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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mercredi 17 juin 1992 - Vol. 32 N° 21

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 408, Loi sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre


Journal des débats

 

(Onze heures cinquante-huit minutes)

La Présidente (Mme Marois): La séance est ouverte. Je voudrais rappeler le mandat de la commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 408, Loi sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Je vais d'abord demander à la secrétaire s'il y a des remplacements. Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière) sera remplacée par Mme Blackburn (Chicoutimi) et Mme Juneau (Johnson) est remplacée...

La Présidente (Mme Marois): Qu'est-ce que c'est...

La Secrétaire: ...par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve) pour la durée du mandat.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Je n'ai rien entendu. Merci. Non, j'ai entendu ce que vous me présentiez, Mme la secrétaire, mais je n'ai pas entendu d'autres commentaires. Ça va très bien aller. Nous allons sûrement aller en profondeur, au coeur de chacun des articles de la loi.

Je pense qu'on en était à l'article 25, si vous le permettez. Je ne sais pas, est-ce que l'amendement avait déjà été déposé? Non. Alors, oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mission et pouvoirs (suite)

Mme Harel: Mme la Présidente, je cherchais une technique d'amendement qui nous permette de le rédiger de façon telle qu'il veuille bien dire ce que nous souhaitions qu'il veuille dire. Alors, ça se lirait comme suit: Remplacer le premier paragraphe de l'article 25, tel qu'amendé, par le suivant: «La Société peut, par règlement approuvé par le gouvernement, déterminer les frais exigibles de toute personne pour l'utilisation de certains services qu'elle offre, sauf les services de formation.»

Et le deuxième paragraphe se lit tel quel, Mme la Présidente. (12 heures)

La Présidente (Mme Marois): Alors, ça deviendrait... Si je comprends bien, on a eu un amendement qui a été présenté, et ce que la députée de Hochelaga-Maisonneuve nous présente, c'est un sous-amendement.

Mme Harel: C'est un sous-amendement. C'est juste.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça? Mme Harel: Excusez-moi, oui.

La Présidente (Mme Marois): Tout à fait, je retrouve mes vieux réflexes de présidence. nous devons donc procéder, si les membres veulent bien être attentifs, par le sous-amendement; par la suite, à l'amendement et, évidemment, par l'article principal.

Oui, Mme la députée.

Mme Harel: Mme la Présidente, en fait, le sous-amendement consiste à ajouter les mots «sauf les services de formation» à la fin du premier paragraphe. Mais nous l'avons libellé de façon telle qu'il remplace le premier paragraphe, tel qu'amendé.

M. Bourbeau: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Le sous-amendement et remplacement du premier paragraphe. Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Ce genre de sous-amendement ou d'amendement est d'une nature telle que, même si j'étais personnellement d'accord pour l'accepter, je ne pourrais pas le faire sans obtenir, comme vous le savez, l'autorisation du Conseil des ministres, parce que c'est un amendement de fond qui implique même un amendement de politiques gouvernementales. Alors, ce que je proposerais, c'est qu'on suspende le sous-amendement, l'amendement et l'article au complet...

Mme Harel: Jusqu'à demain.

M. Bourbeau: ...enfin, jusqu'à demain ou...

Mme Harel: Demain matin, pour la bonne raison...

M. Bourbeau: ...la semaine prochaine.

Mme Harel: ...que je comprends le ministre de le suspendre.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

M. Bourbeau: Et, à ce...

Mme Harel: Ça me fait plaisir que le ministre le propose.

M. Bourbeau: Oui, mais je vous ai toujours

dit la même chose.

Mme Harel: Pour moi, il y a une bonne nouvelle qui s'en vient, Mme la Présidente, parce que...

La Présidente (Mme Marois): Je vous entends.

Mme Harel: ...aujourd'hui même, je crois que, ce matin, au COMPACS, et cet après-midi, au Conseil des ministres, il y aura...

La Présidente (Mme Marois): Nous sommes mercredi, effectivement.

Mme Harel: ...une proposition convenue entre le ministre de l'Éducation et le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Si le ministre suggère la suspension de l'article 25, c'est, est-ce que je peux assez le souhaiter, parce que l'entente intervenue est à l'effet qu'il n'y ait pas de tarification, qu'il n'y ait pas de frais de scolarité? Peut-être des frais d'inscription de cours ou autres, mais pas de frais de scolarité comme tels. En fait, est-ce que je joue à Perrette et le pot au lait, que je vends la peau de l'ours avant de l'avoir tué? J'espère que non. On verra demain quand on reviendra avec l'article 25 suspendu.

M. Bourbeau: La députée de Hochelaga-Maisonneuve semble extrêmement bien informée de ce qui se passe.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Je vois que Claude Morin est toujours au travail, Mme la Présidente.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que vous croyez qu'il est payé?

M. Bourbeau: Ça!

La Présidente (Mme Marois): Excusez-moi! Passons. Non, ce que je voudrais...

Mme Harel: Mais dites-vous bien...

La Présidente (Mme Marois): À ce moment-ci, cependant, est-ce qu'il est nécessaire, Mme la députée, que vous fassiez valoir votre point de vue d'une façon un petit peu plus élaborée ou ça va, vous en avez convenu déjà?

Mme Harel: bien, je comprends que, en proposant la suspension du sous-amendement, le ministre convient qu'il est admissible, n'est-ce pas?

La Présidente (Mme Marois): C'est ce que je crois comprendre. Je tire cela aussi comme conclusion. On est d'accord, M. le ministre?

M. Bourbeau: Oui.

La Présidente (Mme Marois): que, d'abord, le sous-amendement est admissible et qu'il le prend, dans le fond, en considération, et qu'il consultera les concernés au gouvernement.

Mme Harel: Je dois vous dire... C'est d'ailleurs notre collègue, le député d'Abitibi-Ouest, porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation, qui m'avait suggéré le libellé d'un tel sous-amendement.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

M. Bourbeau: Bien, là, il vient de perdre de la valeur, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Mais il faut que vous constatiez que la députée de Hochela-ga-Maisonneuve l'avait quand même pris à son compte. Alors, j'imagine que ça lui redonne la valeur nécessaire à vos yeux.

Mme Harel: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Donc, c'est des circonstances atténuantes.

Mme Harel: Ceci dit, le ministre aura bien compris qu'il ne s'agit pas, donc, d'interdire toute tarification.

M. Bourbeau: J'ai très bien compris.

La Présidente (Mme Marois): Bon. Cela étant dit, évidemment, si nous suspendons le sous-amendement, nous devons suspendre l'ensemble de l'article.

M. Bourbeau: C'est ce que j'ai proposé, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): d'accord. alors, nous retenons votre proposition, m. le ministre, et on va passer à l'article suivant, soit l'article 26.

M. Bourbeau: Cet article prévoit que la Société pourra également être financée en partie grâce à la conclusion éventuelle d'ententes de services rémunérés, y compris avec un ministère ou avec un autre organisme public.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que vous avez d'autres commentaires ou explications à donner, M. le ministre?

M. Bourbeau: Bien, oui. Disons que la

Société pourrait se voir confier, par exemple, par entente avec le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, la gestion de certaines mesures de développement de l'employabilité destinées aux prestataires de la sécurité du revenu. Elle pourrait aussi fournir des services spécifiques à des clientèles particulières, par exemple, des services d'orientation professionnelle aux clients de la Commission de la santé et de la sécurité du travail ou de la Société de l'assurance automobile du Québec, après entente, bien sûr, avec ces organismes.

La Présidente (Mme Marois): Qu'est-ce que vous entendez...

Mme Harel: Quel est le dernier exemple que vous nous avez donné?

La Présidente (Mme Marois): La Société...

M. Bourbeau: J'ai dit que la Société pourrait fournir des services spécifiques à des clientèles particulières.

Mme Harel: Oui.

M. Bourbeau: Exemple: des services d'orientation professionnelle aux clients de la CSST ou de la Société de l'assurance automobile du Québec, après entente avec ces organismes-là.

La Présidente (Mme Marois): quand vous dites «rémunérés», est-ce que ce serait, dans tous les cas, des ententes de services rémunérés? on dit «peut».

M. Bourbeau: Écoutez, si la Société juge opportun de rendre les services non rémunérés, ça pourrait exister. Mais, à ce moment-là, je présume que ça ne demande pas beaucoup d'autorisations; il n'y a pas de contrat, il faut être... Mais, si c'est rémunéré, ça prend un contrat, bien sûr, pour lier les parties, là. Si ce n'est pas rémunéré, bien, ça serait à titre gracieux. Adopté?

Mme Harel: Oui, mais je ne pense pas que ce soit pensé à ce point-là. Non, M. le Président, juste une seconde...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: Mme la Présidente, excusez-moi!

La Présidente (Mme Marois): Oui. Ça va. Non, c'est un petit ajustement. À peine quelques minutes, et on s'y fera.

Mme Harel: Je comprends que vous aurez un amendement à introduire à 26.1...

M. Bourbeau: Exact.

Mme Harel: ...qui porte sur autre chose. Quelle distinction vous faites entre 26.1 et 26?

M. Bourbeau: C'est avec un gouvernement étranger.

Une voix: À l'extérieur du Québec.

M. Bourbeau: À l'extérieur du Québec. Pas nécessairement étranger, mais à l'extérieur du Québec.

Mme Harel: Ça peut être, en fait, le gouvernement canadien.

M. Bourbeau: Ça pourrait.

La Présidente (Mme Marois): Ça pourrait.

Mme Harel: On reviendra à 26.1. Mais restons à 26, puisqu'à 26 il s'agit d'ententes de services rémunérés, notamment avec un ministère ou un organisme public. Doit-on comprendre qu'à 26 on consacre le principe de l'exclusion des bénéficiaires d'aide sociale aptes au travail désireux d'améliorer leur sort en obtenant les formations professionnelles dispensées par la Société, et qui en seront finalement exclus, à moins que les centres Travail-Québec ou à moins que le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu n'aient signé une entente avec la Société? C'est ça qu'il faut comprendre?

M. Bourbeau: Bon. La députée présente ça d'une drôle...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...de façon. Je lui ai expliqué, vendredi soir, en long, en large et de tous les côtés la raison pour laquelle nous jugions préférable de ne pas confier à la Société de développement de la main-d'oeuvre la responsabilité des programmes d'employabilité des assistés sociaux. Bien entendu, ces programmes-là devront continuer, les programmes d'employabilité, et la Société pourra signer avec le ministère des ententes relatives à la formation de cette main-d'oeuvre-là. Il ne fait pas l'ombre d'un doute que rien n'empêche qu'une telle entente soit signée, et c'est bien notre intention.

Mme Harel: C'est-à-dire que le ministre va convenir avec moi...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...que c'est une chose de ne pas

confier à la Société les programmes d'employabi-lité, mais que c'en est une autre d'exclure les bénéficiaires des programmes de la Société. En d'autres termes, les raisons administratives pour lesquelles il ne souhaite pas confier les mesures d'employabilité à la Société peuvent s'évaluer en tant que telles, mais la question qui est posée, c'est la suivante: Pourquoi exclure les personnes qui sont sans emploi, qui, pour une bonne partie d'entre elles, ont été victimes de fermetures d'entreprises, qui ont épuisé leurs prestations d'assurance-chômage qui les auraient rendus admissibles aux programmes de la Société, mais qui, une fois leur admissibilité à l'assurance-chômage terminée, se trouvent exclues des programmes de la Société, à moins que le ministère n'ait signé des ententes avec la Société? (12 h 10)

Alors, c'est comme un facteur d'exclusion, le fait d'avoir terminé ses prestations de chômage, et c'est finalement ça qui est pervers. C'est comme si l'admissibilité à la formation dépendait de la source de financement dont vous relevez. Si vous relevez de l'assurance-chômage, vous avez droit aux programmes de la Société. Mais, si vous ne relevez plus de l'assurance-chômage, parce que c'est terminé, vous êtes exclu des programmes de la Société, vous êtes exclu, à moins que le ministère n'ait signé une entente. Et, là, j'aimerais connaître l'intention du ministre à l'égard de ces ententes qu'il veut signer.

Présentement, il y a, dans les ententes Canada-Québec, que vous vous rappellerez, Mme la députée de Taillon, des quotas dans les différents programmes.

La Présidente (Mme Marois): Oui, tout à fait, parce qu'il y a des plafonds au budget, et il y a donc des quotas. Tout à fait.

Mme Harel: II y a, dans toutes ces ententes, ces accords Canada-Québec, des quotas pour les bénéficiaires d'aide sociale. Vous savez dans quel imbroglio ça entraîne les réseaux d'enseignement qui ont toutes les difficultés du monde à constituer des groupes, surtout en région, parce qu'il faut qu'ils respectent des critères d'admission d'une complexité...

La Présidente (Mme Marois): C'est ça.

Mme Harel: ...telle que, souvent, ça empêche tout simplement le cours de se donner. l'admissibilité est fonction de la disponibilité de la source de financement.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça. Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Je ne vois vraiment pas, là, pourquoi on voit un problème ici. Dans le système actuel, quand il y a un assisté, quand une personne qui est assistée sociale veut prendre des cours de formation professionnelle, elle a tout le loisir de le faire. On a des crédits pour le faire, on lui facilite l'entrée dans les programmes. Bon. Souvent, les programmes sont financés par le fédéral, mais c'est des programmes de formation professionnelle.

Si on réfère au Québec la totalité du champ d'activité des mesures actives de main-d'oeuvre, à ce moment-là, c'est des programmes provinciaux qu'il s'agira, et il y aura la même relation entre le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et la Société de développement de la main-d'oeuvre qu'il peut y avoir présentement entre notre ministère et les programmes de main-d'oeuvre du gouvernement fédéral. Il n'y a rien qui empêche qu'on continue de faire la même chose qu'avant. Je ne vois pas pourquoi, là. Ce n'est pas parce que c'est le Québec qui va avoir récupéré la totalité de la juridiction que ça va être plus compliqué qu'avant. Ça devrait être bien moins compliqué. C'est le but, d'ailleurs, de l'exercice.

Mme Harel: Mais, Mme la Présidente-La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...que le ministre veuille faire la même chose, c'est ça qui est, évidemment, très inquiétant, parce que ce que le ministre nous dit, c'est qu'il va reconduire ce qui existe présentement ou à peu de chose près.

M. Bourbeau: Non, non. Ça, ce n'est pas exact. La députée de Hochelaga-Maisonneuve sait fort bien...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...je lui ai dit à plusieurs reprises...

Mme Harel: II veut faire quoi de plus? M. Bourbeau: Vous savez fort bien...

Mme Harel: Par rapport à cette clientèle-là. Je ne parle pas en général.

M. Bourbeau: Vous savez fort bien que ça va être moins compliqué qu'avant. Au lieu d'avoir 25 programmes, on va en avoir 4. Je vous avais expliqué un par un quels seraient les programmes. Tout ça est fait pour simplifier et non pas pour compliquer. Quand je dis que c'est la même chose qu'avant, je veux dire que ça va être aussi possible, sinon plus possible qu'avant, mais ça va être plus simple qu'avant, puis ça va coûter moins cher.

Mme Harel: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...en fonction de la clientèle des bénéficiaires d'aide sociale, j'aimerais que le ministre m'explique en quoi ça va être...

La Présidente (Mme Marois): Plus efficace.

Mme Harel: ...plus efficace, plus facile et quels sont les objectifs qu'il poursuit. Combien de bénéficiaires... vous le savez peut-être, Mme la Présidente... C'est vraiment incroyable de regarder, depuis les quatre dernières années, la participation aux différents programmes de formation professionnelle, dépendamment si le bénéficiaire vient de l'assurance-chômage ou de l'aide sociale. C'est incroyable, Mme la Présidente. Imaginez que, pour le total de tous les programmes dits de formation professionnelle - je ne parle pas des programmes réguliers de rattrapage scolaire - mais pour l'ensemble des programmes de formation professionnelle, ce n'est pas 4000 bénéficiaires qui ont pu en profiter.

La Présidente (Mme Marois): Sur combien de... Sur le bassin de combien?

Mme Harel: Sur un total... Évidemment, quand vous pensez qu'il y a 80 000 nouveaux ménages en un an, quand vous pensez que, juste à Montréal, 83 % des ménages sont aptes et disponibles à travailler, que, pour l'ensemble du Québec, c'est 78 %... Évidemment, ce qui est inquiétant, c'est que l'individu qui a épuisé son chômage, qui est obligé de recourir à l'aide sociale, qui a fini son secondaire - il y en a plus qu'on pense, vous savez; il y a presque la moitié qui ne l'ont pas fini. Mais ça veut dire qu'il y en a la moitié qui l'ont fini. Le seul programme qui, finalement, est le moindrement un peu efficace ne s'adresse qu'aux chefs de famille monoparentale pour leur permettre de compléter trois sessions au collégial.

La Présidente (Mme Marois): Le retour aux études des chefs de famille monoparentale.

Mme Harel: Et ça ne va chercher, chaque année, que 700 à 800 personnes. Il n'y en a pas eu plus en nombre absolu qu'il y en avait, il y a cinq, six, sept ans, malgré l'augmentation quand même à l'aide sociale.

Donc, je reviens à la formation professionnelle...

M. Bourbeau: C'est un programme ouvert. Donc, tous ceux qui veulent y aller peuvent y aller. Ce n'est absolument pas fermé.

Mme Harel: C'est un programme ouvert? M. Bourbeau: Bien oui. Mme Harel: Lequel?

La Présidente (Mme Marois): II n'y a pas de plafond?

Mme Harel: Le rattrapage scolaire ou...

M. Bourbeau: Non, non. Le retour aux études postsecondaires pour les chefs de famille monoparentale. On ne refuse pas les gens qui peuvent y aller, qui veulent y aller.

Mme Harel: Vous savez très bien, M. le ministre, que ce n'est pas parce qu'on veut qu'on peut aller, puisque le plan d'intervention n'est plus décidé par le bénéficiaire. Le plan d'intervention, dans la loi 37 que vous avez fait adopter, est décidé par l'agent d'employabilité. C'est l'agent qui décide, en fonction des ouvertures, s'il le propose ou pas à quelqu'un. Ce n'est pas ouvert à la demande, le retour aux études postsecondaires. Il faut que ce soit proposé par l'agent.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que je dois comprendre que, si la personne demande carrément, l'agent n'est pas nécessairement obligé?

Mme Harel: II n'est pas... La loi a changé. C'est l'agent qui détermine.

La Présidente (Mme Marois): II peut déterminer... Ah, bon! Il peut déterminer un autre plan que celui qui est demandé.

M. Bourbeau: Ça ne vous dérange pas d'avoir des conversations ensemble?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, est-ce que vous avez des commentaires à ajouter à...

M. Bourbeau: Mme la Présidente, moi, je veux bien que vous discutiez avec Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, mais vous devez avoir du temps, en dehors de la commission parlementaire, pour traiter entre vous de ces dossiers-là.

La Présidente (Mme Marois): Ha, ha, ha! Mme Harel: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: J'aimerais mieux que la députée continue le dialogue qui existait avant entre la députée et moi, avec un minimum d'interférence de la part de la présidence. Ça serait bien apprécié. Ce que je vous disais, Mme

la députée...

Mme Harel: Oh, oh, oh, oh!

La Présidente (Mme Marois): Ne vous inquiétez pas, M. le ministre, à cet égard. Mais je pense que c'est mon droit le plus strict de pouvoir aussi questionner sur les...

M. Bourbeau: Oui, mais n'en abusez pas, Mme la Présidente, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Marois): Je n'ai pas l'habitude d'en abuser, je pense, M. le ministre. Alors, dans ce sens-là, nous allons continuer à débattre au fur et à mesure des projets qui sont devant nous.

M. Bourbeau: Alors, je vous répète ce que je vous disais, Mme la députée. C'est un programme qui n'est pas contingenté. Alors, s'il y a des chefs de famille monoparentale qui veulent participer au programme de retour aux études postsecondaires, nous ne contingenterons pas ce programmme-là.

Mme Harel: Alors, là, vous me parlez du programme d'études post-secondaires au niveau collégial. Alors, qu'en sera-t-il pour le programme Rattrapage scolaire au niveau régulier? Qu'en sera-t-il cette année?

M. Bourbeau: Ça, c'est une autre question. Vous ne parlez plus du même programme.

Mme Harel: Bon, bien, ça concerne aussi...

M. Bourbeau: Non, il n'y a pas de changement par rapport à l'année dernière. Le programme Rattrapage scolaire continue sa carrière comme avant.

Mme Harel: Le programme Rattrapage scolaire, vous nous dites qu'il continue sa carrière comme si de rien n'était. Alors, comment allez-vous gérer la diminution de 25 000 000 $ annoncée par le ministère de l'Éducation à l'enveloppe de ce programme de formation à plein temps générale et professionnelle?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: L'enveloppe en question fait présentement l'objet de discussions entre le ministère de l'Éducation et nous, et ces discussions-là ne sont pas terminées encore. Le partage de l'enveloppe, la répartition.

Mme Harel: Vous voulez dire la répartition de la coupure du 25 000 000 $.

M. Bourbeau: La répartition de l'enveloppe.

Mme Harel: Qu'est-ce que vous entendez par enveloppe, là?

M. Bourbeau: Le montant qu'il y a dans l'enveloppe du ministère de l'Éducation pour ces fins-là.

Mme Harel: C'est-à-dire dans la formation générale et professionnelle à temps complet et équipements, dans ce progamme-là, à proprement parler. C'est de ça que vous nous parlez?

M. Bourbeau: C'est vous qui en pariez, là.

Mme Harel: Bon. Alors, moi, je vous pose la question, puisque vous nous dites, à l'article 26, que la Société pourra conclure des ententes de services rémunérés, notamment avec un ministère ou un organisme public, et que vous nous donnez, à l'exemple d'un tel type d'entente de services, celui qui pourrait intervenir entre la Société et le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle pour les bénéficiaires d'aide sociale. Alors, je vous demande si c'est pour la reconduction des programmes déjà existants. Vous sembliez me dire que oui. Dans les programmes existants...

M. Bourbeau: La reconduction des programmes existants tant qu'ils existent, mais, comme on a l'intention de tout modifier nos programmes, à court terme, les programmes existants n'existeront plus. C'est les nouveaux programmes qui vont s'appliquer, comme vous le savez fort bien. (12 h 20)

Mme Harel: Donc, la formation générale et professionnelle à temps complet et équipements, que l'on retrouve dans le budget que vous soumettiez au Conseil des ministres, dans le mémoire déposé devant le Conseil des ministres, où on retrouvait le budget qui serait transféré, indépendamment des décisions du fédéral en matière de main-d'oeuvre, mesures actives ou passives, quoi qu'il en soit, vous mentionniez qu'il y avait un total de 164 411 900 $, mais, dans le mémoire au Conseil des ministres, vous faisiez un chiffre rond de 175 000 000 $, grosso modo. De ce montant, faut-il comprendre que la formation générale et professionnelle à temps complet et équipements se chiffre à 41 793 100 $? Ce programme-là, il est présentement ouvert à qui d'autre qu'aux personnes assistées sociales? Est-ce qu'il l'est aux personnes assistées sociales, puis dans quelle proportion?

M. Bourbeau: De quel programme pariez-vous, là?

M m 3 Harel: Formation générale et professionnelle à temps complet et équipements.

M. Bourbeau: Ce n'est pas un programme du ministère... Du ministère, chez nous?

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée, voulez-vous donner d'autres précisions?

Mme Harel: Oui. Écoutez, si ce n'est pas un programme du ministère, il se trouve à être dans les budgets des CFP et de la direction générale main-d'oeuvre, formation professionnelle...

(Consultation)

M. Bourbeau: Ça, c'est des fonds fédéraux...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...des budgets fédéraux. Alors, c'est ça, ce sont des fonds fédéraux qui transitent par chez nous.

Mme Harel: Ça, ce sont des fonds fédéraux, je comprends, oui, évidemment...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: Tantôt, d'ailleurs, Mme la présidente nous indiquait que c'est à partir de ces fonds que les cours étaient donnés autant aux personnes sur l'assurance-chômage que sur l'aide sociale. Donc, ce que je lui demande, c'est: Quel est actuellement le quota? Est-ce que c'est toujours 27 %? C'est l'accord Canada-Québec qui vaut toujours en cette matière?

M. Bourbeau: Non, ça n'a pas changé. C'est toujours le même pourcentage.

La Présidente (Mme Marois): Je pense que le ministre souhaite apporter quelques éléments d'information supplémentaires. On va lui donner une...

M. Bourbeau: Non, non, les 27 %, on me dit qu'il n'y a pas de changement. C'est toujours le même pourcentage.

Mme Harel: Alors, 27 %, c'est... La Présidente (Mme Marois): Oui.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Ces 27 %, c'est donc appliqué au programme formation générale et professionnelle à temps complet et équipements. C'est ce qu'il faut comprendre?

M. Bourbeau: C'est exact. Achats directs. Les achats directs.

Mme Harel: Bon. Achats directs, quelle distinction le ministre fait-il entre formation géné- rale et professionnelle à temps complet et équipements et achats directs?

M. Bourbeau: C'est...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...la même chose. Les 41 000 000 $, là, la formation générale et professionnelle à temps complet, c'est les achats directs et c'est réparti...

Mme Harel: Bon, d'accord. Alors...

M. Bourbeau: Comme vous savez, c'est...

Mme Harel: ...quand on parle de l'un, on parle de l'autre. C'est ça.

M. Bourbeau: ...les coûts de base qui sont répartis entre les différents ministères. Il y a une partie qui va au ministère de l'Éducation, une partie à l'Enseignement supérieur et la Science, une partie au ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, environ 4 500 000 $ pour les coûts de base, et puis une partie au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

Mme Harel: Est-ce qu'il faut comprendre que, dans ce programme-là, le fédéral a déjà annoncé une diminution?

M. Bourbeau: C'est parce que ce n'est pas toujours les mêmes années.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que le ministre souhaite qu'on suspende pour quelques instants? M. le ministre?

M. Bourbeau: Bon, alors, c'est ça, Mme la Présidente, c'est les coûts de base qui sont répartis entre les ministères dont j'ai parlé tantôt, et les coûts variables qui s'ajoutent à ça.

(Consultation)

Mme Harel: Quelle est la proportion des bénéficiaires d'aide sociale?

M. Bourbeau: Ça ne sera pas long. Je vais vous répondre.

La Présidente (Mme Marois): On va permettre au ministre de faire la conciliation de ses données. On peut comprendre que c'est très complexe.

M. Bourbeau: Parce que vous avez les chiffres 1991-1992, puis moi, j'ai les chiffres de

l'année précédente, il faut que j'essaie de concilier les chiffres pour être sûr que c'est les mêmes montants.

La Présidente (Mme Marois): Et, par la suite, s'il y a d'autres questions, Mme la députée, vous pourrez revenir.

(Consultation)

M. Bourbeau: Alors, Mme la Présidente, on va être obligé de suspendre, parce que je n'ai pas les informations avec moi quant à la répartition de ces coûts-là parmi les ministères.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Est-ce que vous souhaitez poser une autre question, à ce moment-ci? Non? Avant qu'on suspende quelques instants, c'est ça.

Mme Harel: Je voudrais expliquer au ministre l'objet, la perspective dans laquelle je lui pose la question.

La Présidente (Mme Marois): Allez-y, Mme la députée.

Mme Harel: Bon. Le ministre va se rappeler qu'Emploi et Immigration Canada avait donc rédigé un mémoire et déposé ce mémoire devant la commission parlementaire, mais ils n'ont pas pu le présenter devant la commission.

La Présidente (Mme Marois): J'ai cru comprendre ça.

Mme Harel: Mais, dans ce mémoire, on retrouvait la question suivante, et c'est ça, dans le fond, cette question-là à laquelle, moi, je souhaiterais pouvoir répondre. On disait ceci: Votre énoncé de politique reconnaît que les interventions de l'État en matière de main-d'oeuvre doivent être orientées davantage vers les personnes en emploi - on faisait référence à la page 56 de l'énoncé - sans abandonner pour autant à leur sort, notamment, les prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail.

Le mémoire ajoute: Nous sommes conscients que cette priorisation des travailleurs en emploi était déjà préconisée dans certains documents québécois antérieurs, mais nous sommes quelque peu surpris de la voir réaffirmée ici, alors que votre analyse de l'environnement socio-économique fait ressortir le nombre important et croissant des prestataires de la sécurité du revenu et des décrocheurs de la société québécoise.

M. Bourbeau: Là, vous lisez une lettre de qui, là?

Mme Harel: Je lis le mémoire d'Emploi et Immigration Canada.

La Présidente (Mme Marois): À quelle page êtes vous, madame?

Mme Harel: À la page 17 du mémoire d'Emploi et Immigration Canada.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

Mme Harel: Par ailleurs, ne doit-on pas reconnaître que les personnes en emploi ont déjà dans l'ensemble une certaine avance sur les autres en termes de développement des compétences et que les employeurs ont une responsabilité certaine dans la formation et la mise à jour des compétences de leurs propres employés, surtout dans la perspective du développement d'une culture de la formation au sein même des entreprises?

Et, là, la question de fond est la suivante: Vous n'ignorez certes pas, écrit Emploi et Immigration Canada, que la priorité des programmes fédéraux de main-d'oeuvre est accordée aux travailleurs sans emploi et que les fonds d'assurance-chômage consacrés aux mesures actives sont entièrement dédiés aux prestataires d'assurance-chômage. En fait, ce que nous dit Emploi et Immigration Canada, soit que les fonds viennent de l'assurance-chômage pour les prestataires d'assurance-chômage, soit que les fonds fédéraux de main-d'oeuvre sont priorisés pour les travailleurs sans emploi. Et je continue, je cite: C'est dire que, dans l'hypothèse du rapatriement au Québec des programmes fédéraux et, en particulier, des fonds d'assurance-chômage, des ajustements devraient être requis aux priorités énoncées par le gouvernement du Québec.

Alors, ce qu'on disait déjà au ministre, c'est: Vos priorités ne sont pas les nôtres et, comme nous allons vous transférer l'argent sans vous transférer la compétence, vous aller gérer en fonction de nos priorités et vous allez devoir ajuster les vôtres. Depuis lors, la question que je me pose, c'est, évidemment: Comment le ministre va-t-il pouvoir maintenir l'exclusion des personnes qui sont finalement assistées sociales, qui sont de plus en plus nombreuses à avoir épuisé leur chômage et comment va-t-il leur donner accès à des programmes offerts par la Société, qui va avoir le contrôle, je le rappelle, de tous les programmes de formation? Tous les programmes de formation de la main-d'oeuvre vont passer par la Société, tous les programmes de développement de la main-d'oeuvre vont passer par la Société. Le principal bailleur de fonds à 80 % va continuer à être le fédéral qui, au mieux, au mieux, pourrait accepter de transférer les fonds pour les faire gérer par Québec. Mais ces fonds vont venir du fédéral. Éventuellement, la compétence va rester au fédéral, même si les fonds... (12 h 30)

M.Bourbeau: La compétence en matière d'assurance-chômage seulement...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...pas la compétence en matière de main-d'oeuvre.

Mme Harel: Bon, éventuellement, oui... M. Bourbeau: II faut faire la distinction.

Mme Harel: ...parce que, dans l'ébauche progressive, la compétence... Prenons pour acquis que ça va jusqu'à amender l'article 92, prenons-le pour acquis, et que ça va jusqu'à l'article 92.1...

M. Bourbeau: A.

Mme Harel: A oui?

Une voix: A.

M. Bourbeau: A. En tout cas, 1 ou a.

Mme Harel: Enfin. Mettons. C'est parce qu'on parle un peu pour parler. Avant que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique soit amendé... On le fait, pourquoi pas?

M. Bourbeau: Mais on n'en demande pas tant. Une délégation admistrative, ce serait suffisant. Ce que la députée de Hochelaga-Maisonneuve... Moi, je ne comprends pas le problème.

Mme Harel: Pas une délégation administrative. Le ministre...

M. Bourbeau: Par entente administrative.

Mme Harel: ...est conscient que, par une délégation administrative, ce n'est pas lui qui énonce les priorités.

M. Bourbeau: Non, mais ça n'a jamais fait l'objet de la demande du gouvernement du Québec non plus. Là, ne nous en faites pas demander plus qu'on en demande. Le Québec ne demande pas la juridiction en matière d'assurance-chômage. Il demande de gérer, par voie d'entente administrative, au Québec, le programme d'assurance-chômage, de façon, entre autres, à garder l'effet de péréquation. Si les fonds...

Mme Harel: Mais vous avez toujours demandé la juridiction en matière des fonds fédéraux.

M. Bourbeau: Si les fonds fédéraux... Il y a des fonds fédéraux qui viennent de l'assurance-chômage. Ces fonds-là sont destinés, on s'entend là-dessus, aux chômeurs. Mais il y a d'autres fonds fédéraux importants, des centaines de millions de dollars qui sont consacrés, dans le budget fédéral présentement, à la main-d'oeuvre. Ces fonds-là, on en demande le transfert au Québec...

Mme Harel: De la compétence.

M. Bourbeau: ...mais pas sur une base annuelle, sur une base d'entente permanente. Ces fonds-là ne sont pas destinés nécessairement aux chômeurs. Ces fonds-là, ce sont des fonds main-d'oeuvre qui peuvent servir à toute la main-d'oeuvre, quelle qu'elle soit, en chômage ou non, etc.

Donc, le Québec a amplement d'espace financier pour utiliser une partie des fonds venant du gouvernement fédéral pour des programmes visant, entre autres, à venir en aide à ceux qui ne sont pas des chômeurs. Alors, il n'y a rien qui va nous empêcher, ni juridiquement, ni financièrement, de s'occuper de la clientèle dont on parle.

Nous pensons que cette clientèle-là, on ne doit pas la transférer, sa responsabilité, à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, certainement pas, en tous les cas, dans un premier temps, parce que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre aura suffisamment de boulot, dans les premiers mois, sinon dans les premières années, pour s'occuper de tous les problèmes des travailleurs en emploi, des travailleurs en chômage, et nous pensons que le réseau Travail-Québec est mieux équipé, dans un premier temps, pour garder sous sa responsabilité la clientèle de l'aide sociale, y compris l'employabilité, quitte à faire des ententes avec la Société de développement de la main-d'oeuvre pour ce qui est de la formation de ces prestataires.

Je vous ai expliqué, l'autre soir, pourquoi nous préférons et nous justifions cette préférence-là et je vous ai dit... je peux vous le rappeler. Si nous demandons à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre de concevoir des programmes, d'établir des priorités, elle aura naturellement tendance à se préoccuper en premier lieu des besoins d'adaptation de la main-d'oeuvre en emploi et des prestataires d'assurance-chômage. Je ne crois pas faire injure à la conscience sociale de nos partenaires patronaux et syndicaux en soutenant qu'à leurs yeux les budgets de développement de la main-d'oeuvre, à plus forte raison s'ils proviennent du compte d'assurance-chômage, doivent prioritairement servir à accroître la capacité d'adaptation de la main-d'oeuvre active à des marchés du travail changeants et instables.

Je concluais en disant qu'à notre avis le réseau Travail-Québec serait certainement mieux placé pour protéger et s'occuper de cette clientèle, dans un premier temps en tous les cas, que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Mme la Présidente, j'aimerais peut-être solliciter l'attention du ministre quelques minutes seulement pour...

La Présidente (Mme Marois): II vous en... Très bien.

Mme Harel: D'abord, pour insister sur le fait que j'ai l'impression qu'il confond deux choses, parce que, quand il nous parte des raisons qui l'ont amené à ne pas vouloir transférer la gestion des mesures d'employabilité à la Société, je crois que c'est une chose qu'il doit distinguer du fait de rendre admissibles les bénéficiaires d'aide sociale aux programmes de la Société. Je ne pense pas que c'est de la même chose qu'il s'agit. Quand le ministre nous dit: La Société aura, au moment de sa création, assez d'autres chats à fouetter que de s'occuper de la gestion des mesures d'employabilité, je pense, Mme la Présidente, qu'on peut peut-être en discuter, mais trouver ça raisonnable... Ça maintient deux réseaux, ceci dit: un réseau des centres Travail-Québec et un réseau de la Société pour offrir la formation.

M. Bourbeau: Qui trop embrasse mal étreint! Le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue comprend certainement ça.

Mme Harel: Oui, mais vous comprendrez, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Allez-y, Mme la députée.

Mme Harel: Oui, mais le ministre sait aussi, le ministre est conscient, même s'il ne l'admettra pas ici... mais je sais qu'il est conscient lui-même que, advenant qu'il n'y ait pas de transfert des mesures passives, ça veut dire un troisième réseau. Parce que le réseau des centres d'Emploi et Immigration Canada, au niveau local, reste également pour transférer les prestations, n'est-ce pas? Alors, vous auriez un bureau d'immigration ou un bureau de chômage Canada, si vous voulez, les centres Travail-Québec, puis vous auriez un troisième bureau pour aller chercher les mesures de formation.

M. Bourbeau: Ça ne serait pas souhaitable.

Mme Harel: Ceci dit, distinguons donc la gestion des mesures d'employabilité de l'accessibilité à la formation offerte par la Société.

M. Bourbeau: Distinguons et ne distinguons pas parce que, parmi les mesures d'employabilité, n'oubliez pas qu'il y a des mesures scolarisantes. Le rattrapage scolaire, c'en est une, le retour aux études postsecondaires, c'en est une autre. Donc, on n'est pas en terrain inconnu, !à.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Oui. Dans ces mesures dites scolarisantes, Mme la Présidente, on retrouve notamment le rattrapage scolaire. Vous savez que le rattrapage scolaire... Là, heureusement que le ministre a obtenu certains ajustements de son collègue de l'Éducation, notamment en matière de préalables fonctionnels. Ça ne sera plus les mêmes préalables académiques qui étaient exigés auparavant qui continueront. Ce sera modifié de manière à ce qu'il y ait un accès aux élèves adultes qui soit plus facile au niveau de la formation professionnelle que c'était le cas jusqu'à maintenant, où ils devaient compléter des cours de physique, chimie, mathématiques de secondaire IV avant d'avoir accès à un cours d'auxiliaire familial.

Bon, ceci dit, au même moment où on constate, là, l'élargissement des critères académiques d'admissibilité aux études, on constate la diminution des enveloppes budgétaires pour les étudiants à temps plein réguliers qui sont essentiellement des bénéficiaires d'aide sociale. Donc, Mme la Présidente, ce n'est pas peu de chose, c'est 25 000 000 $ de moins, cette année, dans le budget du ministère de l'Éducation au chapitre de la formation à temps plein, donc, au chapitre de ce qu'on peut appeler le rattrapage scolaire. Ce n'est pas nécessairement des travailleurs qui sont en emploi, puis qui voudraient suivre des cours à temps partiel qui prennent ces cours-là, n'est-ce pas? Ce n'est pas des personnes en emploi qui prennent ce cours-là à temps plein et ce n'est pas non plus des chômeurs prestataires de l'assurance-chômage parce que, à ce moment-là, ça fait partie de ce qu'on appelle achats directs ou de la formation sur mesure où ça fait partie d'un autre programme, à l'article 26 de l'assurance-chômage, où on peut être un étudiant indépendant, mais c'est payé à même les fonds d'assurance-chômage.

Donc, les 25 000 000 $ de suppression dans le budget du ministère de l'Éducation pour les cours à temps plein pour les étudiants adultes réguliers, bien, ça va affecter la clientèle de l'aide sociale. C'est évident. Je suis allée moi-même aux crédits du ministère de l'Éducation pou,- essayer d'en comprendre un peu plus long. Alors, j'ai passé même quelques heures dans cette commission que je préside à l'occasion et que j'ai présidée pour cette occasion. La question que je me suis posée, c'est: De quel côté... Les prestataires de l'aide sociale, si tant est qu'on ne les réserve que dans les mesures d'employabilité, que, dans ces mesures d'empioyabilité, 60 %... en tenant compte, évidemment, qu'il y a 8 % des rr.énages qui, en moyenne, peuvent accéder à des mesures d'employabilité, qu'à

l'intérieur de ces 8 % de ménages qui ont accès à des mesures d'employabilité il y a, finalement, dans ces mesures qui sont offertes, 60 % qui font du rattrapage scolaire. Puis, dans ce rattrapage scolaire, s'inscrit la coupure de 25 000 000 $ dont je vous parlais tantôt.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, je ne suis pas d'accord avec ce que dit la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Combien, d'après vous, il y a de ménages qui ont accès à des mesures d'employabilité, présentement?

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée?

M. Bourbeau: Quel pourcentage des ménages?

Mme Harel: Sur le total des ménages? 8 %.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre? (12 h 40)

M. Bourbeau: Oui, mais ça n'a pas de bon sens. On a à peu près 400 000 ménages, au Québec, assistés sociaux, là.

Mme Harel: C'est 8 %.

M. Bourbeau: Et 8 %, ça fait 32 000 ménages en mesures d'employabilité. C'est à peu près ça qu'on a, seulement en rattrapage scolaire. On a présentement, d'après les statistiques que j'ai, là, pour 1992-1993... on estime à 52 500 le nombre...

Mme Harel: C'est parce que, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui. Mme Harel: ...le ministre fait une erreur... M. Bourbeau: ...uniquement le rattrapage... Mme Harel: ...les mesures...

La Présidente (Mme Marois): Attendez un peu, là. Je vais juste...

Mme Harel: Je vais juste tout de suite lui dire, et il va en convenir...

M. Bourbeau: Les mesures d'employabilité...

Mme Harel: ...c'est que les mesures ne sont pas à partir des ménages.

M. Bourbeau: Bien non, mais...

La Présidente (Mme Marois): À partir des personnes, elles s'adressent à des personnes.

M. Bourbeau: Bien non, mais...

Mme Harel: Bien, oui, les mesures s'adressent à des personnes. Alors...

M. Bourbeau: Non, mais c'est vous qui avez dit tantôt: 8 % des ménages...

Mme Harel: Ah bon! Alors, c'est moi qui ai fait l'erreur...

M. Bourbeau: Vous avez répété ça deux, trois fois.

Mme Harel: C'est 8 % des bénéficiaires. M. Bourbeau: Bien oui, mais écoutez, là...

Mme Harel: Mais vous ne pouvez pas faire la règle de trois...

M. Bourbeau: Bien voyons donc, ça n'a pas de bon sens!

Mme Harel: ...du nombre de participants...

M. Bourbeau: Vous comptez les enfants de quatre ans et de trois ans, là-dedans. Mais, quand on parle des personnes à l'aide sociale, c'est toutes les personnes, les enfants avec. Alors, les enfants de deux, trois ans, il y en...

Mme Harel: II y en a plus que 400 000.

M. Bourbeau: Bien oui, je comprends, si vous dites qu'il y a 8 % des personnes qui participent aux mesures d'employabilité, vous nous annoncez que les enfants d'un an, deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans...

Mme Harel: Non, non, non, non, non. Le ministre...

M. Bourbeau: Bien oui.

Mme Harel: Mais, de toute façon, c'est bien simple, M. le Président...

M. Bourbeau: Bien non, mais les personnes, c'est ça.

Mme Harel: ...Mme la Présidente... Je m'excuse.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

M. Bourbeau: Je veux dire, quand on parle...

Mme Harel: On va suspendre cette question-

là. On a les rapports...

M. Bourbeau: Je ne veux rien suspendre du tout.

Mme Harel: ...on a les rapports mensuels. M. Bourbeau: Bien oui.

Mme Harel: Alors, on l'a encore, là, en date...

La Présidente (Mme Marois): Je pense que... Est-ce que vous me permettez? Je pense qu'il y a effectivement une espèce d'imbroglio, là. Il y a un certain nombre de ménages à l'aide sociale..

Mme Harel: Bon.

La Présidente (Mme Marois): ...puis il y a une population totale à l'aide sociale, qui comprend les ménages et les enfants de ces ménages.

M. Bourbeau: C'est ça.

La Présidente (Mme Marois): Bon. Mais combien y a-t-il, pour essayer d'avoir un portrait un petit peu plus complet, là, pour savoir de quoi on parle, en date d'aujourd'hui ou d'il y a un mois, parce que je sais que les statistiques, habituellement, c'est toujours les deux mois qui précèdent, si on veut, combien y a-t-il, au total, de personnes à l'aide sociale dans une période, et en nous donnant un peu la période, là?

M. Bourbeau: Au moment où on se parte, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui.

M. Bourbeau: ...si vous n'êtes pas trop, trop offusquée, je pourrais vous dire qu'en juin...

La Présidente (Mme Marois): Oui.

M. Bourbeau: ...ce n'est pas si mal, quand même...

La Présidente (Mme Marois): C'est très bien, même.

M. Bourbeau: Oui. On estime présentement la population à 421 300 ménages - vous savez que, pour les trois derniers mois, c'est des estimés, là...

La Présidente (Mme Marois): Oui, je sais ça.

M. Bourbeau: ...et le nombre de personnes à 687 800. Alors, 421 300...

La Présidente (Mme Marois): Ménages.

M. Sourbeau: ...aujourd'hui, c'est sensiblement le même nombre qu'il y avait, quand en est arrivés en 1985, à peu près 420 000 ménages. Alors, si vous dites qu'il y a 8 %...

La Présidente (Mme Marois): Et 687 000 personnes. C'est bien cela?

M. Bourbeau: 687 800...

La Présidente (Mme Marois):... 800.

M. Bourbeau: ...estimées.

La Présidente (Mme Marois): Parfait.

Mme Harel: Donc, combien d'enfants de moins de 18 ans?

M. Bourbeau: Bien, écoutez, là, je ne l'ai pas devant moi...

Mme Harel: Le ministre les a, les chiffres.

La Présidente (Mme Marois): C'est parce que le nombre de... Juste pour qu'on termine, là, oui.

Mme Harel: Je sais qu'il les a.

M. Bourbeau: Je regrette. Dans mon petit... je n'ai pas les enfants ici, là, de 18 ans...

La Présidente (Mme Marois): Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: ...mais disons ceci. Tout à l'heure, vous avez dit à plusieurs reprises qu'il y avait 8 % des ménages à l'aide sociale qui étaient en mesures d'employabilité. Là, je vous contredis. Vous me dites: Non, non, ce n'est pas des ménages; c'est des personnes. Mais ça ne tient pas debout, dire ça. On ne peut pas dire ça qu'il y a 8 % des personnes qui sont en mesures d'employabilité, parce qu'il y a tous les enfants qui n'ont pas accès, qui ne peuvent pas participer à des mesures d'employabilité. Alors...

La Présidente (Mme Marois): Mais 400... est-ce que vous me permettez...

M. Bourbeau: ...alors, on ne peut parler que de ménages. On ne peut pas parler d'enfants.

La Présidente (Mme Marois): Vous avez raison, je pense, M. le ministre...

M. Bourbeau: Le rattrapage scolaire, il n'y a pas bien, bien d'enfants.

La Présidente (Mme Marois): ...sur ie fail qu'on doit décortiquer chacune des données pour savoir si on parle ae ménages, si on parle de l'ensemble de la population et des enfants...

M. Bourbeau: C'est pour ça que, dans les mesures d'employabilité, on doit parler de ménages...

La Présidente (Mme Marois): Bon. Mais les ménages, c'est combien de personnes? Parce que ménage, évidemment, on sait qu'un chef de famille monoparentale est un ménage.

Une voix: C'est ça.

La Présidente (Mme Marois): Mais c'est une personne. Alors qu'un couple...

M. Bourbeau: ...le nombre d'adultes, ça serait...

La Présidente (Mme Marois): Oui.

M. Bourbeau: ...un chiffre meilleur. alors, disons, là, qu'en novembre 1991... je n'ai pas les derniers chiffres, malheureusement, mais on avait 445 559...

La Présidente (Mme Marois): Personnes. M. Bourbeau: ...adultes, adultes...

La Présidente (Mme Marois): Adultes.

M. Bourbeau: ...en novembre 1991, et puis, en novembre 1991, à l'aide sociale, il y avait, mme la présidente, 389 658 ménages. donc, s'il y avait 389 658...

La Présidente (Mme Marois): Une règle de trois, là.

M. Bourbeau: ...ménages...

Une voix: Impossible.

Mme Harel: C'est impossible.

M. Bourbeau: Oui, oui, mais c'est très possible. C'était ça, le nombre de ménages en novembre 1991. C'est bien ça?

Mme Harel: II y avait beaucoup plus de ménages biparentaux que cela, parce que, s'il y a 380...

M. Bourbeau: Écoutez, là, ce n'est pas impossible. Il y avait 389 658 ménages à l'aide sociale, en novembre 1991, pour 634 338 personnes. Ça, c'est les statistiques officielles. Aujourd'hui, on est à 421 000 ménages, donc, 40 000 ménages... même pas 40 000, là...

Mme Harel: 56 000.

La Présidente (Mme Marois): 31 000, 32 000 ménages de plus.

M. Bourbeau:. ...31 000 de plus. Donc, ajoutez peut-être encore 20 000 adultes ou 15 000 adultes de plus.

Mme Harel: Mais je ne sais pas si le ministre est conscient...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...qu'avec les chiffres il y a une incongruité. Avec les chiffres que le ministre nous donne, il y a une incongruité. Il nous parle, pour novembre 1991, là, de 445 000 personnes...

