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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le jeudi 6 février 1992 - Vol. 31 N° 3

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières sur le document intitulé « Un financement équitable à la mesure de nos moyens »


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante minutes)

Le Président (M. Joly): Alors, bonjour à toutes et à tous et bienvenue à cette commission. Je vous rappelle le mandat de notre commission. Donc, la sous-commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le document de consultation intitulé «Un financement équitable à la mesure de nos moyens». Mme la secrétaire, avons-nous des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci. Je vois que déjà les intéressés du Conseil du patronat ont pris place. L'expérience étant là, alors on connaît toute la procédure. Quand même, je vous rappelle que vous avez une vingtaine de minutes pour nous exposer votre mémoire et que, par après, les parlementaires échangeront avec vous. Alors, M. Dufour, pourriez-vous nous introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?

Conseil du patronat du Québec

M. Dufour (Ghislain): Alors, merci, M. le Président. À ma gauche, Mme Denise Turenne, qui est présidente du Centre patronal de santé et de sécurité du travail et présidente du conseil d'administration de l'hôpital Fleury.

Le Président (M. Joly): Bonjour, madame.

M. Dufour (ghislain): à ma droite, m. jean tremblay, qui est vice-président exécutif de l'association provinciale de l'industrie du bois ouvré du québec.

Le Président (M. Joly): Merci.

M. Dufour (Ghislain): M. le Président, nous tenons d'abord à féliciter le gouvernement et son ministre de la Santé et des Services sociaux d'avoir préparé le document qui est, aujourd'hui, soumis à la consultation. Le financement de nos services de santé et de nos services sociaux pose, en effet, un problème au Québec. Ce document sera donc des plus utiles, d'autant plus qu'il s'agit d'une analyse fouillée, bien documentée et qui explore bon nombre d'avenues quant à de nouvelles sources de revenus qui pourraient nous permettre de préserver les deux caractéristiques fondamentales de notre régime de santé et de services sociaux, à savoir l'accessibilité et l'universalité.

Dans ce bref mémoire, M. le Président, le CPQ n'entend pas porter un jugement sur la problématique même des dépenses globales engagées au Québec dans le réseau de la santé et des services sociaux. Il fait, à cet égard, généralement siennes, à moins qu'on lui prouve le contraire à partir d'autres sources, les conclusions générales du document. Nous limiterons plutôt nos commentaires à la question même des modes de financement possibles des dépenses de santé et de services sociaux puisque tel nous apparaît être l'objet essentiel de la consultation qu'entreprend le gouvernement dans ce dossier.

Ces commentaires se situent dans la perspective suivante: Les dépenses de santé et de services sociaux, comme l'indique l'énoncé gouvernemental, ont atteint un niveau à ne pas dépasser si l'on ne veut pas affecter négativement la compétitivité de l'économie québécoise et mettre en péril nos finances publiques. Mais si nous avons atteint un sommet à ne pas dépasser en termes de dépenses, sans risquer des conséquences négatives importantes, où sont les solutions? Efficience? Efficacité? Impôt-services? Ticket modérateur? Autant de mots qui prennent alors toute leur importance et qui ne signifient pas la catastrophe, comme voudront nous le faire croire certains groupes tout au long de ce débat. À cet égard, d'ailleurs, il faut saluer le courage politique du ministre qui n'hésite pas à lancer le débat.

Notre présentation est faite sous forme de six commentaires. Le premier commentaire: les employeurs et le financement des dépenses de santé. Les employeurs financent actuellement 22,2 % des dépenses des services sociaux et de santé au moyen, faut-il le rappeler, d'une taxe sur la masse salariale de 3,75 % depuis septembre 1991 qui leur est imposée par le gouvernement du Québec et dont le produit est versé au fonds consolidé. Cette contribution spéciale des employeurs au fonds des services de santé représente presque le quart des dépenses en santé et services sociaux au Québec. C'est énorme, surtout si l'on considère qu'ils participent également, par leurs impôts, au financement des trois autres quarts. Ce n'est donc pas de ce côté qu'il faut aller chercher les ressources nécessaires à l'amélioration du financement des services sociaux et de santé au Québec. Déjà cette taxe de 3,75 % est extrêmement pénalisante pour les entreprises, surtout celles à forte teneur de main-d'oeuvre. Notre objectif collectif doit être de la réduire, non de l'augmenter.

Le deuxième commentaire est sur l'absence de liens entre la consommation de services et les coûts. Nous partageons pleinement l'analyse du

document suivant laquelle l'absence de tout lien entre la consommation de services de santé et leur coût a permis le développement, chez les consommateurs, d'un faux sens de la gratuité et l'affaiblissement éventuel du sens de la prise en charge de la santé par la prévention et par l'adoption d'habitudes de vie saines. Le fait que les producteurs ne soient plus sujets, ne serait-ce qu'indirectement, aux contraintes budgétaires des bénéficiaires n'apparaît pas susceptible non plus de favoriser l'utilisation la plus efficiente des ressources.

Cette analyse, M. le Président, véhicule un message clair: Les services sociaux et de santé ne sont pas gatuits. Les citoyens devraient en être informés, individu par individu, et leur contribution financière, équitable, II va sans dire, sollicitée sans pour autant remettre en cause les principes d'universalité et d'accessibilité.

Troisième commentaire: un meilleur contrôle des coûts. Dépenses susceptibles de croître, baisse des transferts fédéraux, affaiblissement de la croissance économique et des ressources de l'État, contraintes juridiques et socio-économiques, voilà presque la quadrature du cercle. D'où l'absolue nécessité pour le réseau de la santé et des services sociaux d'être extrêmement efficient et efficace. À cet égard, nous trouvons tout à fait saine l'analyse présentée dans le document et qui propose des mesures très sévères pour infléchir le rythme d'évolution des dépenses.

Mais là où il y a certes place à l'efficience et à l'efficacité, c'est dans l'important domaine de la gestion des ressources humaines. Or, à cet égard, le gouvernement lui-même, grand maître d'oeuvre des négociations au cours des 20 dernières années, doit faire son mea culpa. Une grande partie des contraintes coûteuses auxquelles font face aujourd'hui les gestionnaires provient en effet de la rigidité des conventions collectives dont a hérité le réseau de la santé et des services sociaux depuis 1966 et qui rend très difficile une gestion efficace des ressources humaines. Comme le disait un jour un gestionnaire hospitalier, nos conventions collectives ressemblent aujourd'hui ni plus ni moins à des encyclopédies Grolier qui régissent dans les moindres détails les rapports entre les parties, et c'est devenu plus ou moins vivable.

Citons quelques exemples des dispositions de ces conventions collectives qui représentent des coûts astronomiques: le manque de mobilité du personnel, la multiplication des titres d'emplois, les mutations internes qui se font selon les critères d'ancienneté et non de compétence, le coût des arbitrages inutiles - rappelons tout simplement que tous les arbitrages sont payés par les employeurs, donc, c'est évident qu'à ce moment-là on provoque presque le dépôt des griefs - les libérations syndicales trop nombreuses, etc.

Pourtant, le document gouvernemental est tout à fait muet à ce sujet. Tout au plus y signale-t-on une intention de limiter l'évolution du coût global de la rémunération des salariés à un rythme maximal ne dépassant pas l'IPC. Je ne veux pas critiquer cette orientation-là, elle est très intéressante, mais, quant à nous, elle est insuffisante parce que les coûts ne sont pas nécessairement des coûts qui découlent des augmentations possibles de salaires mais des rigidités qu'on retrouve dans les conventions collectives.

Commentaire no 4: mesures portant sur le financement. Le document gouvernemental propose quelques pistes de réflexion quant aux mesures à envisager pour mieux financer notre régime de santé et de services sociaux, mais, quant à nous, nous restons sur notre appétit. Le document propose en effet pour l'essentiel, et je cite: «une responsabilisation collective du financement des services de base et un certain nombre de modalités de financement général visant à établir des liens transparents et systématiques avec l'évolution des besoins spécifiques de financement des dépenses socio-sanitaires». Le ministère dit privilégier cette approche.

On la comprend peut-être mal, mais tel n'est pas notre choix. En effet, cette approche globale, qui ne dégage aucune source de revenus supplémentaires, même marginaux, ne permet pas d'établir un lien entre la consommation individuelle et le financement et son impact sur la responsabilité individuelle risque d'être nul alors qu'on a vu plus tôt combien l'absence de liens entre la consommation de services et les coûts peut être excessivement coûteuse. Nous préférons donc plutôt, et sans hésitation, cette piste proposée par le document quant à une contribution individuelle modeste reliée à la consommation, avec des mesures assurant l'accessibilité de tous les citoyens. Cette contribution pourrait notamment prendre la forme d'un impôt-services que le CPQ a déjà eu l'occasion, en d'autres circonstances, de proposer sous la forme d'un Impôt à rebours.

Le document gouvernemental identifie essentiellement trois obstacles à la réalisation d'une telle approche. Le premier obstacle tient aux difficultés pratiques d'application d'un tel impôt. Nous en sommes conscients, mais elles ne sont sûrement pas insolubles. On pourrait demander aux officiers du ministère de la Santé et des Services sociaux de se mettre en contact avec le ministère du Revenu. Ça fait très longtemps qu'ils ont trouvé les façons de régler ce genre de problèmes là. Ils nous rejoignent tous, soit dit en passant.

Le second tient aux dispositions de la loi C-3 qui prévoit des réductions des transferts fédéraux correspondant à tous les revenus que pourraient percevoir les provinces au moyen de modalités, directes ou indirectes, faisant obstacle à l'accessibilité aux services. L'obstacle est de taille. Mais ces dispositions sont-elles négociables

ou immuables? Faut-il baisser les bras devant une mesure qui avait peut-être du sens il y a quelques années mais qui n'en a plus? Comment le fédéral peut-il se désengager de ses responsabilités financières vis-à-vis le Québec sans lui permettre de compenser le manque à gagner? Si le gouvernement québécois, sans créer de remous insurmontables, a réussi à négocier des arrangements satisfaisants en matière d'Immigration, pourquoi ne pourrait-il pas le faire en matière de santé et de services sociaux?

Le troisième obstacle, M. le Président, tient en une phrase: «À la suite de consultations effectuées par le ministère auprès d'assureurs privés, il apparaît également que les bénéficiaires pourraient très difficilement contracter des assurances pour se prémunir contre les risques associés aux coûts des services complémentaires, si on appliquait la formule de l'impôt-services». Tel n'est cependant pas le résultat de la consultation que nous avons menée nous-mêmes auprès des assureurs privés, du moins en ce qui concerne les services de base même complémentaires. Et ce n'est pas parce que l'impôt-services n'a pas été appliqué ailleurs à ce jour, comme le dit le document, que nos assureurs ne sont pas capables de l'implanter. Le CPQ est convaincu que nos assureurs privés peuvent faire preuve d'énormément d'initiatives au Québec. Nous sommes allés les voir et ils nous ont confirmé cette possibilité d'initiative.

Commentaire 5, les tickets modérateurs. Le document gouvernemental aborde sous plusieurs formes, dont le ticket modérateur ou le ticket orienteur, la fameuse question des tickets modérateurs dans les services de santé et les services sociaux. Le ministère rappelle dans le document sa position traditionnelle d'opposition au ticket modérateur. Je ne la rappelle pas parce que cette position traditionnelle, le ministère la revoit cependant dans son avis de l'annexe 3. J'aime mieux citer l'annexe que le document. Dans l'annexe, il écrit: «Le ministère estime qu'il est devenu important de sensibiliser les bénéficiaires au coût des services et de rétablir les liens entre la consommation et la responsabilité de leur financement. C'est pourquoi, dans l'éventualité où la loi C-3 serait modifiée, une contribution modeste des usagers qui ne ferait pas obstacle à leur accessibilité et qui tiendrait compte de leur capacité de payer pourrait être envisagée. Le ministère reconnaît également comme légitimes les préoccupations des citoyens vis-à-vis de l'importance de minimiser les augmentations du fardeau fiscal, et la tarification de certains services permettrait de tenir compte de ces préoccupations».

M. le Président, je peux dire aussi M. le ministre, nous endossons pleinement cet avis du ministère, d'autant que le sondage SOM-Les Affaires de ce matin vient de confirmer alors que vous avez 80 % des Québécois qui sont favorables au ticket modérateur.

Une voix: Combien?

M. Dufour (Ghislain): 80 %. Je pourrai le déposer au président.

Le Président (M. Joly): Ha, ha, ha!

M. Dufour (Ghislain): II existe d'ailleurs des études sur le ticket modérateur et, lorsqu'on les passe en revue, on constate qu'elles contredisent les arguments de ceux qui s'y opposent. On y apprend entre autres que le ticket modérateur existe sous une forme ou sous une autre dans plus de 40 % des systèmes de santé nationalisés des pays de l'OCDE, y compris la Suède, auquel on réfère constamment. La conclusion de ces études, c'est que le ticket modérateur fait diminuer la demande des services ambulatoires et des médicaments, mais pas les soins hospitaliers. C'est ça qui, dans le fond, est important.

Sixième commentaire, M. le Président, la privatisation. Le document n'aborde presque pas - et c'est de bonne guerre pour le gouvernement - la possibilité de réduire les coûts en privatisant certains services. Pourtant, l'introduction ou l'accentuation de la concurrence, dans une certaine mesure, pourrait sans doute stimuler le secteur public des soins de santé, ne serait-ce qu'en raison de sanctions possibles de la part d'usagers aujourd'hui dépourvus de solution de rechange. Disons d'abord, et c'est important pour nous de le dire, qu'il est politiquement impensable et définitivement indésirable socialement que l'ensemble des services de santé soit privatisé. Ce n'est pas de ça qu'on parle. Il y a peu de gens, d'ailleurs, dans le secteur privé qui pensent différemment, mais il y a une espèce de peur maladive de la privatisation partielle et nous, évidemment, ça nous crée un certain nombre de problèmes.

Si on oublie cette peur maladive et on se demande plutôt dans quel cas l'utilisation des services du secteur privé peut être rentable et compatible avec la mission des établissements de santé, on en arrive à un certain nombre de réponses. Il s'agit de s'assurer au départ que le système demeure lui-même essentiellement public, accessible et universel. Mais au-delà de ce qui est déjà monnaie courante dans les services, par exemple, d'entretien ménager, de buanderie, de cafétéria - ça existe déjà beaucoup - il y a lieu, quant à nous, d'explorer d'autres champs d'action.

Pourquoi se limiter à la seule privatisation de certains services auxiliaires? Au nom de quel principe certaines activités médicales et paramédicales ne pourraient-elles pas également être privatisées? En quoi les usagers du service de radiologie d'un hôpital seraient-ils affectés si un tel service leur était dispensé par une clinique privée oeuvrant à l'intérieur de l'hôpital? Qui oserait affirmer a priori qu'une telle clinique privée de radiologie, à l'intérieur de

l'hôpital, non soumise aux règles bureaucratiques de l'institution, serait moins efficace et plus coûteuse que ia clinique publique traditionnelle interne de l'hôpital? Pourquoi, en tout cas, ne pas mener certaines expériences-pilotes et non pas seulement en radiologie, mais en physiothérapie, en cardiologie, en encéphalographie, etc.? Quant à nous, il s'agit là de mesures d'efficacité et d'efficience qui peuvent sûrement être ajoutées aux propositions du gouvernement qui sont faites actuellement.

Pour d'aucuns, on pourrait même aller plus loin. On rappelle toujours l'expérience de Hawkesbury en Ontario. On sait que c'est une société privée qui gère l'hôpital, l'hôpital étant public et ce, depuis plusieurs années. Appelés à la rescousse pour sortir l'hôpital du gouffre financier dans lequel l'hôpital s'était embourbé, ses gestionnaires ont rétabli la situation budgétaire, amélioré le service à l'urgence, modernisé l'équipement et agrandi l'Immeuble. En somme, la majorité des problèmes que connaissait l'hôpital n'existent plus. Voilà un exemple de gestion dont on pourrait peut-être tirer quelques conclusions utiles sans - je le répète - d'aucune façon remettre en cause les principes d'accessibilité et d'universalité et qui n'a rien du cheval de Troie que craignent tant certains groupes.

En conclusion, M. le Président, nous voudrions de nouveau féliciter le gouvernement d'entreprendre cet exercice de révision du financement de nos services sociaux et de santé. Le document de réflexion qu'il nous propose à cet égard est un bon document de travail. Pour notre part, nous avons voulu, dans ce bref mémoire, affirmer bien haut qu'il est devenu nécessaire, d'une part, d'améliorer l'efficience et l'efficacité de la gestion de nos services sociaux et de santé et, d'autre part, de trouver des sources nouvelles de revenus si nous voulons maintenir les acquis et faire face aux besoins futurs.

Si l'efficience et l'efficacité de la gestion passent, notamment, selon nous, par une meilleure gestion des ressources humaines et des conventions collectives, nous croyons qu'il est également devenu essentiel d'établir un meilleur lien entre la consommation individuelle de services et les coûts, ce qui nous amène à accueillir positivement toute proposition d'impôt-services, de ticket modérateur - et, dans ce sens-là, je le répète, on ne se distingue pas de la population - étant bien entendu que ces mesures ne feront pas obstacle à l'accessibilité des services pour les plus démunis. Par ailleurs, dans ce débat sur le financement de nos services sociaux et de santé, il ne faudrait pas oublier la part consi dérable que pourrait représenter une certaine privatisation. (10 heures)

Terminons, M. le Président, en signalant que le gouvernement du Québec aura tout le soutien du Conseil du patronat s'il entend faire valoir auprès du gouvernement fédéral la nécessité d'une révision de la collaboration fédérale-provinciale en matière de services de santé et de services sociaux, notamment, pour obtenir des amendements à la loi C-3. Il n'y a aucune raison, en effet, pour que le gouvernement fédéral, suite à son désengagement financier face au Québec, s'oppose à ce que la province s'adresse désormais à ses citoyens pour que ces derniers injectent, en quelque sorte, des fonds supplémentaires à ceux qu'ils consentent déjà globalement au financement de leurs besoins en matière de santé. Il y va du droit le plus strict des citoyens québécois de décider eux-mêmes des moyens de combler ce manque à gagner s'ils veulent maintenir des services de santé accessibles et de qualité. L'universalité et l'accessibilité actuelles, M. le Président, sont mieux vues dans ce contexte de relations fédérales-provinciales si on est capable, ensemble, de cheminer.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Dufour. Même si le document que vous avez cité est un document public, pour le bénéfice des parlementaires, j'apprécierais si on pouvait l'avoir. Ça va nous avancer.

M. Dufour (Ghislain): Celui-là?

Le Président (M. Joly): Oui, le journal Les Affaires que vous avez mentionné.

M. Dufour (Ghislain): 1,50 $.

Le Président (M. Joly): On va vous le payer. Je vais vous le payer moi-même. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. Merci, mesdames et messieurs. Je pense que c'est égal au Conseil du patronat comme présentation dans le but de faire des constats, mais aussi pour tenter de trouver des solutions à la problématique dans laquelle on est.

Je commencerai d'abord par tenter de questionner sur la situation financière, qui m'apparaît importante, parce qu'à chaque année le Conseil du patronat rencontre le gouvernement pour lui dire un certain nombre de choses et aussi se préoccuper de l'état des finances publiques. Certains groupes - ils sont quand même relativement nombreux et, parmi ceux-là, le GRIS, qui est un groupe de recherche qui a une bonne crédibilité - tentent de nous faire la démonstration - parce que je ne partage pas leur point de vue, évidemment - que la situation actuelle des finances publiques est une situation conjoncturelle et non pas une problématique structurelle. J'aimerais peut-être vous entendre davantage là-dessus, vous qui suivez de manière très régulière l'évolution des finances publiques du Québec.

M. Dufour (Ghislain): Je pense que ce qui

est campé dans le document est tout à fait vrai. Nous avons atteint une capacité budgétaire dans les domaines de l'éducation et de la santé qui ne saurait être dépassée sans compromettre la compétitivité des entreprises québécoises. Est-ce que c'est conjoncturel? Est-ce que c'est structurel? Sous le gouvernement antérieur, on est allé tout près de 5 000 000 000 $ de déficit. À cause de la conjoncture actuelle, on va se retrouver au-delà de 4 000 000 000 $, soit 4 200 000 000 $. Moi, je n'appelle plus ça conjoncturel quand ça fait à peu près 10 ans qu'on est dans cette situation-là. Alors, non, je ne partage pas cette analyse-là. Je pense qu'on ne reprendra pas du poil de la bête au plan économique en 1992. Ça va aller au début de 1993. Quand ça s'amplifie au fédéral, ça s'amplifie en Ontario, etc. On a des retombées qui sont au Québec.

Alors, la situation économique, il faut se le dire, M. le Président, est difficile. Nous avons beaucoup investi en santé et en éducation. Il faut conserver les acquis, mais il faut être davantage efficace, efficient. Il faut trouver des façons de conserver ces acquis-là, mais pas en augmentant les impôts des citoyens. Je pense que s'il y a unanimité dans la société québécoise, actuellement, c'est que les impôts, les citoyens et les entreprises ont atteint un degré qui ne saurait être dépassé.

M. Côté (Charlesbourg): Je pense que de calculer et d'additionner les déficits au cours des dernières années, les 10 dernières années, ça nous donne suffisamment un point de vue sur le plan financier. C'est quoi? C'est 2 000 000 000 $ par année que nous payons, actuellement, au service de la dette, à partir d'un budget de 35 000 000 000 $ ou 36 000 000 000 $. Je pense que c'est là et on l'a pour plusieurs années. C'est donc une problématique financière...

M. Dufour (Ghislain): Qui est exacte.

M. Côté (Charlesbourg): ...qui est au-delà de l'ampleur d'une conjoncture. En tout cas, pour nous, c'est davantage structurel. J'aborderai le deuxième point, qu'il m'apparaît important d'aborder avec vous parce qu'on a entendu, au cours des deux premières journées, un certain nombre de mémoires de gens qui venaient nous dire: accessibilité, universalité, gratuité, maintenez tout ce qui est le statu quo et faites des mesures d'efficience et d'efficacité. Si jamais vous êtes obligé d'aller chercher de l'argent additionnel, bien, on veut un débat sur la fiscalité parce que les entreprises, elles ne paient pas assez. C'est elles qui ont bénéficié des subventions. C'est elles qui ont bénéficié des rabais au cours des années dernières, d'une manière très importante. Dans ce sens-là, s'il y a une marge de manoeuvre, c'est les compagnies qui doivent payer ça sur le plan de la fisca- lité.

Je raccroche, pour avoir une réponse plus globale, avec votre entrée en matière: Les employeurs paient 22 %, donc 3,7 %, ce qui équivaut à 2 800 000 000 $ par année payés par l'employeur pour notre système de santé et de services sociaux. Vous l'avez dit tantôt, à part de ça, ils paient des impôts de particuliers et ils paient d'autres sortes d'impôts de compagnies. Je raccroche avec mon petit exemple parce que, hier soir, les départements de santé communautaire nous ont rappelé une étude récente qui a été faite, en particulier dans le domaine de l'automobile. Aux États-Unis, il en coûte, sur le plan des avantages sociaux pour les employés, 2000 $ par employé, dont 700 $ pour les frais de santé et de services sociaux. Est-ce que la charge n'est pas plus importante aux États-Unis dans un système qui est pas mal plus privé que le nôtre, par rapport à ce qu'on vit? Globalement, sur le plan de la fiscalité, est-ce que vous croyez - je sais que vous en êtes capable avec toute la sincérité que vous pouvez avoir et avec la connaissance du dossier - qu'on pourrait en exiger davantage des entreprises?

M. Dufour (Ghislain): Je suis content que vous parliez du 3,75 % que les entreprises versent à partir de leur masse salariale pour les fins des services de santé et des services sociaux. Ce n'est pas connu dans la population. C'a été initié au début des années quatre-vingt par M. Parizeau un soir de budget. Depuis, tous les ministres des Finances qui se sont succédé ont augmenté cette part-là pour en arriver aujourd'hui à 3,75 %, qui est énorme comme revenu de l'État, ce que ça rapporte. C'est là que les entreprises, dans le fond, font leur plus grande contribution au financement des services de santé. Il ne faut jamais oublier que dans l'autre partie aussi, ils sont des payeurs d'impôt et qu'ils versent aussi... Alors, on peut estimer facilement à 35 % le financement par les entreprises des coûts des services de santé et des services sociaux au Québec.

Évidemment, c'est le débat actuel qui s'est amorcé par les centrales syndicales et certains de leurs groupes associés qu'on ne fait pas assez payer les entreprises et pas assez, évidemment, les hauts salariés, mais c'est un faux débat. Ce n'est pas ça qu'il faut faire comme débat actuellement, c'est: Est-ce qu'on peut se payer plus comme société? Après ça, on verra qui peut payer davantage. Quant à nous, évidemment, si on veut demeurer compétitif, ce n'est pas purement avec le budget de l'État, c'est avec les impôts que vont aussi payer les entreprises. Actuellement, la compétitivité est bonne. Pour les entreprises québécoises, c'est à peu près le même niveau d'impôt, si on veut, que dans les autres provinces. C'est plus qu'aux États-Unis, par ailleurs. On paie plus d'impôt ici qu'aux États-Unis. Or, on se demande, actuellement, comment

il se fait que ça ne marche pas, le traité de libre-échange avec les États-Unis. C'est un des volets.

Donc, pour nous, on ne saurait d'aucune façon aller chercher des impôts additionnels chez les entreprises, quoique dans notre formule d'impôt-services ou d'impôt à rebours, avec les paramètres qu'on lui donne, ce sont quand même les mieux nantis qui, à ce moment-là, paieraient la note parce qu'il ne s'agit pas d'aller chercher de l'argent additionnel chez les moins bien nantis. Alors, dans ce sens-là, ce n'est pas les entreprises qu'il faut viser, c'est plus les citoyens capables de payer un peu plus et aussi de s'assurer auprès du secteur privé, justement, pour cet éventuel risque.

Quant à votre question relative aux États-Unis, je demanderais à Mme Turenne, qui regarde ce dossier-là de très près, qui est aussi attachée à l'AHQ, de nous en parler.

Le Président (M. Joly): Mme Turenne, s'il vous plaît.

Mme Turenne (Denise): bon. du côté des états-unis, m. le ministre, je pense que les correspondances, les comparaisons qu'on peut faire sont, au départ, relativement boiteuses. aux états-unis, le système de santé et de services sociaux coûte plus cher qu'ici et la faiblesse fondamentale de ça c'est que ça ne couvre pas l'ensemble des citoyens. vous dites que le département de santé communautaire vous a présenté hier soir une étude où ça coûte à peu près 2000 $ par employé au niveau des services sociaux. ce que j'en sais ici, c'est que ça coûte environ 1500 $ par personne pour les services de santé et les services sociaux. je pense qu'on compare des choses qui peuvent difficilement être comparées comme telles.

M. Côté (Charlesbourg): N'empêche qu'on est dans une situation où on compétttionne avec les États-Unis au niveau des entreprises. Une des grandes plaintes de l'industrie automobile aux Etats-Unis est le coût du social qu'ils sont obligés de se donner comme protection - parce que pas assurée par le public - comme entreprise, à leurs employés, qu'ils négocient dans les conventions collectives. C'est pour eux une charge supposément extrêmement importante et, dans ce sens-là, eux disaient - je le répète - pour chacune des voitures, c'est 700 $ qu'il en coûte pour la protection des services de santé et des services sociaux aux États-Unis par rapport à chez nous. Ce que j'essayais de voir c'est que, si les États-Unis sont capables de se payer ça, quelle est la marge de manoeuvre qu'on a au Québec au niveau de nos entreprises quant aux 3,75 %? Elle est plus ou moins? Vous autres, vous dites moins.

M. Dufour (Ghislain): On n'a pas, M. le ministre, de marge de manoeuvre. C'est vrai que l'industrie automobile paie 700 $ par travailleur, mais il faut regarder ça de façon globale. Au Québec, sur le continent nord-américain, on est de ceux, dans les entreprises, qui payaient le plus de taxes sur la masse salariale pour les fins dont on parle ce matin: assurance-chômage, etc. Leur CSST coûte pas mal moins cher que la nôtre. Il y a beaucoup de santé là-dedans. Ils n'ont pas à payer les nonnes du travail comme nous on a à payer. Ils n'ont pas à payer le taux d'assurance-chômage que nous payons.

Alors, quand vous campez la compétitivité dans votre document, M. le ministre, vous ne le campez pas purement en termes de coûts de services de santé, vous le situez dans une problématique globale. Déjà au Québec, nous payons 2 % à 2,5 % de plus en taxes sur la masse salariale que nos collègues ontariens, par exemple. On est la province qui est la plus taxée au plan des taxes sur la masse salariale. On est plus taxés que les États-Unis. Alors, si on prend un petit dossier comme ça, c'est possible. Mais je veux dire que, dans un contexte de compétitivité ou de concurrence, on ne peut pas aller chercher ce qu'il nous plaît. Il faut regarder l'ensemble.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends. Mais ce que vous nous dites c'est que, finalement, globalement, les compagnies ne sont pas capables d'en payer plus. C'est peut-être davantage vers les hauts salariés qu'il faut examiner s'il y a possibilité ou pas.

M. Dufour (Ghislain): Tout en admettant que les hauts salariés vont toujours chercher leur argent dans l'entreprise. Il n'y a que l'entrepri-see qui crée de la richesse et il faut toujours qu'elle soit concurrentielle.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, définitivement.

M. Dufour (Ghislain): M. Tremblay va...

M. Tremblay (Jean): Si vous me permettez, M. le ministre, dans l'exemple que vous donnez au niveau de l'automobile, l'exemple n'est définitivement, je pense, pas vraiment applicable si on regarde l'ampleur des compagnies aux États-Unis et l'ampleur des compagnies qu'on a ici au Québec. Dans le secteur manufacturier, actuellement, depuis deux ans, la majorité des entreprises - enfin, dans le secteur des portes et fenêtres où je travaille actuellement - fonctionnent avec à peu près zéro de marge de bénéfice. Si on augmente encore la charge sociale, on va risquer définitivement d'atteindre et d'attenter à la compétitivité.

Avec le libre-échange, ce sont les compagnies américaines avec qui on doit compétttion-ner. Si je regarde Donat Flamand que tout le

monde connaît, qui a un volume de vente de 40 000 000 $, 50 000 000 $, il doit maintenant compétitionner une compagnie qui s'appelle Andersen aux États-Unis qui a un chiffre d'affaires de 1 200 000 000 $. Je pense que c'est peut-être plus juste de répartir au niveau des entreprises américaines, que chacune puisse négocier localement, que chacune puisse véritablement, selon son pouvoir, négocier un régime avec ses employés. Je pense qu'on a évolué beaucoup plus avec notre régime universel, notre régime totalement accessible. De surcharger encore les employeurs serait d'attenter à leur compétitivité sans donner véritablement plus de services. (10 h 15)

M. Côté (Charlesbourg): O.K. On parle... Vous avez fait largement état, dans votre mémoire, d'organisation du travail, donc mobilité de la main-d'oeuvre, plus de souplesse sur le plan local. On va l'aborder carrément avec les syndicats lorsqu'on va les rencontrer la semaine prochaine, y compris avec les administrateurs d'hôpitaux. Ça me paraît être une piste intéressante à ce niveau-là.

Normatif lourd... Quand j'ai la chance d'avoir avec moi en plus le président du Conseil du patronat, qui est un membre très important de (a CSST, et qu'on parle de santé et sécurité au travail où, dans notre réseau à nous autres, ça nous coûte 150 000 000 $ par année, ça me paraît être un dossier important. De la même manière aussi, on l'a évoqué hier, l'assurance-salaire, 350 000 000 $ par année, ce qui fait 500 000 000 $, c'est quand même des éléments majeurs de notre système. À la lumière de vos expériences, est-ce qu'il n'y a pas là aussi des mesures d'efficience et d'efficacité qu'on pourrait appliquer et qui pourraient très bien nous servir?

M. Dufour (Ghislaîn): À la CSST?

M. Côté (Charlesbourg): J'inclus... Je dis CSST...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Je n'ai pas dit l'organisation de la CSST. Ça, je vous laisse ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Dans notre réseau à nous autres, parce qu'il s'agit de notre réseau maintenant, sur des objets spécifiques de santé et sécurité au travail, de la même manière sur le plan de l'assurance-salaire, est-ce qu'il n'y a pas là aussi de la place à une meilleure efficience et à une meilleure efficacité?

M. Dufour (Ghislain): II y a sûrement place à une meilleure efficacité. Je vais dire que le Conseil du trésor vient de découvrir ce dos- sier-là, le dossier de la CSST, auquel ils avaient attaché très peu d'importance à ce jour. Comme vous le dites, il y a énormément d'argent. Ce que vous comptez, c'est juste de l'argent qui est envoyé à la CSST. Ça vous coûte quatre fois plus cher pour gérer ce dossier-là à l'interne, à l'intérieur des structures.

Alors, moi, je dois dire avec plaisir que le Conseil du trésor ayant mis sur pied maintenant un comité particulier pour les fins de santé et de sécurité au travail, ça va beaucoup mieux. En tout cas les échanges, la connaissance qu'on peut avoir des problèmes du gouvernement est très améliorée. Il y a encore beaucoup de travail à faire. Si vous voulez nous aider aussi, il faudrait peut-être un petit peu moins d'intervention politique des fois dans la boîte parce que ça vous retombe sur le nez. Ça coûte cher parce qu'il y a des interventions qui se font - je ne parle pas de vous, M. le ministre... Tout ça est intégré et ça pose, en bout de ligne, des coûts. On ne peut pas acheter la paix sociale à tout prix et avoir des travailleurs accidentés qui sont parmi les mieux payés au monde pour ne pas avoir de problème. Dans ce sens-là, il faudrait peut-être certaines interventions politiques plus pondérées.

Ceci étant sur...

M. Côté (Charlesbourg): Si vous continuez, je vais vous demander des noms, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour (Ghislain): Je vous les donnerai après.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour (Ghislain): En fait, si je comprends bien votre question, c'est qu'au-delà de ce qui est déjà dit dans le document, par exemple...

M. Côté (Charlesbourg): Robin des bois.

M. Dufour (Ghislain): ...pour regroupement d'achats, pour... Vous avez deux ou trois exemples précis. Vous demandez: Est-ce qu'il y aurait d'autres suggestions? Comme je ne suis pas... Je vais demander à Mme Turenne comment elle vous voit.

Le Président (M. Joly): Mme Turenne, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): On pourrait parler de Fleury en même temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Turenne: Oui, oui. Si je comprends bien votre question, vous dites: Qu'est-ce qu'on

peut faire en matière d'efficience, d'efficacité, du côté du réseau de la santé et des services sociaux?

M. Côté (Charlesbourg): Oublions la santé et sécurité au travail.

Mme Turenne: Oui, ouf.

M. Côté (Charlesbourg): M. Levine nous a donné l'exempte.

Mme Turenne: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Parlons d'assurance-salaire, par exemple. 350 000 000 $ par année que ça coûte dans le réseau de la santé et des services sociaux.

Mme Turenne: je le sais. je vous dirais même dans ce sens-là - je suis absolument consciente de ça - que ça fait partie du déficit chez nous, cet aspect-là des choses et on a réalisé que... on a même réalisé, lors de l'analyse un peu plus approfondie de ce dossier-là, qu'il y avait eu une augmentation importante des gens qui étaient en absence de maladie. là, les gestionnaires du réseau nous disent: ça a trait à la motivation du personnel infirmier qui est décroissante. les conventions collectives sont excessivement larges en matière d'assurance, d'absence comme ça. les conventions collectives sont très larges aussi par rapport à des absences pour... comment ils appellent ça? les gens partent une année...

M. Côté (Charlesbourg): Sabbatique.

Mme Turenne: Des sabbatiques, bon. Dans le réseau, ça crée excessivement de difficultés au niveau de la continuité des services, parce que les gens qui s'en vont, bien sûr, il faut les remplacer. Des mesures d'efficience et d'efficacité, je vous dirai, a priori, il y en a tellement que, si je vous parle de façon plus particulière de chez nous, on a réalisé qu'on pouvait être beaucoup plus performant dans le réseau. C'est certain, M. le ministre, qu'il y a encore des démarches qui peuvent être faites en ce sens-là, mais, au niveau de la rigidité, au niveau de la mobilité du personnel, tout devient très difficile à gérer. Je pense que M. Dufour l'a très bien exprimé cette idée là tantôt.

M. Côté (Charlesbourg): Une petite question bien vfte qui pourrait nous faire sauver quelques piastres. L'examen préemploi quand je m'adresse à des patrons, est-ce que ça signifie encore quelque chose aujourd'hui?

M. Dufour (Ghlslaln): Plus que jamais. Plus que jamais parce que l'environnement dans lequel on oeuvre est devenu plus difficile; l'environne- ment santé et sécurité du travail par exemple, l'environnement protection des autres travailleurs. la loi le prévoit de façon implicite dans la santé et la sécurité du travail. alors, les examens de préemploi sont devenus plus nécessaires qu'ils l'étaient dans le fond d'autant que les chartes et fédérale et provinciale interdisent de plus en plus de faire des examens en cours d'emploi. on est de plus en plus obligés de les faire en préemploi pour bien s'assurer que si on embauche un chauffeur d'autobus éventuellement il sera capable de conduire à bon port. de plus en plus l'industrie québécoise aussi est une industrie plus spécialisée. ça devient de plus en plus essentiel. ce n'est pas là que vous devez faire de l'économie parce que...

M. Côté (Charlesbourg): Je vais finir parce que je voulais vous amener sur mon terrain un petit peu aussi, là.

M. Dufour (Ghislafn): Vous êtes là depuis le début sur votre terrain.

M. Côté (Charlesbourg): oui. à partir du moment où ces examens-là sont nécessaires, est-ce que ça ne devrait pas relever du ressort des entreprises, effectivement?

M. Dufour (Ghislain): Moi, je vous ramène sur le mien, on est d'accord. C'est vous autres qui avez nationalisé la médecine privée du travail, vous autres comme gouvernement, pas vous. Ce n'est pas vous qui étiez au gouvernement à ce moment-là.

M. Côté (Charlesbourg): On prend les héritages bons comme mauvais.

M. Dufour (Ghislain): Les entreprises avaient d'excellents services de médecine du travail. Les grandes compagnies avaient tout ça. On jour on a dit: Non. Il faut que la santé privée, la médecine privée du travail tombe sous le réseau public. Alors, ça a tout été transféré. On demande rien d'autre que de le faire et d'en assumer les coûts, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, vous m'amenez sur votre terrain, effectivement. Donc, ça serait à coût moindre. Bon.

M. Dufour (Ghislain): Définitivement.

M. Côté (Charlesbourg): Une dernière petite question. Ce n'est pas parce que je n'en ai pas d'autres, mais le temps file. Dans votre mémoire vous faites référence à une étude de l'OCDE qui date de 1979 sur le ticket modérateur. Vous dites: II y a plus ou moins 40 pays qui avaient sous une forme ou sous une autre un ticket modérateur. En pourcentage, je pense qu'on va tenter de mettre ça à jour. On serait probable-

ment à beaucoup plus aujourd'hui, mais on va tenter de voir ce que c'est surtout lorsqu'on arrive avec un exemple comme la Suède que vous prenez, que j'ai fait sortir pensant que dans le cas de la Suède c'était tout récent compte tenu du changement du gouvernement alors que c'était mis en application antérieurement sous un gouvernement qui avait une vision pas mal plus socialiste, ce qui était le modèle de tant de Québécois.

J'aimerais en entendre davantage sur l'impact du ticket modérateur parce que, mol, je me suis prononcé contre. C'est clair, il n'y a pas d'équivoque là-dessus compte tenu que les démunis sont des gens qui seraient davantage affectés. Mais évidemment ça progresse dans l'opinion par le dépôt de votre sondage de ce matin. On ne peut pas dire que parce que c'est aussi important les gens ne le veulent pas. Alors, en démocrates on est obligés de regarder ce qui se passe un peu et puis d'être sensibles à cette opinion-là.

M. Dufour (Ghislain): Êtes-vous en train de me dire que vous n'êtes pas d'accord avec l'annexe au document?

M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Je suis d'accord avec ce qu'on a déposé sur la table comme des éléments de discussion. C'est clair et ça a toujours été clair. C'est une commission de discussions et d'échanges et après ça on va se positionner.

M. Dufour (Ghislain): En tout cas, je répète que les trois pages de l'annexe sur le ticket modérateur sont excellentes. Ils se sont sûrement inspirés de ce document auquel on se réfère. C'est vrai qu'il est de 1979 mais nous on n'en a pas trouvé d'autres pour en faire dépôt ici. Là-dedans ça comprend justement des pays de l'OCDE avec lesquels on peut facilement se comparer. Ce n'est pas avec tout autre pays. Dans ces pays-là il y a ce que vous appelez la Suède antérieure, la Norvège antérieure, donc des pays qui étaient très ouverts à des programmes de ce genre-là.

La conclusion, je la répète, c'est ce que je disais tout à l'heure: Ça ne fait pas disparaître, c'est-à-dire on baisse un peu sur les médicaments, on baisse un peu sur les services de cliniques externes, etc., mais, sur les vrais services, ça ne les affecte d'aucune façon. Alors, pour nous, le message est ciair.

Mais ce n'est pas ce qu'on privilégie, je voudrais bien qu'on se comprenne. Nous, ce qu'on privilégie, c'est que vous indiquiez au ministère de la Santé, à la fin de l'année, sur le T4, que M. X ou Mme Y a reçu tant en valeur de services de santé. Déjà là, il y aurait une information extraordinaire, il n'y a pas grand citoyen qui sait ce que ça coûte une journée d'hospitalisation à l'hôpital Saint-François d'Assi- se. Alors, ne serait-ce que leur donner ça, II y aurait à ce moment-là beaucoup d'information. Après ça, on dit: Pourquoi ne pas aller carrément à l'impôt-services, avant même le ticket modérateur, ce qui permettrait à ce moment-là de faire des paramètres que vous contrôleriez, qui d'aucune façon ne mettraient en cause l'universalité et l'accessibilité et qui iraient chercher de l'argent chez les mieux nantis, sachant pertinemment que ces mieux nantis peuvent faire protéger ce risque par l'entreprise privée? Alors, c'est notre approche globale.

On conclut en disant que ce n'est plus vrai que c'est universel et accessible, le réseau de la santé. Qu'on arrête de nous dire ça. On le sait très bien. Je voyais l'autre jour, dans L'actualité, une déclaration du président de la Fédération des cardiologues, qui est à Sacré-Coeur à Montréal, qui disait que la période d'attente pour des gens qui ont des problèmes cardiaques importants, c'est rendu de six mois à un an. Je ne le sais pas, mais qu'on lance ça publiquement, c'est majeur, je pense.

M. Côté (Charlesbourg): Ça mérite... Le Président (M. Joly): S'il vous plaît...

M. Côté (Charlesbourg): Même si c'est dit par une autorité, ça mérite d'être vérifié. On sait pourquoi il y avait des listes d'attente à l'occasion. C'est une bonne occasion de mettre de la pression sur le système pour avoir de l'argent aussi. Là-dessus, je pense que ça mérite une bonne vérification.

M. Dufour (Ghislain): La prochaine fois, je citerai un autre exemple.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. Dufour.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamin-gue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Bienvenue aussi au Conseil du patronat. C'est toujours un plaisir de vous voir même si on ne s'accorde pas sur tout. Vos mémoires, ce que vous présentez généralement, sont toujours ancrés dans le coin du réalisme de la situation. On peut avoir des divergences de vues, mais la contribution que vous apportez au débat est essentiellement importante. Je l'ai répété à plusieurs groupes aussi hier, sur le continuum du débat qu'on a installé ici, il est important qu'on ait toutes les positions et toutes les visions, même si, d'entrée de jeu, vous dites finalement: Je pensais que le ministre n'aurait pas de questions à poser tellement les fleurs l'enterraient au début, tellement vous étiez d'accord en

disant: C'est excellent! C'est extraordinaire! Je pensais qu'on était pour dire: Merci beaucoup. Nous allons poursuivre dans le sens du document gouvernemental, un peu à la blague.

Votre présentation cerne, quant à moi, des aspects du débat de façon très importante - et j'y reviendrai - particulièrement le coeur à la page 4, à votre troisième commentaire. Ça saisit essentiellement toute la situation quand vous dites, sous le titre «un meilleur contrôle des coûts»: «Dépenses susceptibles de croître, baisse des transferts fédéraux, affaiblissement de la croissance économique [...] contraintes...» On est pris avec ça dans une espèce de quadrature du cercle, en vous disant d'entrée de jeu qu'il semble qu'on ne soit pas seul non plus comme société occidentale à être pris avec ce problème-là en matière de santé et de services sociaux. Quand je lis des titres comme «Le système de santé: ruiné et malade. Il coûte de plus en plus cher, il est loin d'être un modèle. Les remèdes proposés sont impopulaires et inefficaces. En fait, personne n'ose s'attaquer aux racines du mal», sauf que c'est la revue Le Point et c'est la France. Alors, vous voyez, on a une problématique qui est assez répandue sur ce continent-là. (10 h 30)

II est assez rare - et c'est ma première question - qu'on va entendre les représentants du patronat nous suggérer des impôts. Vous dites: Oui, il faut rationaliser, il faut augmenter l'efficience et quand, il va nous manquer de l'argent, il faut aller vers la formule de l'impôt-services. D'ailleurs, je pense qu'on peut dire qu'au départ ça s'appelait Impôt à rebours. Vous êtes le parrain de cette formule-là. Ce que j'aimerais que vous m'expliquiez, c'est que j'ai de la misère à réconcilier votre affirmation de la page 2, où vous dites: Nos dépenses en services de santé et services sociaux représentent une part importante de la richesse collective à ne pas dépasser et, par ailleurs, le niveau de financement public à travers les impôts est aussi un niveau à ne pas dépasser, compte tenu du maintien d'une certaine, «concurrentialité» à maintenir avec d'autres pays Industrialisés. Comment vous réconciliez le fait de dire: On ne peut pas augmenter les impôts en général et, d'autre part, votre première suggestion pour en arriver à financer ce qui manquerait dans le système: allez-y avec un impôt-services sur les utilisateurs de services? C'est un impôt, de toute façon. Ça augmente la facture à la fin de l'année. Il y a de l'argent de plus. C'est ça que je voudrais essayer de réconcilier comme méthode, là, comme approche que vous avez, que vous nous faites ce matin.

M. Dufour (Ghislain): O.K. D'abord, je dois dire qu'il nous fera toujours plaisir de vous lancer des fleurs sur certains documents lorsque vous nous en déposerez. On analyse toujours un document pour sa valeur, alors... Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour (Ghislain): Sur la question de la contradiction apparente, II n'y en a pas, M. Trudel, parce que notre première vision des choses - c'est celle, d'ailleurs, qui se dégage du document - il faut éviter d'augmenter les dépenses de santé, et la façon d'y arriver, pour nous, c'est l'efficience, l'efficacité, les conventions collectives, c'est une forme de privatisation qui pourrait permettre de réduire les coûts, etc. Tous les éléments qu'on retrouve, dans le fond, dans notre mémoire. C'est ça, l'objectif premier, sauf qu'il y a aussi un besoin qui est un besoin de freiner la consommation. On ne dit pas qu'elle est abusive, on ne dit pas qu'elle est frauduleuse, on dit: II y a quand même un besoin de prévention en santé qui permettrait de freiner la consommation.

Deux éléments à ce moment-là. Le premier élément, c'est d'être certain que tes individus sont informés que ce n'est pas gratuit, la santé, parce qu'il y a une conception populaire qui veut que, parce que ça vient du gouvernement, c'est gratuit. Ils paient, et drôlement. Donc, une information qui est le lien entre la consommation individuelle et les coûts. Et, après, une participation sous la forme de ce qu'on appelle, nous, l'impôt à rebours, qui n'a pas nécessairement comme objectif d'accroître les revenus non plus, qui peut être un contrôle de la consommation.

Mais, par ailleurs, il faut être réaliste. On sait que les budgets des services de santé et des services sociaux grimpent de 6 %, 6,5 % par année. C'est beaucoup plus que l'Inflation, ça. Il va falloir aller chercher de l'argent quelque part. Alors, ce qu'on pense actuellement être la meilleure formule, après avoir informé les gens, donc fait un lien entre consommation et coûts, c'est l'impôt-services, l'impôt à rebours avec, je vous l'ai dit tout à l'heure - non pas à vous mais à M. Côté - des paramètres très précis. On ne veut pas que ce soit pour la personne qui gagne 10 000 $, 15 000 $ ou 20 000 $. Ça peut être pour la personne qui gagne 30 000 $, 35 000 $. De façon automatique, cette personne-là, qui gagne 30 000 $, 35 000 $, elle est au travail. SI elle travaille, elle a un régime d'assurance qui la protège. Alors, il s'agit d'insérer dans nos régimes de protection collective cet élément neuf auquel on serait amenés à participer.

C'est là que je dis qu'on diffère du document du ministre parce qu'on dit: Vérification faite dans le secteur privé, il y a des assureurs qui sont prêts à prendre ça. Alors, voilà, c'est le cercle. C'est pour freiner un peu la consommation parce qu'on aura donné de l'information, mais il faudra toujours des sources additionnelles, ne serait-ce que pour respecter la croissance des coûts de santé qui sont là, et on n'y peut

rien. Et la formule privilégiée pour nous n'est pas te ticket à 5 $ parce que, justement, il va y avoir des coûts pour aller les chercher, les 5 $. Mais on n'est pas contre le principe. Il y a des débats de société où les gens sont contre. Nous, on dit: On est pour, sauf que, dans le choix des formules, ce n'est pas ce qu'on privilégie, M. Trudel. On privilégie d'aller chercher chez les mieux nantis, sachant que ceux-là n'auront pas de problème parce qu'ils pourront faire assurer par les assureurs privés cette partie-là qu'ils pourraient être appelés à payer à l'État.

M. Trudel: M. Dufour, vous avez probablement, comme tout le monde au Québec, regardé ou entendu parler avec une assez grande intensité de cette émission de la semaine dernière où on disait que la classe moyenne, au niveau des impôts, en a jusque-là. Vous n'avez pas l'impression - ce que vous venez de dire, au niveau de l'impôt-services, des utilisateurs - que, finalement, ce qu'on dit, c'est: On va finir par faire payer plus au niveau de la classe moyenne? Vous n'avez pas l'impression que c'est extrêmement dangereux de pousser cette classe moyenne au-delà de la limite raisonnable? Il y a cette espèce de sentiment, cette espèce de courant au Québec où la classe moyenne est en train de décrocher et, pire que cela, de se désolidariser des plus démunis parce qu'on l'a trop provoquée, on en a trop fait, on en a trop mis sur le dos de la classe moyenne et l'impôt-services, à cet égard-là, ça pourrait être la goutte qui fait déborder le vase. Trop, c'est trop.

M. Dufour (Ghisiain): Non. Moi, je suis d'accord avec votre analyse quant aux revenus moyens. C'est vrai, ils sont surtaxés. Le problème est très réel, je partage l'analyse avec vous. Mais le choix, il est double. Vous avez besoin d'argent en santé. Vous faites quoi? Vous augmentez les impôts? En augmentant les impôts, vous allez les toucher de façon automatique. C'est là qu'est l'argent, dans la classe moyenne. Alors, à l'inverse de vous, au lieu de les taxer, on suggère, nous, que l'on aille dans une protection possible d'assurance collective où vous allez avoir exactement les mêmes revenus. Et c'est très différent comme approche, parce que vous n'avez pas le choix. Vous allez être obligé d'aller en chercher, de l'argent.

M. Trudel: M. Dufour, on ne poursuivra pas très longtemps là-dessus parce que je comprends très bien votre approche. Mais on s'entend au moins pour dire que ce sont deux impôts que nous allons lever, soit l'impôt-services... ou si c'était l'impôt général? Parce que l'impôt général, on peut avoir des critiques sur la progressivité de l'impôt, mais notre régime d'imposition générale pour l'impôt des particuliers, il est progressif. C'est-à-dire que les gens qui gagnent plus cher dans notre société, ils en paient plus; les gens qui sont dans la classe moyenne, évidemment qu'ils en paient un peu plus que les démunis. Pour certaines catégories, on a même exempté. Moi, je suis d'accord au moins pour la question de la transparence. Là-dessus, parfait accord, parfait accord sur la transparence. Mais pourquoi on ne passe pas par notre régime, étant donné qu'on met la transparence sur le chèque de paie, sur le T4? Pourquoi on ne passe pas par l'impôt général progressif?

M. Dufour (Ghisiain): Si vous passez par l'impôt général, vous démolissez votre propre argument. Vous allez aller chercher l'argent, justement, chez la classe moyenne. Nous, ce qu'on vous dit, on vous offre une possibilité même de le faire payer par l'employeur, parce que les 1000 $ maximum, disons, qu'il devra payer à 50 000 $, parce qu'il a eu des soins de santé, ça tombera sur la police d'assurance collective de l'employeur et, à ce moment-là, dans bon nombre de cas, l'employeur paie, même en totalité, l'assurance.

Alors, c'est un choix délibéré qu'on fait où on répartit le risque plutôt que d'aller chercher, justement... Et je vous donne parfaitement raison sur cet éiément-là que la classe moyenne est surtaxée.

M. Trudel: Là-dessus...

M. Dufour (Ghisiain): Et on a des beaux tableaux là-dessus, dont on pourra débattre hors commission parlementaire pour montrer l'impact sur un revenu, par exemple, de 50 000 $, entre votre proposition puis la nôtre.

M. Trudel: Allons à la deuxième partie de votre raisonnement, à la page 3, la baisse des transferts fédéraux. Évidemment, vous comprenez que c'est un sujet favori de ce côté-ci, parce que vous avez bien lu le document qui, à cet égard-là, nous donne des informations extrêmement précieuses. Ce qu'il faut constater, c'est que, grosso modo - je pense bien qu'on va s'accorder là-dessus - le Québec, en matière de dépenses de santé, a fait son travail, je dirais, correctement. On a envoyé dans les dépenses de santé à peu près l'équivalent de l'augmentation du PIB. Ce qui nous cause ce drame financier et qui nous amène à avoir des questions déchirantes au niveau des revenus, entre autres, l'augmentation du financement, c'est le gouvernement fédéral qui, lui, a décidé que ce n'était pas sa priorité et qu'au lieu de mettre 31 % comme nous dans les services de santé et les services sociaux il ne met que 14 %; c'est ce qu'il nous envoie, 14,2 %.

Alors, ça, ça nous amène à ce que vous traitez un peu dans votre document, sur la loi C-3. Le 7 décembre 1990, le gouvernement actuel, le ministre de la Santé et des Services sociaux disait: On va demander la modification de

la loi C-3. Or, il semble, là, que le gouvernement ait reculé là-dessus et dise: Je ne touche plus, je ne fais plus de demande de modifier la loi C-3 au niveau du gouvernement fédéral et je reste dans cette espèce de barrière. Quelle est votre position là-dessus, vous autres, par rapport au paiement de transferts fédéraux et à la loi C-3?

M. Dufour (Ghislain): Bien, je pense que dans le cas de la loi C-3 notre position est claire dans notre document. Moi, j'ai eu l'occasion de discuter avec certains porte-parole du Québec dans le dossier de la loi C-3. Je ne peux pas parler pour M. Côté, je n'en al pas jasé avec lui, mais ce n'est pas l'Information que j'ai. L'information, c'est qu'on continue à débattre avec le gouvernement fédéral de ce problème-là. Notre mémoire dit tout simplement que, si le gouvernement du Québec décide de faire une bataille sur la loi C-3, on va la faire parce que, de toute façon, en ce qui nous concerne, la question de la santé dans le partage des pouvoirs qu'on débat actuellement, ça devrait être provincial. Dans ce sens-là, on supporte le gouvernement du Québec. Mais ce n'est pas ça, là, et il faut vivre la situation actuelle. Alors, on est prêt à rejoindre et le gouvernement et l'Opposition pour aller modifier la loi C-3. Ça n'a pas de bon sens qu'on baisse de cette façon-là les transferts vers le Québec et qu'on ne permette pas de quelque façon, à ce moment-là, au gouvernement du Québec d'aller chercher des revenus additionnels. À sa face même, ce n'est pas défendable.

M. Trudel: À cet égard-là, II semble, justement - vous nous amenez sur ce terrain-là -que dans le débat constitutionnel actuel on veuille même aller beaucoup plus loin que la loi C-3 parce que le ministre des affaires constitutionnelles canadiennes a l'air d'avoir cette grande oreille ouverte pour inscrire dans la Constitution une charte sociale. Vous, à cet égard-là, est-ce que vous allez aussi recommander au gouvernement du Québec de rejeter cette approche-là puisque, je dirais, un cran plus bas, vous dites: II faut revoir tout ça, il faut débarrer, en quelque sorte? Vous, au niveau de la charte sociale, est-ce que vous allez aussi recommander au gouvernement du Québec de rejeter cette approche-là en matière de protection?

M. Dufour (Ghislain): M. le Président, je pense qu'on déborde beaucoup. Je pense exprimer clairement ma pensée sur la loi C-3 en disant qu'actuellement H y a des contraintes qui ne sont pas acceptables pour le gouvernement du Québec et on est prêt à en discuter. J'ai dft, en plus, que la santé devrait être un dossier de juridiction de prépondérance provinciale. Évidemment, on peut toujours penser que la santé, pour certaines maladies, si on a l'immigration, il faut aussi qu'il y ait une responsabilité nationale, fédérale, mais pour l'essentiel nous sommes d'accord avec la position que je connais, moi, du gouvernement du Québec, à savoir que la loi C-3 n'a pas d'allure dans le contexte actuel. Sur la question de la charte sociale, bien, je vous pose juste une question. Quelle charte sociale?

M. Trudel: Si la charte sociale, c'était de constltutionnaliser la loi C-3?

M. Dufour (Ghislain): C'est la charte de M. Rae, c'est la charte de la CSN? C'est la charte de qui? Moi, tant et aussi longtemps que je n'ai pas un document pour faire un débat, je m'y refuse, M. Trudel.

