L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le lundi 16 décembre 1996 - Vol. 35 N° 70

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Président: Alors, mesdames, messieurs, nous allons débuter par une période de recueillement.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous allons débuter par les affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre de la Justice.


Rapport annuel du Procureur général du Québec sur la Loi sur la protection de la vie privée

M. Bégin: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995 du Procureur général du Québec, requis par l'article 195 du Code criminel, sur la Loi sur la protection de la vie privée.

Le Président: Alors, le document est déposé. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


Rapport annuel du ministère de l'Environnement et de la Faune

M. Cliche: Oui, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995 du bon ministère de l'Environnement et de la Faune.

Le Président: Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Rapport annuel de la Société du parc industriel et portuaire Québec-Sud

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 de la Société du parc industriel et portuaire Québec-Sud.

Le Président: Alors, ce document est déposé.


Lettre et avis du DGE proclamant Mme Nicole Léger candidate élue à la suite de l'élection partielle dans Pointe-aux-Trembles

Je vous avise de mon côté que M. le Directeur général des élections a fait parvenir une lettre au Secrétaire général en date du 16 décembre dernier, dont je vous lis l'extrait suivant:

«Conformément à l'article 380 de la Loi électorale, je vous transmets le nom de la candidate proclamée élue [...] à la suite de l'élection partielle tenue le 9 décembre dernier, en vertu d'un décret du gouvernement pris le 6 novembre 1996.»

Et c'est signé: Pierre-F. Côté, Directeur général des élections.

Alors, je dépose cette lettre accompagnée d'un avis proclamant Mme Nicole Léger candidate élue dans la circonscription électorale de Pointe-aux-Trembles.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des affaires sociales et député de Charlevoix.


Étude détaillée du projet de loi n° 41

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé le 13 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 41, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux concernant les contrats d'assurance de responsabilité de certains établissements. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements, dont un au titre.

Le Président: Merci, M. le député de Charlevoix. M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Laurier-Dorion.


Étude détaillée du projet de loi n° 50

M. Sirros: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 12 et 13 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 50, Loi sur la Régie de l'énergie. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.


Étude détaillée du projet de loi n° 78

J'ai également le plaisir et l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 10 et 11 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 78, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives à l'industrie de la construction. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements également.

Le Président: Ces deux rapports sont déposés. J'invite maintenant Mme la présidente de la commission de l'aménagement et des équipements et députée de Mégantic-Compton.


Étude détaillée du projet de loi n° 43

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 11 et 12 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 43, Loi sur les véhicules hors route. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.


Maintenir les loyers dans les logements sociaux à 25 % des revenus des locataires, augmenter leur nombre et assurer la protection des HLM

M. Boulerice: Je dépose l'extrait d'une pétition à l'Assemblée nationale, signée par 680 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Hochelaga-Maisonneuve.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le gouvernement du Québec s'apprête à réviser ses programmes en habitation et que les mesures envisagées menacent directement plus de 800 000 ménages à faibles revenus déjà très affectés par d'autres compressions budgétaires;

«Considérant l'augmentation importante des loyers dans les HLM, les coopératives et les autres logements sans but lucratif afin de puiser 50 000 000 $ dans les poches des 85 000 locataires;

«Considérant le retrait graduel du financement de nouveaux logements sociaux – notamment par le gouvernement fédéral;

«Considérant l'abolition du remboursement d'impôts fonciers, RIF, afin de récupérer 133 000 000 $ auprès de 724 000 ménages;

«Considérant le transfert de la propriété des HLM aux municipalités sans aucune mesure garantissant qu'ils ne pourront être privatisés et que les droits des locataires seront protégés;

(10 h 10)

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir afin de: maintenir les loyers et les logements sociaux à 25 % des revenus des locataires; augmenter le nombre de logements sociaux réalisés chaque année; sauvegarder le remboursement d'impôts fonciers (RIF); et, enfin, assurer la protection intégrale des HLM et le traitement équitable des locataires où qu'ils demeurent au Québec par le maintien de normes nationales strictes.»

Et je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas, aujourd'hui, d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période des questions et des réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le ministre de la Justice proposant que le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, soit adopté.

Et nous en arrivons... M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, compte tenu, quant à l'appel de ce vote, que le premier ministre a déjà annoncé qu'il y aurait une rencontre entre lui-même et les représentants du Barreau du Québec demain, est-ce que le leader du gouvernement a évalué la possibilité fort logique de reporter le vote après la rencontre pour que le premier ministre puisse, dans un premier temps, s'exprimer et, deuxièmement, que le premier ministre puisse montrer au moins un signe de respect envers le Barreau du Québec qu'il va rencontrer? Si on vote avant, il n'y aura plus rien à faire après, là.

Le Président: M. leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je crois que l'opposition a eu amplement le temps pour s'exprimer sur ce projet de loi et le vote ne sera pas reporté.


Questions et réponses orales

Le Président: Alors, nous allons débuter la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle, en principale.


Contre-proposition du gouvernement concernant la réduction de la masse salariale dans la fonction publique

M. Johnson: Oui. Les négociations ou ce qui tient lieu d'apparentes discussions ou négociations dans le secteur public ont l'air de plus en plus d'un truc de magie où le magicien a échappé ses cartes un petit peu partout sur la table, en dessous de la table. La proposition telle qu'elle est comprise à ce moment-ci par des dizaines de milliers de Québécois qui suivent ça de proche et qui est à la veille d'être comprise par tout le monde, y compris les travailleurs du secteur public, c'est un peu comme si un groupe de 100 personnes avaient, pendant de nombreuses années, par déductions à la source, versé dans une caisse afin de se doter d'un régime de retraite, d'avoir une pension et que tout d'un coup il y a un petit génie qui s'aperçoit que, peut-être, on a trop versé depuis quelques années et qui donne l'occasion, sur 100 personnes, à quatre d'entre elles de prendre un numéro. Il dit: Les quatre premiers, vous allez partir avec l'argent que les autres ont mis de côté pendant 15, 20 ou 25 ans. Il y a de plus en plus de travailleurs du secteur public qui sont en train de s'apercevoir que l'argent qu'ils ont mis dans un régime de retraite est en train de disparaître, que les cotisations ont peut-être été trop élevées et qu'au lieu de leur être retournées comme le voulait la proposition gagnante du premier ministre, qui consistait à retourner à tout le monde l'argent de tout le monde, on est en train de retourner à quatre personnes sur 100 l'argent de tout le monde.

Plus on approche, plus on avance, est-ce que ça n'a pas l'air, dans le fond, d'une espèce de petit «deal» qui a été concocté entre le premier ministre et les chefs syndicaux – autrement dit les partenaires de la souveraineté, où il manque seulement le député de Rivière-du-Loup et M. Parizeau – pour faire en sorte que le gouvernement paraisse génial, alors qu'il est en train de concocter ça sur le dos des travailleurs, notamment les travailleurs de la santé?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je vois le chef de l'opposition qui essaie de s'intercaler, en quelque sorte, dans les négociations ou l'amorce de négociations qui est en cours à l'heure actuelle. Je rappellerai des choses à ce sujet: d'abord, que les droits individuels acquis dans les régimes de pension sont protégés; je rappellerai que, dans le RREGOP, il y a 7 000 000 000 $ de surplus, de provisions actuarielles dis-je, plus un autre 1 000 000 000 $ dans les autres régimes, ce qui fait 8 000 000 000 $. Ce qui est amplement suffisant, parce que c'est une norme de 37 %, alors que, normalement, on se satisfait de 25 % des engagements dans les fonds de pension. Alors, les sommes dont nous parlons, les provisions dont nous parlons sont des provisions excédentaires aux 8 000 000 000 $. Et, dans l'entente ou la contre-proposition gouvernementale, il est bien dit, au point 3, que ce programme, l'accessibilité ou un programme d'accessibilité bonifié serait financé «par l'utilisation des excédents actuariels constatés conjointement». Donc, nous demandons à nos partenaires, les organisations syndicales, de venir en discuter, de les constater, de critiquer s'il y en a assez, s'il y en a trop, etc., pour constater le montant de ces provisions actuarielles additionnelles.

Alors, c'est la proposition que nous avons faite. La première était de la redistribuer pour compenser une réduction du temps de travail et une réduction des salaires, mais, présentement, la partie de nos organisations syndicales préférerait que ce soit, à ce stade-ci, plutôt utilisé pour bonifier un régime d'accessibilité à la retraite.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Étant donné que le président du Conseil du trésor – il aurait intérêt à relire sa réponse – a encore jeté beaucoup de confusion entre provisions, d'une part, pour la retraite et excédents et surplus, d'autre part... Il se relira. Il emploie indifféremment provisions et surplus, je l'ai entendu, là. Il y a des provisions et il y a des surplus, c'est deux choses, mais la source étant la même, M. le Président: ce sont les cotisations des employés. Ça ne vient pas, ce n'est pas l'intervention du Saint-Esprit, là, qui a créé des excédents et des surplus au-delà des provisions; ce sont les cotisations des employés, dont on apprend aujourd'hui qu'elles étaient suffisamment élevées pour pouvoir leur être retournées en compensation d'une diminution de salaire brut. Ça ne fonctionne plus.

Mais est-ce que le président du Conseil du trésor ne conviendra pas que ce qui est en train de se passer, c'est que les cotisations aux régimes de retraite de tout le monde, de 375 000 personnes ou à peu près, vont être offertes à 15 000 de ces personnes et qu'il y en a 360 000 qui vont payer, à même les surplus, afin de faciliter le départ de 15 000 de leurs collègues et qu'eux n'auront rien? C'est ça.

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, d'abord, je voudrais continuer, dans le cas présent, la lecture du troisième paragraphe de l'entente parce que ça me paraît important. Je vois que j'aurais dû continuer tout à l'heure parce que le chef de l'opposition ne l'a pas lu au complet.

Ces programmes seraient financés «par l'utilisation des excédents actuariels constatés conjointement au régime de retraite et par un montant au moins équivalent que le gouvernement est prêt à y consacrer». Donc, ce ne sont pas que les employés qui financent.

Une voix: Voilà!

M. Léonard: Il faut le dire. Je le répète, c'est le premier paragraphe du point 3 de la contre-proposition gouvernementale. Bon. Pour ce qui est du reste, M. le Président, nous demandons aux organisations syndicales de s'asseoir à la table pour en parler entre le 1er janvier et le 28 février. On sait qu'un régime de retraite est fondé sur un principe de solidarité entre les participants. Il y en a aussi qui en profitent plus que d'autres parce qu'ils vivent plus longtemps, mais c'est le principe de la solidarité...

Une voix: C'est ça.

M. Léonard: ...qui est en cause. Donc, nous allons en parler et nous offrons d'en parler avec nos vis-à-vis, les organisations syndicales. J'arrête là pour l'instant, M. le Président, mais il faut quand même constater que cinq des responsables de ces organisations syndicales ont recommandé l'entente et que le sixième a dit qu'il en parlerait positivement. Alors, maintenant, les débats se déroulent à l'intérieur des centrales, certaines dans des instances telles que le conseil général et d'autres qui en sont rendues aux syndicats de base. Alors, laissons évoluer les choses.

Le Président: En principale, M. le député de Robert-Baldwin.


Plan de redéploiement des employés du réseau de la santé et des services sociaux

M. Marsan: M. le Président, selon la Régie régionale de Montréal, le plan de redéploiement des employés du réseau de la santé est un véritable fiasco. Un quotidien confirmait ce matin que plus de 3 000 employés syndiqués demeurent payés mais sans emploi à la suite de la fermeture de plusieurs hôpitaux. S'ajoutent à ce fiasco les 30 000 membres du Syndicat canadien de la fonction publique et près de 100 000 employés syndiqués de la Fédération des affaires sociales qui refusent les offres du gouvernement parce qu'ils savent que ce sont eux qui feront les frais de la politique «donne avant le référendum, "dédonne" après le référendum» du gouvernement péquiste.

(10 h 20)

M. le Président, le ministre de la Santé, qui s'est toujours vanté que sa réforme avait été planifiée dans les moindres détails, peut-il nous expliquer tous ces fiascos?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, le terme «fiasco» fait partie de la manchette ce matin et non pas du rapport. Évidemment, ça aide à vendre des journaux quand on fait des manchettes de ce genre-là. Mais il est très exagéré de parler de fiasco. Et j'ai déjà eu l'occasion de dire et de redire souvent au cours des derniers mois que, malgré toutes les améliorations qu'on a pu apporter à la convention collective lors de son renouvellement l'an dernier, nous avons des systèmes de gestion du personnel, surtout quand il est question de déplacer beaucoup de personnes comme c'est le cas dans la réorganisation qui est en cours actuellement où on doit déplacer beaucoup de personnes dans un laps de temps assez court, et on a, malgré des améliorations, encore beaucoup trop de rigidité et dans les règles de gestion du côté du système de santé et dans les conventions collectives. C'est très clair. On est allés jusqu'au maximum de ce que les modifications ont permis de faire, parce que ça aurait été pire si on était restés avec les anciennes conventions. Mais il y a effectivement encore beaucoup à changer pour mettre beaucoup plus de flexibilité, de souplesse et une meilleure capacité de planification et de formation de main-d'oeuvre pour compléter cette opération.

Le problème, il est clair, il est connu. La Régie a fait rapport. Et, comme nous avons dans nos conventions une clause qui prévoyait qu'après une année d'expérience, sur la base des connaissances acquises par expérience, on se rassoirait ensemble, les deux parties, les syndicats et les gestionnaires, pour voir comment on pourrait améliorer encore le système, c'est ce à quoi nous avons convié nos partenaires syndicaux. Moi, je suis convaincu que, sur la base de l'expérience qu'on a depuis un an, on a tout ce qu'il faut pour ajuster le système et compléter l'opération. Mais, effectivement, on a encore un système qui n'a pas tous les éléments pour ça. Dans les prochains mois, avec la bonne volonté de tout le monde, on devrait être capable de changer la situation de façon importante, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Échéancier des négociations concernant la réduction de la masse salariale dans la fonction publique

M. Chagnon: Merci, M. le Président. La semaine dernière, questionné sur le dossier des négociations, le premier ministre nous disait qu'il y avait deux échéanciers à respecter: un aujourd'hui et un le 1er janvier. On sait qu'on a joué beaucoup à saute-mouton avec les dossiers et surtout les échéanciers. Aujourd'hui, c'est l'échéancier de la récupération du 100 000 000 $ à partir du 1er janvier 1997 jusqu'au 31 mars 1997.

Ma question fort simple, M. le Président, au président du Conseil du trésor: Quelle est la ventilation de la récupération du 100 000 000 $ de la masse salariale qui doit être récupéré à partir du 1er janvier, puisque, aujourd'hui, c'est l'échéancier pour cette question-là?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, à ce stade-ci, il n'y a pas de ventilation parce que nous devons en parler à la table entre le 1er janvier et le 28 février. Alors, nous invitons nos partenaires à venir en discuter, mais c'est l'état des choses à l'heure actuelle.

Maintenant, si le député veut faire des ventilations approximatives, libre à lui de le faire, parce que, évidemment, lorsqu'un ministère représente 33 % des dépenses de programmes d'un gouvernement, qu'un autre en représente moins, 25 %, un autre en représente 3 %, c'est sûr que ce ne sera pas le même effort demandé.

Le Président: M. le député de Westmount– Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le ministre a déjà oublié ce que le premier ministre nous disait pas plus tard que mercredi dernier, c'est-à-dire que c'est jusqu'à lundi prochain pour statuer sur les mesures qui seront prises, parlant d'aujourd'hui, pour réaliser une économie de 100 000 000 $ d'ici le 31 mars – pas, à partir du 1er janvier, on négocie; c'est aujourd'hui, l'échéancier des négociations – et c'est quoi, la ventilation?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, on devait avoir des réponses sur ces mesures. Je souligne au député que le 15 décembre, ça se termine à minuit ce soir et que nous verrons par la suite. Par ailleurs, quand on...

Des voix: C'est le 16.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Léonard: Ah, c'est le 16 aujourd'hui! Alors, M. le Président...

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, oui, nous attendons des réponses. Et le dimanche, c'est en fait jour chômé, je suppose que c'est aujourd'hui que les réponses vont rentrer. Ça, c'est au moins ce qu'on peut se dire aujourd'hui.

Nous savons par ailleurs que, par exemple, le Syndicat canadien de la fonction publique doit tenir un conseil général cet après-midi où il va aviser, en tout cas, quant à ses recommandations au Syndicat.

Par ailleurs, M. le Président, nous demandons des lettres d'entente, parce que nous sommes toujours dans le contexte d'une entente négociée, et, sur les 100 000 000 $, nous avons, quant à nous, imposé une obligation de résultat pour le 31 mars, parce que l'année se termine le 31 mars. Alors, les discussions continuent, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: Est-ce que le ministre réalise que c'est la quatrième fois que les échéanciers sont reportés dans ce dossier de négociations? Est-ce que le ministre pourrait nous en donner un cinquième, échéancier, au moins pour nous faire rire, s'il vous plaît?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, quand on parle d'une quatrième fois, je pense que ce n'est pas tenir compte d'un contexte de négociations tel que nous l'avons. Et le député admettra que les négociations ont évolué très favorablement depuis le début. Les discussions, je devrais dire, ont évolué très favorablement.

Aujourd'hui, si nous faisons le bilan, nous avons, comme je l'ai dit tout à l'heure, l'accord de cinq dirigeants d'organisations syndicales plus le fait que la sixième a dit qu'elle parlerait positivement à ses instances de la proposition et de la contre-proposition du gouvernement.

Je pense que nous sommes en voie vers une entente négociée. C'est ce que tous souhaitent. C'est ce que tout le monde souhaite. Est-ce que l'opposition souhaite le contraire? Moi, je pense que non. Pour le bien de la société québécoise, il faut souhaiter une entente négociée. C'est ce que nous faisons, nous nous donnons toutes les chances.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Accueil par les syndicats de la contre-proposition du gouvernement concernant la réduction de la masse salariale dans la fonction publique

M. Chagnon: M. le Président, je pense que la bonne foi, et la respectabilité, et la responsabilité de l'opposition ne pourront jamais être remises en question sur ce dossier.

Ceci étant dit, nous devons toutefois, M. le Président, constater des faits: la Fédération des affaires sociales, 95 000 membres, a suggéré à ses membres de dire non à la proposition ou à la contre-proposition du gouvernement; le Syndicat canadien de la fonction publique recommande à ses membres de dire non, ils sont 30 000. C'est en gros tout le secteur de la santé qui est en train de dire non: Non à l'échéancier d'aujourd'hui et non à la proposition de négociations à partir du 1er janvier.

M. le Président, dans le secteur de l'éducation, après la discussion que nous avons eue ensemble vendredi dernier, je pense que le ministre peut conclure que, compte tenu du ratio maître-élèves qui regroupe et qui fait en sorte de gérer l'emploi de chaque enseignant, la contre-proposition gouvernementale est à peu près inutilisable dans le dossier de l'éducation. Qui reste-t-il, M. le Président, pour accepter la perte de 15 000 postes dans les secteurs public et parapublic si le réseau de la santé et si le réseau de l'éducation ne sont pas touchés?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je voudrais d'abord dire au député que l'année financière 1996-1997 se termine le 31 mars et que nous avons jusqu'au 31 mars pour réaliser le 100 000 000 $. Nous proposons de le faire par négociation; c'est ce que nous ferons du 1er janvier au 28 février. Donc, sur ce plan-là, le député n'a pas à s'inquiéter. Mais nous souhaitons avoir des précisions et des engagements de la part des organisations syndicales, ce que nous sommes en train de discuter présentement.

Deuxièmement, en ce qui concerne le secteur de la santé, je rappellerai au député qu'il y a aussi une phrase, dans le troisième paragraphe, qu'il aurait intérêt à relire et qui dit ceci: «Dans l'atteinte de cet objectif – de réduction du personnel – les parties conviendront au besoin des mesures de réorganisation favorisant la qualité du travail et des services.»

(10 h 30)

Et cela, M. le Président, fait référence au contenu des ententes convenues en 1995 à l'effet que les parties s'assoiraient à la même table pour discuter de mesures dans le cas où il y aurait des problèmes budgétaires qui, d'ailleurs, avaient été déjà évoqués à l'époque. Donc, c'est dans ce contexte-là que ces discussions se font.

Je le corrige sur un point: le Syndicat canadien de la fonction publique n'a pas encore fait de recommandation négative, ils en décideront cet après-midi. Le président a dit ce qu'il en pensait, mais la décision des instances n'a pas encore été prise. Quant à l'éducation, l'éducation convient qu'il y a matière à discussion et à s'asseoir pour discuter de la façon de remplir ou de permettre à des gens de prendre une retraite anticipée.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le ministre peut répondre à la question que je lui ai posée, à savoir: Comme le prévoit la contre-proposition, ces mesures devront favoriser le départ sans remplacement et, si le secteur de la santé n'accepte pas la contre-proposition, si elle n'est pas applicable dans le secteur de l'éducation parce qu'on ne peut pas ne pas remplacer les professeurs qui seraient touchés par cette mesure puisqu'il y aura toujours des élèves devant eux dans les classes, qui des 15 000 postes abolis ou des 15 000 postes touchés cible-t-il dans la fonction publique?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, ce que je perçois des questions du député, c'est qu'il essaie d'inquiéter certaines personnes dans l'ensemble. Ceci étant dit, la CEQ elle-même a convenu qu'il y avait matière à discussion et à négociation du 1er janvier au 28 février. Elle-même, la CEQ. Donc, elle-même perçoit qu'il y a des solutions. Où que ce soit dans le réseau, il reste qu'il peut y avoir des solutions.

Et je dois rappeler au député que l'an dernier aussi, dans la convention, il y avait un 100 000 000 $ qui devait être trouvé pour compenser pour les augmentations salariales, lequel 100 000 000 $ a été trouvé. Alors, si je le suivais sur son terrain, on pourrait dire que, non, ce n'était pas possible, mais cela fut possible.

Donc, à partir du moment où l'on a fait un pas, peut-être qu'il y a un autre pas qui peut être fait. Et, quand il dit que ce n'est pas applicable dans l'éducation, non, pas du tout, c'est applicable, justement, le passé l'a démontré.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le ministre ne se rend pas compte que, dans le fond, ce n'est pas tellement la réaction de l'opposition qui importe là-dedans, c'est la réaction des membres et des syndiqués qui s'aperçoivent, jour après jour, heure après heure, de la plus grande improvisation que le gouvernement leur offre aujourd'hui dans cette contre-proposition? Ils s'apprêtent justement à répondre à cette contre-proposition.

Le Président: M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, quand on parle d'improvisation, je dirais que l'une des premières déclarations de M. le premier ministre sur le sujet a évoqué très nettement qu'il pouvait s'agir de 25 000 emplois en cause, ou bien la proposition gouvernementale. À l'heure actuelle, nous avons une contre-proposition sur 15 000 emplois. Alors, je pense qu'il n'y a pas du tout là d'improvisation. Je dirai aussi, le surplus, que ce sont les centrales syndicales elles-mêmes qui ont évoqué l'idée, par la suite, d'utiliser plutôt des programmes d'accessibilité à la retraite, des programmes bonifiés d'accessibilité à la retraite. Alors, tout le monde s'est entendu sur cette contre-proposition. Moi, je pense que le député devrait féliciter le premier ministre du Québec d'avoir réussi à nous amener tout près d'une entente négociée.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui. Comme le président du Conseil du trésor sait qu'il n'y a pas de régime de retraite par établissement, il n'y en a pas par syndicat non plus, il n'y en a pas par secteur d'activité, est-ce qu'il pourrait nous expliquer ce qui arrive lorsque 125 000 personnes disent: L'argent de mes cotisations pour mon régime de retraite, c'est à moi, ce n'est pas aux autres? Est-ce qu'il est capable de nous dire aujourd'hui comment il va respecter le choix de dizaines de milliers de travailleurs du secteur public de dire: Le surplus de mon régime de retraite, c'est à moi, puis ce n'est pas aux autres, puis ce n'est certainement pas concocté, là, par les partenaires de la souveraineté que ça va se décider? Que ça appartient aux travailleurs du secteur public? Comment va-t-il les respecter, ceux qui veulent garder leur argent pour leur retraite?

Le Président: M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, j'aurais le goût de dire au chef de l'opposition que sa question, à ce stade-ci, est encore hypothétique, parce que tous les syndicats ne se sont pas prononcés, tous les syndicats de base, à la FAS ou autrement, ne se sont pas encore prononcés. Et puis je dirais aussi que, justement, nous avons des négociations qui vont commencer le 1er janvier, jusqu'au 28 février, et donc nous allons en débattre, de cette question, et nous souhaitons que tout le monde soit assis à la table pour en parler. Et c'est dans ce contexte que nous invitons tous nos partenaires syndicaux à venir négocier. On verra. On verra le résultat de la négociation. Nous faisons l'hypothèse, à ce stade-ci, qu'elle sera positive et qu'elle nous conduira à une entente négociée et signée.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Viau.


Réorganisation des services de transplantation

M. Cusano: Merci, M. le Président. Depuis les 10 dernières années, les hôpitaux transplanteurs de la grande région de Montréal ont acquis une réputation mondiale, que ce soit en transplantation de rein, de coeur, de poumon, de foie ou de pancréas. En effet, ces chirurgiens, qui ont acquis cette expertise enviable, sont sollicités par des centres canadiens et américains pour prendre la charge de leur programme de transplantation, que ce soit le Dr Guerraty, qui est maintenant en Virginie, que ce soit le Dr Latter, qui est maintenant à Toronto, que ce soit le Dr Lévy, qui est maintenant à Vancouver. Depuis que le ministre de la Santé s'occupe de ce dossier, c'est le bordel. Le ministre insiste pour fermer des centres transplanteurs à Montréal, où il y a de l'expertise, et à en ouvrir un à Québec, où il n'y a aucun médecin qui a déjà fait de la transplantation pulmonaire.

Une voix: Ça n'a pas d'allure.

M. Cusano: Et l'absurdité du siècle, M. le Président, c'est qu'on apprend que les transplantations pulmonaires à l'hôpital Laval de Québec seront faites sous la tutelle de docteurs transplanteurs de Toronto.

Ma question, M. le Président: Ne serait-il pas plus simple, ne serait-il pas moins humiliant, ne serait-il pas beaucoup plus efficace de permettre aux centres de transplantation de Montréal de continuer à sauver des vies, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, je pense que le député de Viau est parti sur une chasse aux sorcières qui va l'amener je ne sais pas trop où. Il n'y a pas du tout, il n'y a pas du tout de plan pour fermer les centres de transplantation à Montréal et empêcher que des patients aient les services qui leur sont requis, absolument pas, M. le Président.

Ce dont il est question dans tout le domaine de la transplantation, c'est de bien équilibrer le réseau que l'on a dans l'ensemble du Québec. Il s'agit là d'un service surspécialisé. Pour certaines transplantations, on en est encore à la phase d'évaluation des traitements, on n'a pas encore atteint des traitements qui sont définitifs, bien établis comme c'est le cas pour la transplantation rénale, par exemple. Quand on parle de la transplantation pulmonaire, il y a beaucoup de travaux d'évaluation qui sont à compléter présentement. Tout ce que l'on fait, et en incitant la collaboration des équipes qui sont en place, c'est de s'assurer que nos meilleurs talents, dans l'ensemble du Québec, sont mis en réseau, travaillent ensemble et assurent le développement des connaissances de façon la plus rapide et assurent la meilleure qualité de services qu'on peut donner aux patients. C'est ça qui se passe. Il n'y a pas du tout d'opération de chasse pour fermer des centres; au contraire, on travaille pour les consolider, M. le Président.

M. Cusano: En complémentaire, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Cusano: Est-ce que le ministre est en train de dire le contraire de ce qu'il a dit il y a deux, trois semaines, M. le Président? Il y a deux, trois semaines, il nous a dit qu'à l'hôpital Notre-Dame il ne se ferait plus de transplantation pulmonaire. Dans mon langage, M. le Président, ça, ça veut dire que le centre est fermé. Il continue à dire qu'il va faire de la transplantation pulmonaire à Québec. Il n'y a pas de transplanteurs qui sont qualifiés pour en faire, M. le Président. Est-ce que le ministre peut me dire où il va aller chercher, pour le centre de Québec, des transplanteurs qui ont de l'expertise?

(10 h 40)

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, le député doit bien le savoir, parce qu'il semble bien intéressé à la question et la suivre de près, qu'il n'est pas du tout question de fermer quoi que ce soit. Il fait sûrement référence au campus Notre-Dame du Centre hospitalier universitaire de Montréal, qui est effectivement un centre de transplantation multiorganes. On fait beaucoup de transplantations, peut-être, depuis cinq ans – j'essaie de me rappeler des chiffres, là, de mémoire – quelques centaines de transplantations de reins, transplantations hépatiques, transplantations cardiaques, de toute nature, et plus récemment, depuis un an, un an et demi, on avait commencé des transplantations pulmonaires, et c'est à peu près au rythme de 15 qu'on en fait par année, sur les quelques centaines de transplantations pour d'autres organes qui sont faites régulièrement.

Donc, il n'est pas question de rien, rien fermer. Il a été question – et là on revient sur une histoire qui remonte à plusieurs mois... De mémoire, on peut se rappeler qu'il a été question de voir comment, pendant les prochaines années, on pourrait s'assurer d'offrir un service de grande qualité pour les transplantations pulmonaires. Et la situation à Montréal étant celle où plusieurs hôpitaux devaient concourir et se coordonner, de façon difficile, pour assurer le service, un répit pourrait leur être donné en utilisant mieux des ressources que l'on a à l'institut de cardiologie et de pneumologie, à Québec, pour pouvoir faire ces transplantations-là. Et on a même suscité une collaboration entre Montréal et Québec là-dessus simplement pour s'assurer que les transplantations qui doivent être faites, elles soient faites à l'endroit qui est le plus propice pour les gens. Et je peux vous assurer qu'on ne laissera aucun centre commencer à faire des transplantations si les équipes ne sont pas complètes et ne sont pas capables de donner les services avec qualité, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Cusano: Complémentaire très courte au ministre de la Santé, M. le Président: Qui va superviser les transplantations pulmonaires qui seront faites, selon lui, à partir du 15 janvier 1997 à l'hôpital Laval?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Le début des transplantations à l'hôpital Laval a été prévu au début de l'année 1997. Il n'y a pas une date et une heure butoir. Présentement, on sait que ce centre-là, qui a déjà une équipe de pneumologues de 17 médecins, dont cinq ou six, je pense, ont un intérêt et une spécialisation dans le domaine de la greffe pulmonaire, qui a des chirurgiens aussi qui sont présentement en formation, et il y a des ententes avec d'autres centres où les chirurgiens sont en formation et qui assurent une collaboration avec l'institut de cardiologie et de pneumologie à Laval.

Ce qui va arriver, M. le Président, va correspondre, va suivre les lignes de l'entente qu'on est après établir pour que les patients aient des transplantations à l'endroit qui est le mieux équipé pour les faire. C'est sûr qu'on ne laissera pas un centre faire des transplantations s'il n'y a pas des médecins qualifiés pour les faire. Quand Laval commencera à faire des transplantations, l'assurance de qualité va être là, et le tout est supervisé par le Conseil médical du Québec, le Fonds de la recherche en santé du Québec et le Collège des médecins du Québec pour avoir une expertise d'autorité externe, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé peut nous répondre, si tout va bien comme il dit que ça va, est-ce qu'il peut nous répondre alors comment se fait-il qu'il y avait cet article dans le journal d'hier, La Presse , disant que l'hôpital Laval cherche de l'aide à Toronto pour son programme de greffe pulmonaire, alors qu'on avait toute la compétence à Montréal?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Il y a de la compétence à Montréal, c'est vrai, en ce qui concerne les chirurgiens qui ont commencé il y a à peu près un an et demi à faire des transplantations pulmonaires. Mais, à Montréal, pour pouvoir développer le programme, on demandait des fonds additionnels, parce que la transplantation pulmonaire, pendant toute cette année et demie là où on a commencé à en faire, n'a pas été priorisée à l'intérieur des centres où on les faisait pour pouvoir réunir toutes les opérations sur un seul site, avec tout le suivi, et donner les ressources et les priorités nécessaires à ce type d'opération. Ce n'est pas que les gens qui étaient là n'étaient pas compétents, il n'y avait pas une priorisation et une allocation de ressources suffisantes pour avoir le traitement de qualité qu'il fallait, alors qu'on avait et qu'on a toujours à Québec, par ailleurs, un institut qui est spécialisé dans le domaine et qui s'acheminait pour commencer des traitements dans le domaine de la transplantation aussi, avec une priorisation complète, deux salles d'opération en disponibilité tout le temps, et qui aura à terme, quand les transplantations vont commencer, deux équipes, deux salles d'opération, capables de faire deux opérations, deux interventions en même temps, s'il s'agissait de transplanter un coeur et un poumon en même temps.

Cette équipe est en collaboration avec différents centres dans le monde et, si je comprends bien aussi ce que j'ai lu dans le journal, ils sont aussi en collaboration avec une équipe à Toronto, qui est une des équipes qui a la plus large, la plus vaste et la plus longue expérience. C'est tout à fait normal que des milieux universitaires où on fait de la recherche et du développement de services se tiennent en réseau avec les meilleurs centres dans le monde pour qu'on soit assuré de la qualité du service, M. le Président.

Le Président: M. le député des Îles-de-la-Madeleine, en principale.


Négociations entourant la réouverture de l'usine de transformation de poisson de Newport, en Gaspésie

M. Farrah: Oui, merci, M. le Président. Vendredi dernier, soit le 13 décembre, on a appris que le gouvernement maintenait son choix dans le dossier de la réouverture de l'usine de pêche de Newport en Gaspésie, soit la firme américaine Newport Sea Products. Par ailleurs, M. le Président, on apprenait que la compagnie américaine n'avait pas encore obtenu de garantie bancaire d'une institution financière reconnue et n'a toujours pas déposé de demande de permis d'exploitation de l'usine. De là, M. le Président, la question: Est-ce qu'il y a vraiment une volonté de transformation de cette compagnie, alors qu'elle ne fait même pas la demande de permis de transformation?

L'autre question qu'il faut se poser, M. le Président, c'est: Comment avoir choisi cette usine-là, alors qu'elle n'a même pas respecté les critères de sélection?

Alors, M. le Président, la population de Newport, qui dénonce l'improvisation du ministre dans ce dossier, ne croit plus, avec raison, ce gouvernement qui lui a promis pendant deux ans une ouverture imminente de cette usine.

Alors, ma question au ministre délégué aux Pêcheries, M. le Président: Comment le ministre peut-il justifier son choix, quand on sait qu'il n'a même pas lu le plan d'affaires de la compagnie, tel qu'il l'avouait en conférence de presse vendredi dernier?

Une voix: Ça se «peut-u»!

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: M. le Président, ça fait un peu plus de deux ans parce que c'est une usine qui a été fermée dans le temps des libéraux. Ça fait deux ans et un peu plus. Nous, on a pris l'engagement de la rouvrir et on va la rouvrir.

Maintenant, qu'est-ce qu'on a fait? Je comprends aussi l'impatience des gens à Newport, parce qu'on a conté beaucoup de choses dans ce dossier-là. Je pense que Mme Beauchamp et le maire font tout ce qu'il faut pour rouvrir cette usine-là. Et, nous, on va le faire aussi.

Au printemps dernier, j'ai donné le mandat à SOQUIA d'analyser toutes les propositions susceptibles de faire la relance de cette usine-là. Il y en a eu deux. On a engagé une firme d'experts, cette firme d'experts là, on les a rencontrés, on a discuté avec eux des modalités et ils nous ont fait une recommandation sur l'usine en question. Nous, comme gouvernement, pour aller encore plus vite, on a préparé un décret qui m'autorise à signer, lorsque les conditions auront été remplies, le bail – et ça, c'est normal – et finalisé la demande du permis de pêche. Et ça, c'est dans toute transaction. C'est là qu'on en est rendu. «That's it».

Une voix: «That's it»!

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: «That's it, that's all»!

Le Président: M. le député.

M. Farrah: M. le Président, le ministre est-il conscient... Comment la population peut le prendre au sérieux alors qu'il n'a même pas lu le plan d'affaires? Et jamais, jamais le ministre nous a dit pour quelles raisons l'offre de Newport Sea Products est meilleure que celle de Tataris, qui est une compagnie québécoise. Alors, au lieu de vous cacher derrière un comité d'experts, dites-nous pourquoi vous choisissez cette compagnie au détriment de l'autre. C'est quoi qu'elle a de meilleur que l'autre compagnie? Répondez donc aux vraies questions.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Julien: M. le Président, les transactions d'affaires, ça se fait en privé. Il n'est pas question pour l'instant que je dévoile quoi que ce soit publiquement. Lorsqu'on va signer le bail, vous aurez toutes les informations pertinentes. Alors, arrêtons de faire courir des rumeurs sur quoi que ce soit. C'est en négociations, je n'irai pas dans le public avec des négociations privées, il n'en est pas question.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Farrah: M. le Président, le ministre pourrait-il nous dire la vraie raison, si ce n'est le fait qu'il n'exerce plus aucun pouvoir dans son ministère, qu'il serait sous la tutelle du «bunker» et que le choix de cette compagnie, c'est le choix du premier ministre, M. le Président?

