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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mardi 5 mai 2015 - Vol. 44 N° 39

Ministère de la Justice


Ministère de la Justice, volet Lois professionnelles


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Table des matières

Lois professionnelles

Documents déposés

Discussion générale

Justice

Remarques préliminaires

Mme Stéphanie Vallée

M. Alexandre Cloutier

Mme Nathalie Roy

Documents déposés

Discussion générale

Adoption des crédits

Adoption de l'ensemble des crédits

Autres intervenants

M. Gilles Ouimet, président

M. Sylvain Pagé

M. Richard Merlini

M. Jean Boucher 

M. Guy Ouellette

M. Guy Hardy

Mme Manon Massé

*          M. Jean Paul Dutrisac, Office des professions du Québec

*          M. Mathieu Proulx, Tribunal administratif du Québec

*          M. Denis Roy, Commission des services juridiques

*          M. Jacques Frémont, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse

*          Mme Annick Murphy, Directrice des poursuites criminelles et pénales

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Note de l'éditeur : Les crédits du volet Condition féminine du ministère de la Justice ont été étudiés à la Commission des relations avec les citoyens le 30 avril 2015.

Journal des débats

(Onze heures)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, prenez place, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Bon avant-midi à tous. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux, afin de ne pas perturber nos travaux. Là, quand le président dit ça, généralement, on est supposés regarder nos appareils pour s'assurer qu'ils sont en mode silencieux. Ceux qui n'en ont pas, c'est encore mieux.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Hardy (Saint-François) remplace M. Rousselle (Vimont) et M. Pagé (Labelle) remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, bienvenue à ceux qui se joignent à la Commission des institutions pour ces travaux.

Lois professionnelles

La commission est réunie afin de procéder à l'étude du volet Lois professionnelles des crédits budgétaires du portefeuille Justice pour l'exercice financier 2015‑2016. Nous recevons avec plaisir Mme la ministre de la Justice et les personnes qui l'accompagnent, de même que je souligne la présence du député de Labelle, porte-parole de l'opposition officielle en matière de lois professionnelles — bonjour, M. le député — ainsi que Mme la députée de Montarville, porte-parole en matière de justice du deuxième groupe d'opposition. Bienvenue à tous.

Compte tenu des règles et des ententes, il y aura des échanges entre les groupes parlementaires, et les députés du gouvernement disposent d'une période de 30 minutes environ; l'opposition officielle, de 17 minutes; et le deuxième groupe d'opposition, d'environ 11 minutes. Je tiens à vous rappeler, comme je le fais d'habitude, que le rôle de la présidence n'est pas de contrôler la qualité des réponses. De la même façon, nous encourageons des échanges, le plus d'échanges possible, et, dans ce sens-là, il est utile de respecter une certaine proportionnalité, mais la présidence n'a pas pour but de chronométrer les interventions et de respecter un cadre strict au-delà du bloc global attribué à chaque député.

Documents déposés

Avant de débuter la période d'échange, je dépose les réponses aux demandes de renseignements. Voilà qui est fait.

Discussion générale

Et je me tourne immédiatement vers M. le député de Labelle pour un premier bloc d'échange. À vous la parole.

M. Pagé : Oui. Merci, M. le Président. Alors, je vous salue, également les personnes qui vous accompagnent, Mme la secrétaire, chers collègues députés, bien sûr Mme la ministre, et les gens qui vous accompagnent également, les députés aussi de la deuxième opposition. Alors, bonjour à tous et à toutes.

Je voudrais, compte tenu qu'on a peu de temps, aller directement sur un dossier qui a fait couler beaucoup d'encre dans les dernières années, un peu moins dans la dernière année, parce qu'on souhaite toujours qu'un ménage soit fait et que... Il y a un rapport qui vous a été présenté dernièrement. Et on pouvait lire, le 20 avril dernier, dans le journal Le Soleil, avec Michel Corbeil : Les ingénieurs appelés à faire le ménage, et, d'entrée de jeu, on disait qu'on doit nettoyer le climat pourri qui, malheureusement, persiste au sein de cet ordre professionnel. Et c'est important de dire que, malgré le nombre de plaintes qui a monté de façon fort importante dans les dernières années, ça ne demeure que quelques individus par rapport aux milliers, aux milliers d'ingénieurs, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a une problématique pour laquelle il faut s'attarder et qu'il faut régler pour évidemment la sécurité du public.

Un rapport vous a été remis il y a quelques mois. Notamment, il y a tout l'aspect de la cotisation qui doit être augmentée auprès des ingénieurs. On parle de formation continue, la rémunération aussi pour un personnel permanent pour ne pas qu'on perde l'expertise. Ce rapport n'est toujours pas public. J'aimerais savoir s'il va être rendu public, d'une part, et, d'autre part, de quelle façon vous allez vous assurer que les recommandations de ce rapport seront faites de façon rigoureuse.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, M. le Président, je remercie le député de Labelle de sa question.

Je vais prendre juste quelques secondes simplement pour présenter les gens qui m'accompagnent : donc, à ma droite, le président de l'Office des professions, Me Jean Paul Dutrisac, qui nous accompagne, et Mme Lucie Boissonneault. Et je suis accompagnée de l'équipe de direction de l'Office des professions et de mon conseiller politique, Me Jad Barsoum.

Alors, je remercie mon collègue pour sa question. Effectivement, il y avait eu, au cours... je dirais, depuis 2013, certaines préoccupations qui ont fait l'état... ou qui ont fait la manchette des journaux, une certaine friction au sein même de l'Ordre des ingénieurs. Et, lorsque je suis arrivée en fonction en avril dernier, il y avait une friction entre certains groupes qui s'opposaient notamment à une hausse des cotisations. La préoccupation derrière tout ça... Parce qu'il faut quand même se rappeler que l'Ordre des ingénieurs a comme mission première la protection du public. Alors, les ordres professionnels ont cette mission première de protection du public, et une des préoccupations était : Est-ce que l'ordre avait suffisamment de ressources pour lui permettre de mener à bien son objectif de protection du public, et donc de pouvoir notamment donner suite aux plaintes qui avaient été logées? Parce que, il ne faut pas se cacher, suite à la commission Charbonneau, il y a eu une multiplication de plaintes qui ont été formulées à l'Ordre des ingénieurs. Maintenant, il fallait s'assurer que l'Ordre des ingénieurs dispose des ressources nécessaires pour pouvoir traiter ces plaintes-là. Certaines étaient peut-être non fondées, mais encore fallait-il prendre le temps de les analyser. Et l'autre élément : Est-ce que le syndic était suffisamment équipé? Est-ce que le syndic, et l'équipe du syndic, au sein de l'Ordre des ingénieurs disposait des ressources nécessaires pour lui permettre de procéder aux inspections annuelles, pour lui permettre de bien encadrer l'ordre et permettre aussi à l'ordre d'offrir toute cette formation-là?

C'est important puis c'est important de mettre en contexte ce qui s'est passé. Et, suite à des frictions importantes à l'interne, nous avons demandé à ce qu'un accompagnement se fasse auprès de l'ordre, et cet accompagnement-là a donné suite effectivement à un rapport qui nous a été remis par les deux accompagnateurs, Dr Lamontagne et Me Pilote.

Maintenant, suite à ce rapport-là, il y a eu une rencontre. J'ai rencontré le président de l'ordre en compagnie du président de l'Office des professions afin de mettre en oeuvre les recommandations. Le président de l'ordre m'a assurée qu'il était de leur intention de donner suite aux recommandations, puisqu'ils avaient déjà amorcé une campagne et un travail à l'interne qui visaient justement à redorer l'image de la profession, parce qu'il y a cet élément-là aussi qui est important. L'image de la profession des ingénieurs avait été aussi, largement, affectée et malmenée. Donc, pour que l'image de la profession soit redorée, il fallait assurer au public que l'ordre professionnel était à même de mener à bien et de bien protéger le public, donc que les ressources soient données. Alors, bon, le rapport m'a été remis le 3 février 2015, et la rencontre a eu lieu le 23 mars dernier. Et il y aura, suite à cette rencontre-là, la mise sur pied d'un comité, un comité qui a comme objectif de mettre en oeuvre les recommandations. Et il y a un lien qui se fait régulier, un lien régulier entre le président de l'Office des professions et l'Ordre des ingénieurs.

Donc, c'est un suivi qui est toujours en cours, c'est un suivi qui nous préoccupe et pour lequel nous portons une attention soutenue.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : On avait compris que, pour mettre en application plusieurs recommandations, le financement, donc le niveau de cotisation, qui est toujours à 310 $, on a rajouté 90 $ de plus l'année dernière en assemblée générale. Et on recommande très fortement dans le rapport... M. Lamontagne et M. Pilote recommandaient très fortement cette augmentation.

Est-ce que vous avez l'assurance que cette augmentation devrait passer à la prochaine assemblée générale annuelle?

• (11 h 10) •

Mme Vallée : Bien, évidemment, tout est sujet à l'approbation des membres. Donc, l'assemblée générale annuelle aura lieu, et, à ce moment-là, les membres seront à même de se prononcer évidemment sur les recommandations qui seront formulées.

C'est certain qu'il y a toujours, il existe toujours... et il ne faut pas mettre ça de côté, il existe toujours, au sein de l'ordre professionnel, certains groupes qui ne sont pas très chauds à l'idée de hausser les cotisations professionnelles. Maintenant, si on compare les cotisations professionnelles de l'Ordre des ingénieurs avec les cotisations professionnelles des autres professions, qu'il s'agisse des membres du Barreau, de la Chambre des notaires, du Collège des médecins, on parle de cotisations professionnelles qui sont beaucoup plus importantes et qui justement visent à doter les syndics des professions des outils requis pour pouvoir mener à bien leurs inspections et aussi assurer les services de formation.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui, effectivement. Et, dans cet article de Michel Corbeil, on soulève même la question d'aller jusqu'en tutelle si jamais on n'arrivait pas à prendre les moyens nécessaires. On parle de moyens exceptionnels. Ça pourrait être quoi, les moyens exceptionnels? Est-ce qu'on pourrait envisager une tutelle si jamais on ne réussissait pas à aller de l'avant avec les recommandations?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Vous savez, M. le Président, ce n'est jamais la solution qui est privilégiée, mais c'est une solution qui est prévue au Code des professions. C'est une solution. Les outils sont là. Maintenant, je préfère de loin la voie de l'accompagnement, puisque je considère que nous avons... Le rapport donne des pistes d'accompagnement fort intéressantes à l'ordre. L'ordre a la responsabilité de faire le nécessaire afin de protéger le public.

Les rencontres et les échanges que j'ai eus avec M. Sauvé, le président de l'ordre, ne me permettent pas de croire que l'ordre n'a pas l'intention d'aller de l'avant. Alors, lorsque j'ai des échanges avec M. Sauvé, oui, je vois... Et je vois le visage de M. le Président. Je m'excuse, je me suis mal exprimée. En fait, nous avons une très bonne collaboration de la part du président de l'Ordre des ingénieurs et de son conseil, de son comité exécutif. Alors, pour le moment, je ne pourrais pas vous dire qu'aujourd'hui la tutelle est une solution que j'envisage, puisque je vais permettre au comité de faire le travail en compagnie de l'Office des professions, en compagnie des accompagnateurs. J'ai senti cette ouverture, j'ai senti cette volonté ferme de la part du comité exécutif de, oui, vouloir assurer la protection du public, de vouloir redorer la cote de popularité de la profession. Et d'ailleurs M. Sauvé avait entamé une campagne, une tournée du Québec afin de se rendre dans les régions pour prendre le pouls des membres, ce qui l'amène aussi à pouvoir mieux comprendre les défis et les enjeux.

Alors, pour le moment, je vous avoue que je n'en suis pas là, puisque les démarches que nous avons faites ont toujours été reçues bien correctement, avec beaucoup d'ouverture, de la part du président et de son équipe.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Le temps passe très rapidement. Évidemment, j'aurais eu d'autres questions, mais on va essayer d'aborder au moins un autre sujet.

Il y a quelques mois... janvier, février derniers, le Conseil des ministres a adopté un règlement permettant aux assistants, assistantes optométriques de pouvoir poser des gestes qui sont normalement réservés aux opticiens d'ordonnances. On comprend que c'est arrêté dans le temps, c'est pour une période de deux ans, sauf que, pour poser ces gestes-là, les gens... l'office des opticiens d'ordonnances nous fait remarquer que ça prend une formation collégiale. C'est une formation de plus de 2 600 heures, c'est 2 670 heures, effectivement, et dont 1 400 — j'ai été surpris — dont 1 400 sont justement liées à la formation des gestes, des actes qui vont être posés par les gens qui, à partir de ce règlement, pourront poser ces gestes avec seulement 72 heures de formation.

Vous savez très bien, vous avez vu comme moi les lettres, les communiqués en provenance de la Fédération des cégeps, et également les personnes âgées, les regroupements de personnes âgées, et d'autres personnes qui se sont montrées très, très inquiètes à l'égard de ce règlement et surtout de cette formation, qui somme toute semble bien minime, 72 heures, par rapport à ce que normalement ça demande.

Alors, ma question, elle est simple : Avant de prendre cette décision, quel rapport, quelle évaluation vous avez eus qui vous permettent de croire que ces 72 heures seront suffisantes pour poser ces gestes sans nuire à la santé du public? Parce que je pourrais vous citer plusieurs personnes qui sont très, très inquiètes, et là on parle évidemment de santé publique. Est-ce que vos collègues qui sont à la Santé publique ou encore le ministre de la Santé vous ont émis un rapport avant de prendre cette décision? Est-ce que vous pourriez le déposer si le rapport existe?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre, et je souligne qu'il nous reste 3 min 30 s à ce bloc d'échange.

Mme Vallée : D'accord. Je pense qu'on pourra y revenir, quitte à prendre une partie du bloc. Je pense, c'est important de faire le point sur la situation. Il y a eu une grosse campagne publique dans ce dossier-là. Il y a actuellement un bris de service dans certaines régions du Québec.

Alors, il faut comprendre que les optométristes et les opticiens ne posent pas les mêmes gestes et il y avait un bris d'opticiens dans certaines régions du Québec. 65 % des opticiens sont concentrés dans les régions de Montréal, Québec et la Montérégie. Et donc il y avait des bris de service dans les régions du Québec. Il y a eu un jugement rendu par la Cour supérieure qui venait interdire certains gestes posés par les assistantes-optométristes. Alors, suite à ce jugement-là, et compte tenu des failles et des manques des ressources, il était opportun de trouver une solution temporaire pour permettre la formation et permettre que de nouveaux opticiens puissent s'installer dans les régions. Maintenant, il faut aussi bien comprendre que le règlement ne vise que quatre actes précis, ne vise pas tous les actes posés par les opticiens, quatre actes que pourront poser les assistants et assistantes optométriques, mais il s'agit, par exemple, du choix d'une monture, et ces actes-là sont faits sous la supervision d'un optométriste, évidemment, et, le choix d'une monture, l'accompagnement évidemment sera en fonction des indications du professionnel qui a analysé le contenu de l'ordonnance. Il s'agit des prises de mesures, alors mesurer, hein, les lunettes, là. Alors, les mesures sont prises en lunetterie seulement et sont validées par le professionnel compétent, donc elles ne peuvent être envoyées sans que l'optométriste ait validé. Il s'agit de l'ajustement, donc — je m'excuse, Jad — l'ajustement, les vis sur les lunettes, là, alors ajuster la vis. Actuellement, compte tenu du jugement, l'assistante-optométriste ne pouvait même pas visser la vis, et les gens devaient attendre que l'opticien soit présent ou que l'optométriste se libère. Alors, on s'entend que les bris de service pour les personnes âgées, dans certaines régions, étaient importants.

Alors, ça, c'est le type d'ajustements qui peut être fait maintenant, mais l'assistant va ajuster les lunettes seulement sous supervision du professionnel compétent. Et l'Ordre des optométristes évidemment indique que le professionnel doit valider l'ajustement effectué auprès de certaines clientèles. Donc, les clientèles qui ont un profil particulier, qui ont une problématique particulière ne peuvent faire visser leurs vis sans que l'optométriste soit présent. Mais, par exemple, je vois que M. le député de Labelle porte de bonnes lunettes, il pourra aller faire ajuster ses vis par un assistant-optométriste en fonction du règlement.

Il y a également la vérification sommaire du confort. Alors, est-ce que vos coussinets...

Une voix : ...

Mme Vallée : Mais c'est important de le mentionner, M. le Président, parce qu'on prétend que la santé oculaire des citoyens est à risque en raison de ce règlement-là.

Alors, les gestes sont somme toute très restreints, et tous ces gestes-là doivent être posés sous la supervision d'un optométriste. Maintenant, l'analyse de l'ordonnance, l'assistant ne peut pas la faire, et ça relève exclusivement de l'opticien, comme c'est le cas. Le choix de la lentille ophtalmique, encore là, l'opticien le fait en toute autonomie, ce n'est pas permis pour les assistants optométriques. Le taillage des verres, ce n'est pas permis par l'assistant optométrique. Valider la conformité des lunettes avec les données de prescription, ce n'est pas un geste que l'on a permis. Alors, on a vraiment restreint le champ à un nombre d'actes limité justement pour éviter de porter un risque et les assistants optométriques qui posent ces gestes-là auront aussi l'obligation d'avoir suivi une formation de 72 heures.

Alors, M. le Président, il y a quand même tout un encadrement qui se fait et qui a donné lieu à toute une analyse.

• (11 h 20) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. Simplement indiquer : les députés du côté gouvernemental avaient fait signe de vous permettre de continuer la réponse. Donc, le temps a été enlevé ou emprunté au premier bloc d'échange du député de La Prairie. À vous la parole, M. le député.

M. Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. Un plaisir de vous retrouver ce matin après une étude de crédits des Affaires intergouvernementales canadiennes d'hier après-midi qui fut...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...ces jours-ci.

M. Merlini : ...très enthousiaste. Oui, effectivement. Mme la ministre, bienvenue à votre étude des crédits à la Commission des institutions, et bienvenue également à tous ceux qui vous entourent et qui vous accompagnent ce matin dans cet exercice nécessaire. Salutations à notre collègue de l'opposition officielle, évidemment de notre cher collègue de la deuxième opposition également.

Ce matin, on est effectivement sur les lois professionnelles. Et en juin 2013, donc lors de la dernière législature, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une loi qui visait à moderniser le système de justice disciplinaire applicable aux membres des ordres professionnels.

Alors, la loi n° 17 a été sanctionnée le 12 juin et elle porte le titre Loi modifiant le Code des professions en matière de justice disciplinaire, et cette réforme visait à améliorer l'accès à notre système de justice disciplinaire afin, entre autres, d'accélérer le traitement des dossiers. On le sait très bien, Mme la ministre, vous avez dit à plusieurs fois que l'accessibilité à notre système de justice est un de vos souhaits et un de vos objectifs qui vous avaient été donnés lorsque vous avez été nommée au poste de ministre de la Justice. Évidemment, cette loi visait à créer, au sein de l'Office des professions du Québec un bureau des présidents des conseils de discipline des ordres professionnels. Vous-même, Mme la ministre, vous avez été questionnée par la députée de Bourassa-Sauvé ici même, dans notre chère commission, M. le Président, en juin dernier, en juin 2014, à savoir quelles étaient les étapes qui avaient été franchies à ce moment-là. Il y avait, entre autres, l'adoption, par le gouvernement, du Règlement sur la procédure de recrutement et de sélection des présidents des conseils de discipline.

Maintenant, la question est fort simple, M. le Président : Où en sommes-nous rendus? Est-ce que le bureau du président des conseils de discipline est fonctionnel? Que reste-t-il à faire? Et j'aimerais en particulier entendre Me Dutrisac nous parler de l'importance qu'aura le Bureau des présidents des conseils de discipline dans l'ordre des professions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Une voix : ...consentement, M. le Président.

Mme Vallée : Bien...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...à la fois.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Je remercie mon collègue. Évidemment, le Bureau des présidents des conseils de discipline n'est pas encore formé, j'ai reçu tout récemment les recommandations. Alors, on devrait être à même de procéder à la formation du bureau au cours des prochaines semaines. Alors, l'objectif est évidemment d'aller de l'avant avec cet important chantier. Il s'agissait du projet de loi n° 17 et à ne pas confondre avec le dernier projet de loi n° 17 que nous avons adopté, qui était et qui visait la nouvelle gouvernance du Barreau. Et donc le bureau des présidents n'est pas encore en fonction mais devrait être formé au cours des prochaines semaines.

Si vous le permettez, puisque la question s'adressait à Me Dutrisac, avec le consentement, je lui céderais la parole.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il y a consentement?

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, Me Dutrisac, dans un premier temps, vous identifier pour le bénéfice de nos téléspectateurs, et à vous la parole.

M. Dutrisac (Jean Paul) : Oui. Merci, M. le Président. Donc, Jean Paul Dutrisac, président de l'Office des professions.

Alors, effectivement, il y a plusieurs années, on avait noté, à l'Office des professions mais aussi au cabinet du ministre de la Justice, des problématiques de délai au niveau des décisions disciplinaires, décisions sur culpabilité et décisions sur sanction qui mettaient à l'épreuve et qui pouvaient fragiliser éventuellement, là, la mission de ces conseils-là de bien protéger le public, et la situation faisait en sorte que, de la façon que ça fonctionnait, les présidents de conseil de discipline étaient des avocats qui étaient nommés, évidemment, par le Conseil des ministres mais des avocats qui n'étaient pas nécessairement à temps plein à faire le travail de président de conseil de discipline, donc qui avaient d'autres activités professionnelles, là, qu'ils devaient remplir en même temps, ce qui fait en sorte que, des fois, il pouvait y avoir des difficultés au niveau d'agenda de cour, etc., pour entendre les causes.

On a étudié la situation et on a fait la proposition, avec le projet de loi n° 17, de formaliser, en fait, les conseils de discipline pour les rendre, nous le pensons très sincèrement, beaucoup plus efficaces et beaucoup plus efficients dans leurs travaux. Alors, dorénavant, lorsque le Bureau des présidents de conseils de discipline sera créé au sein de l'Office des professions, les avocats qui agiront comme présidents de conseil de discipline seront des avocats nommés par le gouvernement toujours mais qui agiront à temps plein. Donc, ce seront des avocats qui seront rémunérés, et c'est créé au sein de l'office, des avocats rémunérés et qui agiront à temps plein pour exercer leurs fonctions de président de conseil de discipline. Donc, on pense que ça va ajouter à l'efficacité et à l'efficience des travaux des présidents de conseil de discipline.

De plus, dans ce projet de loi là, on va instituer aussi une certaine hiérarchie dans le Bureau des présidents de conseils de discipline. Donc, il y aura un président en chef, ce qui n'existe pas actuellement. Il y aura un président en chef et un président en chef adjoint qui pourront évidemment s'assurer de la bonne gestion des dossiers au sein du Bureau des présidents de conseils de discipline. Donc, on croit vraiment que ça va apporter une grande amélioration à la justice disciplinaire, donc à la mission du système professionnel.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. M. le député de La Prairie.

M. Merlini : Alors, vous avez dit, Mme la ministre, que le bureau n'est pas encore en fonction mais que vous avez reçu... comment dire, un avis, là, des recommandations. Alors, quelle est la suite de ces recommandations-là?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

• (11 h 30) •

Mme Vallée : Tout simplement, ces recommandations-là font suite à un appel de candidatures qui a été lancé le 7 juin 2014. Et donc les personnes qui étaient désireuses de présenter leur candidature pour les fonctions de président en chef et président en chef adjoint avaient jusqu'au 31 juillet 2014 pour le faire.

Alors, par la suite, nous avons demandé la formation d'un comité de sélection. C'est un comité qui était entièrement indépendant et entièrement responsable du processus de sélection. Donc, tout le processus de sélection s'est fait par le comité de sélection qui était formé... puis je tiens à les remercier, profiter de la tribune pour remercier M. le juge, à la retraite, Louis-Philippe Landry, Mme Dominique Lerome... Derome, pardon, et M. Luc Gervais, qui ont passé tout ce temps à scruter les candidatures, à faire les entrevues. Et donc, par la suite, ils ont analysé les dossiers des candidats et m'ont remis hier, en fait, un rapport qui indique le nom des personnes qui sont aptes à exercer les fonctions. Donc, nous verrons, là, comme je vous disais, dans les prochaines semaines, à assurer la mise en place des nominations. Et évidemment l'office a aussi, comme M. Dutrisac mentionnait, mis en place un comité de déontologie, mis en place les mesures afin que les règles déontologiques qui s'appliquent aux présidents puis aux membres des conseils de discipline soient en vigueur.

Et il y a eu aussi des démarches qui ont été faites pour toute la question des règles de preuve et des règles de pratique applicables aux plaintes qui seront soumises aux conseils de discipline des ordres professionnels. Donc, il y a un projet de règlement qui avait été publié à la Gazette officielle du Québec le 26 novembre 2014 et il y a eu un certain nombre de commentaires qui ont été formulés. L'office a fait un certain nombre d'analyses des commentaires formulés, et il y a eu quelques petites modifications qui ont été apportées au règlement. Donc, l'objectif sera également de permettre à ce que les règles de preuve et pratique applicables à la conduite des plaintes soient soumises sous peu pour approbation au gouvernement.

Alors, ce sont des démarches qui peuvent apparaître un peu longues mais qui quand même s'inscrivent dans un processus rigoureux, et on devrait en principe être en mesure d'avoir un bureau des présidents qui serait fonctionnel à l'automne 2015. Alors, ça, c'est une bonne nouvelle. Lorsque les règles de preuve seront adoptées, lorsque nos présidents et vice-présidents ou présidentes ou vice-présidentes seront nommés, bien nous serons en mesure d'avoir un bureau de discipline, éventuellement, qui sera efficace et, nous l'espérons, qui pourra répondre aux préoccupations dont on vous a fait état.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. M. le député de La Prairie, 2 min 30 s.

M. Merlini : Merci beaucoup. Il y a un point qui m'intéresse, entre autres, là, vous avez parlé de l'adoption éventuelle d'un code de déontologie applicable aux présidents et aux autres membres des conseils de discipline. Vous parlez qu'il y a des démarches qui sont en cours. Est-ce Me Dutrisac pourrait nous donner un peu plus de détails, là, à savoir, là, quelles sont les démarches qui sont en cours pour arriver à un code de déontologie qui serait applicable éventuellement au conseil des présidents, qui sera en fonction, comme vous dites, en espérant, à l'automne 2015?

Est-ce qu'il y a quelque chose que vous pouvez rajouter aux démarches, là, que Me Dutrisac pourrait nous entretenir là-dessus?

Mme Vallée : Bien, en fait, il y aura une consultation. Le code qui a été préparé sera soumis au Conseil interprofessionnel du Québec, donc le CIQ, qui... en fait, a été soumis au CIQ, qui a commenté, et le projet de règlement sera publié sous peu à la Gazette officielle. Et donc, par la suite, il y aura évidemment une période de consultation publique de 45 jours, donc les personnes intéressées pourront, à l'intérieur de ce délai-là, formuler leurs commentaires. Et par la suite, comme dans tout le processus réglementaire, par la suite, bon, si des modifications doivent être apportées, elles le seront, et ce sera une autre pièce qui sera soumise au gouvernement pour approbation. Mais le CIQ a soumis ses commentaires très récemment à l'office. Je ne sais pas si Me Dutrisac voudrait ajouter.

M. Dutrisac (Jean Paul) : Merci, Mme la ministre. Non, vous avez effectivement, là, bien fait, là, l'explication d'où on en est rendus actuellement avec le code de déontologie.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète ce bloc. Je me tourne vers le deuxième groupe d'opposition. Bonjour, Mme la députée de Montarville. À vous la parole.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Pour une durée précise de?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Pour une durée de 11 minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Merci, M. le Président. J'aimerais saluer les gens de la commission, Mme la ministre, Me Dutrisac, les gens qui l'accompagnent, les collègues du gouvernement, de l'opposition officielle, mes collègues qui m'accompagnent.

J'aimerais faire un suivi, M. le Président, un suivi de dossier. Mme la ministre est au courant, on en avait discuté ensemble. Et mon collègue de Labelle, d'entrée de jeu, est entré avec tout le dossier sur l'Ordre des ingénieurs. Alors, j'aimerais poursuivre parce qu'il y a un aspect qui n'a pas été abordé, naturellement, faute de temps, comme toujours. Dans ce dossier-là, je comprends, vous nous avez dit, Mme la ministre, qu'un comité vient d'être nommé, il y a eu cette rencontre en mars dernier. Si on remonte à l'année dernière, à pareille date, vous et moi avions eu des discussions. On sait que ça avait brassé à l'ordre. On attendait les élections, le nouveau C.A., qui a été mis en place. Mais il y a un sujet dont on n'a pas parlé et sur lequel j'aimerais revenir. En 2013‑2014, dans toute la foulée de la fameuse commission Charbonneau, il y a 856 plaintes qui ont été formulées auprès de l'Ordre des ingénieurs du Québec, des plaintes contre des ingénieurs déposées à l'ordre et qui touchaient naturellement, en gros, les dons aux partis politiques, la collusion, la corruption.

Alors, à cette époque, l'ordre était incapable de suffire à la tâche, et c'est la raison pour laquelle il y avait, entre autres, tout ce branle-bas de combat, et on avait demandé de l'aide également. Alors, un an plus tard, où en sommes-nous actuellement? Quelle est la proportion de ces plaintes qui a été traitée, 856 plaintes reliées à tout ce qui a trait à la commission Charbonneau et ses suites? On en est où plus précisément dans le traitement de ces plaintes-là? Dans quelle mesure ça avance? Y a-t-il des suspensions qui... enfin, l'ordre professionnel a-t-il procédé à des radiations, à des suspensions? Où en est-on?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, M. le Président, c'est exactement... et je remercie la collègue de sa question, parce que c'est un élément clé derrière l'accompagnement.

Un des points forts qui nous a amenés à intervenir d'une façon un petit peu plus vigoureuse auprès de l'Ordre des ingénieurs, c'était justement le nombre de plaintes et le manque de ressources qui étaient destinées au traitement de ces plaintes. Alors, au cours de la dernière année, l'Ordre des ingénieurs a engagé trois nouveaux syndics pour permettre l'analyse des dossiers, parce que 856 plaintes, c'est quand même beaucoup de temps d'analyses et de vérifications qui sont requises de la part du bureau de syndics. Donc, l'Ordre des ingénieurs, dans la foulée de l'accompagnement qui lui a été offert, a ajouté des bras, des syndics, des ressources, et ça permet évidemment d'opérer, là, d'ajouter un peu aux dossiers. Maintenant, je n'ai pas les chiffres précis, à savoir le nombre de dossiers, là, qui sont pendants actuellement, mais les effectifs au sein du bureau du syndic, depuis 2013, ont augmenté de façon substantielle. Donc, il y a maintenant 30 employés au sein du bureau du syndic. Non seulement des syndics supplémentaires ont été nommés, mais il y a quand même 30 employés qui veillent aux dossiers, et ça permet, là, de traiter les dossiers. Mais on avait une préoccupation, c'est qu'au sein de l'Ordre des ingénieurs la mission première de protection du public ne semblait pas être comprise par les membres. Les membres ne semblaient pas comprendre que l'ordre avait comme objectif premier de protéger le public et notamment de donner suite à des plaintes comme celles qui avaient été logées. Et cette perception même à l'intérieur de l'ordre a eu comme effet de ne pas allouer suffisamment de ressources pour traiter ces dossiers-là.

Il y a aussi toute la question de la formation offerte aux membres, qui n'était pas non plus... toute la question de la déontologie, toutes ces questions-là avaient été peut-être un petit peu mises de côté. Maintenant, il y a une volonté, comme je l'ai mentionné lorsque notre collègue de Labelle m'a questionnée, il y a une volonté, au sein de l'ordre, de changer la façon de faire, de changer les choses, et ils nous ont démontré de façon concrète, par l'ajout de ressources, par l'ajout de syndics, qu'ils prenaient le taureau par les cornes et qu'ils y veillaient.

Maintenant, M. le Président, je peux m'informer et revenir auprès de ma collègue avec les chiffres précis. Je ne les ai pas et je ne voudrais pas donner de l'information qui n'a pas ce degré de précision là. Alors, je m'engage, M. le Président, à faire le point et à vous revenir avec le nombre de dossiers, avec le suivi, où on en est avec les suivis des plaintes logées et formulées à l'ordre.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Oui. Je remercie la ministre, parce que ça faisait l'objet d'une demande subséquente qui allait suivre : si nous pourrions avoir une idée du nombre de dossiers qui ont été traités. Je vous demandais également si on a une idée... Y a-t-il eu des radiations, des suspensions? Mme la ministre nous dit qu'il y a maintenant une trentaine d'employés qui sont au bureau du syndic, plus trois syndics au total.

Ma question est peut-être un peu pécuniaire. Mais, dans la mesure où les cotisations à l'ordre n'ont pas augmenté, ces frais-là sont assumés de quelle façon? Est-ce qu'il y a une problématique financière pour l'ordre ou est-ce qu'on arrive à suffire à la tâche avec les sous qui sont alloués par les membres de l'ordre actuellement?

• (11 h 40) •

Mme Vallée : Il y a actuellement... Bien, je vais vous citer un petit extrait du rapport. Alors, les accompagnateurs se sont questionnés sur cet enjeu-là. Et le rapport nous indique que, selon les informations que les accompagnateurs disposent... dont les accompagnateurs disposent, plutôt, les ressources financières nécessaires à l'accomplissement de son mandat sont à la disposition du syndic. Alors, actuellement, en 2015, en février 2015, le bureau du syndic disposait de ressources financières nécessaires, et le rapport dit : «...ces ressources [doivent] être maintenues et même augmentées pour permettre un traitement diligent des dossiers d'enquête et surtout le traitement des dossiers en attente. Le syndic [doit donc] continuer à disposer des effectifs et ressources financières pour assurer un traitement des dossiers dans les délais comparables aux autres ordres professionnels au Québec.»

Donc, tout l'encadrement du bureau du syndic a fait l'objet de constat de la part des accompagnateurs, et les accompagnateurs soulèvent l'importance de maintenir... Alors, maintenant, est-ce que, pour maintenir et pour bonifier les ressources, une hausse des cotisations professionnelles s'impose? C'est la question à laquelle le conseil d'administration doit répondre et verra à proposer ou à déposer ses propositions à l'assemblée des membres qui aura lieu en juin.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville, trois minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci pour la réponse, Mme la ministre. Vous faites allusion à un rapport dont vous parlez ici, les constats des accompagnateurs. Est-ce que c'est possible d'avoir ce rapport, que vous le déposiez, que nous en prenions connaissance?

Mme Vallée : Moi, j'ai reçu l'avis de l'office. Le rapport a été déposé à Me Dutrisac. Il contient un certain nombre d'informations nominatives, alors...

Une voix : ...

Mme Vallée : On peut le rendre public, là. Me Dutrisac m'informe qu'on peut le rendre public, alors on pourra...

Mme Roy (Montarville) : Ce serait apprécié, pour la compréhension du dossier. Maintenant, dans le temps imparti qu'il me reste, j'aimerais vous parler, M. le Président, Mme la ministre, de l'ordre...

Une voix : ...

Mme Roy (Montarville) : ... — oui, je fais bien ça, merci — de l'ordre des enseignants.

Vous savez, pour nous, afin d'améliorer la qualité de l'enseignement, nous croyons qu'il est urgent de créer un ordre professionnel des enseignants. On le répète depuis 2012. En plus de rehausser les exigences à l'entrée de la profession, un organisme de la sorte pourrait s'assurer que tous les enseignants suivent un parcours de formation continu et pertinent tout au long de leur carrière. Nous croyons que l'instauration d'un ordre professionnel contribuerait à la nécessaire revalorisation de la profession enseignante tout en contribuant à l'amélioration de la qualité de l'enseignement pour le plus grand bénéfice des élèves. Alors, l'an dernier, la question avait été ramenée dans le débat public avec la publication d'un rapport d'experts sur le financement, l'administration, la gestion des commissions scolaires. L'ancien ministre de l'Éducation avait même indiqué qu'il comptait demander un nouvel avis à ce sujet à l'ordre des professions du Québec. Récemment, le nouveau ministre de l'Éducation, le député de Charlesbourg, a rejeté l'idée d'un ordre professionnel des enseignants, dès son entrée en fonction.

Alors, questions multiples. Mme la ministre, de quel côté penchez-vous? Croyez-vous que créer un ordre des enseignants serait une bonne chose? Et, Me Dutrisac, si ce nouvel avis qui a été demandé à l'ordre des professions du Québec a été réalisé, quelles sont ses conclusions?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, il reste moins d'une minute à ce bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition, mais, s'il y a consentement pour poursuivre la réponse, vous pourrez emprunter du temps du côté du gouvernement. À vous la parole, Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, M. le Président, je pense, ce qui est important, parce qu'on demande... Souvent, lorsque certains dossiers font l'objet d'une médiatisation, on demande la création d'un ordre professionnel, on demande la création d'une corporation professionnelle. Il faut toujours se poser la question, parce que la valorisation du travail des enseignants, évidemment c'est important. Ceci dit, est-ce que ça passe nécessairement par la création d'un ordre professionnel? L'ordre professionnel est là pour assurer la protection du public. Alors, il ne faut jamais oublier, perdre de vue cet objectif-là. L'ordre professionnel n'est pas là pour mettre en valeur une profession x ou y, ce sont plutôt les corporations professionnelles qui vont avoir ce mandat-là.