M. Trudel: Merci. Mais on a de bonnes indications, vous dites, jusqu'à maintenant.

M. Dufour (Ghislain): Pardon?

M. Trudel: On a quand même de bonnes indications. Vous nous donnez la piste: Nous appuyons la position actuelle du gouvernement du Québec, pour ceux qui la comprennent. Allons maintenant dans un autre chapitre, sur le terrain des conventions collectives.

M. Dufour (Ghislain): Oui.

M. Trudel: Est-ce que vous pensez, M. Dufour - je vais m'exprlmer très carrément - que ce serait un bon «deal», à propos des masses salariales dans le domaine de la santé et des services sociaux, dans le débat actuel, de dire aux 250 000 salariés: Si vous voulez, on va vous garantir, pour le prochain cycle budgétaire, qu'on va respecter les mécanismes de négociation et leur résultat? Ce que ça veut dire - je fais une petite parenthèse - concrètement, c'est que, s'il y a de l'enrichissement, ça va, et le partage de cet enrichissement collectif on le discutera aux tables de négociation. Mais, en retour, nous vous demandons de vous asseoir avec nous, très rapidement, pour revoir ce que vous avez appelé la rigidité de l'application des conventions collectives ou, enfin, on sait de quoi on veut parler: des coûts intérieurs aux conventions collectives, à leur application normative. Est-ce que vous pouvez dire si ce serait un bon «deal» de faire ça, de dire: On compte sur vous, on va respecter les mécanismes pour le prochain cycle budgétaire sauf que, tout de suite, on veut s'asseoir? Venez regarder avec nous autres l'argent qu'il y a à l'intérieur au niveau de l'application des conventions collectives. (10 h 45)

M. Dufour (Ghislain): Vous me demandez de me substituer au président du Conseil du trésor, ce que je ne ferai pas. Sauf que j'ai vu tout à l'heure, dans les indications du ministre, à peu près la même chose que vous: ce besoin de

s'asseoir avec les centrales syndicales et de regarder tout ce dossier de la rigidité des conventions collectives. Mais je pense qu'il serait plus habile de dissocier les deux. Je pense qu'on devrait débattre, à sa face même, dans le cadre de cette commission parlementaire, des rigidités, des contraintes actuelles et séparer ça d'un objet de négociation parce que, là, vous allez négocier la rigidité contre autre chose. Alors, si vous ne réussissez pas à négocier autre chose, vous gardez la rigidité. Moi, je distinguerais très nettement les deux dossiers, je pense, en termes d'efficacité. C'est ça qu'on cherche.

M. Trudel: oui, tout à fait. en disant qu'on ne peut pas toujours réclamer tout du même coup à un ensemble de salariés qui constituent, oui, c'est vrai, 80 % des dépenses de notre système; 250 000 employés, c'est quelque chose. c'est tellement bien illustré, quant à moi, la partie que ça coûte, le normatif, là, au sens large, la rigidité, la question de la mobilité et de la polyvalence des tâches, que je pense... quand vous pariez de cela au conseil du patronat, vous en parlez aussi largement avec le secteur privé. il semble que, dans le secteur privé, avec les centrales syndicales, on ait fait un petit pas au niveau de ce que d'aucuns appellent le nouveau contrat social. est-ce que ce ne serait pas, donc, une façon de dire: là, l'espèce de nouvelle définition du contrat social en matière des relations du travail avec nos 250 000 employés de ce secteur-là, ça ne pourrait pas prendre cette tangente-là, de transporter sur le terrain du secteur public cette possibilité de dire: c'est correct, on va respecter, on va s'engager, les deux parties, sauf qu'il faut qu'on regarde quelque chose, c'est la partie qu'on va vous demander, comme on va en demander d'autres aux médecins, comme on va en demander peut-être au niveau des utilisateurs par l'impôt-services, selon votre suggestion, etc.?

Dans ce sens-là, vous dites qu'on les distingue, mais c'est une bonne piste.

M. Dufour (Ghislain): Ah, c'est une bonne piste! C'est ce que j'avais vu un peu dans l'intervention du ministre tout à l'heure, de s'asseoir avec les centrales en dehors des négociations comme telles et de regarder. Eux aussi, ils tiennent à l'accessibilité, à l'universalité, ils tiennent au contenu du régime actuel. Alors, ils vont être obligés de faire une contribution. Cette contribution-là, quant à moi, passe par une meilleure gestion du réseau. Or, la meilleure gestion du réseau passe par le contenu des conventions collectives. Alors, il faudra sûrement en débattre avec eux.

M. Trudel: oui, j'ai regardé l'information que vous nous avez distribuée à propos du sondage dans les affaires de ce matin. donc, à la question «si vous aviez à décider de la manière de réduire le déficit qu'accumule le gouvernement à l'égard des soins de santé, auriez-vous tendance à exiger des frais fixes de 5 $ par jour d'hospitalisation, etc.?», ça varie selon la dimension et, grosso modo, on en tire la conclusion que 80 % sont d'accord avec un ticket modérateur.

Il faut bien regarder la question, je pense. C'est: «Si vous aviez à baisser le déficit». Or, il est bien démontré que ce n'est pas une mesure de financement, un ticket modérateur. Et j'ajouterais comme dimension, aussi, dans le même sondage, que 74 % sont contre l'abolition de la gratuité des soins dentaires pour les enfants, et 63 % n'acceptent pas la suggestion de supprimer la gratuité des examens de la vue.

Ce que je veux juste faire ressortir par là, M. Dufour... Bon, on ne peut pas ignorer qu'il y a 80 % des gens qui disent: Un ticket modérateur, on n'a pas peur de cela. Je pense qu'il faut faire attention - je veux avoir votre opinion là-dessus - en disant: Ce serait un moyen pour financer, pour régler nos problèmes. En ce sens-là, le document ministériel... Nous autres aussi, il y a de bons bouts qu'on trouve bons là-dedans; on ne rejette pas tout au complet. Dans sa réflexion sur le ticket modérateur, le ministre a dit: Moi, mon nid est fait, il n'y aura pas de ticket parce que j'ai regardé tout ça. C'est heureux, ça. S'il a dit ça, il n'y aura pas de ticket modérateur; il n'y en aura pas. Tout le monde est à l'écoute tout le temps parce que... On nous dit que ce n'est pas durable, l'effet d'un ticket modérateur; ce n'est pas durable et ça n'a pas des effets qui nous permettent de régler un problème de financement. Alors, à cet égard-là, pourquoi y aller quand même avec l'idée du ticket modérateur quand les effets recherchés ou les effets obtenus ne régleront pas le problème que nous avons au Québec?

M. Dufour (Ghislain): II est évident que ça ne donnera pas des sources de revenus énormes mais, ça, le document le dit, je pense. En tout cas, nous, on le dit. Ce n'est pas l'objectif d'aller chercher des revenus additionnels, c'est l'objectif d'essayer de freiner une certaine consommation. C'est ça qui est clairement établi dans le document auquel nous nous référions tout à l'heure. Et c'est pour ça, d'ailleurs, que nous, on privilégie aussi l'impôt-services plutôt que le ticket modérateur. Mais faites attention; le ticket modérateur, il faut savoir de quoi on parle aussi. Moi, je lisais ce matin Mme Lysiane Gagnon dans sa chronique. Elle était d'accord, par exemple, pour un ticket modérateur sur le logement, sur la nourriture. Parce que, disait-elle, si on le prend à la maison, pourquoi pas à l'hôpital, etc.

Moi, je ne veux pas embarquer dans les différences, sauf que je dis: Vous faites un mauvais débat, hommes politiques, quand vous dites que la population ne veut pas de ticket modérateur. Je veux dire, ce n'est pas la premiè-

re fois, hein? Aujourd'hui, c'est ça, mais il y a eu Léger & Léger il n'y a pas tellement longtemps. Plusieurs sondages confirment qu'il y a une ouverture de la population. Alors, il ne faut pas faire un faux débat en disant que la population n'en veut pas.

M. Trudel: Juste un commentaire, et ce n'est pas sur votre réponse, M. Dufour, c'est sur le sentiment général que m'inspirent les résultats de ces sondages. Ces sondages me semblent renforcer un préjugé, un mythe largement répandu au Québec et qui, heureusement, est complètement détruit par le document du 18 décembre: que les citoyens et citoyennes sont des abuseurs de services de santé. Et ça, ça renforce ce sentiment qu'il faut mettre un ticket parce que les citoyens et citoyennes sont des abuseurs de services. Le document nous démontre que c'est faux, que c'est fini, ce mythe. On ne peut plus parler de cela. Il y a au moins ça comme mérite dans ce document-là, en plus d'autres mérites, bien sûr. Les citoyens du Québec ne sont pas des abuseurs, et on a l'impression que la spirale de l'appui sur un ticket, c'est une autre mesure de renforcement de la désolidarisation sociale qui est en train de se produire au Québec à l'égard, par exemple, de nos services de santé et services sociaux. Et je le dis, je ne fais pas ça en réplique à votre remarque mais il y a une espèce de spirale là-dessus.

M. Dufour (Ghislain): Mme Turenne.

Le Président (M. Joly): Mme Turenne, une courte réponse, s'il vous plaît. Un commentaire.

Mme Turenne: Oui, M. Trudel, vous avez raison et je pense qu'il faut que ça soit clairement établi. Un ticket modérateur, une forme de participation quelconque du citoyen-consommateur aux services de santé, ça ne veut pas dire que les gens fraudent et abusent. L'objectif recherché, encore une fois, c'est de faire le lien et de faire comprendre à la population consommatrice que les services de santé et services sociaux, ce n'est pas gratuit. Alors, ce lien de transparence et ce lien de participation de la population... Ce que le sondage nous dit, c'est que la population est d'accord pour participer lorsqu'elle consomme un service quelconque. Je pense que c'est comme ça qu'il faut le prendre, positivement.

M. Trudel: Je conclus...

Le Président (M. Joly): Terminé, M. le député.

M. Trudel: ...je conclus en disant.

Le Président (M. Joly): C'est déjà conclu, M. le député.

M. Trudel: Ce n'est pas mon...

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît.

M. Trudel: Je n'ai pas été difficile sur le temps, M. le Président.

t

Le Président (M. Joly): Non, mais, là, c'est que j'ai une demi-heure à rattraper...

M. Trudel: Oui.

Le Président (M. Joly): ...et j'ai laissé déborder tout le monde. Je suis prêt à avoir cette latitude mais, d'un autre côté, la minute par-dessus la minute fait en sorte que, tantôt, je ne pourrai pas donner satisfaction aux autres groupes qui vont se présenter.

M. Trudel: On s'est bien entendus.

Le Président (M. Joly): Très, très courte conclusion.

M. Trudel: très courte conclusion. merci beaucoup de votre présentation.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Non, non, elle est éclairante. Je regrette, parce j'aurais évidemment une question extrêmement intéressante à propos de la page 9 de votre document, en disant: Là, il y a moyen d'aller chercher au fédéral l'argent qu'ils nous doivent. Le ministre a organisé un autobus pour aller faire une parade à Ottawa. Alors, si vous voulez embarquer pour aller faire Beuh! Beuh! à Ottawa et penser qu'on va les avoir... Je pense que ça fait 32 ans que nous, on n'est pas d'accord. C'est assez. Mais votre contribution, messieurs, madame, est très importante. Merci beaucoup de votre présentation.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Merci. Le message est passé. Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

M. Atkinson: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, à la page 13, au paragraphe 3 sur la privatisation, j'ai de la difficulté à suivre vos arguments en ce qui a trait à la privatisation de bons soins à moindres coûts. Vous citez l'exemple du Worthing District Hospital où les patients vont à l'hôtel pour leur convalescence suite à une chirurgie. Ceci a démontré que les patients se rétablissaient beaucoup plus rapidement qu'à l'hôpital, et non que le secteur privé était mieux que le secteur public. Il semble que le système le plus économique et humain soit celui avec des fonds publics et l'individu qui récupère à la maison.

Cependant, disons pour le moment que nous adoptons un tel système; allez-vous recommander que tout le monde soit obligé de passer sa convalescence à l'hôtel ou auront-ils le choix? Si vous optez pour le premier, je crois que plusieurs vont renoncer à la chirurgie à cause du coût et, avec le deuxième, vous créez des services de santé à deux classes. J'ai de la difficulté à comprendre votre concept de la clinique privée à l'intérieur des hôpitaux, mais je crois comprendre que les patients devront payer directement pour les services de laboratoire, de physiothérapie, etc. En d'autres mots, la Régie paiera pour votre chirurgie du coeur si vous payez pour les rayons X.

M. Dufour (Ghislain): MmeTurenne.

Le Président (M. Joly): Mme Turenne, s'il vous plaît.

M. Dufour (Ghislain): Mme Turenne, sur des grands principes, parce qu'on n'entrera pas dans l'expérience du Worthing District Hospital.

Mme Turenne: Je pense que ce que nous avons essayé d'exprimer ici, monsieur, c'est de faire référence à de nouvelles façons d'offrir des services de santé. Est-ce que c'est absolument essentiel que les gens vivent une convalescence dans un centre hospitalier alors que, tout simplement, ils pourraient être suivis a leur domicile? On connaît maintenant les expériences qui ont été faites pour des centres hospitaliers à domicile, et c'est l'essence de ce qu'on exprime ici.

Maintenant, sur l'autre question par rapport à la privatisation, ce qu'on lance, finalement, comme idée, c'est de dire: Est-ce que ça ne serait pas intéressant de penser à privatiser certaines activités médicales qui sont offertes à l'intérieur des centres hospitaliers actuellement, que ce soit au niveau de la radiologie, au niveau de l'électroencéphalographie ou en physiothérapie? À la condition, toutefois, que les deux types de systèmes, le système privé et le système public, ne vivent pas ensemble à l'intérieur d'une même Institution. C'est une ouverture d'esprit, dans ce sens-là, que, je pense, le Conseil du patronat met sur la table aujourd'hui.

M. Dufour (Ghislain): Mais je veux juste être certain qu'on se comprenne bien parce que vous avez parié, encore là - c'est un discours que, nous, on ne peut accepter - de médecine de riches, dans le fond, dans le sens que la personne s'en va à l'hôtel. Bien non, elle ne s'en va pas à l'hôtel, c'est l'hôtel qui est intégré au réseau hospitalier.

Une voix: Ah!

M. Dufour (Ghislain): Bien oui. On ne défendrait pas qu'on envoie les gens au Reine Elizabeth, là.

M. Atkinson: Oui, oui, ce n'est pas le Rftz-Carfton.

M. Dufour (Ghislain): Ça peut être le Ritz-Cariton, tant mieux, sauf que c'est intégré à l'hôpital et que c'est le même prix qu'une chambre d'hôpital. Il ne s'agit pas d'avoir des coûts additionnels. Inversement, on vous dit que, dans une formule comme ça, ça coûte 344 $ de moins. Alors, c'est des moyens pour réduire les coûts, mais surtout pour réduire les listes d'attente, parce que les listes d'attente sont épouvantables. Les médecins ne peuvent pas opérer, il n'y a plus de lits disponibles. Alors, là, tu es en attente trois mois, six mois, huit mois. Alors, on dit: Est-ce qu'il n'y a pas possibilité de meilleurs soins à domicile, de service d'hôtellerie à l'extérieur, etc., ce qui est une certaine privatisation? Ce n'est pas pour les riches mais pour tout le monde. Ça existe déjà, d'ailleurs, soit dit en passant, au Québec. Dans beaucoup d'hôpitaux les hospitalisations sont d'un jour et, le soir, on transfère le malade dans des centres privés qui ont de la physiothérapie, etc. Tout le monde étant égal par ailleurs.

M. Atkinson: Merci, madame; merci, messieurs. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Je veux vous remercier. Juste en conclusion, je veux quand même faire une distinction: s'il n'y a pas d'abus, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas une consommation excédentaire de services. Je pense qu'il y a une distinction très nette à faire. Oui, c'est vrai que, globalement, on a conclu qu'il n'y avait pas d'abus; ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas une consommation excédentaire de services et ça, ça me paraît aussi assez important. Merci de votre contribution.

Tout simplement, sur la charte sociale, je veux dire que votre ancien chef, Mme McLaughlin, a dit que ce n'était pas nécessairement à mettre dans la Constitution ce matin, d'après ce que j'ai pu comprendra-Une voix: Pas nous autres, vous autres.

M. Côté (Charlesbourg): ...et quand à madame que vous citiez, de La Presse, évidemment, vous me permettrez de m'abstenir compte tenu de la grande amitié qui nous lie.

Des voix: Ha, ha, hal (11 heures)

Le Président (M. Joly): M. Dufour, Mme Turenne et M. Tremblay, au nom des membres de

cette commission, merci d'avoir été présents. Bon voyage de retour!

J'appelle maintenant les gens représentant l'Association des directeurs généraux des services de santé et des services sociaux du Québec et je les invite à bien vouloir prendre place rapidement, s'il vous plaît.

S'il vous plaît, si vous voulez prendre place! M. Levine et votre groupe, bienvenue à cette commission. Alors, M. Levine, auriez-vous la gentillesse de nous introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?

Association des directeurs généraux des services de santé et des services sociaux du Québec

M. Levine (David): Merci beaucoup, M. le Président. À ma gauche, M. Jean-Pierre Mont-petit, directeur général de l'hôpital Charles-LeMoyne, ainsi que Mme Micheline Larose, directrice générale du centre de réadaptation Mont Saint-Antoine; à ma droite, à l'extrême, M. Lucien Lessard, directeur général du CLSC de Forestville, et, directement à ma droite, M. Michel Denis, directeur général de l'Association des directeurs généraux.

Le Président (M. Joly): Merci. Alors, je vous rappelle que vous avez une vingtaine de minutes pour nous exposer votre mémoire et que, par après, les parlementaires échangeront avec vous.

M. Levine: Merci beaucoup, encore une fois, M. le Président, M. le ministre et membres de la commission. Ça me fait grand plaisir d'être parmi vous aujourd'hui pour exprimer quelques-unes de nos opinions.

Je vous rappelle que l'association des D.G. représente presque l'ensemble des établissements du Québec, l'ensemble des D.G. des établissements du Québec. Ça veut dire: les CLSC, les centres d'accueil, les conseils régionaux, les hôpitaux et les CSS.

Notre orientation nous permet de parler de l'ensemble de la question du financement en ce qui concerne le système de santé, et non pas sur un groupe d'établissements pris individuellement. Vous savez que le problème du cloisonnement des établissements au Québec était là avant la réforme, il est là après la réforme, et ça reste encore un des dilemmes qu'on doit regarder de près. À titre de président de l'Association, je vais essayer de parler plutôt globalement de l'ensemble de la question.

J'aimerais aussi vous rappeler une petite citation de M. Henry Mintzberg qui, lors d'une rencontre avec les professeurs de l'Université de Montréal, a dit: «II est plus complexe de gérer une organisation de santé que de gérer General Motors». J'aimerais qu'on garde ça en tête pendant notre discussion d'aujourd'hui.

On va essayer d'aller très vite au coeur du sujet pour souligner le titre de notre mémoire «Avant d'investir davantage». Présomption un peu trop rapide. On a eu tendance depuis les derniers jours, dans les autres mémoires, à sauter trop vite à l'idée que ça prenait plus d'argent. On dit: II faut être plus efficaces, il faut être plus efficients. Oui, c'est vrai. Mais on n'a pas l'air de donner suffisamment d'importance à ces mots et, tout de suite, on dit: Comment on va aller chercher d'autre argent? Évidemment, à titre de gestionnaires dans le réseau, notre préoccupation est de voir comment on peut faire mieux avec ce qu'on a et ce dont on a besoin pour faire mieux avec ce qu'on a. Et nous, on est ici aujourd'hui pour exprimer cela. il est évident - et je ne resterai pas longtemps là-dessus - que l'impasse que le fédéral nous a imposée exige un leadership fort de la part du Québec; elle exige que... Je ne sais pas si, en autobus, on se ramasse à Ottawa tous ensemble... Mais sûrement, c'est une partie du problème, et ce leadership à travers les provinces canadiennes et ce leadership que le Québec peut démontrer, peut-être qu'on doit le prendre sur nos épaules et le faire actuellement.

Si je regarde maintenant les efforts de redressement et de rationalisation, on va parler de cinq points particuliers - je sais que ça intéresse beaucoup le ministre et l'ensemble de son équipe - et on va essayer de souligner des points assez importants. Pour nous, la clef de la réponse est ici; c'est un sujet très sérieux et on va souligner à plusieurs reprises à l'intérieur de ce chapitre que c'est le leadership du gouvernement qui est la clef. Sans le leadership du gouvernement, on n'y arrivera pas.

Premièrement, le contrôle de l'offre de services et la question des médecins. J'aimerais, au départ, tracer un petit modèle qui peut vous expliquer un peu notre compréhension de la problématique. Aux États-Unis, vous avez un système de santé où les hôpitaux sont des entrepreneurs qui, eux-mêmes, cherchent un profit. Vous avez les médecins salariés de ces hôpitaux qui, eux-mêmes, cherchent un profit. Ils sont tous les deux ce qu'on appelle «à volume dépendant». Ils cherchent tous les deux à augmenter le volume, avec un coût qu'on sait être de 12 % à 13 % du PIB et avec 35 000 000 non assurés.

Si on se tourne vers l'Angleterre, vous avez des hôpitaux qui fonctionnent à budget global avec le reste du système; vous avez les médecins à salaire, encore une fois, mais, cette fois-ci, à salaire de l'État; vous avez un système qui est à volume opposé: ni l'un ni l'autre ne veut avoir du volume dans le système - 6 % du PIB - et vous avez des listes d'attente absolument terribles. Si vous êtes malade en Angleterre, c'est mieux de venir au Canada pour être soigné.

Dans notre système, vous avez des établissements de santé à budget global qui sont fermés

dans leur fonctionnement en termes de budget et qui sont à volume opposé; vous avez le corps médical et le mode de rémunération qu'on a, qui est à volume dépendant, qui cherche a augmenter le volume. C'est en harmonie aux États-Unis; c'est en harmonie en Angleterre. Au Canada, au Québec, ce n'est pas en harmonie. Il y a une disharmonie, il y a une certaine tension. On dit tous que cette tension est bonne. Elle est très bonne. Ça nous a permis d'offrir la gamme complète de tous les services à un prix de 8 % à 9 %. C'est une dynamique qu'il faut maintenir, mais il faut quand même regarder comment l'ajuster.

Pour nos médecins en chirurgie, qui travaillent à l'acte, c'est excellent; ils veulent réduire le séjour moyen. Ils veulent avoir plus de cas; ils sont payés par intervention chirurgicale. Pour nos médecins en médecine qui sont payés pour leur journée de présence à l'hôpital, ce n'est pas nécessairement dans leur intérêt de réduire le séjour moyen et d'avoir plus de cas. Pour nos médecins qui travaillent à l'urgence, qui travaillent à l'acte, on peut dire que ça devient à volume dépendant et peut-être qu'à l'urgence on doit être à volume opposé. Dans ce sens-là, je pense qu'il y a des choses à regarder sur le plan de la rémunération, sans remettre en question la dynamique qu'on a actuellement et qui est excellente pour le Québec.

Si on continue et qu'on regarde la question des patients en centre hospitalier, et qu'on parle de la question de la réduction du séjour moyen, tout le monde a indiqué, surtout l'AHQ hier, qu'il y a un montant important qu'on peut sauver en termes de séjour moyen, en termes de cette réduction, il y a plusieurs programmes, pas juste les chirurgies de jour. Je vous donne l'exemple des programmes de gestion de cas qui sont une manière de gérer chaque cas par un protocole développé avec les médecins, les infirmières et l'ensemble de l'équipe, qui permet de réduire d'environ 20 % le séjour moyen de chaque patient traité. Il y a moyen de tourner ça en argent liquide.

Ce n'est pas juste d'éviter d'ajouter des lits dans le réseau. Il y a moyen que ça, ça nous donne une masse importante. On peut arriver, au centre-ville de Montréal, à fermer 500 lits et à demander aux autres producteurs d'absorber ce volume par une réduction du séjour moyen. Ça prend une certaine réallocation des ressources, ça prend un support aux soins à domicile et d'autres choses pour lesquelles on peut aller dans le détail.

Quand on réalise l'importance de ça, c'est quoi l'élément clé de la réussite, ici? Et ça, personne ne l'a mentionné jusqu'à date. L'élément clé de ça, c'est une décision de la part du gouvernement de déterminer des objectifs clairs de réduction de séjour échelonnés sur une période de temps à laquelle, nous, comme administrateurs, on peut souscrire. C'est très difficile pour mol d'entrer dans un établissement et de vouloir introduire toutes sortes de réductions ou redressements si mol et mon conseil d'administration n'avons pas l'appui du gouvernement et qu'il n'y a pas un objectif clairement déterminé. Si, après cette commission, on arrive à faire une nouvelle loi ou un ajout, il faudra quand même penser à concrétiser l'ensemble des choses dont on parle dans des objectifs très concrets.

Si on parle de la question de l'alternative aux ressources institutionnelles - et ça, je pense que tout le monde en parle, de ces questions - il faut rajouter les soins à domicile, c'est évident. Je pense que tout le monde est d'accord là-dessus. Le fait qu'on soit en arrière de l'Ontario... Je vous rappelle que, dans le document, c'était indiqué que ça coûtait moins cher d'aller dans les hôpitaux en Ontario que d'aller dans nos hôpitaux du Québec. Ça nous coûte plus cher ici, dans nos institutions de santé. Ça coûte le double. Mais ils investissent le double, en Ontario, pour les soins à domicile, ce qui indique clairement qu'il y a une piste là, et je pense qu'on est tous d'accord là-dessus.

Mais où il faut regarder dans ces ressources alternatives, c'est dans l'exemple suivant, et je cite le document des CLSC qui vont venir à la fin des discussions. J'ai trouvé ça très frappant. Il indique que, paradoxalement, le Québec qui possède l'un des meilleurs taux mondiaux de sauvetage des bébés de petit poids à la naissance a aussi le double privilège de figurer parmi ceux qui ont le plus fort taux de naissance de bébés de petit poids. Je vous rappelle que Mme Lavoie-Roux a investi 8 000 000 $ pour 23 lits de néonatalité dans la région de Montréal. 8 000 000 $ récurrents par année, chaque année. Résultat: on a fait des articles fantastiques, on a sauvé des enfants de petit poids, on a une renommée internationale. Et, en même temps, on a le plus grand taux d'enfants nés à un petit poids. Il faut investir autrement et je pense que ça souligne très clairement les alternatives qui doivent être recherchées. Ce leadership du gouvernement dans ces alternatives est très important, et on peut souligner plusieurs autres exemples, évidemment. On comprend la dynamique qui existe, surtout la dynamique politique, mais ce leadership est extrêmement important.

Si on veut parler de l'acharnement thérapeutique et du développement technologique, je pense que ce qui est important, et tout le monde le souligne, c'est qu'il faut qu'on commence à évaluer ce qu'on fait. On demande le nombre d'examens radiologiques, on demande le nombre de tests en laboratoire. Est-ce qu'on pose la question à savoir combien de ces tests sont positifs et combien de ces tests sont négatifs? Et, si le taux d'examens négatifs est trop élevé, ça veut dire clairement qu'on demande trop d'examens. Si le nombre de tests donne un nombre positif approprié, ça va indiquer que le nombre de tests qu'on demande est à la mesure

des besoins.

La question, c'est qu'on ne cherche pas ces informations et on ne met pas sur pied des mécanismes pour les discuter. Et ça, c'est carrément dans le domaine médical. C'est aux médecins, peut-être au nouveau conseil médical qui a été suggéré, de faire ce type d'évaluation et de nous donner des barèmes, des «guidelines». Je pense que les médecins cherchent ces barèmes, et ce n'est pas nous autres, comme administrateurs, qui pouvons les développer. Je pense que, de plus en plus, si on regarde, comme je l'ai mentionné, les programmes de gestion de cas, les médecins participent. Ils participent beaucoup dans le développement des protocoles, dans le développement des algorithmes, et c'est par ce développement-là qu'on va arriver à trouver le moyen de contrôler l'ensemble des dépenses. Je pense que le gouvernement est très conscient de ça et a déjà subventionné des projets-pilotes dans le développement de gestion de cas. Il y a plusieurs protocoles qui sont déjà développés et en utilisation et II faut les extenslonner. (11 h 15)

Je parle très brièvement de la délégation de certains actes médicaux et je fais référence à l'Ontario où, tout récemment, finalement, les sages-femmes ont été inscrites dans la loi: On va tenter bientôt un projet-pilote au Québec, on le sait. Il y a du chemin à faire à ce sujet-là et pas seulement pour les médecins. Il y a un rôle qui peut être joué par plusieurs autres intervenants professionnels dans le domaine, et peut-être que cette réallocation, si elle est regardée sérieusement, peut nous amener des économies importantes.

J'aimerais qu'on parie très brièvement de la question du contrôle de la demande des services. Je pense que tout le monde a indiqué que ce n'est pas le citoyen qui abuse du système. Quand on est malade, on va chercher des services qu'on a le droit de recevoir, et j'espère que ça va rester un droit au Québec et non pas un privilège d'aller chercher ces services. Ce qu'on doit réaliser, c'est que les médecins, confrontés par les citoyens qui demandent des services, ont tendance à demander un ensemble d'examens. Et la suggestion du gouvernement d'avoir une assurance collective pour les médecins est une excellente suggestion. Même si le taux de poursuites au Québec n'est pas élevé comme aux États-Unis, cette préoccupation est toujours présente. Et, très souvent, les médecins dans nos institutions nous servent cet argument pour expliquer le nombre d'examens et le nombre de tests qu'ils demandent. Je pense qu'il faut suivre cette voie d'une façon, encore une fois, très importante.

Encore une fois, le leadership gouvernemental en ce qui concerne la consommation de la population. On a créé un niveau d'expectation parmi nos citoyens. À qui la faute? Premièrement, le gouvernement, en créant le système qu'on a, qui est un système dont on doit être fier; les administrateurs, qui voulaient toujours agrandir leurs structures; les médecins, qui sont à volume dépendant et qui cherchent toujours à accroître leurs revenus. On a un système qui a créé un niveau d'expectation parmi la population et ce niveau d'expectation est très présent. Pour le contenir, il faut que le gouvernement soit conscient de son rôle et de ses responsabilités. Et, comme on le dit, il faut montrer aux citoyens ce que ça coûte, puis il faut mettre ça dans son impôt pour qu'ils comprennent ce que ça coûte. C'est tout à fait vrai. Il faut l'indiquer. Et je vous dis simplement qu'en indiquant ce que ça coûte on atteint nos objectifs. Il ne faut pas en arriver à leur charger sur leurs impôts ce que ça coûte quand ils sont malades.

Quand, pour les médecins, on a introduit les programmes de revue d'utilisation des médicaments, surtout pour les antibiotiques, puis qu'on a créé ce qu'on appelle les «Infomed» dans les hôpitaux pour expliquer ce que ça coûte, les médicaments, les médecins ont changé leur comportement de pratique pour choisir les médicaments moins chers parce que, eux aussi, ils comprennent le dilemme dans lequel on se retrouve. Et je pense que c'est là qu'on doit regarder.

Je vais aller un petit peu plus vite, M. le Président, avec le temps qui reste, pour dire qu'on pense qu'avec 12 000 000 000 $ on est capable d'en faire plus. On pense qu'on est capable, avec ça, de couvrir nos besoins. Une mise en garde. Il ne faut pas investir dans de nouvelles structures. Il faut utiliser l'argent qu'on a pour couvrir les nouveaux besoins de la Régie, pour couvrir les nouveaux besoins des structures qu'on est en train de créer avec la loi 120. Il est incompatible d'aller chercher de l'argent parmi les citoyens du Québec pour payer des structures et de ne pas payer directement les services qu'on offre à la population.

Si on touche maintenant la question du panier de services, on ne veut pas s'embarquer longuement mais simplement dire qu'il faut l'étudier, il faut l'étudier de près. L'Orégon, qui était mentionné hier et où un ensemble d'études a été fait, je ne suggère pas et je suis très loin de suggérer ce type d'approche. Ce qui est quand même important, c'est que cette analyse faite avec le corps médical, avec les fédérations, avec les corporations est fondamentale. Il faut qu'on commence à comprendre les priorités et ce qu'on offre. Qui va prendre la décision d'offrir à quelqu'un de 92 ans, atteint d'un cancer, un programme de dyallse rénale? Actuellement, il n'y a aucun «guideline» qui permette aux médecins de prendre ces décisions difficiles. Et, plus souvent, c'est plus facile de ne pas prendre ce type de décision. Ça, encore une fois, ça prend ce leadership et c'est criant; les médecins eux-mêmes le demandent.

Finalement, si on touche la question des

administrateurs de réseau, le ministre a souligné à plusieurs reprises la grande importance des ressources humaines, la grande importance de la formation de ces ressources humaines, l'encouragement, la motivation. C'est les Individus qui gèrent le système. C'est les individus qui offrent les services. La qualité, l'efficacité et l'efficience des services ne viennent pas des règlements, des décrets ni de toutes les choses qu'on a besoin de suivre sur le plan financier. Ça vient des individus. Ça coûte cher, mais il faut payer la note. Le ministre a parlé à plusieurs reprises de la santé et de la sécurité au travail. Donner des cours sur les maux de dos à l'intérieur de mon institution coûte 86 000 $, et 30 000 $ par année, récurrents, pour des cours sur le déplacement des malades: comment les employés peuvent déplacer les malades pour ne pas avoir de maux de dos.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît.

M. Levine: II faut les payer, ces 86 000 $. Si on n'a pas d'argent parce qu'il y a ces restrictions-là, on n'arrive pas à faire des économies.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, M. Levine, en conclusion.

M. Levine: En conclusion, je vais toucher le dernier sujet qui est: S'il y a manque à gagner, qui paie la note? Au nom de l'ensemble des directeurs, on veut suivre la philosophie, la dynamique que le Québec a développée depuis 200 ans en ce qui concerne l'ensemble de notre culture. Le Québec est un des seuls endroits qui ait supporté autant la coopération entre les citoyens, le mouvement coopératif, l'attitude où on doit partager nos responsabilités. Dans ce sens-là, on ne supporte pas l'impôt-services individuel quand on est malade et on supporte la mutualisation des risques qui se doit d'être ajoutée à une responsabilité de l'ensemble de la société. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Levine. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je pense que c'est une occasion privilégiée que nous avons d'échanger avec ceux qui ont une responsabilité très grande de gérer ces 12 000 000 000 $. Je pense que c'est peu dire comme responsabilité.

M. le Président, plus souvent qu'autrement on est confronté, règle générale, à travers l'information quotidienne, à être davantage questionné sur un cas, disons-ie, isolé, de mauvaise administration alors qu'on parie très peu souvent des bons coups. On a la chance d'avoir avec nous ce matin deux exemples de bonne gestion et de volonté d'innovation que je salue en la personne du porte-parole et en la personne aussi du directeur général de Charies-LeMoyne qui, lui aussi, a mené son expérience de rationalisation à l'intérieur, d'efficience et d'efficacité, en collaboration avec les médecins et l'ensemble des employés, ce qui n'a pas été facile mais ça a donné des résultats. Évidemment, tu vas trouver ça dans les paragraphes quelque part, mais pas en «front page». Il faut bien se le dire et profiter de l'occasion ce matin pour le redire, même si je le dis à l'occasion et que ça passe inaperçu. Donc, après cette reconnaissance que certains pourraient appeler des flatteries, mais une reconnaissance bien méritée, il y a d'autres expériences comme celle-là dans le réseau, qui sont peut-être plus petites mais faites dans différents autres domaines et d'autres secteurs. Et ça, ça m'apparaissait important de le dire à ce moment-ci. On a la notion d'un budget global fermé, et je pense que nos administrateurs font des efforts surhumains pour être capables d'en arriver à respecter le budget global fermé. Dieu sait que ce n'est pas toujours facile. Et dans ce sens-là, je pense qu'on a atteint des rendements assez exceptionnels à ce niveau-là de la part de l'ensemble des Intervenants. Même s'il y en a, à l'occasion, à gauche ou à droite, un certain nombre qui réussissent à s'échapper, ce n'est pas majeur; il n'y a pas de dérapage absolument condamnable à ce moment-ci.

Au moment où on entre dans les mesures d'efficience et d'efficacité - et votre message ce matin dit: Oui, effectivement, on peut faire plus, on peut faire mieux avec ce qu'on a - cependant, il y a des conditions de leadership du central, parce qu'il y a un message assez clair là aussi. Vous vous attendez à davantage de leadership du central, y compris dans la non-réglementation, dans les directives, ainsi de suite. Il y a un certain dépoussiérage à faire, on en a déjà parlé. Et ça, je le comprends, le message, et je le prends tel quel. Je le crois très sincère et inspiré du vécu.

Vous avez donné un certain nombre d'exemples des choix politiques qui ont été faits, qui n'ont pas nécessairement été ceux qu'on aurait dû faire. La néonatalogie est un exemple particulier. Je pourrais vous en ajouter un qui, lui, a été un choix plus politique, sur le plan de la cardiologie tertiaire où on a dit: Maintenant, pour être bien sûr que l'argent qu'on attribue politiquement ne soit pas utilisé à d'autres fins dans les centres hospitaliers, au niveau de la cardiologie tertiaire, parfait, on va vous donner x centaines de milliers de dollars additionnels mais vous allez devoir traiter tant de cas additionnels. Ça aussi, ça donne des résultats intéressants quand on assume un leadership. Je comprends.

Ceci étant dit, parlons d'efficience et d'efficacité. Vous me connaissez, l'objectif est très clair: D'en avoir plus pour notre argent. C'est exactement dans la même lignée que vous

autres. Je voudrais aborder des problèmes spécifiques. C'est ça qu'on essaie de faire, voir jusqu'où on peut aller dans l'efficience et l'efficacité sur le plan de notre économie. Après ça, des décisions s'Imposeront sur le manque à gagner, des décisions qu'on devra prendre ultérieurement. Donc, de notre efficience et de notre efficacité de commission parlementaire découleront un certain nombre de décisions qui conditionneront votre avenir et le nôtre.

Parlons de politique de gestion des ressources humaines, financières et matérielles. Je pense que, si on n'en parle pas avec vous autres, on va peut-être avoir de la difficulté à en parler avec d'autres en connaissance de cause. On va donner l'exemple de la CSST. Je pense que vous abordez un exemple et, comme on vous a devant nous autres, on va arrêter de vous flatter. C'est clair que c'est un succès fantastique. Vous avez été obligés d'investir, comme vous l'avez dit tantôt, mais pour sauver, on me disait, plus ou moins 800 000 $, ce qui est quand même considérable. Dites-moi donc: Qu'est-ce qui fait que, si vous avez pu, vous, le faire chez vous, ça ne se passe pas ou ça ne semble pas se passer ailleurs? Je ne veux pas dire qu'il n'y a pas d'efforts de faits ailleurs. Qu'est-ce qui fait que, chez vous, c'a réussi d'une manière extraordinaire et qu'on ne semble pas réussir autant ailleurs, exception faite de vos qualités personnelles pour être capables de gérer un dossier comme celui-là? Est-ce que ça prend le leadership du ministère pour régler ça?

M. Levine: Dans ce type de dossier, je pense que la responsabilité reste entière, à l'Intérieur de l'organisation, aux gestionnaires, à un conseil d'administration convaincu de la nécessité de faire, disons, ce ménage. Je pense que, oui, il y a un effort important à faire dans ce dossier-là. Effectivement, sur 150 000 000 $ II y a 25 000 000 $ à 30 000 000 $ à sauver; il y a une gestion à faire dans ce réseau. D'ailleurs, votre sous-ministre adjoint aux ressources humaines a déjà fait un projet avec nous autres de 600 000 $, où H y avait un CLSC, deux centres d'accueil et un hôpital d'impliqués à dresser un processus qui permettrait aux autres établissements du réseau de connaître l'ensemble des dangers pour chacun des postes de travail et, par la suite, d'implanter les mesures qui s'imposent pour réduire les accidents. Je pense que, dans ce sens-là, il y a des efforts qui sont faits, qui pourraient être faits. Voilà, vous avez un montant Important à récupérer, garanti.

M. Côté (Charlesbourg): Mais par une volonté aussi qui viendrait, qui serait assumée en tenues de leadership par le gouvernement en donnant la ligne de conduite à partir des expériences vécues, ce que je comprends.

M. Levine: Le leadership, dans ce cas-là, était nécessaire à cause du régime rétrospectif qui a créé un fardeau tellement fort sur les institutions qu'on n'avait d'autre choix que de réagir d'une façon extrêmement immédiate et importante. Mais, au-delà de ça, nous avons une responsabilité comme employeurs face à nos employés. Si on veut créer la qualité totale et une atmosphère de participation dans l'organisation, il faut éviter des accidents à nos employés, même si ça relève juste d'un mal de dos.

M. Côté (Charlesbourg): Je vais vous en lancer comme ça, pour le temps que j'ai, des dossiers: assurance-salaire.

M. Levine: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): 350 000 000 $ par année. (11 h 30)

M. Levine: Ça, c'est un dossier où, effectivement, il y a des efforts importants qui doivent être faits. Les efforts dans ça, vous savez... L'assurance-maladie est pour des gens qui sont vraiment malades, c'est vrai. Beaucoup de congés sont aussi pris par des gens qui appellent et qui disent: Je n'entre pas aujourd'hui. Des fois, on découvre qu'il y a deux semaines ils ont demandé un congé sans solde et on n'a pas accordé le congé sans solde pour aller au mariage le samedi parce qu'on avait des problèmes de main-d'oeuvre. L'individu, le samedi matin, il a appelé puis il a dit: Je ne viens pas à l'hôpital. De toute façon, s'il est prêt à perdre son salaire pour la journée, il appelle et il n'est pas là. Moi, j'ai l'impression que ce qu'on doit faire dans le dossier de l'assurance-maladie, c'est une surveillance très minutieuse de ce dossier-là. Les 9,6 jours qui sont accordés dans les conventions collectives, multipliés par le nombre de travailleurs, sont une partie importante de vos 350 000 000 $. S'ils ne sont pas malades, on leur donne de l'argent au 1er décembre. Alors, veut, veut pas, une grande partie de cet argent sort.

L'autre partie, qui est la maladie à long terme de deux semaines, trois semaines, où c'est l'assurance-maladie qu'on pale à l'intérieur de nos organisations, ça, il faut simplement s'assurer qu'il y a une bonne surveillance. Les organisations ont des médecins qui font l'évaluation de la validité de ces maladies à long terme, mais, quand ils sont valables, ils sont valables. De l'autre côté, créer une atmosphère de travail stimulante, créer une atmosphère de travail où les travailleurs aiment ça aller au travail, où c'est Intéressant de rester à l'Intérieur, on aura beaucoup moins de «burnout», on aura beaucoup moins de frustration, on va avoir beaucoup moins de maladie. Ça relève de la gestion des ressources humaines globalement.

Une voix: Je pense que M. Lessard a de quoi à rajouter.

M. Lessard (Lucien): J'ajouterais ceci, M. le ministre. C'est que, dans le secteur des accidents de travail, je pense qu'il y a des efforts qui peuvent être faits. Mais, en ce qui concerne I assurance-maladie, les directeurs généraux, on n'a pas beaucoup de pouvoirs, excepté le pouvoir d'essayer de mobiliser nos employés. En retrait préventif, M. le ministre, nous n'avons pas le choix. C'est la CSST, concernant par exemple une personne qui tombe enceinte, qui communique avec nous et nous demande: Avez-vous un travail à offrir à cette personne-là, un autre travail que le travail qu'elle fait actuellement? Dans d'autres petits établissements, nous avons le choix. Si nous lui offrons un travail, on va devoir payer deux salaires. Il y a plus que ça, M. le ministre. C'est que j'ai vu un petit établissement qui a contesté chez nous un retrait préventif et je vous avoue que le directeur général y a goûté parce qu'il y a eu des procédures, etc. Donc, dans le secteur de la maladie, on est soumis aux billets des médecins. Je vous avoue que moi, j'ai essayé d'établir un système où je pouvais contester le billet qu'on avait du médecin et je vous avoue que ce n'est pas facile. Donc, sur ça, on est pieds et poings liés. On n'a pas grand-chose à dire. C'est automatique et je vous avoue qu'il y a une certaine complaisance là-dedans qu'on ne dénonce pas trop des fois parce que c'est nous autres qui allons être attaqués directement. Il y a une complaisance, je vous l'avoue, et une complaisance qui doit coûter terriblement cher à l'État.

M. Côté (Charlesbourg): Je pense que la problématique... Effectivement, dans un grand établissement vous pouvez offrir des alternatives, alors que dans un petit établissement il est clair que ça a ses limites. Donc, ce n'est pas miraculeux. Ça a ses limites, mais, quand on parle de l'ordre de 25 000 000 $, 30 000 000 $, c'est quand même assez important, merci, sur le plan de... Et tout ça additionné fait des choses intéressantes.

On est donc dans une situation où deux dossiers en particulier, l'assurance-salaire et santé, sécurité au travail, 500 000 000 $ comme enveloppe, c'est quand même considérable. De par le contact que vous avez avec les employés de manière régulière, est-ce que la base syndicale serait ouverte, elle, à échanger sur des conditions aussi importantes que celle-là, pour peu qu'il puisse y avoir au bout de la ligne un partage des économies? Et ça, ça me paraît être... Si le gouvernement décide de faire ça, de tout sauver et garder pour lui, il est clair qu'on va aller directement sur un mur. Mais, sur le partage des économies, est-ce que vous pensez que la base, dans votre vécu, évidemment, serait ouverte à ce genre de discussion là?

M. Levine: Je pense, surtout pour la santé et sécurité au travail, que les syndicats sont très conscients de la problématique. Eux aussi veulent éliminer... mieux, qu'il n'y ait aucun accident à l'intérieur de l'organisation. Je pense qu'avec les programmes qui sont faits actuellement il y a une bonne collaboration là-dessus.

Sur la question de l'administration de la CSST, qu'on fait de l'assignation à l'intérieur de l'organisation, des fois, oui, il y a de la contestation, il y a des griefs et il faut aller en arbitrage là-dessus. Vous savez, c'est l'assignation qui est la manière avec laquelle nous autres, on a sauvé ce qu'on a sauvé. L'assignation est la façon de trouver un travail autre à l'intérieur de l'organisation, même s'il y a un surplus, que d'aller à la CSST et payer deux fois et demie ou trois fois et demie le coût du salaire de l'individu en termes de primes à la CSST.

Je pense que, sur la question de la maladie, il devient plus compliqué, plus difficile... C'est là où le syndicat veut sûrement défendre les travailleurs non pas en ce qui concerne le harcèlement de la part de l'administration, en ce qui concerne... Je pense qu'il serait prêt à collaborer en créant une atmosphère de travail convenable et en créant cette atmosphère qui permette de diminuer...

Il y a une conséquence, à mon avis, directe de ces vases communicants entre la maladie, l'atmosphère et la qualité de vie au travail qui sont liées. Là-dessus, je pense que le syndicat est prêt à nous aider.

M. Côté (Charlesbourg): Si c'étaient des négociations locales sur des conditions comme celles-là, avec des paramètres sur le plan national - on se comprend bien - mais plus de souplesse sur le plan d'une négociation locale pour chacun des établissements, est-ce qu'on serait dans une situation où ce climat que vous évoquez serait plus favorable?

M. Levine: Moi, je dis oui dans le sens qu'à l'intérieur de la vie de l'organisation, de l'établissement, c'est là où ça se passe et c'est la dynamique entre les individus qui compte. Toutes les boîtes ne sont pas pareilles. Il y a des boîtes où il va y avoir une distance entre les deux et une attitude plus rigide. Il y en a d'autres où II va y avoir une beaucoup plus grande collaboration et ça peut avancer beaucoup. Moi, je pense que d'aller vers ce niveau local est une approche fort intéressante.

M. Côté (Charlesbourg): Quand on continue dans ce genre de dossier, ça peut être une conséquence directe de qu'on vient de mentionner, mais j'ai fait sortir des chiffres. Ils sont approximatifs. Je pense qu'il ne faut pas les prendre nécessairement au pied de la lettre, mais on serait dans une situation à peu près d'un paiement de 70 000 000 $ de salaires supplémentaires, de temps supplémentaire au niveau du réseau. Est-ce qu'il n'y a pas là une situation

aussi à laquelle on peut s'attaquer? Il est inévitable que si quelqu'un prend sa journée de congé, qu'il vous appelle le matin et que vous soyez dans une situation de remplacement, ça a des conséquences directes, mais ça, ça s'ajoute à tout ça. 70 000 000 $, est-ce que ça vous apparaît un dossier sur lequel on peut travailler puis avoir un certain nombre d'économies à ce niveau-là?

M. Levine: je pense que pour chaque gestionnaire d'une organisation, s'il ne travaille pas la question de la main-d'oeuvre indépendante, s'il ne travaille pas la question du temps supplémentaire utilisé, s'il a essayé de ne pas faire ce qu'on appelle la reconversion des heures sur la liste de rappel pour créer des emplois, où vous avez cinq descriptions de tâches regroupées ensemble, on ne gère pas bien nos organisations. c'est sûrement un élément qui doit être regardé. il est quand même compliqué, sept jours par semaine, 24 heures sur 24 et, des fois, le samedi soir, de minuit à 8 heures, quand il y a trois personnes qui ne sont pas là... on demande à des gens s'ils sont prêts à travailler ces huit heures de plus à temps et demi et on est heureux quand ils acceptent. souvent, ils n'acceptent pas et ça, ça nous pose des fois des dilemmes. mais oui, c'est un dossier qu'il faut travailler absolument.

M. Côté (Charlesbourg): Comme je parle à des cadres supérieurs, le taux d'encadrement, mol, j'entends ça, là... Quand je me promène, que je discute avec des salariés dans les établissements, on nous parle d'un taux d'encadrement qui est élevé. Je sais que les statistiques mêmes du ministère nous disent qu'au cours des dernières années il y a eu une légère diminution du taux d'encadrement. Mais on entend ça - et vous n'êtes pas sans fe savoir aussi - très très souvent de la part des travailleurs que les cadres... Commencez donc par couper chez les cadres. Quand tu fermes quelque part, c'est toujours l'infirmière auxiliaire, pour prendre cet exemple-là, qui, elle, va être coupée, alors que les cadres ne sont jamais coupés, eux autres. Est-ce qu'on est dans une situation avec un taux d'encadrement où il y a aussi de l'espace ou de la marge de manoeuvre?

M. Levine: Je peux parler beaucoup plus facilement du réseau hospitalier. Je vais peut-être demander à mes collègues de regarder dans leur réseau respectif la tendance de la gestion aujourd'hui où on parle de la qualité totale. C'est d'éliminer les paliers intermédiaires de décision et, à la place d'avoir cinq paliers, II y a trois paliers et on élimine les coordonnatrlces au niveau des soins pour avoir les Inflrmlères-chefs qui relèvent directement de la directrice. Ça, ça se fait et je pense que des gestionnaires du réseau hospitalier l'ont bien réalisé. Autant on est capable d'éliminer des cadres, on les élimine. Ça ne touche pas les services à la clientèle. Je pense d'ailleurs que les gens sont très conscients de ça. Il y a d'autres réseaux comme le CSS qui a peut-être un taux d'encadrement différent de celui dans le milieu hospitalier. Je ne suis pas prêt à me prononcer là-dessus. Vous pouvez poser les mêmes questions à des gens qui gèrent les CSS. Pour les centres d'accueil ou de réadaptation, je ne sais pas si Micheline...

Le Président (M. Joly): Mme Larose, s'il vous plaît.

Mme Larose (Micheline): On observe la même tendance que celle que David vient d'expliquer dans les centres de réadaptation pour jeunes, entre autres où l'on tente le plus possible d'éliminer le palier qu'on appelle Intermédiaire, si vous voulez, pour responsabiliser davantage les cadres de premier niveau que sont, dans notre cas, les chefs d'équipe. Ça ne se fait pas du jour au lendemain parce que, quand les gens sont habitués de vivre dans un système centralisé, ça prend un certain temps de formation pour que les gens de premier niveau acceptent et accèdent de façon efficace à la prise de décision sans trop se sentir insécures. Mais c'est certain que c'est la tendance du réseau, à mon point de vue, et que c'est vers ça qu'il faut continuer d'aller.

M. Lessard: M. le Président.

Le Président (M. Joly): M. Lessard, brièvement, s'il vous plaît.

M. Lessard: M. le ministre, j'ajouterais ceci. Je n'aime pas, moi, parler comme ça, à savoir: II paraît que le taux d'encadrement est très fort. C'est certain qu'on dit: Jamais dans notre cour. Mais je regarde chez nous, en tout cas, dans notre secteur, notre taux d'encadrement est très, très minime. C'est certain qu'il faudrait regarder ailleurs, par exemple. Je pense que ce dossier-là, il faut qu'il se regarde secteur par secteur. Est-ce que le taux d'encadrement des CRSSS est plus fort? Je ne pourrai pas répondre, je ne suis pas sûr non plus. Mais je voudrais, par exemple, avant de parler d'un taux d'encadrement global...

M. Côté (Charlesbourg): Vous nous donnez des pistes, là, je comprends.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lessard: II faudrait qu'on regarde secteur par secteur. C'est certain que le taux d'encadrement dans certaines structures bureaucratiques peut être assez élevé. Mais je poserais la question aux personnes et je le regarderais, par exemple.

M. Côté (Charlesbourg): Comme je m'adresse...

M. Lessard: Quand vous me dites ça comme ça, vous me lancez ça comme ça, je ne peux pas vous répondre parce que je n'ai pas de chiffres.

M. Côté (Charlesbourg): Comme je m'adresse à quelqu'un qui a toujours le sens politique assez aigu, ça ne se sort pas de son homme, ça!

M. Lessard: Je ne suis pas sûr encore, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Ah oui. Ça ne se sort pas de son homme. Évidemment, est-ce que je comprends que vous suivez la même logique que l'employé qui dit que l'encadrement est toujours au-dessus de nous autres?

M. Lessard: Non, non.

M. Côté (Charlesbourg): C'est un peu la logique que vous me donnez, je veux dire. La première piste, vous me dites, le CRSSS. Allez donc voir au CRSSS; c'est ceux qui vous encadrent.

M. Lessard: Je pense que... Non, non. Ce que je veux illustrer, M. le ministre, je pense que, pour discuter d'un dossier comme celui-là, il faut le regarder secteur par secteur. On ne peut pas lancer un chiffre comme ça, que nous n'avons pas d'ailleurs. Mais lancer un chiffre comme ça sans nous regarder... Ça fait plusieurs fois que j'entends dire ça, un taux d'encadrement très fort. Or, je n'ai jamais reçu de chiffres de la part du ministère qui me prouvent que nous avons un taux d'encadrement très fort. Moi, je pourrais vous donner des exemples précis chez nous où nous avons un taux d'encadrement très, très faible, en tout cas, au niveau de nos établissements.

Le Président (M. Joly): Parfait. Merci. On pourra revenir sur le temps de l'autre formation parce que vous savez comment ça fonctionne. Je vais reconnaître M. le député de Matapédia, s'il vous plaît.

M. Paradis (Matapédia): Oui, une seule question. M. Levine, vous avez parlé de meilleure efficacité, de meilleure efficience et avec le défi de le faire avec l'argent qu'on a. Puisque vous représentez la continuité des services... Bon, ça peut être un CLSC ou un centre hospitalier. En tout cas, on se sert des CLSC. Comment vous faites ça?

M. Levine: Dans la continuité, dans l'intégration entre les différents secteurs?

M. Paradis (Matapédia): Pour la continuité du service à donner au patient, à notre client. Parce que mol, je me bute toujours à quelque chose. J'avais assisté au forum des aînés à Montréal et j'avais été ébahi d'entendre que lorsqu'un patient sort d'un hôpital, lui, il n'a plus de responsabilité. On le met sur le trottoir et, si le patient a besoin d'un service de soins à domicile, il faut qu'il appelle lui-même au CLSC pour dire: Bien là, je viens de me faire mettre sur le trottoir. Y a t-il quelqu'un quelque part qui va venir me donner un service? Comment va t-on faire ça cette interrelation d'établissements, cette complémentarité de services avec le défi que vous nous dites? On a assez d'argent pour le faire? Expliquez-moi ça.

M. Levine: La question que vous demandez, c'était la question de la loi 120, c'était la question d'un des objectifs de correction soulignés par la commission Rochon et soulignés par de multiples intervenants. Mme Lavoie-Roux a suggéré un conseil d'administration par CLSC qui regroupe un hôpital, un CLSC, des centres d'accueil; tout le monde sous le même chapeau. Énorme résistance de réseaux, regroupement d'établissements par regroupement d'établissements, pour finalement arriver à un regroupement d'efficience ou d'efficacité des centres d'accueil et qui laisse tous les autres réseaux complètement indépendants. Là, on dit: Ah! Responsabilité de la Régie. C'est eux autres maintenant qui vont être capables par le POS, par le plan d'organisation de soins, de coordonner les activités, doigts croisés, pour espérer que ça va arriver.

M. Côté (Charlesbourg): Toujours en disant que les missions sont un peu plus claires dans la loi pour chacun des établissements. (11 h 45)

M. Levine: La mission est claire, mais la clarification de la mission, quand on a dit: Oui, II est important de clarifier, mais cela amplifie le problème de cloisonnement et ne le réglera pas. Et ça, c'est quelque chose à regarder. Je pense que la Régie, s'il y a cette bonne coordination, peut créer des programmes et si on va vers une gestion par programme, tel qu'il a été suggéré, et un financement par programme, tel qu'il a été prôné, on va y arriver parce qu'à ce moment-là, quelqu'un qui n'est pas chez moi, sans qu'il soit branché avec les soins à domicile, sans que le CLSC ne soit pas impliqué puis que ce soit une personne âgée, sans que le réseau de centre d'accueil n'ait pas été averti...