Des voix: Oh!

Le Président: M. le ministre.

M. Julien: J'aimerais rappeler à mon collègue le député des Îles que, lorsqu'on a un dossier qui concerne plusieurs ministères, parce qu'il y a le ministère de l'Agriculture, il y a SOQUIA, il y a le ministère des Finances, il y a un minimum de coordination qui doit se faire versus une décision ministérielle.

Une voix: C'est ça.

(10 h 50)

M. Julien: Je pense que le rôle du cabinet du premier ministre, c'est celui-là. Ça ne s'est pas fait dans la nuit, comme dans la loi 142, au niveau de la construction, où on ne savait pas ce qui se passait là. C'est clair, c'est bien fait. C'est ça qui va se passer.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Jacques-Cartier, en principale.


Rôle des garderies à but lucratif dans les services à la petite enfance

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. En décembre 1994, un jeune entrepreneur de la région de Montréal a obtenu une garantie de prêt de la Société de développement industriel afin de lancer une entreprise, une garderie de 30 places à but lucratif. En septembre 1995, la garderie démarrait et obtenait un permis de l'Office des services de garde à l'enfance suite à la levée du moratoire de la ministre. La semaine passée, ce même entrepreneur apprenait que sa garderie ne fera pas partie du nouveau réseau des centres à la petite enfance; et, d'ici à l'an 2000, il sera obligé de fermer les portes de sa garderie, qui a reçu l'appui financier d'un autre ministère de ce même gouvernement.

Ma question à la ministre de l'Éducation: Peut-elle confirmer que les garderies à but lucratif seront exclues de son nouveau système et que cette décision va occasionner la fermeture de 400 garderies et la perte de 3 500 emplois?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je remercie le député de sa question. Il est évident qu'avec le nombre de places que nous avons en garderie nous ne pouvons nous priver d'aucune place. Celles disponibles dans le réseau des garderies à but lucratif seront aussi mises à profit, M. le Président.

Nous déposerons au début de janvier le livre blanc concernant la politique familiale et particulièrement, évidemment, tout ce qui a trait à la politique à la petite enfance, soit les services de garde, les services de maternelle et de prématernelle. Nous aurons l'occasion à ce moment-là de voir comment nous travaillerons avec les garderies à but lucratif de telle sorte qu'on puisse utiliser leurs services et qu'elles puissent être intégrées dans l'ensemble des services à la petite enfance, en respectant leurs particularités mais en ne se privant pas d'excellents services qu'on y retrouve dans la majorité des cas, M. le Président.

M. Kelley: Mais est-ce que la ministre peut expliquer comment ce jeune entrepreneur a reçu ces renseignements en appelant au cabinet de la ministre elle-même? C'est un de ses représentants qui a carrément dit à ce jeune entrepreneur qu'il n'y aurait pas de place pour sa garderie dans le nouveau système.

Mme Marois: Comme nous parlons d'ajouter des places, M. le Président... On démarre avec une base dans laquelle nous tenons compte du nombre de places qui se trouvent aussi dans les garderies à but lucratif.

Cependant, ce qui est dit, et ça, il faut que ce soit clair, normalement, à moins que ces garderies ne se transforment pour devenir des institutions sans but lucratif, avec les règles qui entourent les institutions sans but lucratif, dont, entre autres, les parents qui sont majoritaires sur le conseil d'administration en vertu de la loi actuelle, M. le Président, ces garderies ne deviendront pas des centres à la petite enfance. Ce que nous avons dit, c'est que les garderies de même que les agences de garde en milieu familial, qui se transformeront progressivement pour offrir un ensemble de services qui vont dépasser largement la garde, qui peuvent s'adresser aux parents pour les soutenir dans leur rôle de parents, des services éducatifs de prématernelle... mais, cependant, ce que l'on dit, c'est que les garderies à but lucratif ne seront pas des centres à la petite enfance mais pourront contribuer dans l'ensemble des services à la petite enfance, à la mesure de leurs capacités, selon des règles que nous établirons très clairement avec ces garderies, M. le Président.

Le Président: M. le député de... En principale?


Nominations à la présidence des comités de discipline des ordres professionnels

M. Bergman: Oui. M. le Président, le 19 juin 1996, le ministre de la Justice et responsable des lois professionnelles procédait à 12 nominations concernant les présidents des comités de discipline. Pressé de nommer ses amis, les décrets de nomination comportaient une erreur grave les rendant illégaux. L'une de ces nominations concernait Me Germain Jutras, qui est le frère du député de Drummond. Me Germain Jutras a été accusé par la Cour supérieure d'avoir offert un pot-de-vin de 50 000 $ à un témoin pour qu'il se parjure.

Ces révélations surviennent au moment où l'Assemblée nationale étudie présentement le projet de loi n° 62 destiné à légaliser rétroactivement les nominations du 19 juin.

M. le Président, devant ces démonstrations que les nominations du 19 juin étaient clairement partisanes et que la compétence des personnes nommées peut être remise en cause, le ministre peut-il s'engager à annuler la nomination de Me Germain Jutras, à réévaluer les autres nominations et à surseoir à l'adoption du projet de loi n° 62?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, il est bien évident qu'il ne s'agit pas pour moi d'intervenir dans ce qui se déroule devant la Cour supérieure. Une personne est mentionnée par ce jugement, elle a droit d'aller en appel. J'ai lu dans les journaux qu'elle avait l'intention de le faire, et vous comprendrez que je ne commenterai pas plus loin là-dessus. Cependant, je peux informer cette Chambre que, ce matin, la personne en question a informé le président de l'Office des professions à l'effet qu'elle se retirait de toute décision qu'elle avait devant elle ou tout dossier qu'elle avait devant elle et qu'elle nommait quelqu'un qui pourra agir comme suppléant, comme c'est prévu par la loi dans les circonstances, de telle sorte qu'il n'y aura aucune décision qui sera rendue.

En ce qui concerne le projet de loi n° 62, il vise à faire en sorte qu'une disposition qui n'a pas été introduite depuis le début de l'Office des professions dans la loi sur l'Office des professions, à savoir qu'une personne qui est nommée puisse, même si elle n'est plus renouvelée dans son mandat, continuer à rendre des décisions dans les dossiers qu'elle a déjà à ce moment-là... C'est un problème qui origine depuis le début et que le projet de loi n° 62 va corriger, M. le Président.

Le Président: Une dernière complémentaire, rapidement.

M. Mulcair: M. le Président, comment est-ce que le ministre de la Justice peut prétendre qu'on avait besoin d'un projet de loi pour corriger rétroactivement son erreur, alors que le problème vient du fait que lui et son groupe autour de lui ont modifié le décret de nomination pour enlever la disposition qui a toujours, depuis 20 ans, été contenue dans ces nominations-là, à l'effet qu'on avait le droit de continuer? C'est à cause du fait qu'ils ont joué dans le décret de nomination que le décret a été déclaré illégal et qu'il est obligé de revenir ici, dans cette Chambre, par une loi avec un bâillon, pour jouer rétroactivement dans les décisions des comités de discipline. C'est à cause de lui, le problème, M. le Président.

Le Président: M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, il est exact que, depuis 20 ans, cette mention est faite dans les décrets pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de rupture dans le temps et dans le pouvoir des personnes. Pour une raison inexpliquée, cette disposition n'a pas été reproduite au moment des décrets. Cependant, quelques jours plus tard, un nouveau décret a été fait pour ajouter cette disposition-là, et tout, normalement, devrait être conforme.

Cependant, compte tenu du fait que des personnes se sont prévalues de leur droit de contester les nominations et de mettre en doute ce décret, M. le Président, nous avons le devoir d'éviter cette situation-là, et c'est pourquoi la loi est déposée, c'est-à-dire le projet de loi n° 62. Il faut faire en sorte que toutes les décisions qui seront rendues par ces personnes soient valides et ne soient pas contestables.

En ce qui concerne le fait qu'elle n'a pas été reproduite, il s'agit, semble-t-il, d'une erreur purement technique et il s'agit de la corriger. Parce qu'elle a déjà été corrigée, les deux personnes veulent s'en prévaloir.

M. Bélanger: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je pense que vous avez entendu clairement le député de Chomedey encore proférer des propos antiparlementaires à l'endroit d'un collègue. C'est inadmissible, le comportement du député de Chomedey.

(11 heures)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Sur la question de règlement, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, en vertu de l'article 213, propos déformés ou mal compris... 212, pardon, est-ce que le leader du gouvernement peut nous dire pourquoi il comprend qu'on a dit des propos antiparlementaires? Est-ce que c'est parce que j'ai dit que le ministre était un incompétent?

Le Président: M. le député de Chomedey, il y a deux articles auxquels vous avez contrevenu, et je voudrais juste vous rappeler les dispositions de l'article 32, du décorum, qui dit que tout député doit «s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui ou au bon fonctionnement de l'Assemblée» et qu'on doit garder le silence à moins d'avoir obtenu la parole. C'est clair qu'à ce moment-là vous n'aviez pas obtenu la parole du président.

D'autre part, je rappelle à tous les membres de l'Assemblée, et ça pas uniquement pour cet incident mais pour d'autres propos que je viens d'entendre immédiatement après cet échange, l'article 35, qu'on ne doit pas «se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant à l'adresse de qui que ce soit».

Alors, ni d'un côté ni de l'autre, même si on n'a pas la parole, on ne doit pas utiliser des langages qui sont blessants ou injurieux, d'autant plus qu'on n'a pas la parole et qu'à ce moment-là on contrevient également à l'article 32 qui nous interdit de prendre la parole quand on n'a pas été autorisé à le faire.

À ce moment-ci, j'ai déclaré que la période des questions et des réponses orales était terminée. Il n'y a pas de réponses différées. Nous en arrivons maintenant aux votes reportés.


Votes reportés


Adoption du projet de loi n° 130

Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le ministre de la Justice proposant que le projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, soit adopté.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie– Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever... M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Pendant le déroulement du vote, un député s'est retiré de l'Assemblée nationale, un député péquiste. Quelle mesure entendez-vous prendre pour qu'il vienne voter?

Le Président: M. le député, j'ai remarqué également, moi aussi, qu'un collègue a quitté l'enceinte, mais le vote, à ce moment-là, n'avait pas commencé, dans le sens où...

Des voix: Oh!

Le Président: À ce moment-là, l'officier à la table n'avait pas commencé à faire l'appel nominal des députés. Alors, je ne pense pas, à ce moment-ci, que le président ait l'autorité pour empêcher un député de quitter l'enceinte s'il ne désire pas participer à un vote. Si c'était l'intention. Je n'en ai aucune idée, si c'était l'intention. Je sais que j'ai vu, moi également, un collègue, un député, un membre de l'Assemblée quitter le salon bleu avant le début de l'appel nominal des députés. À ce moment-ci, c'est tout ce que je peux dire. M. le leader.

M. Paradis: Strictement pour rappeler, là, les dispositions de l'article 225 de notre règlement, qui sont claires et formelles. Je le lis, M. le Président: «Lorsque a lieu un vote par appel nominal, il est interdit d'entrer dans la Chambre après la mise au voix et d'en sortir avant la proclamation du résultat.»

M. Bélanger: ...M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Et vous savez très bien, M. le Président, qu'il ne peut y avoir aucune question de règlement pendant qu'il y a un vote. Après le vote, les questions de règlement.

Le Président: À ce moment-ci, je demanderais à ce que ces interventions soient réservées pour après le vote. On verra, à ce moment-là, comment on disposera de la question.

Alors, que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup), M. Le Hir (Iberville).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:58

Contre:38

Abstentions:0

Le Président: La motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je demanderais le consentement pour que le député de La Peltrie puisse être ajouté au vote ministériel, M. le Président.

M. Paradis: Également consentement, M. le Président, pour que le député de Marguerite-D'Youville puisse enregistrer son vote de ce côté-ci de la Chambre.

Le Président: Alors, M. le député de La Peltrie, vous pouvez regagner votre siège, et le vote est enregistré.

À ce moment-ci, je voudrais juste rappeler les dispositions de l'article 227 pour l'avenir, puisque j'imagine que, cette semaine, on devrait avoir un certain nombre d'autres votes: «Pendant un vote, les députés ne peuvent prendre la parole que pour faire un rappel au règlement ou pour signaler une violation de droit ou de privilège.»

Alors, à ce moment-ci, pour la question qui avait été posée précédemment, j'en réfère à l'article 225: «Lorsque a lieu un vote par appel nominal, il est interdit d'entrer dans la Chambre après la mise aux voix et d'en sortir avant la proclamation du résultat.»

Alors, ce que j'ai indiqué, c'est que, à ma connaissance et à mon point de vue, la mise aux voix n'avait pas débuté puisque, à ce moment-là, l'officier de la salle n'avait pas commencé à faire l'appel nominal.


Motions sans préavis

Alors, ceci nous amène maintenant aux motions sans préavis. Mme la ministre de l'Éducation.


Souligner le 50e anniversaire de l'UNICEF

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 50e anniversaire de l'UNICEF et son apport déterminant à l'égard des secours apportés aux enfants dans le monde entier.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Bélanger: Il y a consentement sans débat, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Sans débat. Alors, la motion est adoptée.

(11 h 10)

Alors, Mme la ministre de la Culture.


Souligner le décès du poète Gaston Miron

Mme Beaudoin: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le décès du poète national, M. Gaston Miron, et qu'elle offre ses condoléances à sa fille, Emmanuelle, à sa compagne, Mme Marie-Andrée Beaudet, ainsi qu'à l'union nationale des écrivains québécois.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Il y aurait consentement pour deux intervenants de part et d'autre.

Le Président: Deux interventions de chaque côté? Très bien. Alors, Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. Avant-hier s'est éteint celui que le premier ministre a comparé à Pablo Neruda, Aimé Césaire, Léopold Senghor: Gaston Miron, cet immense poète qui a rapaillé dans son coeur et dans son oeuvre les espoirs du Québec.

Gaston Miron a consacré toute son énergie à vouloir faire accéder le Québec au rang d'un pays riche d'une langue et d'une littérature, d'une culture et d'une histoire dont il s'est fait l'ardent défenseur à travers son écriture, son verbe et son engagement. Né dans les Laurentides, «ces vieilles montagnes râpées du Nord», comme il le disait, Gaston Miron n'a jamais renié ses origines modestes. Il aimait l'homme de la rue. Il faut l'avoir vu une seule fois palabrer au carré Saint-Louis autour de toujours et encore la même chose, le Québec en marche, pour saisir un tant soit peu ce qui le hantait jusqu'à la démesure. Car Gaston Miron était un homme de démesure, la seule qui convienne à un être de cette trempe pour qui le mot «identité» rimait avec liberté. Poète avant toute chose, il croyait au pouvoir des mots et il s'en servait sur toutes les tribunes pour dire et redire le Québec devant des auditoires qu'il fascinait autant par l'authenticité de ses propos que par sa vaste connaissance des littératures du monde.

«Homme répandu comme une légende, animateur et agitateur de première force, dont le visage se confond presque avec le visage de notre société», comme l'a dit de lui le poète Jacques Brault, Gaston Miron a vu son oeuvre couronnée notamment par les prix Duvernay, Apollinaire, Molson, du Conseil des arts du Canada, et surtout par le prix Athanase-David, Prix du Québec. Il a été décoré de la médaille de l'Ordre des francophones d'Amérique. Il est officier de l'Ordre du Québec et, en 1993, il a reçu les insignes de commandeur des arts et des lettres de la République française.

Nous garderons de lui un souvenir d'un homme qui a tenu son rêve à bout de bras et à bout de mots. Puisse l'exemple de Gaston Miron, qui avait choisi la poésie comme lieu d'ancrage et de combat, nous inciter à poursuivre «La marche à l'amour» pour un Québec souverain.

En terminant, M. le Président, j'aimerais lire une strophe tirée de «L'Homme rapaillé», une très belle strophe: «Nous te ferons, Terre de Québec lit des résurrections et des mille fulgurances de nos métamorphoses de nos levains où lève le futur de nos volontés sans concessions les hommes entendront battre ton pouls dans l'histoire c'est nous, ondulant dans l'automne d'octobre c'est le bruit roux de chevreuils dans la lumière l'avenir dégagé l'avenir engagé.»

Le Québec vous salue, Gaston Miron.

Le Président: Sur la même motion, M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Quand un poète meurt, dans une société c'est un phare qui s'éteint, et le Québec, aujourd'hui, est un peu plus sombre et un peu plus triste qu'il ne l'était hier, à cause du décès de Gaston Miron. Je ne partageais pas toutes les idées de Gaston Miron, mais je dois témoigner, parce que je l'ai connu, je dois témoigner que c'était un homme de générosité, c'était un homme d'engagement, c'était un homme de solidarité. Il incarnait toutes ces valeurs-là et il savait les exprimer par sa poésie.

Moi aussi, M. le Président, j'ai pensé qu'il était préférable, plutôt que de faire un discours sur Gaston Miron, de reprendre un de ses textes qui, à mon sens, pour moi, l'incarne parfaitement. Je vais essayer de vous le donner, plus imparfaitement: Camarade, tu passes invisible dans la foule, ton visage disparaît dans la marée brumeuse de ce peuple au regard épaillé sur ce qu'il voit. La tristesse a partout de beaux yeux de hublots. Tu écoutes les plaintes des graffitis sur les murs, tu touches des pierres de l'innombrable solitude, tu entends battre, dans l'ondulation des épaules, ce coeur lourd par la rumeur de la ville en fuite. Il était un camarade anonyme. Il allait au rendez-vous brumeux de la mort tandis qu'un vent souterrain tonnait et cognait pour les années à venir, dans les entonnoirs de l'espérance. Qui donc démêlera la mort de l'avenir?

Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Taschereau.


M. André Gaulin

M. Gaulin: «Je suis sur la place publique avec les miens, la poésie n'a pas à rougir de moi, j'ai su qu'une espérance soulevait ce monde jusqu'ici.» «Recours didactique». Gaston Miron.

M. le Président, je rendrai hommage au poète Gaston Miron en me référant beaucoup au texte même de l'auteur. Pour éviter la lourdeur, je ne donnerai pas les références que je fournirai cependant au service de transcription de l'Assemblée nationale.

Gaston Miron, celui qui parlait «avec les mots noueux de nos endurances», s'en est allé. Samedi, il s'en retournera, «cet homme au galop d'âme et de poitrine», à sa terre natale de Sainte-Agathe-des-Monts «dans les vieilles montages râpées du Nord».

Il a vécu, Miron, ce poète qui se reconnaissait en nous au plus profond de notre quête historique, il a vécu, traversé certes par sa naissance: «Souvenirs, souvenirs, maison lente, un cours d'eau me traverse je sais, c'est la Nord de mon enfance avec ses mains d'obscure tendresse». Mais il a surtout vécu cette ville à laquelle il s'est tant identifié, Montréal, Montréal «dans les Mille et une Nuits des néons, sur les talus du Mont-Royal, orignal, quand tu brames, orignal» dans cette métropole galopante où le pays «apparaît par tous les chemins défoncés de son histoire» avec «les brûlants compagnons dont la lutte partage et rompt le pain du sort commun dans les sables mouvants des détresses grégaires».

Homme de souffrance, Miron le magnifique, selon l'expression de Jacques Brault, souffrait dans chacun de ses frères et soeurs humiliés, refusait «un salut personnel et transfuge» et se tenait constamment de rue en rue, de porte à porte, «sur la place publique avec les siens», nouveau Sisyphe poussant sur «la rance odeur de métal et d'intérêts croulants, poème, mon regard, j'ai tenté que tu existes, luttant contre mon irréalité dans ce monde».

Aujourd'hui, M. le Président, c'est un peuple rapaillé par lui qui pleure un poète national qui a fondé, avec ses commensaux de l'Hexagone, en 1953, la conscience d'appartenir à une littérature, non pas nationaliste, mais de conscience nationale, c'est-à-dire d'inclusion, de pluralité des tendances, des écritures, des émotions, des imaginaires. Comme le disait Gaston Miron lui-même en recevant, en 1983, le prix Athanase-David, et je cite: «Une culture complète est toujours une et multiple, ouverte et plurielle, et dans ces conditions elle peut rendre compte dans son activité globale et ses oeuvres de l'ensemble de la problématique humaine dans ses propres schèmes et produire son propre discours sur le monde, contribution à la culture universelle, en ce qu'elle est une version de vivre l'humanité, l'humanité québécoise. L'avenir de la littérature québécoise et de son histoire d'amour avec la langue est lié au destin du peuple et de la culture qui les portent. Le dire, c'est d'une évidence à faire pleurer.» Fin de la citation.

L'oeuvre de Gaston Miron, reconnue par de nombreux prix internationaux, traduite dans plusieurs langues, témoigne du combat titanesque d'un homme contre le conformisme social, contre «la tristesse héréditaire», contre l'exploitation des humbles malgré «l'inusable espoir des pauvres», contre aussi la menace qui pèse sur les petits peuples de cette planète. Cet homme courageux, qui se définissait comme un anthropoète, un poète nationalitaire et identitaire, a profondément été traversé par la souffrance, celle qu'il portait pour nous dans les grands cycles de son oeuvre poétique, «La Batèche», «La Vie agonique», «La Marche à l'amour». Cette souffrance fut féconde, elle a témoigné de nous, elle nous a assumés, elle a été rallieuse et elle a, comme sa poésie, pris le mors obscur de nos combats: «ma poésie, les yeux brûlés, tous les matins tu te lèves à cinq heures et demie dans ma ville et les autres.»

M. le Président, nous offrons nos plus vives sympathies à Emmanuelle Miron, sa fille, à Marie-Andrée Beaudet, sa compagne, à sa famille ainsi qu'à ses si nombreux amis, poètes et compagnons ou lecteurs et lectrices d'une oeuvre si influente. C'est avec les mots mêmes du poète, dans la langue de Molière et de Miron, que nous prenons congé de lui, qui nous sera toujours présent. Cet extrait de «L'ombre de l'ombre» le rapproche doublement du poète Alain Grandbois, son aîné: «La mort, la mort acétylène en fanaux de nuit, un matin d'obus lilas, une fraîcheur d'éclair et de truite mouchetée, la mort au cri de girouette dans la gorge, la mort, elle ne pèse que l'ombre de l'ombre.»

Gaston Miron, merci. Ce n'est qu'un au revoir.

(11 h 20)

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Gaston Miron, effectivement, est né en 1928 à Sainte-Agathe-des-Monts, dans les Laurentides, mais il est né aussi une seconde fois quand il s'est installé à Montréal, en 1947, un Montréal au lendemain de la guerre 1939-1945 où toute la jeunesse canadienne-française s'apprêtait à s'éveiller à un monde, une jeunesse au coeur généreux, avide de liberté, qui se sentait déjà à l'étroit dans le cadre traditionnel de la société québécoise de l'époque, une jeunesse que la guerre avait épargnée et qui se sentait prête à refaire le monde. Ce sera la génération qui, la première, suivra les leaders de la Révolution tranquille, les Jean Lesage, René Lévesque, Paul-Gérin Lajoie et les autres.

Gaston Miron était de cette génération de Québécois qui a cru en l'avenir du Québec et qui a contribué à l'émergence et à l'affirmation de la société québécoise que nous connaissons aujourd'hui. Certains ont utilisé la voie politique, d'autres la voie économique, Gaston Miron a choisi la voie poétique. «L'Homme rapaillé» fut certes la partie de son oeuvre la plus connue, comme peut-être aussi la plus inspirée. On y retrouve le poète aux prises avec ses paradoxes, ses tiraillements, ses émerveillements. Paradoxes, tiraillements et émerveillements qui sont autant ceux du poète face à sa vie que face à sa société. «L'Homme rapaillé» fut édité une première fois en 1970; la plus récente édition date de 1994 et ce n'est sûrement pas la dernière.

Gaston Miron a été l'un des fondateurs de la revue Possibles , née en 1976, dont la dernière livraison, parue il y a quelques jours à peine, célébrait justement son 20e anniversaire et rendait un hommage particulier à l'un de ses illustres fondateurs, Gaston Miron, comme en une tragique prémonition.

On retrouve les poèmes de Gaston Miron dans nombre de recueils de poésie soumis à nos étudiants depuis déjà plusieurs années. Miron est incontournable, homme d'une pièce, homme, comme on dit souvent pour qualifier ces êtres, au caractère bien trempé et bien tranché. Presque un quart de siècle après «L'Homme rapaillé», Gaston Miron a reçu les insignes de l'Ordre des francophones d'Amérique du président du Conseil de la langue française d'alors, notre collègue le député d'Outremont. Nous y avons retrouvé l'homme intact dans son parti pris inconditionnel pour une langue française de qualité, une langue française maîtrisée, loin de l'idéologie joualisante qui eut cours à une certaine époque où le Québec se cherchait une identité.

Mais, attention, Miron n'a jamais renié pour autant une langue française proprement québécoise, mais une langue française québécoise articulée, dotée de la terminologie aussi précise que diversifiée et soucieuse d'une syntaxe bien maîtrisée, car Miron, poète, était aussi un homme d'une très grande exigence quant à la langue française.

En nous quittant aussi subrepticement, Gaston Miron a provoqué chez chacun d'entre nous un choc et a créé un vide. Nous nous ennuyons déjà de son verbe haut, franc et authentique, un verbe qui transcendait les partis et les idéologies, car Gaston Miron aimait trop la liberté pour l'encadrer par quelque frontière. Nos sincères sympathies à sa famille et à ses proches.


Mise aux voix

Le Président: Alors, cette motion est adoptée. Et je vous demanderais, mesdames, messieurs, de vous lever pour un moment de silence.

(11 h 25 – 11 h 26)

Le Président: Merci. Si vous voulez vous asseoir.

Toujours aux motions sans préavis, M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Oui, M. le Président. Je sollicite le consentement de la Chambre pour adopter cette motion:

«Que l'Assemblée nationale réitère son appui à la francophonie canadienne en favorisant la candidature de Moncton, Nouveau-Brunswick, en vue du Sommet de la francophonie de 1999 et enjoigne le gouvernement du Québec à soutenir vigoureusement les démarches entreprises à cet égard par le gouvernement du Nouveau-Brunswick.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion, M. le leader du gouvernement?

M. Bélanger: Oui, M. le Président. L'opposition officielle nous a effectivement transmis la motion avant la période des questions. Cependant, le ministre des Affaires internationales est présentement en mission au Maroc et nous n'avons pu le rejoindre et lui demander son avis sur la question, M. le Président. Alors, ce que je suggérerais, c'est que, demain, on représente cette motion parce que, aujourd'hui même, nous ne sommes pas en mesure de donner ce consentement.

M. Paradis: Oui, mais je remarque quand même que le ministre responsable des Affaires canadiennes est parmi nous aujourd'hui. Et il s'agit tout simplement pour le Québec, le gouvernement du Québec, l'Assemblée nationale d'appuyer, dans le cadre de la francophonie, une autre ville canadienne. À notre connaissance – je tiens à rassurer le leader du gouvernement, là – il n'y a pas d'autres villes canadiennes qui sont en lice. Ce n'est pas du tiraillement. Ça m'apparaît assez simple et assez clair comme motion de support.

M. Bélanger: M. le Président, c'est le Sommet international de la francophonie. Donc, il est tout à fait normal que le ministre des Affaires internationales soit consulté. Alors, nous reviendrons demain, si le député veut à ce moment-là représenter sa motion, M. le Président.

Le Président: Alors, pour le moment, il n'y a pas de consentement. M. le leader.

M. Paradis: Est-ce qu'on peut avoir l'assurance, à ce moment-là, que, demain, on pourra en débattre?

M. Bélanger: M. le Président, on verra demain.

Une voix: Oh là là!


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Aux avis touchant les travaux des commissions, à ce moment-ci, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Merci, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission de l'économie et du travail procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 76, Loi instituant le Fonds de partenariat touristique, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.

La commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

La commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 62, Loi modifiant le Code des professions concernant les comités de discipline des ordres professionnels, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

La commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 61, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Justice et d'autres dispositions législatives concernant l'administration et l'aliénation des produits de la criminalité, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

La commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée des projets de loi privés suivants: projet de loi no° 212, Loi concernant Champlain Regional College of General and Vocational Education; projet de loi n° 235, Loi modifiant la Loi concernant la Fédération des commissions scolaires du Québec, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

J'avise également cette Assemblée que la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude des projets de loi d'intérêt privé suivants: projet de loi n° 242, Loi concernant la Municipalité régionale de comté du Domaine-du-Roy; projet de loi n° 225, Loi modifiant la Charte de la Ville de Hull.

De plus, en dérogation aux règles de fonctionnement du règlement de l'Assemblée nationale quant au délai de convocation des intéressés pour l'étude des projets de loi d'intérêt privé, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude du projet de loi d'intérêt privé suivant: le projet de loi n° 250, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Charlevoix-Est et la Municipalité de la rivière Malbaie.

(11 h 30)

L'étude de ces projets de loi d'intérêt privé se déroulera à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine le mardi 17 décembre 1996, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement, d'abord, pour déroger aux règles pour les projets de loi privés? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, avant d'offrir le consentement, est-ce que le gouvernement pourrait assurer les membres de cette Chambre qu'en tout état de cause, quant à tous ces projets de loi, les populations ont été avisées? Je comprends que les délais requis ne sont pas toujours respectés, mais qu'il n'y a pas de projet de loi privé où les citoyens dans leur milieu n'auront pas la possibilité de se manifester?

M. Bélanger: Oui, M. le Président, je peux donner cette assurance au leader de l'opposition que toutes les mesures ont été prises afin que les populations concernées soient avisées de ce qui se passe.

Le Président: Très bien. Alors, il y a consentement pour déroger aux règles pour les projets de loi privés.

Nous en arrivons maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président... Oh! Renseignements sur les travaux de l'Assemblée? Je m'excuse, M. le Président.


Affaires du jour

Le Président: S'il n'y a pas d'intervention à ce moment-ci, nous allons procéder aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.


Étude des crédits supplémentaires n° 1 pour l'année financière 1996-1997

M. Bélanger: M. le Président, je vais vous demander de prendre en considération l'article 62 de notre feuilleton. Et je vais faire motion, à la suite d'une entente avec l'opposition concernant l'étude des crédits supplémentaires n° 1, pour que nous procédions dans l'ordre ci-après énuméré:

À compter de maintenant, pour une période de deux heures, il y ait échange entre le ministre de la Santé et des Services sociaux et les députés de Robert-Baldwin, Notre-Dame-de-Grâce et Nelligan, en accordant une période de cinq minutes aux députés indépendants;

De 15 heures à 18 heures, il y ait échange entre le président du Conseil du trésor et les députés de Westmount–Saint-Louis, Verdun et Jacques-Cartier, en accordant une période de cinq minutes aux députés indépendants;

Qu'à compter de 20 heures, pour une période d'une heure, il y ait échange entre le ministre délégué au Revenu et les députés de Nelligan et Verdun, en accordant une période de cinq minutes aux députés indépendants;

Par la suite, pour une période d'une heure, il y ait échange entre le ministre des Ressources naturelles et les députés de Montmagny-L'Islet et Richmond, en accordant une période de cinq minutes aux députés indépendants;

Et finalement, pour une période d'une heure, il y ait échange entre la ministre de l'Éducation et les députés de Verdun et Nelligan, en accordant une période de cinq minutes aux députés indépendants.

Je propose, M. le Président, que nous en fassions un ordre de l'Assemblée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Il s'agit, dans les faits, pour préciser, de l'étude des crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1997, qui ont été déposés par M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances le 12 décembre dernier et renvoyés pour l'étude à la commission parlementaire. À ce moment-ci, M. le leader du gouvernement, une motion pour qu'on puisse se transformer en commission... en plénière.

M. Bélanger: M. le Président, je propose que cette Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Président: Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Alors, en conséquence, l'Assemblée se constitue en commission plénière afin d'entreprendre l'étude des crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1997. Et ce sera un vice-président qui présidera la séance à ce moment-là.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

(Reprise à 11 h 42)


Commission plénière


Santé et Services sociaux

M. Pinard (président de la commission plénière): Mmes, MM. les députés, je vous rappelle que la commission plénière se réunit afin d'étudier les crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1997.

Conformément à l'ordre adopté par l'Assemblée, au cours des deux prochaines heures, nous allons procéder à un échange entre M. le ministre de la Santé et des Services sociaux et MM. les députés de Robert-Baldwin, de Notre-Dame-de-Grâce et de Nelligan. Au cours de cet échange, une période de cinq minutes sera allouée aux députés indépendants.

En vertu de l'article 290, au début de l'étude en commission plénière, un représentant de chaque groupe parlementaire peut prendre la parole pendant au plus 20 minutes. Le représentant du gouvernement a droit à une réplique de même durée. Comme nous allons avoir l'occasion d'entendre aujourd'hui cinq ministres, nous avons donc décidé de répartir le temps de parole en remarques préliminaires de cinq minutes à chacun des ministres, et également, à la toute fin, vous aurez droit à une réplique de cinq minutes.


Remarques préliminaires

J'accorde immédiatement la parole à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux pour ses remarques préliminaires. M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, il y a une demande de crédits supplémentaires de l'ordre de 195 000 000 $ qui s'explique par deux raisons, deux causes principales. Il y en a une sur laquelle on a eu à revenir à quelques reprises dans les dernières semaines et dans les derniers mois qui est reliée au programme d'assurance-médicaments et, dans le 195 000 000 $, ce montant compte pour un peu plus de 144 000 000 $. C'est vraiment la grosse partie. Le reste est essentiellement dû à des modifications qui ont été faites dans d'autres programmes qui sont gérés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec pour les services dentaires, les services optométriques et d'autres services comme les orthèses et prothèses. Mais la mise en place des mesures de réductions budgétaires, avec les délais nécessaires de préparation de règlements, consultations, approbation de décrets, a été un peu plus longue que ce qui avait été prévu et ce qui avait été souhaité. Il y a donc eu un certain manque à gagner pour la différence de montant, donc pour à peu près 50 000 000 $, ce qui fait au total 195 000 000 $.

Si on revient, M. le Président, au montant principal de 144 000 000 $, on peut le décomposer pour mieux comprendre la source de cette demande de crédits supplémentaires, et ce montant de 144 000 000 $ se décompose de la façon suivante. Il y a d'abord un montant de 116 000 000 $ qui est relié à la mise en place, d'une part, du programme d'assurance-médicaments et qui est relié aussi au prix payé pour les médicaments. Dans la révision de la liste qui a été faite, on avait prévu une récupération sur le prix des médicaments et celle qui sera faite sera un peu moins grande que prévu.

Alors, je reprends donc ce 116 000 000 $, pour bien comprendre. Ce 116 400 000 $ qui est relié strictement aux médicaments, on le décompose de la façon suivante. Il y a un premier montant de l'ordre de 95 000 000 $ qui est directement le programme d'assurance-médicaments. On avait prévu, lors de la préparation du budget en janvier 1995, que l'économie avec le programme d'assurance-médicaments pourrait être de l'ordre de 224 000 000 $ et l'économie est, en fait, pour cette année de 129 000 000 $ parce qu'on a retardé la mise en place du programme et parce que, en plus de ça, le début du programme, à compter d'août, a été partiel, c'est-à-dire que les gens ne devaient payer que la coassurance, que le 25 % de la coassurance, mais il n'y avait pas de franchise qui était applicable, c'est-à-dire cette portion qu'on doit payer à 100 % qui va commencer à partir du mois de janvier. On sait que le premier 100 $, on doit le payer au complet. Ça n'a pas été le cas pour les cinq derniers mois de l'année 1996. En plus, il y a la prime qui n'a pas été demandée. Mais ça, ça n'affecte pas ce coût-là.

Essentiellement, ce qui explique qu'on passe de 224 000 000 $ à 129 000 000 $ comme économie, c'est le fait qu'on a retardé la mise en place du programme pour donner le temps de tout préparer, mais surtout de bien informer les gens au maximum avant que le programme commence, et, deuxièmement, qu'on a mis en place un programme de façon progressive, en ne requérant pas la franchise mais seulement la coassurance. Ce qui veut dire 224 000 000 $ moins 129 000 000 $, ça nous fait un dépassement de crédits de 95 000 000 $.

En ce qui concerne le prix des médicaments, on avait prévu une économie de 32 000 000 $. Mais, là aussi, avec les ententes qu'il a été possible de faire, de conclure en cours d'année, on a seulement 11 600 000 $ au lieu des 32 000 000 $, ce qui nous fait un dépassement de 20 000 000 $. Tout ça fait 116 000 000 $.

Le montant complémentaire qui nous amène au 144 000 000 $ qu'on voit aux crédits tient essentiellement aux frais qui sont payés aux pharmaciens. Et là aussi, avec le décalage dans le temps d'une entente qui était à compléter, à convenir avec les pharmaciens, l'entente qui a été convenue, il y a 28 000 000 $ de dépenses additionnelles qu'on est obligé d'enregistrer. Alors, tout ça nous fait le 144 000 000 $, presque le 145 000 000 $ pour le médicament; et les autres, on ira dans les détails s'il y a des questions, mais je pense que le cinq minutes d'entrée en matière ne me permet pas d'y aller...