Actuellement, je vous dirais, au moment où on se parle, il n'y a pas de chantier en cours sur la question des enseignants. Je peux laisser Me Dutrisac répondre, parce que je sais qu'il a eu des réflexions par le passé et son expérience et son expertise à titre de président de l'Office des professions est quand même assez solide. Alors, si vous permettez, je vais passer la parole à Me Dutrisac sur la question des ordres des enseignants et peut-être l'historique derrière tout ça.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il y a consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Me Dutrisac.

M. Dutrisac (Jean Paul) : Oui. Merci, M. le Président. Oui, effectivement, on avait déjà demandé à l'Office des professions de faire une réflexion et de produire un avis concernant la création éventuelle d'un ordre des enseignants il y a plusieurs années, je dirais, même décennies, et l'office a effectivement produit un tel avis en 2003, et les conclusions, à ce moment-là, les conclusions étaient qu'il n'était pas nécessaire de créer un ordre professionnel des enseignants.

Il faut toujours comprendre que, quand on crée un ordre professionnel, comme l'a si bien mentionné la ministre, ce n'est pas pour reconnaître, ce n'est pas pour avoir l'effet de reconnaître une profession ou de valoriser une profession, c'est vraiment parce que les personnes qui exercent une activité professionnelle font des activités à risque de préjudice. Et il y a un certain nombre de critères qui sont indiqués au Code des professions pour permettre de se faire une tête sur est-ce qu'on doit encadrer une profession ou s'il n'est pas nécessaire d'encadrer la profession, d'une part. D'autre part, il faut voir aussi si... parce que, par exemple, il peut être nécessaire... l'exercice professionnel peut répondre aux critères du Code des professions. Par ailleurs, la profession peut être aussi encadrée dans un autre système et de façon correcte.

Au moment où le premier avis a été produit par l'office, l'office croyait que la profession d'enseignant était quand même bien encadrée par les lois qui régissent le système scolaire. Donc, maintenant, on est rendus en 2015, 12 ans plus tard. Est-ce que les choses ont évolué à la faveur de produire un nouvel avis, de faire une nouvelle étude? Peut-être. Si éventuellement l'office reçoit ce mandat, on pourra regarder le dossier, bien évidemment.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète, Mme la ministre? M. le député d'Ungava.

M. Boucher : De combien de temps dispose-t-on, M. le Président?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : 12 minutes. Nous nous rendons jusqu'à la fin de l'heure prévue pour nos travaux.

M. Boucher : Procédons. Mme la ministre, bonjour. Bienvenue à ceux qui vous accompagnent et à toute votre équipe.

Première des choses, bon, je vais vous parler d'encadrement professionnel, d'ordre de profession du côté des massothérapeutes. Vous savez que, bon, premièrement, la massothérapie, puis les spas, puis le genre de soins corporels, si on veut, c'est quelque chose qui est de plus en plus en vogue. On voit les centres de santé se multiplier, et puis dans ça il y a des centres qui sont tout à fait professionnels et tout à fait bien dotés et bien encadrés puis il y a d'autres centres qui sont peut-être plus douteux. Même, à certaines occasions, bon, ce qu'on appelle communément le salon de massage mais pas pris dans le sens du centre de santé professionnel, mais plutôt pris dans le centre de... comment dire...

Une voix : ...

M. Boucher : C'est ça, plutôt pris dans un...

Une voix : ...

• (11 h 50) •

M. Boucher : ...un genre de lieu de débauche, qu'on pourrait dire d'une façon... qui allait même jusqu'à émettre des reçus pour services rendus puis dont les services étaient réclamés auprès d'assureurs privés. C'est sûr que, bon, les assureurs privés, dans ça, étaient un petit peu naïfs ou... mais, de toute façon, l'assurance privée, c'est tous les cotisants à l'assurance qui sont roulés dans cette affaire-là, parce que, bon, on sait très bien que, l'assurance, là, c'est l'ensemble des cotisants qui défraient les montants versés, puis plus il y a de montants versés inutilement, plus les cotisations seront élevées.

Dans le passé, Mme la ministre, il avait été question, en juin 2014, lors de l'étude des crédits de l'an passé, d'étudier la possibilité de créer un ordre professionnel des massothérapeutes. Ça avait été évoqué à ce moment-là. Comme vous le disiez si bien... bon, je vais essayer de vous citer, là, mais ça ne sera pas aussi bien dit que vous, là, un ordre professionnel, c'est dans le but de protéger le public. Ce n'est pas dans le but de rehausser une profession ou de la mettre en valeur ou lui donner des lettres de noblesse, c'est dans le but de protéger le public. Question qui se pose : Est-ce que protéger des assureurs tombe sous le chapeau de la protection du public? Ça, c'est la première question qu'il faut se poser dans ce dossier-là.

Outre, bon, ces maisons qui pratiquent des massages peut-être plus douteux, il y a d'autres massothérapeutes qui, après avoir lu un bon livre, s'improvisent massothérapeutes, puis commencent à faire ça chez eux, puis peuvent faire des manoeuvres qui des fois ne sont peut-être pas adaptées et puis peuvent causer plus de problèmes que de solutions aux gens qui font appel à ces services-là. Comme je disais tantôt, bon, des massages soi-disant thérapeutiques avaient été remboursés par des assureurs privés, puis la Fédération québécoise des massothérapeutes avait publié un communiqué affirmant qu'un ordre des professions produirait ainsi un avis d'opportunité... que l'office des protections, pardon, produirait un avis d'opportunité afin de créer un ordre professionnel pour les massothérapeutes.

Mme la ministre, pouvez-vous nous informer si l'office des protections... pardon, des professions a réalisé des travaux au cours de la dernière année relativement à la demande de la création d'un ordre, et voir si, bon, on envisage de formuler un avis à cet égard-là, et puis de voir s'il y a un ordre qui commence à pointer à l'horizon?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, M. le Président, je remercie notre collègue pour sa question parce que c'est un dossier qui m'interpelle avec mes deux chapeaux. C'est-à-dire, la ministre responsable des ordres professionnels se sent interpelée par la question de la protection du public, et la ministre responsable de la Condition féminine aussi. Parce que comprenons que, parmi les massothérapeutes autoproclamés, il y a aussi un certain réseau de traite des femmes, certains réseaux de prostitution qui utilisent l'appellation «massothérapeutes».

Alors, je suis très sensible à cet élément-là et je suis très sensible aussi à la question qui a été soulevée par notre collègue, c'est-à-dire ceux et celles qui s'autoproclament massothérapeutes et qui peuvent, de façon bien intentionnée, porter atteinte à la santé et à la santé physique des gens qui les consultent. Alors, dans ce contexte-là, le 13 février dernier, j'ai mandaté l'Office des professions de... je lui ai donné le mandat suivant, c'est-à-dire un mandat en trois temps : d'abord, entreprendre, amorcer un chantier de réflexion quant à l'avenir de la profession de la massothérapie auprès des différents ordres professionnels et auprès des fédérations, des associations, des représentants de massothérapeutes — alors, ça, c'est la première étape; par la suite, consulter les ministères qui sont impliqués quant à l'encadrement idéal requis pour reconnaître la profession de massothérapie et aussi s'assurer de la protection du public; et me proposer, par la suite, des démarches qui seraient nécessaires pour permettre d'intégrer les massothérapeutes au système professionnel et réserver un certain nombre d'activités. Alors, la réflexion est en cours actuellement.

M. le Président, notre collègue nous a fait état des compagnies d'assurance qui s'étaient peut-être fait berner en remboursant des frais de massothérapie qui n'était pas nécessairement de la massothérapie. Mais, pour cet élément-là, moi, les compagnies d'assurance, le mandat, ce n'est pas de protéger les compagnies d'assurance. Alors, les compagnies d'assurance ont quand même la responsabilité de déterminer les critères propres au remboursement des frais et ont quand même une certaine autonomie quant au contrôle des réclamations qui leur sont présentées. Mais, moi, ce qui me préoccupe, c'est vraiment la protection des gens, la protection des citoyens. On a encadré, on a des ordres professionnels pour venir assurer la protection... Par exemple, on parle des chiros, les physiothérapeutes. Alors, on encadre ces professions-là. Alors, je pense qu'il est quand même important de regarder et de voir s'il n'y aurait pas lieu d'encadrer la profession de massothérapie ou peut-être de l'inclure à un autre ordre, là.

La réflexion, le chantier est en cours. Mais actuellement on a un ordre professionnel pour les acupuncteurs, je vous ai parlé des chiros, on a un ordre professionnel pour les diététistes, on a un ordre professionnel pour les ergothérapeutes, on a évidemment des ordres professionnels pour les podiatres, les physiothérapeutes. Alors, notre système professionnel veille à assurer la protection des citoyens et des citoyennes qui sont aux prises bien souvent avec des problèmes de santé et qui cognent à la porte de professionnels. Alors, les professionnels autoproclamés, bien, parfois, ça donne lieu à des situations qui sont extrêmement dangereuses, qui peuvent être extrêmement dangereuses et qui méritent d'être encadrées, et puis, en encadrant la massothérapie, bien on peut aussi éviter que des réseaux de traite, des réseaux utilisent une profession d'apparence correcte pour mener à bien leurs activités illicites.

Alors, ça aussi, pour moi, ça demeure un élément extrêmement important, et, étant très sensible à toute la question de la traite des femmes et de la prostitution, bien je vous avoue que j'ai donné ce mandat à l'office, et on verra à faire la suite de ce chantier, qui est très important. Et je dois dire aussi que les groupes de femmes qui oeuvrent auprès des prostituées ou qui oeuvrent de près auprès des femmes qui sont dans le giron de la prostitution étaient très satisfaits de savoir que nous avions ce mandat qui était en cours, puisque, pour elles, il s'agissait d'un enjeu. Et prenons aussi... je pense, le maire de Montréal avait soulevé le fléau que constituait la prolifération des studios de massage un petit peu partout sur le territoire de la ville de Montréal. Donc, il y a un bon nombre d'éléments qui militent et qui nous amènent à mener à bien cette réflexion.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Chomedey, deux petites minutes.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Je vous ferai grâce des présentations. On ne peut pas terminer cette partie de l'étude des crédits sans demander à Me Dutrisac il en est rendu où avec sa réforme des codes des professions. Parce que c'est mes troisièmes crédits. On en a parlé en 2012, 2013, 2014. Et vous nous proposiez une réforme costaude du Code des professions.

Dans la minute et demie qu'il nous reste, j'aimerais ça que vous nous actualisiez, avec la permission de la ministre, où est-ce que vous en êtes rendus dans votre réforme du Code des professions?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il y a consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, Me Dutrisac.

M. Dutrisac (Jean Paul) : Oui. Merci, M. le Président. Alors, ça va être effectivement assez difficile en 1 min 30 s de rendre tout le côté costaud de la réforme.

On a fait beaucoup de travaux, à l'Office des professions. On a évidemment invité nos partenaires aussi à faire beaucoup de travaux pour nous alimenter, et le Conseil interprofessionnel et les ordres professionnels ont planché sur une réflexion profonde pour nous proposer des améliorations au Code des professions. Moi-même, à l'office, j'ai mis en place cinq chantiers de réflexion sur différents sujets pour apporter effectivement des améliorations, une modernisation à plusieurs dispositions, plusieurs chapitres du Code des professions.

Actuellement, nous sommes à déterminer nos dernières orientations à présenter à la ministre, qui vont porter sur trois volets. Donc, il y aura un premier projet législatif éventuellement qui va être présenté à la ministre, qui va comporter trois volets : d'abord, évidemment, on sait toute l'importance de la gouvernance aujourd'hui dans toutes nos institutions, donc on va proposer des bonifications au code au niveau de la gouvernance de l'Office des professions, on va déjà commencer par nous; ensuite, on va proposer des bonifications au code au niveau de l'organisation et de la gouvernance des ordres professionnels; et par la suite, le troisième volet, bien, on va proposer des améliorations au code, des outils supplémentaires pour tenir compte de tout ce qui s'est discuté, tout ce qui a été révélé à la commission Charbonneau, pour outiller les ordres professionnels pour qu'on puisse ne pas se retrouver dans une même situation.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Malheureusement, c'est tout le temps dont nous disposions ce matin.

Compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'après les affaires courantes pour l'étude du volet Justice. Bon appétit à tous.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 15 h 32)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, prenez place, s'il vous plaît! Bon après-midi à tous. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux, afin de ne pas perturber nos travaux.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Hardy (Saint-François) remplace M. Rousselle (Vimont) et M. Charette (Deux-Montagnes) remplace M. Martel (Nicolet-Bécancour).

Justice

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, merci, et bienvenue aux membres qui se joignent à nous pour la suite de nos travaux.

La Commission des institutions est réunie afin de procéder à l'étude du volet Justice des crédits budgétaires du portefeuille Justice pour l'exercice financier 2015‑2016. Nous recevons cet après-midi, encore une fois avec plaisir, la ministre de la Justice; M. le député de Lac-Saint-Jean, porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, bonjour; et M. le député de Deux-Montagnes, porte-parole du deuxième groupe d'opposition... pardon, Mme la députée de Montarville, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de justice. Alors, compte tenu des règles et des ententes intervenues, les députés du gouvernement disposeront d'une période totale de 2 h 30 min; ceux de l'opposition officielle, d'une période de 1 h 21 min; et ceux du deuxième groupe de l'opposition, de 54 minutes. Je crois comprendre qu'il est possible que... Ah! c'est cet après-midi seulement. Ce soir, c'est autre chose. Bon, voilà. Il ne faut pas aller trop vite.

Je me permets de vous rappeler que la présidence n'a pas pour but de contrôler la qualité des réponses. Dans le but de favoriser le plus d'échanges possible, j'encourage les parlementaires à respecter une certaine proportionnalité entre la durée des questions et des réponses en tenant compte toutefois des sujets qui sont abordés dans les questions. Contrairement à la période de questions et réponses orales, il n'y a pas de limite de temps stricte qui s'applique aux questions et réponses au-delà de l'enveloppe de temps pour un bloc d'intervention. Et la mise aux voix des crédits sera effectuée à la fin du temps qui est alloué à l'étude de ce volet.

Puisque nous avons débuté nos travaux à 15 h 32 et qu'une période de trois heures doit être consacrée à l'étude de ces crédits cet après-midi, est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit jusqu'à 18 h 32?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il y a consentement. Merci.

Remarques préliminaires

Alors, nous allons débuter, dans un premier temps, par les remarques préliminaires. Mme la ministre, vous disposez d'une période de 12 minutes pour vos remarques, et je vous cède la parole.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Alors, M. le Président, chers collègues du gouvernement et de l'opposition, je suis heureuse de vous retrouver aujourd'hui pour cette séance qui sera consacrée à l'étude des crédits du ministère de la Justice du Québec et des organismes qui relèvent de la ministre de la Justice. Alors, M. le Président, j'espère pouvoir vous rassurer et je m'engage à ce que la qualité des réponses soit au rendez-vous.

Alors, vous me permettrez de vous présenter les représentantes et les représentants de la haute direction du ministère qui m'accompagnent : alors, à ma droite, Me Nathalie Drouin, sous-ministre de la Justice; et, à ma gauche, Me Marjorie Théberge, ma chef de cabinet et complice de tous les instants. J'aimerais vous présenter les représentantes et représentants des organismes qui seront avec nous aujourd'hui : alors, Me Mathieu Proulx, président du TAQ — du Tribunal administratif du Québec; Me Ginette... Mme Ginette Galarneau, pardon, présidente de l'Office de la protection du consommateur; M. Normand Bolduc et Me Nathalie Lachance, du Conseil de la justice administrative; Me Denis Roy, président de la Commission des services juridiques; et Frikia Belogbi, du Fonds d'aide aux recours collectifs. Ce soir, se joindront à nous Me Annick Murphy, Directrice des poursuites criminelles et pénales; Me Jacques Prémont, président de la commission des droits de la personne et de la jeunesse; et M. Richard Carbonneau, du BAVAC. Et je tiens également à souligner la présence de la superéquipe du ministère de la Justice. Vous me ferez grâce de l'énumération et de la présentation de chacun des membres de l'équipe qui sont présents. Mais je tiens à les remercier à l'avance, parce que, vous savez, chers collègues, la préparation des crédits demande énormément de temps à nos équipes à l'intérieur des ministères et je leur en suis très, très, très reconnaissante.

Avant d'aller plus loin, vous me permettrez de revenir sur les dimensions du budget du gouvernement qui touchent le portefeuille Justice. M. le Président, je souscris aux orientations du budget du gouvernement du Québec, elles permettent de répondre aux objectifs de rigueur budgétaire sans sacrifier les acquis en matière de justice. Il s'agit d'un budget pragmatique et soucieux de l'intérêt public. Il témoigne de notre volonté de répondre à la fois aux impératifs d'une gestion rigoureuse et responsable des fonds publics tout en continuant d'agir pour accroître l'accès à la justice.

Ainsi, le budget des dépenses du portefeuille Justice pour l'année 2015‑2016 s'élève à 873,9 millions de dollars. C'est 3,8 de plus que le budget de dépenses de l'exercice 2014‑2015... 3,8 %, pardon, qui atteignait 842,2 millions de dollars. Cette hausse tient compte des économies relatives au gel des effectifs et des mesures annoncées et retenues par le gouvernement concernant notamment les gains de productivité et la réduction des dépenses de fonctionnement. Au cours de la prochaine année, le ministère devrait également compter sur des revenus additionnels résultant de la hausse de la contribution pénale, ce qui lui assurera de consolider ses activités et de réaliser les actions prévues à son prochain plan stratégique en matière d'accès à la justice. De plus, une entente de partage des revenus provenant des cotisations fiscales liées aux activités criminelles annoncée par notre gouvernement permettra d'augmenter la capacité de traitement des dossiers judiciaires en matière pénale.

Enfin, le budget de dépenses sera en mesure d'assumer la poursuite de plusieurs mesures, dont notamment la hausse des seuils d'admissibilité à l'aide juridique, qui est prévue pour le 1er janvier 2016; le financement du coût de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, pour un budget de 130 millions de dollars; le maintien du plan d'action gouvernemental contre l'homophobie; le budget de 500 000 $ prévu au Fonds d'Accès Justice pour un programme d'aide financière destiné aux organismes intervenant auprès de citoyens en matière d'accès à la justice. Et, avec ce budget, notre gouvernement respecte son engagement, le Québec retrouve l'équilibre budgétaire après six budgets déficitaires. L'équilibre budgétaire retrouvé donnera un nouvel élan au Québec et nous ramènera sur le chemin de la prospérité. Des finances publiques saines sont le gage d'un Québec plus fort et plus juste pour tous les Québécois et particulièrement pour les clientèles vulnérables.

Au cours de la dernière année, plusieurs mesures ont été instaurées pour une justice plus accessible. Par exemple, le 1er janvier dernier, nous avons fait passer de 7 000 $ à 15 000 $ la limite d'admissibilité des causes logées à la division des Petites Créances de la chambre civile de la Cour du Québec de façon à rendre plus accessible ce tribunal, où les citoyens se représentent seuls, sans avocat. Cette première étape pour moderniser notre justice civile sera suivie de la mise en oeuvre de l'ensemble des dispositions du nouveau Code de procédure civile en janvier 2016 pour une justice plus simple, plus rapide et moins coûteuse. Rappelons que le nouveau Code de procédure civile encouragera notamment les recours aux modes amiables de règlement des différends, comme la médiation. Plusieurs dispositions permettront également de simplifier les procédures et de les rendre plus accessibles. Enfin, elles doteront les juges de pouvoirs accrus en gestion.

• (15 h 40) •

À l'approche de ce virage qu'entreprend notre justice civile et à l'invitation du Barreau de Montréal, j'ai d'ailleurs signé une déclaration de principe sur la justice participative le 13 novembre dernier avec quelque 70 représentants issus de la magistrature, des tribunaux administratifs, des facultés de droit ainsi que des milieux juridiques et sociaux. J'ai appuyé cette déclaration, car ses valeurs correspondent tout à fait aux principes fondamentaux qui guident nos actions menant vers la modernisation de notre justice civile.

Parmi les autres réalisations de la dernière année, nous avons également procédé à l'inauguration de trois nouveaux centres de justice de proximité : dans la région de l'Outaouais, de la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine et du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Il s'agit d'organismes sans but lucratif financés par le gouvernement du Québec qui offrent gratuitement des services d'information et d'orientation juridiques à la population. Ils se sont ajoutés à ceux exerçant déjà leurs activités dans les régions du Grand Montréal, de la Capitale-Nationale et du Bas-Saint-Laurent. Notre gouvernement travaille à mettre en place des mesures pour rapprocher la justice de la population, et ces centres en sont un bel exemple. En plus d'être le fruit d'un travail de nombreux intervenants régionaux, ils s'appuient sur un partenariat avec le Barreau du Québec, la Chambre des notaires du Québec, la Société québécoise d'information juridique, des partenaires à l'origine de l'implantation des centres dès 2010. Parmi les autres réalisations, soulignons aussi la mise en ligne des rôles d'audience en matière civile pour l'ensemble des palais de justice ainsi que la mise en ligne des rôles d'audience en matière criminelle pour les palais de justice de Longueuil, de Montréal, de Québec, de Sherbrooke et de Trois-Rivières. Leur mise sur pied illustre notre volonté et celle des tribunaux de moderniser l'administration des services de justice. De plus, dans le cadre de mes fonctions de ministre responsable à la lutte contre l'homophobie, nous avons notamment accordé du soutien financier à plusieurs organismes pour la réalisation de projets destinés à lutter contre l'homophobie et la transphobie ainsi qu'à favoriser la pleine reconnaissance des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transgenres. Nous avons aussi fourni un soutien financier complémentaire à 23 organismes d'aide et de défense des droits oeuvrant auprès de ces personnes.

En 2014‑2015, nous avons également initié plusieurs actions pour améliorer les services aux citoyens. Parmi nos initiatives, mentionnons l'implantation d'une prestation électronique de services pour la livraison numérique de documents pour le Registre des droits personnels et réels mobiliers ainsi que la mise en ligne d'une version améliorée du formulaire électronique de demande aux Petites Créances.

Dans le cadre de mon mandat de Procureur général du Québec, plusieurs actions ont aussi été initiées pour défendre les intérêts du Québec, et, parmi celles-ci, mentionnons le dépôt d'une preuve de réclamation totalisant 409 millions de dollars à titre de créancier dans les procédures d'insolvabilité de la MMA ainsi que la poursuite de nos travaux dans le cadre de la poursuite contre les fabricants canadiens de produits de tabac et des compagnies étrangères auxquelles ils sont apparentés.

Au nombre des projets de loi, je retiens tout particulièrement l'adoption du projet de loi n° 26. D'ailleurs, je salue les collègues qui ont participé activement à tous les travaux entourant le projet de loi, la loi qui vise principalement la récupération des sommes obtenues à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le cadre des contrats publics. Il s'inscrit évidemment dans une démarche afin de rétablir un climat d'intégrité et de probité en matière de contrats publics. Avec cette loi, les organismes publics disposent maintenant de plusieurs outils pour récupérer les sommes payées injustement à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le cadre de contrats publics et pour faciliter d'éventuels recours civils. Ainsi, les dispositions du projet de loi n° 26 nous permettront d'instaurer un programme de remboursement volontaire rigoureux et inspiré des meilleures pratiques ainsi que des mesures exceptionnelles pour faciliter les recours civils contre les personnes ou les entreprises fautives. Ces actions témoignent de la volonté de notre gouvernement d'obtenir réparation et de donner aux entreprises fautives ayant revu leur gouvernance l'occasion de rembourser les sommes perçues en trop et de se réhabiliter.

La dernière année nous a également permis d'amorcer plusieurs travaux, dont le rehaussement et la modernisation des systèmes de sécurité au palais de justice de Montréal; l'installation du réseau Internet sans fil dans plusieurs salles des palais de justice de Québec, et de Montréal, ainsi que de Longueuil, Laval, Gatineau, notamment — alors, je vous informe que maintenant, à partir d'aujourd'hui, plusieurs palais de justice sont dotés d'installations sans fil, c'est une première étape qui mène vers un déploiement dans d'autres palais de justice au cours de la prochaine année; également, l'implantation d'un projet pilote de visiocomparution dans les palais de justice de la région de l'Outaouais ainsi qu'au centre de détention de Gatineau; la mise en fonction d'une solution innovatrice permettant le dépôt électronique de la preuve dans le cadre du dossier de la pyrrhotite au palais de justice de Trois-Rivières.

Enfin, en compagnie du député de Côte-du-Sud, nous avons procédé à l'inauguration du palais de justice de Montmagny, qui a été agrandi et rénové, le 14 novembre dernier. Alors, c'est des travaux qui avaient été débutés en 2012, qui auront finalement coûté 2 millions de moins que prévu, pour un investissement total de 29,2 millions $.

Alors, en terminant, M. le Président, l'accès à la justice demeurera au coeur de nos priorités pour la prochaine année. Parmi les exemples d'actions qui vont en ce sens, je vous rappelle notre intention de maintenir l'augmentation des seuils d'admissibilité financière à l'aide juridique, qui sera en vigueur le 1er janvier prochain, et nous poursuivrons également nos efforts pour améliorer nos services à la population et assurer la meilleure utilisation possible des ressources mises à notre disposition. À ce propos, nos équipes ont participé avec beaucoup de rigueur aux consultations de la commission permanente de la révision des programmes. L'exercice nous a d'ailleurs permis d'identifier plusieurs pistes de solution prometteuses pour assurer la qualité et l'efficacité de nos interventions.

En terminant, je tiens à vous réitérer combien l'accès à la justice est une priorité pour notre gouvernement et combien je suis fière de pouvoir compter sur des équipes compétentes formées de gens dévoués pour bien servir nos concitoyennes et nos concitoyens. Je vous remercie.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. J'invite maintenant le député de Lac-Saint-Jean, porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, pour des remarques préliminaires d'une durée maximale de sept minutes.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, bonjour aux collègues de l'Assemblée nationale, bonjour à vous, Mme la ministre, Mme la sous-ministre. Saluer également tous ceux et celles qui vous accompagnent aujourd'hui, saluer tout le travail de préparation qui a été fait pour ces études de crédits, saluer aussi la compétence, de manière générale, de la fonction publique québécoise, qui fait un travail remarquable qui doit être dit, redit et valorisé, à mon point de vue. C'est une période qui est quand même difficile pour la fonction publique, c'est une période où je pense que le besoin d'effectifs est particulièrement criant. Et, Mme la ministre, lorsque vous faites référence à la rigueur gouvernementale, je fais plutôt référence, de notre côté, à l'austérité gouvernementale. Il y a des décisions de coupures qui ont été prises. Vous faites référence à la nécessité d'équilibrer le budget, ça va de soi, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a des alternatives pour qu'il y ait plus de revenus à l'État du Québec. Il y a de l'argent au Québec.

Maintenant, ce sont des décisions que vous avez prises, de réduire les budgets. En matière de justice, ça a des impacts importants sur les ressources qui étaient prévues, que finalement... ne seront jamais embauchées ou peut-être que vous nous donnerez les détails à ce sujet un peu plus tard. Le Fonds Accès Justice, qui non seulement n'arrive pas à prendre son plein envol, mais a également été coupé, le rapport quant à l'aide juridique qui était prévu pour juin de cette année et qui est remis à janvier l'année prochaine, c'est tous des indicateurs, finalement, de décisions que vous avez prises, au gouvernement, qui ont un impact, en bout de course, pour l'accès à la justice au Québec. Alors, ce que je vous dis, d'entrée de jeu, il faut quand même être conscient qu'il y a des choix non seulement législatifs qui sont faits par le gouvernement actuel, mais, à mon point de vue, il y a des mesures qui auraient pu être prises pour accroître les revenus de l'État québécois, ce qui aurait fait en sorte que nous n'aurions pas, au moment où on se parle, à discuter des différentes coupures et différents programmes qui, malheureusement, ont été touchés.

Alors, il y aura plusieurs enjeux que nous allons discuter, des enjeux qui sont peut-être plus liés à l'actualité, et d'autres, davantage liés à l'administration de la justice, mais de manière générale, à ce stade-ci, je vais simplement me contenter de dire... et de féliciter tous ceux et celles qui portent l'État du Québec sur leurs épaules, qui travaillent à l'intérêt de la société québécoise et de la nation québécoise. Puis j'aurai la chance, M. le Président, de garder le temps précieux qui m'est alloué pour poser davantage de questions. Merci.

• (15 h 50) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, merci, M. le député. Il y aura quatre minutes qui seront redistribuées dans les différents blocs. Je me tourne maintenant vers Mme la députée de Montarville, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de justice. Pour vos remarques préliminaires, vous disposez de cinq minutes.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président, et, oui, j'irai de remarques préliminaires. D'abord, avant de commencer les travaux, j'aimerais saluer la ministre, saluer la ministre, la remercier pour sa collaboration, sa transparence durant ces travaux que nous amorçons. J'aimerais également saluer son équipe ministérielle, grande équipe à l'arrière, et tous les fonctionnaires qui l'accompagnent; les collègues de l'aile parlementaire gouvernementale qui sont là; ainsi que le député de Lac-Saint-Jean; M. le président, naturellement; et le secrétariat pour son excellent travail; et finalement les téléspectateurs, les gens qui nous écoutent à la maison.

Alors, on est ici aujourd'hui pour effectuer une tâche centrale à notre responsabilité parlementaire, ça s'appelle l'étude des crédits budgétaires. Alors, c'est un exercice démocratique essentiel auquel doit se livrer le gouvernement en toute transparence pour que tous les Québécois puissent savoir comment et pourquoi les sommes qui sont retenues sur leurs salaires et les taxes perçues sur leurs achats sont utilisées, mais c'est aussi un processus nécessaire de reddition de comptes qui vise à s'assurer de la gestion responsable des fonds publics et aussi de la pertinence des objectifs fixés, de leur adéquation avec les attentes des citoyens, et surtout l'atteinte de ces objectifs. Plus spécifiquement, je suis ici aujourd'hui au nom de ma formation politique mais aussi au nom de tous les citoyens du Québec pour m'assurer de la bonne gouvernance dont la ministre et ses gestionnaires sont responsables et dans plusieurs domaines : dans la gestion des services de justice, l'amélioration de l'accessibilité du système, la gestion des différents registres, les certifications, l'administration des dossiers d'infraction pénale, la gestion des amendes. En fait, la justice, c'est large, large, large. Alors, pour ce faire, j'ai l'intention de poser des questions courtes et claires pour lesquelles je m'attends à recevoir des réponses concises qui vont directement au but.

Cela étant dit, M. le Président, notre temps de parole étant limité, bien je vais réserver le temps qu'il me reste pour le reporter, reporter les minutes restantes pour poser des questions à la ministre.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, il y aura trois minutes qui seront reportées à vos blocs.

Documents déposés

Nous allons débuter les périodes d'échange, mais, avant de débuter, vous me permettez de déposer les réponses aux demandes de renseignements, ce que je fais. Voilà. C'est lourd, faites attention, Mme la secrétaire.

Discussion générale

Je cède maintenant la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean pour un premier bloc d'échange.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, Mme la ministre, d'abord, sur l'affichage commercial, une décision importante qui a été rendue publique, vous pouvez peut-être nous expliquer votre vision, à vous, de l'affichage commercial au Québec et si vous avez l'intention d'intervenir.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, le dossier de la Charte de la langue française relève de ma collègue ministre responsable de la Charte de la langue française, et je crois qu'elle a eu ou elle aura l'opportunité de répondre aux questions.

Ceci étant dit, nous avons reçu le jugement rendu la semaine dernière par la Cour suprême, nous avons pris connaissance des motifs qui ont été invoqués par la Cour suprême, nous...

M. Cloutier : Cour d'appel.

Mme Vallée : La Cour d'appel. Pardon. Désolée. Petit lapsus. Et actuellement, et tel que l'a mentionné le premier ministre à la période de questions il y a moins d'une heure, et tel que nous l'avons mentionné la semaine dernière, nos équipes, tant les équipes du ministère de la Justice que les équipes du ministère de la Culture et de la Langue française et de l'Exécutif, sont à analyser les différentes options qui se dressent devant nous. Alors, voilà. Je n'aurai pas une réponse bien différente de celle de notre premier ministre à offrir à notre collègue à cette étape-ci du dossier, puisque le délai d'appel court et nous sommes toujours dans cette période où toutes les options sont devant nous.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Je comprends bien, mais vous êtes également la députée de Gatineau. Est-ce que vous pensez que l'affichage commercial au Québec devrait se faire en français?

Mme Vallée : M. le Président, je réitère la réponse, c'est-à-dire que, pour ce qui est des suites à donner au jugement de la Cour d'appel, nous verrons, nous sommes en analyse de ce dossier. Et je crois que nous sommes dans la question des crédits Justice, donc la députée de Gatineau pourra... mais...

M. Cloutier : La ministre de la Justice a aussi la responsabilité de faire respecter la loi au Québec.

La Charte de la langue française est évidemment un de nos textes législatifs les plus importants. On l'a même qualifiée comme quasi constitutionnelle. Vous avez la responsabilité d'en assurer son respect et son intégralité. Maintenant, il y a une décision qui sera à prendre. Lorsque quatre juges de la Cour d'appel sont unanimes et rejettent sur le banc une décision d'emblée sans même croire nécessaire de reporter les motifs, c'est parce qu'ils ont des bonnes raisons de le faire.

Alors, il y a une décision qui doit être prise. Est-ce que vous avez l'intention d'intervenir pour assurer que l'affichage commercial au Québec se fasse en français?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, je pense que, dans ce dossier-là, nous avons pris nos décisions, nous avons exercé notre leadership. Je pense que nous avons porté le dossier devant la Cour d'appel. Ça a été un des premiers dossiers pour lesquels j'ai dû intervenir lors de mon arrivée en fonction l'an dernier.

La Cour d'appel s'est prononcée. Il arrive, à l'occasion, que la Cour d'appel rende des jugements sur le banc, alors ce n'est pas exceptionnel. Simplement atténuer un peu les propos, là. On semble vouloir créer une crise linguistique de toutes pièces. Il y a une décision qui a été rendue, alors on analyse cette décision-là. Il y a différentes pistes de solution qui s'offrent à nous, qui s'offrent au gouvernement, et nous allons prendre le temps de le faire, mais, chose certaine, cette réflexion-là, je ne le ferai pas à haute voix, comme ça, lors de la période d'étude des crédits, c'est une réflexion que nous avons avec nos équipes. Nous avons un délai d'appel de 60 jours. Alors, vous allez nous permettre de faire cette réflexion-là de façon rigoureuse, de façon sérieuse, et je pense que nous avons... et notre gouvernement a toujours été à la défense... est là pour défendre et pour promouvoir la langue française.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Est-ce que je comprends donc que vous avez la même position que celle qui a été défendue devant les tribunaux?

Mme Vallée : M. le Président, dans ce dossier-là, il est clair qu'on va agir, il est clair que le gouvernement, il prendra une position. Mais, ceci étant, je n'entrerai pas cet après-midi dans cette réflexion-là à haute voix dans le cadre de l'étude des crédits budgétaires.

Dans un premier temps, puis je le réitère, là, la ministre responsable de la langue française, c'est notre collègue députée d'Outremont. Alors, c'est elle qui est ministre et c'est un dossier qui relève de sa prérogative. Oui, en tant que ministre de la Justice, en tant que Procureur général, j'ai accompagné ma collègue et notre gouvernement dans ce dossier. Maintenant, c'est une décision qui se prend en équipe, puisque nous travaillons en équipe.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, quelle est la position du Procureur général du Québec?

Mme Vallée : M. le Président, le délai d'appel prendra fin dans 60 jours. Je ne réfléchirai pas à haute voix dans ce dossier-là. Nous avons pris position, nous avons porté position. Je réfère mon collègue au mémoire déposé et aux plaidoiries que nos équipes ont brillamment fait valoir.

Ceci étant, pour ce qui est de la suite des choses, nous vous informerons en temps et lieu.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Alors, je vais aider un peu la ministre. La position du Procureur général du Québec en Cour d'appel, c'était de défendre...

Mme Vallée : De la Procureur général.

M. Cloutier : Absolument.

Mme Vallée : Oui.

M. Cloutier : J'ai dit...

Mme Vallée : Ça me chatouille, en tant que ministre responsable de la Condition féminine.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vais vous demander de vous adresser à la présidence.

Mme Vallée : Je suis désolée, M. le Président, c'était plus fort que moi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Non, non, la remarque s'adressait à tous les parlementaires présents.

M. Cloutier : Mais la remarque est tout à fait juste et appropriée. Puis j'invite même la ministre à la refaire si jamais je devais m'égarer à nouveau, mais c'est tout à fait exact.

Alors, la position de la procureur à la Cour d'appel du Québec, c'était quand même celle de l'Office québécois de la langue française, et, à moins que la ministre nous dise qu'elle a une nouvelle position en étude des crédits, ce que j'essaie simplement de lui faire dire, c'est est-ce que la position qui a été défendue à la Cour d'appel est toujours la même position aujourd'hui en étude de crédits.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, évidemment, la position qui a été défendue devant la Cour d'appel, c'est la position que nous avions. Maintenant, cette position-là n'a pas été retenue par le tribunal. Nous avons à déterminer quelle sera la suite des choses. Est-ce que nous porterons le dossier en appel? Ça fait partie des options qui sont sur la table. Est-ce que nous allons plutôt regarder les autres pistes de solution, telles que légiférer sur la question? Nous verrons. Et, je tiens à rassurer mon collègue, la Procureur général... et, les positions que nous prenons, nous les assumons, il n'y a pas de position mini-wheats, comme on pourrait le dire. Et simplement aussi faire une petite parenthèse : j'ai rappelé à l'ordre le collègue en le taquinant, en rappelant qu'il s'agit de la Procureure général, mais, tout simplement, pour les collègues autour de la table, pour ce soir, rappelez-vous que la Directrice des poursuites criminelles et pénales maintenant doit se faire interpeler de la sorte, et tentons de mettre de côté nos habitudes d'y référer comme étant le DPCP et le Directeur des poursuites criminelles et pénales.

