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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 22 octobre 1996 - Vol. 35 N° 45

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Journal des débats


(Quatorze heures trois minutes)

Le Président: Nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Aux affaires courantes, déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: L'article a de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 50

Le Président: Alors, à l'article a du feuilleton, M. le ministre des Ressources naturelles présente le projet de loi n° 50, Loi sur la Régie de l'énergie. M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, ce projet de loi créé la Régie de l'énergie. Il prévoit que la Régie a pour fonctions de fixer, à la suite d'audiences publiques, les tarifs et les conditions de distribution et de transport d'Hydro-Québec et des distributeurs de gaz naturel, sauf à l'égard d'un contrat spécial de fourniture d'électricité que le gouvernement détermine. Elle a également pour fonctions de surveiller leurs opérations afin de s'assurer que les consommateurs aient des approvisionnements suffisants et paient selon un juste tarif, de déterminer leurs taux de rendement, d'autoriser leurs projets d'immobilisation et d'approuver leurs plans de ressources. Pour ce faire, le projet établit des critères dont la Régie doit tenir compte.

Ce projet de loi prévoit que les contrats d'exportation d'électricité d'Hydro-Québec sont soumis au contrôle de la Régie selon qu'elle le détermine. L'autorisation du gouvernement est maintenue, dans les cas qu'il détermine, à l'égard des contrats de transport et d'exportation d'électricité des producteurs privés et de ceux dont Hydro-Québec ne peut interrompre unilatéralement la livraison.

Ce projet de loi confère à Hydro-Québec un droit exclusif de distribution d'électricité sur l'ensemble du territoire du Québec, à l'exclusion des territoires desservis par un distributeur opérant un système municipal ou privé d'électricité. Les systèmes municipaux se voient également attribuer un système exclusif de distribution d'électricité sur le territoire qu'ils desservent.

La Régie sera seule compétente pour examiner les plaintes des consommateurs insatisfaits des décisions rendues par les distributeurs d'électricité et de gaz naturel à l'égard d'un tarif ou d'une condition de services. Ceux-ci doivent instaurer une procédure interne d'examen des plaintes des consommateurs. Elle sera, de plus, chargée de surveiller les prix de la vapeur et des produits pétroliers de sorte qu'elle puisse, sur demande, renseigner un consommateur sur les prix exigés par un distributeur. En matière d'essence et de carburant diesel, elle fixe aussi un montant représentant les coûts d'exploitation d'un détaillant pour l'application d'une présomption légale en matière de prix de vente introduite dans la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers.

Ce projet de loi attribue également à la Régie des fonctions de nature consultative ainsi que des pouvoirs d'inspection et d'enquête.

Enfin, ce projet de loi introduit des mesures relatives au financement de la Régie et contient des dispositions de nature technique et transitoire, notamment sur la fixation des tarifs de fourniture d'électricité d'Hydro-Québec jusqu'à l'entrée en vigueur du chapitre IV de la loi ainsi que des modifications de concordance pour permettre la mise en place du nouvel organisme.

Les lois modifiées par ce projet: il y a la Loi sur l'exportation de l'électricité, la Loi sur Hydro-Québec, la Loi sur la protection du consommateur, la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic, la Loi sur le régime de retraite des fonctionnaires, la Loi sur les systèmes municipaux et les systèmes privés d'électricité, la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers, la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik, la Loi sur la coopérative régionale d'électricité de Saint-Jean-Baptiste de Rouville et abrogeant la Loi pour favoriser l'électrification rurale par l'entremise de coopératives d'électricité.

Les lois abrogées par ce projet sont: la Loi concernant l'examen des plaintes des clients des distributeurs d'électricité et la Loi sur la Régie du gaz naturel.

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Est-ce qu'on pourrait demander, à ce moment-ci, M. le Président, au leader du gouvernement s'il a l'intention de tenir des consultations publiques sur cet important projet de loi présenté par son ministre de tutelle?

M. Chevrette: On pourra s'entendre avec l'opposition pour des audiences particulières.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article b de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 47

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi n° 47, Loi modifiant la Loi sur le paiement de certaines amendes. M. le ministre de la Justice.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur le paiement de certaines amendes afin de permettre le recouvrement du produit des amendes et confiscations attribué au Québec en vertu du Code criminel ou d'une autre loi fédérale selon les dispositions du Code de procédure pénale.

Ce projet de loi apporte, par ailleurs, à la Loi sur le paiement de certaines amendes des modifications de concordance et d'ordre terminologique. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article c de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 52

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation présente le projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments et modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


M. Guy Julien

M. Julien: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments afin principalement d'assujettir à cette loi l'eau et la glace commerciales, de même que la glace mise gratuitement à la disposition du public, lesquelles étaient régies par la Loi sur la qualité de l'environnement. L'eau des fontaines publiques d'eau embouteillée sera également assujettie à la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments.

Ce projet de loi prévoit un nouveau type de permis relatif à l'embouteillage de l'eau et à la fabrication et à l'emballage de la glace. Il confère au gouvernement les pouvoirs réglementaires nécessaires pour lui permettre de régir adéquatement les eaux et la glace, notamment en ce qui concerne les normes relatives à leur qualité et à leur composition.

Ce projet de loi permet aussi d'exiger la transmission de renseignements nécessaires à l'application de la loi et apporte certaines modifications aux dispositions pénales prévues à la loi.

Ce projet de loi modifie également la Loi sur la qualité de l'environnement afin de supprimer les dispositions portant sur les eaux destinées à des fins commerciales et de prévoir l'obligation d'obtenir, dans les cas déterminés par règlement, l'autorisation du ministère de l'Environnement et de la Faune pour l'exploitation d'eaux souterraines.

Enfin, ce projet de loi prévoit des dispositions transitoires ainsi que certaines modifications visant à assurer l'harmonisation des dispositions de la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments avec celles du Code civil du Québec.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

(14 h 10)

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article e, M. le Président.


Projet de loi n° 54

Le Président: À l'article e du feuilleton, M. le ministre délégué au Revenu présente le projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec. M. le ministre délégué au Revenu.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur le régime de rentes du Québec afin de donner suite à la déclaration ministérielle du ministre des Finances prononcée le 19 juin 1996 à l'effet d'augmenter de 0,4 % le taux de cotisation au Régime de rentes du Québec pour le porter à 6 %, et ce, à compter du 1er janvier 1997.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Rapports annuels du ministère des Ressources naturelles, de la Régie du gaz naturel, de la Société des établissements de plein air et de la Société nationale de l'amiante

M. Chevrette: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer les rapports suivants: tout d'abord, le rapport annuel 1995-1996 du ministère des Ressources naturelles; le rapport annuel 1995-1996 de la Régie du gaz naturel; le rapport 1995-1996 de la Société des établissements de plein air; et le rapport annuel 1995-1996 de la Société nationale de l'amiante.

Le Président: Alors, les documents sont déposés. M. le ministre de la Sécurité publique.


Lettres du juge Jean-Pierre Bonin et du directeur de la Sûreté du Québec, M. Serge Barbeau

M. Perreault: Oui, M. le Président. Je dépose en cette Assemblée copies de deux lettres que j'ai reçues vendredi dernier. La première est la lettre de démission de l'honorable juge Jean-Pierre Bonin, à qui le gouvernement avait confié une enquête sur les événements entourant l'affaire Matticks. La deuxième lettre que je dépose est de M. Serge Barbeau, ex-directeur de la Sûreté du Québec, par laquelle il annonce sa décision de se retirer de la direction de la Sûreté du Québec pour la durée de l'enquête publique, que j'ai l'intention de recommander au Conseil des ministres demain, monsieur.

Le Président: Alors, les documents sont déposés. M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens et ministre responsable de l'Immigration et des Communautés culturelles.


Avis du Conseil permanent de la jeunesse sur l'accès graduel à la conduite automobile

M. Boisclair: Oui. M. le Président, j'ai l'honneur de déposer l'avis du Conseil permanent de la jeunesse sur l'accès graduel à la conduite automobile.


Décisions du Bureau de l'Assemblée nationale

Le Président: Alors, les documents sont déposés. Je dépose, de mon côté, les décisions du Bureau de l'Assemblée nationale nos 806, 807, 809 et 812.


Dépôt de rapports de commissions

Alors, au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de la culture et député de Lévis.


Consultation générale sur le projet de loi n° 40 ainsi que sur la proposition de politique linguistique

M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de la culture qui a siégé les 28 et 29 août, les 3, 4 et 5 septembre 1996 afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 40, Loi modifiant la Charte de la langue française, ainsi que sur le document de consultation intitulé «Le français, langue commune: promouvoir l'usage et la qualité du français, langue officielle et langue commune au Québec».

Le Président: Alors, le rapport est déposé, M. le député.

Dépôt de pétitions.

Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.


Questions et réponses orales

Alors, nous en arrivons maintenant à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Transfert à Toronto du centre de transaction des actions canadiennes de Desjardins

M. Johnson: Oui. Dans la préparation du Sommet, on sait que le premier ministre nous a dit rencontrer les différents présidents des chantiers, des groupes de travail, y compris évidemment M. Béland, qui est le coordonnateur des travaux. On sait, par ailleurs, que M. Béland, à tout le moins le Mouvement Desjardins, a annoncé le déménagement vers Toronto de son portefeuille d'actions canadiennes de 2 000 000 000 $, avec ce que ça signifie en pertes d'emplois importants pour Montréal et le logement de décisions, à l'avenir, à Montréal. On sait l'inquiétude, pour ne pas dire la colère que ça a soulevé dans le milieu financier de Montréal à cet égard-là, et, dans ce dossier, on est en droit de s'étonner que le premier ministre et le vice-premier ministre aient été passablement silencieux sur la place publique, notamment dans le cas du vice-premier ministre qui n'hésite pas à commenter même le temps qu'il fait et la météo.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: Ça lui est déjà arrivé. Je voudrais demander au premier ministre si M. Béland, lorsqu'il l'a rencontré la dernière fois, lui a parlé de ça.

Le Président: M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Il est normal que quelqu'un qui se fait qualifier d'homme invisible, en tout respect, veuille appeler l'autre M. Météo; c'est de bonne guerre. Quant aux questions de l'épargne, c'est vrai que nous en avons peu parlé, mais nous avons, par ailleurs, agi. Et je vais vous dire quel a été le scénario des dernières années sur l'épargne. Le dernier grand rapport sur l'épargne au Québec a été présenté par le gouvernement de René Lévesque. Il avait été confié à un grand expert d'en assumer la rédaction, M. Paul-Henri Rousseau, justement du Mouvement Desjardins.

Quand nous sommes revenus aux affaires, nous nous sommes rendu compte que la situation se détériorait en termes de déménagement de gestion de capitaux de Montréal à Toronto. C'est la raison pour laquelle nous avons secondé – et ça a été de l'argent bien placé et à peu de frais – à hauteur de 10 000 $, l'enquête de M. Rosaire Morin, de l'Action nationale. C'était un bon placement. Il nous demande de le seconder pour l'avenir, nous allons le faire.

Mais, en plus, nous avons découvert qu'alors que vous étiez au pouvoir et que le chef de l'opposition actuel était premier ministre le ministre des Finances et le ministère des Finances étaient déjà sur la piste du problème, mais qu'il y avait un rapport qui avait été publié et qui était déjà prêt aux Finances quand on est arrivés, en 1994. Alors, c'est ça, se taire devant les problèmes et ne rien faire, et c'est ça, reprendre l'action dès qu'on a pu le faire. Ce qui est arrivé.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Lorsqu'on sait que le gouvernement, par le vice-premier ministre, si on en croit les journaux, intervient dans des ventes d'hôtel pour assurer que la CSN, avec l'argent des contribuables, puisse acheter un hôtel – on ne comprend pas pourquoi – et que le gouvernement n'intervient pas sur la place publique dans ce dossier spécifique du transfert du centre de transaction des actions canadiennes de Desjardins, est-ce qu'on doit comprendre de la réponse-fleuve du ministre des Finances que le premier ministre – parce que ma question s'adresse au premier ministre – n'a pas parlé de ce dossier-là à M. Béland? Ma question est: Est-ce que M. le premier ministre s'est entretenu avec M. Béland de la décision de celui-ci et de son groupe de transférer les centres de décision à Toronto?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, d'abord, je pense qu'il faut affirmer haut et clair que nous avons au Québec l'expertise pour gérer ce genre de fonds et qu'il n'est pas du tout nécessaire de faire appel aux gens de Toronto pour le faire. Il faut, en plus, reconnaître que nous avons au Québec des fonds mutuels qui ont d'excellents résultats. Donc, il y a une pratique au Québec, et il n'y a pas de raison de faire appel à Toronto dans ce cas.

Reconnaissons cependant que la situation s'est aggravée considérablement par rapport à l'attraction que Toronto exerce dans ce domaine à la suite de la décision du gouvernement fédéral de créer une commission nationale des valeurs mobilières. Une infraction très grave qui est commise à la Constitution, un empiètement dans les pouvoirs du Québec qui a été dénoncé par tous les gens d'affaires au Québec. Alors, avant que le vice-premier ministre réponde des interventions qu'il a faites auprès de M. Béland – et il en a fait; il en répondra dans un instant – je voudrais demander au premier ministre... au chef de l'opposition...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: M. le Président, il faut reconnaître que nos rôles respectifs précédents...

Une voix: Continue, ça s'en vient. Lâche pas, ça s'en vient.

Le Président: M. le député! M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il faut reconnaître que nos rôles respectifs précédents se prêtent à ce genre d'inversion, d'autant plus que le chef de l'opposition rentre d'Ottawa. Il a rencontré ses amis d'Ottawa. Est-ce qu'il leur a parlé, justement, de la nécessité pour eux de renoncer à cette décision de faire de Toronto le pôle d'attraction des fonds mutuels et des institutions financières canadiennes par la création d'une commission inconstitutionnelle des valeurs mobilières nationales? La question lui est posée à ce moment-là, M. le Président, et, pour ce qui est de la suite des choses, pour M. Béland...

Le Président: À ce moment-ci, M. le ministre des Finances, je dois céder la parole à l'autre côté, puisque le temps imparti pour la réponse est largement écoulé. Alors, M. le chef de l'opposition.

(14 h 20)

M. Johnson: Ma question était fort simple au premier ministre: Est-ce qu'il a parlé à M. Béland de ce problème-là? Ou est-ce que M. Béland lui a donné avis préalable de son déménagement? Et, incidemment, est-ce que le premier ministre, lorsqu'il est enfermé 18 heures par jour dans le «bunker», a l'occasion de prendre connaissance des archives, y compris de la lettre de 1994, que j'ai moi-même signée, signifiant, comme tous les premiers ministres l'ont fait, que, une commission des valeurs mobilières canadienne, ça n'a pas de bon sens pour le Québec et que c'est pour ça qu'on garde la nôtre, incidemment?

Le Président: M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Ce n'est pas surprenant que le premier ministre ait été tenté de poser une question au chef de l'opposition officielle sur ce sujet. Il aurait pu en poser 1 000. Ils ont été dans l'inaction totale face à ce dossier majeur...

Des voix: ...

M. Landry (Verchères): ...durant 10 ans. Alors, ça méritait plus qu'une question.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Landry (Verchères): Quant aux rencontres avec M. Béland et diverses autorités du Mouvement Desjardins, dont le président directeur général de la Banque Laurentienne, elles ont débouché sur les conclusions suivantes. D'abord, le Mouvement Desjardins est désolé et attristé devant ce phénomène. Il nous offre sa coopération et veut contribuer à toute action qui aurait dû être faite depuis déjà plusieurs années et que notre gouvernement entreprendra en respectant la libre circulation des capitaux pour restaurer Montréal dans son rôle de centre financier.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre, qui cultive encore la différence entre les discours et les gestes, peut faire autre chose que de dénoncer le gouvernement fédéral pour quelque chose qui n'a aucun rapport avec la décision qui a été prise? Est-ce que le premier ministre se rend compte qu'il vient de nous avouer qu'il n'est pas intervenu auprès du Mouvement Desjardins? Et est-ce que le premier ministre se rend compte qu'en suivant la logique de son vice-premier ministre c'est la Caisse de dépôt qui va déménager à Toronto la prochaine fois?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le ministre des Finances a discuté de la question avec M. Béland, le président du Mouvement Desjardins, et j'ai la conviction que le Mouvement Desjardins va prendre les mesures qui s'imposent pour redresser la situation.

Une voix: Exactement.

Le Président: En principale, M. le député de Frontenac.


Circonstances entourant l'institution d'une enquête publique à la Sûreté du Québec

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, tout le Québec a été témoin vendredi du coût de théâtre du ministre de la Sécurité publique qui, en ordonnant l'enquête publique à la Sûreté du Québec, désavouait tout ce qu'il disait encore la veille à l'Assemblée nationale lorsqu'il refusait cette enquête publique que l'opposition demandait depuis deux mois. On connaît déjà des témoins importants de cette enquête publique: les trois enquêteurs de la Sûreté du Québec, qui sont suspendus; le directeur de la Sûreté du Québec, M. Barbeau, qui n'est plus à la Sûreté du Québec.

Ma question au ministre de la Sécurité publique: Comment le ministre, qui n'a pas dit ce qui s'est passé entre jeudi et vendredi dernier, qui a mal informé l'Assemblée nationale jeudi dernier, qui a compromis son premier ministre... Comment le ministre de la Sécurité publique, qui est un témoin important de la crise à la Sûreté du Québec, peut expliquer que, durant l'enquête publique... Comment expliquer qu'il va rester en place, alors que les autres témoins importants ont soit été suspendus ou ont décidé eux-mêmes de quitter leurs fonctions?

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: M. le Président, je pense que le député de l'opposition a trop souvent les yeux tournés vers Ottawa pour regarder des scénarios qui ont peu à voir avec les réalités qu'on vit. Dans ce dossier...

Le Président: M. le ministre.

M. Perreault: M. le Président, dans ce dossier, j'ai dit, j'ai répété et je redis que notre détermination était d'aller au fond des choses, que ma conviction, c'est que c'est dans l'intérêt du Québec et dans l'intérêt de la Sûreté du Québec. Il ne s'est rien passé entre jeudi et vendredi. Ce qui s'est passé, c'est que, vendredi, le juge Bonin – et j'ai remis à cette Assemblée copie de la lettre – prenant acte de ce qui s'était passé dans la semaine, m'écrivait ceci: «Cette semaine, trois officiers de police qui avaient initié l'enquête ont été suspendus, leurs documents confisqués. Ce geste a amené une escalade entre les différentes personnes sujettes à l'enquête.» Et, plus loin, le juge ajoutait : «Le climat qui en résulte rend impossibles les compromis procéduraux nécessaires à une enquête administrative suivant l'article 181 de la Loi sur l'organisation policière.»

À partir de ce moment-là, M. le Président, dans la mesure où notre intention a toujours été depuis le début d'aller au fond des choses dans ce dossier, il restait à la disposition du ministre et du gouvernement un moyen, c'est celui de l'enquête publique, et c'est la recommandation que je vais faire au Conseil des ministres demain.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, comment le ministre de la Justice, Procureur général, peut tolérer cette situation où le ministre de la Sécurité publique, témoin important dans cette crise à la Sûreté du Québec, va préparer lui-même le mandat de cette commission d'enquête publique, va le présenter au Conseil des ministres avec ses recommandations, va nommer les membres de cette commission d'enquête et, par la suite, comme si de rien n'était, se présenter devant sa propre commission d'enquête publique et continuer en même temps d'être le ministre de la Sécurité publique et patron de la Sûreté du Québec? Ma question s'adresse au Procureur général.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: La réponse est très simple, M. le Président: Parce que ça relève de son autorité, et il l'exerce comme la loi le prévoit.

Des voix: Bravo!

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui. Au premier ministre: Compte tenu que, depuis des mois, son nouveau titulaire depuis janvier de la Sécurité publique a présidé à des dangereux dérapages, qu'il s'agisse des problèmes de combats extrêmes à Kahnawake, qu'il s'agisse des libérations illégales de nos prisons, qu'il s'agisse, dans le cas de son prédécesseur, dont il est le digne successeur, de faire de l'horticulture dans des champs de pot, à l'égard desquels on attend toujours que des plaintes soient logées, est-ce que le premier ministre n'est pas tanné de voir le discrédit dans lequel la sécurité publique est plongée? Et comment fait-il pour maintenir sa confiance à l'endroit du député de Mercier?

Des voix: Oui.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la confiance du premier ministre et de qui que ce soit au gouvernement n'est aucunement en cause par rapport au ministre de la Sécurité publique, qui fait un excellent travail et qui le fait avec honnêteté.

M. le Président, disons clairement ce qu'il en est. Une affaire trouble au sein de la Sûreté du Québec, l'affaire Matticks. Nécessité de faire une enquête pour que le public sache ce qui s'est passé. L'enquête est déclenchée dans le cadre d'une enquête à caractère public, puisqu'il peut y avoir des audiences publiques, confiée à un juge en vertu d'une loi existante, un mode d'enquête qui a fait ses preuves à plusieurs reprises, accepté par l'honorable juge Jean-Pierre Bonin qui commence l'enquête, qui se déroule normalement. Et, tout à coup, en plein milieu de cette enquête, la semaine dernière, coup d'éclat: le juge Bonin, à la lumière de certains faits qu'il relate dans cette lettre, nous dit: «La voie administrative, illégale en l'espèce, n'est plus possible. Il n'est plus possible de conduire une enquête dans ces conditions, et donc, je me désiste de mon mandat.» Le gouvernement, à ce moment-là, tire les conclusions qui s'imposent: il faut donc une commission d'enquête publique, au sens de la loi générale, ce que nous avons décidé de faire, ce que nous déciderons de faire au Conseil des ministres de demain, lorsque nous serons saisis de la recommandation.

Une voix: Très bien.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, comme tous les faits dont parle le juge Bonin étaient connus, étaient de notoriété publique pendant la période de questions jeudi dernier, comment se fait-il que, tout d'un coup, les déclarations du premier ministre lui-même, ici, à l'Assemblée et celles de son ministre sont renversées quelques heures plus tard?

(14 h 30)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Pas du tout, M. le Président. Nous avons répondu la semaine dernière, avec à-propos, que l'honorable juge Bonin, qui avait la crédibilité qu'on lui connaît, continuait d'exercer son mandat, qu'il le mènerait à terme, et qu'à terme on jugerait s'il y avait lieu d'aller plus loin, s'il fallait faire davantage de lumière. Nous apprenons le lendemain que le juge Bonin, portant un jugement sur ce qui s'est passé durant la semaine et sur la capacité qui était la sienne de conduire l'enquête dans ces conditions, décide de se retirer. Alors, nous tirons la conclusion qui s'impose: il faut donc une enquête plus large, l'enquête de nature publique prévue par la loi, et demain nous serons saisis de la recommandation où nous aurons à le décider.

Le Président: En dernière complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Comment se fait-il que les faits invoqués par le juge Bonin, qui étaient, je le répète, connus, l'ont amené, lui, dans quelques heures, à souligner l'impossibilité pour lui de continuer cette enquête, alors que littéralement en même temps et le premier ministre et son ministre prétendaient et clamaient ici même qu'il n'y avait pas de problème puis que ça pouvait continuer comme ça, avec une enquête administrative?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le fait nouveau, un fait magistral qui éclate dans le dossier, c'est le jugement que porte l'honorable juge Bonin à l'effet que cette enquête qu'il conduit ne peut pas être poursuivie dans le cadre qui prévalait jusqu'à sa démission, et le fait nouveau, c'est la démission du juge. Voilà le fait nouveau. La démission du juge oblige donc le gouvernement à reconsidérer le genre d'enquête, et puisque le juge a fermé la porte à ce genre d'enquête en disant que les compromis procéduraux qui sont requis pour une enquête de ce genre ne sont plus possibles, le gouvernement va donc, demain, prendre une décision en conséquence.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Donc, ce que le premier ministre nous dit, c'est que le juge Bonin a compris, lui, où menaient les faits qui étaient connus, contrairement au ministre de la Sécurité publique qui, lui, n'avait rien compris.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est manifestement de la compétence du juge responsable que ressortit le soin de décider si, oui ou non, il peut continuer dans les circonstances qui prévalaient. Il a pris sa décision, il en a informé le public de façon très correcte, et maintenant le gouvernement prendra les siennes.

Le Président: En principale, M. le député de Chomedey.


Nomination de M. Mario Bilodeau à titre de sous-ministre adjoint au ministère de la Justice

M. Mulcair: Oui, M. le Président, en août dernier, nous avons mis en garde le ministre de la Justice contre le choix de Me Mario Bilodeau, ex-avocat des Hell's Angels, en tant que sous-ministre adjoint aux affaires criminelles et pénales. Or, des révélations récentes du Regroupement des victimes des caisses populaires démontrent que nous avions raison de le mettre en garde ainsi. Entre autres, il a été révélé que le sous-ministre Bilodeau avait arrêté les procédures dans une cause criminelle malgré une preuve accablante qu'un mandataire de la Caisse populaire de Sherbrooke-Est avait préparé de fausses déclarations ayant eu pour effet de nuire à un homme d'affaires de la région.

On souligne aussi que, curieusement, la Caisse populaire avait financé la construction du repaire des Hell's Angels à Lennoxville et que l'un des avocats qui défendaient la Caisse populaire de Sherbrooke-Est, Me Conrad Chapdelaine, en plus, lui aussi, d'être un ancien procureur des Hell's Angels, était le candidat défait à l'investiture péquiste dans le comté de Sherbrooke.

Devant des faits aussi troublants et qui, selon le Regroupement, mettent le premier ministre dans l'embarras, le ministre de la Justice croit-il toujours qu'il a bien fait de nommer, parmi les 17 000 avocats du Québec, Me Mario Bilodeau, ex-avocat des Hell's Angels, alors qu'il appert clairement que cela n'est pas de nature à favoriser la protection de la population?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, un journaliste qui assiste à ces séances de questions a qualifié le député de Chomedey comme étant celui qui posait les questions les plus cochonnes. Je pense qu'il devrait réviser sa position parce que je ne peux pas utiliser en cette Chambre le mot pour qualifier les crimes par association que ce monsieur vient de faire en cette Chambre. C'est tout à fait inacceptable. Je vous le dis, M. le Président...

Des voix: Bravo!

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît, de part et d'autre! Je ne voudrais pas être obligé de suspendre la séance cet après-midi. M. le leader de l'opposition officielle, question de règlement.

M. Paradis: Oui, vous aurez compris, M. le Président, que, suite au début des propos prononcés par le ministre de la Justice, à peu près tous les paragraphes de l'article 35 peuvent être invoqués à ce moment-ci, particulièrement les alinéas 6° et 7°. Il suffirait, pour que cette séance de questions se déroule correctement, que le ministre se conforme à l'article 79 de notre règlement: «La réponse à une question doit être brève, se limiter au point qu'elle touche et ne contenir ni expression d'opinion ni argumentation.» Que le ministre s'en tienne au règlement: il est Procureur général du Québec, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je pense qu'avec les pouvoirs que vous avez il y a aussi des limites à profiter de l'immunité parlementaire pour porter des accusations contre des honnêtes citoyens.

Le Président: Je pense que, de part et d'autre, si on relisait l'article 35, qui nous a été lu par le leader de l'opposition officielle – de part et d'autre, pas uniquement d'un côté, mais de part et d'autre – on pourrait y trouver un enseignement à la fois sur la façon dont on a posé la question et sur la façon dont on a amorcé la réponse. Dans un cas comme dans l'autre, je crois qu'il y aurait lieu de regarder et de lire, les uns et les autres, le libellé de l'article 35. Et, dans ce contexte, je vous rappelle que non seulement des réputations de gens qui ne sont pas ici pour se défendre sont en cause, d'une part, mais, d'autre part, il y a des gens qui occupent des fonctions publiques qui doivent aussi répondre de leurs responsabilités. Alors, M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, le député qui pose cette question de cette manière est cette même personne qui a déclaré au Journal de Québec : «Le but du colloque organisé par le Barreau est de monter une opposition formelle et stratégique contre la réforme de Bégin parce que, à leur point de vue, il y a encore des choses là-dedans qui n'ont pas de sens, et on est largement d'accord avec eux là-dessus», et qui s'est fait dire par le bâtonnier que les forums n'étaient pas organisés pour faire des oppositions, mais pour discuter intelligemment des projets de loi et non pas faire ce qu'il fait depuis toujours, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: On peut ne pas avoir apprécié la façon dont une question a été posée, mais la réponse doit porter sur l'essentiel de la question et non pas sur, fondamentalement, d'abord, le style de la question. Alors, en complémentaire.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre de la Justice du Québec et Procureur général de tous les Québécois est capable de nous dire qu'il est confiant que, parmi les 17 000 avocats de la province de Québec, la meilleure personne pour être le patron des procureurs de la couronne et pour décider des poursuites contre les Hell's Angels et d'autres bandes de motards criminalisées, c'est un ex-avocat des Hell's Angels? Est-ce qu'il dit ça aussi à la famille du jeune garçon qui a été tué par une bombe des Hell's Angels, que c'est la meilleure personne pour être le patron des procureurs de la couronne du Québec?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, j'ai déjà eu l'occasion de le dire à une émission de télévision, que j'avais entièrement confiance au sous-ministre de la Justice, Me Mario Bilodeau. Deuxièmement, à ce que je sache, ce n'est pas un crime de représenter quelqu'un devant les tribunaux. Parce que tout le monde ici, au Québec, encore, a le droit d'être représenté par un avocat lorsqu'il est accusé de quelque chose. Mais je trouve ça insultant que des gens fassent des associations parce qu'on a représenté une personne et disent que nous sommes pareils à cette personne que nous avons représentée. Cette personne, qui invoque à longueur de journée la Charte des droits et libertés, la bafoue ici, en cette Chambre, à la journée longue.

(14 h 40)

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: M. le député de Chomedey, en complémentaire.

M. Mulcair: Est-ce que le ministre de la Justice du Québec et Procureur général de toutes les Québécoises et de tous les Québécois est capable de comprendre que c'est une chose d'avoir le droit d'être défendu, mais que la population s'attend à être défendue par son...

Le Président: M. le député, le climat est suffisamment tendu cet après-midi pour qu'en plus on n'ajoute pas au travail du président l'obligation de tolérer que les gens fassent son travail à sa place. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Est-ce que le Procureur général du Québec est capable de comprendre que la population est en droit d'être bien représentée lorsque vient le temps de poursuivre devant les tribunaux et que ce n'est pas normal qu'une personne qui a déjà représenté des bandes criminalisées soit celle qui donne les ordres d'arrêter des procédures, y compris dans des cas concernant les Hell's Angels?

Le Président: M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, il est libre au député de Chomedey d'insulter tous les procureurs, c'est son droit de le faire; il supportera les conséquences du jugement qu'il porte. Mais ce que je peux dire, c'est que les procureurs de la couronne au Québec font un excellent travail, ils sont dirigés par un sous-ministre aux affaires criminelles et pénales qui fait un excellent travail et qui est apprécié par l'ensemble de ceux-ci, et je pense, M. le Président, que c'est une excellente décision qui a été prise de le nommer à ce poste.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, en complémentaire.

M. Johnson: Oui. M. le Président, sur un autre ton – un autre ton dans la réponse, évidemment: Est-ce que le premier ministre ne trouve pas inquiétantes les apparences de conflit d'intérêts – parce que c'est ça, le fond du dossier – qu'un procureur qui dans le privé agissait pour des bandes criminalisées soit par la force des choses, hein, par la force des choses, littéralement celui qui prend les décisions de cesser des procédures, de prendre des procédures et d'ajuster des procédures à l'endroit de ces mêmes gens là? Est-ce que le premier ministre ne peut pas envisager les circonstances dans lesquelles l'image de la justice et les apparences de conflit ne viendraient pas ternir l'administration de la justice? C'est ça qui est en cause ici.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que le chef de l'opposition souhaitera rectifier ses propos quand il verra qu'il a dit il y a un instant que la personne en question agissait pour des bandes criminalisées.

Une voix: Oui.

M. Bouchard: C'est une chose qu'on ne peut pas dire de quelqu'un qui est un avocat, qui exerçait ses devoirs d'avocat et qui en cette matière permettait à des concitoyens d'exercer des droits de concitoyens devant les tribunaux: le droit démocratique de se faire défendre, d'avoir un avocat. C'est un honneur de cette démocratie que d'avoir des avocats qui sont prêts à défendre les gens lorsqu'on les accuse, et il n'est pas question de blâmer quelqu'un qui a fait du droit criminel, qui a agi bien sûr pour des prévenus, de ne pouvoir ensuite assumer des fonctions publiques, s'il l'a fait de façon intègre et correcte, M. le Président.

Une voix: Voilà.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: En rappelant au premier ministre le b.a.-ba des mots du vocabulaire, lorsqu'un avocat agit pour un... Du calme! Lorsque le premier ministre actuel agissait pour le gouvernement pour couper les salaires de 20 %, ce n'est pas lui qui le faisait, il agissait. Son client était... Alors, d'agir comme procureur dans certains dossiers, dans une longue carrière...

Le Président: J'ai dit au moins une fois aujourd'hui, je l'ai dit la semaine dernière – je pense être obligé de le répéter – qu'il n'y a qu'un président d'assemblée ici. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Ce que je demande au premier ministre, c'est clair, regardez, là: Les dossiers, tels qu'ils sont soulevés, de la nomination de ce sous-ministre adjoint tiennent au fait que, dans sa carrière privée, qui d'aucune façon n'est entachée par qui que ce soit ici quant à l'intégrité...

Des voix: Oh!

M. Johnson: Voyons! Qui a dit ça, là, à part le leader gouvernemental? Pas du tout, pas du tout.

Est-ce que le premier ministre ne croit pas, comme chef du gouvernement, que les apparences peuvent en prendre un coup lorsque, dans des circonstances telles que celles qui ont été décrites, la même personne, après une longue carrière dans le privé, est en position de prendre des décisions qui affectent ses anciens clients? Il me semble que c'est clair, la question, là. Est-ce que le premier ministre trouve que, sur les milliers d'avocats qu'il y a au Québec et les douzaines... pas les centaines, mais peut-être les douzaines qui peuvent combler ce poste, la meilleure personne était celle qui est dans cette situation-là à l'occasion? C'est ça qu'on demande au premier ministre.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que toute la Chambre et le grand public auront pris acte avec satisfaction de la reconnaissance par le chef de l'opposition de l'intégrité et de la compétence de Me Bilodeau. Et, en conséquence, M. le Président, le gouvernement est parfaitement apte, à ce moment-là, à choisir des gens intègres et compétents pour leur faire assumer des fonctions publiques.

Une voix: Exact.

Le Président: En principale, M. le député de Shefford.


Déréglementation pour favoriser la création d'emplois

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Les gens d'affaires décrient la multiplication des taxes et des règlements qui empêchent la relance de l'emploi. Le premier ministre lui-même disait lors de son discours inaugural, le 25 mars dernier, que, pour créer de l'emploi, notamment dans une période où le secteur public n'en crée pas, il faut donner de l'oxygène au secteur privé. Cela signifie simplifier l'aide de l'État et alléger sa réglementation.

M. le Président, rien de tout ça n'est encore fait, et, à titre d'exemple, je désire déposer la masse réglementaire adoptée par ce gouvernement depuis le 12 septembre 1994.

Une voix: Ha, ha, ha! C'est bon!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: À condition que le tout se fasse dans l'ordre et dans le respect du décorum, il n'y a pas de problème à ce que vous présentiez des documents, mais il y aura un problème pour le dépôt s'il n'y a pas de consentement unanime, par exemple.

Alors, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Est-ce qu'il y a consentement? M. le Président?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je pense que c'est assez difficile pour nous de savoir quels sont les documents. Est-ce qu'il a déposé un bottin téléphonique? On n'a aucune idée de ce qu'il a déposé. Mais, dans les circonstances, on va lui permettre de déposer ce qu'il veut.

Le Président: M. le député de Shefford.

M. Brodeur: M. le Président, c'est tout simplement la réglementation depuis le 12 septembre 1994, le jour de l'élection du Parti québécois. La chambre de commerce... Est-ce qu'il y a consentement, M. le Président?

Le Président: À l'ordre! J'ai d'abord entendu le leader du gouvernement qui a donné son consentement, sauf que j'ai aussi entendu d'autres députés qui ont refusé leur consentement. Puisque ça prend un consentement unanime, il n'y a pas de dépôt, d'une part.

D'autre part, je voudrais mettre en garde – et je ne porte pas le propos uniquement sur le geste du député de Shefford aujourd'hui, mais sur l'ensemble des membres de l'Assemblée – pour faire en sorte qu'on ne se retrouve pas dans des dépôts de documents massifs, à occasionner des coûts inutiles de reprographie, d'une part, et, d'autre part... Je ne dis pas que c'était le cas de ce que le député de Shefford vient de faire. Je pense qu'il peut y avoir des illustrations symboliques et qu'on utilise des moyens, du fait que maintenant l'Assemblée est télédiffusée, mais je pense qu'on devrait éviter aussi, par ailleurs, de tomber dans le ridicule, ce qui n'est pas le cas cet après-midi.

(14 h 50)

Mais je crois que le danger, c'est que, si on commence ce type de dépôt massif, outre les problèmes de reprographie, on peut créer une spirale qui pourrait nous amener assez loin. Alors, après-midi, ce que je comprends, c'est que, comme il n'y a pas de consentement unanime, il n'y a pas de dépôt de documents, mais il y a présentation de documents pour illustrer le propos de la question. Alors, M. le député de Shefford, votre question principale maintenant.

