L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le mercredi 6 décembre 1995 - Vol. 34 N° 84

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures six minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mesdames, messieurs les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais qu'on appelle l'article d du feuilleton.


Projet de loi 120

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'article d du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur la Régie du logement afin de permettre au gouvernement de prescrire l'utilisation obligatoire d'un formulaire de bail ou d'un formulaire d'écrit en cas de bail verbal. Ce projet de loi modifie également le Code civil du Québec au même effet et contient des modifications de concordance.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, qu'on appelle l'article a du feuilleton.


Projet de loi 121

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi 121, Loi modifiant les lois constitutives des communautés urbaines et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, ce projet de loi modifie les lois constitutives des communautés urbaines afin, principalement, d'y supprimer divers contrôles ministériels et d'assouplir certaines procédures comme cela avait été fait précédemment pour les municipalités régies par la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec.

Le projet de loi accorde également aux trois communautés un pouvoir général de tarification pour financer les biens et services et activités qu'elles fournissent ou exercent. Il autorise, de plus, les communautés à conclure avec le gouvernement une entente ayant pour objet la prise en charge, à titre d'expérience-pilote, de responsabilités gouvernementales susceptibles d'être décentralisées.

Par ailleurs, le projet de loi modifie les règles d'adjudication des contrats de la Communauté urbaine de l'Outaouais afin de les rendre similaires à celles régissant les autres communautés. Le projet de loi élargit, en outre, les pouvoirs de la Communauté urbaine de Montréal en matière d'assainissement des eaux et précise certaines expressions employées dans la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal.

Enfin, le projet de loi permet aux communautés urbaines ainsi qu'aux corporations municipales et intermunicipales de transport, à la Société de transport de la ville de Laval et à la Société de transport de la Rive-Sud de Montréal de publier une demande de soumissions publiques relatives à un contrat de construction comportant une dépense supérieure à 100 000 $ dans un système électronique d'appel d'offres.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je vous prierais d'appeler l'article e du feuilleton.


Projet de loi 118

Le Président: À l'article e du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor présente le projet de loi 118, Loi modifiant la Loi sur les services gouvernementaux aux ministères et organismes publics. M. le ministre.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur les services gouvernementaux aux ministères et organismes publics afin de permettre au ministre responsable de l'application de cette loi d'emprunter, auprès du ministre des Finances, les sommes prises sur le Fonds de financement institué en vertu de la Loi sur l'administration financière.

(10 h 10)

Le projet de loi permet également au ministre responsable de l'application de la Loi sur les services gouvernementaux aux ministères et organismes publics, pour les fins du service aérien gouvernemental, sur autorisation du gouvernement et aux conditions que celui-ci détermine, de former un fonds d'amortissement à partir des sommes constituant un fonds spécial. Ce fonds d'amortissement aura pour objet d'acquitter le capital et les intérêts de tout emprunt remboursable sur ce fonds spécial ou toute autre obligation prévue à un contrat relatif à un bien ou un service financé par ce fonds spécial.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Également, je voudrais que vous appeliez l'article f du feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi 119

Le Président: À l'article f du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor présente le projet de loi 119, Loi modifiant les régimes de retraite des secteurs public et parapublic et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi donne suite à certaines propositions contenues dans la lettre d'intention du gouvernement annexée aux conventions collectives dans les secteurs public et parapublic et concernant les principaux régimes de retraite applicables aux employés visés par ces conventions. Il donne également suite à certaines propositions formulées, notamment par le comité de retraite.

Concernant les propositions contenues dans la lettre d'intention du gouvernement, le projet de loi prévoit l'introduction, dans la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, de deux nouveaux critères permanents d'admissibilité à la retraite sans réduction actuarielle. Ainsi, une pension sera accordée à tout employé qui a au moins 35 années de service et 55 ans ou qui a au moins 20 années de service et 60 ans.

Il abroge aussi le délai de 180 jours prévu dans cette loi pour la personne qui prend sa retraite en vertu du critère de 55 ans d'âge. Cette loi est également modifiée afin de remplacer par 1/3 de 1 % le pourcentage de réduction actuarielle de 0,5 % actuellement applicable à l'égard de la pension d'un employé qui est admissible à une pension réduite. Le projet de loi modifie en outre cette loi afin de permettre au gouvernement de prévoir par règlement diverses mesures visant notamment à favoriser la prise de la retraite à l'égard de personnes qui appartiennent à une catégorie ou sous-catégorie déterminée par ce règlement.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit que les participants au régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics et au régime de retraite de certains enseignants qui atteignent la limite de 35 années de service cessent de cotiser à leur régime tout en maintenant leur participation. Enfin, le projet de loi modifie la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, la Loi sur le régime de retraite des enseignants et la Loi sur le régime de retraite des fonctionnaires afin de prolonger de trois ans à cinq ans la durée maximale d'une entente concernant le programme de mise à la retraite de façon progressive.

En ce qui a trait aux autres modifications, le projet de loi permettra, pour l'ensemble des régimes de retraite administrés par la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, qu'un participant de même que son conjoint puissent obtenir un relevé des droits accumulés au titre de l'un de ces régimes dans le cadre d'une médiation effectuée préalablement à des procédures en matière familiale. Le projet de loi apporte également certains ajustements aux modalités du calcul de la coordination de la pension accordée en vertu du régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, du régime de retraite des enseignants et du régime de retraite des fonctionnaires avec celle accordée en vertu du régime de rentes du Québec.

Enfin, le projet de loi comporte des modifications visant à faciliter l'administration des régimes de retraite ainsi que des modifications de nature technique ou de concordance.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.


Dépôt de documents

Nous en sommes au dépôt de documents. M. le premier ministre.


Rapport annuel du ministère du Conseil exécutif

M. Parizeau: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1994-1995 du ministère du Conseil exécutif.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Toujours au dépôt de documents, M. le ministre de l'Éducation.

M. Chevrette: M. le Président, ce sera remis à demain.

Le Président: Donc, M. le ministre, maintenant, de l'Environnement et de la Faune.


Rapports annuels de la Société québécoise de récupération et de recyclage et de la Fondation de la faune du Québec

M. Brassard: M. le Président, je voudrais déposer deux rapports, d'abord celui de la Société québécoise de récupération et de recyclage, 1994-1995, et celui de la Fondation de la faune du Québec pour l'exercice financier qui a pris fin le 31 mars 1995.

Le Président: Ces documents sont déposés.

Mme la ministre déléguée au Tourisme.


Rapport annuel de la Société des établissements de plein air du Québec

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1994-1995 de la Société des établissements de plein air du Québec.

Le Président: Document déposé.

Alors, il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.


Dépôt de pétitions

Nous en sommes au dépôt de pétitions. M. le député de Marguerite-D'Youville.


Parachever la voie réservée au transport en commun sur la route 138, de Kahnawake à Châteauguay

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1 000 pétionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Châteauguay.

Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que l'aménagement des voies réservées aux véhicules de transport en commun fait partie de la politique de transport urbain pour la région de Montréal;

«Considérant qu'une voie réservée aux véhicules de transport en commun leur permet d'accéder plus rapidement à Montréal via le pont Mercier;

«Considérant que la voie réservée sur la route 138, pour accéder au pont Mercier est déjà complétée sur une longueur de 1,8 km;

«Considérant que le pont Mercier est surchargé par le passage quotidien de 80 000 automobilistes et que l'avenir est au transport en commun;

«Considérant que le parachèvement de la voie d'accès contribuerait à augmenter l'efficacité du transport en commun et, par conséquent, son utilisation;»

L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés et soussignées, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministère des Transports afin que l'aménagement de la voie réservée au transport en commun sur la route 138 soit parachevée de Kahnawake jusqu'au boulevard Saint-Francis, à Châteauguay.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une question de privilège ou sur une question de fait personnel.


Questions et réponses orales

Nous en sommes à la période de questions et de réponses orales. Pour une question principale, M. le député de Châteauguay.


Allégations de conflits d'intérêts au Secrétariat à la restructuration

M. Fournier: Merci, M. le Président. Dans le dossier de favoritisme au Secrétariat à la restructuration, l'ex-ministre à la Restructuration a déclaré hier que les responsabilités dans le processus d'octroi des contrats à son Secrétariat ne relevaient pas de lui mais bien, premièrement, du secrétaire général associé, Pierre Campeau, nommé par le premier ministre; deuxièmement, du sous-ministre du premier ministre, M. Louis Bernard, évidemment nommé par le premier ministre; et du Conseil du trésor alors présidé par l'actuelle ministre des Finances et dont l'actuel président était alors le vice-président.

M. le Président, il y a une date importante à retenir, il s'agit du 1er juin où une rencontre a eu lieu, impliquant trois directeurs du Secrétariat à la restructuration, et le sous-ministre du premier ministre, M. Louis Bernard.

On se souviendra, selon ce que nous en disait l'ex-ministre à la Restructuration en septembre dernier, que les allégations de conflits d'intérêts soulevées par les trois directeurs s'étaient révélées, selon Louis Bernard, à l'époque, sans fondement. Pourtant, le Vérificateur général nous apprend que les allégations étaient fondées, mais que les seules suites avaient été de congédier les trois directeurs qui avaient révélé le favoritisme.

M. le Président, pour que la responsabilité ministérielle – base de notre système politique – et le lien de confiance signifient encore quelque chose, le premier ministre peut-il expliquer pourquoi il a accepté d'écarter les trois directeurs qui révélaient les anomalies, pour ainsi perpétuer les irrégularités? Comment ne pas y voir un effet de l'obsession de la séparation?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, nous sommes en face d'un rapport du Vérificateur général qui révèle une situation très grave, très sérieuse. On se comprend bien, ce n'est pas mineur, ça: ça mine, à sa base, le lien de confiance qu'une société doit avoir avec son administration. On ne peut pas laisser ça le moindrement de côté et ce n'est pas – comment dire – ce n'est pas par des allusions ou des insinuations qu'on va faire avancer ce dossier-là comme il doit avancer. Et je voudrais en dire... je voudrais expliquer comment ce dossier-là, à l'heure actuelle, est en train d'avancer. C'est passablement plus sérieux que de commencer à interpréter des renvois de personnels qui se sont passés il y a quelques mois, à partir de déclarations qu'aurait faites ou que n'aurait pas faites M. Louis Bernard.

Là, je veux juste ouvrir la parenthèse un instant, parce qu'il y a quand même des limites de mettre en cause l'intégrité de quelqu'un, M. Louis Bernard, qui a été nommé par M. Bourassa – on va se parler d'intégrité, là – pour présider un groupe de travail, le 7 novembre 1989, histoire d'aller voir ce qui s'était passé dans le dézonage agricole à Laval, et l'affaire Tommy D'Errico. Ça ne vous rappelle rien? M. Bourassa avait demandé à Louis Bernard d'aller vérifier et d'aller enquêter là-dessus. L'intégrité de Louis Bernard n'est pas en cause et ce n'est pas parce qu'il ne peut pas se défendre en cette Chambre qu'on doit accepter des insinuations pareilles!

Des voix: Bravo!

(10 h 20)

M. Parizeau: Bon, revenons au fond de la question, maintenant, M. le Président. Le Vérificateur général présente, comme c'est assez courant à ce qu'on me dit, au secrétaire général de l'Exécutif, le 22 novembre, un exemplaire, une copie préliminaire de son rapport pour validation – il paraît que c'est courant. Dès la vue de ça, le secrétaire général du Conseil exécutif s'adresse au ministère de la Justice – il n'y a pas de contentieux à l'Exécutif – et demande avis sur ce qu'il doit faire, dans la mesure où le rapport final qui sortirait dans quelques jours consacrerait tout ce qu'il y a dans le rapport préliminaire. Est-ce qu'il y a des gens à suspendre, et comment le fait-on en vertu de la loi? Est-ce que le gouvernement peut récupérer des sommes? Quel chemin doit-il suivre? Y a-t-il dans le rapport du Vérificateur général quoi que ce soit qui pourrait mener à des enquêtes criminelles et à des poursuites au criminel? Le ministère de la Justice va répondre dans les jours qui suivent et indiquer – j'y reviendrai tout à l'heure – qu'il n'y a pas, dans l'état actuel du rapport du Vérificateur général, matière à poursuite au criminel. Pas encore. Il faudrait avoir davantage de renseignements. Le rapport du Vérificateur, le rapport final, va sortir le 29...

Le Président: En conclusion, s'il vous plaît.

M. Parizeau: ...c'est ça, le 29 novembre. Le 29 novembre, le secrétaire de l'Exécutif – M. Michel Carpentier, donc – me dit: Donnez-moi une couple de jours pour passer à travers cette version définitive et je vous ferai rapport. Effectivement, il me fait rapport, a suspendu deux fonctionnaires sur la base des recommandations... Il y en a qui disent: Pourquoi est-ce que vous avez procédé comme ça, pourquoi vous n'avez pas suspendu sans solde? Parce que le ministère de la Justice nous a indiqué que les deux fonctionnaires en question sont suspendus avec solde, ont 15 jours pour répondre à ce qu'il y a dans le rapport du Vérificateur général et, alors, après ça, d'autres mesures peuvent être prises.

D'autre part, il constitue un comité d'examen du dossier avec quelqu'un du Contrôleur des finances, du ministère de la Justice et de l'Exécutif. Il est clair que le Vérificateur n'en a pas assez. Le mandat du Vérificateur a été d'examiner les rapports avec le dénommé Lafrance avec les contrats. Il est clair que l'enquête du Vérificateur débouche sur d'autres contacts...

Le Président: En conclusion.

M. Parizeau: ...et il est donc normal que, immédiatement après avoir suspendu les gens, créé ce comité, on développe un mandat nouveau pour le Vérificateur de façon à – comment dire – élargir ça, à ce qu'il puisse regarder tous les contrats. J'aurai l'occasion de déposer ce nouveau décret au Conseil des ministres tout à l'heure, après la période des questions.

Le Président: En conclusion, s'il vous plaît.

M. Parizeau: M. le Président, j'aimerais, de consentement mutuel, qu'on me donne quelques instants de plus pour examiner cette question des poursuites au criminel et de l'intervention de la police, ou je peux le faire en complémentaire, comme on voudra.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Moi, je tiens à assurer le premier ministre que nous prendrons le temps de poser toutes les questions et qu'il aura le temps, comme vous le lui avez accordé, de répondre complètement.

Le Président: Alors, pour une question... À ce moment-ci, je suggère qu'on passe à une question complémentaire. M. le député de Châteauguay, pour une question complémentaire.

M. Fournier: Merci, M. le Président. En question principale, si vous me permettez.

Le Président: En principale.


Responsabilité du premier ministre quant aux irrégularités survenues au ministère du Conseil exécutif

M. Fournier: Tout en rappelant que je suis heureux de constater que le premier ministre accepte que la chose est très sérieuse, et je lui rappelle que c'est bien sûr grâce à nos interventions s'il y a eu effectivement enquête du Vérificateur.

M. le Président, considérant que le premier ministre a nommé le sous-ministre Campeau, qu'il a nommé le sous-ministre Bernard, qu'il a nommé la présidente du Conseil du trésor de l'époque et le ministre à la Restructuration, et compte tenu que toutes les irrégularités se sont produites au ministère du Conseil exécutif dont il est le grand responsable, le premier ministre savait ou aurait dû savoir que, dès décembre 1994, deux collaborateurs de la Restructuration contestaient le mode d'attribution des contrats. Le premier ministre savait ou aurait dû savoir que, le 13 février 1995, un coordonnateur a démissionné, car il trouvait conflictuelle la nomination de Claude Lafrance. Le premier ministre savait ou aurait dû savoir, en juin, que son propre sous-ministre avait écarté les trois directeurs qui avaient révélé les conflits d'intérêts, tout en ne changeant rien à une situation pourtant vivement contestée par le Vérificateur général. Le premier ministre savait, M. le Président, ou aurait dû savoir, à tout moment, de janvier à septembre, par la présidente du Conseil du trésor de l'époque ou par le vice-président du Conseil aujourd'hui président du Conseil du trésor, que, de façon systématique, aucun mécanisme de contrôle ne s'appliquait au Secrétariat à la restructuration.

Le Président: Votre question, s'il vous plaît.

M. Fournier: Question: Le premier ministre, qui savait ou aurait dû savoir, peut-il nous dire si son inaction et son silence résultent d'un aveuglement volontaire pour cause référendaire ou s'il était d'accord, depuis le début, avec une absence totale de contrôle?

Des voix: Ah!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: Ce genre d'insinuation ne mènera...

Des voix: Ah!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! On a pu entendre le député de Châteauguay poser sa question dans le silence. J'aimerais qu'on puisse écouter la réponse dans le silence également. M. le premier ministre.

M. Parizeau: Il ne peut pas y avoir de silence de l'autre côté: leur siège est fait. Des insinuations prennent la forme d'accusations. C'est basé sur certains éléments qui, à leur face même, sont faux. C'est moi ou mon secrétaire à l'Exécutif qui aurait mis à la porte les trois fonctionnaires? Allons donc! Personne ne dit ça, bien, sauf le député de Châteauguay. Mais, c'est nulle part, ça. C'est nulle part. Non. Nous sommes en face d'une enquête qui doit se poursuivre et aller jusqu'au bout et faire toute la lumière.

La question s'est posée à savoir très vite, depuis 48 heures, si on met la police là-dedans, tout de suite. Le ministère de la Justice consulté est d'un avis différent. Et comme il est habituel qu'on ne rende pas publics les avis juridiques dans des causes comme celles-là, le ministère de la Justice, le sous-ministre de la Justice me suggère plutôt de faire état du document suivant qu'il a préparé à mon intention et à l'intention de cette Chambre. Je le déposerai dans un instant, si on m'y autorise. Et voici ce que le sous-ministre de la Justice me dit ou envoie à mon secrétaire général, M. Carpentier: «Tel que j'ai déjà eu l'occasion de vous en informer, nous avons fait procéder à l'examen, par la direction des affaires criminelles du ministère de la Justice, du rapport d'enquête du Vérificateur général sur l'octroi par le Secrétariat à la restructuration de contrats de service. Après lecture et analyse des documents tels que soumis et à la lumière du droit en pareille matière, la direction des affaires criminelles ne recommande pas l'implication des forces policières dans l'état actuel du dossier.»

C'est pour cela que ce matin, à la fin de l'avant-midi, je vais proposer au Conseil des ministres un décret qui élargit le mandat du Vérificateur général, et, dès que vont apparaître les conditions nécessaires ou les renseignements suffisants pour mettre la police là-dedans, bien sûr, on met la police là-dedans. Est-ce que ça mènera – comment dire – à des causes d'ordre criminel? On ne peut pas l'affirmer pour le moment, mais, moi, je n'exclus rien du tout. On va aller au fond de cette affaire-là. Toute la lumière va être faite. C'est beaucoup trop grave, encore une fois, pour non seulement l'intégrité, mais la réputation d'intégrité de l'administration du Québec sous toutes ses formes pour qu'on puisse passer quoi que ce soit de ce dossier sous silence. Merci, M. le Président.

(10 h 30)

Le Président: M. le député de Frontenac, pour une question principale ou complémentaire.

M. Lefebvre: Une question additionnelle, M. le Président, au premier ministre. M. le Président, est-ce que le premier ministre est en train de nous dire qu'il a requis une opinion du Procureur général et ministre de la Justice avant même de soumettre les faits au ministre de la Sécurité publique, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: La question m'estomaque, venant d'un ancien ministre de la Justice. Le ministre de la Justice est le jurisconsulte du gouvernement. C'est le conseiller de l'Exécutif en ces matières. Alors, on reçoit un rapport du Vérificateur général, on le transmet à la justice et on leur demande: Jusqu'où peut-on aller avec ça sur le plan de poursuites à intenter? C'est comme ça. Et, alors, le ministère de la Justice donne un avis, dont je parle aujourd'hui.

Effectivement, M. le Président, puisque... Continuons dans cette voie. Le ministre de la Sécurité publique, j'ai discuté avec lui de ça. Est-ce que – j'allais dire indépendamment de l'avis du ministère de la Justice – on devrait tout de suite envoyer la police? D'après ce que je comprends de ceux qui connaissent ces questions, c'est encore un peu tôt. Il faut en savoir davantage, il faut étoffer davantage le dossier.

Ce que je cherche à faire, M. le Président, c'est essentiellement ceci – je pense que tous ceux qui comprennent un peu le fonctionnement de notre machine vont saisir ce que je veux dire. Je ne voudrais pas qu'à cause d'irrégularités, de quelque ordre que ce soit, dans les démarches entreprises aujourd'hui, demain, la semaine prochaine, on fasse en sorte que, même sans l'avoir voulu, des causes puissent être renvoyées ou puissent ne pas aboutir, pour toute espèce de vice de forme, devant les tribunaux. On va aller jusqu'au bout de cette affaire-là, on va procéder exactement dans les formes, mais il n'est pas question ou de cacher ou de retarder quoi que ce soit.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup, pour une question complémentaire.

M. Dumont: Merci, M. le Président. Alors, est-ce que le premier ministre peut assurer cette Chambre qu'il a l'intention de prendre toutes les mesures pour aller jusqu'à assurer le remboursement des sommes versées indûment, afin d'éviter qu'on augmente la taxe de vente de 1 % pour financer des contrats attribués en dehors des règles, pour des travaux qui, dans certains cas, n'ont même pas eu lieu?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: Ce n'est pas tout à fait les mêmes montants, là. Ça fait un peu pâté de cheval et d'alouette, là: un cheval, une alouette. Les montants ne sont pas tout à fait du même ordre. Ce qui ne veut pas dire, cependant, que nous n'avons pas l'intention de récupérer les sommes qui sont dues au Trésor québécois. Ça a été une des trois premières interrogations du secrétaire général de l'Exécutif, au ministère de la Justice: comment peut-on récupérer les sommes en question? Bien sûr, ça va être un des éléments majeurs du dossier. Là encore, cependant, il faut, je pense, que le Vérificateur général aille plus loin dans son étude pour qu'on soit davantage éclairés sur justement comment procéder dans des voies comme celle-là.

Le Président: M. le député de Châteauguay, toujours en complémentaire? M. le député de Châteauguay, en complémentaire?

M. Fournier: Oui, en complémentaire, M. le Président. Est-ce que le premier ministre est en train de nous dire, en nous expliquant les démarches qui s'en viennent et en refusant de parler de ce qui s'est passé depuis un an, est-ce qu'il est en train de nous dire qu'il refuse de reconnaître sa responsabilité ministérielle à l'égard du ministère du Conseil exécutif, dont il est le grand responsable, et où se sont passées toutes ces irrégularités?

Une voix: Exact.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, j'ai passé assez de temps en cette Chambre, d'abord, pour non seulement savoir à quel point la responsabilité ministérielle est un des éléments majeurs de notre système, mais à apprendre aussi qu'on est responsable de tout, y compris de ce qu'on ne sait pas. C'est à la fois une certaine injustice, mais la gloire du système parlementaire dans lequel nous vivons.

Le Président: M. le député de l'Acadie, pour une question principale.

Une voix: Les poubelles! C'est l'heure des poubelles!


Responsabilité du Conseil du trésor quant au respect des procédures d'appels d'offres dans l'attribution de contrats de recherche

M. Bordeleau: Principale, M. le Président. Le triste passage du ministre à la Restructuration fait naître des inquiétudes sérieuses sur la façon dont le Conseil du trésor s'est acquitté de ses responsabilités. Rappelons ici, M. le Président, que l'actuelle ministre des Finances avait alors la responsabilité de la présidence du Conseil du trésor, que l'actuel président du Conseil du trésor en était le vice-président et que les ministres de l'Environnement, de la Sécurité publique et de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie en étaient membres.

Dans un communiqué de presse émis hier, l'ex-ministre à la Restructuration confirme la responsabilité directe du Conseil du trésor dans ce fouillis scandaleux d'utilisation des fonds publics, mandat confié...

Une voix: Bon, bon, bon!

Le Président: À l'ordre! J'en appelle à votre mémoire quant à l'article 77 du règlement qui stipule notamment que les questions ne peuvent être formulées de manière à susciter un débat. Alors, je pense que le libellé même de votre question amène effectivement un débat. Je vous demanderais de bien vouloir, s'il vous plaît, tempérer les propos. Oui, M. le leader de l'opposition officielle. À l'ordre!

M. Paradis: Sur la question de règlement, pour vous soumettre simplement que les propos utilisés par le député de l'Acadie n'ont, en aucun temps, dépassé, sur le plan des décibels ou de la mesure, les propos utilisés par le premier ministre.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: On ne jouera pas au fin-fin. Vous avez décidé que les injures et les accusations n'étaient pas de mise en cette Chambre, qu'ils se conforment donc! C'est tout.

Le Président: Alors, s'il vous plaît, M. le député de l'Acadie, en ayant en tête les dispositions de l'article 77.

M. Bordeleau: Alors, je disais donc, M. le Président, que l'ex-ministre confirme la responsabilité directe du Conseil du trésor dans ce fouillis exemplaire d'utilisation des fonds publics: mandats confiés sans analyse préalable des besoins, travaux entrepris avant signature des contrats, paiements effectués sur la base d'informations incomplètes concernant le temps travaillé, travaux de recherche payés alors que rien n'a été fait, dépassements des tarifs maximaux permis par le Conseil du trésor.

Le Président: Question, s'il vous plaît!

M. Bordeleau: La question, M. le Président: Comment l'ex-présidente du Conseil du trésor et actuelle ministre des Finances peut-elle expliquer que, subordonnant la saine gestion des fonds publics à l'empressement référendaire ou à la cause de l'indépendance, elle ait accepté sans s'objecter que le Secrétariat à la restructuration distribue, de façon continue et à répétition, des contrats de recherche sans aucun respect des procédures normales d'appels d'offres?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: Avant que ma collègue la ministre des Finances ne réponde à cette question, je voudrais, justement parce que je suis responsable dans le sens où on l'entendait tout à l'heure, dire ceci au député de l'Acadie: Il ne s'agit pas d'un fouillis, ce qui apparaît dans le rapport du Vérificateur, ce n'est pas un fouillis, c'est une violation claire, évidente de tout engagement qui évite que l'administration soit en conflit d'intérêts. On a clairement violé cette règle.

Le problème consiste à savoir si, au fond, il y a un système de fraude qui s'est organisé. Il faut aller au fond de cette question-là. Ce ne sont pas des choses qu'un gouvernement accepte de gaieté de coeur dans son administration. On ne peut pas imaginer que, invariablement, la perfection va régner. Mais, quand on trouve un cas comme celui-là, il faut aller jusqu'au bout. Mais ne pas confondre, ce n'est pas un fouillis, hein! C'est peut-être une tentative de fraude, en tout cas un système qui viole clairement les clauses... qui sont clairement un cas de conflit d'intérêts.

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Marois: Alors, M. le Président, comme le premier ministre l'a mentionné, le Vérificateur général se verra confier un mandat lui permettant d'aller plus loin dans l'examen des contrats octroyés au Secrétariat à la restructuration. Dans cette vérification, s'il y avait un constat à l'effet qu'il y a eu erreur de la part du Conseil du trésor, je souhaiterais qu'à ce moment-là il nous fasse des recommandations pour que nous corrigions de telles erreurs.

(10 h 40)

Cependant, M. le Président, nous disposons actuellement, pour l'octroi de contrats, d'un très bon encadrement et législatif et réglementaire. Les ministères et les organismes publics sont les premiers responsables du respect de ces règles dans leur gestion contractuelle. Cependant, le Conseil du trésor est habilité à autoriser des dérogations à ces règles pour des motifs d'intérêt public, M. le Président. Pour pouvoir procéder selon un processus dérogatoire, les ministères et organismes doivent, au préalable, en obtenir l'autorisation. Cependant, dans la plupart, effectivement, des cas relevant du Secrétariat à la restructuration, les demandes d'autorisation n'ont pas été formulées au préalable. Nous n'avons donc pas fait de recommandation positive, M. le Président, mais nous avons autorisé, cependant, les paiements, nous avons même demandé de les réduire, à l'occasion, pour s'assurer que ces paiements rencontraient les sommes maximales prévues dans un tel type de contrats, M. le Président.

Le Président: M. le député de l'Acadie, pour une question complémentaire.

M. Bordeleau: Complémentaire. Comment l'ex-présidente du Conseil du trésor peut-elle expliquer qu'elle ait accepté, à maintes reprises, des dérogations à la procédure d'appel d'offres alors que le Vérificateur général reconnaît, dans son rapport d'enquête, que le Secrétariat à la restructuration aurait pu faire appel au fichier central des fournisseurs et qu'il ne l'a pas fait? Quelles démarches la ministre responsable à ce moment a-t-elle faites auprès du ministère de la Restructuration pour l'encourager à avoir recours au fichier central?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Marois: M. le Président, dans le rapport du Vérificateur général, qui a été rendu public hier, ce que j'ai lu, c'est que le Vérificateur constatait que le Conseil du trésor avait été mis devant les faits accomplis. Dans les faits, M. le Président, lorsque nous avons accepté des dérogations, ces dérogations étaient justifiées, d'une part, par l'urgence et, d'autre part, par la compétence spécifique liée au contrat lui-même, ce qui est prévu dans nos règles et ce que nous avons appliqué rigoureusement, M. le Président.

Le Président: M. le député de l'Acadie, toujours en complémentaire.

M. Bordeleau: Oui, en complémentaire, M. le Président. Reconnaissant que l'urgence était probablement les échéanciers référendaires et la cause de l'indépendance, est-ce que l'ex-présidente du Conseil du trésor reconnaît, ce qui ne fait aucun doute aux yeux du Vérificateur général, que le Conseil du trésor n'a pas alors exercé les contrôles minima, puisque certains contrats ont été payés alors que rien n'a été fait?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Marois: Je ne comprends pas que le député de l'Acadie puisse dire que rien n'a été fait. Au contraire. Au contraire, nous nous sommes assurés que, dans tous les cas de contrats qui ont été présentés, lorsqu'on risquait de passer à côté des règles prévues dans la Loi sur l'administration financière et dans ses règlements, que celle-ci allait être respectée. Certains contrats ont été retournés, d'autres refusés. Et lorsque nous les avons acceptés, cela était, bien sûr, dans un certain cas, des dérogations, mais pas des dérogations sur le fond, des dérogations sur la forme, M. le Président.

Le Président: M. le député de l'Acadie, toujours en complémentaire.

M. Bordeleau: En complémentaire, M. le Président. Est-ce que la présidente ne reconnaît pas que certains contrats ont été payés alors que les études n'ont pas été réalisées?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Marois: Jamais nous n'aurions accepté, M. le Président, de payer...

Le Président: À l'ordre! Mme la ministre.

Mme Marois: Jamais nous n'aurions accepté, M. le Président, de payer pour des contrats non réalisés. Ce que je peux dire, à ce moment-ci, M. le Président – et, évidemment, je n'ai pas devant moi tous les documents pertinents et utiles – et le Vérificateur général pourra – et cela est déjà disponible, l'a été, de toute façon par le passé – le constater. Nous présumons – et cela fait partie des règles que nous avons au sein du gouvernement, puisqu'il y a des mécanismes de contrôle, le Contrôleur des finances, le Vérificateur – de la bonne foi des personnes, qui sont des gestionnaires, qui nous présentent des demandes. Jamais, M. le Président, nous ne l'aurions autorisé en le sachant. Mais, à ce moment-là, M. le Président, ce qu'il faut constater, c'est que nous avons pris les demandes telles qu'elles nous étaient présentées, nous avons posé les questions habituelles et normales qui se posent dans le cadre de nos responsabilités, et, dans ce sens-là, jamais, M. le Président, le Conseil du trésor n'aurait autorisé des paiements sans que les travaux ne soient faits. À moins que quelqu'un, quelque part, ne nous ait pas dit la vérité.

Le Président: M. le député de l'Acadie en complémentaire toujours.

M. Bordeleau: Oui, en complémentaire. Est-que la ministre, à ce moment-là, reconnaît que les contrôles n'ont pas été exercés ou met-elle en doute le rapport du Vérificateur général, qui disait, et je cite: «Cinq fournisseurs ont été payés pour des travaux qu'ils n'ont pas réalisés»?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Marois: Au contraire, au contraire, M. le Président. Je crois que le Vérificateur général doit poursuivre ses travaux et creuser davantage chacune de ces questions. Cependant, je ne crois pas que le Vérificateur général ait dit que le Conseil du trésor était informé de cela.

Le Président: M. le député de Westmount– Saint-Louis, pour une question principale?


Rôle du Secrétariat du Conseil du trésor dans l'attribution de contrats de recherche

M. Chagnon: En principale. M. le Président, j'ai eu la chance, sinon l'honneur, de siéger huit ans et demi au Conseil du trésor, et j'ai siégé sous deux présidents. Je n'ai jamais vu un tel cafouillage venant du Conseil du trésor. M. le Président, je me demande comment le président du Conseil du trésor, qui est ancien vice-président du Conseil, a pu accepter que le Conseil ou plutôt le Secrétariat serve de couverture au patronage de son option.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Question de règlement. M. le Président, en vertu de l'article 77, on ne peut pas prêter d'intention ni surtout faire le procès de qui que ce soit, M. le Président, et surtout porter des accusations, alors que le mandat qu'on vient de donner, c'est un mandat d'enquête encore plus élargi. Il y a une décence minimale en cette Chambre. Je vous ai dit, M. le Président, qu'on en avait assez mangé la semaine dernière, qu'on ne tolérerait plus jamais cela au niveau de la période de questions.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, effectivement, M. le Président, sans se fier au texte comme tel du lexique qui nous est fourni par la présidence quant aux mots qui ne sont pas permis dans cette Chambre, le mot «patronage» comme tel n'apparaît pas, mais il apparaît lorsqu'il est allié aux mots «patronage politique». Peut-être que, dans les circonstances, on pourrait remplacer la terminologie.

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Il faudrait que le leader de l'opposition écoute ses propres collègues. Ce n'est pas ce à quoi je fais allusion du tout. Il a essayé d'insinuer, une fois de plus, de façon vicieuse, un vocabulaire additionnel. C'est ça qui est arrivé.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader! Je pense que les choses... Il est inutile d'en rajouter, je pense que les choses sont claires en l'espèce. Qu'on invoque des possibilités de patronage, comme ça a été fait, je pense que c'est non parlementaire, et je demanderais au député de Westmount–Saint-Louis de bien vouloir retirer ses paroles et reformuler sa question.

M. Chagnon: D'autres l'ont déjà dit dans cette Chambre, M. le Président, il est très difficile pour moi de défendre l'indéfendable, mais je vais acquiescer à votre demande, M. le Président, et vous pourrez, par le fait même, faire comme tous les autres membres de cette Chambre et les membres, entre autres, de la Tribune de la presse et comprendre ce que l'on peut comprendre dans ce qui se passe. Mme la ministre des Finances nous disait qu'elle a autorisé...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Je pense qu'on a intérêt à être clair dans des circonstances... À l'ordre! On a intérêt à être clair dans les circonstances. M. le député de Westmount–Saint-Louis, je vous demande de retirer vos paroles et de reformuler votre question. S'il vous plaît! Alors, M. le député de Westmount–Saint-Louis, je n'ai pas entendu que vous aviez retiré vos paroles. Je vous demanderais de retirer vos paroles et de reformuler votre question.

M. Chagnon: M. le Président, j'ai déjà dit que j'acquiesçais à votre demande. M. le Président, à partir du moment où, comme l'a si bien dit la ministre des Finances dans sa première réponse, on autorise les paiements sans avoir autorisé les dérogations préalables à l'octroi de ces contrats, il y a un cafouillage, il y a un problème. Et le président du Conseil du trésor n'aurait jamais dû accepter, lui qui était vice-président à ce moment-là, ce genre de situations qui amènent aujourd'hui le Secrétariat à passer pour avoir été la couverture ou l'instrument – ou l'instrument – d'une conduite qui est certainement à déconsidérer et questionnable.