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: ...mais c'est essentiellement les autres programmes gérés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Le Président (M. Pinard): Merci. J'accorde immédiatement la parole au député de Robert-Baldwin pour ses remarques préliminaires. Vous avez cinq minutes, M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord saluer les représentants de la Régie de l'assurance-maladie, les fonctionnaires, les membres du cabinet. Je voudrais d'entrée de jeu, M. le Président, vous signifier quand même notre surprise d'être de nouveau réunis pour approuver des crédits additionnels dont la grande majorité, le pourcentage important, eh bien, relève du compte d'assurance impôt-médicaments qui, aux dires du ministre, ne s'est pas réalisé dans les délais prévus ou des délais convenables.

Pourquoi cette surprise? Eh bien, il y a six mois à peu près, au mois de juin dernier, nous étions en commission parlementaire – même, ça a commencé auparavant – et on avait offert depuis longtemps au ministre de pouvoir discuter d'un projet de loi aussi important. Je vous rappelle qu'il y avait eu à ce moment-là même un premier sommet socioéconomique et on aurait pu siéger; on a retardé les travaux de la Chambre. On aurait pu siéger dans l'intersession pour être sûrs que le programme, le plan était bien fait, bien planifié.

(11 h 50)

On s'aperçoit aujourd'hui que ce qui a été dit au mois de juin dernier, eh bien, ça devient l'évidence même: on assiste vraiment à un dossier d'improvisation où on a fait des changements majeurs. Et, vous savez, M. le Président, j'ai pris l'engagement, à toutes les tables que nous aurons, de bien rappeler que ce programme d'assurance impôt-médicaments a été voté à 5 heures du matin et qu'à minuit dans la même nuit, eh bien, on nous avait déposé pour 120 pages d'amendements, ou à peu près. Alors, ça aussi, ça montrait beaucoup l'improvisation.

Rapidement, rappeler que ce programme, bien, on a trouvé qui va payer: ce sont les personnes aînées, les assistés sociaux également. Nous regrettons et nous sommes conscients aussi que ces gens-là auront, dans plusieurs cas, à choisir entre prendre leur médication et manger. Et déjà différentes coalitions sont venues soit en commission parlementaire ou encore devant le Parlement ou devant le bureau du premier ministre à Montréal souligner cette difficulté qui est associée au programme d'assurance impôt-médicaments parce que les seuils de pauvreté sont vraiment beaucoup trop bas.

Il y a également, M. le Président, cette fameuse liste qui est déterminée par le ministre après recommandation du CCP. Eh bien, on a eu l'exemple du Betaseron où les patients ont été obligés de faire des représentations extrêmement importantes, d'organiser des manifestations devant différents bureaux de ministres et du premier ministre. Ils ont également déposé à l'Assemblée nationale – et j'étais fier de le faire en leur nom – une liste de 27 000 noms qui supportaient ce genre de médicament. Suite à cela, eh bien, le ministre, je pense, s'est rendu aux doléances des patients. Il n'avait plus le choix, c'est un médicament qui est accepté en Ontario, aux États-Unis, un peu partout, et les experts s'accordaient pour dire qu'il était efficace, qu'il ne guérissait pas mais qu'il améliorait la qualité de vie.

Alors, on s'est aperçus que les représentations que nous avions faites au moment de la commission parlementaire pour que le milieu scientifique soit vraiment intégré au Conseil consultatif de pharmacologie plutôt qu'avoir des nominations qui, dans certains cas, pourraient être partisanes... Eh bien, nous pensons que cette recommandation demeure toujours.

Nous aimerions également ou nous souhaitons pouvoir questionner le ministre sur un certain nombre de dossiers qui sont reliés aux demandes de crédits additionnels. Il y a des négociations qui sont en cours actuellement. Eh bien, on aimerait savoir aussi où on s'en va un peu avec les orientations. On parle d'une proposition où on fait mention que les jeunes ne doivent pas être remplacés. Le ministre connaît bien le milieu de la santé, la dynamique, alors donc on sait que c'est très difficile à appliquer. Il y a tout le plan de redéploiement qui semble être extrêmement coûteux et qui intervient, je pense, indirectement en tout cas, dans cette demande de crédits.

M. le Président, je pense que, nous, de nouveau, en terminant – vous me faites signe que c'est déjà terminé – nous voulons rappeler les manquements qui existent encore à cette législation. Les organismes communautaires sont obligés de recueillir des fonds pour aider les gens démunis.


Discussion générale


Programme d'assurance-médicaments

Alors, M. le Président, la première question, si vous me permettez, à ce moment-ci, c'est: Pourquoi avoir attendu si longtemps, être rendus au 16 décembre, pour faire cette demande? Il me semble que le ministre, avec les nombreux fonctionnaires qui l'entourent, pouvait prévoir cette difficulté depuis le printemps dernier.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Bon, M. le Président, pourquoi avoir attendu aujourd'hui pour faire cette demande? Si j'ai bien compris le processus, et le député de Robert-Baldwin doit savoir ça aussi, il m'apparaît que c'est le temps normal de la période de l'année où les crédits supplémentaires additionnels sont discutés. Nous, on savait, et je l'ai déjà dit dès le mois de juin, au moment où, au lendemain de l'adoption de la loi qui a créé le programme d'assurance-médicaments, nous avons pris la décision de mettre en place le programme à compter du mois d'août seulement et, comme je le disais tout à l'heure, de demander comme paiement seulement la coassurance...

Et ça, c'est des décisions qui ont été prises après avoir discuté beaucoup avec les groupes qui représentaient les personnes âgées et les prestataires de la sécurité du revenu. Les groupes ont été rencontrés avant la commission parlementaire et ont étudié le projet de loi au moment de la commission parlementaire, et certaines discussions ont eu lieu par après. La décision a été prise de faire une mise en place progressive du programme d'assurance-médicaments, mais disant très bien à ce moment-là que le coût à payer pour ça était nécessairement une économie, qui était prévue à ce programme, qu'il faudrait transférer ailleurs. Et on avait déjà dit que de l'ordre d'à peu près... pour le programme d'assurance-médicaments lui-même, qu'on aurait un manque à gagner, si vous voulez, de l'ordre d'à peu près 100 000 000 $. En fait, il est de 95 000 000 $. Alors, il n'y a pas de surprise. Ça n'a pas été découvert la semaine dernière, c'était déjà prévu depuis le mois de juin, fin juin, début juillet, qu'on aurait besoin de crédits supplémentaires à ce titre-là.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: M. le Président, les assureurs privés, lorsqu'ils sont venus en commission parlementaire, nous ont clairement indiqué que, selon le régime, tel qu'il était présenté, le 175 $ identifié par la Régie ne serait pas suffisant. Il ne comprenait pas les frais dits administratifs, et on nous avait expliqué de long en large quels étaient ces nombreux frais. Les représentants des différentes organisations d'assureurs privés ont parlé beaucoup plus d'un montant de 230 $. Alors, j'aimerais demander au ministre: Comment ça se fait que, lui, il nous dit que le 175 $ est suffisant comme prime, alors que les assureurs privés nous ont clairement démontré que le coût réel était de 230 $?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Alors, là, il faudra d'abord clarifier ce dont on parle, M. le Président. Le financement d'un régime comme celui-là, du régime d'assurance-médicaments, provient globalement de deux sources. Il y a un montant qui est la prime, ce à quoi réfère le député de Robert-Baldwin, et, par ailleurs, il y a les paramètres qui sont reliés à la consommation du médicament, soit la franchise et la coassurance, qui répartissent le coût du médicament entre le régime lui-même et les consommateurs.

Ce qui avait été prévu comme bénéfices, gains, économies possibles au cours de la première année était seulement relié aux paramètres reliés à la consommation de médicaments, c'est-à-dire la franchise et la coassurance. La prime sera payable seulement pour la première année complète du régime, ou à partir de la première année complète du régime, c'est-à-dire pour l'année 1997. Et elle sera payée par les gens après l'année. Donc, au début de 1998, on paiera la prime qui assure la protection pendant toute l'année 1997.

Et on sait que cette prime – et j'y reviendrai tout à l'heure – est graduelle, selon les revenus des gens: ou on ne paie pas de prime du tout ou on paie une prime partielle, et on paie une prime complète seulement à partir d'un certain niveau de revenus, lequel niveau correspond aux échelles de pauvreté fixées par Statistique Canada et correspond à l'échelle la plus généreuse, la plus élevée. Ce qui fait, par exemple, que, pour une famille de deux adultes et de deux enfants, c'est à partir d'un peu plus de 30 000 $ de revenus par année que les gens paieront une prime complète. En bas de ça, entre 30 000 $ et 19 000 $, la prime qui est exigible... Entre 30 000 $ et 21 000 $, on paie une prime partielle et, en bas de 21 000 $, pour une famille de deux enfants et de deux adultes, il n'y a aucune prime qui est exigible.

Alors, ça, ça n'a rien à voir avec le financement du régime pour cette première année partielle, parce que la prime n'était pas... c'était déjà prévu qu'elle ne serait pas exigée pour cette année-là. Mais la différence vient donc essentiellement des paramètres de consommation, c'est-à-dire: de ne pas avoir exigé de franchise, c'est une perte d'économies importante, et, en commençant avec seulement la coassurance et seulement au mois d'août au lieu de plus tôt dans l'année, il y a encore un manque à gagner qui provient de cette source-là.

Alors, je ne voudrais pas qu'on risque de brouiller les cartes en suggérant que la prime qui a été fixée à 175 $ risquerait de s'avérer insuffisante pour financer le programme. Ce n'est pas le cas du tout. Encore une fois, cette prime n'était pas escomptée pour la première année du programme, première année partielle en 1996, et elle viendra comme source de financement du programme seulement l'an prochain.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

(12 heures)

M. Marsan: Oui. Une inquiétude qui, je pense, est évidente, c'est l'inflation au niveau de ce que les gens auront à payer. On parle du 175 $ identifié à la Régie. Mais est-ce qu'on peut, avec ces crédits supplémentaires qu'on nous demande aujourd'hui, être assuré, là, que, dans l'avenir prévisible, les trois, quatre, cinq prochaines années, la prime et la franchise ne seront pas augmentées, comme tel? Est-ce qu'on a la certitude? Est-ce que le ministre peut nous donner cet engagement, étant donné déjà les difficultés de ce programme-là et en sachant aussi que, selon les rapports de l'OCDE, il existe une augmentation des coûts associés, peut-être de l'ordre de 10 %, à la consommation des médicaments?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Là-dessus, M. le Président, je n'ai aucune hésitation à rassurer tout le monde qu'il n'y a aucun risque, au moment où on se parle, que ce régime-là ne puisse pas être financé comme il a été prévu, parce que je le redis encore: Qu'on demande des crédits supplémentaires, ce n'est pas parce que ça a mal fonctionné, c'est parce qu'on a pris en juin une décision qui intervenait six mois plus tard que la préparation du budget. On sait que les paramètres, la stratégie budgétaire avait été faite au début de l'année. Tout à l'heure, j'ai dit 1995, mais c'est le début de l'année 1996 plutôt, et, six mois plus tard, après avoir eu en commission parlementaire des discussions et fait un certain nombre de rajustements pour répondre à des demandes qu'on nous faisait, M. le Président, on a identifié... laissé aller, si vous voulez, une économie possible pour cette année.

Maintenant, l'an prochain, au moment où le régime va fonctionner complètement, d'abord il y aura la prime, qui sera exigible à la fin de l'année 1997, qui va nourrir le fonds d'assurance à partir duquel on fait les paiements que l'État continue à contribuer au régime. En plus de ça, il y aura des mécanismes importants qui seront mis en place. On sait d'abord qu'on a la confection de la liste et que le Conseil consultatif de pharmacologie, qui avise le ministre pour la liste de médicaments, a vu son rôle élargi pour pouvoir aussi tenir compte du prix juste, raisonnable et équitable du médicament, ce qui va donc amener l'État-payeur, si vous voulez, pour une proportion importante des consommateurs de médicaments, dans une meilleure position pour ajuster le prix du médicament à ce qu'il est équitable et raisonnable de payer. Donc, il y a des mécanismes de contrôle du prix beaucoup plus puissants que ce qu'on pouvait avoir avant.

En plus de ça, il y a dans la loi qui a créé le régime d'assurance-médicaments un autre élément très important qui est le comité de révision de l'utilisation des médicaments, pour lequel on a déjà eu une expérience très importante au cours d'au moins trois ou quatre ans, je pense, pour l'utilisation des médicaments en établissement. C'est donc un régime qui s'est développé, qui est assez bien rodé et qu'on va étendre à l'utilisation de l'ensemble des médicaments. Des expériences semblables faites ailleurs ont très bien montré qu'on peut, avec une bonne révision de l'utilisation des médicaments, diminuer la consommation de médicaments, et la diminuer non pas en privant les gens de médicaments dont ils auraient besoin, mais en diminuant plutôt l'utilisation de médicaments qui est faite en surplus, de façon souvent très inadéquate et qui non seulement coûte cher sans donner de bénéfice au patient, mais très souvent cause des problèmes à des personnes. On sait que des personnes qui prennent régulièrement des médicaments sans qu'il y ait un bon contrôle de cette nature, on retrouve à peu près 20 % de ces gens-là qui doivent consulter dans une salle d'urgence durant l'année pour une raison qui est reliée à l'utilisation de leurs médicaments.

Donc, le régime d'assurance, il faut le voir au complet, il faut le voir avec la confection de la liste où il y a des mécanismes de contrôle plus efficaces pour le prix; il faut le voir avec le Comité de revue de l'utilisation des médicaments, où il va y avoir une meilleure information qui va être retournée et aux médecins et aux pharmaciens et aux personnes qui utilisent des médicaments, pour qu'on en fasse une utilisation beaucoup plus adéquate. Et tout ça va se situer, troisième élément, dans le cadre d'une politique du médicament qui est en élaboration présentement et qui va nous donner des indices pour bien suivre le programme, pour bien en mesurer l'impact, de sorte qu'on soit capable, au besoin, d'apporter des correctifs et être sûr que dans trois ans, quand cette loi sera révisée, que le régime sera révisé en commission parlementaire... C'est prévu dans la loi. Il n'y a pas beaucoup de lois qui créent de nouveaux programmes qui se donnent cette exigence, M. le Président. On s'est donné l'objectif et l'obligation de résultat et, dans trois ans, une commission parlementaire pourra revoir le fonctionnement du régime, pourra revoir la loi et, au besoin, apporter les correctifs nécessaires, mais ce sera fait sur une base de données, d'une évaluation qui aura été faite régulièrement avec les mécanismes que j'ai décrits.

Je pense qu'on peut être très, très sûr, très assuré de ce côté-là, qu'il y a tout ce qu'il faut pour bien gérer ce programme-là. Encore une fois, les crédits supplémentaires requis cette année ne sont pas par hasard, ne sont pas à cause d'une difficulté dans la gestion et dans le lancement du programme, mais ils sont directement la conséquence d'une décision prise très sciemment en juin, juillet dernier, quant à la mise en oeuvre plus progressive du programme afin de faciliter le changement, l'absorption du changement ou l'adaptation au changement de tous ceux qui doivent consommer des médicaments, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, quant à moi, il y a une partie de l'explication du ministre, quant au dépassement ou au manque à gagner, qui n'est aucunement crédible, aucunement crédible. Quand le ministre parle du fait qu'il y a une partie qui est due à la mise en place du système au mois d'août, il a dit, et je le cite: «À compter du mois d'août seulement.» C'est ses mots à lui, là. Le projet de loi a été présenté le 15 mai, M. le Président, le 15 mai, et il a été adopté le 20 juin. Si une partie n'était pas appliquée au mois d'août, qu'est-ce qu'il veut dire par ça? Est-ce que le projet de loi a été prêt pour application le 1er juillet, après avoir été adopté le 20 juin et après avoir été présenté le 15 mai? Ce n'est pas crédible, ça, M. le Président. Qu'une partie soit due à une mise en place progressive, peut-être, mais, quand le ministre dit qu'il y a une partie qui est due au fait qu'on l'a mise en vigueur seulement à compter du mois d'août, ce n'est pas crédible.

J'aimerais que le ministre me dise c'est quoi, la partie du manque à gagner entre le 20 juin, quand son projet de loi a été adopté, au 1er août, qui fait en sorte qu'il y a un manque à gagner. Qu'il m'explique donc ça.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Bon. Je peux comprendre la question du député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vais revenir au début de la préparation de la stratégie budgétaire, parce que ce qui était envisagé à ce moment-là, c'était effectivement de pouvoir modifier, avant l'adoption d'un nouveau programme, les conditions qui prévalaient à l'époque pour les personnes âgées et les prestataires de la sécurité du revenu, qui avaient déjà leurs médicaments fournis et payés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Autrement dit, on pouvait concevoir de modifier les règles de remboursement et de couverture offertes par la Régie pour les deux groupes de personnes, les prestataires de la sécurité du revenu et les personnes âgées, qui étaient déjà, si vous voulez, couvertes par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Il n'y avait pas formellement un régime général comme on a présentement, mais ces deux groupes de personnes avaient une forme d'assurance, vu que leurs médicaments étaient essentiellement offerts gratuitement; c'est l'État qui en assurait complètement le coût.

On aurait pu changer ça seulement... sans avoir une loi qui adoptait un régime général qui couvrait tout le monde, on aurait très bien pu faire ça, et on aurait pu le faire dès le 1er avril pour modifier les règles du jeu et demander une contribution aux prestataires de la sécurité du revenu et aux personnes âgées. C'était ce type de scénario qu'on avait vu possible, vu le contexte budgétaire qui était celui de l'époque et qui est encore le nôtre, de commencer par modifier la couverture qui était offerte à ces deux clientèles-là à partir du 1er avril; ça, c'était faisable avec le dépôt des crédits. Lors du dépôt des crédits, le gouvernement pouvait décider qu'il changeait la couverture qui était offerte à ces deux groupes-là et exiger un paiement partiel. Ça, ça aurait fourni une première économie. C'est évident que la loi ne pouvait pas... Ce n'est pas le nouveau régime qui aurait été en place, on ne pouvait pas le mettre en place avant de l'avoir adopté. Ça, c'était en janvier 1996, fin 1995, début 1996, à la préparation du budget.

Quand on est arrivé à mars-avril, comme on avait continué de consulter dans la suite du rapport du groupe qui était présidé par M. Castonguay, qu'on avait rencontré beaucoup de gens et qu'on avait plus vu, avec les différents groupes, quelles seraient les meilleures conditions, les plus équitables et les plus faciles pour s'adapter à ce changement-là, on a d'abord pris une première décision: de ne pas modifier les règles de jeu qui existaient avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec pour les prestataires de la sécurité du revenu et les personnes âgées, de les laisser telles quelles jusqu'au moment où on aurait approuvé le régime général pour tout le monde et de ne pas commencer avec eux en préliminaire, si vous voulez.

(12 h 10)

C'est de là que vient la différence très, très importante. Une fois la loi adoptée, fin juin, on aurait toujours pu commencer, on était prêt pour commencer le 1er juillet; ça, ça aurait été possible, mais là on a jugé de, comme la loi était adoptée, que c'était le début de l'été, qu'il fallait se donner encore un peu plus de temps pour revoir les groupes impliqués, redonner de l'information et bien s'assurer que tout partait, là, en donnant le maximum de temps aux gens de s'adapter.

Alors, je comprends la question. C'est la stratégie budgétaire qui a été modifiée, où on a décidé de ne pas exiger plus comme contribution avant que tout le monde, au Québec, soit couvert par le même programme, de sorte que, là, on aura vraiment quelque chose de purement équitable pour tous.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: J'apprécie énormément la franchise du ministre qui nous indique que c'est une stratégie budgétaire. Ce que, nous, on décrie depuis le début de ce processus-là, c'est que le projet de loi n° 33, assurance-médicaments, n'a rien à voir ou presque avec les médicaments et tout à voir avec les finances du gouvernement du Québec. J'apprécie énormément la franchise du ministre qui vient d'admettre en cette commission plénière qu'effectivement les décisions qui ont été prises ont été prises en fonction de l'état financier du gouvernement du Québec et des budgets.

Ceci étant dit, M. le Président, comme le ministre vient de le dire, on aurait pu faire des choses pour les crédits au mois d'avril, le gouvernement ne l'a pas fait. Mais, à ce moment-là, il savait déjà, M. le Président, qu'ils avaient pris la décision de ne pas changer les modalités de financement pour les personnes âgées, pour les assistés sociaux. S'ils ont pris cette décision, au mois d'avril, de ne pas le faire, comment voulez-vous que le ministre invoque aujourd'hui une dépense non attendue d'une certaine somme de dizaines de millions de dollars? Ils savaient, au mois d'avril, dans la préparation du budget, qu'ils ne mettraient pas à contribution des personnes âgées et des assistés sociaux avant quelque chose comme le 1er août.

Ce n'est pas une dépense inattendue, M. le Président. Le ministre des Finances et le ministre de la Santé auraient dû prévenir, au moment de la préparation du livre des crédits, des sommes additionnelles pour couvrir ce manque à gagner, pas revenir au mois de décembre en plaidant: C'est des sommes inattendues, quand le ministre vient d'admettre effectivement: C'était un choix qu'on a fait. On a pris le choix au mois d'avril, là, on est rendu en décembre, puis il faut compenser pour. Quant à moi, ça n'a pas de bon sens, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: En fait, les mêmes observations qu'a faites le député de Notre-Dame-de-Grâce amènent une conclusion plutôt différente, c'est-à-dire que, oui, il y avait un élément budgétaire. Ça, on ne s'en est jamais caché. Dans tous les coûts de notre système de santé et de services sociaux présentement – je pense qu'on va remonter là pour bien voir dans quel univers on fonctionne – on attribue, on alloue 10 % du produit intérieur brut, au Québec, à la santé et aux services sociaux. C'est en avant de tous les pays au monde, si on exclut les États-Unis, qui sont dans un autre univers en ce qui regarde la santé et les services sociaux.

On est à un point de PIB de plus que la France, qui est le pays qui, en Europe, consacre le plus à la santé et aux services sociaux. On sait que la moyenne des pays d'Europe, la communauté européenne, de l'OCDE, est autour de 8, 8,5 présentement et qu'il y a des pays aussi bas qu'autour de 6,5, 7. Et ces pays-là, c'est des pays comme le Danemark, la Grande-Bretagne. Si on sort de la communauté européenne et qu'on va dans les pays du G 7, le Japon est à ce niveau-là aussi.

Alors, ça, il faut vraiment avoir toujours dans la tête – et ça, on ne s'en est jamais caché – qu'on a une réorganisation de nos services pour pouvoir diminuer la part du produit intérieur brut qui est consacrée à la santé et aux services sociaux. Je ne reprendrai pas tout le discours et toute la logique qui sous-tend la réorganisation du réseau, on sait qu'on peut faire plus, autrement, à moindre coût.

Ça, c'est vrai aussi pour le secteur du médicament, où on a conclu qu'il faudrait demander là une contribution aux gens en fonction de leurs revenus, selon leur capacité de payer, pour préserver d'autres services de santé ailleurs. Si on veut diminuer, on ne peut pas faire porter tout le coût de la diminution de ce qu'on investit dans le domaine de la santé et des services sociaux pour en arriver à un niveau plus comparable à d'autres pays, plus à un niveau qu'on peut vraiment se payer avec l'argent qu'on a, sur les hôpitaux. On en a pris pas mal sur les hôpitaux parce qu'on avait trop de lits. On en a pris sur d'autres équilibrages qui ont été faits dans le système. Mais, pour que ça soit vraiment équitable et qu'on maintienne un bon système, une couverture complète, il faut que la contribution vienne des différents secteurs, des différentes sources possibles de financement.

Donc, il y avait de prévu dès le début, dans le contexte budgétaire actuel, dans le contexte de ce qu'il est normal de donner aux services de santé et aux services sociaux, la décision de répartir la contribution des gens de façon différente. Première chose. Si on avait tout appliqué ça strictement dans le cadre budgétaire, comme on l'avait prévu au début dans la préparation du budget, là on n'aurait pas respecté vraiment l'essence qu'a rajoutée en plus le programme d'assurance-médicaments. Comme on a attendu pour faire ces modifications-là dans le cadre d'un programme d'assurance-médicaments, là on était sûr que la contribution qui était demandée était demandée à tout le monde, pas seulement à ceux qui étaient déjà les clients de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, les personnes âgées et les prestataires de la sécurité du revenu, pas seulement à eux, mais à tout le monde.

Il faut bien se rappeler que ce régime-là, qui est un partenariat entre le public et le privé, couvre tout le monde avec un régime général qui a trois caractéristiques essentielles. Qu'on soit couvert par un collectif privé ou par un programme individuel avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec, pour tout le monde, il y a un plafond maximal de 750 $. Il n'y a personne qui va payer plus que 750 $ pour la consommation de médicaments durant l'année, tous régimes confondus. La coassurance, la proportion du prix qu'on est obligé de payer, est au maximum à 25 %; ça a été fixé pour l'ensemble de tous les régimes. Et, finalement, la liste de médicaments accessibles est la même aussi, et c'est la liste qui est préparée par le Conseil consultatif de pharmacologie, qui contient plus de 4 000 médicaments, à laquelle on en a rajouté près d'une cinquantaine de nouveaux cette année pour être sûrs d'avoir une couverture complète.

Alors, là, quand on a justement fait ce changement-là dans le cadre du programme qui a été mis en oeuvre, non seulement on rencontrait un objectif budgétaire, mais on le faisait avec une répartition beaucoup plus équitable du coût. C'est ce qui nous permet de pouvoir dire qu'on a maintenant, pour tout le monde, accessible le médicament, ce qui est un élément important de notre virage ambulatoire. C'est accessible à tout le monde, tout le monde contribue, mais en fonction de son revenu et de sa capacité de payer, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Plus le ministre parle, plus je suis inquiet. Il me semble que c'est encore un autre exemple d'improvisation du ministre. Nous sommes ici cet après-midi discutant d'un ajout entre 15 % et 20 % dans le budget sur le programme des médicaments. Si mon information est correcte, c'est un ajout entre 15 % et 20 %. Et les réponses que le ministre donne aujourd'hui, effectivement, sont loin d'être crédibles.

Je voudrais questionner un peu sur la question du prix des médicaments. Il a dit qu'il a voulu sauver 32 000 000 $. Selon ma compréhension, effectivement, il a sauvé juste 20 000 000 $ sur le prix des médicaments. Mais, selon moi, M. le ministre, le prix des médicaments était gelé pour trois, quatre ans, déjà. Avec ça, ce n'est pas le prix des médicaments. Peut-être que le ministre veut changer le mot, c'est plus le coût des médicaments et pas nécessairement le prix. Je lui donne la chance de s'expliquer.

La chose qui m'a frappé le plus quand le ministre a donné des réponses à mes collègues, c'est qu'il a dit, si j'ai bien compris, qu'il veut élargir le rôle du Conseil consultatif de pharmacologie, le CCP. Il veut élargir ce rôle, et il était assez clair dans ça. Il veut que le CCP, malgré que le DGPS, à Ottawa, ait fait les études sur l'efficacité des médicaments, refasse les études. Mais ils ont ajouté que le CCP va introduire le concept des coûts, le prix des médicaments. Avant de recommander une liste, est-ce que le médicament est sur la liste ou non, il va tenir compte du prix des médicaments et du coût au système.

Il me semble, M. le Président, que le ministre est en train de mettre de côté son premier rôle: de s'assurer que la santé de la population québécoise est bel et bien protégée. Parce qu'il me semble qu'il doit y avoir une autre place dans notre système où on peut explorer la question de coût. J'espère qu'il va recommander à ce qu'un médicament soit sur la liste, accessible à tous les Québécois pour la pure et simple raison: est-ce que c'est efficace? est-ce que c'est bon pour les citoyens? et que ce ne soit pas nécessairement basé sur le coût. On peut trouver d'autres instances où on peut avoir cette discussion, mais il me semble que le ministre de la Santé doit jouer le rôle de protéger le système de santé et ne pas faire le travail pour le ministre des Finances.

(12 h 20)

Avec ça, M. le Président, je voudrais donner une chance au ministre d'expliquer son attitude dans cette question: un, sur les prix des médicaments et, deux, sur le rôle du CCP, qui introduit un concept où ils vont de plus en plus jouer un rôle, comme j'ai déjà dit dans cette salle, d'adjoint parlementaire au ministre des Finances.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, pour ce qui est de la question de la gestion des coûts des différents programmes du gouvernement, je pense... ça surprendra peut-être les gens d'en face d'entendre ça, ils n'ont pas l'air à se rappeler comment ça fonctionne, un gouvernement, mais c'est une question de décision de gouvernement et d'une responsabilité collective qui est prise par tout le gouvernement, et singulièrement par les ministres qui doivent gérer différents portefeuilles. Et, comme la santé et les services sociaux sont pour une part très importante – c'est plus de 30 % des dépenses de programmes du gouvernement – je pense que la population serait très mal servie si le titulaire du poste, ministre de la Santé et des Services sociaux, n'étant pas le serviteur servile du ministre des Finances mais étant le collaborateur du ministre des Finances, n'assure pas une gestion efficace de 30 % des dépenses, d'une proportion de 30 % des dépenses de programmes du gouvernement.

Et pourquoi – est-ce que le député pourrait nous expliquer pourquoi? – une fois qu'on a évalué, et c'est le premier rôle du CCP, d'évaluer la qualité thérapeutique et la valeur thérapeutique d'un médicament, une fois qu'on a retenu des médicaments qui ont la qualité, l'efficacité thérapeutique requise, pourquoi on se contenterait d'acheter celui qui coûte le plus cher sur le marché alors qu'il peut y en avoir d'autres qui fournissent le même type de médicament à beaucoup moins cher? Et on sait – et le député de Nelligan, qui connaît très bien ce type de dossier, le sait très bien – que la variation entre différents médicaments de même nature, qui ont les mêmes effets, peut être très, très grande. Ça peut varier par un facteur de trois, quatre ou cinq, dans certains cas.

Alors, ce n'est qu'une mesure de gestion compétente; une fois qu'on a à choisir entre différents médicaments également efficaces pour un type de problème, qu'on s'assure qu'avec l'argent des taxes de tout le monde on va payer pour les médicaments qui sont les moins coûteux, parce qu'on va pouvoir fournir le service à beaucoup plus de monde à moindre coût, et je pense qu'à ce moment-là ça devient une question des lois du marché de faire les ajustements nécessaires pour que tout le monde reste dans un système compétitif, mais en s'assurant que le consommateur est servi correctement quant à la qualité du produit et quant au coût de ce produit-là, et que le rapport qualité-prix est fait. Et ça, tout bon gestionnaire, normalement, fait ça. Et, si ça avait été fait depuis plus longtemps au Québec, on n'en serait peut-être pas réduit à l'effort qu'on est obligé de fournir de façon gigantesque présentement, M. le Président.

M. Williams: M. le Président, un bref complémentaire à cette question. Vous avez mentionné, M. le ministre, que vous avez prévu de sauver 32 000 000 $, mais, effectivement, vous n'avez pas atteint cet objectif attendu. Je voudrais expliquer... le 32 000 000 $ est basé sur quoi? Pourquoi vous n'avez pas atteint votre objectif?

M. Rochon: Cette économie de 32 000 000 $ était prévue en réalisant deux types d'opération: un, qu'un certain nombre de médicaments – je pense qu'on en a identifié deux ou trois – qui pourraient être transférés à ce qu'on appelle la liste d'exceptions. Ça, c'est un peu technique...

M. Williams: Question de règlement.

Le Président (M. Pinard): Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Je m'excuse, mais ce n'est pas vous... J'ai de la difficulté à vous entendre, M. le ministre. J'espère qu'on peut avoir le quorum.

Le Président (M. Pinard): D'accord. Est-ce que, à ce stade-ci, vous accepteriez, parce que les mêmes règles s'appliquent... mais certains de nos députés pourraient peut-être se retirer dans les salons adjacents pour compléter leurs études particulières et faire en sorte que les députés ici pourraient continuer à échanger avec le ministre de la Santé, tout en demeurant dans les salons adjacents pour le maintien du quorum?

Est-ce que ça vous conviendrait comme ça, M. le député de Nelligan?

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Parfait. Alors, messieurs, je vous invite... Alors, M. le ministre.

M. Rochon: Merci, M. le Président. Ce que je rappelais, c'est que l'économie du 32 000 000 $ qu'on avait envisagée devait provenir de deux sources: une première qui était le transfert de certains médicaments sur ce qu'on appelle la liste d'exceptions, c'est-à-dire, une fois qu'un médicament est sur la liste d'exceptions, le médecin qui l'a prescrit doit justifier, de façon particulière, que c'est bien ce médicament-là et non pas un autre, peu importe son prix, qui est nécessaire pour le patient. De sorte que, à ce moment-là, ça va... Et c'est encore une démonstration que le régime fonctionne pour assurer la meilleure qualité au patient.

Et si, pour le médecin, il n'y a aucune substitution acceptable par un générique parce qu'il a des raisons thérapeutiques de vouloir procéder de cette façon, alors le médecin peut exiger à ce moment-là qu'on prenne le médicament en question; mais si ce n'est pas exigé par le médecin, ça veut dire que d'autres médicaments en substitution peuvent être utilisés.

Et on sait que, de fait, par expérience, le transfert d'un médicament sur la liste d'exceptions, qui, en général, est fait selon les indications mêmes du producteur du médicament... que le fait de le mettre sur la liste d'exceptions, ça en diminue beaucoup la consommation. Quand c'est sur la liste générale, on a un peu le réflexe, souvent, de dire: Bon, ce n'est pas indispensable d'avoir celui-là, un autre médicament cinq fois moins cher ferait aussi bien, mais, tant qu'à y être, on y va avec ça.

Alors, ça, c'est des millions qu'on peut économiser de cette façon-là. Il y avait donc ça à identifier comme source d'économies. Et l'autre, c'est une discussion qui évolue à travers tout le Canada, pas seulement au Québec, c'est le système de référence pour payer les médicaments. Nous, on a un système qu'on appelle le système du prix de vente garanti, je pense, qui fixe le prix des médicaments. Ça aussi, ce serait assez technique d'en expliquer les détails, mais retenons que c'est un système par rapport à un autre qui s'appelle le système du prix le plus bas.

Et, au Québec – et, ça aussi, le député de Nelligan pourrait même expliquer tout ça dans ses fins détails probablement mieux que je peux le faire, parce que je sais qu'il s'intéresse depuis plusieurs années à cette question – si on paie certains médicaments, ou l'ensemble des médicaments, sur le prix le plus bas plutôt que le prix de vente garanti, il y a une économie importante à faire de ce côté-là. Maintenant, au Québec, on est en discussion avec l'industrie pharmaceutique pour s'assurer qu'on maintient un système de financement du médicament qui est honnête pour la population, qui est une bonne gestion des fonds mais qui, aussi, tient compte de la collaboration qui est établie avec l'industrie pharmaceutique, qui a investi beaucoup en recherche ici et qui, en plus des coûts du médicament comme tels, investit beaucoup pour les coûts de la recherche.

On sait qu'au Québec on a donné, depuis plusieurs années maintenant, une protection additionnelle des brevets sur une période de 15 ans à partir de la commercialisation, à partir de la mise en vente d'un nouveau produit, ce qui fait une période plus longue que dans les autres provinces canadiennes de protection d'un prix d'un médicament breveté. Bon. Ça, c'est quelque chose qui est en discussion pour s'assurer que dans l'ensemble de notre partenariat avec l'industrie pharmaceutique, on fasse peut-être des ajustements éventuellement de ce côté-là. Mais, ça, c'était vu comme une possibilité. Et il y a des discussions qui ont été commencées, qui sont en cours avec l'industrie pharmaceutique présentement pour voir comment, dans l'ensemble de ces moyens-là, on fixe le prix et sur quelle liste on met le médicament quant à son utilisation, on peut faire une plus grande économie.

Bon. Alors, on a été plus optimiste que ce qu'il a été possible de faire. On a pensé qu'on pourrait avoir des ententes qui nous amèneraient à 32 000 000 $ d'économies. Ça a progressé, mais à peu près au tiers de ce qu'on espérait. Alors, toute l'explication est là.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Sur le même point, je constate que l'un des objectifs du programme d'assurance-médicaments, outre de régler la situation budgétaire du gouvernement, c'était un des objectifs nommés par le ministre au moment où il l'adoptait, c'était justement la réduction du coût des médicaments. À partir du moment où on nous dit que les objectifs en cette matière-là ne sont pas rencontrés, ma question va être bien simple: Est-ce qu'on n'est pas en train, avec ce facteur-là, de déjà commencer à préparer le terrain pour ce que, moi, je craignais au moment de l'adoption de l'assurance-médicaments, une fois que la pompe à fric est installée dans nos pompes, dans les poches des contribuables, est-ce qu'on n'est pas en train de préparer le terrain déjà pour des augmentations de la prime pour les années subséquentes?

