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Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le mardi 12 juin 2007 - Vol. 40 N° 4

Étude des crédits du ministère des Finances (1): volet Finances


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Table des matières

Finances

Autres intervenants

 
M. Alain Paquet, président
Mme Linda Lapointe, vice-présidente
M. Roch Cholette
M. Guy Lelièvre
Mme Nicole Ménard
M. Pierre Marsan
M. Emmanuel Dubourg
M. Claude Morin
Mme Lucille Méthé
* M. Jean Houde, ministère des Finances
* M. Sylvain Toutant, SAQ
* M. Norman E. Hébert, idem
* M. Alain Cousineau, Loto-Québec
* M. Henri-Paul Rousseau, CDPQ
* M. Richard Guay, idem
* M. Pierre Brunet, idem
* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quinze heures quinze minutes)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je rappelle bien sûr à toutes les personnes présentes ici, dans la salle, de bien s'assurer d'avoir éteint la sonnerie de leurs téléphones cellulaires pour ne pas perturber nos travaux.

La commission est réunie cet après-midi afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires relevant de la ministre des Finances pour l'année financière 2007-2008. Une enveloppe totale de neuf heures a été allouée pour l'étude des trois programmes du ministère des Finances. Un premier bloc de six heures est prévu aujourd'hui et un autre bloc de trois heures, consacré au volet Institutions financières, suivra vendredi après-midi.

D'abord, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Arcand (Mont-Royal) est remplacé par M. Marsan (Robert-Baldwin).

Finances

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors donc, je rappelle brièvement le fonctionnement de la commission pour l'étude des crédits. Plusieurs des collègues avons participé à d'autres commissions depuis quelques jours, alors je ne rappellerai pas le détail de la décision du président de la Chambre à cet égard. Il y aura d'abord, en conformité avec cette décision, des remarques préliminaires, des blocs de 15 minutes: d'abord pour la ministre des Finances, suivies par le critique officiel en matière de finances, et ensuite suivies des remarques préliminaires du porte-parole officiel de la deuxième opposition pour les finances. Par la suite, le temps qui nous est dévolu sera réparti en proportion de 35 % pour le groupe parlementaire formant le gouvernement et 65 % pour l'ensemble des deux oppositions, dont 53 % pour l'opposition officielle, de ce 65 %, et 47 % du temps pour le deuxième groupe d'opposition.

J'inviterais bien sûr, de manière à dynamiser nos travaux, un peu comme l'invitait le président de la Chambre, à ce que, dans la mesure du possible, les questions et réponses soient relativement concises et soient relativement proportionnées, je dirais, de part et d'autre. Il peut arriver à l'occasion qu'une réponse soit une minute de plus, on ne le fera pas à la seconde près, mais j'inviterais bien sûr d'y aller avec diligence à cet égard. Et en dernier lieu j'invite encore une fois les membres de la commission, comme c'est le règlement, de ne pas faire d'échanges directs mais de le faire à travers la présidence pour faire valoir les différentes argumentations.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, nous débutons nos travaux, et je cède la parole, pour ses remarques préliminaires, à Mme la ministre des Finances.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, chers collègues, d'abord permettez-moi de saluer les gens qui sont ici présents, d'abord l'opposition officielle et la deuxième opposition ainsi que plusieurs membres du personnel du ministère des Finances, et bien sûr je vais saluer plus particulièrement certains groupes qui se rapportent au ministère des Finances à bien des égards, M. le Président, et donc je vais les présenter subséquemment.

Alors, traditionnellement, bien sûr c'est l'occasion aujourd'hui de discuter des crédits attribués au ministère des Finances pour 2007-2008. Traditionnellement, cet exercice est l'occasion pour présenter les crédits de l'ensemble des secteurs du ministère des Finances, faire état de nos réalisations et des actions que nous comptons entreprendre dans les prochains mois, discuter des différents organismes qui font partie du portefeuille ministériel de la ministre des Finances, c'est-à-dire l'Autorité des marchés financiers, la Caisse de dépôt et placement du Québec, l'Institut de la statistique du Québec, la Société des alcools du Québec et la Société des loteries du Québec. Je profite d'ailleurs de l'occasion pour saluer la présence, dans la salle, des dirigeants de ces sociétés: M. Yvon Fortin, directeur général de l'Institut de la statistique du Québec, M. Alain Cousineau, président-directeur général de Loto-Québec, et M. Sylvain Toutant, président-directeur général de la Société des alcools du Québec. Quant à M. Henri-Paul Rousseau, président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement, et Pierre Brunet, président du conseil d'administration, ainsi que M. Jean Saint-Gelais, président-directeur général de l'Autorité des marchés financiers, nous aurons l'occasion de les rencontrer à la prochaine séance de la commission parlementaire, qui concerne le volet Institutions financières.

n (15 h 20) n

Le budget de dépenses du ministère est de 7,4 milliards de dollars en 2007-2008. En soustrayant de ce montant les amortissements, c'est-à-dire 1,6 million de dollars, et en ajoutant les investissements, 2,3 millions de dollars, on obtient les crédits totaux qui sont de 7,4 millions de dollars. Lorsque l'on considère les crédits du ministère des Finances dans leur ensemble, on observe que les crédits permanents, dont font partie le service de la dette et les frais de services bancaires qui n'ont pas été votés, accaparent 98 % des crédits totaux. Le service de la dette, qui se chiffrera, en 2007-2008, à 7,2 milliards de dollars, est le troisième poste budgétaire en importance au gouvernement après la santé et l'éducation. C'est d'ailleurs à cause de l'importance de la dette que mon gouvernement a décidé de s'y attaquer, notamment par la création du Fonds des générations qui a été annoncé lors du discours sur le budget de l'an dernier.

Dans le discours sur le budget de cette année, j'ai annoncé qu'on devait s'attaquer à la dette avec fermeté, notamment en accélérant les versements au Fonds des générations. Ainsi, au 31 mars 2009, le Fonds des générations atteindra près de 2 milliards de dollars. Donc, si on enlève les crédits permanents qui, je le répète, n'ont pas besoin d'être votés, il reste alors des crédits à voter, pour le ministère des Finances, de 154 183 700 $ en 2007-2008. Sur une base comparative, ces crédits représentent une augmentation nette de 3 millions de dollars, soit 2 % de plus par rapport à l'exercice financier de 2006-2007. On remarque, au programme 1, élément 2, que les crédits octroyés au ministère des Finances comprennent un montant de 114,3 millions de dollars qui sera transféré à l'Institut de la statistique du Québec. Le ministère dispose aussi d'un budget spécial de 52,7 millions, en 2007-2008, à titre de provision pour augmenter tout crédit pour des initiatives concernant les revenus. Ce poste budgétaire, inscrit au programme 2, élément 6 des crédits du ministère, est en hausse de 5 millions de dollars par rapport à l'année précédente, ce qui nous permettra de poursuivre nos efforts de lutte contre l'évasion fiscale. Ces sommes, qui sont destinées au financement de mesures spécifiques, représentent 34 % des crédits à voter en 2007-2008. Elles seront transférées à d'autres ministères et organismes comme le ministère du Revenu, le ministère de la Justice et la Commission de la construction du Québec.

Pour sa part, le budget d'investissement passe de 3 380 000 000 $, en 2006-2007, à 2 330 000 $, en 2007-2008. Est-ce que j'ai dit 3 milliards de dollars? 3 380 000 $, pardon. Cette baisse de 1 milliard de dollars est attribuable à une diminution au niveau des projets de développement informatique. Il y a une réduction des acquisitions de matériel informatique.

J'aimerais également profiter de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui pour vous présenter les principaux organismes qui relèvent directement de ma responsabilité. Mais d'abord j'aimerais rappeler que mon gouvernement a posé des gestes démontrant l'importance que nous accordons à la rigueur et à la transparence. Ainsi, la nouvelle Loi sur la gouvernance des sociétés d'État en est un exemple concret. Cette loi augmente les pouvoirs du Vérificateur général. Dès 2007-2008, il pourra covérifier la Société des alcools du Québec et la Société générale de financement du Québec, alors que, dès 2008-2009, il pourra vérifier la Régie des installations olympiques, la Société des établissements de plein air du Québec et l'Agence métropolitaine de transport. Je tiens à souligner que les efforts demandés pour améliorer les finances publiques interpellent également les sociétés d'État. À chaque année, le gouvernement demande à ces sociétés de prendre les mesures nécessaires pour réduire leurs dépenses et ainsi accroître leurs bénéfices, revenus qui, rappelons-le, contribuent au financement des dépenses de l'État. Pour nous, les sociétés de l'État sont une des pièces maîtresses du service public. Il m'apparaît donc important de souligner leur contribution à l'atteinte des objectifs gouvernementaux.

Si vous le permettez et si j'ai l'acquiescement de l'opposition officielle et du deuxième groupe d'opposition, je pourrai d'ailleurs donner l'occasion à chacun des présidents de répondre à certaines de vos questions.

À titre de conclusion, avec les crédits qui lui sont accordés, le ministère des Finances sera en mesure de continuer à réaliser sa mission de favoriser le développement économique du Québec et de soutenir la croissance de l'économie, de l'investissement et de l'emploi. Les choix budgétaires du ministère des Finances seront effectués selon les cinq grandes orientations stratégiques qu'il s'est données dans son plan annuel de gestion des dépenses.

En matière de finances publiques saines, le ministère va continuer à viser l'équilibre budgétaire et accélérer les versements au Fonds des générations afin de diminuer la dette.

Du côté de la fiscalité, tel qu'annoncé au dernier discours sur le budget, le ministère va valoriser le travail en réduisant les impôts, ce qui rend notre régime fiscal compétitif.

Du côté du déséquilibre fiscal, on sait que des progrès considérables ont été réalisés au titre de la péréquation. Les discussions se poursuivront sur le financement de l'éducation postsecondaire et des autres programmes sociaux.

En ce qui a trait au secteur financier, nous allons continuer, avec diverses modifications législatives et réglementaires, à améliorer la protection des épargnants et à harmoniser les règlements du système des valeurs mobilières avec les autres provinces.

Enfin, du côté de la modernisation, le ministère va continuer à collaborer aux divers projets gouvernementaux en cours, notamment par la mise en oeuvre de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État et par la réalisation des différents éléments prévus à l'entente avec le Vérificateur général.

Par ailleurs, sur le plan de la régie interne, le ministère accentuera ses efforts afin d'attirer et de retenir les ressources humaines dont l'expertise est nécessaire à la réalisation de la mission du ministère des Finances.

Je vous remercie et je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Mme la ministre. Je cède la parole maintenant à M. le député de Chauveau, pour ses remarques préliminaires, le porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances.

M. Gilles Taillon

M. Taillon: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Permettez-moi, à mon tour, de saluer les dirigeants du ministère des Finances et aussi les dirigeants de l'Institut de la statistique du Québec, de la Société des alcools du Québec et de Loto-Québec.

Alors, M. le Président, en scrutant le plan de gestion du ministère des Finances, donc en regardant un petit peu ce qu'on poursuit comme objectifs, je retiens quatre principaux résultats à atteindre. D'abord, la nécessité de maintenir un équilibre budgétaire dans un contexte d'un financement de la santé qui est problématique et d'une démographie vieillissante. Deuxième objectif à atteindre: conduire des travaux pour réduire la dette. Troisième objectif: des objectifs de croissance économique avec une fiscalité qui a un impact sur l'activité économique, une fiscalité plus compétitive et plus équitable. Un quatrième objectif qui vise à améliorer, dans le sens d'augmenter, les transferts fédéraux principalement au titre de l'enseignement postsecondaire et des infrastructures, une volonté aussi, dans cet objectif lié aux transferts fédéraux, d'encadrer le pouvoir fédéral de dépenser. Et, cinquièmement, un objectif de protection des épargnants et des investisseurs. Alors, dans le plan annuel de gestion, Mme la ministre, il est assez clair que vous poursuivez ces grands objectifs là.

À la lumière des décisions prises dans le budget 2007-2008 et 2008-2009, puisque nous avons un budget sur deux ans, il nous semble que les choix de mesures ne concordent pas avec les objectifs à atteindre dans votre plan de gestion. Au lieu d'une réduction de la dette, on assiste, pour les deux prochaines années, à une augmentation de la dette. Une augmentation qui totalise plus de 5 milliards après déduction des sommes placées au Fonds des générations, en déduisant, donc, augmentation de 5 milliards de dollars. Et vous projetez ? et on aura l'occasion d'en rediscuter ? une augmentation de 30 milliards au niveau des investissements des infrastructures publiques pour les cinq prochaines années. Dans notre compréhension, une réduction de la dette, ça ne veut pas dire une augmentation de la dette, à moins d'une nouvelle créativité comptable qui nous échappe. Nous aurons donc l'occasion, avec les questions qui vont suivre, de revenir là-dessus.

Vous poursuivez, Mme la ministre, des objectifs de croissance économique, mais des études réputées démontrent assez clairement que les pays fortement endettés subissent les contrecoups négatifs sur leur taux de croissance économique. L'endettement, qui n'est rien d'autre qu'une taxe différée, nuit à l'investissement et surcharge les générations futures, ce qui risque d'être catastrophique chez nous, compte tenu d'une démographie qui rapetisse la population active, les 15-65 ans, celle qui paie, dans les faits, taxes et impôts. Nous aurions souhaité, à l'opposition officielle, que vous affectiez les excédents budgétaires de l'année 2006-2007, de 1,3 milliard de dollars, à la réduction de la dette, dégageant une marge de manoeuvre qui aurait permis d'investir au niveau des infrastructures plutôt que d'y aller de l'utilisation de ces sommes pour équilibrer votre budget.

n (15 h 30) n

Bref, au niveau du premier objectif, nous allons devoir réconcilier augmentation et réduction, ce qui nous apparaît un petit peu contradictoire. Deuxièmement, au plan de la recherche de l'équilibre budgétaire, les budgets 2007-2008 et 2008-2009 sont en équilibre, je le disais tantôt, grâce à l'utilisation d'une réserve ponctuelle, une réserve 2006-2007 constituée principalement de ventes d'actif, de revenus supplémentaires d'Hydro-Québec et de revenus d'impôt en provenance du règlement de l'équité salariale. Des mesures fiscales coûteuses, de l'ordre de 950 millions, pour les particuliers et des annonces de mesures fiscales, pour les entreprises, qui affecteront sérieusement les recettes fiscales, principalement à compter de 2009-2010, nous inquiètent quant à l'objectif que vous vous êtes fixé, votre deuxième, de l'équilibre budgétaire. Déjà, votre ministère, à la suite de nos demandes, prévoit, en 2009-2010, un déficit de quelque 250 millions de dollars, sans compter l'effet de la réorganisation des normes comptables et de la nécessaire intégration des déficits cumulés des hôpitaux et des universités. Nous aurons l'occasion, au cours de cette défense des crédits, de tenter de savoir un petit peu comment vous envisagez intégrer à la comptabilité gouvernementale ces résultats financiers en provenance des hôpitaux et des universités.

Cette situation pénible des finances publiques donc pour les trois prochaines années, qui paraît moins pour les deux prochaines compte tenu de l'équilibre dû aux revenus extraordinaires, mais, en 2009-2010... sont possibles aussi avec une compression de l'augmentation des dépenses publiques de 1 %, à la fois 2008-2009 et 2009-2010, donc une compression, par rapport à l'année 2007-2008, de 1 %, une compression d'environ 600 millions de dollars. Vous nous avez, lors de la présentation du budget, dit que ça allait être facile, cette compression-là; nous ne sommes pas aussi sûrs de cela que vous et nous aurons besoin d'avoir des précisions quant aux lieux où se feront ces compressions.

Comment concilier cela avec l'augmentation importante des dépenses de santé prévisibles? Nous comptons beaucoup, sans doute comme vous, du gouvernement, sur la commission Castonguay, mais nous sommes quand même inquiets de la pression à la hausse sur les dépenses, toutes les dépenses de santé.

Malgré cette conjoncture difficile, il faudra au moins, malgré cela, déterminer les mesures d'impact des baisses d'impôt sur l'activité économique. C'est, j'ai compris, un objectif secondaire. Peut-être qu'il y a là un miracle possible ou des recettes qui vont nous permettre de faire en sorte que les recettes fiscales augmentent à tel point qu'on puisse échapper aux difficultés que nous prédisons suite à l'analyse des chiffres de votre budget. Donc, Mme la Présidente, du côté de l'équilibre budgétaire, des inquiétudes importantes quant à l'avenir, et nous aurons l'occasion d'y revenir.

Concernant les transferts fédéraux, votre troisième objectif, la stratégie retenue en campagne électorale et traduite dans votre budget d'utiliser les produits du règlement de la péréquation ? en fait le 700 millions que vous affectez à la baisse des impôts, nous pouvons dire que c'est 80 % du règlement de la péréquation de la première année ? place le Québec dans une position de négociation difficile vis-à-vis le fédéral et les autres provinces. La raison pour laquelle je ne parle que de la péréquation, c'est parce que c'est un petit peu s'illusionner que de penser que, pour les autres sommes, il n'y a pas un élastique d'attaché au transfert qui vient au titre ou de la santé, ou de l'éducation, ou de la main-d'oeuvre, ou de l'environnement.

Donc, dans l'ensemble, Mme la ministre, nous pensons que c'est une stratégie qui risque de se traduire par d'énormes difficultés face à nos négociations futures avec le gouvernement fédéral, parce qu'après avoir parlé de besoins en santé et en éducation voilà qu'aussitôt l'argent arrivé, celui du déséquilibre fiscal, celui donc de 80 % de la péréquation, on l'utilise à d'autres fins. La plaidoirie voulant qu'on ait déjà mis 1 milliard de plus en santé ne nous touche pas beaucoup, et je ne pense pas qu'elle touche beaucoup les vis-à-vis dans la négociation au niveau des transferts, puisqu'on vous rappellera certainement que l'entente 2004-2013 du fédéral prévoit une augmentation d'à peu près 1 milliard en provenance du fédéral pour la santé au cours des prochaines années.

Notre inquiétude s'est confirmée, la semaine dernière, par la stratégie fédérale qui est ressortie très clairement au moment de la réponse de quelques ministres du gouvernement Harper aux demandes du Québec dans le dossier des festivals. On a rapidement répondu que, si on trouvait ça bon, les festivals, on avait les moyens de prendre l'argent pour les financer nous-mêmes à Québec.

Bref, Mme la ministre, nous pensons que, pour des fins électorales, on a affaibli notre stratégie du Québec vis-à-vis le reste du Canada. Notre question aujourd'hui, et on y reviendra tantôt: Comment comptez-vous rétablir notre rapport de force pour atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés d'améliorer les transferts fédéraux au niveau de l'éducation postsecondaire, au niveau des infrastructures et bien sûr pour limiter le pouvoir fédéral de dépenser?

En somme, Mme la ministre, pour nous de l'opposition officielle, la stratégie que vous avez utilisée dans vos budgets ne concorde pas avec vos propres objectifs, et nous serons à l'écoute, tout au cours de l'après-midi, d'une démonstration pour nous prouver le contraire. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Chauveau. M. le député de Rousseau, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de finances.

M. François Legault

M. Legault: Merci, M. le Président. Je voudrais à mon tour saluer la ministre, saluer tous les collègues, saluer aussi tout le personnel du ministère des Finances et des sociétés d'État.

Écoutez, je voudrais d'abord déplorer l'absence, aujourd'hui, du président de la Caisse de dépôt et placement du Québec. On est à étudier les crédits du ministère des Finances. Évidemment, quand on parle de la Caisse de dépôt et placement du Québec, on parle d'une société d'État qui gère des actifs nets de 143 milliards de dollars nets, des actifs totaux sous gestion de 237 milliards. On peut parler de l'État à l'intérieur de l'État. Or, M. le Président, je pense que c'est important de rappeler que, l'année dernière, lors de l'étude des crédits qui s'était passée sur deux jours, la première journée en tout cas, de notre côté, avait été consacrée à la saga de la Société des alcools du Québec, on s'en souviendra tous, vous vous en souvenez sûrement personnellement, ça avait amené la démission du président du conseil d'administration de la SAQ. On avait souhaité une commission parlementaire spéciale, mais finalement le Parti libéral avait souhaité que ça se passe aux crédits.

Or, lors de la deuxième journée, le président de la Caisse de dépôt ne pouvait pas être présent, donc on n'avait pas pu, lors de la deuxième journée, poser nos questions à celui qui gère plus de 100 milliards d'actif pour nous. Or, M. le Président, cette année, l'étude des crédits est sur deux jours, tout le monde comprend bien que, vendredi, c'est mon collègue le député de Charlevoix, qui s'occupe des institutions financières, qui sera ici. Il n'a jamais été question, et on me dit que, dans le passé... la Caisse de dépôt, comme société d'État, doit et a toujours, à part de l'année dernière, été présente, représentée lors de l'étude des crédits du ministère des Finances. Or, M. le Président, je continue d'espérer que, ce soir, étant donné qu'on se réunira de 8 heures à minuit, on réussira à convaincre Henri-Paul Rousseau, le président de la Caisse de dépôt et placement du Québec, de quitter Montréal, de venir vers Québec, pour qu'on puisse ensemble échanger sur les défis majeurs qu'on a à la Caisse de dépôt.

On le voit à toutes les semaines, on a des entreprises québécoises qui sont vendues à des intérêts étrangers. Il y a beaucoup de Québécois qui sont inquiets. Ça inclut le président du Mouvement Desjardins, ça inclut le président du Fonds de solidarité, ça inclut de plus en plus de gens d'affaires à Montréal, même à Toronto, et, M. le Président, je pense que... Évidemment, là, j'ai une série de questions de prêtes sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, je vais les poser à la ministre des Finances. Je pense qu'en ayant la responsabilité de la Caisse de dépôt et placement du Québec elle pourra peut-être être en mesure de répondre à une partie des questions. Mais je veux vous dire, M. le Président, ma grande déception, et je sais qu'il y a même un courriel qui a été envoyé à la responsable des travaux parlementaires au Parti libéral, hier, pour s'assurer de la présence du président de la Caisse de dépôt et placement du Québec tout l'après-midi et toute la soirée aujourd'hui, et malheureusement on arrive ici et M. Rousseau n'est pas présent.

n (15 h 40) n

Ceci étant dit, M. le Président, cette étude des crédits du ministère des Finances évidemment se situe dans un contexte où un budget a été déposé il y a quelques semaines, un budget où malheureusement on n'a pas vu beaucoup de vision pour relever les grands défis qu'on a au Québec, que ce soit le défi du vieillissement de la population, le défi de la mondialisation, le défi de l'environnement, un budget, M. le Président, où, malgré le 700 millions de dollars qu'on est allé chercher à Ottawa pour régler une partie du déséquilibre fiscal, aucun argent additionnel n'a été investi en éducation, ce qui devrait pourtant être notre première priorité au Québec. C'est grâce à des négociations avec le Parti québécois qu'on est allé chercher un 30 millions de dollars pour les enfants qui ont des difficultés d'apprentissage. C'est bien, ce n'est pas suffisant. M. le Président, un budget où, en santé, si on exclut ce qu'on appelle les coûts de système, c'est-à-dire les coûts pour garder les mêmes services à la population, couvrir l'inflation, les salaires, les impacts du vieillissement, il reste, pour des nouveaux services, dépendamment de l'analyse qui est faite, entre 50 et 80 millions de dollars seulement pour des nouveaux services. Or, au moment où on crée une commission, la commission Castonguay, pour étudier comment dans l'avenir on va pouvoir financer nos besoins en santé, comment on va faire pour fonctionner alors qu'il va nous manquer de revenus, mais au même moment, M. le Président, on a choisi, dans ce budget, de ne pas investir davantage en santé et plutôt de tout consacrer les marges de manoeuvre aux baisses d'impôt.

M. le Président, le budget qui a été déposé, c'est un budget aussi qui n'a aucune vision au niveau du développement économique. On nous promet, dans deux ans, des gestes importants au niveau de la taxe sur le capital des entreprises, qui vont coûter 800 millions de dollars, mais, on va le voir tantôt, aucune provision nulle part n'est prévue pour financer ce 800 millions de réduction donc de taxe sur le capital. Et, je le répète, M. le Président, aussi un contexte où, au niveau du développement économique, bien, on a perdu plus de 100 000 emplois dans le secteur manufacturier, ce qui a affecté grandement les régions ressources, et c'est à bout de bras, M. le Président, suite à des négociations de dernière minute, qu'on a pu s'assurer que les crédits d'impôt pour les régions ressources seraient maintenus, parce que le premier budget qui avait été déposé abolissait, comme c'était prévu au budget Audet, les crédits de régions ressources sur trois ans.

M. le Président, je pense que c'est important, quand on parle de développement économique, de rappeler l'approche de laisser-faire économique du Parti libéral du Québec, cette résignation, entre autres, face à la perte des sièges sociaux, et, il faut se rappeler, M. le Président ? vous étiez là ? il y a trois ans, c'est ce gouvernement libéral qui a modifié la mission de la Caisse de dépôt et placement du Québec. On s'en rappellera tous, la Caisse de dépôt et placement du Québec avait été créée, il y a 40 ans, par Jean Lesage avec une double mission: rendement et développement économique. Or, c'est ce gouvernement qui a choisi de reléguer au second rang la mission de développement économique, et, quand on vient pour analyser les impacts de cette décision d'avoir mis de côté le développement économique, la mission de développement économique de la Caisse de dépôt et placement du Québec, bien, le président de la Caisse de dépôt est absent, et la ministre des Finances ne s'est pas assurée qu'on pourra avoir des réponses à nos questions.

M. le Président, je pense que c'est important aussi de rappeler la façon dont les baisses d'impôt des individus ont été faites. Rappelons ce que la ministre des Finances a choisi de faire: elle a choisi d'accorder à ceux qui gagnent moins de 75 000 $ par année des baisses d'impôt moyennes de 200 $ par année, alors que les personnes qui gagnent plus de 75 000 $ par année vont recevoir des baisses d'impôt moyennes de 1 000 $ par année qui représentent, juste pour ceux qui gagnent plus de 75 000 $, 491 millions de dollars de manque à gagner dans les revenus du gouvernement du Québec. Donc, on ne parle sûrement pas de la classe moyenne. Et c'est à un moment, M. le Président, où on a des besoins urgents en éducation et en santé, un moment aussi où les finances publiques sont dans un état précaire. Cette année, la ministre des Finances a balancé son budget en utilisant une réserve non récurrente de 1,1 milliard de dollars. Pour les années suivantes, c'est moins clair, on aura sûrement des questions à poser de ce côté-là. Et, M. le Président, évidemment, en utilisant le 700 millions de règlement partiel du déséquilibre fiscal pour réduire les impôts, je pense qu'on vient... en tout cas, ce gouvernement vient d'éliminer toute possibilité, au cours des prochaines années, d'aller chercher des montants additionnels à Ottawa, puisqu'alors que de façon unanime à l'Assemblée nationale, depuis plusieurs années, on dit que les besoins sont à Québec et que l'argent est à Ottawa, bien, il faut croire qu'on a oublié ces revendications. Mais, après avoir organisé des autobus, entre autres avec des étudiants, des recteurs, pour aller réclamer à Ottawa, bien, ces étudiants puis ces recteurs se sont retrouvés sans un sou, tout est allé à la baisse d'impôt.

M. le Président, je pense que ce qu'on a vu dans ce budget, c'est un budget où on n'a donné aucun espoir, aucune vision pour le Québec, aucun investissement additionnel en santé, en éducation, sauf les montants d'une centaine de millions qu'on est allé chercher dans des négociations de dernière minute, aucune approche non plus au niveau du développement économique, en particulier développement économique des régions. Il a fallu se battre pour protéger les acquis, donc pour s'assurer que les crédits d'impôt pour les régions ressources soient maintenus, mais, de ce côté-là, il n'y a pas eu de bonification. Donc, c'est vraiment, face aux défis que le Québec a à relever, la résignation libérale, la résignation complète.

Et, M. le Président, je pense qu'on aura l'occasion, au cours des prochaines heures, de poser des questions justement sur cette vision qu'on devrait avoir, au Québec, concernant, oui, la Caisse de dépôt et placement du Québec. Vous savez, la Caisse de dépôt et placement du Québec, c'est l'outil de développement économique le plus important qu'on a au Québec, donc c'est sous la responsabilité de la ministre des Finances. Donc, au moment où, par exemple, on risque de perdre le contrôle de la plus grande entreprise industrielle au Québec, Alcan, je pense que c'est important de se le dire, là, parce que ça ne semble pas en tout cas inquiéter le ministre du Développement économique, à qui on a posé des questions hier soir, jusqu'à minuit. Écoutez, il n'y a pas une entreprise qui a investi plus au Québec, depuis 100 ans, qu'Alcan, et il ne semble pas y avoir de plan ni à la Caisse de dépôt et placement du Québec ni au gouvernement libéral du Québec pour essayer de mettre en oeuvre une stratégie pour protéger ce siège social important et s'assurer qu'on ne continue pas la saignée.

M. le Président, je termine en disant qu'on aura évidemment aussi, à part de la Caisse de dépôt et placement du Québec, des questions à poser sur les équilibres financiers au cours des cinq prochaines années. La ministre nous a déposé un document expliquant les prévisions de revenus et de dépenses pour les cinq prochaines années. Il y a des questions très importantes qui se posent et, encore là, beaucoup de questions donc qui sont sans réponse. Donc, M. le Président, on essaiera, au cours des prochaines heures, quand même de discuter des défis qu'on a à relever au Québec. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. le député de Rousseau. Avant de procéder aux discussions sur les crédits, tout d'abord, j'aimerais rappeler peut-être la façon de procéder, l'organisation générale de nos travaux. Généralement, ce qui se fait, c'est que nous procédons à une discussion d'ordre général sur l'ensemble des programmes du ministère des Finances. Et, dans ce cas-ci, à l'exception du volet Institutions financières, qui sera discuté vendredi, nous procéderions donc, à la fin de nos travaux ce soir, à la mise aux voix à 23 heures, tel que stipulé dans l'ordre de la Chambre. Nous procéderons à la mise aux voix des programmes 1 et 3 environ cinq minutes avant la fin de nos travaux, et le programme 2 ainsi que l'ensemble des crédits du ministère seraient pour leur part aux voix vendredi, à la fin de l'étude du volet des institutions financières. Alors, Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: ...M. le Président, que j'avertisse la deuxième opposition que je viens de communiquer avec la Caisse de dépôt et placement du Québec. Et je dois venir à la défense du président parce qu'il avait été convoqué pour vendredi, et il avait été mis avec les institutions financières, et qu'il avait un comité de direction ce soir. Par ailleurs, je lui ai demandé malgré tout de se faire remplacer. Il sera ici ce soir, à 8 heures. Alors, simplement...

Une voix: ...

Mme Jérôme-Forget: Puis avec le président du conseil d'administration.

n (15 h 50) n

Le Président (M. Paquet): Merci, Mme la ministre. Et donc est-ce qu'il y a consentement pour procéder de cette façon, pour la discussion d'ordre général, les votes? Parfait. Il y a consentement. Et nous procéderons donc par blocs d'environ 15 minutes, 15 à 16 minutes, de manière à permettre une rotation, et le temps bien sûr sera préservé pour chaque groupe. Et j'indiquerai, au fur et à mesure ? on fait les calculs présentement ? les temps qui seront à la disposition de chaque groupe au fur et à mesure de l'évolution de la discussion.

Discussion générale

Alors, sans plus tarder, je cède la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière de Finances, M. le député de Chauveau.

Augmentation du budget du ministère

M. Taillon: Merci beaucoup, M. le Président. Mes premières questions vont porter sur les crédits du ministère des Finances pour ensuite aborder les questions que j'annonçais dans mes remarques préliminaires au niveau de la dette, de l'équilibre budgétaire, et tout ça.

Alors, Mme la ministre, vous avez parlé d'une augmentation du budget du ministère des Finances d'à peu près 2 %, si on exclut le service de la dette. En quoi consistent ces augmentations-là? Comment vous pourriez les expliquer?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, comme... ce que pose la question de l'opposition officielle, c'est essentiellement comment l'administration a administré ce 2 %. Je vais bien sûr demander au sous-ministre de répondre à cette question. Je présume que ce sont surtout des augmentations de salaire.

M. Houde (Jean): Alors...

Le Président (M. Paquet): M. le sous-ministre... Est-ce qu'il y a consentement pour...

Des voix: Consentement.

Le Président (M. Paquet): Il y a consentement. M. le sous-ministre.

M. Houde (Jean): Peut-être que le député a remarqué que le ministère essentiellement autofinance, devrais-je dire, ses augmentations de salaire. Vous avez vu que la masse salariale du ministère, elle est réduite du nombre de retraités qui ne sont pas remplacés. Le ministère est soumis à une règle de 60 % et... de non-remplacement, et donc nous autofinançons nos augmentations de salaire, et, à toutes fins pratiques, quand on regarde les augmentations du ministère ? vous les avez dans les informations qui vous ont été données, je crois ? ce qu'on a autofinancé, c'est d'abord l'augmentation des dépenses de 1,9 million de dollars et dont 1,3 million de dollars est relié à la rémunération. On a également autofinancé les augmentations prévues dans les conventions collectives parce qu'il y a un certain nombre de personnes qui sont syndiquées au ministère, les avancements d'échelon également, et on a aussi autofinancé l'augmentation de l'indice des prix à la consommation pour ce qui est du fonctionnement, et finalement la variation faible des frais reliés aux services bancaires. Ça, c'est la partie qui a été autofinancée.

Et donc l'augmentation du budget du ministère, il faut toujours se rappeler que le ministère a une partie de son budget qui est dans ce qu'on appelle les crédits permanents, des crédits qui ne sont pas votés, des crédits qui sont prévus pour la dette. Et je voudrais juste peut-être préciser votre question. Est-ce que votre question porte sur l'ensemble, à la fois la dette, le service de la dette, et sur les dépenses de fonctionnement, ou les deux?

M. Taillon: ...dépenses de fonctionnement.

M. Houde (Jean): O.K.

M. Taillon: Je l'avais exclu de ma question.

M. Houde (Jean): Pardon?

M. Taillon: J'avais exclu le service de la dette qui, lui, augmente de près de 4 %, là.

M. Houde (Jean): Alors, vous parlez de 154 millions versus 151 millions.

M. Taillon: Tout à fait.

M. Houde (Jean): Alors, au fond, essentiellement, l'augmentation du budget du ministère, c'est une augmentation pour ce qu'on peut appeler, là, les luttes... la lutte à l'évasion fiscale, le programme 6, et en contrepartie... Vous avez ça dans l'information, là, des crédits au programme 6, là. Et vous avez en contrepartie 5 millions d'un côté et 2 millions de moins, 1 million de moins à l'amortissement et 1 million de moins à l'investissement, ce qui fait une hausse de 3 millions.

M. Taillon: ...de moins à l'investissement, c'est quoi?

M. Houde (Jean): ...l'investissement qu'on avait dû faire en informatique, notamment, puis les programmes qui sont venus à terme.

Financement et gestion de la dette

M. Taillon: C'est beau. Ça va pour les programmes du ministère, gestion interne. La dette maintenant. Dans votre plan de gestion annuel, Mme la ministre, vous parlez de travaux pour réduire la dette. Est-ce que vous pourriez nous faire part, nous expliquer en quoi consistent ces travaux-là? Évidemment, je suppose que l'évolution de la dette en fonction du PIB, ça ne nécessite pas de travaux. Donc, je ne voudrais pas avoir cette réponse-là. Les autres travaux.

Mme Jérôme-Forget: Alors, Mme la Présidente, au niveau de la dette, il est clair, Mme la Présidente, que, si on repartait à zéro et que nous n'avions pas de dette, tout le monde s'en réjouirait. Je ne viendrai pas faire le plaidoyer d'avoir une dette. Nous avons la dette et nous devons trouver des solutions à cette dette et tenter, malgré tout, malgré des obligations à l'endroit des services, malgré des obligations à l'endroit de nos infrastructures, de résorber cette dette et de le faire, je dirais, avec sagesse. Et avec sagesse, ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'on ne peut pas abandonner nos missions au niveau des infrastructures, ça veut dire qu'on ne peut pas baisser les bras face à des programmes gouvernementaux. Le faire avec la dette finalement, c'est de le faire de façon soutenue, je dirais, sérieuse, rigoureuse pour qu'en bout de ligne la dette, par rapport à notre richesse collective, ce qu'on appelle communément le PIB, produit intérieur brut, que finalement, en proportion de cette richesse-là, elle représente un moins haut pourcentage.

Or, depuis que nous sommes là, nous sommes passés de 46 % à 43 % en quatre ans, à savoir ce qu'elle représente, et nous avons créé le Fonds des générations pour précisément rencontrer cet objectif de rembourser la dette. Et c'est pour ça que finalement, aujourd'hui, dès l'an prochain, il y aura déjà 2 milliards de dollars de mis dans ce Fonds des générations pour combler les écarts que nous avons avec la dette. Et, en plus de ça, Mme la Présidente, ce que j'ai fait dans ce budget-ci, c'est que j'ai donné le mandat à Hydro-Québec justement de s'assurer qu'on va exporter de l'électricité, qu'on va le faire à gros prix, si bien que justement, au niveau du Fonds des générations, nous augmenterons de 400 millions par année justement le remboursement de la dette.

Je suis aussi préoccupée que le député de... pas de Taillon...

Une voix: Chauveau.

n (16 heures) n

Mme Jérôme-Forget: ...mais de Chauveau. Je le sais, Mme la Présidente, je m'en excuse. Le député de Chauveau. Je suis aussi préoccupée de la dette. Vous savez, pendant des années, on l'a accumulée, cette dette-là, et le drame, c'est qu'on l'a accumulée pour de l'épicerie. Il y en a pour 90 milliards de dollars, et donc vous comprendrez que tout le monde veut résorber cette dette-là. Mais, d'ici 2025, c'est-à-dire dans 20 ans, avec les projections que nous avons faites tant au niveau finalement de ce qu'on va vendre, à Hydro-Québec, et les redevances hydroélectriques également, elle va représenter moins de... à peu près 25 % de ce qu'elle représente par rapport au PIB, par rapport au 43 % que ça représente aujourd'hui, c'est donc une démarche, je dirais, très rigoureuse.

Maintenant, je veux revenir au député de Taillon parce que je compte effectivement me pencher sur le problème de la dette plus sérieusement parce qu'il y a un volet qui mérite d'être examiné. Vous savez, on parle, nous, du niveau de la dette, effectivement, pour le gouvernement, 122 milliards de dollars, mais nous oublions que nous avons des actifs comparativement à d'autres États qui n'ont pas d'actifs, je pense à Hydro-Québec, je pense à la Société des alcools du Québec, je pense à Loto-Québec. Or, le Vérificateur général, contrairement à ce qu'on ferait dans une entreprise, prendrait en considération les actifs qu'on a; au gouvernement, on ne peut pas faire ça. Je ne veux pas minimiser, Mme la Présidente, l'idée qu'il faille s'attaquer à la dette, mais je pense qu'il va falloir qu'il y ait un travail beaucoup plus rigoureux pour que justement on soit conscients de la démarche que nous devons faire d'éradier cette dette. Je pense qu'on doit se rendre à ça parce qu'effectivement le député a raison de dire que les États où ça va très bien, ce sont des États qui n'ont pas de dette, ça, on le sait. Il y a 7 milliards de dollars d'intérêts, c'est le troisième poste de dépenses du gouvernement, alors vous comprendrez que je ne peux pas traiter ça à la légère. Mais je pense qu'il va falloir qu'il y ait une réflexion très sérieuse pour prendre en compte les actifs parce que, quand on regarde d'autres États qui ne sont pas propriétaires de leur hydroélectricité, qui ne sont pas propriétaires justement de la Société des alcools du Québec ou de Loto-Québec, bien ces gens-là n'ont pas ces actifs-là.

