L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente de la justice

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente de la justice

Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 14 juin 1979 - Vol. 21 N° 133

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 207 - Loi concernant la succession de Malvina Beauchamp, du projet de loi no 239 - Loi concernant la succession de Nicholas Minailo, du projet de loi no 228 - Loi concernant la succession de Pierre-Victor Rougier, du projet de loi 234 - Loi concernant la succession de Julien Levasseur, du projet de loi no 248 - Loi concernant la succession de Charles Frenette et du projet de loi 262 - Loi concernant Claude Desfossés


Journal des débats

 

Etude des projets de loi privés nos 207, 239, 228, 234,

248 et 262

(Douze heures et cinq minutes)

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons commencer les travaux de la commission élue permanente de la justice qui a le mandat de faire l'étude de différents projets de loi privés de même que du projet de loi no 28. Je pense qu'il faut dire immédiatement que les projets de loi privés feront l'objet d'un rapport distinct du rapport sur la loi 28. Si vous me le permettez, M. le ministre, avant de commencer notre étude, je vais donner la liste des membres participants à nos travaux.

Seront membres: M. Alfred (Papineau), M. Bédard (Chicoutimi), M. Blank (Saint-Louis), M. Charbonneau (Verchères), M. Clair (Drummond), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Samson (Rouyn-Noranda) et M. Pa-quette (Rosemont) en remplacement de M. Vaillancourt (Jonquière).

Pourraient aussi intervenir: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Laplante (Bourassa) en remplacement de M. Duhaime (Saint-Maurice); M. Lavigne (Beauharnois), M. Léger (Lafontaine); M. Godin (Mercier) en remplacement de M. Marois (Laporte), et M. Pagé (Portneuf), de même que M. Tardif (Crémazie). Il y aurait M. Marcoux (Rimouski), qui interviendrait en remplacement de M. Léger (Lafontaine). Il n'y en a pas d'autres.

M. Lalonde: Je veux simplement savoir une chose. Après les projets de loi privés, on revient à la loi 28. Serait-il possible d'avoir un consentement maintenant pour changer les membres et les intervenants au besoin, au moment où on abordera la loi 28, parce que c'est possible que ce ne seront pas les mêmes?

Le Président (M. Dussault): C'est acquis. Je vais, au départ, entendre M. le ministre.

M. Bédard: Tout simplement une remarque, M. le Président. Avec votre permission, je voudrais proposer qu'on étudie les différents projets de loi dans l'ordre suivant: les projets de loi nos 207, 239, 228, 234, 248 et 262. Il y a certains changements par rapport à la liste qui est là, que nous avions proposée, étant donné certaines disponibilités dont il faut tenir compte.

Le Président (M. Dussault): D'accord. Je voudrais vérifier si les requérants sont présents. Il y aurait donc, dans l'ordre, le projet de loi no 207, Loi concernant la succession de Malvina Beau-champ. Le requérant est-il présent? Merci. Ensuite, le projet de loi privé no 239, Loi concernant la succession de Nicholas (Nicolas) Minailo. Le requérant est-il présent? D'accord, merci. Ensuite, le projet de loi privé no 228, Loi concernant la succession de Pierre-Victor Rougier. Le requérant est présent. Le projet de loi no 234, la Loi concernant la succession de Julien Levasseur. Merci. Le projet de loi no 248, Loi concernant la succession de Charles Frenette. D'accord, merci. Le projet de loi privé no 262, la Loi concernant Claude Desfossés. Merci.

Nous allons d'abord entendre la requête du projet de loi privé no 207. Me Jacques Laurent est présent. Je demande à Me Laurent de nous expliquer brièvement le sens de la requête.

M. Laurent: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Vous pouvez rester assis.

Projet de loi no 207

M. Laurent (Jacques): II s'agit d'un projet de loi qui demande la modification partielle d'un testament qui date de 1956, testament qui a été fait par une dame Malvina Beauchamp, décédée en 1967. La disposition qui nous intéresse est la suivante. Mme Beauchamp a laissé 18 héritiers. Il y a trois exécuteurs testamentaires dont les deux premiers sont incapables d'agir et le troisième est une personne âgée qui maintenant doit administrer le seul actif valable de la succession, soit deux maisons d'appartements situées boulevard Saint-Joseph à Montréal. Une des clauses du testament dit que les exécuteurs testamentaires ne pourront pas vendre ou autrement aliéner ces immeubles — ce sont deux maisons d'appartements, avant la fin du terme de 20 ans, à partir de son décès.

Pendant ce terme, les exécuteurs devront bien entretenir ces deux propriétés et les peinturer à tous les deux ou trois ans. Or, il appert que cette dame avait voulu geler un actif pour une période de 20 ans après son décès. Elle est décédée en 1967, ce qui nous mène à 1987. Elle voulait protéger cet actif et assurer certains revenus aux héritiers.

Or, cet actif sans hypothèque qui est évalué par la ville de Montréal à environ $325 000 n'est aucunement rentable. Au contraire, même sans hypothèque, même sans frais d'hypothèque, en 1978, selon les états financiers déposés, il a créé un déficit de $729, sans frais d'administration, puisqu'il est administré par la troisième exécutrice testamentaire. C'est que les revenus n'augmentent pas depuis nombre d'années, alors que les dépenses augmentent substantiellement. Bien qu'on cherche à améliorer la situation des logements, on ne peut pas le faire puisqu'on manque de revenus, on manque de fonds.

Ce qu'on demande par cette loi, on ne veut pas affecter le voeu de la testatrice de ne pas distribuer l'actif pendant vingt ans, on demande que cette prohibition d'aliéner soit levée pour permettre la vente de cet actif non rentable pour la succession, qui va procurer des deniers qui seront conservés en fiducie par l'exécutrice testamentai-

re jusqu'en 1987 et qui, alors, seront partagés entre les héritiers qui seront survivants à ce moment. Dans l'intervalle, au moins les héritiers auront des revenus, alors que, cette année, en particulier, ils n'ont eu aucun revenu; au contraire, ils ont un petit déficit de $729. Cela ne procure aucun revenu. Le voeu de la testatrice sera bien protégé, sera bien respecté, il n'y aura pas d'aliénation, il n'y aura pas de distribution avant 1987. On gèlera un actif et en 1987 on procédera au partage de cet actif.

Le Président (M. Dussault): Merci. Y a-t-il des remarques préliminaires avant que j'appelle l'article 1?

M. Bédard: M. le Président, je n'aurais que trois petites questions. Vous avez mentionné, si j'ai bien compris, qu'il y avait trois exécuteurs testamentaires dont deux dans l'incapacité d'agir. Vous pourriez peut-être nous dire les raisons pour lesquelles ils sont...

M. Laurent: II y en a une qui est devenue incapable à cause de son âge, c'est une vieille dame. Le deuxième est décédé.

M. Bédard: Je pense qu'il y a une bonne raison pour le deuxième. Vous dites également que les revenus tirés de l'exploitation des immeubles sont inférieurs aux dépenses entraînées par son exploitation. Est-ce que vous avez des chiffres?

M. Laurent: Au 30 juin 1978, ce sont des états financiers vérifiés, il y a eu des revenus de location de $53 852, alors que les dépenses, sans frais d'hypothèque, il n'y en a pas, sans amortissement, il n'y a pas de dépenses d'amortissement, se sont élevées à $55 000, ce qui a fait une perte de $729, puisqu'il y a eu un petit revenu de la succession de $421. Vous avez donc des revenus globaux de $54 273 contre des dépenses d'exploitation de $55 002.

M. Bédard: Dernière question, est-ce que tous les héritiers ont été informés du fait que vous vouliez présenter ce projet de loi?

M. Laurent: Oui, les héritiers ont été informés, il n'y a aucune objection et les avis ont été donnés forcément dans les journaux.

M. Bédard: Non seulement ils ont été informés, mais vous nous dites qu'il n'y a eu aucune objection qui ait été formulée.

M. Laurent: Aucune objection.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je ne veux pas étendre le débat sur ce projet de loi en particulier, mais je voudrais en profiter pour indiquer de quelle manière on est appelé à travailler dans une commission parle- mentaire comme celle-ci. Les documents qui pourraient être pertinents pour que les députés se fassent une idée ne sont pas disponibles ou ne sont disponibles qu'à un certain nombre de députés. J'imagine que des tractations ou des communications ont eu lieu entre le requérant dans ce cas ou dans d'autres avec le ministère de la Justice, avec des fonctionnaires du ministère de la Justice, mais là on nous parle d'un testament, d'un bilan qui a été remis à quelqu'un et on ne l'a pas vu.

M. Bédard: Je ne sais pas si cela fonctionnait avec des tractations...

M. Lalonde: Des tractations non pas dans le sens péjoratif, je parle des communications, des échanges.

M. Bédard: ... dans le sens positif du mot. Dans le cas présent, je crois qu'il y a eu communication seulement du requérant avec le greffier...

M. Laurent: Avec le greffier adjoint en loi, Me D'Amour.

M. Bédard: De telle sorte que nous n'avons pas plus d'information du côté ministériel en main que du côté de l'Opposition.

M. Lalonde: Mais comment peut-on changer, passer une loi sur un testament dont on n'a même pas vu l'exemplaire? Il me semble que c'est un peu imprudent.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mercier.

M. Godin: Je voudrais quand même ajouter quelques nuances. D'abord, le ministre a raison, le mot "tractation", dans le dictionnaire Le Petit Robert, implique louche...

M. Lalonde: Je voulais dire échanges.

M. Godin: Alors...

M. Lalonde: Je retire ce mot...

M. Godin: Vous retirez ce mot, d'accord.

M. Lalonde: Je l'échange. (12 h 15)

M. Godin: Deuxièmement, j'ai eu une conversation brève, mais qui m'a satisfait personnellement, avec le procureur qui est ici présent. J'ai pris connaissance verbalement et je viens de prendre connaissance visuellement des documents qui existent. Je m'en satisfaits personnellement quitte à ce que, si vous voulez, les consulter vous aussi, Me Laurent les mette à votre disposition.

M. Blank: Je pense qu'on doit consulter le dossier pour chaque projet de loi et on devrait nous donner ça au moins une journée avant la

séance de la commission pour l'étudier. On faisait ça avant 1976, on le faisait. On avait des dossiers préparés sur chaque projet de loi.

M. Lalonde: C'est parce qu'on passe une loi ici.

M. Blank: ... au moins du côté ministériel. M. le ministre, au moins si le côté ministériel avait les dossiers.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, je suis également d'accord avec ce que demande le député de Marguerite-Bourgeoys. Il n'y a pas un tribunal qui accepterait de rendre un jugement, et c'est ce que nous faisons ici...

M. Lalonde: Même pas d'écouter. Le tribunal...

M. Fontaine:... sans que le tribunal puisse au moins prendre connaissance du testament en question, des bilans dont on a parlé. Je ne mets pas en doute, loin de là, la parole du procureur qui est là. Ce n'est pas ça du tout. Je suis assuré que ce qu'il nous dit est vrai. Mais on est obligé de le croire.

M. Blank: Combien d'héritiers y a-t-il dans...

M. Laurent: 18.

Une Voix: 18 dont 12 survivants.

M. Blank: L'âge du plus jeune? Est-ce qu'il y a des mineurs?

M. Laurent: Non, il n'y a aucun mineur.

Si vous me permettez de répondre, les documents en question, le testament, les états financiers, les avis dans les journaux et d'autres renseignements qui ont pu m'être demandés ont été fournis à mon interlocuteur qui était le greffier adjoint.

M. Lalonde: Merci. Pouvez-vous — étant donné qu'on ne les a pas de toute évidence et pour ne pas retarder la marche des travaux — nous lire le paragraphe du testament qui crée l'interdiction et peut-être même les avenants ou les attendus, s'il y en a, qui donnent ouverture à cette interdiction pour tenter de connaître l'intention de la testatrice?

M. Laurent: La disposition importante: "Elle ne pourra", puisqu'on parle de l'exécutrice testamentaire, la première, Mme Beauchamp, qui est devenue incapable, "aura la saisine. Jusqu'au partage final de mes biens, mon exécutrice testamentaire gardera mes biens en fiducie, les gérera et les administrera. Elle placera les capitaux de ma succession sans être restreinte par les articles 980...(?) et suivants du Code civil. Elle ne pourra pas vendre ou autrement aliéner mes deux immeubles, portant les numéros civiques 2005 est, Saint-Joseph à Montréal et 5025, rue Bordeaux à Montréal, avant la fin du terme de vingt ans ci-devant stipulé. Pendant ce terme, elle devra bien entretenir ces deux propriétés et les peinturer tous les deux ou trois ans." C'est tout pour les immeubles.

M. Lalonde:... interdiction. Alors, ce que vous demandez essentiellement, c'est d'échanger à l'intérieur d'un capital gelé un actif pour un autre.

M. Laurent: Exactement.

M. Lalonde: Ce qui est étonnant, c'est que cet actif ne soit pas rentable. C'est fort possible de ne pas rentabiliser une maison d'appartements, comme on le dit, une conciergerie, mais est-ce que des efforts ont été faits pour rentabiliser? Vous mettez devant nous le choix que l'exécutrice testamentaire doit faire, à savoir comment bonifier la situation des légataires qui, éventuellement, en 1987, vont toucher aux biens.

M. Laurent: C'est à partir des états financiers vérifiés, puisqu'on a nommé des vérificateurs. Aucun revenu en 1974, $1600 en 1975...

M. Lalonde: Est-ce que les loyers ont été augmentés depuis le décès survenu en 1967?

M. Laurent: Je ne l'ai pas depuis 1967, mais de 1974 à 1978, c'est passé de $50 100 à $53 800.

M. Lalonde: C'est une bonne... Je pense que c'est là qu'est le problème: les dépenses augmentent, les assurances augmentent et les taxes augmentent.

M. Laurent: Oui, mais il y a des dispositions législatives publiques qui empêchent... si vous voulez modifier ces dispositions, peut-être que...

M. Fontaine: ... la loi no 37.

M. Lalonde: Ce que je veux dire, c'est que si ces actifs, si ces maisons étaient conservées dans le patrimoine de la succession jusqu'en 1987, il est fort possible, quand on connaît l'inflation et la tendance depuis dix ans — que la valeur marchande dans huit ans soit, sinon doublée, du moins augmentée, si l'entretien est fait et que les loyers sont augmentés aussi. Il faut de l'administration. En échangeant ça pour un prix de vente qui va être déposé dans une compagnie de fidéicommis, on se trouve à ne pas aider les légataires.

M. Laurent: On les aide, d'une part, en leur fournissant des revenus, dans l'intervalle, pendant les huit ans, le prix de vente va générer des revenus, 10% ou 11% des placements, et, deuxièmement, l'évaluation foncière de ces deux immeubles, telle qu'établie par la ville de Montréal,

contrairement à ce qu'on peut croire, a été diminuée, parce que la succession n'a pas les fonds nécessaires pour les entretenir d'une façon convenable. Cette année, il faut faire une dépense, me dit-on, pour changer les fenêtres, parce que cela coule. C'est une dépense, avec les revenus qu'ont ces gens, qu'ils ne pourront pas faire.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Je voudrais dire que l'exécuteur testamentaire est malade aussi en plus.

M. Laurent: Malade, c'est une personne qui n'a pas de santé, elle a soixante-sept ans.

M. Laplante: Elle ne peut plus elle-même administrer ces choses logiquement.

M. Laurent: Elle ne se sent pas en santé, mais je n'ai pas de certificat médical. C'est une personne âgée, qui doit administrer 29 logements, percevoir les loyers, voir aux réparations, à l'entretien. Elle se sent incapable de faire cela. Si on nomme un administrateur, cela va coûter encore des sous.

M. Laplante: Concevez-vous, dans vos termes d'avocat, que dans un testament de ce genre, la première préoccupation de l'exécuteur testamentaire est de conserver au moins les biens qui sont là jusqu'en 1987, d'une façon ou d'une autre, soit en les vendant et en gardant l'argent jusqu'en 1988...

M. Laurent: C'est essentiel. Le voeu de la testatrice va être respecté. C'est de geler l'actif pendant vingt ans et de le distribuer au bout de vingt ans.

M. Laplante: D'accord.

M. Fontaine: Tout cela à cause d'une autre disposition du testament qui dit que ce soit...

M. Laurent: Oui, pas de partage avant 1987.

M. Fontaine: Est-ce que vous avez des acheteurs éventuels qui ont fait des offres d'achat?

M. Laurent: Non, pas à ma connaissance. Il y avait une prohibition d'aliéner, on ne pouvait pas la mettre en vente.

M. Lalonde: M. le Président!

M. Fontaine: II n'y a pas eu de demande de faite...

M. Laurent: II n'y a eu aucune démarche.

Le Président (M. Dussault): Un instant, s'il vous plaît, si vous me permettez, je voudrais faire appel de l'article 1, parce que nous sommes sur le fond actuellement. Je voudrais auparavant faire en sorte que nous nommions un rapporteur. Nous ne l'avons pas fait au début de nos travaux, tout à l'heure. Est-ce qu'on peut me faire une suggestion de rapporteur? Il serait souhaitable, évidemment, que cela soit fait par un membre peut-être. Puis-je me faire...

M. Godin: M. Alfred est prêt.

Le Président (M. Dussault): Oui, M. Alfred (Papineau), est-ce que la commission est d'accord?

M. Fontaine: D'accord.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Papineau sera le rapporteur.

M. Fontaine: Je donne mon accord pour que ce soit M. Alfred qui soit le rapporteur, c'est d'ailleurs l'un des rares députés qui est assidu aux commissions parlementaires, il reste jusqu'à la fin.

M. Lalonde: II ne vient pas seulement mettre le trouble.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska, j'aimerais évidemment que vous ne fassiez pas ce genre de remarque, parce que vous savez qu'on ne peut pas faire de question de privilège en commission parlementaire.

M. Bédard: Non, je pense que M. le député de Nicolet voulait manifester par sa remarque, pour sa part et au nom de sa formation politique, qu'il est le seul qui non seulement reste jusqu'à la fin, mais aussi le seul qui vient au commencement.

M. Fontaine: Non, M. le Président, cela n'est pas ce que je voulais dire, le ministre l'interprète comme cela...

Le Président (M. Dussault): Voyez-vous, M. le député de Nicolet-Yamaska, pourquoi je disais que cela ouvrait des portes à des questions de privilège qui ne peuvent se faire en commission parlementaire.

M. Fontaine: Je voudrais faire remarquer qu'actuellement il y a une autre commission parlementaire qui siège, il y a également l'Assemblée nationale, et que l'Union Nationale n'a que dix députés, présentement.

Une Voix: II va y en avoir plus que cela à la prochaine élection.

Le Président (M. Dussault): Vous avez au moins la sympathie de la présidence, M. le député de Nicolet-Yamaska. J'appelle l'article 1 et, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.

M. Lalonde: Seulement une remarque, il est fort possible que la prohibition d'aliéner soit quelque chose dont l'on doive se départir dans ce cas-ci, pour un tas de raisons. Mais j'ai beaucoup

de difficultés, pour ma part, à accepter les raisons que vous invoquez, à savoir que l'immeuble n'est pas rentable, parce que l'exécuteur testamentaire est une vieille personne, parce que les loyers n'ont pas été augmentés, parce que les fenêtres coulent et des choses comme celles-là. Autrement dit, je suis convaincu que si l'exécuteur testamentaire n'est pas en mesure d'administrer le testament que mon collègue est en train de lire, la loi contient des dispositions pour remplacer un exécuteur testamentaire. Surtout, j'ai cru comprendre que cet immeuble n'est pas hypothéqué. C'est facile d'emprunter pour améliorer l'actif et le rendre rentable. Le fait que l'immeuble soit tellement mauvais, cet argument ne me paraît pas tellement pertinent. J'aimerais mieux que tous les héritiers soient d'accord.

M. Laurent: C'est le cas aussi. Je vous fais ma démonstration à partir des états financiers des quatre ou cinq dernières années qui démontrent une augmentation de $3800 des revenus. Je suis sûr que tout propriétaire cherche à augmenter le prix de ses loyers, mais il y a des lois qui existent et qui gouvernent ces immeubles et les propriétaires ne peuvent pas augmenter les loyers... il ne semble pas. En quatre ou cinq ans, cela a augmenté de $3800.

M. Lalonde: Je suis d'accord que les lois rendent difficile l'augmentation des loyers, mais, si vous aviez raison dans votre dernière proposition, à savoir que c'est à cause des lois, tout le monde serait ici pour vendre ses immeubles. Il y en a qui sont encore rentables, d'après ce qu'on peut voir, même si c'est plus difficile, même s'il y a des contrôles. Je ne veux pas défendre les politiques du gouvernement actuel, mais...

M. Bédard: Surtout que, là-dessus, on vit surtout suivant les lois du gouvernement précédent.

M. Lalonde:... même si le Parti québécois est au pouvoir, il y a encore des choses qui se passent. Il y a de l'espoir.

M. Bédard: II n'y a sûrement pas de quoi faire un débat. On va essayer d'apporter certaines corrections.

M. Fontaine: On a apporté des amendements l'an dernier.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Messieurs, sur le fond, s'il vous plaît!

M. Lalonde: C'est pour cela que je me demande si les légataires, étant donné que tous les héritiers peuvent être d'accord, peuvent dire: On peut passer à côté du désir du testateur... Au fond, ce qu'on recherche, c'est respecter sa volonté. Mais le fait que ce ne soit pas rentable, à mon sens, n'apparaît pas tellement.

M. Laurent: On respecte sa volonté, monsieur, en partie tout au moins, puisqu'on gèle un actif pendant 20 ans. Il n'est pas question de partager le produit de la vente avant le terme de 20 ans. Au bout de 20 ans, en 1987, on ne sait pas ce qui peut se produire. L'exécutrice, l'exécuteur testamentaire d'alors, qui est aussi fiduciaire, aura l'obligation de vendre l'immeuble, quelles que soient les conditions.

M. Bédard: Vous nous affirmez qu'il n'est pas question de partager le produit de la vente avant la date impartie par le testament.

M. Laurent: C'est une autre disposition du testament.

M. Bédard: Et que les héritiers sont tous d'accord pour lever l'interd'ction.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mercier.

M. Fontaine: Tout à coup on deviendrait indépendant, cela pourrait perdre de la valeur.

M. Lalonde: Ah! C'est cela.

M. Godin: M. le Président, je ne pense pas que les députés ici puissent ou doivent se substituer à la volonté des héritiers. Or, nous avons devant nous les renseignements qui nous permettent de croire que les héritiers eux-mêmes veulent réaliser l'actif, quitte à le laisser en fiducie jusqu'à la fin de la période en question. Le seul cas où on pourrait se substituer, c'est s'il y avait une injustice pour l'une ou l'autre des parties. Or, il ne semble pas que ce soit le cas. C'est la raison pour laquelle j'ai parrainé et je vais appuyer ce projet de loi-là.

M. Blank: Parrainer une loi, il n'y a pas obligation de l'appuyer, le règlement ne dit pas cela. C'est seulement pour donner une chance au requérant de venir devant cette assemblée.

M. Godin: Ce que je dis, M. Blank, c'est que non seulement je le parraine, mais je l'appuie.

M. Blank: D'accord.

M. Godin: Est-ce que je peux dire cela?

M. Blank: Oui, certainement, vous pouvez dire cela, mais le fait que vous parrainiez un bill n'est pas...

M. Lalonde: Ne vous sentez pas mal à l'aise.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mercier, je vous rappelle que vous devez appeler votre collègue par le nom de son comté et non par son nom...

M. Godin: M. le député de mon comté.

Le Président (M. Dussault): Du nom de son comté, vous avez raison. M. le député de Mont-Royal.

M. Blank: Je ne suis pas certain qu'il ait voté pour moi.

M. Godin: Cela est secret, M. le député.

Une Voix: Vous ne restez pas dans votre comté?

M. Ciaccia: En réponse aux remarques du député de Mercier, vous semblez dire qu'on ne peut pas se substituer à la volonté des légataires, mais vous demandez à cette commission de se substituer à la volonté du testateur. Oui, parce que la volonté du testateur était que, pour une période de X années, la propriété ne devait pas être vendue.

M. Godin: M. le député puisque vous interprétez ce que je dis, la volonté du testateur ou de la testatrice, c'est de ne pas aliéner un actif sous une forme ou sous une autre et votre collègue de Marguerite-Bourgeoys a été très clair là-dessus.

M. Ciaccia: Non, si vous permettez...

M. Godin: Vous m'avez posé une question. Laissez-moi y répondre.

M. Ciaccia: Je ne vous ai pas posé de question.

M. Godin: En bonne courtoisie, il me semble que, quand on pose une question, cela appelle une réponse.

M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que j'avais le droit de parole?

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mercier, il semble qu'on ne vous pose pas de question et le député voudrait terminer son intervention.

M. Godin: Alors, c'est une nouvelle définition des questions. Il y a un nouveau dictionnaire libéral qui vient d'être écrit.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mont-Royal, vous avez la parole.

M. Ciaccia: Je vais essayer d'être un peu plus constructif. La volonté de la testatrice était de ne pas aliéner cet immeuble pour une période de X années. Vous dites: On va geler le produit. On protège les légataires, les héritiers. (12 h 30)

Ce n'est pas exactement cela, parce que, par exemple, si vous aviez aliéné après cinq ans, avec le même raisonnement que celui que vous avez aujourd'hui, vous auriez aliéné cette propriété après cinq ans. Aujourd'hui, tenant compte de l'inflation, les légataires auraient été perdants. C'est une des raisons qui motivent une personne à dire, dans le cas d'immeubles, d'attendre X années parce que la croissance, le jeu du marché, etc, oeuvrent en faveur des locataires. On a l'impression qu'à moins qu'il y ait vraiment des raisons urgentes, ce serait dans l'intérêt des héritiers d'attendre la fin de la période parce que, certainement, il va y avoir une augmentation de la valeur de l'immeuble. Si vous prenez seulement l'argent, il n'y aura pas d'augmentation de la valeur de l'argent dans cinq ans, je peux vous en assurer, cela va aller en diminuant avec l'inflation. Ils vont avoir moins dans cinq ans qu'ils n'auront aujourd'hui, tandis qu'une propriété, même si cela ne rapporte pas pendant les cinq prochaines années... Je prends vos déclarations, à savoir que cela ne rapporte pas pour le moment. L'augmentation de la valeur peut être beaucoup plus que les intérêts de 6%, 7% ou 8% de ce qui pourrait être vendu aujourd'hui.

