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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le lundi 21 avril 1997 - Vol. 35 N° 52

Étude des crédits du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie


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Table des matières

Industrie, commerce, science et technologie


Autres intervenants
M. François Beaulne, président
M. Michel Côté
Mme Diane Barbeau
M. Michel Côté
* M. Jacques Brind'Amour, ministère de l'Industrie,
du Commerce, de la Science et de la Technologie
*M. Louis-L. Roquet, SDI
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quatorze heures dix minutes)

Le Président (M. Beaulne): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'économie et du travail souhaite la bienvenue à la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce pour procéder à l'étude des crédits du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.

Conformément à ce qui a été établi par les leaders, nous aurons aujourd'hui à échanger sur les programmes 1, 2 et 3 du ministère: programme 1, Soutien technique aux secteurs manufacturiers et commerciaux, au développement de la science, de la technologie et du commerce extérieur; programme 2, Soutien financier aux secteurs manufacturiers et commerciaux, au développement de la science, de la technologie et du commerce extérieur; programme 3, Soutien aux sociétés et organismes d'État. Nous avons quatre heures qui sont prévues pour les échanges sur ces programmes-là, c'est-à-dire jusqu'à 18 heures, et, comme nous terminerons demain une discussion sur le commerce extérieur, nous adopterons l'ensemble des crédits à ce moment-là.

Maintenant, pour permettre d'avoir une discussion qui roule assez bien et qui permette aux différents collègues d'intervenir, je vous propose le déroulement suivant, comme on l'a fait ici, à la commission, dans d'autres études de crédits, et qui semble avoir fonctionné de façon satisfaisante pour tout le monde: d'abord, les députés qui veulent s'en prévaloir, de même que la ministre, pourront avoir jusqu'à un maximum de 20 minutes pour des remarques préliminaires; par la suite, nous procéderons à des échanges par programme. Si je comprends bien, M. le porte-parole de l'opposition officielle, vous souhaiteriez un échange plus général à l'intérieur de chacun des éléments de programme. Et, pour permettre à chacun d'intervenir à sa guise et d'avoir un temps équitablement partagé entre les formations politiques, ce que je propose, c'est que, comme vous le savez, d'après le règlement, il y a un maximum d'interventions de 20 minutes par intervenant, et aussi vous savez que nous devons respecter le principe de l'alternance. Alors, ce que je propose, c'est que, lorsque les députés de l'opposition d'une part et d'autre part les députés du gouvernement voudront intervenir sur un même sujet qui est enclenché par un des intervenants, vous pourrez utiliser le temps non utilisé par votre collègue du côté de la même formation politique, et par la suite nous passerons à l'autre côté pour un autre échange de 20 minutes soit avec le même collègue ou soit en partageant le temps avec ceux qui voudront se joindre à la discussion. Alors, est-ce que ça vous convient? Ça vous convient? Bon.

Alors, sur ce, Mme la secrétaire, pouvez-vous nous indiquer s'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Barbeau (Vanier) remplace Mme Simard (La Prairie) et M. Brodeur (Shefford) remplace M. Beaudet (Argenteuil).


Industrie, commerce, science et technologie


Remarques préliminaires

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, sur ce, je demanderais à Mme la ministre de nous livrer ses remarques préliminaires, si, bien sûr, elle souhaite s'en prévaloir.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Bien sûr, M. le Président. Je vous remercie. D'abord, bonjour, mesdames et messieurs. On se retrouve encore cette année pour étudier les crédits du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, et, si vous me permettez, j'aimerais vous présenter d'abord les personnes qui m'accompagnent: à ma gauche, le sous-ministre, M. Jacques Brind'Amour, qui est accompagné de Mme Christine Ellefsen, la secrétaire générale du ministère, qui est derrière avec les membres de l'équipe de support; à côté de M. Brind'Amour, le président-directeur général de la Société de développement industriel, M. Louis Roquet, qui est accompagné de MM. Yvon Marcil et André Côté, qui sont également vice-présidents de la Société.

Et je vais, si vous me le permettez, présenter les autres sous-ministres du ministère et je leur demanderais de se lever à l'appel de leur nom: alors, du sous-ministériat aux politiques et à l'analyse économique, MM. Marc Jean et Yvon Pomerleau, directeurs généraux, accompagnés de Georges Corriveau, directeur, et de MM. Roland Staford, Ahmed Elassal et Yves Fortin; du sous-ministériat aux industries et au développement technologique, M. André Caron, qui est sous-ministre adjoint par intérim, qui est accompagné de M. Georges Archambault, directeur général, et de Mme Madeleine Caron, directrice; du sous-ministériat aux investissements étrangers et aux sociétés d'État, M. André Dorr, sous-ministre adjoint, qui est accompagné de M. Gilbert Delage, directeur; du sous-ministériat aux opérations régionales, aux services aux entreprises et aux coopératives, Mme Micheline Fortin, sous-ministre adjointe, qui est accompagnée de M. François Paradis, directeur général; de la Direction générale de l'administration du ministère, M. Michel Gauthier, directeur général, accompagné de Mme Nicole Nolin, directrice.

Alors, le gouvernement s'est fixé comme objectif de favoriser la prospérité économique et sociale du Québec en relançant le développement économique et la création d'emplois, et ce, avec la poursuite de l'objectif visant l'élimination complète du déficit budgétaire en quatre ans. Cette volonté de soutenir le développement économique s'est manifestée ouvertement dans la préparation du Sommet sur l'économie et l'emploi de l'automne dernier, alors que le gouvernement affichait clairement ses intentions en ce domaine. Le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie s'est donc vu confier cette année le mandat de revoir en profondeur ses modes d'appui en matière de compétitivité des entreprises. Conscients que le ministère doit poursuivre ses efforts dans la réduction du déficit, donc travailler avec des moyens limités, nous avons concentré nos efforts à recibler nos interventions en révisant la stratégie industrielle et en axant notre action sur les déterminants les plus fondamentaux de la croissance économique du Québec.

Nous amorçons maintenant la troisième année du Plan stratégique triennal du MICST, lequel encadre nos choix budgétaires pour l'exercice 1997-1998. L'année qui vient de se terminer nous a permis, entre autres, de consolider l'intégration de la mission ministérielle d'appui à l'expansion des marchés. On se rappellera que cette nouvelle responsabilité nous avait été confiée en 1996-1997. Le ministère a donc procédé à l'intégration des volets du commerce extérieur et du Bureau des investissements étrangers. Ce transfert d'activités permet maintenant au MICST d'arrimer les activités de développement industriel, scientifique et technologique aux occasions d'affaires sur les marchés étrangers et d'harmoniser les actions de prospection d'investissements à l'étranger. Des réaménagements administratifs et des regroupements de directions et de services ont donc été effectués en cours d'année afin de rationaliser la gestion.

D'abord, la mission du ministère: contribuer à doter le Québec d'une économie compétitive aux fins d'appuyer l'emploi et l'accroissement de la richesse. Dans le contexte de la mondialisation des marchés qui oblige les entreprises à être de plus en plus compétitives et à intégrer rapidement les résultats des progrès de la science et de la technologie, le rôle du ministère consiste principalement à favoriser l'appropriation des capacités concurrentielles qu'impose la mondialisation des marchés et à supporter la mutation en faveur des activités à plus forte valeur ajoutée, particulièrement celles qui sont reliées à la nouvelle économie, et ainsi à permettre d'accroître nos perspectives de création d'emplois à moyen et à long terme.

Cinq enjeux majeurs concernent le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie: d'abord, la participation des industries québécoises à l'essor de l'économie mondiale et, à cette fin, le maintien des conditions favorables au développement des investissements et à la poursuite de la conquête des marchés d'exportation pour nos entreprises; deuxièmement, le renforcement des partenariats sectoriels pour que s'instaurent et se développent les synergies nécessaires à l'amélioration de la compétitivité et à la mutation vers la nouvelle économie; troisièmement, l'accroissement de la recherche-développement et des capacités d'innovation technologique en lien avec les priorités économiques du Québec qui favorisent notamment la production de biens et de services à haute valeur ajoutée; quatrièmement, la concertation et la mise en valeur des ressources régionales afin de favoriser le démarrage et le développement d'industries compétitives sur tout le territoire, et en particulier de contribuer à redonner à la région de la métropole son rôle fondamental de région industrielle stratégique; cinquièmement, la création de conditions favorables à l'entrepreneurship, à la mise en valeur et au développement des compétences québécoises. Pour réaliser sa mission et atteindre ces objectifs stratégiques, le ministère doit donc orchestrer ses activités dans un contexte économique caractérisé par une constante évolution.

Avant de procéder à l'examen des crédits, rappelons brièvement la toile de fond économique dans laquelle se sont insérées les actions du ministère au cours de la dernière année ainsi que les perspectives économiques qui guideront notamment le choix de nos priorités. Après une progression modeste en 1996, l'expansion de l'économie québécoise devrait se poursuivre à un rythme plus soutenu en 1997. Selon les plus récentes prévisions de différents organismes privés, la production intérieure brute réelle au prix du marché afficherait en moyenne une progression de 2,5 %, en 1997, au Québec. Pour ce qui est du secteur manufacturier québécois, la situation devrait continuer de se redresser, en 1997. Plusieurs indicateurs vont d'ailleurs dans ce sens: une situation d'équilibre des stocks des manufacturiers, une hausse des commandes en carnet, le raffermissement de la demande au Canada et aux États-Unis, le maintien du dollar canadien à un niveau avantageux par rapport au dollar américain.

(14 h 20)

Ces perspectives à court terme alimentent l'optimisme des manufacturiers, comme le confirment les perspectives du monde des affaires du premier trimestre de 1997. Les intentions d'investissement des manufacturiers québécois sont de nouveau en forte hausse, en 1997. Les dépenses d'immobilisation prévues sont en croissance, avec une augmentation de 15,3 %. L'accroissement du taux d'utilisation des capacités de production, les succès commerciaux à l'étranger, les profits élevés et la modernisation des usines sont des facteurs qui contribuent à soutenir l'investissement manufacturier au Québec. Au plan de l'ensemble de l'économie, la prévision des dépenses totales d'immobilisation au Québec se situe à 26 000 000 000 $, en 1997, ce qui représenterait une hausse de 1,4 %.

En 1997, la poursuite de l'expansion économique aux États-Unis, les meilleures performances d'autres pays industrialisés et le maintien de conditions fondamentales favorables devraient stimuler les exportations internationales du Québec. Les résultats des secteurs de l'automobile, des pâtes et papiers et de la première transformation des métaux seront assurément meilleurs en 1997 qu'ils ne l'ont été en 1996 pour des raisons hors de notre contrôle, de ce côté-ci de la frontière. Enfin, un redressement des mises en chantier, un léger raffermissement de la consommation et l'augmentation prévue des exportations contribueront à une amélioration sensible du marché du travail.

En 1997, selon la prévision des organismes privés, l'emploi serait susceptible de croître de 1,3 %, au Québec, ce qui représenterait une augmentation d'environ 40 000 postes. Cette progression plus vigoureuse de l'emploi devrait se traduire par une diminution du taux de chômage. L'apport des PME dans la création d'emplois au Québec va demeurer majeur, au cours des prochaines années, notamment parce que la majorité des nouvelles entreprises sont de petite taille. Les PME sont en effet les principales responsables de la création d'emplois depuis 15 ans, au Québec. La période que nous vivons présentement, loin d'être sans précédent historique, est plutôt typique d'une phase de transition de l'économie québécoise. L'entrée dans la nouvelle économie, même si elle est inéluctable, est en même temps le prélude à une période de croissance où seront introduits de nouvelles techniques, de nouveaux produits et de nouveaux services. Au cours de l'année qui vient de se terminer, le ministère a été appelé à réexaminer ses stratégies d'intervention et à réajuster les plans d'action qui les sous-tendent, et ce, dans le but de favoriser la création d'un environnement adapté aux défis de l'an 2000.

La stratégie industrielle que le ministère entend mettre en place au cours de la prochaine année priorise trois objectifs: premièrement, accroître la compétitivité à cause de l'incontournable globalisation de l'économie; deuxièmement, favoriser l'innovation, parce que c'est la clé de la croissance; troisièmement, augmenter les emplois, en particulier les emplois de qualité, car la finalité de la croissance, c'est l'amélioration du niveau de vie de notre population.

Les actions qui en découlent peuvent aussi être regroupées sous trois axes: renforcer les partenariats sectoriels. Le ministère procédera à une reconfiguration et à un renforcement de l'appui à certaines tables de concertation sectorielles. Ensuite, améliorer les facteurs de compétitivité des entreprises et favoriser la mutation vers la nouvelle économie. Les principales actions pour atteindre cet objectif consisteront à mettre en oeuvre un plan d'action en science et en technologie, à favoriser le développement des exportations, toujours, en augmentant le nombre et la qualité des entreprises exportatrices et en diversifiant les marchés à l'étranger, à soutenir les projets majeurs d'investissement structurant, à réviser les rôles et les mandats de certains organismes et sociétés d'État et à soutenir le développement de l'entrepreneurship. Enfin – et c'est le troisième axe – favoriser l'émergence et le développement d'entreprises compétitives et le renforcement du tissu industriel sur tout le territoire par le renouvellement de l'offre de services du ministère en région et par le soutien et la promotion de la métropole comme région industrielle stratégique.

Les crédits du ministère, des organismes et des sociétés d'État qui s'y rattachent s'établissent donc à 315 800 000 $, ce qui représente une diminution de 64 400 000 $ par rapport aux crédits de 1996-1997. Ces crédits intègrent les activités transférées au ministère reliées notamment au développement du commerce extérieur et du marché intérieur canadien, à la prospection d'investissements étrangers et tiennent aussi compte du transfert au Conseil exécutif du Secrétariat à la déréglementation. Cette diminution s'explique essentiellement par des ajustements effectués aux crédits de la Société de développement industriel, et ce, sans affecter sa programmation régulière auprès des PME par une révision des modes d'intervention du Centre de recherche industrielle du Québec, par la fin du programme Fonds de développement technologique ainsi que par la diminution du budget de fonctionnement attribué au ministère.

Les crédits de la SDI s'établiront à 92 100 000 $, en 1997-1998. La réduction est importante, soit 33 600 000 $ par rapport à 1996-1997, et explique pour plus de la moitié la diminution de l'enveloppe budgétaire du MICST. Trois éléments sont à la source de la baisse des crédits accordés à la Société. Ce sont d'abord une diminution de 16 200 000 $ dans les provisions pour pertes dans les interventions financières de la SDI garanties par le gouvernement, dont 10 200 000 $ provenant de la révision des besoins financiers, accordée à deux mesures annoncées dans le discours sur le budget de 1996-1997, c'est-à-dire le crédit-acheteur à l'exportation et le programme de soutien financier pour l'acquisition de navires construits au Québec, 5 600 000 $ attribuables à une diminution de l'activité du Programme d'investissement en démarrage d'entreprises, une diminution de 8 300 000 $ des aides attribuées en vertu des mandats gouvernementaux confiés à la SDI, consécutives d'abord à la baisse du taux de base des banques et, en second lieu, grâce au rachat par anticipation des actions privilégiées que la SDI détenait dans Domtar, entre autres, et enfin une baisse de 6 500 000 $ attribuable à la fin de la prise en charge d'intérêts du Programme d'investissement en démarrage d'entreprises. Il faut préciser encore une fois que cette diminution importante des crédits de la SDI ne devrait pas affecter le volume de ses activités régulières auprès des PME via le programme Garantie Québec.

La situation financière du Centre de recherche industrielle du Québec exige aussi un redressement majeur. Même si les dépenses de cette société ont été bien contrôlées en demeurant stables, les revenus autonomes ont montré une stagnation, si bien que les cinq dernières années ont été pour le CRIQ des années de décroissance. Notre défi dans ce dossier était de trouver une façon de mettre en valeur l'expertise et les produits développés au Centre. Nous avons donc fait adopter par le gouvernement un plan d'affaires sur cinq ans qui prévoit la transformation du CRIQ en une compagnie à fonds social qui s'autofinancera. À cet effet, nous avons déposé un projet de loi qui fera du CRIQ une compagnie dont 100 % du capital appartiendra au gouvernement. Cette nouvelle loi donnera à la société un mandat clair de commercialisation.

Le fer de lance de cette nouvelle vocation sera la création de sociétés de commercialisation en partenariat avec le secteur privé. Ceci permettra au CRIQ de procéder à l'exploitation et à la commercialisation des résultats de ses recherches en s'associant à des partenaires du secteur privé. Cette formule a l'avantage d'allier le savoir-faire du CRIQ à la connaissance commerciale et aux moyens financiers du secteur privé. Le plan d'affaires prévoit que les revenus propres du CRIQ augmentent sensiblement de 18 000 000 $ pour l'année en cours. En conséquence, en 1997-1998, les crédits alloués au CRIQ sont diminués de 5 500 000 $.

Le Fonds de développement technologique est un programme qui est terminé depuis le 31 mars 1995. Les crédits requis diminuent donc depuis chaque année et servent uniquement à rencontrer les engagements du gouvernement dans les projets aidés. Cette année, les crédits consacrés au Fonds de développement technologique s'établissent à 13 100 000 $.

Les crédits alloués au fonctionnement du ministère, en 1997-1998, affichent une diminution de 6 900 000 $ par rapport à l'année précédente. Cette baisse traduit l'impact du programme de départs assistés de l'automne 1996 – 42 postes – et des mesures prévues pour 1997-1998, ainsi que des mesures de réduction substantielle de nos coûts de fonctionnement. Le ministère a cherché, par ces choix budgétaires, à préserver un bassin de connaissances et d'expertise permettant de soutenir efficacement son action de développement industriel, technologique et scientifique et de développement du commerce extérieur.

Dans la lancée des mesures annoncées dans le discours sur le budget de mai 1996, le ministère a pu maintenir les ressources lui permettant d'appuyer sa stratégie de développement des exportations, ayant notamment pour objectif de favoriser, on le sait, l'émergence de 2 000 nouveaux exportateurs entre 1996 et l'an 2000 et d'intensifier son approche intégrée de promotion et de prospection d'investissements étrangers.

(14 h 30)

Les crédits consacrés à l'aide à l'entreprise passent à 143 100 000 $, en 1997-1998. Il s'agit d'une diminution attribuable en grande partie à la diminution des crédits de la SDI et à la fin du Programme d'investissement en démarrage d'entreprises. Par ailleurs, une partie de cette diminution résulte du changement apporté aussi au mode de financement des sociétés Innovatech. Puisque l'aide offerte par les sociétés Innovatech revêt principalement la forme d'achat de capital-actions, leur financement se fera dorénavant surtout par des avances, lesquelles totaliseront 16 100 000 $ en 1997-1998.

Bien que le Programme d'investissement en démarrage d'entreprises tire à sa fin, ce qui entraîne une diminution des sommes consacrées à l'aide au démarrage d'entreprises, il n'en demeure pas moins que cette fonction demeure une priorité pour le MICST. Nous avons dû cependant ajuster notre aide au démarrage d'entreprises pour tenir compte de la disponibilité accrue de capital de risque au Québec pour ce type de projet ainsi que des nouvelles mesures annoncées dans le récent discours sur le budget pour favoriser le démarrage d'entreprises. On pense, entre autres, au congé de taxes sur le capital pour les nouveaux investissements et à un amortissement accéléré de 125 % combiné à un congé fiscal de cinq ans pour les nouvelles sociétés. Ainsi, le MICST maintiendra le programme Jeunes Promoteurs avec des crédits de 6 300 000 $ pour l'année 1997-1998. Bien que ces crédits affichent une diminution par rapport à l'an passé, cette baisse est essentiellement due à la fin du plan de relance. Le programme Jeunes Promoteurs revient donc, en 1997-1998, à sa vitesse de croisière. Le ministère maintiendra également sa contribution aux Services d'aide aux jeunes entrepreneurs, qui s'établira cette année à 7 800 000 $.

Malgré une reprise intéressante en 1996, la performance récente du Québec en matière d'attraction d'investissements étrangers, surtout en provenance des États-Unis, doit s'accélérer. L'Entente auxiliaire Canada-Québec sur le développement industriel, le seul instrument financier que le Québec possède pour attirer les grands projets, tire à sa fin. Ces raisons nous ont amenés à repenser et à reformuler une forme d'aide financière qui garde le Québec dans la course aux investissements. Le 9 octobre 1996, le Conseil des ministres autorisait en principe la création du Fonds de développement industriel pour une durée de cinq ans. En 1997-1998, le MICST consacrera 12 600 000 $ à cette mesure. De plus, lors du dernier discours du budget, le gouvernement a annoncé la création du Fonds pour l'accroissement de l'investissement privé et la relance de l'emploi, le programme FAIRE. Ce fonds disposera de 250 000 000 $, dont 75 000 000 $ sous la responsabilité du MICST, pour des projets de plus de 25 000 000 $.

En conclusion, rappelons qu'en réalisant ces choix budgétaires le gouvernement a visé principalement à préserver l'essentiel des orientations du dernier discours sur le budget en assurant le maintien à un niveau satisfaisant des programmes axés sur le soutien à l'innovation, le développement des exportations, l'accroissement des investissements, le démarrage d'entreprises par les jeunes entrepreneurs et l'aide à la petite et moyenne entreprise via la Société de développement industriel. Il a également cherché à maintenir un soutien adéquat aux divers organismes qui oeuvrent à la promotion du développement technologique et scientifique. Afin de mieux cibler et d'assurer l'efficacité de ses interventions, le gouvernement a procédé à la mise à jour de sa stratégie industrielle. Il s'est doté d'un plan d'action intégré en science et en technologie et a revu l'offre de services de ses directions régionales en les dotant d'un nouveau programme d'intervention, Impact PME.

Par ailleurs, le gouvernement a procédé à la mise en place de certains instruments en vue de mieux cerner et évaluer les résultats de son action. Nous avons créé une direction de la gestion financière des programmes afin de regrouper toutes les informations sur les aides financières consenties et de fournir aux gestionnaires les informations pertinentes pour effectuer le suivi de gestion des différents programmes. Nous avons également mis en place une direction de l'évaluation des programmes afin de permettre au ministère de mieux connaître l'impact de ses interventions auprès de sa clientèle. Enfin, le ministère a débuté une démarche d'élaboration d'indicateurs de performance portant sur la clientèle, l'organisation interne, l'innovation et les résultats. Il a établi ses produits et services prioritaires et il définit actuellement des indicateurs qui permettront de mesurer et de suivre l'évolution de notre action.

Les mutations profondes en cours actuellement à travers le monde nous ont amenés à recibler nos interventions pour assurer des conditions favorables au développement de nos entreprises et les inciter à améliorer leur compétitivité. Les entreprises québécoises ont ainsi déployé, au cours des dernières années, des efforts importants pour accroître leur productivité et conquérir de nouveaux marchés. Ces efforts rapportent aujourd'hui des dividendes. Tout indique que nous sommes sur la bonne voie. En effet, le Québec devrait cette année afficher un rythme de croissance supérieur aux dernières années. C'est dans cet esprit d'ouverture que nous entamons notre discussion d'aujourd'hui sur les crédits du MICST. L'objectif d'aujourd'hui est de questionner l'administration des fonds publics, et c'est l'occasion de demander aux responsables d'expliquer leurs prévisions budgétaires. Je vous remercie, et nous sommes là pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. Alors, je donne la parole au député d'Orford et porte-parole de l'opposition en matière d'industrie et commerce. M. le député.

M. Benoit: Le député de Shefford va y aller.

Le Président (M. Beaulne): Ah! c'est... Bon.

M. Benoit: Commencez avec le député de Shefford.

Le Président (M. Beaulne): L'opposition a des porte-parole qui se partagent la tâche, alors je crois comprendre que c'est plutôt notre collègue de Shefford qui va commencer...

M. Brodeur: C'est bien ça.

Le Président (M. Beaulne): ...en rappelant qu'il est porte-parole de l'opposition en matière de PME et de SDI. Allez-y, M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Mme la ministre et tous les gens qui vous accompagnent, je vous salue. Aujourd'hui, nous débutons l'étude des crédits en industrie et commerce qui sont aussi... Ah! et je salue aussi tous mes collègues, y compris les collègues de l'opposition et les collègues ministériels.

Je disais qu'aujourd'hui nous débutions les crédits dans l'industrie et commmerce, et ça vient quelques jours ou une semaine ou deux après l'interpellation que nous avons eue avec le ministre de l'Économie et des Finances, et aujourd'hui, en espérant que la ministre dit vrai, qu'elle va répondre à nos questions... Il y a deux semaines, j'accompagnais le député d'Orford à l'interpellation. Ça a été une période de questions excellente mais une période de réponses très faible. Donc, j'espère qu'aujourd'hui Mme la ministre et ses acolytes sauront nous renseigner vraiment sur l'essence même des crédits de l'industrie et du commerce.

Donc, M. le Président, ce qu'on disait il y a quelques semaines au ministre de l'Économie et des Finances, c'est que, à la lumière des actions et non des discours, il semblait y avoir un manque de vision total de la part du gouvernement sur l'économie du Québec. Les discours sont énormément différents de la réalité. Juste pour vous imager la différence entre le discours et la réalité, on sait que, dans l'ensemble des crédits budgétaires du gouvernement, il y a une diminution de 5 %. Donc, on devrait s'attendre, suite au discours du gouvernement qui parle de création d'emplois, qui en parle, qu'on devrait avoir moins de coupures dans les budgets susceptibles de créer de l'emploi.