Alors, je pense qu'il va falloir qu'on regarde ça. Mais je puis assurer le député que, moi-même, je ne voudrais pas passer à l'histoire, comme ministre des Finances, d'avoir négligé de regarder ce volet du gouvernement, parce qu'effectivement ? d'ailleurs, le député de Chauveau l'a dit, le député de Rousseau en a parlé également ? la santé accapare énormément de nos fonds, hein? Si on augmentait la santé par rapport à la croissance économique, ça devrait être à peu près 4 %. Or, on met toujours, en santé, à peu près 6 %, puis plus ça va... Ça devait être 5,1 % selon le rapport Clair, ça devait être 5,1 % selon le rapport Ménard, nous sommes rendus, cette année, à 6,4 %. Alors, vous comprendrez qu'il y a un problème, d'où la mise en place de cette commission, qui ne doit pas simplement se pencher sur tout le volet de la santé, mais sur le financement de la santé, un point c'est tout. C'est tout ce qu'on veut.

La Présidente (Mme Lapointe, Groulx): M. le député de Chauveau.

M. Taillon: Merci beaucoup. Si je regarde les composantes de la croissance de la dette en me référant au document du budget, je constate qu'au niveau des immobilisations nettes, en 2008-2009, il y a une diminution d'à peu près 30 % par rapport à 2007-2008. Et par ailleurs, Mme la ministre, vous nous avez annoncé que vous vous engagiez dans un plan d'investissement dans les infrastructures de 30 milliards sur cinq ans. Alors, j'aimerais que vous me réconciliez qu'est-ce qui explique la diminution en immobilisations nettes et comment vous comptez comptabiliser ou quel arrangement financier vous allez mettre en place pour tenir compte de ce 6 milliards par année ? ou je ne sais pas comment il va être ventilé, là ? au titre des investissements en infrastructures. Quel effet ça va avoir sur la dette?

La Présidente (Mme Lapointe, Groulx): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Mme la Présidente, ce que soulève le député de Chauveau, c'est quelle est la partie de la dette qui va à la dette qu'on reconnaît à l'intérieur du gouvernement, à l'intérieur du périmètre comptable, et il y a une partie de la dette qui va pour les établissements de santé, les commissions scolaires, les cégeps, etc. Alors, voilà une démarche que l'on fait, que l'on doit faire, et c'est la raison pour laquelle, encore là, au niveau des hôpitaux, nous avons des actifs, il y a des actifs, là. Au niveau des écoles, il y a des actifs. Au niveau des cégeps, il y a des actifs. Il va falloir qu'au gouvernement on commence à réaliser qu'on a des actifs. Bien sûr, la question qu'on peut se poser: Est-ce qu'on peut les vendre demain, contrairement à une entreprise privée qui, elle, peut se départir? Mais, en tant qu'État, en tant que gouvernement, nous avons la responsabilité justement de pourvoir aux infrastructures. Et justement, pour contrer une tendance naturelle des hommes et des femmes politiques ? et je m'inclus dans ça ? dans le 30 milliards de dollars, il y en a 20 milliards, de dollars, que ce ne seront pas des coupures de rubans, Mme la Présidente, hein, ça va être de rénover, de restaurer ce que j'appelle notre patrimoine, de réparer nos écoles.

Moi aussi, j'ai été aussi ébranlée quand j'ai vu à Radio-Canada, je pense, une émission où on voyait le toit d'une école, en 2006, couler. Je pense, c'était en 2007, même. Surtout, surtout que j'ai mis en place, depuis trois ans, un fonds justement qui représente 2 % de la valeur de l'actif pour le maintien d'actif, moi, je ne peux pas comprendre qu'il y ait un toit encore qui coule, je ne comprends pas. Bon. Il faut dire, Mme la Présidente, des fois, il y a des choses qui arrivent. Je vous raconterai qu'à l'Assemblée nationale il y avait de l'eau qui coulait dans la salle du caucus où j'étais, dans notre bâtiment, un patrimoine absolument extraordinaire, tout récemment. Alors, vous comprendrez, ce sont des choses qui arrivent. Il n'en demeure pas moins qu'on doit corriger absolument au niveau des actifs, et c'était la raison pour laquelle j'ai dit qu'il fallait absolument qu'on réinvestisse au niveau des infrastructures.

La Présidente (Mme Lapointe, Groulx): Il reste moins d'une minute.

M. Taillon: Oui. Alors, Mme la Présidente, je repose ma question, j'ai peut-être été mal compris, là: Qu'est-ce qui explique qu'il y a une diminution au niveau des immobilisations nettes entre les deux années, 2007-2008, 2008-2009, de 700 millions de dollars à peu près, là, si on arrondit les chiffres?

Mme Jérôme-Forget: ...Mme la Présidente, si vous permettez, parce que je sais qu'il ne reste pas beaucoup de temps, c'est le transfert à l'AMT du métro de Laval de 1,5 milliard de dollars. C'est ça?

Une voix: La différence entre les deux.

Mme Jérôme-Forget: La différence entre les deux?

Une voix: 1,9 à 1,2.

Mme Jérôme-Forget: Donc, 700 millions de dollars? À peu près, 650 millions de dollars, c'est ça, la différence.

La Présidente (Mme Lapointe, Groulx): Merci, Mme la ministre. Je vais passer la parole à M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, suite... Oui?

Mme Jérôme-Forget: ...M. Rousseau.

M. Legault: Oui. Merci, Mme la ministre des Finances, de pouvoir nous laisser toute la soirée à poser des questions à M. Rousseau... par le député de Rousseau, c'est ça.

Projections des revenus et des dépenses
pour les prochaines années

Écoutez, lorsque la ministre des Finances, Mme la Présidente, a déposé son budget, dans les jours qui ont suivi et avant le vote sur le budget, elle a demandé à ses fonctionnaires de rencontrer les deux partis d'opposition pour présenter des projections jusqu'en 2011-2012 ? vous avez probablement ce document-là ? projections donc sur cinq ans. Je pense que c'était peut-être une demande du critique de l'opposition officielle, mais en tout cas c'était une demande qui était faite, je pense, par bien des gens au Québec de se demander finalement... Parce que toute la question qui ressortait du budget déposé par la ministre des Finances, c'est: Est-ce que le gouvernement du Québec peut se permettre de réduire ses impôts, donc ses revenus, de 950 millions de dollars par année de façon récurrente? Et évidemment, étant donné que les baisses d'impôt s'appliquent surtout à partir du 1er janvier 2008, il ne fallait pas seulement regarder l'année financière 2007-2008, mais regarder les années suivantes pour voir est-ce qu'il y a une marge suffisante.

Et je voudrais attirer l'attention de la ministre sur justement le cadre financier qui présente les projections de revenus et de dépenses non pas pour cette année, mais pour l'année prochaine, pour l'année 2008-2009. On prévoit donc, pour l'année 2008-2009, de réduire la croissance des dépenses de programmes à 3 %, ça veut dire à une croissance de 1 591 000 000 $. Bon. 1 591 000 000 $, si on fait un petit calcul rapide... Et puis j'aimerais peut-être que la ministre des Finances, là, me corrige si ce n'est pas exact. Comme elle nous le disait tantôt, les coûts de système, c'est-à-dire les coûts pour garder les services actuels à la population, en santé, sont autour de 5 %, 5,1 %. Je pense que tout le monde est d'accord. Nous, on était à 5,2 %. Si je fais un petit calcul, là, ça donne 1,1 milliard par année pour maintenir les services à la population en santé. Ça coûte 1,1 milliard. En éducation, pour avoir été là trois ans puis les avoir suivis de très proche, les coûts de système, c'est certain que les fonctionnaires du ministère les évaluent à 3,5 %, mais je pense qu'en resserrant c'est possible de les garder autour de 3 %. 3 %, ça représente 400 millions. Et, si on prend l'ensemble de tous les autres ministères et qu'on dit que la croissance, c'est à peu près l'inflation, 2 %, c'est un autre 400 millions. Donc, si on fait le total, 1,1 milliard en santé, 400 millions en éducation, 400 millions dans les autres ministères, ça fait un total de 2 milliards de dollars par année que ça coûte pour maintenir les services actuels à la population. Sinon, il faut faire des coupures.

Or, dans les prévisions de la ministre pour balancer son budget l'année prochaine, elle réduit la croissance des dépenses de programmes à 1 591 000 000 $, disons 1,6 milliard. Donc, a priori, ce qu'on voit ici, c'est qu'il faudrait s'attendre, l'année prochaine, pour balancer le budget avec l'effet sur une pleine année des baisses d'impôt, d'avoir des coupures d'environ 400 millions de dollars pour être capable, là, de dire: Bon, j'ai des coûts de système de 2 milliards, c'est le coût pour maintenir les services actuels, mais, dans mes prévisions, je prévois seulement 1,6 milliard. Donc, il faudra s'attendre, l'année prochaine, à des coupures de 400 millions.

Je voudrais savoir, là, comment la ministre des Finances compte-t-elle arriver avec une croissance des dépenses de programmes de seulement 1,6 milliard.

La Présidente (Mme Lapointe, Groulx): Mme la ministre.

n (16 h 10) n

Mme Jérôme-Forget: Mme la Présidente, ce que je veux dire au député de Rousseau, c'est que, depuis le début, depuis quatre ans... Parce que la question que pose le député de Rousseau, c'est plutôt relié au Conseil du trésor, à savoir le contrôle des dépenses, et je vais prendre la question parce que c'est un dossier que je suis depuis quatre ans. Alors, je suis ravie de pouvoir répondre au député de Rousseau, parce que quelqu'un qui n'a pas justement administré un gouvernement peut avoir des doutes et penser qu'il n'y a rien d'immuable. Or, depuis que je suis présidente du Conseil du trésor, année après année, il a fallu justement, à compter du mois de décembre, commencer justement à rappeler tout le monde à l'ordre, si bien que parfois nous nous dirigions vers des écarts de 300 et même 400 millions de dollars et finalement, en freinant la machine, on était capables de contrôler, on arrivait au déficit zéro.

D'autre part, ce que je veux dire au député de Rousseau, c'est qu'au niveau de certaines dépenses et de certains programmes il y a certains programmes qui n'augmenteront plus. À titre d'exemple, l'heure et demie, l'ajout d'une heure et demie, qui, à sa vitesse de croisière, représente 143 millions de dollars, il est encore de 143 millions de dollars l'an prochain, donc sans être gelé, là, tout court, mais, autrement dit, il n'y a pas d'augmentation.

Il y a également au niveau de l'aide à l'industrie forestière. Rappelons-nous qu'on a mis au départ 33 millions de dollars, 120 millions de dollars, et tout à coup ça va décroissant. Donc, voilà encore un indicateur où il y a une diminution au niveau des dépenses.

Pensons au niveau des orphelins de Duplessis. Bien, il y a plusieurs démarches dans un gouvernement qui arrivent une fois et que par conséquent, comme ça ne se répète pas, voyons, l'année suivante, ça ne tombe pas avec des augmentations au niveau des dépenses.

En plus, M. le Président, c'est là finalement qu'on doit faire appel à beaucoup de rigueur. Et, à bien des égards, vous vous rappelez, je n'ai pas toujours une très bonne réputation, j'ai une réputation d'une femme qui dit souvent non. C'est malheureux, mais je dis souvent non. Et par conséquent, à cet égard, rappelons-nous qu'avec le remplacement d'un départ à la retraite sur deux nous avons, au niveau des quatre dernières années, économisé 1,2 milliard de dollars au total, de façon récurrente 650 millions de dollars. Et je vois ici des chiffres, ça va s'élever, ça va augmenter encore de 100 millions, de 200 millions l'autre année après. Et par conséquent c'est ça, gérer les deniers publics. Ça veut dire qu'il faut faire appel à de l'imagination. Et, contrairement à ce que dit le député de Rousseau, je pense, moi, qu'il doit y avoir des contraintes au gouvernement. Il va savoir comme moi que, s'il y a un surplus quelque part, vous avez 25 paires d'yeux qui le regardent, ce surplus, et il y a des chances que tout le monde aille mettre le grappin sur ce surplus. Alors, à bien des égards, il faut gérer très serré pour être sûr justement qu'on contrôle cet appareil gouvernemental. Je parle trop longtemps, M. le Président? O.K. M. le député de Rousseau, je vous confie la parole.

Le Président (M. Paquet): Alors, je vous confie la parole, en tant que président, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. M. le Président, moi aussi, je connais ça, des femmes qui disent non, mais je veux quand même revenir aux coûts de système, parce que, bon, les coûts de système, essentiellement ce sont les augmentations de salaire, l'inflation. Bon. Il y a un peu plus que ça quand il s'agit de parler de santé parce qu'il y a les médicaments puis les impacts du vieillissement, mais disons, là, pour les gens qui nous écoutent, là, qu'essentiellement les coûts de système, ce sont les augmentations de salaire et l'inflation. Donc, c'est une augmentation de dépenses, mais ça n'amène pas des services additionnels.

Moi, je peux vous dire, là, pour les avoir suivis de près, là, que je suis convaincu que ça prend 2 milliards de dollars par année au Québec pour couvrir les coûts de système. Et d'ailleurs c'est tellement vrai que, cette année, les dépenses du gouvernement du Québec augmentent d'un peu plus que 2 milliards. Mais le problème, c'est l'année prochaine. L'année prochaine, la ministre a choisi de réduire ses revenus de 950 millions de façon récurrente donc en réduisant les impôts, et là c'est là que la question se pose: Est-ce que le Québec peut se permettre de réduire ses revenus de 950 millions? Et le premier impact qu'on voit dans les projections de la ministre, c'est que la ministre prévoit, l'année prochaine, que l'augmentation des dépenses, au lieu d'être 2 milliards, ce soit seulement 1,6 milliard. Ça veut dire 400 millions de moins que les augmentations de salaire et l'inflation, donc 400 millions de coupures.

Et je veux rajouter une autre contrainte par-dessus ça. Durant la campagne électorale, elle faisait partie d'une équipe, le Parti libéral du Québec, qui a déposé une plateforme qui s'appelle S'unir pour réussir le Québec de demain, et, dans cette plateforme, on nous disait qu'on ajouterait, sur cinq ans, 4,5 milliards de nouveaux services, de promesses électorales. Vous vous en rappelez, là, on en a parlé beaucoup pendant toute la campagne électorale, le Parti libéral avait un cadre financier où il se disait: On est capables, selon nous, d'aller chercher des marges de manoeuvre de 4,5 milliards. Et, bon, c'est sur deux pages, puis ça donne une moyenne annuelle de 900 millions. Donc, si vous me suivez, M. le Président, ce qu'on est en train de dire, c'est que, l'année prochaine, à cause de la baisse d'impôt de 950 millions, il nous manque déjà 400 millions pour garder les services au niveau actuel.

Ma question à la ministre des Finances: Est-ce que les promesses de la campagne électorale d'ajouter 900 millions de dollars par année en promesses de toutes sortes, est-ce qu'on doit oublier ça pour les prochaines années?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre des Finances.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je remercie le député de Rousseau de me donner l'occasion de lui rafraîchir la mémoire. J'aimerais lui rafraîchir la mémoire, parce que, premièrement, tantôt, dans son plaidoyer, il est venu encore condamner la baisse d'impôt de 969 $ par année à ceux qui gagnent 75 000 $ et plus. Dois-je comprendre, M. le Président, qu'il vient défendre finalement le secteur financier et les pétrolières? Parce que ce financement additionnel qu'on a donné justement pour le budget, le 100 millions de dollars, vous vous rappelez, on a devancé la hausse d'impôt au niveau du secteur financier et au niveau du secteur pétrolier.

Je suis étonnée que le député de Rousseau en parle encore, parce que le monde, là, qui gagne 75 000 $ au Québec, je présume qu'il pense que ce sont des multimillionnaires. Savez-vous que c'est du monde qui travaille fort et qui ne gagne pas des fortunes, M. le Président? Et de leur donner un répit de 969 $, il me semble que ce n'est pas du luxe, dans un premier temps. Dans un deuxième temps, je voudrais lui dire par ailleurs que 80 % des baisses d'impôt sont allées justement aux gens qui gagnent moins de 75 000 $ quand on voit le total. Alors, je ne sais pas qu'elle est l'horreur qu'il a à donner des baisses d'impôt aux gens qui gagnent 75 000 $.

Maintenant, je voudrais également lui rafraîchir la mémoire, M. le Président, alors que, lui, en 1998... Ça doit lui dire quelque chose, le ministère de l'Éducation, parce que je pense que le député de Rousseau était ministre de l'Éducation. Or, imaginez-vous donc, de 1998 à 1999, il a augmenté les dépenses, au niveau de l'éducation, de 200 millions; de 1999 à 2000, il les a augmentées de 200 millions de dollars; de 2000 à 2001, il les a augmentées de 700 millions de dollars après avoir baissé les impôts de 1,1 milliard de dollars. Pourquoi était-ce souhaitable en 2000 de baisser les impôts de 1 milliard de dollars et d'augmenter les dépenses en éducation de 700 millions de dollars, alors que, nous, aujourd'hui, on hausse les dépenses en éducation de 5 %, en santé de 6,4 % et qu'on baisse les impôts de 950 millions de dollars?

Il faut quand même avoir une certaine logique dans sa vie, dans sa carrière politique. Et la logique, c'est que, quand on défendait des valeurs à un moment donné, ce n'est pas fou d'avoir les mêmes valeurs un peu plus tard. Parce que ça a été la même chose, M. le Président, l'autre année après, le gouvernement a encore baissé les impôts de 1 milliard de dollars, et là, en santé, on mettait 1 milliard de dollars. Nous, on en met 1,4 milliard, de dollars. Qu'est-ce qui fait que c'était si bon à l'époque puis ce n'est plus bon aujourd'hui? Moi, j'aimerais ça qu'il m'explique, le député de Rousseau, parce que j'ai les chiffres ici, là, depuis 1993-1994. Peut-être que ça l'intéresserait justement, le budget de dépenses 2007-2008. Il serait peut-être intéressé de voir ça.

n (16 h 20) n

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre, le bloc de 15 minutes est terminé à ce moment-ci. Alors, je serais prêt à céder la parole... à reconnaître le député de Hull. Nous aurons la chance de revenir. M. le député de Hull.

M. Cholette: Merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, chers collègues. Je veux saluer également les fonctionnaires qui accompagnent la ministre, entre autres du ministère des Finances, mais de plusieurs organismes, notamment l'Institut de la statistique, Loto-Québec, la SAQ et les gens du cabinet, bien évidemment.

Alors, les propos que je vais tenir vont être dans deux temps. Je vais terminer par une question. Je l'annonce déjà, Mme la ministre, je vais parler de transferts fédéraux, je parlerai de péréquation, un sujet qui est cher au député de Rousseau, puisque la thèse politique du député de Rousseau initialement était sur le manque du financement fédéral, et c'est pour ça qu'il fallait être souverains. Et maintenant c'est parce que, là, on en a, de l'argent du fédéral, vous voyez, on a les moyens d'être souverains. Alors, là aussi, je vais lui demander de faire son choix, un petit peu de logique là-dedans.

Mais je voudrais débuter par des images que j'aimerais qu'on puisse discuter ensemble. Parce qu'ici on est souvent dans une bulle, au salon bleu, à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, et les gens qui nous écoutent ont de la difficulté à saisir l'ampleur des montants puis l'ampleur des enjeux. Mais je voudrais revenir sur des notions que le député de Chauveau a avancées tantôt. Il est très préoccupé de la dette. On l'est tous, c'est pour ça qu'on a fait le Fonds des générations d'ailleurs, qui a été à peu près applaudi par tout le monde. Bien, sauf des gens en face, mais c'est correct, là, c'est votre rôle d'être contre, puis ça, vous êtes bien bons là-dedans. Mais, pour ce qui est du Fonds des générations, ça, c'est de l'argent en banque, hein, qui va servir à payer la dette lorsque ce sera le temps de payer cette dette-là. Mais j'aimerais ça qu'on en parle plus concrètement, de la dette, parce que ça fait peur au monde, puis on pense que c'est un tabou au Québec, d'avoir une certaine dette. Mais il faut expliquer ça, puis j'aimerais ça prendre l'exemple d'une hypothèque de maison.

Le député de Chauveau, lui, il dit: Ça n'a aucun bon sens, là, au Québec... La position de l'ADQ ? c'est important, là ? la position de l'ADQ, c'est de dire que ça n'a aucun bon sens qu'on mette une cenne noire de plus sur la dette au Québec. La conséquence de ça, c'est de figer les investissements publics au Québec. Ça veut dire pas une cenne noire sur les routes de plus, pas une cenne noire dans les hôpitaux, pas une cenne noire dans nos écoles, pas une cenne noire dans nos actifs. Ça, c'est la position traditionnelle de l'ADQ. Par idéologie, ils ont décidé de dire que la dette, là, elle est déjà trop haute, je suis d'accord avec ça, en passant, mais elle est déjà trop haute, il faut stopper ça, il faut geler la dette. Ça, ça ferait en sorte que, pour les argents qui seraient mis sur des infrastructures, ce serait payé comptant, ils paieraient ça cash. La conséquence de ça, c'est que c'est les contribuables d'aujourd'hui qui paieraient l'entièreté de cette dépense-là, alors que l'actif durerait sur des années, sur 25 ans, sur 30 ans. On le sait, nos hôpitaux ont duré 50 ans, 35 ans, 40 ans, on voit ça, mais la position traditionnelle de l'ADQ, c'est d'utiliser l'argent d'aujourd'hui pour payer comptant un actif comme ça. Ça ne se tient pas, là, il n'y a personne qui fait ça, ça n'a aucun bon sens.

Mais, pour expliquer davantage comment il faut calculer ça, une dette, je vais prendre l'exemple d'une hypothèque. En théorie, là, quelqu'un qui a une hypothèque de 50 000 $, c'est-u bon, ça? La réponse: Ça dépend. Ça dépend de quoi? Bien, ça dépend de ses revenus. Quand vous allez à la banque puis vous demandez: M. le banquier, Mme la banquière ? c'est-u comme ça qu'on dit ça, «banquière», Mme la banquier? je ne sais pas ? je veux une hypothèque de 50 000 $, la première question qu'ils vous posent, c'est: T'es-tu capable de payer ça, une hypothèque de 50 000 $? L'actif vaut-u 50, vaut-u 60, 75? Ça, c'est la première question. Puis la deuxième: T'es-tu capable de payer ça? Puis ça, ça dépend de ta richesse, ça dépend de tes revenus. Au Québec, le calcul qu'on fait pour savoir ça a-tu du bon sens, le montant de la dette, on calcule ça avec un ratio, on dit: T'es-tu assez riche pour payer ça? Puis le poids de ta dette sur tes revenus. Au Québec, on calcule ça avec un ratio sur... le poids de la dette sur ce qu'on appelle le produit intérieur brut. En français, ça veut dire notre richesse, notre développement économique, notre capacité de payer ça.

Et la bonne nouvelle, c'est que, depuis qu'on est là, malgré le fait qu'on a investi massivement dans nos infrastructures, le poids de notre dette sur notre richesse a toujours baissé. Ça, c'est comme si, à votre maison... vous avez décidé de changer de maison, vous avez augmenté votre hypothèque de 10 000 $, mais vous avez augmenté vos revenus de 50 %. Êtes-vous plus riche ou plus pauvre? Vous êtes peut-être plus riche malgré le fait que votre hypothèque a grossi, a été plus grande. Mais l'actif a suivi en conséquence.

Bien ça, c'est la première chose, je pense, qu'il faut dire, parce que c'est facile de parler dans l'absolu, de dire: Ça n'a pas de bon sens d'augmenter la dette. Ce avec quoi ? je prends l'exemple contemporain ? on ne peut pas être d'accord, ce serait geler le Québec. Ça, c'est la position traditionnelle de l'ADQ. Sauf que je réalise qu'à travers les travaux des commissions parlementaires on voit qu'il va falloir se brancher à un moment donné, de votre côté, là, parce qu'à chaque jour vous demandez plus d'investissements. À la période de questions, vous voulez plus d'investissements sur les routes. Là, on vous demande: Où est-ce qu'on va prendre ça, cet argent-là, vous ne voulez pas qu'on mette ça sur la dette? Mais là c'est le néant. Là, là, c'est un blanc pur, pur neige.

Pour ce qui est du député de Rousseau maintenant, il nous parlait des investissements en éducation. Eh bien, c'est intéressant de souligner qu'il nous parlait de... Mon Dieu! les coûts de système, ça ne couvrira même pas les coûts de système malgré le fait que vous mettez de l'argent à plus finir dans l'éducation. Ce qu'il est intéressant de voir, c'est que... Je veux bien qu'on accepte les critiques, que ça n'a pas de bon sens, puis il faut mettre plus d'argent ? ça, c'est la position traditionnelle du PQ ? sauf qu'en un an on fait plus que ce que lui a fait, et son gouvernement, pendant neuf ans. Bien là il faut se brancher là aussi. Je veux bien prendre les critiques, mais je veux répéter ça, là, on met plus d'argent neuf, de la nouvelle argent, on met plus d'argent dans le réseau de l'éducation en une seule année que ce que le député de Rousseau a fait, lui, entre autres, quand il était au ministère de l'Éducation. Bien là il faudrait se décider un peu.

L'autre chose, il parle beaucoup, le député de Rousseau, de... il sort un chiffre en disant: Ah, les gens qui gagnent bien de l'argent, 75 000 $, bien de l'argent, vont avoir une grosse baisse d'impôt. Moi, je suis content de faire partie d'une équipe qui a décidé d'avoir un budget équilibré, équilibré de deux façons. Premièrement, ça balance. Les deux colonnes, là, elles balancent. Sur un budget de 60 milliards, quand, l'année prochaine puis dans deux dans, il va manquer 250 millions sur 60 milliards de dollars, c'est un budget qui... Puis, cette année, ça balance, puis on est train de regarder les réserves pour les années prochaines. Ça fait que c'est un budget non seulement qui balance dans les deux colonnes, mais c'est un budget équilibré, balancé, qui fait en sorte qu'on est capables de baisser les impôts de façon ciblée tout en investissant de façon majeure en éducation puis en santé. Puis ce que le député de Rousseau a oublié de dire, c'est que, lorsqu'il prend des chiffres en absolu, il dit: Mon Dieu! 1 000 $ de baisses d'impôt, c'est épouvantable pour les gens qui gagnent 75 000 $, etc., il oublie de dire le poids de cette baisse d'impôt là sur le total des impôts qu'ils paient.

Quelqu'un qui paie 200 $ d'impôt par année ? il y en a au Québec qui paient au total, là, 200 $ d'impôt par année au Québec ? quelqu'un qui paie 200 $ d'impôt au Québec puis on lui donne un break fiscal, une baisse d'impôt de 100 $, c'est 50 % de ses impôts qu'il ne paie pas. C'est beaucoup, 100 $ sur le 200 $. C'est beaucoup d'argent. Quelqu'un qui paie 12 000 $ d'impôt puis qu'on lui en enlève 900 $, je comprends que le chiffre est plus gros, mais, toutes proportions gardées, il est moins avantagé que la personne qui payait 200 $ d'impôt. Donc, il faut regarder ça avec un poids relatif. La baisse d'impôt est en fonction de ce que tu paies, et c'est bien certain que, si tu en paies moins, le chiffre absolu va être moins, mais le poids relatif de ta baisse d'impôt va être supérieur.

Correction du déséquilibre fiscal

Et ça, ça m'amène à la question... Parce que, si on a été capables, si on a été capables de mettre de l'argent en santé d'une façon extraordinaire, hein ? personne n'a jamais fait ça, mettre l'argent qu'on a mis en santé ? si on a été capables d'investir en éducation puis si on a été capables, au bénéfice des gens, là, qui travaillent très fort, puis tenter de ramener ça à la moyenne canadienne, de baisser les impôts des citoyens du Québec, c'est, entre autres, à cause d'une gestion très serrée de nos finances publiques, à cause de priorités très établies, très claires de la part de notre gouvernement puis ça a été aussi par le truchement du règlement du déséquilibre fiscal. Je comprends que c'est un sujet délicat pour nos amis d'en face, parce que le principe d'autonomie, c'est rien, ça, ce n'est pas revendiquer plus d'autonomie au niveau de la péréquation, vous êtes nulle part là-dedans. Puis l'autonomie, ça peut être souveraineté. Je veux dire, on surfe, là, sur deux chaises ? ça, on sait ça ? à l'ADQ.

Puis, au PQ, bien, moi, je me souviens, ça fait longtemps que je fais de la politique, puis initialement c'est que le Canada était cassé, puis il fallait être souverains parce que le Canada était cassé. Ça n'avait pas de bon sens, on était plus riches que ça, puis il fallait sortir du Canada parce que le Canada était endetté. Et là on a des surplus à Ottawa, puis là il faut sortir du fédéral parce que... du régime fédératif parce que, là, c'est notre argent qu'ils ont. Là, ça n'a plus de bon sens, ils font des surplus, puis c'est nous autres qui avons les besoins. Et ça, ça s'appelle le règlement du déséquilibre fiscal, hein? Il y a de l'argent à Ottawa qui nous est revenu, puis ça, c'est grâce à des efforts extraordinaires d'une équipe gouvernementale, depuis quatre ans, qui a fait des gains. C'est dans ce sens-là, Mme la ministre: Voulez-vous nous parler de comment le règlement du déséquilibre fiscal a aidé le Québec dans ses choix budgétaires?

n (16 h 30) n

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Alors, M. le Président, vous comprendrez qu'effectivement ça fait des années qu'on parle de déséquilibre fiscal, hein? On en a parlé non seulement alors qu'on était au gouvernement, mais on en a parlé également quand on était dans l'opposition. Et, par conséquent, tout à coup est arrivé un dénouement au niveau du déséquilibre fiscal, un dénouement qui... Depuis que nous sommes au pouvoir, M. le Président, à cause justement de l'effort répété du premier ministre, hein, qui a harcelé les gouvernements les uns après les autres, le déséquilibre fiscal... les transferts fédéraux vont atteindre 13,2 milliards de dollars. Il s'agit d'une augmentation de 48 %, c'est-à-dire 4,2 milliards par rapport à 2002-2003. Ça, là, c'est ce qu'on retrouve aujourd'hui, une augmentation de 48 %. Ce sont des progrès considérables, une démarche qui a été soutenue.

On n'a jamais baissé les bras, et encore, M. le Président, nous ne baissons pas les bras au niveau des transferts au niveau du déséquilibre fiscal au niveau de l'éducation postsecondaire. Nous estimons qu'à cet égard le gouvernement fédéral n'a pas répondu à nos attentes, et nous allons continuer d'en parler. Nous allons continuer d'en parler également au niveau des infrastructures. Mais, juste pour cette année, nous recevrons 2,2 milliards de dollars de plus en transferts fédéraux par rapport à l'an dernier. Vous remarquez finalement combien toute cette démarche, aujourd'hui, nous a permis justement d'aller baisser l'impôt des contribuables québécois.

Ce pour quoi nous l'avons fait... Et, M. le Président, quand on dit que, nous, au gouvernement du Québec, on va faire quoi pour aller rencontrer le ministre des Finances et les gens d'Ottawa? On va leur dire qu'on va faire comme toutes les autres provinces qui ont reçu de la péréquation et qui ont baissé leurs impôts. Il y en a six, M. le Président, donc on n'est pas les seuls. Il y a neuf provinces qui ont baissé les impôts. Il y en a bien sûr deux qui ne reçoivent pas de péréquation. Alors, je pense qu'à cet égard on n'est pas les seuls, là, on n'est pas les seuls, on est en bonne compagnie. Nous n'avions pas baissé les impôts parce que, contrairement au Parti québécois qui, lui, avait baissé les impôts et avait investi seulement 720 quelques millions de dollars en santé, nous, pendant quatre ans, on a donné priorité à la santé. Et mon collègue le ministre de la Santé a fait un travail, et je le dis, M. le Président, colossal, colossal en santé, il a fait un travail colossal. Et, aujourd'hui, on le sait tous qu'il y a encore des problèmes au niveau des urgences, mais rappelons-nous qu'il y a eu une augmentation de 20 % de l'utilisation finalement au niveau des hôpitaux.

Alors, vous comprendrez que, nous, on n'a pas fait le choix de baisser les impôts puis d'aller mettre de l'argent après, on a décidé qu'on allait mettre de l'argent d'abord et ensuite baisser les impôts, et c'est ce qu'on a fait. Et on a utilisé, comme le disait mon collègue, on a utilisé l'argent de la péréquation et des transferts fédéraux pour finalement donner un répit à tous les contribuables québécois, y compris ceux qui gagnent 75 000 $ et plus par année, parce que, nous, au Québec, M. le Président, on est riches en pauvres, mais on est pauvres en riches, je peux vous garantir ça.

Le Président (M. Paquet): Il reste 1 min 25 s, M. le député de Hull.

M. Cholette: Non.

Le Président (M. Paquet): Ça va? Alors donc, je reconnais maintenant le député de Chauveau.

M. Taillon: Alors, merci beaucoup...

Le Président (M. Paquet): J'indique, juste pour son bénéfice, le bénéfice des membres de la commission, qu'il reste à l'opposition officielle 1 h 36 min 49 s, incluant jusqu'à 23 heures ce soir, et 1 h 24 min 10 s au deuxième parti d'opposition. M. le député de Chauveau.

Financement et gestion de la dette (suite)

M. Taillon: Oui. Alors, merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais signaler au député de Hull que nous partageons les objectifs de la ministre des Finances de réduire la dette. Alors, moi, j'interprète toujours que, quand on réduit la dette, on la réduit, on ne l'augmente pas. Il faut donc faire des efforts pour atteindre cet objectif-là.

Ma question à l'égard de la dette pour laquelle je n'ai pas eu de réponse tantôt: Le 30 milliards de dollars qui est prévu dans les investissements d'infrastructures, où je le retrouve dans les facteurs de croissance de la dette pour les deux prochaines années?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, il y a toujours de la dette qui est à l'extérieur du périmètre comptable au niveau des établissements de la santé, au niveau des cégeps et au niveau des universités, des commissions scolaires. Il y a ce volet qui est toujours à l'extérieur du périmètre comptable, et c'est la raison pour laquelle ça n'apparaît pas à l'intérieur du périmètre comptable qu'on calcule actuellement.

M. Taillon: Donc, ça veut dire qu'en plus des éléments qui sont à l'extérieur du périmètre comptable vous me dites que le 30 milliards va se situer à l'extérieur du périmètre comptable, ça va être le fonds caché, là, sous le bitume, là, de 6 milliards, c'est ça?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: À peu près la moitié, M. le Président.

M. Taillon: Donc, on va avoir une dette parallèle.

Mme Jérôme-Forget: Bien, on a toujours... M. le Président, il s'agit de regarder la dette: il y a la dette nette, puis il y a la dette qui comprend l'ensemble des dépenses du gouvernement. Vous avez, à l'extérieur du périmètre comptable, également Hydro-Québec, vous avez les hôpitaux, vous avez les municipalités, vous avez différents secteurs qui sont impliqués.

Projets de partenariat public-privé

Et je voudrais revenir justement au niveau des hôpitaux, M. le Président, parce que je pense que l'ADQ, ils n'aiment pas beaucoup ça, les partenariats public-privé. Peut-être que le député de Taillon devrait parler à ses collègues au caucus, là, puis à son chef. Parce qu'à cet égard ce qui se passe quand on fait un PPP, M. le Président, le financement est assumé par le partenaire privé, et justement le remboursement de cette dette, que ce soit pour un hôpital ou pour une route, se fait sur une période de 30, 35 ans. Je pense que le député devrait être heureux de savoir ça, devrait appuyer justement la démarche des partenariats public-privé, il verrait que c'est une très bonne solution au niveau de l'endettement des gouvernements.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

M. Taillon: Oui, merci, M. le Président. Alors, on présume beaucoup, de l'autre côté de la Chambre, de ce qu'on pense, hein? On n'est pas contre les PPP, on veut les voir en action. Et j'interprète donc les projets comme le CHUM, comme la 25, tout ça, ce n'est pas compris dans les provisions que vous avez là. C'est-u là? Ce n'est pas là?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, la 25, elle se trouve à l'intérieur du périmètre comptable; les CHU sont à l'extérieur du périmètre comptable.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

M. Taillon: Oui. Une petite question complémentaire sur les CHU. Moi, je ne voulais pas parler des PPP tout de suite, mais, puisque la ministre m'en a parlé, parlons-en. Les CHU, est-ce qu'on a actuellement ? on a fait des appels d'intérêt ? est-ce qu'on a actuellement des firmes du Québec qui sont intéressées par ces projets-là, ou si on va devoir recourir, comme dans le cas de la 25, à l'extérieur pour la réalisation?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, j'aime beaucoup entendre ce discours, parce que, dans nos appels d'intérêt, on mentionne toujours qu'on veut qu'il y ait de la participation du Québec, que ce soit au niveau de l'ingénierie, de l'architecture, et, dans le fond, pour compléter, les partenariats public-privé. Et, suivant la démarche que nous suivons, notamment pour la 25, j'aimerais vous rappeler que toute l'ingénierie, c'est Genivar, compagnie québécoise, à ce que je sache. Toute la construction également, c'est une compagnie qui a un bureau, une maison-mère à Boisbriand. Nous avons également le financement qui, lui, le financement, vient de MacQuarie qui utilise des fonds de retraite un peu partout dans le monde, qui va financer le projet. Moi, M. le Président, si quelqu'un veut venir financer nos histoires qu'on se construit chez nous, bravo. S'ils assument le risque, qu'ils sont capables de le faire à moins cher puis ils assument le risque, je suis très heureuse.

Au niveau des hôpitaux, M. le Président, là il s'agit de projets d'envergure, et nous devons obtenir les meilleurs projets. On ne doit pas se retrouver avec des projets mal attachés, mal ficelés comme j'ai vus dans nombre de cas, y compris des hôpitaux construits au Québec. Je pourrais vous en nommer, des exemples. Si je vous parlais du Lakeshore, je vous raconterais à peu près une histoire d'horreur, une histoire d'horreur. Et il y en a d'autres aussi, M. le Président.

Mais, moi, je m'attends à ce que nos entreprises qui vont soumissionner à l'étranger soient également considérées. On pense aux Bombardier, on pense à SNC, qui, eux, font des PPP un peu partout dans le monde et qui sont sélectionnés. Pourquoi, nous, ici, au Québec, on dirait: Nos PPP, nous, on va les faire nous-mêmes, puis on ne fera pas appel à l'expertise extérieure?

n (16 h 40) n

Ce qu'on exige, dans justement les appels d'intérêt et les appels de propositions et de qualifications, c'est que justement ils s'assurent de transmettre leurs connaissances à des firmes locales, ils doivent donc être associés à des firmes locales. Et vous comprendrez, M. le Président, si on construit un hôpital ici, vous comprendrez qu'ils ne vont pas transporter tous leurs matériaux, tous leurs ouvriers, toutes les personnes impliquées dans ce partenariat public-privé. C'est clair qu'il va y avoir des gens qui vont travailler ici, et la grande majorité, pour ne pas dire 95 % des gens, va travailler ici.

Et, moi, justement quand j'ai fait... j'ai commencé à réfléchir au niveau des PPP, ce qui me préoccupait... Parce que tout se fait en PPP de nos jours, hein? Qu'on aille en France, qu'on aille en Europe, partout, qu'on aille dans le reste du Canada... Il y avait d'ailleurs un pays qui n'en faisait pas beaucoup mais qui commence à en faire, c'étaient les États-Unis. Mais, partout au Canada, tous sont PPP. Je n'aurais pas voulu qu'on perde l'occasion de ne pas développer l'expertise ici, mais encore faut-il la développer, faut-il la développer. Et je vous assure que, quand on aura fait les routes, que ce soit la 25 et la 30, quand on aura fait la salle pour l'OSM, quand on aura fait un CHSLD, quand on aura fait les deux hôpitaux universitaires, il y aura beaucoup de connaissances qui appartiendront à des Québécois et qui vont pouvoir exporter ces connaissances à l'extérieur et pouvoir soumissionner, eux aussi, dans des projets qui vont se passer ailleurs au Canada... ou ailleurs dans le monde, pardon.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

Financement et gestion de la dette (suite)

M. Taillon: M. le Président. Or, le premier ministre nous présente très souvent en Chambre un graphique nous démontrant l'évolution de la dette par rapport à notre produit intérieur brut: courbe descendante. J'aimerais connaître quels sont les principaux facteurs qui amènent à cette projection-là, donc les composantes de cela.