M. Brodeur: En principale. La Chambre de commerce du Québec concluait son congrès ce mois-ci en souhaitant que le prochain Sommet soit celui de la déréglementation. Ma question au premier ministre, M. le Président: Lors du prochain Sommet, le premier ministre s'engage-t-il à déréglementer plutôt que d'abolir deux ou trois règlements pour épater la galerie?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, en effet, les gouvernements adoptent trop de réglementation, nous le reconnaissons, mais notre gouvernement à nous, depuis 1994, en a adopté beaucoup moins que le gouvernement qui nous précédait.

Une voix: Absolument.

M. Bouchard: Durant les années...

Une voix: On ne le verrait plus.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, en 1992, 1993, 1994, le gouvernement qui nous a précédés a, en moyenne, adopté 600 règlements par année, et, nous, en 1995, on en a adopté 419. Alors, c'est beaucoup moins que ceux qui ont été adoptés... J'ajouterai que, s'il fallait empiler les règlements du gouvernement précédent, on perdrait le député de Shefford de vue.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Shefford.

M. Brodeur: M. le Président, en additionnelle. Comment peut-on faire confiance au premier ministre, puisque, depuis son arrivée en janvier dernier, en neuf mois seulement, il a fait adopter plus de 5 400 pages de règlements, 20 pages par jour, sept jours par semaine?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il faudrait d'abord savoir combien de règlements. Il y a des règlements qui font plusieurs centaines de pages. C'est probablement qu'il y en a beaucoup moins que ce qui a été adopté en 1994...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: ...mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question qui mérite une longue réponse.

Une voix: C'est ça. C'est ça.

Le Président: M. le député de Westmount– Saint-Louis, en principale.


Conditions salariales dans la fonction publique

M. Chagnon: En principale, M. le Président. Est-ce que le premier ministre peut nous dire quelle est la politique de son gouvernement concernant les conditions de travail des cadres des ministères, du réseau de la santé, du réseau de l'éducation, puisque ceux-ci n'ont jamais reçu les augmentations préréférendaires consenties à tous les autres employés syndiqués?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, le gouvernement n'a pas pris de décision, à ce jour, à leur sujet.

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.

M. Ouimet: En complémentaire, M. le Président.

Le Président: En complémentaire.

M. Ouimet: À la ministre de l'Éducation: Est-il vrai que la ministre de l'Éducation, lors d'une réunion tenue le 23 septembre dernier devant les représentants des cadres et hors-cadres scolaires, affirmait souhaiter augmenter leur salaire, mais que le premier ministre bloquait le dossier et qu'elle demandait aux cadres scolaires de faire pression sur le premier ministre et son entourage pour que les cadres et hors-cadres puissent recevoir leur augmentation salariale préréférendaire?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: M. le Président, j'ai l'habitude d'être capable de défendre mes dossiers là où le forum me permet de le faire, que ce soit au Conseil des ministres ou au Comité de priorités. Cela est juste que j'ai rencontré l'Association des cadres scolaires. Cela est juste que je leur ai dit que je croyais qu'il était utile et nécessaire d'évaluer une possibilité de solution en ce qui les concernait pour l'ensemble de leurs conditions. Je me suis même engagée – et c'est un travail qui est actuellement en cours – à corriger toute espèce d'éléments qui étaient des irritants quant à leurs conditions générales de fonctionnement ou de travail et pour lesquels il n'y avait pas nécessairement de crédits à dégager.

M. Farrah: En complémentaire.

Le Président: En complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Oui, M. le Président. Est-ce que le premier ministre peut nous confirmer en cette Chambre que, lors de sa rencontre du 8 octobre dernier à ses bureaux de Montréal avec les chefs syndicaux, il les aurait placés devant les choix suivants: réduire le salaire des employés de l'État de 7 % ou en congédier 30 000, reniant ainsi les engagements pris par le gouvernement péquiste avant le référendum?

Une voix: Oh! Oh!

M. Bouchard: M. le Président...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: ...je ne reconnais pas les chiffres qui sont mentionnés. Au cours de cette rencontre, nous avons eu l'occasion de discuter du Sommet avec les représentants des grandes centrales, mais nous avons également abordé la question du problème budgétaire que nous aurions à régler tous ensemble, les Québécoises et les Québécois, lors du budget de l'année prochaine. Et nous avons fait part aux centrales syndicales de l'ampleur connue publiquement, par les chiffres déjà publiés, de l'effort budgétaire que nous aurons à faire, qui est de l'ordre de 2 600 000 000 $, plus un autre 300 000 000 $ de revenus à trouver. Et nous avons dit aux centrales syndicales que c'était un problème que nous avions conjointement et que nous devrions l'examiner ensemble.

Nous avons, également, rappelé que les coûts de main-d'oeuvre n'avaient pas fait l'objet de compressions, ou à peu près pas, d'une façon très minimale, au cours du budget que nous avons rendu public en mai dernier, mais que, lors du prochain budget, s'agissant d'un poste budgétaire qui est de l'ordre de 58 % des dépenses du gouvernement, il faudrait jeter un coup d'oeil là-dessus.

Le Président: M. le député.

M. Farrah: M. le Président, en additionnelle. Compte tenu que le règlement ne nous permet pas de poser sept questions, comme les journalistes, avant d'avoir l'heure juste, est-ce que le premier ministre s'apprête à ouvrir les conventions collectives, oui ou non?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement n'envisage pas cette hypothèse. Le gouvernement envisage de travailler très sérieusement et de privilégier l'approche consensuelle. Nous avons des partenaires qui sont des gens responsables, qui connaissent bien les difficultés des budgets publics, qui veulent maintenir l'emploi, et nous sommes convaincus que nous pourrons définir avec eux des solutions alternatives qui vont permettre d'arriver aux résultats escomptés en protégeant l'emploi dans toute la mesure du possible.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Donc, on comprend que le gouvernement souhaite une réouverture des conventions collectives, mais de consentement.

Une voix: C'est ça.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Pas du tout, M. le Président. Nous savons que, dans certains cas, les conventions prévoient des clauses de rediscussion de certains aspects des conventions. Donc, dans ce cas, ça va se faire dans le cadre d'accords déjà agréés. Et, d'une façon générale, M. le Président, je crois qu'il est important, au nom de l'équité, actuellement, pour l'ensemble des Québécois, quel que soit leur statut, d'examiner l'effort qu'ils doivent faire pour nous aider à maintenir l'emploi et à relancer l'économie du Québec.

Le Président: Complémentaire? Écoutez, il reste 10 secondes, je pense que...

Des voix: ...

Le Président: M. le leader...

M. Paradis: Oui, M. le Président, simplement pour rappeler à la mémoire des parlementaires que, la semaine dernière, jeudi, du côté ministériel, il ne restait pas 10 secondes, l'heure était dépassée, et qu'il y a eu une question de permise. Il reste 10 secondes, le temps réglementaire est là pour poser la question. Avec une réponse brève, M. le Président, nous n'hypothéquerons pas les travaux minces prévus par le leader cet après-midi.

Le Président: M. le député de LaFontaine, sans préambule, dans ce cas-là.

M. Gobé: Je vais essayer, M. le Président.

Le Président: Rapidement, rapidement.

Une voix: Fini!

Le Président: Rapidement.


Décrets régissant les secteurs du verre plat et du bois ouvré

M. Gobé: L'industrie québécoise des portes et fenêtres est aux prises avec un marécage et un fouillis inextricable de réglementation...

Une voix: Question.

M. Gobé: ...et ça nuit grandement à sa compétitivité, comparativement, en particulier, aux conditions de travail qui sont en vigueur dans les autres provinces et aux États-Unis.

Une voix: Question.

M. Gobé: L'association des manufacturiers de fenêtres du Québec, la Chambre de commerce du Québec, l'association des exportateurs du Québec demandent depuis de nombreux mois, M. le Président, l'abrogation de deux décrets, soit celui du vert plat et celui du bois ouvré. Est-ce que le ministre du Travail entend donner suite à ces demandes et quand?

Le Président: M. le ministre du Travail.

(15 heures)

M. Rioux: M. le Président, très brièvement. La Loi sur les décrets de convention collective est en examen. Les deux décrets dont parle le député sont également en examen, et, au cours des prochaines semaines ou des prochains mois, on aura des nouvelles à communiquer à ce sujet.

Le Président: C'est la fin de la période des questions et des réponses orales.

Votes reportés. Il n'y a pas de votes reportés.

Aux motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, vu qu'il y a des consultations cet après-midi, je demanderais le consentement de cette Chambre pour que nous puissions procéder immédiatement aux avis touchant les travaux des commissions.

Une voix: Consentement.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Alors, il y a consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission des affaires sociales poursuivra les consultations générales sur le document de consultation sur la réforme du Régime de rentes du Québec intitulé «Pour vous et vos enfants: garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec», de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra les consultations générales sur le projet de loi n° 12, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, le mercredi 23 octobre 1996, de 10 heures à 13 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Ça va. Je vais, si on me le permet, pour ma part, puisqu'on est aux avis touchant les travaux des commissions, vous aviser que la commission de la culture se réunira aujourd'hui, mardi le 22 octobre, de 15 h 30 à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, de même que le mercredi 23 octobre, de 10 heures à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, afin de poursuivre la consultation générale sur le document intitulé «Les enjeux du développement de l'inforoute québécoise».

Je vous avise également que la commission de l'éducation se réunira en séance de travail demain, mercredi le 23 octobre, de 10 heures à 13 heures, à la salle RC.171 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'étudier et d'adopter le projet de rapport et les conclusions et recommandations de la commission sur les conditions de la réussite au secondaire.


Motions sans préavis

Alors, nous revenons aux motions sans préavis et... Je demanderais aux députés qui ont à travailler à l'extérieur de l'enceinte de l'Assemblée nationale de le faire rapidement et en silence. Alors, M. le ministre du Travail, aux motions sans préavis.


Souligner la Semaine de la santé et de la sécurité du travail

M. Rioux: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la 11e édition de la Semaine de la santé et de la sécurité du travail, qui permet de mieux faire connaître et comprendre les divers aspects de la santé et de la sécurité du travail et leurs incidences sur le niveau global de qualité de vie au Québec.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Il y a consentement pour un intervenant de part et d'autre.

Le Président: Alors, M. le ministre du Travail.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, l'objectif de la Semaine de la santé et sécurité du travail, tel qu'inscrit dans le décret 1272-85 du 11 septembre 1985, consiste à mieux faire connaître et comprendre les divers aspects de la santé et de la sécurité du travail et leurs incidences sur le niveau global de qualité de vie des Québécois.

Le thème retenue cette année, c'est: «La prévention des accidents et des maladies reliés au travail». Les travailleurs connaissent bien leur milieu de travail. Ils sont donc, avec leur employeur et en collaboration avec tous les intervenants disponibles du milieu, les meilleurs agents de prévention. C'est pourquoi, cette année encore, la CSST met tout en oeuvre pour les inciter à organiser des activités de prévention dans leur milieu de travail de façon à ce qu'ils recherchent ensemble des solutions afin d'éliminer les dangers, et il s'agit de rejoindre les clientèles où elles se trouvent, c'est-à-dire sur les lieux de travail.

Le mot d'ordre cette année, à l'occasion de la onzième Semaine, vient soutenir ce message de la prise en charge de la prévention par le milieu de travail avec un slogan d'actualité: «La prévention des accidents du travail, mission possible». Pour favoriser une participation accrue dans les entreprises et particulièrement dans les PME, la CSST a adopté une stratégie de mobilisation de ses partenaires en santé et sécurité et de ceux des milieux syndicaux et patronaux. Elle a ainsi conçu des outils simples, dont une vidéocassette servant à déclencher toute une réflexion sur les solutions pour éliminer les dangers; de plus, un guide d'animation pour les personnes chargées de l'organisation de l'activité dans les entreprises et des outils promotionnels, dont une affiche et des macarons.

L'intérêt de ce matériel, c'est qu'il pourra survivre à la Semaine et soutenir le travail réalisé couramment par les comités de santé et sécurité en milieu de travail.

Je tiens à souligner l'excellente participation du milieu du travail à cet événement en cours. Au cours des dernières années, ils ont été particulièrement efficaces, alors qu'on avait repensé entièrement la stratégie dans le but de rejoindre un plus grand nombre d'entreprises, et particulièrement les PME. Les résultats confirment l'intérêt de conserver cette stratégie. Je suis assuré qu'une fois de plus les travailleurs et les travailleuses de même que les employeurs auront démontré leur engagement face à la prévention des accidents et des maladies reliés au travail, non seulement pendant cette semaine vouée à la prévention, mais, je l'espère, durant toute l'année. Merci, M. le Président.

Le Président: M. député de LaFontaine, juste avant de vous céder la parole pour une intervention sur cette motion, je voudrais simplement faire préciser aux deux leaders ce qu'on a convenu il y a quelques instants, avant la rubrique des motions sans préavis. Vous avez donné, M. le leader du gouvernement, des avis touchant les travaux des commissions. Est-ce que je comprends qu'il y avait également consentement pour que ces commissions siègent malgré le fait que nous n'avons pas terminé les affaires courantes, ou c'est simplement les avis de convocation que vous avez donnés? Parce qu'il y a une distinction importante à faire.

M. Bélanger: M. le Président, de la façon dont les avis, justement, étaient rédigés, ça indiquait clairement que, dès 15 heures et non pas après les affaires courantes, les travaux des commissions pouvaient commencer. Donc, il y avait consentement à l'effet qu'on pouvait commencer dès 15 heures les...

M. Paradis: Vous avez d'autant plus raison de soulever la question, M. le Président, qu'il s'agit d'une procédure exceptionnelle. Les échanges vont porter sur la courtoisie qu'on devait avoir envers les groupes qui étaient invités par les commissions parlementaires. Ce n'est pas une habitude que doit prendre l'Assemblée nationale, de façon à permettre à tous les membres d'assister à ces importantes motions qui peuvent être présentées, il s'agit d'une situation exceptionnelle à laquelle nous avons concouru, M. le Président.

Le Président: Alors, je comprends qu'il fallait que les choses soient dites clairement, puisqu'il pouvait y avoir par la suite une jurisprudence qui n'était pas dans le sens que les uns ou les autres auraient souhaité. Alors, à ce moment-ci, je vais reconnaître M. le député de LaFontaine sur la motion de M. le ministre du Travail.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, bien sûr, c'est avec plaisir qu'aujourd'hui nous parlons de cette motion qui vise à souligner la onzième Semaine de la santé et de la sécurité du travail. C'est d'abord pour ceux et celles qui travaillent, certainement, et pour ceux et celles qui ont perdu leur autonomie ou un membre de leur famille au travail que j'appuie cette motion, et pour lesquels on doit aujourd'hui certainement avoir une pensée particulière.

M. le Président, par contre, certains faits troublants existent tout le temps. En effet, plus de 15 ans après l'adoption de la Loi sur la Santé et la Sécurité du travail, près de 75 % de la main-d'oeuvre québécoise n'est toujours pas assujettie à la loi. Ça, M. le Président, il faut le dire. Chaque année, un nombre trop important de décès et d'accidents surviennent trop souvent sur les lieux. Et qu'il suffise de rappeler, de mémoire, à cette Assemblée les dizaines de morts sur les chantiers de construction au Québec dans les dernières années. Et, malgré que le ministre nous dise qu'il a l'intention de mettre l'emphase sur la prévention des accidents, le gouvernement accepte encore que les inspecteurs en santé et sécurité au travail soient moins nombreux que les agents de conservation de la faune. C'est là des chiffres... ou des situations qui parlent par elles-mêmes.

Lorsque j'entends les discours ronflants du ministre, je pense qu'il devrait plutôt se pencher sur ce genre de situation là et régler concrètement les situations au lieu de se gargariser avec des phrases creuses et des slogans pour la galerie. En fait, M. le Président, je déplore la maladresse du ministre du Travail qui a réussi à déplaire tant aux travailleurs qu'aux employés et qu'aux parties syndicales en lançant un groupe de travail sans consultation aucune et qui a pour but de réduire les indemnités de certaines catégories de travailleurs lorsqu'ils sont accidentés au travail. Et, M. le Président, je nommerai en particulier les travailleurs saisonniers, les travailleurs sur appel et les travailleurs et les travailleuses de l'industrie de la construction. Ça aussi, il faut le dire.

On ne peut pas, M. le Président, tenir un discours de gauche et marcher à droite. Il faut avoir le courage de ses opinions ou alors le courage de ne pas faire... ne pas tenir ses opinions et ses engagements électoraux. Et ce n'est pas ce que le ministre fait, là non plus.

M. le Président, la CSST est certainement actuellement, au Québec, dans une situation qui s'améliore au niveau financier, et on doit cela certainement aussi à l'immense effort qui a été fait depuis quelques années pour mettre un peu d'ordre dans toute cette administration. On doit s'en féliciter et féliciter les administrateurs de cet organisme.

Et, finalement, M. le Président, un autre dossier dans lequel le gouvernement retarde, c'est la déjudiciarisation de la CSST, parce que, en particulier, les travailleurs l'attendent, tout le monde l'attend. Et nous attendions, nous, comme opposition officielle, que le gouvernement dépose un projet de loi, tel que ça avait été promis en 1994. Nous sommes maintenant en 1996. Le ministre du Travail tient encore des discours creux sur la solidarité, je ne sais trop quoi, et il n'y a encore là aucune action de sa part. Deux langages, M. le Président, un avant les élections et un après.

(15 h 10)

M. le Président, en conclusion, c'est sûr que j'appuie la motion pour la motion et non pas pour le discours que le ministre a fait. Moi, personnellement, M. le Président, je suis très heureux de voir que, encore maintenant, il y a des gens qui se penchent sur la santé et sécurité au travail, et je souhaite que le ministre prenne les actions nécessaires, celles que j'ai mentionnées et qu'il n'a pas faites, dans les prochaines semaines et les prochains mois pour l'ensemble et l'amélioration du sort des travailleurs et travailleuses du Québec. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, M. le député de Shefford, maintenant.


Souligner la Semaine de la PME

M. Brodeur: Oui, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour l'adoption de la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine de la PME, qui se tient cette année du 20 au 26 octobre 1996.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour que cette motion soit débattue, M. le leader du gouvernement?

M. Bélanger: Oui, il y aurait consentement, M. le Président, pour un intervenant de part et d'autre.

Le Président: Je crois que c'est ce qui a été convenu, M. le député de Shefford. Oui, alors, il y a consentement, M. le député de Shefford, allez-y.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir aujourd'hui de souligner la Semaine de la PME, qui se tient du 20 au 26 octobre. Nous devons être fiers de nos petites et moyennes entreprises du Québec. Ces entreprises sont bien diversifiées et se situent dans différents secteurs d'activité, comme l'entreprise de service, le commerce de détail, l'entreprise manufacturière, sans oublier les secteurs à nouvelle économie comme l'informatique, l'environnement, la pharmaceutique, la biotechnologie, l'électronique, et bien d'autres.

Nous passons trop souvent sous silence la grande importance qu'ont les PME dans l'équilibre et la stabilité de notre économie, et plus particulièrement au Québec. En 1995, on dénombrait plus de 170 000 PME au Québec. La PME demeure la pierre angulaire de notre économie. Celle-ci appartient majoritairement à des intérêts québécois.

M. le Président, on sait aujourd'hui que les PME sont celles qui créent le plus d'emplois. N'oublions pas que c'est le secteur où la perte d'emplois est la plus faible au Québec. M. le Président, dans ce contexte, vous comprendrez l'importance d'instaurer des mesures qui favorisent la création de PME au Québec. Nous nous devons de privilégier une écoute active à tout ce secteur d'activité. Nous sommes convaincus, du moins de ce côté-ci de la Chambre, que la déréglementation est la seule voie pour favoriser l'expansion et la création de PME.

M. le Président, le gouvernement se doit de favoriser un climat et un environnement propices à ce développement. Malheureusement, malheureusement, aucune mesure sérieuse n'a encore été prise. La création d'emplois demeure encore aux discours, mais jamais dans l'action gouvernementale. Comment ce gouvernement peut-il prendre des mesures favorisant la création d'emplois lorsque l'esprit de ce gouvernement est ailleurs? Les créateurs d'emplois proposent au gouvernement des solutions concrètes, mais ils attendent toujours après l'action de ce gouvernement.

Commençons par rappeler au gouvernement du Parti québécois qu'il est le champion incontesté de la réglementation – nous pouvons dire de la surréglementation. Peut-être s'agit-il de sa façon à lui d'encourager le secteur de l'imprimerie, mais enfin...

M. le Président, les dirigeants des PME sont convaincus qu'il n'y aura pas de relance de l'emploi si on ne passe pas par la déréglementation des lois du travail, entre autres. Nous sommes tous convaincus qu'en alourdissant le coût salarial par des taxes et des règlements le gouvernement péquiste pousse les entreprises à utiliser davantage de machines et moins de travailleurs. Les entrepreneurs sont aussi convaincus qu'une telle réglementation étouffe l'initiative et fait perdre toute motivation.

M. Rodrigue Tremblay, ancien ministre péquiste, dois-je le rappeler, déclarait récemment que, pour créer des emplois aujourd'hui dans ce Québec de 1996, il faut être un véritable héros. Les chiffres parlent d'eux-mêmes depuis janvier dernier. Il y a 54 000 emplois de moins au Québec, ce qui dénote hors de tout doute qu'il y a une absence totale de stratégie du gouvernement péquiste pour relancer l'économie, et surtout pour créer des emplois.

Le gouvernement avait lancé, à la fin de 1994, en précampagne référendaire, un plan, qu'on pourrait qualifier de tape-à-l'oeil, de démarrage d'entreprises. Le gouvernement a cautionné pour 400 000 000 $ de prêts. Ce plan de démarrage consistait à présenter un plan d'affaires où l'expectative de création d'emplois, de trois emplois, était presque exclusivement le seul prérequis à l'obtention de ce cautionnement. On n'exigeait aucune étude sectorielle afin de s'assurer que l'on ne compétitionnait pas de façon déloyale des secteurs saturés. Le gouvernement criait haut et fort en 1994 qu'il allait créer au-delà de 50 000 emplois avec ce programme. En 1995, il criait encore la même chose. Et, à la fin de 1995, l'emploi stagnait toujours. Il répète encore la même chose en 1996. Résultat: jusqu'à présent, on perd encore 54 000 emplois au Québec. Comble du ridicule: on annonçait encore la semaine dernière un ajout de 12 000 000 $ au programme Démarrage d'entreprises afin de sauver les meubles. M. le Président, le gouvernement jette maintenant la serviette sur le plan A, qui aurait dû être de créer un climat favorable à stimuler l'économie et la création d'emplois. Il le remplace par son plan B, qui consiste tout simplement à partager équitablement la pauvreté.

M. le Président, l'action tarde. Récemment, le premier ministre en appelait aux investisseurs pour créer de l'emploi. Mais encore faudrait-il qu'il mette en place des mesures favorisant la création d'emplois. Dans le même ordre d'idées, on pourrait aussi bien demander aux groupes sociaux de mettre fin à la violence ou à la toxicomanie sans prendre les moyens pour y arriver. Le gouvernement essaie de satisfaire tous les groupes de pression en faisant fi de l'intérêt général. M. le Président, ce gouvernement se doit d'agir maintenant et non de pelleter en avant, comme c'est trop souvent son habitude. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Shefford. Je reconnais maintenant Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. J'aimerais tout d'abord souligner au député de Shefford que la Semaine de la PME, qu'il nous propose de souligner avec sa motion, c'est une belle sinon une heureuse initiative de la Banque de développement du Canada. Il sera certainement fier d'apprendre ça. Je ne sais pas s'il le sait.

Ceci étant dit, je pense que j'aimerais profiter de l'occasion également pour rappeler à cette Chambre l'importance que le gouvernement du Parti québécois accorde et a toujours accordée au développement de nos PME. Et, en termes de comparaison de performance, le gouvernement du Parti québécois bat tous les records, depuis ses débuts, à cet effet. Vous l'avez dit, le député de Shefford l'a dit, le Québec compte au-delà de 170 000 PME, soit plus de 99 % des entreprises québécoises. Ces PME emploient 42 % de la main-d'oeuvre. En outre, ce sont les PME qui créent systématiquement la majorité des nouveaux emplois au Québec. Alors, dans ce qu'il est convenu d'appeler la nouvelle économie, ce sont en effet les PME qui sont appelées à créer les emplois de demain.

Les indices démontrant que le Québec est en train de réussir son passage vers la nouvelle économie sont de plus en plus nombreux. Certains observateurs internationaux qualifient d'ailleurs le Québec de chef de file en territoire canadien à cet égard. Et, dans les faits, si on regarde les chiffres, de 1979 à 1989, les PME du Québec ont créé 510 000 emplois, alors que, durant la même période, les grandes entreprises en ont perdu 57 000. On sait où doit aller l'effort du gouvernement.

Mais il y a des défis à relever par nos PME autant que par notre gouvernement si nous voulons réussir la transition vers la réalité économique du XXIe siècle. Le premier, c'est celui de l'innovation. Les entreprises qui consacrent une part appréciable de leurs ressources à la recherche et au développement réussissent mieux que les autres. Notre gouvernement, dans son budget, dans le redéploiement de ses activités économiques, dans la préparation de sa nouvelle politique scientifique et technologique, continue de démontrer une fois de plus son engagement dans la poursuite du développement de l'innovation dans nos PME. Au début des années quatre-vingt, vous vous rappellerez que le gouvernement du Parti québécois misait déjà sur l'innovation. Rappelez-vous «Bâtir le Québec» et «Le virage technologique». Nous continuons dans le même sens.

Le deuxième défi de nos PME, c'est l'augmentation de leur capacité d'exporter. Nous avons pour objectif d'amener 2 000 nouvelles entreprises sur les marchés étrangers d'ici l'an 2000. Ce défi sera relevé avec l'aide de nos partenaires du secteur privé. Par ailleurs, un récent sondage fait pour le MIC et un autre de ses partenaires indiquait que 25 entreprises certifiées ISO, au sein d'un groupe témoin, avaient augmenté leurs exportations internationales de 53 % en 1994, alors que les exportations du Québec, elles, augmentaient au cours de la même période de 20 %. Le défi de l'exportation est donc fortement lié à celui de la qualité, et notre gouvernement continuera à appuyer les entreprises, les PME dans un programme d'amélioration continue de la qualité. Aujourd'hui, 60 % des entreprises manufacturières ont implanté un tel programme au sein de leur organisation. Il est intéressant de noter que près des trois-quarts de ces entreprises ont aussi vu leur chiffre d'affaires augmenter.

(15 h 20)

Voilà donc, M. le Président, quelques-uns des défis de nos PME, quelques-uns des défis que nous allons aider les entreprises à relever au cours des prochaines années. Nous entendons continuer à appuyer les hommes et les femmes du Québec qui oeuvrent au développement de nos PME, et ce, dans toutes les régions du Québec, comme le gouvernement du Parti québécois l'a toujours fait depuis ses premiers mandats.

En terminant, j'aimerais rappeler aux députés de l'opposition que, la première chose que les gens d'affaires nous demandent, c'est d'établir un climat favorable par l'élimination du déficit, un déficit qu'ils nous ont laissé. Ça a été la première recommandation de la Chambre de commerce du Québec. Vous avez, évidemment, omis de le dire. Or, le déficit que vous nous avez laissé était de 5 700 000 000 $. Cette année, nous allons le réduire à 3 200 000 000 $.

En terminant, je voudrais féliciter et remercier les hommes et les femmes du Québec qui, par leurs initiatives au sein des PME québécoises, contribuent à leur façon à la réussite du Québec d'aujourd'hui, et c'est pour cette raison que j'appuie cette motion, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Alors, je comprends que cette motion est adoptée? Adopté.

Aux avis touchant les travaux des commissions. Nous avons réglé cette rubrique précédemment.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Renseignements, maintenant, sur les travaux de l'Assemblée. Je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Marquette. Cette motion se lit comme suit:

«Qu'afin de favoriser la réussite scolaire et l'égalité des chances du plus grand nombre de jeunes, l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec qu'il garantisse dès maintenant et de façon non équivoque pour septembre 1997:

«L'accès gratuit et à temps plein aux services de garde ou de maternelle pour tous les enfants de quatre ans de milieux économiquement défavorisés;

«L'accès à la maternelle temps plein à tous les enfants de cinq ans de milieux économiquement défavorisés;

«Le financement de ces mesures à même les crédits du ministère de l'Éducation tout en tenant compte que 58 % des écoles publiques montréalaises sont considérées comme des écoles défavorisées.»


Affaires du jour

Alors, nous en arrivons maintenant aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 7 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 48


Adoption du principe

Le Président: À l'article 7 du feuilleton, M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 48, Loi modifiant la Loi sur la Société générale de financement du Québec. Alors, M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, je dois vous dire d'abord que le lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et qu'il en recommande l'étude à l'Assemblée, comme il se doit, avant que nous ne parlions du principe. Et ce projet de loi, il consiste à réviser la loi d'une institution fondamentale du Québec, la Société générale de financement. Cette Société a été, si l'on peut dire, un des bras économiques agissants majeurs de notre Révolution tranquille, avec Hydro-Québec et quelques autres institutions. Elle est typique des institutions des années soixante où, à l'occasion de la venue au pouvoir d'un gouvernement libéral – progressiste, celui-là – qui comptait dans ses rangs, en particulier, en plus de Jean Lesage, un jeune et brillant ministre qui s'appelait René Lévesque et qui deviendra à son tour premier ministre du Québec et d'autres leaders, dont Paul Gérin-Lajoie, dont Georges-Émile Lapalme, évidemment, dont Eric Kierans, qui ont donné, pour la première fois de l'époque contemporaine, la dimension d'un véritable État national au gouvernement de la province de Québec.

On se souvient d'ailleurs que l'aspect reprise en main économique était au centre des préoccupations de ces leaders et du Parti libéral de l'époque. D'ailleurs, le maître mot de ce temps était précisément «Maîtres chez nous». Cela signifiait que les Québécois et les Québécoises et leur gouvernement du temps avaient pris acte cruellement de la dépendance économique dans laquelle ils se trouvaient. Si le gouvernement du Québec sentait le besoin de dire «Maîtres chez nous», c'est parce que les Québécois et les Québécoises n'étaient pas maîtres chez eux dans plusieurs aspects de la vie humaine, mais en particulier au chapitre du contrôle des institutions économiques en général, de l'appareil de production en particulier. C'était une résultante historique. Les historiens ont beaucoup travaillé cette question, l'école de Montréal en particulier, Michel Brunet et les autres. Mais il est un fait que cet accident d'une extrême gravité, qui est survenu en 1760, a eu une vague d'effets socioéconomiques durables jusque pratiquement à l'aube de la Révolution tranquille et à l'occasion de la Révolution tranquille.

Et quels ont été ces effets? Dans les premiers temps, ce qui était la Nouvelle-France a été totalement coupée de sa base économique, donc ses circuits, ses circuits bancaires, ses circuits de production, ses circuits de distribution, du jour au lendemain. Alors, la petite élite économique de Nouvelle-France a été ruinée et souvent décimée physiquement, non pas par la mort mais par le retour en France. Alors, pendant les décennies qui ont suivi le gouvernement militaire, une série d'injustices, en dépit de l'Acte de Québec, ont fait en sorte que les Québécois francophones, ce qu'on appelait les habitants, dans le temps – et ça n'avait aucun sens péjoratif, et ça n'en a pas encore aujourd'hui, d'ailleurs – se sont vu évincés de toute activité économique importante, sauf pratiquement de subsistance et, évidemment, d'une grande activité économique de base d'agriculture où ils sont restés mais où ils furent confinés.

Il a fallu amorcer par la suite une longue remontée, parce que la puissance économique, ça réside largement dans le capital financier ou physique accumulé. Et quand on n'a pas ce capital physique ou financier accumulé, le pas de porte, comme disent les économistes, est trop élevé pour être franchi par ceux qui n'ont pas de moyens, contre ceux qui en ont. Alors, on peut dire: Oui, tout le monde a le droit d'ouvrir un chantier maritime. Oui, mais, si celui qui a un capital accumulé et des équipements accumulés, qui produit déjà des bateaux, décide de se défendre vigoureusement contre toute nouvelle entrée, il va se défendre. Il va se défendre par les prix, il va se défendre de diverses façons. Et, en plus, à l'époque, il y avait une complicité entre un pouvoir colonial de domination – et ce n'est pas faire injure aux autorités britanniques, parce que les Français ne faisaient pas différemment en Afrique et dans d'autres colonies – un pouvoir colonial autoritaire et de domination qui avait tendance à favoriser ses nationaux, c'est-à-dire les Britanniques, et non pas ceux qui commençaient déjà à s'appeler des Canadiens français.

Ça a été très long à remonter, cette côte. Tellement long que, lorsque je suis arrivé, plusieurs siècles plus tard, à l'Université de Montréal, en 1959 – et les gens de mon âge s'en souviennent très bien, et les manuels d'histoire en ont retenu la trace – il y avait quelques douzaines de francophones millionnaires en dollars dans l'ensemble de la ville de Montréal et la région. Et nous, les jeunes étudiants de l'Université, comme on avait une certaine admiration pour ces réussites, des fois mêlée d'un certain esprit critique, on les connaissait pratiquement tous par leur nom puis on connaissait leur entreprise. Je vais en citer quelques-uns pour référence historique. Disons Dupuis Frères, tout le monde connaissait Dupuis Frères. C'était un des millionnaires francophones de l'époque. D'ailleurs, assez curieusement, la famille de Dupuis, Dupuis Frères, était originaire du même petit village dont je suis sorti moi-même un certain nombre d'années plus tard et qui s'appelle Saint-Jacques de Montcalm. Il s'appelait Narcisse Dupuis. Il est parti à Montréal et il a monté cet empire. Il y en avait quelques douzaines. Je ne veux pas tous les nommer, mais il y avait Ouimet, Cordon bleu, tout le monde sait ça. Il y avait aussi une très grande famille – et ça m'amène au rôle de la Société générale de financement – une très grande famille québécoise de constructeurs maritimes, de dragueurs établis aux confluents du Richelieu et du Saint-Laurent, et à laquelle était apparenté le premier ministre Bourassa, la famille Simard, qui avait monté un empire, Marine Industrie.

(15 h 30)

D'ailleurs, il y a une très jolie anecdote. Je ne sais pas si elle est rigoureusement vraie – Robert Bourassa, s'il était ici, aurait pu nous le dire – qui dit que ces Simard, qui étaient évidemment de Baie-Saint-Paul, d'ou viennent les Simard – les Simard viennent de Baie-Saint-Paul, de Charlevoix – étaient des capitaines de goélettes et de caboteurs. Et souvent, à bord de ces goélettes, les pères et les fils travaillaient ensemble. Le patron de la goélette, le capitaine, avait son fils comme mousse. Alors, un Simard de Baie-Saint-Paul vient à Montréal avec sa goélette et son fils, et éclate, au retour vers Baie Saint-Paul – et je ne peux pas dire de quoi ces retours étaient accompagnés ni ce qu'ils avaient fait à Montréal ou pas – une violente querelle entre le père et le fils, à tel point que, rendus à Sorel, le fils débarque le père... non, l'inverse, le père débarque le fils: Je t'ai assez vu! Enfin, je ne leur mets pas de mots dans la bouche, mais il l'a laissé sur le quai et, pour tout héritage, il lui a donné deux choses: une orange, qui était un objet très, très rare à l'époque – des oranges, aujourd'hui on achète ça à la douzaine au supermarché, mais, dans ce temps-là, une orange était un objet exceptionnel – et sa montre en or. Alors, le jeune est resté sur le quai en voyant s'éloigner la goélette, et puis il a pelé l'orange, puis il avait l'orange, et puis il a jeté la montre à l'eau, puis il a remis les pelures d'orange dans sa poche, dans l'émotion et la confusion de voir partir son père. La famille Simard racontait beaucoup plus tard que, comme il avait jeté son héritage à l'eau – la montre – toute l'aventure de la famille dans le dragage consistait à aller rechercher l'héritage...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): ...et ils l'ont fait. Ils l'ont fait d'une façon grandiose, mais ils ont connu les difficultés des néomillionnaires francophones du temps: les problèmes de succession. Et la Société générale de financement dont nous parlons aujourd'hui a été fondée, croyez-le ou non – ça peut surprendre les plus jeunes – pour régler les problèmes de succession de certaines grandes familles capitalistes francophones qui autrement auraient dû vendre leur entreprise à l'étranger, aux États-Unis en particulier, ce que plusieurs ont fait, du reste, hein! Alors, une des grandes réalisations de notre Société générale de financement, ça a été de faire ça, non sans difficulté et non sans critique.

Vous savez que la SGF a dû se départir ultimement de ses actifs dans Marine, et ça n'a pas toujours été après des péripéties très glorieuses ni des profits très grands, mais on sait pourquoi ça a été fait, et ça a maintenu cette entreprise-là et des dizaines d'autres. Dans ce temps-là, les grands noms qui ont illustré la direction de la Société, je ne veux pas faire injure à ceux que je ne mentionnerai pas, mais il y a eu M. Gérard Filion et M. Jean Deschamps. M. Filion a dirigé Le Devoir aussi, soit dit en passant, mais il était diplômé de l'École des hautes études, je crois. C'était quelqu'un qui avait une formation de base en économie et en finances, mais, comme, à l'époque, les formations de base en économie et finances pour les francophones, ça conduisait à être comptable de quartier ou à être l'assistant d'un comptable dans un grand bureau anglophone, bien, ils ont fait toutes sortes de choses, sauf souvent leur métier, et Gérard Filion a fini par faire ultimement son métier, qui était le monde des affaires, et a présidé les destinées de Marine Industrie. Jean Deschamps a fait la même chose. Jean Deschamps, qui, lui aussi, avait une formation HEC, professeur HEC, qui a été notre délégué du Québec à Paris pendant plusieurs années, s'est illustré à la tête de cette Société.