• (16 heures) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Est-ce que vous êtes d'avis qu'il n'y a que sept entreprises qui sont concernées par la décision de la Cour d'appel?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, pour ce qui est de ce dossier-là, il y a, dans les faits... Bon, dans les faits qui nous préoccupaient dans le dossier, il y avait un certain nombre d'entreprises qui étaient touchées et qui ont fait l'objet... et qui étaient spécifiquement touchées par le dossier. Maintenant, est-ce qu'il existe, au Québec, d'autres entreprises qui n'auraient pas fait l'objet de la poursuite et qui utiliseraient cette façon de s'afficher, ce type d'affichage? C'est possible. Peut-être que mon collègue aurait pu poser les questions à ma collègue responsable de l'Office québécois de la langue française. Je n'ai pas les statistiques et les données à portée de main, j'en suis désolée, je ne suis que responsable de la Justice.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Alors, ça me fait plaisir de lui répondre. Et vous aurez compris que c'est un jugement qui est déclaratoire. Effectivement, il y avait un certain nombre d'entreprises qui étaient concernées, mais vous aurez compris qu'avec le jugement de la Cour d'appel ça ouvre une brèche à l'ensemble des entreprises. Ce sont donc toutes les entreprises qui dorénavant pourront enregistrer leur marque de commerce, et donc contourner l'application de la loi 101. Puis je vous soumets ça pour la suite des choses dans votre prise de décision d'aller en appel ou non, mais il y a une décision gouvernementale importante qui devra être prise.

Mme la ministre, quelles sont vos demandes pour le projet de loi C-51, concrètement, au gouvernement fédéral?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Pour le dossier C-51, M. le Président, c'est un dossier pour lequel nous avons interpellé nos homologues. Lorsque je dis «nous avons», c'est qu'encore une fois il s'agit là d'un dossier d'équipe sur lequel nous planchons, ma collègue de la Sécurité publique ainsi que mon collègue ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes.

Et, à titre de rappel, nous avons formulé, nous avons adressé une correspondance à nos homologues le 17 mars dernier. Alors, évidemment, nous soutenons qu'il est important de défendre nos droits, mais tout ça, dans le respect de nos droits. Alors, c'est un principe qui est important et qui commande de porter une attention particulière, c'est-à-dire que, dans cette préoccupation de soutenir les actions de sécurité, c'est une priorité. Le contexte actuel, il nous amène peut-être à s'assurer de bien assurer la sécurité des citoyens et des citoyennes du Canada. On le comprend puis on comprend cette préoccupation-là du gouvernement fédéral, mais il faut s'assurer de préserver la règle de droit. Et donc nous avons transmis nos commentaires au ministre Blaney, au ministre MacKay et à l'honorable Denis Lebel, leur soulevant les préoccupations que nous avions, notamment aux pouvoirs qui étaient accordés au SCRS, c'est-à-dire les changements d'orientation qui ont été apportés par le projet C-51, des pouvoirs qui pourraient permettre au SCRS d'outrepasser les droits garantis par la Charte des droits, et nous souhaitons que soient apportées des modulations.

Or, l'objectif du projet de loi est louable, M. le Président, mais, encore une fois, dans les moyens d'atteindre ces objectifs-là, nous avons soulevé des préoccupations, et je crois que nous ne sommes pas les seuls. Si je me souviens bien, le 9 mars dernier, la première ministre de la Colombie-Britannique a également soulevé des préoccupations à l'égard du projet de loi C-51.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean, il reste 7 min 40 s.

M. Cloutier : Concrètement, là, Mme la ministre, là, il y a eu des amendements qui ont été apportés, il y a un projet de loi qui avance du côté fédéral, vous demandez quoi au gouvernement d'Ottawa? Est-ce que vous êtes satisfaits, par exemple, avec la nouvelle définition qu'on donne à «sécurité du Canada»?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, nous nous penchons sur le projet de loi, nous suivons avec intérêt les travaux du projet de loi. Il y a eu, la semaine dernière, une réunion entre les hauts fonctionnaires des ministères de la Justice à laquelle a participé le ministère de la Justice. Alors, il y a des échanges, nous avons soulevé nos préoccupations. Ma collègue ministre de la Sécurité publique rencontrera ses homologues fédéraux au cours du mois de mai. Alors, nous avons un certain nombre de préoccupations, nous travaillons en collaboration. Notre objectif n'est pas d'arriver et de confronter le gouvernement fédéral.

Vous comprendrez, M. le Président, que, les objectifs du projet de loi, nous les reconnaissons. Alors, il n'y a pas lieu de faire de ce projet de loi là... de le monter en épingle pour créer de toutes pièces une confrontation fédérale-provinciale. Nous travaillons en collaboration avec nos homologues des autres provinces et avec nos homologues fédéraux pour, nous le souhaitons, pouvoir bonifier et pour pouvoir venir apporter des nuances à un projet de loi qui soulève un certain nombre d'interrogations non seulement ici, au Québec, mais un petit peu partout au Canada.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Alors, Mme la ministre... travaux et surtout que les gens comprennent c'est quoi, les demandes du Québec, pouvez-vous clairement nous exprimer, puisqu'il y a eu des amendements au projet de loi... Il y a eu une lettre qui a été écrite dans laquelle vous reprochez au gouvernement fédéral d'avoir procédé unilatéralement. Il y a des enjeux du respect de la charte québécoise des droits et libertés.

Est-ce que je peux savoir qu'est-ce que la ministre de la Justice pense du projet de loi et quels sont les amendements qui sont réclamés?

Mme Vallée : Alors, M. le Président, nous avons soumis une correspondance à travers laquelle nos inquiétudes sont clairement indiquées. Alors, j'ai déjà déposé cette correspondance à l'Assemblée nationale au mois de mars dernier. Nous travaillons, avec nos fonctionnaires du ministère de la Justice, dans le cadre des échanges entre hauts fonctionnaires, à établir... et nous souhaitons, éventuellement, arriver avec des amendements. Mais, pour le moment, nous travaillons en collaboration. Donc, il n'est pas question... et je ne permettrai pas ou je ne donnerai pas de munition à mon collègue pour permettre de soulever encore une grosse crise constitutionnelle ou quasi constitutionnelle avec le gouvernement fédéral. Là n'est pas du tout notre façon d'aborder ce dossier-là.

Nous avons soulevé nos préoccupations, nous avons fait part de nos préoccupations au gouvernement fédéral. Nous travaillons en collaboration avec nos homologues du gouvernement fédéral. Il y aura des tables de discussion où des échanges seront faits, et c'est à ce moment-là que nous formulerons nos préoccupations. Je comprends que mon collègue aimerait que nous déchirions notre chemise sur la place publique pour se braquer contre le gouvernement, mais, l'objectif visé par le projet de loi, nous le soutenons. Alors, maintenant, tentons de le bonifier, mais faisons-le dans un principe de collaboration, de fédéralisme de collaboration plutôt que de confrontation.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Alors, M. le Président, là, on m'accuse d'intention de vouloir déchirer notre chemise, mais est-ce que...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je ne sais pas si c'est un reproche d'intention, là.

M. Cloutier : Ça va, je vais poursuivre. Merci, M. le Président. Est-ce que vous trouvez ça normal que vous êtes incapable de me nommer les enjeux pour le Québec avec le projet de loi sur une loi aussi importante et fondamentale qui remet en cause des droits et libertés du Québec, qui est décrié par plusieurs anciens premiers ministres, par des professeurs d'université? Et, lorsque je vous demande quelles sont les demandes précises d'amendement du gouvernement du Québec, je n'ai rien d'autre qu'un énoncé de bonnes intentions. C'est inquiétant, M. le Président.

Je réitère ma question : Quelles sont les demandes d'amendement du Québec dans ce projet de loi, qui est important pour l'avenir de notre nation?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

• (16 h 10) •

Mme Vallée : Alors, M. le Président, je pense que le collègue ne saisit peut-être pas ce que je tente de lui expliquer. Mais, le travail que nous faisons, nous avons très bien identifié les enjeux, nous en avons fait part dans notre correspondance du 17 mars dernier. Il y a des pouvoirs accrus accordés notamment au SCRS qui permettent, d'une certaine façon, de contrevenir aux droits protégés par la Charte canadienne des droits et libertés et, incidemment, par la charte québécoise. Nous sommes préoccupés par ces pouvoirs accrus, nous l'avons soulevé.

Maintenant, M. le Président, j'ai indiqué à mon collègue que le travail se faisait par le biais des tables existantes, c'est-à-dire qu'il existe des moyens pour travailler et pour faire avancer ces dossiers-là. Il y a eu, pas plus tard que la semaine dernière, une table où les hauts fonctionnaires de la Justice se sont rassemblés, et ont pu discuter du projet de loi C-51, et ont pu soulever certains enjeux avec leurs homologues du gouvernement fédéral, leurs homologues de la Justice du gouvernement fédéral. Il y aura, en mai prochain, une table des ministres de la Sécurité publique à laquelle participera ma collègue et à laquelle il sera question notamment du projet de loi C-51.

Et, comme je l'ai mentionné, également c'est un dossier que nous pilotons en équipe, à travers les différents canaux qui s'offrent à nous, dans une optique de collaboration. Nous avons soulevé des préoccupations, nous les avons mises de l'avant, nous avons exercé notre leadership. Je crois, M. le Président, que le Québec est la première province à avoir clairement identifié les enjeux. Je sais que la Colombie-Britannique a soulevé certaines préoccupations un peu différentes de celles soulevées par le Québec. Mais nous sommes là, nous exerçons notre leadership à l'intérieur des différentes tables où nous pouvons le faire, et là-dessus, M. le Président, je suis très fière du travail que font les équipes des différents ministères qui sont impliqués dans ce dossier-là. Il n'est pas question de dire que nous sommes frileux et que nous ne travaillons pas dans le dossier, que nous ne savons pas où... Au contraire, bien au contraire.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre.

M. Cloutier : Juste en terminant...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Quelques secondes, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : ...qui est le leader du dossier au gouvernement du Québec? C'est-u Justice, Sécurité publique, Affaires intergouvernementales? Quel ministre a la responsabilité de ce dossier-là?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En 10 secondes, Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, c'est un dossier que nous travaillons en équipe. Alors, évidemment, les aspects de justice sont pilotés par Justice, les aspects de sécurité publique, par Sécurité publique, et il y a une partie qui relève évidemment des Affaires intergouvernementales canadiennes.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je...

Mme Vallée : Nous, on travaille en équipe. Je ne sais pas, peut-être que ce n'est pas comme ça du côté de l'opposition, mais chez nous on travaille en équipe.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça met un terme à ce premier bloc d'échange. Je me tourne maintenant vers le côté du gouvernement. M. le député d'Ungava, à vous la parole.

M. Boucher : Merci, M. le Président. Pourriez-vous m'indiquer de combien de temps je dispose?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : De 20 minutes.

M. Boucher : Merci, c'est trop de bonté. Alors, salutations à Mme la ministre, aux gens qui l'accompagnent et toute son équipe derrière, salutations aux députés, bon, des deux oppositions, salutations à mes collègues de la banquette ministérielle.

Alors, Mme la ministre, je vais vous amener dans un tout autre registre, un tout autre domaine, celui des affaires de l'Office de la protection du consommateur. Vous savez, bon, le 28 novembre 2014, votre collègue M. le ministre des Transports avait présenté le projet de loi n° 25 concernant la Loi transférant au président de l'Office de la protection du consommateur la responsabilité de délivrance des licences de commerçant et de recycleur de véhicules routiers, la loi qui a été adoptée le 24 mars dernier. Vous savez que, dans ce domaine-là, bon, il y a un petit peu l'adage populaire où les commerçants de voitures usagées vont... je vais peser mes mots, disons...

Une voix : Oui.

M. Boucher : ...les commerçants de voitures usagées ne sont peut-être pas toujours les personnes les plus fiables, et, bon, si vous regardez dans les sondages «envers quelle profession avez-vous le plus confiance?», ça score toujours parmi les derniers, juste devant les avocats. Ça, je ne le sais pas pourquoi.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Boucher : M. le président semble bien apprécier ma blague.

Alors donc, côté recyclage de véhicules, bon, c'est sûr qu'il y a des recycleurs de véhicules qui sont, comment dire, irréprochables et qui mènent un commerce vraiment sans tâche, mais, d'autres, on a vu souvent, à plusieurs reprises, des descentes policières dans ce qu'on appelle, dans le jargon populaire, des cours de scrap où, souvent, c'étaient des recyclages de véhicules qui avaient été accidentellement transportés là avec une dépanneuse et non pas démolis dans un accident. Donc, il y a peut-être un certain ménage à faire de ce côté-là.

Dans une autre vie, bon, j'ai été témoin, entre autres, d'un recycleur où vous appeliez le type en question puis disiez : As-tu un moteur de Toyota, telle année? Ah! je n'ai pas ça, mais laisse-moi faire deux, trois téléphones, là, puis, demain, je vais avoir ça. Puis, ce qu'il faisait, il partait avec sa dépanneuse, allait dans le village d'à côté, ramassait la marchandise dont il avait besoin, il la ramenait puis il rappelait son client : Bien, justement, là, je viens de t'en trouver un, puis etc. Donc, c'est sûr que ce n'est pas le lot de la majorité, fort heureusement, mais quand même... Aussi, côté, bon, être sûr que tous ces gens-là paient leur juste part de taxes, vraiment que les taxes sont vraiment perçues sur toutes les pièces de véhicules usagés vendues, ce qui n'est pas nécessairement le cas, encore une fois, malheureusement, alors, Mme la ministre, dans un premier temps, je vais avoir plein de sous-questions à vous poser, là, dans plein de domaines sur l'Office de la protection du consommateur. On va y aller une à la fois.

J'aimerais savoir, bon, premièrement, c'est quoi, les raisons fondamentales, là, qui ont amené le ministre... Je vous en ai décrit un petit peu, là, mais je suis sûr que vous êtes plus en mesure que moi de renseigner les gens qui nous écoutent à savoir les raisons fondamentales qui ont amené le ministre des Transports à déposer ce genre de projet de loi là pour transférer cette compétence-là puis quel bénéfice les consommateurs vont retirer de l'adoption de ce projet de loi là.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le député.

Avant de vous céder la parole, Mme la ministre... La commission vient de recevoir un message de la part du bâtonnier du Québec qui vous est adressé, Me Boucher... pardon, M. le député d'Ungava. Mme la ministre.

Mme Vallée : Bien, vous me permettrez de saluer M. le bâtonnier, Me Synnott, qui écoute nos travaux. Alors, salutations aux membres du Barreau.

En fait, le dossier dont fait état notre collègue, M. le Président, c'est un autre dossier qui a été travaillé en équipe. Je pense que c'est peut-être la marque de commerce chez nous. C'est un dossier que j'ai piloté conjointement avec mon collègue ministre des Transports. Et, pour nous permettre d'être un petit peu plus efficaces, mon collègue a piloté ce dossier-là en commission parlementaire pendant que nous travaillions sur le projet de loi n° 26. Alors, ça a permis, en même temps, de traiter deux enjeux importants et de faire avancer la législation. Alors, l'efficacité, parfois, c'est fort intéressant.

Alors, ce qui nous a amenés à faire ce transfert-là, c'est qu'il y a à peu près 5 900 licences de commerçant, recycleur de véhicules routiers à la SAAQ... il y en avait à peu près 5 900, et cette compétence-là, qui est transférée à l'Office de protection du consommateur, vise à permettre à l'office de répondre de façon précise au nombre de plaintes. C'est que, depuis des années, l'Office de protection du consommateur recevait énormément de plaintes de citoyens en lien justement avec, entre autres, les problèmes que certains commerçants et recycleurs de véhicules pouvaient causer parfois — vente d'équipements désuets, déficients, fausse représentation, véhicules volés, bref, la liste est longue — et l'office n'avait pas juridiction, malheureusement, pour intervenir. Alors, l'objet de ce transfert-là, c'est de protéger le consommateur, de permettre d'être plus efficaces, parce que le mandat qui est confié à la Société de l'assurance automobile, bien c'est protéger l'utilisateur de la route contre les risques qui sont liés à l'usage de la route et non protéger les acheteurs de véhicules face aux pratiques de commerce douteuses des recycleurs et des commerçants.

Par contre, l'Office de la protection du consommateur, il a une expertise dans la gestion des licences et des certificats dans plein de domaines — on pense au domaine du voyage, au domaine du recouvrement, les prêts d'argent — donc l'Office de la protection du consommateur a déjà des équipes, est déjà sensibilisé, a déjà des réflexes d'enquête, des façons de travailler qui pouvaient certainement répondre aux différents besoins qui avaient été mis de l'avant ou qui ressortaient des appels et des plaintes formulés. Donc, le projet de loi vise justement à mettre au profit des consommateurs du Québec, à mettre au profit de la société l'expertise qui a été développée au fil des ans par l'Office de protection du consommateur. Et il y avait aussi un autre élément, c'est qu'actuellement la gestion des permis de commerçant puis de recycleur, c'était vraiment à la pièce et ça ne permettait pas d'assurer une protection complète des consommateurs en matière d'automobiles. Parce que, il faut se rappeler, la Loi sur la protection du consommateur touche et encadre les contrats de vente, les contrats de location, les locations d'automobiles neuves, les automobiles d'occasion, les contrats de financement.

Donc, il y avait plusieurs aspects qui étaient déjà sous la responsabilité de l'office, mais les licences, elles étaient sous la responsabilité de la Société d'assurance automobile. Donc, on a changé les choses, on a modifié les pouvoirs, on a modifié le tout via le projet de loi n° 25. Donc, on a vraiment donné des pouvoirs accrus pour pouvoir intervenir auprès des commerçants qui contreviennent à la loi et qui font rager bien des consommateurs au Québec.

• (16 h 20) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député d'Ungava.

M. Boucher : Vous parliez tantôt, Mme la ministre, d'environ 5 900 licences. Pouvez-vous me faire comme une ventilation, là, de quels sont les commerçants puis les... ne pas les donner avec vous aujourd'hui, là?

Mme Vallée : Bien, en fait, on a actuellement, là... bien, en janvier 2015, la Société d'assurance automobile gérait... En fait, ce n'est pas 5 900, je m'excuse, M. le Président, c'est 5 880 licences, donc : il y a 5 380 licences de commerçant, il y a 149 licences de recycleur, et on a 351 licences de commerçant-recycleur. Alors, ces commerçants-là, pour les gens qui nous écoutent, pour le bénéfice aussi des parlementaires, c'est... on va assimiler aux commerçants ceux qui font l'acquisition de véhicules routiers dans le but d'en faire le commerce soit la vente ou la location à long terme, par exemple comme un concessionnaire, un commerçant de véhicules d'occasion ou de véhicules récréatifs ou celui qui démonte ou vend des véhicules routiers mis au rancart, des carcasses ou des pièces provenant de ces véhicules, comme un commerçant qui gère, dans le jargon populaire, nos fameuses cours à scrap, qui ornent les routes du Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député d'Ungava, il reste 10 minutes à ce bloc.

M. Boucher : Merci, M. le Président. Dernière petite question sur nos cours à scrap, comme on dit affectueusement. Quelqu'un qui aurait des problèmes aujourd'hui, juste question de bien renseigner le public, à partir de quand la loi n° 25 sera-t-elle effectivement en vigueur?

Mme Vallée : Le projet de loi va entrer en vigueur le 19 octobre 2015.

M. Boucher : Merci. Je veux vous amener dans un autre registre — les vacances s'en viennent, l'hiver a été froid : les agences de voyages. C'est sûr que, l'hiver, on regarde plus pour le Sud; l'été, peut-être plus l'Europe. Plusieurs agences de voyages ont un service vraiment impeccable et puis sont à recommander à tous ceux qu'on peut connaître, mais, malheureusement, dans certains cas, bon, ce n'est peut-être pas toujours 100 % vérifié.

Au cours de l'année 2014‑2015, l'office a poursuivi la campagne Voyagez bien protégé, qui vise à faire connaître la protection financière qu'offre le Fonds d'indemnisation des clients des agents de voyages. Cette campagne-là s'adressait aux voyageurs québécois ainsi qu'aux professionnels du secteur du voyage. Alors, Mme la ministre, j'aimerais que vous nous rappeliez un petit peu quels sont les objectifs de cette campagne-là puis nous en dresser un bilan à savoir quels résultats ça a pu produire.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Bien, M. le Président, il faut se rappeler que, bien, il existe actuellement un règlement sur les agents de voyages et le règlement permet d'utiliser une partie des sommes prévues dans le fonds d'indemnisation, soit 5 % des revenus de placement des sommes accumulées dans le fonds ou une somme jusqu'à concurrence de 250 000, pour financer des campagnes d'information qui sont destinées aux voyageurs, parce que trop souvent, aussi, dans ce domaine-là, il arrive malheureusement que des gens investissent des sommes importantes mais se font flouer, et n'ont pas nécessairement le produit auquel ils aspiraient, et n'ont pas la vacance de rêve qu'ils souhaitaient avoir.

Alors, l'objectif de la campagne qui a été Voyagez bien protégé misait justement à renseigner les clients des agences de voyages notamment à l'égard de leurs droits. C'est une campagne qui a été lancée entièrement sur le Web et qui permettait, par le biais d'un sondage, de déterminer les destinations principales des voyageurs à l'étape de la planification d'un voyage puis les destinations importantes aussi pour ceux qui s'apprêtent à réserver un voyage. Il y a eu des activités de communication qui ont été mises en oeuvre à l'hiver 2013, mais c'est vraiment au printemps dernier, le printemps 2014, que les activités les plus importantes ont été déployées. Alors, c'est des actions de communication qui visaient à diriger les voyageurs vers des professionnels du voyage sur le site voyagezbienprotege.gouv.qc.ca. Il y a eu quand même plusieurs visites, 41 000 visites dans le site pour les voyageurs, et les professionnels du voyage aussi ont visité le site. Il y a près de 3 000 visites de la part des professionnels du voyage. Il y avait, à l'intérieur de cette campagne-là, des capsules vidéo qui rappelaient avec humour qu'un voyage, bien ça ne s'improvise pas, ça se planifie. Et c'est une campagne qui a été visionnée à plus 228 000 visionnements. Et il y a eu aussi plus de 5 millions d'internautes qui ont été rejoints par les placements publicitaires qui ont été faits sur le Web. Il y a eu aussi une campagne sur Facebook qui a permis d'augmenter le nombre d'abonnés à la page de l'office sur le réseau.

Alors, l'objectif, c'était d'informer les voyageurs de l'importance de bien planifier leurs voyages, de faire affaire avec les bonnes personnes, et il y a eu aussi des liens entre l'office et les professionnels du voyage qui ont été faits dans le cours de cette campagne-là.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député d'Ungava, il vous reste cinq minutes.

M. Boucher : ...M. le Président. Écoutez, je vais vous amener sur un autre terrain, toujours dans la cour de l'Office de la protection du consommateur. Mme la ministre, on va conclure avec ça. Je pense, ça va être tout le temps qui va m'être imparti.

L'office réalise des programmes de surveillance, bon, auprès des commerçants afin que les commerçants respectent les obligations qui leur incombent et, par le fait même, les droits des consommateurs, voir que ça soit respecté. Comme je vous dis, il y a des activités de surveillance qui sont réalisées auprès des commerçants. Pouvez-vous nous indiquer en quoi consistent ces activités-là, surtout dans la dernière année et puis quels genres de résultats ont été obtenus par ce type de campagne de surveillance?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Eh bien, M. le Président, rapidement. En 2014‑2015, l'office a réalisé des programmes de surveillance dans le domaine des agences de voyages, on en a parlé un petit peu. Dans le secteur de l'automobile, on s'est penché sur les situations de publicités qui étaient non conformes où le commerçant offrait des taux de financement à 0 % ou un rabais au comptant lors de l'achat de véhicules neufs — alors, ça, je pense qu'on a tous en tête des images de publicités qui font état de taux de financement à 0 %; des règles d'indication de prix, de l'application pour la politique d'exactitude des prix — alors, on a mené des programmes de surveillance dans ce contexte-là; programmes de surveillance également dans le cadre de la vente itinérante d'appareils de chauffage et de climatisation et aussi auprès des titulaires des différents permis. Alors, l'office effectue des vérifications de façon continuelle.

Il y a eu quand même, dans ces activités de surveillance là, 65 dossiers dans lesquels l'office pourrait envoyer des avis de non-conformité. Il y a eu envoi de 94 avis d'infraction — 90 relatifs au non-respect de dispositions en matière d'indication et d'application de la politique d'exactitude du prix, quatre qui visent des commerçants exerçant des activités dans le domaine du chauffage ou de la climatisation — 18 dossiers qui visaient des agents de voyages pour lesquels l'office pourrait intenter des poursuites pénales et la signification de poursuites dans sept dossiers relatifs au secteur de l'automobile. Dans les dossiers, les amendes réclamées sont de 1 899 918 $.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète votre réponse?

Mme Vallée : Oui.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste deux minutes, M. le député d'Ungava.

• (16 h 30) •

M. Boucher : Bien, je pense, ce genre de campagne là est primordial, Mme la ministre, particulièrement dans le domaine de l'automobile, où il y a... bon, je ne nommerai pas la marque, là, mais il y a une campagne publicitaire qui passe ces jours-ci à la télé où c'est le père de famille avec ses deux enfants au restaurant, puis un des deux lui demande : Combien as-tu payé la voiture? Puis, le père lui dit : Ah! bien, vous savez, une voiture, là, c'est bien dur de dire quel prix ça coûte, là, ça dépend, puis etc. Finalement, bien, souvent les gens se présentent au garage en disant : Bon, bien, je m'attends à payer tant, mais là finalement, avec tout ça, là, le prix a augmenté sensiblement, puis, dans l'émotion puis l'aspect irrationnel de l'achat, bien les gens des fois se font...

Une voix : ...

M. Boucher : ...pas rouler, mais se font embarquer dans des engagements qu'ils n'auraient peut-être pas pris autrement. Je n'accuse personne d'être malhonnête, mais ils se font pousser dans des engagements qu'ils n'auraient peut-être pas pris normalement s'ils avaient su dès le départ que, bon, je fais ça, ça va coûter tant, etc.

Il nous reste à peu près une minute, Mme la ministre. J'aimerais que vous me parliez brièvement de la poursuite dans le secteur des... pardon, des télécommunications — c'était le mot difficile du jour — puis le résultat d'un programme de surveillance, là, bon.

Mme Vallée : Depuis le 30 juin 2010, il existe des nouvelles règles de la Loi sur la protection du consommateur qui encadrent le domaine, les contrats de services en matière de télécommunications, il y a des règles qui portent sur les renseignements obligatoires que doivent comprendre les contrats maintenant, l'interdiction de clause de modification unilatérale du contrat, ceux qui portent sur le renouvellement du contrat, sur l'annulation du contrat puis les frais, le maximum de frais qui peuvent être exigés.

Alors, évidemment, l'entrée en vigueur remonte à près de cinq ans maintenant. Il y a eu un programme de surveillance, les activités de surveillance dont on a parlé tout à l'heure ont été menées dans le cadre des dossiers de télécommunications, et il y a des enquêtes qui ont été menées par l'office et qui ont conduit au dépôt de poursuites pénales à l'encontre d'entreprises, donc, cinq entreprises qui... et pour lesquelles des dépôts de poursuite ont été faits. Alors, il y a aussi des enquêtes qui sont en cours actuellement menées de front par l'office et qui ont pour objectif d'assurer que les règles en vigueur, les nouvelles règles qui touchent le domaine des télécommunications soient suivies à la lettre par les commerçants qui oeuvrent dans ce domaine-là. C'est important, c'est une loi d'ordre public, et il est important de la respecter.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça a complété, on a même dépassé un peu. Je devrai retrancher, dans les prochains blocs, du temps.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, je n'en doute pas. Je me tourne maintenant vers la députée de Montarville pour votre bloc d'échange. À vous la parole.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, avec naturellement votre permission, qui sera accordée, je vais faire un suivi de dossier, un dossier dont nous avons parlé plus d'une fois, et une mise en situation pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, le fameux dossier de Mme Hélène de Kovachich. Pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, il faut dire de qui il s'agit.

En 2012, cette dame est l'ancienne présidente du Tribunal administratif du Québec, ce qu'on appelle le TAQ. Donc, Hélène de Kovachich a versé 213 500 $ à son avocate pour la représenter dans une affaire l'impliquant personnellement, et ce, à même le budget du TAQ, c'est-à-dire à même la poche des contribuables québécois. Mme de Kovachich a démissionné de son poste de juge en chef après que ces informations eurent été divulguées en 2013. Elle a ensuite occupé le poste de juge jusqu'à sa suspension par le Conseil de justice administrative en novembre 2014, et ce, pour une durée de six mois. Son retour en poste est d'ailleurs prévu incidemment, Mme la ministre, demain, mercredi le 6 mai 2015. Malgré que le Vérificateur général ait conclu que le bien-fondé de la prise en charge par le TAQ de la dépense relative à la représentation du membre n'a pas été démontré, le TAQ lui a accordé en 2014 une augmentation salariale de 16 605 $, soit une somme équivalant à 13 % de son salaire, en faisant passer son traitement annuel de 123 512 $ à 140 117 $, comme pour la majorité des autres juges administratifs de la Section des affaires immobilières.

Une première question me vient à l'esprit, et j'en aurai d'autres : Comment la ministre de la Justice peut-elle justifier qu'une telle augmentation salariale ait été offerte à une juge qui a dérogé aux principes de transparence dans la gestion de fonds publics, selon les termes mêmes du Vérificateur général, et qui n'aura finalement que repayé, selon l'entente récemment conclue, 100 000 $ des 213 500 $ de fonds publics, qu'elle a indûment utilisés à des fins personnelles? Et je pose cette question, puisque le projet de règlement du 11 décembre 2013, décret n° 1324-2013, modifiant le Règlement sur la rémunération et les autres conditions de travail des membres du Tribunal administratif du Québec prévoyait qu'à compter du 1er avril 2014 le traitement annuel des membres à temps plein du Tribunal administratif du Québec autres que ceux qui occupent des charges administratives au sein du tribunal soit majoré de 5 %. Donc, le décret disait : L'augmentation sera de 5 %, et là ce qu'on constate, c'est que Mme de Kovachich jouit d'une majoration de 13 %.

Alors, la ministre peut-elle nous éclairer? Le TAQ a-t-il été plus généreux qu'il ne le devait dans ce dossier? J'aimerais avoir des précisions à cet égard. Et la troisième question qui suivrait, à cet égard, sur son salaire, si je peux m'exprimer ainsi : Quel sera son traitement pour 2015?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, alors, dans le dossier qui nous occupe, le dossier de Me de Kovachich, je vais... d'ailleurs, j'ai souligné la présence de Me Proulx, qui est ici, je pense qu'il y a une chose qu'il est très important de mentionner, le dossier de Me de Kovachich est un dossier qui relève du Tribunal administratif du Québec. Alors, le Tribunal administratif du Québec est un organisme qui est indépendant, qui jouit d'une pleine indépendance, et ça, c'est extrêmement important. Alors, là-dessus, il y a bon nombre de réponses auxquelles Me Proulx pourra répondre, et c'est pourquoi Me Proulx est ici. Il faut aussi faire la part des choses. Le traitement des juges administratifs est réglementé et est prévu par le Secrétariat aux emplois supérieurs, alors le traitement d'un juge administratif... et le traitement sera similaire au traitement des autres juges administratifs. Alors, il n'y a pas de cas d'exception.

Pour ce qui est de Me de Kovachich, il faut comprendre aussi que le Conseil de la justice administrative a rendu une décision en novembre dernier, et, dès le lendemain de la décision rendue par le Conseil de la justice administrative, le gouvernement, par décret, a entériné la recommandation mise de l'avant par le Conseil de la justice administrative. Donc, il faut donc comprendre que, depuis six mois, Me de Kovachich a été suspendue sans traitement, donc elle n'est pas rémunérée. Alors, ça, c'est important de le mentionner. Il faut faire la part des choses, il faut faire attention. Je pense qu'il est quand même important, dans ce dossier, de dire les choses de façon très précise et d'être, comme le dirait le député de Chomedey, très factuels. C'est important. Je comprends qu'il y a en cause des sommes d'argent importantes qui ont été mises de l'avant par les différents médias, mais il faut quand même aussi considérer que depuis six mois, suite à la décision du Conseil de la justice administrative, Me de Kovachich n'a pas reçu de traitement.

Sur les détails plus précis, et avec la permission des membres de la commission, je pourrais céder la parole à Me Proulx, qui a des informations encore plus précises, là, sur le détail des conditions de travail de Me de Kovachich.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Alors, dans un premier temps, Me Proulx, vous identifier pour le bénéfice de nos téléspectateurs, et la parole est à vous.

• (16 h 40) •

M. Proulx (Mathieu) : Oui. Je suis Mathieu Proulx, président-directeur général du Tribunal administratif du Québec. Alors, bonjour, M. le Président, bonjour, Mmes et MM. les parlementaires.

Alors, écoutez, en mai 2013, Mme de Kovachich a démissionné de son poste de présidente mais pas de son poste de juge administratif, donc elle recevait le salaire de juge administratif à temps plein. En décembre 2013, le gouvernement de l'époque a pris un décret changeant le niveau de qualification des juges administratifs, alors ils ont été classifiés DMO 4. Alors, tous les juges administratifs juristes sont rémunérés avec l'échelle de DMO 4. Les juges-médecins, c'est DMO 4 bonifié; les psychiatres, DMO 5. Alors, il y a une grille qui est prévue dans le décret. Et donc, Mme de Kovachich, le niveau actuel, depuis le 1er avril, c'est 140 117 $ pour les juges administratifs juristes. Pour les juges administratifs médecins, c'est un petit peu plus élevé, environ 145 000 $. Alors, voilà.

Donc, je rappellerai qu'il n'y a pas d'évaluation à la production, là. Il y a une évaluation formative qui est faite au Tribunal administratif du Québec, et Mme de Kovachich va faire l'objet d'une telle évaluation comme tous les autres juges administratifs.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète, Mme la ministre?

Mme Vallée : Oui.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Alors, merci, M. le Président. Je comprends, comme disait Mme la ministre, qu'il faut être prudents avec les chiffres. Je suis heureuse d'entendre que M. Proulx confirme ce que je viens de dire à l'effet que le salaire de Mme de Kovachich est passé de 123 000 $ à 140 000 $. Vous dites que son traitement, à compter du 1er avril 2014, est de 140 117 $ — c'est exact, c'est ce que vous venez de dire — alors ça confirme ce que je vous disais et que nous avons trouvé dans l'étude des crédits. Alors, j'ai fait mes devoirs aussi à cet égard-là. Je comprends qu'il y a beaucoup de chiffres. Je comprends également que, durant la période de... une période de sanction, si je peux m'exprimer ainsi, durant six mois, madame n'a pas eu de traitement, n'a pas eu de salaire.

Cependant, j'aimerais poursuivre à cet égard-là, j'aimerais savoir, durant cette fameuse période, si le TAQ a remplacé madame, parce qu'on peut en déduire ou on peut supposer qu'il a économisé six mois de salaire, mais ce n'est pas garanti, M. le Président. Alors, je voulais savoir si l'absence de Mme de Kovachich a été comblée. Si tel est le cas, a-t-on payé quelqu'un d'autre pour faire son travail ou a-t-on économisé quelque chose, six mois de salaire?

M. Proulx (Mathieu) : Évidemment, si vous me permettez, les planifications de rôle sont déjà faites. Alors, devant l'absence d'un juge administratif, la vice-présidente à la Section des affaires sociales a été obligée d'ajuster le nombre de rôles, puisqu'il y avait un membre de moins pour une période de six mois. Alors, ce que j'ai compris de la situation, à la Section des affaires sociales, c'est que des collègues ont dû redoubler d'efforts pour ne pas pénaliser, là, les citoyens pour les audiences de la Section des affaires sociales.

Mme Roy (Montarville) : Donc, si je comprends bien, ce sont les collègues qui ont mis les bouchées doubles, il n'y a pas eu personne qui a... Omettant les bouchées doubles, a-t-on payé les collègues en temps supplémentaire, a-t-on eu des frais supplémentaires à débourser?

M. Proulx (Mathieu) : Non, pas du tout. Chez nous, ce sont des salaires annuels, et, qu'importe le nombre d'heures dans une journée, vous êtes payés selon l'échelle de DMO 4.

Mme Roy (Montarville) : Merci, maître.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Oui. Je vais poursuivre sur ce dossier, tout de même rappeler que le tarif horaire de 425 $ et le montant des honoraires prévu au contrat que Mme de Kovachich avait accordés à son avocate étaient beaucoup plus élevés que ceux habituellement accordés pour une défense, là, une défense d'un membre du TAQ.

