dans votre intervention, enlevé le tiers de mon intervention, et j'en suis heureux. Vous l'avez fait d'une manière très, très appropriée, en parlant de CDEC, du développement de l'est de Montréal, les liens entre SQDM et MICT. J'ai posé des questions hier à la ministre quant à sa conception du rôle de la SQDM en matière de création d'emplois; comment elle se voit comme partenaire d'autres institutions dans l'ensemble de la stratégie gouvernementale. C'était resté en plan, comme réponse, et vous avez reformulé ces questions avec beaucoup de pertinence. Ça me préoccupe beaucoup aussi.

Deuxième élément de conclusion. J'ai compris hier, lorsque je questionnais la stratégie de la SQDM quant à une utilisation d'une marge de 10 % de ses programmes allant vers les régions; tout à coup, j'ai eu une réponse qui fait foi de tout. La ministre a dit: Mais ce n'est plus 10 %, c'est 100 % qui va aux régions.

Je souhaite bonne chance à la SQDM quant à son mouvement de bascule aussi complet. Il aurait pu y avoir une autre stratégie qui consiste à y aller graduellement: de 10 à 20, à 25, à 50 %. On bascule d'à peu près rien à 100 %. Ce qui veut dire que les régions, les SQDM en région devront elles-mêmes se remettre au travail pour, j'imagine, formuler des programmes ou des mini-programmes assortis aux besoins régionaux. Il y a là une charge lourde qui est transférée aux régions à travers ce mouvement de bascule complet de zéro à 100 %, puisque c'est la réponse que j'ai entendue. Et j'avise la ministre que l'opposition suivra avec grand intérêt ce mouvement de bascule. Tout en partageant le besoin d'aller vers les régions, on y va tout à coup entièrement et à 100 %. Est-ce que tout a été bien pesé en ce qui a trait à l'impact de cela, l'impact soudain d'un tel transfert, et pour ce qui est des services centraux de la SQDM et pour ce qui est des services régionaux?

(11 h 30)

Troisième remarque et dernière remarque, M. le Président. Je me suis peut-être fait mal comprendre ou la ministre m'a mal saisi; elle a laissé entendre que je croyais que c'était facile de négocier avec le fédéral. Holà! Je n'ai jamais dit ça et je ne voudrais pas qu'elle en conclue à cela. Mais je l'ai encouragée, cependant, et j'emploie l'expression que j'ai employée hier, à prendre son grabat, à faire son effort et à se rendre à Ottawa, à rencontrer M. Axworthy, qui l'a invitée d'une manière très pressante encore le 20 mars dernier à venir la rencontrer et à négocier.

Ce n'est pas facile, des négociations, celui qui vous parle en témoigne, peut en témoigner d'une bonne partie de sa vie, ce n'est jamais facile. C'est rare aussi qu'on a raison à 100 % dans des négociations. Donc, si on entre dans un processus de négociation, peut-être qu'on va découvrir des réalités plus larges, qui font que nos demandes initiales doivent être quelque peu mitigées, ce qu'on pourrait vivre quand même, avec tout ça, pour le plus grand bien-être des travailleurs.

Ça se pourrait qu'on trouve ça dans un processus de négociation. Bien sûr, si on n'en entreprend pas, on fait juste s'écrire, on fait juste faire des conférences de presse, laisser entendre qu'il y aura une solution à tout cela le jour où on aura acquis la souveraineté, bien, ça ne prédispose pas tellement au dialogue et à la coopération entre les parties. Les quelques exemples ponctuels qu'on a cités tout à l'heure, où il y a eu coopération, c'est parce qu'on n'a pas procédé par des conférences de presse et par des déclarations et des mises au défi. On a procédé discrètement, sous le mode de la coopération, et on a obtenu des points d'accord et des points de coopération très importants.

Alors, au cas où la souveraineté soit quelque peu retardée, au cas où il y aurait encore quelques années à franchir avant d'arriver à cette étape dont rêve la ministre, au cas où les travailleurs seraient encore en attente de meilleurs services en matière de formation et d'adaptation, est-ce qu'on ne pourrait pas se mettre au travail d'une manière concrète et entreprendre ces négociations, entreprendre de nouvelles rencontres avec le gouvernement fédéral, et voir si on est toujours à la même heure sur l'horloge, ou s'il n'y a pas moyen de faire débloquer certains dossiers, en attendant que le grand jour ou le grand soir arrive?

Le Président (M. Tremblay): Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, je comprends que le député de Bourassa a choisi d'anticiper sur l'examen que nous ferons de l'état des négociations. Alors, je vais immédiatement en profiter pour lui rappeler que, dès l'an dernier, le gouvernement précédent a donné le ton sur la façon dont il fallait aborder les négociations. Je comprends qu'il était absent de cette Chambre. Alors, je voudrais lui faire lecture – il y a déjà un an maintenant, c'était le 14 avril dernier – de ce que le premier ministre de l'époque disait à l'Assemblée nationale en réponse à une question du chef de l'opposition. Et je cite le premier ministre de l'époque, qui est l'actuel chef de l'opposition. Alors, il dit ceci: «Il m'apparaissait important que le Québec manifeste à tous ses partenaires quelle était notre attitude dans ce dossier. Et j'ai commencé dès ce matin, de même que notre collègue, le ministre du Travail, responsable du dossier de la main-d'oeuvre, à communiquer avec nos homologues. Nous avons communiqué avec nos homologues dès hier soir pour bien les sensibiliser à ce que nous envisageons comme étant un processus qui n'est pas respectueux d'une véritable consultation et des véritables besoins, donc, du Québec et des autres provinces.

«Et il me fait plaisir d'indiquer ici que l'opinion que j'ai et la façon dont j'envisage la défense des intérêts du Québec répondent et trouvent écho chez nos collaborateurs et que nous avons, à partir de ce moment, à décider comment nous manifestons de façon concrète notre opposition à la démarche de M. Axworthy, comment nous indiquons clairement que ce n'est pas une façon de consulter, que ce n'est même pas une façon d'aborder les dossiers. Et, d'ici quelques heures, il m'apparaît que nous aurons une décision extrêmement claire à donner et à indiquer aux Québécoises et aux Québécois de la façon dont, concrètement, nous allons défendre leurs intérêts dans ce dossier».

Et je vous rappelle, M. le Président, que le premier ministre et son gouvernement de l'époque décidaient de boycotter la conférence fédérale-provinciale qui, à l'instant même, suite d'ailleurs à l'appui qu'il recevait de son homologue ontarien, avortait. Il n'y a plus eu depuis un an aucune nouvelle convocation de la part du ministre fédéral. Et si le député de Bourassa pense que, moi, j'ai refusé de rencontrer M. Axworthy, je dois lui dire, là, que je l'ai invité plus souvent à me rencontrer qu'il m'a invitée lui-même, et que, dans la lettre du 20 mars – dont il avait obtenu copie avant moi, d'ailleurs, à l'Assemblée; je ne l'ai reçue à mon bureau qu'une heure et demie après qu'il me l'ait lue en Chambre – où M. Axworthy se disait si désireux de me rencontrer, nous en aurions eu l'occasion au Salon Jeunesse, où je coprésidais avec mon collègue Jean Garon les 10 jours de la formation professionnelle et technique, où il devait également y être pour en faire l'ouverture, mais où il a finalement choisi de se désister.

Alors, je vous dis ceci, M. le Président: Nous avons réclamé, ma collège responsable du dossier des Affaires intergouvernementales canadiennes et moi-même, de façon pressante, une rencontre fédérale-provinciale sur toute la question du marché du travail et de la main-d'oeuvre.

Je vous rappelle que nous avions clairement énoncé, en octobre dernier, après la publication du livre blanc de M. Axworthy, livre blanc qui donnait lieu à plusieurs hypothèses, que nous allions attendre les choix du gouvernement fédéral avant de nous lancer dans une consultation qui n'en fut point une, puisque les réponses, dans le budget Martin, face cachée de la réforme Axworthy, diffèrent entièrement de tous les échos que la consultation fédérale a pu pourtant engendrer l'automne dernier.

Alors, bien loin de répondre positivement, nous comprenons qu'Ottawa n'a pas l'intention de convoquer la conférence des ministres du marché du travail pourtant prévue en novembre dernier, puis reportée en février, puis reportée en mars, avant l'automne prochain. Alors, c'est une politique de fait accompli devant laquelle nous nous retrouvons, une politique de fait accompli où le ministre Martin annonce les intentions de son collègue Axworthy d'amputer 600 000 000 $ dans le programme de développement des ressources humaines cette année, d'amputer un total de 1 100 000 000 $ sur deux ans, de réduire, donc, de 1 400 000 000 $ à 400 000 000 $, donc d'amputer 1 000 000 000 $, là, complètement, dans tout le budget de développement des ressources humaines, et de jouer aux vases communicants en faisant transférer et financer par la caisse d'assurance-chômage, sous la forme d'une sorte de taxe déguisée, l'ensemble des interventions en matière de développement de la main-d'oeuvre, donc d'utiliser ce qu'il y a de plus régressif comme financement, parce que je vous rappelle que c'est essentiellement les travailleurs et employeurs, et en particulier les travailleurs à revenu et à salaire moyens et inférieurs qui cotisent à la caisse d'assurance-chômage, étant donné le plafond de 810 $ par semaine. Alors, c'est donc devant une situation de fait accompli devant laquelle nous nous retrouvons, et, ça, c'est d'autant plus inacceptable que, pendant ce temps-là, Ottawa décide unilatéralement de resserrer l'admissibilité à l'assurance-chômage, de nous transférer de plus en plus nombreux les chômeurs non admissibles aux prestations d'assurance-chômage mais qui viennent grossir les rangs de l'aide sociale; selon les dernières évaluations, 40 000 bénéficiaires de plus à l'aide sociale sont des chômeurs qui, autrement, auraient eu droit aux prestations. Alors, ce qui m'inquiète, c'est que ça n'indigne pas le député de Bourassa autant que ça indignait son parti lorsqu'il était au gouvernement l'année passée.


Adoption des crédits

Le Président (M. Tremblay): Alors, sur ces paroles, est-ce que le programme 4, sous le secteur Main-d'oeuvre et emploi, et intitulé Développement de la main-d'oeuvre, est adopté?

M. Charbonneau (Bourassa): Sur division.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Tremblay): Adopté à la majorité des voix.

(11 h 40)


Volet concertation

Alors, nous allons maintenant procéder au volet concertation pour des remarques préliminaires de la ministre. J'ai accepté, là, des explications un peu plus longues de la ministre sur le volet concertation, qui répondaient également à la demande du député de Groulx. Alors, étant donné qu'il nous reste 20 minutes, je vais essayer d'équilibrer les remarques préliminaires de la ministre avec, également, les remarques préliminaires du député de Bourassa. Alors, Mme la ministre. Equilibrer le temps, je veux dire, pas les propos, le temps. Alors, si vous avez des remarques préliminaires, Mme la ministre.


Remarques préliminaires


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, ça va être très bref parce que je pense qu'on a intérêt à poursuivre au niveau de l'échange. Le secrétaire associé à la concertation est ici présent. Nous avons obtenu deux mandats du Conseil des ministres, à savoir, d'abord, l'implantation de la mesure de contribution des entreprises pour l'équivalent de 1 % à la formation de leur personnel, et, d'autre part, le mandat de faire le ménage dans l'héritage des 102 programmes Mesures de formation de main-d'oeuvre qui nous ont été légués. M. le Président, simplement un mot pour vous indiquer que nous avons l'intention d'effectuer cette harmonisation des programmes dans la perspective d'élargir la marge de manoeuvre des régions. Je veux profiter peut-être de l'occasion pour vous signaler que c'est avec enthousiasme que les sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre ont accepté le défi qui consiste non pas à bâtir des programmes avec un cadre normatif puis à multiplier les critères dans leur propre région, mais à utiliser un menu de programmes qui est à leur disposition et dans lequel elles vont choisir ce qui est prioritaire pour leur région. Alors, elles n'ont pas à bâtir des programmes; le menu des programmes est déjà existant. Elles ont les fonds maintenant et la marge de manoeuvre à 100 % pour utiliser ces fonds, en privilégiant ceux des programmes qui leur conviennent le plus. Alors, c'est dans cette perspective-là qu'on entend aussi rationaliser et harmoniser les autres programmes déjà existants, dans la perspective d'amener les régions à pouvoir accroître leur marge de manoeuvre.

Le Président (M. Tremblay): M. le député de Bourassa.


M. Yvon Charbonneau

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, M. le Président. Je voudrais tout d'abord rassurer la ministre et lui dire d'entrée de jeu que je trouve que c'est une bonne idée de la part de son gouvernement d'avoir institué ou officialisé une fonction ministérielle en regard d'un mandat qui s'appelle la concertation. C'est une innovation dont la portée demande à être explorée, mesurée, évaluée, mais c'est une bonne idée que d'élever à ce niveau cette préoccupation dans un gouvernement.

La ministre nous dit qu'elle a reçu deux mandats jusqu'à maintenant. J'ai tout de même constaté qu'on nous propose des crédits de 1 500 000 $. Je constate, d'après les renseignements qu'on nous a fournis – Renseignements généraux, le cahier est tout petit, celui-là, on va se retrouver très vite, il a cinq, six pages – qu'il y a une équipe de 18 personnes au travail; 16 l'année prochaine, ce qui est une équipe quand même substantielle. J'aimerais qu'on prenne en note une question ou deux à cet égard, outre les propos généraux sur lesquels je vais continuer. S'agissant de la page où on nous fait état des effectifs du Secrétariat, est-ce qu'il s'agit bien là d'effectifs salariés entièrement par le Secrétariat ou s'il y a des emprunts d'autres administrations, Finances, SQDM, qui ne sont pas budgétés là? Si tout est budgété là, vous pourrez me répondre là-dessus.

J'aurai aussi, en regard des renseignements qui nous ont été fournis, à la page où il est question des voyages à l'étranger... Il y a un voyage qui m'a bien intéressé, c'est celui de M. André Beaudet, que je ne connais pas, qui est allé à Paris du 27 janvier au 5 février pour étudier toute la question de la formation professionnelle et de son financement. Ce n'est pas du tout pour critiquer la tenue de ce voyage-là, ce serait pour avoir accès au rapport, que je pose la question. Ça va nous éviter d'y aller puis ça va nous permettre de discuter d'une manière mieux informée avec la ministre lorsque le temps viendra. Ce seraient deux questions plus particulières.

Je reviens à ma ligne plus générale, le Secrétariat à la concertation, la ministre d'État à la Concertation. J'aimerais faire ressortir qu'il existe déjà des organismes qui, en principe, assurent la concertation des parties, des intervenants au Québec.

Il y a, par exemple, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre – main-d'oeuvre. Il y a un volet main-d'oeuvre de ce côté-là. Est-ce qu'on l'utilise, ce forum, pour des questions? Il y a aussi une institution, elle, qui est moins formelle mais qui a l'air à avoir été ranimée depuis quelque temps, la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, où le ministre rencontre des intervenants sociaux, syndicaux, patronaux, autour de son projet de fonds de 1 %, mais peut-être sur d'autres aussi. Il y a là un forum de concertation. Alors, quelle est l'utilisation qu'elle compte faire de cette Conférence par rapport au CCTM ou par rapport également au conseil d'administration de la SQDM? Elle vient, elle-même – elle en faisait état hier – de renouveler la moitié des membres du conseil d'administration et elle insistait pour dire qu'elle avait nommé des gens, des très hauts dirigeants, des figures de proue de leurs organisations.

Est-ce que c'est pour les confiner à un rôle de second ordre qu'elle a nommé tous ces gens de haut renom et de haute responsabilité, en faisait circuiter sa consultation par le biais de la Conférence permanente plutôt que par le C.A. de la SQDM? On n'invite pas des hauts dignitaires ou des hauts dirigeants de ce rang-là à participer à un conseil d'administration pour ensuite s'apercevoir que, par la porte d'à-côté, on fait des vraies affaires avec une autre Conférence qui, elle, n'a pas de statut officiel. C'est une Conférence qui a été créée à un moment donné, pour consultation, par un ministre du gouvernement précédent, qui a mené à l'élaboration d'un document qui a inspiré la mise en route de la SQDM du temps de M. Bourbeau.

Puis là on ranime cette Conférence au lieu de travailler avec les instances connues qui sont déjà en place, qui ont un statut officiel, dont on nous dit qu'on rehausse la composition, le C.A. de la SQDM. On retrouve là le président du Mouvement Desjardins, le président de la CSN, le président de la CEQ, les présidents de toutes les grandes organisations au Québec, le président du Conseil du patronat, qui n'était pas là auparavant. Et on semble heureux d'avoir retiré au C.A. de la SQDM des grands joueurs sociaux comme ceux-là, et, en même temps, on invoque le consensus de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, un organisme qui n'a pas de statut, pour faire avancer le dossier du 1 %.

À quoi on joue en matière de concertation, M. le Président? Ça fait penser à certains théâtres d'été où il y a une douzaine de portes sur la scène, et on ouvre une, ferme l'autre, puis les comédiens passent d'une porte à l'autre. Finalement, on a de la difficulté à suivre l'intrigue – sans connotation malheureuse au mot «intrigue», M. le Président. Simplement, on a de la misère à suivre l'évolution du dossier. Il y a des institutions officielles qui existent. Et on utilise des institutions officieuses pour faire avancer des dossiers délicats. J'aimerais entendre la ministre sur sa philosophie de la concertation, parce que la concertation repose essentiellement sur la transparence. Le succès des démarches de concertation repose sur la cohérence, la transparence, la continuité. Les à-coups des consultations en parallèle par des portes dérobées, ce n'est pas un bon moyen, à moyen terme, de faire avancer les dossiers majeurs comme ceux-là.

(11 h 50)

Il y a des institutions officielles qui existent. Il y en a aussi d'autres à l'usage de la ministre, si elle veut faire avancer certains dossiers. Il y a l'IRIR, il y a la CSST. Et, le dossier de la concertation, M. le Président, au Québec, il n'est pas né de cette innovation que la ministre incarne, vu son affectation ministérielle. Il y a plusieurs organismes qui sont là pour l'assurer à longueur d'année. Que veut-on de plus ou qu'espère-t-on de plus de la part de ce Secrétariat à la concertation qui n'ait pas été possible ou envisageable à travers les organismes actuellement en place? Je pense que, si on peut justifier ces 1 500 000 $, à partir de réponses concrètes à des questions comme celles-là, bien, on pourra suivre ce dossier avec encore plus d'intérêt.

Et, au-delà de deux mandats, est-ce que la ministre entend nous dire que le Secrétariat à la concertation va devenir le haut lieu de la concertation interministérielle entre les différents ministères du gouvernement? Parce qu'on sait qu'il y a tout un chassé-croisé dans le domaine de la main-d'oeuvre, mais on doit s'en écarter, on a dit «concertation». Concertation, ça peut être plus large que la main-d'oeuvre. Il y a un chassé-croisé important, plusieurs ministères ou directions de ministères sur plusieurs dossiers, dans le domaine de la main-d'oeuvre. On sait ce qui existe du côté de l'emploi, de l'éducation, du MICT, du développement régional, et on pourrait en nommer d'autres. Est-ce que son Secrétariat a des responsabilités de ce côté-là? Est-ce que son Secrétariat fait double emploi par rapport au Conseil du trésor, qui, lui, essaie de réaliser une concertation aussi avec les partenaires sociaux, syndicaux? Il fait état, de temps à autre, d'une signature, d'une entente sur la réorganisation du travail, la restructuration du travail. Est-ce que c'est là une autre main qui s'agite au vaste champ de la concertation gouvernementale? Est-ce que c'est relié au Secrétariat et à la responsabilité de Mme la ministre actuelle? Je pense que c'est des questions importantes à regarder.

Concertation intergouvernementale, est-ce que c'est aussi de votre responsabilité? Si, par vos initiatives, on en arrivait à entreprendre des négociations avec l'autre ordre de gouvernement, le gouvernement fédéral, sur certains dossier, moi, j'appelerais ça aussi de la concertation.

Je crois que la population attend des actions de ce côté-là. On a beau nous citer des lettres du précédent premier ministre datées d'il y a à peu près un an, je crois que ce n'est pas en citant de telles lettres que le gouvernement actuel va nous faire la démonstration que, lui, est en train de changer des choses et que, lui, essaie de nouvelles choses. Si c'est pour s'arrêter, arrêter l'horloge à la date du 14 avril de l'année dernière que la population a changé de gouvernement, je pense qu'elle serait un peu déçue d'entendre qu'on n'essaie pas de nouvelles choses. Ce n'est pas à la faveur d'une rencontre sociale à l'occasion d'une exposition à Montréal qu'on peut parler d'un rendez-vous raté en matière de négociation ou de concertation. Il faut vraiment entamer une démarche rigoureuse et avoir des dossiers et convoquer, rencontrer les homologues avec des objectifs précis en tête, et là on fait des bilans et, ensuite, s'il y a lieu, on parle de statu quo. Puis, si ça a changé, si l'heure a changé un peu, on le dit aussi.

Dans le cours de l'automne 1994 et en février 1995, il y a eu de nouvelles politiques; certains les déplorent, d'autres les regardent pour ce qu'elles peuvent apporter: transfert social canadien, et tout le reste. Il y a de la concertation, il y a des efforts à faire de ce côté-là aussi.

Alors, mes questions, M. le Président, ou mes commentaires à ce moment-ci, consistent à demander à la ministre quelle envergure, finalement, elle entend donner à son mandat de la concertation et, également, de nous justifier l'utilisation d'un Secrétariat à la concertation en appui à une Conférence permanente d'adaptation de la main-d'oeuvre alors qu'il existe un C.A. de la SQDM et qu'il existe également un Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, des instances bien connues et bien officielles.

Le Président (M. Tremblay): Alors, j'aimerais rappeler aux membres de la commission que, tel que convenu entre les parties, il nous reste sept minutes. Alors, aux réponses, aux nombreuses réponses du critique de l'opposition, le député de Bourassa, j'aimerais dire à la ministre que ses réponses vont devenir ses remarques finales. Alors, Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, là, en matière de remarques préliminaires, mais tout en étant finales, je dois vous dire que je n'ai pas vraiment cependant saisi, dans les propos du député de Bourassa, s'il nous reprochait d'avoir mis sur pied le Secrétariat à la concertation ou s'il en était content.

Je veux tout de suite le rassurer sur le fait, cependant, que c'est avec non seulement l'assentiment, là, des partenaires patronaux et syndicaux, mais c'est avec leur... En fait, c'est à partir du choix qu'ils ont fait et de la demande qu'ils m'ont exprimée que la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre est restée, si vous voulez, vivante.

Alors, les partenaires patronaux et syndicaux qui y siègent, en fait, au nombre de huit – il s'agit essentiellement des quatre grandes centrales syndicales, et, du côté patronal, de l'AMQ, du Conseil du patronat, du Mouvement Desjardins et de la fédération des chambres de commerce – m'ont demandé, l'automne passé, de maintenir la Conférence permanente d'adaptation sur la main-d'oeuvre comme le forum de réflexion, de discussion et d'échanges sur la mesure d'implantation de l'équivalent de 1 % de contribution des entreprises à la formation de leurs employés. Et c'est dans ce cadre-là que les réunions ont eu lieu et, notamment, également, pour réitérer à l'unanimité l'intention ferme des partenaires patronaux comme syndicaux, indépendamment de leur allégeance partisane, là, l'intention ferme de tous ces partenaires de rapatrier au Québec l'ensemble des mesures actives en matière de formation de la main-d'oeuvre.

M. le Président, j'ai parlé trop brièvement, hier, des mesures actives. Nous avons fait préparer un tableau à cet effet pour bien vous indiquer de quoi on parle quand on parle de rapatrier les programmes et le financement des mesures actives. En fait, on parle de formation, oui, mais on parle aussi d'aide à la création d'emplois, on parle de soutien à l'«entrepreneurship», d'aide à la mobilité, d'information sur le marché du travail, de placement, d'orientation. Et c'est de cela dont il s'agit quand on dit que, à l'unanimité, les partenaires tant patronaux et syndicaux... Et je me rappelle, encore récemment, le président du Conseil du patronat, M. Dufour, demander de modifier le procès-verbal de la réunion antérieure pour qu'apparaisse clairement que ce sont des mesures actives dont il s'agit quand on parle de rapatriement. Et, ce rapatriement, c'est pour en arriver à harmoniser, à intégrer l'ensemble de toutes ces mesures qui sont dispersées, éparpillées, pour en avoir une vision commune, et surtout être plus efficaces en regard des besoins de la main-d'oeuvre au Québec. Donc, maintien de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, à la demande des partenaires.

D'autre part, à la demande également des mêmes partenaires, qui considèrent que, sur certains dossiers, ils sont des partenaires et, sur certains autres, ils peuvent, à l'occasion, être aussi des adversaires, je rappelle qu'en matière de relations de travail le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre a maintenant une mission essentiellement à l'égard du travail, Conseil consultatif du travail, et que, essentiellement, pas nécessairement exclusivement, les partenaires se retrouvent dans un autre forum qui, cette fois, aborde, au niveau du Conseil consultatif du travail, les questions relatives à l'organisation du travail, les questions relatives à l'aménagement du temps de travail, les questions qui sont de nature à se régler, au niveau des conventions collectives, au niveau du Code du travail.

Moi, j'ai pris l'engagement, dorénavant, de ne pas procéder à des modifications substantielles au Code sans toujours préalablement demander un avis du Conseil consultatif du travail, qui veut être plus qu'il n'était jusqu'à maintenant, c'est-à-dire un forum où s'établissaient les listes d'arbitres et les listes de médecins du bureau médical de révision, mais qui veut être beaucoup plus que ça et qui, paritairement, conjointement, a décidé d'être à l'avant-scène de la réflexion sur les relations de travail dans notre société. Et c'est avec l'accord de la ministre et l'appui du ministère que le Conseil consultatif et ses membres pourront disposer de ressources supplémentaires à ce qu'ils avaient jusqu'à maintenant justement pour pouvoir s'acquitter de cette nouvelle responsabilité.

À l'égard du Secrétariat à la concertation, je rappelle – puisque je dois le faire, sinon, je comprends que l'impression qui en restera, c'est simplement celle des décrets auxquels je référais, quant au mandat – le document qui s'intitule «Cahier explicatif des crédits», qui a été remis à l'ensemble des membres de cette commission parlementaire, où on y explique les dossiers qui sont actuellement ceux sur lesquels travaille le Secrétariat à la concertation. Il s'agit à la fois du dossier Action emploi jeunesse, qui, en collaboration avec le Forum pour l'emploi, a permis, dans l'ensemble des régions du Québec, de mettre à contribution les partenaires, pas simplement patronaux et syndicaux, l'ensemble des partenaires du Forum pour l'emploi, qui couvre très large, en allant chercher tant dans le monde scolaire que dans le monde municipal que, je dirai même, dans le monde clérical, pour mettre à contribution l'ensemble des forces vives des régions, dans un objectif d'insertion des jeunes à l'emploi. Et je disais hier que le bilan se fera les 13 et 14 juin prochain dans le cadre d'un grand rassemblement ici, à Québec, où les initiatives prises en région pourront se multiplier, en étant connues de l'ensemble de la population.

(12 heures)

Également, autre mandat extrêmement important dont s'acquitte le Secrétariat à la concertation, c'est celui, conjointement avec le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes, de la coordination en réponse aux intrusions d'Ottawa tant au niveau de la sécurité du revenu qu'au niveau de l'éducation, qu'au niveau de la santé, qu'au niveau des services de garde et, évidemment, de la main-d'oeuvre. C'est ce qu'on appelle communément la réforme Axworthy, qui, comme vous le savez, est comme une peinture à numéros: pour avoir un portrait complet, il faut faire le tour parce que ça concerne plusieurs ministères. C'est stratégique, évidemment, parce que c'est une façon détournée, tout en économisant, pour Ottawa d'entrer dans les champs de juridiction des provinces. C'est également le Secrétariat à la concertation qui, conjointement avec le SAIC, s'occupe de la coordination de ce dossier.

Je parlais tantôt du dossier de la contribution de 1 % des entreprises à la formation professionnelle et j'ajoute évidemment le dossier de l'intégration des programmes du gouvernement et du guichet unique. Il faut également ajouter à cela un mandat récent, M. le Président. Il s'agit du suivant, qui nous a été confié par le premier ministre, qui est de mettre à la disposition des 17 signataires actuels des ententes-cadres avec le gouvernement l'ensemble des livres, d'ouvrir les livres tant du côté des dépenses que du côté des revenus. Alors, un premier exercice est entrepris du côté des dépenses en ouvrant l'ensemble des livres, conjointement avec le Trésor et sa présidente, d'ouvrir, donc, ces livres aux employés du gouvernement. L'exercice se complétera par une deuxième phase, après le discours du budget, où on ouvrira entièrement à nos employés et à ceux qui sont signataires de l'entente-cadre les livres de revenus et l'état de la situation, de façon à en arriver à la tenue d'un forum public sur l'ensemble de ces questions.

Alors, voilà le mandat dont on s'acquitte. Je comprends qu'il s'agit présentement d'un total de 15 employés, dont la très grande majorité sont, finalement, prêtés par leur ministère d'origine. Alors, je laisserai, s'il y a des questions là-dessus, le secrétaire associé y répondre.

Le Président (M. Tremblay): Mais le temps dont les parties avaient convenu pour discuter du volet concertation est écoulé, à moins évidemment que vous n'ayez le consentement des membres de la commission pour amputer...

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, étant donné qu'il y a une demi-heure, si jamais, des fois, ça permet d'éclairer mon collègue sur le mandat de la concertation... Étant donné qu'on a seulement une demi-heure, on a très peu de temps pour aborder le sujet de l'emploi. Alors, ça ne me dérange pas de remettre ça à cet après-midi, 14 heures... 15 heures, c'est-à-dire.

Le Président (M. Tremblay): Étant bien convenu que ce temps additionnel de 15 minutes pour la concertation va venir amputer les six heures qui sont réservées à l'emploi. Donc, M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Je croyais que madame avait passé la parole à M. Laflamme.

Le Président (M. Tremblay): Je pense qu'elle voulait donner la parole à M. Pierre Laflamme, secrétaire général associé au Secrétariat à la concertation.


Discussion générale


Secrétariat à la concertation

M. Laflamme (Pierre): Oui. Sur les questions précises, M. le Président, on a demandé des informations au sujet de M. Beaudet. C'est une mission... M. Beaudet nous était prêté par le ministère de l'Éducation. Il avait une mission prévue en France spécifiquement sur la formation professionnelle. On y a ajouté – je pense que le document mentionne le détail – les frais de transport payés par le MAI et les frais de séjour par le Secrétariat. On a ajouté un volet d'information additionnel dans la démarche de confection du projet de loi et la démarche du 1 % de formation professionnelle.

Au niveau des effectifs, effectivement, ça a été le Secrétariat pour... en 1994-1995. Vous comprendrez qu'il s'est mis en place graduellement à partir de l'engagement du secrétaire général associé, qui n'a pas pu être fait immédiatement, évidemment, après la nomination, mais ça s'est fait en cours de route. Donc, depuis le 1er avril, tout le monde est en place et l'équipe est complète.

Le Président (M. Tremblay): Est-ce que c'est le même André Beaudet qui a été coordonnateur pour la négociation de l'élimination des barrières interprovinciales récemment? Est-ce que c'est le même?

M. Laflamme (Pierre): Je ne pense pas que... M. Beaudet était le conseiller spécial du sous-ministre adjoint, M. Jacques Lanoux, à l'Éducation. S'il a participé, je ne penserais pas que ce soit la même personne.

Mme Harel: M. le Président, je souhaiterais que le secrétaire associé puisse développer également le mandat à l'égard de la mobilité interprovinciale de la main-d'oeuvre, qui, j'en suis certaine, vous intéresse beaucoup.

Le Président (M. Tremblay): Très bien. Alors, M. Laflamme.

M. Laflamme (Pierre): Vous savez probablement, M. le Président, qu'à l'intérieur de l'Accord sur le commerce intérieur canadien il y a le chapitre concernant la mobilité de la main-d'oeuvre, dont le développement, la rédaction et la mise en application ont été confiés au Forum des ministres responsables du marché du travail. Dans ce sens-là, compte tenu du mandat gouvernemental, au Secrétariat à la concertation, de coordonner l'action gouvernementale en matière de relations fédérales concernant la main-d'oeuvre, le mandat a échu au secrétaire général associé à la concertation, au Secrétariat et à la ministre de coordonner le développement et la rédaction. Ce chapitre de la mobilité doit entrer en application à compter de juillet 1995, donc c'est prochainement, et il y a, des différentes pièces prévues, un échéancier de mise en place assez serré. On doit avouer que le rythme de suivi de l'ensemble des autres provinces est relativement variable, compte tenu des ressources, effectivement, qu'elles peuvent y affecter. C'est plus le Québec et l'Ontario qui sont le plus en avance dans la rédaction et la poursuite de la mise en place de ça.