M. Bourbeau: Oui, oui.

Mme Harel: ...et de 380...

M. Bourbeau: Adultes, adultes.

Mme Harel: Adultes. C'est ça. Et de 389 000 ménages.

M. Bourbeau: C'est ça.

Mme Harel: N'est-ce pas? Alors, c'est bien simple: il n'y aurait que 56 000 personnes, si vous voulez, qui vivraient...

La Présidente (Mme Marois): En couple. Mme Harel: ...en couple.

M. Bourbeau: Oui, bien, on sait que la très grosse majorité des assistés sociaux sont des personnes seules.

Mme Harel: Oui, mais imaginez-vous ce que ça signifie, M. le Président. Ça signifierait, à ce moment-là... Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée. Ça viendra.

Mme Harel: J'ai de la misère.

La Présidente (Mme Marois): Ne vous inquiétez pas. Nous avons toute la journée pour nous y faire.

Mme Harel: Alors, imaginez que ça supposerait que les deux tiers soient des ménages formés d'un adulte, d'une personne seule.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui, c'est probablement ça, parce que les personnes seules à l'aide sociale, on en a 60 %, je crois, puis il y a toutes les monoparentales qui forment une grosse partie.

La Présidente (Mme Marois): C'est quoi le...

Mme Harel: 100 000, 105 000, les chefs de famille monoparentales.

La Présidente (Mme Marois): 105 000 chefs de famille monoparentales.

M. Bourbeau: Oui, mais c'est énorme. Vous avez les ménages à un. Ajoutez à ça toutes les personnes seules, vous êtes rendue...

Mme Harel: À 200 000.

M. Bourbeau: ...à deux tiers de la clientèle.

Mme Harel: Oui, mais on n'est pas à 400 000.

M. Bourbeau: Non, non, non, non.

Mme Harel: II y a quelque chose qui ne marche pas.

Une voix: C'est plausible.

M. Bourbeau: Les chiffres sont bons, je suis convaincu.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que ce sont des statistiques vérifiées par le ministère?

M. Bourbeau: Les familles biparentales sont très peu nombreuses. Je crois qu'il y en a à peu près 20 000... les couples sans enfants. Et puis, les biparentales, c'est la même chose. Je suis pas mal convaincu que les chiffres sont bons.

Mme Harel: Parce qu'on s'est vraiment éloignés, par ailleurs, de notre sujet.

La Présidente (Mme Marois): oui, on s'est éloignés un peu. on essaie de clarifier, j'imagine, un peu les données sur lesquelles on appuiera nos prises de décision. parce que c'est ça.

M. Bourbeau: Tout ça, c'est parti d'une affirmation de la députée de Hochelaga-Maison-neuve que nos mesures d'employabilité ne sont pas populaires, qu'il n'y a que 8 % des ménages, alors que moi, je vous dis qu'il y a 50 000 ménages à peu près, selon nos statistiques, qui participent à des mesures d'employabilité, sur 400 000.50 000 sur 400 000, ça fait 25 %...

La Présidente (Mme Marois): Non.

M. Bourbeau: N'oubliez pas qu'il y a presque 100 000 inaptes qui ne peuvent pas participer, de toute façon. Alors, il faudrait presque les enlever.

Mme Harel: Ah non, Mme la Présidente. Ça, non. Non, non, non.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Mâisonneuve.

Mme Harel: Le ministre a tellement insisté en commission parlementaire...

M. Bourbeau: On souhaite qu'ils participent.

Mme Harel: ...a tellement insisté sur l'admissibilité des inaptes...

M. Bourbeau: Oui, oui. Une voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: ...il l'a tellement dit au salon bleu qu'il ne viendra pas me dire le contraire, maintenant.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Alors, les inaptes sont admissibles. Est-ce que c'est ça, M. le ministre, que je dois comprendre?

M. Bourbeau: Oui, ils sont admissibles, mais ils participent peu.

Mme Harel: Oui. Il ne peut pas les écarter, à moins que ce soit ça la directive qui soit envoyée aux agents.

La Présidente (Mme Marois): Donc, on doit rester aux chiffres de base sur les ménages et le nombre de personnes adultes, et les couples versus les ménages monoparentaux.

M. Bourbeau: Oui, quand on regarde les mesures d'employabilité, tout le monde, bien sûr, est théoriquement admissible. Mais si vous considérez qu'il y a dans le programme Soutien financier, en novembre 1991, 95 791 personnes - mettez 100 000 aujourd'hui - si vous considérez qu'il y avait 125 438 non disponibles, les mères de famille monoparentales d'enfants de moins de six ans, les gens qui sont temporairement malades, incapables de vaquer à leurs occupations, les femmes enceintes... Bon, alors, encore là, ce n'est quand même pas un groupe qui peut facilement participer à des mesures d'employabilité. On est rendu à 225 000 ménages sur 400.. adultes plutôt, pour la moitié des adultes, et puis considérez qu'il y en 52 000 dans la mesure d'employabilité, vous êtes... Une bonne proportion participe aux mesures d'employabilité.

La Présidente (Mme Marois): Et ça, c'est toujours les chiffres de novembre 1991. M. !c ministre? Oui?

M. Bourbeau: Oui, novembre 1991.

Mme Harel: ...conscience...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...plus que jamais, Mme la Présidente, à quel point, dans ce contexte-là, les mesures généreuses pour compenser les coupures pour partage du logement, etc., les mesures d'allocation qui ne sont attribuées qu'aux couples avec enfants ou aux personnes avec enfants, combien ça ne leur coûte pas cher. Parce que, finalement, c'est une minorité à l'intérieur des prestataires d'aide sociale qui sont admissibles.

Alors, on voit bien que, étant donné que c'est essentiellement des personnes seules ou des personnes chefs de famille qui se retrouvent à l'aide sociale, le fait qu'on ait autant pour les transferts de revenus, dans le cadre du SUPRET, par exemple, aboli l'aide pour maintenir à l'emploi, et qu'on n'ait aucune aide non plus en matière d'allocation-logement, et qu'en plus on ait la coupure pour le partage du logement, on peut voir à quel point on a pu augmenter la pauvreté-La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

M. Bourbeau: Aucune aide pour l'allocation-logement? Comment aucune aide pour l'alloca-tion-logement?

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

Mme Harel: ...pour les personnes seules. M. Bourbeau: Ah non!

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Mme la Présidente, je reviens à ce que j'étais en train de bien préciser, c'est-à-dire que nous ne sommes pas ici à demander au ministre qu'il transfère la gestion des mesures d'employabilité à la Société. Nous sommes ici pour demander au ministre quelle sera sa politique d'ouverture des programmes de main-d'oeuvre aux bénéficiaires d'aide sociale. C'est la Société qui va offrir ces programmes de main-d'oeuvre, et il y a toute une - je déteste ce mot-là - clientèle... Ça a l'air tellement...

La Présidente (Mme Marois): Marketing. (12 h 50)

Mme Harel: Marchand, marketing. Mais il y a toute une catégorie importante de sans-emploi...

La Présidente (Mme Marois): De personnes.

Mme Harel: ...de personnes sans emploi qui, finalement, n'auront pas accès aux programmes de main-d'oeuvre. En fait, tous les bénéficiaires de l'aide sociale n'y auront accès que restric-tK/ement dans la mesure où les centres Travail-Québec feront des ententes avec la Société. Et, là, la grande question à poser reste celle des crédits budgétaires, n'est-ce pas? C'est bien évident que ces ententes-là auront lieu dans la mesure où le ministère aurait l'argent pour acheter de la Société des cours main-d'oeuvre pour les personnes assistées sociales.

Présentement, ce qu'il faut constater, c'est que, présentement, un grand nombre... et ça, c'est dans le mémoire que le ministre déposait au Conseil des ministres sur le projet. On lit ceci: Un grand nombre de prestataires ne sont pas référés aux programmes de main-d'oeuvre, mais plutôt à des activités comme le rattrapage scolaire. On voit très bien à quel point ça fait tourner en rond, puisque cette catégorie de personnes sans emploi se retrouve dans des activités de rattrapage scolaire ou elle abandonne à plus de 50 %. C'est un taux extrêmement élevé d'échec, finalement. C'est un deuxième échec scolaire qui, souvent, s'ajoute à celui connu dans la petite enfance.

Ce que j'aimerais demander au ministre - je reviens - c'est: Quelle est la politique qu'il entend développer pour permettre... Comment le gouvernement entend contracter avec la Société? Est-ce qu'il maintient la politique actuelle? Je pense qu'il n'y en a pas 4000, je crois. Même, je pense que c'est trop généreux, 4000, 4000 bénéficiaires qui peuvent suivre des cours de main-d'oeuvre, 4000 sur les 389 000 dont parlait le ministre tantôt.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Les prestataires de la sécurité du revenu devraient pouvoir participer plus activement aux programmes de développement de la main-d'oeuvre, notamment les mesures de placement, de formation professionnelle et d'aide à l'emploi. Jusqu'ici, on a aménagé, dans les accords fédéraux-provinciaux, certaines dispositions en vertu desquelles un pourcentage déterminé de la clientèle totale de certains programmes doit être constitué de personnes aptes au travail recevant des prestations de la sécurité du revenu. De même, un certain rapprochement s'est opéré depuis deux ans entre les centres Travail-Québec, qui gèrent les programmes favorisant l'intégration en emploi de ces prestataires, et les commissions de formation professionnelle.

Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...il faut accroître ces échan-

ges parce que toute personne sans emploi apte au travail, quelle que soit la source de revenu dont elle dépend, devrait, pour peu qu'elle y consente elle-même des efforts, recevoir les services qui lui donnent une nouvelle chance d'accéder ou de reconquérir le marché du travail. Mme la Présidente, j'ai jugé bon de...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...citer deux paragraphes de l'énoncé de politique «Partenaires pour un Québec compétent et compétitif», parce que ça constitue la politique du gouvernement en la matière. C'est clair, c'est précis, c'est écrit et on dit qu'il faut accroître les échanges. Donc, avec le mécanisme qu'on a prévu dans la loi de conclure des ententes de services avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, on pourra accroître ces échanges, et c'est notre intention la plus ferme.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Mme la Présidente, le ministre a oublié de lire la suite.

M. Bourbeau: ...mais je ne voulais pas vous endormir totalement.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: J'aimerais continuer...

La Présidente (Mme Marois): Ce n'était pas le cas, de toute façon, M. le ministre. Oui, Mme la députée.

Mme Harel: J'aimerais continuer, Mme la Présidente. Le ministre nous disait justement: quelle que soit la source du revenu. Alors, s'il le veut, on peut même introduire, en amendement au projet de loi, ce principe qui nous apparaît absolument fondamental. Le ministre le sait d'ailleurs parce que c'était, lors de la conclusion des travaux de la commission parlementaire, un des objectifs que nous énoncions, à savoir la formation de la main-d'oeuvre offerte quelle que soit la source du revenu dont on dépend.

Je vais poursuivre la lecture que faisait le ministre de son énoncé. Alors, ça dit ceci: Cet énoncé comporte, on en convient, une part d'idéal et ne fait pas l'unanimité. D'autres allèguent qu'avec un taux de chômage de plus de 10 % la priorité devrait être accordée à l'aide aux personnes en emploi et aux personnes licenciées.

Tout en reconnaissant que les interventions de l'État en matière de main-d'oeuvre doivent être orientées davantage vers les personnes en emploi, le gouvernement du Québec ne saurait abandonner à leur sort les quelque 200 000 personnes aptes et disponibles au travail qui dépendent de la sécurité du revenu. Parce que, ce faisant, il en condamnerait, pour de très longues périodes, un grand nombre à un état de dépendance et de pauvreté. De plus, l'expérience démontre que les programmes mis à la disposition de ces clientèles leur offrent la voie du marché du travail et de l'autonomie. Ces succès méritent que l'on accroisse nos efforts, etc.

Alors, là, ce qu'on dit, c'est que le gouvernement pourra établir avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre les modalités d'une compensation financière pour les services qu'elle serait appelée à rendre aux prestataires de la sécurité du revenu. On dit, d'une part, que le principe...

M. Bourbeau: On est revenus à l'article 26.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: C'est ça. On dit, d'une part, que l'objectif devrait être que toute personne sans emploi apte au travail devrait pouvoir obtenir de la formation de main-d'oeuvre, quelle que soit la source de revenus dont elle dépend. On émet le principe et, ensuite, on dit que c'est un bel idéal, ça ne fait pas l'unanimité et, en attendant, le gouvernement va contracter avec la Société... On ne nous dit pas quel sera le volume. On ne vous dit rien de tout ça. Sauf que, présentement, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...je regardais...

M. Bourbeau: ...de loi. Quand même je mettrais qu'il y en aurait 3842...

Mme Harel: La formation sur mesure, volet employabilité. Je les ai fait sortir, les programmes de main-d'oeuvre, ce n'est même pas 4000. La formation sur mesure offerte... Ça, ça veut dire... formation sur mesure, c'est formation de la main-d'oeuvre qui est offerte aux personnes sur l'aide sociale. Alors, en 1990-1991, il s'agissait de 1515 bénéficiaires. Puis savez-vous qu'en 1991-1992 on diminuait à 1258 bénéficiaires? Plutôt que de s'améliorer, finalement, l'offre de formation de la main-d'oeuvre aux bénéficiaires d'aide sociale, malgré l'augmentation du nombre de bénéficiaires, a diminué.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Est-ce que la députée s'est rendu compte qu'on est en train de faire une réforme, justement? Il y a des choses avec

lesquelles on n'est pas d'accord, nous non plus. On fait une réforme, c'est pour changer des choses. Alors, si ce n'est pas satisfaisant, on va l'améliorer. On reconnaît que ça peut s'améliorer. C'est pour ça d'ailleurs qu'on fait une réforme. On va économiser 275 000 000 $ uniquement en frais d'administration en rapatriant les pouvoirs de main-d'oeuvre du gouvernement fédéral, en faisant sauter les deux réseaux. En ayant un seul réseau, on pourrait consacrer des sommes à ça. C'est l'objectif recherché. Je n'ai jamais dit que c'était parfait.

Mme Harel: Je ne reviens pas avec la fable de La Fontaine, mais le ministre sait très bien que, pour économiser ces 250 000 000 $, il lui faudrait entièrement harmoniser, en obtenant la gestion de l'ensemble des mesures dites actives et passives, c'est-à-dire autant les prestations d'assurance-chômage que la gestion de l'ensemble de la formation et du développement. Et ce n'est pas parti pour ça. Le ministre le sait également.

M. Bourbeau: Oui, mais...

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que ce que la députée dit est juste dans le sens où c'est le maximum qu'on pourrait économiser, advenant le fait qu'il ait une intégration parfaite, les 275 000 000 $?

M. Bourbeau: C'est-à-dire que le chiffre vient de... Il s'est trouvé comme suit. On a regardé quels étaient les coûts d'administration des programmes du marché du travail dans les 24 pays de l'OCDE, et les coûts d'administration tournent autour de 6 %, 6,5 %, selon les années. Au Québec, nous, on se rend compte que les coûts d'administration du marché du travail - et j'entends les mesures actives et passives, assurance-chômage, aide sociale, tout ça - ça tourne autour de 9,5 %, 10 %, selon les années.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça. Donc, une différence de 3 % à 4 %.

M. Bourbeau: Donc, si vous estimez que, présentement, il se dépense 9 000 000 000 $ au Québec là-dessus, 3 % de différence, on va chercher 275 000 000 $ de frais d'administration. C'est évident qu'ayant deux réseaux, même trois, évidemment, avec l'aide sociale... Présentement, il y a trois réseaux. On voudrait réduire à deux, un réseau pour l'aide sociale et un réseau pour main-d'oeuvre et assurance-chômage. Dans ce sens-là, sur une période de deux ou trois ans, quatre ans, parce qu'il faudrait qu'il y ait une certaine attrition des fonctionnaires, parce qu'il y aurait beaucoup trop de fonctionnaires, sur une période de temps, avec les retraites, etc., on en viendrait à économiser une somme d'argent qui pourrait être située entre 200 000 000 $ et 300 000 000 $. C'est l'objectif recherché, en plus d'avoir plus d'efficacité. Je sais que la députée de Maisonneuve partage ce point de vue là. Alors...

Mme Harel: Partage cet objectif. La députée de Taillon également.

La Présidente (Mme Marois): Tout à fait. C'est pour ça que je soulevais la question sur le total...

M. Bourbeau: Et c'est la position du Québec. Là-dessus, il n'y a aucune hésitation. C'est notre position. Elle n'a pas varié d'un iota.

Mme Harel: La vôtre?

M. Bourbeau: Quand vous m'avez posé la question en Chambre, l'autre fois, je n'ai pas tergiversé longtemps sur la réponse, et personne ne m'a contredit.

Mme Harel: C'est tout à votre honneur, d'ailleurs.

La Présidente (Mme Marois): Je voudrais faire remarquer aux membres de la commission qu'il est 13 heures et qu'il faut suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 24)

Le Président (M. Joly): Au moment d'ajourner, nous en étions à l'article 26 et, en vérifiant la feuille de temps, je vois que, déjà, nous avons épuisé le temps permis par le règlement, soit 23 minutes et 10 secondes, sur l'article 26. Dois-je conclure que nous passons au vote? Est-ce qu'on peut considérer que l'article 26 est adopté?

Une voix: Adopté. Des voix:...

M. Bourbeau: M. le Président, tout en vous signalant que nous avons un amendement, en fait, le projet de proposer un article 26.1. Est-ce que ça vous empêche d'adopter l'article 26 ou...

Le Président (M. Joly): Non... M. Bourbeau: Non.

Le Président (M. Joly): ...sauf qu'on peut adopter 26.

M. Bourbeau: C'est bien ce que je pensais.

Le Président (M. Joly): Est-ce que vous êtes

d'accord, Mme la députée?

Mme Harel: Un instant, M. le Président. À l'article 26, nous retrouvons donc la proposition à l'effet de permettre à la Société de conclure des ententes de services rémunérés, notamment avec un ministère ou un organisme public. Je comprends que le ministre a pris connaissance des communiqués qui nous sont parvenus, à moi-même comme porte-parole de l'Opposition et au ministre responsable, notamment le communiqué intitulé «Le secteur communautaire forme une coalition», et, dans ce communiqué, au troisième paragraphe, on y trouve ceci... au quatrième plutôt: «Pour ces organismes, une véritable politique de développement de la main-d'oeuvre doit relever le défi de l'intégration au marché du travail de toutes les personnes qui en sont exclues ou dont les emplois sont précaires et vulnérables. Cela exige donc que le secteur communautaire soit considéré comme un partenaire à part entière au sein de la Société.» Et la coalition, c'est une très, très, très vaste coalition. Le ministre en a la liste; je vais donc immédiatement me dispenser d'en faire la lecture. Mais c'est impressionnant.

Le Président (M. Joly): Mme la députée... Mme Harel: Vous-même seriez impressionné.

Le Président (M. Joly): ...je tiens juste à vous rappeler que, déjà, sur l'article en question, nous avons dépassé le temps, nous sommes rendus à 25 minutes. Je n'ai pas d'objection si j'ai le consentement. Si M. le ministre est d'accord, moi, je peux laisser déborder le temps...

M. Bourbeau: M. le Président, de toute façon, j'admets la liste des organismes, M. le Président, comme le veut, et la meilleure preuve disponible...

Mme Harel: C'est-à-dire que c'est mon temps à moi, là, M. le Président, qui est épuisé?

Le Président (M. Joly): Oui.

Mme Harel: Mais ma collègue, la députée de Chicoutimi...

Le Président (M. Joly): D'ailleurs, 25 minutes... Ah non! Je n'ai pas d'objection. Je veux juste essayer d'appliquer la procédure parce que je m'aperçois, en prenant la responsabilité, que, déjà, on avait dépassé le temps de 25 %. Alors...

Mme Harel: C'est parce que vous n'étiez pas là, M. le Président.

Le Président (M. Joly): II faut qu'il y ait une certaine rigueur.

M. Dourbeau: Je peux vous rappeler, M. le Président, que la présidence ne s'occupait pas du temps avant votre arrivée.

Le Président (M. Joly): Bien, je ne sais pas. C'est parce que moi, de temps en temps, je me vire de bord puis je vérifie. Alors, je veux être juste dans l'application, disons, du mandat qui m'est confié.

M. Bourbeau: Oui, vous avez bien raison, M. le Président, l'équité, c'est très important.

Le Président (M. Joly): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai eu l'occasion, en Chambre, de rappeler les principales interventions qui s'étaient faites à ce sujet, particulièrement l'exclusion de certains travailleurs. On consacre des catégories de travailleurs, selon qu'ils sont en emploi ou aptes à l'emploi, et ça vient consacrer une situation que dénonçaient à peu près partout les intervenants, à l'unanimité. Les gens que je rencontre dans mon comté - vous en avez certainement, je vois les députés ici - et qui viennent vous dire: On est comme assis entre deux chaises: on n'a pas l'âge, ça ne fait pas assez longtemps qu'on est sorti de l'école, pas assez longtemps qu'on est chômeur, trop longtemps qu'on est assisté social... Et, finalement, selon qu'ils aient l'un ou l'autre des statuts, ils se retrouvent constamment entre deux chaises.

J'ai reçu, et je suis certaine que ma collègue a fait longuement la démonstration, une trentaine de lettres de différents organismes, pas des individus. Des individus, on dirait que c'est des individus. Mais, là, vous avez toutes les chambres de commerce de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, vous avez la plupart des municipalités et toutes les MRC. On ne peut pas avoir un projet de loi qui puisse prétendre répondre à des besoins alors qu'il y a une telle objection quant à la structure proposée. Et quand le Conseil du patronat fait sensiblement les mêmes représentations qu'on fait là-dessus, je commence à trouver que ça fait pas mal de monde et, si ça ne fait pas consensus général contre le projet, c'est une manifestation d'opposition qui mérite de faire réfléchir.

L'exclusion des personnes aptes au travail, mais bénéficiaires de l'aide sociale, de ce projet de formation, ça va à rencontre de tout le discours qu'on a tenu sur l'urgence et la nécessité d'adapter la main-d'oeuvre aux besoins de la société. Je ne vous ferai pas de longue démonstration, je suis certaine que vous y avez déjà réfléchi, parce qu'on a des données très précises sur les principaux facteurs qui expliquent ia pauvreté, et, au premier rang, c'est la sous-scolarisat'nn. C'est clair et net, c'est une constante au Québec. Et c'est peut-être au

Québec comme partout ailleurs dans le monde, sans doute. La sous-scolarisation entraîne une série de pathologies. Je me permets de raconter un fait, sans tomber dans le pathos. Ça s'est passé à la CSST. Les accidentés du travail...

M. Bourbeau: M. le Président, sur quel article est-on dans le moment?

Mme Blackburn: 26, M. le Président, et ça parle des assistés sociaux.

M. Bourbeau: Est-ce qu'on est dans la pertinence du débat avec la CSST, M. le Président?

Mme Blackburn: Oui.

(15 h 30)

M. Bourbeau: II me semble qu'on s'éloigne d'une façon dangereuse...

Mme Blackburn: Je voulais juste prendre un exemple qui pourrait éclairer le ministre, s'il écoute un peu.

Le Président (M. Joly): C'est parce qu'on était rendus dans des cas de comté.

Mme Blackburn: Des travailleurs accidentés qui, à cause de la structure, sont devenus assistés... bénéficiaires de l'aide sociale, et ces bénéficiaires...

M. Bourbeau: M. le Président, on n'est pas dans l'aide sociale, là, du tout, du tout. On est dans la main-d'oeuvre et dans les ententes de services avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Mme Harel: m. le président, on est tout à fait dans le sujet. on est dans l'exclusion des personnes assistées sociales des formations de main-d'oeuvre offertes par la société...

M. Bourbeau: On est dans l'exclusion, pas dans l'inclusion.

Mme Harel: ...et on est dans l'inclusion d'une... à partir d'un contrat que pourrait signer la Société, et on ne sait pas quel sera le volume de ces personnes qui pourront bénéficier ou pas de ces programmes de formation. Ce qu'on sait, c'est que présentement c'est dérisoire.

Mme Blackburn: Et ce qu'on sait, c'est que ces personnes exclues sont les plus faibles et les plus fragiles de la société parce que sous-scola-risées. Les travailleurs accidentés, 50 % des travailleurs accidentés ont moins de neuf ans de scolarité. Souvent, on explique qu'ils ont eu un accident par leur incapacité à décrypter une mesure d'urgence, une consigne d'urgence; ils sont incapables de , la lire, donc de l'interpréter, et ça explique un certain nombre d'accidents. Ce sont ces personnes-là qu'on retrouve le plus rapidement sur l'aide sociale parce qu'elles sont aussi mal équipées pour défendre leurs droits comme travailleurs accidentés. Et là on est en train de créer une espèce de catégorie de travailleurs potentiels aptes au travail, à part, parce qu'ils ont eu le malheur de passer de chômeurs ou de non-travailleurs dans une entreprise à un statut d'assisté social. Je pense que ce n'est pas susceptible de faire une intégration porteuse de développement. Dans ce sens-là, si on accepte une telle disposition, je ne peux qu'endosser les inquiétudes et les préoccupations exprimées par ma collègue.

S'il y a un dossier qui me tient à coeur... Je suis entrée en politique quasiment rien que pour ça, pour deux raisons: parce que je suis souverainiste, puis je crois que ça passe beaucoup par les connaissances, par le développement personnel et la scolarisation. On ne peut pas avoir un peuple plus indépendant que chacun des individus l'est généralement. Ça, c'est vrai. Alors, moi, j'ai toujours pensé que ça passait par la scolarisation. C'est un dossier que je connais bien, mais qui me tient à coeur. Si on ne le fait pas, je l'ai toujours dit, si on ne s'occupe pas de ces travailleurs assistés sociaux qui sont sous-scolarisés, c'est tout le Québec qu'on appauvrit. C'est toujours eux qui nous coûtent le plus cher. Puis ce n'est pas mal de le dire; c'est un peu triste de le faire, mais, en même temps, on le sait, c'est eux qui ont le plus de problèmes de santé, qui ont le plus de problèmes de comportements sociaux. Par exemple, juste en matière de sécurité, on apprend une chose absolument surprenante, ils ont moins tendance à attacher une ceinture de sécurité dans une voiture. On a appris, le ministre devrait écouter ça aussi, vous savez qu'il y a quatre fois plus d'analphabètes dans les pénitenciers fédéraux que dans la population normale. Ils sont incapables de contrôler l'information qui leur est livrée. Ça fait de ces individus-là des personnes comme s'ils ne parlaient pas la langue, quand vous n'êtes pas capables de la lire. Alors, c'est de ces personnes dont on parle quand on les exclut.

Vous savez, quand on les exclut de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, ce n'est pas de la main-d'oeuvre, ça? Je trouve que ça apporte, ça transmet, ça communique une perception négative quant à leur statut et à leur capacité de s'en sortir. Moi, je pense qu'il y aurait moyen, si le ministre le voulait - il ne semble pas très, très, très réceptif à l'idée - de le modifier de manière à inclure la possibilité de conclure des ententes en vue d'assurer la formation de ces personnes-là, et en nombre suffisant, évidemment. Ce n'est certainement pas là ce qui nous manque actuellement, des travailleurs bénéficiaires de l'aide sociale et aptes au travail. On en a combien de

centaines de milliers? Pour faire quelques écoles sans doute.

Alors, j'aurais terminé là-dessus. Je me permets cependant de rappeler au ministre, je lai fait en Chambre et je le refais ici, les organismes qui ont pris la peine de nous écrire pour dire: Ne laissez pas passer ce projet de loi. Alors, j'ai ici les lettres. Elles me viennent de la Chambre de commerce de Jonquière, de la ville de La Baie, de la municipalité de Saint-Félix-d'Otis, de la Corporation municipale de La Doré, de la municipalité de Saint-Ambroise, de la ville de Dolbeau, de Nutrinor - c'est une coopérative agro-alimentaire importante chez nous, il y a un nombre assez important d'employés; je ne voudrais pas vous le livrer, mais je pense que c'est quelque chose comme 200 - de la MRC de Maria-Chapdelaine, de la coopérative municipale de Larouche, de la ville de Jonquière, de la ville de Normandin, du Syndicat des producteurs de bois du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de la Fédération des syndicats du secteur aluminium - ça, ça représente 6000 ou 7000 employés - de la Chambre de commerce de Chicoutimi, du groupe Ce-gerco - qui est un groupe de génie-conseil, un des groupes les plus importants en génie-conseil, et qui a un bureau à la fois à Chicoutimi et à Jonquière et un à Montréal - de la ville de Métabetchouan, de la Chambre de commerce de La Baie, celle de Saint-Félicien, d'Alma, du cégep de Saint-Félicien, de la municipalité de Bégin, de la ville de Mistassini, de l'Association regroupant les femmes en emplois non traditionnels, l'ARFENT, de la Chambre de commerce régionale du Lac-Saint-Jean, de la Chambre de commerce de Chicoutimi, des corporations municipales de Saint-François-de-Sales et d'Hébertville, de la commission scolaire Chibougamau-Chapais, de la municipalité de L'Anse-Saint-Jean et de la ville de Desbiens. Et ça continue de rentrer. Quand je l'ai fait, quand je me suis présentée en Chambre et que j'ai pris la parole sur ce projet de loi, j'en avais 26; il y en a 4 de rentrées depuis.

Alors, ça ne veut pas dire que la satisfaction est totale et complète. Quand on a des manifestations d'opposition aussi importantes, il me semble qu'on doit un peu réviser ses positions. On ne légifère pas pour un gouvernement, on légifère pour du monde. Il me semble que c'est une affaire qu'il ne faudrait peut-être jamais oublier. Et, quand les principaux concernés estiment que ça ne fait pas leur affaire, surtout comme on ne légifère pas pour nous, pour se faire plaisir, il me semble qu'on devrait un peu réfléchir. J'ai terminé.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le ministre.

M. Bourbeau:...

Le Président (M. Joly): Merci. Donc, l'article 26...

Mme Harel: Sur division. le président (m. joly): ...est adopté sur division. j'ai cru comprendre, m. le ministre, que vous aviez un amendement, c'est-à-dire un ajout.

M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais introduire l'article 26.1 par voie d'amendement, à l'effet d'ajouter au projet l'article qui se lit comme suit: «26.1 La Société peut, conformément à la loi, conclure une entente avec un gouvernement au Canada ou à l'étranger, l'un de ses ministères ou organismes, une organisation internationale ou un organisme de cette organisation.»

Cet ajout vise à habiliter la Société à conclure une entente avec un gouvernement, un ministère ou un organisme autre que québécois.

Mme Harel: M. le Président, puisque le législateur ne parle jamais pour ne rien dire, peut-on savoir ce que le ministre veut dire quand il propose que la Société puisse conclure une entente avec un gouvernement à l'étranger?

M. Bourbeau: Disons, en premier lieu, qu'en précisant qu'une telle entente sera conclue conformément à la loi cette disposition implique que la Société se trouvera assujettie au cadre général de conclusion des ententes hors Québec. Ces ententes sont régies, soit par le chapitre III de la Loi sur le ministère des Affaires internationales, chapitre M-21.1, en ce qui concerne les ententes internationales, soit par la sous-section 2 de la section II de la Loi sur le ministère du Conseil exécutif, chapitre M-30, en ce qui concerne les ententes intergouvernementales.

M. le Président, il s'agit là d'une disposition qui n'est pas unique à ce projet de loi, qu'on retrouve dans d'autres sociétés, et qui fait en sorte que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre pourrait, éventuellement, conclure des ententes avec un gouvernement ou un organisme gouvernemental d'un autre pays, à l'effet de, comment dirais-je, effectuer un transfert technologique de connaissances qu'elle pourrait avoir ou d'expertise qu'elle pourrait avoir dans certains domaines, dans certains programmes. On pourrait penser, par exemple, et c'est même le cas présentement, que certains pays sont intéressés par le crédit d'impôt à la formation, par exemple, qui a suscité de l'intérêt dans certains endroits. Nous avons des discussions, par exemple, avec la Tunisie, présentement, relatives à des programmes de formation professionnelle, etc. Donc, la Société pourrait conclure des ententes semblables. (15 h 40)

Mme Harel: Donc, je comprends, par exemple, qu'il pourrait être possible qu'il y ait des échanges entre le Québec et la Tunisie, pour

reprendre l'exemple que donnait le ministre. Ça, ça vaut pour les ententes conclues avec un gouvernement à l'étranger. Mais est-ce que le ministre a une idée de la sorte d'entente qui pourrait être conclue avec une organisation internationale?

M. Bourbeau: Qu'est-ce que la députée entend par organisation internationale?

Mme Harel: La question lui est posée, c'est lui qui le propose dans son amendement à l'article 26.1: La Société peut, conformément à la loi, conclure une entente avec une organisation internationale.

M. Bourbeau: O.K. Je croyais que la députée elle-même avait cité une organisation internationale. M. le Président, dans les projets de loi qui emploient cette clause de style, on signifie en général les organisations qui oeuvrent sur la scène internationale comme l'OCDE, etc.

Mme Harel: Alors, ça veut donc dire... Qu'est-ce que le ministre recherche par l'amendement qui est apporté, l'article 26.1?

M. Bourbeau: À habiliter la Société à conclure des ententes internationales, des ententes avec des organisations internationales ou des organismes de ces organisations internationales.

Mme Harel: Et en regard du gouvernement canadien?

M. Bourbeau: Même chose, mêmes pouvoirs.

Mme Harel: Mais pourquoi l'avoir ajouté s'il ne l'avait pas prévu initialement? À quelle difficulté, en l'absence d'un tel amendement, il veut pallier en le présentant?

M. Bourbeau: À l'article 26, c'est les ententes avec un ministère ou un organisme public et, à l'article 26.1, c'est pour confirmer le pouvoir de faire des ententes avec des organismes à l'étranger, des organismes à vocation internationale.

Mme Harel: Est-ce que vous envisagez des ententes avec le RAPC?

M. Bourbeau: M. le Président, le RAPC, c'est un programme qui, semble-t-il, s'adresse plutôt au gouvernement qu'aux organismes gouvernementaux. Il semble que c'est plutôt le gouvernement qui fait des conventions ou des arrangements à l'intérieur de ce programme-là.

Mme Harel: Ça veut donc dire que la Société comme telle ne serait pas autorisée à conclure une entente avec le Régime d'assistance publique du Canada, par exemple?

M. Bourbeau: En fait, des ententes, c'est des gouvernements... S'il y a une entente, elle pourra faire des ententes avec des gouvernements ou des agences, mais on ne fait pas des ententes avec un régime.

Mme Harel: Alors, avec le gouvernement du Canada, est-ce que...

M. Bourbeau: Elle pourrait faire une entente avec...

Mme Harel: Si le ministre le veut, O.K., d'accord, est-ce que vous pensez que la Société...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: ...vous envisagez que la Société puisse conclure une entente avec le gouvernement du Canada concernant le partage de certains programmes dans le cadre du RAPC?

M. Bourbeau: M. le Président, je ne sais pas où on va aller dans cette direction-là, mais disons que, sur le plan juridique, si la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre obtient l'autorisation du gouvernement du Québec, elle peut conclure des ententes avec le gouvernement du Canada ou avec un autre gouvernement.

Mme Harel: Vous nous mentionniez, je crois hier, que vous aviez l'intention de transférer à la gestion de la Société le programme PATA, le programme d'aide aux travailleurs âgés licenciés. Est-ce que vous avez l'intention de faire de même pour le programme APPORT?

M. Bourbeau: Disons que ce ne sont pas des décisions qui ont été prises. M. le Président, c'est des choses qui sont présentement envisagées. Le programme APPORT, c'est un programme qui loge à la sécurité du revenu. Pour l'instant, la sécurité du revenu, ça va demeurer au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

Mme Harel: Le programme PATA aussi est logé à la sécurité du revenu.

M. Bourbeau: Le programme PATA, c'est un programme qui loge plutôt à la main-d'oeuvre qu'à la sécurité du revenu. Quand j'ai dit tantôt que le programme APPORT loge à la sécurité du revenu, je voulais dire qu'il loge au volet sécurité du revenu du ministère. Le programme PATA, c'est un programme qu'on négocie avec le ministère fédéral du Travail, donc c'est plutôt considéré chez nous comme un programme de main-d'oeuvre, pour l'instant en tout cas. Il y a une incitation au retour au travail dans le

programme PATA avec...

Mme Harel: Et le programme PAIE?

M. Bourbeau: Le programme PAIE, M. le Président, c'est aussi un programme de la sécurité du revenu, d'intégration à l'emploi. Pour l'instant, on n'envisage pas de le transférer. Mais je tiens à dire tout de suite à la députée que ces questions de programme en programme, il ne faudrait pas penser que les décisions finales sont prises. On est en train d'évaluer, de réfléchir sur toutes ces questions-là. Il n'y a aucune décision qui a été prise définitivement. Il pourrait y avoir des changements entre ce que je lui ai dit aujourd'hui, qui sont des intentions vagues, et les décisions qui pourraient être prises un peu plus tard. Tout ça est...

Mme Harel: Mais je comprends donc que, à première vue, vous pensez conserver la gestion du programme PAIE à la sécurité de revenu.

M. Bourbeau: Disons que tout ce qui est sécurité du revenu a de fortes chances de rester au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, et tout ce qui est plutôt main-d'oeuvre a de fortes chances d'être transféré à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Mme Harel: Et qu'est-ce que vous ferez avec les programmes à connotation sécurité du revenu financés à même les fonds fédéraux?

M. Bourbeau: Exemples?

Mme Harel: Exemples. Ceux qui nous étaient apportés par la Coalition québécoise pour le financement par l'emploi. Vous nous donniez l'exemple de PAIE, que vous nous disiez être un programme de sécurité du revenu plutôt qu'un programme de main-d'oeuvre. Donc, je comprends que les programmes de création d'emplois comme PAIE sont, pour vous, des programmes de sécurité du revenu plutôt que des programmes de main-d'oeuvre. Ce genre de programme a son pendant au niveau fédéral. On connaît le Bon d'emploi, fédéral, qui est un programme que le ministre peut considérer comme le pendant du programme PAIE, et on connaît les programmes, dont on a parlé, de développement de l'emploi. Alors, est-ce qu'il faut comprendre qu'il y aurait des programmes de développement de l'emploi qui seraient gérés par la Société et d'autres programmes de développement de l'emploi qui seraient gérés par les centres Travail-Québec?

M. Bourbeau: M. le Président, il est trop tôt pour s'avancer là-dessus. On ne ferait que spéculer. Comme, d'ailleurs, dans les questions constitutionnelles, on pellette des nuages, M. le Président, d'une certaine façon, parce qu'il n'y a pas de décisions qui ont été prises et la réflexion n'est pas encore assez avancée peur pouvoir donner des indications très précises. Je donne à la députée de Hochelaga-Maisonneuve des indications générales, mais, en ce qui concerne les cas particuliers, enfin les programmes pris un par un, toute réponse que je pourrais lui donner pourrait être changée en l'espace de quelques semaines, dès que les évaluations m'auront été transmises. Présentement, je n'ai pas vu les évaluations, donc je ne fais que donner, là, une réaction spontanée qui pourrait changer à la suite des évaluations.

Mme Harel: est-ce qu'on comprend, à ce moment-là, que le ministre veut avoir un pouvoir réglementaire général sans nous dire le moindrement ce qu'il pense faire avec?

M. Bourbeau: M. le Président, le pouvoir dont on parle, c'est un pouvoir qui existe dans un grand nombre de lois et, de toute façon, je ne vois pas pourquoi la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre ne pourrait pas conclure des ententes avec des organismes étrangers. La plupart des sociétés paragouver-nementales de ce type-là ont ce pouvoir-là et elles ne peuvent pas l'exercer sans faire valider par le Conseil des ministres les autorisations. Donc, à toutes fins pratiques, ça n'engage pas tellement le gouvernement.

Mme Harel: C'est-à-dire qu'à l'article 27 le ministre propose que le législateur accorde à la Société un pouvoir de conclure... c'est à l'article 26.1 plutôt... que le législateur accorde à la Société le pouvoir de conclure toutes sortes de types d'ententes, sans nous indiquer quelle sera l'orientation qui prévaudra. Mais je rappelle que le ministre a écarté l'amendement que nous avions déposé à l'effet d'introduire une représentation de groupes communautaires, et ce n'est pas sans inquiéter, M. le Président. Ça aurait permis une sorte de garantie que des personnes siégeant sur le conseil d'administration de la nouvelle Société auraient été porteuses des points de vue, des intérêts et de la problématique de ces emplois temporaires qui sont, depuis maintenant presque 25 ans, financés par les fonds fédéraux. (15 h 50)

Ça ne me rassure pas d'entendre le ministre nous dire que les programmes de création d'emplois... Parce que, finalement, PAIE est à Québec ce que le PDE est à Ottawa, le PDE de six mois, c'est-à-dire qui peut aller jusqu'à un an à Ottawa, mais qui est quand même plus payant que PAIE, c'est presque le double de PAIE. C'est sûr qu'il y a une inquiétude, c'est certain qu'il y a une inquiétude sur 'e terrain, de la part de gens qui disent: Oui, mais est-ce que Québec va niveler par le bas? Est-ce que ça va être l'égalité dans la malchance? C'est-à-dire

tout le monde au même montant que ce qui est payé dans le programme PAIE maintenant, qui est un maximum du salaire minimum, c'est-à-dire à peu près 180 $ par semaine, tandis que les programmes fédéraux allouent jusqu'à 340 $ par semaine. Alors, vous comprenez que, pour des programmes de création d'emplois, par rapport à des organismes qui utilisent l'un et l'autre des programmes de chacun des gouvernements, il y a comme un désir d'avoir des réponses claires sur ce qui arrivera avec les programmes fédéraux qui seraient transférés, si tant est que tout ça se passait, sans qu'il n'y ait aucune garantie sur le maintien de ces programmes. Je rappelle que le fédéral verse, chaque année, 75 000 000 $ pour le financement de projets axés sur le développement de l'employabilité, c'est-à-dire pour des programmes de développement de l'emploi, créant ainsi 8000 emplois temporaires d'une durée moyenne de six mois.

Hier, un regroupement de 600 organismes bénévoles - ce n'est pas rien, hein? un regroupement de 600 organismes bénévoles - oeuvrant au Québec convoquait une conférence de presse pour réclamer que ces programmes disponibles soient profondément consolidés de manière à offrir des emplois d'une durée moyenne de trois ans, allant parfois jusqu'à cinq ans. C'est évident... Imaginez-vous, un regroupement de 600 organismes, qui, actuellement, adressent leurs demandes à Ottawa, puisque ces 75 000 000 $ de financement de centaines de groupes communautaires et populaires sont assurés par Ottawa. Mais, dans la mesure où Québec obtiendrait le transfert de ces fonds, c'est évident que c'est Québec qui aura à répondre à leurs attentes. Qu'est-ce que le ministre nous dit présentement? C'est que les programmes que Québec gère en matière de création d'emplois, comme le programme PAIE, vont rester gérés par les centres Travail-Québec pour les personnes assistées sociales et non pas par la Société dans le cadre d'un programme de développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi.

M. le Président, je dois vous dire que, plus on avance dans le projet de loi, plus je suis convaincue qu'avec le tollé d'oppositions que ça génère, le ministre, c'est un service qu'on lui rend si le projet de loi n'est pas expédié rapidement pour avoir le temps d'y repenser.

M. Bourbeau: M. le Président, pour ce qui est de l'expédier rapidement, on repassera, parce que, même si on allait quatre fois plus vite, on ne l'expédierait pas rapidement non plus. Au rythme où vous allez, on s'en va à un train de tortue. M. le Président...

Mme Harel: On est à notre troisième journée, M. le Président.

M. Bourbeau: Oui, et on est rendus à l'article...

Mme Harel: Le ministre est bien impatient.

M. Bourbeau: On est rendus à l'article 25, M. le Président.

Mme Harel: en fait, on a siégé un après-midi et un avant-midi, et une journée. la deuxième journée, on a siégé en soirée seulement...

M. Bourbeau: Combien d'heures à date, Mme la Présidente... Monsieur...

Mme Harel: ...puis on a siégé une autre journée hier.

M. Bourbeau: Combien d'heures à date?

Mme Harel: Alors, l'équivalent, c'est deux jours, sauf aujourd'hui. Si vous trouvez que c'est trop vous demander pour un projet de loi qui est censé être de cette importance-là...

Le Président (M. Joly): Dix-sept heures.

M. Bourbeau: Combien d'articles adoptés, M. le Président?

Le Président (M. Joly): Nous sommes rendus au 22e article adopté... au 23e article adopté.

M. Bourbeau: Alors, si la députée de Hochelaga-Maisonneuve estime qu'on progresse, 17 heures, 22 articles...

Mme Harel: C'est très raisonnable, M. le Président.

M. Bourbeau: Oui, bien, c'est raisonnable dans votre optique, mais...

Mme Harel: On a vu ça très souvent dans bien d'autres projets de loi qui sont aussi importants que celui-là.

M. Bourbeau: Vous aimez faire durer le plaisir, on connaît ça. Pour répondre, M. le Président, à ce que la députée disait tantôt... Elle disait qu'on écarte les groupes communautaires. Je ne sais pas où elle a péché ça. Nous avons apporté un amendement, tout à l'heure, à l'article 5, je crois, qui laisse clairement entendre que, dans un des groupes, il y aura certainement une place de disponible, M. le Président, qui pourrait fort bien être occupée par des représentants des groupes communautaires. Donc, je ne pense pas que la députée est autorisée à dire que les groupes communautaires seront absents des structures de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Mme Harel: Peut-on croire, à ce moment-là, que ce seraient les groupes de femmes qui ne

seraient pas représentés si ce seul siège que vous consacrez à tous ces gens-là l'était pour un porte-parole des groupes communautaires?

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai l'intention de... J'ai trop d'estime pour les femmes, M. le Président, et j'ai l'intention de leur rendre le grand service de faire en sorte qu'elles soient représentées par plus qu'une personne au conseil d'administration. Si la députée veut se contenter d'une seule personne pour représenter les femmes, c'est son problème. Moi, j'ai l'intention de faire des efforts pour qu'un grand nombre de femmes compétentes puissent siéger au conseil d'administration de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre et, dans ce sens-là, j'ai l'appui de la ministre déléguée à la Condition féminine, M. le Président, qui ne s'inscrit pas, me semble-t-il, dans la ligne de pensée de ce dont parle la députée de Hochela-ga-Maisonneuve.

Mme Harel: Non, non, non. Alors, M. le Président, que le ministre se le dise, on va lui demander, à la ministre déléguée à la Condition féminine...

M. Bourbeau: Mais vous lui demanderez.

Mme Harel: ...si c'est la meilleure façon de procéder. S'il veut, je lui demanderai dès demain...

M. Bourbeau: Effectivement.

Mme Harel: ...à la période de questions, n'est-ce pas? Alors, on pourra vérifier auprès de la ministre déléguée à la Condition féminine - quelle bonne idée! - si ce qu'elle a transmis aux groupes de femmes - on va même, peut-être, déposer les lettres qu'on a eues - à savoir que la ministre déléguée à la Condition féminine ne considère pas que, parce que des organismes mandatent des femmes dans n'importe quelle organisation, ces femmes sont mandatées pour représenter les femmes. Est-ce que la députée de Saint-Henri se considère mandatée, dans ce Parlement, pour représenter les femmes, M. le Président?

M. Bourbeau: Pourquoi on devrait avoir quelqu'un qui représente les femmes?

Mme Harel: Elle est ici pour représenter les électeurs du comté de Saint-Henri...

M. Bourbeau: Est-ce que moi, je suis...

Mme Harel: ...hommes et femmes indistinctement...

M. Bourbeau: Est-ce qu'il y a quelqu'un qui représente les hommes à la Société québécoise de développer!.ent de la main-d'oeuvre?

Mme Harel: est-ce que la députée de saint-henri est mandatée, ici même, dans cette commission, pour représenter les femmes? non, m. le président.

M. Bcurbeau: Et pourquoi tenez-vous absolument à ce que quelqu'un représente les femmes?

Mme Harel: Ce sont ses électeurs, puis c'est mon cas, puis c'est le cas de Mme la députée de Chicoutimi. Alors, pourquoi...

M. Bourbeau: Vous vous sentez à ce point inférieures que vous avez besoin de quelqu'un pour vous représenter?

Mme Harel: Alors, si le ministre n'a pas encore compris après six semaines de commission parlementaire, où il se l'est fait dire par des dizaines d'organismes, M. le Président, s'il ne l'a pas encore compris, je suis prête à lui répéter. Mais j'ai l'impression que c'est un cas, c'est peine perdue. Il n'a pas encore compris qu'il y a des groupes qui sont discriminés dans la société sur le plan du marché du travail et de la main-d'oeuvre et que c'est à ces groupes-là que s'adresse une représentation qui leur permet, pas d'avoir un statut supérieur, mais qui leur permet simplement de rééquilibrer leur sous-représentation chronique, M. le Président.

