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Version finale

40e législature, 1re session
(30 octobre 2012 au 5 mars 2014)

Le jeudi 14 novembre 2013 - Vol. 43 N° 57

Consultations particulières sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous


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Table des matières

Auditions (suite)

Vérificateur général

Conseil pour la protection des malades (CPM)

Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ)

Coalition des tables régionales d'organismes communautaires (CTROC)

Fédération québécoise des sociétés Alzheimer (FQSA)

Intervenants

Mme Suzanne Proulx, vice-présidente

M. Réjean Hébert

M. Yves Bolduc

Mme Sylvie Roy

Mme Stéphanie Vallée

Mme Diane Gadoury-Hamelin

*          M. Michel Samson, Vérificateur général par intérim

*          M. Paul G. Brunet, CPM

*          Mme Lucie Tremblay, OIIQ

*          Mme Pauline Plourde, idem

*          Mme Ginette Bernier, idem

*          M. Sébastien Rivard, CTROC

*          Mme Valérie Lapierre, idem

*          Mme Diane Roch, FQSA

*          Mme Tonya Thibodeau, idem

*          Mme Lise Lalande, idem

*          Mme Josée-Lisa LeFrançois, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Douze heures vingt-sept minutes)

191 12235 La Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Daneault (Groulx) est remplacée par Mme Roy (Arthabaska).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Proulx) : Merci. Alors, ce matin, nous entendrons le Vérificateur général du Québec, et je comprends qu'il y a consentement pour entendre quatre autres groupes cet après-midi.

Je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les fins d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Vérificateur général

M. Samson (Michel) : Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Je suis Michel Samson, Vérificateur général par intérim. Permettez-moi, dans un premier temps, de vous présenter les gens qui m'accompagnent : Mme Marie-Claude Ouimet, directrice principale au Vérificateur général; Mme Carole Bédard, directrice de vérification; ainsi que Mmes Josée Bellemare et Rachel Mathieu, qui font partie de notre équipe de vérification, qui est presque, j'oserais dire, en permanence, au ministère de la Santé, sur les mandats qu'on réalise. Donc, j'ai tous mes experts avec moi pour tenter de vous répondre du mieux qu'on va le pouvoir.

C'est donc avec intérêt que je participe à cette séance de la Commission de la santé et des services sociaux portant sur le document intitulé L'autonomie pour tous, livre blanc sur la création d'une assurance autonomie. Le sujet abordé représente un enjeu important pour le Québec et particulièrement pour le réseau de la santé et des services sociaux, soit celui de répondre à la demande croissante de soins et de services de longue durée pour les personnes en perte d'autonomie.

J'ai récemment réalisé trois vérifications de l'optimisation des ressources portant sur les services offerts à des clientèles nécessitant des mesures de soutien à l'autonomie. Un rapport a traité des services à domicile aux personnes âgées en perte d'autonomie, un autre a concerné les services d'hébergement pour cette même clientèle et un troisième a porté sur la déficience intellectuelle et les troubles envahissants du développement.

Plusieurs constats et recommandations formulés lors de ces vérifications concernent des thèmes abordés dans le livre blanc. Ces thèmes touchent notamment trois paramètres de l'assurance autonomie, soit le cheminement d'une personne admissible à l'assurance autonomie, l'allocation de soutien à l'autonomie et les responsabilités du CSSS; ainsi que le financement. Voici quelques observations qui sont en lien avec ces thèmes. Vous trouverez, dans le mémoire que je vous ai présenté, d'autres constatations que j'ai faites dans mes rapports.

• (12 h 30) •

Pour le cheminement d'une personne admissible à l'assurance autonomie, le livre blanc précise que l'évaluation rigoureuse des besoins constitue le point de départ de l'accès à la gamme de services de longue durée. Cette évaluation exige l'utilisation d'un outil standardisé et bien implanté, de façon à permettre une mesure explicite des besoins de la personne et la planification des services nécessaires.

Dans les centres de santé et de services sociaux que j'ai vérifiés lors de mes travaux sur les services à domicile, les dossiers des personnes âgées qui recevaient de tels services ne contenaient pas toujours d'évaluation des besoins à jour. J'ai donc recommandé à ces établissements de veiller à ce que tous les usagers recevant des services à domicile soient évalués à l'aide de l'outil multiclientèle, à ce qu'un plan d'intervention soit élaboré pour chacun et à ce que l'évaluation et le plan soient mis à jour régulièrement.

L'allocation de soutien à l'autonomie, quant à elle, constitue la part des services assumés par l'assurance autonomie. Les 14 profils d'autonomie établis par l'Outil d'évaluation multiclientèle déterminent la nature et l'intensité des soins ou des services d'aide définis dans le plan de services. De façon à concrétiser le contenu de ce plan, l'allocation de soutien à l'autonomie est attribuée sous forme d'heures de services ou d'une allocation financière pour l'achat de services.

Dans mon rapport sur les services à domicile, je souligne l'absence de lignes directrices provinciales concernant le niveau approprié de services à domicile à offrir en fonction des différents profils d'autonomie de personnes âgées. Par conséquent, les trois CSSS vérifiés offrent l'ensemble des services professionnels aux usagers mais à des degrés d'intensité variables. Bref, l'offre de services à domicile varie en intensité d'un CSSS vérifié à l'autre. De plus, dans chacun d'eux, les liens entre les services fournis et les besoins de l'usager ne sont pas démontrés.

Toujours au sujet de l'allocation de soutien à l'autonomie, cette allocation et l'assurance autonomie fournissent l'occasion d'une harmonisation des pratiques tarifaires entre les différents lieux de prestation de services selon le livre blanc. Cela devrait permettre, pour des services de même nature, d'uniformiser la contribution des personnes. À terme, la démarche devrait conduire à une cohérence entre la contribution de la personne et celle de l'État, quel que soit le lieu de résidence de la personne, qu'il s'agisse d'un CHSLD, d'une ressource intermédiaire ou d'une ressource de type familial, d'une résidence privée pour aînés ou du domicile de type traditionnel.

À ce sujet, je mentionne dans mon rapport sur les services d'hébergement que la contribution des usagers est à revoir. Si l'on exclut l'indexation annuelle, la contribution demandée à l'usager hébergé en CHSLD et les règles servant à l'établir n'ont pas été revues depuis plus de 15 ans. Actuellement, cette contribution ne couvre pas le coût du gîte et du couvert. D'autre part, la méthode de calcul crée des inéquités selon les avoirs ou la situation familiale de la personne. Par ailleurs, dans mon rapport sur les services à domicile, je soulève le fait que la personne âgée vivant en résidence privée pour aînés paie pour des services qu'elle aurait pu recevoir gratuitement du CSSS si elle avait résidé dans un autre type de domicile ou dans une région où les services sont offerts.

L'allocation de soutien à l'autonomie donne la possibilité de choisir son prestataire de services. À cet égard, le livre blanc précise que la modalité allocation directe — chèque emploi-service s'inscrit dans les choix possibles des usagers, particulièrement pour les personnes handicapées. Toutefois, comme il ne peut être question de compromis quant à la qualité des services, tous les prestataires devront obtenir une reconnaissance explicite encadrée à l'intérieur d'un processus formel. Or, lors de mes vérifications sur les services à domicile, j'ai relevé que les mesures en place ne permettent pas d'effectuer un contrôle suffisant de la qualité des services, notamment ceux rendus par les partenaires externes. Les CSSS n'exercent aucun contrôle sur les services rendus par les employés engagés de gré à gré.

Les responsabilités du CSSS sont un autre élément abordé dans le livre blanc. On y indique que la mise en oeuvre de l'assurance autonomie nécessite de réaffirmer les responsabilités du CSSS au sein du réseau de la santé et des services sociaux. C'est aux CSSS qu'appartient la responsabilité d'encadrer l'évaluation des besoins de la personne et de veiller à la qualité de cette évaluation, d'élaborer les plans de services et de les mettre à jour et enfin de s'assurer de la qualité des services fournis.

Dans mon rapport sur les services à domicile, j'ai observé que les CSSS vérifiés font très peu de suivi à l'égard de l'évaluation des besoins, du plan d'intervention et de leur mise à jour. Par ailleurs, bien que les CSSS soient responsables d'assurer la qualité des services rendus par les partenaires externes, seules quelques mesures sont prévues pour évaluer ceux offerts par les entreprises d'économie sociale.

L'enjeu du financement est la troisième partie du livre blanc. On y mentionne que le vieillissement accéléré de la population québécoise nous conduit inévitablement vers une anticipation de ce qu'il en coûtera, tant pour la collectivité que pour les individus, pour en assumer les conséquences. Un levier financier y est proposé pour répondre aux besoins immédiats et futurs. À propos du financement, j'ai formulé une recommandation au ministère dans mon rapport sur les services à domicile. Celle-ci veut qu'en collaboration avec les agences il détermine le financement nécessaire pour les services à domicile en fonction des orientations et des besoins actuels et futurs de la clientèle.

Dans les stratégies de financement, le livre blanc précise que le budget doit être dirigé prioritairement vers les services de soutien à l'autonomie, et ce, de façon à respecter le choix des personnes qui désirent continuer de vivre à domicile ou en ressources non institutionnelles. La mise en oeuvre de l'assurance autonomie implique qu'on recoure plus souvent au soutien à domicile, qu'on maîtrise les dépenses en hébergement et qu'on limite les dépenses d'immobilisation. Dans le même sens, j'ai recommandé au ministère et aux agences vérifiées, dans mon rapport sur les services d'hébergement, de favoriser les soins à domicile si cette option est la plus bénéfique et la plus économique.

En conclusion, je suis heureux de voir que plusieurs des lacunes relevées dans mes rapports de vérification correspondent aux préoccupations soulevées dans le présent livre blanc. Des changements éventuels devraient permettre d'améliorer les services aux citoyens. Je vous remercie de votre attention.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup, M. Samson. Alors, merci pour votre présentation. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec le groupe formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Hébert : Merci, Mme la Présidente. M. Samson, mesdames, merci et bienvenue. Je dois, d'entrée de jeu, vous exprimer mon appréciation pour la lucidité des évaluations que vous avez faites, tant celle sur l'hébergement, il y a quelques années, que celle sur les déficiences intellectuelles, et, plus récemment, sur les soins à domicile. Vous posez un regard extrêmement lucide, précis sur les problèmes du réseau de la santé et des services sociaux que le projet d'assurance autonomie que nous menons tente de régler, et je suis très heureux de voir votre appréciation du livre blanc en fonction de vos recommandations. Et ce parallèle que vous faites entre vos recommandations, le livre blanc et les actions amenées est extrêmement intéressant et, pour nous, appuie de façon importante nos actions puis nos orientations.

Je vais commencer par l'évaluation, parce que vous soulevez qu'on ne peut pas donner de bons services si on n'a pas une évaluation à jour. Effectivement, en préparation de l'assurance autonomie, nous avons demandé à tous les établissements du réseau de procéder à une réévaluation complète des usagers du soutien à domicile, opération qui va se terminer à la fin décembre, donc, pour que nous ayons, pour 2014, une mise à jour. Et nous souhaitons, avec l'assurance autonomie, que cette évaluation soit refaite de façon statutaire.

Et nous avons des données, donc on peut utiliser des données pour savoir quelle est la fréquence. On sait que, pour les personnes en moins lourde perte d'autonomie — ce qu'on appelle, dans notre jargon, les profils ISO-SMAF 1-2-3 — une réévaluation aux deux ans est suffisante étant donné la stabilité relative de ces personnes mais qu'une évaluation, pour les autres profils, annuelle, au moins annuelle, est nécessaire, à moins qu'il n'y ait eu des évolutions. Alors est-ce que ces normes d'évaluation, et surtout de réévaluation vous agréent, compte tenu des éléments que vous avez notés dans vos rapports?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, merci, Mme la Présidente. Comme je le mentionne dans le mémoire qui vous a été déposé, je pense que les dernières vérifications qu'on a faites ont démontré qu'il y avait beaucoup de variations entre les régions et que l'évaluation des personnes n'était pas toujours faite, et n'était surtout pas faite à un rythme régulier dépendamment des conditions des personnes. Donc, c'est certain, lorsque nous, de notre côté, on voit, dans le livre blanc, que ça devient un incontournable, je pense que, peu importe le panier ou le type de services qu'on veut rendre, bien la première étape, vous conviendrez tous que c'est l'évaluation des besoins des personnes, et, par la suite, bien, on peut mieux définir le panier de services qu'on veut offrir. Donc, c'est un incontournable pour nous que l'évaluation des besoins, c'est la pierre angulaire de tout le système pour savoir par la suite comment on prend la personne en charge, comment on la traite, etc.

• (12 h 40) •

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : En ce qui a trait au niveau de services variable d'un CSSS à l'autre, écoutez, vous confirmez une observation que nous avions faite il y a plusieurs années, lorsque nous avons comparé les offres de services de 19 territoires de CLSC en Montérégie avec quel est le pourcentage de réponse aux besoins. Et on avait, bien sûr, une moyenne de 15 % — ce n'est pas beaucoup — 15 % de réponse aux besoins en soins à domicile, mais ça variait surtout de 6 %, pour certains CLSC, à 33 %, pour d'autres. Donc, en d'autres termes, il y a des CLSC qui donnaient beaucoup de services à peu de personnes et d'autres qui donnaient un petit peu de services à tout le monde, et donc il n'y avait aucune corrélation entre le profil ISO-SMAF ou le niveau d'intensité des incapacités et le niveau de services.

Donc, ce que nous souhaitons faire avec l'assurance autonomie, c'est faire en sorte que l'allocation de soutien à l'autonomie soit proportionnelle aux besoins, c'est-à-dire à l'état d'incapacité de la personne, et qu'elle soit là pour assurer une équité entre les différentes régions du Québec et entre les différents usagers. Est-ce que cette façon de pouvoir assurer l'équité répond à vos recommandations?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Encore là, comme on le mentionne dans notre document, c'est en lien avec certaines recommandations qu'on avait formulées au niveau des services à domicile et des personnes hébergées en CHSLD. Ce que je me permettrais d'ajouter, c'est que, oui, je pense qu'on doit rechercher un niveau de services à offrir aux personnes quel que soit le lieu de résidence au Québec pour des personnes qui ont la même évaluation des besoins, mais, dans ce type de services là aussi, je ne voudrais pas donner l'impression que le Vérificateur général s'attend à avoir des standards uniformes et coulés dans le béton, si je peux m'exprimer de la sorte, partout au Québec, on en est très conscients.

Et je me permets, j'ouvre une petite parenthèse. Hier, on était à la Commission de l'administration publique, où le rapport sur les services à domicile a été discuté. Et on a fait aussi valoir que — vous avez probablement vu, c'est ça — l'intensité de services peut varier, mais aussi il faut prendre en compte les caractéristiques de chacune des régions, les temps de déplacement des gens qui offrent ces services-là. Donc, oui, il y a sûrement des paramètres à déterminer, mais il faut être conscient des particularités de chacune de ces régions-là.

Je veux juste revenir au niveau des niveaux de services et de l'évaluation des besoins. Il y a un élément qui est important aussi, que nous, on a constaté dans un de nos rapports et qu'on a souligné au ministère et aux agences, qui était une lacune, à notre avis, quand même assez importante, c'était le repérage des personnes en perte d'autonomie. Ce qu'on a constaté lors de nos vérifications, c'est que souvent ce repérage-là se fait uniquement à l'urgence, lorsque la personne âgée se présente à l'urgence. Et vous comprendrez que, déjà lorsqu'elle arrive à l'urgence, sa santé est déjà affectée et cette personne-là est déjà en perte d'autonomie. Donc, le repérage est un élément crucial aussi bien important pour prendre en charge évidemment le plus rapidement possible ces personnes-là pour leur accorder le niveau de soins requis.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Si je comprends bien, vous souhaiteriez que le PRISMA-7, là, qui est l'outil de repérage qui est actuellement utilisé dans le réseau, soit plus généralisé, qu'on l'utilise, par exemple, dans les GMF, dans les autres points de services des CSSS. C'est ce que je comprends?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Oui, tout à fait. Vous êtes aussi sûrement des spécialistes plus que moi du secteur de la santé, mais je pense qu'on peut tous convenir que, plus on prend en charge une personne rapidement, mieux on peut la traiter. Et aussi le coût pour l'État, au bout de la ligne, sera sûrement assurément moins grand à supporter pour l'État, et le bien-être de la personne va être meilleur aussi.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Le livre blanc prévoit d'utiliser des outils qui sont actuellement disponibles. Donc, le SMAF, dans l'Outil d'évaluation multiclientèle, avec son outil de gestion, les profils ISO-SMAF, est-ce que ce sont des outils qui, selon votre évaluation, sont robustes et sont adéquats pour la gestion de l'assurance autonomie?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. L'Outil d'évaluation multiclientèle, écoutez, nous, le Vérificateur général, on n'a pas fait d'évaluation, je vous dirais, de la qualité de cet outil-là, mais ce qu'on voit, c'est que c'est un outil reconnu dans le milieu et utilisé. Par contre, ce qu'on a constaté lors de nos vérifications, malheureusement, particulièrement dans le rapport sur les services à domicile pour les personnes âgées en perte d'autonomie, c'est que cet outil-là était utilisé de façon très variable, dans le réseau, selon les régions. Et, là-dessus, il y a vraiment, je pense, un pas à faire pour uniformiser l'utilisation de cet outil-là, encore une fois, entre les régions, ce qui permet d'avoir des diagnostics ou des évaluations uniformes, peu importe l'endroit où la personne va se situer, puis, par la suite, on peut définir le besoin de services ou le panier de services qu'on offre. Mais tout le monde recevra le même type de services selon la... avec la même condition.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Au niveau de la contribution financière de l'usager ou encore de la modulation de l'allocation de soutien à l'autonomie, vous soulignez avec beaucoup de justesse qu'il y a des iniquités dans le réseau. Au niveau du CHSLD, il y a un certain niveau de contribution qui est demandé et un autre pour les gens qui vivent à domicile. Et même, à domicile, je disais tout à l'heure que 15 % des services sont donnés et financés par l'État à domicile, c'est moins que ça dans des résidences privées, c'est moins que ça dans des résidences… dans des OSBL. On entendait hier des représentants des OSBL nous dire qu'ils facturent les services, en fait, à leurs résidents.

L'assurance autonomie prévoit, donc, une allocation qui est basée sur les besoins et qui est modulée selon le revenu, peu importe le milieu de vie, ce qui fait en sorte que, pour des gens qui ne vivent qu'avec le supplément de revenu garanti, il y aurait une majoration de l'allocation pour faire en sorte qu'ils n'aient pas à payer de leur poche pour des services étant donné qu'ils n'en ont pas les moyens. Est-ce que ce mécanisme de l'allocation de soutien à l'autonomie basé sur le besoin et le revenu est un mécanisme qui vous apparaît plus équitable?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Vous comprendrez que le choix des moyens revient au ministère ou aux parlementaires de déterminer le meilleur moyen ou le moyen le plus approprié à utiliser. Notre préoccupation est surtout à l'effet qu'on a constaté de l'iniquité entre les personnes puis — comme hier on discutait — au niveau des résidents, des soins à domicile offerts dans les résidences privées. Dans certaines résidences, on facture… la personne doit assumer des coûts; dans d'autres résidences privées, elle n'assume pas les coûts pour les services. Donc, il y a vraiment une disparité à cet égard-là. Et je pense qu'évidemment c'est qu'il faut aller de l'avant puis pour niveler ou éliminer cette iniquité-là dans les services qui sont offerts. Quant au choix exact du moyen, bien je pense que c'est plus aux parlementaires d'en débattre et de choisir le meilleur moyen pour répondre aux besoins.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Un élément sur lequel vous insistez beaucoup, et avec raison, c'est sur la qualité et le contrôle de qualité des services. Dans le livre blanc sur l'assurance autonomie, on prévoit avoir un mécanisme d'accréditation des prestataires de services — qu'ils soient privés, lucratifs ou non lucratifs, organismes communautaires ou autres — et de confier soit au centre de services sociaux ou à l'agence le contrôle et l'accréditation de la qualité en termes de formation. Est-ce que cette modalité proposée par le livre blanc répond à vos préoccupations?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Effectivement, l'évaluation de la qualité des services, je vous dirais, est à parfaire et beaucoup à améliorer dans le réseau, à tous niveaux. Et c'est certain que, lorsqu'on voit dans le livre blanc qu'il y a des intentions, des gestes, des actions qu'on compte mettre en place justement pour uniformiser cette qualité-là des services puis s'assurer de la qualité des services, c'est sûr que ça va dans le sens des recommandations qu'on a formulées dans des rapports antérieurs.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Au niveau du financement, effectivement il y a des aberrations actuellement dans le financement du réseau. Pour une personne qui veut rester à domicile, ça représente une dépense pour un établissement, alors que, si on l'oriente vers l'hébergement, en fait, le lit, il est là et il est financé de toute façon, donc, c'est comme... il n'y a qu'un coût d'opportunité, mais il n'y a pas vraiment de dépense, alors, ce qui fait qu'à un moment donné on atteint un plafond, puis l'établissement dit : Bien, je ne peux plus dépenser autant, je vais l'envoyer en CHSLD, même si ça coûte 90 000 $ en CHSLD puis que ça en coûterait 40 000 $, 50 000 $ ou 60 000 $ à domicile. Cette décision n'est pas prise sur l'intérêt du patient, puis encore moins l'intérêt économique, mais sur la façon dont est financé le système. Avec l'assurance autonomie, on passe vraiment à un financement à l'activité, où, là, les coûts sont comparés pour différents milieux de vie. Ce type de financement, est-ce qu'il permettrait d'obvier aux situations que vous dénoncez dans votre rapport?

• (12 h 50) •

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. De dire si ce type… ou cette façon de faire là va solutionner certaines des problématiques qu'on peut soulever dans notre rapport, vous comprendrez qu'en tant que vérificateur je vais me garder une petite réserve. Je pense qu'il faudrait voir après un certain nombre d'années pour voir l'application et les résultats.

Mais c'est certain que je pense que tous conviennent que le statu quo, j'oserais dire, n'est plus acceptable présentement, donc qu'il faut changer le modèle ou aller vers un autre modèle. Et, là encore, je pense que les personnes âgées, leur souhait, vous le savez très bien, c'est de demeurer dans leur domicile ou dans une résidence privée le plus longtemps possible, et c'est une bonne chose pour leur qualité de vie mais aussi pour... Évidemment ça fait en sorte que les coûts à assumer par l'État sont moins grands que si cette personne-là se retrouve en CHSLD malheureusement trop rapidement.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Donc, pour vous, juste d'ajouter du financement dans les soins à domicile, ça ne provoquera pas le changement. Le statu quo, comme vous le dites, dans le type de financement n'est pas tenable, il faut changer la structure de financement. J'ai bien compris ce que vous avez dit?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Ce que je dis quand je parle du statu quo, c'est que, le modèle actuel, je pense qu'il y a certaines analyses ou certains tableaux dans le livre blanc qui montrent la... avec le vieillissement de la population aussi, les coûts vont ne faire qu'augmenter. Et, en CHSLD, vous l'avez mentionné tout à l'heure, on convient tous que le coût est beaucoup plus élevé qu'une personne en résidence privée ou chez elle. Donc, je pense que c'est une orientation qu'on doit prendre et pour… Je me répète, mais je pense que c'est très important pour les personnes, les personnes âgées, la qualité de leur milieu de vie. C'est certain que les personnes aiment mieux demeurer chez elles ou être en résidence privée et retarder le plus possible, malheureusement si besoin est, l'entrée en CHSLD.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Avez-vous été à même d'examiner les projections financières que nous avons préparées dans le livre blanc, c'est-à-dire l'évolution des coûts avec le statu quo, donc en utilisant le mode de prestation actuel, et les coûts si on implante une assurance autonomie et qu'on priorise le maintien à domicile, donc l'annexe IV? Est-ce que le cadre financier qui est présenté dans cette annexe-là en termes d'évolution des coûts est un cadre financier qui tient la route, selon votre évaluation?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. De dire si le cadre financier qui est présenté tient la route, je vais peut-être vous décevoir, mais malheureusement je ne peux pas vous répondre. Évidemment, on a analysé… Vous deviez vous douter de ma réponse de toute façon. Mais on a analysé… Évidemment on a examiné les deux options qui sont présentées, les deux tableaux qui figurent dans le livre blanc, mais évidemment ces données-là reposent sur un certain nombre d'hypothèses assurément, et ces hypothèses-là, on ne les a pas, on ne les a pas examinées. Donc, vous comprendrez qu'une fois que je ne suis pas en mesure d'analyser les hypothèses ou d'examiner les hypothèses sur lesquelles reposent les calculs, c'est difficile pour moi de dire, au bout de la ligne : Oui, tout est correct, ou, peu importe, j'ai des commentaires à faire, ou non. Donc, on est dans cette situation-là.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Mais ce n'était pas votre rôle non plus, et je le comprends très bien. Quoi qu'il en soit, si on regarde juste... et vous le soulevez dans votre... Dans un de vos rapports, vous dites que 30 % à 35 % des personnes qui entrent en CHSLD, dans certaines régions, ne répondent pas aux critères d'admission — c'est bien ça? — et donc ne devraient pas aller en CHSLD. Dans des régions du Québec où on a mis des normes et des barèmes beaucoup plus précis — les profils 10 et plus — en CHSLD, on réussit à diminuer le taux de lits en CHSLD à 2,6 %, 2,5 %, voire moins important.