On a vu la semaine dernière une manifestation à l'avant du parlement, les agriculteurs qui se plaignent d'une baisse de 16 % ou de 18 % de leurs crédits budgétaires. On sait qu'en agriculture il y a au-delà de 10 000 emplois et même plus qui sont créés à partir de ces enveloppes-là; à l'Industrie et au Commerce, c'est 16 %. Il faut imager qu'il y a une coupure de 16 % dans les crédits budgétaires dédiés à l'industrie et au commerce au Québec, donc il y a une vocation économique, une vocation création d'emplois comparativement à 5 % dans le reste des coupures des crédits budgétaires, sauf qu'on note malheureusement, M. le Président, dans les crédits de l'Industrie et du Commerce, qu'il y a une augmentation du coût de la gestion interne. C'est surprenant. Normalement, on devrait plutôt consacrer des sommes à la création d'emplois. Non, on coupe de 18 % puis on augmente le coût de la gestion interne. Il y a une baisse de la rémunération de 10 % et une baisse des programmes de 18 %.

On se pose toujours des questions. Pourquoi coupe-t-on les programmes de 18 % puis qu'on baisse la rémunération seulement de 10 %? On note qu'on avait 1 080 fonctionnaires l'an passé et qu'on a toujours 1 080 fonctionnaires cette année, donc j'aimerais aussi tantôt qu'on m'explique pourquoi on opère une coupure de 16 % et qu'on garde le même nombre de fonctionnaires. Je dois présumer, dans ce cas-là, qu'il y en a peut-être plusieurs – un certain nombre, disons – sans nommer un nombre précis de fonctionnaires, qui n'auront pas grand-chose à faire et qui seront tablettés. De toute façon, de toute évidence, il y aura de l'argent sûrement mal investi, puisque 18 % des programmes sont coupés, sauf qu'on garde le même nombre de fonctionnaires et que, je le répète, il y a une augmentation des coûts de la gestion interne. Donc, à première vue, M. le Président, cette façon de procéder ou cette façon de faire un budget ou d'adopter des crédits budgétaires est très questionnable.

(14 h 40)

On a parlé aussi de technologie. On sait que c'est particulièrement important dans la mondialisation des marchés. On en parle partout, la ministre en parle régulièrement, le ministre de l'Économie et des Finances aussi nous parle de la mondialisation des marchés. Vous êtes toujours présent lorsqu'il nous parle de la Chine en passant par la Roumanie, l'Italie, etc., donc il nous démontre ses grandes connaissances en géographie, sauf que présentement, aujourd'hui, on diminue les fonds du CRIQ de 33 %, on diminue les fonds de développement économique de 53 % puis on garde toujours le même nombre de fonctionnaires. Donc, M. le Président, comme je vous disais tantôt, l'année passée on avait 1 080 fonctionnaires, cette année nous avons encore 1 080 fonctionnaires. Il n'y a aucune logique là-dedans.

On nous parle des jeunes, des possibilités de création d'emplois pour les jeunes. À la lecture des crédits, ce dont on s'aperçoit, c'est que l'aide aux jeunes entrepreneurs est diminuée de 31 %, on élimine l'aide au démarrage d'entreprises puis on diminue le budget des SAJE de 10 %. Donc, encore là, une preuve que le discours est contraire ou du moins très différent de la réalité. À partir de ça, ces coupures-là, 31 % aux jeunes entrepreneurs, plus de programme de démarrage d'entreprises, on diminue les SAJE de 10 %, mais on garde le même nombre de fonctionnaires. Je vous l'ai dit tantôt, 1 080 l'an dernier, 1 080 cette année.

On nous a parlé d'exportation. On a vu que le programme d'exportation, le programme de soutien à l'exportation, est diminué de 28 %. J'ai posé la question au ministre de l'Économie et des Finances à la période de questions; ça n'a pas été long qu'il s'est pété les bretelles pour nous dire qu'il y avait 630 et quelques compagnies exportatrices de plus au Québec. Mais, M. le Président, je peux vous dire qu'il n'a pas fait exprès parce qu'il n'a rien fait pour ça. Ces compagnies-là, c'est des gens, en fin de compte, des entrepreneurs qui se sont pris en main, mais le gouvernement, en baissant ses crédits budgétaires de 28 % pour le programme de soutien à l'exportation, en fin de compte, n'appuie pas réellement, sauf dans son discours. Dans les faits, ces gens-là sont laissés à eux-mêmes. On a des entrepreneurs qui sont quand même valables et intelligents, au Québec.

Et, à cette fin-là, M. le Président, vous étiez là, à l'interpellation de vendredi il y a deux semaines. J'avais cité en exemple la région Granby–Bromont. D'ailleurs, dans la merveilleuse région de la Montérégie, et vous l'aviez souligné, j'ai pris l'exemple de Granby–Bromont comme compagnie exportatrice, puisque cette région-là a 393 ou 397 PME, ce qui représente une des meilleures régions au Canada, et c'est la meilleure région au Québec en perspective de création d'emplois.

Même chose dans la Beauce. Dans la Beauce, on a une somme de PME extraordinaire qui est un exemple à suivre pour tous les industriels du Québec. Ça me porte à penser, M. le Président... Je fais des parallèles, au passage. Vous savez que la région Granby–Bromont et la région de la Beauce ont des députés libéraux. Donc, j'imagine que, lorsque le gouvernement du Parti québécois ne se mêle pas de leurs affaires, ça va bien mieux. J'espère que ça va continuer après la prochaine élection partielle, mais la preuve est là que, lorsque les gens se prennent en main et peut-être lorsque le gouvernement s'occupe moins de leurs affaires, ça va un peu mieux.

Ensuite de ça, la ministre nous a parlé tantôt de certaines mesures qui ont été prises dans le budget pour soi-disant créer des emplois. On en a parlé aussi à l'interpellation, des mesures que je qualifierais de tape-à-l'oeil, d'artifices, en fin de compte. Dans le budget, je dois dire que le ministre des Finances, à sa façon théâtrale habituelle, prend son verre d'eau et annonce que, pour les cinq prochaines années, les nouvelles PME n'auront pas d'impôt à payer, et tout le monde se met à applaudir: Bravo! Il a été établi clairement, et le ministre des Finances ne l'a pas nié non plus lors de l'interpellation, que les PME qui paient de l'impôt dans les cinq premières années, c'est très rare, et je lui ai même répété que votre ancien chef, M. Parizeau, avait déclaré qu'une PME qui paie de l'impôt devrait changer de comptable. Donc, encore là, c'est plutôt un artifice, du tape-à-l'oeil et c'est aucune mesure concrète. Je le répète encore, c'est dit, ça, à la suite d'un verre d'eau et d'un applaudissement général en Chambre lorsque le ministre des Finances annonce ça.

Il en a annoncé un autre. Le ministre vous en a parlé tantôt, un fonds d'investissement privé de 2 200 000 000 $. Le minimum d'investissement: 25 000 000 $. Durant la semaine de relâche, à Pâques, je me suis donné la peine d'appeler plusieurs industriels de mon comté, la Société de développement économique régional, et on a fait le tour des investissements de la région. Je vous répète, M. le Président, que la région Granby–Bromont est la meilleure région au Québec en perspective de création d'emplois. L'an dernier, on a eu une augmentation d'emplois de 6 %. Donc, je voudrais demander: Ce fonds-là de 2 200 000 000 $ avec un minimum d'investissement de 25 000 000 $, est-ce que ça va vous aider? La SODER de la région m'a sorti les chiffres: depuis 1993, dans la région de Granby– Bromont, le plus gros investissement de toutes ces compagnies-là, 393 compagnies, dépasse à peine 1 000 000 $. Pas 25 000 000 $, 1 000 000 $. Je le répète, M. le Président, c'est la région qui crée le plus d'emplois au Québec.

Donc, tout le monde se demande, avec un programme où ça prend 25 000 000 $ minimum pour investir, ça avantage qui. Je sais que dans notre coin ça n'avantage personne puis je suis certain que dans la Beauce non plus; donc, on se pose des questions. Qui ça avantage? Je demandais au ministre des Finances, comme le dit un des industriels chez nous: Est-ce que ce programme-là pourrait peut-être avantager une usine d'éthanol dans le comté de Verchères puis une usine de pâtes et papiers dans le comté de Jonquière? Mais, à part ça, rien; du moins, rien qui ne se créerait pas de toute façon.

Je pense que, même si on ne donne pas 25 000 000 $ à GM, probablement qu'elle pourrait peut-être s'installer, sauf que chez nous puis sûrement dans la région de la Beauce, qui, je le répète, sont des exemples à suivre en termes de création d'emplois, ce programme-là n'est encore que tape-à-l'oeil. Imaginez, M. le Président, lorsqu'on demande un minimum de 25 000 000 $, chez nous il n'y a pas de projet de 25 000 000 $. Il y en aurait peut-être un. La ministre s'en souviendra, il y a Hyundai qui a une grande usine vide; là on aurait de la place pour un projet de 25 000 000 $ et plus, mais le premier ministre, quand il s'est rendu en Corée, était à quelques kilomètres du siège social puis il a oublié d'y aller. Probablement un surplus de cocktails, à cette époque-là, un horaire trop chargé en rencontres sociales, sauf que chez nous on aurait aimé savoir, premièrement, si l'usine est à vendre. Si oui, combien? Parce que, si on veut trouver un nouvel investisseur, il faut savoir à quel prix ils veulent vendre. Ou bien, s'ils ne veulent pas vendre, ils «ont-u» l'intention de repartir quelque chose dans ce coin-là? On ne l'a toujours pas su. Donc, ça, c'est le seul projet qui serait peut-être au-delà de 25 000 000 $, mais pour nous le fonds d'investissement privé de 2 200 000 000 $, c'est encore un artifice. C'est encore une annonce qui se fait durant un discours du budget avec un grand verre d'eau et des applaudissements, sauf que, dans les faits, ça ne sert absolument à personne.

Donc, M. le Président, comme je vous l'ai dit tantôt, on a fait le tour des crédits budgétaires. Tout ce qu'on a, c'est une coupure de 16 % par rapport à une coupure de 5 % des autres crédits budgétaires. L'année passée, on a parlé plus spécifiquement du plan Paillé. Je suis certain qu'on va en reparler tantôt avec le président-directeur général de la SDI, qui est ici, sauf qu'on s'est aperçus, lors de la dernière année, que les pertes s'additionnaient rapidement. À la lecture des crédits de la SDI, on s'aperçoit qu'il y a déjà des pertes de plus de 34 000 000 $ dans le plan Paillé, sauf qu'il y en a 33 000 000 $ au cours des 12 derniers mois et on voit que la vitesse de croisière des pertes s'accélère. Si on fait une moyenne des pertes depuis 12 mois, c'est environ 3 000 000 $ par mois, sauf que les pertes s'accélèrent. Naturellement, les premiers versements ont commencé à être exigés des débiteurs, et, à ce moment-là, on s'aperçoit que ça devient de plus en plus difficile.

On se souviendra, M. le Président, du rapport du Vérificateur général l'an dernier qui disait que, dans ces programmes de démarrage d'entreprises là, il n'y avait aucun suivi. Donc, la preuve est faite que les pertes, à la vitesse où on les voit, pour ainsi dire, débouler depuis quelques mois, pourraient arriver à des chiffres assez astronomiques. Si j'ai bien compris, l'an dernier ces pertes-là ne sont pas... Elles seront, en fin de compte, reportées à l'année 1994 ou début 1995, alors que le prêt a été effectué. Donc, il faut savoir lire les crédits de cette année où on a une perte de 34 000 000 $ en 12 mois avec des pertes qui augmentent de mois en mois.

(14 h 50)

Dans les derniers mois, on a vu des pertes de 5 000 000 $, je crois, en janvier et de 4 000 000 $ en décembre, de 5 000 000 $ en novembre. Donc, par rapport à des pertes de 1 000 000 $ et quelques en avril ou en mars l'an dernier... Tantôt, j'adresserai une question plus pointue au président de la SDI en sortant les chiffres. Donc, on doit se poser des questions sur la façon dont on administre les fonds publics. D'un côté, on a dilapidé des sommes importantes dans un programme de démarrage d'entreprises sans trop savoir où allait cet argent. On le savait, sauf qu'il n'y avait aucune étude de faite correctement sur chacun des investissements qu'on faisait. On pouvait aussi bien avoir trois salons de bronzage sur la même rue, quatre restaurants, etc. M. le Président, vous n'avez qu'à circuler dans votre comté. Je suis convaincu que vous le faites et je suis convaincu que les députés alentour de cette table ont entendu des commentaires plus ou moins – surtout moins – élogieux sur le plan Paillé ou sur la façon dont on a distribué ces sommes-là, et, je le répète, à la veille du dernier référendum. On aura à subir les conséquences des pertes de ce montant-là.

M. le Président, c'est en gros ce qu'on voit dans les crédits de l'Industrie et du Commerce cette année, une baisse des dépenses de programmes de 16 % et surtout une non-diminution des effectifs, 1 080 fonctionnaires l'an dernier, 1 080 fonctionnaires cette année, et tout ça cause une augmentation de la gestion interne alors que le reste baisse. Au total, on baisse de 16 %. Donc, il y a beaucoup de questions à se poser sur l'administration de ce gouvernement-là, et j'espère qu'aujourd'hui enfin on aura des réponses à ces questions-là. On sait qu'au salon bleu nous avons la période des questions, c'est rarement la période des réponses, mais, étant donné que la ministre tantôt nous a dit qu'aujourd'hui on aurait des réponses à nos questions, nous sommes suspendus à ses lèvres et j'espère qu'elle pourra à tout le moins effleurer chacun de ces sujets-là et nous justifier pourquoi nous avons une diminution de 16 % des dépenses de programmes, une augmentation du coût de la gestion interne et toujours 1 080 fonctionnaires à l'Industrie et au Commerce.

Là-dessus, M. le Président, je ne sais pas si la ministre aurait quelques commentaires à apporter avant qu'on lui pose d'autres questions.

Le Président (M. Beaulne): Mais d'abord je demanderais s'il y a des députés du côté ministériel qui veulent faire des remarques préliminaires. Non? Pas nécessairement? Bon. Alors, M. le député d'Orford, vous pouvez y aller pour des remarques préliminaires.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Merci de gérer nos travaux, ici, aujourd'hui. Mme la ministre, on aura l'occasion de travailler ensemble dans les prochains mois, étant le nouveau porte-parole en matière d'industrie, de commerce, de science et de technologie. Alors, j'espère que vous et moi ensemble allons faire avancer le Québec sur la création d'emplois d'une façon particulière. Vous pouvez compter, comme je l'ai dit à votre ministre lors de l'interpellation, sur notre plus complète collaboration. Quand on voudra faire de l'économie, non pas un débat constitutionnel ou un débat linguistique mais bien un débat économique, nous serons là pour aider les Québécois et les Québécoises à faire avancer leurs entreprises, à faire avancer leurs enfants, à faire avancer les jobs au Québec.

Il y a des constats qu'il faut faire, Mme la ministre, M. le Président, devrais-je dire. Je dois m'adresser à vous. Excusez-moi. Je suis un jeune parlementaire, je ne connais pas encore toutes ces habitudes. Alors, le premier ministre, le 23 février, et c'est peut-être ce qui doit nous guider, nous, de l'opposition... C'est cette pensée de M. Bouchard, le 23 février, qui disait: Il faut cesser de maximiser nos qualités, de nous trouver admirables et de voir de façon un peu moins claire nos défiances, nos défauts, nos limitations et ce qu'il faut corriger. Ce n'est pas souvent que je m'inspire d'une façon particulière des paroles de M. Bouchard, mais cette fois-ci je vais m'en inspirer. Alors, on va essayer avec vous de voir un petit peu vos défiances, vos défauts, vos limitations et ce qu'il faut corriger, bien sûr, et c'est votre chef qui nous invite à le faire.

Je n'ai pas besoin de vous rappeler, Mme la ministre, M. le Président, que les Québécois dans leur ensemble, dans les derniers mois, dans les dernières années, s'appauvrissent, et il y a une série de statistiques. Je vais les donner très rapidement. Nous savons qu'en ce moment le Québec est la province, avec Terre-Neuve, la plus taxée sur le continent. Alors, quand on part du Mexique, là, qu'on monte jusqu'à la terre de Baffin, les Québécois, poche de 6 000 000 de population, nous sommes les plus taxés. Peut-être société distincte invite, mais les Québécois ne la trouvent pas drôle du tout.

Nous avons aussi en ce moment les plus hauts taux de faillite sur la partie canadienne du continent. Les Québécois individus ont des taux de faillite absolument astronomiques, en ce moment. Nous avons, et nous l'avons vu dans une étude qui est sortie pendant que vous étiez dans des pays plus cléments que les nôtres, des taux de pauvreté absolument inacceptables dans la province de Québec, en ce moment. Et ce qui est dramatique dans ces chiffres-là, c'est le rajeunissement de la pauvreté, le rajeunissement de l'itinérance, le rajeunissement du chômage. Dans ma propre circonscription électorale, où j'annonçais un carrefour jeunesse-emploi ce matin, en regardant les statistiques en fin de semaine, des jeunes, dans un comté qui est relativement prospère, je dois avouer... On a des taux de chômage, dépendant des villes, qui vont de 15 % à 16 %, 17 % chez nos jeunes, qui sont pourtant bien instruits, qui sont plus souvent qu'autrement, dans notre coin de pays, absolument bilingues. Il y a deux universités et il y a, même à ça, des taux de chômage très élevés. C'est décevant. Une partie du débat d'ailleurs avec le ministre a porté sur les jeunes, le manque d'horizons qu'on pouvait leur ouvrir. Moi, je vous invite comme ministre... Et on va faire, de notre côté, tout l'effort qu'on peut pour vous aider de ce côté-là, bien sûr.

En parlant des jeunes, il y a 14 000 chômeurs. Jour pour jour aujourd'hui sur il y a un an, il y a 14 000 jeunes de plus au Québec qui sont sur le chômage qu'il y en avait il y a un an. C'est préoccupant. On sait aussi qu'il y a au-dessus de 15 000 jeunes en bas de 35 ans, instruits, qui ont quitté le Québec. Alors, l'exode entre provinces, c'est 15 000 jeunes qui ont quitté le Québec, et ça aussi, c'est préoccupant. On perd des gens qui sont un peu tannés. Pour avoir été dans l'Ouest canadien cet hiver, c'était remarquable, je n'ai jamais vu tant de jeunes Québécois – on les reconnaît parce qu'ils sont bilingues, avec leur «packsack» – dans l'Ouest canadien essayer de se trouver des jobines un peu à gauche et à droite parce que le Québec ne correspond pas, n'est pas capable de répondre finalement à ce besoin qu'ils ont de se trouver des emplois. J'ai expliqué à votre ministre, dans cette interpellation, que des jeunes qui viennent nous voir dans nos bureaux de comté, qui ont des bacs en pédagogie et puis qui finissent comme concierges à la commission scolaire de Montréal, on vit ça constamment dans nos bureaux de comté, et ce n'est pas exactement très agréable.

La situation économique se détériore non seulement chez les jeunes, mais, dans le budget 1997-1998, on peut y voir le plus haut taux d'endettement depuis à peu près toujours, au Québec, un taux d'endettement absolument extraordinaire. Alors, les gens du Québec sont après s'endetter, et qui dit s'endetter dit aussi finalement s'appauvrir. Et on voit les graphiques, le taux d'épargne n'a jamais été si bas au Québec. Donc, non seulement les gens s'endettent, mais ils ne sont pas capables de se bâtir des réserves, en ce moment, et c'est la situation des ménages au Québec.

Mais revenons d'une façon un petit peu plus particulière à votre ministère, ce ministère, Mme la ministre. Je ne sais pas sous l'influence de qui, je ne sais pas qui comprend mal l'importance de ce ministère-là chez vous, mais les budgets vont passer de 334 000 000 $ à 229 000 000 $; c'est 35 000 000 $ de moins. Et là on est en bas du 1 %, hein? L'importance de ce ministère-là, en termes de budget, sur l'ensemble des budgets du Québec... On parle de 0,075 %. Alors, c'est devenu un ministère finalement qui fait bien des réunions, bien des rencontres, mais qui, à la marge, quand on regarde l'importance qu'il a acquise dans l'ampleur de l'appareil gouvernemental...

Mon confrère de Shefford, tantôt... Puis je veux revenir sur cet aspect-là. Les coupures touchent, dans votre ministère, d'une façon particulière les jeunes, qui, je pense, auraient besoin d'aide plus que jamais, finalement. Je vais finir en vous rappelant que, si au moins on avait une lueur d'espoir que les choses vont aller en s'améliorant... Mais ce n'est pas évident, évident. Pendant votre absence, la semaine dernière, c'était la Banque Royale – grande institution – qui nous rappelait que le PIB sera, pour la prochaine année, de 3,1 % au Canada et de 2,7 % pour le Québec. Ce sont des écarts importants, hein, quand on les regarde, venant de la Banque Royale, qui sont tout à fait crédibles.

Quand on dit qu'on pense que ça va continuer... Il y a ce sondage de la Chambre de commerce où 25 % des membres affirment que dans leur entreprise les projets d'investissement sont retardés en raison du contexte constitutionnel. Alors, sondage fait en février. Dans un autre sondage qui, lui, a été fait par Le Groupe Léger & Léger, que vous connaissez très bien, auprès de l'association des manufacturiers et des exportateurs du Québec, l'organisme dont M. Le Hir a été le directeur général pendant si longtemps, dont M. Ponton maintenant est le directeur général, alors 76 % des membres répondant à Léger & Léger disent que le principal obstacle au développement économique du Québec, c'est effectivement le climat politique, bien sûr.

(15 heures)

Si on continue, la semaine dernière, à l'assemblée des actionnaires, nous avons eu les actions de Leroux. Leroux, ces gens dans l'acier, très ancienne compagnie, chiffre d'affaires très important, les actions sont listées sur la Bourse de Montréal, et M. Leroux a été obligé de répondre à une question que, oui, l'effet Québec était un facteur indéniable et important en ce qui a trait au prix de ses actions.

Alors, j'aimerais vous dire, Mme la ministre, on est sorti du bois; ça va bien par en avant. Et là votre ministre, lui, se gargarise. Il prend le dernier mois ou le dernier trois heures ou la dernière semaine et demie, puis là il nous fait des statistiques absolument extraordinaires. Moi, j'ai connu ça, j'ai été conseiller financier. J'ai vu beaucoup de gens devenir tout à fait euphoriques sur le prix de l'action de la dernière journée sur le marché boursier. Il faut faire bien attention, là. Il faut rester très humble dans ce métier-là, de part et d'autre, et ne pas trop se gargariser quand on prend les dernières semaines et essayer de projeter sur les années à venir, parce que, si on le prend sur un terme un peu plus long, si on le prend de trop près, depuis l'arrivée de votre gouvernement, c'est loin d'être très heureux.

Et en lisant certains des documents... En passant, nous les avons eus jeudi en fin d'après-midi, deux grosses boîtes à poignées, Mme la ministre. Vous comprendrez qu'on n'a pas lu tous ces documents-là. Ça serait apprécié à l'avenir qu'on puisse recevoir les documents un petit peu plus à l'avance que le vendredi après-midi, alors que l'interpellation est le lundi midi. Mais on a pu en regarder quelqu'uns, et la question qu'on devra se poser un peu plus tard peut-être aujourd'hui, c'est dans un document, à la page 118, le secteur manufacturier et le commerce au Québec.

En 1996, on s'aperçoit que les ouvriers du Québec sont payés, si on les compare à l'Ontario, 2,71 $ de moins; si on les compare à l'ensemble du Canada, 1,58 $, et avec les États-Unis, il y a un 2 $ de différentiel. Il y a seulement trois secteurs où les gens du Québec seraient plus payés que l'Ontario. Alors donc, si nos gens sont moins payés, nous devrions être capables de créer de l'emploi beaucoup plus rapidement que la compétition. Au moment où nos gens sont moins payés, toujours selon une de vos études... Le ministère des Finances nous faisait parvenir, il n'y a pas très longtemps, La fiscalité des entreprises au Québec , et là on y dit, à la page 34, tous les avantages, quoique M. Ponton n'est pas d'accord avec ces chiffres-là, mais votre ministère, notre ministère des Finances nous dit comment au Québec les gens paient moins d'impôts et comment ils devraient investir au Québec.

Alors, on a des salaires moins élevés, on a, à ce que vous dites, de la fiscalité plus intéressante, et je dois aussi avouer qu'on a fait des efforts – et là-dessus je serais d'accord avec vous – très grands dans les derniers mois, dans les dernières années, en ce qui a trait à la formation de la main-d'oeuvre. D'ailleurs, il y a une entente qui va se signer aujourd'hui. Alors, avec ces trois éléments-là, j'ai de la misère à comprendre que l'Ontario nous dépasse, que les États-Unis nous ont dépassés et, à certains égards, le Nouveau-Brunswick.