Le ministre a reçu, d'ailleurs, de la Coalition des organismes communautaires pour le développement de la main-d'oeuvre, qui, aujourd'hui même, n'est-ce pas? c'est encore tout chaud, ont fait une conférence de presse... Alors, il s'agit de l'Association des clubs de recherche d'emploi du Québec, de l'Association des mouvements action chômage du Québec, de l'Association des parrains des services d'employabilité du Québec, de l'Association des services externes de main-d'oeuvre, de l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, du Centre de recherche-action sur les relations raciales, du Centre d'intervention pour l'accès des femmes au travail, du Conseil permanent de la jeunesse, de la Fédération des associations de familles monoparentales du Québec, de la Fédération des femmes du Québec, de l'Institut canadien d'éducation des adultes, de l'Institut de formation en développement économique communautaire, du Regroupement des centres de femmes, du Regroupement québécois des organismes de développement de l'employabilité. (16 heures)

Quand on réussit à provoquer une coalition de cette importance-là, qui est appuyée par des organismes aussi importants que la CSN, la CEQ, l'UPA, l'Association provinciale des commissions de forr^ption professionnelle et l'Opposition officielle, oui, M. le Président... L'ensemble de

ces organisations a reconnu la nécessité que le secteur communautaire ait une représentation significative au sein du conseil d'administration de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Et la Coalition annonce aujourd'hui même que, forte de ces appuis, quel que soit le sort qui sera fait au projet de loi, elle entend poursuivre ses démarches afin que le secteur communautaire soit reconnu comme un partenaire légitime et indispensable du développement de la main-d'oeuvre, autant à cause de son expertise que de sa connaissance des besoins des populations les plus vulnérables face au marché du travail.

Alors, ce n'est pas parce que ça va se terminer ici que pour autant, M. le Président, le ministre doit considérer que ça va être fini. C'est partie, une revendication légitime, c'est une spécificité de la société québécoise que cette importance du secteur communautaire dans la vie de la société québécoise, qu'elle soit sur le plan de la santé et des services sociaux, même sur le plan de la justice - on l'a vu, d'ailleurs, par le dernier sommet qui a permis l'irruption de la présence du communautaire à côté de la magistrature et des grandes corporations professionnelles comme la Chambre des notaires et le Barreau. C'est un phénomène incontournable dans la société québécoise. Le ministre a essayé de le harnacher, finalement, en reconnaissant un seul siège sur les 19 sièges. La pression va se poursuivre, la pression va continuer, M. le Président.

Alors, nous revenons donc à l'article 26.1.

Le Président (M. Joly): Est-ce que vous étiez en train de dire que vous n'étiez pas pertinente, là?

Mme Harel: Ha, ha, ha! Je vous laisse le soin d'en tirer vos propres conclusions.

Le Président (M. Joly): Ha, ha, ha! Non, c'est parce que vous sembliez me ramener à l'ordre, moi. Alors, l'article 26.1, Mme la députée. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, l'exclusion des bénéficiaires de l'aide sociale, c'est 313 477 personnes aptes au travail qui se trouvent exclues des services offerts par la Société, pas tant des services que de l'accès aux programmes de formation prévus par la Société. Si on inclut les personnes qui sont bénéficiaires de l'assurance-chômage, là vous augmentez, vous doublez sans doute ce nombre. Mais le problème, c'est que, normalement, la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre aurait dû être faite pour les 3 700 000 travailleurs, avec des dispositions lui permettant de rencontrer ces personnes.

Quand le gouvernement a commencé à s'intéresser à cette question, j'avais eu l'occasion d'en parler assez longuement, à différentes occasions, dans différentes commissions parlementaires, et, à mon grand étonnement, c'est quand, en se pétant les bretelles, il y a un peu plus d'un an, il déclarait que c'était la trouvaille du siècle, qu'il y aurait des crédits d'impôt à la formation dans les entreprises. Alors, les entreprises qui donnaient de la formation se verraient créditer un pourcentage x selon la formation donnée dans l'entreprise, avec un certain nombre de critères, évidemment, selon lesquels ces cours de formation pouvaient être crédités.

Alors, à la lecture du document et à la lecture de la politique, vous constatiez que ça irait donner des crédits d'impôt à toutes les entreprises qui en faisaient. Chez nous, à Alcan, à Arvida, ils ont commencé à donner de la formation, d'abord, à leurs contremaîtres et, ensuite, à leurs employés, avant même qu'on parle de formation à l'entreprise au Québec. Ce n'est pas compliqué, ils le faisaient déjà. Et, curieusement, ils ont pris, dans ce domaine de la formation, exactement la même orientation qu'ils avaient prise en matière de recherche et développement, alors qu'en matière de recherche et développement c'était un échec complet. C'était un échec complet parce que, selon les évaluations qui ont été faites à la demande d'un groupe de travail créé par le ministère de l'Industrie et du Commerce, ceux qui recevaient des crédits d'impôt pour des travaux de recherche avaient déjà été initiés les années précédentes. Ils ne comptaient même pas ça dans les bilans au moment où ils présentaient les états financiers. Ça leur arrivait comme un cadeau du ciel, ça, parce que, de toute façon, ils en faisaient. Par ailleurs, les petites entreprises qui auraient eu besoin d'avoir rapidement les sous pour soutenir un projet de recherche, elles, elles attendaient, évidemment, les rapports d'impôt puis elles ne pouvaient pas le porter. Ça a été exactement la même chose en matière de formation professionnelle.

C'est drôle, c'est comme s'ils n'étaient pas capables de voir les dimensions entières d'un problème; ils voient des morceaux. Ils s'en vont comme ça, des petits morceaux. C'est vrai qu'un puzzle, c'est fait de petits morceaux, mais en autant qu'on a une idée un peu de ce que ça veut donner comme image puis comment les morceaux s'imbriquent. Le problème avec ce gouvernement-là, il fait ça dans toutes ses lois. On n'a pas l'impression qu'il travaille sur des ensembles, il travaille sur des morceaux. Il travaille sur des morceaux. Et ce n'est pas comme ça qu'on aura, jamais, une politique un peu cohérente, susceptible de donner des résultats.

Parce que ce qu'on invoque ici et ce qu'on plaide... On ne plaide pas pour le plaisir de plaider. Moi, je vous dirais, comme ma collègue: II fait beau aujourd'hui, puis l'été, ce n'est pas long au Québec. Je suis sortie pour l'heure du

lunch puis il faisait beau, il faisait doux, ça aurait été agréable de rester à l'extérieur. Pourquoi pensez-vous qu'on soit en train de faire ce genre de travail, puis vous aussi, collés sur vos chaises? Simplement parce qu'on pense que c'est une loi qui devrait être aussi importante et aussi efficace que les différents intervenants l'ont souhaité, et c'est ça qu'on travaille. Et on se bute, mais constamment, constamment, avec la plupart des ministres, pas tous, malheureusement... ou heureusement, je dois dire, pas tous parce qu'il y en a qui comprennent puis, évidemment, ils comprennent aussi que l'intervention de l'Opposition, ce n'est pas juste pour faire de l'obstruction, c'est pour essayer d'améliorer des affaires, pour rendre les lois plus efficaces. Moi, je le maintiens. Je voudrais tellement que cette loi soit efficace que tout le monde puisse bénir le ministre demain matin. Je dirais: Tant mieux! Je n'éprouverais pas de malaise parce que, enfin, il y a un gouvernement, il y a un ministre dans ce gouvernement qui a fait quelque chose qui reçoit l'assentiment de la population. Je serais heureuse. Ce n'est pas comme ça qu'on travaille. On travaille dans le but de doter le Québec d'une loi capable de nous donner une véritable politique et de soutenir une politique de formation de la main-d'oeuvre. Et je trouve toujours ça un peu démobilisant. Je ne comprends toujours pas, non plus, comment, après sept ans, je continue à tenter de convaincre les personnes qui, d'avance, ont décidé qu'elles ne veulent pas. Mais ça fait partie de notre responsabilité. Et je me dis en même temps: Ça sensibilise mes collègues des deux côtés de la Chambre, tant de notre côté que du côté du gouvernement. Et j'imagine qu'ils ne sont pas sourds à ce qu'on avance; je sais que, pour une bonne part d'entre eux, ils savent qu'on a raison.

Mais ce qui m'étonne toujours, c'est qu'une fois qu'un ministre a pris une voie il trouverait complètement honteux de s'en écarter le moindrement, même quand on lui dit qu'il est dans l'erreur. Je veux dire, reconnaître une erreur, l'erreur est... Votre collègue, M. Ryan, disait: L'erreur est humaine, c'est de persévérer dans l'erreur qui est mal. Vous connaissez son sens de la morale. Alors, moi, je me dis: L'erreur est permise, elle est humaine. Je pense que ça fait partie de la grandeur de la personne qui est capable de la reconnaître. Moi, je pense qu'il faut être capable de reconnaître ses erreurs, puis ça ne diminue jamais personne de reconnaître que peut-être, à ce plan-là, il a erré puis il faudrait peut-être aller davantage dans la direction qui lui est indiquée. Je pense que tous, nous avons déjà fait des expériences où, difficilement, on avouait une erreur Mais jamais je n'ai regretté de l'avoir fait. Jamais je n'ai regretté de l'avoir fait parce que ça demande beaucoup de maturité. Mais ça demande aussi un certain courage parce que, au moins, on s'est avoué une faiblesse.

Moi, je pense qu'au gouvernement il y a un ministre, quand il est rendu £ ce poste, qu'il occupe ces fonctions, qu'il adopte une loi qui a des conséquences énormes sur des masses de population, il ne peut pas rester insensible à un discours de l'Opposition qui voudrait l'amener à examiner un peu ce que l'extérieur dit. Moi, je ne parle pas en mon nom, là. Vous savez, moi, je ne serai pas affectée par votre programme. Dieu me bénisse! puis je suis heureuse, puis j'ai des bonnes chances, et je croise les doigts. Mes enfants ne le seront pas non plus parce qu'ils se débrouillent bien. Et les vôtres, sans doute, hein? C'est ça, le problème: on est, nous, ici, en train de plaider pour des gens qui n'y sont pas et qui sont sans voix, et qui sont incapables d'infléchir le ministre. C'est toujours ce qui me peine un peu parce que c'est facile pour nous de regarder ça d'en haut et dire: Ça ne m'affectera pas bien gros dans mon quotidien, ça. Et ce n'est pas vrai, même, quand je dis ça, parce que ça m'affecte. D'abord, ça m'affecte parce que je suis sensible à ces situations et ça m'affecte aussi parce que ces gens-là sont moins productifs et s'ils sont moins productifs, c'est que ça me coûte plus cher, s'il faut le prendre sous cet angle-là. Si ce n'est pas pour des raisons humanistes, prenons-le pour des raisons de calcul bassement intéressé. Moi, je vous dis: Chaque fois que ces gens-là sont mal formés ou qu'ils sont obligés de frapper à trois, quatre portes, où on en fait des catégories, des catégories! je trouve ça triste. (16 h 10)

On n'est pas là en train de parler en notre nom. Moi, je vous dirais: Je me suis inscrite à cette commission, et je ne suis pas membre de cette commission, parce que ces questions-là m'intéressent, parce que, pour moi, c'est l'avenir du Québec qui est marqué par la qualité de la politique de formation de la main-d'oeuvre. On sera bons dans la mesure où on se sera donné une politique capable de répondre aux besoins, mais plus que de répondre aux besoins, de les devancer, mais aussi d'éviter cette espèce de compartimentation qui va avoir des effets particulièrement pernicieux. Ces cas-là, ça se ramasse dans nos comtés, ça, dans nos bureaux. Qu'est-ce que vous pensez qu'on leur dit? Les fonctionnaires ont moins l'occasion de rencontrer ces gens-là. C'est complètement... c'est déroutant. On ne sait pas quoi leur répondre. Ce qu'ils nous disent, c'est de sens commun: Voulez-vous me dire? moi, je suis sur le bian-être social puis je voudrais travailler, je voudrais me former; ils m'envoient dans un cours qui ne me convient pas, ou encore je voudrais aller là, je ne peux pas parce que je ne réponds pas à la bonne catégorie; tu sais, pour entrer dans cette catégorie-là, il faudrait que je leur mente. Qu'est-ce que vous voulez que je leur dise? Probablement, comme le président dit: Tu n'es pas obligé de tout dire. On finit par leur dire ça.

Le Président (M. Joly): Moi, j'ai dit ça? Madame, je m'excuse, madame...

Mme Blackburn: Non?

Le Président (M. Joly): ...mais je n'aimerais pas que vous continuiez sur cette voie-là...

Mme Blackburn: Très bien. Mais vous savez...

Le Président (M. Joly): ...parce que, là, vous me prêtez des paroles que je...

Mme Blackburn: Vous avez tout à fait raison, si vous ne voulez pas les endosser. Mais on ne dit rien...

Le Président (M. Joly): Non, je n'endosse pas, mais je n'aimerais quand même pas que ce soit inscrit dans les gâtées.

Mme Blackburn: Très bien.

Le Président (M. Joly): Si vous avez à me citer, vous me citez sur ce que j'ai dit.

Mme Blackburn: Bien, M. le Président. Je ne voulais pas vous offenser. J'expliquais...

Le Président (M. Joly): ...La réalité, c'est que vous parlez, vous n'avez peut-être pas le temps de penser à tout ce que vous dites, là.

Mme Blackburn: Pardon, M. le Président...

Le Président (M. Joly): Mais j'espère. Des voix:...

Mme Blackburn: M. le Président, là, je ne le prends pas. Je pense que ça demande...

Le Président (M. Joly): Non, non, mais...

Mme Harel: Demandez-lui de retirer ses paroles.

Mme Blackburn: Ça demande des excuses, et je demande au président...

Le Président (M. Joly): Non, mais je m'excuse, là...

Mme Blackburn: Là, aïe!

Le Président (M. Joly): Je m'excuse, chère madame, mais ne me prenez pas à partie dans ce que je n'ai pas dit.

Mme Blackburn: Non. M. le Président, je vais vous expliquer. Je pense que c'est...

Le Président (M. Joly): Je ne suis pas prêt à vous endosser dans ce que vous dites...

Mme Blackburn: M. le Président, vous allez me permettre de m'expliquer?

Le Président (M. Joly): ...nos visées différentes.

Mme Blackburn: Je pense que ce n'était pas offensant et c'était...

Le Président (M. Joly): Ça l'était très, si vous regardez le contenu de ce que vous avez dit et que vous me demandez d'endosser ce que vous avez dit.

Mme Blackburn: J'ai expliqué et je vais réexpliquer le cas...

Mme Harel: M. le Président, vous avez été vous-même...

Le Président (M. Joly): Je ne vous demanderai pas de retirer vos paroles, madame...

Mme Harel: M. le Président, vous avez vous-même été offensant avec Mme la députée de Chicoutimi.

Le Président (M. Joly): Madame...

M. Bourbeau: Alors, vous êtes quittes tous les deux, M. le Président...

Le Président (M. Joly): ...est-ce que vous êtes en train de dire qu'on se sert mutuellement la même médecine?

Mme Blackburn: Non. M. le Président, je n'ai pas voulu être offensante avec le président. Il l'a été avec moi, il a présenté ses excuses. Je vais expliquer ce que j'ai dit. Quand il se présente un jeune homme...

M. Bourbeau: II reste à vous à présenter vos excuses, maintenant. Lui, il l'a fait.

Mme Harel: Bien, elle explique, là.

Mme Blackburn: Je reçois un jeune homme dans mon bureau qui me dit: Madame, j'ai tout tenté pour essayer de me qualifier pour entrer dans un programme, je suis incapable de me qualifier parce que je ne suis pas dans la bonne catégorie; vous savez, je ne rentre pas dans le moule parce qu'ils me demandent des critères auxquels je ne réponds pas, O.K?, parce que je suis bénéficiaire de l'aide sociale ou je suis entre deux chaises parce que je viens juste de terminer, j'ai quitté l'école puis, là, je suis entre deux chaises: je ne sais pas par où passer. Et là, qu'il me dit: Madame, si je leur dis exactement

ce que je suis, ce que je fais, ils me refusent. Alors, je leur dis, comme sans doute, et c'est là que j'ai parlé du président, s'il veut m'écouter, je dis, à ce moment-là, au jeune homme: Bien, si vous pensez que ça peut vous faciliter l'entrée dans un cours de formation en évitant de dire tout, absolument tout sur votre situation, bien, écoutez, je ne vous dirai pas comment faire. Et c'est ça que j'ai prêté. Ce n'était pas offensant, d'aucune façon. Moi, je ne pense pas. Vous ne le faites pas. Bravo! Merci...

Le Président (M. Joly): non. là, je vous demande tout simplement de ne pas régler mes problèmes de conscience si vous, la vôtre est élastique.

Mme Blackburn: puis j'ai été très polie et je pensais que c'était fait sur le ton de la courtoisie. je connais le ton à présent, m. le président. je ne vous invoquerai plus ou je ne vous citerai plus...

Le Président (M. Joly): Merci.

Mme Blackburn: moi, je pensais qu'on le faisait sur le ton de la courtoisie. alors, si ce n'est pas ça le ton que vous voulez avoir ici, merci.

Le Président (M. Joly): Dans le sens que ça a été dit, je ne le prends pas.

Mme Blackburn: Je continue donc, M. le Président. Je continue donc, M. le Président. Alors, quand on est sur les dents, comme ça, on a un petit problème de fatigue, sans doute.

Le Président (M. Joly):...

M. Bourbeau: M. le Président, vous quittez?

Une voix: Non...

Le Président (M. Joly): Mme la présidente vient...

Mme Harel: Fait son entrée.

Le Président (M. Joly): ...jouer son rôle.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le vice-président, d'avoir assumé cette responsabilité.

Mme Harel: Je crois que vous étiez aux crédits, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça. J'étais convoquée. J'avais ordre de la Chambre d'être présente pour l'étude des crédits.

Mme Blackburn: Alors, l'amendement qui nous est déposé a été modifié parce qu'il y avait un amendement... d'abord, un premier amendement, et l'amendement qui nous est déposé vient modifier celui que nous avions, si j'ai bien compris. Alors...

Mme Harel: Qui vient s'ajouter.

Mme Blackburn: Qui vient s'ajouter à l'amendement? C'est un ajout?

La Présidente (Mme Marois): 26.1.

Mme Blackburn: Oui, ça ajoute à l'article, mais, par rapport au premier amendement que nous avions en main, il y a une modification pour y inclure une entente avec un gouvernement au Canada ou à l'étranger. Est-ce qu'il y a beaucoup d'ententes avec l'étranger?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: 11 n'y en a aucun. La Société n'existe pas encore.

Mme Blackburn: Bon. Actuellement, j'imagine qu'il doit y en avoir par le biais du ministère, par le biais des différents services. Je sais qu'il y en a entre des services dans les universités et dans les collèges, mais est-ce qu'il y en a pour la formation de la main-d'oeuvre de façon générale?

M. Bourbeau: Oui, il y en a...

Mme Blackburn: Est-ce que vous en prévoyez et de quelle nature?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: J'ai répondu à cette question-là tantôt; la députée de Hochelaga-Maisonneuve me l'a demandé. Même question.

La Présidente (Mme Marois): Alors, Mme la députée, est-ce que la réponse vous satisfait?

Mme Harel: Mais je n'ai pas eu de réponse.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée.

Mme Harel: Mme la Présidente, je n'ai pas eu de réponse. Alors, peut-être que Mme la députée de Chicoutimi va être plus chanceuse que moi.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: J'ai donné des réponses. Vous regarderez les galées. J'ai répondu parfaitement à cette question-là tout à l'heure. Même question,

exactement. Mais vous n'étiez pas ici, je pense, ou, si vous étiez ici, vous n'écoutiez pas.

Mme Blackburn: Pardon? Je voudrais comprendre. Je n'ai pas...

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: J'ai répondu à la question tout à l'heure.

Mme Blackburn: Vous disiez que je n'étais pas ici ou que je n'écoutais pas?

M. Bourbeau: L'un ou l'autre, puisque j'ai répondu.

Mme Blackburn: J'ai dû quitter, comme on a tous des obligations, pour rendre un appel téléphonique...

M. Bourbeau: Oui, oui, c'est correct. Je ne vous blâme pas.

Mme Blackburn: Généralement, quand je suis ici, M. le ministre, j'écoute...

M. Bourbeau: Parfait.

Mme Blackburn: ...attentivement.

M. Bourbeau: Moi aussi.

La Présidente (Mme Marois): Alors, est-ce qu'il y a d'autres questions ou commentaires sur l'amendement qui est l'amendement 26.1? Est-ce que l'amendement serait adopté à ce moment-ci? Oui, M. le député de...

M. Trudel: J'aurais peut-être une question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): ...Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Trudel: au niveau des ententes qui peuvent être conclues par la société avec toute autre organisation, est-ce que ça peut être des contrats rémunérés, comme on avait à 26, par ailleurs, avec des organismes scolaires, avec un collège, avec une université, avec un collège privé?

M. Bourbeau: C'est l'article 26. Là, on est sur les ententes avec des gouvernements étrangers pour les organismes internationaux. On a passé ça à l'article 26 tantôt.

M. Trudel: Oui.

M. Bourbeau: C'est adopté.

M. Trudel: Mais il existe aussi des organis- mes assimilables au plan des organismes du gouvernement canadien. Je vais vous donner un exemple: le Collège militaire royal de Saint-Jean, à Saint-Jean. S'il faut absolument le placer dedans, ça en est un exemple.

M. Bourbeau: Je croyais que vous parliez des collègues québécois. Si c'est en dehors du Québec...

M. Trudel: Non, non, non. C'est au Québec.

La Présidente (Mme Marois): Le Collège militaire, à Saint-Jean-sur-Richelieu, c'est ça?

M. Bourbeau: On va laisser Me Crevier répondre à ces questions subtiles, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Me Crevier.

M. Crevier (Luc): Quand il s'agit d'ententes faites avec un organisme à l'intérieur du Québec, ça peut être l'article 26 qui s'applique et qui mentionne que «la Société peut conclure des ententes de services rémunérés, notamment avec un ministère ou un organisme public» ou encore ça peut être en fonction de ses pouvoirs généraux, en tant que corporation, de conclure toutes sortes de contrats. Mais l'article 26.1 est réservé aux contrats à l'extérieur du Québec.

La Présidente (Mme Marois): M. le député.

M. Trudel: et ces contrats qui peuvent être signés en vertu du statut corporatif de la société, ces contrats peuvent couvrir de la dispensation de formation?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui. J'avais mal saisi la question. Oui, absolument.

M. Trudel: mais comment vous analysez la situation par rapport à la mission générale prévue pour la société d'être en support aux programmes du ministère et la possibilité... vous savez, m. le ministre, que ça a fait l'objet, le moindre qu'on puisse dire, de frictions, hein! de frictions importantes dans le réseau...

M. Bourbeau: Je pense qu'on s'est mal compris.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Quand vous dites «la dispensation de formation», dans un premier temps, j'avais cru penser que vous croyiez que la Société dispenserait elle-même des cours. C'est pour ça que j'ai dit non. Mais, après ça, j'ai

pensé que vous vouliez dire que la Société, en tant que cliente, pourrait engager, faire des ententes avec des formateurs qui seraient en dehors. Si c'est ça que vous voulez dire, oui, elle pourrait le faire, elle pourrait faire des ententes comme elle fait avec des cégeps, avec des commissions scolaires. Je présume qu'elle pourrait faire une entente avec le Collège royal de Saint-Jean ou des collèges qui sont de juridiction autre que québécoise. Mais la Société elle-même ne serait pas formatrice. Elle va être acheteuse de formation.

M. Trudel: Et est-ce qu'elle pourrait aussi...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député.

M. Trudel: Pardon, Mme la Présidente. Est-ce qu'elle pourrait être à l'inverse aussi? Est-ce que c'est interdit? Franchement, je n'ai pas vu dans l'article et je n'ai pas scruté, évidemment, aussi intensément et minutieusement. Mais est-ce que l'inverse peut se produire, c'est-à-dire que la Société devient dispensatrice et non plus acheteuse d'activités? (16 h 20)

M. Bourbeau: II n'est vraiment pas dans nos intentions, puis ce n'est pas, non plus, d'aller... Elle n'a pas ces pouvoirs-là dans la loi. La Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre n'est pas un organisme dispensateur de formation, ni les sociétés régionales. Tout au contraire, c'est un organisme qui est plutôt acheteur de formation ou qui fait des contrats en vue de prévoir la formation par des formateurs qui sont autres qu'elle. C'est pour ça tantôt, quand vous avez dit contrats de formation, je ne savais pas dans quelle direction vous le preniez.

M. Trudel: Mais vous savez qu'actuellement ça se pratique. Il y a des exemples de commissions de formation professionnelle qui sont devenues dispensatrices d'activités de formation.

M. Bourbeau: Moi, non. Mais je vais vérifier autour de moi.

La Présidente (Mme Marois): On va permettre au ministre de consulter des personnes qui pourraient l'aider à compléter la réponse.

(Consultation)

M. Bourbeau: Alors, M. le député, on vous écoute. Chez nous, on n'est aucunement au courant, enfin, les gens qui m'entourent, de commissions de formation professionnelle qui pourraient être des dispensatrices de cours. On attend vos révélations.

M. Trudel: Non, mais qu'en vertu de contrats...

La Présidente (Mme Marois): Alors, M. le député.

M. Trudel: Vous dites: II n'y a aucun contrat qui existe dans aucune commission de formation professionnelle au Québec qui ferait en sorte qu'on serait la cheville qui fait en sorte que l'activité est dispensée dans telle région, par exemple, pour telle activité de cours, etc., parce que je me souviens très bien d'avoir interpellé, même dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue, la commission de formation professionnelle pour dispenser des cours. Parce que vous savez ce qui peut se passer si ce n'est pas restreint à ce niveau-là dans la loi. C'est que l'organisme même peut devenir une espèce de sous-contractant pour un autre organisme à titre de dispensateur d'activités parce qu'il n'y a pas de convention collective, il n'y a pas de conditions de travail de prévues, il n'y a pas d'encadrement qui est prévu à cette fin-là, et rien n'empêcherait la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre de devenir contractante et de dire: Bon, pour tel programme, moi, je vais dispenser, je vais aller chercher mes ressources, par exemple au collège, et je vais dispenser. Est-ce que, formellement, la loi interdirait cela?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, ce n'est pas la vocation de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, ou de ses sociétés régionales, ni des CFP présentement, de dispenser elles-mêmes la formation. Elle sert de véhicule entre un individu qui a des besoins de formation et un formateur, ou de lien entre les deux. Elle peut acheter de la formation, elle peut organiser des cours, si vous voulez, préparer l'organisation des cours, mais ce n'est pas la CFP... ce ne sera certainement pas la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre qui va agir comme formateur. Ce n'est pas sa vocation. On n'a pas prévu, non plus, dans le projet de loi ces fonctions-là, et je ne vois pas comment elle pourrait le faire.

La Présidente (Mme Marois): M. le député.

M. Trudel: Est-ce que, M. le ministre, de dispenser elle-même une activité de formation, pour la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, ce serait, dans votre esprit, de favoriser, de soutenir le développement de la main-d'oeuvre?

M. Bourbeau: Le fait de donner des cours?

M. Trudel: Oui.

M. Bourbeau: Bien, je présume qu'on peut

donner tout le sens qu'on veut, dans un sens très large...

M. Trudel: Je vous demande ça, comme question au hasard.

M. Bourbeau: ...soutenir le développement de la main-d'oeuvre, ce serait être tiré par les oreilles, comme on dit, mais tout est... Vous savez, soutenir, là, c'est aussi large que long. Vous pouvez avoir cette interprétation-là, je présume, vous pourriez.

M. Trudel: Oui, parce que vous allez convenir assez facilement qu'en matière de soutien au développement de la main-d'oeuvre, si la formation et le perfectionnement ne font pas partie des mesures de soutien, là, je ne sais pas dans quel monde on vit.

M. Bourbeau: Mais c'est parce que ce n'est pas clairement dit. C'est vague, ça, soutenir le développement de la main-d'oeuvre, vous savez, ça peut comprendre bien des choses. À la rigueur, ça peut certainement comprendre la formation. Mais la Société québécoise soutient, oui, le développement de la main-d'oeuvre dans le domaine de la formation en subventionnant la formation, mais il y a toute une marge entre subventionner la formation et donner la formation. Votre question, c'est: Est-ce que la Société va être une formatrice? Je vous signale, à cet effet-là, que nous faisons un pas dans la direction que vous souhaitez, en ce sens que dans la loi actuelle sur les commissions de formation professionnelle, la Loi sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre, sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, on donne le pouvoir, à l'article 7, aux commissions de formation professionnelle de donner des cours d'apprentissage, de formation professionnelle...

M. Trudel: C'est ce que je voulais dire.

M. Bourbeau: Bon. Alors, on n'a pas répété ces pouvoirs dans la présente loi indiquant très bien les directions dans lesquelles on veut aller. Donc, vous devriez être content, satisfait et réjoui qu'on ne répète pas ces articles-là. Si je comprends bien, vous vous inscrivez dans...

La Présidente (Mme Marois): M. le député, est-ce que c'est le cas, êtes-vous content et réjoui?

M. Trudel: Ah! je suis un peu plus heureux...

M. Bourbeau: Rassuré?

M. Trudel: ...mais je suis loin d'être satisfait. Je suis loin d'être satisfait parce que, si ce n'est pas l'intention du législateur, compte tenu des problèmes que ça a causés dans bien des régions du Québec... Effectivement, la loi actuelle permet de dispenser des activités de formation, en matière de perfectionnement ou de formation de base, il y a toutes sortes de choses qui se sont produites là-dedans. Mais, si le législateur ne prévoit pas explicitement que ça ne puisse se réaliser, il est évident que de telles pratiques vont se poursuivre ou pourraient se poursuivre dans le réseau, ça me semble inévitable. Et c'est toute la zone grise que ça a créée en matière de formation et de perfectionnement au cours des dernières années, ça a causé... Ne me dites pas, vous ne pouvez pas me dire que vous n'étiez pas au courant des frictions, du niveau de frictions élevé dans bien des régions du Québec entre les commissions de formation professionnelle et les maisons d'enseignement ou les établissements, parce qu'il y a cette possibilité qui n'est pas exclue nommément de par la loi, ici, et qui pourra se reproduire. Ça a causé énormément de problèmes au niveau des établissements et des employeurs aussi et des personnes qui cherchaient cette formation.

Vous savez, rendu à terme, souvent la déclaration, c'est ça, la déclaration du maître d'oeuvre qui initie la procédure de soutien ou la mesure de soutien, c'est: Bien, écoutez là, moi, je la veux, cette formation-là, moi, je désire que cette activité-là soit dispensée. Puis le cadre de l'établissement dans lequel on veut acheter le type de service dit: Moi, j'ai des normes, j'ai une réglementation, j'ai une organisation, j'ai une planification. Alors, la tentation est bien grande de dire: Je vais sauter carrément pardessus parce que, moi, la loi ne m'interdit pas. La loi ne m'interdit pas de dispenser des activités de formation, y compris, M. le ministre et Mme la Présidente, aussi d'autres effets pervers possibles. Je ne dis pas que c'est largement répandu, je n'ai pas les moyens d'enquêtes et d'examens du ministre, mais y compris les effets pervers d'établissements de formation qui pourraient eux-mêmes passer par le véhicule de la CFP pour faire en sorte que des activités soient dispensées dans des conditions autres que celles prévues dans le cadre de cet établissement-là.

Je vais vous donner un exemple. Évidemment, les collèges ont tous du personnel syndiqué et avec des conditions de travail très bien définies. Si vous voulez faire une passe, si vous voulez en arriver à sauter par-dessus ces conditions de travail, vous avez l'instrument idéal; vous n'avez qu'à vous installer de connivence avec votre groupe régional de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre et la CFP actuellement et dire: Bien, sais-tu? comme il y a un besoin évident qui est mentionné, comme il y a un besoin évident qui nous est apparu, puis moi, je ne peux pas tout à fait, dans les coûts que vous nous proposez, réaliser l'activité, je vais la réaliser à travers ton cadre juridique,

ton cadre corporatif. Ça, M. le ministre, j'ai vu cette pratique s'initier à plusieurs occasions. Alors, vous n'avez pas peur que tout ça puisse se produire avec une aussi large définition de la possibilité de faire des ententes rémunérées?

M. Bourbeau: Non, non.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Non, Mme la Présidente. La réponse, c'est non.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. (16 h 30)

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, j'ai demandé au secrétariat de notre commission de nous fournir la répartition du temps mis à notre disposition depuis le début de l'examen du projet de loi 408. Alors, je constate qu'à 15 h 25 - alors, les chiffres sont donc en date d'aujourd'hui, 17 juin, à 15 h 25 - nous avons siégé l'équivalent de 15 h 10 min 19 s, alors 15 h 10 min. L'Opposition a utilisé 7 h 33 min; le ministre, 5 h 54 min. Il y a eu une suspension de 42 min, et le reste du temps a été laissé au président, c'est-à-dire à la présidence. En fait, 10 min, n'est-ce pas?

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Ce qui est très court, finalement. Donc, je n'avais pas exagéré ce matin.

Mme Harel: Alors, quand on calcule le temps de l'Opposition, sur ces 15 h 10 min, soit 7 h 33 min, on se rend compte, Mme la Présidente, qu'au total, nous avons utilisé à peine 55 % du temps de l'examen de la commission depuis le début de nos travaux. Alors, ça me semble, en fait, raisonnable et assez intéressant. C'est donc un total de 15 h 10 min, n'est-ce pas? Ceci dit...

M. Bourbeau: Mme la Présidente, sur ce sujet-là...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...je conclus deux choses. Premièrement, c'est que le ministre, jusqu'ici, était de bonne foi...

Mme Harel: Oui.

M. Bourbeau: ...il l'est encore, d'ailleurs.

La Présidente (Mme Marois): J'espère.

M. Bourbeau: Je prends bien note de ce que vient de nous dire la députée de Hochelaga-

Maisonneuve. Je promets de m'amender pour l'avenir, Mme la Présidente, d'une façon spectaculaire.

Une voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Moi, ce que j'allais dire, c'est qu'effectivement c'est à peu près ce qu'on retrouve habituellement, compte tenu qu'il reste que, souvent, il y a plus d'un intervenant du côté de l'Opposition et que c'est un petit peu normal. Donc, ça reste dans l'équilibre.

M. Bourbeau: Ah! Vous allez en apprendre beaucoup d'ici la fin, Mme la Présidente, je vous le promets.

La Présidente (Mme Marois): J'en apprends toujours...

Mme Harel: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): ...M. le ministre, dans toutes les circonstances où...

M. Bourbeau: D'ici la fin des travaux.

La Présidente (Mme Marois): ...j'ai la chance de présider la commission ou d'être membre d'une commission. Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Mme la Présidente, sachant que nous avons jusqu'à minuit ce soir...

La Présidente (Mme Marois): C'est cela.

Mme Harel: ...alors, vaut mieux maintenir un climat de mutuelle courtoisie, disons, dans cette commission. Ceci dit, je souhaiterais que le ministre nous indique...

La Présidente (Mme Marois): Je constate que c'est toujours le cas, Mme la députée.

Mme Harel: ...si, l'amendement qu'il introduit à 26.1, cela peut permettre à la Société de conclure une entente avec la Commission nationale, la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre?

M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: Donc, je comprends que la Société, en vertu de 26.1, pourrait directement conclure une telle entente avec la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre. D'abcrd, Mme la Présidente, laissez-moi vous présenter cette Commission canadienne de mise

en valeur de la main-d'oeuvre, et vous, dire toute l'importance que revêt la réponse que le ministre vient de nous donner. La Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre a été mise sur pied en janvier 1991 et, à partir de là, la ministre McDougall, qui en était, à ce moment-là, responsable, avait annoncé la création de la Commission pour donner suite aux recommandations découlant des consultations organisées par le Centre canadien du marché du travail et de la productivité.

Ai-je à vous rappeler que le Centre canadien du marché du travail et de la productivité avait obtenu un mandat de la ministre fédérale - Emploi et Immigration - de conduire des consultations sur la question de l'application de la stratégie de mise en valeur de la main-d'oeuvre, de conduire des consultations auprès des entreprises, auprès des syndicats, et de les conduire d'un océan à l'autre. Moi, j'ai eu la chance de participer à l'une de ces consultations qui s'est tenue à Montréal. Il y a eu six grandes consultations. Celle de Montréal a porté sur les bénéficiaires de l'aide sociale et sur toute la question de l'aide sociale. Ça se passait entièrement en anglais - ai-je besoin de vous le dire - et tous les commissaires nommés pour mener cette consultation étaient anglophones. Je pense que tous étaient anglophones, et je pense que la majorité était unilingue. Cette consultation... Je comprends que le gouvernement du Québec, le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle n'y ont pas été associés, n'ont pas voulu s'y associer. Je crois qu'ils n'y ont envoyé aucun représentant, si ma mémoire est bonne. Donc, le fédéral charge le Centre canadien du marché du travail et de la productivité de conduire cette consultation. Une fois terminée, la consultation, le rapport qui en est rédigé propose la mise en place d'une Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre, ce qui est fait. À partir de janvier 1991, des discussions sont amorcées avec les gouvernements provinciaux - dont nous sommes toujours - de toutes les provinces relativement à la création de structures consultatives à l'échelle provinciale et territoriale.

En d'autres termes, ce que nous faisons aujourd'hui, là, il ne faut pas que vous pensiez que c'est singulier et spécifique, et surtout pas de la concertation. Parce que si le ministre était le moindrement sensible à la concertation, s'il l'était le moindrement, c'est évident, Mme la Présidente, qu'il aurait été énormément plus sensible à l'importance d'apporter des changements à son projet de loi. Moi, je ne comprends pas, vraiment! On ne serait pas ici à siéger - puis, je veux que ses collègues le sachent parce que lui le sait - si certains amendements avaient été apportés au projet de loi, ou s'il nous disait qu'il allait proposer au Conseil des ministres d'apporter certains amendements. Je vous assure que ce n'est pas la mer à boire!

Il y a un tollé de protestations. Il y a quatre pôles d'opposition. Il y en a un qui est quasi inconditionnel, c'est celui qui est représente par le groupe qui a fait une conférence de presse, hier: Conseil du patronat, Chambre de commerce du Québec...

M. Bourbeau: Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: On est toujours à l'article 26.1 sur les contrats internationaux. Il me semble qu'on est loin un peu. La pertinence...

Mme Harel: Non, non. On est avec la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre.

M. Bourbeau: Non, non. Mais vous n'étiez plus là, là. Revenez-y!

Mme Harel: Vous proposez que la Société fasse entente avec cette Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre.

M. Bourbeau: Revenez-y!

Mme Harel: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Vous avez...

Mme Harel: ...je vais vous prouver à quel point je suis dans le sujet. 26.1...

La Présidente (Mme Marois): Je n'en doute pas, Mme la députée.

M. Bourbeau: Moi, j'en doute, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Je voudrais juste, peut-être, répondre au ministre. Compte tenu du temps qui nous est imparti, je pense qu'il est loisible de permettre aux personnes...

M. Bourbeau: De parler de...

La Présidente (Mme Marois): ...qui sont membres de la commission, aux membres de la commission d'intervenir sous l'angle qui leur convient, et de faire valoir leur point de vue pour se ramener plus spécifiquement à l'objet de l'article.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, je comprends, mais là la députée ne parle plus des contrats internationaux, elle parle de la liste des organismes québécois qui s'opposent au projet de loi. On n'est plus du tout sur l'article 26.1. Il me semble que... Est-ce que vous êtes contre la

pertinence, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Marois): Pas du tout, absolument pas. Comme la députée nous a dit qu'elle nous rappellerait la pertinence de son point de vue, je vais lui permettre de s'exprimer sur cela.

M. Bourbeau: Qu'elle revienne rapidement!

Mme Harel: Certainement. Sur la pertinence, Mme la Présidente, là?

La Présidente (Mme Marois): Certainement.

Mme Harel: Je veux vous rappeler que nous ne sommes pas qu'à examiner un amendement qui propose à la Société de conclure des ententes avec les gouvernements étrangers. À moins que, pour le ministre, le Canada soit maintenant un gouvernement étranger. Nous en sommes à un amendement qui permet, en plus des ententes avec les gouvernements étrangers, qui permet aussi à la Société de conclure des ententes avec un gouvernement au Canada, un de ses ministères ou organismes. Le ministre lui-même vient de me répondre que la Société pourrait, en vertu de cet amendement, conclure une entente avec la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre. Je rappelle, Mme la Présidente, que cette Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre a été mise en place malgré le désaccord de Québec. Cette Commission canadienne, qui est composée de 22 membres représentant les syndicats, le monde des affaires, les groupes d'action sociale, les établissements de formation, c'en est une vraie commission de partenariat. Et bien, cette Commission, Mme la Présidente, siège actuellement. Elle avait, dit-on, prévu un siège pour Québec, et Québec ne l'a pas utilisé. Cette Commission a comblé le siège ainsi refusé par quelqu'un d'autre, et cette Commission a amorce des discussions avec les gouvernements provinciaux. Je vous rappelais que la structure consultative, là-La Présidente (Mme Marois): Vous allez me permettre, Mme la députée, de vous souligner que vous en êtes à la fin des 20 minutes qui sont prévues - et je pense qu'on a très clairement calculé le temps depuis le début de l'après-midi - pour votre intervention sur l'amendement 26.1. Ce qui n'est pas le cas, évidemment, du député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, ni des autres membres de la commission - entre autres, je vois le député de Nelligan, là - qui pourraient évidemment utiliser leur temps de parole.

M. Houde: Ce n'est pas d'hier qu'on siège ici. Depuis 12 ans! On connaît un peu les règlements.

La Présidente (Mme Marois): Je n'en doute pas, M. le député.

Mme Harel: Alors, ai-je besoin, Mme la Présidente, de vous dire que nous allons voter contre cet amendement en vous signalant qu'il s'agit là, en fait, de permettre à Québec de s'en tirer à bon compte par une entente administrative qui va simplement lui donner le pouvoir de sous-contracter les priorités qui seront définies par la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre. (16 h 40)

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Alors, est-ce que l'amendement 26.1 est adopté?

Mme Harel: Un vote nominal, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Marois): Un votre nominal. Alors, Mme la secrétaire. Oui, Mme la secrétaire, si vous voulez appeler les députés. Je rappelle que le vote porte sur l'amendement 26.1 qui, je pense, a été distribué à tous les membres de la commission, et qui se lit comme suit: «La Société peut, conformément à la loi, conclure une entente avec un gouvernement au Canada ou à l'étranger, l'un de ses ministères ou organismes, une organisation internationale ou un organisme de cette organisation.»

La Secrétaire: Alors, M. le ministre, M. Bourbeau (Laporte)?

M. Bourbeau: Oui, en faveur. La Secrétaire: M. Joly (Fabre)? M. Joly: Pour, madame. La Secrétaire: M. Houde (Berthier)? M. Houde: Pour.

La Secrétaire: Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve)?

Mme Harel: Contre.

La Secrétaire: Mme Loiselle (Saint-Henri)?

Mme Loiselle: Pour.

La Secrétaire: Mme Marois (Taillon)?

La Présidente (Mme Marois): Contre.

La Secrétaire: M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue)?

M. Trudel: Contre.

La Secrétaire: Alors, M. Williams (Nelligan)?

M. Williams: Pour.

La Présidente (Mme Marois): Alors, Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire: 5 à 3. L'amendement est adopté.

La Présidente (Mme Marois): Alors, l'amendement est adopté: 5 voix pour et 3 contre. Bon, nous en sommes maintenant à l'article 27.

M. Bourbeau: cet article permettra au gouvernement d'assujettir, en vertu d'un règlement qu'il pourra adopter, la conclusion par la société de certains types de contrats à l'autorisation du ministre de la main-d'oeuvre, de la sécurité du revenu et de la formation professionnelle ou du gouvernement lui-même.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre.

M. Bourbeau: Je voudrais, Mme la Présidente, introduire un amendement pour remplacer l'article 27 du projet de loi par le suivant: «La Société ne peut, dans les cas déterminés par règlement du gouvernement, conclure un contrat dans le cadre des programmes qu'elle administre sans l'autorisation du ministre ou du gouvernement selon ce que le règlement prévoit.»

On comprendra que cet amendement a pour objet de limiter les catégories de contrats susceptibles de faire l'objet du pouvoir réglementaire qui est prévu à l'article. En effet, seuls les contrats conclus en application des programmes que la Société administrera pourront être assujettis, aux fins de leur conclusion, à l'autorisation du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle ou du gouvernement. Le pouvoir réglementaire spécifique qui est prévu par l'article 27 du projet de loi n'enlèvera rien au fait que la Société demeurera assujettie à la réglementation générale issue de la Loi sur l'administration financière et de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services.

La Présidente (Mme Marois): Ça va, M. le ministre? Est-ce que vous avez d'autres commentaires à ajouter?

(Consultation)

Mme Harel: Je trouve que cette formulation-là est lourde, hein, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Marois): J'ai l'impression que le ministre, lui-même, essaie vraiment de bien déchiffrer par rapport à ce que nous avons dans l'article principal.

M. Bourbeau: Mme la Présidente... La Présidente (Mme Marois): Oui.

M. Bourbeau: J'étais en train de parler de sport avec mon voisin.

La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse. Je vous attendais, je croyais que vous vouliez ajouter des commentaires.

M. Bourbeau: Non, non, pas du tout.

La Présidente (Mme Marois): Vous aviez terminé votre intervention.

M. Bourbeau: J'ai terminé, bien oui.

La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse, M. le ministre. Alors, Mme la députée de Hoche-laga-Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, Mme la Présidente, je dois vous dire que j'ai rarement vu une rédaction aussi lourde. La, on introduit un amendement pour nous dire ce que la Société ne peut pas faire. C'est assez rare, ça, comme technique de rédaction des lois. Habituellement, on dit dans une législation ce que la Société peut faire, ou on dit ce que le législateur décide qu'une régie ou un office peut faire. Là, on dit: La Société ne peut. Donc, ça veut dire qu'elle ne peut pas...

Une voix: C'est ça.

Mme Harel: «...conclure un contrat dans le cadre des programmes qu'elle administre sans l'autorisation du ministre ou du gouvernement selon ce que le règlement prévoit.» Puis, on a déjà dit: «La Société ne peut, dans les cas déterminés par règlement du gouvernement...» On a deux fois le mot «règlement», puis il n'a pas l'air de référer à la même affaire. Je vous assure, là, que je trouve ça un peu compliqué comme technique. C'est quoi, l'idée?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, est-ce que vous voulez commenter?

M. Bourbeau: si vous trouvez que la technique est compliquée, on va demander à l'auteur de la technique de nous donner son point de vue sur la question.

La Présidente (Mme Marois): Alors, Me Crevier.

M. Crevier: Oui. Quant au terme «règlement» qui est utilisé au départ, là, on vise bien sûr le règlement qui va venir déterminer quel contrat sera assujetti à l'autorisation. À la fin de la disposition, on vise tout simplement le même règlement, selon ce que le règlement prévoit. Alors, on vise bien le même règlement qu'on mentionne un peu plus haut.

Mme Harel: Pourquoi le faire deux fois?

M. Crevier: C'est pour préciser la mesure dans laquelle... C'est que le règlement va donner la mesure dans laquelle les contrats seront sujets à autorisation.

Mme Harel: Alors, pourquoi le premier... M. Crevier: C'est-à-dire, excusez... Non.

Mme Harel: ...membre de phrase est utile? On pourrait très bien dire: «La Société ne peut conclure un contrat dans le cadre des programmes qu'elle administre sans l'autorisation du ministre ou du gouvernement selon ce que le règlement prévoit» si c'est le même règlement que ce qui est à la première ligne.

La Présidente (Mme Marois): Me Crevier.

M. Crevier: C'est effectivement le même règlement que dans la première ligne. On dit: «dans les cas déterminés par règlement», sauf qu'on dit plus loin que c'est l'autorisation du ministre ou celle du gouvernement. Alors là, on vient préciser que le même règlement va venir dire si c'est le ministre ou le gouvernement qui va devoir autoriser la conclusion du contrat. En fait, quand on dit: «selon ce que le règlement prévoit», on renvoie au même règlement. Ça pourrait aussi être «selon ce que ce règlement prévoit», ça aurait le même sens.

Mme Harel: Alors, il faut faire une règle de trois, là. Il y a des contrats qui seraient assujettis, d'autres ne le seraient pas. Parmi ceux qui sont assujettis, certains le seraient... C'est-à-dire qu'il y a des contrats assujettis à une autorisation, puis d'autres ne le sont pas. Ceux assujettis à une autorisation, il y en a qui sont assujettis à l'autorisation du ministre et, d'autres, à l'autorisation du gouvernement.

La Présidente (Mme Marois): Me Crevier.

M. Crevier: C'est-à-dire qu'en principe aucun contrat ne sera assujetti tant qu'il n'y aura pas un règlement qui va venir prévoir qu'une autorisation est requise. Donc, en principe, il n'y en a pas, d'autorisation. Le règlement peut en exiger une et, à ce moment-là, le règlement va venir préciser lui-même s'il s'agit d'une autorisation du ministre ou du gouvernement.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce qu'il n'y a pas, effectivement, une façon peut-être plus simple de le dire? Je pense que l'intention est claire, là, et assez précise, mais est-ce qu'il n'y a pas une façon de le rédiger qui serait un petit peu moins lourde, si on veut? C'est un peu le sens de votre remarque, Mme la députée? On pourra venir sur le fond par la suite.

