Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(début : 27 novembre 2018)
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Le
jeudi 7 novembre 2019
-
Vol. 45 N° 37
Mandat d'initiative - Augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH)
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente-six minutes)
Le Président (M. Provençal)
: Bon matin à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous
souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes, dans la salle, de
bien vouloir éteindre la sonnerie des leurs appareils électroniques. La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions
publiques dans le cadre du mandat d'initiative concernant l'augmentation
préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les
jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, M.
le Président. M. Lafrenière (Vachon) est remplacé par M. Bachand
(Richmond); M. Benjamin (Viau) par Mme Nichols (Vaudreuil); Mme David
(Marguerite-Bourgeoys) par Mme Sauvé (Fabre); M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine) par M. Gaudreault (Jonquière).
Le Président (M. Provençal)
:Merci, Mme la secrétaire. Nous
entendrons ce matin les organismes suivants : Mme Anne Hébert,
psychologue, et l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux.
Comme la séance a débuté à 11 h 36, y a-t-il consentement pour
poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit 13 h 6? Consentement.
Merci.
Je souhaite maintenant la bienvenue à Mme
Ariane Hébert. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. Vous
avez la parole, madame.
Mme Hébert (Ariane) : Alors,
bonjour. Je suis Ariane Hébert. Je suis psychologue clinicienne. Je me
spécialise dans l'évaluation de la santé mentale auprès de diverses clientèles.
Donc, traduction libre, je ne suis pas spécialiste parce que, pour évaluer la santé
mentale, je me dois d'être une bonne généraliste, donc je me dois de connaître
le TDAH, bien entendu, mais aussi les autres troubles pour être capable
d'émettre des bons différentiels.
Alors, je vous ai transmis mon mémoire ce
matin, je viens davantage vous jaser de mon expérience clinique, donc de ce que
je vois, moi, dans mon bureau et de comment j'évalue le sujet qui vous
préoccupe. Donc, tout d'abord, il faut savoir qu'en étant en bureau privé je
rencontre toutes sortes de clientèles. Alors, en ce qui concerne le TDAH, par
exemple, je vais rencontrer autant les parents qui viennent se faire
interpeller pour une première fois par un enseignant qui a nommé que peut-être
l'enfant bougeait un petit peu plus que la moyenne. Je rencontre aussi des
parents qui, ça fait plusieurs années qu'ils vivent des difficultés, qui se le
font dire régulièrement, qui rencontrent aussi des enjeux importants à la
maison, alors... et, entre ça, bien, ça va du gris pâle au gris foncé, là.
Donc, pour ma part, c'est la clientèle que je couvre.
Ce que je remarque dans le contact parent,
première des choses, c'est que, comme les parents sont maintenant mieux
informés, hein, on peut aller trouver sur Internet les critères diagnostiques
du DSM, donc sur le TDAH, et puis les enseignants aussi, alors, d'entrée de jeu,
c'est plus facile pour eux d'attribuer ce trouble-là aux symptômes qu'ils
observent. Je ne pense pas que ce soit dans une intention malveillante, là, je
me suis diagnostiqué quelques cancers par Wikipédia cette année, alors je pense
que c'est dans cette lignée-là, hein? On sait, on connaît l'information, donc
on tente de poser une étiquette sur ce qu'on sait.
• (11 h 40) •
Maintenant, l'autre chose qui me saute aux
yeux, dans le contact parent toujours, c'est que les gens ont perdu de vue
ou... non, je devrais dire, les gens ne savent plus c'est quoi, la norme, donc
qu'est-ce qui est normal pour un enfant en 2019, de ce qui l'est moins. Ce que
j'entends par là, c'est qu'aujourd'hui, dans notre vie actuelle, pour les
jeunes à qui on demande d'être dans un service de garde de 7 h 30 à
5 h 30, à qui on demande d'aller en autobus et de revenir... en fait,
d'aller et de revenir à l'école...
Mme Hébert (Ariane) : ...Donc,
qu'est-ce qui est normal pour un enfant en 2019 de ce qui l'est moins? Ce que
j'entends par là, c'est qu'aujourd'hui, dans notre vie actuelle, pour les
jeunes à qui on demande d'être dans un service de garde de 7 h 30 à
17 h 30, à qui on demande d'aller en autobus et de revenir... en
fait, d'aller et de revenir à l'école en autobus, de dîner à l'école, de rester
assis, d'avoir un agenda de président des États-Unis, on se demande maintenant
si... est-ce qu'un enfant qui n'est pas capable de rester une demi-heure assis
pendant le souper si c'est normal? Donc, on a un peu perdu nos balises par
rapport à ça et donc on tire des conclusions de comportements qui ne sont plus
nécessairement adaptées à notre ère de vie, là.
Donc, je reviens encore, là, la normalité
s'est perdue en cours de route, on ne sait plus. Et puis ça, c'est commun dans
les... auprès des parents, c'est commun aussi auprès des enseignants, puis j'ai
envie de vous dire, quitte à me faire tirer des tomates, c'est aussi commun
pour les professionnels. Il y a beaucoup de professionnels qui ne savent pas,
par exemple, où devrait se tracer la ligne en 2019, qu'est-ce qui constitue de
l'agitation ou de l'inattention. Alors, ça, ça fait partie, je pense, des
causes qui peuvent conduire à un surdiagnostic. Enfin, ce n'est pas la réponse,
mais ça fait partie du problème.
D'autre part, j'ai aussi évoqué, dans mon
mémoire, qu'on manque de ressources pour mettre en place des applications, des
stratégies pour intervenir de façons différentes, intervenir autrement que par
médication, c'est vrai. En fait, les parents... vous savez, j'ai écrit un livre
sur le déficit d'attention, il s'est vendu à 75 000 exemplaires au
Québec, il parle des stratégies autres que la médication. Ça fait que moi, je
traduis par là une volonté des parents à faire autrement que par la médication,
mais en même temps, c'est des parents qui ont souvent des enjeux eux-mêmes,
hein? On sait que c'est une maladie génétique, alors ce n'est pas rare que les
parents eux-mêmes soient atteints du TDAH. Et puis comme il y a souvent des
comorbidités, le TDAH se présente rarement seul, ça fait que donc il y a des
éléments anxieux, il y a des éléments de dépression, il y a plein d'autres
choses... il y a des troubles de comportement, puis il y a autres choses qui
viennent avec et qui compliquent, en fait, la mise en oeuvre des stratégies.
D'autre part, je suis maman d'enfants TDAH
et je suis très bien outillée et, néanmoins, je suis capable de vous dire, puis
permettez-moi l'expression, c'est toffe, ce n'est pas facile de mettre en place
des stratégies, d'assurer un suivi, de personnaliser les interventions, même
quand on a des bonnes connaissances. Ça fait que, donc oui, c'est sûr que la
médication devient, à ce moment-là, peut-être une solution beaucoup plus... je
n'ai pas envie de dire fragile... bien, facile, dans le sens où les parents
mettent l'éponge, mais dans le sens où c'est abordable pour eux.
La mère qui arrive, là, avec ses trois
enfants, là, à 17 heures, puis il faut qu'ils soient couchés à
19 h 30, puis qu'on lui dit : Fais un parcours moteur pour tes
enfants, pour les libérer de leurs tensions de la journée, pour qu'ils puissent
apprendre leur alphabet en sautant dans les marches, elle n'a pas le temps, ce
n'est pas réaliste pour elle. Ça fait que donc c'est bien beau proposer des
moyens, des stratégies, mais encore faut-il réussir à aller les atteindre, et
ce, à ce que ce soit réaliste dans leur quotidien. Ça fait que, donc oui, on
manque d'outils, en fait, de stratégies, de ressources pour aider ces
parents-là, pour mettre en place des plans, etc.
Et finalement j'ai aussi parlé de la
pression de performance dans mon mémoire. La pression de performance, là, il
faut le voir, en fait, de deux angles : on peut penser que notre société
exige toujours plus, c'est vrai; on peut aussi penser que maintenant l'enfant a
pris une place tout à fait différente dans nos familles versus il y a quelques
années. Alors, la lunette est beaucoup mise sur nos enfants. Écoutez, v'là
30 ans, là, je ne suis pas sûre que c'était commun de trouver deux parents
assis dans une pratique de hockey, à 5 h 30 le matin, pour assister,
hein? C'était la mère qui ramassait les six enfants du quartier, maintenant
c'est chose commune. Ça fait que donc on est vraiment beaucoup plus centrés sur
nos enfants et beaucoup plus fragiles ou, encore là, on détecte beaucoup plus
toute anomalie de comportement et on en tire des conclusions. Parfois, là, j'ai
la chance, si je peux m'exprimer ainsi, de voir des parents qui viennent
s'asseoir devant moi à titre préventif, ils me disent : Écoute, on n'est
pas sûrs qu'il a un TDAH, mais on aimerait ça ne passer à côté de quelque
chose. O.K., alors, à ce moment-là, décrivez-moi les atteintes qu'a, cet
enfant-là, dans son quotidien. Mais il n'en a pas vraiment, mais s'il fallait
qu'il y en ait?
Alors, on me demande de diagnostiquer un
trouble préventif, mais ça, encore là, ce n'est pas exception, là. Ça fait que
vous comprenez, l'idée, c'est de dire : on est dans une société où on
refuse toute souffrance à nos enfants. On le voit d'ailleurs à travers les
troubles anxieux et pleins d'autres choses, là, mais on ne veut tellement
qu'ils aient mal, on ne veut tellement pas que leur estime soit atteinte, que
les notes descendent, etc., puis encore là, ce n'est pas parce qu'on veut en
faire des chevaux de course, c'est parce qu'on a le souci que ces petits
êtres-là ne souffrent pas, c'est noble, mais ça vient interférer avec notre
jugement, c'est sûr, O.K.?
Et tout ceci étant dit, je pense aussi
qu'au Québec, là, on est vraiment bons. Je pense qu'on est des bons
professionnels, je pense qu'on est des bons parents, je pense qu'on est très
aptes à détecter, à déceler des troubles de comportement...
Mme Hébert (Ariane) : ...ça
vient interférer avec notre jugement, c'est sûr, O.K.?
Et tout ceci étant dit, je pense aussi
qu'au Québec, là, on est vraiment bons. Je pense qu'on est des bons professionnels,
je pense qu'on est des bons parents, je pense qu'on est très aptes à détecter,
à déceler des troubles de comportements, des troubles de santé mentale et du
TDAH. Je pense qu'on connaît ça, dans notre communauté scientifique, on en
parle beaucoup, c'est connu aussi dans les médias. Ça fait que, oui, peut-être
qu'il y a du surdiagnostic, oui, peut-être qu'il y a trop de médication. Vous
les avez, les chiffres, moi, je ne les ai pas, moi, je suis une clinicienne.
Mais ce que je sais, c'est qu'on est bons, ça fait qu'il y a certainement de ça
aussi qui vient jouer dans l'augmentation.
Puis, vous savez, tu sais, en 1954,
l'Asperger, là, ou l'autiste, là, ça n'existait pas, il n'y en avait pas, ce
n'était pas encore inventé. Ça fait que, là, maintenant, le TDAH a été inventé,
alors on en voit partout, peut-être. Mais peut-être qu'il y en a réellement
aussi beaucoup. Puis aujourd'hui, bien, de l'autisme, il y en a un sur 64.
Probablement que vous allez faire une autre commission, dans quelques années,
sur l'autisme, tu sais. Donc, mieux on connaît ça, mieux on peut le
diagnostiquer aussi, ça fait qu'il y a... Je ne suis pas capable de vous dire,
personnellement, est-ce qu'il y a du surdiagnostic. Peut-être, à cause de tout
ce que je viens de vous nommer, mais ça se peut aussi qu'on soit juste bien
bons. Voilà.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je vous
en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais maintenant passer la parole à la députée
d'Abitibi-Ouest pour commencer la période d'échange. À vous la parole.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président. Merci, Mme Hébert. Vous parlez de... Votre présentation
est faite avec passion, merci beaucoup, on sent que vous aimez ces enfants-là.
Alors, moi, j'aimerais qu'on parle de... Il y a une normalité qui s'est perdue
en cours de route, et vous l'associez à quoi, cette...
Mme Hébert (Ariane) : À notre
rythme de vie, en fait, là. Tu sais, comme je vous dis, les conditions
actuelles, là... Est-ce que certains d'entre vous avez appris à apprendre en
lettres attachées sur un iPad? Donc, il y a une réalité qui est maintenant là,
actuelle, qui change de façon très, très rapide, et on a du mal, à ce
moment-là, à établir de nouvelles balises sur, maintenant, c'est quoi, la
norme, là, tu sais. Écoutez, moi, j'ai des enfants de 18 et 16 ans et,quand je
compare mes vieilles avec les jeunes, qui sont maintenant au primaire, on est
dans deux mondes. Ça fait que... les changements vont tellement vite, donc ce
qu'on demande aux enfants aujourd'hui ça n'a aucune commune mesure avec ce qui
était voilà 15 ans, voilà 10 ans, j'ai envie de vous dire voilà quelques
années. Donc, c'est quoi, un enfant normal, maintenant, c'est quoi, un enfant
qui... on devrait s'attendre à quoi d'un petit bonhomme de sept ans, par
exemple, qui a passé la journée à l'intérieur, qui a passé le tiers de son
temps rivé à l'écran, qui est... etc., là, tu sais, vous voyez. Ça fait que
c'est dans cette optique-là que je pense que la norme est rendue confuse.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Vous, en étant clinicienne, tout ça, est-ce que vous avez été capable, avec vos
enfants, de mettre en application certains outils que vous offrez à votre
clientèle?
Mme Hébert (Ariane) : Oui,
bien, en fait, le livre, là, TDA/H—La boîte à outils, ça venait surtout
de cette idée-là, dire : Eh! Moi, là, je pense que j'ai tout essayé.
Probablement pas, mais j'en ai essayé beaucoup, et donc je voulais rendre ça.
J'en ai essayé. Malgré tout, mes enfants prennent une médication, parce que ces
belles stratégies là ont leurs limites, alors... Tu sais, c'est là aussi qu'il
ne faut pas se mettre la tête dans le sable, les stratégies comportementales,
là, c'est merveilleux, là, ça aide, puis ça ne devrait jamais être indépendant
de la médication, mais des fois, ce n'est pas suffisant.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) : Et
lorsque vous rencontrez certains clients, on parle de troubles préventifs.
Alors, qu'est-ce que vous leur faites et qu'est-ce que vous leur dites?
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, là, ça, c'est... Tu sais, j'écoute, bien, entendu, je reçois leurs
préoccupations, mais je leur explique que, pour avoir un trouble, il faut
toujours bien que la personne qui est atteinte en vive les conséquences. Ça
fait que, même si on trouve sur papier que votre enfant a des fragilités
attentionnelles, si, dans la vraie vie, ça ne s'articule pas, on ne peut pas
lui donner un diagnostic de trouble. Par contre, on peut déjà mettre en place
des mesures préventives. Donc, tu sais, tout ce qui est stratégie comportementale,
les coquilles insonorisantes, un coussin lourd pour qu'il diminue son
agitation, faire plus d'exercice, l'hygiène de vie, on n'a pas besoin de
diagnostic pour faire ça, c'est ça, la beauté de la chose. Ça fait que, donc,
on va établir ça, on va... Autrement dit, quand ça arrive, là, je fais du
coaching parental.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) : La
dernière question
Mme Hébert (Ariane) :
Allez-y.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) : Au
niveau de la médication, trouvez-vous qu'on... trop les enfants?
Mme Hébert (Ariane) : Je
pense que je suis chanceuse, dans ma région, beaucoup de pédiatres me réfèrent
pour un diagnostic différentiel. Je pense que ce n'est pas comme ça dans toutes
les régions. Alors, je ne jette pas le blâme aux médecins ou à personne, là,
mais c'est possible. C'est possible qu'on attribue des traits d'agitation
rapidement à du TDAH ou des traits de... à l'enfant lunatique, ça se peut, oui.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je vous
en prie.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Oui. Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour. Merci
pour votre présence ici aujourd'hui. J'aimerais vous entendre par rapport
vraiment à l'écran, ce que ça fait à nos jeunes selon vous puis comment on peut
améliorer les choses.
• (11 h 50) •
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, l'écran, là, c'est un des pires ennemis de l'attention, parce que le
cerveau est ainsi fait qu'on a un système de vigilance interne, si vous voulez,
O.K.? Ça fait que, donc, rapidement...
Mme Picard : ...pour votre
présence, ici, aujourd'hui. J'aimerais vous entendre par rapport vraiment à
l'écran, ce que ça fait à nos jeunes selon vous puis comment on peut améliorer
les choses.
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, l'écran, là, c'est un des pires ennemis de l'attention parce que le
cerveau est ainsi fait qu'on a un système de vigilance interne, si vous voulez,
O.K.? Ça fait que, donc, rapidement, on va aller repérer dans notre environnement
qu'est-ce qui est saillant. Ça fait que si, disons, là, vous prenez une belle
promenade dans un champ de blé avec les arbres et tout ça et que, tout d'un coup,
il y a une tache noire qui apparaît, rapidement, c'est ça qui va attirer votre
attention. Maintenant, les écrans, on est bombardé de stimuli saillants. Ça
fait que ça fait en sorte que, même si on veut se dégager de ça, notre cerveau,
par automatisme, retourne à aller vers les stimuli saillants. Ça fait que, ça,
ça nuit à notre entraînement à cibler soi-même notre attention. Ça fait que,
donc, par exemple, là, si, disons qu'on est dans un environnement à stimuli
égal, là, le prof, l'écureuil sur l'arbre, mettons. Je suis supposé normalement
d'être capable de faire un «shift», là, je cherche mon terme français, mais un
déplacement d'attention selon mon gré, selon ma volonté. Mais par contre, les
écrans, ils crient tellement fort dans mon cerveau que, là, ce changement-là,
là, il n'est plus tout à fait dans mon contrôle. Ça fait que ce faisant, bien,
je perds l'habilité à m'autoréguler par rapport à mon attention, là. Ça fait
que, donc, plus jeune on introduit les écrans et c'est présent dans la vie des enfants,
moins ils sont entraînés à cibler leur attention.
Mme Picard : Ça me fait
penser, justement, M. le Président, mon fils m'a déjà dit ça : Maman,
c'est plate. Dans la vie, il n'y a pas de gros dragons qui viennent attaquer
notre maison. Il n'y a pas...
Mme Hébert (Ariane) :
C'est exact.
Mme Picard : Il manque
d'action dans notre vie.
Mme Hébert (Ariane) :
Tout à fait.
Mme Picard : Et j'ai
dit : Bien, mon Dieu! Mon petit gars, c'est vrai qu'il n'y a pas de dragon
dans la maison.
Mme Hébert (Ariane) : Puis
vous dites ça puis, tu sais, j'ai envie de vous dire : C'est dur, là, pour
un dragon de rivaliser... C'est-à-dire, c'est dur pour un prof de rivaliser
avec le dragon, là, tu sais. C'est ça.
Mme Picard : Voilà. Vous l'avez
bien dit. À propos d'alimentation ou d'hygiène de vie, est-ce que vous pouvez
m'en dire plus, de qu'est-ce qui serait bien pour nos enfants?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, l'hygiène de vie, là, ça aussi, ce n'est jamais indépendant de
la médication ou des stratégies. C'est-à-dire que... Encore une fois, je dis
souvent aux parents : Vous savez, pilule, pas pilule, là, un enfant qui ne
dort pas, je vous promets qu'il va être inattentif. Ça fait qu'il y a ça aussi
qu'il faut toujours regarder. Donc, si un enfant ne mange pas suffisamment, ne
dort pas suffisamment, il a un rythme de vie effréné, tu sais. Qu'est-ce que
vous faites de vos fins de semaine? Probablement que vous avez une liste
d'activités, parce que chaque enfant en a au moins trois pour bien s'épanouir,
n'est-ce pas. Ça fait que, donc, tu sais, c'est ce rythme-là qu'on impose aux
jeunes qui... On oublie que se traîner les savates un peu puis s'emmerder sur
le divan, ça aussi, ça fait partie des apprentissages qu'ils devraient pouvoir faire.
Ça fait que donc, quand ils tombent dans la lune, on se dit : Bien voyons,
il est supposé d'être tout là. Le coach de hockey est en train de donner des
instructions puis, je le vois, il est dans la lune. Il a eu combien de temps,
lui, pour se déposer aujourd'hui. Ça fait que, tu sais, vous voyez, le rythme
de vie puis l'hygiène de vie est hyper importante évidemment, là, tu sais. Ça
fait que, oui, il faut... Il y a une préoccupation à ce niveau-là aussi.
Mme Picard : Est-ce que
vous trouvez que la société met trop de pression sur nos enfants?
Mme Hébert (Ariane) :
Ah! je le répète, là, moi, je pense que ce n'est pas... Ce n'est pas qu'on veut
en faire des chevaux de course, c'est qu'on ne veut pas qu'ils souffrent. Ça
fait que, donc, si tu as des pas bonnes notes, tu risques de te décourager, tu
risques d'avoir une faible estime. Donc, tu sais, tout ça déboule. Ça fait que,
donc, je vais chercher à t'éviter ça à tout prix. Je pense que c'est plus dans
cette idée-là, tu sais, l'idée de dire : Bien, je ne te laisserai pas
souffrir si je peux faire autrement.
Mme Picard : Concernant
l'anxiété, j'ai l'impression que, des fois, on médicamente les enfants qui ont
un problème d'anxiété aussi ou des pressions, comme vous avez mentionné au début.
Est-ce que c'est votre impression aussi? Ou est-ce que... Est-ce que vous
pensez que la majorité des diagnostics de TDAH, c'est vraiment des TDAH
justifiés?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, écoutez, c'est sûr que je peux seulement vous parler de mon expérience.
Ça fait que moi, en bureau, c'est mon travail, de faire un bon différentiel.
Maintenant, est-ce qu'il y a souvent des TDAH qui viennent avec de l'anxiété?
Ça, oui. Est-ce qu'on médicamente les enfants anxieux? J'ai envie de vous
dire : Je crois que non. En tout cas, dans ma... Encore là, dans ma
communauté, quand j'établis un diagnostic de trouble anxieux, il n'y a pas de
pédiatre dans mon coin qui recommande des médications. Ça fait que hourra pour
ça! Parce qu'à cet âge-là, d'ailleurs, les stratégies comportementales sont
hautement efficaces, là. Mais je ne pourrais pas vous parler pour l'ensemble du
Québec, certainement pas, là.
Mme Picard : Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Est-ce qu'il a d'autres interventions de la part des... du
gouvernement? Oui, Mme la députée d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président. Votre vision, c'est d'être une référence incontournable
pour éclairer les décisions et les pratiques. J'aimerais que vous élaboriez sur
ce sujet.
Mme Hébert (Ariane) : Je
m'excuse, j'ai perdu un bout de votre phrase. Voulez-vous me le répéter?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Ah! O.K. Je me disais qu'au niveau de votre vision, c'était une vision éclairée
pour les enfants, et des incontournables, et des choses pratiques, des outils
pour eux. Alors, comment on peut élaborer à ce niveau?
Mme Hébert (Ariane) : Je
ne suis pas sûre de vous saisir...
Mme Hébert (Ariane) : ...toute
votre phrase. Voulez-vous me la répéter?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Je me disais qu'au niveau de votre vision, c'était une vision éclairée pour les
enfants et des incontournables et des choses pratiques, des outils pour eux.
Alors, comment on peut élaborer à ce niveau?
Mme Hébert (Ariane) : Je ne
suis pas sûre de vous saisir, je m'excuse encore, là. Vous voulez que je vous
parle des stratégies?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Les stratégies, la vision, la... oui.
Mme Hébert (Ariane) : Qui
sont autres que la médication?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Oui.
Mme Hébert (Ariane) : Bien,
les stratégies comportementales qui existent, c'est dont... ce vous...
Mme Blais (Abitibi-Ouest) : S'il
vous plaît.
Mme Hébert (Ariane) :
D'accord. Bien, en fait, les stratégies comportementales, premièrement, malheureusement,
elles ne sont pas universelles. Alors, il y a... Par exemple, on va avoir des
stratégies, disons, pour réduire l'agitation motrice chez les enfants. Souvent,
on va passer les trucs sensorimoteurs, disons les coussins lourds, les... Je ne
sais pas si vous êtes familiers avec ça, on a des espèces de lézards qu'on
dépose... ça a un poids, on dépose ça sur les cuisses des enfants, ça permet de
diminuer l'agitation. Mais, comme je vous dis, ces trucs-là ne sont pas
universels. Première des choses, le lézard, dans certains cas, bien, ça devient
un projectile, hein? Dans d'autres cas, le lézard n'a pas cet effet calmant là.
Ça fait que, donc, il faut vraiment... Toutes les stratégies, il faut les
essayer pour voir à les personnaliser, puis voir lesquelles correspondent le
mieux aux symptômes qu'on observe.
D'autre part, les stratégies se font quand
même demandantes, c'est-à-dire que tout ce qui est comportemental en termes de
gestion des émotions, par exemple, on ne fait pas ça en... Tu sais, la gestion
des émotions qui est inhérentes aux TDAH, là, ils ont des difficultés à inhiber
certaines émotions et réaction, et donc, là, c'est un long parcours
d'apprentissage de quelle émotion tu peux laisser passer et de quelle façon, et
on n'a pas une balle de stress pour régler ça, là. Donc, c'est vraiment de la
psychoéducation, de l'enseignement, etc. Ça se fait, ça se fait bien, je...
Encore là, je parie que peu d'entre vous avaient un coin doux, dans votre
classe de primaire, pour aller vous apaiser quand que vous vous sentiez en
colère. Alors, c'est de plus en plus en vogue, ça se fait de plus en plus. Mais
ce sont néanmoins des stratégies qui demandent beaucoup d'énergie et de
connaissance et de remise sur le plancher, etc. Il y en a plein, il y en a
toute une panoplie. Mais autre chose que je dis souvent aux parents, là, tous
les trucs et stratégies du monde ne sont adéquats que dans une seule condition,
c'est d'être appliqués, et c'est ça l'enjeu le plus difficile.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci.
Mme Hébert (Ariane) : Je vous
en prie.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) : Il
nous reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Provençal)
: Sept minutes.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Sept minutes, parfait. Alors, dans votre document, vous mentionnez que l'usage
des médicaments long terme, lorsque non justifié... Pouvez-vous élaborer sur
les conséquences néfastes de la médication qui est non justifiée?