Sans faire de partisanerie politique — mais il faut prendre certains faits en considération — s'il y a un changement de gouvernement dans deux ans, cela va augmenter beaucoup. Alors, on doit porter cela à votre attention.

C'étaient quelques remarques que j'avais à faire au sujet de ce problème.

M. Bédard: M. le Président, on va essayer...

M. Ciaccia: Cela a baissé en 1976 et, en 1981, seulement dans deux ans, cela va...

M. Alfred: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Papineau.

M. Alfred: M. le Président, je m'excuse auprès des gens qui sont là, parce que tout ce que le député de Mont-Royal vient de dire a déjà été dit. C'est son absence qui explique son intervention parce que toutes les explications ont été données.

Le Président (M. Dussault): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 1? M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: On n'a pas indiqué les numéros de lots dans l'article 1. Vous ne pensez pas qu'il serait préférable de les indiquer? On indique seulement les numéros civiques.

M. Blank: ...

M. Laurent: Oui, je vous remercie de cette suggestion, mais cette difficulté me semblait mise de côté par le fait que l'article 1 mentionne le numéro d'enregistrement du testament, lequel mentionne le lot en question. Dans le testament lui-même, on ne donne pas les désignations.

M. Lalonde: On donne la même adresse dans le testament.

M. Laurent: Je ne voulais pas créer de confusion.

M. Fontaine: D'accord.

Une Voix: Adopté.

M. Lalonde: Sur division.

Le Président (M. Dussault): L'article 1 est adopté sur division.

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Dussault): J'appelle l'article 2.

M. Bédard: Ce n'est pas comme cela que ça fonctionne. Est-ce que je dois comprendre que... M. le Président, sur le débat de fond...

M. Lalonde: Je ne me sens pas capable de voter en faveur de cet article, c'est pour cela que j'ai exprimé ma division.

M. Ciaccia: ... les expériences que j'ai eues dans des cas similaires, cela n'a pas oeuvré en faveur des héritiers, cela a travaillé contre eux.

M. Lalonde: C'est cela.

M. Ciaccia: Si les héritiers avaient été conseillés différemment, ils auraient attendu la période voulue dans le testament et ils auraient eu beaucoup plus d'avantages. Pour ces raisons, je ne pourrai pas voter en faveur de l'article.

M. Fontaine: M. le Président, quant à moi, les explications qui m'ont été fournies par le procureur me satisfont. Etant donné le consentement de tous les héritiers exprimé par l'entremise du procureur, je serais prêt à donner mon accord pour l'acceptation de ce projet de loi.

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le ministre.

M. Bédard: Depuis que, comme ministre de la Justice... je pense que mes prédécesseurs fonctionnaient de la même manière. En tout cas, c'est ma manière de procéder concernant les projets de loi privés, on essaie d'arriver à un consensus. S'il n'y a pas de consensus, la lecture du projet de loi va être reportée ou devra être présentée de nouveau. Je ne sais pas si l'Opposition veut que ça aille dans ce sens.

M. Lalonde: M. le Président, naturellement, c'est au ministre et aux autres députés de prendre leurs responsabilités, à savoir s'ils doivent voter en faveur...

M. Bédard: Cela marche par consensus, vous le savez.

M. Lalonde: Oui, c'est-à-dire que c'est la décision du ministre, d'après ce que je comprends, de ne pas prendre de décision autre que celle qui serait unanime de la part de la commission. C'est son droit. C'est comme ça qu'il a agi jusqu'à maintenant pour les projets de loi privés et il y en a quelques-uns qui ont été reportés à cause de ça, parce qu'il y avait des doutes qui étaient exprimés, et je respecte cette approche. Mais c'est sa décision et non la mienne. Je pense que ça ne m'oblige pas d'être en faveur d'une majorité autour de la table à cause de cette approche.

Etant donné ceci, étant donné que le ministre — j'imagine que d'autres députés ministériels seront influencés par la décision du ministre... Je dois expliciter les raisons pour lesquelles, raisons que j'ai déjà un peu exprimées dans mes questions, je ne suis pas en mesure comme membre de cette commission de dire que je suis d'accord.

Le Président (M. Dussault): M. le député, si vous me le permettez, si l'on doit continuer la discussion sur l'article 1, je vais revenir sur l'écriture et dire que, pour le moment, l'article 1 n'est pas encore adopté. Je vous écoute, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Cela ne porte pas réellement sur le plaidoyer fait par Me Laurent. Je pense que c'est au gouvernement, qui est l'interlocuteur, enfin, ce n'est sûrement pas l'Opposition, de la population, des membres de la population, qui ont des voeux, des demandes à faire ici par projets de loi privés, de préparer des dossiers, de s'assurer que les choses qui sont représentées par les partis ou leurs procureurs... Que ce soit l'Assemblée nationale, Me Laurent dit que c'est le greffier en loi. Parfait. Mais le greffier en loi répond à quelqu'un, à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale nous convoque: il y a une décision qui est prise quelque part de nous convoquer. On reçoit un avis de la Chambre ce matin de venir ici pour étudier des projets de loi privés.

M. Bédard: Je vous donne ma politique, ma manière de fonctionner, lorsqu'il s'agit de l'étude des projets de loi privés qui nous sont déférés par l'Assemblée nationale, à savoir essayer d'en arriver à un consensus et, s'il n'est pas accepté, à moins de raisons très particulières...

M. Lalonde: Etant donné que le ministre a un peu plus d'influence que moi sur l'Assemblée nationale, pas comme assemblée délibérante, politique, mais comme organisme, comme structure faisant partie de l'ensemble du gouvernement, je lui demanderais, si c'est possible, pour éviter d'autres cas comme ça, avant d'accepter de réunir la commission parlementaire, de voir à ce que des dossiers soient faits. Si l'élément, qui est important, qui est capital, à savoir que les héritiers sont tous d'accord avec ceci, est représenté, si c'est un élément important qui est offert au greffier en loi ou aux autres députés, à ce moment, ces documents devraient nous être fournis.

Je crois Me Laurent, que je connais personnellement depuis plusieurs années, quand il me dit que les héritiers sont d'accord, je le crois personnellement, parce que je le connais. Mais c'est assez pauvre, vous allez quand même l'admettre, de nous obliger à nous fonder simplement sur cette déclaration pour changer ce qui est la loi entre les parties, c'est-à-dire la volonté d'un testateur dans un testament notarié.

Il m'apparaît que, si les héritiers sont parfaitement d'accord, le minimum qu'on aurait pu avoir distribué autour de la table, c'est cet accord des héritiers. Après ça, c'est leur problème. On est obligé, à cause de cette absence, de se mettre dans la position du testateur, à savoir si ce serait mieux de vendre ou de ne pas vendre. Je ne veux pas jouer ce jeu.

C'est pour ça que j'ai dit sur division et, si vous le voulez, je vais m'abstenir. Mais je ne pourrai pas voter, parce que je n'ai pas les éléments nécessaires.

M. Bédard: M. le Président, j'aurais une suggestion à faire. Je ne crois pas que mes propos — en tout cas, ce n'était pas mon intention — doivent être interprétés comme une critique vis-à-vis de l'Opposition officielle, qui ne se sent pas prête à donner son consentement.

Le député de Marguerite-Bourgeoys exprime l'intention et le désir d'avoir plus d'explications sur l'ensemble des questions qui ont été soulevées. Je proposerais de suspendre l'étude de ce projet de loi et peut-être que, d'ici à ce qu'on ait adopté les autres, certaines des interrogations qu'a le député de Marguerite-Bourgeoys pourront être satisfaites. Il y aura peut-être aussi la possibilité de demander au greffier en loi jusqu'où il peut donner des réponses aux questions soulevées.

Dans ce sens, je ne pense pas que ce soit l'intention de personne, à moins qu'on ait des raisons très importantes, de vouloir bloquer quoi que ce soit, que ce soit du côté ministériel ou du côté des oppositions. Je proposerais qu'on suspende l'étude de ce projet de loi, qu'on passe à un autre, et on verra s'il y a lieu de revenir à l'étude de ce projet de loi.

M. Lalonde: Avant de suspendre, si vous permettez, ce que je veux éviter... vous avez sûrement consulté, ou votre client vous a sûrement dit: J'ai consulté les légataires et ils sont d'accord.

M. Laurent: Je les ai consultés moi-même.

M. Lalonde: Vous les avez consultés vous-même.

M. Laurent: Ils m'ont consulté. Oui.

M. Lalonde: Est-ce que vous leur avez parlé personnellement à tous et chacun?

M. Laurent: Tous.

M. Lalonde: Est-ce que ce serait possible d'avoir de leur part une signature attestant qu'ils sont parfaitement d'accord avec le projet de loi?

M. Laurent: D'une part, oui. D'autre part, je vous soulignerai ceci, pas en défense...

M. Lalonde: Est-ce que ce sont ceux qui sont dans la liste du testament ou y en a-t-il d'autres?

M. Laurent: II y en a six qui sont décédés. M. Lalonde: A ce moment-là, cela ne va pas...

M. Laurent: II y en a que je n'ai pas vu mais à qui j'ai parlé au téléphone. Mme Beauchamp, la première exécutrice testamentaire, que voulez-vous, elle n'est pas tout à fait "composée". Ce sont de vieilles personnes. Tout le monde était d'accord. Ce que je voulais vous dire, M. le député, c'est que je me suis plié à toutes les exigences du règlement. Il y a eu des publications dans un journal français et dans un journal anglais, dans la Gazette officielle du Québec, les quatre publications. J'ai fourni tous les documents qu'on m'a demandé de fournir. J'avais un interlocuteur valable, qui est là depuis nombre d'années, c'est un greffier en loi. Tout ce qu'on m'a demandé, je l'ai fourni, et on me demande aujourd'hui douze consentements écrits. Dans un autre projet de loi privé qui vient, le projet de loi 234, des consentements écrits, j'en ai.

M. Lalonde: Ah bon!

M. Laurent: C'est parce qu'il y a une personne qui est impliquée directement, tandis que ces personnes ne sont pas impliquées directement, elles n'habitent pas ces logements.

M. Lalonde: Je sais, mais ce sont elles qui vont recevoir le produit de la vente.

M. Laurent: Les revenus qu'elles n'ont pas dans le moment, elles n'ont aucun revenu.

M. Lalonde: Et le produit de la vente.

M. Laurent: Oui, mais ce sont des gens assez âgés qui n'ont aucun revenu dans le moment.

M. Lalonde: Ce que je veux éviter, c'est que, le lendemain de l'adoption de cette loi on reçoive une lettre d'un des légataires qui dise: Oui, Me Laurent m'a appelé, mais ce n'est pas cela que je voulais dire. Vous seriez dans une aussi mauvaise situation que nous.

M. Laurent: Oui, mais ces gens ont donné leur consentement. D'abord, ils sont venus me consulter; d'autre part, ils ont lu les avis dans les journaux.

M. Lalonde: Oui, mais écoutez...

M. Laurent: Je comprends, mais ce sont les exigences du règlement.

M. Lalonde: Qu'est-ce qu'ils disent, les avis? Vous voyez comme on est dépourvu comme député, on n'a même pas la copie des avis qui nous sont remis.

M. Godin: Vous avez le téléphone à votre bureau, M. le député?

M. Bédard: Là, il ne faudrait pas exagérer. J'ai été trois ans dans l'Opposition et j'ai eu à étudier des projets de loi privés de cette nature. En toute honnêteté... les remarques du député de Marguerite-Bourgeoys, il ne faudrait pas qu'elles soient en dehors de la stricte réalité qui existait auparavant. Nous aussi, lorsque nous étions dans l'Opposition, nous n'avions pas tous les papiers que requiert le député de Marguerite-Bourgeoys. Si nous les demandions... on est très ouvert pour les offrir, mais c'est le greffier en loi qui peut fournir ces documents.

M. Lalonde: En fait, j'aurais probablement pu avoir eu la copie des avis, comme le dit le député de Mercier, si je l'avais demandé, mais je n'avais aucune idée que cette question serait soulevée ce matin.

M. Laurent: M. le député, dans le projet de loi 234 que je présenterai tantôt, c'est justement à la suggestion d'un greffier adjoint en loi, Me Reed, que j'ai des affidavits des deux personnes. Pour cela, on ne m'en a pas demandé. Je ne veux blâmer personne, mais on ne m'a pas dit... Les avis ont été publiés quatre fois dans le Devoir, je pense qu'à l'époque la Presse était en grève, et c'était très clair.

Une Voix: Dans le Devoir? (12 h 45)

M. Laurent: Dans le Devoir et dans la Gazette officielle de Québec, en caractères un peu plus gras: "Succession de Dame Malvina Beauchamp, veuve de..." — avec les numéros des bâtisses — "avis est par la présente donné que telle personne s'adressera à l'Assemblée nationale pour obtenir l'adoption d'une loi privée lui permettant la vente ou l'aliénation de deux immeubles portant les numéros que vous connaissez, rue Saint-Joseph et rue Bordeaux, district de Montréal, nonobstant toute prohibition d'aliéner d'iceux contenus dans le testament de Mme Beauchamp fait tel jour devant Me Guy Girard, notaire. Cela a paru quatre fois.

Le Président (M. Dussault): Si vous me le permettez, j'aimerais faire le point. M. le ministre nous suggère de suspendre. J'avais, avant qu'il nous fasse cette suggestion, trois demandes de parole. Il y avait M. le député de Nicolet-Yamaska, M. le député de Bourassa et ensuite M. le député de Mercier.

M. Fontaine: M. le Président.

M. Laplante: Vous pouvez enlever mon nom...

M. Fontaine: J'ai donné mon accord et, à la suite de la lecture des avis qui ont été publiés quatre fois dans le journal Le Devoir, je pense que ça nous donne les garanties suffisantes pour nous permettre d'adopter ce projet de loi.

Le Président (M. Dussault): M. le ministre, est-ce que vous retenez votre suggestion?

M. Bédard: Etant donné qu'il y avait certaines interrogations qui avaient été formulées par le député de Marguerite-Bourgeoys et que d'autres réponses ont été fournies depuis quelques minutes, on peut suspendre l'étude, si l'Opposition officielle est désireuse d'avoir d'autres informations qui lui permettaient de...

M. Lalonde: J'ai cru comprendre de Me Laurent qu'il serait difficile physiquement d'obtenir le consentement écrit de tous les locataires.

M. Laurent: II y en a une, en tout cas. Je ne sais pas si elle est en mesure de lire et de signer son nom. Elle sera peut-être morte d'ici à ce que je l'obtienne. Les autres, c'est plus facile. Il y a des nièces dans le testament. On parle d'une nièce, Mme Cléroux. Ce ne sont pas des jeunes filles.

M. Lalonde: Qu'est-ce que vous avez contre les jeunes filles?

M. Laurent: La nièce, Dame Gilberte Cléroux, qui est l'exécutrice testamentaire, a 67 ans. Alors, ce sont tous des gens passablement...

M. Lalonde: Ils sont capables de donner un consentement.

M. Bédard: Le député de Marguerite-Bourgeoys est dans les 60 ans. Ce n'est pas grave!

Le Président (M. Dussault): Est-ce que je peux poser la question: Est-ce qu'il y a consentement de la commission pour suspendre l'étude du projet de loi no 207?

M. Lalonde: On peut suspendre au moins jusqu'à cet après-midi.

M. Bédard: On suspend jusqu'à cet après-midi.

Le Président (M. Dussault): L'étude du projet de loi privé no 207 est suspendue.

M. Lalonde: De toute façon, Me Laurent, je pense que vous deviez rester pour un autre projet de loi qui ne passera pas avant cet après-midi. Cela ne vous retardera pas?

M. Bédard: On pourra aviser à ce moment.

Le Président (M. Dussault): Merci, Me Laurent, pour le moment. J'appelle maintenant le

projet de loi no 239, Loi concernant la succession de Nicholas (Nicolas) Minailo.

Je suppose, monsieur, que vous êtes le procureur de la requérante?

Projet de loi no 239

M. Mullaly: Je suis Me James E. Mullaly, CR, de Montréal, l'avocat et procureur des parties intéressées par le projet de loi.

Le Président (M. Dussault): Vous êtes accompagné de Mme...

M. Mullaly: Avec l'indulgence, M. le Président, des gens de la commission...

Le Président (M. Dussault): Vous pouvez rester assis.

M. Mullaly: Merci. Est-ce que madame, ma secrétaire, qui est plus au courant, qui est aussi au courant que je le suis du dossier... tant que vous aurez besoin de documents, ma secrétaire, Mme Lemay, sera disposée, avec votre permission...

Le Président (M. Dussault): Soyez bien à l'aise.

M. Mullaly: Elle n'est pas une partie interrogée.

Le Président (M. Dussault): Me Mullaly, je vous demanderais d'expliquer brièvement le sens de la requête.

M. Mullaly: Oui, la demande est exposée très brièvement dans le projet de loi, mais elle concerne, au fond, la succession d'une personne morte...

Le Président (M. Dussault): Je ne vous entends pas très bien.

M. Mullaly: Est-ce que je suis assez près? Le Président (M. Dussault): Très bien.

M. Mullaly: La succession est celle d'un homme d'origine ukrainienne qui est venu à Montréal quand il était très jeune. Pas longtemps après son arrivée à Montréal, il a épousé une veuve qui avait cinq enfants. En 1920, il s'est marié à cette veuve; les enfants, à cette date, étaient âgés de deux à douze ans; il y en avait cinq, tous des jeunes. Il a élevé ces enfants et les considérait toujours comme faisant partie de son ménage évidemment; il les a envoyés à l'école, il les a fait travailler, il les considérait au fond comme étant ses propres enfants. En 1943, lui et sa femme, la mère de ces cinq enfants, ont fait des testaments réciproques, l'un en faveur de l'autre, c'est-à-dire que le défunt a tout laissé à sa femme, évidem- ment exécutrice testamentaire; elle, de son côté, a fait un testament tout à fait en faveur de son mari. Je dois signaler au début que c'était son premier et son seul mariage. Il est venu ici passer toute sa vie, comme on pourrait dire, à Montréal où il a travaillé assez fort pour élever la famille, ces enfants qu'il considérait comme les siens.

Je souligne qu'il s'est présenté devant un notaire en 1943 pour faire des testaments réciproques. Elle, la veuve, la mère de ses enfants, l'a précédé par à peine un an; le dossier démontre qu'elle est morte au mois de mars 1976 tandis que lui, à l'âge de 88 ans, est mort au mois de février suivant, février 1977. Les enfants, les bénéficiaires, qui se pensaient évidemment bénéficiaires, ceux qui étaient à l'extérieur sont venus à Montréal; il y en a trois qui demeurent dans la province de Québec. Avant de venir me voir, ils ont trouvé les deux testaments de leurs parents, si vous voulez; ils sont allés voir le notaire devant qui les deux testaments ont été faits, espérant toujours trouver qu'il avait, à la suite du décès de leur mère, ou de sa femme, peut-être fait un testament devant le même notaire. D'après ce que j'ai pu constater par la suite, il ne connaissait aucun autre notaire. Malheureusement, à l'étude du notaire, il n'y avait pas de testament postérieur à celui fait en faveur de sa femme; ils ont fait des recherches, mon bureau a fait des recherches auprès de la Chambre des notaires dans l'espoir de trouver un testament, sans succès.

Finalement, les enfants, un des enfants a trouvé, dans la maison où il habitait, où il est mort subitement, un bloc-notes, un calepin. Si les membres de la commission sont intéressés, j'ai l'original. J'ai examiné ce papier, c'est tout à fait dans l'écriture du décédé. La seule chose qui manquait c'était sa signature complète.

Il y avait une distribution de faite parmi ces enfants, les cinq enfants qu'il a élevés et il partageait la succession: 10%, 8%, 5%, 60%, excepté que la deuxième page sur le calepin contient seulement l'initiale du défunt. N'ayant pas trouvé d'autres testaments plus formels, si vous voulez, j'ai fait une étude du document et j'ai dit: Pour moi, ça peut être considéré par la cour, pour fin de vérification, comme étant un testament en bonne et due forme.

En tout cas, j'ai présenté une requête pour vérification, me basant sur le document qui avait été trouvé parmi les papiers du défunt. J'ai passé une journée à la cour, en témoignant qu'il avait toujours considéré, toute sa vie, que ces enfants étaient les siens. J'ai suggéré au juge qui présidait l'enquête pour vérification qu'à cause de son ignorance de la loi québécoise, étant âgé, étant, d'après les témoignages, un homme pas trop instruit il avait peut-être eu l'impression qu'en faisant un testament en faveur de la mère des enfants c'était au bénéfice de ces enfants qu'il considérait comme étant les siens.

En tout cas, je n'ai pas réussi devant la Cour supérieure, mais je voudrais signaler que le juge, qui a été obligé, d'après lui, à cause de la juris-

prudence de refuser la vérification, a exprimé au moins quatre ou cinq fois dans son jugement qu'il renvoyait la requête avec le plus profond regret, visant tout le temps... Partout dans son jugement, on voit que le juge voulait faire vérifier le testament. Par exemple, dans son jugement, il dit à un endroit: "Si l'initiale du défunt avait paru sur la première page du calepin, j'aurais pu le considérer comme étant la signature du défunt".

Evidemment, c'est clair qu'il n'y avait aucune autre personne que ces cinq enfants qu'il aurait pu considérer comme étant les bénéficiaires de sa succession. Alors, soulignant- la sympathie qu'a exprimée le juge en faveur des bénéficiaires —j'espère qu'ils vont être les bénéficiaires de la succession — j'ai décidé que la seule solution —évidemment, c'est la raison pour laquelle je suis ici aujourd'hui — était d'essayer de faire voter un projet de loi.

Au fond, et en substance, le projet de loi dit tout simplement...

Le Président (M. Dussault): Me Mullaly, si vous me le permettez, j'ai l'impression, parce que j'écoute autour de moi, que les membres de la commission seraient disposés à aller au fait immédiatement. Je pense que nous pourrions gagner un peu de temps si vous pouviez conclure rapidement.

M. Mullaly: Alors, c'est simplement ceci, nous avons fait tous les efforts possibles pour essayer de trouver un testament plus formel si vous voulez, sans succès. Le seul document qui aurait pu passer comme testament est celui que je viens de décrire, que malheureusement la cour n'a pas accepté pour fin de vérification à cause d'un vice de forme. Je demande que cette commission accepte le projet dans les circonstances. C'était un homme âgé de 88 ans, cinq enfants, marié à une femme qui a été sa femme à lui, la mère de cinq enfants. Je demande que cette initiale équi-vaille à une signature pour fin de vérification. Je dois souligner encore une fois que c'est une succession très modeste; ils sont cinq intéressés. (13 heures)

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie. J'appelle l'article 1.

M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, nous avons écouté avec beaucoup d'attention M. le requérant. Je dois dire que nous avons également eu l'occasion de lire le jugement auquel vous avez référé, et nous sommes également très sympathiques à l'orientation du jugement rendu par le juge Nolan. Vous nous avez également exprimé que tous les efforts avaient été faits pour vérifier s'il n'y avait pas un testament antérieur; il semble très clair qu'il n'y en a pas d'autre et que vous avez également pris tous les moyens pour essayer de retracer des héritiers potentiels autres que ceux que vous avez mentionnés.

M. Mullaly: ... pas rencontré...

M. Bédard: Je dois vous dire — je ne veux pas discuter plus longtemps — que, du côté gouvernemental, nous avons examiné l'ensemble de vos représentations et nous sommes sympathiques à l'idée d'y donner suite.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que... M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. L'article 2 est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Est-ce que le projet de loi 239, Loi concernant la succession de Nicholas Minailo, est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Je remercie Me Mullaly. Il est maintenant passé 13 heures. La commission suspend ses travaux...

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le ministre.

M. Bédard: J'aurais une petite requête à faire, sans pression aucune. On sait que, cet après-midi, nous allons avoir à continuer l'étude des projets de loi privés et, également, pour autant qu'il reste du temps — nous espérons qu'il en restera le plus possible — continuer l'étude de la loi 28. Est-ce que mes collègues auraient objection que nous recommencions les travaux de la commission à 14 h 30 plutôt qu'à 15 heures?

M. Lalonde: J'ai des engagements jusqu'à 15 heures.

M. Bédard: Je ne me formaliserai pas... M. Lalonde: J'ai un caucus spécial...

M. Bédard: Je le dis bien, c'est sans pression.

M. Lalonde: ... pour tenter de comprendre où le gouvernement s'en va avec ses lois de rouleau compresseur de fin de session.

M. Bédard: M. le Président, je suis bien d'accord. On ne demandera pas de délai parce que je suis sûr que, si le député de Marguerite-Bourgeoys se donne le temps de réfléchir sur le sens des lois gouvernementales, on aura moins d'obstruction qu'on en a eu jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Dussault): La commission suspend ses travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

Suspension de la séance à 13 h 3

Reprise de la séance à 15 h 10

Le Président (M. Dussault): Messieurs, nous allons reprendre les travaux de la commission de la justice.

Projet de loi no 207 (suite)

Au moment où nous avons suspendu nos travaux ce matin, nous avions aussi suspendu l'étude du projet de loi no 207. Il y a accord des parties à la commission pour revenir immédiatement sur le projet de loi no 207.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, vous savez que, lors de la suspension de l'étude de ce projet de loi, on avait un tas de points d'interrogation de soulevés. Pendant la suspension des travaux, j'ai fait des consultations et j'ai reçu, en particulier, un téléphone de Me Philippe Roberge, le notaire de la succession. D'ailleurs, Me Laurent me l'avait dit ce matin. A la suite de ces conversations, j'aurais quelques questions à poser pour être bien sûr où le débat se situe.

Est-il vrai que non seulement les deux immeubles sont non rentables et que non seulement les fenêtres, comme vous l'avez dit, coulent, mais que même le toit est à réparer? Ces immeubles sont donc dans un état assez avancé de vétusté qui pourrait en faire des taudis à moins que des réparations très sérieuses ne soient faites par l'entreprise.

M. Laurent: C'est tout à fait vrai, M. le député.

M. Lalonde: Est-ce aussi le cas que mettre en bon état ces immeubles prendrait des réparations de plusieurs milliers de dollars que la succession n'a pas?

M. Laurent: Que la succession n'a pas. M. Lalonde: Qu'elle devrait emprunter? M. Laurent: Qu'elle devrait emprunter.

M. Lalonde: Je pense qu'il faut aussi bien souligner que la prohibition d'aliéner — c'est une chose qu'on a peut-être oubliée ce matin — entraîne une prohibition d'hypothéquer. Donc, la succession serait dans l'impossibilité d'emprunter sur hypothèque de ces immeubles. Est-ce exact, Me Laurent?