(10 h 50)

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, on voit que l'opposition en est rendue au bout de ses questions, parce que, là, on est en train d'épiloguer sur ce que ça pourrait être, ce que ça devrait être, et d'essayer d'insinuer des choses sur le rôle du Secrétariat du Conseil du trésor.

Ma collègue des Finances a expliqué comment le tout s'était déroulé, tout à l'heure. Je n'y reviendrai pas. Et le premier ministre a dit qu'il élargirait l'enquête du Vérificateur général, qu'il lui demanderait de le faire. Je pense qu'ici, dans les circonstances, les choses se passent normalement.

J'ajouterai ceci. Hier, à la suite de la publication du rapport du Vérificateur, j'ai demandé au Secrétariat de produire le plus tôt possible une liste contrat par contrat, qui va exposer la situation particulière pour chacun de ces contrats. Alors, je pense qu'en toute transparence nous allons attendre que cette liste soit produite et puis, après, nous pourrons juger là où il y a exactement des choses à reprendre et où il s'est passé des choses qu'on n'admet pas de ce côté-ci de la Chambre.

Le Président: M. le député de Westmount– Saint-Louis, en complémentaire.

M. Chagnon: M. le Président, on peut se demander pourquoi c'était si urgent de donner ces contrats quand on sait, comme témoins ici, à l'Assemblée nationale, qu'il a été si peu pressé ou qu'ils ont été si peu pressés ou que le gouvernement a été si peu pressé de les rendre publics.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je ne vois pas ce que le Conseil du trésor a à voir là-dedans, ni le Secrétariat du Conseil du trésor. C'est celui qui était responsable du dossier qui répondait aux questions, qui a déposé ces études, puis qui les a publiées quand il a jugé bon de le faire. Et ce n'est pas le Conseil du trésor qui est en cause là.

Le Président: M. le député de Westmount– Saint-Louis, toujours en complémentaire.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Pour combien de temps, M. le Président, le président du Conseil du trésor entend-il conserver M. Campeau à un salaire de 114 000 $ par année, qui est relevé de ses fonctions... Pour combien de temps?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, le Secrétariat à la restructuration a donc été aboli; il n'y a plus de ministre délégué à la Restructuration et un certain nombre des employés qui travaillaient dans ce ministère, qui sont des fonctionnaires, ont été recasés. M. Campeau a un contrat; il est donc, à l'heure actuelle, affecté à d'autres tâches. Mais, là, il vient d'être relevé de ses fonctions jusqu'à ce qu'on ait un complément de renseignements conformément à ce qui doit être fait, encore une fois, en vertu de la loi de la fonction publique. Bon. Nous allons suivre chacune des étapes. Ça ne veut pas dire que...

Mais si vous me permettez, en terminant ma réponse, M. le Président. J'entends l'échange des quelques dernières minutes, puis je pense que certains de nos collègues ne se rendent pas compte à quel point c'est plus grave qu'ils le pensent. Ce n'est pas juste une question de patronage, là. C'est de voir s'il y a eu un certain nombre de personnes qui se sont organisées, en violation des règles les plus élémentaires de conflits d'intérêts, pour monter un système. On n'a pas ce qu'il faut dans les mains pour en être sûrs. Et on ne va pas aller devant les tribunaux sans être sûrs. Puis la clé de ça, c'est l'élargissement du mandat du Vérificateur général.

Le Président: M. le député de Westmount– Saint-Louis, toujours en complémentaire.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le premier ministre admet que, si on avait appliqué toutes les mesures de contrôle qui existent actuellement et que la ministre des Finances a évoquées, ce triste débat que nous avons n'aurait jamais eu lieu?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: On ne peut pas vraiment répondre à une question comme celle-là. Il y a un rapport du Vérificateur général, qu'on vient de recevoir, sur l'ensemble des opérations du gouvernement. Si tous les contrôles étaient parfaits dans le gouvernement, on n'aurait pas besoin de ça. Bon. N'est-ce pas? Encore une fois, là, personne ne peut en tout temps assurer que tout est parfait. On a un vérificateur général qui n'est pas un fonctionnaire du gouvernement mais de l'Assemblée nationale, qui va, parfois, à la demande des parlementaires, parfois, à la demande du gouvernement et, statutairement, une fois par année, qui dépose ses observations, qui se transforment ou non en accusations à partir du moment où il y a une matière suffisante. Bon. C'est notre chien de garde, le Vérificateur général. L'important, là-dedans, c'est qu'on ne cherche d'aucune espèce de façon à cacher quoi que ce soit.

Le Président: M. le député de Verdun, pour une question principale.


Demande d'enquête administrative sur la gestion des contrats attribués par le Secrétariat à la Restructuration

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Il ne me semble pas inutile, compte tenu de ce qui se passe, de rappeler la loi 198 sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organisme, qui doivent, M. le Président, rendre compte, au moins une fois par année, de la gestion administrative et de toute question soulevée par un rapport du Vérificateur général.

M. le Président, j'aurais une question au leader du gouvernement. Est-ce que le leader du gouvernement, compte tenu de ce qu'on a eu dans le rapport du Vérificateur général déposé hier, à savoir que des travaux ont été entrepris avant la signature de contrats, que des paiements ont été effectués sur la base d'informations incorrectes, que des travaux de recherche ont été payés alors que rien n'a été fait, qu'il y a eu des dépassements de tarifs maximaux, est-ce que le leader ne pense pas qu'il faudrait respecter la loi, à ce moment-là, et convoquer, dans les plus brefs délais, la commission du budget et de l'administration, présidée par le député d'Arthabaska, et la commission des institutions, présidée par le député de Richelieu, de manière qu'on puisse entendre à la fois, et le secrétaire général, et le secrétaire général associé qui était chargé de la Restructuration, et le secrétaire du Conseil du trésor? À mon sens, on a là un moyen de pouvoir permettre à ces fonctionnaires de se faire entendre. Il faut respecter la loi. Qu'est-ce que...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, la loi 198 n'est pas du ressort, dans son application, du Conseil exécutif; elle est du ressort des parlementaires, en vertu de la réforme parlementaire, et le député de Verdun, qui en est l'auteur, de cette loi, le parrain, sait très bien que c'est aux parlementaires, en commission, de convoquer les différents sous-ministres face à leur imputabilité, qu'ils doivent en rendre compte devant les commissions parlementaires. Ça fait trois fois dans une semaine qu'il me soulève le cas, et il a raison, mais je lui dirai qu'autant ses trois présidents de commission que les cinq nôtres n'ont pas, jusqu'à date, sauf une commission, pris le mandat d'initiative d'en convoquer. Ce n'est pas au leader du gouvernement à imposer.

Cependant, je voudrais mettre en garde les parlementaires: l'Assemblée nationale n'est pas, non plus, un tribunal; l'Assemblée nationale est là pour faire faire la lumière. On vit dans un système de droit, et les individus ont droit à une défense pleine et entière, et il ne faudrait pas se comporter comme des gens qui doublent le système judiciaire au Québec.

Le Président: M. le député de Frontenac, pour une question principale.


Demande d'enquête policière sur les irrégularités relevées par le Vérificateur général au sein du Secrétariat à la Restructuration

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. M. le Président, le ministre de la Sécurité publique a, j'imagine, lu le rapport du Vérificateur. Il a entendu tout ce qui s'est dit, ici, ce matin, particulièrement, M. le premier ministre qui, de façon assez étonnante, nous avoue que, soupçonnant un système de fraude, il se contente d'un avis demandé au jurisconsulte, alors qu'on sait que la fraude, M. le Président, ça relève...

M. Chevrette: Question de règlement.

M. Lefebvre: ...de la police et du Code criminel.

Une voix: Il n'y a pas de fraude là encore.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président. M. le Président, le premier ministre a même déposé, par mon intermédiaire, hier, le rapport du Vérificateur, et a annoncé qu'il y aurait un décret dans quelques minutes, élargissant l'enquête, alors que le député se lève et dit: Le premier ministre se contentant de... S'il vous plaît, M. le Président, je vous demanderais... à un ancien ministre de la Justice, de choisir ses termes.

Le Président: Alors, en rappelant les dispositions de l'article 77...

(11 heures)

M. Lefebvre: Alors, M. le Président, ma question au ministre de la Sécurité publique. Outre le volet de l'enquête administrative qui est nécessaire, est-ce que le ministre ne considère pas qu'il ne doit pas, lui, être mis à l'écart par le pouvoir politique, par le «bunker», par le premier ministre et son entourage, et lui-même, M. le Président, compte tenu de la responsabilité qu'il a, le ministre de la Sécurité publique, d'être, dans ses fonctions, au-dessus de toute partisanerie politique, qu'il a la responsabilité de protéger l'intérêt public, et ceci étant dit, M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique ne convient pas qu'il doit prendre charge du dossier, ordonner immédiatement, M. le Président, une enquête policière par l'escouade économique de la Sûreté du Québec – l'escouade économique de la Sûreté du Québec, oui, M. le Président – de sorte que la population de tout le Québec puisse savoir ce qui s'est passé dans tout ce dossier-là, M. le Président, qui, il faut bien l'avouer, a une odeur assez nauséabonde, M. le Président?

Le Président: M. le leader adjoint de l'opposition officielle et député de Frontenac, je vous avais juste, encore une fois, invité à être prudent eu égard à l'article 77, cinquième alinéa, que les questions ne doivent pas être formulées de façon à susciter un débat. Et je pense que la fin de votre question était directement en contravention avec ce cinquième alinéa. Alors, à ce moment-ci, j'en appelle à votre collaboration, sinon je devrai vous rappeler à l'ordre pour une première fois. M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ménard: Alors, M. le Président, moi, j'ai reçu le rapport hier. Après l'avoir demandé, je l'ai reçu en fin d'après-midi. Je ne suis pas un surhomme, là. Le mardi soir, après avoir assisté au caucus, ma priorité, c'est de me préparer au Conseil des ministres. Et, finalement, ce n'est que ce matin que j'ai commencé à lire le rapport – je suis rendu à la page 15 – et je vais prendre les décisions qui s'imposent lorsque je l'aurai terminé. Déjà, j'en ai lu assez pour avoir une idée des responsabilités qui m'incombent. Mais je rappellerai ceci: la Sûreté du Québec doit demeurer indépendante du pouvoir politique jusque dans la mesure, comme l'a bien expliqué le coroner Gilbert – c'est un des aspects qu'on oublie dans son rapport, mais qu'il a très bien étudié – où ça implique une crise sociale ou quelque chose comme ça.

Le document est public. Rien n'empêche la Sûreté du Québec de le lire et de tirer ses propres conclusions sur ce qu'elle a à faire. Quant à moi, je vais toujours me porter garant de cette indépendance nécessaire de la Sûreté du Québec qui ne doit pas être perçue ni jamais servir des intérêts partisans, de quelque côté qu'ils soient. Donc, vous pouvez être certain que, en temps et lieu, la Sûreté du Québec sera saisie, et, de toute façon, peut se saisir déjà du rapport qui est public et en tirer les conclusions qu'elle voudra.

Vous êtes aussi conscient, enfin, M. le Président, le député est certainement conscient, comme ancien ministre de la Justice, que, parfois, brûler des étapes dans la progression des enquêtes, c'est prévoir un désastre éventuellement et qu'il y a des enquêtes qui doivent être menées dans un certain ordre. Les dispositions d'éthique qui doivent être enquêtées sont des dispositions plus exigeantes encore que celles du Code criminel et elles doivent être enquêtées, à mon avis...

Le Président: En terminant.

M. Ménard: ...dans un certain ordre. Merci.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Le premier ministre avait demandé de déposer un avis. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on puisse le faire à ce stade-ci?

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Il y a consentement, M. le Président.


Document déposé

Le Président: Alors, je comprends qu'il y a consentement. M. le premier ministre.

M. Parizeau: Alors, M. le Président, je dépose un avis du sous-ministre de la Justice et sous-procureur général, M. Michel Bouchard, à Michel Carpentier, secrétaire général du Conseil exécutif, au sujet du rapport d'enquête du Vérificateur général au gouvernement daté du 6 décembre 1995.

Le Président: Alors, ce document est déposé. C'est donc la fin de la période de questions et de réponses orales. Il n'y a pas de réponses différées, pas de votes reportés.


Motions sans préavis

Nous en sommes aux motions sans préavis. Mme la ministre responsable de la Condition féminine.


Souligner la journée du 6 décembre commémorant les événements de l'École polytechnique

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Je demande le consentement de cette Chambre pour déposer cette motion sans préavis:

«Que l'Assemblée nationale souligne la journée du 6 décembre commémorant les événements de l'École polytechnique et condamne toute violence faite aux femmes.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Consentement. Mme la ministre.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

M. Lefebvre: M. le Président...

Le Président: Est-ce que c'est une question de règlement, M. le leader?

M. Lefebvre: Non, non, non, M. le Président. Il y a effectivement consentement, puis, de part et d'autre, on s'entend pour qu'il y ait deux intervenants de chaque côté.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

Une voix: ...le député indépendant.

M. Boisclair: Je crois comprendre que – c'est ça – avec le député indépendant, donc, ce sera 2-2-1, M. le Président.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Re-merci, M. le Président. Le 6 décembre devra, à travers les temps, rester gravé dans notre mémoire collective. Le tragique anniversaire du massacre survenu à l'École polytechnique le 6 décembre 1989 où 14 jeunes femmes ont été fauchées à l'aube de leur vie nous rappelle que la violence menace toutes les femmes, sans égard à leur origine, à leur âge ou à leur statut socioéconomique. Tant de viols, tant de drames conjugaux et tant de meurtres d'ex-conjointes relatés jour après jour dans les journaux arrivent malheureusement à banaliser cette violence.

L'Assemblée nationale commémore le 6 décembre pour condamner toute violence faite aux femmes. À ceux qui croient qu'on devrait arrêter de souligner ce triste anniversaire, je rappellerai qu'il n'y a pas si longtemps des individus ignobles commémoraient, eux, le massacre lui-même par une salve de 14 coups de fusil. Il faut se souvenir lucidement et sobrement, car le souvenir appelle à la vigilance de la collectivité. La violence est là, et elle est malheureusement encore trop grave.

En plus de nous souvenir, nous devons faire oeuvre de prévention et d'éducation. La violence est intolérable, faut-il le rappeler, où qu'elle se trouve et sous quelque forme qu'elle soit. Il nous faut refuser les petits gestes de violence si nous voulons empêcher les gestes d'ultime violence. Il faut que les femmes cessent de vivre en apprivoisant la peur. Il faut que les hommes apprennent à régler leurs différends autrement que par des coups. Il faut que la collectivité sache reconnaître les signes de violence, s'y refuse, s'y oppose, les condamne. Prendre la violence à sa source, éliminer la peur ainsi que prévenir, dépister, contrer la violence faite aux femmes sont les fondements de la mobilisation collective nécessaire à l'élimination de la violence faite aux femmes.

À titre de ministre responsable de la coordination interministérielle de la politique gouvernementale en matière de violence conjugale, en compagnie de cinq de mes collègues, j'annoncerai aujourd'hui même une série de mesures concrètes pour contrer la violence, car, en effet, ce n'est qu'avec l'effort de chacune et de chacun que la collectivité pourra enrayer ce fléau.

Le 6 décembre, il faut se souvenir pour changer. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la ministre. Pour une autre intervention, Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: M. le Président – merci, M. le Président – c'est avec une vive et profonde émotion que je prends la parole aujourd'hui pour rappeler à tous et à toutes la terrible tragédie qui a eu lieu à l'École polytechnique de Montréal, tragédie dans laquelle des jeunes filles ont perdu la vie de façon violente, jeunes femmes dont l'avenir était prometteur et sans limite. Je désire, M. le Président, aujourd'hui, condamner toute la violence qui est faite aux femmes. J'aimerais transmettre à nouveau aux parents et aux amis de ces jeunes filles, qui ont le courage de continuer malgré cette profonde blessure qui donne, M. le Président, l'impression qu'une partie de soi-même n'existe plus, j'aimerais leur transmettre au nom de tous mes collègues toute la compassion et reconnaître publiquement le courage dont ils font preuve jour après jour depuis déjà six ans.

M. le Président, la violence qui est faite aux femmes n'est ni un phénomène nouveau ni un phénomène marginal. Aucune femme n'est à l'abri de cette violence. Elle peut toucher indifféremment toutes les femmes. Il faut dénoncer haut et fort la violence conjugale, les agressions sexuelles et toute autre sorte de violence dont peuvent être affectées les femmes de notre société. M. le Président, la violence sous toutes ses formes entraîne des conséquences néfastes sur l'intégrité physique et psychologique des femmes, puisque ces actes de violence meurtrissent non seulement le corps, par les coups et les blessures, mais aussi l'esprit, par l'avilissement, la destruction de l'identité, la dévalorisation personnelle et l'humiliation.

(11 h 10)

La violence est intolérable, mais vous conviendrez avec moi qu'elle devient insupportable lorsqu'elle est dirigée contre des femmes qui présentent une vulnérabilité particulière. Je pense ici, M. le Président, à la violence du partenaire à l'occasion d'une grossesse, à celle exercée auprès des femmes souffrant d'un handicap physique ou mental, ou à la violence exercée auprès des aînés. Ce sont des exemples, mais, malheureusement, c'est là la triste réalité, M. le Président.

Au cours des ans, de nombreuses actions gouvernementales ont été entreprises. Je pense notamment au ministère de la Santé et des Services sociaux, au ministère de la Justice, au ministère de la Sécurité du revenu, qui ont mis en place des politiques pour pouvoir aider à contrer ce fléau que vivent les femmes de notre société.

Au cours des ans également, M. le Président, des centres d'aide ont vu le jour, des centres d'aide aux victimes d'actes criminels, des centres de violence conjugale, des centres d'hébergement pour les femmes victimes de violence conjugale, des centres-femmes pour venir en aide aux femmes en difficulté, des centres et des services téléphoniques d'urgence, qui sont accessibles 24 heures par jour, sept jours par semaine, pour répondre aux besoins de ces femmes violentées.

Mais, M. le Président, le plus troublant, c'est de constater que, malgré tous les efforts et la mise en place de services pouvant venir en aide à ces femmes, les statistiques nous prouvent, hors de tout doute, que la violence persiste malheureusement encore aujourd'hui.

Permettez-moi de vous rappeler quelques chiffres. Une enquête récente de Statistique Canada nous indique que la majorité des Québécoises sont habitées par un sentiment d'insécurité lorsqu'elles sont à l'extérieur de leur résidence. M. le Président, 62 % des femmes adultes craignent de marcher seules dans leur quartier le soir; 73 % des femmes craignent d'attendre ou de prendre seules le transport en commun. Les stationnements intérieurs sont perçus comme étant particulièrement menaçants pour les femmes, puisque huit femmes sur 10 y ressentent ou y ont ressenti de l'insécurité. L'enquête révèle également qu'un grand nombre de femmes sont victimes d'agressions diverses. Près de la moitié des Québécoises de 18 ans et plus – ça, c'est 45 % des femmes – ont déclaré avoir été victimes d'au moins une agression physique ou sexuelle depuis l'âge de 16 ans.

M. le Président, j'étais heureuse d'entendre tout à l'heure la ministre et, hier soir, à Radio-Canada, on apprenait que le gouvernement québécois annoncerait aujourd'hui de nouvelles mesures qui assureraient une meilleure protection pour les victimes de violence conjugale. Je tiens à vous assurer que l'opposition officielle s'associe à toute intervention qui vise à contrer la violence faite aux femmes.

M. le Président, il faut que tous les efforts soient mis en oeuvre pour enrayer ce fléau social et que le gouvernement québécois continue à prendre toutes les actions nécessaires pour l'éliminer. Tous et chacun devront s'impliquer afin d'enrayer le phénomène de la violence qui est faite aux femmes et, ainsi, leur garantir le bien-être et la protection auxquels elles ont droit. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Alors, je joins ma voix à celle du gouvernement et de l'opposition officielle pour appuyer cette motion. Les événements tragiques de l'École polytechnique nous rappellent, une fois l'an, comment la violence n'a pas sa place dans notre société, comment la violence peut bouleverser les événements d'une société et de ses familles, comment la violence peut détruire.

Cet anniversaire si triste nous rappelle chaque année aussi que jamais la violence ne doit être présentée dans aucune des circonstances de la vie de notre société comme une solution. Elle nous rappelle évidemment comment, dans notre action, dans notre quotidien, comme individu, il faut poser des gestes pour contrer la violence, comment, individuellement, on peut être inspiré par des actions comme celle d'Heidi Rathjen ou de Virginie Larivière contre la violence, mais aussi comment, dans notre action collective, et particulièrement comme parlementaires, nous avons une responsabilité de contrer et de faire reculer la violence. Nous devons, en effet, dans nos paroles, dans nos actions, constamment faire reculer toutes les formes d'utilisation ou de recours à la violence et rappeler, qu'en toutes circonstances, la violence fait partie des problèmes et non des solutions.

Évidemment, le souvenir des victimes de la Polytechnique appartient d'abord et avant tout aux amis et encore plus aux familles des victimes à qui nous adressons chaque année, du fond du coeur, nos regrets, notre sympathie. Mais, pour l'ensemble des Québécois, cette tragédie est devenue un symbole, et il nous appartient comme société d'en faire le symbole du besoin d'un changement dans notre action, dans nos perceptions et dans notre tolérance de la violence. Ainsi, nous pourrons aider les victimes innocentes de cette terrible tragédie à laisser un héritage d'espoir à tous les hommes et toutes les femmes du Québec qui ont été tant saisis le 6 décembre 1989 et qui se sentaient si impuissants. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Y a-t-il une autre intervention? M. le député de Beauce-Nord.

M. Bégin: M. le Président.

Le Président: Oui. La règle d'alternance jouant, à ce moment-là, je vais céder la parole à M. le ministre de la Justice.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, je voudrais joindre ma voix à celle de mes collègues pour dénoncer la violence sous toutes ses formes et particulièrement la violence qui est faite aux femmes dans notre société. Le 6 décembre nous rappelle combien ça peut être tragique pour tout le monde des événements semblables à celui qui s'est produit le 6 décembre il y a six ans. Il faut la dénoncer, mais aussi, je pense, il faut prendre des moyens pour faire en sorte qu'on la prévienne, qu'on la dépiste et qu'on fasse en sorte qu'il y en ait de moins en moins. Il faut faire en sorte que, dans notre société, de façon préventive, les gens sachent qu'on ne peut pas et qu'on ne tolérera pas, d'aucune façon, la violence faite aux femmes. M. le Président, je crois qu'il faut donner des moyens partout dans notre société pour éviter que des choses semblables ne se produisent.

Aujourd'hui, le gouvernement dévoilera une politique dénonçant la violence conjugale et des moyens précis que chacun des ministres propose afin de régler ou de solutionner en grande partie ce problème. Il faut que toujours les violences conjugales soient judiciarisées, qu'il y ait des condamnations qui sanctionnent ces gestes-là, et il faut aussi qu'il y ait des intervenants psychosociaux qui aident les gens qui sont à la fois les victimes et qui sont aussi les auteurs pour éviter qu'ils ne se répètent.

M. le Président, un ensemble de mesures peuvent être prises à cet égard, et, à titre d'exemple, et je tiens à le mentionner devant cette Assemblée nationale, le 6 décembre dernier, les femmes demandaient que, dans les palais de justice, les victimes de violence et de violence conjugale dans l'attente de témoigner ne soient pas placées à la vue et n'entendent pas leur agresseur, et j'ai promis que je ferais l'essentiel pour que des salles d'attente ou des aires d'attente soient aménagées dans chacun des palais de justice. Et je peux vous dire, M. le Président, aujourd'hui, que, dans les 56 palais de justice du Québec, il y a maintenant une aire d'attente pour les femmes qui sont victimes et qui peuvent attendre en toute quiétude pour témoigner sans avoir à subir une double agression de leur agresseur en attendant de témoigner.

M. le Président, d'autres mesures spécifiques seront annoncées par mes collègues, et je pense qu'il est extraordinairement important qu'on ait une politique, maintenant, gouvernementale cohérente, globale et, je pense, qui va apporter des fruits extrêmement importants. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le ministre de la Justice. M. le député de Beauce-Nord.


M. Normand Poulin

M. Poulin: Merci, M. le Président. Je tenais à intervenir sur cette motion, M. le Président, car la violence faite aux femmes est un sujet qui me touche personnellement. Je suis père de trois jeunes filles, et mon souhait le plus cher est qu'elles puissent vivre dans une société où elles se sentiront en sécurité, une société où la violence faite aux femmes n'est pas tolérée, une société où des événements comme celui qui est arrivé à la Polytechnique il y a déjà six ans ne se produiront plus. Pourtant, encore aujourd'hui, de nombreux événements nous rapportent des drames horribles. Qu'il me suffise de mentionner l'assassinat crapuleux, la semaine dernière, de la policière Odette Pinard, ou bien de Cindy Faucher, une fillette de neuf ans, qui trouvait la mort dans un drame familial survenu en avril 1995 à Sainte-Marie de Beauce, et bien d'autres, bien d'autres drames presque quotidiens de crimes et de violence qui sont commis à l'endroit des femmes. Pourtant, il ne faut pas considérer la violence comme un phénomène inévitable. Tout acte de violence peut être évité, mais, surtout, doit être évité.

(11 h 20)

M. le Président, je crois sincèrement que l'on peut améliorer notre société à l'endroit des femmes, mais des gestes concrets doivent être posés. On peut penser à de nouvelles législations, de nouvelles politiques, comme la récente adoption, par le gouvernement fédéral, d'une loi sur le contrôle des armes à feu, qui est un pas dans la bonne direction. En effet, rendre les armes moins disponibles permettra certainement de sauver des vies. Mais, plus important encore, ce sont les mentalités qu'il faut changer. Il faut que cela soit clair dans notre société que la violence n'est pas une solution, qu'au contraire cette violence ne cause que des problèmes supplémentaires. Il ne faut pas ménager nos efforts pour que de plus en plus de prévention se fasse dans nos écoles, en y inculquant certaines valeurs. Il faut apprendre et éduquer nos enfants dès leur jeune âge à résoudre leurs conflits autrement que par des gestes violents.

Le drame qui s'est déroulé à la Polytechnique l'a été parce qu'un individu avait jugé que ces étudiantes n'étaient pas à leur place et qu'elles avaient pris la place des hommes. Malheureusement, il y a encore certaines personnes qui partagent cette opinion. Les mentalités évoluent, mais, M. le Président, il reste beaucoup de chemin à faire avant d'en arriver à une véritable égalité. Il faut que les jeunes garçons sachent que les jeunes filles ont droit aux mêmes chances qu'eux, que tous les métiers et toutes les professions sont à leur portée. Il faut que les jeunes Québécoises sentent que toutes les portes leur sont ouvertes.

M. le Président, chacune et chacun d'entre nous doit se sentir concerné par cette situation dramatique. Ce n'est pas un problème uniquement féminin, la violence faite aux femmes a une influence sur toutes nos vies, car elles touchent nos filles, nos mères, nos soeurs. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le député de Beauce-Nord. Alors, est-ce que la motion de Mme la ministre responsable de la Condition féminine, à l'effet «que l'Assemblée nationale souligne la journée du 6 décembre commémorant les événements de l'École polytechnique et condamne toute violence faite aux femmes», est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Nous sommes toujours aux motions sans préavis. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui. Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de l'Assemblée pour déposer la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale accepte unanimement et respecte les résultats du référendum du 30 octobre dernier en réponse à la question suivante qui a été rejetée démocratiquement: "Acceptez-vous que le Québec devienne souverain, après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politique, dans le cadre du projet de loi sur l'avenir du Québec et de l'entente signée le 12 juin 1995?"»

Une voix: Non, M. le Président.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Non.

Le Président: Il n'y a pas consentement. Toujours aux motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous en venons aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission de l'économie et du travail procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants: le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le bâtiment; le projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les édifices publics, et ce, dans l'ordre indiqué, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Merci, M. le leader adjoint. Je vous avise que la commission de la culture se réunira en séance de travail aujourd'hui, le mercredi 6 décembre 1995, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle 1.181 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de faire le bilan des consultations particulières sur l'avenir de Radio-Québec et de préparer le rapport de la commission de la culture qui sera déposé à l'Assemblée nationale.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, pourriez-vous m'indiquer si vous avez convoqué le comité directeur de la commission de l'Assemblée nationale, en fonction de l'article 4.1j, pour coordonner les travaux non prioritaires des commissions, établir le calendrier et, en particulier, nous indiquer comment ces commissions vont remplir les obligations qu'elles doivent faire en fonction de la loi 198 amendée par la loi 95? J'aimerais avoir le calendrier des auditions, si possible.

Le Président: Alors, si tel est le désir des présidents de commissions, il me ferait plaisir de convoquer un tel comité directeur. J'ai l'occasion de rencontrer, d'ailleurs, les présidents de commissions régulièrement. Ceci étant dit, pour le reste, je prends avis de votre question et j'y reviendrai ultérieurement.

Toujours aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le député de Vachon.

M. Payne: En ce qui concerne les travaux de la commission de la culture, M. le Président, on se réunit en séance de travail à partir de maintenant, mais, comme il s'agit d'une séance de travail, suivant l'habitude, normalement et souvent, ça déborde le temps. Vérification faite auprès du leader, ça ne pose aucun problème en ce qui concerne la possibilité de prolonger cet après-midi, dans la mesure où il y ait une entente tout à l'heure avec l'opposition. Voilà!

Le Président: M. le député de Vachon et président de la commission, je pense que la commission est tout à fait... a toute la latitude pour disposer de cette question-là normalement.

Maintenant, toujours aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, s'il n'y a pas d'autres demandes de renseignements, je serais prêt à rendre maintenant la décision...

M. Dumont: M. le Président.

Le Président: ...la directive...

M. Dumont: M. le Président.

Le Président: Oui, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui, sur les renseignements sur les travaux. Il y a une seule question écrite qui déborde de plus de six mois, c'est-à-dire qui remonte au mois de mai, au ministre de l'Éducation, la question 19. Je voulais savoir si on peut attendre des réponses incessamment.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président, je comprends que le député de Rivière-du-Loup est nouveau à cette Assemblée, mais, s'il avait été ici au moins depuis 1989, il se serait aperçu que le gouvernement maintient une très bonne performance dans le nombre de questions auxquelles nous apportons les réponses et dans notre intention de répondre à toutes les questions qui sont inscrites au feuilleton, M. le Président.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a d'autres demandes de renseignements? Ça va.

Alors, vendredi dernier, à l'étape des renseignements – à l'ordre, s'il vous plaît! – à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée, j'ai pris en délibéré la demande de directive du député de Chomedey relativement à la séance du 30 novembre 1995 de la commission de la culture.

Après avoir examiné les points soulevés dans la demande de directive du député de Chomedey, je suis toujours d'avis que la question qui m'a été soumise concerne l'organisation des travaux d'une commission parlementaire et relève de la compétence du président de la commission de la culture, car celui-ci a les pleins pouvoirs de présider cette commission. Le président de l'Assemblée ne peut s'immiscer dans l'organisation des travaux des commissions parlementaires et n'a pas droit de regard sur ces matières. Je vous réfère, à cet égard, à une décision rendue par un de mes prédécesseurs, M. Jean-Noël Lavoie, dans laquelle il affirme que le président de l'Assemblée nationale n'a pas à donner de directive sur une décision rendue en commission.

Alors, s'il n'y a pas d'autres demandes de renseignements... M. le député de Chomedey, sur une question...

M. Mulcair: De directive, M. le Président.

Le Président: ...de directive.

M. Mulcair: Alors, dans un premier temps, je tiens à vous remercier d'avoir étudié la question et de nous avoir apporté ces précisions, mais je me permets d'émettre une nouvelle question de directive à ce moment-là. J'aimerais savoir, M. le Président, en vertu de quelle disposition des règlements régissant les travaux de cette Assemblée et de ses commissions parlementaires un député constatant qu'une commission parlementaire continue – malgré l'objection de l'opposition, et non seulement malgré son consentement, mais malgré son objection – se poursuit au-delà du temps imparti par l'ordre de cette Chambre... en vertu de quel règlement un député dans une telle position peut alors intervenir en commission, si ce n'est pas ici qu'on peut le faire. Vous me dites qu'on peut le faire en commission. Alors, comment on s'y prend et en vertu de quoi?

Le Président: Puisqu'il s'agit d'intervention en commission, je vous suggérerais de référer cette question-là au président de la commission et il verra à statuer sur cette question, il a toute la latitude pour en disposer. Voilà. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Peut-être plus précisément, en convenant que le président de la commission a toute la latitude pour disposer de la question, il en a déjà disposé dans un cas pratique, concret et précis, en disant que, les ordres de la Chambre, il n'en tient pas compte. À partir de ce moment-là, comment peut-il être rappelé à l'ordre et par qui?

Le Président: À ce moment-là, puisqu'on sort du contexte de la commission, la seule procédure qui est à la portée d'un député, c'est la procédure normale prévue à notre règlement remettant en cause la conduite d'un député. Alors, je vous réfère, à ce moment-là, aux articles habituels au niveau de notre règlement. Voilà. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui. Merci encore une fois, M. le Président, et, justement, c'est la voie que nous allons suivre.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres demandes de renseignements sur les travaux de l'Assemblée?


Affaires du jour

Sinon, nous allons aborder les affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

(11 h 30)

M. Boisclair: Oui. M. le Président, à ce moment-ci, je vous prierais d'appeler l'article 13 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi 114


Adoption du principe

Le Président: À l'article 13 du feuilleton, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du principe du projet de loi 114, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et d'autres dispositions législatives concernant l'industrie des courses de chevaux. Alors, est-ce qu'il y a consentement, premièrement, pour déroger à l'article 237 du règlement, qui prévoit un délai d'une semaine avant la présentation et l'adoption du principe d'un projet de loi?

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, il y a consentement sous les conditions suivantes. Nous avons convenu, de part et d'autre, de renoncer au délai de sept jours de façon à permettre à M. le ministre de faire sa déclaration au niveau de l'adoption de principe du projet de loi. Par la suite, nous indiquerons au leader adjoint du gouvernement si nous sommes prêts à la réplique de l'opposition officielle. Sinon, le débat sur le projet de loi sera ajourné et il appellera un autre projet de loi.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: C'est effectivement conforme aux discussions que nous avons eues précédemment, M. le Président.

Le Président: Alors, dans ces conditions, je comprends qu'il y a consentement. Alors, à ce moment-ci, M. le ministre.


M. Marcel Landry

M. Landry (Bonaventure): M. le Président, le 18 juin 1993, l'Assemblée nationale a adopté le projet de loi 94 proposant une restructuration de l'industrie des courses de chevaux en raison des nombreuses difficultés financières et organisationnelles de ce secteur. Cette loi abolissait donc la Commission des courses de chevaux et confiait la responsabilité du contrôle et de la surveillance des courses à la Régie des alcools, des courses et des jeux, alors que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation se voyait confier la promotion de cette industrie. Le 20 décembre 1993, le ministère a conclu avec la Société de promotion de l'industrie des courses de chevaux, société regroupant les divers intervenants du secteur, une entente de collaboration permettant de lui confier la gestion des programmes de promotion de cette industrie. Pour réaliser ce mandat, une aide financière de base de 10 500 000 $ et une subvention additionnelle de performance lui étaient accordées par le ministère. Cette entente autorisait également à acquérir l'Hippodrome Blue Bonnets, appelé aujourd'hui Hippodrome de Montréal.

Les difficultés financières n'avaient pas été solutionnées puisque, après un an seulement, les opérations de l'Hippodrome Blue Bonnets affichaient un déficit d'opération de 5 000 000 $. Les hippodromes de Québec et de Trois-Rivières connaissaient également des difficultés financières. Quant à l'Hippodrome Connaught, il a cessé ses opérations en début de 1995. Les raisons principales qui ont occasionné cette problématique sont la conjoncture économique difficile et l'implantation des casinos d'État.