Mme Hébert (Ariane) : La
médication à long terme, en fait, c'est ça. Ça, c'est le point où, encore une
fois, je le présente souvent aux parents, et il y a des parents qui vont me
dire : Bien, c'est génétique. Mon enfant est TDAH, ça veut donc dire que
probablement moi aussi. Puis je leur fais toujours de la mise en garde parce
qu'il y a des petits coquins qui essaient les médicaments de leurs enfants pour
voir si eux réagissent bien, hein, à la médication, et si... donc, pourraient
en conclure qu'ils ont un TDAH ou pas. Et je leur dis toujours : Tu sais,
si vous prenez une ou deux pilules de ritalin, là, vous allez avoir une très
belle journée, vous allez vous sentir efficace, focus, etc. Par contre, après
un mois, vous risquez d'avoir des symptômes qui sont nettement moins agréables,
dont des symptômes dépressifs, une augmentation de l'agressivité, des traits
anxieux, etc. Ça fait que, donc, c'est comme, tu sais, si vous prenez deux Red
Bullaujourd'hui, là, ça se peut que vous soyez très alerte. Si vous prenez
quatre Red Bull pendant un mois, à tous les jours, votre niveau de vigilance
devrait avoir baissé pour laisser place à d'autre chose. Ça fait qu'on est un
peu là-dedans, là. Ça fait que, donc, quand ce n'est pas justifié, ce n'est pas
adéquat, là, à long terme.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Parce que les effets secondaires qu'on remarque souvent, ce sont
l'amaigrissement, tristesse, anxiété.
Mme Hébert (Ariane) : Oui,
c'est vrai que ça... Par contre, il y a des effets secondaires comme ça où
c'est simplement la famille de molécules qui ne correspond pas aux individus,
là. Alors, il faut faire attention, ce n'est pas... L'amaigrissement, l'effet
coupe-faim du médicament TDAH, c'est le premier effet secondaire qui est
observé dans... je veux dire, à 99 % de la population qui en prend ou à
peu près. Ça fait que celle-là, c'est presque une condition sine qua non, là,
presque.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) : Et
idéalement, quelqu'un qui prend une médication régulière doit avoir un suivi
clinique à combien de temps, les prises de sang, ces choses-là?
Mme Hébert (Ariane) : ...aux
six mois, normalement, là. Une fois que la médication est installée, bien
entendu, dans la période, tu sais, d'installation du médicament...
Mme Blais (Abitibi-Ouest) : Et
on m'a déjà dit que lorsqu'on prend une médication comme ça, on ne doit pas la
couper directement, on ne doit pas la stopper, on doit y aller.
Mme Hébert (Ariane) :
Écoutez, je ne suis pas médecin, et les avis diffèrent à ce niveau-là.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Oui?
Mme Hébert (Ariane) : Oui,
les avis diffèrent. Il y a beaucoup d'adultes qui se permettent de jouer comme
ça avec leur médication puis qui n'en subissent pas de conséquence. Encore là,
le discours que je tiens, de par ce que je sais, c'est auprès des parents, pour
des petits corps pas tout à fait formés encore. Si vous choisissez d'arrêter,
n'arrêtez pas pour une fin de semaine, là. Si vous choisissez d'arrêter,
arrêtez pour la période d'été, peut-être, là. Mais... Parce que ça fait
beaucoup de variation, là, dans le système, ça fait que... Mais... Oui?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Est-ce que les intervenants, au niveau des garderies, des commissions
scolaires, sont avisés de certains comportements dus à une médication, ou?
• (15 heures) •
Mme Hébert (Ariane) : Non, pas
vraiment. En fait, encore là, j'ai envie de vous dire, là, la majorité des
enseignants...
12 h (version non révisée)
Mme Hébert (Ariane) : ...
peut-être, là, mais... Parce que ça fait beaucoup de variations, là, dans le système,
ça fait que... Mais...
M. Blais : Est-ce que les...
Mme Hébert (Ariane) :
Oui.
M. Blais :
...intervenants au niveau des garderies, des commissions scolaires sont avisés
de certains comportements dus à une médication ou...
Mme Hébert (Ariane) :
Non, pas vraiment. En fait, encore là, j'ai envie de vous dire, là, la majorité
des enseignants que je côtoie connaissent ce qu'ils connaissent par Internet,
par ouï-dire. Ils n'ont pas de cours au niveau de leur bac, par exemple, là,
pour leur parler des symptômes du TDAH ou... ni même des stratégies à mettre en
place, là. Alors, ils se renseignent aussi bien qu'ils peuvent, là, mais c'est
limité.
M. Blais : Et, selon
vous, est-ce qu'il y aura place à information au niveau des commissions
scolaires?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, j'ai envie de vous dire, moi, la quantité de demandes de formation que je
reçois, là, je sens qu'il y a un désir d'en connaître davantage.
M. Blais : Merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
M. Blais : Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Provençal)
: Oui. Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Rebonjour.
Mme Hébert (Ariane) :
Rebonjour.
Mme Picard : En fait,
j'aimerais savoir, selon vous, dans le système scolaire, est-ce qu'il devrait y
avoir un ratio personnalisé pour les enfants qui ont un TDAH? Est-ce qu'on
devrait... Plutôt qu'un prof soit avec 25 élèves, est-ce qu'on devrait
vraiment plus cibler les ratios dans les...
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, j'ai envie de vous dire, dépendamment des symptômes, là. C'est sûr que ce
n'est pas le... Ce n'est jamais le diagnostic qui détermine les services que
doit recevoir un service, c'est plus les manifestations qu'il présente. Parce
que le TDAH, je le répète, là, ça va de gris pâle à gris très foncé. Ça fait
que, donc, dans certains cas, oui, ça va être nécessaire, effectivement,
d'avoir une aide supplémentaire ou ça serait bienveillant pour le professeur,
qu'elle puisse en avoir moins dans son groupe, là, tu sais... Parmi les
stratégies, tantôt, je vous disais, tu sais, des fois, je rencontre des profs
puis je leur dis : Bien, ton élève TDAH, essaie de le placer en avant de
la classe. Puis, tu sais, il y a des enseignants qui me disent : Oui, mais
rendu là la moitié de la classe va être en avant de la classe, tu sais. Oui,
O.K., je comprends, tu sais. Il y a des enjeux qui se vivent comme ça, qui sont
très difficiles.
Alors, est-ce qu'on devrait attribuer plus
de ressources? Dans un monde idéal, bien entendu, là.
Mme Picard : Au niveau...
Merci. Au niveau des évaluations, la chaîne d'évaluation, du point où la
garderie, l'école, s'aperçoit que l'enfant a peut-être une problématique, un
trouble, jusqu'au moment du diagnostic, voyez-vous une amélioration qu'on
pourrait apporter dans cette chaîne-là?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, comme je vous disais...
Le Président (M. Provençal)
: Rapidement, s'il vous plaît.
Mme Hébert (Ariane) :
Pardon?
Le Président (M. Provençal)
: Il va falloir être un petit peu rapide dans la réponse. 30
secondes.
Mme Hébert (Ariane) :
Oui, on pourrait faire une amélioration. En fait, il y a un dépistage qui
pourrait être plus efficace, effectivement, si on connaissait mieux la norme de
ce que c'est, un enfant régulier.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je vais céder maintenant la parole à la
députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Hébert, un plaisir de vous entendre,
vraiment. Et j'ai parcouru un petit peu, bien sûr, tout ce que vous avez fait
puis les outils que vous avez développés pour les parents, les livres que vous
avez faits, et c'est quelque chose d'assez exceptionnel. Alors, je vais vous
féliciter d'abord pour ça.
Tantôt, vous avez abordé la question parce
qu'une commission comme celle-ci, avec un mandat d'initiative comme celui-ci,
ça fait appel aussi à regarder peut-être d'autres situations puis des
diagnostics qui sont arrivés de façon un peu massive au fil des décennies,
hein? On a parlé... vous avez parlé du syndrome d'Asperger tantôt, alors je
pense que vous êtes en faveur d'un mandat d'initiative comme celui-là, qui
pourrait aussi, au niveau de l'anxiété aussi, au niveau des jeunes, des enfants
et des jeunes adultes qui ont... qui souffrent de troubles du spectre de
l'autisme, je pense que vous seriez certainement en faveur de d'autres
exercices tels que celui-là.
Écoutez, j'ai beaucoup de questions, alors
je vais essayer d'être assez concise, d'abord. Vous avez parlé... puis je pense
que la nuance est tellement importante. C'est une chose, d'observer. C'est une
chose de dénoter des comportements. Puis je me ramène un peu au DSM, qui
est très rigoureux dans la notion de persistance des symptômes, et les six
symptômes, et pour l'hyperactivité, et pour... Alors, ce n'est pas un simple
comportement qui n'a pas d'impact sur la vie du jeune qui fait en sorte
qu'automatiquement on doit être dans l'observation vers un diagnostic du TDAH.
J'ai vraiment beaucoup apprécié ce commentaire-là, puis ça... je suppose, je
fais un peu le lien que vous adressez peut-être ce propos-là en lien avec la
notion du surdiagnostic.
Est-ce que c'est effectivement... Est-ce
qu'il y a une corrélation entre l'observation, qui peut être un peu arbitraire,
malgré la bienveillance de tous, là, je le répète, malgré la bienveillance de
tous, et des parents, et des enseignants, mais est-ce qu'on n'est pas dans une
évaluation un peu trop rapide qui est liée à une information et non pas une
expertise?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, tout à fait, c'est ce que j'ai présenté dans le mémoire ou, en
fait, ce que j'ai essayé de traduire, c'est que le DSM, pour établir le
diagnostic du TDAH, il nous présente des critères comportementaux. Mais, du
coup, c'est partir d'un comportement subjectif puis en faire un diagnostic
objectif. Alors, il y a beaucoup de gris dans les critères comportementaux, et
c'est pour ça...
Mme Hébert (Ariane) : ...pour
établir le diagnostic du TDAH, il nous présente des critères comportementaux.
Bien, du coup, c'est partir d'un comportement subjectif puis en faire un
diagnostic objectif. Alors, il y a beaucoup de gris dans les critères
comportementaux et c'est pour ça que c'est l'expertise du professionnel
consulté qui détermine sa capacité à établir le diagnostic. Donc, dans cet
ordre d'idées là, encore là, pas de façon malveillante, mais il y a des parents
qui lisent ces critères comportementaux là puis qui se disent : bien oui,
bien oui, mon enfant parle souvent, bien oui, mon enfant est agité au souper,
bien oui. O.K., mais l'est-il plus qu'en enfant de son âge en 2019? C'est là
que ça devient délicat.
Le Président (M. Provençal)
: ...
Mme Sauvé : Je vais
poursuivre, merci, M. le Président. Vous savez, il y a un des éléments qui me
préoccupe beaucoup puis je sens que ça vous préoccupe avec toute l'expertise
que vous avez et encore davantage. La panacée universelle pour le TDAH, c'est
donc le médicament dans la majorité des cas prescrit par un médecin, mais en
même temps on n'est pas face à des tests sanguins puis on n'est pas en train de
pouvoir évaluer sur la base de test médicaux, alors c'est vraiment l'analyse
comportementale liée à des tests psychométriques et tout ça, ça fait qu'on est
comme dans un traitement médical, mais en même temps on n'a pas de mesures qui
sont liées à la notion médicale. Alors à mon avis, c'est peut-être, puis je
l'entends de vous, on l'a entendu aussi dans les présentations précédentes,
c'est un peu un problème qui peut être relié, puis j'essaie de comprendre
vraiment, encore une fois, le surdiagnostic, de passer d'une notion
d'observation, peut-être non experte malgré la bienveillance, puis pas
suffisamment vers l'évaluation professionnelle clinicienne puis
l'aboutissement, bien, c'est le médicament.
Mme Hébert (Ariane) : Mais,
en même temps n'est-ce pas le cas de la majorité des troubles mentaux?
Mme Sauvé : Oui.
Mme Hébert (Ariane) : Ce sont
des diagnostics comportementaux que l'on observe et qu'on traite par
médication.
Mme Sauvé : Oui, bien
d'accord. Vous savez, vous avez parlé tantôt de la normalité, parce qu'encore
là, avec le diagnostic qui est beaucoup plus accessible du TDAH, on vient définir
qu'est-ce qui est normal, qu'est-ce qui ne l'est pas, qu'est-ce qui est
vraiment une réalité TDAH et des comportements d'agitation et tout ça qui ne
méritent pas un tel diagnostic et qui sont certainement liés avec le
surdiagnostic. On parle de la notion, puis il y a des présentations précédentes
qui l'ont nommée, toute la notion de l'environnement de l'enfant qui peut faire
qu'il ait des comportements ponctuels. Il vit une crise à la maison, il vit une
situation difficile à l'école, alors ça peut faire en sorte que, oui, on
observe, l'enseignant ou le parent observe plusieurs comportements, mais on
n'est pas dans le TDAH parce que c'est vraiment circonstanciel, périodique et
lié à ce que l'enfant vit.
D'ailleurs, j'ai vu dans un des articles
vos propos, puis dans le fond vous répondiez à la question «Quels sont les plus
gros défis des parents d'aujourd'hui?» On est bombardé d'information, de ce qui
devrait être la normalité et de ce qui ne l'est pas et de comparaisons à
travers des réseaux sociaux et des moyens de communication qui sont beaucoup
plus faciles. On a parlé beaucoup de pression scolaire, mais est-ce qu'il n'y a
pas aussi une pression des médias sociaux, où on est toujours, l'enfant est
toujours dans une comparaison, est toujours dans une réalité où il faut être
dans l'instantanéité. Est-ce qu'il n'y a pas cette réalité-là aussi qui ajoute
à la pression?
Mme Hébert (Ariane) : Bien,
je ne sais pas si c'est seulement les médias sociaux, mais je sais que
maintenant l'information circule librement, hein? Alors, par exemple si je
rencontre des difficultés avec mon fiston, mais je sais que la troisième
voisine a vécu des difficultés semblables et que maintenant son fiston est
médicamenté et qu'elle n'a plus besoin de mettre autant d'énergie et d'efforts
dans les devoirs et que lui siffle en allant à l'école, etc., j'ai accès à ça,
maintenant, comme information. Et c'est sûr que je peux regarder ça avec envie,
là, tu sais. Oui, cette notion-là, elle vient jouer, là, les parents donc sont
au courant un peu de tout ce qui se passe dans le voisinage et quand... des
fois, on entend parler des histoires d'horreur de la médication, mais on entend
aussi beaucoup les «success stories» et ça donne envie de vivre la même chose,
là.
Mme Sauvé : Vous savez, vous
avez parlé tantôt, puis c'est un principe que j'aime beaucoup entendre, le
coaching parental. On parle que dans les solutions pour l'enfant TDAH
diagnostiqué, on a parlé beaucoup de la médication, donc la prévalence qui a
monté en flèche, évidemment, c'est d'ailleurs au coeur du mandat qu'on a
aujourd'hui et qu'on a dans les jours qui sont liés à ce mandat-là de la
commission. Mais honnêtement, moi, je crois beaucoup à la modification du
comportement, l'implication des parents, des enseignants, une approche
collaborative entre professionnels et tout ça. J'y crois beaucoup, beaucoup.
J'ai...d'ailleurs j'ai étudié en psychologie en modification du comportement...
Mme Hébert (Ariane) : Ah!
bon.
• (12 h 10) •
Mme Sauvé : ...et donc, pour
moi, c'est, je trouve qu'il y a un effort qui serait mérité et peut-être
intéressant de faire valoir davantage l'approche psychosociale, qui malgré le
manque d'études, a fait en sorte qu'on passe par exemple d'une efficacité...
Mme Sauvé : ...et donc, pour
moi, c'est... je trouve qu'il y a un effort qui serait mérité et peut-être intéressant
de faire valoir davantage l'approche psychosociale qui, malgré le manque
d'études, a fait en sorte qu'on passe, par exemple, d'une efficacité du traitement,
quand on est dans le médicament, on peut passer de 60 % à 95 %, quand
on y ajoute l'approche psychosociale. Alors, comme clinicienne, c'est une
approche, bien sûr, que vous mettez en place avec le coaching parental. Je vois
aussi par exemple l'institut Douglas, à Montréal, qui a développé beaucoup,
beaucoup cette approche-là psychosociale. Alors, est-ce que ça ne mériterait
pas, cette alternative, d'être davantage fouillé, d'être davantage documenté
puis d'être un peu mis de l'avant?
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, tout à fait, moi, je suis 100 % d'accord avec ce que vous dites, en
mettant toujours le bémol, puis je ne veux pas être négative dans mes propos,
mais en vous rappelant que c'est difficile, c'est beaucoup de travail, parce
qu'on fait face à des familles dont les parents ont souvent eux-mêmes ce type
d'enjeu là, alors ça complique d'autant plus l'intervention. Mais, ceci étant,
on ne baissera pas les bras parce que c'est difficile, n'est-ce pas? Alors,
oui, tout à fait, je suis de cet avis-là.
Mme Sauvé : Une autre
question, d'ailleurs, je l'ai lu dans votre mémoire, vous avez questionné le
fait que le traitement par le médicament à long terme peut amener des effets et
sur la santé et sur le comportement de l'enfant ou de l'adulte. Hier, on a
entendu, de la part d'un autre clinicien, un neuropsychologue qui est venu nous
dire que, finalement, il n'y a pas véritablement de suivi, dans la ligne du
temps, là, il n'y a pas vraiment de suivi, de réévaluation de la situation pour
s'assurer que le médicament mérite encore... parce que, dans plusieurs cas, il
nommait que des enfants diagnostiqués TDAH, rendus à l'adolescence, il y en a
plusieurs qui ne l'ont plus, et pourtant, parce qu'il n'y a pas eu de suivi et
de réévaluation, ils continuent à prendre le traitement. Est-ce que, pour vous,
c'est un élément important qui mériterait d'être corrigé?
Mme Hébert (Ariane) : Bien,
en fait, c'est vrai, j'abonde dans le même sens, là, il n'y a pas réellement de
suivi. Et, même quand les parents vont me dire : Est-ce que c'est
nécessaire de revenir faire réévaluer l'enfant, parce qu'on m'a dit
qu'ultimement j'ai juste à essayer d'arrêter la pilule pour voir s'il l'a
encore ou pas?, je suis toujours un petit peu estomaquée. Donc, oui, on devrait
investir davantage dans ce suivi-là. Là, j'ai perdu le reste de votre question.
Est-ce que j'ai répondu?
Mme Sauvé : Oui.
Mme Hébert (Ariane) : O.K.
Mme Sauvé : Je pense que vous
avez bien répondu, très bien même. Est-ce que j'ai encore un peu de temps?
Le Président (M. Provençal)
: Une minute.
Mme Sauvé : Très rapidement,
l'apport des tests psychométriques, il n'y en a pas qui sont directement en
corrélation avec le diagnostic comme tel, mais ce sont des bonnes mesures à
défaut d'autre chose. Est-ce que... Parce que j'ai vu aussi que dans vos propos
vous disiez que... manque de ressources, et tout ça, vous n'aviez pas toujours
le temps, je ne parle pas de vous, mais de façon générale...
Mme Hébert (Ariane) : Oui,
oui, je comprends.
Mme Sauvé : ...on s'entend,
que, donc, le test psychométrique n'est pas toujours au coeur de l'évaluation
vers le diagnostic. Est-ce que c'est important, pour vous, le test?
Mme Hébert (Ariane) : Bien,
en fait, les tests psychométriques, pour ma part, sont hyperimportants, mais,
en même temps, je le répète, ce sont des critères comportementaux, donc... Et
l'autre chose, c'est que les tests psychométriques peuvent montrer des lacunes
qui ne sont pas articulées dans la vraie vie. Alors, c'est là où je
disais : Tu sais, il faut faire attention, là, on ne donne pas un
diagnostic préventif. Donc, même s'il y a des lacunes très importantes au test,
mais que l'enfant siffle, est bourré de bonheur et puis qu'il n'y a pas
d'atteinte dans sa vie, il n'a certainement pas un trouble, cet enfant-là. Ça
fait que c'est dans cette optique-là, là, qu'il faut faire la part des choses
avec les tests.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Mme Sauvé : Merci, Mme
Hébert, merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je vous
en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais céder maintenant la parole au député de
Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci. Bonjour,
Mme Hébert. Merci pour votre présentation. À quel point, selon vous, doit-on
changer la société pour que diminue la pression de performance qui est imposée
aux enfants?
Mme Hébert (Ariane) : Bien,
écoutez, en fait, changer la société, c'est un gros mot. J'aurais envie de vous
dire qu'il faudrait, je crois, outiller les parents ou les aider à comprendre
que la souffrance contrôlée, c'est un processus d'apprentissage nécessaire.
Donc, ce n'est pas nécessaire de mettre son enfant dans une bulle de verre pour
s'assurer de sa réussite, au contraire, ça lui nuit. Donc, dans cette
optique-là, vivre des enjeux, rencontrer des difficultés, surmonter des
embuches, ça devrait faire partie de l'éducation, puis là je pense que notre
courant va à l'encontre de ça. Et puis je me fie beaucoup aussi sur
l'augmentation des traits anxieux qu'on décrit aussi dans les médias, là, et
encore une fois, dans mon expérience clinique, là, j'ai envie de vous dire,
quand je pose la question aux parents : Est-ce que votre enfant est
anxieux?, une majorité va me dire oui. O.K. Maintenant, comment? Comment
voyez-vous ça? Bien, vous savez, il a mal au ventre avant sa présentation orale
ou il s'endort tard la veille de la rentrée scolaire. On est dans de la
normalité, là, hein? Donc, c'est...
Mme Hébert (Ariane) : ...quand
je pose la question aux parents : Est-ce que votre enfant est anxieux?,
une majorité vont me dire oui. O.K. Maintenant, comment? Comment voyez-vous ça?
Bien, vous savez, il a mal au ventre avant sa présentation orale ou il s'endort
tard la veille de la rentrée scolaire. On est dans de la normalité, là, hein?
Donc, c'est... Et puis on ne veut pas intervenir. On veut que, la veille d'un
examen, il soit un peu anxieux parce que peut-être qu'il va se mobiliser à
étudier.
Ça fait que, donc, c'est la même chose ici
à tous les niveaux, là. Donc, ce constat que je fais dans mon bureau, je pense
qu'il est répandu, là. On cherche à éviter le déplaisir à nos enfants à tout
prix. Ce n'est pas une bonne chose.
M. Zanetti : Donc, c'est moins
dans une optique de les faire avoir le meilleur résultat possible que... ce que
vous sentez, là, c'est qu'on veut leur éviter des difficultés...
Mme Hébert (Ariane) : Exact.
M. Zanetti : ...puis des
échecs.
Mme Hébert (Ariane) : Tout à
fait, oui.
M. Zanetti : Le système d'éducation
va aussi un peu dans ce sens-là. Je ne sais pas si j'ai encore des secondes...
Le Président (M. Provençal)
: Oui, il reste 40 secondes.
M. Zanetti : O.K. Dans le système
d'éducation, justement, on a beaucoup parlé de la question des notes, hein, des
notes, qu'on essaie de faire éviter l'échec le plus possible et éviter de
redoubler aussi. Est-ce que, selon vous, cette façon de voir l'éducation va
être un peu dans la même ligne que celle qui veut nous faire éviter...
Mme Hébert (Ariane) : Je
pense que oui. Moi, je ne suis pas de cet avis-là, qu'on ne devrait pas faire
redoubler, tout ça. Puis, encore une fois, l'intention est souvent très
bienveillante, on ne veut pas que l'estime de l'enfant soit fragilisée, etc.,
mais, encore une fois, si je peux me permettre l'expression, là, «life is
tough», puis c'est une bonne chose de l'apprendre puis d'apprendre à composer
avec ça. Ça fait que, donc, en mettant en sorte plein d'interventions qui
feront en sorte que l'enfant ne vivra pas ses difficultés, moi, je ne crois pas
qu'on est en train de l'outiller. Au contraire, je crois qu'on peut lui nuire.
M. Zanetti : Merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je vous
en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. La parole est maintenant au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Merci,
Mme Hébert.
Mme Hébert (Ariane) :
Bonjour.
M. Gaudreault : La question
qui tue : C'est quoi, être normal aujourd'hui pour un enfant? Avez-vous...
Si on n'a pas le temps dans le peu de temps que j'ai, vous nous enverrez une
annexe à votre mémoire, mais c'est quoi, la normalité aujourd'hui?
Mme Hébert (Ariane) : Bien,
la normalité, là, c'est... dépendamment de quel âge on parle, première des
choses, là, mais la normalité, ce n'est certainement pas ce que c'était voilà
15 ans. Ça, je suis capable de vous certifier ça. Maintenant, est-ce que je
suis capable d'établir toutes les balises de ce qui est normal? Bien, peut-être
en fonction d'un déficit d'attention on pourrait en jaser, mais je n'ai pas la
réponse ultime.
M. Gaudreault : Je m'y
attendais. Mais, je veux dire, la normalité a changé partout : dans le
reste du Canada, en Belgique, on a entendu parler de la Flandre hier par une
autre spécialiste, mais les niveaux de TDAH n'ont pas explosé comme ici, au
Québec. Alors, pourquoi notre normalité à nous ferait exploser le TDAH puis pas
la normalité d'autres sociétés occidentales comparables à la nôtre?
Alors, moi, je suis bien prêt à
dire : On est bons au Québec, comme vous l'avez dit, peut-être qu'on
décèle mieux puis on diagnostique mieux le TDAH, mais je ne peux pas croire
qu'on serait les seuls à bien faire ça. La normalité a changé partout, là.
Mme Hébert (Ariane) :
Probablement. Mais, vous savez, je suis allée au salon du livre à Paris, là,
puis les gens passaient à côté de moi puis ils me disaient : Mais c'est
quoi, ça, du TDAH?, chose qui n'arrive pas à Montréal, là. Ça fait que je ne
peux pas vous parler de tous les pays, mais, chose certaine, je le redis et je
pense qu'on connaît bien notre sujet au Québec et qu'on est bons. Peut-être,
peut-être qu'on surdiagnostique nos enfants parce qu'on est encore plus
préoccupés que d'autres pays ou d'autres cultures par leur bien-être, ça se
peut. Ça...
M. Gaudreault : Il faudrait
parler à un anthropologue.
Mme Hébert (Ariane) : Exact.
M. Gaudreault : Vous dites
dans votre mémoire, je pense que c'est vers la toute fin, là, vous parlez d'un
diagnostic — le dernier picot — «un diagnostic
rigoureusement posé». C'est quoi, un diagnostic rigoureusement posé? Est-ce que
c'est une contrevérification, est-ce que c'est une double validation?
Mme Hébert (Ariane) : Bien,
pour moi, un diagnostic rigoureusement posé, ça veut dire qu'on a fait le tour
du jardin. Donc, on a observé les comportements, on a pris en note les
comportements, mais on est allé voir plus creux. Donc : Votre enfant est
agité à table. O.K., il n'est pas capable de rester assis à table. Comment ça
se passe, le souper, chez vous? Ah! Vous êtes sept, en famille recomposée, la
télé est ouverte, la radio joue? Ah! Ça, c'est une évaluation rigoureuse. Parce
qu'être agité à table, là, ça ne dit pas grand-chose. Ça fait que c'est pour ça
que je vous dis ça. Dans le fond, ça prend une bonne évaluation psychosociale.
Il faut vraiment faire le tour du jardin.
M. Gaudreault : Merci.
Mme Hébert (Ariane) : Je vous
en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vous remercie, Mme Hébert, pour votre
contribution à nos travaux. Je suspends les travaux quelques instants afin de
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 20)
(Reprise à 12 h 22)
Le Président (M. Provençal)
: Maintenant, je souhaite la bienvenue aux représentants de
l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux.
Je vous rappelle que vous disposez de 10
minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec
les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter
votre exposé.