M. Laurent: C'est exact, M. le député.

M. Lalonde: Donc, la succession se trouve dans un cul-de-sac, si je comprends bien.

M. Laurent: C'est exact.

M. Lalonde: Ceci étant démontré, toutes nos questions sur les possibilités de rendre rentable cet immeuble deviennent caduques. Ce sont des questions qu'on posait ce matin.

M. Laurent: C'est exact.

M. Lalonde: II y a une chose, par exemple, la question de l'accord des locataires. Me Roberge me disait qu'il n'avait pas d'objection — je vous l'ai rapporté tantôt, lors d'une conversation privée — qu'on soumette la vente de ces immeubles à l'accord écrit d'une partie — moi, je dirais de la majorité — des légataires. Si on pouvait faire un amendement après le mot "vendre", à la quatrième ligne du paragraphe 1, en y ajoutant les mots "avec l'accord écrit de la majorité des légataires", serait-il utile d'ajouter "vivants au moment de la vente"? Je ne pense pas, parce qu'on ne peut pas avoir l'accord de quelqu'un qui n'est pas là. Les légistes qui sont ici, Me Jacoby, par exemple, pourraient nous corriger sur le langage approprié, mais c'est à peu près l'idée.

M. Bédard: Je n'ai aucune objection à cette formulation.

M. Lalonde: Très bien.

M. Bédard: Je n'ai pas d'autres questions à poser à Me Laurent puisque, dès ce matin, j'avais la conviction que la prohibition d'aliéner incluait nécessairement la prohibition de l'obtention d'un prêt sur hypothèque, ce qui amenait la succession dans un cul-de-sac, c'est pour cela que nous n'avions pas posé la question.

Le Président (M. Dussault): II s'agirait donc d'ajouter à la quatrième ligne de l'article 1, après les mots "à vendre", les mots "avec l'accord écrit de la majorité des légataires". C'est cela?

M. Lalonde: C'est cela.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que l'article 1 tel qu'amendé est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Lalonde: Adopté. M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Est-ce que le projet de loi no 207 tel qu'amendé est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté.

M. Bédard: Je remercie, d'une façon tout à fait particulière, le député de Bourassa de sa collaboration.

M. Lalonde: Le député de Mercier.

M. Bédard: Le député de Mercier.

Une Voix: Bourassa, c'est le gars qu'il a battu.

M. Bédard: C'est vrai, il a battu M. Bourassa, oui.

M. Lalonde: Est-ce qu'il va changer de comté encore la prochaine fois? Non? Vous êtes bien là?

M. Godin: Je voudrais remercier le Saint-Esprit qui a éclairé nos collègues du Parti libéral.

M. Lalonde: C'est un notaire.

M. Blank: C'est un notaire qui l'a fait.

M. Lalonde: Ce n'est pas le Saint-Esprit.

M. Bédard: C'est parce que l'Opposition ne savait pas que la prohibition d'aliéner entraîne la prohibition de consentir des hypothèques. Maintenant, ils sont éclairés.

M. Lalonde: Le ministre peut faire des gorges chaudes tant qu'il le veut.

M. Bédard: Je peux faire mes remarques, le projet de loi est adopté.

M. Lalonde: Oui, mais il reste que j'ai eu des informations sur l'état de l'immeuble et peut-être que le député de Mercier n'était pas là quand... Il relira le journal des Débats, c'est adopté de toute façon.

M. Godin: A la fin de la première, oui, j'étais là.

M. Lalonde: Tantôt?

M. Godin: Non, je n'étais pas là, tantôt. (15 h 15)

M. Bédard: Cela rejoignait des choses qui ont été dites ce matin.

M. Blank: C'est arrangé, il a promis des bills en anglais...

Le Président (M. Dussault): On remercie Me Laurent.

Projet de loi no 228

J'invite à se présenter devant nous les requérants relativement au projet de loi privé no 228, Loi concernant la succession de Pierre-Victor Rou-gier.

M. Bédard: M. le Président, on pourrait peut-être informer le représentant de l'Union Nationale que le projet de loi auquel il était consentant a effectivement été adopté, étant donné certaines lumières additionnelles qui ont été portées à l'attention des membres de l'Opposition officielle.

M. Fontaine: Cela me fait réellement plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): J'invite les requérants à se présenter.

M. Lefrançois (Jean): Jean Lefrançois, avocat des requérants.

Le Président (M. Dussault): Pourriez-vous aussi nous présenter les gens qui vous accompagnent;

M. Lefrançois: Avec le concours de Me Maurice Laurendeau, et M. Marcel Dubois, de Rougier Inc., et M. Mireault, du Trust général du Canada.

Je dois dire que cette requête à cette commission est faite avec le concours unanime de Rougier Inc., et du fiduciaire, Trust général du Canada; il n'y a aucune divergence entre ces deux parties...

Le Président (M. Dussault): D'accord. M. Lefrançois:... qui sont devant vous.

Le Président (M. Dussault): Merci. Est-ce que je peux vous inviter à nous expliquer brièvement le sens de la requête?

M. Lefrançois: Certainement.

Il s'agit de donations et d'un testament faits par Pierre-Victor Rougier, qui était un commerçant spécialisé dans les produits pharmaceutiques. Il venait de France et a fondé, ici, au Québec, des entreprises très connues et très rentables; il est devenu un homme très fortuné. Il est décédé en 1946. En 1932,1933 et 1934, il a fait des donations et il a également fait un testament en 1934 avec les codicilles subséquemment.

En gros, ces donations et ce testament comportaient des fiducies et comportaient possiblement, aussi, des legs particuliers dont je ne parlerai pas, parce qu'ils sont distribués, réglés, etc., mais il y avait des biens qui étaient laissés en fiducie à la Société d'administration et de fiducie ou au Trust général du Canada. Aujourd'hui, ces deux institutions ont été fondues par une loi et sont devenues le Trust général du Canada, aux droits des deux anciennes compagnies de fiducie, de sorte qu'on a un seul fiduciaire, même si c'est

issu de deux compagnies, aux termes de ces différents actes de donation.

Il y a eu peut-être sept actes de donation, le testament et les codicilles. Les biens en fiducie actuellement administrés par le Trust général du Canada se situent à environ $600 000 avec des revenus de l'ordre de $55 000 par année. La demande ne concerne pas l'ensemble des biens administrés en fiducie, mais elle concerne un capital de l'ordre de $200 000 environ et des revenus de l'ordre d'à peu près $20 000 par année. Les autres biens qui font l'objet d'autres donations ou qui font partie de ces donations ne sont pas affectés par la requête. Il y a des legs, par exemple, à la faculté de médecine de l'Université de Montréal, à la faculté de droit ou à la faculté de pharmacie ou au sanatarium Puy-de-Dôme ou à différentes institutions qui ne sont nullement affectées, ou même à la caisse de retraite des employés de Rougier Inc., qui a déjà fait l'objet, d'ailleurs, d'un projet de loi privé, il y a peut-être 20 ans de cela, devant cette assemblée, et cela ne fait pas l'objet de la requête.

Donc, on parle substantiellement d'une partie seulement de ces donations. Pour les deux parties qui sont concernées par la requête, c'étaient des avantages aux hôpitaux catholiques de langue française de la ville de Montréal. Dans trois donations et dans le testament, on a des avantages qui étaient créés en faveur des hôpitaux catholiques de langue française de la ville de Montréal.

D'autre part, dans deux donations, il y a des avantages directs ou indirects qui sont créés en faveur de l'hospice de Saint-Germain-Lembron, qui se trouve dans le Massif central, en France, c'est un hospice pour vieillards. Cette requête devant vous ne concerne que ces deux dispositions, les donations qui étaient faites pour les hôpitaux catholiques de langue française de la ville de Montréal et pour l'hospice de Saint-Germain-Lembron.

Quant aux hôpitaux catholiques de langue française de la ville de Montréal, depuis 1971, année de l'adoption de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, on doit dire que le caractère confessionnel de tous les hôpitaux de la région de Montréal et de tous les hôpitaux de la province a été considérablement affecté. Effectivement, si on regarde cette loi, on voit que sur les quatorze membres du conseil d'administration, il y en a quatre au maximum qui peuvent être nommés par les représentants de l'ancienne corporation qui était une corporation religieuse et, pour le reste, ce seront des représentants du gouvernement, des patients, des médecins, de ceci, de cela. Enfin, le conseil d'administration est devenu en très grande majorité non confessionnel. La nouvelle corporation qui administre les hôpitaux doit se conformer à cette nouvelle loi, elle doit faire ses budgets, elle est assujettie constamment à des approbations gouvernementales et, à toutes fins utiles, elle est devenue une corporation laïque, même si l'ancienne corporation qui contrôlait les immeubles a le droit de nommer jusqu'à concurrence d'un peu moins du tiers des administrateurs. c'est la limite de la confessionnalité de ces hôpitaux.

En pratique, j'ai même lu un article sur ce sujet, à savoir que c'était assez clair que, maintenant, nous avions des hôpitaux qui étaient laïques. Tous les hôpitaux connus de la région de Montréal, sont devenus à toutes fins utiles des hôpitaux laïques. Il y a un motif de modification, parce qu'il y avait une intention d'avantager des oeuvres de la santé de la part du donateur et du testateur et cette intention ne peut plus être réalisée.

Pour ce qui est de ces dispositions, qui représentent peut-être $14 000 par année de revenus actuellement, ce que nous demandons dans la requête, c'est qu'étant donné ce changement et cette impossibilité d'atteindre uniquement le but et, d'autre part, le fait qu'il y a eu depuis 1930 une extension substantielle de la recherche en dehors de l'île de Montréal, autrefois on peut dire que tout ce qui se faisait au point de vue développement était surtout concentré à Montréal, mais actuellement cela n'est pas le cas, cela se fait à Sherbrooke et un peu partout, ce que nous demandons c'est donc que cela soit donné à toute corporation à but non lucratif de langue française oeuvrant dans la province dans le domaine de la santé. C'est la première demande du projet de loi.

Le Projet de loi affecte également des dispositions à l'hospice de Saint-Germain-Lembron, qui est un hospice pour vieillards dans le Massif central en France. Quant à cette disposition, ce qui est arrivé, c'est que le donateur a fait une donation de $20 000, c'est la donation du 19 novembre 1931, en disant que les revenus devaient être administrés par le fiduciaire, le Trust Général, et que les revenus nets devaient être versés à l'hospice mais ne devaient jamais dépasser 25 000 francs.

Or, il y a eu une dévalutation de l'argent français, 25 000 francs sont devenus 250 francs nouveaux, aujourd'hui, cela représente $60. En pratique, l'hospice reçoit actuellement $60 par année et il y a eu une accumulation considérable, les $20 000 valent peut-être $29 000 ou $30 000, parce qu'il y a eu quand même quelques investissements de capital, ces obligations ont pris un peu de plus-value et cela vaut à peu près $30 000 aujourd'hui, ce capital rapporte peut-être $2 800 environ, et on distribue $60 par année. Il y a donc accumulation considérable. Il s'est créé, de cette façon, avec les années, un capital de $50 000 qui ne sert à aucune fin.

Non seulement cela, le donateur avait tellement peur que cette donation de 25 000 francs français ne soit pas suffisante, que le capital ne soit pas suffisant, qu'il a créé dans une autre donation une sécurité pour assurer ce qui est aujourd'hui $60 par année. Cette sécurité n'a plus d'objet. C'est simplement comme une garantie, il n'y a pas d'argent qui sort de cette autre donation. C'est une garantie pour payer ce qui, aujourd'hui, est évalué à $60 000.

Nous suggérons, quant à ce deuxième aspect, de dire: Voici, vous avez une donation qui vaut

$30 000, en gros, les revenus nets de ces $30 000, à l'avenir, pour être plus simple, on va les verser à l'hospice de Saint-Germain-Lembron chaque année. Au lieu de $60, il va recevoir $2800 ou $2700, ce qui est déjà une amélioration considérable, par rapport aux $1000 à peu près que représentait le legs du testateur à l'époque, si on tient compte de l'inflation et de différents facteurs; c'est déjà une plus-value assez importante.

Quant au capital accumulé de $50 000, on a dit qu'on ne pouvait pas l'utiliser, on n'avait pas le droit, il ne fallait pas donner plus que 25 000 francs français ou 250 nouveaux francs, on demande qu'il soit versé au legs universel et pour être évidemment administré de la même façon, c'est-à-dire pour les oeuvres de santé à but non lucratif de langue française dans la province de Québec. C'est le but de la requête.

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie. Y a-t-il, avant l'appel de l'article 1, des remarques préliminaires?

M. Bédard: Peut-être pas des remarques préliminaires, mais sûrement quelques questions.

M. Lalonde: Seulement une remarque pour établir—Me Lefrançois et moi étions associés à l'ancien bureau où j'étais, chez Geoffrion et Prud'homme — que les clients que vous représentez n'étaient pas là à ce moment?

M. Lefrançois: Non, en aucune façon, et les procureurs initiaux dans la requête, tel qu'il apparaît au dossier, n'étaient pas à notre bureau.

Le Président (M. Dussault): J'appelle l'article 1. M. le ministre.

M. Bédard: Je voudrais savoir de Me Lefrançois, à l'heure actuelle, à quels hôpitaux sont versées des sommes.

M. Lefrançois: Actuellement, l'argent est versé à l'hôpital Sainte-Justine, à l'Hôtel-Dieu, à l'hôpital Notre-Dame. Principalement, ces récentes années, cela a été versé à l'hôpital Sainte-Justine.

M. Bédard: Ces sommes sont utilisées à quelles fins, au niveau de ces hôpitaux, selon votre... connaissance?

M. Lefrançois: Elles sont utilisées par l'hôpital Sainte-Justine aux fins qu'il désire, parce que...

M. Bédard: C'est bien clair qu'il peut l'utiliser comme il le veut de par les dispositions du testament, mais je vous demande si vous avez l'information pour nous dire à quelles fins il sert et quels sont les montants aussi.

M. Lefrançois: Je sais en pratique qu'une partie de l'argent a été utilisée pour transporter des enfants infirmes jusqu'à l'hôpital Sainte-Justine, parce qu'il y avait un problème de transport de ces enfants. Je sais que c'est une des parties de l'argent. Quant à l'hôpital, il a créé une fondation. L'autre partie de cet argent a été utilisée pour fins de recherche, je crois, je ne pourrais pas vous le dire spécifiquement. Je sais que l'argent n'a pas été dépensé autrement qu'en le versant aux hôpitaux. Ce que les hôpitaux en ont fait, c'est très difficile de vous en rendre compte, parce que je ne le sais pas personnellement.

M. Bédard: Vous comprendrez que je dois poser la question. Si vous ne pouvez pas y répondre, ce n'est pas moi qui vais vous en faire reproche. Si vous le pouvez, ça apporte un éclairage de plus pour les membres de la commission.

Pouvez-vous me dire quels sont les montants versés pour l'année présente à Sainte-Justine, à l'hôpital Notre-Dame et à l'Hôtel-Dieu?

M. Lefrançois: M. Mireault, du Trust Général, m'informe que les derniers versements ont été de $7000 à l'hôpital Sainte-Justine et de $5000 à l'hôpital Notre-Dame de Montréal.

M. Bédard: Pouvez-vous me dire si les hôpitaux en question, les conseils d'administration, etc., les autorités sont au courant de la présentation de ce projet de loi et s'ils sont d'accord avec ce projet qui aurait pour effet, à première vue, de les rendre moins certains d'obtenir certaines sommes qui leur étaient dévolues dans le passé?

M. Lefrançois: Spécifiquement, non, je ne peux pas dire qu'il y a eu d'avis en ce sens. Evidemment, il y a eu des avis généraux, mais il n'y a pas d'avis spécifique. Mais je dois dire qu'aucun de ces hôpitaux n'a de droits acquis; en aucune façon spécifique, ils n'avaient de droits acquis. Cela pouvait tout être donné en vertu des donations à un même hôpital pendant quinze ans et à aucun autre hôpital.

M. Bédard: Sauf, que globalement, ces hôpitaux, sans les identifier, ceux que vous avez identifiés, ont quand même un droit acquis de penser pouvoir recevoir des montants, de savoir qu'il y a au moins un fonds qui peut être à leur disposition. (15 h 30)

M. Lefrançois: C'est cela. Si je peux me permettre...

M. Blank: Je pense que l'explication de l'avocat établit que, maintenant, on ne peut pas suivre les termes du testament, parce qu'il n'y a plus d'hôpitaux catholiques. C'est là le problème.

M. Lefrançois: Effectivement, si je peux me permettre, M. le ministre...

M. Bédard: Sauf qu'à l'heure actuelle, votre projet de loi a pour effet de faire passer cet argent qui était donné à des hôpitaux à une faculté de médecine.

M. Lalonde: Ou à une corporation à but non lucratif de langue française oeuvrant dans le domaine de la santé, cela peut être les mêmes hôpitaux.

M. Lefrançois: Cela peut être les mêmes hôpitaux, mais, si je peux me permettre...

M. Bédard: Je voudrais terminer mes questions et peut-être que l'Opposition pourra ensuite poser les miennes. Je dois vous dire que je pose ces questions simplement pour avoir plus d'éclairage...

M. Lalonde: On veut vous aider.

M. Lefrançois: Si je peux me permettre, M. le ministre, sur ce point, je conçois que si, actuellement, les hôpitaux avaient un droit acquis, même comme groupe, et, à ce moment-là, il s'agissait de changer le bénéficiaire de telle partie à telle autre, je crois qu'on pourrait me demander un consentement, parce qu'on dirait: Ces gens ont un droit acquis. Je prends la position ferme que ces gens n'ont, même comme groupe, aucun droit acquis, parce qu'il existe plus d'hôpitaux catholiques, et cela semble très clair. Ce n'est pas comme si quelqu'un avait un legs et qu'on essayait de le diminuer. Il n'a plus de droit, actuellement, même comme catégorie, même comme classe. Je pourrais vous signaler les dispositions de la Loi des services qui, carrément, affectent le droit, de sorte qu'on n'a plus, en aucune façon, des bénéficiaires inscrits devant nous.

M. Bédard: Pourquoi élargissez-vous la possibilité jusqu'à faire des dons à une faculté de médecine plutôt que de laisser cela dans le réseau des hôpitaux?

M. Lefrançois: D'une part, à l'origine, il s'agissait d'hôpitaux catholiques de langue française de Montréal. Or, je pense...

M. Bédard: J'aurais peut-être une petite question sous-jacente, si vous me permettez. Vous dites des hôpitaux catholiques de Montréal. Pourquoi, alors que c'était circonscrit à Montréal, élargissez-vous cela à l'ensemble du Québec?

M. Lefrançois: II y a deux raisons. D'une part, c'est parce que, comme je le dis, actuellement, le but de la fondation, comme tel, ne peut plus être rempli; c'est une chose qui nous semble assez claire, puisqu'il n'y a plus de bénéficiaire devant nous. Donc, il s'agit de trouver une autre fin à ces sommes. Pourquoi une faculté de médecine de langue française du Québec? Quel était le but du donateur? Je pense qu'il y avait deux buts: d'une part, c'était d'encourager la santé, la recherche, et aussi, dans une certaine mesure, je crois qu'il voulait que la compagnie qu'il avait édifiée, — la compagnie Rougier Inc., par son conseil d'administration, ait un certain pouvoir— au point de vue prestige et soit associée à des oeuvres du domaine de la santé.

Au point de vue recherche, il se fait de la recherche dans les universités tout autant que dans les hôpitaux; cela, c'est la raison d'étendre les hôpitaux aux universités. Je considère que les facultés de médecine font de la recherche, elles ont même des hôpitaux associés, on est donc vraiment dans ce domaine de la recherche médicale. D'autre part, pourquoi sortir de la région de Montréal? Comme je l'ai mentionné et comme c'est allégué dans la requête, en 1930 et 1931, ce qui se faisait au point de vue recherche et développement en médecine — il faut considérer l'intention du donateur, qui voulait associer sa compagnie aux développements médicaux — se faisait surtout à Montréal. On peut dire qu'à peu près 90% ou 95% de tout ce qui se faisait au point de vue développement était concentré dans la métropole. A cause, évidemment, des subsides gouvernementaux, à cause de toutes sortes de développements, on peut dire que les centres universitaires en dehors de Montréal, soit Sherbrooke, soit Laval, se sont considérablement développés au point de vue médecine, et leur travail peut être aussi valable que ce qui se fait à Montréal.

Pourquoi se limiter maintenant uniquement à ce qui se fait dans la région de Montréal? Je pense que si le docteur vivait aujourd'hui, si on pouvait appliquer son but intégralement, on ne serait pas ici devant vous, on n'aurait pas le droit de le changer. Mais on est devant une situation où le but poursuivi comme tel ne peut pas être atteint, parce que le legs a carrément pris fin, parce que le bénéficiaire comme tel ne peut plus le recevoir. Il faut donc se placer un peu dans l'intention du donateur et voir la recherche, voir les développements qui se font dans le domaine de la santé. Je crois que les limiter à la région de Montréal, vu les développements depuis les années trente, serait avoir une vue un peu étroite du problème.

M. Bédard: Si le projet de loi n'était pas accepté, à qui seraient données les sommes pour l'année qui vient, ou l'an prochain?

M. Lefrançois: A mon humble opinion, elles ne pourraient pas être données.

M. Bédard: Vous les avez données, je ne comprends pas.

M. Lefrançois: Ecoutez, c'est...

M. Bédard: Est-ce que vous voulez nous dire que, jusqu'à maintenant, elles ont été données illégalement? Cela n'est pas le cas du tout.

M. Lefrançois: Depuis 1971, depuis que je me suis penché sur ce problème, mon opinion, avec la doctrine que je peux citer, M. le ministre, il semble clair que ces corporations sont devenues des corporations laïques, donc, comme telles ne peuvent pas recevoir...

M. Bédard: Vous savez, il y a le domaine purement légal, juridique...

M. Lefrançois: Si on peut jouer technique...

M. Bédard: II y a aussi, je pense, au niveau des membres de la commission parlementaire le souci, cela n'est jamais très facile, d'essayer d'identifier le mieux possible la volonté du testateur.

M. Lefrançois: Je le reconnais...

M. Bédard: II semble que, jusqu'à un certain temps, quand même, — c'est votre opinion, entre parenthèses — jusqu'à la Loi des services sociaux, la volonté du testateur est très clairement exprimée. C'est votre prétention que la nouvelle Loi des services sociaux a eu pour effet de changer la volonté au testateur d'une certaine façon, de venir en contradiction avec la volonté du testateur. Je pense que c'est ce que nous avons à analyser aujourd'hui, les membres de la commission. D'autre part, vous nous dites que le testateur voulait voir son nom associé au domaine de la santé. Ce n'est peut-être pas spécifique, vous dites plus spécialement au domaine de la recherche, dans le domaine de la santé. Est-ce que vous voulez dire par là qu'il ne se fait aucune recherche dans les hôpitaux?

M. Lefrançois: Certainement pas et...

M. Bédard: Non, les sommes — comme il s'en fait — dont vous avez fait état peuvent être données, à ce moment, en tenant compte de cet aspect, je ne parle pas de l'aspect confessionnel et de l'aspect francophone, mais elles peuvent être orientées vers les départements de recherche qui peuvent encore exister quand même dans nos hôpitaux.

M. Lefrançois: Si la requête était accordée, il n'y a rien qui empêcherait évidemment le fiduciaire, avec le conseil d'administration, de donner des sommes aux hôpitaux, sous la seule réserve qui suit. Je dois simplement mentionner qu'en même temps que la Loi des services de santé a été adoptée, il y a toutes sortes de règlements qui ont été adoptés, à savoir que l'hôpital ne peut pas accepter d'argent, de donations sans l'approbation du gouvernement, sans dire ce qu'il va en faire. Autrement dit, les hôpitaux ont perdu un contrôle, indépendamment du caractère laïque. Quand vous dites: On pourrait donner, mais on pourrait donner avec des mécanismes beaucoup plus lourds que ce qui existait avant 1971 et parce qu'il y a des fonds spéciaux qui doivent être créés, je peux me référer aux règlements adoptés en vertu de la Loi des services de santé et à la loi elle-même.

M. Blank: II y a une chose à ce moment. Il y a un précédent pour cette sorte de projet de loi privé. En 1974 ou 1975 cette commission a passé une loi un peu dans le même sens. L'ancien ministre qui était en charge est ici actuellement. Je dois dire...

M. Bédard: Je suis très heureux de saluer mon ancien collègue, M. Choquette, mais, avant de dire que tel projet de loi était semblable à celui qu'on discute...

M. Blank: C'est de la jurisprudence.

M. Bédard: Non, j'aimerais bien que vous nous disiez d'abord quel projet de loi c'est, pour que les membres de la commission aient l'occasion de le voir et constatent jusqu'à quel point c'est semblable.

M. Blank: Oui, je vais vous l'expliquer, c'est pour cela que j'ai demandé la parole. Je ne me souviens pas du nom, mais je vais vous dire exactement ce qui était dans la loi et je suis certain que votre ministère va le trouver.

C'était un monsieur de la ville de Québec, qui a créé une donation avec le Royal Trust, qui donnait un revenu annuel de $100 000. Dans son testament, il disait que c'était pour accorder des bourses aux jeunes étudiants anglophones protestants de la ville de Québec pour aller à l'Université Queen's. Dans la loi privée, présentée par Me Stein, de Québec, cela était changé pour inclure tous les enfants de n'importe quelle langue et de n'importe quelle religion pour toute la province de Québec. Ceci s'est passé ici.

M. Bédard: Je n'en ai pas à l'ensemble du Québec...

M. Blank: L'ensemble du Québec... la langue et la religion aussi.

M. Bédard: ... ou aux questions de langue et tout cela, mais permettez-moi de vous dire que, durant les trois ans que j'ai été dans l'Opposition, je sais une chose...

M. Blank: Peut-être que...

M. Bédard: ... et je vais vous ajouter quelque chose, par exemple, que vous n'avez pas ajouté, c'est que, lorsqu'on avait à passer un projet de loi privé qui pouvait toucher des intérêts de légataires, comme c'est le cas présentement, je ne me rappelle pas en avoir accepté un seul, si nous n'avions pas la conviction que les intéressés étaient informés. D'ailleurs, ce matin, on a eu une discussion dans ce sens, la question était très importante. Il faut avoir la preuve, autant que c'est possible, que, d'une part, les personnes intéressées ont été informées et que, deuxièmement, elles sont consententes.