Alors, si tout le Québec était à 2,5 % places, qui est une norme que le député de Jean-Talon même accepte, on aurait 7 800 places de trop en CHSLD actuellement, 7 800 places de trop, pour un montant annuel de 685 millions de dollars. Alors, ce 685 millions de dollars là, c'est le coût de ne pas utiliser de façon juste et raisonnable les CHSLD pour ce pour quoi ils sont conçus et de ne pas prioriser les soins à domicile. Alors, il y a un coût, là, réel, qui est actuellement assumé par le réseau, de ce problème fondamental d'utilisation du CHSLD pour des gens qui pourraient être ailleurs.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, merci, Mme la Présidente. Oui, je partage vos propos. Le seul point que j'aimerais rajouter, évidemment, c'est que ces personnes-là qui présentement se retrouvent dans des CHSLD et qui n'ont pas le profil, disons, pour être en CHSLD, bien, si elles ne sont pas là, il va falloir leur offrir quand même des services. Puis, demain matin... C'est une tendance qu'on ne peut pas, je pense… En tout cas, vous êtes spécialistes du domaine plus que moi, mais c'est sûrement une tendance qu'on ne peut pas inverser en l'espace d'un an ou deux, là. Mais je comprends très bien. Écoutez, on l'a soulevé dans nos rapports, qu'il y avait des gens qui étaient en CHSLD qui ne devraient pas être là compte tenu de leur profil. Mais, une fois qu'elles sont là, les personnes, il faut s'en occuper et bien le faire aussi.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Ce n'est pas dans l'intention ni du livre blanc ni dans notre intention de sortir des gens du CHSLD, mais, si on peut mettre fin à cette tendance, dans quelques années on aura utilisé de façon beaucoup plus judicieuse une ressource coûteuse qu'est le CHSLD.

Je terminerai sur le système d'information pour vous dire que le système d'information est déjà conçu — ça va peut-être intéresser le député de Jean-Talon — la conception est déjà faite, et l'implantation du système d'information est déjà faite. Les 102 établissements du réseau ont le système d'information sur les personnes âgées avec l'informatisation de l'Outil d'évaluation multiclientèle. Alors, c'est déjà intégré dans le réseau, et on peut aller recueillir l'information, de sorte que l'opération réévaluation des usagers actuels, qui se fait d'ici le 31 décembre, nous fournira automatiquement les données dont on a besoin pour être en mesure de faire la mise en place de l'assurance autonomie. Alors, je voulais juste vous rassurer, parce que c'est une préoccupation que vous avez, sur l'utilisation adéquate des systèmes d'information dans le réseau.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson? Non?

M. Samson (Michel) : Oui. Non, écoutez, merci pour la précision. C'est certain, encore là, c'est en lien avec une problématique qu'on avait... qu'on a soulevée dans nos rapports.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre, pour 3 min 30 s environ encore.

M. Hébert : Et cela — merci, Mme la Présidente — et cela devrait faciliter tant le suivi de gestion interne dans les établissements du réseau qu'un travail subséquent, que j'espère que vous ferez dans l'avenir pour faire la mise à jour de vos constatations à la lumière de l'implantation de l'assurance autonomie parce qu'il faut être en mesure de pouvoir documenter l'impact de la mise en place de l'assurance autonomie tant sur l'évaluation et la réévaluation, que la qualité des services, que l'équité dans l'accès aux services. Alors, j'imagine qu'une information de gestion de ce type-là va faciliter votre tâche, parce que ça n'a pas été facile, si je comprends bien, dans les travaux que vous avez menés.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Effectivement, vous avez raison, c'était quand même une lacune assez importante au niveau du ministère d'avoir des systèmes d'information robustes et qui se parlent et qu'on est capables de colliger toute l'information. J'en profite, vous me donnez l'occasion de rendre crédit aux gens qui m'accompagnent, à l'équipe qui est ici, parce que ce sont eux qui ont colligé énormément de données, dépendamment des endroits où on allait, pour être capables de tracer un portrait plus provincial, disons, et arriver avec les constats qu'on retrouve dans notre rapport. Donc, c'est sûr que plus les systèmes d'information sont robustes, plus on est capables d'avoir une information à jour, je pense que plus les gens qui rendent les services peuvent, justement, rendre le bon service et au bon moment aux personnes âgées ou à d'autres types de clientèles.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : On a parlé de la qualité, de l'évaluation et de l'accréditation des prestateurs. Vous soulevez un autre enjeu de qualité, qui est le suivi des usagers pour s'assurer qu'ils ont bel et bien reçu les services et qu'ils sont satisfaits des services. On prévoit utiliser... «utiliser» étant un abus de langage, donc on prévoit que le gestionnaire de cas va, par son contact régulier avec l'usager… serait à même de pouvoir assurer ce suivi de qualité. Est-ce que c'est une stratégie qui vous apparaît intéressante?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

• (13 heures) •

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Oui, on considère que ça serait une bonne approche. Parce que ce qu'on a vu aussi dans certains dossiers, c'est que les personnes âgées qui recevaient des services, par exemple d'une entreprise privée ou d'une firme d'économie sociale, cette... la personne âgée est considérée comme étant l'employeur. Donc, souvent, malheureusement, cette personne-là peut être un petit peu... je n'oserais pas dire démunie, mais c'est plus difficile pour elle d'être très critique vis-à-vis la qualité du service qu'elle reçoit. Alors, si on a quelqu'un de plus... de l'appareil, du ministère ou de l'agence, du CSSS, peu importe, qui joue ce rôle-là, je pense que ça peut assurer, encore là, une meilleure uniformité au niveau de la… puis s'assurer, premièrement, surtout s'assurer que la qualité des services qui sont rendus aux personnes sont… sont adéquats, et corrects, et répondent à leurs besoins.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre, en conclusion, pour 30 secondes.

M. Hébert : Juste sur le chèque emploi-service — parce que vous l'avez soulevé, là, et j'ai oublié de vous poser la question — ce que nous souhaiterions, c'est qu'il soit soumis, le personnel engagé via le chèque emploi-service, aux mêmes critères de qualité qu'on exige des autres prestataires de services. Est-ce que ça, ça répondrait à vos préoccupations de qualité de ce personnel engagé de gré à gré par les personnes?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson, rapidement.

M. Samson (Michel) : Oui. Ma réponse : Oui.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci. Alors, le premier bloc d'échange, le temps s'étant écoulé, nous allons poursuivre avec le deuxième bloc d'échange avec l'opposition officielle. La parole est au député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à notre commission. C'est toujours un plaisir de vous rencontrer. Je reviendrais sur la question du nombre de places en CHSLD. Vous dites… Vous devez avoir l'information. Il y a des endroits au Québec qui actuellement ont 2,5 places en CHSLD par 100 personnes de 65 ans et plus?

M. Samson (Michel) : Je m'excuse, si on a… Votre question, je m'excuse, c'est si, présentement, au Québec, on a des CHSLD…

M. Bolduc (Jean-Talon) : Il y a des CSSS qui, dans leur territoire, ont seulement que 2,5 places par 100 personnes de 65 ans et plus.

M. Samson (Michel) : Ce qu'on me dit, ce qu'on me mentionne, c'est qu'on n'a pas les données à jour, malheureusement. Je n'ai pas les données à jour pour pouvoir vous répondre.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Je vais vous donner la réponse. On l'a vu souvent en commission ici, il y a des endroits qui ont 2,5 places parce qu'eux ont fait la transformation au niveau du maintien à domicile sur plusieurs années, et également au niveau des ressources intermédiaires. On parlait tantôt de la donnée — je pense que c'est vraiment la donnée de Montréal, principalement — où il y a environ 30 %, 35 %, 40 % des patients en CHSLD, lorsqu'on fait l'évaluation de leur profil ISO-SMAF ou le nombre d'heures-soins, qui étaient considérés comme étant possible de les mettre ailleurs que dans un CHSLD. Mais on parlait beaucoup de ressources intermédiaires et une petite catégorie peut-être, maintien à domicile. Est-ce que l'évaluation que je viens de vous dire là concorde avec ce que vous avez évalué, c'est-à-dire qu'à Montréal il y a des gens dans des places de CHSLD parce qu'il n'y a pas de places en ressources intermédiaires?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Oui, ça concorde avec les constats qu'on avait, d'ailleurs, dans notre rapport sur les services d'hébergement, oui.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Seulement pour vous dire, on veut maintenir le plus possible nos gens à domicile, là. Vous savez, dans le réseau en général, la norme actuellement, c'est à peu près 15 % des personnes de 65 ans et plus qui reçoivent en moyenne 28 interventions annuelles, qui demeurent à domicile. Après ça, lorsque vous perdez de votre capacité, vous allez en ressource intermédiaire. Moi, ma compréhension de la situation de Montréal, on avait plusieurs, plusieurs personnes en CHSLD, parce qu'il n'existait pas de places, il n'y en avait pas, de places en ressources intermédiaires. Mais, à ma connaissance, cette catégorie-là de patients, s'il n'y a pas de ressources intermédiaires, n'avaient pas non plus les profils pour retourner à domicile. Est-ce que c'est l'évaluation que vous aviez faite également?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Oui, c'est l'évaluation qu'on en avait faite, là, de développer… Donc, ce qu'on recommandait, d'ailleurs, c'était de développer des places en ressources intermédiaires pour justement pallier à cette problématique-là.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : J'apprécie énormément votre réponse. Vous savez qu'en médecine, avant de faire un traitement, il faut d'abord faire un bon diagnostic. Ça fait que, si on pense qu'en développant énormément les soins à domicile — puis j'y crois, là, en passant, beaucoup — on va régler la problématique de Montréal, si vous n'ouvrez pas de places en ressources intermédiaires, il y a une catégorie de patients qui ne sera pas plus capable d'aller à domicile. Et ça veut dire que, même si vous mettez beaucoup, beaucoup d'argent dans le soutien à domicile, cette catégorie de personnes là, qui représente à peu près 0,8 place par 100 personnes de 65 ans et plus — excusez-moi de vous parler de ratio, mais c'est comme ça qu'il faut le travailler — en ayant ces 0,8… si vous n'avez pas ce 0,8 place là, ces gens-là vont s'en aller en CHSLD.

Je ne sais pas si, dans votre évaluation, vous êtes d'accord avec moi, mais c'est ça, le problème qu'il y a eu à Montréal. Il y a eu un manque de maintien à domicile, ça, on y croit, mais la grosse problématique, c'est qu'il manquait des ressources intermédiaires, à 0,8. Il y a des endroits qui ont atteint le 2,5 places par 100 personnes de 65 ans et plus en CHSLD, ils avaient en même temps développé entre 0,6 et 0,8 place en ressources intermédiaires, et, après ça, 15 % de la population était capable de rester à domicile, avec — puis il y a une moyenne — 28 interventions annualisées. Je ne sais pas qui a fait l'évaluation parmi vous autres, mais c'est les chiffres que vous avez dû retrouver.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

Une voix :

M. Samson (Michel) : Excusez-moi. Oui, ce qu'on me mentionne, c'est que, oui, ça correspond à l'évaluation qu'on a faite dans le rapport sur les services d'hébergement. Mais c'est sûr aussi qu'on peut intensifier les services en soins à domicile. Mais c'est l'autre volet...

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Tout à fait d'accord. Dans vos évaluations également, est-ce que vous vous êtes rendu compte... quand vous parliez d'optimisation, vous vous êtes rendu compte qu'il y avait moyen d'améliorer la performance, pas nécessairement en faisant travailler les gens plus fort, il y avait moyen d'avoir plus de visites à domicile par le personnel déjà existant? C'est la discussion que vous avez eue hier. Êtes-vous d'accord avec ça?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, oui, tout à fait d'accord. Oui, dans les soins, services à domicile, on a bien vu des variations très importantes, dans le temps des services qui étaient rendus, entre les CSSS, entre des régions. Ça varie beaucoup, beaucoup.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Et puis, certains, vous êtes des évaluateurs de performance, vous savez que, si, à un endroit, un exemple, ils voient deux patients par jour puis, à l'autre endroit, ils voient six patients par jour avec même catégorie de patients, même distance, mêmes critères, là — on est capables de retrouver ça au Québec — vous comprenez que la première chose à faire pour améliorer la performance du réseau de la santé, c'est d'abord d'amener les gens qui en voient deux à en voir six. Puis, en passant, ce n'est pas de leur faute; c'est souvent dans l'organisation du travail. Est-ce que c'est l'évaluation que vous trouvez? Est-ce que c'est les recommandations que vous faites également?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Effectivement, c'est un peu le constat qui se dégage encore du rapport qui a été discuté hier sur les services à domicile. Et c'est certain qu'au niveau de la productivité ce qu'on a recommandé au ministère, c'est d'en venir à établir certains standards qui peuvent... Comme je le disais tout à l'heure un petit peu précédemment, on ne s'attend pas à des standards coulés — je me répète — coulés dans le béton pour toutes les régions au Québec, il peut y avoir certaines particularités selon les régions, mais il n'en demeure pas moins qu'il devrait y avoir certains standards parce que présentement, on voyait, les écarts étaient très, très importants pour le même type de professionnels ou de services qui étaient rendus, le temps qui était consacré aux patients vraiment à domicile, selon les régions.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Jusqu'à date, là, je pense qu'on s'entend à 100 % sur l'évaluation, comment est le réseau de la santé. Vous comprenez également que les gens nous disent toujours : Bien, il faut respecter l'autonomie professionnelle, en nous disant : Bien, c'est nous autres qui décidons de la charge de travail qu'on peut faire. On ne peut pas fonctionner comme ça dans un réseau. Puis généralement, si un endroit est vraiment en bas de la moyenne, on essaie au moins de les ramener dans la moyenne. Puis, en performance, on n'essaie pas que ce soit tous des Gretsky, là, mais on dit au moins qu'il faut qu'ils soient tous des bons joueurs. Ça, vous êtes d'accord également, comme principe de performance?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Oui. D'ailleurs, dans notre rapport sur les services à domicile, on donne quelques exemples pour que ce soient des ergothérapeutes ou d'autres types de professionnels. Si, partout, on atteignait la moyenne provinciale, on dégagerait un nombre très important de centaines ou de milliers d'heures qui, à ce moment-là, seraient disponibles pour donner encore plus de services à domicile, sur place, à ces personnes âgées là.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : On s'entend parfaitement bien. Pourquoi je vous pose ces questions-là? C'est parce que l'assurance autonomie est partie d'un principe que le système ne fonctionne pas et qu'en refaisant l'allocation des ressources avec juste le montant on était capables d'améliorer le système. Mais, la réalité, si on a des endroits qui, sans assurance autonomie, réussissent à atteindre les ratios de 2,5 lits en CHSLD, 0,8 lit en ressources intermédiaires et également 15 % qui est suivi à 28 interventions, et que ça, à ce moment-là… — puis mon critère est celui-là — je n'ai aucun patient qui attend, pour la population, pour un lit de CHSLD dans les urgences...

Même hier les gens disaient qu'au Saguenay—Lac-Saint-Jean il y en avait plus, de lits disponibles — même à 2,5 — que de patients qui attendaient. Ils n'ont pas d'assurance autonomie. Pourquoi, à Montréal et les autres régions, ils ne seraient pas capables de faire la même chose, non pas en essayant de tout rechanger un système de financement, mais bien en optimisant les ressources et en donnant des consignes, comme c'est fait actuellement, de ramener les ressources au bon endroit et de leur donner un coup de main en développement des ressources intermédiaires? Je parlais à des gestionnaires, des gens qui sont habitués dans l'évaluation. Si une organisation peut le faire, pourquoi les autres organisations ne peuvent pas le faire?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente, justement, hier, ce qu'on a discuté au niveau de la performance, c'est que, comme vous le savez, il y a plusieurs régions qui ont entrepris des mandats ou qui ont donné des mandats à certaines firmes pour justement améliorer la productivité et améliorer leur performance.

Ce qu'on constate encore, c'est que toutes les bonnes pratiques d'une région ou d'un endroit ne sont pas nécessairement partagées avec d'autres institutions de la même région ou entre les régions. Donc, dans le réseau, il se fait de très belles initiatives — hier, on en a présenté quelques-unes par des gens qui étaient présents — mais la diffusion de toutes ces bonnes pratiques là n'est peut-être… n'est pas encore faite dans tout le réseau, et c'est certain que, si elle était faite, tout le monde y gagnerait en performance à cet égard-là.

• (13 h 10) •

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Je pense que, si vous êtes d'accord, actuellement tout le monde travaille à améliorer sa performance dans tous les CSSS. On parlait des problématiques de Montréal. Si vous allez à Lucille-Teasdale, Pointe-de-l'Île — entre autres, ils ont fait tous ces projets-là qui ont été contestés, mais ils ont quand même fait les projets — ils ont tous amélioré leur performance au cours des dernières années. Et moi, je pense qu'actuellement on fait aussi des constats sur une façon de fonctionner du réseau qui datait peut-être de voilà six ou sept ans, mais, même à Montréal, actuellement, ils sont en train de changer leurs façons de faire. Ils optimisent leurs ressources avec ce qu'ils ont. Ça, il faut au moins faire ce constat-là.

Puis, juste pour conclure sur ce point-là — on va en discuter un peu plus, mais un élément — vous savez, quand on a fait la chirurgie d'un jour, au début, on avait les tableaux, là, il y a des établissements qui étaient à 90 % de ce qui était attendu, puis la majorité étaient en bas du 30 % ou 25 %. L'année d'après, il y en avait plus qui étaient à 90 %. Puis, quand vous regardez six ans après, il y en avait très, très peu qui étaient en bas du 90 %, la majorité étaient en haut du 90 %.

Tout simplement, dans le réseau de la santé, ce n'est pas en donnant une consigne que tout va changer du jour au lendemain, mais, sur le long terme, tout le monde atteint à peu près les mêmes ratios, mais il y en a que ça prend plus de temps que d'autres. Moi, je pense que c'est ce que nous sommes en train de vivre actuellement dans les soins à domicile, où les consignes sont claires qu'il faut atteindre les ratios, tant des ressources intermédiaires, CHSLD que soins à domicile, mais la question, c'est : Si vous changez le financement et vous ne changez pas ces manières de faire là, est-ce que ça va changer quelque chose?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Présentement, effectivement, dans le réseau, ce qu'on a constaté, ce qu'on constate, c'est qu'il y a beaucoup d'exercices pour améliorer la productivité, améliorer la performance. Puis ça, c'est réel, ça se passe, les gens travaillent vraiment dans cette optique-là. Mais je pense qu'au-delà de ça le ministère a un rôle majeur à jouer en établissant un certain standard. Jusqu'où on veut aller et à quoi on s'attend minimalement comme services ou comme temps que certaines spécialités, certains spécialistes vont passer à domicile auprès des personnes âgées, je pense que le ministère se doit d'établir certains standards à cet égard-là. Parce qu'on peut améliorer la performance, on peut toujours s'améliorer, mais jusqu'où on veut aller? Puis il faut se comparer aussi, chose qui ne se fait pas présentement, pour pouvoir justement utiliser les bonnes pratiques d'une région puis les exporter dans une autre.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. D'ailleurs, juste pour vous dire, les systèmes d'information, ils étaient en place, mais il y a des a des endroits, dont Montréal, qu'il a fallu donner des coups de pied pour qu'ils finissent par l'installer, le SMAF, là, même j'ai intervenu souvent comme ministre. Mais je pense qu'avec le temps tout le monde maintenant en fait partie. Ça, c'est la question organisation des services, performance. Ça, juste pour vous dire, on est tous d'accord avec ça, puis le réseau, il faut qu'il passe par là, on n'a pas le choix.

Maintenant, l'assurance autonomie… On l'a dit, ces principes-là, nous sommes tous d'accord avec ça : le maintien à domicile, développer des ressources, que les gens aient les ressources nécessaires pour répondre à leurs besoins, qu'on mesure puis qu'on ait un système d'information. Ça, là, c'est 100 %, aucun problème. L'assurance autonomie, c'est une autre affaire, c'est : Comment on va le financer? Et c'est là qu'il y a un problème. Quand vous faites des évaluations, si vous faites l'évaluation, comme Vérificateur général, d'un ministère qui a mis un système en place, qui a tout mis ce qu'il fallait, mais il a oublié un petit élément, combien ça va coûter, s'il installe puis il mesure après combien ça va coûter, comment vous les évalueriez, ces gens-là?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Mme la Présidente, ce que je dirais, c'est qu'effectivement je pense que la première étape, comme je mentionnais tout à l'heure, c'est l'évaluation des besoins et le repérage des personnes. Une fois qu'on a repéré toutes les personnes, qu'on a évalué leurs besoins, bien, là, on est en mesure de définir possiblement un panier de services qu'on veut offrir, de définir notre offre de services, quels types de services, et là on peut savoir combien ça va coûter, rendre ce service-là, et aller de l'avant avec ça. Présentement, il y a encore… comme on l'a vu dans nos rapports, il y a beaucoup de cas, il y a beaucoup de situations ou de régions où l'évaluation des besoins n'est pas faite. Donc, c'est difficile de savoir exactement quels types de services on va rendre à ces personnes-là et le coût qui va en découler.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : …ça va bien, notre discussion, en passant, là. Jusqu'à date, on s'entend, d'après moi, à 100 %, hein? Ce n'est pas difficile, là, c'est facile, là. D'habitude, c'est nous autres qui répond aux questions. La question, je la repose, là : Si quelqu'un décide de mettre un système en place, un système informatique en place, il a décidé d'acheter le système au fur et à mesure puis il n'a pas évalué avant combien ça coûtait, qu'est-ce que vous en pensez comme gestionnaire? Et qu'est-ce que vous auriez fait comme recommandation à cette personne-là, le fait qu'il a agi avant d'évaluer les coûts? Vous êtes gestionnaire, la réponse, elle devrait être facile.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Je pense que vous ne serez pas surprise de la réponse, Mme la Présidente. C'est certain que… Puis on l'a fait dans certains rapports. Vous donnez l'exemple des projets informatiques. Malheureusement, la grande lacune, c'est l'évaluation des besoins qui n'est pas faite au départ. Donc, on doit évaluer les besoins : Qu'est-ce qu'on veut avoir? Est-ce qu'on a différentes options qu'on a analysées, premièrement? Une fois qu'on a évalué nos besoins, c'est quoi, les options qui s'offrent à nous? Et, par la suite, là on est en mesure d'évaluer combien ça peut coûter, puis on définit ce qu'on veut avoir de façon très précise, et on va de l'avant.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Combien il me reste de temps, Mme la Présidente? J'aime beaucoup ça, jusqu'à date.

La Présidente (Mme Proulx) : Il vous reste six minutes à peu près.

M. Bolduc (Jean-Talon) : O.K. Il va falloir avancer. Je vais vous poser une question. Si, demain matin, vous décidez d'avoir un projet, est-ce que vous êtes capable de dire si vous êtes pour ou contre le projet, même si vous avez un bon projet, si vous n'avez pas une évaluation des coûts?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. C'est certain que, pour évaluer un projet, le volet majeur, très important, c'est les coûts, et, pour évaluer les coûts, j'ai besoin des hypothèses et les bases sur lesquelles repose cette évaluation-là, qui ont permis de déterminer ou d'établir les coûts.