Et j'aimerais aussi avoir les composantes d'une autre courbe de dette, celle par habitant, qui, elle, a une allure un peu différente, qui monte, hein? On l'a jusqu'en 2006 ici; elle est en croissance. Avec les nouveaux développements, avec les efforts que vous comptez faire pour réduire la dette ? je n'ai pas encore compris comment vous allez le faire, là, mais en tout cas supposons qu'on fait un acte de foi puis que vous allez la réduire ? la dette par habitant va avoir l'air de quoi, en 2025, au moment où vous faites le calcul pour la dette via le PIB?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Vous savez, M. le Président, mon collègue le député de Hull l'a bien indiqué, ce que l'ADQ veut, c'est ne plus mettre un sou sur la dette, c'est ça qu'ils veulent. Ça, M. le Président, là, pour un gouvernement, c'est d'une irresponsabilité crasse. Ça veut dire qu'on ne fait plus nos routes, on ne répare plus nos ponts, hein? Il faudra arrêter de poser des questions, là, O.K.? On ne fait plus nos ponts, on ne répare plus... on ne reconstruit plus d'hôpitaux, on ne reconstruit plus d'écoles. Les toits coulent, ce n'est pas grave, on va les laisser couler parce qu'à bien des égards, finalement, on ne s'en occupe pas. On ne peut pas faire ça, comme État.

Ce qui est important, mon collègue le député l'a bien expliqué, ce qui est bien important, c'est que la dette, la proportion de la dette par rapport au PIB diminue. Or, la dette diminue avec le Fonds des générations, dans lequel fonds il va y avoir 42 milliards de dollars d'ici 20 ans, et c'est la raison pour laquelle il faut qu'on soit certain justement de vendre l'électricité, d'augmenter, d'accroître nos ventes d'électricité et de ne pas avoir peur d'en vendre, de l'électricité, pour être capables justement de rencontrer nos obligations.

Alors, moi, vous savez, je pense qu'il serait bien irresponsable pour le gouvernement de décider, du jour au lendemain, qu'on doit payer tout comptant et que finalement on va vampiriser tous les services qui sont offerts aux citoyens. Parce qu'imaginez, hein, imaginez d'investir, par exemple, 2 milliards de dollars ou 3 milliards de dollars, qu'on le prenne au niveau des services... Savez-vous quel est le budget d'un hôpital universitaire? 500 millions de dollars par année. Il faudrait en fermer combien, de ces hôpitaux-là, pour payer nos infrastructures comptant, comme disait mon collègue, cash? Je pense que là il faut être certain qu'on a une approche rigoureuse, une approche soutenue. Et d'ailleurs, M. le Président, le Vérificateur général a été sans équivoque: quand on a de l'actif en retour, on doit le payer, mais on doit le payer progressivement. Ce qui fait mal, c'est le 90 milliards de dollars qui a été mis là pour payer de l'épicerie, tous gouvernements confondus, tous gouvernements confondus, et ça, c'est ça qu'il faut absolument freiner. Il faut absolument cesser cette démarche-là, il faut se concentrer sur des produits, des, des... une démarche qui va être focusée sur des actifs, de la construction et de la réparation, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

M. Taillon: M. le Président, un commentaire. Écoutez, la ministre fait gorges chaudes, là, de l'irresponsabilité de l'ADQ. Je lui rappellerais qu'elle a mis 14 milliards sur la dette depuis que son gouvernement a pris le pouvoir, plus une augmentation de la dette en périmètre comptable, et les toits coulent comme jamais. Puis, nous autres, ce qu'on veut, pour reprendre l'exemple simple du député de Hull, c'est que, quand on emprunte puis qu'on a une hypothèque, on doit rembourser le capital. Alors, ce qu'on veut, c'est qu'il y ait du remboursement de capital au niveau de l'État aussi. Ça termine mes commentaires sur la dette.

Projections des revenus et des dépenses
pour les prochaines années (suite)

Ma question maintenant au niveau de l'équilibre budgétaire, je prendrais le tableau qu'a présenté le député de Rousseau tantôt, qui nous a été fourni par le ministère des Finances suite à une demande de notre part pour connaître ce qui arrivait en 2009-2010, et on parle d'équilibre budgétaire, je veux demander à la ministre des Finances: Est-ce que ça l'inquiète, un déficit appréhendé de 250 millions en 2009-2010, avec une situation de contraction des dépenses assez sérieuse à 3 %, alors qu'on vit, depuis quatre ans, cinq ans, avec des augmentations de dépenses qui sont davantage autour de 4 % que 3 %, écart de 500 à 600 millions par rapport à la réalité d'aujourd'hui? Comment vous allez réagir pour atteindre l'équilibre à partir du déficit appréhendé deux ans avant le coup?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, vous comprendrez que je vais utiliser la même démarche que j'ai utilisée jusqu'à maintenant pour contrôler les dépenses du gouvernement. J'ai mentionné plus tôt justement un écart de 259 millions en 2009-2010, parce que justement on faisait croire, par toutes sortes d'insinuations, qu'on cachait des chiffres et on cachait la situation financière. On a non seulement donné 2009-2010, on a mis 2010-2011 et 2011-2012, avec des projections de croissance extrêmement conservatrices, et, dans les deux cas, en 2010-2011, il faudrait se rappeler que là il y a un surplus de 193 millions de dollars et, en 2011-2012, un surplus de 40 millions de dollars. Donc, je ne ferai pas gorges chaudes non plus du surplus qu'il y a en 2010-2011, mais je vous dirais que de résorber 259 millions de dollars, c'est faisable. Ça va nécessiter bien sûr une démarche rigoureuse. Ne pas remplacer un départ à la retraite sur deux, c'est ça que ça va vouloir dire.

En plus, M. le Président, je voudrais rappeler au député de Taillon qu'un des dossiers...

Une voix: Le député de Chauveau.

Mme Jérôme-Forget: ... ? de Chauveau, pardon ? qu'un des dossiers qu'on a réglés, finalement, au gouvernement, c'est l'équité salariale. De récurrents, au niveau de l'équité salariale, il y en aura pour 825 millions de dollars. Vous comprendrez que c'est là une démarche qui a fait appel à beaucoup d'efforts de la part du gouvernement, il fallait payer les arrérages depuis 2001. Et ça faisait 10 ans que la loi avait été passée, ça s'est fait à l'intérieur d'un cadre financier, c'était le but d'ailleurs de garder des réserves pour pouvoir rencontrer les obligations de la Loi sur l'équité salariale.

Alors, je vais rappeler au député de Taillon... au député de Chauveau, pardon ? je pense que ça va le suivre pour toute sa carrière politique ? député de Chauveau que jusqu'à maintenant on a réussi... j'ai bien confiance, M. le Président, qu'en remplaçant un sur deux on va atteindre l'objectif. Il y a des programmes justement qui ont atteint leur vitesse de croisière. Il y en a d'autres auxquels on met fin, il va falloir qu'on gère de façon serrée.

n (16 h 50) n

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Rousseau.

M. Legault: Bien, merci, M. le Président. D'abord, vous allez me permettre de trouver assez cocasse d'entendre le porte-parole de l'Action démocratique du Québec s'inquiéter des compressions des prochaines années dans les dépenses, parce que je regardais le programme de l'ADQ, qui s'appelait Pour un Québec plus riche, plus autonome et plus humain, et, dans ce programme, l'ADQ promettait de couper 1 % dans les dépenses de tous les ministères. Donc, au moins avec l'ADQ, c'était clair. Maintenant, ce qu'on ne sait pas, c'est où est-ce qu'on s'en va avec le Parti libéral.

Donc, je veux revenir sur ce que disait tantôt la ministre des Finances. D'abord, la ministre des Finances m'a dit que je condamnais les baisses d'impôt de 969 $ par année pour ceux qui gagnent plus de 75 000 $ par année. C'est faux, M. le Président. On souhaiterait tous offrir des baisses d'impôt à ceux qui gagnent plus de 75 000 $ par année. Mais la question qui se pose et la question que je me pose plus que jamais actuellement, c'est: Est-ce que le gouvernement du Québec peut se permettre, compte tenu des besoins urgents en éducation et en santé, se permettre donc de réduire ces impôts, donc ses revenus, de 950 millions de dollars par année?

Or, effectivement, comme le disait le député de Chauveau, ce qu'on voit, c'est, quand on regarde les projections de dépenses de l'année prochaine, donc au moment où on aura appliqué la baisse de revenus complète des impôts donc de 950 millions, la ministre prévoit une augmentation de dépenses de seulement 1,6 milliard. Or, comme je l'ai expliqué tantôt, seulement pour couvrir les augmentations de salaire, l'inflation, ce qu'on appelle les coûts de système, on a besoin de 2 milliards.

Donc, première constatation: il y aura 400 millions de coupures l'année prochaine. Deuxième constatation: si on prend la plateforme électorale, les promesses du Parti libéral du Québec, on promettait des nouvelles dépenses ou des nouvelles réductions de revenus de 900 millions de dollars par année pendant cinq ans, pour 4,5 milliards. Donc, ce que ça veut dire, c'est que les 900 millions de promesses électorales par année, oublions ça, déjà il faudra couper 400 millions l'année prochaine à cause du choix qui a été fait de baisser les revenus.

Intentions de la ministre
concernant la taxe de vente

Ma question très pointue, précise, à la ministre des Finances... Oui, j'ai une question précise à poser et j'aimerais avoir une réponse. Vous savez, M. le Président, Mme la ministre des Finances, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a promis, durant la dernière campagne électorale, de réduire de 2 % la TPS. 1 % de TPS, c'est 1,1 milliard pour le Québec. Évidemment que, si le gouvernement fédéral diminue la TPS et que le Québec occupe le champ fiscal, donc augmente du même montant la TVQ, ça donne 1,1 milliard de plus par année en revenus.

Lorsque le gouvernement fédéral a fait la première baisse de 1 %, son prédécesseur, Michel Audet ? qu'on peut appeler maintenant par son nom ? a choisi de ne pas occuper le champ fiscal. Maintenant, ma question très claire: Est-ce que la ministre des Finances exclut la possibilité... lorsque la TPS sera baissée d'un deuxième 1 %, est-ce qu'elle exclut la possibilité d'augmenter d'autant la TVQ, c'est-à-dire de récupérer 1,1 milliard?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Alors, M. le Président, vous comprendrez que le déséquilibre fiscal, il peut se transmettre de plusieurs façons. Il peut se transmettre en comptant, il peut se transmettre en points d'impôt, il peut se transmettre également avec une TPS versus TVQ. C'est là un transfert du fédéral aux gouvernements provinciaux. Alors, moi, M. le Président, quand il s'agit du déséquilibre fiscal, je ne vais pas m'accrocher dans les fleurs du tapis pour déterminer qu'un est bon puis l'autre n'est pas bon. Ce qu'on sait, c'est qu'au niveau de l'éducation postsecondaire on est en droit d'obtenir davantage du fédéral pour atteindre, atteindre le niveau auquel était soutenue l'éducation postsecondaire en 1994-1995.

Maintenant, j'aimerais revenir au député de Rousseau parce qu'il parle toujours des coûts de système. Bien, moi, je vais lui en parler, des coûts de système, M. le Président, au niveau de la santé et des services sociaux. Je vais lui parler, au niveau de la rémunération, de 795 millions de dollars, d'accord? Il y en a 571 millions: les paramètres salariaux, l'équité salariale, les échelles, autres coûts liés à la rémunération. Il y a 225 millions de dollars, l'ajout et bonification de services. Il y a, par exemple, 170 millions de dollars pour de nouveaux services médicaux, dont la prise en charge des clientèles vulnérables. Ça n'existait pas, ça, là. C'est nouveau. C'est de l'ajout de services. 55 millions de dollars pour l'ajout d'environ 200 nouveaux médecins et l'introduction de nouvelles technologies. Alors, quand on dit que tout, dans la santé, ce sont des coûts de système, c'est manifestement faux.

Au niveau du fonctionnement du réseau, il y en a pour 560 millions de dollars. Il y en a, de ce 560 millions de dollars, 133 millions de dollars pour l'indexation des dépenses autres que salariales et service de la dette. Nous avons 109 millions de dollars pour l'assurance médicaments. Et, dans l'assurance médicaments, M. le Président, il arrive qu'on reconnaisse de nouveaux médicaments, qui sont coûteux, mais c'est de l'ajout, là. C'est de l'ajout de services, parce que désormais les médicaments vont transformer la médecine, si bien qu'on va avoir recours d'abord à des médicaments plutôt qu'aller avec des lits d'hôpitaux ou des interventions chirurgicales. Ça, là, c'est clair que c'est une nouvelle tendance. Il y a 71 millions d'ajouts au niveau d'autres programmes, et, au niveau de la bonification de services, il y en a pour 122 millions pour les clientèles vulnérables et 125 millions pour le vieillissement de la population, nouvelles technologies et fonctionnement des nouvelles installations.

Alors, quand le député de Rousseau nous dit: C'est tout de l'argent, ça, ce sont des coûts de système. Bien, c'est clair que, si on ajoute des docteurs, des infirmières, des nouveaux médicaments et qu'on change nos technologies pour pouvoir être plus efficaces, vous comprendrez qu'on peut bien dire que c'est des coûts de système. Moi, j'appelle ça de l'ajout de services, j'appelle ça de l'ajout de services, alors, à cet égard.

Maintenant, je voudrais lui dire également au niveau... Il s'inquiète beaucoup au niveau de l'écart du fardeau fiscal moyen entre le Québec et les autres provinces. Jusqu'à maintenant, ceux qui gagnaient 45 000 $ et moins payaient moins d'impôt au Québec par rapport à la moyenne canadienne. Avec le budget que j'ai déposé, c'est 55 000 $ pour payer moins que la moyenne canadienne. Après 55 000 $, nous payons toujours plus que la moyenne canadienne. Et ceux qui gagnent 75 000 $, ceux que le député de Rousseau ne voulait absolument pas qu'ils reçoivent une baisse d'impôt de 969 $, ceux pour qui il s'est battu, M. le Président, envers et contre tous, y compris supporter les pétrolières et le secteur financier, moi, je vous dis, M. le Président, j'ai fait le choix des gens qui gagnaient 75 000 $ et plus et 75 000 $ et moins pour donner des baisses d'impôt à tous les Québécois qui paient de l'impôt.

Le Président (M. Paquet): M. député de Rousseau.

M. Legault: M. le Président, je veux reposer ma question parce que je veux être certain d'avoir bien compris la réponse. Donc, ce que la ministre des Finances nous dit, c'est: lorsque le gouvernement fédéral baissera la TPS d'un deuxième 1 %, elle n'exclut pas la possibilité d'occuper le champ fiscal et donc d'augmenter la TVQ de 1 %, c'est-à-dire de 1,1 milliard. Est-ce que c'est bien ce qu'elle nous a dit? Elle nous a dit, là: Le déséquilibre fiscal peut se transmettre de plusieurs façons. Est-ce que c'est ce qu'elle veut dire, qu'elle n'exclut pas la possibilité d'occuper le champ fiscal?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

n (17 heures) n

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, quand on parle de déséquilibre fiscal, ce n'est pas sorcier, c'est une tarte. Ce que ça dit, c'est que, du côté fédéral, il y a trop de revenus par rapport à leurs obligations. Quant à nous, nous avons moins de revenus par rapport à nos obligations. Si le fédéral souhaite que le transfert se fasse en comptant, je vais prendre l'argent. Si le fédéral dit: On va vous donner des points d'impôt, je vais être très heureuse, M. le Président. Et je n'exclus pas, si le fédéral dit: Moi, je règle le déséquilibre fiscal en baissant ma TPS, je n'exclus pas l'idée de considérer la TVQ.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau.

M. Legault: M. le Président, c'est toute une nouvelle qu'on vient d'apprendre aujourd'hui. Donc, la ministre des Finances vient nous dire que, lorsque le gouvernement fédéral va baisser la TPS d'un deuxième 1 %, c'est-à-dire de 1,1 milliard, elle n'exclut pas d'augmenter la TVQ de 1,1 milliard. M. le Président, ce que ça veut dire, c'est que le débat qu'on a eu depuis deux semaines sur la capacité du gouvernement à baisser ses revenus au moment où il y a des besoins urgents en santé et en éducation, bien ce débat-là a été un peu faussé parce qu'il y avait une donnée qu'on ne connaissait pas, qu'on vient d'apprendre, c'est-à-dire que la ministre des Finances n'exclut pas la possibilité d'augmenter les revenus du gouvernement du Québec en augmentant la taxe de vente provinciale, la TVQ. Donc, ce que ça veut dire, c'est qu'aujourd'hui elle nous a annoncé des baisses d'impôt de 950 millions mais qu'elle nous dit que c'est possible que, demain, elle réclame 1,1 milliard de plus de TVQ aux Québécois.

Je pense, M. le Président, le débat qu'on avait lors du dépôt du budget, c'était de savoir est-ce que le gouvernement du Québec a les moyens de diminuer ses revenus de 950 millions. Bien, ce débat-là a été fait en cachant une donnée importante: la ministre des Finances vient confirmer aujourd'hui qu'on avait raison, que c'est nous qui avions raison, que le Québec ne peut pas se permettre de diminuer ses revenus de 950 millions, puisqu'elle compte déjà augmenter de plus de 1 milliard de dollars la TVQ en l'augmentant de 1 %.

Le problème, M. le Président, c'est qu'en attendant les malades et les enfants vont attendre pour des services, parce que le gouvernement de Stephen Harper nous a dit: Le deuxième 1 %, il viendra probablement en 2009, peut-être 2010. Ce que ça veut dire donc, c'est qu'en baissant les impôts de 950 millions aujourd'hui puis en augmentant la TVQ dans deux ans tout ce qu'on fait, c'est un effet net dans les poches des contribuables de zéro mais un délai additionnel de deux ans pour les malades, pour les enfants qui ont des difficultés d'apprentissage, pour tous ceux qui attendent des services de santé et d'éducation. M. le Président, je pense qu'il faut regarder le portrait dans son ensemble. Le premier ministre et le gouvernement libéral ne peuvent pas se permettre de baisser les impôts et les taxes quand on tient compte des besoins urgents en santé et en éducation, et ils auraient dû le dire depuis deux semaines. Ça fait deux semaines qu'on entend le premier ministre et la ministre des Finances nous dire: Oui, on est fiers d'offrir des baisses d'impôt de 950 millions. Mais, aujourd'hui, on apprend que ce ne sera pas possible, que dans le fond il y aura une augmentation de la TVQ de 1 %, c'est-à-dire de 1,1 milliard.

Donc, M. le Président, ce qu'on apprend aujourd'hui, c'est que le gouvernement libéral donne d'une main et compte, demain, reprendre de l'autre. Donc, aujourd'hui, on a la confirmation, M. le Président, que le gouvernement libéral... il vient nous confirmer qu'on manque de fonds au Québec pour répondre aux engagements en santé et en éducation. Le Parti libéral du Québec s'est promené pendant cinq semaines, en campagne électorale, en promettant, entre autres, au-delà des coûts de système, un rattrapage de 1,4 milliard récurrent en santé. Or, il ne met rien dans le budget, il met tout dans les baisses d'impôt, mais il nous dit: Non, dans le budget, il y a seulement les coûts de système. Et c'est là qu'on ne s'entend pas, c'est que la ministre pense que tout l'argent à la santé est tout pour des nouveaux services. Or, moi, je l'invite à aller voir dans son propre budget, dans son propre budget, à la page 12, chapitre I, volume IV, où... Combien de temps il me reste?

Le Président (M. Paquet): Votre bloc est terminé, mais on va laisser... la ministre a le temps de répondre. Si vous permettez, on peut prendre un bloc qu'on va étendre autour de 20 minutes, et ça fait partie de votre temps.

M. Legault: Non, non. Si c'est terminé, c'est terminé, là, mais...

Le Président (M. Paquet): C'est terminé, à ce moment-là. Alors, Mme la députée...

M. Legault: C'est terminé. Bon. Mais, M. le Président, je veux juste dire, là...

Le Président (M. Paquet): Le bloc continue, d'accord.

M. Legault: ...que c'est un manque de vision à long terme, là.

Le Président (M. Paquet): C'est votre bloc qui continue.

M. Legault: On a, à court terme, un mauvais financement de la santé et de l'éducation, des baisses d'impôt qui vont être remplacées dans deux ans par une hausse de la TVQ. C'est quand même, là, toute une surprise qu'on a aujourd'hui de la part de la ministre des Finances.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau, vous avez utilisé donc une intervention de cinq minutes, c'est ça? 5 min 20 s. Donc, on a la possibilité soit de laisser la ministre répondre pour équilibrer, comme on a fait depuis le début... Donc, est-ce que vous laissez la ministre répondre, M. le député de Rousseau?

M. Legault: On continue les procédures qui avaient été prévues.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Alors, Mme la députée de Laporte, c'est loisir à vous d'utiliser votre temps.

Mme Ménard: ...le temps à la ministre de répondre.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Alors, voilà ce qu'on appelle quand quelqu'un charrie, M. le Président. On a un exemple parfait de quelqu'un, là, qui est de mauvaise foi, de mauvaise foi...

M. Legault: ...

Mme Jérôme-Forget: Oui, oui, c'est ça, de mauvaise foi. Je le répète trois fois puis quatre fois, parce que, M. le Président...

Le Président (M. Paquet): Question de règlement? M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. La ministre des Finances doit savoir depuis longtemps qu'on ne peut pas prêter des intentions à quelqu'un dans cette Chambre. Donc, je lui demanderais de retirer ses paroles, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Alors, j'inviterais Mme la ministre, s'il vous plaît, à... Mme la ministre, je pense qu'il faut faire attention aux termes qui sont non parlementaires. Ça se déroulait bien jusqu'à maintenant.

Mme Jérôme-Forget: Je retire mes paroles, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Alors, vous comprendrez que le député de Rousseau nous fait tout un plaidoyer, là, pour justement faire tout un cinéma ici, à l'Assemblée nationale, pour qu'on se retrouve aujourd'hui où il interprète mes propos. Ce que j'ai dit, c'est que, d'où que vienne l'argent du fédéral, le transfert, il y aura une entente à l'effet que c'est fait d'une façon, d'une autre ou d'une autre. Moi, ce que je dis, c'est que la tarte du fédéral est trop grande dans leurs revenus par rapport à leurs dépenses, certainement au niveau postsecondaire.

Maintenant, le député de Rousseau, il était bien content quand il y avait le rapport Séguin. Il semblerait que c'était le rapport que vous avez demandé à Séguin de combler. Et de quoi parlait Séguin? Il parlait justement de ça. Mais là c'était correct à l'époque parce que c'est un rapport qu'ils avaient demandé, que son gouvernement avait demandé. M. le Président, le député de Rousseau ne veut pas en donner... ne voulait pas que le Parti libéral du Québec donne des baisses d'impôt. Dans son temps, alors qu'ils avaient coupé, M. le Président, ils avaient coupé en éducation, hein, le véritable ministre de l'Éducation de l'époque... En 1996-1997, ils n'ont pas augmenté les budgets en éducation, ils les ont coupés de 420 millions. En 1997-1998, ils les ont coupés de 592 millions. Pas une cenne en plus, là, 592 millions en moins. Puis là il vient nous faire la remontrance, alors que, lui, quand le Parti québécois a baissé les impôts de 1,1 milliard de dollars, il a mis en santé... ils ont mis en santé 720 quelques millions de dollars après avoir coupé année après année?

Moi, M. le Président, là, je vais vous dire, je trouve ça incroyablement surprenant. Je surveille mes mots, là, parce que je pourrais dire des choses antiparlementaires. Je voudrais l'éviter le plus possible. Mais il faut être sérieux, là, ici, là, hein? Il faut être sérieux. On ne peut pas avoir dit une affaire pendant des années puis après ça faire le contraire. Et on ne peut pas avoir dit justement que, dans son temps, baisser les impôts, c'était correct pourvu qu'on augmente les dépenses de 700 millions en santé et de moins que ça en éducation. Il était ministre de l'Éducation, M. le Président, il n'a jamais mis autant d'argent en éducation qu'on en a mis cette année puis il baissait les impôts en même temps. Deux poids, deux mesures. Ça, là, est-ce que c'est un Gémeaux? Parce que, vous savez, des Gémeaux, là, ça a deux personnalités. Alors, je ne sais pas si c'est un Gémeaux, le député de Rousseau.

n (17 h 10) n

Une voix: ...

Mme Jérôme-Forget: C'est ça? C'est un Gémeaux? Ah! Bon, bien, O.K., j'ai tout compris. J'ai tout compris maintenant, c'est le dédoublement d'une personnalité. Alors, il avait une personnalité il y a déjà quelques années et, aujourd'hui, il a une autre personnalité, d'autres valeurs, d'autres valeurs, d'autres perceptions.

M. le Président, vous comprendrez que ce n'est pas sérieux, ce que dit le député de Rousseau. Nous, on maintient le cap au niveau du déséquilibre fiscal. Nous, on est des fédéralistes, on parle au gouvernement d'Ottawa, hein, on essaie de s'entendre. On essaie de s'entendre avec les autres gouvernements provinciaux parce que nous estimons d'ailleurs que les autres gouvernements provinciaux souhaitent également avoir une augmentation au niveau du transfert au niveau de l'éducation postsecondaire.

M. le Président, je reviens encore toujours au député de Rousseau quand il parle des coûts de système. Il inclut dans les coûts de système, là, tout ce qu'on peut imaginer. D'ailleurs, si je regarde tout le profil du Parti québécois en éducation et en santé, ils n'ont jamais couvert les coûts de système. Ils ont baissé en santé, hein, moins 400 millions, moins 400 millions en éducation, moins 592. Ça a été la même chose en santé, ils ont coupé de 1,6 milliard de dollars, si bien qu'on est encore en train de réparer les pots cassés. Parce que vous comprendrez, après avoir donné 300 000 $ à chaque docteur qui prenait sa retraite et avoir demandé à 4 500 infirmières de quitter leur poste d'infirmière, vous comprendrez, M. le Président, qu'on n'a pas de leçons à recevoir du Parti québécois dans sa gérance ou de la santé ou de l'éducation. Ça, je le refuse, M. le Président. Je pense que le député de Rousseau a démontré vraiment, là, qu'il était un vrai Gémeaux, un vrai, un véritable, et qu'il a deux personnalités, deux discours, avant et après. Je trouve ça bien dommage qu'on ait des gens comme ça à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, Mme la députée de Laporte.

Société des alcools du Québec (SAQ)

Mme Ménard: Oui. Alors, M. le Président, j'aimerais parler de la Société des alcools du Québec.

Une voix: ...

Mme Ménard: Ça va? Alors, M. le Président, j'aimerais parler de la Société des alcools du Québec. Et, comme vous savez, M. le Président, étant nouvelle députée, la majorité des dossiers que je touche, je dois faire plusieurs recherches. Alors, j'ai fait une recherche sur la Société d'alcools du Québec et j'ai une petite histoire à vous raconter, si vous me le permettez.

Alors, M. le Président, en 1898, le gouvernement canadien tient un référendum sur la prohibition au Canada. Déjà là, M. le Président, la province de Québec vote en majorité non. En 1918, le gouvernement du Québec adopte une loi sur la prohibition totale devant prendre effet le 1er mai 1919. En 1919, à la suite d'un référendum tenu par le gouvernement du Québec, la plupart des Québécois votent en faveur de l'exclusion de la bière, du vin et du cidre de la Loi sur la prohibition. Le Québec est maintenant le seul endroit, tant au Canada qu'aux États-Unis, où la prohibition n'est pas totale. Le gouvernement du Québec choisit une solution originale: la tempérance plutôt que l'abstinence. Contrairement au reste de l'Amérique du Nord, il adopte la Loi sur les boissons alcooliques et crée la Commission des liqueurs du Québec.

Alors, la commission reçoit comme mandat d'assurer le commerce des vins, des spiritueux et de vérifier la qualité des produits vendus. Elle rachète les stocks, évalués à près de 5 millions de dollars, des épiciers et des importateurs. Dès la première année, la commission aménage son laboratoire de contrôle, ouvre 64 magasins, offre 383 produits. Elle compte, à ce moment-là, 415 employés. Et les ventes s'élèvent à 15 millions de dollars, et le revenu net de la commission atteint 4 millions de dollars.

Alors, nous sommes rendus en juin 2007. Au terme de l'exercice 2006-2007, la SAQ déclare des ventes brutes de 2,9 milliards de dollars, une augmentation de 7,8 % par rapport à l'exercice précédent, et un bénéfice net de 710,1 millions de dollars comparativement à 656,9 millions en 2005-2006, soit une croissance de 8,1 %. Les recettes gouvernementales totales tirées de l'exploitation, incluant les revenus fiscaux, ont atteint 1,4 milliard de dollars.

À titre de société d'État, la SAQ verse d'importantes sommes à deux paliers de gouvernement sous forme de taxes, de droits et d'un dividende au gouvernement du Québec.

Depuis sa création, la SAQ a connu bien sûr un conflit mondial, la grande dépression, l'avènement de la radio, du téléviseur, des ordinateurs et a vécu aussi des bouleversements inouïs: changement de nom, changement de mandat, de statut, apparition des comptoirs libres-services, introduction du vin dans les épiceries et les dépanneurs, conflits de travail, période de récession économique et plusieurs tentatives de privatisation. Alors, heureusement, son 80e anniversaire coïncide avec la période la plus prospère de son histoire. Et cette tendance semble être là pour de bon, les assises de la société d'État n'ont jamais été aussi solides.

Il est très intéressant de constater que la société d'État contribue financièrement au maintien et au développement des activités d'Éduc'alcool, dont le mandat est de promouvoir la consommation réfléchie de l'alcool, et elle offre aussi un partenariat privilégié à de nombreux organismes culturels et humanitaires. J'ai lu aussi que la société intervient également auprès de nombreux groupes voués à la protection de l'environnement et du recyclage du verre.

On a vu aussi apparaître une nouvelle génération de magasins. On a maintenant la SAQ.com pour les internautes, la SAQ Dépôt pour les économes et les spectaculaires SAQ Sélection Art de vivre.

Je vais vous citer le président-directeur général de la société, Sylvain Toutant, qui disait: «Nous sommes très satisfaits de ces résultats non pas parce qu'il s'agit de résultats records, mais parce qu'ils sont le fruit des efforts de tous les employés pour faire de la SAQ un meilleur détaillant et une entreprise innovatrice.»

Efficacité et service à la clientèle

Alors, ma question pour Mme la ministre concerne l'efficacité et le rapprochement des besoins de la clientèle. Pouvez-vous nous parler des actions qui ont été prises pour être plus efficace et finalement avoir un meilleur rapprochement?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre des Finances.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, savez-vous, je vais laisser le président, M. Toutant, répondre parce qu'il a de bonnes nouvelles à annoncer, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): M. Toutant.

M. Toutant (Sylvain): M. le Président, Mme la ministre, on a mis en place, depuis trois ans, essentiellement quatre grands blocs d'initiatives qui nous ont permis d'améliorer les résultats de la société, lesquels, si on regarde en termes de progression de ventes, en trois ans on parle de 18 % d'augmentation de ventes, 18 % de baisse d'inventaire et une amélioration substantielle au niveau de l'endettement, une baisse de 75 %, tout ça avec une amélioration du service à la clientèle.

n(17 h 20)n

Les quatre principaux projets sur lesquels nous avions travaillé et nous continuons de travailler... Le premier, c'est un projet d'envergure, qui s'appelle Service-conseil, à l'intérieur de la SAQ, M. le Président. Ce projet-là a pour but finalement de revoir l'ensemble des procédures opérationnelles entre la chaîne d'approvisionnement et à l'intérieur des différentes succursales de façon à libérer du temps de la part de nos employés afin qu'ils puissent se consacrer davantage au service-conseil. Nous avons donc mis en place ce qu'on appelle à l'interne les zones rouges, des journées pendant lesquelles évidemment les succursales ne peuvent recevoir de marchandise, de façon à ce qu'il n'y ait pas de manipulation dans les périodes de pointe, manipulation de marchandise dans les périodes de pointe, mais que le temps soit consacré essentiellement au service à la clientèle. À ce projet-là sont venus se greffer des programmes de formation. Entre autres, en partenariat avec l'ITHQ, nos conseillers en vin ont tous suivi une formation d'environ 160 heures sur le service à la clientèle et sur tout l'aspect produits évidemment et doivent eux-mêmes faire de la formation à l'intérieur de l'entreprise auprès de leurs collègues.

L'autre élément très important: avec l'arrivée de la nouvelle politique d'achat et mise en marché le 27 octobre 2005, la SAQ a été en mesure de remettre sur les rails finalement le processus de référencement de nouveaux produits. Nous avons donc, cette année, introduit 1 000 nouveaux produits à la sélection de la SAQ, donc beaucoup plus de choix pour les consommateurs, des nouveautés. On sait que les consommateurs sont à la recherche de produits ou de découvertes du monde dans le domaine viticole et on répond à ces besoins-là à travers la sélection de produits, donc une amélioration au niveau du choix et du rapport qualité-prix.

L'autre élément important, c'est toute l'approche marketing. Plusieurs recherches ont été faites pour mieux comprendre les besoins de notre clientèle. Nous avons mieux segmenté notre clientèle et nous avons développé des outils de communication et de marketing adaptés à chaque segment. Je pense ici à la nouvelle circulaire publicitaire qui est publiée 14 fois par année, le lancement du magazine Tchin Tchin, le lancement du magazine Cellier, qui, lui, s'adresse davantage aux passionnés, connaisseurs, et les programmes corporatifs, les programmes promotionnels corporatifs, au nombre de 14.

Nous continuons aussi l'amélioration de notre réseau en actualisant nos bannières. Et d'ailleurs, à cet effet, nous avons déjà deux succursales avec le nouveau format SAQ Sélection qui ont été actualisées, et l'ensemble du réseau sera refait au cours prochaines années sur ce modèle-là. M. le Président, merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, ça termine ce bloc. M. le député de Chauveau.

Modification des conventions
comptables du gouvernement

M. Taillon: Merci beaucoup. Alors, on peut compter sur une régularisation de la comptabilité gouvernementale suite au mandat que la ministre nous a annoncé avec le Vérificateur général. Quel va être l'effet sur la situation financière du Québec en 2009-2010, par exemple, d'une intégration dans le périmètre du gouvernement des déficits cumulés des hôpitaux et des universités? Est-ce que ça va avoir une influence, 2009-2010, là-dessus ou si on va envoyer ça à la dette?

Mme Jérôme-Forget: Alors, M. le Président, au niveau de...

M. Taillon: ...va être à peu près à 2 milliards à ce moment-là, là, hein, les deux réseaux. Il est à 1,5 actuellement.

Mme Jérôme-Forget: Au niveau des établissements de santé ? et ça va être la même chose, M. le Président, pour l'éducation ? nous devons faire le travail avec le Vérificateur général, comme ça s'est fait dans toutes les provinces, parce que, dans toutes les provinces, la dette des hôpitaux était à l'extérieur du périmètre comptable; dans toutes les provinces, la dette des écoles était à l'extérieur du périmètre comptable. Ce que nous faisons: nous nous rallions à une décision, prise en 2005 par l'Association canadienne des comptables agréés, justement d'incorporer les hôpitaux et les commissions scolaires à l'intérieur du périmètre comptable.

Mais encore là, M. le Président, je l'ai souligné, il y a des problèmes parfois qui doivent être discutés. La valeur des actifs notamment, est-ce qu'on en prend considération? Est-ce que les fondations sont incluses dans la dette ou dans les revenus? Alors, vous comprendrez que ça touche plusieurs volets. Et, quand j'ai rencontré mon collègue justement de l'Ontario, il me disait que ça faisait deux ans qu'il travaillait avec le vérificateur général là-bas pour trouver justement la réponse et les réponses que soulève l'intégration à l'intérieur du périmètre comptable des volets rattachés aux déficits des hôpitaux et des commissions scolaires. Dans un cas, M. le Président, il y a un déficit; dans un autre cas, il y a un surplus, au niveau des commissions scolaires. Alors, vous comprendrez que tout ça doit être fait avec beaucoup de rigueur, beaucoup de sérieux, et c'est la raison pour laquelle je veux absolument que ce travail-là soit fait non pas seulement pour répondre aux besoins finalement de l'Association canadienne des comptables agréés et de suivre ce qu'on appelle les PCGR, mais je pense que ce qui est important, là, c'est qu'on trouve des solutions aux problèmes du Québec qui reflètent un endettement important.

Et, contrairement à d'autres provinces, nous avons par ailleurs des actifs absolument fantastiques, ne serait-ce qu'au niveau d'Hydro-Québec, la Société des alcools du Québec, Loto-Québec. Ça, je pense que c'est important de le rappeler. Mais nous allons faire le travail de façon extrêmement sérieuse avec le Vérificateur général. J'ai dit justement au député de Chauveau que nous allions le tenir au courant pour que justement... parce que je sais que c'est un dossier qui le préoccupe particulièrement, que nous allions le tenir au courant, au fait des discussions et de la façon dont nous allons aborder ce problème. Mais c'est un problème d'envergure qu'on ne peut pas régler d'un volet, M. le Président, je pense que ça nécessite justement... Et justement le sous-ministre me donne justement... la formation d'un groupe de travail entre le Vérificateur général et le ministère des Finances, et le mandat, c'est l'examen des conséquences sur les plans comptable, financier et administratif de la consolidation des réseaux de santé et de l'éducation au périmètre comptable du gouvernement, l'examen des conséquences sur les plans comptable, financier et administratif de l'application des PCGR du secteur public et l'examen des implications de l'harmonisation aux PCGR du secteur public sur la Loi sur l'équilibre budgétaire.

Et je reviens souvent à cet exemple qu'a soulevé le député de Chauveau à l'effet que c'est vrai que le Vérificateur général a annoncé qu'il y avait un déficit, une dette de 5,3 milliards de dollars. Je reviens toujours à cet exemple, M. le Président, du gouvernement fédéral qui s'était trompé dans la péréquation. Et, s'étant trompé de 3 milliards de dollars, nous faisons une entente de remboursement sur 10 ans à raison de 300 millions de dollars par année. Or, le 3 milliards de dollars devait apparaître dans les états financiers de l'année. Il aurait donc fallu couper 5,3 milliards de dollars, certainement 3 milliards de dollars au niveau de cette décision prise par Ottawa, qui s'était trompé, M. le Président. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui s'était trompé, là, c'est le gouvernement fédéral, au niveau de la péréquation et des transferts au gouvernement du Québec. Alors, vous comprendrez que je reviens toujours à cet exemple.

C'est un travail qui doit être fait de façon rigoureuse, de façon sérieuse, et nous allons le faire de cette façon-là, de façon rigoureuse et sérieuse, avec le Vérificateur, avec les gens du ministère des Finances, pour trouver justement les façons de régler... parce que le Vérificateur général est parfaitement conscient qu'on ne pourrait pas, dans une situation comme celle qui s'est passée, aller couper les dépenses du gouvernement à cet égard. Il en était conscient, il l'a reconnu, et d'ailleurs je lui ai dit que jamais je n'accepterai, moi, en tant que ministre des Finances et présidente du Conseil du trésor, d'aller couper dans les services tout simplement de 3 milliards de dollars, alors qu'on a convenu d'une entente pour les prochains 10 ans avec le gouvernement fédéral.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

Effets des réductions d'impôt
sur la croissance économique

M. Taillon: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme la ministre, vous avez, dans votre plan de gestion annuel, une orientation qui vise à mesurer les impacts des baisses d'impôt sur la croissance économique. Vous avez un plan de travail dans ce sens-là. Je regardais vos prévisions présentées dans le calcul du ministère des Finances pour les années 2007 à 2011, et il y a des baisses d'impôt importantes que vous avez mises en oeuvre, 2007-2008, 2008-2009, ça ne se reflète pas dans la croissance économique de vos prévisions. Est-ce que vos mesures d'impact, c'est pour plus tard? Vous n'en avez pas tenu compte? Vous n'avez pas confiance dans votre objectif? C'est quoi, la réponse?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: ...d'abord donner une première réponse, M. le Président, puis, après ça, je demanderai au sous-ministre de compléter la réponse. Mais vous comprendrez que, si on avait commencé à estimer l'impact des baisses d'impôt pour augmenter les revenus du gouvernement, on nous aurait taxés de plusieurs noms. Nous avons décidé, aux termes des revenus, d'être conservateurs dans nos projections. Justement pour ne pas être taxés d'être trop optimistes, nous avons été, je dirais, plus que réalistes. Probablement que nous avons sous-estimé les revenus, mais je vais laisser au sous-ministre, si vous permettez, M. le Président, à M. Jean Houde, le soin de compléter peut-être la réponse pour le député de Chauveau.

