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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le lundi 29 avril 1996 - Vol. 35 N° 9

Étude des crédits du ministère de la Justice


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Table des matières

Formulation de jugements

Centres d'aide aux victimes d'actes criminels

Administration de la justice

Formulation de jugements (suite)

Administration de la justice (suite)

Aide aux justiciables (suite)

Conclusions

Adoption de l'ensemble des crédits


Intervenants
M. Marcel Landry, président
M. Normand Jutras, président suppléant
Mme Céline Signori, présidente suppléante
M. Paul Bégin
M. Thomas J. Mulcair
M. André Boulerice
M. Roger Paquin
M. Jean-Guy Paré
*M. Gaétan Lemoyne, ministère de la Justice
*M. Jean-K. Samson, idem
*M. Pierre Lorrain, Commission des services juridiques
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quinze heures seize minutes)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): À l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames, messieurs, nous poursuivons, cet après-midi, l'étude des crédits budgétaires concernant le ministère de la Justice pour l'année financière 1996-1997.

Je demanderais à M. le secrétaire d'annoncer les remplacements.

Le Secrétaire: Il n'y a pas de remplacements, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci, M. le secrétaire.

Je vous rappelle qu'il nous reste cinq heures sur l'enveloppe initialement prévue de sept heures consacrées pour l'étude de ces programmes. Alors, tel que convenu lors de notre première séance de travail sur l'étude des crédits du ministère de la Justice, nous procéderons donc à l'étude sous forme d'une discussion générale. Cependant, nous allons passer les différents programmes et nous procéderons au vote sur l'adoption des crédits à la toute fin.

M. le ministre, est-ce que vous avez...

M. Bégin: Je suis prêt à répondre aux questions qui pourraient être posées, je pense que c'est le but de l'exercice.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien, M. le ministre. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: On va aider le ministre à atteindre le but de l'exercice, M. le Président. Il me fait plaisir de saluer mon collègue, le ministre de la Justice, ainsi que les gens qui l'accompagnent.


Formulation de jugements


Lieu de résidence du juge en chef de la Cour du Québec (suite)

Vous vous souviendrez sans doute, M. le Président, que, lorsqu'on s'est quittés la semaine dernière, on était dans le programme 1, Formulation de jugements, et on avait eu l'occasion de rappeler au ministre qu'aux termes d'une législation qu'il avait lui-même adoptée l'année dernière, lui-même proposée à l'Assemblée nationale, et que l'Assemblée avait adoptée l'année dernière, l'article 90 de la Loi sur les tribunaux judiciaires prévoit que le lieu de résidence du juge en chef et du juge en chef associé établi sur le territoire de la ville de Québec ou dans le voisinage immédiat de cette ville... ils y exercent principalement leurs fonctions. Le ministre était au courant de la situation suivante.

Depuis sa nomination il y a huit mois presque jour pour jour, le juge en chef résidait toujours dans sa région natale, le Saguenay–Lac-Saint-Jean, et il logeait à l'hôtel Château Frontenac. Le ministre a dit qu'il avait demandé au juge en chef, Louis-Charles Fournier, de précipiter les choses – c'était son terme exact – et le ministre nous rappelait qu'il, c'est-à-dire M. Fournier, avait des problèmes parce que ce déménagement n'avait pas été planifié. Le ministre nous a dit avoir demandé au juge en chef puis il lui a demandé gentiment de le faire et il devait vérifier ce qui était arrivé. Il devait aussi vérifier pour nous le coût qui pouvait être afférent au fait que le juge en chef logeait au Château Frontenac.

Alors, c'est ma première question pour le ministre aujourd'hui: Est-ce qu'il a les informations qu'il s'était engagé à nous donner la semaine dernière?

M. Bégin: M. le Président, j'ai mentionné, au moment où la question m'a été posée, que, effectivement, le juge en chef, au moment où il a été nommé, n'avait pas pu anticiper cette nomination, puisque ce n'était pas un concours qui était ouvert pour ceux et celles qui étaient intéressés à être nommés juge en chef, mais c'était une discrétion qui appartenait au gouvernement, et il l'a su quelque chose comme le 25 ou le 26 août 1995. Donc, au moment de procéder à sa nomination, il n'avait pas pu anticiper de quelque manière que ce soit son futur et il m'avait demandé, et il m'a demandé évidemment de pouvoir tenir compte de ce changement subit dans sa vie, qu'il ne savait pas exactement à quel moment il pourrait être installé définitivement à Québec.

Par ailleurs, au moment où on s'est parlé, ni l'un ni l'autre ne pouvions savoir ni anticiper que le référendum aurait lieu le 30 octobre et qu'avant et après cette décision il aurait, en tant que juge en chef, à être membre du Conseil du référendum et qu'il aurait à statuer et à entendre plusieurs causes sur cette question-là, ce qu'il a dû faire. Donc, le temps qu'il a dû consacrer, d'une part, à ses fonctions de réorganisation de la Cour et ses tâches particulières qui ont surgi compte tenu d'un événement qui n'était pas dans le décor ont rendu sa tâche plus difficile et ça a pris un peu plus de temps que requis et souhaité pour le faire.

(15 h 20)

La question que vous aviez posée, c'était quelles étaient les dépenses occasionnées par le fait que le juge en chef de la Cour du Québec n'a pas encore établi sa résidence principale à Québec. Et j'avais mentionné qu'il avait... je lui avais mentionné que, fin de mars ou à peu près, j'avais été informé qu'il n'avait pas encore eu sa résidence et qu'il devait prendre une décision à cet effet rapidement. Le total des frais d'hébergement et de subsistance à Québec, qui partent du 4 septembre jusqu'au 29 mars 1996, sont de 22 585,05 $. C'est ça? Alors, le chiffre qu'on me donne, c'est le montant en question. Voilà.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Je veux juste m'assurer que j'ai compris le chiffre de 22 585 $. Est-ce que le ministre nous a...

M. Bégin: Le total des frais d'hébergement et de subsistance à Québec.

M. Mulcair: Hébergement et subsistance.

M. Bégin: Oui.

M. Mulcair: Est-ce qu'il y a eu des frais de kilométrage versés pour le voyagement entre le Saguenay–Lac-Saint-Jean et Québec? C'était une de nos questions jeudi également.

M. Bégin: La seule question que j'ai, moi, c'est celle-là, les dépenses occasionnées par le fait que le juge en chef de la Cour n'a pas encore établi... Il est évident qu'il y a des dépenses de kilométrage, comme il y en aurait entre Québec et Montréal, entre Montréal et Sherbrooke, mais je n'ai pas cette réponse au moment où on se parle, à moins que...

M. Mulcair: Oui, mais c'est une question importante, M. le Président, parce que, si le ministre est en train de nous dire qu'il y a eu aussi des frais de kilométrage, c'est important de le savoir.

M. Bégin: Alors, on m'indique, j'ai un autre chiffre ici qui indiquerait, sans faire la distinction, 28 460,50 $. Alors, pour la période du 4 septembre 1995 au 29 mars 1996, le total des frais d'hébergement et de subsistance et de kilométrage, 28 460,50 $.

M. Mulcair: Donc, environ 6 000 $ de voyagement, de transport, grosso modo.

M. Bégin: Voilà. Oui.

M. Mulcair: C'est important parce que c'est aux termes de la loi que c'est prévu que son lieu de résidence soit établi à Québec. Donc, M. le Président, c'est important de savoir ce chiffre-là de 6 000 $ additionnels. C'est donc 28 460 $ qui sont en cause et pas les 22 000 $ que le ministre nous a mentionnés au départ. Est-ce qu'il y a d'autres chiffres qu'on devrait connaître?

M. Bégin: Pas à ma connaissance.

M. Mulcair: Vous savez, M. le Président, si on avait suivi la loi, et la loi a été votée par cette Assemblée nationale à la demande du ministre actuel, au mois de juin l'année dernière, les contribuables n'auraient pas été pris avec une facture de l'ordre de 30 000 $. Si on avait suivi la loi, ces dépenses-là n'auraient pas dû être effectuées. D'ailleurs, je me permets de suggérer que les dépenses en question sont proprement illégales. Au contraire de ce qu'affirme le ministre, ce n'est pas une excuse de référer au 30 octobre et au référendum, ce n'est pas une excuse non plus de nous dire qu'il y a des problèmes de cette nature-là. C'est la loi qu'il avait présentée ici, à Québec, à l'Assemblée nationale, qui prévoyait ça.

Les 6 000 $, par exemple, de voyagement. Vu que le lieu de résidence du juge en chef doit être à Québec, ce voyagement ne peut pas être remboursé. On n'est pas en train de lui rembourser quelque chose de légal, à ce moment-là. C'est ici qu'il doit être. S'il voyage de Québec vers Montréal ou Sherbrooke ou Trois-Rivières, ou peu importe, évidemment, il va se faire rembourser son kilométrage, comme tout le monde dans la fonction publique québécoise. Ça va pour tout le monde qui occupe une fonction semblable. Mais ce qui est absolument inacceptable, alors que le ministre savait ce qu'il avait mentionné dans sa loi – il y tenait, ça a fait l'objet d'un très long débat ici, à l'Assemblée nationale – c'est d'apprendre que tout près de 30 000 $ de l'argent des payeurs de taxes est allé... et, nous, on insiste là-dessus, ces dépenses-là n'ont pas été remboursées légalement. La loi ne saurait être plus claire, et je le répète, M. le Président, l'article 90 de la Loi sur les tribunaux judiciaires stipule clairement que le lieu de résidence du juge en chef et du juge en chef associé est établi sur le territoire de la ville de Québec.

Donc, en vertu de quelle autorisation on a payé presque 30 000 $ au juge en chef pour des voyagements vers son vrai lieu de résidence au Saguenay–Lac-Saint-Jean, d'une part? Et, d'autre part, sur quelle base on s'est permis de lui verser des frais de subsistance, des frais de logement, des frais de repas lorsqu'il est ici, à Québec, alors que c'est son point d'attache? C'est là, en vertu de la loi, qu'il doit être. En vertu de quoi ces 30 000 $ ont pu être versés, M. le Président? On le demande au ministre.

M. Bégin: Alors, si je comprends bien le député de Chomedey, il nous dit: Le juge en chef est nommé le 30 août; le 1er septembre, il commence à travailler; il se rend à Québec et il faudrait qu'immédiatement il se soit installé dans une résidence qu'il a trouvée à Québec; il faudrait qu'il ait vendu sa propriété là où il demeurait; il faudrait qu'il ait tout réglé ses problèmes en faisant son travail comme tel.

Je souligne, M. le Président, qu'il est prévu dans les règles de fonctionnement de l'État que, normalement, une personne a six mois environ dans des circonstances analogues pour se trouver une résidence, pour trouver les moyens de s'établir de façon définitive à l'endroit où on l'a assignée, que, par ailleurs, elle continue d'être un être humain qui a une famille, qui a des relations, qui a des biens à surveiller et qu'elle doit continuer à vivre, et que, entre-temps, il est normal qu'on couvre ses dépenses.

On peut trouver que c'est peut-être plus que ce qu'on aurait fait soi-même, peut-être que quelqu'un aurait pu trouver plus rapidement que d'autres une résidence, mais je n'ai pas de raison de croire que le juge en chef préfère particulièrement garder sa résidence dans un endroit incertain plutôt que dans un endroit permanent, mais qu'au contraire, comme d'autres, il a hâte de pouvoir s'installer parce qu'il sait que sa nomination est pour une période de sept ans et qu'il va, évidemment, pendant sept ans, être à un endroit.

Alors, je crois qu'il fait des efforts pour se déménager, mais, entre-temps, il faut bien qu'il continue à vivre et qu'en conséquence il se rende de Québec au Lac-Saint-Jean et du Lac-Saint-Jean à Québec. À moins que mon collègue ne veuille prétendre qu'absolument, pour être nommé juge en chef, il faut demeurer à Montréal et qu'on soit nécessairement proche de l'endroit où doit siéger la Cour ou que seuls ces gens-là pourront avoir le droit, sans déménager, d'être là.

Moi, je pense, M. le Président, qu'il est absolument normal qu'on laisse, à une personne que l'on déplace subitement, à qui échoient à la fois un honneur et une grande responsabilité, le temps qu'il faut pour s'installer. Quant au reste, on peut chicaner, on peut discuter mais, à mon point de vue, c'est chercher des poux et quand on sait que c'est de la pure normalité des choses que ça se passe comme ça.

M. Mulcair: M. le Président, en fin de semaine, on a eu le droit d'entendre le premier ministre Bouchard dire que des lois qui s'appliquent puis des lois qui ne s'appliquent pas, ça n'existe pas. Il fallait qu'on applique la loi. C'est ça que le premier ministre Bouchard nous a dit en fin de semaine: les lois qui s'appliquent puis les lois qui ne s'appliquent pas, ça n'existe pas.

Le ministre de la Justice, celui même qui est responsable de l'application des lois ici, au Québec, est en train de nous dire que, sans aucune assise juridique, il a versé presque 30 000 $ de l'argent des contribuables au juge en chef de la Cour du Québec qu'il venait de nommer. C'est inadmissible, et on le répète, M. le Président, c'est une dépense illégale. Si le juge en chef a mis plus que huit mois à date pour déménager à Québec, ce n'est pas ça, le problème. Il aurait pu prendre une résidence ici, à Québec; personne ne dit qu'il était obligé de vendre, de brader sa maison au Lac-Saint-Jean pour venir ici, personne n'est en train de suggérer ça. Mais toute dépense du gouvernement doit avoir une assise légale. Alors que la loi, ici, précise, au contraire, qu'il doit avoir sa résidence à Québec, c'est illégal de lui verser des sommes pour voyager de Québec au Lac-Saint-Jean lorsque ce n'est pas pour affaires, pas parce qu'il a gardé sa résidence là-bas et est seulement venu temporairement ici, à Québec, entre-temps.

Par ailleurs, le ministre s'est essayé, lors de la commission parlementaire de la semaine dernière, de nous convaincre que ça pouvait quand même constituer une résidence à Québec. Si c'est le cas, c'est à lui, c'est au juge en chef de payer cette résidence-là. C'est écrit nulle part dans le décret de nomination; c'est écrit nulle part dans la loi que ce sont les contribuables qui vont payer pour sa résidence, une fois qu'il est rendu ici, à Québec. Alors, huit mois plus tard, presque 30 000 $ plus tard, les contribuables sont toujours en train de payer, et c'est illégal, et c'est inadmissible, légalement et politiquement. Et c'est ça qu'on n'accepte pas dans la réponse du ministre, qui tend à juste vouloir mettre ça sur le compte d'une affaire humaine. Il dit: Bon, il a le droit d'avoir sa famille... Bien entendu. Toute personne qui a déjà eu à se faire nommer à une fonction qui requérait son déménagement dans une autre ville a eu à soupeser le pour et le contre, à regarder quel effet ça allait avoir sur ses affaires privées. Ça va, ça, c'est normal.

Le ministre nous réfère à une pratique que j'aimerais bien voir écrite quelque part, que, selon lui, dans certains cas, on peut prévoir six mois. On aurait pu prévoir quelque chose dans son décret de nomination. C'est là où on le fait. C'est son engagement, c'est son contrat de travail, en quelque sorte, ce sont ses conditions. On aurait pu mettre quelque chose là-dedans si vraiment il le fallait. Mais le ministre n'a rien fait du genre. Le ministre a proposé à l'Assemblée nationale une loi qui a été longuement débattue et sur laquelle il insistait beaucoup. Il nous avait même dit, en boutade, l'année dernière: Vous savez, c'est la même distance entre Montréal et Québec qu'entre Québec et Montréal, parce qu'il trouvait que les gens de Montréal hésitaient à venir à Québec. Mais je lui souligne amicalement que c'est la même distance entre le Lac-Saint-Jean et Québec puis entre Québec et le Lac-Saint-Jean, sauf que, quand on a, aux termes de la loi, sa résidence à Québec, on n'a pas le droit de se faire rembourser les dépenses de kilométrage pour retourner dans sa vraie résidence, parce que sa vraie résidence, en vertu de la loi, ça doit être ici, à Québec. Et c'est le ministre qui a voté cette loi, c'est le ministre qui l'a proposée, c'est l'Assemblée nationale qui a jugé, et le ministre n'a aucune excuse pour avoir versé 28 460 $ au nouveau juge en chef de la Cour du Québec. Et nous demandons, M. le Président: Est-ce que le ministre de la Justice va exiger que toutes ces sommes-là soient remboursées, parce que ces sommes-là ont été versées illégalement?

(15 h 30)

M. Bégin: M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: Le député de Chomedey prétend que ceci a été fait illégalement. Je lui soumets qu'à chaque fois que le gouvernement demande à quelqu'un en particulier, par exemple, un sous-ministre, de faire un déplacement de cette nature, que nous avons demandé – et c'est vrai maintenant, puis c'était vrai dans le temps où il était à l'Office des professions ou à d'autres fonctions. Et la norme est de six mois, normalement, pour trouver, dans des circonstances normales, un logement et, entre-temps, ses frais sont déboursés. C'est ce dont on m'informe et qui a été suivi. Quant aux délais qui dépassent six mois, dans certaines circonstances exceptionnelles, on permet qu'il y ait des déboursés. M. le Président, je soumets que nous sommes dans ces circonstances et qu'en conséquence ce qui a été fait a été correctement fait et que le juge, je l'ai mentionné, a été informé qu'il devait, très rapidement, maintenant que le temps était écoulé, trouver une résidence ici, à Québec.

M. Mulcair: M. le Président, on est face à un ministre de la Justice et Procureur général qui confond normes et pratiques administratives. Une loi est un texte normatif, une loi peut fixer des normes. La loi prévoit clairement qu'il doit avoir sa résidence à Québec. Le décret de nomination du 30 août 1995, nommant le nouveau juge en chef, est un texte normatif. On aurait pu y insérer certaines dépenses, on aurait pu prévoir une période de transition si telle avait été la volonté, cette fois-ci, du gouvernement. Dans un cas, c'est l'Assemblée nationale qui parle; dans l'autre cas, c'est un décret du gouvernement. Ni dans un cas ni dans l'autre n'a-t-on permis une telle dépense. Au contraire, le texte même de la loi stipule très clairement que le lieu de sa résidence était à Québec. On n'avait pas le droit de verser les sommes qui ont été versées, le ministre le sait. Et on répète notre demande: Est-ce qu'il va demander au juge en chef, gentiment – parce que c'est ce qu'il vient de nous dire, il demande gentiment au juge en chef de rectifier la situation – est-ce qu'il va lui demander gentiment de rembourser aux contribuables l'argent qu'il a reçu illégalement?

M. Bégin: Je répète ma réponse de tout à l'heure, M. le Président, à l'effet qu'il ne s'agit pas d'argent perçu illégalement mais de sommes versées pour tenir compte d'une situation tout à fait normale. Et je sens, dans le débat que soulève le député de Chomedey, cette amertume qu'il nous livrait l'automne dernier lorsqu'il s'agissait d'adopter la loi. Il trouvait tout à fait inadmissible que le siège social de la Cour du Québec soit ailleurs qu'à Montréal, que c'était tout à fait incompréhensible qu'on veuille le déplacer à Québec, pensant que seulement à Montréal l'endroit du siège social pouvait exister. Je lui ai mentionné que la Cour du Québec aurait son siège social ici, à Québec, et que, par ailleurs, il pouvait y avoir aussi des nominations d'autres personnes que venant de Montréal ou de Québec qui pouvaient être juge en chef. Et je pense que c'est une chose correcte de choisir, parmi l'ensemble des juges, quelqu'un qui est le mieux placé pour accomplir la fonction de juge en chef, et c'est ce qui a été fait au mois d'août.

Mais bien sûr qu'il y a des circonstances qui font que tout être humain normalement constitué ne peut, dans les quelques jours qui suivent, à la fois assumer ses fonctions, être à l'extérieur et penser qu'il reçoit la rémunération normale à laquelle il a droit mais qu'il doit, au contraire, puiser à même ses deniers pour être capable de combler des dépenses qui sont exigées par la fonction. M. le Président, je pense qu'il s'agit d'une mesquinerie que de vouloir dire que des sommes déboursées par une personne pour se déplacer, comme c'est le cas pour l'ensemble des fonctionnaires à qui on demande de se déplacer... de les payer de sa poche et surtout quand il ne s'agit pas, d'aucune façon, d'une chose illégale mais, au contraire, d'une chose tout à fait normale et qui se fait depuis toujours.

M. Mulcair: D'abord, M. le Président...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Monsieur.

M. Mulcair: Oui. Le ministre confond un peu lorsqu'il dit qu'on était contre le déménagement du siège de la Cour du Québec vers Québec. Au contraire, on s'est opposé quant au Conseil de la magistrature parce qu'on trouvait que ça n'avait pas de bon sens de déménager le Conseil de la magistrature à Québec étant donné que la vaste majorité des causes entendues par ce Conseil émanaient de Montréal et on trouvait que c'était imposer des dépenses inutiles aux parties, qui étaient souvent des particuliers. Ça, c'était notre position et on la maintient. Pour ce qui est du déménagement du juge en chef, c'était autre chose, et on s'est dit d'accord avec lui.

Par contre, le ministre peut utiliser tous les qualificatifs qu'il veut pour décrire notre position. Il est en train de référer à une norme, soi-disant. Qu'il produise la norme, qu'il nous montre la norme qui dit qu'il y a six mois dans un tel cas. S'il l'avait, il l'aurait déjà déposée, M. le Président. Il ne l'a pas. Ce que le ministre ne saisit pas, c'est que, Québec, c'est chez lui à partir de sa nomination. Qu'il soit au Château Frontenac, c'est son choix. Qu'il prenne un appartement, c'est son choix. Qu'il achète une maison, c'est son choix. Mais, du moment que la loi prévoit clairement que le lieu de résidence du juge en chef est à Québec, on n'a pas le droit de lui verser des sommes comme s'il était en séjour à Québec. Il ne peut pas être en séjour alors que la loi dit que c'est là son lieu de résidence. Alors, que le ministre produise sa norme, on a hâte de voir ça, une norme que le ministère aurait, une norme qui prévoit six mois. Puis, de toute façon, on a largement dépassé six mois, il va commencer son neuvième après-demain. La norme n'existe pas. Le moment de prévoir ça était lors du décret de nomination. Si c'était si facile à prévoir, comment ça se fait que le ministre de la Justice ne l'a pas prévu dans son décret de nomination?

Non. Il peut utiliser tous les arguments qu'il veut, il peut tenter de distraire l'attention sur ce qui est vraiment en train de se passer ici, le fait est que, illégalement, presque 30 000 $ de l'argent des payeurs de taxes ont été versés au nouveau juge en chef, le fait est qu'aux termes de la loi sa résidence doit être à Québec, et on n'a pas le droit de lui payer presque 30 000 $ de voyages, de repas et de résidence ici, à Québec, alors que c'est stipulé que c'est là où il doit résider. C'est notre dernier mot là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: Alors, M. le Président, je réitère que c'est la pratique qui est observée dans ces matières, généralement six mois, une période de transition pour permettre à la personne qui est déplacée d'une manière tout à fait imprévue, qui n'est pas le fruit d'une démarche qu'il a entreprise lui-même et qu'il aurait pu planifier, qui lui permettrait d'éviter de tels déboursés...

Je rappelle à nouveau, et en terminant, que le juge en chef est à la fois juge en chef, président du Conseil de la magistrature et président du Conseil du référendum, trois tâches qui lui ont échu le 30 août et commençant le 1er septembre 1995, que, compte tenu des circonstances particulières, il a dû travailler de manière extraordinaire et que, dans les circonstances, il était plus difficile pour lui de trouver rapidement une résidence permanente à Québec, et je soumets, M. le Président, qu'il était juste et normal que ces déboursés lui soient remboursés.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Drummond.


Soutien administratif à la magistrature

M. Jutras: M. le ministre, l'année dernière, il avait été question de certains ajustements qui devaient se faire au niveau du personnel des juges, les secrétaires entre autres, et ça, autant au niveau de la Cour supérieure qu'au niveau de la Cour du Québec. Il était question que ces secrétaires-là soient aussi utilisées comme greffières audiencières. Est-ce que, finalement, autant au niveau des deux tribunaux... est-ce que ça, maintenant, c'est réglé et puis est-ce que c'est la même politique qui est établie, dans un cas comme dans l'autre? Et est-ce que, finalement... Il y a certainement des économies qui vont en résulter; elles sont de quel ordre?

M. Bégin: M. le député de Drummond, je vous remercie parce qu'il s'agit là d'une question extrêmement importante qui avait fait l'objet, je crois, de mon premier discours devant la magistrature, un des premiers discours que j'ai livrés après avoir été nommé ministre. Je déplorais l'état de la situation, l'état dans lequel se trouvait la magistrature au niveau des équipements requis pour travailler. En particulier, je mentionnais que la magistrature était encore dotée de dactylos, qui n'étaient pas des traitements de textes, qui étaient tout à fait inadéquats, et que, souvent, pour être en mesure de rendre des jugements, on devait reprendre des 20, 25 ou 30 pages parce qu'on avait commis une erreur ou encore parce qu'on jugeait à propos de modifier, suite à une révision du document qu'on avait rédigé, l'ensemble de tout le texte et que ça représentait des coûts extraordinairement élevés.

(15 h 40)

Par ailleurs, il avait été également mentionné que, depuis de très nombreuses années, on n'avait pas pu régler certains problèmes qui existaient concernant le transfert de certaines personnes d'une fonction à une autre ou d'un poste à un autre parce que la situation était tellement pourrie depuis 10 ans entre la magistrature et l'administration qu'il n'était pas possible de faire quoi que ce soit. Je vais vous donner un exemple. En 1986, une injonction a été émise par le juge Gold pour empêcher qu'il y ait des transferts de postes de secrétaires, d'un poste à un autre, ou pour qu'on mette à pied certaines secrétaires parce qu'il n'y avait pas eu entente avec la magistrature. Et, pendant 10 ans, cette situation pourrie s'est maintenue et même s'est encore plus détériorée, puisque, par la suite, il y a eu des injonctions pour empêcher des déplacements de greffiers audienciers, de huissiers audienciers. Et même, à la toute fin, quand on est arrivé, il y avait un autre dossier qui venait d'éclore, qui était celui de certaines secrétaires spécifiques affectées à des juges qui ne pouvaient pas être déplacées selon les règles. Cette situation provient de 10 ans de malentendu, d'incompréhension, de chicane entre l'administration publique et la magistrature. La situation était telle que, lorsque j'ai commencé dans mes fonctions, les juges en chef me disaient, les uns après les autres, et ça me renversait: Merci, M. le ministre, de nous rencontrer. Et je disais: Oui, mais c'est normal, je suis là pour ça. On disait: Non, ça fait deux ans qu'on ne nous répond plus; ça fait deux ans qu'on n'a plus rien, on n'a plus de contacts; ça fait deux ans qu'on ne répond plus à nos lettres; ça fait deux ans qu'on ne répond pas aux coups de téléphone que l'on dispose.

Alors, par la suite, j'ai donc, et je l'ai dit... je pensais que la modernisation des équipements de la magistrature devait se faire, mais ceci implique, bien sûr, lorsque l'on fait des choses semblables, qu'il y a, un, des coûts, puis, d'autre part, qu'il y a aussi des personnes qui occupent des fonctions et que ça implique, donc, une réorganisation du travail.

En 1985, les juges de la Cour du Québec avaient accepté une façon différente de travailler par rapport à celle qui existait antérieurement. Les secrétaires avaient accepté de siéger comme greffières en cour et, en conséquence, avaient allégé considérablement le nombre de tâches qui devaient être accomplies par d'autres personnes; elles les avaient prises à leur compte. Ces économies de fonctions avaient été acceptées, assimilées dans le fonctionnement, mais la contrepartie qui était d'avoir des équipements meilleurs n'avait pas été accomplie.

Par contre, la Cour supérieure n'avait aucunement procédé à quelque remaniement que ce soit au niveau des fonctions, pour des raisons qui sont assez évidentes compte tenu de ce que je viens de mentionner, tout à l'heure, c'est-à-dire que des injonctions avaient été émises parce qu'on avait voulu bousculer la façon de faire et le travail de la magistrature et faire en sorte qu'ils ne soient pas capables de travailler selon les critères d'indépendance, d'impartialité qu'ils jugeaient essentiels. Donc, les allocations de secrétaires n'avaient pas été établies.

Alors, j'ai mentionné qu'il fallait faire quelque chose et, dès mon entrée en fonction, j'ai commencé à travailler avec la magistrature pour trouver une solution, une façon de faire et une façon même, je dirais, d'autofinancer l'installation de nouveaux équipements, d'appareils de traitement de textes qui, non seulement permettent aux secrétaires de faire un travail meilleur, plus rapide, mais aussi qui permettent à la magistrature d'entrer en contact avec la SOQUIJ qui détient, vous le savez, l'information, tous les jugements qui sont là, et qui permettent non seulement d'y avoir accès mais qui permettent également de transférer directement de leur ordinateur les jugements qu'ils ont donc pour enrichir cette banque de jugements de la SOQUIJ. Donc, une amélioration considérable.

Alors, j'ai entrepris de débroussailler tout ça avec la magistrature. Je dois vous aviser, vous informer que j'ai pris plus de temps que je n'aurais pensé qu'il était nécessaire de le faire. Je croyais que c'était plus facile, mais l'écheveau était tellement tissé croche et, je dirais, les relations étaient tellement gâtées qu'il était difficile d'arriver avec une approche tout à fait nouvelle et d'être cru du premier coup, parce que l'expérience antérieure avait été mauvaise. Mais, malgré ça, peu à peu, à la fois avec la Cour supérieure et la Cour du Québec, on a réussi à établir une proposition qui permettait de faire des économies substantielles au niveau du personnel tout en procédant à l'acquisition d'équipements neufs, modernes, qui vont permettre, comme je viens de le mentionner, à la fois d'avoir un travail meilleur de la part des secrétaires, mais aussi qui vont permettre de transférer à SOQUIJ et de SOQUIJ aux juges l'information juridique qui émane directement du travail intellectuel des juges.

Ceci a été conclu, et j'ai signé des lettres avec la magistrature à l'effet qu'on commencerait à implanter de tels ordinateurs. Au moment où on se parle, la moitié de l'équipement est arrivé à Montréal. On est à procéder, au palais de justice de Montréal, comme à Québec, au câblage de tout ce qu'il est nécessaire de faire à l'intérieur du palais de justice. Vous comprenez que c'est une opération qui est assez importante. Elle est en voie. Nous avons procédé avant le 31 mars 1996 à l'achat de la moitié des équipements. Nous allons procéder dans les prochains jours à l'achat des autres 50 %, de sorte que nous espérons qu'à la fin de juin 1996 l'ensemble de la magistrature du Québec, que ce soit à Gaspé, ou à Montréal, ou à Québec, ou à Rouyn-Noranda, partout au Québec, les juges de la Cour supérieure et les juges de la Cour du Québec auront, par le biais de leurs secrétaires, des équipements modernes avec des plans de travail qui sont adaptés à ce type d'équipement dans l'ensemble du Québec, et il n'y aura aucune distinction entre les uns et les autres. Bien sûr qu'il y aura aussi... Je ne suis pas un spécialiste en matière d'informatique, mais il y aura tous les relais, les modems qu'il faudra pour qu'on puisse vraiment travailler de façon efficace et moderne avec ces appareils. Ce qui veut dire que, cette année, enfin, après 10 ans, la magistrature, notre magistrature sera équipée d'appareils satisfaisants.

En parallèle à ça, il y aura évidemment une réduction d'un certain nombre de postes de secrétaire – c'était le sens de votre question – et aussi d'un certain nombre de postes de huissier audiencier, la magistrature ayant préféré faire en sorte qu'il y ait un peu moins de huissiers audienciers plutôt qu'un peu moins de secrétaires. C'est une question d'organisation et de fonctionnement de la cour. J'ai cru qu'il était mieux de leur laisser le soin de déterminer de quelle façon ils allaient procéder que d'essayer de leur en imposer une qui aurait été en discordance par rapport aux besoins. Parce qu'il faut comprendre que la façon de fonctionner de la Cour supérieure à Montréal, de la Cour supérieure à Québec et de la Cour supérieure à Montmagny, ce n'est pas du tout la même chose, pour des raisons qui sont assez évidentes, de volume, d'ampleur, du nombre de salles, et ainsi de suite... ce qu'on ne retrouve pas nécessairement, par exemple, à Montmagny. Donc, il faut que chacune des cours trouve de quelle façon elle aime mieux travailler. Est-ce qu'elle aime mieux que les secrétaires... Parce qu'elles vont le faire maintenant, les secrétaires de la Cour supérieure à Montréal, elles vont faire comme c'était déjà le cas à Québec, mais pas ailleurs, aller travailler, je ne sais pas exactement le nombre d'heures ou de demi-journées, mais je pense que c'est 50 % de leur temps – je pourrais me tromper là-dessus, mais on pourra corriger aussi – 50 % de leur temps à la cour avec un juge et, le reste du temps, elles travailleront à leur bureau comme elles le font actuellement, ce que les secrétaires à Québec font et que ne font pas les secrétaires à Montréal.

Alors, c'est un grand portrait de ce qui s'est passé, mais je peux vous dire que c'est une transformation majeure, puisqu'à ça se greffe le fait qu'il y a eu, d'abord, à la Cour d'appel, un ajout important de recherchistes pour permettre à la cour de mieux fonctionner, qu'il y a eu également d'autres recherchistes qui ont été ajoutés à la Cour supérieure et à la Cour du Québec pour faire en sorte que leur travail soit plus facile et mieux fait, et je pense que ça porte des fruits. On pourra en reparler, par exemple, à la Cour d'appel, du rendement qu'ils ont obtenu cette année avec des recherchistes puis qui ont pu travailler à mieux fonctionner ou à mieux élaborer des méthodes nouvelles de travail.

On me souligne que c'est pour 25 % de leur temps que les secrétaires à la Cour supérieure à Montréal vont aller à la cour, et non pas 50 %.

M. Jutras: On m'avait dit, moi...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, M. le député de Drummond.

M. Jutras: On m'avait dit que l'économie qu'on irait chercher serait de l'ordre de 50 % – ce n'est peut-être pas exact, ça ne venait pas du ministère, c'étaient des discussions de corridor de palais de justice – que l'économie serait de l'ordre de 50 % dans le sens suivant: C'est comme si on se retrouvait, par exemple au niveau de la Cour supérieure, avec une secrétaire pour deux juges.

(15 h 50)

M. Bégin: Ce n'est pas tout à fait exact. La proposition que j'avais faite visait à faire en sorte qu'il y ait une réduction au niveau des secrétaires, mais on n'avait pas touché à d'autres fonctions comme celle de huissier audiencier, par exemple. D'autre part, à la Cour supérieure, il faut savoir qu'il y a des juges à plein temps, mais il y a les juges qu'on appelle surnuméraires. Alors, c'est une façon différente de fonctionner. Les juges surnuméraires n'ont pas tout à fait la même fonction que les juges à plein temps. Alors, il y a un ratio qui a été établi, qui n'est pas nécessairement d'une secrétaire pour deux juges, mais c'est plutôt à peu près, je dirais, neuf dixièmes de secrétaire par juge pour les juges réguliers, mais, pour les secrétaires de juges surnuméraires, c'est une pour deux juges surnuméraires. Alors, là, on a le ratio en question.

Par ailleurs, il y a une économie assez substantielle au niveau de l'argent, c'est environ 1 200 000 $ d'économie, mais il faut comprendre que ce n'est pas une économie qui est complète, puisqu'elle est réinjectée pour l'achat d'équipements, parce qu'il faut bien les acheter. Alors, la réduction est transformée en dépenses au niveau des ordinateurs, la réduction de secrétaires. Normalement, les effectifs en moins, cette année, à la Cour supérieure ou à l'ensemble, c'est 36, il y a 36 ETC de moins. Alors, c'est un effort de rationalisation qui rapporte 1 200 000 $ et qui est réinjecté dans les nouveaux équipements.

M. Jutras: Dernier point là-dessus. L'économie au niveau... parce que je sais qu'il y avait le problème aussi au niveau des huissiers audienciers, ce qu'on appelle les porteurs de livres...

M. Bégin: Ha, ha, ha!

M. Jutras: Qu'est-ce qui arrive à ce niveau-là? Je sais qu'il y a eu des injonctions là aussi, les ordres de certains juges qui exigeaient d'avoir leur huissier audiencier. Vous en avez juste dit quelques mots. Mais on se retrouve dans quelle situation avec ça? Est-ce que chaque juge de la Cour supérieure garde son huissier audiencier et puis...