En novembre 2014, nous parlions de cette décision se fondant sur le principe d'inamovibilité des juges. Le Conseil de la justice administrative a tout de même écarté la sanction ultime, qui était la destitution. Madame va reprendre son poste, revenir en fonction demain. Nous devons donc remettre en question la légitimité du retour en poste de madame. Cependant, son intégrité et la confiance du public envers elle peuvent certainement être remises en cause après ce qui s'est passé. Des facteurs atténuants ont mené le conseil et déterminé qu'une suspension de six mois sans solde était la sanction la plus adéquate et proportionnelle. Mme la ministre a ratifié cette recommandation.

J'aimerais savoir, Mme la ministre... Vous avez ratifié cette recommandation, mais on apprenait aussi le 28 mars dernier que le TAQ avait conclu une entente de remboursement avec Mme de Kovachich, que le TAQ va récupérer 100 000 $ sur les 213 500 $ de fonds publics, qu'elle a utilisés à des fins privées. Donc, cette décision, elle a été déposée auprès de la ministre. Alors, la ministre avait-elle un pouvoir discrétionnaire quant à cette entente et trouve-t-elle que cette entente est convenable et suffisante? Parce qu'il y a quand même un manque à gagner qui a été pris dans la poche des contribuables.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Nous sommes, M. le Président, dans le coeur du dossier. Tout ce dossier-là démontre à quel point il est important de préserver l'indépendance du TAQ. Et, dans ce dossier-là... je pourrai permettre à Me Proulx de commenter, mais il n'y a eu aucune ingérence politique dans le dossier, aucune intervention politique dans le dossier qui nous préoccupe.

Le Vérificateur général avait, dans son rapport en date de 2013, février 2013... 2014, pardon, à sa recommandation 4, recommandé que le TAQ, donc, détermine, sur la base de la connaissance du dossier judiciaire, des règles en vigueur, de la jurisprudence et des avis gouvernementaux, la pertinence pour le TAQ d'assumer les frais reliés au contrat attribué à Me Gayrard et documenter la décision qui a été prise. Alors, le TAQ a évalué, a fait une évaluation du dossier — je pourrai céder la parole à Me Proulx pour expliquer davantage — et a formulé une décision documentée et écrite sur la question. Et, si vous permettez, M. le Président, je céderais la parole à Me Proulx, puisque ce dossier-là vraiment relevait de la compétence et de la juridiction du TAQ et il était important que le TAQ se penche sur la question comme le TAQ devait avoir et donner suite aux quatre recommandations du rapport du Vérificateur général.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, je comprends qu'il y a consentement et...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste cinq minutes et plus.

Mme Roy (Montarville) : Moi, je remercie Me Proulx, c'est très clair. Et je comprends que vous n'aviez aucun pouvoir décisionnel sur cette entente qui est intervenue et, l'indépendance du TAQ, je la comprends très bien. Alors, je vous remercie à cet égard-là.

J'aimerais passer à une autre question, comme le temps qui m'est imparti est très court. Autre dossier, on va parler d'une défense, la défense du ministre Heurtel dans le dossier McInnis. Le 3 juin 2014, le ministre du Développement durable...

Une voix : ...

Mme Roy (Montarville) : Pardon? Alors, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, pour vous mettre en situation : le 3 juin 2014, le ministre du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques a délivré un certificat d'autorisation à Ciment McInnis pour la construction d'une cimenterie à Port-Daniel—Gascons. Le 1er août, des groupes environnementaux ainsi que ciment Lafarge ont présenté une demande de révision judiciaire à la Cour supérieure. Ils soutenaient, avec raison, que le ministre a excédé sa compétence en délivrant ce certificat, car, conformément à l'article 2.n.4 du Règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement assujettissant les cimenteries à la procédure du Bureau d'audiences publiques en environnement, le BAPE, seul le gouvernement du Québec peut émettre un certificat d'autorisation, et ce, après qu'une procédure d'évaluation des impacts sur l'environnement ait été complétée en vertu de la section IV.1 de la Loi sur la qualité de l'environnement.

Alors, en sa qualité de Procureur général, la ministre a défendu le ministre de l'Environnement dans cette cause. À ce jour, j'aimerais savoir, M. le ministre, combien... M. le ministre; M. le Président. Je m'adresse à la ministre via le président. Excusez-moi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : La ministre est là, et le président est ici.

Mme Roy (Montarville) : Alors, à ce jour, j'aimerais savoir combien a coûté aux contribuables la défense du ministre Heurtel, quels sont les coûts, les débours, les frais judiciaires, extrajudiciaires, notes sinographiques, procédures, déplacements, combien d'heures ont été consacrées par Me Normand Lavoie à ce dossier et combien de juristes ont travaillé sur ce dossier au niveau du contentieux, au niveau de la rédaction législative.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Si je peux me permettre, simplement, avant de vous céder la parole, parce qu'on parle d'un dossier qui, je crois, est toujours pendant, alors, simplement je nous invite à la prudence. Parce qu'on peut faire référence aux procédures, mais, par exemple, de souligner que c'est avec raison qu'on a contesté, là, peut-être qu'on est dans un champ qui pourrait nous amener sur un terrain glissant. Alors, simplement un petit rappel à tous. Mme la ministre.

• (16 h 50) •

Mme Vallée : Bien, M. le Président, la représentation du ministère du Développement durable s'est faite à l'interne, c'est-à-dire qu'il s'agit d'avocats à l'interne à l'emploi du ministère de la Justice qui ont plaidé et qui ont fait les représentations, comme nous le faisons dans bon nombre de dossiers au quotidien. Donc, contrairement à des dossiers où nous sollicitons une expertise à l'externe, il n'y a pas de facture autre évidemment que le temps... Il y a évidemment le temps des procureurs qui se sont penchés au dossier, qui ont monté le dossier, qui ont monté l'expertise, mais il ne s'agit pas ici d'un dossier qui a été confié à des avocats de l'externe, de la pratique privée. Donc, il s'agit bel et bien des avocats du ministère de la Justice, de nos équipes, de nos plaideurs qui se sont rendus et qui ont fait valoir les différentes représentations.

Ceci étant, M. le Président, le dossier a été reporté, a été rayé du rôle d'audience, mais le dossier est bel et bien actif, est toujours actif, alors, dans le contexte, je ne commenterai pas davantage le dossier, qui est toujours pendant devant la Cour supérieure.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville, deux minutes.

Mme Roy (Montarville) : Oui. Vous comprendrez, M. le Président, que je ne demandais à Mme la ministre de commenter le dossier mais plutôt quels ont été les déboursés, les frais, les notes sinographiques, le nombre d'heures aussi qui ont été consacrées par les avocats du ministère, combien de juristes ont travaillé sur ce dossier.

Mais, cela dit, si le projet de loi n° 37 ne vient que confirmer l'état du droit actuel... Je comprends que la cause est pendante, mais le ministre nous a comme fait comprendre que la cause, c'est fini. Si le projet de loi n° 37 ne vient que confirmer l'état du droit actuel selon lequel les projets de Ciment McInnis ont toujours été soustraits à la procédure du BAPE et que le gouvernement aurait pu le présenter bien avant mars, alors pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de le présenter et avoir dépensé temps et argent pour la défense, pour une défense, défense à laquelle un terme allait de toute façon être émis par voie législative? Vous comprenez ce que je veux dire, M. le Président.

Alors, le gouvernement aurait-il pu présenter le p.l. n° 37 en septembre 2014 et éviter, justement, cette défense?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Oui. Alors, simplement revenir sur la question des honoraires, là. Je pense que c'est important d'informer : il n'y a pas de comptabilité par dossier dans les dossiers, c'est-à-dire que, contrairement à dans une boîte privée où on remplit nos petites fiches de temps, là, cette comptabilité-là n'est pas tenue au ministère. Donc, nos équipes sont là, et donc il n'y a pas de... Par contre, lorsqu'on fait affaire avec des avocats de l'extérieur, là, à ce moment-là, on tient une comptabilité, mais, lorsqu'il s'agit de nos équipes, on ne travaille pas de cette façon-là.

Maintenant, pour ce qui est du dossier de Ciment McInnis et de Port-Daniel, M. le Président, à ce que je sache, le projet de loi est toujours sous étude, alors il ne faut pas présumer de l'issue de nos travaux. Alors, puisque nous ne pouvons présumer de l'issue de nos travaux, nous ne pouvons non plus présumer de l'issue du litige, et c'est pourquoi le dossier est toujours pendant et il n'est pas fermé. Il est toujours actif et peut être activé par un nouvel avis de présentation. Alors, ceci étant, je pense que, pour ce qui est du reste, on limitera nos commentaires. Et, si la collègue souhaite activer le dossier, elle pourra... sincèrement, si le développement de la Gaspésie lui tient à coeur, bien, elle pourra en informer ses collègues qui sont au dossier et s'assurer que le dossier puisse aller rondement. Mais, ceci étant, je sais que le dossier a... à date, il y a quand même plusieurs heures qui ont été consacrées à l'adoption de principe, et nous n'avons pas encore entamé le processus d'étude article par article, alors, je pense qu'il faut permettre à cette Assemblée de jouer son rôle avant de présumer de l'issue de tant du dossier judiciaire que de l'adoption du projet de loi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, Mme la ministre. Ça complète ce bloc, même que nous avons empiété une autre minute sur le bloc du député de Sherbrooke...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...de Saint-François, là, M. le député de Chomedey. Alors, M. le député de Saint-François, à vous la parole.

M. Hardy : Eh bien, M. le Président, j'aimerais saluer Mme la ministre, ensuite les collègues du côté ministériel, les collègues de l'opposition officielle et les collègues de la deuxième opposition, tous les gens qui sont présents ici, et qui accompagnent Mme la ministre, puis qui font... je remarque qu'ils font un travail remarquable, et je salue les gens qui nous écoutent par l'entremise de la télévision, à la maison.

M. le Président, permettez-moi de faire une petite introduction, là. C'est la première fois que je siège ici en votre présence comme président de commission, et j'ai remarqué depuis ce matin que vous avez un doigté extraordinaire pour bien mener à bien la commission sur laquelle on siège.

Une voix : ...

M. Hardy : Ça fait que, ceci dit, M. le Président, j'aimerais vous parler de l'aide et indemnisation pour les victimes d'actes criminels.

Alors que le Québec investit plus de 220 millions par année pour supporter les personnes, les victimes d'actes criminels — je le divise en deux, trois volets : 124,5 millions pour le régime d'indemnisation, 20 millions pour supporter les organismes financés par le ministère de la Justice à même le Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels et 80 millions pour supporter des organismes dédiés à l'aide aux victimes financés par le ministère de la Santé et des Services sociaux comme les maisons d'hébergement et les CALACS — les critiques demeurent nombreuses de la part des victimes elles-mêmes, et les organismes qui viennent en aide... Les coûts du régime d'indemnisation sont par ailleurs en augmentation constante, sans possibilité de freiner cette croissance résultant principalement de l'effet cumulatif de l'octroi des rentes viagères, dont le déficit actuariel et le coût du service, ou le coût de services courants, sont incontrôlables.

Depuis leur entrée en vigueur en 1973... c'est la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, qui est au chapitre L-6, et 1988... qui est la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels, chapitre A-13.2, les lois applicables n'ont fait l'objet d'aucune réforme majeure malgré plusieurs tentatives et quelques modifications apportées à la pièce au régime d'indemnisation au fil des ans. À cet effet, les dernières modifications furent apportées le 23 mai 2013 par l'entrée en vigueur de la Loi modifiant la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, la Loi visant à favoriser le civisme et certaines dispositions du Code civil relatives à la prescription. On y prévoit — permettez-moi de vous les énumérer — premièrement, le remboursement des coûts de nettoyage de la scène du crime ou d'un crime selon certaines conditions prescrites; deuxièmement, le remboursement de certains frais engagés pour la résiliation d'un bail résidentiel dans un contexte de violence conjugale ou d'agression à caractère sexuel; troisièmement, la prolongation du délai pour produire une demande d'indemnisation d'un an à deux ans; quatrièmement, une hausse de l'indemnité forfaitaire dont bénéficient les parents d'une personne à charge décédée — elle passe de 2 000 $ à 12 000 $; cinquièmement, la prolongation du délai de prescription du Code civil pour les actions en responsabilité civile : lorsqu'un acte causant un préjudice corporel peut constituer un acte criminel, c'est de trois ans à 10 ans; si le préjudice relève d'une agression à caractère sexuel, le délai de prescription est de 30 ans.

Au cours des travaux parlementaires tenus dans le processus d'adoption de cette loi, tous les intervenants entendus ont salué les mesures de bonification proposées mais ont insisté sur la nécessité d'une réforme en profondeur du régime d'indemnisation. Le ministre de la Justice de l'époque avait alors annoncé qu'un livre vert portant sur la réforme d'aide ou de l'aide à l'indemnisation serait déposé en décembre 2013.

Depuis ce temps, le ministère de la Justice travaille en collaboration avec différents partenaires à l'élaboration d'un document d'orientation devant faire état de l'ensemble des enjeux et problématiques, faire comprendre l'approche préconisée par le gouvernement à l'égard de la réforme envisagée et présenter des propositions de modifications autant de nature administrative que législative.

Ma question, Mme la Présidente : Quand la ministre de la Justice entend-elle rendre public un document de consultation portant sur la réforme de l'aide et de l'indemnisation offertes aux victimes d'actes criminels?

• (17 heures) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le député de Saint-François, mais votre introduction a été un peu ternie par le fait que vous m'avez appelé Mme la Présidente, mais, bon, c'est...

Des voix : ...

M. Hardy : C'est l'émotion.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, simplement, là, ça, c'est ce que ça fait lorsqu'on racle des feuilles le dimanche puis qu'on n'est pas en forme. Alors, simplement — pour ceux qui se posent des questions, là — j'ai tenté de faire ma forte, mais...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ce n'est pas une bonne idée.

Mme Vallée : Ce n'est pas une bonne idée. Alors, voilà. Le collègue de Saint-François soulève un enjeu qui est tellement important et il a bien mentionné : L'aide gouvernementale qui est apportée aux victimes d'actes criminels via l'indemnisation — les victimes d'actes criminels — soulève tellement de préoccupations, soulève tellement d'insatisfaction.

Le collègue l'a mentionné, le Québec est la province la plus généreuse. Je sais que, du côté de l'opposition, là, lorsqu'on fait ce type de comparaison là, on nous dit : Il ne faut pas se comparer au reste du Canada, mais c'est quand même intéressant de voir les sommes qui sont investies dans le reste du Canada en matière d'indemnisation d'actes criminels. Et, si on regarde, le Québec dépense quand même, per capita, 11,25 $, donc 11,25 $ per capita, par personne, alors que, par exemple, si on se compare à l'Ontario, la somme versée par personne pour le régime d'indemnisation est de 2,19 $ par personne. Alors, ça, c'est per capita. Et, en Alberta, c'est 4,98 $; en Colombie-Britannique, 3,19 $; en Saskatchewan, c'est 0,45 $ par habitant. Alors, chaque Québécois verse au régime d'actes criminels 11,25 $, donc, pour un montant qui, l'an passé, totalisait 119 millions de dollars et qui, cette année, est estimé à 130 millions de dollars. Alors, il y a une croissance année après année. Il y a des sommes majeures.

C'est quand même beaucoup de sous qui sont investis pour l'indemnisation des victimes d'actes criminels, donc, 20 millions de plus cette année que l'an dernier, mais malgré ça, malgré ça, il y a énormément d'insatisfaction, et les membres de cette commission qui avaient assisté mon prédécesseur lors des modifications apportées à la loi au cours de l'année 2013‑2014... je pense que les membres de cette commission ont été à même d'entendre les doléances et les récriminations qui étaient portées par certains groupes. Alors, évidemment, on se doit de faire quelque chose. Et, lorsque je suis entrée en fonction, évidemment, le mandat qui m'a été confié par le premier ministre, c'est de rendre la justice plus accessible et considérer aussi les besoins des personnes qui sont plus vulnérables, et ici, dans les personnes vulnérables, il y a, bien entendu, tous ceux et celles qui sont victimes d'actes criminels. Alors, ce dossier-là m'interpelle, et j'entends, à court terme et au cours de la prochaine année, agir rapidement dans ce dossier-là. Je souhaite que nous puissions revoir cette loi, qui, bien qu'elle ait subi des ajustements, des amendements à la pièce, n'a pas subi de cure de jeunesse ou n'a pas subi de mise à jour dans son ensemble. Alors, il y a lieu d'avoir une grande consultation sur cet enjeu-là, il y a lieu de revoir... Et je suis persuadée qu'on peut mieux faire les choses tout en respectant le cadre financier que nous avons. On dispose actuellement d'une somme substantielle. Il s'agira de voir comment on peut, à l'intérieur de ce carré de sable, mieux aider les victimes d'actes criminels.

Et, vous savez, M. le Président, nous sommes... et les différents chapeaux que j'occupe me permettent aussi d'avoir un regard sur les besoins. Et, dans le cadre notamment des consultations en matière d'agression sexuelle, plusieurs victimes, plusieurs groupes qui viennent en aide aux victimes, les CAVAC, les CALACS ont abordé et ont soulevé les difficultés, l'accompagnement, les besoins d'accompagnement des victimes d'actes criminels. Alors, ces travaux-là, l'équipe du ministère de la Justice est déjà à l'oeuvre. Alors, ça, là-dessus, je dois le dire, j'entends déposer quelque chose au cours de la prochaine année pour que puissions nous revoir, parce qu'on travaille si bien ensemble, les membres de cette commission. Non, mais, sérieusement, c'est un enjeu, c'est un chantier qui est important, c'est un chantier qui commande une attention particulière, et nous sommes à travailler sur ce dossier-là. Alors, c'est un des chantiers que nous menons de front comme plusieurs autres dossiers. Je sais que les membres de cette commission sont toujours impatients de recevoir de nouveaux mandats.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Saint-François, c'est six minutes à votre bloc d'échange.

M. Hardy : Merci. Il me reste combien de temps, vous dites?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Six minutes.

M. Hardy : Six minutes. Merci, Mme la Présidente. Je vous pose une autre question.

Des voix : ...

M. Hardy : Mme la ministre, excusez-moi, c'est la nervosité. Vous m'intimidez, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous fais de l'effet.

M. Hardy : Écoutez, depuis plusieurs années, l'ensemble des intervenants de la justice a établi un consensus quant à la nécessité de mettre en place un modèle d'administration de la justice plus accessible, plus efficace, plus efficient et plus rapide.

Le ministère de la Justice est conscient que l'amélioration de l'accès à la justice doit passer par la contribution du levier technologique et qu'il accuse un retard en cette matière. Une refonte majeure des façons de faire est maintenant devenue incontournable pour faire face aux problématiques actuelles de l'administration de la justice. En ce sens, différents projets sont réalisés. La publication des rôles en ligne est l'une des priorités identifiées dans le cadre du programme de transformation organisationnelle de l'administration de la justice et s'inscrit dans la vision cible.

Jusqu'à présent, les rôles étaient imprimés et affichés quotidiennement dans les palais de justice. Ils étaient parfois même envoyés par courriel aux intervenants judiciaires. Les données des rôles civils étaient également publiées par le Barreau du Québec via leur site Internet, mais l'affichage n'était pas adapté aux outils mobiles. En ce qui concerne les données des rôles criminels, elles n'étaient pas disponibles en ligne. Le manque d'uniformité et la complexité de l'accès à ces informations, mis en parallèle avec leur importance pour les intervenants judiciaires, ont mis en évidence la nécessité de moderniser la publication des rôles. Ainsi, le service en ligne de publication des rôles s'adresse aux juges, aux avocats ainsi qu'aux citoyens. En effet, les rôles sont utilisés par la majorité des intervenants judiciaires au Québec et ils visent à rendre disponibles des extraits de rôle en ligne, ainsi bien à partir de téléphones intelligents et de tablettes que d'ordinateurs.

En mars 2014, une version pilote du service en ligne a été déployée. Elle contenait des extraits de rôle en matière criminelle pour les palais de justice de Québec, Longueuil, Sherbrooke et Trois-Rivières. En septembre 2014, la version complète de la première phase du projet a été mise en ligne. Elle contient des extraits des rôles d'audience en matière criminelle pour cinq palais, soit Québec, Longueuil, Montréal, Sherbrooke et Trois-Rivières, ainsi qu'en matières civile et pénale pour les palais de l'ensemble de la province. Seuls certains rôles d'audience de la Cour supérieure et de la Cour du Québec sont diffusés. Une deuxième livraison visant la publication des rôles en ligne de la Cour d'appel ainsi que ceux des rôles en matière criminelle pour le reste de la province — je parle de la Cour supérieure et de la Cour du Québec — sera présentée ultérieurement pour être autorisée.

Ma question, Mme la ministre : Pouvez-vous nous dire, concrètement, quel serait l'impact de ce nouvel outil?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre, il reste trois minutes.

• (17 h 10) •

Mme Vallée : Alors, M. le Président, depuis septembre dernier, il est possible pour les avocats, les avocates du Québec d'accéder aux rôles en ligne dans le confort de leur salon.

Alors — pour ceux et celles qui ont pratiqué et qui pratiquaient jusqu'à tout récemment — on devait se fier à des rôles papier qui parfois n'étaient pas à jour et qui parfois étaient appelés à changer. Donc, combien de fois on arrive à un palais de justice dans la mauvaise salle, puisque la salle avait changé, et tout ça, sans nécessairement avoir eu la chance de le vérifier? Alors, maintenant, grâce à un outil, qui estroles.tribunaux.qc.ca... alors là, je ne sais pas si on peut le voir, mais il est accessible de nos iPad, et on peut facilement aller retrouver tous les palais de justice du Québec et accéder, et c'est très simple, par le biais d'une recherche toute simple... d'accéder aux rôles. Alors, on sélectionne la matière, donc criminelle, civile ou pénale, donc, disons, civile, et disons qu'on est à la Cour du Québec et qu'on va, par exemple, au palais de justice de Maniwaki — je vais faire une infopub pour le palais de justice de mon patelin — alors, il est possible d'accéder au rôle à partir de Québec sans nécessairement devoir contacter le greffier et lui demander de nous transmettre le rôle par télécopieur. Alors, c'est un outil tout simple. Et puis on se serait demandé : Bien, pourquoi on n'a pas accès à cet outil-là, on n'y a pas eu accès avant? Bien, l'outil n'était pas disponible. Maintenant, il l'est. Il répond à des préoccupations qui ont été soulevées par bon nombre de juristes. Et c'est un petit peu aussi dans l'esprit de notre développement et du déploiement des technologies de l'information. Nous y allons plutôt par petits projets. Alors, le système TOJ, auquel notre collègue a fait référence, qui est la transformation organisationnelle de l'administration de la justice, c'est un système qui se déploie en phases, par petits projets. Alors, on a d'abord ce projet-là.

On a également, à l'intérieur de TOJ, instauré et commencé le déploiement du wifi dans les palais de justice. Alors, depuis septembre dernier, Montréal et Québec avaient accès à des bornes sans fil, et puis maintenant, depuis aujourd'hui — alors, je suis fière, parce qu'hier ça ne fonctionnait pas puis ce n'était pas tout à fait à point, mais ce matin c'est à point, donc ça tombe bien, parce que, dans le cadre de nos crédits, on peut l'annoncer fièrement — les palais de justice de Longueuil, de Laval, de Gatineau et de Joliette et les palais de justice de Montréal et Québec ont maintenant leur réseau sans fil, c'est-à-dire que, dans les salles de cour, les avocats, les journalistes, le tribunal ont accès au wifi; à l'extérieur des salles de cour, les gens ont accès au wifi. Alors, il y a des bornes qui permettent l'accès au wifi, ce qui n'était pas disponible jusqu'à tout récemment dans les palais de justice, et ça va améliorer évidemment l'accès aux documents, l'accès à bon nombre d'outils qui sont disponibles en ligne. Donc, à même les tablettes, les avocats auront accès plus rapidement aux données. Alors, c'est quand même une bonne nouvelle pour les utilisateurs des palais de justice, et je tiens à rassurer les membres du Barreau, qui nous formulent tous attendre avec impatience ce déploiement-là, et nous verrons aussi à poursuivre le déploiement des bornes sur le territoire du Québec au cours des prochains mois, de la prochaine année.

Donc, comme vous pouvez voir, M. le Président, nous y allons de façon graduelle, par petits projets, mais des petits projets qui changent d'une façon quand même très importante la pratique et la façon dont le droit et l'accessibilité à la justice au Québec... dont le droit est pratiqué, et l'accessibilité à la justice. Pardon.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. On a encore un peu empiété sur le prochain bloc. À un moment donné, il n'y aura plus de temps. M. le député de Lac-Saint-Jean, à vous la parole.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, je vais revenir au dossier de Mme de Kovachich.

Vous avez dit tout à l'heure qu'il n'y a pas eu d'intervention politique. Pourtant, il y a quand même eu une discussion entre Mme de Kovachich puis l'ancien ministre de la Justice. Est-ce que vous jugez que le ministre de la Justice aurait dû intervenir pour nous assurer qu'on ne se retrouve pas dans une situation où l'argent public est utilisé à des fins personnelles?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, je vais passer la parole à Me Proulx, mais, chose certaine, dans ce dossier-là, je pense qu'il faut faire attention, il faut se garder de dresser des constats. Alors, je crois que nous avons agi de façon responsable dès que le Conseil de la justice administrative a rendu sa décision. Dès le lendemain, un décret a été pris par le gouvernement afin de donner suite aux recommandations du Conseil de la justice administrative. Par la suite, les membres du Tribunal administratif, présidé par Me Proulx, ont donné suite aux recommandations du Vérificateur général.

Alors, pour ce qui est de la recommandation et de... peut-être de permettre, M. le Président, à Me Proulx de s'exprimer sur la décision qui a été rendue par le Tribunal administratif.

M. Cloutier : Ça va.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça va?

M. Cloutier : Je vous remercie, M. le Président. Vous aurez compris que, sur le plan strictement factuel, il y a eu une discussion entre Mme de Kovachich et l'ancien ministre de la Justice et le dossier a ensuite été retourné au sous-ministre à l'époque. Qui a négocié l'entente avec Me deKovachich?

Mme Vallée : Les discussions et les négociations se sont faites via le TAQ.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Très bien. Et ma question, c'était : Qui a négocié pour le TAQ?

Mme Vallée : Alors, le TAQ était représenté par Me Munn. Je laisserai Me Proulx... Et la représentation, le choix du représentant était le choix du TAQ.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, je comprends qu'il y a consentement à ce que Me Proulx... Encore une fois, je veux simplement, de façon préventive, là... Nous sommes le législatif, et là on a un pied... on s'approche de... En fait, on parle d'indépendance judiciaire, alors je nous invite à la prudence. Me Proulx.

M. Proulx (Mathieu) : Oui. Je rappellerai, M. le Président, quand je suis rentré en fonction en mai 2013, j'ai trouvé sur mon bureau des factures d'honoraires professionnels de Me Gayrard. Comme les informations étaient incomplètes, j'ai demandé d'avoir l'avis d'un tiers neutre et impartial qui pourrait me donner des conseils. Alors, c'est là que le Conseil du trésor a mandaté le Vérificateur général pour faire une vérification particulière.

Alors, le Vérificateur général a complété son mandat et a déposé, en février 2014, un rapport avec quatre recommandations. Les trois premières recommandations, c'est de doter le TAQ de balises, d'un encadrement dans l'attribution de contrats de services juridiques. Je suis actuellement en train de finaliser ça avec un comité consultatif. Au mois de juin, ce sera probablement complété.

La quatrième recommandation était destinée au président du TAQ, de voir, s'il y avait lieu, en analysant la jurisprudence, de... s'il y avait lieu de récupérer. Alors, c'était ma responsabilité, à titre de P.D.G. du TAQ, non seulement de donner suite à la quatrième recommandation, mais également, en vertu de l'indépendance judiciaire dont bénéficie le TAQ en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne... L'indépendance judiciaire a une composante, l'indépendance institutionnelle, qui est très importante au niveau de l'indépendance administrative et confère une autonomie au TAQ. Alors, j'ai pris, donc, une décision administrative. J'ai considéré le rapport du Vérificateur général, qui disait que le contrat était valable, donc il fallait l'honorer, et donc payer les honoraires. J'ai tenu compte du rapport du comité d'enquête du Conseil de la justice administrative, de la jurisprudence. Mme de Kovachich m'a donné accès à des documents qui étaient protégés par des ordonnances restrictives, mais un jugement de la Cour supérieure permettait à madame de donner connaissance à certains documents à des autorités. Alors, c'est ce qu'elle a fait. Je me suis donc aperçu que les aspects personnels et professionnels étaient enchevêtrés, et, donc, un principe de partage en a découlé.

Et j'ai tenu compte également des risques de litiges additionnels très coûteux si on demandait de rembourser complètement. Alors, j'ai tenu compte de ça. Je crois que c'est une mesure de prudence, parce qu'on n'avait aucune garantie sur la fin du litige si on allait en litige avec Mme de Kovachich.

• (17 h 20) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Je vous remercie. Je vais essayer de poser des questions brèves pour avoir des réponses brèves, parce que le temps évidemment nous est compté. Est-ce que vous avez eu un avis du gouvernement du Québec comme le recommandait le rapport?

M. Proulx (Mathieu) : Oui. Dans le cadre des travaux du comité consultatif, il y avait une représentante du ministère de la Justice qui a été invitée et qui m'a donné des avis.

M. Cloutier : Est-ce qu'on peut en avoir une copie, de cet...

M. Proulx (Mathieu) : ...des avis verbaux. Les gens étaient invités par le comité consultatif et donnaient des avis verbaux. C'étaient la jurisprudence et les façons de faire au ministère.

M. Cloutier : Est-ce qu'on peut connaître quel était l'avis du gouvernement du Québec?

M. Proulx (Mathieu) : ...ne m'a pas donné d'avis sur la quatrième recommandation, m'a donné des avis sur les trois premières recommandations dans le cadre du comité consultatif, où nous avons invité des gens.

M. Cloutier : Mais, dans la quatrième recommandation du rapport du Vérificateur général, il y avait un avis gouvernemental de prévu.

M. Proulx (Mathieu) : Ce que j'ai pris, M. le député, c'est les remarques d'un fonctionnaire. Dans le cadre des trois premières recommandations, on nous instruisait... les invités qui ont comparu, là, devant notre comité consultatif nous instruisaient des mécanismes à l'interne d'attribution de contrats de services juridiques et de leur jurisprudence. Alors, c'est tout simplement ça que j'ai eu comme contribution.

M. Cloutier : Je comprends qu'il y a eu négociation avec Me de Kovachich et je comprends que c'est M. Jean-François Munn, c'est ça, qui était la personne attitrée. Quel était son rôle, à lui?

M. Proulx (Mathieu) : Il m'a accompagné dans ce mandat-là. Me Munn a un contrat de services juridiques au TAQ en matière de relations de travail. Alors, compte tenu de son expertise, j'ai donné des instructions à Me Munn de communiquer avec Mme de Kovachich, et donc d'engager des discussions avec celle-ci. Donc, Me Munn me revenait régulièrement, et je lui donnais certaines instructions qu'il suivait. Et c'est moi seul qui ai pris la décision finale.

M. Cloutier : Est-ce que...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Vous dites qu'il était sous contrat. Et donc c'était un contractuel du Tribunal administratif du Québec?

M. Proulx (Mathieu) : Il avait un contrat qui a été pris, je crois, en 2010 et qui se termine en novembre prochain pour des services de consultation en matière de relations de travail.

M. Cloutier : Est-ce qu'il avait lui-même reçu des contrats directement de Me de Kovachich? J'essaie de comprendre l'indépendance pour m'assurer que la négociation, vous aurez compris, elle était complète et entière, avec toutes les sécurités que cela peut comporter. Je veux juste m'assurer que Me Munn n'a jamais obtenu de contrat directement au moment où Me de Kovachich était présidente du Tribunal administratif.

M. Proulx (Mathieu) : Bien, c'est-à-dire que le contrat de Me Munn a été retenu en 2010. Donc, Mme de Kovachich était présidente à l'époque et a recouru aux services de Me Munn pour des problèmes spécifiques de relations de travail au TAQ, que ce soit avec des membres ou avec des membres du personnel.

M. Cloutier : Juste pour que je comprenne bien. Est-ce que c'est des contrats... Juste que je saisisse, là. La nature du contrat, c'est quoi? C'est un contrat ouvert, puis il y a une facturation à l'heure? C'est comme ça que ça fonctionne?

M. Proulx (Mathieu) : C'est à peu près ça, là, en matière de relations de travail.

M. Cloutier : Donc, ce que je comprends bien, Me de Kovachich, lorsqu'elle était présidente du tribunal, a eu, comme services professionnels, des recommandations ou les... le travail, en fait, de Me Munn à quelques reprises, probablement.

M. Proulx (Mathieu) : Probablement.

M. Cloutier : Puis cette même personne là a eu la responsabilité de négocier?

M. Proulx (Mathieu) : En mon nom et avec mes instructions. J'avais une complète confiance en Me Munn. Il prenait ses instructions auprès du président du tribunal, qui est votre serviteur.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste 9 min 30 s à ce bloc d'échange.

M. Cloutier : Est-ce qu'à votre point de vue, puisqu'il y a quand même un lien d'emploi entre le Tribunal administratif et Me Munn... croyez-vous qu'il avait l'indépendance nécessaire pour faire ce travail?

M. Proulx (Mathieu) : Tout à fait, tout à fait. C'est un professionnel d'une grande rigueur, d'une grande expertise. J'avais une totale confiance en Me Munn. J'ai eu des séances de travail avec lui, et il prenait ses instructions de moi, et de personne d'autre.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Est-ce qu'il vous est venu à l'esprit de choisir quelqu'un de l'extérieur du Tribunal administratif qui n'avait, donc, pas de lien d'emploi avec le tribunal?

M. Proulx (Mathieu) : Non. Je pouvais recourir à ce contrat-là, qui était encore en vigueur. Et moi, j'ai eu à travailler avec Me Munn, et je reconnais sa très grande expertise, ses bons conseils, et je n'avais pas de raison de recourir à une autre personne, là.

M. Cloutier : Je vous remercie, Me Proulx.

Nomination des juges, Mme la ministre. Puisque vous êtes en grande collaboration avec gouvernement fédéral, êtes-vous satisfaite de la lenteur du gouvernement d'Ottawa dans la nomination des juges à la Cour supérieure?

Mme Vallée : À la Cour supérieure ou à la Cour suprême?

M. Cloutier : Non, à la Cour supérieure. Cour suprême, je pense que ça va pour le moment. Il y en a moins à nommer, en tout cas.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, bien évidemment, pour ce qui est de question de la nomination des juges à la Cour supérieure, j'ai fait part de nos préoccupations à notre collègue, au ministre de la Justice, puisqu'il y a toujours un certain nombre de postes vacants à la Cour supérieure un peu partout sur le territoire du Québec, et cette situation, et je l'ai dit et je l'ai redit, cette situation crée une certaine pression sur nos tribunaux. J'en sais quelque chose, puisqu'en Outaouais notamment il y a une pression, et des juges de Montréal viennent prêter main-forte régulièrement. Le juge Rolland en a fait état également. Le juge en chef de la Cour supérieure en a fait état notamment lors de la rentrée des tribunaux.

Donc, à plus d'une occasion, ceux et celles qui étaient présents ont pu entendre le juge Rolland faire état des enjeux et des défis que constituent le manque de juges ou le fait que l'ensemble des postes prévus à la Loi sur les tribunaux judiciaires ne soient pas comblés au moment où nous nous parlons. Alors, il y a eu certaines nominations qui ont été faites par le gouvernement fédéral en octobre dernier, quelques unes, mais il reste toujours des postes à combler. Alors, évidemment, nous avons réitéré... et non seulement je l'ai réitéré par écrit, mais j'ai aussi réitéré, à chacune de mes rencontres ou de mes discussions avec mon homologue, l'importance de combler les postes prévus à la Loi sur les tribunaux judiciaires, l'importance d'assurer que l'ensemble des districts judiciaires soient pourvus du nombre de juges prévu par la loi, puisqu'actuellement nous avons six postes toujours vacants, toujours à combler. Alors, pour notre part, au niveau de la Cour du Québec, on tente d'agir avec célérité et d'assurer de combler les postes vacants quand même avec un rythme qui permet de combler les lacunes. Alors, j'ose espérer que notre collègue du fédéral puisse faire la même chose.

Alors, il y a actuellement, là, au moment où nous nous parlons, six postes de juge à combler à la Cour supérieure du Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean, il nous reste cinq minutes.

M. Cloutier : Est-ce que vous avez les indications sur les moments où il pourrait procéder et combler les postes?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

• (17 h 30) •

Mme Vallée : J'aimerais pouvoir dire oui, mais, malheureusement, je n'ai pas d'indication précise quant au moment où les postes seront comblés. Aussi, c'est parce que, chaque fois que nous nous retrouvons devant une situation comme celle-là, c'est une pression sur les contribuables, mais c'est aussi une pression sur les juges, qui sont appelés à mettre les bouchées doubles et à se déplacer un peu partout sur le territoire. Je sais notamment que les juges de l'Outaouais seront appelés à siéger à Montréal, des juges de Montréal, à siéger en Outaouais. Bref, ça commande un jeu d'échecs un petit peu particulier pour les juges coordonnateurs et pour le juge en chef, et je sais qu'ils sont très préoccupés par les postes qui sont toujours vacants.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Oui. Est-ce que vous êtes satisfaite sur le processus de nomination des juges par le gouvernement fédéral? Est-ce que vous êtes d'avis, dans le fond, que la procédure de nomination à Ottawa devrait être revue comme on l'a fait au Québec?