Le Président (M. Paquet): M. le sous-ministre.

M. Taillon: ...savoir c'est quoi, votre prévision de l'impact, là.

Le Président (M. Paquet): M. le sous-ministre des Finances.

M. Taillon: On ne vous en tiendra pas rigueur.

n(17 h 30)n

M. Houde (Jean): Alors, je ne sais pas si je vais me lâcher lousse, comme me suggère le député, mais simplement lui rappeler que les baisses d'impôt des dernières années sont déjà intégrées dans nos prévisions, celles de cette année ne le sont pas. La ministre vient de dire qu'il y a un élément de conservatisme là-dedans. Je peux peut-être vous indiquer ce que ça signifie, l'ensemble des actions du gouvernement, non seulement les baisses d'impôt des particuliers, mais la réduction de la taxe sur le capital et les autres mesures que l'on a prises. Nous, on estime qu'à terme, sur 12, 15 ans, c'est 0,25 de PIB réel que ça occasionne d'amélioration. Ça ne se traduit pas instantanément dans l'année qui suit, mais, sur une période d'une douzaine d'années, là, c'est 0,25 de PIB réel ce qui a été fait comme décision de baisses d'impôt aux sociétés et aux particuliers, qui ne sont pas intégrées dans les prévisions que vous avez.

M. Taillon: ...vous nous avez dit que vous avez tenu compte...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

M. Taillon: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Quand j'ai dit que vous avez tenu compte... que ça apparaît actuellement, les baisses d'impôt, les années antérieures, pour combien en 2007-2008?

M. Houde (Jean): Je ne l'ai pas, le chiffre. Je pourrais vous le donner; on l'a, là, au ministère parce qu'à chaque année, nous, on fait ce modèle-là. On peut vous le fournir facilement. Je vais vous le fournir, M. le député.

M. Taillon: C'est beau. Alors, M. le Président, je ne suis pas Gémeaux...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

M. Taillon: Merci. Je ne suis pas Gémeaux, donc je peux vous poser ma question...

Une voix: ...

Transferts fédéraux en matière
d'éducation postsecondaire

M. Taillon: Je comprends que la ministre est moins nerveuse, là, que nous parce qu'évidemment elle prévoit peut-être aller chercher 1 % de TVQ. Mais, au-delà de ça, combien d'argent, dans le règlement du déséquilibre au niveau de l'enseignement postsecondaire, le Québec estime demander au fédéral pour un règlement satisfaisant? Dans vos orientations, vous allez chercher de l'argent de ce côté-là. C'est quoi, la demande Québec, aujourd'hui, pour l'enseignement postsecondaire?

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, il y a deux chiffres, on va les sortir. Il y a le chiffre pour arriver au taux de 1994, avant que le gouvernement fédéral commence à baisser ses transferts aux provinces au niveau de l'éducation postsecondaire, avant qu'il commence d'ailleurs à le faire pour la santé également, O.K.? Alors, c'est la raison pour laquelle je vais attendre, je ne voudrais pas donner... induire le député de Chauveau dans l'erreur.

(Consultation)

M. Taillon: ...c'est pour le Québec...

Mme Jérôme-Forget: ...600 millions de dollars, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Je dirais que l'écart entre si on indexait le coût... si on indexait le transfert au niveau de l'éducation postsecondaire, indexé depuis 1994, ce serait environ 600 millions de dollars. C'est ce qu'on veut rechercher, c'est ce qu'on veut obtenir, M. le Président, parce qu'on veut revenir au niveau de 1994-1995.

Le Président (M. Paquet): M. le député.

M. Taillon: M. le Président, est-ce que c'est 600 millions de plus que le 200 millions à peu près ? j'arrondis les chiffres, là ? prévu pour 2008-2009 au titre de l'éducation postsecondaire ou si c'est 600 moins 200?

Mme Jérôme-Forget: Non, non, c'est 600 millions de plus, M. le Président.

M. Taillon: Que ce qui est déjà obtenu.

Mme Jérôme-Forget: On me rafraîchit la mémoire, et je l'ai mentionné plus tôt, c'est qu'il y a unanimité des provinces à cet égard, toutes les provinces demandent justement de corriger le transfert au niveau de l'éducation postsecondaire.

M. Taillon: Donc, c'est une demande globale de 3 milliards à peu près.

Mme Jérôme-Forget: 3,5 milliards de dollars.

M. Taillon: M. le Président...

Le Président (M. Paquet): M. le député.

Dividendes versés par les sociétés d'État

M. Taillon: Oui. Au niveau des... Trois minutes, merci. C'est pour permettre dans le fond d'enclencher le débat avec les sociétés d'État ce soir. Quelle est votre commande de dividendes aux sociétés d'État pour les trois prochaines années?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, il y a une nouvelle donne: il n'y a pas de commande de placée aux sociétés d'État, les sociétés soumettent par ailleurs un plan stratégique qui est approuvé par le Conseil des ministres, mais il n'y a pas de commande spécifique au niveau des dividendes.

M. Taillon: Est-ce que je peux, M. le Président, à ce moment-là...

Le Président (M. Paquet): M. le député.

M. Taillon: ...poser la question aux présidents des sociétés d'État: Dans leurs plans stratégiques, quelle est la provision de dividendes additionnels prévue pour les deux prochaines années?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: ...il demande aux sociétés d'État.

Le Président (M. Paquet): À M. Toutant de... lequel président?

M. Taillon: Oui, oui... bien, à leur choix, celui qui est prêt le premier.

Mme Jérôme-Forget: M. Cousineau est prêt.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. Cousineau, de Loto-Québec.

M. Taillon: Oui, mais, lui, il ne verse pas de dividende.

M. Cousineau (Alain): Oui, M. le Président. La prévision budgétaire, pour l'exercice 2007-2008, dégagerait un bénéfice net d'environ 1 410 000 000 $, duquel il faut retirer certains montants qui sont versés dans des fonds dédiés d'environ 72 millions, ce qui laisse un dividende appréhendé d'environ 1 325 000 000 $.

M. Taillon: Qui serait une augmentation, par rapport à 2006-2007, ou une diminution?

M. Cousineau (Alain): Une légère diminution par rapport à 2006-2007, compte tenu que notre prévision de revenus pour l'exercice qui s'amorce prévoit également une légère diminution.

M. Taillon: On aura l'occasion de nous expliquer pourquoi tantôt, là? O.K. Du côté de la Société des alcools du Québec.

Le Président (M. Paquet): Donc, M. Toutant, M. Sylvain Toutant, de la SAQ.

M. Toutant (Sylvain): Merci, M. le Président. Pour nous, en 2007-2008, le bénéfice net estimé est de 745 millions. Il sera livré évidemment en entier en dividendes, et, pour 2008-2009, 785 millions de dollars comparativement à 710 pour cette année.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chauveau.

M. Taillon: ...la même chose à peu près, donc 10 %, en gros, là. C'est beau. Merci. C'est terminé pour moi.

Le Président (M. Paquet): D'accord. M. le député de Rousseau.

Choix budgétaires du gouvernement

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. M. le Président, je suis content parce que je viens d'avoir la réponse à la question que je me pose depuis deux semaines. Depuis deux semaines que je me demande: Comment une femme aussi prudente peut-elle baisser les revenus de 950 millions sans en avoir les moyens et en sachant très bien, parce que je sais qu'elle le sait, les besoins urgents en santé et en éducation? Et la raison pourquoi je sais qu'elle le sait, c'est qu'elle a défendu la plateforme électorale du Parti libéral du Québec pendant la campagne électorale, plateforme électorale où le Parti libéral promettait des réinvestissements, au-delà des coûts de système, juste en santé, de 1,4 milliard.

Donc, ce qu'on vient d'apprendre, M. le Président, et je veux reprendre les paroles de la ministre des Finances, c'est que la tarte du gouvernement fédéral est trop grande, et donc, lorsque le gouvernement fédéral va baisser le deuxième 1 % de TPS, elle va augmenter la TVQ de 1 %, donc de 1,1 milliard. C'est tout un changement, M. le Président. Vous vous rappellerez, vous étiez là, l'ancien ministre des Finances, Michel Audet, quand on lui avait posé la question, sa première réponse, ça avait été de dire: Il faudrait examiner cette possibilité-là. Mais, dans l'après-midi, après avoir rencontré son premier ministre, il nous avait dit: Jamais on n'augmentera la TVQ de 1 %. J'espère en tout cas, on va sûrement suivre, au cours des prochaines heures, la réaction du premier ministre, mais en tout cas on verra.

Mais, M. le Président, depuis deux semaines, ce qu'on dit, c'est très clair, je pense que c'est un peu aussi... en tout cas, c'est ce qu'on dit, nous autres, de notre côté, c'est-à-dire que, compte tenu des besoins urgents en éducation puis en santé, le Québec n'a pas les moyens de baisser les revenus, les impôts de 950 millions de dollars. Or, pendant tous ces débats, qui ont été difficiles, je pense qu'il faut l'admettre, il nous manquait une donnée. Il nous manquait une donnée, c'est ce que vient de nous dire la ministre des Finances, c'est qu'elle compte augmenter les revenus du gouvernement du Québec en puisant dans la poche des contribuables 1,1 milliard de plus pour la TVQ. Donc, ce que ça veut dire, c'est que le gouvernement libéral va reprendre d'une main ce qu'il vient de donner aux contribuables de l'autre.

n(17 h 40)n

Le problème, M. le Président, c'est ce que je disais tantôt, c'est qu'il y a un délai de deux ans, et on le voit bien dans les projections sur cinq ans, parce qu'on voit que la ministre des Finances est obligée, pendant deux années, en 2008-2009 et en 2009-2010, de réduire de façon drastique la croissance des dépenses de programmes à environ 1,6 milliard par année ? on voit très bien les deux années. Ensuite, avec, on suppose, l'argent de la TVQ, on recommence une augmentation plus normale des dépenses de programmes.

Bien, M. le Président, moi, mon inquiétude, ce sont ces deux années-là, l'année 2008-2009 et l'année 2009-2010. Pour ces deux années, la ministre des Finances prévoit des augmentations de dépenses de programmes de seulement 1,6 milliard. Or, M. le Président, j'invite la ministre des Finances, si elle ne me croit pas, là, de voir dans ses propres chiffres, elle va voir, là, volume IV, pages 12 et 13, elle va voir qu'à la santé et services sociaux les coûts de système, si on exclut l'équité, c'est environ 1,1 milliard par année. Donc, l'inflation et les augmentations de salaire, c'est 1,1 milliard. À l'éducation, c'est noir sur blanc, 413 millions, les coûts de système en éducation. Donc, on est rendus à 1,5 milliard.

Imaginez-vous, M. le Président, ce qu'on dit, là, c'est que, pour les deux prochaines années, les dépenses totales du gouvernement vont augmenter de 1,6 milliard, et, seulement en éducation puis en santé, on a besoin de 1,5 milliard pour couvrir les augmentations de salaire et l'inflation. Ça veut dire, là: on exclut tous les autres ministères et évidemment on exclut aussi les promesses électorales de 900 millions de dollars par année sur cinq ans. Rappelez-vous ça: 4,5 milliards de promesses, ça a été répété des dizaines, même des centaines de fois pendant la campagne électorale, 4,5 milliards de promesses électorales qui, encore une fois, ne pourront pas être tenues au moins pour les deux prochaines années, le temps qu'on augmente la TVQ de 1 %.

Donc, M. le Président, je suis surpris. Je ne sais pas, je cherche un mot, là: qu'on ait faussé le débat de cette façon depuis deux semaines, alors qu'on se demandait, tout le monde au Québec: Est-ce que le gouvernement du Québec a la capacité de baisser ses revenus compte tenu des besoins en éducation et en santé? Au moment où on se disait: Est-ce qu'on a raison?, mais on a la confirmation aujourd'hui: M. le Président, on avait raison. On avait raison. La ministre des Finances vient, aujourd'hui, nous donner raison. Elle nous dit: Pendant les deux prochaines années, je vais faire des coupures, je ne vais pas respecter mes promesses électorales, et, dans trois ans, avec la hausse de la TVQ de 1 %, qui va lui permettre d'aller chercher 1,1 milliard de plus dans les poches des contribuables, elle va se trouver à annuler complètement les baisses d'impôt de 950 millions et elle va pouvoir reprendre un rythme de croisière plus normal dans ses dépenses de programmes.

M. le Président, je trouve que c'est un manque de vision total, parce qu'il y a des malades qui attendent actuellement sur des listes d'attente. Il faut avoir vu les médias, là, lu les journaux, entre autres depuis deux jours, pour comprendre comment les gens sont découragés, découragés de voir que la situation se détériore dans les hôpitaux, dans les urgences, que finalement il n'y a pas de lumière au bout du tunnel. Or, M. le Président, ce qu'on vient leur annoncer... Puis j'entendais, aujourd'hui, le président de l'Agence de santé et services sociaux de Montréal dire, dire: On se donne trois ans pour régler le problème. J'étais surpris d'entendre le «trois ans». Je me suis dit: Comment se fait-il qu'il n'annonce pas des améliorations pour dans un an, peut-être deux ans? Il nous dit: Il y aura des améliorations dans trois ans. Pourquoi dans trois ans, M. le Président? Parce que, pendant les deux prochaines années, il n'y aura pas... c'est noir sur blanc dans les prévisions de la ministre: il n'y aura pas un sou de plus pour des services additionnels en santé et services sociaux. Ce sera deux années de vache maigre, et c'est pour ça que même ceux qui sont dans le réseau nous disent: Attendons trois ans.

Écoutez, la population est découragée, M. le Président. La population est découragée de voir que, malgré toutes les promesses, on n'a pas réinvesti en santé et services sociaux, on n'a pas réinvesti en éducation, qu'il y a des enfants qui ont des difficultés d'apprentissage qui attendent pour des services.

M. le Président, moi, dans mon comté, j'ai des taux de décrochage de 40 %, 50 %, j'ai même une école où il y a 55 % de décrochage. Les enseignants sont découragés. Ils souhaitent plus de ressources dans les écoles pour venir aider ces enfants qui ont des difficultés. Ça veut dire quoi, ça, M. le Président? Ça veut dire être capables de donner, oui, des orthopédagogues, des orthophonistes, je sais qu'il en manque au Québec, c'est vrai, mais il faut être capable peut-être d'ajouter des enseignants. Il faut être capable d'ajouter des travailleurs sociaux, être capable de faire le lien avec les familles, de s'assurer que, dans nos écoles, il y ait plus de sport, qu'il y ait plus d'activités artistiques, qu'on soit capables de mieux s'occuper des enfants, que l'école, au lieu de finir à 3 heures, finisse peut-être à 5 heures, qu'on soit capables enfin de donner des services. Surtout, surtout, M. le Président, je dirais, là, il y a deux endroits où c'est plus difficile: les garçons et les milieux défavorisés de façon générale. Et de voir, là, que, malgré le 700 millions qu'on a obtenu d'Ottawa, entre le budget de Michel Audet en février et le budget qui a été déposé il y a deux semaines, on n'ait pas choisi d'ajouter un sou... en fait on a ajouté 30 millions, là, qu'on a dû négocier à la force du poignet, jusqu'à la dernière minute, qu'on n'ait pas choisi d'aider les enfants, d'aider les malades et qu'on nous dise, même au niveau du développement économique: Faites-moi confiance, on va baisser la taxe sur le capital... Quand va-t-on baisser la taxe sur le capital? Pas cette année, pas l'année prochaine: on a deux années de vache maigre, dans deux ans, lorsqu'on aura été chercher le 1 % de TVQ.

Donc, baisser les impôts cette année, il y a un coût à payer à baisser les revenus de 950 millions cette année. Je comprends, là, puis on apprend maintenant que la ministre des Finances va compter sur des revenus additionnels de la TVQ de 1,1 milliard dans deux ans. Mais le problème, ce sont ces deux années-là, deux années où on ne pourra pas être capables de donner des services à la population, des services qui sont urgents, M. le Président, urgents.

Et actuellement je pense aussi qu'il faut parler de développement économique. Je pense que, même au niveau du développement économique, la baisse des impôts des individus n'est pas la meilleure approche. Je pense que, même si on se dit: Supposons qu'on serait capables de combler complètement les besoins en services, ce serait quoi, les priorités pour faire du développement économique?

Un, investir massivement en éducation, de la petite école jusqu'à l'université. Je ne sais pas si la ministre a eu l'occasion, depuis qu'elle a déposé son budget, de parler avec les recteurs d'université, mais les recteurs d'université sont choqués contre le gouvernement libéral. Pourquoi ils sont choqués? Parce que la ministre, et le gouvernement libéral, les a embarqués dans un autobus, il y a un an ou deux, pour aller à Ottawa, aller chercher de l'argent pour le déséquilibre fiscal, et là, maintenant qu'on reçoit 700 millions de dollars, bien il n'y a pas un sou du 700 millions qui va pour l'éducation, rien pour les universités.

Donc, cette année, M. le Président, les universités vont faire des déficits, vont se retrouver dans une situation où ils vont avoir de la difficulté à garder leurs professeurs. Je le sais que vous êtes professeur vous-même, là. Donc, on se retrouve dans une situation, M. le Président, où les universités vont être obligées peut-être de se départir d'un certain nombre de professeurs, alors qu'ils devraient faire le contraire, devraient augmenter, ajouter au nombre de professeurs et surtout ajouter à la qualité de tous les services, incluant la recherche qui se fait dans nos universités. C'est un manque de vision, M. le Président, de dire: Je vais attendre deux ans de recevoir 1,1 milliard de la TVQ pour être capable de financer correctement les réseaux de l'éducation et de la santé. C'est une erreur, M. le Président.

C'est une erreur aussi de ne pas investir suffisamment dans les cégeps. Écoutez, il y a des cégeps, entre autres en région, c'est là que ça se passe bien souvent, le développement économique régional, il y a des besoins, il y a des attentes, entre autres au niveau des CCCT. Il y a...

Mme Jérôme-Forget: L'éducation, François...

M. Legault: ...du côté des cégeps, M. le Président, il y a plusieurs demandes... Actuellement, ils sont obligés de fermer des cours. Dans plusieurs secteurs, les cégeps sont obligés de fermer des cours. M. le Président...

Le Président (M. Paquet): Je vous rappelle... M. le ministre...

M. Legault: Oui. Je termine juste en vous disant...

Le Président (M. Paquet): ...M. le député, juste vous rappeler, il vous reste deux minutes, si vous voulez laisser le temps à la ministre de répondre.

n(17 h 50)n

M. Legault: Oui. Je veux juste terminer, M. le Président. M. le Président, en formation professionnelle: en formation professionnelle, dans mon comté, on a à peu près la moitié du nombre de places per capita qu'il y a dans l'ensemble du Québec. On a essayé. Lorsque j'étais ministre de l'Éducation, on a ouvert un nouveau centre de formation professionnelle, on a commencé à faire du rattrapage. Toute la région de Lanaudière est en sous-représentation en formation professionnelle, et c'est pourtant un des endroits, surtout dans le nord de Lanaudière, où il y a le plus de décrochage. Si on veut réduire le décrochage, il faut être capable d'offrir aux jeunes plus de possibilités au niveau des métiers. Or, ces services, ces programmes ne sont pas offerts, et la ministre choisit, à court terme, de baisser les impôts des contribuables.

Je comprends que les contribuables ont le droit à un répit, même ceux qui gagnent plus de 75 000 $, mais elle devrait leur dire aujourd'hui clairement que ce répit est temporaire, qu'il y a une facture qui s'en vient dans deux ans au niveau de la TVQ. Et, selon moi, c'est un mauvais choix stratégique. Je pense que la ministre, aujourd'hui, en disant: Je baisse les impôts plutôt que d'investir dans les services et j'attends l'augmentation de la TVQ dans deux ans, fait un mauvais choix stratégique...

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Rousseau.

M. Legault: ...sans vision.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Rousseau. Donc, avec le bloc que vient d'utiliser le député de Rousseau de 15 minutes, il restera autour de 52 minutes ce soir. Il reste 1 h 24 min 46 s pour le moment au parti ministériel et 1 h 6 min à l'opposition officielle, évidemment, là, sujet au temps de l'organisation des travaux et le temps du président. Alors, Mme la députée de Laporte.

Mme Ménard: M. le Président, étant nouvelle, là, j'ai de la misère à comprendre. Je pensais que c'était un échange. Là, ça fait 15 minutes que le député de Rousseau parle, il nous a servi vraiment un beau monologue. Alors, je vais laisser ma place à notre ministre des Finances.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Effectivement, c'est un monologue, M. le Président. Mais je voudrais revenir au député de Rousseau, M. le Président, parce que là il ne sait pas compter. L'éducation postsecondaire, on vient de le dire, c'est 600 millions. Et d'ailleurs tous les ministres, tous les ministres des Finances du Canada veulent avoir le transfert d'argent du fédéral au niveau de l'éducation postsecondaire. Alors, c'est 600 millions, là, O.K.? Alors, que le député de Rousseau parle de la TVQ de 1,2 milliard, c'était 1,3 milliard, après ça, ça a tombé à 1,1 milliard, je veux dire, là, là, il pensait qu'il avait trouvé, là, une perle. M. le Président, ça fait des années qu'on dit qu'on veut récupérer l'argent au niveau de l'éducation postsecondaire, et nous allons travailler et je vais travailler très fort pour obtenir ce transfert au niveau de l'éducation postsecondaire. Ça, soyons assurés de ça.

Maintenant, le député de Rousseau nous parle du manque de vision. Où était-il, le député de Rousseau, quand ils ont coupé 35 000 employés de l'État et qu'ils en ont embauché 56 000 deux ans plus tard au coût de 3 milliards de dollars? Ça, c'était la façon de calculer au Parti québécois. Où était-il, le député de Rousseau, quand ils ont remercié 1 500 médecins à raison de 300 000 $ chacun, 300 000 $ chacun, pour leur demander de quitter? Il dit qu'il était à Air Transat. Non, il n'était pas à Air Transat, il était bien dans le gouvernement du Parti québécois. Oui, oui. Les 4 500 infirmières, les 1 200...

Aujourd'hui, avec le trémolo dans la gorge, M. le Président, il parle des enfants qui ont des problèmes d'apprentissage. Savez-vous qu'est-ce qu'il a fait, son gouvernement, quand il était au pouvoir? Il a remercié 1 200 orthopédagogues, hein? Il y avait trop de monde dans les hôpitaux. Il y avait trop de monde dans les hôpitaux, trop de monde dans les écoles, trop de monde partout, on remerciait, on remerciait. Et d'ailleurs, M. le Président, ce que ne sait pas le député de Rousseau, c'est que former un médecin, ça prend sept à huit ans. Or, imaginez-vous, depuis la démarche, la cohorte commence à arriver, M. le Président, au niveau des nouveaux médecins. Vous en avez remercié 1 500, à raison de 300 000 $ chacun, pour qu'ils partent, pour qu'ils quittent. Alors, vous comprendrez qu'au niveau de vision parlons de vision.

Il était lui-même ministre de l'Éducation. Il était très heureux, très heureux d'aller couper les budgets dans le ministère de l'Éducation, alors qu'on baissait les impôts de 1,1 milliard de dollars. L'autre année après, on a encore baissé les impôts de 1 milliard de dollars, encore le même scénario au niveau de la santé et au niveau de l'éducation. M. le Président, la vision, là, elle n'est certainement pas du côté du député de Rousseau. S'il y en a un qui a coupé dans les services, s'il y en a un... Et, tant en santé, tant en éducation, tant au niveau des orthopédagogues, tant au niveau des médecins, tant au niveau des infirmières, c'est eux qui ont fait ça. Ils en ont coupé 35 000, M. le Président, comme ça, d'un coup, à raison de 3 milliards de dollars. D'ailleurs, ils sont allés piger dans le fonds de retraite des retraités pour payer la moitié de la facture. Ça, là, M. le Président, c'est d'être irresponsables, irresponsables.

Je comprends, le député de Rousseau, que ça le fatigue, parce que nous avons fait un budget centré sur six priorités qui veut essentiellement augmenter la richesse du Québec, M. le Président. Oui, on a dit qu'on allait baisser les impôts puis, grâce au ciel, on l'a fait, M. le Président, parce que toutes les autres provinces l'ont fait également. Imaginez, si on ne l'avait pas fait, où est-ce qu'on se retrouverait en termes d'écart entre nous et les autres provinces. Et, on le sait, ceux qui gagnent plus de 75 000 $, qui fatiguent beaucoup le député de Rousseau, ces riches à qui il ne veut absolument pas donner de baisses d'impôt, nous, on estime que ces gens-là ont le droit à des baisses d'impôt. D'accord? 75 000 $, là, ce ne sont pas des richissimes, là, ce sont des gens qui gagnent leur vie, qui se lèvent tous les matins et qui ont le droit d'avoir une baisse d'impôt. Nous, on y croit, M. le Président. Non seulement on a dit qu'on allait baisser les impôts, on a dit qu'on allait éliminer progressivement la taxe sur le capital d'ici janvier 2011. Pourquoi? Pour créer de la richesse.

On a dit justement qu'on allait s'occuper de nos infrastructures; pas simplement des nouvelles infrastructures, s'occuper de notre patrimoine, M. le Président. On a dit qu'on ferait une entente avec le Vérificateur général pour la transparence. On a dit qu'on allait continuer la modernisation. Oui, on va continuer à la faire, la modernisation. C'est vrai que, moi, je n'ai pas procédé dans la modernisation comme a fait le Parti québécois, hein, tout à coup, là, mettre une croix sur 35 000 personnes. Non, on n'a pas fait ça, nous autres, puis on ne le fera pas non plus, nous autres, on ne fera pas ça. On va y aller modestement, rigoureusement. Mais, à la longue, M. le Président, rappelons-nous, on a économisé 1,3 milliard de dollars. Ça commence à faire des gros sous, ça, M. le Président, 1,3 milliard de dollars.

Alors, moi, je vous dis, je n'ai aucune leçon à prendre du député de Rousseau en termes de valeurs, parce que, lui, quand il a baissé les impôts, il a à peine mis d'argent et en santé et en éducation. Aujourd'hui, il parle du décrochage scolaire. M. le Président, savez-vous que le décrochage scolaire est passé, en trois ans, de combien à combien, la réussite scolaire au niveau secondaire? De 79 % à 84 %. Oui, j'aimerais ça que le député de Rousseau... 79 % à 84 %, c'est un beau chiffre, ça, il faut s'en rappeler, de ce chiffre-là. Ça veut dire qu'au niveau de l'éducation secondaire il y a plus de jeunes heureusement qui complètent leur secondaire, et on doit l'applaudir, parce que le minimum, le minimum qu'on peut obtenir dans notre société, c'est manifestement compléter son secondaire.

Je pense, M. le Président, que...

Le Président (M. Paquet): Oui. Compte tenu de l'heure... Merci, Mme la ministre.

Compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la Commission des finances publiques jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

 

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Merci. Alors, la Commission des finances publiques reprend ses travaux. Nous sommes toujours réunis pour débattre des crédits du ministère des Finances. Je souhaite bienvenue à nouveau à tous les membres de la commission ainsi que Mme la ministre, ainsi que tous les gens qui vous accompagnent du ministère ainsi que des différentes sociétés d'État.

Lorsque nous avons suspendu les travaux, à 18 heures, il restait 7 min 45 s au bloc qui était en cours, qui était le bloc du côté ministériel. Alors, je vais laisser la parole à quelqu'un du côté ministériel dans un moment.

J'invite les membres à formuler, comme c'était le souhait de plusieurs membres de la commission et de parlementaires... Et je sais que tous les députés nous écoutent, qu'on essaie d'avoir, pour maximiser le nombre d'échanges... avoir d'échanges, d'environ des questions et des réponses de même ordre de grandeur. Alors, ça a été même un souhait qui a été formulé par le président de la Chambre suite à des discussions qu'il y a eu entre les leaders. Alors, j'encourage les députés à de façon... avec un peu de flexibilité, là, à s'en tenir un peu... à essayer de respecter cela.

Donc, à la fin, je garderai cinq minutes pour faire le vote. À ce moment-ci, comme nous commençons nos travaux environ six minutes en retard, les travaux pourraient se terminer à 23 h 22 au plus tard, à moins qu'on fasse fi du temps d'un bloc ou de l'autre.

M. le député de Chauveau, vous avez une question de directive?

M. Taillon: M. le Président, oui. On souhaiterait peut-être y aller, là, bien sûr après la réplique des représentants du gouvernement, y aller peut-être à interroger Loto-Québec, la SAQ et la Caisse de dépôt, dans l'ordre, de telle manière à libérer ces gens-là, puis on continuera par la suite.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Est-ce qu'il y a consentement pour ce faire?

Mme Jérôme-Forget: Le député de Rousseau est absent, il brille par son absence, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre, on ne peut pas souligner...

Mme Jérôme-Forget: Oui, je le sais, mais c'est parce que, vous comprenez, c'est lui qui a fait tout un cinéma pour que le président de la Caisse de dépôt soit ici.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Écoutez, on va commencer le bloc, et, tout à l'heure, il pourrait y avoir de la consultation...

M. Taillon: ...du vide, ce n'est jamais bon, hein?

Le Président (M. Paquet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président (M. Paquet): S'il vous plaît, à l'ordre! Merci. Alors, nous allons commencer avec le bloc de 7 min 45 s du côté ministériel, et par la suite je suggère, de façon informelle, que les gens puissent se parler en marge de la commission et essayer d'en venir à une entente, alors, à un consentement.

Alors, sans plus tarder, je cède la parole à Mme la députée de Laporte.

Société des alcools du Québec (suite)

Consommation d'alcool des Québécois

Mme Ménard: Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais continuer avec la SAQ. Alors, j'aurais deux questions. Je lisais récemment un rapport sur la consommation, et on disait: La consommation d'alcool des Québécois, de 7,6 litres par année d'alcool pur, est alignée sur la moyenne canadienne et se situe en deçà des normes de santé du Canada. Le modèle de consommation des Québécois est le plus responsable au Canada, avec des consommations plus fréquentes, mais en plus petites quantités qu'ailleurs au Canada. Et on disait que les Québécois évoluent aussi vers la consommation de produits de gamme supérieure.

Alors, ma question est... Bon. Il y a des études qui se font puisqu'on est en mesure de lire des choses comme ça. Et c'est bon dans le fond, parce qu'on voit, là, qu'on se situe en deçà des normes de Santé Canada, Alors, j'aimerais savoir, au niveau des études, à quelle fréquence... et nous en parler un peu comment ça se passe, ces études-là. Alors, peut-être, si on a consentement, M. Toutant pourrait nous en parler. S'il y a consentement, là,

Le Président (M. Paquet): Alors, Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je vais demander à M. Toutant de répondre. Mais par ailleurs, parce que je pense qu'il a été trop modeste aujourd'hui, j'aimerais simplement donner quelques informations. Durant les trois dernières années, qu'est-ce qui s'est passé à la Société des alcools? On a augmenté les ventes de 18 %; on a réduit un stock d'inventaire de 18 %; on a réduit l'endettement de 75 %; et de plus on a augmenté de 1 000 produits la variété qui est disponible à la Société des alcools, et, M. le Président, avec un taux de satisfaction de 97 %. Il ne l'a pas dit, je veux le dire, parce qu'il est un homme modeste. Mais je vais lui demander de répondre à ma collègue.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. le président de la SAQ, M. Toutant.

n(20 h 10)n

M. Toutant (Sylvain): M. le Président, oui, le modèle de consommation évidemment québécois est un peu unique, c'est vrai. La consommation d'alcool pur per capita est de 7,6 litres. Ce qui est particulier, c'est que c'est relativement stable, M. le Président, depuis plusieurs années. La moyenne canadienne est de 7,9 litres. Le Québec est positionné au neuvième rang en termes de consommation d'alcool per capita, donc c'est une bonne nouvelle.

Éduc'alcool est un partenaire privilégié pour la SAQ. Il fait partie du modèle qui est unique en termes de prévention de la consommation abusive d'alcool. Donc, nous sommes en partenariat avec Éduc'alcool. La SAQ investit autour de 2,5 millions par année dans des programmes de prévention à ce niveau-là. Ce qui est particulier du modèle aussi, c'est évidemment la fréquence, on en parlait, la fréquence de consommation plus grande mais des consommations plus petites, et une propension évidemment à consommer davantage de vin que de spiritueux, donc ce qui fait que globalement le modèle de consommation des Québécois est un modèle sain qui perdure dans le temps. Et l'objectif de la SAQ est de contribuer, à travers toutes les campagnes d'Éduc'alcool, à maintenir ce modèle-là, la pérennité de ce modèle de consommation.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Laporte, oui.

Révision des règles de gouvernance

Mme Ménard: Alors, j'ai une troisième question. L'année 2006-2007 aura aussi donné lieu à une réforme majeure de la gouvernance de la société. Est-ce que M. le président-directeur général pourrait nous parler de ce qui a été mis en place?

Le Président (M. Paquet): M. le président.

M. Toutant (Sylvain): M. le Président, s'il y avait consentement, je pourrais peut-être passer la parole à M. Norman Hébert, qui est président du conseil d'administration, qui a gouverné évidemment toute la réforme à ce niveau-là.

Le Président (M. Paquet): M. Hébert.

M. Hébert (Norman E.): Oui, M. le Président. En fait, en vue de l'adoption de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, la Société des alcools a poussé la révision de ses règles de gouvernance en s'adjoignant un groupe de travail composé d'experts externes, à savoir MM. Denis Desautels, Richard Drouin et Mme Louise Roy. En fait, les travaux du groupe de travail ont porté sur les aspects de gouvernance et leur conformité générale aux bonnes pratiques dans ce domaine, tant au niveau des sociétés cotées en Bourse que les recommandations du Vérificateur général du Québec.

Donc, le groupe de travail a formulé des recommandations qui ont été adoptées par le conseil, et je note particulièrement au niveau de l'accueil et la formation continue des administrateurs, la politique de voyage et des séjours des membres du conseil, les activités de développement des relations d'affaires, la création d'un comité des pratiques commerciales, un code d'éthique pour les employés, ainsi que le rôle de l'ombudsman et la divulgation d'actes fautifs. Donc, en somme, nous sommes fiers, à la Société des alcools, d'avoir joué un rôle d'avant-garde au niveau de la gouvernance, et on peut maintenant bien accompagner la direction dans son travail. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Laporte.

Mme Ménard: Merci.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Mme la ministre, ça va? Alors, je reconnaîtrai maintenant M. le député de Chauveau.

M. Taillon: Mme la députée de Groulx, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Ah, pardon! Oui, Mme la députée de Groulx et vice-présidente de la commission.

Loto-Québec

Mission

Mme Lapointe (Groulx): J'aimerais saluer tous les gens qui sont ici, ce soir, et les remercier sincèrement d'être ici. Je veux m'adresser à Mme la ministre pour avoir des explications sur Loto-Québec. J'ai regardé les dossiers, la mission de Loto-Québec, j'aimerais entendre parler de la mission, premièrement.

Mme Jérôme-Forget: ...le président de Loto-Québec est là. Je vais l'inviter à répondre. Je pense qu'il va se faire un plaisir.

Le Président (M. Paquet): D'accord. M. Alain Cousineau, président de Loto-Québec.

M. Cousineau (Alain): Oui. M. le Président, je pense que c'est une question qui est tout à fait d'actualité. Et je pense que ce qui la met le mieux en lumière, c'est ce que nous allons indiquer dans notre rapport annuel qui sera déposé prochainement à l'Assemblée nationale. Et, sans faire de jeux de mots, pour nous, la donne a changé à Loto-Québec, pour trois raisons fondamentalement: l'ère de la croissance continue est révolue; le questionnement sur la place du jeu dans notre société a pris de l'ampleur; et il y a une offre de jeu parallèle qui se développe en marge du cadre légal. Et ces trois éléments-là nous questionnent.

Je peux les reprendre. L'ère de la croissance continue. On a vu, dans les années quatre-vingt-dix, des croissances supérieures à 10 % de croissance mais une fracture en 2001. Les marchés sont, à toutes fins pratiques, saturés, et la croissance moyenne, depuis le début des années 2000, a été inférieure à la croissance du taux d'inflation. Et on a vu, cette année, une diminution de 5,9 % des revenus de Loto-Québec attribuable à 72 % à la nouvelle Loi sur le tabac, qui a affecté dramatiquement les revenus de la Société des loteries vidéo du Québec, et à 28 % à notre programme de reconfiguration du réseau des appareils de loterie vidéo dans les établissements licenciés aux fins de réduire l'accessibilité. En fait, c'est une mesure de santé publique que nous avions énoncée dans notre plan stratégique de 2004-2007, et le déploiement de cette mesure-là a un impact également sur la croissance de nos revenus.

Pour tous les observateurs qui ont suivi la scène reliée à l'évolution du jeu, des projets comme le déménagement du casino, la création des salons de jeu ont amené des questionnements, que, comme moi, vous avez observés dans les journaux, de groupes de citoyens, de groupes de pression, des questionnements aussi à l'Assemblée nationale.

Et ce qu'on observe de plus en plus, c'est qu'il y a une offre de jeu parallèle qui se développe, qu'on pense au jeu sur Internet, qu'on pense au pari illégal qui a été dévoilé dans le cadre de l'opération Colisée dernièrement, qu'on pense même aux appareils d'amusement légaux actuellement dans les établissements licenciés qui sont utilisés à des fins autres que celles auxquelles ils sont destinés. Et ça, ça nous amène, je pense, à questionner ? c'est ce qu'on veut faire dans notre prochain plan de développement qu'on va adresser au gouvernement ? les objectifs actuels de Loto-Québec. Il y en a quatre: ne pas augmenter l'offre de jeu, maintenir le dividende, investir davantage dans la prévention du jeu excessif et favoriser le développement de l'industrie touristique.

Mais je pense que le débat nous amène à considérer que fondamentalement il y a deux missions à Loto-Québec qui sont les objectifs qui étaient à l'origine de la création de l'institution et qui ont été repris dans les années 1993-1994, quand on a élargi le mandat de la société au-delà des loteries pour y inclure les appareils de loterie vidéo et la création des casinos. Et ces deux missions fondamentales nous apparaissent être de canaliser l'offre de jeu dans des circuits contrôlés... On dit bien «canaliser». On ne dit pas «faire croître», on ne dit pas «augmenter», on dit «canaliser» l'offre de jeu dans les circuits contrôlés. Et la deuxième mission fondamentale, la raison pour laquelle on a une société d'État, c'est d'encadrer la consommation. Je pense qu'on doit créer des conditions qui sont favorables au jeu responsable dans la société. Ça, ça nous apparaît être les deux missions, et nous voulons certainement proposer dans notre plan de développement la réorientation explicite de la société en fonction de ces deux grandes missions qui nous apparaissent être celles qui étaient à l'origine de la création de Loto-Québec.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Groulx.