M. Bégin: Non.

M. Jutras: Non.

M. Bégin: Non, non. J'ai dit que la Cour supérieure a préféré travailler au niveau des huissiers audienciers que des secrétaires comme telles. Je ne peux pas vous faire le départage. Je pourrais le faire de façon plus précise si c'est requis mais pas instantanément. Ils ont préféré réduire le nombre de huissiers audienciers que le nombre de secrétaires comme tel. Alors, c'est plutôt à ce niveau-là que ça va jouer. Par ailleurs, les secrétaires vont assister le juge à 25 % de leur temps en cour. Donc, tout cet aspect de transfert de documents, etc., va se faire beaucoup plus facilement par le biais de la secrétaire en question.

Par ailleurs, vous parlez d'injonction. J'ai mentionné trois injonctions, mais il y avait quatre injonctions à l'époque où je suis arrivé comme ministre de la Justice. L'une concernait le stationnement. Ce dossier est réglé. Les juges paient leur stationnement comme tous les autres, parce qu'on s'est parlé et on a convenu de régler le problème. Deuxièmement, les trois autres injonctions, c'est la condition qui a été convenue avec la magistrature pour fournir de nouveaux équipements, c'est que toutes ces questions d'injonction seraient annulées pour que les parties puissent fonctionner normalement. Il faut comprendre qu'une injonction, c'est bien compréhensible, je pense que le ministre de la Justice va la respecter. Et c'est ce qui a été fait pendant 10 ans mais ça nous empêche de faire quelque transformation que ce soit, quelque changement que ce soit dans le fonctionnement de la cour. Alors, avec le règlement qu'on a fait, ces jugements-là disparaîtront. Il y aura un règlement hors cour et tout redeviendra normal. On pourra retrouver les modes de fonctionnement usuels en matière de relations patron-ouvrier ou patronales-syndicales, si on aime mieux.

M. Jutras: Mais, concrètement parlant, est-ce qu'un juge de la Cour supérieure qui se rend dans sa salle de cour et qui siège... est-ce que, encore, il a constamment avec lui un huissier audiencier...

M. Bégin: Non.

M. Jutras: ...toutes les fois qu'il siège?

M. Bégin: Non. Il y a des accommodements. Je ne peux pas vous décrire exactement quels sont chacun, dans chaque cas, les accommodements en question, mais il y aura des huissiers qui vont servir, par exemple, deux ou trois juges ou quatre juges et qui vont circuler soit pour faire une photocopie qui est demandée par des parties au cours du procès, soit pour apporter un livre, soit pour apporter quelque documentation que ce soit, donc qui vont être au service de trois ou quatre juges simultanément. Mais c'est une transformation profonde par rapport à ce qui existait antérieurement où la personne restait là tout le temps que siégeait la cour, qu'il y ait quelque chose à faire ou non.

M. Jutras: Par contre, il y avait l'aspect quand même – tantôt, j'ai fait une blague en disant les porteurs de livres – il y avait quand même un aspect sécurité avec ça. Qu'est-ce que le ministère envisage à ce niveau-là? Parce que, quand même, dans certaines cours, et peut-être plus dans certaines juridictions, il peut y avoir plus de danger, qu'on peut dire, ou, en tout cas, la sécurité peut être compromise plus facilement. Qu'est-ce qui est envisagé à ce niveau-là?

M. Bégin: Il faut comprendre que cet aspect de la sécurité des juges est un aspect très important et que, dans tous les nouveaux palais de justice, il y a un premier degré de protection qui est fait en faisant en sorte qu'il y ait des couloirs réservés strictement à la circulation de la magistrature, donc auxquels le public ne peut pas avoir accès. Vous connaissez la pratique qui fait que, pour avoir accès à ces corridors, il faut passer par un seul endroit où il y a un gardien de sécurité et on doit s'identifier. Ça, c'est le premier degré. Ça existe dans les nouveaux palais de justice. À Montréal, certains travaux ont été faits à certains endroits pour améliorer. Il en reste d'autres à faire. Tout n'est pas parfait. Parce que ce n'est pas nécessairement facile quand on trimbale certaines personnes dans les palais de justice, en particulier les criminels, ce n'est pas toujours évident que la sécurité est en place.

Par ailleurs, il y a, bien sûr, dans la cour elle-même, des risques qui sont encourus par ceux et celles qui sont là, et ce ne sont pas toujours des enfants de choeur, comme on disait chez nous quand on était jeune, qui se présentent devant la cour, de telle sorte qu'on est en train de procéder, au moment où on se parle, et ce sera terminé à la fin de juin, à installer ce qu'on appelle un bouton-panique. Au lieu d'avoir une ou des personnes qui restent en place en permanence pour faire en sorte que, s'il arrive quelque chose, on puisse intervenir rapidement, maintenant, les juges auront toujours, à la portée de la main, du doigt, un bouton-panique, et des personnes entraînées à cette fin, qui se tiendront à certains endroits particuliers, mais en moins grand nombre que ce n'est le cas actuellement, pourront intervenir rapidement en cas de commande. Je pense qu'il s'agit là à la fois d'un aspect sécurité pour la magistrature, et on peut en installer partout, et, d'autre part, il s'agit, évidemment, d'une dépense à court terme qui est faite, mais, à moyen et à long terme, étant donné que c'est une dépense récurrente, la présence de personnes, il s'agira d'une économie à ce niveau-là.

M. Jutras: Je ne sais pas si la situation est réglée au palais de justice de Drummondville, mais ce que vous venez d'énoncer, c'était un gros problème qu'il y avait là. Les juges, les détenus et ceux qui devaient être condamnés passaient dans le même couloir, se croisaient aller-retour. Je ne sais pas si la situation a été corrigée, mais ça fait longtemps que cette situation-là était déplorée, autant par les juges que par les avocats, ça n'avait aucun sens.

M. Bégin: Écoutez, je ne pense pas que la situation soit corrigée à Drummondville. Cependant, vous comprenez la situation financière, dans son ensemble, du gouvernement; le budget d'immobilisation ne peut plus être ce qu'il a déjà été. Par contre, j'ai prévu un certain montant, de petites sommes, de modestes sommes, j'en conviens, pour essayer de travailler... si on ne peut pas faire tout ce qu'on voudrait faire, au moins essayer de corriger des situations comme celle-là. Je n'ai pas vu personnellement le palais de justice de Drummondville, mais je sais, par exemple, qu'à Matane la situation que vous décrivez est tout à fait présente. Je l'ai vu, la porte du juge, c'est l'endroit où circulent les prisonniers, menottes aux mains. Vous savez que c'est tout à fait inconvenant et tout à fait inacceptable. Alors, il y a des travaux qui vont être faits, je pense, en cours d'année. C'est des sommes, souvent, relativement modestes. Je vais travailler – je ne sais pas, cette année, dans le cas de Drummondville – mais travailler à ce niveau-là, investir modestement mais solutionner des problèmes ponctuels, concrets comme celui-là. Dans d'autres endroits, ce ne sera malheureusement pas faisable à court terme, mais il y a plusieurs projets comme ça, de transformation... mettons, des dépenses de 50 000 $, 75 000 $, 100 000 $, déplacer des murs, faire en sorte qu'on ne se croise pas. On va essayer de faire ça, mais je ne peux pas vous dire que, pour Drummondville, ce sera corrigé.

M. Jutras: Merci.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Chomedey. Ensuite, ce sera Mme la députée de Blainville.


Publication de jugements

M. Mulcair: Oui, merci, M. le Président. Mon collègue et confrère, le député de Drummond, était un peu rendu dans Soutien administratif à l'activité judiciaire, qui est l'élément 1 du programme 2, alors qu'on n'avait pas tout à fait fini avec Formulation de jugements, mais c'est peut-être un bon point de transition que de parler de la Société québécoise d'information juridique; en ce qui regarde, justement, la publication des jugements, c'est intimement relié à leur formulation. Parce qu'on dit que nul n'est censé ignorer la loi. Dans notre système, les jugements font partie de ce droit, alors on doit les connaître. C'est aussi un élément, si on peut dire, qui se rattache, d'une certaine manière, à Soutien administratif à l'activité judiciaire.

Moi, je voudrais savoir de la part du ministre si, à l'égard de SOQUIJ, il sent que toutes les barrières nécessaires sont en place pour s'assurer qu'il n'y a pas de conflit possible entre ce qui demeure quand même quelque chose qui est payé par l'État, ou du moins subventionné d'une manière parabudgétaire, et la nécessaire indépendance judiciaire. Je vais me permettre d'illustrer ma question avec un exemple concret.

(16 heures)

Il y a un jugement concernant la Charte de la langue française qui a été rendu en 1983 ou 1984, si ma mémoire est bonne, ça concernait un fleuriste de Montréal, McKenna, celui-là même qui était impliqué dans la cause qui était allée jusqu'à la Cour suprême, qui est devenu le jugement de juin 1985. Mais celui-ci était plutôt sur une question assez technique concernant un règlement pris en application de la Charte de la langue française, le Règlement sur la langue du commerce et des affaires. Aux termes de ce règlement, il avait été prévu que, si on voulait distribuer des catalogues et brochures bilingues dans un lieu public, ça devait faire l'objet d'une publication distincte. Par contre, on pouvait les distribuer à domicile dans une seule et même version. Le juge Viau, si ma mémoire est bonne, avait déclaré illégale la disposition, car ça allait à l'encontre du principe de la Charte à cet égard-là, qui avait toujours, depuis son adoption au mois d'août 1977, prévu la possibilité de l'adopter dans les deux langues.

Alors, deux choses intéressantes se sont produites avec ce jugement-là. C'était le premier jugement qui déclarait illégale une disposition d'un des règlements de la Charte. Le jugement n'a jamais été porté en appel, donc est devenu res judicata, et n'a jamais été publié. Alors, à toutes les quelques années, quand ça devient nécessaire d'obtenir un jugement, j'appelle mon collègue chez McCarthy Tétrault, Allan Hilton, qui avait plaidé la cause, pour lui demander s'il aurait la bienveillante collaboration d'aller trouver dans ses tiroirs, dans le cas McKenna, une copie du jugement.

Mais ce qui était encore plus intéressant, c'est que le règlement lui-même, jusqu'à ce qu'il soit modifié, il y a trois ans, avec le projet de loi 86, pendant donc une dizaine d'années, a continué d'être publié avec cette disposition là-dedans, et même les publications administratives, les recueils administratifs de l'Office de la langue française continuaient d'être publiés avec cette disposition là-dedans. C'est intéressant. M. Samson, qui vous accompagne aujourd'hui, est très au courant de cette situation.

C'est assez inusité, parce qu'on dit qu'on doit connaître la loi. Un avocat qui doit donner un conseil à son client, normalement, devrait s'attendre à pouvoir mettre la main sur le jugement. Or, ce jugement-là ne figure dans aucune banque, il n'a jamais été publié. Il infirme et il est chose jugée; il est de jugement définitif. Il dit qu'une disposition n'existe plus. On continue, le gouvernement continue à publier des recueils administratifs, des règlements pris en application de la Charte de la langue française avec cette disposition dedans alors qu'elle n'existe plus légalement. Alors, ma question pour le ministre vise à savoir s'il a porté une réflexion particulière sur ce qui pourrait, à la limite, devenir assez délicat, de voir l'État jouer ce rôle dans la publication des jugements.

Rappelons, M. le Président, que, dans d'autres juridictions, aux États-Unis notamment, mais surtout dans les provinces de «common law», ce sont surtout des services privés, des éditeurs privés qui publient les jugements, alors qu'ici l'État est impliqué là-dedans depuis de nombreuses années. Est-ce que ce genre de situation et les difficultés possibles que cela peut engendrer a fait l'objet d'une réflexion particulière du ministre? Et, si oui, est-ce qu'il peut partager avec nous les fruits de sa réflexion?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: Trois choses, M. le Président. La première, qui me semble la plus évidente: pendant les années 1986 à 1994, il me semble qu'il aurait été facile, à ceux qui posent des questions, de corriger les erreurs qui auraient pu être commises. Mais je vais leur pardonner parce qu'il y a une deuxième raison à cette chose-là, c'est que SOQUIJ est un organisme indépendant du gouvernement, et qui fonctionne de manière indépendante, et j'espère qu'il va continuer à fonctionner de manière indépendante, parce qu'il joue un rôle extrêmement important, c'est de sélectionner, parmi les milliers et les milliers de jugements qui se publient chaque année, ceux qu'il considère, au moment où les événements se produisent, devoir être l'objet d'une publication.

S'il se publie 3 000 jugements par année faisant l'objet d'arrêts ou de l'attention, pardon, des arrêtistes, donc qui comportent des mots clés, des mots-résumés qui font en sorte qu'on les publie et qu'on les indexe, et qui sont répertoriés facilement par des techniques propres à ce type de dossiers, si, sur 30 000, il y en a 3 000 qui sont l'objet d'une telle attention, il y a donc 27 000 dossiers – je prends une hypothèse – qui ne sont pas traités.

Bien sûr que l'exercice en question comporte une certaine part de discrétion, une certaine part d'erreur, une certaine part de jugement. Dans certains cas, à la limite, on pourrait même dire de manque de jugement, mais ce n'est pas là l'important parce que, de façon générale, les usagers, les principaux usagers de SOQUIJ sont satisfaits de la manière de travailler de SOQUIJ. Cependant, on leur fait peut-être grief de ne pas publier suffisamment de jugements. Bon. C'est une question qui est intéressante et qui peut être corrigée.

C'est pourquoi, M. le Président, j'ai formé un groupe de travail, un comité de travail sur la Société québécoise d'information juridique, qui m'a remis un rapport au mois de novembre, à la fin de novembre. Il était sous la présidence de Me Pascale Mercier, avec un certain nombre de membres, de personnes. Permettez: Raynald Brulotte, directeur général des Publications du Québec, parce qu'il y a l'aspect service gouvernemental qu'il fallait impliquer; M. Jean-Paul Gagné, directeur général; M. Mathieu Godin, président de Convitech informatique inc.; l'honorable juge Maurice Lagacé, juge à la Cour supérieure; Me Serge Larouche, un avocat de la pratique privée; Me Denis Le May, conseiller à la documentation en droit à la bibliothèque de l'Université Laval; Me Denis Marsolais, notaire, qui, incidemment, a été élu président de la Chambre des notaires il y a quelques jours, il y a une quinzaine de jours; il y avait Me Jean-K. Samson, ici présent, sous-ministre associé, et Me Denis Coulombe, secrétaire du comité, qui est un fonctionnaire du ministère.

Ce rapport a été rendu public il y a environ trois semaines, un mois peut-être, c'est: «SOQUIJ: mission, orientations et choix pour l'avenir». Je pense que c'est un document de travail extrêmement bien fait, ce n'est pas la réponse à toutes les questions qu'on se posait, mais je pense qu'il y a des bonnes pistes de solution là-dessus.

Par la suite, le Barreau a fait publier récemment – je ne l'ai pas ici – un autre document qui a dû être publié vers la fin février, début mars, qui porte sur le même objet et qui a été fait de manière indépendante puisque mon rapport n'était pas public; peut-être le Barreau l'avait-il entre les mains de manière non officielle. Mais ce n'est pas grave, il n'y avait rien d'extraordinaire là-dedans. Ils ont fait leur propre réflexion de leur côté.

Il y a également les éditeurs privés que je devais rencontrer vendredi dernier, à Montréal. Une urgence m'a empêché de les rencontrer, je les ai salués à la porte et je leur ai dit: Bon, bien, à vendredi prochain. Donc, je les rencontre à Montréal la semaine prochaine, ce sont les éditeurs privés.

SOQUIJ, évidemment, c'est tout ça, c'est l'information juridique; c'est la publication; c'est l'édition; c'est la diffusion de l'information juridique et je veux, avant de prendre des décisions à cet égard, consulter l'ensemble du milieu, le Barreau, avec qui j'ai parlé de la question plus tôt dans la même journée de vendredi dernier. On a mis, je pense, une heure à discuter de ça. Devaient suivre les éditeurs privés et, en conséquence, préparer le terrain pour des décisions éventuelles.

Bien, tout ça fait en sorte qu'on doit positionner, par exemple, le rôle de l'Éditeur officiel, qui a toujours été en concurrence avec SOQUIJ, qui pose des problèmes. Il y a des éditeurs privés qui posent des questions et qui veulent avoir des réponses. Il y a eu un certain désintéressement au niveau des modes de nomination puisque je pense que, quand je suis arrivé en fonction, il n'y avait plus personne qui avait encore un mandat, c'étaient toutes des prolongations de mandats que j'ai continuées, d'ailleurs, en me disant: avant de faire quoi que ce soit, on va se questionner sur le fonctionnement de SOQUIJ, on va voir ce qu'on devrait faire sans avoir aucune arrière pensée, aucun parti pris.

Il s'agissait d'avoir la plus grande ouverture possible, mais dire, 15 ans ou 20 ans après, ce qu'on doit faire avec SOQUIJ... Surtout que, depuis quelques années, l'autoroute de l'information chambarde complètement le mode de fonctionnement. Alors, tout ça étant en place, qu'est-ce qu'on doit faire? C'est ce que j'ai demandé. Et on peut retrouver, entre autres, une proposition dans ce rapport qui est extrêmement intéressante et qui vise à répondre à votre question de manière plus spécifique. Je pense à la recommandation 20, qui dit ceci: Que SOQUIJ établisse et gère un entrepôt électronique – un entrepôt électronique – constitué, entre autres, du texte intégral de toutes les décisions rendues par les tribunaux et par certains organismes administratifs du Québec de façon à répondre davantage aux besoins de certains clients. Bon, c'est une proposition qui est extrêmement intéressante, c'est qu'on veut regrouper dans un seul entrepôt tout ce qui peut se publier en cette matière pour que ceux et celles qui ont le temps, le goût, l'argent, la disponibilité pour aller cueillir de l'information dans cet entrepôt-là puissent l'avoir sans qu'on ait comme fonction de tout éditer. Parce que là on tombe avec un autre problème qui est celui de la trop grande masse, une masse informe, et c'est aussi pire que ne pas avoir du tout d'information. Alors, il faut donc faire des choix. Mais ceux qui voudront investir pourront retrouver dans cet entrepôt tous les renseignements.

Alors, je pense, M. le Président, qu'on est en face de quelque chose d'extrêmement intéressant, on est à un point tournant en matière d'information, de diffusion de l'information juridique. Il faut qu'on se positionne à nouveau, compte tenu des changements profonds qui ont eu cours, compte tenu qu'on prétend que certains coûts sont trop élevés pour avoir droit à certains jugements.

(16 h 10)

L'apparition dans ces derniers temps d'éditeurs privés qui veulent avoir accès plus facilement à ces informations juridiques pour les transformer et les rendre accessibles aux usagers d'une manière différente, tout ça fait en sorte que c'est le temps ou jamais de se questionner et c'est pour ça que j'ai fait le comité en question, mais c'est un travail qu'il faut compléter avec le Barreau, avec la magistrature.

Parce que, pensez-y là, qu'est-ce que l'on fait, par exemple, aujourd'hui, pour un juge qui est nommé? Actuellement, il a le droit, en vertu des règles, d'obtenir des abonnements à peu près à toutes les revues, à toutes les publications juridiques du Québec, ce qui est excellent; les statuts refondus, les règlements, etc. C'est excellent, c'est même correct, cependant, ça représente des coûts fantastiques quand on pense qu'il y a 290 juges au Québec. Bien, si vous avez 290 abonnements à la même revue, c'est extrêmement dispendieux.

Si on transforme tout ça en argent qui pourrait être investi dans la bibliothèque, non pas du juge, mais la bibliothèque du palais de justice... Parce qu'il y a des procureurs de la couronne qui ont leur bibliothèque. Il y a le Barreau qui attend d'avoir une bibliothèque. Enfin, on a, dans un même établissement, des fois, à Montréal, m'a-t-on dit, jusqu'à 11 bibliothèques différentes, en plus de celle que chacun des juges peut avoir. Si on est capables de regrouper tous les argents qu'on investit là-dedans pour les transformer en ordinateurs, en CD-ROM, en tout autre instrument d'accès à la justice, tout en réservant à la population, qui n'est pas encore capable d'utiliser ces instruments-là, la forme papier, ou encore les avocats qui ne sont pas encore équipés, je pense qu'on peut rationaliser considérablement les coûts et faire en sorte que, par contre, on ait aussi une justice qui est beaucoup plus moderne, parce qu'on a des équipements tout à fait adaptés à l'époque où on vit.

M. Mulcair: On fait nôtres, M. le Président, les commentaires formulés récemment par le Barreau à ce sujet. En janvier 1996, le Barreau du Québec publiait un mémoire intitulé «Pour une politique sur l'accès et la diffusion de l'information juridique», et je me permets de lire une seule phrase: Le Barreau du Québec s'inquiète du fait qu'aucune politique en matière d'accès et de diffusion de l'information juridique n'ait été élaborée jusqu'à maintenant par le ministère de la Justice. Ça, ça se retrouve à la page 10 du rapport en question.

Mais je suis très content de constater que le ministre porte une attention particulière à cette très importante question. Il a raison aussi de souligner qu'avec les divers outils informatiques qui existent aujourd'hui, auxquels on ne pouvait même pas songer il y a quelques années, ça va sans doute y aller au même rythme et on va connaître les possibilités d'accéder à de l'information juridique qui est beaucoup plus facile et beaucoup plus accessible à tout le monde.

On n'a qu'à penser au fait que la plupart des bureaux, aujourd'hui, ont un CD-ROM et que SOQUIJ publie maintenant une version, si je ne m'abuse, des lois et règlements refondus sur CD-ROM. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il sait si ces lois et règlements sont publiés en français et en anglais, la version CD-ROM publiée par SOQUIJ des lois et règlements du Québec?

M. Bégin: Vous savez que ça fait à peine, je pense, un mois et demi ou deux mois que le premier CD-ROM jamais publié au Québec...

M. Boulerice: J'aimerais indiquer au ministre que c'est plutôt un DCMSF: disque compact mémoire support fixe. Merci.

M. Bégin: Je vais l'écrire pour être capable de le dire. Ha, ha, ha! Alors, le premier DCMSF a été publié il y a à peine un mois, un mois et demi. J'en suis particulièrement fier, parce que, au niveau particulièrement des règlements, c'était extrêmement difficile d'être à jour. Ça nécessitait un effort considérable. Je peux me tromper dans l'information, mais je pense qu'il sera mis à jour, remplacé à tous les six mois, et, dorénavant, il sera possible d'avoir le règlement à jour aux 15 jours, en ligne, «on line». Ha, ha, ha! C'est une traduction simultanée. Pour tous les règlements. Je pense que c'est un progrès considérable.

Cependant, l'effort qu'on a mis et que j'ai demandé qu'on investisse pour arriver à ce premier résultat n'a pas permis, à ce stade-ci, de l'avoir en anglais, mais il est bien sûr que, maintenant qu'on est capable de l'avoir une première fois, ce sera facile d'investir pour être capable de l'avoir en anglais à la fois, aux mêmes périodes, au même rythme qu'on le fera en français.

M. Mulcair: M. le Président, le ministre a, assis à sa droite, Me Jean-K. Samson, qui est probablement une des personnes au Canada les mieux placées pour expliquer le sens et la portée du jugement de la Cour suprême dans le renvoi sur le Manitoba, jugement rendu au mois de juin 1985, jugement qui ne saurait être plus clair. L'adoption...

M. Bégin: Je vous indique qu'ils sont disponibles en anglais et en français sur papier.

M. Mulcair: L'adoption de tout le processus d'élaboration, d'adoption et de publication des lois et règlements du Québec doit se faire en même temps en anglais et en français. Je laisserai au ministre le soin de prendre conseil, mais je pense que ça serait très hasardeux pour lui de rester avec son impression que le fait que ça existe sur papier en anglais constitue une manière correcte d'obtempérer au jugement de la Cour suprême là-dedans.

Je crois que, si on regarde les manières d'interpréter les jugements et les textes de lois, il est tout à fait clair que, si la manière d'accéder à cette information juridique devient une manière électronique, il faut que l'accès aux deux... Et ça, c'est très, très clair non seulement dans la décision même de la Cour suprême, mais dans les autres décisions qui ont suivi après toutes les négociations avec le Procureur général du Manitoba: toutes les étapes, tout le processus doit être identique et pareil.

Alors, je pense que le ministre aurait intérêt à prendre conseil sur cette question très particulière, car je crains qu'en rendant moins disponible une des deux versions il est en train peut-être de commettre un accroc à la Constitution, compromettant ainsi la légalité d'un ensemble de documents ou de décisions, et je suis sûr que, comme Procureur général du Québec, ça ne serait jamais son souhait.

M. Bégin: Alors, l'homme le plus informé en cette matière au Canada me dit que nous respectons l'article 133 et que, contrairement au fédéral, qui ne publie plus sur papier, le Québec l'a toujours sur papier en français et en anglais, et que les lois sont adoptées en français et en anglais.

M. Mulcair: En tout cas, M. le Président, d'aucuns oseraient nous dire qu'on est en train de créer du travail pour les avocats. Je suis sûr que ça non plus ce n'est pas le souhait du ministre là-dedans, mais je peux lui assurer que, s'il demeure convaincu qu'une seule version sur support papier suffit pour rencontrer les exigences de l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867, je ne partage pas son point de vue et je suis convaincu qu'un jour quelqu'un va soulever le problème, parce que c'est sûr et certain que, lorsqu'un texte constitutionnel prévoit une obligation comme celle-là, l'obligation évolue avec les temps et avec les moyens de communication.

C'est comme, si on voulait prendre le raisonnement du ministre, si on publiait une seule copie en langue anglaise, puis on la déposait à la Bibliothèque nationale du Québec. Je ne pense pas que quelqu'un dirait qu'on a rempli notre obligation. Il est déjà assez difficile d'accéder aux deux versions des textes de lois au Québec et, souvent, la lecture des deux versions rend plus facile la compréhension de l'intention du législateur, parce que le traducteur a souvent eu à vraiment se poser la question: qu'est-ce qu'on voulait dire ici? Et très souvent la lecture des deux textes est un avantage.

Moi, je suggère à mon collègue, le ministre de la Justice, de regarder cette question attentivement. Et ce n'est pas si difficile. Une fois qu'on a le mécanisme en place, aujourd'hui, avec les moyens informatiques dont on dispose, ce n'est pas le travail que c'était il y a 20 ans, quand on était en train de faire le premier travail de la Commission de refonte des lois du Québec. Ce n'est plus ça du tout. Aujourd'hui, ça peut se faire d'une manière machinale, beaucoup plus simplement. Et, si ça se fait dans les autres provinces, je ne vois pas pourquoi ce serait si difficile ici.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci, M. le député de Chomedey. Mme la députée de Blainville.

Mme Signori: Merci, M. le Président. Moi, je vais me permettre d'être délinquante un peu parce que, oui, bien sûr, je vais sortir du programme, parce que, comme il y a des avocats qui vont vouloir souvent prendre la parole, je la prends tout de suite.


Centres d'aide aux victimes d'actes criminels

Alors, je voudrais avoir des informations au sujet des CAVAC, M. le ministre. Ma première question: Est-ce que la subvention aux CAVAC va rester telle qu'elle est? Est-ce qu'elle sera augmentée ou à tout le moins maintenue? Et est-ce que vous prévoyez aussi développer de nouveaux CAVAC cette année, pour 1996-1997? Parce que je connais le travail qui est fait par CAVAC Laurentides et je ne voudrais pas qu'ils soient empêchés de faire leur beau travail dans les Laurentides, mais aussi ailleurs au Québec.

(16 h 20)

M. Bégin: Alors, il y a un certain nombre de CAVAC, je crois que c'est 10, à travers le Québec. Nous avions pensé être en mesure, peut-être, dans l'année 1995, à même des sommes qu'on escomptait recevoir, permettre la réalisation d'autres CAVAC ou... en tout cas, le mot ne me revient pas à l'esprit. Ce n'est pas l'équivalent d'une succursale, mais un point de services additionnel et on pensait à la région de Thetford-Mines. Malheureusement, les argents dont nous disposons sont insuffisants pour le faire.

C'est donc pourquoi nous avons dû nous limiter à ce que nous avions annoncé initialement pour le budget de l'année 1995-1996. Chacun des CAVAC a reçu un montant, je pense que c'est 75 000 $, sauf un qui a eu 90 000 $, celui de Montréal; chacun a reçu son montant. Alors, ce montant va être maintenu. Cependant, c'est clair que les CAVAC, les centres d'aide aux victimes d'actes criminels, sont des institutions absolument essentielles, et qui font un travail remarquable. J'en ai vu quelques-uns à l'oeuvre et je peux vous dire que c'est impressionnant, le travail que, généralement, je dis, ces femmes font, puisqu'on retrouve beaucoup de femmes, et presque exclusivement des femmes, dans ces centres-là.

C'est un travail remarquable d'aide et d'entraide à l'égard des personnes qui sont victimes d'actes criminels et qui, à un moment ou l'autre, doivent être appelées à témoigner, que ce soit pour elles ou pour d'autres, et elles reçoivent, ces victimes-là, lorsqu'elles se présentent dans des centres, l'aide de personnes qui les informent sur leurs droits, qui les informent du déroulement éventuel du procès qui aura lieu, de leur témoignage qu'elles auront à rendre, non pas du contenu du témoignage, mais de la manière dont ça se déroule, de tout ce que sera le décorum au moment où elles seront là, et qui, évidemment, reçoivent ces instructions au moment où elles sont dans des salles qui sont aménagées spécialement pour ces personnes, en attendant, pour ne pas subir, comme je l'ai dit à plusieurs reprises et que je redis encore une fois, pour ne pas subir une seconde violence en étant face à face, en attente de leur procès ou de leur témoignage, devant leur agresseur.

Alors, tout ça, c'est des choses remarquables et il faut trouver le moyen d'augmenter leur financement. Cependant, la caractéristique particulière du financement des CAVAC, c'est les suramendes compensatoires qu'ordonnent les juges au moment de la condamnation des auteurs de crimes, qui servent à financer, là-dessus. Et je dois dire à cet égard que, dans l'ensemble du Québec, sauf dans la région de Montréal, il y a vraiment l'utilisation par les juges de cette technique de la suramende compensatoire. Malheureusement, Montréal qui est quand même, vous le savez, presque 50 % de la population, donc, qui représente certainement quelque chose qui se rapproche de 50 % de l'ensemble des cas où on pourrait imposer une telle amende, malheureusement, les juges de la région de Montréal ne les imposent pas, ce qui fait que le financement des CAVAC est un peu rendu difficile par cette situation.

J'attends une occasion de le dire, de le demander à la magistrature, en respectant, bien sûr, son indépendance, de devoir peut-être utiliser un peu plus ce pouvoir qu'ils ont de condamner les auteurs à des suramendes pour faciliter l'entrée des fonds pour les CAVAC. Alors, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas ça, et compte tenu des enveloppes fermées dont nous disposons, et surtout compte tenu de la situation économique budgétaire du gouvernement, vous comprenez qu'on ne peut pas envisager, à court terme, une augmentation de leur financement tout en contribuant, de manière accessoire, comme je le disais, en fournissant des endroits où elles peuvent travailler mieux qu'au milieu d'un passage ou d'un corridor, en attendant d'être entendues.

Mme Signori: Alors, si je comprends bien, les juges ont le pouvoir, mais c'est un pouvoir qu'ils n'utilisent pas dans la région de Montréal pour cette suramende-là?

M. Bégin: C'est que la loi prévoit cette suramende compensatoire, mais on a constaté que, par rapport à l'ensemble des autres régions, les juges l'utilisent un peu moins à Montréal, bien, moins à Montréal qu'ailleurs, et c'est ce qui fait qu'il y a peut-être un manque d'entrées de fonds pour aider à financer les CAVAC.

Mme Signori: Est-ce que, vous, comme ministre de la Justice, vous avez un moyen, je ne sais pas, direct ou indirect de les inciter ou si c'est comme la prérogative du juge?

M. Bégin: Vous savez qu'on ne peut pas donner d'ordre, de directive à la magistrature.

Mme Signori: Absolument.

M. Bégin: Cependant...

Mme Signori: Il y a des trucs.

M. Bégin: ...il y a différents forums qui peuvent se permettre de favoriser une demande; peut-être pas une demande, mais un souhait pour qu'on se rappelle que ça existe et que c'est très utile, que c'est très avantageux, et demander une plus grande collaboration à ce niveau-là, mais ça ne peut pas dépasser ce stade-là.

Mme Signori: Sauf que les groupes de pression autour peuvent faire la demande; pas vous, mais les groupes de pression.

M. Bégin: Bien sûr que, si les femmes veulent dire la chose, c'est bien permis. Vous avez plusieurs occasions, plusieurs organismes. Il n'est pas nécessaire que ce soit un organisme qui soit le CAVAC qui le demande.

Mme Signori: D'autres groupes, c'est ça.

M. Bégin: Les groupes de femmes, dans des manifestations, dans des rencontres, dans les réclamations que vous faites, c'est une possibilité, oui, effectivement.

Mme Signori: Alors, si je comprends bien, les CAVAC de la région de Montréal sont comme sous-financés?

M. Bégin: Non, parce que la répartition n'est pas faite régionalement, mais c'est un...

Mme Signori: Globalement.

M. Bégin: C'est globalement. Il y a une répartition qui est faite, là, c'est 75 000 $ pour chacun des CAVAC et Montréal. Alors...

Mme Signori: Montréal a un peu plus.

M. Bégin: Oui. Tous les autres: Québec, Chicoutimi, Hull, Rimouski, Trois-Rivières, Longueuil, Laval, Sherbrooke et Saint-Jérôme, c'est 75 000 $; Montréal, c'est 90 000 $, mais, bien sûr que ça permet de défrayer, à Montréal, le salaire d'une coordonnatrice et d'une intervenante à temps plein, ce qui n'est pas le cas ailleurs.

Mme Signori: Alors, pas de développement pour cette année, mais le maintien des subventions.

M. Bégin: Au moment où je vous parle, non, malheureusement, je ne peux pas le voir. Mais, si, par hasard, il arrivait qu'il y ait des entrées plus importantes d'argent, il me semble que ça serait possible, à moins qu'une règle budgétaire nous en empêche, de réinvestir immédiatement au niveau des CAVAC.

Mme Signori: Merci.

M. Bégin: Qui sont vraiment, vraiment, un support remarquable à la justice. Il faut le reconnaître et c'est reconnu par tout le monde. Vraiment, maintenant, je pense que, s'ils n'étaient pas là, il faudrait les créer.

Mme Signori: Oui. Parce que je sais que le CAVAC Laurentides...

M. Bégin: Non, c'est vrai, cher collègue. C'est le gouvernement précédent qui les a créés, c'est une de leurs belles actions et je pense qu'on ne doit que les encourager à travailler.

Mme Signori: Qui ça, l'opposition ou nous autres?

M. Bégin: Les femmes.

Mme Signori: C'est correct. C'est bien. Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Jutras): Alors, remarquez, M. le ministre, qu'on n'avait pas mis en doute ce que vous disiez.

M. Bégin: Mon collègue en avait ri.

Le Président (M. Jutras): Ah!

M. Bégin: Disons, souri.

Le Président (M. Jutras): Le langage non verbal.

M. Bégin: C'est ça.

Le Président (M. Jutras): Alors, M. le député de Chomedey, allez-y verbalement.

M. Mulcair: Malgré tous les pouvoirs et les compétences qu'on reconnaît au ministre de la Justice et Procureur général, M. le Président, l'interprétation de la gestuelle n'est pas un de ses points les plus forts. J'étais effectivement en train de sourire, ce n'était évidemment pas en rapport avec le sujet très important qui se discutait avec la députée de Blainville, c'était du fait qu'avec une série de questions comme celles de la députée de Blainville et comme celles posées par vous-même, M. le député de Drummond, lorsque vous n'étiez pas dans le siège, le fauteuil de la présidence de cette commission, le ministre est en train, jusqu'à date, a réussi à gruger à peu près les deux tiers du temps qu'on a utilisé jusqu'à date.


Administration de la justice


Implantation d'un service de médiation familiale

Mais on va tenter d'aller dans l'ordre qui est prévu. On est dans l'élément 1, programme 2, Administration de la justice. Élément 1, Soutien administratif à l'activité judiciaire. On se souviendra, M. le Président, que le précédent gouvernement avait proposé et l'Assemblée nationale a adopté une importante loi sur la médiation familiale, dont l'entrée en vigueur était prévue pour l'automne 1994. Afin de financer ce nouveau service, tous les éléments du tarif des frais judiciaires en matière civile – vous vous souvenez sans doute de ça aussi – ont été majorés de 4 $ et deux nouveaux postes se sont vu ajouter des frais de 75 $, en 1993.