M. Bolduc (Jean-Talon) : …question, là, parce qu'il y en a eu plusieurs, mais là c'est une vraie, là : Si on n'a pas encore les besoins des patients au Québec parce qu'ils sont en train d'être faits, est-ce qu'il peut y avoir un cadre financier qui est acceptable dans le livre blanc ou c'est juste des suppositions de croissance de populations avec des coûts moyens?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Mme la Présidente, c'est certain que, si l'évaluation des besoins n'a pas été faite de façon rigoureuse et complète, la marge d'erreur est très grande. C'est certain qu'il y a un risque important que les coûts ne soient pas ceux… peu importe en haut ou en bas, que les coûts ne soient pas ceux qu'on projette, compte tenu que l'évaluation des besoins n'a pas été faite au départ. C'est ce qui arrive dans beaucoup de projets informatiques, d'ailleurs. C'est un exemple facile, malheureusement.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Vous ne savez pas comment j'aimerais ça faire votre job parce que je trouve qu'on a le même raisonnement, on travaille de la même façon. Puis, en passant, depuis les débuts de la commission, c'est comme ça que j'ai traité le dossier, de façon rigoureuse, c'est-à-dire on est d'accord avec les grands principes, on sait que la transformation doit se faire, on sait qu'il y a de l'optimisation qui doit se faire, sauf qu'on ne peut pas prendre de décision par rapport à une l'assurance autonomie tant qu'on n'a pas tous les éléments au niveau des besoins : le nombre de personnes; c'est quoi, les profils; ça va correspondre à quel service; et combien… le service.

L'autre question qui vient après : Trouvez-vous normal que, comme décideurs — puis là je ne vous poserai pas… je ne vous demande pas de vous mettre à notre place, là — on dise au moins à la personne c'est quoi, le service qui va être couvert — ça, vous avez dit oui dans votre rapport — mais, en plus de ça, combien elle va devoir contribuer pour avoir le reste des services qui ne seront pas couverts?

Troisièmement, dans l'allocation des ressources, c'est à partir d'un certain revenu. Est-ce que ce serait normal qu'on dise à la personne, si vous gagnez 50 000 $, ça va être quoi, votre déductible pour que vous soyez capable d'avoir des services que, par la suite, l'État va payer jusqu'à un certain pourcentage?, un peu comme en CHSLD. Vous savez que vous rentrez dans un CHSLD, vous avez tant de revenus, ça veut dire qu'à la fin ça peut vous coûter jusqu'à 21 000 $. Est-ce que vous trouvez normal qu'avant d'accorder notre support à de l'assurance autonomie on ait tous ces chiffres disponibles?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Tous ces éléments-là sont très interreliés et directement reliés, encore là, à l'évaluation des besoins. Pour notre part, tout part de là. Une fois qu'on aura l'évaluation des besoins, bien on définira le panier de services qu'on veut offrir, qu'est-ce qu'on veut se donner exactement comme système, combien ça va coûter, et par la suite, là, les décideurs pourront prendre les décisions sur les coûts à assumer ou non par les personnes, peu importe lesquels soient-ils. Mais c'est vraiment l'évaluation des besoins, comme dans n'importe quel projet, qui est à la base de tout.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Juste en passant, même si on ne passe pas à l'assurance autonomie, vous êtes d'accord, puis je pense, c'est ça qui est votre rapport, il faut quand même faire de l'optimisation, le statu quo est non acceptable. En plus de ça, il faut avoir un système d'information qui est fiable. Il faut également qu'on soit capables d'avoir une répartition des ressources puis une équité entre les régions. Ça, on est tous d'accord avec ça.

La question : Est-ce qu'un gouvernement peut le faire, ou un ministre, ou un ministère peut le faire sans revoir le modèle de financement? Parce qu'à la fin le financement, c'est juste comment je vais aller chercher de l'argent et comment je le distribue. Et tout le monde qui sont venus ici nous ont dit : Ce n'est pas compliqué, on n'a pas assez d'argent. Moi, je pense qu'il faut optimiser dans un premier temps. Mais, la deuxième, ils disent : On n'a pas assez d'argent.

Et, si vous mettez en place l'assurance autonomie avec un montant de 100 millions de dollars par année, puis vous constatez que ça vous en prend non pas 100, mais peut-être 300 ou 400, à ce moment-là, vous devez vous poser des questions. Soit que vous revoyez ce que vous voulez offrir ou encore vous décidez d'aller voir votre ministre des Finances avec votre Conseil du trésor puis vous lui expliquez que ça vous prend 300, 400 millions de dollars supplémentaires par année. Lui, il faut qu'il explique à la population, après ça, combien ça va coûter plus d'impôt. Je suis content parce que vous connaissez ça, les chiffres, là. Êtes-vous d'accord que ça devrait fonctionner comme ça? Un jour, vous allez peut-être nous évaluer là-dessus.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

• (13 h 20) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Vous pouvez faire un petit consensus de deux minutes pour...

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Écoutez, peu importent les suites, ou la voix qui sera privilégiée ou adoptée par les parlementaires, par rapport au livre blanc, c'est certain que, le Vérificateur général, ce qu'on souhaite, c'est que les changements qui seront apportés dans le système nous permettront de dire, dans trois ans, dans quatre ans ou dans cinq ans, peu importe, que ça fonctionne bien puis qu'il y a vraiment eu des améliorations notables par rapport aux situations qu'on a vues dans les dernières années. Le choix des moyens, vraiment, appartient aux parlementaires, mais nous, c'est certain que ça doit reposer sur une évaluation rigoureuse, une évaluation des besoins, et par la suite on se donne un cadre en fonction de cette évaluation-là.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon, pour une minute.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, bien, écoutez, je vais vous donner votre note, là. Quant à moi, vous avez eu 100 %. Vous avez très, très bien répondu. La logique que vous nous avez discutée, là, c'est la logique, je pense, qu'il faut avoir dans ce projet de loi là. Il faut arrêter de vendre des rêves à des gens, il faut être réaliste. Moi, je pense, à la fin, par contre, les patients doivent avoir les meilleurs soins, il faut faire le changement dans le système, il faut faire l'optimisation, il faut revoir les façons de faire. La qualité, il faut qu'elle soit au rendez-vous. La question que je pose, c'est qu'avant de faire ça puis avant de décider… Puis ça, il faut le faire, mais, avant de décider de tout changer le système pour le financer différemment, il faut qu'on ait des chiffres.

Le ministre, d'après moi, a sous-estimé ses coûts, il a sous-estimé également des effets humains. Ça va coûter beaucoup plus cher qu'il pense, puis, à un moment donné, on va se retrouver avec un système où ça va coûter… Soit qu'il va se faire dire non par rapport au budget, ou encore qu'il nous dise, demain matin, qu'il va avoir 2 ou 3 milliards à mettre dans le réseau de la santé pour une assurance autonomie. S'il n'est pas capable de dire ça, c'est un projet qui va avoir beaucoup de difficultés à être réalisé. C'est mon diagnostic à moi. Je ne vous demande pas de le partager, mais, avec ce que vous nous avez donné aujourd'hui, vous m'avez confirmé que notre façon de penser était la bonne. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup. Alors, nous allons poursuivre nos échanges avec le deuxième groupe d'opposition. La parole est à la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Merci. Je vous remercie aussi pour votre rapport du printemps dernier, pour votre travail, qui a été bien fait puis qui nous a vraiment éclairés sur les problèmes qu'on sent instinctivement quand on est un député de terrain, quand on rencontre des gens, mais qui sont documentés par vos propos.

Il y a beaucoup de consensus dans cette commission-là. Tout le monde est pour le maintien à domicile, tout le monde est contre le statu quo, tout le monde se dit que ce que vous avez dit dans votre dernier rapport, ce sont des choses à corriger puis qui sont inadmissibles, inacceptables. Le financement de ce projet-là fait encore partie d'une nébuleuse. Mais il y a quelque chose sur laquelle je voudrais avoir votre opinion.

Le financement à l'acte. Si, à chaque fois qu'on donne des services, on est financés en fonction de ça, bon, lorsqu'on a, comme vous le dites, des professionnelles qui manquaient un peu de productivité auprès des personnes directement concernées, qui faisaient beaucoup de travail administratif, elles vont devenir un fardeau parce que l'établissement qui les engage, si ces personnes-là ne sont pas efficaces et productives, n'aura pas son budget. Est-ce que vous croyez que ça, c'est une mesure qui va inciter à plus de productivité, à plus d'efficacité dans le système?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. C'est certain que ce qui nous préoccupe puis qu'on a vu dans notre rapport, dont vous avez cité quelques éléments, là, c'est la disparité qui existe présentement. Tu sais, il y a une disparité très importante, que ce soit ergothérapeute, physiothérapeute, peu importe, là, mais entre les régions puis… Encore là, je reviens à l'élément que le ministère doit mettre… doit établir certains standards justement pour que ces gens-là puissent être beaucoup plus présents auprès des personnes âgées à domicile. Lorsqu'on a, dans certains cas, 15 % du temps qui est passé à domicile auprès des personnes âgées, je pense qu'hier, d'ailleurs, à la Commission de l'administration publique, que ça soient les représentants des agences ou des CSSS le reconnaissaient, il faut que ça s'améliore, il faut changer la façon de faire et être beaucoup plus performants. Donc, c'est vers ça qu'il faut aller.

Il y a beaucoup de moyens, il y a plusieurs moyens disponibles. Il y a des régions qui ont commencé à le faire, que ce soit en utilisant, par exemple, des aides-infirmières au lieu d'une infirmière pour poser certains gestes. Évidemment, les technologies de l'information peuvent aider aussi beaucoup. Et l'aspect administratif aussi mérite d'être revu parce que possiblement que ces gens-là… Puis, la dernière chose, on n'est surtout pas en train de dire que ces gens-là ne travaillent pas, mais ces gens-là devraient être à domicile, chez les personnes âgées, le plus possible, et ce n'est pas ce qu'on constate présentement. Donc, il y a un travail de bureau ou quelque chose qui ne fonctionne pas et qu'il faut changer.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Mais la question que je vous pose : Le fait que ça soit financé à l'acte, est-ce que ça serait une incitation... Parce que finalement, là, on sait qu'il faut que tout le monde évalue avec le même outil. Puis pourquoi ça donne des résultats différents dans deux régions différentes, l'évaluation des mêmes personnes?, c'est parce qu'il y a un problème d'application. Ce n'est pas compliqué. Puis le ministre ne peut pas aller régler, cas par cas, tous les dossiers.

Mais moi, je me dis que, ça, on le sait, là, qu'il y a une inégalité. Mais on a la chance, nous trois, d'être dans les endroits où il y a les meilleures pratiques. Sauf que, pour ceux qui doivent s'améliorer, si on leur dit : On finance à l'acte, le gestionnaire, le directeur du CSSS ou du CLSC, il va se dire : Comment ça que tu as juste une personne de rencontrée par journée? Tu ne voudrais pas en rencontrer trois? Parce que j'ai un budget à rencontrer, moi aussi. C'est dans ce sens-là que je vous pose... Financement à l'acte, pensez-vous que c'est un encouragement à être plus performant?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui, Mme la Présidente. Le financement à l'acte ou le financement par activité, c'est ce qu'on voit, je pense que vous le savez, de plus en plus dans différentes administrations, dans d'autres juridictions. Donc, c'est certain que c'est quelque chose vers laquelle il faut aller. Puis nous croyons, chez nous, qu'effectivement ça peut contribuer à améliorer la productivité des gens, avec un financement à l'acte ou une rémunération à l'acte.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska, il vous reste une minute.

Mme Roy (Arthabaska) : Finalement, là, on se retrouve devant deux thèses, hein? Un dit «le verre à moitié vide», l'autre, «le verre à moitié plein», un ministre qui nous dit «ça nous prend ce changement-là pour arriver à corriger ce que vous avez dénoncé» puis une autre thèse qui dit «il faut corriger ça avant de faire la caisse de soutien à l'autonomie». Vous, entre ces deux paradigmes-là, vous vous situez où? Je ne vous en pose pas une facile, hein?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Samson, pour une très courte réponse.

M. Samson (Michel) : Très courte réponse : Je vais laisser la décision aux parlementaires, je vous dirais.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup. Alors, le temps s'étant écoulé et compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures. Et j'informe mes collègues qu'ils peuvent laisser leurs effets personnels ici.

(Suspension de la séance à 13 h 27)

(Reprise à 15 h 5)

La Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Nous allons poursuivre sans plus tarder les consultations particulières et auditions publiques sur le livre blanc sur la création d'une assurance autonomie intitulé L'autonomie pour tous.

Je souhaite la bienvenue à notre invité. Pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Conseil pour la protection des malades (CPM)

M. Brunet (Paul G.) : Bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les membres de l'Assemblée nationale. Merci de cette invitation. Paul Brunet, président du Conseil pour la protection des malades, organisme qui fêtera ses 40 ans l'an prochain. J'espère que le gouvernement s'en souviendra, et pourquoi pas une mention d'hommage au fondateur, Claude Brunet, qui fonda cet organisme il y a 40 ans? Ce serait vraiment apprécié sûrement du milieu et de la famille du fondateur Claude Brunet.

J'en viens au document en très résumé parce qu'on n'a que 10 minutes, et les gens ont eu notre document. Évidemment, nous félicitons la volonté du gouvernement de vouloir favoriser la prestation de services là où résident les personnes et protéger le financement qui leur est destiné. Nous trouvons que c'est une volonté très noble. Rappelons, par ailleurs, que déjà, en 2003, les citoyens-usagers du Québec s'étaient fait promettre que l'État dispenserait de plus en plus de services à domicile et dans la communauté, nous disait en tout cas les orientations ministérielles signalées alors, mais la réalité fut tout autre, malgré ces engagements. Et, cette fois-ci, devons-nous croire l'État dans les promesses et les propositions qu'il nous fait aujourd'hui?

Les coûts. Avant de chercher des nouveaux revenus, ne devrait-il pas nous venir à l'esprit, et à vous les représentants de l'État, aux experts des différentes commissions qui s'y sont penchés, de commencer par questionner et justifier d'abord les dépenses actuelles? Rappelons que ce sont 30 milliards de dollars que nous dépensons à chaque année. Malheureusement, je n'ai pas vu de questionnement sérieux dans aucun des rapports qui se sont succédé avec à leur tête des experts pourtant aguerris à ces recherches et ces questionnements. Il nous apparaît que, pour toute entreprise, surtout quand sa viabilité est à risque, cette question élémentaire de savoir qu'est-ce qu'on dépense et comment on le dépense devrait nous venir à l'esprit à tous.

Pendant ce temps, les HEC, le rapport Ménard signalent que, dans le réseau de la santé, nous avons beaucoup de ressources, des ressources qui se comparent avantageusement aux autres juridictions et parfois même plus importantes. Pourtant, nous ne réussissons pas à servir et à soigner tous les citoyens qui en ont besoin, du plus petit enfant à la personne la plus âgée ou à la personne la plus lourdement handicapée. Je veux saluer ici, par contre, le questionnement serré que le ministre de la Santé, le Dr Hébert, a fait récemment auprès des GMF, qui, même s'ils représentent une idée extraordinaire pour le réseau de la santé, idée issue du rapport Clair, ne livraient pas les services convenus en contrepartie de rémunération pourtant importante qui leur est versée.

L'imputabilité des CSSS. Le livre blanc propose qu'en assurance autonomie à tout le moins les CSSS deviennent les premiers artisans de l'accessibilité de par la réaffirmation de leurs responsabilités pour évaluer les besoins des personnes, coordonner et surveiller la prestation des services. Il est en effet souhaitable qu'on clarifie d'abord quelles sont ces responsabilités parce que, présentement et selon notre prétention, mais surtout celle de l'Association québécoise des établissements de santé, il y a plusieurs problèmes de dysfonctionnement, de confusion et de duplication — ce sont les mots des rapports — dans l'exercice même des responsabilités entre les agences, les CSSS et les établissements. Ne devrions-nous pas questionner d'abord ce qu'on fait avant d'ajouter des sous?

L'autorité. Je l'avais dit déjà dans un autre projet de loi, lorsque l'ancien ministre de la Santé avait présenté le projet de loi sur la gouvernance, que présentement l'autorité du ministre, du ministère, des agences, des CSSS et des établissements sont… sont tellement confuses — et je cite quelques exemples dans la loi — que certainement il risque d'y avoir de sérieuses problématiques si on demande maintenant, dans l'état actuel de la loi, aux CSSS de signer et d'exécuter quelque entente que ce soit. J'illustre, donc, le propos en mentionnant quelques articles de loi recensés ici pour appuyer mon propos.

• (15 h 10) •

Donc, l'admissibilité aux soins. Pour nous, évidemment, on est d'accord avec le projet de loi ou le livre blanc aux conditions suivantes. Tous les citoyens, quel que soit leur âge, devraient avoir accès aux soins et services prévus dans le projet sur la base évidemment de l'évaluation de leurs besoins. Tous les citoyens majeurs devraient contribuer à l'assurance et à la caisse, sauf évidemment les personnes démunies. La contribution devrait se faire sur la base des revenus dont dispose chaque famille, de façon progressive, mais jamais sur la base de la consommation de ces soins et de ces services. Nous croyons en effet que, par définition, un État qui se dit social-démocrate doit commencer… ou doit, plutôt, comme pour l'éducation, mutualiser les coûts des soins de santé au bénéfice de tous ses citoyens, riches et pauvres.

La conclusion : on ne peut plus ne rien faire. Comme le gouvernement le dit, il faut un effort supplémentaire de la part des citoyens pour répondre adéquatement aux besoins qui seront grandissants. Nous croyons qu'il faut par ailleurs examiner sérieusement les coûts de la performance du système, de revisiter les dizaines de paliers hiérarchiques et de savoir enfin si — on avait invité le rapport Ménard de le faire, mais malheureusement on n'en a pas eu de réponse — on en a pour notre argent.

Aussi, pourquoi ne pas en profiter, dans cette foulée, dans ce projet, de continuer à promouvoir des modes de vie plus sains et la prévention? Et surtout encourageons avec obsession le personnel de la fonction publique à soigner, à servir les citoyens et les usagers du réseau en leur permettant enfin d'avoir des responsabilités claires et en leur permettant ainsi de répondre fièrement de leurs accomplissements. Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup, M. Brunet. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec le groupe formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Hébert : Bonjour, M. Brunet, merci beaucoup de votre mémoire. On sera là pour célébrer le 40e anniversaire de votre organisation avec plaisir. Vous nous dites qu'en 2003 il y avait des réformes qui étaient supposées de prioriser le soutien à domicile et vous nous dites que ça ne s'est pas matérialisé. J'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus. Quelle est votre appréciation de l'état des soins à domicile actuellement, au Québec?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Oui. M. le ministre, j'en ai pour preuve les différents rapports qui sont parvenus sur la place publique depuis tout ce temps, que ce soit le Vérificateur général, que ce soit la Protectrice des citoyens plus récemment. Il y a un manque flagrant, encore une fois, malgré les efforts — convenons-en qu'il y en a eu — à cet égard, et tout le monde ne reçoit pas les soins et les services à domicile dont il a besoin. Il faut souvent des batailles, des insistances extraordinaires de la part des familles pour que les gens réussissent à avoir les soins et les services dont ils ont besoin. C'est, du moins en tout cas, les plaintes et les informations que nous recevons. Et nous savons qu'il y a beaucoup d'efforts à faire.

À la fin des années 90, l'ancienne association qui avait précédé l'AQESSS parlait d'autour de 250 millions de dollars qui manquaient, à ce moment-là, récurrents, pour soigner le monde comme il faut à domicile. Je n'ose pas m'imaginer le chiffre que ça prendrait aujourd'hui, mais je sais — et certainement que votre projet de loi y concourra — que ça va prendre plus d'argent pour soigner le monde et offrir des soins et des services adéquats chez eux, avec du personnel compétent.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Est-ce que, d'après vous, de mettre plus d'argent dans le système va être suffisant pour pouvoir vraiment donner un vrai choix aux usagers de rester à la maison et de recevoir les services dont ils ont besoin?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Je le disais tantôt, si on ne réexamine pas et ne refait pas l'exercice de savoir si on en a pour notre argent actuellement avec ce qu'on dépense, avec l'état de la situation que l'AQESSS fait, je crois qu'on risque fort de dépenser encore plus de sous pour pas nécessairement plus de résultats, en effet.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Le projet d'assurance autonomie prévoit redonner à l'usager un pouvoir, avec l'allocation de soutien à l'autonomie, un pouvoir de recevoir les services dont il a besoin. Est-ce que de redonner à l'usager, plutôt que le système de financement actuel qui passe par les établissements, de redonner à l'usager ce pouvoir-là vous apparaît être une bonne façon de pouvoir imprimer un changement significatif dans le système?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Toute la question de l'«empowerment» puis la responsabilisation du citoyen, sinon de l'usager, en autant qu'il soit capable de le faire, hein, convenons-en, là, pas tout le monde, mais, comme idée générale de responsabiliser les gens et de faire en sorte qu'ils décident plus et mieux de ce dont ils ont besoin avec les allocations financières que l'État pourrait leur procurer, certainement que c'est une bonne idée, mais toujours en nous assurant que les gens sont capables de le faire.

On a souvent affaire, particulièrement à un certain moment de leur vie, à des gens qui sont lourdement hypothéqués à plusieurs plans, et il faut être conscient qu'on ne pourra pas faire tout avec les gens. On s'est trompé, je pense, quand on a voulu désinstitutionnaliser tout le domaine de la psychiatrie et on a fait reposer sur les municipalités, les grandes villes en particulier, de graves risques pour la sécurité de gens, alors qu'on a voulu intégrer d'autres gens dans la communauté. Il faut faire attention, ce n'est pas bon pour tout le monde. Mais, oui, l'idée générale est intéressante puis importante.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Donc, l'idée d'accompagner les gens... bien, c'est sûr qu'il y a déjà la famille, les proches qui sont autour, mais de les accompagner avec un intervenant pivot ou un gestionnaire de cas nous permettrait de donner l'accompagnement nécessaire aux personnes pour qu'elles puissent, en dépit de troubles cognitifs ou d'incapacité, être capables de pouvoir recevoir les services dont ils ont besoin.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Oui. Je pense que c'est la vertu même de vouloir permettre aux gens de rester chez eux le plus longtemps possible avec l'aide qu'on nous a déjà promise et que, j'espère, cette fois-ci, ça va être vrai, pour qu'on puisse rester chez soi et qu'on continue à vivre dignement avec des services et des soins adéquats, oui.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Notre stratégie était de financer, de commencer le financement des soins à domicile avant même d'implanter la nouvelle façon de soutenir les services à domicile, donc l'injection de 110 millions cette année dans les soins à domicile, de façon à ce qu'on puisse s'assurer que le financement soit là avant de faire la réforme. Est-ce que, pour vous, c'est une stratégie qui a du mérite?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Certainement, mais, sans être un expert et pour avoir cité les chiffres tantôt, je ne suis pas sûr qu'on va avoir assez de 110 millions, M. le ministre.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Notre prétention est de doubler le budget des soins à domicile, donc d'ajouter 500 millions dans les soins à domicile. Ça, ça veut dire 500 millions récurrents, 1,6 milliard si vous le prenez sur cinq ans. Est-ce que, pour vous, c'est un investissement qui est significatif?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Certainement. Certainement, M. le ministre. Mais je rappelle qu'en 1998 l'ancienne association des CLSC-CHSLD parlait de 250 millions récurrents par année. Je ne sais pas ce que ça donne aujourd'hui, je me fie sur vos experts pour le déterminer.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous dites que, si on ne veut pas refaire la même erreur qu'en 2003, il faut être capable d'avoir des conditions gagnantes pour réaliser un vrai changement. On a parlé un peu du financement, de l'ajout de financement. Est-ce qu'il y a d'autres conditions gagnantes importantes, outre le financement et l'«empowerment» — je reprends votre terme, qui m'apparaît approprié — l'«empowerment» des usagers par rapport à leurs services?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Un peu comme l'AQESS le suggère, et nous insistons, il faut revoir l'autorité et la délégation d'autorité. Si on veut que les CSSS fassent le travail, il va falloir faire du ménage dans la clarification des responsabilités de l'autorité, particulièrement au niveau des CSSS, et leur laisser, comme vous le proposez vous-même dans votre livre blanc, leur laisser la marge de manoeuvre requise pour faire le travail sur le terrain. C'est une mission de services. Il faut que le pouvoir soit délégué et décentralisé, ce qui n'est pas le cas présentement.