Prévisions de revenus

Mme Lapointe (Groulx): M. le Président, j'aimerais revenir sur, lorsqu'on s'est parlé précédemment, sur les plans stratégiques. La SAQ est revenue en projetant ses objectifs sur les quatre prochaines années, alors que j'ai juste pris le premier chiffre de Loto-Québec, c'était juste... on parlait de 1 410 000 $ qui étaient supposés retourner à l'État et qu'il y avait possiblement... les objectifs seraient difficiles à atteindre cette année. J'aimerais entendre... C'est juste reparler de tout ça, voir c'est quoi, les objectifs qui devraient être atteints cette année, et si vous croyez qu'on va les atteindre, et les suivants, 2008-2009, 2009-2010.

Le Président (M. Paquet): M. Cousineau.

M. Cousineau (Alain): Nous avons estimé, cette année, que nous atteindrions des revenus de 1 409 000 000 $, pour être plus précis que tantôt, là. 1 409 000 000 $, nous sommes confiants de les atteindre. En tout cas, les indications que nous avons après deux mois complétés dans l'année, c'est qu'on est tout à fait en ligne, même légèrement en avance sur le budget. On est confiants de le faire.

L'an dernier, si nous n'avons pas atteint cet objectif-là, c'est que l'estimation que nous avions faite de l'impact de la Loi sur le tabac... a été considérablement plus important que nous l'avions estimé. Et nos estimations ont été faites à partir de ce qui s'était observé, il n'y en avait pas beaucoup, mais dans des contextes ailleurs et des contextes où on avait introduit la notion d'interdiction de fumer. Chez nous, l'impact a été de 20 % à 25 % de baisse des revenus de la Société des loteries vidéo du Québec semaine après semaine, et cet impact-là s'est manifesté tout au cours de l'année, d'où des résultats qui sont essentiellement attribuables... la diminution, là, d'à peu près de 200 millions de nos revenus l'an dernier.

Cette année, évidemment on est dans une année où l'impact tabac se fait sentir pendant deux mois. Et nos prévisions que nous avions faites sur la base de l'expérience vécue démontrent que, pour les deux premiers mois, nos prévisions étaient exactes. Alors, on s'attend à une très légère augmentation, cette année, de nos revenus. Et, pour les années subséquentes, on s'attend à des augmentations qui vont être conséquentes avec l'augmentation de l'inflation, sans plus.

n(20 h 20)n

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Groulx.

Mode de gestion

Mme Lapointe (Groulx): L'année passée, vous dites que vous n'avez pas atteint les résultats. Est-ce qu'il y a eu des mesures qui ont été prises afin de resserrer les méthodes de gestion à l'intérieur de l'entreprise?

M. Cousineau (Alain): Nous, on est une organisation multidivisionnaire. En fait, il y a quatre entreprises, à toutes fins pratiques, à l'intérieur de la même organisation. On s'adresse à des marchés qui sont fort distincts: le marché des casinos, le marché des bingos, le marché des loteries vidéo du Québec et le marché des loteries comme telles. Et les profils de clientèle sont fort différents de l'un à l'autre, alors c'est quatre organisations.

Si on regarde la Société des loteries vidéo du Québec, je pense qu'il y a des hommes d'affaires dans cette salle qui vont apprécier que des marges comme on a dans cette société-là, c'est à peu près inexistant dans n'importe quelle industrie. L'année précédente, nous avions fait quelque chose comme 1,3 milliard de revenus, nous avions réalisé un bénéfice net de 800 millions. Ce n'est pas des marges qu'on observe généralement souvent.

Et tout ça est fait avec 40 employés. Tout le modèle est un modèle d'impartition à 100 %. Il y a 40 employés qui gèrent 1,3 milliard de chiffre d'affaires et qui génèrent 800 millions de bénéfices. Tous les contrats... En fait, il faut réduire de ça les montants qui sont payés aux tenanciers évidemment pour exploiter les sites, il faut... L'entretien des appareils, l'achat des appareils, tout ça, c'est sur des contrats à long terme, sur des ententes sur lesquelles on ne peut pas agir à l'intérieur d'un mois. On pense qu'on est une organisation extrêmement efficace à ce niveau-là.

Au niveau des autres secteurs, je pense notamment au secteur des casinos, où là, comme on l'a dit, en 2004, on prévoyait des croissances, pour les trois prochaines années, d'environ maximum de 1 %, inférieures à l'augmentation des coûts de main-d'oeuvre... Or, à la Société des casinos, c'est 6 000 employés que nous avons. Ça fait qu'on peut imaginer que des augmentations de 2,5 % de la masse salariale, l'augmentation des autres coûts font que c'est clair que l'augmentation des coûts est supérieure à l'augmentation des revenus. Et, dans ce cas-là, on a pris des mesures significatives pour introduire de la technologie dans nos établissements. On appelle ça la technologie du sans numéraire, du «cashless», disent les Anglais, qui est une transformation radicale de nos modes d'opération qui s'est déroulée au cours de l'année et qui va se compléter au Casino de Charlevoix bientôt. Et on estime que nous allons ainsi réussir, une fois que ce sera implanté dans l'ensemble de nos opérations, à réduire nos coûts d'environ 10 millions par année, ce qui est extrêmement significatif. Mais il y a une marge à ce qu'on peut faire. Au-delà de ça, on va avoir à se poser des questions sur la croissance éventuellement que je soulevais tantôt.

Et, du côté des loteries, bien, quand vous avez 50 % de vos revenus qui s'en vont aux gains aux gagnants, que vous avez un nombre d'employés relativement limité dans... d'effectifs à la Société des loteries de 800 personnes, là je pense qu'on a essayé de prendre des mesures pour faire en sorte que nous conservions nos marges, puis je pense que les indications que nous avons à l'heure actuelle sur notre capacité de le faire sont positives.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Groulx.

Gratifications remises aux employés

Mme Lapointe (Groulx): M. le Président, en regardant plein de papiers sur Loto-Québec, j'ai vu qu'il y avait un système de gratification ? chose qu'on ne voit pas dans le secteur public ? pour les gens qui travaillent à Loto-Québec. Est-ce que je me trompe ou c'est un système de gratification, lorsque les résultats sont atteints, qui est autour de 4 % à 8 %? J'aimerais vous entendre là-dessus et savoir qu'est-ce qui permet d'avoir des gratifications ou des bonifications.

Le Président (M. Paquet): M. Cousineau.

M. Cousineau (Alain): Je dirais, M. le Président, en réponse à cette question, que c'est un système de participation aux bénéfices qui, pour le moment, est essentiellement axé sur la performance économique de l'organisation. Je dis malheureusement, quant à moi, parce que le système qui est en place et qui prévaut depuis plusieurs années est essentiellement axé, d'une part, sur le bénéfice net consolidé de la société et, d'autre part, selon que l'individu appartient à une filiale ou l'autre, en partie sur le bénéfice d'exploitation de la société. C'est donc dire qu'il y a dans le fond un calcul purement mathématique. C'est un programme de participation aux bénéfices qui est axé sur la performance économique, qui, en passant, est un des moins généreux des sociétés d'État. Ça varie entre 4 % et 8 %, 4 % si on atteint 100 % de l'objectif et 8 % si on atteint le maximum de l'objectif possible, mais qui, en deçà de 98 % de l'objectif, donne exactement zéro à nos employés.

Alors, c'est un système, pour le moment, qui est axé sur la performance économique. Nous, on pense que, dans le secteur qui est le nôtre, d'autres mesures devraient être utilisées. Et, dans le cadre du programme de gouvernance, qui nous amène à formuler des propositions au gouvernement sur les régimes de bonification, nous allons proposer un régime où l'impact de la contribution économique va être significativement réduit auprès d'autres facteurs qui touchent davantage à notre capacité de mobilisation des employés et reliés à des objectifs très spécifiques de service à la clientèle.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée.

Mme Lapointe (Groulx): Oui. J'aurais deux volets à ma prochaine question. L'année passée, si on n'a pas atteint nos objectifs, est-ce qu'il y a eu gratification, s'il y a eu bonification? Et en même temps est-ce qu'il y a des évaluations de personnel qui sont faites afin de recevoir ces bonifications-là?

M. Cousineau (Alain): Comme je vous l'ai indiqué, la première condition, c'est que les objectifs économiques soient atteints. Mais, au-delà de ça, il y a une évaluation personnelle de l'individu qui est faite, il doit rencontrer un certain nombre d'obligations de performance pour recevoir le boni. Le conseil d'administration, comme c'est le cas dans toutes les sociétés, peut ajuster le bénéfice net en fonction d'événements qui sont hors du contrôle de ceux qui sont bonifiables. Dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, on a considéré que l'impact de l'effet sur le tabac n'était pas la responsabilité des employés de la société, ce qui fait que, dans le cas donc des employés de la Société des loteries vidéo du Québec, il y a eu ajustement. Et cet ajustement-là a été approuvé par le conseil d'administration, de sorte que le résultat net a été qu'effectivement des employés ont reçu des bonifications, mais, au total, ils ont reçu quelque chose comme... je pense, c'est 13 millions au total, pour l'ensemble des employés de Loto-Québec, si mon souvenir est bon ? et là je vais demander qu'on vérifie, ça, c'est l'an dernier, mais cette année la bonification a été réduite de 3 millions de dollars.

Mme Lapointe (Groulx): O.K.

Le Président (M. Paquet): Il reste une minute environ au bloc, Mme la députée.

Filiales

Mme Lapointe (Groulx): Bon. Je vais continuer. J'aimerais entendre parler sur les services connexes qu'offre Loto-Québec. Et je sais qu'il y a plusieurs embranchements à Loto-Québec, plusieurs divisions, et j'aimerais vous entendre parler des différentes divisions qu'il y a.

Le Président (M. Paquet): M. Cousineau.

M. Cousineau (Alain): Bon. M. le Président, j'espère pouvoir comprendre la question, là. On a toute une série de filiales. Certaines sont des filiales opérationnelles. Je pense notamment à la Société des loteries vidéo du Québec, une entité qui a le mandat d'opérer tout le réseau des appareils de loterie vidéo dans l'ensemble des établissements licenciés au Québec. Il y a la Société des casinos du Québec, autre filiale opérationnelle, qui a le mandat évidemment, comme son nom l'indique, d'opérer les trois établissements de casino que nous avons à travers le Québec. La Société des bingos, qui a le mandat d'opérer des bingos en ligne. On n'opère pas des salles de bingo, on offre un produit à l'intérieur des salles qui est un produit de bingo en ligne. Alors, on parle d'un chiffre d'affaires de 30 millions, là, ce n'est pas... Sur un chiffre d'affaires de 3,8 milliards, ce n'est pas...

Une voix: ...

n(20 h 30)n

M. Cousineau (Alain): Et 100 % des bénéfices sont remis à des OSBL dans ce cas-là. Il y a une nouvelle société, qui est la Société des salons de jeu du Québec, qui est en train d'implanter les établissements qui vont recevoir une partie des appareils qui sont retirés du réseau des établissements licenciés. Il y a la Société des loteries qui opère... En fait, ce n'est pas une société, c'est Loto-Québec originale. On n'a pas créé une filiale, mais la corporation principale a une activité opérationnelle qui est l'opération des loteries.

À la périphérie de ça, il y a un certain nombre d'autres filiales. Qu'on pense à Casino Mundial, qui a le mandat d'exploiter le know-how que nous avons développé en matière d'opération d'installations de divertissement diversifiées, casinos, hôtellerie, restauration, et qui gère actuellement un investissement majeur que nous avons complété l'an dernier, où nous sommes propriétaires à 35 % d'une société française qui, elle-même, opère 21 casinos sur le territoire français, et deux autres casinos sont en construction et vont s'ajouter, nous avons eu des... Alors, nous opérons en coactionnariat avec un partenaire britannique qui s'appelle Bridgepoint, cette opération-là en France.

Il y a un certain nombre de filiales qui s'occupent d'immobilier et de construction de nos projets: Casiloc inc., une société immobilière qui possède l'édifice qui abrite le siège social de la société; Ingenio, qui est notre filiale de recherche et développement, qui a maintenant une réputation mondiale, une société très innovatrice qui est dans le fond notre société de recherche-développement, donc développement de produits, de systèmes de distribution novateurs qu'on peut utiliser chez nous, mais qu'on vend aussi à l'étranger. Alors, vous seriez peut-être intéressés d'apprendre que certains de ces produits-là sont vendus dans six États aux États-Unis, dans les provinces atlantiques, en Colombie-Britannique, et, dans trois pays européens, il y a des propriétés intellectuelles que nous avons acquises et qui sont vendues dans ces pays-là. Mais l'objectif, ce n'est pas de faire des sous, l'objectif, c'est de minimiser les coûts de recherche et de développement, parce que son orientation principale, c'est effectivement de faire de la recherche-développement pour... Et c'est unique, je dois dire, au monde dans les sociétés de loterie d'avoir une filiale comme celle-là. Et il y a probablement...

Il y a une filiale qui s'occupe... Nter, qui offre des services de technologie de... ? Nter, N-t-e-r ? qui offre des services de technologie de l'information à deux de nos filiales, les casinos et la Société des loteries vidéo.

Le Président (M. Paquet): D'accord, merci. Ça met fin, à ce moment-ci, à ce bloc-ci, mais vous aurez l'occasion de poursuivre. Si je comprends bien, il y avait une...

Une voix: Il va y avoir d'autres questions encore.

Le Président (M. Paquet): Oui, oui, tout à fait, et, si je comprends bien, il y a une proposition, tout à l'heure, qui a été faite par le député de Chauveau ? je pense qu'il y a eu des échanges là-dessus ? à savoir qu'on procéderait, à ce moment-ci, particulièrement à des questions pour Loto-Québec; par la suite, une fois qu'on continue à faire la rotation, que toutes les questions pour Loto-Québec seraient terminées, on passerait à l'étude de la SAQ et par la suite à la Caisse de dépôt. C'est bien le consentement? Consentement. Alors, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. M. le Président, bon, d'abord je voudrais saluer encore tous les collègues du ministère des Finances, des différentes sociétés d'État. Malheureusement, compte tenu du temps qu'on a de disponible, on ne pourra pas poser des questions à toutes les sociétés d'État. Je sais qu'il y en a certains qui vont sûrement être déçus, mais... Surtout M. Toutant, c'est ça, oui. Mais, comme je l'ai annoncé plus tôt, je veux réserver mes questions pour Henri-Paul Rousseau, le président de la Caisse de dépôt. Donc, je vais laisser la parole peut-être à mon collègue pour qu'il complète les questions avec les autres sociétés d'État pour pouvoir libérer les autres personnes.

Le Président (M. Paquet): Bon. Alors donc, est-ce qu'il y a des questions du côté ministériel? M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: On peut aller sur la dette? On peut revenir sur la dette, c'est ça?

Le Président (M. Paquet): Pour l'instant, je pense que le consentement, c'est qu'on irait aux sociétés d'État, je crois, sur Loto-Québec, s'il y a des questions pour Loto-Québec. Oui, madame...

Mme Jérôme-Forget: ...ils sont tous ici, là, de toute façon.

Le Président (M. Paquet): O.K.

Mme Jérôme-Forget: Que M. Legault... pardon, le député de Rousseau pose ses questions à la Caisse de dépôt, puis, si, nous, on veut revenir à Loto-Québec, on reviendra à Loto-Québec. De toute façon, ils sont ici jusqu'à 11 heures. Je vais leur apprendre que vous êtes ici jusqu'à 11 heures ce soir, O.K.

Une voix: Au moins.

Mme Jérôme-Forget: Vous allez souffrir comme nous autres.

Une voix: Au moins.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. le député de Robert-Baldwin. Bien, excusez, ou le... Mme la ministre. Alors, M. le député de Rousseau.

Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ)

Maintien de sièges sociaux au Québec

M. Legault: Oui, merci. M. le Président, la ministre des Finances nous avait avertis tantôt que c'était la femme qui dit non. Donc, hein, vous allez rester ici, vous ne quitterez pas. Écoutez, je voudrais d'abord saluer M. Brunet, président du conseil d'administration de la caisse, M. Rousseau, président de la caisse, les remercier d'être ici ce soir. Je veux en profiter aussi pour les féliciter pour le rendement de la caisse. Je pense qu'il faut le dire, d'être dans le premier quartile des grandes caisses de retraite, je pense que c'est digne de mention. Donc, bravo pour le rendement.

Le sujet ? puis j'ai plusieurs questions à vous poser ? dont je veux traiter ce soir, c'est toute la situation concernant le contrôle des entreprises au Québec. On a vu, au cours des dernières années, plusieurs entreprises québécoises être vendues à des intérêts étrangers. Il n'y a qu'à nommer Domtar, Abitibi-Consol, Cambior, Sico, Molson, Van Houtte, Aliments Carrière et peut-être, là, on a une offre d'achat hostile qui est sur la table, Alcan, qui est la plus importante entreprise industrielle au Québec.

Bien, moi, en tout cas, je suis de ceux qui pensent que c'est important, les sièges sociaux au Québec. D'abord, il y a beaucoup d'emplois indirects qui... Et je suis certain que M. Brunet, anciennement de la Financière Banque Nationale, va être d'accord avec moi que beaucoup de professionnels qui obtiennent leur emploi ou leur contrat, leur mandat avec les représentants des sièges sociaux, donc des avocats, des courtiers, des banquiers qui font affaire avec les sièges sociaux... C'est la même chose avec un tas de petites et moyennes entreprises qui, comme fournisseurs, évidemment ont des emplois indirects quand il y a un siège social. Déjà, on me dit qu'il y a des sociétés de Montréal, en informatique, qui ont peur de ce que pourrait vouloir dire de perdre le siège social d'Alcan, qui ont peur que ce serait plus difficile pour eux de continuer à faire affaire avec le siège social. Donc, il y a beaucoup d'emplois indirects.

Il y a beaucoup aussi, à moyen terme et à long terme, de projets, que ce soient des projets en recherche-développement, que ce soient carrément des projets de nouvelles usines, ce n'est pas toujours le cas mais, en moyenne, il y a plus de projets qui sont faits près des sièges sociaux qu'ailleurs. Ça ne veut pas dire que c'est toujours comme ça. Évidemment qu'il y a plein d'autres considérations fiscales et autres, mais il reste qu'en moyenne il y en a toujours un peu plus quand on est près des sièges sociaux. C'est plus facile, je pense, pour un pays, de convaincre les dirigeants d'une entreprise de développer leurs projets dans le pays en question quand ils ont la chance justement de rencontrer à tous les jours les dirigeants.

Je pense que c'est doublement important au Québec où on n'a pas une longue tradition familiale, on n'a pas beaucoup de familles riches. Donc, la Caisse de dépôt, je pense, au Québec, a un rôle encore plus important qu'ailleurs parce qu'il n'y a pas une longue tradition comme dans certains pays européens, une longue tradition, là, d'investissement, puis, comme on dit souvent, il n'y a pas beaucoup de familles qui sont capables d'écrire un chèque de 100 millions ou plus, puis on sait que les transactions, aujourd'hui, ça se joue en milliards de dollars. Donc, la Caisse de dépôt a un rôle important à jouer.

Dans ma petite expérience dans l'entreprise privée, j'ai pu voir, en essayant de faire des acquisitions dans certains pays en Europe, qu'il y a souvent des blocs d'actions qui ne sont pas à vendre, qui sont détenus par ce qu'on appelle des joueurs institutionnels, et les actions ne sont pas à vendre. Donc, ça nous a empêchés, je pense que ce n'est pas un secret, là, quand on était chez Transat, de faire certaines acquisitions de grossistes en voyage, que ce soit en Allemagne, en Grande-Bretagne, en France.

Et je dirais que... On dit souvent, là, que tous les pays essaient de protéger leurs sièges sociaux, sauf peut-être les États-Unis, puis encore. On a vu, au cours des dernières années, des exemples. Entre autres, quand il a été question de parts pour être vendues à Dubai, il y a eu une réaction du monde des affaires. Quand il y a eu une pétrolière, là, qui pouvait être vendue à des Chinois, il y a eu une réaction. Donc, même aux États-Unis, il y a des réactions de ce côté-là. Puis en France... je lisais dernièrement une citation, là, d'un leader politique qui disait, et je le cite: «Ce fut une lourde erreur de laisser disparaître Pechiney, fleuron de notre industrie, au bénéfice du canadien Alcan. Nous ne pouvons conserver tous les secteurs industriels, mais nous devons sélectionner ceux qui nous semblent porteurs, pour lesquels nous avons des atouts, et y investir massivement.» Fin de la citation. Qui a dit ça? Qui a écrit ça? Nicolas Sarkozy dans son livre Témoignage. Un politicien qui n'est pas un socialiste, là, qui est plutôt un politicien de droite. Mais on voit que même Nicolas Sarkozy a dit clairement que, pour lui, ça avait été une erreur que le gouvernement français laisse Pechiney être vendue à Alcan.

n(20 h 40)n

Tout ça pour vous dire que parfois je nous trouve, les Québécois, un peu naïfs de ne pas avoir de plan, de stratégie. Or, peut-être une première question générale ? et puis, avec le consentement de tout le monde, j'aimerais peut-être que la question soit répondue par M. Rousseau: Est-ce que la Caisse de dépôt se sent interpellée dans la situation qu'on voit, là, de la vente des sièges sociaux, où on vit un peu le monde à l'envers, là? Avec la Révolution tranquille, on a pris le contrôle de notre économie, et là ça semble nous glisser des mains. Est-ce que M. Rousseau est préoccupé de la vente de plusieurs de nos sièges sociaux, là, des dizaines, au cours des dernières années?

Le Président (M. Paquet): M. Henri-Paul Rousseau, président de la Caisse de dépôt.

M. Rousseau (Henri-Paul): Merci, M. le Président. Vous me permettrez, s'il vous plaît, de dire peut-être un mot sur ce qu'est la caisse parce qu'une grande partie de la réponse que je vais donner découle de ma compréhension et de la compréhension de ceux qui déposent à la caisse de ce qu'on doit faire.

Et d'emblée je peux vous dire, M. le Président, que la caisse et ses dirigeants, ses gestionnaires, ses employés vivent au rythme de la planète et au rythme du Québec, et on lit les journaux comme vous, et on est très préoccupés de ce qui se passe, et on agit en conséquence. Ceci étant dit, notre préoccupation comme citoyens n'est pas nécessairement celle qui nous permet de faire certaines choses, puisque, d'abord et avant tout, nous sommes là en fonction du fait qu'il y a actuellement 25 déposants qui regroupent l'essentiel de nos régimes collectifs d'assurance et de rentes qui sont déposés en la Caisse de dépôt. Et le plus important de tous les mots dans la mission de la caisse, ce n'est pas le choix entre le rendement et le développement économique, c'est le fait que nous sommes encadrés par une politique de placement qui appartient à chacun des 25 déposants. Et cette réalité, elle est incontournable, elle ne sera jamais changée parce qu'ils ont vécu, au cours des années, des situations qui les ont convaincus que c'était comme ça que ça devait se faire et que leur argent soit géré de façon professionnelle.

À cause de ça, nous avons une situation où chacun des déposants choisit, sur nos conseils, mais ils sont libres de faire leur décision, une politique de placement qui les amène à faire des choix entre 18 portefeuilles d'investissement qui leur sont proposés par la caisse. Deuxièmement, nous avons avec chacun de nos déposants une entente de services aux termes de laquelle ils sont traités comme des clients, puisqu'on leur doit une reddition de comptes mensuelle, on leur doit également une information complète sur les opportunités d'investissement et sur les risques qu'on prend en leur nom. Cet encadrement s'inscrit dans un encadrement détaillé où chaque déposant reçoit à la fois ses rapports, mais aussi signe sa politique de placement.

C'est donc dire que la Caisse de dépôt et placement gère son 150 millions plus ou moins, aujourd'hui, sur une base nette, à partir de ces contraintes. Ces contraintes-là constituent notre encadrement et qui se traduit par une politique intégrée de gestion des risques aux termes de laquelle nous prenons nos décisions d'investissement. Je vous donne un exemple. Aujourd'hui, si la caisse faisait un placement qui dépasse 2 % de son actif net, elle doit aviser ses déposants en fonction des règles que nous avons, donc il y a un encadrement sur ce qu'on doit faire, je veux simplement le rappeler. Et, lorsqu'on fait un geste qui a pour conséquence de ne pas procurer à ces déposants le rendement optimal, compte tenu des risques qu'ils sont prêts à prendre, ils sont les premiers à cogner à ma porte et à dire: M. Rousseau, vous faites mal votre job. Et je l'ai entendu en 2002 quand j'ai joint la caisse, et il s'en fallait de peu pour que plusieurs d'entre eux décident de ne plus être à la Caisse de dépôt. Or, un des avantages de la collectivité québécoise, c'est cette coopérative, d'avoir regroupé tous ces déposants autour d'une même table et qui fait qu'aujourd'hui la caisse peut effectivement faire un gros chèque.

Ceci étant dit, notre premier mandat, c'est donc un gestionnaire d'actifs, qui est de l'argent qui ne nous appartient pas, et qui est contraint par ses politiques. Ceci étant dit, nous avons une activité très forte de placement et notre mission, c'est de gérer ces avoirs dans l'intérêt des déposants en respectant leurs politiques de placement tout en contribuant au développement économique du Québec, et nous le faisons de façon acharnée de quatre façons. La première, nous avons des activités de financement, et je pourrais aller en détail sur chacun des segments, il y a cinq segments dans lesquels on investit au Québec: le capital de risque, la petite entreprise, la moyenne entreprise, l'entreprise qui est en situation de relève et de transfert de propriété ainsi que la grande entreprise. Je n'irai pas en détail, mais juste pour vous dire, M. le Président, qu'en date de 2006 les engagements de la caisse et les investissements de la caisse au Québec sont plus élevés à la fin de 2006 qu'ils étaient au niveau maximum lors de la bulle où la caisse était apparemment très présente.

Je pourrais revenir sur chacun de ces points-là, mais je voudrais aller plus rapidement pour parler de la deuxième approche que nous avons. C'est que nous avons un rôle de catalyseur de l'industrie. Et je donne un exemple: le rôle dans le capital de risque. Le capital de risque au Québec est maintenant un capital de risque qui a repris sa part de marché de l'économie canadienne, mais, plus important encore, ce capital de risque a une composante privée. Et ce que vous avez dit tout à l'heure, ce qui a été dit est à l'effet qu'il y a moins de richesses au Québec qu'ailleurs, mais il y en a plus qu'avant. Il y a des capitalistes québécois qui sont maintenant capables d'investir dans cette économie, et ils le font, ils le font avec nous. Et nous avons des fonds dans lesquels nous investissons, et ce sont de bons Québécois qui investissent chez nous de leur argent qu'ils ont créé suite à la croissance économique que nous avons eue. On le fait avec eux, mais on le fait aussi avec des fonds étrangers que nous avons attirés. Nous avons attiré une douzaine de fonds sur le Québec. Et cette activité-là a fait qu'on s'est positionné comme catalyseur complémentaire de l'industrie plutôt qu'être un compétiteur de l'industrie, ce qui fait qu'aujourd'hui les entreprises de technologie de l'information, technologie... biotechnologie et technologie industrielle ont du choix, et même le président de la FTQ, M. Henri Massé, avec qui on travaille au niveau du fonds, qui est le plus gros joueur de capital de risque au Québec, le Fonds de solidarité, travaille avec ces fonds étrangers maintenant de façon très dynamique parce qu'on a créé une dynamique de marché. Donc ça, c'est notre deuxième rôle comme catalyseur.

Et notre troisième rôle, c'est dans nos activités qu'on considère comme structurantes pour l'économie du Québec, des activités qui ne paraissent pas beaucoup. On a créé avec d'autres institutions du Québec le Collège des administrateurs sur la gouvernance. On a lancé, le 8 mai, l'idée d'un centre international sur la prospérité des entreprises du Québec pour justement permettre aux entreprises du Québec, qui sont déjà positionnées à l'échelle mondiale, d'aller plus loin et d'être des gagnants de la mondialisation plutôt que de souffrir la mondialisation, et on travaille... et on a eu une réception extraordinaire de plusieurs joueurs privés et autres.

Enfin, dans les activités structurantes, on a adopté une politique d'investissement socialement responsable, et c'est dans ce cadre-là qu'on vote nos procurations. Sur cette politique-là ? vous pourrez avoir les détails sur le site Internet de la caisse ? nous avons clairement indiqué notre préoccupation sur la propriété des entreprises. Comment nous l'avons indiquée? C'est en disant que, nous, la Caisse de dépôt et placement du Québec, contrairement à d'autres investisseurs canadiens et étrangers, nous sommes favorables au maintien des actions à votes multiples qui permettent à un entrepreneur, à une famille, à une compagnie de rester la propriété de ceux qui l'ont mis au monde. Nous avons dit que cette chose-là était normale, était acceptée par l'ensemble des marchés mondiaux, incluant le marché américain, où de grandes entreprises comme celle de Warren Buffett et Google sont de cette nature, et donc on n'est pas plus fous que les autres: on est capables d'appliquer ça. Cette application-là, on la nuance en disant: Il faut quand même donner de la place aux minoritaires, mais ça, c'est les fleurs du tapis. L'essentiel, c'est de pouvoir contrôler. Cette chose-là est acceptée et acceptable, et c'est une façon très efficace de garder le contrôle.

Maintenant, sur la question: Est-ce que la caisse, dans ses objectifs de placement, fait en sorte qu'elle a des positions de blocage pour les entreprises du Québec? La réponse, c'est non. Et pourquoi il ne faut pas que ce soit ainsi? Deux raisons. La première, c'est: si on le fait, on va augmenter le coût du capital de ces entreprises contrairement à la première manière. La première manière qui est les actions à votes multiples, on le voit, les actions sont performantes. Mais, si on prend des positions de blocage de la caisse, qu'est-ce que ça fait? Vous allez détruire l'accès au capital de ces entreprises de façon faramineuse, et le coût du capital des entreprises au Québec va augmenter. Pourquoi? Parce que ces entreprises-là vont être considérées comme des filiales de la Caisse de dépôt et vont subir un escompte sur leurs actions. Il ne faut jamais faire ça; ça nuirait au développement économique du Québec et ce serait contraire aux objectifs que nous avons, qui est d'avoir accès au capital. Ça, c'est la première raison.

La deuxième, M. le Président, c'est: à chaque fois que la caisse a pris cette démarche, O.K., on peut remonter l'histoire, ça a coûté très cher à tout le monde, incluant les déposants. Et, moi, quand je suis entré, en 2002, quand les travailleurs de la construction m'ont dit: M. Rousseau, on est obligés de baisser nos prestations de rentes et d'augmenter nos cotisations à cause de ce qui a été fait, on ne veut plus que ça arrive, bien je pense que c'est pour eux que je travaille.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, ça met fin au bloc à ce moment-ci. Je reconnaîtrais maintenant le député de Robert-Baldwin.

Mission

M. Marsan: M. le Président, à mon tour d'abord de saluer Mme la ministre, et les collègues, et particulièrement tous les gens des différentes sociétés d'État. Je vous remercie de votre présence, M. Rousseau. Je sais que vous aviez des activités très importantes avec votre président de conseil, mais nous avons été informés que vous étiez avec nous ce soir. Alors, c'est très, très apprécié.

Moi, je voudrais vous poser une courte question, M. Rousseau. Au cours de nos échanges cet après-midi, le député de Rousseau et critique en matière de finances nous indiquait que la mission de la Caisse de dépôt, qui avait été créée sous M. Lesage, et on s'en souvient, avait été changée de façon très, très importante, et il donnait l'exemple... D'abord, c'était une des premières missions, c'était le gardien des dépôts des Québécois via les caisses de retraite, mais aussi c'était surtout au niveau du développement économique, où il nous laissait entendre que la caisse ne faisait plus de développement économique. Alors, moi, j'aimerais ça que vous nous disiez exactement qu'est-ce qui en est par rapport aux origines ou par rapport à ce que M. Lesage avait dit, et les correctifs qui... pas les correctifs, mais les changements qui ont pu être apportés au fil des ans et plus... Il y a quelques années seulement, je pense qu'on a révisé la mission de la caisse. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

n(20 h 50)n

M. Rousseau (Henri-Paul): Merci, M. le Président. La mission de la caisse, si on retourne au discours de M. Lesage de 1965, en deuxième lecture, a été, à ce moment-là, clarifiée. Il a dit: Oui, la caisse serait un joueur important. Il ne s'est pas trompé. Les fondateurs de la caisse ont eu raison, et ça demeure vrai. Mais il a dit aussi que jamais la caisse ne devrait se mettre dans une situation pour subventionner une entreprise et s'occuper de subventions aux entreprises, que c'était là le rôle de d'autres organisations et que l'État devait s'en occuper. Et il a fait, par cette phrase, une clarification très nette entre le rôle de l'État qui doit... et a tous les pouvoirs pour le faire dans sa légitimité et la caisse qui a essentiellement à cet égard un rôle de fiduciaire, et, dans ce sens, il a dit clairement que le développement économique devrait être rentable.

Et la réponse à votre question, monsieur, c'est qu'on fait tout pour faire du développement rentable. Et du développement économique qui n'est pas rentable, ce n'est pas pour nous, et la raison, c'est que c'est à d'autres à le faire et ça a été légitime de le faire, de subventionner et faire quoi que ce soit, mais, en ce qui nous concerne, on ne peut pas le faire autrement.

Dit autrement, la mission qui a été clarifiée, non pas changée par la loi de 2005, elle a été simplement clarifiée, la douce ambiguïté de dire que les deux sont égales, ça permettrait à un dirigeant de la caisse de vous dire: Bien, cette année, on a eu une mauvaise année, mais on a fait beaucoup de développement économique, qui est très difficile à mesurer, et ça, je pense que ce n'est pas correct. Quand on gère l'argent des autres, il faut être capable de rendre des comptes de façon précise. Nous, on a une obligation qui est encore plus pointue: il faut faire les deux, il faut faire du développement économique et il faut faire de l'argent, il faut être capable de rendre des comptes sur les deux. Et, dans notre rapport annuel, vous avez une section, à partir de la page 132, qui fait la reddition de comptes sur le développement économique, et le reste, c'est sur la performance.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci. Je pense que c'est une précision qui est importante quand vous parlez du développement économique, mais vous ajoutez vraiment le qualificatif «rentable», et je pense que, là, ça prend toute sa dimension. Et, moi, je comprends très bien ce que vous nous dites et ce que vous faites également.

Partenariats

Juste une courte question, M. le président de la Caisse de dépôt. Vous avez mentionné que le Fonds de solidarité était un des plus beaux joueurs du capital de risque et vous avez nommé M. Massé qui évidemment est un syndicaliste qu'on connaît tous très bien. Alors, je voudrais vous demander le genre de partenariats que vous avez dans la Caisse de dépôt, là. Je comprends que les syndicats ont leur place à la Caisse de dépôt. Est-ce que vous pouvez nous parler en général des différents partenaires que vous avez?

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): En fait, la caisse a beaucoup de partenariats et certains du côté financement, donc le Fonds de solidarité, le Mouvement Desjardins, la Banque Nationale, la Banque Royale. On a beaucoup de partenariats canadiens, québécois et internationaux de ce côté-là. Les relations avec les syndicats sont à deux places précisément. On a des membres des représentations syndicales sur le conseil, mais on a également des relations quasi quotidiennes avec les déposants sur les comités de placement où sont présents les chefs syndicaux et les représentants syndicaux, que ce soit au RREGOP, au RRPE ou dans plusieurs instances comme la CSST. Et, l'an passé, par exemple, il y a eu une réunion à tous les deux jours entre les dirigeants de la caisse et les déposants, parce qu'il y a une réalité que peu de gens connaissent, c'est que la caisse toute seule, ça n'existe pas, la caisse n'existe que pour et par ses déposants, et c'est ça qui est le plus important, c'est les déposants à la caisse, c'est leur argent et c'est eux qui dominent essentiellement toute l'orientation. Récemment, on voulait faire un changement important, on est allés les voir, les 25, et on s'est assis avec eux pour dire: On voudrait faire ce changement-là, qu'est-ce que vous en pensez? Et c'est tout à fait normal. Quand on fait des changements qui sont à la marge, c'est dans la marge qu'ils nous donnent, mais, quand c'est important, c'est leur décision de la prendre.

Donc, cette dynamique-là fait qu'on a des partenariats, on a des relations avec et les syndicats et les gens d'affaires qui sont en fait derrière le contrôle de l'argent des déposants.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Viau.

Politique de gestion intégrée des risques

M. Dubourg: Merci, M. le Président. Donc, c'est à mon tour de saluer la ministre et toutes les personnes qui accompagnent la ministre ce soir. Je suis bien content de les rencontrer quasiment pour la première fois.

Donc, ma question s'adresse à M. Rousseau. Bien, d'abord, je commence par féliciter, comme le député de Rousseau l'a fait, la Caisse de dépôt avec les rendements que vous avez eus, etc., et que ça va très bien à la Caisse de dépôt ? comment dirais-je ? vous avez aussi parlé de la contribution du rôle que joue la Caisse de dépôt à l'économie du Québec. Dans le présent contexte, on parle de mondialisation, on parle de gouvernance, j'ai l'impression que le succès que connaît la Caisse de dépôt est en partie peut-être lié à la politique intégrée de gestion de risques. J'aimerais vous entendre parler un peu plus de cette politique-là, et comment est-ce qu'à la Caisse de dépôt vous l'exercez.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): Est-ce que vous permettez, M. le Président, que le chef de la direction de placement, M. Richard Guay, qui est un expert de la gestion de risques, qui a été derrière toute la démarche qu'on a faite depuis quatre ans, réponde à la question?

Le Président (M. Paquet): Certainement. M. Guay.

M. Guay (Richard): M. le Président. Alors, le rôle de la politique de gestion intégrée des risques adresse en fait un des aspects qui apparaît dans la mission même de la caisse, et notre rôle, c'est de gérer la part des déposants dans le respect de leur politique de placement. Et donc les différents chapitres qui touchent la politique de gestion intégrée des risques visent à mettre cet encadrement du risque là pour s'assurer que le portefeuille de chacun de nos 25 déposants respecte la tolérance au risque et les objectifs de rendement qui sont visés par chacun de ces déposants-là.

Alors, M. Rousseau avait mentionné tantôt une de ces clauses, il mentionne à l'effet que, si la caisse a l'intention d'investir plus que 2 % de l'avoir d'un déposant dans un seul placement, bien, ça amène déjà un certain niveau de concentration où il y a un processus qui est enclenché, et on doit en informer nos déposants.

D'autre part, la politique de gestion intégrée des risques limite le risque que chacun des gestionnaires de la caisse peut prendre pour atteindre leur objectif de rendement. Et, à titre d'exemple, lorsqu'on demande à un gestionnaire d'ajouter 2 % de rendement, donc de bonifier le rendement d'un déposant ou d'un portefeuille de 2 %, bien il ne peut pas le faire en prenant n'importe quel type de risque. En l'occurrence, malheureusement, là, on ne lui permettra pas d'acheter des billets de Loto-Québec pour atteindre ses objectifs. Et donc on l'encadre, et il doit en tout temps avoir un minimum de diversification dans son portefeuille, il doit avoir des actifs répartis, et on mesure... Pour obtenir 2 % de rendement, on limite son risque à 4 %. Donc, le plus de risque qu'il peut prendre, c'est de perdre 4 %, là, selon les probabilités qu'on utilise.

Alors, la politique de gestion intégrée des risques a ça comme objectif. Donc, en tout temps, on respecte la limite de risque, la tolérance au risque global d'un déposant. Et, dans chacun des portefeuilles dans lesquels ? les 18 grands portefeuilles ? nos déposants peuvent investir, il y a des objectifs de rendement et, à ces objectifs-là, il y a des limites de risque et à ces limites de risque là sont également attachés des critères minimums de diversification. Et tout ce rôle-là assure que, bien, un gestionnaire, même s'il avait des idées farfelues, mais il y a d'autres mécanismes qui vont l'arrêter puis éviter que le portefeuille soit trop risqué.