Malgré l'augmentation des tarifs, le projet de loi n'a toujours pas été proclamé en vigueur et, pour la présente étude des crédits, on a posé une question spécifique, et la question était de savoir, dans le budget 1996-1997, les détails de l'implantation du service de médiation familiale, conformément à la loi modifiant le Code de procédure civile concernant ce sujet, projet de loi 14, qu'on appelait dans le temps. Le ministère nous répond, à la page 130, qu'aucun budget n'a été identifié, pour l'instant, pour l'implantation d'un service de médiation familiale.

Alors, nous aimerions savoir comment le ministre peut expliquer que dans son dernier rapport annuel, en page 13, il affirme que, pour l'année 1994-1995, les orientations du ministère visait à rendre la justice plus humaine et accessible, notamment au moyen de la médiation familiale, et que cette loi n'est toujours pas en vigueur, et ce, M. le Président, malgré le fait qu'on est toujours en train de collecter les fonds pour l'appliquer.

Le Président (M. Jutras): M. le ministre.

M. Bégin: Je demanderais peut-être au député de Chomedey de répéter sa dernière phrase, parce quelqu'un m'a parlé à l'oreille et j'ai perdu ce qu'il a dit.

(16 h 30)

M. Mulcair: Pas de problème. Ce que nous étions en train de demander, M. le Président, c'est comment le ministre peut expliquer que dans son dernier rapport annuel, à la page 13, il a affirmé que, pour 1994-1995, les orientations du ministère visaient à rendre la justice plus humaine et accessible, notamment au moyen de la médiation familiale, et que la loi n'est toujours pas en vigueur malgré le fait qu'on est toujours en train de collecter des sommes spécifiquement, d'une manière dédiée, pour son application.

M. Bégin: Alors, je rappelle qu'au moment où la loi a été adoptée, sous un gouvernement précédent qui favorisait la médiation familiale, il y avait eu imposition d'une tarification particulière afin de financer cette médiation familiale. Mais, la loi étant en vigueur depuis plus d'un an lorsque nous sommes entrés au pouvoir, les budgets ne prévoyaient absolument pas de médiation familiale et rien n'était prévu à cet effet-là. Vous le savez, il y a eu les enveloppes fermées qui ont été adoptées et les argents, antérieurement, qui étaient là s'en vont directement au fonds consolidé du revenu. Alors, ce qui est fait depuis, c'est la continuation de ce qui avait été fait antérieurement, c'est-à-dire que le gouvernement libéral avait adopté une belle loi, mais n'avait pas fait en sorte de la mettre en vigueur, et l'argent qui avait été prévu pour ça, il ne l'avait pas affecté à cette loi-là. Par la suite, il a été évidemment impossible de la mettre en vigueur, à moins de gruger sur d'autres services offerts à la population en matière juridique.

Cependant, j'invite le député de Chomedey à être patient. D'ici peu de jours, il sera peut-être en mesure d'avoir une réponse qui le satisfera.

M. Mulcair: Bon, bien, je pense que le ministre n'a pas seulement manqué la fin de la question, il a manqué le début aussi. Contrairement à ce que le ministre vient de dire, la loi a été adoptée il y a trois ans, mais elle n'a pas été proclamée en vigueur, elle n'est pas encore en vigueur.

M. Bégin: C'est ça.

M. Mulcair: Le ministre a dit qu'elle était en vigueur depuis trois ans.

M. Bégin: Non.

M. Mulcair: Si. Vous allez relire les transcriptions.

M. Bégin: Si c'est le cas, je corrige: votée il y a trois ans, mais non mise en vigueur depuis ce temps-là.

M. Mulcair: Mais, depuis le 27 octobre 1993, M. le Président – en fait, le décret date du 13 octobre 1993, publié dans la Gazette officielle du 27 octobre 1993 – les tarifs ont été modifiés pour cette fin-là, pour mettre de l'argent là-dedans. Le ministre se fait un malin plaisir de référer à l'ancien gouvernement comme s'il avait fait quelque chose de pas correct, mais le tarif a été adopté, l'entrée en vigueur était prévue pour l'automne 1994. Il y avait, comme le ministre le sait, des choses importantes à mettre en place. Il plaide ça lui-même tout le temps. Mais le ministre, dans sa réponse, ne nous a pas dit qu'il restait encore des choses administratives ou autres à mettre en place. Il est en train de nous expliquer que son gouvernement, par ses choix, a adopté une méthode budgétaire de ce qu'il est convenu d'appeler des enveloppes fermées, ce qui fait que tout est envoyé, effectivement, au fonds consolidé du revenu. Donc, c'est un choix qui repose sur les épaules de son gouvernement.

Mais est-ce que le ministre n'est pas en train de nous dire qu'il a décidé de ne pas aller de l'avant avec la médiation familiale, que le projet de loi 14, il est en train de le mettre dans la même corbeille à papier que celle dans laquelle on a mis les études Le Hir?

M. Bégin: Si le député de Chomedey veut dire qu'en ne proclamant pas la loi en 1993 il la mettait à la poubelle, bon, je suis prêt à dire que je suis d'accord avec lui. Je rappelle qu'en septembre 1993 une loi adoptée par eux avec une tarification adoptée par eux, ils ont envoyé l'argent au fonds consolidé du revenu, mais n'ont pas mis en vigueur la loi, de telle sorte que, de septembre 1993 à mars 1994, ils n'ont rien fait. Et, en mars 1994, au moment d'adopter le budget pour 1994-1995, ils n'ont pas non plus pris les mesures nécessaires pour mettre en vigueur cette loi et affecter les fonds, qui étaient collectés depuis, à ce moment-là, six mois, et qu'ils projetaient, pour une autre année, de l'envoyer là. Malheureusement, vu l'état déplorable dans lequel on a trouvé les finances publiques – vous savez qu'il y avait un déficit de 5 700 000 000 $ que l'ancien gouvernement nous a laissé – dans les mesures que nous avons dû entreprendre pour corriger le tir et nous assurer qu'on réduise très substantiellement le déficit pour le ramener graduellement à zéro, bien sûr que les argents qui étaient déjà affectés ailleurs n'ont pas pu être rapatriés pour mettre en vigueur cette médiation familiale tant souhaitée. Cependant, je réitère au député de Chomedey que, s'il est patient quelques jours, il sera peut-être satisfait de la réponse qu'on lui donnera.

M. Mulcair: J'attendrai, M. le Président, avec impatience pendant ces quelques jours. On avait vraiment l'impression que le ministre n'allait pas mettre en vigueur cette très importante loi, mais avec l'assurance qu'il vient de dire et avec le vote de confiance qu'il vient de répéter, même si ni lui ni moi n'étions là au moment de son adoption, du moins comme parlementaires, bien, je suis très content de l'entendre réaffirmer son adhésion à ce projet de loi, et on attend les quelques jours que le ministre nous a dit qu'on devait attendre.

M. Bégin: Avec votre permission, je voudrais juste compléter. Ça nous fera plaisir, éventuellement, de corriger aussi une autre loi qui s'appelait la loi 33, sur la perception des arrérages de pensions alimentaires, qui avait été adoptée en 1988 et, quand nous sommes arrivés, qui ne fonctionnait pas encore. Alors, on l'a fait, elle est en vigueur concrètement, et elle sera finalement en vigueur le 1er mai, donc dans quelques jours. Et ça, c'était quelque chose qui avait été adopté en 1988. Ça nous a pris à peu près six mois pour l'adopter.

M. Mulcair: M. le Président, le ministre de la Justice et Procureur général se félicite peut-être un tout petit peu trop parce que, selon toutes les informations dont on dispose, malgré le fait que la loi va être en vigueur, les services ne sont pas du tout prêts. Mais il vivra avec sa déclaration et son tapage de bretelles, puis on verra peut-être, l'automne prochain ou au printemps 1997, quand les groupes de femmes vont être en train de dire: Aïe! ce n'est pas du tout ça que vous nous aviez promis, ça ne marche pas, votre patente, bien, peut-être qu'il va regretter son autofélicitation spontanée.


Déménagement de la direction régionale des services judiciaires de Laval-Laurentides-Lanaudière à Joliette

Je voudrais revenir dans le même domaine et sur le même sujet, M. le Président, sur une question qui a déjà fait l'objet d'une question et réponse, lors de la période des questions à l'Assemblée, ainsi que d'une discussion en fin de journée entre le ministre et moi-même. Localement, à Laval, les gens cherchent toujours à comprendre comment il se fait qu'on a déménagé un service important de Saint-Jérôme à Joliette, donc à plus de 50 km, provoquant ainsi six mises en disponibilité et nécessitant la construction, au coût de milliers et de milliers de dollars, de locaux à Joliette pour faire ce travail-là alors que, selon les plans et devis du palais de justice de Laval, relativement nouvellement construit, l'espace était prévu, l'espace est toujours là, et c'était à moins de 50 km de Saint-Jérôme. On aurait pu, donc, éviter les mises en disponibilité. Quiconque a déjà mis les pieds au palais de justice de Saint-Jérôme sait que c'est un palais de justice qui est vraiment à la limite de craquer, tellement que ça ne suffit pas. Donc, c'était logique de sortir ce service-là. Mais on cherche toujours à comprendre, et on n'a rien trouvé, dans les réponses que le ministre nous a fournies jusqu'à date, qui nous permette de comprendre. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il va toujours aller de l'avant avec ce déménagement de Saint-Jérôme à Joliette?

M. Bégin: Écoutez, M. le Président, je pense que le député de Chomedey oublie qu'il a posé une question en Chambre sur cette question-là et, d'autre part, qu'il a demandé un débat de fin de séance, je pense. Il a eu l'occasion de parler pendant cinq minutes, j'ai eu l'occasion de parler pendant cinq minutes, il a eu le temps de parler pendant deux minutes. M. le Président, il me semble que le député de Chomedey, qui se plaint que les députés ministériels posent des questions, prennent le temps, devrait consacrer son temps à des questions un peu plus pertinentes. Je vais lui déposer, ce soir, ce que j'ai dit à l'Assemblée nationale il y a environ un mois. Je pense que je ne pourrai pas changer mes réponses si lui ne change pas sa question.

M. Mulcair: Ma question était changée, M. le Président, elle était de savoir si le ministre allait toujours de l'avant avec cette décision mal informée de déménager ce service de Saint-Jérôme à Joliette plutôt qu'à Laval.

M. Bégin: Oui.

M. Mulcair: Ma question était juste de savoir si le ministre maintenait sa décision.

M. Bégin: Oui.

M. Mulcair: C'est pertinent pour nous, à Laval, M. le Président.

M. Bégin: Oui.

(16 h 40)


Noms de personnes acquittées inscrits au registre de la cour

M. Mulcair: La question du plumitif a été soulevée lorsque le Protecteur du citoyen était de passage devant la commission des institutions, au mois de janvier. Vous vous souviendrez sans doute qu'on avait fourni des exemples de personnes qui avaient été trouvées non coupables dans des causes, et c'était fondamental, dans notre société, que lorsqu'on... D'abord, on bénéficie d'une présomption fondamentale d'innocence et on n'est pas coupable, à moins que notre culpabilité ne soit prouvée sur tous les éléments de l'infraction, hors d'un doute raisonnable, devant un tribunal dûment constitué ou même un jury, selon le cas. Mais cette personne – et bien d'autres, bien entendu – a appris que son nom pouvait continuer de paraître électroniquement dans les registres de la cour, malgré le fait qu'elle n'ait rien fait, et ça peut justement porter préjudice. L'exemple qu'on avait donné, c'était quelqu'un qui travaillait dans une profession où le degré de confiance nécessaire était très élevé, et ça portait continuellement préjudice. Est-ce que le ministre de la Justice a bougé sur cette question-là depuis que ça a été soulevé ici, au mois de janvier? Est-ce qu'il y a eu des changements qui ont été instaurés?

M. Bégin: Avant même que la question ne soit soulevée ici, M. le Président, j'avais eu des représentations qui avaient été faites par plusieurs personnes. Certaines étaient de mes collègues; d'autres étaient des collègues de l'opposition; d'autres, c'étaient des cas de comté. Plusieurs personnes m'avaient soulevé le problème des plumitifs où on retrouve le nom de certaines personnes qui ont été accusées de crimes, mais qui ont été acquittées et qui se voient embêtées, pour ne pas dire plus, dans certaines circonstances. Que ce soit pour une carte de crédit, que ce soit pour quelque acte juridique que ce soit, elles se voient opposer des refus qui ne s'expliquent pas et, quand elles creusent, elles s'aperçoivent que ça provient de la présence d'une information découlant des plumitifs.

Alors, M. le Président, oui, effectivement, j'ai bougé. J'ai écrit à mon collègue fédéral à cet effet pour lui rappeler qu'en 1990 une telle demande avait déjà été formulée et qu'il n'y avait pas eu de réponse, et qu'il serait opportun qu'il en donne une. Par ailleurs, ce sujet est inscrit au comité tripartite, comité que j'ai remis en fonction à mon entrée en fonction, c'est-à-dire ce comité qui regroupe les trois juges en chef, la bâtonnière ou le bâtonnier et le vice-président du Barreau, dépendamment des personnes qui sont en poste, mon sous-ministre et mon chef de cabinet; nous nous réunissons périodiquement pour discuter de l'ensemble des problèmes de la justice. Or, ceci est un problème qui est à l'ordre du jour, je pense, du prochain comité tripartite.

De plus, à la conférence fédérale-provinciale qui se tiendra les 7 et 8 mai – je peux me tromper dans la date – prochain, c'est un sujet que nous discuterons de manière informelle – l'agenda avait été écrit par le fédéral – mais nous avons l'intention de soumettre cette question à nos collègues parce que nous la considérons comme extrêmement importante, et au détriment des droits de certains individus qui auraient vraiment, vraiment avantage à ce que leurs droits soient respectés intégralement et que des gens ne profitent pas des instruments modernes comme l'informatique pour leur nuire dans leur réputation ou dans leur recherche d'emploi, par exemple. Parce que c'est terrible, quelqu'un qui fait une recherche et on trouve que cette personne-là a été accusée, mais la personne a été complètement libérée de toute accusation. Donc, on ne le lui dit peut-être pas nécessairement directement, mais c'est fondamentalement à cause de ça qu'on lui refuse un emploi. Alors, il y a d'autres situations semblables et je pense qu'on doit corriger ça. À la limite, M. le Président, je pense qu'il se pourrait, si jamais le fédéral ne bougeait pas, que nous prenions, encore là, d'autres mesures qui permettraient d'arriver peut-être pas totalement à l'objectif, mais qui éviteraient les principaux irritants.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député.


Requête du Québec à la Cour fédérale relativement à la commission Krever sur le sang contaminé

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Sur un autre sujet, maintenant, qui a été récemment dans l'actualité et qui concerne les affaires juridiques, cette fois-ci. On a tous vu et entendu le ministre de la Justice et Procureur général, il y a deux semaines, si ma mémoire est bonne, tenter d'expliquer les raisons qui l'avaient motivé à aller devant les tribunaux pour tenter de bloquer, en quelque sorte, l'action de la commission Krever. Il tentait de nous convaincre qu'il n'avait jamais eu l'intention d'ouvrir un nouveau front constitutionnel et il affirmait que les avis auraient été donnés aux avocats d'abandonner cet argument.

Mais la déclaration qui a été déposée à la cour – à moins qu'on ne lise mal, mais c'est ça qu'on cherche à savoir – est survenue environ une semaine après que Kromstrom Desjardins, qui représente le Procureur général dans ce dossier, eut déposé en cour fédérale une requête basée uniquement sur des arguments en vue de contester l'ingérence de la commission dans un domaine provincial. Alors, nulle part, dans cette requête, n'avons-nous trouvé des arguments de justice naturelle que le ministre, pourtant, invoquait, parce que, quand le ministre a rencontré les journalistes, M. le Président, il disait: Ah bien, vous savez, ce n'est pas correct, les gens n'ont pas eu le droit d'être entendus. Le droit d'être entendu – l'expression latine est souvent utilisée: audi alteram partem – c'est vraiment fondamental, dans notre système de justice. Donc, le ministre a monté sur ce grand cheval et il a dit: Vous savez, je suis là pour protéger ce principe. Mais, lorsque nous lisons la déclaration, le vrai document qui a été déposé en cour, on ne trouve aucune référence à ce principe de justice naturelle. Alors, est-ce que le ministre peut nous aider à clarifier la situation?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: Écoutez, M. le Président, je n'ai pas... avec des arguments comme ça, je n'ai pas l'intention de donner une leçon de droit à mon collègue. Je ne sais pas quel document il a lu, mais je sais que ce qui a été déposé devant la cour contient une argumentation à cet effet-là. Peut-être qu'il ne retrouvera pas les mots «justice naturelle», mais il retrouvera d'autres éléments qui permettent d'arriver aux mêmes conclusions.

Deuxièmement, écoutez, il ne s'agit pas de refuser de répondre aux questions, mais je croyais que nous étions aux crédits et non pas au moment où on justifiait les politiques, par ailleurs, qui avaient été adoptées antérieurement, avant que je n'arrive. La déclaration comme quoi on ne reconnaissait pas la compétence de la commission ou du gouvernement fédéral de s'immiscer dans les questions de santé, celles-ci étant de juridiction provinciale, a été énoncée au mois de... en 1994, par un procureur mandaté à l'époque par le gouvernement libéral qui nous précédait.

Alors, là-dessus, je ne pense pas qu'il y ait eu de changements qui ont été apportés. Cependant, concernant la question de la justice naturelle, oui, on pense que ces règles n'ont pas été observées et elles sont plaidées comme tel. Quant au reste, j'ai fait, je pense, des déclarations publiques tout à fait suffisantes pour permettre que la position du gouvernement soit comprise. Enfin, je vous dis simplement, M. le Président, que cette question est sub judice et il serait préférable qu'on laisse à la cour le soin de trancher.

M. Mulcair: M. le Président, nous sommes extrêmement sensibles à la règle de ce Parlement, qui, évidemment, s'applique aux commissions parlementaires, de ne pas aller discuter du fond des questions, mais je veux tenter de situer un peu plus le contexte pour mon collègue, le ministre de la Justice, pour qu'il comprenne toute la pertinence de ce qu'on est en train de discuter.

On est à l'élément 2 du programme 2, Administration de la justice, Affaires juridiques et législatives. Et je vais citer un très bref passage d'un article paru dans le journal Le Devoir du 18 avril 1996: «Même si de nouveaux avis ont été déposés la semaine dernière par Québec pour contester l'ingérence de la commission fédérale dans une compétence provinciale, le ministre Bégin affirme que la bataille ne se fera pas sur le front constitutionnel. Des avis auraient été donnés aux avocats d'abandonner cet argument.» Le document que je montrais tantôt à mon collègue, M. le Président, c'est la déclaration, l'avis d'une demande constitutionnelle et... les termes qui sont utilisés là-dessus: «Voici les faits pertinents donnant naissance à la question constitutionnelle. Voici le fondement juridique de la contestation.» C'est une série de paragraphes très brefs comme ça. Et, là-dedans, on retrouve exclusivement des arguments d'ordre constitutionnel.

Alors, d'autres journalistes ont renchéri; ils ont regardé la question. Par exemple, Jean-Jacques Samson, dans le journal Le Soleil du 20 avril, dit: «Le Procureur général du Québec, le ministre Paul Bégin, tente de justifier le blocage des travaux par le Québec par le fait que les ministres mis en cause n'ont pas été entendus par le juge. Eh bien, qu'ils le soient!» Alors, vous voyez, M. le Président, le ministre a bien dit ce qu'on a répété tantôt. Il a tenté de dire que c'est une question de justice naturelle. C'est une question du droit d'être entendu. Et, ici, on voit, dans les vrais papiers de la cour, les papiers officiels, que ce n'est pas ça qu'il est allé plaider. Il est allé plaider exclusivement des arguments constitutionnels. Alors, c'est sûr que, moi, je ne vais pas aller lui dire qu'il a raison ou tort de présenter tel ou tel argument. Ce n'est pas ça du tout, notre propos, cet après-midi.

Nous, on tente de savoir ce qu'il nous manque parce que, selon ce qu'il a dit en conférence de presse – et j'étais là dans ce qu'il est convenu d'appeler le «hot room», il y a une couple de semaines – je l'entendais parler du droit d'être entendu.

(16 h 50)

«La dernière offensive du Québec, qui a déposé la semaine dernière une requête en Cour fédérale, a été interprétée partout comme une contestation de la constitutionnalité de la commission Krever qui ne devrait pas, selon Québec, être autorisée à examiner un secteur de compétence provinciale. "Si on a l'impression que le Québec, en plaidant l'inconstitutionnalité, veut mettre le couvercle sur la commission et qu'on veut l'empêcher de fonctionner, il faut préciser que ça n'a jamais été notre intention", affirme le ministre Bégin.» Ça, c'est un article de Denis Lessard, dans La Presse du 18 avril. Alors, vous comprendrez notre confusion devant les affirmations du ministre qui sont citées dans ces divers articles et ce que l'on retrouve, noir sur blanc, dans la déclaration.

Un autre article, cette fois-ci par Normand Girard, dans le Journal de Québec du 18 avril. Il dit ceci: «Le ministre de la Justice a ajouté que le gouvernement reconnaît à la commission le droit de rendre des conclusions dans tous les domaines qu'elle juge à propos, mais qu'il ne lui reconnaît pas le droit de faire le procès de quelqu'un sans l'avoir entendu.» Ça, c'est assez clair. Donc, lui aussi, il a compris la même chose que nous autres. Mais on a pris la peine d'aller chercher le document qui donne les vrais arguments, puis ça, ce n'est nulle part là-dedans. Il dit plutôt... et ça, c'est le point 1.3: «Dans la déclaration, le gouvernement du Québec a toutefois clairement indiqué que sa collaboration serait et demeurerait, en tout temps et en toute circonstance, subordonnée au respect de sa juridiction et de sa compétence.» 1.5: «Sur la base notamment que la commission agit en dehors de sa juridiction.» 2.1: «Une commission d'enquête fédérale n'a pas compétence pour faire enquête sur les affaires du gouvernement d'une province.» 2.2: «Une loi fédérale en cette matière serait inconstitutionnelle.» 2.6: «Une commission d'enquête n'a donc pas compétence pour formuler des conclusions, même non coercitives, en l'absence d'une justification constitutionnelle de la tenue même de son enquête, et elle n'a pas non plus compétence pour émettre des avis de la nature de ceux qui ont été émis en l'espèce.»

Alors, vous voyez? Ça, c'est le dernier point de leur déclaration. Et ça, c'est vraiment très clair... «en l'absence d'une justification constitutionnelle». Pas en train de parler du droit d'être entendu. Pourtant, c'est ce que le ministre a dit, lorsqu'il a rencontré les journalistes avec le ministre Jean Rochon, le ministre de la Santé et des Services sociaux. Dans Le Soleil du 18 avril 1996, un autre article sur la commission Krever; encore une fois, on cite le ministre Bégin: «Nous contestons donc sur la base qu'on n'a pas suivi les règles de justice naturelle qui s'appliquent à la grandeur du Canada.» C'est important, ça, comme sujet, M. le Président, parce que, trop souvent dans notre société, que ce soit au niveau provincial ou au niveau fédéral... Et si on veut voir un excellent exemple au niveau fédéral, on n'a qu'à regarder la commission sur la Somalie où le juge Gilles Létourneau est en train d'essayer de faire le travail qui lui a été demandé, alors qu'on voit que les gens font tout ce qu'ils peuvent pour cacher les documents. C'est très, très important, dans une société comme la nôtre, que ce principe fondamental de responsabilité ministérielle ne soit pas bafoué par des manoeuvres. Donc, dans un cas comme celui de l'enquête sur la Somalie, on regarde au niveau fédéral et on n'a pas besoin de croire que c'est juste à un niveau qu'il y a parfois ces problèmes-là. On peut tous, comme citoyens, se sentir extrêmement frustrés que la vérité ait autant de difficultés à sortir.

Dans un pays qui ne peut pas se vanter d'avoir au moins le régime théorique de responsabilité ministérielle que, nous, on a avec notre système parlementaire britannique, le pays étant la France, on a quand même vu une commission d'enquête sur les agissements des élus dans le domaine du sida et de la contamination du sang et les transfusions, etc. Et, en France, non seulement ça n'a pas été bloqué, mais c'était considéré publiquement très important que toute la lumière soit faite dans un tel dossier. Eh oui! Ça a fait en sorte que les gens responsables sont même allés en prison. Mais c'était vraiment à ce point grave socialement et ce qui a été fait était à ce point-là délictuel qu'on a même imposé des peines d'emprisonnement, en France.

Alors qu'ici, où on se félicite, avec raison la plupart du temps, d'être dans un système parlementaire d'inspiration britannique où on a cette notion de responsabilité ministérielle, on constate un effritement de notre adhésion, dans les faits, à ce grand principe. On a vu ça dans le cas des études Le Hir. Il a suffi que le premier ministre se lève et dise: J'ai tourné la page. Il a dit ça comme si c'était la réponse au problème. Ce n'est pas une réponse au problème de l'illégalité dans le cas des contrats Le Hir.

Alors, il faut que les ministres soient tenus responsables. Et, soit dit en passant, comme vous le savez, M. le Président, là-dedans, il y a tantôt des ministres libéraux, tantôt des ministres péquistes. Il n'y a pas de discrimination dans ce que je suis en train de dire. Mais le ministre de la Justice est allé devant les journalistes. Puis, je viens de citer quelques exemples des journaux qui ont repris ses termes exacts. Il a dit: Ah! – vous savez, il montre patte blanche – il dit: Ah! Il y a un problème grave de justice naturelle ici. Et: Loin de nous l'idée d'essayer de bloquer une commission d'enquête sur le sang contaminé par le VIH, non, non, non, mais je suis le Procureur général, je suis là pour assurer le respect de ces grands principes de justice naturelle, dont le droit d'être entendu. Bien, moi aussi, j'avais trouvé ça... comme avocat, avec une sensibilité à ces questions-là aussi, je me suis dit: Oui, c'est indéniable, s'il y a des gens qui s'apprêtent à se faire «blaster» sans qu'on leur ait donné la chance d'être entendus, c'est important. Mais je suis allé chercher les papiers, puis ils n'en parlent pas. Là-dedans, ce n'est pas un de leurs arguments. Leur argument est purement constitutionnel, d'un bout à l'autre.

Donc, ils essaient de le bloquer, ça, c'est clair, mais c'est dommage et c'est dangereux. Dommage, car, dans notre système parlementaire, la reconnaissance de la responsabilité ministérielle est un des fondements dangereux parce que, si on commence à nier cette responsabilité, on commence à jouer, justement, dans ce qu'il y a de plus précieux dans notre système, le fait que les gens qui sont élus et qui siègent avec le lieutenant-gouverneur en conseil, le Conseil des ministres, ont cette énorme responsabilité, beaucoup de privilèges et de droits qui vont avec, mais des responsabilités aussi. Et le public, par le biais d'une commission d'enquête, comme dans le cas de la commission Krever, a le droit de savoir ce qui s'est passé sans que tous les moyens imaginables et possibles soient utilisés pour tenter de bloquer le processus, d'empêcher que la lumière soit faite.

Encore une fois, M. le Président, si ça avait été juste de dire: Non, non, on a regardé comment Krever a fait ça, on est inquiet, il n'a pas donné aux gens la chance d'être entendus, on aurait pu être beaucoup plus sensibles à l'opposition du ministre. Mais ce n'est pas ça qui est écrit dans les documents. Alors, on cherche toujours à savoir comment il se fait qu'il y a une telle différence entre ce que le ministre a dit en conférence de presse, entre ce qui est rapporté dans tous les articles que je lui ai cités et le document que j'ai mentionné tantôt. Est-ce qu'il y a une autre déclaration qui a été déposée à la cour? Est-ce qu'il nous manque de l'information? Ça se peut, mais on tient juste à essayer de savoir, de sa part, l'origine de cette différence.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, j'ai donné, tantôt, plusieurs motifs. J'ai consenti à fournir une explication, mais j'ai soulevé le fait que nous sommes à l'étude des crédits et que dans tout ce qu'a dit, depuis à peu près 10 minutes, le député de Chomedey, il n'y a rien qui a trait aux crédits. En conséquence, je l'invite à continuer de penser tout haut, c'est très intéressant de l'écouter, mais ça n'avance rien quant à l'étude des crédits.

M. Mulcair: Bien, c'est la deuxième fois aujourd'hui, M. le Président, qu'on constate que le ministre a énormément de difficultés à saisir le but de l'exercice, mais on va tenter à nouveau de lui expliquer.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Mulcair: Vous voyez, M. le Président, nous sommes effectivement à la défense des crédits et, tout comme pour nos premières questions, lorsque le ministre nous a expliqué qu'il avait fait une dépense purement et proprement illégale de presque 30 000 $ de l'argent des payeurs de taxes à quelqu'un qui n'y était pas autorisé et qui n'y avait pas droit, cette fois-ci, on est dans la partie de l'administration de son ministère qui traite, dans le programme Administration de la justice, de la question des affaires juridiques et législatives. On vient de dire que ce ne sont pas les avocats du ministère qui sont en train de plaider au nom du Procureur général du Québec, dans cette cause, mais bel et bien une société en nom collectif d'avocats de la capitale, du nom de Konstrom Desjardins. Alors, oui, c'est pertinent, M. le Président, parce que le ministre est en train de dépenser de l'argent des payeurs de taxes pour embaucher ces avocats.

Le ministre, comme personne responsable d'un ministère et comme personne, justement, redevable devant cette commission, nous dit: Voici ce que j'ai décidé comme ministre, qu'il y avait une faille importante, en termes de justice naturelle, dans ce dossier-là. Et voici que, dans les faits, il prend l'argent des payeurs de taxes – c'est pour ça qu'on est dans les crédits, pour savoir comment il dépense son argent – il prend l'argent des payeurs de taxes, il le donne à Konstrom Desjardins et il leur dit: Maintenant, malgré ce que, moi, je viens de dire publiquement, allez déposer des papiers qui ne parlent que de constitution. Alors, ce que nous tentions de savoir, c'est: Est-ce que c'était nécessaire de dépenser l'argent du public pour embaucher Konstrom Desjardins, pour donner purement des arguments constitutionnels alors que, lui, ministre responsable de ce ministère, a dit publiquement et à de nombreuses reprises que ce n'était pas son intention de le faire? Alors, voyez toute la cohérence de notre position, M. le Président. On essaie de savoir si l'argent qu'il dépense, c'est pour faire ce qu'il dit.

(17 heures)

M. Bégin: J'ai entendu beaucoup d'affirmations, mais pas de questions. J'ai entendu beaucoup d'affirmations mais pas de questions.

M. Mulcair: Visiblement ou audiblement, le ministre a de la difficulté, parce qu'il y avait effectivement une question à la fin. Est-ce que le ministre peut nous dire comment ça se fait qu'il dit une chose aux journalistes et que les avocats, qu'il paie avec l'argent des payeurs de taxes, font d'autre chose devant la cour?

M. Bégin: M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, il y a une firme d'avocats qui a été engagée par le gouvernement libéral, qui s'appelle Kronstrom Desjardins, Me Michel Jolin. Il a continué le travail qui avait été entrepris antérieurement. Je pense que c'était normal dans les circonstances. Et quant au reste, M. le Président, je le répète, il s'agit d'une question qui n'est pas une question de crédits; d'autre part, c'est sub judice et je vais me restreindre à ces commentaires sur cette question-là, si question c'est.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Saint-Jean.

M. Mulcair: M. le Président, il y a une expression qui dit que parfois le silence est plus éloquent. On va se permettre, à notre tour, d'interpréter les silences et les refus de parler du ministre.

M. Boulerice: Si le silence est éloquent, pratiquez-le, cher ami, pratiquez-le! Ha, ha, ha!

M. Mulcair: André, je vois que c'est à...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Je rappelle aux participants... M. le député de Chomedey, je rappelle aux participants de cette commission que c'est normalement le président ou la présidence qui distribue les droits de parole, et j'ai invité le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Alors, on est passé au programme 2 avant que j'aie pu poser mes questions sur le programme 1, mais comme les règles nous le permettent, celles qu'on a adoptées, je reviendrai à des questions sur le programme 1.


Formulation de jugements (suite)


Nominations de juges

D'abord, depuis que vous êtes ministre, il y a eu combien de nominations de juges? Ensuite de ça, j'ai remarqué que dans le tableau 4 des questions on parle de 290 juges, puis, dans le tableau 3, on parle de 296. Est-ce qu'il y a 296 ou 290 juges?

M. Bégin: Il y a 290 juges autorisés, mais il peut arriver qu'à un moment dans le temps, si on prend les nominations, il y ait des postes qui ne soient pas comblés. À ce moment-là, on peut avoir un nombre inférieur. Mais il y a 290 juges autorisés.

M. Paquin: C'est parce que j'ai dans le tableau 3...

M. Bégin: Excusez. Il y a peut-être autre chose. C'est qu'il y a des juges à pouvoir étendu. Ce n'est pas tout à fait la même chose, il y en a six.

M. Paquin: Ah bon! Ça fait 296 au total.

M. Bégin: Votre question était par rapport à quel élément, là?

M. Paquin: Là, je suis dans le programme 1 et...

M. Bégin: Élément?

M. Paquin: ...en fait, ma première question est une question globale. Donc, on convient qu'il y a 290 juges, là. Combien vous en avez nommé depuis que vous êtes là? Et dans quelle cour? Et homme-femme, le rapport, ça ressemble à quoi? C'est quoi le portrait?

M. Bégin: Alors, depuis que nous sommes en fonction, les premières nominations ont eu lieu, à moins que je ne me trompe, en mai 1995. Non, même avant ça. J'ai ici nommé, depuis le 1er avril 1995 – je n'ai pas les périodes antérieures – quatre personnes à la Cour du Québec, quatre nominations féminines; il y a eu sept nominations masculines. Ça, c'est à la Cour du Québec. À la cour municipale, il y en a eu deux; deux nominations féminines. La même personne a été nommée à deux cours municipales distinctes. Quant aux nominations masculines aux cours municipales, il y en a eu 12. Il faut comprendre qu'il y a plusieurs des nominations qui couvrent plusieurs cours. Non, il y a eu 12 nominations distinctes, je m'en excuse.

Parmi ces nominations, je pense qu'il y a des caractéristiques particulières qu'il serait bon de faire ressortir. Entre autres, que la première personne hispanophone ou de langue hispanophone, espagnole, a été nommée en juin 1995 et, à moins d'erreur, c'est soit la première, soit la deuxième personne de langue italienne à être nommée également, en juin 1995.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Je vous reviens après, c'est une sous-question.

M. Paquin: Ça va.

M. Boulerice: C'est juste une petite sous-question qui va dans le sens de mon collègue. Je vois la liste des juges et je vois Saintonge, Jean-Pierre. C'est M. Saintonge, l'ancien président de l'Assemblée nationale, n'est-ce pas?

M. Bégin: Oui.

M. Boulerice: Ah, bien, M. le ministre...

M. Bégin: Il a été nommé à Longueuil, en septembre 1995.

M. Boulerice: M. Saintonge, député de La Pinière, ancien président de l'Assemblée nationale, présidence qu'il a fort bien exercée, je me permets de vous le souligner, a été nommé juge.

M. Bégin: C'est exact.

M. Jutras: Est-ce qu'il avait été élu sous la bannière libérale?

M. Boulerice: Oui, il avait été élu sous la bannière libérale mais, en devenant président, il s'était abstenu de toute participation à son caucus. Non, mais je trouve ça intéressant, parce qu'il n'y a pas tellement longtemps votre critique était monté aux barricades parce qu'une dame avait eu le malheur, dans la vie, d'épouser un homme politique.

M. Mulcair: M. le Président, question de règlement.

M. Bégin: C'est exact.

M. Boulerice: Et là je vois que vous, vous ne tombez pas dans de telles bassesses et vous avez su reconnaître à son mérite...

M. Mulcair: M. le Président, question de règlement.

M. Boulerice: ...les hautes fonctions que M. Saintonge a...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques...

M. Boulerice: Oui?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Un instant, j'ai une question de règlement.

M. Boulerice: Une question de payeur de taxes ou de contribuable? «Contribuable» est plus français que «payeur de taxes».

M. Mulcair: Ma question de règlement vise à vous demander le droit de corriger. Vous savez, aux termes de notre règlement, il est permis à un député qui vient de se faire critiquer personnellement pour avoir dit quelque chose de pouvoir rectifier les faits. Alors, aux termes de notre règlement...

