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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le vendredi 12 juin 1992 - Vol. 32 N° 18

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 408, Loi sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre


Étude détaillée du projet de loi n° 21, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Onze heures vingt-six minutes)

Le Président (M. Marcil): Je déclare la séance ouverte et je rappelle le mandat de la commission des affaires sociales. Elle se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives. Est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Boucher Bacon (Bourget) sera remplacée par Mme Hovington (Matane); M. Houde (Berthier) par M. Khelfa (Richelieu); Mme Juneau (Johnson) par M. Paré (Shefford); Mme Marais (Taillon) par M. Garon (Lévis); M. Paradis (Matapédia) par M. Maltais (Saguenay); M. Trudel (Rouyn-Noran-da-Témiscamingue) par M. Blais (Masson).

Le Président (M. Marcil): C'est quasiment une nouvelle commission parlementaire.

M. Bourbeau: C'est l'équipe de relève.

Projet de loi 21

Le Président (M. Marcil): L'équipe de relève, je m'aperçois de ça. Donc, nous étions à la période des motions préliminaires. Je suis prêt à entendre le premier intervenant, M. le député de Lévis.

Motion proposant d'entendre la Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec

M. Garon: M. le Président, je voudrais présenter une motion qui se lirait comme suit: «II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec.»

Le Président (M. Marcil): Est-ce que vous voulez la déposer?

M. Garon: Certainement.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce qu'on suspend pendant que vous étudiez la recevabilité?

Le Président (M. Marcil): Je vais étudier la recevabilité de cette motion.

M. Bourbeau: Allez-vous prendre en délibéré la motion, M. le Président?

M. Garon: Voulez-vous qu'on suspende nos travaux pendant que vous étudiez ça?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Allez-vous prendre en délibéré, M. le Président?

Le Président (M. Marcil): Je vous donne la parole, M. le député de Lévis.

M. Bourbeau: M. le Président...

M. Garon: M. le Président, comme vous avez constaté...

M. Bourbeau: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Ça va, M. le député de Lévis...

M. Bourbeau: II y a une procédure qui doit être suivie avant de donner la parole au député de Lévis. La présidence doit rendre sa décision sur la recevabilité. Je n'ai pas entendu la décision de la présidence. J'espère qu'elle va être motivée aussi, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Oui. Donc, après mûre réflexion...

M. Garon: Par écrit.

Le Président (M. Marcil): ...je considère que la motion est recevable. Donc, je vais entendre le député de Lévis.

M. Bourbeau: Ce n'est pas tellement motivé, M. le Président, je dois dire.

Le Président (M. Marcil): Ce n'est peut-être pas motivant, M. le député, mais je me suis motivé à le dire.

M. Garon: C'est parce que, M. le Président, j'ai compris que les postulats n'ont pas à être démontrés, non plus que les axiomes.

M. le Président, vous avez remarqué, ce matin, quand vous avez dit...

Le Président (M. Marcil): ...je tiens à vous informer...

M. Garon: Oui.

Le Président (M. Marcil): ...M. le député et tous les députés, ça m'est déjà arrivé, dans le premier mandat, M. le députe de Terrebonne, vous vous en souvenez... J'aimerais bien que dans le débat, toujours, on n'oublie pas la pertinence. Donc, votre temps va être respecté. Allez-y.

M. Jean Garon

M. Garon: Oui, oui. Aucun doute. Vous comprenez, M. le Président, quand, ce matin, on a annoncé que je remplaçais la députée de Taillon, que c'est une figure de style, puisque je ne remplace pas, je suis incapable de remplacer la députée de Taillon, excepté qu'essentiellement on veut dire que je prends la place de la députée de Taillon pour la séance d'aujourd'hui.

Une voix: Vous prenez son siège. (11 h 30)

M. Garon: D'abord, c'est une question qui est très importante, et on a mis en cause le Mouvement Desjardins dont le siège social est à Lévis. Alors, je ne pouvais pas passer à côté de cette commission parlementaire, puisqu'on met en cause le Mouvement Desjardins. Je pense qu'on ne peut pas mettre en cause un mouvement de l'importance du Mouvement Desjardins sans qu'on entende le président du Mouvement Desjardins, le président de la Confédération des caisses populaires Desjardins, surtout avec un nom comme celui-là, difficile à porter, la Confédération des caisses populaires Desjardins. Vous savez que M. Béland est le président d'une fédération de fédérations. C'est à ce titre que nous pensons que nous devrions l'inviter, d'autant plus que certains députés ont évoqué une lettre que nous n'avons pas reçue, et dont nous venons juste d'avoir copie. Je ne l'ai même pas encore lue. Je vais vous dire bien franchement, je viens juste d'en avoir une copie. Je vois qu'elle a été envoyée le 30 mars 1992, mais nous ne l'avons jamais eue.

On voit, en regardant cette lettre de la députée des Chutes-de-la-Chaudière, qui est le comté le plus près du comté de Lévis, donc qui est plus près du siège social de la Confédération des caisses populaires Desjardins... Regardez le texte qu'elle a reçu un peu avant moi, et elle m'a indiqué que les représentations que fait le Mouvement Desjardins dans sa lettre au ministre sont très, très limitées et qu'il faudrait véritablement, avant d'adopter un projet de loi de cette nature et d'accuser le Mouvement Desjardins de la paternité de ce mouvement, le ministre en assumant la maternité, puisqu'on laisse entendre que celui qui en a fait la demande, c'est le Mouvement Desjardins... C'est comme si on disait que c'est le Mouvement Desjardins qui demande au gouvernement de priver l'ensemble des citoyens d'une longue fin de semaine, une longue fin de semaine au début de juillet, que les gens étaient habitués d'avoir à l'occasion de la fête de la Confédération. On comprendra qu'il y a des employés - il y a des milliers d'employés dans le Mouvement Desjardins - qui seraient très déçus d'apprendre une chose comme celle-là, puisque je suis persuadé qu'à l'heure où on se parle beaucoup d'entre eux ont déjà planifié leur fin de semaine de trois jours à l'occasion de la fête de la Confédération...

M. Bourbeau: M. le Président...

M. Garon: ...et que l'ensemble des citoyens...

M. Bourbeau: ...est-ce que je pourrais poser une question?

Le Président (M. Marcil): Oui, un instant, M. le député.

M. Bourbeau: Sans interrompre le député, là...

Le Président (M. Marcil): Une question de règlement, M. le ministre?

M. Bourbeau: Oui. Je pense qu'il conviendrait peut-être que le député lise la lettre avant de parler plutôt que de parler avant de la lire.

M. Garon: Oui.

M. Bourbeau: II comprendrait que le Mouvement Desjardins veut fêter le 1er juillet. Donc, les employés du Mouvement Desjardins, d'après la lettre, vont être en vacances le 1er juillet. C'est le sens de la lettre de M. Béland.

M. Garon: Oui, mais c'est ça que je dis.

M. Bourbeau: Non, ce n'est pas ce que vous dites.

M. Garon: Bien oui. J'ai dit: ...priver d'une longue fin de semaine.

M. Bourbeau: Bien non. Le 1er juillet, c'est un mercredi.

M. Garon: Bien, le mercredi, ce n'est pas une longue fin de semaine. Si on a un congé le mercredi, on travaille le... et on a un congé le samedi et le dimanche, ce n'est pas comme avoir une longue fin de semaine de trois jours.

M. Bourbeau: C'est ça que M. Béland veut, le mercredi.

M. Garon: C'est pourquoi je préfère m'en tenir à une lettre dont on nous a donné tardivement copie, alors que M. Béland... et m'en tenir au discours de M. Béland à la basilique de

Québec, devant 700 personnes, où il disait qu'il ne fallait pas ajuster les hommes aux machines, mais ajuster les machines aux hommes...

Une voix: Ou aux femmes.

M. Garon: ...ou aux femmes, qu'il ne fallait pas avoir une pensée oeconomicus, arrêter de défendre l'homo oeconomicus, mais défendre l'être humain dans sa totalité, dans sa globalité, dans ses fonctions de père ou de mère de famille, dans ses responsabilités sociales, ne pas s'ajuster aux machines. Quand j'ai entendu des discours comme j'en ai entendu à l'Assemblée nationale, M. le Président, de gens qui nous disaient que les machines étaient importantes, qu'il y a des opérations bancaires qui ne pourraient pas être faites cette journée-là s'il y avait congé le lundi, imaginez-vous à quel point ça doit être épouvantable, alors que nous sommes dans le libre-échange, la plus grosse partie de nos exportations s'en va aux Etats-Unis et les Américains fêtent, eux, le 4 juillet. Vous savez qu'il y a bien plus de chances, à ce moment-là, que certaines journées... On serait peut-être mieux de fermer le 4 juillet, parce que j'ai l'impression qu'on fait de plus en plus des affaires avec les Américains et qu'on fera, dans l'avenir, de moins en moins des affaires avec le Canada. Arriver aujourd'hui avec une fête comme celle-là et vouloir faire ces changements aujourd'hui, il me semble que c'est à contre-courant. Si on avait fait ça en 1867, je ne dis pas. Ça aurait commencé à ce moment-là, alors que les affaires n'étaient pas considérables, mais, aujourd'hui, on s'en va beaucoup plus dans le libre-échange avec des affaires qui vont se faire avec les Américains, peut-être avec le Mexique, avec le reste de l'Amérique, et de moins en moins on aura des affaires à faire avec la Saskatchewan, la grosse Saskatchewan de M. Romanow, dont on dit que, dans 15 ans, sa population pourrait baisser de 1 000 000 à 650 000.

Une voix: Ah oui?

M. Garon: Bien oui. Les prévisions des grands planificateurs ou des grands penseurs de l'avenir; ils ont dit que la population de l'Ouest du Canada va diminuer. J'avais dit, à une conférence fédérale-provinciale, même en 1985, que ce qui serait le plus rentable dans l'Ouest, ce serait sans doute de recommencer à faire l'élevage du bison dans des prairies naturelles et d'organiser des safaris à 5000 $ du bison; ça ne coûterait pas de subventions au reste du Canada. Parce qu'il faut payer des milliards de subventions par année pour maintenir des gens là et ce n'est pas évident qu'ils doivent être là. Quand vous allez vous promener dans l'Ouest, chaque fois qu'il y a un cours d'eau, vous voyez un petit cerne autour, c'est le sel qui sort de la terre. Il y a un problème de salinité épouvanta- ble, et il faut payer des milliards pour maintenir ça, alors qu'aujourd'hui les productions de l'Ouest sont de moins en moins nécessaires.

Les Ukrainiens qui sont venus au Canada au XIXe siècle, aujourd'hui je dois vous dire qu'on voit de plus en plus de missions qui s'organisent entre le Canada et l'Ukraine. L'Ukrainien qui retourne voir en Ukraine, puisque, maintenant que le communisme, la fédération soviétique vient de péter au fret, M. le Président, la fédération, la confédération soviétique, et qu'on revient à la Russie... Là, les Ukrainiens peuvent se sentir davantage ukrainiens, ils retournent en Ukraine voir ce qui pourrait être fait. On sait que les terres de l'Ukraine sont bien meilleures que les terres de l'Ouest du Canada, mais que les méthodes de commercialisation du communisme font défaut. Les méthodes communistes, d'avoir des fermes immenses à 4000 acres ou hectares, avec plusieurs personnes qui travaillent là-dessus, la Russie s'est rendu compte - ça a pris bien du temps à s'en rendre compte - que, finalement, les paysans qui avaient un petit lopin de terre à côté de leur maison, d'à peine un acre ou même de moins que ça, ces acres-là, qui représentaient moins de 10 % de la superficie, représentaient plus de 40 % de la production. Parce que l'être humain étant ce qu'il est, les gens travaillaient plus fort sur leur acre personnel, tout petit, à côté de leur maison, que sur la grande ferme de l'État. Après 75 ans de communisme! Voyez-vous, c'est un peu comme la Confédération. En Russie, ça a pris 75 ans à se rendre compte que la confédération soviétique n'était pas bonne. Ici, nous autres, les Canadiens, ils sont plus lents. Alors, après 125 ans, on voit qu'on est dans le goulot d'étranglement actuellement et que des gens commencent à se poser des questions sur ce fonctionnement qui est un accident historique, en réalité, M. le Président.

Vous savez, si les États-Unis n'étaient pas devenus indépendants en 1783, après le Boston Tea Party, où les Américains n'ont pas voulu payer de taxes à l'Angleterre sans être représentés, puis ils ont décidé de se libérer, ils ont même envoyé des émissaires ici, pour embarquer avec eux. Les gens de mon village, un certain nombre de personnes du village d'où je suis originaire, Saint-Michel de Bellechasse, d'ailleurs se sont joints à la révolution américaine. Je dois vous dire que, même, il y en a un certain nombre qui sont enterrés dans le stationnement de l'église, parce qu'à ce moment-là l'Église excommuniait les gens qui participaient à la révolution, américaine, parce que l'Angleterre, voyant arriver cette menace, avait accepté de donner des droits religieux en 1774, avec l'Acte de Québec, et avait oublié le serment du Test qu'elle avait passé en 1673. Pourquoi? Pour amadouer les Québécois ou les Canadiens français du temps pour qu'ils restent avec la couronne anglaise. Mais, comme les Américains, eux, avaient décidé de se libérer et d'être eux-

mêmes... Et, à ce moment-là, la population des États-Unis, ce n'était pas une population considérable, c'était quelques millions de personnes. Quand les Américains ont fait l'indépendance américaine, vous savez, ils étaient moins nombreux que les Québécois le sont aujourd'hui. Ils ont décidé de devenir indépendants, et l'Angleterre s'est retrouvée avec quelques colonies au Nord, qui n'étaient pas grosses, et elle a pensé qu'en les regroupant, dans deux Canada, elle pourrait mieux les défendre et, ensuite, dans une Confédération pour cautionner les dettes des compagnies de chemins de fer anglaises qui s'étaient endettées en faisant des chemins de fer vers l'Ouest. (11 h 40)

Au fond, elle regroupait des colonies au Nord qu'il restait, le résidu de l'Amérique du Nord qui n'était pas embarqué dans l'indépendance américaine. Le Canada, c'est ça. C'est un accident historique. C'est un pays formé en réaction. Et formé avec quoi? Avec des loyalistes qui ont quitté les États-Unis avec leurs boeufs puis leur charrette, leur femme et leurs enfants, et ce qui restait de place dans la charrette pour mettre du ménage ou encore des vêtements, parce qu'ils ne pouvaient pas tolérer de vivre autrement que sous la couronne britannique.

Une voix: Les loyalistes.

M. Garon: Vraiment, il fallait avoir un amour incroyable de la reine d'Angleterre ou du roi d'Angleterre pour quitter les États-Unis, pays merveilleux, des paysages extraordinaires, encore aussi beaux, peut-être mieux que les Rocheuses, M. le Président. Partir avec une voiture, deux boeufs. Ceux qui étaient plus riches pouvaient avoir deux voitures avec deux boeufs, quatre boeufs. Comme, dans ce temps-là, les familles étaient nombreuses, ils partaient avec leur femme et peut-être leurs 10 ou 15 enfants, imaginez-vous qu'il ne restait pas beaucoup de place pour des meubles dans la voiture ou dans la charrette. S'en venir au Nord dans le froid, parce qu'ils trouvaient intolérable... Abandonnant leur maison, leur terre, tout ce qu'ils ne pouvaient pas amener dans la charrette, pour s'en venir rester au Nord sous la couronne britannique...

Le Président (M. Marcil): M. le député, vous parlerez un petit peu de la fête du Canada dans votre discours.

M. Garon: Oui, c'est pour ça. Bien oui, c'est ça que je dis. Au fond, c'est ce qui est arrivé en réaction. C'est les loyalistes qui refusaient l'indépendance américaine. C'est un peu comme les Mohawks, ça. Les Mohawks, vous savez, ils se sont trompés. Au moment de l'indépendance américaine, ils se sont demandé - d'ailleurs, il y a un film qui a été fait là- dessus - s'ils devaient embarquer avec les Américains ou les Britanniques? Et, torturés, ils ont décidé d'embarquer avec l'Angleterre, parce qu'ils ont pensé que l'Angleterre gagnerait. Mal leur en a pris; ils ont perdu. Ayant peur des représailles, ils ont dit à la mère britannique: Aidez-nous! les Américains vont nous maltraiter. Et les Américains, les Anglais, l'Angleterre leur a donné un petit espace de terrain au sud de Montréal. Et, depuis ce temps-là, on a les Mohawks qui ont gardé leur fidélité totale à la couronne britannique.

Mais, dans le fond, encore là, c'est une erreur. Le Canada, on dirait, est toujours bâti sur des erreurs. Erreur des Mohawks qui se sont trompés d'alliés. Ils n'ont pas pris les bons. Hein?

Une voix: Les loyalistes.

M. Garon: Erreur de Champlain qui a embarqué avec les Hurons plutôt qu'avec les Iroquois. Des Hurons, s'il était arrivé 15 ans plus tard, il n'en aurait pas resté. C'était une espèce en voie d'extinction...

Le Président (M. Marcil): Erreur de Jacques Cartier...

M. Garon: ...parce que les Iroquois étaient en train d'exterminer les Hurons. Encore une erreur. Quand vous regardez le Canada, c'est une suite d'erreurs. Quand vous regardez que Christophe Colomb a découvert l'Amérique...

Une voix: C'est une erreur.

M. Garon: Erreur. Il s'en allait en Chine.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix:...

M. Garon: Pardon, au Japon. Puis, après ça, quand vous regardez Jacques Cartier, bien, lui, il est reparti, puis il a toujours pensé qu'il était arrivé en Chine, ou au Japon, je ne m'en rappelle pas. Mais en tout cas.

Une voix: Aux Indes.

M. Garon: Aux Indes, pardon. Aux Indes.

Une voix: Les Indiens.

M. Garon: c'est pour ça qu'il appelait ça même les indiens. encore un autre qui s'est trompé, m. le président. le canada est bâti sur une suite d'erreurs.

Alors, aujourd'hui, on ne voudrait pas qu'on fête une fête sur une erreur d'interprétation d'une lettre de m. béland. ce serait une autre erreur.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Et je suis convaincu - parce que je connais M. Béland et je connais le Mouvement Desjardins - que le Mouvement Desjardins n'aurait jamais l'âme assez basse pour vouloir enlever une longue fin de semaine aux citoyens. Jamais! Jamais! J'en suis convaincu. Et comme on est en train de faire des erreurs d'interprétation, en tout cas, il y en a un qui en fait une. Le ministre dit: C'est ça que le Mouvement Desjardins veut et nous, nous disons non. Alors, la seule façon de trancher ça - puisqu'on dit qu'on donne la paternité de cette loi et de cette disposition au Mouvement Desjardins, on ne peut pas faire une loi sur une erreur - il faut faire venir la Confédération des caisses populaires Desjardins pour leur dire: Dites-nous franchement, voulez-vous vraiment... est-ce que c'est vrai, l'interprétation que fait le ministre de votre lettre, que vous voulez enlever la longue fin de semaine aux Québécois à la Confédération pour que le Canada fête sa fête le 1er juillet de façon obligatoire, et que, quand ce sera un mercredi, ce sera un mercredi, quand ce sera un mardi, ce sera un mardi, quand ce sera un jeudi, ce sera un jeudi, puis, quand ce sera un vendredi, ce sera un vendredi-Une voix: Là, ce sera une longue fin de semaine.

M. Garon: Oui, ça arrivera une fois de temps en temps.

Une voix: Une autre erreur.

M. Garon: Est-ce que c'est ça que vous voulez? Moi, je ne voudrais pas qu'on fasse cette erreur. Je comprends qu'il y a des effaces au bout des crayons, que les gens ont mis des effaces au bout des crayons parce qu'on peut se tromper, mais excepté que ce n'est pas nécessaire de finir l'efface avant d'avoir fini le crayon. C'est pourquoi il faut essayer de minimiser les erreurs en faisant des consultations appropriées. Essentiellement, la lettre dont on vient de parler - je suis persuadé que les gens vont vous parier beaucoup de cette lettre - ceux qui l'ont vue disent tous, de notre côté, que ce n'est pas ça que le Mouvement Desjardins dit. Et moi, comme je connais le Mouvement Desjardins dans ses principes, dans ses raisons de sa fondation, dans sa philosophie, et M. Desjardins... Écoutez, il faut le faire! Il n'y a pas beaucoup de monde qui a parié dans la cathédrale de Québec. La plupart de ceux qui sont allés, ils ne pariaient plus quand ils y sont allés.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Ils sont allés pour leur dernier voyage dans la cathédrale, et là on leur a fait une cérémonie pour les saluer parce qu'on ne les reverra plus. Excepté que M. Béland, lui, est allé parier à des vivants, devant 700 personnes, et il a dit à tout le monde quelle erreur on fait. C'est d'adapter les hommes aux machines, les êtres humains aux machines. Pour le confort des machines, on emmerde des êtres humains. On éc?ure les citoyens pour le confort des machines.

Quand j'entendais la députée de Bellechasse, M. le Président, qui nous laissait entendre - comprenez-vous - que le Mouvement Desjardins, et d'autres députés ministériels qui ont suivi voulaient absolument qu'on ajuste les êtres humains aux machines, j'ai dit: Non, ça, ça ne marche pas. Avant ce moment-là, je n'avais pas l'intention de parier, mais, quand j'ai entendu ces discours, j'ai dit: On ne peut pas faire ça au Mouvement Desjardins, on ne peut pas faire en sorte que les gens pensent - parce que ça va passer à l'histoire, hein?... Les gens diront, après ça: C'est au Mouvement Desjardins, et je ne voudrais pas occasionner de dépenses aux citoyens, ou que le Mouvement Desjardins sera obligé de passer des annonces dans les journaux et dire: Ce n'est pas vrai, ce n'est pas ça qu'on a demandé au gouvernement, et le gouvernement a désapprouvé ce qu'on a droit de congé... il n'aurait pas besoin de prendre d'alibi pour essayer d'accuser quelqu'un d'autre de vouloir le faire. Je suis convaincu que le Mouvement Desjardins, je suis persuadé que M. Béland vous dirait: Non, jamais nous n'avons voulu priver les citoyens d'une longue fin de semaine.

Et rappelez-vous bien quand on parie des gens qui travaillent selon les normes du travail. Ça, c'est comme le salaire minimum. Moi, je me rappelle, je vais vous répéter, vous dire quelque chose que je n'ai jamais dit publiquement pour être enregistré dans un débat public. Je me rappelle, quand j'étais au Conseil des ministres, du temps du premier ministre M. René Lévesque, on pariait du salaire minimum, et quelqu'un avait dit: II faudrait peut-être bien trancher, ça fait deux heures qu'on parie de la question. Et M. Lévesque avait dit, à ce moment-là: Non, on va prendre tout le temps qu'il faut, parce que les seuls défenseurs que les gens au salaire minimum ont sont ici autour de la table; ils n'ont pas d'autre chose que la loi et les règlements du Conseil des ministres, et nous autres, il faut prendre le temps pour prendre une décision qui est la bonne décision parce qu'ils n'ont pas d'autres défenseurs. Au contraire, il y a une loi pour protéger un salaire minimum, parce qu'il n'y a rien d'autre qui les défend que cette loMà, et les décrets qui sont adoptés en vertu de cette loi-là par le Conseil des ministres. Et le premier ministre du Québec du temps, M. Lévesque, avait dit: II faut prendre tout le temps qu'il faut et, quand on aura fini notre discussion, prenons la meilleure décision possible, mais, au moins, on saura qu'on aura tout le temps qu'il faut pour

des gens dont nous sommes les seuls protecteurs. Ça, c'est les gens au salaire minimum. Même chose que ceux qui ont des vacances, 4 % par année pendant...

M. Bourbeau: C'est pour ça que vous l'avez gelé pendant...

M. Garon: Là, je regrette, parce que vous remarquerez qu'aujourd'hui, vous regarderez, il y a actuellement 12,5 % de chômeurs, et votre ministre des Finances annonce officiellement que le taux ne baissera pas avant 1996. 1996, c'est loin. Alors, ça prend beaucoup d'humilité de la paît d'un gouvernement qui pense être au gouvernement et, parce qu'il va être au gouvernement, le taux de chômage va rester à au moins 12,5 %, il ne baissera pas. Alors, quand un ministre qui a déjà été député pendant 36 ans est prêt à admettre ça, il est prêt à faire une grosse admission au point de vue des possibilités de son gouvernement et des capacités de son gouvernement à réduire le chômage. En partant, parce que vous savez que le budget, c'est quasiment un engagement, il prend un engagement, quasiment, que le chômage ne baissera pas en bas de 12,5 % d'ici à 1996. C'est une admission considérable. Je n'ai jamais vu un ministre des Finances dire ça, d'ailleurs. Mais, quand on n'a pas de programmes, quand on n'a pas de perspectives, quand on n'a pas de projets vis-à-vis des problèmes économiques, bien, évidemment, on dit des choses comme celle-là pour essayer d'habituer les gens à leur misère. Il manquait juste au ministre des Finances à dire que, heureusement... (11 h 50)

II manquait juste au ministre des Finances à dire que, heureusement... Il pourrait dire, il aurait pu dire, et je pense qu'il est à la veille de le dire, que ceux qui, par ailleurs, auront moins ici-bas seront mieux placés de l'autre bord. Il aurait peut-être pu dire ça pour essayer d'aider les gens à endurer leur sort. Mais, aujourd'hui, les gens pensent moins... On pense moins, quand on parle de ces questions-là, à un Dieu vengeur, à un Dieu qui aime voir le monde souffrir. Nous autres, on a eu des écoles jansénistes, ici, épouvantables, au Québec. On a toujours pensé de voir l'avenir avec un Dieu qui nous aimait tristes, qui nous aimait miséreux, qui nous aimait dans la misère, qui nous aimait souffrants. Je me rappelle, moi, quand j'étais à l'école, on nous montrait toujours le portrait de Gérard Raymond. On nous disait: Lui, il se faisait souffrir, il mettait des affaires dans son matelas pour avoir mal pendant qu'il dormait. Moi, je me suis toujours dit: Je ne peux pas croire que le bon Dieu, il est heureux parce que quelqu'un souffre, puis des gens souffrent, se font souffrir pour le rendre heureux. J'ai toujours pensé que ça ne marchait pas, j'ai toujours pensé que ceux qui enseignaient ça disaient des niaiseries. Je vais vous dire bien franchement, j'ai toujours pensé qu'un bon Dieu qui aime les gens malheureux, ça ne peut pas être un bon Dieu et qu'au contraire il veut les gens le plus heureux possible. Mais c'était le langage du temps que les puissants avaient inventé pour faire en sorte que les gens misérables endurent leur sort, pour essayer de justifier leur misère en disant: Plus tard, vous allez avoir une meilleure place quand vous allez être de l'autre bord. Mais ceux qui leur disaient ça, ils n'avaient pas l'air à être préoccupés à avoir une bonne place de l'autre bord. Ils aimaient mieux avoir la meilleure place ici. Ceux qui leur tenaient ces discours-là, eux, ils n'avaient pas l'air à aimer ça, être bien de l'autre bord. Ils avaient l'air à dire: Moi, j'en profite pendant que ça passe, mais vous autres, vous allez être mieux de l'autre bord; je veux tellement votre bien que je vais le prendre en attendant pour vous rendre plus heureux de l'autre bord. Alors, on ne voudrait pas que ça arrive, ça. Puis on ne voudrait pas donner à penser que les libéraux attribuent la paternité d'une telle pensée au Mouvement Desjardins.

Moi, je suis convaincu, et je le dis parce que je pense être complètement connecté sur les citoyens quand je dis ça, à tel point, écoutez... À quel point, écoutez, bien... La journée où je faisais un discours là-dessus en Chambre, à 16 h 15, 16 h 20, jeudi, si ma mémoire est bonne, on rencontrait la Chambre de commerce après, et je ne savais pas que les gens de la Chambre de commerce avaient écouté mon discours. Après la rencontre avec la Chambre de commerce, les gens m'ont dit: Ils ont entendu ton discours et ils ont dit: De quoi le gouvernement se mêie-t-il de vouloir changer ça, de mettre la Confédération le mercredi plutôt qu'une longue fin de semaine? Parce que même les commerçants trouvent ça plus avantageux d'avoir la fête une longue fin de semaine, parce que fermer le magasin une journée, le mercredi, pour, après ça, le refermer deux jours, même les gens d'affaires aiment mieux... Puis c'est rare que les consommateurs, les travailleurs et les gens d'affaires ont tous la même vision des choses. Ils aiment tous mieux avoir une longue fin de semaine de trois jours. C'est plus utile pour ceux qui prennent leurs vacances parce qu'ils peuvent mieux s'organiser. C'est plus utile pour les consommateurs, c'est plus utile pour les entreprises, c'est plus utile pour tout le monde. Alors, pourquoi le gouvernement... À moins qu'on ait en face de nous un gouvernement méchant qui dise: J'aime ça, j'aime mes Québécois quand ils souffrent un peu plus. Pourquoi vouloir absolument détruire cette fin de semaine de trois jours pour des gens qui, au fond, ne sont pas couverts par des conventions collectives, qui ont, au fond, comme principal partage la loi du salaire minimum, la loi des vacances minimums, les 4 %, puis la Loi sur les normes du travail pour leur dire: Vous autres, ne vous en faites pas, votre fête du

Canada, ça va être le mercredi si c'est le mercredi, vous n'aurez pas une longue fin de semaine?

Moi, je pense que l'ensemble des citoyens n'est pas d'accord avec ça, avec le projet de loi qu'il y a ici. C'est notre évaluation, parce que, si on pensait que les gens étaient d'accord, vous pensez que ça passerait vite, il n'y aurait pas beaucoup de discussions. On est convaincus. Dans le débat, les libéraux essaient de se dégager de la paternité de l'affaire puisqu'ils disent: Nous autres, ce n'est pas parce qu'on veut ça plus particulièrement. Sauf quelques-uns. J'ai vu le député de Verdun, oui, je me rappelle, le député de Verdun a dit que, lui, il voulait ça expressément. Je me rappelle d'avoir entendu l'enregistrement de sa convention, à M. le député de Verdun. Il expliquait aux citoyens qui ne voulaient pas l'avoir comme candidat, il leur disait - ça a été enregistré et ça a passé tel quel à Radio-Canada: Que vous le vouliez ou non, je serai votre candidat parce que mon chef a dit que c'était moi, le candidat; que vous le vouliez ou non. Et ça a passé tel quel aux nouvelles, je l'ai entendu. Je l'ai entendu, je n'en revenais pas. Je n'avais jamais entendu parler d'une affaire comme ça.

Une voix: II a été élu pareil.

M. Garon: II n'a pas été élu, il a été nommé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: II a été nommé. Il disait aux gens avec la même voix que je l'ai entendu dire au Parlement: Ça va être un mercredi, la fête du Canada. L'air un peu enragé, dire: Vous allez y goûter!

Une voix:...

M. Garon: Bien, il disait aux militants libéraux qui étaient dans la salle: Que vous le vouliez ou non, militants libéraux, c'est moi qui serai votre candidat. Que vous le vouliez ou non! Bien, nous autres, on n'aime pas une société bâtie comme ça. Nous autres, on n'aime pas...

Une voix: Les électeurs...

M. Garon: II y a des masochistes partout.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Alors, essentiellement, ce que je veux dire, je ne voudrais pas qu'on attribue faussement une paternité au Mouvement Desjardins, en essayant de se déguiser en courant d'air sur le plan de la responsabilité pour essayer de la passer à une autre. On a vu, dans les discours à l'Assemblée nationale, des députés libéraux qui disaient: Ah! mais ce n'est pas nous autres; nous autres, ça ne nous fait rien que ce soit une longue fin de semaine, mais c'est le Mouvement Desjardins qui dit ça, ça fait son affaire dans ses affaires bancaires parce que les banques seraient ouvertes en même temps que les banques de Calgary, les banques d'Edmonton, les banques de Winnipeg... Parce que, si on va voir les montagnes Rocheuses...

Une voix: Les banques à grain donner le 4 juillet.

M. Garon: Moi, j'ai dit: Là, c'est déconnecté. Je vais vous dire une chose: ça, c'est vraiment le confort des banques, on est mieux d'avoir notre fête le 4 juillet. On fait bien plus affaire avec les États-Unis et on va faire bien plus affaire avec les États-Unis dans l'avenir qu'avec Regina. Il faut manquer d'imagination que de dire: On s'en va à Regina. J'ai été dans beaucoup de conférences fédérales-provinciales, je vais vous dire une chose: à Regina, les gens arrivaient le matin même et repartaient le soir même.

Une voix: Ah oui?

M. Garon: Ce n'est pas un endroit touristique ou un endroit où il y a grand-chose à faire, à Regina. M. Romanow vient de là. C'est pour ça qu'il aime ça parler de la Constitution comme ça, il n'y a rien d'autre à faire. Ça suppose que sa lecture, le soir, c'est de lire la Constitution, parce qu'à Regina, comprenez-vous, l'avenir est sûrement... À moins que le gouvernement libéral nous dise: Maintenant, on a signé le libre-échange, mais l'avenir, vous autres, c'est dans l'Ouest; c'est à Regina, l'avenir. Moi, je ne sais pas, j'ai pensé que notre avenir serait plutôt avec New York, avec Philadelphie, avec Boston, avec Chicago. Mais, eux autres, ils disent: Non, non, on vous ramène dans le droit chemin: Regina, Moose Jaw. Moose Jaw, moi, j'ai su que ça existait parce qu'on donnait toujours la météo de Moose Jaw, au Canada. Quand j'étais petit gars, on disait toujours quelle température il ferait à Moose Jaw.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: II y en avait un autre, ...Current, je ne me rappelle pas...

Une voix: Swift Current.

M. Garon: Swift Current. Je ne sais pas où c'est exactement, Swift Current, mais je sais quelle température il faisait, je l'ai su pendant des années. À tous les jours, on nous disait: À Swift Current, telle température; à Moose Jaw, telle température. On avait de la misère à savoir quel temps il ferait chez nous le lendemain.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: M. le Président, le député de Lévis oublie Medicine Hat. Medicine Hat.

M. Garon: Non, Medicine Hat n'était pas dans les... Ils ne le disaient pas, ils ne donnaient pas la température à Medicine Hat.

M. Bourbeau: Ah! ils ne le disaient pas? Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Marcil): II vous reste deux minutes, M. le député de Lévis.

M. Garon: Alors, M. le Président... Une voix: Laissez-le aller.

M. Garon: ...vous comprendrez que l'avenir, j'en suis persuadé, est beaucoup plus au Sud que dans l'Ouest, dans le libre-échange, et de dire qu'on veut se connecter avec les banques de l'Ouest, surtout, je vais vous dire une chose, je pense qu'on serait mieux de ne pas trop être connectés avec eux autres. Vous avez vu les deux qui ont fait faillite, qui nous ont coûté une fortune? On a payé à 100 %, sans pleurer, parce qu'on est toujours un peu masochistes au Québec. On a payé les deux banques. Ça nous a coûté combien d'argent? 1 500 000 000 $?

Une voix: Mets-en.

M. Garon: On a payé pour les banques de l'Ouest. Je pense qu'on va être plus en sécurité si on n'est pas trop connectés.

Le Président (M. Marcil): En conclusion, M. le député.

M. Garon: M. le Président, je pense qu'il faut absolument voir le Mouvement Desjardins - c'est pour ça, la motion - pour qu'on n'attribue pas faussement à M. Béland et au Mouvement Desjardins une demande, que les gouvernements font, que les députés ministériels font, que le gouvernement veut faire, do priver les citoyens d'une longue fin de semaine, en vertu du projet de loi qu'il présente devant nous. Je voudrais que M. Béland puisse, avec tous ceux du Mouvement Desjardins qui voudront venir avec lui, nous dire ce qu'ils veulent exactement, en respectant le discours à la basilique de Québec où M. Béland disait à la face du Québec...

M. Bourbeau: Le discours de Notre-Dame.

M. Garon: ...qu'il faut ajuster les machines aux êtres humains plutôt que les êtres humains aux machines.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député. C'est la grâce que nous nous souhaitons tous. Nous avons entendu parler de la température à Moose Jaw, sauf qu'on n'a jamais entendu parler de la température le 1er juillet, chez nous.

Maintenant, est-ce qu'il y a un membre du parti ministériel qui veut intervenir?

Une voix: Mme Cardinal? Mme Loiselle?

Le Président (M. Marcil): Vous avez un mot à dire, M. le ministre? (12 heures)

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Je suis très heureux de voir la façon dont les travaux progressent ce matin, M. le Président. J'espère qu'on va pouvoir arriver à l'article 1 avant l'heure du midi, qu'on en est à la dernière motion préliminaire et, j'espère aussi, au dernier intervenant sur cette motion-là, ayant conclu que les députés de l'Opposition sont tout à fait disposés à discuter du projet de loi lui-même. Étant donné, M. le Président, comme vous le savez, que la session achève, je suis convaincu qu'on va bientôt revenir à des préoccupations un peu plus sérieuses.

D'autre part, M. le Président, je ne pense pas que nous soyons nécessairement en train de perdre notre temps, parce que, comme le disait Emile Zola, «Un Parlement qui discute est un Parlement qui travaille», alors...

Une voix:...

M. Bourbeau: Mais, par contre, M. le Président... Ce n'est pas tout à fait exact. Je reviens à ce que j'ai dit, je reviens à ce que j'ai dit. Je pense que, plutôt, on est en train de perdre notre temps parce qu'on ne discute pas présentement, on monologue. Alors, pour discuter, il faudrait que, de part et d'autre, il y ait des discussions constructives. Alors, ce n'est pas très constructtf, ce qui se passe présentement, M. le Président.

Alors, pour ne pas faire en sorte de prolonger indûment les débats sur la motion préliminaire, quant à moi, je serais disposé à passer à l'article 1. Si d'autres députés de l'Opposition veulent continuer, M. le Président, à faire perdre le temps à la commission, on va les écouter avec patience, mais tout en réalisant que notre patience, éventuellement, pourra avoir des limites.

Alors, quant à moi, j'aimerais mieux qu'on commence l'étude des articles 1 à 19, de façon à pouvoir terminer au moins pour ce soir les articles 1 à 19. M. le Président, vous savez qu'on est convoqués jusqu'à 18 heures, donc ça nous laisse à peu près encore quatre heures de débat.

II me semble que c'est suffisant pour faire 19 articles.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et député de Laporte. Maintenant, je vais reconnaître, pour une question, M. le député de Mas-son.

M. Blais: Je voulais tout simplement remercier le ministre de son monologue.

Le Président (M. Marcil): Donc, je vais reconnaître maintenant Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Bien sûr que je pense tout à fait appropriée la motion que nous avons déposée, puisque la lettre de M. Claude Béland nous a été plus qu'autrement servie, que ce soit dans des discours à l'Assemblée nationale ou ici, en commission parlementaire. En fait, ça devenait uniquement le livre de référence et, à certains égards, j'avais presque l'impression que c'était la bible du Parti libéral en ce qui concerne ce projet de loi, M. le Président, en fait qui reposait sur... la lettre de M. Claude Béland. À cet égard, M. le Président, j'aimerais vous dire à quel point tout ce qui a été documents bibliques ou, en tout cas, religieux, ou diktats des évêques, à quel point ça a été dangereux pour nous comme Québécois, et c'est ça qui a fait en sorte qu'on a eu de la difficulté au niveau de notre histoire à nous développer dans le cours normal des choses, M. le Président. Alors, il ne faudrait pas qu'on retombe dans le même piège. Il ne faudrait pas en faire un écrit episcopal, ou de ce genre, ou de style littéraire de cet ordre, M. le Président. Bien au contraire, il faut le prendre comme étant une suggestion parmi d'autres et une réflexion parmi d'autres, M. le Président. Et ça ne représente en rien, en fait, parce que c'est le seul que nous avons, nous n'avons aucun autre texte, c'est le seul texte que nous avons qui fait état d'une telle façon de procéder et qui met en cause, même, certaines façons de faire les affaires et qui demande une harmonisation, si vous voulez, avec le reste du Canada en ce qui concerne l'ouverture, les heures d'ouverture des banques pour la fête nationale du Canada.

Je sais qu'il n'y a pas si longtemps on parlait des heures d'ouverture. On a même déjà eu un projet de loi sur les heures d'ouverture, on parlait de la possibilité d'ouverture le dimanche, ou ces choses-là, et on n'a jamais parlé de la fête du 1er juillet, en tout cas que ça pouvait mettre en cause... où les heures d'ouverture pouvaient mettre en cause nos rapports avec différents commerces du reste du Canada, M. le Président. C'est la première fois, en fait, qu'on a un texte qui remet en cause notre capacité de transiger, de faire des affaires avec les autres provinces du Canada, M. le Président Je trouve ça assez particulier, d'autant plus que la majorité des caisses Desjardins ne sont jamais ouvertes le samedi, et je pense que c'est peut-être aussi un des problèmes des caisses populaires. Peut-être qu'elles auraient avantage aussi à ouvrir les fins de semaine. En tout cas, je ne le sais pas, mais...

Une voix:...

Mme Vermette: Pardon?

Une voix: Les guichets automatiques.

Mme Vermette: Les guichets automatiques, oui, mais, pour faire des transactions de tout autre ordre, le guichet automatique est toujours assez limité. Mais, en fait, de plus en plus, au niveau du système bancaire, on sait fort bien que les banques sont ouvertes le samedi et favorisent certaines transactions financières pour les gens qui travaillent, justement.

Donc, à mon avis, quant à moi, c'est un faux problème que d'apporter cette lettre-là comme étant un des éléments majeurs, une pièce à conviction majeure, en ce qui nous concerne, au niveau du projet de loi 21, M. le Président. Je regardais, parce qu'on oublie souvent l'histoire, on disait: L'honneur n'abdique point. Nul n'a le droit de me prendre ma liberté, mon bien, mon ciel bleu, mon amour. Tout l'univers aveugle est sans droit sur le jour. Fût-ce 100 000 000 d'esclaves, je suis libre. C'est Victor Hugo qui disait cette chose.

Alors, la proclamation royale date du 24 mai 1867 et l'entrée en vigueur est le 1er juillet. On consacrait le nouveau dominion. Je peux vous dire comment ça a été introduit. C'est qu'en principe c'est vraiment l'Église qui était derrière cette reconnaissance et, au niveau de la presse écrite du Québec uni, parce qu'à l'époque, en 1867, on parlait du Québec uni, c'est la presse religieuse qui était omniprésente et faisait en sorte que les Québécois, les Canadiens français, parce qu'à l'époque, on les appelait les Canadiens français, devaient reconnaître de facto cette proclamation de la Confédération et du 1er juillet, M. le Président.

Alors, on se souvient très bien de certains diktats de certains évêques, et je voudrais vous en lire une partie, M. le Président. Alors, l'archevêque de Québec, Mgr Charles-François Baillargeon, qui a publié le 12 juin 1867 et qui disait: Comme l'union fédérale qui vient de s'opérer, écrit-il, émane de l'autorité légitime, vous la regarderez comme votre loi et vous obéirez à l'ordre de Dieu en l'acceptant en toute sincérité.

M. Garon: M. le Président, j'aimerais écouter la députée de Marie-Victorin. M. le Président...

Mme Vermette: M. le Président. M. Garon: M. le Président... Le Président (M. Marcil): Oui.

M. Garon: II y a tellement de conversations et ça parte tellement fort; la députée de Marie-Victorin est à cinq pieds de moi et j'ai de la misère à l'entendre. Elle fait un discours important; j'aimerais qu'on puisse entendre son discours. Ceux qui veulent parler peuvent aller parler dans le corridor. Je ne veux pas empêcher les gens de se dire un mot ici et là, mais là, quand il y a cinq, six questions dans la conversation d'engagées et tellement fort qu'on n'entend plus rien, ça ne marche pas.

M. Bourbeau: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Effectivement, je dois dire que la députée de Marie-Victorin est en train de prononcer un excellent discours d'une qualité supérieure quant au fond et quant à la forme aussi. Je dois dire que moi-même, j'avais un peu de difficultés à l'entendre. Évidemment, il y avait le député de Masson devant moi qui était en conversation avec sa voisine, puis ça créait un bruit de fond. Alors, j'abonde dans le sens du député de Lévis, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): c'est bien, m. le ministre. donc, je demanderais la collaboration de tous mes collègues de cette commission parlementaire. nous allons continuer à entendre le discours très intéressant de mme la députée de marie-victorin.

Mme Vermette: M. le Président, je peux vous dire que je suis tout à fait heureuse d'entendre les propos du ministre, parce que, s'il continue à nous écouter de cette façon-là, je suis convaincue qu'on va pouvoir arriver à une entente d'ici la fin de nos travaux et, sûrement, nous allons laisser tomber, en fait, la partie qui, pour nous, cause problème, M. le Président.

J'étais en train de dire et j'étais en train de vouloir faire la démonstration qu'il faut faire attention dans certains écrits et qu'il ne faut pas surtout les considérer comme des diktats religieux, parce que ça pourrait nous causer des problèmes. J'étais en train de vous faire une démonstration, comment avait réagi à l'époque le clergé, et surtout l'archevêque de Québec qui disait, le 12 juin 1867: Comme l'union fédérale qui vient de s'opérer, écrit-il, émane de l'autorité légitime, vous la regarderez comme votre loi et vous obéirez à l'ordre de Dieu en l'acceptant en toute sincérité. Bientôt, vous serez appelés à choisir ceux qui, soit dans le Parlement fédéral, soit dans le Parlement local, devront travailler à mettre en pratique la nouvelle Constitution. Vous vous garderez donc de donner vos voix à des hommes disposés à la combattre ou même à mettre des entraves à son fonctionnement.

Une voix: C'est effrayant!

Mme Vermette: Mais, aujourd'hui, ajoute Mgr Baillargeon, la discussion n'est plus possible, la loi est promulguée. L'oeuvre de l'autorité doit être respectée. Refuser de s'y soumettre, ce serait renverser l'ordre établi par Dieu et résister à sa volonté, ce serait marcher à l'anarchie, à la trahison, à la révolte et à tous les maux qui s'ensuivent.

C'est peut-être pour ça, M. le Président, que, très souvent, on nous dit qu'on est intolérants, nous, de notre côté, parce que, finalement, on remet en cause certains propos de cet ordre-là et, quand on regarde un peu plus loin, on dit: Peut-être que la liberté a une autre saveur, une autre odeur et une autre dimension, M. le Président. (12 h 10)

Et le grand adversaire des démocrates, Mgr Bourget, ordonne des prières publiques, le 25 juillet 1867, à l'occasion de l'établissement du régime confédératif. Dans sa lettre pastorale, il expose la ligne de conduite traditionnelle de l'Église à l'occasion des changements de régime, M. le Président.

Par ailleurs, et on allait plus loin, et c'était dans un des courriers... Le Courrier de Saint-Hyacinthe claironnait, M. le Président, en 1867: La grande ferveur de l'épiscopat à l'endroit de la Confédération ne plaît pas à tout le monde. Les commandements des évêques de la province sur la nouvelle Constitution, écrit le Journal des Trois-Rivières le 19 juillet 1867, n'ont pas été entièrement au goût des anticonfédérés. La preuve, c'est que - écoutez ça, M. le Président, je suis convaincue que le ministre va être très intéressé par ça... On disait que cette attitude du clergé à faire un acte de foi vis-à-vis la Confédération... On inscrivait, dans le Journal des Trois-RMères à l'époque: La preuve, c'est que pas une famille libérale n'a daigné reproduire ces importants documents émanés des plus hautes autorités religieuses du pays. Les écrits remarquables portaient trop le cachet de la vérité et du désintéressement pour pouvoir orner les colonnes des journaux de la démocratie, M. le Président.

Et, au nom de cette démocratie, M. le Président, je pense qu'il aurait été important d'entendre Claude Béland, parce que je considère que cet homme-là doit être un être très respectueux de la démocratie, M. le Président. Et le

respect de la démocratie demande qu'on consulte et qu'on se plie aux voeux de la majorité. Pour nous, comme Québécois, notre choix est fait, et c'est une seule fête nationale, et c'est la fête nationale des Québécois.

Le Président (M. Marcil): merci beaucoup, mme la députée de marie-victorin. maintenant, je vais entendre mme la députée des chutes-de-la-chaudière, pour 10 minutes.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président. Moi aussi, je vais appuyer la motion de mon collègue, le député de Lévis, à l'effet que ce serait intéressant d'entendre le Mouvement Desjardins, le président du Mouvement Desjardins, M. Béland, signataire, n'est-ce pas? de la lettre qu'on a en face de nous ce matin. On pourrait jaser de beaucoup de choses avec M. Béland, entre autres...

Des voix:...

Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît, je demanderais l'écoute de tous les députés.

Mme Carrier-Perreault: On pourrait discuter, entre autres, de la lettre, la seule lettre qu'on a devant nous, devant les yeux, où il y a une demande, effectivement, qui a été faite, mais, disons, il faut s'entendre sur la nature de la demande. Quand on nous dit que le Mouvement Desjardins a demandé cette disposition-là telle qu'elle est écrite dans la loi, bien, là, il y a quand même un monde. Là, on l'a devant les yeux, M. le Président. Enfin, on a le texte, nous autres aussi, de la demande officielle. J'imagine que c'est la seule demande qui a été faite...

Des voix:...

Le Président (M. Marcil): Allez-y, madame.

M. Blais: Je m'excuse auprès de...

Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît!

M. Blais: Je m'excuse humblement, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): C'est ça, je demanderais...

M. Blais: C'est parce que, vu que je suis celui qui est censé s'occuper de cette loi-là avec le groupe, je m'excuse auprès de ma consoeur, c'est qu'on a eu une petite entente, le ministre et moi, puis on a dérangé un peu le discours très important que vous faites, et je m'en excuse très humblement.

Mme Carrier-Perreault: Est-ce que vous avez eu une petite entente sur le fond, cher collègue?

M. Blais: Non, non. Je lui ai dit qu'on ne commençait pas l'article 1 avant ce soir. Aucune...

Mme Carrier-Perreault: Bien, là... Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Qu'on avait beaucoup de choses à dire.

Mme Carrier-Perreault: Bien, ce serait intéressant si on rencontrait le Mouvement Desjardins, peut-être qu'on pourrait avoir des éclaircissements. Étant donné que c'est le seul document qu'on a qui nous démontre que, peut-être, il y a eu un semblant de demande... Comme je le disais, M. le Président, quand on prend connaissance du document, on se rend compte que ce que le ministre fait, ça ne va pas du tout dans le sens de ce que Desjardins demandait, de ce que M. Béland demandait. En fait, ça peut peut-être arriver aux mêmes conditions, mais le ministre l'étend drôlement, M. le Président. Le ministre, lui, en fait une condition pour tout le monde, tout le monde va prendre ça, alors que Desjardins... Même à ça, M. Béland, dans sa lettre, nous donne même une façon, en fait, de demander un amendement, effectivement, demander un amendement au ministre, parce que chez Desjardins il y a des caisses, il y a des fédérations qui ont des politiques de conditions de travail, des politiques internes. Il y en a d'autres aussi qui ont des conventions collectives, bien sûr. Mais les conventions collectives, ce n'est pas là qu'il y a vraiment un problème parce que l'article 59.1, dans la Loi sur les normes du travail - là, je suis un petit peu plus technique, M. le Président, mais je pense qu'il faut dire les choses comme elles sont... À l'article 59, on a déjà prévu qu'il y avait des possibilités pour les gens qui avaient des conventions collectives et/ou un décret d'aménager ce genre de congé, de jour férié. Desjardins, ce qu'il demande, à toutes fins pratiques, c'est de faire un amendement à cet article-là pour qu'on puisse retrouver les mots «de ses conditions de travail», compte tenu que, dans certains des établissements, chez Desjardins, on n'a pas de convention, on a uniquement des politiques de conditions de travail.