M. Boileau (Luc) : Très bien.
Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je me présente, Luc Boileau, je suis le
président et directeur général de l'Institut national d'excellence en santé et
services sociaux, qu'on appelle l'INESSS. Je suis accompagnée de Mme Sylvie
Bouchard, qui dirige la Direction du médicament, et de Mme Sylvie Desmarais,
qui dirige la Direction des services... non, des services sociaux. Parce qu'on
a l'esprit psychosocial aussi à l'INESSS.
Alors, permettez-moi d'abord de vous
remercier de nous permettre de venir rendre compte de nos travaux que nous
avons faits sur le TDAH, et tous les éléments qui s'y associent, au cours des
quelques récentes dernières années.
Comme vous le savez sans doute, l'INESSS
est une organisation assez jeune, elle a moins de 10 ans, et elle est le fruit
d'une fusion du Conseil du médicament du Québec et d'une agence d'évaluation
des technologies et des modes d'intervention en santé. Et, dans l'exercice de
ses fonctions, qui ont pour mission, pour l'essentiel, de promouvoir
l'excellence clinique et puis une utilisation efficace des ressources, d'une
façon très, très, très sommaire, elle fait quatre types de produits. Le
premier, ce sont des états de connaissance, donc qu'est-ce qui est connu sur un
sujet. L'autre, ce sont des états de pratique, comment pratiquons-nous ici, au
Québec, ou à travers le monde mais, mettons, au Québec, sur tel ou tel domaine?
On produit également des guides de pratique pour les cliniciens, qu'ils soient
médecins ou tout autre professionnel de la santé et des services sociaux, et on
produit également des avis.
Alors, lorsqu'on fait un avis, ce ne sont
pas des avis qui sont faits par le personnel de l'INESSS. C'est soutenu par le
personnel de l'INESSS, mais c'est articulé autour de l'expression de plusieurs
grands experts qui sont mobilisés pour faire ces avis-là avec nous, et que
c'est délibéré, avec plusieurs perspectives qui sont également économiques,
éthiques et, bien sûr, spécialisées.
Alors, dans ce contexte-là et dans le
cadre du chantier de la pertinence clinique, que le ministère mettait de
l'avant il y a quelques années, on a été mandaté pour faire des portraits de
prévalence de l'utilisation des médicaments spécifiques au TDAH au Québec mais
aussi en relief avec ce qui se passe au Canada. Puis on a bonifié aussi ces
portraits-là de portraits des services psychosociaux qui sont utilisés dans le
traitement du TDAH pour les Québécois de moins de 25 ans, donc du zéro à 25
ans.
Alors, force de ces constats, on a aussi
produit un avis. Puis c'est ce que je vous disais, un avis, donc, ça va
chercher les opinions d'expertises élargies et avec un processus délibératif
pour justement favoriser... ou, en fait, non, un avis sur la trajectoire
optimale des services pour les enfants, les adolescents, mais également les
jeunes adultes qui ont un TDAH. On a aussi fait un état de connaissance sur le
Concerta, qui est très utilisé, puis les médicaments génériques qui y sont
associés.
Et, plus récemment, nos avis ont été
faits, et nos documents... Nos rapports ont été faits en 2017 et 2018, mais,
plus récemment, au cours du printemps, on a remobilisé toutes les données pour
voir s'il n'y avait pas eu une évolution encore plus récente sur notamment
l'usage des médicaments dans ce domaine-là.
Alors, le TDAH, c'est un trouble très
fréquent, vous l'entendez...
M. Boileau (Luc) : ...nos avis
ont été faits et nos documents... Nos rapports ont été faits en 2017 et 2018.
Mais, plus récemment, au cours du printemps, on a remobilisé toutes les données
pour voir s'il n'y avait pas une évolution encore plus récente sur notamment
l'usage des médicaments dans ce domaine-là.
Alors, le TDAH, c'est un trouble très
fréquent. Vous l'entendez, j'imagine, depuis un certain temps. Ça atteint probablement
une personne sur 20, un enfant sur 20, plus souvent chez les garçons, deux à
quatre fois plus souvent chez les garçons, et ça peut être important. Ça peut
affecter bien sûr le développement des enfants, vous l'entendiez, sur le plan
social, émotionnel, intellectuel en plus de fragiliser à l'occasion bien sûr
des relations avec son milieu ou sa famille. La gravité des symptômes, ça peut
varier beaucoup, et à l'occasion, bien, ça peut être associé à des
comorbidités, que ce soient des troubles d'opposition, de délinquance ou même
de provocation. Ça en fait donc une situation qui est assez complexe puis qui
n'est pas homogène, et on sait maintenant qu'au moins 50 %, sinon les deux
tiers des enfants diagnostiqués, les symptômes principaux vont se poursuivre
vers l'âge adulte.
De notre côté, les études qu'on a faites
démontrent que l'approche thérapeutique, d'une façon générale, et il y a
plusieurs façons de faire ça, mais, en général, ce qui est recommandé, c'est
d'avoir une approche qui est multimodale, c'est-à-dire qui privilégie non pas
uniquement des approches pharmacothérapeutiques, donc des médicaments, mais qui
le conjugue aussi avec des interventions psychosociales. De ce côté-là, on a
remarqué que l'approche nord-américaine, d'une façon générale, va privilégier
une approche médicamenteuse, donc pharmacologique, et pour les enfants qui sont
pris avec ce problème de... qui sont âgés de plus de six ans, et puis qui peut
être maintenue aussi en combinaison avec d'autres services, ça va de soi. Par
contre, quand on se dirige vers l'Europe ou en Australie, on va voir que
l'approche pharmacologique est plus retenue pour un deuxième niveau
d'intervention : on va privilégier plus des approches psychosociales comme
point de départ puis on réserve ça pour des TDAH plus compliqués, plus sévères.
Alors, le Québec, comme le Canada, ce n'est pas très surprenant que ça
s'inscrive dans ce mouvement d'une utilisation un peu plus forte du médicament.
Quand on regarde maintenant... Et vous
avez les données, je crois, devant vous. Mais, quand on regarde la prévalence
de l'utilisation des médicaments pour le TDAH, au Canada, elle se situe à
autour de 4 %. En fait, c'est... nos données les plus récentes, qui datent
de 2017‑2018, c'est 4 %. Là, je ne veux pas vous noyer dans des chiffres,
mais ça va être important juste de calibrer ça. C'est 4 %; trois ans
avant, c'était 3,3 %. Donc, ça a augmenté d'une vingtaine de pour cent sur
la scène canadienne. Quand on regarde au Québec les données les plus récentes,
quand on les prend pour 2017‑2018 dans ce programme-là, quand on se compare au
Canada, c'est 8 %. Donc, on est le double de la moyenne canadienne, et là
je vous parle pour tous les enfants... bien, tous les enfants et les adultes de
18 à 25 ans, donc du zéro-25 ans. Quand on exclut le Québec du
Canada — là, c'est juste pour des questions, là, de chiffres, là,
bien sûr... Non, non, mais je viens juste d'y penser en vous voyant, là. Mais,
quand on exclut le Québec du Canada dans les données,là, ça change, parce que
le Québec a un poids important sur le plan populationnel. Alors, on arrive à
une distinction où, il y a un an ou deux ans, c'était 2,9 % de tout le
Canada excluant le Québec et au Québec 8,1 %. Donc, c'est plus que trois
fois plus que le reste du Canada. Donc, l'élément distinctif ici marque plus.
• (12 h 30) •
Quand on s'en va du côté de notre
programme, ici, le régime public d'assurance médicaments, alors on voit que
depuis 2012, 2012‑2013 jusqu'à 2018‑2019, donc le plus récent qu'on a, on est
passés de 5 % à 7,6 %, donc une augmentation de 50 % sur une
période de six ans. Sur la médication au complet, là, je vous parle du nombre
de personnes de zéro-25 ans qui reçoivent un médicament comme ça. Mais, quand
on regarde de façon plus fine qui a... pas bénéficié, mais qui a... où est-ce
qu'on a vu cette croissance-là, on voit que ça se distingue entre les groupes
d'âge. Donc, le zéro à cinq, six ans, il y a... c'est à peine 1 % ou
0,9 %, il n'y a pas eu de changement, à toutes fins utiles. Le cinq ans à
neuf ans, il y a eu un léger changement... bien, léger, 12 % de plus sur
l'espace de ces six, sept dernières années. Quand on va sur la cohorte du 16...
excusez-moi, du 10 à 12 ans, on a augmenté de 13 %, et c'est dans ce
groupe-là où on le prescrit le plus. C'est 15 % des jeunes qui ont... qui
reçoivent ça, donc c'est un peu plus qu'un sur sept. Mais c'est dans le groupe
du 13 à 17 ans où là on a vraiment connu l'augmentation de 50 % dans les
dernières six, sept ans et c'est surtout dans le groupe du 18 à 25 ans où là, ça
a passé du simple au triple, O.K. Donc, le poids de répartition de...
12 h 30 (version non révisée)
M. Boileau (Luc) : ...sur
sept, mais c'est dans le groupe du 13 à 17 ans, où là on a vraiment connu l'augmentation
de 50 % dans les derniers six, sept ans, et c'est surtout dans le groupe
du 18 à 25 ans, où là, ça a passé du simple au triple. O.K. Donc, le poids de
répartition de ces prescriptions ou ces utilisations-là se différencie selon
l'âge. Et, plus le temps passe, plus on voit que les cohortes un peu plus
âgées, là, ce n'est pas très âgé, là, mais de 13 à 17 et 18-25, vient en
reprendre beaucoup plus, le reste étant en augmentation, mais jamais de
l'importance de ces deux autres groupes là.
Ce qu'on voit aussi au Québec, c'est des
disparités régionales importantes. Donc, on se retrouve avec des profilages qui
nous montrent que, par exemple, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, la moyenne globale
du 0-25 est, sur nos dernières données, 2018‑2019, ce sont les plus récentes,
est à 14,2 %; Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, 13 %; le
Bas-Saint-Laurent, autour de 12,9 %; la Côte-Nord, 12 %. Donc, c'est
des pourcentages élevés. Ce que je veux vous faire remarquer ici surtout, pour
le bénéfice de vos études, c'est que Montréal est à 3, quelque chose comme
3 %, 3,1 %; Montréal, là, ça se compare tout à fait avec ce qui se
passe sur le reste du Canada, l'île de Montréal; Laval, c'est 4,3 %. Donc,
déjà, on passe de Montréal à Laval, on va augmenter de 40 %, là, en moyenne.
Et on traverse puis on s'en va à Lanaudière, là, on tombe à 12 %
pratiquement. Donc, on passe du simple, au triple, au quadruple, en traversant
des rivières. Il n'est pas question ici d'un pont qui change tout ça, mais les
comportements prescriptifs ou les comportements des enfants, ce qui serait
étonnant, se différencient, du moins, dans la perception qu'on a et
l'utilisation des médicaments. Donc là, vous voyez l'expression de variation
régionale importante.
Le Président (M. Provençal)
: Conclusion.
M. Boileau (Luc) : En
conclusion. Je vous dirais qu'on utilise beaucoup le Concerta, très peu le
Ritalin, mais que, surtout, on a fait des études au niveau des services
psychosociaux, puis on a recommandé une trajectoire qui tenait compte de toutes
ces variations-là en, d'abord, centrant une approche sur les besoins et les
jeunes et leurs familles, en amont du diagnostic, l'accès à des programmes
d'entraînement aux habilités parentales pour les enfants d'âge préscolaire qui
ont des difficultés apparentées au TDAH, l'accès à des interventions sociales à
chacune des étapes, un processus d'évaluation qui prend compte du portrait
psychosocial des enfants, tant le portrait psychosocial, que la santé physique,
psychologique et scolaire et la mise en place de mécanismes de liaison entre le
milieu scolaire et les services sociaux, et ce, même s'il y a des questions qui
persistent.
Et la dernière touche que je vous dirais,
c'est qu'on le sait que c'est... 70 %, ce sont des prescriptions faites
par les omnipraticiens qui n'ont pas toujours, comme c'est témoigné,
l'opportunité de faire des diagnostics complets, être appuyés par des
mécanismes de diagnostic qui sont plus disponibles pour ceux qui peuvent se les
payer, parce que le réseau, les réseaux sociaux... de services sociaux, comme
les réseaux d'éducation, ne peuvent pas le fournir au complet, mais que, malgré
tout, dans nos efforts et avec les experts que nous avons consultés, on
n'arrive pas à dire s'il y a surmédication, surutilisation des médications,
mais ce qu'on sait, c'est qu'on l'utilise beaucoup ailleurs. Il y a différentes
hypothèses pour expliquer ça, et ça va nous faire plaisir de répondre à vos
questions. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci pour votre exposé. Alors, la députée de Lotbinière-Frontenac
va initier la période d'échange.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Bonjour. Merci pour votre présentation. Moi,
je suis quand même très surprise de voir les chiffres, puis concernant les
groupes d'âge, plus que la personne avance en âge, plus qu'il y a de la
médication, puis aussi les disparités régionales. Comment vous pouvez expliquer
ça?
M. Boileau (Luc) : Si vous me
permettez, M. le Président, la première chose, c'est que, plus on avance en
âge, plus on voit qu'il y a une augmentation de la prescription au fil du
temps, mais il n'en demeure pas moins que c'est le groupe de 10 à 12 ans chez
qui on prescrit le plus. Ce que nous notons, c'est que les comportements
prescriptifs n'ont pas beaucoup changé au Québec, pas beaucoup changé pour les
enfants de zéro à cinq, de six à neuf, et de 10 à 12, au fil des six, sept
dernières années. Toutefois, pour les 13 à 17 et les 18 et plus, là on a vu une
augmentation de la prescription, donc de l'utilisation de ces médicaments-là,
mais ils demeurent moindres que ceux qui ont 10 à 12 ans, d'une part. Juste
pour bien clarifier ça, c'est qu'on voit... tu sais, on dit souvent : Ça
augmente sans fin. Bien, un instant, ça augmente, oui, mais pas pour tous les
groupes d'âge. On le voit plus marqué chez les 13, je me répète, là, du 13 à...
M. Boileau (Luc) : ...de ces
médicaments-là, mais ils demeurent moindres que ceux qui ont 10 à 12 ans, d'une
part. Juste pour bien clarifier ça, c'est qu'on voit... tu sais, on dit
souvent : Ça augmente sans fin. Bien, un instant, ça augmente, oui, mais
pas pour tous les groupes d'âge. On le voit plus marqué chez les 13 à... je me
répète, là, du 13 à...
Une voix
: 10-12.
M. Boileau (Luc) : Bien,
10-12, non, c'est... ça a augmenté de 13 %, le 10-12, au fil des dernières
années, je crois. Peut-être que ma collègue va dire que j'ai erré, et ça me
ferait plaisir d'être corrigé si c'est le cas, bien, plaisir, c'est un gros
mot, mais... Alors, le point, c'est qu'on observe des variations régionales qui
sont importantes, on n'arrive pas à mettre le doigt là-dessus. Y a-t-il des
variations chez les enfants d'une région à l'autre? Ce serait extrêmement
étonnant. On parle plutôt d'autres variables, peut-être la disponibilité
d'autres services, le fait que les familles peuvent vouloir se restreindre...
dans des comportements différents, selon des zones démographiques, mais on
n'arrive pas à mettre le doigt dessus. Ce qu'on sait, toutefois, c'est qu'on
est capable sans doute de pouvoir granulariser ça, donc avoir des données
beaucoup plus fines. Parce qu'une région, c'est grand, hein, et il pourrait y
avoir un groupe, une clinique qui prescrit plus qu'une autre, puis on peut
avoir des moyennes qui s'allongent. Donc, il y aurait moyen d'approcher ça sur
une base plus, je dirais, raffinée, plus locale, ce que nous n'avons pas l'occasion
de faire jusqu'à maintenant, mais nous serions disposés à le faire.
Excusez-moi, M. le Président, mais est-ce que mes collègues...
Le Président (M. Provençal)
: Maintenant, M. le député de Dubuc.
M. Tremblay : Bonjour. Merci
pour la contribution. Dites-moi, on parle de la gratuité des médicaments 18-25
ans inscrits au régime public d'assurance. Comment, selon vous, on peut
expliquer qu'on arrive à ouvrir le bar? Comment on en arrive, historiquement, à
se dire, comme société, en tout cas, au niveau de la santé aussi : C'est
gratuit? Est-ce que vous comprenez le sens de la question?
M. Boileau (Luc) : M. le
Président, est-ce que... Mme Bouchard, qui est la directrice du médicament.
Mme Bouchard (Sylvie) : En
fait, les assurés dans le régime public qui sont aux études à temps plein et
qui peuvent le démontrer ont accès à cette gratuité-là, ça fait partie du
régime public d'assurance médicaments. Et ça, c'est une grande distinction, peut-être
que ça peut expliquer des différences, notamment avec d'autres juridictions ou
d'autres provinces canadiennes qui n'ont pas ces mêmes couvertures d'assurance
médicaments.
M. Tremblay : O.K. Avez-vous
répertorié, dans le cadre de votre travail, l'évolution de ce qu'on pourrait
appeler une démarche ou un protocole, peut-être que vous avez les meilleurs
termes que moi pour l'exprimer, mais qui vont nous mener vers des cas précis ou
un échantillonnage jusqu'au diagnostic. On parle de disparités avec les régions
par rapport à des grands centres, par exemple. Est-ce que le fait qu'en région
on ait moins d'effectifs... réduisent la chaîne de travail qui va nous mener
vers une certaine rigueur de précision? Comment... Avez-vous travaillé sur ces
aspects-là?
M. le Président, Mme Desmarais, qui est la
directrice des services sociaux, va répondre.
Mme Desmarais (Sylvie) : En
fait, dans nos travaux et dans les consultations qu'on a faites auprès
d'experts, auprès de professionnels, gestionnaires, et auprès d'usagers, ce
qu'on remarque , c'est... d'abord, ce sont les médecins qui sont consultés dans
un premier temps pour avoir accès à un diagnostic. Alors, c'est sûr que les
familles qui n'ont pas accès à des médecins, déjà là, c'est plus difficile.
Mais, par ailleurs, on remarque aussi, dans le cadre de nos travaux, que la
tendance à la montée du diagnostic et de la médication... l'accès aux services
sociaux n'a pas suivi cette même tendance-là. Alors, dans nos travaux, ce qu'on
a pu relever de la part des familles et des experts, c'est que, très souvent,
après un diagnostic, ça peut prendre jusqu'à... pour 50 % des gens, ça
prenait jusqu'à un an pour avoir accès à des services psychosociaux, et
23 %, ça pouvait prendre jusqu'à cinq ans. Alors, c'est sûr que l'organisation
des services dans les régions... sont très variables également et on a pu le
constater, là, dans nos travaux, et c'est cet accès-là aux services
psychosociaux qui est beaucoup plus difficile, dépendamment des régions aussi.
M. Tremblay : Je continue?
Le Président (M. Provençal)
: Je reconnais le député de Richmond.
M. Tremblay : Oui.
• (12 h 40) •
M.
Bachand
: Merci
beaucoup, M. le Président, c'est intéressant. Malheureusement, c'est intéressant.
Alors donc, les chiffres que vous nous donnez, c'est négatif. Et puis,
lorsqu'on regarde la courbe, elle s'accentue, et si on prend comme prémisse que
cette maladie est génétiquement... est dans les gênes, dans 15 ans, au Québec,
on va se retrouver avec, quoi, le tiers de la population qui va être
médicamentée, si... c'est parce qu'il y a un aspect exponentiel, si on regarde
la courbe et si on prend comme prémisse, encore une fois...
M.
Bachand
:
...comme prémisse que cette maladie est génétiquement... est dans les gênes,
dans 15 ans, au Québec, on va se retrouver avec, quoi, le tiers de la population
qui va être médicamentée, si... c'est parce qu'il y a un aspect exponentiel si
on regarde la courbe et si on prend comme prémisse, encore une fois, que c'est
dans les gênes. Alors, c'est très... c'est dérangeant et, encore fois, ce n'est
pas un médicament sans conséquences secondaires. Il y a des effets secondaires
qui sont majeurs et on en parlait hier avec d'autres intervenants, entre
autres, des conséquences de l'alcoolisme, l'usage des drogues, etc. après, dans
l'âge adulte. Alors, donc, c'est extrêmement important.
J'aimerais vous entendre là-dessus, sur
un, mais vous avez des recommandations super intéressantes aussi et ça, je
pense que c'est... Vous en avez plusieurs, alors, j'aimerais aussi que vous
nous parliez des recommandations principales que vous aimeriez voir appliquées,
et ça, bien sûr, à très court terme.
M. Boileau (Luc) : M. le
Président, je vais juste distinguer deux réponses. La première, c'est qu'avec
ce que nous vous montrons, le côté exponentiel, il est juste lorsqu'on
l'agglomère pour le réseau... pour l'ensemble du 0-25 ans, c'est-à-dire le mot
«exponentiel»», mais une croissance importante, comme vous le soulignez, 50 %
depuis les six, sept dernières années. Mais lorsqu'on le distingue par groupes
d'âge, on voit qu'il y a une augmentation beaucoup moindre chez les jeunes
enfants, le 0-5 ans, les 6-8 ans... 6-9 ans et les 10-12 ans. Même le 10-12
ans, ça a baissé un peu dans les deux dernières, là, puis je ne veux pas dire
que, voici, on a tout changé, mais on voit que ça baisse un peu.
Là où ça augmente, c'est sur les 13 ans et
plus, 13 ans à 17 ans, 17 ans à 25 ans, et on n'a pas fait le 25 ans et plus,
et moi, je peux vous assurer qu'il y a de la consommation de médicaments. Il y
en a pour 200 millions actuellement au Québec, là, pour les 0-25 ans.
C'est 200 millions de dollars de médicaments qui sont dépensés là-dedans,
mais il y en a probablement en haut de 25 ans et si la tendance se maintient,
il va y en avoir encore.
Alors, c'est comme si la cohorte des
enfants de 10-12 ans, après 12 ans, on voulait continuer à leur en offrir, ou à
leur en donner... excusez-moi, on ne leur offre pas, mais on leur donne. Alors,
c'est ce qu'on voit, c'est une augmentation de ce côté et après l'âge adulte,
ou à l'arrivée de l'âge adulte, on dit : Bien, je pense que tu en as
encore besoin, ça fait qu'on continue. C'est dans ces groupes-là où on voit
cette augmentation. Mais il n'y a pas de signe comme quoi on augmente de plus
en plus pour nos enfants, nos jeunes enfants. Ça augmente un peu, mais jamais
de façon aussi grande que ces deux autres cohortes-là.
Maintenant, nos recommandations touchent
beaucoup la prise en charge, et le diagnostic, et le suivi, et je vais laisser
Mme Desmarais les rendre plus explicites.
Mme Desmarais (Sylvie) : En
fait, dans le cadre de nos travaux, on a fait une revue systématique des
meilleures pratiques aussi à travers le Canada, mais aussi à l'étranger et nos
recommandations s'appuient vraiment sur les meilleures pratiques qu'on a
recensées. Et ces pratiques-là touchent notamment l'importance d'une évaluation
complète. Je pense que vous l'avez entendu à plusieurs reprises, que
l'évaluation... le processus d'évaluation pour arriver à un diagnostic
mériterait d'être optimisé, je vais dire ça comme ça, pour vraiment avoir un
portrait à la fois psychosocial de l'enfant, un portrait scolaire, et un
portrait au plan clinique et psychologique, pour pouvoir établir réellement un
bon diagnostic pour les enfants, et ensuite décider s'il y a nécessité d'avoir
une médication. Alors, ça, c'est un premier volet de nos recommandations.
Un deuxième volet aussi qui est ressorti à
la fois dans notre recension, mais dans nos discussions avec les experts, et
les gens du réseau, et les parents, c'est celui d'avoir une fonction de liaison
entre le réseau de la santé et des services sociaux et le réseau de
l'éducation. Cette fonction-là, elle est importante, parce que parfois, ce sont
des intervenants qui ne maximisent pas la communication et pourraient davantage
profiter d'un système intégré d'évaluation et de prise en charge par la suite
par le milieu scolaire ou par le milieu de la santé et des services sociaux.
Autre élément dans nos recommandations et
celui d'une détection précoce aussi et on sait qu'au Québec actuellement, il y
a un projet qui s'appelle Agir tôt, là, qui se met en place dans les
différentes régions. Il est espéré que ça permette, justement, une détection
précoce de ce côté-là, mais qu'on puisse, dès lors qu'il y a des difficultés
apparentées au TDAH, qu'on puisse offrir aux parents des programmes d'habiletés
parentales. Actuellement, ces programmes-là se retrouvent dans l'ensemble du
Québec, la plupart du temps, mais sont souvent ciblés pour des clientèles très
vulnérables. Alors, des gens qui présentent certaines difficultés ne sont pas
toujours éligibles à ce type de programme là. Donc, il faudrait assurer une
plus grande accessibilité pour les parents lorsque l'enfant est plus jeune.
Bien sûr aussi, c'est d'offrir des
interventions psychosociales à toutes...
Mme Desmarais (Sylvie) :
...Alors, des gens qui présentent certaines difficultés ne seront pas toujours
éligibles à ce type de programme là, donc il faudrait assurer une plus grande accessibilité
pour les parents lorsque l'enfant est plus jeune. Bien sûr, aussi c'est
d'offrir des interventions psychosociales à toutes les étapes, qu'on pense à la
détection, qu'on pense à l'évaluation, mais aussi en cours de suivi de la
personne ou du jeune qui doit être aussi réévalué et non pas vu dans un
contexte, là, juste d'évaluation et de diagnostic.
L'autre élément aussi, et je sais que la
personne qui était avant nous l'a mentionné, l'importance de la sensibilisation
et de la formation des intervenants à la fois du réseau de la santé et des services
sociaux, mais également du réseau de l'éducation pour vraiment parfaire nos connaissances
autour du TDAH et s'assurer d'avoir une vision commune ensuite des interventions
qui doivent être offertes, bien sûr, dans le milieu scolaire, mais aussi par
des intervenants de la santé et des services sociaux. Alors, c'est l'essentiel
de nos recommandations, qu'on espère porteuses.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour. Merci
beaucoup pour votre présence aujourd'hui. Je me demandais s'il n'y avait pas un
lien entre le fait que le 10-12 il y ait une augmentation assez forte. Est-ce
que vous pensez qu'on peut quelquefois confondre les symptômes, bien, en fait,
les comportements liés à l'adolescence, et le TDAH?
Mme Desmarais (Sylvie) : Je
peux me permettre de répondre?
M. Boileau (Luc) : C'est parce
que je pensais à mes enfants, mais allez-y.
Mme Desmarais (Sylvie) :
Alors, peut-être une petite nuance. Oui il y a une augmentation, mais ce n'est
pas la plus grande augmentation dans cette strate d'âge là. Mais oui les
experts, les parents et les gens du réseau nous ont dit parfois qu'il y a une
confusion entre les différents symptômes et que toute l'importance d'un
diagnostic différentiel aussi, parce qu'on parle beaucoup des troubles anxieux
aussi actuellement chez les enfants, les adolescents, alors ça prend vraiment
un diagnostic différentiel et ça prend les bonnes interventions. On vous l'a...