(12 h 30)

Je ne sais pas. Le ministre nous disait, entre autres, tout à l'heure que c'est une loi qui a un mécanisme de révision, de réexamen au bout de trois ans. À mon avis aussi, et comme il le soulignait, c'est une bonne chose de revoir ce qu'on fait. Est-ce que, lui, à l'heure où on se parle, a des indications claires, certaines à l'effet que, avant cette révision-là, outre les indexations pour tenir compte de l'inflation, il n'y aura pas d'augmentation réelle de la prime? Parce que, dans des programmes comparables, dans d'autres provinces entre autres, il y a eu, suite à l'adoption des régimes, des augmentations significatives des coûts qui ont été transférées sur la prime.

M. Rochon: Bon, je vais repréciser; je pense que le député de Rivière-du-Loup n'était pas avec nous tout à l'heure, quand j'ai répondu à une autre question, mais qui retouchait la même préoccupation. Il faut qu'on comprenne très bien que les crédits supplémentaires qu'on doit demander cette année, ce n'est pas causé par une inflation dès le départ du coût du programme; c'est strictement en lien avec le fait qu'on a décidé de ne pas aller chercher une contribution qui est prévue, de ne pas aller la chercher tôt dans l'année, et qu'on a retardé la mise en oeuvre des mesures, ce qui fait que tous, maintenant, vont contribuer d'une façon adaptée à leurs revenus, mais vont contribuer au prix du médicament.

En ayant retardé, pour les différentes raisons que j'ai expliquées, parce qu'on a discuté beaucoup avec les gens et qu'on a voulu être le plus souple possible pour donner à tout le monde le temps de se préparer et de s'ajuster à ce nouveau programme, on a accepté un manque à gagner, si vous voulez, ce faisant. Mais ce n'est pas le coût du régime comme tel qui augmente; c'est une source d'approvisionnement qui n'a pas été là cette année et qui le sera l'an prochain.

Et, pour s'assurer que ça le sera l'an prochain, il faut bien se rappeler – puis je vais redire ça encore une fois – que le régime d'assurance-médicaments, c'est un élément d'un système qui comprend différents volets. Bon. Il comprend, en plus du régime d'assurance comme tel, la confection d'une liste, sur recommandation, avec le travail qui est fait par le Conseil consultatif de pharmacologie, qui est un comité technique de professionnels, de scientifiques, qui travaille avec tout un réseau d'autres comités et de groupes dans des domaines plus spécialisés et qui peut confectionner une liste, s'assurant qu'elle est complète, qu'elle a des médicaments qui sont requis pour les gens, mais pas n'importe quel médicament, qu'on offre un panier qui fait face à tout ce qui peut être médicalement requis. Une fois qu'on a bien tenu compte de la valeur thérapeutique d'un médicament, qu'on s'assure aussi qu'on y inscrit des médicaments pour lesquels le prix est jugé équitable, juste et raisonnable. Donc, un bon rapport qualité d'abord, mais qualité-prix aussi.

En plus de ça, il y a le mécanisme de révision de l'utilisation du médicament, qui est fait en vertu d'une entente, d'un protocole qui a été établi entre la Régie de l'assurance-maladie du Québec, le Collège des médecins et l'Ordre des pharmaciens, de sorte qu'on s'assure, comme ça a été le cas dans d'autres pays qui ont adopté des programmes qui peuvent être semblables au nôtre à certains égards, qu'on va avoir une diminution de l'utilisation du médicament. On l'estime autour de 10 %; ça peut peut-être même être un peu plus.

Mais là, ce qu'il est intéressant encore une fois de remarquer, c'est que partout ou avec un régime qui couvre tout le monde, une liste qui est confectionnée sur une base technique et scientifique, l'évaluation de l'utilisation du médicament amène à diminuer l'utilisation de médicaments qui est faite de façon non appropriée, et ça, on a des données sûres là-dessus, là. On sait qu'il y a des gens qui utilisent régulièrement des médicaments... Je le répète encore une fois: Il y a 20 % de ces gens-là qui vont se retrouver à consulter souvent en urgence pour une raison, pour un problème qui est causé par l'utilisation de leurs médicaments. Sur ce 20 % de personnes là qui consultent, il y en a un 20 % de ceux-là qu'on va aussi hospitaliser parce que leur problème est assez sérieux. Donc, il y a ce mécanisme-là.

Donc, le régime, le Conseil consultatif de pharmacologie, le comité de révision de l'utilisation des médicaments, tout ça est encadré dans une politique du médicament qu'on est à élaborer, où il y aura même un groupe de citoyens qui va aviser et conseiller le ministre, et on va s'assurer qu'on a des paramètres pour bien évaluer la progression de ce programme-là, de sorte que dans trois ans, quand on va le représenter en commission parlementaire – c'est écrit dans la loi – il pourra y avoir une évaluation qui sera faite, des ajustements qui pourront être faits au besoin, mais sur une base de données très concrètes qui ont été recueillies tout le temps.

Alors, il faut faire bien attention pour ne pas avoir l'impression ou laisser couler l'impression que, dès le départ, le programme d'assurance-médicaments coûte plus cher que prévu, ce n'est pas vrai. Il est enligné selon ce qui avait été prévu, mais il sera en opération au complet à partir du 1er janvier. C'est donc un début de programme qu'on a fait, où on a sciemment, au mois de juin, accepté de sacrifier une partie de l'économie qui était prévue à ce titre-là pour tenir compte de plusieurs représentations qui nous ont été faites par les gens et pour que la mise en place du programme soit la plus douce possible, en donnant le temps aux gens de s'ajuster.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui, je comprends. Ma question était précise: Est-ce que le ministre anticipait... Sur la base de la difficulté qu'il a eue à rencontrer ses objectifs sur les coûts des médicaments, est-ce qu'on peut s'attendre à des hausses de la prime? Si je me fie aux réponses du ministre sur son optimisme quant aux réductions des coûts, il nous annonce presque que, d'ici les trois prochaines années, on pourra s'attendre à ce que, pour les gens, la prime de 175 $ soit abaissée. Alors, je ne sais pas si je l'ai bien compris, mais le 175 $ qui est prévu pour la première année, c'est un maximum et ça n'ira pas en montant, ça va aller en diminuant. Alors, je ne sais pas s'il confirmera. Il pourra me confirmer ça en même temps que me répondre à la deuxième question que j'avais.

Je l'avais questionné, le printemps passé, lors de la période des questions, sur l'administration elle-même de l'assurance-médicaments. Le ministre m'avait dit, à l'époque, que c'était des coûts minimes, que ce n'était pas très important, qu'on ne pouvait pas connaître le nom de chacun des quelques fonctionnaires qui allaient être affectés à ça. On constate, dans la ventilation des crédits, que c'est quand même, au chapitre de la rémunération, à l'élément 4 qui est sur les services pharmaceutiques et médicaments, un peu plus de 38 000 000 $ qui apparaît à la rémunération.

Je ne connais pas tous les facteurs pour faire une moyenne en termes de rémunération, pour trouver le nombre de personnes, mais, calculé vite à la main, ça me donne quelques centaines de personnes, là. À 38 000 000 $ de rémunération, je ne sais pas si c'est pour une année au complet, on arrive vite à 600, 700 personnes en termes de rémunération, à mon avis. D'ailleurs, soit dit en passant, 40 % des crédits supplémentaires totaux qui sont donnés au ministère de la Santé et des Services sociaux présentement, c'est de l'ordre de la rémunération. Alors, je ne sais pas s'il peut, maintenant que le régime est en place, nous donner une idée de l'ampleur de bureaucratie que le régime d'assurance-médicaments a créée et, en même temps, nous indiquer, si j'ai bien compris, qu'il s'agit de baisses des primes qui s'en viennent.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le ministre, si je résume: l'importance de la fonction publique rattachée à ça et la baisse probable des coûts de la médication.

M. Rochon: Il y avait, d'abord, une première question qu'a rappelée le député de Rivière-du-Loup quant à l'évolution de la prime. Je ne m'engage pas à ce qu'on diminue la prime au cours des trois prochaines années. Ce qui a été prévu, c'est qu'on maintienne cette prime-là. Mais je n'ai aucune objection, si les mécanismes qu'on a mis en place sont efficaces aussi rapidement et qu'on peut annoncer une diminution de la prime, je pense que n'importe quel ministre de la Santé serait très heureux de faire ça. Alors, on va l'espérer. Mais ce dont on peut être sûr, c'est qu'on devrait être capables de faire marcher ce programme-là avec les paramètres qui ont été adoptés dans la loi.

Et, pour cela, je vous donnerais juste quelques chiffres qui montrent comment tout ça est pâle présentement par rapport aux prévisions qu'on avait faites. Pour l'implantation du système et toute l'inscription qui a été faite, on avait prévu 7 800 000 $ pour le coût de cette opération-là; là, elle est à peu près terminée et ça permet de faire une prévision révisée qui va être à 500 000 $ de moins que ce qui était prévu, c'est-à-dire qu'on prévoit arriver à 7 300 000 $ plutôt qu'à 7 800 000 $ pour la mise en place. L'instauration du système prévoyait un autre coût important, qui était celui de tout le système de communication interactive avec l'ensemble des pharmacies et la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Il y avait 19 200 000 $ de prévus pour ça et, au moment où on se parle, le coût prévu est exactement de 19 200 000 $. Alors, ce qui était prévu comme coût pour faire fonctionner le système, ça fonctionne dans ces limites-là.

(12 h 40)

Le montant auquel réfère – et c'est la deuxième question – le député de Rivière-du-Loup, M. le Président, le 38 000 000 $, ce n'est pas la gestion du système; c'est le montant qui est représenté par les honoraires des pharmaciens. Alors, le professionnel, qui est celui qui rend le service sur le terrain est le pharmacien. Et on payait déjà, de toute façon, dans le régime auparavant, comme la Régie de l'assurance-maladie du Québec couvrait déjà les mêmes clientèles essentiellement, les personnes âgées et les prestataires de la sécurité du revenu. Maintenant, on rajoute à peu près 1 000 000 de personnes avec ceux qui n'avaient pas d'assurance, mais c'est l'évolution de cette masse salariale d'honoraires, en fait, qui sont payés aux pharmaciens pour les services rendus.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Rivière-du-Loup, il vous reste encore une minute trente.

M. Dumont: Je veux seulement savoir: L'administration elle-même du régime, est-ce qu'à ce stade-ci le ministre a une certaine idée du nombre de personnes supplémentaires qu'elle a requis?

(Consultation)

M. Rochon: Un instant, M. le Président.

(Consultation)

Le Président (M. Pinard): C'est une question qui demande... Alors, M. le ministre, si vous êtes prêt à répondre maintenant.

M. Rochon: Je pense que le député de Rivière-du-Loup... On parlera éventuellement de la liste du député de Rivière-du-Loup, s'il veut vraiment savoir. S'il est difficile de donner une réponse quant au nombre de personnes de plus, c'est que ce programme-là, et j'en discutais avec M. Dicaire qui est le P.D.G. de la RAMQ... Vous allez comprendre que les gens qui travaillent à la RAMQ sont dans différents services qui gèrent l'ensemble des programmes: il y a l'assurance-maladie, le service optométrique, le service dentaire, l'assurance-médicaments, orthèses et prothèses, et ils font les différentes opérations de recevoir les factures, vérifications, validations, paiements ou des choses du genre. Donc, la structure n'est pas en fonction d'une équipe qui ne travaille que sous l'assurance-médicaments, une autre qui fait toutes les opérations que pour l'assurance-santé, et le reste. Alors, c'est pour ça que c'est difficile de donner le nombre de personnes qui ne travaillent que là-dessus. C'est à travers toute l'équipe de la Régie.

Maintenant, à ce qu'on me dit, si on veut faire une estimation à l'oeil, c'est que, en ajoutant ce programme-là et en ajoutant 1 000 000 de personnes, ça pourrait vouloir dire 25 à 30 personnes additionnelles qui seraient requises pour la gestion de l'augmentation de volume qui sera à traiter avec l'assurance-médicaments. Permettez-vous que M. le président de la Régie donne un complément de réponse, s'il vous plaît?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre, vous avez toujours l'opportunité de faire intervenir un de vos sous-ministres ou responsables.

M. Dicaire (André): Peut-être deux mots, là, pour se rappeler que, lors de la commission parlementaire sur le projet de loi, le Regroupement des assureurs et les représentants des assureurs, pour gérer ce quantum additionnel d'assurés de 1 000 000 de personnes, avaient avancé la possibilité que ça puisse atteindre un pourcentage de 30 % de frais administratifs. Si vous prenez 30 % de frais administratifs sur 200 000 000 $ de coût d'assurance, vous vous retrouvez avec 60 000 000 $ de frais administratifs que les compagnies d'assurances avaient dit devoir charger pour être capables de gérer le système.

Nous, on va le faire. Au lieu de 30 %, on avait pris l'engagement qu'on le ferait entre 3 % et 5 %, et je dois vous dire qu'on est encore à l'intérieur de ces chiffres-là. On va le faire entre 3 % et 5 % de frais administratifs; donc, ça va être quelque chose de l'ordre d'entre 5 000 000 $ et 7 000 000 $ de frais administratifs qu'on va devoir, disons, absorber à la Régie de l'assurance-maladie pour gérer ce volume additionnel d'adhérents. Donc, quand vous comparez ce quelque 3 % à 5 % comparativement à 30 %, il y a toute une marge, considérable, disons, à l'avantage et au bénéfice des assurés eux-mêmes.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que vous avez une autre question complémentaire? Non. Alors, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui. Merci, M. le Président. Dernièrement, la coalition sur l'assurance-médicaments, qui est surtout représentée par Mme Bérubé et Mme Lecompte qui sont venues en commission parlementaire exposer les difficultés auxquelles les personnes aînées sont confrontées, a fait un sondage. On pourra peut-être dire qu'il n'était pas suffisamment scientifique, mais ça donne quand même une indication de ce qui se passe actuellement avec le programme du ministre. Ils ont interrogé 110 personnes; 36 ayant abandonné leur traitement, 45 ont éprouvé des difficultés sérieuses à faire face à leurs autres dépenses que sont le loyer et l'épicerie et 10 personnes ont dû être hospitalisées.

On sait que les aînés demandent que, sous le seuil de pauvreté, ils n'aient pas à payer le programme d'assurance-médicaments. De plus en plus, on est en train de documenter que les personnes aînées doivent choisir entre manger et prendre leurs médicaments. Je vous rappelle aussi qu'au moment de la commission parlementaire, bien, là aussi, il y a eu des changements entre le premier projet du ministre et un projet subséquent. On est passé, au niveau des coassurances, de 20 % à 25 %. On ne savait pas d'où ça venait, mais ça dénotait également l'improvisation qui est associée à tout ce projet et évidemment le seul objectif – on n'arrête jamais de le répéter – c'était de récupérer les 196 000 000 $ qui étaient prévus aux crédits. Le ministre nous dit: Bien, je n'ai pas été capable de faire ça comme il faut; je me représente de nouveau devant vous, on va essayer de trouver une autre façon d'y arriver.

Le problème de sous-consommation est vraiment présent actuellement avec le nouveau régime. Je crois que l'Ordre des pharmaciens va présenter ces jours-ci, je crois que c'est le 19 décembre, un rapport à ce sujet. Je pense qu'il faudra l'étudier très attentivement, mais les premières indications que nous avons jusqu'à maintenant vont dans le sens que les gens ne prennent pas leurs médicaments.

Alors, ma question au ministre: Est-ce qu'il accepterait, là, comme le demande la Coalition des aînés, la coalition sur l'assurance-médicaments, de réviser les seuils de pauvreté pour que, sous le seuil de pauvreté, les personnes aînées n'aient pas à défrayer le coût de leurs médicaments, comme c'était le cas ou presque avec la circulaire «malades sur pied» où ils n'avaient qu'à défrayer, sous l'ancien gouvernement, il faut le dire, M. le Président, le 2 $ par prescription jusqu'à un montant maximal de 100 $?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre de la Santé.

M. Rochon: Alors, M. le Président, il faut se rappeler ce qui a déclenché le travail en 1993. Ce qui nous a amenés à ce régime d'assurance-médicaments qu'on a, ça a été une décision du gouvernement de l'époque, auquel on vient de référer, qui avait décidé, lui, tout simplement, pour commencer à faire face à ses déficits, de faire disparaître ce qu'on appelait la circulaire «malades sur pied» qui payait des médicaments pour des gens qui ont cinq ou six maladies importantes qui entraînent des consommations importantes de médicaments. Alors, ce que le gouvernement antérieur avait prévu faire pour régler le problème, c'est faire disparaître ça, puis laisser les gens payer entièrement leurs médicaments.

C'est un peu différent d'un régime qu'on met en place où tout le monde devra donner une contribution, mais où personne ne va jamais payer plus que 750 $ par année pour ses médicaments, et ce plafond-là va être géré sur une base trimestrielle. Alors, sur trois mois, ce n'est jamais plus que 187 $ que quelqu'un aura à payer, en tenant compte de la franchise et de la coassurance. Il ne faudrait pas qu'on fasse de démagogie là-dessus, parce qu'on a vraiment un régime qui est un régime de solidarité sociale qui assure que tout le monde va avoir accès aux médicaments en s'en partageant le coût en fonction de sa capacité de payer. Capacité de payer.

(12 h 50)

Ce qui donne la protection de l'assurance-médicaments comme dans tout régime d'assurance, c'est, d'abord, la prime qui sera exigible pour l'année 1997, à la fin de l'année, c'est-à-dire qui sera payable au début de 1998. Or, cette prime, M. le Président, on a choisi comme seuil de rémunération pour des personnes qui auront... comme seuil à partir duquel les gens vont commencer à payer une prime... Je vais prendre deux exemples. Un adulte seul va commencer à payer la prime à partir d'un revenu de 10 400 $ et, pour une famille de deux adultes et de deux enfants, c'est à partir de 21 900 $ qu'on va commencer à payer la prime. Et là ça va être une prime partielle de 40 $ par 1 000 $ de revenu jusqu'à un maximum où, là, la prime sera de 175 $. Pour la personne seule qui a commencé à payer progressivement à 10 400 $, le maximum va intervenir quand la personne va avoir une rémunération au-dessus de 14 775 $. Pour la famille de deux adultes et deux enfants qui aura commencé à payer une prime partielle de 40 $ à un revenu de 21 900 $, on va payer une prime complète de 175 $ quand on aura un revenu supérieur à 30 650 $.

Or, par rapport au seuil de pauvreté, on va comparer ça. À partir du montant où on exige un début de paiement qui est de 10 400 $, si on compare ça à ce que sont les seuils de pauvreté au Québec... On en a deux. Il y en a un qui est celui du ministère des Finances pour fins d'impôt et l'autre qui est celui du ministère de la Sécurité du revenu. Si on prend celui du ministère de la Sécurité du revenu, qui est plus élevé comme seuil que celui du ministère des Finances, pour une personne seule, un adulte seul sans enfant, le seuil est fixé à 8 000 $. Alors, nous, on commence, avec ce programme-là, à exiger un début de paiement de prime à 10 400 $.

Si on prend comme niveau supérieur Statistique Canada, Statistique Canada prend comme base de seuil de pauvreté 14 473 $ exactement, et la prime complète, pour nous, sera exigible au-delà de ce seuil-là à 14 775 $. Donc, entre ce qu'on appelle les seuils de faibles revenus de Statistique Canada, nous, on exigera la prime complète à un montant qui est légèrement supérieur aux seuils de faibles revenus de Statistique Canada et, à un montant qui est plus élevé de 2 000 $ que les seuils que l'on a au Québec pour la sécurité du revenu, les gens ne paieront pas de prime du tout.

Alors, il y a donc là, dans ce que ça coûte pour faire partie du système, si vous voulez, vraiment quelque chose d'équitable où, encore une fois, en bas de 10 400 $ ou de presque 22 000 $ pour la famille, on ne paiera pas de prime du tout; après ça, c'est une prime progressive. Et, au moment où on paie la prime complète de 175 $, qui est une des primes les plus basses pour tous les programmes du genre qui peuvent exister, on sera déjà au-dessus de ce qui est le seuil de faibles revenus de Statistique Canada. Donc, il y a une progression dans le partage et on a un système beaucoup plus progressiste, là, que régressif.

Maintenant, l'utilisation. C'est un peu dangereux, je pense, des déclarations comme ce que nous fait le député de Robert-Baldwin où, à partir d'une étude qu'il avoue ne pas être peut-être très rigoureuse et scientifique, quand même, là, il part puis il fait des généralisations comme si on avait fait une étude très rigoureuse. L'opposition est souvent très forte pour faire des dépôts de documents. S'il y a une étude à laquelle le député de Robert-Baldwin a eu accès, je l'inviterais à la déposer pour qu'on puisse dans les prochains jours l'analyser et être sûrs que, s'il y avait un problème qu'on n'avait pas vu, on puisse l'identifier. Mais j'aimerais vraiment voir parce qu'il y a certains documents qu'on a déjà déposés dont on n'a jamais pu retracer trop, trop les origines. Je voudrais bien savoir de quoi on parle avant de faire des généralisations comme on vient de faire là.

Parce que, nous, on le suit, ce programme-là, et on peut vous dire que, pour les quatre ou cinq derniers mois où le programme a commencé à fonctionner, en fait, de juillet à octobre compris, si on prend l'ensemble des prestataires, il y avait eu, juste avant le début du programme, une augmentation d'achats où les gens ont fait des provisions, ce qui a fait que, dans le premier mois, il y a eu une chute importante par rapport au mois de juillet parce que les gens avaient déjà fait leurs provisions. Mais, si on prend l'ensemble de la période pour l'ensemble des clientèles, il y a même eu une légère hausse de 1,8 % de jours-ordonnances, qui est l'indice de base qui est mesuré. Alors, pour l'ensemble des clientèles, ce n'est pas vrai de dire que les gens ont été privés de médicaments; il y a eu une légère augmentation de la consommation.

Quand on regarde les médicaments qui ont été en baisse de consommation, on voit, par exemple pour les personnes âgées, qu'on parle de médicaments pour la toux, pour la peau, suppléments diététiques, les benzodiazepines. S'il y a des médicaments qui sont prescrits et consommés beaucoup trop, et ça, c'est connu par plusieurs études, c'est ce type de médicaments dont on a diminué la consommation. Par contre, toujours pour les personnes âgées – j'ai une liste devant moi – tous les médicaments pour des problèmes cardiovasculaires, des problèmes reliés au fonctionnement du système nerveux central, à part les benzodiazepines, diabète, asthme, antiviraux, il y a eu une hausse de consommation de ces médicaments.

Alors, les quatre mois de fonctionnement du régime tendent plutôt à démontrer qu'il y a une stabilisation qui se fait et que, oui, il y a baisse de consommation de certains médicaments qui sont ceux qui sont connus comme étant souvent peu surutilisés et, pour les médicaments essentiels dont les gens ont besoin, ça se maintient ou c'est légèrement en hausse comme consommation. Alors, ça, c'est sur quatre mois. On suit régulièrement, parce que c'est important que les gens ne soient pas privés; c'est le but du programme que le médicament soit accessible. D'après nos données, nous, ça fonctionne et les gens ne sont pas privés de médicaments. Et, quand on a baissé la consommation, c'est plutôt pour le genre de médicaments où on s'attendait à ce qu'il y ait une baisse de consommation.

Maintenant, ceci dit – je terminerai là-dessus, M. le Président – une fois qu'on a conçu un régime qui est appliqué à plus de 7 000 000 de personnes et qui fonctionne bien pour l'ensemble, bien sûr, on peut s'attendre qu'il y ait des difficultés micro qui se présentent pour certaines personnes à certains moments, et on a vu que ces difficultés-là n'étaient pas en lien avec le prix qu'elles avaient à payer. Là, il faut bien réaliser que les gens qui ont les plus petits revenus n'auront pas à payer plus de 50 $ par trois mois. Il y a le premier 25 $ de coûts de médicaments qu'ils vont payer au complet; après ça, ils vont payer le quart de la facture seulement, jusqu'à un maximum de 150 $; après ça, ils ne paient plus. Ils ne paient plus rien pendant les trois mois, puis ça recommence l'autre trois mois après.

Ce qui a pu créer une difficulté dans certains cas: comme on l'appliquait sur cinq mois et qu'il n'y avait pas cette gestion trimestrielle, donc les gens qui avaient le plafond le plus bas, c'est 83 $, 85 $ qu'ils devaient payer. Et, si quelqu'un avait une prescription avec un montant assez élevé comme première prescription, il pouvait être obligé de payer tout le montant, de se rendre à son plafond dans un premier paiement, et ça, ça posait un problème. Ça, ça pose un problème, mais on l'a réglé, ce problème-là, pour s'assurer que les pharmaciens – et on a eu une excellente collaboration de la part des pharmaciens – au besoin, puissent échelonner le paiement sur quelques semaines, ce que – on nous l'a dit d'ailleurs – déjà des pharmaciens faisaient, de toute façon, quand des gens n'avaient pas tout le liquide pour payer tout de suite. C'était une question de liquidité de fonds pour le premier paiement, mais ce n'était pas fondamentalement le caractère du régime qui exige un montant global de l'ordre de 50 $ par trois mois.

Alors, il faut faire attention à ça, là, parce que semer l'impression, sur la base de quelques données qui ne semblent pas avoir été validées, que, de façon générale, il y a des gens qui se privent de manger pour être obligés de payer leurs médicaments, d'après toute l'information qu'on a, M. le Président, ce n'est pas ça du tout la situation. Et il y a une collaboration qui a été établie, pharmaciens-CLSC-Régie de l'assurance-maladie du Québec, pour que, si une personne est en difficulté, ces gens-là vont régler le problème sur une base clinique, comme on le fait beaucoup dans le domaine de la santé et des services sociaux. On a des régimes généraux qui sont appliqués et quand, pour des situations très particulières, il faut tenir compte d'incidents spécifiques, bien, on a des professionnels de la santé qui sont là pour faire ça et qui le font très bien, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Je vous inviterais, M. le ministre, s'il y a possibilité – je sais que vous avez un sujet qui est tellement large – à essayer d'être plus concis un petit peu dans vos réponses pour permettre à l'opposition de vous en poser davantage, de questions.

M. Rochon: Je peux essayer de faire ça, M. le Président. Ça dépend des questions, comment elles sont formulées puis combien il y a de corrections à faire.

Le Président (M. Pinard): Effectivement, je reconnais que vous avez un ministère qui est...

Alors, M. le député de Robert-Baldwin, allez-y.

M. Marsan: M. le Président, quand j'ai à choisir entre écouter le ministre et écouter les gens qui sont eux-mêmes sur le terrain, je pense à des personnes aînées, avec un leadership certain: Mme Bérubé, qui est présidente de la Coalition des aînés du Québec, Mme Lecompte, qui est présidente de l'Association québécoise pour la défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, et eux qui sont régulièrement en contact avec leurs membres, qui ne fuient pas leurs membres, qui vraiment savent ce qui se passe avec ce nouveau régime, eh bien, lorsqu'ils nous décrivent la situation, je suis certain que ce sont elles qui ont raison, M. le Président.

(13 heures)

Je voudrais aussi vous rappeler qu'entre... la situation qui existait sous le gouvernement libéral: pour un couple de personnes aînées qui auraient eu à débourser le maximum pour leurs médicaments, ils auraient dépensé 200 $; sous un gouvernement péquiste, avec le nouveau régime, c'est au moins 1 500 $ pour le couple. Et ça, c'est le minimum, lorsqu'il y a une consommation moyenne.

Je voudrais quand même enchaîner, le temps passe assez rapidement. Dans le rapport Castonguay, le rapport Castonguay qui était un peu le précurseur au projet de loi du ministre, M. Castonguay a vraiment fait la distinction entre les personnes aptes et inaptes au travail en ce qui concerne la sécurité du revenu. On ne sait pas pourquoi le ministre n'a pas voulu retenir cette distinction-là. Il y a des gens qui ne sont vraiment pas capables de payer les 200 $ parce qu'ils n'ont pas la chance de pouvoir travailler, parce qu'ils peuvent avoir différentes difficultés.

De plus, le ministre a déclaré en Chambre, je crois que c'est le 21 novembre dernier, que tous les citoyens devraient avoir accès à son programme et qu'il s'engageait lui-même à régler les cas par cas.

Alors, deux questions précises: Un, qu'est-ce qui arrive avec les inaptes qui ne sont pas capables de payer? Et est-ce qu'on peut avoir les grandes lignes de son nouveau programme, sa nouvelle politique du cas par cas pour les gens qui seraient en sérieuses difficultés et pour lesquels nous recevons des appels comme députés?

Et j'aimerais vous donner un exemple bien précis. C'est arrivé dans mon comté, puis je pourrais donner les informations au ministre par la suite, où la personne, par trois fois, a parlé avec des représentants du ministre et la dernière fois qu'elle a eu l'information, c'était: Tu n'as pas d'argent, tu n'auras pas tes médicaments. C'est ça qu'on lui a dit.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre, aux deux interrogations.

M. Rochon: Bon. Alors, premier élément soulevé par le député de Robert-Baldwin que sous un gouvernement libéral les personnes de 65 ans et plus payaient seulement 2 $ par prescription, c'est vrai. Maintenant, en gérant de la façon dont ils ont géré, ils nous ont laissé le plat qu'ils nous ont laissé, aussi. Là, on a un déficit qui est hors proportion, avec une dette qu'on a réussi à doubler en sept ans. Il faut le faire, doubler la dette du Québec pour la rendre à 76 000 000 000 $ en sept ans. De la façon dont on a géré les programmes, c'est ça que ça nous a amené.

Maintenant, il y a plus que ça si on regarde le point de vue des gens. C'est vrai que les gens de 65 ans et plus payaient seulement 2 $ par ordonnance, mais les gens de 60 ans et plus, les gens de 55 ans et plus, qui sont souvent des retraités, qui souvent on des problèmes de santé et des consommations de médicaments autant que les gens de 65 ans et plus, eux autres payaient tout, ils n'avaient aucune protection. Et là ce que ce régime-là fait, c'est que tout le monde a la même protection, partage ensemble le coût selon son revenu, et tout le monde a une protection. C'est vrai que pour la personne de 65 ans et plus qui a un revenu un peu élevé, la personne va payer une prime complète si son revenu est assez élevé, va payer 25 % du coût des médicaments jusqu'à un plafond de 750 $.

Maintenant, si c'est une personne âgée qui reçoit le supplément du revenu garanti, son plafond maximum par année sera de 200 $: 50 $ par trois mois. Mais la même protection va être offerte aux 55 ans, aux 60 ans et plus et à ce 1 100 000 jeunes personnes qui n'avaient pas de protection, des gens qui gagnent des petits salaires, des travailleurs autonomes pour la plupart. Et on sait que c'est des petits salaires parce qu'il y en a 500 000 parmi ce 1 000 000 là... Il y a 800 000 adultes dans ce groupe-là, 300 000 enfants: les enfants, ça ne va rien leur coûter, et, parmi les 800 000 adultes, il y en a 500 000 qui ne paieront même pas de prime. Ce que j'expliquais tout à l'heure, c'est que leur revenu est assez bas qu'ils n'auront aucune prime à payer. Ces gens-là vont avoir une protection et ils n'en avaient aucune avant.

C'est ça, la différence entre le système qu'il y avait avant puis ce qu'il y a maintenant, c'est que maintenant tout le monde est protégé pour un prix, un coût, une contribution ajustée à son revenu, alors que, dans le régime d'avant, tu avais des gens qui avaient une protection complète puis d'autres n'avaient rien comme protection, alors qu'ils avaient, en fait, les mêmes besoins. Ça, c'est une différence. Et c'est sûr que, pour ceux qui vont contribuer plus, c'est un effort à faire, mais, pour la grande majorité de ceux qui vont avoir une protection qu'ils n'avaient pas du tout avant, on vient d'avoir un programme qui répartit de façon solidaire, juste et équitable le coût d'un produit qui le rend accessible à tout le monde.

Maintenant, quand on parle de l'autre question, de la différence entre les gens... C'est une classification qui disparaît avec la réforme de la sécurité du revenu, ce qu'on appelait avant des gens qui sont des prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail, par rapport à ceux qui sont prestataires mais inaptes au travail. La décision qui a été prise de ne pas faire de distinction entre ces deux groupes-là et de demander la même contribution repose sur une couple d'éléments très clairs.

D'abord, des gens qui sont inaptes au travail, compte tenu des besoins qu'ils peuvent avoir, plus grands de façon générale, ont un barème de base de paiement de leurs prestations qui est plus élevé que les aptes au travail. C'est déjà pris en compte en bonne partie dans le calcul de leur prestation de base, qui est sensiblement – je ne me rappelle pas des chiffres précis...

Une voix: ...

M. Rochon: 100 $ par mois. C'est 1 200 $ par année de plus que ces personnes-là ont.

Deuxièmement, le fait d'être inapte au travail, ce n'est pas pour des conditions, très souvent, qui sont reliées ou qui causent une prise de médicaments plus importante. On sait qu'il y a des gens qui sont inaptes au travail à cause de problèmes de santé qui peuvent être reliés à un problème de déficience intellectuelle, par exemple. Il y a une bonne partie des gens qui étaient classés inaptes au travail qui ont un état de santé qui est assez... où il y a eu une grande perte d'autonomie et qui ont des problèmes de santé importants. C'est une clientèle en général très âgée qu'on retrouve déjà dans des établissements de soins de longue durée où ils ne vont pas payer du tout leurs médicaments.

Alors, si on regarde les personnes qui sont inaptes au travail, il y en a une bonne partie en établissement, qui ne paient pas leurs médicaments de toute façon, absolument pas. Il y en a une bonne partie pour lesquels la raison qui les rend inaptes au travail n'occasionne pas du tout une consommation plus grande de médicaments. Et, de toute façon, la prestation de base de ceux qui étaient inaptes au travail par rapport à aptes au travail tenait compte de besoins de consommation différente et supérieure à ceux qui sont aptes au travail.

Alors, c'est pour ces raisons-là, M. le Président, toujours avec le même objectif d'équité, pour que chacun ait l'accès aux mêmes médicaments, mais en contribuant selon sa capacité, que les personnes prestataires de la sécurité du revenu ont été dans l'ensemble considérées selon leurs revenus et non pas selon une classification qui est là pour d'autres raisons.

Le Président (M. Pinard): Merci. Alors, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Il y avait un autre élément: le cas par cas, où, en cette Chambre, il s'était commis en disant qu'il s'engageait à régler ces problèmes-là. J'ai donné un exemple, j'en aurais d'autres, mais je pense que le temps...

Le Président (M. Pinard): M. le ministre, concernant la demande du député de Robert-Baldwin.

M. Rochon: Alors, s'il y a un cas particulier, le député le sait très bien, M. le Président, on va en prendre connaissance et on répondra là-dessus. Mais on ne commencera pas, en commission d'étude des crédits, à discuter d'un cas où tout ce que j'en sais, c'est ce qu'on veut bien me dire, et, comme je l'ai déjà vu dans d'autres questions, la présentation de la réalité avec un certain biais... Je ne peux pas répondre sur la base de ces informations-là.

S'il y a des personnes qui sont en difficulté, le député le sait très bien, si jamais le filet qu'on a à la base – pharmaciens, CLSC – ne peut pas aider une personne qui peut avoir une difficulté, le député connaît très bien les mécanismes pour référer ces cas-là et qu'on s'en occupe. Alors, je l'inviterais à faire ce qu'il sait très bien faire quand il veut le faire, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Marsan: Ça mériterait d'être bien précisé. Vous dites: On connaît bien les mécanismes. Voulez-vous les dire, parce qu'il y a des gens qui nous écoutent. Quand vous avez fait l'affirmation en Chambre, il y avait plusieurs députés ici qui reçoivent des cas de comté, et je pense que les gens auraient intérêt à savoir exactement, quand il y a une difficulté et qu'ils ne sont pas capables de payer, ce que vous leur suggérez, vous, le ministre de la Santé.

M. Rochon: D'abord, il faudrait voir, M. le Président, quelles situations il peut y avoir eu où les gens, soit auprès du pharmacien ou du CLSC, reçoivent une solution à leur problème. Et, quand le pharmacien ou les gens du CLSC ne peuvent pas directement satisfaire le besoin d'une personne, ils sont connectés à tout un système, eux, où ils peuvent remonter au niveau des régies régionales, dans le cas des CLSC, pour voir comment on peut régler le problème. Les pharmaciens, au besoin, sont en interaction directe avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec, et on a le système au complet pour s'assurer qu'il n'y ait aucune question, aucune situation qui va rester en plan, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, tantôt le ministre a évoqué trois seuils de pauvreté en ce qui concerne les revenus des Québécois. Je pense que, s'il y a quelqu'un qui brouille les cartes un peu, c'est lui-même. Il y a un seuil de pauvreté objectif, c'est celui établi par Statistique Canada. Le seuil de pauvreté de la sécurité du revenu, je défie le ministre de tenter d'être capable de vivre là-dessus, celui des Finances aussi. Mais il y en a un qui est objectif, qui n'a pas d'affaires ni avec les prestations de la sécurité du revenu ni avec le niveau d'imposition des Québécois et Québécoises, il s'agit de celui de Statistique Canada.