Alors, ce serait intéressant de pouvoir en discuter et d'entendre M. Béland s'exprimer là-dessus, parce que le ministre, ce qu'il fait, ce n'est pas du tout la demande de Desjardins. S'il avait corrigé, peut-être que là il aurait pu satisfaire les gens du Mouvenent, en tout cas leur donner une latitude. Mais là le ministre, par le biais de son projet de loi, il dit: Ce qui est

bon pour Desjardins - dans certains cas, parce qu'il y en a qui étaient protégés, comme je vous le disais, chez Desjardins, ceux qui ont des conventions collectives avaient des possibilités de réaménager... Mais là il dit: Ce qui est bon chez Desjardins, ça va être tout le monde qui va l'appliquer pareil; qu'il y ait des politiques de conditions de travail ou pas, tout le monde va marcher pareil, ça va être le 1er juillet que ça va se fêter; que tu sois commerçant, que tu aies n'importe quel établissement, c'est exactement ça, on va faire du 1er juillet un jour férié pour tout le monde, un genre de fête nationale. C'est comme ça. C'est pour ça qu'on dit que le ministre est en train, à toutes fins pratiques, de créer une deuxième fête nationale.

Bien sûr qu'il ne fera probablement pas d'arrêté en conseil, comme ça a été le cas pour la Saint-Jean-Baptiste. On se rappellera qu'il y a eu un arrêté en conseil quand on a décidé qu'au Québec il y avait une fête nationale, que c'était la Saint-Jean-Baptiste. Dans ce cas-ci, dans le cas qui nous concerne, il n'y aura pas de ça. Il n'y aura pas, non plus, de grande déclaration, de discours important là-dessus, mais, par le fait même, la façon dont on va aménager cette journée de congé... Et j'entendais, justement, hier soir, le député de Nelligan, parce que, si, dans la tête du ministre, ce n'est pas une fête nationale, le député de Nelligan, hier soir, a dit que c'était une fête nationale, pour son monde, chez lui.

M. Williams: Moi?

Mme Carrier-Perreault: Oui, vous, M. le... Oui, lui, M. le Président. Lui. Hier soir.

Disons qu'on peut très facilement voir que ça donne une espèce de même effet. C'est le même effet, puisque ça va être pris par tout le monde de la même façon, alors que le décret, lui, avait prévu que ça se fêterait le 29 juillet... le 29 juin, pardon, c'est une erreur, le 29 juin, et que le ministre avait même dit que ce serait la fête des déménagements. Alors, on passe à la fête du Canada officialisée, officielle, et ce n'est pas tout à fait ce que Desjardins demandait, non plus. J'espère, je ne sais pas, je vois que le député n'a probablement pas reçu la copie. On a eu l'honneur d'avoir la copie de la lettre de M. Béland, ce matin. Alors, nous, de notre côté, on aimerait bien rencontrer, effectivement, les gens du Mouvement Desjardins, on aimerait bien que M. Béland vienne s'exprimer, qu'on puisse discuter avec lui.

Écoutez, M. le Président, dans ce genre de lettre, M. Béland doit avoir, doit vivre, à toutes fins pratiques... Moi, j'aurais aimé ça savoir comment il vivait ça, le 24 juin. Voyez-vous? Le 24 juin, c'est la fête nationale du Québec. Les établissements sont fermés ici; les établissements bancaires dans le reste du Canada fonctionnent. Il est obligé de fermer ses établissements, M.

Béland; les caisses ferment le 24 juin. C'est une fête nationale au Québec et c'est une fête qui n'est pas reconnue ailleurs. Alors, est-ce que ça lui crée des problèmes, à ce moment-là, quand il est obligé de fermer une journée quand les autres continuent de fonctionner? Comme mon collègue de Lévis disait tantôt, avec la libéralisation des échanges et tout ça, ces gens-là doivent faire affaire de temps en temps avec les organisations financières, si on veut, les institutions financières américaines. Qu'est-ce qui arrive le 4 juillet? Le 4 juillet, c'est la fête nationale des États-Unis. Alors, on va avoir des problèmes tantôt, M. le Président, s'il faut tenir compte de toutes les fêtes qui se fêtent un peu partout, autour, juste pour ajuster nos normes du travail et, en plus, les imposer à tout le monde. Les commerçants ne feront pas d'affaires avec les établissements bancaires, à ce que je sache. Ils préféreraient garder leur congé pour allonger la fin de semaine. Ça a été dit. Le Conseil du patronat l'a déjà dit. (12 h 20)

II y a cette possibilité que les caisses, en fait, que M. Béland apportait, d'amender l'article pour laisser une plus grande marge de manoeuvre à ceux qui avaient des politiques de gestion, des politiques de conditions de travail établies, parce que c'est déjà écrit. Quand on regarde l'article 59.1 dans la Loi sur les normes du travail, la possibilité existe pour d'autres catégories. On dit, et je le cite: «La présente section ne s'applique pas à un salarié qui, en vertu d'une convention collective ou d'un décret - et, là, Desjardins demandait qu'on ajoute «ou de ses conditions de travail»; c'est ça qu'ils ont demandé au ministre - bénéficie d'un nombre de jours chômés et payés, en sus de la fête nationale, au moins égal au nombre de jours auxquels ont droit ceux à qui la présente section s'applique; la présente section ne s'applique pas non plus à un autre salarié du même établissement qui bénéficie d'un nombre de jours chômés et payés, en sus de la fête nationale, au moins égal à celui prévu dans cette convention ou ce décret.» M. Béland a écrit ça, effectivement, au ministre. Il demandait un amendement en vue de pouvoir appliquer ses politiques, et le ministre, lui, a décidé d'en faire une loi pour tout le monde. La règle générale est de fêter la fête du Canada et tout le monde va fêter cette année le 1er juillet, en même temps.

Alors, M. le Président, vous me faites signe que mon temps est terminé. En conclusion, je pense qu'on aurait eu effectivement beaucoup de questions et qu'on aurait eu intérêt... en tout cas, on aurait intérêt à rencontrer les gens de l'institution en question pour pouvoir clarifier certains points et essayer de faire comprendre au ministre que ce qui est écrit dans la lettre, ce n'est pas du tout ce que lui veut nous imposer. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup,

Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Shefford.

M. Williams: Ah!

Le Président (M. Marcil): Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Est-ce qu'on fait l'alternance ou...

Une voix: Oui, absolument. Oui, oui.

Le Président (M. Marcil): Si vous voulez intervenir, vous me l'indiquez. Est-ce que vous avez quelque chose à dire sur la fête du Canada?

M. Williams: Oui, ce n'est pas nécessairement sur la fête du Canada. Je pense qu'on discute...

Le Président (M. Marcil): Sur la motion, justement, là.

M. Williams: ...de la motion... Une voix: D'inviter M. Béland.

Le Président (M. Marcil): Sur la motion préliminaire à l'effet d'inviter M. Béland.

M. Williams: ...d'inviter M. Béland.... Une voix: ...des Caisses populaires.

M. Williams: ...ou ne pas inviter le Mouvement Desjardins, si j'ai bien compris la motion.

M. Garon: D'autant plus qu'il doit être avec M. Bourbeau lundi.

M. Bourbeau: Oui, absolument.

M. Garon: Alors, ce serait facile de l'inviter. Il n'aurait pas besoin de faire deux voyages.

M. Bourbeau: Je transmettrai l'invitation de la commission...

Le Président (M. Marcil): Ça va? M. Bourbeau: ...si on siège encore...

Le Président (M. Marcil): Vous voulez intervenir, M. le député de Nelligan?

M. Williams: Oui, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Nelligan, pour 10 minutes.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Juste avant, c'était tellement un compliment que la députée des Chutes-de-la-Chaudière me faisait de citer mon interprétation de l'article de la loi. C'est aussi important pour elle qu'elle l'ait mentionné. Hier soir - on pourra citer le Journal des Débats plus tard - mais, hier soir, je pense, j'ai dit et j'ai voulu clarifier, si ce n'est pas clair, que, certainement, pour moi, le 1er juillet, chaque année, c'est la fête du Canada. C'est clair et net. Toujours. Et je pense que, si on veut fêter d'autres choses le 1er juillet, nous sommes tous «libéral», avec un petit «I», et on peut certainement utiliser d'autres mots, si vous voulez.

Selon l'article de loi, certains n'ont pas de congé férié. Mon interprétation de ça, c'est que ce n'est pas légal. Quand je parle avec tout le monde dans mon comté - le député de Shefford, hier soir, parlait de son comté - dans mon comté nous avons toujours pensé que le 1er juillet était la fête du Canada. C'est une fête panca-nadienne. C'est une nation, c'est un pays. Si quelqu'un veut appeler ça «fête nationale», ce n'est pas plus que ça. J'espère que, dans un pays démocratique, libre et ouvert, on peut avoir des titres différents d'une fête. Encore une fois, on met beaucoup de temps sur des débats de mots. Comme je l'ai mentionné hier soir, M. le Président, on met beaucoup de temps sur un débat, à savoir: Est-ce que nous allons avoir ce congé férié le lundi ou le mercredi cette année?

En Chambre, juste avant, nous avons eu un débat sur le projet de loi 9... 15, excusez-moi. Le projet de loi 9, c'était Santé et Services sociaux. J'ai mentionné que je trouve ça dommage que nous ayons mis des heures et des heures, des journées et des journées, sur un article qui va changer un congé férié du lundi au mercredi, et nous n'avons pas mis la même importance sur un débat de fond, c'est mon opinion, sur notre système de santé et de services sociaux.

En tout cas, encore une fois, je pense que c'est assez clair. J'ai eu la chance de lire la lettre de M. Béland. Je pense que sa perspective sur un point est assez simple, c'est assez clair. 11 a dit tout ce qu'il avait besoin de dire. nous sommes très occupés par d'autres choses. il est un homme très occupé. j'ai eu la chance de travailler avec lui durant la commission bélan-ger-campeau. je pense qu'il suit toutes ces questions avec toute la compétence. je pense que, dans une lettre de deux pages sur un article, c'est bien clair. jusqu'à date, je ne suis pas convaincu que nous avons besoin d'inviter ce monsieur, de discuter le point qu'il a déjà soulevé dans une lettre. encore une fois, j'espère, m. le président, qu'on pourra avancer sur la discussion de cette loi et passer cette loi, parce

que je souhaite, avant la fin de cette session, qu'on puisse avoir le débat de fond, un débat substantiel sur le bien-être des Québécois et des Québécoises. Merci beaucoup.

Le Président (M. Marcil): merci beaucoup, m. le député de nelligan. maintenant, je vais reconnaître m. le député de shefford, pour 10 minutes.

M. Roger Paré

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Vous allez comprendre que je suis d'accord avec la motion de mon collègue de Lévis. Le projet de ioi qu'on discute, on l'a dit et on va le répéter, ça n'a pas été demandé, il n'y a pas eu de pétition, il n'y a pas eu de mouvement de foule, il n'y a pas eu de demande intensive ou de demandes regroupées par rapport à un changement semblable. Mais, de l'autre côté, on utilise comme argument, et comme seul argument, même si, nous, on sait très bien que ce n'est pas ça qu'ils font, et c'est vrai qu'on va en profiter, avec le temps qu'il nous reste, au cours des prochaines semaines, pour en faire un débat de fond sur les modifications qu'on va amener qui sont des modifications politiques... Mais le seul argument qu'on utilise pour le justifier, c'est la demande de M. Béland. Si c'est le seul argument favorable qu'on a, comment peut-on se permettre de refuser qu'on l'entende? Comment peut-on se permettre de le citer, de l'utiliser, de l'interpréter? Je dois vous dire que ce serait bien plus facile de l'écouter et de le questionner, puis c'est la logique même. Si c'est votre argument, j'aimerais ça l'avoir, M. Béland, pour l'entendre et le questionner, échanger avec lui. Parce que c'est M. Béland, au départ, et on connaît le respect qu'il a pour les Québécois, on connaît les visions qu'il a pour le Québec. Il est très intéressant. Et ce qu'il représente, c'est suffisamment important pour qu'on puisse l'entendre.

Vous savez, le Mouvement Desjardins, les caisses populaires Desjardins au Québec, c'est extraordinaire comme Mouvement. Je suis convaincu qu'il n'y a pas un député qui, à un moment donné, n'a pas l'occasion d'aller dans une caisse, à une fête quelconque, à une cérémonie, par les caisses populaires, et ils ne sont pas là pour louanger le Mouvement Desjardins, dire à quel point on est contents de les avoir... Ça fait partie des fiertés collectives québécoises d'avoir le Mouvement coopératif Desjardins. C'est par dizaines de milliards, son chiffre d'affaires; c'est par dizaines de milliers, les employés; et les sociétaires, c'est quasiment les trois quarts, sinon un peu plus, des Québécois qui adhèrent au Mouvement des caisses populaires Desjardins.

Et pourquoi doit-on les écouter et pourquoi est-ce si populaire? On ne les appelle pas «caisses populaires» pour rien, c'est vraiment populaire, c'est une coopérative d'épargne, mais c'est populaire dans le sens qu'elles ne peuvent pas faire autrement que d'avoir la sensibilité, la capacité de comprendre et de s'adapter, comme institution, à leur milieu, puisque les conseils d'administration, c'est des bénévoles issus du milieu. C'est ce qui fait que les caisses populaires sont si près des gens, si capables de s'adapter, capables de répondre aux besoins. Regardez l'évolution et vous allez vous apercevoir qu'à mesure qu'elles ont grossi elles ont été à même de s'adapter à la réalité québécoise et même, à plusieurs occasions, et spécialement maintenant, comment dirais-je, de stimuler le développement local et régional. Pourquoi? Parce que c'est les gens du milieu qui gèrent cette fortune milliardaire qu'est l'actif des caisses populaires. Bravo à ces gens-là, bravo au Mouvement, qui sont bien représentés par tous les bénévoles au niveau des conseils d'administration et par un personnel compétent, mais aussi par un représentant qui est à l'honneur du Mouvement Desjardins, M. Béland. (12 h 30)

Qu'on se cite, nous, les députés, qu'on se dise qu'on s'est mal interprétés, que ce soit en commission ou à l'Assemblée nationale, c'est une affaire. Mais qu'on se permette de citer quelqu'un d'autre et de l'interpréter, quelqu'un de l'extérieur, qui n'est pas du monde politique, je dois dire, de temps en temps, je trouve que c'est un peu irrespectueux. On n'a pas à interpréter les paroles des gens. Tout simplement, si on n'est pas capables de se mettre d'accord ou si on veut utiliser leur nom et leur discours ou leur lettre, bien, au lieu de les utiliser, qu'on les invite. Je suis convaincu, connaissant M. Béland, qu'il accepterait de venir ici, même à quelques jours à peine d'avis. La preuve, c'est qu'on apprend que le ministre va être avec lui lundi. Il pourrait l'amener pour que l'échange ne se fasse pas juste à deux, mais se fasse entre M. Béland et les membres de la commission.

Une voix: C'est ça.

M. Paré: La demande de M. Béland, ça n'a pas été de transformer une habitude, une coutume québécoise, absolument pas. Ça a été, par rapport au fonctionnement de l'institution qu'il dirige, qu'on apporte un amendement, une modification à la loi, qui ne vient pas chambarder tout le fonctionnement de la collectivité, de la société, mais un amendement qui va toucher sa société, c'est-à-dire le Mouvement Desjardins. Ce n'est pas la même affaire. C'est complètement différent. Cet empressement qu'on a d'utiliser M. Béland et de même interpréter sa lettre, c'est qu'on veut, justement, se trouver un petit argument justifiant une volonté strictement politique du gouvernement.

Une voix: Un bouc émissaire.

M. Paré: Mais absolument pas de répondre à une demande de M. Béland dans l'esprit et la lettre du contenu de sa demande. Ça, c'est dangereux. Je dois vous dire: comme politiciens, il faut avoir un peu plus de respect des gens à l'extérieur du Parlement, des gens impliqués dans la société, et je trouve qu'on n'agit pas correctement en faisant ça. La façon de se corriger, d'une certaine façon, ou de s'excuser par rapport à M. Béland, ce serait de lui faire ou de nous faire l'honneur de l'entendre ici, en commission. Ce n'est pas compliqué. Ça pourrait ne pas être très long. Ça permettrait de ne pas utiliser M. Béland, mais d'écouter M. Béland. Ce n'est pas du tout, du tout la même chose. Il faut être bien conscients de ça. On l'a, la lettre. Mes collègues ont lu les paragraphes concernant la demande de M. Béland. Je vais vous dire, je n'ai pas l'intention de la relire. C'est clair, c'est net. Ça ne sert à rien de répéter ça. Nous sommes vendredi. Il y a une rencontre lundi. Donc, ça veut dire que M. Béland est déjà disponible d'une certaine façon, puisqu'il va rencontrer le ministre sur autre chose.

Pourquoi n'accepterait-on pas de le recevoir ici et de clarifier une chose? Est-ce que c'est une demande expresse de M. Béland qui fait qu'on va modifier une habitude et une coutume populaires au Québec ou si c'est le gouvernement qui décide de modifier quelque chose pour une orientation et une direction politiques, mais qui utilise M. Béland comme bouc émissaire? Ça, je pense que, comme société, on doit être assez honnêtes et respectueux pour clarifier cette chose-là. Quand on l'aura clarifiée, on aura peut-être bien clarifié autre chose qui nous permettra d'accélérer l'étude du projet de loi comme tel. Mais on se base sur des prémisses qui sont fausses. On se base sur une lettre qu'on interprète de façon fausse, et ce n'est pas correct. On ne doit pas légiférer à partir de fausses prémisses. On ne doit pas interpréter des gens de l'extérieur pour justifier des gestes qui sont décidés ici, qui sont de notre responsabilité à nous, et à nous seulement, et non pas la responsabilité des gens de l'extérieur.

Je comprends que le Mouvement Desjardins est important. Je l'ai dit tantôt, c'est non seulement un mouvement important en termes de capital, d'employés, de services, ça l'est en termes de fierté pour les Québécois. C'est notre institution financière qui est publique, dans le sens que ce n'est pas une institution privée, dans le sens que ce n'est pas public et parapublic gouvernemental. Donc, si on utilise sa lettre, je dois vous dire qu'on devrait l'écouter. Ce n'est pas compliqué. Ce n'est pas long. Je pense que c'est un minimum de respect, et ça va nous permettre de clarifier quelque chose qui n'est pas clair, parce que le débat, quand on cite la lettre, ce n'est même pas sur le fond du sujet ou le fond du dossier qu'on est en train de regarder, c'est sur une interprétation de lettre. On devrait être assez honnêtes pour être clairs, pour clarifier les choses et, si on n'est pas capables juste entre nous, aller chercher le signataire de la lettre et lui demander de nous donner, lui, son interprétation, le fond de la volonté qu'D voulait exprimer par sa lettre, la clarté par rapport à sa demande.

Le Président (M. Marcil): En conclusion, M. le député.

M. Paré: En conclusion, ça voudra dire qu'on n'utilisera pas des boucs émissaires pour légiférer, mais on se basera sur la réalité des choses. C'est pour ça que je suis d'accord avec la motion, on devrait écouter M. Béland en commission.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Shefford. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Masson.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je tiendrais à vous dire, M. le Président, que je viens d'écouter très attentivement les remarques du député de Nelligan. Il a eu un discours bref et élégant, et je crois que ses confrères en étaient très contents. C'est sûr que c'est à prendre avec des gants blancs lorsqu'il y a bataille entre deux Parlements. Il s'est plaint de notre tactique, mais il faudrait qu'il sache que c'est un régime britannique. Dans les cas où on discute pour perdre son temps, c'est l'essence propre de notre Parlement.

C'est bien sûr qu'on est là, on parle et on tergiverse, mais nous avons là un cas d'espèce, et je ne voudrais pas que la façon dont on procède fasse que nos paroles l'excèdent. C'est, pour nous autant que pour vous, quelque chose d'un peu souffrant, mais nous nous plions, et ceci, légitimement, aux procédures et aux règles de notre Parlement. Ce que nous faisons là, nous le faisons en suivant les règlements. Et, sur ça, je mets à caution M. le président. À faire ce que nous faisons en ce moment, il me semble qu'il n'y a là rien de surprenant.

C'est ainsi. C'est bien sûr que c'est un nouveau, le député de Nelligan, mais votre confrère a fait la même chose quand il était dans ce Parlement. Je ne voudrais pas que ceci vous étonne, mais j'ai eu beaucoup de discussions, et j'en ai eu même à la tonne, avec celui qui tenait votre siège, même si l'horloge est arrêtée et qu'on aurait besoin d'un orfèvre.

M. le ministre nous demandait très gentiment si nous passerions bientôt à l'article 1. Je lui réponds très candidement que, pour ma part, il n'en est pas question - on va tomber dans les «on», une «escousse» - il n'en est pas question. Même si ceci...

Une voix:...

M. Blais: Alors, vous savez bien que, si nous faisons obstruction, ça ne prend pas une grande déduction pour savoir que, comme de raison, il faudrait, et je vous l'assure, pour nous fermer, une motion de clôture.

M. Bourbeau: Est-ce que je dois comprendre que le député le souhaite de tous ses voeux? Il l'appelle de tous ses voeux?

M. Blais: Je ne vous dis pas que je la souhaite. J'aimerais plutôt que des amendements soient faits à cette loi que nous étudions, afin d'y apporter des améliorations. Parce que ce que nous demandons, ce n'est pas des choses extraordinaires, c'est tout simplement de rendre le 1er juillet une fête ordinaire. Nous n'avons pas d'objection à ce qu'elle soit fériée.

M. Bourbeau: Est-ce que je peux poser une question au député?

M. Blais: Oh! Allez-y, vous me feriez...

M. Bourbeau: Et si vous aviez le choix entre ne pas recevoir les amendements et une motion de clôture, qu'est-ce que vous préféreriez?

M. Blais: Je n'ai pas compris la question.

M. Bourbeau: Si le choix était une motion de clôture ou aucun amendement, comme vous le souhaitez, qu'est-ce que vous préféreriez?

M. Blais: Bon. Nous insistons pour que l'article 10 et l'article 18 soient retirés de ce projet de loi et, si vous apportiez ces amendements-là, c'est bien sûr que nous, nous passerions immédiatement à l'article 1.

M. Bourbeau: Et si on ne les apporte pas, ces amendements-là? (12 h 40)

M. Blais: Si vous ne les apportez pas, nous allons nous battre comme feux et diables. On sait que c'est vous qui «légifère»; nous allons nous battre de ce côté-ci comme Lucifer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: À vous entendre, je ne crois pas que vous apportiez quelque amendement que ce soit et que nous devrons vivre et vous, vous pourrez vivre avec cette loi.

M. Bourbeau: Oui, absolument. Et on a bien l'intention de vivre avec cette loi, oui. Et les citoyens du Québec, aussi, je crois.

M. Blais: Vous ne voulez apporter à ce

Parlement, à cette loi, aucun changement?

M. Bourbeau: Pas ceux que vous souhaitez voir apporter, en tout cas.

M. Blais: Est-ce que vous voulez nous dire par ceci que vous auriez l'intention d'apporter quelques amendements?

M. Bourbeau: Pour l'instant, non. Mais, si jamais vous nous faisiez la preuve que certains amendements pourraient bonifier la loi, tout en respectant les principes que nous avons invoqués dans la loi... Mais pas les amendements du genre de ceux que vous souhaitez avoir, certainement pas.

M. Blais: Vous comprenez qu'ici il n'y a rien d'étonnant que nous voulions faire venir M. Béland, parce que ce que vous dites en ce moment, pour nous, est un raisonnement d'enfant.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Ce que je comprends, c'est que l'Opposition n'est pas disposée à passer l'article 1 avant... Avant quand, déjà?

Une voix: Avant le 1er juillet.

M. Blais: Nous allons boire le calice jusqu'à la lie.

M. Bourbeau: Est-ce que je dois comprendre que vous n'avez pas l'intention, jamais, de passer à l'article 1?

M. Blais: Nous ne voulons pas que cette loi, telle qu'elle est rédigée, passe à ce Parlement. Nous ne voulons pas, et c'est évident. Nous voulons que la Loi sur les normes du travail passe, mais nous ne voulons pas que les lois nationales, celles du Canada et du Québec, changent de statut. Le statut qu'elles ont actuellement, nous voulons qu'elles restent comme elles sont. Nous voulons qu'elles gardent le même statut: le 24, la fête nationale du Québec; le 1er juillet, une fête fériée et payée. On est complètement d'accord avec ça. Mais on ne veut pas que les dates changent. Nous voulons que ça reste tel que c'est. Pour une fois que nous sommes pour le statu quo, je voudrais que vous nous regardiez sans qu'il y ait quiproquo.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Alors, vous n'apportez aucun amendement, M. le Président?

Le Président (M. Marcil): M. le député de Masson, pour pouvoir commencer à discuter des amendements, il faudrait d'abord appeler l'article 1 et, ensuite, le discuter. Et s'il y avait des

amendements de proposés, à ce moment-là, on pourrait voir. Mais, tant et aussi longtemps que nous n'avons pas terminé les motions préliminaires, moi, je ne peux pas appeler l'article 1. Donc, je vous écoute attentivement.

M. Blais: M. le Président, je comprends bien votre position, mais cette tactique ne nous fera pas tomber, ne fera pas tomber notre façon de nous objecter, parce qu'on peut commencer l'article 1, qu'il n'y ait aucun amendement qui soit suffisant, et, si on nous présentait, avant qu'on arrive à l'article 1, des modifications à l'article 10 et à l'article 18, peut-être qu'on changerait nos positions. Mais, vu qu'on ne veut pas nous les présenter avant, c'est que vous jugez immédiatement que ces amendements ne sont pas suffisants.

M. Bourbeau: M. le Président...

Le Président (M. Marcil): M. le député de Masson, moi, je ne peux pas présumer qu'il va y avoir des amendements à différents articles. Je vais vous entendre, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...je pourrais peut-être clarifier pour le député et dire que le parti gouvernemental n'a pas l'intention de proposer des amendements maintenant ni pendant l'étude du projet de loi quant aux articles 10 et 18. Nous n'avons l'intention d'apporter aucun amendement. Je pense qu'on se doit d'être clairs et honnêtes envers l'Opposition pour qu'elle sache à quoi s'en tenir, bien sûr.

M. Blais: À ce moment-là, j'ai bien l'impression que, si vous voyez notre objection comme un tic, il va falloir que vous ayez un peu plus de tact, parce que votre tactique nous porte à faire continuer à marcher le tic-tac.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Ça va prendre encore combien de temps?

M. Blais: nous allons continuer. nous allons boire le calice jusqu'à la lie et jusqu'à temps que les moyens d'obstruction soient terminés et finis.

M. Bourbeau: Ces moyens-là peuvent durer combien de temps, selon vous?

M. Blais: C'est vous qui en êtes le maître. Nous ne voulons pas que cette loi passe avant la fête nationale du 24 juin. Nous ne voulons pas.

M. Bourbeau: Autrement dit, vous êtes prêts à faire une défense héroïque jusqu'au 24 juin. On est quelle date aujourd'hui, M. le Président? Le 11?

Le Président (M. Marcil): Pardon? Une voix: Le 12.

Le Président (M. Marcil): Nous sommes le 12 juin, aujourd'hui.

M. Bourbeau: Je présume que c'est jusqu'au 1 er juillet, dans le fond.

M. Blais: nous sommes prêts à y aller de toutes nos forces et de toutes nos flammes pour brûler ces articles avec le brandon de la saint-jean.

M. Bourbeau: Et de tous vos mots aussi?

M. Blais: On a quelques mots bien sûr, mais on trouve que c'est déjà un mal et on ne veut pas d'autres mots dans ces lois.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: M. le Président, pour les fins du Journal des débats, c'étaient des mots, m-o-t-s, dont je parlais, bien sûr.

M. Blais: Oui, j'ai écouté sans mot dire.

M. Bourbeau: C'est bien ce que j'ai compris.

Le Président (M. Marcil): En conclusion, M. le député de Masson.

M. Blais: En conclusion?

Le Président (M. Marcil): Oui.

M. Blais: Ça fait déjà 10 minutes que nous nous interjectons?

Le Président (M. Marcil): C'est 8 minutes et 20 secondes de...

M. Blais: Alors, en guise de conclusion, je tiens à dire, M. le Président, que nous sommes dans un système britannique et nous nous sommes acclimatés à ce système britannique. Vous voyez bien qu'on utilise le système britannique pour faire de l'obstruction quand une loi ne nous plaît pas. Nous l'avons fait. Et M. le député de Nelligan nous a rassurés, et j'espère que mes paroles le rassurent. J'aimerais bien, en conclusion, dire directement par votre intermédiaire, M. le Président, au député de Nelligan que le Parti québécois est d'accord que le 1er juillet soit la fête du Canada et nous sommes d'accord que ce soit fêté. Il ne faut pas nous prêter de mauvaises intentions. Ce que nous ne voulons pas, c'est qu'elle soit fixe comme le 24 juin. Qu'elle soit mobile et qu'elle puisse être reportée soit à un lundi ou à un vendredi selon

les ententes qu'il y a entre les travailleurs et leurs différents syndicats ou leurs différents patrons. Cette loi-là va empêcher ça de se faire. La seule qui est empêchée... c'est le 24 juin, comme toutes les fêtes nationales des États où il y a un Parlement souverain. Toutes les fêtes des États ne sont pas mobiles, et nous voulons qu'il y ait une seule fête au Québec qui ne soit pas mobile, c'est le 24 juin. Ce n'est pas un manque de compréhension et de générosité envers ceux qui se disent Canadiens. Sur votre position et sur la nôtre, je pense que les choses sont très claires. Il manque, chacun de notre côté, une tolérance de l'autre, mais nous avons des objectifs différents. C'est tout. Mais je ne pense pas qu'il y ait de mauvaises intentions ni d'un côté ni de l'autre. C'est ce que je voulais dire, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Masson.

M. Williams: M. le Président...

Le Président (M. Marcil): Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: ...est-ce que je peux poser une question de clarification au député de Masson?

Le Président (M. Marcil): M. le député de Masson, est-ce que vous acceptez?

M. Blais: Avec bonhomie.

M. Williams: vous avez juste mentionné que le parti québécois est d'accord que le 1er juillet soit la fête du canada. est-ce que j'ai bien compris?

M. Blais: Oui, oui.

M. Williams: C'est le 1er juillet. Vous avez dit, si j'ai bien compris...

M. Blais: Oui, oui, c'est le 1er juillet.

M. Williams: Je pose la question juste parce que je voudrais être clair aussi.

M. Blais: Si vous permettez, je vais répondre. Oui.

M. Williams: O.K. M. Blais: Oui.

M. Williams: Oui. O.K. Vous avez dit: C'est le 1er juillet...

M. Blais: On a voté pour en 1990, d'ailleurs.

M. Williams: Oui, oui. Je pense que c'était une sage décision. Mais vous avez...

M. Blais: Nous avons toujours été victimes de notre bonté et nous continuons.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Vous avez dit que le 1er juillet, c'est la fête du Canada, mais le congé férié du 1er juillet n'est pas «bougeable», c'est le 1er juillet. Mais le congé doit être «bougeable».

Une voix: Mobile.

M. Williams: Mobile. Excusez, mobile.

M. Blais: Voulez-vous que je vous réponde? C'est exactement ça, vous avez bien interprété. Dans chacun des endroits au monde où il y a un Parlement souverain qui représente un peuple, une nation, un État... D'ailleurs, c'est l'État du Québec, puis il y a un peuple au Québec, et ce peuple-là a une fête nationale. Dans tous les pays du monde, à peu près, la seule fête qui ne soit pas mobile, c'est la fête de la majorité qui habite le territoire où il y a un Parlement. Une demi-minute? Au Québec, nous disons que c'est le 24 juin, et c'est la seule fête qui ne doit pas être mobile. Cependant, nous savons aussi que nous sommes des Canadiens géographiques par l'histoire et nous acceptons, à cause de notre statut de colonisé, que le 1er juillet soit aussi fêté, mais que cette fête-là doit être mobile. C'est ça qui est notre point de vue.

M. Williams: Est-ce que j'ai le droit encore de demander...

M. Blais: Oui, oui.

M. Williams: Si vous acceptez qu'une fête nationale, une fête d'une nation, d'un pays, doit être non mobile, comme le 4 juillet, je ne comprends pas. Malgré votre position constitutionnelle, la dernière fois que j'ai regardé que... Nous sommes au Canada, nous sommes Canadiens, nous sommes...

Une voix:...

M. Williams: Ah! je ne commence pas de débat, Québécois ou Canadiens. Nous sommes au Québec aussi, mais nous sommes Canadiens. Nous sommes la province de Québec dans l'Assemblée nationale, mais la province de Québec, tout le peuple canadien... Québécois et fier d'être Québécois aussi. Mais, par votre définition d'une fête nationale, pannationale de ce pays, ce doit être non mobile, comme vous l'avez juste mentionné. Et si une fête, pour un pays, doit être non mobile, doit être la même journée chaque année, comme vous avez juste mentionné que

votre parti appuie cette position, je ne comprends pas du tout votre position dans ce débat. Est-ce que la fête du Canada le 1er juillet est mobile ou non mobile? Si c'est la fête d'un pays, c'est non mobile, comme vous l'avez juste mentionné. (12 h 50)

M. Blais: Écoutez, ici, au Parlement du Québec, il y a des députés élus par les Québécois pour défendre ce qui se passe sur le territoire québécois. À Ottawa, ils ont un Parlement pour défendre ce qui se passe sur le territoire canadien. Et si quelqu'un doit légiférer pour que le 1er juillet ne soit pas une fête mobile, c'est le Canada et non le Québec. C'est par condescendance que le Parti libéral apporte ça, parce que je crois qu'au Parlement d'Ottawa c'est à eux à prendre cette décision-là. Nous, nous avons à prendre des décisions sur des choses qui nous regardent, nous, comme Parlement, qui regardent le territoire québécois. Que le Canada fasse une loi et oblige que, d'un océan à l'autre, et je suis un homme pacifique, mais pas du Pacifique à l'Atlantique... O.K.? Je suis un homme pacifique et je voudrais que notre gouvernement... Le gouvernement libéral actuel, c'est le mien aussi, même si je suis dans l'Opposition, et lui, il a assez de députés pour défendre les intérêts du territoire québécois. Les lois qu'il doit faire, c'est ce qui regarde le territoire québécois et les fêtes sur le Québec, et non pas agir en gouvernement, en Parlement soumis à un autre qui, lui, devrait prendre ses décisions. Cette loi-là, si on ne veut pas en étant Canadiens qu'elle soit... Nous autres, on veut qu'elle soit mobile...

Le Président (M. Marcil): En conclusion, M. le député.

M. Blais: Oui, oui, ce ne sera pas long. De toute façon, il reste du temps. Ce serait au Parlement d'Ottawa à prendre cette décision-là et à faire cette loi, et non pas a nous.

Une voix:...

Le Président (M. Marcil): Elle est arrêtée.

M. Blais: Oui, elle est arrêtée. C'est ça que je disais, on manque de tic-tac. Il est moins 10. Vous comprenez bien ma position...

M. Williams: On ne prend pas votre temps, là.

Le Président (M. Marcil): Non, non. S'il vous plaît!

M. Blais: Est-ce que vous comprenez bien...

M. Williams: Est-ce que je peux poser ma dernière question de clarification?

Le Président (M. Marcil): Je voudrais mettre la motion au vote, compte tenu que le...

M. Williams: O.K. Parfait.

M. Blais: II reste cinq, six minutes. Laissez-le donc finir.

M. Garon: Consentement.

M. Blais: Laissez-le donc finir.

Le Président (M. Marcil): Vous voulez...

M. Garon: Consentement.

M. Blais: Oui, laissez-le finir.

Le Président (M. Marcil): O.K. Une dernière question.

M. Williams: Une dernière question. M. Blais: On a encore six, sept minutes.

M. Garon: C'est parce que ça continue à éclairer....

M. Williams: Est-ce que j'ai bien compris...

Le Président (M. Marcil): Ça prendrait beaucoup, beaucoup de watts...

Des voix:...

M. Blais: Non, je pense que...

Le Président (M. Marcil): Non. Excusez, je vais mettre la motion au vote, ensuite vous ferez une motion d'ajournement, si vous voulez. O.K?

M. Blais: J'espère que vous m'avez compris, M. le député.

M. Williams: J'ai bien compris, mais j'ai une certaine surprise que les membres du Parti québécois demandent au gouvernement canadien...

Le Président (M. Marcil): M. le député de Nelligan.

M. Williams: ...de prendre une décision pour nous ici.

Le Président (M. Marcil): M. le député de Nelligan, on vous remercie beaucoup.

M. Blais: Non, non...

Le Président (M. Marcil): M. le député de Masson, merci beaucoup. Merci beaucoup. S'il vous plaît!

M. Garon: On consent à ce que le...

Le Président (M. Marcil): Moi, comme président, je mets la motion au vote.

Une voix: Parfait.

Le Président (M. Marcil): C'est assez. Merci beaucoup. Donc, je vais vous appeler par ordre alphabétique. M. Blais, député de Masson?

M. Blais: Pour.

Le Président (M. Marcil): Pour la motion. M. Garon, député de Lévis?

M. Garon: Pour.

Le Président (M. Marcil): M. Paré, député de Shefford?

M. Paré: Pour.

Le Président (M. Marcil): Ça va. M. le député de Trois-Rivières?

M. Philibert: Contre.

Le Président (M. Marcil): Mme la députée de Châteauguay?

Mme Cardinal: Contre.

Le Président (M. Marcil): Mme la députée de Saint-Henri?

Mme Loiselle: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. le député de Nelligan?

M. Williams: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. le député de Laporte?

M. Bourbeau: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Merci. Donc, la motion est...

M. Garon: Le vote est irrégulier. Le Président (M. Marcil): Pardon?

M. Garon: Parce que vous êtes supposé appeler les membres, pour un vote, par leur nom, pas par leur nom de comté. On appelle toujours...

Le Président (M. Marcil): Ah! bien, je peux le reprendre, si vous voulez, si ça peut régler...

M. Garon: Bien, normalement quand on appelle les gens, on les appelle par leur nom propre.

Le Président (M. Marcil): C'est bien.

M. Garon: C'est le seul moment, d'ailleurs, où ils sont appelés par leur nom; habituellement c'est par leur nom de comté, sauf au moment du vote.

Le Président (M. Marcil): Vous avez raison, M. le député. Je vais reprendre le vote en ce qui concerne ce côté-ci. Mme Cardinal, députée de Châteauguay?

Mme Cardinal: Contre.

Le Président (M. Marcil): Mme Loiselle, députée de Saint-Henri?

Mme Loiselle: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Williams, député de Nelligan?

M. Williams: Je n'ai pas changé, contre.

Le Président (M. Marcil): M. Philibert, député de Trois-RMères?

M. Philibert: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Bourbeau, député de Laporte?

M. Bourbeau: Contre.

Le Président (M. Marcil): Donc, la motion est rejetée, et j'ajourne les travaux...

Une voix: Vous les suspendez jusqu'à 15 heures.

Le Président (M. Marcil): Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures. Ça va? Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 54)

(Reprise à 15 h 13)

Le Président (M. Marcil): Je déclare la séance ouverte. Je rappelle le mandat de la commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives.

Donc, nous étions toujours aux motions. Est-ce qu'il y a des motions à annoncer? M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui. Comme, avant le dîner, le

ministre nous a laissé clairement entendre qu'il n'y aurait pas de modifications, vous allez me permettre d'apporter une motion qui se lirait comme suit...

Le Président (M. Marcil): Motionnez, monsieur.

Des voix: Ha, ha, ha!

Motion proposant d'entendre le Conseil du patronat du Québec

M. Paré: Je motionne: «II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende le Conseil du patronat du Québec.»

Le Président (M. Marcil): Pourriez-vous la déposer, s'il vous plaît...

M. Paré: Avec plaisir, monsieur, en liasse et en paquet...

Le Président (M. Marcil): ...que je puisse la lire, afin de vérifier sa recevabilité. Je vais peut-être vous demander de suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 14)

(Reprise à 15 h 15)

Le Président (M. Marcil): La motion étant recevable, j'entends votre argumentation, M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Devant une si judicieuse décision, M. le Président, c'est avec plaisir que je vais parler quelques minutes, c'est-à-dire à peu près une trentaine, pour vous dire pourquoi je trouverais très utile qu'on entende le Conseil du patronat du Québec sur un projet de loi comme celui-là.

Premièrement, ça concerne les normes du travail, la Loi sur les normes du travail. Donc, si c'est sur les normes du travail, normalement, je suis sûr que le Conseil du patronat du Québec serait intéressé à venir se faire entendre là-dessus pour voir si ça a des effets. Parce que je suis convaincu que jamais le gouvernement n'oserait passer une loi, légiférer dans un domaine aussi important que les normes du travail, sans avoir évalué les impacts. Sauf qu'ils n'ont pas été vraiment rendus publics. Je n'ai pas eu l'impression qu'il y a eu beaucoup de discussions, parce que, là où on en a entendu parler jusqu'à maintenant, c'est ici.

Mais ça va concerner beaucoup de monde. Il ne faut pas oublier que les normes du travail, c'est une grosse machine, c'est un instrument important, puisque à peu près 50 % des travailleuses et des travailleurs du Québec sont directement concernés par la Loi sur les normes du travail. Comme les normes du travail, c'est une institution qui est en place depuis une douzaine d'années, que les gens se sont habitués non seulement à travailler avec la Commission des normes du travail, mais avec la Loi sur les normes du travail, c'est devenu indispensable. C'est devenu un outil collectif très important. Donc, tout ce qui est relié au travail passe maintenant par les normes du travail, sauf là où il y a convention collective. Mais 50 % de la population des travailleuses sont directement concernées par ça.

Donc, ça concerne, évidemment, ceux qui sont intéressés de près, dont les employeurs, et on sait que les grands employeurs, les superemployeurs au Québec sont représentés par le Conseil du patronat. Je suis convaincu que ces gens-là aimeraient se faire entendre, et le plaisir serait partagé; nous, nous serions très heureux de les entendre et de pouvoir échanger avec eux autres. À moins qu'il y en ait eu et que je ne l'aie pas vu - ce qui est fortement possible, parce qu'il s'en passe tellement de choses et on est tellement occupés avec les heures prolongées qu'on fait en fin de session, ça se peut qu'il se passe des choses dans les journaux, à la radio et à la télévision sans qu'on en ait connaissance - moi, je n'ai pas vu de commentaires du Conseil du patronat sur le projet de loi 21 qu'on est en train de discuter. Je pense que c'est parce que ces gens-là n'ont pas eu le temps d'en prendre connaissance, ou demandent à être consultés. Surtout quand on sait à quel point les choses politiques et publiques sont suivies de près par le Conseil du patronat, ce serait important qu'on puisse les entendre et avoir leurs commentaires là-dessus, sur un changement qui risque d'avoir des effets.

On a parlé beaucoup de la fête nationale, on a parié beaucoup de congé, depuis le début, sur cette loi-là. Je me rappelle que le Conseil du patronat s'était déjà prononcé lorsque le gouvernement québécois avait décidé de faire du 24 juin la fête nationale avec ce que ça veut dire comme obligation. On décide que c'est une fête nationale et une fête nationale, en soi, c'est sacré. La preuve, regardez dans tous les pays du monde, normaux, une fête nationale, c'est quelque chose qui se fête la journée même, c'est quelque chose qui est fêté par tout le monde. La fierté s'exprime cette journée-là, donc il faut que ce soit une journée différente. Les gens du Conseil du patronat étaient venus dire que, non, non, il ne fallait pas changer ça; le 24 juin

pouvait être mobile. On n'était pas d'accord, je dois vous le dire. On était même déçus d'une réaction semblable. C'est ne pas reconnaître qu'on est un peuple normal qui a droit à sa fierté et à ce droit de l'exprimer lors d'une journée qu'on appelle la fête nationale. Ils étaient venus s'exprimer, pas en commission, mais ils avaient fait valoir leur point de vue en nous disant comment ça pouvait perturber les choses, comment ça pouvait être dérangeant, comment ça pouvait nous coûter cher. Si, dans une société, on faisait juste évaluer des coûts comme ça, sans tenir compte qu'il y a autre chose que juste la piastre, le dollar et la rentabilité, on serait des sociétés malades. Heureusement, il y a des visions qui sont différentes, et ça, pas au Québec, à travers le monde entier, il y a la vision qui veut qu'on traite les gens comme des humains, comme des êtres n'ayant pas seulement un portefeuille, un neuf à cinq à respecter et à travailler, mais aussi un sentiment de fierté, un sentiment d'appartenance qu'ils veulent exprimer, et d'une façon particulière, à leur fête nationale. (15 h 20)

À ce moment-là, le Conseil du patronat avait fait valoir son point de vue, qu'on ne pouvait pas et que c'était mieux que ce soit mobile, qu'on puisse déplacer la fête pour l'ajouter à une fin de semaine pour en faire une longue fin de semaine. Si l'argument était bon pour le 24 juin, qui est la fête nationale du peuple québécois, et il n'y a plus personne qui conteste qu'on est une nation, un peuple, tout ce qu'il nous manque c'est un pays, mais on est un peuple avec nos différences, nos particularités, notre caractère, notre culture, on a tout, tout, tout, il nous manque juste de dire qu'on veut qu'on ait le pays pour qu'au niveau mondial cette reconnaissance soit visible, c'est-à-dire mettre notre drapeau aux Nations unies et être capable de négocier et d'échanger avec les autres pays du monde comme un adulte, comme un pays normal, comme un pays responsable. Si, pour le 24 juin, le Conseil du patronat avait dit que c'était bien trop dangereux, bien trop coûteux, bien trop dérangeant, j'ai l'impression que, pour le 1er juillet, il va être encore bien plus déterminé à faire valoir ces arguments-là, que ça va nous coûter très cher, que ça va déranger, que ça va bousculer. Parce que l'argument qui est retenu par bien des gens, arrêter des chaînes de production le vendredi pour recommencer le lundi, arrêter le mardi soir pour recommencer le jeudi matin et finir le vendredi soir pour recommencer le lundi matin, parce qu'on a un congé, le 1er juillet, qui tombe, cette année, un mercredi... Donc, si...

M. Blais: Cette année, ça tombe un mercredi?

M. Paré: Ça tombe un mercredi, oui. Juste le lendemain du mardi. Si c'était valable comme argumentation il y a quelques années pour le 24 juin, imaginez-vous comment l'argument du 1er juillet est encore bien plus fort, parce que, là, ça fait deux semaines de file en plus, donc pas seulement une, mais deux... Alors, là, le Conseil du patronat qui a fait valoir son point de vue il y a quelques années sur la fête du 24 juin, on va lui passer le 1er juillet, ici, en fin de session, comme ça...

M. Blais: Le 24 juin tombe quelle journée cette année?

M. Paré: Un mercredi aussi, ça tombe bien. Ça veut dire que...

Le Président (M. Marcil): La fête de la Saint-Jean-Baptiste tombe le 24 juin cette année.

M. Paré: La fête nationale des Québécois...

Le Président (M. Marcil): Ah bon! C'est nouveau.

M. Paré: ...qui est en même temps la fête de notre patron, parce qu'on est un peuple-Le Président (M. Marcil): Ah! c'est bien, ça.

M. Blais: C'est la fête de M. Parizeau?

M. Paré: Je voudrais continuer, M. le Président, ha, ha, ha! en restant au niveau de la fête nationale, notre fierté, collectivement, d'être au-dessus des partis politiques. Je ne comprends pas qu'on refuse aux gens de s'exprimer là-dessus. C'est sûr qu'il y a la fierté, mais il y a les coûts, et je vais vous dire, les coûts, c'est minime par rapport à ça. Mais là où je veux en venir et vous montrer que, des fois, je trouve qu'on n'est pas très constants ou congruents dans notre jugement ou dans les arguments qu'on utilise, on dit, d'une façon sérieuse et sans rire, qu'il faut passer ce projet de loi maintenant, rapidement, parce que M. Béland aurait dit que ça aurait été utile pour le Mouvement Desjardins. Comment se fait-il qu'on va agir et qu'on va légiférer rapidement sur un projet de loi parce qu'un représentant d'un organisme, qui est majeur et très important au Québec, j'en conviens, mais parce que M. Béland, des caisses populaires, a dit et a demandé, dans une lettre, une modification à la loi et non pas ce qu'on est en train de voter ici, mais on l'utilise, par exemple... Mais parce que M. Béland, comme un des intervenants majeurs au Québec, a demandé des modifications à la loi, on est en train de légiférer. Et, pourtant, le Conseil du patronat, qui, sur un principe semblable, s'est prononcé contre il y a quelques années, on ne l'entendra pas, on ne lui permettra pas de s'exprimer. On dit: II y a comme deux

poids deux mesures, ou: II y a comme quelque chose d'irrationnel là-dedans.

Il faudrait que le Conseil du patronat puisse aussi se faire entendre pour voir si, avec ce principe-là, il est d'accord et si, le fait de faire ça, ça va amener des effets négatifs, pour la société et pour l'économie. Mais non, on ne l'écoutera pas. Et moi, je n'ai pas vu de commentaires. Il faudrait lui donner la chance, à M. Dufour. Peut-être que le commentaire va être: Je n'ai pas de commentaires à faire, ou peut-être que ça va être qu'il est d'accord, plus par ses convictions politiques que par son rôle de président du Conseil du patronat du Québec. Ça, c'est une chose à voir. Mais ça nous permettra d'échanger avec lui et de le savoir. Il faudrait l'entendre, parce que M. Dufour, on aime ça, l'écouter. On l'entend souvent. Il prend des positions d'une façon presque quotidienne sur tout et, là-dessus, ce serait normal qu'il en prenne une aussi et qu'on puisse l'évaluer, alors que là, moi, je n'ai rien vu, rien entendu, et on va légiférer ne sachant pas ce qu'il pense du projet de loi. S'il est d'accord pour ses convictions politiques, il a le droit. Mais, nous, on a le droit de le savoir et on saura que, quand il prendra une position sur un autre congé, il faut d'abord tenir compte du côté politique plus que du côté économique. Parce qu'à un moment donné, qu'on soit en politique ou pas, il va falloir qu'on soit clairs et que les gens sachent de quel bois on se chauffe.