Et elle a fini par agrandir son empire, changer son type d'actions, pour nous conduire il y a une quinzaine d'années à un événement majeur qui nous conduit lui-même aux changements de lois qu'on fait aujourd'hui, en particulier pour un des aspects financiers du projet. Quel est cet événement? C'est que la société française Pechiney-Ugine-Kuhlmann, en l'année 1977 ou à peu près, peut-être 1978, a décidé, après des conversations intenses avec le gouvernement du Québec de l'époque et à la suite de circonstances que je ne veux pas relater ici, mais qui m'ont mis en cause personnellement, parce que Pechiney-Ugine-Kuhlmann était dirigée à l'époque par un de mes anciens professeurs d'économie en France avec lequel j'ai pris contact comme jeune ministre du gouvernement Lévesque... André Bisson, qui était à l'époque au Conseil du patronat et qui a fait une carrière de banquier par la suite, connaissait, lui, un vice-président de Pechiney dont il était également l'ancien condisciple. Des fois, les choses se font par des hasards assez personnels, hein?

Alors, Bisson et moi – ha, ha, ha! – on convainc le président ou le vice-président, ou l'inverse, de regarder sérieusement le Québec comme lieu pour construire une aluminerie, et les Français sont séduits par cette possibilité. Cependant, autant eux que nous souhaitent que l'action ne se fasse pas seule. On n'était pas particulièrement chauds à voir uniquement Pechiney-Ugine-Kuhlmann faire de l'aluminium au Québec, et eux n'étaient pas particulièrement chauds à venir faire de l'aluminium seuls au Québec. Pourquoi est-ce qu'on n'était pas particulièrement chauds? Bien, parce qu'on était toujours dans l'esprit du «Maîtres chez nous». «Maîtres chez nous», c'est maître chez nous, que ce soit un investissement qui vienne de Paris, de Londres ou de Washington. On voulait bien, suivant l'esprit de la Révolution tranquille, que les Québécois et les Québécoises contrôlent une partie importante de leur économie.

Alors, l'association s'est faite entre la Société générale de financement, Pechiney et d'autres partenaires étrangers, et s'est conduite de cette manière la formidable aventure de l'Aluminerie de Bécancour, ABI aujourd'hui. L'Aluminerie de Bécancour, qui a nécessité des investissements de plus de 1 000 000 000 $, est une réussite absolument prodigieuse. En termes techniques, c'est une des installations de sa catégorie les plus avancées du monde. On voyait dans les journaux, aujourd'hui ou hier, qu'on était au désir de la nième phase d'expansion.

Et la SGF a fini, après un certain nombre d'années, par vendre sa participation – et c'est ce qui nous amène à changer nos lois aujourd'hui – rapportant au gouvernement un dividende de 486 000 000 $. M. Jean Deschamps ne l'aurait jamais cru de sa vie, ni M. Gérard Filion, ni aucun autre des loyaux serviteurs de la Société générale de financement, qu'elle pouvait rapporter un dividende, dans une seule opération, de près d'un demi-milliard de dollars au gouvernement. On est loin des pelures d'orange qui coulent lentement dans le Richelieu. Mais, ça, ça a fait que la Société a disposé d'un énorme capital qui a fait l'objet, et c'est normal, de la convoitise du ministre des Finances, qui a dit: Moi, j'ai investi – moi, c'est nous, parce que c'est tous les ministres des Finances et tous les Québécois et les Québécoises depuis 1960 – dans la SGF, bien, maintenant, je prends mon dividende. Mais, en prenant son dividende, il frustre la Société d'une marge de manoeuvre importante dont elle peut avoir besoin pour continuer sa mission.

Alors, ce qu'on vous propose dans la présente loi, c'est justement de modifier le capital-actions. Et il serait approprié que le ministre des Finances soit autorisé à souscrire 50 250 000 actions ordinaires de son capital-actions pour une considération globale de 502 500 000 $ payables à même le fonds consolidé du revenu, sur demande autorisée par résolution des administrateurs de la Société et effectuée en conformité des besoins financiers de la Société prévus à son plan d'exploitation annuel. Tout ça est dit en termes techniques, mais c'est très simple, c'est que nous voulons que la SGF garde sa crédibilité totale face à ses partenaires étrangers, comme elle a eu de la crédibilité face à Pechiney-Ugine-Kuhlmann naguère, pour dire: Je suis une société majeure, j'ai un gros capital souscrit. Si vous me proposez un projet important, que ce soit de 200 000 000 $, de 300 000 000 $, de 400 000 000 $, ma participation, je peux répondre, car la loi qui me constitue me permet de le faire, et je peux demander au ministre des Finances, mon actionnaire, de verser le capital souscrit suivant les projets qui pourraient se présenter. Alors, voilà la mécanique financière de l'aventure.

Mais il est maintenant temps également de changer la vocation de la Société elle-même. Je vous ai bien expliqué, M. le Président, qu'au départ c'était plutôt de recueillir des successions de grandes familles québécoises capitalistes et de faciliter ces successions et d'empêcher la vente des actifs à l'étranger. Ce n'est plus en ces termes que le problème de la SGF se pose ou que l'action de l'État moderne et stratège qu'est devenu l'État du Québec se pose également. On pourrait dire même que, vu sous l'angle d'aujourd'hui, le fait, pour l'État seul, de se lancer dans une grande aventure industrielle est une incongruité. On dirait une intervention lourde, voire une intervention grossière. Je ne suis pas du tout en train de dénoncer ce qu'ont fait les gens de la Révolution tranquille, mais aujourd'hui est-ce qu'on pourrait songer que l'État achèterait un chantier maritime, par exemple? Est-ce qu'on pourrait songer que l'État ouvrirait une mine sur la Côte-Nord, comme l'aventure Sidbec-Normines? Est-ce qu'on pourrait songer que l'État achèterait un complexe sidérurgique comme l'État de la Révolution tranquille a acheté Dosco pour en faire Sidbec-Dosco et être un exploitant de premier rang dans le monde de la sidérurgie? Je crois... Pardon?

(15 h 40)

M. Chagnon: Les mines d'amiante.

M. Landry (Verchères): Aussi. Le député me dit «mines d'amiante»? Oui, mines d'amiante. Je ferais quand même une... C'est le député de Westmount, pour les besoins du Journal des débats , qui se fait mon souffleur. Et, quand ce qu'il dit a du bon sens, je suis prêt à le reprendre à mon compte, et, dans ce cas-là, il dit que c'est fréquent, mais il exagère largement les choses. Ha, ha, ha!

Dans ce cas-ci, je crois que, dans le contexte d'aujourd'hui, l'État n'investirait pas dans une mine d'amiante. Je dois par ailleurs dire que, quand on a vu la suite des choses – et la suite des choses, c'est que, la semaine passée encore, il y a eu 175 000 000 $ d'investis dans l'amiante au Québec – c'est largement dû au fait que, pendant une période creuse et de désespoir où les agences américaines de l'environnement ont banni le produit ou ont tenté de le bannir de toutes les façons, il est vraisemblable, et les historiens économiques le diront, que c'est la présence de l'État provisoirement dans l'amiante qui a permis de passer la période difficile et de faire qu'il y a encore des mineurs d'amiante aujourd'hui au Québec et que le produit est encore extrait des entrailles de la terre, «processé», comme on dit dans le langage des transformateurs miniers, et exporté. Mais c'est une autre aventure, et on pourrait avoir un débat là-dessus. Mais je pense que ce ne serait utile, en effet, de faire aujourd'hui des interventions de cette lourdeur dans aucun secteur de l'activité économique.

Est-ce que ça veut dire que l'État se retire totalement et n'a plus aucune responsabilité à assumer, que la SGF est un instrument périmé et qu'on n'en a pas besoin? Réponse: Non. Si on posait la question à Wall Street, ou à Hong-kong, ou à Singapour, ou dans des endroits où on a tendance à pratiquer une économie de marché orthodoxe et stricte, la réponse pourrait être: Oui, c'est fini, ces aventures-là, et on n'a pas besoin de la SGF et on n'a pas besoin d'instruments analogues. Mais nous ne sommes pas dans ce contexte. Nous sommes dans le contexte québécois, où se pratique une forme de capitalisme, et il y en a plusieurs, qui n'est pas le capitalisme ultralibéral de Wall Street, qui peut convenir peut-être à un espace économique comme celui des États-Unis, la plus grande puissance de l'histoire du monde, 300 000 000 d'habitants, une économie tellement diversifiée que le commerce extérieur, pour eux autres, c'est une chose presque insignifiante. C'est surprenant de le dire, mais les États-Unis, ça importe-exporte 10 % du PNB, guère plus. Le Québec est à 50 %, puis les grandes puissances commerçantes sont à 20 %, 30 % ou 40 %. Les États-Unis sont à 10 % parce que cette économie est tellement forte, c'est une machine tellement extraordinaire que laisser jouer les forces brutes du marché, en termes économiques en tout cas, sans parler des conséquences sociales, en termes économiques, peut être un calcul assez sage.

Pour une économie comme celle du Québec, de 7 000 000 d'habitants, ou de la Suède, 10 000 000 d'habitants, voire de l'Ontario – même taille à peu près que la Suède – voire de la très puissante République allemande qui maintenant doit avoir près de 90 000 000 d'habitants avec la réunification des deux Allemagne... On est à 100 000 000, c'est vrai, parce qu'il y avait quand même pas mal de monde à l'Est, puis déjà on était à 60 000 000 à l'Ouest. Alors, une centaine de millions de personnes. Même pour eux, le capitalisme qui s'y pratique et qu'on appelle «capitalisme rhénan» n'est pas le capitalisme de Wall Street.

Alors, quelle est la différence entre les deux et pourquoi est-ce que le Québec, selon moi, pratique et doit pratiquer le capitalisme rhénan? Le capitalisme rhénan implique un rôle collectif pas forcément étatique, mais aussi étatique dans la plupart des cas et qui fait que les pouvoirs publics et les organisations sociales et démocratiques et associatives veulent jouer un rôle dans l'économie, veulent garder dans cette économie nationale un certain nombre de centres de décision importants, bref une économie concertée, non pas planifiée. Je pense que le procès de la planification, il a été entendu. Les économies planifiées, à partir de 1917 jusqu'à nos jours en Union soviétique et à partir de la Deuxième Guerre mondiale dans les pays satellites, comme on les appelait, ont fait que la cause est entendue. L'économie centralisée et planifiée, où l'État devient investisseur et décide des quantités produites et des prix, c'est loin de ce que quiconque a en tête. Il y a peut-être quelques endroits, encore, au monde où on s'accroche à ce qui est un vestige passéiste d'une cause entendue.

Mais ce n'est pas parce que l'Union soviétique s'est effondrée et que son système économique a fait la preuve de son ineptie et de sa dangerosité qu'on doit s'en aller à l'extrême droite et se laisser emporter vers un capitalisme orthodoxe où seul le marché aurait droit de faire des arbitrages. Parce que, si tous les arbitrages sont laissés au marché, on peut voir se développer rapidement des effets extrêmement pervers, l'un d'entre eux étant l'enrichissement des riches jusqu'à plus soif et l'appauvrissement des pauvres. «Pauvreté zéro», qui sort des milieux les plus populaires de notre société, comme titre d'une campagne actuellement, c'est une chose qui doit nous interpeller. Et ce n'est pas l'économie de marché pure qui peut conduire à un appauvrissement zéro, ça, c'est absolument certain. Et les économies rhénanes, les économies concertées comme celles du Québec, qui l'est déjà et qui va culminer dans la concertation, dans ce sommet économique que nous aurons dans les jours qui viennent, a choisi, je crois, la bonne voie, avec des institutions comme la SGF.

Cependant, cette bonne voie, elle n'est pas rigoureusement la même qu'en 1960. Et c'est la raison pour laquelle je propose aussi un autre changement à la loi constitutive de la SGF et qui est en discussion devant notre Assemblée. En effet, la possibilité que la SGF puisse réaliser seule des projets de développement est éliminée, de même que l'actuelle notion de planification et de coordination des entreprises contrôlées par la SGF, qui paraît mal adaptée, notamment à la réalité des nombreux investissements où la SGF détient une participation minoritaire, de l'ordre de 25 % du capital-actions émis et en circulation.

En d'autres termes, la loi de la SGF prend acte des nécessités de notre temps que je viens de décrire, mais n'abdique pas les responsabilités collectives dans le domaine de l'intervention économique. Ça veut dire que nous allons pousser la SGF, dans la mesure où elle ne le fait pas elle-même spontanément, ce qui est le cas le plus répandu... Parce qu'il y a un conseil d'administration, d'hommes et de femmes parfaitement responsables, avec une équipe de direction pour diriger la SGF, qui est capable d'un dynamisme très considérable. Mais, comme le gouvernement est l'actionnaire de cette Société, je proposerai aussi quelques changements à cet actionnariat.

Il est normal que le gouvernement veuille pousser ou inciter la SGF dans une direction ou dans l'autre au service des intérêts collectifs, et cela sera toujours possible. Mais la SGF n'agira plus seule. Donc, ce sera toujours en association avec des capitaux locaux ou étrangers. Et elle ne cherchera plus à planifier, ou à coordonner, ou à orienter des choses qui n'ont pas besoin de l'être. Et surtout dans les participations minoritaires, il faut spontanément laisser nos associés, avec leur dynamisme, leurs technologies, leur capacité de production et d'exportation, être libres du développement de leur entreprise. C'est donc dans cette nouvelle optique que la SGF continuera son action.

(15 h 50)

Je dis bien «continuer» parce que, globalement, je pense que l'économie québécoise des 30 ou 40 dernières années est un grand succès. Ça peut avoir l'air paradoxal, eu égard au taux de chômage, je ne le nie pas. Sauf que, concernant ce taux de chômage, il y a des préjugés profondément enracinés, que généralement partage d'ailleurs le député de Westmount – et là comme je l'ai écouté tout à l'heure, je lui demande de m'écouter attentivement – et un de ces préjugés, c'est de dire que l'économie du Québec se détériore par rapport à celle de l'Ontario, que le revenu per capita du Québec se détériore par rapport à celui du Canada, que les investissements étrangers sont en déroute au Québec. Je vais donner quelques chiffres qui montrent que ces affirmations tiennent du préjugé et que, à cause de notre modèle économique, nous avons des succès économiques qui ne sont pas ce que nous voudrions en regard de la création d'emplois, mais qui sont importants, qui ne sont pas négligeables et qui doivent nous inciter à continuer plutôt qu'à nous décourager ou à vouloir mettre la hache dans toutes nos institutions.

D'abord, ce taux de chômage qui est trop haut, qui est déplorable, qui décourage les jeunes en particulier et les moins jeunes, bien, il est assez semblable à celui d'autres économies occidentales de pointe très développées et très évoluées, dont précisément l'Allemagne, troisième puissance économique du monde après le Japon – c'est États-Unis, Japon, Allemagne – dont la France, quatrième. Alors, après l'Allemagne, immédiatement la France, et, donc, trois et quatre ont à peu près le taux de chômage du Québec à quelques décimales près.

Il y a une différence qui préoccupe beaucoup les gens qui veulent cultiver le préjugé disant que c'est l'instabilité économique, la soi-disant instabilité économique du Québec, qui explique la différence entre le Québec et l'Ontario. Cela est faux. Et je vais citer des chiffres d'un des meilleurs économistes du Québec, mais la plupart des économistes ont publié des choses du même genre. Et cet économiste, il s'appelle Pierre Fortin et il vient de publier un article remarqué qui s'est appelé «The Great Canadian Slump». Et il met en lumière là-dedans que l'incertitude politique ne peut constituer une explication à la récession canadienne, puisque, sur la période de 1990-1996 – période dans laquelle on a eu Charlottetown, on a eu Meech, on a eu le référendum sur la souveraineté du Québec – deuxième trimestre inclus – et vous savez qu'on a eu un trimestre assez dramatique – l'écart du taux d'emploi entre le Québec et l'Ontario a rétréci considérablement. Je conseille au député de Westmount–Saint-George...

Une voix: Westmount–Saint-Louis.

M. Landry (Verchères): Westmount–Saint-Louis. Je m'étais trompé de saint et je m'en excuse profondément, M. le Président. L'écart a rétréci considérablement, alors que, j'imagine, ils le font de bonne foi, mais ils colportent partout que la situation politique du Québec expliquerait le taux de chômage, etc. Cet écart qui était de 82 emplois pour 1 000 adultes en 1989 en faveur de l'Ontario n'était plus que de 47, alors pratiquement la moitié pour 1 000, au deuxième trimestre de 1996. L'écart entre le taux d'emploi du Québec et de l'Ontario constaté par l'économiste Pierre Fortin est le plus mince depuis le début des années soixante, donc depuis les années de la naissance de la Société générale de financement. Il faut méditer cela. Il faut regarder cela de près.

Un autre indice: le fameux écart entre les taux. Le député de Westmount–Saint-Louis est un ancien adjoint parlementaire aux finances, je crois. Le fameux «spread», que vous appeliez et que, nous, on appelle plutôt l'«écart», spontanément, entre les obligations du Québec et celles du Canada, la différence de taux d'intérêt, l'écart entre ces titres et ceux du Québec était de 75 %, en moyenne, il y a un an. Ils ne sont plus que de 42 %, 43 % aujourd'hui. C'est cette année que les importantes émissions du Québec dans le long terme ont été réalisées dans les meilleures conditions et au meilleur coût depuis au moins dix ans. Alors, où est-elle, là, l'instabilité politique? Elle n'apparaît pas dans les chiffres. Elle peut apparaître dans une rhétorique politique de nos amis d'en face et de ceux et celles qui ne partagent pas l'opinion exprimée par 60 % des Québécois francophones et 50 % des Québécois, toutes langues et origines confondues, au référendum. Mais, même quand on veut faire une campagne d'opinion solide, on n'est pas exempté de la réalité. Que l'opposition, le Parti libéral d'aujourd'hui, fasse toutes les campagnes qu'elle veut – avec de mauvais alliés, d'ailleurs, les fédéraux, qui, le lendemain des référendums où on a vu leur alliance se réaliser, les roulent dans la farine immanquablement et de façon humiliante. Ça n'a pas été moins humiliant pour Claude Ryan face à Pierre Elliott Trudeau que pour l'actuel chef de l'opposition officielle face à Jean Chrétien et toute la formation politique qui les suit. Alors, ils peuvent faire les campagnes qu'ils veulent, ils peuvent s'allier jusqu'à plus soif avec des gens qui vont les laisser tomber le lendemain du vote, mais, dans ces campagnes, ils ne doivent pas oublier que la vérité a ses droits.

Et on peut tirer sur le parti du gouvernement – tirer au sens démocratique du terme – tant qu'on veut, mais on ne peut pas tirer sur l'économie du Québec. On ne peut pas lui tirer dans le dos, en particulier. Alors, il ne faut pas dire n'importe quoi de l'économie du Québec. Et l'économie du Québec, depuis cette période que j'ai décrite au début de mon intervention, M. le Président, elle a évolué d'une façon extrêmement favorable. Le Québec, c'est la quinzième puissance économique du monde. Vous savez, l'ordre que j'ai donné tout à l'heure en commençant par États-Unis, Japon, Allemagne, France – on est rendu à quatre – Québec est au quinzième rang. Ce n'est donc pas une petite économie. C'est une grosse... peut-être une moyenne, ça dépend des critères, mais c'est une grosse machine économique. Il y a 135 pays souverains dans le monde, ou à peu près, peut-être un peu plus – et il y en a 35 de plus depuis cinq ans, soit dit en passant – puis le Québec est au quinzième rang.

Pour le revenu par tête – j'ai vérifié les chiffres encore ce matin – depuis une vingtaine d'années, le revenu par tête du Québec est rigoureusement parallèle dans sa croissance avec celui du Canada, des fois légèrement plus haut, des fois légèrement plus bas. Alors, toutes ces prétentions à l'effet que, parce que nous avons le désir d'accéder au concert des nations dans l'égalité avec les autres, ça aurait des conséquences néfastes sur notre économie est une invention de rhétorique politique qui ne tient pas compte des faits. Les faits, c'est les suivants: l'économie du Québec, que j'ai décrite au début de mon intervention, était une économie dominée, une économie qui n'avait pas de pertinence autrement que par des investissements étrangers ou des investissements locaux, mais qui, malheureusement – ce n'est pas un reproche que je leur fais – n'étaient pas conduits dans la langue de l'immense majorité des Québécois et des Québécoises. Mais, aujourd'hui, Quebecor est le deuxième plus grand imprimeur de la planète Terre.

On est loin des quelques douzaines de francophones millionnaires en dollars, là; on est dans les milliards de chiffre de vente. Cet empire, vous savez, est mené par un curieux personnage qui fait de la pub pour Loto-Québec, qui se fait payer et qui remet ça à une fondation charitable. Cascades, probablement le plus grand cartonneur et fabricant de papier d'Europe de l'Ouest, une entreprise québécoise née durant les années auxquelles j'ai fait allusion et qui a pris une formidable expansion, bien sûr, par le Régime d'épargne-actions, une autre institution québécoise. Bombardier, dont les dirigeants ne sont pas toujours en accord avec notre option – c'est normal en démocratie, nous les respectons – mais leurs travailleurs, qui sont beaucoup plus nombreux, votent pour nous; alors, ça nous console largement. Et d'autres.

(16 heures)

Alors, tout ça pour dire que l'économie ontarienne est une chose extraordinaire; ce n'est pas rien, l'économie ontarienne. C'est 10 000 000 d'habitants, et c'est prospère, et c'est dynamique, et c'est à peu près ontarien fondamentalement comme, moi, je suis Chinois, parce que le coeur de l'économie ontarienne, c'est Ford, GM et Chrysler. Le coeur de l'économie québécoise, c'est Quebecor, Bombardier, Cascades, SNC-Lavalin, Alcan, multinationale québécoise avec son siège social rue Sherbrooke, à Montréal. Et, à tout prendre, puisqu'on a vu que le taux de chômage évoluait en parallèle, que les revenus évoluaient en parallèle, j'aime mieux habiter dans un pays qui contrôle largement son économie tout en étant ouvert aux investissements étrangers, ouvert aux multinationales et aux transnationales, mais avec la contrepartie que nous avons aussi des multinationales et des transnationales. Le Canada en a déjà eu, comme Massey-Ferguson, par exemple, qui est allée mourir assez ignominieusement au sud de la frontière.

Les multinationales du Canada aujourd'hui, c'est les multinationales du Québec, et la propriété québécoise purement privée ou mixte ou coopérative de grands empires est un formidable atout pour l'économie du Québec d'aujourd'hui et pour l'économie du Québec de demain. Quand on pense que 50 % du commerce bancaire au Québec est réalisé par une institution privée, donc non gouvernementale, mais pas purement capitaliste puisqu'elle est coopérative – le Mouvement Desjardins – quand on pense que, comme le font les capitalistes rhénans, les syndicats allemands, la Fédération des travailleurs du Québec a mis sur pied, avec l'aide des pouvoirs publics et de l'ensemble des contribuables, il est vrai, un formidable outil qui s'appelle le Fonds de solidarité et qui, à chaque jour, participe à des nouveaux investissements, dans les régions en particulier, avec des sociétés maintenant décentralisées et associé avec d'autres capitaux publics ou privés, crée des emplois...

Dans ma circonscription, hier, par exemple, je suis allé au lancement d'un nouvel investissement, Sol Max: 80 emplois créés en usine, 80 sur les chantiers de construction pour installer le produit de haute technologie qui en résulte. Je ne parle pas de la construction de l'usine, là, parce que ça, c'est 50 de plus. Alors, deux fois 80 permanents, avec comme actionnaire le Fonds de solidarité des travailleurs et des travailleuses du Québec. Alors, tout ça pour vous rappeler, en terminant, que l'économie québécoise est une économie diversifiée dans ses productions, on le sait, en transition vers les productions les plus porteuses d'avenir, sans tourner le dos aux matières premières, qui sont un bienfait de la nature, puisque ce sont des richesses naturelles et que nous n'avons pas de mérite à les avoir sur notre territoire, mais qui sont là.

Vous vous souvenez, M. le Président, quand on est allés inaugurer cet endroit aussi extraordinaire dans votre propre circonscription, sur les bords du Saint-Maurice, un parc thématique souvenir de la naissance du Québec industriel à Shawinigan? Bien, le Québec industriel à Shawinigan, il est né largement parce qu'il y avait cette extraordinaire force hydraulique qu'on appelait la «houille blanche» à l'époque et qui a amené d'abord l'industrie de l'aluminium et diverses autres industries. Alors, tout ça, c'est là, mais la différence, c'est que, il y a 25 ans, quand j'enseignais l'économie dans un collège de Montréal – 25 ans, peut-être un peu plus, je ne veux pas me tromper dans mes dates – j'enseignais aux étudiants et aux étudiantes que les grands postes exportés de l'économie québécoise, c'étaient pâtes et papiers, produits de la forêt, planches deux par quatre, lingots d'aluminium, concentrés de fer, de cuivre, de zinc.

Tous ces produits sont encore dans notre bilan exporté. D'abord, certaines de ces richesses sont renouvelables et se renouvellent maintenant: la forêt; l'hydroélectricité, c'est renouvelable par définition; les mines, ça l'est moins, mais de vigoureux programmes d'exploration et des investissements font que les réserves se renouvellent. Tout ça est encore dans notre bilan exporté. Mais, dans les premiers postes maintenant, à côté de pâtes et papiers, à côté d'aluminium, se retrouvent avions complets et moteurs d'avion et turbines, matériel électronique lié à l'aviation, matériel de communication, de télécommunications, encore une fois, logiciels et matériel en utilisant les techniques les plus modernes. Donc, la diversité de produits, vous la voyez. La diversité d'exportation, vous la voyez: 50 % du PIB franchit les frontières pour être consommé par d'autres que par nous.

Mais vous voyez aussi, M. le Président – et c'est par ça que je conclus – la diversité d'agents économiques impliqués: des entreprises purement privées d'ici, des entreprises purement privées d'ailleurs, des entreprises coopératives, des entreprises mixtes, des entreprises purement publiques, comme la puissante Caisse de dépôt et placement, des entreprises comme la SGF.

Donc, nous vous demandons de modifier la loi et ses associées, parce que c'est ça qu'on dit aujourd'hui: La SGF ne sera plus jamais seule, si on peut dire, dans un projet, elle sera avec des entreprises de tous les autres types que j'ai mentionnés, qu'elles soient d'ici ou d'ailleurs, pour consolider cette puissance économique du Québec qui ne cesse de croître depuis le jour où la Société générale de financement du Québec est entrée en action.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le vice-premier ministre et ministre des Finances. Je céderai maintenant la parole au député de Westmount–Saint-Louis. M. le député, je vous avise que vous avez droit à un temps de parole de 20 minutes, puisqu'il y a un temps équivalent au temps octroyé au vice-premier ministre qui sera accordé au député de Laporte. Alors, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le Président. J'aurais pris la peine, de toute façon, de vous indiquer que mon droit de parole n'aurait pas pu dépasser 20 minutes, puisque, modestement, j'apporterai une contribution à titre de lanceur de relève, dans le fond, au député de Laporte, qui ne pourra pas être avec nous cet après-midi mais qui y sera plutôt demain matin.

M. le Président, c'est toujours un plaisir d'écouter le ministre des Finances conter l'histoire économique. Je vous dirai tout simplement, toutefois, que le ministre des Finances, tout en étant fort intéressant, a une meilleure compréhension et connaissance de l'histoire et historique économique à partir du moment où il était étudiant. La partie 1955 à aujourd'hui est plus fondée que celle qui repose sur ses connaissances livresques, évidemment, particulièrement, si j'ai bien compris, assez portées sur la vision historique qu'avait l'école de Montréal, c'est-à-dire les historiens comme Michel Brunet. Je suggérerais... Et probablement, même sûrement, que le ministre a fait des lectures d'histoire économique de ses anciens collègues de l'Université du Québec – je pense à Linteau et aux autres du groupe de Linteau – qui sont plus modernes comme vision de cette histoire économique.

Je ne prendrai à titre d'exemple, M. le Président, que, lorsque l'on fait une visite, chez vous, du musée qui raconte les fondements de notre histoire économique, eh bien, on ne passe pas, comme l'a souligné le ministre, par l'électricité, la houille blanche. On ne part pas par là, on passe par les Forges du Saint-Maurice. Les Forges du Saint-Maurice sont, je dirais, le premier développement économique où on a fait de la transformation. On a fait de la valeur ajoutée ici, en Nouvelle-France, sous l'inspiration d'un intendant qui avait un esprit plus favorable au développement économique, qui était l'intendant Talon, à l'époque, pour ceux qui ont lu sur cette question. On a eu, malheureusement, trop de Bigot pour trop peu de Talon dans notre histoire pré-guerre de 1760, pré-conquête de 1760. La période post-conquête de 1760, peu importe. Enfin, le ministre des Finances a eu le blâme sévère sur le conquérant. Je dois signaler que non seulement le conquérant n'a pas forcé la population locale à vivre sur des fermes, ou à vivre sur des terres, ou à faire de l'exploitation agricole, mais il y a eu un choix qui s'est fait ici, qui a été secondé, dirais-je, par les élites locales canadiennes françaises les plus traditionnelles, qu'elles soient du type seigneurial ou du type ecclésiastique.

On peut mentionner la création des HEC. Parmi les premiers professeurs aux HEC – je pense qu'il est encore en vie – M. François-Albert Angers, qui devrait être un résident du nouveau village d'adoption du député de Verchères. Il doit être assez âgé, de toute façon. C'était un prof de Gérard Filion, de mon parrain, Pierre Proulx, qui a été secrétaire général de l'UCC pendant des années, et de tout ce groupe de jeunes qui étaient, eux – et c'était fort rare pour l'époque – intéressés aux questions économiques et aux questions de comptabilité. Très peu de jeunes, même jusqu'au milieu de ce siècle-ci, au Québec, étaient intéressés par une approche autre que celle des professions libérales les plus connues. Pensons à la médecine, au droit, au droit notarial ou à la pratique privée du droit comme on la connaît. Très peu s'en allaient en génie. Très peu s'en allaient en économie, ou en finance, ou en comptabilité. Ça a fait en sorte que, effectivement, on a eu un retard économique sur la plupart des autres provinces, et particulièrement l'Ontario.

(16 h 10)

Pensons uniquement, M. le Président, au fait, et ça, ce n'est pas la faute ni du conquérant ni du fédéral, ni de personne, qu'au Québec on n'a eu un ministère de l'Éducation qu'en 1964, à peu près à la même période où on a créé la SGF. En Ontario, on avait créé un ministère de l'Éducation depuis 1908; depuis 1905 au Nouveau-Brunswick. Au Québec, on a attendu en 1964. Et, même en 1964, il faudrait reparler... Vous auriez plaisir... Le député de Verchères se rappelle et a bien connu Paul Gérin-Lajoie. Et Paul Gérin-Lajoie, à l'époque, en 1964, a fait bloc contre beaucoup de forces à travers le Québec qui voulaient empêcher même la création du ministère de l'Éducation. Malgré tout, il y a eu création du ministère de l'Éducation. Il y a eu développement rapide, exponentiel de notre capacité de pouvoir s'instruire, de pouvoir instruire la population en général depuis les derniers 30 ans.

M. le Président, il est clair que les Gérard Filion, les Jean Deschamps, qui ont présidé les destinées de la SGF à l'époque, l'ont fait avec les outils qu'on leur a donnés, qui étaient quand même relativement bien faits. Le ministre l'a mentionné, lorsqu'on a créé la SGF, on a créé la SGF, c'est vrai, pour faire en sorte d'éviter que Marine Industrie s'effoire, que Marine Industrie tombe, que Marine Industrie et que les nombreux travailleurs de Sorel disparaissent, suite à des problèmes, je pense, qui étaient non seulement conjoncturels, je dirais, à l'époque, avec Marine Industrie, mais des problèmes structurels d'administration internes et des problèmes de financement et des problèmes aussi de s'assurer d'avoir des contrats. Parce qu'il n'y avait à peu près rien que le gouvernement fédéral qui donnait des contrats pour nettoyer la voie maritime, particulièrement depuis sa création, pour permettre aux bateaux de se rendre à Montréal d'abord. Mais, suite à la création de la SGF, on a vu la SGF prendre des actions et prendre position financière dans de multiples domaines dont l'aluminerie, les alumineries.

Le vice-premier ministre nous parlé du succès de Bécancour, de Pechiney. Exact. C'est un succès, Bécancour, autant un succès qu'Alouette a été un succès aussi à Sept-Îles. Les alumineries, pour toutes sortes de raisons, à cause de notre capacité électrique, à partir du moment où on a un port de mer, on est capable d'importer le bauxite, à cause de notre capacité électrique, encore une fois, on est capable de transformer le bauxite en aluminium... C'est d'ailleurs la raison fondamentale, la seule raison pour laquelle les compagnies d'aluminium comme Alcan, d'abord, ont commencé à s'installer au Saguenay et plus tard au Lac-Saint-Jean, et ensuite sur la Côte-Nord, à Baie-Comeau, Reynolds.

Plus tard, on est revenu chez vous. Reynolds s'est en allé, par exemple, a développé son industrie de Shawinigan. Et les alumineries, au Québec, ont été depuis toujours garantes non seulement d'investissements majeurs, mais aussi d'emplois fortement rémunérés dans à peu près toutes les régions où on était capable d'avoir une accessibilité rapide, avec l'électricité et éventuellement, peut-être contrairement... C'est la seule place, à peu près, chez vous, où il n'y a pas un port de mer, évidemment à Grand-Mère, mais on a un réseau de chemin de fer qui pallie à la carence d'un réseau fluvial ou maritime. On prend l'aluminium chez vous, on l'amène quand même au port de Trois-Rivières, je présume, et on le distribue un peu partout sur le continent.

Effectivement, le ministre nous annonce qu'il veut... Et c'est une drôle de vision. Il dit: Nous avons fait un profit de 480 000 000 $ en vendant notre part de la SGF. Donc, on n'a plus la part de la SGF dans Pechiney, à Bécancour, on a vendu. On a fait 480 000 000 $. Le 480 000 000 $, M. le Président, le ministre ne nous a pas dit ce qu'il a fait avec. Il est en train d'essayer de nous faire comprendre qu'il retourne à la SGF. C'est un petit peu différent dans les faits. Dans les faits, le ministre a pris 480 000 000 $ et s'est assuré que... Il a diminué le niveau de la dette du Québec de 480 000 000 $ en vendant des actifs l'an dernier.

Ce sur quoi le projet de loi nous amène à réfléchir, l'avenue sur laquelle on nous amène à réfléchir, c'est effectivement d'augmenter le fonds social de la Société. On double, ni plus ni moins. On l'amène de près de 500 000 000 $ à 850 000 000 $. Mais il faut savoir que le fonds social de la Société, il a été modifié plusieurs fois depuis la création de la SGF. Cent millions en 1964, M. le Président, je ne vous apprendrai rien, ça vaut à peu près 800 000 000 $ aujourd'hui; 450 000 000 $, la dernière fois qu'on a modifié et qu'on a amendé ce projet de loi là, en 1983, ça vaut à peu près 850 000 000 $ de capital social qu'on veut donner à la Société aujourd'hui. En deux mots, ce n'est pas juste de dire, comme le fait le ministre, qu'il est en train de retourner à la Société ce qu'il est allé rechercher en vendant son capital-actions ou son profit sur la vente de Pechiney. Ce qu'il fait, il donne à la Société la même force financière, pas plus, pas moins, que celle qu'elle avait il y a 15 ans – il y a 13 ans, plus justement – que celle qu'elle avait lors de sa création, il y a 30 ans, en dollars constants. Parce que, effectivement, l'inflation a grugé la valeur du capital social de la SGF, et je pense que c'est tout à fait justifié de reprendre et de faire en sorte que le capital social soit accru à la SGF. Et c'est normal qu'on le fasse, qu'un gouvernement ou l'autre le fasse à un moment donné ou à un autre. Compte tenu de l'érosion de la valeur du dollar, il est évident que, inflation aidant... il y a moins d'inflation depuis trois ou quatre ans, il n'y en a presque plus, mais il y a quand même eu pendant 10 ans une force d'inflation qui a fait en sorte de pratiquement doubler la valeur de l'argent de 1983.

M. le Président, je pense que le ministre n'a pas non plus parlé longtemps du contenu du projet de loi, et je le comprends. L'histoire économique du Québec à la sauce du vice-premier ministre était fort plus intéressante que le contenu du projet de loi, parce qu'il n'y a pas grand-chose dans ce projet de loi là. Une fois qu'on a dit ce que je viens de vous dire, on vient d'augmenter le capital social, et, pour le ministre, là, il ne mettra pas, à partir de l'argent des impôts du Québec, un 400 000 000 $ de plus dans la cagnotte. Il va donner un pouvoir à la SGF de faire des investissements à même sa capacité d'emprunt de ministre. Quand la SGF va faire des investissements, la SGF va les faire au nom du ministre des Finances et de la capacité d'emprunt du ministre des Finances. Ce n'est pas de l'argent neuf mis dans la cagnotte d'investissements de la SGF, là. Il faudrait bien se comprendre.