Quand le ministre des Finances se gargarise, je l'invite à faire bien attention, parce que je pense que c'est la théorie de l'éponge, Mme la ministre. La théorie de l'éponge, c'est qu'une éponge a quatre côtés. Quand on regarde ce qui se passe économiquement, bien vous avez d'abord l'Ontario où là il y a une croissance économique – avec Mike Harris – absolument démesurée, on a ensuite les États-Unis – mon comté est adjacent au comté de la Nouvelle-Angleterre – on sait comment l'économie fonctionne très bien de ce côté-là et on a de l'autre côté le Nouveau-Brunswick qui a aussi effectivement ses heures de gloire en ce moment – et on sait qu'il partait de très loin. Bien sûr que, quand tout l'environnement économique est positif, en quelque part il faut qu'il y ait un effet d'entraînement sur le Québec.

Et, quand le ministre se gargarise de ça, je lui dirais: Attention! On peut douter que c'est à cause de vous, M. le ministre, et on peut peut-être penser qu'il y a tellement d'activités économiques tout alentour, et particulièrement une politique d'exportation que le Parti libéral a mise en place à l'époque où il était là, que ça a finalement fait des effets positifs sur le Québec. Mais ceci dit, je suis loin d'être sûr que c'est à cause des politiques que le gouvernement a mis en place. Alors, je finirai en vous donnant certains éléments.

Quand je vous dis que je suis loin d'être sûr que les prochaines semaines et les prochains mois vont être tout à fait rosés au Québec: le revenu personnel baisse, on l'a vu tantôt; l'endettement personnel est à la hausse, c'est absolument incroyable; les taux d'intérêts: aux États-Unis, il y a une forte pression sur les taux d'intérêts, et on l'a vu dans différents milieux américains où on pense même que l'inflation pourrait reprendre; le chômage persiste – je ne veux pas tomber dans la saga du chômage, les boutons me poussent à chaque fois que je me remets à parler de chômage au Québec, c'est désastreux; dans le comté du premier ministre, chez les jeunes, c'est le plus haut taux de chômage au Canada, on dépasse le 20 % – les achats d'équipement continuent à baisser d'une façon sporadique dans les derniers mois, là, je n'ai pas les chiffres, mais n'ont pas augmenté – alors que l'Ontario augmentait de 17 % dans les dernières années, le Québec a augmenté de 3,8 % dans les achats d'équipement – la croissance du PIB, je l'ai dit tantôt, sera plus faible au Québec que dans le reste du pays; le nombre de faillites, plus élevé au Québec qu'ailleurs; la dette publique est en forte progression, parce qu'on semble mélanger des choses entre le déficit de tous les ans et le total des dettes, alors le Canada a une dette de 600 000 000 000 $ – ça ne nous aide pas – le Québec a une dette de 80 000 000 000 $, et là on s'aperçoit qu'on est après régionaliser l'endettement, il faut parler aux centres hospitaliers dans la grandeur du Québec, il faut parler à plein d'organismes où on est après essayer de décentraliser et ces gens nous disent: On est après décentraliser des déficits, bon, enfin, ça aussi, c'est un autre débat dans lequel je ne veux pas embarquer; le fardeau fiscal des Québécois est le plus élevé.

Et il y a d'autres secteurs qu'on ne contrôle pas bien sûr, mais qui auront, je pense, à court terme des effets sur notre économie et je pense à l'effet de surchauffe du Dow Jones; ça aussi pourrait éventuellement avoir un effet plutôt négatif sur l'ensemble de l'économie québécoise. On ne passera pas à côté, si jamais ça devait se produire.

Alors, tout ça dit, Mme la ministre, on est préoccupé par les mois et les années à venir. Les gens d'affaires le sont. Le budget finalement, quand on regarde ça, là, la TVQ qui ne sera pas remboursée, somme de 500 000 000 $ pour l'industrie; alors, eux aussi se posent énormément de questions. Ceci dit, soyez assurée de notre collaboration pour travailler avec vous; on a plus de 10 heures à passer ensemble, alors on va essayer de les rendre très agréables. Merci, Mme la ministre.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, M. le député de Johnson, toujours à l'étape des remarques préliminaires.


M. Claude Boucher

M. Boucher: Tout à fait, M. le Président. Je n'avais pas pensé intervenir, compte tenu que je croyais qu'on allait entrer dans le vif du débat et le vif des propos qui doivent être tenus ici, c'est-à-dire l'étude des crédits. Mais, puisque nos deux collègues de l'opposition ont fait un discours extraordinaire sur la situation économique du Québec, j'aimerais d'abord rappeler à mon collègue d'Orford que j'avais l'impression qu'il parlait du Québec des années 1985 à 1994.

Il a décrit parfaitement la situation qu'on a vécue sous le régime libéral en parlant de la situation actuelle. Le Québec noir, on l'a connu dans ces années-là, le Québec du chômage. Je lui ferai remarquer d'ailleurs que l'écart entre le taux de chômage au Québec et le taux de chômage au Canada, presque depuis le début de la Confédération, est de 2 %. Cela n'a rien à voir avec la situation économique actuelle. Je lui rappellerai aussi que 95 % des emplois créés au Canada depuis l'été dernier l'ont été au Québec, 91 000 nouveaux emplois.

Cette performance extraordinaire, comme il l'a dit très bien... Et là vous avez vu un peu ses contractions. Il a dit que le Québec d'aujourd'hui, c'est un Québec en déroute à toutes fins pratiques et il terminait son intervention en disant que, si la situation économique s'améliorait – ce qui n'est pas le fait des provinces ou des états en déroute – c'est à cause de la performance économique des États adjacents au Québec, de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. Alors, là, il y a une contradiction. Il a défait par sa finale ce qu'il a essayé de faire dans tout son discours. On voit bien, là, que l'opposition ne sait pas où elle va, pas plus qu'elle ne l'a su pendant neuf ans.

Ce qu'on fait actuellement au Québec, c'est qu'on est train de nourrir non pas un cheval mort – comme ils ont fait avec les dépenses faramineuses qui nous ont conduits à des déficits records et une dette qui a doublé sous leur régime – on ne nourrit pas avec de l'argent emprunté un cheval mort, mais on est train de nourrir un cheval très vivant; l'économie du Québec est en train de renaître et les espoirs sont devant nous.

(15 h 10)

La seule lueur d'espoir évidemment à laquelle nos collègues d'en face s'accrochent, c'est celle de pouvoir prendre le pouvoir aux prochaines élections. Mais ce n'est pas une lueur d'espoir qui est très importante pour eux, vous le comprendrez, parce qu'ils savent qu'ils ne pourront pas le faire. Alors ils s'accrochent à d'autres types de lueur d'espoir. Et souhaiter comme ils le font, et prendre leur rêve pour la réalité, que la situation économique du Québec soit mauvaise, M. le Président, c'est disgracieux, et ce n'est pas une façon, comme le député d'Orford le disait tout à l'heure, d'offrir sa collaboration au ministre que de détruire de cette façon-là la réputation du Québec. Moi, je les invite à bien regarder la situation du Québec d'aujourd'hui, à bien voir comment le Québec est en train de se sortir de cette période de noirceur que nous avons connue entre 1985 et 1994. J'aimerais que l'opposition s'associe à nous, regarde ce qui s'en vient devant nous, jusqu'à quel point on est en train de redonner au Québec la force dont il a besoin pour se développer, et ils savent que, quand nous aurons tous nos moyens pour nous développer, alors que nous n'en avons que la moitié actuellement, nous allons bâtir un état extrêmement vigoureux sur le plan économique. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Johnson. Mme la ministre, avant de passer à un échange sur des questions plus pointues, vous avez, si vous le voulez, la possibilité de réagir aux remarques préliminaires qui ont été faites, pour un maximum de 20 minutes.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, je le veux, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Alors, vous avez la possibilité de le faire.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Je le veux, parce que, si la théorie économique, fort innovatrice d'ailleurs, du député d'Orford et du député de Shefford avait été aussi efficace, ils auraient pu durant les huit ou neuf années où ils ont été au pouvoir la mettre en pratique et peut-être que ça aurait pu donner des résultats. Malheureusement, ils ont bien gardé pour eux leur grand secret de développement économique du Québec.

J'aimerais établir au départ, M. le Président, que nous ne sommes pas ici pour nous insulter mutuellement. Le député de Shefford a commencé sa présentation en disant: Si la ministre dit vrai. Je voudrais demander à mes collègues députés d'être polis et respectueux. Nous sommes ici pour étudier les engagements, les crédits, et je pense qu'on peut le faire avec intelligence et politesse et avec un peu de classe. Alors, je vais dire la vérité, comme je le dis toujours, comme tous ceux qui passent ici doivent le faire, et je n'ai pas l'intention de commencer de bataille sur mes intentions et ma connaissance profonde.

Ceci dit, je voudrais aussi ajouter un autre commentaire parce que le député d'Orford a mentionné mes absences à plusieurs reprises, mon absence de la dernière semaine. Comme je pense que le ton était un petit peu choquant, j'aimerais indiquer au député d'Orford que, quand je m'absente, c'est soit pour aller accompagner une mission en commerce extérieur, dont j'ai la responsabilité, ou alors pour aller présenter les avantages du Québec, que je devrais peut-être présenter plus souvent au Parti libéral, j'en conviens, si on m'y invitait.

Je suis allée présenter l'avance qu'avaient les femmes entrepreneurs du Québec par rapport aux femmes des autres économies industrialisées, ce qui, soit dit en passant, a permis d'informer un peu, peut-être même les membres de la députation de l'opposition, sur la réalité de l'initiative et de l'entrepreneurship au féminin au Québec, qui est, il faut le dire, que ce soit parmi les plus jeunes ou les femmes plus âgées, exemplaire dans les économies industrialisées. Ça me fera plaisir de faire parvenir au député d'Orford une copie de mon texte. Il apprendra peut-être les forces de l'économie du Québec, puisque, quand on les présente à l'étranger, sous le grand chapiteau de l'enveloppe canadienne, il semble que nos messages passent beaucoup plus clairement et semblent être mieux compris. Alors, je le ferais avec grand plaisir.

J'aimerais apporter quelques commentaires quant au discours et à la réalité dont a parlé le député de Shefford, justement parce que les discours qu'il tient ne sont pas du tout représentatifs de la réalité. J'aimerais donner sur cette question une réponse concernant les investissements au Québec. Pour l'année 1996-1997, depuis le 1er avril 1996, on parle d'investissements de l'ordre de 2 000 300 000 $ au Québec. Je voudrais ajouter un commentaire qui est tiré des études faites par le Mouvement Desjardins qui, on le sait, a une équipe en conjoncture économique très poussée, une des meilleures – pas seulement au Québec, mais j'oserais dire en territoire canadien – qui indique que, durant la période des années quatre-vingt, où les libéraux étaient au pouvoir, l'examen des investissements totaux incluait toujours les investissement d'Hydro-Québec. Or, on sait qu'aujourd'hui les investissements d'Hydro-Québec sont beaucoup plus modestes.

Or, depuis que nous sommes au pouvoir, nous les excluons parce qu'ils sont beaucoup plus modestes et, si on regarde strictement les investissements privés – et c'est là l'indicateur de confiance en une économie, c'est là qu'on peut influencer comme gouvernement, en dehors de prendre les fonds des contribuables – les investissements privés en 1996 ont connu un augmentation de 9 % et de 4,4 % à ce jour, en 1997. Et ce sont eux qui prennent le relais des investissements au Québec. Et ça, M. le Président, c'est parce que le Québec est un bon site d'investissement et que nos conditions sont non seulement concurrentielles, mais elles sont à l'avantage des investisseurs privés. D'ailleurs, je suis d'accord avec les propos du député quand il dit que, quand le gouvernement n'intervient pas, ça va mieux. Peut-être qu'il aurait dû moins intervenir dans les années 1985. Mais, dans notre cas, les investissements essentiellement privés en témoignent.

Je voudrais aussi répondre à la question des effectifs, parce que la question des effectifs semble préoccuper le député de Shefford, avec raison d'ailleurs. Mais il aurait peut-être dû relire la réponse qui lui a été fournie au niveau des galées, parce que, si on regarde les prévisions de crédits qui ont été déposées, elles tiennent compte des réductions en termes de valeur du budget. Pour ce qui est des effectifs, nous ne savions pas, au moment où nous avons fait les budgets, quels étaient le nombre et la valeur des personnes qui se prévaudraient du départ de mise à la retraite anticipée.

En conséquence, si on regarde les chiffres des effectifs du ministère, je rappellerai au député, parce que je l'ai dit dans mes remarques d'introduction, mais je ne suis pas certaine qu'il les a entendus, peut-être qu'il était préoccupé par autre chose, que nous avons en 1996-1997 accueilli dans les rangs du ministère de l'Industrie et du Commerce – bien, là, j'espère qu'il m'écoute, là – l'équipe du commerce extérieur du MRI. Il y avait là 23 personnes qui se sont jointes à notre ministère. Nous avons aussi accueilli les services des affaires du commerce intérieur canadien, du marché canadien du ministère des Affaires intergouvernementales canadiennes. Il y avait là quatre personnes, et nous avons transféré au Conseil exécutif quatre personnes qui composaient le Secrétariat à la déréglementation.

Alors, nous sommes partis d'un effectif de 896 au 1er avril 1996 et nous avons eu au cours de l'année 42 départs assistés, pour un total, au 1er avril, de 892. Si on ajoute maintenant la SDI... le Conseil de la science et de la technologie, on monte l'effectif à 1 080. Et dans ce 1 080, on tient compte des départs assistés de 12 personnes de plus à la SDI. Deuxièmement, les départs assistés au 1er avril 1997. Là, je vais demander au sous-ministre de vous donner le chiffre exact parce que depuis le dépôt des crédits, on a le nombre de départs assistés au total pour cette année.

M. Brind'Amour (Jacques): Oui, il y a une provision, pour la...

Le Président (M. Beaulne): ...pour les fins de la transcription...

M. Brind'Amour (Jacques): Oui, Jacques Brind'Amour, sous-ministre. Au 1er avril 1997, nous avons, dans le cadre des crédits, une provision pour 66 départs assistés. Évidemment, ça dépendra si les gens veulent s'en prévaloir.

Mme Dionne-Marsolais: Voilà. Alors, je pense que c'est important de faire cette correction-là parce que c'était une préoccupation du député. L'autre commentaire que je veux faire, c'est concernant les crédits du ministère. Et encore là, dans mes remarques de départ, j'ai indiqué que les crédits du ministère, des organismes et des sociétés d'État qui s'y rattachent représentaient une diminution de 64 400 000 $ par rapport aux crédits de 1996-1997. Et essentiellement cette diminution-là s'explique par les ajustements qui ont été effectués au crédit de la Société de développement industriel, et j'ai bien pris soin de dire: Sans affecter sa programmation régulière auprès des PME.

Le second élément, ça a été la révision des modes d'intervention du Centre de recherche industrielle du Québec, et on aura l'occasion d'entendre les deux P.D.G. parler des changements, et enfin, la fin du programme Fonds de développement technologique et l'ensemble des réductions du budget de fonctionnement. En fait, ça veut dire qu'au ministère nos employés vont travailler peut-être un peu plus, un peu mieux, un peu différemment à l'aide des nouvelles technologies, mais je pense que c'est un défi que l'on peut rencontrer dans l'intérêt de la gestion des fonds publics.

(15 h 20)

Le dernier point que j'aimerais souligner, c'est les soi-disant fonds pour la SDI et les fonds pour les PME. Vous avez mentionné tout à l'heure qu'une PME, dans le dernier budget, ne paierait pas d'impôts. Je vous rappelle qu'on ne parle pas seulement de l'exemption d'impôts, mais aussi des charges de la main-d'oeuvre salariales qui sont des charges importantes pour une PME, comme pour toutes les entreprises, d'ailleurs. Alors, ce ne sont pas seulement des dépenses d'impôts et ce n'est pas seulement pour les deux ou trois premières années, mais c'est pour cinq ans. Donc, c'est une mesure qui n'est pas négligeable et qui est importante pour du démarrage d'entreprise.

Je terminerai, M. le Président, en rappelant un chiffre que j'ai mentionné à l'Assemblée, je pense – oui, lors d'une présentation – 95 % des emplois qui ont été créés depuis janvier en territoire canadien ont été créés au Québec. Il y a certainement quelque chose qui inspire la création d'emplois au Québec.

En terminant, l'effet Québec dont parlait le député d'Orford. Quand j'étais à Toronto, l'effet Québec pour nous, c'était la perception que l'on avait du Québec et c'est la prime de préjugés envers le Québec. C'est un effet que vous connaissez sûrement très bien et dans ces conditions-là je pense que les commentaires sont les suivants, sur lesquels tous les financiers s'accordent.

L'effet Québec, il existe au Canada, et c'est pour ça que de plus en plus de nos entreprises vont se financer à l'extérieur du Canada, parce qu'elles sont considérées là comme des sociétés d'exploitation normales. C'est d'ailleurs pourquoi plusieurs de nos sociétés envahissent le marché américain.

Le Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. Avant de passer la parole au député pour des échanges plus pointus, je rappellerai que c'est la pratique dans cette commission de faire les débats de manière civilisée. Mais j'aimerais revenir sur l'allégation que vous avez faite concernant les propos du député de Shefford. Comme vous avez pu le voir, la commission ni la présidence n'a relevé le fait que le député avait dit: Si la ministre dit vrai. De la façon dont je l'ai interprété et dont il semblerait que la majorité des collègues l'ont interprété, c'est: Si les données qu'invoque la ministre sont exactes. Moi, c'est comme ça que je l'ai compris. Je ne l'ai pas perçu comme une attaque à votre intégrité personnelle et je pense que c'est dans ce sens-là que l'invoquait le député. Alors, cet incident, je pense, est clos. J'inviterais maintenant le député de Shefford à poser des questions à la ministre dans le contexte des volets 1, 2 et 3 des programmes que nous examinons.


Discussion générale


Société de développement industriel (SDI)


Taux de pertes du plan Paillé

M. Brodeur: Je vous remercie, M. le Président. Vous êtes bien fin. Donc, je viens d'écouter attentivement la ministre. J'aimerais dire, d'entrée de jeu, que ça fait déjà une heure et quelque, là, qu'on pellette des nuages. J'aimerais en venir à des questions plus pointues. C'est certain que, malgré ma jeune expérience politique, j'ai quand même été élu dans une partielle, alors que le parti dont je fais partie était au pouvoir, et on entendait les mêmes histoires: Ce n'est pas de notre faute; c'est de votre faute. Puis là on entend la même chose. Donc, j'aimerais ça qu'on change peut-être de niveau de langage et qu'on passe vraiment, comme l'a dit la ministre au début, à une période de réponses.

Donc, pendant qu'on a nos gens de la SDI ici, j'aimerais immédiatement peut-être m'adresser soit à la ministre ou à M. Roquet, par votre intermédiaire naturellement, M. le Président. Ne bougez pas. J'avais des chiffres ici tantôt concernant le plan Paillé et j'en ai parlé dans mon introduction. J'ai ici un rapport de la Société de développement industriel du Québec, Étude des crédits 1997-1998, Renseignements particuliers, à la question 24. On a une nomenclature des pertes subies par le plan Paillé depuis juillet 1995. On voit particulièrement qu'il y a une vitesse de croisière qui fait en sorte que les pertes augmentent de mois en mois à partir d'avril 1996, donc plus ou moins 12 mois. On a un total de déboursés à date, c'est-à-dire en date du 21 mars 1997, de tout près de 35 000 000 $. Plus de 33 000 000 $ de ces pertes ont été inscrites depuis 12 mois.

Donc, j'aimerais savoir, la Société de développement industriel, quelle est son expectative de pertes pour l'an prochain, alors qu'on voit que les pertes ont atteint des chiffres record en novembre de 5 000 000 $, en janvier de 4 000 000 $ et en août dernier de 4 000 000 $? Donc, on voit qu'il y a une augmentation sensible des pertes. Il y a des mauvaises langues sur le terrain qui disent que le plan Paillé, rendu à terme, devrait enregistrer des pertes d'environ 200 000 000 $. C'est peut-être des mauvaises langues, sauf que j'aimerais entendre du président de la SDI; à la vitesse où vont ces pertes-là...

Et d'ailleurs, on se souviendra en décembre, par un beau vendredi matin, j'avais posé la question à la ministre: Qu'est-ce qui se passe avec les pertes du plan Paillé? Je me souviens de la réponse. On avait parlé de tourisme plus que des pertes du plan Paillé, je crois. J'aimerais savoir de la part du président de la SDI si ce qu'on entend sur le terrain pourrait s'avérer vrai, particulièrement lorsqu'on voit des pertes de 33 000 000 $ en un an.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, M. André Côté et M. Roquet se sont joints à moi. Alors M. Roquet, le président-directeur général, va répondre aux questions spécifiquement sur la SDI.

Le Président (M. Beaulne): M. Roquet, vous avez la parole.

M. Roquet (Louis-L.): Merci, M. le Président. Les réclamations payées à date sont de l'ordre de 34 900 000 $ sur un en-cours d'à peu près 390 000 000 $, ce qui représente à peu près 9 % de l'en-cours total. Au moment où le programme a été créé, les provisions qui ont été établies ont été établies – je crois prudemment – sur la base de l'expérience qui était disponible. Or, l'expérience disponible en matière de programme de démarrage, M. le Président, vous en conviendrez, n'est pas très abondante.

Actuellement, les chiffres de provisions qui sont normalement retenues pour nos opérations sont de 15 % quand il s'agit d'une garantie sur un prêt industriel et commercial. Celle qui a été retenue, avec l'accord du ministère des Finances, a été de 35 %. Si – et j'en suis convaincu – à l'expérience, ces provisions s'avéraient trop optimistes, elles seront corrigées, révisées et je suis sûr que non seulement la commission parlementaire, mais l'Assemblée nationale en seront informées.

Pour le moment, nous ne sommes pas surpris de voir le taux de pertes ou le taux de réclamations s'accélérer. Comme vous l'avez souligné tout à l'heure dans votre introduction, M. le député, plusieurs des interventions ont bénéficié d'un congé d'une prise en charge d'intérêts, et l'obligation de rembourser ou de payer les intérêts a précipité soit l'abandon des affaires, soit la faillite de plusieurs entreprises.

Actuellement, on n'a pas d'indication. Il faut faire attention aussi; il y a une distinction – et je ne dis pas que vous avez confondu dans votre exposé, M. le député, mais c'est davantage dans la perception publique – il y a une différence entre le taux d'échecs et le taux de pertes. Autrement dit, on pourrait avoir 50 % des entreprises soutenues par ce programme-là qui abandonnent les affaires ou font faillite, et la perte nette pourrait être de 35 %. Ce sont deux taux qui sont différents. D'abord, parce que le programme ne garantit pas la perte à 100 % et deuxièmement parce que la réalisation des actifs permet la récupération de certains montants et la réduction de la perte.

(15 h 30)

Mais effectivement je pense qu'il faut qu'on soit réalistes: les démarrages d'entreprises sont des entreprises qui sont périlleuses. Il existe des statistiques, selon les sources et selon les moments, qui nous disent que, sur une période de trois ans, de cinq ans, de sept ans, de 10 ans, le taux de survie des entreprises est de x. Pour le moment, tout ce que je peux vous dire, c'est que nous sommes, comme institution financière du gouvernement du Québec, adéquatement approvisionnés, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. Roquet. M. le député.


Évaluation du plan Paillé en termes de retombées économiques et de création d'emplois

M. Brodeur: Oui. Merci, M. le Président. Donc, si j'interprète bien les propos du président de la SDI, nous avons, à date, puis la très grande majorité de ces pertes-là est dans la dernière année, ce qui représente 9 % ou 10 % du montant total investi, et on parle de 390 000 000 $. J'ai bien compris aussi que, ça, c'est des pertes, c'est les argents qui ont été déboursés par la SDI. Ça exclut naturellement l'argent qui a été récupéré par les institutions financières par d'autres garanties, peut-être, qui ont été prises auprès de ces gens-là.

Ma question va s'adresser plutôt à la ministre. On a vu, l'an passé, un nombre de création d'emplois assez minime. Tantôt, la ministre nous parlait de 95 % des emplois au Canada depuis janvier. Je vous ferai remarquer qu'on est au début d'avril. L'année passée, on a parlé de 60 % toute l'année, puis on est arrivé à la fin de l'année avec 5 %. Il semble qu'à partir du programme – on va l'appeler le plan Paillé, parce qu'on l'avait appelé comme ça l'an passé – donc en 1994, en 1995, en 1996, il n'y a pas réellement eu de création d'emplois. On parlait possiblement de 50 000 emplois créés par ce programme-là. Donc, à l'usage, on voit que, pour ainsi dire, il n'y a rien du tout. On ne peut pas parler non plus des chiffres, il n'y a pas de chiffres concernant le déplacement d'emplois. Il est évident qu'avec la façon dont on a procédé dans ce plan-là on a sûrement créé, entre parenthèses, ce qu'on pourrait appeler la concurrence presque déloyale envers d'autres entreprises qui ont dû fermer des portes ou mettre des gens à pied, aussi.