Face à ces difficultés, les villes de Trois-Rivières et Québec ont fait part au gouvernement de leur intention de cesser leurs activités si elles n'obtenaient pas une aide gouvernementale suffisante pour contrer tout déficit éventuel. Devant un tel constat, le gouvernement a décidé de venir en aide, dans les plus brefs délais, à l'Hippodrome de Montréal en autorisant une garantie d'emprunt de 5 000 000 $ pour lui permettre de continuer d'opérer en attendant l'identification de solutions permanentes. Ainsi, pour appliquer des solutions à plus long terme, un groupe de travail composé de représentants de notre ministère et du ministère des Finances a été constitué. Après avoir consulté les divers intervenants du secteur, le groupe de travail a proposé certaines mesures de redressement, dont deux d'entre elles contribuent à accorder un appui financier pour soutenir et développer les hippodromes. Ces mesures sont: retourner aux intervenants – à savoir la SPICC et les hippodromes – la totalité des revenus provenant de la taxe sur le pari mutuel perçue par le gouvernement – c'est environ 3 500 000 $ d'argent nouveau qui sera ainsi accordé aux hippodromes par cette mesure – et autoriser les hippodromes à opérer des appareils de loterie vidéo. Ces appareils généreront des revenus supplémentaires d'environ 1 900 000 $.

Pour permettre aux intervenants de bénéficier des revenus supplémentaires essentiels à la poursuite de leurs activités, il est requis de modifier la loi du ministère de façon à pourvoir l'organisation d'un fonds qui aura pour fonction de recevoir du ministère du Revenu les sommes correspondant aux taxes sur le pari mutuel pour les redistribuer entre la SPICC et les titulaires de licences de courses ou de pistes de courses.

Le projet de loi prévoit également accorder à la Régie des alcools, des courses et des jeux le pouvoir d'autoriser les hippodromes à opérer des appareils de loterie vidéo, soit 125 pour Montréal, 100 pour Québec et 50 pour Trois-Rivières.

Comme vous pouvez le constater, M. le Président, le présent projet de loi accordera au gouvernement les moyens appropriés pour fournir l'important soutien financier grandement attendu par les intervenants de l'industrie des courses de chevaux.

Enfin, je crois important de vous mentionner que le groupe de travail poursuit son mandat dans le but d'identifier des solutions additionnelles qui permettront d'assurer une saine viabilité financière de cette industrie qui emploie près de 4 000 personnes au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Alors, est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce projet de loi? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: De concert avec le leader de l'opposition officielle, je ferais motion pour ajourner le débat, à ce moment-ci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, je vous demanderais de suspendre quelques instants, le temps que... d'autant plus que je suis convaincu que nos amis vont y concourir, puisque le ministre de la Justice doit se déplacer du Conseil des ministres. Il est en route et devrait être ici d'ici quelques instants.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, je vais suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 37)

(Reprise à 11 h 42)

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, MM. les députés, si vous voulez bien vous asseoir, nous allons reprendre nos travaux. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: L'article 21 du feuilleton, toujours, M. le Président.


Projet de loi 92


Adoption

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, à l'article 21, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi 92, Loi modifiant le Code de procédure pénale. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre de la Justice, tout en vous rappelant, M. le ministre, que vous avez un droit de parole maximal de 60 minutes. À vous la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Au mois de juin, on déposait le projet de loi 92 visant le Code de procédure pénale. Nous n'avons pas procédé à l'étude de ce projet de loi à ce moment-là. Cependant, dès son dépôt, des gens ont fait des représentations pour que certaines mesures prévues dans le projet de loi soient modifiées, entre autres relativement aux travaux compensatoires, les amendes, l'emprisonnement, enfin, plusieurs éléments que je vais reprendre.

Nous avons, compte tenu de ces représentations, jugé à propos de former un comité interministériel des ministères de la Sécurité publique, de la Justice et des Transports, afin d'entendre les représentations faites par, entre autres, des greffiers municipaux et des municipalités. Le comité s'est réuni au mois de septembre et, après avoir entendu pendant une semaine les différents intervenants, a fait un rapport au ministre de la Justice, et j'ai jugé à propos de tenir compte de ces représentations et de procéder à des modifications au projet de loi qui avait été initialement proposé.

Je me propose maintenant de vous rappeler très brièvement, M. le Président, chacun de ces amendements qui donnent l'essence même du projet de loi. Alors, tout d'abord, le premier de ces amendements propose de maintenir l'accès au Programme de travaux compensatoires pour toutes les infractions pénales. Ceci avait été prévu de manière différente dans le projet de loi.

Le deuxième amendement vise à limiter l'accès au Programme de travaux compensatoires aux individus dont l'incapacité de payer aura été démontrée.

La troisième mesure, c'est qu'on prévoit au Code de procédure pénale une disposition similaire à celle prévue au Code de procédure civile, ce que nous appelons l'article 543, qui permet d'interroger la personne pour savoir si, effectivement, elle est incapable d'acquitter son amende et qu'elle pourra ou non jouir des travaux compensatoires pour acquitter sa peine.

Par ailleurs, un quatrième amendement revoit à la hausse la table d'équivalences prévue à l'annexe du Code de procédure pénale pour des montants d'amendes de 500 $ et plus.

Un cinquième amendement propose de maintenir l'emprisonnement obligatoire comme recours ultime pour toutes les infractions pénales.

Sixièmement, on prévoit que, lorsque le défendeur est déjà en prison au moment où la sanction est rendue, concernant des infractions au Code de la sécurité routière, par exemple, l'emprisonnement imposé pour défaut de paiement d'amende ne pourra pas être purgé simultanément, mais de manière consécutive, de sorte que la personne ne puisse pas jouir d'un avantage indu du fait qu'elle est en prison.

Septièmement, on propose de laisser une plus grande discrétion au juge pour déterminer la durée d'un emprisonnement, contrairement à ce qui existait antérieurement où il y avait une table fixe que le juge devait respecter au moment de rendre sa décision.

Un huitième amendement, qui est en concordance avec celui qui précède, propose d'abolir la table d'équivalences en ce qui a trait à l'emprisonnement pour laisser, comme je viens de le dire, la discrétion au juge.

Un neuvième amendement vise à permettre dans tout le territoire du Québec, à toutes les municipalités du Québec, l'utilisation de ce qu'on est convenu d'appeler le sabot de Denver, pour la perception des amendes.

Un dixième amendement, beaucoup plus global, vise à introduire, dans le Code de procédure pénale, suite aux discussions avec les spécialistes en informatique, une série d'amendements pour permettre d'intégrer les documents électroniques à la preuve et à la procédure pénale, et s'assurer de l'intégrité de l'ensemble du processus pour que tout fonctionne correctement et que les droits des individus soient correctement protégés.

Enfin, également, il est prévu de prévoir des modes de signification différents pour le constat d'infraction. On le fera, dorénavant, par courrier ordinaire, et ainsi que la signification d'assignation de témoin, qui pourra être faite tant par le courrier ordinaire que par le télécopieur ou un procédé électronique.

Comme vous pouvez le voir, M. le Président, il y a eu plusieurs amendements qui ont été apportés au projet de loi suite à ces auditions. Et je voudrais remercier l'opposition pour le travail de collaboration qu'elle a apporté au moment de l'adoption de ce projet de loi. Ils ont collaboré à faire en sorte que des changements soient apportés et que le projet de loi soit amélioré. Je voudrais aussi remercier tous les membres de la commission qui ont travaillé sur ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey, porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice. À vous la parole, M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, comme mon collègue, le ministre de la Justice, vient de le dire, il y a eu, effectivement, collaboration au cours des dernières semaines entre les deux formations politiques sur cet important projet de loi qui, rappelons-le, dans sa première incarnation au printemps, posait des problèmes fondamentaux. Notamment, le projet de loi prévoyait – à cet égard-là, ça visait une fin louable – qu'on ne mettrait jamais plus quelqu'un en prison à défaut de payer une amende. Même si l'idée de dire qu'on ne mettait pas en prison quelqu'un lorsque c'est une question d'amende peut paraître à sa face même une bonne chose, il y avait une faille, parce qu'on n'était pas en train de tenir compte du fait qu'il y a des gens qui refusent de payer une amende. Alors, si quelqu'un refusait de payer une amende et était capable de le faire, il y avait un problème. On créait une catégorie de personnes au-dessus de la loi. Et encore, si quelqu'un n'avait pas les fonds pour payer une amende et qu'il refusait de faire des travaux communautaires, bien, encore une fois il faut avoir un ultime recours à l'emprisonnement, même si ça demeure très rare dans ces conditions-là.

Le projet de loi faisait deux choses, dans sa première version: ça éliminait ce recours aux travaux compensatoires, donc, il n'y avait aucune option pour quelqu'un qui ne payait pas son amende ou n'était pas capable de la payer, et ça éliminait, en même temps, l'emprisonnement. Alors, c'était un paradoxe duquel il fallait absolument sortir. Et le ministre vient d'expliquer exactement ce qu'il a fait, il a collaboré avec d'autres ministères et organismes, et s'est rendu à l'évidence que la première version ne marchait pas.

Le ministre a aussi évoqué un principe important, dont on a eu l'occasion de parler déjà, mais qui vaut la peine de rementionner aujourd'hui. Il parle du fait que le projet de loi remet là où ça doit être, c'est-à-dire entre les mains d'un juge, la discrétion de déterminer la peine d'emprisonnement et à quel temps, à quelle cadence ça va être purgé en fonction des travaux compensatoires. Le ministre a dit, justement, que c'est le juge qui doit jouir d'une discrétion dans ces matières-là, et on est d'accord avec lui. Sauf qu'il y a un problème. À l'heure actuelle, au Québec, pour ces infractions relativement mineures, tous, dans le domaine juridique, savent que, malgré les lois votées par l'Assemblée nationale, malgré la confiance que l'on fait à nos services de police, malgré la confiance que l'on fait à nos juges, il y a un maillon dans la chaîne qui est assez faible, et c'est l'administration de la sécurité publique et les prisons. Ça ne relève évidemment pas du ministre de la Justice, mais bien plutôt de son collègue à la Sécurité publique, qui ne porte pas une attention suffisante à cette importante question, qui a pourtant été soulevée à plusieurs reprises par le Barreau du Québec.

(11 h 50)

Si un juge décide, en ultime recours, que, justement, une personne va purger une peine, que ça soit de 10 ou de 15 ou de 20 jours, peu importe, il faut justement que la loi que le juge est en train d'appliquer au nom de tout le peuple du Québec soit mise, justement, en application, soit exécutée, dans les termes techniques de l'art.

Or, M. le Président, on sait tous qu'à Montréal, notamment, les prisons gérées par la province de Québec sont à ce point pleines qu'une personne qui écope d'une peine comme ça, et surtout lorsqu'il n'y a pas de violence, une peine de 20 jours ou de 30 jours, va tout simplement aller se présenter à une prison comme Bordeaux. Très brièvement, on constaterait sa présence et elle ne purgerait aucune partie de sa peine.

Ça peut bien faire plaisir aux gens dans cette circonstance-là, et on les comprend bien, mais il y a un problème fondamental vis-à-vis de l'application des lois votées par l'Assemblée nationale et tout le système que notre société a mis en place pour veiller à l'application et à l'exécution de ces lois-là. Alors, on souhaite que le ministre de la Sécurité publique va éventuellement commencer à s'occuper de ce problème important, et je crois justement que l'approche préconisée par le ministre de la Justice dans ce dossier-là risque d'aider. Mais il y a des démarches importantes au plan purement technique, bureaucratique, qui doivent être faites et on souhaite, de ce côté de la Chambre, que le ministre de la Sécurité publique commence enfin à s'occuper de cette partie de son dossier.

Le ministre de la Justice, M. le Président, a également mentionné que le projet de loi va prévoir, comme c'est le cas de plus en plus, que, pour sauver de l'argent, on va pouvoir faire la signification, c'est-à-dire l'envoi officiel de certains documents par courrier ordinaire. C'est vrai que ça peut sauver de l'argent au gouvernement, et on est d'accord avec lui là-dessus – on ne peut pas être en désaccord – mais on l'invite à être très prudent en surveillant l'effet concret de ces décisions-là, car, si le fait de l'envoyer par courrier ordinaire fait qu'il y a juste plus de contestations après par des gens qui prétendent ne pas avoir reçu le constat d'infraction, on ne sera pas plus avancé. En d'autres mots, si, en sauvant un petit peu d'argent d'un côté, on embourbe les tribunaux plus de l'autre, on n'est pas avancé. Alors, on espère justement que le ministère de la Justice va porter une attention particulière aux effets et aux résultats concrets de cette décision de laisser la signification se faire dorénavant par courrier ordinaire dans plusieurs circonstances.

Là-dessus, M. le Président, il me fait justement plaisir de dire qu'avec les correctifs maintenant apportés à cet important projet de loi, de notre côté, l'opposition officielle, on est d'accord avec l'adoption de ce projet de loi et, justement, le travail qui a été fait est un exemple de ce qui peut être fait lorsqu'on prend le temps d'écouter et d'analyser en profondeur tous les effets et tous les impacts d'un projet de loi. Merci beaucoup, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Le projet de loi 92, Loi modifiant le Code de procédure pénale, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Article 23, s'il vous plaît.


Projet de loi 106


Adoption

Le Vice-Président (M. Bélanger): À l'article 23, Mme la ministre de la Sécurité du revenu propose l'adoption du projet de loi 106, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et la Loi sur l'assurance automobile. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Sécurité du revenu, tout en vous rappelant, Mme la ministre, que vous avez un droit de parole maximal de 60 minutes. À vous la parole, Mme la ministre.


Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais tout de suite vous rassurer, je n'ai pas l'intention de parler 60 minutes, d'une part, parce qu'il s'agit là d'un projet de loi qui fait consensus, et, d'autre part, parce que ça a surtout un caractère technique. L'importance de ce projet de loi n'en est pas moindre, cependant, il s'agit de corriger ce qu'on appellerait une inéquité fiscale.

Alors, nous abordons aujourd'hui l'étape de l'adoption du projet de loi 106, intitulé: Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et la Loi sur l'assurance automobile. L'objectif premier de ce projet de loi en est un d'équité, équité envers les bénéficiaires du programme de l'assurance automobile qui, en raison de l'invalidité résultant de leur accident, ont également droit à une rente d'invalidité de la Régie des rentes du Québec. L'inéquité que vient corriger ce projet de loi résulte des différences de traitement fiscal entre les prestations versées par les deux organismes gouvernementaux en cause. Les indemnités de remplacement du revenu versées par la Société de l'assurance automobile du Québec ne sont en effet pas incluses dans le revenu imposable du bénéficiaire, alors que les prestations versées par la Régie des rentes du Québec sont imposables. Cette différence de traitement fiscal provient de la nature même des sommes versées qui servent à dédommager la victime d'un accident d'automobile, alors que, en ce qui concerne la rente d'invalidité du Régime de rentes du Québec, il s'agit là d'un revenu qui résulte de cotisations ayant déjà fait l'objet d'une déduction fiscale. Ainsi, la personne qui n'a pas droit à la rente d'invalidité, soit parce qu'elle n'a pas assez cotisé à la Régie des rentes, soit parce que son invalidité n'est pas suffisamment grave pour lui reconnaître le droit à une rente d'invalidité, reçoit une indemnisation globale non imposable. Elle reçoit cette indemnisation, il va de soi, de la Société de l'assurance automobile du Québec.

Par ailleurs, deux personnes occupant la même voiture et qui auraient un accident duquel résulte l'invalidité pour les deux personnes, la personne qui n'a pas cotisé à la Régie des rentes ou insuffisamment se verrait recevoir une rente de la Société de l'assurance automobile du Québec qui, elle, serait non imposable, alors que l'autre personne, dans la même voiture, qui aurait une invalidité à la suite de cet accident-là et qui aurait droit à la Régie des rentes du Québec et à une rente de la Société de l'assurance automobile du Québec verrait la partie versée par la Société de l'assurance automobile du Québec non imposable, alors que la partie de la rente est imposable. C'est cette injustice, sinon une injustice, à tout le moins une inéquité fiscale, que nous voulons corriger.

Ce problème tire enfin sa source du double mode de coordination des prestations de ces deux organismes. J'aimerais ici, comme je l'ai fait lors de l'adoption du principe de ce projet de loi, brosser un court historique du problème que vise à régler le projet de loi 106. Le programme d'assurance automobile, qui a été créé en 1978, prévoit des prestations en cas d'incapacité. Ces prestations, dites indemnités de remplacement du revenu, sont coordonnées par les rentes d'invalidité du Régime de rentes du Québec, puisque, comme chacun le sait, ce Régime est à la base de la sécurité du revenu, non seulement lors de la retraite ou du décès du cotisant, mais aussi en cas d'invalidité du cotisant.

On peut décrire cette coordination comme étant un agencement des montants payés par la Société de l'assurance automobile du Québec et la Régie des rentes du Québec dont le but est d'empêcher qu'il y ait une double indemnisation pour un même accident. Alors, si chacun payait sans voir ce que l'autre paie, un accidenté de la route serait payé par la Société de l'assurance automobile du Québec et par la Régie des rentes. Donc, il y avait obligation, si on ne voulait pas voir verser deux prestations complètes d'indemnité, il fallait qu'on puisse harmoniser les deux organismes. Ainsi, lorsqu'un accidenté de la route acquiert droit à des prestations payables en vertu de ces deux programmes, l'indemnité de remplacement du revenu qu'il reçoit de la Loi sur l'assurance automobile est réduite du montant de la rente d'invalidité que lui verse la Régie des rentes. Alors, elles se complètent, à ce moment-là.

Lors de la réforme du programme d'assurance automobile qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1990, la Loi sur le régime de rentes du Québec a été modifiée afin de faciliter la coordination qui existait déjà. Depuis ce moment-là, l'accidenté de la route est présumé avoir présenté une demande de rente d'invalidité à la Régie et, s'il a droit à cette rente, celle-ci lui est payée par l'entremise de la Société de l'assurance automobile du Québec. Aussi, lorsque la Société reçoit la rente d'invalidité pour l'automobiliste accidenté, elle effectue la coordination telle que prévue par la Loi sur l'assurance automobile qui consiste à intégrer le montant de la rente d'invalidité à l'indemnité que la Société de l'assurance automobile verse. Ces règles particulières du versement de la rente d'invalidité avaient pour objet, d'une part, d'éviter à l'accidenté de la route d'avoir recours à deux organismes, la Société de l'assurance automobile et la Régie des rentes, pour faire reconnaître ses droits et, d'une part, lui permettre de recevoir une somme globale d'un seul organisme.

(12 heures)

Cette nouvelle technique de coordination entre la Société et la Régie, qui consistait essentiellement à assurer un versement global de deux prestations par un même organisme, a eu cependant comme effet de rendre plus évident un problème de traitement fiscal. En effet, l'accidenté de la route reçoit son indemnisation de la Société de l'assurance automobile durant toute l'année, et ce n'est qu'au moment de remplir sa déclaration auprès de la Régie des rentes du Québec que, là, il se voit obligé de payer des impôts. Alors, vous voyez le portrait, M. le Président. Pendant un an, il est couvert par la Société de l'assurance automobile du Québec; après un an, il recourt à la Régie des rentes du Québec, tel qu'est son droit, et, là, c'est la Régie des rentes qui verse sa part à la Société de l'assurance automobile, et il sort seulement un chèque.

Cependant, la disparité de traitement fiscal qui est dénoncée résulte, comme je viens de le mentionner, du fait que c'est la rente d'invalidité de la Régie des rentes qui demeure payable à l'accidenté de la route. Donc, l'accidenté de la route reçoit un chèque de l'assurance automobile et reçoit un T4 de la Régie des rentes, parce que la Régie des rentes compense une partie de la rente qui est versée par la Société de l'assurance automobile. Alors, à la fois, ça entraînait des tracasseries et de longues explications. Il fallait corriger la situation.

Et aussi, afin d'y remédier, M. le Président, l'article 1 du projet de loi 106, qui en est la disposition essentielle, introduit un nouveau mode de coordination. Dorénavant, la rente d'invalidité du Régime de rentes du Québec ne sera désormais plus payable pour un accident de la route si le cotisant a droit à une indemnité en vertu de la Loi sur l'assurance automobile. La totalité de l'indemnisation pour l'invalidité résultant de l'accident sera alors exclue du revenu imposable du bénéficiaire, puisque seule l'indemnité versée par la Société de l'assurance automobile du Québec lui sera payable et que cette indemnité ne sera aucunement réduite.

Cependant, pour les quelques cas où l'invalidité est inférieure à la rente d'invalidité, le projet de loi prévoit qu'une rente résiduelle pourra être payable au cotisant en vertu du Régime de rentes du Québec. Seule cette rente, qui correspond à la différence entre la rente d'invalidité normalement payée et l'indemnité reçue, devrait être incluse dans le revenu imposable du bénéficiaire. Cette rente résiduelle continuera d'être versée par l'entremise de la Société de l'assurance automobile du Québec, puisque l'expérience de ce genre de versement s'est montrée, depuis 1990, fort positive pour les prestataires, les bénéficiaires.

Dans les communications avec le bénéficiaire, ce montant résiduel de la rente d'invalidité sera clairement identifié comme provenant de la Régie des rentes du Québec. Par ailleurs, le cotisant bénéficiaire d'une rente d'invalidité du Régime de rentes bénéficie d'une série de mesures particulières dont l'application doit être maintenue pour que la personne dont l'invalidité résulte d'un accident de la route reçoive le même traitement que les autres cotisants invalides. Ce qu'on veut dire ici, c'est que, en recevant une rente d'invalidité de la Régie des rentes, la personne est présumée continuer de contribuer à la Régie des rentes. Donc, elle augmente sa couverture à la retraite, de même que la couverture de ses dépendants et de son conjoint en cas de décès. C'est pourquoi le projet de loi présenté maintient l'application de l'ensemble des dispositions du Régime de rentes du Québec au cotisant bénéficiaire de l'indemnité, malgré le fait que la rente d'invalidité ne lui soit pas payable.

Grâce au maintien de ces dispositions, la période cotisable pourra être ajustée par l'exclusion des périodes d'invalidité du cotisant. Il en résultera une augmentation de la rente de retraite et, en cas de décès, de la rente, je disais donc, qui pourra être versée au conjoint survivant. De plus, chacun de ses enfants de moins de 18 ans qui est à sa charge pourra continuer de recevoir une rente d'enfant de cotisant invalide.

Le nouveau mode de coordination des prestations permettra donc que le traitement fiscal soit uniforme pour tous les bénéficiaires d'une indemnité de remplacement du revenu versée par la SAAQ, qu'ils soient ou non admissibles à une rente d'invalidité de la Régie des rentes. Même si, en raison de la coordination, la rente d'invalidité ne pourra être payable au cotisant, l'ensemble des éléments accessoires à cette rente, c'est-à-dire sa capacité d'augmenter sa cotisation et de couvrir ses dépendants et lui-même, ou lui-même à la retraite, ça lui assurera un traitement égal à celui que reçoivent l'ensemble des bénéficiaires de la rente d'invalidité du Régime de rentes du Québec.

Avoir agi autrement, on aurait eu un traitement différent selon que vous étiez devenu invalide à la suite d'un accident dans votre résidence ou d'un accident d'automobile. Dans le cas d'un accident dans une résidence, vous êtes présumé continuer à contribuer, ou d'un accident de travail, par exemple, vous êtes présumé continuer à contribuer à la Régie des rentes, donc augmenter votre rente à la retraite – la même chose pour n'importe quel accident qui invalide – alors que celui qui a un accident invalidant à la suite d'un accident d'automobile n'aurait pas la même couverture. C'est ce que nous avons voulu corriger.

Le projet de loi modifie également les dispositions actuelles de la Loi sur l'assurance automobile. La réduction de l'indemnité en fonction du droit à la rente d'invalidité effectuée en vertu de cette loi doit en effet être abolie, puisque, désormais, elle sera effectuée par la Régie des rentes en vertu de la Loi sur le régime de rentes du Québec.

Par ailleurs, diverses mesures de concordance qui sont nécessaires pour faciliter la coordination des prestations sont introduites dans ces deux lois. Ces mesures concernent notamment le délai de prescription et des modalités de recouvrement des sommes déjà reçues par le cotisant au titre de rente d'invalidité lorsque l'indemnité de remplacement du revenu lui devient payable de façon rétroactive. Le cotisant n'aura donc pas à rembourser directement la Régie des sommes dues par suite de l'application de la nouvelle coordination des prestations, puisque c'est la Société de l'assurance automobile du Québec qui se chargera du recouvrement de ces sommes à même les versements rétroactifs de l'indemnité. Alors, ces modalités particulières de remboursement permettront d'ailleurs un meilleur arrimage de la coordination proposée dès sa mise en application. On évitera ainsi la réclamation, directement du bénéficiaire, des sommes reçues au titre de la rente d'invalidité, alors que les sommes équivalentes lui seront dues au titre d'indemnité de remplacement du revenu.

Par ailleurs, afin que le changement du mode de coordination n'affecte pas le coût global des prestations pour les deux organismes concernés, à savoir la Société de l'assurance automobile et la Régie des rentes, un transfert de sommes est prévu de la Régie des rentes à la Société. Ces sommes correspondent au montant des rentes d'invalidité qui, sans le nouveau mode de coordination, auraient été applicables au cotisant victime d'un accident de la route et auraient, de ce fait, été réduites par la Société de l'assurance automobile du Québec. Autrement dit, c'est l'assurance automobile du Québec, la Société, qui verse la totalité de la rente, et la Régie des rentes verse mensuellement les sommes qu'elle devrait verser si on n'avait pas coordonné les services et centré ça dans un seul organisme. Alors, la Régie des rentes verse les sommes qu'elle devrait normalement verser au bénéficiaire, elle les verse à la Société de l'assurance automobile.

Je voudrais préciser enfin, M. le Président, que le projet de loi 106 vise non seulement à uniformiser le traitement fiscal entre les bénéficiaires d'une indemnité versée par la SAAQ, mais aussi, par la même occasion, à uniformiser l'application de la coordination pour que tous les accidentés de la route tirent avantage de la collaboration établie entre la Régie et la Société de l'assurance automobile.

Comme je l'ai déjà mentionné à l'occasion de l'adoption du principe du présent projet de loi, la coordination continue de s'effectuer sans l'intervention de la Régie pour les victimes d'accidents survenus avant le 1er janvier 1990, puisque la réforme de 1990 ne s'appliquait qu'aux personnes ayant subi un dommage corporel en raison d'un accident d'automobile survenu à compter de son entrée en vigueur. Ces personnes n'ont donc jusqu'à maintenant pas pu bénéficier de l'avantage que confère le versement des prestations par un seul organisme et elles connaissent, elles aussi, le même problème d'ordre fiscal.

De façon à régler de la manière la plus complète possible le problème posé, le projet de loi propose que les mesures introduites soient applicables dès leur entrée en vigueur à tous les cotisants admissibles à une rente d'invalidité de la Régie des rentes du Québec en raison d'un accident d'automobile, et ce, sans égard à la date de l'accident. Il est à préciser que le mode de coordination proposé ne pourra s'appliquer sans que les systèmes informatiques de la Régie des rentes et de la Société de l'assurance automobile aient été modifiés en conséquence.

Par ailleurs, une nouvelle entente d'échange de renseignements entre ces deux organismes permettant notamment d'identifier les cotisants victimes d'accidents survenus avant 1990 devra nécessairement être conclue. C'est ce qui explique que les nouvelles dispositions de la loi entreront en vigueur à la date que fixera le gouvernement, parce qu'on aurait pu dire au 1er janvier, mais il faut prévoir des modifications aux systèmes informatiques.

(12 h 10)

Toutefois, en raison des conséquences fiscales des modifications proposées, un amendement a été adopté en commission parlementaire pour établir que les nouvelles dispositions pourront s'appliquer avec effet rétroactif au 1er janvier 1996. Grâce à cet amendement, les bénéficiaires de ces deux programmes gouvernementaux bénéficieront des avantages conférés par le nouveau mode de coordination de leurs prestations pour toute l'année 1996, et ce, malgré les délais nécessaires pour une mise en application harmonieuse de la coordination proposée qui requiert d'importantes modifications aux systèmes informatiques, je le rappelle, des organismes impliqués et la conclusion de nouvelles ententes d'échange de renseignements entre eux.

Enfin, le projet de loi 106 vient remédier à une injustice dans le traitement des accidentés de la route. Aussi, j'en recommande l'adoption. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la ministre de la Sécurité du revenu. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité du revenu et de Régie des rentes du Québec. À vous la parole, Mme la députée.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Tout d'abord, aujourd'hui, nous sommes à l'étape finale du projet de loi 106, soit son adoption, projet de loi, comme vient de le mentionner la ministre, qui modifie la Loi sur le régime de rentes du Québec et la Loi sur l'assurance automobile du Québec.

D'entrée de jeu, M. le Président, je tiens à vous rappeler que l'opposition officielle a collaboré et s'est associée, de façon harmonieuse, à travers toutes les étapes qu'a dû franchir le projet de loi 106, autant au moment de son adoption de l'accord de principe qu'en commission parlementaire et que, aujourd'hui, pour son adoption.

Premièrement, je dois vous dire que nous sommes en accord avec le projet de loi parce qu'il s'agit, ici, d'une mesure qui est juste et équitable pour les accidentés de la route. Comme l'a précisé la ministre en expliquant le projet de loi 106, les grandes lignes du projet de loi 106, ce projet vise essentiellement à corriger une disparité fiscale et une iniquité qui est existante dans le traitement des sommes qui sont versées aux accidentés de la route qui sont indemnisés uniquement par la Société de l'assurance automobile du Québec et les accidentés de la route qui sont indemnisés par la Régie des rentes du Québec et par l'assurance automobile du Québec. Il nous apparaît, pour l'opposition officielle, que c'est très juste et équitable d'uniformiser, finalement, ces deux rentes en une seule indemnité globale, totale et non imposable pour tous les accidentés de la route. Il n'y a aucune raison valable, pour nous, que soit pénalisé un accidenté de la route par rapport à un autre accidenté de la route en raison du fait que l'un est admissible à une rente d'invalidité de la Régie des rentes du Québec et l'autre de la Société de l'assurance automobile du Québec.

M. le Président, il y a un autre aspect du projet de loi qui est, pour nous, très important. C'est que le projet de loi 106 vise, également, à conserver tous les avantages qui sont reliés à une rente d'invalidité de la Régie des rentes du Québec, même si les victimes de la route n'y auront plus droit, puisque, comme l'a expliqué la ministre tantôt, dorénavant, la totalité des sommes qui seront versées seront sous forme de remplacement du revenu et payées uniquement par la Société de l'assurance automobile du Québec.

Ce projet de loi aussi apporte toutes les garanties requises à la protection de ces droits, notamment l'ouverture du droit à la rente de retraite, à la prestation pour enfant invalide et la préservation de la rente de décès, dans l'éventualité, il va de soi, du décès de la personne invalide. Pour nous, cette garantie-là, dans le projet de loi, était très importante, et nous sommes très heureux qu'elle apparaisse dans le projet de loi 106.

Nous avons, durant la commission parlementaire article par article, exprimé à la ministre quelques inquiétudes au niveau du gouvernement fédéral quant à la perte des revenus fiscaux que le projet de loi 106 va apporter au niveau du traitement fiscal au niveau fédéral, mais la ministre nous a assurés, en commission parlementaire, que tout a été fait de façon conforme, tout ça en respectant la juridiction des deux gouvernements: le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral.

Alors, M. le Président, en terminant, je répète que l'opposition officielle, que mes collègues de la commission des affaires sociales, ensemble, nous avons travaillé de façon harmonieuse à ce projet de loi, et c'est avec plaisir que nous allons voter pour son adoption, en espérant, en souhaitant, que le projet de loi sera mis en vigueur le plus tôt possible, et cela, M. le Président, en pensant aux victimes et aux accidentés de la route. Merci beaucoup.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Le projet de loi 106, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et la Loi sur l'assurance automobile, est-il adopté? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui. Je vous demanderais de rappeler l'article 13 du feuilleton de ce jour, mais je crois qu'on devra suspendre quelques instants, puisque c'est maintenant au tour de l'opposition. Je ne sais pas qui va intervenir – ah! d'accord – sur les courses. Parfait. Alors, l'article 13, M. le Président.


Projet de loi 114


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bélanger): Donc, nous revenons à l'article 13 du feuilleton. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du principe du projet de loi 114, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et d'autres dispositions législatives concernant l'industrie des courses de chevaux.

Alors, je suis maintenant prêt à céder la parole à M. le député de Shefford. À vous la parole, M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Je prends la parole immédiatement devant mon collègue de Pontiac qui viendra ici bientôt, et c'est lui qui sera porte-parole dans ce dossier-là pour la commission parlementaire qui, je crois, sera appelée cet après-midi.

M. le Président, le projet de loi 114 est un projet de loi important. Nous savons tous – et le ministre de l'Agriculture le sait très bien aussi – que l'industrie des chevaux de course est présentement en crise et que nous avons besoin d'intervenir rapidement. Donc, M. le Président, pour illustrer l'importance de l'industrie des chevaux, on sait qu'aujourd'hui, au Québec, nous avons tout près de 54 000 chevaux, toute catégorie. Naturellement, là-dedans, 73 % des chevaux du Québec sont utilisés à des fins de loisirs et 12 % à des fins de courses. Ce n'est pas parce qu'on en utilise seulement 12 % à des fins de courses que l'industrie est moins importante; au contraire, l'industrie des courses procure au moins 4 000 emplois au Québec, pour un total d'environ 8 600 emplois dans toute l'industrie des chevaux.

Naturellement, pour plusieurs, ici, l'industrie des courses de chevaux ou l'industrie du cheval en général paraît anodine, mais, dans le domaine de l'agriculture, on sait que l'industrie du cheval vient au quatrième rang. On sait naturellement que l'industrie laitière est la plus importante, l'industrie du porc, l'industrie des céréales, mais l'industrie du cheval vient au quatrième rang. Les dépenses d'élevage seulement, M. le Président, au Québec, s'élèvent à 353 000 000 $, donc c'est une industrie très importante. Les salaires payés s'élèvent à au-delà de 255 000 000 $ et les retombées agricoles sont certaines.

M. le Président, pas plus tard que la semaine dernière, on pouvait lire ici: «Plus de 53 800 chevaux au Québec. L'industrie procure de l'emploi à 8 600 personnes.» Et je désire simplement citer un passage de l'article pour dénoter l'importance de l'industrie du cheval, et particulièrement de l'industrie des courses, pour signaler et bien démontrer que le projet de loi est important à l'heure où on se parle. Il dit: «Juste pour nous situer un peu, retenons certaines dépenses associées au cheval: 52 300 000 $ pour les aliments (foin et concentrés); 18 600 000 $ pour les soins vétérinaires; 16 800 000 $ pour les services de maréchalerie; 12 700 000 $ pour l'achat de litière; 10 200 000 $ pour frais de saillie; 7 100 000 $ pour les cours d'équitation et 4 900 000 $ pour des services de cordonnerie.

«En 1995, beaucoup de gens vivent donc grâce au cheval. Pour chaque dépense de 100 $ dans ce domaine, 72,30 $ sont directement virés dans l'économie québécoise, dont 0,3332 $ retournent directement dans le seul secteur agricole, ce qui est considérable.»

Donc, M. le Président, à partir des faits qui nous sont exposés et considérant que l'industrie des courses particulièrement est en difficulté, il est important d'apporter un tel projet de loi. On sait que le gouvernement libéral, auparavant, avait subventionné la SPICC en 1994-1995, en 1995-1996, en 1996-1997. Nous avions d'ailleurs posé des questions ici, en plénière, et lors de l'étude des crédits, sur les courses de chevaux. Naturellement, depuis un an ou depuis quelques mois, il y a des questions qui ont été soulevées, particulièrement par le maire de Québec, le maire de Trois-Rivières, qui ont fait toutes sortes de suggestions afin de sauver, pour ainsi dire, l'industrie des courses au Québec.