• (15 h 20) •

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Le livre blanc propose non seulement que les CSSS soient des prestataires de services publics, mais également reprennent la gestion publique du système. Vous le savez, les gens qui sont en résidence privée, les gens qui reçoivent des services d'entreprises d'économie sociale échappent au contrôle public. Et on n'a pas de mécanismes d'accréditation de la qualité, on n'a pas de mécanismes pour attester de la formation des personnels. L'assurance autonomie prévoit confier soit aux CSSS ou aux agences le rôle d'accréditer les prestataires de services peu importe qu'ils soient privés associatifs, privés lucratifs ou communautaires. Comment vous voyez cette délégation de responsabilités?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Je vous dirais que ce n'est pas une idée qui est méchante, au contraire, si on veut nous assurer que les soins sont bien rendus. La seule chose que je dirais, c'est — je l'ai dit lorsqu'il y a eu le projet sur la certification des résidences privées : Donner une certification, c'est une chose, mais on se leurre si on ne la suit pas, si on ne vérifie pas que les choses continuent à être bien faites. Parce que, là, à ce moment-là, on se sera leurré en pensant qu'en établissant une certification quelconque et sans les suivre, ces certifications-là, que les choses se passent bien. Or, ce n'est pas le cas. On le sait, il y a eu beaucoup de dérapages et de choses tristes qui se sont passées dans ces lieux-là, comme ailleurs, d'ailleurs, on le sait.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Je voudrais faire un peu plus de pouce, là, sur l'accréditation. D'après vous, est-ce que c'est le centre de santé et de services sociaux, donc l'autorité locale, ou l'agence de santé et services sociaux, donc le régional, comme c'est le cas pour la certification des résidences privées, qui devrait avoir cette responsabilité d'accréditation et de contrôle de qualité des prestataires?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : C'est une bonne question. Pour avoir géré la chose publique dans les villes pendant 30 ans et avoir fait une maîtrise en administration publique, j'aimerais ça le regarder plus sérieusement. Vous devriez nous confier un mandat, on va le regarder plus... Non, mais, c'est parce que c'est une question fort importante, qui m'intéresse beaucoup, mais je vais… Vous répondre à brûle-pourpoint, comme ça, ça ne serait pas vous rendre service et certainement pas faire le tour de la question comme il mériterait... Ce que je sais, par définition, c'est que, pour les soins directs, hein, pour livrer la mission directe, il faut que l'autorité soit dans les mains des gens le plus proche possible du monde. Est-ce que la certification est suivie, fait partie de ces questions-là? Je ne suis pas certain. J'aimerais ça le regarder comme il faut.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous soulevez avec beaucoup d'insistance l'importance de créer une caisse séparée pour sécuriser les sommes qui sont dédiées aux services à l'autonomie. J'aimerais vous entendre sur ce qui supporte votre opinion.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Bien, en fait, sans être un grand expert dans le domaine, nous savons que l'État a parfois eu la tentation d'aller piger dans des caisses qui étaient supposées être réservées — je pense à l'assurance automobile — alors qu'il ne devait pas le faire. Alors, j'espère... et je me fie sur vous pour que jamais l'argent qui sera accumulé dans cette caisse-là ne servira à d'autres choses qu'à soigner du monde et à assurer un service de santé adéquat et performant pour les citoyens.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Mais j'aimerais vous entendre sur la nécessité d'avoir une caisse séparée. On sait que — et la Protectrice du citoyen l'a mentionné dans ses rapports — des sommes qui sont supposées être étiquetées au soutien à domicile sont, en fait, utilisées pour d'autres missions dans les établissements. Ma crainte, s'il n'y a pas une caisse séparée, c'est qu'à supposer qu'on diminue le taux d'hébergement au Québec ces sommes-là, plutôt que d'être envoyées aux soins à domicile, soient envoyées à la mission hospitalière d'un établissement ou à d'autres vocations. Alors, comment est-ce que vous entrevoyez, là, la création d'une caisse séparée?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Bien, si elle sert... et là, encore là, je ne suis pas un expert, mais, si elle sert, cette création-là, à assurer plus d'indépendance et de séparation... Hein, rappelons-nous, une des craintes qu'on avait quand on a fusionné les différentes missions d'établissements, en 2003, je pense, on avait peur — puis je pense que ça s'est matérialisé — que les budgets d'hébergement étaient parfois confusément intégrés aux budgets d'hospitalisation à court terme et vice versa, de sorte qu'on ne s'y retrouvait plus nécessairement. Et, me dit-on, parfois, l'argent de l'hébergement a servi et sert encore à de l'hospitalisation à court terme. Et on ne veut pas ça, évidemment.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Le Vérificateur général a soulevé l'iniquité dans l'accès aux services d'une région à l'autre… d'un milieu de vie à l'autre, ça, c'est encore plus évident, mais d'une région à l'autre. Est-ce que des conditions nationales d'accès à une allocation, une allocation qui est convenue selon des critères et des normes nationales, pourraient permettre d'aplanir une certaine partie de ces iniquités?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Oui, si les ressources sont là où les gens habitent, hein? Ce n'est pas parce qu'ils auraient nécessairement ou disposeraient d'allocations que les ressources s'y trouveraient nécessairement. Je pense que c'est le défi de l'État et des gouvernements qui se succèdent. Il y a du monde qui ne reçoit pas les soins dont il a besoin, même, des fois, quand il en aurait les moyens de se les payer, dans certaines régions québécoises, vous le savez mieux que moi.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre, il vous reste 1 min 30 s.

M. Hébert : Oh là là! C'est pour ça que nous souhaitons que les prestataires puissent être variés et ne pas reposer uniquement sur la prestation publique, mais aussi la prestation des entreprises d'économie sociale, des résidences privées lucratives ou non lucratives.

Je prends bonne note de la modulation que nous souhaitons faire de l'allocation selon les revenus, avec laquelle vous êtes d'accord. Un mot sur les citoyens. Tous les citoyens devraient avoir accès… Les moins de 18 ans, dans l'assurance autonomie, là, vous pensez qu'on devrait les inclure aussi?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Bien, écoutez, l'idéal, c'est que tout le monde devienne ou soit autonome. Et vous savez qu'il y a des gens de moins de 18 ans qui ne le sont pas, qui ont besoin de manière criante de l'aide de l'État et qui ne la reçoivent pas nécessairement. C'est pour ça que j'ai pensé que, dans un monde idéal, une telle assurance devrait assurer… tout le monde deviendra autonome ou le sera le plus possible malgré et quelque soit son âge.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup. Alors, nous allons poursuivre les échanges avec le groupe formant l'opposition officielle. La parole est à la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, merci pour votre présentation. J'ai quelques petites questions toutes brèves qui font suite aux commentaires qui sont prévus à votre mémoire. Vous mentionnez, à la page 10, que «tous les citoyens majeurs contribuent à l'assurance et à la caisse autonomie, sauf les personnes démunies». Et j'aimerais savoir votre définition de «personnes démunies» parce que le seuil n'est pas nécessairement le même. Est-ce que, pour vous, il s'agit des gens qui sont prestataires de l'aide sociale? Est-ce qu'il y a un revenu auquel vous pensez lorsque vous qualifiez une personne de «personne démunie»?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Mais, en fait, je me fie aux critères, là, qui sont établis dans les différentes lois sur le sujet. Simplement, je vous dirais qu'une personne démunie, c'est une personne pauvre. Ça vous éclaire un peu plus, Mme la députée? Écoutez…

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Non, c'est important.

M. Brunet (Paul G.) : Oui, c'est très…

Mme Vallée : En fait, je vous pose une question parce que ce n'est pas… la contribution, le niveau de contribution n'est pas nécessairement prévu. Le livre blanc laisse sous-entendre qu'il y aura une contribution qui sera requise de la part des contribuables. Mais maintenant vous nous dites : Nous, on souhaite que les personnes démunies ne soient pas privées de l'assurance autonomie et ne soient pas tenues de prendre à même leur budget, déjà très réduit, une contrepartie afin de recevoir des services. Mais une personne démunie, on s'entend, ça peut être très… la définition de «démuni» est très élastique et très variable. Mais j'aimerais savoir ce que vous et votre organisme considérez comme étant une personne démunie. Ça va nous permettre, nous, un peu plus tard dans le processus, de déterminer… de voir où on en est et puis d'étudier aussi le projet de loi qui sera déposé à la lumière des observations que les groupes nous auront faites.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Ce n'est évidemment pas notre expertise, avec le peu de ressources que nous avons, d'avoir réfléchi longuement sur le sujet, documentation et littérature à l'appui. Mais je vous donnerai au moins deux indications si elles peuvent servir. Quand quelqu'un est obligé de choisir entre manger, se loger ou se faire soigner, je pense que la personne est pauvre et est démunie.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

• (15 h 30) •

Mme Vallée : Je comprends le tout, mais évidemment tout dépend aussi de la contribution qui sera demandée. Parce que, là, on ne sait pas. Est-ce qu'on aura un montant fixe, je ne le sais pas, de demandé nonobstant le revenu? Par exemple, est-ce que ça serait un montant un peu comme on a fait… Parce que certains groupes, là, sont venus nous dire qu'on devrait peut-être appliquer, pour l'assurance autonomie, le principe qui a été appliqué, par exemple, pour les services de garde, c'est-à-dire un montant fixe nonobstant le revenu des gens. Bon. Est-ce que c'est ce qui est prévu actuellement par le gouvernement? Je n'en ai aucune idée parce que le livre blanc ne nous explique pas le type de contribution qui sera requise.

On nous parle du revenu puis on nous parle d'intensité de services. Puis là-dessus, je comprends que vous avez aussi des observations à faire, sur la question de l'intensité des services, mais, pour moi, il est important de déterminer qu'est-ce qu'était pour vous une personne démunie. Est-ce que c'est quelqu'un qui a, tout simplement, sa pension, par exemple sa pension de vieillesse ou son chèque d'aide sociale, et qui ne reçoit aucun supplément? Est-ce que c'est quelqu'un qui travaille au salaire minimum?

Parce qu'il y aura des gens visés par l'assurance autonomie. Je pense, entre autres, aux personnes à mobilité réduite, aux personnes atteintes d'une déficience intellectuelle qui sont sur le marché du travail, mais qui n'ont pas des gros revenus, qui travaillent avec un revenu... le salaire minimum ou de petits revenus. Donc, dans cette clientèle-là, ce n'est pas mauvais d'avoir une idée de ce qu'on considère comme étant démuni, parce que quelqu'un à... le revenu peut... Il peut y avoir des tranches qui vont faire toute la différence entre la qualification de démuni ou pas.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Moi, Mme la députée, le projet qui est devant nous, c'est pour améliorer l'accès aux soins pour les gens qui sont visés. Si, par toutes sortes de considérations, on exclurait des gens, c'est sûr que vous n'aurez pas notre appui. On pense que le monde qui en a besoin, à plus forte raison et souvent dans des circonstances de pauvreté, devrait y avoir accès comme les autres. Alors, où devons-nous mettre la barre? Je me fie à vos experts pour le faire et à toute la sagesse du gouvernement. Mais nous ne sommes pas experts dans le domaine. Nous savons simplement et nous espérons que ce projet-là permettra à plus de gens d'avoir accès à des services et à des soins pour rester dignes le plus longtemps possible et avoir le goût de vivre. On en a parlé récemment, hein, dans un autre projet de loi.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Oui. Bien, effectivement, vous faites un clin d'oeil au projet de loi n° 52. C'est certain que c'est un projet de loi qui est important. C'est certain aussi que l'objectif, c'est d'assurer des services de qualité à tout le monde le plus… le mieux possible, les meilleurs services de la meilleure façon possible. J'aimerais vous entendre un petit peu davantage justement sur la considération de... la base, la consommation des soins ou des services. Est-ce que vous avez d'autres observations à formuler que celles qui sont prévues à votre mémoire?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Bien, en fait, c'est l'évaluation des besoins sur laquelle reposerait ou devrait reposer et repose déjà en bonne partie l'attribution des heures-soins des personnes, qu'elles soient admises, hospitalisées ou à domicile, par les services qui existent déjà. Ça serait intéressant... Et je comprends que le livre blanc va aller dans ce sens-là, où on évaluera les besoins des gens. Et c'est sur cette base-là que la consommation devrait être autorisée, il me semble, comme on le fait déjà... pas assez, parce qu'on a quelques problèmes puis il y a un certain «backlog» sur l'évaluation de certaines personnes, à telle enseigne qu'on est obligés de déplacer du monde trois, quatre fois dans le réseau, particulièrement pour admettre quelqu'un en CHSLD. Ça aussi, c'est un problème. Et j'espère qu'avec les sous supplémentaires on va agir mieux sur cette question-là et sur les autres qui permettront aux gens d'avoir accès à des soins convenables et dignes.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Est-ce que vous vous êtes penchés sur le panier de services, c'est-à-dire quels seraient les soins et les services qui devraient minimalement être offerts?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Bien, en fait, moi, je me rabats tout le temps sur cette disposition de la loi — je pense que c'est l'article 1, hein : Permettre au monde de recouvrer la santé et de la maintenir. Ça, c'est la base. Si on ne fait pas ça ou on ne travaille pas à cet objectif simple puis qu'on se met à le compliquer, c'est sûr qu'à plusieurs moments on a passé à côté. Mais, si tout ce qu'on fait, tout ce que vous faites, tout l'argent qu'on dépense servait à permettre aux gens de recouvrer la santé, la maintenir, parfois... — c'est relatif, là, dépendant de notre condition — et que cela se fasse avec la recherche constante de quelque chose qui est humain et digne, je pense qu'on aurait le meilleur système au monde. On n'est pas loin, il y a encore des choses à corriger, je pense.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Je comprends votre intervention, mais, quand même, il y a des choix. Idéalement, dans le meilleur des mondes, on pourrait offrir tous les services, mais il y a quand même des choix qui sont devant nous. Par exemple, on a eu plusieurs organismes qui sont venus plaider leur cause, disant : Bien, vous devez… nos services doivent absolument faire l'objet d'une couverture par le nouveau principe d'assurance autonomie, que ce soient, par exemple, les services de préparation de repas, que ce soient les services de loisirs, que ce soient… Alors, c'est quand même une très vaste... On a devant nous des suggestions très, très intéressantes qui permettent d'améliorer la vie au quotidien des gens qui choisissent de demeurer à la maison malgré les limitations. Et je me demandais si vous aviez réfléchi sur cette question, à savoir : Qu'est-ce qui devrait minimalement être assuré par l'État? Qu'est-ce qui constitue une base? Qu'est-ce qui constitue un petit plus qui pourra peut-être s'ajouter suivant les disponibilités?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : J'ai le goût de vous référer aux discussions qu'on a eues quand on a réglé hors cours récemment avec près d'une centaine de centres d'hébergement sur la question des frais de buanderie, où, pour la première fois, grâce à vous et à nous, on a fait adopter, au Québec, une politique pour laver le linge en centre d'hébergement. Et je reviens à votre question. C'est quoi, laver du linge? Alors, j'ai répondu aux avocats : C'est comme chez vous. Qu'est-ce que vous avez besoin, chez vous, pour vivre de manière élémentaire et digne, avec des services de base? Faire laver le linge quand on n'est pas capable de le faire, faire de la nourriture qui est bonne. C'est la même affaire. N'embauchez pas trop de spécialistes là-dessus, on va s'y perdre.

Qu'est-ce que ça prend pour que, chez vous, moi, chez moi, chez vous, on puisse vivre sainement, dignement, respectueusement évidemment des conditions dans lesquelles on se trouve? Avec de l'aide. Je vous le jure, si vous faites cette démarche-là comme on l'a faite pour les frais de buanderie… On est arrivés avec une belle politique, d'ailleurs, que l'État, le gouvernement applique maintenant aux centres d'hébergement. Imaginez-vous, comment laver du linge! Généralement, c'est comme chez vous. C'est la même affaire dont les gens ont besoin, dépendant de l'âge et du handicap dans lequel ils sont pris, la même affaire. N'embauchez pas trop de spécialistes, parce que, des fois, ça va résulter en des choses un peu énormes.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Ma collègue a parlé beaucoup du panier de services, contribution… On élabore un projet où on est tous d'accord avec les principes : garder les gens à domicile, avoir la bonne personne au bon endroit, la qualité également. Où on a une différence, c'est : les besoins étant tellement grands, l'argent est limité. Parce que, même si on voulait mettre, mettons, 500 millions cette année, je pense que les disponibilités budgétaires n'y sont pas.

Quel est le risque, advenant le cas qu'on ne fasse pas la réorganisation, ou, même si on fait la réorganisation, et on se rend compte qu'il manque beaucoup d'argent dans le système, mais on a fait la promesse aux gens qu'ils auraient un certain niveau de besoins remplis, et là on va être obligés de leur donner juste un pourcentage de ça? Quel est le risque qui pourrait arriver dans un projet comme celui-là qu'on veut mettre en place très rapidement?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet, pour une courte réponse en maximum une minute.

M. Brunet (Paul G.) : Oui. M. Castonguay, dans son rapport, dit que, si on faisait mieux les choses dans le réseau, on sauverait 15 %. 15 % de 30 milliards, là, on peut en avoir des soins puis des services de plus. C'est là le défi, je pense. Si on n'a pas le courage de faire ce réexamen-là et, Dieu sait, ça fait un bout de temps… Je le sais que vous autres aussi vous le savez que ça le prend, mais, bon, pour d'autres raisons que moi, je n'ai pas à prévoir, vous ne pouvez pas le faire, mais je pense qu'il faut ce réexamen-là, il faut qu'il soit fait. Et ça presse parce que, si vous rajoutez des sous, puis vous redemandez un effort aux gens, puis que vous n'avez pas fait vos devoirs à la base, à savoir est-ce qu'on en a pour notre argent — c'était le titre du rapport Ménard — bien, on n'avancera pas puis on va continuer à dépenser des sous pour rien, il me semble. C'est ce que l'AQESSS nous dit, en tout cas, sans le dire.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci, M. Brunet. Alors, nous allons poursuivre les échanges avec le deuxième groupe d'opposition. Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Bonjour, bonjour, bienvenue. Vous êtes un habitué. Ma question, c'est... Votre avant-dernière conclusion, à la page 10, je ne la comprends pas, là : «La contribution se fait sur la base des revenus dont dispose chaque famille...» Ça, ça veut dire qu'on évalue en fonction des revenus. Bon. Pour le reste, on en saura peut-être un peu plus demain, à l'interpellation. Peut-être que vous pourriez nous amener les chiffres, M. le ministre. Par contre : «...mais jamais sur la base de la consommation de ces soins ou de ces services.»

Est-ce que vous dites que quelqu'un qui a peu de services doit payer la même chose que quelqu'un qui a beaucoup de services? Ce que je veux dire, c'est : La contribution aux soins à domicile, admettons, pour quelqu'un qui aurait besoin de ménage deux heures par semaine, par contre une autre personne qui aurait besoin de plusieurs autres services en plus, on ne paierait pas plus?

• (15 h 40) •

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

M. Brunet (Paul G.) : Il faut distinguer. On veut que le monde qui est capable de payer paie la contribution. Après ça, on va aller évaluer les besoins des gens comme on le fait des fois présentement… pas des fois, mais généralement, espérons-le, dans toute la structure puis la mécanique d'évaluation des besoins. Il ne faut pas qu'il y ait de lien entre ce que vous payez puis ce dont vous avez besoin, c'est ça notre point de vue. Les gens contribuent, puis après ça on évalue vos besoins. Si vos besoins sont plus grands que ce que vous contribuez, ce n'est pas grave.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : J'avais compris ce qui était écrit. Il n'y a pas d'adéquation entre les services offerts et la contribution. C'est ça? O.K. Maintenant, vous dites : «Tous les citoyens majeurs contribuent à l'assurance et à la caisse autonomie, sauf les personnes démunies.» Quand on sait qu'une famille de deux adultes, deux enfants qui gagne à peu près 60 000 $, il leur reste, comme marge de manoeuvre, par jour, 2,70 $. Ça fait beaucoup de monde, ça, qui n'ont pas les moyens de payer le système, vous savez.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Brunet.

Mme Roy (Arthabaska) : Puis vous dites...

M. Brunet (Paul G.) : Bien, c'est pour ça que vous êtes là.

Mme Roy (Arthabaska) : Oui. Oui.

M. Brunet (Paul G.) : C'est le défi de l'État de dépenser l'argent comme il faut puis de trouver les ressources qu'il faut, équitablement, en nous assurant qu'on continue à mutualiser les coûts puis à partager les coûts pour que le monde puisse vivre décemment au Québec avec les soins requis. Mais, encore une fois, je m'excuse, on n'a pas cette expertise-là pour vous dire c'est quoi, le revenu où les gens devraient payer ou ne pas payer. Alors, nous, on n'a pas ces ressources-là, on se fie à l'État pour l'identifier, avec la sagesse qu'il a.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska, pour moins d'une minute.

Mme Roy (Arthabaska) : Non, ça répond à l'ensemble de nos questions. Vous avez été assez clair, puis votre propos a le mérite d'être simple et clair, donc moi, je n'ai pas d'autres questions.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup. Alors, je vais suspendre les travaux quelques instants. Et j'invite le prochain groupe à prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 43)

(Reprise à 15 h 44)

La Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les fins d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec (OIIQ)

Mme Tremblay (Lucie) : Mme la Présidente, M. le ministre, membres de la commission, on est heureux d'être avec vous aujourd'hui pour vous parler de notre conception de l'assurance autonomie. Avec moi aujourd'hui, ma collègue Ginette Bernier, qui est vice-présidente de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, et Pauline Plourde, qui est directrice-conseil à l'ordre. Je suis Lucie Tremblay, la présidente-directrice générale de l'ordre.

Alors, d'entrée de jeu, l'ordre appuie le livre blanc dans son objectif d'augmentation à l'accès aux soins et le libre choix de la personne quant à son milieu de vie. Aujourd'hui, nous allons vous présenter ce qu'on juge comme des opportunités et des défis, par exemple, aussi, du livre blanc sur l'assurance autonomie sous l'angle de la protection du public, bien sûr, et des rôles infirmiers.

Les soins à domicile reliés à la perte d'autonomie sont un enjeu crucial du système de santé, ils concernent des personnes qui sont très vulnérables et dont la perte d'autonomie est reliée à des problèmes complexes et évolutifs de santé physique et de santé mentale. On le sait, l'espérance de vie ayant augmenté, de nouvelles situations cliniques émergent et touchent plein de clientèles variées. Plusieurs personnes souhaitent pouvoir faire le choix du lieu où elles recevront des soins, et ceci nécessite une prise en charge à domicile et une aide accrue de la dyade aidé-aidant. Ces complexités cliniques impliquent la mise en place d'un panier de services variés et harmonisés et les services de professionnels compétents pour répondre aux besoins de la personne en perte d'autonomie.

L'offre de services de l'assurance autonomie devra être précise et harmonisée pour envisager une organisation efficace du soutien à domicile, et ce, partout au Québec. En appui à l'assurance autonomie, l'infirmière est vraiment une ressource clé pour évaluer, effectuer la gestion de cas dont la condition physique et mentale est la cause principale de la perte d'autonomie.

Les enjeux que l'ordre présente ici concernent particulièrement l'imputabilité du réseau public à l'égard du panier complet de services qui sera rendu disponible. Aujourd'hui, on va vous parler de la responsabilité de ce réseau public, l'évaluation des besoins, la gestion de cas, la contribution des aides-soignants, les besoins en technologie et la nécessité d'intégrer cette dyade aidé et proche aidant, bien sûr.

Alors, en ce qui a trait à l'assurance autonomie, les CSSS sont confrontés à des défis majeurs quant à l'offre de services, la coordination, la gestion des risques et l'assurance qualité. Ils auront besoin de moyens pour oeuvrer dans un environnement marqué par l'arrivée de nombreux et de nouveaux fournisseurs de services. Le domicile étant un lieu isolé où les intervenants agissent seuls, sans supervision et ayant peu recours sur place pour consulter des collègues, les CSSS devront assurer la sécurité et la qualité des services rendus et demeurer imputables de cette gamme de services. Pour ce faire, ils assureront eux-mêmes les services professionnels et encadreront, grâce à des ententes contractuelles, les services donnés par d'autres fournisseurs.

Alors, l'assurance autonomie implique que les services professionnels demeurent sous la responsabilité directe du réseau public selon les divers lois et règlements. À ce moment-ci, l'ordre recommande que les pratiques cliniques, l'encadrement et les normes relatives à la sécurité et à la qualité demeurent une responsabilité du réseau public de santé selon les mandats qui lui sont confiés par la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

En ce qui a trait à l'admissibilité à l'assurance autonomie, celle-ci fera l'objet d'une évaluation des besoins basée sur les activités de la vie courante qui se fait actuellement avec l'Outil d'évaluation multiclientèle pour les usagers des services à domicile. Cet outil intègre le système de mesure de l'autonomie fonctionnelle, alors l'outil d'évaluation multiclientèle mesure le niveau d'autonomie, mais il ne permet pas nécessairement une évaluation complète de la condition de santé des personnes et les impacts de cette condition de santé là au niveau de leur autonomie. Il ne permet pas non plus d'évaluer le niveau de soins de la personne ni l'ampleur des besoins psychosociaux. Les besoins de la dyade aidant-aidé ne sont pas évalués non plus par l'Outil d'évaluation multiclientèle. Alors, une évaluation incomplète peut impliquer que l'usager et ses proches aidants ne soient pas... ne reçoivent pas les soins qui sont appropriés pour cette situation-là.