Donc, à partir des données qu'on a là, on enregistre des pertes à partir d'un programme, sauf que, d'un autre côté, de façon plus précise, il n'y a aucune création d'emplois. Comment la ministre analyse-t-elle cette perte sèche? D'ailleurs, le président de la SDI, tantôt, nous disait qu'on ne peut pas, à cette date-ci, prévoir le montant des pertes. On nous suggère que peut-être il pourrait être plus élevé; on sera averti, à ce moment-là. Comment peut-on analyser ces pertes que je considère assez importantes, qui sont, à date, de 10 %? Imaginez-vous, quand on va se mettre à rembourser le capital aussi, la vitesse de croisière des pertes va augmenter énormément par rapport à une création d'emplois que je qualifierais de nulle, suite à ce programme-là, à cause, peut-être, de pertes d'emplois ailleurs ou de déplacement d'emplois, tout simplement. Donc, comment la ministre peut-elle justifier, en date d'aujourd'hui, ou peut-elle donner son appréciation sur un programme qui, en pratique, me semble avoir été de nul effet?

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: D'abord, j'aimerais peut-être passer la parole au président-directeur général qui pourrait nuancer ou compléter des éléments de la question du député, parce qu'il y a des nuances importantes à faire au niveau des constatations qu'il semble faire. Alors, si vous me permettez, je vais demander à M. Roquet de prendre cette question et je réagirai après.

Le Président (M. Beaulne): M. Roquet.

M. Roquet (Louis-L.): M. le Président, vous savez que, quand le gouvernement confie à un ministère ou à une institution la responsabilité d'un programme, il lui confie en même temps la responsabilité d'évaluer l'efficacité ou les retombées de ce programme-là pour le bénéfice et du gouvernement et de l'Assemblée nationale qui a autorisé les crédits pour ce programme-là.

Dans le cas du plan Paillé – si vous me permettez, je vais continuer à l'appeler le plan Paillé, pour simplifier le propos – il était difficile de faire cette évaluation-là avant qu'un nombre suffisant d'entreprises aient pu terminer la période où elles bénéficiaient d'une prise en charge d'intérêts et aient opéré, mettons, en moyenne, une année dans des conditions de concurrence normales. Alors, le programme ayant débuté en décembre 1994 avec quelques prêts, c'était le tout démarrage, nous sommes arrivés à cette période au début de l'année calendaire 1997 et nous avons négocié avec le Bureau de la statistique du Québec un protocole de recherche exhaustif portant sur un échantillon de 1 800 entreprises du plan Paillé, un échantillon qui donne un niveau de fiabilité qui est acceptable aux conclusions que l'on trouvera.

Nous avons aussi convenu d'élargir la portée de cette enquête-là ou de cette étude-là beaucoup au-delà de ce qu'on fait normalement dans une étude de retombées économiques, c'est-à-dire que nous avons demandé, par exemple aux entreprises dans l'échantillon, non seulement combien d'emplois avaient été créés, mais d'où venaient les employés. Est-ce qu'ils étaient à l'emploi d'un concurrent? Est-ce qu'ils étaient à l'assurance-chômage? Est-ce qu'ils étaient à l'aide sociale?

Alors, ce portrait-là, le BSQ qui a effectué le sondage, qui est en train de le colliger, nous garantit des résultats et un premier niveau d'analyse pour la fin du mois de mai. J'aurais beaucoup aimé pouvoir l'apporter à la commission parlementaire, mais je peux prendre l'engagement, je pense, si ma ministre l'autorise... Ce rapport-là sera un rapport public. Il a été payé avec des fonds publics qui avaient été mis à la disposition du MICST pour faire l'évaluation du programme. Je pense que, l'échantillon étant assez important, on pourra tirer des conclusions non seulement sur l'impact global du programme en termes de création d'emplois, en termes de retombées fiscales, etc., mais sur l'impact par secteur économique, si vous voulez, l'industriel, le manufacturier, le commerce de détail, les services aux entreprises, etc., qui sont les différentes catégories d'interventions qui ont été soutenues par le plan Paillé.

Le Président (M. Beaulne): M. Roquet, pouvez-vous disposer de suffisamment d'exemplaires pour les différents membres de la commission?

M. Roquet (Louis-L.): Je pense que le rapport sera rendu public, mais certainement que le... Si vous me permettez de donner une autre information. Mme la ministre pourrait peut-être répondre aux questions sur la diffusion du rapport?

Le Président (M. Beaulne): D'accord. C'est important de déterminer ici si vous vous engagez à le remettre à la commission pour qu'il soit diffusé aux membres de la commission ou si vous dites que vous allez le déposer à l'Assemblée nationale, au salon bleu, à l'intention de tous les députés, là. Il faut qu'on s'entende, pour les fins de nos transcriptions. Alors, je laisserai la ministre répondre à cette question.

M. Roquet (Louis-L.): Une autre information qui est importante quand on parle des coûts du programme. Vous savez, M. le Président, que, quand un gouvernement investit dans un projet, du seul fait de la structure de fiscalité, dès qu'un gouvernement investit 1 $, il en récupère automatiquement à peu près 0,35 $, ce qui veut dire qu'en pratique jamais un gouvernement n'investit 1 $ dans l'économie. Il investit 0,65 $, c'est automatique. Ceci est confirmé par des études que le BSQ a faites avec son modèle économique «input–output» et basées sur la structure industrielle et sur la base de données de la SDI, donc adaptées à notre portefeuille, ce qui nous permet de dire que, depuis le début du plan Paillé, seulement avec la réalisation des projets, la construction, l'achat d'équipement, etc., le gouvernement du Québec a récupéré 100 000 000 $ en fiscalité, non pas en avantages indirects, etc., mais en fiscalité réelle, ce qui réduit le coût d'un programme du type de ce programme-là d'aide à l'investissement dans le démarrage d'entreprises.

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, Mme la ministre, pour éclaircir également la question du document, là.

(15 h 40)

Mme Dionne-Marsolais: Alors, un certain nombre de commentaires. En ce qui concerne le rapport qui a été demandé à la SDI, je crois que, dès qu'il sera déposé au Conseil et approuvé par le Conseil, on le rendra public. L'objectif que l'on poursuit avec ce programme-là, depuis le début, c'est de combler un manque dans la courbe de capital de financement disponible au Québec. On le sait, au Québec, on a entre 45 % et 50 % de tous les fonds de capital de risque au Canada. Ce que l'on sait aussi, c'est que, en amont, le capital de démarrage est défaillant, au Québec, et que nos institutions financières n'ont pas une expérience approfondie de financement d'entreprises en démarrage. L'objectif de ce programme-là était de leur donner une occasion d'apprendre et d'appuyer le démarrage de certaines entreprises. Alors, il y a eu des échecs, bien sûr, mais qui dit échec dit aussi réussite. Il y a eu d'excellentes réussites. Et c'est à la lumière des résultats, après un certain temps dont a parlé le président-directeur général, que l'on verra ce qu'il faut améliorer dans ce type d'exercice.

C'est pourquoi le rapport est important, pour qu'on puisse orienter les actions du gouvernement de manière efficace, de manière non pas, comme l'a mentionné le député de Shefford tout à l'heure, à mettre en péril des activités industrielles qui existent déjà, mais à appuyer les initiatives d'entrepreneurs par rapport au développement de projets. Parce que l'objectif qu'on poursuit avec ce programme-là comme avec les autres, c'est d'augmenter la création d'emplois. Il y a des entreprises qui ont bénéficié du financement, du capital de démarrage issu du programme de démarrage d'entreprises qui ont créé jusqu'à 20, 25 emplois. Ce sont de grands succès. Alors, il ne faudrait pas conclure, parce qu'il y a aussi des échecs et c'est la courbe normale qui est en cause ici, c'est vrai pour toutes les institutions financières, c'est vrai pour tous les programmes qu'on lance.

Alors, dans ce contexte-là, quand nous aurons fini une analyse des retombées de ce programme-là à l'aide du modèle interindustriel du Québec, on le rendra public et ça nous permettra de progresser pour appuyer nos entrepreneurs, parce que c'est un problème qui existe à travers tout le Québec. Les sociétés de capital de risque n'ont pas la masse critique souvent ou l'intérêt de financer des sociétés en démarrage. C'est pourquoi d'ailleurs Innovatech Québec–Appalaches – et vous en parlerez quand on questionnera Innovatech – a concentré et a réservé 3 000 000 $, si ma mémoire est bonne, pour appuyer leur accès aux résultats de recherche universitaire pour justement appuyer la mise au point de plans d'affaires et la mise au point de demandes de brevets, pour qu'on puisse développer un produit ou un procédé à son étape de précommercialisation, l'étape où une société de capital de risque est intéressée à investir et à regarder plus attentivement ses chances de réussite, et donc un investissement plus important. Parce que des investissements en bas de 100 000 $ dans du capital de démarrage, il ne s'en fait pas beaucoup. C'est un très gros manque pour l'économie du Québec et c'est à cette niche-là de marché que le programme de démarrage s'est concentré.

Le Président (M. Beaulne): M. le député, je vais passer la parole aux députés ministériels. Votre bloc d'échanges de 20 minutes étant terminé, vous pourrez revenir par la suite. Alors, M. le député de La Peltrie.


Aide aux entreprises dans les régions affectées par les inondations en juillet 1996

M. Côté: Merci, M. le Président. Mme la ministre, bonjour et bienvenue à cette commission, ainsi que votre équipe. Alors, l'an passé, vous vous souviendrez qu'on a eu beaucoup de pluie qui a occasionné des dégâts dans différentes régions du Québec et qui a eu des effets néfastes au niveau touristique. Est-ce que vous pouvez un peu nous faire un bilan du programme de la SDI en faveur des entreprises touristiques, relativement à ces régions qui ont été affectées par ces pluies diluviennes?

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Avant de passer la parole au président de la SDI, j'aimerais peut-être indiquer que... Vous vous rappellerez qu'au moment où on a regardé l'état des entreprises dans les régions qui ont été affectées par les pluies diluviennes de l'été dernier, on s'est rendu compte qu'il y avait un fort pourcentage d'entreprises qui avaient des problèmes de fonds de roulement et qui étaient soit des entreprises à but lucratif ou à but non lucratif. Comme dans le secteur touristique, il y en a beaucoup. Dans ce contexte-là, on a demandé à la Société de développement industriel de regarder – on a modifié un certain nombre de conditions d'accessibilité à ces programmes – de porter une attention particulière. Elle a étudié un certain nombre de dossiers – peut-être que le président pourrait nous donner les résultats – qui ont répondu – c'est ce que le secteur touristique nous dit – à un besoin très important de fonds de trésorerie pour ces entreprises.

Le Président (M. Beaulne): M. Roquet.

M. Roquet (Louis-L.): M. le Président, la SDI a eu deux types d'intervention auprès des entreprises qui, sans avoir été directement sinistrées, c'est-à-dire sans avoir subi des dommages matériels, avaient subi des dommages financiers importants et mesurables. Par exemple, des entreprises de croisières qui avaient vu des commandes fermes prises par des grossistes annulées à la dernière minute à cause des sinistres de l'été dernier. Alors, nous avons, à date, octroyé 40 interventions, pour un peu plus de 1 000 000 $, et 27 autres interventions sont à l'étude et devraient être autorisées, pour la plupart d'entre elles, si on se fie à la moyenne historique, dans les quelques prochaines semaines. Ça, c'est le premier ensemble de mesures, si vous voulez. C'est une variante du Programme d'investissement en démarrage d'entreprises, ce qu'on a appelé le volet sinistrés.

Les autres mesures que nous avons faites, c'est dans des entreprises qui sont plus importantes et pour qui une garantie portant sur un prêt maximum de 50 000 $ aurait été insuffisante. Ce sont des entreprises qui sont saines – c'est une des conditions du programme – mais qui ont eu une mauvaise saison qui, sans mettre en danger la survie de l'entreprise, les met dans une situation d'encaisse extrêmement serrée. Alors, dans ce cas-là, ce que nous avons fait, c'est que nous nous sommes approchés des institutions financières et d'autres fournisseurs de ces entreprises-là qui sont nos partenaires. Nous avons négocié des amendements à nos actes de garantie et aux prêts et nous avons convaincu, dans certains cas, par exemple l'institution financière d'accorder un moratoire sur le remboursement du capital pour enlever la pression sur l'entreprise et lui permettre de faire une bonne saison, la saison 1997, on l'espère, pour se redresser. Alors, c'est deux trains de mesures différents. Dans le deuxième cas, c'était vraiment au cas par cas.

M. Côté: À part le Saguenay–Lac-Saint-Jean qui a été beaucoup affecté, est-ce qu'il y a d'autres régions aussi qui ont eu des pluies assez importantes? Est-ce qu'il y a eu aussi des interventions dans d'autres régions que le Saguenay–Lac-Saint-Jean?

M. Roquet (Louis-L.): Oui, il y a eu des interventions. Il y en a eu en Gaspésie. Il y en a même eu dans le coin de Baie-Saint-Paul, etc. Il ne faut pas oublier que beaucoup de ces entreprises touristiques – on ne parle pas nécessairement de ce qu'on appelle communément un gîte du passant ou un «bed and breakfast» – avaient des réservations qui avaient été faites par des grossistes en voyages, si on pense, par exemple, aux entreprises de croisières, etc. Quand on a vu les nouvelles sur le désastre, les gens n'ont pas vraiment enregistré quelle était la région qui physiquement était affectée et les grossistes ont annulé des excursions qui n'avaient rien à voir avec le Saguenay, ou des séjours dans d'autres régions.

Quand on regarde le dossier, on n'octroie pas cette aide-là à l'aveuglette. On s'aperçoit que, de fait, dans des régions à l'extérieur de la région sinistrée, il y a des réservations qui ont été annulées en invoquant les difficultés de transport, le refus des touristes de venir parce qu'ils ont peur qu'il y ait des effets de débordement puis que ce soit, à la limite, tout le Québec qui soit paralysé par ça. Alors, ça a été beaucoup plus large. Mais, sans faire d'interprétation excessive des règlements, on peut vraiment attribuer cette situation-là au sinistre de l'été dernier même si c'est dans une région qui est différente.

(15 h 50)

M. Côté: Est-ce qu'il va y avoir, au cours de la prochaine saison, une évaluation assez pointue qui va se faire pour les mesures que vous avez prises, si effectivement elles vont être bénéfiques?

M. Roquet (Louis-L.): Certainement. Comme tous les programmes que nous avons, nous faisons une évaluation. Dans le cas de ce volet-là, ce qu'on veut vérifier très rapidement, c'est, après la fin de la prochaine saison, donc l'automne prochain, être en mesure d'évaluer si cette mesure-là, qui était, dans le fond, une bouffée d'oxygène, était adéquate, était suffisante. Ces entreprises-là deviennent des clients de la SDI. On a une obligation vis-à-vis d'elles. On va faire l'évaluation de l'aide et des besoins ultérieurs, s'il en est, dès la fin de la prochaine saison touristique d'été. Parce que c'est surtout des entreprises qui font du tourisme d'été. On en a quelques-unes qui font du tourisme d'hiver – de nature – mais, pour la très grande majorité, c'est du tourisme d'été.

M. Côté: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Johnson. Oui, avez-vous fini?

M. Côté: M. le Président, est-ce que... J'aurais d'autres questions, pas nécessairement à la SDI. Est-ce qu'on doit revenir?

Le Président (M. Beaulne): Non. Je pense qu'on est mieux de centrer nos questions sur la SDI, d'autant plus que je pense que nos invités sont ici pour une période de temps limitée. D'ailleurs, pour le bon fonctionnement de nos échanges, dans la mesure du possible, si on peut passer vos préoccupations qui se rapportent à la SDI en priorité, ce serait préférable.

M. Côté: Et, pour l'ensemble du ministère, on pourra y revenir?

Le Président (M. Beaulne): On pourra y revenir plus tard. Mais là on va toucher principalement celles sur la SDI. Allez-y, M. le député de Johnson.


Dossiers Magnola, Tafisa et Kruger

M. Boucher: Moi, j'ai trois entreprises ou futures entreprises, dans ma région, qui m'intéressent évidemment au plus haut point et qui intéressent sûrement la SDI. J'aimerais avoir des informations sur la présence de la SDI dans les projets Magnola, dans la région d'Asbestos, Tafisa, dans la région de Lac-Mégantic, et Kruger, plus précisément à Bromptonville, l'installation d'une machine à papier couché.

M. le Président, Mme la ministre voudrait vous parler.

Le Président (M. Beaulne): Oui, allez-y, Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce qu'on peut demander au président de la SDI de répondre aux préoccupations du député? Il avait des questions très précises, à savoir trois investissements.

Le Président (M. Beaulne): Oui, certainement.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, M. Roquet, peut-être que vous pourriez répondre?

M. Roquet (Louis-L.): Si vous me permettez, je vais commencer par parler brièvement, M. le Président, du dossier Tafisa qui est une société espagnole appartenant à un holding portugais, qui s'est implantée à Lac-Mégantic, dans le cadre d'une usine de panneaux à fibres de bois orientées, ce qu'on appelle du panneau OSB. Le partenaire normal de Tafisa aurait été REXFOR, au moment où l'investissement a été fait. Mais REXFOR avait à ce moment-là un investissement dans une société concurrente de Tafisa et c'est ce qui a amené la SDI à jouer un double rôle, ce qu'elle ne fait à peu près jamais, c'est-à-dire celui de prêteur ou de garant et celui d'investisseur en équité dans le projet.

Tafisa a annoncé au ministère des Ressources naturelles son intention de doubler la ligne de production, ce qui représente un investissement d'à peu près 100 000 000 $. Nous leur avons suggéré, maintenant qu'il n'y a plus de conflit d'intérêts comme il pouvait y en avoir un il y a quelques années, que leur partenaire naturel, s'ils avaient besoin d'une injection d'équité, serait REXFOR plutôt que la SDI, mais que, à l'intérieur des règles de cumul d'aide, d'un maximum d'aide gouvernementale dans un projet qui demeure un projet de PIB, nous étions prêts à participer au financement sous forme d'une garantie, par exemple, si REXFOR créait un montage financier dans lequel, en plus de l'équité, il y avait un financement bancaire qui requérait une garantie.

Récemment, ils nous sont revenus. Notre objectif – je vous avoue, mon objectif personnellement – étant de transférer le dossier à une société d'État qui a une expertise particulière dans le domaine du bois... Le dossier nous est revenu avec un plan d'affaires détaillé. Nous sommes à l'étudier actuellement et nous ferons éventuellement une recommandation – «éventuellement», c'est rapidement, parce que le président du Conseil doit venir en visite dans les semaines qui viennent – à nos ministres respectifs – dans le cas de REXFOR, au ministre des Ressources naturelles; dans le cas de la SDI, au ministre d'État de l'Économie et des Finances – sur la façon la plus intéressante, pour le gouvernement du Québec, de susciter cet investissement-là, tout en minimisant la mise, parce que c'est un projet qui est très rentable. Le premier investissement de Tafisa a été très rentable aussi.

M. Boucher: Précisément sur cet investissement-là, est-ce que vous ne demandez pas à la compagnie de retirer vos billes du premier investissement, actuellement?

M. Roquet (Louis-L.): Non. Il y a eu une discussion à cet effet avant que j'arrive à la SDI, c'est-à-dire il y a plus de deux ans. Quand je suis arrivé à la SDI, j'ai émis l'opinion qu'il était aberrant pour le gouvernement de se désengager d'un projet qui en était encore à une phase de démarrage. Qu'éventuellement le gouvernement s'en retire pour utiliser les fonds dans d'autres projets, comme financier et non pas comme personne politique, ce que je ne suis pas, mais comme financier, m'apparaît être raisonnable. Mais, comme financier, il m'apparaissait aberrant de demander à un projet qui était en démarrage de racheter la part du gouvernement, d'autant plus que cette part-là aurait été rachetée à un prix de beaucoup inférieur à celui qui pourrait être obtenu maintenant, seulement sur la base de la valeur aux livres. Alors, ça ne m'apparaissait pas une décision sage ou une recommandation sage à faire à notre ministre de tutelle.

Maintenant, je pense que ça va dépendre vraiment de la volonté du partenaire principal, de quelle est la quantité de capital qu'il est prêt à investir et qu'est-ce qu'il veut laisser à d'autres partenaires locaux. Parce qu'il y a des partenaires qui sont des fournisseurs de matières premières, dans ce projet-là, des partenaires locaux de Lac-Mégantic, etc., qui ont investi dans le projet aussi. C'est ce montage-là qui est en train de se négocier.

Le seul retrait qui nous avait été demandé – et ça, c'était une concession qui nous était demandée par Tafisa – c'était que nous abandonnions une option que nous avons, de 1 200 000 actions. Ce que nous avons indiqué, c'est que nous étions prêts à recommander au gouvernement de concéder un tel avantage, mais dans un contexte où il y aurait un projet majeur avec des investissements et de la création d'emplois, mais certainement pas pour bonifier l'investissement qui avait déjà été réalisé.

Ça résume à peu près l'état de la situation sur Tafisa, M. le Président.

M. Boucher: Il y a aussi les deux autres.

M. Roquet (Louis-L.): Pour ce qui est de Kruger, c'est un peu la même situation. Au tout début, la SDI a été approchée pour offrir une garantie. Nous trouvions, sur le plan strictement financier, qu'il n'y avait pas assez d'investissements en capital dans le projet et que le gouvernement, dans ce projet-là, assumait un niveau de risque astronomique, pas parce que le projet n'est pas un bon projet, au contraire, mais parce que l'effet de levier dans le montage financier était beaucoup trop important. Alors, les gens de Kruger ont fait leurs devoirs et leurs leçons. Ils ont trouvé des partenaires et ils ont trouvé l'équité nécessaire. Il est actuellement à l'étude et c'est probablement le type de projet qui pourrait être financé sur la base du programme FAIRE qui a été annoncé lors du dernier budget.

M. Boucher: On m'avait dit que le montage financier était réglé. Est-ce que vous êtes en train de me dire que les propriétaires vont rouvrir l'entente qu'ils avaient eue sur la base du nouveau programme?

(16 heures)

M. Roquet (Louis-L.): Non. Tout simplement, c'est une question de savoir sur quel programme allez-vous l'imputer dans un... Avant le programme FAIRE, il aurait fallu recourir probablement à un article 7 à cause des montants impliqués ou l'imputer à l'Entente auxiliaire Canada-Québec sur le développement industriel. Avec le programme FAIRE, vraisemblablement ce projet-là rencontre les critères du programme et pourrait – je dis bien «pourrait» – être imputé à ce programme.

M. Boucher: O.K. Et finalement...

M. Roquet (Louis-L.): Mais le montant demeure exactement le même, et le montage ne change pas; c'est vraiment de savoir à quel fonds vous allez l'imputer.

M. Boucher: Finalement, Magnola?

Mme Dionne-Marsolais: Pour le projet Magnola, d'abord, Métallurgie Magnola, c'est un consortium qui regroupe Métallurgie Noranda, SNC-Lavalin, la SGF – et non pas la SDI – et Aisin, du Japon. On sait que les gouvernements du Québec et du Canada ont apporté une contribution financière au projet-pilote de l'ordre de 4 000 000 $. L'usine-pilote a été construite sur le site de la compagnie Zinc électrolytique, à Valleyfield, et ses opérations ont débuté au mois d'octobre. Tout se passe apparemment très bien. L'expérience-pilote est concluante ou semble être concluante, de sorte que, si tout continue dans le sens des derniers mois, Métallurgie Magnola et ses partenaires pourraient être en mesure de prendre une décision d'ici à l'automne pour une construction, à ce moment-là, de l'usine commerciale, qui pourrait effectivement s'établir à Asbestos.

Alors, ce qu'on peut dire, c'est que le déroulement du projet de l'usine-pilote va très bien. Les résultats sont concluants, à ce jour. La période n'est pas terminée, mais on est confiants que, d'ici peu, peut-être même d'ici à l'été, d'ici à juillet, il pourrait y avoir des décisions de la part de la Société.

M. Boucher: On parle évidemment, dans ces projets-là, de plusieurs centaines d'emplois directs nouveaux, n'est-ce pas, Mme la ministre?

Mme Dionne-Marsolais: Oui. L'estimé est de 375 nouveaux emplois à Asbestos. C'est un investissement de l'ordre d'à peu près 500 000 000 $ là-bas, et la production est prévue pour démarrer en l'an 2000. Donc, c'est un très beau projet.

M. Boucher: Je répéterai ça à nos collègues d'en face, qui n'ont peut-être pas compris...

Mme Dionne-Marsolais: Oui, parce que, quand on parle de création d'emplois, ils n'aiment pas entendre, on dirait. Ha, ha, ha!

M. Boucher: ...que les trois magnifiques projets qui s'en viennent sont dans le sens du développement économique du Québec et de la création d'emplois.

Je vais terminer par une petite question.

Mme Dionne-Marsolais: Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais ajouter, toujours pour le bénéfice de nos collègues de l'opposition, que c'est un projet de 500 000 000 $. C'est plus de 25 000 000 $. Donc, il y en a, des projets qui sont de plus de 25 000 000 $, sur notre planche à dessin.