M. Paquin: M. le Président, le règlement existe en effet et c'est immédiatement après la fin de l'intervention qu'on peut l'utiliser.

M. Mulcair: Non, M. le Président, je ne pense pas que ce soit une interprétation raisonnable de permettre à quelqu'un de continuer à dire des sottises comme le député est en train de le faire sans pouvoir les corriger tout de suite.

M. Boulerice: «Sottises», M. le Président, ça c'est antiparlementaire. Non, je m'excuse, j'en fais une question de règlement, moi aussi.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): «Sottises» est effectivement antiparlementaire.

M. Boulerice: Antiparlementaire. Alors, le ministre... Pas le ministre, parce que jamais ça ne lui arrivera, mais le député se retire...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Bon. Messieurs, un instant.

M. Boulerice: C'est son père qui aurait dû le faire, mais ça, c'est une autre histoire.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Un instant. Il m'apparaît important, à cette étape-ci, de vous rappeler certains principes qui guident notre travail de parlementaires. Prêter des intentions malveillantes ou utiliser des propos non parlementaires sont des gestes ou des propos interdits dans notre travail. Alors, je vous inviterais à respecter le décorum qui est séant aussi bien dans un travail à l'Assemblée nationale comme telle qu'en commission, et, en ce sens-là, de ne pas prêter non plus d'intentions malveillantes avant ou après le fait, ou peu importe. Et ça vaut pour les deux côtés de cette...

M. Mulcair: Mais je demeure, M. le Président...

M. Boulerice: Il s'excuse, là, pour «sottises».

M. Mulcair: ...sur ma première question de règlement. Le député de Saint-Jean vient de dire, vient de confirmer...

M. Boulerice: M. le Président, on est toujours dans la question de règlement. Le mot est antiparlementaire, donc il doit le retirer.

M. Mulcair: Je vais répondre, dans un premier temps, et vous allez être très satisfait de ce que je vais faire en réponse à mon collègue de Sainte-Marie– Saint-Jacques après, M. le Président. Oui, effectivement, la question a déjà été soulevée dans cette Chambre, à l'Assemblée nationale, la question de savoir si, malgré le fait qu'il y avait des femmes qui avaient toutes les qualités requises, notamment de l'expérience en matière criminelle et pénale – c'était de ça qu'il s'agissait lorsqu'on parlait de la femme de Bernard Landry qui avait été nommée juge en matière criminelle et pénale. Alors, non seulement elle n'avait pas d'expérience en matière criminelle et pénale, elle n'avait jamais eu un client de sa vie, elle n'avait jamais plaidé une cause de sa vie.

Alors, c'était très important pour nous de dire: Dans la liste d'aptitude, dans la liste d'admissibilité, il y avait des femmes et des hommes avec toutes les qualités requises, et on avait eu la nette impression que c'était pour des raisons autres, des raisons de népotisme, qu'on avait même dit à l'époque, et on persiste à dire que c'était une nomination qui ne se justifiait pas. Mais ce n'était pas parce que c'était une femme. Si le député savait le moindrement ce par quoi, moi, je suis passé quand j'étais à l'Office des professions du Québec pour venir à la défense des femmes vis-à-vis de l'Ordre des médecins, il ne se permettrait pas ces propos.

Maintenant, M. le Président, pour ce qui est de son intervention, maintenant qu'il est mieux informé, il est moins sot, donc je retire ce que j'ai dit tout à l'heure.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, je tiendrais à vous rappeler que lorsque...

M. Boulerice: Il est plus facile de devenir moins sot que de devenir moins fat.

(17 h 10)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: M. le Président, tout simplement pour lire le règlement 212, pour qu'on se comprenne bien: «propos mal compris ou...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Ou déformés.

M. Paquin: ...déformés». Bon. «Tout député estimant que ses propos ont été mal compris ou déformés – on parle de propos qui ont été tenus jadis – peut donner de très brèves explications sur le discours qu'il a prononcé.

«Il doit donner ces explications immédiatement après l'intervention qui les suscite. Elles ne doivent apporter aucun élément nouveau à la discussion, ni susciter de débat.»

Alors, je pense qu'on a entendu la réponse et tout ça, sauf qu'il m'apparaît que le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques aurait pu terminer sa question, et peut-être aurions-nous vu les nuances qu'il désirait apporter de façon à ce qu'elle soit tout à fait conforme à notre règlement. Et, de toute façon, M. le Président, j'apprécierais que vous lui permettiez de terminer son intervention.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui. M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: Bien, M. le Président, on a un peu divagué, mais on retient quand même une chose, la sottise semble se corriger plus facilement que la fatuité, donc c'est rassurant, mais par contre inquiétant d'autre part. Mais, ceci étant dit, compte tenu d'un argumentaire qui n'avait pas à être fait tantôt, quelles étaient les prédispositions si particulières dans le cas de M. Saintonge? Il n'a jamais été un avocat spécialiste dans le droit de la jeunesse. Je ne vous critique pas de l'avoir nommé, je m'en réjouis. Il est bon qu'on sache bien traiter les anciens présidents de l'Assemblée nationale.

M. Bégin: Alors, à cet égard, je vais me limiter à dire que le processus dans lequel s'inscrit la nomination d'un juge fait en sorte qu'après des rencontres à un comité de sélection, avec chacun et chacune des personnes qui désire se présenter, il y a une recommandation qui est faite au ministre de la Justice d'une ou de plusieurs personnes jugées aptes à être nommées. Quant au reste, je pense qu'on doit s'abstenir de tout commentaire quelconque à cet égard.

C'est ce qui fait, je pense, la qualité et la force du mode de nomination que nous avons au Québec par rapport à d'autres modes de nomination, mais on doit rester à ce niveau-là. Tout le reste, c'est de la confidentialité. Il s'agit simplement de constater qu'une personne a été jugée apte par un comité indépendant à être nommée juge et, par la suite, le ministre de la Justice recommande au gouvernement une nomination. Après coup, quelqu'un est donc nommé, et c'est un constat, et je pense qu'on doit se limiter à cela.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Saint-Jean, aviez-vous terminé?

M. Paquin: Non, je n'avais pas terminé.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Bon, alors...

M. Paquin: Et je voudrais justement enchaîner sur les propos qu'on vient de tenir. Moi, je me réjouis qu'on nomme de grands Montérégiens dans des fonctions comme celles-là. Je regardais justement – bien, on vient d'invoquer l'article 212 – l'essentiel de la jurisprudence a été faite par des grands Montérégiens. Il y a notamment Jean-Pierre Saintonge, Jean-Pierre Saintonge, Jean-Pierre Saintonge et Pierre Lorrain. Alors...

Une voix: Oh, oh!

M. Paquin: ...ça me permet de les saluer au passage.

Alors, ma question, qui portait sur la nomination des juges, je voulais la raccrocher à une préoccupation du député de Chomedey concernant l'accès à la documentation juridique, et dans les deux langues, et aussi sur les nouveaux dispositifs.


Perfectionnement des juges

Dans le programme 1, élément 2, au Conseil de la magistrature, on sait qu'il y a trois personnes qui sont là – il y a un professionnel, un technicien, un personnel de bureau – trois personnes dont la responsabilité, c'est toute la question de la déontologie judiciaire et le perfectionnement des juges. Or, on s'apprête, depuis deux mois, donc, selon ce que vous indiquez, à avoir à notre disposition des CDMSF sur un certain nombre de questions, et je me demandais, est-ce que, effectivement, dans un souci d'investir dans les personnes en même temps, puisque ce genre de dispositif va devenir disponible, puisqu'une rationalisation des supports écrits et des abonnements et la disponibilité de tels instruments sont là, est-ce qu'il y a un programme de soutien aux magistrats de façon à les aider à pouvoir utiliser ces instruments adéquatement? Parce que ce n'est pas tout le monde qui a été formé il y a plusieurs années qui utilise de façon très conviviale ces équipements-là. Et est-ce que vous avez prévu quelque chose pour soutenir les juges dans leur adaptation à ces instruments?

M. Bégin: Avec votre permission, compte tenu que c'est des choses très spécifiques, spécialisées, j'ai mon sous-ministre, ici, au service judiciaire, qui est Gaétan Lemoyne, qui pourrait répondre, je pense, de manière très particulière à votre question. Avec la permission de la commission.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui.

M. Lemoyne (Gaétan): Gaétan Lemoyne. Alors, le ministre a indiqué un peu plus tôt au cours de l'assemblée aujourd'hui qu'il y avait un programme particulier d'informatisation des secrétaires des juges et, en même temps, ces outils informatiques vont permettre d'avoir accès à la documentation juridique informatisée dont on a parlé tantôt via CD-ROM et accès aussi aux banques internes et externes du ministère.

Une voix: CDMSF.

M. Lemoyne (Gaétan): CDMSF, oui. Excusez. Alors, dans ce contexte-là, il y aura ultérieurement d'autres discussions avec le Conseil de la magistrature pour voir quels seront les impacts de l'accession à ces nouvelles technologies-là sur les sommes qui sont présentement affectées au Conseil de la magistrature pour toute la documentation juridique. Alors, c'est à venir. Il n'y a rien de particulier qui est planifié pour l'instant autrement que de rendre les outils informatiques accessibles à la magistrature et aux banques de données.

M. Paquin: Il n'y a pas eu de demandes particulières à ce moment-ci de la part des juges, par exemple?

M. Lemoyne (Gaétan): Bien, des demandes, oui, pour y avoir accès, mais des demandes particulières rattachées à des programmes particuliers ou autres, c'est en examen au niveau du comité tripartite puis au niveau des discussions qu'on a régulièrement avec les juges en chef des différentes cours.


Administration de la justice (suite)


Répartition des substituts du Procureur général dans les districts judiciaires

M. Paquin: O.K. Alors, je passerais maintenant à des questions sur le programme 2. Lorsqu'on s'est rencontrés, la dernière fois, j'avais demandé si on aurait aujourd'hui disponibles les réponses aux questions de l'opposition pour les questions 51 à 55. Vous savez qu'elles avaient été omises, là; il y a un fax qui ne s'était pas rendu, je ne me souviens pas trop exactement, mais on avait indiqué à ce moment-là qu'elles pourraient être disponibles aujourd'hui.

En tout cas, j'aimerais – puisque je ne les ai pas et, même si on me les donnait immédiatement, je n'aurais pas le moyen de les compulser – peut-être poser directement mes questions là-dessus. Je les avais évoquées dans mes notes préliminaires, c'est sur la question de l'adéquation entre le nombre des substituts au Procureur général...

M. Bégin: Entre? Excusez, l'adéquation entre?

M. Paquin: Entre le nombre de substituts au Procureur général pour chaque district judiciaire puis les besoins réels; le nombre de dossiers traités; le nombre de plaintes par mois acheminées aux substituts; le nombre de plaintes par mois qui ont par la suite été portées devant les tribunaux; celles qui ne l'ont pas été et, en fin de compte, l'objet de ma question, c'est: Y a-t-il adéquation entre le nombre de ces procureurs substituts et le travail? Est-ce que ça va? Est-ce que la répartition dans les différents endroits est bonne aussi?

M. Bégin: J'ai, d'abord, des réponses qui sont données dans les questions 54 et 55 qui pourront compléter pour la répartition du nombre de substituts à l'égard de chacun des districts judiciaires ou des points de services qui sont donnés. Ensuite...

M. Paquin: On va nous les remettre tantôt?

M. Bégin: Pardon? Oui, on va les distribuer. La moyenne des dossiers traités par mois, par points de services. Comme en Montérégie, il y a cinq points ou cinq palais de justice, ou cinq points de services. Alors, on voit pour chacun combien il y a de dossiers.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre?

M. Bégin: Pardon?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Vous allez les déposer à la commission?

M. Bégin: Oui, ils sont disponibles.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, j'accepte.

M. Bégin: On me dit qu'ils sont même déposés depuis vendredi.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): On ne les pas eus au secrétariat de la commission. On ne les a pas eus au secrétariat de la commission comme tel.

M. Bégin: Excusez, c'est parce qu'il se produit un phénomène de réverbération puis je n'entends pas. Je m'excuse.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, alors, au secrétariat de la commission, on ne l'a pas eu.

M. Bégin: On m'a même dit que c'était jeudi après-midi. Bon, en tout cas, on en a des copies ici, on pourra compléter. Je m'excuse auprès des membres de la commission, ça a été envoyé.

Alors, je reviens à votre question: Y a-t-il adéquation ou non? Bon, la réponse, c'est que, de façon générale, c'est oui. Certaines décisions temporaires ont dû être reprises, qui ont pu donner l'impression que, effectivement, il n'y aurait pas un nombre suffisant de personnes, à une question qui avait été posée par mon collègue en Chambre, il y a trois semaines environ, je pense, concernant les procureurs de la couronne. Je peux dire que les personnes qui avaient été déplacées ont toutes retrouvé leur emploi, je pense. Si ce n'est pas fait, ce sera fait dans les prochains jours.

(17 h 20)

Nous avons trouvé des moyens pour faire en sorte que nous gardions, partout où il existait des personnes dans des postes spécifiques, particulièrement en ce qui concerne les crimes de violence, de violence conjugale en particulier, que les personnes qui étaient spécialisées dans ces domaines puissent continuer à exercer à ces endroits. Alors, on a, de façon générale, suffisamment de ressources. Je dois vous dire, cependant, que c'est très fragile comme équilibre, parce que, toujours, on est sujets à une variation qui est en dehors de notre contrôle.

Par exemple, l'opération Carcajou a entraîné, dans les régions de Laval et de Montréal, une augmentation rapide du nombre de dossiers, compte tenu du travail policier. Et, alors, vous comprenez que des fois, à ce moment-là, l'équilibre n'est pas toujours instantanément concordant. D'autre part, nous avons pris des moyens pour augmenter le nombre de procureurs qui vont être disponibles pour faire la lutte à la criminalité et, d'une façon plus particulière, à même les produits de la criminalité, et ces gens, donc, pourront, d'une part, être orientés de manière très précise vis-à-vis de certains crimes et nous pourrons, à partir du programme qui existe maintenant, qui est maintenant possible en vertu de l'amendement qui a été apporté au Code criminel et des ententes avec le fédéral, utiliser les produits de la criminalité – on saisit bien – pour avoir un certain nombre de procureurs additionnels qui pourront travailler en ces matières.

M. Paquin: Est-ce qu'il n'y a pas eu, il y a quelques mois, des appels d'offres concernant des substituts au procureur, mais occasionnels, ou quelque chose comme ça?

M. Bégin: Ah! il y en a toujours, des occasionnels. Par exemple, il y a plusieurs personnes, il y a des femmes qui pratiquent dans ce domaine et, lorsqu'elles prennent un congé de maternité, bien sûr, il y a engagement d'occasionnels, parce qu'il faut le faire. Il y a d'autres raisons: il y a les transferts d'un district à un autre pour être capable de prendre une expertise dans un domaine. Enfin, il y a une variation sur le territoire et dans le temps, mais, fondamentalement, il y a toujours un nombre suffisant de personnes.

M. Paquin: J'ai pu comprendre que les personnes que vous engagez comme ça, sur une base occasionnelle, sont sur une base occasionnelle, mais permanents pendant cette période-là, c'est-à-dire à temps plein et complètement assignés à ça.

M. Bégin: Oui, oui.

M. Paquin: Et ils ne peuvent pas, par exemple, continuer leur pratique de bureau, s'ils sont avocats...

M. Bégin: Non.

M. Paquin: ...enseigner et tout ça, alors qu'au fédéral ils ont une pratique, semble-t-il, qui est légèrement différente, à savoir qu'ils ont, comme ça – vous me corrigerez si je me trompe – ils auraient une banque de substituts au procureur, mais occasionnels, et, selon l'endroit où se passe le besoin, ils vont chercher une personne qui est ainsi assignée, qui continue ses activités de bureau et qui peut à l'occasion, donc, être occasionnelle, mais vraiment ad hoc sur des questions, et la personne est nommée pour une certaine période.

Est-ce que je me trompe là-dessus? Et, si je ne me trompe pas, pourquoi avez-vous une formule comme celle-là plutôt que l'autre?

M. Bégin: Écoutez, je pense que la situation qui prévaut actuellement est celle qui prévalait antérieurement. Au Québec, nous avons choisi de faire en sorte que les personnes que nous engageons, même si c'est occasionnellement, travaillent à temps plein pendant la période où elles sont engagées, que ce soit pour six mois ou pour un an. Ce matin, par exemple, je pense que c'est trois ou quatre personnes que j'ai autorisées à travailler pour une période, dans certains cas, d'un an sur une base occasionnelle, mais à temps plein.

D'autres préfèrent des méthodes différentes. Je ne suis pas familier avec la manière de faire au fédéral, mais je sais qu'il y a déjà eu des périodes où on travaillait avec des gens comme ça, qui sont dans le privé, qui agissaient à la fois dans leur pratique privée ou encore comme procureurs. Mais, au Québec, tout leur temps est consacré exclusivement à la pratique du droit criminel pour le substitut du Procureur général.

M. Paquin: Moi, je vous soumets que, pour l'utilisation des crédits, si une personne, par exemple, est en congé de maternité, bon, effectivement, vous avez besoin de quelqu'un occasionnel pour une base assez stable. Si c'est des personnes qui s'en vont en perfectionnement dans une autre juridiction pour se familiariser, ça peut être la même chose aussi, mais il y a des moments où il y a un accroissement subit de dossiers. Vous parliez tantôt de Carcajou, et on aime à se plaire qu'il pourrait y en avoir dans d'autres occasions et dans d'autres circonstances, particulièrement au niveau criminel.

Est-ce que ce n'est pas plus opportun, à ce moment-là, d'avoir une banque d'avocats compétents, présélectionnés, disponibles, occasionnels, sur appel, plutôt que d'embaucher sur une longue période quelqu'un? Et, aussi, ça permettrait possiblement – en tout cas, peut-être – d'avoir des avocats plus intéressants, très intéressés, très dédiés à certaines problématiques, qui ne désirent pas devenir procureurs à long terme, mais qui ont leur pratique et qui consentiraient à... À ce moment-là, chacun y trouverait un bénéfice, je pense, et certainement, en tout cas, à première vue, il m'apparaît que ce serait moins onéreux pour le ministère.

M. Bégin: Actuellement, il y a l'engagement de personnes qui travaillent de manière occasionnelle, mais ces personnes-là ont dû, avant d'être engagées pour la première fois, passer un concours, être sélectionnées; on s'est assuré de leur compétence à exercer cette fonction-là. Je pense qu'on a, dans les faits, une banque importante de personnes qui, à l'occasion, sont engagées comme ça.

Je peux vous dire que ce matin – c'est, des fois, le fruit du hasard de la mémoire – j'ai vu quelqu'un pour lequel j'avais déjà signé antérieurement et que j'ai signé pour au moins une seconde fois. Alors, c'est donc quelqu'un qui est revenu, qui revient pour une seconde fois pour travailler pour nous. C'est déjà quelqu'un qui est formé, qui est compétent et qui a passé le concours. Je pense que c'est une forme de banque de données.

Bien sûr qu'on pourrait penser à d'autres méthodes, mais je crois que celle-là est nettement satisfaisante. En tout cas, mon sous-ministre qui est ici peut en témoigner, tout fonctionne bien et il n'y a pas de sentiment qu'on doive en changer.

M. Paquin: Je peux me permettre une autre question?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui. Votre intervention, M. le député de Chomedey, c'était sur un autre sujet? Alors, M. le député de Drummond.

M. Paquin: Est-ce que c'est sur le même programme?

M. Mulcair: Oui.

M. Paquin: Moi aussi, ce serait sur les affaires juridiques.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): O.K. Bien, vous aurez, messieurs, l'occasion de revenir. M. le député de Drummond, est-ce que c'est sur le même objet, directement?


Diminution du nombre de procédures judiciaires

M. Jutras: Oui. Oui. On a parlé, là, M. le ministre, du nombre de substituts du Procureur général, mais on remarque quand même une chose, là, au niveau des affaires de la justice au Québec, présentement, c'est qu'il y a une diminution importante des dossiers qui s'ouvrent dans tous les districts judiciaires; que ce soit au niveau des affaires pénales ou criminelles, que ce soit au niveau des affaires civiles, il y a moins de dossiers qui s'ouvrent, il y a moins de dossiers qui s'inscrivent. C'est peut-être dû, la baisse des inscriptions, par exemple, au timbre judiciaire qui est passé, du temps des libéraux, de zéro à 250 $. C'est peut-être ça, ça fait 250 %. Et puis c'est la même chose en matière criminelle. Donc, il y a moins de dossiers et c'est généralisé. Alors, je ne sais pas...

Et ce n'est pas la première année, là, c'est au moins la deuxième année qu'on remarque ce phénomène-là. Je ne sais pas si vous êtes en mesure de nous dire, cette baisse-là, de quel ordre elle est, de quel pourcentage? Et de un. Que ce soit en matière criminelle et que ce soit en matière civile, premièrement. Puis, deuxièmement, il me semble que ça, ça doit avoir des effets. Peut-être que ça en n'a pas nécessairement au niveau des substituts du Procureur général parce que, bon, il y a de nouveaux mandats qui sont apparus, là, il y a eu des accents qui ont été mis comme dans Carcajou, puis tout ça, mais, quand même, je me dis: Il y a une baisse de volume. Alors, ça doit entraîner, il me semble, une baisse au niveau des coûts de l'administration de la justice. Et puis est-ce que ça n'engendrera pas une baisse des substituts du Procureur général?

M. Bégin: Effectivement, il s'est produit, particulièrement depuis deux ans, une baisse généralisée en matière de procédures judiciaires, d'ouvertures de dossiers, de procédures comme telles. L'exception étant peut-être dans le domaine matrimonial où, là, il y a à peu près une constance. Cette baisse est quand même relativement importante, de l'ordre – écoutez, tout n'est pas absolu là-dedans – d'environ 20 %, que l'on constate. Ce qui est, en soi, un pourcentage assez important.

Est-ce que nous retrouvons la même baisse dans les coûts, par exemple, ou dans les procédures? La réponse n'est pas nécessairement oui. Vous savez que, si on prend par hypothèse que la cour fonctionnait à 100 % à ce moment-là, s'il y a une baisse de 20 %, si on prenait ça comme étant un absolu, sans tenir compte d'autres critères, on pourrait dire: Bon, bien, au lieu de finir à 17 heures, la personne va finir à 15 heures. Si on regarde ça sur une base purement de coûts, que le juge termine de travailler à 15 heures, ça ne change rien en termes de coûts; la secrétaire du juge non plus; le coût de la salle non plus.

(17 h 30)

En fait, il n'y a pratiquement pas de lien direct, sauf à un certain moment, entre la baisse et la diminution des coûts parce que, de toute façon, il y a des coûts fixes qu'on ne peut comprimer d'aucune manière, et c'est la très grande majorité. Il est certain qu'à un moment ou l'autre, surtout lorsqu'on a un certain volume, par exemple, dans certains districts judiciaires, Québec, Montréal, Longueuil, Saint-Jérôme, ceci a un effet, dans un premier temps, de rendre plus rapide la justice et de faciliter le travail de ceux et celles qui ont pu, au cours des dernières années, voir leur nombre diminuer, mais on ne peut pas sentir, au moment où on se parle, une baisse aussi substantielle. En matières, par exemple, criminelle et pénale, depuis quelques années, il y a de très nombreux dossiers qui ont une complexité considérable par rapport à ce qu'il y avait avant. Il y a des procès, vous le savez, qu'on instruit pour des mois, dans les matières de trafic de stupéfiants, des enquêtes qui sont prolongées. Alors, c'est énorme.

Par rapport à ça, il y a aussi le fait de l'apparition du programme de la non-judiciarisation – vous savez, ce programme, il m'apparaît, moi, en tout cas, extrêmement important – qui consiste à faire en sorte qu'une personne qui commet un certain type de crime, par exemple quand on bouscule quelqu'un, voie de fait, par exemple, alors, si on est en présence d'une personne qui n'a aucun dossier judiciaire, qui ne manifeste pas de probabilité évidente de récidive, qu'on trouve... Dans un crime de telle nature, que la victime soit indemnisée, par exemple... Le procureur de la couronne peut, au lieu de porter une plainte, décider de ne pas judiciariser la chose, de tout simplement envoyer un avis à l'individu l'avisant qu'il a toutes les raisons de croire que, s'il présentait sa preuve devant la cour, il obtiendrait un jugement en sa faveur, donc contre l'auteur du crime, mais que, compte tenu des circonstances, compte tenu de l'absence de risque de récidive, il n'y a pas de poursuite qui est intentée. Alors, ça représente, ça, au Québec, quelque 6 000 dossiers, puis 17 % des 6 000 dossiers portent sur, entre autres, le dossier de voie de fait; c'est énorme. Alors, c'est autant de gens qui ne sont pas judiciarisés. Je pense que ces personnes en bénéficient, le système également. Personne n'est grand gagnant quand on condamne une personne de 45 ans, qui a une profession, qui a commis un geste sous l'impulsion du moment, mais qui a quand même commis quelque chose qui est un crime, et qu'on sait que, compte tenu des antécédents de la personne, il n'y a pratiquement aucune chance de récidive... Tout le monde est gagnant à ce qu'on ne l'amène pas devant la cour. Alors, parmi les dossiers qu'on considère, par exemple, qui ne sont pas amenés devant la cour, il y en a un nombre important de ceux-là qui sont là. Cependant, il faut voir que le procureur de la couronne, bien sûr, doit, lui, quand même porter son jugement, doit étudier la preuve, doit regarder; il continue de travailler, même si c'est de façon moins apparente, puis, finalement, il fait le geste de l'envoyer à la personne pour qu'elle ne soit pas judiciarisée.

Donc, il y a du travail qui se fait, mais il y a moins de dossiers qui apparaissent devant la cour. Par ailleurs, on a eu aussi des ententes qui ont été faites avec les cours municipales, j'en signe régulièrement, qui font en sorte que beaucoup de dossiers sont maintenant transférés aux cours municipales. Alors, l'un dans l'autre, il y a toujours un certain nombre de crimes; on ne les retrouve pas aux mêmes endroits.

Finalement, il y a eu aussi les modifications au Code criminel, le projet de loi C-42, qui fait qu'à cause des nouvelles définitions des crimes il y a moins d'enquêtes préliminaires, donc une diminution de volume d'affaires. Alors, tout ça fait que, pour répondre à votre question, oui, il y a une baisse importante du volume d'affaires. Cependant, ça ne se traduit pas, à ce stade-ci, directement dans une diminution de coûts. Mais on peut penser que, si la chose continue, il est certain que ça aura une répercussion quelque part, soit au niveau des secrétaires, au niveau de certains officiers, construction de nouveaux aménagements, de nouveaux locaux, par exemple, qui coûtent quand même de l'argent. Chaque fois qu'on nomme un juge ou, encore, qu'on engage une personne, il faut un endroit pour qu'elle puisse travailler, bon, ça nécessite des travaux... Pardon?

M. Mulcair: Château Frontenac.

M. Bégin: Il y a Châteauguay, peut-être? Peut-être à Laval, au palais de justice, le petit palais de justice, à Laval?

Alors, il y a moins de coûts et ça va se répercuter. Au moment où on se parle, c'est peut-être inscrit dans le système, mais ce n'est pas encore visible de manière tangible. J'espère... bien, j'espère, si ça continue, c'est sûr qu'on va s'occuper de s'assurer que les économies qui peuvent être faites à la suite de cette diminution-là soient empochées par le gouvernement.

M. Jutras: Vous m'avez beaucoup parlé de la baisse de volume au niveau criminel, mais il y a aussi au niveau civil qu'il y en a une. C'est la même chose, comme vous avez dit, sauf en matière matrimoniale où ça se maintient, mais, en matière civile, il y a une baisse également.

M. Bégin: Il y a une baisse dans tous les domaines, sauf le matrimonial. Alors, la Cour supérieure, la Cour du Québec, en matière civile, en matière... Il y a une très légère baisse au niveau de la jeunesse. C'est moins sensible que dans d'autres domaines. Il n'y a pas d'augmentation, mais il n'y a pas de diminution aussi évidente. Mais, quand je dis 20 %, c'est l'un dans l'autre, l'ensemble des cours et des divisions.

M. Jutras: Et je pense qu'il y a un autre phénomène qui explique cette baisse-là – il faut le mentionner parce que c'est heureux pour notre société – c'est qu'il demeure qu'on vit quand même, en général, une baisse de la criminalité dans notre société.

M. Bégin: C'est exact. Je pense que c'est peut-être aussi un révélateur, et j'espère, d'une certaine manière, avoir raison, en ce sens qu'il n'est pas certain que les coûts de la justice sont rendus tels que les gens ne vont plus devant la justice pour exercer leurs droits, mais y renoncent. Dans une période économique où il y a des risques, par exemple, à aller devant la cour, les gens préfèrent ne pas y aller plutôt que de devoir dépenser, payer des honoraires légaux et, en plus, s'ils perdent, de payer les honoraires de l'autre côté. C'est pour ça, d'ailleurs, que j'ai déposé le projet de loi n° 7 qui vise à faire en sorte que les délais soient plus courts. Je pense qu'en bout de piste les bénéficiaires de ça vont être certainement les gens qui veulent exercer leurs droits, mais aussi les avocats qui vont voir revenir auprès d'eux des gens qui vont leur demander leurs services.

Je donne un exemple, je l'ai donné l'autre jour, en Ontario, il y a une étude qui établit que, si vous avez une créance de 40 000 $, vous n'avez aucun avantage à aller en cour parce que les honoraires judiciaires et les coûts vont manger, même si vous gagnez, le montant que vous allez obtenir. C'est assez incroyable. J'ai entendu des juges me dire qu'ils constataient de plus en plus de cas où les personnes qui ont des réclamations de 7 000 $, 8 000 $, 9 000 $, 10 000 $ les réduisent d'avance à 3 000 $ pour aller aux petites créances et ainsi éviter de devoir payer des honoraires légaux, deuxièmement avoir des délais beaucoup plus courts et faire en sorte que... En tout cas, s'ils perdent, ce n'est rien, mais, s'ils gagnent, bien, ils empochent le plein montant; ils aiment mieux le 3 000 $ que le 7 000 $ potentiel. C'est rendu grave quand, dans un système, on est comme ça. Et on n'est pas pire ni mieux qu'ailleurs, mais c'est une piètre consolation.

C'est pour ça que le projet de loi n° 7, qui vise à faire en sorte qu'on soit rendu devant la cour dans les six mois, ça devrait permettre aux gens de vouloir revenir devant la cour pour exercer leurs droits parce qu'ils sauront qu'ils auront justice rapidement et que ça coûtera moins cher. Alors, vous voyez, tout ça, ces éléments-là vont avoir un impact, à un moment ou l'autre, sur la justice, et j'espère que tout le monde sera gagnant, les citoyens, les avocats et tout le monde.

M. Jutras: Merci.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Messieurs, avant qu'on poursuive les travaux, j'aimerais vérifier avec vous votre disponibilité. On a débuté la séance à 15 h 15, soit 15 minutes plus tard que prévu normalement, et je voudrais vérifier votre disponibilité. Vous aussi, M. le ministre, si vous étiez prêt à continuer jusqu'à 18 h 15... Un représentant de l'opposition officielle m'a signifié que oui, du parti ministériel aussi. M. le ministre, vous seriez disponible jusqu'à 18 h 15?

M. Bégin: Oui.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Parfait. Alors, on va poursuivre les travaux. M. le député de Chomedey.

M. Bégin: Peut-être, M. le Président, prendre trois minutes, à un moment donné, pour mes... Je suis disponible.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que vous voulez prendre le trois minutes tout de suite?

M. Bégin: Non, non. On va continuer.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): C'est bien. M. le député de Chomedey.

M. Bégin: À moins que M. Mulcair ne veuille absolument...

(17 h 40)

M. Mulcair: J'ai écouté, comme tout le monde, les très longues réponses du ministre et je les mets en comparaison avec son refus de répondre à notre question sur la commission Krever. Mais je ferai aussi remarquer à mon collègue, le ministre de la Justice, que son épilogue sur ce qui se passe avec une réclamation de 40 000 $, en Ontario, et son anecdote à propos des juges qui lui auraient dit que les réclamations de 7 000 $, 8 000 $ à la Cour des petites créances sont réglées pour beaucoup moins... S'il veut gruger du temps, ça, c'est tout à fait correct, en termes parlementaires, ça lui fait faire face à moins de questions et c'est une tactique parlementaire tout à fait correcte. Par contre, il devrait peut-être se chercher d'autres textes à nous présenter. Celui-là, il nous l'avait donné mot à mot, jeudi dernier.


Obligation alimentaire des grands-parents

En ce qui concerne les affaires législatives, M. le Président, on sait que... Évidemment, tout le monde, autour de cette table, est au courant du fait que, dans notre système civiliste, le Code civil demeure notre législation primordiale pour tout ce qui est des relations entre les citoyens. Un article en particulier a retenu beaucoup l'attention du public et des médias, au cours des derniers mois, c'est l'article 585. Je dois tout de suite dire que, de notre côté, on était très heureux de voir le ministre commencer sa tournée où il a été capable de rencontrer les divers groupes, les représentants de toutes sortes d'associations et autres qui avaient des choses à dire sur l'obligation alimentaire des grands-parents. Je pense que le ministre a vraiment démontré son intérêt très personnel et a reconnu peut-être toute l'importance du dossier en entreprenant cet important travail.

Est-ce que le ministre est en mesure, aujourd'hui, de nous donner quelques indications des solutions qu'il entrevoit dans ce dossier-là ou est-ce que c'est encore prématuré, à ce stade-ci?

M. Bégin: Non. Je pense que je dois attendre, avant de donner des indications, d'avoir soumis à mes collègues, au Conseil des ministres, la recommandation que j'ai. Cependant, je peux dire qu'avant le 15 mai on sera en mesure de présenter un projet de loi à cet égard.


Incident impliquant la présidente de l'Association pour le recouvrement de pensions alimentaires

M. Mulcair: Pendant sa tournée, M. le Président, il s'est passé un événement. C'était il y a un mois exactement. On est le 29, aujourd'hui; c'était le 29 mars. La présidente d'une association, une mère monoparentale elle-même, présidente de l'Association pour le recouvrement de pensions alimentaires, affirmait avoir été traitée avec violence et véhémence par le ministre de la Justice du Québec. Elle dit que celui-ci a affiché de la haine envers les femmes et les enfants. Elle est même allée jusqu'à réclamer la démission du ministre qui, selon elle, ne mérite plus la confiance de notre Assemblée législative.

Il y a quatre semaines – c'est ça, demain ça fera quatre semaines – on a contacté les autorités responsables, au ministère, pour tenter de voir clair dans ce dossier et on a demandé si on pouvait mettre la main sur l'enregistrement mécanique des audiences de la soirée en question, la soirée du 29 mars. On nous a répondu, le lendemain, je crois, qu'effectivement il y avait un enregistrement, mais que tous les enregistrements, toutes les cassettes avaient été montées en haut, au bureau du ministre, et qu'ils allaient faire le tri, ils allaient trouver quelle cassette était la bonne et ils allaient nous l'envoyer.

La même information nous a été donnée, à une couple de reprises, par le chef de cabinet du ministre qui nous a assurés que ça existait, qu'on allait l'avoir. Mais il va peut-être falloir faire comme dans l'enquête sur la Somalie et arrêter tout le travail, au ministère, pendant une journée complète pour que tout le monde, au ministère, aille regarder dans la boîte des cassettes pour trouver la bonne. Parce que ça fait quatre semaines qu'on nous le promet et on n'a toujours pas eu la cassette. Alors, c'est sans doute une question importante d'organisation du ministère. Si le ministre n'est pas en train de demander des crédits suffisants pour pouvoir lui permettre d'avoir des gens qui savent retrouver une cassette dans une boîte, on va essayer de l'aider avec ça. Mais est-ce que le ministre peut nous dire quand est-ce qu'on va avoir le droit d'entendre ce que Mme Daines, la présidente de l'Association en question, dit avoir été une manière verbalement violente de comportement de la part du ministre?

M. Bégin: Elle a même dit qu'elle avait peur en s'en allant chez elle aussi, elle a mentionné ça. Elle avait peur que tous les hommes qui étaient dans la salle l'agressent. Elle a mentionné... Alors, vous comprenez que je pense que Mme Daines a manifesté une crainte... Pourtant, quand vous lirez les notes sténographiques, le descriptif de ça, vous verrez que je pense que Mme Daines a peut-être cru certaines choses plutôt que de les avoir entendues.