Et c'est la même chose pour la taille des transactions. Aussitôt qu'il y a une transaction d'envergure, de plus de 100 millions, il y a un comité de risque qui est mis en place, qui examine la pertinence de cette transaction-là dans un portefeuille, quel en est le niveau de risque, et est-ce qu'elle est appropriée, est-ce qu'elle contribue plus au rendement du portefeuille qu'à son risque. Et, si la transaction est plus de 300 millions, bien, là, à ce moment-là, c'est une décision qui va remonter au conseil d'administration de la caisse même. Et ces comités de risque là sont constitués d'experts indépendants du gestionnaire qui souhaite faire la transaction, et, comme ça, ça évite un conflit d'intérêts, ça évite un problème de gouvernance à l'effet qu'un expert indépendant, qui n'est pas lié au portefeuille, émet une opinion, est-ce que c'est un placement qui est rentable, compte tenu du risque qu'il implique dans le portefeuille spécifique dans lequel il va se retrouver et dans le portefeuille global de la caisse.

Bon. Je pourrais m'arrêter ici, là, ça vous donne quelques... je pense, les grandes lignes de cette politique et ses objectifs.

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): La politique intégrée des risques, elle fait partie intégrante de notre mission et de notre contribution au développement économique. Pourquoi? Parce qu'il y a un processus d'optimisation de nos décisions de placement qui est relié aux politiques de placement de chacun des déposants. C'est ce qui fait que, lorsqu'on est performant sur le plan de l'ajout de valeur ajoutée par rapport au marché, la CSST, le RREGOP, le RRPE, la CCQ ? la construction ? la Régie des rentes, la SAAQ, le FARR ? qui est la contribution du gouvernement aux caisses de retraite ? et le Fonds des générations sont en meilleure santé, et ça, c'est fondamental, c'est d'abord comme ça qu'on contribue au développement économique. Et c'est par la gestion intégrée des risques qu'on fait en sorte qu'à terme on a une politique d'investissement qui est diversifiée et qui donne de meilleurs rendements, compte tenu de ce que les marchés peuvent offrir. En plus de ça, on dit à nos gestionnaires: Il faut que vous ajoutiez à ce que les marchés offrent. Et c'est le résultat entre les deux qui nous assure des chances de faire mieux que le marché. Ce n'est pas garanti, chaque journée subit sa peine, comme on sait.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Hull.

n(21 heures)n

M. Cholette: Il reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Paquet): Environ cinq minutes.

Rendement des placements

M. Cholette: Cinq minutes. Je veux, M. le Président, profiter de l'occasion de la présence de la caisse pour parler de rendement. Je sais que le député de Rousseau est très inquiet des agissements de la caisse, je peux comprendre, c'est normal d'avoir cette réaction-là, lorsqu'on connaît les rendements de la caisse sous leur administration. Moi aussi, je serais inquiet. Je serais inquiet, si j'étais le député de Rousseau, pour voir qu'en 2001, lorsqu'il était aux affaires, la caisse a perdu 4,6 milliards de dollars et, en 2002, 8,6 milliards de dollars de perte. Ça, on parle, là, M. le Président, du bas de laine des Québécois. Ça, c'est le fonds que les Québécois se sont donné pour assurer notre avenir collectif. Et, sous l'ancienne administration, c'est important de le dire, plus de 13 milliards de dollars... puis 1 milliard, là, pour les gens qui nous écoutent, là, 1 milliard, c'est 1 000 millions. 1 000 millions ont été perdus, donc 13 fois ça a été perdu, en deux ans, sous l'administration, sous l'administration précédente. Nous étions au quatrième quartile du rendement de la caisse.

Peut-être que la question est assez simple. Depuis maintenant 2003, la situation s'est renversée du tout au tout, où nous avons quitté les bas-fonds du rendement de la caisse, sous l'ancienne administration, pour atteindre des sommets jamais inégalés auparavant. Et l'indication que j'en ai me porte à croire que non seulement le rendement s'est amélioré, a passé au positif, des rendements positifs et un premier quartile de rencontré en matière de placement... Alors, peut-être que le président de la caisse pourrait nous parler des rendements rencontrés, notamment la dernière année, au niveau des placements de la Caisse de dépôt.

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): Il faut, ici, faire une grande distinction. Les rendements de la caisse, curieusement, aucun déposant ne touche spécifiquement le rendement de la caisse, hein? Il y a 25 déposants, chacun d'eux touche le rendement de leur portefeuille. La moyenne pondérée de ça donne le rendement de la caisse. On veut comprendre que c'est donc une moyenne pondérée, premièrement.

Deuxièmement, tout notre rendement que nous avons vient de deux sources: le marché ou la performance de nos gestionnaires. Dans la période que vous mentionnez, pour parler en dollars, vous parlez de 13,6 milliards de dollars, la perte sur deux ans: 6 milliards étaient dus à une sous-performance par rapport au marché, le reste était dû au marché. En d'autres mots, si la bourse baisse de façon systématique ou les obligations baissent en prix, la caisse, une journée comme aujourd'hui, où les taux d'intérêt ont monté et la bourse a baissé, bien la caisse a un rendement, dans la journée, qui ne peut pas être positif, les marchés sont en baisse de façon importante. Par contre, si nos gestionnaires ont fait mieux que le marché, on va avoir fait une baisse moins importante. Donc, la notion importante pour nous, c'est relatif au marché. Ça, c'est le plus important.

Je peux juste vous dire que, sur les dernières trois années, nous avons créé une valeur ajoutée ? c'est le concept ? positive de plus de 4 milliards, ce qui fait qu'aujourd'hui, quand je dis que la santé de nos principaux régimes qui sont les régimes de déposants a repris en beauté, c'est à cause du fait que cette valeur ajoutée est venue compenser une grande partie de la valeur ajoutée qui avait été perdue en 2001 et 2002. Mais, si, demain matin, il y avait un changement majeur dans les marchés financiers, on n'est pas à l'abri de rendements négatifs. D'ailleurs, nous disons à nos déposants qu'une année sur six on doit prévoir que les marchés vont donner des rendements négatifs. Ce qui compte pour nous, c'est, sur la moyenne de la longue période, qu'on ait un rendement positif et qu'on fasse mieux que les marchés, et tous les gens qui travaillent à la caisse sont rémunérés non plus sur le rendement absolu, mais sur la valeur ajoutée qu'ils créent.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, Mme la députée de Groulx.

Loto-Québec (suite)

Achat d'oeuvres d'art

Mme Lapointe (Groulx): M. le Président, je vais revenir à Loto-Québec. Je voulais juste faire un constat. J'étais assez surprise de voir que les employés des sociétés d'État avaient des traitements différents que ceux des employés des secteurs publics, qu'ils avaient droit à des bonifications qui étaient non sur leur rendement, mais qui étaient sur le résultat de la société d'État. Ça, c'était un constat que je voulais faire.

J'aimerais maintenant revenir, si je... Je vais parler à M. Cousineau. Il y a une collection d'oeuvres d'art, si j'ai bien lu, qui appartient à Loto-Québec, et que la société consacre annuellement 1 % du revenu brut pour acheter des oeuvres d'art. Donc, depuis 1980, il y a quand même une grande quantité d'oeuvres d'art qui sont là. Alors, je me questionne sur les raisons, premièrement, de cette galerie. Avez-vous un registre de toutes ces oeuvres montrant le coût d'achat, la date d'achat et l'artiste? Et en même temps où sont exposées ces oeuvres? Est-ce que ça se pourrait que d'anciens premiers ministres et ministres ont en leur possession ces oeuvres d'art? Est-ce que vous maintenez un registre de tous les détenteurs de vos oeuvres d'art? Et j'aimerais, si possible, avoir la chance de pouvoir regarder ce registre. Et je continue sur ce... j'ai beaucoup de questions, là, sur ce côté-là. Vous avez une galerie d'art. Combien sont exposées à la galerie d'art? Combien qu'il y a de visiteurs annuellement? Et quelles sont les retombées économiques de cette galerie d'art?

Le Président (M. Paquet): M. Cousineau.

M. Cousineau (Alain): M. le Président, en réponse: un des objectifs qui avaient été fixés il y a 27 ans, parce que la collection Loto-Québec a maintenant 27 ans d'existence, était de contribuer à encourager les artistes québécois, à stimuler la création d'ici grâce à l'achat, l'acquisition d'oeuvres d'art et à favoriser leur diffusion. C'est l'objectif qui avait été établi il y a 27 ans et qui demeure le même aujourd'hui. Nous sommes quelque 900 artistes plus tard, nous sommes quelque 3 800 oeuvres plus tard, et il y a une très grande fierté à posséder, au Québec, une collection qui est parmi les plus importantes collections canadiennes d'artistes exclusivement québécois ? parce que c'est une des données fondamentales de la politique d'acquisition ? et d'artistes contemporains. Les seules oeuvres sont des oeuvres modernes ou contemporaines, qui sont acquises.

Ce qui est intéressant chez nous, c'est que c'est un facteur de mobilisation d'employés. Les jurys sont composés d'employés de la société. On organise, dans toutes les régions du Québec, des foires où les artistes sont invités à présenter des oeuvres, et, avec l'encadrement d'experts, il y a des acquisitions qui sont faites. Il y a des artistes méconnus à l'époque qui aujourd'hui sont très connus, dans notre collection. On peut penser à Riopelle, notamment.

La politique évidemment de diffusion est aussi extrêmement importante. Tous les employés de Loto-Québec ont une oeuvre d'art dans leur lieu de travail, tous les employés de Loto-Québec. Toutes nos installations commerciales ? et en particulier on peut penser aux casinos, à nos hôtels, hein, il faut meubler 400 quelques chambres à Gatineau, des restaurants, etc. ? possèdent des oeuvres d'art. Nous avons offert aux autorités gouvernementales des oeuvres d'art parce qu'on ne veut pas qu'elles soient dans des voûtes. Alors, effectivement, ces oeuvres d'art, vous allez les retrouver dans plusieurs bureaux gouvernementaux ou d'autres sociétés d'État, parce qu'encore une fois on ne veut pas qu'elles soient dans des voûtes. On veut qu'elles soient exposées.

Nous organisons des foires... bien enfin pas des foires, mais, à travers les maisons de la culture, on fait tourner les oeuvres d'art. On a même, il y a deux, trois ans, à l'occasion d'une entente avec le Mexique, fait notre première exposition internationale où, à Mexico, je crois, nous avons présenté une collection d'oeuvres choisies d'artistes, d'artistes du Québec.

Nous avons, il y a deux ans, à l'occasion du 25e anniversaire de la collection, créé un espace, au siège social de la société, qui s'appelle Espace Création, où nous avons organisé un certain nombre d'expositions. Il y a actuellement une exposition. La plus populaire que nous avons créée, c'est l'exposition sur Frédéric Back. On y reçoit quelque chose comme 400 visiteurs par semaine, ce qui, à l'échelle des visites de petites installations, est absolument remarquable. Donc, oui, nous avons une collection. Je vous en ai décrit les objectifs. Nous avons effectivement un registre complet des oeuvres, de leur description, de leur localisation. Et ce registre-là, ça nous ferait plaisir de le mettre à votre disposition.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre des Finances, qui voudrait ajouter à la réponse.

n(21 h 10)n

Mme Jérôme-Forget: Vous me permettrez d'intervenir pour répondre à la députée de Groulx. Je suis un peu étonnée de la question parce que j'estime qu'un des joyaux que nous avons à Québec, c'est justement cette collection qu'a Loto-Québec d'artistes québécois. Et, moi-même, en tant que présidente du Conseil du trésor et ministre des Finances, j'ai plusieurs tableaux d'artistes québécois dans nos bureaux.

Et non seulement, M. le Président, j'en suis très fière, mais je pense que ça joue un rôle important, Loto-Québec joue un rôle important à cet égard pour identifier de jeunes artistes, les soutenir. Et, quant à nous, au niveau de nos ministères, à titre de ministres, de faire voir ces oeuvres-là, vous comprendrez que ça comble plusieurs de ces artistes, sur le plan de la notoriété notamment, pour que leurs oeuvres soient vues, appréciées, admirées. Et je pourrai inviter la députée de Groulx à venir visiter les bureaux et du Conseil du trésor et du ministère des Finances parce qu'elle va pouvoir apprécier elle-même la qualité des oeuvres qu'a Loto-Québec.

Et d'ailleurs, parfois, je vous avouerai, M. le Président, qu'il y a des expositions itinérantes ou des expositions dans certaines villes comme on me le mentionnait pour le Mexique notamment, pour la ville de Mexico, mais je vous dirai qu'à l'occasion justement on vient nous enlever les oeuvres pour qu'elles partent en tournée, faire une exposition quelque part dans le monde. Mais je pense que c'est là un joyau, et je puis rassurer la députée que c'est là... je dirais, ça a été là une vue qui a été clairvoyante de quiconque a commencé cette collection, et peut-être que le président pourrait nous dire qui a commencé la collection.

Le Président (M. Paquet): M. Cousineau.

M. Cousineau (Alain): L'actuel conservateur, Jean-Marc Lafaille, était, me dit-on, le président de la société à l'époque, et celui qui a été invité à organiser une première exposition d'estampes, si je ne me trompe, est M. Louis Pelletier, qui est l'actuel conservateur de la collection.

Le Président (M. Paquet): Merci...

M. Cousineau (Alain): Et je voudrais peut-être ajouter, M. le Président, si vous me permettez...

Le Président (M. Paquet): Bien, certainement.

M. Cousineau (Alain): ...en complément d'information: La valeur à l'achat des oeuvres est de 5,4 millions, ce qui ne donne pas évidemment la valeur aujourd'hui. À titre d'exemple, nous avons donné au Musée du Québec la fameuse oeuvre de Riopelle Hommage à Rosa Luxemburg, qui est une oeuvre exceptionnelle de la collection, que nous avions acquise.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): M. le Président, c'étaient des questionnements et c'est une surprise en même temps de voir que Loto-Québec possède ces oeuvres d'art. Et je ne voyais pas tellement, dans la mission de Loto-Québec, qui, dans le fond, avec ses surplus, redonne l'argent au gouvernement... Je ne doute pas que ce sont de belles oeuvres d'art, ce n'est pas ça du tout, mais je me questionnais, je me questionnais. On ne m'a pas parlé des retombées économiques de la galerie d'art, qui est au siège de Loto-Québec, on ne m'a pas parlé de ça, voir si ça ramenait des retombées économiques.

M. Cousineau (Alain): Bien, d'abord, je veux préciser, M. le Président, que le montant que nous investissons, c'est 1/100 de 1 % des revenus bruts de la société et non pas 1 %, là; 1/100 de 1 % des revenus bruts de la société que nous avons consacrés l'an dernier, 444 000 $, aux acquisitions d'oeuvres d'art.

Et je pense qu'on ne peut pas parler de retombées économiques à proprement parler. Cela fait partie de la responsabilité de bon citoyen corporatif que de contribuer au développement de la culture. C'est une initiative qui a été amorcée et que nous poursuivons. Je ne pourrais pas vous dire quelles sont les retombées économiques de la galerie, sauf qu'elles permettent à des artistes d'être exposés, d'être vus, et ça s'inscrit parfaitement dans le mandat de distribution des oeuvres d'art que nous souhaitions accomplir.

Je veux souligner que la galerie d'art est absolument gratuite pour tous les publics. Alors, on ne cherche pas à financer. C'est un espace relativement réduit dans le hall d'entrée de notre édifice, que je vous invite à visiter, dans lequel nous avons mis en valeur un certain nombre d'artistes, là, au cours des deux dernières années.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): Je vais continuer. Je suis assez étonnée qu'on ait quand même des grosses choses comme ça, que c'est une très belle collection avec des valeurs excessives, et en même temps qu'on a de la misère avec les routes qui tombent, qu'on a des problèmes dans les hôpitaux et des problèmes dans les écoles.

Programme de commandites

Je continue dans un autre ordre d'idées. Le programme de commandites de Loto-Québec, je sais qu'il y a 16 millions, si j'ai bien lu, qui sont en commandites, à tous les ans, qui sont donnés. J'aimerais savoir comment vous calculez vos retombées commerciales, comment vous choisissez vos commandites?

M. Cousineau (Alain): La politique de commandites a été revue il y a deux ans. La politique de commandites, elle est très transparente, elle est très claire: nous investissons en commandites 1 % du bénéfice net de la société. Le bénéfice net était de 1,6 milliard l'an passé, alors nous investissons 16 millions de dollars en commandites.

Nos commandites doivent maintenant s'inscrire dans un programme qui est très clair. C'est essentiellement des grands événements rassembleurs, gratuits, avec le souci d'avoir des commandites qui ont une couverture régionale appropriée. Les événements sont donc évalués, les propositions des événements sont donc évaluées en fonction de critères de retombées économiques, pour la région, de l'événement en question, des retombées commerciales que la société peut en retirer, y incluant la visibilité, et il y a une analyse qui est faite, par une firme indépendante, des retombées de visibilité que nous obtenons dans les commandites. Elles ont permis, cette année, de financer une centaine d'événements dans l'ensemble des régions, qui vont, M. le Président, de festivals qui sont bien connus, le Festival d'été de Québec ou le Festival de jazz de Montréal, de financer des présentations de sept orchestres symphoniques par exemple, d'une foule de manifestations qui vont du Festival du camion en Abitibi, du Festival des fromages à Warwick ou du chocolat à Bromont. Et je pourrais vous en citer de nombreux, mais le souci, c'est d'essayer de redonner aux régions un investissement qui va permettre, qui va favoriser des retombées économiques dans la région par le biais des commandites.

Le Président (M. Paquet): Je crois que Mme la ministre des Finances voulait ajouter quelque chose?

Mme Jérôme-Forget: ...un peu sur ce que la députée de Groulx nous a dit tantôt, à savoir qu'elle était préoccupée avec ce volet de Loto-Québec qui achète des oeuvres d'art pour la valeur d'à peu près 400 000 $ par année, et elle fait le lien entre ça et finalement les ponts, je pense, augmenter les services en santé, etc. Dois-je comprendre de l'ADQ que leur souhait, c'est de finalement... Parce qu'il n'y a pas d'infrastructures, hein, il n'y a pas... on n'augmente pas la dette. Dois-je comprendre que c'est en allant chercher l'argent dans la culture que vous voulez financer les ponts du Québec? Je veux dire, il va falloir qu'un jour l'ADQ nous dise le fond de sa pensée. On vient de l'avoir, on vient d'avoir quand même un exemple, là, où, pour 400 000 $ par année, au fil des ans, on a acquis une collection de tableaux québécois qui profite aux artistes québécois. Puis on sait que ces gens-là ne sont pas riches, hein? Le revenu moyen des artistes québécois, là, c'est à peu près 10 000 $, 12 000 $ par année. Et on fait le lien entre les ponts, un programme d'infrastructures ou des services dans les hôpitaux où on parle de 1,6 milliard, 1,4 milliard de dollars. Je voudrais essayer de comprendre, peut-être qu'elle va pouvoir nous clarifier sa pensée.

Le Président (M. Paquet): Une minute, Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): M. le Président, je me questionne sur la gestion de Loto-Québec et si c'est vraiment géré serré. On cherche de l'argent partout. Je me questionne et je pose des questions sur l'ensemble de tout ça. Je ne discute pas sur les bienfaits de la culture, pas du tout.

Par contre, je n'ai pas à répondre aux questions, encore. Je questionne vraiment sur l'ensemble de la gestion. Et c'est ça que je veux que vous compreniez: une gestion serrée, ce n'est pas simplement à l'État, c'est aussi aux entreprises d'État. On parle de Loto-Québec, les retombées économiques des commandites, je me questionne sur... J'imagine qu'en fin de semaine, au Grand Prix de Montréal, il y avait des commandites qui avaient été faites par Loto-Québec. Je me questionne qui qui était invité au Grand Prix, qui qui était là, quelles sont les retombées économiques. Dans un contexte où est-ce que c'est difficile au Québec, j'essaie juste de proposer des pistes de solution afin de resserrer les entreprises d'État afin de ramener plus d'argent. C'est ça, mon but, en arrière.

Le Président (M. Paquet): Ça termine le bloc pour le moment. M. le député de Rousseau.

Caisse de dépôt et placement du Québec

Mission (suite)

M. Legault: Oui. M. le Président, je voudrais revenir aux commentaires de M. Rousseau tantôt sur... bon, sur la mission de la Caisse de dépôt et sur l'approche qu'il a mise en place depuis 2005. Bon. Il nous disait tantôt... il nous parlait d'Henri Massé. Je pense qu'il faut comprendre, là, qu'Henri Massé et le président du Fonds de solidarité sont inquiets de voir les sièges sociaux quitter le Québec. C'est la même chose pour Alban D'Amours qui siège sur le conseil d'administration de la Caisse de dépôt, qui est président du Mouvement Desjardins, qui a fait une sortie dernièrement disant qu'il était inquiet de voir autant de sièges sociaux quitter. Bon. Je trouve malheureux la... Je sais qu'on a un différend de ce côté-là.

n(21 h 20)n

Le président de la Caisse de dépôt nous dit que, lui, il n'est pas d'accord avec ça, d'avoir des objectifs, d'avoir des blocs d'actions pour bloquer éventuellement des transactions qui pourraient être faites, là, suite à des acquisitions d'intérêts étrangers. C'est bon pour l'Allemagne, c'est bon pour la France, c'est bon pour la Grande-Bretagne, mais il semble que ce n'est pas bon pour le Québec. Je trouve ça un peu naïf parce que je me dis: Si c'est seulement le rendement, puis c'est important, le rendement, mais, si c'est seulement le rendement, la question qu'on peut se poser: Pourquoi ne pas diviser la Caisse de dépôt en trois ou quatre et puis donner ça à des Teachers', des OMERS, au plus offrant? Celui qui fait le meilleur rendement l'année passée, bien, l'année prochaine on lui en donne un petit peu plus, puis on en donne un petit peu moins à celui qui fait un moins bon rendement. Si la caisse, dans le fond, c'est un fonds de pension comme les autres, qui a seulement comme objectif le rendement, je ne vois pas pourquoi on ne la fractionnerait pas, mais je ne suis pas d'accord avec ça.

Je ne suis pas d'accord avec ça parce que, moi, je pense que l'approche qui avait été prise par Jean Lesage, puis là, bon, j'ai... oui, parce qu'on ne fait pas du tout la même lecture, M. Rousseau et moi, de la déclaration qui avait été faite par Jean Lesage, en 1965, concernant la mission de la Caisse de dépôt. Je pense que c'est un peu à l'extrême de dire que, quand Jean Lesage a dit qu'il n'était pas question de donner des subventions... on est tous d'accord avec ça, mais il y a une différence entre donner des subventions puis contribuer au développement économique du Québec. Et d'ailleurs je cite Jean Lesage, en 1965, qui avait dit: «En somme, la caisse ne doit pas seulement être envisagée comme un fonds de placement au même titre que tous les autres, mais comme un instrument de croissance, un levier plus puissant que tous ceux qu'on a eus dans cette province jusqu'à maintenant.»

Bon. Puis je pourrais continuer, là, à citer Jean Lesage, mais, pour moi, là, fondamentalement, si j'avais à mettre, bon, en rang, là, tous les outils de développement économique qu'on a au Québec, il y a des outils fiscaux, il y a Investissement-Québec, la SGF, mais, je veux dire, la SGF, c'est quelques milliards. La Caisse de dépôt, c'est 237 milliards sous actif. Je veux dire, pour moi, là, de loin le plus important outil de développement économique qu'on a au Québec, c'est la Caisse de dépôt, et je trouve tellement malheureux ce qu'on a fait, en décembre 2004, en changeant la mission de la Caisse de dépôt.

On a rompu cet équilibre qu'on avait entre le rendement et le développement économique en disant: On va subordonner au rendement la mission de développement économique. Et, je m'excuse, là, mais j'ai souvent entendu M. Rousseau le dire, et je ne suis pas d'accord avec lui quand il nous dit: Plus on fait de rendement, plus on fait de développement économique. C'est trop facile de dire ça. Il y a plein d'exemples où les deux objectifs sont parfois en contradiction.

Si, demain matin, un acheteur étranger faisait une offre pour acheter Bombardier, ça pourrait être payant peut-être pour la caisse à court terme, pour son rendement, de vendre des actions que la caisse a dans Bombardier, mais je ne suis pas certain qu'à moyen terme, pour le développement économique du Québec, ce serait bon de vendre les actions de Bombardier.

De la même façon, je suis très surpris, là... j'ai feuilleté le rapport annuel de la Caisse de dépôt. Je suis très surpris, si on croit encore qu'un des deux objectifs de la caisse, c'est de faire du développement économique, que nulle part, nulle part, dans le rapport annuel, on nous dit quelle part du 237 milliards d'actif sous gestion est investie au Québec. Nulle part. J'ai feuilleté, page par page, deux fois. Tout ce qu'on dit, M. le Président, c'est qu'au niveau des placements privés, bon, on a atteint un historique cette année, on a 5,4 milliards d'investis en placements privés au Québec. Mais de totaliser qu'est-ce qu'on a dans le marché secondaire, qu'est-ce qu'on a au niveau de l'immobilier, comment ça a évolué depuis cinq ans, moi, je m'attendais à ce qu'on voie un beau tableau, de dire: Voici, depuis cinq ans, comment ont évolué les actifs investis par la caisse au Québec pour le développement économique du Québec, je n'ai pas vu ça nulle part. Et peut-être que M. Rousseau les a, les chiffres, pour dire comment, depuis cinq ans, ont évolué les actifs de la caisse investis au Québec, mais je suis inquiet de voir que, sur 237 milliards, bon, on a 5,4 milliards dans les placements privés.

Et, Mme la Présidente, je vais vous dire ce qui m'inquiète le plus. Ce qui m'inquiète le plus, ce n'est même pas le changement de mission, c'est ce que nous a expliqué M. Rousseau tantôt. C'est que, suite au changement de mission de la caisse, et je ne sais pas si c'est venu d'une directive du gouvernement, mais M. Rousseau s'est senti obligé d'aller signer une entente de services avec chaque investisseur, chaque régime de retraite, où, là, maintenant, il permet à chaque régime de retraite de choisir ce qu'il veut comme placements. Avant que ce soit fait, quand un régime de retraite venait investir à la Caisse de dépôt, ça venait dans un tout: les placements privés, l'immobilier, le marché secondaire. Quand on voulait investir à la caisse, on ramassait de tout. Maintenant, M. Rousseau a permis aux déposants, aux 25 déposants, il l'a dit tantôt très clairement, que c'est eux autres qui vont choisir.

Mon inquiétude. Prenons, par exemple, le cas des placements privés, je sais que ça inquiète des gens, même à l'intérieur de la caisse. Heureusement, depuis quelques années, les placements privés ont fait des bons rendements à la Caisse de dépôt. Mais, si, dans les deux, trois prochaines années, les placements privés ne performaient pas bien, on pourrait se retrouver dans une situation où les déposants diraient: Moi, à partir de maintenant, je ne veux plus de placements privés dans mon portefeuille. Ça veut dire que la caisse ne pourrait pas intervenir dans la partie qui est probablement la plus structurante de ce que fait la caisse, c'est-à-dire, plutôt que d'aller investir dans le marché secondaire, comme un OMERS ou un Teachers', d'aller dire: Bien, je vais aller financer un deal puis négocier directement un placement privé, elle pourrait se retrouver dans une situation où les déposants pourraient décider de ne plus investir. Elle pourrait se retrouver aussi dans une situation où, si, sur les marchés asiatiques ou ailleurs, on prévoyait que, pour les cinq prochaines années, les rendements vont être meilleurs à l'étranger qu'au Québec, elle pourrait se retrouver que la caisse, pour faire des rendements, pourrait investir une moins grande partie de son actif au Québec.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau, juste pour vous rappeler que vous avez pris un peu plus que la moitié de votre bloc. Si jamais vous voulez laisser l'occasion au président de répondre à vos questions.

M. Legault: Oui. Oui. Oui, bien, écoutez, peut-être une question précise pour le président de la Caisse de dépôt, je sais qu'il y en avait plusieurs, là, mais, moi, je voudrais savoir: Depuis cinq ans, comment ont évolué les placements de la caisse au Québec, au total, là, marché secondaire, marché immobilier, placements privés? Au total, là, comment ça a évolué depuis cinq ans? Est-ce qu'il y en a plus, moins? Comment ça a évolué?

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): Il y en a plus, M. le Président.

Mais je dois corriger ici un point important, là: la caisse ne possède pas 237 milliards; il ne faut pas dire ça au public, là, c'est faux. La caisse a des actifs sous gestion de 237 milliards. Sur ce 237 milliards, et soyons précis, il y en a 29,4, à la fin de 2006, qui sont des actifs que nous gérons pour des tiers clients, essentiellement dans l'immobilier, et qui sont investis, je vous le dis tout de suite, dans la majorité des cas, dans le monde, dont une partie au Canada et au Québec.

Nous avons donc, du 237, si on diminue, on a un actif total de 207,9 milliards, qui est l'actif brut. Il y a 64,4 milliards de cet actif-là qui est parce que nous empruntons, grâce à notre cote de crédit AAA, des argents sur les marchés pour investir et dans l'immobilier et dans certaines activités d'ingénierie financière. L'actif net de la caisse, à la fin de 2006, est de 143,5 milliards, premier point.

Deuxième point. Je suis heureux de constater qu'on a compris que la caisse comme un tout ça n'existe pas en 2006, et, honnêtement, quand je suis arrivé en 2002, c'était déjà comme ça et depuis longtemps. Les déposants ont toujours eu un rôle important à la caisse. Il y a eu une douce ambiguïté pendant un bout de temps. Cette ambiguïté venait du fait que les déposants, alors qu'ils croyaient investir dans les actions canadiennes, investissaient, dans les faits, dans une très grande proportion, en placements privés. Et quelle a été leur surprise... Et vous en reparlerez encore... Je vous invite, ceux qui le veulent, à aller voir les gens de la Commission de la construction, les gens de la CSST et tous ceux que j'ai vus en 2002 qui ont fait cette découverte, ils croyaient avoir investi en actions liquides, alors qu'ils avaient investi dans des placements privés non liquides, au moment où le marché était à son maximum en valorisations et de façon concentrée dans les TMT ? technologies, médias et télécoms. Leur surprise a été très grande.

Et, moi, quand je suis rentré, M. le Président, à la caisse, c'est ces gens-là qui m'ont dit quoi faire. Pourquoi? Parce que c'est leur argent et ces gens-là ont... c'est leur argent, je regrette, les travailleurs de la construction. C'est l'argent des entreprises et des travailleurs. À la CSST, c'est pris dans des cotisations de travailleurs. La partie publique, qui est vraiment publique, elle est à une place, c'est la Régie des rentes du Québec où tous les travailleurs y contribuent. Mais tous les autres régimes sont des régimes pour lesquels il y a des engagements juridiquement pris par l'État ou par des régimes, et cet argent-là, il est déjà coiffé, identifié où est-ce qu'il doit aller. C'est à cause de ça que ces déposants on un rôle de fiduciaires. Ils ont un rôle de fiduciaires non seulement légal, mais aussi moral de bien gérer l'argent.

n(21 h 30)n

Donc, ce n'est pas le président Rousseau qui a fait en sorte que c'était comme ça, c'était ça depuis le début. La différence, c'est qu'en 1965 il y avait un seul déposant, lorsqu'on a créé la caisse, et, à ce moment-là, la distinction entre un déposant et plusieurs n'était pas nécessaire. Mais, avec le temps, on a augmenté le nombre de déposants.

Deuxièmement, je suis aussi préoccupé que vous tous ici sur ce qui se passe sur la planète. Et c'est pour ça que nous faisons énormément d'activités pour faire en sorte que les entreprises du Québec, un, aient accès à du financement compétitif venant de la caisse ou de d'autres, et je donne des exemples, dans le capital de risque, dans la petite entreprise, dans d'autres secteurs, et qu'on fait des efforts également pour faire en sorte que les modes de propriété soient des modes qui permettent à ceux qui sont propriétaires de garder le contrôle.

Mais je répète que ce n'est pas parce que la caisse n'a pas de position de blocage d'entreprises qu'elle ne supporte pas le développement économique. Je maintiens que faire ça serait désastreux pour l'économie du Québec comme je suis prêt à débattre que ce n'est pas bon non plus pour l'Allemagne, ni pour la France, ni pour les autres pays, parce que l'accès au capital est essentiel dans un monde de mondialisation, il faut garder l'accès.

Je conclus en disant, M. le Président, que la Caisse de dépôt, aujourd'hui, est un investisseur au Québec, au Canada et partout dans le monde, et on ne peut pas parler des deux côtés de la bouche, faire des transactions du genre qu'on fait dans la planète et en même temps dire: Ce qui est bon pour nous, quand on va investir à l'étranger, ce n'est pas bon pour les étrangers chez nous. Nous sommes un investisseur qui est logique et nous opérons dans un cadre qui est accepté par les marchés financiers. Ceci étant dit, si l'État du Québec veut avoir une politique de contrôle de ses entreprises sur le territoire québécois, c'est autre chose, mais ce n'est ni au président de la caisse ni à ses déposants d'en décider, c'est à l'État et à ceux qui sont élus. Ça, pour moi, c'est très clair.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre, vous vouliez ajouter quelque chose?

Une voix: ...

Le Président (M. Paquet): 2 min 10 s sur ce bloc.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que, peut-être, le député a encore une question?

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau. M. le député.

Placements au Québec

M. Legault: M. le Président, j'avais demandé l'évolution des placements de la caisse au Québec depuis cinq ans.

M. Rousseau (Henri-Paul): On est en croissance d'une façon importante. Je vous donne quelques chiffres ? et je les ferai par secteurs, si vous les voulez. Le capital de risque est un secteur important. La caisse, aujourd'hui, a plus de 400 millions d'investis au Québec, alors qu'il y a cinq ans on avait 285 millions. Plus important encore, les fonds investis dans le capital de risque au Québec, aujourd'hui, comptent pour 36 % des investissements au Canada en 2006, alors qu'ils étaient de 28 % en 2002. J'ajoute que les investissements effectués par des fonds privés et des fonds étrangers, aujourd'hui, comptent pour 31 %, alors que c'était 7 %. Donc, on a réussi notre transformation.

M. Legault: Combien la caisse investit au Québec?

M. Rousseau (Henri-Paul): Nous, je vous l'ai dit, 400 millions, la caisse.

M. Legault: Combien?

M. Rousseau (Henri-Paul): 400 millions directement.

M. Legault: Non, mais au total, sur...

M. Rousseau (Henri-Paul): Je vous le donne en capital de risque.

M. Legault: ...sur 143 milliards d'actif net, combien est investi au Québec?

M. Rousseau (Henri-Paul): Par exemple, on a une grande partie du portefeuille d'obligations qui sont des obligations du gouvernement du Québec. Est-ce que c'est une contribution au développement économique ou à son financement? Même chose pour Hydro-Québec. Même chose pour les municipalités. Donc, on a une grande partie du portefeuille obligataire qui est essentiellement investie au Québec et au Canada. Je n'ai pas ce chiffre. Non, mais ce chiffre-là change à tous les jours.

Je donne un exemple: quand j'investis dans une société comme la Banque Royale qui a des activités à Montréal, est-ce que j'investis au Québec ou au Canada? Quand j'investis à la Banque Nationale, qui est maintenant une société qui est pancanadienne et qui a des activités nationales, est-ce que je compte tout mon investissement au Québec ou au Canada? C'est des questions méthodologiques qui font que ce chiffre-là...

Une voix: ...

M. Rousseau (Henri-Paul): Non. Je n'ai pas ça. Ça n'existe pas, votre chiffre, et il est impertinent. Ce qui compte, c'est: Est-ce que le marché du capital de risque, le marché de la petite entreprise, le marché de la moyenne entreprise a un accès au capital? Et la réponse, c'est oui, parce qu'il y a un marché dynamique.

Le Président (M. Paquet): Alors, ça met fin à ce bloc. Il reste 55 min 31 s environ au groupe ministériel. M. le député de Hull.

Loto-Québec (suite)

Casino du Lac-Leamy, en Outaouais

M. Cholette: Merci, M. le Président. J'aurais une question concernant Loto-Québec. M. le Président, vous savez que Loto-Québec a des activités importantes dans notre région, en Outaouais, particulièrement dans mon comté, avec l'implantation du Casino du Lac-Leamy. Non seulement nous avons un casino le plus récent des trois casinos du Québec, mais nous avons également des équipements de très haut niveau qui accompagnent ce casino, soit l'hôtel Hilton du Lac-Leamy, une salle de concert, un centre des congrès, donc c'est véritablement un complexe extrêmement dynamique pour le développement touristique de notre région.

Sans contredit, beaucoup de commentateurs vont analyser la présence du casino comme étant très, très positive en Outaouais, la création d'emplois bien évidemment mais aussi les retombées secondaires, l'ensemble des sous-traitants, et aussi l'attrait touristique qu'offre ce genre d'établissement. À propos justement de cette offre de jeu, M. le Président, il n'en demeure pas moins qu'on a aussi plusieurs critiques à l'effet que ce genre d'offre de jeu crée des disparités en termes de richesse collective et qu'il nuit également justement à ceux qui ont peut-être un peu moins les moyens, qui se sentent attirés par cet établissement.

Moi, la question que je voudrais poser a trait particulièrement à la provenance de nos joueurs qui fréquentent le Casino du Lac-Leamy. Une des raisons qui ont motivé, je pense, le gouvernement de l'époque d'implanter cette maison de jeu dans un territoire limitrophe, frontalier, donc, à l'Ontario, c'est cette capacité d'attirer des non-Québécois à venir jouer avec un impôt volontaire, venir jouer dans notre établissement. On sait que, depuis ce temps-là, beaucoup de rumeurs font état de la présence possible bientôt d'autres maisons de jeu du côté ontarien. Et, dans ce sens-là, je voudrais savoir, dans un premier temps, de la part de Loto-Québec, quel est le pourcentage de joueurs qui proviennent de l'extérieur du Québec, particulièrement au Casino du Lac-Leamy par rapport aux autres casinos du Québec.

Et ma deuxième question... C'est qu'on sait aussi que Loto-Québec, de par ses revenus bruts, fait en sorte que certaines sommes sont dévolues vers les organismes communautaires qui sont reliés notamment par la présence géographique d'un casino à différentes activités liées à cette présence... à cette maison de jeu. Je voudrais savoir de la part de Loto-Québec quelles sont les sommes qui sont consenties, particulièrement en Outaouais, au niveau des organismes communautaires.

Le Président (M. Paquet): M. Cousineau.

M. Cousineau (Alain): M. le Président, dans la question, le député a fait état que nous avions, dans la région, un des établissements de divertissement intégré parmi les plus modernes de l'ensemble de notre offre. C'est le cas, mais je m'en voudrais de le souligner parce que je pense qu'ils en ont tous le mérite. Il y a un hôtel à Gatineau, vous le savez, le Hilton du Lac-Leamy. Tout le monde pense que c'est Hilton qui opère cet établissement. Ce sont des employés de Loto-Québec qui opèrent cet établissement et qui ont gagné, c'est une première mondiale, pour la troisième année de suite, le meilleur Hilton en Amérique du Nord parmi 271 Hilton en Amérique du Nord. Et ce n'est pas nous qui en faisons l'évaluation, mais c'est la grille extrêmement sévère de Hilton assortie d'acheteurs mystères. C'est la première fois dans l'histoire de Hilton que le même établissement remporte ce prix à trois fois. Pour nous, c'est important, parce que ça signale une qualité d'accueil et de services à la clientèle qui, ajoutés aux autres installations dont vous avez fait état, salle de spectacle et casino, ont un important impact sur le développement économique de la région, d'autant que je dois avouer que c'est l'établissement qui est le plus exposé à la concurrence de l'autre côté de la rivière: Rideau Carleton qui a récemment décidé d'ouvrir 24 heures par jour, d'ajouter possiblement des tables de jeu, de sorte que ce que nous appelons un «racino», en Ontario, se transforme progressivement en casino, et c'est ça qui est une concurrence plus vive.