(13 h 10)

M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé n'a aucun remords, aucun, à faire payer un bénéficiaire d'aide sociale dont les bénéfices peuvent varier entre 6 000 $, pour une personne seule, même avec soutien financier peut-être 7 200 $... Est-ce que lui n'a aucun remords à faire payer ces gens-là jusqu'à 200 $, même si c'est étalé par trimestre, pour une consommation de médicaments? Il n'a aucun remords, lui, quant à ça? Moi, j'ai des remords. Et les gens de mon comté ont des remords.

Quatre fois je me suis levé en cette Chambre pour déposer une pétition demandant au gouvernement d'exempter... Parce que le ministre parle beaucoup de la prime. Je comprends bien, là; on peut lire, là, nous. Même si le ministre en doute de temps en temps, on est capable, de ce côté, de lire. On sait très bien que la prime commence à tel et tel niveau. La franchise puis la coassurance, autre affaire; le ministre parle plus rarement de ça. Le bénéficiaire d'aide sociale, 6 000 $ par année, s'il consomme ou si elle consomme des médicaments, va devoir payer jusqu'à 200 $ par année, étalés sur les trimestres, je veux bien, là. Est-ce que lui n'a aucun remords, lui, à faire payer du monde comme ça, à ce niveau de revenus?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Deux éléments de réponse à ça, M. le Président. D'abord, sur toute la base des analyses qu'on a pu faire, des vérifications, la collaboration qui a été faite entre les différents ministères, le ministère de la Sécurité du revenu et le ministère de la Santé et des Services sociaux, il a été jugé que, oui, jusqu'à un maximum de 50 $ par mois, on peut... par trois mois, excusez, les gens peuvent intégrer ça à leur budget s'ils doivent utiliser des médicaments; l'autre raison étant qu'en faisant cela pour des personnes qui, pendant une période de temps, doivent recevoir une prestation de la sécurité du revenu... et, encore là, c'est l'équité du régime qu'il faut regarder. Il était très identifié qu'il y a beaucoup de gens qui, étant prestataires de la sécurité du revenu, encore là comme pour les personnes âgées de 65 ans, plus ou moins, ne payaient pas leurs médicaments. S'ils trouvaient un travail avec un salaire qui n'était pas tellement élevé, mais un peu meilleur que la prestation de la sécurité du revenu, beaucoup de gens ne pouvaient pas prendre ce travail-là parce que, là, en payant les médicaments à 100 % dans l'ancien régime, alors qu'ils ne payaient pas du tout comme prestataires de la sécurité du revenu, c'était un désincitatif très important à des gens de retourner sur le marché du travail et d'accepter une réinsertion sociale par le travail qui est terriblement importante. On confinait les gens dans un système d'aide, mais en n'ayant pas un jeu d'incitatif qui les amènent, qui les aident à trouver un travail et à le prendre.

Encore là, il faut comparer la situation des gens qui sont des prestataires de la sécurité du revenu et le 1 100 000 personnes de plus qui vont être assurées, qui sont des gens qui avaient des petits revenus, souvent quelques milliers de dollars par année de plus que le prestataire de la sécurité du revenu, qui n'avaient aucune protection; et aussi la difficulté pour les gens de sortir du soutien de la sécurité du revenu pour accepter un travail parce qu'on les faisait passer du jour à la nuit, d'une situation trop grande. Alors, là, ce que ça fait exactement, le système, c'est que ça met de façon plus graduelle et progressive la contribution, pour tout le monde. Sur la base des évaluations qu'on a faites, les gens peuvent intégrer ça à leurs besoins, mais ça les incite aussi à trouver un travail, à gagner plus d'argent, et ils gardent la même protection quand ils ont un revenu à l'intérieur des seuils qu'on a fixés, et ça, ça fait une différence très importante, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, je suis convaincu que les centaines de personnes qui se sont adressées à mon bureau de comté pour signer des pétitions et les dizaines de cas – des dizaines de cas – qui se sont pointés à mon bureau de comté sont très rassurés par le fait que le ministre a des études en main qui disent qu'ils peuvent assumer ces coûts. Je suis convaincu que ça les rassure à 100 %, convaincu de ça. D'une minute à l'autre, là, semble-t-il, parce que le ministre a fait une étude, que le gouvernement a fait des études, ils ont l'argent pour le faire. Il faut le faire, hein, M. le Président, il faut le faire!

En ce qui concerne le désincitatif au travail, moi, je pense qu'il y a d'autres façons d'inciter du monde à aller travailler, puis, encore là, M. le Président, avec la réforme de l'aide sociale de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, il y a énormément d'observateurs objectifs qui nous disent très clairement, là, qu'il n'y a pas d'emplois. Je veux bien, là, que le ministre nous dise que c'est un désincitatif au travail, mais qu'il vienne dans la région de Montréal, il le fait de temps en temps, qu'il vienne un peu plus souvent, il va constater qu'il n'y a pas d'emplois. Il n'y a pas d'emplois. Il faut faire autre chose que simplement imposer 200 $ par année à des prestataires de la sécurité du revenu pour les inciter à trouver des emplois: il n'y en a pas d'emplois. Qu'on commence avec ça, on sera déjà dans une situation beaucoup meilleure que celle dans laquelle on est présentement.

M. Rochon: Je voudrais faire deux commentaires là-dessus, M. le Président. D'abord, quand on fait des discussions quant au coût pour une personne de ses médicaments, on réfère toujours au plafond, le maximum qu'une personne peut payer en suggérant que tout le monde va payer ce montant-là. C'est le plafond, ça. La grande majorité des gens ne se rendent même pas à ce plafond-là.

Alors, pour des gens qui sont des prestataires de la sécurité du revenu – et ça, on connaît leur consommation parce qu'ils étaient déjà assurés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec – il y a à peu près... Et là je le cite de mémoire, je pense que c'est les deux tiers de ce groupe de personnes qui consomment pour moins de 100 $ par année de médicaments. Et la moyenne, une donnée qu'on a pour un bloc de trois mois, est une consommation d'à peu près 50 $ pour l'ensemble des trois mois. La grande majorité des gens n'ont pas une utilisation de médicaments qui va toujours les amener au plafond de ça et beaucoup peuvent l'intégrer effectivement, peuvent gérer ça avec les revenus qu'ils ont.

Maintenant, si le député me demande, deuxièmement, M. le Président: Est-ce que ce serait mieux que tout le monde, les plus petits revenus ne paient rien et qu'on monte le seuil encore plus élevé et qu'à la limite le régime soit donné gratuitement à tout le monde parce qu'on pourrait, comme pour l'assurance-maladie, financer le système par la voie de la taxation générale, c'est bien sûr que ce serait l'idéal, ça. C'est bien sûr que ce serait l'idéal. Mais, si on veut protéger l'ensemble du système de santé et qu'on veut rééquilibrer les coûts de ce système de santé, on est obligé de demander un certain nombre de contributions.

Quand on sera sorti du déficit qu'on a, quand on aura commencé à baisser notre dette et qu'on pourra mieux gérer nos programmes, bien, on pourra bonifier au besoin ce programme-là. C'est bien sûr que, si la richesse collective faisait que l'ensemble du plateau fiscal nous permettait de rendre le régime encore plus généreux, ce serait mieux. Mais là on est obligé de constater que, collectivement, il faut gérer autrement parce que la seule option alternative, c'est celle qui existait avant: on a des gens qui ont une protection complète puis d'autres qui n'ont aucune protection. C'est ça qui est la vraie option alternative.

Alors, ce n'est pas le choix entre ne demander aucune contribution à des gens qui ont un faible revenu ou leur demander une petite contribution, c'est le choix de protéger complètement certains groupes comme avant puis aucune protection pour d'autres qui n'ont pas des bases de revenus tellement différentes. C'est ça qui fait la différence. Alors, c'est sûr que c'est un effort un peu plus grand pour beaucoup de gens, mais tout le monde est protégé à ce moment-là.

Autrement, on a vraiment une situation qui a une bonne dose d'inéquité parce qu'on a des gens qui ont toute la protection puis d'autres qui ne l'ont pas du tout. Il faut bien voir ce qu'on compare comme genre de situations. Mais, dans quelques années, quand on sera sortis de notre pétrin financier où on est, qu'on pourra rendre nos programmes plus généreux, bien, je le souhaite, moi aussi, que ce programme-là fasse qu'on puisse monter les seuils de plus en plus et assurer une protection plus généreuse dans toute la mesure du possible. Mais, présentement, essayer de faire ça, ce serait au prix de sacrifier d'autres choses dans le système de santé ou, encore une fois, de répartir de façon moins équitable le coût du médicament.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, la question de l'équité, de faire payer, de faire porter le fardeau des médicaments par ceux qui ne pouvaient pas se les payer avant, moi, je suis sensible à ça. Le discours du ministre serait d'autant plus crédible si son régime d'assurance-médicaments était «revenue neutral», mais il n'est pas «revenue neutral», il y a une ponction d'à peu près 200 000 000 $ qui se fait, et c'est plus que 200 000 000 $ avec ces crédits supplémentaires là. Moi, je serais beaucoup plus sensible aussi au discours du ministre s'il n'y avait pas cette ponction d'ordre budgétaire, commande des Finances et du Trésor.

M. Rochon: M. le Président, d'abord, encore cette année... Il ne faut pas donner l'impression que le régime coûte plus cher à tout le monde cette année que l'année prochaine, là. On a besoin de crédits supplémentaires justement parce que les gens auront moins payé, auront moins contribué cette année que ce qui avait été prévu au début. C'est pour ça qu'il nous faut des crédits supplémentaires; on va aller chercher l'argent ailleurs. Donc, pour cette année, c'est encore plus souple, plus généreux comme programme que ce qui avait été prévu par rapport au régime continu.

(13 h 20)

Donc, attention! les crédits supplémentaires, ce n'est pas relié à un dérapage, ce n'est pas relié à l'inflation, c'est relié à rien d'autre chose qu'au fait qu'on a commencé à appliquer le programme plus tard que prévu et qu'on le fait graduellement. Le manque à gagner pour le programme, c'est de l'argent que les gens ont eu, eux, qu'ils n'ont pas été obligés de contribuer, donc ça n'a pas été un désavantage de ce côté-là.

Maintenant, il faut bien compter que, quand on dit que l'économie qui est faite, de l'ordre de 200 000 000 $, 240 000 000 $, c'est là où est toute la différence, M. le Président: de pouvoir, en considérant le médicament comme un élément important du virage ambulatoire, que, dans l'ensemble du coût de tout le système de santé – qui est de 13 000 000 000 $... c'est d'avoir réparti différemment des compressions qu'on doit faire pour protéger d'autres éléments aussi.

Et il y a d'autres services qui sont développés en plus. Les personnes âgées, O.K., certaines vont devoir contribuer aux médicaments plus qu'elles ne le faisaient auparavant, mais l'ensemble des personnes âgées, non seulement vont avoir la couverture de façon équitable, mais on développe plus de services de maintien à domicile pour les personnes âgées. Ça, c'est parce qu'on fait une économie là comme à d'autres endroits. On est après améliorer les services qui sont donnés et les soins quand les gens doivent avoir un hébergement et des soins de longue durée. On sait qu'on augmente beaucoup, présentement, l'intensité de services qui sont donnés aux personnes qui sont hébergées pour des problèmes de santé.

Alors, si les personnes âgées regardent l'ensemble des services qu'elles reçoivent avec la réorganisation du réseau, pour la contribution qui leur est demandée, au total, ils reçoivent quelque chose où je pense qu'on peut dire que tout le monde en a, mais vraiment, pour son argent. C'est ça qui est la situation. On ne peut donc pas isoler un seul élément qu'on change et porter un jugement global là-dessus; il faut regarder, ce changement-là, comment ça permet d'avoir une harmonie pas mal mieux équilibrée dans l'ensemble des services que les gens reçoivent. Au total, ça donne à tout le monde un meilleur accès à une plus grande gamme de services et de soins, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Robert-Baldwin.


Transfert de crédits additionnels à la RAMQ

M. Marsan: Oui. M. le Président, j'essaie de concilier le document que nous avons, la demande de crédits additionnels, avec la lettre que le ministre envoyait à ses régies régionales, où il faisait état aussi d'un manque de 100 000 000 $ pour boucler son budget. Les régies ont été capables de donner à peu près un tiers ou 30 % de ce que le ministre demandait. Quand le ministre a vu que les régies n'étaient pas capables de l'écouter, eh bien, il s'est retourné vers son cabinet, il a demandé au cabinet: C'est vous autres qui allez me trouver les 70 000 000 $ manquants.

Alors, ma question au ministre: Comment est-ce qu'on concilie cette opération de manque à gagner important avec le document de demande de crédits aujourd'hui?

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Rochon: Si je comprends bien la question, là, je pense que le député de Robert-Baldwin revient...

Le Président (M. Pinard): Aux 100 000 000 $ de la régie.

M. Rochon: ...aux 100 000 000 $, c'est-à-dire à l'exercice de gestion qui a été fait pour voir comment, à peu près au milieu de l'année budgétaire... Donc, on était au mois d'octobre et on voulait s'assurer qu'on équilibre le budget pour la deuxième partie de l'année. Alors, comme je l'avais expliqué, pour différentes raisons, en partie pour le régime d'assurance-médicaments, la réalité a été légèrement différente des prévisions qui avaient été faites. Quand, au mois de juin, on a accepté qu'il y aurait une économie qui serait sacrifiée cette année, c'est sûr qu'il fallait essayer de la récupérer ailleurs. On sait qu'on a demandé à chacune des régies régionales d'abord de bien s'assurer que son plan de transformation et de réorganisation était bien protégé, que le redéploiement des ressources qui était prévu serait fait comme prévu, mais, par contre, de s'assurer de faire tous les efforts d'efficacité au maximum qui pouvaient être faits pour voir s'il n'y avait pas des économies à faire en cours d'année. Et l'ensemble des régies ont fait l'exercice et ont pu quand même récupérer une trentaine de millions cette année. Alors, ça fait autant de pris.

Maintenant, dans l'ensemble du budget, il faut compléter l'opération et refaire un transfert de crédits additionnels à la Régie de l'assurance-maladie du Québec pour le programme d'assurance-médicaments. Ça va nous permettre de compléter, par ailleurs, le budget du réseau de la santé et des services sociaux. Ces deux enveloppes, on se rappellera... la Régie de l'assurance-maladie du Québec, c'est 3 000 000 000 $ d'enveloppe à peu près. Alors, là, avec les crédits additionnels, ça va équilibrer cette enveloppe-là. Et, dans l'enveloppe de l'ensemble du réseau pour les autres services, qui est de 10 000 000 000 $, là, on aura à faire les derniers équilibres dans les trois prochains mois pour finir l'année à la cible qui avait été fixée au début de l'année budgétaire, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Santé. M. le député.

M. Marsan: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait juste être plus clair? L'opération avec les régies régionales, bon, il y a un manque à gagner de 70 000 000 $, est-ce que l'ajout de 195 000 000 $ vient le compenser ou est-ce que ce manque à gagner continue en termes d'opération? Et vous pourrez nous présenter ultérieurement les moyens que vous aurez pris, à quel service vous allez couper l'accessibilité. J'aimerais ça faire le lien entre le 195 000 000 $ et le 70 000 000 $ manquant qui n'a pas été fait par vos régies.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Rochon: Je ne suis pas sûr que je vois la question, là. On a un budget total de 13 000 000 000 $. Deux enveloppes: 3 000 000 000 $ d'un côté, 10 000 000 000 $ de l'autre. Dans l'effort qu'on a demandé aux régies, c'était à partir d'une estimation au mois d'octobre que, pour l'ensemble du 13 000 000 000 $, on était à découvert d'à peu près 100 000 000 $. Il y a un 30 000 000 $ qu'on a pu récupérer, le ministère continue à en trouver d'autres. C'est une opération un peu plus complexe. On ne peut pas faire un compte à compte de cette façon-là. Ce qu'on fait en rajoutant des crédits additionnels, ça va nous permettre de voir comment ça laisse le budget équilibré pour l'ensemble du système et on va voir comment on complète nos efforts pour faire l'équilibre de l'ensemble du budget de 13 000 000 000 $.

Je voudrais bien être plus précis, mais ça ne se transfère pas d'un compte à l'autre comme ça.

M. Marsan: Il y a des coupures de 70 000 000 $ qui s'en viennent encore, là, d'ici la fin de l'année.

M. Rochon: Non, non, non. Non, non, non. Ça, c'est le langage, évidemment, coupure, coupure, coupure. Il n'y a pas de coupures qui s'en viennent. J'ai pris la peine de dire...

M. Marsan: C'était dans votre lettre, M. le ministre.

M. Rochon: ...que les services des plans de transformation vont se faire comme prévu.

Ces gens-là n'ont pas l'air de penser, M. le Président... ils ont l'air de n'avoir aucune imagination que tu peux, par des mesures de bonne gestion, d'efficacité, de réorganisation, avec des façons différentes de faire des choses, économiser de l'argent. Ils n'ont jamais su ce que c'était d'économiser. Ils ont toujours dépensé. Ils nous ont endettés jusqu'au cou, puis un peu plus, puis là, parce qu'on trouve des moyens de gérer autrement les budgets, ça les surprend.

Le Président (M. Pinard): ...s'il vous plaît.

M. Rochon: Alors, ils peuvent bien dire qu'ils ont compris puis ne pas avoir d'autres questions, M. le Président, mais ça devient quasi indécent...

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre.

M. Rochon: ...de toujours ramener la discussion à ce niveau-là. Il y a bien d'autres moyens d'économiser, mais ils n'ont jamais eu l'imagination de les chercher...

Le Président (M. Pinard) : Merci, M. le ministre.

M. Rochon: ...pas surprenant qu'ils ne les aient pas trouvés.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Robert-Baldwin.


Modifications dans les programmes couvrant les services optométriques et dentaires

M. Marsan: Ma prochaine question, c'est les programmes 2 et 3. Alors, ici, on nous informe, là, qu'il y aura désassurance dans les Services optométriques, de 339 000 $, et les Services dentaires, de 15 000 000 $. Comment est-ce qu'on peut manquer d'argent en désassurant des programmes? Là, il y a une logique qui n'est pas évidente, à tout le moins, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Oui. Est-ce que je peux réentendre la question, M. le Président, là? Je n'ai pas compris.

M. Marsan: Comment est-ce qu'on peut manquer d'argent en désassurant des programmes? Pourquoi est-ce que ça prend des crédits additionnels, de 339 000 $ dans un cas, de 15 000 000 $ dans l'autre, pour désassurer?

M. Rochon: L'explication vient simplement du fait que, quand le budget a été préparé, on avait escompté des dates à partir desquelles les économies pourraient être faites dans les services en question, optométriques et dentaires. Mais, avec les différents délais de consultation, règlements et allant jusqu'au décret qui permet de modifier le programme, les délais ont été plus longs, en bonne partie parce qu'on a pris le temps de discuter plus avec tout le monde qui était impliqué pour faire ces réajustements-là le mieux possible. Ça a été plus long et on a là aussi perdu une partie de l'économie qu'on voulait faire.

Mais je voudrais faire remarquer, M. le Président, que ce qu'on appelle la désassurance de services optométriques et de services dentaires, justement parce qu'on a pris le temps de faire et qu'on a consulté puis discuté avec tout le monde qui pouvait nous aider là-dedans, il n'y a pas de services qui ont été vraiment retranchés aux gens. On a fait des modifications dans le programme, par exemple, dans le cas des services optométriques, en allongeant certains délais, en modifiant, par exemple, la fréquence d'examens préventifs qui étaient faits, en allongeant ce qu'on appelle les délais de carence, les délais après lesquels une personne qui est sur la sécurité du revenu peut requérir les services sans frais.

(13 h 30)

Alors, par différents accommodements administratifs, en s'assurant que les gens avaient le service, toujours dans des limites qui pouvaient être requises par leur état de santé, ça permet de faire des économies. Mais, comme on a voulu faire le plus finement possible ces changements-là, ça a pris un peu plus de temps que prévu et, là aussi, il y a eu un manque à gagner comparativement à l'économie qui avait été prévue.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Nelligan.


Financement des produits sanguins

M. Williams: Une brève question, M. le Président. Nous avons parlé beaucoup aujourd'hui d'assurance, de copaiement, de prime et de franchise. Je voudrais questionner le ministre sur l'ensemble de ce qu'il a présenté aujourd'hui, mais particulièrement sur le système du sang, parce que vous avez sorti un rapport et on peut trouver, à la proposition 30 de ce rapport – et j'espère que la réponse à ma question va être non: «Assurer une accessibilité à tous et à toutes au produit sanguin et à ses dérivés et substituts, de la même manière que pour les autres produits et services offerts par le système de santé et services sociaux.» Dans ça, M. le Président, j'espère que ce n'est pas une façon de cacher une nouvelle approche dans le système du sang, de commencer à mettre de côté la gratuité. J'espère que nous n'allons pas avoir le copaiement, la franchise, une prime dans ce système. Je voudrais juste donner une chance au ministre d'expliquer ce que ça veut dire, cette recommandation à la proposition 30. Est-ce que c'est une façon d'annoncer en cachette qu'il va commencer à obliger les personnes qui ont besoin de produits sanguins de participer avec le copaiement?

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le ministre.

M. Rochon: Là, ce qu'on discute présentement, c'est des crédits supplémentaires qui sont nécessaires pour les programmes qui sont gérés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, et c'est là qu'on retrouve un certain nombre de programmes où on a une contribution qui est demandée de la part de ceux qui utilisent les services, que ce soient des services optométriques, dentaires ou des services pharmaceutiques.

Le sang et les dérivés du sang, ce n'est pas financé du tout sur le budget de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, c'est sur l'autre partie du budget qu'on connaît, qui s'appelle l'assurance-hospitalisation, qui finance l'ensemble des dépenses dans le réseau des établissements. Et ça, ce fonds d'assurance-hospitalisation – je ne sais pas si on peut s'exprimer comme ça en termes comptables – il est essentiellement provisionné à partir de la taxation générale, à partir du fonds consolidé. Les règles du jeu qui s'appliquent sont donc intouchées par tout ce qu'on fait au régime de l'assurance-maladie du Québec. Le rapport auquel fait référence le député de Nelligan est sûrement le rapport du groupe de travail sur le système du sang, qui visait à voir comment on organisait de façon plus efficace et de façon plus sécure la distribution des services. Mais ce n'est pas un groupe qui avait comme mandat de regarder quoi que ce soit en ce qui vise le financement du produit sanguin et des dérivés, qui va rester financé par le régime d'assurance-hospitalisation.

M. Williams: Ça reste gratuit.

M. Rochon: Comme présentement, oui.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui. Je pense qu'on est aux notes finales, M. le Président, c'est ça? C'est la dernière intervention?

Le Président (M. Pinard): Oui. Il vous reste deux minutes.

M. Copeman: Ah bien! Deux minutes. S'il y a deux minutes, je peux poser une question.

M. Marsan: Non.

Le Président (M. Pinard): Allez-y. C'est vous qui déterminez...

M. Marsan: Non, excusez, juste une question de directive.

Le Président (M. Pinard): Oui.

M. Marsan: Est-ce que c'est deux minutes qu'il reste vraiment au bloc de l'opposition?

Le Président (M. Pinard): Au groupe parlementaire de l'opposition.

M. Marsan: C'est tout? Il n'y a pas de cinq minutes ensuite?

Le Président (M. Pinard): Non.


Remarques finales


M. Pierre Marsan

M. Marsan: O.K. Alors, rapidement, M. le Président, de nouveau on constate, je pense, qu'on a vraiment les affirmations ce matin que le programme assurance impôt-médicaments est vraiment un programme improvisé. On a trouvé qui va payer: les aînés et les assistés sociaux. On a essayé de savoir davantage de quelle façon on pourrait avoir une meilleure gestion dans le dossier. Le ministre nous avait dit qu'il pouvait... Dans un geste qui aurait pu être un geste de compassion, bien, il nous a dit: Allez voir le CLSC, allez voir la régie. On ne pensera pas au patient s'il est mal pris, si c'est la fin de semaine, si c'est la nuit ou la soirée. On sait que ces organisations-là ne donnent pas de services la nuit et le soir.

M. le Président, il y aurait eu tellement d'autres endroits où on aurait pu couper. On sait que ce parti au pouvoir ambitionne de faire des référendums à répétition. On vient de donner un pourcentage d'augmentation, 1 %, juste avant le référendum, on essaie de l'enlever. Maintenant, il y a toujours cette épée de Damoclès, l'incertitude politique, qui plane au-dessus de nos têtes. Si on n'avait pas ça, M. le Président, on ne serait pas obligé de couper tant auprès des personnes aînées, de couper dans leurs victuailles – parce que ces gens-là auront à choisir vraiment entre manger et prendre leur médication. On sait, M. le Président, que, sous un gouvernement libéral, un couple de personnes aînées aurait payé 200 $, alors que, sous le gouvernement péquiste, la facture initiale est de l'ordre de 1 500 $ pour une consommation moyenne.

Alors, en terminant, je pense qu'il apparaît de plus en plus clair non seulement à l'opposition libérale, mais aussi à la population – ce sont les gens qui le disent maintenant, ils n'ont pas peur d'aller devant le bureau du premier ministre, ils n'ont pas peur de venir devant l'Assemblée nationale – que cette loi est une loi qui a été bâclée à la dernière minute, avec plein de changements votés à 5 heures du matin, avec 120 pages d'amendements.

Je pense qu'il y a beaucoup de groupes qui demandent au ministre de refaire ses devoirs. On aurait besoin, je pense, vraiment d'une véritable commission parlementaire pour qu'on écoute les gens, pas qu'on les entende et qu'on fasse ce qu'on veut, mais vraiment pour écouter ce que la population a à nous dire.

Ce qui nous console, M. le Président, c'est que tous les députés en cette Chambre reçoivent les doléances des patients, des personnes aînées, des assistés sociaux, et les gens d'en face le savent très bien que ça ne fonctionne pas, le programme d'assurance impôt-médicaments. Ils savent très bien qu'en arrière de ce programme-là tout ce qu'il y avait, la seule chose que le ministre voulait, c'était une récupération de 200 000 000 $. Il n'a pas été capable de la faire et aujourd'hui il nous arrive avec des crédits additionnels où il veut aller chercher encore un 195 000 000 $. C'est la plus belle preuve d'une improvisation, d'une surprise notoire, à la dernière minute. Et j'espère qu'enfin le ministre va comprendre ce que les gens ont à lui dire: qu'il refasse ses devoirs et qu'il présente un dossier beaucoup plus étoffé. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Robert-Baldwin. En réplique, M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, au-delà de la démagogie de routine, je voudrais rappeler des faits. Ce programme a été mis sur pied lorsqu'on a adopté la loi, en juin dernier, après deux ans de travail, où ont participé de façon très intensive des équipes du ministère de la Santé et des Services sociaux, de la Régie de l'assurance-maladie du Québec et des consultants de l'extérieur, où beaucoup de gens, tous ceux qui peuvent être impliqués dans le fonctionnement d'un système comme ça, ont été consultés, et c'est un régime qui est un régime qui assure l'équité entre l'ensemble des Québécois et des Québécoises, où on peut partager, selon nos revenus, le coût de l'ensemble des médicaments, en donnant un accès aux médicaments selon nos besoins à tout le monde.

Depuis que la loi a été adoptée, il y a un travail très important qui a été fait avec l'ensemble des pharmaciens, avec une très grande collaboration de l'Ordre des pharmaciens et toujours les équipes de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, qui ont porté le dossier, appuyées par les équipes du ministère, ont réussi à monter un système évidemment dans un temps record. Ça, je comprends que ça a été fait dans un temps vraiment record, que ça peut surprendre l'opposition et que ça peut surprendre plusieurs personnes. Mais, dans ce temps-là, on a fait un tour de force. Moi, j'ai vu travailler des gens pendant des journées très longues, sacrifier des fins de semaine, s'investir beaucoup et en faire un projet que les gens ont voulu monter et réussir, et c'est réussi. Ça fonctionne depuis cinq mois pour une partie de la clientèle qui va être visée, le programme est prêt à fonctionner pour le 1er janvier.

J'inviterais tout le monde à comparer un peu ce qu'on a maintenant comme système, un système qui va être géré à travers tout le Québec en interaction directe avec toutes les pharmacies du Québec, à ce qui se fait dans les autres provinces canadiennes ou même dans d'autres pays, ce que ça coûte, comment le prix est réparti, comment le système est géré et les mécanismes qu'on a mis en place pour le contrôler, je pense que c'est probablement un des meilleurs systèmes auquel on peut penser, M. le Président. Et ça, ça vient rajouter à tout l'exercice du virage ambulatoire un élément qui était essentiel pour que la gamme complète des services soit accessible à tout le monde et que chacun contribue selon sa capacité de payer.

Et, en terminant, je veux vraiment remercier tous ceux – il y en a qui m'entourent ici aujourd'hui, et leur équipe, encore plus importante, ils n'ont pas pu tous venir ici – qui ont fait qu'il s'est réalisé effectivement, en deux ans, un tour de force. Dans d'autres circonstances, ça aurait pu prendre le double du temps, mais là on l'a fait en deux ans, et vous verrez comment ça fonctionne à partir du 1er janvier. Merci.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. Merci, MM. les députés de Robert-Baldwin, de Notre-Dame-de-Grâce et de Nelligan.

La commission plénière ayant terminé cet échange, je remercie les personnes qui y ont participé et je suspends maintenant les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 40)

(Reprise à 15 h 11)


Conseil du trésor

Le Président (M. Brouillet): Alors, conformément à l'ordre adopté par l'Assemblée, de 15 heures à 18 heures, nous allons procéder à un échange entre M. le président du Conseil du trésor et MM. les députés de Westmount–Saint-Louis, de Verdun et de Jacques-Cartier.

Au cours de cet échange, une période de cinq minutes sera allouée aux députés indépendants. Pour la répartition du temps de parole, nous allons... Ça dure trois heures, hein, l'ensemble des échanges. Alors, nous allons accorder un cinq minutes de remarques préliminaires à chacun des groupes, et le reste du temps sera réparti équitablement. Écoutez, comme c'est trois heures, on peut aller jusqu'à sept minutes et demie pour les remarques préliminaires, mais, après ça, vous en aurez pour trois heures. Alors, ce que vous ne pourrez pas passer...

Alors, 10 minutes au point de départ. Comme c'est sur trois heures, ça va. Et vous pourrez prendre éventuellement jusqu'à 10 minutes, si vous en sentez le besoin, mais vous aurez la période d'échanges pour préciser les choses. Et nous réserverons un cinq minutes pour la réplique du ministre à la fin, pour conclure. Très bien.


Remarques préliminaires

Alors, ceci dit, je suis prêt à céder la parole à M. le président du Conseil du trésor, pour vos remarques préliminaires.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président. Alors, nous sommes réunis en commission parlementaire afin de procéder à l'étude des crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier 1996-1997. Ces crédits qui sont soumis à la considération de l'Assemblée nationale totalisent 1 028 700 000 $. De ce montant, 784 100 000 $ constituent des crédits non budgétaires, dont 744 100 000 $ sont requis suite à l'adoption, par le Conseil du trésor, d'une amélioration des conventions comptables du gouvernement, alors que 244 600 000 $ sont liés au financement de problématiques budgétaires à l'intérieur de certains programmes. Il est toutefois important de préciser que le cadre budgétaire actuel sera respecté. Les présents crédits ne constituent que des réaménagements à l'intérieur des enveloppes fermées des ministères et organismes et n'entraînent donc pas de modifications à l'objectif des dépenses de programmes.

Avant de passer à la description par programme des crédits supplémentaires, j'aimerais vous rappeler les grandes lignes de ces cadres budgétaires dont le gouvernement s'est doté. Comme nous le rappelons souvent, l'assainissement des finances publiques représente pour le gouvernement actuel une réalité incontournable. Notre gouvernement s'est engagé fermement à réaliser l'équilibre budgétaire d'ici l'an 2000. Cet engagement, qui découle de la conférence socioéconomique de mars dernier, a été réitéré lors du dernier discours sur le budget, en mai, de même qu'au Sommet tenu récemment.

Sur la base de cet objectif, le gouvernement s'est donné un cadre budgétaire ferme qui doit également se transposer à chacun des ministères et organismes. C'est ainsi que, depuis deux ans, les ministères se voient allouer une enveloppe budgétaire fermée, c'est-à-dire que leur enveloppe ne peut faire l'objet de demandes d'ajustement en cours d'exercice, sauf pour des raisons exceptionnelles. Les ministères peuvent ainsi aménager cette enveloppe en affectant à leurs divers programmes les crédits qu'ils jugent nécessaires, toujours dans les limites de leur enveloppe. Cette approche laisse ainsi plus de latitude aux ministères quant aux moyens à prendre afin de respecter leur enveloppe sans pour autant affecter la qualité des services à la population.

La gestion par enveloppes budgétaires fermées suppose également que les gestionnaires disposent d'une plus grande latitude de gestion. C'est ainsi que le gouvernement a adopté une philosophie de gestion davantage axée sur les résultats. Traditionnellement, les gestionnaires étaient généralement jugés en regard de la régularité et de la conformité de leurs gestes plutôt qu'en regard des résultats atteints et de la performance quant au coût des services. Mais, en laissant plus de marge de manoeuvre aux gestionnaires, il est possible d'améliorer la performance générale des ministères et organismes. Dans cette optique, le Conseil du trésor a entrepris d'alléger depuis la fin de l'année 1994 les contrôles administratifs centraux qui affectent l'ensemble de l'activité gouvernementale. De plus, en juin de cette année, des modifications à la Loi sur l'administration financière ont été adoptées, ajoutant ainsi un apport substantiel aux allégements déjà réalisés.

Il ne faut toutefois pas oublier que, si une gestion axée sur les résultats implique un allégement des contrôles, elle implique également une plus grande imputabilité. C'est ainsi que le Conseil du trésor, depuis maintenant deux ans, demande à chacun des ministères de préparer un plan stratégique qui décrit ses orientations et ses choix budgétaires. Depuis l'an passé, il leur est également demandé d'y présenter des indicateurs de résultats qui doivent permettre de porter un jugement d'ensemble sur la performance du ministère. Cette plus grande imputabilité des ministres et des sous-ministres dans la gestion de leur enveloppe budgétaire et de leurs programmes est ainsi possible en regard des objectifs financiers du gouvernement, et, vis-à-vis de l'Assemblée nationale, nous sommes donc sur la bonne voie. D'ailleurs, les résultats de l'année financière 1995-1996 sont concluants à ce titre. En effet, pour la première fois depuis 25 ans, les dépenses de programmes n'ont pas augmenté par rapport à l'année précédente. Nous avons respecté l'objectif que nous nous étions fixé. De la même façon, nous sommes bien déterminés à respecter les objectifs que nous nous sommes imposés pour l'année financière en cours et pour les années subséquentes.

Ainsi, dans ce cadre budgétaire que je viens de vous décrire sommairement, les crédits supplémentaires n° 1 ne remettent pas en cause l'objectif des dépenses de programmes que le gouvernement s'est fixé pour l'année budgétaire 1996-1997. En effet, les problématiques budgétaires observées à certains postes seront compensées par des disponibilités budgétaires à l'intérieur d'autres programmes, et, d'ailleurs, il est important de préciser que les ministères pour lesquels des crédits supplémentaires sont requis contribuent également par des disponibilités à d'autres postes budgétaires. Cela démontre la volonté du gouvernement de respecter leur enveloppe budgétaire. Ces crédits sont circonscrits à un nombre restreint de ministères et sont attribuables, entre autres, à des événements imprévisibles en début d'année ou à des retards dans l'implantation de certaines mesures des plans stratégiques.

Comme je l'ai mentionné au début, les crédits qui entraîneront des dépenses budgétaires totalisent 244 600 000 $, alors que les crédits non budgétaires représentent 784 100 000 $. Plus précisément, au ministère des Ressources naturelles, des crédits permanents de 19 300 000 $ sont présentés au programme 2, Connaissance et gestion du patrimoine forestier, en raison des coûts exceptionnels d'extinction des feux de forêt de l'été dernier. Au ministère du Revenu, des crédits de 30 000 000 $ sont requis au programme 1, Administration fiscale, afin de permettre d'entreprendre des programmes spéciaux de lutte contre l'évasion fiscale, qui devraient générer des revenus additionnels. Le dernier discours sur le budget a prévu des mesures à cette fin qui consistent à accentuer la vérification relative à l'évasion fiscale, à intensifier l'échange de renseignements et à améliorer l'information obtenue des contribuables. Le montant de 30 000 000 $ a été pourvu temporairement par un recours au fonds de suppléance. Ce dernier sera remboursé suite à l'octroi des crédits supplémentaires.