Quand j'entendais M. Dufour dire: II faut s'occuper de Constitution, il ne faut pas laisser ça dans les mains de nos politiciens, ou même, il faudrait quasiment... C'est un peu même beaucoup négatif, en disant: II faut que le milieu des affaires prenne en main le débat constitutionnel, comme si ce n'était pas quelque chose de démocratique et de politique, c'est même indécent. Mais, s'il veut faire de la politique, qu'il vienne là où le débat se passe, parce que la démocratie veut que ce soient des gens élus par la population, démocratiquement, et non pas des gens nommés par des milieux des affaires qui ont des intérêts égoïstes, particuliers et privés à défendre. Nous, on n'a pas ça à faire ici. Vous le savez, vous êtes tous des députés, on est des représentants de l'ensemble des intervenants du Québec, mais dans nos comtés, de la totalité de nos citoyens. On représente tout le monde, peu importent leur origine, leur couleur, leur race, leur religion et la grosseur de leur portefeuille. Donc, nous, on est très représentatifs et on a le droit de s'exprimer, on a le droit de faire valoir notre point de vue. Et même ici, à l'Assemblée nationale, c'est nous qui devons décider de l'orientation que va prendre le Québec, en consultation, j'espère, avec la population, par référendum.

Mais la loi qu'on est en train de faire, ça modifie des choses dans le comportement collectif du peuple québécois. Donc, on est en train de modifier des choses; on ne veut pas écouter les gens. On est tellement ouverts, nous, on est tellement disponibles et prêts, on vous dit: On est prêts à être ici le temps que ça prendra et on est prêts à écouter même des gens qui, au départ, ne sont pas nécessairement sympatiques aux causes qu'on défend. Et pourquoi pas? On respecte les idées différentes et on est prêts à discuter avec tout le monde. Donc, si le Conseil du patronat s'est déjà exprimé contre une date... le congé à la date, comment dire ça? à la date même de la fête nationale du Québec, comment se fait-il qu'on ne lui donnerait pas la chance de s'exprimer sur une loi semblable quelques années plus tard, qui fait que le 1er juillet va être fêté la journée même? Parce que c'est ça, l'esprit de la loi. Il ne faut pas se le cacher. On aura beau dire que l'article 1 parie de la nomination d'un vice-président; ça, ce n'est qu'un argument. C'est tout simplement, comment je dirais, essayer de mêler un peu les gens. Mais la réalité, tout est basé sur une seule chose: la reconnaissance de la fête nationale du Canada. Et ça, notre collègue, le député de Jacques-Cartier, si je ne me trompe pas de comté-Une voix: De Nelligan.

M. Paré: ...de Nelligan, je m'excuse, est venu confirmer tout ça depuis hier soir et d'une façon encore plus spécifique ce matin en disant que c'est avec fierté qu'il faut fêter le 1er juillet, fête du Canada. Ça, ça a été très clair. Alors que le ministre vient nous dire que ce n'est pas une question d'une seconde fête nationale pour les Québécois, je vais vous dire, son collègue est venu replacer tes choses exactement là où elles se trouvent, c'est-à-dire dans la réalité des choses. La vérité est toute claire et toute nue à partir de maintenant; ce qu'on veut, c'est la confusion, comme on fait depuis des années. Quand on n'a pas d'arguments pour quelque chose, bien, on a des arguments contre ou on a la confusion. Et là, c'est la confusion.

Là-dessus, j'aurais aimé entendre le Conseil du patronat du Québec qui défend, je dois dire, avec beaucoup d'énergie, beaucoup de conviction, les choses auxquelles il croit. Il faudrait être bien honnêtes là-dessus et bien clairs, le Conseil du patronat est impliqué dans tous les dossiers, il se prononce à peu près sur tout, mais il ne s'est pas prononcé sur la loi 21. Donc, qui ne dit mot consent. C'est probablement ce qu'il faut en déduire: Qui ne dit mot consent. Mais on le voit, tous les jours ou presque, prendre des positions qui sont, dans bien des cas, des positions très politiques, comme, dans le journal ce matin, le Conseil du patronat voudrait «presquement» mettre les politiciens de côté pour décider de la Constitution. Là, il faudrait le faire se prononcer là-dessus. Il faudrait qu'il vienne nous dire si c'est opportun, ce projet de loi là, pas seulement en fonction de ses convictions politiques, mais en

fonction aussi un peu de l'économie en général et du côté économique de ses membres. Il faudrait l'entendre. Il faudrait voir s'il est d'accord à ce qu'on défende la Constitution de cette façon. Est-ce qu'ils accepteraient, eux autres, et est-ce qu'ils trouvent normal qu'on défende une option politique en se mettant en état de faiblesse? (15 h 30)

Je vais vous expliquer ce que je veux dire, parce que c'est pas rien, ce qu'on est en train de voter, ce n'est pas une petite affaire. Nous, on ne semble pas le prendre au sérieux, mais on sait très bien ce que ça a comme effet. On le sait tellement que ce n'est pas pour rien qu'on a décidé de la passer, la loi, parce que si ce n'était rien, si ce n'était pas une loi importante pour le gouvernement, au niveau constitutionnel et politique, si ça ne changeait rien, comme certains ont dit, de l'autre côté, pour quelle raison est-ce qu'on ne la mettrait pas en vigueur juste l'an prochain? Pour quelle raison est-ce qu'on serait en train de la voter maintenant? Même, probablement, le ministre l'a laissé entendre très clairement ce matin, nous mettre encore une fois la guillotine? Ça, c'est donc représentatif du gouvernement libéral actuel.

Au lieu d'amener les lois au mois de mars... Ça, mes collègues, ici, des deux côtés de la Chambre, vont s'en rappeler. Au mois de mars, lorsque les travaux ont commencé, on ne faisait même pas des semaines complètes. Il y a des soirs qu'on ne siégeait même pas, imaginez-vous. On s'est dit que c'est parce qu'il n'y a pas de législation, il y a pas de discussion, le gouvernement n'a plus d'idées.

Une voix: Des motions non annoncées.

M. Paré: Ah, puis des motions non annoncées pour gagner du temps. On pouvait faire parier des députés sur une motion non annoncée, pendant tout l'après-midi, et ça, ça légifère beaucoup... Puis, là, on s'est dit: Mais comment ça se fait? Quand on veut légiférer ouvertement, clairement, avec le respect de la population, on commence au mois de mars et on se donne tout le temps de permettre à la population d'être informée et aux intervenants, comme le Conseil du patronat, de venir en commission pour se faire entendre.

Pourtant, ce n'est pas ça qui s'est passé. En mars, il y a des après-midi complets qui n'ont été retenus, à l'Assemblée nationale, que pour des motions de félicitations: M. et Mme X, la journée de tel groupe dans la société. Je ne dis pas que ce n'est pas important, sauf qu'on a pris des après-midi complets à faire parier du monde sur des motions de félicitations. Puis, il y a des soirs où on ne siégeait pas parce qu'il n'y avait pas de législation déposée. En mars, on n'a presque pas légiféré. En avril, c'est les crédits qui sont arrivés. On a parié de finances. C'est important, ça, il ne faut pas se le cacher, c'est vrai, sauf que tout était concentré, non pas sur de la législation, mais sur les crédits des différents ministères. À la fin de mai, début juin, toutes les lois sont amenées en même temps. Il y a urgence, on légifère 24 heures par jour. Vous avez vu, la semaine passée, deux nuits complètes. Puis, là, on finit tard. Là, ça presse.

Comment se fait-il que ça presse en juin, au moment où tout passe à la vapeur, où on travaille jour et nuit? On refuse d'entendre les gens, puis on refuse de discuter. C'est très symptomatique du gouvernement actuel, et c'est en même temps très inquiétant: c'est qu'on a des choses à cacher. Cette loi-là, elle est fondamentale, cette année, pour le gouvernement. Elle est fondamentale parce que nous sommes dans une année capitale au niveau constitutionnel. On veut, encore une fois, amener plus de confusion, en mêlant davantage les Québécois qui avaient une fête nationale. On respectait ceux qui veulent reconnaître que le Canada, c'est encore leur pays; effectivement, le 1er juillet était, est toujours, et nous, on ne veut pas l'enlever comme tel, un des congés reconnus par la Loi sur les normes du travail.

Mais, là, ce qu'on veut en faire, ce n'est pas ça, deuxième fête nationale. Notre collègue de Nelligan l'a dit carrément, ce matin, deuxième fête nationale. Cherchez les peuples au monde qui ont deux fêtes nationales. Je dois vous dire, quand on voit... On a vu ça, dernièrement, il n'y a pas tellement longtemps. Dès qu'on voit un animal - on a vu un veau, je pense que c'est en Californie ou au Mexique - né avec deux têtes, un veau, ça fait les manchettes mondiales, partout à travers le monde, des bibites à deux têtes. Hein! On voit un concombre qui est un petit peu plus long que les autres, puis ça fait même les manchettes mondiales. Pourquoi? Parce que ce n'est pas normal. Là, on est en train, effectivement, d'être exclusifs, au Québec: seul peuple au monde avec deux fêtes nationales, l'ambivalence, la confusion. Mêler les gens, surtout cette année. La preuve? C'est ce projet de loi. Tout ce qu'on peut faire pour mêler les gens, on va le faire. On va nous faire veiller - probablement 24 heures par jour - au début de la semaine prochaine pour voter cette loi-là en pleine nuit, parce qu'on veut absolument, absolument, que le 1er juillet, ce soit une grande fête. On en a besoin dans le débat constitutionnel actuel. On va fêter quoi? On va fêter le rapport Beaudoin-Dobbie? On va fêter le rapport Clark qui est sorti hier soir, qui est un recul historique sur tout ce que le Québec a connu, même par rapport à la Constitution de 1867? Ils vont même se mettre le nez, d'une façon constitutionnelle, maintenant, dans l'éducation. Imaginez-vous!

La culture. On va nous traiter comme n'importe quelle minorité, comme les autochtones, parce que tous les grands moyens de communica-

tion, non seulement ils les gardent à Ottawa, ils se permettent, constitutionnellement, d'augmenter leur présence dans la culture, même dans les subventions. Est-ce qu'on va finir par arrêter de rire du monde, et dire que la culture est d'exclusivité québécoise provinciale? Mais, tout ce qui est important, tout ce qui est grand, tous les moyens modernes de communication, Ottawa garde ça! Donc, l'Office national du film, Radio-Canada, les moyens de subventions, tout ce qui est troupe nationale, on garde ça, parce que ça, c'est visible, c'est important, c'est majeur. Vous autres, vous garderez... quasiment le macramé, on nous traite de même. C'est ça qu'on va fêter, mais on en a besoin de cette loi-là parce qu'il faut absolument donner l'illusion aux Québécois qu'on ne peut plus s'en passer, puis que c'est important.

Donc, mêlons-nous au bout... Mais je dois vous dire que la capacité de dire n'importe quoi... Le ministre dit qu'on parle beaucoup pour ne rien dire. Je vais vous dire, je n'ai pas cette impression-là. En tout cas, j'essaie d'être clair, mais on a des champions pour dire le contraire. Moi, quand j'entends... Puis, ce qu'on a entendu, il fallait le faire! Dire aux gens qu'un non veut dire un oui. Un non veut dire un oui! Y a-t-il quelque chose de plus contradictoire que non et oui? C'est comme dire aux gens que noir et blanc, c'est pareil. C'est ce qu'on a essayé de faire croire aux gens. Plus tard, on est en train de nous faire accroire que la souveraineté, c'est du fédéralisme. Comme on n'est pas capable de vendre le fédéralisme, on essaie de faire accroire que le fédéralisme, c'est la souveraineté, exactement comme le oui voulait dire un non. Mais, comme ce n'est pas encore assez, il faut passer des lois comme ça, à la vapeur, sans consulter et sans écouter les gens, avec la bénédiction du Conseil du patronat. Mais il devrait venir nous le dire ici, en pleine face, par exemple, devant les députés. Qu'il ne se gêne pas pour dire qu'on ne fait pas notre rôle, qu'on le fait mal ou qu'on n'est pas assez intelligents pour le faire. C'est un peu ça qu'ils nous disent, hein?

Quand je regardais le texte de ce matin, c'est comme s'il fallait décider de la Constitution en dehors du Parlement. Voyons donc! Encore une fois, on va être la seule place au monde où on va dire qu'en démocratie ce ne sont pas les gens politiques qui sont aptes et capables de représenter leur population et de défendre ses intérêts. Qu'il vienne nous le dire en pleine face. C'est pour ça qu'il faudrait l'inviter. Puis, s'il est d'accord avec ça parce que ça fait son affaire au niveau constitutionnel, on va le questionner là-dessus. Mais il faut que ce soit clair, il faut que ce soit juste, et là on va mêler les gens. Encore une fois, on va leur dire qu'un non veut dire un oui, que noir et blanc, c'est pareil, que c'est dans notre tête à nous autres, les péquistes, qu'on voit une différence.

Puis, on a deux fêtes nationales, puis on va fêter deux fêtes nationales. Bravo! «c'est-u» extraordinaire? Bien, voyons donc! On est en train de vouloir dire qu'une fête nationale, ce n'est pas important quand on fait ça. C'est comme s'il n'y avait pas de différence. La société distincte, vous êtes en train de lui passer vraiment le bulldozer dessus. Puis, je trouve ça dommage, puis inquiétant.

J'aimerais ça pouvoir parler aux gens du Conseil du patronat pour voir leur réaction par rapport à quelqu'un qui nous représente et qui négocie pour nous, de la façon dont le gouvernement québécois est en train de le faire. Ceux qui ont déjà fait du syndicalisme ou ceux qui ont déjà été à la tête de corporations, ceux qui ont été des directeurs d'entreprise, des présidents de conseils d'administration vont vous dire que, quand on est en train de négocier, on met toutes les chances de notre côté pour être gagnants. C'est notre rôle, ici, de s'assurer que le Québec soit gagnant. C'est le rôle de tous les députés, peu importe de quel côté on se trouve. C'est d'essayer de faire en sorte - parce que, n'oubliez pas, on est élus à Québec, nous autres, on n'est pas élus à Ottawa, Notre rôle, c'est que le Québec soit de plus en plus fort, de plus en plus riche, parce que c'est comme ça qu'on va rendre les gens de plus en plus heureux. Notre rôle, c'est de s'assurer, quand on défend le Québec, de se mettre en position de force. Un syndicat, quand il négocie pour ses syndiqués, il fait quoi? Eh bien, il va aller chercher des mandats de grève, s'il en a besoin. Il va faire des pressions, s'il en a besoin. Il va même faire des grèves du zèle, s'il en a besoin, mais il va se mettre en état de force, comme représentant, dans le but d'aider ceux qu'il défend. Donc, s'il fallait qu'un leader syndical, dans une période de fin de négociation, se mette en état de faiblesse, puis commence à tripoter avec le côté patronal, ce n'est pas long que les syndiqués diraient: Bien, toi, on n'a plus confiance, va-t-en chez vous! On va se trouver un autre leader. S'il fallait qu'un chef d'entreprise gère mal une entreprise, de façon volontaire, pour faire baisser les actions, je vais vous dire que ça ne serait pas long que les actionnaires auraient une réaction terrible, virulente. (15 h 40)

Bien, qu'est-ce que c'est qu'on est en train de faire, nous autres? Notre porte-parole, au niveau constitutionnel, dans une fin de négociations constitutionnelles, notre représentant, notre premier ministre, avec le Conseil des ministres, on est en train de se mettre en état de faiblesse. Le projet de loi 21 vient confirmer notre état de faiblesse en disant au reste du Canada: Faites-nous n'importe quoi, crachez-nous dessus, refusez Meech, qui est le minimum des minimums, on n'a jamais été si bas dans nos demandes, refusez-nous Meech, ce n'est pas grave. Continuez à négocier, puis à nous dire que les autochtones vont être mieux traités que les

Québécois, ce n'est pas grave. On ne commente même pas. Amenez-nous le rapport Beaudoin-Dobbie, qui n'a aucun bon sens - même le premier ministre... une motion unanime à l'Assemblée nationale, sauf le Parti Égalité. Amenez-nous n'importe quoi, on va passer une motion, mais après on se ferme. Maintenant, on est à la fin de la négociation.

Là, avec ce qui est sorti hier soir, on sait très bien vers quoi on nous amène: un recul sur toute la ligne pour les Québécois. Alors, nous, là, n'oubliez pas, on est des parlementaires. On fête le 200e. Je l'ai dit hier, puis je le répète parce que c'est important de le répéter, je pense. On fête le 200e anniversaire de vie parlementaire à Québec. On est les représentants de la population québécoise. On descend de Papineau et LaFontaine, comme nos pères, au niveau parlementaire, qui ont défendu le Québec et en ont fait une société distincte. Puis, là, nous, on est là pour préserver au moins ce que ces gens-là nous ont donné, ce qu'ils nous ont légué comme héritage, puis essayer de donner autant d'espoir aux Québécois qui vont nous suivre que l'espoir que nos prédécesseurs nous ont donne.

Bien, avec ce qu'on nous a fait hier soir, on est en train de nous enlever ce qu'eux autres nous ont donné. Ce que nos prédécesseurs politiques nous ont légué, on est en train de nous l'enlever au niveau de l'éducation, au niveau culturel, au niveau de la reconnaissance de la société distincte, parce que la société distincte on va la contraindre à l'obligation, maintenant, de faire la promotion et le développement de l'anglais au Québec. Bien, je vais vous dire, jamais nos ancêtres n'auraient pensé cela que, nous, on serait d'accord avec ça.

Bien, hier, avec le signal qu'ils nous ont donné, du chemin étroit dans lequel on nous embarque, on devrait être en train de...

Le Président (M. Marcil): Ça, c'est une et demie.

M. Paré: Pas juste une minute et demie?

Le Président (M. Marcil). Une minute et demie. Là, maintenant, c'est une minute. Donc, si vous pouvez aller en conclusion.

M. Paré: Bien, je conclus, parce que vous me dites qu'il me reste une minute et demie, en disant que c'est inacceptable que le gouvernement nous mette en état de faiblesse avec ce qui est sorti hier soir. Voter la loi 21 qui fait en sorte que, comme Québécois, on les remercie et on va fêter notre seconde fête nationale le 1er juillet, comme une fête nationale, c'est indigne d'un gouvernement. Ce n'est pas une petite loi ridicule qu'on est en train de voter. C'est un signe qu'on donne au gouvernement fédéral: Faites-nous n'importe quoi, on va vous licher les bottines. C'est inacceptable. Si le Conseil du patronat était contre le 24 juin, qu'il vienne nous dire ce qu'il pense, avec ses arguments économiques, du 1er juillet. S'il est d'accord avec ça, puis que l'économie, ça ne compte plus, quand ça défend ses orientations politiques, qu'il vienne rendre compte, lui aussi. Je pense qu'il est temps que les Québécois voient ceux qui les défendent et ceux qui ne les défendent pas. Le Conseil du patronat qui parle tous les jours, bien, qu'il vienne parler aujourd'hui. Moi, j'aurais le goût de les entendre.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Shefford. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Masson.

Une voix: II met son courage à l'épreuve. M. Yves Blais

M. Blais: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Il y a une chose qui est très connue c'est que, comme député, moi, je suis un homme très tolérant. Il y a certains ministres - je les aime pour la plupart - mais le ministre actuel, c'est un ministre que j'ai toujours apprécié. Je trouve qu'il fait son possible. C'est un ministre, d'abord, très nationaliste. J'ai aimé beaucoup ses plats de résistance au cours de son mandat. Il a pris une position très ferme pour le rapatriement de la main-d'oeuvre de façon totale dans les mains du Parlement du Québec. Là-dessus, je trouve que c'est un beau plat de résistance.

À cette table, où nous sommes à discuter de plats de résistance, arrive ici le patronat qui force le gouvernement, avec certains agents économiques, à choisir entre deux dates, soit le 24 juin et le 1er juillet, ou de choisir les deux. Comme dessert, je pense que, si c'est un de ses derniers projets de loi qui arrivent, ça ne fera pas honneur à ses plats de résistance parce qu'il nous amène ici, comme dessert, une «tarte aux dates». Comme dessert, cette «tarte aux dates», je ne l'aime pas beaucoup. Moi, je suis plutôt un type à défendre le folklore qui nous caractérise et, le 24 juin, je pense que la tarte qu'on doit servir, c'est la tarte à la ferlouche tandis que, dans ce projet de loi, on nous amène la tarte du 1er juillet qui est la «tarte à l'affaire louche».

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Je ne crois pas que, malgré toutes les discussions qu'on puisse avoir, le goût et le palais de chacun, qu'on soit gourmet ou gourmand... Il se développe au travers des années et, selon les peuples, des goûts spécifiques. Moi, je tiens à dire - et je pense que c'est assez connu - que mes racines, que mon palais est beaucoup plus satisfait quand je hume le fumet d'une chose beaucoup plus affriolante qu'une «tarte à l'affaire louche». Moi, je désire la tarte

folklorique de la feriouche, et c'est ça, en fait, qui est tout le débat. C'est très drôle que des parlementaires, au prix où nous gagnons, soient là à discuter d'une «tarte aux dates». Si les gens nous écoutaient... On sait que personne ne nous écoute. Grâce à Dieu, personne ne nous écoute, mais quand on sait, au prix où on est payé, qu'on est là à discuter d'un projet de loi sur une bataille de dates! On s'attaque aux dates!

M. le Président, vous ne l'avez pas écouté sur toute la ligne, le patronat. Le président du Conseil du patronat, qui est très bien connu, voulait que vous ameniez ce projet de loi comme un petit pain qui sort du four. Il voulait absolument qu'il amène ça comme ça. Ça n'a pas été aussi croustillant que le patronat voulait le demander. Le pain que vous lui avez servi, vous en avez tranché quelques tranches, et là, à la tranchée, en enlevant de leur petit pain des bouts, ils dont dit: Mais qu'est-ce qu'il dit, le pain, quand on le tranche? C'est très simple, M. le ministre. Il «diminue».

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: C'est ça qu'il dit, le pain, quand on le tranche. Il «diminue». Le patron avait mangé plusieurs tranches dans son projet de loi et, au lieu d'avoir tout un pain toasté de 22 toasts, il va avoir un petit club sandwich, juste trois tranches grillées. Toasté est accepté. Je lève un toast à ça. Mais c'est malheureux. Il y a beaucoup d'agents économiques au Québec. On sait, depuis le rapport Bélanger-Campeau, que la plupart des agents économiques, une très grande majorité de ceux qui sont venus à la commission Bélanger-Campeau dans le monde de l'économie étaient en faveur d'un rapatriement à peu près absolu des pouvoirs. Ils étaient aussi exigeants que le rapport Allaire. Il y avait une seule exception. Ce n'était pas le Conseil du patronat du Québec, CPQ - canadien, provincial, québécois, ils sont trois, eux - ce n'est pas eux autres, c'était le représentant, M. Dufour, lui-même, en personne. Il a suivi depuis le début, d'une ville à l'autre, d'un océan à l'autre, la Constitution, comme une espèce de - je cherche un mot autre que suppositoire, ce n'est pas parlementaire - palliatif à ceux qui manquaient d'arguments pour défendre le fédéralisme économique.

On voudrait qu'il vienne ici nous dire pourquoi, lui, en tant que représentant d'hommes d'affaires qui, à 82 % dans les sondages, sont en faveur de la souveraineté et n'en ont pas peur du tout, choisit encore d'atrophier la fierté du Québec en demandant que le 24 juin soit amovible. La fierté, ça ne se monnaye pas, ça. C'est une chose que l'on a en soi ou que l'on n'a pas. Ça ne se commande pas, ça. C'est comme la conscience sociale. On ne peut pas faire une loi, nous, pour dire: Le peuple québécois devra avoir une conscience sociale. Ça ne se légifère pas, ça.

Le patriotisme, c'est inné. On a ça en soi comme on a un nez pour respirer, comme on a des poumons pour humer l'air, comme on a des yeux, comme le député qui est devant moi, qui sont charmants. C'est comme ça. Ça nous est naturel, ça, et ceux qui ne sentent pas naturellement qu'ils sont des Québécois, c'est inutile. C'est inutile d'essayer. Eux autres, ils vont manger un morceau de «tarte à l'affaire louche». C'est ça qu'ils vont manger comme dessert. (15 h 50)

On aimerait bien que M. Dufour, le président du Conseil du patronat du Québec, vienne nous expliquer comment il peut en arriver, contrairement à ses membres, à demander une chose qui est antifête nationale, en voulant... Lui, il ne veut pas changer le 1er juillet, comme il est dit dans la loi, puis le mettre à une date fixe. C'est le contraire. Il veut laisser le 1er juillet comme il était, date mobile comme fête. Nous autres aussi, on est d'accord là-dessus. Lui, pire que ça, il voudrait que le 24 juin devienne une fête mobile aussi pour, on dirait, déraciner notre fierté. Ils sont en période de sécheresse, les constitutionnalistes fédéralistes. J'ai l'impression qu'ils devraient - comment est-ce qu'on dit ça - sarcler un peu plus le territoire, puis être plus représentatifs.

J'ai trouvé extraordinaire l'exposé de mon confrère de Shefford, extraordinaire. Il a dit: Dans la période actuelle, où la Constitution nous est présentée sur une... On regarde ça comme dans le temps de Notre Seigneur Jésus Christ. On les regarde sur une grande table. Ils sont tous là, attablés, eux autres aussi. Les gens les regardent. À peu près personne n'était là, quand on a parié de la Constitution de 1982, à peu près personne. Les gens ne les connaissent presque plus. Moi, dans mon comté, on m'a demandé souvent: Mais qui sont ces gens? J'ai dit: Ce n'est pas nécessaire que vous les connaissiez, ceux qui sont là. Il s'agit de retenir que celui qui a la gueule croche s'appelle Judas. Le restant, ce n'est pas nécessaire de savoir qui c'est, ce n'est pas nécessaire. Ce n'est absolument pas nécessaire de connaître les autres. Celui qui a la gueule croche, c'est Judas. Ce n'est pas nécessaire de reconnaître les autres.

C'est une figure de style, bien sûr. C'est une figure de style, mais ça en dit très long. Mais, là, que le patronat vienne rajouter, rajouter en voulant rendre mobile la fête nationale, ce serait le seul État qui aurait une fête mobile dans le monde. Le 4 juillet, aux États-Unis, se fête le 4 juillet, la fête de l'indépendance. Ça ne s'appelle pas la fête des États-Unis. Voyons! Il n'y a pas un pays qui fait porter le nom du pays pour désigner sa fête, parce que ça sort tout... ça ne veut rien dire. Le 4 juillet, c'est la fête de l'indépendance américaine. Le 14 juillet, c'est la prise de la Bastille. C'est comme ça. C'est comme ça que ça fonctionne. Je ne savais pas qu'ils l'avaient prise, la

Bastille. Savez-vous où elle est, la Bastille? Je me demande où elle est. Je sais qu'ils l'ont prise, mais ils l'ont déménagée où?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Je ne sais pas. Ça doit être...

Une voix: Ça doit être au Parlement, ici...

Le Président (M. Marcil): En conclusion, M. le député.

M. Blais: En conclusion, j'ai l'impression... Mais, historiquement, pour tout le monde, je le sais où elle est, la Bastille. Elle est dans le Bureau du leader du gouvernement avec la guillotine qui va bientôt... Ils vont bientôt nous arriver tous les deux, afin de faire que l'on se taise. Puisqu'ils «folklorent», je vais conclure en disant que je préfère, dans ce dessert, aux «tartes aux dates», la tarte à la ferlouche, qui est de notre folklore, plutôt que celle du 1er juillet, de «l'affaire louche». Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le député de Masson. Maintenant, je vais reconnaître Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudiè-re.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président. Je ne peux pas croire, personnellement, en tout cas, que le gouvernement, que le ministre va en arriver à nous mettre la guillotine sur un projet de loi comme celui-là. Vraiment, j'ai de la misère à croire ça. Je me demande comment ça pourrait être perçu, comment ça pourrait être vu, un projet de loi comme celui-là, où il n'y a eu, à toutes fins pratiques, aucune consultation, aucune demande. On a parlé de la demande de M. Béland, ce matin. Je pense que tout le monde, autant de notre côté que du côté ministériel, sait lire. On a vu en quoi consistait la demande du Mouvement Desjardins. Ce n'est pas tout à fait ce qu'on est en train de faire, M. le Président.

La seule demande qu'on a vue, qui pouvait se rapprocher un tant soit peu de ce qu'on est en train de faire, c'est la lettre de Claude Béland, qu'on a vue ce matin. À part ça, M. le Président, on n'a rien vu du tout d'autre. Alors, vous comprendrez que je serais absolument étonnée... Je vais vous dire, je ne sais pas comment ça serait perçu que le gouvernement nous mette la guillotine sur un projet de loi amanché comme ça, qui ne répond pas à des demandes, finalement, de personne. Ça ne répond pas à des demandes de personne. Les demandes réelles... Si, vraiment, tout ce qu'on a en main, c'est la demande de Claude Béland du Mouvement Desjardins, on l'a vue, nous autres aussi, M. le Président. On est capable de la lire. Je ne suis pas sûre que M. Béland aimerait beaucoup porter l'odieux de se faire dire: C'est ça qu'on a fait avec votre... C'est grâce à vous si on arrive avec une fête comme celle-là, amanchée comme ça.

M. le Président, je sais très bien que le projet de loi qu'on a devant les yeux ne met pas la fête du 1er juillet dans la loi, n'inclut pas le 1er juillet dans la loi sur les fêtes nationales. Je suis tout à fait consciente de ça. Mais ce qu'on vient faire par le projet de loi, c'est qu'on vient enlever cette possibilité de déplacer le congé du 1er juillet, comme c'était la coutume de le faire, comme c'était permis et, d'ailleurs, comme c'était demandé par le décret qui avait promulgué que, cette année, ce serait le 29 juin qu'on fête le 1er juillet, pour accommoder la population, accommoder tout le monde. On vient, à toutes fins pratiques, dans ce projet de loi là, enlever la mobilité du congé du 1er juillet. On en fait une journée fériée fixe, comme d'autres journées fériées fixes. Je le sais, le ministre va pouvoir nous expliquer ça - Oui, M. le député. Je vois le député de Trois-Rivières qui me fait signe que non. C'est exactement la même chose pour Noël, qui est toujours le 25 décembre. Que Noël soit le mardi, le mercredi ou le jeudi, ça reste Noël, c'est une journée fériée fixe. C'est la même chose pour le Jour de l'an. Qu'est-ce que vous voulez, le Jour de l'an, ce sera toujours le 1er janvier, on n'y peut rien. On vient faire à peu près la même chose mais, ce faisant, M. le Président, on vient, à toutes fins pratiques, même si on ne le met pas dans la loi sur les fêtes nationales, on vient en faire un congé, on vient donner au 1er juillet une espèce de prestige, sans faire d'arrêté en conseil, pour faire des grands discours sur la place publique, pour annoncer ça avec tambours et trompettes. On vient faire, de façon détournée, de façon subtile, ce que beaucoup de fédéralistes apprécieraient grandement qu'il soit fait.

Quand mon collègue demande de rencontrer le Conseil du patronat, je peux vous dire que je l'appuie à 100 %. Ce serait très intéressant de savoir ce que le Conseil du patronat veut faire avec ça, ce qu'il pense de ça, le Conseil du patronat. On sait que le Conseil du patronat était en désaccord total avec le fait que la fête nationale des Québécois, qui est le 24 juin, soit fêtée le 24 juin, de façon ferme et fixe. Là, on parlait d'une fête nationale, M. le Président, qui est la nôtre. Alors, le Conseil du patronat s'était tout à fait objecté à ça, il n'était pas d'accord avec ça. Quand le Parti libéral a repris le pouvoir, en 1985, on sait - et ça, c'est facile de retrouver les articles de presse qui font état des représentations du Conseil du patronat, à ce moment-là - que le Conseil du patronat est venu faire des pressions, a fait du lobbying auprès du gouvernement pour en arriver à faire changer ce statut à notre fête nationale, pour que les travailleurs puissent, en fait, pour que cette

fête-là puisse être changée de date, puisse être mobile, comme d'autres fêtes qu'on a et qu'on connaît, M. le Président. Ce serait intéressant de rencontrer ces gens-là pour voir comment ils perçoivent, non seulement... mais à partir du moment où le gouvernement sera tanné de nous entendre - si jamais il en arrive à ce point - ce serait intéressant de savoir comment ils perçoivent ça, M. le Président.

Je regardais... Quand je vous disais que c'est facile de ressortir les articles de presse, le ministre de l'époque, on se rappellera, en 1986, avait reculé là-dessus. M. Paradis, qui était le ministre du Travail à ce moment-là, n'avait pas déposé de projet de loi allant dans le sens des volontés du Conseil du patronat. C'était très clair. Selon le Conseil du patronat, il nous expliquait, à ce moment-là, que le fait de célébrer la fête nationale en milieu de semaine ou tout simplement le mardi, comme cette année-là, en 1986, coûte énormément cher aux entreprises qui doivent relancer deux fois leurs chaînes de production ou maintenir les employés au travail, moyennant une rémunération double. C'est ce que le Conseil du patronat disait, en 1986, par rapport à la fête nationale du 24 juin qui tombait, cette année-là, en milieu de semaine, M. le Président. Et on n'en avait qu'une. Qu'est-ce qu'il dirait cette année, pensez-vous? Ce serait intéressant de savoir ce qu'il dirait, parce qu'on va en avoir deux de file, hein? On va avoir la fête nationale, le 24 juin, qui va être un mercredi aussi et, la semaine suivante, selon le projet de loi qu'on a devant les yeux, on aura le 1er juillet, encore en milieu de semaine, un mercredi aussi. Je trouve que ça serait important que le gouvernement ait au moins un avis de ces gens-là, qui sont dans le milieu, des intervenants du monde du travail. Pourtant, le Conseil du patronat, c'est un des intervenants, à mon sens, en tout cas, à tout le moins de ce qu'on peut voir dans les différents projets de loi qui nous sont passés, c'est un des intervenants privilégiés de ce gouvernement, M. le Président, le Conseil du patronat. Je ne vois pas en quoi ce serait abusif de demander l'avis du conseil du patronat. Nous autres, on est prêts à entendre l'avis du Conseil du patronat sur le dossier. (16 heures)

Je regarde ce qui se passe en Chambre avec la loi 35, ça vient à peu près directement du Conseil du patronat, aussi. Hein? Avec, évidemment, la collaboration pleine et entière de M. Diamant, qui est le président de la CSST, parce que, lui, c'est ses droits de gérance qu'il protège par le biais de la loi 35. La loi 35, on en parle présentement en Chambre. On est en troisième lecture, une très mauvaise loi, M. le Président, dont le gouvernement aura à assumer la responsabilité. Tout ce qu'on peut faire, nous autres, finalement, quand il arrive des mauvais projets de loi comme ça, M. le Président, tout ce qu'on peut faire, c'est de dénoncer, de parler, d'es- sayer de faire entendre raison au gouvernement, puis d'essayer d'être le plus possible représentatifs des différents intervenants des milieux concernés. C'est tout ce qu'on peut faire, nous autres, ici. Il y a des projets de loi, comme ça, qui nous arrivent, qui sont de très mauvais projets de loi. Dans le cas de la loi 35, c'est évident que le gouvernement en portera lui-même la responsabilité parce que, finalement, c'est un projet de loi où on n'a entendu personne non plus, exactement comme ce qu'on est en train de faire présentement, où on ne veut pas entendre l'avis de personne.

Le gouvernement a raison, a toujours raison, et il se fiche éperdument, à toutes fins pratiques, de l'avis des intervenants du milieu puis des milieux concernés. Le Conseil du patronat, à mon sens, devrait venir nous dire ce qu'il en pense, devrait venir nous dire si c'est intéressant pour lui, s'il trouve qu'il appuie ce projet de loi là. Ce serait intéressant pour tout le monde d'entendre ça, M. le Président. On sait comment c'est puissant, le Conseil du patronat, pour le gouvernement. Peut-être que ça leur ferait entendre raison quelque part. Aussi, dans ce projet de loi là, on pourrait demander comment il trouve ça, le Conseil du patronat, qu'on ajuste aussi le montant des amendes qui sont prévues pour la fête nationale. Je le sais, je ne veux charrier personne, ça ne s'appliquera pas pour la fête du 1er juillet, mais c'est intéressant de voir l'augmentation qui arrive. Sur les amendes, 25 % d'augmentation, M. le Président. Je sais que le Conseil du patronat est très sensible aux données économiques, aux chiffres. Ce serait intéressant qu'il vienne nous expliquer son point de vue, qu'il vienne nous dire ce qu'il pense de ce genre de mesures là qu'on est en train de nous voter dans ce projet de loi, M. le Président, le projet de loi 21.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Je vais reconnaître maintenant Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Merci, M. le Président. Le Président (M. Marcil): Pour dix minutes. Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, je vous remercie beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, effectivement, le Conseil du patronat est réellement visé par le projet de loi 21, puisqu'il doit assumer, d'une certaine façon, la répartition des jours fériés au calendrier dans le domaine du travail et dans les relations de travail. Donc, c'est tout à fait normal que nous demandions au Conseil du patronat de venir se présenter ici à cette commission parlementaire pour nous donner, en fait, la perception qu'ils s'en font, et les

avantages et les désavantages de faire en sorte que le 1er juillet, qui était une fête mobile, devienne une fête fériée, chômée, la journée même où elle se produit.

Je pense, M. le Président, comme on connaît le Conseil du patronat... On se souviendra très bien de la position qu'avait prise le Conseil du patronat dans les années quatre-vingt, au moment du référendum. On se souvient très bien que leur option avait déjà été bien clairement définie, puisqu'ils étaient dans ie clan du non, qu'ils s'étaient vraiment prononcés en faveur de la Confédération, et qu'ils avaient fait un acte de foi en fonction du fédéralisme, M. le Président. Alors, c'est bien évident que, pour eux, on arrive à vouloir faire des brèches au niveau du 24 juin... Ça ne me surprend pas, jusqu'à un certain point, de voir à quel point... Pour eux, le côté patriotisme leur fait mal. En fait, de démontrer qu'on peut avoir une forme de fierté, c'est comme, vous savez, si, pour ces gens... Au niveau du Conseil du patronat, il faut être plus catholique que le pape, M. le Président. Là-dessus, je vais vous dire pourquoi. C'est que, même au moment... En 1982, lorsqu'on a fait le débat pour reconnaître la fête du Canada comme étant l'appellation, pour reconnaître, si vous voulez, ce symbole qui pourrait favoriser le rassemblement de l'ensemble de l'unité canadienne, eh bien, il y a eu énormément de débats, encore là, en 1982. Même certains fédéralistes reprochaient alors au gouvernement de Trudeau de vouloir faire de la fête du Dominion, de la fête du Canada, une fête à tendance politique et non pas nationale, une fête qui était uniquement pour favoriser une unité canadienne parce qu'on venait de passer un référendum, M. le Président. Regardez, maintenant, dans notre contexte politique actuel. C'est peut-être pour ça aussi que je me dis que le Conseil du patronat a déjà l'impression qu'il se trouve sous le parapluie du non, à l'heure actuelle. En tout cas, je ne le sais pas, mais ça aurait été heureux de voir s'il y a eu une modification depuis les années 1980 à aujourd'hui, dans leur orientation, en ce qui concerne leur position vis-à-vis du fédéralisme, s'il n'y aurait pas une possibilité pour eux, en fait, de faire en sorte, bien sûr, qu'on puisse regarder le Canada comme une entité et le Québec comme une entité et que, à ce moment-là, on se respecte mutuellement, chacun sur nos territoires donnés, avec nos fêtes nationales, telles que nous avons toujours eu l'habitude de les reconnaître et de les fêter, M. le Président.

Ce projet de loi m'a permis de retourner à l'histoire et de découvrir certains passages assez intéressants de notre histoire, surtout au moment où il y a eu les débats en ce qui concerne la reconnaissance de la fête du Canada, et de découvrir à quel point, pour les gens, cette fête du Canada représentait très peu pour eux. L'ensemble du Canada, surtout à Québec, bien sûr, représentait... mais très très peu. Le débat, en fait, n'était pas autour de cette fête. On trouvait que c'était diminuer l'impact de la fête du Dominion. On ne voulait pas reconnaître vraiment ce symbole, cette image du Canada qui était d'un océan à l'autre. On trouvait que, quelque part, c'était le grand rêve, vouloir appeler cette fête la fête du Canada, c'était le grand rêve de Trudeau.

Alors, je pense que, effectivement, on a toujours pu comprendre que le Conseil du patronat était un petit peu relié, était beaucoup plus relié au grand rêve de Trudeau que... À certains égards, pour certains... Je ne dis pas que l'ensemble des gens d'affaires favorisent le même projet ou le même rêve, M. le Président, mais au niveau du Conseil du patronat, dont la voix se fait entendre par M. Ghislain Dufour, on sait très bien, en fait, l'orientation. Effectivement, il supportait réellement les tendances de M. Trudeau à l'effet que le Canada prenne une beaucoup plus grande place que le Québec. Inévitablement, ça a un effet d'entraînement en ce qui concerne la reconnaissance de nos fêtes nationales, M. le Président.

On reprochait énormément, à l'époque... On a reproché - ça, c'est en 1982, c'est 10 ans, depuis le temps, M. le Président. Peut-être que, en fait, le Conseil du patronat aurait pu dire: Bien nous, on a révisé nos positions. On a une façon différente de voir les choses, en ce qui nous concerne... De voir aussi tout l'impact économique que peut avoir une telle orientation, de changer comme ça, de même, cette façon de faire, de reconnaissance au niveau... En fin de compte, M. le Président, avec la fête nationale du Canada, puis en même temps et par ricochet... En fait, ce sont les seuls, le Conseil du patronat, qui suggéraient aussi en même temps qu'on fasse la même chose, c'est-à-dire qu'on mette sur le même pied la fête du Canada et la fête nationale des Québécois, M. le Président. C'est assez particulier que ces gens, qui sont des leaders, et qui devraient, au contraire, prôner la fierté du Québec. En fait, ces gens sont un petit peu... ils mettent, en tout cas, le développement, la reconnaissance du pays en jeu, M. le Président. Je trouve ça malheureux, d'une part, mais mon jugement est peut-être erroné. Ça aurait été une occasion extraordinaire de pouvoir entendre le Conseil du patronat pour, justement, rectifier le tir, si jamais il y avait eu possibilité, en fin de compte, d'échanges. (16 h 10)

Je ne sais pas, je suis une personne qui, en fait, quand on m'apporte des arguments convenables, peut entendre raison dans certaines circonstances, M. le Président. Mais, à ce moment-ci, je n'ai qu'une découpure de journaux - Le Soleil du 17 mai 1986 - où on dit que le Conseil du patronat, en fait, était favorable à ce qu'on fasse de la fête de la Saint-Jean-Baptiste une fête... On voulait modifier pour que la fête de la Saint-Jean-Baptiste soit célébrée le

lundi précédent, lorsque le 24 juin coïncide avec la fête sur semaine ou un autre jour ouvrable, M. le Président. Donc, on voit bien que, pour le Conseil du patronat, déjà, il y avait un intérêt, bien sûr, quand ils disaient: C'est peut-être plus facile pour nous d'administrer quand c'est une fête statutaire. Quant à nous, en fait, on trouve ça préférable que d'oeuvrer de cette façon. Maintenant qu'on avait trouvé le moyen de donner à l'ensemble des travailleurs et des travailleuses une fête statutaire, en ce qui concerne le congé de la fête du Canada, bien, écoutez, c'était une occasion privilégiée pour l'ensemble de ces travailleurs et de ces travailleuses d'avoir trois jours au moment d'une fin de semaine de congé.

Le Président (M. Marcil): En conclusion, Mme la députée.

Mme Vermette: Ça aurait été, en tout cas, tout à fait heureux que le Conseil du patronat vienne nous dire ce en quoi il était nécessaire, sur des points économiques, de changer la façon de faire les choses qu'on a toujours faites, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): merci beaucoup, mme la députée. maintenant, est-ce qu'il y a d'autres intervenants? oui, m. le député de masson.

M. Blais: J'ai une autre motion de...

Le Président (M. Marcil): Donc, on va mettre celle-ci aux voix. Est-ce que la motion est adoptée?.

Une voix: Adopté.

Une voix: M. le Président, je demande le vote.

Le Président (M. Marcil): Vous demandez le vote, ça va. Vote nominal, ça va? Bon, je vais vous appeler. Mme Cardinal (Châteauguay)?

Mme Cardinal: Excusez-moi, j'étais... Contre.

Le Président (M. Marcil): Contre. M. Russell Williams (Nelligan)?

M. Williams: Contre.

Le Président (M. Marcil): Mme Loiseile (Saint-Henri)?

Mme Loiseile: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Bourbeau (Laporte)?

M. Bourbeau: Tout contre.

Le Président (M. Marcil): Tout contre. Mme Vermette (Marie-Victorin), excusez-moi?

Mme Vermette: Oui. Pour.

Le Président (M. Marcil): Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière)?

Mme Carrier-Perreault: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Et M. Blais (Masson)?

M. Blais: Je suis pour.

Le Président (M. Marcil): Donc, la motion est rejetée. Je vais appeler l'article 1... Pas immédiatement...

M. Bourbeau: Est-ce qu'on peut passer à l'article 1, M. le Président?

M. Blais: J'aurais une motion avant, si vous permettez, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Oui, je vais écouter votre motion.

M. Bourbeau: Là, je suis assez étonné, je dois dire. Là, je suis étonné.

Motion proposant d'entendre le Mouvement national des Québécois

M. Blais: Malgré la guillotine, qui tombera à 18 heures, «il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende le Mouvement national des Québécois.»

Le Président (M. Marcil): Ah sainte Anne! Donc, la motion étant considérée comme rece-vable, je vais écouter le député de Masson...

M. Blais: Pendant une petite demi-heure.

Le Président (M. Marcil): ...pendant une petite demi-heure et, durant ce temps, je réfléchirai silencieusement à vos arguments.

Mme Carrier-Perreault: Là, ça veut dire qu'il va piquer un somme!

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Hier, j'ai essayé de vous expliquer les origines

du feu de la Saint-Jean, et je pense que, pour beaucoup de personnes, ça a été très instructif. La Société nationale des Québécois est aussi, comme la Société Saint-Jean-Baptiste, une société qui représente les francophones. Dans certaines parties du Québec, il y a la Société Saint-Jean-Baptiste et, dans d'autres, la Société nationale des Québécois. Ça revient à peu près au même, ces deux... Il y a des choses certainement qu'on a apprises hier, qu'on savait peut-être dans notre prime jeunesse, mais qu'on a répétées ici, et qui ont réveillé des souvenirs. Les choses vont nous rester gravées jusqu'à la fin de nos jours. Quand on le répète à un certain âge, les choses qu'on a apprises, étant tout bambins... Entre autres, je n'avais pas souvenance personnellement, moi, qu'au feu de la Saint-Jean, dans l'ancien temps, c'était regardé comme la lumière un peu qui éclaire la vie, et qu'au-dessus, au faite, on mettait un panier avec un renard et des chats qui représentaient les mauvais esprits. Je n'avais pas souvenance de ça. À cause de cette loi, j'ai fait des recherches et, ça, je m'en souviens beaucoup. Je me souviendrai aussi d'une chose que je me suis rappelée. C'est à IHe d'Orléans, les feux avec les bardeaux. Ça, c'est une chose dont je ne me souvenais pas, que les feux de IHe d'Orléans étaient faits avec des bardeaux, qu'on mettait de la paille entre et qu'avec le brandon on allait l'allumer. Quand il était mal bâti ou que les bardeaux étaient mal placés, le feu éclatait et on était obligé de le rallumer. La personne qui avait monté le feu avait manqué de bardeaux, d'où l'expression «il lui manque un bardeau». Je ne me souvenais plus de ça.

Mais je me suis remémoré ça. J'ai regardé les livres des ancêtres, puis j'ai bien remarqué... Il y a beaucoup de mots comme ça, et de choses dont on ne se rappelle pas toujours, comme enfirouâper. Puis, on dit ça en argot. Il y a des mots dont on ne se souvient pas. Enfirouâper, on dit ça très souvent, c'est en argot québécois. Mais, dans notre histoire, nous savons de quoi ça vient, la plupart de nous. Mais quand ça fait longtemps qu'on ne l'a pas entendu, ça vient de... Anciennement, on transportait le... On allait en excursion, les chasseurs s'en allaient dans le bois, et ils emmenaient leurs fusils. Ils ne voulaient pas, à cause des tempêtes, des rapides, etc., quand ils avaient pris leurs peaux, ils avaient étendu... Les peaux de castor, vous savez qu'on étire ça avec des clous, etc. On enveloppait tous les fusils et les aliments dans la fourrure, pour ne pas qu'ils subissent les intempéries. C'était «in fur wrapped». Et les Québécois, nous autres, on dit «enfirouâpé». Ça vient de là, «in fur wrapped». Ça fait curieux, mais on a beaucoup de choses qui nous viennent des expressions anglaises, comme une mitaine. Ça, on le sait tous, ça vient de «mitten».

Mais il y a des choses comme ça dont on se rappelle quand on relit l'histoire. Puis, c'est intéressant de revoir ça. Comme bécosse, ça vient de «back house». Tout le monde le sait, mais «in fur wrapped», c'est un peu plus difficile. Comme quétaine. Quétaine, on dit tous ça, c'est quétaine. Ça vient de quoi? Certaines personnes disent que ça vient d'une famille de l'Estrie. C'est absolument faux. C'est qu'au Moyen Âge et au début de la colonie il y avait un poteau sur la place publique, et quelqu'un qui avait fait une faute, surtout contre l'Église, à l'époque, on l'attachait, mains liées derrière le dos, à ce poteau, pour 24 heures. Ce poteau s'appelle la quintaine. La personne était en punition parce qu'elle avait fait une chose qui n'était pas normale, qui n'était pas correcte ou que la société, à l'époque, n'acceptait pas. Là, on la mettait à la quintaine, et la personne devenait une quintaine, qui est devenu quétaine avec l'usure, avec l'usage, avec le temps. Ça vient du pilori qui était là, où les gens étaient attachés, qui était la quintaine.

Alors, il y a beaucoup de choses qu'on se remémore. Si cette loi a une valeur, ce serait celle de se remémorer des choses comme ça, et puis de revenir à nos sources, etc. Mais point n'est là le sujet de la discussion que je voudrais avoir avec vous, M. le Président, et ceux qui vous accompagnent autour de la table. C'est que je voudrais essayer de faire un bref historique du fait que la Saint-Jean-Baptiste soit devenue, finalement, la fête des Québécois.

Comme j'ai fait l'histoire du feu, je devrai faire l'histoire de la Saint-Jean-Baptiste elle-même. C'est tout de même assez vieux. Je ne remonterai pas à l'époque païenne, parce que ce serait abusif dans les circonstances, mais je voudrais tout simplement dire pourquoi saint Jean Baptiste est devenu le patron des Québécois.