Mais, pour répondre à votre question de façon précise, l'an dernier, le Casino du Lac-Leamy a généré des revenus de 201,9 millions de dollars. Nous avons accueilli 3 951 000 visiteurs et, parmi ceux-ci, la clientèle hors Québec. Évidemment, vous comprendrez que, dans le cas qui nous occupe, il s'agit de traverser un pont pour être comptabilisé comme client hors Québec. Mais ce qu'on veut dire, ce n'est pas de l'argent de Québécois qui est dépensé au Québec, c'est de l'argent d'Ontariens principalement qui est dépensé au Québec. Donc, le nombre de visiteurs hors Québec s'est établi à 1 855 000, donc 47 % de la clientèle du casino provient essentiellement du marché limitrophe ontarien. C'est une source d'emplois significative, c'est une source d'attraction touristique significative. Dans ce sens-là, ça a des retombées touristiques importantes. Mais, au-delà de ça, il y a évidemment une implication de la société notamment dans les commandites. Je pense au Festival des montgolfières, la Musiqu'en août à Saint-André-Avellin, on participe à la fête nationale du Québec la semaine prochaine, les Grands Feux Loto-Québec, qui sont toutes des activités d'attraction touristique ou de retombées économiques dans la région de l'Outaouais.

n(21 h 40)n

Mais nous participons à d'autres niveaux et à d'autres organismes, qu'on pense à toute l'activité de vente de produits de loterie évidemment qui bénéficie à des organismes sans but lucratif qui sont appelés à faire la vente, qui sont des intermédiaires. Et il y a évidemment tous les établissements licenciés pour lesquels... les établissements licenciés qui ont des appareils de loterie vidéo, qui reçoivent des commissions de Loto-Québec. Alors, il y a, au-delà du casino, toutes les autres activités de la société dans l'Outaouais, et on essaie autant que possible d'équilibrer, si on revient juste sur la question des commandites, notre apport régional en fonction de la contribution de chacune des régions.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Cousineau. Mme la députée de Laporte.

Caisse de dépôt et placement du Québec (suite)

Défis pour les prochaines années

Mme Ménard: Oui, j'aurais une question. Bon. Comme toute grande institution, j'imagine que la Caisse de dépôt a énormément de défis. J'aimerais entendre quel est le principal défi de la caisse au cours des prochaines années, sur quoi on va travailler.

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): Merci, M. le Président. Aujourd'hui, notre travail consiste à établir des stratégies de placement dans un monde qui est en profonde transformation. Cette transformation-là n'est pas au début, hein, l'histoire de la mondialisation, on est au début de ça et on doit savoir que c'est là pour continuer, c'est près de 2 milliards de travailleurs qui rentrent sur le marché du travail, ça crée une pression énorme à la baisse sur les salaires, sur les prix. Et on sait maintenant que, ces pays-là, leurs peuples sont encore pauvres, mais les gouvernements sont riches, et il y a ces grands réservoirs de capitaux en Chine, en Inde et dans les pays qui sont des réserves internationales. En plus de ça, on a un contexte où la croissance économique est deux fois plus forte sur le plan mondial qu'elle l'était il y a quelques années.

Donc ça, c'est tout du positif, et en même temps, depuis cinq ans, la valorisation des actifs a été très forte, très rapide. On pense à l'immobilier, les placements privés, les actions et les obligations. Donc, on est dans une situation où les écarts de taux ou de rendements, pour le risque qu'on prend, sont très minces. Quand on est dans cette situation-là, c'est extrêmement difficile de trouver les endroits où on doit investir. C'est pour ça que, depuis trois ans, on a déplacé, si vous regardez notre rapport annuel, qui était plutôt actions et obligations, on a déplacé énormément vers les fonds de couverture, les activités de placement privé, les infrastructures, l'immobilier et de plus en plus à l'international pour aller chercher ces rendements-là.

Notre défi, donc, c'est de pouvoir avoir accès curieusement non pas aux transactions, mais aux personnes qui ont la compétence pour nous permettre de développer ces transactions. Alors, notre défi principal est un défi de ressources humaines, et la caisse a été une extraordinaire école pour l'industrie financière du Québec et du Canada et même du monde entier. On voit des gens de partout qui viennent à la caisse.

Le problème, c'est qu'on ne peut pas être une école éternellement. Il faut être une organisation qui a de la pérennité et de la continuité, et c'est pour ça qu'aujourd'hui on réussit à attirer des gens, on leur donne à la fois des défis, et on les compense, et on les rémunère différemment en fonction de leurs performances. On est allés récupérer des gens en France, à Londres, à Los Angeles, à Boston, et on est en train de recréer à Montréal une masse critique importante de savoir et de know-how dans cette industrie qui est l'industrie du placement.

Ça, c'est une contribution aussi au développement économique, mais ce n'est pas facile, parce qu'en même temps que ça se passe vous avez, au Canada, de grands joueurs qui sont en développement. Le fonds de pension du Canada, qui était placé uniquement en obligations pendant longtemps, maintenant il est placé dans un mode diversifié. PSP, qui est l'équivalent de la CARRA, est installé à Montréal. Vous avez l'ensemble des autres caisses de retraite du Canada. Juste ces joueurs-là, les huit, ça représente plus de 800 milliards de dollars. À 10 % de rendement, c'est 80 milliards de nouveau cash qui cherchent à être investis au Canada. Il ne manque pas de cash ici, il y a énormément de gens qui concurrencent. Regardez dans BCE, on est un parmi trois au consortium, il va y en avoir peut-être d'autres, et c'est une concurrence féroce.

Toutes les transactions importantes font l'objet de compétition énorme, et là ça nous prend l'accès à du talent. Et c'est ce talent-là qui est le nerf de la guerre. C'est pour ça qu'on fait des ententes avec les universités et c'est pour ça qu'on axe notre développement beaucoup sur le recrutement de jeunes, on fait de l'incubation de jeunes talentueux dans toutes les facettes, non seulement dans le placement, mais aussi dans le contrôle. Et ça, c'est de créer un environnement professionnel pour l'ensemble des déposants à la caisse, mais aussi, c'est normal, la caisse va continuer, dans un sens, d'être une école, mais je ne voudrais pas être majoritairement une école. Ça ne me fait rien de perdre 10 % de mon monde sur cinq, six ans, mais je ne veux pas recommencer à construire la caisse à tous les cinq ans, ce qu'on a fait, ce qu'on a fait. Et on ne doit plus être une école.

Maintenant, je suis content de dire que notre taux de roulement a baissé de moitié par rapport à ce qu'il était, et nos employés... maintenant, on commence à avoir de plus en plus de gens qui ont plus de cinq ans d'expérience à la caisse et on recrute pour les garder, pour les conserver. Cette pérennité-là est essentielle pour garder le know-how, garder la capacité et bâtir une organisation qui est au service de ses déposants et du Québec.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la ministre des Finances.

Mme Jérôme-Forget: On va permettre au député de Rousseau un petit effort de mémoire, simplement pour lui rafraîchir un peu le souvenir du passé. Je voudrais lui parler du fameux deal dans lequel le Parti québécois est intervenu, va-t-il se rappeler, le deal qui avait été fait entre Rogers et Vidéotron. Et alors là le Parti québécois est intervenu personnellement, d'ailleurs ce qui était, à bien des égards, une intervention qui n'était pas justifiée, M. le Président, en ce sens qu'un gouvernement intervienne dans une transaction, déjà on peut s'interroger. Mais le député de Rousseau est d'accord avec ça, il trouve que c'est une très bonne approche.

Or, le deal, on a investi, à ce moment-là, 3,2 milliards de dollars. Peut-il se rappeler qu'encore aujourd'hui, suite à cette décision et transaction, ce fameux deal qui avait été fait à l'époque, il y a encore une perte de 1,4 milliard de dollars? J'aimerais également lui rafraîchir la mémoire parce que, M. le Président, pour mettre fin à l'entente entre Rogers et Vidéotron, il y avait ce qu'on appelle un «breaking fee» ? je ne connais pas le nom ? de 250 millions de dollars, un cadeau à Rogers, un cadeau.

J'aimerais lui parler également d'une autre intervention, l'interventionnisme, il aime ça, peut-être que ça va lui rappeler justement Montréal Mode. Montréal Mode, 31 millions de dollars perdus. Marie Saint Pierre, qui existe toujours parce qu'elle n'a pas joint... Moi aussi, je la connais, Marie Saint Pierre, tout le monde connaît Marie Saint Pierre, surtout, nous, les femmes. Je suis étonnée que le député de Rousseau connaisse Marie Saint Pierre, mais... Alors, elle, elle estime que c'est justement parce qu'elle n'est pas allée dans le deal de Montréal Mode qu'elle a survécu.

Alors, voilà les grandes ambitions du député de Rousseau qui, lui, pense que le gouvernement est mieux placé pour prendre des décisions puis intervenir, alors qu'on peut avoir en mémoire, en mémoire récente, des transactions qui ont été désastreuses quand le Parti québécois s'en est mêlé. Alors, je l'invite à beaucoup de prudence et je l'invite surtout à faire confiance aux gestionnaires qui justement sont impliqués dans l'investissement du bas de laine des Québécois. Et rappelons-nous, M. le Président, qu'il n'y a pas très longtemps que tout le monde pleurait ici, autour, dans cette salle, à cause de la Société de l'assurance automobile du Québec à qui on remarquait un très grand déficit. Vous vous rappelez? Que le taux... pas de financement, mais le taux de capitalisation était rendu à un niveau tel que finalement il fallait doubler ou tripler les primes. Bien, je dois dire qu'à cet égard on est bien contents d'avoir eu la Caisse de dépôt, d'accord, parce que les résultats ont été probants à cet égard.

Alors, je voudrais simplement que le député de Rousseau soit également capable de faire l'inventaire de ce qui s'est passé alors que son gouvernement était en place et qu'il intervenait personnellement dans les dossiers de la Caisse de dépôt avec le désastre, les désastres que nous avons connus. Et, s'il veut que je lui rafraîchisse la mémoire avec d'autres désastres, ça va me faire plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, Mme la ministre. Bon. Sur ce bloc, ça va? Donc, nous sommes rendus à l'opposition officielle. Il reste au total 30 min 51 s, une possibilité de le diviser en deux blocs de 15 minutes, si ça vous sied.

M. Taillon: Une remarque, et ensuite je vais passer la parole au député de Beauce-Sud. Une petite remarque rapide, s'il vous plaît.

Le Président (M. Paquet): Oui. M. le député de Chauveau.

M. Taillon: Merci, M. le Président. Alors, écoutez, M. le Président, nos organismes, nos sociétés d'État sont des organismes bien pourvus en ressources humaines compétentes, ça, je pense qu'il faut le reconnaître. Maintenant, nous, à l'ADQ, quand on scrute les engagements de nos sociétés d'État, les engagements financiers, souvent on titille et on s'interroge sur des embauches de firmes de relations publiques, des firmes de relations gouvernementales ou des investissements dans des activités périphériques qui nous questionnent. C'est un commentaire que je voulais faire, M. le Président, ce sont des questions en apparence souvent simples mais qu'on doit peut-être se poser pour éviter des catastrophes comme on a connues dans d'autres juridictions ou certaines catastrophes que l'actualité récente nous a rappelées très récemment. M. le député de Beauce-Sud.

n(21 h 50)n

Le Président (M. Paquet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Morin: Alors, M. le Président, Mme la ministre, MM., Mmes les fonctionnaires et MM. les dirigeants de trois très importantes sociétés d'État, si je vous disais que je ne suis pas un tout petit peu... un tantinet intimidé devant un tel trio, il faudrait que j'aille me confesser après la commission parlementaire. Alors, c'est un grand plaisir pour moi de prendre la parole à cette commission.

Vous savez, aujourd'hui, on a eu la chance de parler amplement de la dette. Tout le monde avait sa solution. La solution la plus facile à saisir était peut-être celle-là du député de Hull qui a quitté, là, mais qui nous a donné un cours sur le courtage hypothécaire en gros, en nous disant que plus on a une hypothèque qui est grosse, plus on est riche. C'était un peu ce qu'il voulait nous dire.

Mais bref on va passer à un autre sujet. J'aimerais surtout parler de la Caisse de dépôt et placement. Vous savez, vous êtes un fleuron de l'économie québécoise, puis, nous, à l'ADQ, on apprécie ce que vous faites et puis ce que vous représentez. Puis, nous, c'est sûr, comme tous les autres, nous nous soucions qu'il y ait une saine gestion.

Comparaison avec d'autres investisseurs

Sur ce, M. Rousseau, j'aimerais vous poser quelques petites questions pour en connaître un peu plus sur la Caisse de dépôt. Quand on compare un peu les rendements que vous connaissez actuellement avec d'autres fonds, d'autres grands investisseurs institutionnels, je vais mentionner, là, Teachers', vous vous voyez où par rapport aux autres grands investisseurs institutionnels?

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau, président de la caisse.

M. Rousseau (Henri-Paul): Merci, M. le Président. Il y a plusieurs joueurs institutionnels, mais notre marché de référence, c'est essentiellement les grandes caisses de retraite canadiennes, les grands gestionnaires de caisses de retraite canadiennes. Donc, vous avez nommé Teachers', on peut nommer le Fonds de pension du Canada, PSP ? PSP qui gère les caisses de retraite des employés du gouvernement fédéral ? on peut nommer OMERS qui est les municipalités ou les hôpitaux de l'Ontario, BC puis l'Alberta. C'est les principaux joueurs du secteur public. Ajoutons à ça les grandes caisses privées comme celle du CN, ou de Bell, ou les autres. O.K. Ça, c'est le marché de référence pour à peu près tout ce qu'on fait et c'est le marché que les firmes comme SEI ou Royal Bank Dexia font pour mesurer la performance. O.K. C'est là-dessus qu'on se compare.

La distinction entre nous et la plupart de ces joueurs est fondamentale: nous avons 25 déposants, la plupart d'entre eux en ont un seul. En conséquence de quoi, lorsqu'on compare, par exemple, le rendement du Fonds de pension du Canada et la caisse, il faudrait plutôt comparer le fonds de rendement du Fonds de pension du Canada avec la Régie des rentes. Ça, c'est comparable. O.K. Il faudrait plutôt comparer celui de Teachers' avec le RREGOP qui correspond, les enseignants et les employés du secteur public. O.K. Bon.

Ceci étant dit, nous, c'est comme ça qu'on se compare. Et, quand on regarde la performance de nos gestionnaires, on prend les actions canadiennes contre les actions canadiennes, le placement privé contre le placement privé, et chacun des secteurs parce qu'ils doivent battre les indices de marché, donc faire mieux que le marché et aussi idéalement faire mieux que leurs pairs.

Ceci étant dit, la plupart d'entre vous et d'entre nous, on ne peut pas empêcher personne de dire: Quel est le rendement de la caisse? Et, ces nuances étant faites, le rendement de la caisse, on le calcule, on le rend public, à chaque année, dans le rapport annuel, mais on l'appelle le rendement moyen des déposants. Ce rendement moyen a été, cette année, de 14,6 %, et, pour une rare fois depuis 25 ans, on a été mieux que Teachers' à 13,2 %. Et par contre OMERS a fait un peu mieux que nous.

Ce qui est plus important pour nous, c'est plutôt la performance moyenne de notre portefeuille sur une longue période. Le court terme, chez nous, se définit en trois ans. Et j'en profite pour dire que, tantôt, là, quand on nous parlait qu'on regarde à court terme les actions, non, ce n'est pas vrai. Le minimum du court terme, chez nous, c'est trois ans, et c'est sur cinq ans et plus que les gens sont rémunérés dans le programme long terme. Pourquoi? On veut justement qu'il y ait une perspective d'investisseur et non pas de spéculateur à court terme. On est là pour la durée, et c'est un des avantages caisse.

Donc, notre comparaison entre nous et ces joueurs a été, dans les trois dernières années, en termes de rendement absolu, très bonne. Pourquoi je peux dire ça? Pour deux raisons. La première, c'est que notre rendement, sur les trois dernières années, en moyenne, a été dans les 5 % meilleurs de l'industrie sur les trois dernières années. Donc, ce n'est pas... Le premier quartile, c'est les premiers 25 %. Mais les premiers 5 %, là, c'est comme les premiers de la classe.

Et, dans ça, les grandes forces de contribution sont venues de trois secteurs, le premier, c'est le secteur immobilier. Et une des raisons pourquoi la caisse est si bonne dans l'immobilier, c'est justement parce que c'est le regroupement de tous les joueurs ensemble. On ne pourrait pas faire les transactions que nous faisons actuellement si on n'avait pas ce regroupement et cette capacité d'écrire un gros chèque et d'exécuter des transactions globales comme on fait, parce qu'on a mis tous les déposants ensemble. Et c'est pour ça qu'il faut que la caisse demeure ensemble, ça fait partie de l'avantage caisse.

Deuxième groupe, c'est le secteur du placement privé et enfin le secteur des actions canadiennes, qui ont été les principaux performeurs. Et ça, c'est la première raison pourquoi on a eu cette performance, ces trois joueurs-là.

L'autre raison, c'est qu'en 2002, quand ça allait très mal et que tout le monde nous disait: Il faut sortir, il faut sortir... Vous savez, il y a une règle, dans le placement... il y en a plusieurs, mais il y en a une entre autres, c'est que ça prend un peu de patience, ça prend même beaucoup de discipline et de la patience. Et, en 2002, on a dit à tout le monde: On ne vous en redonnera pas, d'argent, on ne liquidera pas les portefeuilles. On va être patients avec nos placements. On parlait tantôt de Quebecor Média, on a été patients depuis cinq ans, on a récupéré une partie de la mise. Je ne pense pas qu'on va tout récupérer, ça a été payé à des prix de bulle et on n'y retrouvera pas cette bulle avant longtemps. Puis, ceci étant dit, on a quand même été patients et on a même acheté ceux qui paniquaient pour faire en sorte... C'est pour ça que nos rendements dans les fonds de placement privé sont exceptionnels, ont été très, très bons, et également dans l'immobilier.

Le passé n'est pas garant de l'avenir. Les perspectives que nous avons, je l'ai répété à chaque année, on travaille sur un horizon de rendement de 7 % et avec l'hypothèse qu'une année sur six les marchés devraient... normalement, ils vont donner des rendements moins bons et probablement négatifs. Notre objectif à nous, ce n'est pas en soi d'être le premier 5 %, mais d'ajouter de la valeur par rapport aux indices de nos déposants. Et, là-dessus, c'est la deuxième raison pourquoi je suis très fier de mes équipes, c'est qu'on a créé 4 milliards de valeur dans les trois dernières années, et c'est un 4 milliards sur lequel on va faire de l'argent pour longtemps. Parce qu'il faut comprendre que, dans le placement, le rôle de rendement est majeur. Aujourd'hui, la Caisse de dépôt a 150 milliards. Une très grande partie du 150 milliards, c'est le rendement, parce que, si on fait la somme de ce qui a été déposé et de ce qui a été retiré par les déposants, il reste en gros plus ou moins le rendement, surtout jusqu'à 2005.

Récemment, avec les dépôts au Fonds des générations et l'augmentation des contributions du gouvernement au FARR, les dépôts nets ont augmenté, mais, jusqu'à 2005, l'histoire de la caisse en 40 ans, si on enlevait la somme mathématique des dépôts et des retraits des déposants, il ne restait que 135 milliards de rendement, pour montrer comment le rendement est important. Et, chaque fois qu'on fait moins bien qu'on doit faire, c'est des générations longtemps qui vont en payer le prix, parce que le rendement cumule vers des dollars à venir, et c'est pour ça qu'il faut être très parcimonieux sur la façon dont on gère cet argent.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, j'aimerais...

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre des Finances, oui.

Mme Jérôme-Forget: Bien, simplement pour corriger une impression qu'a soulevée le député de Beauce-Sud au tout début, où il a invoqué que mon collègue le député de Hull avait dit que plus on s'endettait, plus on était riche, quelque chose dans le genre. Ce n'est pas ça qu'il a dit, le député de Hull. Ce qu'a dit le député de Hull, au niveau de l'endettement, M. le Président, c'est que, si on gagne seulement 25 000 $ par année, on peut se payer une maison de probablement 15 000 $, mais, si on en gagne 100 000 $, on est capable de s'endetter davantage. C'est ça qu'il a dit, le député de Hull. Alors, il ne faut pas déformer la pensée.

Je veux avertir le député de Beauce-Sud, M. le Président. Il est très gentil, on l'aime bien, mais, à chaque fois qu'on dit quelque chose, dans cette Chambre, où on peut se faire pincer, on se fait pincer, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, Mme la ministre. M. le député de Beauce-Sud.

M. Morin: M. le Président, je pourrais rajouter qu'on aurait pu aller plus loin, on aurait pu demander de sortir la cote Beacon pour voir s'il avait les moyens ou s'il avait une cote de crédit qui était respectable pour aller s'endetter. Mais peut-être que j'étais le seul qui l'écoutait, là.

Portefeuille immobilier

L'autre fois, vous m'avez mentionné, M. le président, là, pour deuxième question, vous avez parlé beaucoup de l'immobilier, de l'importance de l'immobilier dans vos portefeuilles, dans vos placements. Tous les spécialistes actuellement sont plus ou moins d'accord pour dire qu'on s'en va vers vraiment un ralentissement à ce niveau-là. Est-ce que, vous, à la Caisse de dépôt et placement, vous prévoyez peut-être modifier un peu vos plans d'investissement dans un avenir assez rapproché?

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

n(22 heures)n

M. Rousseau (Henri-Paul): M. le Président, c'est déjà fait. Par exemple, une des raisons pourquoi nos performances en immobilier, en 2005 et 2006, ont été si bonnes, nous avons vendu une grande partie de nos centres d'achats aux États-Unis parce que nous prévoyions à l'époque un ralentissement, et je pense qu'on a eu raison. En même temps, on a investi en Allemagne, on a investi en Alberta, on a investi au Québec, on a investi dans les marchés où les valeurs étaient moins fortes pour profiter de ces marchés.

Dans l'immobilier, la taille de la caisse, à hauteur de 60 milliards d'actif propre et d'actif de gestion, fait de nous un des 10 plus grands joueurs au monde. Ce n'est pas n'importe quoi. Et c'est une équipe formidable, organisée, qui travaille depuis 25 ans, qui a énormément d'expertise. Et cette équipe-là diversifie le portefeuille selon les cycles, selon les régions. Et c'est pour ça que, oui, l'immobilier, dans certains coins de la planète, est trop cher, comme à Londres. Par contre, Paris, depuis trois ans, on a commencé à bâtir. Aujourd'hui, on est très heureux. On a investi en Pologne voilà quatre ans, aujourd'hui on va vendre une partie de nos affaires parce que le marché est valorisé.

Donc, on n'est pas un joueur... on n'est pas un investisseur qui investit de façon passive en immobilier, qui conserve son placement. On a investi avec une optique de cinq, six sept ans de sortir lorsqu'on a fait notre argent. Donc, on est très actifs dans... on change de portefeuilles.

Deuxième remarque que je peux vous dire: La caisse a très, très peu de risques immobiliers auprès des particuliers, pour la simple raison qu'on est une institution de gros et non pas de détail et ce n'est pas dans la nature de nos activités. Et, pour cette raison, tout ce qui se passe aujourd'hui aux États-Unis sur ces marchés-là, oui, ça a un effet de correction majeure et des risques de crédit importants pour certains joueurs, on parle de «subprime», et tout ça, mais je peux vous rassurer qu'on n'est pas dans ça.

Et le secteur immobilier offre encore de bons rendements pour le risque que ça représente. Le problème: ce qui est vrai pour nous est vrai pour la planète, et, encore une fois, depuis, je dirais, 18 mois, notre principal problème, ce n'est pas nos stratégies, c'est de se faire, comme on dit en français, scooper les deals parce qu'il y a énormément d'argent disponible, et ça, c'est notre... Notre drame à nous, c'est de ne pas être capables de gagner les transactions lorsqu'on pense qu'on a le bon prix, la bonne valeur et qu'on la perd pour 2 % d'ajustement de prix. C'est catastrophique parce que, sur un horizon de cinq ans, ça ne fait pas de différence. Et c'est ça, le grand... Le grand problème de l'immobilier, c'est notre capacité d'avoir du succès autant qu'on voudrait pour réaliser les transactions là où c'est encore intéressant.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Rousseau. M. le député de Beauce-Sud.

Rémunération des dirigeants

M. Morin: Merci, M. le Président. Un dernier volet peut-être que je voudrais discuter, parce qu'on parlait beaucoup de réduction d'impôt récemment là, c'est la rémunération des dirigeants de chez la Caisse de dépôt et placement. On a vu ici votre salaire, et tout, là. N'ayez pas peur, je ne vous demanderai pas votre retour d'impôt... je ne vous demanderai pas votre retour d'impôt suite aux réductions d'impôt, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin: Mais c'est qu'on associe le bonus que vous avez touché... c'est un peu à la performance. Mais, si on regarde au niveau mondial, la performance a été bonne partout. Est-ce que vous pouvez m'expliquer... Ça allait bien partout. Je trouve que le bonus a été assez payant pour certains de vos dirigeants, là.

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): Si vous permettez, je vais demander au président du conseil de répondre parce qu'il s'agit d'une question qui me concerne. Donc.

Le Président (M. Paquet): Alors, M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): D'abord, d'entrée de jeu, je pense qu'il faut préciser que la rémunération du président et chef de direction de la Caisse de dépôt est établie par décret. Et le décret, en gros, dit que la rémunération totale, salaire, bonus à court terme, bonus à long terme et tous les paiements ne doivent pas excéder le troisième quartile de l'ensemble des 10 principaux... ce n'est pas les 10, mais tous les principaux fonds de pension canadiens: alors, les Teachers', les OMERS, BC Funds, etc. Donc, en partant, ça, c'est la première chose.

Deuxièmement, c'est qu'on parlait de rendement tantôt, je pense qu'il faut que vous acceptiez puis compreniez parce que... quand on le vit de près, que, si les rendements de la caisse, dans les dernières années, se situent dans les premiers de classe, dans les cinq premiers, ça n'arrive pas tout à fait par hasard. Il faut de la stratégie, il faut de l'organisation de personnel, il faut que les objectifs soient là, et ça prend beaucoup de temps. Et le conseil d'administration a participé, c'est le chef de direction et ses cadres qui présentent les objectifs et la stratégie. Et les discussions sont faites pour... Et le conseil d'administration est là pour juger de l'à-propos des objectifs stratégiques et ensuite réaliser et considérer s'ils ont été atteints.

Alors, dans les derniers trois ans, les stratégies et les objectifs étaient assez sévères. M. Rousseau a tendance à mettre la barre plus haute; M. Guy en sait quelque chose: il faut que les résultats arrivent. Et le conseil d'administration a manifesté, d'une façon unanime, sa très grande satisfaction face au travail établi dans les derniers trois ans.

Et, en calculant toute la rémunération de l'ensemble, le boni total, en se fiant sur le rendement que la caisse a eu et en fait où le décret va jusqu'à 75 % ou le 75e du 100 sur tous les fonds de pension, le conseil d'administration a décidé de frapper le maximum pour reconnaître la contribution du chef de direction.

M. Rousseau (Henri-Paul): Juste rajouter...

Le Président (M. Paquet): Rapidement, M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): Le principe qui gère la rémunération de tous les dirigeants de la caisse, ce n'est pas que ce que les marchés offrent comme rendement. L'an passé, on a fait 14,6, mais on a fait 200 points quasiment de valeur ajoutée. Et, si nous n'avions pas eu de valeur ajoutée, c'est-à-dire une performance supérieure à nos indices, il n'y aurait pas eu de boni. O.K.? Et ça, il faut comprendre ça dans toute la logique. Ça veut même dire qu'une année où les marchés financiers offraient un rendement de moins 3 % pour la caisse et que la caisse réussirait à faire moins 1 % on aurait ajouté 200 points sur 150 milliards et les gestionnaires qui ont contribué à cette valeur ajoutée là auraient des bonis.

Il y a une autre règle chez nous: c'est extrêmement méritocratique, c'est-à-dire que, si vous avez un boni en fin d'année, c'est parce que vous avez dépassé les objectifs qu'on vous avait donnés, autrement il n'y a pas de boni, et, chez nous, c'est la règle. Il y a des gens qui n'ont pas de boni, il y a des gens qui ont des grands bonis. Et deuxième concept qu'il faut savoir: ce n'est pas sur un an qu'on fait ça. Le court terme est trois ans et le long terme est cinq ans. Donc, c'est un système qui fait en sorte que, si vous êtes bon une année, ça peut être par chance, mais il faut être bon longtemps pour que ce soit payant. C'est ça qui arrive.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, ça termine ce bloc-ci. Je cède la parole maintenant au député de Rousseau, là, en l'avisant qu'il reste 22 min 5 s à sa formation politique et je compte bien qu'il va le séparer en deux blocs séparés, évidemment deux blocs de 11 minutes.

M. Legault: Merci, M. le Président. D'abord, une courte remarque, là, sur les propos de la ministre des Finances concernant Vidéotron. Vous savez, quand on fait des investissements, il faut regarder la moyenne au bâton, et puis c'est vrai que ça n'a pas été un bon coup. Par contre, quand la Caisse de dépôt, dans son histoire, a investi dans CGI, dans Bombardier, dans Domtar, dans Rona, dans Cascades, dans NSC-Lavalin, dans Couche-Tard, ces fois-là ils ont fait un bon deal, et...

En tout cas, sans refaire la petite histoire, on va tous se rappeler que l'acquisition de Vidéotron s'est faite après la vente de Provigo. En tout cas, moi, j'étais en total désaccord avec ça, là, qu'on vende Provigo, un de nos fleurons, à Loblaw. J'ai même vu le fondateur, Antoine Turmel, presque pleurer en tout cas dans une rencontre où j'étais présent. Disons qu'il y avait de la pression. Je ne veux pas excuser la transaction, mais il y avait beaucoup de pression d'avoir fait une erreur de vendre Provigo à Loblaw, et là on ne voulait pas faire la même chose avec Vidéotron, mais, effectivement, là, pour un réseau de câble, on a payé très cher.

Placements au Québec (suite)

Peut-être deux questions rapides pour M. Rousseau. Je veux revenir tantôt, là, à... parce que j'aimerais ça avoir un ordre de grandeur des actifs de la caisse qui sont investis au Québec, puis allons-y d'une façon généreuse, là. Supposons, quand il y a un siège social qui est au Québec, même s'il y a des activités à l'extérieur du Québec, qu'on le calcule comme étant investi au Québec, là, je veux juste avoir un ordre de grandeur, là, au 31 décembre 2006, là, si on essayait... essayer de mettre un pourcentage, là. Est-ce que vous diriez qu'il y a 10 %, 20 %, 30 %, 40 % des actifs de la caisse qui sont investis au Québec? Avoir donc un ordre de grandeur. Ça, c'est ma première question.

Maintien de sièges sociaux au Québec (suite)

Deuxième question: Concernant le contrôle des entreprises, j'ai entendu à plusieurs reprises M. Rousseau dire que, ce qui est important, ce n'est pas le contrôle de l'actionnariat, c'est la présence d'un vrai siège social. Il nous disait, lui, que l'actionnariat, c'est secondaire. Ce qui est important, c'est là où est situé le vrai siège social. Comment définit-il «vrai siège social»?

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

Placements au Québec (suite)

M. Rousseau (Henri-Paul): Merci, M. le Président. Sur la première question sur l'ordre de grandeur, un chiffre qu'on connaît bien parce que c'est les monnaies qui nous guident, on sait que, si on distingue dollar canadien et autres devises, ça, on a un chiffre précis, O.K., on a investi à 63 % en dollars canadiens, O.K.? Ça, je peux vous dire ça. Et notre investissement au Québec est de loin la très large proportion de ça, et une des principales raisons, c'est que notre portefeuille obligataire, sur le 143 milliards, qui compte pour près de 30 % est essentiellement investi dans les obligations de la province, Hydro et du secteur public. Mais ça, pour moi, c'est parce qu'il y a des besoins de liquidité et de sécurité de la part des déposants.

Là où je regarde plus quel est notre impact sur l'économie du Québec, c'est dans le portefeuille de placements privés, et c'est normal, et, celui-là, il est très largement en placements privés au Québec, et nous sommes présents dans plusieurs «success stories». Ce n'est pas parce que nous n'avons pas de position de blocage à hauteur de 35 %, comme vous souhaiteriez, qu'on n'est pas là. Nous sommes là, et vous les connaissez comme nous: les alimentations Couche-Tard, les GARDA, les CAE, les Axcan Pharma, Groupe Laperrière, je peux en nommer, ils sont dans le rapport annuel. On est présents. On est très investis au Québec et on va le demeurer. Le débat que nous avons n'est pas là-dessus. Est-ce que la caisse investit au Québec? Oui, très largement et beaucoup, et on va continuer.

n(22 h 10)n

Notre stratégie d'investissement au Québec est beaucoup plus fine que simplement la caisse. On a segmenté ça en cinq composantes du marché, et c'est important qu'on se comprenne là-dessus parce que, dans le capital de risque, quand la caisse faisait la pluie puis le beau temps, il y avait la caisse et personne d'autre. Et, quand la caisse disait non, le deal mourait. Ce n'est pas bon, ça, pour une économie. Ça prend un marché où les investisseurs qui ont des idées peuvent trouver du financement, et c'est ce qu'on a fait. On a transformé cette industrie-là, et j'en suis très fier, et je suis convaincu que, parce qu'on a fait ça, aujourd'hui le Fonds de solidarité, le Groupe Desjardins, le Fonds CSN et tout le monde, on travaille ensemble sur des deals parce que la caisse n'est plus nécessairement un compétiteur d'eux autres, on est un collaborateur. Ça, c'est un.

Sur la petite entreprise, on avait créé des succursales à travers les régions, on perdait de l'argent, on ne faisait rien, on avait, après sept ans, investi 135 millions. On a fait un appel à tous, on a dit: Ceux qui sont dans ce marché-là, National, Desjardins et tous les gros joueurs, venez nous faire une proposition. À ma grande surprise, la Banque de développement du Canada nous a fait une proposition extraordinaire: ils mettaient 150 millions si on mettait 150 millions, ils géraient nos portefeuilles, et ils sont présents dans toutes les régions du Québec et du Canada, et ils font, en gros, 40 % au Canada. Donc, pour nous, c'était du bonbon, on est allés avec ça, on a renouvelé l'entente récemment pour un autre 300 millions.

Dans la grande entreprise, ça, c'est un secteur où, vous avez raison, dans les années quatre-vingt, la caisse était le seul joueur, parce que les entreprises du Québec n'avaient pas la capacité financière qu'ils ont maintenant. Mais aujourd'hui, quand Jean Coutu a acheté aux États-Unis, on était un parmi d'autres. Quand Métro a acheté, là, en Ontario, son compétiteur, on était un parmi d'autres, et ils ne viennent plus nous voir. Pourquoi? Parce qu'il y a de l'argent, comme ça, disponible. Ils vont revenir nous voir quand ça va aller mal. «Don't worry», ils vont venir nous voir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rousseau (Henri-Paul): Mais là, aujourd'hui, ils n'ont pas besoin de nous autres, puis ils n'ont pas besoin de nous autres pour une autre raison: nous autres, ça nous prend du rendement pour le risque qu'on prend. Quand ils vont voir le Fonds de solidarité qui fait 7 % de rendement sur son portefeuille, il peut faire 7 % parce qu'il y a un autre 5 % qui vient d'un crédit d'impôt. Nous, nos déposants, ils n'ont pas de crédit d'impôt. Ils veulent un vrai 12 %, et, pour avoir 12 %, c'est impossible. Or, très souvent ils viennent nous voir puis ils disent: Bien, nous autres, ça va prendre un rendement de 10 %, 12 % là-dessus, le fonds peut le faire à 7 %. Et malgré ça le fonds a 6 milliards puis il y a uniquement quelque 2 milliards et plus investis en capital de risque. Donc, il ne manque pas d'argent dans ce secteur-là et il y a de l'argent disponible.

Le débat que nous avons, c'est: Est-ce que la caisse doit prendre position pour empêcher le contrôle? Je vous ai dit là-dessus que la façon légitime de le faire, acceptée par les marchés mondiaux, c'est d'encourager la détention par des actions à vote multiple. Et ça, notre position a été très claire, nous avons été capables de convaincre beaucoup de sages et gourous de la gouvernance au Canada de ne pas canner cette affaire parce que l'avenir du Canada et du Québec est dans ça, et c'est important que les entreprises familiales gardent le contrôle. Mais je suis convaincu que...

Une voix: ...

M. Rousseau (Henri-Paul): Oui, parce que cet aspect-là est majeur.

 

Maintien de sièges sociaux au Québec (suite)

Le siège social, il y a plusieurs façons de le définir, mais, moi, ma façon très pratique de le définir, c'est où habite le P.D.G., où est-ce qu'il accroche son chapeau, le soir, quand il couche chez lui, où est-ce qu'est son adresse, où est-ce que... et celui ou celle des finances, supposons que c'est une femme, ça pourrait arriver, O.K...

Des voix: ...

M. Rousseau (Henri-Paul): ...puis le service corporatif... une avocate, où est-ce qu'elle... Ces trois fonctions-là sont clés. Pourquoi? Parce que la personne aux finances, la personne qui est au service corporatif ou au niveau juridique et le «CEO», essentiellement c'est ceux qui sont là. Tu as aussi une autre fonction qui est le chef des opérations.

Ce que j'ai dit à des gens qui m'ont posé la question là-dessus: Dans une entreprise planétaire qui ferait des affaires sur deux, trois fuseaux horaires, on peut avoir deux, trois sièges sociaux, ce serait normal, mais, quand on est dans le même fuseau horaire, il y a un siège social qui a du bon sens et c'est le siège social où ces gens-là habitent. Il peut y avoir des centres régionaux, ça existe. Nous aussi, on a des opérations un peu partout sur la planète, mais le siège social, il faut qu'il soit à une place. Et la distinction entre le bureau exécutif puis le siège social, c'est une distinction, il faut aller voir où habitent les gens.

Pourquoi c'est important? Parce que les décisions de contrats sur qui va faire la comptabilité, qui va faire les services juridiques, les décisions d'aide aux artistes, aux activités culturelles, à tout ce qui se passe au siège social, c'est là que ça se passe. Et ça, c'est important que le siège social soit là, puis, nous, lorsqu'on regarde une transaction, la dimension du siège social, on en tient compte. Ce n'est pas la seule, mais on en tient compte également. Et pourquoi on en tient compte? Parce qu'on sait très bien que, si on est plusieurs en ville à participer à l'activité communautaire, à la partie civile de l'activité de la ville ou de la province, bien, il y a plus de monde pour contribuer. Si on a juste la Caisse de dépôt et puis Hydro-Québec, bien là on se fait quêter à tous les jours, des fois on va être obligés d'aller à Loto... parce qu'il se fait quêter, lui aussi.

Mais la dimension des sièges sociaux est fondamentale, et on y croit, et on y travaille. Mais l'approche qu'on doit avoir, c'est une approche qui est acceptée par les marchés et qui ne pénalise pas nos entreprises pour leur donner un coût du capital trop élevé, j'en suis convaincu par expérience de la caisse et par expérience des pays qui ont fait ça. Aujourd'hui, ce que les pays ont fait, c'est des politiques de contrôle, et c'est les gouvernements qui font ça, des politiques de réciprocité, de dire: Bien, si vous venez chez nous investir, vous voulez prendre le contrôle d'une compagnie, il faut avoir la réciprocité. Ça, c'est un élément de politique. Mais là je vous parle plus comme citoyen et comme président de la caisse. Il s'agit de politiques publiques et non pas de politiques d'investissement d'une société, qui, je le répète, pour le bienfait des Québécois et des régimes desquels ils dépendent... La population vieillit, on aura besoin de bons régimes de retraite en bonne santé, de bons régimes en santé, en bonne santé, on a besoin d'une CSST qui paie les prestations qu'on a besoin, on a besoin d'une économie compétitive. Puis la Caisse de dépôt doit rester ce qu'elle fait, faire en sorte que le rendement soit le meilleur possible au profit des Québécois et pas la changer de mission, la respecter comme elle a été faite du début à la fin. Dans les années quatre-vingt, oui, on a fait une autre affaire, mais là on est en 2007 et, en 2007, il y a du capital gros comme ça.