M. Boucher: Et, à Bromptonville, c'est 350 000 000 $, si ma mémoire est bonne. C'est beaucoup plus que 25 000 000 $ aussi. Et Tafisa, 100 000 000 $, n'est-ce pas?

Une question. J'ai eu à travailler... Mais je ne sais pas si ça s'adresse à la SDI ou au MICST. Enfin, je la pose tout de suite. Je me suis rendu compte que, dans un projet notamment dans mon comté, le projet Noma, à Valcourt, qui est une entreprise de sous-traitance pour la compagnie Bombardier, j'ai fait face à une compétition apparente entre le fonctionnaire qui tentait d'attirer l'entreprise qui était une entreprise non québécoise, de l'extérieur, le fonctionnaire montréalais, et le fonctionnaire estrien qui tentait de l'attirer, lui, en Estrie.

Je voulais savoir s'il y a des règles du jeu, au MICST, qui font en sorte que nos fonctionnaires ne jouent pas la compétition interrégionale ou la jouent, Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Si vous me permettez, M. le Président, est-ce qu'on pourrait prendre note de la question? Et, quand on reviendra avec le sous-ministre, il pourra répondre à cette question-là. C'est plus pour raison d'efficacité.

Le Président (M. Beaulne): Oui, certainement. La commission prend bonne note de votre intention de revenir avec la réponse au cours des 10 heures que nous aurons d'échanges avec vous, là, sur votre ministère. Alors, je cède maintenant la parole à nos collègues de l'opposition. M. le député de Shefford, allez-y.


Personnel affecté à l'administration du plan Paillé

M. Brodeur: Oui. Une courte question. On parlait du plan Paillé, tantôt. J'aimerais juste faire des petits chiffres comparatifs avec les effectifs. Je sais qu'en 1994-1995 les effectifs concernant l'administration du plan Paillé devaient être, j'imagine, plus préoccupés par l'acceptation des prêts et qu'aujourd'hui les effectifs 1997-1998 seront probablement plus préoccupés par la réalisation des prêts par les institutions financières. J'aimerais savoir, en comparaison entre l'année 1 du plan Paillé et aujourd'hui, quelle est la différence d'effectifs dans l'administration de ce programme-là.

Mme Dionne-Marsolais: J'aimerais demander, si vous me permettez, à M. Roquet de répondre à cette question, puisque c'est vraiment une question d'administration interne.

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. Roquet.

M. Roquet (Louis-L.): M. le Président, comme il avait été évoqué à la commission parlementaire, l'année dernière, et comme il a été évoqué par le Vérificateur général, si ma mémoire est bonne, dans ses remarques l'an dernier, non pas la dernière année mais l'année précédente, la SDI n'a pas bénéficié de ressources supplémentaires pour la mise en place ou pour la vérification et le paiement des réclamations des garanties du Programme d'investissement en démarrage d'entreprises.

La partie approbation ou, si vous voulez, validation des garanties, au moment de l'émission de la garantie, est un travail relativement simple parce que ce que nous recevons de l'institution financière, c'est un résumé du plan d'affaires avec la recommandation de l'institution financière de procéder, et nous vérifions s'il s'agit bien d'un premier projet, puisqu'un même promoteur ne peut pas financer plus d'un projet, selon les règlements du programme; deuxièmement, nous vérifions si c'est dans un secteur admissible et, troisièmement, nous vérifions la... Je m'excuse. Il y a un troisième point qui est une condition d'admission au programme que nous vérifions. Mais c'est une vérification qui se fait assez rapidement. Alors, même avec le rythme très, très rapide de développement du programme, nous avons été en mesure de faire ce travail-là avec l'équivalent d'à peu près quatre personnes à temps plein: un directeur du programme, un professionnel et deux techniciens ou techniciennes, si ma mémoire est bonne.

Avec le début des réclamations, nous nous sommes rendu compte très rapidement que nous devions faire un examen systématique des réclamations et que nous devions retourner aux documents qui étaient détenus par les institutions financières – l'institution financière A, le plan d'affaires, l'institution financière A, les engagements du promoteur, etc., en détail – alors que ce que nous avons, c'est un dossier sommaire. Il faut étudier ça et vérifier si l'institution financière a géré en bon père de famille, s'assurer de la liquidation des actifs. Est-ce qu'elle a été faite correctement? Est-ce que les garanties ont été enregistrées comme ça doit se faire, etc.?

Actuellement, nous devons avoir environ 11 personnes, à l'intérieur d'un personnel qui a été réduit de façon appréciable. Vous pouvez le voir à l'onglet 5 de notre rapport, 4 ou 5, sur la réduction du personnel. Mais nous avons à peu près 11 personnes à temps plein qui font ce travail-là.

La raison pour laquelle nous l'avons fait, elle est double, M. le Président. La première, c'est que c'est des fonds publics, et on est responsables de les gérer correctement. La seconde, c'est qu'on s'est rendu compte qu'en faisant un suivi très rigoureux on pouvait réduire les réclamations des institutions financières d'environ 2 600 $, en moyenne, par prêt. Alors, si on a 3 000 réclamations à 2 600 $, c'est 7 800 000 $. Ça vaut la peine de faire travailler quelques fonctionnaires de plus. Mais on le fait à l'intérieur d'une enveloppe d'effectif qui est d'à peu près 15 % plus faible que l'an dernier.

La raison pour laquelle on réussit à le faire sans négliger nos autres clients, c'est que notre règlement a été modifié au mois de juillet l'an dernier et que le recours à la garantie – et la bonne volonté de nos gens, qui travaillent très fort – nous permet quand même de rencontrer nos nouvelles obligations avec de nouveaux clients tout en traitant ces réclamations-là de façon adéquate.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.


Création d'emplois pour les jeunes entrepreneurs et les jeunes chercheurs

M. Brodeur: Oui, M. le Président. Je vais mettre un peu de côté le plan Paillé pour tout de suite. J'en profite pendant que les gens de la SDI sont présents. Dans mon intervention, au point de départ, j'ai mis l'accent sur les jeunes. On sait que le taux de chômage chez nos jeunes, au Québec, est pour ainsi dire inacceptable, particulièrement dans certaines régions qui sont plus touchées que d'autres. Je disais qu'il y a certaines mesures qui ont été prises aux crédits qui sont questionnables du fait qu'on parle de création d'emplois, du moins dans le discours, et qu'évidemment on doit penser aux jeunes.

(16 h 10)

Je disais que, premièrement, l'aide aux jeunes entrepreneurs avait été réduite de 31 %, qu'on avait éliminé les programmes de démarrage d'entreprises et qu'on diminue le budget des SAJE de 10 %. Mme la ministre, tantôt, quand elle a repris la parole, n'a pas répondu à cette question-là. C'est pour ça que j'aimerais l'entendre. Comment peut-elle concilier le fait qu'on parle de création d'emplois, d'aider les jeunes, et qu'en pratique on diminue les dépenses de programmes de 18 % et on touche particulièrement les jeunes par les SAJE, les programmes de démarrage d'entreprises puis l'aide aux jeunes entrepreneurs?

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, le député sera heureux de... Enfin, je ne sais pas s'il va être heureux, mais il devrait se réjouir des chiffres que je vais lui donner. Si on regarde les programmes d'aide financière et les déboursés pour 1994-1995, dont une partie de l'année a été partagée par nos deux partis, 1995-1996 et 1997-1998, on constate qu'en 1994-1995 les déboursés pour l'aide à l'entreprise et pour l'aide aux organismes – toujours volet jeunes – étaient de 25 900 000 $. En 1995-1996, les déboursés ont été de 33 100 000 $. En 1996-1997, on prévoit des déboursés de 32 100 000 $ et, en 1997-1998, le budget prévu est de 55 500 000 $. Donc, de 1994 à 25 000 000 $, on passe à 55 000 000 $ dans les crédits prévus pour cette année, M. le Président, et ça, ça comprend l'aide à l'entreprise, donc le programme Jeunes Promoteurs, les programmes de soutien à l'emploi scientifique, les APEX, volet stagiaires diplômés en commerce international, le Programme de démarrage, le volet étudiants entrepreneurs, l'amélioration des compétences en science et en technologie, et, au niveau de l'aide aux organismes, ça comprend le volet SAJE, les mesures de suivi qu'on a annoncées tout récemment au niveau du programme SAJE, la Société d'Investissement Jeunesse et le Placement étudiant du Québec. Donc, je pense que notre gouvernement non seulement appuie l'aide aux jeunes, mais aussi a consenti des efforts de beaucoup supérieurs à ceux du précédent gouvernement par rapport à sa jeunesse.

J'ajouterai là-dessus que les résultats auxquels on arrive sont tels que 25 % de la main-d'oeuvre dans le secteur du tourisme, ce sont des jeunes et que 50 % des entrepreneurs qui ont moins de 25 ans, ce sont des femmes, de nouveaux entrepreneurs, bien sûr.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford.

M. Benoit: On pourrait peut-être revenir à la SDI. J'aurais quelques questions un peu plus techniques. Peut-être que M. Roquet et M. Côté pourraient revenir. M. Roquet...

Le Président (M. Beaulne): M. le député, simplement pour le bon fonctionnement de nos travaux, je vois qu'il y a pas mal de mouvement du côté de la ministre. Alors, je vous rappellerai que, pour les fins de la transcription, à chaque fois je vous demanderais de vous identifier parce que, comme vous semblez avoir une mouvance assez rapide... Pour que nos collègues et partenaires puissent s'y retrouver dans les transcriptions et avoir les bons noms à côté des bonnes réponses. Ça faciliterait notre travail.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, je transmets la parole à la personne responsable en indiquant bien son nom, le cas échéant, et je vais continuer de le faire.


Société de développement industriel (suite)


Dossiers Ani-Mat et Caoutech

M. Benoit: Très bien. Merci, M. le Président. M. Roquet, dans la situation de Caoutech, dans Montréal-Est, est-ce que la SDI est impliquée de près ou de loin, ainsi que dans la situation d'Ani-Mat, dans la municipalité de Saint-Élie-d'Orford? Est-ce que la SDI... On sait que ça date de loin. Il y a d'abord Ani-Mat, ensuite il y a eu Caoutech. Où en est... C'est RECYC-QUÉBEC qui ultimement va gérer le dossier. Mais quelle a été l'implication de la SDI dans ce dossier-là et où en est-on rendu?

Mme Dionne-Marsolais: Alors, je vais demander à M. Roquet de répondre à cette question-là sur le plan administratif.

M. Roquet (Louis-L.): D'accord. M. le Président, Ani-Mat et Caoutech sont deux sociétés reliées. La SDI avait été approchée pour intervenir au niveau des deux sociétés. Nous avons décidé d'intervenir seulement chez Ani-Mat, et c'est RECYC-QUÉBEC qui est intervenue dans Caoutech.

Le dossier Ani-Mat se gère normalement. C'est une entreprise qui ne fonctionne pas mal du tout, qui a un marché pour ses produits qui sont des tapis à partir de caoutchouc recyclé, en particulier des tapis pour les animaux dans les étables.

Pour ce qui est de Caoutech, je lisais, je suppose comme tout le monde, que la relance de l'entreprise était compromise par un différend entre les deux actionnaires qui devaient investir. Nous pourrions intervenir, c'est-à-dire que nous avons la possibilité d'intervenir dans des entreprises dans le domaine du recyclage. Nous n'avons pas été invités à participer à la relance de l'entreprise, actuellement. Mais je sais, pour avoir parlé avec le président de RECYC-QUÉBEC, avec qui nous entretenons des rapports étroits, que RECYC-QUÉBEC est impliquée dans le dossier de Caoutech.

M. Benoit: M. Roquet, le maire de la municipalité de Saint-Élie a écrit au ministre de l'Environnement une lettre très sévère, il y a quelques jours, en ce qui a trait, et vous le disiez vous-même... C'est une compagnie de recyclage qui prend des vieux pneus, les broie et éventuellement fait des produits. Si vous avez l'occasion de venir dans le magnifique comté d'Orford, dans la magnifique région de l'Estrie, vous allez voir, à l'entrée de la ville de Sherbrooke, un magnifique tas de pneus broyés qui s'allonge semaine après semaine et qui est une préoccupation des citoyens de Saint-Élie. Il y avait eu un engagement du ministre de l'Environnement de faire, et c'est clair... D'ailleurs, M. Cliche lui-même reconnaît le fait qu'il avait pris cet engagement-là au 31 décembre 1996, si je ne me trompe, de faire disparaître le tas. Il est toujours là, et là les citoyens sont vraiment préoccupés. On sait les conséquences d'un incendie, dans une histoire comme ça.

Quel est le poids que vous avez dans une situation comme celle-là, étant prêteur d'argent? Quelle est l'influence que vous pouvez avoir auprès du conseil d'administration ou auprès de M. Leblanc, à RECYC-QUÉBEC, pour ne pas dire auprès du ministre de l'Environnement, pour que quelque chose se passe avec ce tas de vieux pneus?

M. Roquet (Louis-L.): La seule influence que nous avons sur RECYC-QUÉBEC, c'est l'influence de la bonne collaboration au niveau de certains dossiers. La SDI ne fait pas de subvention, la SDI fait du financement d'entreprises. Alors, si nous devions intervenir dans la résolution de cette situation-là, il faudrait que ce soit à la demande du ministre responsable et il faudrait que ce soit dans un contexte d'affaires et non pas dans un contexte de subvention ou d'intervention. Nous ne sommes pas un organisme ministériel dans ce sens-là. Mais, dans la mesure où une solution au problème pourrait se trouver dans le contexte d'un projet qui est un projet commercial, industriel, rentable, etc., nous serions enchantés de l'examiner.

M. Benoit: Le ministre de l'Environnement semble dire qu'il attribue le fait que finalement Caoutech, étant dans une situation dont on n'est pas trop sûr – moi aussi, j'ai lu ces articles-là – alors, lui, il semble dire: Bien, on va régler Caoutech, puis éventuellement ça va régler le problème de l'empilement de ces vieux pneus sur le bord de la 55. Est-ce que c'est votre lecture aussi? Est-ce qu'il faut d'abord régler Caoutech pour finalement régler Ani-Mat éventuellement?

M. Roquet (Louis-L.): Je ne suis pas assez informé pour être capable de vous répondre. Si vous voulez, M. le Président, je peux faire parvenir à la commission une réponse écrite. Mais ça demanderait une familiarité avec le dossier que je n'ai pas, et je ne pense pas que mes collaborateurs ici le connaissent assez, d'autant plus que Caoutech n'est pas un de nos clients. Ça prendrait vraiment une étude un peu plus approfondie.

(16 h 20)

M. Benoit: J'apprécierais l'offre du président de la SDI, M. le Président, si vous nous permettez, parce que les citoyens là-bas, puis je parle en leur nom, se font un peu barouetter entre le ministre de l'Environnement, RECYC-QUÉBEC, la compagnie... Alors, on en perd un peu notre latin. Si on pouvait avoir une réponse, ce serait valable.


Frais de voyage

M. Roquet, dans les comptes de dépenses de voyage – je suis un peu allergique à ça, les voyages, moi; depuis que je suis député, je les ai tous refusés, depuis huit ans, et j'invite tout le monde à faire la même chose, bien sûr – je vois qu'il y a un voyage d'un M. Jean Cyr, un vice-président régional. Il va au Texas quatre jours, ça coûte 3 800 $. Vous avez un autre vice-président régional, M. Larivée, qui, lui, va aller une semaine en Espagne, et ça va coûter 2 300 $. Est-ce que c'est juste le taux de change qui fait que c'est si bon marché en Espagne versus le Texas ou si effectivement... Ça me semble beaucoup d'argent, tout ça.

M. Roquet (Louis-L.): M. le Président, je suis familier avec les deux voyages parce que c'est moi qui les ai autorisés. Dans le cas du voyage de M. Larivée, il s'agissait d'une mission économique qu'il accompagnait et un des partenaires d'accueil était une société qui joue un rôle analogue à celui de la SDI, avec laquelle nous avons des relations d'affaires, qui est basée en Catalogne, en Espagne.

Dans le cas de M. Jean Cyr, il s'agissait d'un séminaire de quatre jours donné par des experts sur le financement de projets d'énergie à l'exportation. M. Cyr est directeur du secteur du financement des exportations, et la scolarité pour ce séminaire-là représentait à peu près les trois quarts du coût du séminaire au total. Et, comme il s'agissait d'un séminaire très pointu dans un domaine où nous faisons de plus en plus d'interventions au niveau du financement des exportations, j'ai jugé bon que c'était opportun de lui permettre d'aller acquérir ces connaissances-là. C'était donné par des sommités dans le domaine et c'était dans le domaine du financement des projets d'énergie. Nous avons plusieurs projets dans ce domaine-là que nous sommes à examiner, pour un total d'à peu près 80 000 000 $ d'engagements de la SDI.


Soutien au développement de petits barrages hydroélectriques

M. Benoit: Vous m'ouvrez une porte qui est un peu tentante, celle de l'énergie. Est-ce que vous proposez de subventionner ou d'aider effectivement un bon nombre de petits barrages dans les prochaines années?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: Est-ce que c'est ce que vous êtes après nous laisser sous-entendre? Je n'ai pas eu le temps de lire le rapport, on l'a eu ce matin sur nos bureaux. C'est à peu près 800 pages. On va lire ça tranquillement ce soir, là, mais... Est-ce que c'est un angle où la SDI veut effectivement... Vous semblez dire le secteur énergétique. Est-ce que la SDI se rapproche de la nouvelle mission d'Hydro-Québec? Est-ce que c'est ce que vous êtes après nous dire?

M. Roquet (Louis-L.): Pas particulièrement, dans le sens où d'abord je pense qu'Hydro-Québec a reçu une dotation de 300 000 000 $ par année pour investir dans des projets d'énergie. Ils n'ont pas besoin de nous. Mais il y a plusieurs entreprises québécoises qui ont une expertise particulière soit dans le domaine des microturbines, par exemple, complètement habillées, qui sont des projets plus petits... Il y a des expertises au niveau des lignes de transport, ce qu'on appelle, dans le jargon du métier, de la corde à linge. Il y a plusieurs entreprises québécoises qui nous ont soumis, au cours de la dernière année, des projets que nous sommes en train de regarder. Certains d'entre eux sont sous forme de crédits acheteurs, d'autres sont sous forme de projets qu'on appelle BOT, Build, Operate and Transfer, et c'est des techniques de financement très particulières.

Dans ces financements-là, nous avons toujours comme partenaire la SEE, ce qui m'apparaît prudent parce qu'elle a une expertise et une capacité d'analyse du risque pays en particulier que nous n'avons pas, et nous faisons des interventions pari passu où la part de risque total que nous prenons est toujours marginale par rapport à ce qui est assumé par la SEE. Mais on doit développer une expertise dans ce domaine-là. Au cours de la dernière année, j'ai envoyé un de mes professionnels passer six mois à la SEE, en stage, parce que ça devient de plus en plus demandé. On s'aperçoit que les interventions de la SDI, avec le temps, se déplacent nettement dans deux directions, en pourcentage: c'est le financement de l'exportation de plus en plus et le financement des entreprises de haute technologie, là où il y a des créneaux où la demande n'est pas complètement satisfaite.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Orford, il reste deux minutes à votre bloc d'intervention.


Analyse du risque de taux d'intérêt par Desjardins

M. Benoit: D'accord. Alors, il y aura d'autres questions plus tard. On permettra, bien sûr, au gouvernement... Une courte question. Dans l'étude des crédits, à la page 11, au niveau des différentes études, on nous parle d'une étude qui a été faite par la Caisse centrale Desjardins, analyse du risque de taux d'intérêt, 12 500 $. Est-ce que, effectivement, c'est une simple étude de direction où vont aller les taux d'intérêt? Non, j'espère. Et est-ce que cette étude-là peur être rendue disponible?

M. Roquet (Louis-L.): Oui. C'est une étude des recommandations au niveau de l'appariement entre notre actif et notre passif. C'est que nos problèmes d'appariement ne sont pas exactement les mêmes que ceux d'une institution financière. En particulier, on a de très grosses interventions que nous faisons; nous donnons la possibilité aux clients de faire du remboursement anticipé sans pénalité, etc. Alors, de façon régulière, à tous les ans ou à tous les deux ans, on demande au Mouvement Desjardins, qu'on avait choisi après avoir demandé des soumissions à plus d'un groupe il y a quelques années, d'examiner notre portefeuille et de nous faire leurs recommandations sur l'appariement de nos financements, en fonction de nos obligations, de nos actifs, si vous voulez.

M. Benoit: Si cette étude-là est disponible. on apprécierait, nous, de notre côté, la recevoir. M. le Président, on va laisser et on reviendra plus tard.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, c'est maintenant un bloc de 20 minutes du côté ministériel. Il y a le député de La Peltrie et la députée de Vanier qui ont demandé la parole, en essayant de vous concentrer, préférablement, sur les questions impliquant la SDI directement ou indirectement. Alors, par ordre, le député de La Peltrie, la députée de Vanier et le député de Johnson.


Diminution de la provision pour créances douteuses

M. Côté: Merci, M. le Président. M. le président de la SDI, dans les crédits 1996-1997 et 1997-1998, à l'élément Créances douteuses, on voit qu'en 1996-1997 il y avait pour 27 000 000 $ qui avaient été prévus pour les créances douteuses, alors qu'en 1997-1998 vous en avez pour 10 800 000 $. Donc, il y a une variation de 16 000 000 $. Même s'il y a des explications de ces variations-là, j'aimerais que vous nous donniez un peu plus de détails. Est-ce que c'est parce que c'est la confiance qui s'installe puis il va y avoir moins de pertes? Donc, j'aimerais avoir plus d'information à cet effet-là, s'il vous plaît.

M. Roquet (Louis-L.): Dans notre budget initial 1996-1997, donc celui de l'année qui s'est terminée au 31 mars, on avait, au titre de provision pour créances douteuses en termes de crédits, pour 11 000 000 $, et dans le discours du budget, on a annoncé deux mesures: le crédit acheteur, pour 8 000 000 $, et l'aide à la construction navale, pour 4 000 000 $, qui ont porté ce 11 000 000 $ là à 27 000 000 $. En pratique, à cause de la nature des financements de crédits acheteurs en particulier, qui prennent beaucoup de temps à se monter parce que le client participe à la négociation non seulement de l'achat, mais aussi de son financement, les crédits n'ont pas été utilisés. On a dépensé, sur le 27 000 000 $, un total de 15 000 000 $ à peu près, et, l'année prochaine, on estime que nous aurons besoin de 10 800 000 $, si vous voulez, 11 000 000 $, ce qui correspond à peu près au niveau initial de 1996-1997.

Une des raisons, c'est qu'entre-temps la limite d'autorisation de la SDI a été augmentée. Jusqu'en juillet dernier, quand la SDI faisait une intervention et que cette intervention-là dépassait 2 500 000 $ d'engagement, le gouvernement assumait le risque de l'intervention et on devait retrouver, au niveau des créances douteuses, les montants pour être capables d'assumer la provision pour ces risques-là. Maintenant, la limite d'autorisation de la SDI, avec la permission du ministre, a été portée à 10 000 000 $, ce qui fait qu'il y a beaucoup de projets, qui auparavant étaient imputés aux créances douteuses pour appuyer des garanties gouvernementales, qui sont maintenant assumés directement par la SDI. Alors, on peut faire des interventions aussi importantes qu'auparavant, tout en ayant une provision pour créances douteuses pour risque gouvernemental qui est plus faible.

(16 h 30)

M. Côté: O.K. Merci.

Le Président (M. Beaulne): Mme la députée de Vanier.


Aide à l'entrepreneurship féminin

Mme Barbeau: Merci, M. le Président. Je sais que vous nous avez demandé de rester dans la SDI, mais mon problème, si je peux appeler ça un problème, c'est que je ne sais pas vraiment si... peut-être que ça va toucher la SDI, c'est un peu plus général, mais, comme je suis présente seulement à cette commission-ci en remplacement de la députée de La Prairie, je vais la poser. Mais je pense que ça va intéresser aussi mes collègues de tous les côtés, parce que, compte tenu qu'ils reçoivent probablement beaucoup de demandes de femmes dans leur comté qui veulent se partir en affaires, j'imagine que ça va les intéresser. En tout cas, moi, j'en ai énormément.

Je suis également, aussi, fille d'entrepreneurs. Mme la ministre, et mon père et ma mère ont, chacun de leur côté, une PME, et j'ai suivi de près le départ des deux entreprises, mais de plus près celle de ma mère, ce qui m'a fait réaliser les problèmes qu'elle a eus à avoir un prêt. Un très petit prêt, là, mais ça a été toute une guerre avec la caisse, aussi les taux d'intérêt qui étaient... Il y avait des grosses différences, je trouve, dans le traitement par rapport à l'autre entreprise que mon père a partie. Alors, je sais que, lors de votre allocution d'ouverture à la conférence internationale de l'OCDE – d'ailleurs, vous devriez en envoyer une copie à nos amis d'en face, c'était une bonne allocution, des bonnes données – vous avez parlé de la mise en place d'un réseau québécois d'appui à l'entrepreneurship féminin. J'aimerais avoir plus de détails là-dessus – ça m'intéresse beaucoup – s'il vous plaît.