Le Président (M. Joly): Merci, M. Levine. On pourra élaborer davantage. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci beaucoup. Le temps file très rapidement. Vous n'étiez pas nécessairement là pour reconnaître, oui, aussi... Puis ce n'est

pas parce que vous êtes là que je le dis. Je vais vous relire le seul paragraphe, le bon paragraphe qui vous concernait dans mon discours d'ouverture. Alors, ça ne fait pas partie de la flatterie. «D'aucuns ont dénoncé la bureaucratisation du réseau de la santé et des services sociaux, les technocrates étant la source de tous nos malheurs. Il faut se garder de jugements aussi lapidaires, car gérer un système engloutissant 12 000 000 000 $ n'est pas facile et nécessite des ressources abondantes. Si le réseau a réussi à bien contrôler ses coûts, c'est en grande partie grâce à la vigueur et à la qualité de nos gestionnaires.»

Je ne sais pas si vous allez vous rendre à General Motors, mais effectivement je pense que, globalement, puisque j'ai dit que, pour ma part, au départ, il y avait un certain nombre, dans les mérites du document... il y a beaucoup de démérite, mais il y a des mérites aussi. Un des mérites, c'est d'abattre un bon nombre de mythes et de faussetés quant à notre réseau de santé et de services sociaux, et un des mythes, c'était que ça s'en allait tout chez le diable, ce régime-là, que c'était géré... On entend ça aussi: Ah! C'est géré... C'est quasiment... Vous autres, vous n'avez rien à faire, c'est incroyable! Il faut replacer, et le document replace cela aussi. Nos gestionnaires d'établissements sont de bons gestionnaires parce que, par le résultat, on fait bien notre affaire; on gère bien nos choses, grosso modo.

Premièrement, maintenant, je pense que vous portez, quant à moi - et je ne peux pas vous en demander beaucoup beaucoup plus au niveau du discours. Je le sais. Mol, Je suis en politique; vous autres, vous êtes en gestion. Vous le dites au départ: L'impasse de notre système de santé et des services sociaux est essentiellement due au désengagement du gouvernement fédéral. J'oserais même dire: L'espèce de chicane de famille qu'on a au Québec entre les gestionnaires, les usagers, les associations, ceux qui veulent taxer, ceux qui ne veulent pas taxer: Est-ce qu'on finance ou on ne finance pas... Il nous manque Ici, autour de la table, le témoin qui est venu semer le diable dans la cabane, qui est venu mettre le feu à la cabane. On n'est pas obligé - j'aime votre raisonnement, je vous le dis - de mettre le feu au complet au système parce qu'il y en a un qui ne fait pas sa job, mais on peut faire davantage. alors, c'est pour ça que je dis que je sais que, comme gestionnaire, je ne peux quand même pas vous demander de faire une autre profession d'un cran plus haut. tout le monde a compris votre discours là-dessus, et ça fait pas mal de monde qui passe à la table ici et qui nous répète ce message-là; c'est très clair. c'est à se demander, en conclusion, comme élément de commentaire là-dessus, si, avant la fin de cette commission, il ne faudrait pas demander au gouvernement fédéral d'être là, parce que c'est lui le responsable. Qu'il vienne donc se présenter puis qu'il vienne donc nous le dire que, dans notre responsabilité à nous autres, au Québec, c'est lui qui met la responsabilité. Alors, s'il a la capacité de relever le défi, qu'il vienne nous le dire à cette même table de famille, au Québec, en matière de santé et de services sociaux.

Ma question est la suivante, M. Levine, pour les gestionnaires de notre système de santé et de services sociaux: Quand on prend la piste, les nombreuses et excellentes pistes, je pense, que vous nous suggérez, est-ce que c'est suffisant pour sauver les dimensions essentielles de notre système de santé et de services sociaux au Québec? On va les regarder par après, mais cette question: Est-ce que c'est suffisant, ces mesures, à votre avis, ce que vous vivez là, pour sauver le système?

M. Levine: Si je veux être très honnête, M. Trudel, à ce sujet-là, je ne peux pas vous répondre. Je sais que mes collègues et plusieurs disent: Fais l'effort, fais l'effort, mais il va nous en manquer encore. Mais on ne chiffre pas l'effort, on ne donne pas des objectifs d'atteinte dans l'effort et on n'a pas parlé, à un moment donné, de ce qu'on offre réellement à nos citoyens. Est-ce qu'on peut regarder ce qu'on offre? Si quelqu'un arrive, après étude, et dit: Écoute, 30 % de tous les examens qu'on fait, on peut les éliminer... Wow! Ça se peut que oui, on réponde à ça. Mais, avant de dire ça, il faut qu'on analyse combien de ces examens sont positifs ou négatifs. Si juste 2 % de tous les examens qu'on donne sont positifs, ça veut dire que 98 % disent que tout est correct. Peut-être qu'on pourra avoir évité ces examens au départ. Je n'ai pas les données. Alors, pour vous répondre, ce serait malhonnête, en ce moment, de ma part.

M. Trudel: Très bien. C'est ce qui transperce de votre discours et de votre profession. Il y a M. Lessard qui veut...

Le Président (M. Joly): M. Lessard.

M. Lessard: M. le Président, j'ajouterais ceci, je pense, qui est un problème fondamental actuellement dans le secteur de la santé. J'ai l'impression, des fois, qu'on parle toujours à l'envers du système. Là, on parle de financement, on a parlé de la loi 120 et on nous dit, dans le document du ministère: La politique de santé viendra après. Bien, comment voulez-vous qu'on en arrive à des résultats de santé et qu'on en arrive à des décisions logiques dans ce secteur-là si on ne s'est pas établi des critères de mesure, si on ne s'est pas établi une politique de santé? C'est ça et c'est pour ça que, depuis le début de cette commission parlementaire, chacun des groupes vient demander de plus en plus d'argent, de plus en plus d'argent.

Je termine en disant un peu ceci. Ça me faisait penser, ce matin, à une phrase de Saint-Exupéry qui dit: Fais construire une tour à ton peuple et il deviendra frère, ils deviendront frères. Donne-leur du grain et ils s'entretueront. Des fois, j'ai cette impression-là, moi. C'est qu'ils viennent... encore plus d'argent, encore plus d'argent. J'ai l'impression qu'il faudrait peut-être se poser la question: Avec plus d'argent, c'est quoi qu'on va faire? C'est quoi les objectifs qu'on vise dans le secteur de la santé? Est-ce que c'est de rendre le monde de plus en plus malade? Si c'est de rendre le monde de plus en plus malade, envoyons tous les budgets dans le recouvrement de la santé et dans les hôpitaux, qui ont vu leur budget doubler depuis 10 ans avec 53 % du budget du Québec, de telle façon que, dans 10 autres années, ça sera un budget de 14 000 000 000 $ probablement, au lieu d'être un budget de 7 000 000 000 $ actuellement. Mais les objectifs de santé ne sont pas définis. Il faudrait qu'on les définisse, et là je lance la serviette au ministre.

M. Trudel: Ça m'évite une question, votre complément de réponse.

M. Côté (Charlesbourg): II est là, l'argent, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Effectivement, on procède à l'envers et comment le faire? Le leadership de l'État que vous réclamez du gouvernement, le premier élément de cela, c'est évidemment une politique de santé et de bien-être. Qu'est-ce qu'on privilégie et qu'est-ce qu'on priorise? Est-ce qu'on priorise d'aller travailler parce que ça empêche d'être malade? Est-ce qu'on priorise la prévention et on va aller mettre le fric là? Actuellement, il y a autant de bonnes versions de «où mettre le fric» qu'il y a d'intervenants, qu'il y a de tensions dans le système, et on n'est pas sortis du constat de Rochon pantoute, pas une seconde. C'est «check and balance», là, et puis au plus fort. Il semble qu'on soit encore dans ce mode d'intervention.

M. Lessard: Le corporatif est plus fort qu'il l'était avant.

M. Trudel: On n'a pas changé depuis quelques jours là-dessus et il semble tout le temps... Ça me permet de me rattacher à votre mémoire. Et la conclusion de ça, c'est que c'est toujours l'usager qui va payer plus. Ça, ça semble être rendu là. C'est toujours la classe moyenne, c'est toujours l'usager, c'est toujours les citoyens. On va leur en mettre plus sur le dos encore, de nouvelles taxes, parce qu'on n'a pas fait ces priorités-là.

Allons vers un autre chapitre maintenant, à l'interne du système, parce que je pense que je partage, quant à moi, cette vision des choses. On peut probablement en faire un bon bout avant de frapper le mur de briques. On va le frapper de toute façon; ça, c'est certain. Si le gouvernement fédéral ne fait pas sa job et se défile encore, on ne pourra pas y arriver. Mais même le ministre, le ministère disait hier: Au-delà des 3 % de dépenses supplémentaires qu'on doit faire, au-delà des 3 % plus l'indice des prix à la consommation que pourrait - parce qu'on ne sait pas le choix du gouvernement encore - investir l'État, il y a au moins 1,2 % à comprimer. C'est 140 000 000 $ par année. Ça, ça s'ajoute à nos 200 000 000 $. C'est ce qu'on disait hier. Ça s'ajoute à nos 200 000 000 $.

Travaillons là-dessus un peu et allons jusqu'au bout d'un certain raisonnement ou d'une suggestion faite par l'Association des hôpitaux du Québec hier, et vous en avez parlé un peu aujourd'hui, tout ce qu'on appelle la médecine d'un jour, la chirurgie d'un jour. Vous dites: II faut que tout cela finisse par se transformer en des économies véritables, n'est-ce pas? Parce que, explorant cette voie-là avec l'AHQ, hier, on disait: C'est un service qui coûte beaucoup moins cher et qui nous empêche théoriquement de faire occuper un lit de courte durée - théoriquement, je dis bien - par quelqu'un parce qu'on le fait à l'externe. On le fait venir une journée, on lui fait l'opération et on le renvoie chez lui.

Comment peut-on en arriver avec cette piste-là à vraiment dire qu'on serait plus efficients et qu'il y aurait, au total, au bas de la ligne, moins d'argent de dépensé pour rendre ce service-là? Voulez-vous nous la faire, la séquence, et aller jusqu'au bout, s'il vous plaît?

M. Levine: La réponse à donner à cette question est d'assurer que les établissements réussissent à réduire le séjour moyen, cas par cas, qui maintient les taux d'occupation dans leurs établissements à 92 % ou 93 %, ce qui va générer une capacité, disons, de 500 lits nouveaux dans le réseau. Pour avoir de l'argent, là, il faut trouver un endroit où on ferme 500 lits, on ramasse les 100 000 000 $ que ça donne. On prend 20 000 000 $ ou 25 000 000 $ de ces 100 000 000 $ pour payer les soins à domicile, les médicaments de plus, les interventions chirurgicales de plus aux hôpitaux qui ont augmenté leur nombre d'admissions en réduisant les séjours moyens, et on aura 75 000 000 $ dans notre poche, année après année, dans cet exercice. Le courage politique que ça implique, peu importe le gouvernement, de fermer une institution de 500 lits quelque part est... Je n'ai pas besoin de le souligner.

M. Trudel: Merci pour la réponse et la clarté de la réponse parce qu'il faut aussi que, quand on préconise des mesures comme celles-là, on donne le raisonnement au complet, c'est-à-

dire que les services moins coûteux, quant à la façon de les rendre, impliquent qu'il y a des modifications à ce que nous faisons actuellement. Ce n'est pas tout de dire: La personne qui occupe un lit de courte durée, je rendrai le service à l'externe avec une même efficacité et une même qualité, en se disant que, par ailleurs, le lit de courte durée, il sera tout simplement occupé par d'autres. Là, on n'a pas gagné un rond. Alors, le bout du raisonnement, c'est de dire: Ça correspond, cependant, tout cela à une baisse réelle du nombre de lits de courte durée, en ayant fait la démonstration très claire qu'on serait capable de rendre le service avec une qualité égale d'une autre façon, remplacé par un autre mode d'intervention. Il faut être très clair là-dessus. Ça correspond à des fermetures de lits de courte durée.

M. Levine: Si je peux juste rajouter là-dessus, sur la question, il faut, dans ce sens-là, avant de fermer ces 500 lits, regarder les lits qu'on est en train de construire et poser la question: Est-ce qu'on devrait construire ces lits-là? Parce que si on dit: II y a un potentiel de réduction, II y a un potentiel d'augmenter le volume qu'on est capable de supporter dans le réseau actuel... Repose la question sur les lits et, si ce n'est pas réellement dans une région éloignée qui n'a pas l'accessibilité aux services, regarde ça de près, n'investis pas de l'argent neuf avec des budgets d'opération récurrents. C'est beaucoup plus facile de couper quelque chose qui existe déjà.

Le Président (M. Joly): M. Lessard.

M. Lessard: M. Trudel, simplement pour répondre en politicien, c'est certain qu'obtenir du ministre la construction d'un hôpital de 300 lits dans notre comté, c'est payant politiquement. Mais ce n'est pas payant de se battre pour réduire les lits, par exemple, dans notre... Alors, c'est certain que ça demande beaucoup de courage politique.

M. Côté (Charlesbourg): Surtout réduire les lits là où il y en a de trop!

Une voix: C'est ça, M. le ministre!

M. Trudel: oui, ça, là-dessus, ça fait partie... on se posait des questions là-dessus hier. Je ne peux pas reprendre ça. Je vais manger mon propre temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Mais je ne peux pas m'empêcher de dire que... Mais c'est encore tout de la faute du gouvernement fédéral qui a mis le feu dans la cabane, puis on doit se chicaner entre nous autres, parce que c'est eux autres qui ont mis le feu dans la cabane. Merci beaucoup. Mon message est passé. C'est celui-là. (12 heures)

Le Président (M. Joly): Je vous rappelle, M. le député, qu'il vous reste 4 minutes et 30 secondes.

M. Trudel: Très bien. L'autre élément... Je peux y aller... Il faut que j'y aille en général, vous requestionner autour de la pratique médicale, le mode de rémunération et aussi la question de l'attribution ou de la délégation des actes, sujet brûlant s'il en est un, n'est-ce pas? Ué à cela, je pense qu'on ne peut pas ignorer - quant à moi, je le porte de façon lapidaire - le jugement suivant: la désastreuse expérience de la loi 120 eu égard à la profession médicale et aux autres corps dans le domaine de la santé et des services sociaux, et des citoyens en général.

Bref, il s'est développé - ça s'est répété ici de façon majeure - une désolidarisation profonde au Québec, avec nos professionnels de la santé que sont les médecins. Comment on essaierait de se conter des histoires, moi, je ne cherche pas, pour l'instant, les coupables, mais je dis: II s'est Installé, au Québec, une désolidarisation. Je pourrais employer des mots encore plus forts que ça. Vous autres, vous dites que ça vaudrait aussi la peine de se requestionner sur l'attribution.

Là, il y a des exemples que les DSC nous ont donnés hier, qui sont extraordinaires, et je fais juste les citer. Par exemple, le chef de département pourrait instaurer des règles cliniques et des revues hebdomadaires de dossiers qui diminueraient de 64 % la prescription des textes diagnostiques, selon des études. Je donne ça à titre d'exemple. Vous en avez donné tantôt. Est-ce que vous pensez que nous avons les conditions nécessaires au Québec, actuellement, pour opérer ce virage que vous suggérez dans les pistes à examiner? Sinon, quelles seraient les conditions à mettre en place pour effectuer ce qui m'apparaît, comme vous, pour l'instant, être un virage nécessaire?

M. Levine:pour répondre à cette question, moi, je pense que le corps médical du québec est très conscient du problème. il ne se sent pas dégagé du problème, mais vraiment en plein milieu. je pense que les recommandations qui ont été faites par la fmsq et la fmoq sur la création du conseil médical, sur la création des structures régionales, indiquent la nécessité d'avoir ce regroupement des médecins dits sages pour regarder ces questions. évidemment, la corporation doit être très impliquée là-dedans, même pour admettre qu'ils mettent pour les fédérations un peu quelque chose autour du cou. il ne devient pas l'unique porte-parole. il devient un nouveau type de structure qui est capable d'arriver et dire: dans tel protocole, c'est telle chose et, dans tel autre protocole, c'est telle

chose, comme le groupe d'évaluation sur la haute technologie, actuellement. Quand il se prononce et dit: Le lavage des filtres, c'est correct, on peut laver des filtres, ne vous inquiétez pas sur le formaldehyde, bien, ça, ça vaut 10 OQQ 000 $, cette phrase-là. Ça nous permet, comme établissement, de le faire parce qu'avant de se prononcer là-dessus j'avais tout un ensemble de cas dialyses chez moi qui refusaient qu'on lave leur filtre. Alors, ce type de structure est nécessaire pour nous aider à guider l'avenir du Québec en matière de médecine et je pense qu'on est en train de créer les embryons de ces structures. Je pense, actuellement, qu'il y a une collaboration à ce sujet-là. Tout le monde est maintenant conscient de ça.

Le Président (M. Joly): En conclusion, s'il vous plaît, M. le député.

M. Lessard: J'ajouterais ceci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): M. Lessard, s'il vous plaît.

M. Lessard: J'ajouterais ceci, M. Trudel. Je pense que c'est certain qu'il y a eu du remue-ménage. C'est normal, quand on fait une réforme comme celle-là, ça dérange des gens. De notre côté aussi, comme directeurs généraux, ça a dérangé les établissements, etc. Il y a eu du remue-ménage et c'était nécessaire. Je ne donnerai pas mon opinion concernant un peu le dossier des médecins vis-à-vis du ministère, vis-à-vis du gouvernement, etc., mais cependant je reviens encore sur le fait que, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas des objectifs de santé partagés par l'ensemble des acteurs du réseau, on n'en arrivera pas à construire une tour ensemble. Le jour où on se partagera des objectifs de santé, le jour où on dira, comme on l'a fait, d'ailleurs, en périnatalité, comme on l'a fait au niveau de la vaccination, que chacun des acteurs va devoir s'intégrer à l'intérieur de ça, puisque ce sera partagé par l'ensemble des acteurs, y compris la population...

Le Président (M. Joly): Merci, M. Lessard.

M. Trudel: Alors, compte tenu du peu de temps qu'il nous reste, je vais vous remercier. Il y aurait eu beaucoup d'autres choses sur lesquelles nous aurions pu échanger. Je pense qu'on pourrait boucler la boucle en disant: Le titre de votre mémoire, «Avant d'Investir davantage», ça aurait pu être aussi: Avant d'en charger plus ou avant de couper des services. Moi, je pense qu'il faut prendre cette piste-là. On peut continuer pour un bout de temps. On n'a pas besoin de couper les yeux, les dents et un certain nombre de services assurés, pas avant qu'on ait fait le tour complet de ce que nous pouvons faire de mieux dans notre réseau. Vous êtes, à cet égard-là, des partenaires importants. Merci.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

M. Atkinson: M. le Président, ma question est très brève. Mesdames et messieurs, à la page 24, vous faites allusion à la délégation de certains actes médicaux à d'autres professionnels de la santé. Ma question est la suivante: Quelle est votre position vis-à-vis de la sage-femme et vis-à-vis de l'infirmière clinicienne? La sage-femme, en premier.

M. Levine: Je pense qu'on a déjà souligné, de la part des gestionnaires, un appui à ce sujet. On a cité ce qu'en Ontario le gouvernement NDP vient de faire en acceptant cette législation. Et les efforts au Québec, on commence très bientôt un projet-pilote à ce sujet. Il y a d'autres projets-pilotes qui sont en vue d'être implantés.

En ce qui concerne l'infirmière clinicienne, elles deviennent de plus en plus importantes. Regardez simplement nos infirmières de triage qui sont dans nos urgences et le niveau d'implication qu'elles ont. Elles travaillent avec des protocoles qui sont déterminés conjointement avec le corps médical. Je pense qu'il y a un rôle à jouer quand II est regardé de près. SI tu regardes l'association des médecins de l'Ontario, elle appuie la législation; il n'y a pas une grande remontée à ce moment-là. J'ai l'impression, une fois que c'est très clairement discuté, que tout le monde voit clairement le rôle de chacun. Ouf, il y a un terrain de compromis fort intéressant là-dessus.

M. Atkinson: Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci beaucoup. J'ai l'impression qu'il nous reste encore passablement de travail à faire, mais des pistes s'ouvrent pour nous faire voir le bout du tunnel, en espérant qu'elles seront suffisamment productives pour éviter ce que les policitiens redoutent toujours: de poser des gestes qui, politiquement, ne sont pas payants.

M. Levine: Merci beaucoup, M. le ministre.

Le Président (M. Joly): Merci, au nom des membres de cette commission, à vous, M. Levine, et à votre groupe. Merci d'avoir été parmi nous.

Alors, je demanderais à l'Association des cadres intermédiaires des affaires sociales de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. S'il vous plaît, ceux qui ont terminé, veuillez libérer la salle. Merci de la coopération. Est-ce qu'on

peut fermer la porte à l'arrière, s'il vous plaît? Alors, bonjour, M. Cloutfer.

M. Cloutler (Réal): Bonjour.

Le Président (M. Joly): Bonjour. J'apprécierais si vous pouviez nous introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Association des cadres intermédiaires des affaires sociales

M. Cloutler: M. le Président, mon nom est Réal Cloutler. Je suis président de l'Association des cadres intermédiaires des affaires sociales. Je travaille au centre de réadaptation Le Phare à Québec. J'aimerais vous présenter mes collègues. À ma gauche, le vice-président provincial de l'Association, M. Jean-Yves Ruault, qui représente la région de Montréal au niveau de l'Association; il est cadre au centre hospitalier Côte-des-Neiges à Montréal. Mme Claude Chattier, présidente de la région 3 des cadres Intermédiaires; elle travaille comme cadre à l'Hôpital du Saint-Sacrement à Québec. À ma droite, notre nouveau responsable aux communications, M. Paul Gagnon.

Le Président (M. Joly): Merci. Vous avez une vingtaine de minutes, M. Cloutier, pour présenter votre mémoire.

M. Cloutier: Dans un premier temps, je voudrais remercier M. le ministre Marc-Yvan Côté, pour avoir initié cette consultation. De plus, nous tenons à mentionner notre reconnaissance pour le travail effectué par l'équipe qui a collaboré à l'élaboration du document de consultation mis à notre disposition. Sa formulation peut laisser transparaître un certain dirigisme. Cependant, il n'en demeure pas moins une base de référence et de discussion appréciable.

L'Association a vu le jour le 19 juin 1970 sous le nom de l'Association du personnel cadre intermédiaire du milieu hospitalier du Québec. Elle compte alors 25 membres. Elle réclame un régime de retraite, un régime collectif d'assurance et une formule pour venir en aide à ses membres victimes de congédiement.

En 1974, elle prend son nom actuel, Association des cadres Intermédiaires des affaires sociales, ACIAS. Sa mission est simple: représenter ses membres dignement et de façon responsable; dans un esprit de justice, promouvoir et défendre fermement leurs intérêts; en tout temps, les tenir informés et, naturellement, gérer sagement les biens de l'Association pour assurer la survie et l'efficacité de son action.

La fin des années soixante-dix et le début des années quatre-vingt ont permis de développer une structure permanente apte à répondre aux besoins engendrés par une forte croissance de membership. Aujourd'hui, 20 ans après sa fondation, avec au-delà de 7000 membres, l'ACIAS est devenue la plus importante association de personnel d'encadrement au Québec.

Notre présence aujourd'hui à cette commission a deux buts bien précis. Premièrement, faire reconnaître notre association et les membres qui la composent comme partenaires à part entière du réseau de la santé et des services sociaux et, de ce fait, corriger les iniquités à leur égard qui perdurent depuis des années. Deuxièmement, contribuer, par une approche réaliste et positive, à la recherche de solutions efficientes au problème de financement du réseau de la santé et des services sociaux.

D'un point de vue pragmatique, que ce soit dans le cours normal des opérations ou lors de situations de crise, suite au débrayage des employés syndiqués, nos membres demeurent les personnes-ressources indispensables assurant la continuité des opérations. Nous avons pris connaissance du document «Un financement équitable à la mesure de nos moyens». D'entrée de jeu, il nous faut souligner que le chapitre III traitant des orientations, mesures et options a fait l'objet d'une attention particulière de notre part.

Quatre grandes orientations apparaissent s'imposer à la lecture de ce chapitre: 1e les dépenses; 2° les contrôles; 3° l'allocation et l'utilisation des ressources; 4° le financement.

Parlons, dans un premier temps, des dépenses. Le ministère de la Santé et des Services sociaux entend faire porter ses efforts sur les principales variables stratégiques du contrôle des dépenses et dont la première concerne l'amélioration du contrôle des salaires et de la rémunération. J'ai été très heureux de vous lire, car nous sommes dans l'attente depuis cinq ans du règlement de ce célèbre dossier.

À notre avis, les choix stratégiques du ministère devront tenir compte au préalable des iniquités et des correctifs à apporter au système de rémunération des cadres. De plus, la question des mises à jour, de la classification et de l'évaluation des fonctions types du réseau reste à ce jour un dossier non réglé et en suspens, sans motif valable depuis plusieurs années. Plusieurs postes, compte tenu des délais occasionnés par l'ajustement de leur classification, subissent les effets d'une politique discriminatoire, tel que, par exemple, le personnel cadre Infirmier composé en majorité de personnes de sexe féminin. Bien plus, aucune disposition concernant l'indexation de la rémunération au coût de la vie n'est prévue dans la réglementation sur la rémunération des cadres. C'est pourquoi nous vous soumettons qu'aucune mesure de contrôle des salaires et de la rémunération du personnel cadre ne pourrait être mise en place sans qu'une révision des classifications et des fonctions types des cadres intermédiaires ne soit effectuée de façon à rendre équitable sa rémunération et ce, compte tenu des responsabilités que nous assumons dans le réseau.

Deuxièmement, parlons des contrôles. Les cadres intermédiaires sont plutôt considérés actuellement comme des outils de transmission sur lesquels on peut compter même en situation de crise. Ils sont de plus les personnes-ressources tampons à qui les usagers adressent leurs récriminations lorsque insatisfaits. Pourtant, à quelques cas d'exception près, ils ne sont pas consultés ni impliqués comme partenaires à la planification et à la gestion pour la bonification de l'efficacité et de la rentabilité du système de santé et des services sociaux. (12 h 15)

En conséquence, nous croyons que les penseurs du ministère de la Santé et des Services sociaux auraient tout avantage à réfléchir sur un mode de gestion participative où les compétences, le talent, les connaissances pratiques du milieu pourraient être mises à contribution. À titre d'exemple, je cite: «La moyenne du nombre d'années d'expérience de nos membres à un poste de cadre est de 11,8 années et de 18 années de service dans le réseau. De plus, trois cadres sur quatre de notre association sont détenteurs d'un diplôme universitaire, dont plusieurs de maîtrise.» Ceci dit, nos membres partagent votre volonté d'améliorer le réseau.

Troisièmement, l'allocation et l'utilisation des ressources. Le chapitre III, section 3, visant à apporter les correctifs nécessaires afin de répondre efficacement au problème des ressources disponibles, nous est apparu comme un baume sur les plaies que nous cause la section détermination des dépenses. On y oppose le direct à l'indirect, le qualitatif au quantitatif mais, finalement, on a l'air de remuer beaucoup d'air pour pas grand-chose. En pratique, nous aurions aimé connaître la pertinence de ces mesures.

Néanmoins, il faut relever que c'est dans cette section qu'on propose de canaliser la consultation envers les CLSC et les cabinets privés au moyen notamment d'un ticket orienteur. En tant qu'association de cadres, nous croyons qu'un tel principe démontre une méconnaissance inquiétante de la réalité des CLSC. La réalité actuelle, depuis l'annonce de la réforme Côté, confronte ces derniers à une forte croissance de demande de services. Cependant, aucune mesure quant à l'affectation des ressources humaines et financières n'a été mise en place par le ministère.

Quatrièmement, le financement. Peu importe l'option de financement retenue, il est un principe de société auquel nous tenons. Ce principe est que les personnes à faibles revenus et les personnes les plus démunies doivent être protégées. Cependant, la question de rétablir un lien transparent et systématique entre les dépenses globales et les contributions globales des particuliers nous est apparue des plus pertinentes et mérite, de ce fait, notre entière approbation. Il est plus que temps que le consommateur sache combien coûtent les services sociaux et de santé, ce qui lui permettra de mieux juger des implications des services qu'on dit «gratuits». Cette campagne de sensibilisation visant à démontrer que la santé coûte cher nous semble un pas dans la bonne direction.

Parmi les diverses options proposées par le ministre, nous rejetons celle de l'assignation d'une majoration de la taxe de vente du Québec et celle de l'impôt-services pour des questions de gérance et de partage équitable de la charge fiscale. Cependant, nous appuyons la tarification des services pharmaceutiques et l'option d'une désassurance des services optométriques et des services dentaires curatifs, si ces mesures sont associées à un crédit d'impôt ou à toute autre mesure remboursable en accord avec le principe énoncé.

De plus, deux mesures, qui ne sont ni l'une ni l'autre sans faille dans une approche globale du problème de l'utilisation des soins de santé et des services sociaux et de leur financement, nous apparaissent intéressantes en soi, selon l'objectif qui dit primer à court, moyen et long terme. Premièrement, le ticket modérateur; le deuxième, l'impôt-santé.

Dans l'éventualité où les contraintes imposées par la loi fédérale C-3 étaient levées, nous recommandons l'option d'un ticket modérateur. Quant à l'argument voulant que cette contribution entraînerait une réduction de la consommation des services, nous sommes persuadés que cette réduction, le cas échéant, ferait uniquement la part des choses et permettrait de distinguer les vrais malades des hypocondriaques légers. Par ailleurs, les avantages d'un ticket modérateur, tels que présentés par le ministère, nous apparaissent assez éloquents en eux-mêmes. Notre seule réserve tient surtout à sa perception. Qui déterminera le mécanisme d'implantation et de gestion et à quel coût humain et financier?

Deuxièmement, l'impôt-santé. L'impôt-santé nous apparaît être une solution à court terme pour régler le manque à gagner du réseau de la santé et des services sociaux. Nous considérons cependant que, pour appuyer une telle mesure, elle devrait être assortie d'un mécanisme d'information, dans un premier temps, et de contrôle de l'utilisation des soins afin d'être efficiente et non discriminatoire à l'égard de l'ensemble des payeurs de taxes.

Nous croyons que seule une combinaison de saine utilisation et de saine gestion permettra à l'ensemble de la population qui bénéficie des soins et à l'ensemble des payeurs de taxes qui en assument les frais de trouver l'équilibre pour le mieux-être de tous et chacun et pour celui de nos générations futures.

En conclusion, notre Association, qui représente la majorité des cadres intermédiaires qui oeuvrent dans tous les établissements de santé et de services sociaux, souhaite que le ministre de la Santé et des Services sociaux et les membres de la commission mettent à profit

l'avis que nous leur soumettons. Par contre, il est clair que nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir afin que nos membres ne soient pas victimes de mesures qui pourraient devenir coercitlves. La nature des défis engendrés par la réforme commande que toutes les compétences et l'expérience de nos membres soient mises à contribution en fonction des objectifs poursuivis par le législateur pour le mieux-être des usagers, de ceux qui oeuvrent dans le réseau de la santé et des services sociaux et de ceux qui en assument les coûts. M. le ministre, mesdames et messieurs, merci.

Le Président (M. Joly): M. Cloutler, je vous remercie. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je suis très heureux qu'on puisse échanger avec des cadres qui sont à chaque jour près du terrain. Je pense que vous l'avez très très bien mentionné à ce moment-ci, chaque niveau de cadre a son mérite, ses vertus et ses défauts, et je pense que, dans ce cas-ci, vous êtes ceux qui, effectivement, comme vous le disiez, êtes très près de l'action. C'est pour ça que ça m'apparaît assez intéressant. Quand j'ai vu le premier bout du mémoire, j'ai dit: Ils profitent de notre commission pour nous passer quelques petits dossiers de négociation. Je trouve que vous l'avez fait. Je la laisse de côté, cette partie-là. Ça vous a permis de passer votre message, mais on va aller plus directement à l'objet de la commission.

M. Cloutler: ...pour la reprendre. M. Côté (Charlesbourg): Comment?

M. Cloutier: On va la reprendre, cette partie-là, oui?

M. Côté (Charlesbourg): Ah! C'est inévitable...

M. Cloutier: O.K.

M. Côté (Charlesbourg): ...parce que, si on ne la reprend pas, vous allez nous interpeller.

M. Cloutier: Merci.

M. Côté (Charlesbourg): On se comprend, là. On parle beaucoup de mesures d'efficience, d'efficacité dans notre système. Je vais aborder, dans un premier temps, des questions qu'on a abordées tantôt: santé et sécurité au travail et assurance-salaire. Tantôt, on s'est fait dire - et je n'ai pas raison d'en douter - que la morosité dans l'organisation du travail était un des phénomènes Importants qui faisait en sorte qu'on se retrouvait avec de la santé et sécurité au travail ou avec de l'assurance-salalre pour aller prendre une petite journée de temps en temps pour relaxer et essayer de voir autre chose. On comprend ça; on a le même phénomène dans nos métiers. Est-ce que c'est votre appréciation à vous aussi, à votre niveau, et quelles sont les mesures qu'on pourrait prendre maintenant qui nous permettraient d'améliorer ces situations-là?

M. Cloutier: Moi, mon point de vue là-dessus, M. le ministre, je vous dirais que ce qui est le problème des cadres Intermédiaires, apparemment, c'est plus au niveau de la reconnaissance et de l'appréciation du travail qu'ils font. Dernièrement, d'ailleurs, malheureusement, on nous disait qu'on devait nous couper nos semaines de vacances additionnelles parce que certains employeurs avaient pris une entente concernant le temps supplémentaire en cas de conflit, concernant la disponibilité, parce qu'une Infirmière ou quelqu'un d'autre ne rentre pas au chiffre de travail. De plus en plus, on nous encadre dans une cage de verre, comme gestionnaires, ce qui fait qu'il y a des gens, effectivement, comme vous dites, qui sont moroses et qui font comme l'ensemble, ils vont prendre des maladies plutôt que...

C'est sûr qu'il y a du travail à faire, je pense qu'il y a beaucoup de travail à faire - et ça, je tiens à vous le dire - il faut absolument qu'on implique notre monde. Les gens ne sont pas Impliqués. Ils n'ont aucune espèce de considération sur leur valeur de gestionnaires. Ça, je trouve que c'est terrible parce que, vous savez, notre monde, c'est fini le temps des religieux qui mènent les établissements au Québec. C'est des laïcs et des laïcs, entre autres, qui sont très bien renseignés, qui vont à l'université, qui ont des cours sur les nouveaux modes de gestion, qui sont prêts à appliquer ça dans leur établissement, mais Ils n'ont pas d'écoute.

M. Côté (Charlesbourg): Ils n'ont pas d'écoute?

M. Cloutier: Alors, il y a des régies et les régies, ça, c'est un mot qui est interdit aux cadres intermédiaires, malheureusement. Donc, moi, je pense que, si on reconnaît plus le travail des cadres intermédiaires, si on ne les encourage plus et si on en prend soin surtout, il va y avoir pas mal moins de monde qui va être malade. Ça, c'est sûr.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais ça, c'est une question de gestion de ressources humaines à l'intérieur d'un établissement.

M. Cloutler: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, est-ce que vous êtes après me dire que c'est généralisé à travers le Québec, que ça ne se parte pas et que ce que vous recevez, c'est des ordres, des

commandes sans que vous soyez partie prenante à un certain processus de décision? C'est ça que vous êtes après me dire?

M. Cloutler: Oui, effectivement.

M. Côté (Charlesbourg): Et c'est généralisé?

M. Cloutier: Oui, généralisé, et je vous dirai... Quand on dit qu'on est une transmission, on est une transmission. Une transmission, ce n'est pas autre chose qu'une transmission parce qu'on reçoit d'en haut, on impose en bas ou on dirige en bas, c'est vrai. D'ailleurs, on a fait une étude dernièrement et je vous dirai que nos cadres se sentent plus appréciés par leurs collègues et par leurs employés que par leur cadre supérieur, par leur supérieur immédiat. Quand j'entendais tantôt qu'on disait que dans les réseaux, présentement, la vague va vers la coupure de cadres intermédiaires, je vous dis que j'ai pris des notes et que je vais m'assurer d'être le chien de garde pour les prochains mois.

M. Côté (Charlesbourg): Ça serait quoi, dans ce domaine précis, la mesure qu'il faudrait prendre pour améliorer cette condition-là? Parce que ce que j'ai compris aussi des gens tantôt, au-delà du point que vous avez soulevé, parce que moi aussi je l'ai compris, c'est qu'il y avait une volonté très claire et très nette de mieux harmoniser les rapports à l'intérieur pour que ça fasse une équipe au lieu de plusieurs équipes à l'intérieur de la même bâtisse. C'est quoi la mesure qu'il faut prendre, dans un premier temps?

M. Cloutier: Ce dossier-là est un dossier quand même positif, sauf que nous, on attend depuis cinq ans parce qu'on nous parle et on a fait, d'ailleurs, plusieurs études, autant le ministère que les associations, sur des nouvelles descriptions de fonctions types. En ayant une nouvelle description de fonctions types, effectivement, on a ajouté ou on a enlevé des tâches. On a surtout ajouté des nouvelles tâches et on a aussi enrichi la tâche des cadres, sauf que tant qu'on n'aura pas déposé ça de façon officielle pour qu'on puisse les commenter et surtout former notre monde en fonction de peut-être d'autres fonctions... Présentement, ça se passe comme ça dans le réseau. Moi, je pense qu'on n'aura pas le choix, M. le ministre. C'est le travail qui reste à faire et ce travail-là, on ne le fait pas. On ne s'assoie pas à des tables de travail.

Mol, ça fait six mois que je suis président de cette associatlon-là et j'ai eu à peu près deux rencontres pour travailler, pas pour me faire dire ce que j'avais à faire. Je veux travailler, moi, à des solutions concrètes que je pourrais suggérer avec mon monde. Ça, c'est sûr.

M. Côté (Charlesbourg): Mais, tantôt, on se faisait dire qu'à l'occasion ça prend un leadership qui vient du central. Est-ce que je comprends que ce leadership-là doit d'abord venir au niveau de l'établissement?

M. Cloutier: Définitivement, oui. Oui, surtout, moi, je pense... Nous, on se croise les doigts puis on est positifs dans la réforme, en pensant que, d'abord, on parle, entre autres, d'éliminer plusieurs directeurs généraux, éliminer par voie de retraite ou autre, ou même, entre autres, par voie naturelle. Ce que je pense aussi, c'est que, si la nouvelle forme de qualification des directeurs généraux prend en considération le mode, le nouveau mode de gestion des années 2000, ça va nous aider. Mais je suis sincère, M. le ministre, quand je vous dis que, dans l'ensemble des établissements, on n'est pas sur des comités de gestion. On gère notre unité, on gère notre petit coin et c'est tout.

Mais je pense qu'avec toutes les nouvelles formes de gestion, entre autres, qu'on pense seulement à la qualité totale... La qualité totale, ça part du gars qui fait le ménage dans le corridor en passant par le médecin qui fait une prescription assis à... Alors... Mais, ça, ça existe partout, ça fonctionne. Chez nous, c'est un langage qui est dur à retenir, en tout cas, parce qu'on ne nous écoute pas. (12 h 30)

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Je pense qu'on a fait un point qui est quand même très important dans tout ça. On a à travailler avec des humains et, qu'on le veuille ou pas, il y aura toujours des structures et il va falloir que quelqu'un commande à quelque part. Mais ce que je comprends, c'est qu'il faut, autant que possible, que tout ce monde-là se concerte et qu'il y ait des économies appréciables sur le pian des rendements. Si je vous disais, au-delà de ce qu'on vient de se dire, de votre vécu à vous, sur le plan de l'efficience et de l'efficacité... Ce n'est pas évident qu'on progresse. Quand on parle d'impôt additionnel, quand on parle de ticket modérateur, qu'est-ce que vous voulez, c'est toujours des mesures qui amènent du pour et du contre. Ce qui semble se dégager depuis le début de la commission, c'est que tout le monde est d'accord pour des mesures d'efficience, d'efficacité. On dit: On peut aller chercher beaucoup d'argent avec ça. Selon votre expérience à vous, dans les différents domaines que vous représentez, quelles seraient les principales économies qu'on pourrait faire, sur quoi? Nommez-m'en deux. Commençons par deux.

M. Cloutier: Pour vous en donner une effective... Mol, je travaille dans un centre de réadaptation pour jeunes, où on a une gestion décentralisée. Je vous dirai que c'est efficace au maximum. Entre autres, efficace parce que, présentement, à l'unité que je dirige, nous avons

nos budgets annuels et nous gérons notre argent, avec un certain contrôle, mais pas un contrôle continu comme j'ai vécu, avant, dans un autre établissement où tout était contrôlé: la réquisition d'achat, la commande d'achat, la commande de transport, la livraison d'un ballon pour faire du sport avec les jeunes, voyez-vous? Ça, c'est un exemple concret.

Dans les hôpitaux, entre autres, toute la question tourne autour de la gestion d'un département. À partir des débarboulllettes qui entrent dans le département en passant par les médicaments et autres. C'est toujours contrôlé par un paquet de personnes qui ne sont pas nécessairement les premiers utilisateurs. Alors, la perte de matériel, le vol de matériel et autres, quand je rencontre - c'est de ça qu'on parle - quand on parie d'efficience et quand on parle d'améliorer le réseau, je suis persuadé qu'avec un nouveau mode de gestion où tout le monde est participant à cette gestion-là...

Vous savez, ce qui est un peu aberrant, c'est que nos cadres sont obligés de faire une demande, de faire la preuve qu'ils ont été efficaces pour avoir un boni. Ça veut donc dire que c'est vraiment grave. Il n'y a personne qui est capable de les apprécier tous les jours dans leur travail. Je trouve ça terrible. C'est peut-être parce qu'on entre trop de bonne heure le matin et qu'on part trop tard le soir. Quand tu entres trop de bonne heure le matin, ton boss n'est pas là; quand tu pars trop tard le soir, ça fait longtemps que le boss n'est plus là.

À la fin, on nous dit: Si tu veux avoir un rendement exceptionnel, on te demande de nous faire la preuve. Je ne peux pas faire la preuve. Où je pourrais faire la preuve, il n'y a personne qui me voit aller? Je trouve ça terrible. Alors, ça, c'est l'autre partie aussi. C'est l'autre partie que je trouve terrible parce que, pour améliorer le système, il faut que tout le monde participe, il faut que tout le monde aussi soit responsable, il faut responsabiliser les gens. On ne nous donne pas de responsabilités. On a des directives, on a des notes de service, on a des mémos.

M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, ce que vous nous dites, ce qui est réclamé de la part des établissements, de la part du ministère, moins de paperasse, moins de formules de réquisition, moins de règlements; si jamais on allait vers ça, ce que vous souhaitez, c'est que ça n'arrête pas à la haute administration de l'hôpital, mais que ça puisse aussi descendre au niveau des cadres intermédiaires avec des redditions de comptes.

M. Cloutier: Définitivement. Oui, effectivement. Il y a aussi des processus à réétudier. Je pense que les nouveaux systèmes - et tantôt les gens en parlaient - maintenant, les nouvelles pyramides sont abaissées au maximum. Ça n'enlève pas les chefs, ça. Mais les chefs sont responsables. Ils sont vraiment responsabilisés.

M. Côté (Charlesbourg): Vous nous dites: Le ticket modérateur, ça peut être intéressant, si j'ai bien compris. Vous nous dites que ça nous permettrait de distinguer les vrais malades - et vous avez pris un grand mot - de ceux qui ont peut-être un peu moins besoin. J'aimerais vous entendre davantage, parce que vous devez être en contact assez régulièrement avec ces situations-là et avec des expériences peut-être diversifiées parce que vous avez des gens qui représentent aussi des hôpitaux. J'aimerais ça...

M. Cloutier: Pour ma part, voyez-vous, depuis que je suis président, j'ai fait le tour de 10 régions du Québec. Notre association est dans 12 ou 13 régions du Québec. Quand je rencontre les cadres et qu'on parle un peu de la réforme, on me dit: Écoutez bien, on est là, nous, à l'urgence, et on est là aussi, entre autres, sur le plancher. On voit les personnes qui viennent. On voit, des fois, des patients qui viennent rencontrer, dans l'espace de deux ou trois semaines, peut-être trois ou quatre médecins différents et ils veulent qu'on leur trouve une maladie. Ceux-là, on les connaît, nous autres, on les volt, on les accueille.

On parie de ticket modérateur. On n'en a pas parié beaucoup, sauf que je vous dirai aussi, je vous ai entendu le dire, que la carte d'assurance-maladie avec une espèce de bit informatisé, on aurait de l'information importante là-dessus. C'est incroyable de voir les gens qui sollicitent des services et qui n'en ont peut-être pas besoin. Ceux qui sont vraiment malades et les démunis, moi, je leur dis: Oui, on est là. Oui, on va les aider. Oui, on va même prendre de l'impôt parce qu'on en paie, de l'impôt, nous autres, c'est sûr, pour les aider. Mais pas les autres.

Les autres, il faut qu'il y ait un système. On est même entré... Dans des endroits où je suis allé, il y a même des médecins qui gardent les cartes des patients en disant: Ils sont vieux, ils n'ont pas de mémoire, donc ils vont les perdre, on est mieux de les garder. Qu'on ne signe pas notre facture à payer, parce que, à ce que je sache, on ne la signe pas, notre facture à payer, je trouve ça important, moi. J'étais très heureux, après 25 ans que je payais au gouvernement, d'avoir une lettre, un jour, qui m'a dit: M. Cloutier, est-ce que c'est vrai que votre fille a eu des services de tel médecin, à telle heure, à telle place? J'étais enchanté de ça. Je disais: Mon Dieu Seigneur! Enfin, quelqu'un vérifie si cette carte-là a vraiment servi à la bonne chose.

M. Côté (Charlesbourg): Mais est-ce que vous n'avez pas une crainte qu'en mettant un ticket modérateur il y ait des gens qui aient besoin de services qui soient privés de ces services-là?

M. Cloutier: Je ne pense pas, si on met en place des principes, surtout, entre autres, un mécanisme qui va assurer que les démunis vont avoir des services. C'est ça qui est le plus important, d'après moi.

M. Côté (Charlesbourg): Mais, en même temps, on pense, à tout le moins, qu'il y a... et les gens qui sont pour un ticket modérateur pensent que ça va s'appliquer davantage aux démunis parce que c'est davantage les démunis qui consomment les services. Donc, dans la mesure où il y aurait un ticket modérateur et qu'on protégerait les démunis, ça veut dire que ça va s'appliquer à ceux qui veulent le voir appliquer à d'autres, mais ce n'est pas nécessairement très efficace. Il y a quand même des risques à ce niveau. Mais, dans votre esprit à vous, ce que je comprends, c'est qu'au niveau du ticket, s'il était imposé, à tout le moins, il serait modérateur pour ceux qui ont moins besoin de services.

M. Cloutier: Je pense que le mot «modérateur» est très important. Il est très important parce qu'il a sa signification et c'est ça qui est le plus... Je ne peux pas vous le dire ce matin parce que, effectivement, avant de mettre en place tous les mécanismes qui vont régir ça, c'est une autre chose. Est-ce qu'on parle de 2 $, de 3 $, de 5 $ ou de 10 $? Il y a des gens qui me disaient, en région, aux alentours du Saguenay... On me disait: Réal, d'après nous autres, on dirait comme opinion: Le minimum, 10 $. N'allez-y pas avec 2 $, ça n'a pas d'allure. Comme échange libre, on ne le sait pas. C'est sûr que vous avez même regardé l'application de ça dans d'autres pays. Mais, moi, je pense que... Nous autres, on croit... Parce que... Et je le répète encore. On est là quand les gens viennent chercher des services... Il y aurait sûrement une différence.

M. Côté (Charlesbourg): On a beaucoup parlé du virage - et je finis là-dessus - social par rapport au virage santé. Ce n'est pas toujours facile pour une association qui représente des gens d'un secteur... L'impression qu'on en tire, c'est que, et cela tend à se démontrer par les faits aussi, les chiffres, le secteur santé s'est accaparé du gros lot au cours des dernières années puis que le social est le parent pauvre. Si vous étiez au gouvernement demain matin et que vous vous retrouviez avec des économies réalisées par l'efficience et l'efficacité, quelles seraient les premières mesures qui verraient matérialiser votre générosité dans le domaine du social?

M. Cloutier: Vous tombez bien. Je suis dans le social, alors, ça tombe bien. Je vous dis...

M. Côté (Charlesbourg): C'est pour ça que je vous pose la question.

M. Cloutier: Je dis que ça prend des programmes d'éducation, des programmes de prévention. Je trouve fantastiques les nouveaux programmes d'éducation concernant, entre autres, le tabac. Je viens de prendre un exemple concret encore. Il faut avoir beaucoup de programmes comme ça. Présentement, je suis tout près du CLSC Sainte-Foy-Sillery où, entre autres, on a beaucoup de sollicitation sur les programmes de prévention sur la consommation de la drogue. Je pense que, si on a fait des économies, il faut commencer à éduquer les gens sur la façon de gérer leur vie, comment bien gérer leur vie.

Bien gérer sa vie, c'est peut-être, entre autres, à partir de son alimentation, en passant par le sport. Je pense qu'il faut apprendre aux gens. Il faut réapprendre aux gens comment bien gérer leur vie.

M. Côté (Charlesbourg): donc, la priorité devrait aller à la prévention sous à peu près toutes ses formes. ça devrait être ça, notre priorité.

M. Cloutier: II y a la prévention. Je vous dirai aussi que, la prévention, c'est un mot qui, des fois, est un petit peu inquiétant dans l'application... Je dis que ça prend de l'éducation aussi. Ça, c'est Important.

M. Côté (Charlesbourg): O. K. Merci.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamin-gue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci beaucoup, M. le Président. On va laisser vos affaires en négociation avec le ministre. Vous avez l'air d'avoir une porte quelque part. Vous ferez vos affaires. Vous négocierez avec lui, c'est important. Le message est passé. On comprend, à travers ce message, que vous vous sentez, disons, comme à côté d'un système et un peu partout. Nul doute que le message est reçu pour le très, très court terme; pour le long terme, il faut regarder ça sous un autre angle. Merci d'avoir pris la peine d'écrire un mémoire et de vous présenter devant nous. Vous nous donnez des éléments importants, d'autant plus que vous autres, effectivement, vous êtes proches du terrain. J'aimerais mieux dire que vous êtes entre deux.

Alors, s'il y a un endroit où la frustration peut s'accumuler de façon assez fantastique, c'est bien à cet endroit-là. Peut-être qu'on découvre là un certain nombre de symptômes dans le système à travers ce que vous contribuez, ce que vous faites dans ce système-là.

La première question, ça va être à peu près la première qu'on a posée tantôt aux directeurs généraux. Il y a cette impression, comme on dit,

généralement répandue et généralement reconnue, qu'il y a bien trop de cadres dans le domaine de la santé et des services sociaux. Vous autres, vous êtes particulièrement bien situés, je pense, pour essayer de nous donner, appelons ça l'heure juste là-dessus, à savoir que le taux d'encadrement, au niveau de la santé et des services sociaux, a évolué beaucoup plus rapidement, en général, que les personnels. Vous savez, de toute façon, que c'est une notion très répandue. Alors, y a-t-il, messieurs, mesdames, trop de cadres dans le réseau de la santé et des services sociaux au moment où on se parle?

M. Cloutier: À cette question-là, je vous dirai que ce qui est important... On entend beaucoup parler de ça, effectivement, depuis quelque temps. J'aimerais probablement qu'on me donne les statistiques réelles et qu'on fasse aussi la preuve. Présentement, nous, on vient de faire une étude parallèle concernant les fonctions types, entre autres, de nos chefs infirmières. Je vous dirai que, lorsqu'on va déposer ça à nos amis du ministère, on va leur donner la vraie réalité. Ce n'est pas vrai, dans les faits, parce qu'on a des gens qui vont superviser jusqu'à 50 personnes. Alors, je dis que ce n'est pas vrai. En contrepartie, par contre, si on fait vraiment le tour du jardin au complet, il s'agirait, entre autres, de regarder ça, mais, effectivement, ce dossier-là, je le répète, traîne. Donc, on ne peut pas faire de constat. Il faut refaire les descriptions de fonctions types. Il faut repositionner notre monde. Peut-être qu'à des places, effectivement, il y a un ou deux postes de cadre qu'on pourrait réaffecter à d'autres endroits pour rendre le système plus efficace, mais, nous, on ne pense pas qu'éliminer des cadres, ça va régler le problème d'efficience, surtout pas l'efficience, mais les problèmes de financement. Ce n'est pas vrai, au contraire. Pas nous, en tout cas. D'ailleurs, présentement, on est aux aguets par rapport à ça parce qu'on pense qu'on est la catégorie de cadres où on va peut-être essayer de vouloir regarder le plus possible les regroupements d'unités. On parle beaucoup, présentement, de regroupement de programmes. Je vous dirai qu'il y a des cadres pour lesquels j'ai beaucoup d'admiration. Il y a des cadres en CLSC, présentement, qui vont gérer sept ou huit programmes. Je vous dirai, monsieur, que c'est du monde, ça. C'est du monde à gérer. On est des gestionnaires. Qu'on arrête de penser qu'on est des intervenants. On est des gestionnaires avant tout.

M. Trudel: ce que vous me dites, c'est qu'il n'y a pas de démonstration qui est faite et il faudrait le faire rapidement, ne serait-ce que pour détruire le mythe ou rétablir la vérité, parce que, quotidiennement... nous autres aussi, du côté de l'opposition, on a posé cette question-là. on a fait le ratio et on a dit: hél il s'en promène du monde. On cherchait les réponses et, effectivement, ce n'est pas extrêmement clair là-dessus par une contribution, ce qui m'amène à dire... Vous allez éclaircir une expression qui est reliée à celle-là. Vous avez dit: Chez nous, ce qui est à bannir, c'est le mot «régie». Ça veut dire quoi, ça?

M. Cloutier: Je dis «régie» parce que «régie», c'est le mot que ça porte dans les établissements et la régie, ce sont les décideurs, ceux qui décident des orientations. Une fois les orientations faites, les gens font des politiques, des notes de service et, nous, on applique. Moi, ce que je dis, c'est un comité de régie élargie. Des fois, on l'entend. Par contre, il ne faut pas dire que ce n'est nulle part. Ce n'est pas vrai. On l'entend. Présentement, je fais un peu le tour des établissements et quand je vais dans un établissement qui a une régie élargie, qu'on parle de gestion participative, de qualité totale, je n'ai pas besoin de vous dire que c'est différent. On le voit. En visitant l'établissement, on le voit. On le voit aussi au niveau de ce que j'appelle le «feeling» du travail de l'établissement. On le sent. On sent que les gens sont impliqués là-dedans et, ça, c'est différent.

M. Trudel: très bien. c'est la correspondance de votre description dans votre texte. vous dites: la gestion participative, il faudrait que ce soit la base...

M. Cloutier: Oui.

M. Trudel: ...de la réorientation et de la gestion de nos ressources humaines à partir de nos ressources dans le système. Je vous avoue bien franchement que ce n'était pas là que je voulais vous amener. Je vous pose la question très carrément parce que, avec les gens de l'Association des directeurs généraux, encore tantôt, on n'a pas eu le temps d'aborder ça et ils nous ont dit une espèce de phrase lapidaire: Là, ce n'est pas le temps d'investir dans les nouvelles structures. Ils ont dit: Également, la loi 120. Est-ce que, vous, vous pensez que la loi 120, en matière de structure, va nous amener à la création de nombreux nouveaux postes qui vont servir ou qui seront inutiles? En tout cas, à tous le moins, est-ce qu'on va avoir une augmentation sensible, de votre point de vue, pour gérer cette nouvelle structure dans le réseau de ia santé et des services sociaux, suite à la loi 120? (12 h 45)

M. Cloutier: Nous, on considère la loi 120 comme étant valable. Ce qu'on dit aussi, c'est que si on prend le temps de vraiment faire l'exercice complet... Il faut faire l'exercice complet, entre autres.

Ce que je vous dirai... Présentement, je pense et je sais par personne interposée que ça

travaille fort. Les associations d'employeurs, les directeurs généraux, ça travaille fort à ce niveau-là. Moi, je le vis personnellement, je travaille dans un centre de réadaptation à Québec. On a déposé, cette semaine, au ministère un plan fonctionnel et technique et, en aucun temps, personnellement, je n'ai été consulté. Excusez-moi, ça fait 20 ans que je travaille dans cet établissement-là. «C'est-u» fantastique ça? C'est sûr que je peux vous dire comment fonctionne un groupe de 22 jeunes avec 12 éducateurs, mais je ne suis pas capable de dire comment devrait fonctionner une nouvelle infrastructure à Charlesbourg, avec un supercentre d'accueil incroyable où on va réunir trois centres d'accueil. Alors, en plus de ne pas être informé...

M. Trudel: Lui non plus ne le sait pas.

M. Cloutier: Ce que j'appelle la classification-rumeur, il n'y a rien de pire que ça parce qu'on est classifié-rumeur les cadres.

M. Côté (Charlesbourg): Êtes-vous après m'annoncer un Investissement à Charlesbourg, vous là?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cloutier: 35 000 000 $. Entre les deux, entre Charlesbourg et Québec, dans le coin de Beauport et Giffard, je pense.

M. Côté (Charlesbourg): Ah non, ce n'est pas Charlesbourg. Faites attention.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cloutier: Excusez-moi, oui, c'est assez à Charlesbourg.

M. Côté (Charlesbourg): Ils vont penser que c'est le ministre qui a encore tiré ça chez lui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Ce n'est pas fini. À Québec, les projets ont des roulettes.

M. Cloutier: je vous dirai, premièrement, que, si les gens avaient de la reconnaissance comme j'en ai entendu tantôt de votre part auprès des cadres, je pense que ça pourrait aider. on a aussi les cadres qui sont prêts présentement à quitter le réseau. c'est une question d'avancement. il y a des gens qui ont présentement 30 ans de service de faits. c'est sûr que, malheureusement, on a un plan de retraite qui a démarré sur le tard, comme on dit, mais on a peut-être aussi des cadres qui pourraient effectivement avoir des agencements de...