(12 h 20)

Donc, le projet de loi 114 nous propose, premièrement, la création d'un fonds, d'un fonds qui servira à l'industrie du cheval, et propose aussi d'installer un nombre supérieur d'appareils de loterie vidéo. Donc, c'étaient des suggestions, des parties de suggestions faites par le maire de Québec à l'époque. Il y a aussi d'autres suggestions qu'il a apportées qu'on pourra discuter en commission parlementaire, mais que je crois, pour ma part, plus ou moins acceptables. Et j'imagine que, si le ministre de l'Agriculture n'a pas retenu ces suggestions, c'est qu'il les considérait, lui aussi, non acceptables.

Donc, M. le Président, l'aide aux courses de chevaux est nécessaire, présentement, au Québec, c'est un besoin. On a fait un tour d'horizon de ce qui se faisait ailleurs au Canada pour aider l'industrie du cheval. On s'est aperçu que le secteur privé est intervenu beaucoup plus rapidement et activement en Ontario, par exemple. Donc, j'espère que, suite au coup de main que le gouvernement du Québec pourra donner à l'industrie des courses, on pourra encourager ou donner les moyens nécessaires pour que le secteur privé intervienne et prenne charge des courses de chevaux.

Donc, le projet de loi a pour but, principalement, d'aider les hippodromes, et particulièrement les hippodromes de Trois-Rivières, Montréal et Québec pour lesquels on a pu constater beaucoup de lacunes lors des dernières années. Et, pour vous situer l'importance d'intervenir auprès de ces hippodromes, M. le Président, je peux simplement vous dire qu'à Trois-Rivières, seulement en 1994, il y a eu 360 000 $ de pertes et ils ne paient ni loyer ni taxes municipales. À Montréal, Montréal a terminé l'année avec un déficit d'exploitation de 4 800 000 $. On prévoit cette année un déficit d'au moins 300 000 $ et de 400 000 $ l'année suivante. La ville perçoit 4 200 000 $ en loyer et en taxes municipales. En fin de compte, le déficit, c'est le paiement du loyer et des taxes municipales. À Québec, on a terminé l'année avec un bénéfice de 17 000 $, mais on prévoit des pertes de 60 000 $ cette année et possiblement de tout près de 340 000 $ l'an prochain. Je rappelle que l'Hippodrome de Québec ne paie ni loyer ni taxes municipales. Mais, par contre, M. le Président, ça donne du travail, seulement à Québec, à 541 personnes à plein temps ou à temps partiel. On y compte aussi 14 machines à sous.

Donc, M. le Président, de 1980 à 1994, le volume annuel des paris a diminué de 35 % et l'assistance à ces organismes a baissé de 64 %. Les revenus de taxes sur les paris mutuels perçues par le gouvernement n'ont pas cessé de diminuer non plus, ils sont passés de 20 900 000 $ en 1990 à 16 200 000 $ l'an dernier. Sur cette somme, on a remis à la SPICC 11 300 000 $, on a remis 2 000 000 $ à la Régie des alcools, des courses et des jeux et 2 800 000 $ de gains nets du gouvernement. Donc, on peut constater, à la lecture de ces statistiques, que l'industrie des courses, principalement l'industrie des courses est en difficulté, et on sait, particulièrement dans cette industrie qui est agricole, qu'elle est, en fin de compte, la pierre angulaire de toute l'industrie du cheval au Québec qui, je le répète, procure des emplois à 8 600 personnes.

Donc, le projet de loi 114 a pour but de venir à la rescousse de l'industrie des courses et particulièrement des hippodromes. Je disais, tantôt, au début de mon exposé, que le projet de loi 114 crée un fonds, un fonds qui sera administré non pas par le MAPAQ, mais par le ministère des Finances. Donc, évidemment, M. le Président, en commission parlementaire – et j'espère que nous serons appelés le plus tôt possible – nous aurons des questions à poser sur le système d'opération du Fonds. Naturellement, il me semble peut-être un peu curieux que le Fonds soit administré par le ministre des Finances. On se pose la question: Pourquoi on déroge à l'article 13 de la Loi sur l'administration financière pour confier au Contrôleur des finances la comptabilité du gouvernement? On se demande aussi: Pourquoi n'offre-t-on pas la gestion du Fonds au ministère compétent, donc au ministère qui administre l'agriculture du Québec et, pour ainsi dire, aussi les courses de chevaux?

Donc, le Fonds sera créé, mais sera quand même à la disposition du gouvernement pour les autres dépenses. Donc, c'est un fonds, peut-être un fonds un peu artificiel qui pourra servir à autre chose en attendant que les courses en aient besoin. Donc, on posera des questions au ministre sur l'administration du Fonds. À la première lecture du projet de loi 114, nous avons besoin de clarifications à ce sujet-là. Pour le reste, M. le Président, nous sommes en accord, pour ainsi dire, en accord avec le grand principe d'aide aux courses de chevaux, considérant l'importance de l'industrie, considérant l'importance des revenus qui sont amenés à la classe agricole du Québec de même que le nombre d'emplois qui sont créés, principalement à Québec, à Montréal et à Trois-Rivières.

Il y a aussi d'autres aspects qui seront vus tantôt par le député de Pontiac, qui sera probablement l'intervenant principal en commission parlementaire et le porte-parole de l'opposition à ce moment-là, qui aura des questions, aussi, sur d'autres hippodromes au Québec, qui, présentement, ne sont pas en opération.

M. le Président, pour conclure, tout simplement, en ce qui concerne le principe, nous sommes d'accord avec ce grand principe là. Je pense qu'il est important de sauver l'industrie des courses et, par conséquent, aussi de protéger une grande industrie qui est celle du cheval, qui, je le répète, là, procure de l'emploi et des revenus à beaucoup d'agriculteurs et d'intervenants dans les courses au Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Shefford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Pontiac. À vous la parole, M. le député.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Regardez, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi 114, M. le Président, et je suis convaincu que le ministre de l'Agriculture sait pourquoi. Ça fait au-delà d'un an qu'à toutes les semaines je communique avec lui parce que, juste par hasard, dans le beau comté de Pontiac, il y a la piste, l'Hippodrome Connaught Park, le seul hippodrome au Québec de l'entreprise privée. Ce n'est pas la ville de Montréal, ce n'est pas la ville de Trois-Rivières et ce n'est pas la ville de Québec, c'est privé. Malheureusement, à cause de la situation difficile qu'a décrite le ministre dans le domaine des courses depuis la venue des casinos, cette piste a dû fermer au mois de mars, avril, l'an dernier, et c'est malheureux, M. le Président, lorsqu'on voit qu'il y a quelque 400 emplois, des personnes qui travaillent à la piste et aussi des éleveurs de chevaux, pas seulement du comté de Pontiac mais des éleveurs de chevaux de tout l'Outaouais.

Et une chose, je pense, qu'il faut comprendre, c'est qu'on a besoin... Peut-être que c'est Blue Bonnets, la piste la plus importante au Québec, mais les pistes de Québec, Trois-Rivières et Connaught Park, c'est un peu comme au hockey, une équipe ferme, et c'est là, à ces pistes-là, où les chevaux, et les entraîneurs, et les conducteurs peuvent faire leur école et, éventuellement, les chevaux qui sont les meilleurs finissent à Blue Bonnets ou, ensuite, vont peut-être aller aux États-Unis, comme les conducteurs. Et je pense que c'est un peu ça, l'importance de l'industrie des chevaux de course au Québec.

(12 h 30)

Nous sommes, comme le disait mon collègue de Shefford, d'accord avec le principe. Il est grandement temps qu'on puisse poser des gestes dans ce domaine-là. Et je pense qu'en plus des pistes les hommes de chevaux... Il me semble qu'il y a un nouveau problème qui semble survenir, M. le Président, c'est dans le sens que les éleveurs de chevaux... Je lisais hier dans The Gazette que les bons étalons du Québec, malheureusement, à cause de pas suffisamment de revenus, on les perd soit en Ontario soit aux États-Unis, et il me semble, et j'espère – et c'est des questions qu'on pourra poser au ministre... Le Fonds, la SPICC, est-ce que la SPICC va aussi s'occuper de fournir de l'aide pour qu'on puisse garder chez nous les meilleurs chevaux pour la reproduction? Parce que c'est certainement ça; ça aussi, c'est une piste de revenus pour toute la société québécoise.

Donc, M. le Président, oui, nous avons été un peu lents à réagir ici, malheureusement, au Québec, sauf qu'il n'y a pas seulement les machines vidéopoker dont on va permettre d'augmenter le nombre aux pistes de courses, il y a aussi les salons de paris.

Et je pense que, là aussi, il va falloir qu'on règle un peu les frontières. Il semblerait que, maintenant, Blue Bonnets est rendue un peu dans la région de l'Outaouais, qui est censée être réservée dans la zone 4, pour la piste Connaught. C'est toutes des choses comme ça. Si on veut s'assurer que les pistes de Trois-Rivières, Québec et Connaught – si on peut rouvrir Connaught, puis on est capable de subsister – et permettre le développement des chevaux et des conducteurs pour, finalement, arriver à la grande piste de Blue Bonnets, il va falloir que ces gens-là aussi aient les moyens de survivre.

M. le Président, il y a aussi, pour permettre à certains hippodromes d'aller chercher des revenus, le «simulcasting», qu'on appelle en anglais – malheureusement, je ne connais pas la traduction française. C'est que, dans les pistes, on reçoit des courses qui se font, comme, par exemple, le Kentucky Derby – les pur-sang – le Preakness et le Belmont Stakes, c'est des courses d'intérêt, et ça permet aux gens d'aller à la piste, de faire leurs paris, et ça donne des revenus. Donc, ça, c'est des revenus d'appoint qui, avec tous les autres moyens possibles, vont nous permettre de maintenir au Québec une industrie des chevaux de courses, une industrie de courses qui existe depuis tellement longtemps. Je pense qu'il y a même des indications, cette année, dans la région de l'Outaouais, parce que, de l'autre côté de la rivière, Rideau Carleton a assumé les trois mois – normalement, on aurait eu des courses à la piste Connaught – et on nous indique qu'ils ont été réellement surpris cette année de voir que ça a été une meilleure année. Ils vont probablement faire un déficit, mais moindre. Il y a eu une augmentation, et l'augmentation des revenus est attribuée un peu aux salons hors pistes, qui existent aussi en Ontario, et aussi au «simulcasting», recevoir des courses qui viennent d'un peu partout à travers le monde.

Toutefois, M. le Président, il y a un élément de plus qu'on va avoir ici au Québec dans nos hippodromes, c'est certainement les machines vidéopoker, dont on a augmenté le nombre. Et, sur ça, on aura certainement des questions à demander: Comment on est arrivé à choisir un chiffre comme... c'est 100, je crois, à Blue Bonnets, à Montréal, 125, 100... De quelle façon on est arrivé à le choisir? Et, si, par hasard, on pouvait démontrer qu'il y aurait un intérêt financier à augmenter ça, une fois qu'on a passé le projet de loi, pour assurer la vie de nos hippodromes, est-ce que ce serait facile à faire?

M. le Président, on a des exemples de réussite au Manitoba, à Winnipeg, Assiniboia Downs, qui a fermé ses portes, mais qui a rouvert il y a presque un an maintenant. Et le secret a été d'avoir les courses de pur-sang, les courses sous harnais, et aussi d'avoir des machines vidéopoker telles qu'on prévoit avoir ici au Québec. Je suis convaincu que, là aussi, le «simulcasting», qui apporte encore d'autres personnes et qui assure un plus grand revenu...

M. le Président, j'aimerais vous montrer ça juste pour montrer ce qu'on fait. On parle de la compétition, des casinos, des loteries versus l'hippodrome, les pistes de courses. Et je recevais aujourd'hui... C'est à Toronto qu'ils ont fait ça, à Woodbine. Ça dit: «You'll win the lottery when hell freezes over.» En d'autres mots: Vous allez gagner à la loterie lorsque l'enfer va être gelé. «But you'll win at the racetrack when Woodbine freezes over.» En d'autres mots: Venez à la piste Woodbine et vous allez gagner. Donc, vous voyez qu'ils font de la publicité dans le sens qu'il n'y a pas seulement que la loterie, les casinos: Venez aux courses et vos chances seront probablement meilleures de gagner que d'acheter un billet de loterie. Peut-être aussi qu'on devrait, ici au Québec... Je voyais que, dans le discours du ministre à Blue Bonnets, au mois de septembre, il avait félicité, je pense que c'est IGA, pour la promotion, ce qu'ils font comme concours à la télévision. Peut-être qu'on devrait, dans ce sens-là... Parce que c'est une industrie, comme on dit, qui est de 4 000 emplois ici, au Québec, et une industrie dans laquelle, comme collectivité québécoise, on a investi beaucoup d'argent: on a investi de l'argent pour améliorer les pistes, on a investi beaucoup d'argent dans l'élevage des chevaux. C'est pour ça que je disais qu'il faudrait s'assurer de prendre les moyens pour maintenir une bonne qualité de chevaux, que nos étalons, les meilleurs, on puisse les garder ici, au Québec, quitte à ce qu'à la SPICC on ait un fonds là aussi pour aider les gens à garder ces étalons-là, parce qu'on s'aperçoit qu'une fois qu'ils partent du Québec... On a eu des problèmes à obtenir 3 500 $ pour les frais, tandis que, là-bas, on demande 5 000 $, et ça fonctionne. Donc, qu'est-ce qui arrive ici, au Québec? Il me semble qu'on devrait regarder ça.

Donc, M. le Président, comme je le disais, c'est un projet de loi important pour l'industrie des courses de chevaux. J'espère qu'en commission parlementaire on pourra obtenir des réponses à toutes les questions qu'on a, nos préoccupations. Et une que j'ai soulevée au ministre à plusieurs reprises, c'est que, dans le projet de loi, présentement, on voit que, lorsqu'on parle du nombre de machines vidéopoker, on parle de la piste de courses de Montréal, on parle de la piste de courses de Québec et aussi on parle de la piste de courses de Trois-Rivières. Et, comme il le sait bien, le ministre, j'espère fort bien, moi, que la piste Connaught pourra rouvrir au début de l'année 1996. À ce moment-là, si ce n'est pas ouvert lorsqu'on aura passé le projet de loi, ça ne s'appliquera pas.

On m'indique, moi, qu'il serait peut-être possible, dans le contexte, au lieu d'identifier les pistes de courses comme Montréal, Québec, Trois-Rivières, de les identifier par la zone. Je pense que Montréal, c'est la zone 1; Québec, c'est la zone 2; Trois-Rivières, c'est la zone 3; et l'Outaouais est la zone 4. De cette façon-là, si on le faisait selon la zone, ça couvrirait un peu... C'est des pistes de classe A, dans ces zones-là. Il y a toute cette possibilité aussi que la piste de Blue Bonnets soit fermée et qu'on en construise une sur la rive sud ou à d'autres endroits dans la région de Montréal. Donc, à ce moment-là, si on avait identifié par les zones et la classe, ça serait là et applicable. On ne serait pas obligé de revenir et de faire des changements.

Moi, ce qui me préoccupe, c'est que je crois et j'espère fermement que la piste Connaught pourra rouvrir ses portes en 1996 et que ces gens-là pourront en bénéficier, parce que, comme je l'indiquais tantôt, M. le Président, c'est la seule piste au Québec qui appartient à l'entreprise privée. Donc, je dois vous dire que, collectivement, les Québécois ont aidé beaucoup plus à Québec, Trois-Rivières et Montréal à maintenir l'industrie des chevaux de course qu'ils ne l'ont fait dans l'Outaouais, parce que, dans l'Outaouais, étant une entreprise privée, elle paie des taxes. Elle paie des taxes à la commission scolaire, elle paie des taxes à la municipalité. Donc, à ce moment-là, c'est des revenus d'appoint, et, à ce moment-là, je crois que ça serait certainement... je suis convaincu que le ministre préférerait que toutes les pistes appartiennent à l'entreprise privée; elles pourraient, à ce moment-là, les pistes, être viables et rentables, et ce serait certainement moins de problèmes pour toute la collectivité québécoise.

Donc, M. le Président, en terminant, oui, nous sommes d'accord et nous espérons être capables de bonifier et de voir les changements, donc, que je suggérais ici, pour s'assurer qu'on ne soit pas obligé de revenir à tout bout de champ faire des changements, si on peut couvrir d'une façon assez générale ces points-là. Je sais, M. le Président, qu'il y a peut-être un de nos collègues qui va un peu questionner sur le fonds lui-même, mais, essentiellement, le fonds pour aider l'industrie des chevaux de course, nous sommes certainement totalement d'accord. Merci.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Pontiac. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. À vous la parole, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Le député de Shefford et le député de Pontiac ont, avec beaucoup d'éloquence, suivi les déclarations du député de Bonaventure et ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation quant à l'importance de l'industrie des chevaux de course. Je n'y rentrerai pas et je ne referai pas, actuellement, les arguments qui ont été déposés devant cette Assemblée. C'est une industrie qui regroupe plus de 4 000 ou 4 500 travailleurs, c'est une industrie qui est importante, qui est en difficulté et qui justifie – et, je pense, les intervenants précédents l'ont amplement démontré – une aide gouvernementale dans la période difficile qu'elle traverse.

(12 h 40)

Donc, ceci étant dit, la question que je pose et que je vais débattre avec vous, c'est: Est-ce que le véhicule que le gouvernement choisit actuellement pour soutenir l'industrie du cheval de course est un véhicule approprié? Est-ce qu'on n'est pas en train, M. le Président, de rentrer dans une manière extrêmement dangereuse de gérer les fonds publics? Et je m'explique. On crée actuellement un fonds pour soutenir l'industrie des courses de chevaux, et ce fonds va recevoir une partie de la taxe sur le pari mutuel. Donc, on se situe, on commence à mettre le pied dans le principe des taxes dédiées, c'est-à-dire au moment où on dit: Tel impôt, telle taxe doit être destiné d'abord à telle fonction. Dans le cas qui nous occupe ici, il s'agit de la taxe sur le pari mutuel, qui serait donc dévolue au fonds et utilisée pour les titulaires de licences et de la société de protection des industries du cheval de course. Mais, M. le Président, il s'agit là d'une pente extrêmement dangereuse en termes de gestion des finances publiques, où au lieu d'utiliser le fonds consolidé pour venir en aide à certains secteurs, par programme, qui sont en difficulté, on décide de donner des taxes dédiées. Et quel argument ce gouvernement aura demain pour ne pas dire, par exemple: Pour entretenir les chemins ou les autoroutes, dédions une partie de la taxe sur l'essence ou une partie de telle ou telle taxe? Pourquoi la taxe d'amusement, par exemple, ne serait pas dédiée à l'intérieur d'un fonds destiné spécifiquement à soutenir l'industrie de la culture? Et, quand on commence à aller dans cette direction, M. le Président, on change considérablement la philosophie de gestion. Au lieu d'avoir un fonds consolidé où l'ensemble des taxes et impôts sont dévolus et où l'Exécutif, c'est-à-dire le gouvernement, en fonction des programmes qui lui sont propres, a droit de soutenir telle ou telle partie de l'industrie, on fractionne l'assiette fiscale, c'est-à-dire on prend une partie de telle et telle taxe et on dit que cette taxe va être spécifiquement dédiée à telle chose.

Alors, on pourrait absolument, M. le Président, envisager toutes sortes de choses. Pourquoi ne créerait-on pas un fonds sur la santé, et on dirait: Tel type de taxation devrait être utilisé spécifiquement pour la santé? Pourquoi il n'y aurait pas des fonds sur l'éducation, où, à ce moment-là, au lieu d'avoir, comme État et comme gouvernement, une assiette fiscale, un fonds consolidé et un budget que le ministre des Finances dépose et décide quelles sont les priorités du gouvernement, on aurait strictement... Chacun des sous-groupes ou des sous-fonds aurait partagé les revenus de l'État, partagé l'impôt. Je sais qu'il y a eu déjà un précédent – qu'on pourrait qualifier, peut-être, de pas nécessairement utile – lorsqu'on a, dans la surtaxe appliquée aux plaques d'immatriculation, dévié le résultat de cette surtaxe spécifiquement pour le transport en commun dans les communautés urbaines soit de Québec, soit de Montréal. Mais, à part cette exception... C'est la seule exception que je connaisse où on a eu, dans la gestion gouvernementale, une taxe dédiée.

À l'heure actuelle, M. le Président, dans l'approche gouvernementale, on a aujourd'hui une taxe dédiée, c'est-à-dire une partie de l'assiette fiscale de l'État qui est spécifiquement dévolue à un projet particulier de l'État. Je sais, dans les annonces que le gouvernement a faites, que, bientôt, pour soutenir l'action communautaire, au lieu de fonctionner à partir du fonds consolidé, on va créer probablement un fonds de soutien à l'action communautaire qui serait financé à même un autre type de taxe. M. le Président, je m'oppose.

En termes strictement de gestion, et là, comprenons-nous bien, je ne suis pas en train de m'opposer au principe qu'on doit soutenir l'industrie des courses de chevaux, mais, là où je m'oppose, c'est sur le principe de ne pas utiliser le fonds consolidé, c'est-à-dire de prendre toutes les taxes et tous les impôts du gouvernement, de les rentrer à l'intérieur d'un même fonds et d'avoir un ministre des Finances qui, dans son discours du budget, décide comment on alloue les différentes rentrées des impôts payés par l'ensemble des Québécois et des Québécoises, mais qu'au contraire on dise: Tel type d'impôt va spécifiquement aller pour financer tel type d'activité. Et, si on ouvre la porte de plus en plus grande là-dedans, M. le Président, on est en train d'entrer dans une pente extrêmement dangereuse, où, à ce moment-là, et tout à fait de bonne foi, on pourra créer des fonds de plus en plus pour financer ou soutenir des activités particulières du gouvernement à partir de parties des taxes et revenus du gouvernement au lieu de les financer à partir du fonds consolidé. Et c'est là, M. le Président, le point sur lequel j'aurais besoin – je ne veux pas dire que je m'oppose au projet de loi – d'énormes explications de la part du ministre, parce qu'on est, à mon sens, en train d'aller dans une mauvaise direction.

Il y a d'autres points. Par exemple, on dit: Ce fonds va être financé, bien sûr, à partir du fonds consolidé, mais il pourra recevoir aussi des legs et des dons. C'est l'article 21.3, je pense, du projet de loi. Ma question: Est-ce que les legs et dons sont soumis à déductions fiscales ou non? Autrement dit, lorsque quelqu'un fera un legs ou un don à ce fonds, est-ce qu'il bénéficiera, à ce moment-là, d'une exemption fiscale équivalente au legs et au don? C'est-à-dire où, à ce moment-là, on a une participation directe, par un jeu, un mécanisme, simplement, de la fiscalité du fonds consolidé en surplus au fonds qu'on est en train de créer. Je crois, et j'ai bien regardé le projet de loi, que ce n'est pas précisé comme tel. C'est des questions qu'on posera certainement en commission parlementaire.

Mais le danger que je vois dans la direction que prend ce gouvernement – sur un petit projet de loi, j'en conviens – c'est celui de fractionner l'assiette fiscale de l'État, c'est-à-dire les revenus dont chaque gouvernement a droit, pour le «dévoloir» à un projet spécifique. Et c'est un danger grave. On va dire: Bon, ce n'est pas grave, c'est strictement pour quelques millions de dollars qu'on va mettre à l'intérieur du projet de l'industrie des courses de chevaux, mais cette tendance-là, une fois qu'on a commencé à y mettre la main, on va y aller de plus en plus, parce que, quel argument le gouvernement ou le ministre des Finances aura pour tous les conducteurs, par exemple, pour nous dire ce qui circule déjà dans la population: Pourquoi la taxe perçue actuellement sur les carburants ne serait pas spécifiquement dévolue à l'entretien des routes? Je pose la question. Et, à ce moment-là, on fractionne encore; si on applique le principe des fonds, c'est quelque chose qui serait parfaitement logique.

Pourquoi, par exemple, la taxe d'amusement sur les cinémas, les théâtres, etc., ne serait pas spécifiquement dévolue au soutien de l'industrie culturelle? Et on pourrait, à ce moment-là, débattre. Et, quand vous commencez à fractionner, à «partitionner», à fractionner l'assiette fiscale, c'est-à-dire l'ensemble, l'endroit où l'État va chercher ses revenus, je pense, M. le Président, qu'on est sur une pente très, très, très dangereuse, et j'insisterai, j'inviterai fortement le ministre, tout en soutenant son principe de soutenir l'industrie des courses de chevaux, à faire très attention à la direction qu'il prend actuellement en fractionnant l'assiette fiscale de l'État. Merci, M. le Président.

(12 h 50)

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur ce projet de loi? Droit de réplique, M. le ministre. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, pour votre droit de réplique. À vous la parole.


M. Marcel Landry (réplique)

M. Landry (Bonaventure): Merci, M. le Président. Alors, mon propos va être très bref. Les mesures proposées par ce projet de loi, M. le Président, dans le fond, représentent, par rapport au budget de l'État, un impact minime, compte tenu qu'il y a des retours de fonds qui vont arriver par le biais des appareils de loterie vidéo aussi.

Mais, comme le soulignait le député de Shefford tout à l'heure, il y a une importance économique à cette industrie. C'est, au Québec, près de 4 000 emplois; c'est plus de 60 000 000 $ en salaires. Et, en termes d'importance économique, c'est une activité qui correspond à un complément à beaucoup d'autres activités agroalimentaires. Je pense à l'alimentation pour des fins d'élevage, je pense aux services de santé vétérinaires, je pense aussi aux activités d'entretien, de soins, toutes ces activités-là, dans le fond, qui viennent «complémenter», en quelque sorte, d'autres activités se passant en milieu rural.

C'est aussi – et, ça, cet aspect m'apparaît capital – le débouché d'une main-d'oeuvre d'au-delà de 4 000 personnes, qui, bien souvent, n'ont pas d'autre alternative dans leur milieu, que ce soient ceux et celles qui oeuvrent en milieu rural ou ceux et celles qui oeuvrent en milieu urbain. Parce que cette industrie-là a cette caractéristique d'être à la fois une fenêtre de la ruralité en ville, en quelque sorte – des gens qui viennent participer à des événements sportifs, à savoir les courses de chevaux, dans la ville – et c'est, pour beaucoup de citadins aussi un lien avec la vie animale. En quelque sorte, ça permet à des gens de gagner honorablement leur vie dans ces occupations, que ce soit comme palefrenier, comme entraîneur, comme conducteur, et, aussi, tous les services afférents – la maréchalerie, par exemple – et les fournisseurs d'équipement. Donc, il y a là une industrie qu'il m'apparaît important de soutenir.

Les dernières années, on a souligné des problèmes dus à une situation économique difficile, dus à une compétition de certains autres jeux qui existent, de certaines autres activités sportives aussi, qui viennent compétitionner le spectacle des courses. Mais il faut aussi, entre nous, mentionner que cette industrie-là a vécu certains problèmes de crédibilité, et beaucoup d'efforts ont été consentis... Je crois qu'on a l'occasion, au moment de ce projet de loi, de reconnaître aussi les efforts d'assainissement qui ont été faits, d'une part, par une plus grande rigueur de l'État par rapport à certains comportements non désirables, mais aussi par les gens qui y gagnent leur vie. Et, ça, des deux côtés de la Chambre, nous convenons des efforts qui ont été faits dans ce milieu-là.

Les efforts seront consentis au niveau des associations, des groupements, des hippodromes pour avoir une plus grande rigueur dans le respect de l'événement sportif et du spectacle qu'est la course de chevaux. Des réglementations plus sévères en termes de traitement des animaux aussi, qui sont fortement sollicités; des règles aussi de propreté par rapport à cette industrie-là – d'ailleurs, les méthodes et les modes de contrôle se sont resserrés drôlement au cours des dernières années à ce niveau-là.

Ce qu'on a convenu aussi au niveau de la promotion de cette industrie-là, c'est d'élargir la composition de la Société de promotion de l'industrie des courses de chevaux pour que, dorénavant, cette Société-là intègre les hippodromes comme membres de cette Société de promotion là, de sorte que toutes les composantes de l'industrie, les associations d'éleveurs, les associations dites professionnelles – comme l'Association du trot et amble – donc qui regroupe les entraîneurs, les conducteurs, et, aussi, que les hippodromes soient tous présents, les différentes associations d'élevage. En ce sens-là, cette Société-là a un rôle important de promotion.

On a souligné, le député de Pontiac a souligné certaines initiatives prises cette année en collaboration avec un grossiste en alimentation et l'hippodrome de Montréal pour ajouter de la visibilité, une promotion télévisuelle. Certaines initiatives sont justement en train de prendre forme, associant des partenaires économiques pour faciliter cette promotion-là.

En ce sens-là, les efforts de redressement sont consentis, actuellement, et un peu tout le monde a comme convenu, à un moment donné, qu'il était nécessaire, comme on dit, de se serrer collectivement la ceinture pour arriver à replacer sur ses rails cette industrie-là. En ce sens-là, je pense que nous devons aller de l'avant et moderniser, en même temps, notre industrie, la rendre attrayante pour la clientèle, la rendre crédible aussi et, surtout, la rendre viable. Merci.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le député de Verdun, pour une question de règlement?

M. Gautrin: L'article 213. Me permettriez-vous... Est-ce que le ministre accepterait que je lui pose une question, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, en vertu de l'article 213, M. le ministre, un député peut vous demander une question relativement à votre intervention. Est-ce que vous consentez à ce qu'on vous pose une question?

Alors, je comprends qu'il y a consentement. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: J'ai compris, dans la réaction du ministre, l'importance des courses de chevaux, et je pense qu'on n'en disconvient pas de ce côté-ci de la Chambre. Il ne nous a quand même pas répondu: Pourquoi utiliser une taxe dédiée, c'est-à-dire un principe particulier de l'assiette fiscale, pour soutenir l'industrie des courses de chevaux?

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Verdun. M. le ministre.

M. Landry (Bonaventure): Effectivement, mais on va avoir l'occasion, M. le Président, de regarder tous ces éléments en commission parlementaire, et, si le coeur en dit au député de Verdun, il pourra venir participer à nos échanges. Ce n'est pas à moi de décider de la composition, M. le Président, mais je suis intéressé à regarder cette question. D'ailleurs, le député de Pontiac nous a adressé certaines questions aussi. On ne répondra pas nécessairement à toutes les questions à ce moment-ci, mais on est prêt à examiner les différentes facettes de cette industrie.

Je n'ai pas l'impression que c'est la dernière fois qu'on va avoir non plus, en cette Chambre, à parler de cette industrie-là, parce qu'on est dans un mode de réorganisation et il y a certaines interventions qu'on est prêt à faire maintenant; d'autres vont devoir revenir, d'après moi, dans le temps. Et, en ce sens-là, on pourra examiner la question du député de Verdun, M. le Président, en commission. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre. Le principe du projet de loi 114, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et d'autres dispositions législatives concernant l'industrie des courses de chevaux, est-il adopté? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation

M. Boisclair: Oui. M. le Président, j'ai deux motions à faire. D'abord, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Boisclair: Et je donne avis que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation se réunira, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Il est 13 heures. Alors, compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 4)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, je vous inviterais à appeler, pour débuter l'après-midi, l'article 22 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi 104


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 22, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune propose l'adoption du projet de loi 104, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la qualité de l'environnement. Y a-t-il des interventions?

M. le député d'Orford, vous avez la parole et vous disposez, en tant que représentant de votre groupe parlementaire, d'un temps de 60 minutes. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Alors, il est de coutume, quand on arrive à l'adoption du projet de loi, normalement... Je me souviens de l'époque où nous étions au gouvernement, où le leader refusait à un ministre que son projet soit déposé s'il n'était pas là. Et je pense qu'il n'y a pas grand exception où des projets de loi ont été déposés par les libéraux pendant les 10 ans que nous avons été là, où le ministre n'a pas été là au moment du dépôt. Et Dieu sait qu'on a dû passer des nuits de temps, et les ministres étaient là pour déposer leurs projets de loi. C'est ma première réflexion. Je suis un peu surpris, je suis un peu surpris devant un projet de loi comme celui-là, et Dieu sait que le ministre n'a pas abusé de la législation depuis que nous sommes au gouvernement.

Le ministre nous disait d'ailleurs – ou je devrais dire: son parti nous disait – au moment de l'élection, et je le lirai textuellement dans le programme du PQ, M. le Président... C'était, comme vous savez, entre les pages 33 et 50 dans le programme du PQ, 27 pages sur l'environnement. Je l'ai souvent dit, c'est impressionnant comme programme. Sur la gueule, on est tous égaux. C'est dans les réalités que les choses se différencient un peu. Alors, à l'époque, on écrivait, au premier semestre de 1994, on disait: Une action rapide et efficace doit être menée pour éviter une crise écologique irréversible. C'est le PQ qui dit ça dans son programme, premier semestre de 1994. Un an et demi plus tard, deux ans, M. le Président, le ministre de l'Environnement aura trouvé le moyen de référender. D'ailleurs, je l'ai dit publiquement: On l'a vu plus pendant un mois de référendum à la télévision qu'on l'a vu pendant 14 mois comme ministre de l'Environnement.

Mais, ceci dit, le ministre a trouvé le moyen, en 14 mois, de passer deux projets de loi. Le premier avait un article et le deuxième a à peu près aussi un article, alors que, dans le programme du PQ, on nous disait: Une action rapide et efficace doit être menée pour éviter une crise écologique irréversible. Bien, ou bien il n'y a plus de crise irréversible, ou bien le ministre ne fait pas sa job. Je veux dire, il y a quelque part... S'ils ont écrit ça au premier semestre de 1994, puis on est maintenant dans le dernier semestre de 1995, on a trouvé le moyen de faire deux projets de loi d'un article, il y a, en quelque part, que j'ai de la misère à suivre la logique. Je vous le dirai tout de suite: J'ai bien de la misère à suivre cette logique-là. Et si c'était si important la veille d'une élection, ça me fait penser un peu à la chanson de Félix Leclerc: le lendemain, ils n'ont pas semblé se souvenir de notre nom, les environnementalistes. On en a écrit 27 pages, il n'y a rien qu'on n'a pas dit là-dedans, il n'y a rien qu'on n'a pas promis.

Maintenant, là, on est rendu pas mal plus loin, on est rendu à la fin de 1995, puis j'ai l'impression qu'en environnement, là, on a référendé, M. le Président. Puis, effectivement, il y a des problèmes. Effectivement, il y a des problèmes à Saint-Nicéphore. Effectivement, il y a des problèmes à Montréal. Je vous invite d'ailleurs à aller voir le site de Miron. J'ai eu l'occasion, dans une tournée d'environnement que j'ai faite... ne voyant pas le ministre sur le terrain, moi, je suis parti avec ma formation politique. Pendant trois semaines, on est allés voir ce qui se passait sur le terrain. Effectivement, il y a une crise écologique au Québec, M. le Président, et le ministre devrait réagir. Le ministre devrait aller voir ce qui se passe à Miron. Le ministre devrait aller voir ce qui se passe à Saint-Nicéphore. Le ministre devrait se mettre le nez dans toute la problématique de l'incinérateur de Montréal. Mais non, le ministre nous arrive, en 14 mois, avec deux projets: un d'un article puis l'autre qui n'est pas bien, bien mieux, M. le Président.

Je vais d'ailleurs parler du projet de loi 104, si vous me permettez. Le législateur, au moment où il avait fait cette loi-là, il voulait que ça soit très clair, hein, que, quand une compagnie décidait de bâtir un site pour ses déchets, tout le monde en soit avisé. Alors, on exigeait deux annonces dans des journaux de capitale et, ensuite, on exigeait un certain nombre d'annonces dans la région, ce qui faisait un total de six annonces. Et le ministre nous est arrivé en nous disant: Écoutez, il y a un coût à ça, de 400 000 $.