Mais je vous assure une chose: si les marchés se resserrent et s'il y avait une hausse des taux d'intérêts puis il y avait une récession, les entreprises du Québec vont revenir à la caisse, notre part de marché va monter au Québec. Aujourd'hui, ils vont voir Onex, ils vont voir l'ensemble des joueurs, Teachers', ça se fait sans qu'on le sache. La vérité, c'est qu'il faut payer nos gens pour sortir pour voir les deals, les deals du Québec comme les deals d'ailleurs. C'est un marché très différent, extrêmement compétitif, qui n'a rien à voir avec les années soixante-dix ou quatre-vingt.

Le Président (M. Paquet): Merci. Une minute, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui, juste rapidement. Quand vous dites: Un vrai siège social, c'est là où habite le P.D.G, le V.P. Finances, Service corporatif. Le président du conseil d'administration ou les quelques membres du conseil d'administration, je suppose que c'est aussi important? À quel endroit habite le président du conseil d'administration, c'est...

M. Rousseau (Henri-Paul): Bien, ça dépend, parce que, dans une société qui est à capital ouvert... c'est pour ça que je fais la distinction, moi, entre le siège social, le contrôle et la propriété. Vous avez des entreprises, même très canadiennes, qui sont propriété d'actionnaires mondiaux. Nous, on participe dans l'actionnariat de compagnies qui sont partout à travers le monde, et on a relativement peu d'influence.

Par contre, quand c'est une entreprise qui est de chez nous, qu'on côtoie, même si on a juste 1 % du capital, on a plus d'influence parce que c'est chez nous. Ça, c'est la distinction entre où est-ce qu'est le siège social... La localisation des décideurs est importante, la propriété de nos jours, c'est vrai. C'est sûr que, si vous êtes propriétaire à 100 % de l'entreprise, vous contrôlez tout, ici c'est une question de nuance, mais la question de la localisation des dirigeants est importante.

Le conseil et son président, malgré tout le respect de mon président, c'est important, mais le conseil d'administration peut représenter plusieurs actionnaires à travers la planète, et ça, le lieu de résidence, c'est autre chose, et, même si c'est une entreprise qui a fait affaire mondialement ou à l'étranger, on souhaite avoir des gens qui viennent d'ailleurs.

Le Président (M. Paquet): D'accord? Alors, nous allons du côté ministériel, M. le député de Robert-Baldwin.

Investissement responsable

M. Marsan: Merci, M. le Président. Au moment où la mondialisation est de plus en plus importante, où on parle d'intégrer aux entreprises des éléments environnementaux, des éléments sociaux, des éléments de gouvernance, M. Rousseau, on parle d'investissement responsable. Vous avez des politiques sur l'investissement responsable, et j'aimerais vous demander comment la caisse exerce ses droits de vote et son action en matière d'investissement responsable.

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): C'est un dossier très important, M. le Président, celui de l'investissement socialement responsable. De la même façon que pendant longtemps la préoccupation n'était peut-être pas là, aujourd'hui tous les investisseurs de la taille de la caisse se doivent de se préoccuper des aspects autres qu'économiques d'investissement.

C'est depuis 2003 qu'on travaille sur ce dossier. On a adopté une politique, et notre politique d'investissement socialement responsable fait en sorte qu'on a établi, et vous pouvez le voir sur notre site Internet, une politique pour l'exercice du droit de vote dans les sociétés cotées. Vous pouvez aussi voir, depuis quelques mois, les décisions que nous avons prises, sur le site Internet, quatre, cinq jours après la réunion de l'assemblée annuelle de la compagnie.

Juste donner un exemple: du 1er janvier au 31 décembre 2006, on a traité 2 141 dossiers de procuration. Ça comprenait, ça, le cas de 322 compagnies canadiennes, 1 260 compagnies américaines et 559 sociétés internationales excluant les États-Unis. Mais 2 141 dossiers, ça correspondait ? et c'est important de le comprendre parce que c'est là que se jouent beaucoup de questions de développement économique ? 17 562 propositions qui ont été analysées et votées, et dans ça... des questions sur les droits de propriété mais aussi la structure de l'entreprise. Et ça, on a une politique très active, et c'est dans le fond une équipe dédiée. Sur chaque vote, il y a un comité qui fait en sorte que la politique est prise, et, lorsqu'on n'est pas d'accord, il y a une rencontre pour dédier. Ça occupe beaucoup de notre temps et de mon temps, surtout dans les sociétés très visibles où les enjeux sont sur la rémunération, le rôle des dirigeants, des histoires de... tous les scandales financiers qu'il y a eu suite à Enron et l'implantation de Sarbanes-Oxley, bien ça, ça amène énormément de travail.

n(22 h 20)n

Mais on est un actionnaire activiste, mais on est moins loquace que d'autres. Pourquoi? Et on me reproche ça, pas parce que je n'ai pas la capacité de parler, mais, dans ce dossier-là, je suis convaincu que moins on parle, plus on est efficace, pour deux raisons: il y a beaucoup de monde qui parlent... quand j'ai besoin de parler, sur ces affaires-là, sur les questions de gouvernance, mais, deuxièmement, dans la plupart des cas, les entreprises privées aiment beaucoup mieux qu'on règle ça derrière portes closes, comme on nous dit. Ce que ça fait, c'est que très souvent maintenant ils nous connaissent, et, avant de faire un changement dans leurs lois internes, dans leurs règles de rémunération ou autres, ils nous appellent, ils disent: La caisse, qu'est-ce que vous en pensez? Donc, on a un leadership important et on le joue.

Mais, pour faire en sorte que les gens nous croient dans cette histoire-là, on a décidé, depuis l'an passé, de rendre publics nos votes. Et là maintenant les médias en général voient qu'est-ce qu'on fait et peuvent valider le sens de nos votes mais après la réunion. Et je peux vous dire que ça permet à la caisse d'avoir des interventions extraordinaires.

La deuxième chose, c'est le côté des critères sociaux et environnementaux dans la gestion du portefeuille. Ça, aujourd'hui, sur la question du développement durable et la question des gaz à effet de serre... et toutes ces dimensions-là sont importantes. Non seulement c'est une préoccupation de la caisse et de nos déposants, mais tous les investisseurs de la caisse travaillent ensemble, et ça, ça devient efficace. Naturellement, si j'impose à nos gestionnaires de portefeuilles de se préoccuper d'environnement et de dimensions de Code du travail ou de lois du travail dans d'autres pays où ils vont, s'ils sont les seuls au monde à faire ça, ils vont être pénalisés. Alors, c'est pour ça qu'on travaille avec d'autres, et c'est dans cette optique-là que je suis très fier de vous rappeler que la caisse a été parmi les premiers signataires au monde des principes d'investissement socialement responsable de l'ONU, en présence de Kofi Annan, l'an passé, et que, de 25 que nous étions, maintenant on est rendus plus de 150 et on ramasse des milliards.

Qu'est-ce que ça fait? C'est qu'on est membres du Steering Committee, et mes employés qui sont dans ça, nos représentants font en sorte que, sur chaque dossier, on va se retrouver non pas un, mais 125. On n'est pas tous investisseurs dans les mêmes compagnies, mais, sur les 125, on va se retrouver 40 dans la même compagnie. Alors qu'on représentait, chacun, 0,05 % dans les compagnies, on en représente 22 %. Là, on a un pouvoir et, là, on peut faire en sorte que la société change ses règles. Et je peux vous dire qu'il y a beaucoup de cas où on a été efficaces, sur le plan mondial, avec d'autres joueurs. On ne peut pas le faire tout seuls, et ça se fait ici, ça se fait partout, et c'est une contribution importante au genre de société dans laquelle on veut être, et ça, ce serait en accord avec nos déposants, et c'est une approche intégrée.

Enfin, on participe... et on a lancé une initiative pancanadienne, ce qu'on appelle le Carbon Disclosure Project. Qu'est-ce que c'est, ça? C'est parti en Angleterre voilà quelques années, et c'est de forcer des compagnies à rendre publiques, dans leurs rapports annuels, leurs émissions à effet de serre de façon précise, selon un standard qu'on peut interpréter. Pourquoi on veut ça? Bien, si vous êtes une société qui produit plus de gaz à effet de serre, vous allez représenter un vice pour nous comme investisseurs. Pourquoi? Des risques réglementaires, des risques de taxation, des risques de toutes sortes, et on veut le savoir comme investisseurs, et, de plus en plus, les sociétés s'y prêtent.

Et, cette année, on a fait une démarche plus précise, Richard et moi. Richard comme chef de la direction d'investissement et moi comme chef de la direction, on a envoyé une lettre à 92 sociétés canadiennes, directement aux P.D.G., pour leur demander de se rendre conformes à ce projet-là et de rendre publiques, dans leurs rapports annuels, soit cette année ou l'an prochain, leurs émissions à effet de serre. Encore une fois, c'est pour une raison de bien comprendre les risques auxquels on fait face. Il y a une autre raison, c'est que plus cet aspect-là va être rendu public, plus le public va comprendre les effets et plus on risque d'arriver à un système par lequel on va faire soit le «cap and trade» ou autre dans lequel on croit beaucoup. Il n'y a pas beaucoup de mécanismes, et c'est une façon pour nous.

Dit autrement, un des actifs de la Caisse de dépôt, en plus de sa taille, c'est d'être un joueur mondial et de collaborer avec d'autres sur la planète pour faire un peu du judo avec la mondialisation, c'est-à-dire d'être présent, d'intervenir. On ne peut pas changer le monde du jour au lendemain, mais on peut l'influencer petit à petit, et c'est ce qu'on fait avec d'autres.

M. Marsan: On peut considérer que la Caisse de dépôt...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oh! Excusez. On peut considérer que la Caisse de dépôt est un véritable chef de file dans le domaine de l'investissement responsable.

M. Rousseau (Henri-Paul): Je pense que oui et je pense que vous pouvez être en mesure de le valider à la fois dans le rapport annuel sur le site Internet. Et je pense que les gestes qu'on pose font en sorte qu'on travaille maintenant avec d'autres entreprises canadiennes, d'autres entreprises américaines. Et ce qui est frappant, c'est que c'est autant du secteur privé que public, de toutes les langues, de tous les pays, c'est un phénomène mondial. Et, moi, je crois beaucoup à la force de la finance pour changer le monde dans la mesure où on intervient où on investit, parce que, comme on dit en anglais, «money talks» et c'est une façon... Naturellement, ce n'est pas du jour au lendemain, mais ça se fait.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Viau.

Prévention des fraudes

M. Dubourg: Oui. Bon. Ma question s'adresse à M. Rousseau. Bien, il y a quelques instants, le député de Hull ainsi que la ministre des Finances et présidente du Conseil du trésor ont dit que vous êtes en train de gérer le bas de laine des Québécois, donc c'est une responsabilité très importante. Étant donné les... enfin les scandales qu'on connaît... enfin, aux États-Unis, on a entendu parler des faillites d'Enron, WorldCom, etc., tout ça donc, et la mission de la Caisse de dépôt et de placement, j'aimerais savoir... Aux États-Unis, ils ont beaucoup parlé de la loi SOX, Sarbanes-Oxley, j'aimerais savoir est-ce que la Caisse de dépôt en a pris, des mesures? Est-ce que vous avez implanté ou bien tenu compte de ce qui se passe, là, effectivement, dans le cas de cette loi-là aux États-Unis?

Le Président (M. Paquet): M. Rousseau.

M. Rousseau (Henri-Paul): Merci, M. le Président. Trois choses. D'abord, on a tenu compte sur nous-mêmes, et M. Brunet pourrait élaborer sur tout l'aspect gouvernance à la caisse, donc on a fait le ménage chez nous avant d'aller demander de le faire ailleurs. Deuxièmement, je parlais tantôt de notre politique de vote de procuration et c'est une des choses qu'on fait, dans notre politique, d'incorporer ces éléments. Et, troisièmement, M. Guay pourrait commenter sur la gestion des risques à la caisse pour éviter qu'un Enron arrive chez nous.

M. Brunet (Pierre): Alors, fort simplement, si la Caisse de dépôt investit un peu partout sur différentes bourses, elle a confiance ou elle espère que les conseils d'administration des compagnies que la caisse achète se gèrent sérieusement. Donc, la caisse doit être un modèle, on est condamnés à être meilleurs qu'eux. Alors, c'est le premier mouvement qu'on a décidé de créer dans le sens que la caisse doit être un modèle de gouvernance. C'est quelque chose qui est venu très rapidement, dans toutes les réorganisations, dans la stratégie, et ce n'est pas facile à établir, mais ça s'est établi assez rapidement, et je peux déclarer aujourd'hui que, dans toutes les procédures de tous les comités, dans toutes les règles de gouvernance, on est même mieux que Sarbanes-Oxley à date. Mais ça nous prend une discipline, ça nous prend du temps, mais... quand je dis temps, il faut avoir le temps d'aller à fond dans les questions et les comités, et je peux déclarer aujourd'hui que, de ce côté-là, la gouvernance est excellente à la caisse.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Viau? M. le député de Robert-Baldwin? Ah! Excusez, pardon, M. Guay. Pardon, excusez-moi.

M. Guay (Richard): Oui. Peut-être pour compléter, M. le Président. Du point de vue de la gestion des risques, à une question précédente du député, on a fait référence à la politique de gestion intégrée des risques, et les risques auxquels le député fait référence concernent notamment des risques opérationnels qui ont des conséquences sur des risques financiers. Et la politique de gestion intégrée des risques a pour objectif notamment d'intégrer tous les risques, dont les risques opérationnels. Et, à cet égard, lorsqu'un gestionnaire à la caisse veut notamment investir dans un nouveau produit, il y a, en place dans l'organisation, l'équipe de gestion des risques opérationnels qui s'assure, pour approuver que la transaction ait lieu, que l'équipe indépendante de risques est en mesure de procéder à la transaction, d'effectuer son évaluation par la suite et de mesurer le risque de cette transaction-là, qui fait qu'il y a une équipe, encore une fois, indépendante qui s'assure que la transaction effectuée ou... générée par le gestionnaire peut être suivie, et, s'il y a toute problématique autour de la transaction, bien, qu'elle est captée rapidement dans les systèmes avant que ça devienne plus important.

n(22 h 30)n

Autre volet sur les risques liés, comme vous avez noté, avec WorldCom et d'autres: ce genre de situation là typiquement survient lorsqu'il y a collusion entre plusieurs employés pour cacher une situation, cacher une transaction. Et, à la caisse, nous avons mis en place, en s'inspirant des normes de Sarbanes-Oxley, des attestations financières qui font en sorte que, si vous lisez le rapport annuel, lorsque notre président, M. Rousseau, et notre chef des finances, M. Parent, ont signé cette attestation financière, non seulement ils l'ont signée, mais, pour signer cette attestation financière, moi, j'ai dû signer qu'au meilleur de ma connaissance toutes les évaluations du portefeuille étaient correctes, et ma signature reposait également sur la signature de mes responsables de portefeuilles qui attestaient qu'au meilleur de leur connaissance l'évaluation de leur portefeuille était correcte et jusqu'à un niveau assez fin dans l'organisation, ce qui fait que ça minimise substantiellement la possibilité que la caisse subisse une fraude importante puisque plusieurs employés de plusieurs niveaux de l'organisation doivent signer qu'au meilleur de leur connaissance les évaluations, les processus sont correctement répertoriés dans le rapport annuel.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. Rousseau, oui.

M. Rousseau (Henri-Paul): ...dans le rapport annuel, il y a une section qui s'appelle le cadre de gestion, de la page 139 à la page 156, et qui parle justement de tout le processus de contrôle interne et d'attestation financière qu'on a mis en place suite à tous ces événements.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, je reconnaîtrais maintenant Mme la députée de Groulx...

Mme Lapointe (Groulx): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): ...pour lequel il reste 13 min 26 s.

Mme Lapointe (Groulx): Merci. J'aimerais maintenant m'adresser à la SAQ, Société des alcools du Québec. M. Toutant, si je peux parler directement à M. Toutant...

Le Président (M. Paquet): Pardon?

Mme Lapointe (Groulx): Est-ce que je peux parler directement à M. Toutant?

Le Président (M. Paquet): Vous pouvez poser la question à travers moi à M. Toutant, bien sûr?

Mme Lapointe (Groulx): Non, mais c'est juste... demande est toujours à M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Via moi.

Une voix: M. le Président, est-ce que M. Toutant pense que...

Société des alcools du Québec (suite)

Augmentation des ventes

Mme Lapointe (Groulx): Est-ce que M. Toutant... O.K. Tantôt, vous parliez des résultats qu'il y a eu à la SAQ. Dans les quatre dernières années, vous avez dit que vous aviez eu une augmentation de 18 % des ventes. Je me demandais c'était quoi, la proportion du... le volume de ventes en litres, l'augmentation versus le 18 %, où est-ce que l'augmentation des prix était à l'intérieur du 18 %. Est-ce que... Je veux voir c'est quoi, dans le fond, le volume en litres qui a augmenté versus le 18 %, que vous disiez, sur quatre ans.

Le Président (M. Paquet): M. Toutant, président de la SAQ.

M. Toutant (Sylvain): M. le Président, je n'ai pas les chiffres pour les quatre dernières années, je pourrais vous les sortir. La dernière année, par exemple, au niveau du vin, on a une augmentation de 9,1 % en dollars et de 7,7 % en volume. Du côté des spiritueux, on a eu une augmentation de 7 % en dollars et de 4,4 % en volume. Donc, en effet, il y a une augmentation plus importante du dollar de vente que du volume. Ce n'est pas nécessairement relié à l'inflation dans le système, mais bien que les gens achètent des produits de meilleure qualité. Et c'est un des objectifs évidemment du programme, dont j'ai parlé en début de journée, au niveau du service-conseil, c'est de valoriser des achats où les gens peuvent découvrir des différents produits, etc., et acheter de meilleure qualité.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée.

Comparaison avec l'Ontario

Mme Lapointe (Groulx): Oui. J'aimerais connaître comment se situe la structure de prix de la SAQ versus LCBO en Ontario.

M. Toutant (Sylvain): D'abord, quand on compare LCBO et la SAQ, on compare deux choses complètement différentes, deux entités qui sont différentes, et je vous explique pourquoi.

D'abord, au Québec, c'est principalement un marché de vin, la SAQ est vraiment un détaillant de vin, alors qu'en Ontario c'est davantage le spiritueux. Au Québec, les spiritueux, bières et coolers, ça représente 26 % des ventes de la SAQ et, en Ontario, ça représente 65 %. Donc, le mix produit des deux entités est complètement différent. La marge bénéficiaire en Ontario sur les spiritueux est plus élevée que sur les vins, ce qui fait que LCBO a la possibilité d'avoir une marge un peu plus basse sur les vins et surtout de subventionner de cette façon-là son industrie locale, des vins évidemment canadiens mais principalement ontariens, qui représentent 30 % des vins vendus par LCBO.

L'autre élément important, la SAQ a davantage une offre de produits axée sur les pays d'Europe, alors que LCBO a davantage... À part les produits canadiens, ils ont un axe de produits beaucoup plus sur le Nouveau Monde. On parle d'Australie, Californie, etc.

La bière, ça représente 9 millions de ventes pour la SAQ, et 742 millions de ventes pour LCBO. Donc, c'est deux détaillants qui sont en soi très différents. Vous comprendrez que la bière et des vins sont vendus en épicerie au Québec, alors que ce n'est pas le cas dans le cas de l'Ontario.

Maintenant, globalement, le panier moyen d'un consommateur québécois versus un consommateur ontarien dans le domaine de l'alcool est identique essentiellement, puisque la bière est 5 % moins chère au Québec qu'en Ontario. Sur les spiritueux, on est environ, selon les dernières études, 6 % moins cher que l'Ontario. Et, sur les vins, on est 13 % plus cher, et particulièrement sur les vins d'entrée de gamme. Et c'est l'histoire, depuis des dizaines et des dizaines d'années, de la majoration de la SAQ, puisqu'il y a une partie de la majoration qui est fixe et une partie de notre majoration qui est ad valorem. Donc, en fonction du prix d'achat de la SAQ, il y a une majoration différente.

Donc ça, c'est globalement, mais l'assiette fiscale per capita des deux entités, si on regarde le marché de l'alcool en Ontario puis le marché québécois, est exactement la même. Donc, c'est des choix qui ont été faits il y a belle lurette. On a regardé évidemment quel était l'écart de prix. Est-ce que cet écart de prix là s'améliore au niveau des vins? Oui, il s'améliore: c'était 14,8 % en défaveur de la SAQ en 2002, c'est aujourd'hui 13 %. Et c'est une tendance qui va continuer à s'améliorer, puisque la majoration de la SAQ, donc notre majoration qui est fixée, n'a pas bougé depuis 2002, et on est engagés dans notre plan stratégique à ne pas toucher à cette majoration-là de façon justement à ce que l'écart puisse continuellement se réduire ? la majoration, qui est la marge brute essentiellement que la SAQ perçoit sur ses produits. Aujourd'hui, si on le faisait d'un coup sec, faire une correction des prix sur les produits comparables, le coût pour la SAQ serait entre 200 et 250 millions de dollars. Donc, c'est une des raisons pour lesquelles on n'a jamais fait ce changement-là, alors que les gens paient moins cher la bière au Québec. Donc, c'est un modèle qui est complètement différent. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): Je vais laisser le temps à Lucille Méthé, députée de Saint-Jean, de pouvoir parler. Puis, s'il reste du temps, je vais revenir à la SAQ. Merci.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Saint-Jean.

Loto-Québec (suite)

Coûts reliés au jeu pathologique

Mme Méthé: Bonsoir. Bonsoir à vous tous. C'est un plaisir d'être ici, ce soir, même aussi tardivement, pour discuter des crédits du ministère des Finances. Ma question concerne Loto-Québec. Il y a un aspect qui n'a pas été parlé ce soir qui concerne tous les cas... en fait, les coûts des impacts sociaux sur les joueurs compulsifs, allant de la faillite, des éclatements de couples, de la prise en charge par la société de ces individus-là, la destruction des familles, des thérapies à faire à ces gens-là, en tout cas, bref, une foule d'actions qu'il y a des coûts à ça. On sait que Loto-Québec fait déjà des campagnes de sensibilisation et de prévention, il y a sûrement des montants importants qui sont investis là-dedans. J'aimerais savoir quels sont ces montants-là. Est-ce qu'il y a eu une étude aussi des coûts reliés à tous ces impacts-là? Parce qu'il y a un organisme en fait dans ma région qui prétend... plusieurs organismes prétendent que les coûts reliés au problème des joueurs compulsifs et le traitement de tout ça sont très importants. Est-ce que vous avez des données là-dessus?

Le Président (M. Paquet): M. Cousineau.

M. Cousineau (Alain): M. le Président, d'abord, je pense qu'il faut situer toute la problématique de ce qu'on appelle le jeu excessif, là. La meilleure façon de le faire est de le faire en comparant notre situation au Québec avec les situations qui existent ailleurs. Il y a une étude qui a été publiée en 2002 par Statistique Canada qui compare le taux de joueurs excessifs ou de joueurs pathologiques selon les provinces canadiennes, et le Québec est celle où le taux est le plus bas. Il y a une deuxième étude significative, qui est la plus importante jamais faite au Québec d'ailleurs, qui a été réalisée... les données ont été cueillies en 2002 et compare les résultats obtenus à ce moment-là avec ceux d'une étude antérieure qui avait été faite en 1996. Cette étude-là a été faite par l'Institut national de santé publique avec l'aide du centre d'excellence de l'Université Laval, et on analysait l'évolution du nombre de joueurs pathologiques entre 1996 et 2002. Et ce qu'on se rendait compte, c'est que, pendant cette période, le nombre de joueurs pathologiques probables, là ? c'est une donnée assez technique ? était passé de 1 %, 1 % en 1996 à 0,8 % en 2002 et que le nombre de joueurs à risque est passé de 1,4 % à 0,9 %.

Les statisticiens, à l'époque, indiquaient que ces modifications-là ne nous permettent pas de dire que c'est en régression, mais ça nous permet au moins de dire que ça n'a pas crû entre 1996 et 2002. Et je vous ferai remarquer qu'entre ces deux périodes le chiffre d'affaires de la société a augmenté de plus de 40 %. Alors, quand on fait une équation, là, entre plus les gens jouent, plus... en fait, ce n'est pas tout à fait exact.

n(22 h 40)n

Nous faisions, jusqu'en 2002, un certain nombre de recherches sur des stratégies de prévention et sur des mesures qui allaient dans le sens de votre questionnement. À ce moment-là, le Vérificateur général du Québec a émis un avis à l'effet que nous étions en conflit d'intérêts. Il a donc demandé à ce que nous ne fassions plus de ces recherches-là, mais que plutôt on envoie les argents que nous consacrions à l'époque à ces recherches-là et aux campagnes de sensibilisation au ministère de la Santé et des Affaires sociales, ce que nous faisons. Nous avons donc consacré, l'an dernier, 5 millions de plus que l'année précédente. 22 millions sont remis au ministère de la Santé et des Services sociaux, en plus de 3 millions à la régie, en plus de 30 millions pour les personnes en perte d'autonomie, en plus de 5 millions remis au ministère de l'Agriculture pour compenser la perte des foires agricoles, ce qui fait le total de 76 millions dont je parlais plus tôt et qui nous distingue de la SAQ, parce que ce n'est pas tous nos profits qui s'en vont en dividendes, mais il y en a une partie qui s'en va à des fonds dédiés qui totalisent 76 millions, dont une partie importante est justement pour répondre aux problématiques dont vous parlez.

Alors donc, il y a tout un réseau au Québec qui a le mandat de mettre en place l'organisation pour faire le traitement et faire les études que vous mentionnez. Mais on ne s'en contente pas, on a donc créé une fondation, qui s'appelle la Fondation Mise sur toi, dont la mission fondamentale est à la fois interne, c'est-à-dire qu'elle est une organisation qui renforcit les mesures que nous allons mettre en place pour pallier les problèmes qui sont créés... Je vous donne des exemples. Nous avons créé ? une première mondiale, d'ailleurs ? un centre du hasard au Casino de Montréal où tous ceux qui fréquentent le casino peuvent venir suivre une formation... bien, une formation... enfin, ont une présentation de la part de professionnels sur ce qu'est le jeu, ce qu'est le hasard, etc., pour démystifier évidemment qu'on puisse influencer le résultat d'une loterie ou le résultat d'une machine à sous, alors que c'est tout à fait aléatoire. Il y a plus de 200 000 personnes qui ont suivi ça, c'est une première.

On a bonifié notre programme d'exclusion volontaire où les gens peuvent s'exclure de trois à cinq ans. On fait 10 000 repérages par année. On l'a bonifié, où maintenant on ajoute le suivi par un psychologue et l'entrevue obligatoire à la fin de la période avant de se sortir du programme d'exclusion volontaire.

On a, par exemple, à travers la fondation, mis en place un programme de formation de tous les détaillants dans les établissements licenciés où on retrouve des appareils de loterie vidéo. Nous aurons formé 11 000 personnes, au cours des deux dernières années, dans ce réseau-là pour les sensibiliser à l'identification des personnes qui sont en détresse et pour mettre au point des stratégies de référence à des organismes communautaires qui sont dans chacune des régions.

Ce n'est qu'une partie, ce n'est que la pointe de l'iceberg. Je pourrais continuer, là, à vous donner toute une série de mesures que nous avons mises en place pour assurer que nous remplissons notre mandat de gérer de façon responsable l'offre de jeu au Québec et à l'encadrer de façon à éviter les problématiques.

Mais les problématiques auxquelles vous référez, elles existent. À ma connaissance, il n'y a aucune étude dans le monde ? parce que j'ai posé la question partout à travers le monde, parce qu'on est membres de l'Association mondiale des loteries ? il n'y a aucune étude scientifique qui a établi le coût social du jeu.

Maintenant, il faut voir que le jeu existe, qu'il existait. On se rappellera que, dans les années 1993, on estimait, dans le cadre d'une commission parlementaire, qu'il y avait entre 25 000 et 40 000 appareils de loterie vidéo illégaux. Le choix qu'on a fait comme société, c'est de faire en sorte qu'on allait encadrer ces appareils-là. Il y avait des gens qui quittaient le Québec pour aller jouer dans les casinos ailleurs. Il y avait du jeu illégal un peu partout au Québec. Il y avait autant de problématiques, de retombées sociales. Au moins, aujourd'hui, on essaie d'encadrer, on essaie de gérer ce risque-là puis on essaie de mettre en place, comme société ? puis Loto-Québec fait une partie de ce rôle-là ? une façon de gérer le jeu de façon à éviter les comportements excessifs, mais on doit reconnaître qu'il y en a.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Ça met fin au bloc qui restait à l'opposition officielle. Il reste maintenant 10 min 51 s au député de Rousseau... ou enfin au deuxième groupe formant l'opposition.

Caisse de dépôt et placement du Québec (suite)

Offre publique d'achat sur Alcan

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. Ma prochaine et peut-être dernière ou avant-dernière question, c'est pour la ministre des Finances. D'abord, je voudrais avoir un peu son opinion sur le dossier d'Alcan. Il y a un journaliste qui a demandé au président de la Caisse de dépôt, M. Rousseau: Est-ce que ça vous interpelle, la possibilité de vendre Alcan? Et la réponse de M. Rousseau, je le cite, là, il a dit: «Ce n'est pas à moi de dicter la politique publique. Il y a des gens qui sont élus pour ça, et, moi, je suis nommé pour gérer de l'argent.» Bon. De toute évidence, là, M. Rousseau attend peut-être un signal, là, de la part des élus politiques. En tout cas, c'est ce que j'ai compris.

Je voudrais savoir, tantôt, M. Rousseau nous disait que, dans le dossier de l'OPA hostile sur Alcan, on devrait, au Québec ou au Canada, exiger la réciprocité, c'est-à-dire que, si une entreprise comme Alcoa veut faire une OPA sur Alcan, bien on devrait pouvoir, en Pennsylvanie, où ce n'est pas possible, faire aussi une OPA hostile. Donc, est-ce qu'elle est d'accord pour exiger la réciprocité sur les OPA hostiles?

Maintien de sièges sociaux au Québec (suite)

Deuxièmement, est-ce qu'elle est d'accord avec la définition de «siège social» que nous a dite M. Rousseau tantôt? Est-ce que dans le dossier d'Alcan... est-ce qu'on devrait viser à ce que le président et le vice-président Finances habitent au Québec? Et finalement, M. le Président, je voudrais savoir: De façon générale, est-ce que la ministre des Finances pense que ce serait important de renforcir la partie mission développement économique à la Caisse de dépôt? Et trouve-t-elle que de payer des bonis à la direction de la Caisse de dépôt seulement sur les rendements, sans aucun critère, puis je comprends que c'est plus difficile d'en trouver, des objectifs, mais aucun critère concernant le développement économique du Québec... est-ce qu'il n'y a pas un danger d'effet pervers, c'est-à-dire que la direction de la Caisse de dépôt se concentre à 100 % sur les rendements et ne se soucie pas du tout de protéger les sièges sociaux au Québec?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre des Finances.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, j'ai indiqué plus tôt une démarche qu'avait entreprise le Parti québécois à l'effet qu'il avait voulu justement intervenir dans un deal qui était fait à l'époque entre Vidéotron et Rogers. Avec les pertes qu'on a connues à la Caisse de dépôt, j'ai trouvé que le président de la Caisse de dépôt avait été très courtois à l'endroit du député de Rousseau, parce qu'il a indiqué justement que de ce 13 milliards de dollars il y en avait effectivement une partie importante qui était due aux baisses de rendement de la Bourse mais qu'il restait 6 milliards de dollars bien sûr qui étaient dus, à bien des égards, à une mauvaise gestion des fonds publics.

J'en parle, M. le Président, parce que justement je rappelais au président de la Caisse de dépôt que j'ai été présidente de la CSST, et, pour moi, ce qui était très important, c'est d'avoir une capitalisation de la CSST. Pourquoi? Pour être sûre de pouvoir indemniser les gens qui ont besoin d'être indemnisés. C'est là une justice. Alors, le rôle de la Caisse de dépôt, c'est de s'assurer, par exemple, qu'à la Société de l'assurance automobile du Québec, à la CSST, à la Régie des rentes, les rendements soient là pour rencontrer nos obligations. Nous avons des obligations à l'endroit des gens qui prennent leur retraite, nous avons des obligations à l'endroit des gens qui ont des accidents du travail et nous avons des obligations à l'endroit des gens qui ont des accidents de la route. Et ça, il faut être sûr que les régimes que l'on met en place sont bien équipés pour pouvoir rencontrer les objectifs de dépenses que nécessitent les obligations reliées au type de vulnérabilité de ces gens qui ont ou des accidents de travail ou des accidents de la route.

Alors, vous comprendrez que, M. le Président, à cet égard...

Une voix: ...

n(22 h 50)n

Mme Jérôme-Forget: J'entends le député de Rousseau, là, c'est parce que je veux lui rafraîchir la mémoire de l'argent qu'il a perdu, que son gouvernement a perdu. Je veux lui rafraîchir la mémoire, justement qu'il y a plein de dossiers où le gouvernement était alors intervenu, intervenu auprès de la caisse pour qu'on change les orientations de la caisse, qu'on intervienne. Je l'ai mentionné, M. le Président, Montréal Mode, mais tous les gens qui étaient impliqués dans Montréal Mode ? et il y en avait plusieurs ? ils ont perdu leur argent. Ils ont tous perdu leur argent, hein, du premier au dernier. Du premier au dernier. Ça a été un désastre, cette histoire-là.

Alors, moi, ce que je veux dire au député de Rousseau, c'est que la Caisse de dépôt, elle a d'abord un mandat, de s'assurer que le bas de laine ? on en a parlé, le bas de laine des Québécois, que ce soit dans différents organismes ? soit bien protégé. Et je pense que le président de la Caisse de dépôt nous a donné un plaidoyer extrêmement éloquent à cet égard, ce soir, pour justement faire la distinction entre une entreprise qui s'en irait et qui finalement serait... interviendrait de façon probablement partisane souvent pour justement contrer une décision plus sage.

Offre publique d'achat sur Alcan (suite)

Au niveau de l'Alcan, je veux rappeler au député de Rousseau... Je sens son impatience, n'est-ce pas, à entendre mes sages paroles, mais justement je vais lui dire que mes sages paroles vont lui dire ceci: C'est un dossier qui est en action actuellement. Il y a plusieurs entreprises qui discutent entre elles au niveau de l'Alcan, et vous comprendrez que, dans le moment, je ne veux pas intervenir dans ce dossier, certainement pas ici, à l'Assemblée nationale, aujourd'hui, pour dire quelle serait une bonne transaction par rapport à une autre qui serait moins bonne ou meilleure. Je pense qu'il n'est pas opportun que je dise de telles paroles. Manifestement, et surtout étant ministre des Finances, je pense que ce serait très mal vu que j'intervienne dans une telle situation actuellement. Alors, je vais désappointer le député de Rousseau parce que je ne veux pas combler ses attentes à cet égard.

Mais je puis l'assurer qu'en tant que ministre des Finances je surveille avec un oeil de lynx, M. le Président, toutes les démarches, toutes les transactions, parce que vous comprendrez que c'est très important... Et c'est la raison que, quand est arrivée justement l'entente avec l'Alcan, l'entente qu'a préparée et qu'a fait signer mon collègue le ministre du Développement économique pour protéger justement une transaction future, je pense que c'était là démontrer beaucoup de prudence, prudence d'ailleurs que n'a jamais illustrée le Parti québécois alors qu'il était au pouvoir. Il avançait de l'argent sans jamais exiger, s'il arrivait quelque chose, d'être sûr... c'était la première fois que ça se faisait, d'exiger, s'il arrive quelque chose dans une transaction qui est contre l'intérêt des Québécois... Je pense, M. le Président, qu'à cet égard mon collègue du Développement économique a été sage, prudent, et au contraire on devrait le féliciter.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Bien, étant donné que la ministre ne veut pas parler d'un cas précis, je vais lui poser un cas général. Est-ce qu'elle croit que c'est acceptable qu'une entreprise étrangère puisse faire une OPA hostile sur une compagnie québécoise et qu'une compagnie québécoise ne puisse pas faire une OPA hostile sur cette compagnie étrangère?

Deuxièmement, est-ce qu'elle croit ? et je repose ma question de tantôt ? que c'est important de protéger nos sièges sociaux, nos sièges sociaux étant l'endroit où habitent, entre autres, le président et le vice-président Finances? Est-ce qu'elle trouve que c'est important? Et est-ce qu'elle voit un rôle à jouer à la Caisse de dépôt dans ces objectifs?

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre des Finances.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, dans l'entente qu'a signée mon collègue le ministre du Développement économique, il a justement... il s'est assuré que ça touchait les emplois, le développement, le maintien d'emplois justement dans la région, de même que le maintien du siège social. Alors, on comprendra que je suis sûre que le député de Rousseau est attristé qu'on ait pris autant de précautions, parce que justement on a protégé l'entente qu'il y avait avec l'Alcan. Et, moi, je suis très fière, M. le Président, parce que c'était là une première au Québec. Et nous allons justement... Quand on intervient auprès d'entreprises, je pense qu'il est opportun et sage de nous protéger dans des situations qui pourraient être complexes et problématiques.

M. Legault: Oui. M. le Président...

Le Président (M. Paquet): Malheureusement, M. le député de Rousseau, il ne reste plus de temps.

M. Legault: ...je voulais juste savoir si un siège social à Montréal et un à New York, si c'était dans le même fuseau horaire pour elle et si elle pouvait penser que c'était une bonne idée.

Le Président (M. Paquet): Il ne reste plus de temps, à moins que Mme la ministre, sur consentement...

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je ne vais pas entrer dans la chambre à coucher des gens, je pense que je vais m'abstenir de ça.

Le Président (M. Paquet): Alors donc, le temps du côté de l'opposition officielle et du deuxième groupe d'opposition étant épuisé, du côté ministériel il reste 27 min 59 s, moins cinq minutes... Il reste environ 16 minutes...

Une voix: ...

Le Président (M. Paquet): O.K. Il resterait 27 min 59 s si... M. le député de Hull, oui.

M. Cholette: La tentation est...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull.

M. Cholette: ...grande de l'utiliser, mais, considérant l'heure et si mes collègues d'en face considèrent le temps que nous laisserions sur la table comme complété, nous pourrions peut-être passer au vote immédiatement, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Est-ce qu'il y a un consentement à cette proposition?

Une voix: Consentement.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau, il y a consentement? Donc, il y a consentement.

Adoption des crédits

Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des programmes 1 et 3. Alors, d'abord, est-ce que le programme 1 du ministère des Finances, intitulé Direction du ministère, est adopté?

M. Legault: Sur division.

Le Président (M. Paquet): Le programme 1 est adopté sur division. Est-ce que le programme 3, intitulé Service de la dette et intérêts sur le compte des régimes de retraite, est adopté?

M. Taillon: Sur division.

Le Président (M. Paquet): Donc, le programme 3 du ministère des Finances est adopté sur division.

Donc, juste avant de mettre fin aux travaux, je veux d'abord remercier bien sûr tous les membres de la commission pour leur participation, les gens qui accompagnaient aussi la ministre des Finances et bien sûr les gens des sociétés d'État qui ont été présents. Ils ont eu une participation extrêmement, je crois, importante et instructive pour le citoyen. J'ai eu la chance de reconnaître un de mes anciens professeurs aussi, hein, le président de la Caisse de dépôt, qui m'a enseigné il y a quelques années déjà, et certainement on voit que les talents de professeur ne se perdent pas. Alors, merci beaucoup.

Et, sans plus tarder, j'ajourne les travaux de la Commission des finances publiques à demain, 15 heures, alors qu'elle se réunira à la salle Louis-Joseph-Papineau pour entreprendre l'étude des crédits relevant de la présidente du Conseil du trésor. Merci.

(Fin de la séance à 22 h 57)


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