M. Trudel: Aussi, votre groupe dit: Le problème, c'est le financement. Il faut bien toucher à ça là.

M. Cloutier: Oui.

M. Trudel: J'essaie de faire un petit test depuis quelques heures. J'aurais au moins deux questions à cet égard-là. Vous dites oui à l'impôt-santé, mais... Le «mais», j'y reviendrai plus tard. C'est quoi, l'impôt-santé? Qu'est-ce que c'est?

M. Cloutier: L'impôt-santé, pour moi qui ne suis surtout pas un expert en comptabilité, c'est de dire: Oui, je veux conserver un régime de santé comme celui que j'ai présentement, entre autres. Il va peut-être falloir que j'investisse pour conserver des choses, des acquis. Présentement, j'investis, j'ai un régime de base d'assurance comme cadre et je choisis de me payer du luxe.

M. Trudel: ça va. mais on s'entend bien, vous comprenez bien que l'impôt-santé, c'est l'impôt général actuel qui fait juste changer de nom pour une partie. c'est juste ça.

M. Cloutier: Oui. On s'entend bien, oui.

M. Trudel: Oui? On s'entend bien là-dessus? Alors, quand on dit oui à l'impôt-santé, on dit oui à l'augmentation des impôts généraux. Il y a beaucoup de monde qui ne comprend pas ça comme ça.

M. Cloutier: Maintenant, il faut bien s'entendre que si on me collecte un impôt-santé, compte tenu que je suis dans le système de santé, je vais vérifier que mon impôt-santé va vraiment à la bonne place aussi. Ça, c'est très important.

M. Trudel: Là, vous ne parlez pas de revenus, vous parlez de transparence.

M Cloutier: Oui.

M. Trudel: Ça aussi, c'est un autre volet. L'impôt-santé, dans ce document-là, à moins que quelqu'un ne nous démente, c'est un impôt général, progressif, comme il l'est actuellement, sauf que sur le ticket de paye, puis sur le T4 à la fin de l'année, au lieu d'avoir une petite case qui s'appelle ministère du Revenu du Québec, impôt général au Québec, il va y avoir une petite case divisée en deux qui va être: petite case impôts généraux, et petite case impôt-santé. Mais ce n'est pas différent comme méthode. Quand vous dites... Parce que c'est ça qui m'inquiète, entre autres. Vous dites: L'impôt-santé, oui pour régler le problème du financement temporairement. Vous savez, quand un gouvernement

commence à lever des impôts, c'est à peu près comme faire l'amour, c'est rare que ça arrête en cours de chemin. Ça continue tout le temps. Ça n'arrête pas. Il faut être très conscient de ça. Lever un nouvel impôt, vous dites temporaire. Les impôts temporaires au Québec... Souvenez-vous de notre expérience à partir de Duplessis au fédéral: c'était temporaire pour le temps de la guerre. C'est rare que les États, tous gouvernements confondus, arrêtent. Alors, quand on dit: On est d'accord avec l'impôt-santé, il faut bien qu'on comprenne tous ce que cela veut dire. Il y a un monsieur qui avait un commentaire.

Le Président (M. Joly): M. Gagnon.

M. Gagnon (Paul): Oui. Tout simplement pour préciser justement pour avoir ce type d'interprétation là. Dans l'esprit du mémoire qu'il y a là, l'impôt-santé est que, s'il y a un manque à gagner... Là, on n'a pas les fiscalistes avec nous, on n'a pas les comptables avec nous, mais on va y aller avec un exemple type. Si, dans le réseau de la santé, après qu'on a établi, et c'est pour ça que vous ne pouvez pas dissocier, si vous voulez, la condition qu'on y met, sinon ça devient totalement discriminatoire à l'égard des «contributeurs» de dire: L'année prochaine, il manque 400 000 000 $, on majore les impôts de 2 %, ces 2 % comblent les 400 000 000 $... On continue à gaspiller, II en manque 600 000 000 $, on majore de 4 %, on comble les 600 000 000 $. Ce n'est pas du tout ce qu'on dit. Oui, à un régime de santé. Oui, s'il y a un manque à gagner, à court terme, de 200 000 000 $ pour protéger le système de santé qu'on a et que le gouvernement décidait de majorer l'impôt de 1 % ou 2 % pour combler... Là, comme je vous dis, je n'ai pas les chiffres. C'est ça qu'est dans notre esprit l'impôt-santé. C'est ce 1 % ou 2 % qui vient combler ce manque à gagner qu'on a à court terme. On comprend que, dans l'assiette fiscale, il y a déjà une portion importante qui va au régime de la santé. Mais il faut bien se comprendre que l'impôt-santé dont on parie est celui... si on a, à court terme, à régler un manque à gagner.

Cependant, ça ne peut pas se faire, dans notre esprit, si ce n'est pas associé à des mesures très claires quant à la gestion et tout, les économies et la saine utilisation des soins de santé. Donc, c'est là qu'on parle d'une campagne d'information.

M. Trudel: C'est juste pour m'éclalrer davantage, parce que vous dites: L'impôt-santé, oui, mais à condition que ce soit non discriminatoire, à condition qu'il n'y ait pas de discrimination. Ça s'applique à tout le monde, n'est-ce-pas? Je cherche votre paragraphe. Donnez-moi quelques secondes. Votre paragraphe où vous dites: Oui à l'impôt-santé, mais notre condition pour y aller, en plus de celle de contrôler nos dépenses de santé...

M. Gagnon: Oui. Mais, là, vous lisez le paragraphe à l'envers. Pour ne pas que cet impôt-santé devienne discriminatoire...

M. Trudel: Discriminatoire.

M. Gagnon: ...il doit s'y associer des mesures quant à la saine utilisation des soins de santé. Si vous ne faites, comme gouvernement, qu'imposer un impôt-santé et que vous ne faites pas le ménage dans la cabane, ça devient discriminatoire à l'égard des payeurs de taxes. C'est tout ce qu'on dit.

M. Trudel: Ah bon! Discriminatoire dans ce sens-là.

M. Gagnon: Oui.

M. Trudel: Alors, on s'entend que, quand on dit oui à l'impôt-santé pour combler les besoins manquants, c'est un impôt général avec des mesures pour que ça s'applique à la santé. Alors, je comprends qu'on est en termes de mesures de transparence et non pas uniquement en ternies de mesures de financement.

M. Gagnon: Exact.

M. Trudel: C'est ça qu'il faut bien préciser, qu'il faut qu'on se précise dans le débat...

M. Gagnon: C'est ça.

M. Trudel: ...c'est que l'impôt-santé, c'est d'abord une mesure de transparence. L'autre morceau, quant au financement, c'est des augmentations d'impôt au niveau général, les impôts généraux des particuliers. Alors, on augmente les impôts des particuliers s'il le faut. Je trouve que vous y allez pesant aussi sur le livret de tickets. On va sortir nos machines à imprimer parce que le ticket orienteur, imprimez-nous ça au plus vite, que vous dites. Le ticket modérateur, imprimez-nous ça au plus vite. Vous dites: Ticket orienteur, «let's go». Ticket modérateur, «let's go». À la page... au niveau des frais d'hôtellerie, «let's go». Chargez. Au niveau de l'hébergement, au niveau des repas, dans les hôpitaux, «let's go», allez-y. Et vous dites, en même temps: Mais II faut protéger les plus démunis.

M. Cloutier: Remarquez bien... M. Trudel: J'ai de la misère ià.

M. Cloutier: ...moi, je pense... Ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce qui est important aussi, vous l'avez dit tantôt de façon très éloquente concernant un partenaire qui n'est pas ici aujourd'hui... On dit bien, entre autres, c'est sûr qu'en

fonction de la loi C-3, si la loi C-3 est levée, oui. Si la loi C-3 n'est pas levée, on ne peut pas faire grand-chose.

M. Trudel: La loi C-3 levée, vous autres, vous dites: On est d'accord; le ticket orienteur, allez-y.

M. Cloutier: Oui.

M. Trudel: Ticket modérateur, allez-y; paiement des frais, à la page 16, paiement pour les services hospitaliers de soutien, allez-y; paiement des services hospitaliers d'accommodement, allez-y. Mais vous dites, malgré tout ça... C'est ça que vous dites?

M. Cloutier: Oui, oui, c'est ce que je dis. Oui.

M. Trudel: Réellement, je trouve que ça en fait beaucoup et savez-vous, défaites-moi ce jugement-là parce que c'est important. Quand vous me dites, après tout ça, il faut...

M. Cloutier: Je pense que vous avez une bonne perception, mais il ne faut pas oublier le principe de société auquel, nous, on tient avant tout. On tient avant tout à ce que les personnes à faibles revenus et les personnes les plus démunies soient protégées. Ça, c'est bien important.

M. Trudel: Oui, et c'est précisément là...

M. Cloutier: Je ne collecterai pas un ticket modérateur à tout le monde. C'est celui qui peut.

M. Trudel: Oui, c'est précisément là que ça m'amène comme... Je vous dis l'image que je me suis faite quand j'ai additionné tout ça. Aux États-Unis, ils ont deux régimes pour protéger ces clientèles-là: Medicare pour les personnes âgées, Medicaid pour les plus démunis. À ce compte-là, on s'en irait vers une médecine à l'américaine, c'est-à-dire un Medicaid pour les plus démunis et un Medicare pour les personnes âgées. Le système américain a la prétention aussi de protéger les plus démunis avec Medicaid et Medicare, sauf que le ministre me reprenait lui-même, hier, lorsque je disais: Oui, mais on en laisse 30 000 000 sur le carreau. Le ministre disait: Même plus proche de 50 000 000 que j'aurais mis. Ces mesures-là, je pense, quant à moi, nous amèneraient dans cette direction-là. Est-ce que vous pensez qu'on peut stopper tout ça pour ne pas franchir cette barre, quant à moi, de l'universalité d'un certain nombre de services qu'on se donne de façon solidaire et collective au Québec?

M. Cloutier: Je vous dirai que oui, à la condition qu'on mette en même temps et dans la même foulée toute la question des programmes de prévention et d'éducation. je pense que c'est ça qui est le plus important, mol aussi. on oublie ça souvent, malheureusement.

M. Trudel: Très bien. Merci beaucoup de votre contribution. Continuez votre beau travail souvent méconnu. Dans le réseau, vous êtes entre les deux, mais vous avez aussi l'avantage d'avoir l'information des deux côtés. Donc, votre rôle est Important, non pas comme courroie de transmission, mais pour faire en sorte que toute l'histoire avance. Merci beaucoup de votre contribution.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Moi, je veux vous remercier. Je pense que c'est toujours bon de parler au palier qui parle à celui qui travaille, qui dispense, mais qui est largement syndiqué et défendu par rapport à ceux qui doivent veiller à ce que le travail se fasse sur le terrain. Ça me paraît être très, très important. On aura très certainement l'occasion de se reparler d'un certain nombre de choses assez précises quant à la gestion de l'efficience et de l'efficacité.

Mais, si j'ai compris que les D.G. pouvaient nous passer des messages, on va probablement en avoir des cadres supérieurs et les cadres intermédiaires aussi nous ont passé un certain nombre de messages. Il va falloir que tous ces messages-là soient bien regroupés si on veut faire disparaître des barrières; c'est vers ça qu'il faut tendre. Il faut tendre vers la disparition d'un certain nombre de barrières, mais laisser aussi une latitude aux différents niveaux pour être capables de gérer sur le terrain. Merci beaucoup.

Le Président (M. Joly): Au nom des membres de la commission, à mon tour de vous remercier d'avoir été présents et de nous avoir éclairés. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 14 heures, dans cette même salle.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 14 h 23)

Regroupement des fédérations de médecins du Québec

Le Président (M. Joly): À l'ordre, s'il vous plaît!

Il me fait plaisir d'accueillir la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, la Fédération des médecins résidents du Québec et la Fédération des médecins spécialistes du Québec. Je vois que le Dr Richer et les gens qui l'accompagnent sont présents tel que promis, tel qu'engagé. Dr Richer, s'il vous plaît, j'apprécie-

rais si vous pouviez introduire les gens qui vous accompagnent.

M. Richer (Clément): Merci, M. le Président. Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire, vous aurez remarqué que la profession médicale vous a présenté un seul mémoire. Donc, je voudrais vous présenter ceux qui y ont contribué et qui m'accompagnent: M. Frédéric Faucher, président de la Fédération des associations des étudiants en médecine, donc, la relève; le Dr Robert Marier, à ma gauche immédiate, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, et le Dr Jean-Hugues Brossard, président de la Fédération des médecins résidents du Québec. Dans la salle, pour nous soutenir comme cinquième participant au mémoire, le Dr Roy, président de la Corporation, et le Dr Marc Bois, délégué, si vous voulez, de l'Association des conseils des médecins, des dentistes et des pharmaciens. Ces deux organismes professionnels ont travaillé à vous présenter le mémoire que nous défendrons cet après-midi.

Le Président (M. Joly): Dr Richer et Dr Marier, depuis le temps vous connaissez la règle de procédure. Vous avez à peu près 45 minutes pour livrer votre mémoire et, par après, le temps qui restera sera imparti entre les deux formations. Alors, je vous laisse la parole. Vous avez le droit aussi de passer la parole à qui bon semblera vouloir Intervenir.

M. Richer: Très bien, M. le Président. Nous allons procéder par une rapide Introduction. Nous persistons à dire, en introduction dans notre mémoire, qu'il eût été préférable d'établir d'abord des politiques de santé et de dispensation de services médicaux. Ça nous aurait permis, dans un deuxième temps, une fois ces politiques connues et ces politiques digérées, de tenir ce débat sur le financement pour voir comment articuler les politiques avec les sommes d'argent qui sont disponibles. Et, dans un troisième temps, de procéder à une réforme du cadre légal. Il nous semble que cette séquence logique aurait été préférable.

Nous en profitons également pour réitérer le fait que nous supportons que les grands principes du régime d'assurance-maladie au Québec soient maintenus, c'est-à-dire: l'universalité, l'accessibilité, l'intégralité, la transférabilité et la gestion publique pour les services de base. Nous soulignons que nous avons compris, quand nous avons été convoqués pour ce débat, qu'il s'agissait de débattre sur le système de santé au Québec. Bien sûr, nous sommes conscients qu'il y a d'autres missions dans le gouvernement, particulièrement au ministère de la Santé et des Services sociaux, mais nous pensons que le débat actuellement est «focussé» sur le régime de santé. Nous en profitons pour dire qu'il devrait cependant probablement être élargi à un débat sur l'ensemble des finances publiques du gouvernement parce qu'on ne pense pas que la santé puisse être le seul débiteur de certaines économies dans un grand débat comme ça.

Je demanderai au Dr Brossard de présenter succinctement le premier chapitre de notre mémoire.

M. Brossard (Jean-Hugues): Le premier chapitre du mémoire porte sur le coût du système de santé. Il s'agit d'un exercice de constat pour savoir d'où l'on part avant de décider où l'on doit aller. Le premier constat qu'on fait, c'est que notre système de santé est plutôt performant. Il est performant si on considère les indices de santé tels que l'espérance de vie ou la mortalité périnatale. Il est aussi performant si on considère la satisfaction que les patients expriment lorsqu'ils l'utilisent. La question n'est pas de savoir si la marchandise est livrée, c'est plutôt de savoir à quel prix on obtient ces résultats, quel est le coût de ce système. Quant à nous, on pense que c'est à un coût fort raisonnable qu'on obtient ces résultats-là.

Dans le livre vert, on dit que 6,9 % du PIB servent aux dépenses publiques du système de santé et que, lorsqu'on se compare aux pays de l'OCDE, c'est plus que la moyenne. En fait, la définition de l'OCDE en dépenses de santé est plus restreinte que ce qu'on a utilisé pour calculer les 6,9 %. Si on exclut une partie des dépenses qui devraient être considérées comme sociales dans ces 6,9 %, on s'aperçoit, en fait, qu'il n'y a que 75 % de ces 6,9 % du PIB qui vont vraiment à la santé. Ce n'est pas pour dire que ce qui va au social ne devrait pas y aller, mais pour pouvoir se comparer avec les pays de l'OCDE. Donc, en fait, le Québec affrète à la santé 5,2 % de son PIB, ce qui le place au seizième rang des 21 pays de l'OCDE et ce qui le place en deçà de la moyenne de 5,6 % que les pays de l'OCDE affectent à la santé.

Donc, quand on se compare, la quantité d'argent, dans les dépenses publiques, qui va à la santé, est, somme toute, modeste. De plus, en plus d'être raisonnables, ces coûts sont stables, et ce, depuis de nombreuses années. Les dépenses totales de santé en 1971 étaient de 8,4 % du PIB et, en 1987, de 8,86 %, ce qui est une stabilité remarquable. Si on regarde en argent pondéré, en 1971, le citoyen investissait 1089 $ et, en 1987, 1094 $. Donc, il y a une stabilité. Les coûts, en plus d'être raisonnables, sont restés stables avec les années.

Coûts raisonnables, coûts stables et, comme le reconnaît le livre vert et comme on l'endosse, pas non plus d'abus de consommation flagrant et, nous pensons, pas non plus d'abus de production flagrant. Les services médicaux utilisés par chaque Québécois comptent pour 250 $, alors que, pour les Ontariens, c'est 375 $. En médicaments, les médecins québécois prescrivent pour 83 $ par citoyen, alors que, pour les médecins

ontariens, c'est 141 $. Le nombre de visites à chaque médecin omnipraticien est de 4500 par année pour 15 minutes par visite, alors que, dans d'autres pays, ça oscille en haut de 5000 par année.

Donc, nous avons réussi à maintenir le système de santé à un coût raisonnable, à un coût stable et à contrôler la production de façon à ce qu'il n'y ait ni surproduction ni surconsommation. Toutefois, il est clair qu'au Québec on offre souvent plus de services complémentaires qui sont financés par un mécanisme public et, à ce niveau, on est plus généreux que les autres. Si les coûts sont sous contrôle et que, globalement, ils sont à un niveau qui est déjà inférieur, en moyenne, à ce qu'investissent les autres pays de l'OCDE et qu'ils sont aussi inférieurs ou, en tout cas, proches de ce qu'on doit investir en fonction de notre richesse collective, il faut se demander si couper plus dans les coûts, dans ce qu'on met comme argent, ne risque pas d'entraîner des coupures ou d'entraîner un manque de financement flagrant pour maintenir des services médicaux essentiels. On dit qu'il faut être prudent. Les coûts investis sont limites, sont à un seuil critique au-delà duquel ce sont les services qui seront perturbés.

Une part de la situation actuelle difficile que connaissent les finances de l'État est due, bien sûr, à la dette qui s'est accumulée au fil des ans, est due aussi au fait que les transferts fédéraux ont diminué et est, en partie, due aussi à une conjoncture économique qui est mauvaise, qui, on peut l'espérer, ne le restera pas toujours. Il reste que même si elle s'améliore, la situation économique, il faudra continuer à surveiller étroitement les coûts parce que, dans les années qui vont venir, II va y avoir des pressions croissantes sur notre système de santé pour faire face à des réalités qui ne vont faire que progresser. La population va vieillir, les listes d'attente ne seront peut-être pas toujours tolérées avec la même patience par les patients, les immobilisations seront vétustés, les équipements pas toujours suffisants, il y a de nouvelles maladies qui peuvent apparaître - ce n'est pas qu'on le souhaite, mais ça pourrait survenir - les nouveaux médicaments devront pouvoir être offerts à la population du Québec et il y a des chances que les rémunérations des professionnels qui oeuvrent dans le système de la santé, qui sont souvent parmi les plus basses et injustes par rapport à ce qui existe ailleurs, vont peut-être devoir être redressées. Dans ce contexte, la place qu'il y a pour rationaliser les coûts dans le système de santé... L'argent qui pourra être récupéré, en faisant une rationalisation, une gestion plus serrée, ne devrait pas être versé à la dette ou versé à d'autres secteurs de financement du gouvernement, mais bien être planifié pour une utilisation pour faire face à ces nouvelles pressions qui vont apparaître dans le système. Il ne faut pas être trop serré dans la planification des coûts. Il y a des pressions neuves qui vont apparaître et si, oui, il faut rationaliser, ce n'est pas pour verser ces économies au service d'une dette.

En somme, de notre point de vue, les coûts de la santé sont sous contrôle, mais à un seuil critique, un seuil critique qu'il ne faut pas dépasser. Nous sommes déjà en deçà de la moyenne des pays de l'OCDE pour la santé, nous ne croyons pas qu'il faille descendre plus bas. La production de services est raisonnable et la rationalisation qu'on pourra faire devra permettre de faire face à l'avenir et non à la dette, de faire face aux nouvelles pressions qui vont être générées au fil des ans pour faire fonctionner le système de santé.

En un sens, la solution au financement et aux problèmes de financement du gouvernement ne passe pas, à notre avis, par une diminution de l'investissement en santé mais plus par l'exploration de nouvelles sources de financement, de nouvelles sources de financement qui permettront de maintenir les coûts de la santé à ce qu'ils sont actuellement pour ne pas hypothéquer les services essentiels, les services médicaux essentiels offerts à la population.

Le Président (M. Joly): Dr Richer.

M. Richer: Comme source de financement, nous essayons de proposer quelques instruments et quelques nouveautés, si vous voulez, dans le système pour voir s'il n'y aurait pas moyen de trouver du financement complémentaire. Le premier principe qui doit nous guider, c'est que la mécanique de gestion des finances en termes de santé devrait être transparente. Je pense qu'actuellement, pour le commun des mortels, c'est très difficile de se retrouver là-dedans. Il y a des transferts du fédéral qui ont été rendus beaucoup plus compliqués avec la loi de 1977: points d'impôt pour l'ensemble du pays, points d'impôt plus points d'impôt pour le Québec, compte tenu d'une formule un peu différente, plus transferts en argent comptant, le financement qui vient du fonds consolidé de la province, les contributions des employeurs. Donc, pour les citoyens que nous sommes, c'est complexe de se retrouver à l'intérieur de ça. On souhaiterait donc qu'il y ait un mécanisme qui permette la transparence des sources et de la gestion des sommes d'argent qui sont investies dans la santé.

On sait que les sondages nous disent que les citoyens sont prêts à un effort additionnel en termes monétaires pour la santé, mais on pense qu'ils sont prêts pour la santé. On ne pense pas qu'ils soient prêts à investir davantage dans les structures ou dans la bureaucratie. Donc, les instruments qu'on privilégie, c'est l'établissement de caisses-santé, autant au niveau national... Bien sûr, on sait bien qu'on n'est pas dans la bonne instance pour parler du fédéral, mais on pense qu'il est temps de passer le message à Ottawa

aussi pour qu'il fasse un peu de ménage dans sa cour, et qu'il y ait donc des mécanismes clairs, qu'on puisse analyser tranquillement et comprendre surtout, pour savoir combien il y a d'argent qui est transféré d'Ottawa en points d'impôt, qu'est-ce que ça signifie, un point, deux points, 13,5 points d'impôt, qu'est-ce que ça signifie, les transferts en argent comptant, et à quels domaines c'est dévolu au Québec.

Ceci dit, on est devant une commission parlementaire du Québec et on revient chez nous. On pense qu'il devrait y avoir également une caisse santé, au Québec, qui serait composée de deux fonds principaux: un fonds général qui servirait à financer l'ensemble du système et un fonds particulier qui servirait pour des financements qu'on a appelés «spécifiques». Il faut comprendre, par là, le financement de certains équipements lourds dans des établissements, le financement de la recherche, par exemple.

Comment serait alimenté le fonds général? Bien sûr, la première source de fonds du fonds général serait les transferts de sommes d'argent qui nous viennent du fédéral. Ces transferts-là devraient inclure, bien sûr, non seulement les sommes versées au comptant, qui vont d'ailleurs disparaître d'ici 1995-1996, mais devraient comprendre les points d'impôt qui sont transférés du fédéral au Québec aux fins de la santé et de l'enseignement supérieur. Donc, la partie santé devrait être affectée à la caisse santé, donc, dans le fonds général de la caisse santé.

Deuxièmement, les contributions actuelles des employeurs, selon le prorata qui les cotise. Troisièmement, nous pensons qu'on devrait créer un impôt santé distinct qui serait, bien sûr, soustrait de l'impôt général. Donc, nous ne préconisons d'aucune façon une augmentation de la taxe, soit directe, par l'impôt, ou soit indirecte, par les autres mécanismes de taxation. On pense à quelques points, quelques pourcentages de l'impôt général des citoyens du Québec dont la totalité correspondrait, ma foi, à peu près à ce que le fonds consolidé, actuellement, verse aux fins de l'administration de la santé. Donc, on partirait avec un système qui est équivalent avec le financement de l'année zéro, si vous voulez, et l'impôt qui serait dévoué à la santé serait la partie d'impôt qui est nécessaire pour faire les sommes que verse le fonds consolidé aux fins de la gestion du système de santé.

Il devrait y avoir probablement aussi une quote-part de taxes de certaines choses dans notre système. On sait que le tabac, en particulier, l'alcool et les accidents de véhicules moteurs taxent assez lourdement le système de santé. On pense qu'il devrait y avoir une quote-part de ces taxes sur les cigarettes, les boissons alcooliques et l'essence qui soit versée dans le fonds général. Tout ça constituerait le fonds pour payer pour le système général de la santé au Québec.

Le fonds particulier, avec une vocation plus spécifique, pourrait être financé par des dons qui seraient faits par des citoyens et des corporations. Il pourrait être financé aussi par une formule qu'on vous suggère, cette espèce de placement, si vous voulez, des placements offerts aux seuls citoyens du Québec qu'on appelle les bons santé qui seraient par analogie une espèce de régime d'épargne santé. Donc, le gouvernement pourrait, pour les citoyens québécois, dire jusqu'à un plafond donné, 2000 $, 3000 $, 4000 $ par année, si vous voulez, si vous investissez dans les bons santé, cet argent-là serait déductible de l'impôt.

Bien sûr, on se rend compte qu'il y a une perte fiscale pour le gouvernement de faire ça, mais où est-ce que le gouvernement y trouverait son profit? On pense que ces bons pourraient rapporter un intérêt qui serait inférieur au loyer courant de l'argent. Donc, si le loyer courant est de 6 %, 7 %, 8 %, le taux d'intérêt pourrait être de 4 % ou 5 % sur ces bons. Évidemment, l'intérêt ne serait pas taxable tant que le capital et les bons ne seraient pas encaissés. Le gouvernement est garant de ces bons-là, exactement comme les bons du trésor, et il assure donc cette espèce de marché secondaire, pour employer les termes des gens de la Bourse. C'est un impôt qui est donc différé. Le gouvernement ne perd pas. Il perd dans l'immédiat, mais il ne perd pas à long terme. C'est un impôt différé. Donc, c'est différent un peu du régime d'épargne-actions. C'est un peu comme un REER, si vous voulez. Alors, tant que les sommes d'argent sont investies dans des bons santé, II n'y a pas d'impôt à payer pour le citoyen, le contribuable, et il ne pale pas d'impôt non plus sur les intérêts tant qu'ils sont avec le principal. Quand le citoyen juge bon de retirer ses bons, d'encaisser ses bons santé, c'est à ce moment-là qu'il serait taxé. Alors, ce serait à lui de choisir le moment le plus opportun sur le plan fiscal pour retirer ses bons.

La loto santé. Il y a des lotos dans à peu près tout au Québec. On pense que trois ou quatre fois par année, il pourrait bien y avoir une loto santé dont les profits seraient tout simplement versés au fonds particulier pour aider à financer certains éléments spécifiques de notre système de santé.

Bien sûr, il y a d'autres formes de financement et une de celles-là, je pense, intéresse davantage la commission: la contribution directe du patient. Nous ne sommes pas, comme profession, à rencontre du fait que le patient puisse être appelé à contribuer directement pour les services de santé. Ceci dit, ça se ferait toujours dans le respect de la capacité de payer. Donc, II faut trouver une formule pour dégager de cette obligation les gens qui sont démunis et qui seraient moins capables de payer ça. Donc, cette formule-là repose cependant sur une réévaluation, une redéfinition de la gamme et de l'étendue des services assurés.

Le livre vert nous suggérait qu'on puisse parler de services de santé de base et de services de santé complémentaires. Nous sommes d'accord avec cette approche. Dans les services de santé de base, il y en a qui sont essentiels et d'autres qui sont moins essentiels. Les services essentiels, en général, c'est les services médicaux, diagnostiques, thérapeutiques, autant en établissement qu'en cabinet privé et c'est la plupart des services médicaux qui sont essentiels dans notre livre. Cependant, on est conscients que tous les services médicaux n'ont pas la même qualité d'essentialtté, si vous voulez, et on offre la collaboration de la profession au ministère pour définir lesquels, parmi les services médicaux, seraient les moins essentiels.

Quant aux services complémentaires, pour nous, ils sont composés de deux principaux éléments: les services de soutien dans les établissements (services de repas, d'hôtellerie, de buanderie, etc.) et les programmes complémentaires qui sont actuellement administrés par la Régie de l'assurance-maladie (les médicaments, les services dentaires, optométriques, etc.). Nous pensons que ces programmes-là doivent être révisés pour accorder notre générosité à notre pauvreté relative par rapport à d'autres provinces et nous pensons également qu'il y a lieu de discuter assez longuement des services de soutien.

En somme, nous appuierions le fait que le patient puisse être appelé à contribuer directement pour des services médicaux non essentiels, donc moins prioritaires, et pour des services complémentaires, soit les programmes ou soit les services de soutien. En contrepartie, dans la même logique, nous rejetons toute idée de ticket orienteur ou de ticket modérateur. Pourquoi? Parce que ça ne respecte pas le principe qu'on défend. Le ticket orienteur ou modérateur n'a pas de sélectivité. Il veut modérer tout, il veut orienter tout et, à ce moment-là, on pense que ça pourrait toucher également des services médicaux essentiels. Donc, ne faisant pas la part des choses, nous rejetons cette forme de taxation.

Quant à l'impôt-services, nous disons non actuellement, sauf que nous ne le rejetons pas comme principe. Ça pourrait être utile plus tard, si jamais les autres formules de financement échouaient, ce dont nous doutons, cependant.

Et, en terminant, la TVQ, quant à nous, quand elle sera appliquée au Québec, devrait avoir la même vocation que sa soeur fédérale, c'est-à-dire être employée à réduire le... je ne dirai pas «réduire le déficit», parce que je pense qu'on en est arrivé à un point où il ne faut plus viser à réduire des déficits dans les gouvernements, il faut viser à faire des surplus pour réduire la dette, parce que c'est la dette qui est notre problème particulier, autant au Québec - moins, heureusement - qu'à Ottawa. Donc, on pense que la TVQ, que tous les produits de la

TVQ devraient être affectés à la réduction de la dette pour développer à long terme - on s'en rend bien compte - une marge de manoeuvre qui serait plus intéressante. Alors, Dr Marier, sur la performance.

Le Président (M. Joly): Dr Marier.

M. Marier (Robert): Je vais essayer d'être performant. D'abord, on ne l'a peut-être pas assez souligné, mais je me permets de le répéter, c'est que le document que le ministère a présenté sur le financement du système de santé est un bon document, c'est un document qui est sérieux et qui va dans l'esprit qu'on souhaite d'avoir plus de transparence et plus d'échanges qualitatifs permettant à tous les intervenants de pouvoir réfléchir avec les bonnes données sur des problèmes aussi importants que le financement.

Quand on lit les journaux et qu'on participe à une commission comme celle-là, la première réflexion qui me vient à l'esprit, c'est a l'effet qu'il va falloir investir encore dans la communication. Il faut croire qu'on ne l'a pas fait assez le printemps dernier et cet été. Je pense qu'il va falloir vraiment informer la population de ce qui se passe dans notre système de santé. (14 h 45)

Pour reprendre...

M. Côté (Charlesbourg): II y a certaines fois que vous n'avez peut-être pas investi à la bonne place en communication.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Marier: Vous voyez qu'on vous a compris, M. le ministre, parce que, actuellement, c'est National qui nous sert d'agent communica-teur.

M. Côté (Charlesbourg): De ce que j'ai compris, c'est que vous autres, vous avez les moyens; les politiciens, non.

Des voix: Ha, ha, hal

M. Marier: Mais, se fiant sur votre expérience, on a mis au point les limites des dépenses qu'on avait à faire avec National. On a dit, nous, qu'on n'était pas le gouvernement, avant de commencer à faire affaire avec eux.

M. Côté (Charlesbourg): Ça, c'est glissant, ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Marier:lorsqu'on parle actuellement - on va reprendre les termes qui sont utilisés dans les journaux - de «complexe médico-hospitalier», on a l'impression, quand on

fit ça ou qu'on écoute parler les gens, que le complexe médico-hospitalier est parti avec la caisse de santé. Moi, quand je regarde ça comme praticien, je me dis, si on regarde la partie «medico» du médico-hospitalier: II me semble qu'il y a des choses qui ne tournent pas rond la-dedans. J'ai commencé à exercer en 1976 comme médecin spécialiste et les médecins spécialistes, en 1976, étaient les mieux payés au Canada. On est en 1991 actuellement, 15 ans plus tard, et on est les plus mal payés au Canada. Alors, si quelqu'un est parti avec la caisse, je me dis: Ce n'est pas nous autres, ce n'est pas moi.

Si je regarde la partie «hospitalier» du complexe médico-hospitalier, et qu'on entend ce que l'AHQ a véhiculé en commission parlementaire et dans ses excellents mémoires également, je pense que ça tient compte de la réalité. Mais je voudrais vous souligner que, comme médecin spécialiste, quand on parle - et mon compagnon ici, le Dr Brassard, en parlait - de la vétusté du parc immobilier, ça paraît très théorique, mais si je vous raconte un fait clinique, vécu... Je suis un ex-gynécologue et j'étais en train de faire un examen gynécologique sur la table d'examen et la patiente qui regarde au plafond dit: Docteur, est-ce que ça va être encore bien long? Parce que je pense qu'il y a un morceau de plâtre qui va tomber bientôt. On était dans la clinique d'un hôpital. À ce moment-là, des exemples... Dans le fond, on la vit, cette vétusté, et elle est réelle.

Mais, essentiellement, pour être un petit peu plus sérieux, c'est que, comme médecin spécialiste, mon problème, moi, commence non pas lorsque je dois poser un diagnostic ou lorsque je dois opérer quelqu'un, parce que, ça, je sais faire ça, mais lorsque je dis: Cette patiente-là, je devrai l'amener en salle d'opération. Alors, quand est-ce que je vais réussir à l'amener à la salle d'opération, compte tenu des listes d'attente, compte tenu de la disponibilité des lits, compte tenu de la diponlbilité des salles d'opération? Et le problème se complique également lorsque le cas est suffisamment sérieux. Ça peut être, par exemple, un problème de cancer et que j'aie besoin d'une tomographie axiale, communément appelée un «scan». Là, je dois dire: Maintenant, il va falloir que je négocie pour essayer de faire passer cet examen-là dans des délais acceptables.

Ma difficulté est là également quand je suis à l'urgence, que j'examine une patiente et que je me dis: Ayoye! Pour celle-là, il faut aller en salle d'opération. Il est 16 h 30, 17 heures. Là, je suis obligé de prendre un numéro parce qu'avant ça il y a déjà un appendice, avant ça, il y a déjà une fracture, et, avant ça, il y a déjà un autre... Si tout se déroule comme dans le livre, je vais peut-être passer à 22 heures ou à 23 heures sinon, peut-être à 2 heures ou 3 heures du matin. La pression que le patient met sur moi quand il dit: Comment ça se fait que c'est si long? Comment ça se fait qu'on attend? Eh bien, on vit le problème de gestion dans notre système hospitalier.

Donc, quand on regarde ça tant sur le plan médical, tant sur le plan de la gestion du cadre hospitalier, on comprend qu'il y a de la pression dans le système. On comprend qu'il y a des limitations. Vous savez, on a des fermetures de lits à Noël, dans le temps des congés de neige, à Pâques, l'été. Finalement, on ne fait plus des listes de quand seront les congés dans l'hôpital, on fait la liste de quand on va travailler. À ce moment-là, on n'est pas présent et il n'y a pas vraiment de disponibilité pour rendre les services qu'on souhaiterait. Donc, la pression, elle est là dans le système.

Les études que l'on fait, et on l'a dit dans le premier chapitre, c'est qu'en fait, en santé, quand on se compare aux pays de l'OCDE - je ne parle pas des services sociaux - on investit autour de 5,2 % et, ça, c'est inférieur à ce qui se fait dans les pays de l'OCDE parce qu'on sait que la moyenne des pays de l'OCDE, c'est 5,6 %. On peut comprendre que, sur le terrain actuellement, on vit dans un contexte de pression parce qu'on est inférieurs à la moyenne des pays de l'OCDE. Ça nous place non pas au deuxième rang, comparativement à ces pays-là, mais bien, comme on l'a dit tout à l'heure, au 16e rang sur 21. Quand on est rendus à 5,2 % ou à 5 % de notre investissement en santé, on pense qu'on est rendus à seuil critique et, si l'on va plus bas, on va peut-être mettre en péril des services de soins de qualité.

On pense qu'ici c'est pour ça qu'on fait appel à un concept de transparence. Pour nous, c'est important; c'est important qu'on identifie vraiment ce qu'on met en santé, d'abord pour se comparer, si ce n'était que pour une rigueur comptable, mais également pour identifier aussi ce qui se fait du côté social. Ce qu'on vous dit, ici, c'est que c'est aussi important les services sociaux que les services de santé. Mais, si on a éventuellement des choix à faire, pour les faire il faut savoir exactement où ça se situe et où on devra couper. À ce moment-ci, il nous apparaît qu'il n'est pas exagéré ou qu'il n'est pas exorbitant de penser qu'un jour on pourrait, compte tenu des pressions qui existent dans le système, penser à viser 5,6 % en dépenses de santé proprement dites. Mais on comprend actuellement qu'on vit un contexte économique. On comprend qu'on vit en récession. On comprend que le gouvernement du Québec vit ces problèmes-là et que le gouvernement fédéral les vit également et même qu'il se déresponsabilise en passant une partie de ses dettes au Québec avec les transferts fédéraux qui sont diminués. On comprend que, si on essaie de vivre avec nos 5,2 %, c'est bien de le faire actuellement, et on doit essayer de dégager des marges de manoeuvre pour atteindre cet objectif-là. Toutes les suggestions qui ont été faites, celle du Dr Richer tout à

l'heure, celle de l'AHQ et des autres, Je pense que ce sont des pistes valables que le gouvernement doit examiner pour vraiment prendre les bonnes décisions et le bon éclairage. Je pense que c'est à lui de faire ça.

Nous, enfin, ce qu'on dit là-dessus, c'est qu'il y a peut-être une marge de manoeuvre importante qu'on a identifiée et c'est celle de l'institutionnalisation. On constate que, lorsqu'on se compare à l'Ontario, il y a 1,2 % de plus du produit intérieur brut qui va à l'institutionnalisation. Ça, quand on sait que 1 % du produit intérieur brut équivaut à 1 300 000 000 $, je pense que là il y a matière à regarder sérieusement et à voir comment on peut faire ça différemment ou autrement.

Ce qu'on dit, d'autre part - et, ça, je pense que la profession médicale est très claire là-dessus - c'est que, si le gouvernement pense qu'en dégageant des marges de manoeuvre on va réussir à financer la dette provinciale, pour nous, c'est inacceptable. Si la population nous dit «oui, c'est correct, coupez dans la santé pour financer la dette du Québec actuellement», nous nous plierons à ce jugement public, mais nous croyons qu'actuellement ce n'est pas ce qu'il faut faire et c'est pour ça qu'il faut avoir de la transparence lorsqu'on met sur la table des chiffres comme ceux qui sont présentés dans ces dossiers-là.

Le deuxième concept dont je voudrais vous parler, c'est le partenariat, et ce n'est pas de la philosophie. Pour nous, le partenariat, c'est un concept économique. C'est peut-être un concept qui est vieux. On dira que c'est une recette ancienne servie à la moderne, mais, pour nous, c'est bien important. Depuis 1970, progressivement, la profession médicale a tenté de faire du partenariat et, si on relevait tous les colloques et toutes les réunions qui se sont tenues sur le partnership médico-administratif, je pense que nous aurions des tonnes de papier. Cependant, ce partenariat ne s'est pas concrétisé tant qu'il n'y a pas eu un problème de gestion de décroissance de notre système de santé. Et, là, on a commencé à parler aux médecins. On a vécu, suite à ça, des expériences quand même heureuses à un niveau local, à un point tel qu'on voulait faire profiter les régions et le national, le niveau provincial, si vous voulez, de cette expérience-là. Mais on avait l'impression que ça tombait dans l'oreille d'un sourd parce que, lorsque le rapport Rochon a été écrit, la profession médicale était absente. On parlait de nous dans une phrase, on était la clé de voûte du système, mais, dans les 800 autres pages, on était absents. Et, comme le projet de loi 120 découlait directement du rapport Rochon, eh bien, on ne s'y retrouvait pas non plus et, plus que ça, même de façon structurelle, on était balayés de tous les postes où on pouvait avoir une certaine influence dans la gestion.

Cet été, ce qui s'est passé, pour ceux qui étalent inquiets de ce qui s'est passé derrière les portes closes, ce n'est pas de la négociation qu'on a faite; on a fait des échanges avec le ministère pour mettre en place un partenariat. La profession médicale croit que, si on met en place un partenariat, on va être en mesure de régler de gros problèmes comme celui des effectifs médicaux et d'autres problèmes de financement de systèmes de santé comme on en discute aujourd'hui. Quand on parle de partenariat, pour nous, ce n'est pas une question de dire que la balle est dans le camp du ministre ou que la balle est dans le camp des docteurs. Du partenariat, pour nous, c'est un partage 50-50 des responsabilités, c'est un partage 50-50 des succès et des échecs de l'entreprise, et c'est à ce niveau-là qu'on est rendus. On doit vous dire que, depuis cet été, au niveau local, il y a eu une sorte de regain d'énergie, d'espoir qui a été créé puisque, depuis neuf ans, bien qu'on disait dans une loi qu'il faudrait accentuer la collaboration médico-administrative, ça ne s'était jamais mis en application. Actuellement, on pense qu'on va pouvoir débloquer de ce côté-là.

Au niveau des conseils régionaux actuellement, les conseils régionaux essaient de mettre en place, même avant la lettre si on veut, l'application du projet de loi 120, les commissions médicales régionales. Notre problème actuellement, c'est au niveau du ministère; on ne sait pas encore si le ministère veut vraiment faire du partenariat. On a fait nos déclarations d'amour, la bague est là, mais on n'a pas encore vu la main tendue pour la prendre.

Pour nous, donc, le partenariat, ce n'est pas une question de philosophie, ce n'est pas une question de pouvoir, c'est une question de rentabilité, c'est une question d'investir dans l'expertise médicale pour mieux gérer le système de santé. Des exemples de ça, ce n'est pas de la philosophie, c'est concret. Si on regarde dans une région comme Montréal, où il y a beaucoup de salles d'urgence, il serait probablement plus pertinent d'en avoir quelques-unes d'ouvertes 24 heures par jour, 7 jours par semaine, pour donner un meilleur service en mettant en commun des ressources. Il serait probablement beaucoup plus pertinent de mettre en commun des ressources, par exemple, en neurochirurgie ou en chirurgie cardiovasculaire dans le but de donner un service adéquat, avec les bonnes ressources et au bon endroit. Mais ça, ces décisions-là, ça ne se fait pas par des fonctionnaires ou certains fonctionnaires dans un bureau; ça se fait en collaboration avec les experts, parce que ça a des impacts sur la qualité des services de santé.

D'autre part aussi, quand on veut responsabiliser les gens comme ça au niveau régional, ça demande des incitatifs, et l'incitation pour le médecin, c'est de réaliser que si on dit qu'on va faire dans 2 endroits de la neurochirurgie, à Montréal, plutôt que dans 8 ou dans 10 et que,

finalement, ça va être aussi difficile de la faire dans 2 endroits qu'actuellement dans 6 endroits, eh bien, à ce moment-là, c'est sûr que ça ne marchera pas. Si on met ensemble nos ressources et qu'on nous assure qu'il va y avoir des ressources matérielles, si on nous assure qu'on va avoir des ressources humaines, qu'on va avoir des espaces et que les patients vont vraiment avoir de l'accessibilité à ces services, eh bien, je pense que, là, on va avoir de l'incitation, il va y avoir la possibilité d'aller de l'avant.

La même chose aux niveaux national et provincial. On pense que dans chacun des établissements il s'est fait des politiques positives. Quand on parte des rayons X du poumon, dans beaucoup d'hôpitaux ça fait longtemps, ça fait huit ans qu'on ne fait pas, de routine, ce genre d'examen en préopératoire parce que le coût-bénéfice n'était pas là, mais la profession médicale n'avait aucun moyen concret d'imposer ou de faire des dialogues interétablissements, ou régionalement, ou même au niveau provincial pour donner ce genre de directives. C'est sûr que la Corporation émet des orientations, mais c'est très différent de ceux qui sont sur le terrain.

Au niveau gouvernemental, évidemment, des politiques nationales en traumatologie, en cancérologie, on est certains que, ça, ça peut apporter des impacts coûts-bénéfices très importants. Là-dessus, on pense que le ministère doit donner l'exemple. Quand le ministère prend des décisions, on pense qu'il devrait traiter un peu la santé comme la justice, s'élever au-dessus de ça et ne pas se servir de la santé pour prendre des décisions avec intérêt politique, soit du saupoudrage d'équipement ou des décisions qui, finalement, ne relèvent pas de la rationalisation des ressources.

Ce que je voudrais vous dire, en terminant, c'est que ce qui est important pour la santé, c'est qu'elle soit de plus en plus un moteur économique. On pense qu'actuellement on investit quand même beaucoup d'argent dans ce secteur et que cet argent, tant qu'à l'investir, devrait devenir rentable. On pense que la santé est créatrice d'emplois. On pense que la santé peut mettre en valeur la petite et la moyenne entreprise. On sait ce que ça prend, un hôpital: ça prend des équipements, ça prend des vêtements chirurgicaux, ça prend du mobilier. Donc, il y a création d'emplois, impact sur l'économie et on ne devrait pas, à cause de problèmes financiers, niveler par la base, empêcher les pointes d'excellence. Au contraire, on devrait stimuler les pointes d'excellence, stimuler la recherche. Ce qui se développe actuellement au point de vue recherche biomédicale à Montréal, c'est très important et, à ce moment-là, ça va dans le concept de développer des grappes économiques, ça va dans le concept d'exporter des produits de qualité et ça va dans le concept de la valeur ajoutée, d'ailleurs, que votre gouvernement a mis de l'avant ces derniers mois.

Alors, écoutez, c'est le message qu'on voulait vous passer, en vous disant que la profession médicale est prête à la collaboration. On est prêts à regarder... On a parlé dans notre mémoire des services de base, du panier de services. On est prêts à regarder ces choses-là, mais, à ce moment-ci, c'est un véritable partenariat que l'on veut et non pas simplement une gestion de contrôle comme on a déjà connu ou qu'on a failli connaître avec ce qui avait été déposé antérieurement. Merci.

Le Président (M. Joly): Merci, monsieur. Dr Richer, avez-vous quelque chose à ajouter? (15 heures)

M. Richer: En guise de conclusion, M. le Président, on se rend compte que le coût de notre système de santé, bien qu'il soit élevé, est un coût qui est contrôlé, qui se compare avantageusement avec ce qui se fait ailleurs au pays, en Amérique et dans le monde occidental. La performance du système, elle est également bonne. Elle est même excellente, je pense. L'indice de satisfaction, d'ailleurs, des patients le démontre bien. Les indicateurs de santé qu'on a ici, au Québec, même si ce sont des indicateurs qui sont imparfaits, comme l'augmentation de l'espérance de vie et la diminution de la mortalité périnatale le démontrent bien aussi. Les problèmes principaux qui nous affectent actuellement et qui sont sérieux, c'est la croissance insuffisante de notre PIB. Donc, on s'appauvrit; on n'est pas assez riches. Je pense qu'on devrait travailler davantage à augmenter notre richesse collective. Et je suis conscient que ce n'est pas le travail unique du ministère de la Santé et des Services sociaux, c'est un travail de gouvernement pour nous sortir de la dèche. Ce n'est pas vrai qu'on doit rester pauvres puis être contents de l'être. Si on est pauvres, sortons-nous-en. Et, pour faire ça rapidement, il faut payer notre dette publique au plus coupant pour nous dégager une marge de manoeuvre de sorte qu'on respire un petit peu. C'est probablement le seul domaine au Québec dont les dépenses ont crû d'une façon désordonnée et compriment tout le reste. Ce n'est pas le système de santé qui comprime, le système de santé est comprimé par ('augmentation du service de la dette. et je pense, en terminant, que ce que nous disait le dr marier, au fond, pourrait se résumer à une phrase: mieux intégrer le médecin à la gestion du système de santé. voilà un système qui coûte 12 000 000 000 $. on sait qu'on est des générateurs de coûts, pour reprendre l'expression qui est souvent employée par les technocrates. on est des générateurs de coûts peut-être, mais on n'est pas responsables de la maladie des patients du québec. on essaie tout simplement, avec la formation qu'on a eue, de les soigner du mieux qu'on peut. et ceci génère des dépenses de 12 000 000 000 $ dans notre système. je pense que la contribution des médecins

à la gestion de ce système-là peut faire qu'on peut peut-être trouver des solutions qui rendraient la gestion plus efficace et plus efficiente pour employer d'autres termes à la mode. Et voilà, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, Dr Richer, merci, messieurs. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): D'entrée de jeu, M. le Président, je pense qu'il faut peut-être dire que mon collègue et moi avons convenu que je ferais la première demi-heure, qu'il ferait la deuxième demi-heure et qu'on se partagerait le reste par la suite, étant tous les deux concernés par les problèmes que nous soulevons aujourd'hui. C'est à n'en point douter un moment très important de cette commission, puisque vous avez été, depuis le début, le point de mire, et même en votre absence. Lorsqu'on fait la lecture des mémoires qui viennent, vous êtes, plus souvent qu'autrement, Identifiés comme étant des générateurs de coûts assez importants dans le système.

Je suis très heureux qu'on se revole, effectivement, et de constater à nouveau qu'il y a une main tendue et que, si j'ai bien compris, M. Marier, il n'y ait pas nécessairement la main tendue du côté du ministère. Je voudrais, d'entrée de jeu, pour bien s'assurer qu'il n'y a pas d'équivoque, rappeler qu'on a quand même réglé un dossier qui n'est pas sur la place publique, mais qui est assez intéressant sur l'entrée de spécialités en médecine. Il a fallu qu'il y ait certainement une main qui aille rejoindre l'autre sur le plan de la compréhension des problèmes et de la volonté de régler les problèmes des médecins en spécialité de base dans les réglons du Québec. Et il faudrait peut-être faire attention avec ce genre d'affirmation là, parce que les technocrates à l'occasion, eux aussi, peuvent être irrités d'un certain nombre de propos.

Dans ce sens-là, je suis très heureux, et je dois vous dire que je l'attendais ce moment-là, moi aussi, depuis un certain temps, sur le plan des échanges que nous pourrions avoir sur - pas les structures, parce que, là, on n'est pas dans les structures - ce qui conditionne véritablement le système quant à 12 000 000 000 $. Et les 12 000 000 000 $, on en parle et on va en parler pendant tout le temps qu'on va échanger ensemble de manière très ouverte. Puis je sais que vous le faites et c'est votre volonté. Dans ce sens-là, oui, c'est très ouvert, ça va l'être. Les questions vont être assez précises, merci, aussi, à partir du moment où on aura éliminé ce qui m'apparaît être une affirmation dans votre document, d'entrée de jeu, qui n'est pas bonne, que je conteste. Et c'est clair qu'on pourrait se parler de chiffres pendant bien longtemps, que vous pourriez m'arriver avec: Si ce n'est pas 75, ça peut être 80, ça peut être 65, ça peut être 70. Et on va se chicaner pendant une éternité. Le Dr Marier m'a fourni une très bonne occa- sion. est-ce que c'est 5,2 %? est-ce que c'est 5,6 % est-ce que c'est 6,2 %? est-ce que c'est 6,9 %? si j'ai bien compris, vous avez dit qu'à 5,6 %, si on faisait la démonstration des 5,6 %, que 5,6 %, c'était très acceptable. je relève le gant, cette main tendue de 5,6 % par rapport au pib, bien sûr. on se comprend bien, parce que c'est de ça dont il était question. je relève le gant et nous allons vous faire la démonstration que 5,6 %, c'est au-delà de ça que nous investissons au québec. et à partir du moment où ce sera 5,6 % et plus, on devra comprendre que ce que nous investissons est selon la capacité ou au-delà de la capacité des québécois d'investir dans leur système de santé et de services sociaux. donc, je ne me chicanerai pas plus longtemps que ça sur ces chiffres-là; je voulais quand même qu'on en parle, puisque vous les mettez dans votre document d'entrée de jeu, qui est inspiré, si j'ai bien compris, en bonne partie, de chiffres que rochon a publiés il y a quatre ans, qui, depuis, ont été mis à jour. ils sont très défendables de la part du ministère et on va faire cette démonstration avec le plus grand des plaisirs. donc, là-dessus, on va se revoir. je comprends qu'aujourd'hui vous nous dites publiquement que, dans la mesure où cette démonstration de 5,6 % est faite, ça irait selon la capacité de payer des québécois. moi, ça me convient. en autant que je vous ai bien compris, on va tenter de faire la démarche ensemble, de se comprendre sur les chiffres et, à partir de ça, il est clair que dans la mesure où, ça, ce serait établi - je ne présuppose pas qu'on va réussir à vous en faire la démonstration, on va le tenter, soyez-en sûr - je suis pas mal sûr de relever mon pari à ce moment-ci.

Mais plaçons-nous dans cette hypothèse-là, que c'est celle-là qui a 12 000 000 000 $ dans le système et que ces 12 000 000 000 $, c'est ce qu'on peut faire au maximum ou exiger des citoyens du Québec pour leur système de santé et de services sociaux. Il faut donc, par conséquent, aborder un certain nombre de questions avec vous, qui sont sur toutes les lèvres depuis le début de la commission, même avant la commission, et qui le seront aussi après puisque vous êtes au centre de ce système-là. Donc, ce sont des mesures d'efficience et d'efficacité, parce qu'il semble bien que dans les mesures d'imposition, de taxation, de ticket modérateur - on ne parle pas de ticket orienteur parce que, lui, il visait à ne pas avoir une cent - même si l'opinion publique est très favorable au tichet modérateur, de ce qu'on comprend ce matin, c'est des mesures qui sont plus difficiles. Ça ne veut pas dire qu'on les met de côté, mais allons voir ce qu'on peut aller chercher, ce que le système actuel peut nous donner.

Donc, dans ces mesures d'efficience et d'efficacité, avec votre permission, je commencerai pas vous interpeller sur le mode de rému-

nération et non sur la rémunération. D'entrée de jeu, je pense qu'il faut dire de manière très claire que si nous avons réussi, au cours des dernières années, à contrôler nos dépenses de manière macro - je pense qu'il faut le dire de manière très claire - c'est en bonne partie dû au travail qui a été fait sur les salaires des employés et aussi sur la rémunération des médecins. Donc, ceci étant dit, c'est clair que les médecins, dans cette période, ont collaboré au contrôle des coûts. Ceci est très clair et les chiffres le démontrent de manière très nette.

Quand je parie de mode de rémunération, c'est davantage le mode dans lequel nous sommes actuellement. Il nous incite à une dynamique inflationniste. Donc, lorsqu'on est à l'acte, le système peut nous interpeller à l'acte. Je comprends que je n'ai pas, quant à moi, la formation et toute la crédibilité qu'il faut pour convaincre des médecins. Je comprends que mes technocrates, peu importe qui ils sont - parce qu'on parle souvent des technocrates - n'ont pas toute la crédibilité qu'il faut pour être capables de vous convaincre. Laissons parier des médecins. Laissons parier les médecins qui se sont présentés devant nous hier soir.

Des médecins en santé communautaire nous disaient, hier soir - et je vais vous lire un petit bout de texte au cas où ça vous aurait échappé, parce que je sais que vous avez été assez présents à cette commission depuis le début - sous le titre «La rémunération des médecins», ce qui suit: «L'argent étant le nerf de la guerre, la vraie réforme risque de venir avec cette discussion sur le financement. La réforme, deuxième étape, pourrait être la vraie réforme en misant, cette fois, sur ceux qui prescrivent nos 12 000 000 000 $ de services au Québec. Cette réforme pourrait se faire par les médecins. «En effet, le véritable consommateur, celui qui transforme les symptômes des patients en visites, consultations, hospitalisation, tests de laboratoire, examens radiologlques, chirurgies, le véritable consommateur, c'est le médecin. La réforme actuelle, celle du financement, devra lui permettre maintenant de transformer ses gestes de clinicien. Le médecin a perdu le contrôle du menu médical. Il est malicieusement entraîné malgré lui dans une production associée directement à un tarif. Le médecin a perdu son autonomie scientifique, il ne peut pas faire ce qui lui semblerait plus pertinent, plus profitable, sans oublier ce pourquoi il est payé. Comprenons-nous bien, nous ne disons pas que le médecin ne mérite pas ce qu'il gagne, nous disons que le système actuel lui dicte ce qu'il doit faire pour le gagner. La rémunération à l'acte lui a enlevé son autonomie professionnelle. Quelques exemples pourront démontrer que le système n'encourage pas: le pédiatre...» Il y a toute une série d'exemples. J'en ai pris trois évidemment qui font mon affaire. J'imagine que je pourrais prendre les huit et les huit feraient l'affaire aussi, «...le pédiatre, à se départir de la majorité de son travail qui consiste à voir des bébés normaux; l'omnipraticien, à créer des séances collectives d'Information pour ses patients hypertendus, fumeurs, obèses, ou à organiser différemment les 50 % de ses activités jugées délégables à des infirmières, selon certaines études; l'internlste, à renvoyer à la maison après deux jours les infarctus non compliqués.»