Or, dans le cas présent, on nous dit: les personnes intéressées ont été informées, les légataires intéressés ont été informés, mais les hôpitaux en question savaient-ils par avis, que vous présentiez ce projet? Vous n'êtes pas en mesure de nous dire s'ils auraient des objections à formuler.

M. Lefrançois: Non.

M. Bédard: Cela me semble, par l'expérience du passé, un élément de toute première importance. J'étais presque disposé à vous dire dès le début, à partir du moment où vous nous avez dit que vous n'étiez en mesure de nous dire si les hôpitaux en question consentaient ou pas ou avaient des représentations à faire ou pas, j'ai été tenté de vous suggérer de suspendre le projet de loi de manière que nous sachions ce que ces institutions peuvent avoir à dire, si elles sont d'accord avec ce projet de loi.

M. Lefrançois: Comme je le mentionnais à M. le ministre, si ces gens étaient légataires aujourd'hui et s'il s'agissait de leur enlever des biens, je serais entièrement d'accord avec votre position.

M. Bédard: Je comprends, mais on en est sur la position juridique, je respecte votre position juridique, et il reste que, dans le passé, il y a des institutions très précises qui ont reçu des sommes. Il me semble qu'il y aurait eu — je vous le dis parce que je le pense — avantage pour les requérants à ce qu'au moins les institutions qui ont déjà bénéficié d'une aide quelconque, à partir de ce fonds, soient informés du changement et qu'on s'assure si, oui ou non, elles avaient des objections à formuler. Cela me semble fondamental.

Le Président (M. Dussault): II y avait M. le député de Rosemont qui avait demandé la parole. Il est le parrain du projet de loi, le pilote en tout cas.

M. Paquette: M. le Président, sur...

Le Président (M. Dussault): C'est une question de règlement.

M. Bédard: M. le Président, avec votre permission, le député se référait à un projet de loi tout à l'heure, la succession Frank Carel. La décision consistait à adopter cette loi, parce que portant sur un projet de loi privé. Le comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation a jugé, après l'entrée en vigueur de la loi, que cette modification était contraire aux intérêts des protestants.

M. Blank: Cela ne change rien. Il est intéressant de noter que, dans ce projet de loi, les ministériels n'étaient pas prêts à accorder le projet de loi. Cela s'est fait après les pressions de l'Opposition, dirigée par le député de Maisonneuve, qui a convaincu le ministre de l'adopter.

M. Bédard: Mais ça revient à dire que chaque cas doit s'évaluer à son propre mérite et l'on ne doit pas essayer de faire de la politique avec ça ou parler de discrimination.

M. Blank: Mais il faut dire que les moeurs et les idées en matière de religion ont changé depuis 1931. On ne parle pas de discrimination, c'est le contraire, on veut ouvrir l'affaire. C'est le comité protestant, qui ne prête pas à la discrimination qui veut l'ouvrir.

M. Bédard: Je puis vous dire que les hôpitaux qu'on vient de mentionner, les légataires seraient les hôpitaux anglophones et de religion protestante, ou encore, français et de religion catholique, ça ne change en aucune façon le fond de la question elle-même, qu'on doit évaluer à sa juste mesure. (15 h 45)

M. Lefrançois: Sauf qu'il y aurait une question d'intention du testateur, évidemment, à ce niveau. Est-ce que je peux me permettre d'ajouter que c'est, d'une part, le règlement auquel je me référais tout à l'heure où on parlait de fonds de dotation. "Tout établissement public qui désire inscrire, ou continuer à inscrire — je lis le règlement — à ces états financiers un fonds de dotation ou à destination spéciale ou qui sollicite l'autorisation de transférer l'administration en tout ou en partie d'un tel fonds, doit obtenir l'autorisation du ministre." Il y a cet aspect particulier dans la loi et je citais un article très volumineux sur la responsabilité hospitalière paru dans le cahier de droit de l'Université Laval, où on dit: "Donc, ce qu'il faut retenir ici, après analyse de toute la loi, c'est que la corporation hospitalière d'un établissement public est, selon l'expression adoptée, une corporation publique et laïque par opposition à une corporation privée et religieuse."

Il me semblait assez clair que nous n'avions plus de corporations religieuses devant nous, à la suite de la loi et je pourrais ensuite citer, évidemment, tous les articles de la loi qui disent carrément qu'on a une corporation publique.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Rosemont, je vous donne la parole, parce que votre nom apparaît sur le projet de loi et, dans l'esprit de notre règlement, on donne la parole habituellement à celui qui parraine un projet de loi au départ. M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, je suis sensible aux préoccupations du ministre, quant à ce projet de loi. Personnellement, j'aurais souhaité qu'on ait un accord des institutions concernées. Cependant, je pense qu'elles sont au courant de l'existence du projet de loi et il n'y a pas d'opposition qui s'est manifestée. Il y a quand même ça.

J'ai l'impression qu'on doit juger de ce projet de loi sur trois facteurs principaux: la question de légalité et d'applicabilité, du respect de la volonté du testateur et la question d'opportunité et d'utilité des fonds. Je commence par ce dernier point. Vous allez constater que je suis tout à fait absent de conflit d'intérêts dans ce projet de loi, puisque, parmi les hôpitaux qui reçoivent actuellement des fonds, on a remarqué une absence, celle de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont.

M. Lalonde: C'est le genre de conflit d'intérêts qu'on aime bien quand on est député ou qu'on recherche.

M. Paquette: D'autre part, M. le Président...

M. Marcoux: Peut-être qu'ils ensevelissent le projet de loi, une fois adopté!

M. Paquette: Pas plus. M. Marcoux: Peut-être.

M. Paquette: Je n'en sais rien, ça dépendrait de la volonté des fiduciaires et je pense que ça doit rester de la volonté des fiduciaires. D'autre part, M. le Président, je suis encore moins en conflit d'intérêts, puisque l'article 1 a pour effet d'étendre le nombre d'organismes susceptibles de recevoir les fonds au-delà de la région de Montréal. Sur le plan de l'utilité des fonds — je peux me tromper, mais je fais le pari — je pense que les fiduciaires voudront orienter les fonds en termes de complément aux fonds que reçoivent déjà les institutions.

La région de Montréal n'est pas parmi les moins privilégiées en termes d'institutions de santé et d'institutions de recherche. On peut penser — je tombe sur l'autre point — que la volonté du fiduciaire était de jouer un rôle complémentaire à ce qui existait dans le temps. Dans le temps, la situation n'était pas la même qu'aujourd'hui. Aujourd'hui, les institutions de santé se sont développées dans la région de Montréal et on peut supposer qu'enfin, il y aurait peut-être lieu de donner la chance aux fiduciaires d'orienter les fonds vers d'autres régions ou d'autres institutions qui pourraient en avoir plus besoin.

D'autre part, dans le testament, on parlait d'hôpitaux catholiques de langue française. Il faut dire qu'à ce moment-là, les deux termes étaient à peu près synonymes, mais aujourd'hui il est bon de conserver, dans le projet de loi, qu'il s'agit d'institutions de langue française. Encore là, il y a un argument d'opportunité et d'utilité, parce que je pense que, généralement, les hôpitaux de langue anglaise sont bien pourvus en termes d'organismes de dotation qui peuvent compléter les fonds de l'Etat mis à leur disposition. Par conséquent, je pense que c'est aussi une question de respect de la volonté du testataire. Il y a l'argument de légalité et d'applicabilité aussi qui amène à faire des changements. Je ne sais pas si le requérant serait d'accord. Je suis assez peu, n'étant pas moi-même de formation juridique, à l'aise dans ces choses, M. le Président, je le dis en toute humilité, à plus forte raison, puisque c'est connu, si ce n'était pas connu, peut-être pas.

M. Ciaccia: II est humble seulement quand...

M. Paquette: En termes d'applicabilité, est-ce qu'il ne serait pas possible actuellement, pour quelqu'un, de contester une décision des fiduciaires? J'aimerais le demander au requérant. Je pense que vous avez continué à verser des fonds depuis l'application de la nouvelle Loi des services de santé, mais est-ce qu'il ne pourrait pas arriver qu'à un moment donné un organisme, se sentant défavorisé, disant: Nous n'en avons pas eu et l'autre organisme l'a eu, pourrait contester et bloquer l'action des fiduciaires?

M. Lefrançois: Sur ce plan, si je peux me permettre de répondre à cette dernière question du député, évidemment la loi parle pour l'avenir. La loi n'a pas l'effet de ratifier quoi que ce soit.

Le Président (M. Dussault): Me Lefrançois, pourriez-vous avancer le micro, s'il vous plaît?

M. Lefrançois: La loi parle pour l'avenir, elle n'a pas pour effet de ratifier quoi que ce soit qui ait pu être fait depuis 1971. On ne demande pas à cette Assemblée un blanc-seing pour ce qui a été fait, pour déclarer que telle chose a été... Ce serait une autre chose. On demande, à partir de ce jour, d'autoriser de distribuer. S'il y a eu des donations qui ont été faites dans le passé, pendant les derniers six ans, à une fin qui n'était pas tout à fait celle imposée par le testateur, qui n'était pas tout à fait permise, c'est une autre chose. Mais je soumets que la loi est pour l'avenir et n'a aucun but de ratification. Je peux me permettre simplement de me référer une fois de plus à la Loi des services de santé, qui dit clairement que tout établissement est public ou privé, et qu'est un établissement public tout établissement constitué, etc. Alors, les corporations religieuses, les corporations qui existaient autrefois, sont toutes modifiées et sont assujetties à l'application de cette loi, d'une façon globale. Là, on a le conseil des centres hospitaliers — tous ces hôpitaux de Montréal sont des centres hospitaliers — qui est administré par un conseil formé des membres suivants, et là, on a toute la désignation: deux personnes majeures élues par l'assemblée des usagers, deux personnes nommées par le lieutenant-gouverneur en conseil, etc., deux personnes élues par le conseil consultatif. Il y a toute une série de dispositions qui fait que le contrôle religieux est complètement disparu de ces organismes et, en pratique, c'est ce que, d'ailleurs, messieurs Boucher, dans leur article, ont constaté.

Le Président (M. Dussault): Je sens que Me Lefrançois aimerait être entendu de M. le ministre et de M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je vais suspendre trente secondes, si vous...

M. Bédard: Je dois vous dire très honnêtement qu'en politique on apprend à faire deux choses à la fois. J'écoutais quand même très bien, mais j'avais quelques propos à tenir au député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Dussault): Pendant ce temps-là, je constatais un peu de malaise chez Me Lefrançois. J'essayais de trouver la solution à tous les problèmes.

M. Bédard: Nous aussi, nous essayons de trouver une solution, M. le Président.

M. Lefrançois: Je dois dire à M. le ministre et à M. le Président qu'évidemment, si cette Assemblée trouvait qu'elle désirait le restreindre, parce qu'elle a évidemment ce pouvoir au stade de la présentation d'un projet de loi privé, par exemple, à toute oeuvre située dans les limites de l'île de Montréal, de l'île Jésus et dans un rayon de 25 ou de 50 milles de la ville pour couvrir le Montréal métropolitain, je n'ai aucune espèce d'objection. Le souci du fiduciaire et de la compagnie devant vous est effectivement la situation suivante: ce n'est pas un problème litigieux, selon nous, c'est un problème très clair suivant la loi, suivant les règlements, suivant la doctrine, qu'il n'y a plus d'hôpitaux catholiques et qu'on doit trouver une autre fin à ces revenus.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, j'aimerais donner mon opinion. Je pense qu'on a posé plusieurs questions qui nous ont éclairés sur l'ensemble de la situation. La première chose que je voulais dire, c'est que, face à un tel projet de loi, le premier élément qu'il faut retenir, je pense que c'est le respect de la volonté du testateur. Dans vos attendus, dans votre projet de loi, au deuxième paragraphe, vous nous dites: Qu'il a stipulé dans ces actes que le revenu de tout excédent ou surplus, détenu par ses légataires fiduciaires sera versé annuellement aux hôpitaux catholiques de langue française de la ville de Montréal... Le seul élément qui n'existerait plus serait le fait que ces hôpitaux ne seraient plus catholiques.

Vous ajoutez cependant que, selon vous, cela devrait être donné pour de la recherche. Or, cela ne semble pas clair dans le testament, ou du moins dans les attendus que vous nous donnez, quoique je pense qu'on pourrait toujours, en donnant aux hôpitaux, spécifier que ce sera pour de la recherche en milieu hospitalier.

M. Lefrançois: Si je peux me permettre, M. le député, quand je parlais de recherche, évidemment, il faut considérer qu'on avait la compagnie Rougier Inc., qui était contrôlée par le donateur, et que le donateur voulait associer cette compagnie à ses dons. Il y a deux buts.

M. Fontaine: C'est indiqué dans le testament?

M. Lefrançois: Non, c'est une compagnie de produits pharmaceutiques, c'est dans cet esprit. Evidemment, cela allait aux hôpitaux sans fins spécifiques.

M. Fontaine: Je constate que, depuis 1932 ou 1933, on a toujours donné ces sommes aux hôpitaux de la ville de Montréal, et vous nous disiez encore tout à l'heure que $12 000 ont été donnés l'an dernier à l'hôpital Sainte-Justine et à un autre hôpital dont je n'ai pas retenu le nom. Partant de là, je pense que la volonté du testateur est encore respectée aujourd'hui, sauf que vous nous dites que, légalement, les hôpitaux ne sont plus des hôpitaux catholiques. Je pense encore que la majorité des usagers des hôpitaux de langue française de la ville de Montréal sont probablement encore des catholiques et, partant de là, la volonté du testateur est peut-être encore respectée aujourd'hui.

Ce qu'il y aurait peut-être comme suggestion, plutôt que de demander de donner cela à d'autres organismes, ce serait peut-être de faire modifier les termes, par cette loi que vous présentez, en enlevant le mot "catholique" pour s'accorder avec la loi d'aujourd'hui. Peut-être qu'à ce moment-là, on respecterait et la loi actuelle et la volonté du testateur. C'est mon opinion.

Il y a également le fait que les hôpitaux en question n'aient pas donné leur opinion et qu'on n'ait pas pris le soin, comme on l'a vu ce matin, de demander aux légataires de nous donner un écrit de leur consentement. J'aurais aimé que les hôpitaux en question nous donnent leur opinion quant à ce projet de loi.

Pour ce qui est des autres articles, je pense qu'il n'y aurait pas d'objection.

M. Lefrançois: M. le député, si vous me permettez, en soi, je n'ai aucune objection à ce que ce soit donné aux hôpitaux de langue française de Montréal, de la ville de Montréal, on pourrait laisser "la ville de Montréal", même si on a un nombre très restreint d'hôpitaux. Je dois signaler, comme je l'ai signalé à M. le ministre tout à l'heure, que les règlements alourdissent maintenant le mécanisme, parce que les dotations devront être approuvées par le ministre, le budget devra être approuvé par lui. Evidemment, on a des contraintes sur ce plan. Personnellement, le but principal du fiduciaire, c'est que, légalement, suivant la loi, suivant la doctrine, suivant tout le monde, il ne semblait pas qu'il s'agissait d'un cas de jugement déclaratoire, ici; s'il avait été question de jugement déclaratoire, on serait allé devant les tribunaux. Il s'agit d'un cas où c'était parfaitement clair d'après la loi que c'était une institution publique. (16 heures)

M. Bédard: Une question de profane, si c'était si clair que cela juridiquement, comment se fait-il que cela fait sept ans qu'on vit avec cette situation et qu'aujourd'hui on pense qu'il y a une urgence à la changer?

M. Lefrançois: Si je peux me permettre, je n'ai pas été consulté il y a sept ans sur ce problème, je n'ai pas été appelé à regarder la Loi des services de santé à ce niveau, mais je peux dire à M. le ministre que, selon moi, les dispositions sont claires; on dit que c'est une corporation publique, il n'y a plus de corporation laïque.

M. Bédard: Je suis d'accord que c'est bien difficile d'essayer d'évaluer vraiment ce qu'a été la volonté du testateur au moment...

M. Lefrançois: C'est une autre chose, M. le ministre.

M. Bédard: ... où il a fait...

M. Lefrançois: Si je peux me permettre, d'une part, il me semble qu'aujourd'hui le legs, tel que défini, ne peut pas être appliqué.

M. Bédard: Je vous le dis très honnêtement, vous pouvez continuer, j'écoute quand même.

M. Lefrançois: En Angleterre, on a une doctrine: les tribunaux peuvent appliquer ce qu'on appelle le "si près", ils peuvent modifier pour trouver le but le plus près. Cela n'existe pas ici. Si nous n'avons pas le but, le legs ne peut plus être utilisé comme tel. Evidemment, le rôle des projets de loi privé est de remplacer ce rôle judiciaire qui existe en Angleterre, mais qui n'existe pas chez nous. C'est d'appliquer les sommes au but le plus près, tel que le donateur le ferait.

Je ne m'oppose pas à ce que cela soit donné aux hôpitaux de langue française de la ville de Montréal, en autant que cela puisse être appliqué.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Rimouski.

M. Marcoux: Je vais être très bref, parce que je suis essentiellement d'accord avec ce que le député de Nicolet-Yamaska a dit. Quand on regarde l'intention du légataire, je pense que c'était clair. Dans ce temps-là — j'ai vécu dans la région de Montréal — quand on parlait des hôpitaux de Montréal, on parlait des hôpitaux catholiques. L'objet était bien identifié. Je pense que, suite à la modification qu'il y a eu à la loi de 1971, il serait normal que vous demandiez un amendement faisant en sorte que la loi vous permette de les verser aux mêmes institutions qui étaient catholiques et ne le sont plus. Surtout par rapport à la quantité des sommes impliquées, il y aurait lieu de les remettre possiblement à une société sans but lucratif, étendre cela aux universités, possiblement aux hôpitaux qui les reçoivent déjà. Je pense que c'est étendre l'objet inutilement. Il suffit de dire que les hôpitaux visés, l'objet qui était visé, même s'ils ne sont plus catholiques je ne sais pas la formulation juridique pour le donner, mais je suis entièrement d'accord avec le député de Nicolet-Yamaska.

M. Lefrançois: Comme je l'ai mentionné, le but principal de ma requête, c'est que les sommes soient utilisées et ne restent pas en l'air, qu'elles soient utilisées à une fin utile ou à une autre fin utile, cela n'est pas le but principal.

M. Marcoux: II y a un autre aspect qui n'a pas été touché jusqu'à maintenant. Vous avez dit: La loi 71, la Loi de la santé et des services sociaux, fait des contraintes nouvelles aux hôpitaux qui reçoivent des dons ou des choses comme cela. Je pense que c'est à l'hôpital, à ce moment, à trouver la solution sous forme de fondation, de service, de société sans but lucratif, parce que les hôpitaux ont des pouvoirs de ce côté. Mais je pense que le but principal ne doit pas être écarté.

M. Fontaine: Cela me surprendrait d'ailleurs que le ministre des Affaires sociales refuse un don.

M. Lalonde: M. le Président!

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Marcoux: Ce serait masochiste un peu.

M. Lalonde: Surtout dans ces temps difficiles où les services essentiels...

M. Marcoux: Oui, vous nous avez bien préparés...

M. Lalonde: ... ne sont pas toujours assurés dans nos hôpitaux.

M. Bédard: II ne faudrait peut-être pas commencer la discussion.

M. Lalonde: M. le Président, je viens à peine de prendre la parole.

Le Président (M. Dussault): Sur la question de fond, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Ayant établi...

M. Marcoux: Revenons à l'amendement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, nos invités nous ont dit qu'ils étaient d'accord avec la proposition. On pourrait leur demander de nous proposer un amendement illustrant...

M. Lalonde: Je verrai un peu plus loin, parce que... Si vous permettez que je... Ayant établi qu'il n'y a pas de conflit d'intérêts entre l'avocat, Me Lefrançois, et ceux qui vous parlent, j'ai quand même été très sensible aux questions soulevées par le ministre. C'est justement la première question qu'on doit se poser, ici, quand on a un projet de loi privé: Est-ce qu'il s'agit d'un cas qui peut être réglé d'autres façons, par les lois générales, les lois particulières, devant les tribunaux?

Deuxièmement, est-ce qu'on est en train de changer une situation juridique de droits acquis? C'est dans ce sens-là qu'il posait ses questions.

Je serais tenté de demander les lumières juridiques de Me Jacoby qui est à nos côtés et qui a sûrement examiné le dossier, à savoir: Est-ce que l'inquiétude exprimée par les questions du ministre trouve réponse dans ce que prétend Me Lefrançois lorsqu'il dit qu'il n'y a pas de droits acquis pour deux raisons? D'abord, à chaque année, c'est à la discrétion du conseil d'administration de Rougier Inc., à savoir quel hôpital va l'avoir et, deuxièmement, personne ne peut réclamer le paiement, d'année en année, d'autant plus que la catégorie d'hôpitaux catholiques de langue française n'existe pas.

Autrement dit, est-ce que cette inquiétude est réellement fondée, compte tenu des spécificités?

M. Bédard: II est certain que la volonté du testateur était de restreindre ces legs aux hôpitaux catholiques de langue française de la ville de Montréal. On peut parler de droits acquis non pas envers un hôpital en particulier, mais envers l'ensemble des hôpitaux qui se trouvent sur le territoire de la ville de Montréal.

Dans la mesure où on vient toucher la volonté du testateur, le principe, même si on était en Angleterre, je pense que la théorie que vous avez mentionnée tout à l'heure, indiquant que le tribunal collerait le plus possible à l'intention du testateur... si on pouvait régler cela devant un tribunal, je pense qu'on devrait adopter la même attitude pour respecter l'intention du testateur qui était, à tout le moins, de restreindre ses legs aux hôpitaux de langue française qui sont situés dans la ville de Montréal. Il me semble que c'est avec cette formule qu'on respecte davantage ce type de droits acquis.

M. Lalonde: Je vous remercie. Dans ce contexte, la suggestion du député de Nicolet-Yamaska, qui semble avoir été appuyée par un député ministériel, à savoir de changer le moins possible, de conserver aux hôpitaux seulement le bénéfice de ces dons, aux hôpitaux de la ville de Montréal, et, pour être encore plus près de la volonté du testateur, aux hôpitaux de langue française.

J'aimerais ouvrir une parenthèse pour parler du cas qui a été soulevé par le député de Saint-Louis, soit un projet de loi privé de 1974, je crois. On reconnaîtra qu'à cause des changements démographiques et de toutes autres sortes ici, dans la ville de Québec, l'objet même était impossible à réaliser, c'est-à-dire de faire profiter des enfants anglophones protestants de la ville de Québec. Mais il n'en restait plus. Il a été démontré qu'il n'en restait presque plus, ce qui n'est pas le cas pour les hôpitaux de langue française de la ville de Montréal.

Pourquoi ne pas coller le plus possible à la volonté du testateur, en restreignant aux hôpitaux — ils en ont besoin — étant donné que le testateur n'a pas parlé de recherche, peut-être que vous avez raison, à savoir, si on veut faire de la recherche, ce serait peut-être mieux dans des facultés de médecine, c'est peut-être là que la recherche, quoique je ne connais pas personnellement toute la situation... il m'apparaît qu'on devrait plutôt aller vers la suggestion du député de Nicolet-Yamaska, à savoir, restreindre cela aux hôpitaux de langue française de la ville de Montréal.

M. Bédard: Si vous me permettez. Lorsque l'on se rend compte qu'entre autres, l'hôpital Sainte-Justine a employé une bonne partie du montant qui lui a été donné pour assurer le transport des handicapés, je suis convaincu que le testateur serait très heureux de cette utilisation et que cela l'associe vraiment au domaine de la santé.

M. Lefrançois: II ne l'a pas restreint à la recherche.

M. Bédard: Je le sais.

M. Lefrançois: Je pense qu'on ne devrait pas créer une restriction additionnelle dans ce sens-là.

M. Bédard: Est-ce que l'amendement vous irait?

M. Lefrançois: Je n'ai aucune objection à ce que le projet soit modifié en conséquence des remarques de la majorité.

M. Bédard: Je vais proposer au député de Nicolet-Yamaska, qui a proposé...

M. Fontaine: Si le président veut appeler l'article 1, j'aurai un amendement à proposer qui, je pense, pourrait aller dans ce sens-là.

Le Président (M. Dussault): Si je me rappelle bien, l'article 1 était appelé.

M. Fontaine: II était appelé. Alors je propose, M. le Président, qu'à l'article 1, on enlève, à la septième ligne, les mots "à une faculté de médecine d'une université de langue française au Québec ou à une corporation à but non lucratif de langue française oeuvrant dans le domaine de la santé au Québec, conformément aux mêmes modalités" pour les remplacer par les mots "aux hôpitaux de langue française de la ville de Montréal".

M. Lefrançois: Si je peux me permettre, il faudrait peut-être garder les mots "conformément aux mêmes modalités" quand même, qui sont la répartition par le conseil d'administration.

M. Fontaine: Oui, d'accord.

M. Blank: Est-ce que je peux annoncer ici qu'il y a trois hôpitaux de langue française dans mon comté? Saint-Luc...

M. Lalonde: J'en ai un.

M. Blank: ... Jeanne-D'Arc et Hôtel-Dieu.

Le Président (M. Dussault): Y a-t-il d'autres annonces?

Pour bien clarifier ce sur quoi portera dorénavant le débat, je vais reprendre l'amendement de M. le député de Nicolet-Yamaska. Il nous dit:

Pourriez-vous me dire à partir de quel mot, s'il vous plaît?

M. Fontaine: "à une faculté".

Le Président (M. Dussault): II s'agit de soustraire à l'article 1, à partir de la septième ligne, les mots "à une faculté de médecine d'une université de langue française au Québec ou à une corporation à but non lucratif de langue française oeuvrant dans le domaine de la santé au Québec" et remplacer ces mots par les mots "aux hôpitaux de langue française de la ville de Montréal".

M. Fontaine: C'est cela.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Quelle est la loi de 1971? Est-ce qu'on peut conserver le mot "hôpital" dans la loi sans créer un autre vide juridique? "hôpitaux, centres hospitaliers", premièrement...

M. Bédard: Je ne crois pas que cela crée un problème, c'est trop bien identifié.

M. Lalonde: Deuxième question. C'est à Me Lefrançois que je la pose. Est-ce que la disposition concernant les indications du conseil d'administration de la compagnie Rougier Inc. demeure?