Évidemment que c'est fait en très proche proximité, parce que le Secrétariat n'a pas les ressources pour mener ça. C'est fait avec des personnes-ressources de la SQDM, nommément, et qui suivent toute l'activité. Ce qu'ils appellent les «senior officials» – excusez le terme – les hauts fonctionnaires, c'est suivi par la SQDM en concertation avec le Secrétariat.

Le Président (M. Tremblay): Bien. M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Si je comprends bien, M. le Président, nous avons jusqu'à 12 h 30 sur ce dossier. Est-ce que c'est ce que je comprends?

Le Président (M. Tremblay): Ce que j'avais compris, c'est que votre collègue parlait de 15 minutes, mais si votre collègue parle maintenant d'une demi-heure, avec le consentement des membres de la commission, on peut poursuivre sur la concertation.

M. Charbonneau (Bourassa): On doit ajourner à 12 h 30, de toute façon.

Le Président (M. Tremblay): Oui. On va...

Mme Harel: On doit ajourner à 12 h 30.

Le Président (M. Tremblay): On va suspendre...

Mme Harel: Ah! Suspendre.

Le Président (M. Tremblay): ...suspendre à 12 h 30. Je voudrais vous informer que j'ai le député de La Peltrie, également, qui aimerait poser une question. Il est en face de vous. Alors, M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Merci. Nous avons reçu, pendant l'échange préliminaire, de nouvelles données sur le personnel, les effectifs du Secrétariat, qui sont un peu différentes de celles qui paraissaient au Cahier des renseignements généraux. Alors, je constate ici qu'il s'agit d'un effectif total autorisé de 15 personnes. J'ai cru comprendre de la part du secrétaire général associé qu'il s'agit du nombre de personnes qui sont salariées, en fait, au budget du Secrétariat, et qu'il peut y avoir aussi des personnes qui ont été prêtées, provenant d'autres ministères, en plus de ce noyau de 15. Est-ce que mon interprétation est correcte ou non?

Mme Harel: Alors, je vais demander au secrétaire associé de répondre à la question.

M. Laflamme (Pierre): Le budget du Secrétariat... En fait, les crédits qui sont demandés comprennent 15 personnes à plein temps, ce qu'ils appellent les ETC, emplois à temps complet, dont deux hauts fonctionnaires, le secrétaire et le secrétaire adjoint, huit professionnels et quatre fonctionnaires. Pendant la période de mise en place du Secrétariat et compte tenu qu'on est allé chercher des ressources dans différents ministères pour mieux coordonner l'action interne du gouvernement, aux Finances, au MIC, à différents endroits, SQDM aussi, il y a évidemment une période pendant laquelle certaines personnes ont été prêtées, mais le nombre total de personnes engagées n'a jamais dépassé et ne dépassera pas les effectifs de 15 personnes.

M. Charbonneau (Bourassa): Et quant à ma question relative à la mission de M. Beaudet, est-ce que je dois comprendre que nous aurons accès au rapport de cette mission de manière à pouvoir profiter de ces informations disponibles en France sur le dossier de la formation?

M. Laflamme (Pierre): J'imagine. Il y avait un peu un droit de propriété conjointe avec le ministère de l'Éducation et le ministère, mais je pense que ça ne pose aucun problème de rendre public le rapport de la mission.

M. Charbonneau (Bourassa): Je m'en assurerai, M. le Président, en demandant la même chose au ministre de l'Éducation dans deux semaines. Alors, à ce moment-là, la propriété conjointe nous sera accessible.

Mme Harel: Alors, M. le Président, on va se faire un plaisir, même, d'en faire parvenir copie au secrétariat de la commission pour le bénéfice des membres de la commission.

(12 h 10)

M. Charbonneau (Bourassa): Sur l'ensemble du dossier, M. le Président, la ministre a répondu à certaines de mes questions quant au bien-fondé de la mise en place d'un Secrétariat à la concertation, questions que je lui posais en regard de la Conférence permanente, du C.A. de la SQDM. Elle me dit: Les partenaires m'ont demandé ci, les partenaires ont voulu que ça, etc. C'est très important d'être attentif à l'expression des points de vue des partenaires, en concertation, mais, en même temps, je pense que c'est légitime de se poser certaines questions sur le plan de match de la ministre au chapitre de la concertation.

Bien sûr, elle me trouvera toujours d'accord dans ses démarches qui consistent à essayer d'obtenir le point de vue concerté des partenaires sociaux sur ce qu'elle entreprend. Nous serons toujours vigilants à examiner l'état de ces consensus ou de cette concertation. Mais le C.A. de la SQDM ne réunit-il pas tous les mêmes éléments que ceux de la Conférence permanente? On parle de huit partenaires, à la Conférence permanente, et il y a 18 membres plus la présidente au C.A. de la SQDM, incluant les mêmes huit premiers, plus d'autres, c'est-à-dire un tiers du C.A. de la SQDM étant de diverses provenances. Donc, le C.A. de la SQDM comprend les mêmes figures de proue que celles qu'on retrouve à la Conférence et, même, permet un échange un peu plus large avec des représentants d'autres provenances, qui sont, ces parties-là, je tiens à le préciser, tout aussi intéressées que les organismes officiels syndicaux et patronaux au développement de la main-d'oeuvre, de l'emploi et à ces sujets-là, à l'avancement de la formation.

Pourquoi utiliser de temps en temps un forum restreint de huit superreprésentants de superorganismes et puis, par ailleurs, maintenir, non seulement maintenir mais même raviver, relancer le C.A. de la SQDM en y invitant des personnalités de haut niveau qui n'y avaient pas accès auparavant? Donc, d'une manière, on fait croire à ces gens-là et au public qui regarde ça que, oui, on va faire vraiment affaire avec ce qu'il y a de plus décisionnel au Québec, le C.A. de la SQDM. Ça, c'est un langage un jour. D'un autre côté, on ravive la Conférence permanente sur l'adaptation, et, là, il y en a eu huit. Il y a une espèce de club sélect de huit avec qui, là, on essaie de faire d'autres affaires ou des vraies affaires. Et, même, je crois comprendre que lorsque ça ne réussit pas à huit, on les rencontre un par un, en plus, pour essayer de voir si, un à un, on pourrait essayer d'amener ce monde-là à un consensus minimal sur certaines questions et, ensuite, dire au suivant: Écoute, j'ai gagné un point avec un, peut-être que s'il y avait un autre point... essayer de tisser un consensus à travers ça.

Est-ce que c'est ça, la philosophie de la concertation de la ministre? Utiliser plusieurs organismes, l'un en parallèle à l'autre, puis compléter le tout par des rencontres individuelles et essayer, à un moment donné, de montrer qu'on a réussi un concert? En tout cas, je voudrais souligner cet aspect-là. Nous voyons – par des bribes d'information disponibles dans les médias – s'étaler la stratégie de la ministre en matière de concertation, et, ma foi, elle a bien droit d'essayer de réussir dans les mandats qu'elle entreprend, mais, en même temps, pourquoi jouer ce parallélisme? Quel message ça envoie au C.A. de la SQDM que les vraies affaires soient discutées en parallèle à la Conférence permanente? Quel message ça lui envoie? Est-ce que ça veut dire qu'ils seront simplement des exécutants des consensus adoptés ailleurs? Est-ce que ça veut dire qu'il y a des forums plus importants en matière d'orientations et de décisions que le C.A. de la SQDM, une institution créée par une loi, alors que la Conférence permanente, c'est créé à partir d'une décision ou d'un bon vouloir ministériel? Ça peut mourir demain, ça n'a pas de statut autre que celui du bon vouloir des parties et de la ministre, donc un statut purement informel. Est-ce que ça devient plus important de discuter avec une structure informelle, passagère, transitoire, qu'on peut allumer, éteindre, laisser vivoter pendant des années, ou bien si c'est plus important de travailler avec des structures officielles expressément mises en place dans une perspective de concertation parce que c'est ça qui a présidé à la mise en place du C.A. de la SQDM? Alors, j'aimerais, en particulier, entendre l'analyse de la ministre sur cette stratégie de la concertation à volets multiples.

Le Président (M. Tremblay): Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, je vous assure que je ne m'attendais pas à me faire reprocher par un député de l'opposition de trop consulter ou encore de trop rencontrer les partenaires, seuls ou en groupe. Je comprends que ça a l'air à déranger le député de Bourassa, mais je dois lui dire que j'ai quand même l'intention de continuer dans cette voie-là. Je comprends que le député de Bourassa a l'air de se convaincre – il en est éloquent! – qu'il y a là matière à zizanie entre les partenaires. Pourquoi m'a-t-il posé la question, avoir maintenu la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, qui, comme il l'a si bien dit, n'a pas de statut et est un forum informel que mes prédécesseurs ont créé, et que celui-là même qui a mis en place la SQDM a maintenu, alors, pourquoi avoir à nouveau utilisé ce forum? La réponse est très simple: parce que c'était la volonté des partenaires qui en étaient membres. Et à quelles fins est-ce que ces rencontres ont servi? Essentiellement à discuter, échanger, dialoguer sur la question du 1 %.

J'ai moi-même posé clairement la question d'entrée de jeu lors de la première rencontre, le 31 octobre dernier, à savoir s'il ne valait pas mieux que l'ensemble de tous les débats ait lieu au C.A. de la SQDM plutôt qu'à la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, et je dois vous dire que c'est à l'unanimité que les partenaires ont préféré que ce soit – on m'a bien dit: «de façon transitoire» – à la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre que ces débats aient lieu. Pourquoi? Je me suis moi-même posé la question: Pourquoi avaient-ils choisi que cela se fasse à la Conférence permanente? J'en suis arrivée, M. le Président, à la seule réponse qui m'est apparue évidente et qui est la suivante: C'est que, l'automne passé, au début de l'automne dernier, l'héritage que nous avait laissé le précédent gouvernement faisait que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre était au plus bas dans son niveau de crédibilité auprès des partenaires eux-mêmes et que, compte tenu de l'état de la situation, les partenaires voulaient attendre, comme Thomas, de toucher aux changements que je leur annonçais avant de décider qu'ils en étaient satisfaits.

Alors, c'est la raison qui, sans doute, explique pourquoi, en octobre dernier, les partenaires ont choisi que la discussion du 1 % se poursuive au niveau de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre. Cependant, je comprends aussi que nous entendons confier au conseil d'administration de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre la gestion du fonds qui sera mis en place suite à l'implantation du 1 %, de même que l'élaboration du plan de formation annuel qui pourra en résulter.

Alors, il y a donc, disons... M. le Président, dans un calendrier d'intervention, il faut comprendre qu'il n'est pas de mon intention de maintenir, autrement que si les partenaires me le demandent, les mandats à la Conférence permanente, mais que je n'ai pas l'intention de leur imposer un forum autre que celui dans lequel ils veulent travailler.

Le Président (M. Tremblay): M. le député de La Peltrie.

M. Côté: Merci, M. le Président. Mme la ministre, ma question est relative à l'organigramme concernant le Secrétariat à la concertation. Québec, c'est la capitale, c'est le siège du Parlement, c'est là que se prennent les grandes décisions. Les députés de la région de la capitale sont très sensibles à l'effet de voir à ce que demeurent dans la capitale, et à les conserver, les sièges des organismes gouvernementaux.

(12 h 20)

En ce qui a trait au Secrétariat à la concertation, je vois dans l'organigramme, avec un effectif autorisé de 15 personnes: bureau de Montréal, bureau de Québec. Alors, j'aimerais savoir dans quelle mesure la répartition des effectifs va être effectuée. Est-ce qu'il y a des prévisions de faites à cet effet-là?

Mme Harel: Je vous dirai, M. le député de La Peltrie, que la répartition se fait en fonction des mandats, des dossiers et des besoins, mais je laisserai le secrétaire général associé répondre plus spécifiquement à votre question de la répartition, si j'ai bien compris, Montréal-Québec.

M. Laflamme (Pierre): Au niveau de la division des effectifs, actuellement, à cause des mandats qui sont en cours, c'est huit-sept: huit, Québec; sept, Montréal. Il y a des raisons très spécifiques. Vous savez que la plupart des partenaires du marché du travail et les gens sont dans la région de Montréal, si on prend les sièges sociaux des principales centrales syndicales et les autres partenaires. Évidemment, la concertation ministérielle est à Québec, et les personnes, à l'occasion, se transportent. Le Secrétariat lui-même est à Québec. Il n'y a donc qu'un bureau de services au Conseil exécutif à Montréal, dans quelques bureaux qui sont là.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Tremblay): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui. M. le Président, je voudrais, à ce stade-ci, revenir sur ce que j'ai mentionné d'entrée de jeu, mais qui a peut-être échappé à la ministre à ce moment-là. Mon point de vue en est plutôt un d'appui au statut du mandat de la concertation qui est apporté ou qui a été créé par le présent gouvernement. Mes questions, mes interventions visent à nous assurer que ce n'est pas une structure de plus à côté de x autres, mais qu'il y a là-dedans une espèce de plan, une espèce d'agencement où on s'en va vers quelque chose d'efficace et dont les résultats seront mesurables et visibles à un moment donné. Souvent, on a une tendance... Si une structure fonctionne plus ou moins, bien, on en crée une autre à côté ou on en ranime une qui était au ralenti. Et puis on s'en va, comme ça, d'une structure à l'autre. Les mois passent, les années passent et on a consulté. Jamais il n'y a dans mes propos l'ombre d'un reproche sur la consultation que la ministre veut faire. Jamais je n'accepterai qu'on m'impute de tels propos, de telles pensées. Mais, d'un autre côté, il ne faut pas non plus devenir aveugle par le nombre de rencontres, de consultations qu'on peut faire. Ça, on peut en faire, des réunions et des consultations, et dire: Voici, mon agenda est rempli de consultations. Mais, réellement, en quoi avance-t-on vers la concertation? C'est ça qui est important derrière ces nombreuses rencontres.

La consultation, c'est une chose. Je sais – vous l'admettrez certainement avec moi – d'expérience qu'il y a des organismes dont les présidents ou les présidentes sont membres tant du C.A. de la SQDM que d'autres regroupements, que ce soit la Conférence... Ce sont les mêmes gens qui se retrouvent au CCTM. Je n'aborde plus cette question, on en a parlé tout à l'heure, mais c'est les mêmes gens qui se transportent d'un lieu à l'autre. Alors, c'est sûr que si, à un moment donné, on obtient un consensus à une place, on peut être porté à penser qu'il existe partout. Mais ce qu'il ne faudrait pas introduire dans le système, c'est un jeu où il y a les superorganismes, il y a un club sélect de superreprésentants, plus réduit, et puis les autres deviennent les exécutants. Par exemple, le C.A. de la SQDM, lui, il va s'occuper de la mise en oeuvre, alors que les vraies décisions, les vraies délibérations, les vraies orientations, ça aurait été à la Conférence.

On me dit: Oui, je les ai consultés. Ils m'ont dit qu'ils étaient d'accord, eux, les gens de la Conférence permanente, pour être convoqués. Oui, mais les autres, les 18 autres, de l'autre côté, qui sont en partie les mêmes, si on leur avait posé la question à eux, est-ce qu'ils auraient dit: Non, nous autres, on ne veut pas toucher à ça? Je pense qu'à moyen terme le succès de la concertation va venir d'une cohérence dans le système et il va venir de beaucoup de transparence aussi. J'imagine que le mandat du Secrétariat, c'est d'appuyer la ministre dans l'ensemble de ses consultations, qui doivent dépasser la simple coordination.

J'ai cru comprendre, dans certains éléments d'intervention, que le Secrétariat allait soutenir la mise en place des 17 ententes-cadres, faire le ménage dans les programmes qui relèvent de plusieurs ministères. Mais, au-delà de cette coordination de premier niveau, on parle de concertation. Moi, je veux lui accorder le plus grand intérêt, à ce mandat, et non pas du tout, du tout diminuer cette veine-là de travail de la part d'un ministre, ou de la ministre. Je suis même prêt à lui demander ce qu'elle entrevoit en termes de concertation fédérale-provinciale, en termes d'efforts pour reprendre ce travail de ce côté-là.

Il est ingrat, ce travail. Jamais, Mme la ministre, je ne vous dirai: C'est facile, les négociations fédérales-provinciales. Mais est-ce qu'il n'y a pas là un niveau de concertation entre les deux paliers de gouvernement qui, s'il n'est pas fait par votre Secrétariat ou sous votre responsabilité, bien, je me demande par qui il est fait dans le gouvernement. Je m'adresse à vous parce qu'il est question de concertation, et je m'aperçois que la population attend. Quand on a un peu d'écoute pour ce qui s'est dit dans les derniers mois au Québec, la population attend un meilleur niveau de coopération et de concertation entre les grands intervenants dont les actions façonnent nos vies: le fédéral et le provincial.

Les gens n'ont pas dit, ces derniers mois, à ma connaissance: Coupez les ponts, coupez les gaz et parlons-nous entre nous seulement. Ils ont dit, au contraire: On va regarder les vrais problèmes, et puis on voudrait que le monde, que les différents paliers d'intervention coopèrent ensemble, se concertent, allient leurs énergies, clarifient certains domaines où il y a de la superposition, des dédoublements. On en est, et j'appuierai vos efforts là-dessus, mais, essentiellement, qu'on travaille ensemble! Est-ce que votre mandat couvre aussi ce champ de préoccupation?

Le Président (M. Tremblay): Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, je pensais avoir fait parvenir au député de Bourassa, comme à tous les députés d'ailleurs, l'essentiel de ce que ma collègue, la ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, et moi-même avons réclamé de la part d'Ottawa. Ça n'a peut-être pas été fait, là, parce que je comprends, dans les propos du député de Bourassa, qu'il n'a pas bien saisi que, présentement, nous sommes devant un budget fédéral qui nous met devant le fait accompli en matière de main-d'oeuvre. Il n'y a pas de négociations qui peuvent s'entreprendre lorsque le budget déposé, qui sera voté à Ottawa, est à l'effet d'amputer 600 000 000 $ en 1995-1996, 1 100 000 000 $ en 1996-1997, dans le budget du ministère du Perfectionnement des ressources humaines, Canada. Ça, c'est la commande qui est dans le budget. Alors, je ne peux pas m'imaginer que le député de Bourassa souhaiterait que, nous, on collabore à ce que cette commande-là soit remplie, quand on sait les conséquences que ça aura sur les clientèles des personnes sans emploi au Québec, sur le budget du gouvernement du Québec lui-même et sur, finalement, l'état des finances publiques.

(12 h 30)

Ce qu'on nous confirme également, dans ce budget fédéral, c'est l'intention d'Ottawa de geler les transferts... canadiens au chapitre du Régime d'assistance publique du Canada, au chapitre du financement des programmes établis pour l'enseignement post-secondaire, donc collégial et universitaire, et pour les programmes de santé. Alors, c'est donc dire qu'on nous met devant le fait accompli par une coupure qu'on nous annonce, sur les deux prochaines années, des trois quarts du budget du ministère de M. Axworthy au chapitre de la main-d'oeuvre et puis un transfert au niveau de la caisse de l'assurance-chômage et la création d'un fonds d'investissement dans les ressources humaines, fonds d'investissement en ressources humaines, encore une fois, prévu dans le budget de M. Martin, fonds d'investissement qui sera lié à des mesures productives venant de l'assurance-chômage.

Alors, qu'est-ce que, finalement, veut... Qu'est-ce que le député de Bourassa recherche? Autrement, moi, ce qui m'étonne, c'est de ne pas avoir entendu de la part de l'opposition, ni de son porte-parole en main-d'oeuvre, ni du chef de l'opposition, quoi que ce soit qui ressemble au cri d'indignation qui était lancé l'an dernier lorsqu'ils étaient au gouvernement.

Je relisais le communiqué que mon prédécesseur, M. Marcil, envoyait l'an dernier, le 15 avril, sur une annonce faite par M. Axworthy à l'effet de financer le programme Service Jeunesse, qui est toujours en vigueur, qui n'avait pas été discuté avec les provinces et qui, unilatéralement, a été annoncé, et je ne peux pas être plus éloquente que mon prédécesseur l'était, en disant ceci: L'annonce par le gouvernement fédéral constitue un exemple frappant de dédoublement dans le dossier de formation de la main-d'oeuvre. Et ça continue sur le même ton. Tout ça est toujours d'actualité, là.

Je vous rappelle qu'on va voter, dans les crédits, le programme Jeunes Volontaires, qui existait depuis 10 ans, qui est un programme performant, qui est un programme pour lequel on mettait 9 000 000 $ auparavant, que le gouvernement précédent a amputé de moitié, mais qu'on va tenter de maintenir, nous, en activité malgré des listes d'attente impressionnantes de jeunes sans statut qui, dans le fond, sont un peu à la recherche d'eux-mêmes et qui s'inscrivent dans ce genre de programme Jeunes Volontaires pour au moins être utiles à leurs semblables. Je vous rappelle que c'est exactement le même genre de programme qu'Ottawa a décidé de dédoubler et que, depuis le printemps passé, ils financent une structure coûteuse pour venir nous piler sur les pieds dans le même genre de programme.

Alors, qu'est-ce que le député de Bourassa cherche à obtenir en souhaitant qu'on fasse... finalement, qu'on entreprenne, à l'égard de ces annonces qui nous mettent devant le fait accompli... Qu'on entreprenne quoi exactement? Je n'arrive pas à comprendre la position qu'il énonce, M. le Président.


Adoption des crédits

Le Président (M. Tremblay): J'aimerais rappeler aux membres de la commission que le temps dont les parties avaient convenu pour discuter de la concertation est écoulé. Alors, est-ce que les membres de la commission sont prêts à adopter le programme 3, sous la rubrique Programmes de Restructuration, Affaires intergouvernementales canadiennes, Concertation, Développement des régions et Famille, et intitulé Concertation? Est-ce que ce programme 3 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Tremblay): Adopté à la majorité des voix.

Alors, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures, où, après les affaires courantes, nous tiendrons les travaux de la commission à la salle du Conseil exécutif, mieux connue sous le nom de salon rouge.

(Suspension de la séance à 12 h 34)

(Reprise à 15 h 26)


Volet emploi

Le Président (M. Tremblay): Je déclare la séance ouverte. Je voudrais rappeler brièvement le mandat de la commission, qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère de l'Emploi et de la ministre d'État à la Concertation pour l'année 1995-1996. Alors, nous procédons maintenant à l'étude des crédits budgétaires concernant l'emploi, et, de façon plus spécifique, les programmes 1, 2, 3, 5 et 6. Alors, Mme la ministre, pour vos remarques préliminaires.


Remarques préliminaires


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, vous allez me permettre, d'abord, en votre nom, j'en suis certaine, et en celui de membres de la commission, de souhaiter la bienvenue aux présidents d'organismes qui vont nous accompagner durant cette étude de crédits, ainsi qu'à leur personnel. En fait, il s'agit des organismes qui sont sous la responsabilité de la ministre de l'Emploi, à savoir les organismes non budgétaires, comme la CSST, comme la Commission de la construction du Québec et comme la Commission des normes du travail.

Je sais que, dans la salle, il y a parmi nous M. Ménard, de la Commission de la construction du Québec; M. Shedleur, de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ainsi que M. Rivard, de la Commission des normes du travail.

Et, également, des organismes dits budgétaires, pour lesquels nous aurons donc des crédits à voter aujourd'hui, à savoir Me Lemieux, présidente du Conseil des services essentiels; Mme Gendreau, de l'IRIR, l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération, de même que M. Dulude, le secrétaire général du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, et M. Riendeau, de la Régie du bâtiment. En aurais-je oublié, M. le sous-ministre?

Également, M. le Président, vous allez me permettre de remercier – je m'en voudrais énormément de l'oublier – une personne en particulier, Mme Francoeur, Bibiane Francoeur, qui est avec nous, qui, au ministère, a, avec son équipe, passé deux nuits blanches entières pour nous permettre d'avoir des cahiers complets. Je l'ai appris seulement avant-hier. On m'a raconté, au cabinet, que certains attachés politiques sont entrés au moment, le matin, le matin tôt, où son équipe et elle-même quittaient; alors, à deux reprises. Je pense que ça mérite d'être souligné.

Quant aux remarques préliminaires, je vous dirai que, étant donné le peu de temps, d'une certaine façon, qui est à notre disposition, j'ai eu l'occasion à l'ouverture de nos travaux, hier, de vous tracer ce qui m'apparaissait, vu de mon point de vue à moi, l'état de la nation. Alors, pour tout de suite, je vais me contenter d'écouter Mme la députée de Saint-François, et, s'il y a matière à réagir, je le ferai avec plaisir.

Le Président (M. Tremblay): Mme la députée de Saint-François.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, merci, M. le Président. C'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui à l'occasion de l'étude des crédits du ministère de l'Emploi. Il s'agit, bien sûr, d'un moment privilégié pour moi, comme pour tous les parlementaires. Nous avons la lourde responsabilité d'examiner les dépenses du gouvernement; nous avons aussi la chance de voir comment le gouvernement entend dépenser les sommes considérables qui proviennent, bien sûr, des contribuables du Québec. Et c'est avec beaucoup de respect pour ceux et celles qui contribuent au financement des activités de l'État que j'entreprends les quelques heures à notre disposition pour rencontrer, échanger avec la ministre responsable du ministère de l'Emploi et de la Concertation.

Je veux donc, d'abord, saluer, bien sûr, la ministre et tout son personnel politique et administratif, les remercier sincèrement pour tous les documents que nous avons reçus cette semaine. Pour nous, il s'agit d'une source d'inspiration à laquelle nous allons nous abreuver encore pour plusieurs semaines. Pour avoir déjà passé l'expérience, je sais que ce n'est pas facile pour nos fonctionnaires, et je suis persuadée que c'est la même chose pour vos fonctionnaires – vous en avez fait mention, Mme la ministre – de préparer des tonnes et des tonnes de documents, et aussi, en même temps, avoir à briefer une nouvelle ministre sur différents sujets du ministère. C'est une période de travail intense pour toute une équipe, et je veux le souligner aussi et remercier tous les gens qui ont travaillé pour vous.

(15 h 30)

Le ministère de l'Emploi, c'est un jeune ministère qui a vu le jour au début de l'année 1994, compte tenu de sa modification. Il est né d'un heureux mariage entre l'ancien ministère de la Main-d'oeuvre, de la Formation professionnelle et de la Sécurité du revenu et celui du Travail, mais, comme tout nouveau-né, il a besoin qu'on s'en occupe. Il a besoin d'aliments, il a besoin de ressources pour s'épanouir, pour améliorer sa performance, apprendre et donner les services pour lesquels il a été conçu.

Or, la première chose que l'on constate, quand on regarde les crédits du ministère de l'Emploi, c'est une certaine réduction des aliments et, je dirais, un garde-manger plutôt fermé. Je questionnerai la ministre sur les mesures qu'elle entend prendre pour assurer la pérennité des mandats confiés à son ministère et aux nombreux organismes et sociétés qu'elle dirige.

Est-ce qu'elle a l'intention, entre autres, de privatiser certaines des activités de son ministère ou de certains organismes? Est-ce que certaines directions pourraient se transformer en agences gouvernementales? Est-ce qu'elle va succomber à de nouvelles sources de revenus, à de nouvelles tarifications, pour soulager le fonds consolidé de la province? Comment prévoit-elle se donner des indicateurs de performance, de productivité, d'efficacité? Comment voit-elle la gestion des ressources humaines de son ministère? Comment va-t-elle gérer la décroissance de ses effectifs à temps complet?

La réorganisation du travail au ministère de l'Emploi, ça se présente comment? Est-ce que la ministre a commencé à négocier avec ses employés? Quels sont les échéanciers? Comment voit-elle la réalité des enveloppes fermées dans son ministère alors qu'on se prépare à des rondes de négociations historiques dans le secteur de la construction, notamment, et dans le secteur public, principalement? Comment va-t-elle réussir à motiver ses employés alors qu'il n'y a aucune somme de prévue dans les crédits pour améliorer les conditions de travail de ses fonctionnaires? Voilà bien des questions sur lesquelles j'aimerais entendre la ministre.

Je ne m'attarderai pas tellement, M. le Président, sur les chiffres comme tels, dans le livre des crédits, étant donné que la ministre a un budget sensiblement le même que l'année dernière. Cependant, je vais quand même m'attarder peut-être sur des compressions, des compressions qui sont systématiques, c'est-à-dire systémiques, dans tous les ministères. C'est qu'au lieu, par exemple, de continuer dans le sens qu'on avait prévu, dans la direction qu'on avait prévue, avec 1 % de taux de croissance au niveau de la Santé et de l'Éducation, on a décidé de geler toutes les dépenses de l'ensemble des ministères. Il m'apparaît cependant que, pour certains ministères, il y a des priorités. Quand on pense, par exemple, à l'emploi, la relance économique, l'emploi, c'est... L'emploi, bien sûr que c'est important aussi pour pouvoir aller chercher les sommes dont on a besoin au ministère du Revenu et pour être capable d'équilibrer son budget.

Donc, c'est sûr que j'aurais préféré qu'on investisse davantage dans des ministères qui auraient pu être profitables à l'économie, et peut-être qu'on revoie davantage, dans d'autres ministères, des programmes qui sont peut-être moins nécessaires, quitte à les abandonner complètement. Alors, bien sûr que je ne suis pas nécessairement en faveur des compressions systémiques comme on le voit actuellement, mais c'est le choix du gouvernement, bien sûr, le gouvernement qui a été élu, mais qui a décidé de fonctionner ainsi.

On constate, d'autre part, M. le Président, que bien peu de choses ont bougé depuis le mois de septembre dernier au ministère de l'Emploi. Mis à part certains changements cosmétiques, il n'y a pas eu de grands virages. Cependant, je comprends que la ministre arrive. Il faut lui laisser le temps, bien sûr, de regarder à l'interne, de se faire une idée, et puis je pense que c'est important aussi de lui laisser le temps de faire ses preuves.

Donc, dans ce sens-là, je ne veux pas porter critique à la ministre. Je pense que, compte tenu du temps qu'elle est là, on ne peut pas... Je comprends que c'est un peu plus compliqué que de demander, là, que ça bouge rapidement, sauf que, bien sûr, on a toujours des fonctionnaires qui demeurent dans les ministères et qui continuent normalement les politiques, même si on y apporte certaines modifications. Donc, je questionnerai la ministre à ce sujet un peu plus tard.

Je comprends aussi que la ministre a été préoccupée par d'autres priorités. Je pense, entre autres, aux énergies et aux millions de dollars investis dans les commissions itinérantes sur l'avenir du Québec, au dossier de la construction, qui a été la priorité des priorités pour la ministre dans les premiers mois de son mandat. Je la comprends, il était de loin préférable d'avoir le support – et quand je pense, entre autres, à la construction, on se souviendra de quelle façon nos débats se sont terminés – et l'appui des gars de la construction à la veille d'un exercice de relations publiques comme celui des commissions régionales.

Mais, en même temps, on constate un taux de chômage qui ne diminue pas, au contraire, je dirais – même s'il y a eu des périodes qui étaient un peu meilleures – toujours dramatique pour les travailleurs et les travailleuses de la construction. Dans ce dossier, le gouvernement a privilégié non pas le droit au travail et la liberté d'association, mais le syndicalisme obligatoire de par la loi. On n'a pas fait grand-chose pour l'emploi, de sorte qu'on se retrouve aujourd'hui avec autant sinon plus de chômeurs qu'avant, mais des chômeurs syndiqués.

Dans la région de Sherbrooke, toujours, au sens, au niveau de la construction, M. le Président – quand je parle de chômeurs syndiqués, je veux parler, bien sûr, des chômeurs de la construction – la construction résidentielle a chuté de 86 %, selon les derniers résultats enregistrés par la Société canadienne d'hypothèques et de logement au mois de mars dernier. Et, pour l'ensemble du Québec, on accuse un recul de 27 % de mises en chantier par rapport au mois de février. J'y reviendrai, M. le Président, quant aux chômeurs de la construction.