Le Président (M. Beaulne): Alors, Mme la ministre, est-ce que vous souhaitez répondre à cette question? Ou quelqu'un d'autre?

Mme Dionne-Marsolais: Certainement. Je pense que c'est une bonne question, et, peut-être même que, au niveau de la SDI, on aura des commentaires additionnels concernant les femmes qui auraient pu bénéficier des programmes d'aide au démarrage. Peut-être, après mes propos, j'aimerais que le président nous donne quelques chiffres là-dessus.

Alors, oui, c'est vrai, la semaine dernière, j'ai eu le plaisir de prendre la parole à la séance inaugurale de la conférence de l'OCDE sur les femmes entrepreneurs à la tête de petites et moyennes entreprises et j'ai exposé que, en 1994, plus de 150 000 entreprises au Québec étaient effectivement dirigées par des femmes et qu'elles employaient 358 000 personnes. Les Québécoises, comme les femmes des autres pays, semblent... Et la constatation de la députée est fondée non seulement sur l'expérience, mais elle se compare aussi avec ce que vivent les femmes dans d'autres pays. Et ce qui est important, au Québec, c'est de réaliser que plus de la moitié des entrepreneurs de moins de 25 ans, ce sont des femmes, et ça, ça se compare avec à peu près 30 % il y a à peine 10 ans. Donc, on voit que les jeunes femmes sont très entrepreneuses, et c'est tout à leur avantage et c'est tout à l'avantage du Québec aussi.

Les études qu'il m'a été possible de consulter en préparation à cette conférence ont aussi indiqué que les femmes utilisaient plus que les hommes leurs épargnes personnelles pour se lancer en affaires, et ce, dans une proportion de 75 %. Or, à l'analyse, on se rend compte qu'il semble que ce soit parce que, effectivement, un, leur crédit leur coûte plus cher et, deux, parce qu'on demande d'elles des exigences qui seraient supérieures à celles que l'on demanderait de leurs collègues masculins. J'ai donc, avant de partir, consulté quelques représentants d'institutions financières établies au Québec dont on connaît l'intérêt pour l'entrepreneurship au féminin et je leur ai demandé s'ils accepteraient de travailler avec nous et avec des représentants des milieux de recherche en entrepreneuriat ainsi que des représentants des réseaux de femmes entrepreneurs ou de femmes d'affaires pour qu'on puisse trouver des solutions pour faciliter l'accès au capital et surtout le coût de cet accès.

Et, quand je parle d'accès au capital, je ne parle pas seulement des fonds des institutions bancaires traditionnelles, je pense aussi – et c'est là que, pour nous, c'est important. Dans un contexte de responsabilité gouvernementale, il faut qu'on ait une vision à long terme – au capital de développement, donc aux fonds des sociétés de capital de risque. Et, quand on parle avec les femmes entrepreneurs, le fait de se limiter à leurs épargnes personnelles et d'aller chercher du capital dans les institutions bancaires limite leur capacité à développer plus rapidement leurs entreprises et, donc, les empêche de devenir plus grandes, si vous voulez.

Alors, j'ai identifié trois objectifs à ce groupe de travail là, pour lesquels je voudrais qu'ils nous proposent des solutions concrètes. Concrètes en ce sens que les institutions bancaires et des représentants de sociétés de capital de risque vont être impliqués là-dessus et, donc, vont être capables de proposer des choses avec lesquelles ils seraient éventuellement capables de vivre, si je peux utiliser cette expression-là. J'ai donc trois objectifs. D'abord, assurer un meilleur accès au financement des projets qui sont pilotés par des femmes entrepreneurs ainsi que leur accès au capital de risque. Ça, c'est la première chose. Ensuite, faciliter l'accès des femmes entrepreneurs aux réseaux d'influence et surtout aux réseaux des donneurs d'ordres, incluant bien sûr les marchés publics. Et on sait que, avec l'Accord sur le commerce intérieur, les marchés publics vont s'ouvrir à travers tout le territoire canadien. Du moins, on l'espère. On espère la réciprocité et, dans ce contexte-là, assurer l'accès à des femmes entrepreneurs à ces réseaux. Et, le troisième, c'est renforcer l'accès aux femmes entrepreneurs à l'information et aux postes stratégiques, et ça, c'est autant dans les institutions financières qu'au niveau gouvernemental ou autre.

Alors, je suis assez heureuse de la réaction des intervenants des milieux financiers, parce que la Banque Nationale, la Banque de Montréal, le mouvement Desjardins, le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec ont tous accepté de participer à ce groupe de travail là et d'y déléguer quelqu'un. Donc, je pense qu'on sera en mesure de proposer des gestes concrets pour appuyer des jeunes femmes qui seraient aptes non seulement à se lancer en affaires, mais leurs aînées pour le développement de leurs affaires.

Mme Barbeau: Merci beaucoup, Mme la ministre. Étant donné que, en politique, on ne sait pas combien de temps on est là, qu'on est presque sur un siège éjectable, peut-être que j'aurai l'opportunité de profiter de votre réseau un jour. Merci.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Moi, j'ai une question qui n'est pas directement reliée à la SDI, évidemment, mais ça concerne les centres d'appel. Est-ce que vous me permettez de la poser?

Le Président (M. Beaulne): Oui. C'est-à-dire, allez-y. Oui, de toute façon, vous aurez votre bloc de 20 minutes, alors...

M. Boucher: Vous n'avez pas d'opposition, messieurs les...

Le Président (M. Beaulne): Non, allez-y, allez-y.

M. Boucher: O.K. C'est beau, mais vous pouvez quitter, puis on va adopter les crédits au plus vite.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le député de Johnson.

M. Boucher: Très bien.

Une voix: Si ça crée des emplois aussi.


Promotion des centres d'appel au Québec

M. Boucher: M. le Président, la ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie sait que l'Estrie est considérée, maintenant, comme un endroit – de mon point de vue, en tout cas – rêvé pour la mise en place de centres d'appel, et je sais que, maintenant, l'Estrie fait partie des régions ou des municipalités – Sherbrooke particulièrement – où on vante les mérites de ces territoires-là pour que les Américains et autres compagnies internationales viennent installer des centres d'appel. Je voudrais savoir quelle est la stratégie, actuellement, du ministère pour faire en sorte que, à l'instar du Nouveau-Brunswick, qui a, semble-t-il, pris un peu les devants dans cette question-là... Et, si c'est vrai – peut-être que ce n'est pas vrai – quelle est la stratégie du ministère pour que le Québec devienne une terre fertile d'accueil pour les centres d'appel en Amérique du Nord compte tenu de la position stratégique que nous occupons au point de vue linguistique et autre?

Mme Dionne-Marsolais: D'abord, dès l'élection de notre gouvernement, on avait pris un certain nombre de mesures pour enlever les barrières que le Québec possédait pour l'implantation de centres d'appel, notamment au niveau de la taxation des numéros 1-800 et puis de certaines autres mesures assez spécifiques qui ont été annoncées dans le budget de 1996 et de 1995, et votre région, comme vous l'avez bien dit, est une région particulièrement avantageuse pour un investisseur éventuel dans ce secteur-là. Je vais peut-être les rappeler pour mettre en situation ces avantages-là.

(16 h 40)

Au Québec, on a une main-d'oeuvre que tout le monde reconnaît comme étant disponible. On parle 80 langues, malgré ce que l'opposition veut nous faire dire, et il y a 1 500 000 personnes qui sont bilingues seulement dans la région de Montréal. Dans la région de l'Estrie, vous l'avez dit vous-même, et le député d'Orford a renchéri tout à l'heure, il y a une population qui est aussi fortement bilingue et, même, dans certains cas, trilingue, surtout, comme je le sais, dans votre cas. Il y a aussi des centres de formation qui sont spécialisés à travers tout le Québec et, bientôt, il y aura une formation aux niveaux secondaire et universitaire à ce niveau-là. Les coûts d'opération, à Montréal, sont inférieurs – et, en Estrie, cela s'applique également – de l'ordre de 15 % à la moyenne des villes américaines. Les villes américaines sont Atlanta, Boston, Buffalo et plusieurs autres. Il y a une ville qui est moins chère que Montréal, c'est Omaha, et c'est d'ailleurs là que se trouve la masse critique des centres d'appel aux États-Unis, mais, dans l'ensemble, les coûts de main-d'oeuvre sont de 19 % inférieurs, au Québec, à la moyenne américaine. On sait que les coûts immobiliers sont très compétitifs ici, pour ne pas dire avantageux. On sait qu'on a enlevé la taxe de vente sur les services de communication. On sait qu'on a permis l'amortissement accéléré pour l'équipement de traitement de données, de logiciels et, enfin, la qualité des infrastructures, les connexions qui sont très transparentes avec les réseaux américains sont autant d'éléments qui font qu'on a au Québec un potentiel d'accueil de sociétés de centres d'appel.

Et, d'ailleurs, on en a annoncé une importante qui va créer presque 600 emplois à Montréal, Household Finance, qui a annoncé qu'elle avait choisi le Québec, et spécifiquement la région de Montréal dans ce cas-ci, parce qu'elle y est déjà, il faut le dire. Elle a choisi de développer toute une nouvelle activité qui va créer à peu près ça, 592 emplois, si ma mémoire est bonne, et la raison principale, c'est que, effectivement, c'est l'endroit qui est le plus rentable pour elle pour développer ce type de services, et c'est ici qu'elle retrouvent la meilleure profitabilité.

Alors, notre stratégie, on l'a annoncée lors du Sommet sur l'économie et l'emploi, au cours duquel on a annoncé que nous voulions développer le potentiel que l'on connaissait des activités de centres d'appel au Québec et on a appuyé la création d'un consortium de promotion des centres d'appel. Ce consortium-là, qui est créé depuis et qui est la Corporation de commercialisation des centres d'appel du Québec, il regroupe Bell Canada, la Caisse de dépôt et placement du Québec, le Fonds de solidarité, Investissement Desjardins, et cette corporation-là sera appuyée par le gouvernement du Québec en fonction de sa performance dans la création de nouveaux emplois essentiellement en provenance de l'étranger. Il s'agit d'aller chercher des centres d'appel hors Québec et hors Canada – parce qu'on n'a pas du tout l'intention de faire du «raiding» d'est en ouest; pas des déplacements, en tout cas – et de les amener au Québec. Le MICST va conserver une capacité de réaction auprès des entreprises du Québec qui vont prendre de l'expansion en centres d'appel, et on va continuer à fournir de l'information, mais nous ne ferons pas de promotion ou de sollicitation. Toute la promotion sera assurée par la Société de promotion des centres d'appel.

Vous vous souviendrez que l'on a créé le Fonds de développement industriel récemment – il a été annoncé, d'ailleurs, dans le budget, je crois – et, dans ce fonds, on a créé un volet spécial pour favoriser le développement des centres d'appel au Québec qui prévoit une subvention à la création d'emplois à temps plein qui peut varier de 2 000 $ à 4 000 $ par emploi créé. Encore là, il est important d'indiquer que ce sont des appuis qui visent à améliorer la formation et la compétitivité de nos entreprises. On investit dans nos ressources, on investit pour développer une compétence au Québec dans un contexte de long terme. Ce ne sont pas des activités qui ont une durée très courte, parce que développer ça, c'est un gros investissement autant en infrastructures qu'au niveau financier pour les entreprises. Alors, en gros, je pense que, à date, on a des projets pour plus de 2 000 emplois, et on pense que, si la Société de promotion réalise ses objectifs, nous allons pouvoir développer, à travers le Québec et dans les régions qui sont particulièrement concurrentielles, dont la région de l'Estrie, des investissements et des emplois intéressants pour nos jeunes et les moins jeunes aussi, parce qu'il s'agit de compétences ciblées, spécialisées, dépendant des secteurs, mais essentiellement de services linguistiques.


Concurrence du Nouveau-Brunswick

M. Boucher: Une question complémentaire, M. le Président. Comment Québec réagit à la concurrence assez disgracieuse que nous mène le premier ministre du Nouveau-Brunswick par rapport à nos entreprises, notamment les centres d'appel? Est-ce qu'on a une stratégie par rapport à ce harcèlement-là dont sont victimes nos entreprises québécoises de la part d'un premier ministre d'une province canadienne?

Mme Dionne-Marsolais: C'est une question très difficile, M. le Président, parce que notre approche, c'est d'offrir aux entreprises des conditions concurrentielles. Nous ne sommes pas d'accord avec... Ce n'est pas du maraudage, on appelle ça du...

M. Boucher: C'est du maraudage, à certains égards.

Mme Dionne-Marsolais: C'est plus que du maraudage, là, c'est... En tout cas, avec le maraudage et le...

Une voix: La surenchère?

Mme Dionne-Marsolais: Non, ce n'est pas de la surenchère. Quand on va à la chasse et que ce n'est pas légal, comment ça s'appelle?

Des voix: Braconnage.

Mme Dionne-Marsolais: Braconnage! Merci. Alors, on n'est pas d'accord avec ce type de braconnage, parce que le mot est précis. Ça n'ajoute rien au niveau de la création d'emplois, d'une part, au Canada, et nous ne croyons pas que le Québec a une valeur ajoutée à aller chercher ou à aller enlever à une province, en fait, parce qu'on est quand même dans un marché que nous considérons comme un marché libre au Canada, en territoire canadien, du moins tant qu'on y est partie. On a accepté, nous, de respecter les règles de l'Accord sur le commerce intérieur canadien qui prévoit que ce type d'activité ne devrait pas se faire.

Nous participons, avec les autres gouvernements des provinces, pour essayer d'influencer nos collègues du Nouveau-Brunswick, mais la stratégie du Québec est ciblée pour aller chercher des centres d'appel à plus forte valeur ajoutée, pour mettre en valeur les compétences québécoises qui sont supérieures aux compétences du Nouveau-Brunswick, autant au niveau de la langue, autant au niveau de la formation et autant au niveau du service et des secteurs. Et c'est pour ça, d'ailleurs, que des firmes comme Household Finance ont choisi le Québec, et, dans certains cas, je vous dirais qu'il y a certaines entreprises qui ont regretté leur choix, justement parce que les compétences ne sont pas à la hauteur des attentes dans certains secteurs. Alors, au Québec, nous croyons que le plus gros marché, il est au sud, que c'est là qu'il faut cibler nos efforts et que ces efforts-là se font à l'intérieur des règles du commerce international comme des règles du commerce intérieur canadien, et, actuellement, d'autres provinces ont décidé de contester ou de faire leurs reproches au Nouveau-Brunswick pour des raisons qui les concernent, mais, dans notre cas, nous, on s'objecte à ça, on s'objecte fortement et on n'a pas l'intention de jouer le même jeu. Notre stratégie, c'est plutôt d'aller présenter les avantages du Québec, de les mettre en valeur et c'est une stratégie qui est plus efficace à long terme.

M. Boucher: Est-ce que c'est terminé pour nous? Bon. Alors, je reviendrai, j'ai d'autres questions.

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député d'Orford.


Société de développement industriel (suite)


Nomination de femmes à des postes de direction

M. Benoit: Oui. On a écouté votre beau discours sur l'avancement des femmes dans le monde économique québécois, et je pense qu'on y souscrit – notre vice-première ministre était une femme – de faire avancer les femmes. J'ai été moi-même président d'un parti politique où un des premiers gestes que j'ai posés, ça a été l'avancement des femmes à l'intérieur de notre parti pour qu'elles soient candidates, et je crois fondamentalement que vous avez raison quand vous faites ça.

D'autre part, quand nous regardons les chiffres – et, comme nous en sommes à la Société de développement industriel, on pourra revenir dans le cas du ministère éventuellement – dans le cas de la Société de développement industriel du Québec, votre beau discours ne se retrouve pas dans la réalité, Mme la ministre. Les gens, au niveau de l'administration: zéro. Dans les cadres: zéro; 19 pour les hommes. Professionnels: 13 femmes; 67 hommes. Fonctionnaires, là, ça s'inverse. Alors, là, les femmes, c'est toujours la même tangente partout. On voit ça trop souvent. Alors, chez les fonctionnaires: 70-14. Pour un total de 83 femmes et 101 hommes, mais, finalement, on s'aperçoit que c'est dans les emplois les moins bien rémunérés, et ça, c'est préoccupant.

(16 h 50)

D'autre part – et je vous en rends un hommage – chez les plus jeunes, les moins de 30 ans, vous l'avez dit tantôt au niveau de l'entreprise, et ça s'avère aussi vrai chez les plus jeunes, il y a une légère surpondération au niveau des femmes. Je dis bien légère, mais enfin, on voit que, chez les plus jeunes, ça, ça va prendre place. Alors, entre le discours et la réalité, Mme la ministre, qu'est-ce que je dois entendre?

Mme Dionne-Marsolais: Oui, M. le Président. D'abord, je pense que la question du député est très pertinente et je serai heureuse de lui transmettre deux commentaires avant de passer la parole au président de la SDI qui va sûrement nous donner des explications plus détaillées. Nous ne sommes pas dans une période d'embauche, actuellement, au niveau du gouvernement, vous le savez, donc il est fort possible que le profil hommes-femmes des effectifs de la SDI n'ait pas pu changer beaucoup au fil des dernières années. En ce qui a trait à la ministre comme telle, ça me fait bien plaisir de vous dire que, depuis janvier 1996, sur 36 nominations à des conseils d'administration qui relèvent de ma responsabilité, 14 concernent des femmes, soit un pourcentage de 38,9 %. Alors, je pense que c'est un résultat qui témoigne de l'intention de notre gouvernement de corriger la situation et d'augmenter la présence des femmes à des postes stratégiques. Je crois que, dans ce contexte-là, nos efforts portent fruit, et on fait ce que l'on dit.

Maintenant, je vais demander au président de la SDI, M. Roquet, peut-être, de compléter spécifiquement quant aux questions qui concernent la SDI.

M. Benoit: Avant que M. Roquet nous réponde, peut-être, Mme la ministre, pour être sûr que, s'il y a des gens qui nous écoutent, on comprenne bien les choses, vous avez parlé de vos nominations, mais, dans votre propre ministère, en ce moment, peut-être vous donner quelques chiffres, là. Entre le discours de Paris et, encore une fois, la réalité de Québec, il y a comme une petite différence. Chez les cadres supérieurs: chez les hommes, 66; chez les femmes, 13. Personnel professionnel: chez les hommes, 338; femmes, 72. Et, chez les moins bien payés, bien sûr, fonctionnaires ouvriers: 48 chez les hommes et 252 chez les femmes. Alors, là aussi, c'est assez flagrant comme chiffres.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, j'aimerais compléter les données de M. le député. Au discours de Paris, on a parlé des femmes entrepreneurs, on n'a pas parlé des femmes fonctionnaires, premièrement. Deuxièmement, au MICST, j'ai le plaisir, au cas où la nomination aurait échappé au député, de vous souligner que le sous-ministre adjoint au... le titre exact m'échappe, mais qui vient d'être nommé, il y a déjà un mois, est une femme. Alors on a, dans la mesure des nominations que nous faisons – et les chiffres sont là pour le confirmer, en tout cas, depuis que je suis ministre déléguée à de l'Industrie et du Commerce – une performance qui est tout à fait respectable et même enviable dans certains cas. Il est clair que nous ne pouvons pas recommencer notre recrutement, je l'ai expliqué. Nous sommes dans une phase de restructuration au gouvernement, et l'embauche, comme vous le savez, n'est pas en croissance. Alors, il s'agit de faire des efforts pour que les postes qui se libèrent soient non pas toujours comblés par des femmes, mais correctement, en équilibre, possiblement comblés par des femmes.

Maintenant, pour continuer sur la SDI spécifiquement, on peut peut-être passer au président.

M. Benoit: Très bien. Absolument, Mme la ministre.

Le Président (M. Beaulne): M. Roquet.

M. Roquet (Louis-L.): M. le Président, les informations que je vais vous donner ne sont certainement pas destinées à nous disculper, parce que je ne suis pas satisfait de notre performance actuelle à ce niveau-là. Toutefois, j'aimerais attirer l'attention des membres de la commission sur un certain nombre de facteurs. Premièrement, la SDI n'a pas été en mesure d'engager une seule personne à l'extérieur depuis cinq ans. On est dans un régime de compression d'effectifs, et c'est inquiétant parce que la moyenne d'âge du personnel de la SDI est au moins un an et demi plus élevée que celle de la fonction publique en général et que, au cours des quatre ou cinq prochaines années, on risque de perdre 40 % de notre expertise sans avoir eu la possibilité de la transférer à des jeunes.

Deuxièmement, par contre, la SDI a, depuis longtemps, une politique qui est assez unique et qui est de permettre – et c'est le cas actuellement – à des gens qui sont engagés comme secrétaires ou techniciennes, des femmes, à travers du tutorat, à travers des études qu'elles complètent, de pouvoir arriver au niveau de professionnelles. Le problème qu'on a, c'est que ces professionnelles-là sont exceptionnelles, que le salaire maximum qu'on leur paie dans la fonction publique est de 57 000 $ par année, et que, au cours des deux dernières années, je me suis fait pirater les quatre femmes les plus brillantes de la SDI par des gens qui leur offraient un poste identique dans une institution financière pour 25 000 $ par année de plus. Alors, je suis content d'avoir contribué à leur promotion même si cette promotion-là se fait à l'extérieur de la SDI.

D'autre part, nous avons eu récemment deux concours à l'interne pour deux postes professionnels. Un des deux professionnels est une femme. C'est une promotion à partir de techniciens de l'interne. De même, une promotion de niveau commis au niveau technicien, et, encore là, 50 % des candidats retenus ont été des femmes. Malheureusement, comme je vous l'ai dit, elles sont brillantes, et on se les fait pirater.

Par contre, au niveau des cadres, on a des améliorations importantes à faire, mais il n'y a pas eu de nominations de cadres, sauf pour le P.D.G., depuis six ou sept ans, ce qui veut dire que les opportunités pour les femmes d'accéder à des postes de cadres ont été extrêmement limitées. Nous sommes une petite organisation, puis il faut croire que les gens aiment y travailler parce qu'ils ne veulent pas partir, et il ne se libère pas beaucoup de postes à la tête de l'organisation pour pouvoir permettre à des femmes de progresser. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.


Révision de la Loi sur la Société de développement industriel

M. Benoit: M. Roquet, on connaît votre grande réputation et votre honnêteté intellectuelle. C'est tout à l'honneur de la SDI. Le 25 janvier 1997, un journal rapportait vos paroles: «La SDI étouffe dans le cadre gouvernemental avec la loi qui la régit, dit Louis Roquet, président-directeur général depuis 18 mois. La SDI a pourtant pour mission d'appuyer les compagnies novatrices exportatrices qui soutiennent l'économie.» Est-ce que vous étouffez encore, aujourd'hui, M. Roquet? C'est quoi, le devenir de la SDI? Où vous vous en allez? Est-ce que la ministre veut déposer un projet de loi éventuel?

C'est ce que vous demandiez au gouvernement, qu'on devienne, finalement, partenaire avec les banquiers, le capital de risque, les entrepreneurs au moyen d'outils de pointe. Vous nous disiez il y a quelques instants: Écoutez, la moyenne d'âge... Et c'est dramatique ce que vous nous avez dit: 40 % des gens qui quitteront avec leur expertise sans que les plus jeunes puissent prendre ça, alors qu'on a plein de jeunes. J'ai fait tout un discours là-dessus avec le ministre des Finances. J'ai fini notre interpellation de deux heures en parlant de la situation des jeunes au Québec et je ne veux pas recommencer ici aujourd'hui, mais Dieu sait qu'on les gradue. Ils sont compétents, ils sont bons, ils sont intelligents, ils admirent la SDI et ils voudraient probablement tous travailler là, en plus. J'aimerais ça vous entendre un peu, M. Roquet, sur les jeunes, d'une part, et sur cet étouffement dans le cadre gouvernemental. Et je vous comprends très bien. Moi aussi, j'y étouffe, par bout, dans le cadre gouvernemental.

M. Roquet (Louis-L.): M. le Président...

M. Benoit: Vous vous êtes étouffé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Roquet (Louis-L.): Vous avez tout compris.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. Roquet.

(17 heures)

M. Roquet (Louis-L.): Quand j'ai accepté le poste de président de la SDI, le ministre de l'Industrie et du Commerce d'alors, M. Daniel Paillé, m'avait confié trois mandats ou trois défis, et c'est ce qui m'a décidé à accepter le poste. Le premier défi, me disait-il, était de moderniser les outils d'intervention – essentiellement, nos programmes – et de les simplifier. Le second défi était de moderniser la loi de la SDI. Le troisième était d'augmenter la notoriété de la SDI auprès des entreprises québécoises, qui ne recouraient pas toujours à des services auxquels elles devraient recourir. Donc, c'est dans le cadre d'un mandat ou d'un défi qui m'était proposé que ce commentaire-là doit être situé. Cette volonté a été reprise par mon ministre de tutelle actuel, M. Landry.