Nous constituons et nous proclamons saint Jean-Baptiste, patron spécial des Canadiens français qui sont au Canada et de ceux qui vivent sur la terre étrangère. C'est un extrait du bref émis le 25 février 1908 par Sa Sainteté le pape Pie X, cédant ainsi à une demande de Son Eminence le cardinal Bégin, suite aux voeux de la Société Saint-Jean-Baptiste du Québec, que lui avait transmis son président, l'honorable Adélard Turgeon. Alors, officiellement reconnu par l'Église, parce que les saints sont reconnus par l'Église, et c'est normal. (16 h 20)

Je me souviendrai d'une anecdote de saint. Lorsque M. René Lévesque est décédé, plusieurs grandes villes, pour l'honorer, ont donné des noms de rues, des noms de monuments, ou ont voulu rendre hommage à M. René Lévesque. À Montréal, le boulevard Dorchester, pour la partie qui est dans l'est... et, dès qu'on arrive à Westmount, la mairesse a refusé. Puis, c'est par étroitesse d'esprit. Ce n'est pas nous qui étions étroits, c'est elle. Ils n'ont pas voulu. Mais ici, à Québec, ce serait très normal qu'il y ait une rue René-Lévesque. Je me souviens qu'à l'époque, ma secrétaire avait écrit au maire de Québec pour

lui demander de trouver un nom de rue qui porterait le nom de René Lévesque et elle suggérait, entre autres, Saint-Cyrille. M. Pelletier a répondu à ma secrétaire, à l'époque: Ce nom Cyrille est là pour le père de celui qui a fondé le Jardin botanique, le frère Marie-Victorin, qui s'appelait Cyrille. Il disait que c'était en son honneur et que c'était difficile de changer ça. On a regardé la réponse, M. le Président, ça nous avait fascinés un peu. Je dis ça parce que, Pie X, c'était celui qui pouvait - encore des ecclésiastiques - canoniser quelqu'un. Mais vu que le père du frère Marie-Victorin n'était pas saint, même s'il s'appelait Cyrille, j'ai demandé par lettre, au maire de la ville, M. Pelletier, de quelle autorité il avait canonisé Cyrille, pour dire que cette rue était là à cause du père du frère Marie-Victorin. Tout en me questionnant sur la lettre, j'ai dit: Je crois que je comprends. Vu que vous vous appelez Jean et qu'il y a déjà la rue Saint-Jean, je comprends tout. Je n'ai pas eu de réponse. Tout ceci pour vous dire - c'est une anecdote vécue, historique - que, pour déclarer Saint-Jean-Baptiste patron, qu'on dit, des Canadiens français, il fallait Sa Sainteté et, à l'époque, c'était le deuxième successeur de Pie VII, c'est-à-dire Pie X. C'est lui, à la demande du cardinal Bégin, qui a fait le décret.

Pie VII avait fait, lui, après le calendrier grégorien de 1483 - vous devez certainement être au courant de ça - un réajustement du calendrier grégorien que l'on a aujourd'hui, parce qu'il y a des difficultés. Tous les 400 ans, il n'y a pas d'année bissextile. Vous savez, 400 ans, même si ça se divise par 4, il n'y a pas de 29 février. Je ne sais pas si vous saviez ça?

Une voix: Non.

M. Blais: Je crois que l'an 2000 qui vient... 1996, c'est une année bissextile, ça se divise par 4; 2000, c'est une année bissextile, elle ne le sera pas, il n'y aura pas de 29 février. Vous voyez que l'histoire, c'est bon de se la rappeler de temps à autre. Même si ça se divise par 4, ça se divise aussi par 400. Se divisant par 400, il n'y aura pas de 29 février en l'an 2000. Le calendrier de Pie VII, qui avait fait la dernière fuite aquatique de Grégoire XIII...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Marcil): Votre temps compte.

M. Blais: Les silences ne sont pas enregistrés, M. le Président?

Le Président (M. Marcil): Oui, vous pouvez, c'est...

M. Blais: Non non, le temps compte, mais le silence n'est pas enregistré dans le Journal des

débats.

Le Président (M. Marcil): Non. Vous êtes exactement comme en musique: il y a des portées, il y a des silences, il y a des soupirs. Il peut y avoir des écarts, à l'occasion.

M. Blais: D'accord. Excusez-moi de...

Le Président (M. Marcil): II s'agit d'avoir la bonne clé et d'être sur la bonne portée.

M. Blais: Vous êtes très aimable. Excusez-moi de mon point d'orgue, je change de clé!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Ce bref pontifical reconnaissait officiellement le choix populaire, vieux de près de trois siècles. En effet, notre peuple a toujours célébré la fête de la Saint-Jean. Les «Relations des Jésuites», à partir de 1636 - on voit que ce n'est pas d'aujourd'hui - content la cérémonie qui a lieu à la Saint-Jean. Nos ancêtres, qui ont apporté de France cette pratique du Xllle siècle... et, en France elle-même, a reçu une fête des plus... très haut, toujours reconnue par l'Église et toujours célébrée... Il y a toujours le côté laïc et le côté religieux... Mais on dit surtout que, cette fête-là - on vient de différentes parties de la France - on la doit surtout à nos ancêtres normands. Vous savez, moi, je ne suis pas normand, je suis breton, mais j'ai le physique des Normands, c'est-à-dire: grosse poitrine épaisse, la poitrine, poitrine épaisse. Je ne suis pas très grand: 5 pieds et 9 et demi. Les Normands sont des gens trapus, des résistants de la terre, des percherons. En France, le Normand est le percheron de la génération humaine, le cheval un peu plus «étalonné».

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Alors, Benjamin Suite, qui est un historien, dit ça: Les Normands déjà fixés au Québec en 1618 s'étaient donné, le 24 juin, le plaisir d'un feu de joie et autres réjouissances habituelles en ces occasions. Pour que l'Église reconnaisse un saint, il faut absolument - parce que l'Église, c'est difficile lui faire reconnaître les saints, a l'Église; on sait qu'il y a beaucoup de monde qui se bat pour ça - pour que l'Église reconnaisse les saints, il faut absolument avoir des preuves de la véracité de la vie particulièrement austère de la personne, etc. Quand quelqu'un est reconnu comme saint, bien, là, l'Église peut, par proclamation du pape - je pense qu'on appelle ça...

Une voix: On commence par les béatifier.

M. Blais: Oui, mais, quand ils sont saints, ils peuvent les nommer patrons. C'est ce qui

nous est arrivé, nous autres, pour saint Jean-Baptiste. Alors, vive les saints!

Dès les premières célébrations de la Saint-Jean, chez nous, la fête comportait toujours une partie religieuse. Parfois, l'on chantait le Bene-dictus. Je suis persuadé que ceux qui ont fait leur classique, à la table ici, se rappellent du Benedictus. On chantait ça. Le Domine salvum fax aussi, mais c'est entendu qu'aujourd'hui on a oublié le Domine salvum, il y a juste le fax qui marche un peu.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: On a oublié le... Tu sais, je veux dire... On dit que les parties religieuses tombent beaucoup de nos coutumes. Il ne nous reste que le fax aujourd'hui. On chantait le Te Deum. Ça, c'est encore fait. D'ailleurs, au 350e anniversaire de Montréal, l'Orchestre symphonique de Montréal, sous la direction de M. Dutoit, à l'église Notre-Dame, a joué un Te Deum pour l'ouverture des fêtes du 350e.

D'ailleurs, un de mes petits-cousins, qui a un bambin qui a sept à huit ans, était chez moi et on écoutait en même temps. Il me demande, il dit: C'est l'ouverture du 350e anniversaire de Montréal. Je ne comprends pas - il m'appelle «mon oncle» - je ne comprends pas, mon oncle, pourquoi on fête le 350e anniversaire de Montréal et qu'on "oit, à la télévision, des annonces qui disent le 125e anniversaire du Canada. On était où avant? Tu sais, les enfants, parfois, ont de ces questions qui nous ramènent à la réalité. On était où avant, mon oncle? Ça m'a fait réfléchir, beaucoup beaucoup, beaucoup beaucoup. On était certainement quelque part. Peut-être qu'il serait bon de revenir où nous étions. C'est ce que nous défendons, nous.

Alors, que disais-je? Là, on disait qu'on chantait des... Mais, une chose, ici, qui va paraître très curieuse, et qui va en surprendre certainement plusieurs du côté historique. C'est qu'ainsi, par exemple, chez les Iroquois de Sault-Saint-Louis - oui oui, je vous dis ça pour votre propre gouverne - chez les Iroquois de Sault-Saint-Louis, ce qui est Caughnawaga, aujourd'hui, les strophes latines chantées par les Blancs alternaient avec les strophes iroquoises. Il y avait un Te Deum laudamus, puis il y avait «Boum ba choum badum bom choum». Ça marchait, il y avait des réponses indiennes et des réponses latines. Aujourd'hui, le «Bom bom choum» est devenu très populaire à Kahnawake. Le député de la place connaît certainement par coeur les chansons folkloriques iroquoises, surtout le «Bom bom choum», hein? Le «Bom bom choum», je pense qu'il est très connu. C'est un peu comme «Les fraises et les framboises» pour les Québécois. Le «Bom bom choum», c'est vraiment, dans le folklore iroquois, «Les fraises et les framboises» des Québécois, le «Ô Canada» des Ontariens ou que sais-je encore? C'est donc dire que même les Iroquois de l'époque épousaient la Saint-Jean comme fête nationale. Ils prenaient part à l'identité de ceux qui habitent le Québec, et non, ils n'étaient pas en guerre à l'époque, malgré que les Iroquois, entre parenthèses, côté historique, ont été à peu près les seuls avec qui on a eu des problèmes, du côté... On a guerroyé un peu avec eux, parce que les Américains les faisaient monter vers chez nous et, eux autres, ils ont été un petit peu suicidaires, presque génocidaires - si ça se dit - pour les Indiens, ce que nous, nous n'étions pas. Nous avions des bonnes ententes avec toutes les tribus. Nous avions les mêmes attributs à donner aux Iroquois, mais ils arrivaient et ils ne connaissaient pas notre mentalité. Nous avions une mentalité Saint-Jean-Baptiste, mais pas nécessairement dans le sens de mouton à toujours plumer. Pas toujours. Pas toujours. Des fois, on met son casque, son béret français. Mais, même si c'est l'emblème du Canada, ce n'est pas tous les jours que le castor... on ne le tord pas tous les jours, c'est sûr. Elle a passé tout «dret», celle-là. (16 h 30)

Après la conquête, on continue d'une manière ou d'une autre à fêter la Saint-Jean dans les paroisses et sur la côte du Saint-Laurent. «Les Anciens Canadiens», que tout le monde a certainement lu, et les «mémoires», de Philippe Aubert de Gaspé, décrivent la fête il y a 150 ans et le Dr Larue, les feux de joie de IHe d'Orléans, vers 1810, après avoir chanté, etc. On dit aussi qu'en 1850 bien des feux entre Québec et Trois-RMères étaient allumés. Ces feux sur le bord du fleuve se regardaient les uns les autres, tout le pays semblait en feu, en fête, et le long de la rive... D'ailleurs, on a été longtemps à n'habiter que les bords du Saint-Laurent. D'ailleurs, le Haut-Canada de l'époque, qui représentait ce que nous étions... dit qu'un peuple, sur le bord du Saint-Laurent, vit heureux et en paix. Aujourd'hui, ça a bien changé.

La Saint-Jean était alors, on le voit, surtout populaire, une coutume, mais ils disent: une coutume poétique. Bien voyons donc! La Saint-Jean était alors... C'est ça qui est curieux, c'est qu'on dit: Ça, c'est un angle qu'on ne voit pas et que je n'ai pas beaucoup connu, moi. Je ne sais pas si mes consoeurs ici, à la table, ou quelqu'un autour de cette table savait que la Saint-Jean était alors, on le voit, surtout populaire. Ça, on l'a vu par beaucoup... mais une coutume poétique. Ça, la coutume poétique de la Saint-Jean du côté ancestral, je vous jure, M. le Président, que je vais faire de nouvelles recherches là-dessus. Si c'était une coutume poétique, ça voudrait donc dire qu'à l'époque, à la fête de la Saint-Jean, on voyait certainement des rassemblements de familles. Les poètes de la famille ou du coin récitaient certainement des vers, peut-être de là nos chansons de Théodore Botrel. Ceux qui connaissent «La Bonne Chanson», il y a beaucoup de chansons qui rappellent le passé

historique. Quand on était jeune, on chantait «Le chapeau de paille», par exemple. C'est beau, mais, quand on était jeune, on ne comprenait pas le sens de ces mots-là. Pensons-y! «Le chapeau de paille», c'est une chanson très révolutionnaire: «À Saint-Denis, près d'un grand bois, un jour d'orages et de batailles, je mis pour la première fois mon chapeau de paille. Sans égard pour mon beau chapeau, contre l'ennemi la canaille, nous nous battîmes sans repos en chapeau de paille.» C'est une chanson révolutionnaire, ça, puis on dirait que, ce chapeau-là, on l'a oublié à certains moments. Oui. On voit le ministre dont j'apprécie - je le dis toujours et je ne perds jamais une occasion de le dire - le sens du nationalisme. Il est très nationaliste, ce ministre-là. C'est vrai et j'adore ça parce que c'est plus proche de ma position. Je vois qu'il sait ces chansons-là. Il y en a beaucoup qui se chantaient à la fête de la Saint-Jean. «Le violon brisé»...

Une voix: ...brisé.

Une voix: On l'a réparé depuis ce temps-là.

M. Blais: Oui, on a essayé, mais on manque d'arcanson sur votre côté aujourd'hui. Au tout début de la colonie, quand on est arrivés, on était des Français; on est devenus après des Canadiens; on est devenus après des Canadiens français et, là, on veut devenir des Québécois. Ça fait quatre fois depuis 400 ans qu'on demande au peuple québécois de changer de nationalité. Mais, à l'époque où les francophones d'ici se sentaient des descendants de la France, il y a des chansons qui ont été écrites et «Le violon brisé» en est une. C'est une chanson issue de la Révolution française que les francophones d'ici transportaient pour, eux, libérer le territoire québécois. Je ne me rappelle pas tous les mots, mais ça disait: «Ils ont brisé mon violon parce que j'ai l'âme française et que sans peur, aux échos du vallon, j'ai fait chanter la Marseillaise». Nous, ça nous touche moins parce qu'on se sent un peu séparés de la France. On reconnaît que c'est nos ancêtres et on a beaucoup d'affinités, mais on ne se sent pas des Français vivant en Amérique du Nord, on se sent des Québécois. Mais le sens est d'une beauté, pour quelqu'un dont ses ancêtres sont issus de la France: «Ils ont brisé mon violon parce que j'ai l'âme française et que sans peur, aux échos du vallon, j'ai fait chanter la Marseillaise». Alors, le soldat anglais est venu. Il a brisé son violon. Ils lui ont brisé le coeur et son instrument de défense parce qu'on a toujours été pacifistes, des pacifiques. C'est par le folklore, le chant, la poésie, voilà le poétique de la Saint-Jean. Combien y en a-t-il dans «La Bonne Chanson»? Dans les 13 albums de «La Bonne Chanson», combien il y en a de chansons comme ça, des chansons qui sont issues des fêtes de la Saint-Jean et qu'on ne se remémore pas, mais qu'il serait bon de regarder pour retrouver les sources de motivation de ce pays en devenir? «Ô Carillon! je te revois encore!» Combien de personnes ont chanté ça? En tout cas, vous avez... Oui. Je sais. Je sais. J'apprécie toujours. Mais le ministre connaît ces choses-là, cet esprit. Vous avez l'écorce d'un Québécois pure laine. J'adore ça. J'adore ça. Je vais vous...

M. Bourbeau: ...avant longtemps je vais passer pour un vrai...

M. Blais: Non, non. Vous êtes un... Ce n'est pas une honte de passer pour un nationaliste. Je m'excuse. Et je sais que vous n'en avez pas honte non plus.

Bon. Alors, ce côté poétique...

Le Président (M. Marcil): Ne le dites pas trop souvent. Si M. Ryan l'entend, il va...

M. Blais: En tout cas... Mais je pense que ça explique un peu le mot «poétique». Je ne sais pas s'il y en a ici qui se rappellent d'autres chansons révolutionnaires qu'il y a dans «La Bonne Chanson». J'essaie de penser à d'autres... «Le chapeau de paille», «Le violon brisé», «ô Carillon!» Est-ce que vous en avez d'autres que vous pensez qui auraient pu représenter le côté poétique de la fête de la Saint-Jean? Moi, ça fait trop d'années que je n'ai pas regardé ça, mais ça demeure quand même... Ça demeure quand même... Est-ce que M. le ministre en aurait quelques-unes qu'il se remémore? Vous pouvez y aller. Vous avez mon consentement.

M. Bourbeau: M. le Président, je croyais que c'était le député de Masson qui avait la parole. Il me semble que... 30 minutes, si j'ai bien compris?

M. Blais: Oui, mais mon grand sens de la démocratie... Vous savez, si vous pouvez aider à influencer le législateur... De votre part, ce serait très bienvenu. Ils disent que la Saint-Jean était alors, on le voit, surtout populaire, une coutume poétique. La date du 24 juin n'en était pas moins tout indiquée pour le jour où on voudrait instituer la fête patronale et la fête nationale. Et voici qui? Le nationaliste Ludger Duvernay sut le comprendre. Ludger... On dit Ludger, mais les Acadiens disent «Ludgère», comme Viola Léger. Nous autres, on dit M. Léger; eux autres, ils disent «Légère». Nous autres, on dit encore l'«aile de l'auto»; au Nouveau-Brunswick, ils disent le «fender». Ils sont rendus plus loin. Ludger Duvernay sut le comprendre. Aussi, son initiative, le 24 juin 1834, de doter les Canadiens français d'un patron national, d'une fête nationale, d'une société nationale suscita-t-elle l'enthousiasme de tous ses compatriotes. On voit que c'est loin. Quand on est un peuple colonisé et conquis et qu'on veut

la moindre parcelle du bouquet de notre fierté nationale, il faut beaucoup de patience; 1834, et ce n'est qu'en 1908 que ce fut accepté par les autorités religieuses. On voit le cheminement qu'on a à faire. Quand on est valet, on n'est pas roi. Alors, c'est le 24 juin, de doter le Canada français d'un patron national, d'une fête nationale, d'une société... C'était beaucoup d'enthou-siame. Dès 1835, 1836 et 1837, la Saint-Jean-Baptiste s'officialise et se célèbre un peu partout, notamment - écoutez bien les noms - à Saint-Denis, Terrebonne, Saint-Benoît, Saint-Ours, Boucherville, Saint-Jacques-de-l'Achigan, Trois-Rivières, Saint-Hyacinthe, même Saint-Hyacinthe, etc. Ça veut donc dire que, dès 1835, 1836, c'était généralisé. Et puis, qu'est-ce qui arrive? Un peu plus tard, on la fête partout à travers le Québec, en Acadie, aux États-Unis, «le cérémonial se ressemblait partout et partout des messages solennels avec des sermons de circonstance apportés soit par les laïcs ou par les religieux». Quand c'était un laïc, on disait: C'est un discours. Quand c'était un religieux, on disait: C'est un sermon. Dans ce temps-là, en 1837, c'étaient vraiment des sermons parce qu'ils disaient: Sers mon maître le conquérant. En plus de la tradition... C'est beau, se rappeler les traditions. On vibre beaucoup, oui. On a une députée, ici, de la rive sud, où Lévis a été la seule conquête... le député de Lévis lui-même, et Lévis a été la seule victoire de 1760-1763.

Une voix: II a été battu.

M. Blais: En tout cas, c'est extraordinaire! Je n'aurai même pas le temps de finir l'historique. Apparemment, il ne me reste que trois minutes. Je peux demander un prolongement, je pense, M. le Président. On verra. Bon. (16 h 40)

En plus, il y a une tradition qui s'est installée là. En effet, depuis de longues années, on désignait les Canadiens sous le nom de Jean-Baptiste. Ça a été longtemps comme ça. Les Américains, les étrangers qui venaient, ils disaient: Ça, c'est un Jean-Baptiste. Ils disaient: C'est canadien. C'est canadien. Et les autres, ils disaient: C'est les Anglais. On n'avait pas raison de dire ça de même. Mais les Québécois, qui étaient des Canadiens, à l'époque, ce n'étaient plus des Canadiens français, on disait: Lui, c'est un Canadien. Puis vos grands-pères disaient ça: Lui, c'est un Canadien et, lui, c'est un Anglais. Tous sans exception, vous avez connu ça. Tous. C'était nous autres qui étions les Canadiens. Là, le pays a grandi artificiellement. Historiquement, c'est rendu plus grand. Mais les Canadiens, c'était Québec. On disait: Les autres, c'est les Anglais. Non pas parce qu'on était racistes, non pas parce qu'on était xénophobes. On distinguait, dans notre langage, à l'époque, les deux peuples, le besoin de deux pays, le besoin d'affirmation. Tout peuple qui perd une guerre reprend ses possessions, même ceux qui l'ont fait de 1939 à 1945, la plus grosse guerre qu'on ait jamais eue. L'Allemagne, l'Italie et le Japon sont très indépendants aujourd'hui. Nous autres, ça fait très longtemps. J'aimerais bien qu'on reçoive le Mouvement national des Québécois pour qu'il vienne au moins finir l'histoire, ici, de la fête de la Saint-Jean, si jamais je n'ai pas l'opportunité de le faire avant que la guillotine ne nous attaque. Si jamais j'ai l'occasion, je finirai un petit peu plus tard, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Masson. Maintenant, je vais reconnaître Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, pour 10 minutes.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: oui, m. le président. moi, je voudrais appuyer la motion de mon collègue. oui, certainement, m. le président. comme je vous le disais tout à l'heure...

Le Président (M. Marcil): Bon. Est-ce qu'il y en a d'autres qui l'appuient?

Mme Carrier-Perreault: Oh, oui. Bien, j'imagine. On l'a dit... Ça fait plusieurs fois qu'on vous le dit depuis que cette commission-là est commencée. C'est un projet de loi qu'on a devant nous et il n'y a pas eu de consultations, nulle part. Écoutez, ce n'est pas la première motion qu'on fait. Alors, je pense qu'on a essayé, plusieurs. On a parié de la Société Saint-Jean-Baptiste, on a demandé le Conseil du patronat. On pourrait demander les syndicats. On en a d'autres à faire. Parce que ça touche les travailleurs, ça touche les employeurs puis ça touche l'ensemble des Québécois. Quand on arrive avec un projet de loi comme celui-là, le Mouvement national des Québécois... Vous allez peut-être vous demander pourquoi on demande de rencontrer ce mouvement-là. Ce n'est pas le Parti québécois, on parie du Mouvement national des Québécois. Vous savez que c'est quand même très large. Ça regroupe des gens même du Parti libéral, il y en a là-dedans. Alors, je veux dire, ce n'est pas nécessairement un mouvement partisan. C'est quelque chose qui... En fait, c'est un mouvement qui est important au Québec, surtout par les temps qui courent. On se rend compte que les Québécois ont besoin de se serrer les coudes, de ce temps-là. On a besoin de se tenir debout parce qu'on va s'en faire passer une vite, si ça continue, encore une fois. Là, vous n'avez pas raison, M. le Président, de me montrer un petit papier qui me dit: Trois minutes, alors que je viens à peine de commencer. Voyez-vous, M. le Président?

Le Président (M. Marcil): Ce sont des

papiers qui traînaient.

Mme Carrier-Perreault: Ah. Effectivement, le Mouvement national des Québécois, ce n'est peut-être pas un mouvement économique comme le Conseil du patronat. Ce n'est peut-être pas un mouvement économique comme du côté des travailleurs, où on pourrait demander des consultations aussi. Mais c'est un mouvement... En fait, c'est un groupe, c'est un organisme qui est représentatif d'une bonne majorité de la population québécoise. Alors, quand on parle de nous faire une deuxième fête nationale... Parce que je sais et je le répète, M. le Président, on a beau ne pas intégrer le 1er juillet dans la Loi sur la fête nationale, il reste qu'on veut lui donner un statut particulier. On est en train, à toutes fins pratiques, d'officialiser comme une fête nationale, un peu, la Confédération. La fête de la signature de l'acte confédéral. Disons qu'au même titre qu'hier on demandait de rencontrer la Société Saint-Jean-Baptiste - on vous l'a expliqué quand même pendant assez longtemps, hier... On a parlé de rencontrer la Société Saint-Jean-Baptiste, parce qu'on sait qu'elle aussi est un organisme qui est l'un des plus vieux de nos organismes. C'est un organisme qui représente l'ensemble des Québécois. En plus, cet organisme-là, aujourd'hui, a comme vocation d'organiser les activités, les festivités, le défilé, entre autres, de la Saint-Jean-Baptiste. Alors, hier on vous disait que c'était important de rencontrer la Société Saint-Jean-Baptiste pour voir comment elle percevait ce projet de loi là, comment elle percevait le fait qu'on fasse de la Confédération... qu'on lui donne un statut qui ressemble, à toutes fins pratiques, à celui de la fête nationale du 24 juin. C'est pour la même raison, M. le Président, que je pense que ce serait important qu'on rencontre le Mouvement national des Québécois. Eux aussi pourraient nous parler de l'impact que ça peut avoir, ce genre de décision là, au moment où on se parle.

Mes collègues en ont fait état, c'est évident qu'au moment où on se parle, on ne peut pas dire que ça va très bien, que c'est tout rose et que la Confédération nous fait honneur. Comme Québécois, je pense qu'on se sent un petit peu diminués, par les temps qui courent, M. le Président. Surtout quand on voit les documents qui nous sont arrivés ce matin, les documents qui sont sortis la nuit dernière, qui ont été commentés, d'ailleurs, abondamment par des gens du Parti libéral, du parti ministériel, qui ont été commentés aussi par des ministres, mais aussi par des militants du Parti libéral, et pas les moindres, M. le Président. On a vu les commentaires de M. Jean Allaire sur ce qui se passe présentement, sur le genre de résultat auquel on a abouti à date dans les négociations qui sont menées au niveau constitutionnel. On a vu que ce n'est pas le temps de faire de cadeau à ces gens-là. Ce n'est pas le temps de mousser, à toutes fins pratiques, de publiciser ce genre de système qui s'effrite, qui s'effondre, qui nous fuit un peu entre les mains, qu'on aime ça ou qu'on n'aime pas ça. Je sais qu'il y en a qui sont plus déçus que d'autres. On sait qu'il y a des gens qui sont plus inquiets que d'autres de cette situation-là. Il y en a qui sont plus déçus que d'autres, aussi. Disons que pour beaucoup de Québécois, cependant, pour une majorité de Québécois, c'est de moins en moins un mystère, c'est de moins en moins surprenant. Ce n'est pas pour rien qu'l y a beaucoup de monde, que vous avez des pétitions qui vous arrivent justement du Mouvement national des Québécois, implorant, à toutes fins pratiques, le premier ministre de prendre les choses en main et de suivre ses propres directives, ses directives qu'il s'est lui-même données. Il nous dit assez souvent qu'on a voté contre la loi 150, alors que, écoutez, à toutes fins pratiques, c'est lui qui l'a décidé et qui dit très clairement qu'on devra faire un référendum avant le 26 octobre 1992. Alors, c'est le Mouvement national des Québécois qui s'implique et qui envoie présentement à l'Assemblée nationale des pétitions signées par de nombreux pétitionnaires. On l'a vu, ce n'est pas des pétitions ordinaires, là, comme on voit régulièrement. On a des pétitions présentement de 40 000 ou 50 000 personnes qui ont été signées par des Québécois. Alors, disons que les gens au Québec, je pense, de plus en plus sont prêts à prendre une décision, et je pense qu'il faudrait que tout le monde s'en rende compte. Ce genre de décision, bien... c'est pour ça qu'hier on parlait de provocation. Ça devient provocant pour les gens de chez nous quand on voit ce qui se passe d'un côté, et qu'on nous arrive avec des affaires comme ça de l'autre. Moi, je suis convaincue, M. le Président, que ce n'est pas des raisons économiques qui font voter ce projet de loi là. Ce n'est pas parce que c'est bon pour les Québécois qu'on vote ce projet de loi aujourd'hui, qu'on va nous mettre la guillotine, semble-t-il.

Une voix: Non, non, ils n'oseront pas. Mme Vermette: II n'osera jamais.

Mme Carrier-Perreault: Bien, disons que le ministre nous a comme laissé entendre très clairement...

M. Paré: Le ministre a dit que ça ne changerait rien. Voyons donc! Il ne fera pas une guillotine...

M. Bourbeau: Pensons au député de Masson qui, ce matin, l'appelait de tous ses voeux, la guillotine. Il nous implorait...

Mme Carrier-Perreault: Mais le ministre a entériné, a continué à nous dire...

M. Bourbeau: ...ce matin, d'imposer la guillotine.

Le Président (M. Marcil): Continuez le débat, Mme la députée.

M. Bourbeau: On résiste, on résiste.

Mme Carrier-Perreault: De toute façon, pour en revenir au projet de loi, ce n'est pas des raisons économiques qui sous-tendent ce projet de loi là, sûrement pas. Alors, c'est pour ça qu'on dit qu'il y a des raisons politiques. Dans les journaux le 15 mai alors que, nous, de l'Opposition, on n'avait dit aucun mot encore, on avait à peine reçu le projet de loi, ce qui a fait dire aux gens de la presse, le 15 mai que, dans le fond, c'était important pour qui? pour les organisateurs des festivités du 125e anniversaire du Canada. Bien sûr, on a vu la publicité qui nous arrive. On voit la publicité, ça arrive à toute heure du jour, surtout aux heures où il y a de bonnes cotes d'écoute. Ce n'est pas donné, cette publicité-là, M. le Président, et ça afflue. On est, à toutes fins pratiques, inondé de cette publicité-là de notre beau Canada, la petite fille qui chante avec les Rocheuses en fond de scène... (16 h 50)

Une voix: Les vaches qui broutent.

Mme Carrier-Perreault: ...les vaches qui broutent, le ciel bleu. C'est de toute beauté de voir ça!

Une voix: Le ciel bleui

Mme Carrier-Perreault: Alors, ça, c'est une des choses qui se font présentement. On essaie de nous garder nostalgiques de tout ça, de nous dire que c'est nous, que ça nous appartient, que ça nous ressemble. Écoutez, c'est pour aller dans la même lignée parce qu'on sait qu'on s'en prépare toute une, avec le 125e, M. le Président. C'est curieux, on a peut-être un gros déficit canadien, un immense déficit canadien. On voit qu'on est dans le trou, tiens, jusqu'aux oreilles, presque en faillite, M. le Président, et on nous... Il me reste une minute et demie, alors je vais terminer assez rapidement.

Le Président (M. Marcil): Votre conclusion prend toujours une minute et demie.

Mme Carrier-Perreault: Alors, même si, à toutes fins pratiques, on est inondés de dettes, on nous passe une publicité incroyable pour nous dire de rester là alors que, d'un autre côté, on essaie de nous mettre dehors le plus possible puis on ne réussit même pas à s'entendre.

Alors, voyez-vous, M. le Président, je pense que ce serait important d'entendre ce qu'en pense le Mouvement national des Québécois parce que, si ce n'est pas techniquement le fait, c'est subtilement le fait et c'est ce qu'on est en train de faire, à toutes fins pratiques, de façon subtile, une deuxième fête nationale au Québec.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: oui, m. le président, il me fera plaisir de faire quelques minutes là-dessus, en espérant réussir à convaincre le ministre que ce serait important qu'on puisse entendre nos amis du mouvement national des québécois. vous faites signe que oui, m. le ministre? non? pas là-dessus.

M. Bourbeau: Pas du tout. Moi, j'ai de la lecture, ici...

M. Paré: Ah, je m'excuse. Je pensais que vous me faisiez signe que oui, à notre demande, à notre motion pour écouter les gens du Mouvement national des Québécois. Comme on le dit et on le répète depuis quelques heures, la loi qui est devant nous n'est pas une loi du travail, c'est une loi politique. C'est une loi pour reconnaître une fête nationale. Donc, il serait normal, à mon avis, que les mouvements nationaux, dans le sens nationaliste du mot, tel qu'on l'entend ici, au Québec, puissent se faire entendre là-dessus et voir si ça répond à l'esprit nationaliste québécois. Si ça répond à notre particularité, à la société dont nous sommes, qu'on dit distincte... Mais elle n'est pas distincte, elle est tout simplement québécoise. Ça ne sert à rien de la qualifier. On ne qualifie pas les Français d'être distincts, ou n'importe quel autre peuple. Ils sont ce qu'ils sont.

Nous, on essaie de nous cataloguer, on nous sort des mots de toutes sortes parce qu'on refuse de voir la réalité qu'il y a un peuple québécois. Donc, plutôt que de reconnaître qu'il y a un peuple... et quand il y a un peuple, avec ses richesses, sa culture, son Parlement, ses institutions, il doit avoir son pays. Et pour lui refuser son pays, on lui donne, en compensation, des qualificatifs: société distincte, fête nationale du Québec, puis là ça va être fête nationale du Canada. On va tout faire pour essayer de ne pas reconnaître la réalité.

Et ça, c'est assez spécial. Est-ce qu'il y a des... On parie, comment je vous dirais ça, des Américains espagnols. Dans les autres provinces ou, surtout, à Toronto, où il y a tellement de gens des communautés, dont un très grand nombre de gens de descendance italienne, est-ce qu'on les appelle les Italo-Canadiens? Non. C'est des Canadiens. Donc, il y a des Canadiens, il y a des Américains, il y a des Français, il y a des

Polonais et, une exclusivité, comme une espèce de bête rare, il y a des Canadiens français. On s'identifie non pas à sa nationalité, mais à la langue qu'on utilise. Essayez de voir ça à travers le monde, vous allez vous apercevoir que ça n'existe pas beaucoup qu'on identifie des catégories, des types de gens, des types de citoyens. Ce pays est tellement impossible qu'on est obligé de cataloguer les gens; comme on leur refuse un pays tel que ça doit être, on les catalogue par rapport à leur langue maternelle. Et ça, c'est assez spécial. Comme le disait ma collègue avant moi, on peut bien en mettre, des centaines de millions en période de crise pour nous vendre que nous sommes autre chose que ce que nous sommes en réalité, ça ne réussira pas.

C'est tellement vrai. Faisons juste regarder... C'est pour ça qu'il faudrait peut-être parler à des gens qui sont intéressés par le mouvement nationaliste et qui suivent ça de près. Faites juste regarder le débat constitutionnel depuis le lac Meech. C'est spécial qu'on ne s'y arrête pas plus que ça. Meech a foiré et, là-dessus, je pense que c'est unanime, ce n'était pas voulu. La preuve, j'écoutais le ministre dire aujourd'hui que, pour une première fois de l'histoire, il y a eu discussion sérieuse pour essayer de sauver le pays. Aïe! rappelez-vous la prison de Hull, au moment de Meech, où les premiers ministres étaient séquestrés jusqu'à ce qu'une entente puisse arriver: Vous êtes enfermés. Vous sortirez quand vous aurez trouvé quelque chose qui puisse être signable, qui puisse être vendable et un peu acceptable. Aussitôt qu'ils ont été sortis, par exemple, vous avez vu le chiard. Avant Meech, on pouvait toujours dire qu'avec le Québec il n'y a pas moyen de s'entendre. Depuis Meech, depuis la déclaration de juin 1990 du premier ministre, quand il a dit: Je ne retourne pas aux négociations; je ne retourne pas à la table des 11, les anglophones, les neuf autres provinces, sont tout seuls, ils sont entre eux, puis ils ne sont pas capables de s'entendre. C'est spécial! Ils ne peuvent pas dire que c'est le Québec qui est le fauteur de troubles; ils ne peuvent pas dire que c'est le Québec qui amène des demandes exagérées ou qui n'ont pas de bon sens. C'est tellement vrai que le premier ministre refuse même de commenter tout ce qui est déposé, en disant: Ce n'est pas final. C'est des dépôts. Ce n'est pas des offres finales; on ne peut pas commenter ça. Il ne nous dit pas c'est quoi, le minimum qu'on demande, parce que Meech atrophié, malade, contaminé... En substance, on ne sait pas ce que ça veut dire.

Donc, on ne demande rien, on n'est pas présent à la table, puis ils ne réussissent pas à s'entendre entre eux autres. Non seulement sur la reconnaissance qu'on va faire du Québec ils ne sont pas capables de s'entendre entre eux autres, mais ils ne sont pas capables de s'entendre entre eux sur leur relation, comme Canada anglophone, sur le Sénat, la représentation de

chacun, la force des différentes régions, le partage des pouvoirs. Ils ne sont pas capables de s'entendre. Ils ne peuvent pas dire cette fois-ci, contrairement à ce qui s'est toujours dit depuis 125 ans: C'est la faute du Québec. Ce n'est pas la faute du Québec; la preuve, c'est qu'on n'est plus dans la ronde Québec, on est dans la ronde Canada et ils ne sont pas capables de s'entendre.

Donc, si nous, ici, au Québec, on est capables de s'entendre quand on se parle, c'est parce qu'on est un peuple particulier. Issus de ce peuple, il y a des mouvements, non pas nécessairement juste des mouvements de contestation, parce que le Mouvement national des Québécois s'implique effectivement dans certains débats, intervient de temps en temps parce qu'il veut faire valoir son point de vue, mais c'est un mouvement nationaliste, un mouvement issu du milieu, apolitique, indépendant, autonome, qui exprime une fierté de nationaliste et qui s'implique dans les fêtes nationales dans les différentes régions du Québec. Donc, c'est la nature même du peuple qui s'exprime par un mouvement. Comme on est en train de regarder un projet de loi réellement politique, la preuve, c'est que depuis qu'on est ici, des deux côtés de la table, on s'arrête à quoi en pariant du projet de loi? Strictement du côté politique par rapport à des institutions politiques. C'est très clair maintenant. Mon collègue de Nelligan nous l'a confirmé d'une façon claire: C'est pour la reconnaissance de la fête nationale du Canada. Je respecte ça, puis je le dis. Bravo! merci d'être aussi clair. On a besoin de clarté et de franchise.

Donc, c'est un débat sur une loi politique. Comment se fait-il que les mouvements nationalistes ne puissent pas s'exprimer sur quelque chose qui va les concerner, qui va les toucher, parce que ça va toucher toute la population? Pas seulement les travailleurs, même si on touche à la Loi sur les nonnes du travail. À toute la population par rapport à ce qu'on impose comme journée, parce que, là-dedans, on touche aussi à la loi sur les heures d'affaires. Donc, ça veut dire qu'on vient de modifier des habitudes des gens. Le 1er juillet ne sera plus ce qu'il était pour les Québécois. On veut leur faire fêter la fête nationale du Canada. Donc, ce n'est plus seulement une fête, un congé en soi, c'est la fête nationale. Donc, deux fêtes nationales, un peuple avec deux fêtes nationales. (17 heures)

Si c'est ça qu'on veut, on a le droit de le soumettre, on a le droit de le proposer, on a le droit d'avoir un projet de loi. Mais je pense qu'on n'a pas le droit de le passer sans permettre aux gens de s'exprimer, parce qu'on n'est pas censé ici modifier des choses sans que ce soit un besoin ou une utilité pour la population, pas nécessairement pour une formation politique ou une orientation. Essayez de me convaincre que ça va améliorer quelque chose, au Québec, ça, sinon

nous affaiblir, moi, je n'en vois pas. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Shefford. Je vais reconnaître maintenant le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je suis heureux d'arriver et de pouvoir me joindre au groupe. J'ai dû partir à 15 heures cet après-midi pour enregistrer une émission de télévision, pour annoncer un peu le projet de loi du gouvernement et dire que, si les gens perdent leur fin de csmaine de trois jours, ils pourront dire merci au gouvernement, parce qu'on se rend compte à quel point on a des gouvernements déconnectés, tant à Ottawa qu'à Québec.

À Ottawa, là, on discute pour acheter pour 4 300 000 000 $ d'hélicoptères à l'Angleterre pour faire la chasse aux sous-marins soviétiques. Il faut le faire! Comme imbéciles, là, je veux dire, il n'y a pas d'autre mot que ça et, même, je suis généreux en disant «imbéciles». Acheter pour 4 300 000 000 $ d'hélicoptères pour faire la chasse aux sous-marins soviétiques alors que les Soviétiques n'ont même pas d'argent pour mettre du gaz dans les sous-marins, l'huile pour garder les moteurs pas trop chauds. Alors, ça aurait été moins cher, sans doute, d'acheter la flotte, de leur donner des crédits pour acheter quelque chose à manger. Pour 4 300 000 000 $, on pouvait acheter une partie de la flotte de sous-marins soviétiques et leur donner des crédits pour s'acheter quelque chose à manger à la place. Alors, là, on est des grands experts en l'avenir du Canada. Quand on est rendus à 450 000 000 000 $ de dettes, avec des décisions comme ça, ne vous demandez pas... Quelqu'un qui reste là-dedans, c'est quelqu'un qui est masochiste et qui n'a pas peur de la faillite. C'est un pays qui s'en va sur la «bum», comprenez-vous.

Actuellement, nous autres, alors qu'on a 12,5 % de chômeurs, on fait des grands débats, aujourd'hui, pour changer la date de la fête. Au lieu de fêter ça en fin de semaine, on va faire ça le mercredi toute la journée, sans consultation, sans aucune demande de la population. Il faut être complètement déconnecté. Voir si c'est ça, l'urgence nationale. Jusqu'en 1982, c'était la fête du Dominion. On avait des «bills» du Dominion, la fête du Dominion, des timbres du Dominion. Aujourd'hui, on dit: II faut faire la grande urgence nationale. Au cours de la semaine prochaine, je suis content de savoir que le ministre Bourbeau et M. Béland vont être en conférence de presse lundi.

M. Bourbeau: M. le Président, le député de Lévis devrait savoir qu'il n'est pas permis de nommer les députés par leur nom. Il faut nommer le nom... C'est le règlement.

M. Garon: Non, je parle de la conférence de presse. Je ne nomme pas le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, ce n'est pas le même règlement qu'en Chambre, ici?

Le Président (M. Marcil): C'est la même chose. Donc, on appelle les députés par leur nom de comté. C'est ça.

M. Bourbeau: M. le député de Lévis.

M. Garon: Alors, le ministre responsable de ce projet de loi va être en conférence de presse avec M. Béland, président de la Confédération des caisses populaires Desjardins. J'espère que les journalistes vont leur demander si c'est devant la volonté populaire qu'ils enlèvent la fin de semaine aux citoyens pour mettre la fête de la Confédération le mercredi. Je suis convaincu que M. Béland ne pourra pas rester, parce qu'on ne peut pas parler dans l'église impunément en disant qu'il faut s'occuper des hommes plutôt que des machines et, après ça, cautionner un gouvernement qui se cherche des cautions partout. Même aujourd'hui, on l'a vu à la période des questions ce matin, les gens ne sont plus capables d'endosser. Ça n'a plus de bon sens. Alors qu'aujourd'hui on invite le Mouvement national des Québécois, je vais vous dire plus que ça. Moi, je pense qu'il faudrait faire une autre motion pour montrer qu'on n'a pas peur du danger. On pourrait inviter aussi, après le Mouvement national des Québécois qui s'intéresse aux questions nationales, la Légion royale canadienne, des gens qui sont préoccupés des fêtes, les gens de la Légion que je connais beaucoup pour avoir travaillé avec eux, avec les anciens combattants pour la modernisation d'endroits touristiques, pour voir ce qu'ils en pensent. Est-ce qu'ils aiment mieux avoir la fête du Canada le mercredi ou s'ils aiment mieux avoir la longue fin de semaine? Je suis convaincu que la Légion royale canadienne, comme le Mouvement national des Québécois, ce sont des gens qui sont connectés. Ce ne sont pas des gens débranchés. Ce sont des gens connectés et qui vont indiquer que les citoyens aimeraient mieux avoir la fête la longue fin de semaine.

Les députés ont mentionné - le député de Shefford l'a dit à plusieurs reprises, la députée de Marie-Victorin - qu'il n'y a aucune demande dans ce sens-là. Là, on nous dit qu'on s'est référé à M. Béland, qui parle de ses ordinateurs. Bon! Comme ce ne sont pas les ordinateurs qui font des pique-niques, les ordinateurs ne vont pas en vacances, on peut mettre les pitons sur «hold», ils peuvent passer la fin de semaine tranquilles et ils ne font mal à personne, mais les citoyens, eux, ne sont pas indifférents à avoir une longue fin de semaine. Je pense qu'il n'y a pas de volonté populaire, de quelque façon que ce soit. Le Mouvement national des Québé-

cois, qui s'occupe de la fête nationale, va pouvoir l'indiquer. Mais, moi, je suis en train de me demander si les fédéralistes aiment vraiment le Canada, pour essayer de le faire haïr par tous les moyens possibles. Moi, j'ai un peu de tristesse en voyant ça, parce que ce n'est pas une façon de faire aimer le Canada que d'enlever la fin de semaine des citoyens. Je ne pense pas que ce soit aimer vraiment la fête du Canada que de vouloir faire en sorte que les gens souffrent plutôt que d'avoir la fête dans la longue fin de semaine, comme c'était le cas depuis le début. D'ailleurs, le ministre disait, au mois de décembre 1990... Je ne comprends pas quelle mouche l'a piqué; je ne comprends pas quelle mouche a pu le piquer pour arriver avec un projet de loi de même. Ça n'a pas de bon sens. Il n'y a pas de demande, il n'y a pas de volonté populaire. J'en ai parlé encore ce midi, quand j'ai enregistré mon émission. Je disais aux gens que le gouvernement, ce qu'il voulait faire... Les gens, les cameramen, et tout ça, ils disaient: Pourquoi ils font ça? Le monde n'aimera pas ça. J'ai dit: Oui, c'est ça qu'on dit. On ne comprend pas le gouvernement. On a l'impression, des fois, qu'il y a quelque chose qui se passe dans le gouvernement qui est détraqué. Victor Hugo disait toujours, quand il regardait l'univers, qu'il y avait sûrement un horloger quelque part pour que tout ça s'agence aussi bien. Mais, quand on regarde le fonctionnement du gouvernement, on dit: II faut vraiment que ce doit détraqué pour que ça marche aussi mal. Je ne peux croire que le gouvernement a même proposé une guillotine là-dessus. Alors qu'on fête le 200e anniversaire de l'Assemblée nationale, ce n'est pas le temps de mettre des guillotines sur des projets de loi qui ne sont demandés par personne. Le Mouvement national des Québécois pourra saisir les gens de l'Assemblée nationale et de la commission et nous indiquer ce qu'il en pense. À date, il y a eu des motions de présentées. La démocratie, au fond, c'est de vivre en osmose avec la population, être près des gens, non pas être dans une situation où les gens considèrent les parlementaires comme des gens dangereux, mais des gens qui veulent les aider, non pas des gens qui veulent leur nuire. Le projet de loi actuel va nuire aux gens. Il n'aidera pas les gens, ne contribuera pas... Moi, je ne hais pas le Canada, je ne voudrais pas qu'on fasse une loi comme celle-là pour faire haïr le Canada. Il y a assez de gens actuellement qui trouvent qu'il y a des problèmes sans, en plus, faire des lois inutiles qui vont faire en sorte que des gens vont avoir de mauvaises raisons de ne pas être d'accord.

C'est un peu comme les débats constitutionnels actuellement sur le Sénat. Tout le monde savait... On avait l'impression qu'il y avait un consensus très fort pour faire que le plus grand service que les sénateurs pourraient nous rendre, c'est prendre un dernier vote pour voter leur abolition. Le consensus qui est là-dessus au

Canada, c'est que le Sénat est inutile. Aujourd'hui, on voit que, pendant trois semaines, on discute du Sénat dans les réformes constitutionnelles comme si l'avenir était là. Habituellement, les gens qui y sont nommés sont des gens qui sont renommés pour être entrés dans une époque de leur vie où ils ont plus de souvenirs que de projets et qu'ils peuvent se compter...

Le Président (M. Marcil): En conclusion, M. le député de Lévis.

M. Garon: Autrefois, c'était tranquille. Mais, aujourd'hui, qu'on vienne nous présenter un projet de loi comme celui-là en fin de session, dans une période où il y a 12,5 % de chômeurs, je pense que ce n'est pas opportun. C'est pourquoi ii serait bon aussi d'entendre le Mouvement national des Québécois qui a travaillé régulièrement, depuis plusieurs années, pour faire en sorte que la fête nationale du Québec marche bien, qu'elle soit un succès et pour sensibiliser les gens. Comme ce sont des experts, à toutes fins pratiques, en fêtes nationales, on devrait les consulter. Plutôt que de penser que les députés ont la science infuse et que le gouvernement est un expert en fêtes nationales, ce serait bon de consulter le Mouvement national des Québécois, pour qu'il vienne nous donner son opinion sur le projet de loi qui est devant nous, M. le Président. (17 h 10)

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Lévis. M. le député de Nelligan. Je vous ai reconnu, M. le député.

M. Russell Williams

M. Williams: Oui. Merci, M. le Président. J'ai voulu faire quelques remarques moi-même sur la motion d'invitation du Mouvement national des Québécois. Je vais faire à peu près les mêmes remarques que la dernière fois, que ce n'est pas nécessairement un groupe qui est bien reconnu comme un groupe qui suit les questions des fêtes du Canada. Je voudrais rappeler à cette commission qu'on discute un article qui touche le congé férié du 1er juillet. On discute si c'est mobile ou non mobile. On touche la fête du Canada. Ce n'est pas surprenant non plus, M. le Président, que le député de Lévis encourage le ministre responsable de ce dossier à dire quelque chose aux journalistes lundi prochain. Ils ont essayé, heure après heure, question après question, motion après motion, de créer un peu d'intérêt de leur prospective, de leur vision. Jusqu'à date... Encore une fois, hier, j'ai mentionné que... Pas un mot, pas un article. Ils ont essayé pendant 26 heures dans l'Assemblée nationale. Maintenant, à la commission des affaires sociales, ils essaient encore. Encore une fois, M. le Président, pas un article, pas un commentaire, pas une question. Avec ça, je demande des questions, actuellement,

exactement le contraire. Comme M. le député de Lévis l'a demandé: Qui s l'appui de la population? Je pense que c'est bien clair que nous avons l'appui de la population. Encore une fois, ils disent: II n'y a personne qui a demandé. Peut-être qu'il a manqué quelques-unes de mes interventions pendant les dernières heures, mais j'ai répété souvent et je répète encore une fois que j'ai reçu les demandes du peuple, des simples citoyens, les hommes et les femmes qui veulent avoir une fête, un congé férié non mobile le 1er juillet pour fêter certainement le 125e anniversaire de notre pays, mais aussi, comme nous avons discuté, pour fêter plusieurs autres dans l'avenir. J'ai nommé jusqu'au 300e. Peut-être que ^a va être plus long que ça, j'espère que oui. J'ai reçu plusieurs demandes, quand j'ai une chance, comme adjoint parlementaire du ministre de la Santé et des Services sociaux, de visiter plusieurs territoires du Québec. Souvent, j'ai reçu les demandes, aussi. Actuellement, pas loin du comté de Shefford, quand j'étais là la dernière fois, j'ai reçu les demandes: Est-ce qu'on peut changer ça? J'ai reçu personnellement les demandes. J'ai voulu corriger l'image que les députés de l'autre côté du pupitre essaient de créer, qu'ils n'ont pas reçu les demandes. Ce n'est pas une grande surprise qu'un parti formé avec une vision qui veut se séparer du Canada, ils n'ont pas eu les commentaires de leurs citoyens qui veulent fêter le Canada. Je pense que ce n'est pas très... Ça ne prend pas une grande intelligence pour voir la connection entre les deux. Si les personnes veulent fêter le Canada ou veulent avoir un congé férié non mobile, elles vont certainement nous appeler et peut-être qu'elles vont écrire des lettres. Mais ce ne sera peut-être pas très utile de téléphoner aux représentants du Parti québécois. Et c'est dans cette direction que je vais certainement voter contre la motion d'inviter le Mouvement national des Québécois qui, à ma connaissance, n'a pas une longue histoire pour arranger les faits canadiens.