Pour les travailleurs et les travailleuses, c'est aussi, je pense, dramatique. Le gouvernement nous promettait d'emprunter pour financer les investissements. D'un côté, il annonce la relance du Programme d'assainissement des eaux, de l'autre, il abandonne les grands projets, comme Grande-Baleine. D'autres mauvaises nouvelles aussi touchent directement les travailleurs et travailleuses de la construction, dont celle de la construction de la phase II de l'aluminerie Alouette, qui a été reportée aux calendes grecques. C'est une perte, pour le Québec, de 1 100 000 000 $ à 1 400 000 000 $ en investissements. Bref, il n'y a pas beaucoup d'espoir pour les travailleurs de la construction.

De façon générale, regardons du côté du chômage pour l'ensemble des travailleurs québécois. Il était à 11,9 % en septembre dernier. En mars 1995, il est à 12 %. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ça n'a pas beaucoup bougé. Et ça me faisait sourire, hier, M. le Président, quand la ministre nous indiquait qu'il ne faut pas, bon, lorsqu'on parle de chômage, de taux de chômage, regarder ça sur un mois ou deux mois, mais il faut regarder ça sur une période beaucoup plus longue. Et je me disais: Ah! ce que l'histoire peut se répéter. C'est exactement le même discours qu'on tenait à la ministre lorsqu'elle nous interrogeait l'année dernière. Je me souviens, en Chambre, lorsqu'elle posait ses questions sur l'état du chômage, on lui répétait: Mme la députée, vous savez, on ne peut pas considérer un taux de chômage sur un ou deux mois, mais davantage sur six mois ou sur un an, sur un ensemble beaucoup plus élargi. Donc, ça veut dire que quel que soit le côté de la Chambre, M. le Président, on se rend compte que les réponses sont sensiblement les mêmes lorsqu'on parle de chômage.

En terminant, puisque je ne veux pas prendre tout le temps, bien sûr – j'ai beaucoup de questions à la ministre – j'aimerais proposer à la ministre et à mes collègues membres de la commission l'ordre suivant, pour la bonne marche de nos travaux. Nous pourrions commencer par étudier les programmes qui touchent plus directement le ministère de l'Emploi comme tel. Ensuite, nous pourrions aborder des sujets tout aussi importants, mais qui concernent les organismes sous la responsabilité de la ministre de l'Emploi.

Si vous êtes d'accord, M. le Président, l'étude des crédits pourraient se diviser ainsi: on pourrait commencer par les relations de travail; par la suite, les décrets de conventions collectives, l'avenir de la loi, certains secteurs particuliers; par la suite, également, la Commission des normes du travail, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, la Régie du bâtiment, la Commission de la construction, pour terminer par la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

Bien sûr, il y a aussi l'Institut de recherche, et, M. le Président, non pas parce qu'il est moins important, peut-être parce que son budget est plus petit, la seule remarque que j'aurais à ce sujet-là: Je dois dire que l'Institut a une bonne renommée. Je pense que l'Institut fait des études crédibles. D'ailleurs, lorsque j'étais responsable du dossier de l'immigration et des communautés culturelles, nous avons requis à maintes reprises les services de l'Institut pour faire certaines recherches. La seule chose, cependant, que je voudrais souligner – et je ne voudrais pas que la ministre voie de ma part un geste mesquin – je dois vous dire que j'ai été un petit peu étonnée, lorsque j'ai regardé les documents, de me rendre compte que, pour 19 employés, on dépensait en plantes, d'entretien, 1 438 $.

(15 h 40)

La raison pour laquelle je le souligne, c'est parce que je me souviens, quand j'étais à l'immigration, j'avais réalisé la même chose. À un moment donné, j'ai posé la question à mon sous-ministre et à mes sous-ministres associés. Je leur ai dit: Est-ce qu'il y a possibilité de diminuer un petit peu le coût de l'entretien des plantes et de voir, surtout dans un contexte de compressions budgétaires...

C'est un petit peu la même chose aussi au niveau du Conseil des services essentiels, où on dépense 1 147 $. Comme je vous dis, ce n'est pas beaucoup, mais c'est toujours la perception ou l'image, finalement, de la population, quand on demande tellement d'efforts de part et d'autre, et que, bon, on se rend compte que c'est des sommes quand même de cet ordre pour de l'entretien de plantes. Parfois, ça fait jaser et ça donne parfois une image de fonctionnaires qui dépensent des sommes inutilement. Comme je vous dis, je ne veux pas que ce soit vu dans un but mesquin, c'est tout simplement une constatation que je fais, puisque j'avais fait la même lorsque j'étais à l'Immigration.

Alors, M. le Président, je ne sais pas si la ministre veut réagir immédiatement à mes propos. Par la suite, je pourrais commencer immédiatement au niveau de l'emploi, si elle accepte l'ordre... c'est-à-dire la séquence des sujets à étudier, à regarder. Si oui, je pourrais continuer.

Le Président (M. Tremblay): Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, la séquence sera celle que la commission déterminera. J'apprécierais évidemment, cependant, que l'on puisse le faire d'une façon justement séquentielle pour que nous abordions dossier après dossier, en souhaitant la présence à mes côtés du président ou responsable de l'organisme pour lequel nous examinerons les crédits budgétaires.

Quelques remarques générales, suite à l'intervention de Mme la députée de Saint-François, pour signaler que, en fait, il s'agit d'une hausse de prévisions de dépenses de 20 000 000 $, en 1995-1996, en comparaison avec les dépenses effectuées au cours de l'année 1994-1995. C'est donc, M. le Président, des prévisions de dépenses de 316 000 000 $, au total, plutôt que les 295 000 000 $ de dépenses effectuées l'an passé.

C'est aussi le début d'une nouvelle approche. J'ai eu l'occasion de m'en réjouir hier, en particulier à l'occasion du début de nos travaux d'examen des crédits de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, qui, à chaque année, se voyait octroyer des budgets considérables et, dans les mois immédiats qui suivaient, se voyait amputée d'une partie de ses budgets par des compressions imposées en cours d'année.

C'est un autre processus qui débute, avec l'adoption des crédits, maintenant. C'est une approche qui, à mon point de vue, va favoriser une beaucoup plus grande responsabilité des gestionnaires autant des ministères que des organismes budgétaires, puisque cette façon de faire va mettre l'accent sur la gestion des ressources disponibles bien plus que sur des ajustements en cours de route qui nécessitaient énormément de temps et d'énergie et qui déstabilisaient complètement les façons, si vous voulez, d'envisager les activités durant l'année.

Alors, je rappelle que nous allons adopter un cadre budgétaire stable, avec des objectifs de dépenses connus à l'avance, avec l'abandon des crédits périmés fixés après le début de l'année financière, mais, en contrepartie, aucun crédit additionnel ne sera accordé en cours d'année pour de nouvelles initiatives ou de nouveaux mandats.

C'est donc ce qu'on peut qualifier une «gestion par enveloppe fermée», et c'est à l'intérieur des enveloppes que nous allons discuter cet après-midi que l'essentiel de l'activité gouvernementale va se dérouler dans chacune des fonctions dont j'ai la responsabilité. Mais je considère que c'est une bonne nouvelle pour les gestionnaires, que ce processus de budgétisation globale va leur permettre, en cours d'année, une réallocation de leurs ressources financières selon leurs besoins, puisque cette réallocation sera possible à l'intérieur de ces enveloppes fermées.

Donc, 20 000 000 $, un peu plus de 20 000 000 $ de prévisions de dépenses, alors, c'est une hausse réelle. Et je comprends qu'une partie substantielle de cette hausse ira à la main-d'oeuvre, puisque c'est la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre qui pourra en bénéficier.

Par ailleurs, il y a des efforts, des efforts considérables qui sont demandés, notamment, un effort très, très important qui est requis du ministère de l'Emploi lui-même, de même que des organismes qui ont beau avoir des budgets moins imposants et pour qui, même si ça apparaît, en proportion, une réduction moindre, bien, ces réductions-là sont quand même considérables. Alors, ça va être une gestion beaucoup plus serrée qui va être requise autant de la Régie du bâtiment que de l'IRIR, que du Conseil des services essentiels. En fait, c'est un effort non seulement de rationalisation, mais c'est surtout l'effort d'utilisation optimale de toutes les ressources financières, mais au moins avec une marge de manoeuvre où les gestionnaires n'auront pas toujours l'impression qu'ils ont une épée de Damoclès au-dessus de la tête qui peut venir brusquement mettre fin à des efforts qui sont faits pour gérer ça de façon intégrée et cohérente. Donc, ça, c'est la première bonne nouvelle.

La seconde bonne nouvelle. Je comprends que Mme la ministre... Mme la députée de Saint-François – je vous ai, pendant toutes ces neuf années, trop souvent appelée «Mme la ministre» pour arrêter comme ça, même après quelques mois. Mais je comprends que Mme la députée de Saint-François profite de l'étude des crédits pour aborder la question de l'emploi et du chômage au Québec.

Je lui fais grief de ne m'avoir posé aucune question sur ce sujet depuis le début de nos travaux parlementaires, il y a déjà cinq semaines. Je lui dis là, je suis en manque de questions. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, on me dit que quand on connaît la réponse, on ne doit jamais poser de question.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Mais je pourrais, à ce moment-là... Écoutez, je pourrais lui dire que ça me préoccupe de comprendre que l'opposition ne se préoccupe pas suffisamment de l'emploi pour en faire une question prioritaire à l'occasion de l'activité la plus importante dans la journée, qui est la période des questions. Mais je veux lui dire qu'il y a un mois déjà, lorsque, justement, le taux de chômage baissait d'un demi-point, je me rappelle que l'opposition avait prétendu alors que c'était malgré le gouvernement.

Et là je comprends, par les propos qu'elle tenait, que maintenant, en mars, que le chômage est remonté d'un demi-point, là, maintenant, on va prétendre que ce n'est pas malgré, mais à cause du gouvernement.

Mme Gagnon-Tremblay: Ce n'est pas ce que j'ai dit, Mme la ministre.

Mme Harel: Bon. Alors, je veux simplement que vous sachiez que, autant maintenant que dans le passé, il est important d'avoir un portrait d'ensemble de la situation, et ce portrait, il est à la fois préoccupant, mais, en même temps, il est rassurant quant aux mois immédiats que l'on vient de traverser. Quand on regarde la situation de cette année par rapport à l'an passé, c'est évident qu'il y a une nette amélioration. C'est, de mars 1994 à mars 1995, 46 000 emplois nouveaux qui ont été enregistrés.

(15 h 50)

Il y a des régions – je pense, entre autres, à la région de Montréal, de l'île de Montréal proprement dite – où, après cinq années de pertes consécutives, on enregistre pour la première fois une augmentation. Alors, c'est comme si, enfin, là, on avait touché depuis un an le plancher en-deçà duquel on a arrêté de reculer.

Et je disais – parce que les faits sont plus têtus que l'interprétation qu'on en fait – que, de ces 46 000 emplois enregistrés, 5 000 ont été créés entre mars et septembre passé, et 41 000 de septembre à maintenant. Alors, j'ose espérer qu'on n'y est pas indifférent. Je ne vois pas nécessairement la nécessité d'en faire une relation de cause à effet, mais je peux au moins, modestement, penser qu'on n'a pas nui à la situation que l'on peut maintenant constater.

J'aimerais peut-être profiter de cette occasion pour lui dire que ce qui est réjouissant, c'est l'augmentation de la population active. Je sais bien que le chômage est un indicateur, mais c'en est un parmi d'autres, parce que c'est vraiment le ratio des gens en âge de travailler sur la population qui travaille qui est le vrai indicateur de ce qui se passe dans une société. Et c'est le quatrième, là, pour la quatrième fois, de façon consécutive, que l'on enregistre – et c'était le cas également au mois de mars dernier – une augmentation de la population active. Et je comprends qu'on a atteint un sommet qu'on n'avait pas connu depuis 25 mois.

Ceci dit, il y a évidemment – évidemment – place à amélioration, et je comprends que le programme de mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, a pu contribuer, notamment depuis quatre mois et demi, à la mise en place de 3 000 entreprises qui ont bénéficié de la garantie de prêt, et donc de la création de 20 000 emplois dans le cadre de ces 3 000 entreprises.

Je vais à nouveau me permettre de vous faire un léger grief de ne pas profiter pleinement, dans le comté de Saint-François, de ce programme de garantie de prêt. Je comparais les chiffres à la fois dans le comté d'Outremont, le comté de Saint-François, le comté de Hochelaga-Maisonneuve, ou encore le comté de Bourassa, et je me rendais compte que, dans le comté d'Outremont comme dans le comté de Hochelaga-Maisonneuve, c'est 25 nouvelles entreprises qui ont vu le jour depuis quatre mois et demi grâce à ce programme de garantie de prêt, tandis que dans le comté de Saint-François, manifestement, là, il y a un total de quatre entreprises, pour 13 emplois, et dans Bourassa, 12 entreprises – vous voyez, c'est quand même légèrement mieux là – pour 95 emplois. Alors, dans Outremont, je parlais des 25 entreprises, pour un total de 166 emplois.

Je le dis parce que je crois que, quel que soit le programme... Je le dis d'autant mieux que je le disais aussi quand j'étais de l'autre côté, dans l'opposition, et que je félicitais le ministre de l'Industrie et du Commerce des programmes pour pouvoir mieux les faire connaître auprès de la population de mon quartier. Alors, j'espère, je souhaite que Mme la députée de Saint-François fasse de même dans la région de l'Estrie et dans son propre comté.


Discussion générale

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Je dois vous dire que, justement, j'ai un de mes commettants qui est très, très fâché parce qu'il a vu son projet refusé, son prêt refusé par la banque. Il a fait à peu près toutes les banques et les caisses populaires, et on n'a pas voulu lui accorder, justement, la garantie nécessaire. Et je dois dire aussi: tout dépend des projets. Bien sûr qu'on a beau faire connaître le programme, mais encore faut-il qu'il y ait des projets ou qu'il y ait des gens qui décident de partir en entreprise, de créer leur propre entreprise.

Mais je sais qu'il y a eu aussi des refus, par contre, et je pourrai toujours vous envoyer le dossier. Ce n'est pas moi qui décide, bien sûr. Je pense que vous avez donné toute latitude aux banques et aux caisses, alors, bien sûr que, sur une base d'affaires, c'est à ces banques ou à ces caisses de décider. Remarquez que si j'avais le choix de m'imposer, bien sûr que je prendrais l'intérêt de mes commettants et de mes commettantes.

Ceci dit, M. le Président, lorsque je parlais de chômage, tout simplement, ce que je soulignais à la ministre, c'est que, indépendamment ou dépendamment du côté de la Chambre, où on se trouve du côté de la Chambre, je disais que le discours est un peu le même: c'est que, quand on est au niveau du gouvernement, on regarde le portrait d'ensemble, et quand on est dans l'opposition, on regarde de mois en mois, et c'est ce que la ministre faisait au moment où elle était députée. Mais, ça, je pense que c'est tout à fait normal. On l'a connu antérieurement, et on remarque que, comme je le disais, l'histoire se répète.

Quant à la question des enveloppes fermées, M. le Président, il est certain que, pour nos fonctionnaires ou pour l'ensemble du gouvernement, le fait de ne pas avoir à travailler sur des crédits périmés, une fois que les crédits sont déposés et que le budget est déposé, c'est une amélioration. C'est certain que c'est une chose qui est acceptable, à la condition, bien sûr, que ça va pouvoir, à l'usage, traverser le mur de la réalité. Parce que, en même temps, vous avez des fonctionnaires, vous n'avez absolument rien de prévu pour l'augmentation des salaires. On sait, par exemple, que les négociations des conventions collectives débutent en juin; même, elles sont déjà commencées dans certains milieux.

D'une part, ça signifie qu'il n'y aura pas d'augmentation ou, s'il y en a, il va y avoir des réductions d'effectif, et bien certain que chaque ministère devra décider quel programme on abandonne si on veut conserver tous les fonctionnaires à notre emploi, parce qu'il va falloir faire un choix. On ne peut pas, à un moment donné, garder à notre emploi des fonctionnaires qui, si jamais on veut augmenter... Je vois qu'il y a quand même, ici, des améliorations dans les crédits dans certains secteurs, entre autres, pour les cadres, peut-être moins pour les autres corps d'emploi. Alors, on verra, comme je le disais tout à l'heure, si, à l'usage, ça va traverser le mur de la réalité.

Je sais que la présidente du Conseil du trésor avait dit qu'elle voulait mettre fin à la loi 102 et qu'ainsi il n'y aurait plus de mises à pied au niveau des fonctionnaires. Elle a laissé échapper un chiffre hier, de l'ordre de 6 000. Il va falloir, bien sûr, que ça se répercute ailleurs, et mon inquiétude, c'est: Est-ce qu'il va y avoir des balises ou est-ce que ça va être... De quelle façon ça va être géré? Parce que je pense que, de la façon dont on avait décidé de le faire, au niveau des mises en disponibilité, on avait quand même réussi non seulement à contrôler, mais à gérer, finalement, les mises en disponibilité avec les attritions, de sorte qu'on ne sente pas trop... que nos fonctionnaires soient quand même... qu'on préserve les emplois au niveau de la fonction publique soit par attrition ou encore avec les mises en disponibilité. Mais, de toute manière, M. le Président, je ne veux pas revenir au Conseil du trésor, je suis au niveau du ministère de l'Emploi.


Réorganisation du ministère

Donc, Mme la ministre, suite à l'adoption de la loi qui a modifié votre ministère, pouvez-vous me dire si la réorganisation du ministère est complétée maintenant ou s'il reste encore des morceaux à compléter?

Mme Harel: M. le Président, peut-être d'abord une remarque sur la question relative au personnel. Je comprends que, parmi les bonnes nouvelles depuis l'arrivée du nouveau gouvernement, il y a l'abrogation de la loi 198. Ça, ça fait partie des bonnes nouvelles. Également, ce qui peut être mis au compte des bonnes nouvelles, c'est certainement la signature, par 17 organisations syndicales représentant les employés de l'État – dont des organisations syndicales qui avaient refusé de le faire il y a deux ans avec le précédent gouvernement – d'ententes-cadres à l'intérieur desquelles les échanges vont se poursuivre dans les mois qui viennent.

(16 heures)

D'autre part, ma collègue, présidente du Conseil du trésor et collègue de banc à la période de questions à l'Assemblée nationale, me faisait part combien elle aussi aurait souhaité une question en Chambre cet après-midi, mais elle avait eu l'occasion de corriger l'interprétation abusive qui avait été faite à partir d'un échange qui s'est déroulé aux crédits du Trésor hier soir. Ce n'est pas dans l'intention gouvernementale de mettre sur la table, d'aucune façon, un plan de réduction des effectifs qui totaliserait 6 000 personnes. C'est, bien au contraire, dans le cadre d'échanges avec les organisations syndicales que l'ensemble des objectifs vont se dérouler. Mais, ce qui est certain, c'est que, pour le gouvernement, c'est des enveloppes budgétaires fermées.

Alors, je reviens à la question de Mme la députée de Saint-François pour lui signaler que, quand je suis arrivée au ministère de l'Emploi, je me suis rendu compte que le ministère n'avait d'emploi que le nom. Ce n'est que l'appellation qui avait changé, parce qu'en tout et pour tout, là, il s'agissait du bon vieux ministère du Travail, avec 14 employés de plus.

Et je me suis rendu compte que c'était une appellation, si vous voulez, un peu plaquée sur une réalité qui, elle, n'avait pas été substantiellement modifiée. Alors, comme notre intention n'a pas été de nous lancer dans une restructuration provinciale avant d'obtenir le changement majeur de structures politiques que nous souhaitons dans le cadre du référendum, il est évident qu'on n'a pas joué à rebouleverser, six mois après que vous l'ayez fait, les structures politiques comme on l'aurait souhaité et comme on va le faire également, parce que c'est incontournable qu'il faudra le faire. Et, en le faisant, je comprends également que nous allons, par ailleurs, rendre plus visible la mission travail du ministère, qui est une mission importante, là, qui vaut la peine de ne pas être cachée.

Alors, pour ce qui est de votre question, je vous demanderais peut-être de préciser...

Mme Gagnon-Tremblay: La réorganisation. Vous me dites qu'il n'y en a pas eu, finalement, de réorganisation. J'ai demandé si elle était complétée dans votre ministère.

Mme Harel: Alors, je vais demander au sous-ministre, M. Boily, de répondre à votre question.

M. Boily (Jean-Marc): M. le Président, depuis mon entrée en fonction, je n'ai pas osé recommander – puis ça ne fait pas très longtemps que je suis là – à ma ministre de refaire l'organigramme. Je parle de la partie ministère de l'Emploi que vous avez ici dans les renseignements. Avant de faire une proposition à la ministre de modifier ça, il faut d'abord que je voie, avec les gens qui y travaillent, si c'est approprié de faire des changements. Pour l'heure, pour nous, il n'est pas question de recommander des changements dans l'organigramme que vous connaissez.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je voudrais juste revenir sur quelques remarques de la ministre tout à l'heure, lorsqu'on parlait des effectifs et de l'abrogation de la loi 198. Je dois lui dire que, quand même, je pense qu'il y a le discours et il y a les faits. Dans le discours, on peut dire aux fonctionnaires qu'il n'y aura pas de mise à pied, mais, dans les faits, on sait très bien qu'il y en aura, c'est incontournable. Ça a toujours été le discours qu'on a tenu et qu'on continue à maintenir.

Le gouvernement a beau tenir le discours que ça ne se produira pas, mais, quand on voit, par exemple, les compressions, on voit les enveloppes fermées, il faut aller chercher l'argent quelque part. Sauf qu'on fait porter à chaque ministère l'odieux de couper. Et, si on ne veut pas couper dans les services à la clientèle, il va falloir couper quelque part à un moment donné. Donc, dans ce sens-là, je pense qu'il n'y a personne de dupe. Tout à l'heure, on va se rendre compte que, inévitablement, il va y avoir des mises en disponibilité.

Quant aux 17 ententes-cadres, je souhaite bonne chance au gouvernement. Si ça fonctionne, tant mieux! Je dois vous dire que, oui, c'est vrai qu'on en avait signé quelques-unes. On était encore à discuter seulement des libérations syndicales. Vous allez voir, Mme la ministre, tout à l'heure, quand on va commencer à négocier des conventions qui s'en viennent au mois de juin, que les 17 ententes, là, ça ne tient pas toujours de la même façon qu'on souhaiterait. Je vous souhaite bonne chance dans ces négociations-là et je souhaite que vous ayez des résultats au niveau des ententes. Mais, si j'étais à votre place, je ne compterais pas trop être capable d'aller chercher des gains, nécessairement, et d'éviter toute une mise en disponibilité dans votre ministère.

Mme Harel: Soyez sûre que je vais soumettre vos bons voeux à Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Gagnon-Tremblay: Ha, ha, ha! Ma deuxième question, M. le Président: Est-ce que la ministre envisage la possibilité, dans son ministère ou bien – non, je devrais parler au niveau de son ministère – de privatiser certaines activités ou, encore, de regrouper certains organismes? Est-ce que c'est quelque chose qu'elle envisage actuellement ou s'il est trop tôt pour lui poser cette question-là?

Mme Harel: Dans le sens d'une privatisation d'activités, je ne sache pas du tout que cela soit d'aucune façon envisagé. Dans le sens de rationaliser des activités, oui, vraisemblablement. Je comprends que, par exemple, la Régie du bâtiment et la Commission de la construction du Québec ont signé, d'ailleurs, une entente, un protocole d'entente leur permettant d'examiner ce que chacun de ces organismes pourrait mieux faire conjointement. Par exemple, nous envisageons également de mettre à la disposition du secrétariat du Conseil consultatif du travail des services de professionnels du ministère de l'Emploi qui pourront, à leur demande, être affectés à des tâches de recherche qui seront susceptibles d'aider les partenaires syndicaux et patronaux à mieux prendre les décisions en matière de conditions de travail.

Mme Gagnon-Tremblay: Ça va, M. le Président. Je me souviens, lorsque nous étions en commission parlementaire sur le projet de loi 46, on avait souhaité, à un moment donné, que la ministre, justement...

Le Président (M. Tremblay): Mme la députée de Saint-François...

Mme Gagnon-Tremblay: Oui.

Le Président (M. Tremblay): ...je pense que la ministre de l'Emploi n'avait pas terminé, ou M. Boily n'avait pas terminé sur le point que...

Mme Harel: Excusez-moi, peut-être des précisions que le sous-ministre Boily peut apporter sur la question que vous avez posée.

M. Boily (Jean-Marc): On a observé qu'on avait, à l'Institut de recherche, à la SQDM et au ministère, diverses boîtes de recherche, et on s'est demandé s'il n'était pas approprié de revoir ça pour essayer d'éviter des duplications dans certaines activités de recherche, parce qu'on a constaté un certain nombre de ressources professionnelles de recherche qui auraient peut-être pu être utilisées en double à certains égards. Et ça nous a permis de répondre favorablement à une demande du Conseil consultatif, qui voyait que c'était approprié d'avoir un centre de recherche. Alors, on leur a dit qu'on dégagerait plutôt, pour ne pas créer de nouveaux centres de recherche, des ressources qui sont actuellement dans l'un des trois centres de recherche que nous avons. Alors, ça, c'est le premier exemple.

Par ailleurs, on sait qu'au sommet de la construction, on avait regardé les fonctions d'inspection à la Commission de la construction et à la Régie du bâtiment. On sait aussi que la Commission de la santé et de la sécurité agit en inspection et prévention des lieux de travail. Et on s'est dit que, peut-être, il y avait là un champ de rationalisation de nos activités qui pourrait conduire à des économies de ressources relativement importantes. Alors, c'est les deux mandats, là, que, depuis notre arrivée, on est prêts à examiner.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président.

Le Président (M. Tremblay): Un instant, Mme la députée de Saint-François.

M. Boily (Jean-Marc): Si ma mémoire est bonne, dans les trois centres de recherche, on avait dénombré 162 personnes. Alors, on s'est dit: Regardons tous les travaux qu'on a fait faire. Il y a sûrement des superpositions, des duplications. Alors, on est en train de revoir tout ça pour présenter un plan de réorganisation.

(16 h 10)

Le Président (M. Tremblay): Alors, Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Je parle de fusion aussi. Vous vous souviendrez, lorsqu'on avait discuté du projet de loi 46 en commission parlementaire sur la construction, à un moment donné, je souhaitais qu'on puisse envisager le fait de fusionner peut-être certains organismes et de réaménager, toujours pour aider véritablement le travailleur. Et je me disais à ce moment-là: Est-ce que le ministère, même, peut confier à une firme externe, s'il le faut, un mandat pour pouvoir regarder ce qui peut être fait au niveau de la construction? Je pense, par exemple, au niveau du bâtiment et de la Commission et non pas, là, à partir des corporations, que ce soient les corporations patronales ou les corporations syndicales, mais qu'on prenne véritablement pour le travailleur, au centre de nos préoccupations ou encore de l'entreprise, et qu'on essaie de rebâtir ou de bâtir un système qui répond vraiment à une économie moderne, mais toujours en fonction du travailleur et de l'entreprise et non pas en fonction des corporations patronales, des corporations syndicales. On a vu, quand on a fait notre commission parlementaire, comment on peut tirer d'un côté et de l'autre, et je ne suis pas sûre que ce soit à l'avantage du travailleur ou encore des consommateurs. Donc, dans ce sens-là, je me dis: Peut-être qu'un jour ce serait important que l'on puisse avoir un mandat plus global pour regarder la fusion possible, au niveau de la paperasse, et ainsi de suite, mais pour éviter, justement, des chevauchements ou encore de la duplication et que ça puisse répondre vraiment aux travailleurs, ceux qui ont bien des choses à dire aussi, pas toujours laisser, bien sûr, les corporations syndicales ou patronales décider à leur place.

Mme Harel: Je comprends, là, M. le Président, quand nous examinerons les crédits de la Régie du bâtiment...

Mme Gagnon-Tremblay: On pourra revenir. D'accord.

Mme Harel: ...que nous pourrons y revenir en présence, à la fois, du président de la Régie ou accompagné du président de la Commission de la construction du Québec, parce qu'il y a déjà un cheminement qui se fait pour éviter toute duplication. Alors, vous aurez tout le loisir de les interroger, et j'aurai tout le plaisir d'entendre leurs réponses.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, d'accord. Je reviendrai là-dessus. M. le Président, la ministre nous a mentionné qu'elle n'envisageait pas de privatisations comme telles dans son ministère. Cependant, dans le cadre de la réorganisation des ministères, je sais qu'on travaille actuellement afin de créer ce qu'on appelle des agences gouvernementales pour certaines directions.

Est-ce que, dans son ministère, il est possible de créer de telles agences? Si oui, lesquelles?

Mme Harel: Il y a effectivement des études qui se déroulent, mais à un autre niveau qu'au niveau de notre ministère. Je comprends qu'au niveau central, au niveau du Conseil exécutif, là, il y a des études qui se poursuivent, mais ça ne nous concerne pas directement. Il n'y a pas de projet en ce sens au ministère.


Mise en place d'indicateurs de productivité

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. J'indiquais à la ministre, dans mon préambule, M. le Président, que je la questionnerais sur des indicateurs de performance, de productivité et d'efficacité. Je sais qu'on avait entrepris, au ministère, de se doter – comment pourrais-je dire? – pas de barèmes, mais de critères ou d'indicateurs sur la performance et la productivité. Est-ce que vous êtes avancés à ce niveau-là?

Mme Harel: Je vais demander au sous-ministre Boily de répondre à votre question.

M. Boily (Jean-Marc): Je n'ai pas eu l'occasion, disons, de travailler très précisément à développer des indicateurs de productivité. Par ailleurs, je sais qu'il y avait eu une opération réalignement de l'appareil gouvernemental et, au niveau du ministère, avant que j'arrive, dans les années qui ont précédé, on avait effectivement fait du réalignement – ça, c'était à l'époque de Pierre Gabriel, qui était sous-ministre – et ça avait donné, disons, une livraison assez rapide des obligations prévues à la loi 198, en matière de réduction d'effectif et de rationalisation. Par la suite, depuis mon arrivée, en tout cas, on ne s'est pas de nouveau penché sur la définition d'indicateurs.

La raison pour laquelle on n'a pas abordé ça immédiatement, c'est parce que je voudrais l'aborder avec la table sectorielle, qu'on appelle le Comité mixte sectoriel, qui consiste évidemment à rencontrer nos syndicats locaux. Je pense que vous aviez une question, tout à l'heure, là-dessus. Effectivement, nous avons entrepris des discussions avec eux. J'ai participé moi-même au lancement de l'opération et je participerai à des réunions sporadiques pour établir avec eux des ententes possibles sur l'organisation du travail. On va, à ce moment-là, reprendre avec eux les discussions là où elles étaient rendues sur le réalignement et la question de définition des indices de performance. Autrement dit, depuis que nous sommes arrivés, en tout cas, ça ne fait pas encore très longtemps que je suis là, j'ai eu d'autres priorités évidemment à satisfaire, et, cette question-là, je ne suis pas très malheureux de ne pas l'avoir, disons, développée immédiatement, puisque ça nous donne l'occasion de faire participer les représentants syndicaux, donc, les employés à nos discussions là-dessus.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que l'échéancier, finalement, c'est la signature de la convention collective ou si vous vous êtes donné un échéancier pour en arriver à...

M. Boily (Jean-Marc): C'est-à-dire qu'on va se situer dans l'échéancier général, mais, moi, j'ai perçu que, d'abord, notre ministère en tant que tel, qui regroupe les 313 employés, ce n'est pas un ministère immense – on a déjà vu beaucoup plus grand que ça – et je trouve qu'on a une dimension, disons, humaine, dans le sens qu'on est proche de nos employés et de nos syndicats, nos représentants locaux, en tout cas, et que ça va être plus facile de trouver, si c'est possible, là, des arrangements quant à l'organisation du travail. Moi, je leur ai donné comme indication que je pensais qu'on devrait prendre des problèmes très pratiques. Plutôt que de parler de philosophie ou d'indicateurs de performance et de grands objectifs, j'aimerais mieux comprendre les problèmes propres au ministère, des problèmes qui le concernent, que ce soient, disons, les horaires de travail ou la qualité de l'air ambiant ou des choses très pratiques qui peuvent rendre service.

Deuxièmement, en ce qui concerne l'évolution de l'effectif, je veux les tenir au courant de ce qui va se produire. Et je vous informe que, nous, ce qu'on va travailler là-dedans, c'est que, s'il y a des réductions d'effectif, on va essayer de profiter de l'attrition naturelle et, notamment, les mises à la retraite. Comme ce n'est pas une boîte immense, on peut travailler avec les personnes impliquées, on peut les voir puis on peut convenir avec eux comment on peut, disons, réduire l'effectif et, disons, mettre fin à leur emploi par entente.