Dr Boileau vous l'a présenté tantôt.
Ici, l'approche, elle est davantage vers
une approche de première intention médicale et de deuxième intention
psychosociale alors que, peut-être, il faudrait regarder aussi tout le volet
psychosocial, dès le départ, pour voir à ne pas surmédicaliser non plus les
enfants à cet égard-là. Alors, ça a été relevé par les parents, cette
inquiétude-là, de différents diagnostics qui amènent une certaine comorbidité
aussi dans certaines situations.
M. Boileau (Luc) : Mais de
façon...
Le Président (M. Provençal)
: Oui, allez-y.
M. Boileau (Luc) : J'allais
dire : on ne soupçonne pas que les enfants au Québec soient différents des
enfants d'ailleurs au Québec ou d'ailleurs au Canada sur ces comportements, il
n'y a pas de logique qui nous permettrait de dire ça. Si c'est le cas, là,
c'est vraiment très bien camouflé. Mais ici, l'enjeu, c'est : il y a un
accès à la médication qui semble plus rapide. Et puis est-ce que c'est le reste
du Canada qui ne suit pas le pas, est-ce que c'est nous? Ça, les experts...
écoutez, c'est sérieux, là, les experts ne s'entendent pas de façon absolue, de
dire : C'est clair qu'il y a une surprescription. Mais tout le monde
s'entend qu'il y en a beaucoup, puis qu'il ne faudrait pas commencer à
dire : Il me semble qu'il en manque, qu'ils en mettent plus. Là, on n'est
pas là. Mais cet espace de diagnostics, entre le diagnostic qui est souvent
fait dans des contextes un peu plus rapides, sans doute, n'est pas outillé avec
tout l'arsenal qui pourrait être pris, et cette tendance à prescrire et à
suivre ce qui peut être remis en question, je crois, et tous les intervenants,
très franchement, que nous avons eu à rencontrer à partir de l'INESSS et à
travers tous les travaux qu'on a faits, sont très ouverts à ça.
Donc, il n'y a pas une résistance à
dire : Non, non, non, il faut continuer, etc. Ce n'est pas ça. Et je me
répète encore, le 10-12 ans est relativement stable. Il reste élevé, on
est à presque 15 %, donc 94,9 %, là, l'année passée, des enfants de
10-12 ans à travers le Québec, qui utilisent ça et, bien sûr, il y a des
régions que c'est plus encore, mais... et donc c'est la plus forte cohorte, et
l'augmentation, elle est après. C'est comme si on se disait : Bon, il me
semble que ça va bien, là, alors je pense qu'on devrait le continuer. C'est ça
qu'on voit dans le comportement prescriptif.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous cédons maintenant la parole à la
députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci beaucoup,
M. le Président. Alors, M. Boileau, Mme Breton, Mme Bouchard,
Mme Desmarais, un plaisir de vous avoir aujourd'hui. À vrai dire, c'est un
privilège de vous avoir à cette commission parce que votre expertise et votre
portrait ont permis de sonner un peu, en quelque sorte, l'alarme et puis de
nous faire réfléchir collectivement à cette situation et ce portrait
excessivement préoccupants.
• (12 h 50) •
On a eu, depuis quelques jours, beaucoup
d'éclairages qui nous sont venus des professionnels de la santé et aussi des
cliniciens, et j'aimerais peut-être axer plus mes questions, parce que vous...
Mme Sauvé : ...sorte, l'alarme
et puis de nous faire réfléchir collectivement à cette situation et ce portrait
excessivement préoccupant.
On a eu, depuis quelques jours, beaucoup
d'éclairages qui nous sont venus des professionnels de la santé et aussi des
cliniciens, et j'aimerais peut-être axer plus mes questions... Parce que vous
êtes dans des pistes de solution très concrètes.
Je suis très heureuse, dans ma vie, de
m'être un jour inscrite à un cours de lecture rapide parce que ça a été très
bénéfique aujourd'hui. Alors, j'ai passé un peu à travers les différentes
recommandations, et évidemment ça va dans le sens de ce que vous avez constaté,
mais je voudrais un peu les passer rapidement avec vous, si vous me le
permettez, parce qu'il y en a tellement. Sur les 18, il y en a une grande
majorité qui sont absolument essentielles, puis j'aime beaucoup savoir qu'elles
sont inspirées des bonnes pratiques. Alors, on part de quelque chose qui
fonctionne déjà très bien.
Quand je lisais votre coup d'oeil sur le
TDAH, évidemment, le constat, il était très clair qu'en termes d'approche
collaborative entre les professionnels, les gestionnaires des CISSS et des
CIUSSS et le réseau scolaire il y a quelque chose à vraiment améliorer. Alors,
je pense que c'est au coeur de votre recommandation 1 et c'est effectivement
très important.
La recommandation 2, qui est autour de la
détection précoce, je vous dirais que j'ai une certaine préoccupation, un
certain bémol parce que j'ai entendu ce que j'ai entendu depuis quelques jours,
et on a bien nommé la question, même tantôt, de la normalité, qu'est-ce qui est
dans la normalité. L'enfant qui vit une situation particulière, ponctuelle, qui
a peut-être quelques symptômes mais pas l'entièreté des symptômes et donc pas
de TDAH... Alors, comme l'observation n'est pas à ce point rigoureuse, malgré
le bon vouloir tout le monde, moi, la détection précoce, avec ce que j'ai
entendu, sans dire que je suis contre... Je serai toujours pour le principe,
mais, dans les faits, je pense qu'il y a un autre travail à faire pour que ça
se fasse de la meilleure des façons.
La recommandation 3, vous avez parlé de
trajectoire, c'est tellement important, entre le traitement médical, le
médicament et l'intervention psychosociale. Est-ce qu'il n'y a pas là... Pour
que cette recommandation-là puisse se vivre, est-ce qu'il n'y a pas là une
culture à changer? Un médecin de famille, qui va avoir devant lui un patient
qui est en dépression sévère, automatiquement... puis qui est à risque de crise
suicidaire, automatiquement, il va avoir une référence vers un psychologue ou
un psychiatre, mais on n'en est pas là par rapport à la référence vers une
intervention psychosociale de la part du médecin de famille... en tout cas, je
ne le pense pas, puis les constats semblent assez clairs là-dessus. Ça fait que
moi, je crois beaucoup à votre recommandation 3 dans une approche globale,
mais, en même temps, il y a un grand travail à faire, je pense.
Je ne sais pas si vous pouvez me clarifier
un peu comment vous voyez l'application directe de cette recommandation 3,
comment on change la culture, comment on fait en sorte que les médecins de
famille vont avoir le réflexe de faire un traitement qui inclut l'intervention
psychosociale davantage.
M. Boileau (Luc) : Je vais
laisser Mme Desmarais expliquer plus à fond, mais, somme toute, l'idée
maîtresse en arrière de ça pour la détection, là, si je reprends l'élément
détection, ce n'est pas pour encourager le fait qu'on vient de trouver quelque
chose chez un enfant puis on va le médicamenter. C'est vraiment pour favoriser
un repérage plus facile et une habilitation des parents dans des contextes qui
ne sont pas de stigmatiser les enfants mais plutôt de reconnaître que... ah!
bien, il y a peut-être des habilitations que je peux aller me chercher pour des
situations qui pourraient s'avérer un petit peu plus compliquées. Alors, Mme
Desmarais pourra...
Mais la tendance dans la trajectoire,
c'est vraiment de resserrer les mailles. Elles sont... Il y a un tissu de
services, qui est là. Sans doute qu'il pourrait être rendu plus visible et plus
accessible dans certaines zones et pour certains cas, mais, de resserrer les
mailles, donc une coordination plus forte, que vous retrouvez à un autre
endroit... mais de faire en sorte qu'il n'y ait pas ces délais très allongés
qui ont été témoignés par les études que nous avons faites, par les témoignages
qu'il y a eu. Et les intervenants qui vous font ces recommandations-là, qui
sont portées par nous mais qui viennent des experts mobilisés là-dessus, jugent
qu'il y a... c'est vraiment ce tissu-là et c'est possible de le faire.
C'est possible de le faire, et on le fait
dans d'autres contextes, soit le diabète type 2, la prise en charge des maladies
pulmonaires obstructives chroniques, qui sont dans tout autre chose, là, mais
c'est possible de le faire ici. C'est l'alliance services sociaux et services,
entre guillemets, médicaux. Là, je ne veux pas faire une distinction massive,
mais ce maillage-là, c'est ce qui est attendu...
Une voix
: Et
scolaires.
M. Boileau (Luc) : Et
scolaires, effectivement, et scolaires.
Mme Desmarais (Sylvie) :
C'est ça. Écoutez, Dr Boileau a très répondu à votre question...
M. Boileau (Luc) : Donc, on
passe.
Mme Desmarais (Sylvie) :
J'ajouterais simplement, par rapport à la détection... Je comprends très bien
votre souci. Ce que les parents, les experts et les gens du réseau nous ont
dit, c'est toute l'importance d'offrir des services dès que se présentent des
difficultés ou des apparences de difficultés pour vraiment limiter...
Mme Desmarais (Sylvie) :
...la détection. Je comprends très bien votre souci. Ce que les parents, les
experts et les gens du réseau nous ont dit, c'est toute l'importance d'offrir
des services dès que se présentent des difficultés ou des apparences de difficulté
pour vraiment limiter les dégâts, si je peux m'exprimer ainsi, de façon... Ce
n'est pas d'avoir plus de détection de TDAH, mais bien s'assurer justement
qu'on peut offrir à toutes les étapes des services dès qu'une difficulté est
repérée pour soutenir les parents et soutenir les jeunes.
Mme Sauvé : Combien de
temps me reste-t-il? Cinq minutes? Je vais accélérer. Je voulais... La recommandation 4,
je voulais juste vous le nommer parce que j'ai une petite préoccupation quand
on parle d'un même processus pour le scolaire puis la santé, partager l'information
clinique. C'est parce qu'au niveau du réseau scolaire, on n'est pas dans une
information clinique à mon avis. Ça fait que je voulais juste... Écoutez, la
majorité des recommandations qui suivent, c'est extraordinaire, mais je
voudrais particulièrement vous dire à quel point c'est important, votre
recommandation 7, 8 et 9. L'intervention pharmacologique, l'approche
personnalisée. Puis j'imagine que vous inspirez de bonnes pratiques, comme vous
l'avez dit, dans d'autres endroits. Donc, c'est excessivement important. La 8
qui parle de faire un suivi, une révision, je ferais un peu le lien avec votre
recommandation 14 où on dit... La transition vers l'âge adulte, on en a
parlé précédemment avec d'autres présentations, à quel point c'est quelque
chose qui est mis de côté pas mal. Donc, est-ce qu'on peut s'assurer qu'on suit
le jeune, le patient et tout ça pour s'assurer qu'il n'est pas surmédicamenté
au fil de l'âge? Et donc, ça, je trouve ça très important.
Et évidemment la place des interventions
psychosociales, ça revient, ça revient beaucoup. Moi, je vous dirais que dans
la recommandation 11, vous avez fait une liste des interventions
psychosociales efficaces et vous avez mis comme quatrième picot les
interventions qui ciblent à la fois l'enfant et les parents. J'aimerais
tellement voir ça comme premier picot parce qu'en même temps... En même
temps... Puis je ne sais pas ce que vous en pensez, mais quand on est en train
de travailler de façon globale avec l'environnement familial qui est tellement
important pour l'enfant, est-ce que vous ne trouvez pas que c'est effectivement
une priorité?
M. Boileau (Luc) : Vas-y.
Mme Desmarais (Sylvie) :
Si je peux répondre à votre question, en fait, vous voyez, la référence aux
quatre petites étoiles, c'est en fait qu'on n'a pas pu démontrer dans cet
énoncé-là une démonstration scientifique, c'est-à-dire dans la littérature
scientifique. Toutefois, ça a été vraiment un consensus d'experts autour de
cette importance-là d'avoir des interventions qui ne ciblent pas juste les
jeunes non plus, mais les parents. Et un peu plus tôt je vous parlais de
l'importance d'avoir accès pour les parents à des programmes qui développent
les habiletés parentales. Bien, c'en est une manifestation, une intervention
possible.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup. Il me reste...
Le Président (M. Provençal)
: Deux minutes.
Mme Sauvé : Deux minutes.
Alors, la recommandation 12, je sais que les données de la littérature ne
vous amènent pas à vous positionner pour des interventions psychosociales au
niveau de l'adolescence, plus en groupes ou individuelles. Mais ne croyez-vous
pas que le fait qu'à l'adolescence la pression par les pairs est tellement
importante, que la crise identitaire et tout ça que, malgré le manque de
littérature, l'intervention de groupe pourrait avoir un effet plus important?
Mme Desmarais (Sylvie) :
On n'a pas pu le démontrer effectivement au plan scientifique...
Mme Sauvé : O.K.
Mme Desmarais (Sylvie) :
...mais c'est des travaux qui pourraient se poursuivre. Parce qu'on le sait que
c'est démontré aussi dans d'autres types de problématiques. Alors, oui, il y a
une possibilité de voir à mettre en place des interventions à la fois
individuelles et à la fois de groupe. Et, là encore, ça dépend aussi toujours
de la situation d'un jeune. Et parfois c'est préférable qu'il soit en
individuel, ou parfois c'est tout à fait adéquat qu'il puisse avoir une
intervention de groupe.
Mme Sauvé : Parfait.
Merci. Alors, les dernières recommandations, comme je n'ai plus de temps, la
15, la 16, donc, l'approche personnalisée, très, très important. Écoutez, je
pense que j'ai fait le tour. J'ai réussi à passer à travers toutes les
recommandations. Quel plaisir de vous entendre. Merci beaucoup pour ces pistes
de solution. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, je vais maintenant céder la parole au député
de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci
beaucoup. Merci pour votre présence. Dans votre mémoire, vous dites qu'il est
impossible d'affirmer qu'on surprescrit. Est-ce qu'on peut affirmer, selon
vous, avec les données que vous avez, là, qu'on surdiagnostique? Et la question
qui suit, est-ce que, si on surdiagnostique, on ne peut pas conclure, donc, si
on surdiagnostique, qu'on tend à surprescrire? C'est peut-être compliqué, hein?
Je vais recommencer. Non? Ça va? O.K.
• (13 heures) •
M. Boileau (Luc) : En
fait, nos données et les systèmes d'information ne captent pas des diagnostics
aussi bien que des prescriptions...
13 h (version non révisée)
M. Zanetti : ...à surprescrire?
C'est peut-être compliqué, hein? Je vais recommencer. Non? Ça va? O.K.
M. Boileau (Luc) : En fait,
nos données et les systèmes d'information ne captent pas des diagnostics aussi
bien que des prescriptions parce que les diagnostics sont inscrits dans des
dossiers cliniques auxquels nous n'avons pas accès de façon globale au Québec,
et l'inscription d'un diagnostic, quand on veut donner un médicament, on est
des fois obligé, là, de le faire, et Mme Bouchard connaît bien ça, alors
le diagnostic est moins prévalent quand on va chercher les données
diagnostiques que la prescription. Ce que je veux vous... ce sur quoi je
voudrais insister, et, peut-être, Mme Bouchard voudra insister encore
mieux que moi, mais c'est certain que quand on regardait ça, on s'est
dit : Bon, on imagine qu'il y a peut-être une posture de surprescription.
Et là-dessus, les experts consultés qui sont de toute nature ont dit : Ce
n'est pas... l'idée, ce n'est pas de dire qu'il y a une surprescription, il y a
des variations importantes et il y a visiblement une prescription, beaucoup, et
plus qu'ailleurs. Il y a de quoi descendre ça puis de vérifier s'il n'y a pas
des façons autres d'aborder le traitement et l'accompagnement aussi en services
psychosociaux, et donc de ne pas rejeter ça sur le fait qu'on prescrit trop de
ça parce qu'il y a des occasions où c'est absolument nécessaire, d'autres qu'il
y a plus de doutes. Et là, sur ça, bien, bien sûr que les données ont tendance
à montrer ça, mais je veux quand même vous dire que les efforts de mes deux
collègues pour aller chercher ce consensus-là n'ont pas permis d'être établis
au moment où on les a faits, et je vous parle de 2017‑2018, c'est-à-dire
surtout 2017.
Si on reprenait le tout aujourd'hui, peut-être
qu'il y aurait des... et surtout à l'issue de votre exercice parlementaire, il
y aurait peut-être des postures qui pourraient s'ajuster. Mme Bouchard.
Mme Bouchard (Sylvie) : En
fait, ce qu'on voit, c'est que tant le DSM-V que les guides de pratique ou les
lignes directrices, notamment canadiennes, sur lesquelles les cliniciens au Québec
se basent beaucoup pour guider leurs pratiques, vont permettre, ou, en fait,
vont suggérer l'utilisation d'un médicament à partir du moment où on a un
diagnostic de TDAH.
On a eu plusieurs échanges, vous l'avez
entendu par d'autres intervenants, toute cette notion de diagnostics, diagnostic
différentiel, diagnostic ponctuel versus quelque chose qui serait plus
chronique, donc il y a probablement quelque chose à faire autour du diagnostic.
Ce qu'on sait, c'est que des personnes qui ont un TDAH, qui ne sont pas
traitées, on connaît les effets délétères, par exemple, des problématiques en
termes d'absentéisme au travail, les taux d'accidents d'automobile,
l'équivalence en termes de diplomation au niveau du secondaire.
Il y a des études avec l'utilisation des
médicaments. Donc, une personne qui a un TDAH et qui est traitée de façon
adéquate peut avoir des gains sur différents éléments, par contre, ce sont
souvent des niveaux de preuve qui sont faibles, et ce qu'il est important de
noter, c'est qu'on n'a pas ces données-là pour le Québec. Donc, est-ce que,
malgré la grande utilisation de médicaments... Puis on ne dit pas : C'est
trop, on dit que c'est plus qu'ailleurs. On voit qu'il y a une grande
utilisation de médicaments. Quels sont les réels impacts pour la population? Au
Québec, ce sont des données que nous n'avons pas. Donc, est-ce qu'effectivement,
les enfants ou les personnes avec un TDAH traité ont une meilleure
scolarisation, ont moins d'accidents d'automobile, ont des meilleurs gains, là,
sur différents paramètres qui sont étudiés dans les études?
Le Président (M. Provençal)
: Merci.
M. Boileau (Luc) : Et si je
peux me permettre, M. le Président, on n'est certainement pas à dire, avec les
données qu'on voit, pour être en corollaire avec votre question, à dire :
On est inquiet, on trouve qu'on n'en prescrit pas assez à Montréal ou à Laval.
Ce n'est pas ça du tout, là. Donc, on ne peut pas jouer à l'inverse non plus,
pour corroborer ce qui est dit.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais donner la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Merci
beaucoup d'être ici, c'est extrêmement instructif. Est-ce qu'on n'est pas en
train de transformer des comportements sociaux au Québec en maladies?
M. Boileau (Luc) : Il n'y a
pas une autre question, là?
Mme Bouchard (Sylvie) : Bien,
tantôt on a parlé, peut-être, si je peux me permettre, M. le Président, on a
parlé d'une maladie génétique. Alors, on sait qu'il y a de la recherche en ce
sens-là, on entend beaucoup... on voit beaucoup des enfants qui sont
diagnostiqués puis des parents. On a d'ailleurs des humoristes au Québec qui en
parlent largement. Donc, s'il se fait beaucoup de recherches en ce sens-là et
qu'on finit par trouver quelque chose, on aura peut-être des traitements plus
adaptés. Mais on a parlé avec l'intervenante précédente de normalité. Je pense
qu'on est dans une culture de productivité. Il y a probablement un beau mélange
de tous ces concepts.
M. Gaudreault : Il y a de ça là-dedans,
oui.
Je veux revenir sur le fait que... et là
c'est peut-être plus Mme Bouchard... que les médicaments comme Concerta...
Mme Bouchard (Sylvie) :
...précédente, de normalité. Je pense qu'on est dans une culture de
productivité. Il y a probablement un beau mélange de tous ces concepts.
M. Gaudreault : Il y a de ça là-dedans,
oui.
Je veux revenir sur le fait que... et là
c'est peut-être plus Mme Bouchard... que les médicaments comme Concerta,
Ritalin sont couverts par la RAMQ ici au Québec, et pas ailleurs. Est-ce qu'on
est les seuls, seuls, seuls ou le Ritalin, et le Concerta, et autres
médicaments du même genre sont aussi couverts par des régimes d'assurance dans
d'autres juridictions, où on pourrait faire une comparaison? Je ne sais pas si
vous comprenez ma question?
Mme Bouchard (Sylvie) : En
fait, peut-être juste pour corriger ou amener une précision sur ce que vous
amenez, les gens dans le régime public d'assurance médicaments ont une
couverture jusqu'à l'âge de 25 ans lorsqu'ils sont des étudiants à temps plein.
Donc, ça, il y a une gratuité à cette étape-là.
Ce qui est différentiel des autres
juridictions, des autres provinces canadiennes, c'est la couverture des longues
actions. Alors, au Québec, ces médicaments-là sont inscrits. Ce sont des
médicaments d'exception, donc le médecin doit écrire un code ou faire une
particularité avant que le patient puisse se procurer le médicament à la
pharmacie, ce qui est différentiel des autres provinces. Alors, souvent, dans
les autres provinces, ce qui est remboursé, ce sont les courtes actions, alors
qu'au Québec et les courtes et les longues actions sont remboursées. Donc, ça
pourrait peut-être expliquer un usage un peu plus grand au Québec.
M. Boileau (Luc) : Et, au
risque de vous déplaire peut-être, M. le Président, c'est que nous ne pouvions
pas, jusqu'au mois... Jusqu'à cet été, on a recommandé à Mme la ministre de
permettre que les longues actions, les médicaments de longue action puissent
être prescrits en première intention. Parce qu'avant, on devait commencer par
des courtes actions. C'est en dehors des cadres de recommandation au niveau
canadien et international. Donc, on favorise même, lorsque nécessaire, de
commencer avec une longue action. Mais on n'encourage pas, dire : Bien,
donnez ça à tout le monde, là. C'est juste : on n'est pas tenus maintenant
de passer par une courte action.
Et quant à la question demandée
préalablement, c'est comme s'il y avait un curseur, là, qui est à placer. À
quel moment ça devient utile, bénéfique pour l'enfant et pour la famille qu'il
puisse prendre des médicaments? Bien, il ne semble pas y avoir de moment où
c'est bénéfique tout seul de juste donner ça, pas d'autre intervention. Il y a
toujours un bénéfice à avoir une approche, tu sais, bimodale ou multimodale,
d'une part. D'autre part, il peut y avoir des sensibilités qui vont osciller
d'une famille à l'autre, d'un professeur à l'autre, d'un médecin à l'autre,
bien sûr. Et c'est cette base normative sociale qui mérite d'être surveillée,
bien sûr, et vous le faites, et, sans doute, ramenée. Ou, en tout cas, être
très vigilants sur cette croissance-là et de vouloir ne pas la déplacer pour
faire en sorte que tout, maintenant, qui devient source d'inquiétude... et,
sans doute, c'est légitime pour plusieurs de... «Ah! bien, je pense que oui,
là, il mériterait de... que ce serait bénéfique pour lui.» Donc, il faudrait
que ce curseur-là se déplace ou n'ait pas tendance à pousser de l'autre côté.
Voilà.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie de votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 16 h 30.
(Suspension de la séance à 13 h 8)
16 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 16 h 30)
Le Président (M. Provençal)
: Bonjour. La Commission de la santé et des services sociaux
reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques dans le cadre du mandat d'initiative
concernant l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants
chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de
l'attention avec hyperactivité. Cet après-midi, nous entendrons les organismes
suivants : La Dre Johanne Lévesque, neuropsychologue, et le Mouvement
Jeunes et santé mentale.
Je souhaite maintenant la bienvenue à la
Dre Johanne Lévesque. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres
de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé.
Je vous cède la parole, madame.
Mme Lévesque (Johanne) : Merci
beaucoup. En fait, je suis vraiment très heureuse et honorée d'être ici aujourd'hui
pour vous parler de ma clientèle préférée, les enfants qui ont un trouble
déficient de l'attention avec ou sans hyperactivité. Alors, effectivement, je
suis neuropsychologue, ça fait bientôt 17 ans que je vois des enfants et de plus
en plus d'adultes, en fait, je dois dire, au cours des sept, huit dernières
années, qui sont aux prises avec cette problématique-là.
J'ai fait, moi, mon stage postdoctoral sur
une technique alternative à la médication qui s'appelle le neurofeedback pour
traiter des enfants qui avaient un TDAH. Ce n'est pas par hasard que j'ai fait
ça, en fait, c'est parce que mon fils avait un TDAH incroyable, il était excessivement
hyperactif et impulsif. Il a 27 ans aujourd'hui puis il s'en est bien sorti,
mais je cherchais une solution pour lui. Et compte tenu de la longue liste des
effets secondaires associés aux psychostimulants, ça... on était au début des
années 2000, là, j'ai eu un peu peur, comme mère, j'ai eu peur, alors j'ai
préféré retarder le plus possible cette alternative-là et j'ai plutôt choisi
qu'il fasse partie de mon postdoc et j'ai entraîné son cerveau, on a corrigé sa
situation, puis moi, j'ai poursuivi comme clinicienne au lieu de devenir
chercheure. Donc, ça, c'est mon background à moi, comme mère, mais aussi comme
professionnelle.
Suite à ça, bien, j'ai juste continué à
proposer le neurofeedback à des enfants, à des adultes, pour corriger leurs
problèmes d'attention et d'hyperactivité, avec quand même assez de succès, je
vous dirais, un taux de succès qui tourne autour de 60 %, 70 %, ce
qui est excellent dans ce genre de problématique là.
Pour moi, le TDAH, c'est quelque chose qui
a une composante génétique, donc on vient au monde avec ça, par définition,
mais je pense que le contexte social actuel exacerbe les difficultés que ces
enfants-là vivent, c'est-à-dire que dès leur plus jeune âge, ils sont soumis à
un rythme de vie, une pression constante qui est inhumaine, d'une certaine
façon, compte tenu de leur âge. Donc, ils sont pris en charge très tôt, du
matin au soir, vont courir sans arrêt d'une activité à l'autre, qui ont l'air
de périodes libres mais qui n'en sont pas vraiment. Alors, il n'y a plus
beaucoup de temps pour ces enfants-là pour apprendre à être patient, à tuer du
temps, à s'asseoir tranquille sans bouger parce que le contexte l'exige, comme
quand moi, j'étais petite. Ça a beaucoup changé, en fait. La société a beaucoup
évolué, et là tout va très, très vite. Moi, j'en suis rendue à un point où je
considère... je pense sincèrement qu'on est en train d'excéder notre capacité
d'adaptation en tant qu'être humain. La technologie nous permet d'aller
tellement vite, on est tellement bombardés que cette surstimulation-là fait en
sorte qu'on a beaucoup de difficulté à s'adapter. Alors, quand on prend
quelqu'un qui a déjà des difficultés à rester attentif, à rester calme, à
suivre, puis qu'on ajoute cette pression-là, bien, on se ramasse avec des
enfants qui sont anxieux, qui est le prochain gros problème auquel il va
falloir s'attaquer dans notre société.