Aussi, j'ai entendu les commentaires juste sur le Canada, que c'était un pays de «bums». Ce n'est pas du tout mon pays, l'image de mon pays. C'est un beau pays, bien respecté, comme nous avons vu dans le rapport des Nationc unies. C'est un des pays les plus respectés mondialement. Si les députés qui ne croient pas à ce pays ne veulent pas fêter cette fête, ils ont le choix. On vit dans une démocratie. Ils sont certainement les bienvenus dans mon comté pour fêter avec nous. Mais, s'ils ne veulent pas participer, c'est certainement leur choix. Ça a été répété souvent ici, si les employeurs et les employés veulent changer cette date, c'est encore possible.

Mais je voudrais revenir sur la question... Le député de Lévis a mentionné quelques fois le taux de chômage de 12 % ou 12,5 %, et c'est plus élevé dans quelques endroits. Ils ont aussi soulevé le point que, cette année, c'est le 200e anniversaire de la démocratie, dans le Bas et le Haut-Canada. Je pense que le peuple québécois va commencer à se questionner si leurs députés ont gaspillé le temps... Oui, c'est certainement les règles britanniques, comme vous avez mentionné, M. le député de Masson, mais il y a les règles et il y a la sagesse. J'espère que les règles établies sont des règles pour la démocratie.

Quand je parle avec mes commettants, ils veulent qu'on prenne le temps de discuter les questions de chômage, les questions de dette. Ce n'est pas juste le gouvernement fédéral qui a des dettes. Chaque province a des dettes aussi. On doit créer une nouvelle économie. On doit recommencer toutes les questions économiques. Je pense qu'ils préfèrent, nos électeurs, nos commettants... Si on leur demande la question, à savoir s'ils sont satisfaits que nous ayons mis 26 heures à l'Assemblée nationale... J'ai perdu le temps, je ne sais pas combien d'heures nous avons mises... Nous avons mis trois heures aujourd'hui? Oh, excusez. J'ai oublié combien d'heures nous avons mises sur cette simple question, M. le Président, à cette commission.

Si on demande à nos commettants s'ils pensent que c'est du temps bien utilisé par leurs députés, je ne peux pas parler pour mes commettants, mais je gage avec vous que ça va être à 100 % non. Ils vont dire: Nous n'avons pas élu nos députés pour faire des débats comme ça. On veut avoir un échange dans les commissions parlementaires qui est supposé être non partisan, non politisé. On veut avoir un débat de fond. Jusqu'à date, encore une fois, je n'ai pas entendu un débat de fond. J'ai entendu les questions, qu'il y a toujours une réponse très logique, mais jusqu'à date je pense que l'autre côté ne veut pas....

Le Président (M. Marcil): En conclusion, M. le député de Nelligan.

M. Williams: ...entendre de réponse.

Encore une fois, je voudrais juste mentionner que je suis en désaccord avec la motion. Je suis prêt à toujours discuter les questions qui peuvent améliorer cette loi. Je voudrais répéter, comme je l'ai mentionné hier, qu'au minimum il y a deux partis qui prennent cette question... Avec ça, je voudrais vous remercier d'avoir eu la chance d'exprimer encore une fois que je souhaite qu'on fête le Canada, mon pays, le 1er juillet.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Nelligan. Comme il n'y a plus d'intervenants, je vais mettre la motion aux voix.

M. le député de Masson, M. Blais?

M. Blais: Pour.

Le Président (M. Marcil): M. le député Paré

(Shefford)?

M. Paré: Pour.

Le Président (M. Marcil): Mme Cardinal (Châteauguay)?

Mme Cardinal: Pardon? Contre, cher ami, contre.

Le Président (M. Marcil): Contre. M. Philibert (Trois-RMères)?

M. Philibert: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Russell Williams (Nelligan)?

M. Williams: Certainement contre.

Le Président (M. Marcil): Mme Loiselle (Saint-Henri)?

Mme Loiselle: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Bourbeau (Laporte)?

M. Bourbeau: Tout contre.

Le Président (M. Marcil): Donc, la motion est rejetée.

M. le député de Masson.

M. Williams: Est-ce qu'on peut appeler l'article...

M. Blais: Non, pas tout de suite parce qu'il y a des éclaircissements qu'on aimerait bien avoir. On aimerait réentendre le député de Nelligan nous donner des éclaircissements sur cette loi, parce que c'est encore marécageux, brumeux un peu dans nos têtes, et c'est un projet qu'on aimerait... Il a d'ailleurs tenté de façon très, très intelligente et logique... J'ai aimé votre intervention. J'aimerais bien en entendre d'autres de votre côté nous dire leurs idées. J'ai trouvé ça superbe-Une voix: Ça va? (17 h 20)

M. Blais: Ah, ça va très bien. Approuvé. Vous avez droit à ça. J'aurais aimé que Mme la députée de Châteauguay, Mme Cardinal, si vous permettez que j'en parie une minute, M. le Président, de consentement avant la motion, que je dise un petit mot et que vous...

Le Président (M. Marcil): Oui.

M. Blais: Vous permettez une minute?

Le Président (M. Marcil): Oui, il y a consentement à ce que monsieur dévie de...

M. Blais: C'est dont Mme Cardinal m'a fait part, et j'ai trouvé ça extrêmement instructif, il y a quelques minutes je suis allé parier avec elle en lui disant que Kahnawake où les Iroquois fêtaient la fête de la Saint-Jean avec nous, où nous autres on chantait nos chansons de folklore et qu'eux répondaient, qu'on chantait nos Te Deum et qu'eux répondaient par des strophes iroquoises, boum balaboum balaboum baiaboum... Le balaboum, elle dit que c'est vraiment le chant de folklore chez elle, le balaboum, et elle m'a dit que son nom est Cardinal, et qu'elle était excessivement en faveur de la fête nationale du 24 juin, parce qu'elle est descendante de Narcisse Cardinal, un des Patriotes de 1837, qui a été à l'époque - c'étaient les circonstances -vendu aux conquérants par les Iroquois, qui sont les Mohawks, et que sa famille en a subi des torts pendant plusieurs années. Elle avait souvenance, me disait-elle il y a quelques instants, que la dernière lettre avant sa mort que Narcisse écrivait à son épouse, qui était sur le point d'avoir un cinquième enfant, que malgré tout il ne regrettait pas les gestes en soi qu'il avait posés, mais qu'il était amer de l'avoir placée comme mère dans une situation comme ça et la laisser seule avec quatre enfants et demi, et qu'elle était sur le point d'accoucher. Elle me disait qu'elle a relu ces choses-là, que c'était une lettre qui avait fait vibrer chez elle des cordes excessivement sensibles. Elle m'a conté ça avec un oeil tellement resplendissant. On aurait dit qu'elle plongeait son iris et sa pupille dans le passé et qu'elle extirpait de leur tombe ceux qui étaient passés chez ses ancêtres et qu'elle les voyait dérouler devant elle comme si c'était un tableau nouveau, comme si c'était un film, qu'elle me disait. Elle a une façon de capter le tympan de quelqu'un, doublée d'un oeil parleur incroyable. J'ai trouvé ça excessivement intéressant et je remercie beaucoup la présidence de m'avoir permis de faire ce petit aparté. C'est par consentement que j'ai pu me permettre de parier des sentiments de madame que je trouve extraordinaire.

Elle me disait que toutes les chansons des Patriotes, dans sa famille ces chansons-là sont connues, sont chantées, et qu'ils ressentent encore les vibrations des ancêtres. Alors, quand on a devant nous une patriote de ce genre, on ne peut pas faire autrement, M. le Président, qu'en glisser quelques mots, parce que c'est honorant pour la Parti libéral d'avoir dans ses rangs une femme qui a des ancêtres d'un tel patriotisme. Alors, à ceux, madame, qui ont fait que vous êtes chez nous aujourd'hui, qui ont fait que vous êtes là et députée du même comté, d'ailleurs, que votre ancêtre Narcisse Cardinal, qui était député de ce comté, le même comté que vous occupez aujourd'hui, alors qu'on voit une patriote revenir à la même place, sur le même

terrain et qu'elle a les mêmes idées que son ancêtre de revendiquer les droits de ce que nous sommes, une des deux nations fondatrices, eh bien, j'étais ébloui. Je me disais: Vous devriez, madame, nous parler quelques instants de la noblesse de votre famille. Vous remontez de Patriotes de 1837. Ça vous honore, madame. Je vois un sourire tout épanoui de consentement et de satisfaction et vous méritez bien de vous réjouir des ancêtres que vous avez eus.

Personnellement, je n'ai pas eu d'ancêtres dans les Patriotes de 1837. J'aimerais, parce que, contrairement à l'Église catholique qui n'a reconnu que 150 ans après ce que les Patriotes avaient fait pour la francophonie, eh bien, je l'ai reconnu dans ma famille bien avant. Mais je suis jaloux, madame, de ne pas avoir les ancêtres que vous avez, non pas parce que je veux descendre ou désanoblir les miens ou leur donner moins de prestance ou de prestige ou de qualité qu'ils en ont vraiment, mais, quand on est de la lignée des Patriotes de 1837, c'est un poème que de vous regarder, madame. Ça m'a fait plaisir de vous dire ce petit mot parce qu'il est historique, lui aussi. Je suis content que vous soyez là. Je vous remercie de m'avoir permis de dire ça, M. le Président.

Le Président (M. Philibert): Alors, on est rendu où?

Une voix: Une motion à présenter.

Mme Cardinal: Est-ce que je peux dire quelques mots?

Le Président (M. Philibert): Est-ce qu'il y a un consentement, pour Mme Cardinal?

Madame, allez-y. Mme Cardinal, de Château-guay.

Mme Cardinal: Je dois dire au député que je suis très honorée de votre tirade quant à mes ancêtres. Vous m'avez enlevé le plaisir de reconnaître que, depuis des heures, nous entendons parler patriotisme, de rendre hommage, le 24 juin, nos ancêtres. Ça, c'était acquis. Je vous remercie d'avoir fait l'allocution à ma place. Merci.

Le Président (M. Philibert): Merci, Mme la députée de Châteauguay. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

M. Blais: Oui, j'aurais une motion. Le Président (M. Philibert): Oui.

M. Blais: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Philibert): Allez-y.

M. Blais: On vient d'apprendre... Il y a eu une réunion des deux leaders, le nôtre, l-e-a-d-e-r, et l'autre, l-i-t d-'-a-i-r. Les deux leaders se sont rencontrés et ils ont décidé de faire venir Guillotin et de nous passer la guillotine, qui est arrivée avec la Bastille de tantôt. Alors, est-ce que vous croyez qu'il serait bon de continuer?

M. Bourbeau: on a donné droit à vos demandes. vous la réclamiez à grands cris, ce matin, la guillotine. vous l'appeliez de tous vos voeux.

M. Blais: Ce n'est pas que je l'appelais de tous mes v?ux, mais je dis qu'il n'y avait qu'elle pour me couper la parole. Alors, est-ce que... Moi, M. le Président, je suis bien prêt à me rendre jusqu'à 18 heures, comme il a été commandé, mais si le ministre pense que c'est absolument inutile... Je vois que les priorités du gouvernement sont plutôt dans le 1er juillet que dans le 24 juin. Alors, je suis prêt à faire, jusqu'à 18 heures, mon devoir, si le ministre consent à m'entendre malgré sa guillotine.

M. Bourbeau: M. le Président, moi, je pense que nos règlements, de toute façon, ne nous donnent pas le loisir de suspendre la séance maintenant, à moins que le député ne veuille suspendre maintenant. Moi, je suis tout à fait disposé à entendre...

M. Blais: Je ne veux pas suspendre, pour aucune considération.

M. Bourbeau: Bon, M. le Président, moi, je suis tout à fait disposé à entendre les remarques du député de Masson. De toute façon, jusqu'à maintenant, ça a bien fonctionné. Ce n'est peut-être pas tellement instructif, mais plutôt plaisant, parfois instructif, sur le plan historique, peut-être un peu instructif, mais ça ne fait pas beaucoup avancer le projet de loi, on doit le remarquer.

M. Blais: O.K. Alors, M. le Président, j'avais une motion à proposer.

Le Président (M. Philibert): Allez-y, M. le député de Masson.

Motion proposant d'entendre la Chambre de commerce du Québec

M. Blais: Malgré la guillotine, il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente des affaires sociales tienne - ça, c'est nous - avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives, des consultations très particulières quant à tous les articles

dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Chambre de commerce du Québec.

Une motion débattable, M. le Président.

Une voix: Est-ce que vous pensez qu'elle n'est pas recevable?

Le Président (M. Philibert): Non. Elle est recevable. M. le député de Masson, vous avez 30 minutes.

M. Blais: Vu qu'il est 17 h 30, M. le Président, et que, si je prenais ma demi-heure, c'est moi qui commencerais cette motion et qui la terminerais, je ne suis pas obligé de parler une demi-heure?

Le Président (M. Philibert): Pas du tout. Vous pouvez ne pas parler du tout.

M. Blais: Non, non. Je veux absolument parler, parce que j'y tiens. Mais je pourrais faire un peu moins d'une demi-heure. Pour permettre à mes confrères qui brûlent du désir de faire renouveler leur salive, je peux me permettre de parler moins d'une demi-heure.

Le Président (M. Philibert): En clair, vous pourriez parler 10 minutes et deux autres de vos confrères pourraient parler 10 minutes, pour un total de 30 minutes.

M. Bourbeau: Ou bien, dans la très grande rigueur, ne pas parler du tout, M. le Président.

Le Président (M. Philibert): Oui. M. Blais: C'est très bien.

Le Président (M. Philibert): Vous, vous avez une demi-heure, mais vous n'êtes pas obligé de la prendre. Vos collègues de l'Opposition ont un maximum de 10 minutes chacun. (17 h 30)

M. Yves Blais

M. Blais: Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Je suis encore... Vous savez que je suis un Québécois à fleur de lys, un Québécois à fleur de peau, un Québécois à fleur d'espoir de ce pays en devenir. Et je suis, il va de soi, à fleur de bataille pour le conquérir. Et à fleur de bataille pour le conquérir, c'est la fleur de la bataille moderne. Dans la bataille moderne, c'est le verbe qui fait foi.

Alors, refuser de parler sur une motion, venant de moi, ce serait impossible. Mais je vibre encore du regard nationaliste que m'a jeté Mme Cardinal, et ça m'a plu. Je ne savais pas qu'on avait un descendant des Patriotes de 1837 en Chambre. Et je vous jure que je vais faire chanter le cardinal un peu plus que je ne l'ai entendu jusqu'à aujourd'hui. Je vais rencontrer madame, je vais discuter avec elle et, s'il le faut, je vais aller chercher l'histoire dans les documents, et la lui donner pour que, en Chambre, elle nous raconte un peu plus en détail l'histoire de ses ancêtres. Je vais certainement faire quelque chose à ce sujet-là.

Ceci dit, M. le Président, nous aimerions rencontrer la Chambre de commerce du Québec. Ça fait beaucoup de chambres en même temps, ça. J'arrive de la Chambre en haut, je regrette la chambre que j'ai quittée ce matin, et nous demandons la Chambre de commerce du Québec. Il y a trois chambres qui sont ici superposées l'une sur l'autre. Dans le contexte dans lequel je parle actuellement, il y en a une que je regrette plus que les autres, c'est ma chambre, que j'ai quittée ce matin. Malgré que je sois un parlementaire qui aime beaucoup le travail qu'il fait, vient un temps où, à force de ne pas dormir, entre guillemets, nous devenons las. Il y en a qui disent «lasse»; je ne sais pas comment le prononcer. On dit bien un «taon», au Québec, pour dire un «bourdon». On est supposé dire un «tan», on dit un «ton». On dit «taba», puis on dit «Frontenac»; on est supposé dire «Frontena». Mais, que voulez-vous, on a de ces intonations qui nous sont particulières. Mais, quand on dira à quelqu'un «je me suis fait piquer par un "tan"», personne ici, au Québec, ne comprendra. Et, en Europe, si tu dis à quelqu'un «tu as été piqué par un "ton"», il trouve ça un peu curieux. Voyez-vous, juste un petit océan qui... Malgré qu'on soit à trois heures et demie, en Concorde, des deux plus grands pays francophones au monde... D'ailleurs, nous sommes le seul pays francophone de souche en dehors de la France. Alors, c'est spécial.

Mais on a, comme dans toutes les régions françaises, des petits particularismes régionaux. Moi, je suis un petit colon d'Abitibi, et on a nos expressions bien à nous, des expressions qui, parfois, entre guillemets, peuvent sembler un tantinet, même, vulgaires, comme «chier sur le bacul». Mais ce n'est pas vulgaire. C'est une expression bien à nous pour dire... Si j'avais dit «je ne présente pas ma motion et je ne parle pas», les gens d'Abitibi, qui m'écoutent, auraient dit «notre député chie sur le bacul»; il ne veut pas faire son devoir jusqu'au bout. Ce que je ne veux pas, et mes confrères non plus.

Je sais qu'au Lac-Saint-Jean il y a des particularismes de toute beauté. Voyons! «Fais pas simple!» Imaginez! «Fais pas simple!». N'allez pas dire ça à Paris, «Fais pas simple». Ils vont dire: Pardon? Parce que les Français, il ont une façon, même grammaticale, de voir les choses. Nous, on fait des sous-entendus et, par nature - on est habitués comme ça - on sait quel est le reste de la phrase. On est à Paris, et on demande à un gendarme: «J'aimerais aller à la tour Eiffel». Et le gendarme de me répondre: «Mais qui vous en empêche?» La mentalité n'est

pas la même. Mais j'ai dit: «Je ne sais pas comment m'y rendre». Ah! c'est autre chose! Ah! là, c'est sorti, les cartes; il m'a tout montré. Mais, nous, au Québec, si on disait «je voudrais aller au parlement», si on est dans la ville de Québec, bien, on comprendrait immédiatement que ça veut dire que je ne sais pas comment m'y rendre. Mais, là-bas, pas du tout! «Je veux aller à la tour Eiffel». «Mais qui vous en empêche?». Il a fallu que je m'explique. «Je ne sais pas comment m'y rendre». «Je voudrais voir la Bastille». Et de me répondre: «Vous ne savez pas qu'on l'a prise?» Ils ont un sens de l'humour assez poussé, assez poussé. Au Lac Saint-Jean, «on ne fait pas simple», puis «à cause», et «pour qui faire»; mais c'est la seule région au Québec qui dit ça. Au lieu de dire «pourquoi faire»! Au Lac-Saint-Jean, ils ont des expressions merveilleuses, comme si la chose devenait personnalisée à ce point, pour eux... On dit: «Mais tu me demandes ça pour qui faire?» Et c'est beau, en fait, c'est très beau, c'est très joli. J'aime autant ça que «Eh, peuchère! où vas-tu ce soir?». Vous savez, on a chacun nos charmes. Ça aussi, c'est beau, Marius.

M. Bourbeau: Ou encore «un flo en bobettes sur le cran».

M. Blais: Un quoi?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Non, j'aimerais bien l'entendre.

M. Bourbeau: «Un flo en bobettes sur le cran».

M. Blais: Le «cran», je ne connais pas. «Flo», je connais. Ils disent un «flo» pour un jeune; «en bobettes», c'est en slip et, en français, on appelle ça un short. Mais, le vrai nom, c'est slip. Mais, le cran, c'est quoi? Une petite montagne?

Une voix: Une petite montagne, une petite colline.

Une voix: Un petit tas de roches. Une voix: Un petit tas de roches dans un... M. Blais: Ah! Un petit tas de roches, quoi. Une voix: Un cap.

M. Blais: Attention! Les slips puis le cap, là, il faudrait que vous précisiez. Un petit cap de...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: Je connais beaucoup les expres- sions. On dit que, nous autres, à Montréal, on a le «a» gras, mais je vous dis qu'au Lac-Saint-Jean ils disent le mont «Vâlin»; ils ne disent pas le mont Valin, mais le mont «Vâlin».

M. Bourbeau: On est un peu loin de...

M. Blais: C'est très près. Ou bien, donc...

M. Bourbeau: ...la Chambre de commerce, M. le Président.

M. Blais: Mais, la meilleure de toutes, c'est «Fais pas simple». Celle-là... «T'es don d'adon». «T'es don ben d'adon!». Dites ça à un Français! Bonjour, vous arrivez au Québec? Certainement, je descends là. Du bateau? Le bateau retourne, retounez-vous avec? Non. Mais, vous êtes «don ben d'adon!». Pardon? Vous êtes «ben d'adon». Comment, «T'es ben d'adon»? Ils ne peuvent pas comprendre.

Je me souviens, moi, que j'étais arrivé, j'avais fait la location d'une voiture. Je descendais de Paris, en voiture, jusqu'à Nice, sur la côte, et je m'étais arrêté à différents endroits. Mais j'ai eu un problème avec ma bagnole, j'ai eu un petit problème. C'est que ma courroie a brisé, la courroie de mon système de ventilation. Je me suis arrêté au garage, et j'ai dit: «Ma strap de fan est lousse; je pense qu'elle est pétée.» «Ma strap de fan est lousse, je pense qu'elle est pétée», imaginez! Comment voulez-vous qu'un Français comprenne une chose comme ça? Ça fait que le garagiste, il a dit: Eh! dis donc, mec! Mais, moi, je pensais que ça voulait dire le résumé d'un mécano, d'un mécanicien. J'ai dit: Non, je ne suis pas mec du tout. Il a dit: Vous êtes qui? Bien, je ne suis pas mécano, je ne suis pas mécanicien. Il a dit: Ah! On veut dire... Là, j'ai demandé ce que c'était. Ce n'est pas un mécano, même si j'étais au garage. Eh! Dis donc, mec, quelle langue tu parles? J'ai dit: Je parle français québécois. Il y en a qui disent: Je suis Québécois, Canadien, Français d'Amérique du Nord, Nord-Américain, Terrien. Ils ne savent pas où ils sont. Ils sont tellement de choses qu'en fin de compte ils ne sont rien. Mais je l'ai expliqué; j'ai dit: Écoutez, je ne sais pas, je ne connais pas beaucoup la mécanique: «Ma strap de fan est lousse». Je ne connais pas beaucoup la mécanique. J'ai dit: Vous avez juste à nettoyer le «windshield», à lever le «hood», puis à regarder dedans si le député de Berthier est là... Euh... Levez le «hood», puis regardez, vous allez voir. La courroie est brisée. Là, il a compris le mot «courroie». Puis, là, j'ai dit: J'ai «poqué» mon «bumper» aussi. Ça fait que, là, ils n'ont rien, rien compris. C'est pour vous dire que les expressions de chacun...

Mais, au Nouveau-Brunswick, c'est encore pire que ça. Je me souviens d'être allé au Lac-Saint-Jean, à Saint-Fulgence...

Une voix: C'est très beau, ce coin-là.

M. Blais: II y avait un service funéraire. Et ils étaient parents avec des «Nouveaux-Bruns-wickois». Et, nous, on emploie moins, maintenant... Depuis que le PQ a pris le pouvoir, les termes français pour l'automobile sont revenus, comme on a commencé à semer une fierté d'être un peu ce que l'on est. Ce que l'on est, «n-'-e-s-t». Et on a commencé à dire «enjoliveur de roue», «pare-chocs», «pare-brise», «essuie-glace», «clignotant». Puis, aujourd'hui, on comprend ça. On ne fait plus un «flat», on fait une crevaison. On achète un pneu. On sait les mots français, aujourd'hui. Mais, au Nouveau-Brunswick, ils sont rendus plus loin que nous, parce qu'ils sont moins nombreux. Et, comme dans toutes les provinces anglo-saxonnes, les francophones ne sont pas tellement aidés à conserver... Ils n'ont pas, comme nous, de la maternelle jusqu'à la fin de l'université, tous les services, les radios et les télévisions, les communications, les écoles, et tout. Ils n'ont pas ça. Donc, ils perdent beaucoup plus leur souche française qu'ici. (17 h 40)

Alors, j'étais là, et la personne qui arrivait... Bien sûr, venant du Nouveau-Brunswick, c'était très loin. Elle avait eu un petit accident en s'en venant. Ça fait qu'on est allé voir tout suite. Je lui ai dit: Qu'est-ce qu'il y a eu, comme accident? «J'ai poqué mon fender». Ils ne disent même plus «aile de voiture». Le «fender»! C'est rendu loin! Puis il avait un problème avec sa «door». Nous autres, on ne se rendait pas là. On trouve ça drôle, nous, les francophones du Québec, parce qu'on ne s'est jamais rendu aussi loin que ça. On disait «bumper», «windshield», «tire», «cap de roue», «char». «T'sais», toutes des affaires! Mais, rendu à «fender», là, on n'est pas rendu là, nous autres. Donc, ça nous surprenait. Ça fait qu'imaginez-vous donc le mec, au garage, sur la route de Cannes, où je suis allé faire «checker ma strap de fan qui était lousse»! Imaginez! Lui, il arrivait de plus loin que ça, hein! Alors, j'ai fait un peu rire de moi, mais ça m'a donné un coup pour essayer d'être un peu plus perfectionniste du côté langue.

Une voix:...

M. Blais: Je n'ai pas compris... Oui.

Mais, tout ça, c'est simple, en fait, et ce n'est la faute de personne d'autre que nous, les francophones, s'il en est ainsi. Ce n'est pas une accusation à la minorité, là. C'est que, à l'époque du cheval, avant l'arrivée de l'automobile - pensez-y comme il faut - tous les mots sont français. Tous les mots! C'est une charrue, c'est un licoul, c'est des guides. Il n'y a pas de mots étrangers, là. Il n'y en a pas! Quand l'automobile est arrivée... C'était surtout à la fin du régime Taschereau, Godbout... avant Godbout, là, à l'arrivée de Duplessis. On avait un gouvernement, à Québec, qui ne se tenait pas debout. C'est ça, le problème! Ils n'avaient qu'à obliger les gens qui amenaient les voitures ici à mettre la technique française. On est obligé de tout reprendre, après. Mais c'est beaucoup plus difficile de faire un retour en arrière.

Alors, M. le Président, vu que j'avais promis de ne pas parler longtemps, que deux de mes confrères sont là et que je sais qu'ils ont des choses d'un intérêt capital à dire avant la fin... J'ai parlé tantôt d'un point cardinal; là, je sais que les gens ont des points «capitals» à faire. Et afin que personne ne soit déboussolé, de mon côté, M. le Président, avant que de perdre le nord, je cède la parole à quelqu'un d'autre. Et je vous remercie de m'avoir écouté, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Je vous remercie beaucoup, M. le député de Masson, pour cet intéressant monologue. Maintenant, je vais reconnaître le député de Shefford, pour 10 minutes.

M. Roger Paré

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. J'ai écouté très attentivement mon collègue de Nelligan, tantôt. Et c'est dommage qu'il ait dû s'absenter parce que... Ah! Il est là-bas. Il a passé des remarques que j'ai trouvées très intéressantes, mais j'ai quelques commentaires à faire dessus.

La première, il a dit qu'il aimerait ça avoir un débat de fond plutôt que d'entendre les discours qu'on entend. Je vais vous dire, toutes les motions qu'on a déposées depuis le matin pour entendre la Société nationale des Québécois, la Société Saint-Jean-Baptiste, le Conseil du patronat et maintenant la Chambre de commerce, c'est justement parce que, nous aussi, on aurait aimé ça, faire un débat de fond; pas juste entre nous, mais avec les gens qui sont intéressés, dans la société, aux modifications qu'on apporte. Parce que, qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, les lois qu'on vote ici, ça peut nous faire plaisir à nous, mais ça a des effets sur le comportement de la société et sur le vécu des gens. N'oublions jamais ça! On a l'air de prendre ça trop à la légère, ici. Qu'on vienne modifier des choses dans le vécu des gens en pensant que, pour nous, ce n'est pas grave, parce que, quand on va avoir voté, ce sera fini... c'est probablement ce qu'on appelle des «coquilles de fin de session». À un moment donné, dans la première quinzaine de juillet, tout le monde sacre, au Québec. «Ça prend-u une bande de caves pour nous avoir passé des affaires de même!» Bien, vous écouterez, dans vos comtés, ce que les gens vont dire par rapport aux modifications qu'on est en train d'apporter. Ils vont se demander ce qui nous a pris, quelle mouche nous a piqués. Donc, ça, c'était le

premier point auquel je voulais faire allusion. Quand il disait qu'il voulait un débat de fond, moi aussi, j'aurais aimé ça, qu'il y ait un débat de fond par rapport à la modification législative qu'il y a devant nous autres.

L'autre remarque qu'il a faite: Je ne suis pas sûr que nos électeurs seraient contents s'ils voyaient comment on agit et les discours qu'on est en train de faire, comment ils prendraient ça, le temps qu'on est en train de perdre. Nous ne sommes pas en train de perdre du temps. C'est la démocratie qui est en train de s'exercer. Et ce n'est absolument pas la même chose. Et, moi, je suis convaincu que, la tête haute, tantôt, vers 21 heures, dans mon comté, je ne serai pas gêné pantoute de rencontrer les gens et de leur dire ce que j'ai fait aujourd'hui, parce que je suis convaincu qu'ils ne sont pas d'accord avec le projet de loi, et qu'on a fait notre boulot, à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire prendre le temps nécessaire pour essayer d'empêcher la loi de passer, avec les moyens démocratiques qui sont en notre pouvoir. Les gens préfèrent qu'on prenne le temps nécessaire, même si, des fois, c'est long, même si, des fois, ce n'est pas tentant. Je suis convaincu que les citoyens diraient: Au moins, comme Opposition, vous avez essayé de prendre tout le temps que vous aviez. Vous avez utilisé les moyens que vous aviez à votre disposition pour empêcher cette loi de passer.

Et ce n'est pas du temps perdu que d'essayer de convaincre un gouvernement qu'il fait fausse route. Non seulement ce n'est pas du temps perdu, mais c'est une obligation qu'on a, dans un système démocratique, parce que les citoyens qui ne sont pas d'accord n'ont pas d'autre véhicule, n'ont pas d'autre moyen que d'utiliser l'Opposition pour faire valoir leur point de vue. Donc, je n'ai pas l'impression qu'aujourd'hui j'ai perdu mon temps ici, en commission parlementaire, en essayant d'apporter un éclairage sur le projet de loi, en montrant que c'est un projet de loi très politique, que c'est un projet de loi à saveur constitutionnelle. Et, la preuve, c'est le député de Nelligan qui a dit qu'il espérait non seulement qu'on allait fêter grandement le 125e anniversaire du Canada mais qu'on allait fêter encore dans 300 ans. C'est un débat politique qu'on est en train de faire. Il faudrait que nous, parce qu'on n'est pas d'accord, on laisse faire et on laisse aller? Je dois vous dire: Non, il n'en est pas question.

Et l'idée qu'on donne aux Québécois et au reste du monde! Comme si passer une loi comme ça, ça n'avait aucun effet, ça ne touchait personne et que c'était normal, parce que, nous autres, les méchants Québécois, on empêche ça. Comme si, dans le reste du Canada, c'était quelque chose d'acquis. J'aimerais ça, voir un député, en Alberta, apporter un projet de loi demandant que le 24 juin soit considéré comme ce qu'on veut faire du premier juillet, ici! Et là je parle de l'Alberta. Dans n'importe quelle autre Législature provinciale, essayez d'apporter un projet de loi semblable par rapport au 24 juin, et vous allez voir les discours que vous allez entendre. Premièrement, ça ne serait jamais présenté, parce qu'il n'y en a pas un qui voudrait. On a vu un député francophone, en Saskatchewan, essayer d'apporter un projet de loi et une discussion, ou même l'utilisation du français en Saskatchewan. Arrêtez-donc, bongyeu! de nous faire passer pour des «anti quoi que ce soit» parce qu'on veut tout simplement la normalité des choses, comme dans le reste du monde, comme dans les autres provinces du Canada.

Il y a quelqu'un qui avait raison quand il a mis, à l'intérieur du Grand Théâtre de Québec: «Vous n'êtes pas tannés de mourir, bande de caves?» Ça, là, je dois vous dire, c'est très significatif, et ça dit ce que ça doit dire. Ce n'est pas nouveau, mais ça continue. C'est ça qui est inquiétant. Ça continue au moment où on est dans un débat aussi capital que celui qu'on est en train de vivre. C'est une erreur de l'amener maintenant. Et, si on avait la chance d'écouter la Chambre de commerce, effectivement, s'ils étaient dans la salle, ici, ils seraient scandalisés, ces gens-là, pas nécessairement par les discours qu'ils entendraient mais par le fait que, dans une crise économique aussi forte que celle qu'on traverse - et on n'est pas à la veille d'en sortir si ça continue - on a un débat, non pas pour aider les entreprises, encore une fois, mais pour leur compliquer l'existence; il y a des gens qui s'arracheraient les cheveux de sur la tête.

Le gouvernement va passer une loi comme ça en période de crise économique, avec la guillotine, quand on devrait être en train d'essayer de trouver des moyens et des programmes pour aider nos entreprises à créer des emplois ou à ne pas crever. À la place, effectivement, il y a un projet de loi qui n'a pas de bon sens, et l'Opposition qui utilise des discours qui sont un peu longs - et peut-être que vous allez les trouver un peu plats - mais ce sont des moyens démocratiques pour l'empêcher de passer.

Ça n'aidera rien. Ça n'aidera pas le Québec, ça va nous affaiblir. Ça n'aidera pas les entreprises, parce qu'elles vont être obligées, maintenant, de s'adapter à une loi qui vient leur compliquer la vie, alors que la loi actuelle est simple, elle est claire, elle est acceptée, et on vit avec. On vit avec sans amener de complications, ni quoi que ce soit. Bien, là, vous dites: On va fêter ça. Et le député a été très clair là-dessus, on veut fêter le 125e la journée même.

M. Williams: J'ai dit «je». M. Paré: Pardon?

M. Williams: J'ai dit «je».

(17 h 50)

M. Paré: Oui, «je», mais «je», dans le sens d'un projet de loi, c'est aussi la population. Donc, on va faire ça. On peut le changer, sauf que c'était clair, et c'était tout le monde en même temps. Vous nous tiendrez les beaux discours de la politique familiale, mais, ou on ne le changera pas, et ceux qui vont le changer... Puis, que le mari soit changé et que, pour la femme, ça ne soit pas changé, on «va-t-y» en faire, des beaux micmacs? C'est pour dire! C'est des lois qui n'ont pas de bon sens, à mon avis. Non seulement ça n'a pas de bon sens par rapport à la pratique, mais ça n'a pas de bon sens par rapport au respect de la population.

Et qu'on vienne nous tenir le discours, de l'autre côté, qu'on a le droit de fêter cette fête, ça laisse sous-entendre que, dans toutes les provinces canadiennes, il y a le respect de la minorité francophone et qu'ils fêtent le 24 juin. Bien, voyons donc! Voyons donc! Les francophones des autres provinces n'ont pas le droit à cette fête-là, eux autres. Et on va nous reprocher, à nous autres, de vouloir reconnaître la société distincte du Québec par sa fête nationale, le 24 juin! Et! Le 1er juillet, ce n'est pas comme le 24 juin, et ce n'est pas reconnu ailleurs. Il faudrait au moins qu'il y ait, à un moment donné, ce qu'on appelle l'équivalence, la parité. On nous traite, ici, comme si on était des gens non conciliants, non généreux parce qu'on veut la normalité des choses. Je vais vous dire, on est le peuple le plus généreux au monde par rapport au traitement qu'on donne à notre minorité. Et, ça, moi, je dis que c'est une fierté pour les Québécois. Là-dessus, je ne voudrais pas que ça change, c'est une fierté. Moi, je me suis battu, et je me bats encore pour le maintien de mes deux écoles primaires anglophones dans le comté. J'y tiens. Ça fait partie de notre histoire. On est dans les Cantons-de-TEst, et ils ont droit à leurs institutions. Mais, entre la reconnaissance du droit aux individus et l'espèce d'à-plat-ventrisme par rapport à notre contexte de minorité au Canada...! C'est refuser de reconnaître notre fait de majorité au Québec...

Le Président (M. Marcil): M. le député...

M. Paré: ...et je trouve que c'est une loi qui est insultante pour la majorité québécoise. C'est juste une loi de stratégie qui nous est apportée, en plus, par une guillotine. C'est indécent, M. le Président.

Une voix:...

M. Paré: Non, j'ai terminé.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Shefford. Je vais reconnaître M. le député de Nelligan.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président, de me donner quelques petits moments pour faire peut-être une des dernières interventions de cette longue discussion sur... Je m'excuse. Ici, à cette table, on peut certainement répéter quelque chose que nous avons entendu jusqu'à maintenant. Je voudrais dire merci au député de Shefford pour avoir, au moins pendant ses 10 minutes, parié pour la motion. Il a au moins mentionné le nom de la Chambre de commerce. Parce que le député de Masson, pendant toute son allocution...

Une voix: II a oublié.

M. Williams: ...je pense qu'il a oublié. Mais, peut-être, quand il a lu la motion, fl a mentionné les mots «Chambre de commerce». Félicitations pour ça! Mais, après ça, ce n'était pas bien connecté avec la motion. Je n'ai pas appelé la pertinence, mais c'est pourquoi j'ai voulu juste dire merci au député de Shefford.

Mme Vermette: M. le Président, est-ce que...

M. Williams: Est-ce que c'est une question de règlement, ou quoi?

Mme Vermette: Oui, une question de règlement. Est-ce que je pourrais poser une question au député de Nelligan? Je voudrais lui demander s'il voudrait que le député de Masson recommence-Une voix: Pas du tout, pas du tout, pas du tout, pas du tout...

Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît!

Mme Vermette: ...pour qu'il puisse parier de la Chambre de commerce plus souvent, M. le Président.

Une voix: Pas du tout, pas du tout, pas du tout!

Le Président (M. Marcil): Non, non. Laissez le député de Nelligan terminer son exposé.

M. Williams: J'ai juste décidé de mentionner ça, parce que nous avons eu... Le député de Shefford aussi est revenu à mon point sur l'efficacité de notre temps. Oui, c'est vrai, c'est dans la règle démocratique, et on peut vivre avec les règles; on vit avec leurs conséquences, aussi. Mais je voudrais juste mentionner, très vite, que nous avons discuté la question de la famille. Peut-être que le député de Shefford va dire que c'est un conflit d'intérêts, ou ça va être aussi une autre raison, mais sur la famille,

sur la question familiale... J'ai deux enfants, j'ai une épouse qui travaille...

Une voix:...

M. Williams: Elle travaille dans une banque; nous sommes chanceux, les deux travaillent. Vous avez raison. Et on doit discuter les questions économiques comme celles que j'ai mentionnées. Mais, avec des règles telles que nous en avons dans la loi maintenant, elle doit travailler le 29 juin, sauf si elle prend un congé, comme ça. Et elle doit prendre le 1er juillet de congé parce qu'elle travaille dans une banque, et c'est sous les règles fédérales. Je ne sais pas si c'est le bon mot ici, mais c'est les règles. Moi, je n'ai pas la même chose.

Le député de Shefford a discuté des questions familiales. Ça va certainement changer notre fête si je prends le 29 et qu'elle prend le 1er. Ça va être bien difficile de fêter avec mes deux enfants, Christopher et Michael. Et je pense qu'on doit avoir un peu de coordination. Vous avez tout à fait raison. Ça va être bon de coordonner des affaires comme ça, parce qu'il y a plusieurs familles qui seront exactement dans la même situation. Il y a plusieurs Québécois et Québécoises qui travaillent dans la fonction publique fédérale, ici, au Québec, mais ils travaillent là, ils suivent les règles là. Il y a plusieurs Québécois et Québécoises qui travaillent dans des institutions financières, qui doivent travailler le 29 et seront en congé férié le 1er juillet. Il y a plusieurs personnes, Québécois et Québécoises, qui travaillent dans les autres corporations parapubliques fédérales, qui vont avoir les mêmes règles que celles que je viens juste de mentionner.

Avec ça, si vous voulez avoir la coordination de ces congés, avoir la possibilité que le père et «le» mère... - le père et la mère? On a parlé de questions linguistiques, avant; je voudrais être correct quand je parle. En tout cas!

M. Blais: Je tiens à vous féliciter. Vous parlez un assez bon français, meilleur que mon anglais, malgré que ce soit rare que je m'exécute - ça serait le cas de le dire - au sens primaire.

Une voix: Ne continuez pas ça. Une voix: II a posé une question...

Le Président (M. Marcil): Ah bien! Il faudrait qu'il s'adresse au président.

M. Williams: Merci beaucoup, M. le député de Masson. Mais je voudrais certainement souligner l'importance... Il y a plusieurs Québécois qui vont être exactement dans la même situation que moi, qui ont des enfants, et les deux parties de la famille travaillent. Et, si nous n'avons pas une bonne coordination des règles, si nous n'avons pas une harmonisation des congés fériés, ça va être presque impossible d'avoir une fête ensemble pour la famille. Parce que, vous avez tout à fait raison, comme le député de Shefford l'a mentionné, nous avons souvent fait des discours d'appui à la famille. Nous allons continuer de donner des discours qui appuient la famille québécoise.

Je pensais que, ce soir, nous allions discuter aussi d'une loi sur les garderies, mais j'ai entendu dire que ça va être plus tard, la semaine prochaine. Le gouvernement libéral veut supporter la famille. Le gouvernement libéral supporte la famille, et nous allons continuer de faire ça. C'est une façon de faire et, dans mon cas spécifique... J'espère que ce ne sera pas le prochain débat à l'Assemblée nationale. Peut-être que ça va être cité comme un conflit d'intérêts, parce que nous avons cité beaucoup de choses, et nous avons appris beaucoup de choses, ici. Mais j'ai dit: Voilà l'exemple qu'un Québécois canadien, qui a une famille québécoise et canadienne, va être divisé à cause de cette loi. On veut avoir un peu de coordination, c'est pourquoi on peut fêter la fête la même journée. Je pense que c'est clair et simple. J'ai essayé d'être clair et simple pendant tout le débat. J'ai essayé de répondre à toutes les questions, d'expliquer, et, jusqu'à date, je n'ai pas convaincu l'Opposition. Mais peut-être que, plus tard, la prochaine fois qu'on discutera de ça, on pourra changer votre opinion. Merci beaucoup.

Le Président (M. Marcil): M. le député, compte tenu...

M. Williams: M. le Président, en conclusion, je pense que j'ai démontré un bon exemple; nous avons besoin d'une harmonisation des règles pour les familles québécoises.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Nelligan. Compte tenu du temps, nous allons ajourner sine die. Et j'informe les membres de cette commission qu'à 20 heures nous reprenons sur le projet de loi 408.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 26)

Projet de loi 408

Le Président (M. Marcil): Je déclare la séance ouverte, et je rappelle le mandat de la commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 408, Loi sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Houde (Berthier) sera remplacé par M. Gautrin (Verdun). Puis je rappelle également que Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve est membre de la commission pour la durée du mandat.

Institution et organisation (suite)

Le Président (M. Marcil): C'est bien. Donc, nous revenons à l'article 5, pour lequel il y avait un amendement sur lequel nous étions déjà à discuter. Il y avait déjà 18 minutes d'entamées à la discussion, donc, il vous reste 42 minutes, maximum, parce qu'on peut faire 20 minutes par alinéa. C'est ce que Mme la députée avait demandé à ce moment-là, mais elle n'est pas obligée de prendre son temps. Donc, Mme Harel... Excusez, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

M. Bourbeau: M. le Président, c'est 20 minutes pour toute la commission? C'est 20 minutes par personne ou par alinéa?

Le Président (M. Marcil): Oui, oui, par personne.

M. Bourbeau: Donc, c'est 20 minutes pour Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Ça fait 60 minutes pour elle et 60 minutes pour moi.

Le Président (M. Marcil): vous avez toujours le droit de répondre, d'intervenir aux questions. il n'y a pas de temps d'alloué pour vous, dans le fond. o.k.?

M. Bourbeau: Ah bon! Mais je n'ai pas l'intention de me «filibuster» moi-même.

(Consultation)

Mme Harel: M. le Président. Le Président (M. Marcil): Oui. Mme Harel: On est à...

Le Président (M. Marcil): Vous cherchez l'amendement?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Marcil): On peut vous en passer un.

Mme Harel: Finalement, l'amendement a été... Je vais prendre celui de... Alors, nous avions donc, je pense, complété l'échange sur le premier alinéa.

Le Président (M. Marcil): Donc, on passe au deuxième.

Mme Harel: Et j'aimerais, à ce moment-ci, demander au ministre quelles sont les associations d'employeurs les plus représentatives qu'il entend consulter.

M. Bourbeau: Celles que nous allons considérer être les plus représentatives.

Mme Harel: Hum, hum! En ce qui concerne les organismes du milieu coopératif, s'agit-il du Mouvement Desjardins ou du Conseï de la coopération du Québec? Parce que vous mettez «des organismes du milieu coopératif».

M. Bourbeau: Oui, oui. On va consulter l'ensemble des organismes...

Mme Harel: II n'y aurait donc pas que le Mouvement Desjardins?

M. Bourbeau: ...du mouvement coopératif, mais je doute qu'on nomme quelqu'un qui provienne d'une autre organisation que le Mouvement Desjardins, à moins que le Mouvement Desjardins ne manifeste pas d'intérêt pour la chose.

Mme Harel: Hum, hum! Mais, tel que libellé, vous avez l'intention de consulter, nécessairement...

M. Bourbeau: C'est pour ça, d'ailleurs, qu'on l'a rédigé comme ça. (20 h 30)

Mme Harel: Ah bon! Et en ce qui concerne le milieu de l'éducation, il vous avait été demandé, en commission parlementaire, une représentation du milieu de l'éducation qui ne soit pas celle de fonctionnaires nommés par les ministres des ministères concernés par l'éducation. Faut-il comprendre qu'en formulant comme vous le faites, dans votre amendement, «un représente le milieu de l'enseignement secondaire»... Qu'est-ce que vous entendez par l'expression «le milieu de l'enseignement secondaire»?

M. Bourbeau: II n'y a pas essentiellement de modification à ce sujet-là par rapport au texte original. Le libellé est différent, mais ce sont les mêmes mots présentés différemment. Ça laisse toutes les possibilités. Ça peut être un fonctionnaire, ça peut être un enseignant, ça peut être un administrateur. Toutes les possibilités sont sur la table.

Mme Harel: Mais je crois me rappeler qu'au moment de nos travaux en commission parlementaire la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science avait clairement indiqué qu'il allait s'agir pour elle de désigner quelqu'un de son ministère.

M. Bourbeau: La députée veut sans doute

dire «pour elle de recommander», parce que la désignation n'est pas faite par la ministre. Elle est...

Mme Harei: Pas nécessairement.

M. Bourbeau: Oui, mais, même la ministre, ce n'est pas elle qui fait la recommandation au gouvernement. Elle est consultée par le ministre de la Main-d'oeuvre. Alors, c'étaient ses intentions, à elle, par rapport aux consultations que je tiendrai avec elle.

Mme Harel: Alors, c'est donc dire que le troisième alinéa laisserait place pour la nomination de six fonctionnaires.

M. Bourbeau: Ha, ha, ha! En théorie, ce n'est pas impossible, mais, en pratique, il y a très peu de chances. Enfin, tant que c'est moi qui suis le ministre responsable, je n'ai certainement pas l'intention de proposer la nomination de six fonctionnaires.

Mme Harel: Alors, pourquoi ne pas avoir spécifié, comme le demandait la Fédération des commissions scolaires: «après consultation des milieux concernés de l'enseignement secondaire; après consultation des milieux concernés de l'enseignement collégial»? Pourquoi ne pas l'avoir ainsi rédigé? En fait, le ministre consulte ses collègues ministres, et c'est entre eux, comme en un circuit fermé, qu'ils vont nommer les personnes qui vont représenter le milieu de l'enseignement secondaire et le milieu de l'enseignement collégial.

M. Bourbeau: La formule dont parle la députée s'applique surtout à l'article 37. Quand il sera temps de nommer les régions, on va certainement, à ce moment-là, consulter les milieux des commissions scolaires, alors qu'au niveau de la Société québécoise la consultation est plutôt faite auprès des ministres concernés. Maintenant, ça n'empêche pas que mes collègues ministres peuvent consulter les milieux concernés. Ça n'empêche pas non plus, quand ce sera le temps de désigner des membres des conseils régionaux, que je puisse consulter les ministres concernés. Tout est possible.

Mme Harel: Par ailleurs, tout ça est laissé à la pure initiative des ministres. C'est bien ça?

M. Bourbeau: II faut bien que quelqu'un ait l'initiative quelque part. Je pense que c'est au niveau de la Société québécoise qu'on a jugé important que le ministre consulte ses collègues; au niveau des sociétés régionales, on a jugé important que les milieux eux-mêmes soient consultés. Ce qui n'empêche pas que les ministres soient consultés, là aussi.

Mme Harel: Alors, vous vous rappellerez que la Fédération des cégeps demandait de modifier le troisième alinéa de façon à ce qu'il se lise comme suit: «six autres membres dont un provient du milieu des collèges d'enseignement général et professionnel et un autre du milieu des commissions scolaires; ces deux derniers sont choisis après consultation des fédérations représentant les cégeps et les commissions scolaires.» Au niveau de la société mère. C'est donc dire que ça vous laisse le même nombre de membres: six membres - donc le même nombre que celui recommandé par le ministre - quatre à partir de la consultation auprès de ses collègues ministres, et deux qui représentent les mêmes milieux mais qui, en l'occurrence proviennent... Le terme est beaucoup plus fort que «représentent» puisque le souhait de la Fédération des collèges, c'était une rédaction qui disait: «proviennent» du milieu des collèges. Parce que, entre «représentent» le milieu des collèges et «proviennent» du milieu des collèges, il peut y avoir un océan, un continent de différence, et ça l'est tout autant pour la représentation au niveau secondaire. «Proviennent» des commissions scolaires est différent de «représentent».

M. Bourbeau: Est-ce que la députée de Hochelaga-Maisonneuve considère que je doive consulter mes collègues ministres pour le choix des six membres de la délégation gouvernementale? D'après ce qu'elle dit présentement, j'ai l'impression qu'elle estime que j'ai l'obligation de consulter les ministres pour les six membres.