Mme Harel: Bien, Mme la Présidente, on va ajourner, le temps que le ministre revienne. On va suspendre, je veux dire.

La Présidente (Mme Marois): Je n'ai pas d'objection à ce que nous suspendions pour quelques instants...

Mme Harel: D'accord.

La Présidente (Mme Marois): ...le temps que le ministre se joigne à nous.

(Suspension de la séance à 16 h 49)

(Reprise à 16 h 54)

La Présidente (Mme Marois): ...pour que nous reprenions nos travaux. C'est ce que je peux constater. Alors, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, je crois que c'est vous qui aviez la parole.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Suite aux explications qui nous ont été données par Me Crevier, je comprends donc qu'il y aura des contrats assujettis à une autorisation, mais que le principe, c'est qu'il n'y ait pas d'autorisation, à moins qu'un règlement prévoie qu'un tel contrat exige une autorisation. Certains contrats exigeront une autorisation du ministre seulement, d'autres, une autorisation du gouvernement. Mais, dans le mémoire au Conseil des ministres concernant l'article 27, je lis ceci: Puisqu'il existe déjà un contrôle du Conseil du trésor sur l'activité contractuelle des organismes publics, il est apparu nécessaire de limiter le contrôle prévu à l'article 27 initialement rédigé aux seuls contrats conclus par la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre dans le cadre de l'administration de ces programmes.

Alors, si c'est l'objectif qui est recherché, pourquoi est-ce que ça n'a pas été dit clairement dans la rédaction de l'amendement?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je vais laisser répondre Me Crevier, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Me Crevier.

M. Crevier: C'est que la Loi sur l'administration financière - et là je réfère aux articles 49 et suivants, qui ont été récemment adoptés par l'Assemblée nationale - s'applique en soi aux organismes publics, dont la Société. Alors, on n'a pas à répéter le fait que cette loi-là s'applique. Elle s'applique comme une foule d'autres lois, comme, je r.a sais pas, moi, la Charte des droits ou la loi sur l'accès. On pourrait en citer une

foule.

Mme Harel: Donc, ça, ça vaut, donc...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: Vous nous dites: Ça, ça vaut pour l'activité contractuelle. Mais, par ailleurs, vous introduisez un amendement...

M. Crevier: L'amendement vise...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Me Crevier.

M. Crevier: Oui, excusez. L'amendement vise certains contrats qui seraient conclus dans le cadre des programmes. Par exemple, des contrats avec des entreprises.

M. Bourbeau: Hyundai, par exemple, Mon-tupet.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Je citais seulement des cas de programmes qu'on a faits récemment, en formation professionnelle, développement de la main-d'oeuvre, Dowty... autant d'exemples.

La Présidente (Mme Marois): Oui. Est-ce que vous voulez ajouter quelque chose, Me Crevier?

M. Crevier: Donc, des contrats d'une certaine importance, où il y a une autorisation qui serait exigée, à ce moment-là, soit du ministre ou du gouvernement. Par ailleurs, si je peux donner l'exemple d'un contrat de services ou d'un contrat d'acquisition d'équipement informatique, ce genre de contrat là n'est pas strictement contenu dans le cadre des programmes. Par contre, la Loi sur l'administration financière s'appliquerait, en principe, à ce genre de contrat. On n'en connaît pas exactement la teneur, parce que les règlements issus de l'article 49 de la Loi sur l'administration financière ne sont pas encore adoptés et, à ma connaissance, ne sont pas...

Mme Harel: Et l'article 49 dit quoi, exactement?

M. Crevier: L'article 49 dit que le gouvernement peut, par règlement, sur recommandation du Conseil du trésor, déterminer les conditions des contrats. Alors, on fait appel, par exemple, à l'obligation de soumissions publiques ou de choses du genre. L'article 49 s'applique à la Société, en fonction des caractéristiques de la Société.

La Présidente (Mme Marois): C'était l'article 49 de la loi, d'un projet de loi ou d'un... Non? D'une loi qui a été adoptée, c'est ça?

M. Crevier: C'est-à-dire que c'est un article qui a été ajouté ou remplacé récemment...

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

M. Crevier: ...dans la Loi sur l'administration financière.

M. Bourbeau: Une réforme Dutil.

La Présidente (Mme Marois): Oui, je me souviens, c'était venu devant la commission.

M. Trudel: Ça signifie donc aussi qu'il y a des...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Trudel: Ça signifie donc qu'il y a des contrats qui ne pourront être signés sans l'autorisation du gouvernement. Il y a donc certains contrats qui seront soumis à prépublication, et d'autres qui ne seront pas soumis à prépublication, si c'est le cas, du ministre qui décide.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre. M. Crevier: Je m'excuse...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Me Crevier.

M. Crevier: les contrats ne sont jamais soumis à prépublication. c'est la réglementation du conseil du trésor qui, elle, devrait être prépubliée.

M. Trudel: Non, mais vous dites: «conclure un contrat dans le cadre des programmes qu'elle administre sans l'autorisation du ministre ou du gouvernement». Le règlement va prévoir les cas et, dans certains cas, ça sera avec l'autorisation, sans l'autorisation du ministre et, dans d'autres cas, du gouvernement. Qu'est-ce qui va déterminer la catégorie d'autorisation nécessaire?

La Présidente (Mme Marois): Alors, M. le ministre ou Me Crevier? Me Crevier? (17 heures)

M. Crevier: Le principe, c'est que la Société pourra conclure des contrats, sans autorisation. L'exception - et elle sera prévue dans le cadre d'un règlement - c'est qu'il y aurait une autorisation à obtenir, probablement pour des contrats qui sont à très long terme ou pour une valeur très importante. Je peux peut-être, là-dessus, mentionner l'exemple de la Société des établissements de plein air du Québec qui a une disposi-

tion semblable, où le règlement du gouvernement exige une autorisation pour des contrats d'une durée supérieure à 10 ans ou pour un montant supérieur à 5 000 000 $, à titre d'exemple.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Trudel: Si le ministre titulaire a proposé cette disposition au Conseil des ministres, il doit avoir une idée de quel type de division ou quel type de frontière il veut dessiner pour en arriver à ce que ce soit seulement avec l'autorisation du ministre ou avec nécessairement l'autorisation du gouvernement. Est-ce que ce sera modifiable au gré de l'humeur du ministre, de dire: Ici, voyez-vous, je considère que ça demande seulement une autorisation ministérielle du ministre. Par ailleurs, dans d'autres cas, là, je pense que je vais aller chercher l'autorisation du gouvernement. C'est fort différent. Mais c'était quoi l'intention gouvernementale en rédigeant un article comme celui-là? Si c'est vraiment en relation avec l'esprit de la Loi sur l'administration financière, en matière contractuelle, c'est de dire: On restreint la marge de manoeuvre de la Société à certains cas particuliers, spécifiques et, à ce moment-là, on a recours au gouvernement. Le ministre ne peut pas dire en même temps: Je donne de la marge de manoeuvre à la Société et, par ailleurs, je ne lui en donne pas comme ministre... Je ne lui donne pas d'oxygène pour respirer et, dans un troisième cas, l'oxygène va devoir être pompé par le gouvernement. C'était quoi, l'intention ministérielle là-dessus? Il doit quand même y avoir une intention précise, parce que ça m'inquiéterait si le ministre me répondait que c'est un article «z-au-cas-où».

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre. M. Bourbeau: M. le Président, c'est des...

La Présidente (Mme Marois): Mme la Présidente.

M. Bourbeau: Mme la Présidente. Je m'excuse, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Ça va.

M. Bourbeau: Je ne vous ferai pas croire que le masculin l'emporte sur le féminin.

La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie. Je l'apprécie. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: C'est une question de niveau, ça, simplement, de la même façon qu'on a des niveaux présentement avec les CFP, par exemple. Les CFP ont le pouvoir de fairo des subventions, d'engager des subventions - oui, jusqu'à concurrence de 100 000 $ - sans se référer au minis- tre, présentement.

Alors, on pourrait penser, par exemple, que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre pourrait faire en sorte de conclure, dans le cadre de ces programmes, des contrats jusqu'à concurrence de - je ne sais pas, moi - 1 000 000 $ ou 2 000 000 $. C'est à voir. Le gouvernement décidera par règlement quels seront ces niveaux.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député.

M. Trudel: Vous dites: On ne le sait pas. Par exemple, ça pourrait vouloir dire ça. Vous voulez dire que vous n'avez pas fait de projections, que vous n'avez pas fait d'analyse en disant qu'il faudrait accorder telle marge, à tel niveau, pour la Société, en termes d'autorisation, soit ministérielle, soit gouvernementale.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: J'ai tellement de respect pour l'Assemblée nationale que je ne voudrais pas avoir décidé d'avance des pouvoirs de la Société, avant de savoir si l'Assemblée nationale va créer une Société. Tout à coup qu'on ne crée pas de Société, j'aurais perdu mon temps.

La Présidente (Mme Marois): C'est tout à votre honneur, M. le ministre.

M. Bourbeau: Bien sûr. Le plus grand respect.

M. Trudel: Est-ce que, par ailleurs...

La Présidente (Mme Marois): M. le député.

M. Trudel: Est-ce que...

M. Bourbeau: Vous n'êtes pas antipathique, hein? Ça ne fait peut-être pas longtemps que je vous ai devant moi, mais, pour l'instant, ça va encore très bien.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Vous demanderez ça à votre collègue. Après huit mois de travail attentif, ça a l'air qu'il...

Mme Harel: C'est avec mes collègues féminines qu'il a des problèmes, en général.

M. Trudel: Ah oui!

La Présidente (Mme Marois): C'est vrai? Ah bon!

M. Bourbeau: Je ne dirais pas la même chose avec la députée de Chicoutimi, cependant.

Malheureusement, elle n'est pas ici. Mais, si elle était là, je lui dirais.

La Présidente (Mme Marois): J'imagine que si elle était là, cependant, vous répéteriez cela, bien sûr.

M. Trudel: Vous n'auriez pas d'objection à ce qu'on lui répète...

La Présidente (Mme Marois): Bon.

M. Bourbeau: Oui, oui. Absolument, absolument. Je ne me gênerai pas du tout, je vous prie de me croire.

M. Trudel: Vous n'auriez pas objection à ce qu'on lui répète, par ailleurs?

Une voix: C'est...

La Présidente (Mme Marois): Ah bon! D'accord.

M. Trudel: Par ailleurs, la...

La Présidente (Mme Marois): oui, m. le député.

M. Trudel: La Société va certainement prévoir dans son règlement no 1, dans son règlement de régie interne, une délégation de pouvoir de signature à ces chapitres régionaux.

M. Bourbeau: Certainement.

M. Trudel: et, encore là, est-ce que l'intention gouvernementale, en termes d'orientation, c'est de reconduire les marges, les niveaux actuels d'autorisation?

M. Bourbeau: Le règlement est de régie interne, c'est le règlement de la Société. Alors, ça va être la Société, avec ses partenaires syndicaux, patronaux, travailleurs, qui décidera du niveau de cette décentralisation-là, d'autant plus qu'en vertu de l'article 13 - vous vous souviendrez sûrement, on l'a déjà... Est-ce qu'on l'a adopté, l'article 13? Vous vous souvenez, M. le député, l'article 13...

La Présidente (Mme Marois): II a été adopté, effectivement, M. le ministre.

M. Bourbeau: On a dit que le règlement de régie interne est adoptable par la Société seulement, sans l'autorisation gouvernementale.

La Présidente (Mme Marois): Oui mais, M. le ministre, moi, j'ai un peu de difficulté à vous suivre dans le cas présent parce que, dans le fond, c'est... règlement du gouvernement ou je lis mal ce qu'on discute là.

M. Bourbeau: D'ailleurs, je me référais au règlement de régie interne de la Société, parce que le député parlait de délégation de pouvoir. C'est prévu dans la régie interne, articles 13 et 14: «La Société peut prendre...»

La Présidente (Mme Marois): «les autres aspects de sa régie interne», à l'article 13.

M. Bourbeau: «de sa régie interne», c'est un règlement de la Société même, et non pas du gouvernement. Donc, je répondais au député que ce n'est pas le gouvernement qui va prendre cette décision, c'est la Société.

M. Trudel: Mais, dans ce cadre-là...

La Présidente (Mme Marois): M. le député.

M. Trudel: ...très certainement que la délégation de pouvoir de signature d'éléments financiers - par exemple, dans les chapitres régionaux - ne pourra évidemment pas être supérieure, en toute logique, au niveau qu'accordera le gouvernement à la Société de procéder sans nécessairement l'autorisation, soit du ministre, soit du gouvernement. Alors, ça me ramène à la question: Si vous reconduisez essentiellement au niveau de la réglementation pour l'autorisation du ministre ou l'autorisation gouvernementale, c'est aussi bien de dire que vous venez de paralyser tous les chapitres régionaux de la future Société, n'est-ce pas?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Est-ce qu'il y a eu une question? J'ai entendu plutôt une remarque, là?

La Présidente (Mme Marois): M. le député, est-ce que vous voulez reprendre votre questionnement?

M. Trudel: Non, mais est-ce que vous n'êtes pas en train de nous dire que si vous reconduisez essentiellement au niveau de la nécessaire demande d'autorisation, ou ministérielle ou gouvernementale, ce qui existe actuellement pour les sociétés, les CFP actuelles... Est-ce que vous n'êtes pas en train de nous dire, parce que ce sera nécessairement au niveau de la régie interne, un niveau d'autorisation inférieure... En toute logique, vous n'êtes pas en train de nous dire qu'on va paralyser complètement les chapitres régionaux de la Société de la main-d'oeuvre?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je croyais que le mot «chapitre», ça s'employait chez les Hell's Angels et les motards. Est-ce que les Hell's Angels sont très actifs en Abitibi-Témiscamingue, parce que les chapitres, en général, c'est l'expression qu'on

emploie pour des confréries semblables?

M. Trudel: J'ai constaté que l'entreprise centralisatrice de la Société de la main-d'oeuvre...

M. Bourbeau: Pas autant... Pas autant que les Hell's Angels, quand même.

La Présidente (Mme Marois): Dans les sociétés religieuses, M. le ministre, on utilisait ça, les chapitres. Même chez les fonctionnaires fédéraux, actuellement, les subdivisions chez les professionnels, ce sont les chapitres.

M. Bourbeau: Mais c'est les chanoines. Un chapitre, c'est les chanoines, ordinairement.

La Présidente (Mme Marois): Oui, aussi: Oui, M. le ministre. Allez.

M. Bourbeau: Je n'ai pas parlé de reconduire. Je n'ai pas dit qu'on reconduirait les mêmes niveaux. Je n'ai pas exprimé d'opinion là-dessus. J'ai simplement dit qu'éventuellement il y aurait une décentralisation, une délégation de pouvoir, et c'est la Société qui décidera quels seront les niveaux de délégation souhaités.

M. Trudel: Mais les sociétés régionales n'auront pas, évidemment, de statut juridique par la loi.

Mme Harel: Pas «évidemment». Le mot «évidemment» est...

M. Bourbeau: Là, on n'est pas au bon article, je crois que...

Mme Harel: C'est à 31, c'est ce soir. M. Bourbeau: Là, vraiment, vous...

M. Trudel: Alors, dans ce contexte-là, c'est pour ça que j'emploie le mot «chapitre».

M. Bourbeau: Je comprends les efforts que vous faites pour être pertinent, mais là...

M. Trudel: je comprends que vous comprenez pourquoi j'appelle ça des chapitres, parce que c'en n'est pas. alors, ça devient des chapitres.

La Présidente (Mme Marois): Alors, on reviendra sur cet article 31 sûrement.

M.Trudel: Donc, si...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député.

M. Trudel: ...le niveau d'autorisation, for- cément au niveau interne, de délégation de pouvoir en matière financière ne va pas au-delà de l'autorisation, moi, j'en conclus, pour l'instant, que c'est une opération qui va paralyser complètement la capacité d'action des chapitres régionaux de la Société de la main-d'oeuvre.

Mme Harel: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Mme la Présidente, d'autant plus que les sociétés régionales n'ont, en vertu du projet de loi 408, ni le pouvoir d'élaborer, de recommander même... De recommander, oui, mais pas le pouvoir d'élaborer des programmes, ni celui de signer des contrats. Il faut que vous compreniez, là, Mme la Présidente, que... (17 h 10)

La Présidente (Mme Marois): On vous écoute.

Mme Harel: ...la société mère doit faire approuver tous les programmes, d'une part. Une fois - ça, c'est les articles précédents - les programmes approuvés, l'article 27 dit qu'à l'intérieur des programmes approuvés, quand elle veut signer des contrats, certains des contrats, à l'intérieur des programmes approuvés, seront assujettis à des autorisations, soit du gouvernement soit du ministre. Alors, on se comprend bien. La Société, sa marge de manoeuvre, même la société mère, sa marge de manoeuvre est assez restreinte.

M. Trudel: Ce n'est pas ce qu'on peut appeler «directement connecté sur la bonbonne d'oxygène», hein!

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que le ministre a des commentaires, des réponses? Est-ce qu'il veut clarifier l'analyse que Ton fait, la perception qu'on a?

M. Bourbeau: Je réfère la députée, qui ne m'écoute pas, à l'article 14, et elle va voir que...

La Présidente (Mme Marois): Généralement, elle vous écoute.

M. Bourbeau: Oui, bon. Alors, si elle m'écoute, tant mieux, parce que ça va éviter de poser la question deux fois. Alors, en se référant à l'article 14, elle verra: «Un document n'engage la Société que s'il est signé par le président ou, dans les cas déterminés par règlement de régie interne de la Société, par un de ses employés.» Alors, cet employé-là pourra être au niveau régional, pourvu que le règlement de régie interne permette cette délégation.

Mme Harel: Alors, quand on dit...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...«employés», c'est intéressant, M. le Président.

M. Bourbeau: D'ailleurs, dans les ministères, c'est la même chose. Dans les ministères, c'est la même chose.

Mme Harel: Vous voyez à quel point le modèle est vertical, à quel point le modèle est centralisé. Le ministre vient de me citer l'article 14 où le mot «ses» employés est au possessif, il réfère donc à la société mère. Alors, le directeur régional, de toute évidence, à ce moment-là, dans l'exemple utilisé par le ministre, le directeur régional est un employé de la société mère.

M. Bourbeau: C'est vrai, c'est évident, c'est...

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: On le clame haut et fort depuis le début. Mme la Présidente, il ne fallait pas nous accuser de ça, là. C'est l'esprit même du projet de loi, si vous l'avez bien lu, que tous les employés de la Société sont des employés de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. C'est l'économie même du projet de loi.

Mme Harel: Alors, vous comprenez, Mme la Présidente, pourquoi on est ici...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...en ce beau 17 juin, à 17 h 10. Il y a deux raisons, n'est-ce pas? Parmi les quatre pôles de résistance dont je vous parlais tantôt - je l'ai dit souvent au ministre - le pôle constitué par les patrons, ça, je laisse le soin à son entourage et à celui du premier ministre de faire valoir leur point de vue.

Moi, je m'intéresse particulièrement aux pôles de l'éducation, du communautaire et des régions. Le ministre aurait voulu accélérer l'adoption du projet de loi et il aurait reconnu, je le répète, que, sur les 19 sièges, deux auraient pu être occupés par des personnes venant du milieu de l'éducation. Ce n'est pas tant demander, sur 19 sièges... Il s'agissait, dans le fond, simplement, de convenir que ces personnes allaient provenir du milieu de l'éducation. Là, il nous dit qu'elles vont représenter le milieu de l'éducation et qu'elles seront choisies après consultation de ses ministres, des ministres concernés plutôt, pas des siens, mais des ministres concernés par l'enseignement secondaire et collégial.

Nous, on a dit: II faut que les milieux concernés, soit la Fédération des commissions scolaires et la Fédération des cégeps, soient consultés et que les personnes qui vont occuper ces deux sièges-là sur les 19 proviennent de ces milieux-là. Il me semble que ça, ça aurait apaisé et ça aurait donné l'idée que la concertation, ce n'était pas juste sur papier. Ça, c'est supposé être un projet de concertation, n'est-ce pas? Alors, pour un projet de concertation, ce n'est pas vraiment réussi, parce que vous avez donc le milieu de l'éducation qui dit non, puis, vous avez les régions. On y reviendra ce soir - ce sera notre débat de la soirée - mais les régions disent un «non» carabiné, à partir de l'Union des municipalités régionales de comté en passant par tout ce que vous avez - on y reviendra - d'associations représentatives, de tous les organismes possibles des régions. Au début, ils en demandaient beaucoup. Savez-vous ce qu'ils demandent, là? Ils demandent simplement des corporations, au sens du Code civil, pour pouvoir choisir leur directeur général. Ils ne demandent même plus un processus électif pour élire le conseil d'administration. C'est ça qui m'a surprise. C'est qu'il y a eu un énorme pas de fait du côté des régions qui, finalement, de l'assemblée générale qu'elles demandaient avec les CCR, les comités consultatifs régionaux, pour élire le conseil d'administration, ont finalement réduit leur demande à simplement un statut de corporation au sens du Code civil et à un directeur régional qui soit leur employé et qui réponde au conseil d'administration avant de répondre à la Société centralisée, n'est-ce pas? C'est fondamentalement ça.

Finalement, l'autre pôle, qui n'est pas rien non plus, parce qu'il mobilise beaucoup à travers le Québec - on va le voir encore dans les journaux demain, parce qu'ils ont fait une conférence de presse - c'est tout ce que vous pouvez imaginer de ce qui bouge autour du communautaire: du Conseil permanent de la jeunesse en passant par tous les groupes de femmes, en allant du côté de l'éducation permanente des groupes d'employabilité et tout ce que vous pouvez imaginer qui, eux, réclament une représentation de 3 personnes sur 19.

Ceci dit, là, le ministre nous accorderait, pas à nous, comme Opposition parce que, finalement, on relaie... Ce n'est pas ce qu'on demandait. Nous, là, si c'était ce qu'on voulait, c'est qu'on voudrait avoir le financement de 1 % de la masse salariale des entreprises avec un fonds national. On voudrait aussi obtenir que, quelle que soit la source du revenu, il y ait un accès à la formation de la main-d'oeuvre, indépendamment de la couleur du chèque. Alors, ça, on n'en est même pas là. Tout ce qu'on fait ici, c'est qu'on essaie de relayer le minimum de ce qui est considéré comme devant être acquis pour pouvoir soutenir le projet de création d'une Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Ce n'est quand même pas rien, et c'est censé

être un projet de partenariat. On y reviendra n'est-ce pas?

Je reviens moi-même à l'article 27...

La Présidente (Mme Marois): On s'entend, nous sommes sur l'amendement, Mme la députée.

Mme Harel: À l'amendement plutôt. Je constate que, dans l'amendement, c'est dans le cadre des projets qu'elle administre - c'est bien dit «dans le cadre des programmes qu'elle administre» - qu'elle aura à obtenir ces autorisations. Donc, déjà, la Société aura fait approuver ses programmes - vous voyez la lourdeur de tout un processus, c'est quelque chose. La Société va faire approuver ses programmes - imaginez-vous les offices du même genre. Pensez, par exemple, à la Régie de l'assurance-maladie. Doit-elle faire approuver tous ses programmes, la Régie de l'assurance-maladie?

La Présidente (Mme Marois): Je ne saurais répondre, Mme la députée, à votre interrogation.

Mme Harel: On me fait signe que, oui, c'est possible. Donc, tous les programmes de main-d'oeuvre devront être approuvés et, à l'intérieur de ces programmes, une fois approuvés, pour certains contrats, la Société devra requérir l'autorisation du ministre ou du gouvernement.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ii n'y a pas de changement, c'est la situation actuelle. il n'y a pas de changement. je ne sais pas pourquoi vous faites un plat avec ça.

Mme Harel: Alors, pourquoi changer si c'est pour ne pas changer?

M. Bourbeau: II y a un changement. Mme Harel: Parce que, même son allié, là...

M. Bourbeau: II y a un changement, mais pas de cet ordre-là.

Mme Harel: Je suis sûre que le ministre va être sensible à l'Association des manufacturiers du Québec. Ça, il faut dire que l'AMQ a fait savoir un appui inconditionnel. C'est l'exception à la règle, c'est un appui inconditionnel au projet de loi 408. L'AMQ disait dans son mémoire, et je cite: On ferme ici...

M. Bourbeau: Vous oubliez la FTQ, vous oubliez la CSN, vous oubliez la CSD.

Mme Harel: Non, non, non.

M. Bourbeau: Vous les oubliez tous.

Mme Harel: Mme la Présidente, je ne les oublie pas.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée...

Mme Harel: Non, loin de moi l'idée, évidemment, de les oublier. Je rappelle au ministre qu'aujourd'hui même la CEQ et la CSN appuyaient la Coalition des organismes communautaires qui réclame une présence accrue. Je dois vous dire que, dans le mémoire que la CSN déposait devant la commission, elle demandait le retrait de l'article 27 - celui sur lequel nous travaillons - et il y a une vaste...

La Présidente (Mme Marois): Celui sur lequel porte notre débat.

Mme Harel: ...coalition, à laquelle participe la ftq, qui demandait aussi le retrait de l'article 27. je dois vous dire, m. le président, que la csn...

La Présidente (Mme Marois): Mme la Présidente.

Mme Harel: Mme la Présidente. Oh! Quel lapsus!

La Présidente (Mme Marois): Non, mais je comprends. On est un peu fatigués là. C'est ça, à la fin de la journée. (17 h 20)

Mme Harel: Mme la Présidente, je comprends que la CSN a fait publiquement, dimanche dernier, le 14 juin, connaître sa position. C'est censé être un autre partenaire majeur. La CSN dit ceci, et je cite: La CSN pose des conditions précises à la création de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre.

Ai-je besoin d'insister sur les amendements que la CSN demande? Je conclus simplement par leur communiqué, qui disait ceci: Ces amendements sont majeurs, puisqu'en découle toute l'efficacité de la future Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Il serait illusoire de penser que le Québec pourra rattraper son retard en matière de formation professionnelle si la création d'un tel organisme ne sert pas d'abord à planifier, à développer, à élaborer, à réaliser et à gérer l'ensemble des programmes de formation d'employabilité et d'intégration au marché du travail.

La CSN demandait, Mme la Présidente, notamment - on y reviendra - que le gouvernement accorde aux sociétés régionales le même statut juridique que les commissions de formation professionnelle qu'elles remplacent - ça, on reviendra là-dessus. Mais elle demandait, notamment, et elle disait ceci: La possibilité que le ministre ou !e gouvernement intervienne à tout moment dans le fonctionnement et les décisions

de la Société limite les pouvoirs de la Société, ce qui risque d'en paralyser son fonctionnement. Si l'on veut véritablement éviter que cet organisme devienne un monstre bureaucratique, il faut donner à cette Société la capacité d'élaborer des programmes, de les mettre en oeuvre et de gérer l'ensemble des politiques de main-d'oeuvre existantes, ce qui inclut les programmes d'em-ployabilité et d'intégration au marché du travail.

Alors, ai-je besoin d'insister, Mme la Présidente, sur les amendements que réclame la CSN, quand elle dit: II faut viser la création d'un organisme qui dispose de pouvoirs réels et qui peut compter sur la présence d'intervenants qui ont l'expertise et la connaissance des besoins en matière de formation et d'employabilité. L'encadrement actuel de la Société rend impossible l'atteinte des objectifs recherchés par le gouvernement en matière de développement de la main-d'oeuvre.

Si c'est ce que le ministre considère comme un appui, Mme la Présidente, il n'est pas regardant. Je veux vous demander si, à ce stade-ci, nous pouvons présenter un sous-amendement à l'effet de biffer...

La Présidente (Mme Marois): Un sous-amendement?

Mme Harel: Je disais donc que l'Association des manufacturiers qui appuie - ça, c'est un vrai appui. L'Association des manufacturiers appuie, Mme la Présidente, en demandant ceci... Je vais la citer en toute objectivité. L'AMQ dit ceci: Pour que nous soyons prêts à nous accommoder, sous sa forme actuelle, quitte à le voir bonifier par la suite... Elle ajoute, évidemment: Nous avons exprimé certaines réserves relativement à l'étendue des pouvoirs dont jouirait, éventuellement, le conseil d'administration et au degré de décentralisation qui s'effectuerait en faveur des sociétés régionales.

Alors, même la régionalisation est allée chercher un appui du côté de l'AMQ. Mais, encore là, l'AMQ pense pouvoir bonifier le projet, la loi, une fois que la loi est votée. Ce n'est pas un point de vue qui est partagé par personne d'autre, évidemment pas par l'Opposition. Alors, l'AMQ avait, cependant, dans son mémoire, signalé au ministre, concernant l'article 27, que, et je cite: On enferme ici la Société dans un carcan administratif qui freinera sûrement son efficacité.

Est-ce qu'il est admissible, à ce moment-ci, de proposer de biffer l'article 27? Je ne pense pas, hein?

La Présidente (Mme Marois): C'est-à-dire que, là, nous sommes sur l'amendement, actuellement...

Mme Harel: II faudrait d'abord battre l'amendement.

La Présidente (Mme Marois): j'imagine que ce serait la procédure à suivre, battre l'amendement et, par la suite... peut-être que ce qui serait d'abord intéressant, c'est qu'on le voie, l'amendement.

Mme Harel: L'amendement? Il est déposé, l'amendement.

La Présidente (Mme Marois): Non, le sous-amendement, parce que ce serait un sous-amendement...

Mme Harel: II s'agirait de biffer l'article 27.

La Présidente (Mme Marois): Ça pourrait être considéré comme un sous-amendement.

M. Bourbeau: Mais c'est parce qu'il vient de germer dans la tête de la députée. Il n'est pas écrit encore. C'est ça, le problème.

La Présidente (Mme Marois): Vous prêtez...

Mme Harel: En quoi le ministre peut-il prétendre connaître ce qui se passe dans ma tête?

La Présidente (Mme Marois): ...des intentions.

M. Bourbeau: Si vous aviez voulu le faire avant, vous en auriez une copie. Je vois que vous n'en avez pas. Mais, moi, ce qui m'étonne, Mme la Présidente, c'est que, si la députée de Hochelaga-Maisonneuve voulait proposer de biffer l'article 27, pourquoi est-ce qu'elle a pris une heure avant de le proposer? On aurait pu le proposer il y a une heure, quand elle a commencé à en parler.

Mme Harel: À cause de l'amendement. M. Bourbeau: Bien oui, mais...

Mme Harel: Vous comprenez, Mme la Présidente, qu'on voulait...

M. Bourbeau: ...ça fait une heure que vous parlez sur...

Mme Harel: ...connaître la teneur de l'amendement et la portée de l'amendement...

M. Bourbeau: Ça fait une heure que vous en parlez, de l'amendement.

Mme Harel: ...pour comprendre s'il y avait toujours le même carcan qui allait s'abattre sur la Société.

M. Bourbeau: Donc, vous vouliez faire perdre le temps de la commission. C'est mieux

comme ça. Dites-le donc honnêtement que vous voulez faire perdre le temps de la commission.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, je pense qu'on est resté sur le fond de l'amendement qui était là et, moi, je dois prendre les interventions qui sont là. Alors, il faut disposer d'abord de l'amendement qui a été déposé en bonne et due forme par le ministre. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci de nos travaux, M. le Président, et qui portent sur l'amendement?

M. Trudel: Le ministre peut-il nous expliquer quels sont les motifs pour lesquels il demeure insensible à une demande aussi précise que celle de la CSN et, de façon encore beaucoup plus précise, de l'Association des manufacturiers québécois? Parce que, là, je vais vous dire que ça ne se bouscule pas, dans les autobus, dans les régions du Québec, pour faire la parade pour applaudir à l'initiative centralisante et centralisatrice du ministre, à l'intérieur du projet 408, avec la création de cette Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Il faut quand même que le ministre nous donne les motivations du gouvernement pour faire en sorte que... On veut formellement, y compris l'amendement de l'article 27, encarcaner avec un cadenas très serré, des bretelles, puis une ceinture, pour s'assurer que les chapitres - parce que je ne peux pas appeler ça une société, moi; ça n'a pas de statut, cette affaire-là - régionaux n'auront pas, mais absolument pas, d'initiatives. Il faut s'assurer que ça ne pense pas dans les régions; il faut s'assurer que ça n'a pas d'initiatives; il faut s'assurer que ça va être décidé centrale-ment; il faut s'assurer qu'on aura tous les niveaux d'approbation nécessaires pour faire en sorte que, s'il y avait, à l'occasion, des représentants ou des membres de cette Société qui s'avisaient de penser quelque chose, qui s'avisaient d'avoir de l'initiative, qui s'avisaient d'avoir de l'originalité... Non! On veut adopter le format standard. On n'est pas tout à fait dans la confection des chapeaux du ministre Picotte, là, du ministre délégué aux Affaires régionales. On n'est pas tout à fait dans la même direction et...

Regardez, je peux même citer au ministre des commentaires qui étaient faits, pas plus tard que le 22 mai dernier - ce n'est pas tellement loin - dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Regardez des organismes régionaux comme le CRCD du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui dit: Au CRCD, on s'interroge cependant sur !a volonté réelle du gouvernement du Québec d'aller dans le sens de la décentralisation, comme le suppose pourtant le ministre responsable du développement régional, Yvon Picotte - je cite, Mme la Présidente - qui désire remplacer les conseils régionaux de développement par des structures qu'il voudrait à la fois plus autonomes et plus respectueuses de la représentation des divers secteurs de l'activité socio-économique des régions.

On ne règle pas, M. le ministre - dit-on - on ne règle pas un problème en créant une superstructure centralisatrice. Il n'y a aucun lien entre l'énoncé de politique et le projet de loi proposé, clame le président du CRCD du Saguenay-Lac-Saint-Jean, M. Jean Wauthier.

M. le Président, c'est cette façon de dire les choses...

Mme Harel: Mme la Présidente.

M. Trudel: Mme la Présidente. C'est cette façon de dire les choses...

La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme la députée! (17 h 30)

M. Trudel: ...au saguenay-lac-saint-jean. c'est l'écho qu'on a entendu dans toutes les régions du québec. il faut absolument que le gouvernement soit capable de nous expliquer pourquoi il choisit cette direction de la centralisation en matière de main-d'oeuvre, de formation professionnelle et d'employabilité chez les québécois et les québécoises partout, dans toutes les régions, puis que, par ailleurs, au niveau de la santé et des services sociaux, au niveau du développement régional, on se targue de vouloir créer des organismes avec des statuts juridiques qui vont permettre un certain nombre d'initiatives. on ne peut quand même pas dire, de l'expérience des 10 dernières années des commissions de formation professionnelle, qu'il y a eu abus d'initiatives, compte tenu de la mince marge dont disposaient ces sociétés régionales de formation professionnelle. il y a peut-être eu des divergences quant à l'application d'un certain nombre de programmes pensés centralement, mais il n'y a pas eu de... jamais les intervenants régionaux... tous les membres qui composent tous les ccr, tous les comités consultatifs régionaux de toutes les régions du québec n'ont jamais, au grand jamais, réclamé qu'on ferme la valve, qu'on coupe l'alimentation en oxygène et qu'on leur dise finalement ce qui est dit à peu près dans les premiers articles du projet de loi, mais spécifiquement ici, mme la présidente, à l'amendement qui est proposé à l'article 27: bien, savez-vous, dans les régions, là, on ne croit pas que vous possédiez le potentiel pour être capables de penser des programmes adaptés. on ne trouve pas que vous avez cette capacité. dans le fond, voulez-vous être sur le marché du travail, payer vos taxes, payer vos impôts, envoyer ça centralement au gouvernement du québec? en matière de dispensation de programmes et de services, oui, on va rendre certains de ces services dans les régions, mais, pour en qui est de la planification, il ne faudra quand même pas que vous vcjs preniez pour d'autres, dans ces régions-là. on ne peut quand même pas vous

confier la possibilité d'avoir des initiatives, que vous ayez la capacité créatrice d'avoir des initiatives originales, compte tenu du contexte local ou régional et de la situation particulière de la main-d'oeuvre.

Non. M. le ministre, en regard de l'amendement qui est proposé à l'article 27, vous n'avez pas le droit de ne pas justifier à l'ensemble des régions du Québec le pourquoi d'une telle offensive centralisatrice à contre-courant du développement des différents secteurs d'activité économique, culturelle ou éducative dans le monde québécois ou dans le Nord de l'Amérique. On ne peut pas dire aux régions: Vous êtes des déversoirs. On va vous faire parvenir ce qu'on veut bien vous faire parvenir. Par ailleurs, en ce qui concerne les ressources que vous procurez à l'État et votre contribution à la production intérieure brute, ah! ça, par exemple, on va vous en demander, puis tant et plus. Le ministre doit absolument expliquer à la région de l'Abitibi-Témiscamingue, à la région du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, à la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, à la région de l'Outaouais, à la région de Trois-Rivières pourquoi ces régions ne peuvent pas, ne pourront pas utiliser leur potentiel créateur, leurs possibilités d'initiatives en matière de formation professionnelle de la main-d'oeuvre et de développement de programmes visant à augmenter l'employabilité des personnes sur le territoire. Le ministre nous présente une perspective. Je le dis franchement, j'essaie de ménager les mots, Mme la Présidente. Vous l'avez vu avec ce que je viens de lire de la réaction du CRCD du Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est un peu insultant de voir qu'on ne nous fait pas confiance.

Mme la Présidente, ce n'est pas mêlant, je me croirais reculer de 12 années, au moment où on a... 12 ans, qu'est-ce que je dis, 1969, au moment de l'adoption du projet de loi créant l'Université du Québec, où on donnait la possibilité, dans ce projet de loi... Mais c'était un gouvernement de l'Union Nationale, Mme la Présidente, il faut quand même être capable de faire la suite historique. On donnait la possibilité aux régions de se donner non pas des chapitres, mais des constituantes de plein droit avec capacité d'initiative, d'originalité pour répondre aux besoins spécifiques des régions en matière de formation et de recherche de niveau supérieur. On donnait virtuellement, donc, la possibilité, déjà en 1969, à l'originalité régionale de pouvoir s'exercer et aux capacités créatrices des régions de se donner les moyens pour en arriver à une meilleure contribution au développement de l'ensemble du Québec. Alors, comment on peut en arriver, en 1992, en disant, en matière de formation de la main-d'oeuvre, à travers la Société qu'on veut créer: Non, vous n'aurez pas les capacités, vous n'aurez pas les possibilités non plus d'avoir des programmes adaptés à la population de votre région? Pour moi, Mme la présidente, ça veut jd\re que les programmes de formation et de perfectionnement en technologie minière, à la mine doyon, les programmes de formation minière pour la mine radisson, les programmes de perfectionnement de la main-d'oeuvre pour l'exploration minière dans gran-ville, tout ça va être décidé à une société centrale, centralisante, qui va décider ce qui est bon pour les travailleurs et les travailleuses qui désireraient s'inscrire dans le courant de l'activité de développement, si on peut faire appel à leur potentiel, dans le monde minier, par exemple dans la région de l'abitibi-témiscamingue. ou bien m'expliquer aussi comment on peut dire aux régions ou on peut leur décrire, en quelque sorte, illustrer leur incapacité de décider quels seront les programmes de formation dans le domaine de l'agro-alimentaire, dans la région de l'abitibi-témiscamingue, décidés centralement.

Mme la Présidente, un programme de formation et de perfectionnement dans le secteur agro-alimentaire de la région de Saint-Hyacinthe n'a rien à voir, mais rien à voir, en quelque sorte, avec le type de programme nécessaire pour la production dans le domaine de l'agro-alimentaire dans une région nordique comme la région de l'Abitibi-Témiscamingue. La même chose dans le domaine forestier, la même chose dans le domaine touristique, la même chose dans le domaine des produits manufacturiers où, même si ce n'est pas le lot de beaucoup de régions du Québec, il y a des caractéristiques particulières.

Par ailleurs, je me verrais mal, comme région, faire en sorte que je sois en mesure de décider ce qui va se passer en matière de développement de la main-d'oeuvre pour les pêcheries dans le Bas-Saint-Laurent-Gaspésie. C'est le monde à l'envers, c'est à contre-courant, c'est contradictoire avec d'autres orientations ministérielles, ça va contre la volonté des intervenants régionaux. Même l'Association des manufacturiers du Québec, la CSN, la FTQ réclament du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle un peu d'oxygène. Le ministre dit: Non. Je veux m'assurer non seulement que j'ai les deux mains sur les deux poignées, mais je m'assure qu'il n'y a rien qui peut faire en sorte qu'on va en arriver à donner une possibilité d'initiative et que ça va être créateur. 1969, encore une fois, Mme la Présidente, quand on a, par exemple, donné, sous forme législative, la possibilité de créer des chapitres, non pas des chapitres mais des constituantes du réseau de l'Université du Québec, je me souviens que même plus tard, en 1982, il était encore affirmé, dans certains cercles: Hors du mont Royal, point de salut. Que la connaissance universitaire, que le développement de la recherche dans le monde minier, dans le monde agricole, que la connaissance du monde glaciaire, de la recherche sur la nordicité, que ça, ça ne pouvait pas se faire dans les régions. Ça ne pouvait pas

se faire, c'était impossible et que, même dans certains domaines de formation de base, les programmes qui peuvent, à la limite, se retrouver dans une certaine standardisation à travers le Québec, c'était impossible qu'on puisse avoir, finalement, les compétences pour développer la main-d'oeuvre régionale.

Oh! surprise, Mme la Présidente, après avoir fait comprendre, de par la volonté gouvernementale, qu'il y aurait, dans une région comme l'Abitibi-Témiscamingue, par exemple, une constituante du réseau de l'Université du Québec, eh bien, trois ans plus tard, dans le secteur des sciences comptables, cette université obtenait la meilleure moyenne, le meilleur taux de réussite de ses candidats parmi les 4000 candidats qui se sont présentés à l'examen uniforme des comptables agréés au Canada. Au Canada, trois ans plus tard. C'est parce qu'on avait laissé la possibilité d'initiative et parce qu'on avait laissé la possibilité d'avoir des formes originales d'organisation du travail et de la dispensation des activités de formation que nous avons pu arriver à atteindre ce degré d'excellence. Voilà ce qu'on refuse. Ce refus se systématise dans l'amendement qui est proposé à l'article 27, quand on veut absolument, même au niveau de la réglementation, placer ça sous l'empire du ministre et du gouvernement. (17 h 40)

Alors, quelles sont les raisons profondes, les raisons majeures de ces initiatives à contre-courant de la part du ministre et du gouvernement? Peut-il nous expliquer? Nous demandons à voir, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie. Il vous restait à peine quelques secondes. Est-ce que M. le ministre veut intervenir, veut faire quelques commentaires?

M. Trudel: Qu'est-ce que je réponds à mes gens qui vont me poser la question, chez nous?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Bien, je réponds que votre propos était hors d'ordre et qu'à l'article 31, tout à l'heure, on pourra répondre à votre question. La décentralisation, c'est l'objet de l'article 31. Quand on arrivera là, demain soir ou après-demain, à l'article 31, Mme la Présidente, je répondrai au député. Mais c'est hors d'ordre. La décentralisation, c'est l'article 31.

La Présidente (Mme Marois): Juste une chose. L'article 27 prévoit les règlements qui devront être administrés avec ou sans l'autorisation du ministre ou du gouvernement. Évidemment, ça se situe, à ce moment-là, si vous me permettez, dans l'ordre du champ d'activité et des champs des pouvoirs de l'organisme concerné, la Société en l'occurrence. Donc, ça concerne évidemment la façon dont elle risque de gérer ce pouvoir-là.

Alors, vous avez terminé, M. le député. Je pense que... Je m'excuse, j'ai une demande d'intervention de la députée de Marie-Victorin.

M. Bourbeau: Gênez-vous pas! Y a pas de problème! On a tout le temps qu'il faut!

La Présidente (Mme Marois): Effectivement.

Mme Vermette: Oui. Alors, Mme la Présidente, je trouve ça tout à fait particulier, effectivement, que le ministre donne autant de pouvoirs. D'autant plus que ce projet de loi était dans l'orientation de développer un partenariat et de favoriser, en fait, des solidarités dans les régions pour permettre justement à des milieux de travailleurs, avec le milieu patronal et le monde de l'éducation de pouvoir échanger et d'établir ensemble, en fait, des priorités dans le domaine de la formation de la main-d'oeuvre parce que ça répond à des impératifs économiques dans le développement de l'emploi, dans la formation. Ça touche différents volets. On risque, à ce compte-ci, par cette façon de vouloir centraliser les prises de décision, d'arriver à des décisions beaucoup plus politiques que des décisions qui répondraient véritablement aux besoins des milieux. Et ça, pour moi, ça me cause un problème.

On l'a vu, justement aujourd'hui, lorsque la ministre de l'Énergie, la vice-première ministre, annonçait qu'elle décidait de mettre dans son comté, en fait, dans la ville de Laval, le développement d'Hydro-Québec alors qu'on sait très bien que c'était déjà situé à Varennes, que l'IRSST est déjà établi à Varennes et qu'il y avait un milieu qui s'était établi, un échange qui s'était établi entre, justement, les gens de la recherche, le monde scientifique, le monde universitaire, le milieu du travail et, en fait, l'ensemble des intervenants. Ça favorisait aussi l'emploi dans la région. Alors, on fait un transfert de région tout simplement pour favoriser une décision politique. À notre avis, je pense que ce n'est pas de cette façon-là qu'on peut atteindre ces objectifs de partenariat qu'on veut développer dans notre société, ces nouvelles solidarités, en fait, sur lesquelles on compte pour relever les nouveaux défis de la société moderne, pour être plus concurrentiel et pour atteindre, si vous voulez, l'excellence, la qualité totale qui est si chère à certains ministres de ce gouvernement.

Alors, je pense que, quand on a des objectifs particuliers de la part d'un gouvernement, il faut être «congruent» et il faut donner les moyens et les outils nécessaires aussi aux autres qui font partie, qui sont intéressés, en fait, par cette nouvelle façon de faire, par ce nouveau contrat, si vous voulez, dans le domaine de la main-o'oeuv;a et de la formation professionnelle et qui touche aussi le domaine de l'emploi. Je

trouve ça tout à fait passer à côté... Le ministre a de la difficulté à se délester de ses pouvoirs. C'est malheureux, en fait, de voir cette tendance qui persiste. Et dire: Je donne des pouvoirs, je crée une société, mais, d'autre part, c'est cette même société que je vais contrôler, c'est comme si, quelque part, on n'était pas capable de faire confiance à ses partenaires. C'est comme si, quelque part, on avait l'impression que ses partenaires pourraient manquer de vision pour développer un Québec compétent et compétitif alors que ce sont ces gens mêmes qui réclament depuis longtemps d'arriver à des ententes entre les différents secteurs, entre les différents milieux, que ce soit de l'éducation ou que ce soit du milieu du travail, des syndicats, le patronal et d'autres milieux, pour en faire vraiment un tout cohérent et qui permettrait d'atteindre ces exigences de la compétitivité et qui permettrait d'atteindre cette excellence, Mme la Présidente.

Je trouve ça très particulier, encore une fois, de se priver du dynamisme de gens parce que, vous savez, à chaque fois on a l'impression que, peu importent les décisions qu'on va prendre, de toute façon, il y a toujours la sanction royale qui est en haut qui va s'appliquer et, finalement, ça remet toujours en cause le travail, les consultations et la recherche qui ont pu être entrepris par le milieu, par les gens intéressés qui étaient partie prenante dans de nouvelles orientations des façons de faire, Mme la Présidente.

Alors, je trouve qu'à ce moment-ci le ministre aurait tout intérêt à écouter effectivement les demandes pressantes, autant du monde syndical. Même, le seul que le ministre a toujours eu en poche et qu'il nous a toujours démontré, c'est M. Le Hir, qui est le président de l'Association des manufacturiers du Québec. M. le ministre, hier, n'arrêtait pas de nous démontrer à quel point il était fier d'avoir cet appui de M. Le Hir et que ça représentait vraiment beaucoup de monde au Québec. Il disait même que ça faisait le poids par rapport au Conseil du patronat du Québec, que c'était bien important d'en tenir compte. Alors, je ne comprends pas pourquoi, dans ce cas-ci, il ne retient pas la suggestion de M. Le Hir et qu'il ne se rend pas à cette demande et qu'il retire carrément, en fin de compte, cet article. On sait que la motion donne encore plus de pouvoirs au ministre. Alors, évidemment, c'est bien sûr que cette motion est inacceptable. Même, on défend ici des principes, je pense, de participation, des principes où on veut établir dans les différentes entreprises de plus en plus cette philosophie de gestion participative. Je pense qu'il faut que quelque part on donne l'exemple. La meilleure façon de donner l'exemple, bien, ça vient d'en haut. Je pense à cette façon de décentralisation qui favorise justement les meilleures prises de décision au niveau du milieu et qui permet aussi cette responsabilisation des milieux entre eux au niveau des régions. On sait que de plus en plus on favorise le regroupement des régions, la participation des régions, l'organisation des régions, le développement régional. On demande à tous ces gens d'arriver à développer ce partenariat, d'arriver à des consensus, a établir des lignes d'orientation pour favoriser le développement d'une région donnée. Alors, pourquoi faudrait-il finalement que le ministre s'approprie des pouvoirs qui seront déterminés par règlement, d'une part, et qui risquent de faire en sorte que certaines décisions soient très arbitraires et très politiques et qui remettent en cause complètement le travail qui aurait été fait par les gens d'une région ou d'un milieu donné à ce moment-ci?