Outre ce point, dans le dossier qui nous occupe, c'est-à-dire le projet de loi n° 48, la majorité des articles portent sur deux sujets, les autres articles portent sur deux sujets, principalement sur l'élimination ou la tentative – et je pense que c'est salutaire – d'éviter que les membres du conseil d'administration de la SGF soient en conflit d'intérêts avec le poste qu'ils occupent à la SGF. Alors, on dit tout simplement que, lorsqu'un administrateur de la SGF doit étudier un dossier qui le touche personnellement ou qui touche ses affaires personnellement, il doit, d'une part, par écrit aviser la présidence de la SGF et, d'autre part, se retirer des propos et des discussions qui devront être faits au conseil d'administration de la SGF. Ça m'apparaît être assez clair et assez normal. On l'écrit, on le spécifie et on le dit.

Outre ce deuxième point, le troisième point, c'est... Mais là, il y a trois articles pour permettre une défense des administrateurs de la SGF. Au cas où ils se feraient un jour poursuivre par quelqu'un pour une action ou une décision prise par le conseil d'administration, le projet de loi vient donner une défense complète supplémentaire. On annonce que la Société générale de financement, même si elle est poursuivie par un tiers pour un acte accompli dans l'exercice de ses fonctions, les dommages et intérêts résultant de cet acte, s'il a commis une faute lourde ou une faute personnelle, c'est-à-dire s'il a commis une faute, seront financés par la Société générale de financement, qui assurera aussi toute sa défense civile ou pénale en défrayant les frais de ses procureurs. Donc, finalement, c'est tout ce qu'on retrouve dans ce projet de loi là.

(16 h 20)

On nous annonce – et on sait que ça se fait déjà – que la Société fera un plan quinquennal, dont un plan annuel de ses activités sera remis au ministre des Finances. C'est relativement bénin, ça se fait depuis déjà plusieurs années. Or, on a fini le projet de loi quand on a fait ça. Je suis assez curieux de constater que le ministre des Finances tente encore, 30 ans après sa création, de faire la défense de la SGF. Il n'y a personne de ce côté-ci qui remet en question l'existence de la SGF. Je voudrais le rassurer là-dessus, à tout le moins.

Quant à sa vision de la grande force économique du Québec, nous partageons ce sentiment. Il est vrai que le Québec a une diversification de sa force économique, de son capital-actions et aussi de ses activités économiques; toutefois, contrairement à ce que le ministre apporte, nous croyons que l'insécurité politique au Québec amène des problèmes qui sont vécus à tous les jours par des centaines, des milliers de Québécois qui, entre autres, perdent leur emploi de ce temps-ci.

Avec tous les égards que je puis avoir pour le ministre, je voudrais lui mentionner que les vrais hommes d'affaires, non pas comme le ministre, mais les vrais hommes d'affaires – les Jean Coutu, les Guy Savard, les Laurent Beaudoin, les Jacques Bougie, président de l'Alcan – ont tous dit publiquement qu'on vit dans un cadre d'insécurité politique, au Québec, entretenu par le gouvernement actuellement. Le gouvernement l'entretient en disant: La minute qu'on va avoir une chance, on va faire un autre référendum. Je ne le sais pas, je présume que le ministre des Finances, ministre de l'Économie, doit de temps en temps venir à Montréal puis écouter des gens qui nous disent que leurs affaires, même si elles ne vont pas si mal dans certains cas, lorsqu'ils ont de la production supplémentaire à faire, ils vont la faire faire à Albany, dans l'État de New York, à Toronto ou même, depuis quelques années, au Nouveau-Brunswick, ce qui fait que depuis... Contrairement à ce que le ministre dit, nos statistiques de chômage ne sont pas identiques à celles du Canada. Notre voisin, qui a toujours été en arrière de nous, qui a toujours eu un taux de chômage plus élevé que nous, le Nouveau-Brunswick, depuis six mois, M. le Président, le Québec a dépassé, en taux de chômage, le Nouveau-Brunswick. Ça ne s'est jamais vu, jamais vu. Le Nouveau-Brunswick n'a toujours bien pas une structure économique aussi diversifiée que celle du Québec! Pourtant, au Québec, on a 12,6 % de chômage, puis, au Nouveau-Brunswick, on a moins de 11 %.

C'est depuis six mois que le Québec bat littéralement – depuis l'arrivée du nouveau gouvernement, je dirais – a des statistiques de chômage plus élevées que le Nouveau-Brunswick. Je ne parlais pas de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick. Imaginez-vous! Il y a à peu près rien que Terre-Neuve avec laquelle on est à la veille de se comparer. Ça n'a toujours bien pas d'allure! Il doit y avoir une raison pour ça, M. le Président.

Et cela, quoi qu'en dise le ministre des Finances, quoi qu'en pensent nos amis d'en face, même s'il est vrai que certains pays de l'OCDE ont des problèmes conjoncturels de chômage... L'Allemagne est à 10,5 % au moment où on se parle, la France est à 12,4 %. Mais, en France, ça ne va pas bien. Personne ne va vous dire que ça va bien en France de ce temps-ci. Puis j'ajouterai, M. le Président, qu'on n'a pas à essayer de se comparer avec ceux qui vont plus mal que nous. Cherchons à nous comparer avec ceux qui vont mieux, puis on ira mieux nous-mêmes.

Quand je vous parlais du Nouveau-Brunswick, il y a une différence, par exemple. Au Nouveau-Brunswick, il y a un premier ministre qui depuis plusieurs années fait tout en sorte pour amener des investissements chez lui. J'ai hâte de voir le gouvernement faire en sorte... Et on va voir, là, le Sommet s'en vient la semaine prochaine, on va voir ce que le gouvernement a à dire, comment le gouvernement va faire en sorte d'aider à générer de l'emploi. Une des meilleures choses que le gouvernement peut faire pour aider à générer de l'emploi, c'est sûrement de regarder sa vision fiscale, d'assainir le climat politique en faisant en sorte d'arrêter de casser les oreilles aux gens avec le dossier d'un prochain référendum.

De toute façon, M. le Président, c'est sûr que tous et chacun d'entre nous cherchent à faire en sorte que le Québec améliore sa situation sur le plan économique. Mais il y a quand même des recettes fondamentales pour y arriver, et j'invite le vice-premier ministre, le ministre des Finances à faire en sorte de s'assurer que ses paroles, que les gestes, que les discours du gouvernement soient cohérents en matière d'organisation de l'emploi, en matière d'amélioration du nombre d'emplois créés au Québec.

On a un gouvernement qui s'en va comme une poule pas de tête. On a hâte d'avoir un gouvernement – peut-être un jour – qui pourrait savoir ce qu'il a à faire sur le plan économique de façon à s'assurer que la vraie priorité du gouvernement soit la création d'emplois et sa relance économique. Les Québécoises et les Québécois, M. le Président, n'attendent que ça de leur gouvernement.

Le ministre des Finances nous disait: Ah! l'Allemagne, c'est comme le Québec. Mais, en Allemagne, il y a 7 % des jeunes en bas de 30 ans qui sont chômeurs. Au Québec, c'est 30 %. M. le Président, nous, du Parti libéral, nous trouvons que c'est totalement inacceptable. Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Alors, puisqu'il n'y a plus d'intervenant, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, de façon à permettre une dernière intervention, soit celle du porte-parole de l'opposition officielle, le député de Laporte, je ferais motion pour ajourner le débat, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de suspendre quelques instants.

Le Président (M. Pinard): Alors, je suspends les travaux de l'Assemblée pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 27)

(Reprise à 16 h 31)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, l'article 24 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 135


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 24 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du projet de loi n° 135, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la fiscalité municipale. Y a-t-il des interventions sur le principe?

M. le ministre des Affaires municipales.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Nous en sommes donc arrivés à l'avant-dernière étape et la dernière étape ici, à l'Assemblée nationale, pour l'adoption du projet de loi qui deviendra la loi n° 135, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la fiscalité municipale.

Alors, M. le Président, pour les gens qui nous écoutent, les nombreux députés qui ont participé aux travaux de la commission parlementaire, on va reconnaître cette loi sous une appellation qui est plus commune dans les unions municipales, au niveau des municipalités elles-mêmes: la loi sur la TGE. Qu'est-ce que c'est, M. le Président? Il vaut la peine de faire un peu de didactique, un peu de pédagogie autour de ce projet de loi pour bien comprendre de quoi il en retourne et ce que ça signifie pour les municipalités, pour le gouvernement du Québec, pour les citoyens, les citoyennes, les contribuables des municipalités qui nous écoutent actuellement.

M. le Président, depuis le 12 septembre 1994, avec le retour au pouvoir du Parti québécois, nous avons entrepris un vaste mouvement d'assainissement des finances publiques. Les objectifs ont été bien exprimés, sont en général connus, ils ont été ratifiés, adoptés, convenus par tous les grands intervenants sociaux du Québec à l'occasion de la Conférence sur le devenir social et économique le printemps dernier. Le ministre des Finances, depuis ce temps, a une expression ou une description peut-être lapidaire de la situation, mais bien concrète, d'une formule, en disant: Vous savez, maintenant, nos objectifs, sur le plan financier, pour redevenir propres, pour avoir un compte de banque équilibré, c'est 3,2, 2,2, 1,2 et 0.

Qu'est-ce que ça signifie, ces chiffres? Ce sont des objectifs dont nous avons convenu au plan financier, un déficit, cette année, dont la prévision est à 3 975 000 000 $ et qui, suivant les résultats qui nous seront présentés au niveau des états financiers, doit atteindre ce type de résultat quant au défi que nous nous sommes donné, avec des efforts immenses qui se sont déroulés, qui ont pris place, qui se sont inscrits dans nos façons de rendre les services au cours de la dernière année.

Et en particulier, par exemple, dans le domaine de la santé, le ministre de la Santé a été appelé à entreprendre un vaste programme de transformation pour réaligner le type de services, en quelque sorte, que nous rendons aux personnes qui vivent des situations difficiles au plan de la santé, mais surtout à se procurer, en quelque sorte, les ressources pour répondre aux besoins d'une population plus âgée, par exemple au niveau de la longue durée par rapport aux hôpitaux de courte durée. Ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 135, mais les immenses efforts réalisés par le ministre de la Santé et des Services sociaux au sein du gouvernement, ça a pour but précisément d'atteindre cet objectif: le déficit de 3 900 000 000 $ pour l'année 1995-1996.

Pour l'année 1996-1997, le ministre des Finances a eu l'occasion d'exprimer l'objectif et le résultat qu'il faudra obtenir, c'est un déficit maximal de 3 200 000 000 $, ce qui implique donc d'autres efforts. La barre a été fixée à 2 200 000 000 $ pour l'année subséquente; quand on arrivera en 1998-1999, ce sera 1 200 000 000 $, le déficit; et, quand nous tournerons la page du calendrier de l'année 2000, l'objectif convenu par tous les intervenants sociaux du Québec, c'est de dire: On va également avoir un budget propre, un budget équilibré, tant au niveau des dépenses de fonctionnement, des dépenses d'opérations courantes que des dépenses d'investissement, et nous serons donc à équilibre, et même nous n'aurions plus à emprunter, comme objectif toujours, pour nos dépenses d'investissement. Ça a été convenu. Pour ce faire, on doit donc prendre un certain nombre de mesures, et tout le monde doit faire sa part. C'est toujours difficile. Dans le domaine de la santé, ça a été difficile, mais nous avions des objectifs de développement de services pour les personnes qui sont en besoin; la même chose dans le domaine de l'éducation.

Quand on est arrivé dans le monde municipal, M. le Président, le ministre des Affaires municipales de l'époque, l'an passé, le député de Joliette, a annoncé aux municipalités qu'il leur demandait une contribution de 47 000 000 $, c'est-à-dire que, dans cet effort que nous avons tous à réaliser et dans les gestes que nous avons à poser de façon équitable, eh bien, nous demandions aux municipalités de faire un effort de 47 000 000 $. Comment cet effort allait-il être réalisé par les municipalités? Essentiellement par une contribution à partir de la taxe sur les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité. Ça vaut la peine d'expliquer un petit peu, je pense, de quoi il en retourne.

Au Québec, nous avons décidé, il y a un très grand nombre d'années, que les entreprises de télécommunications, les entreprises dans le domaine gazier et les entreprises qui sont dans le domaine de la production de l'électricité, de l'hydroélectricité, auraient, ces entreprises, à payer évidemment leur quote-part, leurs taxes comme tous les autres citoyens contribuables individuels ou tout autre citoyen ou contribuable corporatif. La méthode utilisée, en termes de prélèvement de ces revenus pour le gouvernement et pour les municipalités, c'est le champ foncier, c'est-à-dire: suivant que je possède beaucoup de biens, je suis redevable; on perçoit des argents suivant la valeur de la richesse foncière de l'entreprise ou de l'individu.

Or, dans le domaine des télécommunications, des réseaux de gaz et d'électricité, on va convenir, M. le Président, que c'est un peu difficile d'établir la valeur, pour prendre une illustration, du bout de tuyau qui passe dans la municipalité de Dolbeau, ou de dire: Bien, écoutez, on va évaluer la partie des tours qui servent au transport d'électricité et à alimenter en électricité la ville de Shawinigan, et, parce qu'il y a trois tours dans la municipalité de la ville de La Baie, bon, il va y avoir tant. Et combien ça vaut, une tour pour faire passer des fils électriques pour distribuer l'électricité? On voit bien que, si nous nous étions attachés au principe général de prendre les biens, les immeubles, les terrains appartenant à ces entreprises, nous serions dans une espèce d'entreprise d'évaluation qui amènerait de très nombreuses contestations et de telles dépenses que ça n'aurait pas de bon sens quant au fruit recherché, au résultat recherché, si bien qu'on s'est entendu.

On a dit: Écoutez, pour tous les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité, on percevra la taxe pour les municipalités sur ces réseaux-là à partir du profit net de ces entreprises. Alors, quand vous êtes dans le domaine de la production d'électricité – essentiellement Hydro-Québec – quand vous êtes dans le domaine de la distribution du gaz, grandes entreprises – Gaz Métropolitain et d'autres aussi – quand vous êtes dans le domaine des télécommunications – Bell et autres entreprises de même type – eh bien, on vous demande une contribution à partir de vos profits nets, ce qui évite de faire toute la mécanique de l'évaluation des équipements que vous avez sur les territoires municipaux.

Et, pour encore simplifier davantage, on va faire en sorte que la loi du ministère du Revenu, qui permet de taxer aux fins municipales les profits nets des réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité, eh bien, c'est le gouvernement du Québec qui va faire ça de façon centrale pour ne pas répéter, si vous voulez, le travail, l'opération dans quelque 1 398 municipalités que nous avons jusqu'à maintenant. On n'est plus à 1 400, on est à 1 398, depuis l'adoption par le Conseil des ministres de deux décrets récemment pour la consolidation de deux communautés municipales, une dans Lanaudière et une autre dans la région de l'Outaouais. Alors, pour ne pas répéter l'opération dans 1 398 municipalités, ce que nous nous sommes dit: Simplifions les opérations, on va percevoir ça de façon centrale et on va redistribuer ça aux municipalités, aux 1 400 et plus à l'époque, suivant des critères, des normes avec lesquelles les municipalités vont nous demander de fonctionner. La répartition de la TGE.

(16 h 40)

En quelque sorte, M. le Président, on va donner ça à titre d'exemple, on ne s'en tiendra pas à des chiffres très rigoureux, on va prendre un aperçu général. Quand on a des revenus, par exemple, de l'ordre de 330 000 000 $ pour l'année 1996 sur les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité, on redistribue cet argent-là dans les municipalités, au total, pour l'ensemble des municipalités, suivant des critères, suivant des éléments pour lesquels on s'est entendu avec les municipalités.

Le ministre des Affaires municipales a indiqué aux municipalités le 6 novembre 1995 que nous allions demander aux municipalités de faire un effort de 47 000 000 $ et que nous allions leur demander de faire cet effort à même les revenus de la TGE, dans le sens suivant. D'abord, le gouvernement du Québec, le fonds consolidé, les citoyens et les citoyennes du Québec, au niveau des budgets du ministère des Affaires municipales, à chaque année et en particulier pour l'année 1995, nous avions un poste de dépenses. Soyons extrêmement clairs, le gouvernement prenait une somme de 36 000 000 $ et redonnait ce 36 000 000 $ aux municipalités, en termes de péréquation; quelque 600 municipalités au Québec dont l'évaluation, dont la situation financière s'écarte de la moyenne, en termes de richesse foncière. On n'entre pas dans le détail, c'est extrêmement complexe, mais, en gros, on prenait 36 000 000 $ et on redistribuait ça aux municipalités les plus pauvres au Québec, «pauvres» égalant un degré de richesse foncière qui s'écarte de la moyenne per capita de la richesse foncière dans le territoire de la MRC donnée et dans lequel on retrouve la municipalité. 36 000 000 $.

Alors, ce que nous avons indiqué. Il nous a semblé à nous, au gouvernement du Québec, qu'il était important qu'on puisse continuer à supporter les petites municipalités ou les municipalités dont le degré de richesse foncière s'éloigne de la moyenne. Et nous voulons, nous souhaitons et nous allons continuer à leur distribuer 36 000 000 $. Mais ce ne sera plus le fonds consolidé du Québec qui va fournir ce 36 000 000 $. Le 36 000 000 $ sera pris, oui, dans les revenus de la taxe sur les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité. Le 36 000 000 $ qui était au budget du gouvernement va maintenant apparaître comme élément, comme programme dans la redistribution des argents perçus par la taxe sur les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité. Et nous allons donc faire en sorte que nous allons diminuer de 36 000 000 $ – une première tranche, 36 000 000 $ – la partie qui était payée par le gouvernement aux municipalités et qui sera prise ailleurs, ce qui va diminuer d'une première pression de 36 000 000 $ auprès du gouvernement du Québec.

La députée de l'opposition, porte-parole de son parti en matière d'affaires municipales, a déjà posé de nombreuses questions, ici et en commission parlementaire également, réalisant son travail d'opposition, en disant: Est-ce que le ministre des Affaires municipales peut nous indiquer si, oui ou non, le gouvernement a diminué sa part de financement aux municipalités de 36 000 000 $ pour l'année 1996? La réponse, c'est oui, parce que c'est ça que la réalité des chiffres montre. C'est ça, la réalité.

Cependant, M. le Président, nous pensons que le fait de redistribuer, suivant les critères du programme de péréquation, de l'argent dans les municipalités qui peuvent être plus en difficulté au niveau des revenus tirés de la richesse foncière de l'ensemble des biens, des terrains et des immeubles sur leur territoire, c'est un objectif soutenable, et nous pensons qu'il faut maintenant retrouver ce programme de 36 000 000 $ dans les revenus de TGE. S'agit-il, M. le Président, d'un effort que nous demandons aux municipalités? Réponse: oui. C'est un effort supplémentaire que nous demandons aux municipalités pour réaliser les objectifs collectifs au niveau du gouvernement du Québec. C'est un effort de plus que nous demandons, un premier 36 000 000 $.

Par ailleurs, M. le Président, nous avons aussi indiqué que nous allions supprimer, sur deux ans, l'argent que nous envoyions dans les municipalités pour compenser ou pour le plafonnement des dépenses reliées à la loi adoptée par M. Ryan au niveau de... En fait, c'était la loi 145, qui prévoyait un certain nombre de transferts dans les communautés locales. On ne s'attardera pas trop sur cette partie-là, mais, pour éviter des augmentations trop draconiennes, on avait prévu un programme de plafonnement dans les municipalités, c'est-à-dire que, lorsque ça dépassait un tel montant d'argent pour les contribuables, eh bien, nous compensions la municipalité. Nous avons décidé de diminuer de 50 % la compensation pour le plafonnement due à la réforme Ryan. Je sais, M. le Président, que nous aurions dû dire «l'ex-député d'Argenteuil», mais tout le monde connaissait l'ex-ministre des Affaires municipales, M. Ryan. Je pense que ça identifie mieux la personne qui était responsable de la loi 145 qui a été adoptée ici, à l'Assemblée nationale. Donc, nous avons décidé de supprimer aussi 11 000 000 $ au niveau du programme de plafonnement.

Par ailleurs, nous avions eu au cours des deux dernières années un très grand nombre de représentations, M. le Président, de la part d'un certain nombre de villes-centres au Québec. Oui, un certain nombre de représentations de la ville de Montréal, de Québec, de Chicoutimi, de Hull, Sherbrooke et Trois-Rivières. Essentiellement, sans aller dans le détail, ces municipalités nous disent: Nous, à titre de villes-centres, nous avons à assumer des responsabilités, nous avons à assumer le coût d'infrastructures qui servent à beaucoup plus que la population locale qui vit sur notre territoire. Nous avons à assumer des infrastructures, des dépenses de fonctionnement qui servent à l'ensemble du territoire de la région, et, pour tout cela, nous n'avons pas de compensation. Le gouvernement a fait droit à cette prétention, à cette explication des villes-centres, et nous avons décidé, M. le Président, de verser, pour l'année 1996, toujours à même l'enveloppe de revenus générés par les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité, une somme de 11 000 000 $ aux villes de Québec, Montréal, Chicoutimi, Hull, Sherbrooke et Trois-Rivières, à titre de villes-centres, pour reconnaître qu'il y a cette différence, qu'il y a cette exigence, qu'il y a cette responsabilité et que nous désirons supporter ces villes aux prises avec de telles responsabilités.

Ce qui faisait donc, M. le Président, une somme de 47 000 000 $. Le ministre des Affaires municipales a annoncé cette intention parce qu'il fallait l'annoncer aux municipalités en novembre 1995 pour la préparation des budgets de l'année 1996. Les municipalités, par la loi, doivent adopter leur budget avant le 1er janvier de l'année à venir. Donc, au 30, 31 décembre 1995 pour l'année 1996, il fallait donc les prévenir de ce qui pourrait affecter leurs revenus. Voilà pourquoi le député de Joliette, ministre des Affaires municipales à l'époque, avait annoncé ça aux municipalités en début novembre.

Nous avons, par ailleurs, au début de la session d'hiver 1996, introduit ce projet de loi, ce projet de loi qui vise essentiellement, M. le Président, à faire en sorte qu'on puisse faire financer par les revenus de TGE les programmes que je viens de mentionner: le programme de péréquation de 36 000 000 $ et le programme de 11 000 000 $ pour les villes-centres.

(16 h 50)

Les unions municipales, M. le Président, tant les représentants de l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales et des municipalités locales au Québec, que de l'UMQ, l'Union des municipalités du Québec, qui représente la partie plus urbaine des grandes villes du Québec, ont manifesté, on peut s'en douter, une certaine réticence – le mot est faible – à l'égard du mouvement clairement avancé, déterminé, indiqué par le gouvernement du Québec, et les municipalités ont indiqué de diverses façons au ministre des Affaires municipales qui a succédé au député de Joliette qu'elles n'étaient pas très, très d'accord avec le projet de loi, puisque cela allait affecter, effectivement, leurs revenus. Et le revenu des municipalités était affecté pour 0,5 %. 47 000 000 $, qui, dorénavant, seront financés par les municipalités elles-mêmes à travers la taxe sur la TGE, eh bien, ça équivaut à financer elles-mêmes ces programmes. C'est 0,5 % de leurs revenus. Les municipalités, au Québec, ont des revenus, en gros, de 9 000 000 000 $, et ce que nous leur demandions en termes de 47 000 000 $, c'était 0,5 %.

Nous avons été à même de constater, d'ailleurs, que les municipalités ont très bien géré cette compression, parce qu'il s'agit d'une compression, puisque la résultante, au moment où nous nous parlons, ça signifie, pour les contributions à demander aux contribuables... Pour une maison unifamiliale, à travers le Québec, la moyenne d'augmentation de la contribution a été de 0,1 % pour une unité familiale. Alors, ça veut donc dire que les municipalités, oui, ont fait leur effort et ont bien géré cette compression que nous leur avons demandée, cette contribution que nous leur avons demandée.

Alors, voilà, M. le Président. Donc, on leur a fait savoir qu'on demandait une contribution de 47 000 000 $, et les municipalités nous ont indiqué, en gros, qu'elles étaient non pas complètement en désaccord – on le verra dans quelques instants – avec une contribution... Parce que le monde municipal est un niveau de gouvernement, on le comprendra facilement, qui est extrêmement prêt du citoyen, puisqu'il faut avoir été, comme le député de Rouyn-Noranda– Témiscamingue, au conseil municipal d'une grande municipalité, Saint-Guillaume-de-Granada, pendant au-delà de six ans pour comprendre que, le lundi soir de la première semaine du mois, eh bien, les citoyens peuvent parler directement à leurs conseillers ou à leur maire. C'est la démocratie directe, M. le Président, qui s'exerce. Alors, ce que les gens des unions municipales et des municipalités nous ont dit, c'est: Il y a là, bien sûr, une nouvelle façon d'intervenir pour nous demander de faire notre contribution au niveau municipal, et on en est, ont-ils dit, ces représentants. Nous voulons faire notre part parce qu'on comprend que, en termes d'équité, comme on a dit, à certaines occasions, tout le monde doit jouer dans le film, tout le monde doit faire sa part. Et c'est ce qui s'appelle l'équité. On aura tous à faire une part pour en arriver à atteindre notre objectif de retrouver la liberté de choix, le choix des programmes, le choix des priorités, le choix de nos interventions, le choix des secteurs dans lesquels on veut intervenir. Actuellement, on en est privé de cette liberté parce que nous avons été au-delà de nos capacités de payer en termes de revenus.

Alors, les municipalités ont dit: On va faire notre part. Et elles ont proposé au ministère des Affaires municipales une espèce d'entente, M. le Président, et on s'est retrouvé un beau jour du mois de mai au lac Saint-Pierre, dans la région de Trois-Rivières, avec les représentants de l'Union des municipalités régionales de comté, l'UMRCQ, et de l'UMQ à discuter de cette question. D'aucuns diront que c'est parce qu'on a forcé le bras, un peu, du ministre des Affaires municipales qu'on a discuté de ça au lac Saint-Pierre. Avec une écoute attentive, active, il nous a semblé important qu'on mette ça sur la table, que la suggestion qu'on nous faisait d'en discuter, bien, ça valait le coup parce que c'était la contribution du monde local à la réduction du déficit collectif que nous avons au Québec. Ça valait la peine d'en discuter.

Sans aller dans le détail, M. le Président, on a comme mis sur la table une proposition, en particulier à partir des interventions de l'UMQ. La proposition était la suivante, soit: Le monde municipal doit faire sa part, nous allons faire notre part. Est-ce que le gouvernement pourrait, par ailleurs, s'engager comme partenaire au niveau de la gestion des services publics au niveau local et au niveau national avec ceux et celles qui sont particulièrement chargés de la gestion au niveau local? Est-ce qu'on pourrait aussi compléter notre entente en disant: Toute nouvelle intervention dans le champ de la TGE devrait être assortie d'un accord avec les unions municipales?

M. le Président, à partir d'un tel mouvement de bonne volonté... Puis il faut le dire, il faut le souligner parce que, souvent, des gens nous disent: Ah oui! mais, écoutez, on est tout seuls à faire notre part, c'est toujours aux mêmes qu'on demande de faire des efforts; les municipalités, elles n'en font pas, d'efforts. Ce n'est pas conforme à la réalité, M. le Président. Et, pour le dire, là, on n'est pas simplement au niveau du discours, on en a discuté pendant de très longues heures à cette réunion spéciale du lac Saint-Pierre, les 23 et 24 mai dernier, et on est arrivés à une entente. On a traduit cela dans un texte et on a signé une entente avec les représentants de l'UMRCQ et de l'UMQ au sujet de la répartition de l'enveloppe provenant de la taxe sur les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité.

M. le Président, je tiens absolument à vous lire les «considérant» de cette entente avec les unions municipales représentant l'ensemble des municipalités, 1 400 à l'époque, qui ont signé en toute liberté cette entente au sujet de la répartition et, en fait, de l'effort de leur contribution au niveau de l'assainissement des finances publiques du Québec et de ce qu'elles allaient pouvoir faire en termes de contribution, les municipalités. M. le Président, cette entente entre le gouvernement, l'UMQ et l'UMRCQ était précédée d'un certain nombre d'«attendu».

«Attendu la réforme de la fiscalité municipale entrée en vigueur en 1980, laquelle comportait une mesure permettant aux municipalités de remplacer l'impôt foncier sur certains équipements des réseaux de télécommunications et de distribution de gaz et d'électricité par une taxe calculée à même le revenu brut des entreprises visées, la taxe sur la TGE» – ce que j'ai expliqué il y a quelques minutes en termes de champ de taxation.

Deuxième attendu: «Attendu la propriété des revenus de la TGE aux municipalités en fonction d'une formule de répartition qui vient d'être examinée par le comité de la Table Québec-municipalités formé pour évaluer les possibilités d'en modifier les clés de répartition» – on voit bien, M. le Président, qu'on a bien expliqué, on a bien compris c'était quoi, cette taxe, comment elle était répartie.

Troisièmement: «Attendu la perception confiée au ministère du Revenu ainsi que la redistribution effectuée par le ministère des Affaires municipales, deux opérations par lesquelles le gouvernement perçoit une somme équivalant à 3 % des revenus de la TGE à titre de frais de gestion.»

Et, quatrième attendu, M. le Président, il faut être attentif parce que c'est substantiel comme approche et comme apport aux défis que nous avons à relever: «Attendu que les municipalités acceptent de contribuer concrètement au processus d'assainissement des finances gouvernementales, tel qu'elles s'y sont engagées lors de la conférence de Québec les 18, 19 et 20 mars 1996;

«Attendu que, dans le cadre des discussions entourant l'adoption du projet de loi n° 135 – ce pourquoi nous sommes réunis aujourd'hui – projet de loi modifiant de nouveau la Loi sur la fiscalité municipale, les deux unions municipales prennent acte de la décision gouvernementale à l'effet de réaffecter une partie des sommes de la TGE pour financer des programmes d'aide financière destinés aux municipalités; et

«Attendu que les considérations qui précèdent font partie intégrante du protocole d'entente que nous avons signé, les trois parties conviennent de la répartition suivante.»

(17 heures)

M. le Président, je veux particulièrement insister et redire que les municipalités, dans un texte écrit par entente avec le gouvernement du Québec, ont mentionné, ont dit, ont exprimé publiquement qu'elles voulaient et qu'elles allaient réaliser leur part dans l'assainissement des finances gouvernementales du Québec. Il faut le souligner, il faut le dire, il faut le dire haut et fort que les municipalités du Québec ont accepté de faire leur part dans cet effort collectif pour une somme d'au moins 47 000 000 $, 47 000 000 $ auxquels s'est ajoutée une autre somme, une somme de 3 000 000 $. Pourquoi? Parce que, dans nos discussions au lac Saint-Pierre, nous avons été amenés aussi à nous intéresser à la question du financement des municipalités régionales de comté, les MRC. Tout le monde connaît l'expression maintenant. C'est presque aussi connu que nos CLSC, hein? Ce sont des acronymes qui se sont répandus dans le décor à l'occasion de la création de ces instruments, au tournant des années soixante-dix. Les CLSC, maintenant, c'est rendu dans le langage courant. Ce sont des établissements qui font notre fierté dans tout le monde de la santé à travers le monde. Le Dr Rochon, qui est le ministre de la Santé et des Services sociaux, a eu l'occasion certainement de le constater largement à travers le monde: un réseau unique, original, d'une capacité absolument extraordinaire au niveau de la prévention, le nouveau réseau de CLSC. Puis, dans le monde municipal, le réseau des MRC: 96 municipalités régionales de comté réunissant autour d'une même table les maires des 1 400 municipalités du Québec pour en arriver à voir aux fonctions d'aménagement et, de plus en plus, au soutien au développement économique et à la création d'emplois.

Alors, M. le Président, nous avons aussi annoncé, en novembre et en décembre 1995, que nous allions retirer aux MRC une somme de 9 000 000 $ qui était prévue pour financer leurs activités de fonctionnement. Pourquoi? Bien, parce que l'effort devait être équitable pour l'ensemble de tous les participants à la chose publique et pour tous les niveaux de gouvernement ou d'établissements au Québec, et que, pour 1997, nous allions supprimer ce programme. Or, les MRC, les maires, les représentants de l'UMQ et de l'UMRCQ ont convenu que les MRC ont une responsabilité particulièrement importante, surtout, de plus en plus, au niveau du soutien au développement économique, et, à la suggestion du ministre des Affaires municipales, on a décidé de réserver 3 000 000 $ supplémentaires dans l'enveloppe de la TGE pour financer le soutien au développement économique par les municipalités à l'intérieur des MRC du Québec, en retour de quoi le ministre des Affaires municipales s'engageait de son côté à regarder à l'intérieur de ses programmes et de son enveloppe fermée pour trouver une autre somme de 6 000 000 $, ce qui a été fait, pour financer le soutien au développement économique et à la création d'emplois par les municipalités à travers la MRC. C'est ce que j'ai pu annoncer au congrès de l'UMRCQ au début de septembre dernier, donc 3 000 000 $ supplémentaires.

En cours, M. le Président, on demandait un effort de 50 000 000 $: 36 000 000 $ dans les programmes de péréquation, 11 000 000 $ pour redistribuer aux villes-centres et 3 000 000 $ pour redistribuer aux MRC. Puis on a tout inclus ça à l'intérieur d'un protocole d'entente et on a signé ça le 22 août 1996. Alors, il faut reconnaître l'implication des municipalités. Elles le font formellement à travers un protocole d'entente. Nous pouvons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 135 en se disant que nous avons une entente avec les municipalités du Québec. Très certainement, du côté de l'opposition, on prétendra qu'on n'a pas fait ça de gaieté de coeur, qu'on n'avait pas le grand sourire, que ce n'est pas tout à fait, peut-être, conforme à la réalité des faits ou à l'interprétation qu'on pourrait en faire, que, quand les municipalités ont à remettre 50 000 000 $ dans l'effort collectif pour assainir nos finances publiques, elles ne l'ont pas fait d'une si grande gaieté de coeur que ça. M. le Président, il ne faut quand même pas dire le contraire de ce qui est écrit. Les unions ont signé avec nous cette entente historique pour dire: Nous aussi, on fait notre part. Elles s'y étaient engagées au sommet de Québec, les 19 et 20 mars 1996, et les municipalités du Québec ont tenu parole. Elles ont adopté, elles ont signé un texte de cette contribution de 50 000 000 $ pour l'effort collectif d'assainissement des finances gouvernementales.

Et je voudrais, avant de terminer ma présentation, déposer officiellement à l'Assemblée nationale l'entente signée le 22 août 1996 par Mme Jacinthe B. Simard au nom de l'UMRCQ et l'entente signée par le représentant de l'Union des municipalités du Québec, M. Gilles Vaillancourt, le président et maire de la ville de Laval, et le ministre des Affaires municipales. Je voudrais déposer cette entente qui témoigne bien de l'effort des municipalités et de la contribution concrète qu'elles apportent en termes d'assainissement des finances publiques. M. le Président, je dirais...


Document déposé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le document est déposé. Bon.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je dirais, avec le dépôt de cette entente, que ça clôt le débat ou presque. Ou presque.

Il restait, à partir de ce moment, à discuter du contenu du projet de loi, ce que nous avons fait en commission parlementaire. Et on nous a demandé, au début de notre commission parlementaire: Est-ce qu'on pourrait une dernière fois entendre les représentants des unions municipales, faire ce qu'on appelle des consultations particulières?

M. le Président, j'ai été porte-parole de l'opposition en différentes matières pendant tout près de cinq ans et je vais vous dire que ce n'était pas usuel que le gouvernement qui nous a précédés accepte les consultations particulières. Je me souviens avoir eu de célèbres débats avec le ministre de la Santé et des Services sociaux de l'époque pour faire entendre un certain nombre de représentants des milieux de la santé. Et, avec tout ce qu'on doit reconnaître à l'ex-ministre de la Santé en termes de réforme qui a été adoptée, il avait parfois, oui, l'oreille dure, doit-on le mentionner. Il avait parfois l'oreille dure, un peu dure pour écouter un certain nombre de groupes; pas toujours, il faut être correct, il faut être clair, il faut être honnête. Il y a moult occasions où il a accepté, mais, dans d'autres occasions et dans d'autres responsabilités, c'était assez difficile.

On nous a demandé, à l'égard du projet de loi n° 135, d'entendre les représentants de l'UMQ, de l'UMRCQ, ce que nous avons fait. Les représentants ont d'abord confirmé l'entente que nous avions eue, que nous avions signée le 22 août dernier et ont témoigné, en quelque sorte, de l'effort qu'ils acceptaient de faire.

La présidente de l'UMRCQ a soulevé un point sensible, M. le Président. Quand on dit qu'on va financer à même les revenus de TGE la péréquation, il y a une petite mécanique fine dans la péréquation, c'est: on est par ailleurs dans un processus de consolidation des communautés municipales. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que deux municipalités, avec les programmes que nous avons mis au point, peuvent accepter de se fusionner. Et lorsqu'on se fusionne, pour employer un langage simple, pour la compréhension, nous avons un programme de neutralité, c'est-à-dire qu'on ne perd pas de revenus parce qu'on a changé de statut. Alors, il faut bien financer ce programme de neutralité au niveau de la péréquation. Et c'est l'enveloppe de 36 000 000 $ qui va permettre de financer cela.

Mme la présidente de l'UMRCQ a signalé que nous n'avions point discuté de cette question au lac Saint-Pierre, c'est-à-dire le fait de financer dans le programme de péréquation ce qu'on appelle l'élément de la neutralité. Ça peut paraître bien technique, mais la question s'est posée comme cela. Et j'ai affirmé et je réaffirme aujourd'hui que nous allons réaliser en 1996, lorsque nous allons adopter la loi n° 135, exactement les mêmes gestes, en termes de péréquation, pour les municipalités, les mêmes gestes que nous avons posés en 1995. Il n'y a donc rien de différent. Et, si nous n'avons pas discuté de cette question au lac Saint-Pierre, c'est que nous avons établi, tous les participants, de bonne foi, au niveau de l'accord politique que nous avons convenu, de réaliser à même les revenus de TGE ce que nous réalisions en 1995 au niveau de la péréquation.