Là, ce n'est pas moi, ce n'est pas mes technocrates, c'est des médecins qui le disent et je pense que, si on n'aborde pas aujourd'hui le mode de rémunération, est-ce que le mode de rémunération n'est pas effectivement, dans notre système, un des problèmes très importants quant au contrôle des coûts et à l'efficience ou l'efficacité de ce qu'on peut gagner à l'intérieur du système?

M. Richer: Je peux bien en parier un petit peu. Le mode de rémunération, nous autres, ça fait longtemps qu'on est assis à la table avec le ministère pour en discuter. On a une certaine expérience, probablement pas mai plus que les médecins qui vous ont parié hier, en santé communautaire, surtout s'il faut qu'on reproche à des médecins de faire des séances d'information sur l'hypertension et le danger de la cigarette, ça m'étonne beaucoup d'un médecin qui vient de la santé communautaire. S'ils connaissent autant les chiffres que la pratique de la médecine, je pense qu'ils perdent de leur crédibilité. Enfin, on pourra y revenir. nous, nous n'attachons aucune vertu, et vous le savez, à un mode de rémunération plutôt qu'à un autre. on a 2000 médecins omnlprati-ciens, pour votre information, qui sont rémunérés à salaire actuellement dans le système. il y en a un certain nombre, et ce nombre-là atteint un plateau, qui sont rémunérés à la vacation. encore là, la vacation, c'est un mode de rémunération au temps, et les autres sont rémunérés à l'acte. je pense qu'il y a des avantages et des désavantages. il m'apparaît inopportun de rejeter complètement le blâme sur le mode de rémunération à l'acte dans notre système comme générateur de coûts. je pense qu'il y a des avantages dans la rémunération à l'acte. entre autres, avec nos systèmes de plafonnement, vous le savez, nos systèmes de revenus moyens, quand on dépasse l'objectif collectivement comme cette année d'ailleurs, les 5 % d'augmentation négociée se traduisent par une augmentation de 3,54 %, parce qu'on a dépassé de 1,41 % l'année passée.

Donc, il y a un remboursement au ministère de la Santé des sommes qui sont perçues en trop. Par ailleurs, il faut bien admettre que la rémunération à l'acte est un mode de rémunération qui favorise aussi la production et, dans notre système actuel, la productivité, ce n'est quand même pas une chose à rejeter. On dirait que c'est péché d'être productif dans notre système. 51 le ministère est assez riche pour se permet-

tre - et ça, vous pourrez en parler à un de vos prédécesseurs, M. Castonguay, et peut-être M. Forget aussi - de mettre tous les médecins à honoraires fixes, allez-y, je vous souhaite bonne chance. Vous allez vous rendre compte qu'il y aurait peut-être intérêt à mettre certains fonctionnaires à l'acte. Ça augmenterait la productivité et ça nous empêcherait d'attendre aussi longtemps, des fois, pour avoir des services publics ailleurs. Ce n'est pas toujours mauvais l'acte. Je sais que ça peut générer des coûts, mais je pense qu'on a démontré qu'il n'y a pas d'abus dans notre système, autant par les dispensateurs de soins que par ceux qui les consomment, et je ne vois pas pourquoi, alors que les trois modes sont permis et alors qu'on essaie de préserver une certaine équivalence actuarielle - et vous en savez quelque chose - on mettrait tous les maux sur la rémunération à l'acte. Elle a des faiblesses, elle a des avantages, exactement comme la rémunération à honoraires fixes. Vous les connaissez très bien, d'ailleurs, les faiblesses et vous connaissez aussi les avantages.

M. Côté (Charlesbourg): Par ma question, je n'ai pas dit que c'était la source de tous nos maux. J'ai bien spécifié que c'était le mode globalement et que celui-là en était un. Il y a d'autres pays qui sont allés vers le salariat de médecins et qui n'ont pas réglé pour autant leurs problèmes de santé, leurs problèmes d'accessibilité. Je pense que ça m'apparaît à ce niveau-là assez clair.

Le Président (M. Joly): M. Marier.

M. Marier: Là-dessus, M. le ministre, et puisque vous avez lancé le débat, je pense que la profession médicale est sûrement prête actuellement à s'asseoir autour de la table et à évaluer les avantages et les désavantages des types de rémunération des médecins, d'autant plus que, comme je vous le disais tout à l'heure, comme médecins spécialistes, nous, avec la rémunération à l'acte, on a vraiment l'impression d'avoir été roulés parce que, comme on vous le disait tout à l'heure, on est passés de la première place à la dernière place. Et on n'était pas à salaire, on était à l'acte. Donc, pour nous, ce n'est sûrement pas une façon extraordinaire d'être rémunérés. (15 h 15)

Le deuxième point, c'est parce qu'on a toujours l'impression - et ça été véhiculé évidemment largement - que les médecins sont à la «castonguette» et, à ce moment-là, qu'ils peuvent produire et travailler jour et nuit et se faire des revenus importants. C'est vrai qu'il y a des individus qui peuvent peut-être faire ça. Mais s'il y a beaucoup d'individus qui font ça, en même temps, à cause du cadre de négociation qu'on a avec le ministère depuis 1976, avec les objectifs tarifaires, avec les revenus moyens bruts, les dépassements qui sont faits, on les repaie l'année passée et, comme on l'a dit tout à l'heure, les revenus sont diminués en conséquence. C'est-à-dire que si on dit: On a eu une augmentation de revenu de 5 %, on a dépassé de 2 % l'année d'avant, à ce moment-là, ça nous donne 3 % d'augmentation. Alors, c'est pour ça que je vous dis qu'on se sent très à l'aise d'en parler ouvertement. Malheureusement, nous, ce qui nous frustre le plus, c'est ce qui a été véhiculé dans la population, comme si on pouvait délibérément, disons, faire sauter la cagnotte à chaque fois. Plus que ça, on travaille dans les hôpitaux. On ne contrôle pas. Avec les fermetures de lits, avec les fermetures de salles d'opération, les fermetures de soins intensifs, les limitations des congés, etc., on n'a pas accès, ad lib, si on veut, à toutes les ressources comme ça peut paraître lorsqu'on regarde ça de l'extérieur. Alors, on pense actuellement qu'il y a des contrôles d'entrée d'étudiants en médecine, il y a des contrôles dans les postes de résidence, il y a des contrôles qui, au niveau de la gestion des hôpitaux, ont été bâtis. Et, en plus de ça, avec le gouvernement, les objectifs tarifaires, ça permet d'arriver à des résultats, justement, de contrôle de rémunération pour laquelle on se dit: Écoutez, dans nos prochaines négociations, M. le ministre, on va revenir, parce qu'on a l'intention de faire des pressions pour changer ça.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends. Le système qui a été établi, de plafonnement avec indexation, récupération l'année suivante, est un système qui a permis de contrôler de manière macro la rémunération. Je l'ai dit au départ et ça me paraît très clair de le répéter aussi. Et, par conséquent, ça ne s'est pas fait sur le dos des travailleurs sociaux, ça s'est fait sur le dos des médecins qui travaillent. Bon. Une chose est certaine, c'est que, par le mode de rémunération, ce que vous me signifiez c'est qu'il y a une ouverture à revoir les modes de rémunération, les différents modes, que ce soit à vacation, que ce soit à l'acte ou que ce soit à salaire, pour tenter de corriger les lacunes que nous pouvons avoir dans le système. Moi, j'en suis bien heureux, et je pense que c'est dans ce sens-là qu'on va réussir à progresser pour tenter de dégager des marges de manoeuvre à l'intérieur de ce qu'on a maintenant.

J'ai une autre série de questions de ce genre-là, et vous m'en avez presque volé une, dans votre présentation, M. Marier, sur le pulmonaire. Le CETS, qui a fait son rapport sur les radiographies pulmonaires de routine, nous a fait la démonstration qu'il y avait pour à peu près 10 000 000 $ d'examens qui ont été faits et qui étaient, à toutes fins pratiques, inutiles. Vous l'avez évoqué tantôt comme un des exemples où on pouvait être plus performants et utiliser l'argent à d'autres fins. Ce que vous me dites,

c'est que dans certains cas on pouvait le détecter dans un centre hospitalier, par exemple, en particulier, où ça a peut-être même été corrigé avant que le cets l'analyse. qu'est-ce qui fait, par exemple, que nos cmdp, qui sont là justement pour être dans des situations d'évaluation de ces choses-là, ne l'ont pas détecté avant ou ne l'ont pas transféré comme expérience dans les autres centres hospitaliers?

M. Marier: Bien, c'est une des raisons pour lesquelles on se demandait pourquoi vous ne les avez pas invités ici. C'est que les CMDP, dans la loi, dans chacun des centres hospitaliers, ont un rôle précis, bien clair. Les CMDP ont réalisé que ce rôle-là devait absolument déboucher sur une régionalisation. Ils ont travaillé depuis sept, huit ans à mettre en place des associations régionales de CMDP, et même une association provinciale pour passer des messages. Mais sauf que...

M. Côté (Charlesbourg): Je vous retourne la balle parce que, l'été passé, vous étiez bras dessus, bras dessous dans toutes vos démarches.

J'imagine que vous auriez pu l'être aujourd'hui aussi. Pourquoi ils ne sont pas là?

M. Marier: Parce que vous ne les avez pas invités.

M. Côté (Charlesbourg): Comment, je ne les ai pas invités? Je n'ai invité personne d'autre. Vous avez décidé de venir ensemble comme coalition, et, dans ce sens-là... Le seul que j'ai voulu avoir tout seul, c'est Augustin, de la Corporation professionnelle. Vous le savez, je vous l'ai dit.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): il ne faut pas se faire de cachette et il le sait aussi.

M. Marier:écoutez, on va dire au dr bois de venir s'asseoir avec nous et à ce moment-là... écoutez, c'est ça le problème. ça fait longtemps que la profession médicale essaie de mettre en place des mécanismes pour avoir un impact régional et un impact national. ça s'est fait à petits pas et là on en est rendus là. je pense que l'ouverture que vous avez faite cet été en disant «oui, on va aller dans les commissions médicales régionales, oui, on va aller avec une loi particulière et un conseil médical du québec», je pense que ça va dans le sens des objectifs que vous vous donnez. on devrait encore être plus productifs... ça, c'est un exemple, les rayons x des poumons, mais il y a beaucoup d'autres exemples qu'on peut faire au niveau national.

M. Côté (Charlesbourg): J'en ai d'autres; ne vous inquiétez pas, je ne vous laisserai pas partir comme ça, pour une fois qu'on peut se parler. Soyez sûrs de ça, j'en ai d'autres.

Ce que je comprends, quand vous évoquez le Conseil médical, c'est une question de main tendue aussi et le ministère a quand même réagi assez rapidement merci pour vous livrer le Conseil médical.

M. Marier: Oui, c'est un point positif.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, il ne faut pas se gêner pour le dire aussi de temps en temps quand il y en a.

M. Marier: Non, non, mais on cherche à établir...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Marier: C'est ce que je venais de vous dire, cher ministre, on cherche à établir un partenariat et on a cité ce point positif il y a quelques instants; que vous le souligniez encore, on est bien d'accord là-dessus.

M. Côté (Charlesbourg): Les tests de routine, ce qui est communément appelé des «tests de routine. Selon certaines études de l'Angleterre, on parle de plus ou moins 20 % de tests de routine qui sont questionnables et qui pourraient nous permettre de faire un certain nombre d'économies au niveau du Québec. Ce que je comprends, c'est qu'au Québec c'est plus ou moins 700 000 000 $ dont il est question en termes de tests de routine. Si on applique - soyons généreux, on ne prendra pas 20 %, nous autres, on est bien distincts; disons qu'on est bien performants et qu'on en fait moins que les autres - juste 10 %, ça signifierait au bout de la ligne 70 000 000 $ d'économie. J'aimerais vous entendre là-dessus. Vous allez me dire oui, et je vais vous le faire dire sur la place publique. Je me suis commis à l'occasion sur la place publique et ça aide un peu. Je vais vous faire commettre sur la place publique. Quelle est votre appréciation de cette situation spécifique des tests de routine qui impliquent 700 000 000 $ et, selon les études - on peut les contester - que plus ou moins 20 % de ces tests-là - je le mets entre guillemets parce que je ne suis pas médecin et je ne peux le juger moi-même - on pourrait s'en dispenser, donc avec des impacts sur le plan financier assez importants? Quelle est votre opinion là-dessus?

M. Brossard: Je peux répondre. Écoutez, je pense qu'il y a un grand pas qui a été fait il y a quelques années et qui continue à se faire dans plusieurs milieux hospitaliers où on a commencé à offrir des tests scindés et non pas des tests en «package deal»: 36 tests d'un coup. On envoyait le sang et on recevait 36 tests d'un coup. C'est le changement d'habitude qui fait en sorte qu'on

peut maintenant obtenir un test à la fols et bien distinguer l'utile de l'Inutile dans des «package deal» de 36 tests; cela a fait en sorte que, oui, on peut commencer maintenant à apprécier et à ne demander que l'essentiel dans ces tests-là.

Ce qui ressort de ce que vous mentionnez, que de 10 % à 20 % de certains tests seraient inutiles, c'est le fruit d'un domaine de recherche relativement récent qui est la recherche evaluative coûts-bénéfices des actes médicaux qui est un domaine de recherche qui est en explosion dans le milieu médical depuis, je dirais, une dizaine d'années à cause des pressions économiques qui existent partout et dans tous les pays. Cette recherche-là nous apprend des choses qu'on a constamment et d'année en année. Je suis prêt à reconnaître que l'ajustement ne se fait pas, une fois que le papier ou que le produit d'une recherche est sorti, en une semaine dans l'ensemble du monde. C'est un pan de recherche relativement récent qui est en évolution et qui, à mon avis, devrait peut-être être financé parce qu'il y a là des changements d'habitudes médicales qui ne pourront se faire que le jour où la science va montrer que c'est inutile. On ne peut pas faire plus en médecine que ce que la science nous dit qu'on doit faire à ce jour. Comme de fait, quand on apprend un élément neuf, ça demande un changement de conduite et ce changement de conduite demande une latence, je voudrais que, dans un domaine de recherche qui est en progression comme celui-là, l'évolution de nos connaissances fasse en sorte que, oui, il y a des changements d'habitudes qui sont possibles.

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'un objectif...

M. Marier: Si ça peut vous rassurer... M. Côté (Charlesbourg): Oui.

M. Marier: ...M. le ministre, ça fait plusieurs années qu'au sein des CMDP, au niveau des comités d'évaluation médicale, il y a du travail qui se fait de façon systématique là-dessus et que, comme on le dit, on s'ajuste évidemment à nos notions. Mais ce qui va probablement accélérer le phénomène, c'est la possibilité de se parier au niveau régional et la possibilité aussi d'avoir une concertation au niveau provincial parce que le travail qui se faisait dans un hôpital devait être recommencé dans l'autre et chacun multipliait les expériences en parallèle, si on veut, et c'est ça qu'on va pouvoir corriger avec ce qu'on a mis de l'avant.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais est-ce qu'il est pensable que l'on puisse à peu près avoir comme objectif 10 % de réduction de ces examens? Est-ce que c'est possible et qu'est-ce qu'il faut faire demain matin?

M. Richer: C'est bien difficile à dire, ça, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): De ce que je comprends, c'est encore plus difficile à réaliser.

M. Richer: Non, ce n'est pas ça. Vous pensez que la profession médicale a de la mauvaise volonté au départ, j'ai l'impression.

M. Côté (Charlesbourg): Absolument pas, absolument pas!

M. Richer: Ce que je veux vous dire c'est...

M. Côté (Charlesbourg): Absolument pas, c'est d'autres études ailleurs.

M. Richer: O.K., peut-être, mais comme le laissent entendre le Dr Marier et le Dr Brossard, quand on fait une recherche dans un hôpital, on a un petit bassin de population. On n'a aucun moyen, nous autres, les médecins, de faire véhiculer toute cette recherche, de faire que de l'hôpital Notre-Dame ça se rende le lendemain matin à l'hôpital à Sainte-Anne-des-Monts. Ce n'est pas si facile que ça, la régionalisation, vous le savez)

M. Côté (Charlesbourg): C'est en région ça!

M. Richer: C'est en région ça! De sorte que ce qu'on dit, le CETS, c'est une excellente initiative. On vous a proposé le Conseil médical du Québec, que vous avez accepté d'ailleurs. C'est tout à votre honneur. On pense qu'au niveau de ce Conseil on peut très certainement diffuser que si la radiographie pulmonaire de routine «préhosp» qui était un dogme dans mon temps, M. Côté... C'est vrai que je suis vieux, moi! Mais c'était un dogme dans mon temps. La médecine, ce n'est pas une science prospective. On ne peut pas dire: Aujourd'hui, je décide en me levant un matin que c'est dangereux de fumer. Ce n'est pas vrai. On le sait aujourd'hui parce qu'on a de l'expérience en aval. On ne peut pas arriver et penser qu'en amont on va décider de ce qui va être dangereux pour le monde. On n'a pas la science infuse. Donc, il faut, si vous voulez, marcher comme des scientifiques et dire: Voici, on va faire de la recherche là-dedans. Et on se rend compte que la radiographie pulmonaire qu'on a faite, avec toute la meilleure volonté du monde - c'est nos professeurs qui nous ont enseigné ça à l'université - ce n'est plus utile. Bon! À partir de ce moment-là, je pense que là on serait insignifiants et vous auriez raison de dire que ça ne marche pas, notre système, si on continue à les prescrire. Mais il faut quand même trouver un véhicule qui fait que cette information est transmise.

Aux analyses de routine. Je vais vous parler comme un omni qui a pratiqué 22 ans dans une

grande ville, Montréal. D'abord, au début, on pouvait prescrire une hémoglobine et une héma-tocrite, c'était possible pour un patient qui faisait de l'anémie. Mais, plus tard, c'est devenu presque impossible parce que, là, il y a eu les SMA 12, les SMA 24. C'était tout mécanisé. On nous disait à l'hôpital que ça ne coûtait pas plus cher de faire un SMA 12 - moi, je n'ai jamais cru ça - de faire 12 analyses plutôt que d'en faire une ou deux. Mais, ça, c'était le principe.

Mais l'autre affaire qui est encore plus importante que ça, c'est que dans une ville comme Montréal on a des listes d'attente. Ça prend 31, 32, 35 jours quand on prescrit une pauvre formule sanguine à un patient dont on veut vérifier l'anémie, si vous voulez. Ça prend 30 et quelques jours. Quand le patient a son rendez-vous 30 et quelques jours plus tard et qu'on reçoit le test, parce qu'on a voulu pratiquer comme il faut et qu'on n'a pas demandé le fer sérlque, à ce moment-là, en même temps, parce qu'on s'est dit, «je vais voir, Je n'aurai peut-être pas besoin de le demander», on se rend compte que, là, il faut le demander et ça prend un autre 30 et quelques jours. Qu'est-ce qu'on fait au point de vue pratique? On prescrit les trois analyses ou les quatre analyses en même temps pour éviter les 30 et quelques jours d'attente supplémentaire à notre patient. C'est une réalité avec laquelle on est pris. Il va falloir aussi qu'on discute de l'opportunité de rendre l'accessibilité aux tests de laboratoire dans les établissements, soit les hôpitaux, soit les CLSC, plus facile dans les grandes villes comme Montréal.

M. Côté (Charlesbourg): Je pense qu'on est dans la bonne ligne. On a de l'argent. Il faut faire la démonstration au peuple, aux payeurs de taxes que l'argent qu'on a est utilisé à la bonne place. Je n'ai pas la conviction que l'argent qu'on dépense aujourd'hui est toujours utilisé à la bonne place, même si de manière macro il est sous contrôle. À l'intérieur de ça - et c'est mon discours depuis deux ans - je pense qu'il faut s'interroger, et c'est ce qu'on fait. Je trouve ça intéressant qu'on puisse le faire de cette manière et qu'on se soit réservé le temps qu'il faut pour le faire avec vous autres qui vivez sur le terrain.

J'en ai une autre petite.

M. Richer: Allez-y!

M. Côté (Charlesbourg): Ah! J'en ai encore pour un bout de temps. Obésité. Là, je m'adresse au Dr Richer. Je suis à l'aise pour vous en parier, vous êtes l'un des premiers à m'en avoir parié dans les rencontres que nous avons eues. On estime à plus ou moins une centaine de médecins qui ont des cliniques qu'on peut apparenter à des cliniques d'obésité. Il faut être bien clair, il n'est pas question pour moi de questionner le «médicalement requis». Je pense que c'est assez clair. Mais, selon les analyses que nous faisons ou les données que nous avons, il y a plus ou moins 10 000 000 $ qui se perdent dans ce genre de cliniques là. C'est quoi qu'il faut faire pour s'assurer que ça ne se fasse pas?

M. Richer: ce n'est pas simple, on en a parié depuis un petit bout de temps. on est conscients qu'il y a un problème là. exactement comme les «fast-food» de la médecine. je n'ai jamais été gêné de vous en parier. ce n'est pas gênant non plus, c'est gênant que ça existe, tout simplement. quand on essaie de proposer quelque chose qui va lier la rémunération complète du médecin à une certaine appartenance à un établissement, je pense qu'on propose quelque chose qui est d'avant-garde. nulle part ailleurs au canada ça ne s'est fait. c'est dans ce sens-là qu'on veut, si vous voulez, participer à l'élimination de ces faux «fast-food» qui logent au-dessus de chez jean coutu, gratuitement souvent. ça, je pense qu'on doit le reconnaître, la profession médicale. on a une faiblesse là qu'on essaie de corriger, on vous le dit bien honnêtement. (15 h 30)

Comment le faire? Bien sûr, il ne faut pas encourager les obésologues de Québec, comme il y en a qui l'ont déjà fait, vous le savez, qui vont faire du cabinet à Baie-Comeau et à Rimouski, comme si les médecins de Baie-Comeau et de Rimouski n'étalent pas capables de traiter l'embonpoint qui peut nécessiter un traitement médical. Le problème, c'est qu'ils encombraient en plus les laboratoires. Vous savez ce que c'est, quand on veut éliminer des problèmes endocriniens... Je parie de quelque chose que je ne connais pas, mais mon collègue, ie Dr Brassard, peut en parier longtemps. Si on prescrit un certain nombre d'analyses pour voir s'il n'y a pas des déficiences endocriniennes qui produisent cette obésité-là, qu'est-ce qu'on fait dans une petite ville comme Baie-Comeau ou Rimouski? On bloque les laboratoires pour les vraies analyses courantes dont on a besoin le lendemain, puis pendant le mois suivant. Ces obésologues viennent faire du bureau. Ils reviennent la semaine suivante, puis deux semaines après, comme ils le font à Rimouski. Donc, on ne pense pas que ce soit un service intéressant pour la population. On est prêt, à ce moment-là, à discuter avec le ministère de moyens précis pour tenter d'enrayer ça, dans le respect de la liberté des pratiques. Je pense qu'il y en a qui font d'excellentes pratiques là-dedans, mais il y en a qui se sont réfugiés dans ça.

M. Côté (Charlesbourg): On me signale que mon premier bloc est déjà terminé. Alors, je vais laisser la chance à mon collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

Le Président (M. Joly): C'est ça. M. le

député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter, à mon tour, la bienvenue aux représentants des médecins. Oui, c'est important que vous soyez là. D'entrée de jeu, je dirais que ce que vous nous faites savoir aujourd'hui, et la façon dont vous le faites, c'est empreint de responsabilité et de respect. Je note, par exemple, au départ, un élément de votre responsabilité. L'un des vôtres, le Dr Brossard, est en négociation avec le gouvernement, et il n'a pas fait le quart d'un dizième d'allusion parce qu'il sait que ce n'est pas de ça qu'on discute ici. Ça, il faut le dire. C'est un conflit sérieux de ses membres avec l'employeur qui s'appelle le gouvernement du Québec, mais on n'a pas profité de la tribune qui est créée ici. Ça, c'est un signe - je veux le relever - de la profession médicale lorsqu'elle se présenté devant nous, pour essayer de voir - oui, finalement - ce qui arrive à notre système de santé et de services sociaux et pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.

Quant à moi, vous avez bien saisi l'essence de la situation, et je veux le répéter, peut-être sous un angle différent. Il y a, au départ, dans cette commission et dans le document du ministre, au moins 10 mythes, 10 éléments qui courent dans la société et qui ont été détruits par le document du 18 décembre dernier. Entre autres, un des mythes par rapport à la profession médicale, c'est que c'est surpayé. C'est le mythe le plus fréquent. Ce qui est indiqué: les citoyens non abuseurs; on contrôle bien nos affaires au Québec. Vous le répétez ici: on contrôle même plus que relativement bien; on contrôle très bien l'évolution de nos coûts. Du côté de la profession médicale, les discussions, les dépenses capées ou les salaires, la masse salariale enfermée dans un tout comme ça s'est fait au cours des dernières années, ça nous indique qu'on a un bon contrôle là-dessus et que, relativement parlant, par rapport aux autres provinces canadiennes en Amérique du Nord, nos médecins gagnent leur argent, et ils n'en gagnent pas des tonnes de plus, au contraire, que ce qui se passe dans les autres provinces ou ailleurs au Québec.

Cela ne nous empêche pas, par ailleurs, de se questionner sur l'efficience. Mais, avant d'arriver à cet élément de la séquence, vous diagnostiquez très bien qu'on fait nos affaires comme il faut, au Québec, sur le plan administratif. Du côté de la profession médicale, vous avez fait votre part aussi dans l'évolution du contrôle des dépenses - il y en a encore à faire aussi, chez vous et ailleurs. Sur le plan de ce que vous êtes comme consommateur de coûts, eh bien, c'est, en termes relatifs, bien proportionné par rapport à ce qui se passe ailleurs. Notre problème, c'est celui de la croissance insuffisante des revenus au Québec. Vous avez bien raison sur deux aspects. La croissance de notre PIB, ça s'appelle l'emploi. On n'ira pas vous imputer ça indirectement au... c'est la job d'autres. Deuxièmement, le désengagement magistral du gouvernement fédéral. Là-dessus, non plus, je n'irai pas très loin parce que vous diagnostiquez cette situation très bien. J'ose dire, cependant, avant de passer à la première question, qu'avec le malaise qui est introduit dans notre société par le désengagement fédéral, ce qui est introduit comme problème parce que les choix de dépenses du gouvernement fédéral ne sont pas les mêmes que les choix que nous avons faits au Québec - mettre 31 % de nos dépenses publiques en santé et services sociaux; eux, ils ont décidé de n'en mettre que 14 % - il ne faudrait pas que cela nous divise au Québec, en particulier avec nos professionnels de la santé.

Vous dites - et nous sommes d'accord avec cela: Regardons ce que nous pouvons faire avec les dollars que nous avons, en termes de rationalisation et d'efficience. Je voudrais revenir un peu aussi sur l'élément qui nous a été apporté hier par les départements de santé communautaire, sérieux et à la blague, parce que des mouvements étaient venus ici, à cette commission, pour nous dire: Ah! ceux-là, ce ne sont pas des vrais docteurs, ils sont virés au social. Il faut travailler avec ça aussi dans la société parce que ça existe. Il faut prendre ça comme des indices pour être capables de trouver la vérité et surtout les bonnes solutions.

À la réponse du ministre, Dr Richer, vous répondiez: Mais, la rémunération à l'acte, ce n'est pas générateur de coûts parce qu'il y a la productivité et il y a la limite supérieure qui est fixée. Il faut rétablir ça aussi. Mais ce que ces gens-là nous disaient, c'était: Nos médecins... le système oblige peut-être à poser un certain nombre de gestes qui ne sont pas assez productifs, compte tenu des problèmes que nous avons à affronter. Alors, ce n'est pas que c'est générateur de coûts, ce n'est pas qu'ils ne méritent pas, ce n'est pas qu'ils gagnent trop - c'est bien dit dans le document - c'est que les gestes qu'on les force un peu à poser médicalement ne sont pas les gestes les plus efficients pour l'ensemble des gens qu'ils ont à rencontrer, de la population du Québec.

C'est dans ce sens-là qu'ils donnaient cet exemple de l'omnipraticien qui a créé des séances collectives d'information pour ses patients hypertendus, fumeurs ou obèses, ou a organisé différemment les 50 % de ses activités jugées délégables à des infirmières. Moi, ma question est la suivante: Dans le contexte de l'efficience, dans le contexte de l'augmentation de l'efficacité de notre travail et du dollar qu'on y investit, est-ce que c'est réaliste de penser que, dans un temps relativement court, les professions médicales pourraient s'asseoir avec les intervenants concernés pour examiner l'attribution d'un certain nombre d'actes - d'actes dits médicaux, actuellement - pour faire en sorte qu'ils puissent

être attribués, peut-être, comme responsabilités à d'autres, de façon, je dirais, à garder ceux et celles qui sont préparés pour des interventions et des actes beaucoup plus spécifiques et d'une qualité ou d'une efficience plus grande, et qu'ils puissent avoir le temps de le faire? Est-ce que c'est pensable, ça, dans le contexte de ce que nous sommes et des dangers qui guettent notre régime, qu'on puisse s'asseoir et regarder ça avec d'autres professions et, disons-le carrément, par exemple, avec les DSC, avec les infirmières?

M. Richer: Oui, je pense que c'est tout à fait pensable, M. Trudel. D'ailleurs, on a commencé à le faire. Il n'y a pas très longtemps, on rencontrait, avec le sous-ministre délégué aux relations du travail, les gens de la Corporation d'urgences-santé. On nous demandait, dans un premier temps, si la profession médicale était prête à s'impliquer dans la formation des techniciens ambulanciers - à Montréal, entre autres, mais ça pourrait être à l'échelle du Québec - pour apprendre à ces techniciens ambulanciers certains actes médicaux qu'on doit faire en situation d'urgence, ce qui permettrait de retirer graduellement, au fur et à mesure de l'augmentation de la formation des techniciens ambulanciers, des médecins de la route. On a dit oui à cette question-là, sous réserve de discussions approfondies avec la corporation professionnelle. Nous n'avons pas le pouvoir, comme fédération... Ce n'est pas dans notre mandat de discuter, vous en conviendrez, de la délégation des actes, mais on n'est pas du tout contre ce principe. On vit avec ça à l'année longue, les médecins. On délègue des actes, de temps immémoriaux, à des infirmières dans les hôpitaux et à des aides-infirmières, etc. Donc, le concept en soi, c'est un concept avec lequel on est habitué de vivre. On est ouvert à cette discussion actuellement. On l'a démontré, il n'y a pas plus longtemps que le 15 janvier, quand, avec M. Charlebois, nous rencontrions la Corporation d'urgences-santé.

M. Brassard: Nous sommes très très disponibles à la délégation des actes. Il y a beaucoup d'hôpitaux où la liste d'actes délégués n'est pas la même d'un hôpital à l'autre, ce qui fait qu'il y a des médecins qui doivent passer des journées, des nuits à faire des ponctions veineuses ou à faire des prélèvements ou des gestes qui sont délégués ailleurs. Probablement que leur utilité serait plus grande s'ils étaient à poser des tâches diagnostiques et des tâches thérapeutiques qui sont d'un autre type. L'examen de la délégation des actes, en tout cas, pour ce qui est des médecins résidents, est quelque chose qui nous apparaît important parce qu'il y a une grande partie des tâches que nous faisons qui s'apparentent seulement lointainement à la médecine.

M. Marier: D'autre part, M. Trudel, je voudrais vous dire qu'une de nos 30 associations, à la fédération, c'est L'Association des médecins spécialistes en santé communautaire et que ces gens-là font partie du groupe quand même, de façon générale. Il peut arriver qu'il y ait des groupes de médecins qui se prononcent sur des sujets qui diffèrent de l'harmonisation de toute la profession médicale. Mais ça, comme je vous dis, on est dans une démocratie, puis il peut y avoir des nuances de pensées. Encore une fois, là-dessus, c'est à ça qu'on travaille actuellement, même entre nous, entre associations, pour essayer de voir comment on peut corriger des biais qui sont faits par l'attribution de certains actes, de certains tarifs, etc.

Actuellement, on travaille énormément sur ce qu'on appelle la valeur relative des actes chirurgicaux, ce qu'on appelle la VRAC; la valeur relative des actes diagnostiques, ce qu'on appelle la VRAD; et la valeur relative des actes médicaux, la VRAM, pour essayer justement d'harmoniser, pour donner une juste valeur, pour ne pas qu'on se retrouve avec des écarts inclus. De la même façon, même avant que le ministre nous le suggère, on avait déjà commencé à regarder des orientations quant à Inciter... parce qu'on a des problèmes dans nos distributions de services de santé. Puis, on se dit: Les médecins qui veulent aller en région, c'est important. Donc, il faut essayer de rémunérer les spécialités de base, en tenir compte. On travaille là-dessus également.

On travaille sur la rémunération pour essayer, dans certains secteurs où, justement, l'acte est plus difficile à définir ou qu'il y a des modalités différentes... Donc, on travaille sur des modes de rémunération pour favoriser un service qui, autrement, serait mal rémunéré. Alors, ce sont tous des dossiers auxquels on s'attaque actuellement et auxquels on est ouverts à la discussion.

M. Trudel: En tout cas, moi, je suis heureux de voir réitérer cette volonté de s'asseoir et de continuer ce travail parce que vous notez que l'ouverture est là et qu'on peut poursuivre. Je pense qu'on peut faire plus avec les choses que nous avons actuellement, surtout avec la compétence que nous avons dans l'ensemble du corps médical. Comme le disait le Dr Brossard, eh bien, il y a un certain nombre de gestes qu'on perçoit, en tout cas, comme étant des gestes de routine qui requièrent moins de grandes qualifications, au sens général du terme, qui pourraient nous amener à économiser, en quelque sorte, de l'énergie, du temps et de la compétence pour les mettre aux bons endroits. Si vous me dites: Bon, on fait la VRAC, la VRAD, la VRAM, etc., j'espère que ça va faire VROUM! VROUM! VROUM! à la fin, et qu'on va pouvoir en avoir plus en termes de services.

Maintenant, quant au nombre de médecins. Ça, c'est une question importante qui est soulevée dans le document et qui est présentée comme

une piste quand on parle du niveau de dépenses ou, encore, lorsqu'on parle de l'efficience ou de la rationalisation dans le système. Grosso modo, quand on fait les bonnes divisions dans le document par rapport à l'Ontario, il y aurait au Québec, plus ou moins, 500 médecins de plus, entre 400 et 500. Ça dépend où on situe la virgule puis le point, 400 à 500 médecins. C'est une partie importante de ce qui serait notre masse supplémentaire de dépenses dans le système.

Bien sûr, je sais qu'il faut coupler ma question avec la question de la répartition des médecins au Québec, mais, moi, là-dessus, je fais juste une parenthèse en disant: Vous avez relevé le défi à l'occasion de la 120 et on verra. On verra, il y a des choses qui se font actuellement. On vous voit un peu partout dans le circuit faire des propositions avec votre monde. Il faut qu'on en arrive à la solution, mais ce n'est pas ça, notre problème. Le problème, c'est, pour l'Instant, le nombre de médecins. Pour vous, est-ce qu'il y a trop de médecins au Québec, premièrement? Deuxièmement, est-ce que l'idée de contingenter davantage, un petit peu plus, l'entrée en faculté, c'est une idée qu'on doit continuer à examiner pour en arriver à une moyenne de médecins par tranche de population qui soit à peu près celle des pays industrialisés? (15 h 45)

M. Richer: Ce n'est pas facile de répondre à cette question-là avec des indices de certitude qui soient élevés. Il est sûr qu'on se multiplie à un rythme plus rapide que la population, en général. Ça, on en a parié au ministre - dans le temps, c'était M. Johnson - en 1980. Si les statistiques démontrent qu'on va 3,2 fois plus vite que la population, en termes d'accroissement, je ne sais pas quand on va dépasser un seuil critique. Mais la simple loi mathématique va faire qu'un jour on va dépasser. Est-ce quand on va être 50 000 docteurs au Québec? Je pense qu'on va l'avoir dépassé depuis très longtemps, à ce moment-là. Est-ce qu'on l'a dépassé, actuellement? C'est difficile à dire, compte tenu qu'il faut aussi prendre en considération d'autres facteurs qui viennent, si vous voulez, mettre une sourdine à ça.

Il y a le vieillissement de la population médicale, il y a le vieillissement de la population en général. Il y a aussi les changements de valeurs chez les médecins. Dans notre temps, on travaillait facilement 70 ou 72 heures. Ce n'était pas plus intelligent qu'il le faut, mais c'était ça, les circonstances, dans ce temps-là. Ce n'est peut-être pas souhaitable que ces moyennes soient maintenues, mais je pense que les jeunes médecins, comme tous les autres éléments de la population, veulent avoir une vie personnelle un peu plus satisfaisante, si vous voulez. Donc, il faut tenir compte de ces facteurs-là.

Il faut également tenir compte de la grandeur de notre province. Évidemment, on est la province la plus grande du Canada. On est aussi distinct par ça. On est la province la plus grande, avec des territoires qu'il faut desservir, vous le savez, de la façon la plus satisfaisante possible. Ceci dit, je pense que mon collègue spécialiste aura d'autres interventions à faire là-dessus, mais il faut agir avec beaucoup de précautions sur ces facteurs de multiplication des médecins avant d'arriver à dire: C'est quoi, le chiffre absolu, idéal? On se rend compte qu'on est beaucoup, actuellement, mais est-ce qu'on est trop? Encore, ce n'est pas facile à dire.

M. Marier: Là-dessus, j'aimerais ajouter que l'information de 3,2 fois l'accroissement de la population date déjà de quelques années et, actuellement, on serait beaucoup plus près du chiffre de 1,7 fols l'accroissement de la population, ce qui est déjà moindre. Si on ajoute les facteurs correctifs que le Dr Richer vient de mentionner, soit la féminisation de la profession, le changement de valeurs et d'habitudes de vie, le vieillissement... Lorsqu'il parie des spécialistes, de la médecine spécialisée, à ce moment-là, il va falloir être prudent, encore une fois, avant de prendre des décisions qui auront des répercussions sur plusieurs années. Ce que je voudrais également ajouter, c'est que, déjà, il existe au Québec... Si vous faites mention du rapport Barer-Stoddart qui a été publié et dont les ministres de la Santé ont adopté les grandes lignes, c'est qu'on est déjà 10 ans en avance là-dessus, au Québec. Déjà, le ministère a le pouvoir de contrôler les entrées dans les facultés de médecine. Déjà, le ministère contrôle les postes de résidence avec les cadres de référence qu'il avait mis en place. Déjà, ces contrôles étaient là.

Ce que je voulais vous dire également, c'est que cet été, quand on a abordé le dossier des effectifs médicaux, on s'est rendu compte comment, désespérément, on manquait de données fiables et valables pour porter un jugement. Alors, nous, rapidement, on a essayé de ramasser les données parce qu'il fallait travailler vite. On avait des délais très courts. Le ministre voulait qu'on soit efficace et efficient et, à ce moment-là, on a donc consulté les DSP, nos présidents d'associations, la Corporation, les statistiques disponibles au GRIS, avec M. Contandriopoulos. À ce moment-là, c'est que, si on superposait ça, on n'arrivait pas aux mêmes chiffres.

Actuellement, on est en train de travailler à avoir des banques réelles de ce que sont les besoins en effectifs et de ce que sont vraiment nos effectifs médicaux. Moi, je suis toujours un gynécologue, officiellement. Je suis supposé être à temps plein pour faire de la gynécologie, mais je suis un président de fédération et je n'en fais plus de la gynécologie. C'est toutes des choses comme ça qu'on doit évaluer. Il y a des gens qui sont malades, qui travaillent à demi-temps. Il y a des gens qui, pour des raisons X, ont des profils

de pratique très différents. Ce sont toutes ces données-là qu'on va devoir faire, établissement par établissement, association par association, région par région. C'est ce travail-là auquel on s'est attaqué depuis l'été dernier. Ce qu'on a fait, c'est qu'on est sorti des grandes lignes et on a essayé de dire: Prudence pour ne pas nuire aux services de qualité que la population est en droit d'attendre des médecins du Québec.

M. Trudel: Ça veut donc dire, à cet égard-là, que vous ne recommandez pas au ministre actuel de la Santé d'adhérer à l'entente avec les neuf autres ministres de la Santé au Canada, qui ont décidé à Banff, la semaine dernière, par consensus, de couper de 10 % les inscriptions dans les facultés universitaires à travers le Canada.

M. Richer: On dit que ça a été fait, M. Trudel, pour nous autres, ici, en 1983-1984. il y a eu des coupures de 5 % par année pendant trois ans dans les facultés de médecine. On est en avant des autres, ce n'est pas pour rien. Dans ce sens-là, on dit tout simplement au ministre: Soyez prudent en considérant ces chiffres-là parce qu'on a besoin d'études complémentaires. Il se peut que ces études-là confirment qu'on est trop, mais, avant de faire ça, je pense qu'on est mieux de regarder comme il faut. Comme le dit le Dr Marier, il y a beaucoup d'autres considérants à examiner comme il faut avant de déterminer exactement quelle est la population médicale au Québec.

M. Brassard: Je vous dirai, M. Trudel, que quand je suis rentré en médecine, il y a déjà 11 ans - ça ne paraît pas, comme ça - notre groupe était de 210. L'année suivante, le groupe qui entrait après moi, ils étaient 200. Le groupe suivant, ils étaient 180. Le dernier groupe qui est rentré était de 160, dans la même école de médecine. Oui, les entrées, les admissions en médecine ont été coupées. Oui, la gestion des postes de résidence a été faite très étroitement. Oui, nous avons tous participé à ça dans le cadre de la table de concertation qui s'en occupe, et nous avons bien compris qu'il fallait contrôler le nombre de médecins. Toutefois, il y a des choses qui sont des imprévisibles: ce sont le vieillissement de la population, les nouvelles maladies, le fardeau que la population présente, les demandes en soins médicaux s'accroissent, les médecins travaillent de moins en moins d'heures, et ils ont changé. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut être très prudent, ne pas couper plus parce qu'on risque de se trouver finalement dans une situation déficitaire en termes de capacité à donner des services médicaux. Ce n'est pas si évident que ça qu'on a un surplus extraordinaire et ce n'est pas aussi évident que ça, au fond, avec les changements d'habitudes en pratiques médicales, qu'on n'est pas en train de couper, qu'on ne se coupe pas nous-mêmes, en fait, en pratiquant différemment au fil des ans et qu'on ne risque pas, en coupant aussi en nombre, de dépasser une limite critique.

M. Trudel: II s'agit, dans un premier temps, d'établir ce qu'est le véritable médecin équivalent à temps complet, pratiquant sur le terrain, avant de porter un jugement définitif là-dessus. C'est important que les chiffres soient mis sur la place publique pour les gestionnaires publics. Deuxièmement, c'est un mythe durable ça. Pour ne pas s'aventurer dans des voies qui pourraient nous coûter cher... Effectivement, si on s'aventurait dans une coupure supplémentaire au niveau des places en faculté de médecine, sur la foi de chiffres qui ne traduisent pas la réalité, ça va être dramatique dans 15 ou 20 ans, tout en constatant qu'on a été sept ou huit ans en avant des autres, si j'ai bien compris, une autre fois au Québec. Bon! Voilà! C'est bien établi pour ce bout-là qu'on a commencé, oui, surtout que ça prend 10 ans pour former un spécialiste. Alors, on n'a pas le droit de se tromper au départ parce que ça fait long avant de pouvoir se reprendre. Il faut être absolument sûr là-dessus. C'est important. Si vous faites ce travail-là, Dr Marier, là-dessus, il faut nous le communiquer, je pense, très rapidement.

Ça va achever, pour moi aussi, ma portion dans pas grand temps. Je voudrais qu'on touche un petit peu à la question de - expression maintenant consacrée - la révision du panier de services en essayant de trouver les bonnes définitions de ce que ça veut dire réviser le panier de services. Pour d'aucuns, réviser le panier, ça veut dire, comme image, actuellement, dans le contexte: couper les services d'optomé-trie, l'examen de la vue; couper le curattf au niveau des dents pour les moins de 16 ans. Ça veut dire couper des pans de services qui sont actuellement assurés. Pour d'autres, ou d'une façon plus raffinée, réviser le panier de services, ça veut dire: Est-ce qu'on peut - je vais essayer de faire une image pour décrire la situation - prendre la brique de l'ensemble des actes qui sont couverts par la RAMQ? Est-ce qu'on peut se reposer la question sur la pertinence, l'efficience, le médicalement requis, pour le mieux-être de la personne, de l'ensemble des actes qui sont actuellement couverts? Première question, quant à moi: Est-ce que, oui, il est possible, dans un premier temps, et souhaitable que l'on repasse à travers l'ensemble des services assurés, qu'en quelque sorte l'on fasse le ménage à partir du critère «médicalement requis pour le mieux-être», et qu'on puisse donc procéder à cet examen de révision du panier de services assurés en matière de santé au Québec à partir du critère «médicalement requis pour le mieux-être de la personne». Est-ce que c'est possible, est-ce que c'est souhaitable d'en arriver à faire cela?

M. Richer: C'est certainement possible, on vous le propose d'ailleurs dans notre mémoire. Il y a plusieurs façons, vous dit-on. En fait, notre mémoire aurait pu comporter 300, 400 pages, mais, par déférence pour les commissaires, on s'est dit: Peut-être qu'on va le résumer un petit peu.

M. Trudel: Merci, vous avez compris ça.

M. Richer: Mais on pourrait développer chacun des items qu'on a mis, pas comme contribution, si vous voulez, mais comme analyse qu'on fait de la situation. Quand on dit qu'on est prêt à participer à une redéfinition des services médicaux de base pour établir lesquels sont essentiels et lesquels sont moins essentiels et que, dans ce contexte-là, les moins essentiels pourraient appeler une contribution monétaire du patient, ça répond exactement à votre question. Il y en a, des services comme ça. On en a déjà fait, des assurances sélectives, si vous voulez. Pensez à la phlébologie qui a été désassurée, dans le temps que M. Lazure était ministre de la Santé, donc en 1978 ou autour de... Il y en a eu d'autres. Tout ce qui touche l'esthétique n'est pas assuré.

Regardez l'exemple qui se passe au Manitoba actuellement. Au Manitoba, on a jugé bon de désassurer les verrues, les petites tumeurs bénignes, l'exérèse des kystes sébacés, des choses vraiment bénignes. Pour une clientèle donnée, disons, les moins de 14 ans, je pense que c'est resté assuré; je ne voudrais pas vous induire en erreur, mais c'est verifiable. Pour les plus de 14 ans, on dit: C'est bénin, c'est de l'esthétique, une verrue, il nous pousse toujours quelque chose, finalement, sur la peau. D'abord que c'est bénin, que ce n'est pas dangereux, je pense que le patient peut avoir la responsabilité de payer pour se faire enlever ça. Oui, à votre question, on peut réviser le livre des services.

Mais on vous propose davantage, si vous voulez. Quand on dit qu'il devrait y avoir des unités d'évaluation gériatrique au moins dans chacune des sous-régions du Québec, si ce n'est pas dans chacun des hôpitaux, c'est exactement pour être plus efficients, pour que les patients gériatriques soient mieux évalués, à savoir s'ils doivent rester dans un centre hospitalier de soins de courte durée parce qu'ils ont besoin de soins conformes à leur diagnostic, ou si on ne peut pas les rediriger, s'ils ont besoin d'hébergement, dans un CHSLO, ou alors les rediriger à domicile. Ça, c'est une mesure à laquelle on peut contribuer rapidement.

Le maintien à domicile, l'hôpital à domicile. On fait des expériences-pilotes avec le ministère, depuis quelques années, sur l'hôpital, l'hospitalisation carrément à domicile, et le maintien, mais du vrai maintien à domicile. Le maintien à domicile devrait répondre à des critères d'admissibilité dans le maintien. Ne se fait pas maintenir à domicile qui veut. Il faudrait qu'on dise que le maintien à domicile est fait pour éviter l'institutionnalisation d'un patient. Sinon, ça va coûter plus d'argent au contribuable, ça ne rendra pas plus service. Alors, ça, ce sont des choses auxquelles on est prêt à contribuer; on en discute à la table des négociations.

Les services ambulatoires. Quand on dit, dans les hôpitaux, qu'il y a probablement trop de services ambulatoires, qu'est-ce que ça veut dire? Les cliniques externes, dans le langage courant, si vous voulez. Il y a bien des choses qui ne devraient pas être faites dans les cliniques externes, on est bien conscients de ça. Ça coûte beaucoup plus cher, cas par cas, dans la clinique externe d'un gros établissement, le Royal Vie ou Saint-Sacrement, que dans une clinique de CLSC, par exemple. Plus l'établissement est gros, plus ça coûte cher. Donc, c'est plus cher dans les hôpitaux que dans les CLSC, quoiqu'on dise l'AHQ, et c'est plus cher dans les CLSC que dans les cabinets, quoiqu'on dise la Fédération des CLSC. Alors, celui qui va nous contredire, il va falloir qu'il soit dans le hangar, si vous voulez, à ce moment-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Richer: Mais on vous propose de revérifier ça, et très rapidement.

Le développement technologique. Là aussi, on vous dit qu'on devrait être capable d'amortir les chicanes interrégionales ou même intrarégio-nales. On est prêt à collaborer à ça, la profession médicale. Il n'est probablement pas nécessaire d'avoir des scanners partout; il est nécessaire d'en avoir un certain nombre. Je pense qu'on n'a pas à décider où, mais on a à participer à la discussion qui ferait que ce serait plus opportun de l'avoir dans cette sous-région. En médecine de première ligne, on vous propose la complémentarité entre les hôpitaux, les CLSC et les cabinets privés. Ce ne sont pas juste des mots, ça, H faudrait que ce soit vrai. On en discute avec la Fédération des CLSC, actuellement, et ce n'est pas évident que le message passe.

Le Président (M. Joly): Merci.

M. Trudel: Merci, on va y revenir. Merci, jusqu'à ce moment-ci.

Le Président (M. Joly): Je passe la parole à M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président.

M. Paradis (Matapédia): M. le Président, avant de poursuivre, j'aurais une courte question, à la suite de ce que le l'honorable député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue...

Le Président (M. Joly): C'est sur le temps de notre formation. Je vous reconnais, M. le député de Matapédia. (16 heures)

M. Paradis (Matapédia): Rapidement. Mon collègue, le député, a parlé tout à l'heure d'effectifs médicaux, chose qui me préoccupe énormément aussi. Trouvez-vous ça normal qu'un centre hospitalier - pour ne pas le nommer, Sainte-Anne-des-Monts - dépense, en 1991, 135 000 $ pour recruter des médecins, les inviter chez eux, leur payer leurs billets d'avion, leur donner un paquet d'incitatifs, leur faire visiter la région quelques jours? Est-ce que c'est normal qu'ils dépensent 135 000 $ pour recruter des médecins?

M. Richer: Je pense que la loi 120 a répondu à cette question-là, monsieur. Il n'y a plus de dessous de table. Est-ce que c'est normal? C'est normal qu'un hôpital s'implique pour essayer de faire de la publicité pour avoir des effectifs médicaux, oui. Comment? En donnant des primes... je ne sais pas là. Mais je pense que la loi 120 a bien répondu à ça.

M. Paradis (Matapédia): Ce n'est pas des primes. Ils les invitent.

M. Richer: II est très normal, il est normal qu'il y ait des efforts qui soient faits par le local pour essayer d'attirer des gens. Ça se fait partout ça. La Banque Nationale, quand elle veut avoir un gérant de banque aux Îles-de-la-Madeleine, elle fait quelque chose. Elle l'attire et elle le fait venir. Il faut quand même aller voir ce qui se passe. Si Sainte-Anne-des-Monts, comme localité, ne peut pas générer le nombre de docteurs dont elle a besoin en termes d'omnis et de spécialistes, il est normal qu'elle en invite d'ailleurs. Pour les inviter et leur faire comprendre ce que c'est que Sainte-Anne-des-Monts, qu'on paie le billet d'avion, si on peut y aller en avion, qu'on paie l'autobus, ça ne m'apparaît pas un gros gros problème.

M. Paradis (Matapédia): Mais le problème avec la Banque Nationale, c'est que, s'ils ont besoin de 100 gérants, ils vont en engager 100, contrairement à la pratique médicale où il y a plus d'effectifs médicaux dans une sous-région; dans une région donnée, il va y en avoir plus, ce que vous allez corriger, m'a-t-on dit.

M. Marier: Ce qui nous préoccupe le plus, au niveau des effectifs médicaux, c'est qu'on se retrouve à réussir à faire du recrutement, à amener des médecins en région, mais, finalement, on a de la difficulté à leur fournir les outils pour travailler, les espaces, les salles d'opération parce que les budgets des hôpitaux sont limités et qu'il y a des contraintes. Alors, on vit un problème à Sept-îles actuellement. On vit des problèmes aussi à Rouyn-Noranda. C'est des problèmes qui sont réels. Il y a des gens qu'on amène en région et, à ce moment-là, c'est que l'hôpital - parce qu'il y a plus d'activités, c'est sûr - de courte durée a des besoins accrus pour faire fonctionner ses salles d'opération, pour faire fonctionner ses cliniques externes, pour faire fonctionner... À ce moment-là, on est mal placé.

Nous, ça nous préoccupe plus cet élément-là parce que si on livre la marchandise en effectifs - pour lesquels on s'est engagé à travailler activement - à ce moment-là, il va falloir qu'il y ait un pendant à ça et, pour nous, c'est une préoccupation qui est plus grande.

Le Président (M. Joly): Merci, Dr Marier. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): C'est ce qu'on essaie de faire par la même logique. Évidemment, les gens qui allaient en centre-ville où les médecins spécialistes sont davantage installés et qui recevaient des services, il va falloir couper les budgets de ceux-là et les réallouer en région, là où les gens maintenant vont être soignés parce qu'il va y avoir des spécialistes. Ça aussi, ça fait partie du même monde. Donc, c'est la même masse qui doit répondre aux mêmes besoins. Donc, la logique, il va falloir qu'elle se transfère aussi.

Le cas de Sept-îles est un cas qui est dans les journaux ce matin. Il est assez intéressant. Il y en a d'autres aussi qu'on pourrait nous donner. Il me reste plus que ça, mais comme je n'ai pas beaucoup de temps, je me suis gardé trois questions.

La première. On en a entendu parler beaucoup, même lorsque nous avons lancé la réforme en disant que nous allions sur le complémentaire, les médicaments, faire en sorte de changer un certain nombre de choses. La réaction des personnes âgées, vous vous en souviendrez, ç'a été de dire: Vous allez nous pénaliser, nous autres, alors que des pilules, on ne peut pas en avoir si on n'a pas une prescription pour se rendre à la pharmacie. On en a rediscuté depuis le début de la commission, évidemment, ce phénomène des médicaments où il y a plus ou moins - uniquement dans les programmes de personnes âgées et au niveau des gens sur l'aide sociale - 500 000 000 $ qui sont là avec la pratique du semainier qui s'est développée et que vous connaissez très bien.

Vous êtes passablement, à ce niveau-là, pointés du doigt. Je veux aller encore plus pointu avec une situation de médicaments: tout ce qui est «benzo» - on en a parlé là - avec des effets thérapeutiques limités dans le temps, reconnus. L'Ordre des pharmaciens, hier, nous disait: Oui, effectivement, c'est vrai que la durée est limitée sur le plan de l'effet. Des gens disent 14 jours, d'autres disent 21 jours. Eux recommandaient

l'obligation - ça va peut-être vous faire plaisir - de retourner voir le médecin au bout des 21 jours pour être capable d'avoir un renouvellement de cette prescription-là. Ça peut être une solution à tous ces problèmes-là. En prenant l'exemple du «benzo», qu'est-ce que c'est qu'il y a à faire et qu'est-ce que vous pouvez faire? Au bout de la ligne, s'il n'y a pas votre petit papier, il n'y a pas de médicaments.

M. Richer: II y a des problèmes avec les personnes âgées pour les réactions médicamenteuses, c'est reconnu. On dit que de 10 % à 20 % des hospitalisations sont dues à des réactions médicamenteuses chez les patients âgés de 65 ans et plus. Il y a 675 000 personnes âgées au Québec, peut-être un peu plus. Je vous parle de statistiques de 1987. Il faudrait voir combien il y a de personnes âgées qui sont hospitalisées d'une façon absolue pour des réactions médicamenteuses. Trop? Sûrement.

Mais il y a des raisons qui expliquent ça. Les personnes âgées sont souvent porteuses de plusieurs maladies. Donc, elles ont des ordonnances qui tiennent compte de ça, qui sont multiples. Il y a des erreurs qui sont de plus en plus faciles à faire parce qu'il n'y a pas de soutien ailleurs, souvent, pour les aider. Des erreurs, si vous voulez, de dose, des erreurs de moment de la prise du médicament, de la séquence dans laquelle ces médicaments différents doivent être pris.

Il y a aussi beaucoup de médicaments en vente libre. Si la moyenne des ordonnances de médicaments sur prescription en 1987 - ça ne fait pas si longtemps - était de 81 $ par citoyen, prescrits par les médecins du Québec, il faut croire qu'il s'en procurait d'une façon bien meilleure que ça. 81 $, vous admettrez avec moi que ce n'est pas long qu'on dépense ça, en termes de médicaments, même au prix de 1987. Alors, les médicaments en vente libre viennent compliquer le tableau; on en est conscient aussi. Il y a souvent un double système de prescriptions: à l'hôpital et quand le patient est congédié de l'hôpital. Souvent, on recommence parce que les supports à domicile sont à peu près inexistants. Il faut bien admettre aussi que, plus on devient âgé, généralement, plus on devient sensible à la médication. Avec une dose normale d'adulte, pour une personne plus âgée, ça peut devenir une surdose. Donc, tous ces facteurs ensemble, si vous voulez, expliquent un certain nombre de ces cas-là qui seront hospitalisés, sans égard au fait qu'ils prennent beaucoup de médicaments.

Ceci dit, il y a certainement des ordonnances, d'une part, peut-être trop nombreuses - oui, on a un devoir à faire là-dedans aussi. Il y a certainement des patients qu'il va falloir supporter davantage pour tenter de se déprendre dans ce fouillis de médicaments. Vous savez que les gens âgés conservent leurs médicaments.