Alors, de notre côté, ma formation politique, vous savez les efforts qu'on a faits entre 1985 et 1995 pour baisser la taille de l'État, pour baisser les dépenses de l'État. Alors, on a souscrit à cette demande du ministre dans le projet de loi 104. Et le ministre nous disait qu'il y avait 66 compagnies où il aurait fallu qu'on «publicie» dans les prochaines semaines ces annonces dans les journaux, et qu'on parlait d'un coût de 400 000 $. J'avais demandé au ministre de nous expliquer un peu ce coût-là. Ça n'a pas été évident.

Et, hier, d'ailleurs, en lisant le rapport du Vérificateur du Québec, il nous disait: Attention avec les chiffres du ministère de l'Environnement. Il nous donne un cas, d'ailleurs: quand on parle des bouteilles de vin récupérées, il dit que, si on parle au ministère, ils vont nous parler de 60 % des bouteilles de vin qui sont récupérées, mais si on parle à RECYC-QUÉBEC, pour le même moment, ils vont nous parler de 30 % des bouteilles récupérées. Alors, le Vérificateur nous dit: Méfiez-vous des chiffres du ministre, là, ce n'est pas évident, évident. D'ailleurs, dans son propre document, le ministre nous dit, sur la générique, que les chiffres pourraient être contestés, ou, enfin, il questionne lui-même certains de ces chiffres, finalement.

Enfin, le projet de loi, le but, c'est de passer de six annonces à une annonce. Et, comme vous verrez, je ne pense pas que le ministre va passer à l'histoire comme a passé M. Léger, de votre côté, ou Clifford Lincoln, de notre bord, ou Mme Bacon ou Pierre Paradis vont passer à l'histoire pour des grands ministres de l'Environnement. Je ne pense pas que le ministre actuel, avec une loi qui fait passer les annonces de six à une, là, va, dans son c.v., être bien fier de ce fait d'armes là, M. le Président.

(15 h 10)

Maintenant, oui, on est pour les coupures, mais, d'autre part, on dit au ministre: Attention! Le législateur, à l'époque, avait une idée, c'était de s'assurer que tout le monde soit informé de ce qui se passe, qu'il ne s'en fasse pas passer une en quelque part dans une région parce que les citoyens sont moins vigilants, parce qu'il y a peut-être des intérêts particuliers que des gens défendent. Et il faut se rappeler ici que le but, c'est l'environnement. Alors, on est un peu surpris de voir qu'il passe de six à une.

Et là où les affaires se compliquent, c'est quand on demande au ministre: Qu'est-ce qui va arriver dans des régions où il y a une très forte proportion de communautés autres que des communautés francophones? Et je vous dirai tout de suite qu'on souscrit à la loi 101. On souscrit aux lois qui ont fait que la langue de travail, au Québec, c'est la langue française, que la langue d'affaires, au Québec, c'est la langue française, que la langue de la terre, c'est la langue française. Mais on souscrit aussi à une bonne information de nos concitoyens, et le ministre, de la façon qu'il a organisé sa loi, bien, il dit: Maintenant, une annonce.

Alors, nous, on a fait un amendement. On pensait bien que le ministre se rallierait. Franchement, l'amendement n'était pas si compliqué que ça. On disait: Où il y a une nécessité, où la compagnie est dans un patelin un peu plus anglophone, on «pourrait-u» faire rien qu'une annonce, mais dans les deux langues? Il me semblait que c'était clair. Or, le ministre a commencé par nous dire: Ouais, bien, ce n'est pas légal, on va vérifier ça. Nous, on a immédiatement, en commission, fait sortir les différentes lois linguistiques du Québec et on a démontré au ministre qu'effectivement, légalement, il n'y en avait pas, de problème, qu'on pouvait effectivement avoir la même annonce dans les journaux anglophones et francophones s'il y avait un besoin. Alors, le ministre a pris en considération...

Notre amendement a été reçu par la présidence, il a été reconnu, et on pensait bien que le ministre aurait accepté ce qui semblait, finalement, juste un geste de bonne volonté pour d'autres communautés que la communauté francophone. Et je vous ferai remarquer, M. le Président, que, historiquement au Québec, les journaux anglophones ont été très portés vers les dimensions environnementales. J'ai souvent l'occasion de comparer, par exemple, La Tribune , chez nous, avec le Sherbrooke Record , et les articles à connotations environnementales sont beaucoup plus recherchés et importants dans le Sherbrooke Record qu'ils le sont dans La Tribune . Si on faisait la même recherche, on s'apercevrait qu'à Montréal la Gazette a historiquement eu de très bons suivis sur des sujets d'environnement et a même mené des batailles à l'occasion. Je suis un peu surpris que le ministre n'accepte pas qu'une annonce ne puisse pas être faite dans les deux langues s'il y a nécessité.

Je lui donnais l'exemple, par exemple, d'une mine dans l'Estrie qui s'appelle Bakertalc, qui est listée sur la Bourse de Montréal, Bakertalc, qui a ses installations dans une région qui s'appelle Bolton Centre. Et on sait que la communauté de Bolton Centre est une communauté surtout anglophone. Si jamais Bakertalc voulait installer un dépôt de matières, peu importe, alentour de sa mine, il serait bon que la communauté anglophone dans la région de Bakertalc en soit informée dans son journal. Bien non! le ministre nous dit: Bien, non, votre amendement, je ne le recevrai pas.

Alors, certains journaux anglophones du Québec ont eu vent de la chose, et je vous rappelle l'éditorial du Sherbrooke Record de vendredi dernier, signé par Rita Legault, qui est une environnementaliste, qui est une très bonne journaliste. Rita Legault disait: «Government has a moral responsibility...» Le gouvernement a une responsabilité morale d'informer non seulement la communauté francophone, mais la communauté, aussi, d'une autre langue si c'était nécessaire.

M. le Président, je suis un peu surpris de voir deux poids, deux mesures alors qu'on sort d'un débat référendaire. Je comprends que, pour le gouvernement, c'était bien important, l'indépendance du Québec, aussi important que, M. le Président, l'environnement est important pour nous, M. le Président. Et, voyez-vous, dans toute la publicité que le gouvernement a faite au moment du référendum pour ce qui était d'amener les gens à leurs assemblées, ce qui était de faire parvenir les études Le Hir, avec les 40 numéros à gauche, les numéros de téléphone, tout ça, M. le Président, on l'a fait dans les deux langues, on n'avait aucun problème: le Sherbrooke Record , le Stanstead , la Gazette , tous ces journaux-là avaient de la publicité en quantité industrielle. C'était pour la grande cause noble de la souveraineté. Mais quand on arrive à la grande cause noble de l'environnement, ce pour quoi je vous adresse ici la parole, M. le Président, eh bien! là, on y va dans une seule langue. Ça, ce n'est pas grave si on ne parle pas dans la langue du citoyen quand c'est nécessaire – et, encore une fois, je dis: «quand c'est nécessaire». Et le ministre n'a pas voulu recevoir cet amendement, le ministre s'en tient à son plan de match et il dit: Non, nous autres, on y va comme ça et ça finit là.

Alors, vous nous voyez, de notre côté, M. le Président... Vous savez que le Parti libéral, historiquement, a été un parti d'une très grande coalition. On n'a jamais essayé de gérer le Québec en excluant des gens, comme on voit trop souvent dans d'autres pays ou dans d'autres formations politiques. Nous, le Parti libéral, on a toujours essayé de regrouper les gens dans des dynamiques qui avaient l'approbation assez large de la société. Et, ici, c'est un cas typique où on sait qu'il y a bien plus de monde qui sont environnementalistes, au Québec, qu'il n'y en a qui sont indépendantistes. Et, pourtant, on a été capable de faire de la publicité dans les deux langues pour l'indépendance, mais on ne veut pas la faire dans les deux langues pour ce qui est de l'environnement. Et quand je dis qu'il y a un double discours qui se tient de l'autre côté, un double discours où on disait «Une action rapide...», M. le Président, et, après 14 mois, cette action rapide, ça a été deux petits projets de loi d'un article... Une action rapide, si c'est ça, M. le Président, la nouvelle façon de gouverner de ce gouvernement, deux petits projets de loi en environnement, alors que, dans le programme, on avait dit qu'on irait rapidement, vous nous voyez, de ce côté-ci, complètement abasourdis par cette nouvelle façon de gérer la chose publique en environnement.

Alors, M. le Président, c'est la première partie du projet de loi 104. Vous devez aussi comprendre, M. le Président, qu'alentour du projet de loi 104 s'est greffée, dans les dernières journées, ce qu'on appelle la générique. Pour les gens qui nous écoutent, la générique, c'est cette grande enquête, M. le Président, c'est cette grande opération pédagogique où on va demander aux gens de venir dire ce qu'ils pensent de l'environnement au Québec.

Maintenant, je veux faire remarquer aux gens qui nous écoutent ici cet après-midi que la générique en soi ne règle rien. Quand on dit qu'une action rapide et efficace doit être menée, ce n'était pas exactement, je pense, ce que voulaient dire les écrivains du programme du PQ. Une générique, ça ne règle rien; ça va être une grande consultation, comme le PQ semble être capable d'en faire pas mal: une sur la décentralisation, une sur la souveraineté et, envoie donc par là, ça coûte cher et on continue!

Alors, là, on va faire une générique, une grande consultation, et, je vous le dis tout de suite, je souscris à cette grande consultation en environnement. Non seulement j'y souscris, mais je vais inviter l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec à participer à cette opération-là. Parce que la dernière consultation qu'on a eue au Québec, menée par le PQ, celle de la décentralisation, celle-là, je peux vous en parler un peu. Ce que j'y ai vu, M. le Président, en pleine réunion, c'était la commission scolaire avec sa gang de fonctionnaires qui se chicanaient avec la gang de fonctionnaires de la MRC, pour ne pas dire ceux de la ville et de la régie régionale. Tu voyais tout le monde qui tiraillait la couverte de son bord. Ça a été ça, le débat de la décentralisation, dans pas mal de régions au Québec. Ce que je demande dans la générique, c'est qu'on essaie de s'élever au-dessus de tous ces groupes organisés dans nos sociétés et qu'on écoute les vrais citoyens, ce qu'ils ont à dire dans le débat des déchets dans les prochains mois et les prochaines années.

Et, M. le Président, quand je dis que la générique ne règle rien, il faut bien se comprendre. Parce que le ministre nous annonce, lundi, la générique, la première rencontre de la générique se tiendra quelque part en février et, ensuite, on parle d'une deuxième journée quelque part dans le milieu de l'année 1996, ce qui fait que, finalement, M. le Président, aucun des problèmes que le PQ avait trouvés dans son programme électoral de 24 pages, à la fin de 1997, en début de 1998, aucun de ces problèmes-là ne sera réglé. On n'aura que fait de la conversation, on n'aura qu'écrit du papier, alors que, dans le programme, on disait: «Une action rapide et efficace...» Alors, on est très loin, hein? Vous savez, on est tellement loin que les citoyens sont après nous dépasser par la bande.

Dans la région de Drummondville, il y a un comité d'environnement. Ils ont dit: On devrait se faire une petite pétition pour mettre de la pression sur le ministre, parce qu'on a un site, ici, qui s'appelle Saint-Nicéphore, puis que ça nous énerve pas mal. Savez-vous, M. le Président, combien ils ont ramassé de signatures en quelques jours à Saint-Nicéphore? Vingt-deux mille signatures. Ça commence à être du monde, ça, là, au sujet d'un site de déchets. Ce n'est pas la fermeture de l'hôpital, ce n'est pas la fermeture de la route, ce n'est pas une épidémie qui est poignée dans la ville. Un site de déchets, 22 000 signatures à Saint-Nicéphore. Saint-Nicéphore, c'est un peu moins gros que la ville de Montréal, ça, là. Vingt-deux mille signataires.

(15 h 20)

Là, ils sont allés voir le député de Drummond puis ils ont dit: Écoute donc, il y a 22 000 de tes concitoyens qui ont signé ça; la signerais-tu? Puis il a dit: Non, moi, je ne la signerai pas. Il a oublié son programme électoral: «Une action rapide et efficace...» On est après se faire dépasser par la bande par les citoyens, qui disent: Bougez, faites quelque chose, arrêtez de nous faire des projets de loi avec un seul article dedans! Où est-ce qu'on s'en va! Vingt-deux mille signatures dans une seule région au sujet d'un seul site de déchets.

Voulez-vous que je vous parle du site de Magog? Je vois mon délégué régional qui est assis devant nous, ici, le député de Johnson. Vous lui demanderez ce qui se passe dans la magnifique et belle région de Sherbrooke. D'ailleurs, j'invite tout le monde à venir skier en fin de semaine, ça va être extraordinaire. M. le Président, avez-vous une idée de ce qui se passe dans le secteur des déchets de la région de Sherbrooke en ce moment? C'est incroyable. Une chicane organisée dans le milieu de la rue entre l'entreprise privée, la ville, les soumissionnaires. La cacophonie totale. «Une action rapide et efficace doit être menée pour éviter une crise écologique...», dans le programme du PQ, page 34.

Pendant ce temps-là, on laisse le monde se chicaner. Pas à peu près à Sherbrooke, hein, là! Le maire sur un bord, le président de Laidlaw sur l'autre bord, la gang de Recyclage Orford... Le chiard est poigné. Puis le ministre, lui, nous écrit des projets de loi d'un article à savoir si on va mettre six articles ou un article pour faire de la publicité dans le journal. Il y a quelque part où ça ne marche pas, en plus de la pétition de 22 000 noms de Saint-Nicéphore.

Mais je suis loin d'avoir terminé. Je voudrais vous parler d'un autre petit bout du programme, parce que ça a trait au projet de loi 104. Dans le programme électoral du PQ, il y avait un grand engagement. Il ne faut pas se leurrer. Il n'y en avait pas 25. De reconnaître les CRE, là, ce n'était pas l'engagement du siècle, ça. Ils étaient déjà là. Vous avez financé. Très bien, je reconnais ça. Le grand engagement du PQ, c'est qu'au Québec il y a une problématique, il y a neuf sites de déchets, puis il y a 60 % des déchets qui s'en vont dans ces neuf sites-là. On se «comprend-y»? C'est assez simple, comme chiffres: neuf sites de déchets, 60 % des déchets vont dans ces neuf sites-là. M. le Président, ces neuf sites-là, ils ont juste une particularité spéciale, ils appartiennent à l'entreprise privée, puis on n'a pas grand contrôle là-dessus. Alors, le grand engagement du PQ, à la page 45, c'était: «Restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public.» C'est clair, c'est précis, c'est net. Enfin, dans un gros document du PQ, je me retrouve. Puis je vais vous dire franchement que j'étais d'accord avec ça, moi. Je suis même allé voir du monde dans mon comté puis je leur ai dit: Toi, tu es bien environnementaliste, là. Si tu veux que, les sites, ils deviennent de propriété publique, là, vote PQ. C'est écrit dans le document, c'est bon puis ils ont l'air de vouloir le faire. Ça, c'était il y a à peu près 14 mois. Restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public pour éviter tout abus dans ce dossier névralgique, de la gestion, etc. Alors, voici que le ministre, lundi, nous dépose «Pour une gestion durable et responsable de nos matières résiduelles» dans la belle province de Québec; document de consultation publique, 18 recommandations. N'est-ce pas?

Alors, M. le Président, maintenant, puis-je vous lire, à la page 41, ce qu'on y dit? Je ne le ferai pas, ça va prendre l'après-midi. Ici, dans le programme: Restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public. Je vais vous en lire des petits bouts. Vous allez voir que ça s'est mélangé en cours de route, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, M. le député d'Orford, je voudrais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, non pas que je tienne à dispenser le député d'Orford de lire le document qu'il a entre les mains. Est-ce que je peux amicalement lui rappeler la règle de la pertinence qui nous indique que tout discours doit porter sur le sujet en discussion. Nous en sommes à l'adoption du projet de loi 104, où on dit que le débat sur la motion d'adoption d'un projet de loi est restreint à son contenu. Est-ce que je pourrais rappeler à ceux et celles qui nous écoutent que le contenu en discussion... J'en lis les notes explicatives: «Ce projet de loi modifie la Loi sur la qualité de l'environnement en ce qui a trait à la publication dans les journaux d'avis concernant l'attestation d'assainissement d'un établissement industriel.» Je pense que le député aurait intérêt à restreindre son propos et à le ramener au sujet qui est débattu, et je vous inviterais à lui rappeler la règle de la pertinence, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Alors, écoutez, le projet de loi est relativement succinct et sur un sujet très précis. Alors, en principe, selon nos règles, ça doit se limiter au sujet en discussion. Alors, je vous inviterais à ne pas trop faire tout le procès de tout le domaine de l'environnement. Il y a d'autres lieux et d'autres moments où vous pourrez le faire. Je vous inviterais, s'il vous plaît, à revenir, autant que possible, là, le plus près possible du sujet en discussion.

M. Benoit: M. le Président, si votre leader m'avait écouté jusqu'à la fin, il aurait compris toute la pertinence de l'argumentaire. Malheureusement, il m'a coupé dans le milieu d'un énoncé. Je voudrais aussi rappeler à votre leader que je suis allé à l'école du ministre de l'Éducation actuel pendant des nuits et des nuits dans ce noble Salon, et j'ai appris un peu toute cette dynamique parlementaire à l'école du ministre de l'Éducation actuel. Alors, on ne m'en voudra pas trop. Je comprendrais bien, de la part du leader...

Ceci dit, je voudrais juste finir l'énoncé que j'étais après faire et je reviens au projet de loi. D'ailleurs, c'est tout à fait près du projet de loi 104, M. le Président. Dans ce document que le ministre a déposé, «Restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public», ça, c'était clair, c'était précis. Et, là, on lit des choses comme «Le gouvernement entend favoriser la mise sur pied de comités de suivi formés de citoyens et de citoyennes ayant pour mandat de surveiller la provenance et la quantité des résidus enfouis dans les lieux privés et publics. Le ministère de l'Environnement et de la Faune autorisera les projets...», puis là ça continue des pages et des pages. Ce n'est pas ça qu'on avait pris comme engagement avant le projet 104, c'était de restreindre la propriété, de faire que ces sites-là deviennent des propriétés publiques, qu'on règle instantanément le problème de Saint-Nicéphore, qu'on règle instantanément le problème de Lachenaie, qu'on règle le problème de Magog. Ce n'est pas ça qu'on est après faire ici, c'est de la consultation qui va durer pendant deux ans, qui ne va rien faire de ce que vous avez dit que vous feriez ici. Alors, M. le Président, je comprends que votre leader essaie de m'arrêter. Ils n'aiment pas ça quand on leur remet finalement la réalité entre leur programme électoral...

M. Boisclair: Point de règlement.

M. Benoit: ...et la réalité, maintenant, de ce qui est après se passer en environnement au Québec, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, M. le député d'Orford. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Est-ce que je peux rappeler au député d'Orford, en vertu des dispositions de l'article 32 de notre règlement, que ce n'est pas moi qui l'ai rappelé à l'ordre, mais c'est bien vous, M. le Président, qui lui avez demandé d'observer la règle de la pertinence.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Selon nos coutumes, oui. Alors, j'écoute toujours attentivement et docile... – pas toujours docilement, il faut faire attention; il y a des fois, ce n'est pas toujours... enfin – les remarques des leaders, et j'avais effectivement signalé que vous vous éloigniez pas mal du sujet. On peut toujours s'en éloigner un petit peu, mais il faut y revenir dans des limites raisonnables de temps pour qu'on puisse voir les liens, si vous voulez, avec vos propos et le sujet en discussion. Alors, je vous inviterais, M. le député d'Orford, à vous soumettre.

M. Benoit: Bien sûr, M. le Président, je reconnais votre autorité et votre sens de l'équité dans vos décisions. Alors, bien sûr que je reviens immédiatement au projet de loi 104. M. le Président, notre formation politique est d'accord avec les coupures que le ministre veut apporter, pour ce qui est des sommes d'argent. Le ministre nous parle de 400 000 $, ça nous semble effectivement prohibitif. Mais j'aurais souhaité au même moment que, si un montant de 400 000 $ nous semble prohibitif pour de l'annonce, de la publicité en ce qui a trait à l'environnement – c'est les chiffres du ministre – il me semble que les millions qu'on a développés pendant la campagne référendaire auraient aussi probablement une figure prohibitive.

Ceci dit, oui aux coupures d'argent que le ministre veut apporter, non au manque d'informations que le ministre est après nous imposer. Pour la raison que j'ai expliquée plus tôt, on pense que les communautés autres que francophones ont le droit, quand c'est dans leur région et qu'il y a un problème, d'en être informées par l'État, qui leur appartient au même titre que la communauté francophone. Je vous donnerai un seul exemple, et Dieu sait que, si ça s'était produit, cette annonce-là, on ne serait pas dans la moitié du trouble dans lequel on est aujourd'hui à North Hatley, un petit patelin dans mon comté, dont un de vos confrères, ex-député maintenant décédé, le député de Laurier, que nous avons tous apprécié, je pense, et aimé, qui avait sa résidence dans North Hatley... Bien, si, ce matin, il avait été à North Hatley, quand il se serait levé, il verrait maintenant une tour de cellulaire à North Hatley. Pourquoi ça s'est produit, cette tour de cellulaire, M. le Président? Parce que, justement, dans la loi, on n'oblige pas à ces annonces publiques, apparemment, ce qui fait que la compagnie a été capable, avec un voisin puis avec la ville, et puis la MRC n'était pas là... Puis, la première chose qu'on sait, on a eu cette tour-là. Ce n'est pas une situation dramatique, mais ce que j'essaie d'expliquer ici, c'est que s'il y avait eu cette annonce, cette obligation d'annonce de ne pas perturber le paysage dans un des plus beaux paysages du Québec, bien, on ne serait pas pris, ce matin et hier, entre la MRC, les citoyens, les contestataires, avec une situation... Tout le monde serait égal, tout le monde aurait été invité avant le fait à se prononcer sur cette situation-là. Déjà, d'ailleurs, les citoyens, depuis hier, nous arrivent avec des solutions qui me semblent tout à fait intéressantes, où la tour pourrait être mise dans des endroits où elle serait plus efficace et, effectivement, probablement moins voyante. Mais on n'a pas écouté les citoyens, on ne leur a même pas dit qu'on voulait les entendre, M. le Président. Le projet de loi 104, c'est ce qu'il va faire dans le cas d'une de nos communautés si jamais il y avait un projet chez eux. Il n'y a pas d'obligation, M. le Président, de faire de la publicité de leur côté.

(15 h 30)

Alors, M. le Président, si on veut une société écologique, si on veut une société environnementale, je pense qu'il faut espérer que le ministre va aller plus loin dans les prochaines semaines. J'espère que le nouveau premier ministre du Québec, qui, lui, a été ministre de l'Environnement à Ottawa, va avoir une sensibilité plus grande pour l'environnement. Je vous rappellerai une question que j'ai posée au premier ministre actuel quand on a eu le débat nucléaire en France et qu'on a posé une question au ministre de l'Environnement, au ministre des Affaires internationales et au premier ministre, et on a toujours eu la même réponse: Ce n'est pas grave s'il y a des essais nucléaires en France, ce sont nos alliés. Comme si nos alliés ne polluaient pas en environnement, M. le Président, alors que, encore là, c'était dans le programme du PQ. Alors, je pense que le nouveau premier ministre du Québec... Et c'est peut-être un voeu important, à l'arrivée de la période des Fêtes, c'est que le nouveau premier ministre du Québec ait une plus grande sensibilité pour les dimensions d'environnement. Il en a eu une à l'époque où il était à Ottawa. Espérons qu'il amène avec lui cette sensibilité au Québec et qu'il en fasse une des grandes priorités. Je suis après lire ce document que vous avez imprimé, je viens de le sortir de la bibliothèque il y a quelques minutes: «Le coeur à l'ouvrage», que vous avez écrit avant ce référendum, et j'essaie de voir, là-dedans, tout ce coeur à l'ouvrage que vous vouliez mettre à l'environnement. Est-ce que c'est encore des paroles? Et ceux qui m'écouteront dans les prochaines journées sur l'environnement, je peux être sûr, maintenant, je vais vous parler du coeur à l'ouvrage. Pas de votre programme, je vais vous parler du coeur à l'ouvrage. Qu'est-ce qu'on y disait en environnement, là-dedans, et qu'est-ce qu'on était prêt à faire? Ce grand projet de société que votre gouvernement voulait faire et qu'il veut toujours faire, d'ailleurs. Alors, on va regarder les dimensions d'environnement là-dedans. M. le Président, chez nous, on pense que l'environnement, c'est vraiment quelque chose d'important. Et le projet de loi 104, il faut aller pas mal plus loin que ça pour transcender, dans nos populations, le message d'une société écologique, d'une société environnementale. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres interventions? Il n'y en a pas. Alors, je vais mettre aux voix le projet de loi. Le projet de loi 104, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la qualité de l'environnement, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, vous aurez noté qu'il aura fallu tout ce grand discours pour finalement donner l'appui au projet de loi. Je m'en réjouis. Vous me permettrez, à ce moment-ci, d'appeler l'article 9 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi 110


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 9, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie propose l'adoption du principe du projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour. Alors, M. le ministre, vous disposez d'un temps de parole de 60 minutes. Je vous cède la parole.


M. Daniel Paillé

M. Paillé: Merci, M. le Président. Parfois, l'Assemblée nationale doit légiférer pour simplifier les choses. Je sais que, des fois, c'est rare, mais, dans ce cas-ci, c'est vrai. Alors, le projet de loi a pour but de confirmer tout simplement des titres de propriété de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour sur tout immeuble qu'elle possède actuellement et qui est situé dans son territoire d'activité, et de garantir que les titres de propriété sont incontestables aux personnes qui ont déjà acquis un terrain de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour ou de la société dont elle a pris la succession, c'est-à-dire la Société du parc industriel du centre du Québec.

On se souvient que cette Société a été instituée dans la foulée des années soixante, où l'idée d'une grande sidérurgie au Québec avait fait sa marque, et, comme le gouvernement avait acheté Sidbec, le site de Bécancour s'était retrouvé un peu orphelin. Alors, donc, on a fait un immense parc, et aujourd'hui on est très heureux de savoir qu'il y a 16 entreprises industrielles et 24 entreprises de services qui y ont fait des investissements de 2 800 000 000 $. Alors, on a, dans le centre du Québec, dans le coin de Bécancour, des sociétés qui produisent des choses, du genre: la SKW, Narco Canada, câbles Reynolds, Norsk Hydro, l'Aluminerie de Bécancour, bien sûr, et un certain nombre d'autres entreprises qui font travailler 2 600 personnes directement et près de 4 000 personnes de façon indirecte.

La loi constitutive de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour a été sanctionnée en octobre 1990. En vertu de cette loi, la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour s'est vu transférer les droits et obligations de l'ancienne Société du parc industriel du centre du Québec, qui opérait, elle, depuis janvier 1969. Un récent projet d'acquisition de terrains appartenant à la Société a mis en lumière des irrégularités au niveau des titres de propriété des terrains acquis. Depuis la création de la Société, il s'avère qu'un très grand nombre de terrains ont été acquis par la Société de l'ancien ministère de la Voirie ou de tiers qui les avaient, eux aussi, acquis du ministère de la Voirie, aujourd'hui appelé le ministère des Transports. Donc, les contrats d'acquisition de plus d'une centaine de terrains ont été signés par des gens que l'on appelle des divisionnaires du ministère de la Voirie et qui n'avaient pas la capacité légale d'agir à cette fin. Cela, donc, a eu comme effet d'entacher la qualité des titres de propriété des immeubles que la Société a acquis et revendus par la suite.

La Société a répertorié 17 transactions immobilières, entre elle et des entreprises implantées dans son parc, qui seraient entachées d'irrégularités ayant pour origine les acquisitions de terrains réalisées par le ministère de la Voirie. Il y a donc une incertitude qui règne, maintenant que ce fait est connu, autour de la validité des titres de propriété de la Société, et cela occasionne des dépenses onéreuses de recherches de titres aux acquéreurs; ça complique, ça peut paralyser et ça peut même bloquer d'importants financements hypothécaires.

Maintenant que les entreprises qui sont situées dans le périmètre touché connaissent la situation, la Société et le ministère des Transports sont exposés à des poursuites judiciaires si la qualité des titres de propriété n'est pas rétablie correctement. Les juristes à qui nous avons demandé d'étudier la question en sont venus à la conclusion que les actes de vente de ces terrains, passés entre les anciens propriétaires terriens et le ministère de la Voirie par l'entremise de ses ingénieurs divisionnaires, sont nuls et de nullité absolue, suivant les articles 1416 et 1417 du Code civil.

De plus, en vertu de l'article 1418 du Code civil, les tribunaux ne peuvent corriger la situation. Reprendre toutes les transactions, une par une, s'avérerait, évidemment, une tâche impraticable, compte tenu, notamment, du nombre de transactions, du nombre de vendeurs, du nombre d'héritiers qu'il faudrait retracer, convaincre de signer de nouveaux documents, ceci sans compter qu'au bout de l'exercice on ne serait pas tout à fait certain d'avoir tout rendu conforme. Donc, la seule façon de le faire, c'est par voie législative: c'est une solution simple, pratique et définitive au problème.

Tout comme l'article 26a de la Loi de la Société du parc industriel du centre du Québec, édicté par l'article 5 de la Loi modifiant la Loi de la Société du parc industriel du centre du Québec, qui a été sanctionnée en mai 1971 et qui clarifiait les titres de propriété des terrains de la Société situés dans les limites du territoire du parc, telles que définies à cette époque, le présent projet de loi se veut une suite logique, si on peut dire, de la loi de 1971 et clarifie les titres de propriété des terrains de la Société, suivant les modalités qui y sont prévues.

Alors, c'est un très petit projet de loi, de deux ou trois articles, dans le but, donc, de confirmer la validité des titres de propriété des terrains de la Société. Le projet de loi confirme le titre de propriété de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour sur tout terrain qu'elle possède actuellement et qui est situé dans son territoire d'activités, et garantit les titres de propriété incontestables aux personnes qui ont acquis des terrains de la Société ou de la Société du parc industriel du centre du Québec.

Alors, M. le Président, c'est un projet de loi de nature assez technique, qui remplace une foule de transactions qu'on serait obligé de faire. J'invite donc les gens de cette Chambre, l'Assemblée nationale, à accepter rapidement et unanimement ce projet de loi. Merci.

(15 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je remercie le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie – c'est bien ça, c'est dans l'ordre – et je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Outremont. M. le député.


M. Gérald Tremblay

M. Tremblay: Merci, M. le Président. J'ai écouté attentivement les propos du ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. J'ai également pris connaissance d'une lettre adressée par Me André Villeneuve, notaire, de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, à M. Laurent Brunet, du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, qui explique, de façon très claire, les propos que le ministre vient de nous tenir. J'ai également parlé avec le président du parc industriel et portuaire de Bécancour, M. Pierre Clouâtre, et, finalement, j'ai eu l'occasion de parler avec le nouveau maire de Bécancour, M. Maurice Richard. Tous ces intervenants nous demandent d'adopter ce projet de loi le plus rapidement possible. Alors, pour éviter tout délai inutile et pour clarifier les titres, je voudrais dire au ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie qu'il peut compter sur la collaboration de l'opposition pour adopter ce projet de loi le plus rapidement possible.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Outremont. M. le député de Nicolet – c'est ça, oui, Yamaska, bon, il me semblait qu'il manquait quelque chose – Nicolet-Yamaska. Alors, M. le député, je vous cède la parole.


M. Michel Morin

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que j'interviens aujourd'hui sur le projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour. Ce même parc, M. le Président, est situé dans mon comté, soit celui de Nicolet-Yamaska.

D'abord, M. le Président, j'aimerais faire un peu d'histoire pour bien situer la problématique qui est devant nous. La ville de Bécancour fut créée en 1965, de la fusion de six municipalités, soit celles de Saint-Grégoire, Sainte-Angèle-de-Laval, Gentilly, Bécancour, Précieux-Sang et Sainte-Gertrude. J'en profite, d'ailleurs, pour leur offrir mes meilleurs voeux à l'occasion de leur 30e anniversaire de fondation. Aujourd'hui, la ville de Bécancour compte près de 12 000 habitants et abrite sur son territoire le parc industriel de Bécancour, qui, soit dit en passant, est le plus grand parc industriel et portuaire du Québec, avec une superficie de 69 km². À date, environ 27 km² ont été vendus à des entreprises qui y ont investi 2 800 000 000 $ et qui y comptent près de 2 600 employés, dont 40 % habitent sur la rive sud et 60 % sur la rive nord. M. le Président, je m'enorgueillis de posséder dans mon comté un parc industriel d'une telle ampleur. Pour cette raison, il est primordial que la Société du parc profite ou possède les garanties nécessaires en ce qui a trait à ses titres de propriété.

Rappelons les faits, M. le Président, afin de bien comprendre la problématique. Au début des années soixante, il se répand à Bécancour l'idée d'une grande sidérurgie, comme l'a mentionné tantôt le ministre de l'Industrie et du Commerce. Des fonctionnaires recommandent donc au gouvernement de faire l'acquisition de terrains situés en bordure du fleuve; 7 650 acres sont ainsi acquis par le gouvernement du Québec, qui, en 1968, créera la Société du parc industriel du centre du Québec, dont le mandat est de doter ce parc des infrastructures nécessaires pour y accueillir l'industrie lourde. Le 25 octobre 1990, la loi est sanctionnée par le gouvernement du Québec, créant la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, remplaçant ainsi la Société du parc industriel du centre du Québec.

Mais, M. le Président, l'acquisition de terrains appartenant à la Société par la compagnie Tioxide Canada a mis en lumière certaines irrégularités au niveau des titres de propriété. Bref, ces titres ne sont pas clairs. En voici d'ailleurs les raisons: plusieurs terrains furent acquis par la Société du parc via le ministère de la Voirie, à l'époque – aujourd'hui ministère des Transports – en 1973 et 1974. Plusieurs centaines de terrains furent ainsi acquis par la Société du parc et signés par des divisionnaires du ministère de la Voirie, qui n'étaient pas légalement autorisés à en faire l'exécution, ce qui a eu pour conséquence d'entacher les titres de propriété. La Société a dénombré pas moins de 17 transactions immobilières de cette nature. Le projet de loi 110 a donc pour but de clarifier définitivement cet état de fait en légalisant toutes ces transactions faites depuis 1971.

Le fait de voter ce projet de loi évitera ainsi l'incertitude qui règne sur la validité des titres de propriété et évitera également à la Société des dépenses onéreuses de recherches de titres. Finalement, elle permettra à la Société de finaliser deux transactions actuellement en cours, puisque les deux acquéreurs refusent actuellement de payer à la Société la balance de la transaction tant et aussi longtemps qu'ils n'auront pas obtenu tous les titres de propriété, ce qui représente la jolie somme de 700 000 $. De plus, la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour craint que des poursuites ne lui soient intentées depuis que la compagnie Tioxide Canada a trouvé cette faille juridique, soit que les actes de vente de terrains sont nuls.

Reprendre toutes ces transactions cas par cas serait une tâche presque impossible – compte tenu du nombre de vendeurs, compte tenu également du nombre d'acheteurs et d'héritiers – sans pour autant avoir la certitude de la conformité de l'exercice. Seule une modification législative peut apporter une solution pratique et définitive à ce vice de procédure. Pour cette raison, le projet de loi 110 vient confirmer le titre de propriété de la Société sur tout terrain qu'elle possède actuellement et qui est situé sur son territoire. Elle garantit également des titres de propriété incontestables aux personnes qui ont acquis des terrains de la Société.