Mme Vallée : Vous savez, M. le Président, il existe un processus de sélection à Ottawa, le gouvernement fédéral procède... Bon, il y a un comité qui est mis en place, un comité qui sélectionne les personnes aptes à être nommées, c'est le Commissariat à la magistrature fédérale qui procède à l'évaluation des candidatures. Le Québec, il y a actuellement, je pense, si je ne m'abuse, un juge désigné par le juge en chef du Québec, il y a un représentant du Barreau du Québec, il y a des représentants du ministère de la Justice, il y a des représentants des forces policières. Alors, ce comité, c'est différent, c'est différent de notre comité, mais il y a des représentants de la société juridique québécoise autour de la table et des gens hautement qualifiés et qui font leurs recommandations au ministre.

Alors, évidemment, pour notre part, nous avons procédé à un réaménagement, quant au secrétariat, notamment, à la nomination des juges, mais il y a quand même des représentants québécois autour de la table qui font leurs recommandations au ministre de la Justice.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean, deux minutes.

M. Cloutier : Vous avez dit en Chambre que les juges de la Cour suprême devraient pouvoir comprendre le français. Est-ce qu'il s'agit là d'une nouvelle position du gouvernement du Québec?

Mme Vallée : Non, pas du tout, je ne pense pas. Je pense que le gouvernement... en tout cas, du moins, le gouvernement précédent a, j'ose espérer, eu cette préoccupation. Non, ce n'est pas une nouvelle préoccupation. Je l'ai réitéré. Je pense qu'il est important pour les représentants de la plus haute cour du pays de pouvoir comprendre et de pouvoir s'exprimer en français, puisqu'il y a la possibilité que les dossiers soient plaidés en français devant la Cour suprême.

Alors, ce n'est pas une nouvelle position, ce n'est pas un changement de cap, c'est une préoccupation. Je pense que, lorsqu'on occupe les plus hautes fonctions...

M. Cloutier : Qu'est-ce que...

Mme Vallée : ...lorsqu'on occupe les plus hautes fonctions, il est important de pouvoir communiquer dans les deux langues officielles, que ce soit à la Cour suprême ou que ce soit dans d'autres hautes fonctions au gouvernement fédéral.

M. Cloutier : Vous êtes consciente que ce n'est pas le cas au moment où on se parle. Alors, quelles représentations vous avez l'intention de faire pour changer la situation?

Mme Vallée : Bien, en fait, ces représentations-là, nous les faisons lors... nos préoccupations, nous les transmettons à nos collègues. Évidemment, nous avons une préoccupation, nous avons une intervention un petit peu plus active dans le cadre de la nomination des trois juges du Québec à la Cour suprême. Nous faisons ces recommandations-là, également nous transmettons nos préoccupations à nos homologues. Et, M. le Président, je pense qu'également, du côté des oppositions, si je ne m'abuse, des oppositions à Ottawa, il y a également des préoccupations qui ont été formulées.

Je pense qu'en général on s'attend à ce que quelqu'un qui occupe les plus hautes fonctions puisse être bilingue, et ce n'est pas seulement au niveau de la Cour suprême, de la composition de la Cour suprême, mais c'est aussi dans le cas du Vérificateur général, dans le cas des autres sphères. Il y a deux langues officielles au Canada : le français et l'anglais. Alors, voici. Je pense qu'on peut le dire, on peut le réitérer, on peut en parler sans nécessairement le faire d'une façon qui est dans un contexte de confrontation. Je pense qu'il est important de sensibiliser les gens à cet enjeu qui est le bilinguisme dans les hautes fonctions fédérales.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, ça met un terme à ce bloc d'échange. M. le député de La Prairie, à vous la parole.

M. Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, dans vos remarques d'ouverture, vos remarques préliminaires, qui datent de maintenant deux heures, depuis ce temps-là, vous avez soulevé plusieurs points pour lesquels j'aimerais vous poser des questions.

Contrairement au député du Lac-Saint-Jean, je ne vois pas de vision apocalyptique au ministère de la Justice, car vous avez dit que vous êtes capable d'accomplir votre mandat avec votre équipe, évidemment, parce que ce n'est pas l'affaire d'une personne, sans sacrifier les acquis de la justice. Alors, c'est quand même un point important à souligner que vous avez dit dans vos remarques préliminaires. En même temps, vous avez mentionné que votre budget a été augmenté 3,8 % malgré le fait que des efforts budgétaires ont été faits. Vous avez également soulevé ce point que votre budget était 873,9 millions de dollars. Ce n'est quand même pas rien. Vous avez une équipe aujourd'hui qui vous accompagne et qui accomplit le mandat qui vous est confié de façon assez remarquable. Vous avez évoqué la mise en vigueur du nouveau Code civil, qui vise à la simplification et l'accessibilité de la justice au Québec. Ce n'est quand même pas rien. Vous avez parlé des centres de justice de proximité, encore une fois, qui illustrent comment vous souhaitiez avoir une simplification et une accessibilité de la justice, et vous avez terminé en disant que l'accès à la justice... et je le répète, au risque de me répéter, là, l'accès à la justice est au coeur de vos priorités.

Une autre chose que vous avez parlé, et c'est le premier sujet sur lequel je veux vous entretenir, c'est la loi n° 26. La loi n° 26, comme on le sait, elle a été adoptée le 24 mars dernier à l'unanimité par les membres de l'Assemblée nationale du Québec, et c'est une loi qui est extrêmement importante, et je vais lire l'intitulé de la loi pour le bienfait des gens qui nous écoutent — le titre est le suivant : la Loi visant principalement la récupération de sommes payées injustement à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le cadre de contrats publics.

Cette loi prévoit des mesures exceptionnelles dans le cadre de l'adjudication, de l'attribution ou de la gestion des contrats publics, alors ça va bien au-delà de qu'est-ce qui avait été proposé dans l'ancienne législature, qui visait... et là je fais référence au projet de loi n° 61, qui est mort au feuilleton, mais qui visait en particulier les contrats de l'industrie de la construction seulement. Maintenant, partir sur ce point-là, les mesures spéciales qui étaient contenues dans le projet de loi qui est devenu maintenant la loi n° 26, ce sont des mesures spéciales qui seraient en place pour une période de cinq ans mais dont la prescription pour s'en prévaloir est de 20 ans. Alors, si on prouvait qu'une entreprise ou une personne a commis une fraude ou une manoeuvre dolosive, une des... voyons, une des mesures exceptionnelles, ce serait alors que l'entreprise aurait le fardeau de la preuve de démontrer que les sommes réclamées par l'État ne sont pas justifiées. À ce moment-là, le montant réclamé pourrait aller jusqu'à 15 % de la valeur du contrat. Une autre mesure exceptionnelle, c'est que, si le tribunal accueillait l'action intentée par le gouvernement, une somme supplémentaire correspondant à 20 % des sommes dues devrait être versée par les entreprises fautives ou les personnes fautives afin de couvrir les frais engagés par les organismes publics dans la poursuite. Il faut aussi rappeler que c'est l'Autorité des marchés financiers qui déterminerait à ce moment-là si une entreprise peut continuer de contracter avec le gouvernement.

Votre proposition de décembre 2014 a tenu compte de la plupart des commentaires qui ont été reçus en commission parlementaire en décembre 2013. Alors, nous avons tenu de nouvelles consultations. Suite au dépôt évidemment du projet de loi, qui est devenu une loi en mars dernier, on a tenu des consultations et des auditions publiques les 15 et 16 janvier derniers. Et, pour vous dire à quel point, pour le bénéfice de nos auditeurs... comment ces consultations étaient importantes, je vais mentionner ceux et celles qui sont venus ajouter et bonifier au projet de loi, parce qu'il y a eu effectivement des amendements que vous avez proposés et que les députés de l'opposition ont également tenu à proposer. Alors, on a reçu en consultations particulières la ville de Montréal, l'Association de la construction du Québec, la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec, l'Association des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec, la ville de Laval, l'Institut des administrateurs de sociétés, le Conseil du patronat, la Fédération des chambres de commerce du Québec, l'Association des ingénieurs-conseils du Québec, le Vérificateur général du Québec, la ville de Gatineau, que vous connaissez très bien, le Directeur général des élections et l'Union des municipalités du Québec.

Et l'idée était fort simple, c'était, comme notre travail de parlementaire nous exige de le faire, de bonifier le projet de loi, parce que cette loi est extrêmement importante, suite à tous les témoignages que nous avons entendus évidemment devant la commission Charbonneau.

Pouvez-vous nous expliquer plus en détail les outils que cette loi a mis en place — il y a deux volets dans la loi n° 26 que j'aimerais que vous élaboriez un peu plus — et pourquoi cette loi était devenue nécessaire, est maintenant importante, aussi la portée crépusculaire? Il ne faut pas négliger sa portée crépusculaire dans l'application de la justice.

• (17 h 40) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, merci, M. le Président. Alors, on ne dira pas assez à quel point le projet de loi n° 26 était attendu non seulement de la députée de Montarville, mais aussi par les organismes publics, notamment, les municipalités, les villes qui attendaient de nouveaux outils pour leur permettre d'aller récupérer les sommes qui leur avaient été facturées en trop, et je pense que le projet de loi n° 26 démontre l'importance d'agir, d'agir de façon responsable. Donc, pour permettre aux villes de récupérer les sommes qui avaient été payées en trop, facturées en trop, il fallait revoir nos règles, notre droit civil parce qu'actuellement un recours se prescrit par trois ans, actuellement il y a une obligation, dans un litige, de faire la preuve, de faire une démonstration du dommage qui a été causé. Alors, tous ces éléments-là venaient poser des obstacles substantiels pour les villes, pour les organismes publics qui souhaitaient récupérer les sommes dont ils avaient été floués.

Donc, compte tenu de tout ce qui a été mis en lumière dans le cadre de la commission Charbonneau notamment, il était important d'apporter des mesures particulières. Donc, pour des circonstances particulières, des mesures particulières, et des mesures particulières, bien ce n'est pas des mesures qui sont en vigueur de façon indéfinie, mais ce sont des mesures qui sont en vigueur pour un temps bien précis et pour lesquelles il y aura une fin éventuellement.

Donc, deux grands volets à ce projet de loi là. D'abord, il y a un programme de remboursement pour les entreprises qui souhaitent se réhabiliter commercialement. Je pense que c'est l'élément le plus important. C'est permettre un moment, permettre une période, pour les entreprises qui souhaitent se réhabiliter, de pouvoir entreprendre des négociations afin de rembourser une partie des sommes ou... en tout ou en partie, les sommes. Alors, c'est un programme de remboursement volontaire, donc, qui, sur une base volontaire, permettra aux entreprises d'entreprendre un processus. Et ce programme-là sera présidé par une personne neutre, impartiale que nous verrons à identifier sous peu, alors la personne désignée comme administrateur de ce programme de remboursement volontaire le sera bientôt. Et ça, ce programme-là est important parce qu'il s'inscrit dans la philosophie du nouveau Code de procédure civile, où nous tentons de mettre de l'avant le règlement préalable des différends. Plutôt que d'engager des frais et des délais... Parce que chaque dossier ouvert devant un tribunal est un dossier qui s'ajoute à la liste, et qui occupe du temps de cour, et qui occupera du temps de notre personnel. Alors, évidemment, si nous pouvons d'entrée de jeu régler les dossiers par le biais de négociations, par le biais de pourparlers, bien nous sommes gagnants, puisque nous libérons des salles de cour, nous libérons des juges, nous libérons des procureurs, et là-dessus il y a des économies substantielles, sans compter aussi les économies financières. C'est qu'une procédure requiert des frais, des frais judiciaires, requiert des frais de signification, requiert aussi des expertises, et le temps, le taux horaire des professionnels qui s'investissent dans le dossier peuvent grimper de façon significative. Alors, le programme de remboursement volontaire vient, d'une certaine façon, permettre de s'entendre.

Maintenant, ce programme-là est en vigueur pour une période d'une année, et, pendant la mise en place de ce programme-là, il y aura une possibilité de suspendre les procédures. Donc, si des procédures étaient en cours, elles seront suspendues. Alors, le programme est en vigueur pour une année, mais il y aura la possibilité... Quelqu'un qui s'inscrit, par exemple... Disons que le programme commence en janvier. Bien, quelqu'un qui s'inscrit dans la dernière journée de l'année, bien, aura une année pour régler et pour entreprendre les pourparlers, là. On s'entend là-dessus, là, il n'y a pas un 24 heures de discussion en accéléré. Donc, ça, c'est la première étape. Puis je pense que c'est quelque chose d'assez novateur. On s'est inspirés de procédures et de programmes qui avaient été mis en place ailleurs, dans d'autres juridictions, et qui ont fonctionné.

Par la suite, bien, si le programme de remboursement volontaire n'avait pas été choisi par une entreprise et si l'organisme public souhaite poursuivre une entreprise, il y aura la facilitation des recours. Donc, comme je l'ai mentionné d'entrée de jeu, nous avons modifié la prescription, qui permet de déposer un recours pour les fautes commises dans les 15 années et l'établissement d'une présomption de dommage qui correspond à un pourcentage du montant du contrat.

Donc, il s'agit là de deux volets. La prolongation de la prescription et la présomption de dommage sont deux éléments fort importants qui permettront aux organismes publics d'entreprendre des recours, qui faciliteront la prise de recours. Alors, encore une fois, je tiens à le réitérer, il s'agissait là de mesures extraordinaires. On est venus modifier les règles du droit civil. Alors, on les a modifiées dans un contexte fort particulier et nous les avons modifiées pour un délai précis. Donc, il y a quand même une clause crépusculaire, comme vous l'avez mentionné. Et voilà. Alors, c'est les deux grands axes du projet de loi, qui sont quand même très importants.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. M. le député de La Prairie, il vous reste six minutes.

M. Merlini : Oui. Merci beaucoup. Un des points que la majorité des intervenants dans les consultations particulières nous ont dit, c'est qu'ils souhaitaient que la réhabilitation visée par le programme de remboursement volontaire ne soit pas quelque chose à rabais, que les sommes qui ont été versées et qui ont été payées injustement soient bel et bien récupérées, qu'une entreprise ou un individu n'arriverait pas, à rabais, se refaire une crédibilité quelconque. C'est pour ça que j'ai souligné que l'Autorité des marchés financiers va quand même être impliquée, là, à savoir qui peut continuer à faire affaire avec le gouvernement dans cette chose-là, mais j'aimerais vous entendre sur... Parce que l'autre remarque qui était souvent... c'est qu'on parlait de la carotte et le bâton, là, l'effet du projet de loi avait cette chose-là, mais que diriez-vous à ces gens-là qui croient que ça va créer une réhabilitation à rabais, que les gens vont tout de suite se prévaloir, en dedans d'un an, de dire : Bien, O.K., effectivement, je vais vous donner un montant, on s'entend-u sur un montant moindre? Mais tous les intervenants, en particulier les municipalités, et qui sont des très grands donneurs d'ouvrage, souhaitent justement aller plus loin, et vous avez dit que vous souhaitiez qu'il y ait une facilitation des recours également si le processus de réhabilitation ne fonctionnait pas.

Mme Vallée : M. le Président, alors, il ne s'agit pas, dans le dossier du programme de remboursement volontaire, d'acheter sa réhabilitation, la participation au programme de remboursement volontaire est l'un des facteurs. Et, dans le cadre du remboursement volontaire, il y aura aussi une évaluation : Est-ce que l'offre, elle est raisonnable? Est-ce que l'offre, elle est fondée? L'administrateur ou l'administratrice du programme sera accompagné de juricomptables, donc il y a quand même un suivi très rigoureux qui sera fait à l'intérieur du programme. Et la participation d'une entreprise au programme de remboursement volontaire sera un des facteurs considérés par l'AMF mais non le seul.

Alors, ça, c'est important. Et il y aura cette rigueur dans l'appréciation de chaque dossier, il y aura aussi une possibilité pour les organismes publics de faire valoir leur voix dans un processus qui s'apparente au processus que nous connaissons à l'intérieur des dispositions de la loi sur la protection des créanciers.

Alors, l'objectif, oui, c'est certes d'éviter les coûts et les délais qui se rattachent à la prise de procédures, permettre à ceux et celles qui souhaitent se réhabiliter et aux entreprises qui souhaitent se réhabiliter de le faire mais de le faire de façon sérieuse. Alors, évidemment, dans le cadre du projet de loi, je pense qu'on a eu la chance d'échanger, et les mesures prévues au projet de loi et les mesures qui seront au programme de remboursement, au règlement vont aussi bien encadrer tout ça. Alors, il n'est pas question, là, d'y aller avec un règlement à rabais. Ce n'est pas un «fast track» pour une réhabilitation à l'AMF, il s'agit d'un élément. Et la personne désignée, l'administrateur du programme, soumettra les recommandations à la ministre de la Justice ou au ministre de la Justice, mais les recommandations auront fait l'objet d'une évaluation, là, et les organismes publics seront aussi mis à contribution. Ça, c'est important. Ils auront, de par le projet de loi, l'obligation de collaborer avec l'administrateur du régime, ce qui permettra de déterminer aussi si l'offre qui est présentée est une offre raisonnable ou non.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de La Prairie, il reste deux minutes.

M. Merlini : Merci. Dans le rôle de l'administrateur, vous dites qu'il va faire les recommandations à la ministre de la Justice pour évaluer, là, si l'offre est raisonnable. Dans la mesure où il y a quand même une offre raisonnable, est-ce que l'administrateur peut quand même recommander à la ministre de la Justice ou à l'organisme en... Est-ce que les recommandations vont également... je fais un aparté, là, mais est-ce qu'elles vont également aux organismes, que l'administrateur neutre peut faire les recommandations ou ça va strictement à vous? Et, deuxièmement, est-ce qu'il y aurait une recommandation qui dirait : Oui, l'offre est raisonnable, mais, étant donné la gravité, si je peux dire, de la manoeuvre dolosive qui a été commise... Est-ce que l'administrateur pourrait également recommander un recours judiciaire?

Mme Vallée : Bien, dans un premier temps, les organismes, je pense qu'il faut se rappeler... je ne me souviens pas l'article précis, là, mais les organismes sont consultés. Donc, les offres présentées par l'entreprise seront soumises aux organismes publics parce que... et qui auront la possibilité de se prononcer sur cette offre-là. Alors, ça, dans un premier temps, avant même d'être présenté à la ministre, avant même d'être présenté au ministre ou à la ministre responsable, il y aura eu tout cet élément-là. Alors, toute cette évaluation aura été faite par l'administrateur, et l'administrateur aura eu l'opportunité d'obtenir les commentaires des organismes publics et aura eu également accès à l'information des organismes publics.

La recommandation sera basée non seulement sur l'information transmise et fournie par l'entreprise, mais également suite aux consultations auprès des organismes publics qui auraient contracté avec cette personne. Par la suite, l'administrateur verra à transmettre l'offre. Si l'offre n'est pas raisonnable — et là, tu sais, on peut extrapoler puis on peut penser à plein de circonstances — bien là soit l'offre ne sera tout simplement pas acceptée par l'administrateur, et donc ne sera pas soumise à la ministre ou au ministre, ou l'offre acceptée pourrait évidemment, ultimement, ne pas être raisonnable aux yeux de la ministre ou du ministre. Mais tout ça sera vraiment... et ce sera une évaluation cas par cas, et c'est pour ça qu'il y aura toute une équipe autour. Il y aura des juricomptables qui seront aussi chargés de faire l'évaluation, puisque chaque cas, chaque situation, sera évalué en fonction des circonstances propres.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, ça met un terme à ce bloc d'échange. Mme la députée de Montarville, à vous la parole.

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. J'aimerais poursuivre sur un suivi de dossier, le fameux dossier SharQc, le procès SharQc, et, comprenez-moi bien, M. le Président, pas question que j'entre à l'intérieur du procès. Loin de moi, loin de moi cette idée. Je vais plutôt m'en tenir aux chiffres qui sont rendus publics à l'étude des crédits, au budget, tout simplement, des sommes qui ont été dépensées, alors c'est important que les gens soient au courant de cette information.

Le fameux procès SharQc, naturellement, pour revenir un petit peu dans le temps, faire un petit peu d'historique, tout avait commencé en 2009, grosse arrestation, 156 Hell's Angels, gros procès, ce qu'on appelle des mégaprocès. Il y avait 156 accusés. C'est énorme, la gestion de la preuve, les procédures, les avocats. Tout ça pour dire que quelques années après, en 2011, ce qui s'est passé, c'est que le procès a avorté. 2011, donc, libération de 31 accusés. Ces gens-là sont libérés, pas de procès pour cause de ce qu'on appelle requête en délai déraisonnable, ça avait pris trop de temps. Par la suite, d'autres procès SharQc ont continué pour les autres accusés. On parle de SharQc un, SharQc deux, entre autres, il y en a plusieurs qui sont toujours au rôle. Cependant, ce qui m'intéresse, ce sont les coûts, les coûts de ces mégaprocès. J'aimerais revenir aux faits, je vais vous parler de SharQc un et SharQc deux. Sur uniquement deux ans, 2013 et 2014, SharQc un et SharQc deux auront coûté aux contribuables, en aide juridique, si je peux m'exprimer ainsi, pour défendre ces criminels, quelque chose comme 9 millions de dollars. En fait, c'est une aide qui est payée par le gouvernement pour défendre les accusés. Ce n'est pas le système d'aide juridique classique, là, mais on comprend que c'est une aide financière qui est apportée à ces criminels et, pour les besoins de simplifier et de vulgarisation, c'est une aide qui est payée par les contribuables. Donc, 9 millions de dollars pour SharQc un et SharQc deux en 2013‑2014.

Si on prend uniquement SharQc deux, il y a 22 membres des Hell's Angels dans ce qui s'appelle SharQc deux. Selon les crédits, en 2013, la facture pour défrayer leur défense, à ces 22 accusés, s'élevait à 650 000 $. En 2014, la facture pour défendre ces 22 accusés, toujours les mêmes, s'élevait à 4,2 millions de dollars.

La première question, Mme la ministre : Qu'est-ce qui justifie cette augmentation des coûts de la défense en un an, qui sont quand même très importants, plus de 3,5 millions de dollars pour toujours les mêmes 22 accusés? Comment peut-on justifier cette dépense, ce gros bond? Si on parle de 4,2 millions pour une seule année pour défendre 22 accusés, ça représente, en moyenne, si on fait une moyenne, là, 4,2 millions divisés en 22, des honoraires de 191 000 $ pour défendre un accusé durant une année. Alors, qu'est-ce qui explique ce bond-là, M. le Président? Je pose la question à Mme la ministre.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

• (18 heures) •

Mme Vallée : Dans un premier temps, M. le Président, je pense que c'est important d'expliquer le contexte dans lequel ces honoraires-là sont versés, parce ça peut paraître énorme, oui, c'est beaucoup de sous, mais il y a un contexte dans lequel l'État est tenu de verser ces honoraires-là, d'assumer les honoraires.

Alors, on appelle ça des requêtes du type Rowbotham. Alors, c'est la Cour suprême qui nous a enseigné que ce type de procédure là, c'est une réparation en vertu de l'article 24.(1) de la Charte canadienne des droits et libertés puis qui vise à respecter aussi les articles 7 puis les articles 11d de la charte. Alors, c'est l'accusé, donc c'est le criminel, comme le dirait la députée de Montarville, qui demande au tribunal de suspendre l'instance pour négocier avec l'État pour obtenir une aide juridique distincte. Alors, ce n'est pas le régime d'aide juridique que nous connaissons, ce n'est pas le régime d'aide juridique qui est applicable à un dossier standard, puisqu'il s'agit de dossiers exceptionnels. Alors, dans un dossier particulier, une demande est faite afin que l'État assume les frais. Évidemment, les principes qui sont applicables, il y a une analyse qui doit s'effectuer, et c'est une analyse qui se fait suite notamment à une décision qui a été rendue qui est dans l'affaire R.C.

Et donc on s'assure que l'accusé puisse disposer d'un avocat compétent, on considère un certain nombre de facteurs, les atteintes au principe de justice fondamentale, la liberté, la sécurité psychologique du prévenu sont considérées. Est-ce que les infractions mettent en péril, justement, mettent en péril la liberté et la sécurité du prévenu? Est-ce que le droit à un procès équitable est assuré dans le contexte? Et donc il y a vraiment toute cette analyse-là qui est faite et, depuis 2010, il y a eu des modifications législatives qui sont venues encadrer tout ça.

Alors, dans le contexte qui nous préoccupe, dans le cas des procès SharQc, il est évident que plus on s'approche de la date du procès, plus les avocats... ou plus les accusés qui ont eu accès et qui ont vu leur requête accueillie et leurs honoraires défrayés par l'État risquent de consacrer des heures à la préparation de leurs dossiers. Alors, il est normal qu'à la veille d'une date de procès les avocats aient facturé plus de temps. Pour ce qui est de l'évaluation et de l'analyse plus fines, Me Denis Roy, qui est ici, pourrait renseigner davantage la collègue, mais je veux également mentionner que SharQc, c'est 156 accusés en 2009, 156 accusés. Là-dessus, on a 64 accusés qui ont déjà plaidé coupables, et il y a eu 18 accusés qui ont plaidé coupables le 16 mars dernier. Il reste encore un certain nombre de dossiers qui sont pendants. Mais c'est ce que nous appelons un mégaprocès qui s'est fait dans un contexte particulier qui visait la lutte au crime organisé. Alors, je pense qu'il faut aussi prendre tout ça dans son contexte. Est-ce qu'un mégaprocès coûte cher à l'État? Oui. Est-ce que la lutte au crime organisé coûte cher à l'État? Oui. Est-ce que nous devons mener une lutte au crime organisé? La réponse est oui, et nous avons cette responsabilité de répondre aux enseignements de la Cour suprême, de répondre à nos obligations constitutionnelles puis aussi d'assurer la protection des citoyens et d'assurer une lutte au crime organisé.

Alors, je tiens à réitérer ça, parce que je sais que la collègue a émis un communiqué un peu plus tôt cet après-midi en disant à quel point c'était épouvantable. Oui, ce sont des fonds publics qui ont été consacrés à la défense d'accusés dans un contexte particulier, mais ça s'inscrit dans un contexte aussi de lutte au crime organisé, et c'est une responsabilité que ce gouvernement a et que tous gouvernements confondus de tous partis confondus ont pris très, très, très au sérieux. Alors, pour moi, c'est important.

Maintenant, je suis prête à céder la parole à Me Roy, qui pourra préciser davantage les étapes ou peut-être qui pourra expliquer la hausse peut-être de façon plus précise, le pourquoi de la hausse des coûts au cours de la dernière année... ou de l'augmentation des coûts.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Y a-t-il consentement?

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, Me Roy, dans un premier temps, vous présenter pour le bénéfice de nos téléspectateurs... vous êtes bien connu ici, mais pour nos téléspectateurs, et à vous la parole.

M. Roy (Denis) : Denis Roy, président de la Commission des services juridiques, qui, comme on le sait, s'occupe de l'aide juridique mais aussi, depuis 2010, d'un autre volet que l'aide juridique, et c'était pertinent de le mentionner à propos du sujet dont on parle. Alors, merci, M. le Président, salutations à tous les parlementaires.

Je ne sais pas, M. le Président, si je pourrai aller dans le fin détail des années financières mentionnées par la députée. Je suis heureux d'entendre que... et c'est important de le faire à chaque fois, de ne pas confondre l'aide juridique avec le chapitre III, parce que vous savez même que le titre du chapitre III s'appelle Prestation de certains services juridiques autres que l'aide juridique. Donc, on voulait bien, quand on a fait les travaux en commission parlementaire avec... lors de l'adoption de cette loi.

Moi, ce que je voudrais vous dire, c'est que c'est évident que, et la ministre l'a bien indiqué, les paramètres de l'obligation constitutionnelle du Procureur général sont bien connus maintenant depuis l'arrêt R.C. C'est un arrêt qui avait renversé, d'ailleurs, un certain nombre de jugements qui avaient été rendus par des juges qui avaient eux-mêmes ordonné des honoraires dans le cadre de Printemps 2001. Mais je pourrais peut-être vous donner une espèce de comparaison pour évaluer la différence depuis l'arrêt R.C. et depuis l'entrée en vigueur du chapitre III de la Loi sur l'aide juridique.

Globalement, depuis cinq ans, vous l'avez mentionné, Mme la députée — M. le Président, Mme la députée l'a mentionné — le procès SharQc est commencé. Il y avait au départ plus de 150 accusés. Bon, il y a eu différents épisodes. Il en reste encore aujourd'hui, et c'est pour ça que je suis un peu étonné du chiffre de 22, parce qu'encore aujourd'hui il y a 21 accusés qui sont sous le chapitre III sur les 27 accusés qu'il reste. Donc, c'est un nombre beaucoup plus important d'accusés qui étaient représentés ou dont les honoraires des avocats étaient payés par le chapitre III dans les années mentionnées. Je n'ai pas le chiffre précis, mais je pourrais évidemment le fournir éventuellement. Mais ce que je voudrais dire, c'est qu'en ce qui a trait à SharQc et jusqu'à la fin de la dernière année financière, depuis cinq ans, grosso modo, les honoraires versés par la Commission des services juridiques en vertu du règlement qui a été adopté sont de l'ordre d'environ 18 millions de dollars depuis cinq ans pour l'ensemble des honoraires qui ont été versés dans SharQc, et ce, pour parfois... au début, c'était 100 accusés, parfois 80, maintenant il en reste 21. Donc, c'est sûr qu'aujourd'hui c'est le nombre minimal qu'il reste depuis le début de SharQc. Donc, je vous dis, pour un nombre considérable d'accusés, en cinq ans, 18,7 millions.

Dans Printemps 2001, le total des honoraires qui ont été versés était de 5,8 millions pour 19 accusés sur une durée de deux ans et demi. Donc, on compare ici presque 6 millions, 19 accusés, deux ans et demi avec 18,7 millions pour un nombre considérable d'accusés pendant un procès qui a duré cinq ans. Ce que je veux illustrer par ça, et on comprend, M. le Président, que les justiciables soient préoccupés par les sommes investies, mais le prix à payer... Évidemment, la Commission des services juridiques est un joueur, entre autres, là-dedans, il y a d'autres joueurs qui prennent des décisions, et nous administrons un règlement qui est venu paramétrer et encadrer. C'était d'ailleurs le nom du projet de loi : la loi encadrant l'obligation du Procureur général.

Donc, bon, ce sont les précisions que je peux apporter aujourd'hui. C'est que les chiffres à propos des 22 accusés m'apparaissent ne pas représenter la réalité, mais je ne suis pas en mesure d'informer les membres de la commission aujourd'hui précisément. Je m'engage à le faire au besoin, mais c'est certainement plus que 22 accusés, d'une part, et, d'autre part, on peut déduire des chiffres que je viens de vous dire que la méthode adoptée depuis 2010 est plus efficace que celle qui avait été utilisée dans Printemps 2001.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Mme la députée de Montarville.

Mme Roy (Montarville) : Oui. Je vais poursuivre. Les chiffres dont nous disposons grâce à l'étude des crédits, c'est qu'il y a 42 avocats au dossier, et, si on additionne SharQc un et SharQc deux, on parle ici de 51 accusés, d'où le 9 millions pour 51 accusés. Je sais très bien qu'il y en avait 156. Mme la ministre me dit : La députée les appelle des criminels. M. le Président, un accusé qui plaide coupable à des accusations est un criminel.

Cela dit, Mme la ministre, vous avez émis l'information à l'effet qu'il y a aussi la récupération des biens de la criminalité qui peuvent être saisis puis qui vont aider à récupérer des sommes. Alors, dans le dossier SharQc, du début à aujourd'hui, y a-t-il des sommes, des biens qui ont été saisis, des biens acquis par la criminalité qui ont été saisis et vendus?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Il y en a, M. le Président. C'est une question que nous pourrions peut-être garder en suspens pour ce soir, puisque Me Murphy, notre Directrice des poursuites criminelles et pénales, sera présente et aura avec elle le fin détail. Alors, si la collègue de Montarville accepte, peut-être que nous pourrons demander à Me Murphy d'illustrer... Elle n'est pas présente, mais elle sera avec nous ce soir.

Mme Roy (Montarville) : Parfait.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville. Il nous reste cinq minutes à ce bloc.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. Oui, M. le Président. Si quelqu'un peut nous dire quelles ont été les sommes qui ont été récupérées chez ces accusés, ce serait intéressant. Par ailleurs, donc, on sait que ce n'est pas tout à fait terminé.

Est-ce que vous aviez fait une évaluation des coûts de SharQc du début à la fin? Est-ce que vous entrez dans votre évaluation? Où en sommes-nous à cet égard, puisqu'il y aura encore d'autres sommes de déboursées, le travail n'est pas complété?

• (18 h 10) •

Mme Vallée : Bien, le dossier n'est pas terminé, il reste actuellement 27 accusés, alors je pense qu'il faut peut-être se garder une petite gêne.

Simplement vous informer et informer les membres de la commission : il y a eu plus de 370 requêtes présentées dans ce dossier-là. Alors, il y a eu énormément de requêtes de présentées dans le dossier. C'est un dossier qui est complexe. Je suis un petit peu perplexe, parce que j'ai devant moi le communiqué de la collègue dans lequel elle nous demande de mettre fin à la pratique coûteuse et inefficace des mégaprocès.

Les mégaprocès sont complexes, mais ils font suite à des mégaenquêtes. Et nous avons le privilège ici d'avoir le député de Chomedey, je pense, qui a, dans une autre vie, oeuvré et qui s'est consacré à ces mégaenquêtes et qui pourrait bien mieux que moi expliquer la particularité de ces enjeux-là. Mais, pour avoir, dans une autre vie, aussi oeuvré dans le domaine, il s'agit de dossiers qui comportent beaucoup, beaucoup de documents, beaucoup de preuves à analyser. Il s'agit là de dossiers complexes, mais, si on arrive à mettre un frein au crime organisé, je pense qu'encore là c'est notre responsabilité de le faire. Et il y a quand même eu, dans ce dossier, 64 accusés qui ont plaidé coupables. Ce n'est pas rien, ça, M. le Président. C'est 64 accusés qui ont plaidé coupables. On a... qui avaient plaidé coupables dans le passé, on en a 18 de plus qui ont plaidé coupables en mars. Alors, c'est, quoi, près de 80 accusés qui ont plaidé coupables, je m'excuse, dans le dossier. C'est beaucoup, ça. C'est 80 personnes qui font l'objet de différentes accusations très graves et qui ont reconnu leur culpabilité, et, sans mégaprocès, on n'aurait pas eu ces 80 plaidoyers de culpabilité puis on ne sait pas qu'est-ce qui... Il reste encore des dossiers.

Alors, je pense, M. le Président, oui, ça coûte cher, on a une responsabilité. Me Roy en a fait la démonstration. Il y a un certain nombre d'impondérables dans ces dossiers et il y a l'évaluation de dossiers. Fort difficile de déterminer au tout début d'un dossier le coût final de cette affaire. Maintenant, est-ce qu'on peut améliorer les choses? Certes. Est-ce qu'on peut améliorer la façon dont nous procédons ou la vitesse de croisière? Certainement. Je pense qu'il y a une réflexion qui s'est amorcée tant du côté de la DPCP que du côté de la Cour supérieure, il y a des échanges aussi avec le Barreau du Québec. Alors, il y a une réflexion quant à tout ça. Je pense que ces mégaprocès, ces dossiers nous amènent aussi à tirer des conclusions, à tirer des constats et à améliorer la façon dont les choses se font. Mais est-ce que la réponse, c'est de dire : Parce que ça a coûté cher, il faut en finir puis il faut mettre une fin aux mégaprocès puis mettre une fin, mettre un terme aux mégaenquêtes? Non, parce que ce serait abdiquer devant le crime organisé, et il n'est pas question d'abdiquer devant le crime organisé, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Montarville, 1 min 15 s.

Mme Roy (Montarville) : Merci. À la lumière des propos du juge Brunton, en 2011, justement, qui devait faire un aveu d'échec en devant faire avorter le procès et libérer 31 personnes qui n'auront jamais de procès et qu'on n'enverra jamais derrière les barreaux, puisque votre souhait est justement de lutter contre la criminalité, je considère qu'il est dommage qu'il faille que nous parlions de ça en 2015, de modifier les façons de faire, et je tends la main à la ministre à cet égard-là.

Est-ce que vous vous engagez à revoir le fonctionnement des fameux mégaprocès à la lumière des commentaires qui avaient été formulés par le juge Brunton à l'époque?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En 30 secondes, Mme la ministre.

Mme Vallée : ...M. le Président. 80 accusés, là, ça, SharQc deux, il y a quand même un gage de succès, là, qui est là. Et je pense que j'ai été assez claire dans mes propos : il y a des réflexions qui sont en cours. Et évidemment, comme dans toute démarche, on peut toujours s'améliorer, on peut toujours faire mieux et apprendre de ce que nous avons vécu. Mais de prétendre que SharQc n'a pas été un succès... SharQc deux, là, actuellement, on a 80 plaidoyers de culpabilité, 80. Ce n'est pas un aveu d'échec, ça, là, là, 80, et le dossier est encore pendant.

Alors, M. le Président, je veux bien dire : Oui, il y a une amélioration, mais ce n'est pas dans un contexte d'aveu d'échec. Il y a un travail formidable qui s'est fait de la part de l'équipe de la DPCP, de la part des juges, de la part des enquêteurs, de la Sûreté...