Mme Harel: En entendant la question que vous me posez, ça me confirme encore plus dans la nécessité que vous consultiez les milieux d'enseignement collégial et secondaire, parce que le fait est - pour répondre à votre question - qu'il n'y a pas d'obligation pour que vous consultiez vos collègues ministres, sauf pour ces deux nominations...

M. Bourbeau: C'est exact.

Mme Harel: ...et le danger vient justement de là. C'est que vos collègues ministres, la seule possibilité qu'ils aient d'avoir quelqu'un pour être leurs yeux et leurs oreilles à cette société mère, c'est de pointer, si vous voulez, de désigner quelqu'un - le mot «désigner» est inadéquat, là...

M. Bourbeau: Suggérer, suggérer.

Mme Harel: ...juridiquement parlant, de suggérer, ou, je dirais presque, en langage politique, de vous imposer quelqu'un en faisant valoir que, de toute façon, auprès du Conseil des ministres, c'est leur seul homme ou leur seule femme dans la place. Et, ça, ça peut devenir un fait inquiétant. Ça peut devenir doublement inquiétant, du fait que, n'étant pas eux-mêmes

représentés, n'étant pas... Le ministère de l'Éducation ou celui de l'Enseignement supérieur et de la Science n'étant pas eux-mêmes représentés sur ce conseil d'administration de 19 personnes, la tentation va être très, très, très, très grande de choisir quelqu'un - puisque, pour représenter les milieux du secondaire et du collégial, vous devez les consulter - la tentation va être très grande, non pas de choisir quelqu'un qui provient de ces milieux-là et qui est, dans le fond, choisi par ces milieux-là, mais de choisir quelqu'un qui leur convienne à eux, dans la logique et la dynamique de leur ministère, qui est en conflit avec le vôtre.

Je ne dis pas ça pour faire un procès, là. J'ai constaté ça pendant un mois, le temps qu'ont duré nos travaux. Vous ne seriez pas là, eux ne seraient pas là comme ministres, ce seraient d'autres ministres, mais Je pense bien que la rivalité fratricide continuerait.

M. Bourbeau: La députée emploie des mots, M. le Président, qui sont nettement exagérés par rapport à la réalité, là.

Mme Harel: Vous trouvez?

M. Bourbeau: C'est un cas où la fiction dépasse la réalité.

Mme Harel: Vous trouvez? M. Bourbeau: Oui, oui. Oui, oui.

Mme Harel: Ah oui? Vous trouvez que ça l'est sur... Je dirais que ça l'est moins sur le terrain que ça ne me semble l'être, mais, s'il y avait juste un exemple à donner, le seul que j'aurais à donner, c'est celui que l'on retrouve dans l'énoncé de politique. Je pense que c'est celui qui est le plus percutant, n'est-ce pas, quand... Merci. Je pense que, dans l'énoncé de politique, quand on retrouve le papier qui a été collé à la page 63, là, on se rend compte un peu que ça n'a peut-être pas été fratricide, mais ça a sûrement été viril.

M. Bourbeau: M. le Président, mes relations avec mes collègues, la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science et le ministre de l'Éducation, sont excellentes. M. le Président...

Mme Harel: Sûrement!

M. Bourbeau: ...elles sont excellentes.

Mme Harel: Mais, quand vous vous êtes rendu compte que la fuite à TVA, à l'automne dernier, provenait de l'Éducation, vous vous êtes rendu compte que vous n'aviez pas juste des amis là-bas.

M. Bourbeau: Écoutez, à l'Éducation, il n'y a pas seulement le ministre; il y a des fonctionnaires, aussi, alors... (20 h 40)

Mme Harel: Oui, oui. Je ne vous parie pas de vos collègues.

M. Bourbeau: Je ne dis pas que c'est...

Mme Harel: Je vous dis qu'indépendamment des personnes il y a présentement - vous le savez, de toute façon, autant que je le sais, autant que les gens qui sont concernés le savent - une impasse qui n'a pas été dénouée. Et il y a un certain nombre de...

M. Bourbeau: M. le Président...

Mme Harel: ...conciliations qui ne se sont pas faites.

M. Bourbeau: Le phénomène de l'émergence de l'importance de la main-d'oeuvre et des changements qu'on doit apporter à la main-d'oeuvre sur le marché du travail, un peu partout, dans tous les pays, a amené ces tensions. C'est ainsi dans tous les pays que j'ai visités, entre les ministères de l'enseignement national des pays et les ministères du travail ou de la main-d'oeuvre. On tente de faire valoir des nouvelles façons de faire les choses en matière de formation de la main-d'oeuvre. Ce n'est pas un phénomène qui est unique au Québec, de vouloir changer les choses. Et, quand on change des choses, évidemment, ça dérange, et ça peut perturber certaines personnes qui sont réfrac-taires au changement. Mais je ne pense pas que le phénomène soit plus accentué au Québec qu'il ne l'est en France, par exemple, ou dans d'autres pays.

Mme Harel: En fait, vous faites valoir le vieil adage: Quand je me regarde, je me désole et, quand je me compare, je me console. N'est-ce pas? C'est ça?

M. Bourbeau: SI vous voulez.

Mme Harel: Ceci dit, M. le Président, en répondant à la question du ministre, je me confirme encore plus à quel point il serait nécessaire que les milieux de l'enseignement secondaire et collégial soient représentés.

M. Bourbeau:...

Mme Harel: Oui, mais qu'ils le soient par des personnes qui proviennent de ces milieux, parce que, étant donné que ce n'est que pour ces deux postes-là seulement que les ministres, collègues et néanmoins amis - c'est ce que je conclus - du ministre de la Main-d'oeuvre seront consultés, je suis convaincue que la tentation va être très, très, très forte de nommer des gens

qui vont plus faire valoir le point de vue des ministères que le point de vue des régions... des milieux, je veux dire, des milieux concernés.

M. Bourbeau: M. le Président, je...

Mme Harel: Excusez-moi, c'est un lapsus significatif. J'ai bien dit «des régions». Ce sera un autre débat, ce soir.

M. Bourbeau: Je ne sais vraiment pas où s'en va la députée de Hochelaga-Maisonneuve avec ses questions. M. le Président, quoi de plus normal que, dans une société de développement de la main-d'oeuvre où on veut que le monde de l'éducation soit représenté, il y ait des représentants du ministère de l'Éducation? Qui est mieux placé pour représenter le ministère de l'Éducation qu'un haut fonctionnaire du ministère de l'Éducation? Il me semble que c'est beaucoup plus représentatif qu'un commissaire d'école locale. Même chose pour le niveau collégial. Il me semble que ce n'est pas aberrant de penser que - je ne sais pas, moi - le sous-ministre de l'Éducation ou le sous-ministre de l'Enseignement supérieur, un sous-ministre adjoint ou un directeur général ferait un excellent représentant du monde de l'éducation, du monde de l'enseignement supérieur, certainement aussi bien que n'importe quel commissaire d'école ou professeur, sans vouloir rie1" enlever à ces derniers. Et je ne vois pas pourquoi on viendrait prétendre qu'il y a un danger que le monde de l'éducation soit mal servi par une représentation semblable.

La députée de Hochelaga-Maisonneuve fait son travail, c'est bien évident, mais je vois un peu quelle est la technique utilisée. Il y a eu 80 organismes qui sont venus en commission parlementaire. Bien sûr, il n'y a pas eu l'unanimité sur tous les sujets. Donc, il est facile de prendre, dans les 80 mémoires, à l'égard de chaque article, 10, 15 ou 20 mémoires qui n'étaient pas d'accord complètement avec l'article, d'arriver et de nous dire: Tel organisme a proposé autre chose; pourquoi ne le faites-vous pas? Nous, on n'a pas fait un projet de loi en fonction des desiderata de chacun des 80 organismes; on aurait des sous-amendements, nous-mêmes, et le projet de loi ne se tiendrait pas. Il faut être cohérent. On a dessiné une loi, un organisme avec un plan stratégique, et on a mis sur pied l'organisme selon la philosophie que nous véhiculons. On a essayé de donner, autant que possible... Aux grands courants qui se sont dessinés, on a essayé de répondre autant que possible. On ne peut pas modifier à la pièce chaque article du projet de loi parce que l'organisme untel l'a souhaité, c'est évident.

Et je suis convaincu que la députée de Hochelaga-Maisonneuve peut trouver, à l'égard de chacun des articles de ce projet de loi, des voix qui se sont élevées et qui ont demandé des modifications. Il y en a eu, j'en suis convaincu, à chaque article, étant donné qu'on avait 80 organismes. Mais je ne peux quand même pas tenter à la fois de plaire à 80 organismes et avoir un projet de loi cohérent. Alors, c'est sûr qu'on peut apporter un amendement à chaque article, en disant: Tel organisme a demandé telle chose, alors je propose qu'on le fasse. Il faut quand même que, ça, ça s'harmonise complètement avec le reste du projet de loi. On ne peut pas tirer dans toutes les directions en même temps.

Alors, je fais appel au sens commun de la députée de Hochelaga-Maisonneuve pour ne pas nous soumettre à des amendements continuels, à chaque article, qui feraient en sorte de tenter de plaire à un organisme à l'égard d'un article, et à l'organisme suivant à l'égard de l'autre article. C'est sûr que ça permettrait peut-être à la députée d'aller dire aux organismes: Bien, j'ai proposé votre amendement, puis ça n'a pas fonctionné, mais, si on le faisait, si on acceptait tous ces amendements-là, je ne sais pas comment on se retrouverait à la fin de l'exercice. On aurait, je pense, une Société québécoise qui serait toute croche, qui aurait des caractéristiques, parfois, peut-être contradictoires. Alors, je fais appel à la bonne volonté de la députée pour qu'on puisse procéder. Moi, je suis prêt à regarder tous les amendements, mais qu'on ne vienne pas les apporter uniquement parce que les cégeps en ont parlé quelque part.

Mme Harel: M. le Président, je veux rassurer le ministre. Je ne dépose et je ne déposerai à cette commission que des amendements que je serais personnellement prête à défendre si j'étais à sa place. Et j'essaie de m'en faire un principe de travail: ne prendre des engagements et ne proposer des amendements que dans la mesure où je serais capable de prendre ces engagements et de proposer ces amendements si j'étais assise de l'autre côté de cette table.

M. Bourbeau: Mme la députée me rassure, M. le Président.

Mme Harel: Et je me rends compte que c'est parce... Je ne lui proposerai aucun amendement, durant l'étude qu'on fera du projet de loi 408, que je ne serais pas prête à défendre devant mes collègues, si tant est que j'occupais le siège qu'il occupe.

Ceci dit, je me rends compte qu'on a une vision différente du projet de loi. Autant on peut souhaiter, l'un comme l'autre, qu'il y ait une Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, autant la vision que l'on en a peut être différente, fondamentalement différente, très profondément différente. Moi, je n'ai absolument pas de réserve, aucune nuance à apporter au fait qu'il y a des sous-ministres qui siègent sur ce conseil d'administration, et qu'ils y siègent pour y représenter le gouvernement. Il y aura quatre

sièges pour ça. Mais que, pour les deux sièges qui sont censés représenter l'Éducation, ce soient des sous-ministres qui y siègent, ça... Personnellement, là, indépendamment du reste, même si c'est vendredi soir et que j'aimerais mieux faire autre chose... Je ne comprends pas qu'on n'ait pas été convoqués ce matin, étant donné que c'était ce matin qu'on devait siéger sur le projet de loi 408 et que, à la dernière minute, le leader du gouvernement a décidé de changer ça. Indépendamment de ça, on est là pour travailler, puis je le fais vraiment le plus positivement possible.

Mais, ceci dit, je le dis bien, bien simplement, c'est impensable. Je sais très bien que la formation de la main-d'oeuvre a bouleversé profondément les milieux de l'éducation, partout dans les sociétés industrialisées, étant donné que les milieux de l'éducation étaient des milieux institutionnels et que ce sont des milieux qui ont de la difficulté à simplement assouplir les règles qui, d'un siècle à l'autre ou d'une décennie à l'autre, avaient certainement amené une culture de tous ces milieux de l'éducation, une culture de l'apprentissage académique par des voies conventionnelles, etc. Ça, je peux bien en convenir, sauf que les sociétés ont relevé les défis de ces bouleversements quand elles ont pu mettre côte à côte les entreprises et les écoles et qu'à partir de leur rapprochement le milieu de l'école s'est ouvert à l'entreprise et le milieu de l'entreprise s'est ouvert à l'école. Sinon, c'est la crispation, et c'est les procès d'intention, d'un côté comme de l'autre. Et il n'y a pas, de toute façon, d'avenir de ce côté-là, parce que c'est une force d'inertie, et la lourdeur de l'appareil institutionnel est telle qu'elle peut tout bloquer. (20 h 50)

D'un autre côté, le ministre le sait, le milieu des affaires, lui aussi, peut bloquer. Et, en l'occurrence, actuellement - ce qui est quand même étonnant; c'est un paradoxe - le milieu des affaires est venu majoritairement nous dire qu'il voulait un rapprochement avec l'école, mais qu'il ne considérait pas que le projet de Société du ministre de la Main-d'oeuvre était le moyen le plus approprié pour effectuer ce rapprochement-là.

M. Bourbeau: Certains milieux d'affaires.

Mme Harel: Oui, mais... Disons que c'est «certains», mais ces milieux-là sont quand même représentatifs de la grande entreprise - pour ce qui est du Conseil du patronat, ça, le ministre en conviendra, c'est le discours que tenait le Conseil du patronat - ils sont représentatifs des milieux d'affaires des petites et des moyennes entreprises. Pour ce qui est des chambres de commerce... Bon, alors, de qui d'autre parlons-nous? Parce que l'AMQ, l'Association des manufacturiers du Québec, qui est une force montante, importante, et qu'il faut plutôt soutenir et consolider, bien, l'Association des manufacturiers du Québec est venue, malgré tout, tenir le même langage du nécessaire rapprochement de l'entreprise avec l'école et de l'importance d'une présence accrue du milieu de l'éducation au sein de la Société. Et là, quand le ministre, à mes préoccupations, me répond que ce ne serait pas une si mauvaise chose que ce soient des sous-ministres qui représentent l'Éducation, là, je crois qu'il y a un fossé énorme, énorme, énorme. Parce que si c'est des sous-ministres qui représentent l'Éducation, là, je pense qu'on ne marche pas du tout dans la même direction, pas du tout, du tout, du tout, du tout, du tout.

M. Bourbeau: Je n'ai pas dit ça, M. le Président.

Mme Harel: Vous venez de le dire, il y a quelques minutes.

M. Bourbeau: J'ai dit que c'était une possibilité. Je n'ai pas annoncé que ce seraient des sous-ministres. Ça pourrait être...

Mme Harel: Oui, mais que ce soit une possibilité...

M. Bourbeau: Oui, mais, écoutez, vous préféreriez un fonctionnaire régional d'une commission scolaire? Un directeur d'une commission scolaire? C'est un fonctionnaire, lui aussi.

Mme Harel: Mme Drouin, la présidente de la Fédération des commissions scolaires. Mme Drouin ou la vice-présidente, Mme Lemieux. En fait, pourquoi pas quelqu'un du milieu des commissions scolaires?

M. Bourbeau: Mais ça pourrait être ça. Il n'y a rien qui interdise que ce soit elles qui soient nommées en fonction.

Mme Harel: Alors, pourquoi ne pas croire que c'est eux dont il faut s'assurer la présence?

M. Bourbeau: Mais, écoutez, avec la modification que je propose: «...dont un représente le milieu de l'enseignement secondaire», Mme Drouin pourrait parfaitement se qualifier avec ça.

Mme Harel: Non, parce que, pour se qualifier, il faudrait que ces deux derniers membres soient choisis après consultation des ministres concernés, c'est-à-dire le ministre de l'enseignement secondaire puis la ministre de l'enseignement collégial.

M. Bourbeau: II n'y a rien qui dise que le ministre de l'enseignement secondaire ne pourrait pas proposer Mme Drouin.

Mme Harel: II peut le faire...

M. Bourbeau: Mais oui.

Mme Harel: ...mais il n'est dit nulle part non plus qu'il devra le faire. Et il pourrait très bien choisir, plutôt, de faire nommer un sous-minlstre.

M. Bourbeau: est-ce que la députée de hochelaga-maisonneuve souhaite qu'on mette que le ministre doit nommer la présidente des commissions scolaires?

Mme Harel: Je pense que je vais non seulement souhaiter, mais en temps et lieu, à ce troisième alinéa, je ferai une proposition pour que les ministres concernés puissent être consultes quant à la nomination des membres autres que ceux représentant le milieu de l'enseignement secondaire et le milieu de l'enseignement collégial. Je crois que...

M. Bourbeau: La députée de Hochelaga-Maisonneuve sait fort bien que ces nominations-là sont discutées au Conseil des ministres et, dans ce sens-là, tous les ministres sont consultés sur toutes les nominations. Parce que, quand on propose un décret du gouvernement, ces décrets-là font l'objet de discussions au Conseil des ministres, donc, les ministres concernés vont être consultés au Conseil des ministres sur ces nominations-là. Ms peuvent s'objecter et, en cas d'objection majeure... Enfin, la députée a déjà été ministre, elle sait que, quand un ministre a une objection majeure sur une nomination, c'est suffisant pour la retarder, sinon pour la bloquer.

Mme Harel: Mais est-ce que le ministre peut me dire pour quelle raison il a préféré... je dirais «s'entêter», parce qu'on a toujours les défauts de ses qualités, hein? On peut dire du ministre qu'il est tenace, mais on peut reconnaître aussi qu'il est entêté. N'est-ce pas? Ça dépend du point de vue où on se place. Mais pourquoi est-ce qu'il s'entête à... Je n'ai pas vraiment compris, lorsque j'ai lu le projet de mémoire qui avait été déposé au Conseil des ministres, pourquoi le ministre ne donnait pas suite à deux courants majeurs, deux courants qui, pourtant, se sont exprimés fortement au moment des travaux de la commission parlementaire, qui sont, finalement, deux courants importants. S'il avait simplement donné suite à la représentation de ces deux courants-là pour leur faire une place au sein de la Société, il n'aurait pas toutes les difficultés qu'il rencontre présentement. Il peut bien me dire ce qu'il veut, le ministre, mais qu'on soit la seule commission parlementaire à siéger ce vendredi soir, après que, toute la journée, c'est le projet de loi 21 qui a été appelé plutôt que le projet 408 qui, normalement, devrait être le projet majeur, qui devrait être un projet extrêmement important, pas simplement pour le ministre, mais pour son gouvernement...

M. Bourbeau: Avez-vous demandé à vos collègues, qui ont parlé sans arrêt sur le projet 21? Nous, on était prêts à procéder, avec 408. C'est vous qui avez parlé pendant 34 heures sur le projet de loi 21, alors, vous avez retardé la commission.

Mme Harel: Non, je vais rappeler au ministre qu'après le début de la deuxième lecture sur le projet de loi 408 le projet de loi n'a même pas été rappelé vendredi dernier, en Chambre, à l'Assemblée nationale, en deuxième lecture; le projet de loi aurait pu l'être immédiatement, en deuxième lecture. Le gouvernement n'était pas du tout obligé d'appeler le 21. Moi, ce qu'on m'avait dit, c'est que le menu législatif, c'était d'abord le projet de loi 408, après, le projet de loi 30 et, après ça, le projet de loi 21. C'était dans cet ordre-là, que je trouvais absolument logique, dans l'ordre de l'importance des choses.

M. Bourbeau: Mais c'est toujours ça.

Mme Harel: Alors, le projet de loi 408 a été appelé jeudi; il ne l'est plus vendredi. Et, vendredi, le projet de loi qui est appelé, c'est le projet de loi 21. Alors, on se demande, on se dit: Comment comprendre que le gouvernement décide de donner préséance au projet de loi 21, à la fête du Canada? Il y a rien à comprendre à ça, surtout que le Canada ne donne absolument pas de bonnes raisons au gouvernement de fêter, particulièrement cette année, pas plus que les autres années. Alors, pourquoi cet acharnement à faire primer le projet de loi 21 sur le projet de loi 408? Ce sera l'énigme de ma session.

M. Bourbeau: Mais, si vous voulez...

Mme Harel: je suis en manque, moi, là, parce que je pensais vraiment... moi, j'étais convaincue qu'on serait en travaux sérieux depuis le début de juin.

M. Bourbeau: Mais, si vous vouliez vraiment discuter du projet de loi 408, pourquoi avoir fait perdre 36 heures à la Chambre pour un projet de loi que vous ne jugez pas important?

Mme Harel: Mais ce n'est pas nous qui appelons les projets de loi.

M. Bourbeau: Oui, mais vous ne le trouviez pas important, le 21, alors pourquoi ne l'avez-vous pas laissé aller rapidement?

Mme Harel: Mais, au contraire, justement. Si le ministre le juge peu important, lui aussi, comment se fait-il que son gouvernement, son leader l'ait appelé pendant 36 heures? Et comment se fait-il...

M. Bourbeau: Vous posez... Non, mon leader ne l'a pas appelé pendant 36 heures, il l'a appelé une fois, et c'est vous qui avez fait durer le plaisir pendant 36 heures.

Mme Harel: Je rappellerai au ministre que le leader du gouvernement a le contrôle du menu législatif. C'est lui qui appelle les projets de loi; il peut immédiatement, après une demi-heure, une heure, comme il veut, mettre fin à un débat et en entreprendre un autre. Il n'y a aucune...

M. Bourbeau: M. le Président... Mme Harel: Là...

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Hochelaga-Maisonneuve voudrait-elle admettre avec moi que, ni elle ni moi, on ne peut régler le problème des leaders. On a des leaders qui prennent leurs décisions. Moi, je suggérerais qu'on revienne au projet de loi 408. Je pense qu'on est en train de faire des débats qui ne nous feront pas avancer sur le chemin du 408.

Mais, pour ce qui est de l'éducation - dont on parlait tantôt, si on veut revenir à ça - il n'y a rien qui empêche le ministre de nommer des personnes - si tant est que ses collègues le lui conseillent - qui seraient autres que des hauts fonctionnaires du gouvernement. Ça pourrait être des hauts fonctionnaires régionaux, des commissions scolaires, ça pourrait être des élus, ça pourrait être n'importe qui, mais il faut que quelqu'un décide. La loi estime que c'est le Conseil des ministres qui nomme, donc, tous les ministres auront l'occasion de faire valoir leur point de vue. Si on pense que la proposition du ministre de la Main-d'oeuvre n'est pas bien équilibrée, mes collègues pourront faire valoir un point de vue différent et, probablement, influencer la décision du Conseil des ministres. (21 heures)

Mme Harel: Alors, M. le Président, j'insiste simplement sur le fait que c'est assez incompréhensible qu'il y ait une part si congrue qui soit faite à l'éducation et que, en plus, il n'y ait absolument aucune, aucune, aucune garantie qui soit faite que les milieux de l'éducation, sur le terrain... Il n'y a aucune assurance que les personnes qui seraient supposées représenter le milieu de l'éducation en proviendront. Il n'y a absolument aucune assurance. Il me semble que si le ministre avait simplement ouvert sur deux choses, je termine là-dessus, là, pour donner la garantie... J'espère qu'il l'a fait, en passant, à la CEQ. J'espère qu'il a eu la sagesse de le faire, parmi les cinq membres prévus au premier alinéa, hein? Il me semble qu'il y aurait eu du bon sens là-dedans, puis, comme je lui en attribue, j'imagine que...

M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai donné de garanties à personne, pas à la CEQ, pas à la

FTQ, pas la CSN, pas au Conseil du patronat ni à l'AMQ. Je n'ai pas voulu présumer de la décision de l'Assemblée nationale. Alors, si j'avais commencé à vendre la peau de l'ours avant qu'elle ne soit mise par terre, c'est la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui, aujourd'hui, viendrait me blâmer d'avoir fait un crime de lèse-Parlement, comme vous appelez ça. Bien non, je n'ai pas voulu faire un crime de lèse-Parlement, mais aucune garantie à personne.

Mme Harel: Mais il se serait fait des alliés, et peut-être ses alliés n'auraient-ils pas clamé tout haut ce qu'il aurait pu leur faire savoir tout bas? Mais...

M. Bourbeau: Vous savez, les alliés, parfois, ça fait connaître des choses tout bas qu'on ne veut pas répéter tout haut.

Mme Harel: M. le Président, je vous le dis bien sincèrement, le ministre, à ce moment-ci, il a bien peu d'alliés. Si tant est qu'il en a, ils ne s'expriment pas. Ceux qui ne lui sont pas alliés, eux, s'expriment beaucoup, très haut et très fort.

M. Bourbeau: M. le Président, la politique, c'est ainsi. Quand on veut agir, en politique, selon sa conscience et non pas pour faire plaisir à Pierre, Jean, Jacques et tout le monde, on prend des décisions. Souvent, on se fait dire par des gens: La décision est très bonne, mais on ne peut pas le dire en public. Alors, moi, j'ai appris à composer avec ça et je prends les décisions qui réapparaissent les meilleures. Je les fais confirmer par le Conseil des ministres.

Je dirai à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve que j'ai plusieurs alliés au Conseil des ministres, puisque le projet de loi a été approuvé par le Conseil des ministres, et plusieurs alliés parmi le caucus. Je pense qu'elle en connaît quand même quelques-uns ici et je pense qu'on pourrait en aligner 90 autres. Nous avons quand même encore la confiance des Québécois.

Alors, la députée de Maisonneuve peut peut-être peindre un portrait très noir de la situation, tenter de jeter un petit peu d'huile sur tous les feux qui se manifestent à travers le paysage, mais en gros, je pense que nous avons la confiance des électeurs. Il y a des gens qui s'expriment. Elle sait fort bien que ceux qui sont en faveur, en général, ne font jamais de bruit. Ils nous le disent, comme ça, là, dans des conversations privées, mais en général, ils ne le disent pas trop sur la place publique. Ceux qui sont contre, par contre, ça, ils le disent très fort et ils le font savoir et surtout, ils téléphonent ou ils écrivent à la députée de Hochelaga-Maisonneuve, qui, je la comprends, ne reçoit que des téléphones et des lettres de gens qui sont contre. Mais c'est vrai dans tous les projets de loi. Vous nous dites...

Mme Harel: En plus, se sont les amis du gouvernement qui m'écrivent.

M. Bourbeau: Oui, mais... Je comprends, mais, parfois, vos amis à vous, ils me disent des choses, moi, qui sont différentes, aussi. Alors, la politique se fait, comme on dit parfois... M. le Président, il y a une expression anglaise qui dit: «Politics makes strange bedfellows». Parfois, on se retrouve, M. le Président, avec des alliés qu'on ne pensait pas être des amis et qui le deviennent de façon circonstancielle. Moi, je...

Mme Harel: C'est pour ça qu'en général il faut avoir 10 amis pour 1 ennemi.

M. Bourbeau: Oui, bien, c'est bien ce que je pense avoir, M. le Président. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Je pourrai faire une liste à la députée de Maisonneuve de tous mes amis. Elle va être surprise, peut-être.

Mme Harel: Mais le ministre a peut-être surpris... Non, pas surpris mais... Si tant est que les propos qu'il vient de tenir sont sincères, comme je l'imagine, je peux difficilement comprendre comment lui-même n'est pas à même de comprendre, présentement, qu'il est en train de vivre, dans ce Parlement, ce qu'on appelle une fin de régime.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Moi, j'ai déjà eu l'occasion d'en vivre une.

M. Bourbeau: Ha, ha, ha! Oui, oui. Moi aussi, je l'ai vécue, votre fin de régime, et celle-ci ne ressemble pas à celle que j'ai vue.

Mme Harel: J'en connais les signes précurseurs et je peux maintenant les identifier très très bien. Quand on en arrive à mettre un bâillon, comme sur la loi 21, dans un projet de loi qui n'est demandé par personne ou presque, par personne... Moi, le ministre serait surpris, je réponds souvent au téléphone dans mon bureau, puis je réponds, là, à des personnes, des travailleurs qui ne font pas de politique, qui n'ont jamais appelé un député et qui, finalement, décident en groupe d'appeler, puis qui appellent pour me dire: On veut notre congé le lundi.

M. Bourbeau: Bien oui...

Mme Harel: Ce n'est pas la fête du Canada ou du Québec, etc. Ils ont un voyage de pêche, c'est organisé, ça fait des années et ils ne peuvent pas comprendre pourquoi maintenant ce serait changé. À part, la Gazette, évidemment...

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que la députée de Maisonneuve...

Mme Harel: Ça, je comprends que la Gazette fait campagne, mais à part le fait que le gouvernement veut aller chercher le vote d'Equa-lity et qu'Equality est en compétition avec la formation politique qui est au gouvernement présentement, qu'est-ce qu'il y a comme autre raison? En fait, on n'est pas à 21, on revient à 408.

M. Bourbeau: M. le Président, une seule remarque. Si Mme la députée de Maisonneuve est en train de nous dire que le gouvernement fait une grave erreur, que le Québec est en train de se soulever sur la question de la fête du 1er juillet et qu'à la suite de la journée sanglante d'hier, où l'Opposition a fait une bataille rangée jusqu'à 2 heures du matin... Est-ce que la députée de Maisonneuve a pris connaissance de L'ARGUS d'aujourd'hui? Il n'y a pas un seul article de journal dans tous les journaux d'aujourd'hui qui traite du très grave problème...

Mme Harel: Ça, c'est un signe précurseur d'une fin de régime.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: ...qu'a vécu l'Assemblée nationale hier, M. le Président, où le sang coule dans les rues à travers le Québec au sujet de la fête du 1er juillet. Ça n'intéresse personne, M. le Président.

Mme Harel: D'accord. Jusqu'à ce que les gens découvrent qu'ils n'ont pas congé le lundi. Ils vont assez vous en vouloir.

M. Bourbeau: Tant mieux pour vous.

Mme Harel: Dans un sens, moi, je me dis: Est-ce qu'on prend nos responsabilités, puis on s'assume comme Opposition, parce qu'une bonne opposition, ça rend le gouvernement meilleur, ou on vous laisse faire vos erreurs? Quand les gens vont découvrir qu'ils n'ont pas congé, pour des raisons idéologiques uniquement - parce que la grande majorité ne fête pas le Canada; ça se peut que ça fasse de la peine au député, mais c'est ça, la réalité - quand ils vont découvrir que vous voulez leur faire fêter de force, en plein milieu de la semaine, ils vont vous haïr.

M. Bourbeau: Un beau congé en plein milieu de la semaine, c'est agréable.

Mme Harel: Bon. On revient à 408, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'amendement?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Avez-vous présidé toute la journée? Alors, on va tout de suite déposer notre sous-amendement.

Le Président (M. Marcil): Le sous-amendement à l'amendement 5, c'est ça?

Mme Harel: Oui, c'est bien ça. D'abord, M. le Président, une dernière question...

M. Bourbeau: Elle est ineffable.

Mme Harel: ...dont on n'a pas parlé à l'article 5, c'est la nomination du président. Le ministre sait que la grande majorité des organismes qui appuient le projet de loi 408, en fait, la majorité de ceux qui pensent pouvoir y siéger et qui appuient le projet de loi lui ont demandé de consulter les organismes concernés avant de procéder à la nomination du président. Je vois que le ministre n'a pas retenu cette suggestion. Puis-je savoir pourquoi?

M. Bourbeau: Non, j'ai fermement l'intention de consulter, M. le Président.

Mme Harel: Alors, pourquoi ne pas l'avoir écrit?

M. Bourbeau: Je n'ai pas besoin de l'écrire, je le dis.

Mme Harel: Oui, mais vous, c'est vous. Vous êtes unique, irremplaçable...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: ...mais il arrivera un jour où...

M. Bourbeau: Et singulier.

Mme Harel: ...nous vous perdrons, le Québec vous perdra. C'est une chose à ne jamais oublier, n'est-ce pas? que notre fonction est transitoire, qu'avant d'être nommé ministre il faut d'abord être élu député, d'une part, puis ensuite, évidemment, il faut être nommé. Quoi qu'il en soit, pour dire la vérité, un projet de loi ça survit au ministre parrain qui le fait adopter, n'est-ce pas?

M. Bourbeau: II peut survivre longtemps aussi.

Mme Harel: Alors, pourquoi ne pas engager l'avenir dans le sens que vous dites que vous allez le faire? Pourquoi ne pas consulter?

M. Bourbeau: Écoutez, ça c'est une décision du Conseil des ministres de rédiger le projet de loi comme ça, mais il est bien entendu avec tout le monde que le gouvernement ne nommera pas ou ne nomme pas un président d'un organisme qui se veut un creuset du partenariat sans effectuer une certaine forme de consultation. Donc, que ce soit écrit ou non, j'ai l'intention de consulter les principaux dirigeants des milieux concernés. C'est un choix de gouvernement de l'écrire comme ça.

Le Président (M. Marcil): Ça va? Votre sous-amendement, madame?

Mme Harel: Alors, M. le Président, ce sera l'objet de notre premier sous-amendement.

Le Président (M. Marcil): On va le faire photocopier. Nous allons le faire reproduire. (21 h 10)

M. Bourbeau: Ils ne sont pas écrits déjà?

Mme Harel: C'est parce qu'on a, finalement, trois scénarios possibles.

M. Bourbeau: Vous êtes prêts à toutes les éventualités.

Mme Harel: M. le Président, je voudrais donc faire l'amendement suivant. Dans nos projets de loi, le masculin comprend le féminin. C'est bien ça.

Le Président (M. Marcil): II y a certains endroits où le féminin comprend le masculin aussi.

Mme Harel: alors, on pourrait, par exemple, décider à l'article 5 de dire: le gouvernement nomme la présidente. on pourrait le souhaiter, en tout cas.

M. Bourbeau: Absolument. Si vous avez des suggestions à nous faire parvenir, les enchères sont ouvertes.

Mme Harel: J'en ai deux. J'en ai déjà parié, d'ailleurs. Alors, donc, l'amendement se lirait comme suit: «Le gouvernement nomme le président après consultation du conseil d'administration.»

(Consultation)

Le Président (M. Marcil): Là, vous touchez le premier alinéa.

Mme Harel: C'est un amendement, excusez-moi.

Le Président (M. Marcil): II vient avant l'amendement que vous avez apporté, là, les trois alinéas.

M. Bourbeau: On est pris dans notre plomberie juridique.

Le Président (M. Marcil): Ce que je vais faire, mesdames, messieurs, je vais suspendre l'amendement à l'article 5 qui a été déposé par le ministre. Nous allons y revenir immédiatement après celui-là, parce que, lui, il précède.

M. Bourbeau: II ne précède pas dans le temps, mais il précède dans le sens.

Le Président (M. Marcil): Dans le sens.

M. Bourbeau: De toute façon, M. le Président, j'ai toujours cédé le pas aux femmes. Je suis habitué, j'ai été élevé comme ça.

Le Président (M. Marcil): Elle a même signé.

Mme Harel: Ah, mon Dieu!

Le Président (M. Marcil): Ha, ha, ha! j'ai dit qu'elle devait le signer.

M. Bourbeau: II est paraphé.

Le Président (M. Marcil): C'est bien. C'est ça. C'est qu'à l'article 5 l'amendement est le suivant: Ajouter, après «Le gouvernement nomme le président», les mots «après consultation du conseil d'administration».

M. Bourbeau: M. le Président, je peux peut-être tout de suite dire à la députée de Hochela-ga-Maisonneuve pourquoi on n'a pas retenu cette formule-là. Dans une version antérieure, on avait pensé utiliser une formule semblable. Le problème que ça pose... C'est que notre intention est, dès que la loi aurait été adoptée, si tant est qu'elle l'est un jour, de commencer par nommer le président-directeur général, dans un premier temps, et subséquemment de nommer les membres du conseil d'administration. Alors, on serait assez mal pris de nommer un président... Si on devait consulter le conseil d'administration, il faudrait attendre une bonne période de temps avant d'avoir formé tout le conseil d'administration. Ça peux prendre un certain temps de faire tous ces arbitrages-là et ça retarderait d'autant le choix du président.

Il est important, dans mon esprit, dès que la loi va être approuvée, de s'attaquer en premier lieu à la nomination d'un président-directeur général. Il y a énormément de travail à faire au cours des prochains mois: prévoir la transition et préparer tous les dossiers, tous les projets sur le plan technique que requiert la mise sur pied d'une nouvelle société. Ça va demander pas mal de boulot. Ça serait, à notre avis, imprudent de retarder indûment la nomination d'un président-directeur général ou d'une présidente-directrice générale. Alors, pour ces raisons-là, et je répète que nous sommes tout à fait décidés à consulter les milieux - je pense que c'est quand même un peu de tradition de consulter les milieux dans un cas comme ça, surtout dans une société qui se veut une société tripartite, qui va être marquée au coin de la concertation et du partenariat - nous ne l'avons pas indiqué dans le projet de loi.

Mme Harel: Est-ce que le ministre, compte tenu de ce qu'il m'a dit, serait prêt à envisager de consulter les associations représentatives?

M. Bourbeau: Vous parlez des syndicats, des...

Mme Harel: Oui.

M. Bourbeau: Oui, c'est exactement ce que nous avons l'intention de faire. Les dirigeants des organismes.

Mme Harel: Dans les alinéas qui suivent, il est toujours question soit d'associations de salariés, soit d'associations d'employeurs. Étant donné l'amendement que je veux faire au troisième alinéa, il faudrait penser aux milieux représentatifs aussi. Quant aux associations, est-ce qu'il serait prêt à écrire ce qu'il dit qu'il est prêt à faire? Comme il est prêt à le faire, il n'y a pas de problème à le dire.

M. Bourbeau: Oui, il y a des problèmes à le dire. Je l'ai indiqué tantôt.

Mme Harel: Je comprends les problèmes qu'il a. Je serais prête à retirer mon amendement, étant donné qu'on peut concevoir que les nominations devront se faire au niveau de la présidence et vice-présidence vraisemblablement avant que le conseil d'administration soit formé. Peut-être même que ce sont ceux qui sont nommés qui auront à faire les consultations auprès des associations. Mais est-ce que le ministre est prêt quand même à procéder à une consultation auprès des associations représentatives? Auquel cas, mon amendement se lirait comme suit: «Le gouvernement nomme le président après consultation des associations représentatives.»

M. Bourbeau: M. le Président, dans une version antérieure... Je crois qu'on avait un texte semblable, à un moment donné, hein?

Mme Harel: Je veux juste vous rappeler peut-être une expérience plus ou moins récente...

M. Bourbeau: Mais le Conseil des ministres... J'ai eu plusieurs versions, comme la députée de Hochelaga-Maisonneuve peut s'en douter. Elle a probablement même déjà vu certaines des versions antérieures. On n'a pas retenu finalement cette formule-là. Le gouvernement ne l'a pas retenue. Mais il est bien entendu que nous allons

consulter les dirigeants des organismes ou les députés représentatifs tant du milieu patronal que du milieu syndical.

Mme Harel: Alors, s'il est bien entendu que vous allez le faire, moi, je trouve qu'il n'y a pas de difficulté à le dire. C'était quand même une des préoccupations, le ministre s'en souviendra, de toutes les associations d'employeurs ou de salariés qui se sont présentées devant la commission. Le Conseil du patronat demandait que le président soit nommé avec l'accord des membres du conseil d'administration. Il n'était même pas question de consultation. Ensuite, l'APCFP demandait qu'il y ait aussi une consultation. Un bon nombre de groupes ou de comités qui se sont présentés devant la commission demandaient que le conseil d'administration soit consulté par le ministre avant qu'il ne procède à la nomination du président. Ensuite, il y a eu la FTQ et même le Mouvement Desjardins qui nous demandaient que le président soit nommé par le conseil d'administration et non par le ministre. En fait, la CSN demandait que le gouvernement nomme le président parmi les personnes qui auront été désignées par le conseil d'administration. (21 h 20)

Alors, notre amendement à l'effet de consulter les associations représentatives, c'est comme une sorte de compromis entre ce qui était réclamé d'un côté, presque à l'unanimité, que ce soit par les patrons ou les syndicats, et d'un autre côté, ce que le ministre invoque, à savoir la difficulté de le faire, en tout cas, tout au moins pour mettre en place la Société. Une fois, évidemment, la Société mise en place, parce que le ministre ne fait pas adopter le projet de loi 408 simplement pour nommer une première fois un président, c'est une loi qui vaudra pour toutes les fois successives où il y aura à remplacer le président. Alors, je le retire. C'est ça.

Le Président (M. Marcil): Vous le retirez? Mme Harel: Oui, je vais le retirer.

Le Président (M. Marcil): Donc, l'amendement est retiré.

Mme Harel: Ce que je vais proposer à la place, c'est un amendement à l'effet que le gouvernement nomme le président après consultation des associations représentatives.

M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais dire ceci à la députée de Maisonneuve. Ça vaut pour l'amendement qu'elle est en train de fignoler et ça vaut pour d'autres, probablement, qu'elle devra apporter plus tard, aussi, relativement aux pouvoirs de la Société. Ce que je voudrais lui dire, c'est que ces sujets-là ont fait l'objet de longues discussions au sein de l'appareil gouvernemental. L'arbitrage... Je veux que la députée de Maisonneuve m'écoute, là.

Mme Harel: Oh, oui, j'écoute, ne vous inquiétez pas.

M. Bourbeau: L'arbitrage entre les souhaits des groupes et avoir un maximum d'autonomie, tant sur le plan de la nomination des membres, tant sur le plan des pouvoirs de la Société, tant sur le plan aussi de la composition, de la structure de la Société, ces discussions-là ont eu lieu au Conseil des ministres, dans l'appareil gouvernemental, et ont duré très longtemps, plusieurs semaines, pour ne pas dire plusieurs mois. On comprend le désir des associations, des organismes d'avoir une marge de manoeuvre très grande, un pouvoir de nomination étendu. On comprend également que, contrairement à ce qui se passe dans bien d'autres pays, en Allemagne, par exemple, ici, les milieux patronaux ou syndicaux ne fournissent pas de capitaux, pratiquement, dans la mise sur pied d'un organisme comme celui-là. C'est financé à peu près à 100 % par des fonds du gouvernement. En Allemagne, c'est financé presque exclusivement par des fonds privés. Quand on met tout l'argent, on peut réclamer des pouvoirs importants, mais quand on ne met pas beaucoup d'argent, ou pratiquement rien - disons la vérité, on ne met rien du tout, M. le Président - on ne peut pas exiger autant de pouvoirs que quand on s'implique beaucoup financièrement. Le gouvernement, lui, est responsable devant l'Assemblée nationale des deniers publics. Il ne peut pas céder le contrôle d'une société semblable impunément.

Alors, je voudrais que la députée de Maisonneuve réalise que ma capacité de consentir à ses amendements est très limitée, pour ne pas dire inexistante, en ce sens que tous ces débats-là ont déjà eu lieu au sein de l'appareil gouvernemental, les arbitrages se sont faits et le Conseil des ministres a tranché dans tous ces cas-là. Je n'ai pas de marge de manoeuvre. La députée peut déposer beaucoup, beaucoup d'amendements. Elle peut me faire la preuve par a plus b que ces amendements-là sont très valables. Tout ce que je peux lui répondre, et je vais lui répondre ceci pendant plusieurs heures, j'ai l'impression, c'est que le gouvernement a tranché de telle ou telle façon. Mais je peux lui dire qu'entre le projet original, le projet que nous avons devant nous et celui que nous aurons avec les amendements que je suis autorisé à déposer, il y a eu une évolution très importante en faveur d'une relaxation des contrôles que le gouvernement avait originellement prévus, une marge de manoeuvre accrue pour la Société et que les articles qu'on étudie présentement sont déjà des articles qui ont fait l'objet d'un recul de la part du gouvernement par rapport à des clauses qui étaient beaucoup plus contraignantes dans les versions antérieures. Alors, on peut déposer beaucoup d'amendements, on peut en

parier à satiété, mais ma marge de manoeuvre est très réduite, M. le Président, sinon inexistante.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Madame.

Mme Harel: Ça veut donc dire qu'il ne s'agit pas de véritable partenariat.

M. Bourbeau: Oui, je pense qu'il y a un partenariat évident.

Mme Harel: Le ministre lui-même vient de signaler que les partenaires n'apportent pas, dans ia corbeille de mariée de la nouvelle société, là...

M. Bourbeau: La dot est très faible, mais, par contre, M. le Président, le gouvernement apporte une dot importante et ce capital-là, ces fonds-là seront gérés conjointement par les partenaires. Cependant, les partenaires autres que le gouvernement ne peuvent pas demander d'avoir la gestion intégrale totale et l'indépendance absolue quand ce sont des fonds gouvernementaux.

Mme Harel: Alors, ça pose vraiment le problème, comme on le posait, de l'absence d'un fonds national de formation professionnelle dans lequel les entreprises investissent. Pourtant, ce sont là des fonds publics et ce sont... Non seulement il y a un problème, tel que mentionné par le ministre, quant au fait que ce sont des fonds publics, mais il y a un problème quant à la représentativité aussi. L'argument que le ministre vient d'utiliser, à bon droit, je crois, ce même argument-là, celui qu'il utilise, je ne comprends pas qu'il l'écarté quand on en vient à parier de la représentativité et de l'absence, de la sous-représentation des personnes sans emploi. Le même argument vaut... Non seulement il n'y a pas une contribution, disons, par exemple, des entreprises qui pourrait permettre de justifier, par exemple, la gestion complète du fonds, mais il y a un problème de représentativité. Il n'y a pas que des travailleurs non syndiqués, il y a des entreprises non représentées, si vous me permettez cette expression-là. Il y a des entreprises qui considèrent que, dépendamment soit de sièges que le ministre fera, elles pourront ou pas être représentées...

M. Bourbeau: Le gouvernement...

Mme Harel: ...par exemple, des entreprises, pour parier clairement, là, des régions. L'Abitibi, par exemple, ou le Lac-Saint-Jean ou la Mauri-cie, n'importe quelle, n'ont pas vraiment l'impression - et c'est là la conclusion que je tire à la suite d'une petite tournée - d'être représentés par les associations d'employeurs de Montréal. Elles ont l'impression, par exemple, que le

Conseil du patronat, c'est essentiellement des grandes entreprises de Montréal, avec peut-être l'Alcan, comme exception, là, au Lac-Saint-Jean. Mais pour l'ensemble des milieux d'affaires dans les régions du Québec, ils n'ont pas vraiment l'impression... D'abord, il n'y a pas de filiales régionales, il n'y a pas de congrès, d'élections, ils ne sont pas invités à participer à un choix de dirigeants. Il ne faut pas minimiser la chose. Dans les sociétés où il y a des appareils de concertation qui gèrent vraiment des grands pans des politiques sociales, n'oubliez pas qu'il y a derrière ça tout un dispositif pour confirmer la représentativité autant des travailleurs que des employeurs.

M. Bourbeau: Mais il n'y a rien qui dit qu'il n'y aura pas une place pour quelques-unes de ces personnes-là à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, là. On a gardé un siège du côté des travailleurs, des milieux de la main-d'oeuvre. On a six membres qui représentent la main-d'oeuvre québécoise. Il y en a cinq qui représentent les organismes syndiqués, mais il y a un siège qui va rester disponible. Il y a la délégation gouvernementale aussi qui peut faire place à quelques personnes de ces milieux-là et il y a aussi les sociétés régionales. Ces organismes-là, qui sont régionaux et non pas nationaux, auraient probablement plus d'influence sur une société régionale que sur la société nationale. (21 h 30)

Mme Harel: Le ministre sait qu'il y a eu une très vaste coalition qui s'est organisée autour de l'UMRCQ, en particulier. Il a, je pense, même rencontré M. Nicolet à ce sujet. Il sait qu'il y a eu, finalement, de part et d'autre, du côté de ces organismes qui s'étaient présentés devant la commission, une sorte, je dirais, de compromis qui s'est fait. Je prenais connaissance de la même lettre qu'il a reçue, j'en suis certaine, de l'Association des CFP. Je comprends que leurs demandes se sont réduites en regard de celles qu'ils faisaient quand ils sont venus devant la commission. Il y a un chemin qui s'est fait. Le ministre ne peut pas, je pense, prétendre, maintenant, que les organismes ont les mêmes revendications, disons, que celles qu'ils avaient au moment où ils sont venus devant la commission. D'ailleurs, aujourd'hui même, dans Le Soleil, on retrouvait le point de vue des organismes régionaux, qui considèrent que la création de la Société québécoise... qui estiment que la volonté de centralisation à Québec dans le domaine de la main-d'oeuvre vient en nette opposition avec la politique de décentralisation du gouvernement qui est rendue publique par le ministre responsable du développement régional, etc.

Ceci dit - on reviendra sur la régionalisation - il faut que le ministre convienne... Par exemple, je ne retrouve plus du tout, dans les demandes, celle que les sociétés régionales aient un représentant au conseil d'administration. Je

peux lui dire tout de suite que je n'ai pas l'intention de déposer un amendement à cet effet-là. Mais ce que je comprends du ministre, c'est que, finalement, tout l'exercice qu'on fait, à part les amendements que lui va déposer, rien de ce qu'on peut faire, finalement, ne sera retenu.

M. Bourbeau: M. le Président...

Mme Harel: C'est ça que je dois comprendre?

M. Bourbeau: ...ce que je voudrais simplement dire, c'est que l'initiative de préparer un projet de loi est laissée au gouvernement, je crois, qui vit avec ses lois. L'Opposition peut suggérer des amendements. Elle ne doit pas s'offusquer si le gouvernement les refuse, parfois, et elle doit se réjouir s'il les accepte. Moi, je ne refuse pas des amendements pour ie plaisir de les refuser. J'ai déjà dit à la députée de Maisonneuve que j'ai vécu, moi, étant dans l'Opposition, des situations où des ministres de l'ancien gouvernement, je dois le dire, refusaient systématiquement des amendements sans même les regarder parce qu'ils étaient proposés par l'Opposition. Moi, j'ai connu ça, M. le Président, des ministres qui ne voulaient même pas regarder un amendement. C'était vu comme étant un péché mortel que...

Mme Harel: Donnez-nous des noms.

M. Bourbeau: Pardon?

Mme Harel: Donnez-nous des noms.

M. Bourbeau: Oui, oui, je peux vous en nommer, si vous voulez. Je vous les nommerai dans le particulier. M. le Président, moi, je n'ai jamais agi comme ça. J'ai toujours dit: Si un amendement améliore le projet de loi, à notre point de vue, on l'accepte. Mais il y a des choses que je ne peux pas accepter parce que ces débats-là ont déjà eu lieu au sein du gouvernement, ces arbitrages-là ont été faits. La députée sait fort bien que, pour pouvoir accepter un amendement qui modifie substantiellement le projet de loi, je dois retourner devant le Conseil des ministres. Je n'ai pas l'autorité d'amender un projet de loi, parce qu'il a été approuvé par le Conseil des ministres, le projet de loi, dans sa globalité. Alors, si je propose un amendement de forme, un amendement mineur, j'ai une certaine marge de manoeuvre, sans quoi je n'en ai pas. Alors, des amendements comme ceux que propose la députée, je ne peux pas les accepter sans retourner voir le Conseil des ministres, et je sais, pour y avoir été, que je ne peux pas les passer. Donc, on peut parler pendant toute une soirée, moi, ça m'est égal, mais c'est l'impossible en ce qui me concerne.