Les intervenants à domicile ont besoin d'un outil qui inclut toutes les dimensions afin de cerner la situation globale et déployer un plan de services qui soit pertinent. Puisqu'elle est la seule professionnelle avec le médecin à y être autorisée par la loi, l'infirmière joue un rôle vraiment central quant à l'évaluation de la condition de santé physique et mentale de la personne. Elle doit donc évidemment être impliquée lors de cette évaluation. L'ordre recommande donc la bonification de l'Outil d'évaluation multiclientèle ou l'utilisation systématique d'un outil complémentaire standardisé afin de permettre l'évaluation complète de la condition physique et mentale de la personne en perte d'autonomie.

Troisième élément, la gestion de cas est un élément majeur de l'organisation de l'offre de services, de la coordination et de la contribution des professionnels en soins à domicile. Le gestionnaire de cas est un professionnel employé par le CSSS intervenant auprès des personnes en perte d'autonomie. Il est le référant unique pour la coordination des soins et services à la personne et à ses proches aidants. Il est responsable de l'évaluation et de la planification des services via le plan de services individualisés, la dispensation et la coordination de l'ensemble des mesures prévues avec l'équipe interdisciplinaire. Il peut provenir de disciplines professionnelles différentes évidemment et ne devrait pas agir seulement comme un courtier de services. Il devrait être en mesure d'offrir des services propres à sa propre discipline en collaboration interprofessionnelle.

• (15 h 50) •

La gestion de cas devrait être confiée à l'intervenant ayant les compétences qui sont reliées à la problématique dominante de la personne qui est en perte d'autonomie. La personne qui présente une condition de santé qui génère des enjeux cliniques, des problèmes de santé physique, des troubles cognitifs, des problèmes avec les médicaments, des traitements invasifs devrait nécessairement être assignée à une infirmière pour la gestion de cas. Alors, à ce moment-ci, l'ordre recommande que l'infirmière soit la gestionnaire de cas pour les personnes qui ont des besoins de cette nature-là.

L'infirmière en soutien à domicile a besoin de connaissances approfondies et d'un jugement clinique certain, une capacité d'adaptation et une aptitude à travailler en partenariat avec l'usager et ses proches aidants. La diversité d'intervenants en soins à domicile implique aussi que les infirmières exercent davantage leurs habiletés de coordination et de soins et de suivi des patients, notamment en encadrant les soins effectués par les proches aidants.

À cet effet, les changements du Code des professions ont permis aux proches aidants d'offrir une prestation de soins, notamment en ce qui concerne les activités de la vie quotidienne. Or, les activités de la vie quotidienne ne se limitent pas seulement aux soins d'hygiène ou à l'aide à la mobilité, mais elles impliquent souvent des soins invasifs puis l'administration de médicaments. Nous, à l'ordre, on est particulièrement préoccupés par ces soins invasifs et l'administration des médicaments qui sont confiés à des aides-soignants dans un contexte de soins à domicile. Alors, l'ordre suggère que les soins invasifs relatifs aux AVQ et à l'administration des médicaments devraient être confiés uniquement aux employés du CSSS selon une règle de soins émise par la directrice des soins infirmiers de ce CSSS. Cette règle de soins balise le plan d'intervention et les rôles des intervenants impliqués.

D'ailleurs, dans le même ordre d'idées, le livre blanc précise que les services requis par les personnes en perte d'autonomie présentant des besoins plus complexes devraient être dispensés exclusivement par les CSSS. L'ordre considère que les soins invasifs sont des soins complexes et recommande que le rôle des entreprises d'économie sociale quant aux AVQ soit limité aux personnes qui ne requièrent pas de soins invasifs ou d'administration de médicaments.

L'accès aux services médicaux est souvent difficile en soins à domicile, et l'infirmière praticienne en soins de première ligne pourrait être vraiment mise à contribution. Son champ d'exercice, en collaboration avec le médecin, lui permet vraiment d'assurer le suivi des personnes en perte d'autonomie. Nous recommandons de rendre disponibles pour les soins à domicile des équipes tandem médecin-infirmière praticienne spécialisée en première ligne pour soutenir une réponse efficiente à la hausse potentielle des demandes de soins médicaux à domicile.

Quatrième point, la capacité de répondre à la demande de soins suscités par l'assurance autonomie dépendra de l'organisation de l'offre de soins, qui placera vraiment les technologies et les télésoins au centre du processus de soins et d'organisation du travail. Les télésoins soutiendront l'analyse, le traitement de l'information et les soins dans un contexte interdisciplinaire et intersectoriel. La coordination des soins et services des personnes en perte d'autonomie nécessite la mise en place de processus fluides et efficaces. Ces processus peuvent difficilement être actualisés et performants sans des systèmes informatiques intégrés et interopérables. Conséquemment, les mécanismes reliés à l'assurance autonomie risquent d'être lourds et ne pas atteindre les objectifs prévus par la réforme en termes d'accessibilité et d'utilisation pertinente de toutes les ressources disponibles si ces technologies de l'information et de télésoins ne sont pas au rendez-vous.

En ce qui a trait aux proches aidants, ils constituent sans aucun doute la plus grande source d'aide aux personnes en perte d'autonomie. De nombreux aînés sont eux-mêmes des proches aidants auprès de leur famille puis ils sont souvent confrontés soit à être eux-mêmes âgés ou à être pris un peu en sandwich, où est-ce qu'ils s'occupent de leurs parents âgés et de leur propre famille. Alors, sans des services qui répondent spécifiquement aux besoins des proches…

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay, en conclusion.

Mme Tremblay (Lucie) : ... — oui, j'achève — le soutien à domicile est difficile. Il faudra donc considérer et prévoir des services assurés aux proches aidants.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci.

Mme Tremblay (Lucie) : Je terminerai juste en vous disant que, si on veut qu'il y ait un libre choix, il est essentiel aussi qu'il y ait d'autres services qui soient disponibles, oui, pour que la personne vive à domicile, mais, si elle souhaite faire un choix qui est différent, qu'elle puisse le faire et que ces services-là demeurent disponibles.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons débuter la période d'échange avec le groupe formant le gouvernement.

M. Hébert : ...appelés au vote.

La Présidente (Mme Proulx) : Alors, la commission va suspendre ses travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 55)

(Reprise à 16 h 20)

La Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. La parole est à M. le ministre.

M. Hébert : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, Mme Tremblay, Mmes Bernier, Plourde. Merci de votre mémoire et de vos suggestions et commentaires sur le projet d'assurance autonomie.

Avec ce projet, avec l'assurance autonomie, on retrouve une gestion publique des services de soutien à l'autonomie avec un plein contrôle de la prestation de services, et nous prévoyons donc accréditer les différents prestataires de services pour s'assurer de la qualité. Je pense que c'est une préoccupation que vous avez et que vous appuyez dans votre mémoire.

Quel devrait être l'établissement qui soit responsable de cette accréditation-là? Le centre de santé et services sociaux ou l'agence de la santé et des services sociaux? On sait que, pour les résidences privées, dans le processus de certification, c'est l'agence qui en est responsable. Est-ce que vous avez une opinion sur l'instance qui devrait être responsable et imputable de cette accréditation des prestataires?

Mme Tremblay (Lucie) : En fait…

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay, allez-y.

Mme Tremblay (Lucie) : Je ne me corrige pas, je m'en excuse. En fait, je pense que c'est un sujet qui devrait faire place à la réflexion parce qu'il y a des avantages et des inconvénients aux deux. Premièrement, si c'est au niveau local que cette évaluation-là se fait, bien sûr on est près de la communauté, on connaît bien ce qui se passe, mais, du même coup, c'est plus difficile de garder une distance. Par contre, au niveau des agences, il y a parfois un décalage avec cette réalité terrain là. Alors, est-ce que j'ai une réponse claire? Non, mais je pense que c'est nécessaire que ce soit porté à une autre réflexion.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : L'assurance autonomie réaffirme une gestion publique du réseau mais inclut un certain nombre de partenaires prestataires qui peuvent être publics mais aussi privés, associatifs, ou lucratifs, ou même communautaires. Vous êtes, si je comprends bien, en accord avec cette variété de prestataires, la seule réserve que vous avez se situe au niveau des soins invasifs et des médicaments, où, là, vous dites : Il faut que ce soit un prestataire public. Même si ce prestataire est accrédité et que la formation est normée, vous souhaitez quand même que ce soit, pour les soins invasifs et la distribution de médicaments, une organisation publique.

Mme Tremblay (Lucie) : Tout à fait.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Tout à fait.

M. Hébert : J'aimerais que vous expliquiez la raison.

Mme Tremblay (Lucie) : Oui. Vous comprendrez que les soins invasifs, ça comporte un haut risque, ça comporte aussi une notion de soins qui est immensément intime, et la personne qui est à domicile est seule avec le client. Quand l'intervenant fait partie de l'équipe du CSSS, il est encadré, il est supporté par une équipe de soignants. Peut-être que vous pourriez donner la parole à ma collègue, Mme Plourde, qui travaillait jusqu'à tout récemment dans les milieux et qui peut nous éclairer d'exemples plus précis.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Plourde.

M. Hébert : ...

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre?

M. Hébert : ...de donner votre réponse, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, nous dire qu'est-ce que c'est, les soins invasifs.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Bien, en fait, je vais... si vous voulez, Mme Plourde va répondre à celle-là aussi.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Plourde.

Mme Plourde (Pauline) : Alors, les soins invasifs, les derniers règlements qui ont été faits dans le cadre de la loi n° 90 impliquaient qu'on pouvait confier à des aides-soignants, des gens qui n'avaient pas de formation professionnelle, certains soins invasifs, donc des soins qui impliquent... Par exemple, une sonde vésicale, c'est un soin invasif; l'administration de certains médicaments par des voies x, ça peut être aussi des soins invasifs; les soins d'une trachéotomie avec des… des soins complexes qui impliquent qu'on a un impact sur la sécurité des personnes. Alors, c'est inclus dans un grand titre : les activités de la vie quotidienne nécessaires au maintien de la santé de la personne, mais qui nécessitent aussi de la complexité, qui impliquent de la complexité de soins. Donc, quelqu'un qui n'a pas de formation, quelqu'un qui ne connaît pas les impacts aussi de ces actes, c'est plus difficile, et on met en péril la sécurité des personnes.

Donc, AVQ au niveau du bain, de certains soins, etc., ça, c'est une chose, puis je pense que c'est bien décrit dans le mémoire. Mais des AVQ, des soins invasifs et l'administration de médicaments chez des gens qui ont des problèmes complexes comme ça… Nous, on considère que ce qui est décrit dans le livre blanc par rapport à la complexité des soins… ces gens-là, ce sont des gens qui ont des problèmes complexes et qui doivent être encadrés dans un secteur professionnel qui soutient des aides-soignants mais qui sont les employés du réseau.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : La distribution simple de médicaments via des systèmes alvéolaires ou de distribution de médicaments, est-ce que c'est inclus dans ce que vous souhaitez ne pas déléguer à des prestataires autres que des prestataires publics?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Plourde.

Mme Plourde (Pauline) : Bien, la distribution de médicaments implique que la personne qui donne le médicament n'a pas à porter un jugement sur ce qu'elle fait. La personne qui reçoit le médicament a toute sa tête pour être capable de dire : Ça, c'est le bon médicament, puis ça, ce n'est pas le bon. Administrer, c'est autre chose. Alors, c'est pour ça qu'on faisait la nuance, dans le mémoire, entre la distribution de médicaments, qui est non réglementée, et la notion aussi d'administration, qui est réglementée.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Merci, ça amène une précision importante. On a dit dans le mémoire que les soins professionnels, incluant les soins infirmiers, étaient sous la responsabilité des établissements publics. Vous savez qu'il y a des infirmières qui oeuvrent au niveau de certaines résidences privées pour aînés, que ce soient des résidences privées lucratives, ou des offices municipaux d'habitation, ou des OSBL. Est-ce que cette pratique devrait continuer, à votre avis, devrait être encadrée ou devrait être prohibée?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, nous, on pense que c'est important qu'il y ait vraiment une coordination des soins et que cette coordination des soins là se fasse au niveau du CSSS.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Je ne suis pas sûr de comprendre votre réponse.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Oh, excusez! En fait, le fait qu'il y ait des poches d'infirmières ici et là et que ce ne soit pas coordonné avec l'équipe interdisciplinaire du CSSS, ça peut faire en sorte que l'épisode de soins soit fragmenté. Nous, ce qu'on recommande, c'est que les soins infirmiers soient centralisés, toute l'évaluation des besoins de la clientèle soit centralisée au CSSS.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Et je comprends de votre réponse que, s'il y avait une coordination et surtout une vérification de la qualité, ce serait une pratique acceptable pour vous. Est-ce que j'abuse?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Reformulez ça, je ne suis pas sûre de comprendre votre question.

M. Hébert : O.K. Une infirmière qui pratique en résidence privée pour aînés, est-ce qu'on devrait poursuivre dans cette voie-là ou pas? Je vais poser votre question très clairement.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Je ne pense pas. Je pense que ça devrait être centralisé au niveau du CSSS.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous nous parlez de la gestion de cas. Est-ce que la formation des infirmières est appropriée pour agir comme gestionnaire de cas ou intervenant pivot?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Les infirmières qui sont formées au niveau universitaire reçoivent une formation en santé communautaire. Les infirmières qui pratiquent actuellement et qui ont développé cette expertise-là sont habilitées à le faire.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : En formation initiale.

Mme Tremblay (Lucie) : Les nouvelles infirmières qui sortent de l'université, oui. Les infirmières qui sont sur le terrain sont toutes compétentes pour pouvoir faire cette coordination-là de l'épisode de soins.

M. Hébert : Vous soulevez avec beaucoup de justesse que le gestionnaire de cas peut aussi intervenir dans son champ de compétence, n'est pas seulement là pour faire l'évaluation, la coordination des services mais aussi faire une intervention, et je suis tout à fait d'accord avec vous.

Vous nous parlez de l'Outil d'évaluation multiclientèle qui mériterait d'être bonifié avec des outils standardisés, en fait, qu'il y ait une boîte à outils, à toutes fins pratiques. Déjà, l'évaluation des proches aidants a fait l'objet d'un certain nombre de recommandations par des groupes qui vous ont précédées, la participation sociale également. Est-ce qu'il y a d'autres segments ou objets d'évaluation qui devraient attirer notre attention particulièrement pour bonifier l'Outil d'évaluation multiclientèle?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, comme on le dit dans le mémoire, c'est important d'être en mesure d'évaluer l'état de santé de ces personnes-là, et, en ce moment, bon, ce n'est pas possible de le faire avec l'Outil d'évaluation multiclientèle. Donc, un outil qui va permettre d'apprécier les besoins de soins de ces malades-là parce que, bien sûr, l'Outil d'évaluation multiclientèle mesure le niveau d'autonomie, mais souvent il y a des besoins de soins. Et, si Mme la Présidente veut donner la parole à une… par exemple, ma collègue de droite, pour donner des exemples plus concrets…

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Bernier.

• (16 h 30) •

Mme Bernier (Ginette) : Je regarderais par rapport au niveau d'évaluation pour le client, l'Outil d'évaluation multiclientèle au niveau de l'ISO-SMAF va nous donner l'évaluation par rapport à la perte d'autonomie fonctionnelle. Et tout ce qui est de l'évaluation par rapport au niveau de surveillance, la cotation par rapport au niveau de surveillance pour un client qui a des problèmes cognitifs, bien, c'est plus difficile de le retrouver là, ou des problèmes cliniques avec l'exigence de soins requis, de doser l'exigence de soins requis pour faire vraiment l'évaluation globale, c'est là qu'on aurait des ajouts à faire. Si on veut avoir vraiment un portrait complet, si on veut bien évaluer l'ensemble des besoins que notre client va avoir besoin, donc, à ce moment-là, il faut vraiment qu'on ait cette portion-là aussi, autant le niveau de perte d'autonomie, autant le niveau de surveillance exigé, autant le niveau de réponse à des besoins cliniques. Et là on aurait comme un portrait global.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre, en conclusion. Il vous reste à peine quelques secondes.

M. Hébert : Vous voyez d'un bon oeil la constitution d'une enveloppe financière protégée. J'aurais voulu vous demander quelle est votre appréciation que ce soit la Régie de l'assurance maladie qui soit le gestionnaire de cette enveloppe-là. Je ne sais pas si elles peuvent répondre en…

La Présidente (Mme Proulx) : Rapidement.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, on souhaite effectivement qu'il y ait une enveloppe protégée parce que, comme le disait M. Brunet juste avant nous, il y a un danger, quand ce n'est pas protégé, que ça s'en aille à d'autres endroits. Et on pense que les personnes qui sont vulnérables, en perte d'autonomie, qui veulent rester à domicile, qui veulent faire un choix de leur milieu de vie doivent pouvoir avoir accès à un budget qui va venir du niveau gouvernemental. De quelle enveloppe exactement? On va vous laisser faire les choix par rapport à ça.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup, Mme Tremblay. Alors, nous allons poursuivre les échanges avec le groupe formant l'opposition officielle. La parole est à la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Merci aussi pour un mémoire qui est très clair. Et j'aurais quelques petites questions, puis on va essayer de se partager le temps rapidement, mon collègue et moi.

Tout à l'heure, vous avez eu des échanges avec le ministre quant aux recommandations… entre autres, votre recommandation n° 13, concernant le rôle des entreprises d'économie sociale. Puis je veux juste m'assurer de bien saisir. Si je comprends bien, ce que vous souhaitez, c'est que toute personne qui sera appelée à donner un soin ait reçu une formation adéquate. Mais, pour ce qui est des préparations de repas, ménage, et trucs comme ça, ça, ce n'est pas… vous n'en êtes pas… vous ne demandez pas cette formation-là pour quelqu'un qui poserait ces gestes-là. Est-ce que je comprends bien?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Vous comprenez très bien. Donc, pour tous les soins invasifs et ce qui a trait à la médication, on souhaite que ce soient des employés de l'État, qu'ils soient bien formés, bien sûr, mais qu'ils soient aussi supportés par leurs collègues et qu'ils soient encadrés par des règles de soins. Pour ce qui est des autres activités, bien, écoutez, ça ne prend pas nécessairement toujours une formation pour pouvoir donner ce type de services là.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Est-ce qu'une infirmière à la retraite qui choisit de donner quelques heures par semaine dans une entreprise d'économie sociale, dans un OSBL, serait habilitée, à votre avis ou selon vos représentations, à pouvoir donner des soins à domicile chez un bénéficiaire?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Il n'y en aura pas, de réponse simple sur celle-là, je suis vraiment désolée. La coordination des soins à domicile, c'est complexe. Et, par exemple, si on fait affaire avec une entreprise d'économie sociale, puis, quelques jours, c'est une infirmière et, quelques jours, ce n'est pas une infirmière, c'est à ce moment-là que ça devient vraiment chaotique. Et nos expériences cliniques nous démontrent que les infirmières peuvent passer beaucoup de temps à former des aides-soignants, dans les milieux de soins actuellement, et il y a un taux de roulement de ces aides-soignants-là qui devient complètement étourdissant. Et, quand les infirmières passent leur temps à former, reformer, aller encadrer, corriger le tir, bien, pendant ce temps-là, elles ne font pas ce qu'elles font de mieux : aller évaluer les besoins de santé de la population, déterminer les soins dont ils ont besoin et, dans bien des cas, administrer ces soins-là. Donc, il y a une perte d'énergie très importante quand ces aides-soignants-là ne font pas partie du réseau et qu'on doit constamment les former. Mme la Présidente, je ne sais pas si ma collègue Mme Bernier voudrait ajouter quelque chose à ça.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Bernier.

Mme Bernier (Ginette) : Un lien qui est important, c'est, quand on a des soins particuliers à donner comme ça, la communication entre les équipes de travail par rapport aux infirmières. Mettons, par rapport à nos auxiliaires, quand il survient une problématique pour une auxiliaire familiale qui va donner un service, un soin, bien, quand elle revient à l'établissement, souvent elle va côtoyer sa collègue de travail, elle va pouvoir rapidement échanger : Il est en train de se passer telle chose. L'infirmière, rapidement, ou autre intervenant, dépendamment le cas, va être capable de réajuster les services à donner ou de dire : Bien, regarde, demain matin, je vais aller voir, je vais aller voir ce qui de passe, il semble se passer quelque chose de particulier. Alors que, si ce soin, mettons, invasif là est donné par quelqu'un de l'entreprise d'économie sociale, bien je ne suis pas sûre que je vais avoir le retour au bon moment pour réajuster le service qui va être donné. Donc, c'est là notre inquiétude, pour vraiment éviter que ce client-là, parce qu'on n'a pas eu la bonne information, bien prenne le téléphone ou il se dirige à l'urgence. Ce n'est pas là qu'on veut le voir, on veut le voir chez lui, en pleine possession de ses moyens, avec tous les conseils puis tout ce qu'il peut faire pour éviter, justement, d'aller solliciter d'autres services alors qu'il peut avoir chez lui ce qu'il a besoin.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Mais je comprends le but de votre intervention. Par contre, je me dis, dans le contexte actuel, où on a certaines régions qui ont des pénuries quand même assez importantes de personnel infirmier, où cette assurance autonomie là est mise en place pour tout le monde peu importe leur lieu de résidence géographique, comment on peut s'assurer qu'il y aura suffisamment de professionnels partout en région pour assurer les soins qui devront être offerts et les services qui vont être offerts à compter de mars 2014, si on suit le projet du ministre?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Bernier.

Mme Bernier (Ginette) : Oui. Je vous dirais qu'à partir du moment qu'on assure la coordination — puis là on parle de services cliniques ou de services qui vont être aussi joints avec nos auxiliaires familiales — à partir du moment que nos infirmières font la coordination, c'est certain qu'ils vont devoir... Ils priorisent en fonction de la clientèle, du bassin de clientèles qu'ils ont à desservir. Donc, ils vont faire les choix de mettre le plus possible la bonne personne au bon endroit, la personne qui a été formée, la personne qui est capable de donner le service.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à notre commission. Dans vos recommandations, je vous amènerais à la recommandation 15 : «L'ordre recommande, dans le contexte où l'assurance autonomie veut permettre le libre choix, que d'autres solutions de remplacement au domicile soient prévues et que l'accès à des ressources d'hébergement existantes soit maintenu...» Qu'est-ce que vous entendez par les «autres solutions de remplacement au domicile»?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, par exemple, les CHSLD. Et, vous savez, on le dit dans notre mémoire, il y a des proches aidants qui sont des proches aidants qui sont eux-mêmes très âgés, des proches aidants qui sont, à un moment donné, épuisés de prendre soin de la personne. Et le libre choix, ça veut vraiment dire d'avoir d'autres opportunités. On parle du CHSLD, ça peut être des lits de répit, ça peut être toutes sortes de façons d'offrir du soutien au proche aidant et de permettre à la personne de vivre de façon digne aussi.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, merci, Mme la Présidente. Parce que généralement les gens, on va les maintenir le plus possible à domicile, c'est ce qui est prévu, je pense, avec ou sans assurance autonomie. L'assurance autonomie, c'est beaucoup aussi une question de financement, mais je pense que les objectifs à la fin demeurent les mêmes. Vous êtes d'accord que, de toute façon, il y a des clientèles qui vont devoir aller en ressources intermédiaires et en CHSLD. Et puis, ce que je vois également, vous regardez pour des solutions temporaires pour pouvoir donner du répit à la famille. C'est comme ça que vous voyez ça?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En effet, il y a des familles qui prennent soin de leurs proches pendant plusieurs années. Et c'est un travail constant, jour, soir, nuit, tous les jours. C'est important pour eux aussi, à un moment donné, de prendre soin d'eux s'ils veulent pouvoir prendre soin de leurs proches. Et c'est pour ça que c'est important d'avoir des alternatives.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Dans votre recommandation 14, j'aimerais ça que vous réexpliquiez encore, là : «L'ordre recommande d'inclure les proches aidants des personnes en perte d'autonomie comme personnes admissibles aux services de l'assurance autonomie.» Comment vous verriez que ça fonctionne? C'est-u parce qu'ils ont accès à l'assurance autonomie? C'est-u un support spécial, c'est-u du répit, des... Parce que, même au début, on avait parlé, là, avant que le projet soit déposé, que les gens avaient demandé même d'avoir peut-être un salaire. Mais je pense que c'est assez clair maintenant qu'il n'y aura pas de salaire. Mais c'est quoi, les services qu'on peut leur offrir de plus? Et qu'est-ce que vous voulez dire par qu'ils soient accessibles à l'assurance autonomie?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Je propose que ma collègue Mme Plourde réponde à cette question-là.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Plourde.