Je pense qu'il est important de faire diligence dans ce dossier et que l'opposition sera d'accord avec ce projet de loi afin que la Société du parc puisse rassurer les entreprises florissantes de mon comté qui sont touchées par ce dossier. Qu'il suffise ici de mentionner la compagnie Petresa Canada, qui représente 170 000 000 $ d'investissement et 60 emplois; qu'il suffise également de mentionner la compagnie Canadoil Forge, qui y possède 8 500 000 $ d'investissement pour 68 emplois; qu'il suffise aussi de mentionner la compagnie ICI Canada, qui a 152 000 000 $ d'investissement pour 221 emplois – et je continue, toutes ces entreprises-là sont touchées par cette réglementation-là – et la compagnie Chomprox, des investissements de 70 000 000 $, 41 emplois. D'ailleurs, cette compagnie, ce matin, nous annonçait, dans Le Nouvelliste , sous la plume de Marcel Aubry, qu'elle avait décidé d'investir 35 000 000 $ dans la production de peroxyde d'hydrogène suite à une demande de plus en plus croissante dans ce dossier.

De plus, ce dossier représente quelques exemples presque loufoques. Qu'il suffise ici de mentionner le cas de la compagnie ICI Canada, dont les titres des terrains situés en avant de son usine sont légaux, puisqu'ils relèvent du secteur de la ville de Bécancour, secteur Bécancour. Par contre, cette usine est construite sur le site du secteur de Gentilly dont les titres ne sont pas légaux, puisqu'ils ont été signés après 1971. Vous voyez, M. le Président, un peu l'ambiguïté dans laquelle la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour est placée.

(15 h 50)

Ce projet de loi lui permettra également, à la Société qui relève du ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie d'avoir les coudées franches dans ses transactions. Ce projet de loi aura aussi certainement pour effet de sécuriser les grandes entreprises du parc, qui y font un travail remarquable et qui sont des corporations impliquées dans notre milieu. J'en profite d'ailleurs pour les en remercier et les en féliciter. Elles participent à assurer à la ville de Bécancour des revenus non négligeables qui représentent 60 % du total des taxes foncières. Elles sont également très sensibilisées à tout ce qui s'appelle environnement dans notre milieu.

En somme, M. le Président, 6 500 emplois dépendent du parc industriel de Bécancour, et l'activité économique générée par celui-ci se situe à environ 300 000 000 $ annuellement. Il est donc superflu, ici, d'élaborer plus sur ce projet de loi 110, qui ne fera que confirmer et garantir ce qui aurait dû être fait depuis plus de 20 ans. Heureusement, nous avons les outils nécessaires pour y remédier par une modification législative pratique. Comme député de Nicolet-Yamaska et aussi de la ville de Bécancour, je voterai avec empressement pour le projet de loi 110 présenté par mon ministre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nicolet-Yamaska. Y a-t-il d'autres intervenants? Oui. M. le député de Lotbinière, je vous cède la parole.


M. Jean-Guy Paré

M. Paré: M. le Président, c'est avec une certaine nostalgie, mais aussi avec un grand plaisir, que j'interviens aujourd'hui sur le projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour. En effet, j'ai eu l'honneur de siéger au conseil d'administration de cette société de 1984 à 1989. En passant, c'est le député d'Outremont, l'ancien ministre de l'Industrie et du Commerce, qui m'avait signifié mon congé en 1989.

Ce parc industriel est la pierre angulaire de l'économie de la région Bécancour–Trois-Rivières, avec ses 2 600 emplois directs et ses 3 900 emplois indirects. En plus du nombre, ces emplois industriels sont fort bien rémunérés et apportent une qualité de vie avantageuse dans l'environnement immédiat du parc industriel.

Créé le 15 janvier 1969 sur le territoire de la municipalité de Bécancour, ce parc industriel a été composé à partir de terres agricoles expropriées et aussi de terrains appartenant à la voirie. Rappelons que les contrats d'acquisition de plus d'une centaine de terrains furent signés par des divisionnaires du ministère de la Voirie qui n'avaient ni la compétence ni la capacité d'agir à cette fin. L'effet de ces actions a été d'entacher la qualité des titres de propriété de ces immeubles que la Société a acquis par la suite. La Société du parc industriel est une organisation gouvernementale importante, et nous devons corriger ces anomalies afin de ne pas mettre en péril la crédibilité irréprochable que doit s'assurer une telle société.

Des investissements de près de 3 000 000 000 $ effectués par des entreprises ainsi que le gouvernement du Québec doivent être protégés par la modification législative proposée par notre ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Seule cette loi peut apporter une solution pratique et définitive à ce problème. Cette loi viendra confirmer la validité des titres de propriété des terrains par la Société par deux choses: premièrement, la confirmation du titre de propriété de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour sur tout terrain qu'elle possède actuellement et qui est situé dans son territoire d'activité; deuxièmement, par la garantie de titres de propriété incontestables aux personnes qui ont acquis des terrains de la Société du parc industriel du centre du Québec.

J'espère, M. le Président, que l'on procédera promptement à l'adoption de cette loi afin d'établir une fois pour toutes ces titres sur une base inébranlable et incontestable. Cette loi viendra sécuriser plus de 300 travailleurs et travailleuses résidant dans mon comté, dans le comté de Lotbinière. C'est bien sûr que la majorité des travailleurs résident sur la rive nord, donc à Trois-Rivières ou dans le comté de mon collègue, Michel Morin, Nicolet-Yamaska, mais c'est très important au niveau économique et au niveau de la qualité de vie de mon comté. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Lotbinière. Il y a une réplique qui est permise au ministre, à ce moment-là, si vous voulez l'exercer. Alors, je vous cède la parole, M. le ministre.

M. Paillé: La remarque, M. le Président, c'est que je regrette que... Jamais je n'aurais cru que le député d'Outremont a décidé de se passer des services de l'actuel député de Lotbinière comme administrateur, mais c'est vrai qu'en 1989 il commençait son mandat. Donc, on peut mettre ça sur les erreurs de la première année, et je suis sûr qu'il le regrette amèrement aujourd'hui.

Des voix: Ha, ha, ha!


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons revenir maintenant à l'ordre établi, à l'ordre du jour. Le principe du projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui. M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Conséquemment, je fais donc motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): En conséquence, je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi 110.

(Suspension de la séance à 15 h 56)

(Reprise à 16 heures)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour.

Nous allons débuter par les remarques préliminaires du ministre.

M. Paillé: Ce sera article par article. On aura une modification qui a déjà été déposée auprès de nos collègues pour préciser davantage. Il n'y a que deux articles.


Étude détaillée

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Nous allons donc, à ce moment-là, aborder l'étude article par article. Je mets donc en discussion l'article 1 du projet de loi. M. le ministre, vous avez des explications et commentaires à apporter?

M. Paillé: Oui, bien...

Le Président (M. Brouillet): Bien, c'est-à-dire, l'article 1, il est global, et on peut peut-être avoir des présentations générales. Après ça, nous passerons à l'amendement.

M. Paillé: Oui. L'amendement a déjà été soumis. Il convient donc de préciser que c'est une modification, un ajout après l'article 43 de la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, pour préciser, en 43.1, que l'article s'applique aux immeubles situés dans le territoire de la Société et dont elle sera en possession à la date d'entrée en vigueur de la loi. Et il convient de noter que l'article 43.1 ne s'applique pas aux immeubles visés à la loi de 1971. C'est pour ça que... Alors donc, le 43.1, l'ajout que l'on fait pour le 43.1... Il n'y a aucune modification proposée, donc il est proposé comme tel.

On voit qu'il y a deux alinéas. Le premier vise à régler la question de la propriété des immeubles concernés. Alors, c'est le premier alinéa, qui est en deux paragraphes. Et le deuxième alinéa, c'est la question des droits réels sur ces immeubles, autres que la propriété, par exemple les servitudes.

Dans le 43.1, premier alinéa, il y a deux paragraphes pour tenir compte de la loi de 1971. Alors, voilà pour ce qui est de 43.1.

Le Président (M. Brouillet): Bon, très bien.

M. Paillé: Et, concernant l'article 43.2, l'ajout à la loi de la Société du parc industriel et portuaire, on propose, dans l'article 1 de cette loi 110, l'ajout de l'article 43.2. On a déposé ici une modification qui fait en sorte que le nouvel article 43.2 ressemble physiquement à l'article 43.1, justement pour tenir compte du fait que l'on ne veut surtout pas répéter une seconde fois des titres qui ont été conférés par la modification législative de 1971.

Le Président (M. Brouillet): Je lirai peut-être l'amendement.

M. Paillé: Si vous voulez.

Le Président (M. Brouillet): Pour les fins du Journal des débats , je crois que ça conviendrait. Alors, l'article 43.2 de la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, édicté par l'article 1 du projet de loi 110, est modifié par le remplacement du premier alinéa par le suivant:

«43.2 La Société ou la Société du parc industriel du centre du Québec, selon le cas, est aussi déclarée avoir été, au moment de leur aliénation, la seule propriétaire des immeubles compris actuellement dans le territoire décrit à l'annexe I, aliénés par l'une ou l'autre entre le 17 avril 1970 et le (indiquer ici la date d'entrée en vigueur de la présente loi) et qui:

«1° avaient été acquis par la Société du parc industriel du centre du Québec avant le 15 mai 1971 et qui n'étaient pas visés à l'article 26a de la Loi de la Société du parc industriel du centre du Québec (1968, chapitre 60), édicté par l'article 5 du chapitre 63 des lois de 1971;

«2° avaient été acquis par la Société ou par la Société du parc industriel du centre du Québec, selon le cas, depuis le 15 mai 1971.»

Alors, c'est donc l'amendement. Vous avez quelques commentaires?

M. Paillé: Comme vous l'avez indiqué, M. le Président, cet amendement-là remplace le premier alinéa du 43.2 qui était, au préalable, proposé. Alors, donc, c'est par souci de le rendre conforme à 43.1.

Le deuxième alinéa, lui, demeure, évidemment. Et le 43.3 précise les recours aux personnes dont les droits de propriété et les autres droits réels sur les immeubles situés par le territoire de la Société... et prévoit les recours. Il y a un délai de prescription de 10 ans et, aux informations que l'on a, il n'y a aucune cause qui est en cours, mais il faut prévoir au cas où il y en aurait.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. M. le député d'Outremont, vous avez quelques commentaires?

M. Tremblay: Nous sommes prêts, M. le Président, à voter l'amendement ainsi que tous les articles du projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'amendement est recevable, et je vais mettre aux voix, tout d'abord, l'amendement. Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Tremblay: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Maintenant, est-ce que l'article 1, tel qu'amendé, est adopté?

M. Tremblay: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 2.

M. Paillé: Seulement l'entrée en vigueur, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): C'est bien. Alors, l'article 2 est-il adopté?

M. Tremblay: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Le titre du projet de loi est-il adopté?

M. Paillé: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. En conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Je vous remercie tous pour ce travail rapide et efficace, et je vais vous permettre de poursuivre la séance de l'Assemblée. Je suspends les travaux quelques instants, et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de le faire, s'il vous plaît, immédiatement. Je vous remercie.

(Suspension de la séance à 16 h 7)

(Reprise à 16 h 8)

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le président de la commission plénière.

M. Charbonneau (Borduas) (président de la commission plénière): Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, et qu'elle l'a adopté avec un amendement.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce rapport est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président, avec le consentement de l'opposition, je vous demanderais de rappeler l'article 9 du feuilleton, mais cette fois pour l'adoption du projet de loi.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, l'article 9. Nous proposons l'adoption du projet de loi 110. Avant, cependant, j'ai besoin de consentements pour déroger à quelques articles du règlement. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 22 du règlement, puisque la présentation du projet de loi a eu lieu après le 15 novembre?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 230 du règlement, qui prévoit que chaque étape de l'étude d'un projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Alors, est-ce qu'il y a des interventions sur le projet de loi?


Mise aux voix

Alors, le projet de loi 110 – si vous me permettez, je vais le relire pour une dernière fois – Loi modifiant la Loi sur la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, est-il adopté?

(16 h 10)

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, tout en remerciant le député d'Outremont pour son appui renouvelé, je vous demanderais d'appeler l'article 11 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi 112


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'article 11. M. le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie propose l'adoption du principe du projet de loi 112, Loi modifiant la Loi sur les coopératives et d'autres dispositions législatives. M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Daniel Paillé

M. Paillé: Merci, M. le Président. J'espère que... Je suis sûr que la collaboration du député d'Outremont sera aussi bonne dans ce projet de loi qu'elle l'a été dans le dernier projet de loi.

Donc, la loi actuelle régissant les coopératives a été sanctionnée en juin 1982 et est entrée en vigueur en décembre 1983. Depuis sa sanction de 1982, la loi n'a été modifiée qu'à une seule reprise, en juin 1984, pour y introduire des dispositions assez ponctuelles concernant les coopératives de travailleurs. Les dernières modifications remontent donc à plus de 10 ans. Il devient donc nécessaire d'actualiser cette loi afin qu'elle tienne compte des exigences du nouvel ordre économique ainsi que de celles qu'impose l'environnement des entreprises.

Toutefois, avant d'aborder le détail des modifications que nous souhaitons apporter, je pense qu'il est important de situer cette loi dans l'environnement de la réalité coopérative québécoise et aussi dans la perspective plus large d'un contexte économique qui, lui, est en pleine mutation.

Tout au long de son histoire, le Québec a pu compter sur des réussites et des réalisations des coops. Les succès du Mouvement Desjardins, qui font la fierté de ses quelques 5 000 000 de membres, en témoignent assurément. Avec un actif de 80 000 000 000 $, il constitue bien sûr la force économique qui traite aujourd'hui d'égal à égal avec les plus grandes institutions financières du monde. Cette réussite se situe dans le prolongement de l'action d'Alphonse Desjardins qui rêvait de plus de justice et de beaucoup plus d'équité. Elle émerge aussi de la confiance dans notre compétence et dans la compétence de ces milliers d'épargnants qui déjà affichaient la volonté de réussir ensemble.

L'expérience, cependant, n'est pas unique. D'ailleurs, le projet de loi que nous traitons aujourd'hui concerne les coopératives qui oeuvrent dans tous les autres secteurs, sauf celui de l'épargne et du crédit. Leurs succès ne se comptent plus. Le dynamisme et l'engagement de ces entreprises contribuent directement au développement économique, bien sûr, mais aussi au développement social de l'ensemble des régions du Québec. Certaines de ces coopératives sont, dans plusieurs petites villes et villages, l'employeur principal et le moteur de l'économie locale. Le bilan de leur action est fort révélateur: il y a plus de 1 000 000 de membres, plus de 23 000 emplois, un chiffre d'affaires qui frôle les 5 000 000 000 $ et des actifs de 2 400 000 000 $ au moins.

Mentionnons quelques exemples: les coopératives agricoles, qui contrôlent, au Québec, la plus grande partie de l'industrie laitière et occupent une place de tout premier plan dans le domaine de l'agroalimentaire. Elles sont particulièrement actives dans la transformation et la mise en marché de nos produits agricoles. Elles regroupent 36 000 membres, génèrent un chiffre d'affaires de près de 4 000 000 000 $.

Deuxième exemple: nos coopératives forestières, qui réalisent près de 20 % de la coupe de bois et plus du tiers des travaux d'aménagement dans les forêts publiques du Québec. On en saisit toute l'importance quand on sait que la forêt publique équivaut à près de 90 % de la forêt exploitable au Québec. Ces entreprises de coops forestières représentent aujourd'hui une force économique, avec plus de 4 300 travailleurs, 41 coopératives et un chiffre d'affaires de 250 000 000 $. Pour celles-ci, la conservation et le renouvellement du patrimoine forestier québécois demeurent au coeur de leurs préoccupations. Elles ont choisi de relever le défi de la mondialisation en s'engageant dans un processus de certification que l'on peut associer à une norme ISO pour la forêt.

Le troisième exemple que l'on peut donner, c'est les coops d'habitation, qui, au cours des 20 dernières années, ont constitué un parc immobilier de près de 20 000 logements, répartis dans un peu plus de 1 000 coopératives.

Quatrième exemple: nos coops en milieu scolaire, qui offrent à 765 000 membres l'occasion d'apprentissages concrets en les familiarisant avec le fonctionnement des coops, tout en leur permettant de développer des habiletés dans divers domaines comme l'administration, la gestion, le marketing, les communications et, bien sûr, la comptabilité. Au cours des huit dernières années, le chiffre d'affaires a été multiplié par trois et atteint maintenant 100 000 000 $ dans nos coops de milieu scolaire. Ces résultats témoignent évidemment du dynamisme de ce secteur.

Cinquième exemple que l'on peut donner: nos coops de consommation, qui, dans le domaine de l'alimentation, opèrent 90 entreprises, réunissent 86 000 membres, et le chiffre d'affaires est de 360 000 000 $ par année.

On a aussi nos coops de taxis, avec 1 500 membres, 20 entreprises. On a des coops de producteurs de sucre d'érable, qui ont un chiffre d'affaires de 25 000 000 $ et qui exportent sur les marchés internationaux une très grande partie de leurs produits. Bien sûr, tout le monde connaît nos coopératives funéraires, avec 105 000 membres, 9 000 000 $ de chiffre d'affaires.

Il faut ajouter à cette énumération les coops de travailleurs autres que celles du secteur forestier, des coopératives de travailleurs actionnaires qui se sont particulièrement développées au cours des dernières années. Ce type de coop, rappelons-le, permet aux travailleurs d'une compagnie d'acquérir ensemble une partie des actions de cette entreprise. En mettant sur pied de telles coopératives, les employés participent directement à la propriété, à la gestion et au résultat de leur entreprise. Ces coops de travailleurs actionnaires, qui constituent un phénomène récent, regroupent maintenant 2 000 travailleurs, répartis dans 27 entreprises. En outre, les entreprises qui comptent parmi leurs propriétaires une coop de travailleurs actionnaires ont généré 255 000 000 $, en 1994.

À cet effet, je pourrais vous citer plusieurs exemples de types de coopérative. On a, bien sûr, JM Asbestos, que l'on connaît, qui a pu reprendre, ainsi, des activités lorsque les nouveaux propriétaires se sont assurés en partenariat avec la coop et qu'ils ont regroupé 800 employés de l'entreprise. Ensemble, ils détiennent le quart du capital-actions de cette compagnie et ils ont trois membres du conseil d'administration.

On a, dans la région Chaudière-Appalaches, 59 emplois qui ont été maintenus et 14 nouveaux qui ont été créés par une coop, par des employés qui font partie d'une coop de travailleurs actionnaires. C'est l'entreprise Poulies Maska. Ces travailleurs, par leur coopérative, ont acquis 12 % des actions de leur entreprise.

Dans la Mauricie, on a 22 nouveaux emplois qui se sont ajoutés aux 45 existants lorsque les employés d'une scierie, la scierie Jos St-Amant, ont décidé de prendre leur avenir en main et ont fait l'acquisition de l'entreprise qui les employait. Les membres de la coopérative ont investi plus de 2 000 000 $ pour acquérir et relancer cette entreprise.

Tous ces exemples, petits et grands, nous montrent bien encore la réussite des coopératives au Québec. On a quelque 180 coopératives de travailleurs actionnaires, qui se révèlent, aujourd'hui, un moyen efficace d'améliorer la qualité de vie au travail, d'associer étroitement les travailleurs au développement de l'entreprise et de favoriser la productivité et les échanges de profits. Dans un contexte où le facteur humain prend un rôle de plus en plus important, les entreprises coopératives de travailleurs bénéficient déjà d'une solide expérience en matière de participation de leurs membres à la gestion des entreprises. Chaque jour, des Québécoises et des Québécois, qu'ils soient producteurs, consommateurs ou travailleurs, trouvent, par l'entremise d'une coop, une réponse à des besoins spécifiques. L'engagement des coopératives dans leur milieu constitue un apport déterminant pour relever le défi de la nouvelle économie.

Pour en arriver à percer sur les marchés internationaux, il est évident qu'une entreprise doit être solidement implantée dans son milieu. Elle doit mettre à contribution les forces et les talents locaux. C'est dans cette optique que le gouvernement du Québec veut appuyer les entreprises dans les différentes régions du Québec. En créant une synergie des divers acteurs économiques des régions, nous sommes convaincus que les entreprises dynamiques seront mieux appuyées pour se développer et créer des emplois.

La capacité particulière des coopératives à développer des régions périphériques constitue un atout important pour ces entreprises. D'ailleurs, plusieurs coopératives en régions excentrées ont fait la preuve qu'elles pouvaient être de classe mondiale et, pourtant, se développer loin des grands centres. Ces entreprises ont su mobiliser les ressources locales pour développer leur milieu.

(16 h 20)

D'ailleurs, la semaine dernière, le président du Mouvement Desjardins, M. Claude Béland, rappelait que l'économie planétaire ouvre de très grands marchés à ceux et celles qui peuvent les exploiter, mais cela ne garantit en rien le mieux-être des populations. M. Béland disait, et je cite: Il faut viser, à l'échelle nationale et régionale, un véritable développement de nos milieux plutôt que la seule croissance économique. Les collectivités devront définir leur économie de façon à ce qu'elle permette à chacun et chacune de vivre là où il veut vivre, et ce, en toute dignité. M. Béland ajoutait: On réalise aujourd'hui que la croissance des dernières années, stimulée par la mondialisation des échanges, laisse les populations, qui n'en perçoivent pas toujours les avantages, de plus en plus perplexes. Les gens constatent que la croissance est possible sans eux, que le PIB peut croître sans que soient créés de nouveaux emplois. Malgré tous les progrès des dernières années, l'écart entre les riches et les pauvres ne cesse de s'élargir. Le Québec, tout comme le Canada et les États-Unis, n'échappe pas à cette polarisation des revenus. Cela préoccupe d'ailleurs de plus en plus l'économiste.

Et M. Béland concluait son exposé en disant que l'on verra de plus en plus s'affirmer une préoccupation pour le développement des économies locales, pour des économies qui soient au service de leur milieu. Le chef d'entreprise qui aura comme seule préoccupation l'enrichissement de ses actionnaires ne pourra longtemps compter sur le support des populations locales. Fin de la citation.

La formule coopérative et les opportunités qu'elle offre peuvent nous aider à relever ce défi. Dans un tel contexte, on a besoin de reconnaître l'apport des coopératives qui, à partir d'initiatives locales et régionales, ont depuis très longtemps démontré leur capacité à répondre à divers besoins économiques et sociaux dans leur milieu.

M. le Président, le projet de loi sur les coopératives veut miser sur ce potentiel de développement qu'offre cette formule et s'inscrit dans le prolongement des efforts entrepris par le gouvernement du Québec pour favoriser l'établissement d'un environnement propice au développement d'une économie moderne, diversifiée et créatrice d'emplois structurants, le renforcement de la présence et l'attraction au Québec d'industries compétitives sur le plan mondial et les nouvelles formes d'appui aux entreprises en vue de favoriser la compétitivité sur les marchés locaux et internationaux.

De plus, il vient appuyer les efforts déployés en vue de réduire l'effet négatif de législations et de réglementations souvent inadéquates ou trop lourdes ainsi que des tracasseries administratives qui affectent directement nos entreprises. Ainsi, les diverses modifications dans le cadre de ce projet de loi visent à adapter cette loi à la nouvelle réalité des coops et aux exigences de la dynamique économique actuelle. Dans cette perspective, non seulement ce projet nous suggère d'éliminer certaines dispositions laissées en place lors de la révision de 1983 et jugées maintenant désuètes, mais encore le projet de loi nous propose certaines dispositions propres à faciliter l'administration et le fonctionnement des coops, tout en nous offrant de nouvelles avenues au développement, comme celle des coops de commerçants.

Les principales solutions retenues dans le cadre de cette révision sont les suivantes: premièrement, élargir les pouvoirs réglementaires des entreprises coopératives afin de responsabiliser et fournir un encadrement juridique qui, tout en restant fidèle aux règles d'action coopérative, leur offre de l'autonomie; deuxièmement, l'amélioration du fonctionnement coopératif, notamment par la délégation de certains pouvoirs de l'assemblée des membres en faveur du conseil d'administration; troisièmement, l'introduction d'un nouveau régime d'avis en faveur du Conseil de la coopération du Québec, qui permet à cet organisme de se faire entendre lors de la constitution d'une coop, d'une fédération ou d'une confédération, lorsque cela est nécessaire; quatrièmement, le renforcement de la notion de membre-usager; cinquièmement, l'introduction de la possibilité de constituer des coops de commerçants afin de tenir compte de l'intérêt manifesté par ces commerçants de se constituer en coopératives pour s'approvisionner et, donc, diminuer leurs coûts; sixièmement, la clarification de la capacité d'une coop d'accorder une aide financière afin de satisfaire aux pratiques d'affaires, et en concordance avec le régime d'investissement coopératif; septièmement, l'élargissement des parts de qualification pour comprendre les parts privilégiées et ainsi faciliter le financement des coopératives; huitièmement, l'assujettissement du paiement d'un intérêt sur les parts privilégiées à des restrictions liées à la capacité financière, pour, évidemment, bien protéger les créanciers; neuvièmement, l'introduction d'un nouveau mécanisme de financement par le truchement de parts privilégiées participantes; dixièmement, l'introduction d'un pouvoir réglementaire visant à autoriser le conseil à suspendre le droit de vote des membres inactifs ou de rendre éligibles, comme administrateurs, un certain nombre de personnes qui ne sont pas membres de la coopérative; onzièmement, le renforcement des règles de conflit d'intérêts des administrateurs et la modification de certaines règles de fonctionnement du conseil d'administration; douzièmement, la modification du contenu du rapport annuel d'une coop et l'acceptation de la mission d'examen comme mode de vérification pour s'ajuster à l'évolution des pratiques comptables; treizièmement, la modification des règles de virement obligatoire des excédents à la réserve pour permettre l'attribution aux membres de ristournes en parts privilégiées, ce qui, tout en maintenant l'objectif d'autofinancement des coops, laisse plus de latitude aux membres et permet à ces derniers de tirer plus d'avantages de leur coop; quatorzièmement, l'introduction d'un mécanisme de liquidation simplifié pour de très petites coopératives, par exemple celles qui ont des actifs de moins de 10 000 $; quinzièmement, l'introduction d'une nouvelle procédure de dévolution du solde d'actifs d'une coop en liquidation, remettant la responsabilité de cette dévolution au mouvement coopératif lui-même; seizièmement, la modification du régime particulier applicable aux coops agricoles et l'introduction de la possibilité, pour ces coops, de créer une catégorie de membres associés afin de tenir compte du contexte particulier de développement de ces coopératives; dix-septièmement, introduire un nouveau chapitre relatif aux coops en milieu scolaire pour solutionner des problèmes particuliers de ce type de coopérative; enfin, clarifier les dispositions relatives aux coops de travail pour mieux adapter la loi à leurs réalités et tenir compte de la spécificité.

On voit bien, M. le Président, que c'est de rendre le milieu coopératif prêt à affronter l'an 2000. Il faut, en outre, mentionner, M. le Président, que le dépôt de ce projet de loi a fait l'objet d'un important processus de consultation mené auprès des principaux intervenants du milieu coopératif. À cet effet, le Conseil de la coopération du Québec a désigné des représentants du mouvement coopératif pour participer au comité de révision de leur propre loi. Dans le cadre de cette consultation, le mouvement coopératif a également été appelé à soumettre ses commentaires. Une quinzaine de regroupements coopératifs et d'organismes, parmi les plus représentatifs du mouvement, ont soumis leurs commentaires, leurs suggestions au ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Dans le cadre de ce processus de révision, ma préoccupation majeure était que cet exercice tienne compte des volontés du mouvement coopératif québécois et que les changements apportés répondent à leurs besoins, tout en leur permettant de mieux contribuer à notre effort collectif pour l'économie du Québec. Mon prédécesseur, le député d'Outremont, avait refusé de présenter un projet de loi non consensuel dans le milieu coopératif. Il avait bien raison là-dessus. J'ai fait la même chose, et, aujourd'hui, il me fait plaisir de constater le consensus du milieu des coopératives.

(16 h 30)

Donc, si le milieu des coopératives du Québec est d'accord et réclame unanimement cette législation, je souhaite que cette Assemblée nationale entérine la volonté très forte des Québécoises et des Québécois. Qui n'est pas sociétaire d'une coop au Québec? Il n'y a pas grand monde. Alors, adoptons cette loi au plus vite. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Premièrement, c'est ma première intervention à titre de porte-parole, principalement dans la PME, mais aussi concernant la loi 112. Naturellement, dans ce cadre-là, étant nouveau porte-parole, j'offre toute ma collaboration au ministre et peux assurer à nouveau la collaboration du député d'Outremont, comme il le soulignait tantôt. Je tiens aussi à souligner que le ministre, tantôt, disait que, souvent, à la première année à la tête d'un ministère, il vous arrive, par inexpérience, de faire certains gestes qu'on peut peut-être regretter. Je veux tout simplement l'avertir et lui dire tout simplement que je saurai à l'occasion lui rappeler certaines erreurs de la première année.

Donc, pour en revenir au projet de loi 112, intitulé Loi modifiant la Loi sur les coopératives et d'autres dispositions législatives, je disais donc que c'est la première fois qu'il m'est permis, à l'Assemblée nationale, d'étudier un projet de loi touchant le secteur coopératif, et, à cet effet, permettez-moi de vous faire un bref historique de la naissance de l'idée coopérative. Au début de notre ère, les civilisations étaient beaucoup plus collectivistes qu'individualistes. L'homme, l'individu se devait à sa famille, à son clan. Il n'avait pas de droits individuels. En contrepartie, vivre en groupe offrait de meilleures chances de survie. Les années passèrent, l'homme évolua, et on se retrouva au XIXe siècle. C'est à ce moment que l'on peut voir les premières coopératives apparaître. Leur naissance est une réaction aux conditions socioéconomiques misérables des classes ouvrières et paysannes européennes. Par contre, au plan idéologique, la naissance du mouvement coopératif québécois diffère de l'Europe. Il ne symbolise pas les luttes de classes, il apparaît comme un outil de développement économique pour tous les Québécois et toutes les Québécoises.

Au Québec, l'évolution du mouvement coopératif a connu quatre phases de développement: la naissance, de 1850 à 1930; la diversification, entre les années 1930 et 1945; la consolidation, entre 1945 et 1960; et, enfin, l'expansion, à partir des années soixante. Pendant qu'Alphonse Desjardins était occupé dans son mouvement populaire, les agriculteurs mettaient sur pied l'industrie de transformation de produits laitiers. À cette époque, le rôle des coopératives se situait au niveau de l'approvisionnement. Tous sont d'accord pour prétendre que le mouvement coopératif québécois a pris toute son importance avec la crise de 1930. C'est à cette époque que l'on a observé un essor des coopératives dans les milieux de l'agriculture, des forêts, des pêcheries, de l'épargne et du crédit, de la consommation et de l'habitation.

Vers 1945, l'économie mondiale s'est retrouvée en pleine mutation. Ces contraintes furent difficiles à supporter pour plusieurs coopératives. C'est pour cette raison que l'on assiste à la consolidation des coopératives existantes, celles qui survivent au contexte économique. Par la suite, les secteurs coopératifs qui ont survécu grâce à la consolidation ont connu leur révolution tranquille. On doit s'adapter aux changements que vit la société. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le coopératisme est une formule moderne, pourtant axée sur des valeurs très anciennes. L'effort de conviction des masses et le principe fondamental orienté vers les besoins et les préoccupations des personnes humaines constituent l'essence même de l'idée coopérative. À bien des égards, on pourrait associer le mouvement coopératif à la rhétorique de Marx, qui s'est adaptée ingénieusement à la réalité capitaliste.

L'idée coopérative se situe donc quelque part entre les théories capitalistes et les théories socialistes. Certains diront qu'elle a peut-être emprunté le meilleur des deux théories. D'autres, par contre, sont effrayés de l'ampleur du développement du mouvement coopératif et craignent un débalancement de notre économie. S'il y a un consensus au Québec, c'est bien celui que la coopération est un des outils de développement économique les plus efficaces. Quoi qu'il en soit, elle reflète l'évolution des Québécois, devenus investisseurs après avoir été pendant longtemps épargnants craintifs.

Il existe plusieurs formes coopératives, avec des besoins différents. S'il est vrai que les normes administratives peuvent convenir à la plupart des formes, il en va tout autrement lorsqu'il s'agit de la capitalisation de celles-ci. Rappelons-nous que, entre autres, la Coopérative fédérée et le Mouvement Desjardins ont une loi qui répond à leurs besoins spécifiques.

M. le Président, le projet de loi 112 modifie la Loi sur les coopératives en ce qui concerne notamment les pouvoirs des coopératives et de leur conseil d'administration. Ainsi, il permet aux coopératives de déterminer par règlement certaines conditions d'attribution de ristournes ou le territoire ou groupe de recrutement de leurs membres. Il précise certains pouvoirs des coopératives en matière d'aide financière. Ce projet de loi modifie les règles applicables au pouvoir de représentation des membres et permet à une coopérative, par règlement, d'autoriser le conseil d'administration à suspendre le droit de vote d'un membre inactif ou de rendre éligibles comme administrateurs des personnes qui ne sont pas membres de la coopérative.

D'autre part, ce projet de loi confie aux conseils d'administration le pouvoir de déterminer les caractéristiques des parts privilégiées dont ils autorisent par ailleurs l'émission à titre de parts de qualification. De même, il introduit un nouveau mécanisme de financement sous forme de parts privilégiées participantes. De plus, ce projet de loi prévoit la constitution de coopératives de commerçants et supprime les dispositions particulières aux coopératives de pêcheurs et aux coopératives de consommateurs. Il modifie le régime particulier applicable aux coopératives agricoles et permet à ces coopératives de créer une catégorie de membres associés.

Ce projet de loi contient plusieurs modifications de concordance ainsi que des dispositions transitoires. M. le Président, plusieurs questions me viennent à l'esprit en regardant ce projet de loi. Je me demande si on aurait pu mieux répondre aux besoins de certaines grandes coopératives en adoptant une loi spécifique à leurs besoins plutôt que de modifier la Loi sur les coopératives et d'autres dispositions législatives.

À première vue, certaines dispositions m'apparaissent questionnables, entre autres de ne plus avoir besoin d'être membre pour être membre du conseil d'administration. Cette notion pourrait introduire un tiers ayant des intérêts différents que ceux visés par le conseil d'administration de la coopérative et ainsi changer l'objectif de cette coopérative.

M. le Président, en terminant, plusieurs autres questions pourront être discutées en commission parlementaire. J'assure cependant au ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie ma collaboration entière en ce qui a trait à l'amélioration du projet de loi 112 dans le meilleur intérêt des coopérants et des coopératives du Québec. Il va de soi que ma formation politique est d'accord pour donner son consentement à l'adoption du principe du projet de loi 112. Merci, M. le président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Shefford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Borduas. À vous la parole, M. le député.


M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau (Borduas): Merci, M. le Président. Nous avons devant nous un projet de loi qui, essentiellement, vise à favoriser davantage l'utilisation d'un type de modèle de développement économique particulier qu'on a beaucoup expérimenté au Québec, c'est-à-dire le modèle coopératif. Et je crois que le député de Shefford, critique de l'opposition officielle, avait raison, il y a quelques instants dans son intervention, quand il situait idéologiquement le modèle coopératif quelque part à mi-chemin entre, finalement, l'approche marxiste du développement économique, qui a prévalu dans un certain nombre de pays puis dans une grande partie du monde depuis le début du siècle, et l'approche du capitalisme, mais du capitalisme sauvage, celui qui, finalement, prévalait et prévaut encore dans un certain nombre d'endroits au monde, capitalisme sauvage qui veut que, finalement, on recherche uniquement le profit sans tenir compte d'un certain nombre de valeurs fondamentales.