M. Mulcair: Oui, mais, M. le Président, justement, le mot «entendu» est très crucial, dans ce que le ministre vient de dire. Si nous voulons tous savoir ce que Mme Daines a entendu, ça va être très important pour nous tous de pouvoir entendre ce que le ministre a dit et non pas de lire une transcription parce que vous savez, M. le Président, comme nous tous, que le ton qui était employé, du moins le ton qui était reproché au ministre par Mme Daines, est le coeur de la question. Alors, si, comme le ministre semble l'indiquer maintenant, que, selon lui, elle a entendu des choses qui n'ont pas été dites ou entendu un ton qui n'a pas été utilisé, nous voulons quand même aller au bout de cette question-là, enlever tout doute. Depuis quatre semaines, on a attendu patiemment que le document ou, pardon, la cassette nous soit transmise. La cassette, ça fait quatre semaines qu'on nous dit qu'on va l'avoir, ça fait quatre semaines qu'on dit que ça existe puis ça fait quatre semaines qu'on attend. Est-ce que le ministre peut nous dire quand est-ce qu'on va avoir la cassette?

M. Bégin: Je ne peux pas vous répondre quand est-ce que vous l'aurez, mais vous aurez la transcription de ce qui a été dit à ce moment-là.

M. Mulcair: M. le Président, je pense que c'est important de s'entendre. Ce qui est en cause, ce n'est pas une transcription. Ce qui est en cause... Puis ça, c'est important parce que le ministre vient très directement de contredire les affirmations de Mme Daines, qui est elle-même une élue, M. le Président. C'est une conseillère municipale à la ville de Montréal avec le parti de la majorité. C'est une personne avec beaucoup d'expérience dans la vie publique. Je ne pense pas qu'on puisse laisser tomber à la légère, comme le ministre vient de le faire, ses affirmations.

Mais, si le ministre veut, comme nous, faire toute la lumière sur cette situation et permettre que les deux versions se fassent entendre, c'est le cas de le dire, bien, qu'il ne nous donne pas un bout de papier. Un morceau de papier ne va pas nous permettre de savoir si Mme Daines a raison de dire que le ministre a utilisé un ton pas correct avec elle. Ce qui va nous permettre de faire ça, c'est le fait d'écouter l'enregistrement mécanique, qui a été fait aux frais des contribuables. C'est quelque chose qui est public, pas quelque chose qu'on devrait cacher. Et on l'a demandé depuis quatre semaines puis on nous le promet depuis quatre semaines, pas une transcription, la cassette elle-même. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il va nous donner la cassette?

M. Bégin: Alors, j'ai déjà répondu, M. le Président, à cette question.

M. Mulcair: Ah non! Avec respect, M. le Président...

M. Bégin: Alors, soyez-en satisfait ou pas, c'est une chose, mais le fait est que je vous ai dit que vous auriez la transcription des propos tenus durant cette soirée.

M. Mulcair: Est-ce que le ministre est en train de nous parler d'une transcription mécanique, d'une copie de la bobine...

M. Bégin: Écrite.

M. Mulcair: ...ou est-ce qu'il est en train de nous dire qu'il va nous donner des mots sur papier qui ne vont pas du tout nous permettre de connaître le ton qu'il a employé?

M. Bégin: Je pense que, M. le Président, avec la transcription écrite de ce qui a été dit ce soir-là, il sera en mesure de juger les propos qui ont été tenus. C'est ce qui...

M. Mulcair: Un autre beau «cover-up». Ça se «peut-u»!

M. Bégin: Que c'est beau! M. le Président, je pense qu'il y a des mots qui sont antiparlementaires, là. Je pense qu'on vient d'en entendre un.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Effectivement, M. le député de...

M. Mulcair: Je me suis dit que c'était un beau «cover-up»; je n'ai pas dit que c'était un laid «cover-up». C'est un beau «cover-up».

M. Paquin: C'est prêter des intentions.

M. Mulcair: S'il ne veut pas que personne... J'ai fait tout, sauf lui prêter des intentions. Je lui ai dit que ça fait quatre semaines qu'il nous a promis de nous donner la cassette. S'il n'a rien à se reprocher, comment ça se fait qu'il cache la cassette?

M. Bégin: M. le Président, il n'a pas...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Un instant.

M. Bégin: Il n'a pas prêté des intentions, M. le Président, il a porté des accusations.

(Consultation)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, M. le député de Chomedey, compte tenu que vous utilisez... que vous le qualifiez d'une façon ou de l'autre, le terme que vous utilisez étant un mot non parlementaire, je vous inviterais à le retirer.

M. Mulcair: Lequel, M. le Président?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): «Cover-up», monsieur.

M. Mulcair: Le mot «cover-up» est antiparlementaire?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Parce qu'on prête l'intention au ministre de nous fournir un «cover-up».

M. Mulcair: De nous fournir un «cover-up»?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): De... Voilà, je n'ai pas... Vous dites: Voilà, M. le ministre, un autre beau «cover-up».

M. Mulcair: Pardon, je m'excuse, je veux juste saisir votre demande, et je vais pouvoir y répondre, à ce moment-là.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, de retirer: Voilà, M. le ministre, un autre beau «cover-up».

M. Mulcair: Ah oui! D'accord. Oui, je peux retirer: un autre beau «cover-up» et y substituer: une autre tentative de camouflage.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Ce n'est pas mieux, c'est aussi prêter une intention.

(17 h 50)

M. Mulcair: Ah non! Avec respect, M. le Président. Comment est-ce qu'on peut dire que le fait de ne pas rendre public quelque chose que le personnel du ministre a déjà promis de rendre public peut être antiparlementaire? C'est un fait établi. Alors, le ministre, s'il veut faire toute la lumière sur la situation, il va rendre la cassette disponible; s'il veut continuer de garder les choses pour lui, qu'il les garde pour lui. Moi, quand je dis «cover-up», M. le Président, il faut bien comprendre que le mot «cover-up» est un terme anglais. C'est peut-être ça que le ministre me reproche. Alors, c'est pour ça que j'ai cherché le terme «camoufler».

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Chomedey, ne prêtez pas de plus en plus d'intentions...

M. Boulerice: Il m'aigrit, M. le Président. Il me rend de plus en plus...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: Il m'aigrit, M. le Président, il me rend de plus en plus aigre.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Vous ne pouvez prêter d'intention malveillante. Ah, vous pouvez déplorer le fait qu'il ne vous la fournisse pas; ça, c'est votre droit, comme parlementaire. De là à prêter une intention malveillante...

M. Mulcair: Je retire tout propos que j'ai pu prononcer qui aurait pu prêter une intention malveillante, tout en déplorant que le ministre continue de refuser de donner suite aux engagements pris par son chef de cabinet et par d'autres personnes dans son ministère de nous donner une cassette. On persiste à poser la question: Si le ministre n'a rien à se reprocher, pourquoi ne donne-t-il pas la cassette?

M. Paquin: M. le Président...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien, M. le député de Chomedey.

M. Paquin: M. le Président, article 35...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: ...alinéa 6°: Un député ne peut refuser d'accepter la parole d'un parlementaire...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): C'est déjà réglé.

M. Paquin: Non, je ne parle pas du motif indigne, je parle de l'autre volet. On ne peut refuser d'accepter la parole. Alors, le ministre a indiqué, dans son intervention, que la transcription permettait de connaître exactement la teneur et l'ensemble de la situation, et que c'était sa façon de respecter la demande qui avait été faite et l'acceptation qui avait été faite. Alors, moi, je me pose la question: Est-ce que le député de Chomedey refuse d'accepter la parole du ministre ou est-ce qu'il accepte la parole du ministre? Qu'il soit insatisfait de sa réponse n'est pas un motif qu'on peut invoquer.

M. Mulcair: M. le Président, sur la question de règlement du député de Saint-Jean, je pense qu'il aurait mieux fait d'arrêter après son premier effort comme leader, parce qu'il était très bien. Cette fois-ci, avec tout le respect que je lui dois, il tire un peu à côté. Le ministre n'est pas en train de nous demander de prendre sa parole, le ministre n'est pas en train de nous demander ça. Ce qui se passe, c'est que le personnel du ministre et du ministère, c'est-à-dire tantôt des employés politiques, tantôt les fonctionnaires, nous a dit qu'on allait avoir la cassette. Le ministre est en train de dire qu'on va avoir un bout de papier. On va pouvoir savoir ce qui s'est dit, on ne va pas pouvoir savoir comment ça s'est dit. Et on persiste à dire, M. le Président, que, si le ministre n'a rien à cacher, on comprend difficilement pourquoi il refuse de nous donner la cassette. C'est grave, ce que Mme Daines est en train de dire ce qui s'est passé; elle dit que le ton du ministre était vraiment problématique. Alors, on ne peut pas, et le député de Saint-Jean le sait très bien, détecter un ton sur un bout de papier.

M. Paquin: Je comprends qu'il accepte la parole du ministre.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Chomedey, est-ce que vous aviez d'autres questions...

M. Mulcair: Oui, on va...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): ...sur le même sujet? J'avais une autre demande d'intervention.

M. Mulcair: J'allais changer de sujet, mais...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): O.K. Mais est-ce que c'était sur le même sujet, M. le député de Saint-Jean? Non?

M. Paquin: Non. C'était...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Non. Alors, M. le député...

M. Paquin: ...sur des sujets voisins, par contre.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): O.K. Alors, M. le député de Chomedey.


Ressources nécessaires à l'administration de la justice

M. Mulcair: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Nous avons, comme tout le monde, remarqué que certains policiers municipaux et procureurs de la couronne disent qu'ils ont du mal à s'entendre. C'est un article de Jean-Maurice Duddin, dans le Journal de Québec du 4 avril, qui fait ce constat, M. le Président. Il dit: «Les policiers municipaux de tout le Québec se plaignent des procureurs de la couronne, qui exigent maintenant des "dossiers blindés à 100 %" pour daigner procéder. Dans certains cas – de poursuivre M. Duddin – les policiers se plaignent même de devoir "pousser" les procureurs pour qu'ils procèdent.»

Nous voulons savoir, de la part du ministre, si cet état de fait est confirmé par ses propres services internes et, si oui, si, selon lui, c'est un problème de manque d'effectifs.

M. Bégin: M. le Président, il est bien évident qu'aucune instruction de ma part n'a été donnée, de quelque manière que ce soit, à l'égard des substituts du Procureur. Cependant, la règle est la même dans tous les cas, c'est que les policiers doivent apporter aux procureurs de la couronne toute la preuve nécessaire pour avoir, devant la cour, une preuve hors de tout doute raisonnable. C'est un exercice qui est continuel, régulier, permanent, qui est peut-être, à l'occasion, frustrant pour certains policiers, et ça se comprend. Au moment où ils ont travaillé et qu'ils jugent à propos, parce que c'est toujours là que ça se pose comme hypothèse, ils croient avoir une preuve suffisante pour aller devant la cour et, immanquablement, par hypothèse, dans les cas où le procureur de la couronne n'est pas d'accord avec eux, ils subissent un refus. On peut comprendre qu'ils subissent, à ce moment-là, une certaine frustration, et je comprends. Dans certains cas, elle est plus grande que dans d'autres. Il peut arriver que certains soient plus sujets que d'autres à de telles situations, mais c'est normal.

Il faut comprendre qu'un policier, par exemple, a pu, à un moment donné, présenter une preuve qui a été jugée suffisante parce que telles circonstances s'étaient produites. Or, tout à coup, la jurisprudence a évolué, il n'a pas été informé, il n'a pas suivi et le procureur de la couronne lui dit: Ah! peut-être que, il y a six mois, il y a un an, tu avais suffisamment d'éléments pour avoir une preuve hors de tout doute, mais la jurisprudence s'est développée, puis ce n'est pas suffisant.

Par ailleurs, dans certains cas, même si, en apparence, on est peut-être devant une situation analogue, le procureur de la couronne va dire: Oui, mais la Charte a été interprétée, ou la Charte comme telle arrive avec telle, telle, telle approche, donc, ce n'est pas possible. Par ailleurs, on sait que, même si ce n'est pas nécessairement pertinent à chacun des cas, des moyens nouveaux ont été apportés, le procureur de la couronne est au courant que des moyens de défense plus sophistiqués, avec des techniques plus complètes se développent et qu'en conséquence il n'aura pas cette preuve hors de tout doute raisonnable dont il a besoin. Donc, c'est sûr qu'il y a des situations qui sont plus frustrantes pour le corps de police, mais la règle, et c'est ce que les substituts appliquent, c'est qu'ils doivent être convaincus qu'ils ont ce qu'il faut pour faire une preuve hors de tout doute et obtenir une condamnation. Et on ferait grand reproches à ceux-ci, s'ils s'en allaient devant la cour, portant une accusation contre une personne sans avoir cette conviction et cette preuve suffisante. Ça arrive qu'on n'ait pas... Bien sûr qu'il y a des acquittements, mais il faut que le procureur, lui, quand il s'en va devant la cour, ait cette conviction-là.

M. Mulcair: M. le Président, personne ne peut être en désaccord avec la partie de la réponse du ministre où il nous dit qu'un procureur de la couronne ne veut jamais aller en cour et accuser quelqu'un s'il n'est pas persuadé lui-même qu'il a une preuve hors de tout doute raisonnable sur tous les éléments de l'infraction. Ça va de soi, ça. Mais notre question était vraiment de savoir si le ministre ne se préoccupait pas que vraiment on commence à avoir, dans ces questions-là, un manque de ressources pour pouvoir vraiment faire le travail. Il ne faut pas prendre pour acquis que la société paisible, où, justement, on applique la loi, où les gens peuvent se promener dans la rue tard le soir, il ne faut pas prendre pour acquis que ça va continuer, cet état de chose là. Je pense que, si on regarde, on se rend compte que, si on a une société si paisible, c'est bien sûr qu'on a des traditions, c'est bien sûr qu'on a une culture, mais c'est aussi parce qu'on a mis l'effort et les ressources nécessaires, au fil des ans, pour mettre en place des procureurs de la couronne compétents et rémunérés d'une manière adéquate, des tribunaux de justice dignes de notre confiance par leur indépendance et leur impartialité, un système de policiers bien formés et bien rémunérés, parce qu'ils mettent leur vie en danger tous les jours en défendant nos vies et notre propriété, et que tout ça, si on n'y met pas les ressources nécessaires, on est en train de miner ce qui est parmi les fondements mêmes de notre système de justice au Québec.

Alors, quand on voit ces éléments-là commencer à surgir dans le dossier de l'administration de la justice, quand on voit qu'un juge Dionne, dans une cause qui s'appelle La Reine contre Jacques Lapointe, a conclu que la manière qu'avait le ministère de dire qu'en cas de déclaration de culpabilité le substitut du Procureur général n'a pas l'intention de demander l'imposition d'une peine d'emprisonnement dans ce dossier... constituait un accroc. Il y a eu d'autres décisions depuis, puis le droit est dans un état de flux, en ce moment... «flux»... dans un état de flux...

M. Bégin: Ha, ha, ha! Le flux, ça peut être autre chose.

M. Mulcair: Quand le ministre va pouvoir le dire en anglais aussi bien que je le dis en français, il va pouvoir rire de mon français. Mais, pour l'instant, je me débrouille assez bien.

M. Bégin: Non, ce n'est pas du français que je ris.

(18 heures)

M. Mulcair: Alors... Mais le dossier de M. Lapointe et la décision du juge Dionne sont, à notre sens, importants et une autre indication qu'on a un problème. Le ministre a parlé tantôt de déjudiciarisation. Mais, encore une fois, il faut faire extrêmement attention, dans ces cas-là, parce que les lois sont votées pour être appliquées. J'ai eu le plaisir de citer le premier ministre Bouchard, au début de notre rencontre de ce soir avec le ministre de la Justice, M. le Président, et de rappeler ses propos quand il a dit: Bien, ça n'existe pas, des lois qu'on applique puis des lois qu'on n'applique pas.

Alors, ce n'est pas pour un administrateur d'État, ce n'est pas pour un élu pas plus que c'est pour un procureur de la couronne de décider si tantôt il va demander, tantôt pas; ou, tantôt, il va essayer d'imposer ça aux tribunaux, tantôt pas; tantôt, on va décider que certaines personnes qui ont commis des crimes ne vont pas être traitées selon la loi. Alors, autant d'indications... Et, lorsqu'on le met avec le fait que les policiers municipaux commencent à exprimer publiquement leurs propres inquiétudes là-dessus, on se pose des questions et on se dit: D'abord, il faut qu'on soit tous conscients, de part et d'autre, sans partisanerie, que l'administration de la justice, à cet égard, est fondamentale pour préserver cette société paisible qu'on a, où justement on ne craint pas la violence qui existe d'une manière vraiment terrible dans beaucoup de grandes villes américaines, nos villes voisines juste au sud, et, à notre sens, il faut marquer un temps d'arrêt dans cette analyse-là.

C'est une invitation que l'on fait au ministre de continuer de faire très attention. Parce qu'on est préoccupés, lorsqu'on entend des policiers dire que leurs dossiers qu'ils ont montés ne sont pas traités avec tout l'intérêt que ça mérite par les procureurs de la couronne. Et on se posait la question, à savoir si ce n'était pas dû à un manque de ressources. Si c'est le cas, on demanderait, de notre côté, au ministre de mettre les ressources nécessaires là-dedans et de ne pas prendre pour acquis que, s'il diminue de manière drastique les ressources, on va pouvoir continuer de bénéficier de ce qu'on a toujours connu dans notre société: une société relativement libre de crimes parce qu'on a toutes ces institutions en place pour protéger le public.

M. Bégin: Alors, je remercie le député pour sa leçon, mais je lui dirai que la politique de non-judiciarisation... Et je fais attention en le lui disant non pas pour le corriger de son français, mais pour lui dire qu'il y a une nuance entre la non-judiciarisation et la déjudiciarisation. Ce n'est pas la même chose. La politique de non-judiciarisation s'appuie sur la «common law»; c'est le pouvoir du substitut du Procureur général.

En ce qui concerne la petite note, à laquelle vous faites allusion, du juge Dionne, je vous ferai remarquer qu'il y a eu trois décisions qui ont été rendues dans le sens contraire de ce que vous mentionnez et il y en a une autre qui a appuyé celle du juge Dionne. Donc, il y a trois décisions dans un sens, deux dans l'autre. Et, pour le moment en tout cas, c'est la position que nous défendons qui a reçu le plus grand nombre de décisions favorables.

Quant au reste, je pense et je répète que les procureurs de la couronne sont en nombre suffisant et que, par ailleurs, avec le programme de l'utilisation des produits de la criminalité qui a permis l'engagement de huit substituts spécialisés dans la question, je pense que c'est une indication que nous voulons aller de l'avant et que nous prenons les moyens requis pour faire en sorte que le crime soit poursuivi.

Par ailleurs – et je pense que ce n'est certainement pas dû à notre arrivée au pouvoir – il y a effectivement une diminution de 20 % du nombre de dossiers. Je pense que ça entraîne un soulagement dans le travail des procureurs de la couronne et qu'ils sont, en conséquence, en mesure de rendre tous les services qui sont requis d'eux quand les policiers se présentent devant eux pour obtenir l'autorisation de poursuivre.

M. Mulcair: Retournons maintenant, M. le Président, vers l'élément 4, Administration.

M. Bégin: J'inviterais peut-être M. le député à regarder à sa droite... Ha, ha, ha!... pour M. le président.


Rénovation et agrandissement de palais de justice

M. Mulcair: Mme la Présidente, retournons maintenant vers l'élément 4, Administration, rénovation et agrandissement des palais de justice.

La construction à Cowansville a maintenant un an et demi de retard par rapport aux prévisions de l'ancien gouvernement. Est-ce que le ministre peut nous mettre à jour sur l'état du dossier de Cowansville, s'il vous plaît?

M. Bégin: Cowansville, plusieurs éléments se sont produits depuis un certain temps, en particulier la décision de mon collègue de fermer la prison de Cowansville, d'une part. D'autre part, en cours d'année, les plans de ce palais de justice là avaient fait l'objet d'une révision importante, compte tenu que les besoins n'étaient pas ceux que justifiait la bâtisse qui était en voie d'être érigée. Par ailleurs, on pouvait tenir compte, sans fermer la prison, d'une diminution importante de l'espace réservé à la Sécurité publique. Donc, les plans ont été révisés, ils sont encore à l'état de la révision. Alors, au moment où on se parle, il n'y a pas de début de construction, de travaux de faits, à cet endroit.

M. Mulcair: D'accord. Par rapport à l'année dernière, le projet de Montréal semble, si notre lecture est correcte, avoir été relégué aux oubliettes au bénéfice des projets de Matane, ce qui ferait sans doute plaisir à M. Rioux, et de Mont-Laurier, ce qui ferait sans doute le bonheur de M. Léonard. Est-ce que le ministre de la Justice peut nous dire qu'est-ce que M. Ménard a fait pour mériter ce sort et quand est-ce que le projet de Montréal va revenir à l'avant-scène?

M. Bégin: À ma connaissance, le dossier de Montréal n'était pas le dossier qui était en tête de liste dans le plan directeur qui établissait l'ordre des travaux les plus importants de construction ou de reconstruction des palais de justice au Québec. À ce que je sache, le palais de justice de Montréal – je peux me tromper, mais je ne crois pas – n'était pas dans les premiers des plus prioritaires. Il y avait celui, par exemple, de Cowansville, celui de Saint-Jérôme; il y avait celui de Trois-Rivières, celui de Valleyfield, celui de Roberval.

M. Mulcair: Juste pour l'information du ministre, madame...

M. Bégin: Mais ce qui était prévu, et c'est là qu'on tombe dans une autre sphère, c'est celui de la réorganisation, du réaménagement, de la rationalisation. Et je pense que, dans le dossier de Montréal, il y a ce qu'on appelle de la rationalisation à faire, entre autres par le fait qu'il y a eu une réduction des effectifs travaillant au palais de justice, et du travail devra être fait à ce niveau-là. Par ailleurs, il est sûr, et je l'ai mentionné déjà précédemment, que certains travaux de rationalisation, de réaménagement – et je répondais à mon collègue, député de Drummondville, tout à l'heure – seraient faits dans des palais de justice, non pas des travaux majeurs, mais des travaux de réorganisation pour enlever les principaux irritants. Entre autres, à certains endroits, on peut penser que des pièces deviennent tout à fait surchauffées pendant des parties de saisons et ça devient difficile d'y travailler. Je pense, entre autres, à Sept-Iles, je pense à Roberval. Dans le cas de Matane, c'est un cas de circulation des prisonniers et réaménagement et aussi de climatisation. Alors, nous entrevoyons de pouvoir réaliser certains travaux de cette nature-là et en particulier, aussi, à Montréal. Mais ce n'est pas des travaux de reconstruction d'un palais de justice, on le comprendra.

M. Mulcair: Juste pour informer le ministre, Mme la Présidente, que l'année dernière, dans les crédits, à cette même question, projets en attente, Montréal figurait bel et bien sur la liste. Pour ce qui est de Saint-Jérôme, est-ce que le ministre peut nous indiquer qu'est-ce qu'il entend faire, maintenant que ce projet est en retard de plus de 10 mois par rapport aux prévisions qu'il avait faites l'an passé?

M. Bégin: Il y a eu un travail qui a été fait, préparation de plans. Il y a eu une demande de révision de plans pour tenir compte de certains éléments; en particulier, j'ai demandé qu'on revoie les espaces qui étaient réservés pour chacun des services offerts au palais. Je crois, je suis convaincu que les bases qui étaient utilisées étaient... je ne dirais peut-être pas somptuaires, mais trop grandes par rapport à ce qui est nécessaire pour un bon fonctionnement de la justice. Ayant pratiqué pendant 25 ans et ayant fréquenté plusieurs palais de justice, je suis en mesure de dire que, dans certains cas, nous étions en présence de salles démesurément grandes et qui représentaient des coûts énormes. Il me semble qu'il est possible de fonctionner de façon très adéquate dans des locaux moins grands. J'ai demandé, donc, qu'on fasse de telles révisions et ça représente des diminutions de coûts de plusieurs millions. Bien sûr que ça a un effet sur la date de réalisation des travaux, mais, dans une période de temps où l'argent est très rare, je pense que ça vaut la peine de regarder à nouveau et de reporter légèrement dans le temps, mais de s'assurer qu'on ne dépense pas inutilement certaines sommes d'argent importantes.

(18 h 10)

M. Mulcair: Merci, M. le ministre. Mme la Présidente, est-ce que le ministre de la Justice se rappelle notre conversation du 11 décembre 1995, au cours de laquelle je lui avais demandé s'il était en train de dire que l'engagement de fournir des salles appropriées pour les victimes de violence conjugale, notamment pour qu'elles puissent ne pas nécessairement être, dans l'attente d'être entendues comme témoins, à la même place que leurs agresseurs présumés... Est-ce que cet engagement va être rempli? Ça, c'est les débats de l'Assemblée du 11 décembre. Et le ministre m'a répondu: C'est livré à 100 %. Cent pour cent, Mme la Présidente, c'est un absolu. Cent pour cent, ce n'est pas 98 %, c'est un absolu. Si c'est livré à 100 %, dans moins de six mois... On apprend, à la page 127 des réponses fournies par le ministère, qu'il y a des palais de justice «qui présentent – et je cite – une solution temporaire et un échéancier de réalisation à long terme. Le palais de justice de Cowansville et la chambre de la jeunesse de Montréal sont dans ce groupe.» Est-ce que le ministre peut nous donner une meilleure idée de ce qu'il entend lorsqu'il dit une réalisation à long terme? C'est quoi, le long terme?

M. Bégin: Bien, vous comprendrez, Mme la Présidente, que c'est très facile de répondre à cette question en disant que le palais de justice de Cowansville ayant été vidé de son contenu par l'administration précédente et n'ayant pas encore reconstruit le palais de justice, il est évident qu'on ne peut donner, dans ce palais, les services dont il s'agit. La solution que j'ai trouvée, quand je suis arrivé au ministère, en visitant Cowansville, c'est l'installation, dans trois endroits différents sur le territoire, des locaux de la Justice. Donc, on a pris la situation telle qu'elle était et, tant que les travaux ne seront pas complétés, vous comprendrez qu'on ne peut pas avoir de solution permanente. Donc, on doit avoir une solution temporaire.

Il en est de même pour le palais de justice de la jeunesse à Montréal. Les travaux de 30 000 000 $ sont en voie de réalisation. Il est bien sûr que, pendant qu'on fait les travaux, il y a des solutions temporaires qui sont trouvées, mais, quand les travaux seront terminés, vous pouvez être assuré qu'il y aura ce qu'il faut. Quant au reste, partout, et je suis très fier de le dire, à travers tout le Québec – comme je m'y étais engagé lorsque je m'étais adressé au groupe de femmes, un 8 décembre, devant cette Assemblée nationale – oui, partout au Québec, il y a un endroit où les victimes d'agression peuvent attendre et être aidées avant de se présenter devant la cour. Et ça m'apparaît une solution extrêmement heureuse. Bien sûr que ce n'est pas, dans certains cas, le grand luxe. Il a fallu prendre sur d'autres locaux, il a fallu réaménager ça. On avait des sommes relativement modestes à dépenser. Mais partout, maintenant, au Québec, les victimes d'actes criminels attendent dans un endroit qui leur est réservé, à l'abri des regards de leur agresseur, et elles sont souvent aidées par des consoeurs, des amies qui les aident vraiment dans la démarche qu'elles ont à suivre. Alors, je suis très fier de dire ça, Mme la Présidente, et de dire à mon collègue que, oui, c'est réalisé à 100 %.

La Présidente (Mme Signori): Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Chomedey?

M. Mulcair: Sauf pour dire que, si les mathématiques du ministre, en ce qui concerne la supputation des sommes, sont les mêmes que lorsqu'il fait le calcul d'un pourcentage, on risque effectivement d'avoir des problèmes budgétaires dans son ministère.

La Présidente (Mme Signori): Alors, je vais laisser maintenant la parole au député de Saint-Jean pour quelques minutes.


Rapport Coutu sur l'administration de la justice en milieu autochtone

M. Paquin: O.K. Alors, par moments, j'avais l'impression qu'on avait la même liste de questions. Alors, je vais continuer où vous étiez rendu. Il y a la question de la cour itinérante, notamment dans le Nord du Québec. Ça pose des problèmes particuliers de locaux. Vous pourriez nous en parler un peu?

M. Bégin: Le rapport Coutu, le rapport sur ce qui se passe, la justice dans le Nord, énonce qu'il y a des difficultés particulières à cet endroit. Plus particulièrement, les femmes autochtones m'ont fait parvenir, par Mme Kistabish, une lettre à l'effet qu'elles étaient d'accord avec les voies de solution proposées dans le rapport Coutu, mais elles soulevaient quand même certaines inquiétudes relativement à des situations où les femmes violentées dans la communauté se retrouvaient impliquées à aller devant le tribunal. On demandait qu'on aménage des manières particulières pour tenir compte de ça, sans spécifier en quoi consistaient ces manières.

Je dois vous dire que nous avons étudié attentivement le rapport Coutu et il est évident que dans une période de temps relativement moyenne, peut-être trois ou quatre ans, on sera en mesure d'implanter des solutions et aussi une justice en milieu autochtone qui soit satisfaisante. Mais ça va se faire sur un certain nombre d'années. Les budgets sont extrêmement modestes, ce que nous pouvons investir, puis, en tout cas... Et je pense qu'on sera en mesure de fournir les locaux en question. Par contre, on peut se demander si c'est seulement dans les milieux autochtones ou si vous pensez en milieu inuit que le problème se pose, là. Je n'ai peut-être pas saisi adéquatement votre question.

La Présidente (Mme Signori): M. le député de Saint-Jean, si vous avez d'autres questions, il est 18 h 15, vous pourrez procéder après la reprise des travaux.

M. Paquin: Alors, je reprendrai aux mots «les deux». Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Signori): Nous allons suspendre les travaux jusqu'à 20 heures et je vais demander qu'on verrouille la salle pour ne pas avoir à transporter nos documents.

(Suspension de la séance à 18 h 16)

(Reprise à 20 h 8)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): S'il vous plaît, nous reprenons nos travaux. Alors, je rappelle le mandat de la commission qui est de poursuivre l'étude des crédits budgétaires concernant le ministère de la Justice pour l'année 1996-1997. Je vous rappelle qu'il reste deux heures sur l'enveloppe de sept heures consacrée pour l'étude de ces crédits.

Compte tenu qu'il est 20 h 8, est-ce que vous convenez que nous poursuivions jusqu'à 22 h 8?

M. Mulcair: Pas de problème.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien, messieurs, madame. Alors, je redonnerais la parole à M. le député de Saint-Jean pour qu'il puisse compléter son intervention interrompue à 18 h 15.

M. Paquin: Alors, je répondais à la question du ministre en disant que c'étaient les deux, dans le sens que – je pense que c'est peut-être bon de répéter ce que c'était, les deux – c'était la situation de la cour itinérante dans les régions nordiques, vous m'aviez demandé: Est-ce que c'étaient les Inuit ou les communautés autochtones? C'est l'ensemble de ces dossiers-là.

Vous savez, actuellement dans les communautés autochtones au Québec, il y a de la détresse, il y a des formes de... il y a des situations extrêmement pénibles. On pense au taux de suicide chez les jeunes de moins de 15 ans: c'est un sur cinq. Ça n'a pas de bon sens. Et il y a toutes sortes de situations de violence et tout ça. C'est des petites villages et ils vivent des problématiques énormes. Je pense qu'effectivement c'est un sujet sur lequel, moi personnellement, j'ai une préoccupation importante.

(20 h 10)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: Merci, M. le Président. Comme je disais tout à l'heure, bien sûr que si on englobe à la fois les autochtones et les Inuit, dans l'ensemble, la problématique est semblable. Il y a des gros, gros, gros problèmes, effectivement, comme ceux que vous venez de soulever, mais il y a aussi, comme je disais, celui des femmes. Et, en matière de justice autochtone, elles nous ont demandé qu'on puisse, oui, introduire la justice blanche, mais en tenant compte de particularités propres à ces communautés-là. Elles ne nous ont pas dit exactement de quelle manière, mais, si vous vous rappelez quand on a dévoilé la police de la violence conjugale, on avait fait état de cette mesure-là.

Je voudrais, autant que possible cette année, commencer à appliquer dans le milieu autochtone le rapport Coutu, en partie avec des ressources relativement limitées, au départ, mais cette préoccupation concernant les femmes va nous amener à aller voir d'un peu plus près de quelle façon elles voudraient qu'on travaille. Parce qu'elles nous ont dit de ne pas faire comme on fait pour tout le reste de la justice, mais elles ne nous ont pas dit comment le faire maintenant. Alors, je pense que, cette année, ce serait ça que serait l'ouvrage à accomplir et, l'an prochain, commencer de manière plus concrète parce qu'on aura un budget qui nous permettra d'y aller. Cette année, malheureusement, au moment où on a reçu le rapport, le temps de faire son étude pour voir combien ça pouvait impliquer, on n'était pas en mesure de l'introduire à l'intérieur de notre budget.

M. Paquin: En tout cas, c'est un dossier sur lequel je compte vous questionner périodiquement, M. le ministre.

M. Bégin: Ça me fait plaisir.

M. Paquin: Sur la question, justement, de la violence conjugale et de la violence faite aux femmes, la violence faite aux enfants, on a abordé plus tôt, le député de Chomedey aussi, la question des salles attenantes où les uns peuvent attendre sans être en présence des accusés et tout ça, alors je ne reviendrai pas là-dessus.


Lutte contre la violence conjugale

Par contre, il y avait aussi un dossier concernant la politique gouvernementale relative à la lutte contre la violence conjugale et familiale. Qu'est-ce qui a été fait, d'une manière concrète, dans ce dossier, dans le cadre du processus engagé? Et puis aussi est-ce que la ligne SOS violence conjugale est toujours là? Puis, si oui, il y a eu quel volume d'appels, l'année passée, et qu'est-ce qu'on a comme projection pour l'année qui vient?

M. Bégin: Vous vous rappellerez, quand on a fait la déclaration, je crois que nous étions cinq ministres à dévoiler la politique gouvernementale en matière de violence conjugale. Il y a plusieurs facettes – et c'est pour ça qu'il y avait autant de ministres – à ce problème et chacun des ministères avait des propositions concrètes à proposer. En ce qui concerne le ministère de la Justice, c'était particulièrement cette question des salles d'attente et, d'autre part, cette possibilité que des mesures soient prises pour faire connaître à l'avance aux personnes qui avaient été violentées par une personne que celle-ci était sur le point d'être libérée, et, justement, de ce fait, pour qu'elle sache que la personne pourrait être dans le voisinage, et aussi connaître les conditions qui ont pu être imposées pour la libération de la personne, pour ne pas qu'elle vienne dans le voisinage si ça lui a été interdit ou si elle a le droit ou pas de faire certaines choses. Alors, c'est certaines de ces mesures-là.

En ce qui concerne la ligne SOS violence conjugale, il y a eu, si ma mémoire est bonne, une subvention à l'organisme, puis le coût de la ligne, de 220 700 $, qui a été versé à cette mesure. Maintenant, je ne serais pas en mesure de vous donner l'état détaillé, à moins que... Alors, sur le détail de ce montant-là, je ne pourrais pas vous dire de quelle façon ça a été investi, sauf, justement, dans la ligne. Mais, quel est son rendement, son augmentation, je n'ai pas de rapport spécifique à vous donner là-dessus.

Ensuite, il y aurait eu, au cours de l'année, 23 700 appels de femmes victimes de violence conjugale, au cours de l'année 1995-1996. C'est quand même énorme. Par ailleurs, l'organisme comme tel a pu bénéficier d'un local qui est au palais de justice de Montréal, pour le projet qui s'appelle Communic-action. Et ça, c'est en collaboration avec le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal. Ça permet, comme vous le savez, d'informer la victime, comme je disais tantôt, sur les conditions de remise en liberté des prévenus.

M. Paquin: C'est cette ligne-là qui s'appelle Communic-action?

M. Bégin: Bien, c'est un projet plus spécifique. C'est parce que c'est un ensemble de mesures qui se relient les unes aux autres. Et ça, c'est, en fait, aussi avec la Sécurité publique.

Quand une personne est libérée, qu'elle était accusée – admettons que c'était une personne qui avait commis un crime de violence à l'égard d'une femme – au moment d'être libérée, on va informer cette dame que la personne en question va être libérée, pour qu'elle se comporte peut-être un peu de manière différente, qu'elle soit plus attentive aux allées et venues des personnes dans son voisinage, surtout si cette personne qui a été violente à son égard est interdite dans un voisinage prédéterminé, pour qu'elle puisse, si elle voit la personne dans ce périmètre-là, dénoncer à la police qu'il y a un manquement aux conditions de libération de la personne.