Quand les enfants arrivent au primaire, il
y a une pression qui est là, mais qui est... moi, j'appelle ça une pression
bienveillante, c'est-à-dire que, maintenant, on souhaite que tous les enfants
qui sont dans le système scolaire réussissent. Alors, il y a comme une
obligation de réussir. Tout le monde qui est dans le système scolaire souhaite
que chacun puisse exprimer son plein potentiel puis atteindre ses objectifs.
Alors, ce que ça crée, par conséquent, c'est que tous les enfants qui semblent
présenter une difficulté sont identifiés très rapidement. On va les évaluer
tant bien que mal, ça dépend des régions, ça dépend des ressources disponibles,
et ces enfants-là vont voir un plan d'action, maintenant, qu'on appelle, être
mis autour d'eux pour les aider. Mais ce plan d'action là, souvent, va se
limiter à la médication quand on identifie un TDA ou un TDAH chez ces
enfants-là. Parce que d'une part, c'est facile, et d'autre part, il y a quand
même une bonne efficacité à la médication. Il y a des effets secondaires, mais
les effets secondaires... Moi, je ne peux pas vous dire combien de fois j'ai
entendu dire des parents, et des professeurs, et des orthopédagogues, et tous
ceux qui gravitent autour des enfants dans nos écoles : C'est vrai qu'il
ne mange pas pour dîner, c'est vrai qu'elle a mal à la tête toute la journée,
mais maintenant au moins...
Mme Lévesque (Johanne) :
...Il y a des effets secondaires, mais les effets secondaires... Moi, je ne
peux pas vous dire combien de fois j'ai entendu dire des parents, et des professeurs,
et des orthopédagogues, et tous ceux qui gravitent autour des enfants dans nos
écoles : C'est vrai qu'il ne mange pas pour dîner, c'est vrai qu'elle a
mal à la tête toute la journée, mais maintenant au moins elle réussit ou il
réussit. Moi, j'ai bien de la misère avec ça. Ça me brise le cœur. Il y a comme
une limite à ce que je trouve qu'un enfant devrait endurer pour réussir.
Ça fait que, comme société, moi, je pense
qu'on doit se questionner à ce niveau-là parce que des psychostimulants, ce
n'est pas sans conséquence. C'est une faible minorité d'enfants et d'adultes
qui en prennent qui n'ont pas d'effets secondaires à court, à moyen ou à long
terme. Ça fait que ça vient avec ses difficultés, ça fait que ça... Puis, ceci
étant dit, je ne suis pas du tout contre la médication, là, je tiens à
l'établir aussi. C'est un outil parmi tant d'autres, qui est, malheureusement,
souvent le seul.
Et le problème qui vient avec ça, c'est
que plus un enfant prend une médication jeune dans sa vie, plus on se ramasse
maintenant avec des enfants qui, rendus à la fin du primaire, début du
secondaire, sont au maximum de la dose de la médication qui a fini par marcher
puis donner des bons résultats, c'est-à-dire plus d'effets positifs que
d'effets secondaires, mais là ça ne marche plus, ce n'est pas assez encore,
mais là on ne peut pas augmenter la dose. Alors, ce que le médecin est dans
l'obligation de faire, c'est d'essayer une autre molécule. Mais il y avait une
raison initialement pourquoi cette molécule-là fonctionnait chez cet enfant-là.
Ils ne sont pas tous pareils, les médicaments. Alors, quand on essaie une autre
médication, bien là, des fois, ça ne marche pas. Mais, si on n'a rien fait
d'autre que de prescrire un psychostimulant à l'enfant, qu'on ne lui a pas
montré à s'organiser, à planifier, à avoir une hygiène de vie qui est adéquate,
à faire attention à ce qu'il mange, à limiter le temps de jeux vidéos, qui est
excessivement néfaste pour un cerveau, bien, on se ramasse devant un enfant qui
est complètement démuni, qui n'a pas de ressources et qui est rendu au
secondaire. Donc, ça, c'est vraiment problématique, à mon sens.
Le deuxième volet qui vient avec la prise
de psychostimulants, ça ne concerne pas les enfants d'âge primaire qui ont des
problèmes, ça concerne les étudiants du cégep et des universités qui n'en ont
pas de problèmes, mais qui veulent aussi performer. Et ils se procurent un
psychostimulant juste pour ne pas être désavantagés, finalement, par rapport à
ceux qui en ont, qui n'ont pas plus de problèmes qu'eux autres, mais qui
peuvent, grâce à ça, étudier des heures et des heures. Vous le savez peut-être,
mais il y a un énorme marché noir de psychostimulants dans les cégeps, les
universités, même au secondaire, donc, des gens qui ont des prescriptions
légales, qui les ont obtenues, soit en exagérant ou en inventant des symptômes
chez leur médecin... puis, vous savez, les médecins, ils font ce qu'ils peuvent
avec ce qu'ils ont. Ça fait que souvent ils vont faire une bonne entrevue
clinique, ils vont faire passer des questionnaires. Les gens n'ont pas toujours
les moyens d'aller en évaluation au privé. Donc, un médecin devant quelqu'un
qui semble en détresse va prescrire le fameux psychostimulant. Mais, je peux
vous le dire, n'importe qui peut faker un problème de TDA ou de TDAH, même dans
un test d'évaluation neuropsychologique, là. On a juste à faire des erreurs, hein,
ce n'est pas compliqué.
Alors, c'est vraiment un problème plus
large, en fait, que de juste prendre les psychostimulants pour être attentif.
Une personne que je connais très, très bien, qui était dans le cercle d'amis de
mes enfants, elle voulait que moi, je lui crée un faux problème pour qu'elle
puisse se présenter chez le médecin, parce qu'elle disait : Ma technique
est très exigeante, puis, si moi, je ne peux pas prendre de
Concerta — supposons, un psychostimulant — bien, je suis
désavantagée par rapport à mes collègues qui le font. Ça fait
qu'accepterais-tu, s'il te plaît, de dire que j'ai un TDA ou un TDAH puis que
j'ai besoin de médication? Bien évidemment, j'ai refusé. Mais ça, c'est
courant, c'est vraiment... Ça arrive tout le temps, je me fais... Moi, je me le
fais demander une dizaine de fois par année, là, par des gens qui me consultent
juste pour ça. Alors, en tant que tel, c'est un problème.
Puis il y a des gens qui soulèvent le fait
qu'il y a le contexte académique qui est peut-être inadéquat aujourd'hui, parce
qu'il y a de plus en plus d'étudiants qui doivent travailler. Il y a des
contextes sociaux qui sont aussi problématiques. La famille est plutôt éclatée.
Les enfants, des fois, ils sont un peu laissés à eux-mêmes aussi, donc ils s'arrangent
avec les moyens du bord. Ça fait qu'il y a comme tout un contexte
socioéconomique qui va faire en sorte que la pression est grande. Ils ont...
Les jeunes n'ont pas juste à aller à l'école, ils ont aussi à prendre soin du
reste de leur vie, puis des fois, bien, il faut qu'ils le fassent eux-mêmes, ça
fait que, pour s'aider, ils vont vouloir avoir recours à un psychostimulant.
Avant, les gens prenaient du café en masse, beaucoup de café. Mais là
aujourd'hui les gens vont aller vers les psychostimulants.
• (16 h 40) •
Pour moi, les solutions, c'est toujours un
ensemble d'éléments. Les psychostimulants, la médication, c'est le dernier item
qui devrait être introduit quand on veut aider un enfant qui est aux prises
avec un TDAH. Avant, la première chose qu'il faut faire, c'est s'assurer que
cet enfant-là a des heures de sommeil adéquates, que son alimentation comporte
toujours un peu plus de protéines que de glucides, à chaque repas, parce que
souvent ils répondent beaucoup mieux à la présence de protéines que de
glucides, puis là je ne suis pas du tout en train de parler du régime cétogène,
là, je parle juste d'avoir un peu plus de protéines, puis s'assurer aussi que
ces enfants-là bougent ou...
Mme Lévesque (Johanne) :
...que son alimentation comporte toujours un peu plus de protéines que de
glucides à chaque repas, parce que souvent ils répondent beaucoup mieux à la
présence de protéines que de glucides, puis là je ne suis pas du tout en train
de parler du régime cétogène, là, je parle juste d'avoir un plus plus de
protéines, puis s'assurer aussi que ces enfants-là bougent ou ont une activité
qui les passionnent parce que, quand vous aimez ce que vous faites, même si
vous avez un déficit d'attention, vous allez produire naturellement beaucoup
plus de dopamine, et la dopamine est un neurotransmetteur fondamental dans
l'attention, dans le contrôle moteur, mais c'est toujours, toujours associé au
plaisir puis à la motivation.
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes.
Mme Lévesque (Johanne) :
C'est pour ça que, si vous avez appris quelque chose facilement dans votre vie,
c'est probablement parce que vous aimiez énormément ce que vous aviez à
apprendre.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup.
Mme Lévesque (Johanne) :
Ça fait plaisir.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons débuter la période d'échange avec le député de
Dubuc.
M. Tremblay : Merci, M.
le Président. Bonjour. D'abord, je ne sais pas si c'est parlementaire, mais...
ouf! C'est ce que j'aurais tendance à dire en tout premier lieu... C'est
parlementaire?
Une voix
: Oui.
M. Tremblay : Merci,
chère collègue. Dites-moi... Bravo, vous êtes vraiment magnifique. Vous dites
que la surstimulation qu'on vit par rapport à notre réalité de société est en
accéléré depuis un certain temps. On pourrait le croire par rapport aux médias,
par rapport aux communications, tout ce qui s'accélère. On voit déjà... on voit
nos jeunes qui sont déjà avec l'appareil comme ça ou on répète : Mets tes
lunettes ou... Puis on sait déjà que des études se pointent sur le temps
d'usage. On parle de surstimulation, mais nos enfants qui viennent au monde déjà
dans l'ère numérique, est-ce qu'il ne serait pas déjà à propos, pas de
réapprendre à vivre, mais est-ce qu'il ne serait déjà à propos d'encadrer tout
ça puis de s'assurer que, s'ils entrent là, ils vont être surstimulés dans pas
long encore plus?
Mme Lévesque (Johanne) :
Absolument.
M. Tremblay : Qu'est-ce
que vous...
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien... tout à fait, en fait, puis c'est... Tout ce qui est téléphone, jeux
vidéo, etc., c'est excessivement nocif, ça, ça... Les jeunes en fait sont en
train de perdre leur capacité même juste à socialiser. Ils ne sont plus
capables de se parler, ils s'écrivent. Mais, au niveau de l'attention, c'est...
on doit absolument, absolument limiter l'accès à toutes ces plateformes-là parce
que c'est excessivement nocif pour le système nerveux. Ça crée, chez certains
d'entre eux qui ont une propension à devenir dépendants à la dopamine — et
plus tard la cocaïne, qui est le même... c'est le même circuit, là, dans le
cerveau — bien, à devenir dépendants de ce téléphone-là ou de cet
outil-là électronique du jeu vidéo.
Puis c'est pour ça que si jamais vous avez
des enfants qui jouent à un jeu vidéo et que, tout à coup, vous limitez dans le
temps, dire : Bon, O.K., là c'est assez... bien, vous allez voir, il y a
toutes sortes de réactions possibles à ça. Puis ceux qui sont dépendants vont souvent
être beaucoup plus agressifs, un peu comme si on venait de leur enlever leur
plaisir, mais de façon addictive, là, c'est comme, on vient de leur enlever ce
qui leur faisait tant de bien. Il y en a d'autres, quand ça les affecte beaucoup
au niveau attentionnel, vous allez voir, ils sont beaucoup plus zombies. C'est
comme s'ils devenaient léthargiques suite à ça. Ça va leur prendre une
demi-heure, une heure, deux heures des fois à s'en remettre.
Puis là je vous le dis, l'antidote, c'est
du sport. Ça fait que si jamais vous avez des enfants qui font... qui jouent à
des jeux vidéo, vous en avez, là, bien vous négociez, là, la demi-heure de jeu
vidéo, qui devrait être le maximum par jour pour n'importe quel enfant du
primaire, ça fait que... juste pour donner une idée, avec au moins une
demi-heure d'activité physique pour refaire les provisions de dopamine suite à
ça. Mais c'est très important, gérer ça.
M. Tremblay : Dites-moi,
vous avez parlé aussi de la réalité des régions. Ce n'est pas la première fois
où on en entend parler. On... en tout cas, moi, je le réalise, là, puis on se
pose la question, il y a plusieurs hypothèses potentielles. Est-ce que c'est
une question du fait d'être éloigné? Ou on a moins d'effectifs? Ou la
culture... Qu'est-ce qui peut faire la différence entre des enfants dans une
région par rapport à des grands centres?
Mme Lévesque (Johanne) :
En fait, j'étais, pour le plaisir, en fait, dans le coin de Sept-Îles
dernièrement. Et j'ai appris avec étonnement qu'il y avait un taux de
prescription qui avoisinait les 30 %, de psychostimulants, et qu'ils
venaient de perdre la dernière neuropsychologue qui travaillait là, qui avait
décidé de revenir dans les grands centres. Alors, ils n'ont tellement pas de
ressources que l'avantage de la médication, quand ça fonctionne, bien, ça fait
que l'enfant va automatiquement être plus attentif puis plus calme. Bon. Ça
fait que, donc, ça fait... On règle un peu le problème quand même, ça fait que
ça devient une solution qui est rapidement utilisée, faute de mieux, faute
d'autres choses.
Puis pourtant, dans les régions, souvent,
les enfants ont quand même une...
Mme Lévesque (Johanne) : ...parce
que, quand ça fonctionne, bien, ça fait que l'enfant va automatiquement être
plus attentif puis plus calme. Bon, ça fait que... donc, ça fait... on règle un
peu le problème quand même. Ça fait que ça devient une solution qui est
rapidement utilisée faute de mieux, faute d'autre chose. Puis pourtant, dans
les régions, souvent, les enfants ont quand même une hygiène de vie qui est
meilleure que celle des villes parce qu'ils vont jouer beaucoup plus dehors, ça
fait partie du mode de vie, en fait, d'être à l'extérieur. Mais après ça, bien,
c'est... moi, je pense qu'il y a un peu d'éducation à faire, pour avoir donné
des conférences dans les différentes régions du Québec, un peu d'éducation
qui... Je dirais que les gens dans les régions sont un petit peu moins informés
par rapport à toutes ces choses-là, un peu moins au courant. Ça demeure plus du
domaine de la psycho pop puis du folklore, là, il manque un peu d'éducation. Ça
fait que, des parents, des fois, faute de mieux, vont faire ça sans trop savoir
quoi faire d'autre.
M. Tremblay : Question, est-ce
que...Il y aura l'éventualité d'un nouveau Commisaire à la santé. Croyez-vous
que c'est un mandat qui pourrait être prioritaire, intéressant, pertinent pour
un éventuel Commissaire à la santé qui va venir?
Mme Lévesque (Johanne) : Oui,
absolument. Puis, comme je le disais au début, je le ferais conjointement... ce
Commissaire-là devrait s'adresser... s'occuper à la fois du TDAH, mais de sa
petite soeur, l'anxiété qui est dévorante et galopante, en ce moment, chez nos
enfants.
M. Tremblay : Moi, dernière
question en ce qui me concerne, M. le Président. On a parlé de la rigueur des
diagnostics. Il y a une démarche avant d'arriver au diagnostic. Il y a une
réalité, on parle un peu de folklorique ou de... Le parent qui reçoit l'input
de l'école, l'enfant est agité, bon, puis ça démarre. Le médecin, on nous a dit
qu'il y avait des diagnostics qui se donnaient en 15 minutes. Est-ce qu'on est
rigoureux, au niveau des diagnostics, au Québec? Est-ce qu'il n'y a pas
beaucoup de travail à faire pour s'assurer qu'on arrive à une démarche qui est
précise puis qui est efficace?
Mme Lévesque (Johanne) : Oui.
Bien, en fait, j'ai 17 ans de recul, ça fait que je peux vous dire, ça s'est
beaucoup amélioré. C'était vraiment pire au début de ma pratique. Les
diagnostics, c'était en cinq minutes que ça se donnait dans un bureau, là,
c'était très, très rapide, là. Ça prenait deux questionnaires, deux, trois
questions, et c'était réglé. Ça s'est beaucoup amélioré, mais il y a encore du
chemin à faire, définitivement. Juste pour vous donner un petit exemple,
quelqu'un qui aurait une hypersensibilité sensorielle au bruit, bien, même si
son attention est parfaite, il est... aussitôt que quelqu'un fait un, vous
savez, clic clic clic, avec un stylo, là, cette personne-là va être
complètement, complètement inattentive, là, va focuser juste là-dessus. Elle ne
peut pas faire autrement, là, elle a un problème d'intégration perceptuelle. Ça
fait que cet enfant-là, mettons qu'il est dans la classe puis qu'il y a du
bruit tout le temps, là, c'est impossible de se concentrer. Puis même si on lui
donne un psychostimulant, il ne sera pas plus concentré. Ça fait que c'est un
problème, ça fait que oui, l'évaluation est très importante.
M. Tremblay : Merci.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenu.
Le Président (M. Lafrenière) :
Alors, Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Votre présentation était vraiment très
intéressante.
Mme Lévesque (Johanne) :
Merci.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Tout à l'heure, vous avez parlé d'une
meilleure hygiène de vie pour nos jeunes, puis vous avez parlé aussi du temps
que les jeunes passaient sur les appareils électroniques. Combien de... c'est
quoi le temps idéal, là, que les jeunes devraient passer par jour?
Mme Lévesque (Johanne) :
Primaire... pour les enfants d'âge primaire, c'est maximum une demie-heure par
jour, secondaire, une heure par jour. Ça fait que, ça, je sais qu'on est loin,
loin, loin.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : On est très loin de ça, oui.
Mme Lévesque (Johanne) :
Quand moi, je dis ça à des parents là, mon Dieu. Mais je pense qu'il y a un
travail parental à faire aussi, là, il faut sensibiliser les parents aux
impacts négatifs de ça. Vous savez, un enfant... le pire scénario pour un
jeune, c'est, il se lève le matin, ouvre la télé ou prend sa tablette ou
embarque sur sa console de jeu vidéo. Il est déjà en train d'épuiser sa réserve
de dopamine. Il s'en va à l'école, revient dîner à la maison, supposons, parce
que sa mère, elle reste à la maison et qu'il y a quelqu'un qui l'attend, peu
importe, mange, embarque à nouveau sur sa console de jeu, sa tablette, peu
importe, continue à épuiser sa réserve de dopamine, retourne à l'école, revient
à la maison, refait la même chose. Bien, cet enfant-là, finalement, n'est
jamais optimal dans ses capacités d'attention parce qu'il a utilisé un appareil
électronique tout au long de la journée. Ça fait que c'est vraiment
problématique, puis il y a beaucoup d'éducation à faire à ce niveau-là, puis il
faut accepter de passer pour le parent bizarre, je pense, qui refuse l'accès à
un téléphone à son jeune avant 15 ans. Tu sais, c'est... il n'y a pas de
problème, là, c'est juste dans notre tête, en fait.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
O.K. Puis, concernant... comment on fait un meilleur diagnostic? Parce qu'il y
a beaucoup de... les jeunes sont surmédicamentés. Comment on va réussir à faire
un meilleur diagnostic?
• (16 h 50) •
Mme Lévesque (Johanne) : Oui.
En fait, il faut... Pour savoir si quelqu'un a un problème d'attention, il faut
évaluer l'attention. Ça a l'air drôle, dit comme ça, mais ce n'est pas toujours
fait. Alors, c'est comme ça qu'on arrive avec des diagnostics qui ne tiennent
pas debout, au bout du compte, qui étaient finalement... c'était l'anxiété.
L'anxiété... un enfant anxieux va être très agité, on va...
Mme Lévesque (Johanne) : ...En
fait, il faut... Pour savoir si quelqu'un a un problème d'attention, il faut
évaluer l'attention. Ça a l'air drôle, dit comme ça, mais c'est parce que ce
n'est pas toujours fait. Alors, c'est comme ça qu'on arrive avec des
diagnostics qui ne tiennent pas debout au bout du compte, qui étaient
finalement ceux d'anxiété. L'anxiété... un enfant anxieux va être très agité.
On va penser qu'il est hyperactif, mais il est anxieux.
Donc, il faut que les différentes régions
au Québec, les différents secteurs aient accès à des gens qui ont la capacité
d'évaluer comme il faut les enfants. Les psychologues scolaires peuvent le
faire, les neuropsychologues peuvent le faire. Les médecins, c'est vraiment un
dernier recours, parce qu'eux ne sont pas à même d'évaluer directement les
capacités d'attention, ça fait que souvent, c'est pour ça qu'ils nous les
réfèrent. Mais, en même temps, voyez-vous comment c'est une boucle qui peut
coûter cher? Moi, au fil du temps, j'ai développé une évaluation, là, juste
pour ça, qui coûte 500 $. Ce n'est rien puis c'est beaucoup, là. Ça dépend
à qui on parle. Mais comparé à une évaluation globale qui est à 2 000 $,
bien, c'est quand même le quart du prix. Puis quand les gens ont des
assurances, finalement, ils sont remboursés beaucoup. Mais ce n'est pas tout le
monde qui fait ça.
Puis c'est... je pense qu'il y a une
réflexion à faire aussi au sein des neuropsychologues, puis de l'Ordre des
psychologues du Québec, à savoir qu'est-ce qui est vraiment nécessaire et utile
pour qu'on puisse établir hors de tout doute que cette personne-là a un TDA ou
un TDAH. Il y a cette réflexion-là aussi à faire.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Parfait. Puis, dernière question, je voulais
savoir aussi, tu sais, il y a beaucoup de diagnostics, mais après ça, l'enfant,
est-ce qu'il y a des suivis qui sont faits normalement avec le médecin ou on
laisse aller ça?
Mme Lévesque (Johanne) : Ça
dépend des fois. Mais ça aussi, ça s'est beaucoup amélioré, je vous dirais
sincèrement. Et, dans un monde idéal, l'enfant reçoit son diagnostic, rencontre
son médecin, se voit prescrire une médication, il y a un suivi qui est fait une
semaine après, deux semaines après, un mois après, parce que la dose doit être
ajustée, il faut savoir c'est quoi les effets secondaires que l'enfant va
avoir, s'il y en a, et changer de molécule au besoin. Mais ce suivi-là n'est
pas toujours fait. Mais ça devrait être ça. Mais c'est mieux que c'était.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Parfait, merci.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenue.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour. Merci
beaucoup pour le témoignage. Ce matin, on a eu quelqu'un ici, en commission,
qui nous a parlé qu'on devrait peut-être revoir la normalité, parce que la
normalité qui est basée sur les tests et tout, devrait peut-être être revue.
J'aimerais avoir votre impression sur où serait la ligne, ou comment vous voyez
la...
Mme Lévesque (Johanne) : Oui.
Moi, je le vois dans un contexte culturel en fait. On prend tous les enfants
d'une classe qui ont un TDAH ici puis on les transplante, je ne sais pas, moi,
à Maui, puis... dans une école qui... avec des murs à moitié ouverts, dans un
contexte qui est beaucoup plus relax. Je pense qu'il y a moins de problèmes
déjà. C'est... En fait, comme je disais au début, c'est qu'il y a une grosse
pression qui est exercée parce que tout le monde veut que nos enfants
réussissent. Mais ça peut être bien correct aussi de devenir plombier, puis ça
peut être bien correct de finir avocat, puis ça dépend...
Moi, je trouve qu'il va falloir se poser
la question éventuellement : C'est... On veut qu'ils réussissent quoi, nos
enfants, au bout du compte? On veut-u qu'ils réussissent leur vie, leur vie
professionnelle? C'est quoi, là, la vraie question qui est derrière ça? Puis
oui, la normalité, c'est très relatif. Ça dépend beaucoup des contextes.
Mme Picard : Avais-tu une
question?
Une voix
: Vas-y,
vas-y.
Mme Picard : Je voudrais
savoir, est-ce que vous pensez qu'on médicamente les jeunes qui dérangent?
Mme Lévesque (Johanne) :
Plus, en fait, puis c'est démontré. Oui. Parce qu'en fait même les filles, là,
ont passé souvent sous le radar parce qu'il y a un peu plus d'hyperactivité
chez les garçons que chez les filles. Alors, la petite fille tranquille, qui
est dans la lune toute la journée, qui a un certain type de TDA plus lunatique,
va regarder droit en avant. Tout le monde pense qu'elle écoute, mais elle n'est
pas là, elle dans sa tête. Elle est ailleurs. Ça fait que cette enfant-là va...
ça va prendre plus de temps avant qu'elle ait... on détecte qu'elle a peut-être
un problème d'attention. Mais le petit gars qui bouge constamment sur sa
chaise, c'est assez rapide, puis oui...
Mais c'est toujours aussi dans un contexte
de : Qu'est-ce que j'ai comme ressources de disponibles? Puis vous savez,
il y a comme des petits ajouts qu'on peut faire. Il y a comme un rond en
silicone qui s'appelle un Disco'sit. Ça se met sur l'assise de la chaise, ça ne
peut pas se lancer, l'enfant peut difficilement jouer avec ça comme un ballon,
mais quand on est assis là-dessus puis qu'on est hyperactif, on peut bouger. Et
le fait de bouger stimule les mêmes régions du cerveau qui nous permettent
d'être attentifs. Alors, cet enfant-là, naturellement, va être plus attentif.
Ça fait qu'il y a des moyens alternatifs comme ça qui pourraient être mis en
place de façon beaucoup plus générale pour que les enfants tannants puissent
aussi bouger sans déranger.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de Richmond.
M.
Bachand
:
Justement, vous m'amenez sur les enfants tannants, alors je me souviens que
j'étais, il y a plusieurs années, jeune, et beau bonhomme... non, pas vrai.
Mais, je vais vous parler des gars, hein? Quand j'étais à l'école, les gars
normalement étaient à l'arrière de la classe, les filles en avant de la classe,
les tannants étant vraiment dans la dernière rangée des classes. Mais, à ce
moment-là, on avait un parcours différent. On avait... En secondaire III, les
enfants, les garçons ou les filles, pouvaient choisir un parcours long ou
court, professionnel ou pas...
M.
Bachand
:
...l'arrière de la classe, les filles en avant de la classe, les tannants
étaient vraiment dans la dernière rangée des classes. Mais, à ce moment-là, on
avait un parcours différent, on avait... En secondaire III, les enfants... les
garçons et les filles pouvaient choisir un parcours long ou court,
professionnel ou pas, les fameux DEP. Donc, vous parlez de métiers ou tout ça.