Mme Gagnon-Tremblay: C'était sensiblement ce qu'on faisait avec la loi 102, c'est-à-dire, 198. C'est sensiblement la même chose qu'on faisait, finalement, à ce moment-là.

M. Boily (Jean-Marc): ...dans le phénomène, dans le processus.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce que la ministre...

Mme Harel: M. le Président, si Mme la députée de Saint-François me permet peut-être d'ajouter un aspect qui touche un organisme qui est sous le portefeuille de l'Emploi, et qui est la CSST, la Commission de la santé et de la sécurité du travail, qui a déposé, pour approbation au Trésor, un projet global mis en place en 1993 qui permettra de récompenser, en fait, l'ensemble des employés pour des gains majeurs de productivité qui ont pu être réalisés, gains qui totalisent près de 70 000 000 $ sur un total, évidemment, d'un peu plus de 2 000 000 000 $ de budget annuel. Mais je comprends que cet effort peut être couronné de succès parce que c'est le cas, en tout cas, dans l'exemple que l'on peut apporter de la CSST.


Autres sujets

Mme Gagnon-Tremblay: Je m'en réjouis, M. le Président. Dans un autre ordre d'idées, est-ce que la ministre peut nous dire si elle a dégagé des fonctionnaires pour travailler sur les commissions régionales qui ont eu lieu récemment? Et, si oui, combien?

Mme Harel: Oui. J'ai appris que, oui, grâce à votre question. Comme je l'ai posée moi-même pour avoir une réponse à vous offrir, j'ai appris que, oui, un jour et demi... Alors, il s'agit d'une professionnelle. Attendez, je vais voir si mon système fonctionne.

Mme Gagnon-Tremblay: On n'a pas eu de réponse.

Mme Harel: Je vais vous donner le nom de la personne...

Une voix: On va la trouver, vous allez voir ça.

Mme Harel: On dit habituellement qu'abondance de biens nuit. Ha, ha, ha! J'ai l'impression qu'on est mieux équipé quand on est dans l'opposition.

Mme Gagnon-Tremblay: C'est plus facile à se retrouver.

Mme Harel: C'est plus facile à se retrouver. Alors, il s'agit de Mme Marie-Josée Fortier, qui occupe la fonction d'agent de recherche et qui a été prêtée, du 3 mars au 21 mars, à la commission régionale de Laval.

Mme Gagnon-Tremblay: C'est la seule personne. Est-ce qu'elle est encore là? Est-ce que c'est terminé? Est-ce qu'il y en a d'autres? Il n'y en a pas d'autres.

Mme Harel: Du 3 au 21 mars.

Mme Gagnon-Tremblay: O.K. C'est terminé, il n'y en a pas d'autres présentement.

Mme Harel: Il n'y en a pas d'autres, non.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce qu'il y a des contractuels?

Mme Harel: Non plus.

Mme Gagnon-Tremblay: Il n'y a pas de contractuels non plus.

Le Président (M. Tremblay): Mme la députée de Saint-François, j'ai cru comprendre là, que la ministre avait mentionné qu'une personne avait été libérée pour une journée et demie. Alors...

Mme Harel: Oui, excusez-moi, je me suis mal exprimée. Non, j'ai obtenu, moi, une réponse à cette question-là il y a une journée et demie passée, et c'est une...

Mme Gagnon-Tremblay: Du 3 au 21 mars.

Mme Harel: ...agente de recherche qui a été prêtée pour les fins d'effectuer les analyses à la commission régionale de Laval.

Mme Gagnon-Tremblay: Du 3 au 21 mars.

Mme Harel: Du 3 au 21 mars.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce que le ministère de la ministre participe actuellement aux études commandées par son collègue, le ministre Le Hir, ou par d'autres ministères?

(16 h 20)

Mme Harel: Oui, nous participons aux grands travaux du député d'Iberville en matière de restructuration et nous souhaitons qu'il réussisse à finaliser ses travaux puisque cela nous permettrait d'imprimer notre vision des choses quant à l'organisation même des services gouvernementaux.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que la ministre peut nous dire, M. le Président, si le fruit de ces travaux sera connu bientôt? Est-ce qu'on pourra en disposer?

Mme Harel: Écoutez, je pense qu'il vaut mieux s'adresser à mon collègue d'Iberville, au ministre responsable du dossier de la restructuration. Et nous travaillons du côté de l'emploi, sous la responsabilité du sous-ministre Jacques Henry, en étroite collaboration avec les ministères de la Sécurité du revenu et également en collaboration avec le secrétariat au développement régional et avec Industrie et Commerce. Nous souhaitons pouvoir dégager une vision de réorganisation des services gouvernementaux dans la perspective d'une politique de plein-emploi.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, j'ai remarqué, dans les réponses que la ministre nous a fait parvenir, qu'il y avait environ 10 attachés politiques à son cabinet plus le personnel de soutien. Est-ce qu'elle a reçu l'autorisation du premier ministre pour le dépassement?

Mme Harel: Alors, j'ai reçu une autorisation qui se termine à partir de la prochaine année financière. C'est une autorisation du fait que s'ajoutait au cabinet de l'Emploi celui de la Concertation. Et je comprends également que j'ai pu bénéficier d'une présence accrue compte tenu de l'importance que le dossier de la construction a prise dans l'ensemble des activités du ministère.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que ça veut dire, M. le Président...

Mme Harel: Que je devrai réduire du quart.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous devrez réduire. Oui? Merci. Quant à la tarification, M. le Président, est-ce que la ministre songe à de nouvelles tarifications au cours de l'année ou au cours des prochaines années?

Mme Harel: Votre question s'adresse au ministère de l'Emploi ou à l'un ou l'autre des organismes? Au ministère de l'Emploi, non.

Mme Gagnon-Tremblay: Non. Pour les organismes, vous préférez qu'on attende tout à l'heure, qu'on revienne?

Mme Harel: Il y a deux organismes...

Mme Gagnon-Tremblay: Parce que je sais que c'est la ministre, finalement, qui indique aux organismes de nouvelles tarifications.

Mme Harel: Oui, vous avez raison. Il y a la Régie du bâtiment du Québec et la Commission de la construction du Québec qui pourront vous expliquer leur objectif, en particulier la Régie du bâtiment, un objectif de tarification qui va leur permettre d'atteindre presque l'autofinancement de leur activité d'inspection.


Politique de plein-emploi

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. M. le Président, je voudrais revenir à l'engagement de la ministre, ou, je dirais, du gouvernement, en campagne électorale, de mettre en place, dans les 100 jours de son élection, les mécanismes nécessaires à l'implantation d'une politique de plein-emploi. Il y avait aussi l'adoption d'une loi nationale sur l'emploi, l'établissement d'une commission nationale. On devait établir, dans chaque collectivité locale, un centre local de l'emploi. On devait prévoir aussi la création dans chaque entreprise ou établissement d'un comité paritaire sur l'emploi – avec lequel je suis en désaccord, cependant, puisqu'on se retrouvait avec des centaines et des centaines de comités paritaires.

Cependant, je me souviens, dans l'engagement du Parti québécois, cette politique de plein-emploi exigeait la souveraineté du Québec. Alors, là, maintenant, on a décidé de reporter le référendum à l'automne ou peut-être même plus tard. Donc, on laisse encore planer l'incertitude. Est-ce que ça veut dire qu'on va devoir mettre une croix sur cette politique de plein-emploi? Est-ce que la ministre y travaille présentement? Est-ce qu'il y a d'autres priorités, justement, que la souveraineté du Québec? Et je pense que c'est important, parce que, quand on parle de plein-emploi, écoutez, c'est l'économie du Québec qui s'en ressent, les travailleurs, les travailleuses qui sont à la recherche d'emploi. Je comprends qu'il y a eu une augmentation de la création d'emplois, en général. Pensons par exemple à la construction. On ne peut pas dire qu'actuellement, au niveau de la construction, ça va bien. Je pense qu'il faut bien reconnaître qu'au niveau du résidentiel, entre autres, c'est en diminution, c'est en chute libre, même, je dirais, dans plusieurs régions. Au niveau des grands travaux, on l'a dit, on l'a répété, il y a plusieurs grands travaux qui ont été abandonnés. Donc, ça m'inquiète.

Et aussi, la démographie. Je comprends que la ministre n'est pas la ministre de la démographie, mais, par contre, ça a aussi son importance. La démographie aussi, c'est important au niveau de la création d'emplois, au niveau, comment pourrais-je dire, des travailleurs. Parce que, si on se retrouve à un moment donné avec de moins en moins de naissances ou encore avec de moins en moins de population, c'est des gens en moins qui consomment. C'est important. Et je me souviendrai que, seulement pour être capable de maintenir notre poids démographique au sein de la Fédération canadienne, ça prend 1,8 enfant par femme et 55 000 immigrants par année. Alors, actuellement, on est à peu près à 1,6 enfant par femme, et, à ce que je sache, je ne sais pas si, cette année, on va pouvoir atteindre les 30 000 immigrants. Donc, ça a de l'importance.

On ne peut pas s'imaginer, on ne s'imagine pas, à un moment donné, que notre poids démographique peut avoir une importance sur l'économie du Québec, compte tenu aussi de notre population vieillissante. Cette population vieillissante consomme de moins en moins. Ce sont les jeunes ménages, généralement, qui consomment. Et on sait que la consommation de biens et de services, c'est ce qui fait tourner la roue et c'est ce qui crée des emplois. Donc, bien sûr, il y a aussi actuellement tout le contexte, l'incertitude qui plane, et cette reprise économique, qu'on est censé connaître, tarde. Elle n'est pas accompagnée vraiment... On ne la sent pas, finalement, dépendamment des secteurs. Par exemple, dans le secteur manufacturier, on sent une certaine reprise et, dans d'autres secteurs, on ne sent pas cette reprise. Pour en parler souvent avec des gens dans le milieu, on ne sent pas nécessairement cette reprise. Et ce qui m'inquiète beaucoup, c'est qu'on nous annonce une possible récession encore en 1997. Alors, vous comprenez que, si on n'est pas capable de créer des emplois rapidement, on n'est pas capable de redonner confiance aux investisseurs pour la création d'emplois... Parce que ce sont les investisseurs, finalement, qui créent de l'emploi et qui investissent dans des entreprises, que ce soient les investisseurs étrangers ou encore nos entrepreneurs, ici, qui réinvestissent dans leur entreprise. C'est inquiétant, au niveau de l'emploi.

Donc, j'aimerais savoir, dans ce contexte-là, ce que la ministre entend faire pour véritablement donner un élan à la création d'emplois, compte tenu de ce que je viens de dire, M. le Président.

Mme Harel: Alors, M. le Président, deux mots d'abord sur la question des contrats qui auraient été annulés par le présent gouvernement. Mme la députée de Saint-François a même fait référence au contrat de Grande-Baleine. Est-ce que j'ai besoin de rappeler que, pour tout contrat, il s'agissait surtout de contrats de recherche, puisque ces contrats avaient totalisé, en recherche seulement, la modique somme de 250 000 000 $, c'est-à-dire un quart de milliard de dollars? Et, finalement, avec la capitalisation de ces dépenses-là, c'est presque 500 000 000 $ qu'il va falloir financer pour payer ces contrats de recherche, en sachant que ce qui nous pendait au bout du nez si on continuait, c'était l'obligation de faire de nouvelles recherches, suite aux décisions de la commission canadienne.

(16 h 30)

Je rappelle également qu'en matière d'incertitude ce n'est finalement pas la situation aussi menaçante que décrit Mme la députée de Saint-François, parce que, depuis six mois, c'est un nouvel élan en faveur de la création d'emplois auquel on assiste. Les chiffres que j'ai cités tantôt le démontrent amplement.

Cependant, elle a raison quand elle signale que la croissance économique ne s'accompagne plus, comme avant, de la croissance de l'emploi. C'est d'ailleurs là le défi le plus important que les sociétés industrielles ont à relever, et c'est un défi singulier, parce que, auparavant, quand il y avait croissance économique, ça signifiait automatiquement croissance de l'emploi. Dans leur langage familier, les gens savaient très bien que si un gros investissement était annoncé, ça ne voulait pas dire moins d'ouvrage, ça voulait dire plus d'ouvrage.

Je reviens, il y a trois semaines maintenant, d'Alma, où j'ai rencontré à la fois la direction et le syndicat qui cherchaient les moyens de maintenir une activité importante pour 178 travailleurs qui allaient être mis à pied suite à l'annonce d'un investissement majeur, de 110 000 000 $, investissement pour transformer le procédé de pâtes thermomécanique dans l'usine de pâtes et papiers.

Donc, maintenant, des investissements majeurs, quand ces investissements sont annoncés, ce à quoi il faut s'employer dans la plupart des cas, c'est à ce qu'il n'y ait pas trop de pertes d'emplois, à tenter de diminuer autant que faire se peut. Évidemment, si on continue sur l'exemple du Lac-Saint-Jean, on comprend qu'avec les 1 000 000 000 $ investis par l'Alcan en 10 ans, c'est presque 3 000 pertes d'emplois qui en ont résulté.

Donc, à partir de là, on doit nécessairement distinguer croissance économique et croissance de l'emploi, d'autant plus que la croissance économique continue de faire un bond en avant important. La croissance de l'emploi, elle, elle est tributaire de beaucoup d'indicateurs aussi importants, par exemple, que la formation de la main-d'oeuvre. C'est évident, on en a parlé ce matin, qu'il y a une pénurie de travailleurs qualifiés. Et c'est évident que quand on travaille sur le relèvement de la qualification, quand on travaille sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre en emploi et sans emploi, on travaille dans la perspective d'améliorer les chances de l'emploi, parce que c'est évident que l'espérance d'emploi, c'est comme l'espérance de vie, ça. On peut l'améliorer, dépendamment des conditions qui sont réunies.

D'autre part, d'autres conditions aussi, d'autres indicateurs. Je pense en particulier au partage volontaire du temps de travail. Encore récemment, il y a 10 jours maintenant, Le Soleil publiait un sondage SOM- Le Soleil qui révélait que 40 % des travailleurs considéraient être prêts à partager volontairement le travail s'ils étaient convaincus que ça résulterait en une augmentation du nombre d'emplois. Il en va ainsi, bien évidemment, de la gestion du temps supplémentaire. C'est évident que, dans une période de croissance économique, le temps supplémentaire est en croissance, ce qui est le cas, toute vérification faite encore récemment. J'étais en Gaspésie, et le syndicat me faisait part que, dans l'usine de pâtes et papiers de Gaspésia, juste avec le temps supplémentaire, ils seraient capables de créer une centaine de nouveaux emplois.

Alors, il y a finalement bon nombre d'indicateurs sur lesquels on doit travailler, mais c'est évident que ce qui nous complique la vie, bien évidemment, puis ce qui nous paralyse aussi, c'est que les sans-emploi, pour une partie de leur vie, appartiennent au fédéral quand ils sont chômeurs puis, après, appartiennent au provincial quand ils ont épuisé leur chômage puis qu'ils sont sur l'aide sociale, et puis que les programmes qui s'adressent à l'une et à l'autre de ces personnes sans emploi ne sont pas harmonisés, ne sont pas coordonnés, et parce que le Canada a décidé, au moment où le Québec voulait pourtant s'en sortir, d'entrer dans les programmes d'employabilité, qui sont souvent des programmes qui tournent en rond et qui permettent simplement de passer d'une colonne à l'autre, d'assisté social à chômeur, et vice versa.

Alors, nous en sommes à mettre en place les conditions qui permettraient l'émergence d'une véritable politique de plein-emploi. Et cette politique de plein-emploi, je la résume très, très brièvement comme ceci: c'est une politique où le développement économique est intégré au développement social. Nous sommes malheureusement dans une réalité complètement étrangère à ça, où vous avez, d'un côté, du développement économique complètement étranger au développement social, et vice versa. Ce qui nous est proposé par Ottawa, c'est de continuer à dissocier le développement économique du développement social, le développement social étant réservé, en fait, aux seules mesures d'employabilité.

J'aimerais également terminer en vous signalant que vous, comme le député de Bourassa, avez cité abondamment le programme du Parti québécois. Je vous en remercie, mais je vous rappelle également que nous avons comme proposition de transformer la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre en commission nationale de l'emploi, mais de mettre en place au niveau du terrain, là où le développement local se fait, des services intégrés de développement et de ressources-conseils à l'entreprise et de ressources-conseils aux employés. C'est dans l'intégration du développement économique et social que se trouvent les garanties d'une politique de plein-emploi réussie.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la ministre. Bon. Je demandais tout à l'heure: Est-ce que la ministre a une idée, finalement, du moment où elle pourra nous annoncer cette politique de plein-emploi? Est-ce qu'elle s'est donné un échéancier?

Mme Harel: Là, nous travaillons concurremment avec le Secrétariat à la concertation et avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Comme je l'indiquais ce matin, la première étape à franchir est celle de la rationalisation des programmes déjà existants. J'ai fait part du mandat que nous avions eu de faire le ménage dans les 102 mesures et programmes de formation de la main-d'oeuvre. Je vous rappelle qu'il s'agit de 102 programmes qui sont dispensés par neuf organismes gouvernementaux. Mon collègue de l'Industrie et du Commerce a eu, lui, le mandat de faire le ménage dans les 140 programmes de subventions aux petites et moyennes entreprises qui existent présentement. Et nous le faisons dans la perspective d'un guichet unique sur le terrain.

Alors, vous me demandez un échéancier. Je vous dis que c'est pas à pas que nous allons y arriver: d'abord, au niveau de la rationalisation des programmes; ensuite, dans la mise en place d'un vrai régime d'apprentissage, régime d'apprentissage qui sera possible dès septembre 1995, avec l'annonce que mon collègue de l'Éducation a faite à l'égard des métiers non spécialisés pour cette année et à l'égard des métiers reconnus pour septembre 1996, dans un an. Alors, nous travaillons à l'élaboration d'un véritable régime d'apprentissage où il va être possible d'obtenir une qualification reconnue, transférable, une diplomation, tout en étant dans l'environnement du travail.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, si je comprends bien, c'est que le premier geste que pose la ministre dans le but d'en arriver à sa politique de plein-emploi c'est de revoir l'ensemble des programmes, d'essayer de fusionner le plus possible ces programmes. La ministre a aussi parlé de la possibilité d'une semaine de quatre jours ou encore de limiter le temps supplémentaire. Est-ce que ça fera également partie de la politique du plein-emploi de la ministre, de réduire la semaine de travail à quatre jours ou encore de réduire le temps supplémentaire?

(16 h 40)

Mme Harel: Mme la députée de Saint-François, je souhaiterais vous faire parvenir... Malheureusement, Mme Bellemare a quitté la commission étant donné que l'examen des crédits de la SQDM était terminé, mais je ferai parvenir au secrétariat de la commission, pour le bénéfice de tous les membres de la commission, un tableau très succinct, en fait, 8,5 x 14, dans lequel nous avons précisé nos interventions pour en arriver à élaborer une démarche de plein-emploi. Alors, c'est évident que le réaménagement du temps de travail en fait partie, mais nous pensons que ça ne peut pas être imposé législativement. Ça ne peut être que réalisé avec le concours et la collaboration des milieux concernés, tant les milieux d'affaires que les milieux syndicaux.

Déjà, au Conseil consultatif du travail, il y a un groupe paritaire qui, depuis presque un an maintenant, réfléchit sur l'aménagement du temps de travail. Nous pourrons, je crois comprendre, très rapidement bénéficier du résultat de leurs travaux, et puis je m'engage à en faire part à la critique de l'opposition.

Mme Gagnon-Tremblay: J'apprécierais, M. le Président. Merci. Vous savez, je comprends que la semaine de quatre jours est difficilement imposable dans le sens qu'on a déjà suggéré, même au niveau de la fonction publique. On veut avoir la semaine de quatre jours, mais en même temps être payé pour cinq jours. Alors, c'est toujours un peu plus compliqué quand arrive le temps de la paie par la suite.

La ministre, j'imagine, elle doit avoir l'intention aussi, M. le Président, de consulter les entreprises, les entrepreneurs, qui sont des créateurs d'emplois dans le cadre de sa politique de plein-emploi.


Taxe pour la formation de la main-d'oeuvre

Je ne voudrais pas revenir, comme tel, sur son engagement de l'imposition de la taxe de 1 % au niveau de la formation professionnelle puisque mon collègue a discuté de la formation professionnelle. C'est parce que j'étais étonnée, ce matin, j'avais une coupure de journal de ma région, justement le journal La Tribune , où il y avait M. Pierre Cléroux, qui est le président, qui est un des représentants des petites et moyennes entreprises, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui se basait sur une étude de l'École nationale d'administration publique et qui disait que, seulement dans la région de l'Estrie, cette taxe de 1 % sur la formation professionnelle que le gouvernement veut imposer pourrait provoquer la perte de 1 200 à 1 500 emplois seulement dans les petites et moyennes entreprises de la région de l'Estrie.

Et bien sûr que, là, il fait part de ses préoccupations et puis... bon, compte tenu aussi... Ce n'est pas seulement la taxe, mais c'est aussi toute la paperasserie administrative que ça peut entourer, parce que ça prend aussi certains contrôles. Il faut quand même que vous soyez capable de contrôler aussi ces entreprises qui donnent de la formation. Donc, je ne veux pas entrer dans ce sujet, étant donné que mon collègue l'a fait, mais je soumets à la ministre qu'elle aurait avantage à rencontrer les entreprises aussi, à écouter les entrepreneurs avant d'imposer une telle taxe pour voir vraiment l'impact parce que... Vous savez, quand on m'arrive et qu'on dit: Près de 1500 emplois menacés seulement dans la région de l'Estrie, je pense qu'il y a toujours quelque chose, il y a toujours anguille sous roche. On ne peut pas, bien sûr, dire: Bien non, ça n'a pas d'importance. Ce n'est pas ça qu'on veut faire. Ça n'aura pas d'impact. Je souhaiterais, de toute façon, que la ministre puisse vraiment consulter les entrepreneurs avant d'imposer une telle taxe.

Je voudrais revenir, cependant...

Mme Harel: Si vous permettez, peut-être, M. le Président...

Mme Gagnon-Tremblay: Oui.

Le Président (M. Tremblay): Madame.

Mme Harel: ...spécifiquement sur cette remarque, j'ai personnellement rencontré avec mes collaborateurs M. Cléroux, justement, le président de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, et son équipe pour échanger sur la question du 1 %, de même que les représentants du Conseil du patronat, de l'Association des manufacturiers, du commerce au détail, de l'Association des détaillants en alimentation, de la Fédération des chambres de commerce de la province de Québec, de Montréal, et chaque fois je leur demande à combien ils évaluent les emplois menacés faute de formation.

Vous voyez, c'est un peu facile, là, de prétendre que, parce que l'entreprise va devoir consacrer 1 %, qui est une dépense, une taxe, là, encore faut-il comprendre que, la taxe, on ne décide pas comment on va la dépenser. Tandis que l'obligation de dépenser le 1 %, l'entreprise va pouvoir satisfaire cette obligation comme elle l'entend pour améliorer sa prospérité. Donc... Déjà, par exemple, les entreprises manufacturières consacrent l'équivalent de 18 % de leur masse salariale à l'achat d'équipement. Ce sont les chiffres de l'an passé. Alors, les entreprises manufacturières, en moyenne, qui consacrent 18 % de l'équivalent de leur masse salariale pour acheter des équipements et des machines, comment imaginer qu'elles pourraient être rebutées à consacrer 1 % à la formation de la main-d'oeuvre qui utilise ces nouvelles technologies, qui utilisent ces équipements, ces machines? C'est évident que le milieu des affaires, qui me dit, à l'unanimité, croire à la nécessité de la formation de la main-d'oeuvre ne pourra pas longtemps tenir le genre de discours où il va prétendre que former sa main-d'oeuvre, c'est menacer l'emploi. C'est ne pas la former qui menace l'emploi.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je pense que... Bon, je ne souscris pas entièrement aux propos de la ministre, parce que, comme le disait justement M. Cléroux, il faut créer un momentum aussi. À un moment donné, il faut sensibiliser davantage les entreprises, il faut créer ce momentum comme on l'a fait avec la qualité totale. Je pense que... Je ne sais pas si on a épuisé tous les recours, les incitatifs, et, je pense aussi, tous les programmes, si on a épuisé, par exemple, les expériences avec les collèges ou encore avec les entreprises, la transition au niveau de la formation. On sait très bien que... Je suis d'accord quand vous dites que s'il n'y a pas de formation, il y a aussi perte d'emplois. Par contre, est-ce qu'on a épuisé tous les incitatifs ou encore tous les moyens? Est-ce qu'on a véritablement travaillé avec les entreprises? Est-ce que nos institutions d'enseignement l'ont fait? Moi, je dois vous répondre, Mme la ministre, que je ne pense pas que nos institutions d'enseignement l'aient fait. Je pense, par exemple, à notre région, où, à un moment donné, j'avais initié une table de travail en concertation avec le milieu de l'entreprise et le milieu de l'éducation, et, à mon grand étonnement, j'étais... je me rendais compte que la commission scolaire ne savait pas ce que l'université faisait ou ce que le collège faisait en termes de formation, et vice versa. C'est depuis que ces gens-là sont assis à une même table, ils travaillent avec les entreprises, qui ont réussi à trouver des moyens pour inciter davantage à former des gens. Alors, c'est dans ce sens-là. Mais, tout ce que je souhaite, M. le Président, c'est que la ministre, bien sûr, écoute aussi les entrepreneurs, qui ont à coeur de créer de l'emploi et qui ont à coeur aussi de donner le plus de formation possible à leurs travailleurs et travailleuses, sauf que je pense qu'il faut le créer, ce momentum.

Mme Harel: Est-ce que je comprends, M. le Président, que c'est Mme la députée de Saint-François qui sera responsable du suivi quant au 1 % ou si ce sera le député de...

Mme Gagnon-Tremblay: Non. C'est mon collègue.

Mme Harel: ...Bourassa?

Mme Gagnon-Tremblay: C'est mon collègue.

Mme Harel: C'est le député de Bourassa.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui.

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Tremblay): J'aimerais juste me permettre un commentaire pour la réflexion de la ministre. Lorsqu'on mentionne que les entreprises dans le secteur manufacturier, 18 % de leur chiffre d'affaires est investi dans des équipements de production, je serais surpris de voir les statistiques des investissements de ces entreprises manufacturières dans la formation de la main-d'oeuvre, parce que je doute que ce soit moins de 1 %, de façon générale. Je pense que les représentations de M. Cléroux, le président de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, sont à l'effet que sa clientèle, 15 000 petites et moyennes entreprises... Donc, là je ne serais pas surpris que la très grande majorité des très petites et des petites et moyennes entreprises n'investissent pas 1 % de leur chiffre d'affaires dans la formation de la main-d'oeuvre. Alors, je ne pense pas que ce soit le temps de faire le débat sur ce sujet-là, mais ça serait très important, le moment venu, que des statistiques pertinentes soient remises, si ce dossier-là va être analysé. Est-ce que ce dossier-là va être analysé à cette commission? On ne le sait pas. Avez-vous été informée quelle commission sera appelée à étudier...

(16 h 50)

Mme Harel: Bien, M. le Président, je suis contente que vous me posiez la question aujourd'hui. J'ai l'impression qu'il va falloir le clarifier dès notre retour du congé pascal, parce qu'il y a la commission de l'éducation, je crois, qui a envoyé une lettre au Bureau de l'Assemblée nationale pour se voir attribuer le dossier du 1 %, et on me fait part que la commission des affaires sociales a même décidé, en séance de travail, qu'elle allait avoir la responsabilité de la SQDM, notamment, qui se verra confier le 1 %. Mais je crois, personnellement, que ça revient à la commission de l'économie et du travail. Alors, je pense qu'il va falloir que ce soit clarifié, ça, au niveau du Bureau.

Le Président (M. Tremblay): Étant donné le précédent qui a été créé au niveau de la main-d'oeuvre, où nous avons analysé les crédits pour une période de quatre heures, je pense que, essentiellement, à cause de plusieurs remarques que vous avez faites tout à l'heure, notamment au niveau de votre politique de plein-emploi, on ne peut pas dissocier le social de l'économique. J'ai toujours prétendu que 50 % de nos problèmes économiques sont le résultat direct de nos problèmes sociaux. Si on trouvait des solutions concrètes, notamment au niveau de la prévention, pour régler nos problèmes sociaux, on aurait beaucoup moins de préoccupations au niveau économique. Donc, je note bien votre souhait et je ferai part de ces commentaires à nos collègues. Je serais personnellement d'accord, vous pouvez le dire également au leader de votre gouvernement, pour accueillir ce projet de loi à la commission de l'économie et du travail. Je suis convaincu que les collègues ici seraient très intéressés à participer à ces discussions-là également.

Mme Harel: Vous savez, ce n'est pas indifférent, à quelle commission ça sera confié, parce que ce sera dans la perception que les partenaires en auront. C'est évident, si c'était confié à l'éducation, la perception qu'ils en auront, c'est celle de voir une mesure leur échapper, tandis que dans la perspective où on tient à ce que ce soit entièrement de leur responsabilité, y compris dans l'élaboration de la réglementation, ça suppose, à mon point de vue, que ça vienne là où l'ensemble du sort de l'entreprise est discuté, c'est-à-dire à l'économie et travail.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je pense que ça a toujours été une chasse gardée de l'éducation. On a toujours eu un peu de difficulté à définir, finalement, à qui appartient le dossier. Je pense qu'il doit être fait en concertation, mais on ne peut pas non plus dissocier la formation du travail ou de l'emploi. Donc, je pense que ce serait juste que ce soit débattu ici.


Accès des femmes au marché du travail

Je voudrais revenir, M. le Président, sur l'accès des femmes au marché du travail, parce que lorsqu'on parle d'emploi, on parle aussi de femmes, pour une forte majorité. Dans le programme du Parti québécois, on s'était engagé, en campagne électorale aussi... on avait parlé de ce «passeport-travail», qui pourrait être monnayable, par exemple, contre un salaire, qui est transférable d'une entreprise à l'autre, assorti de modalités d'application différentes selon les régions pour les femmes désireuses de retourner sur le marché du travail. Qu'en est-il de cet engagement? Est-ce que la ministre travaille sur cet engagement? Est-ce qu'elle a une liste? Est-ce que ça va faire partie également de sa politique de plein-emploi pour l'accès des femmes sur le marché du travail, la réintégration?

Mme Harel: Alors, je remercie Mme la députée de Saint-François de sa question. Mais je comprends, quand elle se réfère au programme, évidemment, ce n'est pas un des engagements que le présent gouvernement a rendus publics à l'occasion de la campagne. Ça fait partie du programme général. En matière de problématique de main-d'oeuvre féminine, je dois lui signaler que la façon de l'aborder est la suivante. J'en ai discuté avec le comité de gestion de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, et, suite à des représentations qui ont été faites par une coalition d'organismes animée par le CIAFT, centre d'information pour l'accès à l'information des femmes sur le marché du travail... le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, qui souhaite l'implantation d'un CAMO, comité d'adaptation de la main-d'oeuvre, donc qui souhaite que soit mis en place ce qui a été jusqu'à maintenant un instrument de développement de l'intervention sectorielle... On sait que le CAMO pâtes et papiers, ou le CAMO métallurgie, ou le CAMO routes, ou le CAMO plastique ou aéronautique... Les groupes cibles qui sont identifiés comme surreprésentant les personnes handicapées, les jeunes, les travailleurs d'origine immigrante et les femmes se dirigent de plus en plus vers la mise en place de CAMO, comités d'adaptation de la main-d'oeuvre, pour permettre le bilan de la situation puis encourager des initiatives, pour corriger. Alors, c'est au niveau de la SQDM que ça va se passer. Essentiellement, ce qui a été retenu, c'est la mise en place de comités d'adaptation de la main-d'oeuvre pour les quatre groupes cibles que j'ai mentionnés, avec un budget qui est celui compris dans les crédits votés aujourd'hui d'initiatives sectorielles et de stabilisation de l'emploi, qui va être offert aux régions qui vont vouloir se lancer dans des projets particuliers pour l'un ou l'autre de ces groupes cibles.

C'est certain que s'il n'y a pas des correctifs qui sont apportés au fur et à mesure, le fonctionnement naturel du marché du travail a tendance à exclure toutes les personnes qui ne coïncident pas avec le modèle régulier, si vous voulez. Il faut assumer qu'une intervention groupe cible est toujours nécessaire, et elle doit s'ajouter à l'intervention régionale et à l'intervention sectorielle et être appelée, tant au niveau de l'intervention sectorielle que... régionale, plutôt, et sectorielle. Et c'est par le biais des CAMO qu'on entend y arriver.