M. Lefrançois: Oui, elle demeure. C'est pour cela que j'avais mentionné "conformément aux mêmes modalités". Il faudrait peut-être le répéter et cela pour éviter toute ambiguïté à ce niveau-là, parce que dans le projet que j'avais envoyé avant qu'il ne soit modifié, j'avais dit "et en particulier en suivant les indications du conseil d'administration de la compagnie Rougier Inc." Ce serait peut-être utile de le préciser à nouveau à ce stade-là.

M. Fontaine: Cela était inscrit dans le testament?

M. Lefrançois: Dans le testament et les donations.

M. Fontaine: On n'a pas besoin de le répéter?

M. Lefrançois: Je ne vois pas tellement d'ambiguïté, surtout si l'attendu de la loi demeure, je pense que l'intention est assez claire à ce moment-là.

M. Lalonde: Oui.

M. Fontaine: D'accord.

M. Lefrançois: Si je peux me permettre, M. le Président, dans cette même optique, est-ce qu'on ne pourrait pas couvrir, puisqu'on reste avec le même groupe de bénéficiaires que celui de 1971 et qu'il n'y a pas de préjudice, est-ce qu'on ne pourrait pas éviter un problème en disant que les revenus ont été versés ou seront versés par le fiduciaire depuis 1971 pour couvrir ce problème des revenus distribués depuis 1971?

M. Lalonde: Vous nous avez dit tantôt que vous ne vouliez justement pas vous servir de la commission pour couvrir le passé.

M. Lefrançois: Ce n'était pas mon intention, mais maintenant qu'on reste avec exactement le même groupe de bénéficiaires, sauf qu'on l'adapte, c'est ce que la commission fait.

M. Lalonde: Ah bon.

M. Lefrançois: Je me demande si cela pourrait être fait.

M. Bédard: Je pense qu'il n'y a pas eu de problème jusqu'à maintenant. Je pense que vous comprendrez facilement que c'est difficile au niveau d'un bill privé d'y aller en plus avec un effet rétroactif.

M. Lalonde: Même dans un bill public, on l'évite quand on peut.

M. Bédard: Oui. Cela n'a pas créé de problème jusqu'à maintenant.

M. Lefrançois: Personne n'a soulevé de problème, mais je me demandais si cela ne pouvait pas se régler.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que l'amendement à l'article 1 est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, pour être conséquent, dans le préambule, au troisième paragraphe...

Le Président (M. Dussault): Normalement, nous devrions étudier le préambule à la fin. (16 h 15}

M. Bédard: C'est drôle, parce que, quand on a étudié le projet de loi 22, on avait argumenté trois jours de temps pour dire qu'il fallait commencer par le préambule.

M. Lalonde: Vous étiez tout à l'envers dans ce temps-là, vous vous en souvenez?

Une Voix: C'est-à-dire que c'était le contraire, on voulait l'étudier après.

Une Voix: Vous n'aviez pas eu raison.

M. Bédard: Non, on n'avait jamais raison dans ce temps.

Le Président (M. Dussault): De toute façon, cela a peut-être servi à clarifier la question, M. le ministre. Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que l'article 1 tel qu'amendé est adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté tel qu'amendé. J'appelle l'article 2.

M. Bédard: Pour ce qui est de l'article 2, nous n'avons pas de remarque à faire. Nous sommes

prêts à l'adopter, puisqu'il est ressorti des propos de Me Lefrançois que l'institution en question recevrait plus. Je ne vois pas comment une institution n'ayant même pas été consultée peut refuser d'avoir plus. Le problème de consultation ne se pose pas.

Le Président (M. Dussault): L'article 2 est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. J'appelle l'article 3.

M. Lefrançois: M. le Président, si je peux me permettre, au niveau des attendus, une simple correction au deuxième paragraphe...

M. Lalonde: On n'est pas rendu là encore.

M. Lefrançois: D'accord.

M. Lalonde: On fait le préambule après.

M. Lefrançois: C'est simplement parce qu'il me semblait qu'on parlait de légataire fiduciaire et il faudrait que ce soit précisé.

Le Président (M. Dussault): Nous allons y revenir quand même à la fin, si vous permettez, Me Lefrançois. Sur l'article 3, il n'y a pas d'autres interventions. L'article 3 est-il adopté? Adopté. J'appelle l'article 4.

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Nous revenons au préambule.

M. Bédard: Au préambule, à la suite des amendements qui sont intervenus dans l'étude du projet de loi, je pense qu'il y aurait avantage, en termes de concordance, au troisième paragraphe, à retrancher les mots "et que la recherche médicale au Québec à l'extérieur de la ville de Montréal s'est considérablement accrue".

M. Lalonde: Oui.

Le Président (M. Dussault): II s'agirait d'enlever, au troisième paragraphe du préambule, à la cinquième ligne, les mots "et que la recherche médicale au Québec à l'extérieur de la ville de Montréal s'est considérablement accrue". Est-ce que ce retrait est accepté par la commission?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Il y aurait donc un point après les mots "les services sociaux", c'est-à-dire un point virgule pour respecter la ponctuation.

M. Lalonde: C'est cela.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que ce préambule tel que modifié est adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que le projet de loi no 228...

M. Bédard: Une seconde...

M. Paquette: Avant le préambule, je pense que Me Lefrançois avait une remarque.

M. Lefrançois: Je ne sais pas si vous en êtes au deuxième paragraphe du préambule actuellement ou au troisième...

M. Bédard: D'accord. Allez-y!

M. Lefrançois: Au deuxième, on avait parlé de "détenu par ces légataires fiduciaires". Je pense qu'il faudrait, soit parler de ces fiduciaires, même si c'est la même compagnie aujourd'hui et qu'autrefois, c'était le Trust Général et la Société d'administration en fiducie, mais enlever de tout événement le mot "légataires" parce qu'on a des donations aussi. Il y a un testament et il y a plusieurs donations. Le mot "légataires" devrait être enlevé, et on devrait peut-être même écrire "détenu par ces fiduciaires" parce que c'est un fiduciaire, mais il administre en différentes qualités.

Le Président (M. Dussault): II s'agirait donc de retirer à la deuxième ligne du deuxième paragraphe le mot "légataires". Est-ce que c'est aussi accepté par la commission?

M. Lalonde: Adopté. M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Le préambule est adopté. Est-ce que le projet de loi no 228, Loi concernant la succession de Pierre-Victor Rougier est adopté tel qu'amendé?

M. Lalonde: Adopté. M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté tel qu'amendé.

M. Bédard: On vous remercie, Me Lefrançois.

Le Président (M. Dussault): Merci, Me Lefrançois.

Projet de loi no 234

J'invite les requérants relativement au projet de loi 234, Loi concernant la succession de Julien Levasseur, à se présenter devant nous. Me Jacques Laurent, je vous demande à nouveau de nous expliquer brièvement le sens de votre requête.

M. Laurent: Merci, M. le Président. Je vais être le plus bref possible. La requête qui est devant vous a trait à un testament rédigé en 1970 par un homme d'affaires de Montréal, M. Julien Levas-seur, qui est décédé en 1972.

Au testament, apparaissent les noms de trois exécuteurs testamentaires, le Trust général du Canada, son fils, Jean-Paul Levasseur et son frère, André Levasseur, le frère du défunt. Par la suite, André Levasseur, le frère du défunt, a été remplacé par une des filles du défunt, héritière, Mlle Claudette Levasseur.

Ce testament ne touche que trois personnes: le fils et les deux filles du de cujus. La disposition qui nous intéresse particulièrement est la suivante: Au testament, à la page 4, le testateur dit: qu'en ce qui concerne mes deux filles, Claudette et Lorraine, leur part de capital des biens de ma succession ne leur sera remise que lorsqu'elles auront atteint l'âge de 55 ans. Elles ont actuellement 39 ans, pour une, Claudette et 37 ans, pour l'autre, Lorraine. Jusqu'à cette date, mes exécuteurs testamentaires leur serviront une rente mensuelle rétroactive à mon décès de $500 chacune, à même les revenus de leur part de succession leur appartenant.

Quant au fils, Jean-Paul, les dispositions qui s'appliquent à lui sont plus précises. Il a droit de toucher à ses parts de capital, la moitié à l'âge de 25 ans, et l'autre moitié à l'âge de 40 ans. Comme il a 31 ans, il a déjà touché la moitié de sa part.

Les actifs de cette succession, dont le principal exécuteur testamentaire est le Trust général du Canada, s'élevaient, au 31 mai 1978, à $683 000 et ne comprenaient que les parts des deux filles. Donc, à la base, il est évident que les parts de capital de la succession revenant aux deux filles requérantes sont suffisantes pour demander une augmentation de leur rente. Pourquoi le font-elles? C'est en raison forcément de l'augmentation du coût de la vie. Le père, probablement, au moment de son testament en 1970, ne se sachant pas aussi fortuné, a donc inscrit des rentes mensuelles de $500. Quand la succession s'est ouverte, on s'est aperçu qu'il y avait assez de capital pour payer des rentes beaucoup plus substantielles, puisque, calculées à 10% par année, sur des parts de quelque $300 000, chacune des filles pourrait retirer un revenu de $30 000 à $35 000, grosso modo. Elles n'en retirent, dans le moment, que $6000 par année. Le fils est à l'écart. Il a déjà hérité de la moitié et, pour me soumettre aux directives ou plutôt aux suggestions du greffier en loi de l'Assemblée nationale dans ce cas-ci, j'ai obtenu, en date d'hier, pour qu'il n'y ait pas changement d'idée, deux affidavits sous serment du colégataire, Jean-Paul Levasseur, et de l'exécuteur testamentaire, le Trust général du Canada. Donc, vous avez deux consentements écrits de deux des trois exécuteurs et du colégataire, Jean-Paul. Les deux filles n'ont pas consenti par écrit, puisque, forcément, elles sont avantagées par la disposition que l'on recherche.

C'est à peu près tout ce que j'ai à vous dire, en tout cas, pour être précis et concis.

M. Lalonde: Est-ce que c'est la première fois que de telles demandes sont faites à l'Assemblée nationale?

M. Laurent: C'est la première... Dans le cas de cette succession?

M. Lalonde: Oui.

M. Laurent: Ah oui! A ma connaissance...

M. Bédard: Non... Ah oui! Il y en a eu d'autres...

M. Fontaine: II y en a eu d'autres, mais pas pour cette succession.

M. Lalonde: On en a eu une...

M. Bédard: Tancrède Bienvenue, pour cette succession.

M. Fontaine: Non, celle-là, c'est Julien Levasseur.

M. Lalonde: Julien Levasseur et Tancrède Bienvenue, c'est une autre affaire qu'on avait...

M. Blank: Tancrède Bienvenue, c'est une autre affaire. C'est un ancien président de la Banque provinciale...

M. Lalonde: Oui, l'an dernier, on a eu un...

Le Président (M. Dussault): Alors, avant l'appel de l'article 1, y a-t-il des remarques préliminaires sur ce projet de loi no 234?

M. Lalonde: Oui, moi, j'en ai. M. Bédard: Moi aussi.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je ne sais pas si on pourrait... ce serait peut-être rendre nos pouvoirs exorbitants, parce que notre devoir c'est de s'approcher le plus possible de l'intention du testateur. Mais quand je vois une discrimination évidente entre le garçon et les deux filles.

M. Laurent: II n'y a pas de discrimination.

M. Bédard: II a mentionné, tout à l'heure, que le garçon avait eu lui...

M. Lalonde: Oui, il y a une discrimination, le garçon avait le droit d'avoir la moitié de sa part à 25 ans et l'autre moitié à 40 ans, et les filles à 55 ans seulement.

M. Bédard: Oui, c'est vraiment de la...

M. Lalonde: Je ne sais pas si ça ne devrait pas être vraiment notre devoir de corriger ce genre de bisbille.

M. Fontaine: On va soumettre ça à Mme Payette!

M. Lalonde: Je trouve absolument... Tout en respectant la mémoire de M. Julien Levasseur — c'était son intention, il n'y a pas de doute — je me demande même si ce ne serait pas une question d'ordre public que de changer ça. Je vais voir ce que les autres en pensent autour de la table.

M. Laurent: Je suis sûr que les requérantes n'auraient pas d'objection à diminuer le délai pour toucher à leur part-capital; mais je n'ai pas leur consentement écrit là-dessus.

M. Blank: La suggestion que j'aurais à faire dans cette affaire, c'est de respecter la volonté du testateur et de garder la succession ouverte jusqu'à 55 ans, mais jusqu'à cette date elles pourraient avoir tout le revenu.

M. Lalonde: II n'y a personne qui puisse être lésé du fait qu'elles toucheraient leur revenu; c'est à elles.

M. Laurent: Le seul qui pourrait être lésé, ce serait Jean-Paul, le fils colégataire, puisqu'il lui reste à toucher un sixième.

M. Lalonde: Dans les $600 000 il a encore un intérêt?

M. Laurent: Non, dans les $683 000, ça ne comporte pas... c'est seulement la part des deux filles.

M. Lalonde: A ce moment-là, il n'y a personne qui a de l'intérêt dans la part des deux filles, à part elles.

M. Laurent: Là, je vous dis $683 000, parce qu'on a fait une répartition. Il y a $683 000 qui reviennent aux deux filles.

M. Blank: Qu'est-ce qui arrive si une des deux filles décède?

M. Laurent: Pardon.

M. Lalonde: Si une des deux filles décède, qu'est-ce qui arrive? Cela s'accroît?

M. Laurent: Non, sa représentation...

M. Lalonde: Alors il n'y a personne qui est lésé si elles touchent tout le revenu?

M. Laurent: Non, d'ailleurs, Jean-Paul, par souci, a signé un consentement; il consent à ça.

M. Lalonde: II a consenti seulement à ce que vous proposez?

M. Laurent: A ce projet de loi.

M. Lalonde: Ce que vous proposez c'est $1500 par mois chacune.

M. Laurent: C'est encore, grosso modo, seulement 60% de leur part-capital.

M. Fontaine: Pourquoi demandez-vous que ce soit rétroactif?

M. Laurent: Parce que ce projet a été amorcé en 1977.

Le Président (M. Dussault): M. le ministre.

M. Bédard: A l'heure actuelle, elles reçoivent $6000 par année.

M. Laurent: C'est ça.

M. Bédard: Avec votre projet de loi, ces $6000 deviendraient $18 000. Je ne veux pas dire par là que ce soit un montant très élevé, $18 000, mais au niveau du principe il nous faut essayer de rester conforme le plus possible à la volonté du testateur. Quelles étaient ses raisons pour agir de la sorte? Je ne le sais pas, mais elles sont quand même exprimées assez clairement dans son testament pour que, à l'heure actuelle, on ne puisse en déroger, à moins que le législateur y aille de son consentement par projet de loi privé.

Chose certaine, c'est que, qu'on soit d'accord ou pas avec la volonté du législateur, avec peut-être la forme de discrimination dont il a pu faire preuve dans la répartition de ses biens, c'est une chose. Maintenant, nous avons à respecter quand même et à être le plus proche possible de cette volonté du testateur.

Il y aurait peut-être la possibilité d'insérer le principe de l'indexation depuis 1970.

M. Laurent: Depuis 1972, lors de son décès.

M. Bédard: Ce qui aurait pour effet de passer de $6000 à $10 000 ou $12 000, mais pas à partir d'un montant qu'on soumet de notre propre chef, mais à partir d'une réalité qui existe et qui est celle de l'augmentation continuelle du coût de la vie. (16 h 30)

M. Laurent: Voici, M. le ministre, j'ai cherché comme vous à découvrir les intentions du testateur. Les intentions du testateur étaient que les deux filles ne touchent pas à leur part-capital avant l'âge de 55 ans; ceci est totalement respecté. Sa deuxième intention, me semble-t-il, était que dans l'intervalle elles bénéficient des revenus de leur part-capital. Dans le moment, leur part-capital croît — l'année passée — de $16 000 pour chacune d'elles par année. Or, par cette requête, nous demandons au législateur de consacrer le fait qu'elles puissent toucher les revenus de leur part sans affecter le capital. Je peux vous dire qu'avec toutes sortes de calculs, même à $18 000, elles ne touchent même pas tous les revenus de leur capital.

M. Bédard: On n'a quand même pas affaire à un testament qui a été fait il y a 30 ans. On a affaire à un testament qui a été fait en 1970, il y a seulement neuf ans...

M. Laurent: II y a dix ans, neuf ans.

M. Bédard: Le testateur avait ses raisons propres de déterminer ce qu'il a déterminé de façon très précise dans son testament, de façon tellement précise qu'on ne peut pas en sortir. C'est pour ça que nous, au niveau de la commission, on n'a pas à être d'accord avec des motifs que nous pouvons déceler... Avec les motifs du testateur... Nous avons à respecter légalement, pas moralement, mais légalement, ses intentions exprimées dans son testament. C'est pour ça que la formule...

M. Laurent: Sa première intention, M. le ministre, était de geler le capital pour X années jusqu'à l'âge de 55 ans. Ceci est totalement respecté.

M. Bédard: ... d'indexation... Oui, oui.

M. Laurent: Voici, il s'agit de deux dames. Une est mariée — Lorraine — et elle en a moins besoin. Pour être honnête, elle a manifesté qu'elle en avait moins besoin, elle est mariée et son mari a des revenus. L'autre, Claudette, la plus âgée, est seule, sans emploi, elle a été très sérieusement malade, elle a subi deux opérations — je n'ai pas de certificat médical, mais elle a subi deux opérations — très importantes; elle est actuellement sans emploi, elle n'a aucun revenu actuellement. Non seulement n'a-t-elle aucun revenu, mais elle emprunte du Trust Général du Canada sur son capital. Donc, elle paie au trust des intérêts sur son propre argent.

M. Johnson: Me Laurent, j'aimerais vous demander quel âge avait le signataire du testament au moment de sa mort, à peu près.

M. Laurent: Je n'ai aucune idée.

M. Johnson: Enfin, vos clientes, les personnes que vous représentez, ont quel âge en ce moment à peu près?

M. Laurent: La plus vieille a 39 ans.

M. Johnson: C'est ça, il s'agit d'une succession ouverte en 1970...

M. Laurent: 1972.

M. Johnson:... en 1972, le testament a été fait en 1970. S'agissait-il d'une personne, qui, par sa formation ou son occupation, connaissait, d'après vous, les vertus d'un capital, c'est-à-dire qu'un capital pouvait produire 10% dans les années 1970 ou...

M. Laurent: En 1970, ça ne produisait pas... M. Johnson: ... ça produisait 6% ou...

M. Laurent: ... alors qu'aujourd'hui ça en produit plus. Donc, ça ne fait qu'augmenter la part-capital qu'elles toucheront à l'âge de 55 ans. Dans l'intervalle, il a gelé à $500 par mois leurs revenus de cette succession-là.

M. Johnson: Et ces $500 par mois correspondaient à quel pourcentage à peu près du capital à l'époque? Seulement pour savoir, en gros, si ça correspondait au...

M. Laurent: Quand il est décédé, j'estime qu'il ne devait pas connaître l'étendue de sa fortune, puisqu'il a...

M. Johnson: II ne devait pas en connaître la valeur, carrément...

M. Laurent: ... inclus une clause dans son testament qui peut vous éclairer là-dessus: "A chacune d'elles un montant de $500 à même les revenus de telle part de succession leur appartenant, avec réduction proportionnelle au cas d'insuffisance de tels revenus.

M. Johnson: Ah...

M. Lalonde: II pensait qu'il n'avait pas les moyens. C'est drôle, on a discuté un peu de la suggestion du ministre. Je trouve que si on injecte une indexation dans le testament, on est aussi loin de l'intention du testateur que si on lui donne tous les revenus.

Et au lieu de simplement tenter de sauver un pseudo — enfin, il n'est pas pseudo, c'est un principe important — principe d'être bien fidèle à l'intention du testateur, j'aimerais mieux y aller carrément et si on peut déceler qu'au fond, s'il a dit $500 c'est parce qu'il n'était pas sûr même que ses biens seraient suffisants pour produire ces revenus, je verrais strictement une question d'équité, au nom de l'équité, de leur donner tous les revenus.

C'est peut-être délicat la question, mais on a eu des cas comme ça ici. Est-ce qu'au moment de son décès ou de son testament, dans cette période, de 1970 à 1972, ses filles ou l'une de ses filles avait un problème quelconque qui aurait pu inspirer au père une prudence quant à lui permettre de toucher l'argent: prodigalité ou autre chose semblable?

M. Laurent: Je ne saurais vous répondre. M. Lalonde: Pas à votre connaissance. M. Laurent: Pas à ma connaissance.

M. Lalonde: Si on essaie de prendre les $500 et qu'avec une espèce de formule à la fixation on

justifie $12 000, on intervient autant dans l'intention du testateur que si au nom de l'équité, en s'assurant très bien qu'il n'y a personne qui perd de droit, d'autres tiers qui pourraient être lésés, une fois ça assuré, je disais que la règle la plus élémentaire, c'est qu'elles aient le revenu.

M. Laurent: Je suis sûr que les requérantes partageraient avec plaisir votre point de vue.

M. Lalonde: Je sais, j'en suis convaincu, surtout qu'il y a eu assez des discriminations dans ce testament, alors que les filles ne sont pas capables d'avoir leur argent avant 55 ans et que le garçon l'a à 40 ans, la moitié à 25 ans et l'autre à 40 ans.

Il faut dire que je suis un peu inspiré par ça pour tenter de trouver une solution qui va essayer de faire disparaître la discrimination, au moins en partie.

C'est presque d'ordre public.

Le Président (M. Dussault): Puisque nous sommes sur le fond, j'appelle l'article 1.

M. Bédard: II faut se faire une idée. M. le Président, vous êtes à même de constater qu'une fois que les membres de la commission se sont fait une idée, ça va vite pour l'adoption; alors je pense qu'il y a avantage à être le moins formaliste possible.

Je comprends, c'est une demande que je fais au président, étant très respectueux...

Le Président (M. Dussault): C'est parce qu'habituellement, on ne discute pas du fond, si on n'a pas appelé l'article 1. Ce sont les règles élémentaires que le président doit connaître.

M. Bédard: Si vous en faites une question de principe, d'accord, M. le Président. On peut appeler l'article 1.

Le Président (M. Dussault): II est appelé, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): M. le ministre du Travail.

M. Johnson: Me Laurent, pourriez-vous citer de nouveau le bout de phrase que vous avez lu tout à l'heure? En d'autres termes, vous avez cité un bout de phrase, tout à l'heure, du testament qui, si je l'ai bien compris, laissait entendre que ce que craignait le testateur, c'était que le capital ne soit pas suffisant pour produire $500 d'intérêts par mois pour chacune des filles? Est-ce que c'est bien ça, est-ce que vous pourriez relire le bout?

M. Laurent: Sûrement. "A chacune d'elles, au moment... en ce qui concerne mes filles, mes exécuteurs leur serviront une rente mensuelle de $500 à même les revenus de telle part de succes- sion leur appartenant, avec réduction proportionnelle au cas d'insuffisance de tels revenus de leur part et, dans le cas contraire, tout surplus devrait être ajouté à leur part de capital".

Mais la première restriction, la première crainte, c'était qu'il n'y aurait pas assez de revenu pour leur servir une rente de $500. Il ne connaissait pas sa fortune, je présume. Je crois qu'à $18 000, on est encore dans les limites d'un grand conservatisme, parce qu'au moment où je vous parle, après avoir payé toutes les dépenses, après avoir fait payer les mensualités...

M. Bédard: Est-ce que vous pourriez...

M. Laurent: C'est un homme d'affaires, il avait des entreprises.

M. Fontaine: Son niveau de scolarité, vous ne savez pas?

M. Laurent: Je ne saurais vous dire. Il était agent d'affaires, lors de son testament.

M. Bédard: Est-ce que des légataires travaillent présentement? Pouvez-vous nous le dire?

M. Laurent: II y en a une qui ne travaille pas. Il y en a une qui était professeur, qui a enseigné pendant dix ans, qui s'est retirée de l'enseignement — c'est la requérante principale — et qui a subi, au cours de cette année, deux interventions chirurgicales d'importance, de très grande importance, elle était en danger, elle ne travaillera pas pour un bout de temps.

M. Bédard: Et l'autre?

M. Laurent: L'autre est dans une situation financière moins désavantagée; elle a un mari qui a des revenus. Ce qu'on a voulu faire dans cette loi, c'est respecter la volonté du père, à savoir que des deux filles soient toujours sur le même pied. Le gars d'un côté, et les deux filles sur le même pied d'égalité.

Le Président (M. Dussault): Limitez...

M. Laurent: On ne peut pas demander une pension de $1800 à une et de $2000 à l'autre, je pense que ce serait... Si on veut toujours respecter le plus possible...

M. Bédard: Je vais essayer aussi... Des demandes semblables à la vôtre ont déjà été portées, par voie de projet de loi privé à l'attention de l'Assemblée nationale, à l'attention de la commission, et des décisions ont été prises. Par exemple, plusieurs projets de loi concernant la succession de Tancrède Bienvenue ont été adoptés au cours des quinze dernières années. Tous ces projets avaient pour but d'augmenter une rente. De 1970 à 1978, elle a été portée par l'Assemblée nationale de $10 000 à $15 000, soit une augmentation de 50%, puis indexée par le projet de loi 265, en 1978.

A l'heure actuelle, ce que vous nous demandez, c'est une hausse — de $500 à $1500 — de 300%, dans le cas présent. Vous nous demandez cette hausse pour un testament qui n'a quand même pas été rédigé il y a 20 ans ou 30 ans; il a été rédigé il y a moins de dix ans. Lorsque je mentionnais tantôt l'idée de l'indexation, c'est parce que ce principe — je me rappelle certaines discussions concernant la succession Tancrède Bienvenue — est celui qui a été envisagé, surtout, lorsqu'il s'agissait de voir s'il y avait lieu d'augmenter certaines rentes, et c'est dans ce sens que je faisais la proposition d'une augmentation, en tenant compte de la date du testament, de $500 à $1000, parce que c'est à peu près dans les limites de ce que donnerait l'indexation si elle avait été donnée au moment du testament et que, d'autre part, dans le cas de Tancrède Bienvenue, le principe de l'indexation avait été retenu par un comité tel que le nôtre.

M. Laurent: J'ai pris connaissance de la dernière loi concernant la succession de Tancrède Bienvenue. D'une part, je voudrais éviter d'avoir à revenir devant vous, puisque selon vos propres dires, M. le ministre, il y a eu plusieurs projets de loi privés concernant la succession. On ne veut pas revenir. On veut se placer au-dessous de la limite, au-dessous du revenu des parts de capital, qui est de $30 000.