Nous avons réalisé, au cours des derniers mois – je ne me souviens plus de la date exacte – une étude d'étalonnage, si vous voulez de «bench marking», auprès de huit institutions québécoises, canadiennes, nord-est américaines et européennes qui oeuvrent dans des secteurs qui sont connexes aux nôtres, financement du développement des entreprises, essentiellement de la PME. Les conclusions de cette étude-là, qui sont en appui à la réflexion que nous faisons sur la loi de la SDI, sont à l'effet que les seules entreprises qui vraiment ont une performance exceptionnelle dans ce domaine-là jouissent d'une flexibilité, d'une latitude et d'une capitalisation que la SDI n'a pas. Et il ne faut pas s'en scandaliser, la loi de la SDI a été écrite en 1971. Au moment où elle a été écrite, la SDI faisait essentiellement de la subvention et elle gérait des programmes très, très normés, très précis, où, à la limite, il suffisait d'analyser une demande et de voir si les 12 critères étaient satisfaits ou non, où, dans certains cas même, une formule mathématique permettait d'établir le montant de l'aide de façon absolument algébrique.

Ce que nous faisons maintenant, c'est tout à fait différent. D'abord, les entreprises ne se financent pas uniquement avec leur institution financière; elles se financent aussi avec des prêteurs sur base d'actifs. Il y a du capital de risque, il y a du capital de développement, souvent il y a deux, trois ou quatre financiers qui vont intervenir dans un montage financier. C'est la raison pour laquelle nous avons besoin – et c'est ce que nous avons proposé au gouvernement – d'un cadre qui correspond à la réalité du financement en 1997, sans critiquer le cadre qui avait été créé en 1971, parce qu'il correspondait aux besoins des entreprises et à la structure de l'industrie du financement. Alors, c'est ce décalage-là que nous entendons résorber.

Nous avons à peu près terminé la rédaction d'un mémoire que nous allons d'abord soumettre à notre ministre puis soumettre en consultation au ministère de l'Industrie et du Commerce, au ministre des Finances, etc. Nous espérons pouvoir déposer ou nous espérons que notre ministre pourra déposer à la session d'automne prochain une révision de la loi de la SDI qui, sans en faire une société d'État autonome au même titre, par exemple, qu'Hydro-Québec, lui donnera quand même un cadre d'une institution financière publique et qui lui permettra de faire son travail plus adéquatement.

M. Benoit: Dernière question. Une des recommandations au ministre, si j'ai bien compris, c'est que vous aimeriez avoir un conseil d'administration autonome, comme d'autres sociétés d'État. Est-ce que vous maintenez toujours cette position-là et est-ce que votre compréhension est que, dans le projet de loi, nous retrouverons un conseil d'administration à la SDI?

M. Roquet (Louis-L.): Un conseil d'administration autonome, M. le Président, comme celui d'Hydro-Québec, non – là, c'est mon opinion personnelle – dans le sens suivant: si un gouvernement veut que la SGF pose un geste et est prêt à en assumer la responsabilité, si le conseil d'administration d'une société d'État autonome refuse, la seule solution pour le gouvernement, qui est actionnaire, c'est de changer les membres du conseil d'administration jusqu'à temps qu'ils votent du côté où le gouvernement aimerait qu'ils votent.

Dans le cas de la SDI, la SDI a un rôle d'agent d'exécution de certaines interventions. C'est l'article 7. Ce rôle-là ou cette possibilité-là peut être utilisée par un gouvernement, avec sagesse ou non, ça dépend de sa décision. On est dans une société démocratique et le Conseil des ministres a le droit de donner des orientations à la SDI. Si on enlevait dans la loi de la SDI cette capacité pour le gouvernement de faire réaliser des opérations importantes à son propre risque à travers la SDI en recourant à l'expertise de financement de projet qu'il peut y avoir à l'intérieur de la SDI, je pense qu'on priverait le gouvernement d'un outil. Maintenant, comme tous les outils, ça peut être plus ou moins bien utilisé. Mais, personnellement, je ne recommanderais pas au gouvernement d'éliminer cette capacité-là d'investir, d'intervenir à travers la SDI dans des dossiers particuliers. Donc, dans ce sens-là.

Par contre, ce dont il faut se rendre compte, parce que la structure actuelle et le régime de gérance de la SDI ne sont pas très connus, jusqu'en juillet dernier, je devais demander l'autorisation de mon conseil pour une intervention financière de 1 000 000 $, mais je pouvais dépenser 3 500 000 $ pour mon système informatique sans leur en dire un mot. Et ça, ça me renverse que mon propre conseil n'ait aucune influence sur la gestion interne de l'entreprise qu'il est supposé présider. Mais, c'est comme je vous le dis, c'est parce que la loi remonte à 1971 et, dans ce temps-là, on n'envisageait pas que la SDI fasse les opérations qu'elle fait maintenant.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. Roquet. M. le député de Shefford.


Garantie de prêt pour un projet d'hôtel à Varadero, Cuba

M. Brodeur: Oui, merci, M. le Président. Dans un autre ordre d'idées mais concernant toujours la SDI, on apprenait, dans un article de La Presse , en août dernier, qu'il est arrivé une première à la SDI, alors que la SDI a garanti un prêt de 2 800 000 $ sur un projet d'hôtel à Varadero, Cuba. On comprend que le but de la Société de développement industriel est probablement de créer de l'emploi au Québec, sauf qu'on comprend mal, si la nouvelle est exacte, comment une garantie de prêt de 2 800 000 $ dans un hôtel sur les plages de Cuba... je comprends que, quand on s'étouffe au Québec, ça serait peut-être plus agréable d'aller à Cuba, sauf qu'on sait que, généralement, les investissements dans ces pays-là sont peut-être moins sûrs, c'est un marché qu'on connaît moins. Donc, j'aimerais savoir pourquoi la SDI est allée d'une garantie de prêt d'un montant de 2 800 000 $ dans un hôtel qui ne crée aucun emploi, pour ainsi dire, au Québec.

M. Roquet (Louis-L.): Le journaliste qui a apporté la nouvelle était mal informé, pas à peu près, 100 % mal informé. Je vous explique ce qu'il en est. Le Fonds de solidarité a développé une stratégie d'appui à l'exportation de produits québécois. Dans le cadre de cette stratégie-là, il a imaginé un consortium de tête doté d'un capital souscrit mais non payé, si vous voulez, de 10 000 000 $ sous forme de garantie. Le Fonds de solidarité met 4 000 000 $, la Banque Nationale met 2 000 000 $, la SDI annonce sa disponibilité à fournir 4 000 000 $ de garantie mais ne met rien. Cet outil-là est essentiellement un outil de marketing qui est doté d'un certain sérieux, puisque les promoteurs du consortium de tête dispose de fonds éventuels de 10 000 000 $. En dessous de ce consortium de tête là, un certain nombre de consortiums opérent dans le domaine du tourisme, dans le domaine de l'agroalimentaire et dans d'autres secteurs dans lesquels il est possible et intéressant de faire des investissements à Cuba.

Le rôle de la SDI là-dedans – et ça fait partie de l'entente: premièrement, le 4 000 000 $ de garantie n'est pas donné, il sera appliqué à certains projets qui rencontreront les règles actuelles de financement de la SDI, projet par projet, et il n'y a aucune obligation pour la SDI de s'impliquer dans un projet.

Deuxièmement, puisqu'il s'agit, M. le Président, de financement d'exportations, la seule façon dont la SDI pourrait financer un hôtel à Varadero, ce serait de financer une entreprise québécoise qui fabrique de l'équipement de cuisine pour qu'elle puisse exporter son équipement de cuisine à Cuba, ou des ascenseurs, ou des systèmes de communication, ou des matériaux de construction, etc., mais certainement pas financer un hôtel. Alors, nous financerions, dans le cadre de projets de promoteurs québécois qui pourraient implanter un hôtel en Floride, ou à Cuba, ou ailleurs, strictement l'exportation des biens et services produits au Québec, et pas plus que le pourcentage. D'ailleurs, on ne finance pas, dans nos crédits acheteurs, plus de 50 % du contenu québécois.

Alors, je pense qu'on a fait des associations à partir d'informations partielles. Je peux vous dire que, actuellement, il n'y a aucun projet d'hôtellerie à Cuba qui est à l'étude à la SDI.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. Roquet, de ces précisions. Alors, je vais prendre une petite pause de cinq minutes. Vous conviendrez que cinq minutes sur quatre heures, ce n'est pas tellement long. Alors, on prend une petite pause de cinq minutes exactement.

(Suspension de la séance à 17 h 10)

(Reprise à 17 h 17)

Le Président (M. Beaulne): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux, étant bien entendu que nous terminerons à 18 heures l'étude des programmes 1, 2, 3, tel que convenu.

M. Boucher: Souhaitons-le, si l'opposition ne fait pas obstruction.

Le Président (M. Beaulne): Non, non, non. Ça se déroule très bien.

Une voix: Tu n'as pas connu ce que c'était de l'obstruction.

Le Président (M. Beaulne): D'ailleurs, M. le député de Johnson, c'est à votre tour de poser des questions.

M. Boucher: J'avais une question, M. le Président, concernant la Société Innovatech du sud du Québec, mais on m'a dit qu'on étudierait ça la semaine prochaine. Alors, je vais la retenir.


Mise en place de centres locaux de développement

J'en ai une autre. Je voudrais que la ministre nous dise comment elle perçoit puis de quelle façon elle voit la mise en place éventuelle, si évidemment ça se produit, des centres locaux de développement, l'espèce de guichet unique que le gouvernement du Québec désire mettre en place pour l'emploi et le développement économique? Comment elle perçoit ça et comment elle entend collaborer, parce que son ministère est un acteur important, évidemment, dans le développement économique?

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, je pense qu'il est important de rappeler que notre gouvernement a presque deux obsessions, c'est l'efficacité et la flexibilité. Dans le contexte de tout le travail qui se fait au niveau de la régionalisation, la position du MICST et le travail du MICST, c'est de se rapprocher le plus près possible des clients. Or, au ministère de l'Industrie et du Commerce, nos clients ce sont les créateurs d'emplois, ce sont les employeurs, ce sont les entreprises, qu'elles soient des entreprises à but lucratif ou des organismes à but non lucratif.

Donc, toute notre stratégie et toute la collaboration qu'on a apportée dans ces travaux ont visé à apporter un meilleur service, le plus près possible des entreprises sur le terrain. C'est dans cet esprit-là que nos travaux se sont réalisés. Encore là, je le dis, ce sont les employeurs qui créent des emplois. S'il n'y avait pas d'employeurs, il n'y aurait pas d'emploi. Les employeurs peuvent être des travailleurs autonomes ou des employeurs de plusieurs personnes. La propriété des entreprises qui emploient ne nous préoccupe pas trop. Ce qui est important, c'est qu'il y ait création d'emplois et un développement économique en conséquence, pour un développement social, bien sûr, comme je l'ai dit dans mes notes d'introduction.

Alors, tous les travaux – et le gouvernement fera connaître le résultat de ses travaux prochainement – que le gouvernement a faits et auxquels le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, comme le ministère du Tourisme d'ailleurs, ont contribué visent à se rapprocher de nos clientèles, qui sont les employeurs.

M. Boucher: Merci.

Le Président (M. Beaulne): Ça va?

M. Boucher: Oui.

(17 h 20)

Le Président (M. Beaulne): Est-ce qu'il y a d'autres demandes d'intervention du côté gauche? Allez-y, M. le député de La Peltrie.


Stages en entreprise et emplois d'été pour les étudiants

M. Côté: Merci. Alors, Mme la ministre, dans le dernier budget du ministre des Finances, on a créé une place, je pense, pour les jeunes. On n'a pas oublié les jeunes. Donc, il y a beaucoup de mesures qui ont été annoncées concernant les stages et les emplois pour les étudiants. Dans votre ministère, plus spécifiquement, quels seront les efforts qui vont être déployés pour l'employabilité de nos jeunes l'été?

On voit également dans les notes du discours du budget que seront admissibles les entreprises et les organismes sans but lucratif. Est-ce que c'est l'ensemble des entreprises, autant privées que les entreprises sans but lucratif, qui vont être reconnues? Puis dans quels secteurs? Est-ce que c'est dans tous les secteurs également que ça va être reconnu, ça, pour l'emploi étudiant?

Mme Dionne-Marsolais: D'abord, un certain nombre de remarques sur la création d'emplois. Le récent discours sur le budget a présenté effectivement un ensemble de mesures à cet effet-là. Pour répondre spécifiquement à votre question au niveau des organismes sans but lucratif, c'est tous les organismes sans but lucratif qui seront susceptibles d'être des candidats. Les nouvelles opportunités que l'on voudrait réaliser dans le cadre des nouvelles mesures de création d'emplois de 1997-1998, il y en a à peu près trois en plus de quelques modifications au PSES, donc au Programme de soutien à l'emploi scientifique. Les sommes qui sont consacrées à la création d'emplois d'été pour les jeunes dans les entreprises et au gouvernement vont augmenter pour les trois prochaines années – c'est l'engagement du budget, là – de plus de 30 000 000 $. Au total, on estime à 20 000 étudiants la possibilité d'obtenir un emploi cet été avec ces hypothèses-là.

Le partage. On parle de 17 300 emplois dans différents secteurs mais en entreprises privées. Aux 10 900 emplois qui sont comblés par le biais du PEQ, Placement étudiant Québec, vont s'ajouter 6 400 nouveaux emplois, dont 5 250 seront des stages rémunérés en entreprise. Et à cette fin le gouvernement va investir 7 000 000 $ pour élargir le volet étudiants-stagiaires en administration, en sciences et en technologie pour le Programme de soutien à l'emploi scientifique.

Dans les nouvelles entreprises qui sont admissibles, on parle des entreprises des secteurs de l'agriculture, des forêts, des mines, de la culture au niveau de la production et des communications. Désormais, ils sont tous accessibles. Et les organismes à but non lucratif qui oeuvrent aussi dans ces secteurs-là le seront aussi.

On élargit aussi l'admissibilité des étudiants. Les nouvelles catégories d'étudiants admissibles vont être ceux en formation professionnelle au secondaire et ceux de formation technique en première année au niveau collégial, ainsi que les étudiants de niveau universitaire qui sont inscrits en arts, encore là, en communications, en droit et en journalisme.

On a aussi modifié les barèmes d'aide financière. La subvention maximale par entreprise a été doublée à 10 000 $. La durée minimale de l'emploi a été réduite de huit à six semaines. L'aide financière pour les étudiants de niveau secondaire et de niveau collégial première année est de 100 $ par semaine à condition que l'entreprise, elle, verse un salaire hebdomadaire d'au moins 250 $.

On a aussi enrichi les stages admissibles et les types d'emplois spécialisés ont été enrichis afin de répondre aux nouveaux secteurs, par exemple, la production animale, le journalisme, la transformation des produits de la mer, les techniques juridiques, l'exploitation agricole ou forestière.

On a mis de l'avant, cette année, un programme assez particulier, qui est un programme de tutorat au commerce international et en développement technologique. Pour qu'il y ait une chance plus grande de recrutement de la part des entreprises au niveau des stagiaires mais dans une perspective de continuité, de plus long terme, on a pensé qu'identifier des tuteurs auprès des étudiants serait une façon de rapprocher les étudiants du besoin des entreprises et surtout d'assurer un suivi de ces étudiants-là, de sorte que, éventuellement, ils puissent envisager, à long terme, d'être recrutés par ces entreprises-là s'ils ont fait un bon travail.

Alors, l'objectif général qu'on poursuit avec ce programme-là, c'est vraiment de rapprocher les établissements d'enseignement, qu'ils soient de niveau collégial et universitaire, aux entreprises québécoises, en défrayant une partie du salaire versé pour l'embauche de l'étudiant-stagiaire, encadré par un tuteur faisant partie du personnel enseignant des établissements qui offrent les programmes de formation concernés ou, dans le cas du commerce international, un commissaire à l'exportation dans la région concernée.

M. Côté: Pour ce type d'aide là, pour ces étudiants, le salaire qui va être payé, est-ce que c'est sur la base du salaire minimum? Vous avez parlé tout à l'heure de 250 $ hebdomadaire.

Mme Dionne-Marsolais: Le barème d'aide est toujours de 100 $ par semaine, 250 $ pour un étudiant collégial – je parle de notre contribution, là – ou 120 $ par semaine pour 300 $ pour un étudiant universitaire; 300 $ étant la contribution de l'entreprise. Ces emplois avec...

M. Côté: Il n'y a pas de minimum d'établi?

(Consultation)

Mme Dionne-Marsolais: Excusez-moi. La contribution du MICST, c'est 120 $ pour un salaire payé à un étudiant de 300 $.

M. Côté: O.K.

Mme Dionne-Marsolais: La durée de l'emploi, c'est huit à 14 semaines. Par employeur, le maximum ne change pas, il reste à 10 000 $. L'objectif, encore là, de ce programme, qui est très important, c'est de s'assurer... Parce que, en commerce international, la demande est énorme, les besoins sont énormes, et c'est très difficile de former des étudiants. Alors, on a pensé qu'en les liant à un tuteur on aurait la possibilité d'avoir un effet de levier plus grand à très court terme et, dans un contexte de continuité, à long terme, si l'étudiant fait bien son stage d'été.

M. Côté: Oui. Est-ce que l'ensemble des étudiants doit passer par le Placement étudiant du Québec? On parle de 20 000. Dans les notes du ministre des Finances, on dit qu'il y a 20 000 jeunes qui pourront obtenir, cet été, un emploi en passant par le Placement étudiant du Québec.

Mme Dionne-Marsolais: Tous les emplois étudiants devraient passer par Placement étudiant Québec, d'après l'information que mon sous-ministre me donne. Peut-être que je peux demander au sous-ministre de répondre spécifiquement à cette question qui est un peu de nature technique et dont les modalités d'application relèvent de l'administration.

M. Brind'Amour (Jacques): Jacques Brind'Amour, sous-ministre. Oui, par le Placement étudiant. Il faut comprendre la façon dont il fonctionne. Le Placement étudiant engage les étudiants l'été qui sont placés dans chaque région. Ils sont censés de faire le lien dans chaque région. Donc, on décentralise. Donc, d'être capable de faire 20 000 emplois-étudiants pendant l'été, ça ne pose pas de difficulté majeure.

M. Côté: Une entreprise privée également, si elle embauchait un étudiant, elle doit aussi faire appel à Placement étudiant, si elle veut profiter du programme.

M. Brind'Amour (Jacques): Exactement. Il y aura une campagne de promotion très bientôt qui va expliquer toutes les modalités. Mais disons que chaque année on procède comme ça. Ça ne pose pas de difficulté.

M. Côté: Merci.

Mme Dionne-Marsolais: Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais peut-être ajouter que le volet du programme d'emploi stratégique pour étudiants a un budget, pour 1997-1998, de 7 100 000 $. Je suis certaine que nos amis de l'opposition vont être contents de savoir que c'est à peu près trois fois plus que ce que, eux, avaient consacré, en 1993-1994, puisqu'ils n'avaient consacré que 2 400 000 $ à ce volet. Alors, je pense que ça témoigne d'une intention, au-delà des discours, d'une action.

Pour ça, pour faire connaître ce programme-là, on va faire parvenir une pochette d'information, vendredi, à tous les députés, de sorte que vous pourrez avoir les réponses aux principales questions qu'il est normal de se poser dans le cadre d'un programme de cette nature.

M. Côté: Merci, Mme la ministre.

(17 h 30)

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, M. le député d'Orford.


Société de développement industriel (suite)


Aide au financement de coopératives funéraires

M. Benoit: J'aurais une dernière question à poser à M. Roquet, et probablement qu'on finira avec M. le député de Shefford. Toute la politique en ce qui a trait aux coopératives funéraires. Au Sommet, on nous a dit qu'il y avait quelque chose qui s'en venait là-dessus. On sait tous que c'est suite, je pense, à la vente de Magnus Poirier et Alfred Dallaire. Là, les représentations qui sont faites auprès de nous, on nous dit: Bon, très bien, on veut financer les coopératives. Mais qu'est-ce qu'il arrive des corporations à capital de risque qui sont dans l'industrie? Est-ce qu'on n'est pas oublié là-dedans? Il me semble qu'il y a quelque chose qui est compliqué à comprendre là-dedans, effectivement. Pourquoi on va financer, dans ce programme, que les coopératives, en ce qui a trait aux thanatologues, et non pas les maisons indépendantes ou autres qui ne sont pas des coopératives?

Le Président (M. Beaulne): M. Roquet.

Mme Dionne-Marsolais: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Je vais demandé à M. Roquet, parce que je crois qu'il y a une petite technicalité, une petite nuance technique à préciser au député. Alors, M. Roquet, peut-être, vous pourriez répondre.

M. Roquet (Louis-L.): Lorsque la Société de développement coopératif a été fusionnée avec la SDI, il y a quatre ou cinq ans, si ma mémoire est bonne, on a transféré à la SDI le règlement, le programme de financement des coopératives. Ce programme de financement des coopératives prend sa source légale dans la loi d'aide aux coopératives qui n'est pas la loi selon laquelle la SDI intervient normalement dans ses interventions financières auprès des entreprises. Alors, la Loi sur l'aide au financement des coopératives donne des pouvoirs, la capacité d'intervenir dans n'importe quel secteur d'activité, ce que la SDI ne peut pas faire de par son mandat de base.

Par exemple, dans son programme de base, la SDI ne peut intervenir que dans le manufacturier, le tertiaire moteur, le recyclage et certains créneaux du tourisme qui sont davantage récréotouristiques, alors que dans le domaine des coopératives on peut intervenir dans à peu près tous les secteurs d'activité des coopératives. Donc, par définition, il faudrait à la SDI, pour pouvoir intervenir dans une autre structure légale qu'une coopérative funéraire, un décret du Conseil des ministres pour lui donner le pouvoir d'intervenir dans ce secteur-là, qu'elle n'a pas.

M. Benoit: Vous confirmez exactement ma compréhension des choses. La question que je pose maintenant à la ministre: Est-ce que vous ne mettez pas en compétition des forces non égales, c'est-à-dire, d'un côté, le mouvement coopératif qui, lui, peut être financé dans un programme de développement des coopératives funéraires, et, de l'autre côté, l'entreprise privée qui, elle, n'a pas cette possibilité-là? Ce que vient de nous dire M. Roquet. En tout cas, elle ne l'a pas à la SDI; peut-être qu'elle l'a à la Banque Nationale, mais ça, c'est une autre affaire. Qu'est-ce que vous répondez à ça, Mme la ministre?

Mme Dionne-Marsolais: Je ne suis pas... La société qui est dans le domaine, une entreprise funéraire, peut se financer, peut avoir accès à tous les programmes d'aide.

M. Benoit: Comme?

Mme Dionne-Marsolais: Peut-être que le président de la SDI pourrait compléter sa réponse pour répondre à votre préoccupation, parce que je ne vois pas la difficulté que vous avez, là. Alors, M. Roquet.

M. Roquet (Louis-L.): Écoutez, la vraie problématique est la suivante: actuellement, tout le monde le sait, le nombre des décès au Québec, comme en Amérique du Nord, va augmenter de façon appréciable au cours des prochaines années, et trois ou quatre très grandes multinationales se font concurrence sur le marché mondial. Loewen, SCI sont en train d'acheter non seulement ce qu'il y a au Québec, mais ils sont en train d'acheter ce qu'il y a en France, ce qu'il y a en Belgique, ce qu'il y a en Angleterre, etc. Ce qui leur permet de faire ça, c'est qu'ils sont capables d'obtenir du capital à 35 fois et profit. Alors, le multiple est plus élevé que dans les secteurs les plus flyés de la haute technologie.

Par exemple, comme financiers, au Québec, si des opérateurs indépendants se fixaient comme objectif de consolider l'industrie et de s'opposer à la volonté de Loewen, de SCI et de Stewart, la seule façon de le faire, ce serait de se trouver un partenaire financier, comme par exemple la Caisse de dépôt, de faire une ou deux acquisitions stratégiques, de s'en aller en bourse et d'aller chercher du capital pas cher pour être capable de contrer ces gens-là. Sinon, c'est impensable de penser qu'on peut faire des acquisitions comme ça puis consolider l'entreprise québécoise à partir d'opérateurs québécois avec des montages qui sont «leveragés» et dans lesquels il y a de la dette. C'est impossible.

Mais là je parle comme un financier. Je me dis que, si je voulais faire quelque chose dans ce domaine-là et que j'étais un opérateur privé – la Caisse de dépôt est déjà dans l'industrie funéraire, c'est déjà un actionnaire de Magnus Poirier – je convaincrais, comme opérateur, trois ou quatre opérateurs funéraires, je m'assoirais avec la Caisse, je ferais une couple d'acquisitions stratégiques et je flipperais ça sur le marché, et là je me servirais de l'effet d'accès à du capital moins cher pour être capable de faire une proposition qui pourrait être originale à des opérateurs québécois.

M. Benoit: Ce dont nous font part les thanatologues, finalement, c'est que la proportion de détention de l'entreprise privée... Je reconnais avec vous les faits, là, des chiffres américains, les «price earning», puis tout ça. Je suis tout à fait d'accord avec vous, il y a un problème pour nos opérants, ici, de salons mortuaires, mais est-ce qu'il faut en changer la proportion entre le coopératif et l'actionnariat de capital de risque? Je n'ai jamais compris que c'était une mission du gouvernement, moi, de faire passer les actionnaires d'une sorte à une autre sorte. J'ai bien de la misère à les suivre là-dedans.