Au ministère de la Santé et des Services sociaux, des crédits permanents de 195 300 000 $ sont présentés au programme 10, Régie de l'assurance-maladie du Québec, dont 150 100 000 $ sont attribuables au délai dans la mise en place d'un régime d'assurance-médicaments, au coût de son implantation, à l'évolution des prix et de la demande de médicaments, à la composition de la liste des médicaments ainsi qu'à la rémunération des pharmaciens. Le solde des crédits, soit 45 200 000 $, correspond principalement au retard dans la mise en place de certaines autres mesures du plan stratégique, notamment celles relatives à la révision des services médicaux couverts, au service dentaire, à la rémunération des dentistes de même qu'à la fourniture d'aide technique.

Au Conseil du trésor, Administration et fonction publique, des crédits de 744 100 000 $, à la supercatégorie non budgétaire Prêts, placements, avances et autres, sont requis au programme 5, Contribution du gouvernement à titre d'employeur, suite à une modification qui a été apportée aux conventions comptables du gouvernement. À compter de 1996-1997, le gouvernement inscrira à la dépense un compte qui reflétera les coûts relatifs aux congés de maladie et aux vacances accumulés par les employés du gouvernement dans l'année même où ils sont gagnés, ce qui évitera de reporter ces coûts aux années futures. Cette modification a ainsi pour effet d'étendre la comptabilité d'exercice à ce type de dépenses, constituant ainsi une meilleure comptabilisation.

(15 h 20)

De façon plus précise, un compte au montant de 744 100 000 $ doit être constitué au passif des états financiers du gouvernement, en date du 1er avril 1996, pour les congés gagnés mais qui n'ont pas été utilisés par les employés avant cette date. Ce montant sera porté à la dette nette, et les dépenses des années antérieures feront l'objet des redressements appropriés. Par la suite, à la fin de chaque année, le coût des congés de maladie et des vacances accumulés par les employés au cours de l'année sera porté à la dépense, et le compte de passif sera ajusté du même montant. Ainsi, le paiement des congés de maladie et des vacances d'un employé qui quittera la fonction publique, pour la retraite ou pour d'autres raisons... Ils seront payés à même ce compte, étant donné qu'ils auront déjà été inscrits à la dépense et au passif des états financiers du gouvernement.

Finalement, au ministère de l'Éducation, des crédits de 40 000 000 $ à la supercatégorie non budgétaire Prêts, placements, avances et autres sont requis au programme 3, Aide financière aux étudiants, pour faire suite à l'augmentation des réclamations des institutions financières relativement aux prêts non remboursés par les étudiants. Cette hausse est principalement due à la conjoncture économique et à la hausse du volume des prêts.

Pour terminer, M. le Président, je désire réaffirmer que l'actuel gouvernement respectera les objectifs qu'il s'est fixés pour l'année en cours et qu'il maintiendra le cap sur le déficit zéro pour l'an 2000. Il s'agit pour nous d'un objectif incontournable si nous voulons sortir le Québec de l'endettement, rétablir sa santé économique et financière et protéger notre filet de sécurité sociale. Je vous remercie.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le président du Conseil du trésor. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Westmount–Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le Président. Je tiens à saluer les membres qui accompagnent le ministre, les gens du Conseil du trésor, les gens de son cabinet. Et je voudrais signaler que, depuis 1992 en fait, puisque c'est là une révélation pas tout à fait nouvelle mais qui fait l'objet d'une publication du ministère des Affaires internationales et qui est l'objet d'une publicité financière du Québec, dans laquelle on retrouve qu'effectivement, depuis 1992 au minimum, la différence entre les crédits votés par le Parlement et les crédits qui sont finalement dépensés par l'Exécutif... Ils sont à peu près les mêmes, une distinction d'à peu près 100 000 000 $, 150 000 000 $, 1992-1993, 1993-1994, malgré le fait que toutes ces années, y compris celle que nous vivons actuellement, sont des années où les difficultés d'ordre financier sont quand même relativement élevées.

M. le Président, lorsqu'on regarde le sommaire des crédits supplémentaires qui nous ont été déposés, on s'aperçoit que la colonne du Conseil du trésor en crédits non budgétaires est relativement courte. Dans les crédits supplémentaires demandés par le Conseil du trésor, Contribution du gouvernement à titre d'employeur: 744 100 000 $. Le ministre vient de nous annoncer qu'il s'agit d'une modification aux conventions comptables. J'invite le ministre à nous déposer cette modification des conventions comptables. Je voudrais aussi suggérer, parce que cette dépense de 744 000 000 $ s'inscrit au titre de dépense de congés de maladie à être monnayés cette année... C'est le genre de question auquel il faudra évidemment répondre.

On parle aussi de vacances payées et de congés de maladie pour 744 000 000 $ pour des gens qui vont prendre leur retraite ou qui sont susceptibles de la prendre cette année, peut-être plus particulièrement eu égard à la contre-proposition dont on parle depuis quelques semaines et qui fait quelques vagues à l'égard de la possibilité de favoriser le départ sans remplacement, au plus tard le 1er juillet 1997, de 15 000 personnes. Évidemment, il faudra discuter de cette question-là au cours des heures qui viennent, M. le Président. Elle a son importance, vous le comprenez, sur le plan financier. Nous aurons des questions plus pointues concernant l'intérêt... On peut comprendre l'intérêt que le ministre a à s'organiser, à faire en sorte, un peu, de faire la machine à remonter le temps en rouvrant les états financiers de toutes les années précédentes pour y ajouter, si j'ai bien compris, le coût des journées de maladie à être monnayées et aussi le coût des vacances à être payées année sur année.

M. le Président, je m'arrêterai ici pour demander au président, d'une part, pour commencer, de déposer la modification des conventions comptables qu'il a modifiées.

M. Léonard: M. le Président, je suis d'accord pour déposer cette modification aux conventions comptables et je vais ajouter...

Le Président (M. Brouillet): Alors, le document est déposé.

M. Léonard: ... – un instant – aussi un autre tableau qui présente une estimation des montants qui auraient été présentés au compte congés de maladie et de vacances pour quelques années antérieures pour que les gens saisissent bien ce dont il s'agit.

Le Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Chagnon: Je remercie le ministre pour la présentation du deuxième tableau; il anticipe la demande que j'étais pour lui faire de toute façon.


Documents déposés

Le Président (M. Brouillet): Alors, nous avons un nouveau document déposé, tel que demandé.

M. Chagnon: Je pourrais en avoir des copies aussi, M. le Président?

Le Président (M. Brouillet): Nous allons en faire faire des photocopies pour...


Discussion générale


Modification des conventions comptables du gouvernement

M. Chagnon: M. le Président, pendant qu'on fait faire les photocopies, est-ce que le ministre peut nous dire si le Vérificateur général a été sollicité ou si on a sollicité l'opinion du Solliciteur général sur la modification des conventions comptables?

M. Léonard: Oui.

M. Chagnon: Et quelle a été sa réponse?

M. Léonard: Il est d'accord.

M. Chagnon: Est-ce qu'on peut avoir une copie de sa réponse?

M. Léonard: On n'a pas d'accord écrit.

M. Chagnon: Pardon?

M. Léonard: On n'a pas d'accord écrit. Mais je pense qu'en toute logique, comme il s'agit d'un rapprochement vers la comptabilité d'exercice, on conviendra que, à mon sens, cela va dans le bon sens en termes de transparence des états financiers. J'explique très concrètement ce dont il s'agit. C'est qu'il y a des employés qui ne prennent pas leurs congés-maladie et qui prennent... Je connais quelqu'un qui a eu, en l'espace de 30 ans, une dizaine de congés-maladie. Mais, de par le jeu des conventions collectives signées et des conventions à l'intérieur du gouvernement, c'est une dette du gouvernement. Lorsqu'ils quittent, effectivement, le gouvernement doit payer un certain nombre de congés; il doit payer ces congés, à la moitié, en général, de la valeur de ces congés. Cette dette n'a jamais été inscrite aux états financiers du gouvernement, mais elle n'en est pas moins réelle. Et donc, nous avons décidé de l'inscrire aux états financiers, présentement.

Le Président (M. Brouillet): Merci. Alors, M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, le ministre reconnaîtra avec moi qu'au moment où on effectue, par exemple, le paiement, en 1996, de congés de maladie qui auraient pu être pris antérieurement et, comme il l'a signalé, qui n'ont pas été pris, pour quelqu'un qui est à notre emploi, disons, depuis 25 ans, inévitablement on se pose la question: Comment va-t-on rétablir, en rouvrant les états financiers de 1972, 1973, 1974, pour financer des congés de maladie payés non plus avec le salaire de 1971, 1972, 1973, 1974, mais avec le salaire de 1996...

M. Léonard: On se trouve effectivement à rectifier des états financiers, mais cela est conforme, beaucoup plus conforme à la réalité. Là, je m'informe du salaire qui est utilisé, du taux de salaire utilisé.

(Consultation)

M. Léonard: Oui. Ce qu'on me dit, c'est qu'on inscrit la dette au salaire de l'année où le congé non utilisé a été acquis.

M. Chagnon: Oui, mais la dépense réelle ne sera pas celle-là. Exemple, vous...

M. Léonard: Oui, mais on ne peut pas savoir à quel moment ce déboursé sera fait, effectivement. On ne le sait pas. Ça peut être dans 10 ans, ça peut être dans 15 ans comme ça peut être cette année.

M. Chagnon: ...on rouvre les états financiers dans le passé, dans le fond on se trouve à faire des écritures virtuelles, parce qu'à partir du moment où... Et le ministre comprend fort bien ce que je veux dire. Quand, en 1971, le salaire, par exemple, moyen d'un professionnel était de 18 000 $, s'il est rendu à 60 000 $ en 1996, c'est évident que c'est avec de l'argent de 1996 qu'on va repayer ces salaires et congés, ces vacances payées. Alors, évidemment, si on ramène les états financiers avec les sommes de 1971, 1972, 1973, on n'aura pas un portrait véritablement exact de notre dépense réelle, celle qu'on va retrouver, par exemple, sur notre déficit.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, je comprends le point du député. Par ailleurs, mieux vaut l'indiquer, premièrement, dans l'année où la dépense a été réellement encourue, donc 1972, en escomptant aussi que, lorsque l'on fait la comparaison d'états financiers, elle se fait sur une base historique, mais on peut aussi la faire en termes de dollars constants. Et donc, à ce moment-là, si vous faites une comparaison sur une base de dollars constants, vous rétablissez beaucoup mieux la justesse des données financières qui apparaissent aux états financiers.

Alors, je comprends le point de vue du député, mais, si on a une séquence strictement historique sans présenter d'états financiers sur une base de dollars constants, on a déjà une distorsion manifeste par suite de l'inflation, surtout de ce temps-là, qui était considérable. Mais, par ailleurs, on connaît aussi les techniques qui nous permettent de rétablir les états financiers sur une base comparable. Alors, si vous voulez, s'il y a eu une augmentation réelle des traitements, effectivement la dette, lorsqu'elle sera déboursée, sera un peu plus élevée que la dépense encourue telle qu'indiquée aux états financiers. Mais il peut arriver aussi des circonstances où c'est l'inverse, dépendant de la période de référence.

(15 h 30)

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le président du Conseil du trésor. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci beaucoup. Je suis toujours au stade d'essayer de comprendre pourquoi on fait ça à ce moment-ci et j'ai devant moi le tableau que le ministre vient de déposer. J'aimerais savoir son idée. Avec la proposition qu'il a faite pour les 15 000 départs assistés, ça va être quoi, l'impact sur le solde de 744 000 000 $, d'ici la fin de 1997? Est-ce qu'on a une idée du coût total du nombre de congés de maladie, du nombre de congés de vacances que nous devrons payer en moyenne pour les 15 000? Je ne demande pas un chiffre précis, mais il faut avoir une prévision, quand même, si on enlève 15 000 fonctionnaires, combien ça va nous coûter. Est-ce qu'on peut dire 50 000 000 $, 100 000 000 $? Est-ce qu'on peut avoir une idée au moins de l'ordre de grandeur?

M. Léonard: Ça me permet de rétablir un peu la remarque du député de Westmount–Saint-Louis, tout à l'heure. Lorsque nous avons pris la décision d'inscrire au passif les congés de maladie et les vacances non prises, le programme de 15 000 départs assistés n'était pas en cause, pas du tout. Il n'y a pas de relation entre les deux. Par ailleurs, il y en a une a posteriori, puisque les sommes versées pour les années antérieures à l'année en cours vont devoir être prises sur cette réserve. C'est difficile, cependant, de savoir quel montant inscrire, présentement.

Vous allez convenir avec moi que le dossier n'est pas terminé, que la proposition est sur la table, qu'elle est débattue à l'intérieur des instances syndicales pour décider de venir à la table de négociation. Donc, quel sera le résultat définitif le 28 février? Nous espérons que ce sera 15 000 départs de la fonction publique et parapublique, de sorte que les objectifs financiers seront atteints.

Mais, si vous me demandez de quantifier combien ça coûtera en congés de maladie ou en vacances reportées, nous avons connu une expérience semblable, au cours de l'été, par le programme de départs assistés que nous avions implanté, mais appliqué, cette fois, strictement à la fonction publique, où il y a eu 2 067 personnes qui ont quitté et qui nous ont coûté des sommes quand même assez importantes: 160 000 000 $ en tout. Mais je cherche le montant en termes de vacances et de congés de maladie, là...

Mais j'ai déjà donné ces chiffres. Un instant, on les a, je les ai, ici. Alors, en congés de maladie, au 31 mars 1996, c'était 38 600 000 $, et le paiement des vacances annuelles accumulées au 31 mars 1996, c'est 12 600 000 $ pour les 2 067 personnes, la prime de départ constituant le solde de 109 000 000 $, pour atteindre 160 200 000 $.

M. Kelley: Voulez-vous répéter le volet congés de maladie?

M. Léonard: Congés de maladie? 38 600 000 $.

M. Kelley: Alors, ça, c'était pour 2 000...

M. Léonard: Deux mille personnes.

M. Kelley: ...personnes. Alors, moi, je n'ai pas demandé un chiffre précis, mais il faut quand même avoir un certain ordre de grandeur. Alors, on peut prendre les chiffres par 7,5, et ça va donner un ordre d'idée que...

M. Léonard: Oui, mais vous ne...

M. Kelley: Mais, moi, si je parle de 250 000 000 $...

M. Léonard: En tout cas, dans le programme...

M. Kelley: ...je suis «in the ballpark».

M. Léonard: Ha, ha, ha!

M. Kelley: Je ne dis pas «précis», mais, si 2 000 employés...

M. Léonard: Un des...

M. Kelley: ...me coûtent 40 000 000 $, 15 000 vont me... Si je dis 250 000 000 $, je dois être dans l'ordre de grandeur, 300 000 000 $.

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: Disons que, premier élément, dans le programme de départs assistés que nous avions, nous avions remboursé complètement les jours de congé de maladie, ce qui était un avantage non négligeable pour faciliter les départs, alors que, habituellement, de par les conventions, c'est la moitié seulement qui est remboursée.

Deuxièmement, c'est que, dans la santé et l'éducation, les jours de congé de maladie ne s'accumulent pas du tout de la même façon. Alors, il y en a qui sont non monnayables et d'autres qui le sont, mais à une échelle beaucoup plus réduite, de sorte qu'il ne s'agit pas du même ordre de grandeur.

Alors, à ce stade-ci, je ne pense pas que... En tout cas, on ne peut sûrement pas faire de règle de trois, et cela va dépendre aussi des avantages ou, en tout cas, des bénéfices qui seront accordés suite aux négociations que l'on veut tenir du 1er janvier au 28 février.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: En tout cas, je comprends, et, comme je dis, si je cherchais un chiffre exact, ça, c'est une chose, mais il faut quand même penser à ça. On vient ici devant la Chambre pour créer un fonds de 744 000 000 $, au même moment où c'est évident qu'on va faire un retrait assez important sur ce fonds bientôt. Alors, je comprends très bien qu'il faut faire toutes les balises, que ça va dépendre du résultat des négociations d'ici le 28 février. Ça va dépendre beaucoup de choses comme ça, mais je cherche... Est-ce que ce fonds va baisser, au cours de l'année 1997, de 100 000 000 $, 200 000 000 $, 300 000 000 $? Je pense qu'il faut être capable quand même de me donner... Est-ce que c'est entre 100 000 000 $ et 200 000 000 $? Est-ce que c'est entre 150 000 000 $ et 250 000 000 $? J'espère au moins qu'on a essayé de préciser les coûts liés à l'offre avant de la mettre sur la table.

M. Léonard: M. le Président, je pense qu'il est prématuré de mettre des chiffres sur la table là-dessus. Premièrement, sur le 744 000 000 $, oui, c'est sûr que le 744 000 000 $ va être affecté. Dans quelle mesure? Difficile à dire à ce stade-ci. Est-ce que les avantages qui proviennent de provisions actuarielles différentes vont suffire à créer des bénéfices intéressants pour que les gens quittent? Ce n'est pas impossible parce qu'il s'agit de montants substantiels. Les jours de congé de maladie et les vacances sont deux considérations que les gens prennent en compte lorsqu'ils décident de prendre leur retraite. Ça en est. Alors, oui, ça va être affecté. Dans quelle mesure? Difficile à dire.

Par ailleurs, le fait que ce soit au passif, c'est déjà une provision qui est là, c'est-à-dire que c'est reconnu comme une dette du gouvernement. Et puis je réitère encore au député que le cas des réseaux de la santé et de l'éducation est différent de celui de la fonction publique, parce que les conventions collectives sont différentes.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Jacques-Cartier.

(15 h 40)

M. Kelley: J'ai pris bonne note de ça, mais c'est quand même... Je veux voir jusqu'à quel point, parce que la façon de... Même s'il n'y avait pas de négociation, avec l'âge de notre fonction publique, il y aura du monde qui vont prendre leur retraite bientôt de toute façon. Alors, je pense qu'avec le profil démographique de notre fonction publique le fait de créer un compte comme ça, il faut le faire de toute façon. Mais je pense quand même que j'aimerais savoir jusqu'à quel point, en créant ce fonds, ça va étaler ou atténuer l'impact du départ assisté de 15 000 fonctionnaires cette année sur les années précédentes, parce que ça va être une facture assez importante. Tout le monde...

M. Léonard: Les années précédentes ou les années subséquentes?

M. Kelley: Moi, je parle des années précédentes, parce qu'en fait, ce qu'on fait ici, c'est de créer le 744 000 000 $ à partir des états financiers précédents, si j'ai bien compris. On va rouvrir les autres états, on va dire qu'en 1992-1993 on va allouer un montant x, en 1993-1994 on va allouer un montant x, en 1995-1996 on va... Alors, on va rouvrir tout ça pour créer le fonds qui va apparaître à partir du 1er avril 1996. Alors, je veux juste voir, sur ce fonds – qu'on donne l'impression artificiellement, un petit peu, qu'on va créer sur les années précédentes – c'est quoi, le montant qu'on va puiser dans ça dans les mois à venir.

M. Léonard: Bon. Alors, M. le Président, je vais répondre au député qu'il s'agit de reconnaître un passif qui existe. Quelqu'un qui s'en va a droit au remboursement de ses congés de maladie ou des jours de vacances qu'il n'a pas pris.

Maintenant, en termes de, disons, transparence, pour moi, il est clair, et je pense que pour le député aussi il est clair que ces congés de maladie ont été accumulés dans le passé. On peut même dire à quelles années ils appartiennent; le calcul est fait. Et donc, au fond, on vient corriger les états financiers, mais à juste titre, parce que ces jours de congés de maladie n'ont pas été pris dans l'année où ils auraient dû l'être. Puisqu'on s'est engagé à les rembourser, c'est une dépense, donc, des années antérieures et pas du tout des dépenses des années futures. En réalité, lorsque quelqu'un va prendre sa retraite, par exemple, et qu'il va se faire rembourser ses congés de maladie, à ce moment-là il va être remboursé de la moitié – en tout cas, dans certaines conventions, c'est cela – de la valeur de ses congés de maladie. C'est tout à fait conforme à la réalité.

Au fond, on se rapproche d'une comptabilité d'exercice dont tout le monde sait que, pour rétablir une meilleure imputabilité, elle doit être poussée le plus loin possible. Les gouvernements qui ont rétabli leur situation financière ont tenu compte et se sont rapprochés beaucoup de la comptabilité d'exercice, quand ils ne l'ont pas adoptée intégralement.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci, M. le Président. Je n'ai pas remis ça en question, mais je regarde le tableau et, le 1er avril 1995, il y avait 764 000 000 $; on voit une baisse de 20 000 000 $ dans une année. Alors, si j'ai bien compris, le nombre de journées non utilisées accumulées en 1995-1996 était moindre que le nombre de départs que nous avons payés. Alors, ça explique pourquoi le solde a baissé de 20 000 000 $. C'est vrai que le nombre de départs à cause des personnes – la loi 198, entre autres... Le nombre de personnes qui ont quitté entre les deux 1er avril a été plus grand que le nombre de journées accumulées par le monde qui était dans le système.

Alors, basé sur cette expérience, le fait qu'on est en négociation et que les départs assistés sont au coeur même de la contre-proposition gouvernementale, je pense que l'opposition peut savoir au moins qu'il y a une prévision au Conseil du trésor que ça va nous coûter 100 000 000 $, 200 000 000 $. Je n'ai pas demandé un chiffre précis, mais, si on est capable d'aller dans le passé pour voir notre expérience antérieure, ça doit nous donner un genre d'idée de combien ça va coûter dans l'avenir.

M. Léonard: Le député va convenir que, d'abord, il y a une proposition de programme, mais que le programme n'a pas encore été négocié, les paramètres n'en sont pas établis. Par ailleurs, le fait qu'il y ait inscrite à la dette nette une provision pour des congés de maladie et des vacances indique que cette somme est reconnue et donc qu'elle existe. Quel sera le solde au bout? Est-ce que ce sera 200 000 000 $ de moins? On ne peut pas dire présentement; ça n'a pas été négocié et cela dépend de qui partira soit dans la fonction publique, soit dans les autres secteurs, santé ou éducation.

Je dirais aussi qu'effectivement, dans la fonction publique, il y a eu 2 000 départs cet été. Il y a encore 3 000, 3 500 personnes qui pourraient avoir accès à leur retraite dans la fonction publique. Donc, on voit un ordre de grandeur. On a vu ce que ça a donné cet été. Par ailleurs, lorsque l'on parle des réseaux, les conventions collectives ne sont pas les mêmes, les modalités de rachat des congés de maladie comme des vacances ne sont pas les mêmes.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Sauf, M. le Président, que le réalisme nous oblige à constater qu'on peut imaginer, peu importe la négociation entre le 1er janvier et le 28 février, qu'elle ne sera pas en deçà de ce que prévoyait le cadre de règlement de la loi n° 66, et ça doit être un estimé sur lequel le Conseil du trésor s'est penché et a réfléchi pour l'avenir. Tout au moins, on peut imaginer que le plancher va être la loi n° 66, puis, après ça, ça va négocier, c'est relativement évident.

Mais, pour revenir au cadre, c'est-à-dire à la modification à la convention comptable, pourquoi vous préférez, sous prétexte de comptabilité d'exercice, renvoyer dans le passé, rouvrir vos états financiers pour les 10, 15, 20, 25, 30 dernières années pour y installer petit à petit le pourcentage ou le nombre ou la valeur des congés de maladie et de vacances à être payés plutôt que de les rentrer dans votre comptabilité d'exercice au moment où vous payez? Évidemment, je comprends que vous voulez éviter d'avoir une grosse bosse, une verrue, ou appelons ça un minivolcan, une montagne, une colline, en tout cas quelque chose de croche – ha, ha, ha! – quelque chose de croche dans le sens de «qui n'est pas linéaire».

M. Gautrin: Quelque chose qui est linéaire n'est pas croche du tout.

M. Chagnon: Ha, ha, ha! Vous nous expliquerez ça tout à l'heure, vous.

Une bosse, en fin de compte, dans vos états financiers pour le moment où vous faites le paiement de vos vacances et congés de maladie, ce serait plus évident. Il me semble que ce serait plus clair, ce serait plus limpide et transparent sur le plan des états financiers parce que la dépense se serait faite telle année pour tel montant. On la retrouverait aux états financiers du moment de l'année de cette dépense.

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je veux juste quand même rectifier ce que dit le député en disant: C'est une bosse, c'est une montagne, c'est une colline. Puis là il a passé le mot «croche», comme si c'était douteux comme technique. Ce n'est pas douteux. Non, je tiens à rétablir parce que je sais que, des fois, ça dérape un peu. Alors, je tiens à rétablir. Ce n'est pas du tout une technique qui est nébuleuse ni douteuse. Non, pas du tout.

Il faut convenir, et le député va en convenir avec moi, que, si quelqu'un part aujourd'hui, qu'il a, par exemple, 100 jours de congés de maladie accumulés tout le temps qu'il a travaillé, ces jours de congés de maladie lui sont payés. Mais la dette, le montant qu'on lui verse n'appartient pas à l'année dans laquelle le montant est versé, mais appartient à toutes les années antérieures, le temps qu'il a fait sa carrière ici.

Donc, ce que l'on reconnaît actuellement par cette modification aux conventions comptables, c'est que ce 744 000 000 $, c'est un 744 000 000 $ qui appartenait à des années antérieures au 1er avril 1996 et que, par la suite, ce que nous allons indiquer aux états financiers, ce sont les variations à cette provision, comme on fait dans le cas de provisions pour mauvaises créances. On a, dans les états financiers du gouvernement: prêts, placements, avances. C'est de même ordre. Donc, dans ce cas-ci, il s'agit de comptes à payer éventuellement par rapport à des engagements déjà pris antérieurement.

(15 h 50)

Nous sommes effectivement en train de glisser vers la comptabilité d'exercice, ce qui donne une meilleure idée des états financiers d'un gouvernement, comme des états financiers sur le plan du privé, en particulier. Toutes les entreprises ont une comptabilité d'exercice. Je dis «toutes les entreprises», c'est beaucoup dire, «toutes», mais, je dirais, la plupart des entreprises et toutes les grandes entreprises ont des comptabilités d'exercice.

Il faut savoir que, par exemple, des calculs d'intérêts courus à recevoir ou à payer font l'objet de calculs très précis dans les entreprises, dans les banques notamment, ou dans n'importe quelle autre entreprise. Si vous avez des intérêts à payer le 1er janvier sur des obligations émises dans une entreprise ou une hypothèque, bien, le 1er janvier, vous les payez. Mais, en fait, la dépense appartient aux six mois courants avant, si vous payez vos intérêts à tous les six mois. Donc, ça appartient ou ça devrait être comptabilisé dans l'année précédente et non pas dans l'année courante où vous les déboursez. C'est la même chose dans les comptes de retraite actuellement.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, le ministre nous donne un autre exemple: la provision pour créances douteuses. Est-ce que vous avez l'intention de modifier votre convention comptable pour rouvrir vos états financiers jusqu'à ad infinitum pour rentrer vos créances douteuses dans le temps?

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, la provision pour créances douteuses est justement un élément de comptabilité d'exercice parce que... C'est un exemple parfait de ce que nous faisons actuellement. Nous, lorsque nous évaluons des comptes à recevoir, nous ne savons pas généralement quels comptes ne seront pas payés. Nous avons des doutes dans une entreprise; nous avons des doutes sur certains comptes où le client peut avoir des difficultés à payer mais pas de certitudes. Et il ne faut surtout pas reconnaître une certitude, je dirais, en plus; il ne faut pas la reconnaître.

Alors, on crée une provision pour faire face à une estimation générale de ce qui ne sera pas payé, parfois sur des comptes précis mais qui restent à l'intérieur de l'entreprise, donc où... La provision pour mauvaises créances est exactement l'équivalent de ce que nous faisons à l'heure actuelle. Et la provision pour mauvaises créances, il s'agit de comptes à recevoir, alors qu'ici il s'agit de comptes à payer.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: ...lorsqu'on a des comptes à recevoir, qui ne sont pas nécessairement... et qu'on les radie, par exemple, comme vous faites des opérations de radiation de mauvaises créances...

M. Léonard: Ça, c'est une autre chose. Lorsque vous radiez une mauvaise créance, vous la radiez contre la provision justement, mais je signalerai...

M. Chagnon: Oui, mais vous ne ramenez pas votre radiation sur les années passées ad vitam aeternam.

M. Léonard: Ah! Mais, par définition, les comptes à recevoir sont des éléments d'actif à court terme.

M. Chagnon: Oui, mais...

M. Léonard: Comme les comptes à payer, c'est à court terme aussi. Tandis que, là, l'accumulation de la provision s'est faite durant plusieurs années. Je signale au député que, l'an dernier, les principes sur la provision pour pertes sur garantie de prêt ont été changés pour y appliquer aussi la comptabilité d'exercice. C'est un des pas qui sont faits vers une comptabilité qui tient compte du moment où la dépense est encourue, réellement encourue, plutôt que du moment où elle est payée ou reçue, dépendant.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Oui, juste sur un autre ordre d'idées. Si j'ai bien compris, en faisant ça on va ajouter à la dette cumulative 744 000 000 $. C'est quoi, l'impact de cette manoeuvre? Est-ce qu'il y a des frais d'intérêt qui sont liés à ça? Est-ce que ça va avoir une influence sur la capacité de prêter du gouvernement, ou c'est juste qu'on passe de – je n'ai pas les chiffres exacts – 54 000 000 000 $, 55 000 000 000 $ de dette?

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: Il n'y a aucun intérêt de payé sur cette provision, aucun intérêt. C'est une écriture comptable, mais qui rend les états financiers plus transparents. En réalité, cette dette existe. Elle existe, et donc nous la mettons aux livres, nous l'inscrivons aux livres, nous la reconnaissons. Mais, comme elle appartient aux états financiers antérieurs à l'année courante, elle est passée à la dette nette.

Alors, cette année, si les gens accumulaient, si nos fonctionnaires accumulaient plus de congés de maladie que ce qui est pris, compte tenu de la masse des fonctionnaires, de l'ensemble des fonctionnaires, bien, effectivement, le 744 000 000 $ monterait. S'il y en avait moins, il baisserait. Donc, ce qu'on va inscrire aux états financiers dorénavant, ça va être la variation de la provision.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Si j'ai bien compris, quand on parle du service de dette, c'est basé sur un montant de, mettons, 54 000 000 000 $ – je n'ai pas le chiffre exact. Est-ce qu'à partir de maintenant on va calculer ça sur un chiffre de 54 744 000 000 $? Et est-ce qu'il y aura un impact sur le service de dette accumulé et que le gouvernement doit payer?

M. Léonard: Il n'y a pas d'impact sur le service de dette. Il y a un impact sur le montant total des dettes du gouvernement, mais ce n'est pas une dette qui est due de par des conventions financières. C'est une dette qui découle de l'application de conventions collectives, et le montant est payé individuellement à chaque personne lorsqu'elle quitte s'il lui reste des congés de maladie ou des vacances qu'elle n'a pas pris.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Ce que vous me dites à l'heure actuelle, c'est que ça n'a aucun effet sur les besoins financiers du gouvernement parce que, dans le fond, c'est simplement une écriture comptable...

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: ...que vous faites et qu'elle n'aura un effet que lorsque les gens quitteront, c'est-à-dire qu'ils voudront, entre guillemets, collecter leur banque de congés. C'est bien cela?

M. Léonard: Oui. Alors, ça n'a aucun effet sur le service de dette. Je le répète, là, aucun effet sur le service de dette.

M. Gautrin: ...donc sur le service de la dette.

M. Léonard: Je n'ai pas compris, là.

M. Gautrin: Alors, ça n'a pas d'effet sur les besoins financiers...

M. Léonard: Non, aucun effet sur les besoins financiers du gouvernement.

M. Gautrin: ...c'est-à-dire sur ce que vous devez emprunter sur les marchés financiers.

M. Léonard: Quelle que soit la méthode que vous employez, vous remboursez les jours de congé de maladie à l'employé qui part indépendamment de la méthode comptable utilisée, mais vos états financiers rendent compte du fait qu'il y a une créance différée de 744 000 000 $ aux employés lorsqu'ils quitteront, à moins qu'ils ne soient malades entre-temps et qu'ils utilisent cette provision pour prendre leurs congés de maladie. Alors, ce que l'on comptabilisera à la fin de l'année, ce sera la variation dans la provision, mais ça n'a pas d'effet sur les besoins financiers nets du gouvernement.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le président du Conseil du trésor. M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Ça n'en a pas jusqu'à temps qu'on commence à débourser les congés en question, comme ça a été le cas, par exemple, cette année, où on avait, au 1er avril 1995, 764 000 000 $ de réserve, ou de provision, ou de fonds consolidé, disons, de cette dépense-là à venir, et on tombe à 744 100 000 $. Alors, il y a un 20 000 000 $ qui est passé à la dette là-dessus, évidemment.

M. Léonard: Ah non! Ah non! Pas du tout. Pas nécessairement, en tout cas.

M. Chagnon: Pas nécessairement, mais...

M. Léonard: Pas nécessairement, parce que les congés de maladie, lorsqu'ils sont remboursés, sont imputés au budget du ministère. Alors, le ministère, lui, paie quelqu'un qui est en congé de maladie à l'intérieur de ses crédits. Il n'est pas autorisé pour autant à dépasser ses crédits. C'est à l'intérieur de ses crédits.

M. Gautrin: Attendez, je ne comprends pas ça.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: ...parce que je n'ai pas compris cette affaire-là.

Le Président (M. Brouillet): Attendez une minute, M. le député de Verdun, M. le ministre est occupé à quelques informations. Ce ne sera pas très long.

Alors, M. le député de Verdun, si vous voulez...

M. Léonard: M. le Président, oui, je vais revenir, là, parce que je pense qu'il faut que je précise davantage. Il y a des congés de maladie qui peuvent être payés par des budgets des ministères, mais il y avait aussi une provision à l'ORH – l'Office des ressources humaines lorsqu'il existait – qui versait une partie des congés de maladie. Je suppose que ça dépendait du moment ou de la provision elle-même par rapport aux employés, parce que je suppose qu'ils prenaient des congés de maladie de l'année en cours et qu'ensuite ils pigeaient dans leur provision.

Le Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Léonard: Les deux.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Simplement pour bien comprendre ce que vous avez dit. Dans le futur... Là, vous prenez la banque des congés de maladie accumulés, vous les comptez, à l'heure actuelle, à la dette parce que, dans le fond, vous dites que c'est une dette. Ça, on se comprend là-dessus. Maintenant, essayons de voir dans le futur. Pour un ministère donné, compte tenu de ses employés, il a un certain montant qui correspond aux congés de maladie. C'est bien le cas?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Bon. Si ces congés de maladie ne sont pas utilisés... Autrement dit, je prends le ministère de l'Éducation... Le ministère de l'Éducation a un certain nombre de fonctionnaires. Dans les crédits du ministère de l'Éducation, il est prévu un montant qui correspond à l'ensemble des congés de maladie possibles pour les fonctionnaires du ministère de l'Éducation.

M. Léonard: Le ministère de l'Éducation est un mauvais exemple parce qu'il n'y en a pas.

M. Gautrin: Ah!

M. Léonard: Prenons un autre exemple...

M. Gautrin: Un instant.

M. Léonard: ...un ministère du gouvernement.

M. Gautrin: Là, les fonctionnaires du ministère de l'Éducation, leurs congés...

M. Léonard: Les employés du ministère, ah oui.

M. Gautrin: J'ai les fonctionnaires...

(16 heures)

M. Léonard: O.K. Ça va.

M. Gautrin: Je m'excuse, M. le Président. J'ai utilisé, vous pouvez regarder, le terme «les fonctionnaires».

M. Léonard: Non, je pensais à «réseau» là. Vous avez raison.

M. Gautrin: Non, non, je ne parle pas de réseau. Ça, je comprends ça. «Réseau», écoutez, je ne mélange pas les deux. Je parle des fonctionnaires du ministère de l'Éducation. Ça, on s'entend?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Il y a quoi? Il y a 2 000 fonctionnaires, si je ne me trompe pas, à peu près, là, de cet ordre-là.

M. Léonard: Non, non. Ça a baissé beaucoup; c'est rendu à 1 600, 1 500.

M. Gautrin: Bon, 1 600. Disons 1 500 pour faire un ordre de grandeur.

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Ces 1 500 personnes là ont toutes une banque de congés-maladie pour l'année en cours. C'est bien le cas?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: C'est quoi? C'est six jours ou sept jours de congé-maladie?

M. Léonard: On me dit qu'ils ont droit à 12 jours par année.

M. Gautrin: Douze jours de congé-maladie. Donc, si je multiplie 1 500 par 12, ça fait quand même pas mal de jours.

M. Léonard: Ça fait 18 000 jours.

M. Gautrin: Hein?

M. Léonard: Ça fait 18 000.

M. Gautrin: Voilà! Je sais bien, mais je ne vois pas... Il faudrait que j'aie le salaire moyen; je pourrais l'obtenir après pour savoir quel est le montant d'argent. Mais, à la fin de l'exercice comme tel, c'est-à-dire quand on va arriver au 31 mars 1997, les congés-maladie non utilisés vont-ils être versés par le ministère dans la banque que vous créez? Qu'est-ce qui va se passer? C'est ça que je ne comprends pas. Autrement dit, à la fin de l'exercice, les congés non utilisés, va-t-il y avoir un transfert dans une dette, en quelque sorte?