Mme Plourde (Pauline) : Au fond, ce qu'on propose, c'est que… le proche aidant est le client, avec l'aidé, donc que ses besoins soient évalués, que ses besoins de formation… Comme proche aidant, il peut avoir des besoins de répit, il peut avoir toutes sortes de besoins, même pour sa propre santé. Donc, la dyade aidant-aidé, c'est notre client, et que ce client-là soit soutenu par des services spécifiques de l'assurance autonomie.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

• (16 h 40) •

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Bien, en tout cas, je pense que c'est dans les modalités qu'il faut discuter, mais je crois qu'on doit s'entendre que ça prend un programme d'évaluation au niveau des aidants puis voir qu'est-ce qui pourrait être fait pour leur faciliter la tâche. Par contre, de dire qu'ils feraient partie de l'assurance autonomie, est-ce que ça voudrait dire... Puis aussi, c'est peut-être plus dans la question de l'évaluation du profil, parce que l'assurance autonomie va beaucoup également en fonction de l'allocation de ressources qui va venir par la suite selon les besoins. Donc, je ne sais pas comment ça pourrait se combiner. Moi, je pense qu'il faut vraiment distinguer les besoins de la personne elle-même, de l'aidé, et également les besoins de l'aidant, mais pas nécessairement dans un cadre d'assurance autonomie combinée, là. En tout cas, c'est des modalités à discuter, puis je pense qu'il faudrait regarder vers quoi... Ce à quoi on s'entend : c'est certain, l'aidant a besoin de support.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : En fait, j'abonde dans votre sens. Effectivement, l'aidant a besoin de support. Il y a des modalités à définir et il y a peut-être des façons différentes de faire les choses, parce que, si on n'est pas en mesure d'aider l'aidant, des fois ça peut précipiter des choix qui ne sont pas le meilleur choix pour le long terme.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci, Mme Tremblay. Alors, le bloc étant terminé, nous allons poursuivre nos échanges avec la deuxième opposition. Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Pour compléter un peu la question de ma collègue, si... Je vous remercie d'être ici. Je trouve que tout est assez clair dans ce que vous dites, et puis il y a seulement que, finalement, des questions d'ordre pédagogique, sauf une que je veux vous poser. Si c'était — on l'a vu dans des cliniques privées — si c'était une escouade d'infirmières privées supervisée par un médecin ou non, de toute façon certifiée, parce que les soins devront l'être, et vérifiée par l'organisme qu'on décidera, est-ce que vous seriez d'accord?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : Vous parlez d'une escouade d'infirmières privées?

Mme Roy (Arthabaska) : Bien, ce que je veux dire, c'est qu'on voit qu'il y a des cliniques privées à l'heure actuelle que... Parce que les soins pourraient être dispensés de façon... par un organisme qui... Ils peuvent être dispensés par un organisme d'économie sociale, ils peuvent l'être par l'État puis ils peuvent l'être aussi par une entreprise à but lucratif ou non. Ça, est-ce que vous auriez les mêmes réserves qu'avec quelqu'un qui fait partie... une infirmière à la retraite qui fait partie d'un organisme...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Lucie) : J'en reviens à l'importance de la coordination par le CSSS. Et je vais inviter ma collègue Mme Bernier à compléter sur cette importance-là de la coordination. Ça ne peut pas être des soins qui sont donnés à la pièce, ça doit s'inscrire dans une continuité, mais aussi ça doit... C'est sous la responsabilité du CSSS, donc les instances du CSSS doivent avoir une espèce de levier pour pouvoir s'assurer de la qualité. Mais, si vous voulez donner la parole à ma...

Mme Bernier (Ginette) : Oui. Pour faire suite à votre question — puis j'y réfléchi, là, en même temps que j'y réponds — quand on parle de coordination, il y a la portion soins, mais on s'entend que le soin ne sera jamais seul. Il y a le soin avec le réseau autour, l'intervenant social. Et, quand on va se rencontrer en équipe interdisciplinaire, puis qu'on dit : On prend le dossier du client, puis on regarde si on répond à l'ensemble de ses besoins pour le maintenir à domicile, bien là c'est comme si on va passer en contrat une portion. Et là on rentre dans : Comment je vais surveiller sa compétence? Comment je vais m'assurer qu'il va donner le bon service au bon moment? Mais tout part de la coordination puis des échanges qu'on doit avoir entre nous pour se compléter.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska...

Mme Roy (Arthabaska) : Bien, à l'heure actuelle...

La Présidente (Mme Proulx) : ...pour environ 30 secondes.

Mme Roy (Arthabaska) : À l'heure actuelle, il y en a, des infirmières au privé qui font du maintien à domicile, engagées par des familles pour aider leur mère ou... Ça se fait actuellement. Il doit certainement y avoir une façon de coordonner.

Mme Bernier (Ginette) : Oui, mais on parle dans...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Bernier.

Mme Bernier (Ginette) : Je m'excuse. Si on parle dans le programme d'assurance autonomie, où on part avec une famille qui a des besoins pour supporter un des leurs puis qui a droit au programme d'assurance autonomie, bien, si on passe par le CSSS, c'est sûr que normalement le CSSS va coordonner l'ensemble des besoins de la cliente, là.

La Présidente (Mme Proulx) : Malheureusement, le temps est écoulé. Merci beaucoup pour votre présentation.

Alors, je suspends les travaux quelques instants. Et j'invite le prochain groupe à prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 45)

(Reprise à 16 h 47)

La Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Coalition des tables régionales d'organismes
communautaires (CTROC)

M. Rivard (Sébastien) : Bonjour. Je suis Sébastien Rivard, de la Coalition des tables régionales d'organismes communautaires.

Mme Lapierre (Valérie) : Et je suis Valérie Lapierre, de la Coalition des tables régionales d'organismes communautaires.

M. Rivard (Sébastien) : Alors, merci beaucoup aux membres de la commission de nous accueillir cet après-midi, ça nous fait vraiment plaisir de participer à cet échange sur un dossier qui est très important pour le milieu communautaire.

Je vais juste présenter rapidement la Coalition des tables régionales, qui regroupe 14 tables de 14 régions différentes du Québec, représentant des milliers d'organismes communautaires partout au Québec. On a naturellement pour mission de regrouper les organismes, mais aussi d'analyser différents dossiers, différentes réformes, changements dans le système de santé et de services sociaux et leurs impacts sur nos membres, en fait, et les personnes qui fréquentent les organismes. Alors, c'est dans cette optique aujourd'hui qu'on est venus vous présenter ce mémoire aujourd'hui. Et voilà. Bien, je vais laisser la parole à ma collègue Valérie.

Mme Lapierre (Valérie) : Alors, merci. Bon, de prime abord, on a, disons, quatre grands enjeux qu'on va articuler dans notre présentation, le premier enjeu étant, pour nous, l'assurance autonomie. On considère qu'il y a des données manquantes, un état des lieux incomplet, selon nous. Donc, on aimerait beaucoup qu'il y ait une suspension — on va voir un peu plus loin par après — une suspension par rapport à la mise en place de tout ça. On appréhende un risque de glissement pour l'autonomie des organismes communautaires à travers leur participation à l'assurance autonomie. Ensuite, les services et soins à domicile universels et gratuits, qui sont, pour nous, un enjeu important également. Et un dernier enjeu, je dirais, qui englobe plusieurs pendants, soit le rôle des entreprises d'économie sociale, la précarité d'emploi, la pression sur les bénévoles et sur les personnes proches aidantes.

Concernant l'état des lieux que nous jugeons incomplet, nous sommes d'accord sur le fait qu'il y a déjà beaucoup de besoins qui sont non répondus, O.K., pour les personnes qui ont des incapacités, des personnes qui sont en perte d'autonomie, et c'est très préoccupant, puis on en convient. Et on est d'accord aussi par rapport au fait que les personnes doivent choisir le milieu où elles reçoivent des soins. On trouve ça intéressant. Ça répond aux préoccupations de plusieurs personnes. Par contre, on se questionne vraiment à savoir si la proposition d'assurance autonomie est adaptée à la réalité actuelle des organisations du réseau public et des différents partenaires du réseau local, soit les entreprises d'économie sociale, les organismes communautaires, soit dit en passant.

• (16 h 50) •

On peut s'avancer vers une solution comme l'assurance autonomie, mais on a l'impression qu'il nous manque des données, soit un bilan des précédentes réformes qui ont eu lieu en santé et services sociaux. Par exemple, la désinstitutionnalisation, virage ambulatoire, qui ont a des objectifs qui pouvaient ressembler, d'une certaine façon, à remettre dans la communauté certains services pour rapprocher des personnes, faire des économies, et puis on n'est pas certains que, déjà à l'époque, cette réforme-là ait eu les effets escomptés sur l'économie et sur les services dans la population. Il y avait eu des pépins qui avaient été constatés par rapport aux services qui n'étaient pas au rendez-vous nécessairement dans les communautés. Puis, encore aujourd'hui, on voit des impacts, à notre avis, de ça, comme par exemple une montée par rapport à l'itinérance. O.K.?

Donc, virage ambulatoire, désinstitutionnalisation. Création des CSSS également, où, bon, il y a eu un bilan en 2010, si je ne me trompe pas, des réseaux locaux de services, mais, bon, on approche 2014, et déjà il y avait quand même des choses qui n'étaient pas réglées par rapport à l'organisation des services. Donc, ce genre de choses, on considère que c'est un bilan qui est incomplet. On considère aussi que… Même le Vérificateur général, au printemps dernier, est sorti en nommant, dans son rapport, qu'effectivement c'était difficile d'avoir un portrait juste des besoins puis des services dans les CSSS, justement parce que, un, il y avait beaucoup de différences entre chacun, et… Bon, je vais conclure là-dessus parce que je sais que je m'égare, là, je vais aller trop loin.

Tout ça pour dire qu'avec... nous, ces constats-là, les constats aussi de comment que ça se passe par rapport à l'organisation des services, en soins à domicile... On sait qu'il y a déjà beaucoup de gens sur des listes d'attente, des personnes non évaluées déjà. Qu'est-ce qui se passe sur le terrain, on considère qu'il manque des données là-dessus, et plusieurs collaborateurs de CSSS nous ont fait les mêmes constats, soit dit en passant. On demanderait à un moratoire, donc une suspension des travaux pour la mise en application de l'assurance autonomie, le temps qu'on ait un portrait clair de la situation, très complet, plus complet qu'il ne l'est présentement, à tout le moins, pour éviter de faire des erreurs telles qu'on a pu voir, dans certains cas, dans des réformes précédentes. Merci… pour cet aspect. Je pense que je vais aller un peu plus vite, le temps passe.

Un de nos problèmes principaux, c'est le risque de glissement pour l'autonomie des organismes communautaires offrant des services à domicile. Bon. Les organismes communautaires doivent respecter la politique de reconnaissance d'action communautaire, et donc on doit avoir une distance critique avec l'État, on doit être libres de nos orientations, de nos pratiques, de notre mission. C'est protégé dans la loi santé et services sociaux. Et on a des craintes de glissement par rapport à nos pratiques. Chaque organisme est autonome de déterminer ces pratiques-là. Et sur quoi on base ces craintes-là qu'on a?

On sait qu'actuellement il y a des organismes qui font des collaborations, et c'est librement consenti, et c'est correct. On n'est pas contre le fait que des organismes participent à répondre à des besoins, là. Par contre, par le passé, il y a eu des normes de certification qui ont été faites et qui ont touché le mouvement communautaire, comme la certification des organismes d'hébergement en dépendance, O.K., puis une telle norme a eu des effets pervers jusqu'à maintenant. Pour donner l'exemple des organismes en dépendance, on sait qu'il y a une agence, qui est l'agence des Laurentides, qui ne considère plus les organismes d'hébergement en dépendance comme étant des organismes communautaires. O.K.? Donc, au plan identitaire, il y a un problème majeur.

Ce qu'on sait aussi, c'est qu'il y a une révision par rapport à cette certification-là, et, tranquillement, moi, ce que j'ai comme information là-dessus, c'est qu'il y en a plusieurs qui ont la crainte d'être pris dans une trajectoire de services, carrément que le citoyen ne puisse plus faire appel à eux directement parce que, justement, il y a réforme puis des modifications des règlements qui sont en cours les concernant, sans les consulter. Donc, ça, c'est un exemple, mais il y en a d'autres, O.K.? Je ne vais pas m'étendre sur l'ensemble des exemples, vous l'avez dans le mémoire.

Mais, cela étant, comme il y a des précédents, pour nous, de situations où, même si les organismes étaient plutôt favorables et finalement il y a des effets pervers qui ont été constatés, on a une crainte de glissement pour l'autonomie des organismes parce que, dans le livre blanc, il y a une… on parle d'une allusion à… «une reconnaissance explicite encadrée [dans] un processus formel». Tout à l'heure, j'entendais M. le ministre parler d'accréditation ou quoi que ce soit. Eh bien, ce genre de choses, on a la crainte, sincèrement, justement, que ça ait un effet pervers, tout simplement. Donc, on veut un respect de l'autonomie des organismes dans toute balise qui pourrait être créée, à savoir est-ce que ça va concerner ou non les organismes communautaires, ces balises.

M. Rivard (Sébastien) : Alors, je ne sais pas combien de temps il me reste, à peu près.

La Présidente (Mme Proulx) : Il vous reste deux minutes.

M. Rivard (Sébastien) : Deux minutes? D'accord. Alors, je vais accélérer. Un autre enjeu très important pour nous, c'est la question des tarifs, de la tarification qu'impliquerait la mise en place du projet d'assurance autonomie. Pour nous, c'est clair que… notre choix est assez clair, il faut absolument maintenir un accès gratuit aux services sociaux pour les personnes âgées à domicile. Et le projet, tel que formulé actuellement, avec le développement de tarifications, malgré peut-être, là… on a entendu M. le ministre à plusieurs reprises parler de modulation, etc., malgré tout ça, ça nous inquiète pour l'impact sur la population, surtout les personnes âgées à faibles revenus.

On le voit déjà depuis 1996, depuis la mise en place des entreprises d'économie sociale en aide domestique, il y a des gens qui doivent choisir entre, par exemple, l'épicerie ou se donner du ménage. Là, si on rentre dans les soins aux personnes en plus, c'est extrêmement inquiétant pour nous. Alors, ça, c'est un élément qu'on voulait mettre de l'avant. Pour nous, c'est vraiment important de garder des services gratuits et que ça soit accessible à toute la population lorsque nécessaire, et je pense que ce l'est dans beaucoup de cas.

On pense que, pour réduire les coûts… M. le ministre Hébert, lui-même, là — on le cite dans notre mémoire — rappelait, il y a quelques années, en 2006, que les coûts les plus importants dans le système de santé, c'est les médicaments en premier, les technologies, l'hospitalisation, en fait l'hôpital, et l'utilisation de la sous-traitance et des services privés. Alors, on pense qu'effectivement il y a un enjeu budgétaire, mais peut-être qu'on pourrait regarder de ce côté-là avant de commencer à tarifer les services à domicile. Alors, je pense que ça, c'était l'enjeu qu'on voulait faire ressortir.

C'est clair que, pour nous, on doit financer la caisse par une fiscalité progressive. Ça, on le fait ressortir. On est membre de coalitions qui se sont penchées là-dessus, on voulait le faire ressortir. Et on est d'accord avec tout le monde qu'il faut avoir des budgets réservés pour l'aide à domicile dans les… nous, on dit dans les établissements ou dans le périmètre comptable du gouvernement.

Alors, en conclusion, là, c'est sûr que la question du recours à l'économie sociale, la dernière partie de notre mémoire, on n'aura pas le temps beaucoup de l'aborder, vous pouvez nous questionner. C'est clair que, pour nous, les conditions de travail dans ces entreprises-là nous préoccupent. On n'a pas réussi à augmenter, malheureusement, les conditions, beaucoup. Il y a beaucoup de roulement de personnel dans plusieurs régions. Alors, ça, pour nous, c'est inquiétant.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard…

M. Rivard (Sébastien) : Merci.

La Présidente (Mme Proulx) : Alors, nous allons débuter la période d'échange avec le groupe formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Hébert : Merci beaucoup. Merci de votre mémoire. D'entrée de jeu, je vous avoue que je suis un peu étonné des craintes que vous avez par rapport à l'autonomie des organismes communautaires. En fait, le livre blanc fait une place aux organismes communautaires parce que je pense qu'ils ont une place dans le soutien à l'autonomie des personnes âgées. Vous auriez préféré qu'on ne fasse pas mention des organismes communautaires? Et là vous nous auriez reproché probablement d'exclure les organismes communautaires. Cette crainte de l'autonomie — les gens pourront toujours faire appel à vous — je ne comprends pas, je ne saisis pas ça.

D'autres regroupements sont venus nous voir pour dire : On veut être financés à la mission, et nous avons répondu. Je pense que vous êtes en mesure d'apprécier l'effort du gouvernement, la première fois depuis 20 ans qu'on met un financement supplémentaire dans la mission globale des organismes communautaires. 40 millions par année, c'est quand même un montant appréciable, plus le 10 millions qu'on avait mis pour spécifiquement les personnes âgées, cette année, dans le 110 millions. Je ne sais pas d'où vient cette crainte-là et comment elle s'appuie sur le livre blanc qu'on a devant nous.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Oui. Alors, je vais tenter une réponse. Donc, la crainte vient principalement du fait de l'accréditation, comme ma collègue soulevait tantôt. En fait, la crainte, ce n'est pas… On n'est pas inquiets, là, que le gouvernement force les entreprises ou les organismes à devenir autre chose que ce qu'ils sont. Ça, on le sait, là, ce n'est pas ça, notre crainte. Les organismes, on l'a dit, peuvent faire des choix volontairement de collaborer. Là n'est pas notre crainte. Mais, si on parle de mettre en place un système d'accréditation d'organismes qui serait en partenariat avec les CSSS, intégré au système de gestion du financement à travers la RAMQ, par exemple, on pense qu'à terme ça va transformer ces organismes-là en autre chose que ce qui était actuellement. Et là c'est tout l'équilibre entre la portion financement à la mission autonome, dans le programme PSOC actuellement, versus activité tarifée.

Alors, c'est ça, on pense que, d'entrée de jeu, il n'y a pas nécessairement d'enjeu d'entrée de jeu, mais on pense qu'à terme ça pourrait dénaturer et transformer ces organismes-là en quelque chose qui ne serait plus des organismes autonomes. Et ça poserait des questions sur les politiques des agences de la santé, qui ne reconnaissent pas les entreprises d'économie sociale actuellement, pour le financement à la mission, l'hybridation de tout ça, vous voyez, c'est ça, notre crainte.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

• (17 heures) •

M. Hébert : Le rôle de l'État, là, c'est d'assurer la qualité des services, et nous voulons retrouver une gestion publique qui nous échappe actuellement, une gestion publique des services de soutien à l'autonomie et un financement public. J'y reviendrai parce que c'est mon deuxième point.

Si on veut retrouver une gestion publique, il faut s'assurer que l'argent qui est investi dans des services soit associé à de la qualité. Je veux dire, l'autonomie des organismes communautaires, les entreprises privées peuvent faire exactement le même plaidoyer, en disant : Nous sommes autonomes, vous n'avez pas d'affaire à regarder nos affaires. Sauf que je pense que l'État doit s'assurer de la sécurité et de la qualité des services qui sont reçus par les personnes.

Alors, je me demande en quoi ça brime l'autonomie de satisfaire un certain nombre de critères lorsqu'on intervient auprès de personnes âgées ou personnes handicapées vulnérables. Il est là, mon... Pourquoi l'État ne pourrait pas avoir des exigences par rapport aux entreprises privées et par rapport aux organismes communautaires pour assurer la sécurité des usagers et la qualité des services?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Oui. Alors, la réponse vient du fait, comme je l'ai expliqué précédemment, que les organismes communautaires, actuellement, dans les cas de relations avec les agences, ne doivent pas réaliser une offre de services publics. S'ils le font, eh bien, c'est une autre forme de partenariat, c'est effectivement une forme contractuelle de partenariat. On ne s'oppose pas du tout à reddition de comptes, évaluation dans ces contextes-là, au contraire, on en est aussi, mais sauf que, quand qu'on parle de contrat de services dans le cadre d'un projet comme l'assurance autonomie, ce n'est plus du tout comme du financement de mission, tel qu'on le conçoit actuellement, qui n'est pas lié à la mise en oeuvre de priorités de l'État. Et ça, on l'a reconnu dans les travaux qu'on vient de faire récemment. Il faut juste faire la distinction entre les deux formes de pratique, l'action communautaire autonome versus une action plus de complémentarité. Et, nous, c'est un peu l'hybridation de tout ça qui nous fait craindre pour l'avenir. Vous voyez?

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Donc, pour la mission globale, ça n'a rien à voir avec le financement de l'assurance autonomie. En d'autres termes, le PSOC ne sera pas inclus dans la caisse d'assurance autonomie, là. On va être bien clairs, là. On reste en financement global. Ce qui va être inclus dans l'assurance autonomie, c'est le financement à l'activité. Et là il y a différents prestataires, des prestataires d'entreprises d'économie sociale, il pourrait y avoir des organismes communautaires, les popotes roulantes, qui sont venues ici hier, qui sont tout à fait prêtes à être des partenaires du réseau. Alors, je comprends bien que, si le financement à la mission globale reste séparé, ça élimine ou ça diminue un bon nombre de vos craintes.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Valérie) : Pardon. Ça diminue effectivement un nombre de nos craintes, mais je tiens quand même à réitérer l'exemple des organismes communautaires indépendants qui reçoivent un financement à la mission et que, malgré une certification qui n'a rien à voir avec des ententes de services, il y a un glissement. O.K.? Et je pourrais faire l'exemple supplémentaire d'organismes en hébergement pour personnes âgées, dont certains ont changé leur mission, entre autres, parce qu'ils ne pouvaient répondre aux critères qui occasionnaient des frais supplémentaires pour les organisations en question. Et ça, ça a fait une différence au niveau de l'identité de ces organisations-là.

Donc, juste pour dire que, malgré le fait qu'on maintienne un financement à la mission, et c'est ce qu'on souhaite, et on comprend que vous voyez ça comme étant légitime et correcte, on sensibilise le ministre et les membres de la commission au fait qu'une reconnaissance explicite encadrée dans un processus formel, dépendamment de la façon dont ça se traduit dans la réalité, peut avoir des conséquences quant à l'autonomie des organismes communautaires sur le terrain.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Mon deuxième point est au niveau de ce que vous appelez la gratuité et la privatisation des services. Nous n'avons pas des services à domicile gratuits et universels, je tiens à vous l'affirmer, là. Vous dites que c'est le cas; ce n'est pas le cas. L'État finance 15 % à peu près des services qui sont requis par les personnes; 85 %, c'est les personnes qui doivent se le payer. Le PEFSAD est un bel exemple, hein, sur 20 $ de l'heure, 7 $ pour les gens qui n'ont pas de revenus, qui ont juste le supplément de revenu garanti. Ils doivent payer de leur poche 7 $. Il n'y en a pas de… actuellement.

Et justement l'assurance autonomie vise à retrouver un financement public. C'est l'inverse. Nous voulons financer davantage des services de soutien à l'autonomie par l'État, et non pas avoir des situations que vous évoquez, où les gens sont obligés de choisir entre l'épicerie de la semaine ou les services d'aide domestique des entreprises d'économie sociale. C'est l'inverse. Et c'est vraiment retrouver un financement public et une gestion publique, quitte à laisser des prestataires privés être sur le terrain. Les entreprises d'économie sociale en sont un bel exemple.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Valérie) : Actuellement, des organismes nous font part que certaines personnes usagères doivent déjà choisir actuellement, justement. Cette situation-là que vous dites qui existe, et effectivement elle existe, pose déjà problème en lien avec les montants que les personnes doivent débourser. O.K.?