Alors, Mme la Présidente, je pense qu'il aurait été souhaitable que le ministre retire carrément et la motion et l'article.

La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie, Mme la députée de Marie-Victorin. Est-ce que le ministre a des commentaires à faire?

M. Bourbeau: Non, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Donc, je vais appeler l'amendement qui se lit comme suit: «La Société ne peut, dans les cas déterminés par règlement du gouvernement, conclure un contrat dans le cadre des programmes qu'elle administre sous l'autorisation du ministre ou du gouvernement selon ce que le règlement prévoit.» Ceci vise à remplacer l'article 27 du projet.

Oui, Mme la secrétaire. Oui. Pardon?

La Secrétaire: Vote nominal?

La Présidente (Mme Marois): Vote nominal? Oui. Mme la secrétaire, si vous voulez appeler les députés.

La Secrétaire: Oui. Alors, voici. M. Bourbeau (Laporte)?

M. Bourbeau: En faveur.

La Secrétaire: Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve)?

Mme Harel: Contre.

La Secrétaire: M. Joly (Fabre)?

M. Joly: Pour.

La Secrétaire: Mme Loiselle (Saint-Henri), elle n'est pas là.

M. Paradis (Matapédia)?

M. Paradis (Matapédia): Pour.

La Secrétaire: M. Trudel (Rouyn-Noranda-

Témiscamingue)?

M. Trudel: Contre.

La Secrétaire: Mme Vermette (Marie-vïc-torin)?

Mme Vermette: Contre.

La Secrétaire: M. Williams (Nelligan)?

M. Williams: Pour.

La Secrétaire: II y a trois votes du côté de l'Opposition.

La Présidente (Mme Marois): Nous n'avons que trois votes du côté de l'Opposition. Il n'y a que trois votes. Donc, moi, je ne vote pas, Mme la secrétaire.

La Secrétaire: Effectivement.

M. Williams: Mme la Présidente, quand vous avez mentionné «nous avons trois votes»...

La Présidente (Mme Marois): Oui. J'ai été... M. Williams: C'est qui...

Une voix: Ce n'est pas partial, ça, un peu? (17 h 50)

La Présidente (Mme Marois): Oui. J'ai été consciente de ce que j'ai dit, mais il reste que, comme présidente, je ne perds pas mon statut de députée de l'Opposition. D'ailleurs, j'ai exercé mon droit de vote à cette fin-là, tout à l'heure.

M. Williams: Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Secrétaire: Alors, l'amendement est adopté.

La Présidente (Mme Marois): L'amendement est adopté à 4 contre 3. Maintenant, nous procédons à l'article...

Mme Harel: Tel qu'amendé.

La Présidente (Mme Marois): ...chère collègue, tel qu'amendé, soit l'article 27. Sur division?

Mme Harel: Sur division. Même vote.

La Présidente (Mme Marois): Alors, nous pouvons maintenant procéder à l'article 28.

M. Bourbeau: Cet article a pour objet d'assujettir à un pouvoir de désavoeu du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle trois catégories d'actes de la Société - ça, c'est l'article avant l'amendement que je vais proposer, Mrr.e la Présidente - un règlement de la Société prévoyant les conditions, c'est-à-dire les modalités de nomination de ses employés, qui est le premier alinéa de l'article 11 du projet; un plan d'effectifs de la Société, référant au premier alinéa de l'article 11 du projet, et un règlement de régie interne de la Société, référant à l'article 13 du projet. L'article prévoit une mécanique précise quant aux modalités d'exercice de ce pouvoir du ministre. J'aimerais remplacer, Mme la Présidente, par voie d'amendement, les deux premiers alinéas de l'article 28 du projet de loi par les suivants: «Un règlement visé à l'article 13 est transmis au ministre dès son adoption. «Le ministre peut désavouer, dans les 45 jours de sa transmission, un tel règlement ou une partie d'un tel règlement, qui cesse alors d'avoir effet à compter de la date du désavoeu. Le ministre en avise aussitôt la Société.»

Cet amendement vise à limiter le pouvoir du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle de désavouer certains actes de la Société, de le limiter à un règlement de régie interne de celle-ci. Dans la version originale de l'article 28 du projet de loi, ce pouvoir de désavoeu du ministre couvrait également un règlement sur les conditions de nomination des employés de la Société ainsi qu'un plan d'effectifs de la Société.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre.

Mme Harel: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...est-ce que, par l'amendement qu'il introduit, le ministre garde son pouvoir de désavoeu sur le règlement de régie interne?

M. Bourbeau: C'est exact.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, oui?

M. Bourbeau: Oui, c'est exact.

Mme Harel: Alors, en comparaison avec l'article initialement prévu, il faut donc comprendre que la différence...

M. Bourbeau: On abandonne le pouvoir de désavoeu sur deux objets différents: sur les conditions de nomination des employés de la Société ainsi que sur le plan d'effectifs de ia Société.

Mme Harel: Et vous le gardez sur la régie

interne.

M. Bourbeau: C'est ça.

Mme Harel: Alors, comme le signale un collègue, quelle magnanimité!

M. Bourbeau: C'est ça. Ça va dans le sens des recommandations du député.

Mme Harel: Est-ce que j'ai besoin, Mme la Présidente, de vous transmettre tous les commentaires négatifs que nous avons pu entendre en commission parlementaire sur un tel pouvoir de désavoeu que se réserve le ministre? Et là je dois vous dire que ce sont sans doute de ses alliés les plus près, les plus proches que le ministre a reçu les critiques les plus vives, n'est-ce pas? Je pense, entre autres, à l'Association des manufacturiers qui, à l'égard de ce pouvoir de désavoeu que le ministre se réserve avec l'amendement... Il faut comprendre que le pouvoir de désavoeu demeure et qu'en plus le pouvoir de désavoeu demeure sur le règlement de régie interne. En n'oubliant pas qu'à la Société, pour que le ministre puisse utiliser son pouvoir de désavoeu, puisque c'est à la majorité des voix que les décisions se prennent, nous a dit le ministre hier, ça supposerait qu'il ait été mis en minorité, que la représentation gouvernementale ait été mise en minorité. La représentation gouvernementale sera constituée de 6 membres sur 19 plus le président que le ministre va nommer. Donc, on peut penser raisonnable qu'il y ait 7 votes sur 19 qui soient acquis au gouvernement tout le temps, étant donné que, des 6 membres représentant la délégation gouvernementale, il y en a 2 qui représentent le milieu de l'éducation, mais on a bien vu qu'ils ne provenaient pas du milieu de l'éducation et qu'ils allaient être nommés après consultation des ministres concernés. Donc, ils représentent les ministres de l'Éducation concernés: secondaire, collégial et universitaire. Donc, ça signifie ceci. Pour en arriver à l'application de l'article 28, il aurait fallu une totale unanimité entre les représentations syndicale et patronale, ou presque, parce que c'est à ce prix-là seulement que la représentation gouvernementale, qui siège déjà, serait mise en minorité. Alors, vous vous rendez compte. Pour que le ministre se donne le pouvoir de désaveu, mais qu'est-ce qui a bien pu germer dans l'esprit des rédacteurs du projet de loi pour en arriver à croire que la concertation se porterait si bien, que le partenariat serait à ce point en bonne santé qu'il faudrait que le ministre utilise le pouvoir de désavouer un règlement de régie interne? Si ça en est rendu là, avez-vous idée qu'il y aurait quelque chose qui n'aurait pas tourné avant? Si ça en est rendu là. Remarquez que ça part tout croche, alors ça se peut que ça continue à aller tout croche, parce qu'il y a une partie de ceux que le minis- tre pense nommer pour représenter la délégation patronale qui ont même laissé entendre, dans leur communiqué hier, que le projet de loi pourrait avorter, étant donné qu'ils pourraient ne pas accepter d'y siéger. Vous voyez, quand la concertation part comme ça, M. le Président, ça part assez mal. Je peux même citer le ministre là-dessus... Le ministre. Je peux même citer...

M. Bourbeau: Bien sûr.

Mme Harel: ...le Conseil du patronat là-dessus. Alors, on dit ceci, et je cite - c'est du communiqué publié en date du 16 juin - «Dans un dossier aussi important que celui de la formation professionnelle, a dit M. Dufour, président du Conseil du patronat, le bulldozer législatif est tout à fait inadéquat. Le ministre doit y penser à deux fois avant d'accoler son nom à une réforme qui risque d'avorter si la grande majorité des entreprises refuse d'y souscrire.»

M. Bourbeau: Ça ne sera pas le cas, Mme la Présidente, soyez sans crainte.

Mme Harel: Bon. J'aimerais bien partager...

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre. Mme la députée.

Mme Harel: ...la confiance du ministre, mais, si je m'en tiens aux positions publiques exprimées par certains des partenaires susceptibles d'être recrutés pour faire partie de la Société, ça regarde mal, si vous me permettez cette expression, Mme la Présidente, d'autant plus que les partenaires, qui sont déjà membres de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre et qui se sont présentés devant la commission, par exemple le Conseil du patronat, l'Association des manufacturiers, la FTQ, la CSD, ont tous demandé de modifier l'article 28 de façon à rendre la Société pleinement responsable de ce qu'elle a à gérer.

Alors... Et ça m'a surprise... En passant, un élément qui m'a vraiment surprise, dans le communiqué du Conseil du patronat, hier. Je ne sais pas si ça a attiré l'attention du ministre. Je dois vous dire que ça m'a surprise, mais tout à fait intéressée. À la toute fin, on y lit ceci: «Pour le Conseil du patronat, le ministre devrait plutôt favoriser l'adoption, par l'Assemblée nationale, du projet de loi sur les excédents d'actifs des régimes de retraite que le projet de loi 408.» Je me suis dit: Que c'est intéressant! Et même, M. Dufour continue: «Les entreprises y trouveront davantage leur compte.» Alors, en fait, c'est un appel à un débat, à un examen du projet de loi 30 sur les surplus des caisses de retraite, déjà voulu par les syndicats. Maintenant, je comprends que c'est le Conseil du patronat qui invite le ministre à favoriser

l'adoption de ce projet de loi plutôt que du projet de loi 408.

M. Bourbeau: Tout de suite après le 408, on passera au projet de loi 30, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. La commission des affaires sociales sera disponbile, évidemment, pour étudier ce projet de loi. D'ici là, je vous dis d'abord, Mme la députée, qu'il vous reste environ 14 minutes à votre intervention sur l'amendement, si vous souhaitez utiliser votre temps.

Mme Harel: Merci.

La Présidente (Mme Marois): Pour l'instant, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 18)

La Présidente (Mme Marois): Si vous le permettez, la commission des affaires sociales va reprendre ses travaux pour étudier le projet de loi 408. Nous en sommes à l'article 28. Nous étions, en fait, à l'amendement à l'article 28, et c'était Mme la députée de Hochelaga-Maison-neuve qui avait le droit de parole lorsque nous avons suspendu nos travaux. C'est ça. C'était un amendement à l'article 28. Nous débutions, en fait, l'étude de l'amendement. Je pense que Mme la députée était intervenue pendant une dizaine de minutes, tout au plus.

Mme Harel: C'est bien ça, Mme la Présidente. Je crois qu'il me restait 14 minutes, plus précisément.

La Présidente (Mme Marois): Oui. 14 minutes, plus précisément.

M. Houde: la confirmation est là. ce n'est pas moi qui ai parlé, c'est elle qui a parlé. vous voyez, là? il me reste 14 minutes. elle a le droit!

La Présidente (Mme Marois): M. le député, vous avez un commentaire à faire qui serait pertinent aux travaux de la commission?

M. Houde: Oui. J'étais à dire, tantôt, avant qu'on ne débute nos travaux, qu'on appeiait la loi sur la fête du 1er juillet ou la loi 408. Les députés d'en face me faisaient des reproches: Pourquoi on n'a pas fait la loi 408 avant? J'ai dit: C'est correct, c'était notre choix. Je suis d'accord avec vous. Mais quelle différence il y avait d'appeler la loi sur le 1er juillet ou la loi 408? Il n'y avait pas de différence. Si on veut an bloquer une, d'accord! Mais je m'aperçois... On a bloqué la première puis on bloque la deuxième. Avoir amené 408 la première, on aurait bloqué 408 la première et on aurait bloqué le 1er juillet la deuxième. Il n'y a pas de changement du tout. C'est votre choix. Quand on a commencé, après la période des questions, cet avant-midi, pour l'article 26... à 16 h 40, on acceptait l'article 26. Il y avait deux lignes et demie, à cet article-là. Ne venez pas nous faire accroire que c'est important. Pour vous, ce n'est pas important, mais c'est votre choix et je l'accepte, je le reconnais.

C'est le commentaire que je voulais faire, Mme la Présidente. Merci.

La Présidente (Mme Marois): Alors, je vous remercie, M. le député de Berthier. Oui, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue?

M. Trudel: Le député veut certainement signaler que c'est notre choix, mais c'est vos priorités, n'est-ce-pas?

La Présidente (Mme Marois): Oui. Le député de Berthier était d'accord. Oui, M. le député de Nelligan?

M. Williams: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Vous avez la parole.

M. Williams:... si ma mémoire est bonne - et peut-être qu'on peut aller dans le passé un peu - je pense que nous avons appelé 408...

Une voix: Le 11 juin. (20 h 20)

M. Williams: Avant, nous avons appelé 21. Je m'excuse, là, avec ça. Nous avons démontré notre priorité. En tout cas, je pense que ma mémoire est bonne et certainement que nous avons appelé 408 avant 21. Si vous voulez faire les recherches, vous pouvez.

Mme Harel: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): D'accord. On semble être d'accord que 408, effectivement, avait été appelé avant 21.

Mme Harel:... ça ne fait pas partie de mes 14 minutes qui me restent, là.

La Présidente (Mme Marois): Non. Nous ne sommes pas sur l'amendement, là. Je crois bien que nous n'avons pas commencé l'amendement. Nous sommes à des remarques préliminaires qui sont possibles, tout à fait, et pertinentes. Oui!

M. Williams: Mme la Présidente, il est un peu tard pour commencer à discuter la per-

tinence, après la journée que nous avons passée ici.

Mme Harel: On n'en discute pas.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Oui. Mme la Présidente, dans le même sens, je pense que le choix a d'abord été de ne pas appeler le projet de loi 30, c'est-à-dire le projet de loi sur les surplus des caisses de retraite, en vous signalant que l'Opposition avait voté, en deuxième lecture, en faveur du principe du projet de loi 30. Il était évident, Mme la Présidente, qu'en appelant le projet de loi 30 le gouvernement avait toutes les chances d'aller chercher l'appui de l'Opposition qui avait déjà voté en faveur du principe, premièrement. Deuxièmement, il faut que le député de...

M. Williams: Nelligan.

Mme Harel: ...Nelligan... C'est un si beau nom de comté!

La Présidente (Mme Marois): C'est un si beau nom!

Mme Harel: J'ai même la photo de Nelligan dans mon appartement de Québec, magnifique, Mme la Présidente.

M. Williams: La photo du député ou la photo de Nelligan?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Ce n'est pas décoratif...

La Présidente (Mme Marois): Le poète ou le député? Quel est votre choix, Mme la députée?

Mme Harel: Ceci dit, il faut comprendre que le projet de loi 408... Effectivement, le projet de loi 408 a été appelé le premier, comme le signale le député de Nelligan, mais il n'a pas été appelé le lendemain, où on aurait pu le terminer, évidemment, le vendredi. Le gouvernement, lui, a préféré le projet de loi 21, vendredi, lundi et les jours qui ont suivi. Ça, c'est un choix qui n'était pas le nôtre. Alors, est-ce que le résultat serait le même? Je dirais possiblement que oui. Le député de Berthier, en fait, il a de l'intuition, n'est-ce pas, Mme la Présidente? Parce que le choix sera le même tant qu'on n'aura pas les amendements. Pour vous simplifier la vie, je peux vous dire qu'essentiellement ça ne se résume pas à beaucoup de choses qui bouleverseraient tout le projet de loi 408. Ça se résume à faire une meilleure place, non pas une plus grande place - il y a toujours deux sièges à l'éducation - mais une meilleure place parce que ces deux sièges seraient . occupés par des personnes qui proviendraient des milieux et non pas qui représenteraient les milieux parce qu'ils sont dans les ministères. Ça consisterait à reconnaître...

Une voix:...

La Présidente (Mme Marois): Oui. M. le ministre.

Mme Harel: Je veux que le député de Berthier le sache, là, que...

Une voix:...

Mme Harel: ...simplement à reconnaître que les sociétés régionales qui remplacent les commissions de formation professionnelle, qui étaient déjà des corporations autonomes, ça ne consiste pas à demander qu'elles gardent entièrement les attributs qu'elles ont maintenant, mais qu'au moins elles soient des corporations au sens du Code civil, avec des conseils d'administration qui sont nommés, mais qui choisissent leur directeur général pour que, dans les régions, les gens n'aient pas le sentiment d'avoir perdu quelque chose avec cette société.

Troisièmement, ça consiste à faire tout simplement une place un peu plus élargie, de passer de un à trois sièges, pour que la main-d'oeuvre sans emploi, la main-d'oeuvre défavorisée, en particulier les groupes de femmes et la main-d'oeuvre que l'on connaît, qui est ciblée comme étant celle qui est discriminée, soit mieux représentée au conseil d'administration de la Société. Le ministre le sait, et son projet de loi aurait filé bien plus vite à l'heure qu'il est. C'est un choix.

M. Houde: Mme la Présidente. Mme Harel: C'est un choix.

La Présidente (Mme Marois): J'ai deux demandes, si vous le permettez, Mme la députée. J'ai le député de Nelligan qui avait demandé la parole préalablement; ensuite, le député de Berthier. Alors, si vous le permettez, je vais peut-être passer la parole au député de Neliigan. M. le député de Berthier, vous êtes d'accord?

M. Houde: Oui.

La Présidente (Mme Marois): M. le député de Nelligan.

M. Houde: Entièrement d'accord.

M. Williams: Merci. Merci beaucoup, M. le député de Berthier et Mme la Présidente. Ce n'est pas mon but de perdre le temps. On veut certainement utiliser le temps de la commission

de façon très utile, comme tout le monde le souhaite, mais je voudrais retourner à mon premier point, que nous avons déposé le projet de loi 408 avant. Je pense, si ma mémoire est bonne, que nous avons eu un débat de cinq heures, le jeudi, et de quatre heures, le vendredi, sur ça.

Mme Harel: Non. Vous n'avez pas une bonne information.

M. Williams: On peut vérifier.

La Présidente (Mme Marois): On pourra vérifier ici, au secrétariat.

M. Williams: Mais le point que je voudrais...

Mme Harel: Ça n'a pas été appelé le vendredi.

M. Williams: On peut vérifier, mais... Quelquefois, je...

La Présidente (Mme Marois): Je vais vérifier, si vous le permettez. On pourra vous donner l'information.

M. Williams: Merci beaucoup. Je n'ai jamais essayé de dire à cette Assemblée que j'ai le monopole sur la vérité, mais c'est ça que je pensais.

La Présidente (Mme Marois): Le monopole sur? Je m'excuse, je n'ai pas compris.

M. Williams: Sur la vérité.

La Présidente (Mme Marois): Ah oui! D'accord.

M. Williams: Mais j'espère que le but de mes remarques préliminaires ce soir, après plusieurs heures de débat... Je pense que c'est clair que les deux côtés veulent passer le projet de loi 408. On veut certainement passer les meilleures lois possible et j'espère que nous allons finir le débat le plus tôt possible pour avancer ce dossier qui est bien expliqué dans la loi 408. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): je vous remercie, m. le député de nelligan. je crois que le député de berthier voulait encore intervenir, brièvement, me dit-il.

M. Houde: Merci, Mme la Présidente. Si je prends les réponses que Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve m'a données tantôt, elle a dit: Nous voulions modifier trois articles, apporter trois amendements et, après ça, ça irait bien. Je n'ai pas assisté à tout le débat parce que, au début, j'étais avec la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Mais, à ce que je sache, à ma connaissance depuis ce matin, elle a apporté deux amendements à deux articles. Donc, il n'en restait plus qu'un. Après ça, on va pouvoir aller assez rapidement, si je comprends bien. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le député de Berthier. J'imagine que la députée de Hochelaga-Maisonneuve a pris bonne note de vos commentaires et pourra, au cours du débat que nous aurons sur les articles de loi, les uns après les autres... nous permettra de clarifier son point de vue et de voir si vous avez bien compris ce qu'elle a démontré il y a quelques instants.

M. Houde: Merci.

La Présidente (Mme Marois): Alors, nous en sommes à l'amendement à l'article 28. M. le ministre, vous avez fait les commentaires...

M. Bourbeau: En effet, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): ...d'usage au départ. Non. Je pense que la députée avait la parole. Nous allons voir où elle en est, si elle veut ajouter des choses.

Mme Harel: Oui. Alors, Mme la Présidente, nous en sommes donc à l'étude de l'amendement déposé par le ministre sur l'article 28 du projet de loi. Cet amendement maintient le droit de désaveu du ministre en ce qui regarde le règlement de régie interne de la Société, mais l'amendement est à l'effet qu'il retire le droit de désaveu du ministre sur la politique d'embauché et sur le volume d'effectifs. Cependant, évidemment, il faut bien comprendre que, si le ministre n'a pas de désaveu sur la poltique d'embauché et les effectifs, c'est que le Conseil du trésor, lui, exerce sa dictature sur la politique d'embauché et le volume d'effectifs, étant donné que, dans le cadre des politiques budgétaires votées chaque année, le dernier mot lui est réservé. Donc, ça ne m'apparaït pas être magnanime de la part du ministre que d'avoir décidé finalement de laisser au Conseil du trésor ce qui appartient au Conseil du trésor et de se garder un pouvoir de désaveu. J'aimerais savoir vraiment pourquoi le ministre veut garder un pouvoir de désaveu. Est-ce qu'un tel pouvoir existe dans d'autres lois? Moi, je n'en connais pas, là. Je ne pense pas que le ministre du Travail ait un pouvoir de désaveu sur la CSST, je ne pense pas que le ministre de la Santé ait un pouvoir de désaveu sur la Régie de l'assurance-maladie, je ne pense pas que, lui, le ministre de la Main-d'oeuvre, ait un pouvoir de désaveu sur la Régie des rentes. Pourquoi un pouvoir de désaveu sur la Société québécoise de développsrren* de la main-d'oeuvre? Ça m'apparaït tellement un projet de loi de fonctionnaires

qui veulent garder le contrôle, vous n'avez pas idée! Ce n'est pas possible, de bas en haut, de façon verticale, ça m'apparalt le pur produit d'un projet de loi de fonctionnaires, ça. Ce n'est pas possible.

La Présidente (Mme Marois): Je pense que le ministre...

Mme Harel: C'est incroyable.

La Présidente (Mme Marois): ...procédera à quelques commentaires sur votre question. Oui, M. le ministre. (20 h 30)

M. Bourbeau: Alors, je dirais que, si la députée de Hochelaga-Maisonneuve veut qu'on traite la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre comme la majorité des organismes gouvernementaux, je serais prêt à retirer le pouvoir de désaveu et à faire en sorte de traiter la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre comme les autres organismes gouvernementaux, sans pouvoir de désaveu, mais un pouvoir du gouvernement sur les règles de régie interne comme dans tous les cas: la CSST, la Régie des rentes du Québec, la CCQ, la SDI, la SIC, la Société de l'assurance automobile du Québec, la RAMQ.

Tous les organismes ont un article de loi qui dit que le gouvernement approuve le règlement de régie interne. Moi, je me suis battu comme un diable dans l'eau bénite pour faire en sorte que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre ait une marge de manoeuvre plus grande. C'est une des rares sociétés au Québec qui n'aura pas à faire approuver son règlement de régie interne pour le gouvernement. Voilà un gain important. Ce gain m'a été suggéré par les membres de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre qui m'ont dit: M. le ministre, essentiellement, plutôt que de soumettre notre règlement de régie interne à l'approbation du gouvernement, laissez-nous aller et gardez-vous un pouvoir de désaveu. La suggestion est venue d'un des membres de la Conférence permanente que je ne nommerai pas, parce que je veux garder quand même confidentielles les discussions. Après un certain temps - d'ailleurs, ce n'était pas... oui, c'était dans le projet de loi 19 - j'ai fini par convaincre le gouvernement de donner cette marge de manoeuvre à la Société. Si la députée de Hochelaga-Maisonneuve insiste beaucoup, ce serait très facile pour moi que d'annuler ça et de revenir au texte standard des autres sociétés. Mais, là, ça voudrait dire que la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre sera un petit peu plus encadrée par le gouvernement qu'elle ne l'est présentement. Voilà!

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée.

Mme Harel: Mme la Présidente, ça m'étonne beaucoup que le ministre nous dise que c'est la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre qui lui aurait suggéré...

M. Bourbeau: C'est des membres. Mme Harel: Des membres? M. Bourbeau: Oui, oui.

Mme Harel: En tout cas, écoutez, il y a sept membres à cette Conférence permanente et, à ce que je sache, dans le mémoire de la CSD, de la FTQ, de l'AMQ et du CPQ, chacun de ces mémoires contient un point de vue complètement opposé au pouvoir de désaveu.

M. Bourbeau: II vous en manque.

Mme Harel: Alors, voilà! il y a quatre des sept membres, c'est-à-dire une majorité des membres de la Conférence permanente qui disent non au pouvoir de désaveu.

M. Bourbeau: II vous en manque, vous avez remarqué?

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

Mme Harel: Oui. Alors, il me manque le Mouvement Desjardins, la CSN et la chambre de commerce. J'imagine que les chambres de commerce qui, d'une façon générale, sont en désaccord avec la centralisation manifeste du projet de loi le sont tout autant à l'égard du pouvoir de désaveu. Alors, il me restera à poursuivre mon enquête du côté de la CSN et du Mouvement Desjardins. Mais, ceci dit, ça ne fait encore qu'une minorité. Il n'y a pas là une majorité qui se prononce en faveur. Le ministre, ce qu'il laisse planer, c'est ceci: Oui, je vous permets d'adopter un règlement de régie interne sans qu'il soit approuvé par le gouvernement, mais, s'il ne fait pas mon affaire, j'ai le pouvoir de le désavouer. Voulez-vous bien me dire, Mme la Présidente, ce que ça leur donne? Ce n'est pas ça qu'ils demandaient, je suis convaincue; je suis tellement convaincue que vous pouvez être certaine que j'aurai des occasions de le demander à chacun des membres de la Conférence permanente, tiens. Évidemment, pas à chacun, il y en a manifestement qui sont contre. Alors, je demanderai à ceux qui ne s'étaient pas prononcés sur cette question et je vérifierai, ça, je vous le promets. Mais, finalement, je suis convaincue que ce qui avait été demandé, c'est qu'il y ait une autonomie de la part...

Et même la CSN, tiens! Je me rappelle que dans le mémoire de la CSN, la seule différence qu'il y avait en comparaison des autres mémoires, c'était sur l'article 29 et non pas sur l'article 28.

Je crois, oui, absolument. C'est donc le ministre qui, finalement, conclut à la demande qui, sans doute, lui avait été faite d'un pouvoir d'adoption de règlement de régie interne, en leur accordant d'une main pour leur retirer immédiatement après. Il y a quelque chose d'anachronique là-dedans.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre. J'ai aussi une demande d'intervention de Mme la députée de Chicoutimi. On va écouter le ministre, s'il vous plaît.

Mme Harel: Oui? Il a droit à cinq minutes après chaque...

La Présidente (Mme Marois): Oui, oui.

M. Bourbeau: Puisqu'on cite les mémoires en commission parlementaire, alors, là, je ne fais pas de secret. Le mémoire de la CSN propose un pouvoir de désaveu plutôt que de désapprobation. Donc, la CSN, pour la nommer, a demandé ça. Le Conseil du patronat du Québec prévoit un pouvoir de dénonciation, de désaveu, estime le contrôle gouvernemental trop fort sur les articles, etc. Donc, vous en avez déjà deux, là. Et ce que j'ai dit à la députée, je n'ai pas dit que, dans leur mémoire, tous les organismes demandaient un pouvoir de désaveu, mais il arrive parfois qu'un représentant d'un organisme, lors d'une discussion, peut approuver une demande de quelqu'un d'autre et, subséquemment, l'organisme peut arriver avec une position qui semble contraire, officiellement, en public. Alors, ce que je vous dis, c'est qu'il y a des membres de la conférence qui l'ont demandé et, à ce moment-là, ça semblait être autour de la table un voeu unanime.

Et je dis toujours à la députée que, si elle veut échanger ce pouvoir-là contre le modèle standard, je suis prêt à le faire, je n'aurais aucune difficulté à faire accepter ça par le gouvernement. Je vais même faire beaucoup d'heureux dans la machine gouvernementale, en tout cas, chez les fonctionnaires qui seraient bien heureux de mettre un peu plus de contrôle sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre en soumettant son règlement de régie interne à l'approbation du gouvernement plutôt que d'arriver a posteriori avec un pouvoir de dénonciation, si tant est que le règlement s'avérait excessif.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: À quelle page le ministre retrouve-t-il la position qu'il dit être celle de la CSN?

M. Bourbeau: Écoutez, je n'ai pas le mémoire devant moi, j'ai un résumé devant moi, ici.

Mme Harel: Parce que j'ai le résumé, moi, du mémoire de la CSN et le mémoire de la CSN devant moi et...

M. Bourbeau: Je n'ai pas de mémoire mais j'ai ici un résumé.

Mme Harel: Je ne retrouve pas... À Mission et pouvoirs de la Société, je ne retrouve pas cette recommandation. En tout cas, dans le résumé du mémoire de la CSN, page 5...

M. Bourbeau: Vous le lirez cette nuit.

Mme Harel: ...Mission et pouvoirs de la Société, on y dit plutôt: «II faut absolument éviter l'encadrement proposé qui limite considérablement les pouvoirs de la Société. Un tel encadrement, s'il était adopté intégralement, nuirait aux initatives et risquerait fort de condamner ce nouvel organisme à un fonctionnement hyperbureaucratique. Nous pensons que l'article 30 de l'actuel projet de loi donne toute la latitude nécessaire pour que le gouvernement puisse assumer ses responsabilités politiques en ce qui a trait à la mission et au mandat de la Société. Conséquemment, nous demandons le retrait des articles 21, 22 et 27 de l'actuel projet de loi...» Et, là, ça continue et il n'est jamais question de 28. «Nous nous opposons catégoriquement à toute ouverture vers une tarification aux individus. Conséquemment, nous demandons le retrait de l'article 25.» Ensuite, ça continue. «Concernant la mission de la Société, nous croyons nécessaire que soit précisé à l'article 17 que la Société met en oeuvre et gère, en collaboration avec les sociétés régionales, l'ensemble des programmes élaborés dans le cadre des politiques...», ce à quoi le ministre a donné suite, là, il faut le reconnaître, par un amendement.

Et ça se termine, Mission et pouvoirs de la Société, par le paragraphe suivant: «Nous pensons que la Société doit privilégier la participation des institutions publiques d'enseignement. Conséquemment, nous demandons qu'à l'article 18, troisième alinéa, soit biffée la référence aux établissements régis par la Loi sur l'enseignement privé.» Nous avons fait cet amendement et le ministre l'a rejeté.

Alors, je ne vois pas où il pourrait être possible... Mais je peux vous transmettre le mémoire de la CSN pour que vous me le citiez parce que, sinon, je ne vois pas où on peut retrouver ça.

M. Bourbeau: C'est un extrait que vous avez, là?

Mme Harel: Moi, c'est le résumé.

M. Bourbeau: Bon, alors, procurez-vous l'original puis vous regarderez...

Mme Harel: Je l'ai l'original. Alors...

M. Bourbeau: Voulez-vous en faire la lecture au complet? Gênez-vous pas, au point où vous en êtes, là.

Une voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): D'ici à ce que la recherche se fasse pour trouver la référence, j'imagine, j'ai la députée de Chicoutimi qui veut intervenir sur cette question, sur l'amendement à l'article 28.

Mme Blackburn: Oui. Je me demandais si... J'ai vu passer un certain nombre d'articles qui touchaient soit des organismes ou des sociétés d'État touchant la réglementation. On en était un jour venus à une entente autour de l'hypothèse de travail suivante. C'était: le règlement est soumis au ministère qui, lui, doit intervenir pour s'assurer que ça ne contrevient pas aux règles administratives et financières du Québec, que ça ne contrevient pas à des lois ou à des chartes. Alors, c'était vraiment un examen sous ces angles-là qui était fait du règlement. Et ça avait reçu l'assentiment du groupe et ça avait été bien reçu de la part du gouvernement. Alors, je me demande si une hypothèse comme ça, ça pourrait agréer et réunir les parties. Moi, il me semble qu'il y a quelque chose là qui...

La Présidente (Mme Marois): Alors...

Mme Blackburn: Alors, je voudrais juste vérifier.

La Présidente (Mme Marois): ...M. le ministre, je ne sais pas si vous souhaitez faire des commentaires ou répondre à la proposition qui est présentée par la députée de Chicoutimi, enfin, l'hypothèse qu'elle souhaiterait que vous exploriez. (20 h 40)

Mme Blackburn: Là, évidemment, il faudrait que je vérifie avec ma collègue, mais c'est quelque chose qui ramène les choses à un niveau plus technique et à caractère plus juridique et qui, à cet effet, a moins pouvoir d'intervention sur l'activité réelle ou sur l'organisation.

La Présidente (Mme Marois): Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Bourbeau: Je crois comprendre que ce que propose la députée de Chicoutimi, c'est essentiellement ce qu'on propose: un droit de désaveu, de désapprobation au cas où la Société passerait un règlement excessif.

Mme Blackburn: Ce n'est pas tout à fait ça. Je demanderais juste un peu l'attention du ministre.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Chicoutimi. Je vais revenir.

Mme Blackburn: II me semble que ce n'est pas compliqué. C'est fait en toute bonne volonté pour essayer de trouver... Dans le cas que je cite, vous auriez le pouvoir, et vos services juridiques, d'intervenir et d'analyser le règlement en tout ce qui a trait aux points qui pourraient contrevenir aux règles administratives et financières du gouvernement, à la Charte et à d'autres lois. Autrement dit, c'est examiner sous l'angle... C'est comme un avis légal sur la portée juridique de ces articles, de ce règlement. C'est là-dessus que, une fois l'information étant fournie, l'organisme peut réajuster, lui, a la responsabilité de revoir son règlement à la lumière de l'avis juridique qui est fourni par le ministère.

Dans le cas auquel je me réfère, ça avait fait l'affaire de tout le monde et ça évitait d'intervenir vraiment sur la gestion interne, le règlement de régie interne. Ça n'était pas comme un désaveu, simplement vous avez un avis, vous devez vous ajuster parce que là, évidemment, ça contrevient à des lois, ça contrevient à la Charte ou ça contrevient aux règles administratives financières. Ça convenait à tout le monde. Je ne sais pas si, une formule comme ça, le ministre pourrait l'accepter, mais c'était vraiment indiqué dans l'article que c'était sous les angles de vérification.

M. Bourbeau: La formule qu'on propose est une formule qui s'inspire un peu de ça. Ce n'est pas exactement la même chose, mais c'est de la même parenté. Celle-là est aussi bonne qu'une autre.

Mme Blackburn: Mais ce n'est pas balisé. C'est ça le problème. Ça pourrait intervenir sur n'importe quel sujet.

M. Bourbeau: Ce n'est pas balisé... C'est la «raisonnabilité» qui s'imposera.

Mme Blackburn: Moi, je veux croire que le ministre est très raisonnable. Mais mettons qu'on change de ministre et qu'il soit un peu moins raisonnable?

M. Bourbeau: Écoutez, je vous répète encore que je suis prêt à le retirer.

Mme Blackburn: Oui?

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: Je suis absolument prêt à retirer l'article complètement et...

Mme Blackburn: Bien oui...

M. Bourbeau: ...à appliquer les mêmes articles que pour tous les autres organismes gouvernementaux. On peut revenir au standard, si vous voulez. Là, on fait un article qui est spécial, mais je peux revenir au standard sans problème, comme pour tous les organismes que j'ai cités tantôt. Je peux vous les citer encore.

Mme Blackburn: Est-ce que vous pouvez nous déposer la liste?

M. Bourbeau: Oui, j'en ai une. Je peux la déposer. Je peux vous la relire: CSST, RRQ - pour les initiés bien sûr, les autres... - la CCQ, la SDI, la SIQ, la SAQ, la RAMQ, la CNT et d'autres. Je sais qu'il y en a d'autres. D'ailleurs, quand j'ai voulu faire l'exception à ça, on m'en a sorti toute une panoplie.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de...

M. Bourbeau: L'offre est sur la table, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre, merci.

Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Moi, c'était l'hypothèse que je soumettais dans un esprit de collaboration, sachant que ça s'était fait ailleurs dans d'autres lois. Si vous me donnez le temps - c'est sûr que je ne pourrais pas aller vous le chercher tout de suite - je pourrais faire des recherches. Ça avait fait l'affaire de tout le monde parce que ça balisait le pouvoir que vous appelez de désaveu ou d'intervention du ministère là-dedans. Alors, c'était la proposition.

Je me dis que le ministre se plonge dans sa lecture plutôt que d'améliorer son projet de loi, ce n'est pas très respectueux ni pour nous, ni pour ceux qui sont concernés. C'est désagréable.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, ça fait 10 minutes que j'écoute la députée de Chicoutimi. Je lui ai fait deux fois la réponse que ce qu'on propose, c'est essentiellement ce qu'elle propose avec quelques modifications. Ce qu'on propose se retrouve déjà dans d'autres lois, et j'ai offert de retirer l'article complètement si l'Opposition souhaite avoir plus de contrôle, si l'Opposition souhaite, en fait, que la Société québécoise soit contrôlée de la même façon que la majorité des organismes québécois. Vous ne pouvez pas avoir plus de bonne volonté que ça; je vous offre de retirer l'article au complet.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Mme la Présidente, le ministre, à l'appui de son pouvoir de désaveu, a cité tantôt deux organismes, la CSN et le Conseil du patronat, nous déclarant que ces deux organismes partenaires, membres de la Conférence permanente sur l'adaptation de la main-d'oeuvre, avaient, dans leur mémoire respectif, proposé un tel pouvoir de désaveu. Je voudrais, Mme la Présidente, vous lire un très, très court extrait du mémoire du Conseil du patronat du Québec, déposé devant la commission parlementaire, à la page 16, concernant l'article 28 intitulé: Pouvoir de désavoeu du ministre. On y lit ceci: «Selon cet article, le ministre peut désavouer dans les 15 jours de sa transmission un règlement ou un plan ou même une partie d'un règlement ou d'un plan soumis par la Société.»

Et je cite le deuxième paragraphe: «La portée de cet article n'étant d'aucune façon sujette à quelque paramètre que ce soit, il confirme la quasi-mainmise du ministre sur la Société dans deux domaines qui sont au coeur de ses opérations.» Si c'est là un appui, franchement, je le répète, le ministre, il n'est vraiment pas regardant. Je comprends qu'avec l'amendement le ministre maintient son pouvoir de désaveu sur un seul des domaines au coeur des opérations, c'est-à-dire le règlement de régie interne.

Ceci dit, Mme la Présidente, ce que le ministre nous dit, c'est soit le pouvoir de désaveu ou soit l'approbation par le gouvernement. Moi, je lui dis que c'est une drôle de façon de traiter de la concertation parce qu'il ne se satisfait pas de détenir le tiers des voix à la Société, il aura le tiers des voix, 6 membres sur 18 membres, si on exclut le président, il pourra compter évidemment sur, j'imagine, la voix du président ou de la présidente de cette Société qu'il aura lui-même choisi et nommé. Donc, il est, de chacune des catégories représentées à la Société, celui qui détient le plus de voix. Alors, ce qu'il nous dit, c'est que si ses représentants ne réussissent pas à faire adopter le règlement de régie interne et qu'il est adopté par un appui de la délégation patronale et syndicale, ce qu'il nous dit à ce moment-là, c'est qu'il se garde le pouvoir de le désavouer.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que, M. le ministre, vous voulez, intervenir?

M. Bourbeau: Mais je n'ai pas entendu de questions. Est-ce qu'il y avait une question?

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Ça va, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve? Alors, je vous indique que, sur l'amendement, si je n'ai pas d'autres commentaires, parce que la députée, je crois, a utilisé tout le temps dont

elle disposait... M. le député d'Abitibi...

Mme Harel: Me permettez-vous, Mme la Présidente-La Présidente (Mme Marois): Pardon.

Mme Harel: II me restait, je pense, trois minutes...

La Présidente (Mme Marois): De Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

Mme Harel: ...avant peut-être de déposer un amendement... Vous me disiez tantôt qu'il me restait trois minutes.

La Présidente (Mme Marois): Oui.

Mme Harel: J'aimerais savoir ce qui se produit si le ministre exerce son pouvoir de désaveu. Le règlement de régie interne deviendrait caduc et, à ce moment-là, qui comblerait le vide ainsi créé?

M. Bourbeau: À ce moment-là, la Société, pour pouvoir fonctionner d'une façon efficace, devrait passer un autre règlement de régie interne. Si elle n'en passait pas un autre, elle serait, disons, condamnée à ne pas avoir de comité exécutif, des choses comme ça. Ce sont des règlements de régie interne. Ce n'est pas des sujets qui portent directement sur les budgets de la Société ou sur ses programmes, mais c'est son fonctionnement. Maintenant, le ministre, dans une autre version, s'était gardé le pouvoir de substituer un règlement. On a retiré cet... Enfin, un peu plus tard, on verra que j'ai l'intention de retirer le pouvoir de substituer un règlement, encore là pour donner à la Société une marge de manoeuvre accrue et pour enlever l'impression que le ministre veut attacher les mains de la Société.

D'autre part, il resterait toujours l'article 30, qui est le pouvoir de directive qui existe dans toutes les sociétés d'État, qui pourrait toujours être utilisé si jamais un cataclysme se produisait.

La Présidente (Mme Marois): Ça va. Merci, M. le ministre. Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions, je vais mettre l'amendement aux voix. Attendez un peu, je l'ai ici. Alors, l'amendement se lit comme suit: Remplacer les deux premiers alinéas de l'article 28 du projet par les suivants: «Un règlement visé à l'article 13 est transmis au ministre dès son adoption. «Le ministre peut désavouer, dans les 45 jours de cette transmission, un tel règlement ou une partie d'un tel règlement qui cesse alors d'avoir effet à compter de la date du désaveu. Le ministre en avise aussitôt la Société.» Est-ce que cet amendement est adopté? M. Bourbeau: Adopté.

Mme Harel: Sur division. (20 h 50)

La Présidente (Mme Marois): Merci. Maintenant, nous revenons à l'article 28. Est-ce qu'il y a des commentaires, des questions, des remarques sur l'article 28 amendé?

Une voix: Adopté.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce qu'il est adopté?

Mme Blackburn: Moi, j'aurais...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, j'aurais peut-être juste une question-Une voix: Pas encore! Une voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): S'il vous plaît, je pense que la députée a le droit de poser des questions.

Mme Blackburn: ...au ministre. Selon vous, c'est quoi la différence entre approuver un règlement et pouvoir de désaveu?

M. Bourbeau: La différence est que, dans un premier cas, la Société ne peut pas avoir un règlement de régie interne sans le soumettre à l'approbation du gouvernement et attendre que le gouvernement l'approuve. Dans le deuxième cas, la Société passe un règlement, elle le met en vigueur et elle l'utilise et, à moins que le gouvernement n'intervienne a posteriori pour lui dire «il y a quelque chose dans le règlement qui ne fonctionne pas», le règlement est en vigueur. Évidemment, ça donne une marge de manoeuvre pas mal plus intéressante à la Société. D'ailleurs, je peux peut-être vous citer, parce qu'on l'a trouvé, l'extrait du mémoire de la CSN, qui dit ceci: «Selon la CSN, il serait amplement suffisant que le gouvernement se garde le pouvoir de désavouer les initiatives de la Société plutôt que de faire dépendre continuellement ses initiatives de son approbation.»

Alors, c'est l'approche qu'on retrouve aux articles 28 et 29 concernant le règlement de régie interne. On voit un peu la différence qu'il peut y avoir entre les deux façons de procéder: dans une première façon, la Société procède de sa propre initiative, et son règlement devient en vigueur automatiquement, à moins qu'il ne soit désavoué.

Mme Blackburn: Et le règlement...

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée.

Mme Blackburn: Oui. Et le règlement de la Société n'est pas publié dans la Gazette officielle, il est simplement transmis au ministre, dans votre version.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Non, pas du tout. Ce n'est pas publié, mais c'est toujours accessible en vertu de la loi sur l'accès à l'information.

M. Trudel: M. le ministre...

La Présidente (Mme Marois): Est-ce qu'il y a des commentaires ou des questions sur cet article? Sinon, nous allons procéder à son adoption.

Mme Harel: Un vote nominal?

La Présidente (Mme Marois): Par vote nominal?

M. Trudel: Mme la Présidente... Mme Harel: Ah! Excusez-moi.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Trudel: est-ce que le règlement de régie interne d'une telle société ne comporte pas habituellement tous les mécanismes de la corporation en matière de dotation de personnel?

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Crevier: C'est-à-dire...

La Présidente (Mme Marois): Me Crevier?

M. Crevier: Oui, c'est-à-dire que ce n'est pas le règlement de régie interne qui va contenir ces éléments-là, ce serait plutôt le règlement qui est prévu...

Mme Harel: En vertu de l'article 11. M. Trudel: À 11?

M. Crevier: ...à l'article 11, effectivement, et qui traite de la manière... «Les employés de la Société sont nommés de la manière qu'elle prévoit par règlement.» Alors, le processus de dotation se retrouverait à 11, qui n'est pas sujet à désaveu, ni à approbation.

La Présidente (Mme Marois): L'article 11 n'est plus soumis à l'approbation? Parce qu'on dit: «...est soumis à l'approbation du gouvernement».

M. Crevier: C'est le deuxième alinéa de 11, où on parle d'approbation du gouvernement, c'est-à-dire l'établissement...

La Présidente (Mme Marois): ...des normes et barèmes...

M. Crevier: ...des conditions de travail.

La Présidente (Mme Marois): D'accord, de rémunération, ça va.

M. Trudel: Mais est-ce que les mécanismes de dotation ne font pas partie, eux, du règlement de régie interne? Une société qui se donne... Il faut savoir où vont être les niveaux d'approbation, qui va avoir les délégations de pouvoir pour engager, qui va avoir les capacités de gérer les conditions de travail, qui va voir... Est-ce que ça, ça n'appartient pas, de façon usuelle, à ce qu'on appelle généralement le règlement de régie interne de la corporation?

M. Crevier: C'est-à-dire que la dotation...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Me Crevier.

M. Crevier: ...oui, la mécanique de dotation se retrouve au règlement dont on parlait tantôt. Par contre, les mécanismes de délégation de pouvoir au sein de la Société se retrouveraient, effectivement, dans le règlement de régie interne, et c'est l'article 14 qui le prévoit, où on...

M. Trudel: Ce qui veut dire...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député.

M. Trudel: ...à la limite - excusez-moi, Mme la Présidente - ...

La Présidente (Mme Marois): Ça va.

M. Trudel: Ce qui veut dire qu'à la limite, de la façon dont l'article est rédigé, le ministre pourrait se garder les pouvoirs sur les mécanismes d'embauché à la Société.

La Présidente (Mme Marois): est-ce que le ministre veut apporter une réponse aux questions soulevées par le député de rouyn-noranda-témiscamingue?

M. Bourbeau: Me Crevier va répondre.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Me Crevier?

M. Crevier: C'est ça. C'est effectivement dans le règlement de régie interne où on va retrouver la délégation de pouvoir comme telle. Mais je ne pense pas que le ministre puisse se réserver quelque autorisation que ce soit, par exemple, sur l'embauche du personnel ou... La seule façon dont le ministre pourrait intervenir au niveau des contrats, par exemple - parce que c'est de ça qu'on parle - ce serait par l'exception, je dirais, de l'article 27 où il peut se réserver un pouvoir d'autoriser certains contrats importants. Mais, autrement, il n'aurait pas la faculté d'autoriser les autres actes d'administration.