On a eu une discussion, on a eu de nombreuses questions de l'opposition, à juste titre, pour comprendre ce qui se passait en 1995 par rapport à 1996 et nous avons convenu d'un certain nombre d'amendements au projet de loi n° 135 pour permettre de financer, en 1996, ce qui se finançait en 1996 et non plus à partir des revenus du gouvernement du Québec, mais des revenus de la taxe sur les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité.

De nombreuses autres explications techniques ont été données en commission parlementaire. La représentante de l'opposition a reconnu, je pense, que nous avions pu fournir tous les éléments de réponse. Et, même si le rapport de la commission a été adopté sur division, nous pouvons peut-être interpréter le message de la façon suivante: Si l'opposition ne se montre pas d'accord pour que nous demandions un effort de 50 000 000 $ aux municipalités dans le mouvement d'assainissement de nos finances publiques, c'est son droit, c'est sa prétention, c'est une opinion que l'opposition aura à soutenir au cours des semaines et des mois à venir. Cependant, jamais, je pense, on n'aura remis en question les réponses que nous avons données aux différentes questions qui se sont posées à l'occasion de l'étude article par article de ce projet de loi.

(17 h 10)

Alors, voilà, M. le Président, de quoi il retourne à l'égard du projet de loi n° 135. Je voudrais donc indiquer que l'adoption de ce projet de loi est assez importante, puisque nous devons obtenir l'autorisation, bien sûr, de l'Assemblée nationale, par l'adoption de cette loi, pour redistribuer aux municipalités les quelque 300 000 000 $ qui sont revenus par cette taxe sur les réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité et que nous n'avons pas pu redistribuer comme d'habitude en juin dernier. Les municipalités attendent ça pour boucler leur budget, parce que nous n'avons pu l'adopter ici, à l'Assemblée nationale. Mais, dès le moment où nous aurons adopté le projet de loi et qu'il sera sanctionné par les autorités compétentes, eh bien, M. le Président, on pourra poster les chèques, comme on dit, puisque la méthode est préparée, nos calculs ont été faits, les indications ont été données aux municipalités, et nous pourrons procéder, tel que le stipule le projet de loi, d'ailleurs, dans les 30 jours qui vont suivre l'adoption d'un tel projet de loi. Et, franchement, M. le Président, bien sûr, nous demandons un effort de 50 000 000 $ aux municipalités, mais nous sommes un peu anxieux, dois-je le dire, de leur expédier par ailleurs des chèques pour quelque 300 000 000 $ que nous avons perçus en termes de revenus, et les municipalités qui ont à boucler leur budget, à terminer leur année financière très bientôt attendent ces chèques d'une façon assez impatiente, je dois bien le dire, et avec raison, je pense.

Alors, avec le concours, avec la collaboration de l'opposition, j'espère qu'on pourra adopter ce projet de loi dans les meilleurs délais pour nous permettre de remplir nos obligations envers les municipalités et reconnaître par ailleurs l'effort que ces municipalités ont fait en termes de contribution à la réduction du déficit et à l'atteinte de l'équilibre des finances publiques du Québec.

Alors, M. le Président, voilà les principales dimensions du projet de loi n° 135, les discussions qui ont eu lieu, je dirais l'heureuse conclusion à laquelle nous en sommes arrivés par cette entente avec les unions municipales. Et, dans le mouvement d'assainissement des finances publiques, il faut donc reconnaître cette contribution assez remarquable des municipalités.

M. le Président, bien sûr, l'opposition aura à s'exprimer sur les discussions que nous avons eues sur le contenu du projet de loi, et très certainement aussi que j'entends utiliser le droit de réplique qui est généralement convenu par notre règlement pour celui qui présente le projet de loi, et suivant les indications et les remarques qui seront faites, eh bien, je pourrai répondre aux remarques et également aux interventions de l'opposition, si besoin était, parce qu'on doit reconnaître que l'opposition, en général, je pense, contribue à l'effort que nous avons initié au niveau des finances publiques du Québec. Et cet effort que nous avons demandé aux municipalités se traduit aujourd'hui à la dernière étape par l'adoption, je le souhaite vivement, de ce projet de loi, le projet de loi n° 135 visant à modifier la Loi sur la fiscalité municipale pour la répartition des taxes des réseaux de télécommunications, du gaz et de l'électricité.

Merci, M. le Président. Voilà de quoi il en retourne, et j'espère que d'ici quelques jours nous pourrons expédier aux municipalités les chèques pour quelque 300 000 000 $ parce que nous aurons adopté ce projet de loi. Merci, M. le Président.


Avis de débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Et, avant de céder la parole au prochain intervenant, je vous fais part qu'il y aura ce soir deux débats de fin de séance: M. le député de Shefford questionnera le premier ministre concernant la déréglementation favorisant la création d'emplois, et M. le député de LaFontaine questionnera le ministre du Travail concernant l'abolition des décrets du verre plat et du bois ouvré.

Alors, je vais maintenant céder la parole au prochain intervenant, M. le député de Montmagny-L'Islet.


Reprise du débat sur l'adoption du projet de loi n° 135


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je vous remercie de me reconnaître à ce moment-ci, suite à la présentation que vient de faire M. le ministre des Affaires municipales dans le cadre du projet de loi n° 135, comme dernière étape d'adoption du projet de loi modifiant la fiscalité municipale, projet de loi qui a été débattu depuis déjà plusieurs mois, dis-je, présenté, comme M. le ministre actuel l'a mentionné, par l'ancien ministre des Affaires municipales en novembre 1995, sans consultation avec les municipalités. Ce projet de loi a été présenté, c'est-à-dire l'annonce qu'il y aurait une coupure dans les versements aux municipalités a été faite à quelques semaines... ou au moment où les municipalités étaient à préparer leur budget. Je pense que c'est une chose qu'il faut se rappeler.

M. le ministre des Affaires municipales vient de nous refaire l'historique du projet de loi n° 135, ce que comporte le projet de loi n° 135. C'est tout comme si les municipalités ne perdaient pas. Oui, il a admis qu'il y avait des coupures, mais qu'elles perdaient peu de transferts parce qu'on prenait ça dans une enveloppe qui était déjà aux municipalités.

Il faut se rappeler que le projet de loi n° 135 touche deux points bien spécifiques: d'abord, le transfert de la péréquation, puis la redistribution des recettes des taxes payées au ministre du Revenu par des taxes provenant du réseau de télécommunications, ce que le ministre a aussi appelé la TGE. C'est évident qu'il y a un manque à gagner pour les municipalités, en 1996, de 47 000 000 $. Il y a une certaine inquiétude qui se développe de semaine en semaine de la part des municipalités, M. le Président – et je vais le préciser, je vais reprendre l'inquiétude de la plupart des municipalités – sur des montants qui pourraient être à nouveau dans le futur pris dans l'enveloppe globale de la TGE, c'est-à-dire la taxe sur le gaz et l'électricité.

M. le Président, comme je le mentionnais, M. le ministre nous a présenté ça comme étant une entente de gré à gré avec les municipalités, le protocole d'entente qu'il a déposé ici, à l'Assemblée nationale il y a quelques minutes, un protocole d'entente qui a été déposé aussi en commission parlementaire, où tous les parlementaires ou les membres de la commission ont pu en prendre connaissance. Évidemment, ce qu'il faut se rappeler, c'est que les municipalités ont réalisé, suite à l'annonce de l'ancien ministre des Affaires municipales, qu'il y aurait une coupure de 47 000 000 $, après l'addition du total, dans le dossier des télécommunications, c'est-à-dire qu'on irait dorénavant chercher l'argent dans des montants d'argent qui leur appartenaient pour faire les transferts de péréquation. Donc, les municipalités en étaient conscientes parce que le ministre l'avait annoncée, elles avaient l'obligation de l'avoir incluse dans la préparation de leur budget 1996, et, après discussion avec les représentants du gouvernement, le premier ministre, le ministre des Affaires municipales, évidemment, les municipalités ont reconnu que c'était inclus dans le budget de la province et qu'il n'y avait plus rien à faire.

Donc, les municipalités ont convenu de signer une entente pour protéger... Oui, elles ont signé l'accord, le protocole d'entente, je dirais, pas nécessairement avec enthousiasme, parce qu'elles ont reconnu qu'il y avait avantage à s'entendre avec le gouvernement pour protéger au moins la balance de l'enveloppe qui reste des 280 000 000 $ sur 300 000 000 $ et quelques. La balance de l'enveloppe, parce que ce montant-là... Ils se disent: Si jamais le gouvernement a pu le faire en 1995-1996, est-ce qu'il aura encore à nouveau l'idée d'aller puiser dans cette enveloppe? Donc, le protocole d'entente, comme le ministre l'a lu tantôt, dit: Les municipalités reconnaissent et prennent acte... Je pense que c'est l'expression la plus importante qu'on doit retenir. La municipalité a signé un protocole d'entente où elle prend acte que le gouvernement lui coupe 47 000 000 $. Donc, est-ce qu'on peut considérer que c'est une entente de gré à gré dans ces circonstances?

Une autre partie, je pense que c'est la première fois que... En fait, le gouvernement en a profité pour retenir 10 000 000 $ de cette même enveloppe, ce qui fait le 36 000 000 $ plus le 10 100 000 $ et quelques comme frais pour collecter la taxe sur les télécommunications et la redistribuer. Donc, le ministère du Revenu en a profité pour s'accaparer, retenir 10 000 000 $ à même cette même enveloppe. Les municipalités ont toutes les raisons de s'inquiéter pour le futur, parce que, si... Quand tu regardes la stratégie, 36 000 000 $ de moins de transferts en péréquation, c'est-à-dire qu'il est puisé dans l'enveloppe qui leur appartenait, le ministre a beau l'avoir présenté à l'envers, dire: Les municipalités vont continuer à toucher la péréquation qui leur était normalement transférée, mais oui, elle est prise à même des revenus qui étaient déjà identifiés aux municipalités.

(17 h 20)

Donc, le protocole d'entente signé à la mi-août, ce qu'il faut reconnaître, et les municipalités sont unanimes à le dire aujourd'hui, elles n'avaient pas le choix, elles se devaient de négocier avec le gouvernement pour protéger la balance de l'enveloppe. La balance de l'enveloppe, il y a toujours... Ce à quoi le ministre a fait allusion tantôt, ce qui inquiète les deux unions et surtout les municipalités à faibles revenus, les plus petites municipalités où il y a une population de, quoi, 2 000 à 3 000 et moins ou 5 000 et moins, si vous voulez... Je pense que c'est elles qui sont les plus touchées et qui sont les plus inquiètes, à savoir si, dans le support aux municipalités et les frais reliés à ce qu'on appelle la neutralité que M. le ministre a décrite tantôt, dans le futur, on ira aussi puiser.

Là, en 1996, on a un projet, un programme qui parle de fusion de 400 et quelques municipalités. Donc, si 400 et quelques municipalités peuvent équivaloir à 1 500 000 $, 2 000 000 $ de frais de neutralité, qu'est-ce que ça donnera dans le deuxième volet du programme de fusion des municipalités? Donc, si on va chercher encore un certain nombre de millions, un certain montant, c'est toujours les municipalités qui y perdront. Parce que, dans le projet de loi, ce que nous avons retenu en commission parlementaire... Parce que le ministre n'a pas voulu inscrire les montants dans le projet de loi. Il n'est aucunement question des montants. Donc, le ministre a le pouvoir d'identifier des programmes et des éléments de programme. Donc, aujourd'hui, il peut identifier des programmes, des éléments de programme. Dans le futur, le gouvernement du Québec pourra aussi le faire.

Ce qu'on doit aussi ajouter à ce moment-ci et ce qui peut inquiéter les municipalités, l'ensemble des municipalités, c'est qu'en 1995 c'est l'ancien ministre des Affaires municipales qui a annoncé la coupure de 36 000 000 $; en 1996, c'est le ministre actuel qui négocie avec les municipalités et qui fait approuver le projet de loi n° 135; et en 1997, si c'est un autre ministre, il ne sera pas nécessairement lié. Et c'est ce qui peut inquiéter les municipalités. Elles croient qu'il ne sera pas nécessairement lié aux échanges qu'il y a eu avec les deux unions et les municipalités en 1996. Et ça peut donner ouverture à des coupures additionnelles, c'est-à-dire aller chercher dans l'enveloppe de la taxe sur les télécommunications, qui est depuis des années un montant d'argent redistribué aux municipalités, pour aller payer ou conserver des programmes existants, en... Je ne dirai pas «en faisant accroire». Parce que le ministre l'a mentionné tantôt, mais il l'a mentionné de façon à prétendre que les municipalités ne perdent rien parce que la péréquation va continuer de leur être payée, mais à partir de l'argent, comme je le mentionnais tantôt, qui leur appartient.

Donc, il y a un autre point, M. le Président, qui inquiète les municipalités. On commence déjà à confirmer que, dans l'enveloppe totale que va percevoir le ministère du Revenu, il y a un manque à gagner prévisible de 15 400 000 $. Donc, s'il y a un manque à gagner prévisible de 15 400 000 $... Et le ministre, tantôt, l'a expliqué en disant: Bien, vous savez, l'enveloppe, c'est plus ou moins tel montant, parce que l'évaluation municipale, c'est fait de façon assez différente d'un endroit à l'autre, on ne peut pas dire que c'est à 100 % de la valeur réelle ou à 80 % de la valeur réelle, ça peut être des montants qui peuvent être variables. Donc, on commence déjà à vouloir expliquer le manque à gagner de 15 400 000 $ prévisible pour 1996. Est-ce qu'en 1997 on vivra le même facteur, un manque à gagner prévisible?

Ce qu'il faut ajouter, M. le Président, à ce moment-ci, c'est que les municipalités, surtout les petites municipalités, s'inquiètent parce qu'il y a un manque à gagner continuel dans leurs revenus, comme ceux de l'entreprise privée en 1996, du gouvernement du Québec et d'autres paliers de gouvernement. Et le ministre de la Sécurité publique vient de leur annoncer qu'on leur exigera une collaboration de 30 000 000 $ dans le domaine des services de la Sûreté du Québec, pour un montant total de tout près de 100 000 000 $. Donc, la moitié de la facture de la Sûreté du Québec est sous la responsabilité des municipalités. Qu'est-ce que ce sera en 1997, 1998? Donc, les municipalités sont en droit de se questionner, toujours en pensant que les petites, surtout les petites municipalités, leur situation financière ne s'améliorera pas, à cause de la responsabilité additionnelle, d'année en année, sur le plan des services qu'elles vont devoir prendre comme responsabilité de donner à leurs citoyens. Donc, tout ça, M. le Président, les projets, comme je le mentionnais tantôt, les programmes de fusion, ceux qu'on connaît pour 1996 et ceux à venir, la confiance envers les municipalités, comme je le mentionnais, si le gouvernement continue au même rythme de coupures de programmes et d'aller... c'est-à-dire non seulement coupures de programmes, mais, au lieu d'aller chercher les argents dans les fonds consolidés, comme on le mentionnait, y aller dans l'enveloppe qui leur est réservée, elles ont toutes les raisons de s'inquiéter.

Donc, je suis très fier d'apprendre, comme M. le ministre vient de le mentionner, que, dans les meilleurs délais, dans les jours qui viennent, les municipalités vont pouvoir toucher les argents qu'elles attendent déjà depuis plusieurs mois comme versements qui leur sont dus depuis bien des années, qu'elles ont l'habitude de recevoir soit à la mi-année financière du gouvernement, soit au milieu de l'été, normalement.

Donc, c'est les éléments que je voulais faire ressortir, M. le Président, et dites-vous que j'appuie et que je suis... En fait, je reconnais que les municipalités ont toutes les raisons d'être inquiètes à ce moment-ci sur les programmes futurs et les revenus futurs. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Montmagny-L'Islet. M. le député de LaFontaine, vous intervenez sur ce sujet? Alors, je vous cède la parole.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Le projet de loi n° 135, nous avons eu l'occasion de l'aborder en commission parlementaire, lorsque nous avons entendu un certain nombre de personnes. J'ai fait discussion avec les collègues, et c'est certainement un projet assez technique au départ, car, en effet, tout ce qu'il vise, selon qu'on se fie au texte, c'est une meilleure répartition, semble-t-il, des taxes perçues par le gouvernement auprès des compagnies de télécommunications, de gaz et d'électricité pour les redistribuer aux municipalités, bon, cela en vertu de la réforme de la fiscalité municipale de 1980. Sauf qu'on découvre aussi rapidement que le gouvernement, qui a coupé 35 000 000 $ d'argent qu'il envoyait aux municipalités, a décidé de le prendre à même ce montant-là en laissant croire qu'il n'y avait aucune coupure. Force est de constater que c'est le même montant qui est réparti différemment.

Ça encore, M. le Président, ça pose toujours la question: Est-ce qu'on va encore une fois pelleter dans la cour des municipalités les problèmes que nous connaissons ici, à Québec, ou est-ce que nous allons prendre comme excuse, pour couper notre déficit, que les municipalités doivent faire leur effort et, nous, nous permettre, à ce moment-là, de ne pas faire le nôtre ou de ne pas dire la vérité aux gens? Car, en effet, ce n'est pas là, certainement, une baisse de dépenses du gouvernement du Québec, c'est simplement un transfert vers les municipalités. Et elles ont lieu de ne pas être contentes. Pour les gens qui ont rencontré l'UMRCQ ou l'UMQ, force a été de constater que, même si elles avaient consenti, à la fin de tout, à signer une entente avec le ministère, ce n'était pas de gaieté de coeur. C'était même un peu à regret et à reculons, et ça, M. le Président, je pense que ce n'est pas une bonne manière. Je ne crois pas qu'un gouvernement ou qu'un ministre des Affaires municipales doive fonctionner comme cela avec les organisations dont il est responsable, et particulièrement les municipalités, ou les unions municipales régionales de comté, ou alors l'Union des municipalités du Québec.

M. le Président, une autre chose qui nous est apparue tout à fait aberrante, dirais-je, parce que... Et je vais m'expliquer, parce que, lorsqu'on regarde le projet de loi, on se rend compte qu'il est dit que le gouvernement remettra en totalité aux municipalités les sommes perçues par cette taxe auprès des compagnies de télécommunications, de gaz et d'électricité, moins 1,5 % pour la collection, et on découvre rapidement que, entre les frais de collection et les frais de distribution, le gouvernement du Québec, sur un montant de 335 000 000 $, à peu près, cette année, qui va être collecté, prend 10 000 000 $ pour faire la collection et la distribution.

(17 h 30)

Bien, là, je pense que les gens qui savent compter rapidement savent qu'il y a au Québec à peu près 1 470, 1 500 municipalités – je sais qu'il y en a qui se sont fusionnées dernièrement – et on calcule que, pour collecter auprès d'entreprises somme toute assez grosses, au Québec, là... Le gaz, l'électricité et les télécommunications, ce n'est pas un millier d'entreprises, c'est Gaz Métropolitain, c'est Hydro-Québec, c'est Bell Canada, c'est Québec-Téléphone, entre autres compagnies. Il n'y en a pas tellement d'autres que cela. Mais, pour collecter 330 000 000 $ et les redistribuer à 1 400 municipalités, ça coûte 10 000 000 $.

Alors, si vous calculez 1 470 municipalités, je pense que c'est le chiffre exact, 10 000 000 $, c'est 14 700 $ pour émettre un chèque. C'est ça que ça coûte. Alors, il y a quelque chose qui ne marche pas. Ou le gouvernement ne dit pas la vérité lorsqu'il dit qu'il remet l'ensemble des argents aux municipalités moins les frais de perception ou alors ça coûte très cher. Dans les deux cas, M. le Président, il y a problème. Parce que, si ça coûte vraiment ce prix-là pour envoyer un chèque à une municipalité, à 14 700 $, il y a certainement des efforts qui pourraient être faits par le gouvernement pour mettre de l'ordre dans cet appareil qui coûte 14 700 $ ou presque 15 000 $ pour émettre un chèque à une municipalité. Prenons l'exemple d'une petite municipalité qui aurait 1 000 habitants ou 1 500 habitants, qui reçoit peut-être un chèque de 100 000 $ et ça coûte 14 700 $ juste pour l'émettre et collecter l'argent, bien sûr.

Alors, M. le Président, on découvre là encore que le gouvernement prend une partie cachée d'argent. Les 10 000 000 $, ce n'est pas ça que ça coûte. Ils ne servent pas à collecter, à recevoir les chèques de Bell Canada, des montants de Bell Canada, d'Hydro-Québec, de Québec-Téléphone et de Gaz Métropolitain. Ce montant-là, M. le Président, c'est de l'argent qui va dans le fonds consolidé de la province et qui est pris par le ministre des Finances, par le Conseil du trésor pour payer d'autres choses, et il ne le dit pas. Alors, il devrait le dire. Il devrait clairement établir auprès des municipalités combien ça coûte pour gérer ce programme-là: 1 000 000 $, 2 000 000 $, 3 000 000 $, je ne le sais pas. Nous ne pouvons pas le savoir parce que, lorsque nous avons questionné le ministre à plusieurs reprises, M. le Président, il a été incapable de fournir une réponse claire. Lui-même l'ignorait. Lui-même ne pouvait dire combien ça a coûté, cette opération qui est de collecter une taxe qui s'appelle la TGE et de la redistribuer à 1 470 municipalités. Ça vous démontre tout le sérieux et toute l'attention avec laquelle on gère les affaires au gouvernement du Québec.

M. le Président, j'ai eu l'occasion de discuter de ça avec les représentants de l'UMQ en particulier, qui assistaient à cette commission parlementaire et qui disaient, en aparté – ils n'avaient pas la parole, ils ne pouvaient pas parler, sinon, semble-t-il, l'auraient-ils dit: Pourquoi le gouvernement ne nous laisse pas gérer ça, nous autres? En bas de 1 000 000 $, on pourrait le régler, ce dossier. On pourrait s'en occuper.

Alors, M. le Président, si certaines unions de municipalités laissent entendre que, pour des sommes beaucoup moins importantes, elles pourraient s'occuper de gérer cette TGE, la récupérer des grosses entreprises qui la paient et la redistribuer après aux municipalités, il y aurait peut-être là occasion de sauver 6 000 000 $, 7 000 000 $, 8 000 000 $ qui pourraient profiter, comme c'est inscrit dans la loi – vu qu'on dit que toutes les sommes générées par la TGE sont redistribuées aux municipalités – aux municipalités.

Et donc, M. le Président, malheureusement, on se rend compte que, encore une fois, encore une fois, on légifère à la pièce. Et je vois le ministre du Travail, qui est en face de moi, qui sourit. On est habitué, avec lui, de le voir, en effet, légiférer à la pièce lorsqu'il le fait, et ce n'est pas souvent, M. le Président. Et on camoufle 10 000 000 $, 10 000 000 $ qui sont dans des frais d'administration cachés que le gouvernement ne veut pas démontrer, et il fait croire aux citoyens, aux Québécois qu'ils servent à de l'administration. Bien, M. le Président, 14 700 $ par municipalité pour émettre un chèque, ce n'est pas ce que j'appelle de la très bonne administration. C'est ce que j'appelle de la mauvaise administration, du gaspillage, ou alors, M. le Président, du camouflage et du pelletage, du transfert de fonds dans d'autres programmes.

Aussi, j'aurais souhaité que le ministre puisse tenir compte de cela. Il avait lui-même, à la fin, fini par admettre que ça semblait très cher, que ça semblait en effet hors de contexte, mais une fois qu'il eut dit ça ou laissé entendre cela, nous voyons qu'aucun changement ne fut amené. Je pense que le président du Conseil du trésor l'en empêcherait, car il devrait trouver ailleurs, pour financer d'autres programmes, un 6 000 000 $, 7 000 000 $, 8 000 000 $, 9 000 000 $, 10 000 000 $, dépendant du coût que ça coûterait réellement pour administrer: ce n'est pas un bel exemple. On demande aux municipalités de mettre de l'ordre dans leur administration, de l'ordre dans leurs finances, de faire preuve de rigueur administrative, et, nous, comme État, on a un programme qui les concerne directement et on leur démontre que, pour leur envoyer une taxe qui est perçue pour eux, ça leur coûte 14 700 $.

Je connais beaucoup de municipalités qui sauraient quoi faire avec ce 14 700 $ là, M. le Président, beaucoup: des bibliothèques qui ne sont pas approvisionnées ou qui ne sont pas ouvertes, des patinoires qui sont fermées, des équipements récréatifs qui ne fonctionnent plus, des baisses de taxes aussi dans certaines petites municipalités. Et combien d'autres choses nos concitoyens qui nous écoutent maintenant seraient à même... Eux qui tous les jours subissent les problèmes et les affres de coupures budgétaires et de situations fiscales difficiles auraient certainement des idées pour dire au ministre des Affaires municipales: Au lieu de charger 14 700 $ par municipalité pour émettre un chèque, donne-le-nous ou donne-le à nos élus municipaux; eux autres sauront quoi faire avec.

Voilà, M. le Président, et je termine mon discours et mon intervention en disant: Je suis extrêmement déçu de voir cette manière d'administrer du gouvernement et je ne peux que la déplorer au nom de tous les gens qui actuellement subissent des compressions et ont de la difficulté dans la société. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Papineau. M. le député.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. C'est pour moi très important de prendre la parole dans le cadre du projet de loi n° 135, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la fiscalité municipale, et ça, pour deux raisons. Tout d'abord, comme citoyen du Québec, je suis très concerné par les nouvelles dispositions mises de l'avant par le gouvernement et également mais surtout à titre de représentant de mes concitoyens et concitoyennes qui, tout comme moi, sont grandement touchés.

Le projet de loi n° 135 est une mesure gouvernementale qui vise à piger dans une enveloppe d'argent appartenant aux municipalités une somme de 50 000 000 $. En conséquence, les municipalités auront à assumer cette ponction, et l'on peut raisonnablement craindre qu'elles auront à augmenter la charge fiscale de leurs concitoyens et concitoyennes. Pour bien saisir toute la portée de ce nouveau projet de loi, il est important de rappeler que celui-ci vise à modifier les deux sources suivantes de transfert des sommes aux municipalités, soit le régime de la péréquation et la redistribution des recettes de la taxe payée au ministre du Revenu par les exploitants de réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité que l'on désigne par TGE.

Dès leur présentation, les modifications proposées par le ministre des Affaires municipales ont vite suscité des commentaires acerbes de la part de l'UMQ et de l'UMRCQ. Au début du mois de mai, Mme Jacinthe Simard, la présidente de l'UMRCQ, affirmait sans détour qu'avec le projet de loi n° 135, et je la cite, «Québec se donne le droit de voler les municipalités». Et je vous réfère au Soleil du 15 mai 1996, la copie de l'article que j'ai avec moi. Rien de plus, rien de moins. En fait, cette pièce législative prévoit qu'une partie des recettes provenant de la taxe payée par les exploitants de ces réseaux pourra désormais servir au financement de certains programmes d'assistance financière destinés à des municipalités.

On se rappellera que ce régime fiscal particulier avait été instauré afin de faciliter la taxation municipale des immeubles faisant partie des réseaux de distribution de télécommunications, de gaz et d'électricité. Il s'agissait d'une certaine forme de compensation pour services rendus à l'immeuble privé et non d'une compensation gouvernementale telle que les «en lieu» de taxes. Or, avec le projet de loi n° 135, le gouvernement se donne le droit de dépouiller les municipalités d'une partie de leurs revenus provenant de la taxe foncière payée par les exploitants des réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité.

(17 h 40)

Le ministre des Affaires municipales vous indiquera sûrement qu'il a obtenu l'entente des unions municipales pour ce faire. Il ajoutera sûrement la notion de partenariat, en vous citant un paragraphe de cette entente qui se lit comme suit, M. le Président: «Attendu que les municipalités acceptent de contribuer concrètement au processus d'assainissement des finances gouvernementales, tel qu'elles s'y sont engagées lors de la conférence de Québec des 18, 19 et 20 mars 1996.» Je voudrais, M. le Président, apporter certains commentaires à ce partenariat. D'abord, des partenaires, ce sont des personnes avec qui on est allié. J'ai l'assurance que l'on ne peut pas conserver ses partenaires lorsqu'on ne les informe pas d'une mesure aussi importante que celle qui est contenue au projet de loi n° 135, soit l'appropriation d'une somme de 50 000 000 $ qui appartient à notre partenaire municipal.

Je tiens à ajouter, M. le Président, certaines observations à la suite de l'audition des représentants des unions au début de nos travaux en commission parlementaire. Mme Boucher, la mairesse de Sainte-Foy, qui est vice-présidente de l'Union des municipalités du Québec, nous indiquait, et je cite: «Le monde municipal s'est engagé à aider le gouvernement du Québec dans sa lutte pour l'assainissement de ses finances dans la mesure où il sera considéré à titre de partenaire et non pas à titre de rival ou d'ennemi à abattre. C'est avec cette espérance d'être respectée, avec cet espoir de participer à un véritable dialogue que l'UMQ a accepté de signer une entente sur le projet de loi n° 135.»

M. le Président, ces propos cités vous démontrent la divergence qui existe dans la notion de partenariat si chère au ministre des Affaires municipales. Mais il y a plus. Ma collègue la députée de Jean-Talon, critique de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales, questionna Mme la mairesse de Sainte-Foy sur cette entente de partenariat permettant la ponction d'un montant de 50 000 000 $ réparti sur trois programmes spécifiques, soit le programme de péréquation, l'aide aux villes-centres et enfin l'aide financière aux MRC. La députée de Jean-Talon lui demandait si, dans les discussions qui ont mené à l'entente de partenariat du 22 août 1996, il avait été question d'inscrire les montants relatifs de chacun de ces trois programmes. La réponse de la mairesse de Sainte-Foy représentant l'Union des municipalités du Québec était la suivante, et je la cite: «Pour avoir assisté, Mme Delisle, au lac-à-l'épaule qui était au lac Saint-Pierre et avoir entendu les propos du ministre, il est certain que ce serait trahir évidemment la confiance que les maires ont faite au ministre si on n'inscrivait pas vraiment de façon formelle ces trois chiffres importants.»

Je voudrais vous indiquer, M. le Président, que les montants alloués aux trois programmes ne sont pas inscrits dans le projet de loi n° 135. Pourtant, ce n'est pas parce que l'opposition officielle ne l'a pas demandé au ministre, et ce n'est sûrement pas parce que les unions municipales ne l'auraient pas souhaité. Les partenaires municipaux devront donc faire confiance au ministre. Que doit-on retenir de ces propos relativement à ce partenariat du ministre des Affaires municipales? Eh bien, pour l'UMQ, on espère être vraiment considéré comme partenaire, être respecté et pouvoir participer à un véritable dialogue.

M. le Président, nous avons eu l'occasion d'entendre la présidente de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, Mme Jacinthe Simard, relativement à cette entente de partenariat signée le 22 août dernier. Ses propos sont fort intéressants, et vous me permettrez de la citer, M. le Président: «Alors, nous sommes arrivés à un consensus au lac-à-l'épaule concernant la TGE, et ça a été une entente qui a été très simple et très claire. Alors, le consensus qui s'est dégagé au lac-à-l'épaule du lac Saint-Pierre au mois de mai 1996 a débouché sur une entente le 22 août de cette année. Alors, je vous le précisais – M. le Président, je m'excuse, c'est toujours Mme Simard que je cite – que nous avions une entente qui a été très simple et très claire, et cette entente est très simple aussi par l'application.»

Alors, je vais vous citer ce qu'elle contient, M. le Président; «On parle d'abord des programmes à être financés par la TGE. Premièrement, les villes-centres, 11 000 000 $, 36 000 000 $ en péréquation et l'aide aux MRC, 3 000 000 $. Toute autre ponction supplémentaire dans la TGE doit être approuvée par les unions municipales. On ne peut être plus simple. Eh bien, pour respecter cette entente qui a été prise, le projet de loi doit geler les montants pris dans la TGE et ne prévoir que trois programmes. Selon les informations que nous avons obtenues, le projet de loi ne respecte pas cette entente à 100 %. Le gouvernement, premièrement, peut modifier sans l'accord des unions les montants affectés à ces programmes. Deuxièmement, le ministre a ajouté un programme à ceux prévus dans l'entente, soit celui de la neutralité pour les fusions municipales.»

Alors, M. le Président, vous me faites signe que c'est donc la fin. Et c'était la fin aussi d'une longue citation des propos de la présidente de l'UMRCQ. Elle nous indique que cette entente du 22 août est simple, mais que les amendements déposés par le ministre des Affaires municipales ne représentent pas fidèlement cette entente. Alors, M. le Président, voilà encore une autre preuve du double langage de ce gouvernement. Pas de hausse de taxes ni d'impôts, nous avait dit M. le premier ministre. De belles paroles, mais, dans les faits, c'est tout le contraire.

En effet, les modifications proposées par le ministre des Affaires municipales créent un manque à gagner de plus de 50 000 000 $ dans les coffres des municipalités. Qui donc paiera ce manque à gagner via la taxe des télécommunications, de gaz et d'électricité? Poser la question, M. le Président, c'est y répondre.

Je termine. Une fois de plus, je déplore le double langage du gouvernement péquiste et ses différentes actions qui font porter tout le fardeau sur le dos des contribuables québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Papineau. Y a-t-il d'autres intervenants? Je repose la question. Y a-t-il d'autres intervenants? Oui, ah bon! Très bien, alors, M. le député d'Orford, je vous cède la parole.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 135. Ce projet de loi modifie la Loi sur la fiscalité municipale pour remanier deux mesures de transfert de sommes aux municipalités par le gouvernement, à savoir la péréquation et la redistribution des recettes de la taxe payée au ministre du Revenu par les exploitants de réseaux de télécommunication, de gaz et d'électricité.

Alors, M. le Président, bien sûr que le ministre est allé consulter les gens du municipal. Et il y avait eu une entente. Les gens avaient dit: On va faire notre part, nous. Tout le monde, je pense, dans la société, finalement, est prêt à faire sa part.

Mais là ce qu'on apprend, au fur et à mesure que ça se développe, ce projet de loi n° 135, au fur et à mesure qu'on parle avec les gens des unions, au fur et à mesure qu'on rencontre les maires, autant des villes-centres que des villes en périphérie, on s'aperçoit qu'il y aura un manque à gagner pour les municipalités de l'ordre de 50 000 000 $. C'est énormément d'argent. Et là les municipalités nous disent: Écoutez, cette entente-là, ce n'est pas pantoute ce qu'on voulait qu'elle soit. Il y a eu plein de changements dans cette entente-là, et l'esprit de l'entente n'est plus du tout le même.

Les modifications, d'ailleurs, qui sont proposées par ce projet de loi sont injustifiables et immorales. Elles permettent au gouvernement de contrôler l'objectif du système d'imposition des exploitants des réseaux, qui est avant tout de compenser les municipalités pour les services qu'elles offrent à ceux-ci. Le gouvernement se permet de prélever à même l'argent des municipalités des sommes d'argent pour financer les programmes qu'il élabore.

Vous savez, M. le Président, on ne peut pas oublier ce que le ministre maintenant au développement régional, le distingué député de Joliette, disait trop souvent lors de la dernière élection: On va transférer des responsabilités, mais on tranférera aussi les sommes d'argent qui vont venir avec ces responsabilités-là. Eh bien, dans la vraie vie, je pense qu'il n'y a plus un maire ou une mairesse au Québec qui croit vraiment que ce gouvernement-là a tenu sa parole, comme dans bien d'autres sujets d'ailleurs, sur son programme électoral ou ses engagements électoraux.

Au niveau municipal, bien, c'est pire que pire, je pense. L'été passé ou il y a un an, le ministre de l'Environnement nous disait: Bon, bien, là, la politique sur les neiges usées, maintenant, dans les municipalités, ça va prendre force. Alors, tout le monde était heureux, hein, le mouvement de l'environnement disait: Enfin une mesure qui va aider les municipalités récalcitrantes à se mettre au pas! Et là il s'est pété les bretelles, il s'est pété les bretelles dans tous les journaux du Québec, il mettait le monde au pas: L'environnement, c'est important. Cette semaine, un entrefilet dans le journal où on apprend que les municipalités récalcitrantes pourront encore déposer leur neige dans les rivières et dans les lacs. C'est ce double discours: Oui, on va vous donner des responsabilités; l'argent va suivre. Là, on s'aperçoit qu'il va manquer 50 000 000 $ dans ce projet de loi là aux municipalités. Les neiges usées, j'aurai l'occasion d'y revenir un peu plus tard ce soir pour expliquer la cacophonie la plus totale qu'il y a dans cette histoire-là.

(17 h 50)

Les corps de police, ah bien, là, c'est plus qu'une cacophonie, M. le Président. Chez nous, dans mon comté, on avait même accepté que quatre municipalités, et non les moindres, se regroupent. Il y avait une économie, il y avait une efficacité, et on avait dit à ces corps de police là: Oui, regroupez-vous, allez acheter des voitures, engagez du personnel. Alors, il y a des gens de la ville de Québec qui ont démissionné, qui ont été engagés par ce regroupement de corps de police où il y avait déjà, d'ailleurs, deux municipalités. Les choses étaient en marche, ça allait bien, et là tout le monde était prêt à procéder.

Qu'est-ce que vous pensez qui est arrivé? Le ministre s'est levé, notre distingué ministre de la Sécurité publique a tout arrêté ça: des enquêtes, des ci, des ça. Alors, là, on s'est ramassé avec des policiers qui avaient démissionné – ils ont été obligés de se faire réengager ici, dans la ville de Québec – des voitures dont on n'avaient pas besoin et puis des maires qui ne sont pas très de bonne humeur, je vais vous le dire tout de suite. C'est ça, la cacophonie péquiste dans la gestion des municipalités. Ça, c'est les corps de police.