Une voix : ...

Mme Vallée : ...oui, oui, oui, M. le député de Chomedey. Alors, il y a un travail qui a été fait, et l'objectif était de donner un grand coup dans le crime organisé au Québec, et je pense que ce grand coup là a été donné, et il faut continuer de donner des grands coups parce qu'on ne peut tolérer l'emprise tentaculaire du crime organisé sur le territoire du Québec. Et c'est notre responsabilité de voir à le combattre et d'y mettre les énergies nécessaires et les ressources nécessaires.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète ce bloc. M. le député de Chomedey, vous brûlez d'envie de prendre la parole, ça me fait plaisir de vous la céder.

M. Ouellette : ...M. le Président, j'en brûle d'envie parce que ça me rappelle certains commentaires que j'ai déjà faits, la différence entre la police et la politique. Je ne vous donnerai pas la réponse aujourd'hui, mais on en a eu un très bel exemple il y a quelques minutes. 156 individus reliés au crime organisé responsables d'une guerre de motards qui a fait plus de 160 morts, on résume ça à un petit communiqué de presse pour effectivement essayer de banaliser ce que tout le monde a fait. Je trouve ça très, très particulier.

Donc, je vais revenir à des meilleurs sentiments, parce qu'ayant eu à témoigner au cours de ces 300 quelques requêtes dans ce procès-là justement pour m'assurer que les citoyens du Québec puissent être en sécurité et que le mot «justice» ait une signification dans la tête des gens je pense que, la Commission des services juridiques, Me Roy l'a mentionné tantôt, on a appris de ces mégaprocès. Et j'y étais en 2001, j'y étais encore en 2009 et, ayant eu à témoigner de très longues journées, de très longues heures devant les différents tribunaux canadiens, je le dis et je suis très factuel, la lutte au crime organisé, c'est nécessaire pour assurer à tous les citoyens du Québec un meilleur environnement et l'application de la justice. C'est pour ça qu'on fait ce qu'on fait. Des fois, on l'oublie.

Je me permettrai de prendre les 12 minutes, si M. le Président est indulgent avec moi, pour souligner de façon très particulière, Mme la ministre, quelque chose qui se fait à la Justice, qui est l'hommage au civisme. Annuellement, là, en période de crédits, il y a cette... je pense qu'il y a ce petit moment qu'on doit garder pour souligner de façon particulière le travail qui est fait et l'implication et l'intervention des citoyens du Québec. On a parlé des mégaprocès, on parle des criminels parce qu'ils ont plaidé coupables, des prévenus tant qu'ils n'ont pas plaidé coupables. Peut-être qu'il faudrait baisser les honoraires des avocats, ça coûterait peut-être moins cher. Puis je ne voudrais pas que le bâtonnier m'écrive aussi, là, étant donné qu'il a fait des remarques à mon collègue d'Ungava.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...pas votre cotisation.

• (18 h 20) •

M. Ouellette : L'hommage au civisme, Mme la ministre, c'est quelque chose qui existe depuis quand même très longtemps. J'étais jeune policier quand il y a un événement qui s'est produit à Montréal où un chauffeur de taxi était intervenu au volant d'un camion semi-remorque qui roulait sur la rue Saint-Urbain à Montréal, où est un des bureaux des procureurs de la lutte au crime organisé, et pour justement essayer de sauver des vies et qui avait été blessé. Ça nous avait amené la loi sur le civisme, ça nous a amené un règlement.

Et annuellement, depuis déjà 29 ans, il y a une cérémonie d'hommage au civisme qui se tient sous la gouverne de la ministre de la Justice ou du ministre de la Justice où annuellement on honore des citoyens du Québec qui ont fait plus que la normalité et qui ont soit sauvé des vies ou ont protégé des vies. Et je m'en voudrais de ne pas faire cette période de crédits en honorant publiquement... Vous l'avez fait le 29 septembre. Puisque c'est moi qui ai la parole, je vais le faire ce soir pour conclure le bloc de la Justice.

Il y a eu sept personnes qui se sont vu décerner la médaille du civisme, et 13 personnes ont reçu une mention d'honneur du civisme. Dans la médaille du civisme, pour la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean... Je me permettrai d'avoir un petit paragraphe pour chacun d'eux, je pense que c'est important que, les gens qui nous écoutent, on le reconnaisse. Quand les gens font des choses qui sont contraires à nos lois, ils sont dénoncés. Je pense qu'il faut aussi reconnaître les bonnes choses qui sont faites, et ça me permet de vous dire que, lundi prochain, c'est la cérémonie de remise, pour la Sécurité publique, qui se fait à l'École nationale de police, et j'en profite pour faire cette petite publicité-là. Et je pense que ça va être important de reconnaître le travail des citoyens et des policiers qui sont intervenus dans différents événements.

Donc, je disais, pour les sept personnes pour la médaille du civisme pour la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean... Carol Larouche, du Lac-Kénogami, pour un événement du 4 décembre 2013. M. Larouche a multiplié les efforts pour porter secours à un ami motoneigiste prisonnier des glaces d'un lac. Après l'avoir extrait du trou d'eau une première fois, il doit répéter la manoeuvre de sauvetage, la glace ayant cédé de nouveau et fait rechuter son ami. Toujours au Saguenay—Lac-Saint-Jean, Luc Simard, de Lac-à-la-Croix, pour un événement du 23 avril 2013 : M. Simard s'est risqué à entrer à plusieurs reprises dans la résidence voisine, d'où s'échappe une immense fumée noire et dense, pour y rescaper la propriétaire. À la dernière tentative, il avance et la cherche à tâtons jusqu'à ce qu'il parvienne à elle, l'agrippe et l'extraie de la maison.

Pour la Capitale-Nationale, Stéphane Fraser, de Saint-Raymond — on parle d'un événement du 3 décembre 2013 : M. Fraser accourt sur les lieux d'un accident pour venir en aide à un conducteur prisonnier de sa voiture, de laquelle des flammes s'échappent du capot. Après avoir tenté de libérer l'homme de sa position, il découvre une pelle et, sans relâche, lance de la neige pour étouffer l'incendie. Simultanément, un pompier est arrivé sur les lieux et a extrait l'homme de sa voiture. Mme Annick Lajoie, de Saint-Raymond, et M. David Gauvin, de Deschambault, un événement du 25 juin 2013 : Mme Lajoie et M. Gauvin portent secours à un automobiliste qui vient de percuter de plein fouet un pilier d'une autoroute. M. Gauvin s'active à éteindre le feu à l'aide d'extincteurs fournis par les camionneurs qu'il arrête sur l'autoroute. De son côté, Mme Lajoie réussit à extraire le conducteur de sa voiture et tente de le réanimer.

La région de l'Estrie, deux récipiendaires. M. Jacques Beaudoin, de Lac-Mégantic, pour un événement du 18 mars 2013 : M. Beaudoin s'y prend à trois reprises pour secourir son ami intoxiqué par le monoxyde de carbone. Comme il ne peut rien faire du premier coup, M. Beaudoin pénètre dans le bâtiment pour ouvrir les fenêtres et les portes afin d'aérer les lieux le plus possible et d'atteindre son ami, effondré et inconscient à l'étage supérieur. M. Pierre Dupont, de Lac-Mégantic aussi, pour un événement du lendemain des événements de Lac-Mégantic, le 7 juillet : M. Dupont parvient, dans des conditions extrêmement dangereuses, à fermer une section de l'aqueduc en vue d'alimenter l'hôpital en eau. Accompagné de deux pompiers, M. Dupont atteint la valve d'eau placée à proximité des wagons bouillonnant de pétrole, et ce, juste avant leur explosion.

Pour la région de Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, M. Jean-Guy Villeneuve, de Fatima, pour un événement du 20 juillet 2013 : M. Villeneuve n'hésite pas à braver les vagues et le fort courant pour ramener à la rive une nageuse en détresse dans le golfe Saint-Laurent. M. Villeneuve la rejoint et lui tend un bras afin qu'elle s'y cramponne et, pour orienter ses mouvements vers le rivage, il nage sur le dos en utilisant le courant.

On a eu 13 mentions d'honneur du civisme, M. le Président; pour la Capitale-Nationale, M. David Gauvin, de Deschambault, et Mme Lajoie. M. Gauvin a eu la médaille d'honneur. Mme Lajoie, pour l'événement que j'ai décrit tantôt, avait eu la médaille du civisme. Mme Adisa Hajdarevic, de Québec, pour un événement du 23 janvier 2013 : Mme Hajdarevic s'empresse de secourir un automobiliste qui a percuté un lampadaire. Après avoir extrait le conducteur de sa voiture, elle s'évertue à le réanimer pendant plus de 45 minutes, sous une température de moins 40°. L'homme est sauf, mais la sauveteuse s'en tire avec des brûlures au premier degré au visage et aux bras. M. Alain Soucy, de Québec, pour un événement du 7 novembre 2013 : Michèle Renaud et Alain Soucy viennent à la rescousse d'une septuagénaire en train de subir une agression. Pendant que Michèle Renaud se presse d'appeler les secours, M. Soucy s'oppose à l'agresseur et le garde à vue jusqu'à l'arrivée des policiers.

Pour la région de la Mauricie, Gabriel Bouchard, de La Tuque, pour un événement du 22 mars 2013 : M. Bouchard se porte au secours de son ami motoneigiste pour l'extraire des eaux glaciales d'un lac. Alors que la glace cède sous le poids du motoneigiste, M. Bouchard n'hésite pas à s'approcher de lui pour l'agripper et le hisser sur la surface pendant que tout s'effrite autour.

Pour la région de Montréal, M. Hamid Jennane, pour un événement du 19 août 2013 : M. Jennane se précipite auprès d'une femme agressée à coups de marteau. Faisant fi du danger, M. Jennane tient l'agresseur sous son joug à l'aide d'une chaise de cuisine, ce qui lui permet de le faire reculer et de l'éloigner de la victime jusqu'à l'arrivée des policiers.

Pour la région de l'Abitibi-Témiscamingue, M. Olivier Béland et Francis Lapointe, de La Sarre, pour un événement du 6 avril 2013 : ils rescapent un motoneigiste tombé dans la rivière. Avançant prudemment sur la glace, Olivier, tenu par Francis, parvient à saisir l'homme agrippé à un bloc de glace à l'aide d'un canif. Ils reviennent ensuite prudemment ensemble sur la rive.

Pour la région des Laurentides, un citoyen du député de Deux-Montagnes, M. Émile Damphousse, de Deux-Montagnes, qui s'est précipité auprès de son père, coincé tête première et jusqu'aux cuisses dans l'étroite ouverture d'un puisard — un événement du 5 octobre 2013. Sans hésiter, le jeune Émile foule le sol instable, qui pourrait l'engloutir à son tour, afin d'agripper son père par les pieds et l'extraire de sa mauvaise position.

Pour la région de la Montérégie, probablement quelqu'un de Montarville... mais j'en ai deux de Longueuil et un de Brossard. M. Daniel Elguera Velasquez, de Longueuil, un événement du 28 juillet 2013 : M. Velasquez s'empresse de porter secours à une passante victime d'un homme qui s'acharne à la rouer de coups. Au pas de course, M. Velasquez rejoint l'agresseur, parvient à l'écarter de la femme et, à l'aide d'autres passants, réussit à le maîtriser. Mme Chantal Lapointe et Éric Marleau, de Longueuil, pour un événement du 31 août 2013 : ces deux personnes mobilisent toute leur énergie pour extirper leur belle-fille, coincée sous un quatre-roues qui a versé dans un ruisseau. Après avoir réussi à l'extraire, Mme Lapointe et M. Marleau se relaient pour la réanimer en lui donnant un massage cardiaque. M. René Rheault, de Brossard, pour un événement du 16 mars, et c'est mon avant-dernier, M. le Président : M. Rheault porte secours à un homme qui est en train de se noyer dans le fleuve. Couché sur son kayak et poussant avec ses jambes pour avancer sur la glace, M. Rheault déploie des efforts soutenus pour rejoindre l'homme et le ramener à la rive.

Et finalement, pour la région du Centre-du-Québec, M. Marc Letendre : dans la nuit du 28 avril 2013, M. Letendre se hâte de porter secours à deux consoeurs de travail tenues en otage par un patient instable et traité en psychiatrie. M. Letendre déjoue d'abord l'homme en pénétrant dans l'unité de soins puis parvient à le maîtriser ensuite.

C'est un très bel exemple, M. le Président, pourquoi on fait le travail qu'on fait et pourquoi on est fiers du travail qu'on fait. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

• (18 h 30) •

Mme Vallée : M. le Président, je pense que c'est, encore là, important de souligner les bons coups et souligner ceux et celles qui vont contre vents et marées pour venir en aide à quelqu'un qui est en détresse. Alors, évidemment, la cérémonie du Prix du civisme, de l'hommage au civisme, c'est une cérémonie qui, dans le fond, se veut un beau gros merci à des gens ordinaires qui remplissent des exploits extraordinaires, souvent au péril de leur vie.

Et je souriais lors de l'énumération faite par le collègue de Chomedey, parce que j'ai rencontré le jeune Émile, notamment, un jeune garçon qui avait 15 ans à l'époque, et la fierté de ce jeune ado là de recevoir ces hommages-là, d'être ici, à l'Assemblée nationale... il était très fier. Je suis persuadée qu'au-delà du moment où il a porté secours à son père, un moment qui restera à tout jamais gravé dans sa mémoire, le 29 septembre dernier sera également un moment qui restera gravé à tout jamais dans sa mémoire, un moment où le Québec lui a dit merci d'avoir fait ce qu'il a fait.

Et je voulais, M. le Président, dire à quel point nous faisons... malgré le fait que nous soulignons cet hommage-là, nous le faisons d'une façon toute sobre, et la cérémonie pour les Prix du civisme, juste pour vous donner une idée, a coûté sommairement, environ, 5 000 $. Alors, c'est une cérémonie importante mais qui se fait en toute sobriété, et, pour moi, c'est très important, lorsque nous remettons des distinctions dans nos fonctions, de le faire. Oui, c'est important de continuer d'honorer ceux et celles qui se dévouent pour les autres et qui posent des gestes extraordinaires, mais il y a une façon de rendre cet hommage-là sans nécessairement... à peu de frais, et c'est ce que nous avons fait, et nous avons eu une très belle cérémonie, et je crois que ceux et celles qui à qui nous avons dit merci le conserveront et s'en rappelleront pour bien des années.

Et je vous convie à la prochaine cérémonie. C'est important. Bien souvent, évidemment, je sais, comme députés, comme élus, on est appelés à vaquer à plein d'activités, mais de voir le sourire et la fierté de ces gens-là, ça n'a pas de prix. Et j'invite les membres de l'Assemblée à être présents à la prochaine cérémonie de l'hommage au civisme. Et nous vous inviterons, nous vous ferons connaître les dates bientôt.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, sur ces paroles, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 19 h 30, où nous poursuivrons l'étude des crédits. J'apprécierais, de la part des membres de la commission et de tout le monde, de la ponctualité pour que nous puissions reprendre dès 19 h 30. Et, sur ce, je souhaite un bon appétit à tous.

(Suspension de la séance à 18 h 32)

(Reprise à 19 h 35)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, prenez place, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Bonne soirée à tous. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas perturber nos travaux.

Alors, je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude du volet Justice du portefeuille Justice pour l'exercice financier 2015‑2016. Puisque nous avons débuté nos travaux à 19 h 34 et qu'une période de deux heures doit être consacrée à l'étude de ce programme, est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit jusqu'à 21 h 34? Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci beaucoup. Avant de poursuivre nos travaux, je vous informe du temps approximatif qu'il reste à chaque groupe parlementaire pour l'étude de ce programme : du côté du gouvernement, environ 54 minutes; du côté de l'opposition officielle, environ 35 minutes; du côté du deuxième groupe de l'opposition, 10 minutes. Et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques devrait se joindre à nous sous peu et elle disposera d'un temps de parole de 15 minutes.

Donc, M. le député de Lac-Saint-Jean...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...bloc d'intervention.

M. Cloutier : Je vous remercie, M. le Président. On vous retrouve, on est heureux.

L'accès à la justice passe beaucoup, comme c'est le cas dans plusieurs autres secteurs d'activité au gouvernement, par l'informatisation. On ne peut pas dire que ça a été un gros succès. Et les exemples sont multiples... d'échecs, que ce soit dans l'administration du gouvernement, au Conseil du trésor, que ce soit avec la santé, le DSQ. Mais je vais être très rapide sur le sujet. Tout ce que je veux savoir, là : Quelles mesures vous avez prises pour vous assurer que ça ne soit pas à nouveau un fiasco puis un gouffre financier? Qui est le pilote dans l'avion? Qui gère tout ce développement du secteur?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, M. le Président, on a eu la chance un petit peu d'aborder cette question-là un peu plus tôt cet après-midi, sur l'informatisation de la justice.

Je comprends la préoccupation du collègue de Lac-Saint-Jean, et on partage cette même préoccupation : s'assurer que les projets informatiques soient bien gérés, bien encadrés. Et nous avons le programme TOJ au sein du ministère de la Justice, comme je l'ai mentionné, qui est la transformation organisationnelle de l'administration de la justice, et c'est une nouvelle façon de faire les choses, une nouvelle orientation qui permet de mettre en place des plus petits projets. Plutôt qu'un grand chantier informatique lourd, complexe qui peut donner lieu effectivement à des ratés à grands coûts, c'est une vision qui permet d'y aller d'une façon bien ordonnée. C'est-à-dire, l'important, c'est de préserver la sécurité du public.

On souhaite, à travers les différents projets, accélérer l'administration de la justice, on veut évidemment accroître la performance de l'organisation, réduire la complexité. Alors, certains des projets dont nous avons parlé un petit peu plus tôt, dont les rôles informatisés, le déploiement des bornes wifi, permettent d'améliorer tout ça, et on souhaite aussi que l'information soit plus accessible et on veut aussi rendre l'information à jour. Donc...

M. Cloutier : ...c'est géré à l'externe par des contrats privés?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...M. le député de Lac-Saint-Jean, mais la ministre a la parole, et, jusqu'à maintenant, j'écoutais sa réponse...

M. Cloutier : ...échanges directs.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Bien, en fait, j'apprécie les échanges directs et, dans la mesure où je n'ai pas à m'en mêler, je ne m'en mêle pas, mais j'apprécierais également qu'on n'interrompe pas un député ou un ministre qui a la parole. Alors, Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Vallée : Donc, en fait, cette vision-là se déploie avec une préoccupation d'assurer une meilleure efficacité, mais on a une équipe qui est dédiée, au sein du ministère. Alors, c'est Me Renée Madore, qui est derrière moi, qui est la sous-ministre associée en charge de ce dossier-là. Et, dans certains dossiers, effectivement, on doit avoir recours à de l'aide externe, mais la gestion du projet se fait à l'interne par nos équipes, avec une vision bien définie, bien claire. Les préoccupations soulevées par le collègue sont aussi les miennes et sont celles de l'ensemble de l'équipe au ministère. Alors, on a une gestion rigoureuse des fonds publics. Mais il y a certains petits projets qui ont été mis de l'avant. C'est sûr, on souhaite... et tous les utilisateurs du système de la justice souhaitent pouvoir accélérer le pas, le déploiement, mais il faut aussi prendre le temps de bien faire les choses.

• (19 h 40) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Oui. Le manque de ressources. On avait prévu 126 personnes supplémentaires en 2012 échelonnées sur trois ans, dont 85 techniciens en droit et 41 postes administratifs. Nous, ce qu'on voit, c'est que, pour 2014‑2015, 2015‑2016, il n'y a aucune ressource supplémentaire et, de toute évidence, les besoins sont bien réels. Comment explique-t-on que, malgré les promesses qui avaient été faites, on n'a pas réussi à augmenter les effectifs nécessaires pour répondre aux besoins du ministère?

Mme Vallée : Actuellement, M. le Président, il y a eu des efforts au cours de la dernière année qui ont dû être mis. Il a fallu... disons, le déploiement de nos ressources s'est fait d'une façon plus restreinte. Oui, ce sont des choix qu'on a dû faire.

Il ne faut pas oublier qu'il y a un contexte budgétaire dans lequel on a été placés, dans lequel on a été confrontés il y a un an qui commandait peut-être d'être un peu plus patients dans le déploiement des ressources et de faire un certain nombre de choix. Alors, c'est là qu'on en est. Le contexte budgétaire a fait qu'on ne pouvait pas déployer aussi rapidement qu'on l'aurait souhaité.

Maintenant, les préoccupations sont là. Je tiens à le rassurer puis je suis fière aussi que le député de Lac-Saint-Jean ait pu le faire d'entrée de jeu, on a des équipes en place qui sont extrêmement professionnelles, tant au sein du ministère de la Justice qu'au DPCP, qu'au bureau de la Directrice des poursuites criminelles et pénales, on a des équipes et on a des gens dédiés et dévoués. Et le déploiement, bien, de l'ajout de ressources cette année... Ça a été un choix que nous avons fait, comme gouvernement, de limiter l'ajout des ressources. Et puis, je tiens à le rappeler, on avait quand même un effort majeur à faire pour redresser les finances publiques et on avait quand même un déficit de 7 milliards, et puis c'est une réalité. Et donc cette réalité a commandé de faire des efforts et des choix. Mais, encore une fois, une équipe extraordinaire au sein du ministère de la Justice.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Vous aurez compris que je faisais davantage référence aux procureurs de la couronne. De toute évidence, il y a des retards. Avez-vous l'intention de combler les retards?

Mme Vallée : Il y a beaucoup de travail qui se fait actuellement. Pour ce qui est des dossiers, ce n'est pas des retards, c'est un choix qui a été fait cette année de ne pas aller de l'avant et de ne pas combler des postes, puisque l'état des finances publiques ne permettait pas de le faire. Alors, il ne faut pas considérer ça comme des retards. C'est sûr qu'avoir eu un contexte budgétaire nous permettant de déployer... Si, par exemple, nous avions pu atteindre l'équilibre budgétaire l'an passé, je pense que c'est 200 millions qui, cette année, auraient été mis à notre disposition, de plus. Mais ce n'est pas la situation dans laquelle on se retrouve, alors c'est certain que ça commande de faire des choix difficiles. Mais, malgré ça, on a des équipes extraordinaires, et notre volonté est évidemment de continuer le bon travail avec les équipes, mais évidemment nous allons le faire avec les ressources dont nous disposons, avec notre capacité de payer. On ne fera pas ça sur la carte de crédit de nos enfants.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : L'entente Québec-Canada concernant les mesures québécoises de justice familiale a pris presque un an, en fait, à être signée. On comprend que les sommes sont rétroactives, mais il nous semble que, lors de la dernière étude des crédits, on avait compris que l'entente avait pourtant été signée l'année dernière.

Comment explique-t-on qu'on ait pris un an de délai avant de s'entendre avec le gouvernement fédéral? Et est-ce que ça a eu des impacts pour le financement pour le Fonds Accès Justice?

Mme Vallée : M. le Président, les sommes ont été au rendez-vous, les sommes ont été versées, il n'y a pas eu d'impact, les fonds n'ont pas été impactés. Il y a eu un délai entre la signature et les différents parcours des documents, mais, ceci étant, ça n'a eu aucun impact, et il n'y a eu aucun programme d'impacté par cette situation.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Par rapport au financement de certains organismes, Juripop aurait été coupée de manière importante dans son budget, de plusieurs milliers de dollars, ce qui l'aurait placée dans une situation de précarité.

Est-ce que la ministre peut nous expliquer qu'une organisation comme Juripop, qui est pourtant un modèle qui a été salué à de nombreuses reprises par à peu près tous les ministres de la Justice... comment on en est venus à une coupure de leur subvention annuelle? On va le dire comme ça.

Mme Vallée : M. le Président, il faut faire une distinction entre les sommes accordées par le Fonds Accès Justice et les sommes accordées par le budget discrétionnaire. Le budget discrétionnaire, ce n'est pas une somme récurrente. Et je crois, si je comprends bien la question de mon collègue, qu'on fait référence à une demande formulée dans le cadre du discrétionnaire. Ceci étant, le budget discrétionnaire a été réduit du budget que l'on connaissait par le passé. Alors, le budget discrétionnaire mis à ma disposition a été réduit.

Ceci étant, Juripop a quand même reçu de l'aide discrétionnaire pour mener à bien ses activités, mais Juripop, comprenons bien, n'est pas non plus un organisme à but non lucratif, il est aussi financé et a aussi un financement de par ses activités lucratives. Alors, il faut aussi distinguer... Lorsque le choix est d'aider un organisme à but non lucratif et un organisme qui n'est pas à but non lucratif qui reçoit des sommes de par ses activités commerciales, bien, c'est aussi considéré dans l'appréciation. Mais, ceci dit, Juripop a été aidée notamment par le discrétionnaire de la Condition féminine pour l'activité de commémoration du 25e anniversaire de la tuerie de Polytechnique. Alors, Juripop a reçu une aide qui est quand même, somme toute, substantielle, compte tenu de la réduction du discrétionnaire. Mais le discrétionnaire n'est pas un droit acquis, puis ça, je le répète, au même titre que les sommes dont nous disposons, comme députés, à titre de soutien à l'action bénévole, ce n'est pas une aide récurrente, et les organismes ne doivent pas s'accrocher à ces aides-là pour boucler le financement annuel, puisque, d'une année à l'autre, les besoins exprimés par d'autres organismes peuvent nous amener à faire des choix qui ne nous permettent pas de continuer et de maintenir annuellement un montant fixe. Mais Juripop a reçu, dans le passé, un coup de pouce puis ils ont des activités, aussi, lucratives.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Je vais aborder maintenant le sujet de la supervision des droits d'accès des parents dans certaines circonstances. On sait que ça a fait l'objet de travaux importants au sein du ministère. Alors, je me questionne sur les suites qui ont été données à ces travaux. Et est-ce qu'il y aura des nouvelles directives qui seront mises en place pour nous assurer qu'il y a toute la formation et l'accompagnement nécessaires pour la supervision des droits d'accès?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre. Il nous reste huit minutes à ce bloc.

Mme Vallée : Oui. Alors, il y a un suivi qui se fait avec la magistrature et il y a eu récemment, là, un suivi téléphonique qui a été fait avec des membres de la magistrature pour discuter de la possibilité d'apporter des modifications au Code de procédure civile dans le cadre, justement, de la supervision des droits d'accès. C'est un enjeu qui est préoccupant. Et on a vu, dans le passé, des dossiers dramatiques défrayer les manchettes, des situations extrêmement difficiles, puis je pense que, pour ceux et celles qui ont pratiqué dans le domaine du droit matrimonial, on a pu, dans le cadre de notre pratique, voir des situations qui n'étaient vraiment pas simples. Alors, il y a une sensibilité qui est là. Il y a eu des échanges tout récemment, et puis, évidemment, la réflexion continue de se faire en collaboration avec l'ensemble des partenaires.

Simplement, je veux juste, M. le Président, revenir, parce qu'on a parlé tout à l'heure de Juripop, simplement rappeler qu'il y aura un appel de projets cette année dans le cadre du Fonds Accès Justice. Il y aura 500 000 $ qui seront répartis entre les organismes, et, comme dans tous les dossiers d'appel de projets, les différents organismes qui ont des projets à soumettre pourront les soumettre, et les dossiers seront évalués.

Alors, je tiens aussi à rappeler que le Fonds Accès Justice permettra de soutenir des organismes qui travaillent à rendre notre justice plus accessible.

• (19 h 50) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Je vous remercie, M. le Président. Juste pour revenir à nouveau sur la supervision des droits d'accès. Vous avez fait référence à certaines situations, mais il y a vraiment des cas dramatiques. Il y a un cas en particulier qui est arrivé au Québec assez récemment qui fait peur, il faut le dire. Maintenant, j'invite la ministre à s'attaquer à cette question-là avec tout le sérieux qui est nécessaire parce que c'est vraiment inquiétant.

Le projet de loi sur l'adoption — dois-je citer à nouveau la ministre ou ce n'est pas nécessaire de le faire? — au moment où elle était une très bonne critique de l'opposition, porte-parole à la justice...

Une voix : ...

M. Cloutier : ...rappelait en long et en large... mais, au-delà de ça, la réalité, c'est que vous aviez raison au moment où vous vous êtes levée pour réclamer des amendements législatifs. Ce qui est moins bon, c'est les délais qui se sont écoulés depuis, et c'est pour ça qu'il faut agir. Il y a beaucoup de gens qui sont en attente des modifications. Alors, je pense que nous sommes rendus à l'heure du dépôt de ce projet de loi.

On en a discuté aux crédits l'année dernière. À ce moment-là, vous m'aviez dit que ça allait être déposé probablement... en tout cas, ce n'était pas aussi clair, mais vous aviez laissé entendre que ça se ferait à la session d'automne. Alors, les délais, à nouveau, s'écoulent. Je me demande si vous avez...

Mme Vallée : Je vais vous expliquer. Je vais expliquer, M. le Président. Et, je comprends, je m'attendais à cette question-là. Je souris, parce que j'étais persuadée qu'on me citerait.

M. Cloutier : ...de ne pas le faire, quand même.

Mme Vallée : Mais, M. le Président, je comprends, mais je tiens à expliquer un petit peu le contexte. Vous savez, nous avons parlé abondamment du comité en droit de la famille, présidé par Me Roy, et Me Roy doit soumettre son rapport éminemment. Et, compte tenu que le rapport brosse un portrait ou devrait... un grand portrait, j'ai souhaité attendre le rapport afin de pouvoir inclure, le cas échéant, les suggestions, les recommandations du comité qui pouvaient éventuellement porter sur l'adoption. Plutôt que de déposer un projet de loi et de revenir par la suite avec des amendements, nous attendions de pouvoir prendre connaissance du rapport de Me Roy et de pouvoir légiférer dans ce sens-là.

Alors, écoutez, je comprends, mais l'objectif, c'était de déposer quelque chose d'important, et évidemment l'adoption demeure un enjeu qui me préoccupe grandement, et c'est un enjeu sérieux. Je sais notamment qu'il y a de très grandes attentes au sein de l'Assemblée des Premières Nations quant à la mise en place et la reconnaissance de l'adoption coutumière. Alors, c'est effectivement très important, alors nous pourrons bonifier le projet de loi. Et c'est ce qui a amené ce retard, ce n'est pas un manque de considération. Nous avons un projet de loi qui, somme toute, pourrait être déposé, mais je préfère m'assurer qu'il soit complet plutôt que de devoir revenir avec un projet de loi amendant un projet de loi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean, trois minutes.

M. Cloutier : Merci. Est-ce que la ministre est capable de donner un échéancier pour les familles?

Mme Vallée : Bien, en fait, nous attendons, en juin, le rapport de Me Roy. On a abordé la question la semaine dernière avec notre collègue de Montarville dans le cadre des crédits de la Condition féminine. Je me suis aussi engagée à rendre public le rapport, alors vous aurez l'opportunité... Par la suite, évidemment, nous verrons à travailler assez rapidement pour pouvoir déposer un projet de loi, parce que nous savons à quel point ce projet est attendu tant par les communautés autochtones que par aussi, notamment, le Mouvement Retrouvailles, qui souhaite depuis des années que des modifications soient apportées au régime de l'adoption au Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Oui. Deux minutes. Alors, protection du consommateur. À nouveau, je vais vous épargner une citation, mais, encore là, il y a eu plusieurs projets de loi qui ont été déposés à l'Assemblée nationale pour lutter contre l'endettement. Depuis, il y a l'affaire Marcotte qui a été rendue par la Cour suprême. Moi, je pense que le législateur québécois a plus de marge de manoeuvre que ce que nous avions avant la décision.

Il y a donc une opportunité de réformer la Loi sur la protection du consommateur, d'y ajouter des dispositions concernant la sollicitation, le remboursement, concernant plusieurs enjeux qui sont vraiment d'actualité qui sont liés à la vie quotidienne des gens. La sollicitation bancaire, elle est excessive. Et pourquoi ne pas légiférer également sur les tarifs bancaires? Et je vous invite à la réflexion. Vous aurez un beau débat législatif à l'interne à savoir si le législateur québécois peut légiférer sur les frais bancaires, mais, moi, ma prétention, c'est que oui, mais vous avez tous les experts avec vous qui pourront vous guider. Mais je pense que l'arrêt Marcotte nous donne davantage... puis il est temps qu'on agisse là-dessus parce qu'il y a vraiment des exagérations. Encore une fois, je pense qu'assez rapidement il pourrait y avoir un consensus à l'Assemblée nationale.

Est-ce que vous avez l'intention de déposer un nouveau projet de loi qui prend acte des nouvelles marges de manoeuvre que nous donne l'arrêt Marcotte?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, on dispose de moins d'une minute pour terminer ce bloc, sous réserve du consentement de...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, j'ai eu l'opportunité la semaine dernière de répondre à une question du collègue de Rimouski, qui m'interpellait justement sur le dossier du surendettement des consommateurs. Et, suite au dépôt du projet de loi par le leader actuel du gouvernement et ministre responsable des Affaires intergouvernementales alors qu'il était à la Justice, il y avait eu une vaste consultation, et cette consultation-là avait mené à un certain nombre de critiques.

Alors, dans la foulée de tout ça, dans la foulée de l'affaire Marcotte, il y a eu des chantiers, un chantier qui est en cours, des échanges qui se font notamment avec l'AMF et avec les institutions bancaires, qui avaient apporté un certain nombre de commentaires. Mais, oui, l'objectif est de soumettre aux parlementaires de cette Assemblée un projet de loi. Maintenant, vous comprendrez, M. le Président, que je ne donnerai pas de date précise, je ne m'engagerai pas, mais c'est de notre volonté d'aller de l'avant. D'ailleurs, nous avons un certain nombre d'échanges avec l'Office de la protection du consommateur, l'AMF, le ministère des Finances et les différents groupes, puisque le surendettement des consommateurs et la vulnérabilité bien particulière de certains consommateurs sont des éléments fort préoccupants.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. Je me tourne maintenant vers M. le député de Chomedey. À vous la parole.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Un peu pour faire du millage sur les commentaires de mon collègue de Lac-Saint-Jean : ce n'est pas tout de déposer les projets de loi, il faut les rendre à terme aussi. On peut en déposer tous les jours. On a eu un très bel exemple, depuis que je suis en politique, où est-ce qu'on déposait des projets de loi et on en faisait quasiment une joute de hockey, là, dire : Six à zéro, sept à zéro, huit à zéro, mais il faut être capables effectivement de leur faire passer tout le processus législatif et se rendre à l'adoption, et on l'a vu avec le projet de loi n° 26, qui est une bonification très importante du projet de loi n° 61 qui avait été déposé auparavant.

Mais je vais, dans le premier bloc qui nous est imparti, vous parler, Mme la ministre... je veux profiter de la présence de M. Prémont pour vous parler d'exploitation des personnes âgées. Je n'aime pas le terme, mais c'est comme ça. Déjà, en 2009, je pense que c'était sous la gouverne de notre collègue de Sainte-Marie—Sainte-Anne, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, en collaboration avec le ministère de la Famille, s'était vu confier le mandat de développer, dans le créneau d'exploitation des personnes âgées, un nouveau mode d'intervention. Pourquoi j'ai gardé ce sujet-là, Mme la ministre? C'est parce que, dans le comté de Chomedey, les 60 ans et plus — parce que je me plais à dire «les personnes âgées», mais je vais descendre l'âge — les 60 ans et plus...

Une voix : ...

M. Ouellette : ... — non, c'est la réalité — représentent plus de 23 000 citoyens de mon comté, 23 000 électeurs de mon comté. Et je pense qu'on vit plus longtemps et on vit plus en santé, et il y a des préoccupations, de façon quotidienne, dans nos bureaux de comté, tous députés confondus, sur tout ce qui touche l'exploitation des personnes âgées.

          Quand, en 2009, la décision a prise par la ministre d'alors, comme je le mentionnais, la députée de Sainte-Marie—Sainte-Anne, de remettre ou de...

• (20 heures) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : C'est soit Sainte-Marie—Saint-Jacques ou Saint-Henri—Sainte-Anne.

M. Ouellette : C'est Saint-Henri—Sainte-Anne. Je suis à la veille de l'appeler par son nom, là, O.K.? Bon.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je ne voulais pas vous interrompre, mais...

M. Ouellette : Non, non. Mais c'est Saint-Henri—Sainte-Anne?

Une voix : Saint-Henri—Sainte-Anne, oui.

M. Ouellette : O.K. J'ai de la misère avec mes saints ce soir, puisque...

Une voix : ...

M. Ouellette : Non, non, mais, puisque mon collègue d'Ungava est à côté de moi, j'ai de la misère.

Donc, je reviens à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Quand on regarde la mission de la commission, on retrouve sur leur site Internet... il y a trois grandes responsabilités : la première, c'est d'informer le public des droits reconnus par la charte; la deuxième, je pense qu'elle est très importante, faire enquête sur des situations de discrimination et d'exploitation.

Quand on parle d'exploitation des personnes âgées, c'est couvert par la charte québécoise à son article 48 de façon très claire. L'article 48 de la charte des droits et libertés de la personne québécoise dit : «Toute personne âgée ou toute personne handicapée a droit d'être protégée contre toute forme d'exploitation.» C'est aussi dit : «Telle personne a aussi droit à la protection et à la sécurité que doivent lui apporter sa famille ou les personnes qui en tiennent lieu.» Et je pense que c'est un programme ou c'est un mécanisme qui est méconnu dans notre population. Comme je l'ai mentionné, puisque notre population vieillit plus longtemps et en santé, on ne répétera jamais assez les organismes qui existent et les gens qui peuvent leur venir en aide.