Et on a tout sacré ça, hein? Les écoles d'arts et métiers qu'on avait, par
exemple, ça n'existe plus, et souvent, probablement que des cas qui aujourd'hui
seraient médicamentés se retrouvaient dans... comme plombiers, comme
électriciens, comme ferblantiers et tout ça. Mais ça n'empêche pas qu'il y a
des cas réels qui existent. Mais je voudrais vous entendre sur le parcours
scolaire, parce que souvent... Parce que, par expérience, ce que j'ai vu, c'est
qu'en secondaire II, secondaire III, les cas lourds, surtout chez les garçons,
c'est vraiment frappant. Les décrochages sont là, la violence est là. Je ne
parle pas des petits gars qui se battent dans la cour — je me suis
battu dans la cour, ce n'est pas grave — mais il y a la violence au
niveau des familles et tout ça. Je veux vraiment vous entendre sur l'âge, là,
secondaire II, secondaire III par rapport à cette problématique de TDAH et
aussi de parcours scolaire.
Mme Lévesque (Johanne) :
Absolument. Bien, moi, je suis quelqu'un de très idéaliste, à la base, puis
dans un monde... dans mon monde idéal à moi, les enfants n'ont pas le même
parcours, en fait, ils ont un parcours qui est beaucoup plus individualisé.
Puis je suis très heureuse de voir qu'en ce moment, dans les écoles du Québec,
il y a de plus en plus de programmes particuliers dans les écoles publiques.
Parce que ça répond à un besoin, hein, ce n'est pas... les enfants ne sont pas
tous les mêmes, on n'est plus à l'époque où ma mère, par exemple, pouvait faire
20 heures de français par semaine à recopier les mêmes phrases pour être
sûre de ne pas faire d'erreur. On n'est plus là, là, il y a énormément d'options,
il y a plusieurs intérêts. Puis c'est un peu ça que je voulais dire
tantôt : on veut qu'ils réussissent quoi, finalement, les enfants, à faire
de l'algèbre ou à réussir leur vie? Ça fait que les parcours scolaires
individualisés, pour moi, font partie de cette clé-là.
Le Président (M. Provençal)
: ...M. le député.
M.
Bachand
:
Très rapidement, parce que... Le titre de la commission, c'est l'augmentation
préoccupante de la consommation des psychotropes... des psychostimulants. C'est
quand même grave. C'est à prendre au sérieux. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vais céder maintenant la parole à la députée de
Fabre.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. Écoutez, Dre Lévesque, c'est un plaisir de vous entendre,
honnêtement, vous nous avez amené aujourd'hui des éclairages qu'on n'avait pas
entendus. Parce que les présentations précédentes ont été excessivement
intéressantes, mais il y a eu, disons, un éclairage plus lié à la petite
enfance, avec la cellule familiale, le rôle d'évaluation, d'observation de
l'enseignant. Là, vous nous amenez une réalité de l'étudiant du collégial,
université. Honnêtement, je suis en bas de ma chaise, là, parce que je trouve
que c'est une réalité dont on doit tenir compte dans toute l'élaboration du
portrait de prévalence de la médication au Québec. Ça fait partie d'un volet
excessivement important, et vous êtes la première à le nommer.
Si je vous ai bien comprise... Vous avez
nommé avec beaucoup de franchise, et j'apprécie ça, que finalement il y a
peut-être un grand problème de société dont on doit maintenant tenir compte si
on veut adresser véritablement la question et des pistes de solution. Et le
problème de société, c'est une pression de performance. Alors... Et c'est là où
je tombe en bas de ma chaise, quand j'entends que des étudiants du cégep, de
l'université, vont faker le TDAH pour être capables d'être en compétition et
puis de gagner, finalement, la performance de la journée au niveau des notes,
et tout ça. C'est excessivement grave. Et je ne sais pas comment est-ce qu'on
peut travailler dans des pistes de solution autres que le médicament, par
rapport à ces jeunes-là, particulièrement, parce que les parents ne sont plus
aussi près d'eux, hein, ils sont dans l'adolescence, ils sont des jeunes
adultes. Alors, on n'a plus la même prise sur le coaching parental. Alors,
comment on s'y prend pour un peu trouver des pistes de solution pour ces
jeunes-là?
Mme Lévesque (Johanne) : Dans
le fond, je pense que ça va être difficile, en fait, parce que c'est un
engrenage qui est mondial, hein, ce n'est pas juste au Québec. Le marché du
travail est excessivement compétitif, les jeunes veulent de l'argent. Moi, ça
m'a frappé d'entendre à quel point, quand on demandait aux... Moi, je demandais
tout le temps... je m'intéresse beaucoup à ce que les gens veulent devenir, ça
me passionne, puis je demandais aux amis de mes enfants : Qu'est-ce que tu
veux faire plus tard? Qu'est-ce qui te tenterait? Ah! je ne sais pas encore,
mais je veux faire de l'argent, ça, c'est sûr. Ça fait que c'était... Puis ce
n'était pas parce qu'on est dans un milieu particulièrement aisé, c'est juste
du monde qui voulait faire de l'argent. Ça fait que faire n'importe quoi pour
faire de l'argent, ça vient avec ça aussi.
Probablement diminuer la pression,
c'est-à-dire on est-u vraiment obligé d'avoir deux, trois examens
universitaires, supposons, deux dans la même journée? On peut-u en avoir un par
jour? Est-ce qu'il pourrait y avoir une période de deux semaines sur laquelle
on va échelonner quatre examens au lieu d'avoir une concentration des travaux
et examens?
• (17 heures) •
Juste de la façon dont les jeunes sont...
17 h (version non révisée)
Mme Lévesque (Johanne) : ...c'est-à-dire
on est-u vraiment obligé d'avoir deux, trois examens universitaires, supposons,
deux dans la même journée? On peut-u en avoir un par jour? Est-ce qu'il
pourrait avoir une période de deux semaines, sur laquelle on va échelonner
quatre examens au lieu d'avoir une concentration des travaux et examens?
Juste de la façon dont les jeunes sont
évalués pourrait faire une différence, à mon avis, peut-être dans une
perspective d'atteinte d'objectifs, un peu ce que la réforme scolaire a voulu
faire, et non pas de quantifier nécessairement, arriver à une note. Parce que
la cote R, hein, ils protègent toujours leur cote R, les jeunes, si... ce qui
est dramatique. Même dans mon domaine, en bas de 4,1, sur 4,3, on ne rentre pas
en neuropsychologie, là, ça fait que c'est très dur. C'est des A puis des A
plus tout le temps. Moi, ce n'est pas la voie que j'ai suivie, j'ai fait la
voie de la recherche en premier, mais, ceux qui font la vraie voie, c'est très
exigeant.
Mme Sauvé : Est-ce que... Justement,
je reviens à ces jeunes-là et la pression de la performance que vous nommez. Maintenant,
aujourd'hui, un jeune en secondaire II se fait parler déjà des choix qu'il
devra faire en secondaire III, pour le IV, et le V, et la suite de ses
études. Alors, dans l'anxiété qu'il a, puis dans la performance qu'il doit
avoir, est-ce que ce n'est pas un élément qui fait que les choix pour l'avenir
sont de plus en plus prématurés, beaucoup plus précoces par rapport à ce qu'on
a déjà connu, devant un choix de carrière, devant un choix de métier alors que
le jeune n'a peut-être pas la maturité émotionnelle pour faire tous ces choix
de vie là?
Mme Lévesque (Johanne) : Absolument.
Absolument. C'est difficile en fait, puis c'est ce qui est explique aussi qu'il
y a autant de changements de programmes rendus au cégep, ou du décrochage,
puis, bien simplement, les jeunes pensaient que, mais finalement ce n'est pas
ça, ils seraient... Moi, je pense que la nouvelle génération a besoin de le
faire, a besoin de le vivre. Moi, j'emploie personnellement une trentaine
d'étudiants, puis ces jeunes-là... étudiants universitaires, fins de bac,
maîtrise ou doctorat, puis ils ont besoin de le vivre, ils veulent l'essayer,
ils veulent être exposés.
À toutes les années, moi, j'ai des
demandes de personnes qui veulent juste venir passer une journée avec moi pour
vivre ce que c'est que d'être neuropsychologue, vivre c'est quoi faire faire du
neurofeedback à quelqu'un, ils veulent comprendre. Ça fait qu'il y a comme
un... ils ont tellement d'options. Moi, il me semble, quand j'avais leur âge,
on en avait moins, des options, mais là c'est fou, ils ont... et je trouve que
ça manque, ça, dans les écoles. Puis, effectivement, c'est très prématuré,
secondaire II, pour demander à quelqu'un de choisir ce qu'il va faire dans
la vie, là.
Mme Sauvé : On commencerait
même à en parler au primaire, alors imaginez. Moi, c'est sûr que je veux savoir
un peu plus... connaître un peu plus tout ce que vous avez développé, dans vos
études postdoctorales, au niveau du neurofeedback, je veux en savoir plus.
J'aimerais ça que vous nous expliquiez, parce qu'on est oui à faire le
portrait, puis à voir un peu l'ensemble des constats, mais bien sûr, entendre
aussi des pistes de solution. Et clairement ce qui ressort des présentations
qu'on a, c'est que le médicament est le premier traitement et bien au-delà des
autres et bien au-delà des interventions psychosociales, mais il faut peut-être
justement valoriser d'autres approches, que ce soient les saines habitudes de
vie. Mais j'aimerais vous entendre, m'expliquer ce qu'est le neurofeedback.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien, en fait, c'est une technique qui a été développée de façon fortuite en
1965-1966 pour traiter l'épilepsie. Alors, je vais vous passer l'histoire parce
que c'est trop long, parce que la technique en tant que telle, c'est déjà assez
compliqué. Mais si on prend, par exemple, le TDAH, il y a plus qu'une façon
d'avoir un TDAH. Au niveau neuroélectrique, il y a plusieurs types d'anomalies
qui vont être responsables que tu dois associer au TDAH dans notre cerveau.
Le cerveau, vous savez, nos cellules
nerveuses communiquent de façon électrique puis de façon neurochimique. On peut
mesurer, on peut enregistrer l'activité électrique chez n'importe qui en fait,
mais une fois qu'on a cette activité électrique là, on la compare à une base de
données qui existe, une norme, puis on peut voir s'il y a des anomalies et
quelles sont-elles, ces anomalies-là. Une fois qu'on les a... c'est comme une
carte topographique de notre cerveau qui nous montre ce qui marche puis ce qui
ne marche pas sur le plan électrique.
Mais une fois qu'on a identifié ce qui ne
va pas, bien, on peut l'enregistrer. Donc, je peux mettre une petite électrode
sur la tête de la personne à l'endroit où il y a le problème en lien avec le
TDAH, je vais lier les fréquences que j'enregistre à une chanson, donc quelque
chose qui est à l'extérieur de lui, un stimulus comme une chanson, et une
animation, comme un vidéo, par exemple. Mais pour que la chanson et le vidéo se
mettent à jouer, la personne, il va falloir qu'elle trouve dans quel état elle
est quand sa chanson joue et que son vidéo bouche. Ça fait que si elle est dans
la lune, bien, moi, les bandes de fréquences que j'enregistre, au lieu de
diminuer, elles augmentent, ça fait que sa chanson, elle ne joue pas. Aussi, à
ses zones rapides, au lieu d'augmenter, pour remplacer des zones lentes qui causent
le TDAH, bien, si elle n'est pas assez attentive, elles n'augmentent pas, ça
fait que son vidéo ne bouge pas.
Ça fait que la personne, elle a comme un
feedback en temps réel de ce qui se passe directement dans son cerveau, puis,
en ajustant son état, elle arrive à prendre le contrôle de ça et à le
renverser. Ça fait que, techniquement, là, c'est de la neuroplasticité pure,
puis c'est une technique qui, contrairement à la médication, prend du temps, on
appelle ça un entraînement en fait. Pour un enfant, on parle d'une quarantaine
d'heures, ça fait que ça ne se fait pas du jour au lendemain. Par contre, il
n'y a pas d'effets secondaires, c'est l'avantage...
Mme Lévesque (Johanne) :
...son état, elle arrive à prendre le contrôle de ça et à le renverser. Ça fait
que, techniquement, là, c'est de la neuroplasticité pure, puis c'est une technique
qui, contrairement à la médication, prend du temps, on appelle ça un
entraînement, en fait. Pour un enfant, on parle d'une quarantaine d'heures, ça
fait que ça ne se fait pas du jour au lendemain. Par contre, il n'y a pas
d'effets secondaires, c'est l'avantage, un peu de fatigue au début. Puis, à la
fin, tout ce qui est acquis est acquis pour le restant de ses jours, c'est là
où on se distingue de la médication. Puis ce n'est pas parfait, ce n'est pas
une panacée universelle, puis ce n'est pas tout le monde qui réagit de la même
façon au neurofeedback. Moi, j'ai travaillé peut-être avec 10 000 personnes,
depuis le début de ma carrière, puis j'ai un taux de succès, comme je disais,
de 60 %, 70 % de remédiation des symptômes, ça fait que ce n'est
quand même pas négligeable.
C'est encore... sur le plan scientifique,
il y a encore une controverse qui est liée à la pratique, je dois le dire,
parce qu'il y a beaucoup moins d'études où on mesure l'effet placebo, les
études à double insu, parce que c'est très, très dur à réaliser. Si j'entraîne
quelqu'un qui comprend le moindrement ce qu'il faut qu'il fasse puis que je lui
présente l'activité électrique de quelqu'un d'autre, bien, il va se rendre
compte qu'il est dans le groupe... dans le mauvais groupe, que ce n'est pas son
activité électrique. Ça fait que c'est très difficile, mais il y en a, des
études de double insu, qui ont montré de l'efficacité, mais il y en a beaucoup
moins que pour les médicaments. Mais, bref, c'est ce que je peux vous dire.
Mme Sauvé : C'est
intéressant. Combien de temps me reste-t-il?
Le Président (M. Provençal)
: ...
Mme Sauvé : Deux minutes.
C'est tellement intéressant. Écoutez, je pense que je vais vous parler après
parce que je veux en savoir encore plus. Est-ce que cette question par
rapport... que je veux vous poser par rapport au neurofeedback : Pour des
jeunes, des très jeunes qui n'ont pas... donc le développement du cerveau n'est
pas complété, est-ce que c'est approprié?
Mme Lévesque (Johanne) : On
peut commencer à partir de l'âge de six ans, mais pas avant ça.
Mme Sauvé : O.K. À partir de
l'âge de six ans. O.K. Parfait. Vous avez dit, toujours dans les pistes de
solution, que vous avez développé vous-même un outil. Vous parliez
évidemment...
Mme Lévesque (Johanne) : Une
évaluation.
Mme Sauvé : Alors donc, un
outil d'évaluation. Et puis, encore là, est-ce que ce sont des propositions de
pistes de solution? Est-ce qu'il y a des outils, comme celui que vous avez
développé, qui pourraient être mis au service des parents? Est-ce que ce sont
des outils qui pourraient être développés en lien avec le développement des
compétences sociales, aussi l'intégration scolaire, et tout ça? Est-ce que ce
sont des outils qui pourraient faire partie de nouvelles avenues d'intervention
psychosociale?
Mme Lévesque (Johanne) : Pas
directement ce que moi, j'ai fait, mais des choses qui ne coûtent rien, que
tout le monde peut faire, ce serait, par exemple, de faire du sport. La
cohérence cardiaque, tout le monde en a entendu parler, puis, sérieusement,
moi, je trouve ça vraiment plate, comme approche, comme technique, mais c'est
très, très efficace au niveau cérébral. Ça fonctionne pour vrai. Donc, ça amène
automatiquement un «reset» au niveau du système nerveux. Ça apaise et ça oblige
une présence, donc une attention.
Ensuite de ça, la méditation dirigée dans
les écoles, le yoga, pourquoi pas? Juste... C'est démontré comme étant
efficace. Alors, c'est quelque chose qui pourrait être fait chez tous... dans
toutes les écoles pour tous les élèves, peu importe le milieu, favorisé, non
favorisé. C'est assez facile à implanter, puis ça ne coûte rien du tout.
Mme Sauvé : Merci...
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenue.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, je vais céder la parole au député de
Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci beaucoup.
En début de présentation, vous avez dit quelque chose que beaucoup d'autres ont
dit aussi, c'est-à-dire que le trouble, là, du déficit de l'attention et de
l'hyperactivité, c'est d'origine génétique. J'aimerais savoir un peu qu'est-ce
qui... C'est quoi, la preuve scientifique de ça? Parce que ça semble être pris
vraiment comme un... comme quelque chose pour acquis par tout le monde, là,
mais qu'est-ce qui soutient cette thèse?
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien, en fait, c'est qu'il y a des études qui ont démontré que, chez les
personnes qui avaient des difficultés mesurées d'attention et de contrôle
moteur, il y avait des anomalies au niveau de l'expression de certains gènes,
comme par exemple le gène D1, D4, en lien avec la dopamine, d'autres gènes en
lien avec la noradrénaline. Donc, c'est ce lien-là, c'est une corrélation qui a
été faite.
Puis, par définition, un trouble
neurodéveloppemental doit être génétique. Donc, ça, c'est un peu comme le chien
qui se mord la queue, là, il faut qu'on arrive à quelque chose qui est inné
pour pouvoir parler d'un trouble neurodéveloppemental. Donc, si c'est inné,
c'est génétique. C'est ça, la fameuse boucle. Oui, c'est ce que je pourrais
vous dire, c'est... La preuve, elle est là, je vous dirais.
Mais, par contre, ce que les études ont
pris beaucoup de temps à essayer de comprendre, puis, à ma connaissance, il y
en a juste trois qui l'ont fait, c'est : O.K. On a un défaut génétique,
mais il vient d'où, ce défaut génétique là? Puis il y a... C'est ça, il me
semble, c'est trois études qui ont été publiées, la première, en 2015, la
deuxième, en 2018, puis, je pense, une dernière, en 2019, si ma mémoire ne me
fait pas défaut, là, qui a montré... qui faisait une liste de 11 produits
chimiques qu'on consomme quotidiennement, soit qu'on les respire, on les mange,
on les boit, et ils ont fait le lien, pour la première fois, avec tous les
troubles neurodéveloppementaux que les enfants ont. C'était la première fois
que c'était fait.
Parce que moi, je trouve que de dire que
c'est génétique, bien... oui, puis? Tu sais, c'est comme... Au-delà de ça, là,
ça veut dire quoi?
• (17 h 10) •
M. Zanetti : Donc, c'est comme
si, au fond, il y aurait peut-être, à cause de la plasticité, disons, des
gènes, une espèce d'influence environnementale qui peut s'exprimer dans des
anomalies...
Mme Lévesque (Johanne) :
...moi, je trouve que de dire que c'est génétique, bien, oui, puis? Tu sais,
c'est comme au-delà de ça, là. Ça veut dire quoi?
M. Zanetti : Donc, c'est comme
si, au fond, il y aurait peut-être pour cause de la placicité, disons, des
gênes, une espèce d'influence environnementale qui peut s'exprimer dans des
anomalies génétiques.
Mme Lévesque (Johanne) :
C'est ça. C'est que pendant la conception, soit à travers ce que la mère
consomme ou à la naissance, dans les premiers mois de la vie de l'enfant, bien
ces éléments-là, environnementaux vont façonner ou influencer le cerveau, de
sorte qu'il va se produire un petit déclic au niveau génétique qui va faire que
l'enfant va être inattentif et hyperactif.
M. Zanetti : Donc, le fait
qu'on nous dise... Ah! oui, c'est terminé.
Le Président (M. Provençal)
: ... au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
beaucoup de votre présentation. C'est très intéressant. On a reçu hier un de
vos collègues, un autre neuropsychologue, qui nous a parlé de la pression du
client payeur, qui payait puis qui voulait un résultat, comme moi, si je veux
m'acheter une auto rouge, je vais chez le concessionnaire puis si j'ai une auto
bleue, je ne serai pas content parce que je veux une auto rouge. Bon, bien là, il
y a des gens qui paient 2 000 $, 2 500 $ pour avoir un
diagnostic de TDAH, puis ils ne l'ont pas, puis, bon, ils ne sont pas contents.
Alors, est-ce que vous avez aussi senti
cette pression du client payeur?
Mme Lévesque (Johanne) : Pas
du tout.
M. Gaudreault : O.K., pas chez
vous.
Mme Lévesque (Johanne) : Je
n'ai jamais été confrontée à ça, vraiment pas.
M. Gaudreault : Mais vous avez
quand même des témoignages de gens, qui disent : Ah! ça pourrait m'aider
dans mon...
Mme Lévesque (Johanne) : Oui,
en fait...
M. Gaudreault : C'est un autre
genre de pression.
Mme Lévesque (Johanne) : Oui,
c'est une pression, oui, mais pas au sens... pas de parents qui s'attendaient à
avoir un diagnostic. En fait, quand moi, j'annonce aux parents que leurs
enfants n'ont pas de diagnostic, bien il y en a qui sont vraiment surpris puis
là, je leur explique pourquoi l'enfant est comme il est, puis là, bien, ils
sont soulagés la plupart du temps. Tu sais, c'est vraiment...
M. Gaudreault : Bon.
Mme Lévesque (Johanne) :
Mais, non, moi, je n'ai pas ça. Les seules pressions que j'ai eues, c'était
d'écrire un faux rapport, dans le fond.
M. Gaudreault : Oui.
Mme Lévesque (Johanne) :
C'est ça.
M. Gaudreault : Maintenant, je
veux revenir un peu sur la question de l'aspect génétique de la chose. Est-ce
que ça... Au moins, est-ce que ça nous permet de déceler plus facilement ou
plus rapidement un TDAH? Parce que je comprends qu'il peut y avoir tous les
tests psychosociaux, les rencontres, etc., mais l'aspect génétique, il n'y a
pas un côté un peu plus mécanique à ça?
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien, en fait, à ma connaissance, il n'y a aucun test génétique en ce moment
qui existe pour pouvoir dépister ça. Nous, en ce moment, on travaille à
développer, via l'intelligence artificielle, l'identification, justement,
précoce via l'activité neuroélectrique des cerveaux que j'ai en ma possession,
pour pouvoir le prédire. Mais on n'est pas rendus là. C'est encore... On en est
encore, moi, je vous dirais, peut-être pour un an.
M. Gaudreault : Ah! c'est à
côté. Oui, oui, oui.
Mme Lévesque (Johanne) : Ça
fait que ce n'est pas si loin que ça, mais... C'est... oui. Mais ce n'est
pas... on ne voit pas l'aspect génétique, mais on pourrait arriver, avec un
électroencéphalogramme, à dire : Opelaïe! Cet enfant-là, est à risque à 92 %
de présenter des symptômes d'un TDAH.
M. Gaudreault : O.K. Il me
reste combien de temps?
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes.
M. Gaudreault : Bon. 30
secondes. Juste pour vous faire une recommandation d'un roman que vous avez
peut-être lu, Royal de Jean-Philippe Baril Guérard...
Mme Lévesque (Johanne) : Non.
M. Gaudreault : ...qui parle
justement des étudiants en droit, qui ont énormément de pression à l'université
pour la course aux stages et qui prennent des...
Mme Lévesque (Johanne) : Des
psychostimulants.
M. Gaudreault : ...des
psychostimulants, effectivement, pour être capables de bien performer pour la
course aux stages. Alors, ça me fait beaucoup penser à ça. Alors, c'est en
train de contaminer notre littérature également, ce qui peut permettre de
sensibiliser.
Mme Lévesque (Johanne) : Oui.
M. Gaudreault : Aslors, voilà.
Merci.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenue.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Dre Lévesque, pour
votre contribution aux travaux de la commission. Je vais demander à l'autre...
suspendre les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de
nous rencontrer.
(Suspension de la séance à 17 h 14)
(Reprise à 17 h 16)
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons terminer notre séance de travail avec les représentants
du Mouvement Jeunes et santé mentale. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à
commencer votre exposé. À vous la parole.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Merci.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bonjour. Mon nom est Stéphanie Benoit-Huneault. Je suis coordinatrice du Mouvement
Jeunes et santé mentale.
Mme Boucher (Anne-Marie) : Je
m'appelle Anne-Marie Boucher. Je suis responsable des communications et de
l'action sociopolitique au Regroupement des ressources alternatives en santé
mentale du Québec et membre du comité de coordination du Mouvement Jeunes et
santé mentale. On voulait, d'entrée de jeu, remercier les membres de la
Commission de la santé et des services sociaux de nous entendre aujourd'hui. On
est très honorés d'être là. On veut aussi remercier les jeunes qui militent au
mouvement depuis ses tout débuts, en 2016, qui ont livré aussi leurs paroles
pour qu'on l'amène en haut lieu politique. Donc, vraiment, on remercie chacun
et chacune de ces personnes qui ont contribué.
On aurait aimé qu'un jeune ou qu'une jeune
soit présente avec nous aujourd'hui, donc, quelqu'un qui milite avec nous,
mais, compte tenu des délais de convocation, ça a été difficile de faire une
présentation qui aurait été satisfaisante et pleine de sens pour nous. Donc, on
a préféré venir sous cette forme. Donc, bien désolées de ne pas pouvoir les
entendre directement aujourd'hui.
Pour ce qui est du Mouvement Jeunes et
santé mentale, en bref, c'est un mouvement qui existe depuis 2016, qui a été
lancé suite à une grande consultation qui a été menée un peu partout au Québec.
Ce qu'on souhaitait, c'était de comprendre, en fait, ce qui se jouait quant à
la hausse accrue des diagnostics en santé mentale, en général, chez les jeunes,
aussi, la hausse accrue de la prise de médicaments. Et cette préoccupation-là,
en fait, était née suite à un travail conjoint, si on veut, autour du rapport,
en 2009, de la commission de l'éthique sur les sciences et la technologie, qui
traitait de l'usage élargi des psychotropes. On parlait de l'usage de
performance tout à l'heure. Ça faisait partie de ce rapport-là, mais aussi l'usage
auprès des jeunes.
Donc, depuis 2016, on a un mouvement pour,
par et avec les jeunes, qui travaille sur différents champs, sur différents
dossiers. On n'est pas des spécialistes de la question du TDAH à proprement
parler parce qu'on ne travaille pas nécessairement avec les diagnostics, mais
plus largement avec les enjeux de la santé mentale. On travaille évidemment sur
l'enjeu de la médicalisation, des difficultés vécues par les jeunes. Et des
thèmes sur lesquels on travaille fortement, c'est l'enjeu des droits en santé
mentale et aussi les conditions de vie qui sont à la racine souvent des
difficultés en santé mentale.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Donc, de prime à bord, on aimerait ça un peu définir ce qu'on entend par
médicalisation qui a tendance à être confondue des fois avec le fait de donner
des médicaments, qui est la médicamentation, deux choses. La médicalisation, en
fait, c'est vraiment le fait d'apposer un diagnostic sur un comportement ou
encore un évènement, en fait, qui ne relève pas du champ médical. On pourrait
parler entre autres de la souffrance liée à un deuil. Bref, en sommes, là, la
médicalisation, c'est vraiment le fait de détourner l'attention de l'environnement
social vers l'individu, en gros.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Nous, donc, en 2016, c'était vraiment une collecte d'information assez large
sur la santé mentale, mais pour les besoins de cette commission-ci, à
l'été 2019, on a mené un coup de sonde par des questionnaires en ligne
pour essayer de recueillir une parole plus diversifiée sur l'enjeu
spécifiquement du TDAH. Donc, d'abord, on aimerait vous ramener quelques enjeux
qui sont ressortis de ce coup de sonde là qui ont été menés auprès de jeunes
jusqu'à l'âge de 30 ans en lien avec le diagnostic et la médication du
TDAH.