Et c'est vrai que la coopération s'est développée au Québec pour faire en sorte qu'aujourd'hui on se retrouve avec un modèle alternatif de développement économique qui soit un modèle qui ait des valeurs particulières. Le ministre, dans son intervention, citait le président du Mouvement Desjardins tantôt, et je pense que l'objectif de la citation, c'était justement de faire prendre conscience aux gens qui nous écoutent et aux gens qui vont s'intéresser à ce débat que, si le gouvernement, et on peut bien le voir, l'ensemble de l'Assemblée nationale va accepter facilement l'adoption de ce projet de loi, c'est parce qu'on croit que ce modèle-là est avantageux. Et, effectivement, s'il est avantageux, et il faudrait peut-être faire un historique, ce n'est pas uniquement parce qu'aujourd'hui il est une alternative, c'est que, à une autre époque, et, ça, le député de Shefford a oublié peut-être de le signaler, au début, le mouvement coopératif au Québec a été une occasion de prise en charge d'une partie des Québécois, c'est-à-dire des Canadiens-français, qui composaient la majorité de la population et qui étaient, à la moitié du siècle dernier, en bonne partie dans une situation d'infériorisation économique à tous les égards, et ce, depuis très longtemps, en fait depuis la conquête. Et c'est à partir de l'utilisation du mouvement coopératif qu'il y a eu une prise de conscience dans beaucoup de milieux du Québec, pas juste dans le milieu urbain montréalais, mais dans beaucoup de milieux à travers le Québec, qu'il était possible pour des gens qui avaient peu de moyens d'organiser le développement, de prendre le contrôle du développement et de décider finalement de s'approprier une partie du potentiel économique, du potentiel de développement économique, et que des petits épargnants, des petits individus, des petits commerçants, des gens qui n'avaient pas des grosses fortunes, s'ils s'alliaient ensemble, s'ils coopéraient ensemble, s'ils organisaient leur développement solidairement ensemble, bien, ils pourraient se retrouver à avoir une force d'intervention efficace.

(16 h 40)

Le ministre parlait tantôt de l'efficacité qu'ont eue l'idée, le travail et le rêve d'Alphonse Desjardins. Aujourd'hui, on se retrouve avec quoi? Avec pratiquement l'ensemble de la population du Québec, ou, en tout cas, presque les deux tiers de la population qui est membre d'une caisse populaire quelconque d'épargne et de crédit initiée par le Mouvement Desjardins, avec un actif de 80 000 000 000 $. Et, à l'époque où on s'est concentré sur l'épargne et le crédit, aujourd'hui, maintenant, et c'est ce que nous invite à faire le projet de loi, on a développé, on a débloqué sur les autres aspects du développement économique, c'est-à-dire tout l'ensemble des secteurs de production, autant au niveau de l'action directe sur la production par des producteurs ou des consommateurs que par, aussi, l'action que pourraient prendre des commerçants.

Mais il n'en demeure pas moins que l'essentielle technique du projet de loi, et je crois que le ministre et le député de Shefford ont énuméré un certain nombre d'éléments qui se retrouvent dans le projet de loi au plan technique, donc, l'essentiel de ça, c'est de faire en sorte qu'on aille plus loin pour favoriser ce modèle-là. C'est important parce que le modèle a fait ses preuves. On ne se retrouve pas à une étape du développement du mouvement coopératif ou de l'idée de la coopération où on a encore des preuves à faire. Les preuves ont été faites et les citations que le ministre a données tantôt sont abondantes pour montrer comment, dans des secteurs de l'industrie forestière, de l'agroalimentaire, du milieu scolaire, de l'habitation, de la consommation, des coopératives funéraires, des travailleurs actionnaires, comment, dans une série de domaines, finalement, l'idée de la coopération a pris naissance, a pris forme, a pris racine et a donné les moyens à des gens de s'organiser solidairement dans leur milieu.

Mais non seulement l'idée de la coopération a fait ses preuves chez nous maintenant, il faut lui donner plus de capacité d'intervention, plus de latitude pour bouger, plus de capacité de réagir rapidement aux situations concurrentielles de la mondialisation de l'économie, autant que de la restructuration économique qui se fait chez nous comme ailleurs, mais il faut aussi se rendre compte qu'il y a un choix de société.

Quand on se retrouve, malheureusement, encore dans un pays qui s'appelle le Canada, où, partout à côté de nous, des choix socioéconomiques sont faits dans un esprit très conservateur et ultracapitaliste, où, finalement, la solidarité ne prévaut plus ou ne prévaut pas, où, finalement, les besoin des individus, les besoins des régions, comme les besoins des gens qui ont moins de fortune, n'est pas tellement pris en considération, on peut se dire: Est-ce que, nous, on veut aller dans cette direction-là, comme Québécois et comme Québécoises de toutes origines maintenant? Parce que, maintenant, on ne retrouve plus uniquement des Canadiens français qui s'intéressent au mode coopératif. On trouve des Québécois de toutes origines qui sont impliqués dans le milieu coopératif et dans les modèles de développement coopératif et qui ont choisi d'en faire leur choix d'intervention puis de développement économique.

Dans le fond, on se retrouve, M. le Président, à vouloir, ici, au Québec, pratiquer un capitalisme civilisé. C'est possible de pratiquer un capitalisme civilisé qui n'oblige pas l'État à devenir le seul maître d'oeuvre et le seul propriétaire des moyens de production et du capital, ce qui était le cas, finalement, dans l'idéologie marxiste et dans l'approche qui a prévalu et qui prévaut encore dans les coins du monde où c'est le régime communiste qui prévaut. Mais, entre ça puis la tendance qui se développe dans nos sociétés démocratiques où le capitalisme prévaut déjà depuis un certain temps d'une espèce de retour en arrière, d'une espèce de situation où on n'a plus besoin de prendre en considération les intérêts des plus faibles, des plus pauvres dans notre société, ça vaut peut-être la peine de se demander s'il n'y a pas un moyen de développement économique plus approprié à des gens, à une population, à une société qui veut mettre en évidence une valeur de développement économique qui prenne en compte la notion de solidarité, qui fasse en sorte qu'on puisse développer un milieu non seulement solidairement pour les besoins des hommes et des femmes de ce milieu-là, mais aussi en ayant une certaine perspective d'avenir qui fasse en sorte que le moteur de l'action, du dynamisme des gens ne soit pas uniquement la recherche de profit, parce que, au bout du compte, quand on veut être efficace, si notre seule motivation d'efficacité est la recherche de profit, souvent, ce qu'on a vu dans un passé lointain et récent de l'utilisation du modèle capitaliste pur, c'est une façon de se comporter qui va à l'encontre des intérêts non seulement des individus dans l'immédiat, mais des intérêts des collectivités sur une période à long terme. Pourquoi parle-t-on du développement durable aujourd'hui?

Par exemple, quand le ministre citait le président du Mouvement Desjardins, qui expliquait que, dans les endroits au monde comme ici, au Québec, l'écart entre les riches et les pauvres est tellement grand et la préoccupation pour les impacts économiques sur les milieux, par exemple, naturels, sur le développement durable qui fasse qu'on ait aussi une préoccupation sur la protection des ressources, sur la capacité d'une société de pouvoir utiliser ses ressources naturelles pour continuer de faire son développement économique et son développement social... Mais, pour avoir ce type de développement économique, il faut avoir une philosophie, il faut croire que la solidarité dans le développement économique, ce n'est pas quelque chose d'inopportun, ce n'est pas quelque chose qui est débranché. On peut être très efficace économiquement, très efficace au plan de la concurrence internationale tout en ayant comme volonté de faire un développement économique qui soit pour le besoin des individus, globalement, plutôt que pour le besoin de quelques individus. Il n'y a personne qui remet en cause, ici, dans cette Chambre, M. le Président, l'idée que, dans un système capitaliste, dans notre société démocratique, il y a de la place pour faire un type de développement économique qui est initié par le besoin de quelques individus de développer quelque chose d'extraordinaire à partir d'une idée et d'en arriver à bâtir des empires autour d'un individu puis d'une famille. Mais, des empires économiques bâtis sur des familles uniquement, ça ne fait pas nécessairement développer une société dans le sens de l'intérêt collectif, ça fait d'abord développer une société dans le sens de l'intérêt de quelques familles. Il y a de la place pour ça, mais il y a aussi de la place, dans une société, pour un modèle alternatif concurrentiel qui fasse en sorte que le développement ne se fasse pas uniquement pour certains individus, certaines familles, certains clans, mais pour des collectivités. Dans ce sens-là, si on veut que le développement économique se fasse pour des collectivités, il faut qu'on ait des modèles, et la coopération telle qu'elle est pratiquée au Québec depuis au-delà de 100 ans est un de ces modèles importants qui est, en fait, probablement le seul qui ait vraiment fait ses preuves.

Quand on regarde ce qui se fait depuis un siècle, un siècle et demi, en termes de modèles de développement économique à travers le monde – le député de Shefford avait raison – il y a comme le capitalisme relativement sauvage, il y a toute une série de variantes puis, à l'autre extrême, il y avait ce qu'on a essayé d'expérimenter en Union soviétique et ce qu'on tente encore de sauver dans certains coins du monde, comme en Chine communiste actuellement, et ce qu'on essaie de mettre en place ici. Ici, malheureusement, on retrouve aussi des pratiques de capitalisme sauvage, malheureusement encore, mais il y a aussi, heureusement, la présence très forte du mouvement coopératif qui fait en sorte que si, à un moment donné, des gens abusent, les gens savent qu'il y a une alternative. À la limite, ils savent qu'ils ne sont pas pris sous le joug de barons de l'industrie qui vont n'avoir comme objectif que leur seul enrichissement personnel, l'enrichissement de leur personne puis celui de leur petit clan, puis de leur petit empire à eux. C'est pour ça que c'est important que le modèle coopératif continue de prospérer, continue de vivre et continue de se développer chez nous. C'est pour ça que c'est important de faire en sorte qu'un projet de loi comme celui-ci puisse être adopté dans un large consensus, parce que ça veut dire que ce large consensus-là, c'est le signal que nous donnons à l'ensemble de la société comme aux intervenants capitalistes, qui ont peut-être une école de pensée d'une autre époque, qu'ici, s'ils ne font pas attention, il y a des alternatives de développement concurrentielles qui vont les déclasser, qui vont faire en sorte que leur attitude devra se policer.

C'est pour ça que c'est important d'avoir un projet de loi qui facilite. Quand on regarde le projet de loi, les gens pourraient dire: Bien, ce n'est pas de la réforme extraordinaire. Au contraire, c'est un projet de loi fondamental. Même si c'est un projet de loi très technique, c'est un projet de loi très fondamental parce qu'il touche fondamentalement à une façon particulière de voir le développement et de favoriser le développement économique et social du Québec. Dans le fond, quand on veut faire du développement, ça nous prend des instruments. Et quand on se rend compte que nos instruments ne sont pas suffisants, on s'en donne d'autres. Quand on se rend compte que nos instruments sont trop contraignants, on les libéralise, on les libère, on fait en sorte que des carcans disparaissent, qu'il y ait plus de latitude de fonctionnement, qu'il y ait plus de capacité de mouvance pour qu'un modèle de développement qui a fait ses preuves continue de se développer au profit de la collectivité et au profit de l'ensemble.

(16 h 50)

Et ce qu'on peut espérer, M. le Président, en terminant, c'est non seulement que ce projet de loi soit adopté, mais que ce projet de loi soit, quelque part, publicisé, pas dans le sens relations publiques gouvernementales du terme, mais dans le sens d'éducation populaire, dans le sens que, si les Québécois comprenaient qu'il y a à l'Assemblée nationale, au-delà d'un certain nombre de débats, des occasions où les gens font des choix fondamentaux... Et, aujourd'hui, mine de rien, nous sommes appelés à faire un choix fondamental. Pas qu'on choisit, là, de faire disparaître ou pas le mouvement coopératif, mais qu'on choisit ou non de lui donner la possibilité de prendre l'essor qu'il doit prendre à la fin du XXe siècle, et en capacité de pouvoir faire en sorte que les Québécois utilisent ce modèle-là pour se positionner économiquement et socialement dans le nouveau monde dans lequel on est en train d'entrer, c'est-à-dire un monde de concurrence, un monde qui, finalement, se globalise au plan économique et un monde qui va appartenir à ceux qui ont développé des instruments de solidarité et d'efficacité qui ont fait leurs preuves.

Et c'est ce que nous avons entre les mains actuellement, comme instrument: un milieu coopératif, une pensée, une philosophie, une idéologie coopérative qui est très enracinée partout dans notre société, partout dans nos régions, et qui mérite maintenant d'être, comme on dirait par chez nous, lâchée lousse pour pouvoir donner sa pleine mesure au moment où les Québécois et les Québécoises ont besoin de redresser leur économie et de franchir une autre étape en termes de développement économique et de progrès. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Borduas. Je suis maintenant prêt à céder la parole à un autre intervenant. Je vais laisser la parole à M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. À vous la parole, M. le député.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. Je suis très heureux d'intervenir sur ce projet de loi, Loi sur les coopératives. Et, M. le Président, l'occasion étant fort belle, et persuadé que mes collègues n'y verront pas une règle de non-pertinence, je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas dire que cette loi nous est présentée par le ministre de l'Industrie et du Commerce, ministre chargé de la Science et de la Technologie, un ministre, M. le Président, fort apprécié dans la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Fort apprécié, M. le Président, parce que c'est à ce ministre que nous devons ce plan, qui d'ailleurs porte son nom – nous l'appelons familièrement «plan Paillé». C'est ce plan, M. le Président, démarrage de nouvelles entreprises, qui a permis, dans la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques, de créer en moins de neuf mois plus de 1 200 emplois dans une circonscription qui en a bien besoin. Pas étonnant, M. le Président, d'ailleurs que, lors de son dernier passage, au mois d'octobre, dans la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques, il ait été reçu avec un enthousiasme, je ne dirais pas délirant parce que ça ferait pompeux, mais avec les yeux et la poignée de main reconnaissants d'un ministre qui savait s'occuper de la petite et de la moyenne entreprise, M. le Président. Et je puis d'ailleurs immédiatement assurer le ministre qu'à son prochain passage, puisque déjà les choses augmentent, nous dépassons les objectifs qu'il nous a fixés, je peux vous dire qu'à son prochain passage l'accueil qu'il aura ne pourra être comparable avec celui qu'il a déjà eu tellement l'ampleur en sera grande. Nous serons heureux, M. le ministre, de vous accueillir.

M. Paillé: Oui.

M. Boulerice: Et je vous dis immédiatement merci. Et, d'ailleurs, les 46 000 électeurs de la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qui recevront dans quelques jours ce bulletin que nous adressons à nos commettants, verront la place que nous faisons au travail effectué par le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. le Président, les coopératives au Québec, ce n'est pas la moindre des choses. Le ministre l'a sans doute dit, c'est 2 000 entreprises coopératives que nous trouvons au Québec; 2 000, M. le Président, qui possèdent des actifs d'au-delà de 2 500 000 000 $, si ma mémoire est bonne, avec un volume d'affaires qui va pratiquement au double, près de 5 000 000 000 $, et qui génèrent une masse salariale – donc de l'emploi, des salaires, et, par conséquent, M. le Président, des impôts, des taxes, ce qui sert à l'État pour fournir les autres services – qui atteint, je crois, aux alentours de 630 000 000 $. Et, M. le Président, vous le savez comme moi, que coopérative...

J'ai beaucoup apprécié, tantôt, les propos de mon collègue, le député de Borduas, quand il faisait état des visions qui, au début de ce siècle, étaient école dans le domaine de l'économie. J'ai beaucoup aimé ses propos sur les coopératives. Et le Québec, au niveau des coopératives, on peut dire qu'il a fait école. Le Québec a été le premier sinon un des premiers territoires d'essai du mouvement coopératif. En plus d'une réalité sociale, puisque c'est social également, en plus d'être une réalité économique, c'est même devenu un objet d'exportation. Il y a un savoir-faire coopératif au Québec qui est maintenant exporté.

Un des beaux exemples de mouvement coopératif – on ne cessera d'ailleurs jamais de le dire – c'est le mouvement coopératif Desjardins. Ce modèle est actuellement exporté au Viêt-nam, et nos amis vietnamiens sont très fiers d'adapter à leur réalité ce modèle coopératif qui est né ici, au Québec.

Nous avons également des – comment dirais-je – tentatives, quoique le mot «tentative» soit un peu faible, au niveau de bien d'autres pays liés à la francophonie et dans lesquels le volet coopératif, au niveau économique, c'est-à-dire dans le sens des caisses d'économie Desjardins, est en train de s'implanter. À moins que ma mémoire défaille, je crois que la chose se fait justement au Bénin, là où vient de se terminer le Sommet de la francophonie, où le Québec a fort heureusement brillé, comme toujours d'ailleurs.

Au niveau des coopératives de travail, puisque cela aussi fait partie du savoir-faire coopératif québécois, eh bien, là, c'est un modèle qui fut implanté par un ancien collègue à nous dans un pays d'Afrique francophone que nous connaissons bien et qui est Madagascar. Beaucoup de coopératives de travail ont été créées à Madagascar, inspirées du modèle coopératif québécois. Le député de Borduas, qui est membre de la Commission de coopération à l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française, pourrait en parler avec des détails plus pointus que moi puisqu'il suit quotidiennement le dossier, alors que je me permets de le superviser une fois à l'occasion, uniquement pour le faire puisque je ne suis pas inquiet des actions de mon collègue, le député de Borduas, qui d'ailleurs a fait un long stage en coopération en Afrique. Voilà!

M. le Président, cette loi que nous présente le ministre de l'Industrie et du Commerce, ministre de la Science et de la Technologie, s'inscrit dans la modernité. Contrairement à ce que disait le député de Shefford, qui aurait préféré que l'on modifie deux, trois petites choses, j'approuve la vision du ministre, qui est, après 11 ans, dans un mouvement qui a l'importance qu'on lui connaît et que je viens de vous donner. Je crois que cette loi méritait d'être revue dans son ensemble. Et, la revoyant dans son ensemble, le ministre pouvait l'actualiser, mais vraiment l'actualiser comme on ne le peut pas, c'est-à-dire regarder secteur par secteur.

Notamment, et cela est une partie très importante, les coopératives agricoles, c'est très important au Québec. Quand on pense Fédérée, je pense que tout le monde la connaît. Eh bien, je sais que ça peut paraître peut-être un peu bizarre que le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qui est un député d'une circonscription d'asphalte, de béton, de néons, parle d'agriculture, mais, au contraire, la terre nous nourrit, et les gens de Sainte-Marie–Saint-Jacques ont beaucoup de respect envers les agriculteurs du Québec.

(17 heures)

Eh bien, déjà, en reprenant cette loi, on tient compte d'un contexte qui est particulier et que nous pouvons observer en région métropolitaine, qui est celui du développement de certaines coopératives agricoles en périphérie des zones urbaines et du fait que seul un producteur agricole peut devenir membre d'une coopérative agricole. Là, le projet de loi permettra de créer dans les coopératives agricoles une catégorie de membres associés. Mais c'est une actualisation comme nous le souhaitions.

Coopératives d'habitation également, et Dieu seul sait qu'encore une fois vous me permettrez de prendre comme exemple ma circonscription, que vous connaissez bien, d'ailleurs. Dans Sainte-Marie–Saint-Jacques, la coopérative d'habitation a été le meilleur moyen pour faciliter l'accès à la propriété pour une catégorie de notre population qui, jamais, n'aurait pu devenir propriétaire. Donc, les coopératives d'habitation, si je devais vous énumérer celles qui existent uniquement dans cette circonscription, j'en aurais sans doute pour une grande partie de cet après-midi et le début de la soirée à vous les énumérer. Eh bien, là aussi, actualisation au niveau des coopératives d'habitation.

Je vous ai parlé tantôt du modèle d'exportation que pouvait constituer tout le mouvement coopératif au Québec. Coopératives de travail: là aussi il y a une actualisation par l'apport du ministre à la Loi sur les coopératives. L'article 223, qui concerne la coopérative de commerce, est abrogé, car cette distinction n'a plus sa raison d'être. Cette phrase peut vous paraître anodine, mais je peux vous dire qu'elle a fait l'objet de plusieurs démarches de la part de membres de coopératives de travail, dans ma circonscription, qui venaient à mon bureau me demander: Quand allez-vous changer cet article dans la loi? Eh bien, aujourd'hui, le ministre de l'Industrie et du Commerce leur donne la possibilité, maintenant, d'oeuvrer et d'opérer dans la modernité, parce qu'il a actualisé la loi. Il vient de le faire au niveau des coopératives de travail comme il l'a fait pour les coopératives d'habitation, comme il l'a fait pour les coopératives agricoles, comme il l'a fait pour les coopératives de consommateurs, les coopératives de pêcheurs, les fédérations, les confédérations. Je parle de coopérants quand je parle de fédération et de confédération; je ne voudrais pas que nos amis d'en face se réjouissent trop rapidement et croient que j'ai changé d'idée.

Mais ce qu'il est important d'abord et avant tout de souligner, c'est que, en cette Chambre, rares sont les projets de loi que nous pouvons présenter en disant: Cette loi est l'objet d'un consensus. La loi que nous présente le ministre de l'Industrie et du Commerce fait l'objet d'un consensus. Cette loi répond aux demandes, aux attentes maintes fois répétées de tous les secteurs qu'elle couvre, cette loi que je viens de vous énumérer; donc une loi qui n'est pas imposée – une loi qui s'imposait, par contre – et une loi qui, finalement, répond aux besoins spécifiques de chacune des catégories de coopérateurs et coopératrices au Québec.

Donc, nonobstant la remarque du député de Shefford, je suis persuadé qu'il sera dans de meilleures intentions au moment du vote. Je crois que nous devons féliciter le ministre, le remercier et adopter ce projet de loi qui, je vous le répète, était une loi attendue, une loi qui répond à toutes les attentes. Donc, ne faisons pas attendre ceux qui la souhaitent, votons cette loi, c'est une bonne loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Je vais céder la parole à M. le député de Gaspé. À vous la parole, M. le député.


M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Alors, merci, M. le Président. Je me joins à mes collègues également pour féliciter le ministre de l'Industrie et du Commerce d'avoir déposé ce projet de loi qui amène des éléments nouveaux. À regarder l'actualité et à regarder le succès que remporte la formule coopérative au Québec... M. le Président, au mois d'octobre dernier se tenait la Semaine de la coopération, et le thème, c'était «Coopérer, c'est réussir autrement». Au cours de cette semaine-là, on a appris qu'au Québec la coopération, c'étaient environ 3 500 coopératives – c'est beaucoup – qu'il y avait, à ce moment-là, plus de 66 000 emplois et un chiffre d'affaires de plus de 6 500 000 000 $ qui circulaient dans les coopératives, M. le Président. Mais, mieux encore, au Québec, sur une population de 7 500 000 habitants, il y a au moins 5 000 000 de personnes qui sont membres d'une coopérative au Québec. Alors, qu'on pense aux caisses populaires, mais qu'on pense à d'autres formes de coopératives; 5 000 000 de personnes, c'est beaucoup, M. le Président, sans compter qu'il y a énormément de gens, aussi, qui font du travail bénévolement à l'intérieur des caisses populaires, et même à l'intérieur des coopératives. Au Québec, ça représente plus de 30 000 dirigeants bénévoles, qui sont élus parmi leurs membres.

M. le Président, les coopératives d'épargne et de crédit occupent une place très importante également. Les caisses d'économie, qui ont des actifs, actuellement, de 80 000 000 000 $, 43 000 emplois et 19 000 dirigeants bénévoles dans 1 320 caisses, c'est la force économique du Québec. C'est une force très, très, très importante au Québec.

Mais, ce qui est le plus intéressant dans cette Semaine de la coopération, c'est les mesures à l'égard des jeunes pour les initier davantage à s'intéresser au système coopératif. Et des mesures ont été prises pour faire en sorte que les jeunes, de l'élémentaire au secondaire, puissent épargner dans des caisses populaires, s'initier au mouvement des caisses populaires, regarder comment fonctionne une coopérative, et c'est 630 000 élèves, M. le Président.

Il y a un autre élément important qu'il faut regarder aussi, ce sont les services qui sont offerts par les différentes coopératives. Aujourd'hui, dans le projet de loi que nous présente le ministre, on introduit les coopératives de commerçants qui peuvent mettre en commun différents services pour s'approvisionner. M. le Président, si on regarde ce qui existe déjà au niveau des coopératives, on en retrouve dans le domaine agricole, on en retrouve dans le domaine de l'habitation, on en retrouve au niveau des consommateurs, on en retrouve au niveau des travailleurs. Mais ce qui est plus intéressant encore, c'est les coopératives de travailleurs actionnaires qui, eux, par leur association avec une entreprise, créent une osmose qui permet, en fin de compte, à l'entreprise de se dynamiser. Et c'est une formule d'avenir, M. le Président.

On a assisté, au cours des derniers mois, et moi particulièrement, avec la venue du plan de démarrage d'entreprises, à la création d'entreprises dans le comté de Gaspé, et il y a des coopératives qui ont démarré, qui ont procuré des emplois. On constate également, à la lecture de l'actualité, que ce n'est pas uniquement dans le comté de Gaspé, mais dans toutes les régions du Québec que des jeunes démarrent des entreprises sous la forme coopérative. Même, on a vu, dernièrement, un groupe de jeunes de 14 ans décider de former une coopérative pour créer leurs propres emplois. Et, ça, le ministre, avec les dispositions dans le projet de loi, vient simplifier les choses, parce qu'on permet à des jeunes de 14 ans de fonder des coopératives.

Alors, M. le Président, au niveau des services que l'on retrouve au niveau des coopératives, bien, les coopératives de consommateurs, je pense que c'est très important d'expliquer à la population qui nous écoute qu'on en retrouve dans l'épargne et le crédit, mais on en retrouve également dans l'alimentation, l'habitation. Et, en Gaspésie, au cours des dernières années, on a assisté à un phénomène très particulier, c'est qu'il y a eu un engouement pour cette formule. Par le biais des programmes de construction d'habitations, sur tout le territoire de la région Gaspésie–les Îles, il s'est construit beaucoup d'unités de logement, dans différentes localités, pour répondre à des besoins, soit pour des personnes âgées, soit pour des personnes handicapées, soit pour des jeunes, soit pour des personnes à faibles revenus, et également pour des personnes qui avaient les moyens de se payer un logement, mais qui adhéraient à la formule coopérative et qui, en participant à ces entreprises, permettaient leur naissance, parce que, compte tenu de leur capacité de payer pour certains et de leur incapacité pour d'autres, ça faisait en sorte qu'il y avait une solidarité qui se développait à l'intérieur des unités coopératives.

(17 h 10)

Or, on en retrouve également, M. le Président, dans les biens et les services en milieu scolaire. On en retrouve dans les garderies, dans la câblodistribution, dans les services funéraires, où les gens se donnent des services en commun pour diminuer les frais; les services publics, l'enseignement, les loisirs. Les coopératives de travailleurs sont sans aucun doute celles qui vont faire en sorte que les gens vont se responsabiliser davantage face à leur travail. Lorsqu'un groupe de personnes décide de fonder une entreprise et qu'elles prennent la formule coopérative, chacun des membres, du fait qu'il a une part sociale comme membre fondateur et comme membre par la suite, ne détient pas plus que sa part, et l'ensemble de l'entreprise est réparti également entre chacun des membres.

Maintenant, ce qui est nouveau dans le projet de loi, c'est que le ministre permet que d'autres personnes qui ne sont pas membres de la coopérative puissent devenir des gens qui vont faire partie du conseil d'administration, et également de transformer ce qu'on appelle communément les ristournes, de transformer ces ristournes-là en parts privilégiées pour augmenter le fonds de l'entreprise. Or, ce sont des initiatives qui sont importantes à souligner.

Maintenant, j'aimerais dire aussi un mot sur les coopératives de développement régional. Vous vous souvenez que, en 1984, le gouvernement du Parti québécois, qui était au pouvoir, avait mis sur pied les coopératives de développement régional. Malheureusement, pour une région comme la Gaspésie, on a dû assister à un freinage très particulier alors que l'actuel chef de l'opposition, M. Johnson, qui était ministre de l'Industrie et du Commerce à ce moment-là, avait décidé d'en diminuer le nombre, et particulièrement en enlevant celles de la Gaspésie. Il nous a fallu attendre quelques années, avec l'appui du milieu, des caisses populaires, des commissions scolaires, pour recréer une nouvelle organisation, une nouvelle coopérative de développement régional afin de venir en aide aux coopératives existantes et soutenir celles qui voulaient démarrer. Alors, aujourd'hui on constate que la coopérative de développement régional est un outil très important pour aider celles qui veulent démarrer.

Comme vous le savez, dans la formule coopérative, le pouvoir appartient aux membres, la propriété appartient à la coopérative, répartie entre les membres, et c'est une formule, je pense, que, à l'heure actuelle, nous allons devoir promouvoir pour faire en sorte de créer une plus grande solidarité à l'intérieur des régions. Dans une région comme la Gaspésie, qui souffre d'une déficience majeure au niveau de l'emploi, je pense qu'il y a beaucoup d'éducation et d'information à faire, et, avec l'aide des services du ministère qui sont en région, nous avons pu faire en sorte que des gens qui adhéraient pour la première fois à la formule coopérative de travailleurs obtiennent de l'information et un soutien technique à l'exploitation de cette entreprise.

Ce qui est intéressant, également, au niveau de la représentation des gens aux assemblées, des membres aux assemblées, lorsque quelqu'un était membre d'une coopérative et ne pouvait assister à une assemblée, il ne pouvait se faire remplacer à cette assemblée. Le ministre a introduit des dispositions particulières pour faire en sorte que ces gens-là, dorénavant, puissent être représentés soit par le conjoint ou soit par quelqu'un de la famille, à condition que ces gens-là ne soient pas déjà membres. Alors, c'est une mesure, je pense, très intéressante et très importante.

Dans l'ensemble, M. le Président, je partage également les commentaires qui ont été formulés par mes collègues de Borduas et de Sainte-Marie–Saint-Jacques en ce qui a trait à toute la philosophie qui découle de cette loi et des amendements que le ministre apporte. Alors, en terminant, je souhaite ardemment que l'opposition concoure à l'adoption rapide de ce projet de loi et que, d'ici le 31 décembre, elle puisse trouver son application. Alors, je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Gaspé. Alors, je vais maintenant céder la parole, pour le droit de réplique, à M. le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. À vous la parole, M. le ministre.


M. Daniel Paillé (réplique)

M. Paillé: M. le Président, c'est agréable de voir que le consensus se fait autour de cette Chambre pour un projet de loi aussi important pour les gens que nous voulons favoriser dans la gestion de leur propre entreprise, c'est-à-dire tous les millions de Québécois qui sont membres d'une coop.

J'aimerais remercier le député de Shefford, mon nouveau critique en PME et coops. En fait, j'en ai trois, critiques, et je les remercie tous les trois, mais celui-là en particulier, puisqu'il est nouveau. Je pense qu'il a fait un bon historique, et l'ensemble des questions qu'il a soulevées, on pourra en discuter lors de la commission parlementaire, article par article, sans être pressés, mais sans perdre de temps, pour pouvoir donner aux coops le projet de loi qu'elles méritent.

Ça fait aussi du bien de voir des gens comme le député de Borduas qui parlent avec autant d'éloquence du balancier que constitue la coopérative au secteur capitaliste. Cependant, il a utilisé un certain vocabulaire pour le milieu capitaliste, d'où je viens, et je me permettrai donc de lui dire que le milieu capitaliste a ses hauts et ses bas, tout comme le milieu coopératif, et que le fait d'avoir un balancier, c'est quelque chose de correct, au Québec. Mais je ne peux pas épouser tout son vocabulaire concernant les gens du milieu capitaliste.

Le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, c'est vrai que, quand je suis allé dans son comté, on a eu un accueil très chaleureux, comme c'est de coutume dans Sainte-Marie–Saint-Jacques, et je suis très heureux parce que c'est un des comtés où le programme Démarrage d'entreprises a été le plus utilisé. C'est l'imagination et la créativité de ces gens qui font en sorte qu'ils utilisent les garanties de prêt que nous mettons à leur disposition. Il me fera toujours plaisir d'accompagner ce député coloré de Sainte-Marie–Saint-Jacques dans sa principauté pour pouvoir constater que les gens de sa principauté se prennent en main, se mettent ensemble et font une économie très fructueuse.

Enfin, je suis sensible aux remarques de mon voisin d'en bas, le député de Gaspé, qui souligne que, avec l'importance des régions dans la valeur des coopératives... Et effectivement on doit se demander comment des régions comme la sienne, ou même la région de l'Estrie – je croyais même entendre le député de Johnson, même s'il n'est pas intervenu... combien les coops sont très importantes pour le développement économique du Québec.

M. le Président, il me fait plaisir, donc, de constater que le consensus du milieu coopératif a imprégné cette Chambre, et c'est avec bonheur que je reverrai l'ensemble de mes collègues en commission parlementaire pour débattre de ce projet de loi que le milieu coopératif attend avec une certaine impatience. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre. Le principe du projet de loi 112, Loi modifiant la Loi sur les coopératives et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Boisclair: Oui. À la demande expresse du personnel du leader du gouvernement, M. le Président, je ferais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Et le messager vous demanderait, M. le Président, de suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Nous allons donc suspendre les travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 19)

(Reprise à 20 h 7)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour. J'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer le menu.

M. Boisclair: Oui, mais encore faudrait-il savoir duquel vous parlez, M. le Président. Mais, en ce qui nous concerne, je vous demanderais d'appeler l'article 7 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi 108


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 7, Mme la ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives.

Mme la ministre du Revenu, vous disposez d'un temps de parole de 60 minutes. Je vous cède la parole.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'informe déjà les membres de cette Assemblée que je n'ai pas l'intention d'utiliser tout le temps qui m'est imparti. Je vais tenter de présenter, de faire un survol des 552 articles de loi que comporte le projet de loi 108, puisque – encore là, il s'agit d'un certain nombre d'articles assez techniques, dans un certain nombre de cas, d'autres moins – nous aurons l'occasion, en commission parlementaire, de les prendre d'une façon plus systématique.

Alors, je soumets donc aujourd'hui à cette Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi 108, intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. Ce projet de loi, à l'instar de la plupart des projets de loi à caractère fiscal qui ont été présentés devant cette Assemblée au cours des dernières années, est volumineux et technique; 552 articles, je le répète, qui modifient 25 lois, dont la Loi sur le bâtiment, la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu et la Loi sur la taxe de vente du Québec, afin de donner suite principalement au Discours sur le budget du ministre des Finances du 9 mai 1995, à ses déclarations ministérielles du 30 novembre 1993 et du 21 décembre 1994, ainsi qu'aux bulletins d'information 92-12, 94-1, 95-1, 95-14 et 95-5 émis par le ministère des Finances respectivement le 23 décembre 1992, le 31 janvier 1994, le 3 février 1995, le 5 juillet 1995 et le 8 septembre 1995.

De manière accessoire, il donne suite à certaines mesures prévues dans le Discours sur le budget du ministre des Finances du 12 mai 1994 ainsi que dans le bulletin d'information 93-5 émis par le ministère des Finances le 25 novembre 1993.

J'ai déjà expliqué, M. le Président, aux membres de cette Assemblée à quoi faisaient référence... c'est-à-dire en quoi consistaient ces bulletins d'information. Essentiellement, ils interprètent et expliquent les mesures prévues au budget et qui permettent leur application, compte tenu que les lois, enfin, que les mesures fiscales s'appliquent dès leur dépôt ici, à l'Assemblée nationale, et que les lois, comme celle que nous adoptons ce soir, viennent plus tard.

(20 h 10)

Alors, je traiterai d'abord, M. le Président, de la modification que ce projet de loi apporte à la Loi sur le bâtiment. Elle y introduit une règle qui permettra la suspension automatique de la licence d'un entrepreneur dont les travaux de construction auront été suspendus à plus d'une reprise par la Commission de la construction du Québec en raison de travaux qui n'ont pas été exécutés en conformité avec cette loi ou la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

Cette mesure a été annoncée dans le discours du budget du ministre des Finances de mai 1995 et s'inscrit dans la foulée de notre action afin d'enrayer le travail au noir dans l'industrie de la construction et de la rénovation et à l'égard de laquelle ma collègue, la ministre d'État à la Concertation, de l'Emploi et responsable de l'Immigration et des Communautés culturelles, de même que députée de Hochelaga-Maisonneuve, a déjà largement contribué. Je fais ici allusion en particulier au pouvoir accordé à la Commission de la construction du Québec de fermer un chantier de construction et aux mesures en matière d'autoconstruction illégale, auxquelles sont associées les municipalités, celles-ci faisant parvenir à la Régie du bâtiment les déclarations de travaux de maisons unifamiliales neuves construites sur leur territoire.