Les neiges usées, je viens de vous en parler. Tout le débat des villes-centres, ah bien, là, chez nous, c'est pire que ça, M. le Président. Là, on a dit aux municipalités: Regroupez-vous. Alors, dans un coin de pays, il y a trois municipalités: Rock Island, Beebe, Stanstead. Elles ont fait une fusion. Ça n'a pas été évident, il y avait des gens qui étaient contre, des gens qui étaient pour. Finalement, la fusion s'est faite, le monde a travaillé fort, et puis là ce dont on s'aperçoit, c'est que les villes environnantes sont après, dans un cas, en tout cas, dans une autre fusion... Là, on va prendre 50 % d'une de ces villes qui se sont fusionnées, puis on voudrait la renvoyer avec une autre ville. Là, les citoyens ne savent plus, d'abord, dans quelle ville ils sont, ils ne savent plus ce qui se passe, et ils se demandent: Où est-ce qu'on s'en va avec ça? Moi qui suis leur représentant, j'ai écrit au ministre et j'ai dit: Écoutez, on n'est pas pour fusionner des villes pour en défusionner 50 % par la suite, ça ne se tient pas debout.

Alors, c'est une cacophonie totale et complète de ce qui se passe dans les milieux municipaux, et il n'y a pas de directives, que ce soit au niveau de la police, que ce soit au niveau des neiges usées, que ce soit au niveau du débat des villes-centres. Les villes ne savent plus quoi faire, hein. Est-ce que l'aréna doit être payée par les villes alentour ou par la ville-centre? Alors, là aussi, c'est une cacophonie des plus complètes. C'est la confusion. Il n'y a personne qui s'y comprend. Le ministre municipal, une journée il dit une affaire, le lendemain il dit l'autre.

Et les villes-centres sont en difficulté. Montréal, on leur a promis des choses extraordinaires, il n'y a rien de ça qui est livré. La ville de Sherbrooke est en difficulté. Je vois le distingué député de ville de Laval qui vient d'arriver. La ville de Laval, le maire était ici hier, ils sont en difficulté. La ville-centre de Trois-Rivières... toutes les villes-centres au Québec sont en difficulté. Elles disent: Réglez le débat des villes-centres, faites quelque chose avec ça. Regroupez les banlieusards, aidez-nous. Bien non, on fait des discours. On a promis des choses extraordinaires.

Rappelez-vous cette magnifique conférence de presse au moment de l'élection, hein. M. Parizeau avec le maire de Montréal, avec les drapeaux du Québec à l'arrière qui volaient à tous vents, où on promettait à la ville de Montréal des sommes d'argent extraordinaires. C'était de toute beauté à la télévision; c'était comme un roman d'amour, soudainement, entre la province et la municipalité de la ville de Montréal. Je vous garantis que, si aujourd'hui ils devaient refaire cette conférence de presse là... D'abord, ils ne la referont pas, hein. Ils auraient peur de refaire cette conférence de presse là. Aucun des engagements qu'ils avaient pris à ce moment-là, avec le drapeau du Québec derrière eux, le premier ministre... le futur premier ministre sur un bord et l'ancien maire de Montréal, aucun de ces engagements-là n'a été tenu, M. le Président. Alors, c'est le double discours. C'est le double discours. Les unions ne sont plus d'accord avec ce qui se passe au Québec, on les entend sur toutes les tribunes.

Le débat sur la production porcine, c'est le plus bel exemple, ça, M. le Président, où là on a pris un problème puis on a dit aux municipalités: Nous autres, on ne veut plus s'en occuper. Vous allez gérer ça, vous autres, les odeurs, les distances. Nommez-moi un seul maire au Québec, un seul maire qui a appelé le ministre de l'Environnement pour lui dire: Nous, maires de petites municipalités ou de grandes municipalités, on est tout à fait d'accord pour gérer le débat sur le porc, au Québec. On se déleste d'une responsabilité qu'on n'est pas capable de gérer aux dépens des petites municipalités. La chicane est poignée à la grandeur du Québec.

Pour ceux qui ont lu La Presse de ce matin, non seulement la chicane est prise entre les municipalités, mais entre les familles. Dans La Presse d'aujourd'hui, on s'aperçoit que dans une même municipalité deux frères s'affrontent dans un débat: un comme maire et l'autre comme producteur. C'est ça qu'on vit à la grandeur du Québec parce que le ministre des Affaires municipales ne veut pas prendre ses responsabilités.

Dans les neiges usées, c'est rien qu'un peu pire, M. le Président. Alors que le ministre de l'Environnement leur disait il y a un an: On met le bâillon, et les neiges usées, vous allez maintenant les nettoyer, eh bien, on apprend, dans un entrefilet de La Presse , en fin de semaine, que, là, les neiges usées, au Québec, on peut continuer à polluer les rivières et les fleuves du Québec. Et, soudainement, à l'intérieur de quelques mois, les neiges usées semblent être moins polluantes.

C'est ça, la cacophonie. Les maires ne savent plus comment s'y retrouver. Et, si les maires et les échevins ne savent pas comment s'y retrouver dans tout ce délestage sans argent, contrairement à ce qu'avait dit le ministre du Développement des Régions, comment voulez-vous que les citoyens se retrouvent là-dedans? Comment voulez-vous qu'ils se retrouvent là-dedans? Et, pire que ça, quand on parle à nos maires, là, ils sont après nous demander des questions: Pensez-vous que le transport scolaire, ça s'en vient vers chez nous? C'est ça qu'on entend. Pensez-vous qu'ils sont après fermer la commission scolaire puis qu'on va s'occuper des écoles? C'est ça, les questions que les maires se posent. C'est ça, le délestage qu'on est après faire sans responsabilité financière.

Alors, vous comprendrez que le projet de loi n° 135... On a assisté à la commission parlementaire, et les unions ne sont pas tout à fait d'accord avec ça. Il va manquer, aux municipalités, 50 000 000 $ en bout de ligne, et puis le Parti libéral du Québec, bien sûr, va continuer à questionner ce manque de 50 000 000 $ vers nos municipalités du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est-elle adoptée? Adopté. Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 57)

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 22 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 8


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 22, M. le ministre délégué au Revenu propose l'adoption du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions? M. le ministre.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Merci, M. le Président. Alors, je soumets effectivement à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 8, intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives, en vue de son adoption.

Le projet de loi n° 8 a été présenté le 14 mai 1996 et son principe a été adopté le 3 juin. La commission permanente du budget et de l'administration en a fait l'étude détaillée le 5 septembre dernier et a adopté les 288 articles, avec certains articles amendés. Il s'agit des articles 6, 15, 76, 121, 140, 142, 150, 256, 273 et 276. Le rapport a été déposé le 16 octobre 1996 et a été pris en considération.

Ce projet de loi, à l'instar de la plupart des projets de loi à caractère fiscal qui ont été présentés devant cette Assemblée au cours des dernières années, est d'une portée, disons, plutôt pratique et modifie 10 lois, dont la Loi sur les impôts, principalement pour rendre la législation fiscale du Québec harmonisée à celle du Canada. À cet effet, le projet de loi n° 8 donne suite à des mesures prévues dans le discours sur le budget du ministre des Finances du 12 mai 1994, dans sa déclaration ministérielle du 21 décembre suivant et dans des bulletins d'information émis par le ministère des Finances respectivement le 31 mars 1994 et le 5 juillet suivant. Par souci de concision, M. le Président, je traiterai seulement de certains aspects du projet de loi, ceux, bien sûr, que je juge les plus pertinents.

Ce projet de loi modifie, en premier lieu, la Loi favorisant l'augmentation du capital des petites et des moyennes entreprises afin d'y introduire une modification portant sur la date la plus tardive à laquelle la Société de développement industriel du Québec doit délivrer le visa relatif à un placement ouvrant droit au crédit d'impôt remboursable visant à favoriser l'augmentation du capital de telles entreprises.

Ce projet de loi modifie, en second lieu, la Loi concernant les droits sur les mines afin de tenir compte principalement, dans le calcul du profit ou de la perte d'un exploitant minier, des cotisations que celui-ci verse à une fiducie de restauration minière et des retraits qu'il effectue par la suite auprès de celle-ci.

Il modifie aussi la Loi sur les impôts en y apportant des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada par divers projets de loi fédéraux, notre objectif étant, entre autres choses, de simplifier la vie du contribuable d'ici, à ce qu'il n'y ait plus au Québec qu'une seule autorité fiscale chargée de ramasser les taxes et les impôts.

Maintenant, M. le Président, j'aborderai par sujets quelques-unes des règles modifiées ou introduites par le projet de loi n° 8 et qui concernent la Loi sur les impôts. Le premier sujet concerne l'élimination de l'exemption de base de 100 000 $ à l'égard des gains en capital réalisés à la suite de l'aliénation d'un bien après le 22 février 1994 et l'instauration d'un mécanisme de comptabilisation des gains accumulés à cette date. Toutefois, cette mesure ne modifie aucunement les règles se rapportant à l'exemption de 500 000 $ relative aux gains en capital réalisés à l'égard d'actions admissibles d'une corporation qui exploite une petite entreprise ou de biens agricoles admissibles.

(20 h 10)

Le second sujet porte sur le traitement fiscal applicable lors d'une remise de dette ou lors du délaissement d'un bien par un débiteur en faveur de son créancier. Ainsi, ce projet de loi propose des modifications relativement aux règles qui s'appliquent lorsqu'une dette d'un débiteur est soit éteinte, soit réglée pour un montant inférieur au principal de la dette et au montant pour lequel la dette a été contractée. Les nouvelles règles font en sorte que le gain économique résultant de la remise de dette ne soit pas immédiatement imposable pour le débiteur. Ce gain est plutôt appliqué en réduction du montant des pertes déductibles reportées des années d'imposition antérieures, du coût en capital du bien du débiteur et du prix de base rajusté de tout autre bien en immobilisation du débiteur.

Par ailleurs, M. le Président, des modifications sont proposées relativement aux conséquences fiscales qui résultent de l'acquisition par un créancier d'un bien détenu par son débiteur lorsque ce dernier omet de payer un montant au créancier. Cette série de mesures est élaborée afin d'accorder un traitement fiscal plus approprié à certains contribuables qui se trouvent dans une situation financière difficile.

Le troisième sujet porte sur l'introduction de nouvelles règles qui visent à clarifier le traitement fiscal applicable à l'égard des revenus provenant de titres de placements détenus par des institutions financières, notamment les banques, les assureurs et les courtiers en valeurs mobilières, dans le cours normal de leur entreprise. Il en est de même à l'égard des gains réalisés ou des pertes subies lors de l'aliénation de tels titres, de sorte qu'un montant approprié aux titres de tels revenus, gains ou pertes, soit dûment constaté pour chaque année d'imposition d'une telle institution financière.

Le quatrième sujet vise la déductibilité des cotisations versées par les entreprises minières à des fiducies de restauration minière et l'imposition des revenus et des retraits effectués auprès de ces fiducies. Les modifications apportées à cet effet sont corollaires à celles apportées par ce projet à la Loi concernant les droits sur les mines.

Le cinquième sujet a trait à l'introduction de règles concernant le traitement fiscal applicable aux arrangements funéraires. Ainsi, les modifications proposées font en sorte que, depuis le 1er janvier 1993, un régime fiscal soit instauré à l'égard de tels arrangements.

Enfin, le sixième sujet concerne une mesure qui plaira aux acheteurs d'une première habitation résidentielle, soit l'extension des règles qui permettent à ces acheteurs de retirer des montants de leur REER après le 1er mars 1994, dans le cadre du Régime d'accession à la propriété.

Enfin, d'autres modifications, y compris des modifications de concordance et de terminologie, sont également apportées à la Loi sur les impôts de même qu'aux autres lois touchées par ce projet de loi.

Je tiens, M. le Président, à remercier mes collègues du gouvernement de même que les députés de l'opposition membres de la commission permanente du budget et de l'administration pour leur collaboration lors de l'étude du projet de loi. Leur support et leur présence ont certes été appréciés.

J'aimerais également revenir sur certaines affirmations de mon collègue le député de Nelligan et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu à l'étape précédente du cheminement de ce projet de loi. M. le député de Nelligan mentionnait, à ce moment-là, qu'il était regrettable que le ministère du Revenu s'en tienne à des projets de loi à caractère plutôt technique, dépouillés, à toutes fins pratiques, de questions de fond, de ces questions qui sont le pain et le beurre quotidiens d'une telle Assemblée. Il disait même qu'il serait souhaitable que le ministre délégué au Revenu puisse s'impliquer davantage dans des questions davantage de fond, pertinentes au domaine, par exemple de la fiscalité, du revenu, enfin, toutes ces questions qui sont des matières importantes au sein de cette société.

À ceci, je mentionnerais deux choses à l'adresse de mon collègue. Premièrement, des questions de fond sont effectivement abordées en relation avec les dispositions fiscales que l'on retrouve dans de tels projets de loi, mais ces questions sont abordées en amont de la présentation d'un tel projet de loi. C'est le cas, par exemple, de la très importante question des pensions alimentaires, du régime des pensions alimentaires. De la même façon, au niveau du projet, qui est devenu réalité maintenant, de l'assurance-médicaments, certaines dispositions prévues à la loi qui a été adoptée ont une conséquence pour le ministère du Revenu, qui doit effectivement assumer son rôle dans ce contexte. Et on pourrait donner d'autres exemples, par exemple, qui peuvent tenir à des éléments de politique fiscale ou des questions de fond qui sont véritablement abordées à ce moment-là.

De tels projets de loi, comme le projet de loi n° 8, viennent, à toutes fins pratiques, donner, mon Dieu, la consécration légale à un certain nombre d'intentions qui ont pu être déclarées, par exemple, avancées lors du discours du budget ou contenues dans d'autres projets de loi adoptés. Ça ne veut pas dire que nous ne nous intéressons pas à des questions de fond. Oui, ces questions de fond là ont été abordées et débattues à un autre moment. Et, bien sûr, comme ministre délégué au Revenu, j'aurais eu l'occasion, soit au niveau de comités ministériels, soit au niveau du Conseil du trésor ou du Conseil des ministres, d'intervenir sur le fond des choses. J'aurais eu l'occasion aussi d'intervenir en Chambre à différentes étapes de projets de loi qui intéressent de près ou de loin le ministère du Revenu et le cadre fiscal, si vous voulez.

Alors, ce que je veux dire simplement, c'est: Ce n'est pas parce qu'on présente un projet de loi qui est la conséquence de décisions prises antérieurement et de débats que nous avons tenus que votre humble serviteur ne s'intéresse pas au fond des choses et n'intervient pas en temps et lieu pour influencer les décisions, autant au niveau gouvernemental qu'au niveau de la présente Assemblée.

D'autre part, il est important de souligner que le ministère du Revenu a une responsabilité fondamentale, c'est de traduire, dans des textes souvent effectivement assez techniques et parfois un peu mécaniques, l'intention du législateur ou du ministre des Finances dans son discours du budget, et de le traduire de la façon la plus correcte et la plus appropriée possible, ce qui est, en soi, une très noble tâche, parce qu'on a intérêt à ne pas faire d'erreur là-dedans non plus. Imaginez-vous, M. le Président, s'il arrivait qu'une disposition adoptée, faisant suite ou faisant écho à un élément du discours du budget précédent, puisse être mal rendue ou mal interprétée dans la Loi sur le ministère du Revenu. C'est donc une responsabilité importante, fondamentale que de s'assurer que, dans ces projets de loi, les idées à l'origine qui ont été adoptées ou défendues soient bien rendues dans de telles pièces. Et, à ce moment-là, c'est là qu'on saisit toute l'importance du travail que nous faisons ensemble, d'ailleurs, via, par exemple, les travaux de la commission du budget et de l'administration à l'étape de l'étude détaillée du projet de loi, l'importance, donc, de cet exercice auquel nous souscrivons.

Enfin, j'espère, M. le Président, que M. le député et porte-parole de l'opposition officielle en ces matières demeure toujours intéressé par ces questions. Je n'en doute pas. J'espère qu'il continuera de souhaiter auprès de son chef qu'il puisse conserver les responsabilités qu'il a dans le moment. Je pense que sa contribution est très certainement appréciée de notre part. Et, s'il arrivait qu'il veuille changer de dossier parce qu'il trouve que les dossiers ne sont pas assez de fond, je peux peut-être l'aider effectivement dans ses représentations pour satisfaire ses besoins. Mais enfin, je pense qu'il a tout intérêt à continuer à travailler ardemment à améliorer de telles pièces. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre délégué au Revenu et député de Portneuf. Je cède maintenant la parole au député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Juste avant de commencer mes commentaires sur la dernière étape parlementaire du projet de loi n° 8, je voudrais juste souligner à mon ami le député de Portneuf, le ministre délégué au Revenu, que ce n'est pas moi qui ai changé mes responsabilités ici, dans cette Chambre. Il me semble qu'on doit certainement prendre les commentaires tels que nous avons offert les commentaires, et peut-être qu'à la fin de mon petit discours je vais expliquer encore une fois ce que j'ai voulu passer comme conseil amical, comme je l'ai passé la dernière fois.

M. le Président, effectivement, nous sommes rendus à la dernière étape du projet de loi n° 8, juste avant que ça soit sanctionné. L'opposition officielle a travaillé avec fierté sur chaque article de la loi. Nous avons questionné plusieurs articles de la loi. Nous avons supporté les amendements qui étaient proposés par le ministre parce que nous avons pensé, après une longue discussion, que quelques articles, effectivement, sont améliorés, les articles de ce projet de loi étaient améliorés avec ces amendements.

(20 h 20)

Je ne répète pas, M. le Président, les huit grands sujets de ce projet de loi, tel que le ministre les a déjà mentionnés. Il y a effectivement 10 lois touchées par ce projet de loi. Nous sommes en train d'harmoniser les affaires avec le fédéral. Et le ministre délégué sait exactement qu'est-ce que je pense de ça. Et je trouve que c'est une excellente affaire. Nous sommes en train de mettre en vigueur quelques gestes légaux que le ministre des Finances, en 1994, a annoncés dans son budget. Avec ça, je suis certainement pour ces mesures.

C'est une loi technique, M. le Président. Et quand j'ai passé mes commentaires au ministre délégué du Revenu, j'ai passé ça parce que, souvent, quand j'ai questionné le ministre délégué pendant la commission parlementaire, j'ai reçu une réponse: Parce que c'était déjà décidé, parce qu'un autre projet de loi nous oblige à faire ça, parce qu'Ottawa fait ça, parce qu'un autre ministre dit qu'on doit faire ça. Il me semble que, si on doit jouer notre rôle parlementaire, on doit comprendre les raisons en arrière des projets de loi, on doit comprendre pourquoi nous avons x articles ou un autre article, pourquoi nous avons prolongé un programme ou nous n'avons pas prolongé un programme. Il me semble que c'est ça que j'ai voulu dire pendant la commission parlementaire.

Et peut-être que ça va prendre un courage exceptionnel à l'autre côté, que, pendant l'étude d'un projet de loi, on trouve des choses qui ne sont pas à 100 % correctes, que le principe de loi n'est pas à 100 % bien ciblé. Si, avec toute bonne foi, nous avons mal fait un article de loi, il me semble que ça va être le temps, M. le Président, d'avoir le courage de dire qu'effectivement on doit changer ce projet de loi. Il me semble que c'est inacceptable d'avoir les parlementaires des deux côtés, de prendre le temps d'étudier article par article et d'avoir une réponse: Bon, c'est technique, je suis juste un technicien, il faut que je mette ça en vigueur.

Avec ça, c'est mon conseil amical à mon ami, l'autre soirée et encore ce soir. J'espère qu'il peut profiter de ces échanges avec les autres ministères et peut-être expliquer un peu plus, un peu mieux qu'est-ce qui se passe dans un projet de loi. Parce que nous avons insisté plusieurs fois pour avoir une réponse plus claire. Souvent, c'étaient les représentants du ministère qui répondaient à nos questions et, basés sur leurs réponses, nous avons supporté plusieurs articles de loi... et les articles de loi qui touchent, comme le ministre délégué l'a déjà mentionné, les exemptions de gain en capital, les mines, les arrangements de services funéraires, les programmes de subvention pour la première maison, etc., et plusieurs autres articles de loi. Il me semble qu'on doit être certain à 100 %, M. le Président, qu'on sait et qu'on connaît la logique en arrière de ce projet de loi. C'est pourquoi j'ai le goût, bientôt j'espère, avec ce ministre délégué, de discuter avec lui comme représentant de son gouvernement en cette matière.

C'est quoi, la vision, s'il y a une vision, de ce gouvernement dans les choses fiscales? Qu'est-ce qu'il veut faire vraiment dans la lutte contre le marché noir? Est-ce que la seule façon dont il pense qu'il peut approcher cette question, c'est d'engager 1 000 enquêteurs? Ou est-ce qu'il y a d'autres choses? Et est-ce qu'il y a d'autres choses que ce gouvernement peut faire pour s'assurer qu'on peut relancer l'économie québécoise, qu'on peut réduire le fardeau fiscal des particuliers? Là, je souhaite avoir cette discussion à la commission du budget et de l'administration avec le ministre délégué, mais, jusqu'à maintenant, et ce n'est pas la première loi technique que nous avons devant nous... Mon conseil aujourd'hui, ce soir, M. le Président, c'est que j'espère que bientôt on pourra avoir cette discussion de fond, de vision, et j'espère qu'on pourra aider ce gouvernement, enfin, à avoir une vision fiscale. On doit savoir les conséquences de chaque article de loi, et, avec plusieurs de mes questions, c'était clair que le ministre n'était pas à 100 % au courant des conséquences de chaque article de loi. J'insiste pour avoir les réponses à ces questions.

Finalement, M. le Président – et ce n'est pas un reproche personnel que je fais ce soir, mais – quand nous avons un projet de loi qui change 10 autres lois québécoises, il me semble que nous avons besoin d'avoir une stratégie de marketing, d'éducation plus efficace pour s'assurer que, une fois qu'on adoptera ce soir le projet de loi n° 8, qui a comme titre Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives, la population pourra comprendre ce que ça veut dire, quels projets de loi ça touche et quels changements c'est en train de mettre dans nos lois québécoises. Avec ça, c'est plus un commentaire d'éducation, de s'assurer que, une fois qu'une loi aussi technique que ça est ratifiée, la population québécoise peut savoir c'est quoi, dans les 200 et quelques articles de ce projet de loi.

Finalement, je voudrais remercier tous mes collègues. Je pense que nous avons fait un travail en commission... Je pense qu'à la fin de l'exercice nous avons ensemble amélioré le projet de loi. À chaque étape du projet de loi, nous avons voté avec le gouvernement et, encore une fois, à cette étape, nous allons voter avec le gouvernement sur ce projet de loi. Merci beaucoup, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan et critique officiel de l'opposition en matière de revenu. Alors, comme il n'y a plus d'intervenant sur l'adoption, le projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe?

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 23 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 9


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): L'article 23: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune propose l'adoption du projet de loi n° 9, Loi abrogeant la Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement et modifiant la Loi sur les réserves écologiques. Y a-t-il des interventions? M. le ministre.


M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. Effectivement, c'est un plaisir d'amener une loi à son cheminement ultime, à son aboutissement ultime, et, ce soir, j'ai donc le plaisir de soumettre pour adoption à cette Assemblée le projet de loi n° 9, qui est intitulé Loi abrogeant la Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement et modifiant la Loi sur les réserves écologiques.

D'abord, quelques étapes de cette vie démocratique, de ce processus démocratique qui nous permettent finalement, ce soir, je l'espère, d'adopter ce projet de loi. D'abord, ce projet de loi n° 9, vous vous en souviendrez, M. le Président, a été déposé en cette Chambre le 1er mai de cette année, et le principe en a, encore une fois, été adopté en cette Chambre le 5 juin 1996, encore une fois suite à un débat passionnant qui impliquait, naturellement, le critique officiel de l'opposition en matière d'environnement, le député d'Orford, et votre humble serviteur, le ministre de l'Environnement et de la Faune.

La commission permanente de l'aménagement, qui avait entamé l'étude de ce projet en juin, a dû s'y reprendre en septembre, et c'est ainsi que, le 17 septembre 1996, la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements a adopté, article par article – et, comme vous le savez, M. le Président, il n'y a que trois articles dans ce projet de loi – lors de l'étude détaillée, ce projet de loi en commission parlementaire. La présidente de cette commission a subséquemment fait rapport à cette Chambre, à l'Assemblée ici rassemblée, le 16 octobre dernier, du travail de la commission, et le lendemain, le 17 octobre, nous avons eu un débat où nous avons pu prendre en considération le rapport de la présidente de la commission de l'aménagement et des équipements.

J'espère que, en ce jour du 22 octobre 1996, nous pourrons adopter ce projet de loi que je vais résumer brièvement, et, par la suite, si vous me le permettez, M. le Président, comme mon collègue d'en face, le critique officiel de l'opposition, a soulevé des questions relatives aux faits et gestes du ministre de l'Environnement et de la Faune, je terminerai mon court exposé sur les questions qu'il a soulevées cet après-midi, au sujet desquelles j'aurais pu répondre en après-midi, mais, comme je savais que je devais intervenir ce soir, je profiterai de l'occasion pour brièvement expliquer à cette Assemblée la situation en ce qui concerne les neiges usées et en ce qui concerne ce dossier qui, je le sais, tient à coeur au critique officiel de l'opposition et à certains membres de cette Assemblée, notamment ceux de la rive sud, le dossier de l'usine de compostage, de l'entreprise de compostage à Saint-Étienne, sur la rive sud.

(20 h 30)

D'abord, quelques mots sur cette loi. Comme son nom l'indique, cette loi, essentiellement, vise à abroger le Conseil de la conservation. Ce Conseil avait été créé en 1989 et il avait été, à ce moment-là, mis en place pour permettre de conseiller le ministre de l'Environnement de l'époque, et subséquemment le ministre de l'Environnement et de la Faune lorsqu'il y a eu la fusion du ministère de l'Environnement du Québec, le MENVIQ, et du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Bref, le rôle initial qui était prévu pour ce Conseil de la conservation et de l'environnement était de conseiller le ministre de l'Environnement et de la Faune soit d'une façon spontanée, lorsque le Conseil pensait avoir à donner des conseils au ministre de l'Environnement et de la Faune, ce qu'il aurait dû faire amplement dans le temps où nos amis d'en face étaient au gouvernement, ce qu'il n'a malheureusement pas fait, ce Conseil, et, deuxièmement, de donner des avis au ministre de l'Environnement et de la Faune lorsque le ministre lui demandait lesdits avis.

Or, avec la nouvelle façon de faire du ministre de l'Environnement et de la Faune, qui, je dois le dire, dans certains cas, avait été initiée par nos prédécesseurs de l'autre parti, mais, bien sûr, accélérée par notre gouvernement à partir de septembre 1994, la nouvelle façon de faire fait en sorte que le ministre de l'Environnement et de la Faune, à la fois dans la définition de ses politiques, la définition de ses projets de loi et dans leur mise en oeuvre, tant au niveau des politiques qu'au niveau des lois et des règlements afférents, de plus en plus, le ministre de l'Environnement et de la Faune et son ministère jugent à propos, jugent bon de s'associer aux différents partenaires dans tous les secteurs industriels, tous les secteurs économiques du Québec afin que ces partenaires aient voix au chapitre et soient des acteurs privilégiés non seulement dans la planification, mais dans la mise en oeuvre des politiques et des lois du ministre de l'Environnement et du ministère de l'Environnement et de la Faune.

C'est ainsi qu'au fil des ans ce Conseil de la conservation et de l'environnement est devenu inutilisé... dans un premier temps, sous-utilisé, dans un deuxième temps, inutilisé, et, dans un troisième temps, caduc, dans la mesure où, des témoignages mêmes de ses membres, ses membres se demandaient à quoi servait ce Conseil. Parce qu'au fil des ans se sont mises en place une série d'associations, une série de tables sectorielles qui permettent au ministre de l'Environnement et de la Faune d'engager et de développer un partenariat avec les secteurs de la vie québécoise et des activités économiques québécoises qui sont des partenaires et des intervenants privilégiés dans le domaine de l'environnement et de la faune. Je vais vous en nommer quelques-uns, M. le Président, ça vous permettra de comprendre ce par quoi le Conseil de la conservation et de l'environnement a été remplacé dans les faits, dans la pratique.

D'abord, il y a eu la création, au niveau régional, des conseils régionaux de l'environnement. Les conseils régionaux de l'environnement, comme vous le savez, sont des organismes régionaux qui, dans les 16 régions administratives du Québec, sont en voie d'être mis en place et dont le rôle premier, c'est d'agir à titre de lieux de concertation, de lieux de conciliation et d'agir à titre de lieux de regroupement à la fois des organismes environnementaux qui existent dans les régions, mais également à titre d'intervenants privilégiés en région auprès des autres organismes ou associations qui sont en interréaction avec ces groupes environnementaux ou qui sont interpellés par les questions environnementales.

Au moment où on se parle, il y a 14 des 16 régions du Québec où se sont formés les conseils régionaux de l'environnement, et, dans les deux autres régions où il demeure à mettre en place ces conseils régionaux de l'environnement, je suis informé que les démarches vont bon train. Et c'est ainsi que, dans la région de Montréal et dans la région du Nord québécois située au nord du 49e parallèle, on devrait bientôt voir la création, l'émergence de conseils régionaux de l'environnement. C'est le témoignage que j'ai reçu tout récemment du bon député d'Ungava. Et, lors d'une dernière présentation, un dernier discours, la semaine dernière à Montréal, les membres provisoires du Conseil régional de l'environnement de Montréal se sont présentés pour me dire qu'ils allaient bientôt demander leurs lettres de créance et leur reconnaissance par le ministère de l'Environnement et de la Faune.

Il y a également le Regroupement national de ces conseils régionaux de l'environnement, Regroupement national qui a maintenant une nouvelle présidente. Ce Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement, lui, fait partie d'une table environnement-faune que le ministre de l'Environnement et de la Faune rencontre sur une base régulière – dans le cas du ministre actuel, à tous les deux mois environ – pour parler des grandes politiques, pour parler des projets de loi en gestation et pour parler de façon générale de l'action du ministère de l'Environnement et de la Faune.

Ces conseils régionaux de l'environnement sont financés par le ministère de l'Environnement et de la Faune de la façon suivante. Lorsqu'ils sont reconnus par le ministère, ils reçoivent de façon statutaire un montant de 40 000 $, ce qui peut paraître peu mais qui est assez substantiel pour des groupes environnementaux qui quelquefois sont sur le bord de la faillite perpétuelle. Ce montant leur permet à tout le moins d'avoir un local, d'avoir une ligne téléphonique, un fax et souvent d'engager une personne qui, à temps partiel, à temps partagé avec d'autres activités, peut voir aux activités du conseil régional de l'environnement.

Ce montant de 40 000 $ peut être augmenté dans la mesure où les conseils régionaux de l'environnement suscitent dans leur milieu des appuis financiers. C'est ainsi qu'on peut aller jusqu'à un maximum de 20 000 $. Si un conseil régional de l'environnement réussit à aller chercher dans son milieu un financement qui peut atteindre 20 000 $, le ministère de l'Environnement et de la Faune, à ce moment-là, peut financer pour l'équivalent du montant reçu par le conseil régional de l'environnement, de sorte que les budgets des conseils régionaux de l'environnement peuvent atteindre un montant de 80 000 $.

Les conseils régionaux de l'environnement sont maintenant en place dans 14 des 16 régions du Québec. Ils sont en voie de s'implanter, de démontrer leur utilité. Le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement, lui, fait partie de la table environnement-faune qui regroupe les grandes associations québécoises, qui est l'interlocuteur privilégié du ministre de l'Environnement et de la Faune et qui, certainement, en ce moment, l'est dans le vaste chantier de modernisation des outils de protection de l'environnement que nous avons amorcé à l'intérieur du ministère de l'Environnement et de la Faune.

Les autres membres de cette table environnement-faune sont – et j'y vais de mémoire – l'Union québécoise pour la conservation de la nature, qui est sans doute le groupe le plus important, qui regroupe le plus grand nombre d'organisations et de groupes environnementaux; il y a Greenpeace Québec; il y a le Regroupement des groupes écologiques du Québec; et, du côté de la faune, il y a la Fédération québécoise pour le saumon atlantique; il y a la Fédération québécoise des gestionnaires de zecs et il y a, naturellement, la Fédération québécoise de la faune, qui représente l'ensemble des disciples de Nemrod ou de saint Hubert, dont je suis, soit les 220 000 chasseurs et pêcheurs du Québec et les millions – on peut s'exprimer ainsi – d'utilisateurs de faune, notamment au niveau du poisson, qui à tous les ans rentrent en forêt pour se livrer à leur passe-temps préféré.

Cette table de l'environnement et de la faune se réunit à tous les deux mois et elle est devenue un interlocuteur privilégié pour le ministre de l'Environnement et de la Faune, comme je l'ai dit, dans la planification de ses politiques, dans l'élaboration des lois et dans toute réforme majeure. Et il y en a une série, en ce moment, qui sont en chantier au ministère de l'Environnement et de la Faune.

Je ne pourrais passer sous silence d'autres tables sectorielles qui sont déjà en place et qui sont, elles aussi, des lieux privilégiés d'échanges avec nos partenaires. Il y a, bien sûr, la table en environnement et municipalités, qui est, je pense, un sous-comité de la Table Québec-municipalités. Je regarde mon collègue des Affaires municipales qui acquiesce, je le sais. C'est donc un sous-comité de la Table Québec-municipalités. Et c'est à cette table Environnement-Municipalités que nous discutons des dossiers environnementaux qui font l'objet d'échanges à la fois avec le ministre des Affaires municipales et son ministère, mais également avec les municipalités. Nous...

Une voix: ...

(20 h 40)

M. Cliche: Pardon?

Une voix: Le COPLEM.

M. Cliche: Le COPLEM, c'est exact...

Une voix: Le Comité permanent de liaison.

M. Cliche: ...le Comité permanent de liaison Environnement-Municipalités, le COPLEM. Des dossiers d'actualité, bien sûr, sont discutés, telles les neiges usées, et j'aurai l'occasion de revenir à la fin de mon exposé brièvement sur cette façon.

Il y a également une table très active ces jours-ci, qui l'a été et qui le sera encore beaucoup plus dans les semaines à venir, la Table de concertation agroenvironnementale, qui, elle, a travaillé beaucoup dans les deux dernières années sur un projet de règlement de la réduction de la pollution agricole, et, au moment où on se parle, le ministre de l'Environnement et de la Faune est en train de finaliser le texte réglementaire qui vise la réduction de la pollution agricole. Cette réglementation reprendra dans l'essentiel le fruit du travail de deux ans de cette Table de concertation, et cette Table de concertation devra immédiatement après la publication de ce règlement être remise à l'oeuvre pour nous permettre, avec les membres de cette Table de concertation... Naturellement, on y retrouve nos amis de l'Union des producteurs agricoles, mais également des représentants des municipalités, des représentants des municipalités régionales de comté, des représentants des groupes environnementaux, des représentants des groupes préoccupés par la santé, la santé communautaire. Mais cette Table aura l'occasion encore une fois d'être un intervenant privilégié pour le ministre de l'Environnement et de la Faune dans la poursuite de cet objectif du virage agroenvironnemental de cette industrie et de ce secteur économique agricole.

Également, le ministre de l'Environnement et de la Faune et son ministère ont des réunions essentiellement bisannuelles avec deux organismes qui représentent l'ensemble du secteur industriel, soit le Conseil du patronat du Québec, qui a créé le Centre patronal en environnement du Québec, et l'Association des manufacturiers du Québec, qui, elle aussi, a un comité de l'environnement, et, à leur demande, nous allons rendre ces réunions bisannuelles sur une base statutaire parce qu'elles ont démontré que ces réunions sont à la fois très productives et qu'elles permettent d'établir un bon partenariat avec ces associations industrielles.

Nous avons également des tables de discussion avec des secteurs encore plus pointus du monde économique du Québec. Je vais en nommer quelques-uns au passage qui me viennent à l'esprit: nous avons une table de partenariat avec le secteur métallurgique afin de moderniser les outils de protection de l'environnement et de responsabiliser les industriels dans ce domaine; nous avons une table de partenariat avec le secteur chimique, également pour permettre de moderniser les outils et de responsabiliser ce secteur; nous avons également une table de partenariat avec les papetières; nous avons eu récemment une table avec l'industrie pétrochimique, l'industrie métallurgique, l'industrie pétrolière également; mais, également, nous avons eu récemment de bonnes discussions avec une table que nous appelons la table du pneu, où tous les acteurs dans le monde merveilleux de la vente, réutilisation et recyclage du pneu au Québec... Cette table a porté à mon attention ou à l'attention du ministère et du ministre le fruit d'un consensus sur une politique de réutilisation-recyclage du pneu.

Il y a, en plus de ces tables que j'ai nommées, un groupe qui s'appelle le Groupe faune et qui, lui, vise à conseiller le ministre de l'Environnement, bien sûr, dans les aspects de la faune, parce que, comme vous le savez, M. le Président, la plupart des grandes espèces fauniques du Québec – certainement les ongulés et le lynx également – font l'objet d'un plan de gestion. Dans l'application et le suivi de ces plans de gestion qui sont quinquennaux, le ministre de l'Environnement et de la Faune doit prendre des décisions, souvent annuelles, pour ajuster l'application de ces plans de gestion et, bien sûr, doit s'ajuster à l'évolution des espèces, qui dépend essentiellement des conditions hivernales qui très bientôt vont s'abattre sur notre beau territoire.