Souvent, ils ne les prennent pas - ils ne sont pas «compilants», comme on dit en médecine - ils ne suivent pas la façon dont ils devraient les prendre, et ils n'en jettent jamais un. Quand vos parents meurent, c'est facile d'aller voir ça. Moi, les miens sont morts il n'y a pas longtemps et j'ai été voir la pharmacie: ça fait peur!

M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, c'est parce qu'on est dans un marché, aussi, où c'est facilement accessible. Il faut quand même se le dire.

M. Richer: C'est exact.

M. Côté (Charlesbourg): Comme c'est gratuit, c'est aussi très accessible. Est-ce qu'on n'est pas rendu à un point où il faut qu'il y ait un maillage? On sait qu'il y a un maillage plus serré, en établissement, entre le médecin et le pharmacien public. Est-ce qu'on n'est pas rendu au point où on devrait avoir un maillage plus serré entre le médecin et le pharmacien d'officine privée?

M. Brossard: Vous savez, il y a une question, je dirais, de formation là-dedans. Il n'y a pas si longtemps que ça, quand un patient était hospitalisé à l'hôpital, sa prescription initiale comprenait une «benzo».

M. Côté (Charlesbourg): Une quoi?

M. Brossard: Tous les patients, quand ils étaient hospitalisés, recevaient une «benzo». On ne dort pas à l'hôpital, paraît-il. Tout le monde en recevait une.

M. Côté (Charlesbourg): J'ai vécu ça, moi.

M. Brossard: Vous savez, ça a changé. Ce n'est plus vrai, aujourd'hui, que tout le monde reçoit une «benzo» en entrant à l'hôpital. Une «benzo» qui était prescrite et qui le restait éternellement, par la suite, qui ne disparaissait plus jamais du carnet de médicaments du patient. Il y a une évolution qui a été faite, ça ne se fait plus comme ça. Il est vrai que les ben-zodiazépines sont un problème de médicament qui n'existe pas qu'au Québec, mais qui existe partout en Occident. En ce qui touche la surconsommation de benzodiazépines, c'est clair qu'il y a une éducation médicale, une formation qui a beaucoup évolué, et il s'en prescrit nettement moins. C'est clair, toutefois, que les patients qui viennent nous consulter et qui désirent avoir une «benzo» repartent très déçus. C'est bien sûr, il faut «dealer» ça durement, je dirais, des fois, avec des demandes médicales, mais ça fait partie de la tâche, ça fait partie du travail d'un médecin. Il y a une évolution dans l'enseignement qui a été fait à la population et dans le domaine

médical. En ce sens-là, tous les médecins passent par le milieu hospitalier et tous les médecins sont en contact avec ce mariage plus étroit pharmacien-médecin, comme vous dites. Je pense qu'il y a une évolution des moeurs importante, à ce niveau-là, qui se fait. On le constate quand on va dans le milieu hospitalier où ces habitudes-là de prescription de «benzo» ont changé.

M. Marier: En fait, pour répondre plus précisément à votre question sur le mariage avec les pharmaciens d'établissement versus de cabinet privé, il est clair que - enfin, J'écoutais ce qui se disait hier - ce n'est pas relié au salariat, s'il y a une amélioration. Ce n'est pas le salariat des pharmaciens d'établissement qui est la réponse au problème de qualité qui peut se faire en établissement. C'est justement la présence sur place, les liens beaucoup plus directs de l'approche médicamenteuse en établissement qui donnent ces objectifs-là. En cabinet privé, c'est clair qu'on n'a pas un pharmacien à côté de nous, chaque fois. À ce moment-là, par contre, il se fait spontanément, dans un secteur, dans un réseau, des contacts parce que la majorité des médecins sont en contact avec deux ou trois pharmaciens de leur secteur puisque les patients vont faire remplir leurs prescriptions dans ce secteur-là. Mais il y aurait sûrement place à de meilleurs échanges entre les pharmaciens et les médecins sur le territoire, ceux qui pratiquent en cabinet privé. Ça, on est d'accord là-dessus.

M. Côté (Charlesbourg): Dans une petite revue que vous connaissez, j'imagine...

M. Marier: Ça nous apparaît être une excellente revue.

M. Côté (Charlesbourg): Bon, alors je suis très heureux. Ça va bien introduire ma question.

M. Marier: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): à la page 6, c'est «l'heure des comptes», signé par m. morgan que vous connaissez très bien. on a eu le plaisir d'être ensemble lorsqu'on a signé la fameuse entente qui fait tant jaser, de l'été dernier. il est dit - je passe un bout que vous connaissez certainement, parce que vous avez l'air de connaître la revue, donc je suis convaincu que vous connaissez totalement son contenu - mais pour arriver à ce que je veux, il dit: la comparaison très défavorable avec le revenu des collègues canadiens, les distorsions à l'intérieur des spécialités, la dévalorisation de la clinique et la perte d'attrait pour les spécialités de base sont autant de cancers qui rongent le fragile édifice de la médecine spécialisée. j'aurais dit ça, je n'aurais pas été cru, c'est clair. je suis à peu près sûr de ça. s'il avait fallu que je dise ça...

M. Marier: Pensez-vous que parce que c'est le Dr Morgan qui l'écrit qu'on le croit?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): D'après ce que j'ai compris, c'est que vous allez peut-être faire juste un mandat.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Marier: Le temps nous le dira.

M. Côté (Charlesbourg): Oui oui, c'est sûr. La pratique, chez vous, c'est comme ailleurs. Ce n'est pas celui qui se présente qui gagne. C'est celui qui est là qui se défait.

M. Marier: C'est celui qui prépare les élections. Vous, vous avez l'avantage de les bâtir et de les gagner. C'est un avantage.

M. Côté (Charlesbourg): Je ne les ai pas toutes gagnées. J'en ai perdu aussi. Mais on tire beaucoup de leçons des défaites aussi. À partir de ça, il me paraît y avoir deux questions que je me dois de vous poser - je ne serais pas honnête envers moi-même si je ne les posais pas, donc, vous devez avoir la même ligne. Est-ce qu'il n'y a pas une problématique de tarification? Est-ce qu'on n'est pas dans une situation, à ce moment-ci, où un certain nombre d'actes, à l'époque, étaient des actes qui demandaient davantage de travail et qui ont été rémunérés à un taux, et le sont encore, qui a été indexé depuis ce temps-là et qui ne nécessitent pas autant de travail de la part du spécialiste, compte tenu de l'évolution de la technologie? J'ai quelques exemples qu'on m'a fournis, et j'imagine que vous pourriez en ajouter passablement à celui-là. Il me paraît y avoir... On organise toujours, quand on négocie, toujours à la hausse, jamais à la baisse, sur le plan de la valeur des actes posés. Je pense qu'il faut l'examiner. Dans un premier temps, est-ce qu'on est dans une situation où il n'y aurait pas un certain nombre d'actes qui sont encore rémunérés à un taux x qui pourrait être revu aussi à la baisse en termes de rémunération? Ça, c'est mon premier point d'argument. Toujours pour tenter de satisfaire Morgan' sur ce qu'il a dit là, j'essaie de connaître la vérité un petit peu partout là.

La deuxième. À Scully, la semaine dernière, il y a des choses qui m'ont frappé - parce que, pour moi, ce n'est pas toujours évident non plus. Le Dr Richer disait. La moyenne de revenus des omnis est de 87...

M. Richer: 89 700 $.

M. Côté (Charlesbourg): ...89 000 $, et celle des spécialistes? 100...

M. Richer: 110 000 $.

M. Côté (Charlesbourg): ...110 000 $. Là, j'ai dit, je vais fouiller un petit peu, je vais demander à la RAMQ. Je suis un petit peu renversé et je veux qu'on les partage ensemble pour savoir s'il n'y a pas un petit peu de travail à faire là aussi. Commençons par les spécialistes. C'est vrai qu'ils sont moins bien payés qu'en Ontario. On l'a dit tantôt. C'est vrai que, sur le plan collectif, ils nous ont aidés de manière collective, en termes de masse, à contrôler nos coûts de santé au Québec. Mais quand tu les regardes de plus près... J'ai dit: Sortez-moi donc ça. Combien il y en a, par tranche, qui gagnent au-delà de 200 000 $, au-delà de 300 000 $, au-delà de 400 000 $. Quand on joue avec des moyennes comme celles-là, j'imagine qu'il y en a qui doivent se retrouver aussi assez bien rémunérés, merci. Il y a, au-delà de 200 000 $... Entre 200 000 $ et 300 000 $, il y a 1569 médecins spécialistes, juste - je vais finir, ça ne sera pas long...

M. Richer: Brut ou net, M. le ministre? M. Côté (Charlesbourg): Non, sans... M. Richer: Brut. On comprend ça là.

M. Côté (Charlesbourg): Votre montant de 89 000 $ était quoi?

M. Richer: II est net.

M. Côté (Charlesbourg): Net.

M. Richer: II est net parce que c'est comme ça qu'on est payé dans la société, généralement. (16 h 15)

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, peut-être. Je ne parle même pas des omnis, donc c'est juste des spécialistes.

M. Richer: Non, non, c'était juste pour fins de clarification.

M. Côté (Charlesbourg): Si vous voulez qu'on en parte, je les ai demandés aussi. Je les ai demandés aussi. Il y a six omnis qui gagnent plus de 300 000 $. J'imagine qu'il sont en région. Eux autres, ça doit être vrai qu'ils sont morts à l'ouvrage.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Donc, à partir de ça, il y en a 1569 entre 200 000 $ et 300 000 $. Je pense qu'on est encore dans des «brackets» de revenus qui sont acceptables dans la société québécoise. Entre 300 000 $ et 400 000 $, il y en a quand même encore un nombre de 354. Au-delà de 400 000 $, il y en a 125, dont, en particulier les radiologistes. Il y en a 26 qui gagnent au-dessus de 500 000 $. Est-ce qu'il n'y a un peu de travail à faire à ce niveau-là? De toute façon, si on le regroupe dans la masse, j'imagine qu'on va pouvoir s'aider pour revaloriser ce que mon ami Morgan pouvait dire éventuellement: médecine interne, chirurgie et ainsi de suite, c'est peut-être là qu'on pourrait régler un certain nombre de problèmes.

M. Marier: Quand on regarde ça de l'extérieur, comme ça, je pense que vos questions sont pertinentes. Je pense que la revue La 2e ligne, qui est la revue de la Fédération des médecins spécialistes, c'est une revue pour s'exprimer. Je pense que le Dr Morgan est le directeur des affaires professionnelles de la Fédération. On a fait des blagues tout à l'heure, mais je pense qu'il émet des opinions pour, justement, ouvrir la discussion. Je pense que c'est dans cette optique-là qu'il faut le voir.

Je pense également que, pour votre première question - est-ce qu'on peut envisager, compte tenu du travail qui est fait et des revenus à la hausse et à la baisse... Je l'ai souligné tout à l'heure, quand je parle du VRAC - le VROUM! VROUM! de M. Trudel - quand je parle du VRAC...

M. Côté (Charlesbourg): ...des VROUM! VROUM! beu-beu...

M. Marier: ...c'est la valeur relative des actes chirurgicaux. Dans cet exercice-là, il est clair qu'il y a eu un effort d'objectivité, à savoir: Qu'est-ce qu'un geste qui est posé par rapport à une autre spécialité, par rapport à une autre spécialité... À ce moment-là, on se dit: II y en a des gestes qui doivent augmenter et d'autres, par conséquent, qui doivent diminuer. C'est à ça qu'on travaille actuellement. C'est déjà avancé du côté chirurgical. C'est en train de se faire au niveau des actes diagnostiques, et c'est en train de se faire au niveau des actes médicaux. Alors, c'est à ça qu'on travaille actuellement. Donc, il est clair qu'il y a des gestes qui vont baisser. Jusqu'à maintenant, vous avez parfaitement raison, les augmentations étaient sur une base historique. Si vous aviez 15 $ pour faire un geste et que là vous négociez, bien, vous dites: Ça va être 17 $ et, l'année prochaine, ça va être 18 $. C'est comme ça que ça allait. Ce qu'on refait actuellement, c'est une harmonisation de tous ces actes-là en essayant de trouver des critères objectifs pour avoir des comparaisons, et pour mettre un chiffre qui soit relativement valable, compte tenu de la masse disponible. Pour nous, on pense que, des fois, c'est sous-payé malgré tout, mais compte tenu du type de masse dans laquelle on joue... pour qu'on puisse en arriver à un chiffre adéquat. Ça, c'est pour votre première question.

Pour là deuxième question. C'est cer-

tain - on l'a dit tout à l'heure - que le système, de la façon qu'il est bâti, permet à certains individus d'avoir des dépassements. Le problème, c'est que, s'il y en a trop qui font ça, ça a un impact direct sur l'association concernée parce qu'on fonctionne avec des objectifs tarifaires. À ce moment-là, les associations concernées sont très préoccupées par ce genre de problème parce qu'il pénalise la majorité de l'ensemble de leurs membres. Donc, il y a des comités d'évaluation de cela. Les gens sont rencontrés et sont évalués pour savoir s'il n'y a pas un biais de contexte. Comme vous le dites, peut-être qu'un individu qui est en zone isolée, qui doit poser plus de gestes parce qu'il n'a pas la demande... La population est là. Il n'a pas le support, mais, s'ils étaient deux, ça aurait l'air bien normal. S'il est tout seul, ça peut amener un total plus élevé ou, encore, compte tenu qu'il rend un service particulier où tous les confrères se réfèrent à cet individu-là, il se retrouve avec un profil déviant.

Mais, dans ce genre de choses là, il y a des contrôles qui sont faits au niveau des associations. Eux ont avantage à régler ces problèmes-là, encore une fois, parce que ce sont les membres de l'association qui s'en trouvent pénalisés. Encore une fois, je le répète, avec l'objectif tarifaire qui leur est donné, ils sont obligés de diminuer leurs actes, en conséquence, par après. De la même façon, on sait que la Corporation fait ça aussi. Elle va évaluer ces gens qui pratiquent au-delà. À ce moment-là, ils nous disent... En tout cas, ils évaluent ça à la pièce, et ils nous disent: Là, il n'y a pas de problème; là, il y a des problèmes. Il y a quand même du travail qui est fait dans ces choses-là.

Quand vous pariez, mettons, de la radiologie, là il faut faire attention. Vous pariez du brut. Vous savez que, quand on est dans des choses de laboratoire, il y a des équipements, de la technologie. Là-dedans entrent les revenus et les frais des instruments techniques qu'ils doivent assumer. À ce moment-là, c'est la partie technique des actes. Alors, là, ça peut donner des chiffres qui sont plus élevés par rapport à d'autres, surtout dans ce genre de spécialité. Donc, ce que vous devez savoir, c'est qu'on s'attaque à ça. Peut-être que le travail qui a été fait jusqu'à maintenant n'a pas été efficace, peut-être. Mais je dois vous dire, qu'actuellement c'est l'un des dossiers majeurs que la fédération mène, c'est-à-dire: Comment gérer la masse monétaire? Comment mieux la répartir? En même temps, selon les objectifs - comme je le disais tout à l'heure - soit pour avoir des médecins en région éloignée, donc des spécialités de base, pour revaloriser les gestes qui sont plus importants sur le plan scientifique et éviter les biais qui ont été créés par le modèle historique.

M. Richer: J'aurais peut-être un commen- taire à ajouter, M. le ministre, là-dessus. La révision à la baisse, chez nous, ça s'est fait par l'entremise de la table de négociation. Par exemple: des ponctions artérielles et certains tests auditifs qui sont passés de 15 $ à 2,30 $. Ce n'était pas à peu près, là. On a fait des révisions parce qu'on trouvait que la valeur relative de certains actes, ça avait changé avec le temps.

Quant au revenu moyen des omnipraticiens, si on en parie, il est bien de 89 700 $. Tous les chiffres que vous pourrez sortir de la Régie diront ça. On parie toujours du revenu moyen net. Je pense que nous sommes des gens qui assumons un certain nombre de dépenses, et ce sont des taux moyens de dépenses aussi. Or, c'est sûr qu'on comprend que certains médecins qui sont isolés dans des régions où ils ont beaucoup de travail à faire peuvent dépasser les moyennes. Mais, vous savez, ce n'est pas péché de gagner de l'argent. Si on fait le travail pour, il n'y a pas de problème dans mon livre à moi.

M. Côté (Charlesbourg): Si on compare ça à certains joueurs de hockey ou de baseball, il est bien évident que je trouve que je ne gagne pas cher, non plus, compte tenu de ce que je fais.

M. Richer: C'est vrai! Vous avez parfaitement raison.

M. Côté (Charlesbourg): J'imagine qu'il y a bien de mes sous-ministres adjoints qui trouvent qu'ils ne gagnent pas cher par rapport à ce qu'ils font et ce que je fais.

Une voix: Ça, c'est des...

M. Côté (Charlesbourg): Une dernière question. Vous évoquez la création d'une caisse santé. Tous ceux qui ont écrit un mémoire - ou à peu près - sont en faveur d'une caisse santé, d'une meilleure transparence. Ce qui est différent dans votre proposition, c'est que vous voulez la limiter à la santé. Je trouve ça dangereux. Je pense que l'idée d'une caisse, c'est une bonne idée. Ça permet une meilleure transparence, mais on s'adresse toujours à la même personne, que ce soit dans le social ou dans la santé. Qu'est-ce qui ferait qu'on devrait, aujourd'hui, le séparer au-delà de ce que j'ai entendu tantôt, que vous nous avez présenté dans votre mémoire? Il me semble que ça me paraît aller à contre-courant de ce que les gens souhaitent un peu partout à travers le Québec. Je comprends que ceux qui le souhaitent, c'est le social. Ils sont toujours considérés comme un peu les parents pauvres du système par rapport à vous autres, qui êtes du secteur santé.

M. Richer: M. Côté, c'est parce qu'on pense qu'il est beaucoup plus facile, dans un premier temps, d'évaluer l'efficacité, l'efficience d'un

système de santé. Les critères, comme vous le mentionnez d'ailleurs dans votre livre vert, sont des critères qui sont actuellement connus. Comme vous le mentionnez aussi dans votre livre vert, les critères pour évaluer les services sociaux sont encore, si vous voulez, des critères à inventer. C'est beaucoup plus difficile d'être précis. On ne pose pas de jugement de valeur sur la nécessité d'avoir des services sociaux, mais on se dit que c'est la caisse santé. Quand vous posez une question aux gens dans les sondages: Êtes-vous d'accord pour faire un effort additionnel pour votre santé? il faut bien comprendre que les gens comprennent santé. Ils ne comprennent pas services sociaux. Ils disent oui parce qu'ils comprennent ça. Mais je ne suis pas sûr, si on leur demandait et qu'on leur expliquait que c'est pour les services sociaux aussi, qu'ils diraient la même chose. Alors, ça ne veut pas porter un jugement de valeur du tout sur l'importance des services sociaux. Au contraire, on n'a pas proposé de dissocier le ministère en deux ministères, comme on l'a déjà fait antérieurement: services sociaux et santé. On pense que ça serait plus humain pour un seul homme, mais on ne l'a pas proposé. On a délaissé cette idée-là. Alors, on se dit que la caisse santé serait beaucoup plus facile à évaluer dans sa gestion qu'une caisse service social. Ça nous empêchera de nous chicaner dans quelque temps sur les 5,2 %, les 5,6 % et les 6,9 %. Nous autres, les 5,2 %, M. Côté, c'est l'évaluation santé, ça exclut les services sociaux. Je pense qu'on se comprend bien là-dessus.

M. Côté (Charlesbourg): On prend le temps, on a pris le pari.

M. Richer: Parfait! On prétend, nous autres, que, s'il y a un ministère au Québec qui s'appelle le ministère de la Santé et des Services sociaux, il doit y avoir une petite fraction de ce ministère, quelle qu'elle soit - ça varie entre 20 % et 30 %, selon les sources - qui s'en va dans les services sociaux, sinon... Ça s'appelle le ministère de la Santé, on ne crée pas des noms pour rien. C'est ce qu'on nous apprend, en tout cas. Chez les politiciens, il paraît que tout a une signification.

M. Côté (Charlesbourg): Rappelez-moi ça. J'ai mal compris, j'ai mal entendu là! La fin, reprenez ça parce que...

M. Richer: Chez les politiciens, tout a une signification, comme le législateur.

M. Trudel: II ne parle pas pour rien dire.

M. Côté (Charlesbourg): II ne parle pas pour rien dire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Le politicien, pas nécessairement.

M. Côté (Charlesbourg): Je vais vous dire une affaire, les politiciens ne sont pas toujours ceux qui sont élus pour l'Assemblée nationale.

M. Richer: C'est très vrai. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): J'ai vu ça l'été passé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Richer: C'est très sain, ça, dans une société.

M. Côté (Charlesbourg): Je n'ai rien contre ça. C'est pour ça que j'adore le genre de réunion comme celle de cet après-midi, et j'en souhaite d'autres. Alors, merci pour le moment, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda-Té-miscamingue, s'il vous plaît.

M. Trudel: II y a d'autres aspects aussi, messieurs, que j'aimerais examiner avec vous, puis d'une façon assez rapide parce que je crois bien qu'il nous reste une dizaine de minutes au total, quelque chose de même.

Le Président (M. Joly): Vous pouvez prendre le temps dont vous avez besoin, M. le député.

M. Trudel: Très bien. Très bien. Au niveau du financement et des contributions, à la page 21 de votre mémoire, vous dites: La notion de contribution directe des patients aux services complémentaires, donc non essentiels, est envisageable. Mais là, très carrément, est-ce que la proposition du livre vert du gouvernement de désassurer l'optométrie et les frais de dentiste pour la catégorie des moins de 16 ans, sur le curatif, est-ce que déjà, vous autres, comme opinion, vous avez fait votre lit là-dessus en disant: Ça, pour nous autres, ça appartient à la catégorie des services essentiels? J'ai compris tantôt que l'essentiel et le non-essentiel... en tout cas, ça me plaisait d'entendre que vous embarquiez dans notre définition du médicalement requis pour le mieux-être. Alors, je pose la question très précisément parce qu'il y a une proposition précise. Dents et examen des yeux, vous autres, vous êtes pour qu'on désassure ça?

M. Richer: Ce qu'on vous dit dans notre mémoire, c'est que les services complémentaires sont à réviser pour ajuster ce qu'on donne gratuitement ici - enfin, gratuitement, il faut le souligner entre guillemets - aux citoyens du

Québec par rapport à ce qui est donné dans les autres provinces. Il faut ajuster ça à notre richesse. On en donne un peu plus que dans les autres provinces et il semble qu'on est moins riche. Dans les services complémentaires, font partie les programmes qui sont administrés par la Régie, dont les médicaments et les services optométriques auxquels vous faites référence. À ce moment-là, si ça doit être désassuré... Prenons l'exemple des services optométriques. Au Québec, je pense que notre système fait que ce n'est pas le citoyen qui est assuré, c'est le service. Si le service est désassuré, il le sera désassuré autant chez l'optométriste que chez l'ophtalmologiste. C'est notre point de vue, si on en arrivait à cette décision-là.

Maintenant, Je pense qu'il faut examiner... Ce qu'on vous propose, c'est d'examiner comment on peut organiser nos services complémentaires - dans les programmes actuellement - pour les rendre à peu près conformes à ce qui se fait dans la moyenne des autres provinces canadiennes.

M. Trudel: Oui, mais, à cet égard-là, j'ai l'Impression qu'il faudrait aller un petit peu plus loin. Lorsqu'on regarde les annexes du document du 18 décembre, c'est sûr qu'il faut examiner ce qui est dans les services de base et dans le complémentaire. Mais, dans le complémentaire, à peu près toutes les provinces canadiennes ont une couverture au niveau des frais dentaires, au niveau des services dentaires, puis des services d'examen.

M. Richer: Pas aussi étendue. Il y en a qui demandent une contribution, d'ailleurs, du...

M. Trudel: Certains.

M. Richer: ...citoyen. Certains demandent une contribution. Certains...

M. Trudel: D'autres cas aussi.

M. Richer: Oui, c'est ça. Pas tous. Mais, souvent, ce n'est pas aussi étendu. Par exemple, les examens de réfraction, les examens de la vue ne sont pas convenus dans toutes les provinces actuellement. Je pense que ce qu'on essaie de dire là-dedans, c'est que, si on a des problèmes de financement, peut-être qu'on est plus généreux que les autres provinces par rapport à notre richesse collective dans le panier. C'est ce que semble nous dire l'analyse qu'on fait du panier de chacune des provinces quand on les compare à ce qu'on donne pour les services complémentaires.

M. Trudel: En tout cas, à cet égard...

M. Marier: Plus que ça. Au Québec, actuellement, on fait payer 77 % par le public, dans notre système. En Ontario, c'est 70 %. Donc, on a quand même 7 %, si on voulait au moins se comparer à l'Ontario de ce côté-là, où on aurait une marge de manoeuvre pour que d'autres approches par des systèmes d'assurance non publics puissent financer. Donc, on pourrait jouer encore. On a une place pour l'imagination, la créativité. (16 h 30)

M. Trudel: Oui, mais on ne peut pas penser qu'on a autant d'imagination pour revoir le non-essentiel dans ce qui est couvert actuellement dans la partie panier de base, ce qui nous amènerait à dégager l'espace pour ne pas prendre tout de suite la décision suivante: Examen de la vue, soins dentaires aux moins de 16 ans, ne touchons pas à ça parce qu'il y a peut-être de l'espace ailleurs. Encore là, on ferait une erreur de sortir ça même si, actuellement, il est classé dans le panier complémentaire.

M. Richer: Oui. Je pense qu'on ferait peut-être une erreur de prendre la décision cet après-midi, mais on ferait certainement une erreur de ne pas regarder, par exemple, s'il n'y a pas quelque chose qu'on peut faire avec ça, comme on a proposé au ministre de la Santé de regarder les services médicaux de base. On a déjà proposé, il n'y a pas si longtemps, de désassurer les services de physiothérapie en cabinet et c'était accepté du côté ministériel. Il y a eu des raisons politiques, que je respecte, de ne pas donner suite à ça, à ce moment-là. C'est parfait, je peux vivre avec ça, mais il est bien sûr que, nous autres, on regarderait ça, la physiothérapie en cabinet privé, ce n'est pas une nécessité de très grande priorité dans le système. Ça doit être fait, ça doit être offert, mais est-ce que le patient peut contribuer à ça? La réponse, c'est peut-être oui, toujours en termes pécuniaire.

M. Trudel: En tout cas, en matière de restriction de services assurés, avec l'exemple que vous venez de nous donner, la physiothérapie en cabinet, c'est qu'il ne faut pas vous faire porter tous les péchés du monde, politiquement vous respectez ça, mais il y a aussi une part de responsabilité, par exemple, parce que, vous, vous avez accepté de réviser cela. Je ne sais pas pour combien il y a de millions là-dedans, mais il y en avait en matière de services assurés.

Je m'en voudrais, par ailleurs, de ne pas toucher à une autre question extrêmement importante, qui est la possible introduction de la carte d'assurance-maladie, la carte à puce. Vous êtes, évidemment, les utilisateurs. Notre façon de fonctionner actuellement, grosso modo, n'a guère évolué depuis, je ne sais pas, 5, 10, 15, 20 ans. Chacun a ses dossiers confidentiels, répétitifs quelquefois. Ce n'est pas pire chez vous que dans d'autres organisations et dans d'autres organismes ailleurs. Compte tenu, cependant, des problèmes auxquels nous avons à faire face

actuellement en matière de financement, en matière de disponibilité de fonds, en matière de services, est-ce que, vous, vous souhaitez l'introduction de la carte à puce avec le dossier médical au complet de l'usager sur cette carte à puce et que vous puissiez intervenir avec cet instrument et en termes d'informations et je reviendrai, je vous le dis tout de suite, tantôt, en matière de contrôle également? Est-ce que vous souhaitez cela? Je vous demanderais de ne pas me répondre uniquement en tant que professionnel de la santé. Je vous demanderais de me répondre socialement également si vous trouvez ça souhaitable. Parce que vous êtes aussi... Parce qu'on vous a dit pendant un certain temps que vous n'étiez pas des citoyens, vous autres, au conseil d'administration. Vous êtes aussi des citoyens, là. Alors, comme citoyens, socialement, qu'est-ce que vous pensez de cette question-là aussi?

M. Richer: Je vais vous faire peut-être les mêmes remarques là-dessus qu'on avait faites au tout début quand on a parlé du projet-pilote auquel on s'est intéressé, d'ailleurs. Il est bien sûr que la technologie moderne doit être bâtie de telle sorte que ce soit «full proof» par la confidentialité des données et, ça, on l'a toujours défendu. On n'est pas les seuls à le dire. Il y en a d'autres qui le mentionnent. Il faut s'assurer que l'information qui concerne une personne soit sa seule et unique propriété. Et on sait que, quand on informatise des systèmes, il paraît que c'est plus facile, un petit peu, de pénétrer là-dedans. Il y a des experts qui disent que même des adolescents de 15, 16 ans peuvent rentrer dans des systèmes informatiques relativement facilement. De sorte que la confidentialité, il faut s'organiser pour qu'un tel système soit vraiment à l'épreuve des balles pour nous permettre de l'appuyer. Cependant, ce qu'on a dit en même temps, il y a un projet-pilote qui est proposé dans la région de Rimouski pour des clientèles cibles. Quand M. Cantin, qui avait reçu le mandat d'étudier ça, je pense, du ministère, l'an passé, nous a invités à participer à ça avec les médecins spécialistes, on a accepté, bien sûr, avec plaisir de collaborer à ça parce qu'on n'a pas le monopole de la vérité là-dedans et on se dit: II faut regarder ce qu'une telle expérience peut donner dans une population relativement close, si vous voulez, de Rimouski - trois niveaux de population différente - pour voir ce que ça va donner. Est-ce qu'on peut découvrir des faiblesses là-dedans? Et est-ce qu'on peut les améliorer? C'est uniquement après avoir vu l'expérience et après avoir fait l'analyse critique de ce qui se sera passé à Rimouski pendant l'année et demie ou les deux ans que ce sera en vigueur, si vous voulez, que, là, on pourra vous répondre d'une façon beaucoup plus précise. Comme citoyen, je vous avoue que j'ai une certaine crainte à cause de la confidentialité. comme professionnel, ça serait un outil fantastique si on pouvait avoir les données là-dessus qui nous permettent de savoir surtout les examens récents qui ont été faits chez les patients pour éviter le dédoublement.

M. Trudel: vous êtes aussi de l'expérience de sherbrooke, au centre hospitalier universitaire. les médecins sont dans cette expérience d'informatisation du dossier et de carte à puce aussi à sherbrooke?

M. Richer: Pas la carte à puce, le dossier médical.

M. Trudel: Le dossier médical?

Une voix: Le dossier médical informatisé.

M. Trudel: Le dossier médical informatisé. Et vous suivez ça d'extrêmement près actuellement.

M. Richer: On regarde ça, parce que, comme je vous dis, comme citoyen, encore une fois, pour nous autres, l'informatisation - pour le citoyen que je suis en tout cas - c'est toujours dangereux. Il y a des données qui circulent partout. Et il faut s'organiser pour qu'on ait vraiment un système très valable en termes de respect de la confidentialité.

M. Trudel: Et il faut que ça déborde, parce que cette question porte sur le financement. Est-ce que vous avez l'impression qu'effectivement, quand nous aurons tous les verrous souhaités, souhaitables, à l'épreuve des balles, comme vous dites, il y aura de l'argent à sauver dans le système grâce à ce moyen, d'une façon significative?

M. Richer: Oui, d'abord que la carte à puce, il n'y en aura pas 400 000 copies de trop qui vont circuler dans le public. Carte à puce ou pas à puce, s'il y en a 400 000 de plus qu'il y a de citoyens au Québec, ça va causer des problèmes très sérieux sur le financement. Mais, ceci dit, je pense qu'il serait peut-être plus facile de contrôler la carte à puce que la carte ordinaire, parce qu'il y a des moyens là-dedans qui sont insérables, si vous voulez, dans l'informatique de cette carte-là, pour s'assurer que le porteur est bien celui qui nous consulte. Et je pense que, sur le plan de l'économie de système, elle pourrait être énorme, parce que ça permettrait aux médecins de savoir et d'avoir accès aux analyses récentes, valables dans les derniers six mois ou dans les derniers trois mois qui ont été faites et commandées par un autre médecin qui n'est pas disponible au moment où le patient se présente à l'urgence. Si on avait ça... Nous autres, on l'expérimente. Comme citoyens, moi-même, je l'ai expérimentée et je pense que M.

Côté en a fait état publiquement. Si on avait notre carte avec nos renseignements, peut-être qu'on éviterait d'avoir une reprise d'examens. On ne peut pas blâmer le médecin à ce moment-là, celui qui les commande. Il fait de la bonne médecine. Il ne les a pas, les analyses. Et on est conscients qu'il y a une duplication non nécessaire et involontaire d'un certain nombre d'analyses qui sont coûteuses pour le système et ça, ça aiderait vraiment, sans compter les effets bénéfiques pour l'état de santé du patient.

M. Trudel: Et, ça, c'est ma dernière question. Vous m'engagez sur cette piste-là. Je ne vous demande pas de sortir votre oeil de détective. On ne vous demande pas de jouer aux policiers. Ce n'est pas votre travail. Mais est-ce que vous avez l'impression... Parce qu'il y a aussi quelque chose qui se promène dans l'air. Il y aurait un assez bon montant de fraudes et fraudeurs qui utilisent notre système de santé et des services sociaux. Évidemment, lorsque le spécialiste, lorsque l'omnipraticien examine la personne, il est là pour sa santé. Il n'est pas là pour vérifier sa... pour jouer à la police. Mais quand même, au niveau de la perception, vous parlez à votre personnel. Est-ce que, vous, quand on traite du problème de la fraude puis du commerce... Il y a quelqu'un qui disait hier: Écoutez, on loue des canes. Est-ce que vous avez l'impression que c'est significatif comme mouvement que, oui, la carte-soleil avec l'absence d'identification personnalisée, ça, actuellement, ça fait l'objet d'un trafic de louage de cartes de services d'une façon importante?

M. Richer: Là-dessus, je pense que Je vais demander à des gens plus compétents que mol de vous répondre, pour la bonne raison que les médecins omnipraticiens, leur vocation de base, c'est de donner les services de première ligne. Et ce n'est pas là qu'on loue une carte, vous comprendrez, 400 $ ou 500 $ qu'on me dit, des fois même plus que ça. Une carte d'assurance-maladie, ce n'est pas pour aller chercher des services de première ligne à la salle d'urgence ou dans un cabinet, on connaît nos patients pour le suivi. Donc, mol, je ne peux pas répondre. J'ai des Idées là-dessus. M. Cantin est plus compétent... ou, alors, dans les hôpitaux. Là, quand les patients sollicitent l'usage d'une carte d'une façon frauduleuse, c'est pour des interventions qui sont beaucoup plus coûteuses. Je ne sais pas si vous avez cette perception-là dans les hôpitaux. Le Dr Brossard et le Dr Marier sont plus en mesure que moi d'évaluer cette réponse.

M. Marier: On n'a pas de données précises à fournir, évidemment, parce que le problème, c'est que la carte dont les gens se servent, elle est bonne. Le problème, c'est qu'on n'est pas capable de savoir si la personne qui maintient la carte, c'est vraiment la bonne personne et c'est ça qui... Alors, évidemment, quand on exerce dans un milieu où c'est cosmopolite, où beaucoup de personnes viennent de différentes nationalités, c'est encore plus difficile à objectiver, sauf que, à notre expérience, il est clair qu'on se rend compte qu'il y a probablement des abus, mais on ne peut pas les quantifier, parce qu'on n'a pas les preuves de cela.

M. Brossard: Ce n'est pas possible de reconnaître un fraudeur d'un autre, parce que c'a l'air d'un individu qui a une carte ordinaire. Mais ce n'est pas...

M. Trudel: C'est pour ça que je faisais la prémisse qu'on ne veut pas vous demander et il ne faut surtout pas vous demander de les identifier, parce que ce n'est pas votre travail puis on ne veut pas que vous fassiez cela. Mais, dans l'exercice de votre profession, il y a quand même des échanges avec les confrères, avec les autres membres des différentes spécialités qui nous amènent à dire: Bien oui, écoutez, ça commence à être significatif. Je veux savoir si on a quelque chose de plus sérieux là-dessus, parce que les montants qui sont évoqués, le phénomène lui-même, suivant qui on interroge ou avec qui on essaie de voir l'ampleur, ça varie et c'est très grand. On nous dit, dans certains milieux, que c'est d'une ampleur assez considérable. SI tout cela nous amenait à nous priver d'un certain nombre de services essentiels, par ailleurs, bien, il faudrait le regarder de très près. Alors, quant à moi, merci. Je ne sais pas si le ministre a d'autres...

Le Président (M. Joly): Excusezl II y a M. le député de Notre-Damende-Grâce qui voudrait prendre la parole.

M. Atkinson: Merci, M. le Président. MM. les docteurs, à la page 28, vous déclarez que les soins médicaux dans un cabinet privé coûtent moins cher que les mêmes traitements dans un CLSC. Pourriez-vous nous donner plus de détails en comparaison avec les coûts en cabinet privé et en CLSC?

M. Richer: Toute l'infrastructure d'un CLSC, il faut que ça se paie, bien sûr. C'est plus lourd, c'est compréhensible. C'est un établissement, au sens de la loi, et, quand on avait fait des enquêtes sur les coûts relatifs de soins de première ligne donnés en CLSC par rapport à ce qui était donné en cabinet privé, il y avait une différence d'à peu près trois pour un, dans ces termes-là. D'ailleurs, si vous voyez l'enquête du CETS sur les radiographies pulmonaires inutiles dont on a parlé tout à l'heure, on dit que la même radiographie pulmonaire préopératoire coûte 23,11 $ à l'hôpital alors qu'elle coûte quelque 18 $ en clinique privée. C'est la même radiographie pulmonaire, qui donne exactement

les mêmes résultats, interprétée par le même radiologiste. Là, il y a une différence de 23 % uniquement dans un petit Item. Donc, je pense que c'est compréhensible, si vous voulez. On ne dit pas que ça doit être ramené au même taux, mais on dit que pour des services qui doivent être rendus en CLSC, par exemple, pour le maintien à domicile, on pense que la coordination du maintien à domicile, c'est la vocation du CLSC et, malgré les coûts, ça doit être fait là. C'est l'endroit le plus efficace pour produire ces soins-là. Mais la première ligne d'urgence ou les urgences mineures, c'est probablement plus efficace de les faire, quand c'est possible, dans un cabinet privé ou, alors, qu'il y ait une complémentarité, dans une région donnée. On pense à Montréal, par exemple, où on a fait une enquête là-dessus, de ne pas avoir un CLSC qui ait la vocation de faire l'urgence de première ligne 12 heures par jour quand il y a 60 cabinets privés de médecins ou des cliniques qui peuvent donner ce service-là. (16 h 45)

M. Atkinson: Merci. Deuxièmement, c'est à la page 28 également. Vous suggérez de revaloriser la rémunération des médecins. Pensez-vous que les honoraires des médecins devraient être augmentés?

M. Richer: Bien, je pense que, ça, c'est un objet de négociation, oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Atkinson: Vous dites oui.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît!

M. Richer: Compte tenu de notre pauvreté relative, oui, je pense qu'ils doivent être augmentés.

Le Président (M. Joly): On va revenir à la pertinence.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Atkinson: Une dernière question, M. le Président. Je vais poser cette question en anglais. Because so many parents and young people asked me this question, because the question is confusing and in many ways is a complementary to my colleague from Rouyn-Noranda-Témiscamingue. On pages 26 and 27 of your mémoire, you dressed the issue of the number of physicians. You refer to the GRIS, the Groupe de recherche interdisciplinaire en santé, which compares the number of doctors in Québec with the number of doctors in Ontario. Now, you put forth the proposition of by looking at different factors such as the growth rates, the age of population and so forth, the difference between Ontario and Québec seems to disappear and, therefore, you conclude that Québec does not have an over-supply of physicians. Now, six years ago, approximately, we seemed to be In a panic. We did not seem to have enough doctors. Then, about two years later, there was another panic that said: We had too many doctors. The young people are wondering whether they should enter the profession. I am wondering how relevant is the comparison that you make with Canada as a whole because, according to the Canadian Medical Association in their report of 1989, they said: Canada had an over-supply of physicians. And, more recently, the 1991 McMaster University paper written by Barer and Stoddart seems to confirm that. And I would also ask for a response from M. Faucher, le président de la Fédération des associations des étudiants en médecine du Québec, because he is one of them: What Is the future of the youths of Québec in medicine if we cannot make up our mind whether we have too many or too few?

Des voix: Ha, ha, hal

M. Faucher (Frédéric): Un des plus importants facteurs au niveau des étudiants en médecine, c'est le profil de pratique qui est en évolution depuis quelques années, entre autres, au niveau du nombre d'heures. On a parlé aussi de la féminisation de la profession. Si on regardait les chiffres qui étaient publiés dernièrement aussi, on voyait que dans le coin des années 2000 à peu près, 2006, on prévoyait, même avec les chiffres actuels des entrées en médecine, une pénurie relative encore ici au Québec d'effectifs médicaux. Alors, je ne crois pas que la situation... Dans les facultés de médecine actuellement, je ne pense pas qu'il y ait trop d'étudiants et je ne pense pas non plus qu'il y ait lieu de diminuer encore plus le nombre d'entrées qui ont déjà été diminuées grandement au cours des dernières années.

M. Atkinson: Dr. Richer, would you answer the question: Who is right on the number of doctors, the Canadian Medical Association or GRIS?

M. Richer: C'est très difficile de répondre. Il y a une chose qui est sûre, c'est que quand on regarde l'étude - et c'est ce que le Dr Marier disait tout à l'heure - qui a été faite par les médecins spécialistes sur les pyramides d'âges - pas de la société québécoise, ça c'est facile à faire, c'est de la démographie, puis c'est assez simple - de chacune des spécialités, il semble que la structure d'âges de nos spécialistes ici au Québec est différente de la structure d'âges des spécialistes des mêmes spécialités en Ontario, de sorte que, bien sûr, un cardiologue qui aurait actuellement 60 ans est aussi utile, sinon plus, à la société, qu'un cardiologue de 30 ans. Mais son «outlook» de cardiologue est sans doute un petit

peu plus court. Donc, il compte pour une tête de pipe, bien sûr, quand on fait une étude juste sur le nombre absolu, mais on doit aussi prendre en considération qu'on devra remplacer éventuellement ce cardiologue-là par un autre cardiologue, toutes autres considérations étant égales par ailleurs.

Comme ça prend 10 ans - on l'a mentionné tout à l'heure - à former un spécialiste, on doit être extrêmement prudent et faire une bonne évaluation de la structure d'âges par spécialité, des changements de valeurs des jeunes médecins, qui sont comme le restant de la société, et de la féminisation très grande de la profession médicale qui produit des pyramides de travail également différent, pour des raisons évidentes.

M. Atkinson: If I can just have one quick last question.

Le Président (M. Joly): Très très courte, M. le député.

M. Atkinson: There is not anybody in this room who does not recognize a community in Québec that is short of general practitioners. And I am not talking about «spécialisations», I am talking about the general practitioners. Do we have enough to service the community...

M. Richer: Yes. We do not have too many, but I guess we have enough. Actuellement, il n'y a pas de pénurie de médecins omnlpratriciens autour du lac Saint-Jean, ce qui est un gain par rapport aux récentes années. Il y a très peu de pénurie sur l'ensemble de la Côte-Nord, quelques petites exceptions. Il y a encore des pénuries dans le Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie, en termes de régions, et en Abitibi. Il y a encore des pénuries locales. Beaucoup moins qu'auparavant. On n'a pas de problème actuellement à faire installer des médecins dans les régions pour les médecins omnipraticiens. On a des problèmes à les retenir et on proposera sans doute au ministère dans nos prochaines rencontres de changer les primes d'Installation qui ne devraient plus être là - on n'a pas de problème à les faire installer, pourquoi les payer pour qu'ils s'installent - en prime de rétention, d'une façon différente, si vous voulez, pour essayer de garder un peu plus longtemps ceux qui s'installent là. Mais je pense que d'une façon absolue, pour les GPs, il y en a assez dans le Québec, il suffit de les répartir un peu mieux.

M. Atkinson: Thank you very much. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Juste pour vous remercier de votre présence cet après-midi. L'information que nous avons échangée va certainement nous servir, en tout cas, j'espère qu'elle va servir pour orienter l'État dans ses choix qui sont décisifs parce que - ça, on peut dire ça aux médecins - c'est clair, notre système de santé et de services sociaux, dans les conditions actuelles, est aux soins intensifs. C'est très clair. Il est aux soins intensifs et il faut au moins avoir toutes les dimensions du diagnostic bien posées quant au remède qu'on va lui administrer, quant au pronostic qu'on va faire. Alors, merci pour cette contribution, cet après-midi.

En terminant, sur une réflexion, Dr Marier, en particulier, qui a assisté, à peu près à toutes nos délibérations - et je l'ai, pour ma part, répété à plusieurs occasions - il n'en demeure pas moins que vis-à-vis de la profession médicale, moi, personnellement, je suis inquiet de cette espèce de brisure de solidarité que nous avons avec une certaine catégorie de professionnels au Québec, qui s'appelle la profession médicale. Je ne cherche pas à distribuer les blâmes, je ne cherche pas à pointer personne, je fais un constat que, comme société, ce n'est pas cette absence de solidarité avec nos professionnels qui va nous amener plus loin et être meilleurs. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il va y avoir toute sorte de monde qui va avoir des gestes à poser et on va n'en ressortir, encore une fois, que meilleurs et plus forts. Et jamais une société ne va pouvoir prétendre être forte si, en particulier, parce que c'est vous autres les professionnels de la médecine, on ne fait pas corps avec eux et on n'est pas collectivement fiers. Et il y a là une brisure qui s'est faite, à mon avis, au cours des dernières années et on est amplement capables, non seulement de réparer mais de projeter dans l'avenir, parce que, si on a de si bons indicateurs de santé, si on a une si bonne relation au plan individuel avec les membres du corps médical, c'est parce que nous avons une force médicale compétente qui est en avance dans l'ensemble du Canada, et il faut en être fier, quant à moi. Merci beaucoup de votre prestation.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je vous remercie très sincèrement. C'est clair que c'est toujours des rencontres très intéressantes, à l'occasion avec des points de vue différents, mais qui ont toujours le même objectif et qui convergent vers le même objectif: avoir un système meilleur pour des meilleurs services à nos concitoyens, selon notre capacité de payer, bien sûr. Et, quant à moi, il y a plusieurs signes encourageants sur le redressement de notre système. Et ça aussi c'est dû en partie aux résultats de nos échanges, très corsés, merci, au cours de l'année 1991, mais iI y a des signes très encourageants - je le dis tel que je

le pense - des signes très encourageants. Et on a eu l'occasion d'échanger cet après-midi sur des problèmes spécifiques qui vont nous permettre d'améliorer, je pense, peut-être davantage nous éclairer quant aux décisions à prendre, et c'est clair que ça devra se faire dans une continuité de partenariat sans cesse amélioré, de mains tendues de part et d'autre en y allant progressivement. C'est clair que je pense qu'on est sur la bonne voie. Et je souhaite rester là suffisamment longtemps encore pour bien m'assurer que la consommation du mariage puisse être faite puisqu'on est encore à se voisiner et à s'apprivoiser, mais c'est sur la bonne voie. Alors merci bien.

Le Président (M. Joly): À mon tour, moi aussi, au nom des membres de la commission, je tiens à vous remercier d'avoir été présents et j'espère que si le mariage se consomme je serai encore témoin.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Au plaisir et merci. Nous allons suspendre les travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 55)

(Reprise à 17 h 3)

Comité provincial des malades

Le Président (M. Joly): II me fait plaisir de souhaiter la bienvenue au Comité provincial des malades. Je présume que c'est M. Clavel. M. Clavel, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous accompagnent.

M. Clavel (Jean): Je vous remercie, M. le Président. Je suis accompagné de M. Paul-Marcel Dessane, qui est membre du conseil d'administration du CPM et qui est aussi président du comité des bénéficiaires du centre Dorchester. Nous avons aussi M. Louis Grondin, handicapé qui vit en domicile. M. Grondin est parti de Montréal ce matin, dans un fauteuil roulant mobile, mais il s'est rendu à Québec en se servant d'un fauteuil ordinaire parce que nous avons eu un pépin, son fauteuil a fait «kaput».

Le Président (M. Joly): Ah bon.

M. Clavel: Nous espérons que, grâce aux bons soins et aux bons services du système de santé du Québec, son fauteuil pourra être réparé dans les meilleurs délais. Merci.

À ma droite se trouve une personne que la plupart d'entre vous connaissez bien, le directeur général du Comité provincial des malades, Mme Michèle Lamquin-Éthier. Merci.

Le Président (M. Joly): Je vous explique. Vous avez environ une vingtaine de minutes. Si vous prenez moins de temps à exprimer votre mémoire, ça laisse un petit peu plus de temps pour l'échange. Alors...

M. Clavel: Je vous remercie.

Le Président (M. Joly): ...je vous laisse aller, monsieur.

M. Clavel: Le mémoire que nous avons préparé est assez volumineux. Ce n'est pas dans notre intention de vous le lire en détail. Cependant, je voudrais vous signaler que le mémoire contient deux chapitres principaux, le premier qui traite d'un examen de la situation et le deuxième qui traite de l'impact des modifications au principe de la gratuité des soins de santé pour les personnes hébergées. Le chapitre no 1 est divisé en six sections.

M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, en décembre 1991, le ministre a publié un document de réflexion sur le financement du système de santé et des services sociaux, document qu'il soumet à la discussion publique. Après étude et analyse, nous avons réalisé que nous ne saurions aborder toutes les questions et chacun des aspects soulevés dans le document ministériel dans des délais aussi courts, compte tenu de l'insuffisance de nos ressources humaines et financières. D'autres, nous en sommes certains, sauront évaluer les propositions soumises et leurs impacts sociologiques, économiques, juridiques ou leurs effets sur la fiscalité. Nous nous en tiendrons aux éléments correspondant davantage aux champs couverts par notre expertise propre en vous transmettant le plus fidèlement possible le message des personnes âgées hébergées que nous représentons.

Nous croyons fondamental de rappeler qu'au delà des statistiques, du langage savant, des grilles d'analyse ou des enjeux propres aux divers groupes d'intérêts il y a les réalités des malades qui, eux, ont des attentes légitimes, des droits et des craintes face à l'avenir.

Dans la section I, où nous traitons de la situation des personnes hébergées. Depuis la prise en charge complète du réseau de la santé et des services sociaux par l'État dans les années soixante-dix, le profil des personnes hébergées s'est grandement modifié. Des personnes nécessiteuses en besoin de protection placées dans des hospices ou des asiles, on est passé à l'hébergement de personnes relativement jeunes et présentant une situation clinique acceptable pour, finalement, se retrouver aujourd'hui avec une population hébergée présentant des manifestations importantes de perte d'autonomie. Le vieillissement de la population, l'éclatement des familles, le changement des valeurs sociales qui a permuté la prise en charge des personnes âgées par leur famille par celle de l'État, le peu de succès de la

médecine face aux maladies dégénératices dont sont souvent affectées ces personnes âgées malgré l'espoir qu'elle avait fait naître, ont contribué à ce que s'installe la situation actuelle. sans refaire l'analyse de l'évolution du réseau de la santé depuis la révolution dite tranquille jusqu'à nos jours, nous devons cependant dire que le choix retenu par les membres de la commission castonguay-nepveu, qui n'a jamais été modifié depuis, était d'organiser le réseau de santé autour des modèles institutionnels. tout sera centré sur l'organisation des services en établissement au détriment du développement des services de maintien à domicile. ce n'est qu'en 1966 que les services externes seront couverts par ce programme. parallèlement, à cette époque, les dispensateurs de soins en établissement commencent à s'organiser en associations et en fédérations, et l'état s'immisce de plus en plus dans ce qui était alors exclusivement une relation médecin-patient.

En même temps que s'installe l'État-provi-dence, les découvertes médicales font naître des espoirs et des attentes face à la solution de problèmes de santé jusque-là jugés incurables. La médecine peut tout, ou presque. Mais, pour cela, on doit investir dans le développement de la technologie nécessaire à l'établissement d'un diagnostic scientifique.

On voit également se développer la croyance que seule la médecine est habilitée à régler la presque totalité des problèmes humains. Pour obtenir un soin ou un service, on doit obligatoirement obtenir une prescription médicale. Tout, ou presque, devient un acte médical. Avec la spécialisation de la médecine, avec la perception qu'elle est omnipotente, avec la prise en charge ou presque complète des personnes en perte d'autonomie par l'État, les personnes hébergées ont acquis la certitude qu'elles sont impuissantes à interagir sur leur propre situation et qu'elles ne possèdent aucun pouvoir de modifier l'irréductible. Les médecins refusent souvent de partager leur savoir médical, surtout avec des personnes âgées moins scolarisées qu'eux. Ils possèdent de grandes connaissances et ils ont souvent la certitude qu'il est inutile de tenter de les vulgariser. Ce réflexe des professionnels de la santé de ne pas associer le patient et ses proches aux démarches le concernant n'a pas contribué à les rendre responsables.

Les médecins n'ont pas toujours pris le temps de sensibiliser leurs patients à la prévention, lorsqu'il était encore temps. Les informer que la modification de certains de leurs comportements, entre autres, pouvait contribuer à améliorer leur blen-âtre n'a pas souvent fait partie des échanges entre le médecin et ses patients. Le réflexe curattf est prépondérant. Et, même après la manifestation des premiers symptômes de la maladie, on se limite souvent à prescrire une pilule, seule responsable de la guérison, croit-on. Combien de personnes igno- rent le diagnostic que l'on a posé après l'analyse de leur cas? Combien de familles doivent encore se battre pour rencontrer le médecin traitant et obtenir des précisions sur le diagnostic et les méthodes de traitement utiles en la circonstance?

Lorsqu'on se penche sur le présent, on a misé presque exclusivement sur le développement d'un réseau institutionnel d'hébergement. On a à peu près mis de côté le développement du maintien à domicile ou de l'hébergement dans des ressources plus légères et plus conformes aux réalités de la vie dans la communauté.

Le regroupement des professionnels et des services dans des établissements de santé et d'hébergement a contribué à retirer aux personnes en perte d'autonomie toute liberté de choisir leur milieu de vie, tout en les forçant à vivre en groupe, dans des lieux institutionnels qui ne répondent pas toujours à leurs aspirations et à l'expression de leur personnalité propre. On a vu apparaître les examens diagnostiques de routine, les prescriptions récurrentes, les soins dispensés à la chaîne, le «découpage» du patient en fonction des actes réservés ou exclusifs à certains professionnels et pas à d'autres, les heures de visite, le nombre et la qualité des visiteurs, l'heure des repas, les heures obligatoires du lever et du coucher, la liste des activités autorisées, et j'en passe.

Nous ne saurions terminer le présent volet sans évoquer le peu de place faite aux familles et aux proches. L'organisation hospitalière n'encourage pas toujours leur participation. On ne pense pas que cela pourrait être profitable aux patients et bénéfique à l'ensemble de la distribution des soins.

Regard sur l'avenir. Actuellement, les personnes hébergées que nous représentons nous disent vivre une insécurité importante occasionnée par les changements inclus dans la réforme et par les discussions actuelles. Elles reçoivent au compte-gouttes l'information nécessaire à leur compréhension par du personnel qui, souvent, ne possède pas plus qu'elles les données justes. La fusion des conseils d'administration et le regroupement des établissements d'hébergement et de soins de longue durée leur fait craindre qu'elles ne pourront plus recevoir de services médicaux. Perdront-elles l'accès à certains services que le rattachement à des hôpitaux de courte durée leur assurait? Ces inquiétudes peuvent paraître futiles à certains, mais elfes n'en affectent pas moins les personnes qui ont dû tout abandonner et à qui on a limité le droit de conserver leurs biens. Il ne leur reste qu'un lit, une table, une chaise, une armoire et quelques bibelots.

Le deuxième volet traite des milieux d'héberqement, dans le domaine de l'hébergement privé. A plusieurs reprises, nous avons dénoncé l'absence de contrôle sur les activités des établissements privés. Certaines personnes y étant hébergées ne reçoivent pas tous les soins que leur état nécessite et sont souvent victimes

d'abus. Notre expérience dans le traitement des plaintes déposées par des personnes hébergées partout en province nous permet de dire qu'il est à peu près impossible d'obtenir que des correctifs soient rapidement apportés à des situations d'abus, d'exploitation, d'absence de services répondant aux besoins des personnes lorsque ces dernières sont hébergées dans des ressources privées ou clandestines. Les personnes qui y vivent paient souvent des sommes importantes pour obtenir des services qu'elles ne reçoivent pas ou qui sont dispensés par des personnes qui n'ont pas la formation adéquate. Nous profitons de l'occasion, M. le ministre, pour demander, encore une fois, qu'un ménage soit fait dans les établissements privés et clandestins pour que toutes les personnes hébergées au Québec ne soient plus exploitées et qu'elles obtiennent la satisfaction de tous leurs besoins. (17 h 15)

Services exigibles par les personnes hébergées. Avant 1984, aucune disposition réglementaire ne venait définir quels étaient les services médicaux que les usagers étaient en droit de recevoir en hébergement. Puis des services médicaux, pharmaceutiques et infirmiers ont, par la suite, été rendus obligatoires. La réforme et la loi 120 ont apporté des modifications importantes à cet égard. Le droit aux services pour les personnes hébergées est donc prédéterminé par des règles, des normes, des procédures internes, des protocoles, des directives, des circulaires, des règlements de conseils d'administration, des pratiques et des procédures administratives adoptés dans le respect des plans d'organisation de services des établissements. Une personne hébergée qui aurait besoin d'un service non disponible ou non prévu dans l'organisation interne de l'établissement doit souvent s'en passer. En conséquence, actuellement, les personnes hébergées reçoivent uniquement les soins et services disponibles dans les établissements où elles se trouvent.