M. Léonard: Ils vont être provisionnés au ministère. Ils vont être imputés au ministère mais provisionnés au central dans ce poste, ici, dont nous parlons. C'est-à-dire que le ministère...

M. Gautrin: C'est-à-dire qu'on va avoir, pour le futur...

M. Léonard: Quelqu'un n'a pas été malade, quelqu'un n'a pas été malade à l'Éducation...

M. Gautrin: Oui, oui, je sais bien, j'ai bien compris.

M. Léonard: ...donc il a 12 jours.

M. Gautrin: Oui.

M. Léonard: Le ministère lui-même va le compter, son 12 jours, comme étant une dépense, mais la provision va être au central, dans le poste dont nous parlons.

M. Gautrin: Donc, le ministère va compter, que la personne ait pris ou n'ait pas pris son congé de maladie, elle va...

M. Léonard: Si elle l'a pris...

M. Gautrin: Si elle l'a pris, il y a une dépense...

M. Léonard: ...il reste 12 jours moins le nombre de jours.

M. Gautrin: ...mais, si elle ne l'a pas pris, il va considérer comme s'il avait eu une dépense...

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: ...de 12 jours de congé de maladie qui vont, à ce moment-là, être provisionnés centralement...

M. Léonard: C'est ça.

M. Gautrin: ...et ça va apparaître... Ça n'aura même pas besoin d'apparaître aux états financiers du ministère?

M. Léonard: Dans les états financiers du ministère, d'abord, s'il n'y a pas d'états financiers du ministère... Mais, quand même, dans les crédits du ministère...

M. Gautrin: Dans les crédits qui vont venir après, si je puis dire.

M. Léonard: ...il y aura 12 jours comptés comme étant une dépense mais qui n'auront pas été déboursés parce qu'ils auront été provisionnés dans la provision comme une dette, parce qu'ils le seront le jour où la personne sera malade ou le jour où elle quittera et qu'elle sera remboursée, si elle n'a pas utilisé l'ensemble de ses jours de congé-maladie, ce qui lui restera.

M. Gautrin: Mais...

M. Léonard: À 50 % là, c'est 50 %.

M. Gautrin: Je comprends bien, M. le Président. Mais, pour continuer sur ça, j'ai donc à peu près 18 000 jours de...

M. Léonard: Moins ce qui aura été utilisé.

M. Gautrin: ...moins ce qui aura été utilisé, qui vont être retirés du budget ou transférés, à ce moment-là...

M. Léonard: À la provision.

M. Gautrin: ...à la provision qu'on est en train de faire au ministère de l'Éducation.

M. Léonard: Maintenant, si...

M. Gautrin: Autrement dit, le ministère de l'Éducation fonctionne maintenant sur des enveloppes fermées. Je ne sais pas si on continue.

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Alors, dans les enveloppes fermées, son enveloppe congés de maladie ne pourra pas être utilisée ou escomptée d'une manière différente si on ne les a pas utilisés. Ça sera quasiment une sous-enveloppe fermée à l'intérieur du ministère. C'est bien ce que je comprends?

M. Léonard: Non. C'est provisionné centralement.

M. Gautrin: Je m'explique.

M. Léonard: Mais je voudrais dire au député, quand même...

M. Gautrin: Oui, allez-y!

M. Léonard: Si vous avez reçu le tableau que j'ai distribué tout à l'heure...

M. Gautrin: Oui, on me l'a passé.

M. Léonard: Vous voyez que, du 1er avril 1992 au 1er avril 1996, la variation est en tout de 60 000 000 $, environ. Mais je donne les chiffres: 1er avril 1992, 685 000 000 $; 1993, 723 000 000 $; 1994, 740 000 000 $; 1er avril 1995, 764 000 000 $; cette année, au 1er avril 1996, elle est descendue à 744 000 000 $. Probablement même qu'au 1er avril 1997 cette somme va être encore plus faible, parce que nous avons remboursé une somme de 38 000 000 $ dans le programme de départs assistés. Et donc, on peut s'attendre à ce qu'elle se réduise.

Mais le point que je veux faire ressortir, c'est que, sur l'ensemble de ces cinq années, vous avez pratiquement une provision assez stable. Ce que nous faisons, c'est que nous reconnaissons un poste provision pour congés-maladie et vacances non pris dans les états financiers du gouvernement qui ne change rien au service de la dette, qui ne change rien, en quelque sorte, au reste des états financiers, mais qui est quand même reconnu comme tel et qui amène les ministères à mieux gérer, aussi. Vous avez des états financiers plus transparents, ça, ça me paraît évident.

M. Gautrin: Je comprends. Mais ce que vous avez annoncé sans que ce soit réalisé, le départ de 15 000 personnes, ça va avoir un effet direct sur votre provision.

M. Léonard: On peut le penser. De quel ordre de grandeur? Tout dépendra des négociations que nous aurons et du programme qui sera mis sur pied.

M. Gautrin: Oui.

M. Léonard: Mais il y a eu un impact sur cette provision, un impact évident à la suite du programme de départs assistés.

M. Gautrin: Oui. Je comprends.

M. Léonard: Mais, dès que quelqu'un s'en va, il diminue la provision, en quelque sorte.

M. Chagnon: Pour arriver à ce montant...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Pour arriver à ce montant de crédits supplémentaires, M. le Président, de combien le ministre entend-il périmer de crédits cette année?

M. Léonard: Il n'y a pas de relation. Attendez un peu. Je ne sais pas si je comprends bien votre question, là. Vous venez de changer de sujet ou si...

M. Chagnon: Oui, oui.

M. Léonard: Ah! c'est un autre sujet.

M. Chagnon: Oui. Parce que, si vous ne faites pas de péremption de crédits, vous risquez d'avoir des dépassements dans certains ministères qu'on n'a pas parce que vous avez fait des péremptions antérieurement.

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: Le 744 000 000 $, c'est extrabudgétaire, de même que le 40 000 000 $ au ministère de l'Éducation.

M. Chagnon: C'est ça.

M. Léonard: Il n'est pas budgétaire.

M. Chagnon: Oui.

M. Léonard: Alors, ce qui est budgétaire, c'est la différence... Ce qui est budgétaire, c'est 244 600 000 $. C'est ça qui est budgétaire. Alors, ce que nous disons aujourd'hui, c'est: Oui, il y a des dépassements sur ce plan-là, il y a 244 000 000 $; par ailleurs, ce sera compensé par des crédits disponibles ou rendus disponibles dans d'autres ministères.

M. Chagnon: Est-ce qu'on ne doit pas ajouter...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Est-ce qu'on ne doit pas ajouter le 100 000 000 $ que recherche le ministre dans sa recherche de 200 000 000 $ d'ici la fin de l'exercice budgétaire de cette année? 100 000 000 $ qui sera pris, on le sait, dans la négociation avec les syndicats d'ici aujourd'hui et l'autre 100 000 000 $, bien, il faut rajouter ce 100 000 000 $ à quelque part. Alors, ce n'est pas un 100 000 000 $ de péremption de crédits supplémentaires, M. le Président?

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, on ne doit pas ajouter de 100 000 000 $, le 100 000 000 $ additionnel dont le député a parlé en premier lieu, parce que nous avons déposé une proposition que tout le monde connaît maintenant et qui implique qu'il y aurait des engagements à livrer, 100 000 000 $ de compressions, en tout cas de réaménagements, ou, en tout cas, à discuter ou à négocier avec des partenaires. Par ailleurs, sur l'autre, effectivement, il peut s'agir de crédits périmés, des crédits périmés additionnels d'ici la fin de l'année ou d'autres mesures.

M. Chagnon: Oui, mais, M. le Président, il faut se rappeler que...

M. Léonard: Mais je rappelle ce que j'ai dit en ouverture, que nous entendons respecter l'objectif budgétaire du gouvernement...

M. Chagnon: Évidemment, c'est...

M. Léonard: ...des dépenses. Donc, cela s'inscrit dans cet objectif. Nous voulons aller chercher 200 000 000 $.

M. Chagnon: Alors, l'annonce...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Le ministre n'annonce pas, pour ceux qui connaissent l'organisation des crédits, qu'il va récupérer 250 000 000 $ d'ici la fin de l'année, c'est-à-dire 244 600 000 $ en péremption de crédits. Je ne fais qu'ajouter...

M. Léonard: C'est déjà fait.

M. Chagnon: Je ne fais qu'ajouter qu'il y a un autre 100 000 000 $ qui devrait s'en venir, puisque et le premier ministre et le président du Conseil du trésor ont annoncé qu'il manquait 200 000 000 $ pour clore l'année financière.

On a demandé aux syndicats d'en trouver 100 000 000 $ à même leur convention comptable, à même... bien, à même leur convention comptable – ha, ha, ha! – à même leur masse salariale et leurs bénéfices marginaux, et l'autre 100 000 000 $, bien, j'imagine que le président du Conseil du trésor va devoir périmer pour 100 000 000 $ de crédits.

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

(16 h 10)

M. Léonard: M. le Président, nous avons fait sensiblement la même opération l'an dernier. L'opposition avait prévu un dépassement des dépenses de l'ordre de 400 000 000 $, 500 000 000 $. Il y en a même qui ont mentionné 600 000 000 $. Nous avons dit que nous respecterions notre objectif et nous l'avons respecté. Nous sommes très confiants, nous allons – pas juste confiants – respecter l'objectif de dépenses que nous nous sommes fixé, puis l'objectif, en termes financiers, de ne pas dépasser le déficit de 3 275 000 000 $. C'est ça qui a été déclaré au budget. Et je vais donner un exemple au député. La baisse des taux d'intérêt, bon, génère des disponibilités dans les services de dette des ministères. Alors, plus le temps passe, plus il peut s'en générer. Donc, cela va servir effectivement à combler des... des ministères où il y a des dépassements.

M. Chagnon: M. le Président, je rappelle...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: ...au ministre que l'an dernier l'opposition avait annoncé qu'il y aurait 600 000 000 $ d'écart dans le budget et l'opposition a eu raison. Il manquait 600 000 000 $ qui ont été, par hasard, subrepticement, là, comblés par une augmentation inattendue de la part du gouvernement de la péréquation: 540 600 000 $ de péréquation venant du gouvernement fédéral en paiements de transfert au gouvernement. Ce n'est pas tellement loin de 600 000 000 $ de revenus, ça.

M. Léonard: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: Oui. Alors, on va en parler. L'objectif de dépenses a été respecté l'an dernier, et même nous avons fait mieux de 24 000 000 $. Nous l'avons respecté intégralement. Par ailleurs, du côté des revenus, il y a eu des plus et des moins. Effectivement, la péréquation au fédéral a augmenté, mais il faudrait aussi parler des coupures du fédéral, si le député veut nous entraîner sur ce terrain. Vous savez que cette année nous recevons environ 1 000 000 000 $, 1 200 000 000 $ de moins que l'année précédente, et, si nous n'avions pas ce manque à gagner du côté des paiements de transfert, nous n'aurions pas les difficultés budgétaires que nous connaissons à l'heure actuelle.

Par ailleurs, pris dans son ensemble, le système fait que nous devons quand même équilibrer notre budget, prendre les moyens de le faire, réduire les dépenses, surtout, pour d'autres considérations économiques. Alors, sur ce plan-là, je le rappelle, je reviens à la base: l'objectif des dépenses, l'an dernier, a été respecté. Il a été respecté. Nous avons fait 24 000 000 $ de moins que ce qui avait été voté aux crédits au début de l'année. Il y a des ministères qui ont dépassé leurs crédits, mais il y en a d'autres qui ont généré des disponibilités pour différentes raisons. Et je dois aussi souligner la bonne volonté de plusieurs ministères de le faire, parce que, au fond, ils avaient respecté leur enveloppe fermée, mais ils ont contribué à équilibrer les finances du gouvernement et les budgets des autres, de ceux qui n'avaient pas pu éviter de les dépasser, leurs budgets.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Westmount–Saint-Louis?

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je rappelle...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Non. J'ai une autre question, mais plus tard.

M. Chagnon: Je rappelle...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci. Je rappelle au ministre que, effectivement, il y a des baisses dans les paiements de transfert, entre autres, dans le paiement des programmes canadiens. Mais toutes les provinces sont sujettes à ce même genre de baisses eu égard à leur richesse ou eu égard à leur nombre de population interne, et les autres provinces, à date, s'en sont mieux tirées que le Québec pour la bonne et simple raison qu'elles ont commencé – le ministre aura raison de le dire...

M. Léonard: ...que ce que vous avez fait au Québec, c'est... Vous êtes en train de plaider votre propre turpitude, M. le député.

M. Chagnon: Oui, oui, oui, mais vous parlez à des gens qui ont défendu des projets de loi comme 198, 197 malgré l'obstination du ministre à l'époque. Mais c'est...

M. Léonard: Le député devrait parler à son collègue de Verdun, parce que son collègue de Verdun va reconnaître que j'ai contribué beaucoup à améliorer son projet de loi 198. On pourrait revenir aux galées là-dessus.

M. Chagnon: Oui, on va revenir aux galées là-dessus, ne soyez pas inquiet.

M. Léonard: Oui, oui. Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Mais, M. le Président...

M. Léonard: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun...

M. Chagnon: M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Gautrin: Mais vous l'avez quand même... La députée de Taillon, lorsqu'elle était présidente du Conseil du trésor, l'a quand même aboli en partie.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, comme je le disais, le Québec peut se plaindre tant qu'il veut, mais il n'est pas l'objet d'un traitement plus mauvais que n'importe quel autre gouvernement de n'importe quelle autre province, en matière de paiements de transfert. Quant à l'augmentation...

M. Léonard: M. le Président. M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Vous aurez votre tour, M. le président du Conseil du trésor.

M. Chagnon: Oui, ce ne sera pas bien long.

Le Président (M. Brouillet): Je vais laisser quelque temps à M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Quant à l'augmentation non attendue, comme je le disais, de 540 000 000 $ de péréquation l'an dernier, le ministre se rappellera qu'il s'agissait de montants cumulatifs pour des années antérieures. Aujourd'hui, le président du Conseil du trésor nous demande de revenir à la comptabilité d'exercice, il nous demande d'inscrire à la dépense des objets qui auraient dû être dépensés ou inscrits dans les années passées. Est-ce que le président du Conseil du trésor peut nous annoncer aujourd'hui qu'il a l'intention d'inscrire aux revenus les revenus qu'il a reçus, par exemple, l'an dernier et qui devraient être comptabilisés dans les années précédentes? Si on rouvre les états financiers pour ajouter des passifs dans les années antérieures, il me semble que la logique voudrait qu'on les rouvre aussi pour ajouter des revenus qui vont pour ces années antérieures.

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je vois que le député veut faire passer le fait que le Québec a reçu plus de péréquation... que cela l'a aidé à équilibrer son budget de l'an dernier, mais il escamote aussi le fait que les coupures aient été majeures, au cours de l'année passée comme au cours de cette année, l'année actuelle.

Mais je note aussi qu'il a dit une chose très importante: les autres provinces ont commencé à rétablir leur bonne santé financière bien avant le Québec. Le problème, c'est que c'était le gouvernement libéral qui était au pouvoir à l'époque et qu'il n'a pas pris les décisions qu'il aurait dû prendre, n'a pas posé les gestes qu'il aurait dû poser pour équilibrer son budget. Alors, nous avons pris la situation telle qu'elle était lorsque nous sommes arrivés, avec un déficit de 5 700 000 000 $, et puis effectivement nous revenons à l'équilibre des finances à pas forcés. Je suis conscient que c'est difficile, nous le savons, que c'est difficile, mais nous le faisons parce que ceux qui nous ont précédés ne l'ont pas fait.

Alors, M. le Président, je voudrais mettre ça en lumière par rapport au fait qu'on dise que la péréquation est augmentée au Québec. Mais les conséquences de ne pas l'avoir fait, aussi, c'est que l'économie s'est anémiée parce que nos services de dette ont continué d'augmenter, alors que, dans les autres provinces, ils se sont stabilisés. Alors, sur la comptabilité d'exercice, on peut faire des grandes déclarations théoriques en disant: Nous adoptons dorénavant la comptabilité d'exercice. Ce que nous faisons, c'est que, en ce qui concerne les dépenses à tout le moins, et même aussi sur le plan financier, nous le faisons poste par poste, mais nous y venons graduellement.

L'an passé, nous avons touché à la provision sur garanties de prêts, et puis nous comptabilisons, par exemple sur les prêts que nous faisons, 15 % ou 20 % – dépendant, en tout cas, du type de prêt, 15 % ou 20 % des prêts que nous faisons aux entreprises ou des garanties de prêts que nous faisons – dans les dépenses courantes du ministère de l'Industrie et du Commerce ou de la SDI mais au ministère de l'Industrie et du Commerce. Alors, nous avons fait ce geste l'an dernier. Aujourd'hui, nous reconnaissons le poste provision pour congés de maladie qui n'ont pas encore été pris. Donc, oui, nous avançons graduellement sur ce plan-là.

(16 h 20)

Je rappellerais aussi une chose. C'est que, en l'occurrence, en ce qui concerne les paiements de péréquation, les paiements de péréquation sont l'objet de corrections finales qui prennent du temps à s'établir. Ce n'est pas comptabilisé immédiatement, les facteurs de correction peuvent s'étaler sur plusieurs années. Nous négocions avec le fédéral le calcul et la reconnaissance des calculs qui servent à l'établissement de la péréquation, et c'est cela qui explique que ces corrections portent sur plusieurs années. Alors, voilà ce que j'avais à en dire. Présentement, nous savons qu'il y a un poste d'une dette différée qui touche les banques de congés-maladie non pris, comme des vacances non utilisées.

M. Chagnon: M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: ...je vais être obligé d'inscrire le nom du député dans la liste trop longue des plaignants patentés qui, depuis deux ans, se plaignent des paiements de transfert, comme tout le monde d'ailleurs, puisque les paiements de transfert, comme vient de le redire, peut-être l'affirmer pour la première fois le ministre, n'ont pas affecté le Québec davantage que n'importe quelle autre province dans les mêmes situations ou n'importe quel autre citoyen de n'importe quelle autre province dans les mêmes situations.

Mais la question que je lui posais, c'était si la convention comptable qu'il nous a déposée aujourd'hui permet, par le biais de la comptabilité d'exercice, d'inscrire à la dépense le passif que représentent les congés de maladie à être monnayés un jour et les congés de vacances à être monnayés un jour, de les inscrire en rouvrant les états financiers de chaque année passée, pourquoi ne fait-il pas la même chose en ce qui concerne les actifs, les revenus? Et je prends à témoin le dossier de la péréquation où, l'an dernier, il y a eu, en 1995-1996, en ce qui concerne le Québec, une augmentation de 286 000 000 $. Ajoutez à cela, pour 1994-1995, une addition de 99 000 000 $ supplémentaires au montant qui avait déjà été perçu par le Québec. Alors, si ou rouvre pour le passé en ce qui concerne les passifs, pourquoi est-ce qu'on ne rouvre pas pour le passé en ce qui concerne les revenus?

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, en ce qui concerne les jours de congé-maladie, pour parler d'un poste que nous contrôlons parfaitement ici, nous connaissons à la fin de chaque année et les gestionnaires connaissent à la fin de chaque année combien de jours de congé-maladie ont été pris ou non et par personne. Ils le savent. C'est comptabilisé dans tous nos systèmes d'information et de gestion du personnel. Je ne dis pas que c'est connu le 1er avril de l'année se terminant le 31 mars, mais dans le mois qui suit, avec les rapports de gestion que nous avons, nous le connaissons, et c'est comptabilisé sur ce plan-là.

Dans le cas dont il me parle, de la péréquation ou de toute autre espèce d'actifs gouvernementaux, on sait que... En tout cas, pour parler de la péréquation, les corrections se font sur plusieurs années et prennent parfois beaucoup de temps à se négocier. Ceci étant dit, si on refait les états financiers sur des bases comparables, ça a déjà été fait au gouvernement, j'ai déjà vu des états financiers remis sur base comparable. En particulier, dans un état financier «Vivre selon nos moyens», il me semble que cela avait été fait à l'époque sur base comparable, il y a deux ou trois ans, trois ans, je pense, maintenant, en 1993. Alors, c'est une chose qui se fait, mais vraiment, à ce moment-là, il faut remonter loin dans le temps. Mais à la différence, actuellement, sur le cas des congés-maladie, nous connaissons la provision que nous devons établir dès la fin de l'année financière ou dans le mois qui suit, si vous voulez.

Sur la question d'inscrire aux états financiers les actifs d'un gouvernement, tout le monde conviendra qu'il est très difficile d'évaluer chacun de ces actifs, même si nous avons fait des progrès en ce sens. Je m'en réfère au rôle d'évaluation constitué par chacune des municipalités. Les actifs du gouvernement sont évalués; ils ne l'étaient pas il y a 15 ans. Mais il faut dire cependant que tous les actifs gouvernementaux ne sont pas évalués. Les équipements lourds, type les routes, par exemple, ne sont pas évalués. C'est pourtant l'objet d'investissements... Le réseau routier du Québec vaut des milliards et des milliards, des dizaines de milliards, mais il n'est pas évalué. Et, sur le plan de la gestion des finances publiques, la capacité de payer, de générer des taxes et des revenus est très importante, plus que la valeur même des actifs qu'un gouvernement gère. Alors, là, on est rendu beaucoup plus loin dans le temps. Je pense que peut-être qu'un jour nous y viendrons, mais, pour l'instant, ce n'est pas notre préoccupation première.

M. Chagnon: M. le Président...

M. Léonard: Je veux dire: Là, on est dans des considérations théoriques, plus.

M. Chagnon: M. le Président, de considérations...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Westmount–Saint-Louis; et après ça, on passera au député de Verdun.

M. Chagnon: M. le Président, des considérations théoriques! C'était théorique, la question soulevée par la convention comptable modifiée par le président du Conseil du trésor, jusqu'à temps que le président du Conseil du trésor décide de modifier la convention comptable.

M. Léonard: C'est une dette différée que nous reconnaissons.

M. Chagnon: Alors, c'est une dette différée, mais, quand on a un actif différé...

M. Léonard: Oui.

M. Chagnon: Puis là je ne parle pas d'une route; je parle d'un montant. Je vous donne la source, c'est le ministère des Finances: 1995-1996, une augmentation d'un montant différé de 286 000 000 $ au chapitre de la péréquation, qui est rentré évidemment dans les états financiers de 1995-1996, plus 99 000 000 $ pour 1994-1995, qui est aussi dans les états financiers de 1995-1996. Tout ce que je dis au ministre, c'est: Si on peut différer un passif comme il le fait, je ne vois pas pourquoi on ne différerait pas un actif, puis ils sont assez hauts. C'est pas mal plus facile de comptabiliser les actifs de péréquation qui nous arrivent a posteriori que les passifs de paiement de vacances ou de congés-maladie.

M. Léonard: M. le Président, je pense qu'il y en a une certaine partie qui est inscrite aux livres du gouvernement, dans les états financiers du gouvernement. Lorsque le gouvernement a une chance raisonnable de percevoir des montants de la part d'un autre gouvernement, disons le fédéral, il l'inscrit ici. S'il ne peut pas le faire, si ses chances sont minces ou si, plutôt, il ne sait pas le montant auquel il a droit, il ne peut pas l'inscrire. Tout le monde sait que la péréquation est facteur de paramètres économiques qui sont rendus disponibles à la connaissance du gouvernement beaucoup plus tard dans le temps, parce qu'il s'agit de réajuster ces paiements de péréquation en fonction de la production intérieure brute de chacune des provinces et des paiements qui sont... de différents facteurs que j'ignore présentement. Je sais qu'il y en a un grand nombre, de facteurs, mais qui sont établis, avérés a posteriori, après que ces données sont disponibles, ce qui prend du temps. Donc, là-dessus on ne peut pas reprocher au gouvernement de ne pas les avoir inscrits, ces montants, à la date où il a fait son budget.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Bon. Pour changer de sujet, je reviens sur le sujet que vous avez sur la table, je vais essayer de le comprendre pour voir ce qui se passe, M. le Président. Si je comprends bien – et je prends un exemple qui est le ministère de l'Éducation, puis on va commencer par s'entendre sur les chiffres au départ, j'aurais pu prendre n'importe quel autre ministère – mettons que, pour les faits de la réflexion, on met 1 500 fonctionnaires, à l'intérieur du ministère de l'Éducation, à 12 jours de maladie, on arrive à 18 000 jours à 200 $ le jour en moyenne. C'est à peu près ça?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Ça ferait un ordre de...

M. Léonard: ...par année ou un peu plus.

M. Gautrin: Oui, bon. Alors, ça ferait un ordre... Non, mais j'essaye de voir l'enveloppe, j'essaye de me donner une idée.

M. Léonard: Oui, oui, d'accord.

M. Gautrin: Non, 3 600 000 $. Est-ce qu'on s'entend sur 3 600 000 $ comme étant l'enveloppe congés-maladie pour un ministère comme le ministère de l'Éducation?

M. Léonard: Théoriquement.

M. Gautrin: Théoriquement.

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Non, mais attendez un instant, qu'on se comprenne bien, là.

M. Léonard: Non, mais, avec les hypothèses que vous faites, oui, c'est ça que ça donne.

M. Gautrin: Non, non, mais écoutez, c'est de l'ordre de grandeur...

M. Léonard: Oui, oui. C'est ça.

M. Gautrin: C'est ce que j'essaie de voir. L'ordre de grandeur de la rémunération est 58 000 000 $. C'est 58 562 000 $. L'ensemble de la rémunération pour tous les fonctionnaires, c'est 58 000 000 $. C'est sorti de cet ordre de grandeur là. Alors, maintenant, je veux comprendre. Le gestionnaire du ministère de l'Éducation, jusqu'à maintenant, se disait: Tous mes gens ne vont pas tomber malades et prendre tous leurs congés-maladie. Donc, dans le 3 600 000 $, il va en être utilisé peut-être un certain pourcentage, et je vais pouvoir utiliser l'autre pourcentage pour d'autres fins de rémunération. Autrement dit, si, pour les fins de la discussion, l'expérience nous a amenés à dire que la banque de congés-maladie de 12 jours était utilisée, par exemple, à 50 % en moyenne, parce qu'elle n'est pas toute utilisée, on pouvait dire qu'il y avait l'équivalent de 1 800 000 $ qui pouvait être réalloué différemment pour des fins de rémunération, actuellement.

(16 h 30)

Et, maintenant, ce que vous avez demandé, c'est qu'à la fin de l'exercice, si la moitié de la banque n'a pas été utilisée, à ce moment-là que ce soit transféré, ce 1 800 000 $, au fonds central. Est-ce qu'on se comprend bien que c'est ça qui se passe? Alors, la possibilité d'escompter les congés de maladie non utilisés ne sera plus faisable. Est-ce que je me comprends? C'est ça ou pas? Est-ce que ma question est...

M. Léonard: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Oui. La réponse vient de la part du président du Conseil du trésor.

M. Léonard: Disons que – mais raisonnons sur un ordre de grandeur, quand même – dans les crédits du ministère de l'Éducation, il y a 260 jours, et chacune des personnes est inscrite à raison de...

M. Gautrin: Dans les crédits, il y a 260 jours?

M. Léonard: Bien, la rémunération est inscrite, disons, sur une base de 260 jours environ.

M. Gautrin: Ah oui, oui! O.K., ça marche.

M. Léonard: Alors, les crédits...

M. Gautrin: Autrement dit, le 58 000 000 $ de rémunération, là...

M. Léonard: C'est sur 260 jours.

M. Gautrin: ...c'est sur une base de 260 jours, à peu près.

M. Léonard: C'est ça.

M. Gautrin: Donc, j'ai évalué un jour à 200 $.

M. Léonard: Alors, quelqu'un qui est malade, quelqu'un qui est malade ne se présente pas et il est payé quand même, à cause de notre système. Mais, si, à la fin de l'année, il n'a pas utilisé ses 12 jours, il a travaillé toute l'année, donc il est toujours payé sur 260. Par ailleurs, il y a une créance envers le gouvernement pour le solde, et c'est ça qui n'était pas inscrit, alors que nous l'inscrivons maintenant.

M. Gautrin: Oui, mais je veux bien comprendre la différence. Supposons que la ministre de l'Éducation soit partie aussi dans le débat. Elle pouvait, jusqu'à maintenant... Est-ce qu'elle pouvait escompter ce 1 600 000 $ en se disant: Il y a 1 600 000 $, dans mon élément 1 de revenus, qui inclut des congés de maladie; je sais que les congés de maladie ne seront pas tous pris, donc je peux en escompter une partie? Et j'imagine que n'importe quel gestionnaire, et un bon gestionnaire, pouvait escompter ces congés de maladie. Maintenant, il ne peut plus les escompter parce que, si les congés-maladie n'ont pas été pris, ils sont obligés de les retransférer au système central.

M. Léonard: Non.

M. Gautrin: Non. Alors, je n'ai pas compris.

M. Léonard: Alors, M. le Président, si vous permettez...

Le Président (M. Brouillet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Gautrin: Ah! je n'ai pas compris.

M. Léonard: ...je vais laisser la parole à Mme Diane Jean, qui est secrétaire associée au Conseil du trésor, qui est responsable de ces politiques budgétaires. Je pense qu'elle va peut-être amener le député à comprendre davantage.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme Diane Jean, s'il vous plaît.

Mme Jean (Diane): En fait, pour le...

M. Gautrin: Est-ce que vous avez compris ma question?

Mme Jean (Diane): Oui. En fait pour le gestionnaire, il n'y aura pas de différence, il recevait la rémunération pour chaque employé pour 260 jours. Si l'employé est présent, il la débourse à titre de rémunération; s'il est en partie absent, il la débourse pour la rémunération et pour les congés de maladie. Alors, chaque année, le gestionnaire n'avait pas de crédits additionnels à débourser, puisqu'il ne pouvait jamais débourser plus que 260 jours pour une personne dans une année donnée. Il n'y avait pas de marge là et il n'y en a pas plus maintenant. La seule différence, c'est que, à la fin de l'année, les congés non pris qui n'étaient pas inscrits au passif le seront maintenant...

M. Léonard: Dans la provision centrale.

Mme Jean (Diane): ...dans la provision.

M. Gautrin: Alors, 260 jours, ça, ça incluait les 12 jours de congé ou pas?

M. Léonard: Oui.

Mme Jean (Diane): Les éventuels congés de maladie et, s'il n'était pas malade, évidemment la même rémunération pour sa présence.

M. Gautrin: Et, à ce moment-là, le passif était où, le passif...

Mme Jean (Diane): Il n'était pas inscrit.

M. Léonard: Il n'était pas inscrit.

M. Gautrin: Il n'était nulle part.

M. Léonard: Non.

Mme Jean (Diane): C'est ça.

M. Gautrin: Il flottait dans...

M. Léonard: Il existait, mais il n'était pas inscrit.

M. Gautrin: Il n'était pas inscrit.

M. Léonard: Alors, ce que nous faisons, c'est que nous l'inscrivons.

M. Gautrin: Autrement dit, dans les... O.K., je comprends. C'est-à-dire que, dans les éléments financiers, dans l'élément 1 du programme 1, par exemple pour le ministère de l'Éducation, il n'y avait aucune provision qui avait été faite pour cela.

Mme Jean (Diane): Il y avait toute la rémunération nécessaire pour le salaire...

M. Léonard: Les 260 jours.

Mme Jean (Diane): ...les congés de maladie ou les vacances. Mais une personne ne peut pas être à la fois en maladie, par exemple, et présente. Donc, chaque jour est rémunéré une seule fois.

M. Gautrin: Mais, advenant le cas où la personne... Donc, je reviens maintenant... Reprenons toujours avant votre provision qui est maintenant... Si la personne partait... Autrement dit, je prends mon fonctionnaire, là, ou mes 10 fonctionnaires ou mes 100 fonctionnaires au ministère de l'Éducation. Lorsqu'ils partaient, il fallait leur payer leur banque, et leur banque, on la prenait à même les crédits qui étaient des crédits salariaux. Et maintenant, dans le futur, ils n'auront plus à payer cette banque-là.

Mme Jean (Diane): En fait, il y avait une provision à ce qui était l'ORH pour payer des congés de maladie qui ne pouvaient pas être payés à même la masse salariale du ministère. Donc, la partie afférente à l'année courante pouvait être déboursée à même la masse salariale du ministère, le reste à même la provision. Sur une base de déboursés...

M. Gautrin: Autrement dit, tous les congés qui étaient non pris se trouvaient dans une provision qu'on trouvait à l'ORH.

M. Léonard: Non.

Mme Jean (Diane): Non.

M. Léonard: Non, non, juste la partie courante de l'année courante.

Mme Jean (Diane): Une provision sur la base des déboursés et non pas sur la base du passif réel.

M. Gautrin: O.K. Pour bien comprendre ce que vous me dites, il y avait à l'ORH un montant qui était l'estimé que le président du Conseil du trésor faisait de ce que les départs naturels des gens de la fonction publique auraient à collecter, entre guillemets, de leur banque de congés de maladie. C'est ça?

M. Léonard: Durant l'année. Durant l'année, exclusivement.

M. Gautrin: Pas durant l'année. Ce qui était accumulé se trouvait où?

Mme Jean (Diane): Oui, oui, mais durant l'année. Déboursé durant l'année.

M. Léonard: Durant l'année. Ce qui était accumulé...

M. Gautrin: Déboursé, bien sûr. Déboursé, on se comprend bien...

M. Léonard: C'est ça.

M. Gautrin: ...durant l'année, mais c'était ce qui avait pu être accumulé pendant toute la carrière du fonctionnaire.

Mme Jean (Diane): Oui...

M. Léonard: Oui.

Mme Jean (Diane): ...avec les plafonds qu'on a énoncés tout à l'heure: 66 jours par fonctionnaire...

M. Gautrin: Oui, ça, je comprends ça. C'est les règles, hein? Mais je veux savoir où c'était. Donc, c'était dans une provision de...

Mme Jean (Diane): De l'ORH.

M. Gautrin: ...l'ORH. Vous avez transféré, maintenant, l'ORH au... Vous ne l'avez pas transféré...

M. Léonard: Intégré.

M. Gautrin: Enfin, on ne reviendra pas sur la loi sur laquelle nous avons pu avoir des divergences de vue, mais enfin, l'ORH, maintenant, a été assimilé ou aspiré ou...

M. Léonard: Intégré.

M. Gautrin: ...par le Conseil du trésor. C'est ça?

M. Léonard: Non, non, ce n'est pas ça qui est arrivé. Il y a eu une fusion.

M. Gautrin: C'est une vision un peu simpliste que je présente.

M. Léonard: L'ORH a été intégré au Conseil du trésor. Bon. La loi a été passée au mois de juin...

M. Gautrin: Je sais tout ça.

M. Léonard: ...ce qui nous a permis de faire quelques millions d'économies. D'ailleurs, en administration, je pense que ce que tout le monde souhaite, c'est que les coûts administratifs baissent...

M. Gautrin: Oui. On ne refait pas ce débat-là.

M. Léonard: ...et nous avons fait ça.

M. Gautrin: Entre nous, là-dessus, on l'a déjà fait.

M. Léonard: Mais – je reviens à votre question – il n'y avait pas de provision totale, globale pour tous les jours de congé de maladie accumulés par le personnel. Il n'y avait une provision que pour les déboursés de l'année en cours, lesquels déboursés, évidemment, étaient...

M. Gautrin: L'estimé des déboursés de l'année en cours.

M. Léonard: Oui, pour les personnes qui partaient...

M. Gautrin: O.K.

M. Léonard: ...uniquement, pas pour celles qui étaient encore là. Tandis que le 744 000 000 $ que nous avons là...

M. Gautrin: D'accord.

M. Léonard: ...est pour toutes les personnes qui sont encore à l'emploi du gouvernement.

M. Gautrin: Bon. Je pourrai le regarder, si vous voulez, dans... Mais est-ce que vous avez une idée de l'ordre de grandeur de ce montant qu'on budgétait à l'ORH...

M. Léonard: Par année?

M. Gautrin: ...par année, l'Office des ressources humaines?

Mme Jean (Diane): À peu près 20 000 000 $.

M. Léonard: Plus ou moins 20 000 000 $.

M. Gautrin: Qui étaient...

M. Léonard: Qui étaient déboursés annuellement.

M. Gautrin: ...qui ont été dans l'intégration – puisqu'on va utiliser les mêmes termes – de l'ORH au Conseil du trésor, qui ont été mis au Conseil du trésor, et c'est maintenant une sortie, enfin, que le Conseil du trésor n'aura plus à assumer, puisqu'ils seront sortis à partir de ce fonds qu'on est en train de créer...