Mme Gagnon-Tremblay: Si je comprends bien, M. le Président, il pourrait y avoir des CAMO femmes.

Mme Harel: Oui, il va y avoir un CAMO femmes.

Mme Gagnon-Tremblay: Un ou il pourrait y en avoir dans toutes les régions?

Mme Harel: Un. Un CAMO femmes pour l'ensemble du Québec, mais qui va avoir comme objectif de soutenir... même en les finançant, à partir d'un fonds qui va leur être alloué, des initiatives régionales et sectorielles, si vous me permettez.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je voudrais savoir de la ministre quand elle a l'intention de déposer la loi sur l'équité salariale. Je sais que, nous, nous avions travaillé. Ma collègue avait travaillé au niveau du ministère pour l'équité en emploi, qui était prévue en 1994. Je sais qu'en mars il y a des groupes de femmes qui ont rappelé au gouvernement qu'il était temps qu'il dépose sa loi sur l'équité salariale. Est-ce que la ministre peut nous indiquer à quel moment elle a l'intention de déposer sa loi sur l'équité salariale?

Mme Harel: J'ai une de mes collaboratrices qui me dit: J'espère que tu ne cherches pas le dossier là-dessus, parce qu'on n'en a pas. Mais, plus sérieusement, c'est effectivement ma collègue, la ministre responsable de la Condition féminine, qui a la responsabilité du dossier de l'équité salariale, et c'est au niveau du Secrétariat à la condition féminine qu'est la barre, l'intervention gouvernementale en matière d'équité salariale.

Mme Gagnon-Tremblay: Le ministère de l'Emploi participait à une table gouvernementale sur la conciliation travail-famille. Est-ce qu'on a recueilli des informations qui permettraient de trouver des solutions pour, bien sûr, régler le problème des femmes, concilier travail-famille, surtout.. quand je parlais tout à l'heure du problème démographique qu'on connaît, pour aider les femmes, tout en ayant une famille, pouvant quand même avoir une famille, puis continuer... puisse aussi continuer son travail. Dans ce sens-là, est-ce que... Et je sais très bien que la ministre, ça a toujours été une de ses préoccupations aussi, la conciliation de la vie familiale et professionnelle.

Est-ce que le ministère, qui participait à cette table... Cette table gouvernementale, est-ce que ça a donné des résultats? Est-ce qu'il y a eu des études de faites sur le sujet récemment ou quoi que ce soit?

Mme Harel: Alors, je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Juste pour ma gouverne, est-ce que vous... Vous avez déjà eu le dossier de la famille, je crois.

Mme Gagnon-Tremblay: Non.

(17 heures)

Mme Harel: Ah bon! Écoutez, j'ai écrit – je crois que c'est la semaine passée ou il y a 10 jours maintenant – au président de la Commission des normes du travail pour lui demander un avis sur la question de la réglementation permettant de mettre en vigueur les dispositions concernant les congés parentaux qui sont introduites depuis décembre 1991 et qui n'ont jamais été appliquées, faute de règlement.

Alors, j'ai l'intention, personnellement, de suivre de près ce dossier. Comme il y a eu renouvellement de la composition du conseil d'administration de la Commission des normes, j'ai également demandé au président de la Commission des normes d'introduire la réflexion au sein du nouveau conseil d'administration de la Commission des normes et, le cas échéant, d'obtenir un avis du conseil, qui est représentatif de divers milieux, comme vous le savez, tant du côté patronal que des salariés, syndiqués, non-syndiqués, que du milieu des organismes familiaux et des jeunes, en particulier. Alors, le principal engagement, c'est celui de rendre opérationnelles les dispositions des congés parentaux qui existent dans la loi, mais qui ne sont pas en vigueur, faute de réglementation.


Accès des jeunes au marché du travail

Mme Gagnon-Tremblay: Quant aux jeunes, M. le Président, parce que, les jeunes, ça nous préoccupe énormément au niveau de l'emploi aussi, on se rend compte que l'avenir est de plus en plus bloqué pour l'emploi chez les jeunes. Je voyais encore hier, je pense, ou avant-hier, un reportage au niveau des médecins – c'est inquiétant – surtout les ophtalmologistes, où il semblait avoir très peu d'ouvertures.

Je sais qu'on avait déjà pensé à une politique d'accès à l'égalité pour les jeunes, quoique, remarquez que j'y crois plus ou moins. On a des politiques d'accès à l'égalité pour d'autres cibles, et puis ça n'a pas donné les effets escomptés. Alors, ce n'est pas moi qui vais encourager la ministre à aller dans ce sens-là, même si c'était un engagement, à un moment donné, ou qu'on en avait parlé au sein de votre formation politique.

Je suis très préoccupée par l'emploi chez les jeunes. Est-ce que la ministre a l'intention, a une stratégie quelconque, que ce soit, par exemple, pour les emplois, bien sûr, à la sortie de leur formation, mais aussi, je pense – je vais lui poser la question aussi – pour les emplois d'été? Je ne sais pas si ça relève d'elle. Parce qu'il y a énormément de difficultés, les étudiants ont beaucoup plus de difficultés.

Et je lisais justement un article du journal, récemment, qui disait que les compressions budgétaires et l'élimination de plusieurs postes, et le non-remplacement de certains employés en congé, surtout au niveau des hôpitaux, feront en sorte que les hôpitaux embaucheront moins d'étudiants au cours de la période estivale. Donc, on se rend compte que les compressions amènent soit les institutions ou encore les entreprises à engager de moins en moins d'étudiants l'été.

On sait que, pour les étudiants, l'emploi d'été est aussi une partie de leur financement pour leurs études pour l'année qui vient. Est-ce que la ministre a une stratégie d'emploi pour les jeunes? Est-ce qu'elle est en train d'élaborer une stratégie d'emploi pour les jeunes ou encore des programmes quelconques? Est-ce que ça va faire partie de sa politique du plein emploi, ou si, actuellement, il y a quelqu'un qui travaille là-dessus?

Mme Harel: Alors, M. le Président, le Secrétariat à la concertation est le partenaire majeur de la grande opération Action emploi jeunesse qui a été lancée par le Forum pour l'emploi dans les régions du Québec le 31 janvier dernier et qui met à contribution l'ensemble des intervenants tant municipaux, scolaires, d'affaires et jeunes aussi. Ce sont les premiers concernés et ce sont les premiers qui participent à part entière à ces initiatives Action emploi jeunesse régionales. Alors, nous aurons l'occasion, en juin prochain, les 13 et 14 juin, au Centre des congrès de Québec, avec 500 participants venant de toutes les régions, de faire le point sur les initiatives qui vont résulter de l'action gouvernementale.

Je comprends que la responsabilité est particulièrement, là, celle de mon... j'allais dire de mon collègue, le premier ministre, mais également, en fait, ministre responsable du Secrétariat à la jeunesse, et de son adjoint, le député de Berthier. Et nous travaillons avec eux notamment sur deux projets, à savoir un véritable régime d'apprentissage, qui donne à un certain nombre de jeunes qui en ont été exclus jusqu'à maintenant non seulement la formation, mais la reconnaissance qualifiée de leur compétence, et nous travaillons également à introduire un véritable projet de soutien à l'entreprise qui acceptera de recevoir des stagiaires dans une perspective d'alternance travail-études.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Dans le cas...

Mme Harel: Et c'est à titre, si vous voulez, de soutien, parce que le mandat est celui du Secrétariat à la jeunesse.

Mme Gagnon-Tremblay: Dans le cas du dossier de la transformation de l'organisation du travail, je sais que votre ministère devait tenir l'automne dernier un colloque sur la transformation de l'organisation du travail. Compte tenu du changement de gouvernement, on comprend la raison pour laquelle ce colloque n'a pas été tenu. Est-ce que la ministre a l'intention de tenir un tel colloque prochainement?

Mme Harel: Je vais demander au sous-ministre, M. Boily, de répondre à cette question.

M. Boily (Jean-Marc): Disons que c'était un des derniers dossiers dont a eu à s'occuper M. Des Trois Maisons, qui a été remplacé par M. Normand Gauthier. Son dernier rapport était à l'effet qu'il ne parvenait pas à convaincre l'ensemble de ses partenaires du modèle de colloque à tenir. Et, pour ces raisons-là, on l'a suspendu pour le moment. Disons qu'on n'a pas fermé la porte à jamais, mais, pour le moment, on a suspendu le projet de colloque.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Alors, M. le Président, j'ai terminé concernant le ministère de l'Emploi et tout ce qui touche l'organisation de l'emploi et la politique sur laquelle la ministre nous dit qu'elle est en train de travailler. J'ai compris qu'elle allait me faire parvenir un document pour nous indiquer de quelle façon ils travaillent actuellement.

J'aimerais aborder maintenant le dossier des relations de travail, donc le Code du travail, le Bureau du commissaire, si elle le désire.

Mme Harel: Le Bureau du commissaire général du travail. C'est bien ça?

Mme Gagnon-Tremblay: C'est ça.

Mme Harel: Les relations de travail.


Bureau du commissaire général du travail (BCGT)


Article 45 du Code du travail

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Au niveau des relations de travail, M. le Président, je voudrais aborder l'article 45 du Code du travail. Je sais que la ministre ne pourra peut-être pas entrer dans les détails puisqu'il y a des dossiers qui sont déjà devant les tribunaux administratifs, comme, par exemple, le dossier de Crowne Plaza, le dossier de Métro-Richelieu, le Palais des congrès de Montréal, mais on a demandé... Je sais que les syndicats ont demandé de modifier l'article 45, entre autres, pour des entreprises qui font faillite et dont, souvent, ce sont les mêmes entrepreneurs, les mêmes propriétaires qui rachètent, ou encore lorsque, par exemple, il y a de la sous-traitance. Donc, je me demande, à ce moment-là...

Je ne sais pas si la ministre peut nous dire où en sont rendus ces dossiers-là, compte tenu de leur cheminement. Je ne sais pas s'il y a eu des jugements de rendus dans ces dossiers-là et, si oui, de quelle façon ça s'est terminé. Je sais qu'il y a une prudence à y avoir parce qu'ils sont devant certains tribunaux administratifs, mais est-ce qu'on a l'intention de modifier l'article 45 pour répondre aux nombreuses demandes du syndicat pour régler ces difficultés lorsqu'elles surviennent?

Mme Harel: Alors, M. le Président, en matière de relations de travail, je dois vous signaler que, au cours de l'année 1994, le Québec a subi 138 arrêts de travail. C'est une baisse de 25 % par rapport à l'année précédente, qui était déjà classée comme exceptionnelle en matière du peu de conflits de travail enregistrés. Alors, c'est un total de 13 000 travailleurs qui ont été affectés par ces arrêts de travail.

(17 h 10)

J'inviterais M. Normand Gauthier, qui est le sous-ministre adjoint aux relations de travail, à répondre aux questions de Mme la députée de Saint-François.

M. Gauthier (Normand): Par rapport à l'article 45 du Code du travail, c'est ça? C'est un article qui est fort complexe. Il y a plusieurs problèmes qui nous ont été soumis par rapport à cet article-là. Il y a une étude qui se fait actuellement par rapport à l'article 45. On est en train de regarder ce qui se fait dans la législation canadienne, par rapport aux différentes provinces au Canada. Alors, c'est un problème très complexe, qui met en opposition d'autres lois canadiennes, comme la loi de l'impôt. Alors, on est en train de faire une étude approfondie sur l'article 45 et, très prochainement, on aura des recommandations à faire par rapport à l'article 45.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que les jugements ont été rendus dans les trois dossiers dont j'ai fait mention?

M. Gauthier (Normand): Je m'excuse, je n'ai pas entendu.

Mme Gagnon-Tremblay: J'ai parlé de Crowne Plaza, du dossier de Métro-Richelieu, de même que du Palais des congrès de Montréal.

M. Gauthier (Normand): Non. Ce n'est pas encore rendu. C'est toujours en cours au Bureau du commissaire général du travail.

Mme Harel: Vous allez me permettre, M. le Président, de commenter ces dossiers épineux qui nous ont, en fait, été laissés par l'administration précédente, en particulier le dossier de Métro-Richelieu.

Je comprends que, dans ce dossier, il y a là une saga judiciaire qui a un effet absolument pervers sur le climat général, et l'article 45 auquel vous avez fait référence, Mme la députée de Saint-François, est donc l'article du Code du travail qui est maintenant, je crois, le plus sujet à controverse dans les instances judiciaires ou quasi judiciaires qui ont à entendre les conflits de travail.

Je ne saurais vous dire comment maintenant, mais je peux simplement vous dire que, en tant que ministre responsable de ce dossier, j'en ai fait part aussi aux partenaires membres du Conseil consultatif du travail. Je crois qu'il nous faut au plus tôt nous pencher sur cette question de façon à y introduire les correctifs de nature à favoriser la paix sociale. Vraiment, présentement, l'interprétation qui est faite de l'article 45, c'est un sujet de très grande controverse qui, comme vous le savez, détériore le climat de travail dans bon nombre d'entreprises.


Conventions collectives de longue durée

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Concernant les nouvelles approches en matière de relations du travail, je sais qu'il y a des... Pour ne pas la nommer, je pense que c'est la CSN qui souhaiterait qu'on mette fin à la négociation des conventions collectives de longue durée.

Est-ce que la ministre a l'intention de maintenir la disposition qui permet justement aux partenaires de pouvoir négocier des conventions collectives de longue durée?

Mme Harel: Je comprends que cette question intéresse également le député d'Outremont. Alors, je dois lui dire que la première chose que j'ai faite en arrivant au ministère, dans les jours immédiats qui ont suivi, c'est de demander un bilan de cette législation et de comprendre qu'à peine quelques dizaines d'entreprises avaient finalement utilisé cette possibilité d'élargir la durée de leur convention collective.

Je ne sais pas si cela a augmenté depuis l'automne dernier, mais je crois que ça n'est pas encore suffisamment répandu pour nous permettre de tracer un modèle. Par ailleurs, Mme la députée de Saint-François, vous savez, pour y avoir été longtemps, en politique, très souvent, quand on est au gouvernement, on s'occupe surtout de ce qui ne marche pas, n'est-ce pas, du moins en premier. Et je comprends qu'aucun des intervenants tant du côté syndical que patronal ne s'attend à ce que je m'occupe de ce dossier-là, ou ne m'en a même parlé, considérant qu'il faut laisser le temps à la mesure de se réaliser pour ensuite conclure si tant est qu'il faut la garder ou pas.

Le Président (M. Tremblay): Je dois dire que je suis un peu déçu de la réponse que je viens d'avoir, parce que, en avril 1991, lors du dossier Sammi-Atlas, ça a été ce qu'on a appelé le contrat social, puis j'entendais la ministre mentionner tout à l'heure l'importance de la paix sociale, ce qu'on appelait la paix industrielle.

Alors, si on veut créer des emplois, si on veut favoriser une meilleure complicité entre les entreprises et la partie syndicale, il faut absolument en arriver à un équilibre entre les demandes traditionnelles de la partie patronale, la paix industrielle, et également la mobilité et la flexibilité de la main-d'oeuvre, avec des demandes traditionnelles de la partie syndicale, un plancher minimum d'emploi et de la transparence au niveau du plan d'affaires de l'entreprise à moyen et à long terme.

On s'aperçoit qu'à toutes les fois qu'il y a un équilibre entre les besoins des patrons et ceux des travailleurs et des travailleuses on implante automatiquement des programmes de formation de la main-d'oeuvre et la qualité totale. Et c'est la concertation par excellence. Lorsqu'on parle d'emploi, lorsqu'on parle de concertation dans une conjoncture économique difficile ou moins difficile ou plus favorable, surtout lorsqu'on s'aperçoit de plus en plus qu'on ne crée pas nécessairement des emplois, de nouveaux emplois, même avec une croissance économique exceptionnelle que nous avons eue au dernier trimestre – plus de 8 % de croissance du produit intérieur brut – on a de sérieuses questions à se poser.

Alors, je voudrais dire à la ministre qu'elle m'a mentionné une dizaine d'entreprises. J'ai juste écrit rapidement lorsque j'ai entendu 10. Alors, Sammi-Atlas, ça en était une. Goodyear ont signé jusqu'à l'an 2002. Goodyear, une entreprise où il restait 300 travailleurs, qui avait 1 600 travailleurs; avec le contrat social, aujourd'hui, c'est rendu presque à 1 800, si ce n'est pas 2 000 travailleurs. La Société des alcools du Québec, la première fois dans le secteur public, contrat de cinq ans et demi. La Ville de Portneuf, contrat à long terme. Abitibi-Price, dans toutes ses usines, contrat de six ans. Gaspésia, contrat de six ans. Domtar, contrat de six ans. Et, il y a quelques jours, pour ne pas dire deux jours, dans les journaux – j'oublie le nom de la papetière – la papetière vient de signer le plus long contrat social: huit ans.

Donc, là, j'arrête, parce que je pourrais vous en nommer d'autres. Donc, il y en a au moins une vingtaine. Le projet de loi 116 a été fait avec la complicité de tous les partenaires. La seule centrale syndicale qui a émis des réserves, c'est la CSN, et c'est la CSN qui s'en sert le plus, des conventions de longue durée. Je vais vous en donner un autre: les chantiers maritimes. Alors, là, je suis rendu à 10. Donc, il y en a plus que ça, il y en a au moins une vingtaine. Et ça a été fait avec complicité entre l'équipe dynamique du ministère du Travail, qui est aujourd'hui le ministère de l'Emploi, et l'équipe dynamique du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.

J'aimerais, j'en fais le souhait, Mme la ministre, que vous considériez l'importance de cette nouvelle orientation qui est la condition essentielle pour accélérer la concertation, pour accélérer la formation professionnelle avec des incidences directes sur la création d'emplois. On nous a déjà dit: Une hirondelle ne fait pas le printemps. C'est évident qu'à toutes les fois qu'on essaie d'innover ou de sortir des façons traditionnelles de créer de l'emploi il y a certaines personnes qui sont sceptiques ou qui regardent ces nouvelles initiatives avec un beau sourire.

Mais, pour une ministre de l'Emploi responsable également de la Concertation, je pense que certaines personnes doivent prendre la relève, véhiculer haut et fort que... Qu'on l'appelle contrat social ou qu'on l'appelle autre chose, je crois profondément... Et les résultats sont là. Ce n'est pas facile de changer les mentalités, même au niveau des ministères, parce qu'on a toujours regardé les relations de travail en fonction d'un code du travail et on se disait: Non, non, non, on ne peut pas faire ça.

Alors, je voudrais juste vous dire, en terminant, que l'avenir m'apparaît à ceux et celles qui arrêtent de voir les choses comme elles sont et disent «pourquoi?» et aux personnes qui vont se dire de plus en plus «nous regardons les choses comme elles pourraient être» et se disent: Pourquoi pas?

(17 h 20)

Mme Harel: J'ai presque le goût de vous applaudir. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Tremblay): Ha, ha, ha!

Mme Harel: Mais, ceci dit, vous me convainquez de la nécessité de demander un bilan au ministère, un bilan à date, à ce moment-ci, au printemps. Alors, c'est une mesure qui fera bientôt deux ans. C'est ça? Alors, ça nous permettra de voir le genre d'entreprise qui l'a utilisée et puis les conditions de réussite où ça s'est signé, en sachant très bien, comme vous le disiez vous-même, qu'il n'y a pas de panacée, surtout en matière de relations de travail, parce qu'il ne faudrait pas non plus qu'il y ait des conflits à partir de cette demande; en fait, que ça ait l'effet pervers de générer des conflits de travail. Ce qui ne semble pas être le cas, ça, je vous l'accorde parfaitement.

Dans l'héritage qui nous est laissé, c'est évident que tout ce qui est bon, on va le garder, y compris l'intervention sectorielle. Ce matin, je n'avais pas eu l'occasion de vous dire que c'est finalement beaucoup en formation de main-d'oeuvre que l'on retrouve l'intervention sectorielle, qui a commencé au niveau des grappes, notamment, et c'est dans ce sens-là qu'on souhaite beaucoup utiliser également l'implication du 1 %, mais on aura d'autres forums pour en reparler.

Ceci dit, on me fait part que, justement, Sammi-Atlas est en demande pour une reconduction, un renouvellement jusqu'en l'an 2000 de la convention. Cependant, ce ne serait quand même pas encore très répandu. Sur environ 2 000 conventions qui se signent chaque année, il y en aurait peut-être pas plus que pour 0,1 %. Mais, quoi qu'il en soit, je pense que ça peut être important de s'en inspirer, et je m'engage, n'est-ce pas, M. le sous-ministre, à déposer au Secrétariat de la commission...

Une voix: L'an prochain! Ha, ha, ha!

Mme Harel: Ha, ha, ha! ...pas pour l'an prochain, mais pour cette année, le bilan de la situation des conventions signées sous les auspices d'une durée extensionnée.

Le Président (M. Tremblay): Juste un autre commentaire. C'est évident que ce n'est pas la solution à tous les problèmes, j'en conviens. Et ça a une certaine flexibilité, ça peut être adapté aux besoins des différentes entreprises, et ce n'est certes pas la seule formule qui existe. On peut prendre, par exemple, le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. La venue dans l'entreprise de représentants syndicaux, de fonds générés par le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, c'est une autre forme de contrat social où le Fonds, par ces intermédiaires, joue un rôle d'éducation économique des travailleurs.

Donc, le contrat social vient, d'une certaine façon, s'ajouter à certaines mesures qui existent déjà. Alors, j'apprécierais que l'étude que vous allez faire soit assez élaborée. Il y a beaucoup de contrats sociaux qui se signent sans nécessairement que les gens de votre ministère en soient informés. Si on pouvait comparer également avec la performance encourageante du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, ce qu'on va réaliser, c'est que peut-être qu'on pourrait arriver, en jumelant ces initiatives aux résultats que nous recherchons tous et que la ministre de l'Emploi recherche, de par ses fonctions: une meilleure concertation, l'accélération de la formation professionnelle dans les entreprises et la création d'emplois.

J'aimerais juste terminer en vous disant qu'il existe malheureusement encore trop, au Québec, un climat de méfiance entre la partie patronale et la partie syndicale. Donc, on doit sûrement, comme élus, et particulièrement la ministre de l'Emploi avec son équipe et la complicité de l'équipe et du ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, arriver à convaincre les entreprises que la formation professionnelle, l'implantation de la qualité totale, l'instauration des normes ISO 9000 et l'ouverture des entreprises sur une économie mondiale nécessitent nécessairement un climat de travail exceptionnel et un climat de travail qui va favoriser la mobilité et la flexibilité de la main-d'oeuvre.

Je vais juste vous donner deux exemples bien précis, en terminant: Si, aujourd'hui, on a un mandat mondial de fabriquer la Camaro et la Firebird à Boisbriand, c'est essentiellement parce que les parties ont réussi à s'entendre dans une nouvelle forme de contrat social, avec de nouveaux mécanismes pour accélérer la formation de la main-d'oeuvre. Je dois vous dire sur ce point, parce que vous en avez parlé tout à l'heure, GM a investi des milliards de dollars dans la formation de la main-d'oeuvre... dans l'instauration de nouvelles technologies sans la complicité des travailleurs, et GM a presque été au seuil de la faillite.

À l'entreprise de Boisbriand, ils ont investi 25 000 000 $ pour assurer la formation des travailleurs. 25 000 000 $ uniquement pour la formation des travailleurs et l'installation de tous les nouveaux équipements de production. Donc, avec la conséquence, aujourd'hui... Si vous vous rappelez, il y a un certain temps, il n'y avait pas... Je me rappelle, parce que j'étais allé à Sainte-Thérèse et j'avais 700 travailleurs qui trouvaient totalement inacceptable qu'ils n'aient pas d'emplois. Aujourd'hui, il y a 3 500 travailleurs à cette usine.

L'autre exemple, c'est Bell Helicopter, à Mirabel. Bell Helicopter, aujourd'hui, c'est une entreprise qui concurrence sur la scène internationale, avec un mandat mondial de fabrication de tous les appareils commerciaux de Bell Textron, et on fait maintenant affaire avec des entreprises américaines qui ont reconnu que, au Québec, lorsqu'on innove au niveau des relations de travail, nous sommes réellement capables d'être les meilleurs et de fabriquer des produits distinctifs, de qualité, et de les vendre partout à travers le monde.

Mme Harel: M. le Président, je voudrais souscrire à vos propos. Je lisais récemment une revue qui s'intitule «Bureau des investissements étrangers», là, «Invest-Québec», et on faisait part d'une étude réalisée, d'un sondage réalisé auprès des filiales de sociétés mères étrangères. C'était un sondage extrêmement important, avec un questionnaire envoyé à 90 de ces filiales, et un taux de réponse de 52 %, ce qui était quand même formidable.

On disait ceci: Les répondants au sondage soulignent que le Québec possède une culture d'affaires se démarquant de celle des autres milieux d'affaires nord-américains. Ils estiment que le Québec se distingue non seulement par son bilinguisme, mais également par l'approche proactive de son gouvernement. Comme ça date de l'hiver 1995, là, je ne sais pas duquel des gouvernements ils voulaient parler, mais, enfin, disons que c'était le gouvernement avec un grand L.

Donc, l'approche proactive de son gouvernement, l'esprit entreprenarial des Québécois, la solidarité entre les milieux patronal, syndical et gouvernemental, sa qualité de vie et son caractère cosmopolite, à leurs yeux, il s'agit-là d'avantages indéniables pour toute société à la recherche d'un emplacement assurant compétitivité et rentabilité à long terme.

(17 h 30)

Et ça n'a rien à voir avec les gouvernements qui se succèdent dans le parlement, mais ça a à voir avec une culture, une culture d'affaires qui est considérée comme différente de la part de ceux-là mêmes, si vous voulez, qui viennent faire des affaires dans un contexte de mondialisation. Alors, je pense que, souvent, on se désole de ce qu'on n'est pas, mais c'est quand les autres jettent un regard sur nous qu'on peut se consoler.

Le Président (M. Tremblay): Si la ministre de l'Emploi a pris le temps de lire le sondage au complet – vous ne l'avez pas dans les pages limitées que vous avez là parce que c'est un sondage assez important – vous allez vous apercevoir que la question 27, qui a été posée aux mêmes multinationales, est la suivante: Est-ce que vous connaissez la stratégie industrielle du gouvernement du Québec connue sous le nom des «grappes industrielles», et si cette stratégie vous a aidé à convaincre vos maisons mères d'investir davantage au Québec? 91 % des entreprises ont dit qu'elles connaissaient très, très bien cette stratégie industrielle et qu'elle avait été des plus utiles pour convaincre leur siège social, les représentants à l'étranger d'investir davantage au Québec.

Mme Harel: Alors, M. le Président, si vous acceptez de me faire parvenir copie de cette question 27 et de la réponse, je m'engage à la transmettre à mon collègue et ami, le ministre de l'Industrie et du Commerce.

Le Président (M. Tremblay): Le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie croit aux grappes industrielles, mais c'est le nom qui a changé, ça s'appelle maintenant les tables de concertation.

Mme Harel: D'accord.

Le Président (M. Tremblay): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Alors, on parlait justement de ces contrats dont vous nous en avez vanté l'importance. Je dirais qu'à entendre le président, et je suis d'accord avec ça, c'est tellement bon, j'aurais peut-être le goût de suggérer à la ministre d'essayer de convaincre sa collègue, présidente du Conseil du trésor, de l'élargir aux secteurs public et parapublic. Ce serait peut-être intéressant, à ce moment-là, de l'élargir. Compte tenu des négociations des conventions collectives qu'on doit aborder très bientôt, alors, peut-être que sa collègue pourrait penser faire des contrats de plus longue durée, même dans le secteur public.

Mme Harel: Encore faut-il faire des contrats, justement, et ne pas imposer par législation, comme cela fut le cas depuis les sept dernières années.

Mme Gagnon-Tremblay: Je dois vous dire cependant, Mme la ministre, que, contrairement aux années antérieures, je pense qu'il y a eu une paix relativement sociale au niveau de notre fonction publique. Il y a peut-être les dernières années où on a dû leur demander un peu plus de sacrifices, mais, compte tenu de toutes les négociations qu'on a réussi à négocier, je pense que c'est quand même une bonne moyenne.


Baisse du taux de syndicalisation

Alors, je voudrais, M. le Président, revenir toujours au Code du travail. Je prenais connaissance il y a quelque temps d'une déclaration de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, qui s'inquiétait du fait que, pour une deuxième année d'affilée, le taux de présence syndicale ait baissé au Québec. Est-ce que la ministre pourrait nous confirmer si c'est un fait, actuellement?

Mme Harel: Je crois que nous assistons à une diminution de la syndicalisation des travailleurs et travailleuses au Québec. Je n'ai pas les chiffres qui le prouveraient, mais je crois que cette diminution est assez substantielle dans le secteur privé au cours des quatre dernières années. Et, comme ministre responsable des normes du travail, ça m'apparaît d'autant plus important d'être vigilante sur la question des normes parce que les normes du travail deviennent de plus en plus les seules protections des travailleurs et travailleuses dans notre société.


Droit de gérance confié aux municipalités

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, l'Union des municipalités du Québec demandait au gouvernement de donner un véritable droit de gérance aux municipalités et elle demandait, justement, le droit au lock-out, entre autres, dans le secteur des municipalités. Est-ce que la ministre a pris connaissance de cette demande? Est-ce que son collègue lui a fait part de cette demande de la part de l'Union des municipalités du Québec, et a-t-elle l'intention de donner suite à cette demande de l'Union des municipalités du Québec?

Mme Harel: Alors, M. le Président, je comprends que la question de Mme la députée de Saint-François porte sur la demande d'un droit au lock-out formulée notamment par le maire de Montréal, et donc de modifications au Code du travail pour permettre aux municipalités l'exercice d'un droit au lock-out, pour équivaloir à l'exercice du droit de grève que détiennent leurs employés.

J'ai reçu de mon collègue, le ministre des Affaires municipales, copie de la résolution adoptée par l'Union des municipalités du Québec à l'effet de requérir une telle modification au Code du travail. J'ai demandé au sous-ministre de mettre en place un groupe de travail à la fois composé d'un représentant des Affaires municipales ainsi que du ministère de l'Environnement, qui va rencontrer les porte-parole concernés par cette demande pour en examiner l'opportunité.

Je dois vous rappeler qu'une telle demande avait été transmise au gouvernement précédent il y a quelques années maintenant, je crois, trois ou quatre ans. Cette demande s'accompagnait également d'une demande de modification du Code à l'égard des policiers et pompiers. Et je crois que l'Union des municipalités souhaitait que le mode de règlement par arbitrage soit modifié par l'exercice du droit de grève pour ces deux catégories d'emplois aussi.

Le gouvernement précédent a choisi d'écarter les modifications au Code en matière d'exercice du droit de lock-out et a plutôt préféré modifier, je crois, l'exercice de l'arbitrage, dans le cas des pompiers et des policiers. Bon, à nouveau, la demande nous est transmise. Il y a déjà maintenant 14 ans, lorsque, en 1981, le Conseil des services essentiels – tel qu'il existe présentement – a été mis sur pied, le législateur avait choisi, dans la logique de l'exercice des services essentiels, que, de toute façon, les pouvoirs publics doivent fournir à la population... Que ce soit dans les hôpitaux ou que ce soit dans les municipalités, c'est essentiellement des institutions qui n'existent que pour fournir des services à la population. Il y a déjà 14 ans, le législateur avait donc préféré soustraire notamment les municipalités à l'exercice du droit de lock-out.

L'exercice du lock-out, c'est de cesser de fournir des services. Alors, il y a un examen approfondi vraiment important qui doit être fait, parce que c'est bien évident qu'il ne faut pas, d'aucune façon, déstabiliser le fragile équilibre qui a fini par s'imposer à toute notre société en faveur du maintien des service essentiels. On a vu le résultat au moment où, notamment à Montréal, quelques ambulanciers décidaient de cesser leur travail, au mois de janvier passé. On a vu pleinement jouer les mécanismes qui ont permis un contrôle de la situation et un retour normal, sans que ça dégénère.

Alors, je crois que le régime des services essentiels, c'est un régime dont on peut être fier comme société. Et il faut protéger et mettre cet équilibre fragile à l'abri de soubresauts. C'est dans ce contexte-là que nous avons l'intention d'examiner la demande qui nous est transmise par l'Union des municipalités.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci.

Mme Harel: Mme la députée de Saint-François, il y aura peut-être, à l'occasion de l'examen des crédits du Conseil des services essentiels, la possibilité de revenir aussi sur la question avec Me Lemieux.