Considérant qu'actuellement les personnes hébergées ne reçoivent pas toujours tous les services requis par leur condition, nous faisons nôtre la recommandation du rapport Pelletier, et je cite: «Que soit implantée une gamme de services accessibles aux aînés en perte d'autonomie, indépendamment de leur milieu de vie.» Nous souhaitons également que soit prise en compte la réalité des personnes hébergées. Il est peu fréquent que des services ultraspécialisés leur soient offerts. Est-on prêt à accepter qu'en raison d'une rationalité économique on en vienne graduellement à perdre de vue l'ensemble de la personne humaine, à extraire de plus en plus tout ce qui est intimement lié à la satisfaction de tous ses besoins en privilégiant uniquement les services curatifs ou de réadaptation à caractère uniquement médical?

Nous souhaitons cependant que les personnes actuellement hébergées ne voient pas passer sous leur nez les améliorations consenties par cette réforme et ne puissent jamais avoir accès à ces services essentiels parce que, d'une part, tout l'argent disponible sera encore une fois massivement utilisé pour les soins de courte durée ou, d'autre part, parce qu'elles n'auront pas les moyens de se les offrir.

Dans le chapitre qui traite du revenu des personnes âgées au Québec, on ne peut questionner le financement actuel du réseau de la santé et des services sociaux avec, comme toile de fond, une possibilité que soient modifiés les services assurés, donc gratuits, sans parler de la capacité de payer de la clientèle que nous représentons. Après leur admission en hébergement, ces personnes voient leur situation financière se modifier à plus ou moins brève échéance. Elles doivent épuiser leurs économies et les revenus générés par la vente ou la location de leurs biens puisqu'ils sont inclus dans le calcul de leurs revenus établissant leur contribution à l'hébergement.

Au sujet de la contribution des personnes hébergées, toutes les personnes hébergées contribuent financièrement à leur hébergement et certaines de façon substantielle. Cette contribution a pour objet d'établir un équilibre, semble-t-il, entre les sommes dépensées par les personnes vivant dans la communauté et celles vivant dans les milieux d'hébergement. On fixe donc le tarif d'hébergement en fonction des dépenses courantes moyennes d'un adulte au Québec. Cette façon de faire nous semble inacceptable puisque les services que les personnes hébergées reçoivent en contrepartie ne peuvent que difficilement se comparer à ce que peut se payer une personne dans la communauté. Bien qu'elles n'utilisent souvent pas l'ensemble des services disponibles dans rétablissement, les personnes hébergées en assument collectivement les coûts. Aucune facturation individualisée n'est disponible. Actuellement, elles paient des sommes identiques, compte tenu de la chambre qu'elles occupent et ce, indépendamment des services disponibles dans l'établissement. Depuis de nombreuses années, nous avons demandé au ministre, sans succès, de modifier la méthode servant à déterminer la contribution des personnes hébergées.

Les personnes hébergées contribuent à l'achat de biens considérés comme «spéciaux»: lunettes, appareils auditifs, prothèses dentaires. On retrouve alors des personnes peu nanties, privées de prothèses dentaires, limitées à s'alimenter avec des purées. Elles peuvent également se voir privées du remplacement de leurs verres correcteurs. Elles ne peuvent plus lire, regarder la télévision, ou se déplacer de façon sécuritaire. Elles ne sont plus appareillées en cas de défaillance auditive. En conséquence, plus personne ne leur parle, les privant de toute vie sociale.

En ce qui trait à l'allocation des dépenses personnelles et les biens et services devant être

assumés par l'établissement, le texte réglementaire prévoit que la contribution des personnes hébergées ne peut excéder le montant correspondant au prix de la chambre et qu'une somme de 125 $ par mois en allocation de dépenses personnelles doit leur être laissée. De nombreuses démarches ont été faites auprès du ministre pour que cette somme soit ajustée au coût de la vie. Le ministre n'a pas reçu positivement nos demandes.

Encore une fois, notre expérience nous démontre que les dispositions contenues dans les circulaires qui traitent des articles dont il a été question plus haut sont souvent bafouées et que les personnes hébergées doivent assumer les coûts reliés à l'achat des articles essentiels.

Le cinquième volet a trait aux dispensateurs de services. Les personnes hébergées actuellement ne peuvent obtenir l'assurance qu'elles recevront des soins médicaux qui tiennent compte des données actuelles de la gériatrie et de la psychogériatrie. L'absence de médecins dans plusieurs lieux d'hébergement nous fait craindre que les services qui demeureront assurés, c'est-à-dire les services dits médicaux, diagnostiques et thérapeutiques obtenus à la suite d'une prescription médicale, soient de moins en moins disponibles dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée. Le ministre nous disait dernièrement, lors du dernier colloque de la commission d'hébergement, et je cite: «qu'il privilégiera les personnes âgées et qu'il entend démédicaliser le phénomène du vieillissement par le renforcement des mécanismes d'assistance et de maintien à domicile».

Nous espérons que son désir de démédicaliser le phénomène du vieillissement ne contribuera pas à ce que les professionnels de la santé désertent les milieux d'hébergement. Nous le répétons, les services autres qu'infirmiers ne peuvent être dispensés que suite à une prescription médicale. Cette règle nécessiterait peut-être un certain assouplissement. Nous souhaitons également que de plus en plus de médecins compétents, dynamiques s'intéressent à la situation des personnes hébergées.

En ce qui a trait aux autres professionnels de la santé, l'ouverture des postes ou le recours à des professionnels consultants ou contractuels sont hétérogènes. Ils sont définis dans le plan d'organisation. Cependant, ces choix se font en fonction de ressources financières dont l'établissement dispose. Certains médecins nous disent qu'ils ne peuvent offrir des services multidis-ciplinaires puisque peu de professionnels de la réadaptation, par exemple, sont disponibles dans leur établissement.

Le Président (M. Joly): Excusez, M. Clavel. Est-ce que c'est encore bien long?

M. Clavel: Pas très long. Je vais terminer dans trois ou quatre minutes.

Le Président (M. Joly): Je vous laisse aller, M. Clavel.

M. Clavel: Nous souhaitons également que certaines dispositions contenues dans les conventions collectives soient revues. Nous avons, à maintes reprises, demandé aux principaux syndicats d'accorder plus de latitude aux établissements et d'exprimer plus de souplesse dans l'interprétation de leur convention collective.

Je passe maintenant à la fin, à l'impact des modifications. Nous craignons que le désir de modifier le principe de la gratuité dans un esprit d'économie touche de façon directe l'universalité des soins. Les personnes hébergées n'ont pas souvent le pouvoir d'effectuer des choix ou de mofifier les orientations que l'on retient pour elles. Le personnel médical et professionnel contrôle les soins et services qu'elles reçoivent. Les administrateurs et les gestionnaires des établissements prennent des décisions affectant directement la qualité des soins qu'elles reçoivent de même que leur qualité de vie, sans qu'elles puissent souvent exprimer leurs préférences.

Elles craignent qu'une modification au contenu du panier de services assurés les affecte directement et qu'elles aient à subir une diminution du service si elles ne peuvent contribuer davantage. Lorsque la guérison n'est souvent plus possible pour elles, compte tenu de leur âge et de leur diagnostic, elles craignent qu'il ne reste plus d'argent pour que leur soient fournis les services de support et d'accompagnement qui font souvent toute la différence entre la qualité de vie acceptable et une mort dans la souffrance et l'oubli.

Et, en conclusion, nous voulons dire que, bien sûr, il faut mieux allouer les ressources, mieux les gérer, mieux les utiliser et mieux les contrôler. Mais la relative rareté des ressources de l'État et de la société ne peut justifier le sacrifice de nos valeurs collectives à cet égard. S'il faut couper, que le gouvernement fasse les choix qui s'imposent, mais qu'il coupe dans d'autres secteurs que celui de la santé et des services sociaux. Le tout respectueusement soumis.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Clavel. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci bien, M. le Président. Ce n'est pas la première fois qu'on reçoit le Comité provincial des malades, parce qu'à mon souvenir nous avions ouvert notre large commission, à l'époque, par le Comité provincial des malades.

M. Clavel: Nous avions apprécié la chose, à l'époque.

M. Côté (Charlesbourg): II nous apparaissait

que c'était l'organisme qui pouvait le mieux s'exprimer pour ceux qui n'ont pratiquement pas de voix. Il y a des voix organisées qui viennent nous voir et se faire entendre. Il y a donc des gens qui sont sans voix s'ils n'ont pas le Comité provincial des malades. On l'avait fait à l'époque et on est encore très heureux de le faire sur le financement.

Ma première question serait la suivante, et j'en ai quelques-unes, là. Est-ce que vous avez l'impression, dans votre vécu, que nous en avons pour notre argent, pour les 12 000 000 000 $ qu'on investit dans ce système? Parce que c'est la question fondamentale. Avant d'en ajouter, il faut, bien sûr, avoir la satisfaction de savoir que celui qu'on a est bien utilisé et qu'il est utilisé pour les fins pour lesquelles on l'a donné. Est-ce que vous avez cette impression-là?

M. Clavel: M. Dessane, vous qui passez une grande partie de vos journées dans une résidence à voir les problèmes qu'ont les malades, les hébergés, j'aimerais que vous répondiez à M. le ministre.

Le Président (M. Joly): M. Dessane, s'il vous plaît.

M. Dessane (Paul-Marcel): Merci. Moi, ça fait au-delà de 12 ans que je suis dans un centre d'accueil et je suis toujours surpris de voir que l'argent que le gouvernement donne ne semble pas nécessairement toujours atteindre le but désiré. Quand il y a des changements, dans bien des cas, c'est au niveau, disons, de l'administration, mais, quand il y a des coupures, c'est au niveau des bénéficiaires: coupures de personnel, coupures dans les loisirs et j'en passe. Moi, j'ai travaillé avec deux ministères, celui de l'Éducation et celui-ci. Celui de l'Éducation, il était payant, pour moi, mais actuellement, évidemment, ça s'appelle du bénévolat. Et, de part et d'autre, je n'en revenais pas de voir le gaspillage.

Vous savez, quand on manipule l'argent des autres, je pense qu'on est plus à l'aise que lorsqu'on manipule son propre argent. C'est ça qui me surprenait, de voir qu'on remplaçait des choses qui étaient encore bonnes, mais ce n'était plus à la mode. On enlevait des tapis parce qu'ils étaient un petit peu défraîchis. Mais d'où cet argent venait-il et à qui, normalement, cela aurait-il pu s'adresser? Est-ce que les soins étaient meilleurs? Non. Là, au centre où je suis, il y a un changement, disons, que j'appellerais pratiquement radical. Il y a beaucoup de bonnes volontés qui se font valoir. Le personnel, à mon idée, disons, d'après le travail qu'il donne, est très bien payé. Ils n'en ont jamais assez, pas plus que moi, quand j'étais professeur, je ne reculais devant une possibilité d'augmentation. Mais il me semble que, lorsqu'on reçoit un montant d'argent, on doit donner en retour, tant au point de vue de soins de qualité que d'attention auprès du bénéficiaire. Là, je peux vous dire une chose. Je suis en contact avec d'autres centres et c'est à peu près la même réflexion que l'on passe. On est toujours surpris de voir que, dans le fond, l'argent ne manque pas, mais s'il arrive quelque chose on coupe et c'est toujours le bénéficiaire qui en subit les conséquences. On enlève du personnel, comme je le mentionnais tout à l'heure, mais par contre, au niveau de l'administration, on est peut-être prêt à ajouter du personnel.

M. Côté (Charlesbourg): Je pourrais peut-être vous demander, si c'est possible, quand vous parlez de votre centre, c'est quel type? Est-ce que c'est un centre public ou privé?

M. Dessane: C'est un centre, disons, qui relève du gouvernement. (17 h 30)

M. Côté (Charlesbourg): Donc, un centre public.

M. Dessane: Public, oui, oui.

M. Côté (Charlesbourg): Ça, c'est un sentiment qui semble être partagé par ceux à qui vous parlez où on ferait davantage d'investissements dans l'administration, ce qui pourrait occasionner des coupures dans le service aux bénéficiaires.

M. Dessane: Oui. Si vous le permettez, M. le ministre, il y a une chose que je tiens à souligner. À la fin de l'année budgétaire, lorsqu'il reste de l'argent, on se lance dans toutes sortes de dépenses des fois qui sont intelligentes, des fois moins intelligentes, de peur que le ministère ou le gouvernement vienne chercher ce qui reste. Moi, je me suis posé la question: Si le gouvernement n'ouvre pas les yeux, il perd des millions.

M. Côté (Charlesbourg): Vous qui êtes très près et qui suivez de très près le quotidien, quelle est la meilleure suggestion que vous pourriez nous faire dans ces cas-là?

M. Dessane: Je vais vous dire une chose. Je n'ai jamais été bon en mathématiques, puis du côté argent, tout ce que je vois c'est le bien-être du bénéficiaire. Je remets entre des mains responsables le soin de dispenser l'argent à bon escient de façon que le bénéficiaire ne manque de rien, puis que, du moins, dans les circonstances, il puisse vivre heureux et non pas toujours dans une crainte, comme on le mentionnait tout à l'heure, à savoir: Est-ce qu'on sera en mesure d'avoir nos médicaments? Serons-nous en mesure d'avoir un médecin? C'est ça qui est important pour nous. Le côté argent, en tout cas, pour ma part, je n'y touche pas.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Juste... Je veux bien comprendre. Vous m'avez fait une démonstration qui nous a été donnée à quelques reprises sur le plan des fins d'année budgétaire et effectivement on accélère un certain nombre de choses pour ne pas que le gouvernement mette la main sur l'argent qu'on n'aurait pas normalement dépensé dans les soins.

M. Clavel: ...ou qui pourrait affecter le budget de l'année suivante.

M. Côté (Charlesbourg): C'est ça. C'est clair que, si vous l'amputez, si vous ne le dépensez pas une année, l'année prochaine vous n'en avez pas besoin, supposément.

M. Clavel: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, il faut trouver des techniques administratives qui vont permettre de protéger un budget mais dont les services vont aller en soins aux personnes et non pas à d'autres fins. Je trouve ça achalant. Je trouve ça même un petit peu odieux dans certaines circonstances, parce que là on parle, effectivement, de sommes d'argent. Ils ont ce qu'il faut sur le plan budgétaire. Ce que je comprends c'est que, s'il en reste 100 000 $, 150 000 $ ou 200 000 $ à la fin de l'année, on va l'investir dans autre chose que des soins qu'on pourrait procurer aux personnes âgées. Ce que vous me dites, ce n'est pas un phénomène isolé, c'est un phénomène qui pourrait être un peu plus répandu qu'on pense.

M. Clavel: Oui. C'est un peu le même principe qui s'applique à tous les ministères du gouvernement.

M. Côté (Charlesbourg): j'ai vu ça au ministère des transports à l'époque. à tout le moins, ils achetaient des tuyaux qui, l'année suivante, pouvaient servir.

M. Clavel: Oui, mais il y a des dépenses qui se font qui ne sont pas nécessaires, mais ils les font parce qu'ils ont l'argent. M. Untel change les tapis de son bureau, parce qu'il a assez d'argent au budget ou il s'achète un nouvel ameublement, des choses comme ça.

Vous savez, le gouvernement devrait peut-être, à l'occasion, prendre l'exemple de l'entreprise privée qui, périodiquement, fait un regard sur elle-même et fait de la rationalisation, chose qui ne se fait pas toujours dans les différents ministères gouvernementaux.

M. Côté (Charlesbourg): On va finir par y arriver avec des méthodes de contrôle.

M. Clavel: Oui, mais les méthodes sont lentes.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, elles sont lentes, mais c'est un système qui ne peut pas se revirer de bord du jour au lendemain.

M. Clavel: Non, j'en conviens.

M. Côté (Charlesbourg): C'est un système qui a été un peu beaucoup laissé à lui-même pendant de nombreuses années, du temps où on avait suffisamment d'argent pour dire: On en met par-dessus le tas, puis on en met par-dessus le tas, et il n'y a pas de problème.

M. Clavel: Puis ça ne dérangeait personne.

M. Côté (Charlesbourg): On ne peut plus, là. Vous avez dit tantôt que les personnes âgées, ce qu'elles souhaitaient c'est, premièrement, pouvoir avoir leurs médicaments et, deuxièmement, avoir accès aux médecins sur le plan du conseil, du diagnostic. Quand vous dites avoir accès à des médicaments, quand on est dans un centre d'accueil public, c'est quoi la problématique d'avoir accès à ses médicaments? Il me semble qu'il n'y a pas de problématique là. Il n'y a pas de... Dites-m'en donc davantage sur les situations où on ne peut pas avoir accès à nos médicaments.

Mme Lamquin-Éthier (Michèle): M. le ministre, puis-je ajouter un complément à ce qui a été dit précédemment?

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, oui, aucun problème.

Mme Lamquin-Éthier: II est exact que des coupures sont faites et que ces coupures-là, de façon tout à fait par hasard, affectent toujours les soins ou les services directs qui sont donnés aux bénéficiaires. Vous ne seriez, j'imagine, même pas surpris de voir le nombre d'établissements où on compte les culottes d'incontinence. Il y a des parents qui prennent soin d'en acheter et de les mettre en réserve sur la tablette parce que leur époux ou leur mère n'en aura pas, parce que c'est 4 par 24 heures et c'est tout. C'est de ça que les bénéficiaires sont insatisfaits et vous leur annoncez...

Bon, il y a une réforme qui arrive à grand fracas, qui les insécurise. On parle de fusion, d'intégration, d'arrimage d'établissements. Ces gens-là ne savent plus s'ils auront ou pas des services, s'ils les auront encore du centre hospitalier duquel ils dépendaient, si ces services-là vont être affectés, de quelle façon ils le seront. Eux ont une capacité financière qui est limitée. Ils ne sont plus productifs et leur capacité de dépenser n'augmentera pas. Alors qu'ils n'ont pas plus ils paient de plus en plus au niveau de la contribution à l'hébergement. En plus, ils assument des sommes qu'ils ne devraient pas pour des services qu'ils n'auraient pas à

payer.

La clientèle que nous représentons n'est pas habituée à revendiquer et elle n'est pas habituée à vous dire: J'ai le droit de. Pourtant, ce droit-là est clairement inscrit. C'est une clientèle à qui on impose des choix et qui craint, encore une fois, d'être la solution aux problèmes actuels qu'on connaît. Elle craint, encore une fois, de devoir payer plus alors qu'elle recevra de moins en moins. Ça c'est le message qu'elle nous a donné et elle insiste pour qu'on puisse vous le livrer. Il y a une absence flagrante de contrôles. S'il y en a, ils ne sont pas exercés. S'ils ne le sont pas c'est parce que c'est mou quelque part. Il n'y a pas assez de personnel ou...

M. Côté (Charlesbourg): Je veux qu'on se suive, là. Je ne veux pas qu'on...

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, c'est parce qu'il est important de compléter...

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui, je comprends, mais je veux juste...

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

M. Côté (Charlesbourg): Je vais vous donner la chance parce que je sais que vous parlez de vécu et d'expérience. Donc... C'est parce que juste sur les médicaments...

Mme Lamquin-Éthier: O.K. parfait.

M. Côté (Charlesbourg): ...je veux comprendre. On est dans une situation de centres d'accueil publics où il n'y a pas de barrières à ce moment-ci à l'accès à des médicaments pour des personnes qui en ont besoin. Je veux juste comprendre. Si on est dans un centre d'accueil autofinancé, privé, c'est peut-être le cas, mais pas dans le centre d'accueil public. Sinon je ne comprends pas, surtout que les médicaments pour les personnes de plus de 65 ans sont gratuits. C'est parce que c'est un point qui est quand même important. Quand on parle des couches, je comprends ça, mais lorsqu'on parle des médicaments, je m'interroge un peu. Je voudrais en savoir davantage.

Mme Lamquin-Éthier: Bon, vous avez annoncé vos intentions de démédicaliser, comme on vous le soulignait tout à l'heure dans notre mémoire. Si la démédicalisation équivaut à enlever les médecins ou à faire en sorte que les médecins se désintéressent des centres d'accueil d'hébergement, c'est bien sûr que ces gens-là vont être privés de services. La médication, à l'heure actuelle, elle est donnée pour plusieurs raisons. En supposant qu'on enlève cette médication-là, notre clientèle va se trouver contention-née, attachée. Dans quelles conditions va-t-elle se retrouver?

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, mais écoutez...

Mme Lamquin-Éthier: Vous envisagez quoi comme modifications?

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, il faut quand même faire attention. Il ne faut pas partir après des peurs qui n'existent pas non plus. Ce n'est pas le ministre qui va enlever les médicaments.

Mme Lamquin-Éthier: Ça existe, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): non, non, mais attendez un petit peu. ce n'est pas le ministre qui va enlever les médicaments. un médicament c'est un médecin qui prescrit ça...

Mme Lamquin-Éthier: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): ...et c'est lui qui va décider s'il l'enlève ou pas. L'une des principales plaintes qui a été évoquée pendant longtemps dans les centres d'accueil ou centres hospitaliers de soins de longue durée, c'est qu'on les tenait dans des lits en les droguant littéralement de médicaments.

Mme Lamquin-Éthier: C'est vrai, ça se fait quotidiennement.

M. Côté (Charlesbourg): Quand on parlait de démédicaliser, c'est de s'assurer qu'on ne soigne pas par des médicaments quelqu'un qui n'en n'a pas besoin. Donc, ce n'est pas plus que ça. C'est le bien-être de la personne toujours, en ayant à l'esprit que c'est d'abord et avant tout le bien-être de la personne et que c'est le médecin qui peut décider de la nécessité ou pas du médicament. Je pensais qu'on se retrouvait dans une situation où il y a des gens qui pouvaient être privés de médicaments en centre d'accueil public alors que tout est supposément gratuit a ce niveau-là.

M. Dessane: C'est la peur que ça soit coupé, ça.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais ça... Je pense qu'il faut être clair. Il n'en est pas question, d'aucune manière, puisque ça fait partie des acquis du système. Cependant, là où il y a abus, là où il y a une consommation qui peut avoir des conséquences pour le bien-être de l'individu... Il est bien évident qu'il n'en est pas question, d'aucune manière. L'autre dossier...

M. Dessane: Vous êtes bien sûr, M. le ministre?

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui. Comment?

M. Oessane: Vous êtes bien sûr?

M. Côté (Charlesbourg): Ah bien, chez nous... Écoutez, je ne peux pas être plus...

M. Dessane: On a lu les journaux et puis... M. Côté (Charlesbourg): Oui.

M. Dessane: ...on a vu à un moment donné qu'il était fortement question qu'il y ait des conditions pour la médication gratuite.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Là on parle de programmes à des personnes de plus de 65 ans qui ont accès au programme public, à domicile ou pour les personnes qui sont sur l'aide sociale. On parle des 500 000 000 $. Quand on parle de médicaments dans les centres d'accueil d'hébergement ou dans les centres hospitaliers de soins de longue durée à travers le Québec, on ne parle pas de ce budget-là. C'est un budget qui est totalement à part.

Donc, les 500 000 000 $ dont il est question, c'est les personnes autonomes qui ont plus de 65 ans, qui ont accès à la gratuité des médicaments à leur domicile et, en plus, des personnes qui sont, pour des raisons qu'on connaît, sur l'aide sociale, parce que c'est une nécessité, qui ont aussi accès à ces médicaments-là. Il n'a jamais été question de la vie de toucher aux médicaments dont les personnes avaient besoin. Au contraire ce qu'on souhaitait c'est renforcer le lien entre le médecin et le pharmacien en centres d'accueil d'hébergement et en CHSLD pour bien s'assurer que la médication soit la médication Indiquée en suivant la personne de telle sorte qu'il n'y ait pas surconsommation ou ajout de consommation, ce qui va faire en sorte que... Elle est dans le lit, on ne sait pas ce qu'elle a, mais elle est littéralement droguée de médicaments. C'est uniquement là qu'on souhaite intervenir, mais pas pour sauver de l'argent, pour la qualité de vie du bénéficiaire. Ça, je ne peux pas vous le dire avec plus de sincérité que je le fais maintenant. Ça, c'est très clair. Très clair.

Mme Lamquin-Éthier: M. le ministre... M. Côté (Charlesbourg): Oui.

Mme Lamquin-Éthier: ...il va falloir aussi que vous envisagiez la question du changement des attitudes. Le réflexe premier de donner une pilule, c'est toujours plus facile que d'écouter, d'essayer de comprendre. Ça achète la paix. Ça procure des temps de loisir au personnel. À beaucoup d'endroits, on surmédicamente. Pourquoi? Parce qu'il y a une insuffisance flagrante de personnel ou que le personnel ne sait pas se comporter face à des personnes, par exemple, qui ont des problèmes cognitlfs. Ils n'ont pas été préparés à ça.

M. Côté (Charlesbourg): Non. On a besoin... Règle générale, on a du bon personnel à travers le Québec qui s'occupe de nos personnes âgées. Ce qu'il faut admettre cependant, c'est qu'il y a eu un alourdissement des clientèles qui sont hébergées et la formation ou l'encadrement des personnes qui travaillent auprès des bénéficiaires n'a peut-être suivi au rythme où il aurait dû suivre. Là où on a, règle générale, des problèmes... On ne nommera personne puisque vous en avez surveillé quelques-uns et mis sur la sellette quelques-uns. Ils avaient de bonnes intentions, mais ils n'avaient pas la préparation et le suivi qu'il fallait pour être capable de faire le travail qu'ils avaient a faire.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, c'est épouvantable, ça...

M. Côté (Charlesbourg): Oui.

Mme Lamquin-Éthier: ...en termes de conséquences pour la clientèle.

M. Côté (Charlesbourg): C'est ça. Mais à partir du moment où on est dans cette situation-là... Le gouvernement a décidé d'augmenter les budgets en termes d'alourdissement de clientèles. Ça, c'est un budget qui évolue depuis un certain nombre d'années - on va continuer dans ce sens-là - pour davantage avoir le personnel qu'il faut compte tenu des gens qui sont dans les lits et qui nécessitent plus de soins qu'avant. Ça demeure toujours une relation d'un professionnel, que ce soit une infirmière, une Infirmière auxiliaire, préposée - allez dans toute la hiérarchie - qui dispense des soins, on fait appel à des professionnels qui doivent se comporter en professionnel vis-à-vis des gens qui sont un peu démunis et malades.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, M. le ministre...

M. Côté (Charlesbourg): C'est pour ça que... Oui.

Le Président (M. Joly): ...je me dois, malheureusement...

M. Côté (Charlesbourg): Je vais aller à ma question qui ne serait pas la dernière, mais... Je veux quand même profiter du temps que vous êtes là - et vous l'avez abordé - pour parler de centres d'accueil publics, de centres d'accueil privés conventionnés, de centres d'accueil autofinancés... Évidemment, vous avez ajouté à ça des foyers clandestins. On sait que dans des foyers clandestins on se retrouve avec des situations où, effectivement, il y a des personnes de moins de 65 ans qui se retrouvent en dif-

ficulté, des gens de 55 ans et plus, qui n'ont pas beaucoup de revenus mais qui se retrouvent dans des foyers clandestins - on en retrouve beaucoup - qui ne sont pas sous notre responsabilité, mais qui font appel à une responsabilité gouvernementale et aussi municipale parce que ça prend des permis sur le plan municipal pour être capable d'y arriver. Est-ce que vous avez des constats différents quant à la qualité... Si on est en centre d'accueil privé conventionné... Pour un privé conventionné, il y a sensiblement le même budget qu'un public par rapport à un centre d'accueil privé autofinancé qui, lui, ne reçoit qu'un permis. J'aimerais vous entendre là-dessus parce que ça va être très conséquent pour les gestes qu'on a à poser et qui seront posés très, très prochainement. (17 h 45)

Mme Lamquin-Éthier: On vous a remis le cumulatif des plaintes et des demandes d'information que nous avons eu à traiter durant la dernière année. La demande que nous avons reçue à notre bureau, ça équivaut à 476 demandes reçues et traitées. Nous avons départagé le nombre total d'établissements privés visés, sur ces 476 là. Nous en avions 24 l'année dernière. Au niveau des établissements publics visés nous en avions 96. C'est assez difficile. On n'a pas départagé entre les conventionnés et les autofinancés. Il faudrait peut-être que je refasse un examen visuel.

M. Côté (Charlesbourg): En tout cas... Ma question est toujours bonne. La réponse peut venir plus tard là, mais je pense que ma question demeure. Pour nous, sur le plan du contrôle - parce qu'on s'en va vers des contrôles beaucoup plus stricts - c'est clair qu'il y aura des priorités d'intervention. Il va falloir le faire là où le bât blesse davantage.

Mme Lamquin-Éthier: Ce qui est important c'est de s'assurer qu'il y ait un contrôle efficace réel qui soit fait, une volonté claire arrêtée et que des actions concrètes soient posées. C'est ça. C'est bien sûr que ces établissements-là sont gérés et leur droit de gérance qu'ils nous objectent souvent, on ne peut pas toujours s'y intéresser. Vous, votre mandat c'est de vous assurer de la santé et du bien-être de ces gens-là et de vous assurer que les services qu'ils reçoivent soient des services adéquats qui correspondent à leurs besoins. Quand on est conventionnés on a une obligation qui est probablement plus lourde et les contrôles devraient être plus serrés. On ne pense que, quand on est autofinancés, ça constitue une porte de sortie qui nous permet de dire à ces gens-là: Écoutez, nous on ne demande rien à personne.

M. Côté (Charlesbourg): C'est parce que le conventionné c'est le ministère qui impose la clientèle plus lourde alors que l'autofinancé c'est une clientèle qui est choisie par le privé lui-même.

Mme Lamquin-Éthier: Mais on retrouve aussi de plus en plus dans certains types de résidences des...

M. Côté (Charlesbourg): II y a des cas lourds, je suis tout à fait d'accord avec ça.

Mme Lamquin-Éthier: Absolument et très lourds même.

M. Côté (Charlesbourg): D'ailleurs c'est pour ça qu'on a voulu ouvrir le maintien à domicile à des ressources privées aussi parce que c'est la personne d'abord qui compte.

Mme Lamquin-Éthier: C'est ça la préoccupation, et de faire en sorte que cette personne-là qui est au centre des préoccupations reçoive les soins et services auxquels elle a droit. Il ne faut pas se fermer les yeux.

M. Côté (Charlesbourg): Je ne peux pas vous dire autrement que je partage votre opinion. Évidemment, ce sont des systèmes qui ne sont pas faciles à mettre en place et là aussi il faut être extrêmement prudents de ne pas dépenser beaucoup trop d'argent en contrôles administratifs alors que ce qu'on vise c'est de donner du bien-être et des services à l'individu. Le message est assez clair et je le partage aussi. Dans nos moyens il faut équilibrer nos gestes.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamin-gue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je veux vous souhaiter la bienvenue également, M. Clavel, le président, Mme Lamquin-Éthier, M. Dessane et M. Grondin. Ça va finir par se réparer la mécanique, j'imagine, à quelque part. Si ça ajoute à des barrières à franchir pour venir jusqu'à nous, il faut vous remercier avec plus d'intensité d'avoir franchi ces barrières pour vous rendre jusqu'à nous.

C'est important qu'on ait votre vision des choses parce que vous voyez... Au moment où vous êtes arrivés... Il n'y a pas autant de caméras et il n'y a pas autant de monde, hein? Après tout, vous êtes rien que les usagers, quoi, hein? Ça, c'est un peu le drame de notre système. C'est la parfaite illustration.

M. Clavel: Les humbles.

M. Trudel: Pardon?

M. Clavel: Les humbles sont mis de côté.

M. Trudel: Oui, c'est ça. C'est-à-dire que

tout le système est supposé être organisé pour vous. À voir l'affluence cet après-midi, pour moi la pyramide est à l'envers à quelque part. On ne se pose pas la question s'il va y avoir une pilule de payée ou non. Le ministre posait des questions sur des «brackets» de rémunération. Il parlait d'autour de 500 000 $ quelque part. On n'a pas de problèmes de fourniture à ce niveau-là, au niveau des médicaments. C'est pour ça que c'est important que vous nous donniez le plus simplement du monde votre vécu et ce que, comme usagers du système, vous avez à nous demander.

J'aurai quelques questions spécifiques tantôt, bien sûr. La commission parlementaire actuelle porte sur le financement du système de santé et des services sociaux au Québec. Vous, comme usagers et membres de la communauté québécoise, est-ce que vous avez conscience que notre système de santé et de services sociaux est vraiment en danger, qu'il est aux soins intensifs? Est-ce que les gens avec qui vous vivez quotidiennement ont cette impression? Bien sûr avec cette question: Qu'est-ce qui serait le plus urgent de redresser dans le système si tant est que le diagnostic serait oui, il est aux soins intensifs, notre système? Vous l'avez lu le document. Est-ce que vous avez d'abord cette impression-là, très clairement?

M. Clavel: Je ne crois pas que nous ayons cette impression quand on se base sur certaines données qui ont été préparées par le ministère qui donne certaines statistiques, qui établit des coûts. Je ne les ai pas de mémoire, mais Mme Lamquin, vous me parliez d'un coût de 29 $ par habitant. Peut-être référer...

M. Trudel: Vous pourriez compléter, mais, déjà, ça amorce bien, quant à moi. Ce n'est pas tellement sur les chiffres précis. On ne peut pas demander ça à vous autres...

M. Clavel: Non.

M. Trudel: ...de jouer les économistes et...

M. Clavel: D'ailleurs, on n'est pas des gestionnaires.

Une voix: Exactement.

M. Trudel: C'est ça. Vous n'êtes pas des gestionnaires et il ne faut pas vous demander ça...

M. Clavel: Non. D'accord.

M. Trudel: ...sauf que vous êtes - on ne dit pas un échantillonnage - des citoyens ordinaires...

M. Clavel: Oui.

M. Trudel: ...des usagers.

M. Clavel: Oui. On représente les citoyens ordinaires.

M. Trudel: Quand vous me dites, tout de go, comme ça, sur l'élan: Nous, on n'a pas l'impression que le système est en danger, c'est bien ça que vous me dites?

M. Clavel: Oui.

M. Trudel: Là, je vais prendre le complément de réponse de madame là-dessus. Je vais revenir après cette impression-là.

Mme Lamquin-Éthier: Vous avez vous-même fait état récemment - et ça a été rapporté par la pressa - des 12 mythes qui sont disparus. Il demeure qu'il y a un problème et nous, on n'est pas, comme vous le disiez, des fiscalistes. Nous ne sommes pas des économistes ni des historiens. On n'a pas de compétence provinciale ou fédérale. On n'est donc pas les mieux placés pour vous donner une opinion là-dessus. On ne pourrait pas cependant passer par-dessus le fait que le fédéral se désengage de plus en plus et que ça, ça constitue un problème. Pour en avoir parlé à certaines personnes, la réponse de ces gens-là, c'est: Écoutez, pourquoi est-ce qu'Hs ne s'assoient pas ensemble, qu'ils ne voient pas ensemble à négocier ça et ce qu'ils pourraient faire ensemble? Ils nous disent que la santé est un bien-être collectif, que c'est un choix qui a été fait et que les principes qui ont été établis doivent être respectés. Ils conviennent que le gouvernement est en position délicate, qu'il y a un manque à gagner. Pour eux - une des solutions dont on nous a fait part - c'est de recommander que les parties s'assoient et conviennent ensemble d'une façon d'accommodement ou d'une façon de se sortir de ce dilemme-là.

La commission va entendre des experts dans ces domaines-là. Il y a 50 groupes qui ont été convoqués. Sept groupes représentent les usagers. La balance, c'est ça, l'expertise. Je pense que vous allez avoir des occasions idéales de leur soumettre des questions dans ces domaines-là, sauf que nous, la clientèle qu'on représente, on vous a dit quelles sont ses inquiétudes. Les usagers nous disent, par ailleurs, qu'ils tiennent aux acquis, qu'ils tiennent à l'universalité, à la gratuité et à l'accessibilité. Ils savent qu'il y a des problèmes: Assoyez-vous et discutez-en entre vous. Ils sont persuadés que des solutions concrètes peuvent être trouvées.

M. Trudel: En tout cas, si on part du point de vue du document du 18 décembre - et c'est loin d'être un reproche que je vous fais parce que vous êtes, quant à moi, témoin moyen de ce que j'entends dans la rue, moi aussi, un peu partout - il y a une espèce d'incrédulité de la

situation. Le système ne serait pas en danger. L'État dit: Pour l'instant, au niveau du manque à gagner, dans le meilleur des cas, il va nous manquer 200 000 000 $ par année. Puis là, ajoutez ça, 400 000 000 $, 600 000 000 $, 800 000 000 $, 1 000 000 000 $. Nous, on prétend qu'au niveau des chiffres c'est encore pis que ça, que c'est entre 2 800 000 000 $ et 5 500 000 000 $. Alors, il y a comme un sentiment d'urgence quelque part quant au maintien des caractéristiques fondamentales de notre régime. Bon.

Ça nous amène donc à constater une autre fois qu'il y a un manque de liens entre notre système et les usagers et même la population en général. C'est comme si c'était donné, que ce serait là pour toujours et que ce serait dans le système, mais ce n'est pas comme cela. Bon. Ça me mène à la question suivante: Votre clientèle, c'est surtout la clientèle hébergée que vous défendez. Mais il y a M. Grondin qui est avec nous qui est, si je comprends bien - on l'a dit tantôt... maintien à domicile.

M. Grondin (Louis): Maintien à domicile, oui, c'est ça.

M. Trudel: Bon. Le Comité provincial des malades aussi...

M. Grondin: Exactement.

M. Trudel: ...défend ces gens-là. Est-ce que vous pensez, M. Grondin, à partir du diagnostic... Prenons comme prémisse qu'il y a vraiment du danger. Le maintien à domicile, est-ce qu'on y met les ressources, le fric, l'aide nécessaire actuellement et est-ce qu'on devrait prendre surtout cette direction pour répondre aux besoins des personnes en détresse - je ne qualifie pas le niveau de détresse - dans le système de santé et de services sociaux?

M. Grondin: Moi, je vous dirais que c'est sûr qu'il y aura toujours un besoin d'institutions, mais pour des personnes qui, comme moi, ont choisi de vivre à domicile, je pense qu'à cet effet-là c'est le meilleur endroit pour vivre. Aujourd'hui, je vous arrive et...

Je vais sortir un petit peu de ça, rien que pour faire une parenthèse. Je suis arrivé en chaise roulante d'un établissement conventionné, fournie par le gouvernement, réparée par le gouvernement hier, brisée encore aujourd'hui, réparée encore par le gouvernement aujourd'hui et qui va finir peut-être par m'être remise entre les mains. Il va avoir un an à peu près le 1er avril, ce fauteuil-là, et ça a l'air d'être un poisson parce qu'il ne fait même pas sa première année et, le deuxième, je ne sais pas quand est-ce qu'il va arriver. C'est un sacré fauteuil et je dois vous dire que ça m'a pas mal un petit peu mêlé cette histoire-là.

Maintenant, pour revenir aux soins en maintien à domicile, c'est un petit peu comme du centre d'accueil élargi, cette affaire-là, parce que je suis encore soumis à toutes les règles du gouvernement. Le CLSC, c'est un établissement de santé comme les autres, en somme, et, étant un établissement de santé comme les autres, je dirai à M. le ministre comme je peux vous le dire à vous aussi que quand on a choisi comme moi de vivre à domicile et, en plus de ça, de gérer son propre budget de services et d'embaucher son propre monde - on nous fait des employeurs comme si on pouvait avoir tous les talents - et, en plus de ça, on nous donne 9 $ l'heure alors qu'on donne plus que 14 $ l'heure aux CLSC pour se procurer la même qualité de services...

Ce n'est pas très, très fort de la part du gouvernement de penser que, nous autres, on est capables, parce qu'on est handicapé, de faire des miracles. On va imprimer de l'argent, ou quoi? C'est ça que je ne comprends pas là-dedans. Il me semble que, là, à quelque part, le gouvernement... Je ne sais pas comment ça se fait qu'il y a besoin de tant d'argent que ça dans les CLSC et qu'il faut qu'on en remette encore et qu'on en rajoute. Comment se fait-il que quand ça arrive pour le donner au bénéficiaire, lui, il a besoin rien que de 9 $ et, quand ça arrive aux CLSC, c'est 14 $ que ça prend? C'est ça que je ne comprends pas.

M. Trudel: Je vais revenir. Il y a deux temps forts, deux temps très forts dans votre intervention. D'abord, vous dites: Moi, j'ai choisi de vivre à domicile. Comment s'est passé ce choix-là? Vous étiez en établissement et vous avez choisi, vous avez décidé - parce que c'est important cette séquence-là - d'être en maintien à domicile, de rester dans votre milieu.

M. Grondin: J'ai choisi de continuer de vivre à domicile parce que je n'ai jamais été en institution et je ne veux jamais y aller de ma vie. Je veux mourir même à domicile, si c'est possible. Je n'ai pas l'intention d'aller vivre ailleurs. Vivre à domicile, c'est là que tout le monde choisit de vivre. Ici, je pense qu'il n'y a personne qui doit vivre en institution. Alors, le meilleur endroit pour vivre, ça doit être à domicile. Moi, je veux continuer de vivre à domicile et, pour ça, il faut avoir des services de qualité autant à domicile et autant quand c'est payé par soi... pas par moi parce que c'est le gouvernement quand même qui me donne de l'argent. Je suis obligé d'arriver à faire des miracles et trouver du monde qui va s'étirer de façon, je trouve, plus que raisonnable. Le gouvernement devrait accorder plus au bénéficiaire qui se donne la peine de faire son propre travail que d'en donner autant aux CLSC. Je ne sais pas quelle sorte de transparence il va falloir qu'il y ait un jour pour qu'on puisse savoir ce

qui se passe dans ces boîtes-là. On n'est jamais capable de savoir ce qui se passe là.

M. Trudel: bon. reprenons cette deuxième séquence pour que je comprenne bien moi-même. vous dites: moi, ça me coûte 9 $ l'heure quand je m'achète...

M. Grondin: C'est-à-dire que c'est ce qu'on me donne.

M. Trudel: C'est ce qu'on vous donne et ça vous en coûte 14 $.

M. Côté (Charlesbourg): Non. M. Trudel: Non?

M. Côté (Charlesbourg): Ça en coûte 14 $ aux CLSC.

M. Trudel: Ça en coûte 14 $ aux CLSC. M. Grondin: Oui.

M. Trudel: Vous demandez comment ça se fait que ça peut coûter 14 $ aux CLSC...

M. Grondin: Oui.

M. Trudel: ...et que, vous, vous n'en avez rien que 9 $.

M. Grondin: Oui.

M. Trudel: Vous avez l'impression qu'il y a quelque chose entre les deux.

M. Grondin: Exactement.

M. Trudel: L'impression, c'est qu'on prendrait ça en administration, en encadrement, ou... (18 heures)

M. Grondin: J'ai bien l'impression que c'est une question d'administration dans le CLSC. Non, on pourrait penser que c'est une question d'administration, pardon. Ce n'est absolument pas ça. Pour l'administration, le CLSC a un budget d'administration pour sa boîte et pour ses employés. Le budget qui est accordé pour le bénéficiaire, c'est un budget protégé. Ce n'est pas un budget qui est tout d'une même enveloppe ou - en tout cas, appelez-le comme vous voulez - tout d'un même bloc. Ça, cet argent-là, c'est divisé en deux. Le budget pour le bénéficiaire, c'est un budget qui est protégé et qui est accordé pour ses soins. Ces soins-là, ce sont les besoins qui sont déterminés par le CLSC comme probablement dans les centres d'accueil d'hébergement de toutes sortes. Ce sont les professionnels qui déterminent les besoins des personnes, comme ça l'a été dans mon cas. Ce sont eux qui ont déterminé et mes besoins et le nombre d'heures de soins dont j'avais besoin alors qu'on est supposé faire ça en collaboration. Je dois vous dire que la collaboration, je m'en ai pas vu puis pas du tout, absolument pas. Il n'y a eu aucune collaboration. Ils sont venus me dire de but en blanc ce qui était bon pour moi puis ce qui n'était pas bon pour moi.

M. Trudel: Ah bon! Il y a Bissonnet qui frissonne des yeux en arrière, là. Non, je comprends que votre... Le ministre pourrait le dire aussi. Il y a différents degrés pour évaluer ce phénomène-là et c'est important, votre témoignage, à cet égard-là. Oui, on reçoit souvent des gens dans nos bureaux de comté qui tout simplement nous disent: Aïe! Comment ça marche, la patente? Comment ça marche cette affaire-là? «C'est-u» le CRSSS? «C'est-u» le CLSC? Est-ce que ça passe par le CSS?

M. Grondin: Le DSC puis le CSS et tous les autres.

M. Trudel: Alors, le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est mêlant pour les usagers.

M. Côté (Charlesbourg): C'est parce que c'est un cas qui est quand même assez important puis Dieu sait qu'il se débat avec beaucoup de vigueur pour faire valoir ses droits. Je pense que c'est un régime qui permet ça. Évidemment, ce qu'il faut dire, c'est qu'il y a une évaluation puis... C'est quoi? Vous avez quoi? Vous avez 44 ou 45 heures de services par semaine?

M. Grondin: Moi, dans le moment, ce que j'ai?

M. Côté (Charlesbourg): Oui. M. Grondin: J'ai 38 heures.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. 38 heures de services par...

M. Grondin: Le maximum, c'est 44, M. le ministre, qu'on pourrait avoir.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, si sur le plan des besoins les heures sont bien évaluées, ce que je crois comprendre, c'est que vous préféreriez avoir les 14 $ puis peut-être en arriver à 9 $ puis vous allonger les heures.

M. Grondin: C'est-à-dire que, là, ce n'est rien qu'un jeu. Vous faites un jeu, vous là, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Non, je veux savoir, là.

M. Grondin: Écoutez, je veux bien embarquer, moi aussi, mais...

M. Côté (Charlesbourg): Non... Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Non, mais, c'est parce que... Non, mais, je vous la pose. Je vous donnais la chance. On pourrait penser puis ça ne serait pas vrai que vous, ce que vous voulez, c'est que le CLSC vous donne 14 $ de l'heure comme lui ça lui coûte pour vous donner les services pour 38 heures...

M. Grondin: Exactement.

M. Côté (Charlesbourg):... alors que vous n'en avez rien que 9 $.

M. Grondin: Bien oui.

M. Côté (Charlesbourg): Mais, ça, ça vous permettrait d'avoir plus de services. C'est ça?

M. Grondin: Des services de meilleure qualité, des personnes plus compétentes et mieux rémunérées, comme il se doit. On vise le monde d'aujourd'hui, au coût de la vie d'aujourd'hui. Ça, c'est de la qualité. Je pense bien que vous visez ça, vous aussi?

M. Côté (Charlesbourg): Ah, bien sûr! M. Trudel: D'accord, d'accord sur ce...

M. Côté (Charlesbourg): Ne vous choquez pas, parce que ce n'était pas pour ça. Ça vous a donné la chance de le dire.

M. Trudel: Oui. Vous avez pu faire valoir votre revendication là-dessus.

M. Grondin: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Ce que je voulais voir, moi, c'est l'aspect de l'allocation directe...

M. Grondin: Oui.

M. Trudel:... par rapport à l'institutionnel, par rapport au fait que ça passe par un établissement. Vous, vous dites qu'en dehors de la réclamation vous en voudriez plus. On en veut tous un petit peu plus dans la vie et ça, ça se discute et ça peut s'échanger. C'est que vous dites: Moi, j'ai choisi de vivre à domicile.

M. Grondin: Oui.

M. Trudel: Je reçois une allocation directe avec laquelle je m'achète des services.

M. Grondin: Oui.

M. Trudel: Ce n'est pas tout à fait insuf- fisant, mais c'est une formule que je suis capable de gérer moi-même. C'est ça que vous nous dites?

M. Grondin: Que je préfère gérer. Je trouve qu'elle est coûteuse en mautadit pour moi, mais...

M. Trudel: Je veux juste tirer comme conclusion qu'il me semble que, compte tenu de l'ampleur des besoins au Québec, cette formule du maintien à domicile, ça me semble une formule qu'il faut explorer jusqu'au bout, jusqu'au bout en faisant confiance aux personnes et je dirais aussi aux personnes et aux associations qui les concernent et qui, souvent, nous aident à avoir la protection nécessaire. Il y a des dangers qui nous guettent à travers cela. Et compte tenu du fait, selon une évaluation qui a été faite par le ministère et présentée par le ministre le 7 décembre 1990, qu'il y aurait des besoins, il faudrait qu'on ait 30 000 places supplémentaires dans nos établissements d'ici l'an 2000, compte tenu du vieillissement de la population en termes d'hébergement, particulièrement des personnes âgées, et qu'on ne pourra jamais se permettre ça. Le gouvernement propose 7000. Ça veut donc dire comme indication qu'il faut faire un investissement massif dans le maintien à domicile avec tout ce que cela suppose comme guide de protection au niveau des abus possibles ou des difficultés dans l'application de ça. Vous êtes d'accord avec ça?

M. Grondin: Bien, je suis plus ou moins d'accord. Je vais vous dire une chose. Je pense qu'il n'a pas besoin de rajouter véritablement. Je pense qu'il y a moyen de réassortir la formule de versement et la formule de paiement. Je pense que si je pouvais m'avancer à faire une couple de suggestions... Je vais vous en faire une couple de suggestions, moi. Principalement, c'est difficile d'être employeur et quand on est handicapé comme moi, là... Même si j'ai travaillé 15 ans dans la fonction publique, ce n'est pas important.

Ce que je veux vous dire, c'est que si on me donnait l'argent, comme l'aide sociale est donnée, au lieu que ça traîne partout sur les bureaux du gouvernement, de haut en bas de la pyramide au ministère... Quand ça remonte, ces petites retenues à la source que je fais et que les autres feront, ça va faire quoi? Ça va être à peine des cents. Si on me donnait le montant global et qu'on me le donnait comme aide sociale pour mes services sociaux déterminés déjà par le CLSC avec un nombre d'heures qui est à peu près suffisant, disons, bien, je pense que, là, déjà on aurait réglé bien des affaires. On éliminerait bien de la paperasserie administrative. Ça, il y en a beaucoup de ça. On pourrait en éliminer et ça pourrait, je pense, permettre à beaucoup plus de personnes de vivre à domicile et de gérer eux-mêmes leurs services. Ce serait une sacrée bonne affaire.

M. Trudel: Très bien.

M. Grondin: Ça, c'en est une formule et peut-être que je pourrais vous en suggérer une deuxième.

M. Trudel: Allez-y donc avec la deuxième. Faites ça vite, là.

M. Grondin: La deuxième, c'est que la formule demande encore un peu de paperasserie, malheureusement. Je pense, si je m'en souviens bien, que j'en avais envoyé copie à M. le ministre. Je l'ai dans mon document, dans mon sac à dos. Je ne sais pas où il est rendu. Il est justement là. En tout cas, de toute façon, M. le ministre, vous avez déjà eu copie des deux formules que j'ai suggérées pour qu'on puisse arriver à faire quelque chose qui soit passablement mieux. Je pense bien que, déjà, dans la première partie que je vous mentionnais, c'était d'avoir 14 $ au lieu d'en avoir 9 $ et, dans la deuxième partie, c'était tout simplement qu'on ait ça sous forme d'aide sociale et qu'on n'ait pas à essayer de devenir ou de faire de toutes les personnes des employeurs comme tels, de plein titre. Ça demande de la compétence pour être employeur. Il faut savoir compter un peu.

Le Président (M. Joly): Merci, monsieur. M. le député, oui.

M. Trudel: Alors, c'est terminé.

Le Président (M. Joly): Terminé, vraiment.

M. Trudel: Alors, pour ma part, en terminant, je vais vous remercier de votre présence aujourd'hui. Je retiens principalement le niveau d'inquiétude. C'est principalement cela que je retiens. Il y a lieu d'être inquiet un peu, beaucoup, quant au système. Oui, il y a lieu. Je ne vous demande pas d'être ceux et celles qui vont contribuer à solutionner totalement l'espèce de problème dans lequel on est situé. Je ne veux pas en faire l'exégèse ici.

Je pense que le débat que nous menons actuellement devrait nous amener - je le souhaite vivement - à ce que nous n'ajoutions pas de charge ou de désengagement vis-à-vis de ce que vous êtes comme catégorie de personnes et que nous puissions arriver, par ailleurs, à répondre au système en vertu du fait que chacun ferait sa part, y compris les partenaires - que vous souligniez tantôt, Mme Lamquin - parce qu'essentiellement on se retrouve dans cette situation aujourd'hui parce qu'il y en a un qui ne fait pas sa job. C'est le gouvernement fédéral qui ne paie plus ses affaires comme il faut au Québec. Merci de votre prestation. Ça a été très intéressant.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Merci au Comité provincial des malades qui est toujours un organisme très vigilant, même si, à l'occasion, ça ne fait pas toujours notre affaire, comme gestionnaires, de se faire interpeller. J'ai toujours compris que vous étiez là pour l'intérêt des bénéficiaires et je pense que ça a été votre marque de commerce. C'est ça qui est rafraîchissant. On ne progresse pas dans la complaisance. On progresse à mettre des choses sur la table, qui sont véridiques, pour tenter de les corriger. C'est ce que vous faites et c'est ce que vous faites bien. Dans ce sens-là, c'est stimulant pour nous.

Moi, je vois l'avenir avec optimisme malgré le fait que le gouvernement n'ait pas de machine à imprimer l'argent. Il faut protéger les générations futures et il faut avoir le respect de nos aînés, peu importe leur état de santé à ce moment-ci. C'est ce que nous tentons de faire et, dans ce sens-là, continuez votre excellent travail. Vous nous avez passé un certain nombre de messages qui sont entendus. C'est clair que dans les solutions, même pour moi, le résultat n'est pas toujours aussi vite que je le souhaiterais, alors, imaginez pour vous autres. Je comprends qu'à l'occasion on piaffe d'impatience, mais c'est un bateau qu'on est après virer de bord. On va réussir à le virer de bord. Ça suscite des inquiétudes, c'est normal, mais, si ça suscite des inquiétudes, c'est que les gens sont vigilants et je vous invite à continuer de l'être et de nous signifer tout ce qui pourrait vous apparaître anormal ou qui mériterait d'être redressé. Merci bien.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre.

M. Clavel: m. le ministre, merci de votre compréhension et, au nom de mes associés, merci à tous les membres de la commission de nous avoir entendus.

Le Président (M. Joly): Au nom des membres de cette commission, à mon tour je vous remercie et vous souhaite bon retour. Alors, je vais demander aux gens de la Coalition des aînés du Québec de bien vouloir s'avancer et prendre place, s'il vous plaît.

Nous allons suspendre les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 18 h 14)

(Reprise à 18 h 18)

Coalition des aînés du Québec

Le Président (M. Joly): La commission reprend ses travaux. Alors, il me fait plaisir, au nom de la commission, de souhaiter la bienvenue

à la Coalition des aînés du Québec. Alors, Mme Brunet, j'apprécierais si vous pouviez nous introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Mme Brunet (Yvette): M. le Président, ce n'est pas moi qui a été désignée pour présenter la délégation. Je vais laisser la personne qui a été désignée faire son travail.

Le Président (M. Joly): Bonsoir, madame. Votre nom, s'il vous plaît.

Mme Farmer (Gisèle): Gisèle Farmer.

Le Président (M. Joly): Mme Farmer, s'il vous plaît, est-ce que vous pourriez nous introduire les gens qui sont avec vous?

Mme Farmer: M. le Président, à ma droite, Yvette Brunet, présidente de l'Association québécoise de défense des droits des retraités, l'AQDR; à l'extrême droite, Rêva Gesser, de Golden Age Association. Rêva va s'adresser à vous en anglais. À ma gauche, à côté de moi, Santo Arcoragi, de l'Association des retraités du gouvernement du Québec, l'ARGQ. Santo est le trésorier de la région Montréal métropolitain pour l'ARGQ. À l'extrême, gauche, Fernande Pelletier, de la Fédération de l'âge d'or du Québec, la FADOQ. Fernande est la secrétaire du conseil d'administration. Moi-même, Gisèle Farmer, je suis de l'Association des retraités de l'enseignement du Québec. Je suis la coprésidente des débats à la Coalition.

Le Président (M. Joly): Merci. Comme vous savez, on a déjà reçu le mémoire. Ça a déjà été lu. Ça déjà été même annoté. Alors, si vous voulez tomber dans le vif du sujet, peut-être soulever certains points majeurs, par après, autant le côté ministériel que le côté de l'Opposition échangeront avec vous. Alors, si vous pouviez faire ça le plus concis possible...

Mme Farmer: M. le Président, si vous permettez, nous avons l'intention de lire le mémoire...

Le Président (M. Joly): Bien.

Mme Farmer: ...et nous voulons travailler en collégialité, c'est-à-dire l'un ou l'autre de nous va s'adresser à vous et ce sera la même chose pour les questions. L'un ou l'autre répondra...

Le Président (M. Joly): Pourra répondre.

Mme Farmer: ...selon notre expertise.

Le Président (M. Joly): Parfait, madame.

Mme Farmer: Nous vous signalons l'absence de Evelyn McQuat, qui était dans la liste. Elle est la présidente du Forum des citoyens âgés de Montréal. Elle s'excuse de ne pas pouvoir être présente, pour cause de maladie.

Le Président (M. Joly): Je vous laisse aller, Mme Farmer. Vous avez la parole.

Mme Farmer: C'est moi qui commence pour l'introduction. Depuis les trois dernières années, la Coalition des aînés du Québec est intervenue plusieurs fois auprès des ministres de la Santé et des Services sociaux, c'est-à-dire Mme Lavoie-Roux et M. Côté. Bien qu'on retrouve plusieurs de nos recommandations dans la loi sur la santé et les services sociaux, les plus importantes n'y sont pas, comme un support accru aux programmes de prévention de la santé et une plus grande implication des organismes communautaires et de la famille autrement que par l'intermédiaire des établissements publics.