M. Trudel: Regardez, Me Crevier. Vous convenez que ce qui concerne les effectifs, à l'article 11, ça c'est le plan, en disant: Nous aurons tant d'employés de telle catégorie, etc., avec un total du nombre d'employés. Et, au règlement de régie interne, on va avoir qui aura le pouvoir, à l'intérieur de la Société, de signer les contrats d'engagement, les délégations de pouvoir sur l'engagement de certaines catégories de personnel, le niveau permis à tel type de cadre pour procéder à l'engagement, les procédures, etc. Et tout ça est soumis au pouvoir de désaveu du ministre.

M. Crevier: Le règlement? Oui.

M. Trudel: Non, mais le contenu du règlement, là, qui contient...

M. Crevier: C'est ça.

M. Trudel: ...entre autres, ça...

M. Crevier: Oui.

M. Trudel: C'est soumis au pouvoir de désaveu du ministre.

M. Crevier: Oui.

M. Trudel: À la limite, donc, juridiquement pariant, le ministre pourrait, par son pouvoir de désaveu, se garder ou vouloir se garder les responsabilités des procédures d'embauché dans la Société ou avoir une poignée telle sur la partie du règlement de régie interne qui traite des pouvoirs d'embauché à l'intérieur de la Socité.

La Présidente (Mme Marois): Me Crevier?

M. Crevier: Juste une précision, peut-être que ça pourrait éclaircir un peu. Le pouvoir de désaveu, il doit être exercé, s'il est exercé, dans les 45 jours de la transmission du règlement.

M. Trudel: Oui.

M. Crevier: Alors, ce n'est quand même pas un pouvoir de désaveu qui peut être exercé un an, deux ans ou trois ans après.

M. Trudel: Non, mais sauf que... Je m'excuse, Me Crevier, mais...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député?

M. Trudel: Sauf que, comme le disait le ministre - je pense que c'est le ministre qui répondait à la question, tantôt, de ma collègue - c'est un processus qui pourrait être un étemel recommencement. C'est-à-dire que, si ça ne satisfait pas le ministre, il peut demander de refaire les devoirs, à aller jusqu'à la limite - et je pense que c'est exact - d'utiliser son pouvoir de directive sur la Société en matière d'embauché du personnel.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: On a l'intention de déposer un amendement à l'article 29, si jamais on peut y arriver...

La Présidente (Mme Marois): Nous cheminons.

M. Bourbeau: ...dans lequel amendement vous allez constater que je propose de supprimer totalement l'article 29 qui donnait au ministre le pouvoir de substituer, dans les 45 jours après avoir mis en demeure la Société d'adopter ou de modifier un règlement, le règlement par un autre règlement: exercer les pouvoirs réglementaires de la Société. Alors, on va voir que j'ai l'intention, encore là, d'abandonner certains des pouvoirs que le gouvernement s'était gardés de façon à laisser une marge de manoeuvre accrue à la Société, ne conservant que ce pouvoir de désaveu prévu.

Maintenant, tout à l'heure, la députée de Hochelaga-Maisonneuve a parlé du Conseil du patronat en nous disant que le Conseil du patronat...

Mme Harel: Page 16. (21 heures)

M. Bourbeau: ...ne favorisait pas non plus... enfin, n'était pas d'accord avec ça. Je voudrais simplement dire ceci. La députée de Hochelaga-Maisonneuve a lu le mémoire du Conseil du patronat, l'article 28, où on dit qu'effectivement on trouve que ce pouvoir total de désaveu est un peu excessif. Par contre, si on regarde l'article 23, à la page 15 du mémoire, le Conseil du patronat dit: «Au lieu de donner au gouvernement un pouvoir monopolistique d'approbation des programmes de la Société - là, on parle des programmes; tantôt, on parlait du...

Mme Harel: Règlement de régie interne.

M. Bourbeau: ...du règlement, oui - il serait plus judicieux de lui confier un pouvoir de dénonciation.» Et on continue en disant: «Cela permettrait à la Société d'être beaucoup plus efficace. Ainsi, ce n'est pas dans la mesure où les politiques de la Société - là, on parle de politiques, donc, on se rapproche drôlement de la régie interne - apparaîtraient incompatibles avec les règles de la saine gestion et la transparence que le gouvernement pourrait exiger des explications, voire même des modifications ou la suppression de programmes.»

Alors, les analystes, au ministère, qui ont fait l'examen du mémoire ont conclu que le Conseil du patronat était d'accord avec la philosophie de...

Mme Harel: Ont confondu programme et règlement de régie interne.

M. Bourbeau: Non. Mais, quand on parle de politiques et de saine gestion, on est pas mal dans la régie interne.

Mme Harel: ...ont confondu 23 et 28. Ceci dit, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...je comprends qu'il y a un amendement sur 29. Nous en sommes à 29 là?

La Présidente (Mme Marois): Non. Non, non, non. Nous en sommes à l'article 28 tel qu'amendé.

Mme Harel: Tel qu'amendé. Moi, je vous propose, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Allez, Mme la députée.

Mme Harel: ...de procéder à l'examen de 28.

La Présidente (Mme Marois): C'est-à-dire que nous suspendions peut-être?

Mme Harel: On va procéder au vote sur 28.

La Présidente (Mme Marois): Non? On est prêts à passer au vote sur 28.

Mme Harel: oui, oui. on va disposer de 28. voilà, c'est le terme que je cherche, mme la présidente, «disposer». est-ce que nous pouvons en disposer?

La Présidente (Mme Marois): Alors, je vais appeler tout simplement l'article...

Mme Harel: Pour ne pas indisposer le ministre.

La Présidente (Mme Marois): ...28, tel qu'amendé, pour savoir s'il est adopté. Est-ce qu'il est adopté?

Mme Harel: Sur division.

La Présidente (Mme Marois): Sur division.

Mme Harel: Ensuite, 29 tel qu'amendé.

La Présidente (Mme Marois): J'appelle maintenant l'article 29.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, je propose de supprimer l'article 29 du projet de loi.

La Présidente (Mme Marois): Essentiellement? C'est l'amendement?

M. Bourbeau: C'est l'amendement.

La Présidente (Mme Marois): Vous ne proposez pas qu'il y ait...

Mme Harel: Biffer 29? Adopté.

La Présidente (Mme Marois): ...d'autres modifications? Je n'ai pas l'amendement devant moi. Est-ce que je pourrais recevoir l'amendement, le projet d'amendement?

Mme Harel: On va plus vite que le secrétariat de la commission.

La Présidente (Mme Marois): La présidence n'a pas le projet d'amendement.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, est-ce que je comprends que si je propose de supprimer tous les autres articles ça va aller aussi vite?

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Alors, l'amendement à l'article 29 se lit comme suit: Supprimer l'article 29 du projet. Est-ce qu'il y a des commentaires, des questions? M. le ministre, est-ce que vous voulez nous...

Mme Harel: Nous lire, oui.

La Présidente (Mme Marois): Non, mais nous expliquer un petit peu ce dont il s'agit. Moi, je veux bien là, mais... Ce qui a justifié là qu'on suspende... Pas qu'on suspende, qu'on raie, qu'on supprime...

M. Bourbeau: Bon. Je croyais qu'il était adopté, l'artic'e ?9.

La Présidente (Mme Marois): Non. Pas du tout. Je n'avais pas reçu l'amendement.

M. Bourbeau: Non, mais il était adopté quand même.

La Présidente (Mme Marois): Je viens de recevoir l'amendement.

Mme Harel: Notre intention est de l'adopter, mais on aimerait mieux que vous nous fassiez connaître les motifs profonds qui vous ont conduit à sa suppression.

M. Bourbeau: Alors, l'article vise...

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: ...comme vous avez vu, à supprimer le pouvoir du ministre d'adopter ou de modifier un règlement à la place de la Société. Vous vous souvenez que dans la version originale l'article 29 couvrait l'ensemble des pouvoirs réglementaires de la Société, le règlement sur les conditions de nomination des employés de la Société, le règlement de la régie interne et le règlement de tarification de certains services.

Alors, le seul pouvoir de substitution qui subsiste se retrouve maintenant à l'article 25 du projet de loi. Il appartient au gouvernement et il concerne la tarification de certains services offerts par la Société.

Mme Harel: II est suspendu pour tout de suite?

M. Bourbeau: Possiblement. La Présidente (Mme Marois): Ça va. M. Bourbeau: L'article 25 est suspendu? Mme Harel: Oui.

La Présidente (Mme Marois): Oui. L'article 25 est suspendu.

M. Bourbeau: II est en suspens.

La Présidente (Mme Marois): C'est bien cela, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui.

La Présidente (Mme Marois): Bon. Est-ce que ça va? Est-ce qu'il y a d'autres questions ou commentaires? Ça va. Donc, l'amendement est adopté, ce qui fait que l'article 29 est supprimé.

Mme Harel: Adopté.

La Présidente (Mme Marois): Adopté. J'appelle maintenant l'article 30.

M. Bourbeau: Cette disposition confère au ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle le pouvoir d'adresser à la Société des directives portant sur ses objectifs, ses orientations, ou encore l'exécution de ses fonctions, lesquelles lient la Société dès qu'elles ont été approuvées par le gouvernement.

Elle prévoit aussi le dépôt de telles directives devant l'Assemblée nationale. Je vous signale qu'on retrouve des dispositions du même type dans plusieurs lois constitutives d'organismes gouvernementaux. Entre autres, font l'objet d'une disposition semblable des organismes aussi divers que le Centre de recherche industrielle du Québec, l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec, la Régie de l'assurance-maladie du Québec, la Régie des télécommunications, la Société d'habitation du Québec, la Société de développement industriel du Québec, la Société immobilière du Québec.

L'utilisation d'un tel pouvoir demeure toutefois une chose vraiment exceptionnelle. En effet, il n'a été utilisé qu'une seule fois, en 1990, directive au Centre de recherche industrielle du Québec sur le mandat de normalisation industrielle au Québec, approuvée par le décret 908-50 du 27 juin 1990. De même qu'en 1991 une directive portant sur les objectifs et l'orientation de la Corporation d'urgences-santé de la région de Montréal Métropolitain, approuvée par le décret 860-91 du 19 juin 1991.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a des questions, des commentaires?

Mme Harel: Oui. Mme la Présidente, ça m'apparaît un article extrêmement important par lequel le ministre peut, dans le cadre des responsabilités et des pouvoirs qui lui sont confiés, déterminer les objectifs de la Société. «Des» objectifs ou «les» objectifs, en fait, on y lit «les», mais ça pourrait être, parmi ceux déjà retenus par la Société, des objectifs, des orientations particulières. Et j'ai pensé, Mme la Présidente, que c'est à ce moment-ci que l'on pourrait demander au ministre s'il entend... Quelle sorte de directives il entend donner? Comment il entrevoit, puisqu'il se fait attribuer un pouvoir qui est quand même considérable, comment il entend le gérer, ce pouvoir qu'il recherche?

La Présidente (Mme Marois): Exercer ce pouvoir.

Mme Harel: L'exercer, le pouvoir qui est recherché.

M. Bourbeau: J'espère ne jamais avoir...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le

ministre.

M. Bourbeau: J'espère ne jamais avoir à l'utiliser, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Vous espérez ne jamais avoir... Attendez juste une petite seconde. Vous préférez ne jamais avoir à l'utiliser?

M. Bourbeau: J'espère ne jamais devoir l'utiliser.

Mme Harel: Parce que vous envisagez de ne l'utiliser qu'a contrario de la Société? Que parce que la Société...

M. Bourbeau: Bien, écoutez, c'est un pouvoir exceptionnel que le gouvernement se donne pour éviter des cataclysmes mondiaux. C'est quelque chose d'absolument... c'est la masse... c'est des choses qu'on ne voit jamais. Mais supposons qu'à un moment donné la Société soit prise en charge, je ne sais pas, moi, par des gens qui deviendraient incontrôlables, incontrôlés et qui ne respectaient pas la loi, les règlements ou qui commenceraient à faire des gestes qui ne seraient pas compatibles avec une saine gestion des fonds publics, le gouvernement pourrait intervenir. Il ne faut pas oublier que ces fonds-là, dans une proportion de 100 % à peu près, ça va être des fonds gouvernementaux pour lesquels on est responsables devant l'Assemblée nationale. Alors, le gouvernement doit se garder quelque part une poignée, ayant abandonné le contrôle de cette Société-là à des individus qu'il ne contrôle pas parce que le gouvernement n'aura qu'un tiers des votes. Alors, le gouvernement n'ayant qu'un tiers des votes et confiant 100 % des budgets à cet organisme-là, ce serait totalement irresponsable de ne pas se garder quelque part une poignée, comme on dit en bon français.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Chicoutimi, je crois, m'a demandé la parole. Oui.

Mme Blackburn: Est-ce que le ministre pourrait nous rappeler le décret touchant le CRIQ, le Centre de recherche industrielle du Québec? Je m'en rappelle, mais vaguement, parce que ça fait déjà deux ans. Et qu'est-ce qui avait justifié l'intervention du ministre, à l'époque?

M. Bourbeau: Moi, je ne m'en rappelle pas. Moi, je ne m'en rappelle pas.

Mme Blackburn: Moi, je me rappelle.

M. Bourbeau: Je ne m'en rappelle pas, Mme la Présidente. Je sais qu'il a été utilisé, le pouvoir de directive. Mais je ne connais pas les faits et je ne suis pas. non plus, tellement intéressé à les connaître...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Bien, écoutez...

M. Bourbeau: ...pour bien vous dire.

Mme Blackburn: ...il me semble que si le ministre veut être un peu sérieux...

M. Bourbeau: Mais je sens que je vais les connaître bientôt.

Des voix: Ha, ha, ha!

(21 h 10)

Mme Blackburn: Non, parce que j'imagine que vous auriez la curiosité d'aller voir, parce qu'ils ont été utilisés à cette occasion-là sous des prétextes fort douteux, et vous pourriez vérifier. Alors, moi, je pense, comme ça a été utilisé si peu souvent... Vous nous dites: Ça existe dans toutes les lois. Vous avez deux cas où c'a été utilisé: Dans le cas du CRIQ et l'autre c'était...

M. Bourbeau: La santé. Dans le domaine de fa santé.

Mme Blackburn: Urgences-santé. Mais c'est vraiment exceptionnel. Alors, pourquoi, étant si exceptionnel, faut-il avoir une telle disposition? Parce que c'est toujours... C'est ça, c'est la ceinture et les bretelles!

M. Bourbeau: Non, il n'y a même pas de ceinture, il y a seulement les bretelles.

Mme Blackburn: Vous pensez? M. Bourbeau: Oui.

Mme Blackburn: Vous avez le pouvoir de désaveu. Vous avez... Et là...

M. Bourbeau: II y avait la ceinture et les bretelles avant mais, maintenant, avec les modifications que j'apporte aujourd'hui, on enlève la ceinture. Il n'y aura plus que des bretelles maintenant.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Mme la Présidente, j'ai pensé que c'était à ce moment-ci de nos travaux, au moment où on étudie l'article 30, que je pouvais m'enquérir auprès du ministre s'il avait l'intention d'utiliser ce pouvoir qui lui est conféré pour que la Société instaure des objectifs quant à l'équité dans l'accessibilité aux programmes de

formation des travailleurs et des travailleuses. .

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Le pouvoir de directive dont on parle ici n'est pas un pouvoir qui pourrait, enfin, qui devrait être utilisé pour indiquer à la Société des directives générales de politique, c'est un pouvoir qu'un ministre peut utiliser lorsqu'il y a un déraillement sur le plan administratif surtout. Je ne vois pas qu'on puisse, qu'on doive utiliser un pouvoir semblable pour faire en sorte d'imposer à la Société une nouvelle orientation. Je pense que ça pourrait se faire par voie de politique gouvernementale qui serait annoncée par le gouvernement et non pas une directive d'un ministre.

Mme Harel: Est-ce que...

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Je pose ces questions, vous comprendrez, Mme la Présidente, parce que l'énoncé de politique sur le développement de la main-d'oeuvre ne contenait pas un mot, pas une ligne, pas une phrase sur la question de l'équité dans l'accessibilité des programmes de formation des travailleurs et des travailleuses et, connaissant la tendance lourde du marché du travail à discriminer des clientèles qui sont historiquement fortement défavorisées, si les programmes de formation de la main-d'oeuvre, comme je vous le rappelle, le font, les programmes fédéraux qui ont choisi de cibler des clientèles pour leur permettre d'effectuer un nécessaire rattrapage...

Et à ce chapitre-là je voudrais rappeler la mesure dans les cours de formation professionnelle non traditionnelle offerts par Emploi et Immigration Canada, un quota qui est de 30 % et qui existe présentement. Alors, c'est, je vous le rappellerai, un gain que la Fédération des femmes du Québec a obtenu, qu'elle avait perdu, d'ailleurs, en 1986. Après des efforts de concertation, elle a pu faire réintroduire des quotas. J'ai apporté avec moi les nombreux mémoires présentés devant la commission parlementaire qui nous démontrent éloquemment que laissés à eux-mêmes, n'est-ce pas, les décideurs en matière de programmes de formation offrent indistinctement, comme si les hommes et les femmes étaient égaux sur le marché du travail. S'il n'y a pas une orientation clairement définie en faveur d'une accessibilité au programme de formation des travailleurs et des travailleuses en regard d'objectifs quantitatifs clairs, il est tout à fait démontré, Mme la Présidente, notamment par une étude du Conseil du statut de la femme qui le démontre âprement, que malgré qu'elles représentent 43 % de la population active la participation des femmes au programme de Formation sur mesure en établissement, par exemple, se situe autour de 30 %.

Cette étude du Conseil ajoute que, de plus, les femmes ne se retrouvent pas dans les champs professionnels qualifiants et prometteurs d'avenir. Et l'étude du Conseil statuait que devant cet état de fait, il fallait présumer que les femmes risquent de continuer à occuper des postes d'exécutantes pour les 30 prochaines années. Alors, ce n'est pas peu de chose.

C'est là, finalement, les données d'une étude du Conseil du statut de la femme du Québec qui est corroborée par l'étude réalisée par le Conseil économique du Canada qui spécifiait qu'une très forte concentration de femmes se retrouve dans des emplois caractérisés par un haut niveau de précarité. Les employeurs n'investissent pas dans la formation de leurs employés et, lorsqu'ils le font, ce sont plus souvent qu'autrement des homnmes hautement qualifiés jouissant d'une solide éducation qui en bénéficient. Je ne sais combien d'autres exemples je pourrais vous donner, Mme la Présidente, à travers différents programmes pour vous signaler qu'en général les études démontrent que la seule formation accessible pour la clientèle femme est la formation sur mesure et l'accès au plus petit diplôme existant.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: mme la présidente, est-ce que je peux demander à la députée de hochelaga-maisonneuve où elle veut en venir avec son intervention? je ne comprends pas tellement.

Mme Harel: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...à une question simple, très simple: qu'un siège soit assuré à une représentation des groupes de femmes à l'intérieur du conseil d'administration de la Société. Je reprends, Mme la Présidente, parce que depuis que j'ai entendu le ministre, ce matin, je me suis dit qu'il ne fallait quand même pas laisser passer l'occasion, lui qui aura à proposer à son gouvernement les nominations à faire au conseil d'administration de la Société. Je ne peux pas, moi, ne pas saisir l'occasion qui m'est donnée pour lui dire et lui rappeler quelque chose d'extrêmement important que le CIAFT, c'est-à-dire le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail du Québec, nous rappelait dans le mémoire qu'il nous présentait au printemps dernier. Cette question, elle portait justement sur la représentation, de quelle nature devait être cette représentation. Dans l'énoncé de politique, le ministre stipule qu'il - et je cite - «s'assurera d'une représentation équitable

des hommes et des femmes au sein du conseil d'administration». C'est de la bonne volonté, et c'est ce qu'il a repris, d'ailleurs, aujourd'hui même.

Et je cite le CIAFT qui en connaît un peu dans le domaine, n'est-ce pas, pratiquant l'intervention pour l'accès des femmes au travail depuis plus qu'une décennie: «Cette intention, non corroborée à l'intérieur de la loi, ne saurait à elle seule nous assurer une prise en compte des intérêts des femmes. En effet, chacune des représentantes pouvant y être nommée assurera les intérêts de son groupe d'appartenance, soit celui des travailleurs syndiqués ou des employeurs. Elles n'auront pas le mandat de défendre la position des femmes. La représentation quantitative ne constitue qu'un leurre dans le contexte où on ne veut pas discuter des orientations d'une politique en fonction de l'impact qu'elles auront sur les femmes.» J'espère que le ministre non seulement m'entende, mais m'écoute, Mme la Présidente.

Et le CIAFT ajoutait dans son mémoire: «Nous invitons donc le gouvernement québécois à suivre l'exemple du gouvernement ontarien qui vient de présenter son projet de loi, nous disait-on - projet que j'ai obtenu depuis - concernant, et je cite, le Conseil ontarien de formation et d'adaptation de la main-d'oeuvre. Dans un premier temps, on y prévoit une place aux représentantes des groupes de femmes. Le gouvernement ontarien vient de démontrer une ouverture politique concernant l'équité en emploi, même si, dans les faits, la place des femmes sur le marché du travail est déjà plus assurée qu'au Québec.» Et on cite à cet effet des taux de participation des femmes au marché du travail qui révèlent un retard du Québec en cette matière.

Alors, vous comprendrez, Mme la Présidente, que j'ai un sentiment d'impuissance parce que, malgré ces mémoires présentés devant la commission parlementaire, malgré les échanges que nous avons pu en avoir, encore ce matin le ministre me parlait de nommer parmi les catégories représentant des employeurs et des salariés, me parlait d'une représentation équitable. (21 h 20)

Mais vous, Mme la Présidente, qui avez vécu la commission Bélanger-Campeau, savez très bien que les femmes qui y siégeaient y siégeaient à titre de porte-parole soit de leur formation politique fédéraliste, soit de leur formation politique souverainiste, soit à titre de porte-parole de leur centrale syndicale, ou de porte-parole de leur association d'employeurs et qu'elles n'y étaient pas spécifiquement pour faire écho aux revendications des femmes. Et c'est une réalité qui est incontournable à laquelle, malheureusement, le ministre ne veut pas répondre.

La Présidente (Mme Marois): Et est-ce que j'ai bien compris que vous auriez souhaité que par l'article 30...

Mme Harel: Oui.

La Présidente (Mme Marois): ...le ministre, dans le cadre des responsabilités...

Mme Harel: Qui sont les siennes, c'est ça.

La Présidente (Mme Marois): ..et pouvoirs qui lui sont confiés, émette des directives qui permettraient à la société d'agir dans le sens de l'équité en emploi? M. le ministre, est-ce que vous avez des commentaires?

M. Bourbeau: Aucun commentaire, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Non, aucun. Mme Harel: Remarquez, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...j'ai encore un espoir. Il est faible. Il est faible, parce que le ministre a déjà rejeté un amendement de l'Opposition pour assurer une représentation équitable notamment des groupes de femmes sur le conseil d'administration, mais j'ai encore l'espoir qu'au niveau des pouvoirs de la Société, je crois à l'article 18, paragraphe 8°, il y ait un pouvoir additionnel qui soit confié à la Société, celui de promouvoir l'équité ou l'égalité dans les programmes de développement ou toute autre formule, là. Le ministre a donc pris en délibéré l'amendement, alors...

La Présidente (Mme Marois): II y reviendra sûrement. M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui. La députée oublie que j'ai accepté son amendement hier à l'article 18. Elle l'oublie, ça.

Mme Harel: Paragraphe 8°?

M. Bourbeau: paragraphe 8°. ça vous n'en parlez pas aujourd'hui, là: «favoriser, dans le cadre des politiques gouvernementales, l'équité à l'égard des personnes et des groupes défavorisés sur !e marché du travail.»

Mme Harel: C'est votre amendement, mais j'y souscrit, je l'ai même adopté...

M. Bourbeau: Avec enthousiasme. Mme Harel: ...avec enthousiasme.

La Présidente (Mme Marois): D'emblée. Est-ce qu'il y aurait, sur l'article 30, d'autres

commentaires, remarques ou questions? Sinon, nous allons procéder à son adoption. Est-ce que ça va? Alors, l'article 30 est-il adopté?

Mme Harel: Adopté. M. Bourbeau: Adopté.

La Présidente (Mme Marois): Adopté. J'appelle l'article 31, donc.

M. Bourbeau: Bon.

Sociétés régionales

La Présidente (Mme Marois): Là, nous passons à un autre chapitre du projet de loi. alors que nous avions procédé à l'étude de la mission et des pouvoirs de la société, nous passons maintenant aux sociétés régionales, de même qu'aux conseils régionaux. alors, m. le ministre, l'article 31.

Établissement

M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente, cette disposition prévoit l'établissement par la Société, dans les régions que le gouvernement détermine, de sociétés régionales qui feront partie intégrante de la Société. Elle précise sous quel nom seront désignées les sociétés régionales. Je signale que les sociétés régionales ne constitueront pas des entités juridiques autonomes, distinctes de la Société, mais plutôt des démembrements de celle-ci. L'on peut s'attendre dans un premier temps à ce que 11 sociétés régionales soient établies pour remplacer les 11 commissions de formation professionnelle de la main-d'oeuvre qui sont actuellement réparties sur l'ensemble du territoire québécois. Toutefois, dans l'éventualité d'un rapatriement de la gestion du programme d'assurance-chômage, l'on pourrait s'attendre à retrouver au moins une société régionale dans chacune des 16 régions administratives du Québec.

Maintenant, Mme la Présidente, comme je m'attends à ce que l'Opposition fasse de très longs commentaires sur l'article 31, et afin de bien préciser ma pensée sur cet article qui va certainement être un des articles les plus discutés du projet de loi, même si c'est difficile d'être plus long que ce qu'on a passé jusqu'à maintenant sur certains articles, j'aimerais faire les commentaires suivants.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre, on vous écoute.

M. Bourbeau: Alors, j'aimerais exposer ou expliquer les choix fondamentaux qu'a retenus le gouvernement. Pour bien comprendre ces choix il faut connaître le mode actuel de gestion des programmes québécois de main-d'oeuvre. Il faut savoir, en premier lieu, que les commissions de formation professionnelle qui gèrent actuellement la plupart des programmes de main-d'oeuvre sont, en quelque sorte, chapeautées par le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. C'est le ministère qui leur octroie la totalité de leur budget, qui leur émet périodiquement certaines directives, qui contrôle, en définitive, les budgets et qui précise les programmes administrés par les CFP.

Le projet de loi 408 prévoit que les commissions de formation professionnelle qui interviennent en région principalement sur des questions relatives à la formation soient remplacées par des sociétés régionales dont le mandat sera élargi non seulement à la formation, mais aussi aux autres aspects du développement de la main-d'oeuvre.

Le projet de loi fait en sorte que l'encadrement des instances régionales, qui est présentement assuré par le ministère avec une rigidité que je ne nie pas, soit désormais confié à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre dans laquelle le gouvernement accepte de se minoriser lui-même. Il s'agit d'une forme très nette de décentralisation. Le gouvernement confie à un organisme contrôlé par les partenaires du marché du travail la responsabilité d'encadrer les instances régionales plutôt que de conserver lui-même cette fonction.

La députée de Hochelaga-Maisonneuve, à l'instar, j'en conviens, de plusieurs intervenants des régions, réclame que les sociétés régionales soient des corporations autonomes comme les commissions de formation professionnelle le sont. Je signale que l'expérience acquise par plus de 20 ans de fonctionnement des CFP nous ont permis de déceler deux problèmes que nous voulons corriger. Premièrement, tout en reconnaissant l'excellent travail des CFP, nous avons vécu des problèmes de coordination entre les CFP qui ne sont pas sans conséquence sur l'accessibilité des personnes et des entreprises aux programmes de main-d'oeuvre, accessibilité qui varie d'une région à l'autre du Québec. Je crois que, sans rechercher l'uniformité ou le nivellement, les sociétés régionales doivent mieux coordonner leurs actions. En deuxième lieu, la multiplicité des sociétés soi-disant autonomes oblige chacune des sociétés régionales à se doter de services administratifs - ou des commissions de formation professionnelle, si vous voulez - de services de gestion du personnel, d'un service de paie et d'un service de communication. Or, un des objectifs importants de la réforme que nous entreprenons a précisément pour but de réduire les frais d'administration. Il faut se donner les moyens de réaliser des économies à ce chapitre. Ces services peuvent aisément être regroupés à la société mère qui agira comme conseillère des sociétés régionales sur les questions plus administratives. Je ne crois pas que les sociétés régionales vont perdre des pouvoirs importants

en partageant ces services administratifs avec une instance centrale.

Il faut savoir distinguer l'essentiel de l'accessoire. Ce n'est, en effet, pas dans ses pratiques administratives que le pouvoir régional peut apporter des réponses aux problèmes vécus par la main-d'oeuvre de la région. Je ne prétends pas que le statut juridique des sociétés régionales est sans importance, mais il ne faut pas non plus y prêter des vertus magiques. Les commissions de formation professionnelle ont toujours bénéficié d'un statut juridique de corporation autonome. Cela ne les a pas empêchées de végéter pendant de nombreuses années, soit de 1970 à 1984, alors que le gouvernement ne leur confiait que des mandats très restreints accompagnés de budgets dérisoires. Ce n'est qu'avec la politique de l'éducation des adultes de 1984 que les CFP ont pu jouer leur véritable rôle et développer la crédibilité qu'elles affichent aujourd'hui. Bref, un statut juridique, ça peut devenir un symbole s'il n'y a pas de volonté politique de greffer un contenu et de confier des responsabilités à une organisation régionale.

Le projet de loi 408 n'enlève aucun levier aux instances régionales chargées de définir les besoins de la main-d'oeuvre et de gérer les programmes. On me répondra que les sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre perdent, par rapport aux CFP actuelles, leur statut juridique, le pouvoir de former leur conseil d'administration, le pouvoir d'embaucher leur directeur régional. Pour ce qui est du statut juridique, j'ai déjà dit l'importance toute relative qu'il peut avoir. Je n'insiste pas davantage. Quant à la formation des conseils d'administration, il faut savoir que ces conseils sont présentement constitués à partir des membres des comités consultatifs régionaux, tous nommés par le ministre. Le changement que nous apportons consiste à choisir directement les membres des conseils régionaux, après consultation, plutôt que de passer par l'intermédiaire d'un corps électoral dont les membres sont tous désignés par le ministre. (21 h 30)

Enfin, pour ce qui est du pouvoir d'embaucher le directeur régional, il faut comparer objectivement la situation qui prévaudra en vertu du projet de loi et celle qui a cours présentement. Présentement, le directeur général d'une CFP est choisi par un jury de sélection de trois personnes, dont deux des trois membres sont choisis par le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. C'est donc dire que le ministre exerce un contrôle sur le choix du directeur régional. Avec le projet de loi sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, le directeur régional serait nommé par la société mère - non pas par le ministre, mais par la société mère - sur recommandation du conseil régional. Ceux qui voient dans ces propositions un recul sur le pouvoir des instances régionales souffrent, quant à moi, d'un sérieux problème d'orieniation spatiale.

Par contre, les sociétés régionales auront des responsabilités élargies en matière de développement de la main-d'oeuvre. Elles vont d'abord poursuivre les activités actuelles des CFP d'estimation des besoins de formation et de gestion des programmes de main-d'oeuvre. J'insiste pour dire que les sociétés régionales pourront exercer ces activités avec la même latitude et même davantage que les CFP actuelles. Qui peut prétendre sérieusement qu'un encadrement placé sous la responsabilité des partenaires du marché du travail peut s'avérer plus contraignant qu'un encadrement fourni par un ministère ou un ministre? Allez défendre cela sur la place publique parce que c'est de cela qu'il s'agit. On voudrait laisser croire que les dirigeants de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, qui, je le répète, seront majoritairement constitués de représentants du patronat et des associations de salariés, vont être plus tatillons, plus centralisateurs que ne l'a été le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

Les sociétés régionales vont pouvoir adapter les programmes à la réalité du marché du travail et de l'emploi dans la région. Il s'agit d'un pouvoir important qui a été réclamé pendant de nombreuses années par les leaders régionaux. Très souvent, les régions sont obligées de composer avec des normes et des critères édictés pour l'ensemble du Québec ou du Canada et elles ne peuvent pas tirer pleinement profit des programmes. Ce pouvoir d'ajustement des programmes constitue une mesure de décentralisation très importante. Le grand défi consiste à élaborer centralement des programmes suffisamment généraux et souples pour permettre aux instances régionales de les modeler à leur situation propre. Les sociétés régionales vont également pouvoir jouer un rôle beaucoup plus actif dans le développement régional, en apportant l'appui des programmes de main-d'oeuvre aux projets de développement conçus dans la région. L'énoncé de politique parle de l'imbrication des politiques de mainnd'oeuvre avec celles du développement régional et les deux politiques concordent sur de nombreux points.

Enfin, les sociétés régionales, contrairement aux CFP, auront le mandat de travailler à la mise en oeuvre de programmes d'aide à l'emploi et de développement local. Nous sommes conscients que dans certaines régions il faudra stimuler la création locale d'emploi pour permettre à la main-d'oeuvre de sortir de la situation de chômage aiguë.

Mme la Présidente, nous parlons ici de développement de la main-d'oeuvre. Par-delà les particularismes régionaux et les spécificités sectorielles, les problèmes et les besoins de

développement de la main-d'oeuvre se ressemblent beaucoup. C'est l'ensemble du Québec et de son économie qui ont besoin de relever le défi du développement des compétences. C'est pourquoi il faut des politiques globales et une certaine unité d'action à travers le Québec. Il y a donc des limites, quand on traite d'une question aussi fondamentale, à la décentralisation pure et très large. Pour des raisons à la fois d'équité et d'efficacité, les entreprises et les individus de toutes les régions du Québec doivent avoir raisonnablement accès aux mêmes services, doivent pouvoir bénéficier des mêmes politiques.

Dans un commentaire récent, le journaliste Laurent Laplante parlait d'une certaine conception de la décentralisation qui confinait à l'anarchie. Il ne faut pas, en effet, avoir une vision romantique de la décentralisation. Je reconnais sans difficulté les avantages d'une certaine décentralisation, et je suis le premier à exiger que les leaders régionaux participent à la conception et à la mise en place des programmes de main-d'oeuvre. Il importe donc de faire aux partenaires régionaux du marché du travail la place qu'ils doivent occuper pour assumer les responsabilités qui leur incombent en matière de développement de la main-d'oeuvre. Il faut aussi leur donner des moyens de mettre à profit les instruments de la politique du marché du travail pour développer leur main-d'oeuvre et leur région. Je crois sincèrement que le projet de loi sur la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre préserve un sain équilibre entre les impératifs d'une coordination des politiques de main-d'oeuvre et la nécessité d'engager les partenaires régionaux dans la définition des priorités et la gestion régionale et locale des programmes de main-d'oeuvre. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. Je crois que nous avons eu une présentation globale en ce qui concerne les sociétés régionales. Est-ce qu'il y a des commentaires, des questions, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve?

Mme Harel: Mme la Présidente, vous comprendrez...

La Présidente (Mme Marois): Nous sommes à l'article 31.

Mme Harel: Nous sommes à l'article 31.

La Présidente (Mme Marois): Je vous le fais remarquer.

Mme Harel: C'est le coeur, d'une certaine façon, de l'opposition que nous menons à ce projet de loi. Le ministre le sait, et j'espère que ses collègues le savent également. Faut-il rappeler que cette question de l'autonomie des sociétés régionales fait le plus large de tous les consensus auprès de la très grande majorité de tous les partenaires et que même l'Association des manufacturiers du Québec, qui est, finalement, le seul des partenaires qui préfère l'adoption de la loi telle quelle, même sans bonification, plutôt que l'absence de loi, même cet allié inconditionnel, dans la lettre envoyée au premier ministre et au chef de l'Opposition, mentionne l'importance malgré tout par la suite d'obtenir une bonification sur la question de la régionalisation. Je l'ai dit au ministre, Mme la Présidente, que je considère que s'il y a un courant qui traverse toute la société québécoise présentement, indépendamment que l'on soit fédéraliste ou souverainiste, que l'on soit péquiste ou libéral, s'il y en a un courant qui fait consensus, c'est bien celui du régionalisme.

J'écoutais le discours du ministre, et je ne veux pas qu'il en prenne ombrage si je lui dis que j'avais l'impression d'entendre un discours des années soixante. Vraiment, je ne sais pas qui le lui a rédigé, mais ça réapparaissait l'éloge de la technocratie: l'efficacité, c'est la centralisation. Alors, il y a quelques leaders régionaux que l'on désigne comme étant ceux qui peuvent nous dire le contexte dans lequel nous devons élaborer les politiques, n'est-ce pas? Mais, les politiques, c'est nous qui savons les choses, qui les élaborons.

Je vous dis, Mme la Présidente, qu'il n'y a vraiment pas une seule autre question qui a fait un si large consensus. J'aurai l'occasion...

La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse, le ministre a un appel urgent.

Mme Harel: D'accord. On ajourne pour quelques minutes.

La Présidente (Mme Marois): Ça nous permettra de prendre une petite pause santé par la même occasion. Alors, nous suspendons nos travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 39)

(Reprise à 22 heures)

La Présidente (Mme Marois): Nous allons reprendre nos travaux. Nous étions à l'article 31. Je crois que la députée de Hochelaga-Maison-neuve... Pardon?

Mme Harel: À moins que le ministre ait des bonnes nouvelles à nous annoncer? Non?

La Présidente (Mme Marois): Ah! Ce serait intéressant.

Mme Harel: Oui?

M. Bourbeau: Si c'était le cas, je n'aurais

pas pris la peine de vous expliquer en long et en large le pourquoi et le comment de l'article 31.

Mme Harel: Je viens de dire à...

La Présidente (Mme Marois): Alors, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, donc, Mme la Présidente... Moi, je ne suis pas résignée, Mme la Présidente.

M. Bourbeau: Je suis résigné à vous entendre.

La Présidente (Mme Marois): vous connaissant, je sais que ça se passe... c'est assez exceptionnel, hein? je ne pense pas l'avoir jamais constaté.

Mme Harel: Après avoir abruptement été interrompue par notre interruption, je souhaiterais reprendre là où j'en étais, Mme la Présidente, quand je vous disais que, en écoutant le ministre, j'avais l'impression que l'auteur du document s'était inspiré des courants de pensée des années soixante, ceux qui faisaient l'éloge de l'efficacité et qui associaient l'efficacité à la centralisation. C'est pour des raisons d'efficacité, nous a-t-on dit, qu'il fallait centraliser.

Moi, c'est exactement pour les raisons inverses, Mme la Présidente, que je pense qu'il faille décentraliser. Je vais tout simplement me servir, pour soutenir le point de vue que j'exprime, de l'expérience que j'ai eue à siéger sur la commission Bélanger-Campeau avec vous-même, d'ailleurs, et Mme la députée de Chicoutimi. Sans doute, allez-vous vous rappeler ces bons moments où nous nous sommes retrouvées en tournée dans les régions du Québec et où nous avons entendu, de la Côte-Nord à la Gaspésie, du Bas-du-Fleuve à la Mauricie, à l'Outaouais, un même point de vue d'intervenants régionaux. Ils sont venus explicitement dire à tous les décideurs qui représentaient les partenaires qui sont parmi les dinosaures qui décident dans la société: Écoutez, il faut une redistribution des pouvoirs dans la société québécoise, les changements que, d'un côté comme de l'autre, vous souhaitez. On en était, à ce moment-là, au rapport Allaire, du côté libéral, et au projet de la souveraineté, du côté du Parti québécois. Les intervenants sont venus dire: Finalement, quoi qu'il en soit, ce que l'on veut, c'est que vous redistribuiez du pouvoir de façon telle que les rapatriements qui vont se faire, vous ne les fassiez pas à Québec, mais que vous les fassiez au Québec.

Ce qui me désole le plus, Mme la Présidente, vraiment, là, c'est que ce projet, qui est devant nous, de Société québécoise, est supporté par la volonté gouvernementale d'un rapatriement qui n'est pas celui qu'on voudrait, qui n'est pas celui qu'on ferait, mais qui est, malgré tout, un certain projet de rapatriement en matière de main-d'oeuvre. Le ministre, tout au moins en ce qui le concerne, lui, je ne sais pas s'il sera longtemps au poste qu'il occupe dans les mois qui viennent. Ça, ça commence à m'inquiéter, là. C'est la rumeur qui commence à circuler, d'ailleurs, dans les milieux concernés. On me disait, encore aujourd'hui, Mme la Présidente, qu'il était question d'un remaniement qui amènerait le ministre à quitter la fonction qu'il occupe, puis je peux vous le dire sincèrement, ça m'inquiète.

M. Bourbeau: Je m'en vais à la Condition féminine.

Mme Harel: Ça m'inquiète.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Ça lui ferait du bien.

M. Trudel: Si ça vous inquiète, là, ce que vous venez d'entendre doit vous faire paniquer.

Mme Harel: Ha, ha, ha! Non, ça, ça me réjouirait, plutôt, de le voir ministre délégué à la Condition féminine.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, vous souhaiteriez aller à la Condition féminine? Est-ce que c'est ce que je dois comprendre?

M. Bourbeau: C'est-à-dire que l'entente que j'ai, c'est que, si le projet de loi ne passe pas d'ici à la fin de juin, je suis muté à la Condition féminine.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: La députée de Hochelaga-Maisonneuve va choisir.

La Présidente (Mme Marois): Ha, ha, ha!

Elle a un poids très important quant à votre sort, M. le ministre, et votre avenir!

Mme Harel: Vous savez, Mme la Présidante, que malgré les apparences cet homme a un sens de l'humour.

La Présidente (Mme Marois): Non, je suis très consciente de ça. Je le connais bien, comme ministre de ma région, Mme la députée, vous savez.

Mme Harel: Je reviens à l'essentiel de mon intervention, l'essentiel étant que, depuis 30 ans, c'est-à-dire depuis la Révolution tranquille, les régions ont l'impression d'avoir tout essayé. Les régions ont essayé la concertation, elles ont essayé les conseils de développement, elles ont essayé le& sommets, elles ont à peu près tout essayé, n'est-ce pas? On pourrait ajouter,

évidemment, pas mal encore à cette liste de ce qui a été tenté. Elles ont essayé les pèlerinages à Québec. Elles ont tout essayé, finalement. Elles ont parfois essayé de couper des routes pour rappeler les gouvernements à la réalité des problèmes qu'elles vivaient. Elles ont essayé des grandes manifestations, des opérations Dignité 1, Dignité 2, des rassemblements dans les églises... ecclésiales. Enfin, mettez-en, la liste serait impressionnante.

Ce dont elles se rendent compte, après 30 années de tentatives diverses, c'est qu'il y a une chose qui n'a pas été essayée: C'est leur donner le pouvoir de décision. Sans doute est-ce là la chose la plus importante, finalement. Moi, j'y crois, personnellement. D'ailleurs, c'est l'espoir que personnellement m'offre la souveraineté, celui d'un brassage sans précédent qui va permettre de redistribuer du pouvoir dans la société. J'espère qu'on va en profiter, d'ailleurs, pour faire une vraie redistribution.

En l'occurrence, le projet de loi qui est devant nous, ça peut être injuste, la vision que j'en ai, mais je vous dis que la vision que j'en ai est la suivante: II y a une Direction générale de la formation professionnelle au ministère de la Main-d'oeuvre. Elle fait entre 260 à 280 professionnels et hauts fonctionnaires. Sur le terrain, dans les commissions de formation professionnelle, à travers les 11 régions où il existe actuellement des commissions de formation professionnelle, il n'y a pas 600 employés qui donnent des services a la population. Des employés qui sont sur le terrain, on en retrouve presque 50 % qui sont là pour élaborer des normes, des critères, des politiques qui s'appliquent aux 600 autres. Grosso modo, si vous me permettez, et ce n'est pas loin d'être la réalité. Le transfert va se faire de la Direction générale de la formation professionnelle à la Société.

Finalement, l'occasion était belle pour enfin mettre la main, n'est-ce pas, sur les commissions de formation professionnelle, qui ne sont pas assez obéissantes. Il arrive des fois, remarquez, qu'elles sont un peu turbulentes, ces commissions de formation professionnelle, et il arrive aussi qu'elles réagissent en prétendant qu'elles sont élues et donc plus légitimes que les fonctionnaires, puisqu'elles peuvent faire valoir des mandats qui leur viennent... Le ministre aura beau entériner, le ministre sait très, très, très bien et son prédécesseur le savait aussi, parce qu'il a attendu parfois des mois avant d'entériner, que le processus se fait, je ne pense pas, jamais... Qu'il me nomme, qu'il me cite un seul précédent où un ministre n'aurait pas entériné les nominations qui lui étaient acheminées, et là, son pouvoir me dira quelque chose.

Je reviens, en fait, parce que, voyez-vous, il y a les pires procès qui se font actuellement dans les corridors. Ils ne se feront pas ici au micro. Les procès se font sur les commissions de formation professionnelle, qui n'étaient pas effi- caces, qui n'étaient' pas compétentes, ces commissions, etc. Vous pouvez en ajouter, finalement. Moi, je pense que, oui, il est possible que tout n'a pas été parfait tout autant que ça ne me semble pas parfait au pays du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle non plus, sauf que pourquoi, Mme la Présidente, saisir l'occasion du rapatriement possible pour en même temps, à mon point de vue, faire une job de bras aux régions? (22 h 10)

Ce n'est pas compliqué. C'est l'idée qu'il n'y en aura plus. Ça n'embarrassera plus, des gens qui disent: Écoutez, j'ai un mandat, j'ai été élu, je suis représentatif de certaines personnes qui m'ont délégué pour dire ceci. Il n'y en aura plus de cette sorte de monde là. C'est fini, n'est-ce pas? Tout le monde va être fonctionnaire, y compris le directeur régional, qui, lui, va être nommé, va être un employé de la société mère. Alors, il y a un conseil d'administration. Évidemment, qui pensez-vous va mener dans le conseil d'administration? Il va y avoir évidemment un aspect consultatif important et un aspect décisionnel, je le reconnais, mais ce n'est évidemment pas au niveau des opérations que les partenaires vont s'immiscer.

Alors, c'est, finalement, une manière pour la structure gouvernementale de faire mainmise sur des corporations, des commissions de formation professionnelle, et en faire des filiales. Ça ne retroussera plus. Ça me fait exactement penser à l'offensive qu'on avait connue quand nous étions au gouvernement de la part du ministère de la Main-d'oeuvre, à l'époque où nous étions au gouvernement, pour ramener l'administration de l'aide sociale à Montréal dans le giron de la Sécurité du revenu de Québec. À Québec, on aime ça, les dominos où tous les morceaux sont faits pareils. Quand il y en a un qui retrousse dans le coin, ça devient un petit canard qui embarrasse tous les autres.

Je vois le député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue, qui a eu dernièrement un exemple frappant et saisissant en l'occurrence. C'était la volonté du ministère de la Santé et des Services sociaux de lancer l'offensive contre la clinique Pointe-Saint-Charles à l'occasion justement d'une réforme de la loi 120. C'était de ramener la clinique de Pointe-Saint-Charles dans le modèle technocratique. Cette offensive-là, remarquez que nous l'avions connue quand nous étions au gouvernement. C'est notre collègue, Denis Lazure, le député de La Prairie, qui me racontait avoir subi les mêmes assauts quand il était ministre de la Santé et des Services sociaux pour ramener la clinique Pointe-Saint-Charles dans le modèle où tous doivent être pareils. Mme la députée de Taillon, vous vous rappelerez les assauts répétés pour faire de même. Heureusement, le ministre a su résister en matière de sécurité du revenu à l'égard de l'administration de l'aide sociale à

Montréal. Il y a une entente qui est signée, je pense, pour cinq ans, mais encore, attendez, attendez, je sens que, dans cinq ans, lorsque viendra échéance, ça recommencera encore une fois. Là, on assiste, à mon point de vue, aux mêmes sortes d'exercices.

Mme la Présidente, moi, ce à quoi je crois, c'est à la différence. Que les régions ne soient pas toutes traitées de la même façon, tant mieux. Le seul exemple que j'ai... Je ne suis pas assez dogmatique pour ne pas d'abord privilégier le côté pragmatique des choses. Savez-vous ce qui m'a convaincue dans ce débat-là? Mon idée n'était vraiment pas faite, malgré les apparences. C'est sûr que je crois à la décentralisation, c'est sûr que je crois à la redistribution du pouvoir, et, en principe, j'aurais plutôt une tendance qui pencherait en faveur d'un pouvoir aux régions. Ce qui m'a vraiment convaincue, c'est lorsque j'ai rencontré les porte-parole de la Commission de formation professionnelle du Montréal métropolitain, qui sont venus devant la commission, et notamment un vice-président qui vient du secteur de la danse, mais que j'avais pu rencontrer précédemment lorsque j'étais vice-présidente de la commission parlementaire de la culture, parce qu'il était venu, au nom de tout le milieu de la danse, présenter des mémoires devant la commission parlementaire de la culture.