Le Président (M. Marcil): bon. à ce moment-là, comme la discussion, le débat est terminé sur l'amendement, je vais le mettre au vote.

Mme Harel: Un vote nominal.

Le Président (M. Marcil): Vote nominal.

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Marcil): Bon. Donc, je lis l'amendement à l'article 5: Ajouter après «Le gouvernement nomme le président» les mots «après consultation des associations représentatives».

Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve)?

Mme Harel: Pour.

Le Président (M. Marcil): Mme Cardinal (Châteauguay)? Non, c'est parce que...

Mme Cardinal: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Philibert (Trois-Rivières)?

M. Philibert: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Williams (Nelligan)?

M. Williams: Contre.

Le Président (M. Marcil): M. Bourbeau (Laporte)?

M. Bourbeau: Hélas, contre.

Le Président (M. Marcil): Donc, l'amendement est rejeté.

Mme Harel: M. le Président, est-ce qu'on peut...

Le Président (M. Marcil): Oui, madame. Mme Harel: ...suspendre pour cinq minutes?

M. Bourbeau: M. le Président, si j'ai dit «hélas», ce n'est pas parce que je n'ai pas voté avec...

Le Président (M. Marcil): Vous voulez... Mme Harel: Enthousiasme.

M. Bourbeau: C'est parce que je ne voulais pas indisposer la députée de Hochelaga-Maisonneuve pour les heures qui viennent.

Le Président (M. Marcil): Donc, on va

suspendre les travaux pour cinq minutes? Mme Harel: Cinq minutes.

Le Président (M. Marcil): II vous manque quoi?

M. Bourbeau: On peut passer au projet de loi 30, si vous voulez.

Des voix: Ha, ha, ha! (Suspension de la séance à 21 h 35)

(Reprise à 21 h 46)

Le Président (M. Marcil): Donc, nous sommes toujours à l'article 5...

M. Bourbeau: Toujours, M. le Président. Hélas!

Le Président (M. Marcil): ...à l'amendement que j'ai suspendu. Donc, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: On revient avec votre amendement, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Donc, on revient avec l'amendement du ministre. À l'article 5, remplacer les paragraphes 1", 2° et 3° du deuxième alinéa de l'article 5 du projet par les suivants.

Mme Harel: Alors, M. le Président, pour donner suite à une des recommandations, notamment formulées par l'Union des municipalités régionales de comté, l'UMRCQ, qui a mis sur pied un groupe de travail constitué de Mme Pagé, de la Centrale de l'enseignement du Québec, de M. Larose, de la Confédération des syndicats nationaux, de M. Maurice Payette, de la Fédération des CLSC, de M. Daoust, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, de M. Fortin, de la Conférence des CRSSS, de M. Sansoucy, de la Fédération des cégeps, de Mme Drouin, de la Fédération des commissions scolaires, de M. Duchesne, de l'Association des industries forestières du Québec Itée, de M. Le Hir, de l'Association des manufacturiers du Québec, de M. Dufour, du Conseil du patronat, de M. Béland, du Mouvement Desjardins, de M. Proulx, de l'Union des producteurs agricoles, de M. Turgeon, de l'Union des artistes... C'est incroyable comment tous ces gens-là se rencontrent partout quand même. C'est juste une remarque, une parenthèse. Je ne sais pas si, dans une semaine, ils doivent passer une journée sans se rencontrer à l'une ou l'autre des tables organisées par l'un ou l'autre des ministères ou, en fait, des partenaires.

Quoi qu'il en soit, l'UMRCQ a formulé un certain nombre de recommandations dites, et je le cite, essentielles au succès du projet. C'est pour, finalement, garantir le succès de ce projet sur lequel travaille depuis tant de mois le ministre que l'UMRCQ lui faisait parvenir ses recommandations, entre autres. Ces recommandations consistent, en fait, essentiellement à quatre grands aspects, le premier étant d'accroître le degré d'autonomie de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. On y reviendra. Je sais que le ministre, sur ce terrain-là, a quand même obtenu des améliorations. Il en fera l'objet d'amendements. Deuxièmement, rappelle l'UMRCQ, constituer des sociétés régionales en corporations au sens du Code civil. Alors, tout ce qui était demandé, finalement, l'essentiel se réduit à ça. Ça fera l'objet, d'ailleurs, d'un amendement de l'Opposition...

M. Bourbeau: On s'en doute bien.

Mme Harel: Troisièmement, assurer une présence appropriée et équitable de tous les groupes concernés au sein des conseils d'administration des sociétés régionales, et je cite: meilleure représentation, entre autres, du secteur de l'éducation. Ça, ça vient de l'UMRCQ, au nom de tous les groupes que je viens de vous mentionner. Finalement, envisager un mécanisme électoral pour les conseils d'administration des sociétés régionales en vue de garantir la représentativité de ces conseils et l'imputabilité des décideurs.

En fait, cette dernière question, je pense, est laissée en retrait par rapport aux trois autres, parce que c'était la position de l'UMRCQ le 25 mai dernier. Cette position, l'UMRCQ la faisait connaître dans une lettre adressée au ministre le 21 mai. Nous recevions, je crois, hier ou avant-hier, une lettre mentionnant la position de l'ACFP, l'Association des commissions de formation professionnelle. Je crois que le ministre recevait, j'imagine au même moment... (21 h 50)

M. Bourbeau: ...position, mais on va finir par le savoir quand même.

Mme Harel: Ça m'est arrivé hier, en plus, sur le projet Innovatech, de recevoir la lettre avant le ministre concerné.

M. Bourbeau: C'est vous qui l'aviez écrite, je suppose.

Mme Harel: Ça a créé un certain imbroglio. Les lettres qui concernent le ministre de la Main-d'oeuvre, je les reçois après lui.

M. Bourbeau: Ça m'étonnerait.

Mme Harel: En tout cas, j'ai constaté que l'ACFP ne parlait plus de mécanisme électoral,

mais que l'ACFP, de concert avec un certain nombre d'organismes, dont je me suis fait faire une liste pour avoir un aide-mémoire, recommande l'incorporation, au sens du Code civil, des sociétés régionales et s'en tient à ça. Le ministre les a rencontrés, ce que je n'ai pas pu faire moi-même, mais le ministre les a rencontrés. Je comprends donc que, finalement, de toute la panoplie de demandes qui se faisaient au moment de la commission, ils ont finalement restreint à une seule essentielle pour eux: les sociétés régionales avec un statut de corporation au sens du Code civil.

Pour donner suite, parce qu'en plus on y souscrit, M. le Président, aux recommandations de l'UMRCQ concernant la présence appropriée et équitable de groupes concernés au sein des conseils d'administration, j'aimerais à ce moment-ci proposer un amendement. Alors, l'esprit d'abord de l'amendement, M. le Président, puis la lettre ensuite.

L'esprit de l'amendement consiste à proposer au premier alinéa... Alors, ce serait plutôt un sous-amendement, parce qu'il y a déjà l'amendement du ministre. C'est ce qu'il faut comprendre?

Le Président (M. Philibert): Si vous voulez en faire lecture. Ça vient amender l'amendement du ministre, c'est donc un sous-amendement.

Mme Harel: C'est ça. Alors, M. le Président, le sous-amendement se lirait comme suit: cinq membres qui représentent la main-d'oeuvre québécoise choisis après consultation des associations de salariés les plus représentatives; cinq membres qui représentent les entreprises... En fait, il faudrait plus lire: quatre membres, excusez-moi, qui représentent les entreprises. Excusez-moi. Je recommence: cinq membres qui représentent les entreprises, dont quatre sont choisis après consultation des associations d'employeurs les plus représentatives et un après consultation des organismes du milieu coopératif les plus représentatifs; trois membres représentant le secteur communautaire...

M. Bourbeau: Après représentatifs?

Mme Harel: au troisième alinéa, excusez-moi: trois membres représentant le secteur communautaire, dont une représentante des groupes de femmes.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée a oublié les zouaves pontificaux aussi.

Mme Harel: Je vais vous rapporter à la Fédération des femmes du Québec.

Le Président (M. Philibert): Est-ce que les femmes sont acceptées chez les zouaves? Ce serait nouveau.

Mme Harel: C'est un terrain glissant à cette heure-ci, à ce moment-ci de la semaine.

Le Président (M. Philibert): Pas du tout, c'est tellement limpide.

M. Bourbeau: C'est facile quand on est dans l'Opposition, M. le Président.

Mme Harel: Et quatrième alinéa: six autres membres dont un provient du milieu de l'enseignement secondaire et un autre provient du milieu de l'enseignement collégial; ces deux derniers sont choisis après consultation des fédérations représentant les cégeps et les commissions scolaires.

M. Bourbeau: Tant qu'à y être, M. le Président, on pourrait ajouter: les Filles d'Isabelle, les Dames de Sainte-Anne, les clubs Richelieu...

Le Président (M. Philibert): Mais, là, au plan technique, avant de...

Mme Harel: Est-ce que je comprends que c'est là...

Le Président (M. Philibert): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Harel: ...une façon dérisoire...

Le Président (M. Philibert): À l'ordre, s'il vous plaît! Avant de parler du fond et de faire des commentaires sur le fond, je pense qu'il faudrait le rédiger, parce que c'est assez compliqué. Pour la bonne marche des travaux, nous demandons que ce soit rédigé.

Mme Harel: Très bien. Alors, je vous demande une suspension de deux minutes, M. le Président.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que je pourrais faire une suggestion?

Le Président (M. Philibert): Oui.

M. Bourbeau: Moi, je serais d'accord qu'on suspende l'article complètement, qu'on le mette de côté. Ça pourrait peut-être permettre à la députée de Maisonneuve de fignoler son amendement au cours de la nuit, au cours de la fin de semaine. Sans ça...

Le Président (M. Philibert): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Bourbeau: J'aimerais mieux que l'amendement soit écrit au moment où...

Mme Harel: Consentement.

Le Président (M. Philibert): Consentement. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve nous revient avec un sous-amendement écrit.

M. Bourbeau: ça pourrait lui permettre aussi, m. le président, de trouver d'autres organismes qu'elle a oubliés, qu'elle pourrait rajouter sur sa liste d'épicerie.

Mme Harel: Alors, M. le Président, je vais...

Le Président (M. Philibert): Alors, je suspends l'étude du...

Mme Harel: Juste avant de suspendre...

Le Président (M. Philibert): ...sous-amendement de l'amendement et de l'article 5.

Mme Harel: ...je veux simplement signaler au ministre que l'amendement que je vais déposer est rédigé suite aux représentations faites par l'Association provinciale des commissions de formation professionnelle, l'Institut de formation en développement économique et communautaire, la Centrale de l'enseignement du Québec, l'Institut canadien de l'éducation des adultes, le Mouvement action-chômage, la Fédération des associations de familles monoparentales, l'Association des clubs de recherche d'emploi du Québec, la Maison internationale de la Rive-Sud, le Regroupement québécois des organismes de développement de l'employabilité, l'Association des parrains des services d'employabilité du Québec, le Collectif des femmes immigrantes du Québec, la Confédération des syndicats nationaux. Je n'ai pas colligé les appuis à cette proposition qui nous sont arrivés aujourd'hui.

Alors, c'est une proposition qui a été mise au point et fait l'objet d'un consensus parmi tous les groupes que je viens d'énumérer.

M. Bourbeau: Consensus public, M. le Président. Sur la place publique.

Mme Harel: Ça a même fait l'objet d'une conférence de presse.

Le Président (M. Philibert): Alors, on avait convenu qu'on...

M. Bourbeau: Parfois, il y a des consensus privés qui diffèrent des consensus publics. le président (m. philibert): alors, on avait convenu que l'article 5 et son amendement étaient suspendus. j'appelle maintenant l'article 6.

M. Bourbeau: M. le Président, cet article fixe la durée maximale du terme pour lequel peuvent être nommés le président de la Société, d'une part, les autres membres du conseil d'administration, d'autre part. Il prévoit en outre que ces personnes continuent d'exercer leurs fonctions à l'expiration de leur mandat et, implicitement, que leur mandat peut être renouvelé.

Mme Harel: Je comprends, M. le Président, que, sur cet article-là, pendant toutes les semaines que nous avons siégé, je ne crois pas avoir entendu un seul commentaire. Alors, nous allons l'adopter.

Le Président (M. Philibert): L'article 6 est adopté.

M. Bourbeau: M. le Président, je suis...

Le Président (M. Philibert): J'appelle l'article 7.

M. Bourbeau: ...ébloui, M. le Président.

M. le Président, cette disposition prévoit que le président de la Société en est également d'office le directeur général. Elle précise les fonctions qui lui appartiennent, d'une part, ayant qualité de président du conseil d'administration, et, d'autre part, en qualité de directeur général de la Société.

Mme Harel: Je crois que c'est la même chose pour l'article 7, M. le Président. À moins que le ministre nous indique que c'est là du droit nouveau, ça me semble être, évidemment, une disposition qui est usuelle.

M. Bourbeau: Aucun commentaire. (22 heures)

Le Président (M. Philibert): Adopté. J'appelle l'article 8.

M. Bourbeau: M. le Président, cette disposition prévoit que le gouvernement détermine les conditions de travail du président de la Société et que celui-ci exerce ses fonctions à temps plein. Quant aux autres membres du conseil d'administration, elle permettra au gouvernement, s'il le désire, de leur allouer des jetons de présence. Elle prévoit, par ailleurs, dans quelle mesure ceux-ci auront droit au remboursement de certaines dépenses.

Mme Harel: Je rappelle au ministre qu'une des centrales syndicales, en l'occurrence fa CSD, avait fait des représentations, dans le mémoire déposé devant la commission, pour qu'une aide financière soit accordée pour compenser les pertes de salaire et autres dépenses encourues. Il ne s'agissait pas, en fait, d'une rémunération, mais il s'agissait plutôt d'une compensation. C'est dans l'esprit, je pense, de la recommandation de la CSD. Est-ce que c'est dans ce sens-là que le ministre entend procéder?

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, c'est intéressant ce dont parle la députée de Hochela-ga-Maisonneuve, parce que je suis, justement, en train de réfléchir très sérieusement à la possibilité de proposer un décret au Conseil des ministres pour la Commission des normes du travail à l'égard de certains des membres qui doivent subir des pertes de salaire lorsqu'ils siègent au conseil d'administration.

La position que je suis en train de prendre, c'est de faire en sorte de rembourser exactement le salaire perdu à l'égard de ceux qui doivent subir des pertes de salaire et non pas de proposer des jetons de présence, par exemple, pour tout le monde. Alors, ça m'apparaît être une formule qui est plus équitable. Ceux qui, réellement, subissent des pertes de salaire pourraient avoir droit à un remboursement sur preuve de ces pertes-là, ce qui ferait qu'on éviterait de conférer des avantages importants à certaines personnes. «Importants», le mot est peut-être fort un peu, mais au moins on compenserait pour les pertes de salaire. Évidemment, il est trop tôt pour dire ce qu'on fera à l'égard de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, mais il me semble qu'une formule comme celle-là serait intéressante.

Mme Harel: Alors, vous envisagez un règlement à cet effet?

M. Bourbeau: Ça se fait par... Mme Harel: Par décret?

M. Bourbeau: C'est un décret du gouvernement. D'ailleurs, je crois l'avoir...

Mme Harel: Qu'est-ce qui se passe dans le parlement?

M. Bourbeau: M. le Président, c'est une apparition.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Le député de Verdun vient de faire son apparition.

Mme Harel: Est-ce que d'autres que nous siègent, ou est-ce que nous sommes les seuls à siéger?

Le Président (M. Philibert): Oui, nous sommes distincts.

M. Bourbeau: Alors, c'est un décret, M. le Président, qui peut être adopté par le Conseil des ministres.

Le Président (M. Philibert): Adopté? Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Philibert): L'article 8 est adopté. J'appelle l'article 9.

M. Bourbeau: Cet article énonce les modalités de nomination par le gouvernement de vice-présidents au sein de la Société dont la nomination s'effectuera à l'initiative du conseil d'administration de la Société. Il prévoit aussi que les conditions de travail des vice-présidents seront déterminées par le gouvernement.

Mme Harel: M. le Président, sur cet article-là, il y a eu beaucoup, beaucoup de représentations, n'est-ce pas? Je ne pense pas qu'on puisse passer sous silence les difficultés qui se présentent dans un certain nombre d'organismes du fait que les vice-présidents sont souvent imposés à leur président. Je pense à un exemple que je connais, c'est celui de la CSST, où, finalement, les nominations successives portent la marque des ministres qui se sont succédé dans un court laps de temps, finalement. Ce n'est pas toujours la même école de pensée qui présidait lorsque les nominations devaient se faire. En l'espace de presque un an, il y a eu trois ministres différents qui se sont succédé. Il y a eu une série de nominations, puis ça a donné une équipe un peu dépareillée. Ça paraît d'ailleurs. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Ce n'est pas nécessairement un bon modèle à suivre, M. le Président.

Mme Harel: Oui, c'est ça qui m'embarrasse, et ça m'inquiète, M. le Président, parce que j'ai l'impression que l'article 9 est à peu près du même acabit, d'une certaine façon, c'est-à-dire... D'abord, le gouvernement n'est pas tenu de nommer des vice-présidents, c'est ça qu'il faut comprendre, hein? par la rédaction de l'article 9. Alors, le gouvernement n'est même pas tenu d'en nommer un. Je ne sais pas. Quelle est l'intention du ministre?

Le Président (M. Philibert): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, il m'apparaît évident qu'on ne peut pas ne pas avoir plusieurs vice-présidents dans une société importante, de l'importance de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Mme Harel: On ne peut pas?

M. Bourbeau: On ne peut pas ne pas avoir plusieurs vice-présidents, à moins d'avoir une structure tout à fait inusitée, donc il y aura des vice-présidents. Et la députée pourra noter que la formule qui est utilisée ici, à l'article 9, est assez inusitée. Je ne crois pas qu'on retrouve une formule comme ça dans aucune autre société gouvernementale. C'est le résultat de longues discussions et d'un arbitrage, si je peux m'expri-mer ainsi, entre divers points de vue. Alors, ce

qui est intéressant ici, c'est que, contrairement à ce qu'on retrouve dans la majorité des cas...

Mme Harel: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: II nous arrive un visiteur d'outre-tombe. M. le Président, contrairement à ce qu'on retrouve dans la majorité des cas, ici ce n'est pas le gouvernement qui prend l'initiative de nommer les vice-présidents. Ce qui est intéressant, pour le bénéfice de ceux qui souhaitent une décentralisation, etc., c'est que c'est le conseil d'administration de la Société qui prend l'initiative, premièrement. Non seulement il prend l'initiative, mais il peut proposer au gouvernement des candidatures de vice-présidents. Alors, c'est déjà une bonne concession, je pense, que le gouvernement fait dans ce cas-ci, se démarquant ainsi d'une tradition qui est assez bien répandue qui veut que c'est le gouvernement qui nomme les présidents et les vice-présidents. La députée de Hochelaga-Maisonneuve sait de quoi je parle, elle a probablement déjà proposé, d'ailleurs, des nominations au gouvernement. Alors, ici, bien sûr, le gouvernement se garde un pouvoir résiduaire. Si jamais il y a divergence de vues fondamentale entre le gouvernement et la Société, le gouvernement peut toujours, après consultation, nommer une autre personne. Mais, encore là, s'il le fait, c'est après consultation. Donc, dans un premier temps, c'est la Société qui propose et, dans un deuxième temps, si le gouvernement ne retient pas ces propositions-là, il doit quand même consulter avant de proposer.

Mme Harel: Alors, je comprends donc que votre interprétation de l'article 9 est à l'effet que, s'il y a nominations de vice-présidents, elles ne pourront venir que sur proposition du conseil d'administration. C'est ça que je dois comprendre?

M. Bourbeau: Non, non. Ce n'est pas ce que j'ai dit. La députée de Hochelaga-Maisonneuve, ou bien a mal compris, ou bien elle fait semblant de mal comprendre.

Mme Harel: Non, non, non, pas du tout. À cette heure-ci...

M. Bourbeau: Bon. Alors, j'ai dit que l'initiative...

Mme Harel: ...j'ai peut-être besoin de...

M. Bourbeau: Est-ce que la députée de Hochelaga-Maisonneuve voudrait un café, par exemple? Non? Oui?

Mme Harel: Oui. Est-ce qu'on... Je suis prête à le payer.

M. Bourbeau: Ce que j'ai dit, M. le Président...

Des voix: Ha ha, ha!

M. Bourbeau: M. le Président, l'article 9 dit que l'initiative de proposer des candidatures est laissée au conseil d'administration de la Société.

Mme Harel: Et, si le conseil n'en propose pas, le gouvernement ne peut donc pas nommer.

M. Bourbeau: Mais le gouvernement peut aussi prendre l'initiative, parce que, en vertu du deuxième paragraphe, il est dit que, s'il décide de procéder à une telle nomination, le gouvernement nomme la personne ainsi proposée ou... Il y a un «ou». On peut dire: S'il décide de proposer une nomination, le gouvernement, après consultation du conseil, peut nommer toute autre personne. Donc, si jamais le conseil décidait de faire la grève et de ne demander aucune nomination de vice-présidents, le gouvernement déciderait, pourrait décider de procéder à une telle nomination, après avoir consulté, toujours, le conseil d'administration. (22 h 10)

Mme Harel: Je sais que le ministre est juriste, là, mais, pour agir dans le sens où il vient de le dire, il faudrait enlever le mot «telle», parce que, ainsi libellé, «s'il décide de procéder à une telle nomination», le mot «telle» renvoie à la nomination proposée par le conseil d'administration de la Société.

M. Bourbeau: M. le Président, je donne raison à la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Si elle voulait proposer d'enlever le mot «telle», je serais d'accord pour l'enlever.

Mme Harel: Justement pas. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Justement pas. C'est justement parce que je considère que, dans le fond, le dispositif de l'article 9 me semble assez intéressant. Finalement, le dispositif de l'article 9, c'est que, pour qu'il y ait une nomination de vice-président, il faut qu'elle, cette nomination, ait été proposée par le conseil d'administration.

M. Bourbeau: Oui, mais, à ce moment-là, si le gouvernement n'est pas d'accord de nommer la personne proposée, le gouvernement peut nommer une autre personne après avoir consulté le conseil.

Mme Harel: Voilà.

M. Bourbeau: Bon. Alors, la députée ne veut pas proposer la modification?

Mme Harel: J'espère que vous n'allez pas la

proposer?

M. Bourbeau: Bon. Alors, à ce moment-là, moi, je serais d'accord pour voter l'article 9 tel quel...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Mais il ne faudrait pas me donner la tentation de proposer un amendement.

Mme Harel: C'est parce que j'en faisais cette interprétation-là. L'étonnement que j'ai, c'est que la CSN, en commission, ait demandé... Non, en fait, c'est qu'elle demandait plus lors de la présentation. Elle demandait que la nomination des vice-présidents soit considérée comme étant de la juridiction du conseil. En fait, l'article 9 prévoit que c'est de la juridiction du gouvernement, mais à la demande, sur proposition du conseil, si vous voulez, quant au poste à créer et, après consultation du conseil, quant à la personne à nommer. On peut s'entendre là-dessus, là.

M. Bourbeau: C'est exact. Oui, ça va.

Mme Harel: Mais ça reste une prérogative du gouvernement.

M. Bourbeau: Disons que c'est le fruit, là, de... Cette formulation-là...

Mme Harel: C'est une belle formulation, ça.

M. Bourbeau: ...a pris compte de toutes les propositions qui ont été faites, puis c'est l'arbitrage qui en a été fait.

Le Président (M. Philibert): Alors, voyant l'Opposition...

Mme Harel: Je ne sais pas pourquoi le Conseil du patronat du Québec disait que le pouvoir d'intervention du ministre auprès de la Société concernant la nomination des vice-présidents est trop grand. Alors, son pouvoir...

M. Bourbeau: Bien, parce que le Conseil du patronat, aussi, aurait voulu que le conseil d'administration nomme tous les vice-présidents.

Mme Harel: Les vice-présidents. M. Bourbeau: C'est la même chose.

Mme Harel: là, de toute façon, le conseil d'administration, pour qu'il y ait des vice-présidents, doit proposer qu'il y ait des fonctions de vice-présidents...

M. Bourbeau: C'est ça.

Mme Harel: ...et soit consulté sur les personnes qui sont nommées par le gouvernement. Ce qui n'est même pas le cas, je pense, actuellement à la CSST ou dans les organismes.

M. Bourbeau: Mais c'est plus que ça, le conseil peut aussi proposer des candidatures.

Mme Harel: Aussi. M. Bourbeau: Aussi. Mme Harel: Oui. M. Bourbeau: C'est ça. Mme Harel: Oui.

M. Bourbeau: C'est un bon point en faveur du gouvernement ici.

Mme Harel: Oui, c'est un bon point, je...

M. Bourbeau: II a cédé.

Mme Harel: En faveur du ministre.

M. Bourbeau: En faveur du ministre, oui.

Mme Harel: Peut-être que le gouvernement ne s'en est même pas rendu compte.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Le gouvernement s'en est rendu compte, soyez sans crainte.

Mme Harel: Le ministre n'avait pas l'air de s'en rendre compte lui-même.

M. Bourbeau: C'est-à-dire que le ministre... Mme Harel: Est fatigué?

M. Bourbeau: Non, mais vous m'avez mis dans la tête des projets auxquels je pourrais peut-être céder si vous ne passez pas à l'article 10 bientôt.

Mme Harel: Alors, c'est adopté.

M. Bourbeau: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Philibert): Adopté. L'article 9 est adopté. J'appelle l'article 10.

M. Bourbeau: Cet article, M. le Président et député de Trois-RMères, fixe la durée maximale du terme pour lequel peuvent être nommés les vice-présidents de la Société. Il prévoit en outre que ces personnes continuent d'exercer leurs fonctions à l'expiration de leur mandat et, implicitement, que leur mandat peut être renou-

vêlé. De plus, il précise que les vice-présidents de la Société exercent leurs fonctions à temps plein et qu'ils ne font pas partie du conseil d'administration de la Société.

Mme Harel: Quand vous dites, M. le ministre, que c'est d'au plus cinq ans, c'est donc un terme qui ne peut pas dépasser cinq ans, leur mandat ne peut pas être renouvelé. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Bourbeau: Non, il peut être renouvelé. Mme Harel: Ah! il peut être renouvelé.

M. Bourbeau: Oui, oui, c'est indiqué, «ou nommés de nouveau». C'est marqué dans l'article.

Mme Harel: Ah oui! Excusez-moi.

M. Bourbeau: Je pourrais peut-être ajouter qu'il est d'usage, dans les récentes lois constitutives d'organismes gouvernementaux, de prévoir que les membres d'un conseil d'administration soient nommés pour une période maximale de trois ans - je parle de membres du conseil, là - à l'exception du président de l'organisme dont le terme peut aller jusqu'à cinq ans. De plus, ces lois précisent toujours que les membres du conseil d'administration demeurent en fonction à l'expiration Ho leur mandat tant qu'ils ne sont pas remplacés. Ça, c'est pour les membres des conseils d'administration. Et je dirais que, pour ce qui est des vice-présidents d'organismes, il y a aussi une certaine jurisprudence qui s'est établie depuis quelques années fixant les termes au plus, au maximum à cinq ans, mais renouvelables.

Mme Harel: Est-ce que vous envisagez qu'il soit possible que ces nominations-là cumulent, par exemple, un poste dans la fonction publique?

M. Bourbeau: C'est-à-dire que le personnel de la Société ne sera pas membre de la fonction publique, mais ceux qui le sont déjà pourront conserver leurs droits acquis. Ils pourront conserver leurs droits acquis indéfiniment.

Mme Harel: On reviendra, je pense, à l'article 11, hein? sur la Loi sur la fonction publique? Adopté.

Le Président (M. Philibert): Adopté. J'appelle maintenant l'article 11.

M. Bourbeau: Les dispositions prévoient que la Société établit elle-même les conditions de nomination de ses employés, son plan d'effectifs ainsi que les conditions de travail de ses employés. Les conditions de travail des employés de la Société, qui comprennent les normes et les barèmes de leur rémunération, devront être approuvées par le gouvernement. Il découle de cet article que le personnel de la Société ne sera pas assujetti à la Loi sur la fonction publique.

Mme Harel: Alors, c'est donc là l'article qui nous permet de faire le débat qu'on reportait sur la question de la Loi sur la fonction publique qui liera ou pas les employés de la nouvelle Société. Alors, vous vous rappelez qu'au moment où on a fait l'examen de l'article 2 - c'est ça - votre conseiller nous a dit que c'était à l'article 11. N'est-ce pas? Vous avez dû recevoir comme moi, cette semaine, une lettre du président du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec.

M. Bourbeau: Je voudrais dire à la députée de Hochelaga-Maisonneuve qu'en commission parlementaire seulement 2 intervenants sur 80 se sont opposés au non-assujettissement du personnel de la Société à la Loi sur la fonction publique, c'est-à-dire le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec et le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec. Alors, en vertu de la tradition que la députée de Hochelaga-Maisonneuve a instaurée depuis le début de la commission, elle devrait, en conséquence, ne pas insister pour assujettir, puisque 78 sur 80 ne l'ont pas demandé. Donc, ce n'est pas un élément rentable.

Mme Harel: Ha, ha, ha! Effectivement, ce sont là les syndicats visés, en fait, malgré que d'autres mémoires mentionnaient cette question-là, notamment les mémoires de la FTQ et de la CSN, étant donné qu'elles détiennent des accréditations pour représenter des unités dans les commissions de formation professionnelle.

Ceci dit, à l'article 11, au premier paragraphe, on lit: «Les employés de la Société sont nommés de la manière qu'elle prévoit par règlement et selon le plan d'effectifs qu'elle établit.» Alors, la manière qu'elle prévoit par règlement, il n'y a pas de convention collective? (22 h 20)

M. Bourbeau: M. le Président, si la députée n'a pas d'objection, comme on va parler de choses techniques, on va demander à Me Crevier de répondre, c'est un expert en la matière, et sûrement qu'il peut le faire mieux que moi.

Le Président (M. Philibert): Maître, allez-y.

M. Crevier (Luc): Oui, if s'agit, en fait, du processus de nomination, de la façon de nommer le personnel. Les dispositions relatives aux conventions collectives, il n'y en a peut-être pas de précises, mais il est évident que ces gens-là sont assujettis au Code du travail et qu'ils peuvent donc négocier collectivement des conditions de travail.

Mme Harel: Dans la mesure où, dans le

projet de loi, les sociétés régionales ne sont pas des corporations au sens du Code civil, c'est donc dire que les employés des sociétés régionales, de la Gaspésie ou de l'Abitibi, ne seront pas, donc, des salariés de leur société régionale, mais vont se trouver à être des salariés de la société mère. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Crevier: Oui, exactement. Oui. Mme Harel: C'est ce que vous proposez. M. Bourbeau: Effectivement.

Mme Harel: Et ça veut donc dire qu'il y aurait une seule accréditation.

M. Crevier: C'est-à-dire qu'en ce qui concerne l'accréditation c'est évidemment le commissaire-enquêteur qui va en décider ultime-ment, alors il est possible qu'il y ait plus qu'une unité, sauf qu'il y aura, effectivement, un seul employeur. Mais il peut y avoir des unités: professionnels ou personnel de soutien, etc.

Mme Harel: Oui, je veux bien croire, mais vous envisagez donc... Habituellement, les accréditations sont émises en fonction, finalement, des employeurs. Alors, il n'y aura qu'un seul employeur et, éventuellement, il pourrait n'y avoir qu'une seule accréditation, par exemple, des conseillers. Vous le dites vous-même, là...

M. Crevier: Oui.

Mme Harel: ...par catégorie d'emploi. C'est donc dire qu'il pourrait y avoir, par exemple, une convention avec... Le recrutement se ferait comment, à ce moment-là?

M. Crevier: Bien, pour la nomination, c'est la Société qui peut recruter, suivant les règles qu'elle va se donner. Elle peut, évidemment, déléguer ce pouvoir-là aux sociétés régionales. Pour ce qui est des unités d'accréditation, là, c'est une autre loi qui vient jouer, le Code du travail, où il y a des règles précises. Effectivement, dans ce cas-là, il y aurait un seul employeur, donc ça peut, évidemment, influer sur la détermination des unités.

Mme Harel: Mais que deviennent les employés déjà assujettis à la Loi sur la fonction publique, ceux, par exemple, qui sont membres du SPGQ ou encore ceux qui sont membres du Syndicat des fonctionnaires du gouvernement du Québec?

M. Crevier: Disons qu'en ce qui concerne les droits individuels ils vont être prévus plus loin dans les dispositions transitoires pour les salariés qui vont être concernés. Pour ce qui est des droits collectifs ou du syndicat, ils sont également préservés dans les dispositions transitoires. Donc, au départ, la convention collective et l'accréditation des deux syndicats concernés, professionnels et fonctionnaires, ça va être toujours valable et ça va lier la Société. Maintenant, par la suite, il est possible qu'il y ait un réaménagement de tout ça, et ça se ferait suivant les règles du droit commun, le Code du travail. Donc, c'est possiblement le commissaire du travail qui déciderait qu'il y aurait un nombre d'unités d'accréditation moindre. Mais, au départ...

Mme Harel: C'est quels articles de transition, ça?

M. Crevier: II y en a plusieurs. Mme Harel: 82?

M. Crevier: II y a 82; 82, c'est en ce qui concerne des droits individuels. À 83, là, on touche davantage les droits du syndicat ou de l'association de salariés. C'est la même chose à 84 et à 85, c'est des droits individuels. Si on parle de droits collectifs pour les syndicats de la fonction publique, c'est 91. Alors, à 91, le premier alinéa assure le transfert de l'accréditation, tandis que le troisième alinéa assure le transfert de la convention collective.

Mme Harel: Alors, ces dispositions transitoires, elles sont introduites du fait que le gouvernement a choisi, à l'article 11, de ne pas assujettir la Société à la Loi sur la fonction publique. C'est ça qu'il faut comprendre. Elles ne seront pas nécessaires, ces dispositions transitoires, à ce moment-là, si... Je sais que dans la mesure où un organisme ou une société est assujettie à la Loi sur la fonction publique, à ce moment-ià, le dispositif d'accréditation syndicale en vertu du Code du travail tombe parce que c'est la Loi sur la fonction publique qui détermine, je pense, l'accréditation. C'est ça?

M. Crevier: C'est vrai. Il existe des particularités dans la Loi sur la fonction publique qui font que ce n'est pas l'ensemble des règles du Code du travail qui va s'appliquer. En particulier, il est prévu que les unités de négociation se découpent suivant certains critères: professionnels, fonctionnaires, etc.

Mme Harel: Dans la Loi sur la fonction publique.

M. Crevier: Dans la Loi sur la fonction publique. Donc, effectivement, il y a peut-être...

Mme Harel: Mais est-ce que la Loi sur la fonction publique ne prévoit pas également la possibilité qu'il puisse y avoir une délégation du recrutement par l'Office de recrutement, et est-

ce que la Loi sur la fonction publique ne prévoit pas aussi qu'il peut y avoir une accréditation au sens du Code du travail pour certaines unités?

M. Bourbeau: De toute façon, elle ne s'applique pas, M. le Président, la Loi sur la fonction publique. Alors...

M. Crevier: Juste pour préciser, peut-être. Il y a deux choses là-dedans. Le processus de nomination, effectivement, la Loi sur la fonction publique prévoit, je dirais, de a à z, un processus de nomination. Donc, dans ce sens-là, c'est certain qu'à l'article 11 on précise que les employés sont nommés de la manière que la Société prévoit. Et si on appliquait la Loi sur la fonction publique, évidemment, là les règles seraient déjà faites et ce serait l'ensemble des règles qui s'appliquerait à la Société.

En ce qui concerne les accréditations, c'est assez différent. En fait, c'est seulement une partie des règles du Code du travail qui ne s'applique pas dans la fonction publique. Pour le reste, ça s'applique quand même.

Mme Harel: en fait, la question de fond que je voudrais poser au ministre, c'est: pourquoi avoir écarté l'application de la loi sur la fonction publique?

Une voix: C'est la mode.

Mme Harel: C'est la mode, oui. À part la mode, là... Effectivement, c'est la mode.

M. Bourbeau: Je dirais que c'est un voeu un peu universel qu'on a constaté. À la Conférence permanente, par exemple, sur la main-d'oeuvre, c'était, à ma connaissance, unanime. La CSN l'a spécifiquement demandé dans son mémoire. D'ailleurs, la députée a certainement lu le mémoire de la CSN; elle le cite à profusion pour tous les autres articles. Alors, c'est bon pour celui-là aussi. Et vraiment, sur les 80 organismes, il n'y en a que 2 qui se sont opposés à ça. On estime généralement que la fonction publique a déjà ses tentacules, je pense, assez bien établies un peu partout dans les ministères, un peu partout, sans avoir besoin de l'étendre davantage.

Mme Harel: Mais c'est une mode, effectivement, présentement.

Une voix:...

Mme Harel: Absolument. Oui. Ça peut dépendre, dans une certaine mesure, peut-être, du durcissement ou de la crispation que les syndicats représentant les fonctionnaires ou les professionnels ont pu témoigner à l'égard de certaines considérations régionales dans l'embauche ou dans les nominations, et il faudrait qu'il y ait une sorte d'assouplissement pour qu'il y ait.... Parce que, effectivement, c'est incroyable que, 30 ans après cette révolution qui a bouleversé le mode de nomination, d'embauché, de recrutement du personnel, qui a assuré une impartialité dans les normes d'embauché, c'est incroyable que ce soit considéré comme étant un frein à une gestion ordonnée et souhaitable, en fait, du personnel et des ressources humaines. Je ne sais pas. Ça m'a l'air d'être une tendance très, très, très forte à écarter. La Loi sur la fonction publique était considérée pourtant, dans les années soixante, comme étant celle qui mettait à l'abri des pressions politiques, qui mettait à l'abri de la partialité dans les nominations. (22 h 30)

M. Bourbeau: Oui, mais il y a une autre tendance, M. le Président. On a tendance à penser que la sacro-sainte sécurité d'emploi tous azimuts qui est accordée à la fonction publique, aujourd'hui, est de plus en plus contestée, si je peux dire, dans la population, étant donné qu'il y a très peu de personnes maintenant qui ont cette possibilité d'avoir la sécurité d'emploi absolue, mur à mur, et peut-être que plusieurs considèrent qu'il n'y a pas lieu d'étendre ce privilège, qui est un privilège assez extraordinaire, à plus de personnes qu'il y en a présentement. Si on devait assujettir les employés de la Société à la fonction publique, ça veut dire que tous les employés des CFP...

Mme Harel: Excusez-moi, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...tous les employés des CFP, par exemple, qui, présentement, n'ont pas ce privilège, l'obtiendraient d'un seul coup, ce qui ferait entrer dans la fonction publique 700 à 800 personnes de plus.

Bref, est-ce que la députée serait disposée à proposer un amendement à cet effet-là? Oui? Ah! ça m'étonne. Ça m'étonne. Mais, M. le Président, si elle veut le faire, je lui dis tout de suite que je n'ai pas l'autorisation pour y consentir. Mais on peut faire l'exercice, pour la beauté du geste.

Mme Harel: Quand le ministre parle de sécurité d'emploi, dois-je comprendre que les employés des CFP n'ont pas de sécurité d'emploi, les employés régis par les conventions collectives des unités d'accréditation existantes à la CSN ou à la FTQ, ou au SPGQ, parce qu'ils sont trois à se partager les unités d'accréditation des commissions de formation professionnelle en région?

(Consultation)

M. Bourbeau: Bon. Où est-ce qu'on en est?

Mme Harel: La sécurité d'emploi pour les employés des commissions de formation professionnelle. Est-ce que je comprends, de l'interven-

tion que le ministre a faite, qu'il n'y aurait pas de sécurité d'emploi pour les employés de la société, si tant est que l'article 11 était adopté?

M. Crevier: Oui, si je peux me permettre. Effectivement, il existe un régime de sécurité d'emploi dans les conventions collectives conclues dans les CFP, sauf que, évidemment, ce n'est pas la même que dans la fonction publique. Il y a plusieurs modalités qui existent; c'est, d'ailleurs, assez élaboré dans les conventions collectives qui s'appliquent aux CFP. Mais ce n'est pas la même que dans la fonction publique.

Mme Harel: Parce que ce n'est pas la même convention.

M. Crevier: C'est-à-dire que, dans la fonction publique, c'est une loi qui prévoit cette sécurité d'emploi là, tandis que, dans les conventions collectives des CFP, c'est davantage sur le modèle d'autres entreprises. Mais c'est une sécurité d'emploi qui est quand même assez importante.

M. Bourbeau: Je présume qu'elle ne subsiste que dans la mesure où les CFP ont des crédits à leur disposition. Si les CFP n'avaient pas de crédits disponibles, elles ne pourraient pas continuer à assurer la sécurité d'emploi, et il n'y aurait pas de recours contre le fonds consolidé, je présume.

Mme Harel: Comment le ministre pense-t-il pouvoir intégrer les fonctionnaires fédéraux si ce qui leur est offert...

M. Bourbeau:... tout doucement. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Un par un? Un par un, si je comprends bien, ou une par une? Non, mais, plus sérieusement, quel est le volume d'intégration dont il s'agit?

M. Bourbeau: Écoutez, présentement, on estime qu'il y a au Québec, je crois, environ 6000 fonctionnaires fédéraux qui oeuvrent dans le domaine de la main-d'oeuvre et de l'assurance-chômage. Je sais qu'un bon nombre, un certain nombre de ces employés-là devraient, au cours des cinq prochaines années, atteindre l'âge de la retraite ou de la préretraite.

Mme Harel: Combien?

M. Bourbeau: Je n'ai pas le chiffre exact, mais je crois que ça peut tourner autour de 1500 ou 2000, à ce qu'on m'a dit, à ce qu'on nous a dit. Et, dans ce sens-là, on ne fait que spéculer, là. Les négociations à venir diront ce qui en est, mais on pourrait très bien concevoir que la Société pourrait prendre, dans ses effectifs, tous les fonctionnaires fédéraux, quitte à ce que, par attrition, au cours des quelques prochaines années, on puisse réduire sensiblement le nombre des effectifs de la Société. Alors, les chiffres les plus précis qu'on a sont au 31 août 1991. Il y aurait au Québec, présentement, affectés à la main-d'oeuvre seulement, 2618, 67 employés...

Mme Harel: 2618?

M. Bourbeau: Et deux tiers.

Mme Harel: D'accord. J'avais 2500.

M. Bourbeau: Je ne sais pas de quelle partie il s'agit là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Vous avez bien dit à la formation de la main-d'oeuvre?

M. Bourbeau: Oui... Non, à la main-d'oeuvre. Mme Harel: À la main-d'oeuvre.

M. Bourbeau: Pas à la formation, à la main-d'oeuvre.

Mme Harel: D'accord, à la main-d'oeuvre.

M. Bourbeau: Ça, c'est le total pour ce qu'on appelle la région Québec, y compris les directions centrales. Dans l'assurance-chômage, secteur assurance-chômage, il y avait 3506, 88, quatre-vingt-huit centièmes d'un employé. Pour un grand total de 6125, 56 employés...

Une voix:...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: M. le Président, parfois, la réalité dépasse la fiction.

Mme Harel: Quand vous parlez des employés à l'assurance-chômage, 3506, ça comprend les employés qui dispensent les mesures actives comme les mesures passives?

M. Bourbeau: Non, ça, je crois que c'est uniquement les employés qui sont affectés à la distribution des chèques à l'assurance-chômage.

Mme Harel: Donc, comme tel, là, ce qu'on peut appeler main-d'oeuvre, c'est 2618 personnes.

M. Bourbeau:, 67; 2619 pratiquement

Mme Harel: Ça, c'est comme 2, 4 enfants par femme.

M. Bourbeau: C'est ça, exactement.

Mme Harel: De ce nombre, on m'a indiqué qu'il y en avait environ 700 qui s'occupaient de formation et que les autres étaient affectés à ce qu'on appelle le service à l'emploi.

M. Bourbeau: Vous tenez ça de paroles verbales ou si vous avez des écrits? On n'a pas de documents...

Mme Harel: Je tiens ça du syndicat de l'Alliance de la fonction publique.

M. Bourbeau: C'est des chiffres que nous, en n'a pas. Mais c'est tout à fait plausible.

Mme Harel: Alors, dans le projet de rapatriement, je faisais part au ministre, aujourd'hui même, de la dernière proposition, l'ébauche de la dernière, dernière proposition, dans laquelle on retrouve, finalement, la disposition que je lui proposais et qu'il a finalement battue hier en commission, à savoir modifier l'article 92, paragraphe 1, de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, pour confier la compétence exclusive de la main-d'oeuvre aux provinces. Mais il est dit également que l'article 91, je ne sais plus quel paragraphe qui porte sur l'assurance-chôma-ge, lui, ne serait pas modifié, et ça consacrerait la compétence exclusive du fédéral à l'égard de l'assurance-chômage. Je le dis de mémoire, mais je pense que le ministre en convient aussi. Cette dernière, dernière proposition parlait d'une entente administrative en matière d'assurance-chômage et spécifiait bien, cependant, que toutes les provinces allaient avoir le même sort dans la mesure où elles voulaient obtenir... signer une telle entente, et que, par ailleurs, il y aurait une disposition constitutionnelle qui ferait en sorte que tous les programmes de perfectionnement soient compatibles avec les objectifs nationaux. (22 h 40)

En lisant cette proposition, je me suis demandé si, finalement, le ministre allait être déprimé ce soir. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Je suis déprimé, M. le Président, parce que je trouve qu'on n'avance pas vite dans le projet de loi...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: ...11 articles après 5 heures. Pour ce qui est du dossier constitutionnel, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, d'abord, si je comprends bien, vient de faire état de l'ébauche dont on a parlé à la période des questions aujourd'hui. Moi, je regarde ça dans une perspective évolutive. Il y a huit mois, les propositions du gouvernement fédéral, en septembre dernier, parlaient de transférer aux provinces la formation de la main-d'oeuvre, point final à la ligne. Donc, c'était pratiquement le statu quo, un peu, à peine amélioré. Un peu après, on a vu le rapport Beaudoin-Dobbie qui est allé un petit peu plus loin, mais pas beaucoup. Maintenant, on semble prendre pour acquis que non seulement la formation de la main-d'oeuvre pourrait faire l'objet de, je n'ose pas dire un transfert, mais plutôt d'un abandon de la part du gouvernement fédéral. Mais là on commence à parler de main-d'oeuvre au complet, ce qui va beaucoup plus loin qu'uniquement la formation.

Certainement sous l'influence des demandes du Québec, on commence aussi à ouvrir un peu sur le chômage. On en parle, puis on laisse entendre que, possiblement, il pourrait y avoir des transferts aux provinces, une partie des fonds d'assurance-chômage. Donc, il semble que les demandes du Québec pénètrent de plus en plus ces milieux qui, autrefois, étaient absolument imperméables. Les discussions, comme vous savez, les négociations n'ont même pas commencé encore. Le Québec ne négocie pas. Alors, moi, je me dis...

Mme Harel: Je pense que c'est terminé, par exemple, si vous voulez mon avis. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Moi, je me dis que tous les espoirs sont permis. On est partis d'une situation où...

Mme Harel: Vous êtes mieux de vous dépêcher, parce que j'ai peur que vous ne commenciez pas ce qui va se terminer.

M. Bourbeau: On est partis d'une situation où le fédéral ne ferait pratiquement rien et, maintenant, il semble, il est en train d'offrir chaque semaine un peu plus, de plus en plus. Alors, moi, je me dis: Ne nous décourageons pas; il ne faut pas être pessimistes; le temps a fait son oeuvre. Et il semble que le temps joue en faveur du Québec, parce que, à chaque mois, à chaque semaine qui passe, les offres semblent s'améliorer.

Mme Harel: Écoutez, si vous le prenez comme ça, tant mieux. Il y a le ministre de la Justice, ou des Affaires intergouvernementales, qui le prend bien, lui aussi. Je ne sais pas si vous avez lu sa remarque à la radio. Vous avez entendu, peut-être? Non? Il faisait état de son fils Nicolas, parce qu'il disait à son fils que les bons danseurs se voient à la fin des soirées. Effectivement, d'ailleurs, à la fin des soirées, quand vous ne vous faites pas piler sur les pieds, vous en concluez que c'est un bon danseur. Et son fils lui avait dit que ça allait être «rock and roll», n'est-ce pas? Le fils du ministre de la Justice est à son égard ce que la grand-mère de Mme Payette était à la sienne.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce qu'on

peut revenir à nos moutons? Mme Harel: Oui. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Comment va se faire l'intégration des fonctionnaires fédéraux? Par exemple, parlons d'un scénario, mettons, probable, qui soit celui du transfert de la compétence en formation de la main-d'oeuvre - c'est déjà là, dans l'ébauche en tout cas, c'est déjà acquis - puis comme étant une sphère de compétence provinciale exclusive. Ça, ça veut dire à peu près 700, me dit-on, des 2500. On m'avait dit 2500, vous me dites 2618; alors, ça doit tourner...

M. Bourbeau: 56.

Mme Harel: C'est un ordre de grandeur. Donc, ça doit être autour de 700, 750 qui s'occupent de formation de la main-d'oeuvre. Évidemment, le ministre sait, et je ne veux pas revenir là-dessus, que les sources de financement vont être de plus en plus l'assurance-chômage, de moins en moins la fiscalité, et qu'on peut se faire passer un cadeau de Grec en se faisant passer une compétence exclusive pour laquelle il y a de moins en moins d'argent qui est transféré. Parce que, finalement, c'est là où l'argent est que le fédéral va rester. Mais enfin! C'est un débat qu'on reprendra un autre matin plus de bonne heure. Mais, pour tout de suite, en ce qui concerne les employés comme tels... Parce que eux, finalement, ce que vous leur offrez par règlement, c'est d'arriver un par un seulement. C'est ça?

M. Bourbeau: C'est-à-dire qu'il y a des précédents, M. le Président. Ce n'est pas la première fois que le fédéral tranfère des effectifs au Québec. On l'a fait à plusieurs reprises.

Mme Harel: À deux reprises.

M. Bourbeau: Lorsque j'étais ministre responsable de l'Habitation, on avait transféré au Québec tous les pouvoirs en matière d'habitation sociale, y compris un certain nombre d'effectifs. Ça s'est fait récemment dans l'immigration, ça s'est fait avec la TPS. Il y a des précédents et on va procéder par... Quand les négociations avec le fédéral seront terminées, on verra comment on va intégrer ces fonctionnaires-là dans la Société.

Mme Harel: Ce n'était pas le même ordre de grandeur. Dans le cas de l'immigration, vous pariiez de 60 employés fédéraux.

M. Bourbeau: Je comprends que, là, c'est...

Mme Harel: Dans le cas de la TPS, vous parliez d'une centaine à peine. Dans le cas de l'habitation sociale, je ne sais pas de combien de fonctionnaires il s'agissait.