Alors, c'est autant de mesures qui s'additionnent les unes aux autres. Certaines sont préventives, d'autres sont curatives. Alors, ça dépend. Mais, pour le téléphone, vous voyez, là, 23 700 appels de victimes de violence conjugale dans une année, ça montre à quel point il y a de la détresse dans plusieurs milieux.


Considérations budgétaires

M. Paquin: Dans un autre ordre d'idées mais dans le même programme, vous vous souviendrez que dans mes remarques préliminaires j'avais mentionné qu'on était conscient, tout le monde, que, dans ce ministère-là, il y a beaucoup de personnel et, évidemment, les compressions sont un peu plus difficiles, peut-être, à exercer qu'ailleurs. Il reste qu'il y avait de prévu des coupures à l'aide juridique qui n'ont pas été réalisées. Notamment, dans les réponses aux questions de l'opposition – je pense que c'est la question 26: Détail des coupures dans le réseau de l'aide juridique. L'objectif de compression fixé à la Commission des services juridiques pour l'exercice financier 1995-1996 fut de 11 700 000 $ – donc, c'est des sommes vraiment importantes – cet objectif s'appuyait sur la réforme de l'aide juridique contenue dans la Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique présentée au printemps. Comme le projet de loi 87 n'a pas été adopté par l'Assemblée nationale, il n'y a donc pas eu de coupures dans le réseau.

Il y a peut-être d'autres endroits où il y a, comme ça, des coupures qui n'ont pas été réalisées. Alors, je voulais savoir quelles conséquences ça a eu, l'année passée, sur l'ensemble des activités, le fait qu'il y a des choses qui n'ont pas été réalisées, et si ça a des répercussions récurrentes cette année, d'une façon ou d'une autre, ou des effets pernicieux sur la situation de cette année au niveau des crédits.

M. Bégin: Au niveau de l'aide juridique, le projet de loi 87, vous vous rappellerez, a été présenté au cours du printemps 1995. Nous avions anticipé qu'il serait adopté avant le mois de juin, ce qui faisait en sorte qu'on pouvait compter environ sur neuf douzièmes d'année, en termes de mesures. D'autre part, vous savez également que, même si on adopte un projet de loi en cours d'année, on n'a certainement pas douze douzièmes, on vient de le voir par l'aide juridique, mais il y a aussi des mesures qui s'implantent au fur et à mesure que le temps avance. Même si on adoptait le projet de loi au mois de juin, par exemple, il y a certains règlements de publication qui peuvent prendre 60 jours, de sorte que ce n'est pas avant cette période additionnelle que le règlement entre en vigueur, donc que les effets se font sentir. Alors, on avait escompté, vous voyez, 11 000 000 $. Le projet de loi n'a pas pu être adopté, ce qui fait que ces économies-là n'ont pu être faites. Alors, elles ont été absorbées, pour la plus grande partie, par mes collègues dans d'autres ministères ou encore un peu à la Justice par d'autres mesures, mais, essentiellement, on doit dire qu'elles n'ont pas été réalisées. Par contre, toutes les autres mesures l'ont été. C'est donc mes collègues qui ont dû faire un effort additionnel pour être capables de rencontrer les buts qu'on s'était fixés au début de l'année.

M. Paquin: Est-ce que c'étaient des contributions des autres collègues avec, comme on dit dans certain milieux, des considérations futures? C'est-à-dire que la Justice, cette année, écoperait en proportion?

M. Bégin: Ha, ha, ha! Non, ce n'était pas de la nature de l'échange au hockey. Non. Cependant, ça n'a pas d'effet pour le futur. Mais vous comprenez que, cette année, le budget prévoit une réduction des dépenses au niveau de l'aide juridique et nous verrons plus tard de quel ordre elle se situe. Prochainement, il y aura le dépôt d'un projet de loi qui sera plus explicite – je m'excuse de ne pas répondre entièrement à votre question – mais il y aura des compressions à effectuer. Je pense qu'il y aura surtout, au niveau de l'aide juridique, un réaménagement extrêmement intéressant et positif et qui va permettre à plus de monde de pouvoir bénéficier de l'aide juridique et qui va faire en sorte que la couverture soit vraiment plus intéressante.

M. Paquin: Ça, comme on dit dans d'autres milieux: Prochainement sur votre écran.

M. Bégin: Ha, ha, ha!

(20 h 20)

M. Paquin: Mais il reste qu'au niveau de la hauteur...

M. Bégin: Non, ça n'a pas d'effets récurrents, comme vous me l'avez demandé tout à l'heure. Cette année, la mesure sera adoptée. Bien sûr qu'une fois adoptée cette mesure-là a des effets récurrents, au fur et à mesure des années, et ça s'échelonne sur une période de trois ans avant que le plein effet ne soit atteint. Mais, après ça, c'est sur une base régulière.

M. Paquin: Aux crédits, est-ce que la hauteur de cette compression-là figure ou pas pour cette année?

M. Bégin: C'est-à-dire que, lorsqu'on regarde les crédits, il est difficile de savoir exactement de quoi il est question parce que, si vous regardez, vous verrez que les crédits sont plus élevés, cette année, que ceux qui étaient là l'an dernier. Il faut savoir cependant que l'aide juridique a ceci de particulier, jusqu'à présent. C'est que, d'une part, il y a une marge de crédit qui permet d'amortir certaines dépenses qui autrement ne seraient pas payables parce que les comptes ont la caractéristique d'arriver à la fin du mandat exercé par l'avocat et, donc, l'année où on le récolte, ce n'est pas l'année budgétaire où ça a été dépensé, de sorte qu'il y a une boule qui roule et qui fait en sorte qu'il y a des montants importants qui sont projetés dans le futur. D'autre part, on a eu aussi une augmentation substantielle des sommes d'argent dépensées à l'aide juridique qui ont été comblées, y compris cette année, par le biais d'apport de finances pour combler le déficit à l'aide juridique. Il était, en moyenne, entre 7 000 000 $ et 10 000 000 $ par année de plus que ce qui était anticipé. Alors, c'est pour ça que les livres de crédits, sans être incorrects, à cause de l'injection de sommes d'argent pour venir combler le déficit, indique un montant supérieur, et on n'est pas nécessairement capable de dire exactement quels sont les chiffres qui vont être les vrais chiffres à la fin de l'année.

M. Paquin: Merci.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, j'aimerais référer le ministre au volume qui répond à nos demandes de renseignements généraux, à la page 15.

M. Bégin: Comment ça que j'ai deux particuliers?

Une voix: C'est le mien que vous avez, M. le ministre.

M. Bégin: Ha, ha, ha! O.K.

M. Mulcair: À la page 15, on trouve une référence, M. le Président, à un sondage téléphonique, au coût de 2 000 $, demandé auprès du Groupe Léger & Léger. C'est le titre qui ne nous permet pas de savoir exactement quel avait été le sujet. Le titre, c'est tout simplement «Perception de certaines dimensions de l'action du ministère de la Justice». C'était assez opaque comme phraséologie. Alors, on aurait voulu savoir si le ministre pourrait nous donner un petit peu plus de renseignements sur le sujet plus précis.

M. Bégin: Avec plaisir. Je vais remettre aux membres de la commission le questionnaire et le résultat du sondage. Alors, je pense que...

Une voix: Pas le résultat, non.

M. Bégin: Vous allez avoir le questionnaire, plutôt. Excusez-moi.

M. Mulcair: Je remercie beaucoup le ministre pour sa bienveillante collaboration. Maintenant, à la page 46 du même volume, on apprend que Marie-Claude Pelletier...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Un instant, M. le député.

M. Mulcair: Pardon, M. le Président.


Document déposé

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, M. le ministre, j'accepte le dépôt.

M. Mulcair: À la page 46... 45, pardon, on a Marie-Claude Pelletier – dernier item à la page 45 – qui fait la rédaction ou correction et mise en forme des discours du ministre de la Justice. Est-ce que le ministre peut nous donner un petit peu plus de détails là-dessus? Et pourquoi c'est nécessaire d'aller en... Oui? Pardon. Je vais tenter... À la page 45, dernier item, le nom de la professionnelle, c'est Marie-Claude Pelletier; l'objet de son contrat, c'est la rédaction ou correction et mise en forme des discours du ministre de la Justice, pour la somme de 10 000 $. Est-ce qu'il peut nous expliquer qu'est-ce que fait Mme Pelletier justement avec ses discours?

M. Bégin: Dans le document, on retrouve un montant de 10 000 $...

M. Mulcair: Oui.

M. Bégin: Je vous avoue que c'est peut-être une projection qui avait été faite, parce que les montants qui ont été dépensés sont de l'ordre de 800 $.

M. Mulcair: Oui, d'accord. Ensuite, à la page 46 – c'est peut-être de la projection encore une fois, on va le savoir dans trois secondes – Robert Pelletier Communications, services-conseils en communications publiques, pour la somme de 9 900 $. Est-ce que le ministre peut nous éclairer sur le détail de ce travail?

M. Bégin: Vous n'êtes pas sans savoir que plusieurs projets de loi ont été préparés pour être présentés. J'ai senti le besoin d'avoir quelqu'un qui pourrait préparer de quelle manière ces projets pourraient être, comment je dirais, véhiculés à travers le public, de manière à ce qu'ils soient bien connus, bien perçus, bien compris par l'ensemble de la population, et c'est le travail que l'on retrouve à cet endroit-là.

M. Mulcair: O.K. Est-ce que Robert Pelletier Communications est une personne morale?

M. Bégin: Je connais la personne physique. Robert Pelletier Communications, je ne peux pas vous répondre si c'est incorporé ou non. Je présume, mais je ne le sais pas.

M. Mulcair: Est-ce que c'est quelqu'un de Québec?

M. Bégin: Oui. Pas de Montréal ni de Laval.

M. Mulcair: Ni du Lac-Saint-Jean.

M. Bégin: Ni du Lac-Saint-Jean.

M. Mulcair: Ça coûterait 28 000 $ juste en hôtel pour...

M. Bégin: C'est modeste, 9 900 $.

M. Mulcair: Ensuite, si on tourne vers la page 61...

M. Bégin: Oui?

M. Mulcair: Le ministre se rappelle peut-être que, même si c'était avant notre temps comme élus, le député et ministre, à l'époque, Jean Leclerc, qui représentait la région de Québec, le député de Taschereau, si ma mémoire est bonne, avait annoncé quelque chose qu'il avait appelé «un train de petites mesures», voilà quelques années, pour réduire le plus possible les dépenses, justement, comme les distributeurs d'eau que l'on retrouve ici pour une somme d'au-delà de 30 000 $: 28 900 $ au ministère, 3 700 $ au Fonds des registres. Ça va peut-être surprendre ceux et celles qui ont oublié, mais ce fameux train de petites mesures avait réussi à réaliser des économies de l'ordre de 17 000 000 $ dans tous les ministères et organismes, à l'époque. Ceux qui voulaient autre chose que de l'eau du robinet étaient invités à se cotiser, casquer et le payer. Est-ce que le ministre trouve que c'est une dépense nécessaire des sommes publiques, d'avoir des distributeurs d'eau pour au-delà de 30 000 $?

M. Bégin: Je peux quasiment vous dire avec certitude que je n'en ai acheté aucun et qu'ils étaient tous là quand je suis arrivé. Il y a 72 bureaux d'enregistrement, 58 palais de justice. Si je regarde l'état des finances publiques quand on est arrivés, ce n'est certainement pas des bonnes mesures qui avaient été adoptées. On avait peut-être touché les petites affaires, mais on avait surtout oublié de toucher aux grosses affaires, qui ont fait 5 700 000 000 $ de déficit.

M. Mulcair: Le ministre avait raison lorsqu'il a dit, tout à l'heure, que lorsqu'on met bout à bout autant de mesures ça finit par avoir des effets importants, et il a raison de souligner que, d'une manière générale, les finances du Québec sont dans un état très difficile, voire lamentable, mais pas depuis...

M. Bégin: 5 000 000 000 $.

M. Mulcair: ...la dernière... Oui, 5 000 000 000 $. On va voir ça avec le budget qui s'en vient bientôt. Mais ce que je suis en train de lui demander, ce n'est pas qu'est-ce qui était là avant, mais ce qu'il fait maintenant. Parce qu'il va falloir un jour ou l'autre, M. le Président, que ce pauvre gouvernement... Je comprends bien que ce n'est pas un chantier, parce que les chantiers sont pour le mois de novembre. Quand il n'y aura plus de vrais chantiers, il y aura des chantiers... Regardez le centre-ville de Montréal, il n'y a pas une seule grue en train de construire quoi que ce soit. C'est la seule ville en Amérique du Nord où il n'y a pas de construction, pas d'activité économique, et c'est à cause de l'option politique visant la séparation du Québec d'avec le reste du Canada que c'est dans cet état lamentable là. Mais, vous savez, les chantiers annoncés pour le mois de novembre, ce gouvernement va être dans sa troisième année au pouvoir et il va encore être en train de chanter la chanson de l'humiliation, et de ci, et de ça, et il n'y aura rien qui va être fait, parce que, jusque-là, c'est jusqu'au mois de novembre que les vraies décisions ont été remises. Alors, d'ici là, trêve de leçons pour le passé.

Regardons ce qui est écrit à la page 61 du volume qui traite des réponses du gouvernement à nos demandes de renseignements généraux. Je demande au ministre de la Justice... Je repose ma question. Les leçons de morale sur le passé, il n'était pas là, moi non plus. Je les tiens pour dites, puis je ne dis pas qu'il a nécessairement tort sur l'ensemble, mais je veux savoir ce que lui, aujourd'hui, 29 avril 1996, comme ministre de la Justice du Québec... Est-ce que, lui, il trouve que c'est une dépense valable de l'argent du public alors que si les gens veulent autre chose que l'eau du robinet, bien, c'est libre à eux de le faire? Mais ce n'est pas les distributeurs qui coûtent ici, c'est évidemment l'eau qu'on prend à contrat, qui est en bouteille. Est-ce que le ministre trouve que c'est une meilleure dépense possible de l'argent du public?

M. Bégin: Je répondrai par une question: Est-ce que le député voudrait qu'on coupe l'eau aux fonctionnaires?

M. Mulcair: Je n'ai pas... Je veux bien que...

M. Bégin: Alors que vous êtes en train de vous verser de l'eau.

(20 h 30)

M. Mulcair: M. le Président, je veux bien que le ministre réponde par une question, mais encore faudrait-il qu'on puisse comprendre c'était quoi, sa question. Est-ce que je peux demander, par votre entremise, M. le Président, que le ministre répète sa question? Je l'ai manquée.

M. Bégin: J'ai dit: Est-ce que vous auriez l'intention qu'on coupe l'eau aux fonctionnaires, dont celle que vous êtes en train de boire ici?

M. Mulcair: L'eau que je suis en train de boire, M. le ministre, si vous voulez venir avec moi en arrière, on va vous montrer que ça vient du robinet et que ça n'a pas coûté une cenne aux contribuables.

M. Bégin: Ah oui! Vous avez pris la peine de demander. C'est sage.

M. Mulcair: Si vous voulez venir voir, ça ressemble à une de ces boules de neige quand on achète... les trucs de souvenirs qu'on achète dans...

M. Bégin: J'espère qu'ils sont moins gros un peu, là.

M. Mulcair: Je vous assure que c'est de l'eau du robinet. Mais vous avez échappé une deuxième fois à toute tentative de vous forcer à répondre à la question, puis on en prend bonne note comme toutes les autres questions auxquelles vous avez refusé de répondre.

La même page nous parle d'une somme totale de l'ordre de 15 000 $ pour des cellulaires et téléavertisseurs. C'est ça, 14 800 $ pour des téléphones et téléavertisseurs...

M. Bégin: Ah! Les deux ensemble.

M. Mulcair: ...au sein du ministère et un autre 2 000 $ en cellulaires au Fonds des registres. Est-ce que le ministre peut nous dire combien de personnes ont des cellulaires dans les diverses directions générales ainsi qu'au Fonds des registres?

M. Bégin: Je peux essayer de vous donner la réponse dans quelques minutes, mais je ne l'ai vraiment pas.

M. Mulcair: D'accord. Merci. Est-ce que le ministre peut nous expliquer, toujours à la page 61, la dépense de 356 000 $ en mobilier de bureau alors que les effectifs sont en train de diminuer? Il s'agit, pour qu'on se comprenne, de la ligne Mobilier de bureau, ministère 286 600 $, Fonds des registres 70 200 $.

M. Bégin: Écoutez, je ne peux pas vous répondre, honnêtement. Je n'ai pas le détail de ce montant-là. Il y a 4 000 fonctionnaires répartis sur le territoire, au ministère de la Justice. Ça m'apparaît être un montant relativement modeste. Je le verrais plutôt au compte, à peu près, des réparations de meubles, là, quand on regarde le nombre. Je pourrai vous fournir la liste, mais, pour le moment, je ne peux pas vous donner le détail.

M. Mulcair: On attend les détails, M. le Président, avec beaucoup d'intérêt.

M. Bégin: On me souligne que ça inclut les nouveaux palais de justice, la magistrature, les changements, nominations de juges... Et pour le mobilier, Fonds des registres, bien, ça, c'est les changements qui se sont produits à la suite de l'adoption des lois et des réorganisations qui se sont faites à la suite de la fusion des deux directions.

M. Mulcair: Est-ce que c'est pour des nouveaux meubles à Québec?

M. Bégin: Malheureusement pour vous, non. Il n'y a pas eu d'achat de nouveaux meubles.

M. Mulcair: Dans aucune des catégories que vous venez de nommer, ni pour...

M. Bégin: Moi, je veux vous dire qu'à mon cabinet on a juste les bons vieux meubles qui craquent, qu'on avait avant. On a juste pris une table qui était dans le bureau d'une des sous-ministres qui est partie et on a remplacé la table de conférence qu'il y avait dans mon bureau par celle-là. On a pris une table de pin qui était dans un autre bureau; on l'a mise là. On a pris des vieilles affaires, on n'a rien acheté; on n'a pas peinturé, on a laissé les murs avec les taches qu'il y avait dessus. On n'a rien fait. Pas de dépenses! Pas de dépenses!

M. Mulcair: Quelqu'un a acheté pour 356 000 $ de mobilier de bureau.

M. Bégin: Oui, mais pour 4 000 personnes ça m'apparaît relativement modeste. Relativement modeste.

M. Mulcair: On va attendre les coupures d'aide juridique puis on va dire ça aux groupes communautaires.

Pour ce qui est des congrès, colloques et perfectionnement, dans la colonne Ministère, directions générales, et la colonne Fonds des registres, on trouve un total de 1 077 100 $ en frais de colloques et congrès. Ça, c'est une augmentation de 18 % par rapport à l'an dernier. Ouf! On peut enfin arrêter de parler de l'ancien gouvernement, on peut regarder juste l'an dernier. Alors, est-ce que le ministre peut nous expliquer quel motif d'État a fait en sorte que, dans ces temps de compressions budgétaires, son ministère ait augmenté de 18 % ses dépenses en frais de colloques et congrès de toutes sortes?

M. Bégin: Je peux vous dire, M. le Président, que la formation est un élément important de la vie démocratique et de la vie d'un ministère. Et, entre autres choses, cette année, ça faisait trois ans que les procureurs de la couronne n'avaient pas eu l'occasion de se réunir dans un congrès de formation et j'ai cru qu'il était opportun d'autoriser cette année, justement, la tenue d'un tel colloque qui n'avait pas eu lieu depuis trois ans. Et, par l'affluence qui était là et l'enthousiasme qui animait les gens lorsque je suis allé les voir, je suis tout à fait persuadé que ç'a été un heureux investissement et un très grand investissement pour les procureurs de la couronne. Quant au reste, c'est le fonctionnement général. Alors, vous avez cette augmentation dont vous parlez, sans que je vous donne le détail par coeur de chacun des coûts.

Ensuite, il y a, à l'intérieur de ça, dans ces congrès, colloques et perfectionnement de 984 000 $, je vous fais mention qu'il y a, pour la magistrature, 447 500 $.

M. Mulcair: On remarque, M. le Président, à la page 79, que ça a coûté, l'année dernière, 15 000 $ pour faire la revue de presse du ministre. Ça, ça représente une augmentation de 70 % par rapport à l'an passé. Est-ce que le ministre peut nous dire les raisons de cette augmentation?

M. Bégin: Tout à fait. M. le Président, lorsque je suis arrivé, il y avait une revue de presse qui était faite et je vous dis honnêtement que, si je m'étais fié sur cette revue de presse pour m'assurer que j'étais en mesure de répondre à toutes les questions que mon collègue pouvait me poser, j'aurais été très mal pris. Alors, j'ai cru qu'il était opportun, pour avoir une revue de presse qui couvre la justice de manière satisfaisante, d'avoir peut-être un prix légèrement supérieur mais surtout d'avoir toutes les nouvelles.

Alors, cette année, je pense être en mesure, j'espère être en mesure de répondre à toutes les questions provenant d'un article de journal paru dans le journal du matin parce que j'aurai eu l'occasion de le lire moi-même.

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous dire si le fruit du travail de Communication Demo est partagé systématiquement avec d'autres ministères? Le but de ma question, c'est de savoir si on est en train... Parce qu'il y a d'autres ministères qui dépensent des sommes semblables pour faire leur propre revue de presse interne. Il y a aussi une revue de presse dans presque tous les organismes du gouvernement du Québec qui sont d'une certaine taille. Est-ce qu'il y a une sorte de partage de cette information qui se fait, à sa connaissance?

M. Bégin: La revue de presse qui est faite pour le ministère est spécifique au ministère.

M. Mulcair: Oui.

M. Bégin: Comme vous le savez, il y a L'Argus qui est publié pour l'ensemble des ministères, mais l'aspect justice n'est généralement pas couvert et, quand il l'est, c'est vraiment dans ses grands titres. Et la justice a ceci de particulier, qu'à chaque jour il peut surgir une nouvelle importante, qui implique des décisions à prendre, et il est fondamental pour la Justice de savoir exactement, au jour le jour, tout ce qui se passe en matière de justice. Chaque procureur de la couronne qui est sur le territoire, chaque police étendue n'importe où sur le territoire peut avoir une influence primordiale dans ce qui se passe ailleurs et il faut être en mesure d'être informé rapidement pour réagir.

M. Mulcair: Donc, la revue de presse est partagée avec les services de police et partagée avec le bureau des procureurs généraux, des procureurs de la couronne.

M. Bégin: Non. Ce que je veux dire, c'est que le mandat des personnes qui sont en charge de faire la revue de presse est de prendre tout ce qu'il y a de justice, mais, parfois, justice et police sont des sujets rapprochés. C'est toujours les deux côtés d'une même médaille: le policier va voir le procureur de la couronne, il y a une réaction, et c'est ça. Alors, il faut absolument connaître... C'est Justice, mais, incidemment, Sécurité publique, mais ce n'est pas partagé avec la Sécurité publique.

M. Mulcair: Ou d'autres organismes ou ministères?

M. Bégin: Non.

M. Mulcair: En tout cas, nous, on se ferait un devoir de la lire tous les jours, si le ministre voulait la partager avec l'opposition.

M. Bégin: Bon, si vous voulez partager la moitié des prix, pas de problème. On aurait les mêmes nouvelles au même moment.

M. Mulcair: Étant donné que ça coûte plus cher pour faire votre revue de presse à l'interne du ministère que ce que ça coûte ici, à l'Assemblée nationale, pour faire la revue de presse de tout, je ne pense pas que vous avez frappé le meilleur «bargain» imaginable.

Mais le prochain item, à la page 79, soulève, M. le Président, la même interrogation de notre part, car ça parle des transcriptions de chez Verbatim et, encore une fois, j'aimerais savoir s'il y a un mécanisme qui est en place, au sein du ministère... Admettons qu'un sujet comme l'actualité en fin de semaine, les histoires des combats sur la réserve de Kahnawake, s'il y avait une interview et que ça intéresse le ministre de la Justice, il fait venir la transcription de ça par son service compétent, ça coûte 83 $, vu la longueur, est-ce qu'il y a un dispositif en place pour que le gouvernement ne paie pas deux fois? Si son collègue, M. Perreault, à la Sécurité publique désire la même transcription, est-ce que la compagnie est responsable d'informer ou si vous le demandez, ça va vous coûter 83 $, et, si le ministère de la Sécurité publique demande la même chose, on repaie? Comment ça fonctionne?

M. Bégin: À ce que je sache, aujourd'hui, je ne pourrais pas vous dire qu'effectivement il peut y avoir une déduction du montant parce qu'un autre ministère ou organisme l'aurait demandé; je ne crois pas. Alors, c'est fait au cas par cas, si le besoin est ressenti d'avoir un bout, un passage d'une déclaration, selon les besoins, mais je ne crois pas qu'on puisse bénéficier d'un avantage comme celui dont vous venez de parler.

M. Mulcair: Parce que c'est un très bon service et tout le monde qui a déjà...

M. Bégin: C'est essentiel.

(20 h 40)

M. Mulcair: Oh! oui, tout à fait. Je suis tout à fait d'accord avec l'idée, mais je me suis dit... Ça me rappelle un peu les discussions qui ont eu lieu il y a quelques années. Il y a eu des tentatives de mettre au moins en communication les services de recherche et les services d'affaires juridiques des divers ministères parce qu'on avait constaté que, souvent, un même sujet pouvait être traité par des gens tout aussi compétents les uns que les autres dans divers ministères, et l'un ne savait pas que l'autre était en train de travailler le même problème.

M. Bégin: Écoutez, je n'ai pas vu les études, mais, à première vue, la gestion de ça doit coûter plus cher que l'économie que l'on fait.

M. Mulcair: On va avoir l'occasion de revenir sur les questions, justement, de cette nature-là.

M. Bégin: Là, écoutez, je vous donne une opinion, je n'ai pas fait l'étude, mais c'est mon impression. Mettez 10 ministères à 5 000 $, ça fait 50 000 $ pour gérer qui l'a eu, qui ne l'a pas eu, c'est à moi, je te l'envoie, ça coûte la moitié du prix. Juste gérer ça, ça va prendre une personne ou deux avec un bureau, un équipement. Alors, à l'oeil, je ne crois pas qu'il y ait un grand avantage à faire ça, et surtout un manque de rapidité.

M. Mulcair: Merci beaucoup pour cette réponse. Bon. Ma prochaine question concerne un autre aspect des lois qui relève du ministre de la Justice et Procureur général, M. le Président, c'est une loi quasi constitutionnelle qui est la Charte des droits.

On a eu l'occasion, à quelques reprises, de discuter avec le ministre de son appréciation de la Charte dans divers dossiers. Mais à l'égard de la liberté de la presse vis-à-vis d'une institution comme celle du Procureur général, nous, on s'est questionné lorsqu'on a constaté que le ministre avait subventionné une revue. C'était une somme de 1 500 $ qui avait été donnée. Mais ce n'est pas un ministre en train de prendre de l'argent... Il y a des fonds qui peuvent exister, mais on a de la difficulté à comprendre comment ça se fait que le ministre de la Justice et Procureur général peut décider que L ' Action nationale , qui est une revue qui reflète ses orientations personnelles politiques, peut, avec justesse, recevoir de l'argent de la part du ministre de la Justice et Procureur général. J'aimerais l'entendre là-dessus. Est-ce que le ministre trouve que c'est une dépense valable?

M. Bégin: Vous avez, dans L ' Action nationale , une revue qui, à l'occasion, a des thèmes qu'elle développe et qu'elle tente de survoler au complet. Entre autres, dans le numéro... voyons, je n'ai pas le numéro, je croyais l'avoir. Il y a eu un numéro spécial: «Projet de société», et je pense qu'à l'intérieur de ce projet de société il y a plusieurs aspects justice, il y a plusieurs aspects charte, relations, citoyens, et il m'apparaissait, sans porter de jugement sur le contenu, sa valeur, qu'il était essentiel de contribuer à la publication d'un tel numéro, et c'était en relation avec justice, charte, de façon générale, et ça m'apparaissait tout à fait pertinent.

M. Mulcair: Donc, il y a eu une demande. M. le Président, si on comprend bien, le ministre a reçu une demande de L ' Action nationale pour l'aider à subventionner un numéro spécial qui traitait de sujets qui étaient directement reliés aux domaines de son ministère.

M. Bégin: Oui.

M. Mulcair: Mais, moi, ce que j'ai trouvé intéressant, c'est que L' Action nationale , dans Le Devoir , au mois de janvier de l'année dernière, disait: Depuis la fin de la Première Guerre, la revue a brassé des idées dans 75 000 pages de textes, sans argent, sans subvention. C'est vraiment une subvention que le ministre a donnée là. On s'entend là-dessus?

M. Bégin: Je parle d'un montant de 1 500 $ pour permettre la publication d'un numéro spécial sur un sujet: «Projet de société».

M. Mulcair: C'est important. C'est une mise au point qu'on va pouvoir faire. Et on remercie le ministre pour sa réponse. Notre...

M. Boulerice: Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: Oui. Ce 1 500 $, M. le ministre, est-ce qu'il a été donné sur ce qu'on appelle le discrétionnaire du ministre?

M. Bégin: Oui.

M. Boulerice: Ah! il a été donné sur le discrétionnaire du ministre.

M. Bégin: Oui.

M. Boulerice: Donc, si je comprends bien, M. le ministre, vous avez plutôt privilégié de subventionner le foisonnement des idées, contrairement à un des prédécesseurs, libéral, de mon collègue, qui, lui, préférait subventionner les chevaux en subventionnant un club d'équitation.

M. Bégin: Ça m'apparaît tout à fait dans l'ordre.

M. Boulerice: Je vous remercie de votre réponse, M. le ministre.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Chomedey.


Aide aux justiciables (suite)


Réforme de l'aide juridique

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Notre prochain sujet concerne le programme 3, Aide aux justiciables. Au cours de l'hiver, on a vu flotter des ballons d'essai de la part du ministre, mais c'était un assez large éventail de possibilités, ça allait de la privatisation complète à l'étatisation complète, et on a bien fait, il me semble, M. le Président, de garder notre poudre sèche dans ce dossier et d'attendre d'avoir quelque chose de solide auquel s'adresser.

Au moment où on se parle, il reste une quinzaine de jours avant la date de dépôt des projets de loi si on veut que quelque chose soit adopté avant la fin de l'année, avant le mois de juin, du moins, avant la fin de la session courante. Alors, la plus récente version qu'on a reçue de la part du ministre parlait de mixité, on parlait d'un volet contributoire. Évidemment, on n'a pas le projet de loi devant nous, mais on peut quand même peut-être se permettre quelques questions générales et voir si le ministre est en mesure ou prêt à nous répondre.

La première question que nous avons pour le ministre, c'est de savoir si en rendant l'aide juridique accessible à un plus grand nombre de personnes, en d'autres mots, à des gens avec des salaires plus élevés, comme il propose de le faire, il va demander en même temps... Est-ce qu'il est possible, dans sa manière de concevoir sa loi, à l'heure actuelle, que des gens qui gagnent moins que le seuil actuel, en d'autres mots, des gens qui sont admissibles complètement à l'aide juridique aujourd'hui, avec leurs revenus, est-ce qu'il est possible que même ces gens-là soient appelés à contribuer selon la formule retenue par le ministre?

M. Bégin: Non.

M. Mulcair: Ils ne seront jamais appelés à contribuer. Je remercie le ministre pour sa réponse claire. En ce qui concerne les services qui vont être offerts, il me semble qu'on peut tous s'entendre que, si on met moins d'argent là-dedans, il va falloir couper les services. On a eu différents rapports, différentes approches, différentes analyses qui ont été faites. Un rapport que nous avons trouvé particulièrement intéressant, M. le Président, c'était le rapport Rabeau qui avait proposé, par exemple, un plafond maximum par avocat et la possibilité d'avoir des tarifs forfaitaires pour certains services. Est-ce que le ministre va retenir ces deux idées qui étaient contenues dans le rapport Rabeau?

M. Bégin: M. le Président, je voudrais vous souligner, d'une part, comme je l'ai mentionné plus tôt, que la décision du Conseil des ministres n'est pas encore prise. Donc, j'ai fait des recommandations et je ne voudrais pas, par des réponses pièce par pièce, arriver à reconstituer l'ensemble du casse-tête. C'est très habile de vouloir le faire, mais je pense qu'on doit résister à cette tentation. Je voudrais juste, cependant, faire remarquer que devant le comité Schabas le Barreau a renoncé à invoquer le contenu et les conclusions du rapport Rabeau.

M. Mulcair: Est-ce que le ministre se souvient que le rapport Rabeau avait, entre autres, parlé de l'opportunité de modifier le Code criminel pour réduire certaines étapes ou rendre certains processus plus rapides, un peu à l'instar de ce que le ministre est en train de proposer de faire en matière civile avec le projet de loi qu'il nous a déposé la semaine dernière? Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a rencontré son homologue fédéral, qui est responsable de l'application du Code criminel, du moins pour ce qui est de sa présence devant l'autorité législative compétente, le Parlement fédéral du Canada?

(20 h 50)

M. Bégin: J'aurai l'occasion, M. le Président, de rencontrer mon homologue le 7 et le 8 mai, à Ottawa, dans le cadre d'une conférence fédérale-provinciale qui devait avoir lieu plus tôt. Je ne me rappelle pas de la date, mais je pense que c'était en février. Ça a été reporté à la demande du gouvernement fédéral. Donc, tout ce qu'on avait pu anticiper faire à ce moment-là a été reporté au mois de mai. Cependant, en cours d'année, à plusieurs reprises, j'ai fait des représentations à mon homologue pour des amendements à apporter au Code criminel. Je n'ai pas une liste complète mais ces mesures visent, à l'occasion, à réduire la procédure, à la simplifier, à la mieux aménager et, dans d'autres cas, à faire en sorte que certaines dispositions du Code criminel soient adoptées ou modifiées.

Par exemple, j'avais demandé qu'on crée une infraction précise et spécifique pour l'excision et l'infibulation. Ç'a été demandé en novembre 1994. J'ai pris connaissance du fait que le gouvernement fédéral avait l'intention d'en faire effectivement un crime spécifique. J'en suis particulièrement content. D'autres demandes ont été faites dans ce sens-là et j'aurai l'occasion de les présenter formellement lors de la rencontre fédérale-provinciale, dans 15 jours. Dans 15 jours, c'est ça? Dans 15 jours.

M. Mulcair: J'ai pris bonne note et je ne veux pas faire perdre le temps de la commission en lui demandant de dévoiler des détails de quelque chose qui est toujours en chantier, de toute évidence, mais est-ce que le ministre peut nous dire si lui et ses proches collaborateurs ont soupesé les impacts de la réduction du nombre de recours, par exemple, CSST, SAAQ, au nouveau Tribunal administratif du Québec et est-ce que les deux lois vont cheminer en même temps, Tribunal administratif du Québec et aide juridique?

M. Bégin: Je vous avoue ne pas bien saisir le sens de votre question. Je peux avoir une compréhension, mais je ne suis pas sûr que ça soit la bonne. Alors, pouvez-vous, s'il vous plaît, être plus explicite?

M. Mulcair: M. le Président, notre question vise à cerner la chose suivante. Lorsqu'on a étudié ensemble, en commission parlementaire, au cours de l'hiver, les propositions pour un nouveau tribunal administratif du Québec, il est apparu évident qu'en réduisant un certain nombre de recours, un certain nombre d'instances d'appel ça pouvait logiquement avoir une influence sur les frais d'aide juridique. S'il y a moins de recours, s'il y a moins de paliers de révision, il y a moins de cas, donc, qui vont être payés à ces niveaux-là que ce qui est payé à l'heure actuelle; logiquement, on s'attend à ce qu'il y ait une certaine diminution. Pour évaluer correctement l'éventuel projet de loi sur l'aide juridique, ça serait utile, donc, de savoir quels recours, quels paliers ne seront plus là pour déterminer, justement, quelles vont être les vraies réductions.

Alors, notre question était de savoir si, d'ici le 15 mai, c'est l'intention du ministre de déposer un nouveau projet de loi sur l'aide juridique et, si oui, s'il compte faire cheminer son projet de loi d'aide juridique avant la fin de la présente session, en même temps que son projet de loi sur le Tribunal administratif du Québec.

M. Bégin: Sur les incidences que pourrait avoir l'adoption de projets de justice administrative et d'aide juridique, il serait, à mon point de vue, présomptueux de vouloir comptabiliser de manière précise les épargnes et les économies qui pourraient être faites, parce que, d'une part, le projet de loi n° 130 vise à faire une réforme complète des institutions et des tribunaux administratifs. Cependant, l'essence, l'effet concret de cette mesure va se réaliser de façon beaucoup plus concrète lorsque sera déposé et sera adopté le projet de loi d'application de la loi sur la réforme de la justice administrative.