Ce Groupe faune, également, conseille le ministre de l'Environnement et de la Faune et est un partenaire privilégié pour relever les grands défis fauniques au Québec. Et, tout récemment, nous tenions une autre réunion, encore une fois dans un cadre enchanteur, en forêt, pour déterminer ensemble la façon dont nous allions relever les défis en matière de faune, notamment l'accessibilité, la relève, une politique familiale en matière de faune et, bien sûr, une gestion et une mise en valeur correctes et optimales des habitats fauniques et de la faune qu'on y retrouve.

Ceci fait beaucoup de comités, beaucoup de tables, j'en conviens, M. le Président, et c'est l'ensemble de ces tables et de ces comités – et je suis sûr que j'en oublie peut-être un ou deux – qui ont remplacé le Conseil de la conservation et de l'environnement dans cet objectif général, dans ce mandat général non seulement de conseiller le ministre de l'Environnement et de la Faune, mais d'être un véritable partenaire dans la mise en oeuvre et l'élaboration des politiques, des lois et des règlements qui visent la protection de l'environnement au Québec. Cette abrogation de Conseil n'est pas une perte pour l'environnement au Québec, c'est tout simplement une mutation où la société doit faire en sorte que les organismes s'ajustent à l'évolution de la société et que ce ne soit pas le contraire, que la société doive s'ajuster ou être encarcanée dans les comités et les conseils créés soit par règlement ou par loi.

L'ensemble des tables que j'ai nommées qui remplacent le Conseil de la conservation et de l'environnement ne sont pas régies par des lois, ne sont pas régies par des règlements, ce qui nous permettra d'être beaucoup plus flexibles. Et le premier ministre a parlé d'une modernisation des outils de protection de l'environnement et d'un ménage amorcé au niveau de la réglementation et de la loi, et c'est un exemple, ici, flagrant. Nous abolissons la loi, nous abrogeons la Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement et nous n'avons pas l'intention de revenir avec une nouvelle loi, une nouvelle série de règlements qui viendraient statuer ou encadrer toutes les tables et les comités dont je vous ai fait la brève énumération et dont j'ai essayé de vous résumer brièvement les mandats.

Avant de terminer, M. le Président, j'aimerais dire quelques mots sur deux dossiers qui ont été évoqués cet après-midi par mon collègue d'Orford, le critique officiel de l'opposition, que j'ai eu le plaisir d'entendre. Rapidement, je voudrais parler du dossier des neiges usées et du dossier qui lui tient à coeur – parce que je sais qu'il m'en a parlé, et je dois dire, là-dessus, qu'il est toujours précieux pour moi d'entendre les commentaires de mes collègues de la Chambre sur ce qu'ils vivent sur le terrain ou sur ce qu'ils voient – le dossier de l'industrie de compostage de Saint-Étienne. Commençons par ce dossier.

Je veux informer cette Assemblée que, suite à une série d'avis d'infraction, j'ai demandé, ce matin, en Cour du Québec, qu'un juge accorde une injonction permanente pour arrêter que s'accumulent sur ce site des matières qui devraient normalement être compostées et éventuellement réutilisées par la voie du compost. Mais nous devons noter que cette entreprise n'a pas respecté son certificat d'autorisation. Le certificat d'autorisation, comme vous le savez peut-être, je vous en informe, prévoyait l'utilisation d'une seule plate-forme de compostage. Au moment où on se parle, nos inspecteurs, de visu, ont constaté qu'il y avait l'utilisation de cinq plates-formes de compostage, qu'il y avait essentiellement un laisser-aller dans l'exploitation de cette entreprise qui causait des dommages et des préjudices à l'avoisinage. Nous avons donc agi dans ce dossier-là, comme dans les autres dossiers, M. le Président. Il y a eu des avis d'infraction qui ont été déposés envers l'entreprise. Il y a eu des demandes de correction répétées de données à l'entreprise qui en a fait fi. Nous avons donc décidé de demander à la Cour du Québec de nous accorder une injonction pour arrêter les opérations de cette entreprise.

(20 h 50)

Ma compréhension du dossier, c'est que son honneur le juge a entendu nos procureurs ce matin et qu'une décision de la Cour est attendue demain matin, et j'espère que la Cour nous donnera raison pour éviter que, dans cette période de ramassage de feuilles mortes, les citoyens des alentours aient à vivre cette situation que nous avons jugée non conforme au certificat d'autorisation que nous avions précédemment émis. Un exemple où nous avons bougé, où nous n'avons pas eu peur d'agir, et je n'ai pas eu peur de recommander à mes procureurs de demander que justice soit faite dans ce dossier.

Un mot des neiges usées. Il y a des bonnes nouvelles, il y a des mauvaises nouvelles, dépendamment de quel côté de la clôture vous vous situez. Si vous vous souvenez, c'est en 1989 que le ministre de l'époque avait déclaré que les municipalités devaient, auraient dû arrêter de rejeter des neiges usées dans les cours d'eau en 1994. Or, année après année, les municipalités ont demandé de reporter cette date et, lorsqu'on m'a fait l'honneur de devenir ministre de l'Environnement et de la Faune, sur la base de l'équité, nous avons décidé de faire en sorte que ces dates soient respectées. Il faut dans ce monde que, lorsqu'un gouvernement se donne une politique, lorsqu'un gouvernement se donne une date butoir à partir de laquelle les entreprises ou les municipalités doivent se conformer à une façon de faire, il faut, sur la base de l'équité, que ceci veuille dire quelque chose.

C'est ainsi que les municipalités qui, elles, s'étaient conformées au projet de politique, s'étaient conformées à la politique et avaient investi dans des lieux d'entreposage de neiges usées ont fait au ministère également moult représentations sur la base de l'équité, disant: Nous nous sommes conformées, nous avons investi dans des sites qui peuvent recevoir les neiges usées, et les municipalités qui, elles, nous entourent, qui ont fait fi de cette date butoir, qui ont fait fi de cette politique continuent à jeter impunément dans les cours d'eau des neiges usées, alors que, nous, nous nous sommes responsabilisées et nous avons pris les mesures nécessaires pour arrêter de jeter dans les cours d'eau ces neiges usées qui sont des polluants, M. le Président.

On a fait beaucoup état de l'arrêt de l'émission du plomb par nos voitures. Comme vous le savez, nous avons arrêté d'utiliser du plomb dans nos essences, c'est-à-dire que les entreprises pétrolières, les raffineries ont arrêté d'ajouter le plomb comme additif à l'essence, antidétonateur. Néanmoins, les neiges usées, même si elles sont maintenant libérées du contaminant, du métal lourd qu'est le plomb, les neiges usées sont quand même des contaminants en termes d'huiles et graisses, en termes d'autres métaux lourds et en termes de matières en suspension, et en matières sèches comme le sable, le gravier et, bien sûr, les sels, les abrasifs et les matières en suspension que l'on retrouve inévitablement dans les neiges usées. Il faut voir l'état des neiges usées après une tempête de neige, où on y retrouve sacs de croustilles, feuilles et autres matières qui se retrouvent éventuellement en suspension dans nos cours d'eau.

Ceci étant dit, comme nous sommes convaincus que la qualité des neiges usées ou la caractérisation des neiges usées de la rue Sainte-Catherine, à Montréal, après deux jours de gadoue, peut être différente de la caractérisation des neiges usées d'une ville comme Amos, nous avons également décidé d'être plus souples sur les caractéristiques des lieux d'entreposage des neiges usées, qui doivent être ajustées à la caractérisation des neiges usées qu'ils vont recevoir. Ceci étant dit, notre intention gouvernementale, elle est ferme. Notre intention est de faire en sorte que nous arrêtions le dépôt, le rejet des neiges usées dans les cours d'eau. Le message a été entendu. Les quelques municipalités qui ne se conformaient pas encore ont commencé à engager des discussions avec mon ministère pour s'y conformer.

Voici les bonnes nouvelles. Les nouvelles d'ordre administratif que j'ai moi-même découvertes, c'est que, pour pouvoir faire en sorte que cette politique ait des dents et que le ministre de l'Environnement et de la Faune ait des pouvoirs non seulement pour arrêter le déversement des neiges usées, mais pour aller chercher auprès des municipalités récalcitrantes un droit environnemental, une forme de pénalité environnementale pour les municipalités qui, nonobstant tous ces arguments, refuseraient de se conformer à la politique... Nous avons conclu que, pour ce faire, nous avions besoin d'une législation pour à la fois donner des dents à cette politique et faire en sorte que nous établissions l'important principe du droit environnemental où une entreprise, un organisme qui jetterait impunément dans les cours d'eau des polluants, contrairement aux volontés ou aux politiques gouvernementales, le ministère et le ministre de l'Environnement et de la Faune pourraient percevoir des droits environnementaux auprès de ces entreprises ou auprès de ces municipalités récalcitrantes, de sorte que la volonté politique y étant, nous devons néanmoins nous moudre, si je peux m'exprimer ainsi, au processus législatif et au processus démocratique de l'Assemblée nationale, de sorte que j'ai l'intention de déposer le plus rapidement possible un projet de loi devant cette Assemblée qui permettrait de confirmer la mise en place d'un droit environnemental pour les entreprises qui refuseraient de se conformer aux politiques ou aux certificats d'attestation qui leur sont donnés.

Et, comme ce projet de loi serait adopté, pensons-nous, au printemps de 1997, l'application de cette nouvelle loi et du règlement afférent aux neiges usées ne se ferait qu'à l'automne de 1997. Ce n'est donc pas sur la base des représentations des municipalités qui, encore une fois, demandaient de reporter l'application de ce règlement que nous devons arriver à la conclusion que ce n'est pas avant l'automne 1997 que nous pourrons agir, mais c'est devant la réalité que nous avons besoin d'une législation et que nous avons besoin d'une nouvelle réglementation qui va découler de cette législation, ce qui fait en sorte que, le principe étant sauvegardé, le principe étant établi, le message étant entendu, c'est à partir de l'automne 1997 que les municipalités devront verser des droits, si jamais à cette date elles ne s'étaient pas conformées. Et les indications que nous avons, et j'ai des discussions avec les maires de Chicoutimi, Montréal et les autres qui m'ont indiqué que, sur la base de l'équité et la base de cette décision, ils semblent apprécier que le gouvernement respecte sa parole et fasse en sorte que ces politiques soient plus que des voeux pieux. Et, compte tenu de l'assouplissement des critères des dépôts de neiges usées eu égard à la caractérisation des neiges usées et eu égard aux territoires et aux cours d'eau qui reçoivent inévitablement les effluents en provenance de ces dépôts de neiges usées, j'ai bon espoir que d'ici à l'automne prochain, je l'espère, nous n'aurons pas à utiliser ce pouvoir et à prélever des droits environnementaux auprès des municipalités qui seraient, à cette étape, encore récalcitrantes.

M. le Président, je tenais à apporter ces deux éclaircissements parce que je sais que le critique officiel de l'opposition en a fait état cet après-midi dans ses remarques. Et je conclus, M. le Président, en demandant à cette Assemblée de bien vouloir adopter le projet de loi n° 9, projet de loi qui vise à abolir le Conseil de la conservation et de l'environnement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune et député de Vimont.

Je cède maintenant la parole au député d'Orford et critique officiel de l'opposition en matière d'environnement et de faune. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. C'est toujours avec grand plaisir que j'écoute notre ministre de l'Environnement nous parler une demi-heure, finalement, sur un projet de loi d'un article. Extraordinaire. Il a fait un bon tour de la situation, d'abord, du projet de loi n° 9. Peut-être le résumer pour les gens qui nous écoutent ici ce soir, qui viendraient d'arriver.

Nous sommes à la quatrième étape d'un projet de loi et, aux quatre occasions qu'on a eues de prendre la parole, on a à peu près dit les mêmes choses, nous, de l'opposition, on a écouté des gens et on est revenus après réflexion, fois après fois, et on a dit au ministre: Écoutez, il y avait un organisme où il y avait une pondération entre des gens qui sont environnementalistes et des gens qui sont peut-être un peu moins environnementalistes, qui siégeaient alentour d'une même table. Entre autres, le milieu des affaires siégeait à cette table-là, et il y avait des compromis qui devaient se faire. Le choix du gouvernement en place... et ils ont été élus, ils ont le droit de faire des choix, ils les font, on n'a pas à les accepter nécessairement de notre côté, ici, ces choix-là. Alors, ils ont décidé de faire plutôt des chapelles.

(21 heures)

Alors, là, ils disent: Bien, on va abroger le Conseil de la conservation et de l'environnement et puis, comme tout bon social-démocrate, on se dit: Bien, ça ne se peut pas qu'ils ferment une affaire, et puis ils vont bien en créer un paquet d'autres. Alors, comme de fait, ils en ont créé bien d'autres, puis il y en a bien d'autres qui s'en viennent.

Et ce n'est pas un conseil qui va manquer à ce ministre-là. Lui-même, d'ailleurs, nous citait tous les groupes, à gauche et à droite, qui vont lui donner des conseils. Il n'aura pas assez de temps dans une journée pour écouter tous ces conseils-là. Mais le malheur, M. le Président, c'est qu'avant il y avait un groupe très large, avec toutes sortes de gens, des gens de différentes visions de la société et de différentes façons de vivre l'environnement. Là, ce qu'on fait, on encarcane des gens de la même pensée ensemble. Alors, les gens de la forêt ensemble, les gens de la municipalité ensemble, les gens des affaires ensemble. J'ai bien hâte de voir ce que ça va donner en bout de ligne, mais ça ne fera pas des compromis comme il nous faut y arriver en ce moment.

Et le plus bel exemple de ça... J'y reviendrai tantôt, vous vous imaginez bien. D'ailleurs, je vois que le ministre de l'Environnement reste ici, il veut entendre encore les dernières sagas qu'on entend sur le terrain au niveau de la production porcine. Mais le plus bel exemple, c'est la production porcine, M. le Président. Si nous avions assis ensemble les opposants et les pour et les contre, peut-être qu'on serait arrivés à un consensus quelconque. Et Dieu sait qu'on l'a demandé, hein. On l'a demandé pour s'asseoir cet été, on l'a demandé pour s'asseoir le 10 octobre, et puis là on nous dit que ça va être au mois de novembre, et puis on attend toujours la date, hein. Nous, on veut asseoir ensemble des gens qui sont pour et des gens qui sont contre, que les gens réalisent qu'il faut arriver à des compromis de part et d'autre.

Alors, ce projet de loi là, malheureusement, M. le Président, on votera contre. Mais je pense qu'après deux ans que ce gouvernement est en place il faut dire les choses comme elles sont. Il faut dire les choses comme elles sont: ce gouvernement a carrément et systématiquement lancé la serviette en environnement. Et on est loin de cette phrase célèbre de notre distingué ministre de l'Environnement qui disait qu'il voulait mettre le maillot vert. On lui a donné le bénéfice du doute, on lui a donné le bénéfice du doute depuis neuf mois, et il est passé du vert très foncé – d'abord, je vous parlerai du programme tantôt, là, qui était un vert très, très, très foncé dans le programme électoral – le ministre est arrivé avec un vert très foncé, c'est passé il y a quelques mois au vert tendre, et là je vais vous dire, là, il n'y a plus de vert pantoute dans le maillot, là. Je ne sais si c'est le lavage, ou si c'est les manifestations, ou si c'est ses amis de l'UPA, comme il l'a si bien dit tantôt, le vert foncé est devenu un vert très pâle, pour ne pas dire sans odeur et sans couleur en ce moment, M. le Président.

C'est toujours intéressant de regarder ce qui s'est écrit dans le temps et où on est rendus deux ans après, surtout quand on parle d'un projet de loi comme celui-là qui devrait nous donner une vision. Alors, il y a quelque temps, M. le Président, quelqu'un écrivait, au Québec: «Une action rapide et efficace doit être menée pour éviter une crise écologique irréversible. L'État québécois a, à cet égard, un important rôle à jouer. On reconnaît aujourd'hui que chaque citoyen et citoyenne a un droit à un environnement sain où il fait bon vivre.» Eh bien, ça, M. le Président, c'était l'introduction du programme électoral du Parti québécois. Il y avait urgence. Il fallait éviter une crise écologique irréversible. Aïe! c'est des gros mots, ça, là, hein. On est en 1994, on est à un mois et demi de l'élection. Une crise écologique irréversible. Imaginez-vous, si vous réélisez le Parti libéral du Québec, il y a une crise écologique irréversible. Si vous élisez le Parti québécois, tous les problèmes environnementaux seront réglés, et certainement en maillot vert, en plus.

Eh bien, nous voilà maintenant deux ans plus tard, M. le Président, et regardons un peu, regardons un peu la couleur de ce maillot vert. Commençons par les règlements. On sait qu'on s'en va vers un sommet socioéconomique. Les Québécois s'entendent à dire qu'il y a trop de règlements, mon confrère de Shefford, aujourd'hui, en a déposé, si on les avait mis un par-dessus l'autre, huit pieds d'épais, M. le Président, des règlements qui ont été déposés par ce gouvernement depuis deux ans. Tous les Québécois se souviennent qu'entre 1976 et 1985 ce bon gouvernement social-démocrate du Parti québécois émettait, année après année, sans exception, année bissextile ou pas, émettait 12 000 pages de règlements par année. Notre député de Shefford vous a montré ce que ça représentait, là, c'était neuf pieds de haut si on les avait mis un par-dessus l'autre, en deux ans. Imaginez-vous, il peut leur en rester encore trois ans, que Dieu nous vienne en aide. Si jamais on les remet sur le bureau, lui et moi, il n'y a plus personne qui va nous voir ici, à l'Assemblée nationale.

Ceci dit, M. le Président, il y a des gens qui applaudissent à ça, de la réglementation à outrance. On est tous d'accord pour dire qu'il y a de la réglementation à outrance, des deux côtés de la Chambre. Ce avec quoi on n'est peut-être pas d'accord de notre côté, c'est d'entendre le ministre de l'Environnement, le premier, dire: Moi, je vais aller au batte. Je vais les enlever, les règlements dans mon ministère. La commande venait de très haut, elle venait du chef.

Alors, lui, là, il dit: Les inspecteurs, dehors, les permis, dehors, 40 % par là. Je ne suis pas sûr que c'est dans le dernier ministère qui a été créé au Québec, ou à peu près, celui où on commençait juste à avoir un peu de culture de l'environnement, celui où les gens commençaient à savoir qu'il fallait faire attention, que c'est ce ministre-là, en déréglementation, qui va passer au batte le premier, et ça, c'est malheureux. Qu'on déréglemente un peu tout le monde en même temps, je serais d'accord avec ça, mais pas qu'on essaie de faire ce qu'on a fait avec Écoflo, auquel je reviendrai tantôt.

Ensuite, ce gouvernement-là, depuis deux ans, bien sûr qu'il a dû couper, et, de ce côté-ci de la Chambre, on est d'accord avec ça. M. le Président, ce n'est peut-être pas ça qu'on disait à la page 40 du programme électoral du Parti québécois il y a deux ans. De l'argent, il était pour en avoir dans ce ministère-là. Je peux vous le lire textuellement, si vous voulez. J'ai l'impression souvent de mieux connaître ce programme que la majorité des gens du PQ. Eh bien, ce gouvernement-là a coupé, depuis qu'il est là, année après année, et cette année c'est plus de 30 000 000 $ qu'on coupera dans ce ministère-là, sans parler du personnel. On coupe tellement, M. le Président, que, là, quand votre femme et vos enfants voudront aller prendre une marche dans le magnifique parc du Mont-Orford, dans quelques semaines, bien, ils devront payer. Ils devront payer un 2 $, il semblerait, peut-être plus. On ne le sait pas, on attend un autre rapport du ministre.

Et là la question qu'il se pose, c'est: Il y a des parcs, par exemple Tremblant, où, là, il y a la moitié du centre de ski qui est dans le parc puis la moitié du centre de ski qui n'est pas dans le parc; c'est où qu'il va mettre la guérite? Alors, on est rendu là. On est rendu là, à se demander où on va mettre la guérite pour ramasser les 2 $. Et on a tellement coupé, dans ce gouvernement-là, de personnel et de dollars, que, là, on essaie de faire payer les gens qui vont vouloir aller respirer du bon air le dimanche. Un bien public, un bien qui appartient à l'ensemble des citoyens, qui fait partie du patrimoine; bien, là, on devra payer, et, dans mon comté, ça a un effet absolument incroyable.

Le ministre savait bien que je lui parlerais des neiges usées. On ne peut pas faire un bilan de deux ans, M. le Président, et puis ne pas lui parler des neiges usées. Permettez-moi de vous lire une phrase absolument extraordinaire que notre ministre de l'Environnement écrivait le 27 février 1996. Ce n'est pas bien, bien loin, ça. C'était clair. Deux belles pages, hein? Les bonnes nouvelles, c'est les grandes, grandes pages; les mauvaises nouvelles, une petite découpure de journal dans le coin de La Presse , le plus petit possible, s'il vous plaît. Alors, il disait... Puis il avait une assurance dans la voix, il était convaincu, hein! C'était le 27 février 1996. Ça venait en application le 1er avril 1996. Il disait: Toutes les recherches et toutes les études – il n'y a pas de niaisage, là – concluent que même les neiges usées provenant des secteurs résidentiels sont trop chargées en contaminants pour être déversées aux cours d'eau. Il ne parlait pas des neiges industrielles puis tout ça, il disait: Elles le sont toutes. Toutes les études, c'est clair, c'est précis, on le sait. Ah bien, là, le ministre des Affaires municipales nous annonce en fin de semaine que, là, ils ne sont plus trop sûrs de ces études-là. Pourtant, c'étaient toutes les études.

Alors, là, pour faire plaisir, bien sûr, à des clientèles avant le sommet socioéconomique, les pauvres poissons attendront encore un an ou deux dans les rivières. De toute façon, dans certaines rivières, ils sont déjà difformes à 30 et 40 %, dans la rivière L'Assomption entre autres. Même si on met un peu plus de neige, un peu moins de neige, M. le Président, on n'en est plus à quelques poissons difformes, au Québec, il semblerait. Alors, là, on nous annonce que, pour les neiges usées, bien, il y aura un petit sursis de quelques années.

Et là le ministre nous dit qu'il va déposer un projet de loi. Tout à fait extraordinaire. Mais je vous rappellerai que c'étaient toutes les études qui démontraient que toutes les neiges étaient bien polluées, et puis il avait été ovationné dans le temps par le milieu de l'environnement. Mais là le comité est un peu moins grand. Ça, c'est les neiges usées, M. le Président.

(21 h 10)

Production porcine. Ah bien, là, on peut en parler et on peut en parler. Dans mon bureau, on ne transporte plus ça à la filière, on transporte ça à la boîte, les documents qu'on reçoit à travers le Québec pour ce qui est de la production porcine. Je ne sais plus par quel bout commencer là-dedans, M. le Président, ça craque à la grandeur du Québec. Et là on nous a promis tellement d'affaires dans le droit de produire. On nous a dit: Oui, on va s'asseoir ensemble cet été, puis, oui, on s'entend, puis, oui, c'est le fun, puis, oui, ça va bien, et puis il n'y en a pas, de problème, et puis on s'en vient avec quelque chose. Et puis là la balloune s'est mise à se désouffler, M. le Président, tout de suite après le droit de produire.

Et puis quand je lis le programme, là aussi on en parlait, on en parlait: «S'assurer que la construction des équipements d'entreposage destinés au contrôle de la pollution animale soit réalisée», etc., financement, puis ils en mettaient, dans le programme. Ça, c'est il y a deux ans. Deux ans après, la chicane est prise, mais pas à peu près. Le ministre, d'ailleurs, dans sa vision stratégique, je pense, les gens s'étaient entendus, puis il disait: C'est une question de temps, il n'y en a plus, de problème, on s'en vient avec ça. Bien là on s'aperçoit que dans la production porcine il n'y a plus rien qui marche.

Le droit de produire, on a passé ça en pleine nuit. Il nous a dit: On va se réunir cet été. On ne s'est jamais réuni cet été. Après ça, c'était le 10 octobre. Le 10 octobre, quand ils ont vu que ça se mettait à chauffer, là, ils ont eu une menace de la visite de nos amis de l'UPA: 10 000 tracteurs. Alors là, il y a eu une commande du bunker qui a dit: Wo! les nerfs! Le 10 octobre, on arrête tout ça. Là, on nous dit que c'est rendu en novembre. On nous dit qu'il y a des documents qui s'écrivent. Mais, dans la vraie vie, là, qu'est-ce qui se passe? On est après émettre des permis, il y a des gens qui ne sont pas heureux de ça. Et puis, si vous en voulez des preuves, on peut vous descendre les boîtes qu'on a à la recherche. C'est à la grandeur du Québec. Dans des villages, ce soir, ce n'est même plus entre opposants qu'on se chicane, c'est dans la même famille. Vous avez tous lu La Presse aujourd'hui, c'est dans les mêmes familles qu'on se chicane.

J'étais à Cookshire en fin de semaine puis je me demandais qu'est-ce que ça sentait à Cookshire. Bien, je ne vous ferai pas de description, M. le Président, ça sentait ça, en fin de semaine, à Cookshire. Pas très agréable. Et les gens qui nous disent qu'il n'y a pas de problème avec les odeurs... Bien, il y a des études qui démontrent que, oui, il y a des problèmes avec les odeurs. Il ne faut pas charrier non plus, il y a des problèmes. Il y a des problèmes avec les nappes phréatiques. Puis il y a des décisions qui vont devoir être rendues. On ne peut pas laisser le monde se déchirer, comme ça se passe, des meilleurs aux moins bons.

Il y a des préfets, en ce moment, qui font des efforts extraordinaires pour essayer d'arriver à des compromis dans leur MRC, qui ont réuni les gens, qui ont fait des ententes entre les parties. Mais là ils attendent des directives du ministère de l'Environnement. Puis quand on dit aux 1 500 villes du Québec: Vous allez gérer les odeurs, bien ça, c'est de l'euphorie totale et collective, ça n'a pas d'allure. Ça n'a pas d'allure de demander à des villes de gérer les odeurs – des villes – quand souvent – dans mon propre comté – il y a des municipalités où l'hôtel de ville est ouvert le mercredi après-midi seulement. C'est ça. À qui on va demander de gérer les odeurs au Québec? Il va falloir asseoir ensemble une fois pour toutes les producteurs agricoles, qui ont des revendications tout à fait valables, puis les gens de l'Environnement aussi. Et puis, si c'était juste un groupe ou deux, mais ce n'est pas ça. Peu importe où vous vous promenez au Québec, on nous accroche puis on nous dit qu'il y a des problèmes chez eux. Alors, je ne sais pas si le ministre attend que le feu soit poigné bien comme il faut pour faire quelque chose, mais il va falloir quelque part qu'on prenne des décisions.

Les plages. Bilan de deux ans, M. le Président, les plages. Cet été, je ne sais pas si vos enfants sont allés se baigner sur des plages du Québec. S'ils ressortaient avec des boutons, ça pouvait être peut-être parce que c'était l'adolescence, mais peut-être que l'eau n'était pas très propre. Et là à qui vous êtes-vous adressé, M. le Président, quand ça s'est produit? La province ne s'en occupe plus, la municipalité ne veut pas s'en occuper, l'entreprise privée ne fait pas d'argent avec ça, elle ne s'en occupe plus non plus. Alors là on laisse ça aux parents à décider si c'était beau, si ce n'était pas beau. Je n'ai jamais vu une affaire comme ça.

La première responsabilité d'un État, c'est ça, c'est de s'assurer que ce genre de situations sont gérées par l'État. Qu'il la donne à l'entreprise privée, demain matin, la supervision de ça, qu'il oblige des gens à payer pour ça; pas de problème avec ça. Organisons la société un peu. Pantoute! Ça a été la cacophonie la plus totale, et vous avez vu comme moi plein d'articles là-dessus.

Dans les points où on peut peut-être se réjouir – le ministre était bien heureux de nous dire que c'était un bien bon coup, moi, j'ai toujours pensé que ce n'était pas un si bon coup que ça – il y a eu une grande conférence à Montréal, il y a quelques mois. Et, à un moment donné, on s'est mis à fouiller: Qui était là? On est allé faire un tour nous-mêmes, regarder ça, puis: Mon Dieu! il y en a bien du monde du ministère de l'Environnement ici. Quand on a commencé à faire le décompte de ça, on s'est aperçu qu'il y avait 70 personnes du ministère de l'Environnement qui étaient à ce congrès-là, M. le Président. On attend toujours, d'ailleurs. On a fait la demande des coûts pour les hôtels, le transport, la nourriture, les inscriptions, on a bien hâte de voir comment ça a coûté, toute cette histoire-là. On a une idée. Ils étaient juste 70 du ministère; c'est pas mal de monde pour un congrès. Moi qui viens de l'entreprise privée, je vous dirai que je n'ai jamais vu ça. Je n'ai jamais vu ça, 70 personnes d'une même compagnie canadienne qui étaient dans un congrès. Et là on parle d'un ministère. Si ça, c'est de la bonne gestion, j'ai comme mes doutes.

Le ministre a subventionné les CRE. Je pense que c'est valable. On reconnaît ça, des groupes qui, sur le terrain, travaillent. Un autre groupe qui donne des conseils au ministre. Il nous disait tantôt, là, qu'il va y en avoir deux autres qui vont être créés, qui vont encore donner des conseils au ministre. Il y a beaucoup de monde qui vont donner des conseils au ministre. Il va falloir qu'il les écoute. Mais ce qu'il a oublié de nous dire... Il nous a dit qu'il y avait une nouvelle présidente. Je pensais qu'il nous donnerait le nom en grande primeur ce soir. J'ai sorti mon crayon pour prendre ça en note. Enfin, peut-être qu'il pourra nous le dire après la réunion, le nom de la nouvelle présidente des CRE. On a hâte de la rencontrer.

Ce qu'il a oublié de nous dire, c'est que, s'il y a une nouvelle présidente, c'est parce que le président ou la présidente qui était là avant a démissionné. M. Pierre Morency, un bon Sherbrookois, un gars du comté d'Orford, imaginez-vous donc, un environnementaliste dans l'âme comme le député, il a démissionné. Savez-vous pourquoi? Parce qu'il pensait que, ce qui se passe au Saguenay, il y a de la magouille là-dedans. C'est ça qu'il a dit dans le journal. Et puis M. Francoeur, qui n'est pas le dernier venu comme journaliste, au Québec, en environnement, qui est l'autorité des autorités comme journaliste, a reproduit ça systématiquement. M. Morency demandait des explications, et je pense que c'était sa job de le faire, et je pense qu'il avait la job pour le faire, et il l'a faite, et il l'a faite très bien. Il est allé là-bas voir ce qui s'est passé, il a parlé avec les intervenants là-bas, il a demandé au ministre de faire une commission qui serait un peu plus structurée, et puis, devant le manque d'écoute – parce que, encore une fois, le ministre, il y a bien du monde qui lui donnent des conseils, il faudrait qu'il les écoute, ces gens-là – bien, M. Morency, qui était le président de tous ces CRE là, lui, a décidé bien humblement de démissionner.

Et Pierre Morency, ce n'est pas le dernier des venus, hein? C'est le gars qui a mené la bataille contre les importations de déchets au Québec depuis une dizaine d'années. Il était tout seul à un moment donné à parler de ça, des importations de déchets. Il était tout seul. Personne ne l'écoutait. On s'est tous aperçu un bon jour que c'est lui qui avait raison là-dedans. Ce n'est pas pour rien que les CRE l'avaient nommé président. C'est un gars de conviction, c'est un gars qui parle fort, c'est un gars qui peut brasser du monde un peu, et, quand on était au gouvernement, il nous a brassés, je vais vous dire ça tout de suite. On l'écoutait, Pierre Morency. Le gouvernement, de l'autre bord, ils ont fait un choix, ils ont décidé de ne pas l'écouter. C'est leur choix. C'est leur choix de ne pas l'avoir écouté, et la seule façon dont il a pu se faire écouter, ça a été en démissionnant.

M. le Président, dans les choses absolument extraordinaires, quand on parle du programme et de ce qui ne s'est pas fait depuis deux ans – le maillot vert qui est rendu pas mal moins vert – il faut parler des sites privés de déchets. Ça, M. le Président, la page 45 – et, comme je sais que vous présidez souvent cette Assemblée, vous m'avez entendu la lire avant ce soir – je vais la relire parce qu'on ne peut pas dire n'importe quoi en période électorale et ne pas le faire ensuite. On disait: Restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public. Une petite phrase bien simple, là. Ça veut tout dire. On sait qu'au Québec il y a à peu près 80 % des déchets de mes confrères, de vous, députés, de vous, citoyens qui vont dans des sites privés. Ça, ce sont des sites qui appartiennent à des compagnies privées, certaines listées sur la Bourse de New York, d'autres listées sur la Bourse de Toronto ou d'autres à des intérêts privés qui sont des compagnies. Alors, on avait dit: C'est fini, cette affaire-là. On a assez de trouble avec ça, et, comme c'est un bien public et puis qu'il y a de l'énergie dans tout ça, alors, les sites privés vont devenir publics. Je vous ai lu la phrase tantôt. Et puis ça, ça a été déposé avec Mme Marois. Ils étaient plein de monde, une grosse estrade pendant la campagne électorale. Aïe! c'était le gros engagement.

Eh bien, là, il y a eu une générique. Ça, une générique, pour les gens qui nous écoutent ce soir, c'est une grande enquête à travers le Québec. On s'imaginait bien, dans la générique, de retrouver cet engagement précis là. C'était tellement clair là-dedans. M. le Président, le document de la générique, ce n'était pas un très gros document, c'était un document d'une trentaine de pages. Il y avait une vingtaine de recommandations là-dedans. Vous ne le croyez pas, vous non plus? Moi, j'ai lu ça et j'ai dit: Ils ont oublié d'imprimer une page, c'est bien sûr. Je vais appeler le ministre, je vais lui dire: Arrêtez les presses, vous avez dû oublier d'imprimer une page. C'était le grand engagement de votre programme électoral. Eh bien, non. Les sites privés, il n'y a pas un mot dans la générique. Pas un mot. Là, on va essayer de créer une patente de bassin, comprends-tu, pour les déchets. Puis là «c'est-u» les MRC? Ça «va-tu» être les municipalités? À l'Université de Sherbrooke, notre distingué ministre nous a dit que, maintenant, ça prendrait 200 000 citoyens pour un site de déchets. La plus belle des cacophonies deux ans plus tard.

(21 h 20)

Écoflo, ça, c'est la dernière, M. le Président, dont il faut que je vous parle. Vous n'en avez pas entendu parler, encore, de celle-là. Écoutez bien ça. Vous savez, quand vous bâtissez une maison à la campagne, vous devez vous bâtir un champ d'épuration et une «tank» septique. Un champ d'épuration, ça prend pas mal d'espace. Alors, il y avait un problème dans certaines régions où les terrains ne sont pas assez grands, et il y a une compagnie, imaginez-vous donc, de Rivière-du-Loup, dans le comté du député de Rivière-du-Loup, et puis, eux, ils font, plutôt qu'un champ d'épuration, une manière de petite «tank» septique et ça passe à travers ça. Alors, tu peux bâtir une maison sur moins grand. Les fonctionnaires du ministère ont toujours dit de tout temps: Ne reconnaissez pas cette installation-là, elle n'est pas adéquate. Le 19 juillet...

Mais, avant que je vous conte ça, il faut que je vous dise qu'il y avait un petit congrès dans mon coin de pays, en fin de semaine. Il y avait des ateliers qui portaient sur différents sujets, et, à un moment donné, «j'ai-t-y» pas vu qu'il y avait un atelier qui portait sur Écoflo. J'ai dit: Ça ne se peut pas que là il y a un atelier qui porte sur Écoflo, l'affaire... Alors, je me suis amené là, et vous auriez dû voir ce que les gens disaient de cette histoire-là.

Alors, finalement, le 19 juillet, pour finir mon histoire, M. le Président – je vois que vous voulez vraiment savoir la fin de l'histoire – les hauts fonctionnaires ont dit au ministre: N'approuvez pas ça. Et là, parce qu'il y a un référendum qui s'en vient, n'est-ce pas, on a besoin du député de Rivière-du-Loup qui, lui, a dit: Écoutez, moi, j'ai besoin de ça dans mon comté. Alors, on va accepter de lui signer que les Écoflo pourront être installés à la grandeur du Québec. Bon, c'est un choix gouvernemental. Là, il y a eu des menaces de démission. On a suivi ça pendant tout l'été. Le référendum est passé. Mais là ça continue à brasser au ministère. Les gens qui ont dit que ce n'était pas bon, ils ne disent pas aujourd'hui que c'est meilleur. D'abord, les municipalités ont écrit au ministre, les MRC ont écrit au ministre, tout le monde a écrit au ministre pour dire: Cette patente-là, on se questionne là-dessus, hein, on se questionne, puis, comme on pense qu'on n'aura pas la réponse avant cinq, six ans, il y aura peut-être bien de la pollution dans cinq, six ans.

Mais là la dernière partie de l'histoire qu'on vient de découvrir, M. le Président, c'est que le ministre vient d'autoriser, au mois de juillet de cette année, 1996, la magnifique somme de 226 000 $ pour étudier ces patentes-là qu'on a approuvées il y a un an; 226 000 $ pour le Centre de recherche industrielle du Québec. Ses fonctionnaires lui ont dit non. Les maires lui ont dit que ça n'avait pas d'allure. Les unions lui ont dit qu'elles questionnaient tout ça, les Écoflo. Et là, la passe référendaire étant finie, bien, on va dépenser un petit 226 000 $ comme si de rien n'était. On ne l'a pas publié, celui-là, il n'y a pas eu de grands communiqués de presse pour le dire – je vous le dis tout de suite, là – pour faire une étude pour savoir si cette décision-là était une bonne décision. Bien, moi, M. le Président... Le ministre de l'Environnement, sa première responsabilité, c'était de faire ce genre d'étude là avant, et non pas après. Et, comme environnementaliste, c'est de l'irresponsabilité.