M. Bourbeau: II n'y en avait pas un très grand nombre.

Mme Harel: Combien?

M. Bourbeau: Une vingtaine, 25.

Mme Harel: Une vingtaine. Ça ne s'est jamais fait dans l'ordre de grandeur de ce qu'on envisage là.

M. Bourbeau: M. le Président, j'innoverai, nous innoverons et...

Mme Harel: Oui, je veux bien croire, mais qu'est-ce que vous allez offrir? Ces gens-là ne seront pas tenus, j'imagine? Parce que l'entente entre le Conseil du trésor fédéral et le Conseil du trésor québécois, en ce qui concerne les transferts de fonctionnaires pour l'immigration, c'était une entente sur une base volontaire, c'est-à-dire que l'entente prévoyait que le fonctionnaire était transféré sur une base volontaire. Mais vous vous imaginez, là, en l'occurrence, quand il s'agit peut-être de milliers de fonctionnaires!

M. Bourbeau: Je pourrais dire ceci à la députée de Hochelaga-Maisonneuve, peut-être que ça lui permettrait de comprendre un peu mieux comment on pourrait procéder. Je lui dirais que le transfert d'activités et de responsabilités du gouvernement fédéral impliquera vraisemblablement le transfert des ressources humaines correspondantes. C'est pourquoi l'article 93 du projet de loi précise qu'«un accord visé à l'article 23 peut prévoir la cession d'une partie d'unités ou de services administratifs d'un ministère ou d'un organisme public fédéral ainsi que les modalités du transfert de certains employés du gouvernement du Canada affectés à ces services ou unités au ministère de la Main-d'?uvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle ou à la Société. Ces modalités peuvent déroger à la Loi sur la fonction publique, le cas échéant.»

Dans un tel cas, le Conseil du trésor pourra déterminer les règles, normes et politiques relatives aux conditions de travail applicables aux employés concernés. L'expérience récente du transfert de fonctionnaires fédéraux au ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, et plus particulièrement au ministère du Revenu dans le cas de la TPS, nous permet d'entrevoir le type de statut et les modalités qui pourraient être appliquées à la Société, le cas échéant. Ainsi, dans le cas du ministère du Revenu, on a négocié des ententes particulières, pour le transfert des ressources humaines, avec le gouvernement fédéral. Chaque fonctionnaire fédé-

rai a reçu une offre d'emploi au gouvernement du Québec de la part du ministère du Revenu. À ce moment-ci, 524 des 530 fonctionnaires fédéraux ont accepté l'offre et ils bénéficieront des mesures suivantes, et il y a certaines mesures qui ont été... Alors, on voit que c'est quand même assez important dans le cas du ministère du Revenu; on parle d'au-delà de 500 fonctionnaires fédéraux.

Je dirais ceci: Les dispositions des conventions collectives et les mesures prévues dans le projet de loi font en sorte que les employés transférés jouiront d'une très bonne protection de leurs droits et statuts. Les employés des CFP pourront également profiter des avantages que procure l'appartenance à une organisation d'envergure. En fait, chacune et chacun y gagnent. Le débat se situera sans doute davantage au niveau des associations de salariés qui tenteront de prendre le contrôle de la représentation des employés de la Société. Je vous signalerais que, dans le cas des employés des CFP, le fait d'avoir une société unique plutôt que plusieurs petites sociétés va faire en sorte de favoriser la mobilité de la main-d'oeuvre, beaucoup plus que si chacun était encarcané dans une petite société régionale.

Mme Harel: Alors, on va revenir, de toute façon, au moment où on fera l'examen de l'article 23, sur la question de l'intégration des fonctionnaires fédéraux, parce que je pense qu'if va falloir des scénarios qui rassurent. Il y a beaucoup d'inquiétude, le ministre doit être bien conscient de ça, pas juste... je ne parle pas des têtes dirigeantes. Il y a beaucoup d'inquiétude dans le milieu même des gens qui donnent un service et qui sont des employés fédéraux. Parmi les 6000 que nous mentionne le ministre, les 6000 qui sont sur le territoire du Québec et qui se demandent ce qui va leur arriver, j'imagine que le ministre doit en rencontrer à l'occasion, comme je peux en rencontrer. Puis les scénarios les inquiètent, d'autant plus que leurs tâches ont été intégrées, un peu comme pour les CTQ présentement, le processus de fusion des tâches qui est entrepris fait qu'il n'y a plus de distinction entre les mesures d'employabilité puis l'estimation de la prestation. On en a assez discuté pour savoir que, finalement, cette intégration fait que, dépendamment des équipes, quelqu'un peut faire un tiers ou deux tiers, trois quarts ou un quart, dans une journée, de l'une ou l'autre, finalement, des fonctions. Et c'est le cas, semble-t-il, au niveau fédéral, ce qui fait que ce n'est pas tranché au couteau comme ça l'est dans l'ébauche progressive fédérale, ce n'est pas tranché au couteau entre la formation de la main-d'oeuvre puis les services à l'emploi. (22 h 50)

Les gens, dans les centres d'emploi et immigration, ils font des deux. Alors, ça les inquiète, d'autant plus que, si une seule partie du mandat est transférée, ça veut donc dire: lesquels d'entre eux vont rester, lesquels vont partir? C'est comme si on était en train de dissocier des fonctions. En fait, clairement, ça veut dire qu'une personne qui est sans emploi, qui va à un centre d'emploi et immigration, elle peut être vue par quelqu'un qui va faire du «counseling», elle peut être vue par quelqu'un qui va faire de la référence à l'emploi. Mais cette même personne-là peut faire aussi de la référence à la formation professionnelle, elle peut lui conseiller de devenir soit un étudiant indépendant avec ses prestations ou de participer à un groupe, etc. Quoi qu'il en soit, si tant est que les propositions fédérales se trouvaient à être confirmées, c'est comme si on revenait à l'ancien modèle où, finalement, une personne devait aller voir un conseiller pour faire du «counseling» ou du service à l'emploi, un autre pour pouvoir suivre un cours de formation, etc. Alors, ce n'est pas vu comme un progrès. Ce n'est pas vu ainsi par les employés qui font le travail, parce que ça a demandé quand même... Il faut le comprendre, ce n'est pas des appareils qui sont légers, ça, quand vous pariez de 6000 personnes. Et c'est Michèle Jean, il faut savoir que c'est la sous-ministre qui était à Québec, qui est maintenant à Ottawa, qui a fait effectuer ce virage-là. Puis ce n'était pas un virage facile à faire d'un appareil de 6000 personnes.

M. Bourbeau: c'est évident, m. le président, que l'entreprise est inusitée, un bloc de 6000 fonctionnaires qui transiteraient d'un gouvernement à un autre...

Mme Harel: Non, ce n'est pas tant les 6000... Ça va être plus facile si c'est les 6000 que s'il y en a juste 2000.

M. Bourbeau: Oui, je comprends très bien ce que dit la députée, mais...

Mme Harel: Est-ce que vous êtes d'accord avec moi?

M. Bourbeau: ...les demandes du Québec portent sur la totalité et non pas sur une partie. Présentement, je pense au stade où on en est dans les discussions qui ont lieu entre les provinces anglophones et le fédéral; on semble déjà d'accord pour transférer aux provinces les mesures actives de main-d'oeuvre.

Mme Harel: Toutes les mesures actives? M. Bourbeau: Bien, enfin...

Mme Harel: C'est votre lecture de la proposition?

M. Bourbeau: Bien oui. Je crois que oui. Il me semble, oui. Pas la vôtre?

Mme Harel: Je crois que c'est les mesures de formation de la main-d'oeuvre.

M. Bourbeau: Mais je crois qu'on en est plus loin que ça maintenant, d'après ce que j'ai pu comprendre.

Mme Harel: Mais, par ententes administratives, ce dont il est question, c'est conclure des ententes administratives avec les provinces afin d'harmoniser et de rationaliser les activités fédérales en matière d'assurance-chômage et les activités provinciales dans le domaine de l'emploi. Alors, ce dont il est question, c'est du maintien des deux, puis d'un accord Canada-Québec de la nature de ceux qu'on connaît, j'imagine, ou, en fait, même amélioré, même amélioré. On ne parle pas du tout d'un retrait du fédéral en ces matières-là.

M. Bourbeau: De toute façon, M. le Président, on discute sur un projet d'ébauche de discussions auxquelles on ne participe pas. Moi, je veux bien spéculer indéfiniment, mais la députée conviendra qu'on ne peut pas aller très loin dans ces discussions-là. Les vraies discussions, les vraies négociations restent à faire. Je peux assurer la députée que, quand les vraies négociations vont commencer, j'ai l'intention de me tenir très près de la table, très près de la table, et de tenir informée la députée, sur une base journalière, du progrès des travaux.

Mme Harel: Même après la clôture de la session?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Alors, j'aurais un amendement à déposer, M. le Président, qui se lit ainsi: Remplacer le premier paragraphe par le suivant: «Les employés de la Société sont nommés en vertu des dispositions de la Loi sur la fonction publique et selon le plan d'effectifs qu'elle établit.»

Une voix: Vous remplacez le premier paragraphe?

Mme Harel: Non. On remplace les mots «Les employés de la Société sont nommés de la manière qu'elle prévoit par règlement» par «Les employés de la Société sont nommés en vertu des dispositions de la Loi sur la fonction publique et selon le plan d'effectifs qu'elle établit».

M. Bourbeau: Est-ce que M. Nicolet est d'accord avec la proposition de la députée?

Mme Harel: M. Nicolas?

M. Bourbeau: M. Nicolet. C'est une mesure qui m'apparaît aller à rencontre de la volonté de décentralisation que prône la députée.

Mme Harel: J'ai vérifié moi-même, cet après-midi, et je sais que la Loi sur la fonction publique permet une délégation de pouvoirs au niveau de l'embauche. Alors, évidemment, on pourrait le spécifier. Si le ministre m'appuie à l'amendement que je propose, je veux lui dire que c'est dans l'esprit de déléguer les pouvoirs au niveau de l'embauche. Il m'apparaît que cette délégation de pouvoirs existe présentement, par exemple au niveau de la CSST. On m'a informée qu'au niveau de la CSST ce n'était pas, je pense, l'Office de recrutement qui procédait, mais c'était sa propre Direction des ressources humaines.

M. Bourbeau: Je vais demander à Me Crevier de préciser.

Le Président (M. Philibert): Me Crevier.

M. Crevier: Oui, juste un point peut-être à préciser. Effectivement, il existe, en vertu de la Loi sur la fonction publique, des possibilités de déléguer, par exemple, la tenue de concours, etc. Sauf que, quant aux règles elles-mêmes, elles sont fixées dans la loi ou dans la réglementation, et l'article 11 est à l'effet quand même qu'il permet à la Société de se donner des règles quant au processus d'embauché. Alors, il y a quelque chose là qui est différent quand même, qui dépasse le cadre d'une délégation en vertu de la Loi sur la fonction publique.

Mme Harel: Mais l'un n'empêche pas l'autre. C'est ça que je comprends, de ce que vous dites?

M. Crevier: C'est-à-dire que, dans la mesure où on dirait, à l'article 11, que la Loi sur la fonction publique s'applique, il y a, dès lors, une série de règles qui vont s'appliquer immédiatement. Les délégations dont on parle, c'est uniquement dans les modalités de tenue de concours, par exemple, ou des éléments semblables.

M. Bourbeau: De sorte qu'il m'apparaît que cette proposition-là limite l'autonomie des régions sur ce point-là.

Mme Harel: Remarquez que les régions n'ont, en vertu de la proposition que vous faites, aucune autonomie. D'abord, elles n'existent pas, elles n'ont pas de statut de corporation, elles ne sont pas employeurs et elles n'ont pas de salariés. C'est la société mère qui détient le statut de corporation au sens du Code civil, qui est l'unique employeur.

M. Bourbeau: Disons qu'alors ça limite... En tout cas, certainement que ça limite l'autonomie de la Société, en tout cas, par rapport...

Mme Harel: Oui, ça, c'est autre chose.

Alors, qu'est-ce qu'on peut mettre dans la balance? D'un côté, l'autonomie de la Société, mais, de l'autre côté, je crois que ça oblige à un débat public qui n'a pas eu lieu finalement, au moment où on a procédé à l'examen, en commission parlementaire, de cette question, parce qu'il y en avait tant d'autres que celle-là, finalement, n'a pas fait surface, elle a été vraiment mise de côté. Mais il y aurait lieu, au moment où vous vous apprêtez à créer un appareil considérable-Moi, je fais l'amendement pour permettre que le débat ait lieu, pour la bonne raison qu'à Montréal, ce débat n'ayant jamais eu lieu dans le passé, maintenant on se retrouve avec une série de sociétés paramunicipales qui se sont multipliées au fil des années, de la précédente administration puis de l'actuelle administration. Et je peux vous dire que, quand on regarde à rebours, on se demande si c'était la voie dans laquelle il fallait s'engager. (23 heures)

Ce qui peut avoir l'air au départ de solutionner l'absence de souplesse, parce qu'on peut reconnaître qu'il y a un manque de souplesse dans une loi de la fonction publique qui n'a pas été vraiment rafraîchie ou renouvelée depuis 30 ans... Cependant, plutôt que d'y remédier en faisant au fur et à mesure que c'est nécessaire, compte tenu de l'évolution de la société, les changements qu'il faut pour que la loi de la fonction publique évolue aussi, on préfère agir à côté. Je crains que, finalement, tout ça se fasse avec des bonnes intentions, je n'en doute pas du tout, notamment avec aussi - il ne faut pas quand même craindre d'en parler - l'intention des centrales syndicales de représenter des membres auxquels la loi de la fonction publique ne donne pas accès présentement, mais dans la mesure où l'accréditation est détenue par des syndicats qui ne sont pas affiliés. Alors, il y a des intérêts de tous bords, tous côtés là-dedans. Il n'y en a pas simplement du côté de ceux qui sont déjà dans la fonction publique.

Mais, quoi qu'il en soit, je constate, en tout cas, pour m'intéresser à ce qui se passe à Montréal, que ça n'a pas donné à Montréal les résultats que c'était censé donner. C'est censé assouplir, donner plus d'autonomie, etc. Puis, finalement, on se rend compte que ce n'est peut-être pas la meilleure façon de gérer du personnel ou des ressources humaines que de multiplier les conventions collectives, multiplier les disparités et, dans la mesure où des postes s'ouvrent là où, finalement, c'est plus payant, les gens vont quitter les fonctions qu'ils occupent. Ce que je crains, finalement, c'est que la fonction publique se ratatine, là, et que les protections qu'on avait introduites dans les années soixante finissent par ne bénéficier qu'à un nombre de plus en plus restreint de personnes.

Je crois qu'en général les réformes qui réussissent finissent par faire oublier les causes qui les ont produites. La réforme de la fonction publique a réussi. Elle a tellement réussi qu'elle a réussi à nous faire oublier pourquoi elle avait été faite parce qu'elle a fondamentalement été faite pour mettre fin à une partialité qui était devenue totalement scandaleuse, etc., mais il n'est pas impossible qu'on revienne à ce régime si on n'y fait pas attention.

Le Président (M. Philibert): Est-ce que vous êtes en train de discuter sur le fond de l'amendement?

Mme Harel: Oui.

Le Président (M. Philibert): Parce que, pour le bon fonctionnement de la commission, votre amendement...

M. Bourbeau: L'amendement est irrecevable.

Le Président (M. Philibert): Vous vous êtes mise à faire du coq-à-l'âne, et l'amendement, tel que présenté, je pense qu'il n'est pas nécessairement facile à saisir.

M. Bourbeau: Le débat a été fait, M. le Président. Alors, on peut le retirer.

Le Président (M. Philibert): II faudrait d'ailleurs, je pense, par respect pour la commission, rédiger les amendements préalablement, parce que je ne pense pas que ça traduise votre pensée ce qu'on retrouve ici. En tout cas, on a de la difficulté à saisir, là.

M. Bourbeau: Mais comment avez-vous pu saisir la pensée, M. le Président? Moi, je m'évertue à le faire.

Le Président (M. Philibert): Mais je pense qu'il faudrait à l'avenir les rédiger.

Mme Harel: Qu'est-ce qui fait problème, M. le Président?

Le Président (M. Philibert): Pardon?

Mme Harel: Qu'est-ce qui fait problème dans la rédaction? Expliquez-moi, en droit, là.

Le Président (M. Philibert): non, ce n'est pas, je pense, la fonction de la présidence de rédiger les amendements ni pour l'opposition, ni pour le côté ministériel. je pense que ça devrait être fait préalablement.

M. Bourbeau: M. le Président, de deux choses l'une, pour ne pas perdre de temps, ou bien on peut suspendre pour permettre à la députée de rédiger l'amendement, ou bien elle peut renoncer à son amendement, étant donné que le débat a déjà été fait.

Mme Harel: Non, M. le Président. Je vois très, très bien qu'il y a eu une confusion. Ce n'était pas «ajouter»; c'était «remplacer». C'est évident. C'a toujours été évident dans mon esprit.

Le Président (M. Philibert): Mais regardez ce qui était écrit, nous.

Mme Harel: D'accord. Très bien.

Le Président (M. Philibert): Alors, il faudrait...

Mme Harel: Alors, c'est «remplacer». C'est évident.

Le Président (M. Philibert): ...lire l'amendement.

Mme Harel: C'est bien ça.

Le Président (M. Philibert): En tenant compte que le temps écoulé sur cette discussion a été bien écoule. Alors, l'amendement, c'est: Remplacer, au premier alinéa de l'article 11 du projet de loi 408, les mots «de la manière qu'elle prévoit par règlement» par les mots «en vertu des dispositions de la Loi sur la fonction publique».

Mme Harel: C'est bien ça, bien sûr.

Le Président (M. Philibert): Mais ce n'est pas ça que vous aviez écrit.

M. Bourbeau: M. le Président, on va comprendre que c'était une faute d'inattention et on pourrait peut-être passer au vote, à moins que les députés veuillent prendre un vote non nominal.

Mme Harel: Non, c'est bien, M. le Président. Un vote nominal.

Le Président (M. Philibert): Un vote nominal.

Mme Harel: C'est comme un quorum, ça, un vote nominal.

Le Président (M. Philibert): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve?

Mme Harel: Pour.

M. Bourbeau: M. le député d'où, là?

Le Président (M. Philibert): Mme la députée de Châteauguay?

Mme Cardinal: Contre.

Le Président (M. Philibert): M. le député de Laporte?

M. Bourbeau: Contre, M. le Président, tout contre.

Le Président (M. Philibert): Alors, l'amendement est rejeté.

Mme Harel: Faites-vous en pas, parce qu'à deux ils me battent quand même.

Le Président (M. Philibert): Nous revenons maintenant à l'article 11.

M. Bourbeau: M. le Président, notre objectif n'est pas de battre la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Le Président (M. Philibert): Nous revenons à l'article 11.

M. Bourbeau: Adopté, M. le Président. Le Président (M. Philibert): Adopté? Mme Harel: Un instant, M. le Président. M. Bourbeau: Sur division.

Mme Harel: «Les normes et barèmes de rémunération ainsi que les autres conditions de travail de ces employés sont établis par la Société et soumis à l'approbation du gouvernement.»

C'est donc dire que la Société aura à signer les conventions collectives de travail. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Crevier: Oui, elle aura, en fonction du Code du travail, à négocier et à signer les conventions collectives.

Mme Harel: Et donc...

M. Crevier: Et, si je peux me permettre, vous avez, en relation avec ça, l'article 70, qui prévoit que le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic va être applicable à la Société.

Mme Harel: Ça signifie quoi, ça, M. le Président?

M. Crevier: C'est une loi qui encadre la négociation, par exemple, en exigeant que les négociations se fassent avec autorisation ou des mandats qui proviennent du gouvernement ou du Conseil du trésor, comme d'autres organismes publics. Mais, quant au fond de la négociation, ça ne change pas les règles, dans le sens où il y a une négociation, il y a des conventions collectives de conclues.

Mme Harel: Est-ce que le ministre pourrait nous fournir les... Est-ce qu'il a, par-devers lui, les dispositions qui sont concernées par l'annexe C de la loi sur les régimes de négociation? En fait, la question qui m'intéresse, là: Quels sont les organismes analogues qui sont soumis au même régime?

M. Crevier: On va en avoir la liste. De mémoire, il y aurait, par exemple, la Commission des droits de la personne.

Mme Harel: D'accord.

M. Crevier: II y avait autrefois...

Mme Harel: Radio-Québec, j'imagine?

M. Crevier: possiblement. il y a aussi les commissions de formation professionnelle qui l'étaient. il y en a une liste, je pense, d'une douzaine environ.

Mme Harel: Comme, par exemple, la Commission des services juridiques?

M. Crevier: Oui, je pense que oui.

Mme Harel: En fait, ce sont là des négociations qui ont toutes la même caractéristique, c'est qu'elles sont soumises au Conseil du trésor.

M. Crevier: C'est ça. Si je peux me permettre, il y a aussi la Commission de la construction du Québec, la Commission des droits de la personne, les commissions de formation professionnelle, la Commission des services juridiques. Il y en a même un certain nombre: HydroQuébec, Société des alcools, Société des loteries du Québec, etc., Radio-Québec.

Mme Harel: D'accord. Adopté... Sur division.

Le Président (M. Philibert): Adopté sur division. J'appelle l'article 12. (23 h 10)

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai eu une fausse joie.

Mme Harel: Je vous en ai adopté pas mal, là, ce soir.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée... Le Président (M. Philibert): L'article 12.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Maisonneuve se contente de peu. Cette disposition vise à empêcher que les membres du conseil d'administration ainsi que les employés de la Société ne se placent en situation de conflit d'intérêts.

Mme Harel: Le conflit d'intérêts, il est vraiment décrit comme impliquant une participation dans une entreprise. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Bourbeau: Disons que...

Mme Harel: ...qui met en conflit leur intérêt personnel.

M. Bourbeau: «ne peuvent, sous peine de déchéance de leur charge, avoir un intérêt direct ou indirect dans une entreprise qui met en conflit leur intérêt personnel et celui de la société.» je pense que les mots disent bien ce que ça veut dire.

Mme Harel: Ils ne peuvent pas se lancer dans des agences de formation professionnelle qui offrent des services, des choses comme ça.

M. Crevier: Là-dedans, il faut évaluer, je pense, chaque cas et il faut que le conflit soit réel et soit susceptible d'influencer le jugement de la personne. Alors, là, il faut voir à chaque cas. Quelqu'un peut avoir un intérêt minime, par exemple, dans une entreprise, sans qu'on considère qu'il soit en conflit d'intérêts.

Mme Harel: Quand est-ce qu'on considère qu'il y a conflit d'intérêts?

M. Crevier: Bien là, c'est difficile, c'est des cas d'espèce en fait. Ce qui est reproduit là, c'est ce qu'on retrouve généralement dans les autres lois qui peuvent créer les organismes. Le critère, en fait, c'est quand il y a un conflit réel qui est susceptible d'influencer le jugement ou la décision d'un employé en faveur de ses intérêts personnels. Ça, c'est à évaluer, là.

Mme Harel: Un intérêt personnel, vous l'entendez comme un intérêt pécuniaire. Par exemple, un membre du conseil d'administration... Un exemple purement hypothétique. Par exemple, le président d'une entreprise, n'est-ce pas? On sait que, si telle décision est prise en matière, par exemple, de subvention à tel genre d'entreprise ou si telle décision est prise en matière de crédit d'impôt pour telle entreprise, il pourra en bénéficier. Comment allez-vous jauger son intérêt personnel?

M. Crevier: II faut quand même que l'intérêt soit suffisamment particularisé, je pense. Si on parie là d'une norme générale qui est en discussion, il n'est pas certain qu'on puisse conclure qu'une personne, en particulier, est en conflit d'intérêts. C'est difficile à établir des règles. C'est vraiment des cas d'espèce.

Mme Harel: Même si l'entreprise qui l'emploie va possiblement bénéficier pour, par

exemple, des centaines de milliers de dollars d'un programme qu'elle aura fait voter, par exemple, par la Société, on ne considérera pas qu'elle a un conflit d'intérêts. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Crevier: Oui. Par exemple, si le programme en question s'adresse à toutes les entreprises du Québec, par exemple, je ne pense pas qu'on puisse y voir là un conflit d'intérêts.

Mme Harel: Alors, par exemple, Hyundai ne pourrait pas siéger sur le conseil d'administration?

M. Crevier: C'est-à-dire que Hyundai, s'il se produit le cas d'un contrat à discuter ou à négocier avec Hyundai...

M. Bourbeau: C'est le premier paragraphe qui s'appliquerait. Le membre du conseil devrait, à ce moment-là, déclarer son intérêt...

Mme Harel: O.K.

M. Bourbeau: ...et s'abstenir de participer à toute délibération et à toute décision portant sur Hyundai.

Mme Harel: Alors, le premier paragraphe concerne les membres du conseil d'administration et le deuxième concerne le président, les vice-présidents et les employés de la Société.

M. Bourbeau: Exact, exact.

Mme Harel: C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Bourbeau: Exact. Les premiers doivent déclarer leur intérêt; les deuxièmes ne peuvent pas en avoir.

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Philibert): Adopté. J'appelle l'article 13.

Mme Harel: On arrive au...

M. Bourbeau: Cette disposition prévoit l'adoption par la Société d'un règlement de régie interne.

Le Président (M. Gautrin): Alors, cet article 13?

Mme Harel: ...d'un comité exécutif va être laissé à l'initiative de la Société. C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Bourbeau: C'est exact. Ça fait partie des mesures d'autonomie que le gouvernement a consenties à la Société.

Mme Harel: Alors, je crois comprendre... Est-ce que c'est là une disposition usuelle ou est-ce que c'est encore un effet de la générosité du ministre?

M. Bourbeau: Moi, je ne connais pas toutes les lois par coeur, mais, dans certaines lois que je connais, c'est le gouvernement qui nomme le comité exécutif, mais je présume qu'il y a des lois où ça peut être ainsi. Le contenu d'un règlement de régie interne varie plus ou moins d'un organisme gouvernemental à un autre. Dans plusieurs de ces règlements, on retrouve des dispositions concernant, entre autres, la localisation du siège social - pas dans le cas présent parce que c'est la loi qui le détermine - le sceau corporatif de l'organisme, les séances du conseil d'administration, fréquence, formalités de convocation, modalités de prise de décision, quorum, ajournement, procès-verbaux, les fonctions et pouvoirs du personnel de direction, la constitution des pouvoirs de certains comités internes - comité exécutif, comité de vérification - et la signature de certains documents.

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gautrin): Adopté. Alors, j'appelle l'article 14.

M. Bourbeau: M. le Président, allez-y mollo. M. le Président, vous allez réveiller...

Des voix: Ha, ha, hal

M. Bourbeau: ...les chats qui dorment.

Le Président (M. Gautrin): Je vais réveiller... Merci, bon.

M. Bourbeau: m. le président, cet article prévoit quelles signatures peuvent lier la société dans les documents qui en émanent ou auxquels elle peut être partie. j'ajouterais que cette clause s'inspire de plusieurs clauses du même type que l'on retrouve dans des lois constitutives d'organismes gouvernementaux.

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gautrin): Adopté. J'appelle l'article 15.

M. Bourbeau: Cette disposition, M. le Président, confère un caractère d'authenticité aux procès-verbaux des séances du conseil d'administration de la Société ou à tous autres documents de la Société lorsqu'ils sont certifiés par le président du conseil ou par une autre personne autorisée par règlement de régie interne de la Société.

Mme Harel: Adopté.

Le Président (M. Gautrin): Adopté. L'article 16. L'article 16, mission et pouvoirs.

Mission et pouvoirs

M. Bourbeau: L'article 16, M. le Président, cette disposition décrit la mission de la Société. Cette mission consistera essentiellement à mettre en place des services et programmes visant à promouvoir et à favoriser le développement de la main-d'oeuvre québécoise, qu'elle soit en emploi ou en chômage, et ce, dans la perspective de favoriser un meilleur appartement entre l'offre et la demande de travail.

M. le Président, j'aimerais proposer un amendement à la commission...

Le Président (M. Gautrin): Bien sûr, bien sûr.

M. Bourbeau: ...amendement qu'on vous distribue à l'instant et qui vise à remplacer l'article 16 du projet de loi par le suivant: «La Société a pour mission de promouvoir et de soutenir le développement de la main-d'oeuvre et de favoriser l'équilibre entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre sur le marché du travail et de l'emploi au Québec.»

Le Président (M. Gautrin): Bon. Attendez, on va voir s'il est recevable. Vous remplacez complètement l'article 16 par un autre article 16.

M. Bourbeau: Oui, et le paragraphe premier de l'article 44 du projet de loi attribue à un conseil régional, entre autres fonctions, celle de définir la problématique du marché du travail et de l'emploi dans sa région. Par souci de cohérence avec cette disposition, il est proposé d'amender l'article 16 du projet de loi en y référant spécifiquement non seulement à la réalité du marché du travail, mais aussi à celle de l'emploi.

(Consultation)

M. Bourbeau: ...étudié la recevabilité de l'amendement, M. le Président? (23 h 20)

Le Président (M. Philibert): Alors, l'amendement est recevable.

M. Bourbeau: II est recevable, M. le Président? Nous sommes en faveur.

Le Président (M. Philibert): L'amendement est adopté?

Mme Harel: oui, m. le président. m. le président, à l'article 44 du projet de loi, on retrouve les fonctions du conseil régional et on retrouve, au premier alinéa, comme fonction, de définir la problématique du marché du travail et de l'emploi sans sa région et, au sixième alinéa, de favoriser la mise en oeuvre de programmes d'aide à l'emploi ou de développement local. Donc, on confie plus que l'équilibre entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre sur le marché du travail et de l'emploi au Québec. On confie même des programmes d'aide à l'emploi.

Une voix:...

Mme Harel: 44, sixième alinéa.

M. Bourbeau: C'est ça.

Mme Harel: On confie plus au conseil régional qu'on est prêt à confier à la société mère. La société mère n'aura donc pas la mission de promouvoir l'aide à l'emploi. C'est ça qu'il faut comprendre. Bon.

M. Bourbeau: M. le Président, je pense qu'il faut lire l'article 16 en conjonction avec l'article 17, et peut-être que la députée de Maisonneuve va trouver réponse à ses préoccupations en lisant l'article 17.

Mme Harel: Oui, justement.

M. Bourbeau: Surtout dans le deuxième alinéa.

Mme Harel: On reviendra sur l'article 17, parce que c'est à l'article 17 que, finalement, on peut débattre de l'exclusion des programmes d'employabilité et d'intégration au marché du travail. À l'article 16... Bon. Moi, je veux juste demander au ministre, je vais lui dire bien simplement, là. On avait idée de proposer un amendement pour ajouter «emploi» de manière à ce que la mission de la Société soit celle de promouvoir et de soutenir le développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi.

M. Bourbeau: On avait saisi ça lors de la consultation publique...

Mme Harel: Oui.

M. Bourbeau: ...où la députée s'était prononcée à maintes reprises là-dessus. Alors, nous sommes allés...

Mme Harel: Au devant.

M. Bourbeau: ...au devant des désirs de la députée.

Mme Harel: Mais il me semble...

M. Bourbeau: Je ne nierai pas avoir été influencé.

Mme Harel: Je ne sais pas si c'est l'heure, mais il me semble que c'est dit de manière assez ampoulée. Pourquoi? «et de favoriser l'équilibre entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre sur le marché du travail et de l'emploi au Québec.» Il y aurait un marché du travail différent de l'emploi. Pourquoi deux mots: sur le marché du travail et de l'emploi? Il y aurait un marché de l'emploi qui serait différent du marché du travail?

M. Bourbeau: Bien, si c'était parfaitement équilibré, ce serait le plein emploi, évidemment.

Mme Harel: Bon. Allons-y pour... Laissons de côté «favoriser l'équilibre entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre». Prenons «sur le marché du travail et de l'emploi». Là, il y a comme quelque chose de redondant.

M. Bourbeau: M. le Président, je pense que la meilleure personne pour expliquer ces nuances-là, c'est M. Yvon Boudreau, qui est le directeur du service des politiques et programmes de main-d'oeuvre au ministère. Peut-être que la députée de Maisonneuve le connaît.

Mme Harel: M. Nolet...

Le Président (M. Philibert): M. Boudreau.

M. Bourbeau: M. Yvon Boudreau. Pardon?

Mme Harel: M. Nolet n'est plus à la Direction des politiques?

Une voix: II est à la sécurité du revenu.

M. Bourbeau: II est à la sécurité du revenu, oui.

Le Président (M. Philibert) M. Boudreau.

M. Boudreau (Yvon): Merci. Bon, c'est parce que les deux expressions...

M. Bourbeau: ...le Journal des débats aussi.

M. Boudreau: Les deux expressions ne recherchent pas nécessairement...

Mme Harel: Ça pourrait être retenu contre lui.

M. Boudreau: Alors, les deux expressions sont couramment utilisées dans la littérature qui concerne le marché du travail et les politiques de travail et de main-d'oeuvre. On parle du marché du travail, qui représente l'ensemble de la réalité du marché du travail, et on parle aussi du marché de l'emploi. Si on veut peut-être risquer une distinction entre les deux, il y a peut-être des activités de travail ou d'emploi qui ne seraient pas considérées comme des activités propres du marché du travail, soit parce qu'elles sont à temps partiel ou pour différentes raisons; en incluant dans le projet de loi les deux mentions, on pourrait a priori penser que c'est redondant, mais on est sûr que ça couvre l'ensemble de la réalité du marché du travail et de l'emploi sous toutes ses formes.

On estime que c'est plus prudent, si on veut couvrir le champ le plus large possible, d'utiliser les deux expressions, mais il y a une nuance qui est subtile.

Mme Harel: est-ce que c'est possible de nous faire la distinction entre ce que serait le marché du travail et ce que serait le marché de l'emploi?

M. Boudreau: Ce que je dis, c'est que le marché de l'emploi couvre vraisemblablement une réalité plus large.

Mme Harel: Laquelle?

M. Boudreau: Celle des emplois...

Mme Harel: Ce n'est pas juste suffisant de le dire. Encore faut-il le démontrer.

M. Boudreau: O.K. Celle notamment des emplois qui ne sont pas considérés... comme des emplois plus typiques, des emplois qui sont plus marginaux, qui ne sont pas des emplois à temps complet, parfaitement rémunérés. On peut penser, par exemple... ou à des activités comme des stages. Donc, on élargit à une notion plus large que celle d'un emploi rémunéré à temps complet ou à temps...

Mme Harel: Vous voulez dire que le marché de l'emploi, ça pourrait faire référence à des stages.

M. Boudreau: Pourrait couvrir des activités plus larges que celles qu'on considère comme étant plus usuelles sur le marché du travail. C'est une réalité un peu plus large.

Mme Harel: L'expression «marché de l'emploi» est plus large que l'expression «marché du travail».

M. Boudreau: À notre avis, oui.

Mme Harel: Pourquoi ne pas choisir l'expression plus large?

M. Boudreau: C'est parce qu'on retrouve les deux expressions dans la littérature et on ne voudrait pas que l'article soit interprété de façon restrictive. On dit: On voudrait couvrir l'éventail des deux réalités que sont le marché du travail

et le marché de l'emploi, et, comme on veut que le mandat de la Société soit le plus large possible, on fait référence aux deux réalités.

Mme Harel: Merci. Alors, abordons l'autre aspect qui est celui de favoriser l'équilibre entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre. Qu'est-ce que ce langage élégant veut dire?

M. Bourbeau: Mais je pense que c'est une expression qu'on emploie déjà, je crois, dans... Ce n'est pas déjà dans la loi sur les CFP, comme vous dites? Cela avise de tenter, dans la mesure du possible, de déterminer quels sont, dans chaque région du Québec, ou à travers le Québec, •3S besoins en main-d'oeuvre et de faire en sorte que la main-d'oeuvre québécoise puisse atteindre un degré de compétence tel qu'elle puisse remplir ces fonctions-là. L'adéquation entre l'offre et la demande: que tous les emplois qui sont vacants puissent être remplis et que toute la main-d'oeuvre qui est non employée puisse l'être. (23 h 30)

Mme Harel: D'accord. Mais, à ce moment-là, ça veut donc dire que si la demande de main-d'oeuvre, si la demande de... parce que je comprends que favoriser l'équilibre entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre, c'est simplement combler les pénuries d'emploi. C'est ça que je comprends.

M. Bourbeau: Et plus que ça, combler les pénuries d'emploi, oui. C'est-à-dire, vu du point de vue des entreprises, c'est faire en sorte que les emplois qui ne sont pas comblés puissent l'être par une main-d'oeuvre qui serait assez qualifiée pour le faire et, vu du côté des travailleurs, faire en sorte qu'on puisse générer des emplois nouveaux qui leur permettent de s'intégrer au marché du travail.

Mme Harel: C'est-à-dire que vous lui donnez une mission de création d'emplois ou de développement de l'emploi?

M. Bourbeau: Oui, c'est une des missions de la Société. D'ailleurs, vous avez tantôt cité l'article 44.

Mme Harel: Si vous aviez été au Conseil des ministres en proposant comme amendement, plutôt que celui que vous présentez, celui de soutenir le développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi, pensez-vous que ça aurait été accepté?

M. Bourbeau: C'est-à-dire que je ne l'aurais pas proposé, parce que l'objet premier de la Société, c'est vraiment le développement de la main-d'oeuvre. C'est une Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Ce n'est pas une société de développement de l'emploi comme tel. C'est un peu accessoire que la Société va, dans des cas particuliers, stimuler l'emploi dans des régions, surtout les régions les plus défavorisées. L'article 44 le dit bien: Un conseil régional a notamment pour mission... Vous remarquerez que c'est uniquement au paragraphe 6° qu'on en vient à parler de «favoriser la mise en oeuvre de programmes d'aide à l'emploi».

Si on en faisait une préoccupation majeure au même titre que le développement de la main-d'oeuvre, on risquerait de se retrouver avec une Société qui, finalement, passerait une partie importante de son temps à financer les programmes occupationnels et non pas de développement de la main-d'oeuvre.

Mme Harel: Est-ce que le ministre accepterait qu'on suspende cet article pour que je puisse simplement consulter sur l'expression? Il est possible qu'elle convienne, mais, comme l'amendement est nouveau, j'aimerais juste consulter sur cet amendement.

Le Président (M. Philibert): Alors, nous avions...

M. Bourbeau: ...sauf que je voudrais qu'on réalise bien que notre objectif n'est pas de ne pas faire la promotion de l'emploi, mais nous ne pensons pas que ce soit une Société dont l'objectif majeur de faire un développement, une création d'emplois.

Le Président (m. philibert): nous avions reçu l'amendement. alors, on suspend l'amendement à l'article 16, de même que l'article 16. j'appelle l'article 17.

M. Bourbeau: Cette disposition, M. le Président, prévoit que la Société élaborera, mettra en oeuvre et gérera des programmes de développement de la main-d'oeuvre qui seront le principal instrument de réalisation de sa mission. Elle précise également les différents domaines d'intervention dans lesquels la Société accomplira sa mission.

Mme Harel: Alors, M. le Président, cet article-là, vous savez, a donné lieu à de très, très, très nombreuses représentations. Le ministre a dû recevoir comme moi des lettres émanant d'organismes les plus divers qui lui demandent d'amender le projet de loi pour que la Société puisse mettre en oeuvre et gérer, en collaboration avec les sociétés régionales, l'ensemble des programmes se situant dans le cadre des politiques de main-d'oeuvre, étant entendu que cette responsabilité s'étend également aux programmes d'employabilité et d'intégration au marché du travail.

Je ne sais pas, moi, je vais vous proposer quelque chose. C'est un beau débat, M. le Président. Quand même, le ministre le sait. C'est quand même un débat important. Ça met en

cause... Bien, c'est un choix. C'est un choix qui s'explique, mais c'est un choix par lequel il y a 225 000 personnes qui vont être écartées, en tout cas, au départ, de l'application des programmes de la Société. On peut toujours croire qu'il pourrait y avoir des ententes. La Société pourra faire des contrats, éventuellement, avec les centres Travail-Québec ou, en fait, l'inverse plutôt. Mais est-ce que le ministre ne préférerait pas qu'on entreprenne cette question-là à tête reposée, au moment où nous serons frais et dispos?

M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas d'objection. On peut le faire. J'aurais peut-être aimé faire valoir ma position à la députée. Elle aurait pu...

Mme Harel: Ah, bien oui!

M. Bourbeau: Elle aurait pu y réfléchir...

Mme Harel: Moi, je suis assez en forme pour vous écouter, mais pas assez pour parler.

M. Bourbeau: Elle aurait pu y réfléchir pendant le week-end. Peut-être que je pourrais même lui donner copie de mon texte; je vais lui donner, M. le Président. Elle pourrait peut-être le relire.

Mme Harel: Ah! J'aimerais entendre vos arguments parce que c'a quand même été un point fort de tous les travaux de la commission.

M. Bourbeau: Disons, M. le Président, qu'effectivement plusieurs organismes qui ont témoigné devant la commission parlementaire, lors de la consultation publique sur l'énoncé de politique, qui est le projet de loi, ont proposé ou réclamé que cette Société prenne également en charge les mesures de développement de l'em-ployabilité. Je vous rappelle que l'énoncé de politique prend plutôt position en faveur du maintien de cette responsabilité dans les centres Travail-Québec.

Nous proposons que le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle conclue des ententes de services avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre garantissant l'accessibilité des clients de la sécurité du revenu aux programmes de main-d'oeuvre administrés par les sociétés régionales.

A priori, le regoupement, au sein de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, de toutes les activités relatives à la main-d'oeuvre, quel que soit le statut des personnes concernées, apparaît logique, séduisant même. Peut-être que la députée s'est laissé séduire. Après tout, les prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail font partie de la main-d'oeuvre active. Ils doivent avoir accès aux mêmes services que les autres personnes qui tentent d'accéder au marché du travail ou de le reconquérir.

De plus, le gouvernement milite en faveur d'un seul réseau de main-d'oeuvre, ce qui constitue son argumentation de base pour rapatrier au Québec l'ensemble des budgets fédéraux dans ce domaine. En conservant les activités de développement de l'employabilité dans les centres Travail-Québec, le ministère ne maintient-il pas deux réseaux de main-d'oeuvre? Mais l'apparence de simplicité, ce n'est pas nécessairement la simplicité. Il faut également s'interroger sur la façon la plus sûre d'offrir les meilleurs services aux clients de la sécurité du revenu.

Il y a au moins cinq bonnes raisons pour lesquelles la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre ne devrait pas se voir confier la responsabilité des programmes de développement de l'employabilité à l'intention des prestataires de la sécurité du revenu. En premier lieu, le fondement même de la création de cette Société tient au partenariat entre les associations patronales, les syndicats et le gouvernement, partenariat qui doit s'exercer dans l'action. La Société aura déjà relevé un défi considérable si elle réussit à faire fonctionner ce partenariat de manière efficace. Or, qui dit partenariat dit mise en commun des intérêts des parties en présence. Nous n'en faisons pas un mystère. Même si, au cours des dernières années, les employeurs et les syndicats ont développé une sensibilité très vive à l'égard de la lutte au sous-emploi et à la pauvreté, leurs intérêts premiers se situent tout de même du côté des personnes en emploi et de celles qui peuvent accéder assez rapidement au marché du travail.

Vous savez, M. le Président, qu'une partie non négligeable de la clientèle de la sécurité du revenu n'a malheureusement pas atteint ce degré de développement préparatoire à l'emploi. Si nous demandons à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre de concevoir des programmes et d'établir des priorités, elle aura naturellement tendance à se préoccuper, en premier lieu, des besoins d'adaptation de la main-d'oeuvre en emploi et des prestataires d'assurance-chômage. Je ne crois pas faire injure à la conscience sociale de nos partenaires patronaux et syndicaux en soutenant qu'à leurs yeux, les budgets de développement de la main-d'oeuvre, à plus forte raison s'ils proviennent du compte d'assurance-chômage, doivent prioritairement servir à accroître la capacité d'adaptation de la main-d'?uvre active à des marchés de travail changeants et instables.

Dans le contexte d'une société d'État qui bénéficierait d'une marge de manoeuvre raisonnable, les besoins spécifiques des prestataires de la sécurité du revenu risqueraient d'être placés dans un deuxième ordre de priorités. Bien sûr, le gouvernement peut faire en sorte, j'allais dire

peut obliger la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre à accorder le même traitement aux clients de la sécurité du revenu qu'aux autres personnes qui réclament l'accès aux programmes de développement de la main-d'oeuvre. Il peut la contraindre par des normes, par un encadrement réglementaire, par des balises soigneusement délimitées dans son champ d'action et par une panoplie de moyens de contrôle. C'est précisément là, M. le Président, la deuxième raison qui milite en faveur du maintien des mesures d'employabilité dans les CTQ. (23 h 40)

Nous voulons que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre ait les coudées franches, qu'elle ne soit pas enferrée dans un encadrement qui étouffe son pouvoir d'initiative. En lui confiant la responsabilité d'une partie du régime de la sécurité du revenu, le gouvernement n'aurait pas le choix de délimiter de façon très précise et, par conséquent, très contraignantes les activités de la Société à l'endroit des prestataires de la sécurité du revenu. N'oublions pas qu'il s'agit d'un régime de dernier recours. Le gouvernement ne peut pas déléguer ce genre de responsabilités sans les encadrer soigneusement. Si nous avions retenu cette option, nous aurions accrédité les comparaisons avec la Commission de la santé et de la sécurité du travail, la CSST, qui, compte tenu des mandats qui lui sont confiés, est astreinte à un encadrement réglementaire et normatif très important.

Troisièmement, nous devons aussi éviter de faire faire certains détours inutiles aux prestataires de la sécurité du revenu. Ces personnes continueront de toute façon de recevoir du réseau Travail-Québec l'aide financière dont elles ont besoin pour subvenir à leurs besoins essentiels. Une fois qu'on leur a octroyé cette assistance, le ministère étudie avec ces personnes l'aide et le soutien qui semblent indiqués pour faciliter leur intégration éventuelle au marché du travail. Des dizaines de milliers de clients de la sécurité du revenu sont actuellement référés à des activités de rattrapage scolaire ou d'alphabétisation. Plus de 60 % des personnes qui participent à des mesures de développement de l'employabilité sont engagées dans des activités de rattrapage scolaire.

Évidemment, les centres Travail-Québec les réfèrent directement aux institutions scolaires. Si la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre prenait charge du développement de l'employabilité, les clients devraient vraisemblablement se plier à une démarche administrative additionnelle. On doit réaliser, je pense, que le réseau des CTQ et celui constitue des sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre, loin de représenter des structures parallèles, forment au contraire des organisations complémentaires pour les prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail.

Quatrième raison, c'est qu'il faut donner une chance à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre de réussir sa mission première, celle du partenariat et de la gestion efficace et cohérente des programmes et services de main-d'?uvre. Si nous voulons confier à cette société d'État tous les problèmes d'intégration sociale et économique, nous allons diluer son dynamisme propre dans la dispersion et les lourdeurs bureaucratiques dont sont fatalement tributaires les organismes aux multiples missions. De grâce, gardons-nous d'une sorte d'excès d'enthousiasme qui nous conduirait à étouffer la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre avant qu'elle ne voie le jour.

Enfin, nous avons acquis la conviction que le meilleur moyen de garantir l'accès des prestataires de la sécurité du revenu aux programmes et services de main-d'oeuvre consiste à négocier un contrat à cette fin avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Si nous payons la Société pour qu'elle accepte 20 000, 30 000 ou 50 000 clients de la sécurité du revenu, nous pouvons être assurés qu'elle les accueillera dans ses programmes et activités. C'est la meilleure garantie que nous pouvons offrir aux prestataires de la sécurité du revenu qu'ils ne seront pas laissés pour compte et, loin d'être marginalisés comme d'aucuns l'appréhendent, ces prestataires aptes au travail prendront part de plein droit aux programmes de main-d'?uvre et de formation professionnelle.

J'insiste pour dire que cela se fait déjà. Des ententes de services existent entre les CTQ et les commissions de formation professionnelle, notamment pour la préparation des plans de formation des stages en milieu de travail. J'ajoute aussi que, dans les autres pays industrialisés, il y a toujours, du moins dans ceux que nous avons étudiés, un régime d'assurance-chômage et un régime d'assistance distinct. Ailleurs, on ne fusionne pas ces deux régimes. Pour ma part, je n'ai pas entendu en Suède, en Allemagne ou en France des remarques à l'effet que les clients du régime d'assistance se sentiraient marginalisés ou méprisés du fait de la coexistence d'un régime d'assurance-chômage parallèle. Il y a des limites aux innovations qu'on voudrait nous voir adopter.

J'ai tenu à apporter ces précisions avant la fin de la présente séance parce qu'il m'apparaît important de dissiper une certaine ambiguïté relative à la fusion des programmes de main-d'?uvre et de développement de l'employabilité. On peut d'ailleurs cultiver cette ambiguïté avec autant de succès qu'on présente cette hypothétique fusion sous l'angle de la simplicité administrative et du respect des clients de la sécurité du revenu. La vérité nous apparaît tout autre. Je vous remercie, M. le Président.

Mme Harel: M. le Président, est-ce que le ministre accepterait de déposer son texte? Je sais bien que ce sera publié dans les galées, mais

ça prend des semaines, lorsqu'on est en fin de session. Si je voulais me retrouver le moindrement... Prenez le temps de le relire, d'abord. L'important, c'est que je voie... Peut-être une seule question. Le fait que le RAPC soit le dispositif qui finance une partie, 50 % des prestations d'aide sociale, est-ce que ça n'a pas une incidence?

M. Bourbeau: Disons, M. le Président, que, comme nous n'avons pas anticipé de transférer l'employabHité à la Société de développement de la main-d'?uvre, nous n'avons pas vérifié avec le gouvernement fédéral. Je ne pourrai pas répondre avec certitude à la question de la députée. On pourrait toujours vérifier, mais c'est une question hypothétique. Donc, on ne l'a pas vérifiée.

Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Est-ce qu'il y a consentement pour suspendre?

M. Bourbeau: Pour suspendre l'article 17?

Mme Harel: Non, pour suspendre nos travaux.

M. Bourbeau: Dès maintenant? Si tôt? Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Je voulais juste dire au ministre... On n'est pas convoqués pour lundi matin?

Le Président (M. Philibert): Non. On est convoqués pour après la période de questions.

M. Bourbeau: On n'est pas convoqués du tout.

Le Président (M. Philibert): On n'est pas convoqués du tout?

Mme Harel: Parce que j'ai été convoquée pour un autre projet de loi, lundi matin.

M. Bourbeau: II n'y a pas eu de convocation pour la commission. Il faut attendre les ordres de l'Assemblée nationale.

Mme Harel: Ça indique un ordre de priorités du gouvernement.

M. Bourbeau: On va travailler lundi.

Mme Harel: M. le Président, je vous remercie. Est-ce qu'il y a consentement?

Le Président (M. Philibert): II y a consentement. Alors, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 48)

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