M. Bédard: Cette proposition que je vous fais, dans mon esprit, aurait... Je vous la fais parce qu'il y a des décisions qui ont déjà été rendues dans le même sens par la commission précédente sur d'autres projets de loi et cette proposition aurait pour effet de ne pas toucher à l'article 2, de l'adopter. Vous demandez l'indexation dans l'article 2. Je n'y aurais pas d'objection, parce que d'autres commissions comme nous ont décidé dans ce sens par rapport à des demandes similaires à la vôtre. J'essaie de demeurer dans la ligne de certaines décisions qui ont été rendues tout en demeurant le plus collé possible à la décision du testateur. (16 h 45)

M. Laurent: Si vous me permettez, M. le ministre, pour conclure, parce que je comprends votre point de vue. D'ailleurs, cet article 2, nous l'avons ajouté à la suggestion des greffiers en loi de l'Assemblée nationale. Le montant de $1500 que nous avons inséré, c'est un peu discrétionnaire, forcément, comme le testateur avait dit $500. Mais nous y sommes arrivés après avoir consulté le Trust général du Canada qui est l'administrateur de la succession, qui nous a démontré — et c'est à sa suggestion — que c'était encore en deçà des revenus de chacune des parts de capital. Cela permettra encore aux parts de capital de s'accroître d'année en année jusqu'à l'âge de 55 ans des deux enfants.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, toujours dans l'esprit du respect de la volonté du testateur, étant donné surtout le paragraphe que vous avez lu tantôt, à mon avis, je pense que vous avez raison de dire que le testateur ne connaissait pas exactement sa fortune et ce qu'il avait dans l'esprit c'était d'assurer le bien-être de ses deux filles pour une certaine période. Etant donné le fait que vous nous garantissez que ça n'entame pas le capital, je pense que les montants demandés peuvent être raisonnables. Si on veut que ces gens puissent profiter de la succession qui leur est dévolue, sans entamer le capital, je ne vois pas pourquoi on leur refuserait ce montant.

M. Bédard: Je ne veux pas nécessairement avoir raison. Je pense qu'on essaie tout simplement de trouver la meilleure formulation. J'essaie de trouver la solution et d'améliorer une situation à partir de deux barèmes — on l'a dit — celui du respect de la volonté du testateur, d'autre part, la logique aussi, avec certaines décisions qui ont déjà été prises dans le passé pour des cas semblables par des commissions comme la nôtre. Je n'ai pas d'hésitation à dire oui sur la question de l'indexation. Déjà, des commissions précédentes l'ont acceptée et, à ce moment, ce principe d'indexation qui a été accepté, accordé à partir du moment où le testament a été fait, donne une augmentation de 100% de la rente mais il y a toujours cet élément du testament qui dit, où le testateur dit que le surplus devrait être ajouté au capital. C'est là.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai bien réfléchi à ce cas très particulier et c'est vrai que la liberté de tester est un principe fondamenta dans notre droit civil. Mais il y a d'autres principes qui prennent de l'importance et qui à mon sens sont aussi fondamentaux. Il y en a un que je trouve aussi fondamental, c'est qu'il n'y ait pas de discrimination entre les sexes. S'il était apparent qu'à cause d'un cas bien particulier... Je vous ai posé la question; vous avez dit qu'à votre connaissance il n'y a pas de particularité au niveau de la santé des héritières. Ce qui est tellement apparent c'est qu'il y a deux filles et toutes deux vont avoir leur capital à 55 ans et le garçon en a eu 50% à 25 ans. Quel est le montant total de la part du garçon?

M. Laurent: A l'époque, quand ils ont fait le partage, il y avait $900 000 dans la succession.

M. Lalonde: Disons autour de $300 000...

M. Laurent: II lui en reste un sixième à recevoir.

M. Lalonde: Je pense que ces principes se corrigent, et on est ici pour le faire. Lorsque pour la première fois une commission parlementaire a

injecté dans un projet de loi privé le principe de l'indexation, ils ont dû se trouver extrêmement nouveaux, extrêmement modernes, et innovateurs. Tout ce qu'on fait, c'est de suivre ça. Mais il me semble qu'on devrait innover encore plus dans ce cas parce qu'on n'enlève rien à personne. Il n'y a pas un tiers qui est lésé. Si elles avaient eu, comme le garçon, la moitié de leur part à 25 ans... il y en a une de 39 ans, vous dites?

M. Laurent: Oui.

M. Lalonde: Et l'autre?

M. Laurent: 37 ans.

M. Lalonde: Elles auraient donc touché immédiatement la moitié au moment du décès, parce qu'elles avaient toutes les deux au-dessus de 25 ans et elles toucheraient l'autre moitié, donc à peu près $150 000, qui à 10% à peu près, produit $15 000, ce qui est encore plus que ce qu'on suggère ici — pas vous-même — mais le ministre suggère de prévoir. Je pense que c'est un cas particulier qui doit être jugé sur l'équité et même si on fait un accroc à la liberté de tester, on se trouve au moins à corriger la situation en faveur d'un autre principe qui, à mon sens, est aussi important, celui de la discrimination des sexes.

M. Bédard: J'ai bien dit tout à l'heure qu'on n'avait pas à se prononcer sur la moralité de la volonté d'un testateur. Que voulez-vous?

M. Lalonde: C'est un principe, cela n'est pas de la morale.

M. Bédard: Celui qui avait de l'argent à ce moment et qui pouvait en disposer, il est connu. Ce ne sont pas les membres de la commission qui avaient à décider.

M. Laurent: Ce que ces personnes demandent, c'est d'avoir les revenus de leur patrimoine.

M. Bédard: Vous comprendrez, j'essaie de ne pas — tout en essayant d'améliorer une situation — créer non plus un précédent dont on ne peut évaluer les conséquences, parce que la décision qu'on prend ici en commission servira nécessairement pour d'autres demandes, d'autres successions dans l'avenir. Je comprends que nous aurons à évaluer, à ce moment, cas par cas. Comme je vous l'ai mentionné, nous essayons de demeurer dans des barèmes et des lignes qui ont déjà été établis par une commission semblable, à la suite de demandes similaires à la vôtre.

Si vous n'avez pas d'objection, je demanderais peut-être de suspendre momentanément, M. le Président, l'étude du projet. Nous allons en entamer un autre et nous allons essayer de voir de quelle façon on pourrait, parce que je suis convaincu que c'est le désir de tous les membres de la commission, accommoder le plus possible les vivants, tout en respectant ceux qui avaient le pouvoir de tester.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une demande à faire au ministre, en attendant, pendant qu'il va réfléchir. Il a invoqué le précédent de la succession de Tancrède Bienvenue. De mémoire, je ne pourrais pas dire, mais il me semble que des tiers avaient des intérêts dans le résidu du capital qui était appelé à payer la rente. C'est pour cela qu'il fallait y aller d'une façon beaucoup plus prudente, parce qu'éventuellement ce capital devait aller à d'autres personnes. Il y avait une espèce de rente ou de pension créée par le testament qui était devenue illusoire, à cause justement du changement, de l'inflation, et le législateur a tenté simplement de mettre un peu de justice là-dedans. Mais, dans ce cas-ci, c'est à elles, éventuellement, ou à leurs enfants ou leurs descendants.

M. Bédard: Si tout le monde est d'accord, il n'y a pas d'objection...

M. Lalonde: Tout le monde est d'accord. M. Bédard: Alors, nous allons suspendre.

Le Président (M. Dussault): S'il y a consentement de la commission de suspendre le projet de loi no 234, il est suspendu. L'étude est suspendue et nous allons passer immédiatement au projet de loi privé no 248, Loi concernant la succession de Charles Frenette.

Projet de loi no 248

Je suppose que nous avons devant nous Me Jean Pelletier, procureur de la requérante.

M. Pelletier (Jean): Oui, c'est bien cela.

Le Président (M. Dussault): Et vous êtes accompagné de...

M. Pelletier: Je suis accompagné de M. Benoît Mercier, qui est représentant du Trust général du Canada, un des exécuteurs testamentaires de la succession Charles Frenette.

Le Président (M. Dussault): D'accord. Me Pelletier, je vous demande de nous expliquer brièvement le sens de la requête.

M. Pelletier: M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, il s'agit d'un projet de loi qui concerne la succession Charles Frenette. M. Frenette a fait un testament notarié, sous la forme authentique, le 13 février 1941. Ce testament a été modifié par un codicille ultérieur, au mois de novembre 1941 également. Le codicille n'apporte pas de changement de fond au testament, il s'agit tout simplement d'apporter des précisions. Il apporte des précisions en ce qui concerne les rentes quinquennales à être versées à ses enfants.

L'article du testament qui concerne le projet de loi no 248 se rapporte à l'article 13, qui contient une prohibition d'aliéner des immeubles du testateur situés à Saint-Charles-de-Bellechasse. Si

nous lisons l'article 13, au troisième alinéa, à la page 5 du testament, le testateur prévoit, "en ce qui concerne les quatre propriétés suivantes, situées dans le village de Saint-Charles-de-Bellechasse, savoir celle dont l'usufruit est ci-dessus légué à mon épouse — c'était sa résidence — celle acquise par moi de Joseph Leclerc sur le chemin principal et presque en face de la route conduisant à la gare, celle dont le terrain a été acquis par moi de M. Joseph Ruel, sur la route conduisant à la gare, et celle acquise par moi d'Alfred Bruneau, je veux et entends que mes exécuteurs testamentaires n'aient pas le droit de les vendre ou autrement aliéner tant qu'un des enfants issus de mon mariage avec mon épouse susnommée vivra, et que, en attendant, ils louent de préférence à tous autres, d'année en année seulement, l'une ou l'autre de ces propriétés à celui ou ceux de mes enfants sus-désignés qui voudront les louer, et je les autorise, à cet effet, de leur faire un prix de loyer de faveur, et le ou les plus âgés ayant préséance, le tout sujet, quant à l'une de ces propriétés, à l'usufruit légué à mon épouse".

Mme Frenette est décédée le 9 avril 1971. Les exécuteurs testamentaires nommés au testament à l'article 13, au testament de M. Frenette sont son épouse: Dame Graziella Prévost, et son frère, M. Joseph Frenette, et Trust général du Canada. En raison du décès des deux exécuteurs testamentaires individus, ils ont été remplacés aux termes du testament par les deux fils plus âgés du testateur, soit MM. Donat et Charles Frenette. Il s'agit d'immeubles situés à Saint-Charles-de-Bellechasse. Ce ne sont pas des immeubles à rapport ou des immeubles à revenus; il s'agit de résidences. Une de ces résidences, d'ailleurs, a été détruite lors d'un incendie l'hiver dernier. Ce sont des résidences de bois, des constructions de bois, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, et les réparations à être effectuées sur ces immeubles sont telles que les revenus qu'ils procurent sont insuffisants pour permettre ces réparations qui ne peuvent, par conséquent, être effectuées.

Ce sont les seuls actifs de la succession de M. Frenette, qui est déficitaire depuis de nombreuses années, puisque les revenus et les recettes provenant de l'exploitation des immeubles qui sont loués ne suffisent pas à défrayer les coûts d'entretien et de réparation, bien qu'ils ne soient grevés d'aucune hypothèque.

Au 31 décembre 1975, le déficit ou le découvert de caisse de la succession s'élevait à $6 673. au 31 décembre 1976, à $9501.94 et au 31 décembre 1977 à $10 000. Donc, le déficit s'accumule d'année en année. Il n'y a évidemment pas d'argent dans la succession pour effectuer les réparations qui sont rendues maintenant nécessaires. D'ailleurs, il y a eu un rapport de préparé par un expert, un évaluateur du Trust général, au mois de janvier 1977, et, sur ce rapport, il indique les réparations qui doivent être effectuées sur ces immeubles de bois, dont un, d'ailleurs, est un immeuble centenaire. Les deux autres qui existent encore sont des immeubles de 60 à 65 ans. Selon le rapport de l'expert du Trust général, il en coûterait, dans le cas de l'immeuble situé au 60, avenue Royale, Saint-Charles-de-Bellechasse, $17 183 pour remettre ça à neuf. C'est une construction de bois, une vieille construction, il y a donc beaucoup de réparations à faire au niveau de la menuiserie, de la peinture extérieure, de la peinture intérieure, de l'électricité, et de la couverture.

Pour un autre immeuble, celui situé au 73, avenue Royale, c'est $9 800. La même chose encore, la peinture extérieure, la menuiserie, la peinture intérieure et ainsi de suite, et c'est $5000 pour l'immeuble situé au 107, avenue Royale. C'est celui qui a été détruit par l'incendie, et au 8, rue de la Gare, il y aurait $1300 de réparations à effectuer, mais il n'y a plus d'argent dans la succession présentement. Bien entendu, comme on le mentionnait tout à l'heure, la prohibition d'aliéner emporte la prohibition d'hypothéquer et, encore là, si on pouvait hypothéquer, les possibilités de louer ces maisons à Saint-Charles-de-Bellechasse à un prix qui permettrait de faire face aux dépenses, sont à peu près nulles, puisque les deux immeubles, celui du 60, avenue Royale, n'est pas loué présentement, mais les deux qui sont loués rapportent un loyer mensuel de $165 dans un cas et $150 dans l'autre. Il n'y a plus d'autre actif dans la succession. (17 heures)

Quant aux intentions du législateur, si nous regardons l'article 9 de son testament, il est prévu...

Le Président (M. Dussault): Je m'excuse, si vous permettez, on souhaiterait que vous abrégiez parce qu'on pense comprendre suffisamment la requête pour pouvoir y arriver rapidement.

M. Pelletier: Au niveau du legs résiduaire ou des rentes, les six enfants de M. Frenette qui sont encore vivants doivent toucher une rente quinquennale de $2500 par année. Le testateur indique bien: Leur vie durant et jusqu'à chaque épuisement de mes biens, c'est-à-dire qu'on peut puiser sur les revenus de la succession, et ensuite, sur le capital. Par la suite, on revient aux petits enfants de M. Frenette, au paragraphe b), il dit: En second lieu, et, pour le cas où il y aurait ainsi un résidu, c'est un partage entre les petits enfants de M. Frenette. Nous avons obtenu le consentement écrit pour la présentation du présent projet de loi de la part des six enfants de M. Frenette et de la part de tous les petits enfants de M. Frenette qui ont consenti à ce que les exécuteurs testamentaires obtiennent l'autorisation.

M. Bédard: C'était la question que je voulais vous poser, si ceux qui peuvent être affectés par votre demande ont été avisés, puisqu'ils étaient consentants.

M. Pelletier: Nous avons obtenu des consentements écrits.

M. Bédard: Vous nous dites qu'ils le sont. Je n'ai pas d'autre question à vous poser là-dessus.

M. Lalonde: Moi non plus. Je pense que vous avez bien démontré que les bénéficiaires éventuels, soit comme locataires à prix privilégié, comme le dit le testateur, soit comme légataires, sont d'accord pour vendre ces immeubles. Je pense bien qu'on doit suivre leur volonté. Je serais prêt à voter en faveur du présent projet de loi.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Est-ce que ce sont des immeubles contigus?

M. Pelletier: Non. Ils sont situés à différents endroits dans le village de Saint-Charles-de-Bellechasse.

M. Fontaine: D'accord.

Le Président (M. Dussault): J'appelle l'article 1.

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): L'article 1 est adopté. J'appelle l'article 2.

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): L'article 2 est adopté. J'appelle l'article 3.

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): L'article 3 est adopté. Est-ce que le projet de loi no 248, Loi concernant la succession de Charles Frenette, est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Merci, Me Pelletier.

Projet de loi no 262

Nous allons maintenant passer à l'étude du projet de loi no 262, Loi concernant Claude Desfossés. Je demande au requérant de se présenter devant la commission.

Une Voix: Nous sommes présents.

Le Président (M. Dussault): Je demande aux personnes présentes de s'identifier.

M. Bouliane (Michel): Michel Bouliane.

M. Landry (Charlemagne): Charlemagne Landry.

Le Président (M. Dussault): Me Charlemagne Landry, le dernier qui s'est présenté. Ensuite.

M. Desfossés: M. Desfossés.

Le Président (M. Dussault): M. Desfossés, oui. Et Me Péloquin?

M. Péloquin (Jean): Jean Péloquin, avocat. Je représente la ville de Montréal.

Le Président (M. Dussault): D'accord. Je demande d'abord au procureur du requérant de nous expliquer brièvement le sens de la requête.

M. Bouliane: Tout d'abord, nous avons remis un projet de modification qui ajoute, à la fin de l'article 1, les mots suivants— je ne sais pas si des copies suffisantes ont été remises — "avec intérêt à compter de leur échéance respective", et à la fin du paragraphe 2 de l'article 2 les mots: "sur présentation d'une requête".

Le Président (M. Dussault): D'accord. De toute façon, pour ce qui est des amendements, nous allons les regarder bien spécifiquement au moment de l'étude des articles. Pourriez-vous nous expliquer plus généralement le sens de la requête?

M. Bouliane: Voici! Il s'agit d'une requête qui a trait à un individu qui, le 12 mai 1966, a été congédié ou suspendu par le comité de discipline de la ville de Montréal, à la suite d'une plainte qui avait été formulée contre lui pour vol et recel, en un mot, qui disait, si vous permettez: Parce qu'il avait été arrêté par la police de la ville de Jacques-Cartier et accusé d'introduction par effraction dans une place d'affaires et qu'ensuite la police de Montréal avait porté une seconde accusation de vol et recel d'un camion. Le comité de discipline l'a congédié. Il a cessé de travailler à partir de ce moment et le procès s'est déroulé devant le juge Sylvestre. Il a été acquitté sur les deux chefs et, à la suite de ça, un grief a été logé. Ce grief a été entendu avec une requête pour non-arbitrabilité du grief, tout d'abord, à savoir que le grief aurait été prescrit.

Cette motion préliminaire a été rejetée. Le grief a été entendu sur le fond devant l'honorable Louis-Philippe Gagnon qui a maintenu le grief, et je cite les conclusions du grief: "Dans les circonstances, il y a lieu d'ordonner que Desfossés soit réintégré dans ses fonctions, avec tous les avantages prévus à la convention collective et ce, rétroactivement depuis le 7 juin 1967."

Je vous ferai remarquer immédiatement — ça peut sembler bizarre lorsqu'on le regarde de près — qu'il avait été congédié le 12 mai 1966, mais c'était rétroactif — alors que c'était rendu en 1968 — au 7 juin 1967, de sorte qu'il a effectivement, à l'intérieur de la décision arbitrale, perdu un an de salaire mais c'est la disposition de l'article 18.04 de la convention collective — je

crois que ça n'existe plus aujourd'hui dans les conventions collectives — qui stipulait que la décision arbitrale ne pouvait rétroagir au-delà de douze mois de la date de sa reddition et elle a été rendue le 7 juin 1968. Cela ne pouvait rétroagir au-delà du 7 juin 1967.

A la suite de cette décision arbitrale, il y a eu un refus par la ville de Montréal de réintégrer le pompier Claude Desfossés dans ses fonctions. Il y a eu une mise en demeure à cet effet. Le 6 novembre 1968, une action a été prise en Cour supérieure par M. Claude Desfossés contre la ville de Montréal. Action, et je fais référence, entre autres, au paragraphe 7, où on dit: Au terme de cette décision, le demandeur a droit au montant ci-après indiqué en salaires et autres avantages prévus à la convention collective, en plus de son recours en dommages-intérêts, tels que ci-après stipulés.

Aux deux paragraphes suivants, il détaille le salaire et les avantages qu'il a perdus. Salaires, qui relèvent strictement de la convention collective, qui vont, pour une première période, au paragraphe 8, du 7 juin 1967 au 7 juin 1968, c'est-à-dire, à compter de la sentence arbitrale et rétroactivement douze mois en arrière, et, ensuite, du 8 juin 1968 jusqu'à la date où l'action a été intentée, c'est-à-dire le 6 novembre 1968.

L'honorable juge André Demers, de la Cour supérieure, a rendu sa décision le 22 avril 1970. Sa décision — si vous voulez en prendre connaissance, elle pourra vous être remise — accorde le plein montant, sauf $960, période durant laquelle l'individu aurait eu des gains ailleurs. Mais il les accorde à la fois en salaires et dommages-intérêts, ce qui, à mon humble avis, n'avait pas été réclamé comme tel, puisque les dommages-intérêts dans l'action n'avaient pas été détaillés. De toute façon, il accorde les dix mois en question, c'est-à-dire l'année de douze mois — c'est-à-dire les $10 000 — et les cinq mois et deux jours jusqu'à la date de la prise de l'action, de sorte qu'en réalité les dommages équivalent au salaire qu'il a perdu jusqu'à la date où l'action a été intentée, où l'émission du bref a eu lieu.

En 1970, la décision est rendue. Cette décision a été portée en appel. La Cour d'appel a rendu une décision favorable, c'est-à-dire qu'elle a rejeté le recours en appel de la ville de Montréal en 1972. Je n'ai pas la décision de la Cour d'appel ici.

A la suite de ce rejet, il s'est écoulé un laps de temps sur lequel je reviendrai tout à l'heure, entre toutes ces procédures et, ensuite, en 1975-1976, on a commencé à brasser cette espèce de recours sur un projet de loi spécial qui permettrait, comme les articles le disent, de faire fixer, par la Cour supérieure, sur requête, l'indemnisation additionnelle à laquelle pourrait avoir droit M. Desfossés.

La première question que, je pense, on peut se poser, c'est pourquoi, tout d'abord, il n'y a pas eu d'autre recours et, jointe à cette question, quelle était la décision arbitrale et quel était son effet.

Je me permettrais tout d'abord de vous sou- ligner qu'à cette période, en droit du travail, — je pense que je n'apprends rien à personne, surtout pas au ministre et à M. Johnson, qui est parti tout à l'heure — il n'y avait pas de "specific performance", on ne pouvait pas exécuter, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas de moyens comme tels pour forcer la ville de Montréal à reprendre M. Desfossés et à faire un recours en dommages-intérêts. Le recours en dommages-intérêts lui-même était extrêmement difficile à exercer pour le futur, ce n'était pas comme une réclamation, une incapacité totale permanente de 25%, parce qu'on ne savait pas quel serait ce recours, quels seraient les dommages qui seraient encourus dans le futur et ce qu'il perdrait, s'il travaillait, etc., s'il recevrait du bien-être social, s'il aurait d'autres revenus additionnels, comme il en a eu, et le juge Demers l'a spécifié, lorsqu'il a gagné $960.

Ce qu'il est important de spécifier aussi, c'est que, toujours, après chaque recours, M. Desfossés s'est adressé à la ville de Montréal pour dire: Quand me reprenez-vous? Après l'audition au comité de discipline, comité de discipline dont il est amplement traité d'ailleurs dans la sentence arbitrale... Je me permets de vous relater certains faits qui relèvent de la sentence arbitrale, brièvement, où on reproche, entre autres, à la ville de Montréal, d'être allée un peu trop vite, alors qu'il n'avait pas été représenté par procureur, et on lui dit: Dans ces circonstances, quel était le devoir des membres du comité? L'avocat de la ville prétendait, à ce moment, — ce n'était pas Me Péloquin à ce moment — que M. Desfossés aurait pu demander un ajournement. On reproche à la ville de Montréal, alors qu'elle a un individu devant son comité de discipline, de ne pas avoir respecté ses droits en partie. Plus loin, on ajoute ceci: M. Desfossés était seul devant ses pairs, on avait refusé à son avocat de l'assister devant le comité de discipline; pourtant, rien dans les règlements ne prohibait sa présence. Plus loin, on ajoute ceci: Dans l'espèce, il ne s'agissait pas d'une infraction mineure au code de discipline, comme dormir en devoir ou être absent du domicile, bien qu'étant dûment inscrit sur la liste des malades, mais d'une infraction majeure, on l'accusait de vol et recel. L'arbitre, seul et unique, à ce moment, ajoute ceci: En somme, le principe audi alteram partem a été violé, M. Desfossés, n'a vraiment pas été entendu. Si on va au fond des choses, on constate, abstraction faite du jugement d'acquittement qui était survenu dans l'intervalle, que M. Desfossés n'était coupable de rien, sauf d'avoir été imprudent, ainsi que ses amis, en accordant leur aide à un personnage qu'ils connaissaient à peine.

Tout ceci pour vous dire que même en dépit de l'acquittement, le comité de discipline aurait pu dire que c'était une conduite déshonorante, mais l'arbitre en vient à la conclusion que ce n'est même pas le cas, parce que, prima facie, il n'y avait pas de preuve.

Alors, après la décision du juge Sylvestre, qui l'acquittait en Cour des sessions de la paix, M. Desfossés a tout fait, par l'intermédiaire de ses

procureurs, pour dire à la ville: Vous voyez, vous n'aviez pas raison, rengagez moi. La ville n'en a rien fait.

Le grief a été logé, et c'est à ce moment qu'il y a eu une motion préliminaire pour non-arbitrabilité du grief, et, encore là, ça été rejeté. Tout de suite après, on s'est adressé à la ville de Montréal en disant: Pourriez-vous à nouveau nous réintégrer? Vous voyez que le grief, on va l'entendre; en principe on devrait le gagner. La ville a dit: Non.

Le grief a été entendu, la décision arbitrale est survenue le 7 juin 1968. On a dit: Ecoutez, la décision est là, réintégrez-nous, on est prêt à travailler, on perd un an de salaire, du 12 mai 1966 au 7 juin 1967, puisque ça ne réagit pas plus d'un an antérieurement à la décision arbitrale. On a dit: Non. Il y a eu des négociations pendant ces cinq mois, cela n'a pas marché. On a pris en Cour supérieure l'action dont je vous parlais tout à l'heure, et à la suite du jugement qui a été rendu en 1970, c'est donc qu'il s'était écoulé plus de deux ans, à ce moment, et ça tombe dans la prescription pour les salaires. Lorsque la décision de la Cour d'appel a donc été rendue — et ça vous montre cette espèce de progression géométrique dans les réclamations pour l'exécution spécifique de la décision arbitrale — le 13 février 1973, le procureur de M. Desfossés écrivait au maire Drapeau, de Montréal: Ecoutez, nous avons eu une rencontre, nous avons épuisé tous les recours, nous sommes rendus à la Cour d'appel, on n'a pas été engagé, on pense que ce serait temps de faire quelque chose, il y aurait lieu, pour la ville de Montréal, de réparer cette injustice et ce tort énorme, en le réintégrant dans le service des incendies de la ville de Montréal et en lui payant les sommes d'argent qu'il a perdues depuis son congédiement illégal, décidé par le juge Gagnon, dans une sentence arbitrale. Nous faisons appel à vos bons offices, etc., pour qu'il soit traité suivant les normes que vous avez appliquées dans le cas du policier Courval. Il ne s'est absolument rien produit par la suite. (17 h 15)

C'est pour ça qu'aujourd'hui on prétend que même si la décision du juge Demers se réfère à des dommages-intérêts, ce sont des dommages-intérêts qui qualifient le salaire qui se prescrit par deux ans, parce que, lorsqu'il n'y a pas la fourniture d'un travail, ça devient du dommage-intérêts. Ce ne sont pas des dommages-intérêts qui résultent, par exemple, de l'exécution d'un travail. Lorsque quelqu'un reçoit une indemnité de 25% à la suite d'un accident d'automobile, ce sont des dommages-intérêts qu'on peut qualifier, qu'on peut identifier et qu'on peut liquider pour le futur. Dans le cas présent, ce n'est pas ça.