En deux ans, on en a vu de toutes les couleurs. Une des dernières questions qui furent posées à M. Parizeau avant que nous quittions pour le référendum, ça a été au moment où il y avait des essais nucléaires dans une possession française. Vous vous en souvenez. Les communautés démocratiques, économiques du monde entier disaient: Il ne faut pas permettre ça, il faut arrêter ça. On a demandé à M. Parizeau, en cette Chambre, alors que le programme électoral était très clair à l'égard des armes nucléaires: Quelle est la position du PQ? qui, lui, avait l'appui, bien sûr, de la France – de certains Français, je devrais dire – dans le débat constitutionnel référendaire. M. Parizeau a refusé carrément de dire que les essais nucléaires en France, c'était quelque chose qu'il fallait complètement arrêter et proscrire. Ça a été ça, la position du gouvernement péquiste, en ce qui a trait aux armes nucléaires et aux essais nucléaires.

M. le Président, dans ce bilan absolument terrible: les enquêtes au Saguenay. Oui, il y a eu un malheur là-bas. Oui, on est prêt à collaborer avec les gens. Oui, il va falloir reconstruire le Saguenay, puis il va falloir le faire vivre. J'y serai d'ailleurs dans une semaine. Je vais aller visiter ça. J'ai été invité là-bas par des environnementalistes. Je vais aller faire mon petit tour là-bas, voir ce qui se passe. On va aller écouter ce qui se passe. Je suis prêt à donner le bénéfice du doute aussi à la commission Nicolet. Mais, M. le Président, quand Pierre Morency a posé des questions, quand il a invité le ministre à aller un peu plus loin, je pense que les groupes d'environnement du Québec auraient grandement apprécié qu'on l'écoute.

Le ministre me permet de parler de Saint-Étienne, je l'ai fait comme porte-parole de l'opposition, avec toute honnêteté. Ces gens-là étaient pris dans un carcan épouvantable, et j'ai personnellement demandé, en privé, au ministre d'intervenir – à son personnel. Je suis heureux qu'il nous dise ce soir que c'est fait, que le jugement sera rendu demain. Il nous a expliqué... Mais je devrais dire au ministre que ça a pris beaucoup de temps. Lui, il nous dit: Oui, mon contentieux... Il nous disait lui-même qu'au moment où ils sont intervenus il était rendu avec cinq plates-formes pour le compost. Le permis émis par le ministère était d'une plate-forme. J'ai vu du haut des airs des photos aériennes et je lui dis: Il fallait être aveugle pour ne pas savoir qu'il se passait quelque chose de pas correct, là. Une plate-forme de compostage, c'est immense. Il a la permission pour une, il est rendu à cinq. Il y a cinq, six villes, ici, qui envoient leurs feuilles là. Les odeurs sont absolument incroyables. Il n'y a aucune règle. Le compostage est dans de l'eau complètement polluée. Tout ça est mélangé avec des pelles mécaniques qui ne sont pas selon les normes, etc. La pression a été très forte, le ministre a dû agir. Très bien, il a agi, mais je pense qu'il aurait dû agir bien avant ça. Ce n'est pas d'aujourd'hui que les citoyens lui demandaient une action ferme et précise.

Or, M. le Président, c'est le bilan des deux dernières années. On pourrait continuer, bien sûr. Le projet de loi n° 9, on vous l'a dit plus tôt, on votera contre. On ne pense pas que c'est là l'avenue.. On pense que l'avenue, en environnement, c'est d'asseoir des gens qui ne pensent pas tous pareil. C'est ce que notre formation politique a fait quand on a écrit notre programme électoral. On a assis des gens de différentes communautés, de différentes visions, des gens qui sont plus jeunes, des gens qui sont plus vieux, des gens qui croient que, avec l'environnement, on peut créer des jobs. Je vous dirai, d'ailleurs, qu'on est probablement un des seuls États qui a trouvé le moyen de perdre des emplois à cause de l'environnement. Tout le monde gagne des emplois à cause de l'environnement. Eh bien, nous, au Québec, cet été, il y eu plein de commerces qui étaient prêts à partir dans la production porcine, qui n'ont pas eu de permis parce qu'on ne s'entend pas. Parce que, si on s'entendait, probablement qu'on pourrait émettre ces permis-là, et puis on pourrait organiser ça, on pourrait le réglementer. Mais non, on a laissé des jobs tomber.

Alors, le ministre, là, il est pris dans la production porcine, entre les demandes du Devoir , puis de Radio-Canada, et puis des producteurs de vin, et puis je pourrais continuer, des gens qui lui disent: Un moratoire. Et, de l'autre bord, l'UPA qui dit: On ne veut même pas s'asseoir à la table. Le ministre, il va falloir, à un moment donné, qu'il tranche. Il ne pourra pas juste laisser le feu poigner continuellement à travers le Québec, de 30 groupes qu'on monte à 35, et de 35 qu'on monte à 40. Et, s'il s'imagine qu'avec l'hiver tout ça va arrêter, qu'il embarque dans mon auto, on va continuer à se promener à travers le Québec, hein. Parce que des groupes, il y en a qui ne lâcheront pas. Ceux qui ont passé, dans le magnifique comté de M. Jolivet, sept jours et nuits debout, à faire la vigile, ils n'ont pas l'idée de lâcher. Puis là il y a une élection où deux frères vont s'affronter, puis ces gens-là ne lâcheront pas, puis ils ont raison de ne pas lâcher parce qu'il y a des opinions tellement diamétralement opposées, M. le Président, là-dedans. Des gens viennent me voir, puis me disent: La prise d'eau est à 12 mètres de l'étendage. J'ai vu ça, M. le Président. À Danville, le ministre a une lettre là-dessus, l'étendage porcin à moins de 1 km de... L'étendage. Alors, imaginez-vous bien que les citoyens, là... Ça, c'est le gars qui est allé au ministère de l'Environnement à Sherbrooke, qui a étendu du purin sur le bureau du fonctionnaire. On n'approuve pas ça, mais ce gars-là, il est exaspéré, il ne sait plus quoi faire. Les gens à côté de chez eux vendent les maisons parce que l'été ça sent tellement fort qu'on ferme les fenêtres. Il y a une accumulation des odeurs, puis lui, il dit: Moi, ce n'est pas vrai que je vais vendre ma maison. Mes parents sont venus au monde là, mes grands-parents sont venus au monde là, je vais vivre là. Mais ce n'est pas vrai qu'on va permettre de l'étendage comme ça. Alors, lui, il ne sait plus quoi faire. Il appelle l'opposition, il appelle le ministre, il appelle son maire, il va voir le délégué régional, puis, à un moment donné, il en a assez. Il prend une chaudière de purin, puis il rentre au ministère, puis il l'étend à terre. On ne peut pas approuver ce genre de chose là.

Mais «c'est-u» ça que le ministre veut qui continue au Québec? Bien, qu'il mette ses culottes. Qu'il dise aux gens c'est quoi, la direction qu'il veut prendre. Finalement, qu'il décide des objectifs qu'il veut atteindre. Qu'il décide des moyens qu'il veut prendre pour les atteindre et qu'il nous dise les dates auxquelles il veut atteindre ces objectifs-là. Et, M. le Président, l'opposition, nous nous ferons un plaisir, si on connaît les objectifs à atteindre, si on connaît les moyens qu'il devrait prendre pour les atteindre et si on connaît les dates qu'il va prendre pour atteindre ces objectifs et ces moyens, nous nous ferons un plaisir de collaborer, parce que l'environnement sera toujours une priorité au Parti libéral du Québec. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption? Alors, M. le ministre, vous exercez votre droit de réplique? Alors, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


M. David Cliche (réplique)

M. Cliche: Merci, M. le Président. Avant que nous passions à l'adoption de ce projet de loi, j'aimerais dire quelques mots sur deux éléments nouveaux qui ont été soulevés par le critique officiel de l'opposition et qui méritent, je pense, des éclaircissements.

Le critique officiel de l'opposition laisse planer des doutes à l'effet que notre gouvernement et que son ministre de l'Environnement et de la Faune n'agissent pas dans les dossiers environnementaux de l'heure. Deux dossiers, donc, qu'il a soulevés et, afin qu'il n'induise pas indûment en erreur les membres de cette Assemblée, quelques éclaircissements.

(21 h 30)

D'abord, les raisons pour lesquelles le ministère de l'Environnement et de la Faune s'est entendu avec le Centre de recherche industrielle du Québec, le CRIQ, et qui expliquent le financement du MEF au CRIQ. Comme j'ai eu l'occasion de le dire à quelques occasions, nous avons une approche moderne en matière de protection de l'environnement, de sorte que, au lieu d'approuver les équipements de dépollution, notamment les fosses septiques, les champs d'épuration et les autres équipements qui permettent d'épurer les eaux des résidences, nous nous sommes donné une approche en bout de tuyau, c'est-à-dire que nous convenons des objectifs environnementaux à atteindre, nous déterminons quelles sont les émissions environnementales qui sont acceptables eu égard au milieu récepteur, et c'est à partir de ces données que les industriels du Québec, les ingénieux du Québec – certains diront «les patenteux du Québec» – viendront faire approuver leur équipement par le CRIQ, par le Centre de recherche industrielle du Québec, qui devra, sur un banc d'essai, une période d'essai, déterminer, conclure, oui ou non, si cet équipement-là qui est sous essai atteint les objectifs environnementaux et répond aux normes d'émission en bout de tuyau qui ont été déterminées.

C'est une approche novatrice, parce que, dans le passé, M. le Président, le ministère de l'Environnement et de la Faune a eu l'habitude d'autoriser les équipements en amont de la pollution, alors que nous nous donnons une approche en bout de tuyau, où nous déterminons les émissions maximales eu égard à l'environnement en aval, en bout de tuyau. C'est ainsi que le CRIQ va devenir le banc d'essai pour l'ensemble des équipements qui sont et qui seront produits au Québec pour l'assainissement des eaux usées des résidences, notamment les résidences qui créent des difficultés relativement à l'application des mesures connues, classiques, soit la fosse septique et le champ d'épuration sur banc de gravier, notamment des petites municipalités d'Abitibi qui se retrouvent avec des sols argileux sur lesquels on ne peut pas facilement installer des équipements classiques comme la fosse septique et les champs d'épuration.

Nous avons étudié les équipements de cette entreprise de Rivière-du-Loup et nous nous sommes entendus avec elle, cette entreprise, pour vérifier si effectivement les équipements qui avaient été autorisés sont performants, parce que, lors de l'autorisation de ces équipements, le ministère de l'Environnement et de la Faune était conscient de s'engager dans une approche novatrice en matière de dépollution des résidences isolées dans des sols argileux et des sols qui ne permettent pas de recevoir des équipements plus conformes.

Au moment où on se parle, j'ai les études de spécialistes qui démontrent que certains de ces équipements devront être améliorés, et il se peut très bien que ces équipements devront dans leur nouvelle forme être revalidés par le CRIQ, par le Centre de recherche industrielle. Cette entreprise, comme les autres entreprises qui veulent implanter des équipements pour desservir des résidences isolées installées sur des sols différents des sols perméables qui permettent la mise en place de fosses septiques et de champs d'épuration, il se peut qu'elle ait à repasser devant le CRIQ. C'est ce qui explique le versement au CRIQ qui est conforme avec la politique moderne d'atteindre des objectifs en matière d'environnement. Ça suscite l'entrepreneuriat, ça suscite l'imagination et ça fait appel au caractère inventeur des Québécois et des spécialistes en la matière.

En ce qui concerne la pollution agricole et la production porcine, je veux juste énumérer les faits qui témoignent de l'action du ministère de l'Environnement et de la Faune et de certaines d'entre elles avec mes collègues de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, du MAPAQ, et du MAM. D'abord, nous avons réussi, là où votre gouvernement avait essentiellement failli, à déposer et à faire adopter par cette Assemblée la loi qui confirme le droit de produire au Québec des producteurs agricoles en zone agricole. C'est un élément important. Nous nous étions engagés à ce moment-là en commission parlementaire, au printemps, à faire en sorte que les questions relatives aux perceptions de nuisance de la population, notamment eu égard aux distances séparatrices entre les lieux de production, les lieux d'épandage et les résidences, soient discutées dans les régions, parce que ce n'est pas se décharger de ses responsabilités que de reconnaître que les perceptions par rapport aux nuisances des odeurs peuvent varier d'une MRC et d'une région à l'autre. Dans le comté d'Orford, comme des comtés qui sont habitués de vivre selon les saisons printanières et l'automne avec les saisons d'épandage, les gens sont habitués de sentir les odeurs. Il pourrait donc y avoir une tolérance plus grande qui pourrait amener des distances séparatrices plus faibles. Nous aurons une commission parlementaire au mois de novembre où nous aurons l'occasion de rediscuter des orientations gouvernementales qui seront acheminées aux MRC et qui seront débattues auprès des MRC, dans les MRC entre des producteurs agricoles, des gens du monde municipal et du monde de l'environnement parce que c'est là que doit se tenir le débat.

Afin de rassurer la population à l'effet que les certificats d'autorisation donnés aux porcheries sont faits conformément à la protection et à la pérennité des écosystèmes, des milieux humides et des milieux sensibles, nous avons établi un nouveau cadre d'examen qui, maintenant, est utilisé par les directeurs régionaux lorsque les directeurs régionaux doivent analyser des demandes d'autorisation de porcherie. Il y a eu un temps de réflexion, essentiellement en juillet, août et septembre, durant lequel temps de réflexion nous avons confectionné ce nouveau cadre d'examen, et, au moment où on se parle, les directeurs régionaux ont repris l'analyse et les émissions de certificats d'autorisation des projets de porcherie et ils le font avec ce nouveau cadre d'examen qui peut nous permettre de rassurer la population à l'effet que, lorsqu'un projet de production porcine est approuvé, il est fait en toute protection de l'environnement et en protection des éléments plus sensibles, tels les prises d'eau, les nappes phréatiques et les milieux sensibles, tels les tourbières, marais, milieux humides et cours d'eau.

Ceci étant dit, il ne faut pas s'arrêter là, et, au moment où on se parle, nous travaillons d'arrache-pied avec les gens de l'UPA et les autres partenaires à finaliser un règlement de réduction de la pollution agricole qui permettra, je l'espère, très bientôt, de confirmer que le secteur agricole, comme les autres secteurs de l'activité économique du Québec, sont résolument engagés dans le virage du développement durable et de l'agriculture durable agro-environnementale au Québec, M. le Président. Je vous remercie. Sur ce, je soumets à cette Assemblée qu'il serait idéal d'approuver ce projet de loi.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune et député de Vimont. Alors, comme il n'y a plus d'intervenant, le projet de loi n° 9, Loi abrogeant la Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement et modifiant la Loi sur les réserves écologiques, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Alors, Mme la ministre et leader adjointe, est-ce que vous avez d'autres articles à appeler?

Mme Caron: Non, M. le Président. Alors, s'il y avait consentement, nous pourrions procéder aux débats de fin de séance.

Le Vice-Président (M. Pinard): Monsieur...

M. Bissonnet: Il me fait plaisir d'accorder le consentement à ce qu'on procède immédiatement aux deux débats de fin de séance que vous avez annoncés précédemment.


Débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Alors, conformément à l'article 310 de notre règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député a droit à une réplique de deux minutes. Alors, M. le député de LaFontaine.


Décrets régissant les secteurs du verre plat et du bois ouvré


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, M. le Président, merci beaucoup. En effet, j'ai demandé à cette Chambre, selon notre règlement, de pouvoir exercer mon droit à titre de porte-parole officiel de l'opposition en matière de travail et d'interroger le ministre un peu plus profondément sur des sujets d'ordre important pour la population, les travailleurs, étant donné que, lors de la période des questions de cet après-midi, je n'ai pas obtenu de réponse satisfaisante.

(21 h 40)

En effet, M. le Président, vous n'êtes pas sans savoir – et l'ensemble de nos compatriotes québécois le savent – que l'industrie, actuellement, des portes et des fenêtres et du verre plat connaît une compétition très importante de la part d'entreprises qui sont établies au Nouveau-Brunswick, en Ontario ou aux États-Unis et qu'une réglementation assez sévère, et qui, je dirais même, pour certains, devient un carcan, fait en sorte que nos entreprises ont de la difficulté à compétitionner et à concurrencer ces marchés.

M. le Président, ces gens qui ont formé une coalition et qui dernièrement, en fin de semaine dernière, se réunissaient demandaient au gouvernement et au ministre de bien vouloir faire en sorte, pour les raisons que je vais expliquer, d'abroger les décrets du verre plat et du bois ouvré. Les raisons invoquées par ces gens, M. le Président, étaient les suivantes. Tout d'abord, bien sûr, leur industrie, qui emploie ces 1 500 personnes actuellement, accuse une perte d'environ 1 000 emplois depuis les deux ou trois dernières années, particulièrement les deux dernières années, du fait de la concurrence d'autres provinces et de la concurrence internationale. C'est très important, à notre époque, car on sait que ces emplois sont en général dans les régions.

Et aussi il en va de la survie de cette industrie, car nos manufacturiers, nos fabricants se disent: Pourquoi n'irions-nous pas installer nos entreprises, nos usines à l'extérieur, nous aussi, afin de profiter de cette absence, de cette déréglementation qui existe ailleurs? Et nous pourrions, avec le traité de libre-échange, produire à meilleur coût et avec plus de facilité les mêmes produits et les exporter ailleurs aux États-Unis, car, en effet, l'industrie des portes et des fenêtres au Québec ne produit que dans une faible partie pour le marché intérieur, pour le marché domestique, comme on l'appelle. Le reste de leur production est fait pour le marché international ou le marché interprovincial.

On sait, M. le Président, que, bien sûr, 6 000 emplois ont déjà été perdus; 2 500 autres emplois pourraient y être créés. Et ce n'est pas moi qui le dis, M. le Président, seulement comme porte-parole de l'opposition, c'est l'association des manufacturiers de portes et fenêtres du Québec, c'est la Chambre de commerce du Québec, c'est l'association des manufacturiers exportateurs du Québec. Alors, vous voyez, il semble qu'il y a un consensus dans ce secteur d'activité pour demander au gouvernement de prendre ses responsabilités et d'acquiescer à cette demande urgente et importante pour cette industrie, pour les travailleurs qui y oeuvrent et pour les employeurs, d'abroger ces décrets.

Alors, la question que je pose au ministre, c'est: Est-ce que le ministre entend donner suite à cette demande? Est-ce qu'il entend faire comprendre, envoyer le message à tous ces travailleurs, à tous ces employeurs qui ont été, pour certains, déposer à ses bureaux en fin de semaine une porte symbolique avec une pétition dessus... Entend-il donner suite aussi aux réflexions de son chef, le premier ministre, M. Bouchard, qui parle de déréglementation à qui veut l'entendre? Est-ce que le ministre du Travail peut nous indiquer aujourd'hui en cette Chambre s'il entend, oui ou non, donner suite aux demandes de l'association des manufacturiers de portes et fenêtres d'abroger le décret du verre plat et du bois ouvré afin de lui permettre d'être plus compétitive et de relever les défis de l'internationalisation des marchés, de créer de l'emploi au lieu d'en perdre et de faire en sorte que nos régions au Québec puissent profiter de ces industries qui sont essentiellement décentralisées et donnent des emplois à travers à peu près tout le Québec? Alors, la question est la suivante: Est-ce que le ministre, oui ou non, entend rapidement annoncer qu'il abroge le décret du verre plat et du bois ouvré?

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. M. le ministre du Travail et député de Matane. M. le ministre.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, non seulement on a entendu le cri des manufacturiers québécois, mais nous allons examiner le décret du verre plat, du bois ouvré et de bien d'autres secteurs qui sont l'objet de décrets et qui vivent sous l'empire de la Loi sur les décrets de convention collective.

Mais de quoi s'agit-il au juste quand on parle de la Loi sur les décrets de convention collective? C'est peut-être important, sur le plan pédagogique, d'expliquer un peu ce que ça veut dire. C'est une vieille loi qui a été adoptée en 1934 et qui permet au gouvernement d'étendre la portée d'une convention collective à un ou plusieurs employeurs ou à une ou plusieurs associations de salariés dans des secteurs précis d'activité. Bien, cette loi-là, M. le Président, depuis 1934, n'a jamais été amendée, n'a jamais reçue de la part des gouvernements une attention particulière face à un amendement quelconque.

Je me souviendrai, parce que j'habitais une autre planète à cette époque-là, qu'en 1966, à l'époque de l'État-Provigo et du rapport Scowen – il y en a qui vont se souvenir de ça dans cette salle – on proposait la déréglementation totale et l'abrogation totale de la loi des décrets. Évidemment, ça incluait le manufacturier.

En 1989, le ministre Séguin, avec qui j'étais lié d'amitié et qui m'en a parlé abondamment, était favorable, lui, au maintien de la Loi sur les décrets de convention collective. Pire que ça, en 1992, M. Séguin a convoqué un immense forum pour parler de la Loi sur les décrets de convention collective et l'abolition des décrets. Il a créé trois groupes de travail qui lui ont fait des recommandations, et tout ça a abouti à une commission parlementaire élargie, M. le Président. Et les libéraux, pendant tout ce temps-là, n'ont jamais bougé d'un poil pour amender la loi des décrets ou l'améliorer.

Puis aujourd'hui le député de LaFontaine vient faire des sermons, essayer de parler de discours creux. Le ténor léger de LaFontaine, son 45 tours est usé à la corde, M. le Président, puis qu'il ne vienne pas parler de la loi des décrets de convention collective dans cette Assemblée.

Qu'est-ce qu'on a fait quand on est arrivé au pouvoir? On a ramassé tout ce qui avait été écrit par les libéraux en termes de paperasse, puis on a essayé de faire en sorte qu'un mémoire soit rédigé. Et, en juin dernier, un projet de loi était acheminé au comité du développement social et au comité de l'économie et de l'emploi.

Qu'est-ce qu'on fait actuellement? Avec ma collègue de l'Industrie et du Commerce, nous sommes à travailler d'arrache-pied au sein d'un comité conjoint pour que non seulement on règle la question du verre plat et du bois ouvré, mais qu'on règle aussi une partie du secteur manufacturier et, en plus, qu'on modernise la Loi sur les décrets de convention collective.

M. le Président, nous, on n'étudiera pas ça pendant 15 ans, on va le faire! C'est ça la différence avec les libéraux, et c'est ça la différence entre agir concrètement et faire de la vocalise, comme le ténor de LaFontaine le fait.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Merci, M. le ministre du Travail. Alors, M. le député de LaFontaine, vous avez le droit à une réplique de deux minutes. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé (réplique)

M. Gobé: Oui, alors, merci, M. le Président. Écoutez, en cette Chambre, il faut mettre les choses au point. Le ministre est au pouvoir; c'est lui qui décide. En 1994, il nous a dit: Nous allons changer les choses, nous allons faire bouger les choses. Et qu'a-t-il fait? Nous sommes en 1996, et des manufacturiers vont manifester devant ses bureaux en lui demandant d'agir.

Le président de la FTQ, M. Clément Godbout – et je vais le lire, M. le Président – nous dit: «Il faut prendre les décrets un par un et se demander s'ils en ont encore besoin. Il n'y a pas de fusion et de décret à faire, nous attendons que le ministre du Travail bouge.» C'est son allié, le président de la FTQ.

M. le Président, il est évident, en cette Chambre, que le ministre ne bouge pas et ne s'occupe pas de ses dossiers. Les gens sont dehors dans la rue, ils manifestent, ils perdent des emplois, ça nuit à l'économie du Québec, et même leurs alliés syndicaux sont d'accord avec ça. Alors, s'il vous plaît, vous n'êtes pas élu pour critiquer ou pour faire l'apologie de ce qui a été le gouvernement avant vous, vous vous êtes fait élire en disant: Nous allons changer des choses. Alors, osez, comme a dit le premier ministre. Alors, osez et abrogez les décrets du verre plat et du bois ouvré demain matin.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Alors, nous allons maintenant procéder au deuxième débat de fin de séance, et je cède la parole au député de Shefford. M. le député.


Déréglementation pour favoriser la création d'emplois


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Je demandais cet après-midi, lors de la période de questions, au premier ministre une question bien simple, à savoir s'il s'engageait, lors du prochain sommet, celui de la semaine prochaine, à opérer une déréglementation sévère. Parce que les gens d'affaires, comme je le disais cet après-midi, décrient la multiplication des taxes et de la réglementation.

(21 h 50)

Donc, cet après-midi, je lui ai tout bonnement posé la question: Qu'entendait-il faire et quand il le ferait? Il nous a répondu, M. le Président, et je désire citer sa réponse pour les gens qui n'étaient pas avec nous à 14 heures, cet après-midi. Je dois dire que ce n'était peut-être pas la meilleure réponse du premier ministre: «M. le Président – et c'était sa réponse – il faudra savoir d'abord combien de règlements. Il y a des règlements qui font plusieurs centaines de pages, c'est probablement qu'il y en a beaucoup moins que ce qui a été adopté en 1994.» Des voix: «Ha, ha, ha!» Il continue sa réponse: «Mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question qui mérite une longue réponse.» Fin de sa réponse, M. le Président. C'est évident que la réponse est tout à fait insatisfaisante autant pour moi que pour toute la population du Québec, particulièrement les gens qui sont à la recherche d'un emploi.

La question, tout le monde se la pose, M. le Président. C'est pour ça que je désire citer certaines personnes que le premier ministre, absent ce soir, représenté par sa ministre déléguée à l'Industrie et Commerce, qui est chargée, j'imagine, de livrer sa réponse... Mais je désire quand même lui faire part de remarques de certaines personnes. J'ai ici devant moi un article du journal Les Affaires intitulé «Pas de relance de l'emploi sans déréglementer les lois du travail», par exemple. Et je cite M. Rodrigue Tremblay, ex-ministre du Parti québécois, donc bien connu dans le milieu du gouvernement, qui dit: «Pour créer des emplois aujourd'hui, dans ce Québec de 1996, il faut être un véritable héros.» Il continue: «Souhaiter la création d'emplois et ne rien faire équivaut pour les politiciens à parler pour la galerie et pour les médias.» Donc, M. le Président, ce que je demandais cet après-midi au premier ministre, c'est exactement ça: Est-ce qu'il peut arrêter d'en parler? Je lui demandais: Qu'est-ce que vous allez faire, particulièrement au prochain sommet. Donc, c'est pour ça aussi...

Naturellement, cet après-midi, je vous ai exhibé les règlements, certains règlements adoptés par le gouvernement du Parti québécois, et on lui a demandé d'en abolir un nombre certain et non un certain nombre. On sait qu'il est très facile d'abolir deux ou trois règlements mal vus, et ça fait bien pour la galerie. On sait très bien que, si on prend, par exemple, l'État du Michigan aux États-Unis qui a aboli 1 000 règlements par année, on a augmenté la création d'emplois de façon significative.

Vous me dites qu'il me reste seulement deux minutes, M. le Président. J'aimerais, à l'appui de cette question-là, citer d'autres personnes. Dans le même article, Yvon Marcoux, de Provigo, disait: «La réduction du chômage et la croissance dans l'emploi se retrouvent dans les pays qui ont réduit la réglementation.»

J'en profite pour en citer quelques autres, dans le temps qui me reste, parce que peut-être que la ministre me dira: C'est vous qui le dites, ce n'est pas eux autres. M. le Président, j'ai visité plusieurs entreprises ces derniers mois, et chaque dirigeant d'entreprise est unanime à dire qu'il faut absolument, pour relancer l'emploi, baisser, alléger cette réglementation.

Un éditorial dans le journal Les Affaires intitulé «Créer la richesse avant de la distribuer», et je cite Jean-Paul Gagné: «Le but des entreprises n'est pas de créer de l'emploi mais de la valeur pour leurs actionnaires. C'est en créant cette valeur qu'elles créent des emplois et de la richesse. Feignant d'ignorer cette dynamique, Québec se refuse encore à prendre les moyens qui s'imposent pour amener des entreprises à investir davantage chez nous, ce qui accroîtrait l'emploi et la richesse. Cela viendra un jour quand nous serons appauvris davantage.» Donc, M. le Président, c'est une question d'importance primordiale pour l'économie du Québec.

Vous me dites qu'il me reste une minute. Ce que je demande à la ministre déléguée – j'aurais aimé voir le premier ministre ici répondre pour lui-même, j'imagine qu'il a livré sa réponse à la ministre déléguée: Qu'est-ce que le premier ministre compte faire prochainement pour améliorer cette situation qui fera en sorte qu'on pourrait peut-être créer des emplois durables au Québec? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Shefford. Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce et également députée de Rosemont. Mme la ministre.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Je vais citer le député de Shefford: «Créer de la richesse avant de la distribuer», j'aurais aimé ça que l'opposition fasse ça et ne nous laisse pas avec un déficit de 5 700 000 000 $, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Mme Dionne-Marsolais: Ça nous aurait permis de le prendre un peu plus au sérieux.

Nous sommes engagés, M. le Président, envers une déréglementation sévère, et j'oserais dire sérieuse, contrairement au gouvernement qui nous a précédés. Le gouvernement du Québec s'est engagé à plusieurs reprises au cours des derniers mois, notamment à l'occasion du discours inaugural et du discours sur le budget, à alléger le fardeau réglementaire et administratif des entreprises dans le but de stimuler l'économie et la création d'emplois. Notre engagement à cet égard ne date pas d'aujourd'hui, et, selon les bilans – on sait que le député de Shefford aime ça, les bilans – récents qui ont été déposés auprès du Secrétariat à la déréglementation par 28 ministères et organismes, au moins une soixantaine de mesures d'allégement réglementaire et administratif visant les entreprises ont été mises en oeuvre depuis notre élection, M. le Président.

L'harmonisation de la TPS et de la TVQ, que nous avons finalisée sous notre gouvernement, constitue aussi une mesure qui a bien simplifié la comptabilité de nos entreprises.

Aussi, notre gouvernement a assoupli plusieurs exigences administratives qui étaient posées aux entreprises par les lois fiscales, notamment en matière d'opposition ou de pénalité.

Nous avons revu également les programmes de la SDI et les avons ramenés de huit à deux. Le transfert de la perception de la cotisation de la Commission des normes du travail au ministère du Revenu puis la rationalisation et l'harmonisation des programmes d'aide financière à l'entreprise – faisant passer les programmes d'aide à l'entreprise du gouvernement de 125 à 36 – ce sont autant d'initiatives heureuses prises par notre gouvernement dans son dernier budget.

Il faut également mentionner que notre gouvernement a ralenti de façon significative le rythme d'adoption de nouvelles réglementations. Au cours des derniers mois, de quelque 600 règlements en moyenne qu'ils étaient, en 1992-1993 et en 1994, sous le gouvernement libéral... Les règlements adoptés en 1995 par notre gouvernement sont passés de 600 à 400, 419 pour être plus précise. C'est à peu près les deux tiers.

Chaque projet de règlement est maintenant examiné par le Secrétariat à la déréglementation et les secrétariats des comités permanents du Conseil exécutif à la lumière d'une politique claire relative à l'activité réglementaire et des récentes directives émises par le Conseil des ministres pour alléger l'activité réglementaire.

Le gouvernement entend aller encore plus loin au cours des prochains mois. Dans le cadre des plans annuels de révision réglementaire 1996-1997, que notre gouvernement a initiés dès notre élection, les ministères et les organismes ont soumis plus d'une centaine de propositions d'allégement à mettre en oeuvre dans les prochains mois. Soixante-dix de ces propositions ont été retenues seulement pour l'année 1996-1997, dont une vingtaine qui vont générer des effets extrêmement importants sur les entreprises et sur l'ensemble de l'économie québécoise.

Parmi ces mesures, mentionnons les projets de la réforme de la tarification de la CSST, la révision des processus d'autorisation au ministère de l'Environnement et de la Faune dans le but d'en réduire le nombre et les délais, la constitution d'un guichet unique au ministère des Transports pour les transporteurs professionnels, Société de l'assurance automobile du Québec et Commission des transports du Québec comprises, la mise en place d'un chèque emploi-services pour les petits entrepreneurs au ministère du Revenu et la révision actuellement en cours du régime des décrets de convention collective, dont a parlé mon collègue le ministre du Travail il y a quelques minutes.

Le gouvernement a également annoncé dans le discours du budget du printemps dernier plusieurs autres mesures qui vont dans le sens de l'allégement réglementaire. Mentionnons seulement la constitution d'un groupe de vigie pour aviser le gouvernement sur l'allégement du fardeau administratif des entreprises en phase de démarrage, l'élimination de 500 000 permis et autorisations sur deux ans, la réduction des délais d'autorisation à l'Environnement et à la Faune à moins de 90 jours et la mise en place de guichets d'information et de référence en région pour aider les nouveaux entrepreneurs.

Le sommet économique de la semaine prochaine sera également l'occasion pour le gouvernement du Québec, avec ses partenaires, d'examiner certaines problématiques posées par les réglementations actuelles qui peuvent constituer des irritants majeurs pour les entreprises québécoises, notamment certains décrets de convention collective, les taxes sur la masse salariale et certaines dispositions du régime de santé et de sécurité au travail.

En terminant, M. le Président, j'invite le député de Shefford – qui aime lire, à ce qu'on a vu ce matin, relire les budgets du Québec de 1996-1997 – à suivre méthodiquement les travaux du sommet de la semaine prochaine pour bien comprendre le processus de déréglementation en cours au Québec à l'heure actuelle et peut-être progresser au même rythme que le reste des Québécois et des Québécoises, M. le Président.

Des voix: Bravo!

(22 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, merci beaucoup. M. le député de Gouin... Merci beaucoup. Alors, M. le député de Shefford, pour compléter nos travaux, vous avez une réplique de deux minutes.


M. Bernard Brodeur (réplique)

M. Brodeur: Merci, M. le Président. On a eu droit encore au discours habituel: C'est la faute de l'autre. Ils ont fait plus de règlements que nous autres. Mon père est presque plus fort que le tien! Je ne le sais pas, là, si on est rendu à ça.

Ce que j'ai demandé tout simplement au premier ministre cet après-midi, ce que j'ai demandé du moins au premier ministre, c'est ce qu'il était pour faire dans l'avenir, d'une façon massive, pour déréglementer ou dérégimenter tout ce processus-là du Québec.

M. le Président, j'aurais aimé voir le premier ministre. Malheureusement... La ministre, je lui lève mon chapeau, elle a quand même fait son possible pour répondre, mais j'aurais aimé entendre le premier ministre. Je veux tout simplement lui dire qu'il n'y a personne qui sent ça, qu'on déréglemente, entre autres, les lois du travail au Québec.

Je citais Yvon Marcoux tantôt, et puis, lorsque la ministre me répondait, je lisais un autre petit bout, puis je vais le lui lire: «Ils veulent discuter d'une nouvelle réglementation», parlant des groupes de pression. Il dit ici, un peu plus loin, il déplore que rien n'a été fait en matière de réglementation depuis le rapport Gobeil. M. Gobeil n'était pas du Parti québécois, je crois, il était du Parti libéral, puis il dit qu'il n'y a rien qui a été fait depuis ce temps-là.

Donc, M. le Président, la masse réglementaire qu'on avait devant nous cet après-midi, ici, était très imposante. Et ce qu'on demande, et ce que tous les milieux d'affaires, et ce que tous les Québécois qui sont à la recherche d'emploi demandent, c'est qu'on puisse faire en sorte que les citoyens n'aient pas d'enfarge pour se trouver un emploi.

Et vous savez tout comme moi, et la ministre le sait aussi, on rencontre des gens dans nos bureaux de comté – du moins, pour ceux qui font du bureau de comté – qui, régulièrement, chaque semaine, nous interpellent parce qu'ils ne peuvent pas se trouver un emploi à cause de la réglementation, et particulièrement dans les lois du travail. Et je pense qu'elle a été de mauvaise foi, la réponse qu'on nous a donnée tantôt, qui, en fin de compte, est complètement hors contexte. On ne répond pas à la question. Tout simplement, tout ce qu'on voulait savoir...

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Dire «de mauvaise foi», c'est évidemment imputer un motif indigne à un député. Alors, j'aimerais bien que le député de Shefford retire ses paroles.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Shefford, vous connaissez les propos non parlementaires. Alors, je vous demanderais maintenant de retirer ces propos et de terminer votre intervention. M. le député.

M. Brodeur: M. le Président, j'aurais peut-être dû dire, sans intention, «induire cette Chambre en erreur». Mais il reste quand même, M. le Président, qu'on passe à côté de cette question fondamentale de déréglementation au Québec, une déréglementation qui est demandée par tous les citoyens, et je trouve presque honteuse la façon dont nous a répondu le premier ministre aujourd'hui, disant qu'il n'avait pas le temps de répondre à ces questions-là, puis, en fin de compte, il remettait ça à quelqu'un d'autre: C'est la faute des autres; ce n'est pas notre faute. Donc, c'est le discours habituel du gouvernement. On parle beaucoup, on fait de grands discours, mais on ne prend aucune action tangible pour, en fin de compte, enrayer le problème de l'emploi au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Shefford. Ceci met fin à nos travaux. Alors, j'ajourne les travaux de l'Assemblée au mercredi 23 octobre, à 10 heures.

(Fin de la séance à 22 h 4)