Ajoutons à cela le projet de loi 99, dont le principe a été adopté récemment par cette Assemblée, et portant sur les garanties financières dans le domaine de la construction résidentielle neuve. J'aimerais souligner que le Vérificateur général a déposé son rapport hier et qu'il fait référence, justement, au fait qu'il y a matière à intervention à l'égard du travail au noir dans le domaine de la construction, et, comme ce rapport portait sur les années antérieures, déjà, par la mesure qui se trouvait au budget et par les mesures que nous avons appliquées en cours d'année, nous venons corriger un des éléments qui avaient été soulignés par le Vérificateur général dans sa révision de nos processus et son analyse en profondeur de nos modes de fonctionnement.

Alors, revenons maintenant au projet de loi, qui modifie en outre la Loi sur les impôts, principalement afin d'y modifier ou d'y introduire plusieurs mesures fiscales propres au Québec et, accessoirement, d'y apporter des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu par divers projets de loi fédéraux.

J'aborderai maintenant, M. le Président, par sujets, quelques-unes des règles modifiées ou introduites par le projet de loi 108 et qui concernent la Loi sur les impôts. Le premier sujet que je porterai à votre attention concerne l'instauration d'une limite au remboursement de certains crédits d'impôt pour les grandes corporations. À cet effet, considérant que les besoins immédiats de liquidités ne représentent pas, en général, une contrainte importante pour les grandes corporations, des modifications sont apportées en vue d'introduire à l'égard de celles-ci un plafond au remboursement de certains crédits d'impôt et de supprimer les règles particulières de réduction de leurs acomptes provisionnels.

Le second sujet traite de l'introduction de deux nouveaux crédits d'impôt afin de faciliter l'accession à la propriété résidentielle. L'un est relatif à l'achat d'une première maison neuve et se rapporte aux intérêts hypothécaires payés sur un prêt consenti pour l'acquisition de cette maison, l'autre concerne les dépenses de rénovation d'une maison existante nouvellement acquise et à l'égard de laquelle une attestation a été remise dans le cadre du programme d'accession à la propriété résidentielle, Premier toit, qui a été mis en oeuvre par la Société d'habitation du Québec.

Le troisième sujet est relatif au resserrement des règles concernant les dons d'oeuvres d'art faits à des organismes de bienfaisance. Ainsi, un particulier n'aura droit à un crédit d'impôt et une corporation ne pourra réclamer une déduction fiscale pour don de bienfaisance dans l'année du don que lorsque l'oeuvre d'art aura été aliénée par l'organisme de bienfaisance et qu'ainsi sa véritable valeur sera connue. Ça aussi, c'est une échappatoire qu'on vient boucher – si on me permet cette expression – fermer. Cette vente devra toutefois intervenir au plus tard à la fin de la cinquième année civile qui suit celle du don. Ainsi, nous nous assurerons que les avantages fiscaux dont un donateur peut bénéficier servent véritablement aux fins pour lesquelles ils sont destinés, c'est-à-dire pour appuyer la mission que poursuit l'organisme de bienfaisance qui est bénéficiaire du don.

Le quatrième sujet concerne les artistes, qui, par leur travail de création, contribuent à l'enrichissement de notre identité collective. À cet effet, une déduction fiscale est introduite pour ces artistes à l'égard de leurs revenus provenant de droits d'auteur dont ils sont les premiers titulaires. Enfin, le cinquième sujet concerne l'application à Fondaction, le Fonds de développement de la Confédération des syndicats nationaux pour la coopération et l'emploi, de certains avantages fiscaux consistant en une exonération d'impôt et de la taxe sur le capital pour ce fonds, en plus de l'octroi d'un crédit d'impôt pour les particuliers acquérant certaines des actions qu'il émet.

Ce projet de loi modifie également la Loi sur le ministère du Revenu afin, notamment, de limiter le droit au remboursement d'un failli qui demande un remboursement au ministre du Revenu, alors que ce remboursement aurait été affecté à sa dette si le failli avait demandé son remboursement avant sa libération. Cette loi est également modifiée afin d'assouplir la pénalité pour remise tardive à l'égard des retards qui n'excèdent pas 14 jours, un délai acceptable dans certaines circonstances.

D'autre part, afin d'empêcher les contribuables délinquants d'encaisser des montants payables par un organisme public sans avoir au préalable régularisé leur situation fiscale, il est proposé de modifier la Loi sur le ministère du Revenu afin de permettre au ministre du Revenu d'exiger des organismes publics assujettis à la compensation gouvernementale des créances fiscales qu'ils retiennent les montants payables aux personnes qui n'ont pas produit toutes les déclarations et tous les rapports qu'elles étaient tenues de produire en vertu d'une loi fiscale. On comprend bien qu'il peut s'agir du versement d'une subvention sous toute espèce de forme et à travers laquelle on peut se compenser si le contribuable n'a pas régularisé sa situation à l'égard des impôts. Encore là, c'est une mesure d'équité qui est très importante.

Par ailleurs, vous savez que, afin d'alléger le fardeau administratif des personnes qui font du transport routier interprovincial ou international, le gouvernement a présenté une demande d'adhésion à l'entente internationale concernant la taxe sur les carburants, soit l'International Fuel Tax Agreement. Cette demande a d'ailleurs été officiellement acceptée le 17 mai 1995, de sorte que cette entente s'appliquera au Québec à compter du 1er janvier 1996. Il est donc proposé de modifier la Loi sur le ministère du Revenu pour assurer une application cohérente des dispositions de cette loi à l'égard de cette entente.

Ce projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec afin principalement de hausser le taux des cotisations des employeurs au Fonds des services de santé, afin de compenser le manque à gagner à terme occasionné par la suppression des restrictions à l'obtention d'un remboursement de la taxe sur les intrants et d'un remboursement partiel de la taxe de vente du Québec. Il modifie aussi la Loi sur la taxe de vente du Québec principalement afin de supprimer la plupart des distinctions que comporte le régime de la taxe de vente du Québec par rapport à celui de la taxe sur les produits et services, ce qui devrait réjouir nos amis d'en face, puisque, évidemment, c'est une harmonisation avec la taxe fédérale. J'ai toujours dit et je le répète, je l'ai dit encore au début de cette semaine: Lorsque l'intérêt des Québécois et des Québécoises est en jeu, nous saurons faire les bons choix et prendre les bonnes décisions. Et ces suppressions, donc, permettent de faire de la TVQ une véritable taxe sur la valeur ajoutée, qui sera, de ce fait, non seulement plus facile à administrer, mais aussi plus favorable à la croissance économique.

À cet égard, M. le Président, j'aimerais vous faire part des modifications les plus significatives apportées au régime de la TVQ. La première modification d'importance concerne la suppression du concept de fournitures non taxables. Ainsi, les biens et les services dont la fourniture se qualifie à ce titre sont assujettis à la TVQ depuis le 1er août 1995 mais peuvent donner droit à un remboursement de la taxe sur les intrants ou à un remboursement partiel de la TVQ, le cas échéant. Par l'élimination de ce concept, nous nous assurons donc de réduire substantiellement les coûts d'administration de la TVQ pour les entreprises, qui voient désormais la TVQ et la TPS s'appliquer essentiellement de la même façon.

La seconde modification qu'il me plaît à aborder est relative à la suppression des restrictions à l'obtention d'un remboursement de la taxe sur les intrants et d'un remboursement partiel de la TVQ. Ces remboursements dont peuvent généralement bénéficier, depuis le 1er juillet 1992, les entreprises québécoises, les municipalités, les administrations scolaires, les collèges publics, les universités, les administrations hospitalières, les organismes sans but lucratif admissibles et les organismes de bienfaisance sont restreints à l'égard de l'acquisition des biens et services suivants: véhicules routiers devant être immatriculés en vertu du Code de la sécurité routière ou d'une loi d'une autre juridiction, carburants acquis ou apportés pour alimenter le moteur d'un tel véhicule, services de téléphone et autres services de télécommunications, électricité, gaz, vapeur ou combustibles et, enfin, nourriture, boissons ou divertissements à l'égard desquels la Loi sur les impôts limite la déduction à 50 % dans le calcul du revenu de l'inscrit.

(20 h 20)

Ces restrictions non seulement alourdissent l'application de la TVQ, mais affectent également de façon particulière les entreprises et les organismes qui disposent de peu de ressources pour s'occuper des aspects administratifs dans ce contexte. Le régime de la TVQ est modifié pour faire en sorte que les biens et les services visés par ces restrictions puissent donner droit à de tels remboursements, et ceci, à compter du 1er août 1995 pour les petites et moyennes entreprises, les municipalités, les administrations scolaires, les collèges publics, les universités, les administrations hospitalières, les organismes sans but lucratif admissibles et les organismes de bienfaisance, et à compter du 30 novembre 1996 pour les grandes entreprises. En outre, pour ce qui est du service de téléphone 1-800 et des autres services de télécommunications qui y sont liés, il donne droit à des remboursements dès le 10 mai 1995, soit le lendemain du discours du budget. À cet égard, je crois qu'il importe de souligner que toutes les entreprises et tous les organismes mentionnés précédemment sont visés par cette dernière mesure. Finalement, en ce qui concerne les remboursements partiels, leurs taux sont haussés à compter du 10 mai 1995 de 3 points de pourcentage dans le cas des municipalités, de 17 points dans le cas des administrations scolaires, des collèges publics et des universités, et de 32,5 points dans le cas des administrations hospitalières, afin de maintenir la situation financière de ces organismes qui prévalait avant le dernier discours du budget.

La troisième modification dont je désire vous faire part a trait à l'introduction dans le régime de la TVQ de règles semblables à celles prévalant dans le régime de la TPS à l'égard des périodes de déclaration. Encore une fois, un irritant administratif qui s'en va. Actuellement, les règles concernant la fréquence de production des rapports de TVQ et de TPS ne sont pas les mêmes et, de ce fait, constituent une source de complexité et de dédoublement de tâches administratives pour les entreprises.

Depuis le 1er août 1995, les personnes qui sont des inscrits dans le régime de la TPS et dans celui de la TVQ ont généralement les mêmes périodes de déclaration dans ces deux régimes. En conséquence, elles peuvent utiliser un formulaire de déclaration conjointe TVQ-TPS et ainsi maximiser les possibilités de compensation de ces deux taxes lorsqu'elles ont, par exemple, un montant à payer dans le régime de la TPS et un remboursement à demander dans le régime de la TVQ.

Dans un autre ordre d'idées, certaines modifications apportées à la Loi sur la taxe de vente du Québec et introduites par ce projet de loi visent à améliorer la compétitivité de l'industrie québécoise du transport routier en regard des transporteurs américains. Dans cette perspective, il a été prévu de réduire les droits d'immatriculation de ces transporteurs, réduction associée à l'introduction d'une taxe d'utilisation du réseau routier pour l'ensemble des transporteurs routiers, y compris les transporteurs américains. Ainsi, ces derniers devront débourser une taxe d'utilisation du réseau routier québécois de manière similaire aux transporteurs québécois, qui, eux, doivent présentement payer une taxe d'utilisation du réseau routier américain lorsqu'ils circulent aux États-Unis. Une saine réciprocité. Ce traitement équivalent vient donc remédier à une situation qui défavorisait les transporteurs québécois, qui devaient supporter des charges supplémentaires.

Enfin, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi concernant la taxe sur les carburants. Ici également, notre souci a été de simplifier le fardeau administratif des entreprises oeuvrant au Québec. C'est particulièrement le cas des transporteurs routiers oeuvrant dans plusieurs juridictions. Ces derniers doivent présentement défrayer la taxe sur les carburants dans chacune des juridictions où ils circulent et, pour ce faire, ils doivent compléter les formulaires exigés par chacune de ces juridictions, verser les taxes à celles-ci. Pour les entreprises, la préparation de ces formulaires s'avère particulièrement complexe. Les modifications introduites font en sorte de mettre en oeuvre au Québec, à compter du 1er janvier 1996, les règles de l'entente internationale concernant la taxe sur les carburants. Selon ces règles, chaque transporteur pourra choisir sa juridiction d'attache, auprès de laquelle il pourra faire rapport et remettre les taxes sur les carburants dues aux juridictions où il circule. La juridiction d'attache verra, quant à elle, à compenser les autres juridictions pour les taxes payables à leur endroit, ce qui est logique et ce qui amène les administrations à jouer leur rôle plutôt que de demander aux consommateurs ou aux contribuables de faire ce travail à notre place.

Dans un même but de simplification, des modifications sont également introduites afin de permettre aux distributeurs de carburant, y compris les détaillants, d'administrer la taxe sur les carburants selon leur pratique commerciale actuellement fondée sur la livraison du carburant établie à une température constante de 15° C.

En conclusion, je vous fais grâce de l'énumération des autres sujets abordés par le projet de loi 108, puisque les notes explicatives de ce projet en font état et que nous aurons l'occasion de l'examiner plus en détail en commission parlementaire. J'invite donc les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi 108. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre du Revenu. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Hull. M. le député.


M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir ce soir sur le projet de loi 108, soit la Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. La ministre, il y a quelques instants, a énuméré les grandes lignes de ce projet de loi, qui sont incluses et indiquées au préambule du projet de loi, dans les notes explicatives. Alors, je n'ai pas l'intention, non plus, de repasser tous ces articles des notes explicatives. Cependant, j'aimerais vous faire remarquer, encore sur ce projet de loi, que c'est un projet de loi qui donne suite à des orientations du Parti libéral, en grande partie, et qui donne suite également à des déclarations ministérielles du gouvernement libéral, ou, si vous voulez, plus précisément du ministre des Finances de l'ex-gouvernement libéral. Alors, dans l'ensemble, le projet de loi, je pense que c'est un bon projet de loi. C'est un projet de loi qui, dans le contexte actuel, avec les principes que nous admettons encore aujourd'hui, doit être adopté.

Néanmoins, la ministre a quand même cru bon d'inclure dans ce projet de loi certains aspects qui, à nos yeux, ne semblent pas correspondre aux attentes des Québécois et des Québécoises. Elle nous disait tantôt que, lorsque l'intérêt supérieur des Québécois et des Québécoises le requerrait, elle prendrait les bonnes décisions. M. le Président, hausser, par exemple, le taux des cotisations des employeurs au Fonds des services de santé de 3,75 % à 4,26 %, je ne pense pas que, les Québécois et les Québécoises, ça va leur plaire. Augmenter la taxe de vente, je ne pense pas, non plus, que ça va plaire aux Québécois et aux Québécoises.

Ces augmentations et d'autres, alors que l'on sait que le ministère du Revenu, selon le Vérificateur général, ne fait pas les choses et ne fait pas non plus les efforts qu'il devrait faire pour aller récupérer les taxes et les impôts des particuliers et des compagnies.

Le message que je veux envoyer à la ministre, finalement, c'est que les gens qui nous écoutent peut-être, puis je leur dis: Si vous êtes un bon payeur de taxes, vous payez des taxes et des impôts pour des personnes qui n'en paient pas. Ça, là, ce n'est pas des cachettes. C'est la réalité, M. le Président. Lorsque la province, ou le gouvernement, adopte son budget à tous les ans, il arrive à x milliards de dollars, il doit fixer des taux de taxes et d'impôts pour correspondre aux revenus. C'est la même chose dans les municipalités, M. le Président. On budgète, on a un budget de x montant d'argent, puis là, bien, on décrète le taux pour l'imposition pour les taxes municipales. Au provincial, c'est la même chose. Et on doit tenir compte, lorsqu'on décrète ces taux au Québec, des intérêts qu'on doit payer sur de l'argent qu'on a emprunté, parce qu'il y a des payeurs de taxes qui ne paient pas leurs taxes ni leurs impôts.

Ce que je demande à la ministre, si c'est vrai que lorsque l'intérêt supérieur des Québécois et des Québécoises le nécessitera elle prendra – c'est ce qu'il nous a dit tantôt – les bonnes décisions, ne pourrait-elle pas demander à son Conseil des ministres, consulter son caucus, consulter les citoyens et les citoyennes du Québec, finalement, et leur demander, à tout ce beau monde: Seriez-vous d'accord qu'on élimine tout ce qui fait en sorte que vous pouvez aller chercher des crédits d'impôt pour payer moins d'impôt?

En d'autres mots, si vous êtes dans la «bracket», si vous me permettez l'expression, de, je ne sais pas, moi, 30 % à 50 % pour payer vos impôts, vous pouvez aller chercher toutes sortes de patentes qui sont mises de l'avant par le gouvernement pour faire en sorte que vous allez payer moins d'impôts, pour diminuer le barème dans lequel vous vous trouvez.

(20 h 30)

Si on disait aux gens: Il n'y aura plus de déductions d'impôts et, au lieu de payer 40 %, 45 %, 50 % de vos revenus, vous allez payer 20 %, 25 %, mais vous allez payer 20 %, 25 % sur le total de vos revenus. C'est ce que je mentionnais hier, M. le Président. On pourrait avoir une petite carte postale qu'on enverrait à la ministre: J'ai gagné tant; votre taux, cette année, à cause de votre budget, est tant. Je vous dois tant.

Ça semble simple, M. le Président. Trop simple puis pas assez compliqué, finalement. Il faut, M. le Président, que les rapports d'impôts soient assez compliqués que personne ne puisse les faire. Alors, on va voir des comptables puis on paie encore pour faire faire nos rapports d'impôts.

M. le Président, je pense qu'il est grandement temps que l'on dise, puis qu'on se le dise... De ce côté-ci, tantôt, elle parlait du travail au noir. De ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, le travail au noir, on ne veut rien... ce n'est pas bon. Ça revient à ce que je vous disais tantôt. C'est des gens qui ne paient pas des impôts, et, nous, on doit payer des impôts pour ces gens-là qui n'en paient pas. Éliminer le travail au noir, parfait. On embarque là-dedans. Mais il faudrait aussi, M. le Président, faire en sorte que les travailleurs aient la possibilité de faire leur propre rapport d'impôts sur une petite feuille puis de dire, comme je le mentionnais: J'ai gagné tant, votre taux est à 20 %, je vous dois tant, fini. On n'a pas besoin, à ce moment-là, d'augmenter, par exemple, ou de déplafonner le Fonds de solidarité. Je donne ça comme exemple. Je le mentionnais à la ministre, je l'ai mentionné à son prédécesseur, chaque dollar mis dans le Fonds de solidarité coûte aux contribuables québécois 3 $ et quelques sous. Si on investit 300 000 000 $ dans le Fonds, bien, ça va coûter 1 000 000 000 $ aux Québécois.

C'est toutes ces petites affaires-là qui font en sorte que, à la fin de l'année, ce nombre incalculable de déductions auxquelles les gens ont accès, ont droit dans leur rapport d'impôts font en sorte, en plus de ceux qui n'en paient pas, que les bons paient pour les pas bons. Je pense qu'on est rendus à un stade où on doit se poser la question. La ministre doit consulter son Conseil des ministres, elle doit consulter son caucus et venir avec des solutions, des propositions pour faire en sorte que les bons ne paient plus pour les pas bons. Tout le monde doit payer sa quote-part.

Alors, dans l'ensemble, comme je vous le mentionnais, ce projet de loi, c'est un bon projet de loi. Malheureusement, la ministre a trouvé l'occasion d'y inclure quatre, cinq items, quatre, cinq sujets qui n'avaient pas été inclus dans les différents rapports de l'ex-ministre des Finances, l'ex-ministre libéral. Alors, dans ce sens-là, nous allons probablement nous objecter. En tout cas, pour le principe, ce sera sûrement sur division, si vous appelez le vote. Et nous aurons, comme la ministre l'a mentionné tantôt, l'occasion de discuter de ce projet de loi plus à fond en commission parlementaire et nous verrons par la suite quelle position notre formation politique prendra sur ce projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Hull. Y a-t-il d'autres interventions? Il n'y a pas d'interventions.


Mise aux voix

Alors, je vais mettre aux voix le principe du projet de loi. Le principe du projet de loi 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

M. LeSage: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui. M. le Président, tout en remerciant le député de Hull pour sa concision, je vous prierais d'appeler l'article 8 du feuilleton de ce jour.


Renvoi à la commission du budget et de l'administration

Oui. D'abord, M. le Président, vous me permettrez de faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Et, cette fois, l'article 8 du feuilleton.


Projet de loi 109


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 8, Mme la ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Mme la ministre des Finances, vous disposez d'un temps de parole de 60 minutes. Je vous cède la parole.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Non, c'est une loi qui est très courte et qui, je pense aussi, vient, comme la loi précédente, éviter des irritants pour les entreprises. Alors, ça devrait être assez... Je vais faire une intervention brève et, au moment de l'étude article par article, on pourra expliciter davantage ce que cela pourrait signifier.

Alors, il s'agit de la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales qui a été adoptée le 4 novembre 1993 et qui est en vigueur depuis le 1er janvier 1994. Qu'est-ce qu'elle fait, cette loi? Essentiellement, elle oblige toutes les entreprises qui font affaire au Québec à s'immatriculer au registre créé en vertu de cette loi. Cette loi impose notamment l'obligation aux entreprises qui n'ont ni domicile, ni établissement au Québec de désigner un fondé de pouvoir qui y réside. Assimilé, en droit commercial, à la notion civiliste de mandataire, ce fondé de pouvoir représente l'entreprise aux fins de l'application de la loi et toute procédure qui doit être exercée contre elle peut être signifiée à son fondé de pouvoir.

Par ailleurs, adoptée et sanctionnée le 14 décembre 1993, la loi 142, qui, comme vous le savez, régissait les relations de travail dans l'industrie de la construction, contenait deux dispositions majeures qui manifestaient clairement l'intention du gouvernement d'ouvrir le marché du travail de l'industrie de la construction aux travailleurs et entrepreneurs d'autres provinces. L'article 67 de cette loi avait d'abord pour effet d'éliminer dans la Loi sur le bâtiment l'exigence relative à une place d'affaires située au Québec comme condition d'obtention d'une licence d'entrepreneur de construction, obligatoire au Québec. La loi levait également, à l'égard des salariés de l'industrie de la construction, l'obligation de résider sur le territoire du Québec pour obtenir un certificat de compétence comme compagnon, comme apprenti ou toute autre occupation, ce qui avait jusqu'alors constitué l'objet principal de litige avec le gouvernement de l'Ontario. On s'en souviendra sûrement au sein de cette Assemblée.

Dans la foulée de cette loi, le Québec et l'Ontario ont conclu, le 24 décembre 1993, une entente sur les achats gouvernementaux et la mobilité de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Cette première entente bilatérale consacrait l'accord de deux gouvernements de façon à favoriser l'accès des travailleurs et des employeurs aux occasions d'emploi et d'affaires qui pouvaient se présenter dans l'autre province sans égard à leur provenance au Canada. Elle constatait aussi l'accord des deux gouvernements à éliminer les barrières à l'approvisionnement au regard des marchés publics dans le domaine de la construction.

En outre, elle pavait la voie à la conclusion d'accords complémentaires relativement à la reconnaissance mutuelle des qualifications et des expériences de travail dans l'industrie de la construction et en rapport avec l'ouverture des marchés publics des deux gouvernements, soit la possibilité que des entreprises puissent soumissionner sur des contrats d'achat de biens, de services – c'est spécifié ceux auxquels on a droit – en faisant des soumissions auprès d'une municipalité ou auprès d'un organisme gouvernemental, ce qui n'était pas possible dans les règlements passés.

Alors, l'introduction de l'exigence relative au fondé de pouvoir fut perçue par le gouvernement de l'Ontario et les entrepreneurs en construction comme un irritant majeur et un obstacle à la mobilité sur le marché du travail dans l'industrie de la construction. C'est d'abord la contiguïté temporelle entre l'adoption de mesures perçues comme contradictoires qui alimentait l'insatisfaction de l'Ontario, même si l'objectif recherché par le législateur québécois ne visait certainement pas, par le biais de la Loi sur la publicité légale, à réintroduire une barrière à la mobilité analogue à celle que comportait la Loi sur le bâtiment.

C'est donc au Comité bipartite de coordination que la partie ontarienne a soulevé la problématique rattachée à l'exigence québécoise relative au fondé de pouvoir. Ce Comité a le mandat général d'assurer l'application de l'accord et de traiter de toute autre question pertinente par rapport à son contenu. Alors, même si la partie ontarienne s'est montrée sensible aux arguments du Québec quant aux objectifs de la Loi sur la publicité légale concernant les entreprises faisant affaire au Québec, elle soutient que l'obligation relative au fondé de pouvoir est nettement perçue comme une manière détournée pour le Québec de réintroduire une barrière à la mobilité fondée sur un critère de présence locale.

(20 h 40)

Elle affirme, en outre, que cette obligation contrevient à l'engagement pris par le gouvernement du Québec dans le cadre de l'entente du 24 décembre 1993. Sa prétention s'appuie aussi sur le fait que la législation ontarienne ne comporte pas d'exigence semblable, du moins à l'égard des personnes morales constituées ou maintenues aux termes d'une loi relevant d'une compétence législative à l'intérieur du Canada. En effet, il existe en Ontario diverses lois qui traitent nommément de l'enregistrement des entreprises et du contrôle légal en matière de publicité commerciale. Parmi ces législations, la Loi sur les renseignements exigés des personnes morales s'apparente, en matière de renseignements à fournir, à la loi 95 en ce qu'elle comporte notamment l'obligation de donner un avis initial dans les 60 jours qui suivent la date où l'entreprise commence à exercer ses activités.

Vous me suivez, M. le Président? C'est un peu complexe, c'est un peu technique, mais il en va parfois de ce type de technicalités dans nos lois, et nous devons être capables quand même d'en saisir le plus pédagogiquement possible, je dirais, les membres de cette Assemblée.

Revenons donc à la loi. Cet avis initial doit contenir des informations sur l'identité de l'entreprise dont le degré de précision varie quelque peu selon qu'il s'agit d'une personne morale ontarienne ou extraprovinciale. En revanche, elle ne s'applique qu'aux seules personnes morales.

Quant à la notion de fondé de pouvoir, on retrouve une exigence analogue à celle édictée par l'article 4 de la loi 95 dans la Loi sur les personnes morales extraprovinciales. Cependant, la lecture conjuguée des articles 2, 14 et 19 confirme bien que seules les personnes morales constituées ou maintenues en vertu des lois relevant d'une compétence législative extérieure au Canada sont assujetties à l'obligation de désigner un mandataire, c'est-à-dire une personne physique âgée de 18 ans ou plus, ou une personne morale dont le siège social est établi en Ontario et dont le rôle consiste à recevoir la signification des brefs, avis ou autres actes de procédure. En somme, l'exigence québécoise relative au fondé de pouvoir ne trouve pas, du moins à l'égard des entrepreneurs du Québec constitués juridiquement en personnes morales, sa contrepartie dans la législation ontarienne.

Conscient de cette ambiguïté apparente, désireux de régler ce différend de façon efficace, le gouvernement a décidé de modifier la Loi sur la publicité légale. La modification vise à lui permettre de dispenser, par règlement et dans certaines circonstances particulières, notamment pour donner suite à une entente intergouvernementale à l'égard d'une province du Canada et à condition qu'il y ait réciprocité avec celle-ci, certaines entreprises de l'obligation de désigner un fondé de pouvoir. Alors, on ne sera plus obligé de désigner un fondé de pouvoir, mais, pour cela, il faut que nous soyons d'accord mutuellement, dans le sens où, l'un et l'autre, nous appliquerons la même règle.

La dispense prévue par la Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales pourrait donc s'appliquer, par voie réglementaire, aux entreprises de la province d'Ontario qui sont visées par l'Entente Québec-Ontario sur les achats gouvernementaux et la mobilité de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction du 24 décembre 1993.

En terminant, M. le Président, je suis confiante que cette modification législative permettra d'assouplir les relations entre le Québec et l'Ontario en matière de mobilité de la main-d'oeuvre, tout en maintenant la protection des citoyens et des citoyennes du Québec. Cela va dans le sens d'un partenariat accru entre nos États voisins. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre des Finances. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. Alors, M. le député, je vous cède la parole.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je serai, de toute façon, beaucoup plus bref que la ministre parce que ce projet de loi ne comporte que deux articles seulement. Et non seulement il n'y a pas matière, si je peux dire, à contestation ou matière à s'opposer, je pense que c'est un projet de loi avec lequel il faut concourir le plus tôt possible parce que ce sont des changements qu'il faut absolument apporter à la loi qu'on avait antérieurement votée.

M. le Président, nous savons que, depuis le 1er janvier 1994, l'Inspecteur général des institutions financières est chargé d'administrer la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Le projet de loi 109 qu'on a devant nous, M. le Président, vient modifier deux articles de cette loi pour faire suite à deux ententes interprovinciales particulières, soit celle sur la mobilité de la main-d'oeuvre dans le secteur de la construction et celle sur les politiques d'achats gouvernementaux. On se rappellera, M. le Président, que ces deux ententes-là ont été signées entre le Québec et l'Ontario et c'est justement le gouvernement libéral précédent qui avait finalisé ces ententes-là avec le gouvernement de l'Ontario.

M. le Président, ces modifications permettront à toute personne ou société venant d'une autre province canadienne, à qui l'obligation d'immatriculation s'impose au Québec, d'être dispensée de l'obligation de désigner un fondé de pouvoir si le gouvernement du Québec y consent et si pareille entente est réciproque avec la province d'où est issue cette personne ou société. M. le Président, ce projet de loi fait un pas supplémentaire en avant vers une libéralisation encore plus grande des échanges commerciaux au Canada. C'est un objectif louable puisque le mouvement des biens et services au Canada est essentiel pour la prospérité de tous les citoyens de ce pays.

Et, M. le Président, c'est la raison pour laquelle nous allons concourir avec ce projet de loi. Nous sommes même prêts et disposés actuellement... J'offre à la ministre la possibilité que cette Assemblée se change en commission plénière pour qu'on puisse étudier article par article et adopter ce projet de loi le plus tôt possible. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viger. Il n'y a pas d'autres interventions?


Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales, est-il adopté? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui. M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui. Conséquemment, M. le Président, je ferais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, en conséquence, je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi 109.

(Suspension de la séance à 20 h 48)

(Reprise à 20 h 50)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Alors, je céderais la parole à Mme la ministre pour quelques remarques préliminaires, s'il y a lieu.

Mme Marois: Non, je n'ai pas de remarques préliminaires, M. le Président. Nous avons déjà procédé au discours permettant de bien comprendre la loi. Ce n'est pas utile à ce moment-ci, je crois.


Étude détaillée

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, je m'en vais mettre l'article 1 en discussion.

Mme Marois: Bien, alors, écoutez, il y a trois articles dans cette loi. L'article 1 fait référence à l'article 4. Je vais quand même prendre le temps de le lire.

Le Président (M. Brouillet): Oui. Il y a un amendement qu'on m'a remis, je crois.

Mme Marois: Oui, il y a un amendement.

Le Président (M. Brouillet): Je vais peut-être lire l'amendement, et puis vous pourrez le commenter par la suite?

Mme Marois: Allez-y donc, lisez donc l'amendement.

Le Président (M. Brouillet): Oui. Très bien.

Mme Marois: Mais, si on ne lit pas l'article, on risque de mal comprendre l'amendement, non?

Le Président (M. Brouillet): Bien, vos commentaires pourront peut-être, par la suite...

Mme Marois: Parfait! Pas de problème.

Le Président (M. Brouillet): ...suffire à expliquer un peu le pourquoi de l'amendement en fonction de...

Mme Marois: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): Ça va? Alors, l'amendement consiste à remplacer l'article 1 par le suivant: L'article 4 de la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales (L.R.Q., chapitre P-45) est modifié:

1° par l'addition, à la fin du premier alinéa, de ce qui suit: «à moins qu'il n'en soit dispensé par règlement»;

2° par le remplacement, dans la première ligne du deuxième alinéa, des mots «Ce dernier» par les mots «Le fondé de pouvoir».

Alors, Mme la ministre, si vous voulez commenter.

Mme Marois: En fait, ce qu'on propose...

Le Président (M. Brouillet): L'amendement est recevable, je pense.

Mme Marois: Oui, je pense que oui, hein, n'est-ce pas, mon collègue de Viger?

Le Président (M. Brouillet): Oui. Pas de problème. Je m'en vais le déclarer recevable pour les fins...

Mme Marois: Alors, le présent amendement, en fait, propose de modifier le début du deuxième alinéa de l'article 4 essentiellement afin d'harmoniser le texte de cet alinéa avec celui de l'addition qui est proposée au premier alinéa du même article 4. Et là j'explique. C'est que l'adjectif démonstratif «Ce» et l'adjectif «dernier» du texte actuel ne peuvent se rapporter au mot «règlement» qui est ajouté à la fin du premier alinéa de l'article 4, les mots «Ce dernier» désignant plutôt le fondé de pouvoir visé au premier alinéa. Donc, le début du deuxième alinéa de la Loi sur la publicité légale doit être modifié en conséquence afin d'éviter toute interprétation erronée. Alors, c'est vraiment une correction de forme et absolument pas une correction de fond.

Le Président (M. Brouillet): Bien. L'article 1 est-il adopté?

Mme Marois: L'amendement, peut-être, M. le Président?

M. Maciocia: M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): Excusez. Nous allons prendre l'amendement avant. Ha, ha, ha! Ça va. Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Maciocia: Nous sommes encore avec l'amendement, M. le Président, parce que, justement, c'est uniquement une correction pour être plus clair, de manière que la législation puisse être interprétée de manière, disons, correcte.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Donc, il est adopté. L'article 1, tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 2.

Mme Marois: Bon, c'est l'essentiel du projet de loi, qui dit ceci: «Le gouvernement peut aussi, par règlement et dans des circonstances particulières, dispenser, à l'égard d'une province du Canada et à condition qu'il y ait réciprocité avec celle-ci, certains assujettis de l'obligation de désigner un fondé de pouvoir prévue à l'article 4. Ce règlement peut notamment être pris pour donner suite à une entente intergouvernementale.» C'est l'essentiel du projet de loi qui est devant nous, ce soir. C'est le fait que ça puisse être facultatif et qu'il y ait réciprocité s'il y a lieu que l'un ou l'autre décide qu'il n'y a plus de fondé de pouvoir, à condition que ce soit cette même règle qui s'applique dans l'autre juridiction de province.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Viger.

M. Maciocia: M. le Président, on est parfaitement d'accord avec les propos de la ministre. On l'a dit déjà, tout à l'heure, à l'adoption du principe du projet de loi. Il faut faire ces modifications-là, puis nous sommes complètement d'accord.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 2 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): L'article 3.

Mme Marois: C'est l'entrée en vigueur, essentiellement la date de la sanction de la présente loi.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 3 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): En conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Alors, je vous remercie tous d'y avoir participé. Et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire gentiment.

(Suspension de la séance à 20 h 54)

(Reprise à 20 h 56)

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le Président de la commission plénière.

M. Gaulin (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales, Mme Marois, et qu'elle l'a adopté avec un amendement.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, à ce moment-ci, je vous demanderais d'appeler l'article 8, à nouveau, du feuilleton, mais, cette fois-ci, pour l'adoption du projet de loi.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi 109. Avant de le mettre aux voix, je dois demander deux consentements. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 230 du règlement prévoyant que l'adoption d'un projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte de celle de la prise en considération du rapport de la commission?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 22 du règlement prévoyant qu'un projet de loi présenté après le 15 novembre 1995 ne peut être adopté avant le 21 décembre 1995?

Une voix: Consentement.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Le projet de loi 109, dont je vous lis pour une dernière fois le titre seulement, pas tout le projet: Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, à ce moment-ci, je ferais motion pour que nous ajournions nos travaux au jeudi 7 décembre 1995, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, nous ajournons nos travaux au 7, demain, à 10 heures.

(Fin de la séance à 20 h 57)