J'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir sur le site de la Commission des droits de la personne ce qu'était l'exploitation, comment la reconnaître, que faire en cas d'exploitation et que fait la commission. Et je pense que, la commission, en 2009, quand elle s'est vu confier le mandat, on lui a aussi donné des outils d'une équipe spécialisée de cinq enquêteurs. Là, c'est sûr que ça a piqué ma curiosité, parce que, dans une ancienne vie, pour effectivement avoir été très, très, très impliqué à ce niveau-là, j'ai réalisé avec beaucoup de satisfaction qu'on avait une équipe d'enquêteurs, mais sûrement que, pour les nombreux téléspectateurs qui nous suivent ce soir — encore là, ce n'est pas un soir de hockey, on est chanceux — on va vouloir en savoir un petit peu plus, on va vouloir aller un petit peu plus en détail, parce que, la Commission des droits de la personne, qui enquête sur l'exploitation des personnes âgées, il y a quelque chose en quelque part qui va mériter un peu plus d'explications de la part de M. Prémont.

Sur le site, il y a des outils très importants. J'ai été impressionné par le... je pense qu'il y a un document qui existe qui s'appelle Personnes âgées — À la défense de vos droits, où on explique la protection, ce qu'est l'exploitation, qu'il y a une équipe spécialisée, que faire en cas d'exploitation, parce qu'il y a beaucoup de services qui existent, mais les gens sont un peu démunis. Et, quand tu es dans le système, tu ne sais pas où te revirer, puis ce n'est pas vrai que tu vas penser à appeler le 9-1-1. Pourquoi tu appellerais le 9-1-1 en cas d'exploitation? Très souvent, c'est des membres de ta famille ou des gens proches qui vont vous exploiter pour toutes sortes de raisons. Et, bon, tu ne veux pas que le système judiciaire intervienne, tu ne veux pas créer de problème à personne, tu endures. Jusqu'où tu vas? Et c'est pour ça qu'on a avantage à effectivement en parler. Puis vous avez avantage à faire connaître votre équipe d'exploitation, votre équipe d'enquêteurs qui travaille dans ce domaine-là.

Ça va m'amener, M. Prémont, avec votre permission, M. le Président, à vous parler du genre d'enquête. Je vais vouloir que vous m'expliquiez comment ça fonctionne. Intervenez-vous souvent? De quelle façon est-ce que vous intervenez? Est-ce que, dès qu'il y a un signalement, il y a des enquêtes? Est-ce que c'est fréquent?

Ma première question à M. Prémont, avec votre consentement, M. le Président, c'est qu'il nous instruise sur cette équipe spécialisée, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent puis pour le bénéfice des personnes âgées, parce que ces gens-là ont besoin d'être rassurés. Ces gens-là ont besoin de comprendre et particulièrement d'être aiguillés au bon endroit pour faire cesser ces comportements, comme je le mentionnais, qui sont très souvent très proche d'eux. Ça serait ma première question, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, M. le Président, je pense que ça prendrait le consentement. Les questions semblent adressées directement à Me Frémont, donc...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Non, mais, en fait, c'est vous qui décidez si...

Mme Vallée : Mais, évidemment, le collègue avait l'air très intéressé à entendre Me Frémont. Alors, je sais que tout le dossier tout le dossier de la maltraitance des aînés est un dossier qui nous interpelle tous et toutes et, avec votre permission, je céderais la parole à Me Frémont pour les données statistiques.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, dans un premier temps, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, Me Frémont, vous identifier. À vous la parole.

M. Frémont (Jacques) : Oui. Jacques Frémont, président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Merci beaucoup pour votre question, pour vos questions.

C'est effectivement un mécanisme, celui de l'article 48, qui est méconnu, et il mérite à être connu, parce qu'en tout cas, nous autres, il nous fait travailler beaucoup. Et ce n'est pas un phénomène qui va en diminuant, l'exploitation des personnes âgées au Québec. Ça va avec la démographie, ça va aussi avec la vulnérabilité croissante. Les gens vivent plus vieux, ils sont plus âgés. Physiquement, les gens deviennent de plus en plus vulnérables. Et la réalité, c'est que, bon an, mal an, nous sommes saisis... ça augmente d'année en année, mais, l'année dernière, on avait 75 dossiers qui ont été ouverts pendant l'année. Maintenant, ce qu'il faut se rendre compte, c'est que ces dossiers-là ne sont pas ouverts par les personnes elles-mêmes. Les personnes âgées, souvent, la caractéristique principale, c'est leur isolement, elles sont seules et, parce que quelqu'un s'intéresse à elles, ces personnes, soudainement, elles deviennent dépendantes de ces personnes, et c'est dans ce contexte-là beaucoup que les phénomènes d'exploitation dégénèrent. Elles font confiance à une personne, la personne lui dit : Confie-moi ton argent, confie-moi un mandat. Et, sur la foi de cet argent et de ce mandat, soudainement, les comptes de banque... c'est souvent de l'exploitation financière, les comptes de banque se mettent à se vider, et les économies d'une vie disparaissent très rapidement. Lorsque les prestations, les chèques arrivent dans le compte de banque, là aussi, ça disparaît très rapidement.

Dans les faits, les dossiers sont très, très rarement dénoncés par les personnes âgées elles-mêmes, parce qu'elles ne veulent pas... souvent, ce sont des gens qu'elles connaissent, des gens de leur famille, des amis, des enfants d'amis. Les dénonciations nous viennent beaucoup par la famille ou, de plus en plus, par les institutions financières. Il y a eu une sensibilisation des caisses populaires, des banques. Et, lorsqu'on voit un phénomène, par exemple, que, soudainement, l'argent qui a été accumulé au fil... les quelques dizaines de milliers de dollars au fil de toute une vie se mettent à disparaître très rapidement, la banque souvent va regarder les types de dépenses. Quand c'est au casino, quand c'est dans des discothèques, quand on voit qu'il y a des baux pour louer des autos, en général, ça suffit pour déclencher l'alerte. Et, l'alerte, très rapidement maintenant, ils savent et nous en saisissent. Et, nous, très rapidement, notre équipe doit enquêter pour voir s'il y a ou non apparence d'exploitation, et, s'il y a apparence d'exploitation, c'est l'article 81 de la charte qui s'applique.

• (20 h 10) •

En cas d'urgence, on doit intervenir, prendre les mesures pour préserver le patrimoine et faire cesser l'exploitation en attendant que nous disposions du dossier. Ce que nous faisons, c'est que, si nous constatons, nous pensons qu'il y a exploitation à la face même, il y a un comité, le comité des plaintes, qui se réunit à l'interne, et on déclenche une enquête de notre propre chef. Donc, ce n'est pas une plainte de quelqu'un, c'est une dénonciation qui nous vient de quelqu'un, et nous déclenchons l'enquête et, au terme de cette enquête, nous décrétons qu'il y a eu ou non exploitation.

Malheureusement, souvent, l'exploitation, quand on en est saisis, parce qu'on bouge très rapidement, l'argent a été vidé et, souvent, l'argent est irrécupérable parce que les gens qui ont exploité sont emprisonnés, parce qu'ils sont disparus, parce qu'ils sont ci, parce qu'ils sont ça. Donc, c'est véritablement un problème. Les enquêtes peuvent être très longues. Lorsqu'il y a un petit peu plus d'argent, qu'il y a un patrimoine conséquent, souvent, il y a eu des transactions immobilières, il y a eu des hypothèques qui ont été prises, ça fait une enquête qui est assez, je dirais, de type juricomptable, qui peut être assez complexe. Souvent, nous devons faire intervenir d'autres... les services sociaux sont appelés à intervenir. Dans certains cas, on parle de la Sûreté du Québec aussi — donc, il y a des aspects carrément criminels, on peut les saisir... dans d'autres cas, ils nous saisissent eux-mêmes des dossiers — le Protecteur du citoyen et le Curateur public, évidemment, dans certains cas aussi.

Donc, ça demande à un certain nombre d'intervenants de bouger. Mais, en général, nous... comment dire, nous réussissons, le mécanisme est correct pour le peu de cas qu'il y a qui nous sont dénoncés. Ce que nous ne savons pas, c'est combien il y a de cas d'exploitation de personnes âgées au Québec qui passent sous le radar, c'est-à-dire où le vide s'est fait, où personne, parce que la personne âgée étaient tellement isolée... que personne ne se rend compte qu'il y a eu exploitation. Et, en général, l'exploiteur disparaît aussitôt que c'est... évidemment, que c'est terminé. Alors, c'est un problème. Et, dans certains cas, les familles dénoncent, mais les familles... comment dire, on n'aime pas la soeur, le frère, le ci, le ça, et là ça devient extrêmement complexe, et, pour nos enquêteurs, il faut se démêler dans, souvent, de longs contentieux familiaux qui ont duré depuis plusieurs années. Je dirais, si j'avais à me recycler dans la criminalité, M. le député, c'est certainement la ligne d'affaires que je prendrais, parce qu'il y a beaucoup, beaucoup d'exploitation, il y a beaucoup de biens qui transfèrent. On n'a pas besoin d'aller faire des hold-up, on n'a pas besoin de commettre, comment dire, des crimes en plein jour. Ça se fait tout doucement, et on exploite les gens.

Je pense que les chambres professionnelles sont de plus en plus conscientisées, dont notamment la question des notaires. C'est une question... j'en discutais avec le président de la chambre. Il est évident que, lorsqu'on fait signer des mandats en cas d'inaptitude alors que les gens sont un petit peu sur le bord... Lorsqu'on a eu une cause, récemment, où on a fait signer un contrat de fiducie de 18 pages, simple interligne, 8½ X 14, à une personne que les services sociaux avaient identifiée comme en perte cognitive sérieuse... Il y a des problèmes aussi avec les corporations professionnelles, et elles sont saisies de ces dossiers-là. Donc, c'est un travail de la commission, c'est un travail de différents intervenants pour faire bouger le système pour, le plus rapidement possible, intervenir, et je pense qu'on fait un travail honnête, dans les circonstances. Mais, malheureusement, ce n'est pas un phénomène qui est là pour disparaître.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Me Frémont. M. le député de Chomedey, il reste deux minutes.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Vous parlez de 75 dossiers et vous nous dites : On peut saisir... parce que, là, vous avez parlé de la Sûreté du Québec dans vos dossiers. Pour bien comprendre, bien, effectivement, saisir, ça ne finit pas toujours au tribunal. Il y a des dossiers que vous pouvez garder à votre niveau, des dossiers d'intervention. Là, vous me dites que vous voulez vous recycler là-dedans. La question que...

Une voix : ...

M. Ouellette : Non, non, mais je comprends. Mais la question que je vais vous poser : Vous faites quoi, à partir d'aujourd'hui, en partant du moment où je veux vous empêcher de vous recycler là-dedans, pour prévenir ce genre de stratagème là? Parce que je pense que, dans les prochaines années, c'est, disons, le crime de l'avenir, là, qui va nécessiter une intervention ou des meilleures communications auprès des personnes âgées.

M. Frémont (Jacques) : Merci de la question. Il y a deux volets. Il y a le volet prévention par l'éducation. C'est clair, nous faisons le plus d'éducation possible, notamment auprès des institutions financières. Souvent, c'est par là que ça... ce sont les mieux placés pour découvrir.

L'autre, c'est une initiative, c'est la signature d'une entente que nous avons signée, l'entente sociojudiciaire dans la région de Trois-Rivières et de la Mauricie, où, là, véritablement tous les acteurs de la région se sont concertés pour... donc, on parle de la Sûreté du Québec, les CSS, etc., et pour que, dès qu'il y a le début d'un phénomène, la machine se mette en marche immédiatement. Les premiers mois de l'entente sont en cours, elle devrait être évaluée sous peu. Il est sûr que le ministère de la Santé et des Services sociaux voudrait étendre ce projet, qui est un projet encore pilote, mais à toutes les régions du Québec pour que toutes les régions du Québec puissent bénéficier d'un meilleur filet, là, de sécurité pour les personnes âgées.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça met un terme, malheureusement, à ce bloc d'échange. Je me tourne maintenant vers la députée de Montarville. Vous disposez de 10 minutes.

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. Bonsoir à vous tous. Pour poursuivre sur notre lancée de cet après-midi... Me Roy nous instruisait, nous informait sur les coûts, entre autres, de l'opération SharQc, et nous avions convenu que... j'avais posé une question, puis on pourrait élaborer parce qu'il y a la personne-ressource qui pourrait nous répondre. Alors, pour les bénéfices des gens qui nous écoutent, Me Roy nous disait que, depuis le début de l'opération SharQc, ce sont 18,7 millions de dollars qui ont été dépensés pour payer la défense des accusés dans tout ce mégaprocès, qui s'est subdivisé en petits mégaprocès. Pour notre part, nous trouvons que c'est beaucoup d'argent, que c'est énorme.

Cela dit, ma question est la suivante : A-t-on pu récupérer des sommes via les biens acquis par la criminalité, des biens qui auraient été saisis dans toute la foulée de l'opération SharQc? Donc, a-t-on saisi des biens? Si oui, a-t-on procédé à la vente? Et quelles sommes ont pu être récupérées?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, alors, avant de céder la place à Me Murphy, notre Directrice des poursuites criminelles et pénales, je veux simplement aviser que la question de la collègue, parce qu'évidemment nous avons fait un certain nombre de recherches et il y a encore... Pour répondre de façon complète à la question de la collègue... ça nous place dans une situation un petit peu particulière dans le sens que, les procédures n'étant pas terminées, il reste un certain nombre de dossiers en suspens et il y aura possiblement composition d'un jury. Donc, il faut prendre bien garde de ne pas contaminer un jury éventuel. Alors, comme le dossier n'est pas encore fermé, les réponses aux questions ne seront probablement pas aussi complètes que souhaite l'avoir la collègue, mais vous comprendrez que, puisque le dossier n'est pas terminé, il serait imprudent de donner certaines informations plus complètes.

Ceci étant dit, je vais laisser Me Murphy poursuivre, avec évidemment le consentement des membres de la commission.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, est-ce qu'il y a consentement pour que nous entendions notre nouvelle Directrice des poursuites criminelles et pénales?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, pour le bénéfice de nos téléspectateurs, dans un premier temps, vous identifier, Me Murphy.

Mme Murphy (Annick) : Annick Murphy, Directrice des poursuites criminelles et pénales.

Alors, il faut être extrêmement prudent, là, dans cette réponse que je pourrais apporter, pour deux raisons : il y aura, le 7 mai, le débat d'une requête en non-communication qui a été présentée et qui sera entendue par M. le juge Vincent, donc, le 7 mai, et il y aura constitution d'un jury dans les prochaines semaines, au mois de juin. Alors, je ne pourrais pas répondre à votre question. Tous ces éléments-là font partie des choses qui sont actuellement discutées. Alors, je ne pourrais pas vous donner de... Par contre, en fait, ce que je vous dis, c'est que l'heure n'est peut-être pas au bilan aujourd'hui, mais il y aura la fin de SharQc et il y aura la possibilité de faire le bilan et de répondre aux questions que vous posez aujourd'hui.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville.

• (20 h 20) •

Mme Roy (Montarville) : M. le Président, si je comprends bien, c'est qu'il est impossible pour nous de savoir si des biens ont été saisis et si des biens ont été vendus. Si la chose est déjà vendue, des sommes ont dû être acquises. Je ne vois pas en quelle mesure cela peut entacher le procès si l'acte de vente est finalisé et quelqu'un a acquis ces biens. Mais, s'il n'y a pas eu de bien saisi, s'il n'y a pas eu de vente, je comprends qu'on ne peut pas avancer non plus.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, je vais céder la parole à Me Murphy, qui pourra faire un petit peu de pédagogie et expliquer, dans le contexte bien particulier du dossier qui nous préoccupe, pourquoi cette retenue est nécessaire.

Mme Murphy (Annick) : Bien, parce que toutes ces... il s'agit d'un procès qui concerne 156, à l'origine, personnes, donc il s'agit d'un procès qui concerne une preuve unique, et les éléments qui font partie de cette preuve-là sont discutés dans l'ensemble des dossiers. Alors, il y a actuellement des discussions devant le tribunal qui concernent ces éléments-là, et je voudrais m'abstenir d'en discuter aujourd'hui pour éviter que cette situation-là puisse faire déraper les procédures qui vont survenir dans les prochaines semaines. Par contre, comme je vous le disais, toutes ces questions-là pourront être posées, et des réponses pourront être apportées sur toutes ces questions de confiscation, de vente, etc., lorsque le procès sera terminé.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Montarville, il reste cinq minutes.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. Alors, je vais passer à un autre sujet, puisqu'on aura les réponses plus tard.

Je vais parler de la fameuse contribution pénale, la fameuse contribution pénale de 10 $ chargée sur chaque infraction pénale en vertu de cette loi de 2003. Bien, cette contribution-là, elle a fait tout un bond avec l'adoption du p.l. n° 28. Il n'y a pas grand monde qui l'a vu passer, là, mais ça se trouvait dans le p.l. n° 28. On sait que, depuis 2012, cette fameuse contribution pénale, qui était originellement de 10 $, est passée à 14 $, et, sur ce 14 $ là, il y avait un 10 $ qui allait aux victimes et un 4 $ pour le Fonds Accès Justice. Mais, avec le projet de loi n° 28 — je ne sais pas si les gens qui nous écoutent l'ont su — ce projet de loi qui a été adopté par le bâillon, eh bien, c'est venu modifier l'article 8.1 du Code de procédure pénale pour hausser la contribution, pour hausser la contribution à 20 $ lorsque le montant total de l'amende n'excède pas 100 $, pour hausser la contribution à 40 $ lorsque le montant de l'amende excède 100 $ sans dépasser 500 $, et finalement cette contribution pénale est haussée de... atteint, c'est-à-dire, 25 % du montant total de l'amende lorsque l'amende dépasse 500 $. Alors, ça, on n'a pas de problème avec ça.

Cependant, il y a quelque chose, dans le projet de loi n° 28, qui nous interpelle, c'est qu'il est prévu que, sur chaque contribution perçue, les premiers 10 $ sont portés au FAVAC et les 8 $ suivants sont portés au Fonds Accès Justice. Donc, je suppose que la balance, puisque maintenant ce sera un montant de 20 $, là, minimalement, qui peut être de plus, supérieur... il y a un 10 $ qui va au FAVAC, un 8 $ qui va au Fonds Accès Justice, donc le reste va dans le fonds généralisé, dans le fonds général, dans le fonds consolidé.

Mais ma question. Si c'est une contribution de 40 $, on demande au défendeur qui a été trouvé coupable de payer une contribution pénale de 40 $. Là, la subtilité, et corrigez-moi si je me trompe, c'est que c'est toujours 10 $ qui sera versé à l'aide aux victimes et 8 $ au Fonds d'Accès. Donc, les 22 $ excédentaires, où iront-ils? J'imagine qu'ils seront versés au fonds consolidé. Donc, je me pose une question, parce que c'est une augmentation appréciable, et on n'a pas de problème avec ça. Ce sont des revenus que cette modification permettra d'engranger, des revenus qui sont estimés à 21 millions, et ça, c'est selon la mise à jour économique présentée le 2 décembre dernier. Alors, ma question : Sur ces 21 millions, combien iront aux victimes et combien au Fonds d'Accès Justice? Alors, on a fait nos devoirs, on a fouillé dans le cahier budgétaire, et le cahier budgétaire des fonds spéciaux nous dit qu'un demi-million ira au Fonds Accès Justice et 2,4 millions au FAVAC. Alors, pourquoi si peu quand on fait un surplus, à cet égard, de 21 millions de plus? Et, malgré tout, le Fonds Accès Justice passe de 1 870 000 $ à 1 040 000 $, donc le Fonds Accès Justice diminue. On engrange plus de sommes avec ces modifications, ces modifications à la contribution pénale, ce qui est une bonne chose, mais le Fonds Accès Justice, lui, diminue. Ça, c'est dans les cahiers des fonds spéciaux.

Ma question : Pourquoi est-ce qu'on a diminué le Fonds Accès Justice?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre, il nous reste 1 min 30 s.

Mme Vallée : Oh! alors, vous allez me permettre de saluer Me Sauvé, du Barreau, qui est présent. Dans un premier temps, pour ce qui est de la balance, il y a une somme d'argent qui... 8 $ sont consacrés au Fonds Accès Justice, 10 $ sont portés au Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels, et effectivement la balance de la contribution pénale va au fonds consolidé. Et le fonds consolidé, je vous le rappelle, sert à financer les autres activités, et notamment l'IVAC, qui verra une hausse de 20 millions de... son budget haussé de 20 millions cette année. Alors, on en a parlé un peu plus tôt cet après-midi, mais il y a quand même d'autres besoins qui sont financés, et le fonds consolidé nous sert à financer ces autres aspects. Donc, oui, une portion au Fonds Accès Justice, oui, une portion au FAVAC, Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels, qui sert notamment à soutenir nos CAVAC, et une portion, oui, qui dans certains cas pourra être plus importante, au fonds consolidé. Mais le fonds consolidé sert également à financer des activités du ministère, et ça, c'est très important, des activités qui, année après année, ne cessent de croître... dont le budget ne cesse de croître.

Pour ce qui est de la balance de la question, on pourra y revenir.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète ce bloc d'échange. Et maintenant, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, à vous la parole.

Mme Massé : Oui. Merci, M. le...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...

Mme Massé : Merci, M. le Président. Bonsoir, tout le monde. Bonsoir, Mme la ministre, ses collègues.

Écoutez, moi, j'ai envie de discuter avec vous du plan de lutte à l'homophobie, dans les faits, ce plan de lutte qui, pour plusieurs personnes de ma circonscription, est fondamental, tant pour les groupes qui soutiennent les personnes gaies et lesbiennes, bisexuelles, trans que pour les personnes LGBT elles-mêmes. Alors, on sait que, dans le plan d'action concerté de lutte à l'homophobie, il y avait des mesures particulières, quatre mesures particulières, qui visaient de façon à soutenir, dans le fond, les groupes communautaires qui font le travail auprès des personnes LGBT. Juste donner un ordre d'idées. Par exemple, on le sait, que, depuis l'adoption de la politique de l'action communautaire autonome du Québec, les groupes LGBT sont, avec d'autres secteurs, mais de façon importante les groupes les moins bien financés au niveau de leur mission, c'est-à-dire leur rôle premier de ce pour quoi ils existent. Exemple, GRIS-Montréal, qui est un organisme qui est cité partout, qui est très actif en conscientisation, sensibilisation, seulement de 12 % à 14 % de leur budget annuel est récurrent. Le Conseil québécois, pour sa part, LGBT, on parle de 55 000 $ annuels récurrents.

Dans le plan de lutte, il y avait des sommes allouées, des montants complémentaires que les groupes où on avait reconnu leur sous-financement... on avait donc réservé un montant comme montant complémentaire pour venir soutenir ça. Alors, je ne sais pas si Mme la ministre pourrait nous partager quels seront ces montants pour 2015‑2016.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

• (20 h 30) •

Mme Vallée : Alors, M. le Président, je remercie la collègue pour sa question, puisque c'est un plan du portefeuille Justice, le plan de lutte à l'homophobie, qui est un élément très important, modeste en fait de ressources humaines mais qui accomplit des réalisations au quotidien et qui travaille et qui oeuvre auprès des groupes. J'ai eu l'opportunité, au cours de la dernière année, de rencontrer les groupes dont la collègue fait mention et qui font vraiment un travail fantastique.

Alors, simplement, je peux décliner, pour le bénéfice des parlementaires et de notre collègue, les sommes que nous entendons mettre à la disposition du Plan d'action gouvernemental de lutte contre l'homophobie. Donc, nous prévoyons, pour ce qui est des organismes communautaires, une augmentation des budgets. Donc, l'an dernier, les sommes étaient de 465 000 $ et passeront cette année à 480 000 $. Alors, ça, ce sont des sommes qui sont versées par le ministère de la Santé et des Services sociaux, par le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale via le SACAIS. Alors, on parle de 480 000 $. Il y aura également des sommes spécifiques qui seront dédiées au programme de lutte contre l'homophobie, donc il y a une somme de 200 000 $ qui sera prévue et des projets d'information et de sensibilisation pour 220 000 $. On soutient toujours la chaire de recherche pour une somme de 25 000 $, le Bureau de lutte contre l'homophobie dispose d'une somme de 200 000 $.

Et il y aura cette année, tel que nous nous sommes engagés, une campagne de sensibilisation. Je m'étais engagée à le faire. On a eu des efforts et on a fait des efforts substantiels l'an dernier, mais, pour moi, c'est un dossier qui me tient bien à coeur, et je le travaille. Puis je suis très fière de la collaboration que nous avons des collègues parlementaires dans ce dossier-là. C'est un dossier qui dépasse la partisanerie et c'est un enjeu de société auquel on doit aussi porter une attention toute particulière dans notre quête pour l'égalité de tous et de toutes.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée.

Mme Massé : Merci, Mme la ministre. Est-ce que vous avez dit le montant investi pour la campagne publicitaire ou ça m'a échappé?

Mme Vallée : Nous avons une somme qui est quand même substantielle, de 700 000 $ prévue pour ça. Alors, il y aura certainement... Et de quelle façon on le déploiera? On verra à le faire connaître, mais c'est quand même des bonnes sommes d'argent qui seront destinées à cette campagne-là pour en faire vraiment un outil important de lutte à l'homophobie et à la transphobie.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée.

Mme Massé : M. le Président, elle lit dans ma tête, je voulais savoir si effectivement la transphobie allait s'y retrouver. Je n'ai plus de question.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Massé : Non, c'est une blague, c'est une blague. Vous avez parlé du 200 000 $ et du 220 000 $ autour de la sensibilisation. Ce sera donc par appel de projets que vous allez procéder?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, dans le cadre des projets spécifiques, c'est un appel de projets, dans le programme de lutte contre l'homophobie.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Et la transphobie.

Mme Vallée : Et la transphobie, bien évidemment.

Mme Massé : ...de l'éducation, sensibilisation, etc. D'ailleurs, vous le savez comme moi, Mme la ministre, que la Coalition des familles homoparentales a développé, grâce à un investissement du ministère de l'Éducation, du Loisir et des Sports, un excellent programme de formation pour soutenir les professionnels au niveau de l'éducation, de l'enseignement, etc. J'espère que vous saurez reconnaître qu'un petit coup de pouce va leur être nécessaire, parce que maintenant on a le guide. Ils ont déjà formé plus de 10 000 professionnels de l'enseignement, mais là, tout ça, ils font ça de façon bénévole, alors j'espère que vous aurez une oreille attentive.

Mais j'aimerais attirer votre attention sur peut-être une sensibilisation que vous pourriez faire à votre collègue au niveau de la Santé. C'est-à-dire que l'Institut national de santé publique du Québec, depuis plusieurs années, donnait deux formations pour les professionnels de la santé, tant au niveau de la question de l'homophobie que de la transphobie, une qui s'appelle Pour une vision nouvelle de l'homosexualité, l'autre qui s'appelle Adapter nos interventions aux réalités homosexuelles. Les formateurs, formatrices sont reconnus partout à travers le Québec, je dirais, même à travers le monde. Et l'enjeu, c'est que, depuis le nouveau budget, l'Institut national... en fait, depuis 2014, l'Institut national exige 140 $ par tête de pipe pour que les professionnels de la santé et du système de santé — ça peut être les gens à l'accueil, etc. — puissent recevoir cette formation-là. On sait comment l'éducation et la formation sauvent des vies, on l'a vu dans une autre commission à laquelle on travaille ensemble sur la question des personnes trans. Je me demande si vous pourriez réussir à convaincre votre collègue au niveau de la Santé que ça pourrait être une bonne idée. Surtout si on s'en va vers une application des règlements au niveau des personnes trans, je pense que ce serait important que cette formation-là puisse se poursuivre à travers le temps. Alors, comment vous voyez ça, Mme la ministre?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, c'est un enjeu auquel on a été sensibilisés par la Coalition des familles homoparentales, d'ailleurs à qui nous avons apporté un soutien financier cette année, et c'est un enjeu qui me préoccupe. Je pense que notre collègue sait à quel point c'est un dossier, c'est un des volets du mandat de ministre de la Justice qui me tient bien à coeur. Et on a des discussions, on est à regarder tout ça. Je ne peux pas m'engager pour un collègue, mais je tiens simplement à réitérer que c'est un enjeu qui effectivement mérite qu'on y porte une attention toute particulière. Alors, j'y travaille et j'espère que nous pourrons arriver à trouver une voie, une piste de passage parce qu'il y a effectivement beaucoup de sensibilisation qui se doit d'être faite et tant dans l'ensemble de l'appareil gouvernemental, dans le domaine de la santé, dans le domaine de l'éducation.

Nous avons quand même encore de grands pas à faire pour vraiment arriver à atteindre cette égalité, je le dis et je le répète, mais j'y crois profondément. Et je remercie la collègue de soulever la question et de mettre un peu le spotlight, comme on dit en chinois, sur cet enjeu-là, qui est trop souvent mis de côté au profit d'autres enjeux qui sont plus frappants dans les médias.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, il vous reste cinq minutes.

Mme Massé : Bien, écoutez, c'est sûr, c'est les gens, comme je le disais tantôt, qui vivent dans mon comté, qui y travaillent, mais c'est surtout, à mon sens, une responsabilité collective qu'on a prise en proposant le premier plan de lutte pour 2011‑2016, de se dire que, dans le fond, il n'y avait rien d'anormal dans le fait d'être homosexuel ou d'être une personne trans et que ce qu'il fallait, c'était plutôt de changer notre rapport à ces personnes-là. Et bien sûr que la formation et l'éducation demeurent fondamentales, d'autant plus qu'on sait que, chez les jeunes LGBT entre 14 et 21 ans — c'est nos enfants, c'est vos petits-enfants — on parle d'un taux de suicide... des comportements, en fait, suicidaires sept fois plus élevés, et, si on va du côté des personnes trans, là on tape le 70 %, 80 %. Alors donc, c'est superimportant.

Et, en ce sens-là, vous savez bien que vous pouvez compter sur moi pour aussi essayer de convaincre votre collègue ministre de la Santé et ainsi que les autres collègues qui sont ici, parce que le département de santé... ou, en tout cas, le secteur de la santé, c'est souvent un secteur qui accueille les gens dans leur grande vulnérabilité, hein? Vous êtes une personne en transition, et dans la salle on vous dit : M. Manon Massé, c'est votre tour, puis vous êtes une femme et vous vous assumez comme femme, et là tout le village vient... toute la province vient de le comprendre; la province, j'exagère. C'est le genre d'impacts qui sont majeurs, où les gens qui ne se sentent pas acceptés... Et je pense que la formation de l'Institut national avait ça de majeur. D'une part, c'est qu'on a plusieurs années d'expérience, d'excellents formateurs et formatrices, mais surtout, si on en est arrivés aujourd'hui, je pense, collectivement à faire en sorte que les personnes qui ont une orientation sexuelle ou une identité de genre ou d'expression de genre qui ne va pas dans le sens de l'hétéronormativité, c'est parce qu'on a fait notre éducation, et tout ça.

Alors, je laisserais peut-être mes dernières minutes à Mme la ministre pour qu'elle nous dise... Le plan d'action se termine en 2016. Je vois que le Bureau de lutte sera encore soutenu dans la prochaine année, c'est nécessaire; la chaire de lutte à l'homophobie, incontournable, parce que depuis ce temps-là on a des chiffres, ce qu'on n'avait pas avant la création de la chaire. Alors, quelles sont vos perspectives pour le plan d'action?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En 2 min 30 s, Mme la ministre.

• (20 h 40) •

Mme Vallée : C'est inquiétant à quel point je souhaitais pouvoir aborder cette question-là.

Alors, M. le Président, évidemment, le plan de lutte à l'homophobie viendra à échéance en 2016. Alors, il est, pour moi... et c'est clair que mon objectif, c'est de le renouveler puis d'assurer une pérennité au plan de lutte à l'homophobie et à la transphobie, évidemment.

C'est un enjeu de société. Ce n'est pas un plan de lutte à la saveur du jour, c'est vraiment quelque chose qui se doit d'être soutenu et c'est des actions, parce que sans action gouvernementale on ne pourra pas venir à bout de briser les préjugés, qui, malheureusement, ont toujours cours. Et, M. le Président, là-dessus, notre collègue peut compter sur mon entière collaboration. Et, pour moi, et comme je le mentionnais tout à l'heure, le Bureau de lutte à l'homophobie, c'est une toute petite équipe, mais c'est une toute petite équipe qui fait un travail extraordinaire, qui est très, très présente auprès des groupes, auprès de la communauté. Je pense qu'il y a des bons liens d'établis, des bons liens de confiance, ce qui nous permet et ce qui permet aux ministres qui se sont succédé aussi de pouvoir poser des gestes, les bons gestes et poser les bonnes actions. Et donc notre intention, mon intention, c'est de renouveler ce plan-là, de le bonifier et évidemment d'en assurer la pérennité.

Et puis je profiterai des dernières minutes, M. le Président, pour sensibiliser tous les collègues parlementaires à l'effet que le 17 mai prochain sera la Journée internationale de lutte à l'homophobie et à la transphobie et sera une journée pour que tous puissions dire haut et fort à quel point il est important de mener cette lutte-là dans notre quête de l'égalité.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça met un terme à ce bloc d'échange. M. le député de Chomedey, à vous la parole.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Je pense que c'est un autre domaine qui nous fait réaliser que les questions de notre collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques... comment vaste est le portefeuille de la Justice et combien de sujets est-ce qu'on doit effectivement tenir compte dans l'administration de la justice.

Je veux revenir au poste de Directeur des poursuites criminelles et pénales, même si maintenant nous avons une directrice. Mais, à l'origine, parce qu'on va faire un petit peu d'histoire, le poste a été créé... ou la Direction des poursuites civiles et pénales origine d'une modernisation de l'État. Et on remonte à 2004. On en a beaucoup fait état, de la réingénierie ou de la modernisation de l'État, et c'est un premier rapport de mai 2004 qui recentrait différents éléments et pour améliorer le service au citoyen puis améliorer l'efficience aussi. Il y avait des discussions, il y a eu un mandat qui a été donné à un... on appelait ça un substitut du Procureur général à l'époque. Là, ça nous ramène probablement à la Commission des droits de la personne et nos personnes âgées, où j'ai fait une confidence tantôt, mais tout ça nous a amenés à la production d'un rapport en février 2005 et au dépôt du projet de loi n° 109 le 11 mai 2005, qui s'appelait la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Et j'en profite pour souligner, à ce stage-ci, notre ancien collègue Yvon Marcoux, qui a piloté ce projet de loi, qui a été entendu en consultations particulières, M. le Président, devinez où?, devant nos nombreux téléspectateurs de la Commission des institutions. Et je pense que tous les gens qui sont venus à la Commission des institutions ont souligné que la qualité du projet de loi n° 109, à l'époque, c'était le souci de satisfaire aux exigences de la démocratie mais particulièrement en termes de transparence puis d'imputabilité. Et, ceux qui y étaient dans ces années-là... peut-être peu nombreux, là, mais, ceux qui y étaient à ces années-là, le projet de loi garantissait que le directeur puisse accomplir... le directeur, disons, puis je vais revenir à la directrice tantôt, Mme la ministre, là, mais le directeur, à l'époque, parce qu'il n'était pas nommé... et que le directeur puisse accomplir ses fonctions de poursuivant qui lui sont dévolues à l'article 13 de la loi de façon indépendante. Et j'insiste parce que souvent on entend, on lit dans nos journaux... je ne dirais pas «fréquemment», mais on lit dans nos journaux, de façon régulière, des commentaires ou certaines nouvelles qui touchent le DPCP ou on a certaines questions à la période des questions qui peuvent... je ne dirais pas «remettre en doute», mais qui peuvent laisser penser à une dépendance du DPCP du ministère de la Justice, alors que c'est tout le contraire.

Le projet de loi n° 109, on voulait que le directeur puisse accomplir ses fonctions de façon indépendante, à l'écart de toute influence étrangère au concept de justice et d'intérêt public, toujours afin de renforcer la confiance du public, un peu comme la Commission des droits de la personne. Et j'aurai sûrement une question, avec le consentement de M. le Président, pour Me Murphy, profitant de sa présence ce soir. C'est une institution qui est très méconnue, dans le sens que, oui, on en entend parler, mais je le sais parce que j'ai eu la chance, à l'interne, dans une autre vie, d'être quotidiennement en présence des gens qui font un travail extraordinaire dans cette institution-là, mais je vais vouloir que vous nous informiez, Me Murphy, de comment ça se décline, le DPCP, provincialement. Je sais qu'il y a des équipes spécialisées, on voit des procureurs partout. J'aimerais ça que vous nous dressiez un tableau ou que vous preniez quelques minutes pour nous décliner, dans la province, le directeur des poursuites... la directrice, en tout cas, le bureau du DPCP, comment ça se décline dans la province, de façon à, comme je le mentionnais à M. Prémont tantôt, rassurer les citoyens, faire en sorte que les citoyens sachent et réalisent qu'il y a des gens de votre bureau dans toutes les régions du Québec.