Décrets de conventions collectives

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Alors, M. le Président, ça complète mes questions concernant les relations de travail. Je vous remercie, M. Gauthier, d'avoir répondu à nos questions. Et, maintenant, je poursuivrai avec les décrets de conventions collectives.

Mme Harel: Alors, les décrets de conventions collectives. Je vais inviter le sous-ministre Henry, de même que le Conseil consultatif et les personnes qui travaillent sur l'examen approfondi des décrets à se joindre à moi.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, on avait mis en place le comité consultatif. Est-ce qu'il y aurait possibilité d'avoir un état des travaux du comité consultatif? Qu'est-ce qu'il a fait depuis sa formation, sa création, et si on prévoit, par exemple, suggérer des recommandations au gouvernement?

Mme Harel: Permettez-moi, je n'ai pas bien saisi la dernière partie de votre intervention.

Mme Gagnon-Tremblay: Si, par exemple, le comité a fait des recommandations ou a l'intention de faire des recommandations au gouvernement...

Mme Harel: D'accord.

(17 h 40)

Mme Gagnon-Tremblay: ...suite à sa création.

Mme Harel: Très bien. Alors, donc, en novembre dernier, je confiais au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre – est-ce qu'on dit toujours: travail, main-d'oeuvre?

Une voix: C'est toujours dans la loi.

Mme Harel: C'est toujours dans la loi, bon. Alors, au CCTM, je confiais donc la responsabilité de transmettre un avis à la ministre sur toute la question des décrets de conventions collectives. Alors, je n'ai pas, peut-être, à vous rappeler tout l'historique qui a précédé la création, en 1992, d'un comité interministériel qui avait comme mandat d'évaluer la pertinence de maintenir, d'abroger ou de modifier la Loi sur les décrets de convention collective. La composition de ce comité réunissait des représentants à la fois de l'Industrie, Commerce, Technologie, Main-d'oeuvre, Sécurité du revenu et du ministère du Travail. Les études réalisées: plusieurs études réalisées dans le cadre du mandat du comité interministériel et, finalement, le rapport, en février 1994, qui a donné lieu à une consultation parlementaire, consultation qui a eu lieu en mai ou juin, mai 1994 donc, au printemps dernier. Alors, suite à cette consultation générale, 35 mémoires ont été déposés, et ça se partageait presque moitié-moitié, les tenants en faveur d'une abrogation et l'autre en faveur d'un maintien et d'un rajeunissement. Mais il y a eu cependant des consensus sur certaines recommandations.

Suite à quoi, en novembre dernier, je confiais au CCTM le soin de repartir avec tout le matériel et non pas de recommencer à zéro, là; de repartir à la fois avec les études réalisées, le rapport du comité interministériel de même que la consultation tenue, pour, en début mai, me faire rapport sur la question. Alors, je souhaiterais peut-être que, à ce moment-ci de nos travaux, un rapport d'étape puisse nous être fait.

Le Président (M. Tremblay): Oui, alors, M. Henry.

M. Henry (Jacques): Alors, M. le Président, il y a eu quatre réunions à date, la cinquième est prévue vendredi prochain, au CCTM. Trois ressources du ministère y sont affectées en soutien, et l'ensemble des 35 recommandations du comité interministériel a déjà été étudié de même que 23 recommandations additionnelles formulées par l'une ou l'autre des parties en commission parlementaire. Il ne reste que 10 recommandations sur, donc, le total de 58 étudiées par les parties, où elles ne se sont pas encore prononcées à date; elles le feront vendredi prochain. Et il se dessine que le rapport du CCTM va parvenir à la ministre avec des recommandations à l'effet de manifester un accord ou des consensus positifs ou négatifs à l'égard de chacune des 58 recommandations qui ont été étudiées très activement au cours des sept dernières semaines.

Mme Harel: Les parties patronales et syndicales ont pris ça très au sérieux. Le groupe de travail qui a été constitué a été élargi également à des représentants de la CSD et de l'Association des manufacturiers, qui, jusqu'à maintenant, n'ont pas siégé au CCTM, mais qui ont été nommés pour les fins de l'étude sur la loi des décrets.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, on a dit qu'il y a déjà 58 études. Il y en a 35 qu'on a déjà reçues. Est-ce qu'il y aurait possibilité d'avoir les 23 recommandations – je parle d'études au lieu de recommandations, ce sont des recommandations – qui ont été reçues récemment, les recommandations dont vous faites mention, pour compléter les 58 que...

M. Henry (Jacques): Mme Harel me signale que oui, ce sont les recommandations formulées en commission parlementaire, que nous avons reproduites dans un document que nous allons vous rendre disponible.

Mme Gagnon-Tremblay: De qui est composé le comité consultatif? Qui siège sur le comité consultatif?

Mme Harel: M. Dulude, le président du CCTM. Excusez-moi, je lui avais donné le titre de secrétaire général, plus tôt.

Le Président (M. Tremblay): Alors, M. Dulude.

M. Dulude (Yves): Le CCTM est composé de 10 personnes, cinq patronaux et cinq syndicaux. La partie syndicale est représentée par le président de la FTQ, le secrétaire de la FTQ, le président de la CSN, ainsi que M. Maurice Sauvé, de la CSN, et Lorraine Pagé, de la CEQ. Du côté patronal, c'est M. Dufour, avec quatre autres représentants du Conseil du patronat, qui sont Roger Hébert, Pierre Comtois, de GM, M. Edmund Tobin, et j'en oublie un...

Mme Harel: M. Blais, d'Hydro.

M. Dulude (Yves): M. Blais, d'Hydro.

Mme Harel: Ça, c'est au niveau du CCTM, mais au niveau du groupe de travail sur la loi des décrets...

M. Dulude (Yves): Élargi. C'est une commission que le Conseil a décidé de former où sont représentés, entre autres, la Chambre de commerce et un certain nombre d'organismes particulièrement intéressés par le secteur des décrets, qui ne sont pas nécessairement des membres du Conseil. L'AMQ, entre autres, est représentée.

Mme Gagnon-Tremblay: Pour la Chambre de commerce, qui siège actuellement?

M. Dulude (Yves): Michel Audet.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Donc, finalement, si je comprends bien, c'est que, suite à ces recommandations, la ministre sera en mesure soit de maintenir la loi telle quelle, la modifier ou y apporter des améliorations.

Mme Harel: Absolument, et il est de notre intérêt de rajeunir cette loi des décrets, d'autant plus qu'un mandat de formation pourra être associé à ceux qui seront confiés au comité paritaire.


Coiffeurs et coiffeuses

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Mme la ministre, vous avez reçu récemment, et, d'ailleurs, j'ai reçu les mêmes documents, et j'ai reçu également la visite de M. Hallé, qui représente la Corporation des coiffeurs et coiffeuses. Il semble y avoir passablement de difficultés. On semble former beaucoup de coiffeurs, coiffeuses pour, finalement, le travail qu'il y a à faire. On semble aussi dire qu'il y a de plus en plus de coiffeurs et coiffeuses qui travaillent, par exemple, dans leur sous-sol, parfois sans plus ou moins de formation ou d'expérience, ou encore travaillent au noir, aussi, travail non déclaré. Et, finalement, la demande de la Corporation des coiffeurs et coiffeuses était à l'effet d'exiger une loi. On pense qu'en ayant une loi, premièrement, on pourrait mieux contrôler la formation. Et je pense qu'au niveau de la loi ça touche beaucoup la formation. Il semble y avoir beaucoup de difficultés au niveau de la formation. S'assurer, je ne sais pas, d'un certificat de compétence, comme on le fait, par exemple, au niveau de la construction, je ne sais pas si c'est possible, mais ils sont très inquiets, finalement, pour l'avenir des coiffeurs et coiffeuses. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là.

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, il ne reste plus qu'un seul décret de la coiffure au Québec, et c'est celui de Hull. C'est un décret qui est extrêmement dynamique, cependant, et qui, je pense, démontre bien jusqu'à quel point, bien appliqué, ça peut donner des bons résultats.

Une voix: Une seule région.

Mme Harel: Une seule région.

Mme Gagnon-Tremblay: La région de l'Outaouais, je pense.

Mme Harel: C'est ça. Un seul décret, dans la région de l'Outaouais. Tous les autres décrets qui existaient dans le secteur de la coiffure ont été abolis en 1984. Et c'est beaucoup suite à cette expérience que nous avons tiré des leçons sur la façon de faire maintenant, parce que nous nous rendons compte que, dans bon nombre de décrets abolis il y a bientôt 11 ans, c'est là où a commencé à fleurir le travail au noir, et qu'il faut certainement moderniser, rajeunir les décrets et ne plus faire en sorte que ces décrets permettent de contingenter les professions. Mais, par ailleurs, il faut souhaiter qu'il y ait une autorégularisation qui puisse se faire dans des métiers sans que ce soit le législateur qui en soit chargé par la voie d'enquêteurs ou d'inspecteurs.

(17 h 50)

Ce qui m'amène à vous dire ceci. Dans le cas précis que vous mentionniez, ce n'est pas à un décret que l'on nous invite, c'est à une loi pour créer un statut de corporation. Et on me dit, au ministère, que cela avait été étudié, l'an passé, et écarté. Et, à ma demande, on refait l'examen. Mais je n'en sais pas plus que ce que je vous en dis maintenant, sauf une expérience très personnelle, qui est que, depuis ma plus tendre enfance, je hante le salon de coiffure de ma mère, et je sais que, lorsque le régime d'apprentissage permettait à des apprentis de se qualifier pour le métier, souvent, ça donnait de bien meilleurs résultats qu'au moment où on a décidé de scolariser dans les polyvalentes la formation de coiffeur ou coiffeuse.

Et je comprends que, dans le cadre de l'examen qu'on fait d'un régime d'apprentissage, parmi les métiers qui pourraient assez rapidement être ceux que l'on envisage qualifier par la voie de l'apprentissage, certainement qu'il pourrait y avoir la coiffure.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, si j'ai bien compris l'intervention du représentant de l'organisme, ils ne veulent pas... Je ne pense pas que la Corporation ne veut pas de décret. C'est une loi, justement, qui pourrait encadrer mieux, finalement, non seulement la formation, mais aussi toute l'activité des coiffeurs et coiffeuses.

Est-ce que vous avez l'intention d'examiner cette possibilité de reporter, par exemple, ce dossier-là au comité consultatif pour voir si on peut y donner suite? Je sais que, oui, ça avait été étudié sous notre gouvernement, mais, ce qu'on me dit, c'est qu'il n'y avait pas eu de décision définitive de prise à cet effet-là. Je pense que c'est demeuré au sein du ministère. Est-ce que la ministre a l'intention de l'aborder au comité consultatif, entre autres?

Mme Harel: Non. Je ne pense pas que ça vienne au comité consultatif, parce que, justement, il ne s'agit pas, pour ceux des promoteurs qui veulent une corporation, de demander que ce soit un décret qui les régisse. C'est vraiment une législation qui est demandée dans la perspective d'un contrôle du métier de la coiffure. Alors, je crois que l'étude qui avait été demandée l'an dernier par mon prédécesseur, M. Marcil, avait conclu à un rejet de la demande. Alors, nous examinons présentement s'il serait possible de satisfaire les besoins de ce métier sans pour autant légiférer. Il ne suffit pas juste de légiférer, hein! Vous le savez, après coup, il faut s'assurer que le contrôle de la législation et que les sanctions en cas de défaut soient appliquées. Alors, légiférer sans application, ça finit par discréditer la législation. Alors, ce que je vous en dis, c'est que nous en sommes encore à l'état embryonnaire de l'examen de la situation.

Mme Gagnon-Tremblay: À tout le moins, je pense qu'on doit se pencher sur la formation, cependant, la formation des coiffeurs et coiffeuses, parce que ce qu'on en disait, finalement...

Mme Harel: Oui.

Mme Gagnon-Tremblay: ...mérite une attention particulière à ce niveau-là.

Mme Harel: Oui. Ça, c'est déjà, par exemple, bien engagé au niveau de la SQDM.

Mme Gagnon-Tremblay: Parce que les gens commencent très tôt aussi, à 16, 17 ans, parfois; ils se retrouvent dans des salons de coiffure très jeunes et avec peu d'expérience. Finalement, c'est le consommateur, aussi, qui n'est parfois pas en mesure de juger l'expérience. Parce que, dans un contexte difficile, les gens vont à celui ou celle qui exige le moins, finalement, en termes de coût. Alors, parfois, on n'est pas toujours conscient, comme consommateur, que la personne est moins expérimentée.

Mme Harel: C'est-à-dire que bien des consommateurs, aussi, n'exigent pas un reçu de ce qu'ils versent. Alors, il y a prolifération du travail au noir dans ce secteur-là.

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, M. le Président, ça complète...


Heures d'ouverture des commerces

Le Président (M. Tremblay): La ministre de l'Emploi a été saisie d'un problème d'harmonisation de certains décrets de conventions collectives avec les dispositions de la loi sur les heures d'affaires, particulièrement dans le secteur de l'automobile ou le commerce de détail, notamment les Canadian Tire. Est-ce que la ministre considère favorablement, à la suite des représentations qui lui ont été faites, la possibilité d'harmoniser ces décrets de conventions collectives avec les dispositions de la loi sur les heures d'affaires? Parce qu'il y a certains commerces, notamment de détail – je mentionne Canadian Tire – qui sont pénalisés à cause de ces décrets de conventions collectives. Et le prédécesseur de la ministre du Travail avait même fait accepter, je pense, un décret au Conseil des ministres, et je ne suis pas certain s'il n'y avait pas eu une publication dans la Gazette... Oui, il y a même eu une publication dans la Gazette officielle du Québec , et la ministre de l'Emploi a sûrement reçu des commentaires. Alors, je voulais juste savoir où en était rendu le statut de ce dossier qui est important pour certains commerces de détail situés dans toutes les régions du Québec.

Mme Harel: Alors, M. le député d'Outremont, on me fait part, effectivement, qu'il y a eu prépublication, le 10 août dernier, que, cependant, c'est justement à l'examen des parties à l'intérieur du groupe de travail du Conseil consultatif et que c'est un sujet actuellement très litigieux, c'est-à-dire un sujet sur lequel, contrairement à beaucoup, beaucoup d'autres, là, les parties ne sont pas encore arrivées à s'entendre.

Alors, dès le mois de mai, j'aurai un rapport de ce groupe de travail et je pourrai voir l'état d'avancement du dossier.

Le Président (M. Tremblay): Un seul commentaire que je voudrais ajouter. Une nouvelle loi sur les heures d'affaires, qui est peut-être rendue une ancienne loi, mais disons qu'il y a des dispositions nouvelles, la loi sur les heures d'affaires, si on pouvait trouver une façon pour permettre justement à tous les détaillants de concurrencer sur une base égale avec d'autres, surtout ceux du secteur de l'automobile. Je pense que ces commerçants, ces gens d'affaires, et c'est évident que les travailleurs aussi semblent favorables à certaines modifications, et, à ce qu'on me dit, c'est plus certains syndicats qui s'objecteraient à cette ouverture-là parce que ça pourrait créer des précédents.

Mme Harel: Voilà! On me fait part qu'il y a des divergences de points de vue au sein même de l'industrie de l'automobile entre patrons, dépendamment si on représente un concessionnaire ou si on représente un garage. Il y a loin, loin, loin d'avoir un consensus au niveau patronal seulement.

Cependant, je dois dire au député d'Outremont que, dès que faire se peut, on essaie de corriger sans attendre les irritants qui existent toujours. Je vais vous en donner un qu'on a porté à ma connaissance, c'est l'interdiction de la livraison du pain le lundi. J'ai découvert que ça faisait déjà 37 ans qu'on interdisait la livraison du pain le lundi, et que c'est la raison pour laquelle on mangeait du pain marshmallow, du pain sec le lundi, parce qu'il est interdit de livrer du pain frais, il est interdit de livrer tout court. Alors, comme la seule façon d'en avoir, c'est de le mettre dans des papiers d'emballage et de le livrer un autre jour, ce qui fait que cette mesure-là est un archaïsme, évidemment, de l'époque où on livrait le pain, j'imagine, non pas à cheval, mais on livrait le pain peut-être, ni en bicyclette, là, le sous-ministre me fait dire n'importe quoi, là, je m'excuse... Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Non, mais il n'est pas complètement autre, où il fallait sûrement, je le conçois bien, protéger ceux des travailleurs qui avaient à faire la livraison pour ne pas qu'ils y soient obligés sept jours par semaine. Mais ce n'est plus le cas maintenant. C'est une industrie qui est d'ailleurs syndiquée à un très, très fort pourcentage. Alors, j'ai écrit à toutes les parties, là, pour leur dire que, nonobstant le rapport qui va m'être transmis en mai, je leur ai annoncé l'intention de prépublier la levée de l'interdiction de la livraison du pain le lundi. Et là on ne me croit pas encore, on me dit qu'on va attendre la publication dans la Gazette , que ça fait déjà cinq ministres qui ont successivement promis la même chose. Ha, ha, ha!

(18 heures)

Le Président (M. Tremblay): Alors, je voudrais peut-être juste ajouter que c'est évident que ça va prendre un certain courage politique, mais, gouverner, c'est décider. Alors, je me rappelle très bien, lorsqu'on a déposé le projet de loi sur les heures d'affaires, les plus grands réticents, c'étaient les commerces de détail dans le secteur de l'automobile, parce que, maintenant, on leur permettait d'ouvrir. Mais si vous regardez, aujourd'hui, les détaillants en automobile ferment, comme avant, le samedi et également le dimanche. Ils se sont entendus pour ne pas ouvrir. Et, si vous vous rappelez, les gens allaient chez les détaillants d'automobiles jusqu'à 22 heures le soir. La loi limite maintenant jusqu'à 21 heures, le soir. Alors, ça a eu des impacts très positifs, notamment au niveau de la famille. Le patron payait son vendeur à la commission; donc, il était assis là, il ne le payait pas plus cher, ça favorisait le consommateur, mais il y avait certaines incidences négatives sur la famille.

Alors, ça n'a pas été une décision facile à prendre. Tout ce que je vous dis, c'est: Pour le pain, définitivement, allez-y et vous allez avoir, du moins, l'appui du député d'Outremont. Et, en ce qui concerne les autres décrets, s'il faut attendre l'unanimité, on ne l'aura jamais. Si c'est un consensus fort, il me semble qu'on doit au moins faire des efforts considérables pour harmoniser les décrets de conventions collectives avec la loi sur les heures d'affaires. Ça, il me semble que c'est un minimum.

Je crois, là, qu'il pourrait y avoir une entente entre les membres de la commission à l'effet que, si on acceptait de suspendre jusqu'à 18 h 30, on pourrait reprendre immédiatement à compter de 18 h 30 pour finir les sujets qu'il reste, pour un maximum de trois heures. Mais ça va dépendre, là, de... Je pense que ça va très bien. Présentement, les échanges sont très positifs. Alors, dépendamment du nombre de filières jaunes... Il y a les filières blanches de la ministre, mais, les filières jaunes, c'est la critique de l'opposition officielle, la députée de Saint-François. Alors, si les membres de la commission étaient d'accord... Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. M. le Président, peut-être pour libérer, entre autres, M. Dulude, j'ai terminé quant aux décrets, le dossier sur les décrets, et, si les membres conviennent de revenir dans une demi-heure, j'aborderais à ce moment-là la Commission des normes du travail.

Mme Harel: Bon. Mme la députée de Saint-François, ce n'est pas du tout mon intérêt, là, de faire pression d'aucune façon pour que vous soyez bousculée dans les dossiers qu'on a à examiner. Mais je comprends que vous souhaitez la présence de l'ensemble des porte-parole des différents organismes.

Mme Gagnon-Tremblay: Bien, c'est-à-dire, si vous êtes capable de répondre à leur place...

Mme Harel: Ah, bon, d'accord. Bien, je les garde. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Tremblay): Alors, je suspends les travaux jusqu'à 18 h 30.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

(Reprise à 18 h 40)

Le Président (M. Tremblay): Alors, avec votre collaboration, la commission reprend ses travaux. Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Étant donné que c'est Jeudi saint, il y a peut-être des personnes qu'on pourrait dégager immédiatement; entre autres, peut-être, Me Lemieux, la présidente du Conseil des services essentiels. Je vais m'abstenir de poser des questions au niveau du Conseil. Alors, peut-être qu'on pourrait libérer les représentants du Conseil, en vous remerciant d'être venus; peut-être que l'an prochain nous aurons plus de questions concernant le Conseil.

Mme Harel: Ne le souhaitons pas. Ne le souhaitons pas parce que ça supposerait, évidemment, qu'ils aient eu plus de travail et, donc, que les conflits aient augmenté.


Commission des normes du travail (CNT)

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, M. le Président, je pense qu'on peut maintenant regarder le dossier de la Commission des normes du travail. Je pense qu'en premier lieu je souhaiterais avoir un état des finances de la Commission. Peut-être qu'on pourrait nous faire part, là, de l'état des finances de la Commission des normes. Comment ça va, est-ce que ça va bien, est-ce qu'il y a des difficultés?

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, je vais demander à M. Rivard de répondre à votre question.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci.

M. Rivard (Jean-Guy): Merci. La Commission équilibre pour la deuxième année, en 1994-1995, son budget. Après avoir enregistré des déficits de 5 000 000 $ par année en 1991-1992 et 1992-1993, la Commission a équilibré son budget au cours des deux dernières années budgétaires et prévoit le faire en 1995-1996 aussi, en enregistrant un léger surplus de 1 200 000 $ à 1 300 000 $, et ce surplus est généralement attribuable à la réorganisation des services.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez réorganisé vos services aussi, je pense?

M. Rivard (Jean-Guy): L'ensemble des services de la Commission, oui, afin de remplir l'ensemble des fonctions qui nous sont dévolues par la loi.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que cette réorganisation, elle est terminée maintenant, est-ce qu'elle est complétée?

M. Rivard (Jean-Guy): Oui, quant aux structures et quant au travail à faire, il reste l'implantation finale.

Mme Gagnon-Tremblay: Il avait été question, à un moment donné, que la perception des cotisations pourrait se faire par le ministère du Revenu. Est-ce que ces négociations sont complétées? Est-ce que ça se fait déjà actuellement ou bien si c'est en voie d'être mis en place?

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, c'est déjà finalisé. Cela le fut dans le cadre du projet de loi déposé par mon collègue, le ministre des Finances, au mois de décembre dernier. C'était un projet de loi qui portait sur le budget, c'est bien ça?

(Consultation)

Mme Harel: Alors, c'est le ministère du Revenu. C'est à titre non pas de ministre des Finances mais de ministre du Revenu que mon collègue a fait adopter, à la fin de la session passée, un projet de loi spécifique sur le prélèvement, dorénavant, de la cotisation de 0,8 %, c'est bien ça, de l'employeur par le ministère du Revenu. Alors, cette année, ça a été fait. Déjà, les entreprises, dans leurs formulaires, se trouvent donc à pouvoir ajouter simplement le montant à la catégorie qui s'appelle: Normes du travail. Donc, un formulaire de moins.

Mme Gagnon-Tremblay: J'imagine que ça a aussi permis une économie à la Commission.

Mme Harel: Oui, ça a permis une économie, mais, en même temps, un transfert d'employés, je crois. Effectivement, c'est une économie assez appréciable, de 1 700 000 $, et un transfert d'effectifs permanents de 15 ou 16 personnes. En fait, 15, exactement.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, O.K., merci. Il semblerait, M. le Président, qu'on a l'intention de faire payer par la Commission des normes les plaintes qui étaient étudiées par le Bureau du commissaire. Auparavant, lorsqu'il y avait des plaintes qui étaient formulées, à ce moment-là, c'était le Bureau du commissaire qui assumait, bien sûr, les frais de ces dossiers, de ces plaintes. Il semblerait qu'il y a eu une entente récemment avec la Commission des normes pour faire supporter ces frais.

Bon, je pense qu'il y a quand même certains représentants qui sont plus ou moins mécontents, finalement, de ce transfert de frais au niveau de la Commission des normes. Comme on vient de nous dire que, depuis quelque temps seulement, on réussit non seulement à équilibrer, mais à ne pas faire de déficit, est-ce que ça peut mettre en péril à nouveau la santé financière de la Commission, ou bien si ça représente des sommes minimes?

Mme Harel: Oui, je réponds à l'instant à cette question.

(Consultation)

Mme Harel: Je voudrais d'abord vous référer – je crois que c'est dans les renseignements particuliers – à l'onglet qui concerne le Bureau du commissaire général du travail et qui porte sur le nombre de plaintes que le Bureau du commissaire général du travail analyse annuellement. Voilà. Alors, je vais vous inviter à regarder l'onglet 27 des Renseignements particuliers et qui porte le total des plaintes reçues par le Bureau du commissaire général du travail en 1994-1995 en vertu du Code du travail et des autres lois du travail.

Alors, ça donne un aperçu assez révélateur des types de plaintes, du genre de requêtes reçues et des délais de traitement. Vous avez, au Bureau du commissaire général du travail, un total de 3 472 plaintes, et vous constaterez que 80 % d'entre elles proviennent de la Loi sur les normes du travail. Alors, c'est sans doute ce qui avait amené mon prédécesseur à entreprendre des pourparlers avec le président de la Commission des normes du travail pour faire financer en partie par la Commission des normes le travail effectué au Bureau du commissaire général.

Alors, vous voyez, en vertu du Code, il y a 697 plaintes, puis en vertu de la Loi sur les normes, il y en a 2 763, pour un total de 3 472. Alors, c'était au discours sur le budget en 1994. Donc, l'an passé, suite au discours sur le budget, c'est mon prédécesseur qui, compte tenu des compressions et du montant des crédits à périmer, charge la sous-ministre, Mme Malo, à l'époque, de concevoir le genre de compressions à effectuer. Puis j'ai ici copie d'une lettre envoyée par la sous-ministre, Mme Malo, avec copie conforme à M. Marcil. Cette lettre est envoyée au secrétaire du Conseil du trésor, et elle confirme l'engagement ferme du ministère de l'Emploi de respecter l'objectif de réduction de dépenses et de le faire... Et je cite:

«Je tiens à vous souligner que nous réaliserons cet objectif par une accélération, pour une bonne part, de notre planification de l'Opération réalignement.» Alors, ça a fait partie de l'Opération réalignement. «Deux projets totalisant 605 000 $ sont conditionnels à des décisions gouvernementales: 1° faire assumer la rémunération des arbitres de différends par les parties, 180 000 $; et, 2° autoriser le financement par la Commission des normes du travail des activités du Bureau du commissaire général du travail en application de la Loi sur les normes du travail.» Et on ajoutait: «Deux documents pertinents chemineront dans les prochaines semaines à cet effet.»

(18 h 50)

Quant à la première mesure, celle qui concerne la rémunération des arbitres de différends par les parties, elle aura été finalement mise de côté, et sera retenue celle qui concerne le financement par la Commission des normes des activités du Bureau du commissaire général du travail en application de la Loi sur les normes. Il faut comprendre que, à ce moment-là, le Trésor, dont vous étiez, je crois, la présidente à l'époque, écrira, le 8 juillet dernier, pour confirmer le bien-fondé de ces mesures, et je cite:

«En ce qui concerne les deux mesures d'économie qui nécessitent des décisions gouvernementales, soit le financement de la rémunération des arbitres de différends par les parties et le financement par la Commission des normes du travail des activités du Bureau du commissaire général du travail, je tiens à vous souligner que si elles ne peuvent être mises en place ou si elles génèrent des économies nettes moindres que prévu, vous devrez proposer des mesures compensatoires équivalentes.» Et M. Dicaire ajoutait: «La situation budgétaire est telle qu'elle exigera une gestion très rigoureuse d'ici la fin de l'exercice.»

Alors, c'est donc dans ce contexte-là qu'une entente relative au financement d'une partie des activités du Bureau du commissaire général du travail en regard de l'application des articles 122 et 124 de la Loi sur les normes... En fait, c'est essentiellement, je pense, un congédiement sans juste cause et puis les pratiques interdites, dans lesquelles on retrouve les congédiements pour grossesse, notamment.

Alors, il s'agit essentiellement des motifs pour lesquels il y a examen par le Bureau du commissaire général du travail. Cette entente a été signée le 31 mars 1995 entre le sous-ministre, M. Boily, et le président-directeur général de la Commission des normes, M. Rivard, et M. Ponton, Gérald Ponton, membre du conseil d'administration de la Commission des normes.

Alors, ce que ça indique, c'est ce qu'on retrouve dans nos crédits, à savoir que, pour l'exercice financier 1994-1995, donc l'an dernier, la contribution de la Commission des normes pour le financement partiel des activités du BCGT, Bureau du commissaire général du travail, en regard de l'application des articles 122 et 124 de la Loi sur les normes, est établie à 425 000 $. Et on y ajoute: Le ministère de l'Emploi et la Commission des normes détermineront les modalités d'une entente relative à la création d'un compte afin de déterminer, en ce qui a trait au financement d'une partie des activités du BCGT par la Commission des normes, pour les années ultérieures...

D'autre part, le conseil d'administration de la Commission des normes a accepté le principe d'un versement annuel et a fait, pour l'année 1995-1996, une provision de 1 000 000 $ dans son budget à cet effet. Alors, voilà l'état de la situation.

Mme Gagnon-Tremblay: Il semblerait, M. le Président, que, suite à la signature de cette entente, les employeurs sont très préoccupés, parce qu'il y aurait quand même un manque à gagner, pour 1995-1996, pour la Commission des normes, de près de 425 000 $, et on me dit que, possiblement, en 1996-1997, c'est 1 300 000 $, et, en 1997-1998, près de 1 700 000 $. Et, compte tenu des compressions qu'à dû faire la Commission pour être capable d'équilibrer son budget, est-ce que, à ce moment-là, ça n'aura pas un impact sur, justement, les finances ou la santé financière de la Commission des normes?

Est-ce que la ministre peut nous assurer que, même avec cette ponction du Bureau du commissaire vers la Commission des normes, ces nouvelles charges, que ça n'aura pas, finalement, et qu'on n'aura pas à revenir... Parce que, bien sûr, si la Commission des normes est obligée d'assumer ces coûts, tôt ou tard, la Commission va devoir couper à nouveau ou bien augmenter ses cotisations. Est-ce que, à ce moment-là, la ministre peut nous confirmer que ça n'aura pas nécessairement d'impact sur la santé financière de la Commission?

Mme Harel: D'une part, M. le Président, je pense bien, la ministre... La ministre... Excusez-moi, Mme la députée de Saint-François. La députée de Saint-François doit convenir que, en transférant le prélèvement de la cotisation au ministère du Revenu, la Commission des normes, comme le signalait tantôt M. Rivard, fait une économie assez appréciable, de 1 700 000 $. Alors, il s'agit donc là, d'une part, à la fois d'une économie et, on peut dire aussi, d'une rationalisation des contrôles normatifs auprès de l'employeur, qui va faciliter, finalement, sa tâche. C'est donc, dans le cadre de la déréglementation, ce qui était annoncé depuis au moins deux ou trois ans. Mais il y a une économie quand même assez appréciable.

D'autre part, je pense bien que la question se pose, à savoir, par exemple, s'il est juste et raisonnable que, pour l'application de la Loi sur les normes elle-même, la cotisation des employeurs serve à financer l'application de la loi. Alors, je comprends que c'est le cas pour l'ensemble des activités sous la responsabilité de la Commission des normes; il en va ainsi tant pour les services de médiation que pour les autres services. Alors, au BCGT, il s'agit des activités qui concernent l'application de la loi des normes, dans l'aspect d'appel des décisions.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Je voudrais aborder les règlements hors cour. Je sais que l'organisme Au Bas...

Mme Harel: Excusez-moi, Mme la députée de Saint-François, ce n'est pas en appel, au BCGT, c'est en première instance. C'est comme si la première instance d'audition de la plainte devant la Commission des normes était au Bureau du commissaire général du travail. Alors, c'était pour ne pas faire double emploi. Mais c'est évident que c'est la première instance. C'est un peu, si vous voulez, comme l'extension.

Je vous rappellerais que le gouvernement précédent avait choisi de faire financer l'ensemble des tribunaux quasi judiciaires. Je pense, entre autres, à la Commission des affaires sociales, et je pense également à la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, qui sont financées par les instances pour lesquelles elles siègent en révision des décisions. À la CAS, le financement provient, à ma connaissance, à la fois de la Société de l'assurance automobile, à la fois de la Régie des rentes du Québec, et peut-être d'une troisième instance... de la CSST, aussi, parce qu'il y a une partie, je pense, seulement des dossiers qui vont en révision à la CAS: ceux, je crois, des plaintes portées avant 1985.