M. Hébert : C'est ça qu'on veut régler.

Mme Lapierre (Valérie) : Mais on ne comprend pas en quoi l'assurance autonomie viendra régler ça, de la façon dont on s'enligne actuellement, en ouvrant davantage pour les entreprises d'économie sociale pour les AVQ. O.K.? Et c'est vraiment là où, nous, le bât blesse davantage. Les activités de la vie quotidienne, nous considérons cela comme des soins, et les soins, selon la CTROC, devraient être… demeurer d'une responsabilité publique. Et, comme vous avez déjà suggéré que le vieillissement… la réponse, dans le fond, au vieillissement de la population serait de réinjecter des sommes dans le réseau santé et services sociaux, et bien évidemment nous sommes d'accord avec cela, mais justement pour augmenter le personnel qualifié pour ce genre d'activité à même les CSSS, justement pour des raisons de coordination, de sécurité, de santé et de qualité, ce qui diminuerait beaucoup les difficultés d'accréditation, par exemple.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Mais les entreprises d'économie sociale ou des entreprises même lucratives, les offices municipaux d'habitation, les OSBL, les résidences privées ont déjà des services d'AVQ pour lesquels ils facturent. Et ce que nous voulons faire, c'est que ces services-là soient financés par l'État. On veut rendre public le financement de ces services-là. Ils sont déjà là. Ils sont déjà là. L'autre solution, ce serait de nationaliser l'ensemble de ces services-là. Mais on ne fera pas ça, ce n'est pas notre option. Notre option, c'est, étant donné le vieillissement de la population, c'est de tirer profit de l'ensemble des prestataires qui sont là. Ce n'est pas d'éliminer des prestataires, c'est de mieux encadrer ceux qui sont là, et surtout d'assurer un financement public et d'avoir une modulation qui fasse que les plus pauvres reçoivent plus de financement public que les gens qui ont plus de moyens. C'est ça, la modulation en fonction du revenu.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Oui. Alors, pour nous, c'est une chose, la question de la gestion du système, effectivement, par le public, de la coordination. Nous, on aurait préféré, dans le cocktail — si je peux m'exprimer ainsi — de services, de vraiment augmenter l'offre de services donnés, par exemple, par des auxiliaires familiales, qui, ceux-là, ne sont pas facturés à domicile, les auxiliaires familiales en CSSS. Pour les personnes principalement à faibles revenus, c'est sûr que le choix qu'on aurait aimé que le gouvernement fasse : de renforcer le prestataire public, sans nécessairement abandonner les autres, mais de renforcer vraiment ceux-là. On trouve qu'il y a de grosses lacunes actuellement qui auraient pu être comblées par le projet d'assurance autonomie.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Et laisser les gens qui sont dans des OSBL d'habitation payer de leur poche pour avoir les services. C'est ça?

M. Rivard (Sébastien) : Ce n'est pas ça que… Ce n'est pas ce que je dis. Je dis effectivement qu'il faut réduire les coûts partout. Il faut trouver une manière effectivement d'assurer l'accès aux personnes les plus démunies. Mais on pense qu'un des ingrédients clés, que je pense que vous partagez vous-même, dans d'autres pays, il y a plus de prestataires publics, on pense qu'on aurait pu faire un effort dans ce sens-là au Québec.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Comparé à la France, il y a beaucoup plus d'entreprises d'économie sociale qu'il y a de prestataires publics dans la prestation de soins.

M. Rivard (Sébastien) : Je ne parlais pas de la France ou de… Il y a d'autres exemples qui arrivent ailleurs.

M. Hébert : Je voudrais juste… Les entreprises d'économie sociale, là, vous ne semblez pas avoir une opinion très, très positive de la qualité des services et des intervenants qui sont là. Si je vous comprends bien, il ne faudrait pas les laisser faire, réaliser des activités de la vie quotidienne.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard, une très courte réponse.

M. Rivard (Sébastien) : Très courte réponse. On ne présume pas de la qualité des services. Ce qu'on constate, par contre, c'est qu'il y a beaucoup de roulement de personnel. On pense que ce n'est pas une bonne idée d'ouvrir le consensus de 1996 aux AVQ. On considère qu'on aurait dû s'en tenir à l'aide domestique. C'est notre position.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci. Alors, nous allons poursuivre nos échanges avec le groupe formant l'opposition officielle. La parole est à la députée de Gatineau.

• (17 h 10) •

Mme Vallée : Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Lapierre, M. Rivard, c'est un plaisir de vous retrouver ici. Je voudrais simplement… J'ai peu de temps, mais je voudrais simplement recadrer quelque chose, faire un clin d'oeil à notre collègue. Oui, il y a eu une annonce intéressante il y a quelques semaines, par contre, il serait important de mentionner que le Programme de soutien aux organismes communautaires a connu une augmentation de 80 % entre 2003 et 2012. Alors, juste, juste expliquer ça à mon collègue. Je sais… je sais qu'il le savait, mais il a oublié d'en parler.

Ceci étant dit, revenons à nos moutons. J'aimerais, Mme Lapierre… Lorsque vous avez commencé à aborder la question, vous avez parlé… bon, commençons par dresser un état des lieux avant de s'embarquer dans une autre grosse réforme puis avant de bouleverser toute la machine. Vous avez fait référence à la désinstitutionnalisation, au virage ambulatoire. La désinstitutionnalisation, dans une autre commission parlementaire, il y a quelques années, avait été soulevée, et vous avez abordé la question avec la problématique de l'itinérance.

Pour vous… Je comprends qu'il est important pour les regroupements que... le regroupement que vous représentez de vraiment prendre une bonne photographie de ce qui se fait actuellement, d'identifier les besoins. On sait — le Vérificateur général est venu un peu plus tôt, puis il nous a remis un certain nombre de rapports — on sait qu'il existe des lacunes, il existe des listes d'attente, il existe des problématiques, mais faisons… dressons le portrait de la situation. Avez-vous, vous, une idée de ce qu'est partiellement le portrait de la situation puis sur l'ensemble du territoire? Parce que ce qui est beau de votre regroupement, c'est que vous êtes vraiment présents un peu partout sur le territoire du Québec.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Valérie) : Nous n'avons pas fait de consultation, O.K., auprès de nos membres des différentes régions sur le sujet. Certaines interventions d'organismes et de personnes fréquentant les organismes ont été possibles. Par contre, on n'a pas un portrait clair de la situation, nous non plus. Et c'est une des raisons aussi pour laquelle on trouve si important d'avoir cette période possible d'établir un portrait clair de ce qui se passe parce qu'on reçoit un message, nous, qui ressemble, d'une certaine façon, à ce qu'on entend ailleurs, à savoir qu'il y a des personnes qui ne sont pas évaluées, il y a des listes d'attente, des personnes qui ont été évaluées mais depuis très longtemps et n'ont pas eu de réévaluation, des personnes qui n'ont pas accès à des services. Et une personne participante, dans le fond, une usagère de services à domicile me disait : C'est comme à la loterie, j'ignore quand je vais avoir le droit de recevoir des services à domicile. Ça fait que ça, c'est une chose qui est… On sait que c'est activement présent. Maintenant, l'ampleur de la situation, on ne la connaît pas totalement. On a vu que, dans le livre blanc, il y avait déjà des pistes, à savoir, bon, des portraits… Il y a des tentatives de portraits qui ont été faites. On ne renie pas le fait qu'il y a déjà des choses qui ont été sur la table. Ce qu'on dit… on ne dit pas qu'il n'y a rien de fait, on dit que ce n'est pas suffisamment complet, à notre avis, pour arriver avec une solution complète, une solution qui va vraiment répondre à l'ensemble. C'est notre position.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Brièvement. Que pensez-vous de l'affirmation, dans le livre blanc, à l'effet que les services seraient facturés en fonction du revenu, possiblement de la capacité de payer de certains usagers et également de l'intensité des services qui seraient requis par l'état de santé de l'usager?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Oui, merci. Alors, pour la Coalition des TROC, c'est clair que toute forme de facturation, que ce soit modulé ou pas, pour nous, est inquiétante. On sait qu'il y a des gens aujourd'hui au Québec — on l'a dit — dont la moindre augmentation de tarifs de quelque sorte que ce soit a un impact énorme parce que les revenus sont insuffisants chez les personnes âgées les plus pauvres. Alors, pour nous, ça nous inquiète, même l'établissement de tarifs. Encore plus, si on commence à moduler à l'utilisation, là c'est totalement injuste et inacceptable, à notre avis, parce que l'état de santé d'une personne, l'intensité des services requis, ce n'est pas son choix. Alors, vous voyez, ça, c'est vraiment une inquiétude qu'on a. Alors, facturation, pas une bonne idée, on aurait préféré un financement par d'autres moyens de ce projet d'assurance autonomie, par des moyens progressifs comme l'impôt ou d'autres formes de mesures progressives et non pas la tarification.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Gatineau.

Mme Vallée : Je vais céder la parole à mon collègue.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. On sait que les organismes communautaires tiennent à leur autonomie. En passant, moi, je suis tout à fait d'accord. Par contre, on sait également que souvent, dans les communautés, c'est les organismes communautaires qui compensent sur certaines défaillances du réseau de la santé. Quelles sont vos craintes par rapport à ça? Si la transformation que le ministre propose démontre, là, qu'il va y avoir un sous-financement et qu'il y a des services qui ne seront pas remplis, qu'est-ce que ça pourrait avoir comme impact pour les organismes communautaires?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Valérie) : Clairement, pour nous, ce genre de choses se traduit et s'est déjà traduit par le passé… les réformes auxquelles je faisais allusion précédemment se sont traduites, dans bien des cas, par une augmentation de listes d'attente pour des services. Dans le fond, la façon d'utiliser l'organisme communautaire, ça devient vraiment une utilisation et non une participation à l'organisme. Les personnes viennent chercher du service, ne s'impliquent pas nécessairement parce qu'elles sont vraiment très, très souffrantes, elles ont beaucoup de besoins. Ce sont des personnes qui vivent des difficultés très lourdes et pour lesquelles, bien que nous ayons plusieurs professionnels au sein de nos organismes, on n'est pas toujours équipés. Ce n'est pas tous les organismes qui sont bien équipés pour recevoir et répondre aux besoins de ces personnes-là, d'où une référence vers le réseau public ou autre, et, pour l'instant, ça pose problème. C'est sûr que ce qu'on voit déjà, c'est, des fois, des listes d'attente. Ça fait que, c'est certain que, si on fait un virage, ce qu'on appréhende, c'est que des personnes vont téléphoner les organismes communautaires pour avoir des nouveaux services. Et on craint aussi que les personnes qui passent directement vers l'organisme communautaire soient tassées, au détriment de ceux qui vont avoir été évaluées par le processus pour l'assurance autonomie.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, merci. Puis on sait que les organismes communautaires, ce n'est pas seulement que des services en fonction des personnes aînées. La priorité que le gouvernement veut donner actuellement aux organismes… à la situation des aînés avec le maintien à domicile, présentement le gros dossier, c'est l'assurance autonomie. Est-ce qu'il y a des craintes parmi les organismes communautaires qu'ils deviennent un peu les négligés? On parle des organismes communautaires en santé mentale, périnatalité ou d'autres types d'organismes communautaires qui pourraient être négligés par rapport à ce qui va s'offrir en assurance autonomie.

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Oui, alors, effectivement, ça peut être une crainte. C'est sûr que, dans les travaux qu'on a faits avec le bureau, avec le ministre Hébert récemment, on a pu constater effectivement une certaine disparité dans le soutien, une inégalité dans le soutien, d'une région à l'autre, d'un programme à l'autre. Effectivement, c'est une crainte. Nous, ce qu'on… Ce que je répondrais à ça, par contre, c'est que, si on veut développer des partenariats avec les organismes communautaires dans des secteurs donnés, il faut absolument leur donner les ressources. Effectivement, dans un domaine comme la santé mentale, on a confié énormément de responsabilités aux organismes, sans nécessairement tous les moyens nécessaires. C'est la même chose dans le réseau public, hein? Alors, je pense qu'il faut faire attention, si on développe des partenariats, de financer adéquatement les organismes communautaires pour ne pas se retrouver avec des catégories d'emplois mal payés et plus de roulement dans notre secteur aussi.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Vous comprenez que le projet du ministre, là, il va offrir un libre choix sur le prestataire de soins et que le prestataire de soins pourrait être public, pourrait être également les organismes d'économie sociale, puis également peut être des organismes privés via les résidences privées, puis ça peut même aller jusque dans les logements communautaires qui pourraient s'organiser pour donner les services. Est-ce que vous avez une crainte qu'à long terme qu'il y en a un qui peut prédominer par l'autre ou encore le privé peut décider d'offrir les services dans les résidences privées ou… qu'à ce moment-là, vu que c'est le bénéficiaire qui choisit, l'usager qui choisit, il pourrait y avoir une dérive vers la privatisation du système?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Oui, effectivement, ce qu'on constate — on l'a dit tantôt, je le disais à M. le ministre — effectivement, 15 % de services offerts par le réseau public, c'est insuffisant. Et, pour compenser l'effet que vous décrivez, il faudrait absolument vraiment améliorer l'offre de services publics gratuite pour tout le monde. Et effectivement, les gens pourront recourir à d'autres secteurs. Mais on ne pense pas qu'il faut favoriser un ou l'autre des secteurs. Il faut laisser le libre choix aux personnes, ça, c'est important. Mais le libre choix ne peut s'exercer… Si on ne peut pas recourir aux services publics, donc il y a déjà un choix de moins qui est enlevé; ça, ce n'est pas correct. Alors, on espère vraiment, comme je vous dis, en priorité, consolider le service public et recourir le moins possible à des secteurs comme le privé ou d'autres secteurs qui impliqueraient des tarifs trop élevés pour la population.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup, M. Rivard. Nous allons maintenant poursuivre les échanges avec le groupe… la représentante de la deuxième opposition. La parole est à la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Bon, j'ai compris quand… Je vais essayer de résumer, là, la pensée que j'ai comprise : qu'en axant notre demande sur le maintien de soins à domicile, vous avez peur que ça cannibalise les autres missions des organismes communautaires. Est-ce que c'est ça?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Non, ce que je disais tantôt, c'est que, si on veut développer un partenariat ou recourir de plus en plus à des organismes d'un secteur, il faut leur donner les moyens. Ce qu'on souhaite, c'est que l'ensemble des organismes de tous les secteurs soient soutenus plus adéquatement. Ce qu'on vous a dit, c'est que, depuis une quinzaine d'années, il y a une énorme disparité, il y a certains secteurs qui n'ont jamais eu de rehaussement depuis plusieurs années.

Alors, ce qu'on dit, c'est que, si on choisit de prioriser un secteur cette année, soit, mais il ne faut pas oublier non plus les autres, il faut être capable de faire l'ensemble de la consolidation en même temps. C'est un peu le plan qui est sur la table et qu'on souhaite qu'il se réalise. Et là-dessus on aurait besoin de l'appui effectivement de la CAQ et du Parti libéral pour s'assurer que l'ensemble des organismes puissent être consolidés. C'est ce qu'on souhaiterait.

• (17 h 20) •

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Oui, dans un monde idéal, si on avait tout l'argent qu'on a besoin pour être solidaires, on n'aurait même pas de débat ici. Tout le monde souhaite ça, là, que ça aille le mieux pour tout le monde, mais il faut faire des choix, je pense, puis le choix qui a été fait, là, c'est un financement à l'acte plutôt que le financement historique qu'on a toujours connu. Qu'est-ce que vous dites de ça?

La Présidente (Mme Proulx) : M. Rivard.

M. Rivard (Sébastien) : Oui, tout à fait. Le financement à l'acte, pour ce qui est du domaine communautaire, pour nous, c'est un peu... c'est contre nature. On ne souhaite pas que les organismes rentrent dans un tel système, ce n'est pas ça qu'on souhaite. Même, on est plutôt pour la gratuité des services dans notre propre milieu. Alors, vous voyez que, rentrer dans un système déjà de tarification de certains services offerts par nos membres, c'est problématique. Et le financement à l'acte, comme j'expliquais tantôt, ça peut être problématique. Si ça module les frais en fonction de l'intensité de services consommés, ça, pour nous, on n'est vraiment à l'aise avec ce principe-là.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Vous dites que les organismes communautaires… bien les organismes que vous représentez, parce que vous représentez tous les organismes communautaires, ne devraient pas faire d'AVQ, d'activités de la vie quotidienne, d'aide à la vie quotidienne. C'est ça?

Mme Lapierre (Valérie) : Actuellement...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lapierre.

Mme Lapierre (Valérie) : Oh, pardon! Actuellement, si organismes il y a dans ce genre d'activité, elles sont très peu nombreuses, ces organisations. Habituellement, on parle vraiment d'AVD dans le milieu communautaire, en grosse majorité. Là, on parle d'organismes communautaires autonomes, là, O.K., et pas d'entreprises d'économie sociale, là. Il y a une nuance importante, là. On sait qu'il y en a certains, mais on sait aussi que ce n'est pas une majorité.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Il y en a certains qui sont de vos membres et qui le font actuellement. C'est ça?

Mme Lapierre (Valérie) : On se doute — ce sera mieux dit comme ça — on se doute que certains peuvent... Ah, moi, en tout cas, ce que j'ai entendu, O.K., dans une CDC, de la part de certains organismes qui étaient présents, c'est qu'il y avait effectivement une pression à ce que des organismes communautaires fassent des AVQ. Maintenant, je n'ai pas de portrait à savoir si les organismes font des AVQ. Par contre, nous, l'information qu'on a en notre possession, ce n'est pas que c'est une activité régulière des organismes communautaires, non.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup. Le temps est maintenant écoulé.

Alors, je vais suspendre les travaux quelques instants. Et j'invite le prochain groupe à prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 23)

(Reprise à 17 h 25)

La Présidente (Mme Proulx) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Fédération québécoise des
sociétés Alzheimer (FQSA)

Mme Roch (Diane) : Merci. Bonsoir, Mme la Présidente. M. le ministre, Dr Hébert, membres de la Commission parlementaire de la santé et des services sociaux. Je me présente, je suis Diane Roch, directrice générale de la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer. J'ai le plaisir d'être accompagnée aujourd'hui de mes collègues : Josée-Lisa LeFrançois, directrice des programmes et services à la fédération; Lise Lalande, directrice générale de la Société Alzheimer de Laval; Tonya Thibodeau, directrice générale de la Société Alzheimer du Suroît et membre du conseil d'administration de la fédération.

Nous souhaitons vous remercier de l'opportunité que vous nous offrez de vous présenter aujourd'hui les recommandations de la Fédération québécoise des sociétés Alzheimer et de nos 20 sociétés Alzheimer régionales sur le projet de loi de L'autonomie pour tous, livre blanc sur la création d'une assurance autonomie. Notre importante mission commune est d'alléger les conséquences sociales et personnelles de la maladie d'Alzheimer et des maladies apparentées, d'aider les personnes atteintes et leurs proches ainsi que de promouvoir la recherche sur ses causes, ses traitements et sa guérison.

Notre philosophie se concentre sur les forces et les capacités de la personne plutôt que sur ses faiblesses ou sur la maladie. Comme vous le savez, plus de 125 000 Québécois sont touchés par la maladie d'Alzheimer ou une maladie apparentée. Ce chiffre ne cessera d'augmenter de façon alarmante pour atteindre 289 000 au cours des 30 prochaines années. Face à cette situation, il nous semble primordial d'agir à l'égard des personnes atteintes et des nombreux proches aidants qui les accompagnent.

Nous accueillons, M. Hébert, favorablement l'objectif du projet de l'assurance autonomie pour tous, qui reflète l'engagement et la prise de conscience du gouvernement quant à la nécessité de prendre en considération le souhait des personnes atteintes à demeurer à domicile, et ce, le plus longtemps possible. En déposant ce mémoire, la fédération et ses 20 sociétés désirent donner une voix aux milliers de Québécois qui font et feront face à ces maladies en soulignant certains aspects du projet d'assurance autonomie qui méritent une attention particulière, et ce, afin de réduire les risques pour la qualité de vie et la sécurité de cette clientèle vulnérable.

Les sociétés Alzheimer oeuvrent depuis près de 30 ans dans leur communauté et offrent des services de soutien individuel ou en groupe, de l'écoute, du répit stimulation, de la formation et de l'hébergement. Nous avons également mis au point un programme de référence, le programme Premier lien, qui permet aux intervenants de la santé et des services sociaux de diriger les personnes atteintes de la maladie, les proches aidants et leurs familles vers les services offerts par les 20 sociétés Alzheimer dès le diagnostic et tout au long de la maladie. L'objectif de notre mouvement et de notre approche permet aux personnes atteintes de poursuivre leur histoire de vie dans la dignité et le respect.

• (17 h 30) •

Vous avez pu constater, à la lecture de notre mémoire, que nos propositions et recommandations sont concrètes et réalistes. En effet, un bon nombre de personnes bénéficient déjà de nos services, et notre souhait est de tout mettre en oeuvre pour que l'ensemble des personnes atteintes et leurs proches puissent y avoir accès. Notre préoccupation à la lecture du livre blanc est d'avoir des personnes adéquatement formées pour intervenir auprès de personnes en perte d'autonomie souffrant de déficits cognitifs. Les sociétés Alzheimer possèdent les connaissances nécessaires pour accompagner les personnes atteintes et former les intervenants de la santé, que ce soit pour améliorer les connaissances sur la maladie ou encore pour faciliter l'approche et la communication. Il serait donc judicieux de reconnaître cette expertise.

Il est également important d'inclure et de valoriser le proche aidant à titre de partenaire incontournable de ce projet de loi. Le proche aidant soutient, écoute, console, participe à toutes les tâches quotidiennes, et cela, au péril de son travail, de sa vie sociale et parfois même de sa santé physique et mentale. Dans le but de réduire le risque d'épuisement de l'aidant et de favoriser le maintien à domicile de la personne atteinte, il est primordial de fournir des services de répit-stimulation qui sont personnalisés, services que les sociétés Alzheimer offrent en gardant toujours à l'esprit le respect et la dignité de la personne.

Il est indéniable que les personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer souhaitent, comme toute autre personne, demeurer le plus longtemps possible à domicile. Notre souhait, Dr Hébert, est de participer à un plan d'action qui établira les mesures nécessaires pour leur permettre de maintenir leur confort, leurs habitudes dans le milieu de vie choisi, et ce, dans des conditions optimales et sécuritaires. Nous vous assurons, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, de l'entière collaboration de notre Mouvement Alzheimer, étendu à travers tout le Québec, engagé et consciencieux dans le respect de notre mission.

Nous vous remercions pour votre écoute. Mes collègues et moi-même serons ravies de répondre à vos questions. Mes collègues qui m'accompagnent ont une vaste expérience avec des personnes atteintes, leurs proches et leurs proches aidants, parce qu'elles ont dirigé et elles dirigent les sociétés Alzheimer. Donc, elles travaillent étroitement avec les personnes atteintes et toutes ces personnes, que ce soient les proches, les proches aidants, les familles. Alors, leur expertise sera favorable, et je dirigerai les questions en conséquence.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci beaucoup de votre présentation. Nous allons débuter la période d'échange avec le groupe formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Hébert : Merci beaucoup, mesdames, de ce mémoire. La Fédération québécoise des sociétés Alzheimer est une fédération que je connais bien pour avoir déjà présidé l'une de vos sociétés à un moment, d'ailleurs, difficile de son histoire. Je sais à quel point vos actions sont extrêmement importantes pour soutenir les personnes et les familles tout au cours de cette maladie terrible et j'en profite pour vous féliciter des actions que vous menez auprès non seulement des familles et des proches, mais également auprès des pouvoirs publics, des établissements, pour qu'on puisse avoir une approche plus adaptée envers les personnes atteintes de maladie d'Alzheimer.

J'aimerais, d'entrée de jeu, que vous puissiez... On a entendu beaucoup de gens nous parler des difficultés du maintien à domicile, la maladie d'Alzheimer entraîne des défis supplémentaires. J'aimerais vous entendre, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, aussi sur les défis particuliers que pose cette maladie, la maladie d'Alzheimer, dans le maintien à domicile.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch.

Mme Roch (Diane) : Je vais diriger cette...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Thibodeau?

Mme Roch (Diane) : Vas-y.