Je le retrouve à la Commission de formation professionnelle, je m'informe et il m'explique combien c'est important, justement, pour le milieu des artistes, pour le milieu de la danse, pour le milieu de la culture d'avoir un représentant à la Commission de formation professionnelle. Il m'explique que ça n'existe pas dans les autres régions parce que ça ne représente pas le même volume d'emplois culturels. Les emplois culturels à Montréal, vous le savez certainement et tous les membres de cette commission doivent le savoir, sont, en termes de volume, aussi importants que d'autres secteurs qu'on valorise comme le tourisme ou l'énergie ou le ferroviaire. La culture à Montréal est un créateur d'emplois extrêmement important. Il me racontait donc que, du fait de la souplesse des structures, il avait réussi à se glisser, finalement, à être connu et à se faire élire à la vice-présidence. Ce n'est pas peu de chose, puisque, en général, ce sont des secteurs assez traditionnels, les CFP, étant, finalement, un produit de comités paritaires des temps passés. Alors, j'ai commencé à croire en la modernité de cette structure-là, en sa souplesse, en sa capacité d'innovation. Je termine. J'imagine que mes 20 minutes sont déjà terminés.

La Présidente (Mme Marois): II vous reste encore deux minutes.

Mme Harel: II me reste encore deux minutes. Vous savez, je considère q'je c'est un débat extrêmement important. Depuis trois mois que !a commission a terminé les travaux qu'elle a menés sur l'énoncé de politique et sur le projet de loi, il y a eu un nombre incalculable de rencontras en région, de congrès, de colloques, de tables de concertation, et l'ensemble de ces interventions ont été dans le sens de reconnaître un statut de corporation autonome aux sociétés régionales. Alors, j'aurai l'occasion sans doute, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Sûrement.

Mme Harel: ...si tant est que le ministre n'y donne pas suite, de présenter un amendement.

La Présidente (Mme Marois): Alors, je remercie la députée de Hochelaga-Maisonneuve de son intervention. Est-ce que le ministre a des commentaires à ce moment-ci?

M. Bourbeau: Pas pour l'instant. Tout ce que je pourrais dire...

La Présidente (Mme Marois): Je vous offre toujours cette possibilité, à chaque fois, évidemment, parce que vous savez que ça fait partie de vos privilèges, de vos droits que de pouvoir intervenir après chaque intervention de l'un ou l'autre des membres de la commission, à titre de responsable de la loi...

M. Bourbeau: Ce que je pourrais dire, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): ...que nous étudions.

M. Bourbeau: ...c'est que je trouve ça un petit peu drôle de la part de la députée de Hochelaga-Maisonneuve, qui est une députée urbaine, de venir faire des leçons de régionalisme à un ministre régional qui est reconnu, je pense, dans sa région, pour défendre avec acharnement les intérêts de la région. Vous demanderez aux gens de Montréal si je ne suis pas considéré comme un régionaliste sur me de Montréal où, parfois, je me sens presque persona non grata pour avoir, à l'occasion, défendu avec intérêt... D'ailleurs, la députée de Hochelaga-Maisonneuve opine du bonnet, là. Personne plus que moi n'est convaincu de l'importance des régions et de développer dans les régions une vie propre.

Cela ne m'amène pas nécessairement à devenir un fanatique inconditionnel d'un mode d'administration donné. Je pense qu'il y a un grand intérêt à décentraliser vers les régions un maximum possible de responsabilités, mais il ne faut pas non plus donner dans l'anarchie. Certaines sociétés ont appris à leurs dépens que la décentralisation à outrance, ça pouvait aussi être contreproductif, pour employer l'exprpssion - je ne sais pas si elle est française - qui dit un peu ce que ca signifie. Vous n'avez qu'à regarder l'effet des réformes en France, les réformes de

décentralisation françaises, les lois Defferre - D-E-F-F-E-R-R-E pour le Journal des débats..

La Présidente (Mme Marois): Oui, nous avons bien compris, M. le ministre.

M. Bourbeau: Sans ça, j'ai peur qu'on me fasse parler des...

La Présidente (Mme Marois): C'est du nom du ministre qui les défendait.

Une voix: Gaston Defferre.

La Présidente (Mme Marois): Gaston, ancien maire de Marseille.

M. Bourbeau: Les lois de décentralisation ont amené en France un niveau de décentralisation tel qu'aujourd'hui la France est gouvernée par sept paliers de gouvernement qui se partagent les responsabilités et les budgets. Si les Québécois croient qu'ils sont taxés aujourd'hui, il faudrait voir ce qui leur arriverait si on leur appliquait la même médecine que la France avec ses lois de décentralisation.

Alors, moi, au risque de me faire accuser d'être un rétrograde ou un fossile des années soixante, Mme la Présidente, je continue à penser qu'il faut procéder avec une certaine prudence dans la voie de la décentralisation. Justement, notre ami Laurent Laplante, qui n'est quand même pas un ignare, présidait la semaine dernière...

Une voix: Je n'ai pas compris.

M. Bourbeau: un ignare. je m'excuse. on m'entend mal. il présidait, la semaine dernière, deux colloques - pas seulement un, deux colloques - sur la centralisation et, dans le journal le soleil de lundi...

M. Trudel: La centralisation?

M. Bourbeau: La décentralisation.

Mme Harel: Un lapsus. (22 h 20)

M. Bourbeau: II disait ceci, en parlant de la décentralisation - le titre, c'est «La décentralisation, pas l'anarchie»; je ne vous ferai pas un «filibuster» à lire tout l'article, mais j'ai deux paragraphes à vous lire: «Plusieurs l'ont observé récemment et plus encore ces jours derniers, la décentralisation est devenue un mot à la mode - ma foi, il parodiait presque la députée de Hochelaga-Maisonneuve - Comme c'est le cas pour chacune des modes qui déferlent périodiquement sur les gestionnaires, beaucoup semblent donc accorder à ce mot des vertus universelles et magiques.» Encore un peu plus, Mme la Présidente, et il ajoutait: Décentralisa- tion, que de crimes on commet en ton nom! Mais il ne l'a pas dit.

La Présidente (Mme Marois): Mais il ne l'a pas dit. D'accord.

M. Bourbeau: »Fort heureusement, certains font cependant la différence entre la décentralisation et l'anarchie et s'efforcent de retirer de ce concept ce qu'il peut donner d'heureux tout en évitant ses effets pervers. On évitera ainsi des réveils douloureux. J'en veux pour preuve deux colloques tenus ces jours derniers à Québec et que, pour cause d'animation, j'ai suivi d'assez près. Le premier s'intitulait Forum national sur la décentralisation et découlait des efforts d'une large brochette d'organismes majeurs, depuis l'UPA jusqu'à la CSN en passant par le Conseil du patronat et l'Association des manufacturiers du Québec. Dans le second cas, ce sont des gestionnaires de l'immense réseau de la santé et des services sociaux - dont un des principaux porte-parole est le député de Rouyn-Noranda-Té-miscamingue; non, ce n'était pas dans le texte, c'est moi qui ajoute cela - qui participaient à l'invitation du ministère concerné à une journée de discussions sur le thème de "regroupement des achats".»

Là, Mme la Présidente, je vais passer des paragraphes parce qu'ils ne s'appliquent pas vraiment à ce sujet. Un peu plus tard, on dit ceci: «Le président du Conseil du patronat, M. Ghislain Dufour, a d'ailleurs été applaudi lorsqu'il a reproché au ministre Bourbeau d'ignorer le poids régional dans son projet de formation de la main-d'oeuvre.»

Mme Harel: Qu'est-ce qui lui prend, M. Dufour?

La Présidente (Mme Marois): M. Dufour.

M. Bourbeau: «Cela pousse la décentralisation fort loin - c'est toujours M. Laplante qui parle - En somme, dit-il, la décentralisation mobilise puissamment, mais elle ne conduit pas tout le monde à la gourmandise irresponsable.»

Bon, alors, voilà, Mme la Présidente, c'est un témoignage parmi d'autres qui en vaut bien d'autres et qui peut être invoqué, à l'occasion, par le ministre qui la ferait.

La Présidente (Mme Marois): Évidemment.

M. Trudel: Pourriez-vous parfaire ma culture?

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Trudel: M. Laplante, c'est un gars de Québec, ça?

M. Bourbeau: Ah, je ne sais pas d'où il vient.

La Présidente (Mme Marois): J'ai deux demandes d'intervention, à ce moment-ci: M. le député de Matapédia et, par la suite, Mme la députée de Chicoutimi.

M. Paradis (Matapédia): Oui, Mme la Présidente, je suis resté un petit peu surpris, étonné, d'entendre ma collègue de Hochelaga-Maisonneuve nous parler avec tant d'intérêt du développement des régions. Tout ce que j'ai entendu depuis que je suis dans cette noble Assemblée, de sa part, c'était surtout de défendre la région de Montréal. Je suis fort heureux, ce soir, de l'entendre défendre avec autant d'énergie les autres régions du Québec et que la commission Bélanger-Campeau ait pu, jusqu'à un certain point, lui ouvrir d'autres horizons.

J'aimerais rappeler aussi à nos collègues d'en face, qui ont fait partie d'un certain gouvernement - parce qu'on ne s'est pas gêné tout à l'heure pour nous rappeler un certain passé - que ce gouvernement-là, à une certaine époque, avait des grandes idées sur le développement régional. Il faut se rappeler le livre blanc de M. Léonard. Ça doit vous dire quelque chose. Il a été un temps où il fut, il a été un temps où il ne fut plus, il a été un temps où il fut encore, et il est devenu encore un de nos collègues. Alors, il avait de ces grands objectifs de développement régional qui, par la suite, ont été poursuivis par votre collègue d'Abitibi-Ouest, M. François Gendron, où on a publié le choix des régions.

On a fait, encore là, beaucoup de choses, beaucoup de papier pour écrire sur le développement des régions, essayer de démontrer que le gouvernement du Québec pouvait donner une certaine chance aux régions de pouvoir s'inscrire dans leur propre destinée. Tout ce qu'on a réussi à faire, je pense, c'est de maintenir et d'assurer leur dépendance totale et complète, jusqu'à un certain point.

On leur a écrit beaucoup de choses. Il y a le fascicule no 5, qui n'a jamais été publié, dont je pourrais peut-être vous donner une copie, ce serait peut-être intéressant, où on disait à une certaine époque qu'on devait aussi décentraliser la main-d'oeuvre, les services hospitaliers, la voirie, les richesses naturelles, la faune, la forêt, l'aménagement, l'évaluation, etc. C'est une liste très exhaustive que vous avez élaborée, à laquelle vous avez pensé, que vous n'avez jamais eu le courage de rendre publique et surtout de négocier sur la place publique avec les intervenants soit régionaux, sort municipaux ou les MRC, pour pouvoir articuler ou mettre de l'avant cette décentralisation. Vous y avez peut-être pensé sommairement, mais vous n'avez jamais eu le courage de le faire, jusqu'à un certain point.

Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député.

M. Paradis (Matapédia): ...ce n'est vraiment pas dans cette commission que nous allons vraiment élaborer une politique de développement régional. Jamais un gouvernement n'aura été aussi loin pour permettre aux régions de se prendre en main. Que l'on pense d'abord au plan d'action qui a été mis de l'avant en 1987 par Marc-Yvan Côté qui est toujours d'actualité - c'est toujours une décision gouvernementale - qui a été suivi, par la suite, par la politique du ministre actuel de l'Agriculture et responsable du Développement régional, M. Picotte, où on dit aux régions: On vous donne l'argent et vous allez le gérer.

J'aimerais vous rappeler que, dans certaines régions du Québec, on nous a dit: Vous savez, nous autres, on a eu une belle concertation dans les sommets socio-économiques. On n'aimerait pas gérer ce type d'enveloppes là. On aimerait les laisser aux députés. Gérez-les, vous autres. J'ai entendu ça de mes oreilles. C'est incroyable, mais j'ai entendu quand même, des gens, des régionaux, que ce soient des élus municipaux ou des gens qui avaient une certaine imputabilité régionale, nous dire: Vous savez, nous, on s'est concerté une première fois, mais il ne faudrait peut-être pas en mettre un petit peu plus, parce qu'on aurait peur de se chicaner. C'est difficile, avouons-le, d'essayer de partager lorsque tout le monde a une richesse ou une pauvreté relative. La concertation, par définition, c'est quoi? C'est d'essayer d'avoir le gros de la tarte ou d'essayer de céder à son voisin un morceau de tarte? La distinction est importante.

Alors, Mme la Présidente, il est important de mentionner ces choses et de dire que le gouvernement actuel a eu le courage de faire et de maintenir ce qui avait été engagé par l'ancien gouvernement, de soumettre des régions à des sommets socio-économiques. C'est peut-être une formule dépassée ou perfectible, on verra par la suite. Il n'en demeure pas moins qu'on a eu le courage de le faire dans toutes les régions du Québec, notamment dans l'Est du Québec, qui est peut-être une des régions les plus pauvres du Québec. Ça a été la dernière à recevoir son sommet. À l'époque, le ministre de Rimouski avait décidé de faire un sommet, mais exclusivement pour Rimouski, ignorant totalement la péninsule gaspésienne. Il faut s'en rappeler.

Le gouvernement du Québec actuel a aussi eu le courage de faire le découpage des régions qui avait été laissé en plan par l'ancien gouvernement. On a eu l'entente Canada-Québec qui nous a permis de mettre en place, de favoriser, de développer et de planifier un certain nombre de projets. Aujourd'hui, on arrive avec peut-être le plus gros morceau de la décentralisation. On dit que io go«ivernement du Québec ne décentralise pas. On ne permet pas aux régions de se

développer. Qu'est-ce qu'on a fait avec la réforme de la santé? Quoi qu'en dise mon collègue et néanmoins ami, Trudel, c'est 30 % de l'argent du gouvernement du Québec qui sera dévolu aux régions pour décider ce qu'elles auront à faire sur les programmes régionaux d'organisation de santé. (22 h 30)

Si on additionne à ça les commissions scolaires, qui ont quand même des budgets régionaux, si on additionne à ça la main-d'oeuvre, qui sera bientôt décentralisée, qu'on additionne les programmes régionaux d'agriculture, la décentralisation du transport, de la voirie avec compensation... Avec compensation. Puis moi, j'ai la prétention de croire que, pour la voirie, les municipalités auront à en faire beaucoup plus avec l'argent qu'on va leur donner que ceux qui, nonobstant leur travail ou leur bonne foi, le font de façon correcte à partir des divisionnaires de nos régions. Je crois que les municipalités auront à en faire plus. Moi, je pense, Mme la Présidente, que jamais le gouvernement du Québec n'aura été aussi loin, que jamais le gouvernement actuel n'aura été aussi loin dans sa volonté de décentraliser les pouvoirs et de permettre, non seulement aux régions mais aux sous-régions, de décider de leur propre avenir, non pas comme l'État-providence qui décide à leur place de façon très paternaliste, mais de leur permettre véritablement de faire des choix, des fois difficiles, mais de faire des choix, des choix complémentaires, des choix de concertation qui leur permettent de décider de leur destinée.

Je répète, au risque d'être redondant, que c'est difficile d'entendre ce soir, autour de cette table, la députée de Hochelaga-Maisonneuve nous faire des leçons sur la décentralisation, la prise en charge des régions lorsque, depuis bientôt sept ans, je l'entends défendre exclusivement, et exclusivement, la région de Montréal.

Mme la Présidente, je vous remercie et ça me fera plaisir d'intervenir possiblement un petit peu plus tard.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le député de Matapédia. M. le ministre, est-ce que vous avez un commentaire ou deux à ajouter?

M. Bourbeau: Mme la Présidente, vous avez entendu la sagesse d'un expert en décentralisation qui représente une des...

Mme Harel: Vous ne l'avez pas consulté. M. Bourbeau: Oui, absolument.

Mme Harel: Ça paraît que vous n'êtes pas inspiré...

M. Bourbeau: Non, mais c'est que vous n'avez pas compris les nuances dans la pensée gouvernementale.

Mme Blackburn: II transcende...

M. Bourbeau: C'est une chose... Il ne faut pas décentraliser tout, là. Il y a certains secteurs, certains dossiers qui sont susceptibles et propices à la décentralisation. D'autres ne le sont pas. Un programme du genre d'un programme de main-d'oeuvre peut difficilement se décentraliser comme un programme d'entretien du réseau routier, par exemple. Il faut voir comment on peut y aller. Je vois difficilement, par exemple, le réseau Travail-Québec totalement décentralisé. Je vois déjà comment il n'est pas facile de maintenir une certaine cohésion, une certaine harmonie, une certaine standardisation dans les politiques en matière de sécurité du revenu et Dieu sait qu'il faut appliquer la loi de la même façon partout. Ce n'est pas facile. Il y a beaucoup de gens qui, facilement, sont portés à interpréter la loi différemment d'une région à l'autre. S'il n'y avait pas centralisation dans le réseau Travail-Québec, ce serait impossible à gérer. Ce serait l'anarchie. Et, je vous le dis, je suis personnellement convaincu, peut-être que Mme la présidente partage ce point de vue, que ce serait une aberration totale que de tenter de décentraliser la gestion et le réseau Travail-Québec.

On a un réseau qui fonctionne relativement bien, à telle enseigne que certaines autres provinces canadiennes ont un réseau de l'aide sociale qui est en partie décentralisé et en partie non. Ils ont... L'Ontario, entre autres, a de plus en plus de difficultés avec le réseau d'aide sociale en Ontario qui est décentralisé pour une partie.

La Présidente (Mme Marois): Au niveau des municipalités.

M. Bourbeau: Au niveau des municipalités. Et avec une application qui diffère d'une ville à l'autre et ça peut même causer des injustices.

Alors, moi, personnellement, l'expérience de mes nombreuses années, qui retourne jusqu'à 1960 et peut-être avant, m'enseigne que, dans ce domaine-là, il faut être prudent et cette prudence m'amène à proposer ce que je propose. Maintenant, je ne prétends pas que d'autres ne peuvent penser différemment. Il y a des idées à la mode qui courent par les temps qui courent, mais on verra si des programmes comme ceux de la main-d'oeuvre peuvent être décentralisés aussi facilement que d'autres programmes comme l'entretien des routes ou les services policiers, par exemple. Alors, on verra. Pour l'instant, le gouvernement propose cette formule-là qui, à notre avis, est plus susceptible d'apporter des résultats à court terme. Et si, dans l'avenir, la décentralisation continue à faire des progrès et si des structures de décentralisation s'installent, comme, par exemple, si on en venait à avoir des MRC beaucoup mieux structurées, peut-être

qu'éventuellement on pourrait envisager une décentralisation de la main-d'oeuvre, mais certainement pas aujourd'hui.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre.

M. Paradis (Matapédia): Très rapidement....

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député de Matapédia.

M. Paradis (Matapédia): oui. très rapidement. peut-être pour ajouter, pour finir rapidement, car je n'ai pas abusé tellement du temps de cette commission.

La Présidente (Mme Marois): Non, vous avez tout à fait raison. Allez-y.

M. Paradis (Matapédia): Alors, vous me le permettrez. C'est que la décentralisation peut se voir dans un cadre assez large, de telle sorte que des choses peuvent être décentralisées au niveau d'une région, d'autres au niveau des MRC, d'autres au niveau des municipalités. Mais il ne faut pas en faire un dogme, une orthodoxie, de telle sorte que tout doive passer par le même canal comme certaines instances régionales ou sous-régionales semblent le vouloir, à un moment donné. Il y a des instances qui peuvent être décentralisées de façon régionale, sous-régionale ou, encore, locale.

La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie, M. le député. Mme la députée de Chicoutimi voulait intervenir, je crois.

Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Ce dont on parle, c'est un organisme qui était décentralisé et qu'on centralise. Vraiment, c'est un mouvement inverse. Le ministre a parlé, à plusieurs reprises, d'une mode, parlant de la décentralisation. Je dirais que la centralisation a aussi été une mode. Et, moi, je pense qu'effectivement il y a comme quelque chose entre les deux. J'ai toujours pense que l'État avait la grande responsabilité d'établir des objectifs nationaux, de s'assurer d'un partage équitable des ressources. Et, par après, dans la mesure du possible, il doit décentraliser tout ce qui concerne la mise en oeuvre. Il a la responsabilité d'établir des objectifs nationaux et l'équité dans le partage des ressources.

Quand on parle de formation professionnelle, je me réfère toujours au modèle qu'on a développé en éducation. En éducation, on a décidé, un jour que la méthode Cuisenaire et le Sablier s'appliquait à tout le Québec. On a quasiment fait des illettrés, des enfants et des jeunes qui ne savent plus écrire parce qu'on a décidé qu'au Québec le même modèle s'appliquait partout. C'est une catastrophe. C'est une catastrophe, parce qu'on a imposé le même modale. Et je dis toujours que, si on avait laissé un peu de latitude à l'époque, probablement que quelques commissions scolaires auraient commis des erreurs, mais on n'aurait pas commis 114 erreurs dans tout le Québec. Alors, ça, c'a été le problème, et c'a affecté 1 000 000 d'enfants. Alors, je me dis que, chaque fois qu'on est train de décider qu'il y a seulement un modèle pour tout le Québec, on a des problèmes.

La même chose quand on décide que, pour le Québec, dorénavant, ce serait mieux géré si on gérait ça de Québec. Moi, je pense que vous êtes... vous n'êtes pas... L'attitude du ministre, tantôt... Là, je me suis un peu calmée. Je l'ai écouté attentivement. Mais c'est méprisant. Je ne sais pas s'il le réalise. C'est comme si les régionaux, c'étaient des bons à rien. Ce n'est pas compliqué. Je vais revenir à ses propos de tantôt, mais je ne peux pas m'empêcher de commenter un peu les propos du député de Matapédia. Il dit: Jamais un gouvernement n'aura été si loin, parce que vous estimez... et je pense, moi, qu'il connaît les régions. Il vient d'une région. Il ne peut pas ne pas partager certains objectifs profonds, profondément ancrés, une volonté tout à fait indéracinable dans les régions d'exiger de la décentralisation, et il le sait. Et je suis certaine qu'il va endosser une partie de mon discours, parce qu'il ne peut pas ne pas se rappeler que ce qu'on a appelé l'opération Dignité qui s'est tenue au printemps, à Chandler, où on a réuni 5000 personnes. Ces gens-là réclament des pouvoirs pour gérer leur développement. Et 5000 à Chandler, vous savez que c'est quelque chose. C'est un village. Je ne sais pas combien, 1200, peut-être 2400.

M. Paradis (Matapédia): C'est méprisant ce que vous dites.

Mme Blackburn: 2400? Ce n'est pas une grosse municipalité.

M. Paradis (Matapédia): Au moins 5000. Mme Blackburn: 5000 à Chandler?

M. Paradis (Matapédia): Vous dites 1000. C'est méprisant.

Mme Blackburn: non, j'ai dit 2500, parce que je connais assez le coin. je suis née en gaspésie, je me suis installée à chicoutimi, et j'ai travaillé à québec.

M. Paradis (Matapédia): Ça fait longtemps que vous êtes partie.

Mme Blackburn: Et j'y vais tous les ans, probablement plus que vous, parce que vous restez à Matapédia, sans doute. Mais...

M. Paradis (Matapédia): Matapédia, c'est où?

Mme Blackburn: ...dans le fond...

La Présidente (Mme Marois): Je vais entendre la députée.

Mme Blackburn: Alors, dans le fond, le dernier sommet économique qui s'est tenu, il s'est tenu dans ma région. Et c'était devenu une farce, une comédie, parce qu'à l'origine les sommets socio-économiques étaient prévus pour amener la concertation autour de ce qu'on appelait des projets structurants pour toute la région. Et c'a vraiment été l'orientation, et c'étaient des budgets, des enveloppes additionnelles qui étaient consacrées vraiment pour doter la région de projets structurants.

De cette orientation, on a finalement biaisé à un point tel qu'on gérait les programmes normes. Au dernier sommet économique, chez nous, c'étaient les enveloppes régulières sur lesquelles on était en train de se chicaner pour savoir où elles iraient. C'était très malsain, effectivement. Et c'est pourquoi personne n'a pleuré la fin du dernier sommet économique. Il s'est tenu chez nous, et c'était devenu... (22 h 40)

M. Bourbeau: On n'en tiendra plus, maintenant.

Mme Blackburn: Parce que vous aviez complètement biaisé les orientations premières et on se chicanait pour savoir comment répartir les enveloppes régulières. Ça n'avait pas de bon sens.

M. Bourbeau: Est-ce possible que les gens de Chicoutimi se chicanent?

Mme Blackburn: Le ministre nous a dit, dans sa présentation... Je l'ai écouté très attentivement et je ne l'ai pas interrompu. Je l'ai écouté attentivement parce que je me dis: II a fondé son projet de loi sur une philosophie, je veux l'entendre, je veux savoir sur quoi ça repose. Il nous a dit: On a deux problèmes: un problème de coordination, un problème d'efficacité. Un problème de coordination, il dit: Les besoins sont variés. Il faut absolument que la main-d'oeuvre qui peut être mobile puisse trouver sensiblement les mêmes services un peu partout au Québec. Ça, ça me rappelle la méthode Cuisenaire. J'ai un petit peu de problèmes avec ça. En même temps, il dit un peu plus loin que, dans le fond, les programmes s'ajustent, il y a un ajustement par rapport aux besoins de chacune des régions. Il y a comme des contradictions. Je l'ai bien suivi et je pourrais lui en citer au moins trois.

M. Bourbeau: Gênez-vous pas.

Mme Blackburn: Oui. Alors, il y a ce problème de coordination. En même temps, il dit: II y a des problèmes particuliers, la région doit s'organiser, doit les identifier, gérer ses affaires puis, en même temps, faudrait qu'elle les gère en fonction des besoins de toutes les régions. Moi, je me dis: II faut faire un peu confiance aux régions.

Je suis complètement désarmée quand je vois un mouvement qui est complètement à contre-courant. À contre-courant de toute la volonté des régionaux, à contre-courant de toute l'expertise qui s'est développée en région, à contre-courant de tout ce qui s'est exprimé au cours des 10 dernières années. Arrêtez de déterminer, à Québec, ce dont on a besoin dans les régions. C'est pas vrai. C'est pas vrai que ce sont des incompétents de la première espèce, incapables de gérer leurs affaires, d'autant que le ministre le reconnaît lui-même. Il dit: Les commissions de formation professionnelle qui avaient un statut d'autonome, très décentralisé, on leur a donné des budgets insignifiants, dérisoires, pour utiliser son expression. Elles étaient efficaces mais ne géraient rien. Quand on a commencé, en 1984, à leur donner un budget, elles étaient bonnes. Là, quand elles commencent à être bonnes, on centralise. Alors, moi, je dis: II y a là-dedans une espèce de retour à une centralisation excessive, centralisation qui, à travers le monde, est en train de démontrer, de mener à un échec, parce qu'il y a de grands mouvements de centralisation.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

M. Bourbeau: On vous écoute, madame. On est tout oreilles.

Mme Blackburn: Merci. Il y a de grands mouvements de centralisation qui ont mené à des échecs. Et le ministre le sait. Et, quand il nous dit que c'est pour des raisons d'efficacité, je mets au défi le ministre d'accepter la situation suivante: il a à diriger, de façon efficace, productive, une équipe de travail pour produire n'importe quoi, un bien manufacturé comme un service. Et on lui dirait: Toute la gestion, toute l'administration, tout ton personnel, ton budget, tes affaires, c'est pas toi qui en décides. Toi, tu décides de ce que tu fais avec mais tu n'as pas de pouvoir sur le reste. Ça, ça va être décidé à Québec. On est les meilleurs puis tu ne touches pas à ça. Il refuserait. Il refuserait en ces circonstances parce que la seule façon de donner des services efficaces et de mobiliser des personnes, c'est de pouvoir les associer à la totalité des actions, des activités dans une équipe, le plus possible, dans la plus grande mesure possible. Ce que le ministre propose, c'est une structure centralisée et qui va laisser aux gens... C'est ça. L'idée de se parler, de jaser, cause,

cause, consultez-vous, définissez des petites affaires mais les vraies décisions, c'est nous autres qui les prenons, les régions n'en veulent plus, n'en veulent plus de ce paternalisme. Les régions ne veulent plus de ce paternalisme et les régions sont capables de se prendre en main.

M. le ministre, on a 16 régions, au Québec, il y en a au moins quelques-unes là-dessus qui vont être moins efficaces - on peut en convenir tout de suite - mais on ne les rendra pas inefficaces toutes les 16 comme on risque de le faire par la centralisation. Chaque fois qu'on a centralisé, moi, je connais plus le réseau de l'éducation, l'enseignement supérieur, chaque fois qu'on a centralisé, qu'on a pondu des directives et des politiques très centralisées... Écoutez, on gère des politiques de gestion de la... Je pense que le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue le sait, juste pour gérer le personnel dans les collèges, là, on avait deux cahiers de sept pouces. Évidemment, c'est pas le cahier de l'enseignement collégial, là. Là, vous les avez tous. C'est la folie furieuse et ça génère l'inefficacité. Le ministre invoque l'efficacité. Moi, je ne vois pas où il va y avoir de l'efficacité là-dedans. On estimait que juste pour gérer le personnel il y avait une personne et demie par année, juste pour répondre aux directives du ministère en matière de gestion de personnel dans un petit cégep. Si vous me dites que c'est efficace, juste pour remplir des... C'est rien, il avait décidé qu'à un moment donné - je ne sais plus comment ça fonctionne...

M. Bourbeau: Y a-t-il quelque chose de plus décentralisé que le réseau de l'éducation du Québec?

Mme Blackburn: II y avait des rapports...

M. Bourbeau: C'est décentralisé au maximum.

La Présidente (Mme Marois): Pardon, M. le ministre, on va laisser la députée terminer son intervention et vous pourrez intervenir, il n'y a pas de problème.

Mme Blackburn: Décentralisé, le réseau? M. Bourbeau: Décentralisé.

Mme Blackburn: Décentralisé? Il gère les immeubles. On pourrait même donner ça aux commissions scolaires, actuellement.

Une voix: Aux municipalités?

Mme Blackburn: Aux municipalités. Et j'en sais quelque chose. J'ai suivi au mot à mot l'exercice d'adoption des deux lois en commission parlementaire. Alors vraiment, réseau décentralisé! Franchement! Là-dessus aussi j'en connais un bout, je pourrais vous... C'est le réseau le plus centralisé. Et je pense qu'il l'est encore plus que les hôpitaux. On avait fait l'exercice de mesurer les pouvoirs qui étaient laissés à un directeur général d'un hôpital et un directeur général d'une commission scolaire ou à une commission scolaire et il y avait un peu plus de pouvoirs dans un hôpital. Dieu sait qu'ils n'en ont pas gros, parce qu'on avait fait l'exercice aussi.

Alors, dans le fond, il y a comme un problème, c'est une absence totale de confiance dans les régions. On vous donne ce qu'il faut pour vous amuser mais le reste, laissez-nous faire ça, nous, les grands, on va vous organiser. Les régions, elles en ont leur claque de se faire organiser par Québec.

À présent, le ministre disait... Ça, ça m'inquiète. Évidemment, c'est la philosophie, mais ça ne m'étonne pas non plus, il dit: La politique de développement régional et la politique de développement de la main-d'oeuvre, deux politiques qui concordent sur plusieurs points. Effectivement, toutes les deux sont centralisatrices. Là-dessus, il faut reconnaître qu'effectivement toutes les deux sont centralisatrices. Et c'est une sinistre comédie de prétendre que la politique de développement régional décentralise des pouvoirs. C'est une farce. Et je suis certaine que le CRD du coin - le CRCD, je ne sais pas comment il l'appelle dans son coin - l'organisme de concertation dans la région 1, doit partager...

M. Paradis (Matapédia): 1 ou 11?

Mme Blackburn: Non. 6, c'est Montréal, il me semble que 1, c'est chez vous, 2, c'est chez nous.

M. Paradis (Matapédia): C'est au Québec, ça, madame.

La Présidente (Mme Marois): Oui, ça va. Alors, s'il vous plaît, est-ce que vous pouvez terminer votre intervention, Mme la députée?

Mme Blackburn: Moi, j'inviterai le ministre... J'imagine que son lit est fait. Ce qui m'attriste là-dedans, c'est que tous les discours qu'on aura entendus, à la fois en commission parlementaire, à l'occasion des consultations, tout ce qu'on a entendu à Bélanger-Campeau, tout ce que les régionaux disent, répètent et redisent, c'est tombé dans le vide. C'est: Cause mon lapin, nous, on va travailler. C'est à peu près ça. Et les régionaux sont écoeurés. Ça n'a pas de bon sens. Ce n'est pas vrai. J'ai lu les lettres. J'ai relu la lettre de l'UMRCQ, que je pourrais relire au ministre. Mais, avant de le faire, je vais revenir un peu sur les déclarations du député de Matapédia qui disait que nous, on n'avait rien fait. La première chose qu'on a faite, on a créé les MRC et on leur a donné le pouvoir d'aména-

gement du territoire, et, progressivement, on a établi des structures qui devraient pouvoir accueillir de nouveaux pouvoirs. C'est vraiment une des structures les plus intéressantes et qui, tranquillement, a développé une expertise qui la rend...

M. Paradis (Matapédia): Une boîte à malle.

La Présidente (Mme Marois): Pardon. S'il vous plaît!

Mme Blackburn: ...habile à accueillir de nouveaux pouvoirs. Alors, il faudrait peut-être leur dire que vous les traitez de boite à malle, mais...

M. Paradis (Matapédia): Je l'ai dit à Nicolet.

La Présidente (Mme Marois): S'il vous plaît! Est-ce qu'on peut permettre à la députée de terminer son intervention?

M. Paradis (Matapédia): Oui, elle a le droit de parler, mais elle n'a pas le droit de dire n'importe quoi.

La Présidente (Mme Marois): M. le député, je pense que j'ai reconnu votre temps de parole et il vous sera possible d'intervenir de nouveau, si vous le souhaitez, il n'y a aucune objection.

Mme Blackburn: Je ne l'ai pas interrompu.

M. Paradis (Matapédia): Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Et j'aimerais que la députée puisse terminer son intervention. Et, si vous désirez intervenir par la suite, votre nom est déjà inscrit, si vous le souhaitez.

M. Paradis (Matapédia): Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Merci.

M. Paradis (Matapédia): Et ça va très bien quand Mme la députée de Chicoutimi n'est pas dans notre commission.

La Présidente (Mme Marois): Ah, non! non, non. S'il vous plaît! La députée de Chicoutimi est membre de la commission...

Mme Blackburn: II est tombé sur la tête. Il est passé par le bord du président.

M. Paradis (Matapédia): Pour la journée seulement.

La Présidente (Mme Marois): Elle a le droit d'y faire valoir son point de vue, comme tous les membres de cette commission, si vous le permettez, M. le député. Madame. (22 h 50)

Mme Blackburn: Nous avions également consulté, puisqu'il y avait eu une commission qui avait fait le tour du Québec. Elle était présidée par François Gendron. M. Parizeau aussi, faut-il le rappeler, a fait le tour du Québec avec une commission qu'il a présidée. Et, pour l'essentiel, les recommandations vont toutes, toutes, toutes, sans exception, dans le même sens: Donnez-nous des pouvoirs. Nous avons à la fois la structure et la volonté, la volonté d'assumer nos responsabilités et d'assurer notre développement.

Il pariait également - je trouvais ça plus amusant, je le soulève - de la tendance ou de la propension qu'aurait ma collègue députée de Maisonneuve de défendre la région de Montréal. Moi, je trouve ça normal de défendre sa région. Mais, ce que fait la députée de Maisonneuve, c'est beaucoup de concevoir Montréal en faisant des régions dans Montréal, alors que la tendance qu'on a, quand on voit Montréal, nous, c'est un tout. Moi, je comprends un peu mieux Montréal depuis que j'ai pris connaissance de certains rapports du Conseil de la famille où on rappelle bien que Montréal, c'est différentes régions dans Montréal. Il y a des régions riches, il y a des régions pauvres, il y a des régions plus ouvrières, il y a des régions en sous-développement. Et moi, je pense que la conception qu'a la députée de Maisonneuve du développement régional se rapproche beaucoup de celle que nous avons quand on parle de donner des outils de développement aux régions. Souvent, et à de multiples occasions, nous avons échangé sur cette question et je pense pouvoir dire qu'elle est capable autant de défendre la nécessite de la décentralisation des pouvoirs pour ma région qu'elle est capable de défendre avec beaucoup de vigueur à l'occasion, je le reconnais, sa propre région. Et c'est tout à son honneur.

Mme la Présidente, le ministre disait: Je ne veux pas avoir une vision romantique de la décentralisation. J'aimerais bien qu'il m'explique c'est quoi, une vision romantique de la décentralisation.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que c'est une question?

Mme Blackburn: C'est une question.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Merci, Mme la députée.

Mme Blackburn: Qu'est-ce que serait, pour lui, une vision romantique de la décentralisation?

La Présidente (Mme Marois): Alors, si vous le permettez. M. le ministre, souhaitez-vous expliquer un peu quelle est cette vision?

M. Bourbeau: Mme la Présidente, j'ai dit ce que j'avais à dire sur le sujet et je pense que je n'ai rien à ajouter.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée, est-ce que vous avez quelque autre commentaire?

Mme Blackburn: C'est-à-dire que quand on prétend ne pas avoir une conception romantique de quelque chose, on devrait être capable de l'expliquer. Si c'est romantique de penser que les régionaux sont capables de se prendre en main, je ne partagerais pas tout à fait son avis. Si c'est romantique de penser que le développement de la main-d'oeuvre, ce qui m'apparaft la base du développement économique, ne peut pas être décentralisé, dites-moi qu'est-ce qui va pouvoir être décentralisé? Les bouts de route, l'entretien des immeubles?

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que le ministre souhaite faire quelques commentaires?

M. Bourbeau: Non, Mme la Présidente. J'ai dit ce que j'avais à dire sur le sujet et je ne veux absolument pas empêcher la députée de Chicoutimi de faire savoir tout ce qu'elle veut dire. La commission est ouverte à ses propos mais je ne suis pas obligé de répondre à ses questions. Je ne suis pas dans une boîte aux témoins ici, et je peux prendre la parole quand je veux. Pour l'instant, je n'ai pas l'intention de commenter davantage. J'ai dit ce que j'avais à dire.

La Présidente (Mme Marois): C'est parce que vous aviez l'air d'avoir manifesté l'intention d'intervenir après que la députée de Chicoutimi aura terminé son intervention.

M. Bourbeau: Non, non, je ne crois pas, madame.

La Présidente (Mme Marois): Ce n'était pas le cas. Bon.

M. Bourbeau: Je sais que la parole est d'argent, mais le silence est d'or, souvent, Mme la Présidente, vous savez.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Alors, je vous remercie, M. le ministre. J'avais une demande d'intervention du député... Mme la députée de Chicoutimi, est-ce que vous avez terminé?

Mme Blackburn: Ça va, oui.

La Présidente (Mme Marois): Merci. J'avais une demande du député de Matapédia. Je crois qu'il a dû s'absenter pour quelques instants. De toute façon, on lui redonnera la parole à son retour. Une demande du député de Berthier.

M. Houde: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais apporter quelques rectifications sur les énoncés de la députée de Chicoutimi, tantôt, quand elle parlait de sommet économique. J'ai été élu député en 1981 dans le comté de Berthier et je fais partie de la région de Lanaudière, la grande région de Lanaudière qui n'était, au début, pas complétée, parce que le gouvernement ne l'avait pas complétée, le gouvernement péquiste, et c'est le gouvernement libéral, avec Marc-Yvan Côté, qui l'a complétée, qui a réussi à faire en sorte que les six régions soient reconnues et soient ensemble pour pouvoir faire une belle et grande région qu'est Lanaudière.

Deuxièmement, il y a eu un sommet économique en 1982, puis le sommet économique de 1982, sous le gouvernement précédent, ça été rien, plus que rien. La seule recommandation qui avait été retenue, ça été de compléter la route - remarquez bien, ce n'est pas dans la région de Lanaudière là - entre Donnacona et Champlain. Ça fait que c'était loin de chez nous, ça, la seule chose. Ça fait qu'il n'y avait rien à avoir là-dedans. Nous en avons tenu un, en 1990, dans la région de Lanaudière, et ça été un succès record. Pourquoi je dis un succès record? C'est parce qu'il y a eu des dizaines de millions de dollars, pas des milliers, des dizaines de millions de dollars qui ont été investis par le gouvernement actuel, et les personnes qui étaient dans les dossiers, qui étaient au sommet, se sont prises en main. Elles ont mis beaucoup d'argent. Ça a créé des emplois. Ça a fait beaucoup de choses et, je pourrais vous dire, non pas des années après, mais quelques mois après le sommet terminé, il y avait déjà des projets qui étaient enclenchés et nous avons inauguré, en dedans d'une année après la tenue du sommet, des réalisations, des inaugurations qui ont été faites. Il s'en fait encore, et les gens qui ont eu des projets qui ont été acceptés, bien entendu - bien des gens ont présenté des projets, mais tous les projets n'ont pas été retenus parce qu'il y avait tout près de 300 projets; il s'en est retenu une centaine environ - et qui ont donné suite aux engagements qui avaient été pris, ça a été un succès monstre dans la région de Lanaudière. Les gens n'en reviennent pas. C'est pour vous dire que le sommet économique, dans notre coin - je ne parlerai pas des autres, je ne les connais pas tellement, j'en ai seulement entendu parler bien peu - chez nous, ça a été quelque chose de sensationnel pour le sommet économique tenu dans la région de Lanaudière. La biennale s'en vient bientôt et les gens sont prêts encore à travailler ensemble pour faire de la concertation, pour qu'on puisse avoir quelque chose de bien dans la région de Lanaudière. C'est pour ça que je voulais apporter quelques précisions à la suite des déclarations de la députée de Chicoutimi. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Alors, je vous remercie, M. le député de Berthier. Il vous reste encore quelques minutes, Mme la députée de Chicoutimi, si vous souhaitez intervenir. D'abord, le député de Matapédia n'est pas là. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Bien, je félicite le député de...

La Présidente (Mme Marois): Berthier.

Mme Blackburn: ...Berthier, je pense toujours à M. Houde, s'il peut déclarer, aujourd'hui, que ça a été un succès sur toute la ligne, le dernier sommet socio-économique. Alors, si tel est le cas, je ne vois pas pourquoi ils ne les ont pas maintenus. C'est ça, le problème, il n'y en aura plus. Ça veut dire qu'ils ont estimé, et le ministre a estimé que c'était une formule boiteuse, qui était devenue inefficace parce que... Alors, j'imagine que ce n'est pas la faute de l'acte du gouvernement péquiste si on a aboli les sommets économiques.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député de Berthier, certainement.

M. Houde: Merci. Écoutez, concernant les sommets économiques, il y a eu du bon dans les sommets qui ont été tenus. Ça, je ne le nie pas, là. Ce n'est pas ça que j'ai dit tantôt. La chose que je dis, à la suite des sommets qui ont été tenus, il y en a eu, d'abord, dans toutes les régions du Québec, et il semblerait, d'après les sondages qui ont été faits auprès des personnes, qu'il y aurait des modifications à apporter parce que ce n'est pas tout le monde qui a pu avoir des projets qui ont été retenus. Ça a frustré des gens, c'est bien évident, ça, mais la participation a été tellement forte qu'ils ne pouvaient pas répondre à tous les projets. Ils ont retenu les plus structurants, et ça a été étudié par les gens du milieu. Les ministres concernés ont donné leur point de vue, mais les gens du milieu ont été présents et, pour la grande majorité, ils ont été bien satisfaits. Il y a des choses à réviser, et c'est pour ça qu'ils ont pensé qu'il y aurait des choses qui seraient mises sur pied dans les mois ou les années à venir.

Mme Blackburn: Ça m'intéresse.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: pendant que mon collègue cherche, mme la présidente, je voudrais savoir pour combien il y avait des projets et combien d'argent vous avez reçu.

La Présidente (Mme Marois): M. le député de berthier. >.

M. Houde: Combien d'argent on a reçu?

Mme Blackburn: II y avait 300 projets. Ça représentait des investissements...

M. Houde: C'est-à-dire que sur 300 projets il y en a eu environ 80, 90 de retenus. Il y avait, de mémoire, je ne suis pas certain des chiffres, mais environ 55 000 000 $ à 65 000 000 $ d'injectés, et le milieu en a mis. Je ne peux pas dire le montant, mais ils ont mis leur part, en tout cas. D'abord, il y avait des barèmes qui étaient établis, lis ont mis leur part. Il y a seulement eu deux projets, à ma connaissance, qui étaient en dérogation, et sur les deux qui étaient en dérogation, pour donner un peu plus que la part normale du gouvernement, il y en a un qui a été accepté et l'autre, en bout de ligne, ça a pris assez de temps pour pouvoir trouver l'argent dans le milieu. Il a été retenu, mais uniquement pour la part qui devait être versée et non en additionnel.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Les demandes représentaient combien de millions? 300 000 000 $ et ils ont eu 50 000 000 $.

M. Houde: Non, non, pas 300 000 000 $. Je ne peux pas vous le dire exactement, mais il me semble que c'est alentour de 55 000 000 $ à 75 000 000 $, la part du gouvernement qui a été versée dans les projets, à date.

La Présidente (Mme Marois): Ça va? Merci, M. le député de Berthier. Alors, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, vous étiez le suivant inscrit sur ma liste. Est-ce que j'avais bien compris, oui?

M. Trudel: Oui, oui.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. (23 heures)

M. Trudel: Mme la Présidente, vraiment, oui, on est au coeur du projet présenté par le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Moi aussi, Mme la Présidente, je n'en croyais pas mes oreilles. Mes yeux ne pouvaient suivre le ministre dans sa présentation de façon attentive parce que je ne pensais pas qu'on puisse entendre ce discours, qu'on puisse entendre cette façon de voir le développement régional et la main-d'oeuvre en région, d'une façon aussi centralisatrice, avec un discours qui est très carrément à contre-courant. Ça me semble une vérité de La Palice de le dire, ça me semble tellement une évidence que c'est même un petit peu curieux de

reprendre la discussion à ce point où nous en sommes rendus dans certains secteurs, en 1992.

Mme la Présidente, j'ai une activité professionnelle, depuis tout près de 25 ans, dans une des régions - s'il y a une région qui est bien périphérique au Québec, c'est bien celle de I Abitibi-Témiscamingue... Je suis sûr que mes concitoyens et mes concitoyennes auraient été extrêmement gênés d'entendre le discours du ministre ce soir et n'auraient pu imaginer qu'on puisse effectuer un tel retour en arrière au niveau de la gestion de la formation et du perfectionnement de la main-d'oeuvre dans une région comme l'Abitibi-Témiscaminque.

Mme la Présidente, on ne peut pas éternellement recommencer les mêmes batailles dans une société. Il y a comme des bonds qualitatifs qui se font dans une société. Oui, et c'est normal, on appelle ça la croissance en spirale de la connaissance et des idées, c'est que, quelquefois, certaines idées reviennent en arrière, mais finissent toujours par reprendre le meilleur de ce qui s'est passé dans la dernière décennie pour continuer à grandir et à se développer. C'est la spirale du développement de la connaissance.

Ce que le ministre nous a exposé ce soir, il est vraiment sur la spirale descendante. Il est vraiment sur la spirale descendante.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Ça n'a pas de bon sens, entendre des choses comme ça, et on ne peut pas, dans une société, éternellement recommencer les mêmes batailles. Écoutez, je me souviens encore, au tournant des...

M. Bourbeau: L'histoire est un perpétuel recommencement.

M. Trudel: Oui, vous en êtes la démonstration particulièrement vivante. Comme dirait le grand historien italien Jean-Baptiste Vico: «L'histoire est faite de corsi et de recorsi». Dans votre cas, c'est des recorsi, qu'on entend ici ce soir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Mais je suis Italien, moi: Bourbeau.

M. Trudel: Pardon?

M. Bourbeau: Je suis Italien d'origine, notario Bourbeau.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Alors, trêve de plaisanteries.

M. Trudel: Je vous souhaite de lire comme il faut Jean-Baptiste Vico. C'est très formateur au niveau de l'évolution de la pensée.

Mme la Présidente, je croyais me retrouver au conseil régional de développement du Nord-Ouest québécois. Voyez-vous, ça ne s'appelait même pas, à l'époque, dans le langage, en tout cas reconnu dans la région, de l'Abitibi-Témis-camingue, en 1965, où on tentait de former une espèce de groupe de concertation pour en arriver à se donner les instruments de notre propre développement. Et Dieu sait qu'à ce moment-là, parce qu'on n'était pas au moment de l'évolution de la société québécoise qui nous portait à être disposés et prêts à décentraliser ce qu'on n'avait même pas construit encore, dans bien des secteurs de l'actitivé québécoise, on cherchait comment on pourrait, en région, être autre chose que des déversoirs, être autre chose que des camps. Parce que ça, là, quelqu'un qui vient d'une région périphérique comme moi puis qui l'a vécu quotidiennement depuis 25 ans, c'est souvent la considération que l'on a pour les régions-ressources du Québec. On va aller vous chercher tout ce qu'il y a en dessous de la terre, on va aller vous chercher tout ce qui pousse dessus, on va aller vous chercher tout ce qui coule à la surface de la terre et, ce qui est sûr, c'est qu'on ne va vous laisser à peu près que les déchets de l'exploitation de ces ressources naturelles.