Enfin, quoi qu'il en soit, c'est une dynamique dans laquelle on s'est engagé dans le passé. Je me rappelle avoir personnellement posé des questions là-dessus, mais il est intéressant de comprendre que c'est la vérité des prix, d'une certaine façon, qui en résulte pour l'organisme qui a à appliquer des lois dont l'application, si vous voulez, génère aussi des révisions ou un examen.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Je voudrais aborder, M. le Président, les règlements hors cour. Généralement, on est tous d'accord qu'on essaie de plus en plus de régler hors cour quand on peut le faire. Mais il semblerait, d'après l'organisme Au Bas de l'échelle... cet organisme semble dire que, trop souvent, la Commission fait des règlements hors cour, mais des règlements hors cour à la baisse, et que, dans ce sens-là, ça nuit, bien sûr, aux travailleurs. Ces règlements ne sont pas toujours faits dans l'intérêt des travailleurs et travailleuses. Qu'est-ce que vous en dites? Quel est votre point de vue là-dessus?

Mme Harel: Mme la députée de Saint-François, j'ai eu l'occasion, de même que M. Rivard, de rencontrer les porte-parole de l'organisme Au Bas de l'échelle. Nous avons même assisté, M. Rivard et moi, à leur 10e... 15e... C'était déjà leur 15e... Leur 20e? Excusez, c'était leur 20e. Vous avez raison, parce que nous sommes en 1995, et l'organisme existe depuis 1975. Alors, nous avons donc célébré le 20e anniversaire d'Au Bas de l'échelle. Et, à cette occasion, M. Rivard me faisait part qu'un groupe de travail conjoint a été mis en place par la Commission des normes, de concert avec également Au Bas de l'échelle... Mais je vais demander à M. Rivard d'en décrire la composition.

M. Rivard (Jean-Guy): Il y a des membres du conseil d'administration de la Commission, des membres, évidemment, du personnel de la Commission et un représentant du Protecteur du citoyen qui siègent sur ce comité. Le but de ce comité est d'étudier les quelques griefs qu'a le groupe Au Bas de l'échelle à l'égard de certaines pratiques générales, si vous voulez, de la Commission, notamment la médiation et les règlements, qu'ils disent être à rabais, de certaines plaintes déposées devant la Commission.

(19 heures)

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. M. le Président, concernant le dossier de la Commission des normes, j'ai terminé, je n'ai pas d'autres questions. Je veux remercier M. Rivard.

Mme Harel: M. Rivard, pour la soirée?

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Bien, c'est-à-dire... À moins que... Vous comprenez que, pour moi, c'est la première expérience, et des dossiers que... Là, je ne sais pas toujours à qui m'adresser. Alors, je ne sais pas si... On discutera de la Régie du bâtiment et de la Commission de la construction et de la CSST. Alors, si M. Rivard n'est pas concerné...

Mme Harel: Concerné...

Mme Gagnon-Tremblay: ...par ces dossiers, bien sûr que...

Mme Harel: Il l'apprécie, parce qu'il a à faire la garde de ses enfants ce soir.

Mme Gagnon-Tremblay: Bon, ça me fait plaisir, et joyeuses Pâques, M. Rivard!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Gagnon-Tremblay: Voilà une ministre compréhensive, qui fait passer la famille avant bien d'autres... Même, Mme la ministre, si vous me l'aviez dit, j'aurais probablement continué à 18 heures, quelques minutes, pour libérer M. Rivard.

Mme Harel: Je viens juste de l'apprendre.

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, peut-être qu'on pourrait aborder la Régie du bâtiment puis la Commission de la construction. Ça peut peut-être se chevaucher, mais, entre autres, c'est au niveau de la Régie du bâtiment.

(Consultation)

Mme Harel: M. le Président, je ne voudrais surtout pas avoir l'air d'insister, mais j'aimerais peut-être savoir si les membres de la commission ont l'intention – ce qui serait tout à fait leur droit – de le faire, à savoir de questionner Mme la présidente de l'IRIR, l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération.

Mme Gagnon-Tremblay: Cet après-midi, j'avais fait mention, Mme la ministre, que je n'aurais pas de question à ce sujet-là.

Mme Harel: Très bien. Alors, je vous en remercie.

Mme Gagnon-Tremblay: Malheureusement, je pensais que ça avait été compris, puisque je l'avais mentionné au tout début pour ne pas que ces personnes soient obligées de demeurer en poste.

(Consultation)


Régie du bâtiment du Québec (RBQ)


Activités d'inspection de bâtiments

Mme Gagnon-Tremblay: Première question, M. le Président, concernant la Régie du bâtiment. On se souviendra que, à cause des compressions, on avait cessé l'inspection des bâtiments, par exemple, dans les hôpitaux, au niveau des hôpitaux et des écoles. Je sais que, actuellement, on est obligé encore de faire d'autres compressions. Il s'agit aussi de sécurité au niveau de la population; c'est important aussi que l'on puisse s'assurer d'une sécurité au niveau de ces bâtiments. Est-ce que la Régie a repris ou reprendra-t-elle ses activités d'inspection pour assurer la sécurité au public?

Mme Harel: Je vais inviter M. Riendeau à répondre à votre question. Peut-être également à celles que vous posiez cet après-midi sur la tarification.

Le Président (M. Tremblay): M. Riendeau.

M. Riendeau (Jean-Claude): M. le Président, merci. Mme la ministre. Dans ce dossier d'importance au niveau de la sécurité, il est évident que la Régie du bâtiment a, au cours des cinq dernières années, fait un travail d'importance dans les institutions dont il est question, que ce soient les hôpitaux et autres institutions d'ordre public qui reçoivent en masse des publics. Nous avons fait les inspections d'usage et nous avons fait les recommandations qui s'imposaient de manière à permettre à ces institutions-là, à même leur budget, de prévoir, selon leurs priorités, bien sûr, et selon les moyens dont elles disposent, les correctifs que nous suggérions.

Nous avons à reprendre ce travail-là, parce que, effectivement, dans le plan d'action annuel établi pour les inspections dans ce type d'installation, compte tenu de l'affluence et de l'importance que ces institutions-là ont envers le public, il est important de revenir auprès d'elles et d'insister à nouveau sur les mesures de sécurité. C'est ainsi qu'en 1995-1996 nous reprendrons ce cycle et nous assurerons, bien sûr, une surveillance plus adéquate.


Tarification des services

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Comme la ministre me le rappelait, j'ai parlé de tarification cet après-midi. Est-ce que, au niveau de la Régie du bâtiment, vous avez des projets de tarification dans quelque domaine que ce soit?

M. Riendeau (Jean-Claude): Oui, en effet. Outre les ajustements annuels dus à l'augmentation des taux d'indexation, qui, heureusement, pour tout consommateur et pour tout administrateur, sont, jusqu'à ce stade-ci, très bas, de l'ordre de 0,02 %, compte tenu de notre norme réglementaire, nous avons quelques ajustements mineurs à faire à ce niveau-là. Toutefois, là où nous allons faire une percée quand même significative, elle se situe, cette intervention, dans l'objectif double d'assurer d'abord l'équité en termes de cotiseurs, entre guillemets, à la sécurité dans le domaine du bâtiment, sachant très bien que depuis nombre d'années il y a dans le milieu une iniquité qui existe.

La Régie du bâtiment, au cours du printemps dernier, a adopté une approche qui ferait en sorte que, sur une base de deux ans, nous en arriverions à établir cette équité entre les secteurs, dans le domaine du bâtiment, que ce soit dans les secteurs électrique, de plomberie, du gaz, des édifices publics, autrement dit, tous les secteurs qui nous concernent.

Nous avons observé, à l'analyse de nos budgets, qu'il existe, malheureusement, de l'interfinancement entre les secteurs et que, d'une façon générale, les services que nous rendons n'étaient pas, à ce jour, répartis sur une base équitable. Des secteurs reçoivent des services de la Régie du bâtiment et ne paient pas nécessairement leur quote-part, alors que d'autres secteurs contribuent à notre effort dans le domaine de la sécurité et ne reçoivent pas pour autant des services dans le domaine, notamment, de l'inspection.

Alors, nous avons proposé, pour le prochain exercice financier, d'ajuster notamment quatre secteurs de manière à ce qu'au cours de l'exercice 1996-1997 nous puissions en arriver à soulager, entre guillemets, les secteurs qui contribuent trop en rapport avec les services qu'on leur rend.

Les quatre secteurs qui font l'objet d'un ajustement pour l'année 1995-1996 sont les suivants: Dans le domaine de la tuyauterie, alors que ce secteur-là s'autofinançait à 80 %, nous allons augmenter la contribution de ce secteur-là à 100 %, en augmentant donc les revenus de 2 100 000 $ à 2 600 000 $.

Dans le deuxième secteur, concernant les appareils sous pression, ce secteur-là, jusqu'à maintenant, finançait les services que nous leur donnions, de l'ordre de 44 %; nous allons ajuster leur effort à 87 %, faisant ainsi passer leur contribution de 1 400 000 $ à 2 600 000 $ pour l'année 1995-1996.

Le troisième secteur concerne les jeux mécaniques et les remontées mécaniques. Alors que ce secteur reçoit des services publics un ensemble de vérifications et qu'il ne contribue aucunement, nous allons augmenter ce secteur-là de l'ordre de 77 %, faisant contribuer ainsi ce secteur pour un montant de 235 000 $ pour l'année 1995-1996.

Dans le domaine du gaz, nous avons ajusté leur tarification. Il s'agit, dans ce cas-là, d'une première diminution qui concernera ce secteur-là au niveau de la tarification pour les détaillants qui vendent des bonbonnes de gaz. Et le taux va passer de 136 $ à 40 $ l'unité.

Évidemment, dans le domaine des autorisations préalables, nous allons également ajuster, pour 1995-1996, le montant de 33 $ par autorisation préalable d'un montant de 8,10 $ par appareil pour nous permettre, dans cette première étape d'une série de deux années, de faire en sorte que l'interfinancement – et c'est là le deuxième objectif que nous visons – soit éliminé le plus possible, de manière à ce que les services que nous fournissons, notamment dans le domaine de l'électricité, bien, soient vraiment rendus sous le principe utilisateur-payeur. Et c'est ça qui nous guide dans le domaine de la tarification. Selon les consultations que nous avons conduites jusqu'à maintenant, les projets de règlement qui seront publiés prochainement ont tout lieu d'être bien reçus par le milieu.

(19 h 10)

Mme Gagnon-Tremblay: Donc, si je comprends bien, dans certains cas, il y a ajustement à la hausse, dans d'autres, ajustement à la baisse.

M. Riendeau (Jean-Claude): Oui, et nous prévoyons, bien sûr, un meilleur ajustement pour l'année 1996-1997. Il s'agit, chez nous, de nous repositionner de manière à pouvoir faire en sorte qu'on soit équitable secteur par secteur.

Mme Gagnon-Tremblay: Ce sont les seules tarifications, là, que vous prévoyez pour 1995-1996.

M. Riendeau (Jean-Claude): Exactement, ce sont les seules.


Application de la Loi sur le bâtiment

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Concernant la Loi sur le bâtiment, où en êtes-vous rendu dans son implantation, dans son application?

M. Riendeau (Jean-Claude): Alors, il me fait plaisir de faire un petit bilan du travail qui a été concerté à l'intérieur de la Régie du bâtiment au cours des derniers mois et de vous dire la volonté qui a été imprimée au printemps dernier de faire en sorte que nous relancions, finalement, les grandes qualités de la Loi sur le bâtiment et que nous procédions à ce que l'on appelle la réforme en mettant en application la Loi sur le bâtiment. Nous avons passé les six premiers mois de l'année 1994 à tenter de mettre en application l'ensemble des règlements qui étaient proposés dans cette Loi sur le bâtiment, et nous sommes rapidement arrivés à la conclusion que, si nous voulions bouger rapidement dans certains secteurs où d'énormes irritants étaient signalés depuis longtemps, il fallait agir rapidement et ne pas attendre de mettre en forme toute la Loi sur le bâtiment telle qu'elle a été conçue.

C'est ainsi que nous avons révisé notre approche pour avoir plutôt une approche par secteur, de manière à pouvoir libérer rapidement les intervenants qui, malheureusement, subissent des irritants d'ordre administratif. Et cette façon de faire, pour nous, déjà, reçoit un aval très positif du milieu et nous permettra quand même d'atteindre l'objectif, la cible qui a été fixée pour avril 1996 à l'effet que les qualités et les avantages que nous prévoit la Loi sur le bâtiment soient mis en vigueur.

Nous avons réalisé au cours de la dernière année un travail d'importance sur un produit également d'importance qui s'appelle le plan de garantie dans le résidentiel neuf. Nous avons convenu récemment, au conseil d'administration, de proposer à la ministre de l'Emploi un produit portant sur les garanties dans le résidentiel neuf et nous sommes en discussion, au moment où nous nous parlons, avec Mme la ministre de l'Emploi de manière à, bien sûr, s'assurer que cela correspond toujours aux volontés qui sont exprimées de faire en sorte que, dans un premier temps, nous puissions assurer au consommateur une meilleure protection de ses investissements et, dans un deuxième temps, que nous puissions responsabiliser les bons entrepreneurs dans le domaine de la construction des résidences neuves au Québec.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le président, est-ce que je me trompe en disant que la Loi sur le bâtiment a été adoptée il y a deux ans, je pense?

M. Riendeau (Jean-Claude): C'est exact. La Régie a été implantée le 1er février 1992 et elle a tenté, au cours de ces années-là, d'abord, de vivre la fusion, puisqu'elle – cette organisation-là, toute jeune – est née de la fusion de la Régie des entreprises de construction du Québec et du ministère du Travail, dans ses parties Direction générale de l'inspection et de la normalisation, alors que les efforts ont été concentrés, dans un premier temps, à faire en sorte que, sur le plan des crédits budgétaires, nous en arrivions à un effort concerté pour autofinancer cette entreprise qui, à ce moment, n'était financée que de l'ordre de 74 %.

Au moment où nous nous parlons, la Régie du bâtiment est fière d'annoncer qu'elle autofinance ses activités, de l'ordre de 98 %, et les efforts ont tous été concentrés dans ce sens-là, dans un premier temps. Dans un deuxième temps, de développer, bien sûr, ce sentiment d'appartenance à cette nouvelle entreprise, nouvellement fusionnée, qui prenait la relève de deux et qui incluait, bien sûr, des responsabilités majeures. Et, dans ce sens-là, évidemment, ce qui nous a guidés, c'est d'abord et avant tout la rationalisation au niveau de nos actions: faire plus avec moins, mais surtout chercher à faire différemment et, dans un deuxième temps, de s'assurer que le nombre de ressources qui demeuraient encore comme effectifs à la Régie du bâtiment puissent travailler en «partnership» avec le milieu. Et c'est là que nous avons concentré nos efforts, au cours de la dernière année, pour développer ce que nous appelons des alliances stratégiques avec le milieu.

Et, au moment où nous nous parlons, nous avons déjà signé une entente avec la CMEQ, la Corporation des maîtres électriciens. Et nous avons également, récemment, le 29 mars dernier, conclu une entente d'alliance stratégique avec notre collègue et homologue, la Commission de la construction du Québec, de manière à favoriser, bien sûr, le rapprochement de nos équipes respectives afin qu'elles travaillent en complémentarité, qu'elles évitent les dédoublements et qu'elles fassent en sorte que le client qui, lui, fait face, bien sûr, dans le domaine de la construction, à une série d'inspections et à une série d'interventions gouvernementales, puisse y trouver son compte.

Mme Gagnon-Tremblay: Je pense que l'harmonisation entre la Régie du bâtiment et la Commission de la construction, je pense que ça s'imposait. On en a parlé longuement lorsqu'on a débattu le projet de loi 46. On avait parlé, jusqu'à un certain point, peut-être même de fusion de certaines directions. Comme je le disais à la ministre cet après-midi, je pense que pour être capable de s'occuper vraiment des véritables préoccupations du travailleur et des employeurs, je pense que c'est important, à un moment donné, qu'on fasse fi, peut-être, de tout ce qui existe et peut-être rebâtir un système qui va répondre vraiment, véritablement à ces préoccupations sans toujours avoir à se soucier – c'est-à-dire, je ne dis pas les mettre de côté – à travailler toujours sous la pression des corporations patronales ou, encore, des corporations syndicales.

Alors, je souhaite, bien sûr, que la Régie du bâtiment travaille de plus en plus avec la Commission et que la ministre, à un moment donné, puisse mandater quelqu'un pour peut-être même continuer à voir à l'harmonisation, peut-être même, je ne sais pas, à la fusion des deux organismes. Là, je sais que vous venez de terminer certains bouleversements, certains changements, et je ne veux pas, bien sûr, vous blâmer, mais, à la vitesse qu'on a prise pour... c'est-à-dire, je ne sais pas si je peux parler de vitesse, mais, à la lenteur qu'on a prise pour être capable d'implanter et d'appliquer la loi, il ne faudrait pas faire beaucoup, beaucoup de changements, en tout cas au cours des prochains mois, je pense bien.


Plan de garantie des maisons neuves

Mais je voudrais revenir aussi sur la question du plan de garantie, le plan de garantie obligatoire. Là aussi, on en avait discuté longuement en commission parlementaire, et vous vous souviendrez qu'on avait même blâmé la Régie du bâtiment de ne pas avoir mis encore en vigueur ce fameux plan de garantie qui était prévu pour avril 1994.

Vous nous dites que le conseil d'administration s'est penché... a adopté, finalement, un plan de garantie obligatoire et que résolution a été acheminée à la ministre. Est-ce qu'il serait possible, Mme la ministre, d'avoir la copie de la résolution de la Régie du bâtiment autorisant ou adoptant, par le conseil d'administration, le plan de garantie obligatoire?

Mme Harel: Alors, M. le Président, évidemment, oui, à la question que vient de poser Mme la députée de Saint-François. Je demanderai à M. Riendeau de faire parvenir copie du procès-verbal, une fois, évidemment, adopté par le conseil. Je ne sais pas si ça a déjà été fait.

M. Riendeau (Jean-Claude): Oui.

Mme Harel: Ça a même été fait. Alors, il pourra la faire parvenir immédiatement au Secrétariat de la commission, pour le bénéfice de tous les membres de la commission.

J'aimerais ajouter ceci, M. le Président, aux propos que vient de tenir M. Riendeau, à savoir que, compte tenu de l'excellente performance affichée par la Régie du bâtiment, le ministère des Finances a même accepté de faire une entorse au principe qu'il avait énoncé, à savoir que les organismes publics pourraient se voir reconnaître 50 % des revenus additionnels qu'ils allaient générer comme équivalents à des mesures de réduction de dépenses.

(19 h 20)

Donc, dans la mesure où les organismes, au ministère, généraient des revenus additionnels, ils pouvaient s'en voir attribuer 50 %. Et, dans le cas exceptionnel de la Régie du bâtiment, il a été possible d'obtenir du ministère des Finances de hausser à 75 % ces revenus additionnels que la Régie du bâtiment peut garder comme équivalents, en fait, à des réductions de dépenses qui sont assez uniformément imposées à tous les autres.

Je dois reconnaître que la Régie du bâtiment avait fait un effort exceptionnel de rationalisation durant les années antérieures, là, immédiates. Quand on pense que, de 1992-1993 à 1995-1996, le budget de la Régie du bâtiment est passé de 37 000 000 $ à 31 700 000 $, alors, vous voyez, pas tout à fait mais pas loin, là, de 5 200 000 $. Et c'étaient des compressions majeures d'effectifs, également, 116 effectifs, puisque, actuellement, la Régie a un total de 627 permanents. En fait, le ETC, c'est «emploi temps complet», là, les fameux ETC, 627 comparativement à 743 en 1992-1993. Alors, il y a donc eu un effort de rationalisation très important, que cet effort se soit accompagné, également, de l'élaboration d'un plan de garantie des maisons neuves, ce qui, vraiment, là, fait valoir le travail soutenu qui a été exigé de la Régie.

Ce plan de garantie a également été communiqué, une fois adopté par le conseil d'administration, au comité consultatif, n'est-ce pas, de 21 personnes... Excusez-moi, 17 personnes, sur lequel comité consultatif, en vertu de la loi, siègent également des représentants des consommateurs. Un consensus semble s'être dégagé au sein de ce groupe diversifié. J'ai reçu trop récemment le projet de plan de garantie pour vous en parler ce soir, mais M. Riendeau me confirme qu'il a quand même été transmis – avec mon appui d'ailleurs – au Secrétariat à la déréglementation pour bien s'assurer qu'il s'agit là d'un plan de garantie qui va réglementer un secteur, mais à la satisfaction des consommateurs, en demande, d'ailleurs, de leur part.

Alors, c'est un peu la situation dans laquelle on se retrouve. Et qu'une phase ultérieure vienne compléter, là, le cheminement que la Régie et la Commission de la construction ont débuté récemment, je pense qu'on ne peut pas le présumer à ce stade-ci.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce qu'on peut me donner une idée de ce que ça couvre? Qu'est-ce que ça va couvrir, le plan de garantie, et les coûts du plan de garantie? Est-ce qu'on a une idée à ce moment-ci?

Mme Harel: C'est que, Mme la députée de Saint-François, je ne l'ai reçu qu'au même moment où je recevais nos crédits. Alors, j'ai pensé, en priorité, étudier nos nombreux cahiers, et je remettais le plan de garantie à après le congé pascal.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci.

Mme Harel: Et pas pendant.

Mme Gagnon-Tremblay: Mme la ministre, est-ce que le président peut nous faire part du contenu du plan de garantie?

M. Riendeau (Jean-Claude): Je préférerais, M. le Président, si vous me permettez, respecter celle à qui je dois livrer le produit. Déjà, elle m'a annoncé une série de bonnes questions auxquelles j'aurai à répondre prochainement. Alors, je préférerais d'abord m'en remettre à ce que Mme la ministre vient de signaler.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que, Mme la ministre, vous pouvez m'indiquer pourquoi... On vote des crédits de 31 000 000 $ environ, au niveau de la Régie du bâtiment; cependant, vous nous avez fait part qu'il y avait d'autres revenus. Donc, pourquoi on vote 31 000 000 $? C'est quoi, les vrais chiffres, les chiffres dans les livres de la Régie du bâtiment? Pourquoi on ne vote pas le total? On vote 31 000 000 $, et il semble y avoir d'autres revenus qui proviennent d'ailleurs.

Mme Harel: Je m'excuse, Mme la députée de Saint-François, le chiffre de 31 621 500 $ est bien celui qui fait état des crédits alloués à la Régie du bâtiment pour l'année 1995-1996. Ce dont je vous parlais tantôt, c'est à l'intérieur de ce montant de 31 621 500 $. La façon de le financer vient en grande partie, là, comme le signalait M. Riendeau, d'un autofinancement à 98 % et vient aussi, donc, du fait de revenus additionnels qui sont générés par les nouvelles tarifications dont il vous a parlé et pour lesquelles la Régie pourra conserver 75 %, et n'aura pas à livrer les mesures de réduction de dépenses qui lui avaient été demandées par le Trésor.

Mme Gagnon-Tremblay: Donc, 98 % déjà prévus, plus le 2 % de nouvelle tarification, c'est déjà compris dans le total de 31 000 000 $?

M. Riendeau (Jean-Claude): Si vous me permettez, M. le Président, avec la permission de Mme la ministre, je comprends et je reçois très bien votre question, dans le sens où il peut régner une petite confusion à l'effet que la Régie du bâtiment est un organisme budgétaire qui a une approche d'autofinancement, c'est-à-dire que ses services, bien sûr, pour lesquels elle accorde des rendements, là, auprès de ses contribuables, reçoivent une contribution, mais qui va au fonds consolidé.

C'est ainsi que, nous, on discute à la fois des deux colonnes, à la Régie du bâtiment, que ce soient les dépenses et les revenus. Ici, vous avez le budget des dépenses, qui correspond à un budget de revenus, mais qui passe par une autre voie que vous connaissez.


Lutte au travail au noir

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Lorsque je parlais d'harmonisation tout à l'heure, un secteur, je pense, où la Régie du bâtiment doit s'harmoniser avec la Commission de la construction, c'est pour contrer le travail au noir. On sait, par exemple, que les inspecteurs de la Régie du bâtiment, qui circulent sur les chantiers pour s'assurer, bien sûr, du respect de la réglementation, vous avez également des inspecteurs de la Commission des normes qui, bon, s'efforcent aussi de voir à ce qu'il n'y ait pas de travail au noir.

Actuellement, on a quand même dans plusieurs dossiers – je pense, entre autres, au Centre des congrès de Québec, où la ministre a réagi très vivement et très rapidement, et on s'est rendu compte que même à l'intérieur d'un projet payé par le gouvernement, et aussi là où la SIQ a un rôle important à jouer, on a de la difficulté à contrer le travail au noir. Imaginez-vous, avec nos propres organismes, on a même de la difficulté à contrer le travail au noir!

Compte tenu, je sais, du travail qui est effectué entre les deux organismes pour trouver des solutions pour non seulement contrer le travail au noir, mais aussi essayer de poursuivre de la meilleure façon possible le travail des deux ensemble, où en sommes-nous rendus avec l'entente signée entre les organismes? Je sais que M. Ménard en avait parlé longuement aussi, en commission parlementaire. Est-ce qu'on a pensé faire jouer un rôle aux inspecteurs de la Régie du bâtiment pour, en même temps, s'occuper du travail au noir?

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, je vais laisser M. Ménard et M. Riendeau répondre précisément à la question de l'inspection. Comme vous avez soulevé le dossier, là, du Centre des congrès, qui est quasi voisin du Parlement, je vais en profiter pour vous signaler que c'est depuis le 11... non, excusez-moi, le 16 janvier dernier, au moment même où nous siégions dans cette salle pour examiner le projet de loi 46, que les inspecteurs de la Commission de la construction du Québec commençaient les visites de chantier du Centre des congrès. Il y a eu un total de 60 visites de chantier et 54 rapports de visite de chantier rédigés. Je le dis parce que je crois qu'il vaut la peine de féliciter la Commission de la construction du Québec pour le travail qui s'est fait sur ce chantier.

(19 h 30)

Et je vous rappelle qu'au moment même où nous siégions, en janvier passé, tard le soir, nous entendions, souvent en infraction à la loi, des bruits des travaux qui s'effectuaient juste à côté. Alors, c'était quand même rendu grave, là, que, de façon impunie, on puisse ainsi braver les dispositions de la loi et des règlements presque à côté du Parlement. Alors, je pense que ça prend valeur de symbole.

Je l'ai dit à M. Ménard et je le dis à mes collègues également: Ça prend valeur de symbole, ce chantier du Centre des congrès. Le travail des inspecteurs a permis d'élaborer une preuve qui va amener la Commission de la construction du Québec à intenter des réclamations civiles, également à transmettre au ministère de la Justice, dans quatre cas précis, un dossier pour poursuites pénales. Alors, je crois qu'il n'est pas juste important de sévir par après, comme vous le mentionniez au moment où on faisait l'examen de la 46, mais il est important aussi de prévenir. C'est à cette fin-là que nous avons instamment exhorté la Société immobilière du Québec à installer une guérite, une barrière, pour contrôler les heures d'entrée et les heures de sortie sur le chantier. Alors, je sais qu'une dernière rencontre doit avoir lieu entre le nouveau président de la SIQ, M. Vézina, et M. Ménard mardi après-midi prochain, à 15 heures 30, mais nous entendons obtenir une réponse favorable à la demande que nous avons transmise. Sur ce, M. Ménard a sûrement un complément d'information sur l'inspection à vous apporter, en précisant cependant que la Régie du bâtiment n'a juridiction que pour les entreprises sans licence. Mais, souvent, le travail au noir est effectué par des entreprises avec licence. M. Ménard.

M. Ménard (André): M. le Président, Mme la ministre, je dois vous dire que la Commission de la construction, depuis novembre, a entrepris des projets-pilotes dans différentes régions du Québec, et, finalement, ça s'est soldé par de nombreuses infractions, de nombreuses réclamations civiles, également des poursuites pénales, comme le disait Mme la ministre. La Commission a entrepris des projets-pilotes en matière d'inspection depuis la mi-janvier. On en a fait dans différentes régions du Québec, telles que Montérégie, Québec, Montréal. Je devrais dire, en plus, que nous avons, si vous voulez, augmenté nos effectifs d'inspection de 43 %. C'est des réaffectations de personnes, des gens qui travaillaient à l'interne ou qui faisaient des travaux de perception de rapports mensuels que nous avons affectées à l'inspection de chantiers. Ce qui veut dire qu'actuellement nous avons 65 personnes qui font de l'inspection de chantiers.

Je pense que la lutte au travail au noir constitue pour la Commission une de ses priorités, et les résultats à cet effet, bien, sont éloquents, parce qu'on constate qu'il y a un bon pourcentage d'heures... Autour de 25 % d'heures sont travaillées au noir dans l'industrie, et, ça, c'est à partir de corrélations entre les rapports, ce qui a été vu sur les chantiers, et le rapport mensuel à la Commission que l'entrepreneur doit nous transmettre chaque mois. En plus de ça, comme le disait mon collègue, M. Riendeau, nous avons accentué nos échanges d'information au niveau d'entreprises qui déclarent faillite puis, par la suite, vont se chercher une autre licence à la Régie du bâtiment. Nous sommes en train actuellement... Nous avons déjà un protocole de signé et toute une série de mesures sont en élaboration.

Et, peut-être pour faire sourire, ça, c'est le recueil des actions initiées en ce qui concerne le travail au noir dans l'industrie de la construction, et il y en a avec tous les organismes au Québec. J'ai rencontré plusieurs organismes, tels que Hydro-Québec, je ne les nommerai pas tous, Travaux publics Canada, etc., et ça constitue pour nous une priorité, la priorité. Peut-être une autre chose également. Il y a toute la question de la suspension des travaux, suite au projet de loi 46. Je dois présenter, je présenterai au conseil d'administration, le 26 avril, toute la méthode opérationnelle, tout ce qui va... bon, finalement, comment ça va se dérouler. Par la suite, je fais la formation, et je pense que, comme la ministre l'annonçait, je pense, dans une entrevue, elle parlait du mois de juin, au niveau de sa mise en application.

Il y a aussi tout l'aspect de l'interrelation avec les autres organismes, le ministère du Revenu, Hydro-Québec, la Société immobilière.

Mme Gagnon-Tremblay: Je disais, à juste titre, que les inspecteurs de la Régie du bâtiment n'interviennent pas nécessairement partout, là, à l'exception des... là où il y a des entrepreneurs qui n'ont pas de licence. C'est ça? Est-ce que, à ce moment-là, là où il y a des licences, il y a une entente entre la Commission et la Régie du bâtiment...

M. Ménard (André): Oui...

Mme Gagnon-Tremblay: ...pour dénoncer? Pour que les inspecteurs de la Régie du bâtiment dénoncent, au même titre que les inspecteurs de la Commission, le travail au noir?

M. Ménard (André): Oui, M. le Président, effectivement, il y a un protocole à cet effet-là. Actuellement, ce que la Commission fait, c'est que, nous, on demande aux entreprises, lorsqu'on va sur un chantier et qu'on fait la vérification pour les certificats de compétence, les dispositions prévues aux décrets, on demande également la licence, on vérifie la licence de l'entrepreneur et, par la suite, le rapport est transmis à la Régie du bâtiment. Une poursuite peut être entreprise et notre inspecteur va témoigner au moment de la... C'est là la complémentarité lorsqu'on parle du service d'inspection. Nous avons également inventorié toute une autre série de mesures, en termes de complémentarité. Je dois vous dire que ce n'est pas uniquement avec la Régie du bâtiment. On l'a fait également avec d'autres organismes, par exemple avec la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Il y a déjà des discussions qui ont été amorcées à cet effet-là.

Mme Gagnon-Tremblay: Je pense que vous avez demandé aussi une compensation à la Régie du bâtiment pour... Est-ce que ça a été... Est-ce qu'on a demandé une compensation? On a demandé de compenser pour les inspections que vous...

M. Ménard (André): M. le Président, effectivement, disons que, depuis 1981-1982, je pense, qu'on fait effectivement de l'inspection, il y a un dossier à cet effet-là qui a été présenté, à la demande du conseil d'administration de la Commission. Nous avons inventorié finalement les différentes infractions que nous avions constatées. Depuis, nous avons fait l'évaluation des coûts. Il y a effectivement un dossier présentement en cours.

Mme Gagnon-Tremblay: Tout à l'heure, vous nous avez fait part des actions de la Commission. Pour mieux apprécier, justement, les actions ou les gestes que vous avez l'intention de poser pour contrer le travail au noir, est-ce qu'il y a possibilité d'avoir copie de ces documents? Est-ce que Mme la ministre accepterait qu'on puisse avoir copie de ce volumineux plan?