Avant ça, je pense que si on essayait d'escompter que parce qu'on supprime un palier, mettons à la CSST, le bureau de révision paritaire, par exemple, ça serait présomptueux de vouloir dire que ça va économiser 10 000 000 $, 8 000 000 $, 4 000 000 $, 1 000 000 $, et qu'en conséquence on devrait dire: l'aide juridique aura des coûts moindres en résultante de cette décision-là. Je pense que c'est trop tôt pour évaluer ça, même si, en parallèle, les deux projets de loi étaient arrêtés, parce qu'autant l'aide juridique est spécifique dans son action, autant l'autre sera spécifique, mais lorsqu'on étudiera l'automne prochain la loi d'application. Alors, avant ça, c'est trop tôt pour être capable d'escompter véritablement, même s'il est évident qu'une fois la loi adoptée, sur la loi d'application, il y aura certainement des impacts au niveau de l'aide juridique. Mais, avant un an et demi, deux ans, il est impossible d'escompter, de calculer de façon précise ces économies-là.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Drummond. Est-ce que vous aviez d'autres questions sur le même sujet, M. le député de Chomedey?

M. Mulcair: Je vais revenir sur l'aide juridique. Je présume que c'est aussi sur l'aide juridique?

M. Jutras: Non, c'est sur les délais.

M. Mulcair: Alors, on est aussi bien de finir avec l'aide juridique tout de suite. On avait quelques questions, mais ça ne va pas être long. On voulait...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien, allez-y, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Juste me permettre... parce que je sais que mon collègue de Drummond a des questions importantes.

M. Bégin: M. le Président, je pense que je n'ai pas répondu complètement à la question que le député de Chomedey a posée. Il m'a demandé si le projet de loi sur l'aide juridique serait déposé ce printemps et serait adopté. La réponse, dans les deux cas, c'est oui.

M. Mulcair: Merci beaucoup pour cette information. Maintenant...

M. Jutras: J'aurais une question sur l'aide juridique, pendant que vous cherchez vos autres questions. Je veux être certain que j'ai bien compris, M. le ministre. Est-ce que vous avez dit que le Barreau, devant le comité Schabas, avait renoncé au rapport Rabeau?

M. Bégin: Je fais référence à une rencontre que j'ai eue vendredi, à Montréal, avec la bâtonnière.

M. Jutras: Vendredi dernier, ça?

M. Bégin: Vendredi, oui, il y a trois jours, avec la bâtonnière et le vice-président, et où on a échangé entre autres sur l'aide juridique. Sans rien dévoiler de particulier ou de précis, il a été mentionné par la bâtonnière que, devant le comité Schabas – et c'est d'elle que je tiens l'information et non pas d'autre part – ils n'avaient pas présenté le rapport Rabeau comme tel, comme étant des représentations formelles faites par le Barreau.

M. Jutras: Ah! bon, alors, ils n'ont pas renoncé.

M. Bégin: Bien, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas présenté le rapport Rabeau comme étant leur position comme telle, et ils ne l'ont pas déposé, débattu et défendu comme tel non plus.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui, juste pour compléter, avant de poser une question technique sur les chiffres comme tels. Est-ce que le ministre peut nous dire si, dans sa manière de voir les choses, les personnes nouvellement admissibles devront pouvoir bénéficier de la mixité du système, comme c'est le cas à l'heure actuelle? C'est-à-dire que quelqu'un qui devient admissible, même avec un volet contributoire, est-ce que ça va être le même régime que ce qui existe pour les autres personnes admissibles à l'heure actuelle, cette mixité du système va se poursuivre dans leur cas?

M. Bégin: D'ici le 15 mai au plus tard, vous aurez une réponse satisfaisante à cette question.

M. Mulcair: O.K. On verra bien si elle satisfaisante, mais le ministre peut au moins s'engager à donner une réponse.

M. Bégin: Ah! ça, c'est certain.

M. Mulcair: La question qu'on avait posée – juste sur les chiffres, on voulait s'assurer d'avoir bien compris – à la page 38 du volume de demandes de renseignements particuliers, on note, à la partie C, que la superficie occupée pour le bureau du président de la Commission était de 25,8 m², mais on voit en haut qu'il y a un effectif de 0,5 ETC. Est-ce que le 25,8 m², ce qui est équivalent à environ 300 pi², est-ce que ça, c'est le bureau du président et la suite de ses secrétaires, ou c'est juste son bureau à lui, le 25,8 m²?

M. Bégin: M. Lorrain est ici, alors, je pense que... Ha, ha, ha! Alors, M. Lorrain, bonjour. Pouvez-vous répondre à la question, s'il vous plaît?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le président...

M. Bégin: Avec la permission du président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le président, si vous voulez en même temps vous identifier, s'il vous plaît, pour les fins de mémoire de la commission.

M. Lorrain (Pierre): Absolument. Pierre Lorrain, président de la Commission des services juridiques du Québec. Pour répondre à la question du député de Chomedey, je partage, tel qu'il est écrit à la page... la secrétaire, avec le secrétaire de la Commission, et l'occupation est exacte, c'est l'occupation que j'occupe personnellement, c'est le bureau qui est déjà loué depuis près de 15 ans, je crois, à la Commission des services juridiques.

M. Mulcair: Le bureau de 25,8 m² est votre bureau personnel...

M. Lorrain (Pierre): C'est ça.

M. Mulcair: ...à vous. Il n'y a pas de secrétaire là-dedans, il n'y a personne d'autre. C'est 300 pi² de bureau pour vous-même, au coût annuel de 226,37 $ par mètre carré.

M. Lorrain (Pierre): Oui. On vient de renégocier le bail avec 30 % de réduction, pour le même espace, avec un petit peu plus de rangement, disons, dans les sous-sols de la Place Desjardins.

M. Mulcair: Dans le sous-sol de la Place Desjardins?

M. Lorrain (Pierre): Non. Nous avons renégocié le bail avec une réduction...

M. Mulcair: Je ne pensais pas que vous étiez dans le sous-sol de la Place Desjardins.

M. Lorrain (Pierre): ...une diminution du coût du bail de 30 %, avec augmentation des espaces locatifs au niveau du rangement.

M. Mulcair: Et le 226,37 $ représente ce nouveau coût?

M. Lorrain (Pierre): Oui.

M. Mulcair: Auparavant, c'étaient 30 %... bien, ça dépend qu'est-ce qu'on prend comme base.

M. Lo rrain (Pierre): À peu près, oui.

M. Mulcair: 30 % de plus auparavant.

M. Lorrain (Pierre): À peu près.

M. Mulcair: Vous avez réduit le tarif, mais vous n'avez pas réduit le nombre de mètres carrés.

M. Lorrain (Pierre): Bien, c'est difficilement... Je pense que ça serait beaucoup plus coûteux, parce que c'est quand même... C'est raisonnable comme bureau. Je ne plaide pas...

M. Mulcair: Oui, 300 pi², on peut dire que c'est raisonnable comme bureau pour une personne, oui.

M. Lorrain (Pierre): Je n'ai pas fait... Pas 300 pi², mais vous êtes tout près.

M. Mulcair: Tout près.

M. Lorrain (Pierre): O.K. ça va. Je n'ai pas fait la transcription de mètres à pieds carrés. C'est le bureau qu'occupent mes prédécesseurs depuis déjà quelques années. Probablement que ce serait plus coûteux de défaire les divisions et ça ne serait pas plus rentable d'enlever peut-être 4 pi en largeur ou en longueur, d'autant plus que c'est un bureau irrégulier qui fait un coin de l'immeuble de la Place Desjardins, dont à peu près 2,5 m, 2,5 pi sur une façade complète du bureau sont inoccupables; c'est le système de chauffage, le système d'aération qui accompagne la vitrine, parce que c'est un mur en verre, à la Place Desjardins.

(21 heures)

M. Mulcair: Mais est-ce que vous ne trouvez pas, sur... M. le Président, si le ministre est consentant, on aimerait savoir, de la part du président de la Commission, s'il n'a pas un exemple à donner, peut-être plus que d'autres. De somptueux bureaux à la Place Desjardins, lorsqu'on est en train de traiter avec les plus démunis de la société, est-ce qu'il ne se sent pas personnellement dans une situation inconfortable? Il vient de dire qu'il a renouvelé les mêmes bureaux. Je veux bien qu'ils soient là depuis un certain temps, mais, en ces moments de compressions importantes, il n'y avait pas d'autres bureaux à beaucoup moins cher que... Même s'il peut nous parler d'une diminution, il existe beaucoup d'espaces à bureaux, à Montréal, pour beaucoup moins cher que 226,37 $ le mètre carré.

M. Lorrain (Pierre): Oui. Oui. Ça, c'est définitif, et il y en a de beaucoup plus chers aussi. Lorsque je suis arrivé à la Commission, il y a deux ans, il restait à peu près deux ans – je dis bien «à peu près», là, peut-être une quinzaine de mois – au bail de la Commission des services juridiques. On a demandé une opinion, on s'est mis à la recherche d'un nouveau local et les commissaires ont évalué sept ou huit soumissions. On a calculé les coûts de relocalisation, de déménagement – ce n'est pas un très grand espace, là; on est 52, 54 personnes, ça varie selon les personnes qui sont soit en disponibilité ou encore en congé de maladie et autres – et il était beaucoup plus coûteux de déménager, de réaménager un local, parce que souvent ils ne sont pas aménagés pour ce qu'on doit en faire.

Il ne faut pas oublier qu'à la Commission des services juridiques on ne reçoit... À Montréal, je dis bien, et c'est par décret, on est obligés d'être à Montréal; si on veut un changement de notre local, ça prend un décret du Conseil des ministres, c'est dans la loi de l'aide juridique. Mais, ceci étant dit, les services que l'on rend n'ont pas la clientèle directe de la Commission des services juridiques, ce sont des services pour les 11 régions de la Commission des services juridiques. Ce sont des services qui s'adressent... par exemple, comptabilité, révision, recherche; le comité de révision, par exemple, ce sont trois avocats qui siègent là-dessus, complètement indépendants, qui ne sont pas des salariés permanents de l'aide juridique mais qui viennent entendre des causes en révision parce que les gens ont soit été refusés ou admis à l'aide juridique. Bon. Le paiement des comptes de la pratique privée est chez nous. Ce sont des services qui s'adressent bien plus à l'ensemble et non pas à la clientèle directement. Vous savez que les commissaires ont une fonction d'abord administrative et de gestionnaires et non pas de services légaux à la population.

M. Mulcair: Je vois. J'ai écouté la réponse, M. le Président, du président de la Commission, mais je vous avoue que... Que les gens viennent voir les bureaux somptueux ou qu'ils ne les voient pas, ça ne change pas grand-chose au problème. Franchement, ce n'est pas ça, la question. Mais le président de la Commission soulève une question, à notre sens, importante, et je la mets en parallèle avec une réponse que nous donnait le ministre, tout à l'heure, quand on lui parlait de la somme qui était versée pour les services de transcription des médias, et je lui parlais de différentes choses qui pouvaient être mises ensemble pour vérifier qu'il n'y ait pas de dédoublements. Il nous a dit à brûle-pourpoint, comme ça, qu'à son avis ce serait plus cher d'essayer de le gérer que les économies que ça allait provoquer, quoi.

Notre question, donc, pour le président de la Commission est à savoir si la Commission... Le président vient de nous parler de ces gens-là, qui sont là pour payer les gens du secteur privé, disons, tout cet aspect comptabilité. Est-ce qu'ils ont mesuré quelle augmentation dans leurs obligations, leurs tâches de gestion pourrait être occasionnée par ce nouveau volet contributoire dont nous parle le ministre? Est-ce que vous avez analysé ça? Est-ce que vous avez mesuré ça?

M. Lorrain (Pierre): L'an passé... Il y a différentes formules, oui. Lors du Sommet de la justice, il y a déjà quelques années, avant que je prenne le poste comme président de la Commission des services juridiques... Le rapport Macdonald également, au début des années quatre-vingt-dix, avait examiné certaines formes de volet contributoire. On a déjà, dans le passé, fait certaines représentations au prédécesseur de M. Bégin, à la Commission des services juridiques, quant au volet contributoire et à l'administration d'un volet contributoire. C'est définitif que la forme du volet contributoire va être extrêmement importante pour nous. Ça peut devenir très complexe à gérer et ça peut devenir plus coûteux à gérer pour l'État, dépendant de la forme qu'on exigera.

Maintenant, l'an passé, tel que je l'avais dit lors de la commission parlementaire que M. Bégin avait convoquée ici, au mois de juin, on avait mis sur pied, la Commission des services juridiques – parce que c'est la Commission des services juridiques qui a le mandat de gérer, d'administrer la loi et les règlements de l'aide juridique depuis 24 ans au Québec – on avait mis sur pied sept comités de transition, sept comités de gestion de la refonte de l'aide juridique. On a l'intention, aussitôt que M. Bégin nous fera part du projet et qu'il sera déposé à l'Assemblée nationale, tel que M. le ministre l'a dit tantôt, d'ici à une quinzaine de jours, de réactiver ces différents comités pour pouvoir trouver les solutions le plus rapidement possible et les plus efficaces possible, pour maintenir le service tel que nous le maintenons depuis 24 ans.

M. Mulcair: Parce que je pense, effectivement, que la réponse du ministre, de tantôt, même si elle est venue assez rapidement, c'était un assez bon réflexe. C'est le genre de décision que tout gestionnaire de la chose publique doit souvent prendre, dire: Écoutez, oui, théoriquement, il y a peut-être un peu de dédoublement d'efforts çà et là. Par contre, si je dois mettre en place toute une structure pour le contrôler, tenter de le supprimer, ça va me coûter plus cher que ce que je cherche à économiser. On ne peut pas trouver défaut avec ce genre d'argument là. Mais, là où on a vraiment des phares de vos 24 ans d'expérience, justement, à la Commission des services juridiques, c'est lorsqu'on s'apprêterait à mettre en place vraiment une autre manière de le faire. Tout d'un coup, il va falloir déterminer, comme on le fait déjà, les revenus, mais commencer à les «matcher» avec un barème, puis faire la perception, puis s'assurer qu'il n'y a pas toutes sortes de combines qui sont mises en place. Vous demanderez à l'Ordre des dentistes qu'est-ce qui se passe avec les assurances privées en matière dentaire, pour comprendre comment les gens peuvent être créatifs là-dedans. Et je pense que vous allez voir qu'effectivement les défis d'organisation et de gestion d'un volet contributoire risquent de venir gruger une partie importante des économies qu'on va pouvoir prétendre faire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Il y a peut-être, par rapport à certaines interrogations mathématiques ou géométriques que posait M. le député de Chomedey, une question technique. En fait, c'est un bureau... Lorsqu'on parle d'un immense bureau, en faisant la conversion, c'est environ 270 pi². Ou bien c'est la forme d'une mini-roulotte de 10 X 27 ou bien c'est une superficie d'à peu près 16 X 16, 16 X 17. Donc, c'est à peu près l'ampleur que ça donne.

M. Lorrain (Pierre): Si vous me permettez, M. le Président, moins les 2,5 pi de large qui ne sont pas occupés par un bureau. On ne peut pas, absolument pas les utiliser. C'est le système d'aération de l'immeuble. Et ça fait partie de la surface parce que... J'étais présent lorsqu'ils ont calculé la surface de mon bureau, pour préparer le cahier des crédits, et c'est par le plafond qu'ils ont calculé les 25,8 m².

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Et ça donne environ 20 $ le pied carré, entretien inclus, sur une base annuelle.

M. Mulcair: ...avec respect, M. le Président, ça donne quelque chose de l'ordre de – et vous me passez... je n'ai pas encore eu le temps de faire les calculs – 55 000 $ ou 60 000 $ par année, juste pour le bureau du président. Alors, quand on regarde les coupures comme on est en train de les regarder, quand on voit le petit monde qui ne gagne même pas ça...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Non. On parle de 5 836 $, coût annuel total.

M. Mulcair: Oh! Pardon. Excusez-moi.

Une voix: Mais non, c'est impossible. Non, non, non.

M. Mulcair: Tu vois, ça, c'est une erreur de mathématiques et je m'en excuse.

M. Paré: ...parler fort.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lorrain (Pierre): On m'avise... La trésorière de la Commission... M. le Président, si vous me permettez, ce prix inclut l'électricité, le chauffage, l'aération, l'entretien, tout le service d'entretien quotidien, six jours par semaine, à la Commission des services juridiques. Et c'est un prix moyen, là. C'est un prix moyen comprenant les espaces locatifs, au sous-sol, de rangement, parce que nous devons détenir, pour toute l'aide juridique, depuis 24 ans, les archives, en vertu de la loi.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, je retire mes calculs parce que je les avais basés sur les données qui apparaissent ici. Alors, mes chiffres ne sont pas meilleurs, finalement.

M. Mulcair: À cette heure de la soirée, on peut tous être pardonnés si ce n'est pas...

(21 h 10)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, M. le député.

M. Boulerice: À nouveau, si je fais le calcul – et je risque de vous décevoir – je crois avoir 4 pi² de plus que vous, dans mon bureau, ici, à l'Assemblée nationale. Alors, vous me permettrez de vous en remercier puisque vous avez été président de l'Assemblée nationale. On nous a évité la moquette, heureusement, à moins que vous n'ayez du parquet dans votre bureau. Donc, on serait probablement allé à l'essence de bois. Mais est-ce que vous avez une étude comparative des coûts entre Place Desjardins et Place Ville-Marie? À ce moment-là, s'il y avait économie pour vous d'aller à la Place Ville-Marie... et, compte tenu de l'utilité de vos services, on pourrait peut-être disposer du 15e étage de la Place Ville-Marie où se trouvent les luxueux bureaux du chef de l'opposition officielle.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le président de la Commission.

M. Lorrain (Pierre): Non, je n'élaborerai pas sur les bureaux du chef de l'opposition; ça, c'est définitif. Mais, tel que je vous l'avais mentionné, les commissaires, les administrateurs de la Commission des services juridiques, avant de décider de renouveler le bail à la Place Desjardins, ont exigé des évaluations et une étude des espaces locatifs à Montréal, les coûts sur le marché. Et nous avons négocié très, très, très serré et très sérieusement avec Desjardins – la filière immobilière de Desjardins – avant de renouveler notre bail. Il y a même plus que ça: jamais dans le passé, durant les 24 premières années de la Commission des services juridiques, on n'avait obtenu, à Montréal, une clause de résiliation sans pénalité. Notre bail, après cinq ans maintenant, contient une clause de résiliation sans pénalité. On a obtenu aussi, en renouvelant notre bail avec une réduction très sensible, tel que je vous l'ai mentionné tantôt, des aménagements locatifs, une amélioration locative qui... Si on l'utilise, ça va, c'est prévu au contrat, sinon elle nous sera remboursée en termes locatifs, en diminution de loyer. Alors, ça peut être soit de la peinture, des tapis. Mais ce n'est pas notre intention, M. le ministre, de le faire dans un avenir très rapproché ni à long terme. On est très satisfaits des locaux qu'on occupe actuellement.

M. Boulerice: Je m'aperçois avec satisfaction que les deux présidences que vous avez exercées – celle de l'Assemblée et celle actuelle – sont toujours sous le signe du souci des deniers publics. Je vous en félicite, M. le président.

M. Bégin: Est-ce que c'est une question?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: C'est une observation on ne peut plus pertinente devant...

M. Lorrain (Pierre): Je n'ai rien à dire là-dessus.

M. Boulerice: Il semblait se dessiner une peu le syndrome de Washington, là, que je voulais éviter.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Drummond.


Réduction des délais devant les cours de justice

M. Jutras: M. le ministre, après l'élection de septembre 1994, un des premiers projets de loi qu'on avait présentés, le nouveau gouvernement, c'était... je ne me rappelle plus le numéro, mais c'étaient des amendements au Code de procédure civile pour tenter d'abréger les délais devant nos cours de justice – malheureusement, je garderai la remarque que je voulais faire pour le retour du député de Chomedey; je ne voudrais pas parler en son absence, mais, en tout cas, je vais quand même poser une question là-dessus – et, là, on avait adopté différentes mesures. On avait augmenté la compétence de la Cour du Québec, on avait aussi, pour la Cour d'appel, augmenté, je pense, les causes de plus de 25 000 $... C'est ça qu'on avait décidé? Oui. On avait adopté aussi d'autres dispositions, là, au niveau de la production des mémoires devant la Cour d'appel pour éviter les requêtes pour rejet d'appel, à savoir que l'avocat doit produire son mémoire, puis, s'il ne le fait pas, il y a un dernier délai qui lui est accordé, sinon il est forclos de le faire. Pour éviter, comme je le disais, les requêtes pour rejet d'appel, lesquelles sont remises deux ou trois fois et, finalement, ça entraîne des délais, etc.

Ma question, M. le ministre, c'est de savoir... C'est en vigueur, ça, depuis le mois de décembre 1994. C'est le premier «filibuster» que nous avions eu à vivre sur un projet de loi aussi mineur. C'est ça que... Oui. J'avais trouvé ça... Je parlais, je voulais vous rappeler, M. le député de Chomedey, le premier «filibuster» que nous avions vécu, de votre part, sur les amendements au Code de procédure civile, à l'automne 1994. Alors, ma question, M. le ministre, c'est de savoir: Est-ce que ça a été évalué, ça, depuis...

M. Mulcair: M. le Président, question de règlement, bien que ce ne soit pas mon habitude d'interrompre mon savant collègue de Drummond. Je pense qu'il a assez l'habitude pour savoir que d'imputer des motifs indignes, ça ne se fait pas. Un «filibuster», c'est quelque chose qui ne vise pas à avancer les travaux de cette Assemblée. C'est sûr qu'on a parfois apporté une attention très particulière aux importants projets de loi du ministre, mais «filibuster» est un terme antiparlementaire, comme il le sait, et je vous demande de lui demander de le retirer.

M. Jutras: Philip Buster, à la place.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Drummond, effectivement, on ne peut prêter d'intention à quelque opposition officielle que ce soit de venir faire des «filibusters» en Chambre, évidemment. On peut parler de s'assurer profondément...

M. Boulerice: C'est un approfondissement de la question.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): ...du respect intégral des droits de l'opposition.

M. Jutras: M. le Président, je me demande, à ce moment-là, comment on doit appeler ça, quand on a notre collègue d'en face qui commence à lire le Code de procédure civile, article par article. Quand on sait que, dans le cas du Code de procédure civile, il y a quelque chose comme 1 000 articles, je me demande comment il faut appeler ça. Peut-être qu'on ne peut pas appeler ça un «filibuster». Peut-être qu'il faudrait appeler ça de l'obstruction systématique.

M. Mulcair: M. le Président, je m'excuse, mais je pense que le député de Drummond est en train de tenter de faire indirectement ce qu'il ne peut pas faire directement.

C'était effectivement une obstruction systématique, de la part du ministre, à toutes les suggestions constructives qu'on lui faisait. Il a raison là-dessus.

M. Jutras: Non, mais...

M. Mulcair: Il disait non systématiquement à toutes nos bonnes suggestions. C'est ça, de l'obstruction systématique.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): MM. les savants avocats de cette commission, je vous inviterais à ne pas vous enfarger sur cette surface glissante, parce que vous êtes en train, l'un et l'autre, de tenir des propos dans lesquels je vois des intentions qui ne sont pas des fleurs. Ceci étant dit, posez votre question, M. le député de Drummond.

M. Jutras: Cela étant dit, M. le ministre, ce que je voulais savoir, c'est que... Depuis que ce projet de loi est en vigueur, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire quels effets cette loi-là a eus sur les délais au niveau de la Cour d'appel? Quels effets ce projet de loi a eus aussi sur les délais au niveau de la Cour supérieure? Parce que nous prétendions, à l'époque, en augmentant la compétence de la Cour du Québec, que nous allions pouvoir référer... certaines causes, c'est-à-dire, allaient pouvoir être référées de la Cour supérieure à la Cour du Québec. Alors, est-ce que, là aussi, il y a eu des modifications quant aux délais? Et, est-ce qu'il y en a eu aussi devant la Cour du Québec? Ça, c'est ma première question, mais je vais avoir d'autres questions aussi sur les délais.

M. Bégin: Alors, concernant les délais, au niveau de la Cour du Québec, il n'y a pas eu de délais additionnels qui ont été créés par l'arrivée d'un certain nombre de dossiers additionnels, vu qu'on avait augmenté la juridiction. Du côté de la Cour d'appel, la mesure qui consistait à dire qu'après un délai de 120 jours, si le procureur n'avait pas déposé son mémoire, il perdait la possibilité de le faire – et, dans certains cas, ça représente l'appel – ceci a eu un effet extrêmement important puisque la Cour d'appel s'est prononcée, je pense – je peux me tromper sur le nombre exact – sur 21 ou 27 dossiers, le même jour, de cas où on ne l'avait pas produit dans les 120 jours, et là les procureurs ont invoqué différents arguments, de la maladie à l'ignorance de la loi, ou à penser qu'ils le faisaient dans le bon délai, etc. Enfin, tout a été invoqué, et la Cour d'appel a rejeté tous les motifs comme tels, d'appel, là-dessus. C'est devant la Cour suprême, pour le moment. Mais l'effet a été quand même là, et je voyais, à la Cour d'appel, le juge Michaud me dire, il y a à peine quelques jours, qu'il n'y a plus personne qui dépasse les 120 jours. Maintenant, tout le monde dépose son mémoire dans le délai.

(21 h 20)

J'aimerais peut-être faire parvenir à la commission – je n'ai pas pensé à l'apporter – mais le juge Michaud, le juge en chef de la Cour d'appel faisait un discours, vendredi dernier – c'est ça, vendredi il y a trois jours – à l'occasion du 50e anniversaire du Barreau des Laurentides. Il fournissait une foule de renseignements, dans son discours, relativement à cette question et il mentionnait, effectivement, que maintenant les avocats déposaient leur mémoire à l'intérieur du délai prescrit. Donc, on peut tirer une leçon que c'est extrêmement positif puisque c'était là un endroit où les délais étaient les plus longs.

Sans attribuer à cette mesure la réduction des délais, je dois vous dire que les instruments qu'on a donnés à la Cour d'appel, entre autres aussi à cause d'une attitude différente de la Cour d'appel... De 48 à 50 mois qu'étaient les délais en juin 1995, ils sont à 28 mois, au moment où on se parle, et, à la même date l'an prochain, le juge Michaud prévoit être aux alentours de 16 à 18 mois de délais après le dépôt de la plainte, ce qui veut dire que, dans moins d'un an et demi, ils auront réduit de plus de 50 % les délais. Ils visent, dans trois ans, à être à 12 mois dans tous les cas et à rester à ce niveau-là.

Ce qui fait que si on prend ces mesures... Et je dois le dire, je veux le dire que la Cour d'appel a fait un effort systématique pour raccourcir les délais, en procédant, dans un premier temps, à l'aide de subventions qu'on lui avait données ou de fonds particuliers pour étudier les dossiers à l'avance, les regrouper par thèmes et faire en sorte qu'on entende, par exemple, systématiquement des causes portant sur le même sujet en même temps, pour être capables d'avoir une familiarité avec l'ensemble de la problématique et de rendre des décisions, comme ça, en procédant à rendre des décisions sur le banc, immédiatement, et à fournir les notes par la suite.

Donc, elle a réussi, en faisant aussi nommer trois juges ad hoc pour une année et d'autres mesures analogues, à réduire substantiellement les délais, ce qui fait qu'avec le projet de loi n° 7 que j'ai déposé la semaine dernière et qui vise à faire une voie accélérée dans 80 % des dossiers de la Cour du Québec ou de la Cour supérieure on peut penser que dans un délai de moins de deux ans, dans peut-être deux ans d'ici, une personne aura pu, d'une part, prendre son action, obtenir un jugement de la Cour supérieure, porter sa cause en appel et obtenir à nouveau une décision de la Cour d'appel, donc, dans un délai de deux ans. Ce qui veut dire que c'est une amélioration très substantielle. Moi, je pense que, si on réussit à faire ça, on va inciter des gens qui actuellement renoncent à exercer leur recours à revenir devant le système judiciaire et à exercer leurs droits. Et, ça, je pense que c'est à l'avantage de la justice en général, de ces personnes en particulier, et aussi pour l'ensemble de la profession juridique.

La Cour supérieure, quant à elle, travaille aussi et a réussi, à Montréal en particulier, à partir de projets-pilotes, à faire avancer substantiellement les dossiers et à réduire les délais. Il y a des projets. C'est le juge Gontran Rouleau, je pense, qui fait une espèce de conciliation. En tout cas, c'est une tentative qui est faite. Je pense que c'est un dossier aux 50 qui est pigé automatiquement. À ce moment-là, le dossier est diverti pour être amené dans ce système-là et vérifier si on accélère les choses en faisant une telle médiation ou une telle conciliation. Il semble que ça va très bien. Puis, d'autres mesures ont été mises en place, à Montréal, de sorte que je pense que, vraiment, si on continue nos efforts, on va être en mesure de rendre la justice vraiment correcte. Dans le terme de deux ans, avoir une décision de la Cour d'appel. Quand on pense qu'aujourd'hui, en deux ans, en moyenne... Il y a un an, en tout cas, on n'arrivait même pas à être rendu pour audition devant la Cour supérieure... Alors, imaginez-vous qu'on franchit toutes ces étapes. Je pense que c'est quelque chose de très bien. C'est une très forte participation de la magistrature combinée avec des projets de loi qui permettent, justement, que toute la justice s'harmonise et travaille plus rapidement.

M. Jutras: Mais il y a quand même deux choses, là, au niveau des délais. Il y a avant qu'un dossier soit inscrit et prêt à plaider, et là vous arrivez avec un projet de loi qui veut s'attaquer à ça, là, et vous nous parlez d'un délai de six mois.

M. Bégin: C'est exact.

M. Jutras: Ça, je vais y revenir tantôt. Donc, avant que le dossier soit prêt à plaider, que ce soit devant la Cour supérieure ou devant la Cour d'appel, là il y a des délais et, évidemment, les délais qui sont là sont imputables aux avocats.

M. Bégin: Exact.

M. Jutras: Mais il y a aussi dans les délais, une fois que le dossier est prêt, le temps qu'on attend pour que la cause soit plaidée. Moi, si ma mémoire est bonne, quand, l'année dernière, on parlait d'un délai de quatre ans devant la Cour d'appel, c'était une fois que le dossier était prêt.

M. Bégin: C'est exact.

M. Jutras: C'est ça. Et c'est ça que vous nous dites, que présentement les juges de la Cour d'appel, ce délai-là, ils l'ont réduit à deux ans.

M. Bégin: À 28 mois...

M. Jutras: À 28 mois.

M. Bégin: ...au moment où on se parle, et la courbe continue de descendre. Le juge Michaud est convaincu qu'à pareille date l'an prochain il sera aux alentours de 16 à 18 mois et, un an plus tard, à 12 mois. C'est ça, je pense... L'important dans votre question, c'est de distinguer deux choses. D'une part, le délai qui était encouru entre le moment de la signification de la première procédure et le moment où les parties étaient devant le juge de la Cour supérieure, par exemple, ce délai-là était assez long et variable dans le temps, bien sûr, mais, ce délai-là, ce n'est pas la magistrature qui pouvait en être tenue responsable puisque c'est les avocats qui cheminent, à ce moment-là. C'est eux qui font avancer le dossier. S'ils sont rapides, le délai est court, mais si, pour des raisons x, y, ils négligent d'agir de façon diligente, à ce moment-là on a des délais très longs, ce qui fait que des dossiers ne sont, dans certaines circonstances, pas prêts à procéder avant trois ou quatre ans. Là, on est rendu, pour que le dossier soit sur la liste d'attente... Si vous calculez que ça prend un an, un an et demi, deux ans de là pour être devant le juge, bien, vous êtes rendu à cinq ans, six ans, ce qui sont des délais absolument inacceptables. Alors là, la cour travaille à son niveau et, par le projet de loi n° 7, on va s'attaquer aux délais du début de l'action jusqu'à temps qu'il soit devant la cour, et le délai sera de six mois dans 80 % des dossiers.

M. Jutras: J'en viens à ce dont vous nous avez parlé à quelques reprises et ce dont vous parliez aussi dans votre allocution du début de l'étude des crédits, la semaine dernière; et là je réfère le député de Chomedey aux pages 26, 27 et 28 parce que vous avez, là, l'allocution. Alors, vous parlez d'abréger les délais à six mois, au niveau des procédures, avant que le dossier soit prêt à être entendu; vous en parlez, entre autres, à la page 29, pour les causes de moins de 25 000 $. C'est ça?

M. Bégin: De?

M. Jutras: C'est ça?

M. Bégin: 50 000 $.

M. Jutras: Ah non! Ça, c'est en Ontario qu'ils ont fait 25 000 $...

M. Bégin: En Ontario, c'était 25 000 $.

M. Jutras: O.K. Et vous, vous...

M. Bégin: 50 000 $.

M. Jutras: 50 000 $. Mais, là, j'aimerais que vous nous expliquiez certaines choses parce que, entre autres, dans votre allocution, à la page 29, vous parliez de certains moyens, mais, à mon avis, ça, ça n'abrège pas les délais. Remplacer un bref d'assignation par un avis, ça n'abrège pas les délais. Ça, là, et différentes choses aussi, procéder par voie de requête, ça n'abrège pas nécessairement les délais. Mais, concrètement, comment ça va se passer, quand on parle de procédures allégées? Est-ce que ça va être des procès à la bonne franquette? Ça va être vite, vite, dépêchons-nous, puis il faut procéder à l'intérieur de tel délai? Ou, on n'entend plus d'experts? J'essaie de voir comment on va pouvoir... Parce que, là, le problème qu'on a, c'est que les procès sont de plus en plus longs et il y a de plus en plus d'experts dans les procès. Comment ça va faire pour que ça procède plus rapidement? Mais là, évidemment, votre projet parle surtout des six mois pour que le dossier soit prêt. Ça va être quoi, là? Est-ce que ça veut dire qu'on ne pourra plus faire de requêtes pour détails? Qu'on ne pourra plus...

M. Bégin: Alors, il y a plusieurs questions. Je voudrais, peut-être d'abord, avant d'entrer dans ce qui va demander une élaboration plus complète, vous parler, à la page 29, de certaines mesures. Effectivement, le projet de loi que j'ai déposé la semaine passée ne contient pas seulement une mesure qui s'appelle la voie accélérée, mais il y a d'autres mesures qu'il m'apparaît important de faire. Par exemple, on a la péremption d'instance. Il faut corriger cette mesure qui n'a pas donné son rendement à la satisfaction des parties. Il y a aussi des mesures qui sont par requête. Oui, c'est des mesures qui accélèrent considérablement, parce que le délai est fixé par le procureur au moment de la signification de sa requête et elle est prête à procéder aussitôt que le dossier est considéré complet. Et là c'est à Montréal qu'il faut référer comme expérience où il y a eu l'introduction des articles 761, 762 et qui a rendu des services vraiment très, très importants à la communauté juridique. La magistrature, comme le Barreau, trouve que c'est une façon de procéder qui est nettement supérieure parce que, dès que le dossier est considéré complet, il attend un peu comme dans une salle d'attente; dès que les parties constatent que le dossier est prêt, on fixe la date et il est prêt à procéder. Cette procédure, donc, elle est beaucoup plus expéditive que la méthode du bref.

(21 h 30)

Si on revient maintenant à la voie accélérée, il faut comprendre que, jusqu'à aujourd'hui, il y a un principe qui a mené le monde juridique, c'est: l'avocat est maître de sa procédure. Alors, il est toujours libre de faire ce qu'il veut en respectant certains délais, mais c'est lui qui décide. Lorsqu'on est en matière de justice, il y a des intérêts contradictoires. Dans certains cas, le demandeur a intérêt à ce que le dossier avance très rapidement. Par contre, le défendeur, lui, n'a pas toujours avantage à ce que le dossier avance rapidement. Comme il a, à tour de rôle, la décision entre ses mains de faire avancer ou de ne pas faire avancer, souvent, il se sert de la procédure pour gagner du temps et faire en sorte que les intérêts des clients soient bien défendus, mais cet intérêt est contradictoire avec celui de l'autre partie.

Donc, la voie accélérée dit ceci: Il est possible dans des dossiers qui ne sont pas complexes de faire en sorte qu'à partir de la date où le dossier est initié et celle où la procédure est complète ce soit déterminé dans le temps, tout en permettant aux parties de faire valoir les moyens les plus fondamentaux qu'ils peuvent avoir. Mais, s'ils veulent les exercer, qu'ils le fassent dans un délai précis. Vous vous rappelez que, dans le Code, il y a deux types de délais: il y a les délais normaux puis il y a les délais de rigueur, ceux qui entraînent la perte du droit s'il n'est pas exercé.