Donc, premier aspect qui est ressorti de
cette consultation-là, c'est que le diagnostic de TDAH, il s'inscrit dans un
contexte social spécifique. On a parlé tout à l'heure de pression de
performance, c'est une pression que les jeunes subissent à l'école dans leur
milieu, mais les adolescents, les jeunes adultes et les parents aussi, hein?
Donc, il faut garder vraiment un oeil large sur tous les milieux dans lesquels
les jeunes évoluent.
• (17 h 20) •
Je vous cite un des témoignages qu'on a
reçu : «C'est un retour à l'école, à 28 ans, qui m'a amené à aller
chercher le diagnostic. Avec le boulot à temps plein, les cours du soir,
j'étais incapable de porter attention pendant les heures de classe. Aussi, le
seul temps que j'avais pour faire mes lectures et travaux était pendant les
week-ends. Il m'était littéralement impossible de rester concentré sur la tâche
que je devais faire.» Ça, on a reçu plusieurs témoignages qui parlaient de la
pression puis la difficulté, en fait, à atteindre un niveau de...
Mme Boucher (Anne-Marie) :
...chercher le diagnostic : «Avec le boulot à temps plein et les cours du
soir, j'étais incapable de porter attention pendant les heures de classe.
Aussi, le seul temps que j'avais pour faire mes lectures et travaux était
pendant les week-ends. Il m'était littéralement impossible de rester concentré
sur la tâche que je devais faire.» Ça, on a reçu plusieurs témoignages qui
parlaient de la pression puis la difficulté, en fait, à atteindre un niveau de
réussite ou un niveau de performance suffisant aux yeux de la personne. Il y a
vraiment un lien fort entre le diagnostic de TDAH, je pense que vous l'avez vu
depuis le début de la commission, et le milieu scolaire, parce que le milieu
scolaire, c'est vraiment un révélateur, des fois c'est un déclencheur de difficulté
et d'anxiété. C'est vraiment en lien avec la réussite et l'échec scolaire, mais
c'est aussi en lien parfois avec de l'intimidation. C'est ressorti beaucoup
dans notre coup de sonde, il y avait plusieurs jeunes qui disaient vivre de
l'intimidation à l'école, et c'est suite à ça qu'ils ont reçu leur diagnostic
de TDAH. Donc, quand on parle de diagnostics erronés, parfois, ça peut être une
explication.
Finalement, bien, ce qu'on a vu aussi dans
notre coup de sonde, c'est que dans certains témoignages, l'école jouait un
rôle dans la médicalisation des difficultés, c'est-à-dire qu'il y avait une
pression de la part du milieu scolaire, que ce soit des enseignants ou de la
direction, pour qu'un enfant prenne une médication. Je cite : «L'école a
forcé mes parents et leur a dit que, si je n'étais pas diagnostiqué, elle
refusait de me reprendre.»
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Le deuxième aspect qui est vraiment ressorti au niveau du sondage, c'est le
mode d'attribution du diagnostic, c'est-à-dire qu'il est très variable,
c'est-à-dire une variété de professionnels qui peuvent être impliqués, pas
toujours les mêmes, pas toujours des neuropsychologues, les temps de
consultation qui varient de cinq minutes à trois rencontres d'une heure où on
prend vraiment le temps avec le jeune de parler de son parcours de vie et ce
genre de trucs là.
Mme Boucher (Anne-Marie) : Et
ça, le moment du diagnostic et de la prescription, ça ressortait beaucoup,
parce que les jeunes, dans notre coup de sonde, nous disaient... En général, ce
qui était rassurant pour nous, c'est qu'ils ont reçu de l'information, hein?
Ils recevaient le diagnostic, ils avaient un peu d'information sur le
diagnostic, de l'information sur leur médication. Par contre, ce qu'on a eu
dans notre consultation, c'est que ce n'est pas tous les jeunes qui avaient de
l'information sur les effets secondaires de la médication. Donc, ça, parfois,
c'était manquant. On se rend compte qu'il y a des jeunes qui prennent la
médication sans vraiment savoir ce qu'ils prennent ni ce que ça peut causer.
Presque tous les répondants de notre coup
de sonde ont fait état d'effets secondaires qui étaient nuisibles, de modérés à
plus graves. Donc, on parle vraiment de perte d'appétit, impulsivité et
troubles du sommeil. Il y a plusieurs répondants qui ont nommé une perte du
sentiment d'être soi. Donc, ce n'est pas à négliger, le sens puis le sentiment
de connexion face à nos émotions. Malgré ces effets secondaires là, qui ont été
nommés par presque tous les répondants, la plupart disaient quand même que
c'était contrebalancé par les effets positifs. Donc, évidemment, ce n'était pas
tout noir, ils se disaient : Il y a plus d'effets favorables que
défavorables, donc je poursuis ma médication. Par contre, il y avait quand même
plusieurs répondants qui parlaient que les effets secondaires étaient plus
nuisibles que les symptômes pour lesquels ils prenaient initialement la
médication, et ça, ça nous interroge quant au suivi médical qui est offert à
ces jeunes-là qui vivent des effets secondaires néfastes importants.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Donc, en ce sens-là, au regard de ces constats-là, pour nous, l'enjeu du TDAH
est vraiment indissociable pour nous d'une réflexion plus large sur la question
de la médicalisation, la médicalisation des problèmes sociaux vécus par les
jeunes, évidemment. On a parlé tantôt d'une consultation qu'on avait menée en
2016 avec 50 organisations, 160 jeunes, 150 intervenants. Je souhaite vous
présenter ici des grandes lignes de ce qu'on nous a communiqué.
Dans un premier temps, les jeunes nous
disent : Le diagnostic tombe trop vite. Le diagnostic a un effet
identitaire qu'on ne doit pas négliger. On parle ici de stigmatisation,
d'étiquetage. La médication est parfois la seule réponse proposée, puis elle est
présentée comme la vraie solution rapide, accessible et efficace. Les jeunes
n'ont pas toujours toute l'information, que ça soit sur le traitement, les
effets, les alternatives possibles, mais aussi sur les interactions entre la
médication et la consommation de drogue et d'alcool. Et, finalement, les effets
secondaires — justement, madame nous l'a nommée précédemment :
la médication peut être incapacitante, voire même dépasser les effets
bénéfiques attendus.
Mme Boucher (Anne-Marie) : Ce
qu'on avait reçu aussi dans notre coup de sonde en 2016, donc cette vaste
consultation là qu'on a menée à l'échelle du Québec, c'est qu'il y avait plusieurs
jeunes qui disaient qu'ils avaient le sentiment puis la sensation que les
médicaments agissaient, oui, sur des symptômes reliés à un état, mais qu'on ne
s'adressait vraiment pas aux causes, aux conditions de vie dans lesquelles ils
évoluaient. Ça fait qu'il est vraiment question d'élargir le regard. Je vous
cite : «Des fois aussi, ce n'est pas juste les neurones qui ne
fonctionnent pas comme il faut, il y a une raison pourquoi les neurones ne
fonctionnent pas comme il faut. Des fois, c'est que nos parents, ils ont leurs
problèmes, eux autres aussi, puis des fois, nos problèmes, bien, ça vient de
là.»
Il y avait aussi l'aspect de l'enjeu de
l'accès aux services psychosociaux, l'attente très longue. On le sait, on n'a
pas suffisamment de professionnels dans les écoles, les services ne répondent
pas toujours aux besoins des jeunes. Il y a des jeunes qui nous ont dit, par
exemple, qu'il avait réussi à avoir un psy, mais très vite il a été dirigé vers
des thérapies de groupe, et ce n'était pas quelque chose qui lui convenait.
Donc, vraiment, l'enjeu d'écouter les besoins des jeunes était toujours central
dans ce qu'on recevait.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Donc, ce qu'on souhaite vous transmettre aujourd'hui en termes de
recommandations, c'est quatre grandes recommandations qui touchent, oui,
évidemment, l'enjeu d'aujourd'hui sur la question du TDAH, mais aussi plus
largement la question qui est en lien avec la médicalisation. D'abord, il faut
vraiment un accès qui est gratuit à la psychothérapie, à l'accompagnement, aux
alternatives de manière à ce que les jeunes aient vraiment un réel choix face à
ces différentes options là, pas juste les jeunes, mais les familles aussi, et
ça, c'est à la fois dans le réseau de la santé, dans le milieu de l'éducation,
mais aussi dans le milieu communautaire, et ce, sans nécessiter d'avoir un
diagnostic. Justement en cette journée, là, de mise à jour économique, là, on
souhaite vraiment mettre de l'avant l'importance d'un financement accru des
services publics et...
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie) : ...les jeunes aient vraiment un réel choix face à ces
différentes options-là, pas juste les jeunes, mais les familles aussi, et ça,
c'est à la fois dans le réseau de la santé, dans le milieu de l'éducation, mais
aussi dans le milieu communautaire, et ce, sans nécessiter d'avoir un
diagnostic. Justement, en cette journée de mise à jour économique, là, on
souhaite vraiment mettre de l'avant l'importance d'un financement accru des
services publics et communautaires pour que les citoyens aient vraiment accès
aux services auxquels ils ont droit.
Notre deuxième revendication, c'est
vraiment de s'assurer d'une participation, en fait, égalitaire des jeunes sur
les questions qui les concernent. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire
d'être à l'écoute de leurs besoins réellement, de leurs aspirations, de leur compréhension
des difficultés qu'ils vivent, mais aussi de leurs idées qu'ils transportent
aussi avec eux pour vraiment transformer les milieux dans lesquels ils
évoluent, mais aussi les politiques qui s'adressent à eux.
Troisième revendication qu'on porte depuis
le début, c'est vraiment de faire en sorte que l'exercice du droit à
l'information, à la participation, au droit à l'accompagnement et au
consentement aux soins libre et éclairé soit respecté et garanti pour tous les
traitements en santé mentale, y compris dans le cas du TDAH. Par exemple, les
effets secondaires doivent être connus et expliqués. La personne doit pouvoir
participer pleinement aussi au suivi médical en étant entendu, et ce, même
quand il fait état d'effets secondaires qui sont nuisibles à sa qualité de vie.
Finalement, on recommande aujourd'hui
qu'une commission parlementaire plus large soit mise sur pied de manière à
traiter l'enjeu de la médicalisation, que ce soit chez les jeunes, mais aussi
chez les adultes et les aînés. Il faudra en faire une opportunité pour définir
des solutions avec l'ensemble des acteurs concernés, y compris les jeunes, et
ça, pour le détail, dans notre mémoire, pages 22, 23, vous avec le détail de
ça. On croit qu'on devrait examiner la médicalisation, ses causes et ses
effets. Aussi constater que la médicalisation vient gommer les conditions de
vie, les conditions sociales dans lesquelles évolue une personne, parce qu'on
se concentre de façon très limitée et notre regard et notre intervention sur
l'individu et sa biologie. Donc, il nous manque une grande partie du tableau.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons débuter la période d'échange avec le groupe du
gouvernement.
Mme Picard :
...permettrait de terminer ses quelques phrases, si vous lui permettez.
Le Président (M. Provençal)
: Oui, oui. Excusez.
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie) : On en était à notre conclusion.
Le Président (M. Provençal)
: Allez-y. Excusez-moi.
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie) : Ah! sans problème. Sans problème. Donc, dans le fond,
pour nous, en élargissant, là, vraiment la réflexion sur la question de la
médicalisation de manière générale, il ne s'agit évidemment pas de nier ici les
difficultés vécues par les jeunes et leur entourage ni même l'apport de la
médication que ça a pour certains jeunes. C'est plutôt, en fait, l'occasion de
nous demander collectivement : Comment on répond actuellement aux
difficultés vécues par les jeunes? Est-ce que ces réponses-là sont adéquates?
Comment on peut mieux faire face à ces problématiques-là dans le respect du
vécu des personnes, du vécu des jeunes, des... oui, c'est ça.
Pour nous, il faut appeler vraiment une
réponse plus large, plus généreuse qui tiendrait compte des difficultés
sociales et économiques vécues par les jeunes. Il faut s'attaquer donc aussi
aux conditions de vie des personnes vivant des difficultés plutôt que de
proposer d'abord et parfois seulement juste le médicament comme solution,
parfois vu comme unique ou magique.
Donc, il faut vraiment procéder à un coup
de barre de manière à permettre à chaque personne d'exercer ses droits et
d'avoir accès à l'accompagnement et à l'aide dont elle a réellement besoin,
qu'elle nomme qu'elle a besoin. Donc, c'est à la fois un enjeu de santé, mais
c'est aussi un enjeu de justice.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous pouvons donc débuter notre période
d'échange avec le député de Richmond.
M.
Bachand
:
Il y a beaucoup de stock dans ça, hein? Honnêtement, là. J'ai fait une lecture
en diagonal, il y a beaucoup, beaucoup de choses, mais avec votre accord,
cependant, je vais essayer de ramener ça au mandat qu'on a à la commission
aujourd'hui.
Alors, dans l'expérience et l'expertise
que vous avez au niveau des jeunes, par rapport... et aux chiffres qu'on
connaît maintenant, là, que le Québec est le champion au niveau de la
médicalisation, le Saguenay est le champion au Québec, justement pour ça aussi,
malheureusement, alors donc qu'est-ce que les jeunes vous disent? Parce qu'on
parle de stigmatisation, et tout ça, mais les jeunes, ils se disent quoi? Ils
disent : J'aime mieux prendre le médicament puis mieux vivre socialement
ou au niveau de la famille? Parce qu'il y a une pression. On connaît tous des
familles qui disent : Mon enfant, là... qui disent au médecin, ou au
thérapeute, ou à un neuropsychologue : Ce n'est pas vous qui vivez avec
mon enfant à tous les jours.
La quotidienneté des parents fait en sorte
qu'il y a une pression directe ou indirecte par rapport à la personne capable de
faire le diagnostic. Mais les jeunes vous disent quoi par rapport à ça, parce
qu'on a vraiment un problème? S'il y a une commission aujourd'hui... puis je le
dis depuis le début de la commission, si on a une commission là-dessus, c'est
parce qu'il y a un problème. Il s'agit de le comprendre, de le définir et
d'apporter des éléments de solution, mais... surtout que vous êtes en contact
avec les jeunes. Par rapport à ça, qu'est-ce qu'ils vous disent spécialement,
spécifiquement sur le problème ici?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Sur l'enjeu spécifique du TDAH, nous, ce qu'on entend, en général, en santé
mentale ou quand on vit des difficultés, c'est sûr que les gens souhaitent
aller bien, ils souhaitent bien s'insérer dans les milieux sociaux, parce qu'on
est des animaux sociaux, on a besoin de se sentir bien intégrés dans nos
milieux, on a besoin de sentir qu'on réussit, qu'on a notre place dans les
milieux dans lesquels on est. Ça fait que c'est sûr qu'en général les jeunes
nous disent qu'ils aimeraient ça que ça se passe bien, ils aimeraient ça
réussir, surtout qu'on est dans un contexte où les écoles sont de plus en plus
compétitives, et ça, tant au primaire qu'au secondaire.
• (17 h 30) •
On parlait des projets particuliers
tantôt, évidemment il y a des effets positifs à ça, mais ça crée aussi un effet
de compétition scolaire, où il y a une pression sur les élèves...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Boucher (Anne-Marie) :
...qu'en général les jeunes nous disent qu'ils aimeraient ça que ça se passe
bien, ils aimeraient ça réussir, surtout qu'on est dans un contexte où les
écoles sont de plus en plus compétitives, et ça, tant au primaire qu'au
secondaire. On parlait des projets particuliers tantôt. Évidemment, il y a des
effets positifs à ça, mais ça crée aussi un effet de compétition scolaire où il
y a une pression sur les élèves à performer parce que, dès le secondaire, il
faut être admis dans les bonnes écoles pour ensuite être admis dans les bons
programmes et ainsi de suite.
Donc, c'est sûr que les jeunes ressentent
cette pression-là. Et ils veulent évidemment être les plus performants, les
mieux insérés possibles. En même temps, il y a une résistance de certains
jeunes qui se disent : Il y a cette norme-là de performance qui est très
étroite. Mais nous, c'est comme faire un entrer un cercle dans un rond... un
cercle dans un carré, pardon, ça rentrerait, un cercle dans un carré. Quelle
image parlante! Un cercle dans un rond. Mais ils disent : Vraiment, ce
qu'on sent, c'est qu'on est différents. On est tous différents en fait. Puis la
norme de ce qui est reconnu comme étant non pathologique est de plus en plus
étroite. Et ça, les jeunes, ils nous disent qu'ils se sentent à l'étroit
là-dedans. Ils aimeraient qu'on puisse valoriser différentes façons d'être au
monde, différentes façons d'être à l'école aussi et différentes capacités. Il y
a des personnes qui sont plus manuelles que d'autres. Pourquoi est-ce qu'il y a
des parcours qui sont moins valorisés et qui se terminent en bout de route par
des salaires aussi qui sont très, très bas et qui font en sorte qu'on a de la
misère à faire vivre notre famille ou nous-mêmes. Donc, évidemment, les jeunes,
ils ne sont pas dupes. Ils savent qu'on est dans une société où il y a de la
compétition et des inégalités. Et ils espèrent s'insérer le mieux possible.
Mais, en même temps, il y a cette pression-là, de répondre à la norme.
M.
Bachand
:
Parce qu'il va avoir des cas très lourds qui méritent un médicament. Vous en
connaissez. C'est clair. Mais il y a d'autres façons de le faire. On est... On
a l'impression aujourd'hui, parce que... Je vais être honnête avec vous. Moi,
il n'y a pas de parent qui est venu me voir pour me dire que ça n'a pas de bon
sens le nombre de diagnostics qu'on fait au Québec. Des parents, il n'y en a
pas, là, hein? C'est des experts comme vous et des groupes comme vous qui
viennent dire aux politiciens, aux politiciennes : Il y a un problème.
Mais on ne voit pas de... Il n'y a pas 500 000 personnes dans la rue
pour dire qu'on a un problème parce qu'on est deux fois plus diagnostiqués puis
plus... deux fois plus de médicaments au Québec. Est-ce qu'on est en train de
banaliser en quelque part?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
De banaliser?
M.
Bachand
:
Banaliser le fait que c'est correct de prendre ces médicaments-là. Est-ce
que... Parce que je sens qu'il y a une problématique réelle, mais à ce
moment-là... Parce que, si les parents, entre autres, mais c'est tout le monde,
là, moi inclus, tout... Si on se dit : Bah! Vaux mieux ça qu'autre chose.
Quelle est la motivation d'aller chercher autre chose, justement, qu'une
médication éventuellement? C'est ça. Ma crainte, c'est que je ne sens pas un
mouvement populaire très fort, à ce stade-ci du moins.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bien, je fait, je pense que... Peut-être que des parents se sentent peut-être
rassurés par ce diagnostic-là. Mais en même temps, je pense que les jeunes nous
parlent aussi des effets que ça a sur eux, tu sais. Puis non seulement ça, mais
on parlait tantôt de la question de l'accessibilité des services. Par exemple,
l'intervenante avant nous parlait de quand elle reçoit des gens en cabinet. Les
évaluations, on parlait tantôt, ça coûte entre 2 000 $,
2 500 $. Quand tu n'as pas accès, quand tu n'as pas le
2 000 $, 2 500 $, et que tu es devant ton médecin de
famille, et que tu dis : Je vis une problématique, mais que, dans le fond,
ta problématique, c'est peut-être qu'il y a des problèmes qui se passent au
niveau de ta famille, mais que... Puis qu'il n'y a rien qui est mis en place.
Il n'y a pas de services auxquels tu as accès, ou on te dit : Bien,
attends dans un an, deux ans, trois ans. Bien, c'est dommage, parce que tu n'as
pas d'argent. Si tu avais de l'argent, je te dirais : Voici une référence
et va consulter. Mais la réalité est qu'en ce moment les services ne sont pas
accessibles.
Mme Boucher (Anne-Marie) : Il
y a plusieurs familles...
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie) : C'est ça, tu sais. On s'entend. Puis ce n'est pas parce
que les gens ne veulent pas les services, au contraire. Les gens veulent les
services. Les gens veulent aller mieux comme... Les jeunes veulent aller mieux,
tu sais. Donc, je pense qu'à ce niveau-là il faut vraiment écouter... Ça, ça a
été vraiment quelque chose qui était... qui est ressorti très, très fortement
aussi de ce que les jeunes voulaient, entre autres particulièrement des jeunes
qui... Puis des fois, c'est des problématiques même au niveau de l'accès de
base. En santé, par exemple, on a discuté avec des jeunes, tu sais, qui ont
vécu ou qui vivent des situations d'itinérance. Avoir accès à un médecin de
famille, ce n'est pas quelque chose qui est facile ou de... quand tu es
constamment en déplacement, tu sais. De dire : Oui, je vais te donner ma
référence et voici mon numéro de téléphone, puis tu es constamment en
déplacement, ce n'est pas quelque chose qui est nécessairement facile, tu sais.
Donc, il y a des enjeux sociaux qui
traversent tout ça. Il y a des services qui ne sont pas accessibles. Puis je
pense que ce qu'on essaie aujourd'hui de faire, c'est vraiment de vous
transmettre cette parole de jeune là et puis de faire... Il faut agir au regard
de pas seulement ce que les parents ou les experts disent, mais en fait,
principalement, ce que les jeunes disent. Ils disent : On vit des
problématiques et on veut.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Peut-être que sur la question de la banalisation, vous avez raison de dire
qu'il y a une culture biomédicale qui est très présente dans notre imaginaire
au sens où, avant, on disait : Ah! lui, c'est un tannant. Lui, c'est un
petit... C'est un petit snoreau. Mais là, lui, c'est un hyperactif. On a plus
tendance à réfléchir les choses, les divergences de comportements en termes de
diagnostic. Puis ça, ça banalise peut-être un peu l'octroi de diagnostics à des
enfants puis la prise d'une médication. Et les parents, je pense que, s'ils
avaient accès à des alternatives à la médication qui seraient gratuites,
accessibles rapidement, je suis certaine que, pas tous les parents, mais
plusieurs parents opteraient pour ces alternatives-là plutôt que pour la
médication, s'il y avait des aménagements qui étaient plus facilement...
Mme Boucher (Anne-Marie) :
...l'octroi de diagnostics à des enfants puis la prise d'une médication. Et,
les parents, je pense que, s'ils avaient accès à des alternatives à la
médication, qui seraient gratuites, accessibles rapidement, je suis certaine
que... pas tous les parents, mais plusieurs parents opteraient pour ces
alternatives-là plutôt que pour la médication, s'il y avait des aménagements
qui étaient plus facilement installés dans les écoles aussi. Ça fait que
c'est... Il y a cet attrait-là, je crois, pour d'autres réponses.
Une voix
: Merci
infiniment. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : J'aimerais vous
entendre surtout... Vous avez parlé de la pression pour être dans les bonnes
écoles. J'imagine que, dans le temps de mon collègue, il y avait aussi une
certaine pression pour aller dans les bonnes écoles. Qu'est-ce que vous pensez
qui a changé de ces années-ci... le clash des générations, là? Il est où, le
lien?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Là, je mets mon chapeau de sociologue de l'éducation. Ce qui a changé... En
fait, l'école québécoise a changé énormément depuis les années 80‑90. On assiste
vraiment à une montée et de la concurrence du privé et de la concurrence des
établissements publics entre eux. C'est quelque chose qui a changé en termes de
culture scolaire. Les syndicats le dénoncent depuis des années, les groupes de
parents le dénoncent. Il y a un changement de culture, qui est à l'oeuvre, puis
on dirait que là c'est...
C'est quand même dans l'arrière-plan de
l'enjeu du TDAH. C'est que la classe régulière, où les jeunes qui ont plus de
difficulté face à l'école se retrouvent généralement, elle a été écrémée de
40 % à 50 % des élèves qui ont le plus de facilité, et ça, ça rajoute
une pression sur la salle de classe, ça rajoute une pression sur l'enseignante
ou l'enseignant et ça crée une différence en termes de réussite scolaire ou de
décrochage scolaire. Ça fait aussi partie de l'arrière-plan de l'enjeu de
l'échec ou de la réussite, ça fait que c'est... Je dirais ça, en bref.
Mme Picard : Moi, j'ai entendu
aussi certains... J'imagine que vous l'avez déjà entendu, là, qu'un enfant qui
ne se fait pas médicamenter, quand il en aurait peut-être de besoin pour son
TDAH, s'automédicamente avec soit du cannabis ou d'autres drogues. Donc ça, ça
peut ajouter aussi peut-être une pression aux parents, de dire : Ah mon
Dieu! Je vais médicamenter mon enfant parce que je ne veux pas qu'il soit
intoxiqué plus tard. J'aimerais savoir, selon ce que vous avez dans votre
entourage, là, votre organisme, qu'est-ce que vous en pensez.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Les jeunes ne nous ont pas parlé de cette problématique-là. En fait, ce que les
jeunes souhaiteraient, c'est d'avoir des renseignements. Est-ce qu'il y a des
interactions... Advenant le cas où on me prescrit, par exemple, du Concerta, est-ce
qu'il y a des interactions qui pourraient nuire si, disons, je prends du
cannabis ou autre? Ce qu'ils veulent, c'est l'information.
À ce moment-là, un coup qu'ils ont
l'information, on doit faire confiance à leur jugement, puis, en fait, ils
veulent qu'on leur fasse confiance. Ils veulent l'information. Ils sont
comme : Bien là, je ne veux pas... je veux... On avait l'idée de... Je
veux aller bien, là, mais, qu'on me donne l'information en conséquence, là.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Mais, tu sais, je pense, il ne faut pas tomber dans un piège, de dire :
Bien, il faut médicamenter pour éviter l'automédicamentation. Je trouve que
l'exposé juste avant le nôtre était très convaincant, à savoir qu'il existe des
alternatives sans effet secondaire nuisible, qui peuvent aider à améliorer la
plasticité du cerveau ou à développer des stratégies pour gérer la question
l'attention, justement.
Donc, c'est de dire : Oui, il faut
qu'il y ait une intervention et un accompagnement qui soient plus généreux dans
les écoles pour que le jeune ne se sente pas constamment défaillant et pas
suffisant face à l'école. Ça fait que c'est sûr que, oui, il y a une nécessité
d'accompagnement mais pas nécessairement seulement la médication.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de Dubuc.
M. Tremblay : Merci, M. le
Président. J'ai une question qui me vient à l'esprit. On parle de revoir le
modèle des écoles. Sans nommer de nom, sur les intentions qui se présentent au
niveau de la société, de revoir... Est-ce que ce nouveau modèle d'école là
n'est pas, selon votre avis, plus cosmétique? Est-ce qu'il tient compte de
cette réalité-là qui nous saute aux yeux, là, ou est-ce que, finalement, le
fait d'avoir une... je ne dirai pas une cuisine mais un bistro, des
aménagements x, y... Pensez-vous qu'on a intégré tout ça dans la démarche qui
est déjà en mouvement?
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bien, je dirais... Je vous référerais, en fait, au Conseil supérieur de
l'éducation, qui avait écrit un avis sur... le titre m'échappe...