Et je vais vous poser la question à... je ne sais pas si c'est 100 $, là, mais là je regardais les augmentations du projet de loi n° 28, peut-être que ça s'est rendu à 110 $ : Que vous nous réitériez que les objectifs du projet de loi n° 109 qui étaient d'assurer une indépendance de votre bureau versus le politique, c'est encore là. Et, que vous rassuriez la population sur cette indépendance-là, je pense que c'est très important. J'en parlais avant la pause de ce soir, comment il est important que la justice, qui est notre tasse de thé, à la majorité des députés... comment c'est important que la justice soit appliquée de façon, autant que possible, uniforme pour tous les citoyens du Québec.

Donc, ma première question, M. le Président, pour Me Murphy, avec la permission de la ministre : Que vous nous décliniez le bureau de la direction des poursuites criminelles et pénales. Et ma deuxième question : Que vous nous donniez votre point de vue sur l'indépendance, qui est très importante, qui était la pensée en arrière du projet de loi n° 109. Est-ce que c'est encore comme ça aujourd'hui, malgré tout ce que c'est qu'on peut entendre et malgré... Parce que, vous savez, les bons coups, on ne les voit pas dans le journal. Les moins bons coups, vous les voyez en grosse page. Ça fait que je pense que c'est important que les gens qui nous écoutent ce soir ou qui nous écouteront cette nuit avant d'aller dormir soient rassurés et qu'on réponde à leurs préoccupations.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre, est-ce que vous souhaitez intervenir ou vous souhaitez céder la parole à Mme la directrice?

• (20 h 50) •

Mme Vallée : Bien, M. le Président, avec votre permission, je céderais la parole à Me Murphy, puisque les préoccupations soulevées par notre collègue sont vraiment quant à l'application de la loi créant le Directeur des poursuites criminelles et pénales et de l'indépendance qui était à la base de tout ça. Alors, je permettrais à Me Murphy de répondre aux questions de notre collègue.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Y a-t-il consentement? Alors, Me Murphy.

Mme Murphy (Annick) : Merci. Alors, je répondrais à la première partie de votre question en vous décrivant un peu... bien, en fait, peut-être avec du détail, là, qu'est-ce que le Directeur des poursuites criminelles et pénales, où sommes-nous, que faisons-nous, etc.

Alors, nous avons 550 avocats, donc 550 procureurs aux poursuites criminelles et pénales, qui sont répartis sur l'ensemble du territoire du Québec, nous sommes présents, donc, dans tous les palais de justice du Québec, et je vous dirais que nous avons environ 50 points de service où se retrouvent des procureurs aux poursuites criminelles et pénales, avec le personnel évidemment en support aux procureurs. Donc, voilà de façon générale. Maintenant, de façon plus particulière, nous avons ce que nous appelons sept bureaux régionaux. Nos bureaux régionaux sont en fait des régions, comme par exemple le Centre-du-Québec, où on couvre Trois-Rivières, Joliette, etc. Donc, nous avons sept bureaux régionaux où les procureurs se trouvent, en réalité. Donc, on peut énumérer, là : le Centre-du-Québec, comme je le disais tantôt; le Sud du Québec; Montréal est pour nous une région; Québec est pour nous une région; le Nord du Québec; l'Est; et l'Ouest. Donc, ces procureurs qui se retrouvent dans ces bureaux-là font les poursuites criminelles et pénales du Code criminel, de la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents et du Code de procédure pénale également.

Nous avons aussi des bureaux spécialisés qui... Nous avons donc le Bureau de lutte au crime organisé, le bureau, physiquement, est situé à Montréal; le Bureau de lutte aux produits de la criminalité, qui est aussi physiquement situé à Montréal. Nous avons le Bureau de lutte à la corruption et à la malversation, qui est aussi situé à Montréal, et nous avons maintenant le Bureau des affaires de la jeunesse, qui est un bureau à gouvernance unifiée, qui réunit l'ensemble des procureurs en matière jeunesse à travers le Québec, et nous avons également un bureau de gouvernance unifiée en matière pénale. Donc, c'est la structure, si vous voulez, du Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Bon an, mal an, en matière criminelle, nous engageons 125 000 poursuites en matière criminelle, et, en matière pénale, les derniers chiffres que nous avons eus, de mémoire, là, c'est 650 000 constats d'infraction, environ. Donc, j'oubliais — et là mes confrères m'en auraient voulu — de vous parler du Bureau de service-conseil, qui est un bureau qui réunit 15 avocats qui travaillent de 16 h 30 le soir jusqu'au lendemain matin, 8 h 30, et qui répondent aux policiers, donc, et qui, donc, donnent du service aux policiers, service-conseil aux policiers. Donc, en tout temps, si on veut, donc 24 heures sur 24, le Directeur des poursuites criminelles et pénales est présent et prêt à donner des conseils, évidemment, aux policiers, donc, 365 jours par année également.

Maintenant, je vous... bien, vous m'avez posé une deuxième question, qui est l'indépendance du Directeur des poursuites criminelles et pénales. Est-ce que c'est toujours d'actualité, hein? L'indépendance du Directeur des poursuites criminelles et pénales, c'est toujours d'actualité. On peut affirmer que le directeur a été créé pour renforcer la confiance du public dans le système de justice pénale, et c'est toujours vrai aujourd'hui.

La loi sur le directeur offre plusieurs garanties d'indépendance, là, et je pourrais vous les énumérer : comme le processus de nomination des dirigeants, qui est un processus transparent; l'inamovibilité des dirigeants — il y a deux dirigeants au Directeur des poursuites criminelles et pénales, donc la directrice et le directeur adjoint, qui vient tout juste d'être nommé, là — donc... donc l'inamovibilité, excusez-moi; l'indépendance financière de ces deux dirigeants; la prestation de serment; l'exclusivité des fonctions — évidemment, on ne peut pas être membre d'un parti politique, on ne peut pas non plus avoir des activités politiques, on ne peut pas contribuer non plus à un parti politique; le directeur, la directrice, donc, peut nommer son personnel, ses procureurs, c'est aussi une garantie d'indépendance importante; mais surtout toutes les orientations, tous les avis, toutes les instructions, toutes les mesures qui peuvent être prises par la Procureur général doivent être publiées dans la Gazette officielle pour assurer la transparence des décisions. Et je pense que je peux affirmer aujourd'hui... pas «je pense», j'affirme aujourd'hui qu'il n'y a, jusqu'à ce jour, aucun Procureur général qui a exercé ce pouvoir-là, de prendre en charge un dossier ou d'intervenir par une instruction ou un avis au Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Donc, vous avez là la démonstration que le directeur est indépendant, agit, exerce ses fonctions de manière indépendante.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : J'aurai deux petites questions complémentaires avant de céder la parole à mes collègues. Vous avez sept bureaux régionaux. J'ai un collègue à ma droite qui est le député d'Ungava, qui est en communauté autochtone. Rassurez-nous et rassurez-le que, sans avoir de bureaux régionaux, là, vous avez une préoccupation...

Mme Murphy (Annick) : Nous avons une très grande préoccupation, je suis désolée de ne pas l'avoir nommée tantôt en détail. C'est que notre bureau... nous, notre bureau régional du Nord assure, donc, la cour itinérante, donc il y a des procureurs qui voyagent et qui se rendent de façon régulière dans les différentes cours itinérantes, si on veut, là. Alors, oui, nous sommes présents. Et nous y sommes depuis déjà longtemps et nous allons continuer d'y être, bien sûr, là.

M. Ouellette : Ma dernière question, M. le Président, pour Mme Murphy. Vous nous dites que vous intervenez comme poursuivant dans les affaires criminelles et dans les affaires pénales. Je regardais dans la loi, dans les... l'article 13 vous donne aussi l'opportunité d'intervenir dans une affaire où vous n'êtes pas partie si l'intérêt de la justice l'exige. Et j'ai frais en mémoire où le bureau est intervenu dans des poursuites en destitution au niveau municipal. Ça a fait les manchettes dernièrement, là. Je pense à Lacolle, entre autres, où d'office le bureau était intervenu. C'est le genre d'intervention qui est couvert par cette partie de l'article 13?

Mme Murphy (Annick) : Je ne suis pas certaine, excusez-moi, là, il faudrait que...

(Consultation)

Mme Murphy (Annick) : ...dans l'intérêt de la justice, là, mais, de façon particulière...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, M. le Président, dans les dossiers auxquels fait référence notre collègue, c'est la Procureur général qui est intervenue en matière municipale. Alors, c'était dans le cadre des fonctions de la Procureur général, et donc c'était un dossier... Il y avait un certain nombre d'enquêtes en plan, mais c'est la Procureur général qui est intervenue dans une procédure de nature civile.

M. Ouellette : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour vous, M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Oui, ça complète.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste un peu moins de trois minutes. M. le député de La Prairie.

M. Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. Pour faire un peu du millage sur... ou du kilométrage, je devrais dire, sur ce que mon collègue de Chomedey a soulevé en termes de transparence et d'imputabilité... Vous savez, Me Murphy, que tout organisme doit produire, évidemment, un plan stratégique et un rapport annuel de gestion.

Le DPCP a été créé en mars 2007, et son premier plan stratégique a été déposé le 1er juin 2010, un plan stratégique qui couvrait 2010‑2014, qui plaçait les interventions du DPCP sur trois enjeux, alors le respect et la protection des victimes et des témoins, l'efficacité des interventions du... du DPCP, pardon, à l'égard des phénomènes de criminalité émergente et finalement le fonctionnement et le positionnement du DPCP dans le système de justice criminelle et pénale québécois.

Sommairement, et peut-être qu'elle pourra donner sa pleine réponse — ça sera enlevé sur notre prochain bloc de temps — j'aimerais entendre si vous êtes... Par rapport à votre rapport annuel de gestion, êtes-vous satisfaite des résultats du premier plan stratégique que l'organisme a eu? Et est-ce que les travaux du prochain plan sont entamés? Parce que je ne voudrais pas voir un délai encore si long entre le plan 2010‑2014 et le prochain plan, qui, en principe, devrait être 2015‑2019.

• (21 heures) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je comprends. Me Murphy, il reste 1 min 30 s.

Mme Murphy (Annick) : Oui. Je vais faire très rapide. Oui, notre plan stratégique est terminé et présenté, c'est-à-dire notre second plan stratégique, et j'irai vite sur les éléments que nous voulons favoriser dans notre plan stratégique.

Notre préoccupation première, au Directeur des poursuites criminelles et pénales, c'est ce qui nous a inspirés dans le premier plan stratégique, qui nous inspire encore, c'est le traitement qu'on réserve aux victimes. Et, outre de continuer, là, de former nos procureurs, outre de continuer de s'attarder, de façon particulière, aux victimes vulnérables, nous allons tenter de présenter un programme qui permettrait aux procureurs, parce que ce n'est pas le cas au moment où on se parle, de rencontrer l'ensemble des victimes et des témoins avant chacun des procès. Alors donc, nous pensons être en mesure d'arriver à ce but, qui m'est cher, disons, dans les deux prochaines années. Toujours en regard des victimes, bon, comme vous le savez, nous avons un ensemble de directives, au Directeur des poursuites criminelles et pénales, et nous allons créer une directive pour les procureurs qui va englober l'ensemble du traitement que les procureurs devraient réserver aux victimes, ce qui n'est pas le cas au moment où on se parle.

Très rapidement, il y a deux autres choses dont je voudrais parler. Il est temps pour le Directeur des poursuites criminelles et pénales d'élaborer ce que nous, on a appelé la gestion électronique de la preuve. Les corps policiers nous en parlent depuis longtemps. Nous allons travailler en collaboration avec eux, avec Justice et nous allons développer la gestion, donc, électronique de la preuve et nous allons évidemment, dans ce contexte-là, associer nos partenaires parce qu'on devra le faire ensemble dans le système de justice. Et ça, bien ça pourra servir évidemment les intérêts pas seulement du DPCP, mais de l'ensemble du système de justice pénale. Nous allons également continuer — évidemment, la formation continue, c'est essentiel chez nous — le programme de mentorat que nous avons mis sur pied, que nous sommes en train d'étendre dans tous les districts du Québec. Et, ce qui me tient également à coeur, et je terminerais là-dessus, nous voulons améliorer la visibilité du Directeur des poursuites criminelles et pénales, nous voulons mieux expliquer aux citoyens non seulement le rôle du Directeur des poursuites criminelles et pénales, le rôle des procureurs, mais aussi expliquer, dans certaines circonstances particulières, les décisions que nous prenons, particulièrement les décisions que nous refusons en matière d'enquêtes indépendantes. Ça peut vous dire quelque chose, j'imagine. Et c'est un constat que nous faisions avant, évidemment, les événements de l'automne dernier et sur lequel nous nous sommes effectivement penchés d'une façon évidemment importante.

Nous allons donc déposer, dans les prochaines semaines, à l'assemblée des chefs, donc nos procureurs en chef, notre plan, notre stratégie de communication. Nous avons embauché un spécialiste en matière de communication. Nous allons utiliser, sans doute, tout ce qu'on peut trouver à notre disposition pour communiquer avec le public, avec les citoyens pour que les citoyens comprennent le travail, parce que, s'il y a quelque chose qui est important, pour nous, c'est de s'assurer que le citoyen comprenne ce qui se passe, sans peut-être évidemment en connaître tous les détails, mais qu'il comprenne, qu'il soit en mesure d'évaluer les décisions que nous avons prises.

Donc, c'est un gros travail, c'est un travail qui nous enchante, et nous allons, donc, faire ce travail-là dans les prochains mois et les prochaines années.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, Me Murphy. Évidemment, là, je vous ai laissée... parce que c'est une réponse importante et intéressante, mais le temps vous sera amputé au dernier bloc du côté du gouvernement. M. le député de Lac-Saint-Jean, à vous la parole pour un dernier bloc de 15 minutes.

M. Cloutier : Je vous remercie, M. le Président. Je vais poursuivre dans la même lignée, concernant le drame, là, le décès d'un enfant tué lors d'une filature. Vous avez ordonné la révision de l'enquête. Je me demandais : En vertu de quel article vous êtes intervenue? En vertu de quel pouvoir, Mme la ministre, vous êtes intervenue?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, dans ce dossier-là, je vais permettre à Me Murphy de prendre la réponse, puisqu'en fait nous avons... Dans ce dossier-là, il a été convenu de confier le mandat à un groupe indépendant. Alors, ce n'est pas une intervention de la ministre, ce n'est pas une intervention de ma part, mais c'est bien, dans la foulée de tout ça, une décision qui a été prise de confier le mandat à un comité d'experts.

Je vais permettre à Me Murphy de poursuivre.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : S'il n'y a pas de consentement... M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Si vous me permettez peut-être de poursuivre, avant, la discussion... Je veux juste essayer de comprendre, là. Qui a pris la décision de la révision de l'enquête?

Mme Vallée : La décision a été prise par Me Murphy de confier la révision du dossier à un comité indépendant.

M. Cloutier : Est-ce que vous vous êtes parlé?

Mme Vallée : Il y a eu des échanges, il y a des échanges. La loi prévoit... et la Loi sur le DPCP nous permet d'échanger sur les enjeux. Mais je n'ai d'aucune façon été saisie du dossier en tant que tel et je ne me suis immiscée d'aucune façon dans le dossier. Il est important de prendre une distance. Oui, nous avons avisé — je vois le visage du collègue — mais la décision a été prise par Me Murphy. Nous avons communiqué cette décision-là en novembre dernier. Il était important, je pense, dans la foulée, de permettre une révision de la part d'un comité indépendant, mais... Voilà.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Mais pourquoi? Vous auriez pu invoquer l'article 24 si vous l'aviez souhaité.

Mme Vallée : Par l'article 24, de la façon dont l'article 24 est rédigé, c'est vraiment une appropriation du dossier, c'est-à-dire que, lorsque la ministre ou le ministre intervient en vertu de 24, il y a une appropriation du dossier.

Une voix : ...

Mme Vallée : 23, oui. Excusez-moi. On parle de 24. C'est l'article 23 qui amène une appropriation du dossier, et il n'était pas question d'utiliser les pouvoirs de 23, et de s'approprier un dossier, et, à ce moment-là, de venir porter atteinte à l'indépendance du DPCP. Alors, dans la foulée des différents événements, il a été convenu de verser ou de confier à un comité indépendant, à des procureurs indépendants l'analyse du dossier, l'évaluation du dossier.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Est-ce que ça s'est fait à votre suggestion?

Mme Vallée : Il y a eu des échanges avec la procureure, avec Me Murphy. Il y a eu des échanges entre également Me Drouin et Me Murphy, et la décision a été prise. Me Murphy a décidé de confier... C'est une suggestion, en fait, qui émane de Me Murphy et du bureau de l'équipe de Me Murphy.

M. Cloutier : Alors, ce n'est pas une suggestion de votre ministère.

Mme Vallée : Ce n'est pas une suggestion. Il y a eu des échanges, oui, puisque, je pense... Rappelons-nous les faits, rappelons-nous à quel point différents éléments nouveaux avaient été portés à l'attention du public. Et, à la lumière de tout ça, Me Murphy a suggéré de confier à un comité indépendant ce qui a été rendu public par la suite.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

• (21 h 10) •

M. Cloutier : Je vais vous lire le premier paragraphe du communiqué de votre ministère :

«À la suggestion de la ministre de la Justice[...], le DPCP a accepté de confier l'évaluation du dossier concernant la collision mortelle du 13 février dernier à des procureurs indépendants.»

Mme Vallée : Il y a eu des échanges, mais Me Murphy nous a suggéré la composition du comité indépendant.

M. Cloutier : Est-ce que c'était écrit dans le communiqué du ministère, c'était votre suggestion?

Mme Vallée : Oui. Il y a eu des échanges... M. le Président, il y a eu des échanges entre nous sur la façon de faire les choses, mais il était évidemment important de ne pas utiliser les pouvoirs confiés par l'article 23, donc de ne pas s'immiscer dans le dossier, et de permettre une analyse complètement indépendante de ce dossier-là, qui avait fait couler beaucoup d'encre au moment du 24 novembre dernier.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Mme la ministre...

Mme Vallée : Je pense qu'il est important de mentionner que les intervenants étaient... Lors de nos échanges, c'est d'un commun accord, en fait, que cette suggestion-là a été retenue, cette solution a été retenue. Voilà.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Bien, M. le Président, moi, je pense qu'il y a une divergence d'interprétations, à notre point de vue, dans l'application des règles puis la capacité d'intervention de la ministre de la Justice. Mais, quand je lis votre communiqué, là, vous écrivez noir sur blanc qu'«afin de préserver la crédibilité et l'indépendance[...], je lui ai suggéré de confier à des procureurs indépendants». Ça m'apparaît assez clair. Puis, comme par hasard, tout ça s'est fait de manière concomitante. Ça fait que ce que j'essaie de vous dire, c'est qu'il y a clairement eu une intervention. À mon avis, vous avez le pouvoir d'intervenir. Je l'ai souvent réclamé en Chambre. Il y a eu des débats ici, en commission parlementaire. Mais, si on doit clarifier le rôle du Procureur général du Québec, qu'on le fasse. Et, de toute évidence, la discussion que nous avons met le doigt sur les zones grises, et il y a des zones grises dans ce dossier-là, ça m'apparaît évident.

Mme Vallée : ...M. le Président, oui, en effet, ce dossier-là a soulevé des zones grises, et c'est d'ailleurs pourquoi une réflexion s'est amorcée aussi avec l'équipe. Dans la foulée de ce dossier-là, une réflexion s'est amorcée avec l'équipe de Me Murphy. Je me rappelle, le collègue a demandé l'intervention dans bien des dossiers. En fait, l'indépendance du DPCP en aurait pris pour son rhume s'il avait fallu intervenir chaque fois que le collègue le commandait. Mais il y avait, M. le Président, une... Ce dossier a soulevé un certain nombre de préoccupations, et nous avons lancé un chantier et nous allons sous peu, aussi, soumettre l'évaluation de ce chantier-là. Alors, c'est un dossier qui était fort préoccupant au moment où nous avons soumis, de façon exceptionnelle, le dossier à des procureurs indépendants.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : J'avoue, Mme la ministre, que je suis assez fier du travail de l'opposition officielle dans ce dossier bien précis là et je pense que vous avez pris une bonne décision aussi en suggérant, comme vous l'avez fait, au DPCP de revoir, et j'espère que le rapport sera rendu avant l'été pour que nous puissions...

Je vais poursuivre avec un autre dossier où je vous ai effectivement demandé d'intervenir également. Dans le dossier de l'ex-chef de police de Lévis, Jean-François Roy, il y a, là aussi, clairement eu du cafouillage. On ne souhaite pas que cette situation-là se reproduise. Est-ce qu'il y a eu une enquête interne pour nous assurer que les délais impartis dans ce dossier-là ne se reproduisent pas, considérant qu'en plus ça concernait un policier? Et on sait bien que ça nécessite un doigté particulier.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Parlant de doigté particulier, il s'agit d'un dossier qui est actuellement pendant devant les tribunaux, alors vous comprendrez, M. le Président, que nous ne commenterons d'aucune façon, puisque Me Roy a entrepris des procédures judiciaires de nature civile.

M. Cloutier : Très bien. Mais est-ce que la ministre s'est au moins assurée que de tels délais... qu'il y a eu une réflexion à l'interne pour ne pas que ça se reproduise?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, le dossier est actuellement pendant devant les tribunaux, alors vous comprendrez qu'en vertu de l'article 35 de notre règlement je ne peux répondre d'aucune façon. Ni moi ni Me Murphy ne pouvons répondre, devant cette commission, des circonstances entourant le dossier, puisqu'il y a à peine... jours une procédure a été entreprise au dossier. Alors, malheureusement, je suis liée par notre règlement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste 4 min 30 s. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : On va parler de l'opération SharQc, un travail exceptionnel qui a été fait par les policiers. Par contre, sur le plan judiciaire, je pense que c'est hautement problématique, de toute évidence. Il y a de sérieuses lacunes, il y a des délais importants, il y a eu des réductions de preuve... pardon, d'accusation. Il y a des négociations qui ont eu lieu. Qu'est-ce que la ministre va faire pour assurer que les procès se déroulent dans des délais raisonnables et que le système judiciaire ait toutes les ressources appropriées pour mener à terme les procès?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, encore une fois, dans SharQc — je sais que nous avons eu l'opportunité un peu plus tôt cet après-midi d'en parler abondamment lors des questionnements de la collègue de Montarville — je tiens simplement à rappeler qu'à la base il y avait 156 accusés. On a 64 accusés qui avaient plaidé coupables avant mars; le 16 mars 2016... 2015, pardon, 18 accusés ont plaidé coupables. Donc, il y a plus de 80 des 156 accusés qui ont plaidé coupables à ce jour. Maintenant, pour ce qui est de la suite des choses, vous comprendrez, M. le Président, qu'il y a actuellement 27 dossiers qui sont toujours pendants, et je tiens à rappeler au collègue que 370 requêtes ont été présentées dans ce dossier, un dossier fort complexe.

Pour ce qui est des commentaires, vous comprendrez que, compte tenu que 27 dossiers sont toujours pendants, il serait tout à fait inapproprié de ma part de commenter davantage ce dossier.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Cloutier : Est-ce que la ministre peut au moins nous assurer que les tribunaux ont toutes les ressources nécessaires pour s'assurer que les procès vont finalement avoir lieu?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Oui.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député.

M. Cloutier : Donc, il n'y a pas de problème, les mégaprocès au Québec, les ressources sont au rendez-vous, qu'est-ce qu'on vient de vivre, ça ne se reproduira jamais, puis on a réussi à mettre en oeuvre les conditions nécessaires pour mener à terme des procès aussi importants?

Mme Vallée : M. le Président, j'invite notre collègue à la prudence. Le dossier n'est pas clos. Il serait très dommage que l'exercice des crédits puisse être utilisé pour faire déraper un dossier qui est toujours en cours.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean, il reste 1 min 30 s.

M. Cloutier : Oui, je veux bien, mais, M. le Président, notre objectif, c'est justement de mener à terme la justice, et, quand les...

Mme Vallée : On peut le faire en ne citant pas des dossiers qui sont pendants.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean a la parole, c'est au député de Lac-Saint-Jean de compléter.

M. Cloutier : C'est parce qu'on parle des mégaprocès, Mme la ministre, il n'y en a pas 50, des mégaprocès, là, mais effectivement... Puis, nous, ce qu'on souhaite, là, c'est qu'on se rende à terme. Il y a un travail exceptionnel qui a été fait. Il y a un travail de longue haleine. Maintenant, il n'y a pas juste l'opposition officielle, là, qui se préoccupe de la capacité à juger avec toutes les conditions nécessaires et de se donner les ressources pour s'assurer de mener à terme un procès aussi important. Il y a de sérieuses questions qui se posent, et les questions sont légitimes, et vous savez que ça ne date pas d'hier.

Il y a plusieurs enjeux qui ont été soulevés par le passé, et ce que je vous demande, c'est : Est-ce que les ressources sont appropriées pour nous assurer que justice va être rendue?

• (21 h 20) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : On va conclure ce bloc d'intervention. M. le député de Lac-Saint-Jean, je pense que vous aviez un point que vous vouliez demander à la ministre avant de terminer.

M. Cloutier : ...M. le Président. Alors, j'ai également une demande. On me dit que vous vous êtes engagée également à déposer aux crédits Justice les réponses aux engagements pris aux crédits Condition féminine quant au suivi du plan gouvernemental 2012‑2017 en matière de violence conjugale. On voulait simplement s'assurer qu'effectivement les réponses allaient être déposées comme prévu.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, ça complète ce bloc. Je ne sais pas si vous souhaitez répondre, Mme la ministre, ou si un député du côté du gouvernement...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Pardon?

Mme Vallée : Bien, en fait...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre.

Mme Vallée : ...je peux toujours prendre une partie de notre temps pour déposer l'information qui avait été demandée par la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Donc, pour ce qui est des formations en matière de violence conjugale, il y a 23 procureurs qui ont été formés afin de mieux intervenir en violence conjugale et créer des ponts entre le social et le judiciaire; il y a 58 procureurs formés en matière de violence conjugale; 10 procureurs formés afin de mieux intervenir en violence conjugale et créer des ponts entre le social et le judiciaire; mieux intervenir en violence conjugale, créer des ponts entre le social et le judiciaire, également, 20 procureurs formés; et, dans une autre formation, 22. Donc, un total, de 133 procureurs formés en matière de violence conjugale entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2015, donc 133 procureurs. Nous avons également une formation, entre le 1er avril 2013 et le 31 mars 2014, où 60 procureurs ont été formés et des formations connexes en matière de violence conjugale : 500 procureurs ont été formés afin de mieux comprendre l'expérience de victimisation des personnes victimes, s'outiller et réfléchir ensemble aux moyens pour faciliter leur passage dans le système judiciaire. Alors, un grand total de 2 648 heures par personne et 378 jours, par personne, de formation offerte aux ressources, depuis deux ans, en matière de violence conjugale — pour les deux dernières années.

Et nous avons également des formations en agression sexuelle, 59 procureurs de formés entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2015, dont 29 formés spécifiquement à un dossier qui interpelle particulièrement la députée d'Hochelaga-Maisonneuve : la traite des personnes, proxénétisme et exploitation sexuelle; 19 procureurs formés en matière d'agression sexuelle envers les enfants; 11 procureurs formés en matière d'exploitation sexuelle et nouvelles technologies; des formations connexes en matière d'agression sexuelle entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2015; 32 procureurs formés : exposition au VIH, aspects juridiques et scientifiques; 55 procureurs formés au niveau de la déclaration des délinquants dangereux à contrôler

Et nous avons également, entre le 1er avril 2013 et le 31 mars 2014, 42 procureurs de formés sur la traite des personnes, proxénétisme, exploitation; 30 procureurs en matière d'exploitation sexuelle et nouvelles technologies; 61 en matière d'infractions d'ordre sexuel; et, infractions d'ordre sexuel et maltraitance, formation spécialisée, 44. Donc, entre le 1er avril 2013 et le 31 mars 2014, 177 procureurs formés, auxquels s'ajoutent les formations de 2014‑2015.

Alors, tout ça pour dire, M. le Président, qu'il y a, au sein de l'équipe de Me Murphy, une préoccupation très présente quant à l'importance d'offrir une formation aux procureurs qui sont appelés à travailler de près avec les dossiers de violence conjugale et en matière d'agression sexuelle. C'est une préoccupation très présente dans l'équipe de la Directrice des poursuites criminelles et pénales.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la ministre. M. le député d'Ungava, il reste huit minutes de débat.

M. Boucher : Vous avez devancé ma question, M. le Président. On en discutera après, M. le Président. Alors, Mme la ministre, encore huit minutes. Je vois votre cou et votre visage tirés. Bon courage, ça se termine bientôt.

Tantôt, Me Murphy m'a ouvert une porte à une des questions de mon collègue ici, à côté de moi, à ma gauche, concernant la justice au Nord, puis, quand je parle du Nord, je parle du vrai Nord, du Nunavik. Bon, là-bas, on a un procureur de la couronne à temps plein qui habite Kuujjuaq en permanence, et puis les autres, bon, c'est des gens qui voyagent d'Amos. C'est... comment dire, c'est une autre façon de pratiquer, une autre façon de voir les choses où, bon, c'est des semaines de cour qui sont entrecoupées. Tout dépendant des périodes de l'année, ça peut être une fois par mois, deux fois par mois — ça dépend des villages — où l'avion voyage avec le juge, le procureur de la couronne, le procureur de la défense, les greffiers, les sténos, tout le personnel de cour, les constables spéciaux et même les détenus. Donc, ça doit faire un vol un petit peu particulier, il doit y avoir de la turbulence de temps en temps, puis ce n'est sûrement pas seulement à cause des vents. Donc, c'est la météo qui décide, hein, au Nunavik; on sait quand on part, mais, souvent, on ne sait pas quand on revient. Donc, c'est une autre façon, des installations qui, souvent, sont... ce n'est pas des palais de justice ultramodernes avec tout le système de vidéo et tout ce qu'on peut imaginer. On se retrouve dans des salles communautaires, dans des gymnases d'école. Tout ça doit être traduit, parce que, bien souvent, les prévenus ne parlent pas très bien l'anglais, pas du tout le français, et c'est de s'assurer que les gens, les accusés autant que les témoins, savent vraiment de quoi il est question.

L'inuktitut est une langue fort complexe que je ne maîtrise, malheureusement, pas encore après sept ans de présence au Nunavik et puis c'est une langue où on fait souvent référence plus à des concepts qu'à des mots. On peut traduire l'anglais au français ou l'anglais et l'espagnol, bon, les mots sont là, mais, souvent, l'inuktitut, c'est des idées, c'est des concepts, il y a des choses qui sont intraduisibles ou qui doivent être traduites avec un laïus. Un exemple, si je dis à quelqu'un : Si tu ne paies pas tes dettes, ton crédit va être mauvais, tout le monde comprend ça. Mais, en inuktitut, c'est un concept qui n'existe pas. C'est un petit laïus, là, de cinq minutes pour expliquer que le banquier n'aura plus confiance en toi, donc il ne voudra plus te prêter de l'argent, donc, quand tu vas vouloir acheter quelque chose, tu ne seras plus capable d'emprunter, puis etc. Donc, c'est des particularités assez spéciales, souvent, des rôles de cour très engorgés puis, souvent, pour des crimes relativement mineurs, mais quand même, quand vous arrivez dans un village, là, de 350 personnes puis il y en a 70, 80, 100 dossiers au rôle, on peut dire que c'est beaucoup de travail pour les gens en question. Donc, c'est un autre monde, c'est quelque chose qui est assez particulier à vivre et à voir dans ce domaine-là.

Alors, vous parliez tantôt, Me Murphy, des programmes de mentorat. Bon, souvent, lorsqu'un avocat termine, bon, son bac en droit, son Barreau, la première chose qu'il s'aperçoit, c'est que, dans le fond, malgré toutes ces études-là, honnêtement, on ne sait pas grand-chose. Pas que le Barreau puis que les universités forment des incompétents, loin de là. On a toute la théorie, on a toutes les belles idées, mais on n'a pas les réflexes, on n'a pas le...

Une voix : ...

M. Boucher : C'est ça, oui. Je viens de recevoir un e-mail, justement. Non, sérieusement, c'est... puis c'est vrai en ingénierie, c'est vrai... je ne sais pas le Barreau, là. Dans n'importe quel domaine, c'est vrai. On a toutes les connaissances théoriques, mais de passer de la théorie à la pratique, c'est un monde.

Souvent, bien, de votre côté, Me Murphy, il y a beaucoup de jeunes procureurs qui sont nouvellement arrivés qui sont sûrement très prometteurs et qui, éventuellement, sont déjà ou deviendront des grands procureurs, j'en suis convaincu, mais vous parliez un petit peu plus tôt d'un système de mentorat qui avait été mis au point pour justement favoriser un peu le coaching ou l'acquisition de connaissances des séniors, qui, eux, bien, tranquillement, s'en vont pas à pas vers la retraite, qui souvent sera fort méritée.

Aussi, en cours de pratique, mon procureur peut être assigné à tel type de dossiers, puis, c'est vrai, on est tous des humains, de temps en temps, les humains, on a tendance à ce que j'appelle tomber dans nos roulières, hein, un pattern avec lequel on est confortable, mais le droit, ce n'est pas une science exacte, ce n'est pas comme la physique ou la mathématique, hein? Deux plus deux, ça faisait quatre voilà 100 ans, ça va faire quatre dans 100 ans. Mais, en droit, c'est plein de zones grises : ce qui était vrai l'année passée est à moitié vrai cette année, puis, dans cinq ans, ce ne sera peut-être plus du tout ça qui va être vrai.

• (21 h 30) •

Une voix : Ça va coûter cher.

M. Boucher : On me dit que ça va coûter cher, mais c'est la beauté du droit puis c'est le système dans lequel on vit. Aussi imparfait soit-il, je pense que c'est le meilleur système qu'on ne peut pas avoir.

Alors, Me Murphy, j'aimerais que vous me parliez un petit peu autant du mentorat que de votre système de formation continue, si on veut, auprès de vos procureurs pour être sûr que tout le monde est à la fine pointe, ait l'acquisition de connaissances dans un domaine où les crimes ne sont plus ce qu'ils étaient, hein? Ce n'est pas simplement des petites voies de fait, est-ce que quelqu'un a frappé ou n'a pas frappé, c'est des crimes économiques, c'est de la fraude, c'est du recyclage de produits de la...

Une voix : Il reste juste une minute.

M. Boucher : Donc, j'arrête ici, je vous laisse la dernière minute.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ce n'est pas une mauvaise idée, parce qu'il reste juste 1 min 40 s. Mme la ministre, je comprends que vous souhaitez... Me Murphy, à vous la parole.

Mme Murphy (Annick) : Alors, évidemment, pour la formation, au Directeur des poursuites criminelles et pénales, ça nous tient évidemment à coeur, tous nos professionnels doivent être formés, notre personnel également. Nous avons une école des poursuivants depuis une dizaine d'années où, pendant deux semaines, les procureurs... c'est l'été, effectivement, où on a plus le temps d'aller former nos procureurs. Donc, nos procureurs se rendent à cette école-là pendant deux semaines.

Il y a la formation de base, il y a de la formation spécialisée pour l'ensemble des procureurs, ça, c'est une chose, mais il y a également de la formation qui est donnée localement et régionalement par les différents bureaux, et ça, c'est en continu. Nous avons actuellement eu deux jours, là, de formation à peu près dans toutes les régions du Québec, parce que les juges étaient en réunion administrative. Donc, nous formons nos procureurs pendant ce moment-là. La formation, c'est une chose. Les procureurs sont jeunes, nous avons énormément de nouveaux procureurs, nous avons beaucoup de procureurs expérimentés qui ont quitté le Directeur des poursuites criminelles et pénales ou qui vont quitter dans la prochaine année. Nous avons besoin de garder l'expertise au sein du directeur et évidemment de la transmettre à nos plus jeunes. Plusieurs moyens sont donc élaborés pour ce faire. Alors, non seulement nous avons cette formation-là, nous avons aussi ce qu'on appelle le parrainage. Alors, lorsque nécessaire, le procureur en chef peut assigner, entre guillemets, un procureur plus expérimenté à des procureurs plus jeunes, et c'est des gens évidemment qui sont des personnes de référence pour toute question pour un jeune procureur.

Nous avons, de façon plus spécifique, du coaching...

Adoption des crédits

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Me Murphy, j'ai l'ingrate tâche de vous interrompre. Alors, je suis désolé, je suis désolé.

Mais, puisque le temps alloué à l'étude des crédits budgétaires du portefeuille Justice est terminé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des crédits.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui. Le programme 1, Activité judiciaire, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Adopté sur division. Le programme 2, Administration de la justice, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Adopté sur division. Le programme 3, Justice administrative, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Aussi sur division. Le programme 4, Accessibilité à la justice, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Sur division. Il faut le dire, hein, si vous êtes d'accord. Le programme 5, Autres organismes relevant du ministre, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Sur division. Le programme 6, Poursuites criminelles et pénales, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Sur division. Le programme 7, Indemnisation et reconnaissance, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Adoption de l'ensemble des crédits

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Sur division. Finalement, l'ensemble des crédits budgétaires du portefeuille Justice pour l'exercice 2015‑2016 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Adopté sur division. Ceci met un terme à nos travaux. Et la Commission des institutions a procédé à plus de 31... nous avons siégé 31 heures d'étude des crédits.

Avant de conclure, je tiens à remercier les membres de la commission, le personnel surtout de la commission, qui nous rend des services inestimables, et tous ceux qui ont contribué à nos travaux.

Je lève la séance. Et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux au jeudi 7 mai. Bonne fin de soirée à tous.

(Fin de la séance à 21 h 34)

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