Ce que vise à faire le projet de loi, c'est de s'assurer que les délais soient vraiment des délais butoirs. Par exemple, là-dessus, on peut discuter, harmoniser, changer le projet de loi en détail, mais on peut garder l'objectif global de six mois. On peut dire: Pour faire une comparution, c'est 10 jours. Bon. Là, on dit: Maintenant, vous allez avoir une défense à faire mais, avant de faire votre défense, vous pouvez avoir un interrogatoire au préalable, vous pouvez avoir une requête pour détail, vous pouvez avoir une autre mesure de cette nature, pas de mesures dilatoires, cependant, ni déclinatoires... oui, une requête déclinatoire, requête en irrecevabilité. Alors, le projet de loi vise à faire en sorte que, dans un délai, admettons, de 30 jours, ces moyens-là soient exercés et, s'ils ne le sont pas dans ce délai-là, c'est fini, ils ne peuvent plus être exercés. La défense peut être faite, mais l'interrogatoire ne pourra pas être fait, il avait à être demandé. Alors, d'un délai comme ça jusqu'à la défense, après ça, la réponse et l'inscription, on est en mesure, dans un délai de six mois, de s'assurer que tous les droits des parties ont été exercés ou ont pu l'être, au choix des parties, et que, dans un délai précis, on est rendu, dans tous les cas, à six mois.

Bien sûr qu'il y a ces dossiers complexes qui nécessitent l'utilisation de la batterie de moyens que l'on retrouve dans le Code de procédure. Le Code de procédure actuel, c'est le code qui est fait pour les cas les plus complexes, les plus lourds; tout est prévu, tout est là, mais c'est ce qu'il y a de plus lourd. Or, ce qu'il y a de plus lourd n'est pas nécessairement ce qui est le plus commun. Au contraire, c'est généralement des choses relativement simples qui sont amenées devant la cour. Mais, comme on n'avance pas plus vite que le plus lent des dossiers, on se retrouve avec des délais considérables. C'est pourquoi, en fixant des délais précis, les avocats devront agir dans un délai précis et exercer les moyens qu'ils peuvent utiliser pendant ce délai-là et, faute de le faire, ils ne pourront plus l'exercer.

C'est un peu comme tantôt, on parlait pour les délais en Cour d'appel, les avocats avaient 120 jours pour produire leur mémoire. Les mémoires produits dans les 120 jours étaient l'exception et non pas la règle, parce que ce qu'on peut faire demain, pourquoi le faire aujourd'hui? C'est un réflexe, on a toujours des choses bien importantes à faire aujourd'hui. Le mémoire, il reste 119 jours, 110, 95, donc, on a toujours le temps. Rendu à peu près à 110, on se préoccupe, on dit: Ouais! Aïe! j'ai 120 jours, il faudrait bien que je communique avec mon confrère; justement, je pars en vacances puis, là, je n'ai pas le temps de faire ça, j'ai plein d'autres choses. On appelle le confrère: Est-ce que tu peux me donner un délai de trois semaines ou un mois, parce que je pars en vacances? Le collègue qui, la semaine prochaine, a probablement un même délai à demander au confrère ou à celui du même bureau, à un collègue du même bureau, va certainement consentir. Et, au bout d'un mois, bien, là, quand l'avocat revient, il a d'autres préoccupations, il sait qu'il a encore du temps. Alors, on joue comme ça, de sorte que les délais se retrouvent à 180, 200 jours. À compter du moment où on met un délai fixe de 120 jours, c'est curieux, tout le monde se met à respecter le délai et à être capable de faire son travail dans un délai comme celui-là. C'est ce principe-là qu'il s'agit de retenir pour atteindre le délai de six mois.

Bref, l'avocat reste maître de sa procédure mais il est obligé de suivre un calendrier s'il veut être encore maître de sa procédure. Et c'est ça, l'avantage: on s'attaque à cette période entre le bref d'assignation et le moment de l'audition dans les dossiers simples, non complexes. Bien sûr que, si vous avez quatre expertises à faire faire, si vous avez cinq appels en garantie, ce n'est pas par cette voie-là que vous allez aller. Mais il y a généralement une relation entre la complexité du dossier et le montant en cause. Ce n'est pas toujours vrai, mais on a des dossiers qui posent des principes de droit extraordinairement complexes et intéressants pour 3 000 $ et des dossiers de 2 000 000 $ qui sont d'une simplicité remarquable. Bien, tout ça, en moyenne, fait en sorte que le montant est généralement en relation avec la complexité de la cause. Et il sera toujours possible, même dans des cas où ils sont inférieurs, si les parties le veulent, de demander à la cour l'autorisation d'être sur la voie plus lente, si vous me permettez cette expression-là. Mais, à ce moment-là, il y aura une décision qui sera rendue sur la base de représentations que le juge sera en mesure d'évaluer et de soupeser et de dire: Oui, vraiment, je suis devant un cas qui nécessite, malgré les apparences, d'être dans la voie plus lente plutôt que d'être dans la voie rapide.

Mais, inversement aussi, celui qui utilisera la technique de mettre son dossier à 63 000 $, alors qu'il n'a aucune complexité, pour être capable d'éluder la voie rapide, mais dont sa créance, à sa face même ou après une étude le moindrement approfondie, dévoilera que le vrai recours c'était 40 000 $ et qu'on l'a purement et simplement gonflé pour le mettre de l'autre côté, il y aura une pénalité. Ou ce sera probablement plus vrai lorsque quelqu'un fera une demande... voyons, quand, en défense, on demande de l'argent, une demande...

M. Jutras: Une demande reconventionnelle.

M. Bégin: Reconventionnelle. Quand il y aura une demande reconventionnelle, c'est à ce moment-là que l'avocat voudra peut-être sortir de la voie accélérée pour aller sur la voie lente. Parce qu'il est rare que le demandeur, lui, a intérêt à ce que les choses n'avancent pas vite. Ça peut exister mais, généralement, le demandeur, lui, il est pressé. C'est le défendeur qui l'est moins.

Donc, on peut s'attendre à ce que les avocats aillent généralement sur la voie accélérée quand ils sont à l'intérieur du montant, mais qui ne gonflera pas. Mais, si jamais ils veulent le faire pour des intérêts obscurs, la cour pourra imposer une pénalité à ce plaideur qui vise non pas peut-être la vérité mais la lenteur.

M. Jutras: Mais je comprends que le principe va être la voie accélérée...

M. Bégin: Oui.

M. Jutras: ...sera la voie accélérée...

M. Bégin: Oui.

M. Jutras: ...et, si quelqu'un veut aller plus au ralenti à cause de la complexité du dossier, il devra faire une requête au tribunal dans ce sens-là.

M. Bégin: C'est ça.

M. Jutras: C'est ça, le principe.

M. Bégin: Oui.

M. Jutras: O.K. Maintenant, j'ai vu, dans l'allocution d'ouverture des crédits, que vous allez présenter de nouvelles dispositions quant aux témoins, là.

M. Bégin: Oui.


Frais d'expertise et convocation des témoins

M. Jutras: Bon. J'ai pris connaissance de ça. Mais, en tout cas, moi, M. le ministre, ce que je voudrais porter à votre attention, puis je pense que ça deviendrait urgent qu'on se penche là-dessus, c'est la question des experts devant les tribunaux. On est rendus avec des frais d'experts qui sont astronomiques. Je prends juste... même à l'aide juridique où, la plupart du temps, les experts coûtent plus cher que les avocats qui plaident le dossier. L'expert est là pour une question. L'avocat, c'est lui qui mène le dossier du début à la fin. Alors, on est rendus avec des frais astronomiques. Les médecins experts qui viennent témoigner devant la cour sont rendus avec des... j'ai vu, dans certains cas, 1 000 $ ou 1 500 $ la demi-journée – ce n'est pas des farces – avec, en plus, les frais de déplacement puis les frais de repas. Puis, là, vous avez la même chose de l'autre côté. Puis, ça, c'est sans compter aussi les frais d'expertise parce que l'expert, au préalable, a préparé le rapport et a chargé tant pour ça.

Moi, je pense que, ça, ça devient un problème urgent. Quand on parle des coûts de la justice, ça, ça en est un coût qui est astronomique. Les experts ont, somme toute, une grande liberté à ce niveau-là. Les avocats sont obligés de fonctionner à tel tarif horaire et, par contre, tu as un expert qui charge le double puis le triple de ce que tu peux charger. Moi, je pense que ça devient urgent de se pencher là-dessus, d'établir probablement une banque d'experts qui seraient à la disposition des tribunaux ou, en tout cas, si on n'a pas de banque d'experts, d'avoir des tarifs qui sont fixés puis, là, l'expert, il décidera d'y aller à ce tarif-là ou non.

(21 h 40)

Je ne sais pas si, au ministère, vous avez commencé à vous pencher sur cette question-là. En tout cas, ceci dit respectueusement, M. le ministre, je vois que vous adoptez des dispositions concernant les témoins, je comprends que ça résulte du sommet que vous avez eu avec des représentants de la magistrature, tout ça, mais, en tout cas, moi, il me semble, je serais allé plus vite du côté des experts parce que le problème m'apparaît bien plus grand là que par rapport aux témoins. Mais, là, évidemment, peut-être, les magistrats, eux, ont vu que le problème était plus sérieux du côté des témoins, en tout cas.

Donc, ce que je voudrais savoir, c'est: Est-ce qu'il y a quelque chose d'entamé à ce niveau-là? Est-ce qu'on peut prévoir quelque chose à court terme pour remédier à cette sérieuse problématique des experts devant les tribunaux?

M. Bégin: Vous avez tout à fait raison, c'est un problème majeur. Celui des témoins ne l'est pas moins ni plus. Il s'agit d'une préoccupation que la rencontre des intervenants a permis de mettre en évidence. C'est qu'on néglige généralement cette question-là, des témoins, qui, finalement, transmettent dans la population l'image d'une justice mal organisée, insatisfaisante, frustrante, où on est manipulé comme un objet. On nous amène là sans nous donner d'informations. On nous fait poireauter pendant une journée et, à la fin de la journée, on daigne peut-être nous dire: Merci, je n'ai pas besoin de toi; les frais, bien, tu vas aller en bas, c'est 12 $; bonjour, merci. En fait, les gens sont traités tout à fait de manière incorrecte et, là-dessus, l'ensemble de la profession et de la magistrature est d'accord pour dire qu'il faut faire quelque chose et s'assurer que ceux qui viennent à la cour soient traités correctement, parce que c'est les principaux auxiliaires, finalement, de la justice. Sans les témoins, il n'y a pas tellement de justice possible. Alors, on a décelé qu'il y avait beaucoup de choses à faire et on va s'y attaquer. Mais ce n'est pas pour négliger les experts, loin de là.

Je dois vous dire que, cependant, la question est peut-être plus délicate, est peut-être plus difficile à régler parce que, si le premier est une question comportementale, le deuxième est peut-être une question de droit des parties. Si une personne juge à propos d'utiliser un expert pour mieux défendre sa position, bien, on comprend tous que c'est tout à fait légitime et qu'elle doive le faire. Cependant, je pense que, malgré toute cette question du respect des droits des parties, on peut constater qu'il y a d'énormes abus qui se font en matière d'expertises. C'est rendu qu'on n'est plus capable d'avoir quelque divorce que ce soit sans qu'il y ait un expert à droite puis un expert à gauche et, de toute façon, en bout de piste, le juge n'est pas plus éclairé sur la décision qu'il a à prendre que s'il n'avait eu aucun expert, d'une part. D'autre part, on a des expertises dans certains cas qui, si on les comparait les unes aux autres et de semaine en semaine, seraient pratiquement des copies conformes ou des copies carbone, comme on disait dans le temps, de celles qui ont été rendues auparavant. Donc, c'est devenu quasiment un peu, dans certains cas, de la routine. Je ne veux pas minimiser le travail ni la qualité du travail fait par certains experts mais je pense que, dans certains cas, il y a des abus.

C'est pourquoi on avait prévu, l'an passé, si vous vous rappelez bien, dans le projet de loi de l'aide juridique, qu'il y ait la possibilité de négocier des tarifs régionaux et/ou des tarifs nationaux avec les experts. Et je pense qu'il faut s'assurer, effectivement, que, si les parties veulent avoir droit aux services d'un expert, il faut que ce soit fait dans un cadre raisonnable et à un coût raisonnable. Alors, il y aura des discussions, des négociations à faire, mais c'est certain que, dans l'année qui vient, il faut que l'on trouve un moyen de baisser le coût des expertises et, dans certains cas, les éliminer. Le juge Michaud m'a envoyé récemment un discours qu'il avait fait en 1993, où, m'a-t-il raconté, il avait parlé justement de l'abus de l'utilisation, des fois, d'experts, c'était devant un parterre composé d'avocats et de psychologues, et il s'était fait applaudir à tout rompre, mais qu'il n'y avait jamais eu de suite à son affaire parce que les intérêts des parties étaient à l'encontre, justement, d'une rationalisation ou une diminution des coûts. Je pense qu'il faut qu'on fasse quelque chose là-dessus. On va le faire. C'est délicat. C'est le droit des parties, et on se sent mal, comme groupe, la capacité de dire: On va restreindre les droits des personnes.

Mais, quand on regarde par le biais de la lunette de l'aide juridique, on se dit: Quand on offre un service, doit-on offrir n'importe quoi, n'importe quel service ou bien un service raisonnable à un coût raisonnable? Il y a des expertises qui coûtent plus cher que le montant des honoraires de l'avocat qui fait toute la procédure; ça pose un problème qui est de l'une ou l'autre des deux choses suivantes: ou l'expertise est trop chère ou l'avocat n'est pas assez bien payé. Alors, il y a quelque chose qui n'est pas correct. Un travail professionnel à peu près d'égale qualité qui est payé trois fois ou quatre fois ou cinq fois plus cher que l'autre, ça pose un problème, et c'est le cas de l'expertise d'une demi-journée, de l'expert qui vient une demi-journée, alors que l'autre travaille pendant plusieurs mois ou peut-être plusieurs semaines à préparer un dossier, qui est à la cour deux jours ou trois jours, qui rencontre le client, qui... Bon, enfin, on connaît la procédure. Alors, il y a un problème là, c'est certain, et on va tenter d'y trouver une solution d'ici la fin de l'année. J'espérerais y arriver par la méthode de la négociation et de la discussion, mais, si ce n'est pas possible, on ira par la méthode de la réglementation et qui sera imposée à l'ensemble du Québec.

M. Jutras: Dernière question. Concernant les témoins, je pense qu'un problème qu'il y a, c'est que, tout le monde étant convoqué à la cour à 9 h 30... Ça, ça en est un gros problème. Bon. C'est impossible que toutes les causes commencent à 9 h 30. C'est peut-être une chose, ça, à laquelle il serait possible de remédier. Ce n'est pas défendu que les juges puissent céduler des causes à 14 heures, dans l'après-midi, et qu'ils en cédulent tant à 9 h 30. Je pense que, déjà, on réglerait une bonne partie du problème des témoins plutôt que de se retrouver avec 150 personnes en cour à 9 h 30, puis tu ne sais pas à quelle heure tu vas passer.

M. Bégin: Bien, c'est un bel exemple de ce qu'on soulevait tantôt. La charte des témoins, c'est de dire: Écoutez, vous pouvez, avocats, planifier un petit peu votre journée; vous savez que vous avez, mettons, 10 témoins; je comprends qu'entre le deuxième et le troisième, de savoir s'il va passer le matin ou l'après-midi, c'est difficile à répondre, mais il est évident que le septième et le huitième, il y a peu de chances que vous l'entendiez avant l'après-midi; pourriez-vous, s'il vous plaît, lui signifier qu'il commencera à 14 heures? C'est une possibilité.

Deuxièmement, pouvons-nous organiser le temps de la cour pour qu'il y ait des sessions du matin et des sessions de l'après-midi, pour que les personnes soient assignées non pas, comme vous dites, collectivement à 9 h 30 à chaque matin pour être entendues à 16 heures, mais plutôt à des heures différentes? C'est toutes ces questions-là qu'on veut aborder et c'est la première fois qu'on le fait. Peut-être qu'on n'arrivera pas du premier coup à trouver toutes les solutions, mais je pense qu'en se penchant sérieusement sur la question, comme on l'a fait dans un premier temps, et en préparant une charte on va y arriver et éviter que les gens aient une très mauvaise perception de la justice.

D'ailleurs, on me souligne que c'est une pratique qui est faite au Tribunal de la jeunesse, et ça fonctionne très bien. Je pense qu'avec un peu de discipline on devrait être capable d'y arriver à la Cour supérieure et à la Cour du Québec. Moi, je pense que c'est irrespectueux de quelqu'un de l'amener à 9 h 30 quand il va être entendu à 16 heures, sauf circonstances véritablement exceptionnelles. Ça n'a aucun sens.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci, M. le ministre.

M. Jutras: C'est sûr que ça peut empêcher un juge de finir à midi quand, des fois, comme on dit, ça déboule et ça va vite et tout est terminé à midi, et là il serait obligé de revenir à 14 heures...

M. Bégin: Oui.

M. Jutras: ...mais, moi, je pense que ça s'impose.

M. Bégin: Mais ce sera toujours l'exception. Normalement, une évaluation correcte du temps de cour, après 20 ans ou 25 ans, un juge, il sait à quoi s'en tenir et il sait à peu près évaluer, les avocats de même. Alors, on est capable de voir à quel moment on va terminer. Puis, deuxièmement, on n'est pas obligé de terminer à midi; on peut finir à 12 h 20, 12 h 25, ou à midi. Sachant qu'on ne pourra pas entendre les témoins parce qu'ils ont été assignés l'après-midi, bien, on arrête à midi et on reprend à 14 heures, et là tout le monde est présent. Alors, je pense que, dans l'ensemble, on est capable de mieux fonctionner. C'est ça qu'on recherche par la charte des témoins, trouver des techniques pour qu'on soit plus correct à l'égard des gens.

M. Jutras: Vraiment la dernière question, c'est là-dessus.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, mais c'est parce que j'ai d'autres demandes.

M. Jutras: Dans votre texte, vous utilisez toujours l'expression «les parties». Concernant les témoins, vous dites: Le deuxième principe engagerait les parties à renseigner le témoin et le troisième principe engagerait les parties à porter une attention particulière aux besoins des témoins. «Les parties», voulez-vous dire «demandeur» et «défendeur»?

M. Bégin: Les avocats, c'est les...

M. Jutras: Oui. Bien, je pense qu'il va falloir aussi que la magistrature s'imprègne de ça et applique ça, parce que j'ai déjà vu des juges, aussi, dire: Les témoins, qu'ils attendent, puis qu'ils soient là à 9 h 30, puis...

M. Bégin: Remarque très pertinente. Les parties ne sont pas simplement les avocats, mais la magistrature, et ils seront signataires, avec le Barreau, les membres du Barreau, la magistrature et les ministères, de cette charte en question, pour s'assurer justement que tout le monde contribue. Et un avocat pourra, s'appuyant sur cette charte, dire: M. le juge, je m'excuse, mais je vous demanderais de faire telle chose. Alors, c'est tout le monde qui va être obligé de respecter cette charte.

(21 h 50)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci, M. le ministre. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui, merci, M. le Président. Je vais référer le ministre au volume des crédits concernant les demandes de renseignements particuliers et notamment aux pages 46 et suivantes.

M. Bégin: 46 ou 48?

M. Mulcair: Quarante-six, fourty-six.

M. Bégin: Fourty-six.


Autres sujets

M. Mulcair: Sechs und vierzig. À la page 47, il y a une référence à un contrat à Me Raymond Doray, avocat bien connu et très respecté de Montréal, dans le cadre d'une représentation de la Cour du Québec et d'un juge devant la Cour supérieure dans le cadre d'une requête en révision judiciaire. Est-ce que le ministre, ou un de ses proches collaborateurs, est en mesure de nous donner le détail de cette cause?

M. Bégin: Ça ne devrait pas être long.

(Consultation)

M. Bégin: Avec votre permission, Me Samson pourrait répondre à cette question, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, Me Samson.

M. Samson (Jean-K.): C'est un mandant qui a été donné, si mon information est juste, dans le cadre du débat que le journal The Gazette a entrepris dans le cadre d'une demande d'accès à l'information. Je ne me souviens plus du fond de la question, mais c'était dans le cadre d'une demande d'accès à l'information.

M. Boulerice: ...à moins que je ne me trompe, est-ce que ça se peut que ce soit le ministère de la Justice qui ait assumé, pour l'Assemblée nationale, ces représentations-là, parce que The Gazette voulait avoir accès à tous les documents de gestion interne des députés de l'Assemblée nationale? Non?

M. Samson (Jean-K.): Ce n'est pas impossible que ce soit ce dossier-là, effectivement.

M. Boulerice: Je crois que c'est cela. Si vous me donnez la date, je pourrais peut-être vous... J'étais au Bureau, à ce moment-là.

M. Samson (Jean-K.): C'était à propos d'un jugement du juge Michel Gagnon, qui a été porté en évocation devant la Cour supérieure, et ce n'est pas du tout impossible que ce soit ce dossier-là, effectivement.

M. Boulerice: Sous réserve, moi aussi, je crois que c'était cela.

M. Mulcair: Vu que c'est de l'information publique et si on n'a pas tous les détails ce soir, juste pour nous aider, peut-être que le ministre et ses collaborateurs pourraient nous faire parvenir cette information-là. Est-ce que ça va?

M. Bégin: Tout à fait.

M. Mulcair: Merci. L'autre question que nous avons dans cette liste des contrats qui sont donnés à des avocats pour certaines représentations concerne Claude Melançon, qui, vous remarquerez, M. le Président, a la médaille d'or du nombre, du moins, de mandats qui sont inclus dans la liste et l'ensemble de ces mandats concerne la SDI, c'est-à-dire la Société de développement industriel du Québec. Ma question pour le ministre est de tout simplement viser à savoir: Est-ce qu'il y a une sorte de balise ou une norme qui existe pour aider un organisme d'État, comme la SDI, pour savoir quand ce serait plus rentable d'embaucher un élément permanent interne? Si on regarde la liste complète ici, vite fait, je vous avoue qu'à cette heure-ci je me fie plus ou moins sur mes maths, mais je pense que c'est à peu près de l'ordre de 40 000 $ que j'avais calculé dans l'ensemble des mandats de M. Melançon l'année dernière. Et il semble y avoir une sorte d'arrangement avec la SDI, où c'est tout le temps lui qui la représente. Est-ce qu'il y a une norme qui existe, un barème, une sorte d'aide que vous offrez aux organismes comme ça pour leur dire: Écoutez, ce serait plus rentable pour les contribuables que vous ayez un «in house attorney»?

M. Bégin: Alors, avec votre permission, Me Jean-K. Samson va répondre à la question que pose mon collègue de Chomedey.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Me Samson.

M. Samson (Jean-K.): Merci, M. le Président. Effectivement, lorsqu'on analyse ce type de mandats, et la Société de développement industriel est un cas type qui a un petit service juridique interne et fait appel à des services externes à des fins contentieuses pour la représentation devant les tribunaux... On a eu l'occasion à au moins une ou deux reprises de discuter avec eux sur l'opportunité de procéder comme ça et, effectivement, dans l'évaluation globale des mandats annuels et des montants annuels, on convenait, tout le monde, que ce n'était pas une méthode qui était onéreuse pour eux, que c'était probablement la meilleure méthode, plutôt que d'avoir un plaideur, et un seul, à l'interne, et qui se balade partout.

M. Mulcair: Bien, je remercie beaucoup M. Samson pour sa réponse. Ça nous rassure d'apprendre qu'effectivement ce genre d'analyse est fait d'une manière régulière et j'imagine que, si jamais on arrivait, à la SDI, à un volume x, bien, l'analyse, le résultat de l'analyse pourrait être autre et vous pourriez, à ce moment-là, leur suggérer d'avoir quelqu'un à temps complet à l'interne.

Je sais, M. le Président, que la détermination des honoraires des avocats est tout, sauf une science exacte, mais je vais me permettre quand même de poser au ministre une question. C'est plus un exemple que d'autres choses. À la page 51, on trouve, l'une après l'autre, deux personnes qui ont fait des représentations pour le gouvernement ou du moins qui avaient des contrats pour le faire. Dans le deuxième cas, ce n'est pas encore chiffré, mais Louis-Philippe Robert que, je vous avoue bien sincèrement, je ne connais pas, mais j'apprends que... Est-ce que c'est 250 $? Est-ce que le P, c'est à l'heure?

Mme Signori: Tarif par dossier.

M. Mulcair: Tarif par dossier?

Mme Signori: Tarif par dossier. Vous avez une légende.

M. Mulcair: O.K. Merci beaucoup. Ça m'aide, ça résout cette partie du problème. Quand il y a des différences... Si on regarde Henri Brun, qui est à 200 $ de l'heure, ou Jacques... je pense que ce n'était pas par dossier dans le cas de M. Brun. Oui, il était à 200 $ de l'heure. Et quelqu'un comme Raphaël Schachter, qui est un criminaliste très bien connu à Montréal, qui est à 100 $ de l'heure. Qu'est-ce qui guide le ministère dans cette... Le premier exemple que je donnais, c'était Henri Brun, qui facture le ministère à 200 $ de l'heure. Sa référence se retrouve à la page 47. Le deuxième, c'est Raphaël Schachter, qui, lui, se retrouve à la page 51, et, comme je le mentionnais au départ, je les donne plus comme exemples que d'autres choses. Mais j'essaie de savoir ce qui guide le ministère pour cette détermination-là parce que, dans ce cas précis, c'est deux avocats avec une expérience à peu près semblable au Barreau, très respectés dans leur domaine. Qu'est-ce qui guide le ministère là-dedans pour arriver à un résultat où l'un est payé littéralement le double de l'autre?

M. Bégin: Il y a plusieurs éléments qui entrent en ligne de compte. Par exemple, le premier, c'est le nombre d'années de Barreau qui va déterminer jusqu'à un certain point le montant réclamé ou payé. Le deuxième va être la complexité du dossier en cause. Alors, on peut avoir des dossiers extrêmement complexes et d'autres qui ne le sont pas. Le troisième élément qui peut être tenu en compte, c'est l'expérience que la personne a, et ça, ce n'est pas toujours relié nécessairement aux années de Barreau. Vous pouvez avoir 10 années de Barreau de pratique générale et 10 années spécialisées, mais ça ne vous donne pas la même expérience. Vous avez aussi le type de mandats particuliers dans lesquels vous êtes. Alors, vous avez là un ensemble d'éléments, je dirais même à la limite la rareté de certaines expertises qui font que des personnes deviennent quasiment indispensables ou incontournables et ce sont les meilleures. Donc, les tarifs peuvent être plus élevés. L'urgence de la situation pourrait être aussi, à la limite, un autre élément. Donc, ce sont des éléments qui se soupèsent. Quelqu'un pourrait arriver à une conclusion différente sans nécessairement avoir tort, ou le premier non plus. Mais, généralement, ce sont les éléments qui sont tenus en compte.

M. Mulcair: À moins que je ne me trompe, M. le Président...

M. Bégin: Pardon? Excusez. Me permettez-vous de compléter juste une dernière chose? Mais, dans tous les cas, à la limite, le Trésor doit autoriser le dépassement de la norme de 100 $, je pense que c'est 100 $ de l'heure.

M. Mulcair: Oui, c'est ça.

M. Bégin: Alors, ça doit être autorisé pour s'assurer qu'il n'y a pas là quelque chose d'inacceptable. Et c'est arrivé déjà que des mandats soient refusés au montant qui a été demandé ou recommandé.

M. Mulcair: Nous sommes tous familiers avec les dépassements, ayant suivi le débat sur les contrats de M. Le Hir avec beaucoup d'intérêt.

Une voix: ...

M. Bégin: Mais je n'ai pas encore eu... Ha, ha, ha!

(22 heures)

M. Mulcair: Mais, M. le Président, ce que nous aurions voulu savoir, justement, c'est si ce tarif de 100 $ de l'heure pour les dépassements, qui n'a pas été changé depuis des lustres, le ministre songe à le changer. Et là je suis en train non pas de lui dire que c'est lui qui a tort, parce que 100 $ de l'heure, effectivement, de nos jours, dans la plupart de ces cas-là, on est en train de presque inviter les gens... Je l'ai vécu lorsque j'étais à l'Office des professions du Québec. Il y avait du délibéré, rédaction à un tarif horaire très bas, mais je vais vous dire une affaire, il y avait du délibéré et de la rédaction. C'est des choses très difficiles à compenser. Mais est-ce que ce ne serait pas une manière plus ouverte et limpide de procéder que de réviser ce tarif-là avant d'être obligé d'aller en dépassement?

M. Bégin: Je vous avoue que je suis pris devant un problème très complexe: couper l'eau ou bien augmenter les tarifs.

Une voix: ...

M. Bégin: Ha, ha, ha! Alors, là, ça, c'est une belle question. 100 $ de l'heure, je vous avoue honnêtement que, dans certains cas, c'est un peu, quasiment choquant pour un avocat qui travaille en pratique privée qui a un tarif moyen de 150 $, 175 $, 200 $ de l'heure et à qui on demande de donner un service et à qui on dit: Bien, voilà, c'est 100 $ de l'heure. Tout de suite en partant, il y a un problème, c'est évident. Donc, ça nous amène à faire des dérogations fréquentes, alors que, peut-être, un rehaussement du tarif réglerait une partie de ces problèmes-là. D'autre part, 100 $, c'est un chiffre un peu magique. Pour des gens, dépasser 100 $ de l'heure... même, déjà, 100 $ de l'heure, c'est absolument impensable, c'est inacceptable. Alors, je pense que, pour un bout de temps, on va vivre avec ce montant de 100 $ de l'heure.

M. Mulcair: M. le Président, nous sommes rendus au stade où on fera quelques remarques très brèves de conclusion, parce que...

M. Paquin: ...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très rapidement.

M. Paquin: À la page 48, il y a André JoliCoeur, 150 $ de l'heure, tarif dérogatoire en voie d'approbation par le Conseil du trésor, comme conseiller et, le cas échéant, pour représenter le gouvernement dans le regroupement de certaines entreprises. Alors, pourquoi est-ce qu'il s'agit d'un tarif dérogatoire en voie d'approbation?

M. Bégin: Le 150 $ de l'heure, c'est un tarif qui est dérogatoire; c'est 100 $ de l'heure.

M. Paquin: Alors, ce qui veut dire que tous ceux qui sont au-dessus de 100 $ ont tous dû recevoir une approbation du Conseil du trésor...

M. Bégin: Oui.

M. Paquin: ...pour tarif dérogatoire.

M. Bégin: Oui.

M. Paquin: Alors, si on en regarde le nombre, là, effectivement, il est temps d'y penser.

M. Bégin: Bien, comme le disait mon collègue de Chomedey il y a quelques minutes, tout le monde reconnaît dans le milieu que 100 $ de l'heure, ce n'est certainement pas représentatif des avocats qui rencontrent les critères que j'ai mentionnés tantôt, c'est clair et net. C'est un tarif minimum très bas actuellement en matière judiciaire. Vous n'avez certainement pas, sur cette base-là, la complexité, l'expérience, le type de mandats, certainement pas. Vous avez un avocat qui travaille à un tarif bas. Alors, c'est normal qu'on ait des dépassements.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Messieurs, il nous reste six minutes. Alors, puisque vous vouliez faire des remarques finales, je vous inviterais à faire ça, chacun, dans une minute et, ensuite, nous allons procéder à l'adoption des crédits.


Conclusions

M. Mulcair: Alors, tout simplement, de notre côté, on tient à remercier le ministre et l'ensemble de ses collaborateurs qui l'accompagnent depuis jeudi dernier pour leur excellent travail de préparation, parce qu'on a eu, à très, très peu d'exceptions près, des réponses à nos questions, puis, dans les autres cas, bien, c'est soit une question de l'échéancier législatif qui fait qu'on le saura sous peu ou, dans d'autres cas, des réponses qui doivent venir sous peu.

Je laisserais le ministre avec un souhait, et je ne le mettrai pas sous forme d'une question... mais c'est peut-être quelque chose qu'on pourra poursuivre ensemble. C'est la question qui a été soulevée par certains groupes communautaires de citoyens en ce qui concerne leurs soupçons de ce que, eux, ils appellent la collusion entre certains procureurs et le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal. C'est un sujet extrêmement délicat. Et, tout en avouant mon admiration et mon respect sans bornes pour notre excellent service de police à Montréal, à Laval et dans la province avec la Sûreté, et à bien d'autres endroits, on devrait peut-être commencer à étudier les modèles qui existent dans d'autres juridictions pour s'assurer que le public se sente rassuré lorsqu'il y a des enquêtes qui sont menées dans des cas comme Martin Suazo, ou d'autres cas comme Marcellus François, Anthony Griffin. Il me semble que, même si c'est une question qui, d'une manière générale, relève du ministère de la Sécurité publique, étant donné la responsabilité du ministre de la Justice pour la détermination des poursuites dans ces cas-là, il y aurait peut-être un bon travail collaboratif. Et ce n'est vraiment pas un sujet sur lequel il serait opportun de faire autre chose que d'offrir notre collaboration. Mais il me semble que tout le public y gagnera puis l'administration de la justice également.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Saint-Jean, très rapidement.

M. Paquin: M. le Président, je voudrais aussi remercier le ministre et son équipe pour la qualité des réponses qu'on a eues. Dans les questions que j'aurais aimé pouvoir poser, en fait, que j'avais mentionnées dans mes préoccupations, dans mes remarques préliminaires, il y en a quelques-unes qu'on n'a pas pu aborder ou qu'on a abordées partiellement. Notamment sur les pensions alimentaires, je pense qu'il y aurait eu des choses qu'on aurait pu explorer ensemble; aussi, sur la question de l'arrimage entre les deux ministres, pour ce qui est de la question de la Charte des droits et libertés de la personne et les amendements qui sont prévus.

Un autre point qui aurait été intéressant, c'est d'examiner le programme législatif qui s'en vient, non seulement pour qu'on puisse un peu planifier notre temps comme commission, mais aussi parce que plusieurs des éléments législatifs vont avoir des incidences sur les crédits, sur les budgets. Mais on aura d'autres occasions de revenir là-dessus. En terminant, je voudrais vous remercier, au nom de notre formation politique, pour la qualité de vos réponses.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Bégin: À mon tour, je voudrais remercier tout d'abord mes collaborateurs, les sous-ministres, les présidents d'organisme qui ont assisté à la commission et qui ont aussi travaillé à préparer les réponses aux questions que l'opposition avait à poser. Je voudrais remercier également les membres de la commission, tant du côté de l'opposition que du côté du gouvernement, pour les questions qui ont été posées. Je pense qu'on a eu l'occasion de faire un survol de l'ensemble des dispositions, et c'est extrêmement enrichissant, je le pense. Les réponses ne peuvent pas être meilleures que les questions; les questions étant bonnes, les réponses, elles, peuvent être un peu moins bonnes. Mais je pense que, dans l'ensemble, on a fait un bon travail.

Je voudrais peut-être terminer et répondre à ce que vous venez de dire, M. le député de Saint-Jean, concernant l'agenda législatif. On sait que, déjà, il y a le projet de loi n° 130, qui avait été déposé, sur la réforme de la justice administrative; il y a le projet de loi n° 131 sur l'éthique et la déontologie; il y a le projet de loi n° 133 relatif à la Charte; il y a l'aide juridique; il y a aussi l'article 585 du Code civil, où on a dit qu'on allait légiférer. Alors, vous avez déjà là un menu assez complet de ce qui s'en vient, d'ici le mois de juin.


Adoption de l'ensemble des crédits

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci, M. le ministre. Est-ce que le programme 1, Formulation de jugements, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Mulcair: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que le programme 2, Administration de la justice, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Mulcair: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que le programme 3, Aide aux justiciables, est adopté?

M. Mulcair: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que le programme 4, Organisation et réglementation des professions, est adopté?

M. Mulcair: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'ensemble des crédits du ministère de la Justice pour l'année financière 1996-1997 sont adoptés?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Madame, messieurs, nous ajournons donc à demain, 10 heures, les travaux de notre commission et nous procéderons à l'étude des crédits budgétaires dévolus aux Affaires intergouvernementales canadiennes pour l'année 1996-1997, en cette salle, à compter de 10 heures. Merci.

(Fin de la séance à 22 h 9)


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