Et, dans le cas des salaires, on ne pourra toujours pas reprocher à M. Desfossés de ne pas s'être exécuté, c'est-à-dire d'avoir poursuivi tous les ans ou tous les deux ans en vertu de l'article 2260 du Code civil, parce que je pense que ces salaires se prescrivent par deux ans, mais il y avait quand même une action pendante, et les possibilités d'amender une action en 1968 étaient différen- tes d'aujourd'hui, de même que l'exécution spécifique est différente aujourd'hui, parce que le projet de loi 45 permet l'exécution spécifique et on peut forcer aujourd'hui la réintégration de l'individu dans le corps de travail où il est syndiqué et dont il fait partie, lorsque la sentence arbitrale, évidemment, l'ordonne aussi.

De sorte qu'en 1973, il y a eu une prescription des conditions salariales. Autre question qu'on peut se poser: Est-ce qu'il aurait pu à ce moment-là dire: Si les quatre autres années sont prescrites, je vais commencer à poursuivre pour 1972. Encore là, je pense que même si c'était le cas, on ne pouvait pas... on demeure toujours quand même où il y a une période de quatre ans où on ne serait pas couvert. On ne demande pas ici de pouvoir faire fixer par la Cour supérieure pour un nombre spécifique d'années, on dit tout ce qu'on pourrait réclamer depuis 1968, on voudrait pouvoir le réclamer sans le préciser à l'heure actuelle, parce qu'il faudrait quand même déterminer tout le travail qu'il a pu exécuter dans l'intervalle et toutes les prestations dont il a pu bénéficier.

Je pense que c'est en deçà des pouvoirs de cette Assemblée de pouvoir accorder les choses que nous réclamons aujourd'hui. L'accord d'un projet de loi privé évidemment peut passer pardessus toute loi, toute décision, je n'ai pas à le cacher à ceux qui ont déjà siégé ou même ceux qui ne sont plus nouveaux et qui ont eu l'occasion de le constater. On se réfère à la décision de Courval. Je pense que cette décision va conjointement avec celle du cas de M. Pacifique Plante, entre autres, et je soumets ici que même s'il y avait eu une négligence, parce que c'était déjà devant les tribunaux, s'il y avait déjà eu une négligence de poursuite, si on peut, par un projet de loi privé, une législation spéciale, passer outre à une loi comme la prescription, qui est prohibitive, et c'est un défaut au-delà duquel on ne peut aller, c'est ce qu'on appelle des délais de déchéance, la bonne foi n'a rien à voir là-dedans.

Dans le cas de Pacifique Plante, à l'article 101 du projet de loi, on avait dit: le montant de la pension alimentaire... Passons pardessus ça. Deuxièmement, l'article disait ceci, au paragraphe 2: "Pacifique Plante peut, dans les douze mois de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, par requête à la Cour supérieure ou à l'un de ses juges, demander un jugement déclaratoire pour faire déterminer tout droit — et je vous souligne les quatre mots qui suivent — même éteint par prescription qu'il aurait pu faire valoir à titre d'employé ou d'ancien employé de la ville de Montréal." Ce jugement a les mêmes effets et est sujet aux mêmes recours en appel que tout autre jugement final de la Cour supérieure.

C'est le même cas pour Courval, auquel nous faisions allusion dans notre mémoire. Les deux étaient assez liés d'ailleurs. Je ne l'ai pas devant moi, je vais me référer à un autre, où non seulement on avait permis de passer à côté d'une loi, mais permis d'allerà l'encontre d'une décision de la Cour d'appel. Je vous réfère ici à une décision qui implique la ville de Saint-Laurent, chapitre 167,

IV, V, Elizabeth 11, page 797, et je pense qu'il est peut-être important de le résumer en quelques mots.

Un individu qui était échevin de la ville de Saint-Laurent avait acheté un terrain alors qu'il n'avait pas le droit de l'acheter, de par ses fonctions. Il avait construit un édifice d'à peu près $40 000 sur ce terrain. Un citoyen, qui à un moment donné, par quo warranto, a demandé de faire annuler cette vente, a dit: monsieur, vous n'avez pas le droit. La Cour supérieure, pour résumer, a maintenu la position de ce citoyen, a déclaré nulle la vente du terrain intervenue en faveur de l'échevin. C'est allé en Cour d'appel, la Cour d'appel a dit: La vente est nulle, donc elle a rejeté l'appel. A ce moment-là, elle a procédé par requête pour permission d'appeler en Cour suprême. Il a dit: Non monsieur, vous n'avez pas le droit d'appeler. Se retournant, le même échevin qui était M. Paul-Emile Laperrière a fait un appel de plans croyant qu'il pouvait avoir droit, sans requête, à faire un appel de plein droit à la Cour suprême.

Il y a eu une requête pour rejet d'appel par l'autre partie, et la requête a été maintenue, de sorte que vous aviez une décision équivalant à une décision du plus haut tribunal du pays qui disait: Monsieur, la vente est nulle. Par bill privé, on l'a déclaré propriétaire absolu et irrévocable, par législation spéciale.

C'est vous dire jusqu'à quel point peut aller la législation des bills privés lorsqu'on regarde les notes explicatives que l'on retrouve dans les règlements annotés de l'Assemblée nationale. Je ne réfère pas aux articles qui ont pu être amendés, je réfère aux notes explicatives. Dans l'ancien volume, à la page 117, l'édition de 1941, on dit, entre autres, en parlant des bills privés: "font partie des bills privés les bills dont l'objet est de déroger à une loi générale dans l'intérêt de quelque individu, compagnie, corps, association, municipalité." On va plus loin que ça lorsqu'on dit quels sont les critères qu'on doit considérer. Je réfère à ce moment-ci à la page 189, à certaines explications sur l'article 638, où on dit: "Au nom des raisons généralement invoquées par le comité à l'appui de sa décision, on peut citer les suivantes, que l'adoption du bill compromettrait des droits acquis ou des poursuites pendantes". Dans le cas présent, il n'y a pas de poursuites pendantes. Cela a déjà été rejeté dans des cas où il y avait des poursuites pendantes ou des possibilités qui existaient encore à ce moment-là. "Lorsque les promoteurs peuvent obtenir en vertu d'une loi générale tous les pouvoirs qu'ils demandent et que le bill est conséquemment inutile." Ce qui n'est pas le cas, on n'a plus de recours à l'heure actuelle. En plus, je pense que fondamentalement, c'est l'équité qui est concernée et l'équité, envers un individu... et je prétends que la ville de Montréal ne peut soulever aujourd'hui le fait que tous les droits soient éteints parce que ce qui se passe aujourd'hui, c'est une conséquence directe d'une corporation qui est la ville de

Montréal. Elle ne peut blâmer un tiers parce qu'elle a refusé. Elle peut toujours dire aujourd'hui: Nous n'étions pas obligé de l'exécuter, on s'asseoit, poursuivez-nous. Dans le cas présent, elle a refusé d'exécuter une décision où elle était strictement concernée, où la décision de l'arbitre dit: Vous n'auriez pas dû faire ça.

Deux ans après, probablement pour éviter des remous probablement, on ne l'a pas réengagé. Alors, la seule personne responsable de tout ce qui se passe aujourd'hui et responsable du non-recours, c'est la ville de Montréal. Si on comprend la position de M. Desfossés qui voulait, en définitive, être réintégré, c'est d'abord ce qu'il a visé, être réintégré... Je vous lisais tout â l'heure différentes lettres, à chacune des étapes, il a demandé à être réintégré. Il n'a pas cru qu'en poursuivant, année après année, ça réglerait le problème. A chacune des étapes qu'il a gagnées, il a demandé la réintégration.

On ne pouvait pas, en 1968 et en 1969, exiger cette réintégration parce que si on était dans le contexte d'aujourd'hui, nous ne serions pas devant vous. Nous aurions exigé ce qu'on appelle "a specific performance".

Alors, nous demandons, vu l'absence de tout recours et même si, à mon avis, il y avait eu négligence, si on en venait à la conclusion en disant: comment cela se fait-il qu'il n'a pas poursuivi, etc. Je pense que même ça peut être couvert par une loi spéciale lorsque l'équité vient primer le droit d'un individu à une indemnisation adéquate. On peut vous dire: Ecoutez, les dommages ont été liquidés. Je m'excuse, ils n'ont pas été liquidés, sinon jusqu'à la prise de l'action. Ce serait quand même une drôle de coïncidence si les dommages liquidés arrivaient justement au 6 novembre 1968.

J'ajoute ceci: II n'en serait pas de même si vous vous retrouviez devant une action prise, supposons en juin 1970 alors que le juge aurait dit: C'est pris en juin 1970, la sentence artibrale est en 1968, j'accorde dix mois de dommage, même si l'action a été prise huit mois plus tard, encore.

Mais à l'heure actuelle, tout ce que le juge a accordé, ce sont les dommages, le salaire, jusqu'à la date de l'émission du bref. Il appelle cela dommages, à mon avis, parce qu'au point de vue juridique, lorsqu'il n'y a pas une fourniture de travail, lorsque la main-d'oeuvre, lorsque la contrepartie n'est pas donnée, cela s'appelle des dommages. C'est du salaire en réalité et cela se prescrit par deux ans. Aujourd'hui, il est trop tard pour cela. Et même si on disait: Encore aujourd'hui, mais en dépit du laps de huit ans qui s'est passé, vous pouvez le réclamer, on ne pourrait pas réclamer plus que pour deux ans en arrière. A ce moment-là, nous pourrions demander la législation spéciale pour les six ans pour lesquels nous n'avons pu les réclamer.

M. Bédard: Est-ce que vous avez consulté la ville de Montréal? Et est-ce que celle-ci vous a exprimé une opinion récemment?

M. Bouliane: Récemment? Elle a été contactée à maintes reprises. Je ne pourrais pas vous donner toutes les périodes. Je m'excuse, mais un projet a été envoyé à la ville de Montréal, il y a au-delà de six mois et je pense des représentants avaient été invités, s'ils le voulaient, à négocier. Je ne crois pas que M. Desfossés ou M. Landry aient entendu parler de la ville de Montréal depuis ce temps-là.

Le Président (M. Dussault): Me Landry.

M. Landry (Charlemagne): M. le Président, j'ai rendu visite à Me Péloquin une fois que les annonces ont paru dans les journaux, annonçant qu'un projet de loi privé serait présenté ici devant l'Assemblée nationale. Nous avons discuté un peu du cas, mais la ville de Montréal ne m'a pas fait d'offre. Je pense bien que dans les circonstances, le chef du contentieux ne pouvait pas non plus me faire d'offre, sans en parler aux autorités de la ville.

M. Bédard: Nous allons attendre le chef du contentieux, nous aurons l'occasion...

M. Paquette: J'aimerais ajouter qu'au mois de décembre, j'ai moi aussi envoyé une copie du projet de loi à Me Péloquin lui disant que j'avais l'intention de présenter un projet de loi concernant M. Desfossés et que s'il voulait s'entendre à l'amiable, il n'avait qu'à m'en avertir. Je n'ai pas eu de réponse à cette démarche.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que la commission veut entendre d'autres personnes?

M. Bédard: II y a un représentant de la ville de Montréal. Il serait sûrement indiqué de l'entendre.

Le Président (M. Dussault): Me Jean Péloquin, vous avez la parole.

M. Péloquin: M. le Président, je représente la ville de Montréal. Evidemment, la ville de Montréal est intéressée à venir ici et elle conteste ce projet de loi parce que des sommes considérables sont en jeu, si on fait l'addition, si on prend les conclusions du projet de loi.

Mais c'est un aspect secondaire de ma présence ici. Je pense que derrière l'opposition de la ville de Montréal, il faut voir une question de principe et une question de principe fondamentale. Evidemment, l'argument principal de mon confrère que j'ai écouté très religieusement, c'est un argument d'équité. Et c'est difficile de ne pas être sympathique au cas qui est devant nous.

Mais dans notre système, on sait que la justice prime l'équité. Evidemment, on veut permettre à une personne d'avoir droit de s'adresser aux tribunaux. On veut permettre à une personne, suivant l'expression anglaise "to have his day in Court". Le requérant a pu s'adresser aux tribunaux à l'époque. Le requérant a eu ce qu'il demandait. Il était représenté par des procureurs très avisés dans le domaine du droit des relations du travail à l'époque. Je crois qu'il était bien conseillé. Non seule- ment a-t-il eu "his day in Court", mais il en a eu deux, parce que la ville de Montréal est allée en appel. Lui n'a pas été en appel. Il était satifait de conclusions du jugement de première instance Son procureur l'a dit lui-même dans le mémoire qu'il a présenté à la Cour d'appel, que je me permets de lire: "Pour toutes ces raisons, nous soumettons respectueusement que le savant juge de première instance a rendu un jugement en toute conformité avec le droit." (17 h 30)

Ceux parmi vous qui sont avocats savent qu'il existe des principes, des règles de droit qui sont d'un côté, la prescription, d'un autre côté aussi Ie res judicata. Evidemment, on a parlé ici de précédents. On a parlé du cas de Armand Courval, on a parlé du cas de Pacifique Plante. Si le requérant obtenait gain de cause ici aujourd'hui, nécessairement, on parlerait de dizaines et de dizaines d'autres cas de personnes qui n'ont pas eu satisfaction parce qu'un jugement a pu être erroné parce qu'il y a eu erreur de leur part, parce qu'elle ont laissé prescrire des droits ou, encore, parce qu'il y aurait eu erreur professionnelle de la part des personnes qui étaient chargées de les conseiller.

Evidemment, les conséquences sont énormes ici dans l'appréciation de ce projet de loi. J'ai remarqué que votre commission se faisait fort, Iors de l'étude des projets de loi antérieurs, de bien être certaine que toutes les parties en cause étaient consentantes. Evidemment, je ne peux pas demander le consentement de ceux qui sont partis, mais toutes les parties qui pouvaient être impliquées par une décision de la commission parlementaire ou de l'Assemblée nationale étaient consentantes.

Je ne sais pas si je devrais et si vous allez me laisser le temps de faire des parallèles entre les cas Plante, Courval et Desfossés. Ce serait peut-être trop long. On peut peut-être s'en tenir simplement à la question de principe. Evidemment, on pourrait aussi parler longtemps de droit...

M. Bédard: Pouvez-vous, pour le bénéfice des membres de la commission, faire rapidement le parallèle entre des cas, pour être plus pratique les cas Courval et Plante, par rapport à ce qui est devant nous.

M. Péloquin: Je ne connais pas le cas que mon confrère a cité de la ville de Saint-Laurent qui remonte à plusieurs années et qui a trait d'ailleurs à l'acquisition d'un terrain. Tout de même, je ne crois pas que ce soit de la même importance, mais je connais les cas Plante et Courval pour en avoir entendu parler et pour avoir également examiné leurs dossiers qui se trouvent dans notre service, parce que la ville était impliquée dans ces deux cas-là.

C'est le cas de Courval qui est arrivé en premier lieu. Courval était un officier de police. Je vais passer vite sur les détails. On sait qu'il y a — je vois qu'il y a des membres de la commission qui connaissent bien son cas — eu énormément de publicité à l'époque. Il a été congédié du service de

police parce qu'il avait été trouvé coupable par les tribunaux de parjure. Evidemment, ayant été congédié pour cause, il ne pouvait réclamer absolument rien de la ville de Montréal. Les années ont passé, plusieurs années et, finalement, la police a trouvé tout à fait par hasard un commencement de preuve qui a permis de faire accorder à Courval son pardon et le déclarer, je pense que Courval n'aurait jamais dû être condamné, qu'il avait été condamné injustement, qu'il avait été condamné parce que certains policiers subalternes s'étaient parjurés devant les tribunaux. Tout le monde était sympathique au cas de Courval. Je ne pense pas que le cas de Courval se compare à celui de M. Desfossés, parce qu'il ne pouvait exercer aucun recours.

Il y avait, je pense, un point fondamental dans le cas de Courval et aussi dans le cas de Plante.

M. Bédard: Dans le cas de Courval, est-ce que c'est un projet de loi privé ou public?

M. Péloquin: C'est un projet de loi privé.

M. Blank: Non, il est passé par l'Assemblée nationale, c'est un projet de loi du gouvernement.

M. Péloquin: Oui, je sais, le 280.

M. Lalonde: Cela doit être privé alors.

M. Péloquin: II n'apparaît pas de parrain à ce projet-là ici sur la copie que j'ai. Non, il n'y a pas de nom en première page de la personne qui aurait pu être responsable du projet de loi. Je crois que c'était un projet de loi public, présenté en 1971.

Une Voix: ...

M. Péloquin: 280.

M. Lalonde: Cela doit être privé alors.

M. Blank: Non, je pense que c'est public. Le greffier en loi me dit que c'est public.

M. Bédard: M. le greffier en loi nous dit que c'est un projet de loi public.

M. Paquette: II n'est pas sûr, il va aller vérifier.

M. Péloquin: Si vous me permettez, lisons simplement les deux premières lignes de l'article 1 : "La ville de Montréal est autorisée à verser à M. Armand Courval une indemnité en raison du pardon qui lui a été accordé." Alors, c'était une autorisation que l'Assemblée nationale donnait à la ville de Montréal d'effectuer un paiement que la ville de Montréal reconnaissait et qu'elle devait lui faire.

Evidemment, ce cas en a amené un autre. On a le troisième aujourd'hui, mais il en a amené un deuxième qui était le cas de M. Plante. Le cas de M. Plante se distingue de celui de M. Courval. Je ne suis pas certain qu'il était aussi justifié, mais je ne ferai pas plus de commentaires que ça. Je pourrais dire, toutefois, que M. Plante n'avait exercé aucun recours, mais je ne crois pas qu'il n'ait pas été en mesure d'exercer un recours à ce moment, parce qu'il avait été congédié, dit-on injustement ou illégalement, mais, tout de même, il n'avait pas été condamné par les tribunaux comme M. Courval. Alors, il n'a pas exercé de recours; on sait que son histoire est assez longue. Il s'est exilé dans un autre pays et, évidemment, quand il est revenu quelques années plus tard, après avoir vu l'Assemblée nationale autoriser la ville à accorder une indemnité, il a demandé une indemnité et la ville s'est adressée à la Législature ici. Il y a eu, évidemment, énormément de pourparlers. C'était le ministre Choquette qui était alors ministre de la Justice et cette Assemblée a résolu tout simplement de lever la prescription des droits de M. Plante et de lui permettre de s'adresser à la Cour supérieure.

M. Plante s'est adressé à la Cour supérieure; il a obtenu $11 800. Il est allé à la Cour d'appel; il a obtenu $115 000. Evidemment, pour un avocat, ça ne surprend pas. Il y a des tribunaux d'appel, parce que les tribunaux de première instance peuvent se tromper. Il y a même un deuxième palier d'appel, parce que les tribunaux d'appel peuvent se tromper.

Alors, si on reprend les deux cas simplement en restant du côté des principes, je crois que la première distinction c'est qu'il y a un consentement de toutes les parties dans les deux premiers cas. Dans ce cas-ci, il n'y a pas de consentement de la part de la partie qui est impliquée et qui devrait payer ce qui est réclamé.

Deuxièmement, Courval n'était pas en mesure de réclamer à l'époque et je pense que c'est très important. Plante, lui, ce n'était peut-être aussi certain que Courval. Il n'a pas réclamé, il était en exil, il avait la crainte de la pègre, il est revenu quelque temps après. Le requérant a réclamé, il avait un procureur, il a eu ce qu'il demandait, il n'est pas allé en appel. Au surplus, il n'a pas non plus cherché par la suite à exercer aucune action en justice. Alors, de deux choses l'une: on sait que dans le cas d'un congédiement légal, la personne qui a été congédiée a deux recours. C'est très clair dans la doctrine et dans la jurisprudence. Il peut se déclarer disponible vis-à-vis de son employeur et réclamer périodiquement les montants de salaire que son employeur doit lui payer. Je pourrais vous citer Pothier, je pourrais vous citer Duvergier, je pourrais vous citer les plus vieux auteurs français. Ils vont vous dire que dans le cas d'un contrat avec un terme déterminé, l'employeur ne peut pas se libérer; il est obligé de payer le salaire. Maintenant, quel recours a-t-il exercé? Cela peut être ce recours.

Il avait un autre recours qu'il pouvait exercer: les dommages et intérêts. Evidemment, c'est difficile de dire lequel des recours il a exercé, mais je pense qu'il ressort du jugement de la Cour supérieure que le juge a voulu mettre fin au contrat et condamner la ville définitivement à payer des

dommages et intérêts. Cela apparaît assez clairement aux dispositifs du jugement et le requérant n'en a pas appelé de cette décision, quoiqu'il ait pu le faire.

On dit que ce n'était pas possible de liquider les dommages entièrement à ce moment. On a fait allusion à un accident d'automobile. Je vous soumets respectueusement que dans des cas d'accidents d'automobiles, il peut y avoir, plusieurs années après le jugement, aggravation de la santé et des dommages subis par le demandeur et, évidemment, s'il fallait que dans chacun de ces cas, le demandeur vienne devant cette assemblée pour demander qu'en équité on lui accorde les dommages auxquels il a droit, je pense qu'on n'en finirait plus. C'est pour ça, d'ailleurs, qu'on a institué ces principes qui sont la prescription et la chose jugée.

La troisième distinction entre les deux cas c'est que, dans les cas de Plante et Courval, je crois que tous les recours avaient été exercés à l'époque où les projets de loi ont été demandés. Je ne suis pas certain toutefois qu'il ne subsiste pas encore d'autres recours de nature judiciaire en faveur de M. Desfossés. Je ne me prononce pas là-dessus, mais je ne suis pas certain qu'il n'en existe plus. On a parlé de prescription tout à l'heure pour une période de six mois. On a laissé entendre qu'il y aurait peut-être d'autres années qui ne seraient pas prescrites et on a dit: A tout événement, même si on pouvait avoir un recours, on voudrait avoir les huit premières années. Mais je pense qu'on devrait commencer par épuiser tous les recours judiciaires avant de s'adresser à l'Assemblée nationale. Je ne veux pas entrer là-dedans, mais si on compare les deux cas, il y aurait la question des états de services aussi. Ce sont des questions personnelles et je ne peux pas entrer là-dedans, mais peut-être que cela a pesé lourd dans la décision à ce moment, parce que la ville a donné son consentement dans deux cas, elle n'a pas donné son consentement dans l'autre. Ce sont des questions d'appréciation. C'est très délicat.

M. Bédard: M. le Président, avec le consentement des membres de la commission, on vient d'entendre les avocats, les procureurs des deux parties. Je comprends qu'ils ont encore des éléments à ajouter, même encore plus, étant donné les exposés réciproques. Je demanderais la possibilité peut-être de suspendre nos travaux quelques minutes au niveau du présent projet, pour terminer, si cela peut se faire rapidement, celui que nous avions suspendu précédemment. Je commence à croire qu'étant donné les arguments, tout est en place peut-être pour une discussion plus longue, qui a très peu de chance de se terminer avant 18 heures. A ce moment-là, Me Laurent, qui avait des représentations à faire devant nous, en subirait un préjudice. Je pense bien que vous n'avez aucune objection.

M. Lalonde: Vous pouvez rester là.

M. Bédard: Vous pouvez même rester là.

M. Lalonde: II peut s'approcher simplement.

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Rosemont?

M. Paquette: M. le Président, je voudrais simplement savoir quand la commission de la justice pourra siéger sur ce projet. Est-ce que nous continuons en soirée?

M. Bédard: Nous ne continuons pas en soirée, selon les éléments d'information que j'ai. Les horaires de fin de session, comme vous le savez, sont très flexibles. A moins d'éléments très contraires, nous terminerions à 18 heures, quitte à recommencer, ce n'est pas certain, lundi matin.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, M. le Président. Avant de suspendre, étant donné que, probablement, on ne pourra pas terminer le projet de loi, j'aimerais qu'entre-temps, entre le moment présent et le moment où nous pourrons reprendre la discussion, les procureurs du requérant fassent parvenir aux membres de la commission une copie des décisions qui ont été rendues dans cette affaire.

M. Bouliane: Voulez-vous parler du jugement de la Cour supérieure et de la décision arbitrale?

M. Fontaine: Les deux, oui.

M. Bouliane: il y en aura des copies pour tout le monde.

M. Bédard: Si vous le voulez bien, je pense que nous n'en avons pas plus que pour cinq minutes dans le cas du projet de loi que nous avons suspendu, et il sera possible de continuer avant six heures sur le présent projet de loi.

Projet de loi 234 (suite)

Le Président (M. Dussault): II y a consentement de la commission pour suspendre temporairement l'étude du projet de loi no 262 et revenir au projet de loi no 234. Me Laurent est devant nous à nouveau, et l'article 1 avait été appelé. M. le ministre. (17 h 45)

M. Bédard: M. le Président, je pense que tout avait pas mal été dit, il y a quelques minutes, concernant ce projet. L'ensemble, sinon la grande majorité des membres de la commission, étaient d'opinion de donner suite au projet de loi privé tel que rédigé. J'avais exprimé certaines réserves en fonction surtout de décisions déjà rendues dans des cas similaires par d'autres commissions. Dans l'intervalle, j'ai été informé de l'état précaire d'une des bénéficiaires qui sont concernées directement par la décision que nous aurons à prendre. Je n'ai aucune objection à me rallier à ce qui se dessinait comme consensus, de donner suite au projet de loi

privé tel que rédigé, tel que la demande en était faite.

M. Lalonde: M. le Président, étant donné que j'étais prêt à aller plus loin pour rétablir un peu de justice et d'équité dans cette situation, il n'y a aucun doute que nous sommes parfaitement justifiés, je crois, de tenir compte aussi de la santé chancelante d'une des bénéficiaires, pour être encore plus généreux que ce que la commission semblait prête à faire. Il n'y a aucun doute que je suis prêt à appuyer l'article 1 tel que demandé. Donc, j'appuie la demande qui est faite.