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Une
école riche de tous ses élèves.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Voilà, merci bien.... qui parlait justement de comment on inclut les jeunes,
entre autres, qui ont... qui sont diagnostiqués TDA, TDAH, puis de comment on
doit... comment il y a des mesures qui peuvent être faites pour, par exemple,
disons, un élève TDAH dans la classe, mais comment ça bénéficie, en fait, à
l'ensemble des élèves, ces mesures-là.
Non seulement ça, mais, dans leur avis,
ils disaient aussi : Il faut faire attention aussi parce que, dans le
milieu scolaire, il y a cette tendance à la médicalisation, justement, parce
que le modèle, il est ça, en classe, ça se passe de cette manière-là, c'est
comme ça qu'on fonctionne, puis, voilà, il faut que tu rentres dans ce
modèle-là, justement, le cercle dans le cercle...
Une voix
: Le cercle
dans le cercle.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
...dans le cercle, dans le cercle. Donc, je crois que c'est possible, même à
l'intérieur des... sans changer nécessairement, là...
Une voix
: Les
bâtiments, là.
• (17 h 40) •
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Oui...
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
...médicalisation, justement, parce que le modèle, il est ça, en classe, ça se
passe de cette manière-là, c'est comme ça qu'on fonctionne, puis, voilà, il
faut que tu rentres dans ce modèle-là justement, le cercle dans le cercle...
Une voix
: Le cercle
dans le cercle.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
...dans le cercle dans le cercle. Donc, je crois que c'est possible, même à
l'intérieur des... sans changer nécessairement, là...
Une voix
: Les
bâtiments, là.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Oui, c'est ça, là. Les bâtiments, je pense que c'est une autre question, mais
l'aménagement à même de la formule dans la classe, ou, des fois, juste les
affiches dans les salles qui peuvent, des fois, peut-être... quand il y a beaucoup
de stimuli, là, ce genre de truc là, là, ou juste de... O.K., bon, ça fait une
heure qu'on est assis, on va bouger un peu, ou on va présenter les choses de
manière plus interactive, on va travailler en équipe ou on change en fonction
des besoins qui sont présents au sein des élèves de la classe en écoutant ce que
les élèves nous demandent, qui ont besoin aussi, tu sais.
Mme Boucher (Anne-Marie) : Ça
fait que ce n'est peut-être pas tant, en fait, dans le type de bâtiment, qu'ils
vont être élaborés. Mais, par exemple, des mesures comme des cantines
scolaires, ça peut faire une différence. Si les élèves ont un bon repas,
justement, bien protéiné dans leur ventre versus un lunch très sucré, peut-être
que les cantines publiques auraient un impact dans les écoles. Le fait que les
profs, oui, sont sensibilisés au fait de prendre des moments, peut-être, de
méditation, de yoga, c'est sûr, c'est des mesures qu'on sait qui fonctionnent,
puis le fait d'avoir mangé, d'avoir bien dormi puis d'avoir des espaces pour
ventiler pendant la journée, c'est la base.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Il faut se rappeler aussi qu'il y a malheureusement encore beaucoup d'élèves
qui vont à l'école et qui n'ont pas mangé parce qu'on est dans... par exemple,
on est dans un contexte familial où les conditions socioéconomiques ne sont vraiment
pas enviables. C'est une réalité encore aujourd'hui.
M. Tremblay : On a parlé
aussi de l'intervention de la famille, de l'intervention du milieu scolaire, un
réseau d'intervention finalement même au niveau de la santé. Est-ce qu'on
pourrait dire qu'il serait à propos de... Si vous aviez à prioriser, qui
devrait recevoir davantage d'outils, ou si ce ne serait pas plutôt en simultané
ou on doit le voir de façon générale ensemble pour améliorer la situation?
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Je ne pense pas qu'on peut penser qu'on va travailler en silos et qu'on va
régler le problème. Je pense qu'il faut travailler de manière concertée dans
l'ensemble de ces milieux-là, c'est-à-dire, ces problèmes-là sont dans ces
différents environnements là et on doit agir dessus, on doit agir également non
seulement... on doit agir de manière générale sur les conditions de vie des
gens, c'est-à-dire sur les questions d'inégalités sociales, sur les questions justement
d'aménagement dans les classes comme on parlait tantôt.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Puis peut-être, en termes de priorisation, c'est sûr, quand on parle des
enfants, bien, évidemment, c'est des enfants qui sont dans des familles, puis
on a tendance des fois à dire : Ah! bien, il faut mieux sensibiliser les
parents. C'est sûr que... Disons, comme moi, présentement, moi, j'ai un fils de
11 ans, j'ai une petite de trois ans. Quand je travaille peu, j'ai des
semaines plus allégées, tout ça, j'ai le temps de faire mon épicerie et tout
ça, bien, je suis plus disponible à mes enfants pour avoir des moments de
qualité, lire, aller marcher, aller courir au parc, mais si j'ai du travail
jusque là, mais je vais dire aux enfants : Bon, bien, faites votre écran,
là, moi, il faut que je travaille parce que j'ai une commission parlementaire
dans deux jours, hein? Non, mais, il faut le voir... Quand on parle d'une
approche plus systémique ou globale, c'est aussi de se dire : Bien, parlez
du TDAH, c'est aussi des enjeux de conciliation travail-famille, de s'assurer
que les familles aient suffisamment lorsque les deux parents travaillent pour
pouvoir peut-être ne pas travailler à temps plein les deux, mais penser à des
horaires aménagés. Puis ça, c'est du temps de qualité qu'on se dégage pour être
avec nos enfants puis justement pouvoir aller marcher, cuisiner des repas de
qualité avec des protéines et tout ça. Et tout ça, bien, ça a un impact.
Donc, une approche systémique, là, on a
l'air d'être très... on va vous révolutionner le Québec en son entier, mais,
quand on parle de santé mentale, c'est directement lié aux déterminants sociaux
de la santé. Donc, oui, travailler avec les parents, travailler avec les
milieux scolaires, le milieu de la santé, le milieu de logement, c'est vraiment
transversal.
M. Tremblay : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à Mme la
députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. C'est un plaisir de vous recevoir. Moi, j'aime toujours, quand je
suis en commission parlementaire, d'avoir l'éclairage un peu représentatif de
l'ensemble des enjeux. Alors, on a entendu beaucoup les professionnels de la
santé, les cliniciens et là on a la voix des jeunes qui s'expriment, alors
merci beaucoup d'être là. C'est très apprécié, la vaste consultation que vous
avez menée, parce qu'effectivement, il y a des réalités très importantes qui
sont exprimées.
On revient un peu sur l'aspect... on a
parlé beaucoup de la pression de la performance, mais vous avez beaucoup mis
l'accent aussi sur la réalité de la famille. Alors donc, il y a... Puis là je
fais appel à votre expertise comme sociologue aussi, cette sensibilité...
Une voix
: ...
Mme Sauvé : Les deux? Alors,
toutes les deux. Donc, c'est évident que, dans l'évaluation de... l'élaboration
d'un diagnostic, ou même à l'étape des observations, on a beaucoup nommé les
différents experts, mais, en même temps, quand il faut regarder la dynamique de
la famille qui peut être au coeur des symptômes de l'enfant et de l'adolescent,
on n'a pas peut-être suffisamment nommé le rôle important que pourraient avoir,
par exemple, les sociologues, les travailleurs sociaux. On ne les a pas
entendus. On ne les a pas nommés. Et, pour moi, c'est une expertise qui peut
être très pertinente parce que... Qu'est-ce qui fait que l'enfant a ces
symptômes? Est-ce qu'on est dans un épisode ou on est dans une réalité...
Mme Sauvé : ...suffisamment
nommer le rôle important que pourraient avoir, par exemple, les sociologues,
les travailleurs sociaux. On ne les a pas entendus. On ne les a pas nommés. Et,
pour moi, c'est une expertise qui peut être très pertinente parce que... Qu'est-ce
qui fait que l'enfant a ces symptômes? Est-ce qu'on est dans un épisode ou on
est dans une réalité dysfonctionnelle permanente de la famille?
Donc, moi, je trouve que, entre autres
dans la recommandation que vous faites à la page 19 de parler, bon, oui, de
gratuité mais aussi d'accès à des alternatives et des alternatives
psychosociales, je pense qu'il serait important d'avoir peut-être ce regard-là
qui est lié directement à l'observation de la famille. Donc, je trouvais ça
important que vous l'ameniez.
Je voulais aussi vous dire que votre
dernière recommandation-phare, je la trouve excessivement importante, parce
qu'il faut prévoir évidemment la suite. Cette commission-là, elle est très
importante, mais, en même temps, une fois qu'on a le portrait, une fois qu'on a
les constats, il faut regarder des pistes de solution, on en a déjà eu
beaucoup, et vous amenez, comme je vous l'ai dit, la réalité du vécu des
jeunes.
Moi, le seul bémol que j'aurais par
rapport à cette commission sur la médicalisation, pour moi, il faut juste faire
attention de bien distinguer la réalité des jeunes qui sont dans des troubles
d'anxiété versus le TDAH, parce qu'on est dans des réalités différentes. Donc,
oui, la commission permanente, dans le portrait, les pistes de solution, mais
juste faire attention de ne pas aller dans une globalité qui ne tient pas
compte des spécificités de réalités qui sont liées à ces deux problématiques de
santé mentale.
Écoutez, moi, je salue vraiment votre
intention d'amener... de faire en sorte qu'on est dans une information
accentuée, vous l'avez nommée. Il y a des jeunes qui clairement n'ont pas toute
l'information sur les effets de la médication. Je trouve ça excessivement
important d'amener ça. Et je pense qu'on a un défi, puis je veux vous entendre
là-dessus, quand vous voulez qu'il y ait une approche plus globale, plus
psychosociale, ce n'est pas simple d'essayer de mettre ensemble les
professionnels de la santé, le réseau scolaire et l'intervention communautaire
que vous avez nommée. Comment on fait ça?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Bien, en fait, c'est des choses qui se font déjà. Il y a des collaborations
très, très intéressantes, comme par exemple, il y a un organisme à Montréal,
Prise II, c'est du communautaire, ils font du soutien aux études pour des
étudiants aux études postsecondaires. Donc, il y a déjà des collaborations
entre établissements-organisations communautaires.
Ensuite de ça, comment on fait en sorte
qu'il y ait davantage de soutien? Bien, c'est peut-être de vraiment être
attentif au besoin qui est exprimé. Puis justement, des fois, dans le cabinet
d'un médecin, on est très attentifs aux symptômes exprimés. Mais, on le sait,
c'est des témoignages qu'on a reçus des jeunes, les médecins ne font pas
toujours le tour du jardin, hein? La personne est anxieuse, elle est stressée,
elle a de la misère à se concentrer : ah! c'est tel trouble. Il y a des
jeunes qui nous ont dit qu'ils avaient reçu quatre, cinq, six diagnostics des
fois dans le courant de certaines... sur le courant de huit, dix ans. Ces
diagnostics-là restent dans leur dossier. Donc là, ils accumulent diagnostics
et médication, mais, au final, peut-être qu'il n'y a jamais un médecin qui
s'est assis une heure avec eux pour leur demander : Qu'est-ce qui se passe
vraiment, dans le fond? Parle-moi de ce qui se passe. Peut-être qu'il aurait
découvert des épisodes de violence, des histoires d'abus, des traumatismes, un
historique de pauvreté familiale. Il y a des enjeux qui ne sont pas toujours
entendus dans le cabinet du médecin, mais c'est des fois la seule porte
d'entrée vers le réseau de la santé et des services sociaux. Et, s'il n'y a pas
une écoute suffisamment longue, les causes qui sont derrière toutes ces
manifestations-là qui sont vues comme des manifestations de troubles de santé
mentale, on ne les entend pas. Ça fait que, pour nous, c'est vraiment ce
souci-là de se dire : Il faut qu'il y ait un lieu d'écoute quelque part où
le jeune peut se déposer, peut faire le tour du jardin puis recevoir des soins
et des services qui sont vraiment adaptés à ce qui se joue derrière les
symptômes qui sont exprimés.
Une voix
: Puis
justement, sur cette question...
Mme Sauvé : M. le Président,
je vais céder la parole à ma collègue.
Le Président (M. Provençal)
: Oui. Alors, Mme la députée de Vaudreuil.
Une voix
: ...
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bien, justement, sur cette question des symptômes, il y a des jeunes aussi qui
nous ont manifesté le fait que, pour eux, le diagnostic n'était pas nécessaire.
Ce qu'ils avaient besoin, c'était d'écoute maintenant. Le diagnostic, c'est une
grille de lecture pour, disons, du personnel médical, mais n'est pas
nécessaire, pas nécessaire en tout temps. Donc, à ce moment-là, je pense que
certains jeunes aussi sont peut-être aussi un peu réticents, là, par rapport
à... justement, quand c'est le troisième diagnostic que tu reçois en trois ans,
tu es comme : Oui, mais je n'ai pas plus accès aux services, je n'ai pas
plus... Ou des fois des... Oui, mais tu ne peux pas avoir accès au programme si
tu n'as pas un diagnostic, parce qu'on doit savoir comment te traiter. Puis tu
es comme : Oui, mais ça dépend, moi, peut-être que mon besoin, c'est de
parler à d'autre monde, comme ça se peut que mon besoin, ce soit de parler en
un à un avec quelqu'un, comme ça se peut que mon besoin, ce soit de
l'art-thérapie, ça se peut que... Les besoins sont divers, peu importe le
diagnostic avec ou sans diagnostic, là.
• (17 h 50) •
Mme Nichols : Puis je
rajouterais, ça se peut que ça soit aussi périodique. Vous en avez parlé, là,
un peu plus tôt, vous avez fait référence à un divorce. Donc, ça se peut que ça
soit une situation familiale, là, qui soit juste...
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
...les besoins sont divers, peu importe le diagnostic, avec ou sans diagnostic,
là.
Mme Nichols : Je
rajouterais : ça se peut que ça soit aussi périodique, vous en avez parlé,
là, un peu plus tôt, vous avez fait référence à un divorce, mais donc ça se
peut que ça soit une situation, une situation familiale, là, qui soit juste un
épisode.
Une voix
: Qui est
transitoire.
Mme Nichols : Oui? Donc,
j'imagine que, dans ce temps-là, justement, juste le fait d'en parler ou
d'avoir ces soins-là, de pouvoir consulter, ça fait certainement une
différence.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Puis, non seulement ça, mais quand ça fait... par exemple, dans le cas d'un
deuil, on vit une période difficile, on vient de perdre un être cher, on a peut-être
besoin d'en parler. On n'a peut-être pas besoin d'en parler dans deux ans. Dans
deux ans, ça se peut que la problématique soit rendue pire, ça se peut qu'elle
se soit résorbée, mais quand le besoin, il est maintenant, des fois des
problèmes qui traînent ne s'améliorent pas nécessairement de soi. Donc, voilà.
Mme Nichols : J'ai
l'impression qu'on oublie aussi... on parle de deuil, là, il y a quand même des
étapes, hein, dans un deuil, qu'on doit suivre. Je pense qu'on ne doit pas s'en
aller tout de suite vers... tu sais, je pense qu'il y a des étapes que la
personne doit vivre, puis de... oui, souvent, d'être accompagnée. Ça peut être
une des pistes de solution, là, plutôt... Tantôt, vous avez parlé : des
fois une personne a deux, trois, plusieurs diagnostics. Donc, c'est des
diagnostics pour avoir accès aux médicaments ou... vous faisiez référence?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Pas nécessairement. Au sens où on pourrait, mettons, imaginer un jeune qui a
des manifestations d'intensité ou d'impulsivité, qui se fait diagnostiquer un
TDAH à la fin du primaire, ensuite de ça il reçoit un diagnostic de la
Tourette, ensuite de ça il reçoit un diagnostic de trouble oppositionnel,
ensuite de ça il reçoit un diagnostic de trouble de personnalité limite, tu
sais, au sens où c'est... ce n'est pas nécessairement assorti de médication,
mais c'est juste une série de lectures sur des manifestations, mais qui, au
final, ces diagnostics-là, ils s'accumulent, ça ajoute des stigmates aussi dans
le parcours du jeune parfois, et ça ne vient pas nécessairement avec une aide
qui est liée à ses conditions de vie, aux causes qui sont derrière toute cette
intensité-là, que le jeune peut exprimer.
Mme Nichols : C'est quand même
assez... c'est troublant, hein? C'est troublant d'entendre ça. Je n'ai pas
d'autres questions. Merci, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais céder la parole au député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci. Dans la
commission, on aborde beaucoup, des fois, des enjeux, là, à des causes de la
situation actuelle, qui sont comme le diagnostic, la façon dont on voit cette
chose-là. Mais moi, j'aimerais qu'on parle davantage de la société dans
laquelle on est, de façon macro, là. On sait qu'on est au Québec et on a le
système d'éducation le plus inégalitaire au Canada et on est aussi l'endroit où
il y a la prévalence de consommation de psychostimulants qui est la plus
élevée. Est-ce que vous pensez qu'il y a un lien à faire entre les deux?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Bien, moi, à ma connaissance, on n'a pas d'études qui montrent une corrélation
claire. Oui, il y a ces chiffres-là qui sont sur un même territoire donné. Il y
a des chiffres qui sont sortis cet automne, là, les chiffres de l'OCDE, qui
nous disent que oui, c'est un système... le plus inégalitaire. C'est aussi
l'endroit au Canada où il y a le plus de consommation de médication
psychostimulante. Je ne m'avancerais pas à faire une corrélation qui n'est
peut-être pas la bonne, il y a peut-être d'autres causes, tout à l'heure on
parlait de facteurs environnementaux, l'incidence des pesticides, tu sais, au
sens où... Quelle est exactement la cause? On n'est pas sûrs.
Mais une chose est certaine, c'est qu'on a
un système qui fait en sorte qu'il y a davantage de décrochage de la part de
jeunes qui éprouvent déjà de la difficulté face à l'école parce qu'ils ont
moins de chances de réussir que s'ils étaient nés dans une autre province au
Canada. Ça fait que c'est sûr que cette situation-là oui peut créer une
pression à ce qu'il y ait une médication de performance qui soit prise pour
corriger cette adversité-là, à laquelle les jeunes sont soumis.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Pour rebondir sur la question des inégalités sociales, il y a un organisme
communautaire qui s'appelle La Troisième avenue, à Montréal, qui travaille
beaucoup avec, entre autres, des parents issus de l'immigration ou des
personnes racisées, puis ils ont sorti un rapport, ils ont eu des discussions
entre parents sur la question justement des diagnostics qui étaient donnés à
leurs enfants, puis ils avaient vraiment l'impression que, au niveau des
différences culturelles, ces différences culturelles là étaient lues sous un
regard, en fait, qui était le regard diagnostique, au lieu de dire : Il y
a peut-être des différentes façons d'exprimer des émotions peut-être
différentes puis que c'est correct. Donc, les parents de ce groupe
communautaire là étaient vraiment préoccupés, en fait, en se disant :
Bien, nos enfants sont... on semble observer que nos enfants sont davantage
diagnostiqués, en fait... justement, c'est une lecture diagnostique sur, en
fait, des...
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Des jeunes qui sont porteurs d'une différence visible, par exemple, ça,
c'est... Il y a des études de Maryse Potvin, entre autres, je crois, qui
travaille spécifiquement sur l'enjeu du fait que, oui, il y a des populations,
des jeunes qui reçoivent davantage de diagnostics que d'autres, là, qu'on pense
aux garçons, aux jeunes qui sont plus jeunes, qui ont une plus grande
immaturité scolaire, les jeunes qui viennent de familles plus pauvres, mais
aussi des jeunes issus de l'immigration.
M. Zanetti : Merci.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
On avait un témoignage, en fait, une enfant qui, justement, venait d'arriver au
pays avec ses parents qui venaient de fuir une situation de guerre...
Mme Boucher (Anne-Marie) : ...plus
jeunes qui ont une plus grande immaturité scolaire, les jeunes qui viennent de
familles plus pauvres, mais aussi les jeunes issus de l'immigration.
M. Zanetti : Merci.
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie) : On avait un témoignage en fait, une enfant qui, justement,
venait d'arriver au pays avec ses parents, qui venait de fuir une situation de
guerre et qui vivait en classe des situations d'anxiété. On aurait pu se dire,
là : Ah voilà! On va lui donner un diagnostic. Et voilà! Mais en fait, ce
que l'école a permis de faire, c'est d'accord pour permettre une meilleure intégration,
on va permettre à son parent d'être là un certain temps, juste pour que cette
figure parentale là qui est en fait très rassurante pour l'enfant, ça permette
de faire cette transition-là entre sortir d'une situation où c'était la guerre
à un contexte scolaire qui est nouveau, dans un nouveau pays, avec plein de
nouveaux codes, avec plein de nouvelles choses qui se passent. Puis à ce
niveau-là, ça avait vraiment été quelque chose qui avait vraiment favorisé, en
fait, la transition pour cette jeune-là. C'était tout simplement que son parent
puisse être présent pendant quelque temps. Si elle vivait des épisodes où elle
ne se sentait pas bien, elle pouvait se retourner vers son parent. Puis son
parent était là : Ça va. On est là. Tout est sous contrôle. Et c'était
tout simple en fait.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons compléter cet échange avec le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Merci. Merci beaucoup. C'est très éclairant, très riche pour notre commission,
ce que vous nous partagez. Je veux poursuivre un peu sur les liens territoire
et revenus familiaux. Pour moi, c'est comme fondamental. Votre mouvement, bon,
découle du Regroupement des Auberges du coeur, le Regroupement des ressources
alternatives en santé mentale, l'association des groupes en défense des droits
en santé mentale partout au Québec. Est-ce que vous sentez cette différence-là
entre à la fois les régions et, sur un autre niveau, sur les revenus familiaux
dans les jeunes que vous avez rencontrés ou que vous avez sondés?
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie) : Tout à fait. En fait, particulièrement les... Si je veux
les séparer, ils ne sont pas nécessairement séparés, mais si on veut, mettons,
les séparer, là, la question des régions, là, il y a beaucoup de jeunes qui
nous disaient : Bon, c'est bien beau, mais les services dans ma région,
ils sont inexistants. Ou, encore, on a une psychologue à temps partiel pour six
écoles sur un territoire qui est grand comme ça. C'est impossible de la voir,
alors qu'il y a beaucoup de monde dans l'école qui en aurait besoin. Donc...
Puis, bon, si on ajoute à ça des questions d'inégalité sociale, si c'est déjà
difficile dans un contexte régional d'avoir accès à des services et qu'on n'a
pas les sous, là, on vient de rajouter d'autres couches pour avoir accès à des
services. Là, on se ramasse vraiment dans une situation qui est, ma foi, là, en
fait, catastrophique, en fait, là.
M. Gaudreault : Oui.
C'est comme si on était quasiment capable de géolocaliser avant qu'il soit
diagnostiqué, tu sais, c'est quoi, un jeune garçon né dans un quartier
défavorisé avec une famille à bas revenu. Puis en plus il est né tard dans
l'année, là, on a appris ça hier. C'est quasiment le cas parfait type, là, du
TDAH.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Ce type que vous nommez est intéressant. En fait, c'est le fait qu'il y a des
inégalités face à l'école. Les jeunes n'arrivent pas tous égaux face à l'école.
Et si on a système qui se veut réellement équitable, bien, il faut accueillir
ces jeunes-là. Sans nécessairement les diagnostiquer, les profs le voient. Les
professeurs le voient très, très rapidement. Quand il y a des élèves qui
éprouvent plus de difficultés, c'est possible, vraiment, de leur donner plus, beaucoup
plus à ces jeunes-là qui arrivent moins favorisés face à l'école et corriger
ces inégalités-là. Mais peut-être que dans le milieu qui est... dans le système
scolaire québécois présentement, malgré toute la bonne volonté des enseignants
et des enseignantes, on ne réussit pas, malgré la bonne volonté des
professionnels aussi qui sont dans les écoles, on ne réussit pas à donner assez
à ces jeunes-là pour réduire les inégalités face à l'école. Et le fait d'avoir
de la difficulté face au contenu, d'avoir de la difficulté à se concentrer, à
un moment donné, bien, ça se traduit en diagnostic. Alors qu'il aurait pu en
être autrement...
M. Gaudreault : Si on
l'avait pris à l'avance.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
...si le jeune avait reçu davantage d'aide, et ça, je le répète, sans nécessairement
les diagnostiquer. On n'est pas obligé de dépister et de diagnostiquer à
quatre, cinq ans, mais on peut aider dans diagnostiquer parce qu'on voit qu'il
y a un besoin d'aide face à l'école.
M. Gaudreault : Il me
reste un peu de temps?
Le Président (M. Provençal)
: Prenez la minute qu'il reste.
M. Gaudreault : Merci.
Mon Dieu! Je veux juste vous entendre sur les liens entre les médecins en
clinique et les intervenants jeunesse, par exemple, dans le milieu communautaire
ou d'autres types de professionnels. Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir un
genre de protocole, le médecin de famille qui reçoit le parent un peu
désorganisé avec son enfant qu'il pense être TDAH, est-ce qu'il ne devrait pas
y avoir un canal de communication direct avec vous autres, quitte à rebondir
plus tard chez le médecin pour avoir un vrai diagnostic? Comment, ça, on
pourrait l'organiser?
• (18 heures) •
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Bien, c'est sûr, il y a déjà des systèmes de référence au sens où, souvent,
dans le réseau, on va recevoir des personnes qui sont référencées par le réseau
parce qu'ils se rendent compte qu'un organisme communautaire pourrait davantage
accompagner les personnes, mieux les accompagner. Des fois aussi, il y a une
méfiance à l'égard du réseau de la santé et des services sociaux pour
différentes raisons dans certaines familles. Est-ce qu'il y aurait un protocole
strict? Je ne pense que ça serait nécessairement la façon de faire, mais de
s'assurer que le réseau et le communautaire se connaissent mieux...
18 h (version non révisée)
Mme Boucher (Anne-Marie) :
...parce qu'ils se rendent compte qu'un organisme communautaire pourrait davantage
accompagner les personnes, mieux les accompagner. Des fois, aussi, il y a une
méfiance à l'égard du réseau de la santé et des services sociaux pour
différentes raisons dans certaines familles.
Est-ce qu'il y aurait un protocole strict?
Je ne pense pas que ça serait nécessairement la façon de faire, mais de
s'assurer que le réseau et le communautaire se connaissent mieux, connaissent
les rôles de chacun... Nous, on le sait qu'il y a des très bonnes
collaborations dans certains cas. Dans d'autres cas, c'est moins heureux. Ça
fait que, oui, peut-être qu'on gagnerait à se parler davantage parce qu'au
final tout le monde est là pour les mêmes raisons, on veut s'adresser aux
inégalités de santé, on veut améliorer la santé des Québécois et des Québécoises
puis, à ce niveau-là, on peut travailler dans la même direction.
Le Président (M. Provençal)
:Je vous remercie beaucoup pour votre
contribution à nos travaux.
La commission ajourne ses travaux jusqu'au
vendredi 8 novembre, à 9 h 30. Merci énormément.
(Fin de la séance à 18 h 1)