Au cours de l'année dernière, le ministre a présenté trois importants documents pour établir une politique de gestion de la santé et des services sociaux et aussi pour proposer des changements dans la façon de les financer: «Une réforme axée sur les citoyens», «Loi sur les services de santé et les services sociaux» et, finalement, «Un financement équitable à la mesure de nos moyens». Un thème majeur se retrouve dans chacun des trois documents, à savoir que les coûts des soins de santé augmentent si rapidement qu'ils menacent l'économie. Selon les documents du ministre, cette hausse est due au vieillissement de la population et au fait que les personnes âgées consomment une part disproportionnée des soins de santé.

Voici notre réponse: Premièrement, le ministre a été très sélectif dans l'utilisation des données qui concernent le taux d'augmentation des coûts et leur justification. Il n'a pas prouvé non plus qu'il existe une crise telle qu'elle demande un changement majeur de politique. Deuxièmement, les remèdes proposés reposent sur une fausse conception de la manière dont les coûts sont produits. Deux de ces fausses conceptions sont qu'une population vieillissante amènera nécessairement une augmentation des coûts et que les augmentations proviennent des choix que font les usagers. Troisièmement, sa volonté de favoriser une tarification des soins et services laisse entendre que les fonds publics ne devraient pas offrir la gratuité et l'universalité des soins de santé. En conséquence, il ne porte pas assez attention aux solutions alternatives telles que nous vous en proposons nous-mêmes.

M. Arcoragi (Santo): La population vieillissante. On a beaucoup parlé des changements démographiques qui ont cours présentement au Québec, de ceux qu'on prévoit, et qui indiquent que les personnes de plus de 65 ans formeront de 17 % à 20 % de la population totale d'ici 30

ans. Bien plus, parce qu'on dit que les aînés utilisent une part disproportionnée des soins de santé, ils ont souvent porté le blâme pour l'augmentation des coûts. C'est ce qu'un auteur a déjà appelé «une démographie alarmiste» - Stephen Katz, «Alarmist Demography: Power, Knowledge, and the Elderly Population» - dans une présentation à l'Association canadienne de gérontologie, octobre 1991. C'est très récent.

Comme l'ont signalé plusieurs auteurs comme Robert Evans - «Strained Mercy: The Economies of Canadian Health Care»; Toronto, Butterworth, 1984 - l'augmentation de la population âgée au cours des quatre prochaines décennies sera compensée par une diminution du nombre des enfants. En conséquence, la proportion de la population dépendante, au total, n'augmentera pas essentiellement. «La proportion de l'ensemble de la dépendance vers l'an 2050, alors qu'on nous prédit des sommets, sera moindre que les années 1950 et 1960.» - Schultz, James H, «The Economies of Aging», 1988, cité par Katz. En tenant compte des coûts de l'éducation des enfants et de la jeunesse ainsi que des soins de santé, les coûts ainsi engagés ne prendront pas une plus grande part du revenu national. Il y aura plutôt un déplacement des coûts reliés à la dépendance. Les prévisions basées uniquement sur l'accroissement de la population âgée ou sur l'hypothèse que la consommation des soins de santé par les personnes âgées gardera le même profil sont par conséquent trompeuses.

Les coûts. Les données contenues dans les documents du ministre... Les documents de la politique du ministre ne se rapportent qu'aux coûts de 1987 et ne donnent pas une idée juste des coûts sur une plus longue période de temps. Il soutient que les coûts devraient tenir compte de la capacité collective de payer et ajoute que les coûts des soins de santé sont légèrement supérieurs, par rapport au produit intérieur brut, à ce qu'ils sont dans l'ensemble du Canada. Il reconnaît cependant qu'ils sont considérablement plus bas que le taux qu'on trouve aux États-Unis, où les sources de fonds privés sont répandues. Il signale que la proportion du produit intérieur brut qui allait aux soins de santé était de 9 %en 1987.

Mais, comme les coûts depuis n'ont pas augmenté indûment relativement au produit intérieur brut, il change d'argument pour justifier son besoin de contrôle et se réfère à l'indice des prix à la consommation et met en garde qu'on ne doit pas laisser aller les coûts au-delà des 3 % actuels. Le taux d'augmentation du coût de la vie varie sur de bien courtes périodes de temps et un changement majeur de politique basé sur cette mesure au cours de trois ou quatre années est injustifié, tout particulièrement quand notre rendement, comme l'indique la productivité, demeure à peu près le même. Selon les mesures auxquelles il se réfère, il prévoit que l'insuffisance des fonds alloués à la santé atteindra de 2 000 000 $ à 4 000 000 $ par année. Ce n'est pas un gros montant par rapport au produit intérieur brut, au coût total des soins de santé ou au budget. Cela ne justifie certainement pas qu'on veuille s'éloigner à ce point d'une politique de soins universels et gratuits.

Décrire les coûts comme une spirale incontrôlable est nettement contredit par une analyse demandée par la Fédération des CLSC - François Champagne et al, «Évolution et projections des dépenses socio-sanitaires au Québec», 1991 - qui fait remarquer que le coût de la santé en 1987, que les auteurs donnent comme étant 8,7 % comparativement aux 9 % du ministre, était alors plus bas qu'en 1983, 9,3 %. Tenant compte à la fois de la population, de l'augmentation du coût de la vie et du produit intérieur brut, la même étude en arrive à la conclusion que, malgré une augmentation des coûts au milieu des années quatre-vingt, le coût per capita des soins de santé était à peu près le même qu'en 1970. On note aussi que le coût des soins de santé était notablement plus bas au Québec que dans le reste du Canada, et cela en dépit du fait que les services au Québec sont offerts plus librement que partout ailleurs au Canada. Le ministre reconnaît également que l'augmentation des coûts au Québec durant les années quatre-vingt était plus basse que dans la plupart des autres provinces - «Un financement équitable à la mesure de nos moyens», page 12.

Il est bien de noter également que l'étude de la Fédération des CLSC montre que le principal facteur de l'augmentation des coûts dans le budget de la santé au Québec réside dans les soins en établissements. En 1987, 57,1 % des coûts allaient aux hôpitaux et autres établissements, comparativement à 13,6 % pour les services médicaux professionnels. Bien que nous soyons d'accord avec le souhait du ministre de réduire l'usage abusif des services médicaux, il semble que même des changements majeurs dans les règlements de la profession médicale, sur lesquels le ministre a mis tant d'emphase, n'auraient pas les effets désirés sur la réduction des coûts à moins que de plus amples efforts ne soient faits pour changer la façon de faire des établissements. (18 h 30)

Le ministre a souligné fortement le besoin de situer le budget de la santé dans le contexte des dépenses globales du gouvernement ainsi que de limiter les coûts de la santé tout comme les autres domaines de dépenses du gouvernement, et cela du fait que les payeurs de taxes se sentent déjà surchargés, tout spécialement en comparaison avec ceux de l'Ontario. Il n'a toutefois pas présenté assez d'information sur le budget total, tout particulièrement au sujet des modes d'imposition. L'étude de la Centrale de l'enseignement du Québec, «La CEQ et l'enjeu fiscal», décembre 1991, fait ressortir des domaines où le

gouvernement a abandonné des formes alternatives de financement, notamment en réduisant les taxes des corporations et des individus à hauts revenus et en leur accordant des exemptions et des évasions fiscales. L'étude montre, par exemple, une diminution des taxes pour les individus dont le revenu dépasse 100 000 $, de 22,96 % en 1978 à 15,45 % en 1988 (CEQ, table 10). Au Québec, seulement 6,7 % des taxes proviennent des corporations (CEQ, table 9). Ces chiffres illustrent que le gouvernement a laissé tomber des sources possibles de revenus beaucoup plus considérables que celles dont il dit avoir besoin pour récupérer les changements à la loi de la santé. En effet, le ministre préférerait taxer les aînés à partir de l'usage qu'ils font des médicaments plutôt que les corporations sur leurs profits.

Toutes les remarques ci-dessus laissent entendre que les documents préparés par le ministre ont traité l'information de façon sélective dans le but de montrer qu'il faut contrôler les coûts et transférer une partie de ces coûts du trésor public aux usagers des services. En fait, les données présentées par d'autres chercheurs indiquent que: a) les changements démographiques ne veulent pas nécessairement dire une augmentation des coûts de la santé; b) les coûts n'ont pas crû de façon disproportionnée par rapport au produit intérieur brut ni comparativement aux autres provinces du Canada; c) les coûts sont beaucoup moindres que ceux des États-Unis qui dépendent beaucoup plus des contributions privées; d) le principal facteur des coûts réside dans les services fournis par les établissements qui ne sont pas sous le contrôle ou le choix des usagers; e) le gouvernement a choisi de laisser tomber les taxes de la part des corporations et des individus fortunés bien au-delà des prévisions du manque à gagner dans les coûts de la santé. Tous ces facteurs nous amènent à soutenir qu'on ne doit pas considérer comme valides les données du ministre. D'autres sources de données et d'analyses ne nous permettent pas d'accepter ses chiffres comme base suffisante de sa politique.

Mme Pelletier (Fernande): Propositions. Le ministre a souvent affirmé l'importance d'établir clairement dans l'esprit des usagers le lien entre la consommation et les coûts. C'est, en effet, une de ses principales raisons pour justifier un transfert des frais aux usagers, puisqu'il admet que les sommes ainsi récupérées seraient une petite partie du budget. Il propose d'exiger 5 $ pour chaque traitement, de ne plus assurer les soins optiques et les soins dentaires pour enfants et d'imposer des frais pour les services à domicile. Il propose également de distinguer entre les soins de base et les soins complémentaires dans les hôpitaux et d'imposer des frais pour ces derniers. La raison des frais à l'usager s'appuie sur le fait que les choix des usagers pour certains types ou quantités de biens et de services de santé influent grandement sur les coûts. Le ministre lui-même le reconnaît. Il est difficile d'imaginer comment le ministre fera la différence entre les soins de base, la nourriture et l'hébergement qui sont les soins complémentaires. La personne qui se remet d'une opération ou d'une maladie devra-t-elle choisir entre manger ou ne pas manger? ou qu'on change son lit ou non?

Le document de la Fédération des CLSC nous dit que 70 % de tous les coûts de la santé relèvent des institutions. Il se peut que, de façon inconsidérée, on envoie des gens dans les institutions, qu'on ne leur donne pas les prescriptions ou les traitements appropriés ou qu'on les réfère à un spécialiste sans nécessité. On doit, bien sûr, corriger ces abus de ressources et nous appuyons certaines suggestions du ministre à cet égard, comme celles de réaliser des économies dans les procédures des institutions et d'informer les usagers sur les frais encourus. Mais les abus ne viennent pas des décisions des usagers. Les décisions concernant les traitements sont prises en fonction des normes professionnelles ou institutionnelles. L'imposition de frais à l'usager ne peut donc avoir que très peu d'effet sur le taux d'utilisation des services. Par ailleurs, elle pourrait, comme le note le ministre, être une lourde charge pour les pauvres et les décourager d'utiliser les services, avec les conséquences négatives que cela pourrait avoir pour la santé publique. Cela affecterait également les choix et la santé des gens moyennement fortunés. L'offre du ministre d'un crédit de taxe remboursable est une piètre consolation sauf pour ceux qui font un rapport d'impôt chaque année et qui, de plus, peuvent se permettre de payer les frais et d'attendre une année pour être remboursés. En pratique, l'argument en faveur des frais à l'usager est beaucoup plus politique qu'un facteur nécessaire et même recommandable pour la promotion de la santé.

Le ministre affirme à maintes reprises qu'il appuie le principe de la responsabilité collective pour les coûts des soins de santé, tout comme il redit sa préoccupation pour les pauvres et les personnes âgées qui ne peuvent se permettre de payer. Ces affirmations ne prouvent rien, puisqu'il conclut qu'il faut donner une leçon aux individus en les forçant à payer, par l'intermédiaire du ticket orientateur, pour l'usage qu'ils font des services.

Dans le livre blanc, «Une réforme axée sur le citoyen», le ministre tient des propos prometteurs sur le développement des services préventifs, le recours aux soins à domicile et le recours aux organismes communautaires. Malheureusement, il n'a pas beaucoup tenu compte de cette priorité dans la loi et dans le document «Un financement équitable...» Par ailleurs, le ministre propose d'ajouter 2000 lits pour soins aigus et 7000 lits pour soins prolongés. Il le fait même s'il reconnaît que le Québec a plus de lits de

longue durée que la plupart des autres provinces. Nous ne voulons pas dire que ces lits ne sont pas nécessaires et nous avons déjà soutenu qu'on pouvait trouver les sommes requises à même les sources de taxes existantes. Mais l'allocation de budget du ministre pour augmenter la capacité institutionnelle semble renforcer l'idée que les soins institutionnels devraient continuer à prévaloir sur les soins préventifs et communautaires. Bien que les sommes allouées aux CSLC dans les six dernières années aient augmenté plus rapidement que celles allouées aux hôpitaux, le livre blanc propose d'augmenter les allocations aux CLCS, de 4,7 % à seulement environ 6,7 % du budget de la santé (Champagne et al., figure 2). Ce transfert de fonds nous semble insuffisant si les CLSC doivent réellement offrir des soins préventifs et des services sociaux.

Les arguments apportés par Champagne et ses coauteurs nous impressionnent. Ils consistent essentiellement à mettre beaucoup plus d'emphase sur l'utilisation des services sociaux au niveau local en incluant les soins à domicile comme partie du programme de soins préventifs. Ils estiment qu'on pourrait sauver jusqu'à 2 000 000 $ par année en favorisant...

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, Mme Pelletier...

Mme Pelletier: ...de maintenir les aînés hors des soins résidentiels ou de longue durée.

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, Mme Pelletier, en conclusion. On a déjà débordé.

Mme Pelletier: Pardon?

Le Président (M. Joly): On a déjà débordé du temps qui nous est alloué. Alors, si vous voulez avoir un petit peu de temps pour qu'on échange avec vous, parce qu'il vous reste...

Mme Pelletier: Ce ne sera pas tellement long, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Non? Alors, parfait. Je vous le permets.

Mme Pelletier: Je vais simplement terminer ici et dire que... Attendez un petit peu. Nous pensons qu'il y a plus d'argent à économiser par une telle politique - je veux dire, les taxes qui sont déjà existantes et tout ça - qu'il y en aurait à gagner par les frais aux usagers. Ce serait également plus en accord avec le concept de santé, tout en sauvegardant le principe de la gratuité et de l'universalité des soins de santé.

Le Président (M. Joly): Merci, madame.

Mme Gesser (Rêva): I am going to be very short.

Le Président (M. Joly): O.K. Permission granted.

Mme Gesser: In relation to the cost of home care, the minister proposes to subsidize individuals in order to permit them to employ their own home helpers. While this is appropriate for some, it is important that there should be careful supervision of such arrangements so that seniors who need support are not made vulnerable to inadequate care. It is not a good idea. The money will not go for the purpose it was intended. How can we pretend that there will be supervision? When there are not enough inspectors to supervise «centres d'accueil», how are you going to supervise individuals?

In summary, we recommend that approval should be denied to the charging of deterrent user fees for medical care, prescription drugs, optical and dental services and complementary services in hospitals, as proposed, and that the «ticket orienteur» should not be implemented. Instead, we propose that the allocations to the CLSCs and community groups should be increased to the point that they are able to provide services necessary to keep many more people, especially seniors, in their own homes. In order to avoid institutional care, I want to tell you that seniors fear dependency more than death and that the tax policies should be made more progressive, that economies should be effected in the use of hospitals and other institutions. And I just have to end by telling you that seniors well remember the premedicare days. We well remember the humiliating means tests. We well remember friends and relatives who could not afford health care and got none and we considérer universal health care our most precious possession.

Le Président (M. Joly): Thank you, Mrs. Gesser.

Mme Farmer: Mme Brunet va terminer avec les recommandations. Ce ne sera pas long.

Mme Brunet: Je ne pense pas que vous ayez l'intention de raccourcir notre temps. Non?

Le Président (M. Joly): D'ailleurs, il n'est pas raccourci.

Mme Brunet: On reste avec une heure.

Le Président (M. Joly): madame, votre temps n'est pas raccourci. les conditions ou, enfin, les ententes étaient que je vous concédais 20 minutes.

Mme Brunet: O.K.

Le Président (M. Joly): Moi, je n'ai pas d'objection. On va vous l'enlever ailleurs.

Mme Brunet: Bon. Ce serait important que je les lise, mais vous semblez...

M. Côté (Charlesbourg): Allez-y! Allez- yi

Mme Brunet: Non, mais si c'est pour...

Le Président (M. Joly): Si les deux formations sont d'accord, je vous laisse aller, madame. Allez.

Mme Brunet: O.K. Mais je pense qu'on doit aussi se garder du temps pour discuter avec M. le ministre. C'est bien important pour nous autres.

Le Président (M. Joly): Bien, allez, Mme Brunet.

Mme Brunet: Alors, je lis les recommandations, si j'ai bien compris?

Le Président (M. Joly): S'il vous plaît.

Mme Brunet: O.K. Afin de rencontrer les objectifs d'amélioration de la santé des personnes, d'efficacité des interventions et du contrôle de l'évolution des coûts, nous affirmons que des changements d'orientation doivent être faits au niveau du système de la santé et des services sociaux. Il faut développer une approche de médecine sociale qui, tout en englobant le curatif, l'institutionnel et le médical, accorderait un rôle accru au préventif, au social, à la prise en charge de la santé par les individus, au communautaire et aux ressources plus légères et alternatives. En ce sens, nous tenons à faire remarquer l'absence presque totale du social dans le document du ministre, comme ce fut le cas dans les documents antérieurs. Nous croyons que le développement de mesures sociales aurait des incidences importantes sur l'évolution de l'état de santé des personnes et des coûts du système.

Dans les choix de solutions au financement du système de santé et des services sociaux, la Coalition des aînés du Québec opte pour maintenir le principe de la solidarité et de la responsabilité collective et s'oppose à toute tarification assumée directement par les usagers. Cette orientation nécessitera, pour réaliser un partage équitable des risques et des coûts, une réforme fiscale qui ne favorisera plus les personnes à hauts revenus, comme le font présentement les modalités de notre fiscalité. Ça se termine là.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme Brunet. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre. S'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je ne cacherai d'aucune manière mon étonnement du contenu du mémoire et de certains constats que vous faites. Il est complètement à l'inverse de tout ce qu'on a entendu jusqu'à maintenant sur le plan du document qui a été déposé. Si j'ai bien compris, le document déposé, sur le fond, ça ne vaut pas cher, ça cache des choses, c'est intentionné. Finalement, ce que tout le monde est venu dire, c'est que c'est un document de base transparent, avec des chiffres réels, une situation réelle. Tout le monde l'a dit, même ceux qui sont pour une charge sociale plus importante, pour des virages, parce qu'on en a eu d'autres qui sont venus nous dire: Ne nous touchez pas, mais touchez aux autres. Vous n'êtes pas les premiers à venir nous dire ça; il y en a d'autres qui sont venus. Mais au moins, à la base, ils ont dit: Le document qui est là, c'est un document qui est crédible. Tout le monde est venu nous dire ça. Quand j'ai entendu ça tantôt, j'ai été obligé de m'arrêter un petit peu pour me contenir, parce que je me dis, je ne sais pas: On ne vit pas dans le même monde et on n'a pas les mêmes données. Il y a quelque chose qui ne marche pas quelque part sur le plan de ce que ça concerne. Il me semble bien que tout le monde est venu dire ça de manière unanime. Vous êtes les seuls à nous dire qu'on est à l'envers dans nos chiffres, dans nos prédictions, dans l'analyse de la situation. Je ne sais pas, là. Expliquez-moi un petit peu. Je ne comprends pas. Je ne comprends pas pantoute. Alors, vous avez pigé tantôt aux États-Unis, tantôt en Angleterre, tantôt à gauche, la CEQ, la CSN, et ainsi de suite. Mais je ne comprends pas. Je vous le dis là, à la base même, je ne comprends pas. (18 h 45)

J'ajoute que c'est un document de consultation qui met des pistes et des hypothèses et que vous avez parfaitement la liberté d'être en accord ou en désaccord. Mais une chose est certaine, au-delà de me dire ce qui ne va pas... Y a-t-il quelque chose qui marche dans le système? Dites-le moi tout de suite. Au moins, on va partir de ça et on va s'entendre là-dessus. Vous avez l'impression qu'il n'y a rien qui marche. Les 12 000 000 000 $ sont complètement dépensés, pas aux bonnes places, et il faut recommencer le système au complet; c'est un peu ce que je comprends. Je trouve ça désolant. Je vous le dis tel que je le pense, je trouve ça désolant pour des gens qui essaient de virer un système et de faire en sorte qu'on mette l'argent aux bonnes places, aux bonnes priorités, en particulier pour protéger ceux qui seront demain matin - aujourd'hui et demain - des plus de 65 ans. Et, s'il y a quelqu'un qui le sait, c'est bien quelqu'un qui a siégé au comité Pelletier dont on a les rapports qui visaient ça. Moi, je vous le dis, je suis très, très, très étonné, à moins que ce soit moi qui sois complètement à l'envers, et c'est possible. Je n'écarte pas ça comme pos-

sibilité, non plus.

Le Président (M. Joly): Mme Brunet.

Mme Brunet: Je pense qu'il faut comprendre qu'il est 18 h 45, que vous siégez depuis le matin, que vous avez été deux heures et quelques avec les médecins. Je comprends votre réaction parce que je pense qu'elle est accompagnée d'une grande fatigue.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Brunet: Ce que vous dites présentement, sur notre mémoire...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Brunet: Ce qu'on dit dans le mémoire, que vous n'avez peut-être pas compris parce que ce n'est pas dit clairement dans votre dernier document... En passant, après la lecture de ce document-là, on est d'accord avec les autres pour dire: C'est un bon document. Mais ce qu'on n'a pas retrouvé, nous autres, dans le document, c'est ce qu'on voudrait et dont on n'a pas beaucoup parlé, principalement la prévention. Bon. On dit que ça coûte cher dans les centres d'accueil. On dit que, dans les hôpitaux, ça coûte cher, qu'on y retrouve trop souvent des personnes âgées, et tout ça. Mais, nous autres, on a un message très court et très clair. On dit qu'il faut que la prévention, dans le cas des personnes âgées qui veulent rester à la maison... Vous le savez, ça, M. le ministre, qu'on en a parlé justement très largement dans le comité des experts, puisque vous faites référence à ce comité. On en a parlé largement et tout le monde a convenu que, oui, les personnes veulent rester chez elles, mais pas à n'importe quel prix. Quand c'est à n'importe quel prix et qu'elles se sentent complètement démunies, alors, qu'est-ce qui arrive, au bout de la ligne? Ces personnes-là font application pour aller dans un centre d'accueil parce qu'elles se disent: Finalement, fini les troubles! On n'a pas assez d'argent, on n'est pas capables d'avoir des services du CLSC, il faut faire état de notre situation jusqu'au dernier sou pour prouver qu'on n'est pas capables de payer, finalement. Alors, les gens se disent: Bon, bien, moi, je vais m'en aller dans un centre d'accueil, je vais régler la situation. Ça ne règle pas la situation. Ça la règle quand les gens sont mal pris, mais, à long terme, ça ne la règle pas. Moi, je peux vous dire que Mme Gesser, à ma droite, elle a 78 ans, et que Mme Pelletier en a 75; elles ne sont pas dans les centres d'accueil, ces personnes-là, elles sont encore très vivantes et très actives. Mais, malheureusement, on ne retient pas qu'il y a encore des personnes qui sont assez actives pour rester chez elles, mais avoir tout ce qu'il faut. Alors, là, vous dites, dans votre document, d'un couvert à l'autre: les défavorisés ne paieront pas, ça ne leur coûtera rien, on va s'en occuper. mais est-ce que vous avez pensé que ceux qui vont payer, qui sont juste en haut de la bra- quette des défavorisés, vont en devenir, des défavorisés? est-ce que vous voyez les coûts, au bout de la ligne?

M. Côté (Charlesbourg): Écoutez, la prévention ne réglera pas tous les problèmes que vous soulevez. Quand on parle de prévention, dans le domaine des personnes âgées en particulier, c'est pour éviter une surconsommation de médicaments, en particulier, qui vont occasionner tantôt une brisure de hanche, parce que surconsommation... C'est clair, je l'ai dit aux médecins tantôt. Vous étiez là quand je l'ai dit aux médecins, tantôt.

Mme Brunet: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Les personnes âgées, quand elles vont chercher des médicaments, c'est parce qu'il y a un prescripteur à quelque part qui est le médecin.

Mme Brunet: Bien, il faut le dire.

M. Côté (Charlesbourg): Non, mais on l'a dit, ça, tantôt. À partir de ça, la prévention peut régler certaines situations comme celle-là. Mais, lorsque vous poussez votre jugement, je me dis: Oui, effectivement, il arrive un certain âge où on n'a pas le choix que de se retrouver en centre d'accueil d'hébergement parce que notre autonomie ne nous permet plus... Oui, dans le document, on dit qu'il faut protéger les démunis. On va commencer par qui quand on parle des démunis? Il y en a parmi vous, ou que vous représentez, qui ont eu l'avantage d'être des travailleurs de grandes sociétés, y compris du gouvernement, avec des régimes de retraite qu'ils se sont gagnés au fil des années. J'en conviens, je suis un de ceux-là, et je serai un de ceux-là comme des collègues qui auront payé toute leur vie. Et abondamment, s'il vous plaît! Et, en plus de ça, quand il sera temps d'avoir des services, je ne suis pas sûr qu'il y aura l'argent pour être capable de nous donner les services à nous autres. Alors, je suis à même de comprendre, lorsqu'on réagit, étant des retraités de grandes compagnies avec un salaire x qui est au-dessus des démunis - parce que ça monte ça, ça monte aussi au-dessus des démunis - qu'on soit un petit peu inquiets lorsqu'on parle de nouveau partage des responsabilités du système de santé et de services sociaux. Je comprends ça.

Mais, dans le livre, elles sont claires, les propositions. C'est une demande qui pourrait être éventuellement, sans que ce soit arrêté, progressive, avec des remboursements d'impôt. C'est sûr que c'est une maigre consolation, Mme Pelletier le disait tantôt. Mais il y en a qui, au moins,

vont avoir une maigre consolation alors que d'autres n'en auront pas pantoute. Et c'est un peu ça notre système d'universalité, d'accessibilité; c'est un partage, c'est une mutuelle. Que ceux qui ont un peu plus les moyens en paient davantage par rapport à ceux qui n'en ont pas pour avoir accès à une qualité de services qui est égale pour tout le monde. C'est ça le choix qu'on a fait. Je pense qu'on a fait les bons choix et qu'il faut continuer de le faire. Mais, à partir du moment où on se questionne sur ce qu'on est aujourd'hui et qu'on doit avoir des services additionnels, moi, je ne suis pas de la théorie de ceux qui essaient d'équilibrer les comptes en disant qu'ayant moins de jeunes, mais plus de personnes âgées qui vont demander des services, les choses vont s'équilibrer. Ce n'est pas vrai. C'est une fausse réalité parce que les jeunes, aujourd'hui, sont des jeunes qui ne sont pas issus de familles comme nous l'étions, nous, davantage unies. Il y a l'éclatement de la cellule familiale avec toutes les conséquences que ça impose au niveau des jeunes, avec tous les problèmes de toxicomanie, avec tous les problèmes de délinquance au niveau des jeunes, et on a aujourd'hui des jeunes qui sont plus lourds et qui exigent davantage. Et, dans ce sens-là, on a voulu, au niveau de la politique, dire: On va protéger deux catégories: nos personnes âgées et nos jeunes.

Évidemment, à partir de ça, ce qu'on essaie, c'est de trouver des solutions pour ne pas hypothéquer des générations futures. On est chanceux, on est encore chanceux malgré tout, et vous autres aussi, parce que, depuis les 10 dernières années, les gouvernements ont pelleté pour l'avenir les déficits d'exploitation, puis pas à peu près, à coups de 3 000 000 000 $, à coups de 4 000 000 000 $ et à coups de 5 000 000 000 $, pour donner des services à vous autres et à nous autres, alors que c'est nos jeunes qui, demain, vont devoir travailler pour payer ces déficits, travailler et payer encore davantage pour se donner un certain nombre de services. Ça aussi, c'est une responsabilité collective. Et moi, je dis: Oui, l'État doit mettre en priorité des services pour ses aînés. Mais est-ce que - et je vais arriver avec une question précise - vous trouvez normal, au-delà de la prescription du médecin qui est nécessaire pour les médicaments, qu'il en coûte aujourd'hui aux citoyens du Québec, à part de tout ce qui est payé dans tout le système en institution, 500 000 000 $ - et vous le savez - pour des médicaments dont 380 000 000 $ pour les personnes âgées? Il y a à quelque part quelque chose qui ne fonctionne pas dans notre système. Et les victimes sur le plan de la qualité, c'est les personnes âgées. Parce que ce n'est pas les médecins qui prennent les pilules. Ce n'est pas les pharmaciens qui les prennent, les pilules. C'est les personnes âgées. Et Dieu sait que tout le monde nous fait des témoignages. Si on a le malheur de perdre un de nos parents et qu'on va faire le ménage de la pharmacie après, on se retrouve avec des pharmacies de médicaments bien pleines. Mais est-ce qu'il n'y a pas une responsabilité qu'on a, collective, et vous autres aussi, pour s'adresser à des questions comme celle-là?

Le Président (M. Joly): M. Arcoragi, s'il vous plaît.

M. Arcoragi: Vous nous dites que ce sont les usagers qui ont une surmédicalisation, puis c'est eux autres qui prennent les prescriptions et ainsi de suite. Mais, en réalité, c'est le médecin qui décide pour celui qui est malade. C'est lui qui décide.

M. Côté (Charlesbourg): C'est ce que je viens de dire.

M. Arcoragi: D'accord. Entre-temps, si nous critiquons votre rapport, c'est parce que vous avez changé le problème du produit intérieur brut avec le problème de l'indexation du prix pour le consommateur. C'est pour ça qu'on a calculé que votre document a eu sa faiblesse. C'est à partir de ce moment-là que vous avez changé vos arguments. C'est pour ça que notre document se réfère surtout à ça sur le côté technique.

Le Président (M. Joly): M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, quitte à ce qu'on puisse échanger éventuellement pour clarifier les choses, je pense que la même logique est toujours là sur le plan des documents. On n'a certainement pas voulu cacher des choses, surtout pas avec un document qui a mis les chiffres là et qui peuvent, à l'occasion, nous desservir de manière très claire. Donc, à partir de ça, il y a des choses... Je suis un de ceux qui veut protéger les personnes âgées, il faut le faire. On n'aurait pas mis le comité Pelletier sur pied si on n'avait pas eu cette volonté-là avec des choses qu'on voulait concrètes. Ce n'est pas facile. Vous étiez représentés sur le comité Pelletier et vous avez vu comment c'était difficile d'en arriver à des propositions concrètes qui vont atterrir sur le terrain. Quand tu restes dans les nuages, c'est facile d'avoir le consensus de tout le monde. À partir du moment où tu descends en bas des nuages, il faut avoir des mesures concrètes. Vous le savez, vous qui étiez sur le comité, ce n'est pas facile d'avoir des solutions concrètes, non plus pour les administrateurs publics qui ont le même objectif que vous autres, protéger nos personnes âgées, faire le maximum avec ce qu'on a et tenter de l'utiliser de la bonne manière. Il y a des progrès là-dessus. Il reste encore des choses à faire, c'est ce qu'on va tenter de faire.

Le Président (M. Joly): Mme Farmer, s'il vous plaît.

Mme Farmer: Tantôt, M. le ministre, vous disiez qu'on avait un contrat social, que, depuis les années soixante-dix, on avait accepté que tous ceux qui versaient de l'impôt en versaient selon leurs moyens et, ensuite, les gens allaient chercher des soins, des services sociaux, selon leurs besoins. On est d'accord et on est encore d'accord avec ce système-là et on ne voudrait pas qu'il change, on ne voudrait pas que vous alliez chercher de l'argent ailleurs que dans cet endroit-là. On propose là-dedans de continuer à imposer, de façon progressive, pour qu'encore ce soit le même principe d'équité qui soit mis de l'avant pour qu'on puisse financer nos soins de santé. Ensuite, quand on propose, nous, les soins de prévention, pensons à des maladies dont les personnes âgées sont souvent menacées, par exemple, la migraine, les maux de dos, les allergies; ce sont des maladies qui n'ont pas besoin d'intervention chirurgicale ou de haute technologie, qui pourraient très bien se soigner sans médicament si on allait vers les médecines douces. Mais on ne met pas tellement d'emphase là-dessus, sur la bonne alimentation, l'exercice, le sport, bon...

M. Côté (Charlesbourg): Je trouve ça le fun... Cette proposition-là, je la trouve le fun et je vois Augustin rire, qui est là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg):... parce que les médecines alternatives, il aime bien ça, lui...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg):... il en mange, mais pas nécessairement pour en pratiquer. C'est clair, la prévention, je suis totalement d'accord avec vous autres. On ne se chicanera pas là-dessus, pas longtemps en tout cas. C'est clair qu'il faut faire un virage prévention et, à ce moment-là, on aura des conséquences dans deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans. Là-dessus, on ne se chicanera pas longtemps. Il est clair qu'il faut le faire. Sauf que, comme État, évidemment, ça prend des sous pour être capable d'agir. Tout le monde nous dit qu'à 12 000 000 000 $ c'est assez et ils ne veulent plus en payer d'impôt. D'autre part, on est constamment l'objet de pressions additionnelles pour en ajouter par-dessus le tas, en termes de dépenses, mais il va falloir le trouver à quelque part, cet argent-là, si on veut être capable d'y aller, sachant fort bien que, dans certains programmes spécifiques, l'argent est peut-être mal dépensé - parce que ça arrive, on a eu une démonstration tantôt - que, d'autre part, on est dans des situations d'abus aussi - ce ne sont pas des abus généralisés, mais dans des situations d'abus, soit par certains dispensateurs, soit aussi par certains consommateurs - et que, globalement, les coûts sont pas mal sous contrôle. On va tenter de faire de notre mieux avec tout ça.

Le Président (M. Joly): Mme Brunet, s'il vous plaît.

Mme Brunet: Lundi, lors de l'ouverture de la commission - c'est un article dans Le Devoir - vous avez dit, bien sûr, qu'en même temps il fallait penser changer les mentalités, et je pense que c'est très important. Et si les médecins coopéraient à changer les mentalités plutôt que de prendre un petit carnet et de prescrire des médicaments... parce qu'il faut dire que les patients, quels que soient les patients, les personnes âgées, entre autres, s'ils passent cinq minutes dans le bureau, ils ne peuvent pas expliquer au médecin ce qui ne va pas, souvent moralement, souvent mentalement. C'est dans leur tête. Souvent, c'est dans la tête, parce qu'ils vivent tout seuls, parce qu'ils sont isolés, pour toutes sortes de raisons. Et ces personnes-là n'ont souvent personne à qui elles peuvent parler. La seule personne, c'est le médecin. Je pense que nous autres, les associations, on a un travail. D'ailleurs, les personnes qui sont dans nos associations n'ont pas grand problèmes. Elles n'ont pas de maux de ci et de ça parce qu'elles sont bien trop occupées. Mais il y a bien d'autres personnes en dehors des associations qui vont rencontrer les médecins souvent parce qu'elles ne comprennent pas ce qu'elle sont en train de vivre. Elles ne savent pas pourquoi elles ont constamment des maux. Le médecin n'aide pas ces personnes-là à voir ce qui se passe aussi dans la vie des personnes. Alors, moi, ça, ça m'apparaît très important de changer les mentalités mais, pour ça, il faut prendre des moyens. Il pourrait y avoir des petits dépliants qui seraient publiés un peu partout pour que les gens en prennent connaissance. Moi, je crois beaucoup à des flashs très courts à la télévision sur la consommation des médicaments. Il y en a sur la drogue; il devrait y en avoir sur ce qui coûte le plus cher à l'État. Mais qu'on avertisse les gens. Les gens ne savent pas en général ce qui se passe. (19 heures)

Là, je vais tomber dans un autre domaine, parce que j'étais très contente de vous lire quand vous avez dit que, dans les transferts fédéraux, cette année, il y a un manque à gagner de 1 700 000 000 $, et vous avez ajouté: On ne penserait pas qu'on va manquer de 200 000 000 $ à 400 000 000 $ cette année. Mais vous ne pensez pas, M. le ministre, que nous autres, qui venons vous parler aujourd'hui, on ne pourrait pas vous aider de ce côté-là? Est-ce que c'est acceptable que le fédéral qui a mis sur pied la santé en 1960, parce que les Canadiens avaient

une très mauvaise santé et n'avaient pas d'école et d'université pour faire avancer les Québécois dans la société... Vous êtes tous là aujourd'hui... parce qu'on est presque en l'an 2000. Mais, en 1960, ce n'était pas comme ça. Les familles n'étaient pas capables de faire étudier les Québécois et c'est d'autres qui prenaient la place. Alors...

M. Côté (Charlesbourg): Je trouve ça très intéressant parce qu'on a commencé...

Mme Brunet: Moi aussi, je trouve ça bien intéressant. C'est pour ça que je vous en parle.

M. Côté (Charlesbourg): On a commencé au début de la commission avec un autobus et on va finir avec un train, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Avec le nombre de personnes qui embarquent, c'est clair.

Mme Brunet: Non, mais je trouve, M. le ministre, que ce n'est pas les petits 5 $ que vous allez aller chercher chez les personnes, c'est le 1 700 000 000 $, et ça fait cinq ans que le gouvernement fédéral diminue les fonds. En l'an 2000, s'il continue comme ça, il n'y aura plus une cent qui va être envoyée aux provinces.

M. Côté (Charlesbourg): Avant ça.

Mme Brunet: On va laisser faire ça? On va laisser faire ça? C'est inadmissible, inacceptable. Vous le dites dans votre document. Vous employez exactement ces mots-là.

M. Côté (Charlesbourg): Vous allez finir par me gagner là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): M. le ministre, votre temps est écoulé. Mme Brunet. Je demande au député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue de bien vouloir prendre la relève.

M. Trudel: En vous souhaitant la bienvenue...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: ...en vous souhaitant la bienvenue et, avec ce que vous venez de dire, je vais me lever debout...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: ...pour vous saluer, saluer votre grande sagesse, votre clairvoyance, votre perspicacité...

Mme Gesser: J'ai juste un petit message.

Le Président (M. Joly): Oui, madame. Je m'excuse, M. le député, Mme Gesser aimerait intervenir.

Mme Gesser: Juste un petit message. Je vais dire la moitié en français et la moitié en anglais.

Le Président (M. Joly): Oui, allez, madame.

Mme Gesser: O.K. Une chose, one thing that troubles us very much comme aînés, c'est d'être toujours un groupe. C'est les aînés, un groupe, on coupe les médicaments pour le groupe des aînés. Nous ne sommes pas un groupe, nous sommes des individus. Nous sommes des personnes. Aging is not a sickness.

Le Président (M. Joly): I hope.

Mme Gesser: Some of us are well and some of us are sick, and our message to you is: Do not treat us as a group of sick people, failing people. For myself, I do not want 38 hours a week home care in my home. I do not want to live that long. You know? What we are asking for... We know that there is not a lot of new dollars in the budget, we know that you want to find how to finance it and we are with you. We agree when the Minister says to have an insurance for malpractice for doctors so that they do not have to be that afraid, that they can practice better. We agree with that. But do not target us as a group. Do not forget that we are individuals. We pay taxes too.

Le Président (M. Joly): The message is there.

Mme Gesser: This is really the message that I am leaving with you.

Le Président (M. Joly): You got the message across, Mrs. Gesser. O.K. Thank you. M. le député, s'il vous plaît.

M. Trudel: Donc, en vous accueillant, au nom de l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale, en saluant votre présence, je ne pouvais pas commencer par autre chose que ce mot que je vous ai dit il y a quelques secondes, compte tenu de ce que je m'évertue à dire depuis bien longtemps, mais depuis le début de la commission, quant à la situation et quant aux solutions. Je vais y revenir, vous pouvez être sûrs, parce que les personnes âgées ont trop de sagesse d'accumulée pour en arriver à cette conclusion-là, pour ne pas qu'on retienne cela.

Le ministre vous a parlé, bien sûr, des données dans le document. Il s'est expliqué avec vous, il va continuer à s'expliquer. C'est ses problèmes, mettons, bon!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: En quelque sorte. Ce que je retiens, moi, c'est que, cependant, malgré tout, il faut bien sentir que c'est un cri d'alarme. Vous avez peur qu'on perde les acquis de notre régime. Si vos prémisses, selon certains, ne sont pas tout à fait exactes, bon, là-dessus, je le disais tantôt, il y en a certaines sur lesquelles, et bien honnêtement... parce que, souvent, les gens disent: Ah! vous autres, dans l'Opposition, vous êtes toujours là pour critiquer et toujours contre toutes les affaires, puis vous ne proposez jamais rien, vous êtes rien que là pour planter le gouvernement. On est aussi capables de reconnaître des fois que les faits sont les faits. Mais ce qui est plus inquiétant dans la situation actuelle par rapport au message que vous nous laissez, c'est: On a peur, peur de perdre les acquis du régime. Nous qui sommes dans une telle situation, les personnes âgées, on a travaillé tout le temps de notre vie, on a contribué au régime, on a peur du remède que vous êtes en train d'appliquer ou que vous voulez appliquer, et que vous sentez à travers ce document.

La perception et le sentiment de quelque chose, ça fait aussi partie de la réalité, ça. Ça aussi, c'est un phénomène. On peut bien dire: On est en absolu désaccord et vous n'êtes pas corrects avec tel ou tel fait, mais ça n'enlève pas la peur, ça n'enlève pas le sentiment d'insécurité, ça n'enlève pas cette espèce de conception des choses en disant: Nous autres, est-ce qu'on compte dans ce régime-là ou si on ne compte pas? Et vous avez l'impression que vous ne comptez pas?

Mme Brunet: Pas juste l'impression.

M. Trudel: Et ça, c'est grave. Ça, c'est grave. Moi, je reçois ça, je suis de l'Opposition et c'est grave quand j'entends des choses comme cela. Je ne veux pas aller trop loin dans ce domaine-là en disant: Bon, bien, au secteur particulier de la santé et des services sociaux, c'est le document qui a été publié le 18 décembre qui a provoqué ça. Même si vous, vous le dites, je respecte votre opinion, mais, en réalité, oui, il faut se le dire entre nous. Oui, notre régime est en danger, notre régime est aux soins intensifs et si on n'y apporte pas un certain nombre de correctifs dont le plus majeur, l'essentiel, quant à moi, est celui que vous venez de mentionner, Mme Brunet, il faut bien savoir, donc, d'où vient le mal.

Alors, je pourrais faire le tour d'un certain nombre de problèmes, d'un certain nombre de situations. Ce que nous, on a dit depuis le début de cette commission, c'est qu'on pense que, dans l'ensemble du système, 12 000 000 000 de piastres, ce n'est pas des pinottes, hein? et, quand on dépense ça, il y a un risque que ce soit, soit mal dépensé, mal orienté ou mal administré. Ça peut arriver. On pense que là-dessus - vous en faites des suggestions, d'ailleurs, dans votre document - on peut réorienter un certain nombre de dollars pour en faire plus avec le même dollar. Cependant, il faut aussi se dire la vérité. Même si on faisait tout cela, il est inévitable qu'il va en manquer à quelque part pour maintenir le régime comme il est là actuellement, parce que, essentiellement - on peut parler de n'importe quel gouvernement depuis une quinzaine d'années - on a assez bien fait notre travail au Québec - c'est rare que l'Opposition dit ça: On a assez bien fait notre travail: rouge, bleu, vert, jaune, carreauté - au sens où on contrôle assez bien nos coûts. On a peut-être mal orienté à des places, mais il y a des fautes à gauche et à droite. Mais il y en a un qui n'a pas fait son travail, c'est le gouvernement fédéral parce que, lui, il a choisi de faire d'autres choses avec notre argent, et c'est pour ça qu'on est pris ici... ça me fait de la peine qu'on soit pris un petit peu pour se chicaner entre nous autres parce que c'est un autre qui a mis le feu dans la cabane.

Ma question est la suivante. Je le disais au départ; vous, vous dites: On va y aller avec vous. Je taquine un peu le ministre avec ça, mais il y a, bien sûr, un fond de la réalité. Ça fait 32 ans qu'on dit au gouvernement fédéral: Donnez-nous nos points d'impôt - Mme Farmer, nos impôts à nous autres - pour qu'on s'occupe de nos services de santé et de nos services sociaux. Toutes les années, je les ai relevées. Toutes les années, sous n'importe quel gouvernement, il y a un ministre des Finances ou un premier ministre qui va dire, à partir de Duples-sis: Donnez-nous notre butin, on va s'en occuper comme du monde. Ça n'a jamais marché.

Le Président (M. Joly): La question, s'il vous plaît, M. le député.

M. Trudel: ça n'a jamais marché. la question, c'est: pensez-vous, si on y va en train cette fois-là, que ça peut marcher, qu'ils vont nous le redonner? mme brunet?

Mme Brunet: Non. Moi, je dis qu'ils vont le redonner à la condition que les gens âgés n'acceptent pas qu'ils ne nous le donnent pas. C'est comme ça que ça marche aujourd'hui. Si la population ne dit rien - même la population des gens âgés se laisse dire qu'elle abuse des médicaments, qu'elle abuse des soins de santé; elle se laisse dire ça - si elle n'est pas capable de se lever debout, bien, tant pis pour ceux qui vont payer. Mais, nous autres, on est des groupes, des associations. L'AQDR existe depuis 12 ans; on défend les droits des retraités puis on leur explique la situation, et je peux vous dire que les retraités sont de plus en plus informés, et c'est ça qui est un peu dangereux pour les gouvernements...

Des voix: Ha, ha, ha!

(19 h 15)

Mme Brunet: ...parce qu'ils sont capables d'être sur la place publique aujourd'hui et de dire ce qu'ils pensent, ce qui n'existait pas il y a une vingtaine d'années. On le sait, on est issu d'une génération de gens soumis pour toutes sortes de raisons que je n'étalerai pas sur la table aujourd'hui, mais vous savez ce que je veux dire. Mais on en est sorti de ça et on ne veut plus rien savoir. Vous dites, M. Côté: Vous avez été représentés sur le comité des experts par des personnes âgées. Mais souvenez-vous que je vous ai dit que, cette fois-là, on n'accepterait pas, dans un comité d'experts pour les aînés, que ce soient les gens de 40 ans qui parlent de nous autres. On n'acceptera plus jamais ça, jamais.

M. Côté (Charlesbourg): Mais...

Mme Brunet: Et d'être raisonnables, comme certains députés nous le disent: Soyez raisonnables, les personnes âgées. Non! On veut notre dû comme si on était encore des gens qui font partie de cette société parce qu'on est convaincus qu'on en fait partie, on est convaincus que l'expérience acquise pendant toutes ces années-là, ça a plus que la valeur d'une piastre et de deux piastres. Ça a plus de valeur que ça. Depuis beaucoup d'années, on n'a pas tenu compte, il y a des gens qui appellent ça de la sagesse, moi, je n'appelle pas ça de la sagesse, j'appelle ça du vécu, puis c'est important qu'on échange entre les générations. Je ne veux pas qu'on soit là tout seuls à prendre la place...

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, mais...

Mme Brunet: ...mais que les autres soient là puis qu'on échange entre nous autres pour arriver à des meilleures solutions et avec un meilleur système.

M. Côté (Charlesbourg): Sur le rapport Pelletier, je vous ai nommées, vous et Mme Leblanc, comme expertes.

Mme Brunet: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Hein?

Mme Brunet: Oui, oui, à la suite de notre recommandation.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Quant à moi, Mme Brunet - parce que j'ai fait aussi promesse à notre bon ami de Notre-Dame-de-Grâce, M. le député Atkinson, qui a quelques questions à poser - je peux quasiment juste conclure que vous représentez maintenant non seulement un groupe important dans notre société, mais de plus en plus impor- tant en termes de nombre, et ça, ça se traduit politiquement. Je vous en prie, je me prosterne à vos pieds...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: ...je requiers que vous vous mobilisiez tous au Québec pour que le gouvernement fédéral, enfin, comprenne le bon sens, sinon il va y en avoir une bonne consultation bientôt, un référendum sur la souveraineté. On ne le demandera plus, on va le prendre. Mais, en attendant, j'accepte quant à moi. Mais vous avez réussi sur la colline parlementaire à faire reculer Mulroney avec une seule phrase: Écoute bien, Charlie Brown, tu ne toucheras pas à ça. Là, c'est le temps de dire: Écoute bien, Charlie Brown, ne touche pas aux affaires du Québec; ne touche pas à nos acquis collectifs les plus importants. Vous avez ce pouvoir-là aussi. Merci.

Mme Brunet: Bon. Là, je ne sais pas, M. Trudel, si vous êtes en train d'essayer de nous embarquer sur une question nationaliste...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Brunet: ...mais on ne s'en va pas là-dedans.

M. Trudel: Je ne suis pas en train; je vous embarque.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Brunet: On ne s'en va pas là-dedans. On se contente de défendre nos droits, puis c'est déjà une grosse job. Mais on a l'intention de la faire jusqu'au bout.

M. Trudel: Merci.

M. Côté (Charlesbourg): Si j'ai compris, vous allez être prêts pour l'autobus, mais pas pour le train.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Mme Trudel, vous avez... Pas Mme Trudel, je m'excuse, Mme Brunet.

M. Trudel: II l'appelle Mme Trudel. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Vous avez compris que c'est un coup de pratique ça, là, hein?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

M. Atkinson: Merci, M. le Président. Avant de poser ma question, je suis très sympathique à la Coalition. Je suis aussi membre de la grande société du Québec des personnes âgées. J'ai plus de 70 ans et pas un jeune membre de cette commission.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Atkinson: J'ai été le modérateur durant six ans à la conférence annuelle, the Conference on Aging, à Montréal. It has been my pleasure to have worked with Reva Gesser and also with Mme Pelletier and everyone else on this Commission. I am only sorry that David Woodsworth was not well enough to come and make the presentation today.

J'aimerais d'abord vous féliciter pour la clarté et les précisions de votre mémoire. Je suis particulièrement heureux de voir que vous abordez le problème de la surconsommation des services de santé par les aînés. Comme on a tendance à blâmer les aînés pour la hausse des coûts, je suis content de voir que vous apportez l'argument contraire. J'aimerais souligner pour votre information et l'information de cette commission qu'une étude approfondie sur les coûts des soins médicaux pour personnes âgées faite par Barer, Evans, Hertzman et Lomas, en 1987, a conclu que l'augmentation des coûts attribuables au vieillissement de la population serait de 1 % pendant les prochains 40 ans.

Maintenant, ma question. Plusieurs fois dans votre mémoire, à la recommandation 18, vous mentionnez que l'aspect social semble complètement mis de côté. Pensez-vous qu'un ministère des services sociaux comme plusieurs provinces allégerait ou aggraverait ce manque? Un ministère, un sous-ministère ou un ministère adjoint des services sociaux? Un ministère, un sous-ministère des services sociaux?

Mme Brunet: Pas à la page 18. Une voix: Le no 18.M. Atkinson: La recommandation 18. Mme Brunet: O. K. Le no 18.

M. Atkinson: Excusez-moi, madame, la recommandation 18.

Mme Brunet: Je ne sais pas s'il y en a d'autres qui veulent répondre. C'est un peu ce que je disais tantôt quand je parlais de la prévention, c'est ça qu'on veut dire, une médecine sociale, c'est-à-dire que la personne, quand elle entre dans le bureau du médecin, elle n'est pas là pour cinq minutes et, actuellement, c'est comme ça. On fait clic-clic et: Assoyez-vous, madame. Qu'est-ce que vous voulez? Bien, là, je ne comprends pas trop... Bon, c'est très bien, on va vous prescrire des psychotropes, parce que les femmes sont prises avec les psychotropes et ça agit sur le système nerveux central. Ça, qu'est-ce que ça fait? Ça rend les femmes très amorphes, ça fait des femmes qui restent à la maison, elles ne sont pas capables de sortir, alors c'est une espèce de cercle vicieux où ces femmes-là se trouvent, en très grand nombre, isolées. Alors, c'est pour ça qu'on dit: La prévention qu'on veut, ça comprend la médecine, ça comprend une approche très différente de celle qu'on a présentement pour essayer d'avoir des personnes âgées qui ne coûtent pas trop cher et qui sont capables de se valoriser dans la société et de continuer à faire des choses. Mais ça, ça prend, entre autres, la médecine pour faire comprendre aux personnes ce qu'elles sont en train de vivre.

M. Atkinson: Vous êtes satisfaits de M. le ministre, du ministère de la Santé et des Services sociaux? C'est adéquat pour les services aux personnes âgées?

Le Président (M. Joly): Oui, Mme Gesser.

Mme Gesser: We know that the Minister, M. le ministre, is sympathetic to prevention. We know that he knows as well as us that to keep people healthy is cheaper than curing them. We know that there are not a lot of new dollars. I mean, we know that. But we are saying to you: It is cheaper to take some of those dollars and put them into prevention and, when we are talking about prevention, we are not only talking about heavy cases just discharged from hospitals, but the kind of services, small services that help people stay in the community to prevent them from breaking down, and this is what we are saying to you. Take some of that money; we know there is no new money and you cannot be magicians. We understand your problems. We are not here just to say that you must give us the world. We say: Take some of that money from the medical model and put it into the preventive model, because we as seniors do not want to go into institutions. We do not want to be over-medicated and most of us do not want to be going running to doctors. And we do not want charity... We just want the change in priorities so that we can remain as people in the community. And as I told you before and I say it again, we are not a group; we are individuals; we are citizens; we are people. We want you to look at it. Do not target us as «le groupe des aînés». We are not, we are people.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme Gesser. Merci, M. Atkinson. Mme Pelletier, vous vouliez. ajouter un dernier mot.

Mme Pelletier: Justement, en plus de la prévention, nous parlons...

Le Président (M. Joly): Je voudrais dire à Mme Brunet que je lui ai donné pleinement son heure.

Mme Brunet: Oh oui! mais je ne me plains pas non plus.

Des voix: Ha! ha! ha!

Mme Pelletier: Ce ne sera pas long, c'est très court. Le maintien à domicile, nous travaillons beaucoup beaucoup sur ça. Les gens récupèrent beaucoup plus vite quand ils sont dans leur milieu et ce qu'il y a de bon en même temps pour le ministère, c'est que ça coûte énormément moins cher. Alors, le même argent qui est dépensé pour les institutions et les hôpitaux pourrait l'être à domicile. En même temps, et pour cette raison-là, il faudrait probablement penser aux organismes communautaires qui, eux aussi, dans le moment... On me disait, justement, que les CLSC, en général, refusent et renvoient des gens dans les centres d'action bénévole, puis tout ça, parce que leur budget... Mais ce sont souvent des gens qui ont besoin de physiothérapie, d'ergothérapie, enfin, de quelque chose. Les organismes communautaires comme les centres d'action bénévole sont pris avec ça. Ils n'ont même pas d'argent pour le transport, pour envoyer ces gens-là, puis les centres d'action bénévole n'ont pas à faire les traitements. Il faut qu'ils les envoient quelque part. Alors, le transport, voyez-vous, pour ces gens-là, c'est une chose à laquelle on devrait voir.

Une autre chose que je voulais ajouter, tantôt nous avions l'air contre tout. Le rapport de la commission Pelletier, c'est fameux, c'est quelque chose...

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je veux vous remercier des éclaircissements dans nos échanges. On comprend Mme Brunet qui insistait pour qu'on ait des échanges pour tenter d'éclaircir des choses. Il est clair que la prévention, non pas uniquement pour les personnes âgées, mais pour l'ensemble de la société, doit être une priorité et un réajustement de notre système par rapport à ce qu'on connaît aujourd'hui.

Ce que je veux seulement dire à Mme Brunet et à ceux qui l'accompagnent, si vous vous imaginez avoir un pouvoir et vous l'avez auprès des hommes politiques, des hommes et des femmes politiques, auprès des pouvoirs politiques, si vous mettez autant d'efforts auprès du pouvoir médical, vous allez pouvoir, là aussi, changer des choses que peut-être nous autres, on a de la misère à faire changer. Et je pense que, dans ce sens-là, il y a aussi un travail à faire d'éducation des personnes âgées auprès de leurs méde- cins. Vous nous dites: Ce n'est pas 5 minutes qu'on veut, 10 minutes, on veut davantage prendre le temps de nous expliquer des phénomènes qui vont nous amener de la prévention et une meilleure consommation, non pas une consommation dont personne ne veut, mais on n'a pas le choix parce que nos pathologies l'exigent! Je pense que vous avez un travail tout à fait extraordinaire à faire de ce côté-là et, effectivement, vous avez un pouvoir tout à fait exceptionnel que vous avez commencé à utiliser de manière plus importante que ce qu'on a connu dans le passé, tout cela étant accompagné par des gens qui, à la retraite aussi, ont des conditions un peu mieux que ceux qui vous ont précédés à la retraite. Et je pense que ça aussi, c'est un des bénéfices de la société québécoise dont vous devez vous servir. Et je vous laisse sur Augustin, parce que c'est le grand patron des médecins. Je suis convaincu que vous allez pouvoir l'instruire davantage. Merci de votre présentation et je vous dis que le rapport Pelletier, oui, c'est un bon rapport qu'on va commencer à mettre en application très prochainement.

Le Président (M. Joly): M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Trudel: Au nom de l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale, je veux vous remercier d'avoir pris le temps de rédiger ce mémoire, de venir ici et de prendre toute l'heure que nous avions réservée pour que nous puissions échanger. Et, oui, servez-vous de ce pouvoir dans toutes les directions, Mme Brunet. Merci beaucoup.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Au nom des membres de cette commission, Mme Farmer et votre groupe, je tiens à vous dire que, si, dans la société, on vous donne votre dû tout comme on vous l'a donné aujourd'hui, vous allez même en avoir un peu plus.

Une voix: On le sait.

Une voix: On le savait.

Le Président (M. Joly): au plaisir et merci beaucoup d'avoir été avec nous. alors, nous ajournons nos travaux à demain matin, 9 h 30, dans ce même salon. merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 19 h 25)

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