M. Fontaine: Je suis également heureux, M. le Président, d'adopter cet article tel que proposé, puisque, moi-même, j'avais déjà manifesté cette intention.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. J'appelle l'article 2.

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. L'article 2 est adopté. J'appelle l'article 3.

M. Bédard: Adopté. M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): L'article 3 est adopté. Est-ce que le projet de loi no 234, Loi concernant la succession de Julien Levasseur est adopté?

Des Voix: Adopté. Le Président (M. Dussault): Adopté. M. Bédard: Merci, Me Laurent. M. Laurent: Je vous remercie, messieurs.

Projet de loi no 262 (suite)

Le Président (M. Dussault): Nous revenons au projet de loi no 262, Loi concernant Claude Desfossés.

M. Bédard: Pour répondre à certaines questions qui ont été posées tout à l'heure, il semble que nous avons deux choix: celui de prolonger notre séance au-delà de 18 heures, avec le consentement des membres de la commission, une prolongation d'une demi-heure ou d'une heure, selon les circonstances; sinon, la continuation du projet de loi, selon les indications du leader du gouvernement, l'étude en serait reportée à l'automne.

M. Lalonde: M. le Président, je suis prêt à consentir à prolonger la séance jusqu'à 18 h 30, en espérant personnellement — je n'ai pas consulté mes collègues — pouvoir en disposer avant l'automne. Si c'est possible, je comprends que c'est le leader qui est le patron, étant donné que la commission de la justice va se réunir, de toute façon, pour étudier le projet de loi 28, dont l'étude est entamée article par article, je prierais le ministre, si c'était possible, d'inviter les parties à se joindre à la commission à la prochaine occasion. Je suis sûr que ce sera probablement lundi matin qu'on va revenir.

M. Bédard: Peut-être qu'il y aurait la possibilité aussi que l'Opposition accepte pour ce cas que nous puissions y aller d'une troisième commission, on verra. Les fins de session comportent des accommodements pour mieux servir les citoyens.

M. Lalonde: Pour ce cas-ci, en particulier, je n'ai pas d'objection, mais pas pour les autres lois.

M. Fontaine: M. le Président...

M. Bédard: Je comprends très bien la réserve...

M. Fontaine: C'est justement la remarque que je voulais faire. Si le leader du gouvernement veut nous faire siéger à trois commissions, spécifiquement pour ce projet de loi privé, je n'aurais aucune espèce d'objection. Cela me ferait plaisir de le faire.

M. Lalonde: Parfait!

M. Fontaine: Cependant, je ne voudrais pas qu'il associe une motion pour faire siéger la commission avec un autre projet de loi qui pourrait être le projet de loi no 28, par exemple.

M. Lalonde: Non, mais, en fait, parce qu'il prête des intentions sinistres au ministre.

M. Bédard: Non, je ne veux pas commencer un débat. Je vous dis... Vous prêtez... Oui. Il y a assez des députés sinistres...

M. Lalonde: A la mine triste.

M. Bédard: A la triste mine, chevaliers à la triste mine, dont parlait le premier ministre, il n'y a pas si longtemps.

M. Paquette: Alors, M. le Président...

M. Bédard: Mais il n'est pas question de commencer un débat. Nous verrons comment nous pouvons accommoder.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, j'aimerais simplement remercier mes collègues de l'Opposition de leur collaboration dans ce dossier.

Est-ce qu'on continue jusqu'à 18 h 30 ou 19 heures?

M. Lalonde: Etant donné le consentement de siéger à trois commissions qu'on a donné, je pense qu'il ne faudrait pas ambitionner. On recommence à 20 heures. On va peut-être passer la nuit là, comme on a passé la nuit il y a deux jours. Laissez-nous au moins dîner.

M. Paquette: Oui, en fait, il s'agirait peut-être de faire un premier temps où on s'informerait suffissamment...

M. Lalonde: Oui, si on pouvait régler ça pour 18 h 30. A ce moment-là, on n'est pas obligé de se réunir. Sinon, on reviendra...

M. Paquette:... quitte à... Bon, allons-y! Une Voix: Allons-y!

M. Bédard: C'est parce qu'il y a des caucus qui se tiennent à l'heure actuelle.

M. Bouliane: Si vous permettez de souligner un fait, je pense que M. le député de Nicolet-Yamaska a demandé des copies des jugements. C'est quand même assez volumineux. Je ne sais pas, si — une simple suggestion — on prévoit ne pas terminer à 18 h 30, je pense que l'examen de ces pièces est important. Je vous laisse libres. Je me mets à la disposition de la commission. Je ne sais pas ce qui en est pour mon confrère. Parce que vu qu'il faut que je fasse ces photocopies, quand même...

M. Lalonde: Est-ce que les services...

M. Bédard: Est-ce que je dois comprendre que le procureur de la ville de Montréal a terminé pour le moment ses représentations?

M. Péloquin: Oui, j'aurais simplement deux points à ajouter, mais, ce n'est pas long.

M. Bédard: Non, mais terminez, de la même manière que votre confrère a...

M. Bouliane: J'aurais à répondre, moi, brièvement, à ce qui...

M. Bédard: Après ça, il y aurait peut-être une petite période de questions aussi des membres de la commission.

M. Bouliane: C'est ça. D'accord.

M. Bédard: C'est à vous de voir comment vous allez utiliser le mieux votre demi-heure.

Le Président (M. Dussault): Alors, nous allons d'abord entendre Me Péloquin pour terminer.

M. Péloquin: Simplement deux points sur lesquels j'avais pris des notes pendant que mon confrère parlait. Il a parlé de l'exécution spécifique, il a parlé du projet de loi no 45, qui forcerait maintenant les employeurs à reprendre les employés.

Je me demande si on peut revenir comme ça et invoquer une loi nouvelle pour demander qu'un employeur, dans un cas particulier, se conforme à cette loi nouvelle. Je pense que c'est l'équivalent de donner un effet rétroactif à une loi seulement dans un cas. Je pense que ce serait un principe tout à fait erroné s'il fallait que cette commission se base là-dessus.

Voici une autre remarque que je voulais faire. Si l'on prend le projet de loi, à la page 4, le quatrième alinéa, on dit: "Que, devant ce refus persistant de la ville, il a été réduit à demander des dommages-intérêts et que, par jugement du 22 avril 1970, la ville a été condamnée à lui verser le salaire et autres avantages qu'il aurait gagnés s'il avait occupé ses fonctions..." Et, deux alinéas plus loin, on dit: "Qu'il est dans l'intérêt de Claude Desfossés que des dommages-intérêts lui soient versés." Mais là, je ne comprends pas. Pour moi, il y a une contradiction.

Il a été réduit à demander des dommages-intérêts; le tribunal lui en a accordés. Il en demande encore. On n'a même pas marqué des "dommages-intérêts additionnels." C'est peut-être du laxisme dans la rédaction, mais je vous fais la remarque.

M. Bouliane: Je m'excuse, Me Péloquin... Le Président (M. Dussault): Me Bouliane.

M. Bouliane: ... en matière d'équité — je m'excuse d'employer une expression populaire — il ne faut pas s'enfarger dans les fleurs du tapis. L'équité, c'est parallèle au droit, aussi bizarre que ça puisse paraître, comme consonnance, jusqu'à un certain point, vous n'avez pas de Cour d'équité et l'équité, évidemment, passe à côté de certains principes de droit ou va dans des avenues où ces principes n'ont jamais été dirigés.

Je vais commencer par la fin. Je vous réfère aux conclusions de l'honorable juge Demers, dans les trois derniers paragraphes. "Considérant qu'il appert des admissions" — la ville avait admis également — "que le demandeur a gagné $960 qui doivent être déduits de son salaire — la conclusion ne parle que de salaire — considérant que le montant réclamé, moins l'argent gagné laisse un solde de $10 027.39 qui représente le salaire et autres avantages — et non pas autres dommages — que le demandeur aurait gagnés, s'il avait occupé ses fonctions du 7 novembre 1967 au 6 novembre 1968. Par ces motifs, le tribunal maintient l'action du demandeur et condamne à payer ladite somme de $10 027.39. On ne réfère, en conclusion — et c'est le dispositif qui est important — qu'au salaire et aux avantages.

De plus, lorsque mon confrère dit qu'en vertu d'une nouvelle loi, on ne pourrait pas revenir dix ans en arrière, je m'excuse, mais nous ne deman-

dons pas l'exécution spécifique de la sentence arbitrale, nous demandons que nous puissions nous adresser à la Cour supérieure, sur requête, pour qu'elle fixe les dommages, non pas qu'elle réintègre M. Desfossés au sein du service des pompiers de la ville de Montréal. Nous ne le demandons pas, nous n'essayons pas de faire réagir la loi 45. Nous voulons avoir le droit de nous adresser à la cour pour faire déterminer ces dommages.

Ce sont les deux derniers points qui ont été soulevés par mon confrère. Si je reviens maintenant au début, je pense qu'il y a des choses que cette commission ne doit pas considérer, comme, entre autres, l'exemplarité et la multiplicité éventuelle des autres cas. Je pense que dans les cas de projets de loi privés, des lois spéciales, chaque cas est un cas d'espèce et doit être analysé à son mérite. Contrairement à ce qu'on dit, je serais surpris, je serais énormément surpris que, en droit du travail, vous vous retrouviez devant — pour employer l'expression de Me Péloquin — 10 000 autres cas semblables où des gens vont dire: On n'en a pas eu assez. Dans le cas présent, nous ne disons pas que nous n'en avons pas eu assez, et nous ne disons pas, comme dans le cas des dommages: II y a eu aggravation. Il n'y a pas eu aggravation, on n'a pas réclamé ce montant. Ce n'est pas une aggravation, ce n'est pas comme si on nous avait accordé $25 000 de dommages pour le futur et que nous revenions aujourd'hui et disions: Ecoutez, on aurait voulu avoir $50 000. On le savait dans le temps, mais on n'en a pas eu assez, il y a eu une erreur. Il n'y a pas eu une erreur, on ne pouvait pas la déterminer. Le salaire constituait le dommage et on ne savait pas si, au lendemain du jugement, c'est-à-dire, le 7 novembre ou le 23 avril 1970, l'individu recommencerait à travailler. C'est aussi simple que ça. On réfère à du salaire, les dommages équivalent à du salaire, parce que la prestation humaine n'a pas été fournie à ce moment-là, ça devient du dommage. Je vous rappelle que c'est exactement en salaire que c'est accordé dans le dispositif du jugement du juge André Demers.

Autre chose qui ne doit pas être considérée, à mon avis, par cette commission; que ce soit une question de principe. Au nom des principes, ce n'est pas la base des lois spéciales les principes; c'est justement pour allerà l'encontre ou couvrir les espaces non couverts, les zones grises des lois, que ça couvre même jusqu'à des délais de déchéance, comme je vous le disais tout à l'heure, dans le cas de Pacifique Plante, que ça aille même jusqu'à dire: Indépendamment du recours qui a pu être exercé ou non. C'est là que je vais tomber dans les deux cas que l'on vous a cités — je laisse celui de M. Laperrière de côté, dont on ne vous a pas parlé — qui annulaient une décision de la Cour d'appel. Il avait exercé tous ses recours et on étaità l'encontre de la décision d'un citoyen. On a dit: Monsieur, vous avez acheté un immeuble, vous n'aviez pas le droit de l'acheter; c'est illégal, on déclare que c'est légal.

Dans le cas de Pacifique Plante, là, vous tombez dans l'équité. M. Plante était un avocat, ancien chef de police de la ville de Montréal, qui connaissait ses droits. Il a dû siéger, à un moment donné au comité de discipline.

M. Bédard: II n'était pas maire, mais il n'était pas loin.

M. Bouliane: Toujours est-il qu'on lui a permis... c'est quand même curieux; quels que soient les motifs. Qu'on vienne nous dire aujourd'hui: La ville était d'accord, c'est curieux qu'elle ait été d'accord aussi rapidement que ça. Elle n'a pas été d'accord pour $11000, je m'excuse, elle a été d'accord pour qu'il s'adresse à la cour pour que ce soit fixé. Cela a été fixé à $11 000; il a été en appel et ça été à $115 000. C'est curieux! Un individu qui était conscient de tous ses droits... Je m'excuse, mais M. Plante n'a exercé aucun recours. Il n'en a exercé aucun et on lui a permis, après ça, de les exercer et ça a été fixé par la Cour d'appel. Je pense que l'unanimité des parties concernées ou des différents intéressés... c'est évident que l'intéressée, la ville de Montréal, c'est elle qui peut être appelée à débourser un montant d'argent. Je vous assure que je n'aurais pas besoin d'avoir une autre motivation que celle-là pour venir m'opposer à une loi spéciale. (18 heures)

Ce n'est pas comme une ville qui dirait: Ecoutez, c'est dû à des tiers, on va être... Ici, ils subissent un préjudice, dans le fond, éventuellement, uniquement parce qu'ils ne se sont pas conformés à une décision, sous prétexte qu'ils n'avaient pas à s'y conformer, en disant: On s'assoit, maintenant, venez nous voir. Poursuivez-nous, faites n'importe quoi, maintenant, on ne s'exécute pas.

Dans le cas de M. Plante, vous aviez un individu qui s'y connaissait et vous avez entre les mains une sentence arbitrale qui va très loin. Elle dit: c'est un individu qui n'est pas représenté. On a pris une sanction contre lui, ses pairs sont devant lui et, en raison du fait que cela a dû d'abord aller devant la Cour des sessions de la paix, il a perdu un an de salaire en raison de la disposition 18.04 de la convention collective de l'époque, qui ne permettait pas une rétroactivité supérieure à douze mois.

On dit que ça va créer un précédent, c'est évident que ça crée toujours un précédent, c'est de la totologie, ça crée toujours un précédent, un projet de loi privé, mais cela ne veut pas dire que, parce qu'il y en a un qui est accordé, on va accorder le suivant. Cela crée un précédent, il y a des avocats ici.

Lorsque, par un projet de loi privé, on admet quelqu'un au Barreau sans qu'il passe les examens, dans des cas bien spéciaux, lorsqu'on l'admet à une Chambre professionnelle, je pense que c'est extrêmement important, et ça s'est déjà produit. On le fait passer à côté d'une loi. Il n'a pas besoin d'avoir nécessairement exercé des recours.

On lui dit: monsieur, par loi spéciale, on vous y autorise. Le but d'une loi spéciale, d'un projet de loi privé, c'est de créer un précédent. Le précédent ne veut pas nécessairement dire que tous les cas qui vont ressembler à ça, on les accorde automatiquement. C'est évident et c'est une question de principe. Le principe d'équité en est un qui est très fort.

On mentionne les autres cas que nous avons cités. On a consenti, dans le cas de M. Plante, à ce que la prescription soit levée. On va consentir à ce que la prescription soit levée dans le cas d'un individu qui exerçait une fonction spécifique, ou c'était lui qui aurait pu y consentir dans le cas d'un autre individu, donc, qui connaissait ses droits, quelles que soient les raisons pour lesquelles il ne les a pas exercés.

Dans le cas d'un simple individu qui n'a même pas été représenté par un avocat, on ne le lui permet pas. Je pense que ceci répond aux arguments qui ont été soulevés. Nous ne demandons pas par cette loi spéciale l'exécution spécifique de la sentence arbitrale, parce que nous ne pouvons pas rétroagir, je suis d'accord avec Me Péloquin sur ce point. Nous voulons pouvoir exercer des droits que nous ne pouvons plus exercer aujourd'hui, et si nous ne pouvons plus les exercer, c'est parce que nous avons passé par toutes les étapes, cinq étapes différentes: Cour des sessions de la paix, motion préliminaire sur le grief, dépôt du grief, gain de cause sur le grief, on va en Cour supérieure et on gagne, on va en Cour d'appel... A chaque étape, on gagne. La dernière, je vous l'ai citée, c'est une lettre adressée au maire de Montréal. On dit: Cela a assez traîné, ça fait cinq ans, M. le maire, ce serait peut-être le temps qu'on se retourne de bord et que l'on dise: Ce gars-là, il serait peut-être temps qu'il commence à travailler.

Je peux vous donner la réponse que j'ai oublié de citer tout à l'heure, ce n'est pas par Me Péloquin, par l'ex-directeur Côté, Péloquin, Normandin et Bouchard, Law Office of the City. Je ne connais pas la traduction, mais, enfin... On nous dit ceci en réponse à notre lettre, on nous dit ceci le 20 mars 1973, sans préjudice: "Nos instructions sont de vous informer que, selon notre opinion, il n'existe pas de liens de droit entre M. Desfossés et la ville de Montréal et qu'au surplus la ville n'a pas l'intention de retenir M. Desfossés à son service à quelque titre que ce soit. Bien à vous..." C'est la seule lettre que je peux vous produire de la ville de Montréal après dix ans de procès. C'est la seule lettre... Si ce n'est pas de l'équité, je ne suis pas capable de vous donner d'autre définition que ça de l'équité.

Le Président (M. Dussault): Nous suspendons deux minutes les travaux de cette commission.

Suspension de la séance à 18 h 4

Reprise de la séance à 18 h 46

Le Président (M. Dussault): Nous allons reprendre les travaux de la commission, si vous voulez retourner à vos places, s'il vous plaît. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je voulais m'en-quérir, à la reprise de nos travaux, si les deux procureurs des différentes parties avaient autre chose à ajouter.

M. Péloquin: Je n'ai pas autre chose à ajouter.

M. Bédard: Me Bouliane.

M. Bouliane: Non, je n'ai pas autre chose.

M. Bédard: Je ne sais pas s'il y a des membres de la commission qui ont des questions particulières à poser.

M. Lalonde: Compte tenu des conversations qu'on a eues...

M. Bédard: Nous allons avoir un amendement à proposer.

M. Lalonde: ... pendant la suspension, je pense que le ministre a un amendement à proposer. On parlera là-dessus.

M. Bédard: Nous avons un amendement à proposer qui remplacerait...

Le Président (M. Dussault): Les articles 1, 2 et 3.

M. Bédard: ... par article 1 qui se lirait comme suit: "Malgré toute prescription applicable et malgré le jugement rendu à son sujet par la Cour supérieure, en date du 22 avril 1970, dans le district de Montréal, Claude Desfossés a le droit, d'ici le 1er janvier 1980, de s'adresser au tribunal compétent pour exercer les recours qui pourraient découler de l'inexécution, par la ville de Montréal, de ses obligations à son égard."

Article 2, "la présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction."

Le Président (M. Dussault): Est-ce qu'il y a des interventions? D'abord, est-ce que la commission consent à remplacer pour les fins de la discussion, les articles 1, 2 et 3, par l'article 1 que nous a lu le ministre?

M. Lalonde: Consentement.

Le Président (M. Dussault): Consentement. Est-ce qu'il y a des interventions sur le nouvel article 1?

M. Lalonde: Peut-être que le ministre veut expliquer les raisons qui l'ont inspiré.

M. Bédard: Je voudrais demander au requérant qui a pris connaissance de l'amendement...

M. Bouliane: J'aurais peut-être...

M. Bédard: ... s'il a des remarques à faire.

M. Bouliane: ... une chose à ajouter, à la fin des mots, "obligations à son égard lui résultant de la sentence," soit que la source de la réclamation éventuelle vient de la décision de l'arbitre Gagnon, Louis-Philippe Gagnon. Je pense que cela fait simplement préciser "de ses obligations à son égard pouvant lui résulter ou lui résultant de la décision de l'honorable Louis-Philippe Gagnon siégeant comme président unique du tribunal d'arbitrage le 7 juin 1968.

M. Lalonde: Je ne sais pas, mais il me semble que, s'il y a des droits, ce n'est pas seulement ou nécessairement à cause de la sentence arbitrale, c'est à cause du lien de droit qui existait au départ.

M. Bouliane: D'accord.

M. Lalonde: C'est son engagement.

M. Bouliane: D'accord, oui.

M. Bédard: Je pense que la formule que je propose est beaucoup plus générale.

M. Lalonde: Oui, plus générale.

M. Bouliane: Je suis d'accord avec vous. L'autre point, c'était notre article 3 qui nous tenait à coeur. Il est relatif aux frais, honoraires, déboursés encourus. Est-ce que la suggestion est à l'effet que cet article tombe?

M. Lalonde: Oui. M. Bédard: Oui.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Je ne sais pas jusqu'à quel point les démarches de M. Desfossés ont pu être faites au niveau de l'aide juridique. Mais je pense que, de toute façon, on ne peut pas s'embarquer dans une telle chose avec l'article 3.

M. Bédard:... porter un jugement, a priori.

M. Péloquin: Je ne sais pas si les membres de la commission s'en rendent compte, mais c'est l'équivalent de demander la "spécific performance". C'est l'exécution spécifique. Je ne pense pas que ma cliente va payer M. Desfossés à ne rien faire. A ce moment-là, elle va le réengager.

M. Bouliane: II n'y a aucune objection à cet égard, qu'il y ait de la "spécific performance" et que, dans l'intervalle, il y ait éventuellement des dommages équivalents en salaires qui soient payés.

M. Péloquin: Je veux bien que les membres de la commission pensent à cet aspect, à l'équivalent pratique de cela. Evidemment, on ne va pas laisser un bonhomme à ne rien faire et le payer. Je pense que l'employeur va le réengager. Est-ce que l'employeur a le choix dans de telles conditions.

M. Lalonde: Si l'employeur n'a pas de bonnes raisons de ne pas l'engager... C'est un des aspects, je vous l'ai dit, de ce cas-là, qui inspire les membres de la commission de lever la prescription, d'écarter la chose jugée, dans la mesure où cela pourrait l'empêcher, autrement, de faire valoir ses droits en cour. C'est le fait que nulle part, on voit, dans ce dossier, une justification de la ville de ne pas avoir suivi la sentence arbitrale. Il y a peut-être des raisons. A ce moment-là, la ville les dira en cour. Cela m'apparaît un hiatus dans le dossier, qui nous justifie, dans ce cas-là en particulier, de faire ce qu'on fait. On ne juge pas. On ne dit pas que la ville doit les dommages. On fait bien attention de ne pas se substituer à la cour. On dit simplement: Etant donné les faits qu'on connaît, essayez de faire valoir vos droits en cour.

Votre question, Me Péloquin, vient-elle du fait que, dans le texte proposé, il y a les mots "exercer les recours en dommages-intérêts"? Est-ce cela qui vous fait dire qu'on ouvre la porte...

M. Péloquin: Non, cela ne tient pas au texte. Je dois m'empêcher de parler, je pense que je nuirais aux droits de ma cliente devant le tribunal lorsque la cause viendra.

Le Président (M. Dussault): Si vous permettez, M. le ministre souhaite que l'on suspende encore pour quelques minutes. Y a-t-il consentement?

M. Lalonde: Pas trop longtemps.

Le Président (M. Dussault): Nous suspendons pour de très brèves minutes.

Suspension de la séance à 18 h 57

Reprise de la séance à 19 h 3

Le Président (M. Dussault): Messieurs, nous reprenons les travaux de la commission. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, nous avons eu certains ajournements, des discussions avec des membres de la commission. J'ai lu tout à l'heure; j'ai porté à la connaissance des membres de la commission, et de la partie requérante, et du procureur de la ville de Montréal, les amende-

merits, un texte en deux articles. Il me semble bien que la commission, les membres de la commission sont prêts unanimement à accepter ce texte, mais naturellement à condition que vous le fassiez vôtre. On est ici pour répondre à une de vos requêtes.

M. Bouliane: En ce qui me concerne, au nom du requérant, je suis disposé à l'accepter comme tel. Je l'accepte comme tel.

M. Bédard: Et d'en faire votre requête?

M. Bouliane: C'est ça. Je le déclare officiellement, M. le Président et M. le ministre.

Le Président (M. Dussault): Le nouvel article, l'article 1, est-il adopté? Je m'excuse, je vais le relire: L'amendement consistait à remplacer les articles 1, 2 et 3 du projet de loi no 262 par le nouvel article 1 : "Malgré toute prescription applicable et malgré le jugement rendu à son sujet par la Cour supérieure, en date du 22 avril 1970, dans le district de Montréal, Claude Desfossés a le droit, d'ici le 1er janvier 1980, de s'adresser au tribunal compétent pour exercer les recours qui pourraient découler de l'inexécution par la ville de Montréal de ses obligations à son égard." Ce nouveau texte remplaçant les articles 1, 2 et 3 est-il adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Dussault): L'article 4 du projet de loi serait renuméroté 2. Est-ce que cet amendement est adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Le nouvel article 2 est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Maintenant, relativement au préambule. Si vous voulez le retirer, je vous suggère l'amendement suivant: Le préambule est retiré.

M. Lalonde: Je pense bien que c'est inutile de toute façon.

M. Bouliane: C'est inutile à ce moment.

Le Président (M. Dussault): Le préambule est retiré. C'est adopté.

M. Bouliane: Je pense qu'il y a peut-être lieu, néanmoins, M. le Président, que je dépose les documents qu'on m'a demandés en dix copies, s'il vous plaît, pour le bénéfice de chacun.

M. Bédard: Vous pourrez les faire parvenir à chacun des membres de la commission.

M. Bouliane: On m'a donné l'adresse à qui je dois les faire parvenir.

Le Président (M. Dussault): Le projet de loi no 262, Loi concernant Claude Desfossés tel qu'amendé est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Dussault): Adopté. Je remercie Me Bouliane, Me Landry ainsi que Me Péloquin de leur participation à nos travaux, de même que M. Desfossés, évidemment.

M. Bouliane: Merci.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Je voudrais dire juste un mot avant de terminer. Cela me fait plaisir d'avoir participé à ce projet de loi, celui d'une personne démunie face à une situation qui a pu se rendre jusqu'à l'Assemblée nationale et être entendue de façon unanime par tous les membres d'une commission parlementaire, et je pense que si on avait rendu en tant que députés seulement ce service, même pendant quatre ans, ça aurait déjà été pas mal.

Le Président (M. Dussault): II n'y a pas d'autres intervenants? La commission a terminé l'étude des projets de loi qui étaient prévus, sauf le projet de loi 28, mais de toute façon il aurait fait l'objet d'un rapport séparé. Le rapporteur de cette commission, M. Alfred, de Papineau, fera rapport à l'Assemblée nationale.

J'ajourne les travaux de cette commission sine die.

Fin de la séance à 19 h 7

Document(s) associé(s) à la séance