Maintenant, si vous me dites qu'il y aurait effectivement pour certains nombres de salons mortuaires des portes d'entrées à la Caisse de dépôt, bon, je suis bien prêt à écouter ça, mais je me serais attendu, de la part de la ministre, à ce qu'elle nous dise quelque chose que, effectivement, tous ces petits salons mortuaires là – puis il y en a, on en a tous dans nos comtés – ou bien vont devenir coopérative ou bien ils vont se vendre aux Américains. Et, s'ils sont capables de se regrouper assez vite, peut-être bien qu'ils peuvent aller à la Caisse de dépôt. Mais, moi, j'aurais aimé qu'on puisse leur offrir un programme, comme on offre finalement aux plus petits via les coopératives. Mme la ministre, vous ne semblez pas très intéressée à regarder ça.

Mme Dionne-Marsolais: Bien, si vous me permettez, je suis très étonnée d'entendre de la part d'un député de l'opposition, qui se dit libéral, que l'État devrait intervenir au niveau de la propriété et du financement des maisons funéraires. Quand on parle de ce secteur-là, au Québec, on est 7 000 000 de personnes, il n'en mourra pas plus que 7 000 000, hein. En tout cas, je ne sais pas comment on va calculer ça, là, on rentre dans une dynamique, dans un secteur absolument particulier.

Je crois que l'orientation industrielle, les grandes tendances que le président de la SDI a présentées sont tout à fait justes. Les ratios prix-profit de 35, c'est énorme. Les groupes Lowen, SCI, Stewart sont des groupes essentiellement américains qui sont prêts à acheter tout ce qui bouge sur le marché. Si notre masse critique ne peut pas varier, je ne vois pas comment, en modifiant notre stratégie là-dedans ou en développant un programme particulier différent de ce qui existe et accessible à tout le monde, on modifierait l'image ou le portrait, au Québec, à ce niveau-là.

Maintenant, il est certain que, s'il y a des idées intéressantes, surtout réalistes... Parce que, quand on parle d'appui du gouvernement pour le développement de nos entreprises, l'objectif qu'on poursuit, je l'ai dit tantôt, c'est la création d'emplois, c'est le développement économique, le développement social. Au niveau de ce secteur-là en particulier, je ne vois pas la valeur ajoutée qu'une intervention du type que vous semblez privilégier peut ajouter.

M. Benoit: Mme la ministre, dans votre projet, il n'y a pas de valeur ajoutée. Tout ce que vous voulez, c'est que la détention soit faite par des coopératives. Il n'y a pas de valeur ajoutée, là. Il ne se créera pas plus de salons mortuaires au Québec, puis vous-même vous venez de dire qu'il n'en mourra pas plus de 7 000 000. Alors, là-dessus, on s'entend, il n'y a pas de valeur ajoutée. Tout ce que vous essayez de faire, c'est la possession du contrôle de certains salons mortuaires, qu'ils ne soient pas américains, qu'ils soient québécois. On se rejoint là-dessus.

Ce qu'on vous dit, c'est qu'on n'est pas d'accord que ce soit le mouvement coopératif et qu'on laisse tomber... Par exemple, je prends un cas bien précis, n'importe lequel, vous voyagez à travers le Québec autant que moi, le salon Mongeau à Saint-Hyacinthe, il a deux choix. Aujourd'hui, ce soir, il a deux choix: il vend à des Américains, j'imagine, ou bien il revire ça en coopérative. M. Roquet nous dit: Bien, s'ils se regroupent une gang, on peut peut-être aller à la Caisse de dépôt puis regarder ça. Il y a quelque chose là-dedans qui... On va changer en proportion la détention des salons mortuaires, finalement. Puis on sait que c'est souvent de petits actionnaires, ce sont des familles, de petites familles, de petites compagnies, un salon mortuaire, il ne faut pas se leurrer, chacun dans nos municipalités. Et, soudainement, c'est le mouvement coopératif qui va prendre ça en main. On est après changer la proportion.

Alors, j'ai de la misère à vous suivre là-dedans. Et je ne comprends pas pourquoi ce programme-là a été limitatif aux coopératives, qu'il ne s'est pas adressé à l'ensemble, parce que le problème, il est à l'ensemble des salons mortuaires.

(17 h 40)

Mme Dionne-Marsolais: J'aimerais peut-être demander au président de répéter ce qu'il vient de me dire au niveau du programme, parce que je pense qu'il y a une petite confusion. M. Roquet.

M. Roquet (Louis-L.): Je m'excuse, il ne s'agit pas d'un geste exceptionnel. Les résultats peuvent être exceptionnels, M. le Président, mais il s'agit d'un projet qui a été présenté au programme actuel de financement des coopératives qui permettait de faire ce genre de financement là, si une institution financière, en l'occurrence les caisses populaires Desjardins, le Mouvement Desjardins, était prête à avancer des fonds. Mais ce n'est pas une exception au programme, ce n'est pas un programme qui a été créé spécifiquement pour permettre l'acquisition de salons funéraires. On en a parlé comme quelque chose de nouveau, mais c'est quelque chose qui est dans le cadre du programme régulier de financement des coopératives.

M. Benoit: Encore là, je ne comprends pas. En quelque part, Mme la ministre et M. Roquet, je ne comprends pas. Ça a été déposé au Sommet socioéconomique. C'était une grosse nouvelle. Ça devait créer 1 050 emplois dans l'industrie, il serait maintenu 1 000 emplois, etc. Et là on dit qu'il n'y a rien d'exceptionnel là-dedans. Mme la ministre, «c'est-u» exceptionnel, ce projet-là, ou ce n'est pas exceptionnel? J'ai de la misère à vous suivre, moi, dans cette affaire-là.

Mme Dionne-Marsolais: Je vais demander à M. Roquet de continuer son explication qui pourra peut-être clarifier la compréhension du député.

M. Roquet (Louis-L.): Je m'excuse, M. le Président, je ne m'attendais pas à me faire poser des questions là-dessus. Vous me prenez un peu de court. La seule chose qui est exceptionnelle là-dedans et qui dépasse la compétence de la SDI, c'est le niveau de l'engagement. Nous ne pouvons pas, même avec l'autorisation de notre ministre, dépasser un engagement financier de 10 000 000 $. Donc, ça prend une décision gouvernementale pour nous permettre d'intervenir en garantie dans une facilité de crédit de 15 000 000 $ et plus. Alors, dans ce sens-là, c'était une décision gouvernementale d'intervenir. Mais le projet aurait été inférieur à 10 000 000 $ et il aurait été en tout conforme à notre programme, au programme de financement des coopératives.

M. Benoit: Mme la ministre, le but du programme, c'était de faire que des Québécois demeurent propriétaires de leur salon mortuaire. C'est exact?

Mme Dionne-Marsolais: Non, ce n'est pas ça. C'est là que vous faites une erreur. C'est là qu'il y a une erreur de compréhension, parce que la Loi sur les coopératives permet à tous les secteurs économiques de devenir une coopérative. Ce n'est pas particulier à ce secteur-là. Toute la problématique d'acquisition d'entreprises québécoises par des Américains, d'abord, ce n'est pas nouveau, et ce n'est pas propre à ce secteur d'activité là. L'outil – parce que c'est un outil ce programme-là – de la coopérative, c'est un outil qui est à la disposition des Québécois qui voudraient s'en servir, mais ce n'est pas ciblé au niveau de ce secteur des salons funéraires.

M. Benoit: Mais, écoutez, au Sommet, ce que vous avez annoncé, et je vais me permettre de vous le lire: «Fonds de développement des coopératives funéraires – c'était dans vos annonces, ça. Ce projet vise la création d'un fonds de développement pour compléter le financement requis pour que les coopératives funéraires puissent doubler leur part de marché d'ici deux ans via l'acquisition d'entreprises.» Ce que je vous dis. Est-ce que c'est soudainement une mission gouvernementale que les gens morts aillent dans des coopératives plutôt que dans des salons mortuaires à capital-actions? C'est ça que les gens qui ont des salons mortuaires dans chacune de nos villes nous disent en ce moment. Ce n'est pas équitable pour eux, propriétaires de petits salons: ou bien ils vont vendre à des Américains et ça va finir là, ou on va créer une coopérative à côté. C'est ce qui va se passer dans la vraie vie.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, pour répondre à la question du député, M. le Président, non, ce n'est pas une politique du gouvernement que les gens s'en aillent dans des salons funéraires coopératives.

M. Benoit: Alors, pourquoi on le fait restrictif à ce moment-là, ce programme-là, aux coopératives seulement?

Mme Dionne-Marsolais: Ce n'est pas un programme nouveau et il n'est pas restrictif. C'est un programme qui s'adresse à tous les secteurs économiques. Ça fait quatre fois que je vous le dis.

M. Benoit: Bien, s'il n'est pas nouveau, pourquoi on l'a mis dans le Sommet socioéconomique, Mme la ministre?

Mme Dionne-Marsolais: Nous sommes dans les engagements financiers de cette année et ce à quoi vous faites référence n'est pas dans les engagements financiers.

M. Benoit: Oui, mais on parle aussi de politiques économiques, ici, Mme la ministre, vous le savez très bien. Êtes-vous après renier cet engagement du Sommet socioéconomique? Est-ce que vous êtes après me dire: On ne veut pas en parler? Est-ce que c'est ça que vous êtes après faire?

Mme Dionne-Marsolais: Non, ce n'est pas ce que je dis.

M. Benoit: Je reviens avec ma question. Les gens qui ont des salons mortuaires aujourd'hui ont deux choix: vendre à des Américains ou vendre à une coopérative. Est-ce que c'est exact?

Mme Dionne-Marsolais: Non, c'est une société. Ils peuvent aller à la banque et se financer, monsieur.

M. Benoit: Oui, exactement. Mais là ce n'est pas égal.

Mme Dionne-Marsolais: Pardon?

M. Benoit: Vous admettrez que, d'un côté, on a la SDI, dans le cas des coopératives; d'un autre côté, vous leur dites d'aller à la banque.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, on peut en discuter jusqu'à demain. S'il y a des propositions particulières – et il semble que le député d'Orford en ait – qui, à son avis, méritent l'attention du gouvernement, on va les regarder de manière spécifique. Alors, qu'il nous les propose et on regardera ce qu'on peut faire.

M. Benoit: La Corporation des thanatologues du Québec est entrée en communication avec votre ministère. Ils vous ont fait part de leurs doléances, est-ce que vous avez idée de donner suite à leur point de vue et d'aller dans la direction de ce qu'ils ont demandé?

Mme Dionne-Marsolais: Alors, je vais demander au sous-ministre de répondre à cette question-là, puisque vous dites qu'ils ont contacté les gens du ministère.

M. Benoit: Je vous rappellerai que du temps où nous étions là, il y avait un problème similaire, c'était celui des préarrangements. J'ai été celui qui a piloté ce dossier-là chez Gérald Tremblay, on l'a réglé. Je me demande si on n'est pas en train... Ces gens-là en ont vu pas mal du gouvernement, les thanatologues, alors ils vous gardent à l'oeil de très près, de très, très près.

Mme Dionne-Marsolais: Alors, M. le Président, je vais demander à mon sous-ministre, qui a peut-être une personne, celui qui a reçu cette demande et qui a des contacts avec le groupe en question, de répondre à cette question-là.

Le Président (M. Beaulne): M. le sous-ministre.

M. Brind'Amour (Jacques): Oui. Jacques Brind'Amour. Lors du Sommet, la Fédération des coopératives funéraires a déposé un projet. Il y a des fonds funéraires, des fiducies qui sont dans chacune des régions. La Fédération voulait fédérer ces fonds-là en un seul fonds et demander au gouvernement si c'était possible que ce fonds-là soit fédéré et géré en quelque sorte par la SDI. Alors, le projet a été reçu comme une initiative du secteur privé, coopératif, voulant fédérer et avoir une masse critique effectivement pour faire les acquisitions. Le projet final, ce n'est pas celui-là qui a été retenu. Le projet final, c'est que le Mouvement Desjardins a mis sur pied un fonds identique de 15 000 000 $ et s'est adressé à la SDI, dans le cadre de ses programmes d'aide aux mouvements coopératifs, où la SDI garantit à 100 % les sommes qui sont investies. Ce que le gouvernement a permis, donc, c'est d'autoriser la SDI à aller de l'avant, comme disait M. Roquet, d'autoriser que les garanties soient faites sur un fonds supérieur à 10 000 000 $. Alors, le résultat, effectivement, c'est que la Fédération des coopératives funéraires dispose donc d'une capacité d'investissements dans un fonds avec 15 000 000 $ qui est garanti à 100 %.

Maintenant, comme disait M. Roquet tout à l'heure, ce n'est pas une nouveauté parce que, en vertu du programme d'aide aux coopératives, on pouvait déjà garantir à 100 % les sommes.

M. Benoit: Donc, l'annonce au Sommet, ça n'aurait pas été annoncé que ça n'aurait pas fait un gros changement, si je comprends bien. C'est ce qu'il faut que je comprenne?

M. Brind'Amour (Jacques): C'est-à-dire que le projet qui avait été déposé au Sommet, le résultat est le même. Je pense, par contre, que la façon d'y arriver est peut-être plus simple, parce que ce qu'il aurait fallu faire au Sommet, ça aurait été de modifier la Loi sur la protection du consommateur qui garantit ces fonds-là régionaux, etc. Alors, le résultat est le même, on se retrouve avec un fonds de 15 000 000 $ qui permet aux secteurs coopératifs d'atteindre ses objectifs.

M. Benoit: Est-ce qu'on atteint ces objectifs? M. Mongeau, de Saint-Hyacinthe – on pourrait en nommer des centaines, j'imagine, au Québec – est-ce qu'on va atteindre l'objectif de l'empêcher de vendre à des Américains? Je veux dire qu'il n'aura pas d'autre choix, lui: ou bien il revire ça en coopérative ou bien il vend à des Américains, alors que je me serais attendu à ce qu'un programme comme ça aide nos petits salons mortuaires à se regrouper, à devenir plus organisés, à se transiger sur des multiples de 32 fois, si c'est ça qui est la norme dans l'industrie en ce moment. Ce n'est pas ça qui va se passer en ce moment. Je ne suis pas sûr que vous avez le bon moyen pour arriver à l'objectif. L'objectif est noble, Mme la ministre, on en est, mais le moyen que vous prenez, je suis loin d'être sûr que vous allez y arriver, à l'objectif.

(17 h 50)

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, quand on exploite une entreprise, on a le choix entre un certain nombre d'options: changer en coopérative, dans ce cas-là, vendre à des Américains ou à des tiers ou acheter sur la base du capital et du bilan de notre entreprise. Je ne vois pas la différence entre une entreprise comme celle-là et une autre par rapport à ces choix. Donc, il n'est pas obligé. Il n'y a rien qui dit qu'il n'y a qu'un choix, de devenir une coopérative ou de vendre aux Américains. Il peut rester comme il est, il peut acheter une autre entreprise, il peut se regrouper avec d'autres. Il y a certainement plus d'imagination dans ce secteur-là que ce que le député semble nous transmettre.

M. Benoit: Mais il y a une discrimination évidente, Mme la ministre. Ce n'est pas une question d'imagination, c'est une question de discrimination. On discrimine une façon de faire du financement versus une autre façon de faire du financement. C'est ce que vous disent les thanatologues. On n'a pas inventé ça, nous autres, c'est les thanatologues qui nous disent: Écoutez, on est pénalisés là-dedans, la proportion va passer de 8 à 16. Il y a, à quelque part, là...

Et l'autre question: Est-ce qu'on parle de nouvelles coopératives qui devront se créer à ce moment-là? Est-ce que ce sont des nouvelles coopératives?

Mme Dionne-Marsolais: Alors, M. le Président, il y a toujours eu, au Québec, autant sous l'ancien gouvernement que sous le nôtre, une certaine forme d'appui aux mouvements coopératifs – vous pouvez l'appeler discrimination si vous voulez – parce que nous avons toujours identifié que, au Québec, c'était un outil intéressant pour une population de la taille du Québec, pour une économie de notre taille. Avec 175 000 000 000 $ comme production intérieure brute, nous sommes une économie qui est quand même de taille, qui est bien différente de l'économie américaine. Donc, l'outil que représente la coopérative, c'est un outil qui sert bien les intérêts des Québécois.

Quant à savoir si c'est un nouveau programme, non, ce n'est pas un nouveau programme.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Merci, M. le Président. On va changer de sujet, là. Dans mon introduction, j'ai parlé de compagnies exportatrices. D'ailleurs, dans le budget du ministre des Finances l'an dernier, on parlait de 2 000 compagnies exportatrices supplémentaires d'ici l'an 2000. Je pense que tout le monde y souscrit. On sait que, de plus en plus, chaque entreprise a plus de moyens d'exporter aux États-Unis. C'est certain que la situation économique qui prévaut, ici, au Canada, par rapport à celle des États-Unis fait en sorte que l'exportation peut être plus facile. Encore là, on a un discours du gouvernement qui dit qu'il faut encourager l'exportation, qu'il faut mettre l'accent sur les marchés extérieurs, sauf qu'on voit à la lecture des crédits qu'il y a une baisse du programme du soutien à l'exportation de 28 %. Ceux qui sont députés depuis un certain temps se rappellent des beaux jours du programme APEX, un programme efficace. Maintenant, on a 28 % de moins dans ce programme d'exportation.

Ce qu'on constate présentement, c'est que les emplois qui sont créés par rapport à l'exportation... On sait que le gouvernement ne le fait pas exprès. En fin de compte, il fait de grands discours, sauf que sur papier il n'y a pas de mesures concrètes qui sont prises pour augmenter l'exportation ou, du moins, pour l'encourager.

Donc, j'aimerais savoir de la ministre si elle se fie sur des données statistiques, qui vont se réaliser de toute façon, pour s'approprier une victoire politique. En fin du compte, le discours et les actes sont évidemment très différents. Comment justifier une diminution de 28 % du programme du soutien à l'exportation lorsqu'on parle d'encourager l'exportation?

Mme Dionne-Marsolais: D'abord, M. le Président, l'exportation au Québec, c'est extrêmement important. J'ai dit tantôt qu'on a une production intérieure brute de 175 000 000 000 $CAN. On vend à l'extérieur du Québec 54 % de cette production-là: 19 % se vend à nos partenaires canadiens et 35 % à nos partenaires à l'international. Et ce qui est en croissance, nos partenaires canadiens augmentent leurs achats chez nous à un taux de 2 % à 3 % par année, alors que nos partenaires à l'international augmentent de 15 % à 20 % par année, en moyenne, leurs achats chez nous. Donc, c'est un volet important de nos activités.

Quant on a ouvert ce matin, on a dit que l'on concentrerait nos questions d'aujourd'hui sur la SDI et sur l'ensemble du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Si vous me permettez, je serais plus portée à ce qu'on reporte cette question-là au moment de l'étude des crédits du volet commerce extérieur, parce que toute notre stratégie à l'exportation est une stratégie qui n'est pas seulement la baisse d'un programme ou l'utilisation d'un seul programme, comme celui dont parle le député, qui est le programme APEX, mais il y a une série d'autres mesures extrêmement structurées et structurantes que nous avons définies, que nous avons prises et que nous mettons en place cette année pour développer les exportations parce que, effectivement, c'est plus que la moitié de notre production intérieure brute.

Le Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. Oui, je conviens avec vous que nous avons deux heures de réservées pour l'étude du volet strictement commerce extérieur. Comme nous approchons de la fin, j'inviterais le député... Il peut bien poursuivre dans cette veine s'il le veut, mais il va y avoir deux heures consacrées spécifiquement au volet exportation.

M. Brodeur: J'y reviendrai donc la semaine prochaine.

Une voix: Nous autres aussi d'ailleurs.


Taux de faillite des PME

M. Brodeur: Tout simplement, pour terminer, et pendant qu'on a le président de la SDI ici, je vais en profiter, parce qu'il ne reste que trois ou quatre minutes à notre journée de travail... Je vois que vous en êtes fiers. On a discuté tantôt du plan Paillé. Naturellement, on est allé du coq à l'âne, les questions étant partagées de chaque côté. On a vu, l'année dernière particulièrement, que 41 % des faillites canadiennes ont lieu au Québec. On connaît la longévité d'un tas de choses, sauf des PME. Je me demande si la SDI ou le ministère a fait des statistiques sur l'augmentation du taux de faillites des PME avec la création de ce plan Paillé. Parce que, naturellement, ça pourrait nous démontrer qu'il y a seulement eu un déplacement d'emplois où qu'on a accéléré des pertes en capital pour certains créanciers, pour certains fournisseurs. Donc, évidemment, je ne sais pas si la SDI a des statistiques des différentiels avant 1995 et après 1995 sur les taux de faillites au Québec.

M. Roquet (Louis-L.): Je n'ai pas d'informations comparatives sur l'évolution des taux de faillite, en particulier au Québec. C'est quelque chose qu'on va avoir l'occasion d'étudier à partir de l'étude de retombées économiques parce qu'on va avoir un meilleur portrait de l'évolution de notre portefeuille.

Mais, je vous réfère, M. le Président, par curiosité, à un article extraordinaire qui est paru dans l'édition du 7 avril 1997 du Globe and Mail de Toronto, qu'on ne peut pas accuser d'hyperfavoritisme envers l'économie du Québec, qui attire l'attention sur l'aspect souvent loufoque des statistiques sur les faillites. Il dit que c'est excessivement difficile d'établir des relations entre la situation économique, le taux des faillites, qu'elles soient personnelles ou d'entreprises.

Je vous cite quelques statistiques que l'auteur cite. Par exemple, si on parle des faillites personnelles – je vais revenir aux faillites d'entreprises, elles sont plus pertinentes – la moyenne canadienne, en 1996, c'est 3,41 faillites par 1 000 habitants en état de travailler, 15 ans et plus. Donc, on s'attend à ce que le taux du Québec soit supérieur à la moyenne canadienne et que le taux de l'Alberta, avec 7 % de chômage, soit un taux extraordinaire. Or, le taux du Québec, en 1996, pour les faillites personnelles est de 4,24 sur 1 000 et le taux de l'Alberta, avec un taux de chômage de 7 %, est de 4,71, plus élevé que le Québec. Et on ne comprend pas pourquoi.

De même pour les faillites d'entreprises. La moyenne canadienne, en 1996, est de 1,53 sur 1 000 entreprises. L'Alberta est à 1,94 et le Québec est à 2,53, plus élevé que l'Alberta avec un taux de chômage de 12 %, avec une économie qui ne connaît pas le boum que l'Alberta connaît.

(18 heures)

La seule chose qu'on observe – et c'est pour ça qu'il faut creuser ce sujet-là et que nous allons certainement le faire – c'est que la moyenne des pertes tend à baisser, au Canada en général et au Québec aussi. En 1992, une faillite coûtait en moyenne 515 000 $ aux créanciers; en 1996, elle en coûte 300 000 $. Alors, on pourrait peut-être formuler une hypothèse sur le fait qu'il se crée davantage d'entreprises et que plus il y a d'entreprises qui se créent, plus il risque d'y avoir des faillites qui sont des faillites petites. On va essayer de voir quel pourrait être le type d'impact.

J'attire votre attention, et je finis là-dessus dans une seconde, M. le Président. L'auteur termine en disant que, dans le fond, les faillites sont peut-être le meilleur indice du dynamisme d'une économie parce que ça prouve que, au moins, il se crée des entreprises. Il le dit sans taquiner, indirectement, en disant que, d'après The Economist , qui est un journal sérieux, un des 10 facteurs qui a le plus joué dans le développement de Silicon Valley, c'est la capacité de faire une erreur et de recommencer par la suite. Ce qu'on peut plus difficilement faire en Europe.


Document déposé

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. Roquet. Ce serait peut-être utile, pour le bénéfice des membres de la commission, que vous nous déposiez l'article en question.

M. Roquet (Louis-L.): Je vais vous déposer l'article, c'est vraiment intéressant.

Le Président (M. Beaulne): D'accord.

M. Benoit: J'ai eu l'occasion de lire cet article, bien sûr, et il faut bien voir qu'on ne s'adresse qu'aux corporations. Je ne pense pas qu'on s'adresse aux faillites personnelles, ici.

M. Roquet (Louis-L.): Les deux.

M. Benoit: Les deux?

M. Roquet (Louis-L.): Les deux.

M. Benoit: Parce que le corollaire est moins évident dans le cas des individus.

Le Président (M. Beaulne): De toute façon, je pense que les collègues de la commission pourront prendre note de l'article à la lumière des transcriptions et des explications qu'en a données M. Roquet.

Là-dessus, je constate que nous avons épuisé les quatre heures d'étude des éléments 1, 2, 3 du programme, et nous ajournons les travaux de la commission sine die.

Je tiens à rappeler aux membres que, contrairement à ce qui avait été prévu, la commission qui devait se tenir demain sur le commerce extérieur est reportée. Donc, la commission de l'économie et du travail ne siège pas demain.

Alors, j'ajourne nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 3)


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