(Consultation)

Mme Harel: Alors, M. le Président, il y a un document qui m'a été remis, qui s'intitule «Actions initiées par la Commission de la construction du Québec afin d'enrayer le travail au noir dans l'industrie de la construction», et c'est daté d'avril 1995, pour les fins de nos travaux. C'est un document qui fait la synthèse de ce qui a été entrepris. Ça a été envoyé aux membres du conseil d'administration de la CCQ. Alors, comme ils ont déjà copie de ça, je crois qu'il pourrait être possible, certainement, que nous le fassions parvenir au Secrétariat également. Je vais charger M. Ménard qu'il le...

Mme Gagnon-Tremblay: Je vais me contenter du résumé, Mme la ministre.

Mme Harel: ...fasse. Je dois vous dire que c'est le résumé que j'ai, moi.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui.

Mme Harel: Je n'ai pas, finalement, cherché à obtenir...

Mme Gagnon-Tremblay: Je vous comprends.

Mme Harel: ...le dossier au complet parce que je crois que le résumé...

Mme Gagnon-Tremblay: Je vous comprends.

Mme Harel: ...me satisfait.


Ententes avec les municipalités

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Alors, j'ai une dernière question concernant le président de la Régie du bâtiment. C'est les ententes avec les municipalités. On se souviendra que, lorsqu'on avait également étudié le projet de loi 46, on avait même prévu, à un moment donné, que les permis de construction pourraient être octroyés à des entrepreneurs qui ont leur licence, mais aussi que les contrôles pourraient se faire par les municipalités.

(19 h 40)

Est-ce que la ministre peut me dire si, finalement, son collègue des Affaires municipales a donné suite, a réussi à convaincre les municipalités, à la Table Québec-municipalités, du fondement de cet article qui était dans le projet de loi qui a été adopté? Et est-ce que, finalement, on prend les moyens nécessaires pour mettre en vigueur cet article?

Mme Harel: Bien, je vous remercie de votre question, Mme la députée de Saint-François. Il y a eu effectivement un comité de travail, suite à l'adoption de la loi 46, chargé de préparer la réglementation sur l'article 51 de la loi 46. Ce comité, sur lequel siège un représentant du ministère des Affaires municipales, a préparé un règlement sur les informations requises aux fins d'obtenir un permis de construction d'une maison unifamiliale neuve. Il s'agit d'un règlement qui modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et qui est à l'examen du ministère des Affaires municipales présentement. Je crois comprendre que mon collègue, le ministre des Affaires municipales, compte en saisir la Table Québec-municipalités le 5 mai prochain.


Lutte au travail au noir (suite)

Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Merci. Je voudrais juste revenir peut-être à un article qu'on retrouvait également dans le projet de loi 46 et qui concernait la suspension des travaux. Vous vous souviendrez qu'en cas, à un moment donné, de délit ou si, par exemple, on se rendait compte qu'il y avait du travail au noir, on pouvait faire suspendre les travaux, arrêter les travaux. Je ne me souviens pas si cet article... Il me semble que cet article devait être promulgué, mais par décret, possiblement en juin. Est-ce que c'est exact? Ma mémoire est fidèle? Remarquez qu'on a étudié beaucoup d'articles, dans ce projet de loi. Est-ce qu'on a l'intention... Compte tenu, justement, des infractions qu'on connaît, je pense qu'il serait urgent que cet article soit promulgué le plus rapidement possible pour montrer, au moins, que la loi avait des dents. Dans ce sens-là, est-ce que vous comptez promulguer par décret cet article le plus rapidement possible?

Mme Harel: Vous vous rappelez sûrement que l'objectif annoncé d'une telle disposition est à l'effet d'empêcher la récidive. Parce que c'est dans les cas répétés, finalement, d'infractions qu'il y a lieu de suspendre les travaux pour obliger l'entreprise à régulariser la situation.

C'est d'ailleurs beaucoup réclamé présentement, notamment à l'occasion du travail au noir identifié au chantier du Centre des congrès. Ça suppose la publication d'une réglementation pour la mise en vigueur de la disposition. Vous vous rappelez qu'on avait annoncé qu'en juillet, vraisemblablement, ça pourrait donc être prêt pour être en vigueur... prépublié, plutôt, excusez-moi. D'autant plus que la convention collective des employés de la Commission de la construction est à l'état de renouvellement et devrait être signée d'ici juin prochain, je crois. Excusez-moi, elle se termine en juin. Nous tenions compte aussi de l'état de la situation interne avant qu'une telle mesure puisse être mise en vigueur et, donc... pour, d'une certaine façon, la mettre à l'abri de la tentation de l'utiliser à d'autres fins qu'à celles pour lesquelles la loi la prévoit.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci.

Mme Harel: Cependant, compte tenu des événements puis de l'accélération, le président de la Commission de la construction du Québec me faisait part, la semaine passée, qu'il entendait déposer au conseil d'administration de la CCQ, le 26 avril, tout le dispositif réglementaire qui, par la suite, pourrait immédiatement faire l'objet – c'est ça – d'une prépublication. Au pire, on va être dans le calendrier prévu, puis, au mieux, on va le devancer. C'est bien ça?


Commission de la construction du Québec (CCQ)


Conseil d'administration

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Alors, M. le Président, je n'ai plus d'autre question concernant la Régie du bâtiment. Donc, on peut libérer M. Riendeau, que je remercie.

J'ai encore quelques questions, M. Ménard. On a eu l'occasion de vous questionner longuement. Alors, ça va quand même être relativement court parce qu'on a... Je pense que vous nous avez donné passablement d'information lorsqu'on a étudié le projet de loi 46. Je voudrais tout simplement... Vous deviez, naturellement, faire des nominations au conseil d'administration. Est-ce qu'elles ont été faites? Et qui siège maintenant au conseil d'administration?

(Consultation)

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, nous voulons simplement bien nous assurer d'avoir à jour l'information, parce qu'il me semble avoir signé un décret à cet effet. Alors, peut-être même est-il déjà adopté, mais je préférerais m'en assurer avant de le confirmer. Simplement, si ça n'était pas le cas, je dois vous dire qu'il n'y aurait aucun empêchement à ce que ça le devienne rapidement, parce qu'il est peut-être resté en plan dans l'une ou l'autre des officines du gouvernement. Mais je comprends que notre intention est de... non seulement de respecter la disposition qui prévoit l'ajout de deux sièges au conseil d'administration pour assurer la représentation, du côté patronal, de l'Association de la construction du Québec, puis, du côté du syndical, une représentation accrue pour que l'équilibre des sièges demeure, de l'international. Alors, je pense que c'est peut-être même déjà complété; en tout cas, c'est lancé, c'est certain.


État des négociations sectorielles

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous avez une idée de l'état de la situation des négociations, finalement, actuellement, suite à l'adoption du projet de loi 46? Ce que j'en sais, c'est que, au niveau patronal, on semble être de plus en plus divisé...

Mme Harel: Divisé?

Mme Gagnon-Tremblay: Divisé, et c'est ce qu'on craignait un peu, finalement, lorsqu'on a adopté le projet de loi 46. Donc, on semble être un peu plus... on semble être divisé de plus en plus, et je me demandais: Est-ce que vous avez une idée de l'état de cette négociation, parce que, finalement... Vous vous souviendrez également que, lorsqu'on avait adopté ce projet de loi, on souhaitait que la négociation se fasse le plus rapidement possible. Et, là, compte tenu de ce que j'en sais... Remarquez, je n'ai peut-être pas l'information que vous avez, mais, compte tenu de ce que j'en sais, on peut s'attendre à des négociations assez difficiles et peut-être aussi assez longues. On me dit que, pour les syndicats, les demandes semblent être assez considérables, compte tenu du contexte économique actuel; par contre, bien sûr, du côté des associations patronales, les offres sont plutôt à la baisse. J'espère qu'on ne se dirige pas vers une confrontation encore une fois et que la ministre n'aura pas à revenir, finalement, avec un autre projet de loi. Je ne sais pas si vous pouvez me donner... Est-ce que vous pouvez me donner une idée de la situation actuelle?

(19 h 50)

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, nous sommes le 13 avril, donc, un jeudi 13, et les parties ont décidé de débuter aujourd'hui même la négociation dans la construction. Alors, c'est parti aujourd'hui. Je ne voudrais pas me prononcer sur les obstacles qu'elles auront à franchir de part et d'autre pour arriver à un règlement négocié. Cependant, je dois vous dire que c'est avec presque soulagement que j'ai compris qu'à l'Association des entrepreneurs en construction du Québec les parties représentatives avaient accepté d'adopter à la majorité un règlement qui permet, maintenant, de procéder dans le sens de la loi 46 et, donc, dans le sens des mandats de négociations qui sont sectorielles maintenant. Alors, il s'est dégagé une majorité qui a permis, donc, l'adoption de tous les règlements qui devaient découler de la loi, mais qui supposaient qu'il y ait une majorité dans l'industrie qui s'entende, du côté patronal aussi. Donc, cette étape-là est franchie. C'était, je pense, le premier test important.

Également, j'ai rencontré des représentants des deux corporations, les électriciens et les plombiers, qui se considèrent un peu comme les perdants dans l'opération, étant donné que les négociations sectorielles sont conduites par les associations d'entrepreneurs soit dans le résidentiel, soit dans les grands travaux ou dans l'industriel et le commercial par l'Association de la construction. Les corporations, avec raison, m'ont fait valoir que, étant exclues comme mandataires sur le plan des négociations, on devrait cependant leur reconnaître un statut de corporation qui n'amènerait pas la double qualification à laquelle on assiste présentement, parce que leurs membres doivent obligatoirement faire partie de leur corporation et, obligatoirement aussi, passer les examens de la Régie du bâtiment. Alors, elles voudraient se voir reconnaître le statut de corporation et, à cet effet-là, voir apparaître une cohérence dans l'action gouvernementale qui confie le mandat patronal à certaines associations sectorielles, mais qui réserve le statut de corporation avec tous les attributs que ça signifie, c'est-à-dire aussi de ne pas doubler les examens déjà requis. Alors, je sais... il a quitté, mais j'en ai parlé avec M. Riendeau, qui m'a dit être en voie d'opérationaliser cette façon, là, maintenant, de faire. Vous savez peut-être que la Régie du bâtiment, jusqu'à maintenant, imposait un autre examen à celui qui déjà était requis pour être membre d'une corporation.

Alors, je ne sais pas, je ne peux plus élaborer sur l'état des négociations. J'entends, de part et d'autre, évidemment des commentaires. Je voudrais que mes propos soient le plus prometteurs possible, mais ça fait partie des règles du jeu aussi d'anticiper que c'est juste l'autre qui ne veut pas régler.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je le souhaite également. Je sais que, quant aux deux corporations, on avait un peu prévu aussi certaines difficultés. Je pense qu'elles se sentent laissées pour compte actuellement. Je ne sais pas si on va pouvoir en arriver quand même à un règlement. Je sais qu'il y a sûrement certaines difficultés, mais on ne peut que souhaiter qu'on en arrive finalement à une convention négociée. J'espère que les parties vont s'entendre et vont être raisonnables dans le contexte économique actuel. S'il y a confrontation, je souhaite que la ministre, à ce moment-là, intervienne, mais intervienne de façon énergique, si jamais ça se produisait, compte tenu de tout ce qu'on a dit et de tout ce qu'on a prévu durant ces nombreuses heures à la commission parlementaire.

Une dernière question concernant la formation professionnelle. Je ne sais pas, est-ce que vous pouvez me donner une idée, vous savez, ce fameux fonds de formation professionnelle qui est toujours gelé compte tenu, là, de la procédure judiciaire de l'APCHQ? Est-ce qu'il y a un règlement en vue ou est-ce qu'on va pouvoir, une fois pour toutes, dégeler ce fameux fonds qui est tellement important, finalement, pour la formation professionnelle et qui ne sert actuellement à rien?

Mme Harel: On me fait valoir que le fonds en est maintenant à 18 000 000 $, que tout cela est gelé suite à une injonction obtenue par l'APCHQ, qui plaide non pas contre le principe d'un prélèvement de 0,20 $ l'heure, mais contre le fait que seulement l'AECQ, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, siège sur le comité de gestion du fonds, en l'absence de représentants des associations patronales sectorielles. Tout ça devrait, me dit-on, faire l'objet des tables de négociation. C'est, je crois, un problème assez complexe. J'ai demandé un avis juridique sur la question. Il serait, semble-t-il, difficile pour nous d'intervenir actuellement étant donné que c'est sous, si vous voulez, la juridiction d'un tribunal. Alors, j'espère comme vous que l'impasse va se dénouer à l'occasion des négociations, à défaut de quoi vous avez idée que ça va traîner devant les tribunaux pendant des années.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. M. le Président, je n'ai pas d'autre question concernant la commission des normes. Je remercie M. Ménard et tous les gens qui l'accompagnent. Vous pouvez...

Mme Harel: Vous avez gardé la CSST pour le dessert.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, pour le dessert. Ha, ha, ha!

(Consultation)


Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST)

Mme Harel: Je crois que vous avez déjà reçu les renseignements généraux pour l'étude des crédits.


Déjudiciarisation du régime

Mme Gagnon-Tremblay: Je dois vous dire, Mme la ministre, que j'ai énormément de questions. Quand même, on se réjouit des efforts faits par la CSST pour rétablir sa situation financière. On ne peut que s'en réjouir et féliciter les gens qui y ont participé. Bien sûr qu'il y a quelques points que je voudrais, entre autres, soulever parce que je trouve ça très important.

Vous vous souvenez qu'il y a eu, à un moment donné, un rapport qui avait été soumis, en mai 1994, concernant la déjudiciarisation du régime québécois de la santé et sécurité au travail. Donc, j'aimerais savoir, à partir du dépôt de ce rapport, est-ce qu'on a l'intention d'y donner suite? Et, si oui, qu'est-ce qu'il y a déjà de fait? Est-ce qu'on peut faire un peu un état de situation concernant la déjudiciarisation?

Mme Harel: Je vous remercie pour cette question. J'ai écrit à mon collègue, le ministre de la Justice, il y a déjà quelques semaines pour lui proposer, dans le cadre de la grande réforme des tribunaux administratifs qu'il veut entreprendre, de faire un pas en avant en commençant par le secteur que représentent, finalement, la santé et sécurité au travail et les appels en matière de lésions professionnelles.

J'ai compris qu'il acceptait de mettre en place un groupe de travail conjoint Justice-Emploi, sur lequel la CSST va être représentée, de façon à examiner si on peut, dans le cadre de la présente session, immédiatement, sans attendre pour autant le grand plan d'ensemble qui devra venir suite à ces consultations... Mais si on peut bouger immédiatement, ce qui supposerait qu'on puisse assez rapidement, pour le 11 mai prochain, déposer un projet de loi, à défaut de quoi on pourra toujours le déposer, mais ça supposera votre consentement pour qu'on puisse l'adopter avant la Saint-Jean.

Mme Gagnon-Tremblay: Mme la ministre, vous aurez sûrement mon appui.

Mme Harel: Le 25 avril, le comité de gestion... Je vais laisser M. Shedleur nous expliquer la séquence du calendrier qui est prévue en matière de déjudiciarisation.

(20 heures)

M. Shedleur (Pierre): Merci beaucoup, Mme la ministre, M. le Président. D'abord, suite à une demande de la ministre, on a réactivé le dossier. Nous allons avoir une rencontre le 25 avril prochain avec des membres du conseil d'administration et des gens extérieurs pour attacher, je dirais, les dernières ficelles, puisque vous savez qu'au mois de juin dernier on avait une résolution. On avait eu un consensus, avec une abstention, et on a voulu élargir à d'autres groupes, dont la CEQ, qui n'avait pas eu l'occasion de participer à ces débats-là, à la demande de la ministre Harel. Le 25, nous aurons cette rencontre-là avec les groupes patronaux, et l'objectif, c'est qu'à la fin de la rencontre on ait une recommandation finale pour le conseil d'administration qu'on pourrait remettre à la ministre. Et, déjà, la ministre nous a invités à la rencontrer avec les membres du comité d'administration, qui est notre conseil exécutif, c'est-à-dire M. Dufour et M. Godbout – probablement qu'ils sont accompagnés aussi de gens – pour faire le point avec la ministre, pour donner une orientation finale au dossier.

Mme Harel: Alors, nous avons prévu cette rencontre mercredi le 26 avril. Cependant, je vais tout de suite, là, m'expliquer sur un aspect du projet de la CSST concernant la déjudiciarisation qui, pour moi, pose difficulté, c'est celui de la présence des assesseurs patronaux et syndicaux auprès des commissaires chargés du dossier. Vous savez sans doute que cette question-là est très, très controversée auprès des experts en droit administratif. Cette présence d'assesseurs n'est pas nécessairement la garantie de la transparence, de l'impartialité et de l'indépendance, parce que ça amène souvent plus une dynamique de négociation d'un règlement que d'un jugement au mérite dans les dossiers. En fait, c'était la position, là, du professeur Garant, Patrice Garant, et je partage ce point de vue. Cependant, l'on me dit que le professeur Garant aurait changé d'idée. Alors... Ha, ha, ha!

Mme Gagnon-Tremblay: Il va devoir vous convaincre. Alors, il va devoir vous convaincre, maintenant, là.

Mme Harel: C'est ça, je demande à en être convaincue, là. Mais le projet de fond, comme vous le savez, c'est la fusion des bureaux de révision avec la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, la CALP. Pourquoi cette fusion? Parce qu'il y a finalement presque un total de 36 mois qui s'écoulent avant que le processus de révision et le processus d'appel à la CALP se soient terminés: 36 mois – C'est bien le cas, là? 33 ou...

M. Shedleur (Pierre): 36, juste à la CALP, un an au...

Mme Harel: Bon, alors, M. Shedleur me corrige, avec raison. C'est 36 mois seulement à la CALP et un an ensuite au bureau de révision. Quand on sait que la loi, elle, prévoit la garantie de retour à l'emploi dans les deux ans qui suivent l'accident, on comprend que, pour la majorité des accidentés qui vont se retrouver au bout de trois, quatre ans à la CALP, déjà, leur garantie est finie. Alors, c'est évident, là, qu'il y a urgence pour remédier à cela et améliorer la situation. Je crois que, là-dessus, l'objectif est très largement partagé. En fait, la discussion, c'est sur la façon d'y arriver. Vous savez que, aux bureaux de révision, il y a des assesseurs patronaux et syndicaux, ce qui n'est pas le cas à la CALP. Et, dans le projet qui m'est soumis, l'idée est de transférer les assesseurs – pas les mêmes, en fait – de les garder pour le nouveau tribunal administratif qui serait formé de cette fusion. En soi, la fusion, c'est une économie de 40 000 000 $.

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, si je comprends bien, M. le Président, c'est qu'il y a une volonté de la ministre de poursuivre, c'est-à-dire de donner suite au rapport sur la déjudiciarisation le plus rapidement possible. Merci.


Inspection et normes de sécurité

Mme Harel: On a aussi une bonne nouvelle. On a une bonne nouvelle. Est-ce qu'on peut en parler, de l'inspection?

M. Shedleur (Pierre): C'est vous qui décidez. C'est vous qui êtes la ministre.

Mme Harel: Ha, ha, ha! Parce qu'on pense, là, avoir trouvé enfin une solution à cette poursuite intentée par la CSST contre le gouvernement il y a de ça maintenant quatre ans, en 1991, sur le partage des coûts d'inspection. Alors, on est sur le point de pouvoir annoncer publiquement, là, une entente qui sera à signer entre le gouvernement et la CSST. Mais, déjà, dans nos crédits, nous l'anticipons en vous faisant voter une augmentation pour un total de 15 000 000 $ au chapitre de l'inspection, à la CSST.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que ça va, finalement, aider à l'inspection – suite aux vagues d'accidents qu'on a connues dans les mines, entre autres? On souhaitait que les inspecteurs soient mieux formés, on souhaitait qu'il y ait plus d'inspections. Est-ce que ces 15 000 000 $ vont justement aider à l'inspection, entre autres, dans les mines?

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, dans deux semaines, ce sera la Semaine de la sécurité dans les mines, et nous avons l'intention de rendre public un plan d'action concerté pour faire face à une situation absolument dramatique de neuf accidents mortels survenus dans les mines d'Abitibi depuis à peine plus d'un an. Alors, deux inspecteurs seront engagés, sur un total de 20 nouveaux inspecteurs. Je dois vous dire que, dans l'entente du partage des coûts de l'inspection, il y a également l'ajout de 20 nouveaux inspecteurs pour l'ensemble du Québec. Mais, immédiatement, je comprends qu'il y a... Je ne sais pas si, au moment où on se parle... mais ça sera dans les jours qui viennent, je crois, ou même au moment où on se parle... Compte tenu du fait que les deux nouveaux postes d'inspecteurs dans les mines en Abitibi n'ont pas pu être comblés à l'interne, la CSST est allée en appel de candidatures, et ça devrait être comblé tout prochainement.

Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que ça pourrait aller jusqu'au changement des normes de sécurité aussi?

Mme Harel: Je crois que oui. Mais je crois qu'un des aspects importants est celui de la formation en santé et sécurité pour les mineurs. Moi, j'y crois beaucoup, surtout qu'il y a 20 ans c'était le secteur de la construction qui était secoué par ce genre de tragédie. Et, on l'a vu avec le cours obligatoire en santé et sécurité, il y a eu un effet considérable de réduction des accidents. Et c'est même une des raisons invoquées par les entreprises de la construction pour considérer avoir fait des économies dans les années difficiles qu'elles viennent de traverser. Alors, il est fortement question également que ce soit examiné, l'obligation d'un cours de santé et sécurité pour les mineurs.


Autres sujets

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Il y avait un autre dossier aussi. On me faisait part que la CSST avait de la difficulté à percevoir des cotisations sur les réserves autochtones. Est-ce qu'il y a eu des ententes de signées avec ces clientèles?

M. Shedleur (Pierre): Alors, à la demande de la ministre, nous sommes devant les tribunaux. Il n'y a rien de simple avec les autochtones, vous le savez, ils ont des droits. Alors, nous avons gagné une première manche devant les tribunaux, mais ils en appellent. Ce qu'on a essayé d'expliquer aux gens qui sont dans les réserves, c'est que ce n'est pas une taxe, la CSST, c'est une compagnie d'assurances publique au service des travailleurs et des employeurs. Or, selon la loi, ils sont exempts de taxes – je ne veux pas embarquer dans un débat trop juridique – et, nous, on prétend qu'on est une compagnie d'assurances. Et, le premier niveau...

Mme Harel: C'est comme une prime.

M. Shedleur (Pierre): C'est ça, c'est comme une prime d'assurance. Et on a gagné juridiquement la première manche; ils en appellent, pour invoquer que c'est une taxe, pour ne pas avoir à la payer. Mais il faut aussi comprendre qu'ils ne sont pas nombreux et que les sommes en cause ne peuvent pas être astronomiques, aussi. Donc, il faut être patient et plutôt essayer de les amener à reconnaître ce fait-là tranquillement au lieu de créer peut-être une crise.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Je voudrais revenir peut-être rapidement sur la situation financière de la CSST; bon, cette situation budgétaire est maintenant acceptable. Est-ce qu'on peut comprendre que ce sont des résultats durables? Est-ce que c'est un virage durable ou si, par exemple, c'est fragile, et qu'on peut revenir rapidement à d'autres déficits?

(20 h 10)

M. Shedleur (Pierre): D'abord, je crois qu'il faut mentionner qu'il y a eu un virement important. Le taux de capitalisation est rendu à 58 %, presque 59 %. C'est une amélioration significative pour protéger le fonds des travailleurs. Eh bien, je vous dirais que ça va être aussi durable que le personnel va persister, sera tenace à poursuivre sa réforme, sa réorganisation, pour donner de meilleurs services, et aussi durable que la collaboration qu'on pourra avoir de toutes les parties. J'écoutais le président, qui parlait de cette concertation-là. En santé et sécurité, il est essentiel de s'asseoir avec les syndicats, les employeurs et le personnel de la CSST pour essayer de travailler ensemble. Et même nos partenaires, entre autres les associations sectorielles paritaires, les fédérations médicales, tout le monde a un mot à dire dans ce processus-là. Or, sans cette concertation-là, ça ne pourrait être durable. J'ai créé il y a déjà près de deux ans une vice-présidence aux relations avec les clientèles et les partenaires pour créer cette synergie-là, pour amener le monde à travailler ensemble pour que ces résultats-là soient durables.

Mme Gagnon-Tremblay: Je lisais justement un article où on disait que 850 emplois disparaîtront à la CSST. Est-ce exact? Est-ce que c'est ce qu'on envisage au cours des... bon, on semblait dire d'ici 1997?

M. Shedleur (Pierre): C'est totalement faux, j'ai émis un communiqué interne et on a même garanti au personnel qu'il n'y aurait aucune réduction, aucune mise en disponibilité, que tout se ferait par attrition. C'est qu'on a un plan de redéploiement des activités centrales vers les régions pour améliorer le service à la clientèle, et, bien sûr, on remet en question nos activités essentielles. Ce qui ne l'est pas, on va éliminer l'activité mais pas les individus. On va réaffecter les gens vers les activités essentielles et les opérations pour donner un meilleur service à nos clients; c'est là que ça se passe. Alors, nous allons réduire nos effectifs, c'est en cours, mais par l'attrition, par des moyens semblables. Et, je l'ai émis dans un communiqué et dans l'entente-cadre avec les syndicats, c'est le premier engagement qu'on a pris, il n'y aura pas de mise en disponibilité à la CSST. Donc, ça aide beaucoup au climat.


Retrait préventif

Mme Gagnon-Tremblay: Merci. Peut-être un dernier sujet que je voudrais aborder, c'est celui du retrait préventif. Et là je pense que la ministre va être très sensible à ce dossier parce que ça touche, bien sûr, toutes les femmes, les femmes enceintes. J'ai toujours été un peu étonnée de voir que ce dossier se retrouvait à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Pour moi, il m'apparaît qu'une femme qui est enceinte, ce n'est pas une maladie. Étant donné que, pour une des premières fois, on a maintenant une femme à la tête du ministère qui voit au bon fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité, est-ce que la ministre, à un moment donné, envisage d'avoir un programme spécifique, un programme spécial pour le retrait préventif des femmes? Est-ce qu'elle considère toujours que ça doit faire partie de la Commission de la santé et de la sécurité du travail?

Mme Harel: Alors, Mme la députée de Saint-François, j'ai eu l'occasion de rencontrer le conseil d'administration de la CSST et d'aborder avec eux cette question. Je dois vous dire que je les ai trouvés bien accablés d'avoir toujours à se défendre sur la place publique de l'application du retrait préventif, quand, pourtant, il leur coûte de plus en plus cher. Vous savez sans doute que 93,7 % des demandes de retrait préventif sont acceptées – 93,7 % – pour un total d'indemnisation de 80 000 000 $, dans un contexte où, notamment, les employeurs ont l'impression de faire plus que leur part et puis de n'en être jamais gratifiés, parce que, finalement, c'est, dans la plupart des cas, le 6,3 % qui, présenté à l'opinion publique, fait décrier la mesure du retrait préventif. Je crois que c'est parce qu'il n'existe pas de caisse de congé de maternité, comme ça devrait être le cas dans notre société, et qu'on fait jouer au retrait préventif le rôle de caisse de congé de maternité pour les travailleuses qui sont enceintes.

Dans la loi de santé et sécurité, à l'origine, la disposition concernant le retrait préventif, ce n'en était pas une de congé de grossesse, c'était, c'est toujours dans la loi, le droit à la réaffectation sur un poste de travail qui ne met pas en danger sa grossesse. Mais ce n'est pas l'état personnel, l'état physique de la personne enceinte que la loi de la santé et sécurité couvre, c'est l'état des conditions de travail qui peuvent affecter le foetus. Et, au fil des années, du fait de l'absence d'une véritable politique de congé de maternité, je vous rappelle que c'est simplement dans le cadre de la caisse d'assurance-chômage qu'il y a un congé de maternité remboursé. Il est remboursé à 55 % maintenant, tandis que le retrait préventif l'est à 90 %. Alors, vous comprenez la pression qui s'exerce sur le retrait préventif.

D'autre part, de moins en moins de travailleurs et de travailleuses réussissent à se qualifier pour les fins de l'admissibilité à l'assurance-chômage. Donc, de moins en moins ont accès au congé de maternité, ce qui fait que la pression sur le retrait préventif, à la CSST, est presque devenue insoutenable, d'une certaine façon, parce que, même avec 93,7 % de taux d'acceptation, c'est encore fortement décrié, comme on a pu le voir dernièrement dans les médias d'information.

Je crois cependant qu'il a pu y avoir entorse dans l'application. J'en ai, en fait, à preuve, moi, en ce qui me concerne, un cas récent survenu ici, dans la région de Québec, où, finalement, on a appliqué des décisions jurisprudentielles de la CALP dans un cas précis pour évaluer la situation d'une personne. Je crois que c'est impensable de calquer une situation à partir d'une décision jurisprudentielle sur l'état de situation d'une personne. Alors, je comprends que, depuis le 1er janvier dernier, lorsque le médecin traitant et le médecin du Département de santé communautaire s'entendent pour qu'il y ait retrait préventif, il est accordé automatiquement.

Bon, est-ce qu'on peut penser que la CSST peut aller au-delà de ça? Je ne pense pas. Et, au contraire, j'ai invité la coalition en faveur du retrait préventif à rencontrer le conseil d'administration de la CSST, un groupe de travail mis en place par le conseil d'administration sur le retrait préventif, et je sais que la rencontre doit avoir lieu prochainement. Je crois que, d'un côté comme de l'autre – c'est ce que je leur ai dit, d'ailleurs, également – ils ont intérêt à lancer l'idée qu'une caisse de congé de maternité s'impose dans notre société.

Mme Gagnon-Tremblay: Tout à fait. De toute façon, on compte sur vous, Mme la ministre. Je sais que vous êtes très préoccupée par le dossier et que vous allez sûrement prendre les intérêts de toutes les femmes, d'autant plus les femmes en âge de procréer, parce que vous savez – je vous parlais justement de démographie ce matin, cet après-midi, c'est-à-dire – l'importance, justement, d'aider les femmes à avoir des enfants. Alors, je compte sur vous.

Mme Harel: C'est la seule injustice entre les hommes et les femmes, ça, l'âge de procréer.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Gagnon-Tremblay: C'est ça. Alors...

Une voix: ...

Mme Gagnon-Tremblay: Non, l'équité salariale, c'est de la discrimination positive, M. le Président. C'est parce qu'il me fait part également de l'équité salariale.

Alors, M. le Président, je vais vous étonner, je vais vous surprendre, mais je n'ai plus de chemises jaunes à ouvrir. Donc, ici se terminent mes nombreuses questions à la ministre. Je veux vous remercier et remercier la ministre, son personnel, les collègues, M. Shedleur et les gens qui vous accompagnent, souhaiter bonnes vacances à la ministre – je sais qu'elle le mérite – et se souhaiter, bien sûr, joyeuses Pâques également.

Le Président (M. Tremblay): Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, je crois qu'il est dans l'ordre de nous rappeler qu'il faut faire l'adoption des différents programmes. Mais, avant que cela ne se fasse, je dois vous dire que c'est le premier exercice que je fais assise de ce côté, et j'appréhendais, d'une certaine façon. Je suis très heureuse du niveau très élevé des débats que nous avons au sein de cette commission. Je suis très contente que nous ayons résisté à l'idée de déménager. J'espère que nous allons y rester.


Adoption des crédits

Le Président (M. Tremblay): Alors, l'étude des crédits budgétaires du ministère de l'Emploi étant terminée, est-ce que les programmes 1, Emploi; 2, Aide financière à l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération; 3, Conseil des services essentiels; 5, Régie du bâtiment, et 6, Aide financière à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, sont adoptés?

Mme Gagnon-Tremblay: Adopté.

(20 h 20)


Adoption de l'ensemble des crédits

Le Président (M. Tremblay): Est-ce que l'ensemble des crédits du ministère de l'Emploi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Tremblay): La commission ayant terminé son mandat, ses travaux sont ajournés au mardi 25 avril 1995, à 10 heures, dans la même salle où la commission étudiera les crédits du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Et vous aurez compris que, étant le critique officiel en matière d'industrie et de commerce, je ne pourrai pas présider cette commission.

Bonnes vacances de Pâques!

(Fin de la séance à 20 h 21)

Document(s) associé(s) à la séance