Mme Thibodeau (Tonya) : Bien, les personnes... les aidants, pour garder quelqu'un à domicile, ont besoin de beaucoup d'aide. Ils ont besoin de périodes de repos, on leur en donne, mais on ne leur en donne pas assez. On essaie d'en donner un peu à tout le monde. Ils ont besoin d'outils pour faire face à leur quotidien et... c'est ça, on leur en donne. Mais je pense que le répit revient souvent, souvent sur la table, ils ont vraiment besoin de se reposer. C'est beau de leur donner des outils pour faire face au quotidien la majorité du temps, mais, si on ne le leur donne pas aussi des périodes de repos, ils vont se brûler, ils ne vont pas pouvoir garder une personne à domicile très longtemps sans notre aide.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

Mme Lalande (Lise) : J'ajouterais, pour que...

La Présidente (Mme Proulx) :

Mme Lalande (Lise) : Je m'excuse. J'ajouterais que, pour bien s'occuper de l'aidant, il faut bien s'occuper de l'aidé. Quand on sait notre personne atteinte entre bonnes mains, relativement heureuse, en sécurité, bien on peut vraiment bénéficier d'un répit. Mais, si la personne à la maison n'est pas qualifiée ou habilitée à bien accompagner la personne atteinte, le répit n'a plus la même valeur.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre

M. Hébert : Vous insistez beaucoup sur la formation des intervenants, qu'ils soient dans le réseau public, dans les entreprises d'économie sociale ou dans des résidences privées. Pouvez-vous nous parler des programmes de formation que vous avez élaborés et que vous mettez à la disposition de ces différents prestataires?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch.

Mme Roch (Diane) : Oui. Bien, plusieurs de nos sociétés ont un programme de formation. Ceci dit, notre programme de formation, qui a été endossé par le Dr Bergman, qui a été aussi initié par notre société de la Rive-Sud, est déjà disponible pour la société de la Rive-Sud. Ceci dit, nous espérons que le programme de formation dont nous faisons référence soit disponible à toutes nos sociétés Alzheimer. On souhaite que les 20 sociétés Alzheimer puissent offrir le service de formation uniformément, de la même façon pour tout le monde. Alors, avec le temps, il serait sûrement possible que ce programme soit disponible à toutes les sociétés.

Ceci dit, nos sociétés offrent des programmes de formation qui ne sont pas offerts de la même façon. Je vais ajouter, Dr Hébert, que nous sommes à travailler l'harmonisation de nos services, et ce projet va vous être remis dès le mois de janvier, tel qu'entendu.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous nous parlez à plusieurs reprises, dans votre mémoire, de ce que vous appelez répit-stimulation. Alors, j'aimerais que vous nous expliquiez qu'est-ce que c'est par rapport à du répit conventionnel, ce que vous entendez par répit-stimulation.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme LeFrançois.

Mme LeFrançois (Josée-Lisa) : Oui, certainement. Alors, le répit-stimulation, dans le fond, se distingue vraiment du répit, de façon à ce qu'on ne le considère pas seulement comme un moyen de surveillance ou de gardiennage. On profite du moment pour donner un répit au proche aidant, mais, en même temps, stimuler la personne atteinte. On croit, comme on le disait au début lors de la présentation de Mme Roch, aux capacités restantes de la personne. Alors, tout comme un muscle, on pense qu'à entretenir et entraîner ses capacités restantes, elles vont demeurer plus longtemps. Alors, la stimulation devient très importante, et on vient bonifier, dans le fond, le répit avec cet autre volet qu'est la stimulation auprès de la personne atteinte.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Vous nous incitez à ce que les proches aidants ou les proches aidantes — on peut le conjuguer au féminin — soient perçus ou soient considérés comme des partenaires, et je suis tout à fait d'accord avec vous, donc qu'on ne les considère plus comme des ressources, mais plutôt comme des partenaires dans le soutien à l'autonomie. Et vous nous dites : Bien, il faut qu'on évalue également les besoins des proches aidantes. Et vous n'êtes pas le premier groupe à nous suggérer d'inclure une évaluation standardisée des besoins des proches aidantes dans l'évaluation des personnes dans le cadre de l'assurance autonomie. C'est une suggestion que nous retenons, alors, c'est un élément important. Si on veut être capables d'intervenir et de répondre à des besoins, il faut d'abord être en mesure de les apprécier.

Nous avons entendu L'Appui, qui est venu ici, et certains autres groupes qui nous ont suggéré de mieux intégrer ce que fait L'Appui à une approche globale des personnes en perte d'autonomie qui ont des problèmes cognitifs. Avez-vous des suggestions? Comment vous voyez une intégration de L'Appui, de ce que vous faites, de ce que le réseau fait dans la perspective de la mise en place d'une assurance autonomie?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch.

Mme Roch (Diane) : Merci. Mme Lalande a déjà été sur le conseil d'administration de L'Appui, à Laval, alors je vais la laisser partager son opinion à ce sujet.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lalande.

• (17 h 40) •

Mme Lalande (Lise) : Merci. L'Appui est un bailleur de fonds. Alors, L'Appui finance des projets, et bien sûr 75 % des fonds alloués par L'Appui doivent être dirigés vers la clientèle Alzheimer. Alors, c'est certain que, dans toutes les régions, s'il n'y en a pas déjà, il va y avoir des projets de soutien, d'aide à une clientèle Alzheimer, qui vont être financés par L'Appui. Alors, on fonctionne de concert avec eux.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le ministre.

M. Hébert : Je vais laisser Mme la députée…

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Oui. Bonjour, mesdames, merci d'être présentes pour nous témoigner de votre mémoire. Alors, moi, j'aurais une question. Vous dites que la plupart des personnes atteintes d'Alzheimer veulent vivre à la maison le plus longtemps possible. J'imagine que, dans votre pratique, c'est ce que vous observez. Et c'est dans cette optique-là naturellement que nous souhaitons contribuer à retarder... que l'assurance autonomie souhaite retarder le plus longtemps possible le placement en CHSLD. Donc, cela est, d'ailleurs, l'un des points fondamentaux du livre blanc, comme je viens de le dire. Avec l'assurance autonomie, nous croyons qu'il s'agit d'un choix responsable pour la société, autant économiquement que socialement. Alors, pouvez-vous élaborer sur le fait que les soins à domicile et une meilleure connaissance de l'Alzheimer peuvent effectivement diminuer la pression sur les CHSLD puis retarder l'entrée en CHSLD de gens atteints d'Alzheimer?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch.

Mme Roch (Diane) : On a beaucoup discuté de ce sujet entre nous. Je vais... peut-être que tu veux poursuivre un peu? Parce que les personnes... C'est vraiment que c'est le souhait de la personne de rester le plus longtemps possible à la maison. Mais, en même temps, mes collègues qui ont des résidences peuvent vivre le transfert de la maison à la résidence. Parce que le proche aidant s'épuise, et la personne qui en prend soin devient complètement épuisée. Alors, le transfert de la maison à la résidence, c'est très difficile, pour en avoir parlé, avec toutes sortes d'exemples. Alors, je vais vous laisser continuer pour...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme LeFrançois?

Mme LeFrançois (Josée-Lisa) : Oui, d'accord. Alors, c'est important... pour répondre à votre question, c'est important, pour la personne atteinte, de conserver ses repères, c'est ce qu'on sait, d'abord et avant tout. Alors, évidemment que ça facilite son orientation lorsqu'elle est dans un environnement connu qu'elle maîtrise quand même bien malgré l'avancée de la maladie, ça vient combler son besoin de stabilité et de sécurité. Le besoin d'être chez soi, d'ailleurs, est très, très fort, même en stade avancé de la maladie. C'est ce qu'on entend souvent chez les personnes, elles veulent retourner chez elles lorsqu'elles n'y sont plus, elles veulent retourner chez elles à tout prix. Alors, c'est évident aussi que, pour nous, on considère que la personne qui demeure à domicile peut vivre davantage, d'abord, à son rythme, conserver ses habitudes. Elle reçoit aussi plus de stimulations. En tout cas, elle a plus de chances d'être stimulée à la maison qu'en institution, évidemment.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée de Masson.

Mme Gadoury-Hamelin : Alors, si je comprends bien, selon les situations, il y a des moments où est-ce que c'est encore possible et d'autres moments, avec ce que vous nous expliquez, où la situation fait que ce n'est plus possible. Et c'est souvent le proche aidant, là, qui est obligé de dire : Je ne suis plus capable, et on est obligé de passer à une autre étape. C'est ce que je comprends.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lalande.

Mme Roch (Diane) : ...un peu les expériences.

La Présidente (Mme Proulx) : Oui, rapidement.

Mme Lalande (Lise) : Tout d'abord, j'aimerais dire que le service qu'on peut offrir avec une approche centrée sur la personne, donc qui regarde le potentiel de la personne qui est encore là, les capacités et non pas le déficit, permet de retarder l'évolution de la maladie, en tout cas pour un certain temps, et tout en conservant une qualité de vie. Et plus on donne de services de cette forme-là, plus que la qualité de vie aussi de l'aidant est maintenue. Alors, c'est certain que d'avoir beaucoup de services de répit à la disponibilité des gens, mais d'autres services aussi — les groupes de soutien, faire de la formation pour les proches aidants pour qu'ils soient mieux habilités à communiquer avec leurs proches, à comprendre ce qui se passe, à ne pas se sentir coupables de dire «j'ai besoin de répit, j'ai besoin de prendre un moment pour moi, je suis à bout», de pouvoir exprimer leurs émotions entre eux-mêmes et avec des professionnels — ça permet de retarder l'échéancier, de dire : Bien, éventuellement, je ne peux plus garder mon proche à la maison, il va devoir être résident ailleurs.

La Présidente (Mme Proulx) : Merci, Mme Lalande.

Mme Lalande (Lise) : Oui.

La Présidente (Mme Proulx) : Nous allons poursuivre les échanges avec le groupe de l'opposition officielle. La parole est au député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Ne vous inquiétez pas pour les cloches, le parlement n'est pas en feu, là. C'est tout simplement que probablement ils ont besoin, dans une salle, d'un quorum. À ce moment-là, ils font sonner. Puis nous autres, on s'entend, on va rester ici, avec vous.

D'abord, félicitations pour votre organisation puis pour tout le travail que vous faites. Je vous ai déjà rencontrée puis je vous avais dit que vous êtes dans nos organismes qui ont beaucoup, beaucoup d'avenir à cause de la croissance des gens qui vont souffrir de la maladie d'Alzheimer qui, je crois, est le plus grand défi de notre réseau de la santé. Les maladies physiques, en général, on peut les garder longtemps à domicile, les gens sont prêts à faire des compromis, mais, lorsqu'on perd nos capacités mentales, notre jugement, là ça devient beaucoup plus difficile.

Comment vous voyez l'avenir pour votre organisation dans le contexte où ça va être en croissance? Vous êtes présents dans la majorité des régions du Québec, il y a des endroits où est-ce que vous êtes appelés à développer. Puis, à ma connaissance, vous êtes vraiment nos répondants par rapport à la maladie d'Alzheimer pour tout le Québec en tant qu'organismes qui vous en occupez, qui êtes responsables. Comme vous voyez votre développement?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch.

Mme Roch (Diane) : Oui. Il est entendu que nous souhaitons que toutes nos sociétés Alzheimer puissent offrir les services, nos cinq services de base, qui sont primordiaux. Le Dr Hébert nous a… enfin, nous avons eu l'opportunité, grâce à la générosité du ministère de la Santé et des Services sociaux, de procéder à une étude, enfin, de tous nos services, c'est-à-dire on appelle le programme l'harmonisation de nos services. Ce rapport va nous permettre d'analyser ce qui est offert présentement, la qualité des services, qui sont excellents, et qu'est-ce qu'on a besoin de faire pour faire en sorte que les 20 sociétés Alzheimer du Québec soient en mesure de grandir et de continuer à offrir les services. Une grande partie de nos sociétés le font déjà, mais évidemment, avec la croissance des personnes atteintes au travers le Québec, il est primordial que les sociétés Alzheimer demeurent, continuent à grandir et participent, avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, au bien-être des personnes atteintes, leurs familles, leurs proches, les proches aidants et les intervenants du milieu de la santé.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Vous aviez... Vous semblez être déçue qu'on ne fasse pas plus mention du rapport Bergman dans le programme de l'assurance autonomie, mais, je vais vous rassurer, je suis convaincu que le ministre est comme moi, là, il croit beaucoup, beaucoup dans vous. Et, indépendamment si l'assurance autonomie ne se fait pas, moi, je pense que vous avez toujours votre place, mais je ne sais pas encore comment un organisme comme le vôtre va s'incorporer dans l'assurance autonomie. Parce qu'il y a des services qui vont être payés par le gouvernement, vous êtes un organisme qui allez donner des services, mais je ne suis pas certain que le financement va venir via l'assurance autonomie comme… ou directement du ministère ou peut-être d'autres sources de financement. Je ne sais pas comment vous... si vous avez regardé comment vous pourriez vous incorporer dans le programme d'assurance autonomie.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch.

Mme Roch (Diane) : Bien, on en a discuté et on avait un grand questionnement à ce sujet-là, d'ailleurs. Déjà, certains de nos services... Et puis, ça, je vais quand même laisser à mes collègues de répondre parce que... À certains de nos services, on obtient un 15 $, ça peut varier entre 3 $ et 15 $ par jour. Mais c'est une question qu'on avait, d'ailleurs, au niveau du financement, qui n'était pas très clair pour nous et qui n'était pas... en fait, on n'a pas trouvé la réponse, la bonne réponse. Mais on peut continuer sur le sujet, je ne sais pas...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Lalande.

Mme Lalande (Lise) : Oui. Pas toutes les sociétés ont des ententes de services déjà avec leurs CSSS ou leurs agences, mais il y a quand même plusieurs ententes de services qui existent déjà. Alors, on fait du répit ou on a des groupes de soutien ou autres services qui sont partiellement subventionnés. Et on se questionnait justement à dire : Bon, si on fait comme… On fait de la consultation, de l'écoute, on a beaucoup de services qui sont gratuits. Et, là, qu'est-ce qu'on fait avec ça? Si la demande augmente, on ne pourra pas les donner gratuitement à tout le monde. Il y a déjà passablement de sociétés Alzheimer qui ont de la difficulté à rencontrer leurs dépenses. On se fie beaucoup sur l'autofinancement et on sait que c'est de plus en plus difficile. Alors, on a un questionnement à ce sujet-là. Parce qu'on ne peut pas dire : On va offrir à notre ancienne clientèle que ça va être gratuit, les nouvelles personnes vont payer. On ne sait pas comment ça va se développer du côté monétaire. Mais c'est certain qu'on va loin, nous, avec un dollar.

• (17 h 50) •

Mme Roch (Diane) : Oui. C'est vraiment une question qu'on se posait, mais je présume qu'avec... C'est un premier travail, mais on va pouvoir en discuter avec vous plus longuement parce que c'est un questionnement que nous avons.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Merci, Mme la Présidente. Moi, je regarde le projet d'assurance autonomie puis je regarde l'orientation qu'on veut pour nos personnes aînées au Québec, et on veut les garder, les maintenir à domicile le plus longtemps possible. On sait que probablement la maladie qui va évoluer le plus dans le temps à cause du vieillissement, c'est les troubles cognitifs. Il faut avoir un programme pour les personnes, mais on sait que, dans les troubles cognitifs, aussi importants que la personne, c'est les proches aidants. Et vous êtes ceux qui offrez ces programmes-là. Et, je suis d'accord avec vous, un dollar investi chez vous, ça nous sauve probablement 10 dollars dans le réseau de la santé. Et, si vous n'êtes pas bien financés, vous ne pourrez pas donner les services, ce qui fait que ces gens-là vont se retrouver encore plus soit dans nos CHSLD ou encore en ressources intermédiaires.

Donc, vous êtes une catégorie, selon moi, à part. Compte tenu de ce que vous faites comme offre de services et de l'organisation que vous avez au Québec, il faut qu'on trouve un moyen de vous financer. Je ne pense pas à ce moment-ci… puis je ne sais pas si le ministre va avoir une réponse à ça, si l'assurance autonomie va le prévoir, mais là, ça va nous prendre un financement particulier. Je sais que vous allez chercher de l'argent par l'autofinancement. Puis, si le ministre a déjà été président d'une société d'Alzheimer, il sait qu'il faut en faire, des activités, il y a beaucoup d'énergies qui sont mises. Mais, dans une réorganisation de système, je pense qu'on doit avoir un financement qui devrait vous être dédié.

Mais partons avec le principe : un, vous êtes des gens d'abord avec une vocation, c'est la première chose. Deuxièmement, c'est : pour les patients et pour leurs familles, c'est ce qu'il y a de mieux en voulant les maintenir à domicile avec une expertise particulière à ces pathologies. Et, troisièmement, on ne se le cachera pas, le réseau de la santé va sauver de l'argent. Donc, moi, je... pas «sauver de l'argent», c'est de l'argent qui est mieux investi. Ça fait que ça, c'est ce que j'appelle un triple gagnant, là : vous pouvez vous épanouir; la famille, le patient sont bien pris en charge; puis notre réseau est plus fonctionnel.

Comment on va le faire? Je ne le sais pas, mais je pense que, quelle que soit la méthode qui va être employée, soit l'assurance autonomie ou une autre méthode, il faut qu'on soit capables de répondre à vos besoins mieux que présentement. Et, également, il va y avoir du développement parce que vous allez avoir de plus en plus de clientèles. Ça fait que c'est ça, l'enjeu. Puis, une tribune comme ici, c'est le genre de réflexion qu'on doit y faire. Et je suis certain que le ministre et toute personne qui va occuper sa place va devoir accorder une attention particulière à votre organisme parce qu'ils font un travail extraordinaire.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch.

Mme Roch (Diane) : Juste dire merci. Et merci pour votre compréhension et votre encouragement aussi.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Oui, oui, parce que, je vais vous dire, moi, je suis choyé, parce que, vous le savez, la société Alzheimer, à Québec, est juste à côté de mes bureaux — c'est un hasard que ça soit comme ça, là — puis j'ai eu l'occasion d'aller les visiter, puis je vois les programmes qu'ils mettent en place. Et également, on a des patients qui... j'ai des patients qui sont suivis pour cette maladie. Et, si on n'a pas ce support communautaire… notre réseau peut prendre en charge certaines choses, mais, à un moment donné, il faut former les aidants naturels. Et j'ai eu l'occasion d'avoir des présentations de vos programmes. Puis, comme vous avez dit, vous avez standardisé vos programmes. Quand on parle de standardisation, vous, vous l'avez fait, maintenant, comment on fait pour la généraliser? Bien, ça, ça va vous prendre des budgets. Avez-vous estimé à peu près combien ça pourrait coûter pour vous généraliser à la grandeur du Québec?

Mme Roch (Diane) : Pas encore. Nous sommes en train de le faire.

Mme LeFrançois (Josée-Lisa) : ...

Mme Roch (Diane) : Vas-y, Josée-Lisa.

Mme LeFrançois (Josée-Lisa) : On vient tout juste de faire le travail synthèse. D'ailleurs, ça s'est fait hier. Alors, c'est vraiment tout frais encore, là, avec des résultats qu'il faut vraiment maintenant analyser puis produire le rapport final.

Mais ce que je voulais ajouter tout à l'heure concernant notre partenariat ou, du moins, le fait qu'on veut vraiment être considérés comme un partenaire incontournable, c'est aussi le fait que, mis à part les services directs que l'on peut donner à partir de nos organismes, de nos sociétés, c'est aussi le souci qu'on a que les autres organismes ou entités qui seront sollicités pour aller donner des services à domicile et qui auront à donner une prestation de services auprès de personnes atteintes le fassent dans un... quand même, avec une certaine base. On parlait de formation? C'est là où nous, on s'inscrit, ça fait partie de notre mission, ça, d'aller former, avec une approche bien précise, les gens qui vont avoir à côtoyer, à accompagner des personnes atteintes.

La Présidente (Mme Proulx) : M. le député de Jean-Talon, pour une courte conclusion.

M. Bolduc (Jean-Talon) : Bien, écoutez, je pense que vous avez un grand marché, là, où vous pouvez vous impliquer. Vous êtes des gens, comme j'ai dit, qui êtes dévoués puis vous avez l'expertise. Et cette expertise-là est très, très, très particulière. C'est pour ça que je peux vous assurer, là, qu'indépendamment de l'évolution de l'assurance autonomie je pense que vous êtes une catégorie à part, ou quel que soit le programme qui va être mis en place, vous devez être un partenaire extrêmement important dans notre réseau de la santé et des services sociaux. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Proulx) : J'invite maintenant le deuxième groupe d'opposition. La parole est à la députée d'Arthabaska.

Mme Roy (Arthabaska) : Merci. Vous nous permettez de finir bien cette semaine, avec une unanimité autour de la table, parce que ça n'a pas été le cas toute la semaine, je dois vous dire, mais c'est... On va partir le coeur un peu plus léger, en étant d'accord sur l'importance que vous avez dans… dans notre société, je dois dire, puis la confiance que vous avez méritée aussi de la population et des intervenants, et le respect que vous avez aussi imposé face à votre travail qui est bien fait. Nos députés, ou porte-parole, ou les ministres, ou l'opposition officielle, on est souvent l'endroit où les gens qui n'ont pas de voix viennent se plaindre, mais on n'entend jamais de mal de vous, puis on considère, puis on voit les bonnes actions.

Vous parlez des aidants, on peut dire «les aidantes» presque, puis vous êtes quatre femmes, ça me semble être assez révélateur de ce qui se passe sur le terrain. Vous avez parlé de répit, d'information, de formation pour les aidantes, vous n'avez pas parlé de soutien psychologique. D'autres intervenants sont venus nous en parler. Est-ce que vous avez un programme à ce niveau-là?

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Thibodeau?

Mme Thibodeau (Tonya) : Oui, on a des programmes de soutien psychosocial, ça fait partie de notre service de base qui est vraiment appliqué à travers la province. C'est le service de base. Durant notre étude d'harmonisation, on a vu que les 20 sociétés, elles l'offraient. Toutes les 20 sociétés offrent au moins des consultations individuelles, familiales, en groupe. On le fait le soir, s'il le faut. On les rencontre la fin de semaine, s'il le faut. On se déplace aux résidences des personnes, s'il le faut. Et on instaure aussi des suivis. La majorité des sociétés instaurent aussi des suivis, et ça fait partie du service de base. Ce n'est pas juste de la consultation, c'est de la consultation et des suivis, pour être sûrs qu'on ne les laisse pas tomber après et qu'on les réfère vers même les organismes qui offrent des services qui sont différents des nôtres et qui peuvent être en complémentarité, et dans le réseau.

Alors, c'est très important pour nous, ce volet-là. Et c'est le volet qui est le mieux comblé. Mais, comme on dit, aller personnaliser le service dans chaque territoire, se rendre à domicile, ça peut coûter très cher. Et, comme ma collègue Lise Lalande a dit, de Laval, plus on a de demandes... On sait qu'aujourd'hui au Canada, d'après l'étude Raz-de-marée, il y avait un nouveau cas toutes les cinq minutes, et, d'ici 2038, on attendait un nouveau cas au Canada à toutes les deux minutes. Donc, on passe d'un cas par cinq minutes à un cas par deux minutes. C'est sûr que la demande va causer le raz-de-marée, et on va en subir les conséquences. Et on ne veut pas perdre la qualité de nos services. Mais c'est un des services de base qui est très fort chez nous.

La Présidente (Mme Proulx) : Mme la députée d'Arthabaska, pour une conclusion.

Mme Roy (Arthabaska) : Ah! Je voulais savoir, est-ce que... qui vous... Comment vous déployez vos services? C'est sur demande, ou il y a quelqu'un qui vous réfère, ou…

Mme Roch (Diane) : Au départ...

La Présidente (Mme Proulx) : Mme Roch, pour une courte réponse?

Mme Roch (Diane) : Oui. Bien, enfin, nous, à la fédération… Je vais parler, après ça, vous pouvez… La fédération, évidemment, on représente les 20 sociétés et on sensibilise le public. Alors, nous, on reçoit des téléphones... on reçoit beaucoup de téléphones, alors, selon où la personne habite, on le dirige vers les sociétés Alzheimer. Et maintenant vous pouvez parler aussi...

Des voix :

La Présidente (Mme Proulx) : Malheureusement, le temps est écoulé, Mme Roch. Le temps est écoulé, malheureusement.

Mme Roch (Diane) : Ah, c'est terminé?

La Présidente (Mme Proulx) : Alors, je vous remercie pour votre présentation.

Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux jusqu'au vendredi 15 novembre, à 10 heures pour l'interpellation du ministre de la Santé et des Services sociaux par le député de Jean-Talon. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 17 h 59)

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