C'est une conception qu'on avait, je pense, globalement, tous gouvernements étant confondus depuis 1960, tout type de gouvernement, par tous les partis, on avait comme dépassé ce stade de la conception d'une nécessaire centralisation pour que ça marche. Il y a suffisamment eu de démonstrations de la capacité de la prise en main des régions. Encore récemment, Mme la Présidente, il se publiait au Québec un ouvrage, quand même, qui a fait les manchettes, qui a fait écrire, et qui était le dernier rapport du Conseil des affaires sociales du Québec et qui s'appelle «Un Québec solidaire, Rapport sur le développement». Et, encore là, on a tout un chapitre qui est consacré à cette espèce de conception qui nous a été exposée par le ministre, il y a quelques minutes, toute cette conception de la centralisation paralysante. Et, Mme la Présidente, en écoutant ce discours du ministre, les oreilles me frissonnaient. Tout à coup, il m'est réapparu les premières pages de ce chapitre 4 du «Québec solidaire» du Conseil des affaires sociales. Et ce n'est pas trop long, Mme la Présidente, je pense que je vais lire parce que ça a un petit peu rapport avec les responsabilités du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

La Présidente (Mme Marois): C'est votre droit le plus strict, M. le député.

M. Trudel: Alors, ce matin de juin 1990, regardez ce que c'est que la centralisation

paralysante.

M. Bourbeau: Le député peut lire, mais, s'il veut déposer, je suis prêt à admettre l'authenticité du document tout de suite.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Je pense que c'est pour les fins de sa preuve, il a besoin de lire.

M. Trudel: J'ai bien trop peur que le ministre évite de le lire avec les nombreuses responsabilités qu'il a et surtout celles qu'il veut avoir en plus au niveau de la centralisation de son organisme en formation de la main-d'oeuvre. Il n'aura plus le temps de lire des choses comme ça. «Ce matin de juin 1990, dans une salle confortable de l'Institut Desjardins, à Lévis, ils étaient une trentaine à se réunir au cours d'un petit déjeuner pour discuter emploi.» Ça nous intéresse, ça, ici. «Convoquée par la Corporation de développement économique de la MRC de Desjardins, cette réunion faisait suite aux assises nationales du Forum pour l'emploi qui avait conclu à la nécessité de vivre localement la concertation instituée à l'échelle nationale. Autour de la table, des entrepreneurs, des spécialistes de la formation et des représentants des institutions qui assistent les sans-emploi. «Pour l'occasion, c'est M. Claude Béland, président du Mouvement Desjardins et du Forum pour l'emploi, qui animait la rencontre. D'entrée de jeu, un participant, important agriculteur de Saint-Henri de Lévis, annonce: "Je suis allé à la "briquade" hier, sur la route 132, et j'ai appris qu'on cherche trois briqueteurs." Ah bon! «Suit une brève discussion sur le peu de recyclage requis pour un tel travail et la facilité relative avec laquelle ces emplois de briqueteur peuvent être comblés. Puis le groupe passe à autre chose, comme si le problème était réglé. Après une quinzaine de minutes, voyant que le groupe ne revenait pas à la proposition de l'homme d'affaires de Saint-Henri, le président de l'assemblée revient à la charge: «II y a une proposition sur la table susceptible de faire trois chômeurs de moins. Ce n'est pas tout de dire que ces emplois seront facilement comblés, encore faut-il savoir comment. Qui peut le dire? Je m'adresse à ceux qui ont la responsabilité du placement. «Commence alors un curieux ballet de l'esquive où danseurs et danseuses battent en retraite sur la pointe des pieds, décrivant arabesques et entrechats autour de figures comme les normes, les programmes nationaux, la rationalisation des dépenses - ça, ce n'est pas une citation de la revue du ministre, là, entrechats et arabesques autour des figures comme les normes, les programmes nationaux, la rationalisation des dépenses. «Moi, je fais des études sur la situation de l'emploi, répond la représentante du centre Emploi et Immigration Canada. «Ce n'est pas mon travail, enchaîne le délégué du centre Travail Québec, mon rôle consiste à administrer les programmes du ministère comme les stages en milieu de travail, les travaux communautaires, le retour à l'école et le programme PAIE. «Ah bon! Intéressant, mais encore... «D'habitude, il me faut 10 inscriptions pour donner un cours de recyclage, annonce le représentant de la commission de formation professionnelle.» Dû aux normes nationales. «Excédé, le président reprend: «Écoutez, c'est pourtant simple. On nous apprend que trois emplois nécessitant peu de recyclage sont disponibles. Vous connaissez les personnes sans emploi puisque vous leur adressez des chèques de prestation. Comment ces personnes sauront-elles qu'il y a trois emplois disponibles à la "briquade"? «On apprend alors que la relation entre l'offre et la demande d'emploi se fait désormais par affichage, etc. «Ce qui semblait clair pour tous, au sortir de la réunion, c'est que la concertation ne peut vraiment s'établir que si les personnes chargées de la faire disposent d'une marge de manoeuvre suffisante pour adapter les programmes gouvernementaux aux réalités locales.» Et à la capacité de décider des normes dans ces programmes. «À l'évidence, ce n'était pas le cas ici; chacun représentant son ministère, son organisme, son établissement.» Ses normes centralisées. Ça, M. le Président, c'est l'exemple de ce qui peut se vivre... (23 h 10)

Une voix: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Ça va, ça va. M. Trudel: ...Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Je vous excuse, je vous excuse. Il est trop tard.

M. Trudel: ...en région, d'une centralisation paralysante au niveau d'une société comme la société de la main-d'oeuvre du Québec.

Mme la Présidente, il m'a été donné aussi d'avoir d'autres expériences en matière de formation des personnes dans les régions. J'ai eu l'occasion de diriger un établissement de formation de niveau universitaire issu de la Loi sur l'Université du Québec, créée en 1969. Une loi vraiment décentralisante. Sauf que, comme toujours, les régions du Québec doivent se battre deux ou trois fois plus fort que le restant des autres régions pour obtenir leur juste part. Si bien qu'au moment de la création de l'Université du Québec, pour la région de l'Abitibi-Témis-camingue, on a tout simplement décidé, compte

tenu d'un certain nombre de paramètres, qu'il n'y aurait pas d'Université du Québec, une constituante de l'Université du Québec dans cette région. On décidait d'avoir un centre d'études universitaires rattaché à la corporation centrale de l'Université du Québec, toujours, bien sûr, pour le bien du monde de cette région, évidemment, de leur incapacité de se prendre en main... On voulait tellement leur bien qu'on disait qu'on finirait par l'avoir. On décidait donc, à partir d'une corporation centrale, d'aller servir les autochtones, d'aller servir les gens qui travaillaient à fournir les richesses naturelles, les ressources naturelles pour permettre à l'industrie manufacturière de fonctionner dans le Québec plus central.

M. Bourbeau: J'ai l'impression que ça ne s'est pas passé comme ça.

M. Trudel: Et dans ce contexte-là, M. le Président...

La Présidente (Mme Marois): Pardon?

M. Trudel: Dans ce contexte-là, Mme la Présidente...

M. Bourbeau: J'ai comme l'impression que ça ne s'est pas passé comme ça.

M. Trudel: Mme la Présidente, si ça ne s'est pas tout à fait passé comme ça...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député. Le ministre pourra intervenir de nouveau, de toute façon, s'il souhaite le faire.

M. Bourbeau: Enfin, Trudel vint!

M. Trudel: Donc, en 1972, nous avons créé cette structure centralisée. Et, à la suite de ça, dans un grand mouvement de réponse à des pressions de la région qui voulait, comme tous les Québécois et les Québécoises, prendre en main leur développement, on daignait déplacer le centre de décision. Mais attention, non pas de Québec vers la région de l'Abitibi-Témiscamingue, mais de Québec vers la région de l'Outaouais...

M. Bourbeau: Intervint Trudel!

M. Trudel: ...prétendant que le colonisateur étant plus proche, ce serait moins paralysant.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Voilà généralement, d'ailleurs, les étapes à travers lesquelles doivent passer les régions. On leur dit: Voici le paquet centralisé, mais vous allez pouvoir jouer dans l'enclos. Comme on dit: Vous allez pouvoir vous amuser. Nous, on détermine la grandeur du carré de sable, et d'autres disent: En région, jase, jase, tapisse, peinture. Jase, jase, perle, parle, tapisse, peinture puis, pendant ce temps-là, ça ne dérange personne. Nous, on décide, le grand monde, à travers les normes nationales: Si vos pèlerinages ont un peu d'intensité, peut-être qu'on va permettre une certaine marge, une certaine marge sur la dispensation des activités. Mais attention, mais attention, il faut que vous compreniez toujours que c'est nous autres qui décident.

Voilà ce qu'on avait fait aussi dans le domaine de l'enseignement universitaire jusqu'en 1978, en rattachant cette région, au plan de l'enseignement et de la formation des ressources humaines de niveau supérieur, à la région de l'Outaouais. Et, pourtant, cette population-là ne s'est pas découragée et a continué à réclamer la volonté de la pleine possession de ses moyens pour en arriver à développer ses ressources humaines quant au niveau concerné. Et c'est en 1983 que le Conseil des ministres du gouvernement du Québec accordait, non pas des programmes, non pas une marge de manoeuvre, non pas un demi-organisme, non pas un délégué à l'action universitaire, non pas la nomination d'un responsable de l'enseignement universitaire, mais, comme le prévoyait la loi décentralisante du réseau de l'Université du Québec, la création d'une université de plein droit qui n'allait pas ressembler à ce que sont l'Université de Montréal, l'Université McGill, l'Université Laval, avec leurs grandes capacités de recherche, leurs grandes capacités de développement, mais qui allait correspondre aux besoins des enfants et des familles de la région de l'Abitibi-Témiscamingue parce que ça adonne que ce sont des Québécois et des Québécoises qui ont aussi la volonté de contribuer au développement intégral du Québec. Et ce n'était pas une question de faire de la duplication de services qui se dispensent ailleurs ou de faire en sorte que nous aurions, dans les 16 régions du Québec, 16 facultés de médecine, les Québécois et les Québécoises sont plus intelligents que ça, mais, quant aux besoins spécifiques de cette région, nous pourrions permettre aux gars et aux filles de cette région d'avoir l'accès à une formation universitaire de qualité et d'obtenir des diplomations dans la région même.

Et c'est comme ça qu'a été créée la dernière unité du réseau de l'Université du Québec et qui permet, depuis bientôt une dizaine d'années, la formation des ressources humaines dans cette région. Et quiconque vous dira que le développement de cet instrument, avec ses propres capacités, ses propres budgets, ses propres niveaux d'approbation de programmes, qui ne sont pas différents des autres universités québécoises, exactement sur le même pied, avec la pleine responsabilité institutionnelle, fait en sorte que ces gens, dans le domaine de la formation au niveau supérieur, sont responsables

d'être bons comme partout ailleurs au , Québec et sont soumis également aux critères de qualité, en termes de formation, dans les différentes disciplines.

Mme la Présidente, on ne peut pas recommencer éternellement les mêmes batailles. On a vécu un certain nombre d'expériences avec nos commissions de formation professionnelle, on a convié autour de la table les différentes catégories d'employeurs, les différentes catégories d'employés, les différentes catégories d'établissements qui contribuent à de la formation pour essayer de dessiner, avec le peu de moyens ou les moyens dont disposent les commissions de formation professionnelle, des programmes adaptés pour répondre aux besoins. On ne peut pas dire: Dans la phase 2 de cette opération, on va rapatrier centralement tous ces instruments-là.

Non. Moi, Mme la Présidente, je pense vraiment qu'on ne peut pas dire aux régions du Québec, après tant d'efforts qui ont été faits dans certains autres ministères et au niveau général des opérations gouvernementales de tels mouvements de décentralisation... Il y a des exemples que j'accompagne, moi, qui ont été donnés par le député de Matapédia, qui nous font la démonstration, oui, effectivement, que les régions ont la capacité de se prendre en main, ont l'énergie, ont la volonté du génie propre qui réside dans ces régions, et c'est prouvé aussi au plan théorique. Et là le ministre aurait intérêt, à mon avis, à retourner, à retourner, oui, à faire de la consultation. Pas de la consultation parce que vous l'avez faite ici, en commission parlementaire, mais de la consultation au niveau des formules gagnantes dans notre société.

Sur le plan administratif, sur le plan de l'organisation des services, sur le plan du développement organisationnel, la décentralisation n'est pas une mode. La décentralisation n'est pas uniquement un courant qui fait en sorte que c'est bien, dans les salons, de parler de décentralisation. C'est un mode de gestion et de développement des organismes qui a fait ses preuves. On a fait la démonstration de l'efficacité parce qu'on permet au potentiel humain des individus qui composent ces organisations de se développer pleinement, de fleurir, de faire en sorte que l'originalité, que les formules adaptées puissent exister. Il n'y a rien de plus tuant, il n'y a rien de plus difficile pour une région, il n'y a rien de plus paralysant pour une région, M. le ministre, que de leur dire: On va vous organiser ça au plan national et, dans un deuxième temps, on va vous donner un hochet qui va vous permettre d'exécuter nos décisions. Vous n'allez pas susciter la collaboration, vous allez susciter la passivité, l'exécution, et vous allez vous retrouver aussi avec des problèmes, tantôt, qui vont faire en sorte qu'on va être obligé de revoir ça d'ici trois ou quatre ans. (23 h 20)

M. le ministre, je conclus en disant, donc... Parce que j'ai bien terminé?

La Présidente (Mme Marois): Oui, vous avez terminé.

M. Trudel: Je conclus, M. le ministre, en disant: Vous avez suffisamment d'expérience, au niveau de la gestion des organismes, pour continuer à réfléchir et ne pas adopter cette conception paralysante, centralisatrice de l'organisation que vous voulez donner aux régions, qui ont toutes dénoncé cette façon-là, cette société de la main-d'oeuvre régionale et, en porte-à-faux, les sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre.

La Présidente (Mme Marois): Alors, je vous remercie, M. le député. Est-ce que vous avez des commentaires à faire, M. le ministre?

M. Bourbeau: Mme la Présidente, je respecte l'opinion de ceux qui ne partagent pas la mienne, mais je dois dire que ce n'est pas après quelques minutes de réflexion que nous en sommes arrivés à la décision de procéder tel que nous le faisons. C'est après une très longue réflexion, et pour les raisons que j'ai déjà énoncées. Je reconnais, cependant, qu'on peut penser différemment mais, en mon âme et conscience, je suis convaincu que, pour le bien de la main-d'oeuvre et pour le bien des Québécois, il est préférable de procéder tel que nous le faisons.

M. Houde: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député de Berthier.

M. Houde: Je voudrais juste - c'est un petit peu ce que j'ai dit tantôt - apporter une précision pour répondre exactement a Mme la députée de Chicoutimi, là. En ce qui concerne le Sommet économique de Lanaudière, là, avec les précisions que j'ai apportées, il y avait 52 projets d'acceptés, dont 50 000 000 $ du gouvernement provincial et 150 000 000 $ du milieu des partenaires. C'est parce que c'est écrit dans les galées puis, si quelqu'un les reprenaient, ça dévaloriserait mes gens qui sont impliqués pour la peine. C'est pour ça que j'ai apporté des précisions. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Marois): c'est bien. je vous remercie, m. le député de berthier. oui, mme la députée de chicoutimi? je sais qu'il vous restait quelques minutes.

Mme Blackburn: Oui, il me restait quelques minutes et je voudrais lire une lettre qui a été adressée au ministre par l'UMRCQ. Je pensais que c'était important de la lire pour qu'elle reste aux galées, pour qu'on se rappelle dans quels

termes ça avait été dit.

M. Bourbeau: ...Mme la Présidente, non? Vous l'aviez oubliée, Mme la Présidente?

Mme Blackburn: Pas celle-là mais... En tout cas.

La Présidente (Mme Marois): Pas depuis que je préside, monsieur. Alors, si vous voulez procéder, madame.

Mme Blackburn: Parce que j'ai vérifié auparavant, puis on m'a dit non. Alors, je ne reprendrai pas la totalité parce que, pour l'essentiel, ils dénoncent la décision du ministre. Mais je reprends à partir du deuxième paragraphe: «Comme je vous le mentionnais, nous partageons en effet sans réserve votre volonté de modifier en profondeur le cadre et les mécanismes de gestion du développement de la main-d'oeuvre dans une perspective de relance de l'emploi. Ce constat premier explique, du reste, notre absence du débat en commission parlementaire de l'hiver dernier.»

M. Bourbeau: Ça avait été cité, cette partie-là. C'est moi qui l'ai citée.

Mme Blackburn: «Nous poursuivons, par ailleurs, tout comme nos collègues des cités et villes - alors, je vais citer peut-être ce que le ministre n'a pas cité - un cheminement qui vise à articuler ou préciser les politiques de décentralisation que devrait adopter le Québec pour alléger sa gestion politique, pour la rendre plus performante, plus efficace, mieux adaptée à une ère de compétition brutale instaurée par la globalisation de l'économie de marché. Le vecteur économique, le redressement de la conjoncture en région sont évidemment des considérations fondamentales qui à la fois structurent notre réflexion et dictent les critères qui doivent présider à l'évaluation des résultats. Pour étayer ces propositions, il apparaît essentiel de rappeler que l'expérience étrangère a prouvé hors de tout doute l'importance de confier aux institutions de la base toute l'autonomie de gestion et toutes les responsabilités administratives qu'elles peuvent légitimement assumer afin de magnifier l'effet de leur implication, c'est-à-dire afin de garantir des résultats. La décentralisation - nous dit l'UMRCQ - puisque c'est bien de cela qu'il s'agit, promet et permet, en matière de développement de la main-d'oeuvre, d'établir l'adéquation entre la demande et l'offre à l'échelle sociale et territoriale qui correspond au milieu de vie des personnes visées par l'action publique. Aucun autre mécanisme, mais surtout pas la gestion centralisée, ne peut assurer la flexibilité et la souplesse qui s'imposent dans une dynamique de l'économie qui dicte la mobilité. L'histoire mondiale récente n'en est-elle pas la preuve, toutes proportions gardées? Prétendre gérer et contrôler a distance des politiques de main-d'oeuvre nie le caractère essentiellement individuel que doivent revêtir la formation, le soutien du revenu et le placement. Pour les organismes associés à l'État, l'engagement dans une démarche dirigiste constitue une répudiation de leurs membres, une négation même de la réalité du mandat de leurs porte-parole régionaux.»

La Présidente (Mme Marois): II faudrait procéder parce qu'il ne vous reste plus de temps.

Mme Blackburn: Oui. Alors, je termine. «Il a été allégué que la délégation de la responsabilité de l'administration de fonds publics à des tiers soulevait des appréhensions sérieuses quant à l'imputabilité ministérielle.» Ils rappellent qu'effectivement ils le partagent. Il leur semble néanmoins qu'en matière de développement de la main-d'oeuvre, dans le cadre de sociétés tripar-tites que vous proposez de constituer, il serait possible d'établir des règles de régie interne qui assureraient la transparence et la rigueur de l'administration. La scrutation publique ne de-meure-t-elle pas la meilleure garantie de la qualité de la gestion? Et ça, c'est signé par M. Ni-colet, le président de l'UMRCQ. C'est un extrait de la lettre qui a été adressée au ministre, pour les fins du Journal des débats, en date du 21 mai 1992.

La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions, je vais appeler...

Mme Harel: Mme la Présidente, j'aimerais, à ce stade-ci de nos travaux, présenter un amendement à l'article 31.

La Présidente (Mme Marois): II faut le faire rapidement, parce qu'il vous reste peu de temps pour le faire.

Mme Harel: D'accord. Alors, Mme la Présidente, l'amendement consiste en l'ajout, après le premier alinéa de l'article 31, de l'alinéa suivant: «Ces sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre sont des corporations au sens du Code civil.»

La Présidente (Mme Marois): Merci. Si je disais à la députée qu'il ne lui restait que peu de temps pour présenter son amendement, c'est qu'en fait il nous reste encore du temps de travail à la commission, au moins jusqu'à minuit. Avec consentement, on pourrait évidemment...

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Non, mais ce que je voulais dire, juste pour qu'on se corn-

prenne bien, pour expliquer le sens de mon intervention, c'est qu'il ne lui restait que très peu de temps de parole et, pour pouvoir présenter un amendement, il fallait qu'elle le fasse sur le temps de parole qui lui restait, ce qu'elle a fait.

M. Bourbeau: Vous êtes d'une impartialité exemplaire, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): j'essaie d'être juste pour les deux côtés de cette table, m. le ministre, en permettant à chacun d'exprimer son point de vue, cependant.

M. Bourbeau: On vous en est très reconnaissant.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre.

M. Bourbeau: Je voudrais dire quelques mots sur la recevabilité de cet amendement-là. Je ne suis pas un expert de la procédure, mais il m'apparaftrait assez étonnant que soit recevable un amendement qui, à sa face même, propose la quadrature du cercle. Parce que l'amendement propose de dire... Peut-être que vous pourriez en faire la lecture parce que je n'en ai pas de copie...

La Présidente (Mme Marois): Oui, je pense que je vais reprendre, si vous permettez.

M. Bourbeau: Oui, très bien.

La Présidente (Mme Marois): Alors: Ajouter, après le premier alinéa de l'article 31, l'alinéa suivant: «Ces sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre sont des corporations au sens du Code civil.»

M. Bourbeau: Alors, cet amendement-là vient après le premier paragraphe qui dit: «La Société établit, à l'intérieur de sa structure, une entité pour chacune des régions...» Alors, comment peut-on, à l'intérieur d'une structure, établir des corporations qui ont la personnalité juridique? C'est impossible, c'est une impossibilité physique. Donc, je prétends qu'il ne peut pas être recevable, parce que le législateur ne peut pas proposer des choses qui sont impossibles, il me semble.

Mme Harel: Mais, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: ...si tant est que ça occasionne les problèmes dont nous parle le ministre, alors mon amendement va consister d'abord, à biffer, au premier alinéa, les mots «à l'intérieur de sa structure», et à ajouter un deuxième alinéa qui se lirait tel quel.

La Présidente (Mme Marois): Que vous avez proposé.

Mme Harel: C'est ça. Alors, je remercie le ministre, d'ailleurs, pour sa collaboration.

M. Bourbeau: Je n'ai pas très bien saisi le sens.

La Présidente (Mme Marois): Oui, très certainement. Je vais vous expliquer l'amendement que propose la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Pour répondre à l'objection que présentait le ministre, elle propose, suite aux mots «La Société établit» que soient biffés «, à l'intérieur de sa structure,». Donc, l'article amendé se lirait comme suit, le premier alinéa: «La Société établit une entité pour chacune des régions que le gouvernement détermine. «Ces sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre sont des corporations au sens du Code civil.»

C'est comme ça que se lirait l'article final si chacun des amendements était accepté. Alors...

M. Bourbeau: Est-ce que c'est un nouvel amendement ou si c'est le même qui est corrigé, là? Comment procédez-vous?

Mme Harel: C'est le même qui est corrigé.

La Présidente (Mme Marois): Un instant, s'il vous plaît. Alors, ce serait le même qui serait corrigé.

M. Bourbeau: Est-ce que la députée avait assez de temps de parole pour pouvoir faire sa correction?

Une voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): En une minute... Je pense que, si je le lisais, ça ne prendrait pas une minute. Donc, elle pouvait le faire. (23 h 30)

Mme Harel: Si on ne le fait pas là, on va le faire ailleurs.

(Consultation)

La Présidente (Mme Marois): Alors, la députée va rédiger l'amendement et nous pourrons ensuite procéder à son étude, parce que je pense que dans... Là, à partir de la discussion qu'on a eue, je pense que cet amendement deviendrait recevable. Et peut-être que...

M. Bourbeau:... Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Je suis surtout

plutôt fatiguée, M. le ministre, à ce moment-ci. J'ai comme un peu de... C'est un peu plus lent, si on veut, comme réflexe. Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: D'ailleurs, il y a une règle d'interprétation en droit. On doit toujours interpréter de façon libérale, c'est-à-dire large et ouverte, plutôt...

La Présidente (Mme Marois): Oui. Oui, j'ai compris.

Mme Harel: ...que de façon restrictive.

M. Bourbeau: Comme le Parti libéral. Alors que l'inverse est, évidemment, étroit et fermé. C'est nécessairement l'Opposition.

M. Trudel: ...les fables de La Fontaine.

M. Bourbeau: Les fables...

M. Trudel: Non? Elles sont disparues?

Une voix: Rémy, c'est comme la souveraineté...

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Oui, c'est ça. C'est même un livre de référence ici, à cette commission. Les fables de La Fontaine, c'est un livre de référence qui est gardé dans nos armoires.

Une voix: C'est vrai?

La Présidente (Mme Marois): Non, je pense...

M. Bourbeau: C'est normal, c'est le livre de cette salle.

La Présidente (Mme Marois): C'est vrai, vous avez raison mais, enfin, ce n'est pas tout à fait le même La Fontaine. Nous sommes dans la salle, oui, Hippolyte-LaFontaine.

M. Bourbeau: C'est la bible de cette salle. Une voix:...

La Présidente (Mme Marois): Oui. Alors, si vous le permettez...

M. Bourbeau: C'est bien ce qu'on appelle des amendements fignolés sur le coin de la table, Mme la Présidente. Pour un amendement aussi important, ça m'étonne qu'il n'ait pas déjà été préparé avant. On fera, après, les discours...

La Présidente (Mme Marois): Là, j'imagine que vous aurez l'occasion d'échanger sur l'amendement et, donc, de soulever cette question-là.

Mme Harel: Oui. Et, comme il vient de...

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée.

Mme Harel: ...parler sur le fond, alors, c'est qu'il reconnaît l'admissibilité de l'amendement.

M. Bourbeau: La présidente l'avait déjà admis, l'avait déjà annoncé.

La Présidente (Mme Marois): Alors, je comprends qu'on a retiré le premier libellé pour le remplacer par un libellé plus complet qui est le suivant, et que je lis: L'amendement consisterait à remplacer le premier alinéa par le suivant: «La Société établit une entité pour chacune des régions que le gouvernement détermine.» Et ajouter le troisième alinéa suivant: «Cette société régionale de développement de la main-d'oeuvre constitue une corporation au sens du Code civil».

Je crois, à première vue, que cet amendement semble recevable. Est-ce qu'il y a des commentaires? Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Sur la recevabilité ou...

La Présidente (Mme Marois): Bien, s'il n'y a pas... Non.

Mme Harel: Non. D'accord.

La Présidente (Mme Marois): On ne fera pas de débat sur la recevabilité si je n'ai pas d'objection. Parce qu'à sa face même...

Mme Harel: Alors...

La Présidente (Mme Marois): ...je crois que c'est recevable. Alors, si vous voulez intervenir maintenant sur le fond de l'amendement.

Mme Harel: Mme la Présidente, je veux simplement, d'abord, rassurer le ministre. Qu'il ne s'en fasse pas trop sur la technique de rédaction de l'amendement. Je dois lui dire que j'ai, pendant trois mois, travaillé en commission parlementaire avec son collègue de la Justice à la révision du Code civil et que nous avons, à la satisfaction générale, j'ai l'impression, procédé de cette façon pour un total de quelques milliers d'articles. Je sais que, si le ministre veut retourner à la pratique, il devra, d'ailleurs, suivre des cours de sa corporation professionnelle. Il en aura pour une soixantaine d'heures, me dit-on, de cours obligatoires...

M. Bourbeau: Ne vous en faites pas, je n'ai aucunement l'intention de retourner sur les bancs d'école.

Mme Harel: ceci dit, mme la présidente, je veux d'abord féliciter le député de berthier. les interventions qu'il a faites ce soir manifestent une certaine passion...

M. Bourbeau: Elle ne recule devant aucune flatterie.

Mme Harel: ...pour la vie régionale qui s'est développée dans Lanaudière. C'est tout à son honneur d'y être associé.

M. Trudel: Quelle démonstration!

Mme Harel: Je le dis simplement, je regrette que le député de Matapédia nous ait quittés, sans doute pour vaquer a d'autres occupations parlementaires, j'en conviens, mais je regrette qu'il ne soit pas là pour que je puisse insister auprès de lui sur le danger d'opposer Montréal aux régions et sur la nécessité d'une réconciliation entre le Québec des régions et sa métropole pour justement arrêter de se faire organiser par Québec. Mme la Présidente, finalement, ce qui nous manque, présentement, c'est un nouveau contrat social, de façon à ce que les régions comprennent que Montréal n'est pas un ennemi, un adversaire, un opposant, et que c'est dans la mesure où les régions et Québec vont finalement faire la paix qu'il sera possible de cesser d'être sous le contrôle d'une technostructure de la colline parlementaire. La redistribution du pouvoir que je réclame pour Montréal, Mme la Présidente, j'espère que le député de Matapédia comprend que cette redistribution du pouvoir le favorisera aussi, tout autant.

Ceci dit, le ministre nous a fait savoir tantôt...

M. Joly: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le vice-président de la commission et député de Fabre.

M. Joly: Dans le même ordre d'idées, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve vient d'ouvrir un volet excessivement important et intéressant qui dit de ne pas opposer la grande région de Montréal versus les autres régions, sauf que si on se souvient, cet après-midi, à la période de questions, le député de Verchères, je crois...

La Présidente (Mme Marois): Le député de Bertrand.

M. Joly: Le député de Bertrand a posé une question à Mme la vice-première ministre con- cernant l'implantation du centre de distribution d'Hydro-Québec à Laval. Si ce n'est pas ça, essayer d'opposer une région contre une autre région! Moi, je me dis qu'il faudrait faire en sorte que ce soit sincère et que ça ne devienne pas simplement des voeux pieux. Il faudrait réaliser que chacun des élus a un rôle à jouer, un rôle qui est celui de défendre sa région, c'est bien sûr, mais jamais au détriment, si vous voulez, de ce qui peut assurer la survie de ces régions-là. Alors, si, par opposition, on dit que la région de la Montérégie ou la région de la Rive-Sud est plus importante que la région de Laval, à ce moment-là, ça devient des voeux pieux.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Joly: Où est-ce qu'on établit l'équilibre et où est-ce qu'on dit: Arrêtons de déshabiller Saint-Paul pour habiller Saint-Pierre?

Mme Harel: Mais, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Oui, je vous écoute, Mme la députée.

M. Joly: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le vice-président.

Mme Harel: ...je ne voudrais pas que le député de Fabre et vice-président de notre commission fasse de la culpabilité par association.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Ce serait tout à fait dommage.

Mme Harel: II invoque les propos de mon collègue, le député de Bertrand, pour m'en attribuer je ne sais quelle responsabilité.

M. Joly: Non, non, mais je dis qu'on a de l'ouvrage à faire dans chacune de nos formations respectives...

Mme Harel: D'accord.

M. Joly: ...de façon à ce qu'on puisse multiplier des philosophies et des approches. De façon à ce que ça devienne des réalités, il y a encore du temps à faire.

Mme Harel: Certainement.

M. Joly: Donc, je mets toujours ça sous le chapeau de l'éducation et, nécessairement, du vécu et du quotidien pour faire en sorte qu'on puisse, un jour, être capables de se respecter

mutuellement. C'est peut-être dans la façon.

Mme Harel: Je comprends, M. le député de Fabre, qu'on va pouvoir compter sur votre collaboration...

M. Joly: Moi, je pense que vous l'avez toujours eue.

Mme Harel: ...pour qu'il y ait une seule usine de filtration des eaux sur les Des de Laval et de Montréal.

La Présidente (Mme Marois): Bon. Je sens que nous allons peut-être régler des dossiers qui traînent depuis un long moment. M. le député de Fabre et vice-président de la commission des affaires sociales. (23 h 40)

M. Joly: Je pense que madame vient d'exprimer un voeu qui lui est sûrement, disons, commandé, peut-être, simplement par l'aspect des chiffres. Vous savez, on peut toujours ajouter de la dentelle aux chiffres, mais entre aujourd'hui et demain, quand on parle d'autonomie aussi, je pense que quand les régions ont la capacité d'être autonomes, et Laval l'a quand même prouvé sous plusieurs aspects, et on commence déjà à se démarquer de Montréal... Laval ne doit pas être à la remorque de Montréal.

Je pense que les gens de Laval, tout comme les gens de la région, disons, extérieure de la Montérégie...

M. Trudel: Oui, c'est bon. Mme Blackburn: C'est très bon.

La Présidente (Mme Marois): S'il vous plaît, il est un peu tard, mais on va essayer de continuer...

M. Joly: Concernant justement l'usine...

La Présidente (Mme Marois): ...à parler un à la fois.

M. Joly: ...d'épuration, ça serait de rendre un mauvais service à Montréal que de leur demander de traiter nos eaux usées. Aujourd'hui, peut-être que ça peut sembler rentable parce qu'il y a peut-être eu un manque de planification dans la façon de construire l'usine actuelle de Montréal mais, dans 5 ans, 10 ans d'ici, je pense qu'ils ne pourront pas donner le service dont les gens de Laval ont besoin et qu'ils requièrent. À ce moment-là, il faudrait encore penser à une autre alternative. C'est pour ça que je pense que, tant et aussi longtemps qu'il sera possible de prêcher l'autonomie de Laval et des régions, à ce moment-là on devrait favoriser ça.

Mme Harel: Ceci dit, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le député de Fabre et vice-président de la commission. Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maison-neuve.

Mme Harel: ...on pourrait certainement, avec le consentement du ministre et du député de Fabre, préciser, à l'article 31, au premier alinéa, le fait que Laval pourra compter sur une société régionale de développement de la main-d'oeuvre. Moi, je serais tout à fait favorable à ce qu'on puisse préciser les configurations géographiques des sociétés. C'est un sujet d'inquiétude qui est exprimé du fait qu'actuellement il y a une commission de formation professionnelle de la main-d'oeuvre qui couvre l'île de Montréal et Laval. Et c'est évidemment beaucoup trop vaste pour prendre en considération le marché de l'emploi et les problèmes de la main-d'oeuvre, dans chacune de ces grandes agglomérations.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le député.

M. Joly: Ce n'est pas simplement une question d'être vaste. Il faut regarder le tissu social qui existe aussi entre les deux régions.

Mme Harel: Je sens que vous avez déjà plaidé, vous, en privé, auprès du ministre.

M. Joly: Non, mais j'ai fait l'analyse. J'ai fait l'analyse, si vous voulez, des deux régions. J'ai regardé toutes les affinités qui pouvaient exister, mais j'ai aussi regardé la spécificité - d'ailleurs, c'est un mot que vous connaissez bien. Alors, Laval, c'est un petit peu ça. Par contre, regardons aussi la population de Laval qui ne le justifie peut-être pas tout à fait parce que, dans le fond, il faut quand même être objectif et être franc. On ne peut pas avoir, si vous voulez...

Mme Harel: C'est 300 000 personnes. Une voix: C'est 400 000...

M. Joly: Non, non. C'était 312 494, hier soir.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Les avez-vous comptés, M. le député?

Mme Blackburn: II en a peut-être ajouté un ou deux. Avec votre hôpital, il y a beaucoup de natalités.

M. Joly: Mais comme les Lavallois sont des gens actifs, d'ailleurs, c'est pour ça qu'on voudrait avoir un deuxième hôpital à Laval. Partant de là, c'est certain que Laval souhaite

être vraiment reconnue comme région au niveau des services qui sont actuellement discutés sur cette commission.

M. Trudel: Avec ses instruments de développement.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, voulez-vous intervenir immédiatement?

M. Bourbeau: Une belle convergence de vues entre les propos du député de Fabre et de la députée de Hochelaga-Maisonneuve, qui semblent tous les deux disposés à introduire, peut-être même, dans le projet de loi, des garanties pour que Laval puisse avoir sa propre société régionale. La députée de Maisonneuve faisait tantôt allusion à ça. Le problème, c'est que, pour en arriver là, il faudrait qu'on ait une loi qui permette ... des sociétés régionales.

M. Joly: M. le ministre, je suis ici...

M. Bourbeau: J'ai l'impression qu'on met un peu la charrue devant les boeufs.

M. Joly: Je suis drôlement surpris de voir qu'il y a encore de l'opposition dans l'Opposition.

M. Bourbeau: Parce que la députée de Maisonneuve propose déjà une société régionale à Laval. Alors, on dirait que dans son esprit...

M. Joly: Moi, je vois qu'elle est convaincue, sauf qu'elle a peut-être des objectifs qu'on ne peut pas identifier actuellement quant au déroulement de cette séance.

Mme Harel: M. le député de Fabre, il y a...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: ...un amendement qui est devant la commission. Je vous assure que cet amendement serait adopté... Je l'ai dit, d'ailleurs, au ministre, ce n'est pas d'aujourd'hui, ni d'hier, il le sait depuis plusieurs jours, je n'ose pas dire semaines, mais il le sait depuis un bon moment. Ce n'est pas possible d'imaginer avoir raison tout seul. Parce que le ministre nous a dit, tantôt: J'ai longuement réfléchi à cette question-là - et je le crois - et, finalement, j'accepte qu'il puisse y avoir un point de vue différent, mais je ne le partage pas. J'ai réfléchi à cette question-là et j'en arrive à une conclusion différente. Et il tire sa conclusion, à savoir que les sociétés régionales, dans le fond, n'ont pas d'existence légale, sont des filiales de la société mère, qu'il va y avoir une sorte de... On appelle ça conseil d'administration, mais ce n'est pas vraiment un conseil, ça va être une sorte de comité consul- tatif, avec un directeur général qui est un employé de la société mère. C'est cette structure-là qu'il nous propose.

Nous, l'amendement, c'est de dire qu'il y aurait des sociétés régionales qui auraient un statut de corporation au sens du Code civil et on n'en est même pas à demander un processus sélectif, mais on dit, oui, qu'on est prêt à voter la désignation du conseil d'administration, mais, évidemment, les pouvoirs de gestion de ce conseil. Qui va aller siéger? C'est ce que me disait le président de la CFP du Montréal métropolitain, qui va être transformée en société régionale, un homme en affaires, connu, qui a monté sa propre affaire et qui me disait: Pourquoi je viendrais, dans le fond, perdre du temps? Parce que ce sentiment, à tort ou à raison, quand il n'y a pas à prendre de décisions, les gens ont un sentiment que tout ça, c'est une perte de temps. Le ministre dit: J'ai réfléchi longuement. Moi, je lui dis: Ça se peut bien. Moi, je pense qu'il l'a fait en vase clos. Moi, je crois au processus parlementaire que l'on fait présentement. Ça peut avoir l'air de retarder les choses. Normalement, si ça avait fonctionné comme le calendrier normal l'aurait permis, on serait au mois de mai - fin mai ou quelque chose comme ça - parce que c'est un genre de législation qu'on ne vote pas en fin de session, à mon point de vue. On serait mi-mai ou fin mai, et il y aurait des tractations. Ce n'est pas possible. Je le dis bien honnêtement, je serais à la place du ministre, et je saurais que mon projet de loi a des chances de ne pas être adopte - un projet de loi auquel je tiens - pour certaines considérations qui sont légitimes... Ce n'est pas de la mathématique. On ne pas dire qui a tort, qui a raison, de façon absolue. Ce n'est pas deux plus deux font quatre. Il est possible qu'un point de vue soit le bon, mais, quoi qu'il en soit, quand, d'un côté, on a tous les partenaires... Moi, c'est ça qui m'a surprise, parce qu'au départ ce n'était pas évident que tous les partenaires allaient adopter ce point de vue là, y compris le Conseil du patronat. C'était loin d'être évident, je vous le garantis, au mois de février dernier. Et même l'AMQ, l'Association des manufacturiers, M. Le Hir, dans la lettre qu'il écrit, la seule réserve qu'il émet concernant le projet, c'est celle concernant la régionalisation. Ça ne lui semble pas, à lui, suffisant pour retarder l'adoption du projet de loi. Mais c'est un point de vue qui est partagé.

À partir du grand colloque sur la décentralisation qui s'est tenu à Québec, les 7, 8 et 9 mai, il y a donc, à l'instigation de l'Union des municipalités régionales de comté, et ça a été finalement appuyé...

La Présidente (Mme Marois): C'était au début juin, non?

Mme Harel: Les 7, 8, 9 juin, excusez-moi.

La Présidente (Mme Marais): Oui.

Mme Harel: Ça été, finalement, appuyé par l'ensemble de tous les partenaires, appuyé par les centrales, y compris la FTQ qui n'en fait peut-être pas une condition d'adoption, mais le ministre sait très bien qu'à ce stade-ci, normalement, l'Opposition qui fait en sorte que le projet ne sera pas adopté - c'est ça qu'il faut comprendre - devrait recevoir des coups de fil pressants de ceux qui tiennent au projet de loi. Vous ne serez pas surprise, si je vous dis, Mme la Présidente, que ce n'est pas le cas. Il n'y a personne qui se bouscule pour dire: On le veut absolument. Non, pas du tout.

Une voix: La vérité. (23 h 50)

Mme Harel: La vérité vraie, absolument. Il y a essentiellement - et c'est un secret de Poli-chelle, on peut se le dire - il y a essentiellement l'AMQ et la FTQ qui le souhaitent. Ça, le ministre le sait.

M. Bourbeau: La CSN, non?

Mme Harel: Mais la FTQ le souhaite assez pour appeler, et l'AMQ le souhaite assez pour l'écrire. Il y a une différence.

M. Bourbeau: Et la CSN?

Mme Harel: En ce qui concerne tous les autres partenaires...

M. Bourbeau: Et la CSD?

Mme Harel: ...la CSN, la CEQ... La CSD, je n'ai d'aucune façon eu d'autres points de vue que celui qu'ils ont exprimé en communiqué de presse, il y a un mois maintenant, où ils réclamaient des modifications. Mais si on parle autant de la CEQ que de la CSN, si on parle de l'ensemble des organisations, la Fédération des commissions scolaires, la Fédération des cégeps, si on cause à propos de tout ce qui regroupe des associations de développement régional, évidemment, ai-je besoin d'insister que, du côté des employeurs, c'est une fin de non recevoir, autant du Conseil du patronat, des chambres de commerce du Québec, des chambres de commerce du Montréal métropolitain.

M. Bourbeau: Quand vous pariez des chambres...

La Présidente (Mme Marois): Pardon? Excusez-moi. Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...des collèges et des commissions scolaires, ils ne sont pas contre la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Ils demandent plus de place au conseil, mais ils ne sont pas contre. Ils sont en faveur, si ma mémoire est fidèle.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: C'est-à-dire, Mme la Présidente, que c'est bien évident que...

M. Bourbeau: Oui, oui, ils veulent plus de place au conseil, c'est tout.

Mme Harel: C'est sûr que je peux, si vous voulez...

La Présidente (Mme Marois): On va laisser la députée exprimer son point de vue. Vous pourrez intervenir à nouveau, M. le ministre, sans problème.

M. Bourbeau: Non, non, mais quand même...

Mme Harel: De toute façon, j'ai apporté tous les points de vue de ces groupes. Je peux vous dire par ailleurs, Mme la Présidente, qu'ils sont très sévères sur les modalités de la proposition contenue dans le projet de loi 408 - très sévères. Je pourrais vous faire lecture du point de vue de Mme Drouin, de la Fédération des commissions scolaires, du point de vue de la fédération des collèges. La question est que cette structure-là ne semble pas leur convenir. Alors, pourquoi, nous, à ce moment-ci, on accélérerait l'adoption d'une structure qui, à sa face même, ne convient pas à une grande majorité de ceux qui devraient siéger sur la même structure? Et cette structure est censée en être une de partenariat et de concertation. Alors, on se demande pourquoi on ne tiendrait pas plus à leur point de vue.

Sur la question des régions, c'est central. S'il y a une question qui fait l'unanimité, c'est celle-là. Pourquoi ça a l'air à tant résister du côté du ministère, et ça semble un fait d'évidence qui s'impose de soi pour l'ensemble du Québec? C'est quand même intéressant de voir qu'il s'est dégagé ce consensus très large. Ça arrive quand même à l'occasion, mais ça n'arrive pas si souvent sur des sujets qu'au Québec il y ait ce consensus très, très, très large. C'est un consensus qui rejoint, je le disais, mais je peux le répéter, l'UPA, l'Union des artistes, le Mouvement Desjardins, le Conseil du patronat, l'Association des manufacturiers, la Fédération des commissions scolaires, la Fédération des cégeps, la Conférence des CR3SS, la FTQ, la Fédération des CLSC, la CSN et la CEQ qui l'ont écrit en appui à la démarche de l'UMRCQ. Ce n'est pas rien, ça, Mme la Présidente, dans la balance. Ce que le ministre met dans la balance, c'est qu'il a réfléchi à tout ça avec sa technostructure qui, elle, dit non. Je veux bien, mais ça m'apparaît disproportionné. C'est la raison

pour laquelle, Mme la Présidente, il serait vraiment souhaitable que nous nous quittions, ce soir, sans avoir disposé de l'amendement pour permettre au ministre d'y réfléchir. Qui sait, la nuit portant conseil...

La Présidente (Mme Marois): La nuit portant conseil.

Mme Harel: ...ses collègues, peut-être, réfléchissant de concert avec le ministre, si, demain, en prenant en considération le bien-fondé de l'adoption de son projet de loi, parce que c'est à ça, je crois, que nous convie le ministre... Est-ce qu'il le veut tel quel ou s'il le veut? Il y a une différence, une distinction à faire, je pense. Si c'est tel quel, à prendre ou à laisser, bien, là, il faut qu'il comprenne qu'il n'y a pas de raison pour que, nous, on achète ça, là. Il n'y a aucune raison.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. À ce moment-ci, on sait qu'il reste a peine quelques minutes pour que nous ajournions nos travaux; est-ce que le ministre aurait un commentaire ou deux avant que nous procédions à cet ajournement?

M. Bourbeau: Ce que je pourrais dire, c'est que devant les demandes répétées de la députée de Hochelaga-Maisonneuve, j'ai fait étudier, au cours des derniers jours, la possibilité de maintenir la même structure, mais tout en permettant aux sociétés régionales d'être incorporées en vertu de la Loi sur les compagnies, ou, enfin, d'avoir une personnalité juridique. Et le résultat de ces recherches-là, c'est qu'il est impossible de modifier le projet de loi de la façon dont on parle. Il faudrait refaire un projet de loi nouveau parce qu'on ébranle la structure juridique du projet de loi en procédant de la sorte. La loi n'a pas été conçue ni écrite dans un sens comme celui-là. Il faudrait probablement modifier des dizaines et des dizaines d'articles avec les dangers que cela peut comporter de créer des situations équivoques ou même carrément inexplicables. Et on ne pourrait pas, malgré toute la bonne volonté qu'on veut y mettre, conserver à la Société cette fluidité dans l'administration en précisant, comme on le fait présentement, ou on voudrait le faire, que les sociétés ont leur propre personnalité juridique. Alors, devant l'impossibilité d'y arriver sans pervertir le projet de loi lui-même, j'ai renoncé à la tentative de le faire, mais je dois dire que j'y ai songé pendant un certain temps au cours des derniers jours. Et je dois reconnaître qu'il est impossible de le faire dans l'état actuel des choses.

La Présidente (Mme Marois): Bon, alors c'est une marque d'une certaine bonne volonté de la part du ministre. Oui, il vous resterait une minute ou deux pour poser une question au ministre. D'autre part, je voudrais dire, pour fins de mémoire et pour la suite des travaux, si on reprenait demain matin ou demain après-midi, qu'il restait six minutes à l'intervention de la députée de Hochelaga-Maisonneuve sur son projet d'amendement.

M. Trudel: M. le ministre, est-ce que vous êtes en train de nous dire qu'après réflexion et examen, s'il eût été possible de le faire, c'était votre volonté de donner une personnalité juridique aux organismes régionaux chargés du développement de la main-d'oeuvre? Si vous faites abstraction de ce qui est l'économie générale de votre première idée de projet de loi qui est devant nous, est-ce que c'était devenu votre conviction que nous aurions pu procéder avec cette idée d'avoir une personnalité juridique des organismes? Vous en étiez convaincu, non seulement en vertu de l'argumentation de ma collègue, mais après vos analyses?

M. Bourbeau: C'est-à-dire que...

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...s'il n'avait été que de consentir une personnalité juridique sans perdre le bénéfice des avantages de la gestion telle qu'elle a été prévue, de l'administration de la Société qui a été prévue, j'aurais pu essayer de concilier le désir de former des sociétés avec la personnalité juridique tout en conservant les bienfaits d'une centralisation pour les fins administratives. Mais c'est impossible. On ne peut pas à la fois être décentralisé et centralisé.

M. Trudel: Voilà!

M. Bourbeau: On ne peut pas à la fois être enceinte et non.

La Présidente (Mme Marois): Ou être enceinte à moitié.

M. Bourbeau: Alors, à ce moment-là, on m'a dit: On ne peut pas procéder comme ça. Si on procède comme ça, il faut passer carrément à des sociétés décentralisées. Donc, devant l'impossibilité... Encore là, c'était un peu comme la quadrature du cercle. Alors, j'ai été obligé d'y renoncer.

M. Trudel: On reprendra tout ça parce que c'est déjà un progrès.

La Présidente (Mme Marois): Alors, nous ajournons sine die.

(Fin de la séance à minuit)

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