M. Léonard: Une sortie?

M. Gautrin: Écoutez, le 20 000 000 $ a été utilisé à quelque chose. Il a été utilisé pour payer aux fonctionnaires qui quittaient leur banque de congés de maladie. Ça va?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Maintenant, le paiement des banques de congés de maladie ne se fera plus à même cette enveloppe-là, il va se faire avec ce qu'on crée actuellement, le 744 000 000 $. C'est bien cela?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Donc, le 20 000 000 $ par année qui se trouvait à l'ORH, qui donc a été transféré au Conseil du trésor, il se trouve où maintenant? Toujours au Conseil du trésor?

M. Léonard: C'est la variation. Là, M. le Président, ce qu'on va inscrire, ça va être la variation en plus ou en moins qui va apparaître au Conseil du trésor. Que la variation de la provision. Mais le passif... Si vous regardez la séquence annuelle, vous voyez très bien qu'elle évolue. Vous la voyez, là: 1er avril 1993, 723 000 000 $, 740 000 000 $, 764 000 000 $ – parfois, elle baisse – 744 000 000 $. Alors, elle va varier sensiblement de même grandeur, mais elle devrait baisser parce que, si le nombre de fonctionnaires diminue, cette provision-là, normalement, devrait diminuer. De quel ordre de grandeur? Nous verrons.

M. Gautrin: Oui, bien sûr, la provision va diminuer, mais les sorties de fonds réelles vont augmenter, c'est-à-dire que dans l'année qui va venir...

M. Léonard: Oui, oui. Si vous liquidez...

M. Gautrin: ...ce qui était une dette et une écriture aux livres va devenir de vrais dollars qui vont être...

M. Léonard: Ah oui!

M. Gautrin: ...être donnés aux...

M. Léonard: Si vous liquidez une dette, effectivement...

(16 h 40)

M. Gautrin: Ça va...

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Mais ce dernier 20 000 000 $, qui était en arrérages, qui se trouve maintenant au Conseil du trésor, je ne vois pas où il est rendu, là.

M. Léonard: ...à travers les autres contributions d'employeur. Il a été utilisé beaucoup pour les départs assistés, en particulier. Pas exclusivement, là, mais en bonne partie.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Programme de départs assistés

M. Chagnon: Il y a eu 2 500 départs assistés.

M. Léonard: C'est 2 067.

M. Chagnon: Oui, mais ça, ce sont les ministères...

M. Léonard: Budgétaires.

M. Chagnon: ...plus le non budgétaire, 400 et quelques. Alors, ça faisait 2 489.

M. Léonard: ...422.

M. Chagnon: Et, pour 38 000 000 $, on a dit tout à l'heure, en congés de maladie; 13 000 000 $ en remboursement de vacances non payées. Il y a eu aussi 2 500 départs assistés dans le secteur, dans le réseau de la santé l'an dernier. Est-ce qu'on a les mêmes statistiques du coût des congés de maladie payés et des vacances non payées, c'est-à-dire des vacances qui auraient dû être payées et qui ont été remboursées et des congés de maladie qui étaient remboursables à ce moment-là?

M. Léonard: D'abord, les dispositions quant aux congés-maladie ne sont pas les mêmes que celles que nous avons dans la fonction publique; même dans beaucoup d'institutions, il n'y en a pas de congés-maladie. Par ailleurs, sur les départs, nous n'avons pas encore ce renseignement au gouvernement pour l'année; nous l'aurons après l'année et chacun... Ces renseignements-là vont nous venir des états financiers des institutions, par exemple les hôpitaux, les centres d'accueil ou les CLSC. Donc, ils vont nous arriver par la suite. Mais nous n'avons pas cette information au moment où nous nous parlons.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, dans le journal d'information du ministère de la Santé et des Services sociaux, l'édition qui est à votre bureau – il est arrivé aujourd'hui, d'ailleurs, ils n'ont pas mis de... – vous annoncez ce qu'il y a eu de fait au ministère.

M. Léonard: Je comprends que vous avez eu le temps de le lire, vous.

M. Chagnon: Bien, j'ai eu le temps de le lire en vrac. Vous aussi probablement. Vous avez beaucoup de monde pour le lire à votre place. Ils auraient dû vous instruire à l'effet que le programme de départs assistés offert aux employés du réseau de la santé et des services sociaux permettait aux personnes admissibles qui s'en prévalaient de quitter avec environ un an de salaire. À Québec, 1 100 employés ont accepté l'offre; à Montréal, 1 414 employés ont fait de même. Et, grâce à un programme financé conjointement avec les établissements, 2 500 salariés – un peu plus même – auront quitté avant la fin de l'exercice financier. Je comprends que les données ne soient pas totalement comptabilisées au Conseil du trésor, mais vous devez avoir une idée un peu de combien ça coûte per capita, à tout le moins. On pourrait faire la mathématique, la règle de trois pour essayer de découvrir comment ça coûte en général ou anticiper.

M. Léonard: Oui, je comprends, là. Le député a une information qui est disponible, si je comprends, depuis ce matin, s'il a reçu le journal depuis ce matin. Mais il a mentionné seulement deux régions: Montréal et Québec. Ce n'est pas tout l'ensemble du Québec, si je comprends bien.

M. Chagnon: Bien, vous comprendrez, M. le Président, que la vague de fermetures d'hôpitaux et de fermetures d'étages, de services et de lits a spécifiquement déferlé sur et Montréal et Québec. Alors, c'est davantage dans cette région-là qu'il y a eu des emplois, un nombre d'emplois, en tout cas, en excédent. Au moment où on se parle, il y en a eu 2 500 postes de rachetés. Ma question, c'est de savoir quel a été le coût moyen de salaires ou, en tout cas... Vous n'avez pas encore le...

M. Léonard: Toute la différence, c'est entre une information qui vient, qui est parcellaire en quelque sorte; c'est Montréal et Québec, donc des régions qui ont pu les comptabiliser. Mais ce que j'ai dit au député demeure vrai: je n'ai pas, à ce stade-ci, au Conseil du trésor, la consolidation de ces chiffres.

Par ailleurs, dans l'article, on fait mention que cela a coûté environ, en moyenne, une année de salaire. Bon, c'est possible, c'est plausible, je dirais. C'est plausible que ce soit cela, parce que dans le programme de départs assistés de cet été, c'est un peu plus élevé que ça mais guère plus. Treize mois? Treize mois, environ 13 mois dans le programme que nous avions cet été. Alors, c'est assez comparable, d'autant plus que les années d'ancienneté dans la santé, en général, sont moins élevées qu'au gouvernement. Le réseau de la santé remonte... son instauration remonte aux années soixante-dix, alors que dans la fonction publique il y a eu un grand développement plutôt dans les années soixante.

M. Chagnon: En ce qui concerne la loi n° 66, le ministre se rappellera que l'ancienneté chez les hommes était en moyenne de 22 ans pour ceux qui se sont prévalus de la loi n° 66, c'est-à-dire la loi permettant des départs assistés, et de 18 ans chez les femmes. Comme on peut imaginer effectivement que, dans le secteur de la santé, l'ancienneté soit un peu plus basse, un peu moins élevée...

M. Léonard: Oui. Probablement plus égale chez les hommes que les femmes...

M. Chagnon: Probablement plus égale chez les femmes que chez les hommes.

M. Léonard: ...parce qu'il y a plus de femmes dans le réseau de la santé. Ce que j'ai dit à cette occasion-là, c'est que, dans le programme de départs assistés, visé par la loi n° 66, nous avions des retraités qui provenaient des années soixante en général. Et, en 1960, il y avait beaucoup plus d'hommes que de femmes qui entraient dans la fonction publique. Donc, c'est assez caractéristique de la composition de la fonction publique à cette période, 1960 à 1970, période d'entrée en place des fonctionnaires.

M. Chagnon: Compte tenu des circonstances et de la conjoncture, je suggérerais au ministre de découvrir c'est quoi, le coût réel qui est anticipé par le ministère de la Santé pour ses 2 500 départs assistés en ce qui concerne ces congés de maladie et ces vacances non payés et à être payés. Parce que, dans le cours de sa négociation à venir dans les deux prochains mois, il aurait intérêt à le savoir pour savoir comment ça peut s'équilibrer.

M. Léonard: M. le Président, je veux juste rassurer le député. Lorsque nous avons autorisé le programme de départs assistés en santé, nous avons demandé des suivis et des chiffres là-dessus. Nous les aurons, je pense bien, au fur et à mesure que les opérations se dérouleront. Mais, même quand le député parle de 2 514 personnes qui ont quitté à l'heure actuelle, je veux juste lui dire que l'année n'est pas finie. Donc, à ce jour, il y a, si je comprends... Je ne remets pas en doute l'affirmation du journal, mais je pense que c'est à ce jour. Alors, oui, nous allons examiner très attentivement toutes les données qui vont nous être fournies sur le suivi du programme.

M. Chagnon: Le ministre va comprendre que, évidemment, lorsqu'il y a presque 500 personnes d'organismes non budgétaires, lorsqu'il y en a 2 000 qui viennent de la fonction publique, lorsqu'il y en a 2 500 qui viennent du réseau de la santé, plusieurs autres centaines qui viennent du ministère de l'Éducation à cause des modifications au RREGOP de l'an dernier, ça fait autant de monde de moins dans le bassin de récupération des 15 000 postes permanents qu'il cherche à récupérer. Dans quel secteur pense-t-il les récupérer?

M. Léonard: M. le Président, il reste que, d'ici l'an 2000, il y a beaucoup de personnes qui vont devenir admissibles au programme de retraite. Il y en a déjà dans la fonction publique au moins 3 000 autres qui pourraient prendre leur retraite maintenant. Alors, ça ne veut pas dire que c'est juste ces 3 000 là qui seraient visées. Mais il y en a 3 000 quand même au moment où nous nous parlons. Cet été, lorsque nous avons établi le programme de départs assistés, il y en avait au-delà de 5 000, un peu plus que 5 000. Il y en a 2 000 qui sont partis. Donc, il en reste encore 3 000 plus toutes celles qui viennent de s'ajouter depuis la fin du programme. Vous allez me dire que c'est limité. Il y en a quand même un certain nombre. Il y en a aussi dans le domaine de la santé; il y en a en éducation. Alors, le député veut savoir les proportions. À ce stade-ci, il n'y a pas de chiffres disponibles pour chacun des secteurs.

(16 h 50)

Par ailleurs, je pense que chaque secteur va être appelé à contribuer; cela va faire l'objet de négociations au cours des deux premiers mois de 1997. Donc, là-dessus, je ne peux pas lui donner de chiffres précis. S'il veut un ordre de grandeur, je m'en tiens à ce que je lui ai répondu en Chambre ce matin: Il y a toujours des règles de trois, mais ce n'est pas nécessairement comparable. Le personnel qui est entré en éducation, dépendant des secteurs d'ailleurs, a un âge moyen, un certain âge moyen qui peut être plus élevé que dans d'autres secteurs, dans le domaine de la santé où il y a eu une augmentation significative au début des années soixante-dix. Et on pense à l'éducation, c'est plutôt autour des années soixante, soixante-cinq; beaucoup de personnel est entré, notamment du côté des professeurs. Bon. Alors, je pense que l'estimation de 15 000 personnes, emplois, est une estimation réaliste. Elle pourrait être plus optimiste, mais nous pensons que c'est réaliste, que c'est faisable qu'il y ait 15 000 personnes qui quittent et qu'on puisse réaménager, réorganiser puis qu'on puisse, disons, diminuer nos coûts de main-d'oeuvre.

M. Chagnon: Remarquez, M. le Président, que, dans le dossier particulier de l'éducation, comme je le mentionnais ce matin, ça pose un problème tout à fait spécial qui est spécifique à celui de l'éducation, en fait. Dans ce secteur-là, lorsque le gouvernement cherche à ramasser ou à récupérer 15 000 postes permanents sans les remplacer, sans remplacements, il élimine de facto l'ensemble des postes de professeurs du primaire, du secondaire qui doivent être remplacés, parce qu'ils sont régis par un critère de ratio maître-élèves. Il y a, disons, 25 ou 30 élèves par classe, par prof, et, avec le nombre d'élèves, la multiplication du nombre d'élèves divisée par le ratio, vous avez le nombre de profs que vous avez au Québec. J'imagine et je comprends qu'il y a des profs qui peuvent avoir l'intention de prendre leur retraite de façon prématurée peut-être, en utilisant le programme que le ministre met de l'avant. Mais, à ce moment-là, de toute façon, le ministre ne pourra pas obtenir un poste sans remplacement de ce poste-là parce que ça prendra un prof pour remplacer le prof qui sera parti.

Mais, ceci étant dit, le ministre nous a aussi dit – et j'ai fait des recherches dans ce sens-là; ça l'intéressera aussi – qu'il s'est servi de l'exemple fédéral de diminution du nombre d'emplois au gouvernement fédéral par un processus très semblable à celui qu'il cherche à... qu'il est en train d'inventer en tout cas, enfin qui est semblable à celui de la loi n° 66 et qu'il élabore de façon beaucoup plus importante pour les mois à venir. Mais je regardais dans l'exemple fédéral, M. le ministre, et, contrairement à l'approche que vous avez, au fédéral on avait mis, on avait ciblé les postes puis les types de postes puis on avait ciblé les postes par ministère. J'ai remarqué que c'était assez particulier.

On avait, par exemple, ministère de la Défense, 150, ou 200, ou 500 postes, pour donner un chiffre ciblé; on avait une cible de tant d'emplois, tant de postes dans tel ministère. Tel autre ministère, le ministère de la Sécurité du revenu ou le ministère des Transports, tant d'emplois. Le ministère de la Santé, woop! pas d'emplois. Ce ministère-là était protégé pour une raison bien simple: on estimait qu'il y avait... Je dis la santé, là, je donne des exemples. Certains ministères étaient touchés; d'autres ne l'étaient pas. Pour voir, atteindre un ministère, quelqu'un qui était dans un ministère touché, qui aurait voulu participer au programme de départs assistés, devait trouver un homologue, un camarade dans un autre ministère pour faire le virement de poste, pour réserver des postes à chacun des ministères. Pourquoi n'avez-vous pas pris la même démarche?

M. Léonard: M. le Président, l'été dernier, nous avons mis en place un programme de départs assistés qui était volontaire et qui était aussi conditionnel à la volonté des gestionnaires de laisser partir quelqu'un, c'est-à-dire que la personne était libre de le prendre, le programme, ou de ne pas le prendre. Le gestionnaire était libre de dire oui ou non, en disant: Ce poste-là, je ne peux pas le laisser aller pour différentes raisons, puis il pouvait... Donc, c'était la liberté des deux côtés. Et pourtant nous avons touché 2 000 postes sur les 5 000 et un peu plus qui étaient susceptibles de bénéficier de la mesure. Donc, il y a eu un succès – moi, je dirais un succès certain – à cette mesure, tout en respectant la sécurité d'emploi, tout en respectant aussi la liberté des gestionnaires.

Actuellement, nous sommes devant une proposition. Nous avons fait cette proposition de 15 000 départs assistés, en quelque sorte. Aussi, c'est une idée des syndicats. Donc, ce que nous avons convenu, c'est de nous asseoir à une table de négociation et d'en parler. Je pense que tout le monde convient qu'il y a moyen de le faire, puisque lorsque nous élargissons l'ensemble de la mesure à l'ensemble des secteurs: éducation, santé et fonction publique, nous n'avons pas seulement un bassin de 55 000 personnes, nous avons un bassin de 400 000 personnes, et donc la possibilité d'en faire beaucoup plus est toujours là. Au fond, on passe de 55 000 à 400 000 personnes au moins, ou 440 000...

(Consultation)

M. Léonard: O.K. On me dit 375 000 équivalents temps complet, mais plus de 500 000 personnes.

M. Chagnon: On est mieux de parler d'ETC, sans ça on va se mélanger.

M. Léonard: ETC, c'est équivalent temps complet. ETC ou 500 000 personnes. Vous voyez que la même proportion se retrouve, au fond, par rapport au programme que nous avons fait cet été. Sur les 55 000, il y en avait 5 000 admissibles, 10 % environ. Il y en a 2 000 qui sont partis. Donc, il en est parti pas loin de 4 %. Donc, si l'on fait la même projection sur l'ensemble des réseaux, il y a un bassin potentiel du même ordre de grandeur, de l'ordre de 15 000 personnes, en étant réaliste.

M. Chagnon: Quoique, comme je le soulignais, dans le réseau de l'éducation, la proportion de gens qui sont susceptibles d'être affectés par ça ou, du moins, de postes permanents qui n'auraient pas de remplacements est relativement petite. C'est des gens qui sont soit des professionnels dans le secteur de l'éducation soit des gens du personnel de soutien.

M. Léonard: M. le Président, nous verrons ce que donnera la négociation. Je pense qu'il y a des choses qu'il est possible de faire par la négociation. Nous verrons.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Puisqu'on a ouvert cette question... On s'éloigne un peu, bien sûr, de strictement les crédits de fin... Mais c'est intéressant d'échanger sur la question.

Ce que, moi, j'ai compris de la déclaration du ministre est la chose suivante: il y a une provision actuarielle dans le RREGOP syndical et dans le RREGOP non syndical qu'il considère pouvant permettre un certain jeu et pouvant être utilisée pour aider des prises à la retraite anticipées. C'est bien ce que j'ai grosso modo compris. Je me suis trompé ou pas? Je ne voudrais pas les qualifier non plus, mais...

(Consultation)

M. Gautrin: C'est ça?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: C'est bon.

M. Léonard: Oui, il y a des provisions actuarielles dans le syndicable et dans le non-syndicable.

M. Gautrin: J'ai utilisé volontairement les termes «provision actuarielle». Je pourrais rentrer sur les rapports entre les provisions actuarielles et ce qui est à l'intérieur du RREGOP. Je ne voudrais pas rentrer ici sur un débat plus acrimonieux qu'on pourrait avoir...

Mais, dans la pension qui est payée à quelqu'un qui part, un fonctionnaire, par exemple, il y a, à partir de 65 ans, une partie qui lui vient du RREGOP et il y a la partie qui lui vient du RRQ, parce qu'il y a, disons, articulation entre les deux régimes. Si vous accélérez, à partir strictement du RREGOP, vos mises à la retraite, etc., est-ce que vous allez pénaliser le RRQ? Vous allez me dire: Le RRQ est plus gros, mais c'est possible quand même de le pénaliser légèrement. Ou bien, à ce moment-là, vous allez adapter l'un par rapport à l'autre, c'est-à-dire la personne ayant moins du RRQ qu'elle ne pourrait obtenir, mais vous allez lui donner plus de la partie RREGOP qui est prévue. Parce que vous comprenez que les deux régimes sont articulés l'un par rapport à l'autre, à partir de 65 ans, dans les prestations. Vous savez ça?

Donc, à partir du moment où vous allez dire: Si la personne part à 63 ans, sa part RRQ va être plus faible, alors, pour pouvoir ne pas être pénalisée à la fin, il faudrait soit qu'il y ait une part RREGOP plus importante, soit qu'à ce moment-là vous alliez, par la loi, forcer le RRQ à ne pas tenir compte du fait que le départ a été avancé, donc pénaliser d'autant l'ensemble du RRQ. C'est ça que je n'ai pas compris dans votre proposition.

(17 heures)

M. Léonard: M. le Président, je vais demander à M. Yvan Cossette, puisqu'on rentre dans des données très techniques, de répondre à cette question, parce qu'il s'agit de l'arrimage de trois systèmes. La Régie des rentes aussi est là-dedans, et il faut en tenir compte. Il y a le RRQ...

M. Gautrin: Le RRQ, c'est la Régie des rentes du Québec.

M. Léonard: Ah oui, la Régie. Oui, oui.

M. Gautrin: Je m'excuse. Le RRQ, c'est la Régie des rentes du Québec.

M. Léonard: Oh! O.K. Ça va.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. Cossette.

M. Cossette (Yvan): Dans l'évaluation qui s'est faite, disons, pour les mesures de départ assisté, lorsqu'on regarde, je pourrais dire, la situation des différentes personnes, on tient compte du fait qu'on pourra devancer, par exemple, la RRQ à 60 ans ou les impacts éventuels qu'il y aura sur les prestations de sécurité du revenu au fédéral aussi. Donc, on tient compte, dans...

M. Gautrin: Un instant. Vous allez avancer même à 60 ans le...

M. Cossette (Yvan): Il est possible d'avancer à 60 ans...

M. Gautrin: Oui.

M. Cossette (Yvan): ...avec pénalité actuarielle.

M. Gautrin: Avec une pénalité qui est à ce moment-là à 70 %, simplement.

M. Cossette (Yvan): Qui est à 5 % par année, si ma mémoire est fidèle.

M. Gautrin: Ça arrive à 70 %.

M. Cossette (Yvan): Donc, si on peut devancer de cinq ans...

M. Gautrin: On dit la même chose: 5 % par année.

M. Léonard: Oui.

M. Cossette (Yvan): 6 %. Donc, on peut devancer de cinq ans le versement de la rente comme telle.

M. Léonard: Mais elle est moins élevée.

M. Cossette (Yvan): Elle est moins élevée. Mais, dans l'évaluation qui est faite, c'est qu'on tient compte de ces éléments-là aussi, dans la mesure de départ assisté, pour le calcul du montant qui doit être octroyé à l'individu.

M. Gautrin: Donc, ce que vous me dites à l'heure actuelle, c'est que votre mesure de départ assisté ne touchera pas, en aucune manière, le Régime de rentes du Québec.

Des voix: Non.

M. Gautrin: C'est-à-dire il va fonctionner tel qu'il fonctionne actuellement...

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: ...mais vous allez adapter, dans la partie RREGOP, le fait que l'individu aurait une partie RRQ ou Régime de rentes plus faible que ce qu'il aurait obtenu s'il avait été jusqu'à 65 ans. C'est bien cela?

M. Léonard: Bien oui.

M. Cossette (Yvan): C'est ça.

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: C'est-à-dire vous allez avoir commencé à compenser à la fois le fait qu'il n'aura pas contribué jusqu'à 65 ans au RREGOP plus son manque à gagner du RRQ. C'est ce que vous allez faire. Bon. C'est intéressant. Je sais que vous êtes en négociations puis que ce n'est pas nous, les éléments négociateurs, mais faites attention, vous en mangez beaucoup rapidement de vos provisions actuarielles, avec ce jeu-là. Ce n'est pas si limpide que ça. Parce que vous devez compenser pour deux.

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Léonard: Oui. M. le Président, il faudrait relire le paragraphe 3 de la proposition. Je le relis. Non, non, mais je vais relire ce paragraphe-là, M. le député de Verdun. Je le cite: «Ce programme devra comporter des mesures temporaires de bonification des conditions d'accessibilité à la retraite et de départ assisté – les deux éléments sont distingués – financées par l'utilisation des excédents actuariels constatés conjointement au régime de retraite et par un montant au moins équivalent que le gouvernement est prêt à y consacrer.»

M. Gautrin: Mais je comprends...

M. Léonard: Il y a des bonifications...

M. Gautrin: Écoutez, pour l'instant, vous êtes en train... Écoutez, on ne peut pas...

M. Léonard: On va en discuter.

M. Gautrin: Vous êtes... On ne peut pas en discuter ici, puisque vous êtes en négociations. Vous remarquerez néanmoins, comme on l'a fait dans le cadre de la loi n° 73, même si ce n'était pas l'objet de la loi n° 73, une inquiétude de la part de l'opposition – et ça a été rappelé ce matin et par le chef de l'opposition et par le député de Westmount–Saint-Louis – sur l'utilisation de cette provision que vous qualifiez d'excédentaire, et l'utilisation pour un petit nombre, alors qu'il y a beaucoup de gens qui contribuent au RREGOP.

Évidemment, je ne peux pas aujourd'hui débattre de la question pour la bonne raison qu'il n'y a rien qui est sur la table, si ce n'est des intentions de votre part, et que vous êtes dans une situation de négociations, mais comprenez qu'il y a, de notre part, une question d'équité qui nous inquiète énormément. Bien sûr, on va voir ce que vous allez, à la fin, finir par apporter. Mais faites bien attention: toute utilisation du RREGOP, que ce soit le RREGOP syndical ou le RREGOP non syndical, dans ces provisions, ça touche tout le monde, hein, pas seulement ceux qui vont partir dans votre programme. Alors, il y a de notre part une certaine inquiétude, et on regarde ça avec beaucoup d'inquiétude. Mais on attend votre proposition, parce qu'il n'y a rien sur la table. Alors, je ne peux pas vous dire autre chose...

M. Léonard: M. le Président, il y a une contre-proposition du gouvernement. Nous en avions fait une, une autre proposition, au départ, et puis nous avions indiqué qu'il y a deux chemins qui pouvaient être suivis: ou bien on abolit les postes ou bien on fait, comme on avait proposé au départ, une réduction du temps de travail compensée par une réduction du salaire, mais aussi compensée – pour éviter que le revenu net ne soit touché – par un congé de cotisation. Bon. Nous avons eu une autre proposition des syndicats qui faisait une ouverture sur l'utilisation de la provision actuarielle excédentaire...

M. Gautrin: Surplus excédentaire.

M. Léonard: ...et nous l'avons intégrée dans la contre-proposition gouvernementale. Là, je comprends qu'on est en train, presque, de faire de la négociation, mais...

M. Gautrin: Non, non, absolument pas.

M. Léonard: ...je dirais à l'heure actuelle qu'elle est sur la table. Nous avons offert de négocier du 1er janvier au 28 février. Donc, nous laissons la négociation jouer son rôle puis nous verrons après, à la fin, s'il y a eu une entente. Ce que nous souhaitons, c'est qu'il y ait une entente. Alors, il y a différentes façons d'aborder les choses, deux chemins. Alors, nous en sommes là présentement.

M. Gautrin: M. le Président, si vous me permettez, il est aucunement de mon intention... Ici, je pense qu'il n'y a rien dans mes questions qui va amener à penser que j'essayais actuellement d'aller un peu plus loin sur un terrain, qui est un terrain propre à la négociation. Ce que j'ai bien voulu indiquer néanmoins, c'est les inquiétudes de la part de l'opposition face à une utilisation sur – et je vais poser mes mots volontairement – ce que vous estimez être des provisions excédentaires à l'intérieur du RREGOP, et, comme parlementaires – à ce moment-là, je vais dire comme parlementaires – nous avons la responsabilité de nous assurer de la santé et de vérifier que la santé des deux régimes de pension, des deux RREGOP qu'on a créés maintenant, puisqu'il y a virtuellement maintenant deux RREGOP après l'adoption de la loi qui a été, j'imagine, promulguée incessamment ou peut-être aujourd'hui... Enfin, elle a été adoptée vendredi soir aux petites heures... aux grandes heures de la nuit... Et il peut y avoir une inquiétude quant à l'utilisation de ces provisions que vous qualifiez d'excédentaires. Et, bien sûr, ici je ne vous demande pas de dire combien vous allez mettre, etc. C'est propre à la négociation. Mais il faut savoir qu'il y a de notre part une inquiétude quant à ces utilisations, et on jugera à la fin. Ce n'est pas nous qui sommes au gouvernement.

M. Chagnon: On jugera l'arbre à ses fruits.

M. Gautrin: On jugera l'arbre à ses fruits, comme vient de le dire le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Léonard: Votre inquiétude peut vous honorer, mais votre curiosité peut être dangereuse.

M. Gautrin: M. le Président, je n'ai pas, ici, demandé plus que... Je tiens simplement à signaler, après qu'on s'est bien compris sur tout ce qu'il y avait, c'est-à-dire que la proposition n'aurait pas pour effet de demander un effort au RRQ... Donc, il faudrait que le RREGOP absorbe tout l'effort, à ce moment-là, de départs assistés. Je dois signaler mon inquiétude aujourd'hui et je ne le dis pas plus que ça. Et je ne suis pas l'agent négociateur, et nous ne sommes pas le gouvernement, mais, comme parlementaires, on a à surveiller la santé de ce régime qui est un régime collectif pour l'ensemble des fonctionnaires et même du secteur parapublic, et nous devons jouer jusque-là notre rôle de parlementaires au moment où vous nous ferez rapport.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Oui, M. le Président. La curiosité de mon collègue n'est pas mal appropriée. Ce qu'il dit, il dit ceci: Il y a un montant, il y a un régime de retraite dans lequel il y a un surplus.

M. Gautrin: Il y a une provision...

M. Chagnon: Il y a une provision, d'abord...

M. Gautrin: ...actuarielle qu'on estime excédentaire. Fais attention, là.

M. Chagnon: Prenons les termes de mon collègue: Il y a un régime de retraite qui s'appelle RREGOP dans lequel il y a une provision actuarielle qu'on estime excédentaire.

M. Gautrin: Que le gouvernement estime excédentaire.

M. Chagnon: Le problème qui se pose au moment où on décide d'en utiliser une partie, puis ce qui n'est pas mauvais en soi... Moi, personnellement, je n'ai pas de problème avec l'utilisation d'un excédent d'un régime de retraite. On le fait régulièrement. Le président du Conseil du trésor a apporté ici des projets de loi qui découlaient de décisions prises par le comité de retraite, par exemple, du RREGOP, qui a amené des modifications qui, peut-être, étaient exclues – ou enfin sa prédécesseure l'an dernier – modifiant le RREGOP, et le surplus du RREGOP ou une partie du surplus du RREGOP est allée à améliorer le fonds de retraite des membres.

(17 h 10)

Le problème qui se pose, c'est: À partir du moment où un secteur décide de ne pas participer à une contre-proposition, comment fait-il pour laisser l'utilisation de ce fonds de pension là ou l'utilisation du surplus du fonds? Avec quel principe le gouvernement peut utiliser ou séparer, ou utiliser, je dirais, le surplus du fonds comme tel? Sur quel principe le gouvernement serait assis pour...

M. Léonard: M. le Président, là nous entrons carrément dans la négociation, et je dirais là-dessus qu'elle n'est pas commencée. Alors, lorsque nous arriverons à la table de négociation, chacun pourra faire valoir ses points, en discuter. Ce qui a été convenu, au moins de la part de six centrales syndicales, c'est de dire que la proposition revêtait suffisamment d'intérêt pour que l'on s'assoie pour en parler. Donc, c'est ce que nous voulons faire.

Même à l'intérieur des syndicats, actuellement ce n'est pas encore conclu. Nous avons des échos où il y a six centrales qui sont d'accord pour... pardon, cinq responsables de centrales syndicales ou de syndicats importants sont d'accord pour en parler. Par ailleurs, il y en a... le président d'une centrale a indiqué qu'il ne faisait pas de recommandation, mais qu'il parlerait positivement de la proposition.

Alors, maintenant vous connaissez un peu le système syndical que nous avons. Il y a des instances qui en débattent. L'une de ces instances, dans une centrale, a décidé de recommander négativement, de faire une recommandation négative quant à la proposition. À partir de là, il y aura des votes dans chacune des unités, des institutions. Donc, nous verrons le résultat; c'est là que tout va se jouer. Il faut laisser le temps aux événements de se dérouler.

Cet après-midi, il y avait aussi une réunion à l'intérieur d'un syndicat affilié à une autre centrale. Nous n'avons pas d'écho à ce stade-ci. Bon. Est-ce qu'on peut laisser les événements se dérouler, et puis, disons, faire attention de ne pas gêner, en aucune façon, son aboutissement qui est normalement d'arriver à une table de négociation? Je pense qu'il y a une phase périlleuse qu'il nous faut respecter. Et puis les questions que vous soulevez vont être soulevées à la table de négociation. Alors, elles le seront, elles seront débattues, il y aura des consensus qui seront établis. Nous, nous savons, chaque syndicat prend sa décision. Par ailleurs, nous faisons face à 500 000 personnes, 375 000 postes permanents. Alors, il y a beaucoup de gens là-dedans.

Pour l'instant, ce que nous souhaitons, c'est qu'il y ait une conclusion heureuse à des négociations. Nous essayons de tout faire pour y arriver, pour qu'on le fasse dans la paix sociale. Cela implique évidemment des discussions, des négociations sur le chemin que nous allons emprunter, mais aussi des discussions sur la façon de faire les choses par la suite. Bien sûr que cela implique des changements. Et nous voulons favoriser, au besoin... On convient... Les parties ont convenu, au besoin, de mesures de réorganisation qui vont favoriser la qualité du travail et des services. Il y a un engagement là-dedans, puis en même temps une considération de ne pas pénaliser la population et la clientèle. Alors, cela veut dire que, aussi, on va en parler, donc qu'on va négocier.

Il faut être conscient aussi que la situation est très différente d'un syndicat à l'autre, d'un secteur à l'autre. Ce qui se passe en éducation, c'est très différent de ce qui se passe dans la santé ou même dans la fonction publique. Puis, à l'intérieur même de chacune des unités qui négocient, c'est très différent. Alors, c'est, disons, une réalité multiforme à l'extrême.

M. Chagnon: M. le Président, je voudrais être bien clair là-dessus, sur le fond. L'opposition partage l'avis du gouvernement à l'effet que l'idéal, c'est d'avoir une négociation et une entente. Puis on sait que ça peut être périlleux, les moments qu'on passe actuellement.

Les questions que nous posons ne regardent pas le caractère, je dirais, de négociation. Ça fait sourire le président du Conseil du trésor, mais les dossiers qui seront véritablement en négociations, c'est l'équivalent du cadre de gestion de la loi n° 66, que vous avez vous-même déposé en commission parlementaire. Lorsque vous établirez, en négociations, si c'est six mois de prime salariale, ou 12 mois, ou 18 mois, ou 24 mois, ou ne je sais, vous arriverez à tirer, dans votre négociation, à élaborer les éléments qui bâtiront votre cadre de gestion.

La question que je posais était beaucoup plus une question de principe. Si une des parties n'est pas là, est-ce que vous allez diviser le surplus du RREGOP parmi les parties qui vont vouloir venir, oui ou non, en fait? Puis, si oui ou sinon, sur quels principes vous allez asseoir votre décision?

M. Léonard: M. le Président, à ce stade-ci, nous faisons l'hypothèse que toutes les parties vont négocier.

M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: ...mettons-nous d'accord sur un certain nombre de points. Il est sûr que, dans la discussion que nous avons, nous souhaitons, comme vous d'ailleurs, que vous en arriviez à un règlement négocié. Donc, on s'entend sur ça. C'est votre problème. On prétend, bien sûr, souhaiter que vous arriviez à un règlement négocié.

Néanmoins, je dois vous signaler qu'il y a une différence entre ce qu'on fait tous les ans suite aux évaluations actuarielles et des recommandations qui sont faites par les comités internes du RREGOP, on améliore ou on augmente les bénéfices du RREGOP. On l'a fait régulièrement, enfin pas régulièrement mais assez fréquemment, si je puis dire, dans des lois qui ont modifié en quelque sorte la structure du RREGOP. Là, à l'heure actuelle, c'est un peu le contraire. Vous vous donnez un objectif de réduction et vous dites: Vous pouvez y arriver à l'aide du RREGOP.

La position que nous défendons de ce côté-ci est double. D'une part, le RREGOP n'est pas seulement la part des gens avec qui vous négociez; c'est aussi à des gens qui sont à côté de ceux qui négocient. Donc, il y a un côté, un élément d'équité duquel on veut s'assurer. D'autre part, il y a une perception qui peut être différente, entre vous et nous, sur quelles sont, parmi les provisions excédentaires, ce qui est excédentaire dans les provisions. Donc, ce n'est pas la place ici pour faire le débat, puis je ne voudrais surtout pas ici rentrer dans les négociations.

Ce à quoi je tiens quand même, puisqu'on aborde la question ici, dans les crédits, avec vous, c'est de préciser qu'au moment où vous allez revenir – parce que vous allez revenir ici, devant le Parlement, une fois que les négociations seront terminées, pour modifier la loi du RREGOP, soit pour intégrer ce que vous aurez obtenu par négociation – et que... De la part de l'opposition – parce que c'est une loi que le Parlement, ici, aura à voter – on aura un certain nombre de questions qu'on aura à se poser, qui seront les suivantes: Est-ce que, réellement, ce qu'on utilise de la provision est réellement la part excédentaire, ou est-ce qu'on n'a pas été prendre plus que l'excédentaire dans la provision? Moi, j'ai un peu une certaine crainte, et je vous le dis tout de suite. Mais je ne peux pas non plus dire que ma crainte est soutenue, est basée sur autre chose qu'une crainte. D'autre part, je dois vous dire qu'on cherchera, de notre côté, l'équité, c'est-à-dire de faire en sorte que la proposition que vous faites ne va pas pénaliser des gens qui n'ont pas participé, parce que le RREGOP est un bien collectif.

Une fois qu'on a dit cela, on ne veut pas aller plus loin dans la négociation. Vous êtes l'agent négociateur, vous avez à vous entendre avec vos partenaires, et nous allons souhaiter que vous vous entendiez avec vos partenaires. Mais les balises que nous avons comme parlementaires – et on est parlementaires ici, dans ce Parlement – qui sont, entre guillemets, responsables aussi de la Loi sur le RREGOP, c'est de s'assurer que ces principes d'équité, d'équité entre les participants aujourd'hui, mais d'équité intergénérationnelle, pour ne pas, disons, gaspiller, si gaspillage il puisse y avoir, une provision excédentaire qui dépasserait ce qu'on pourrait qualifier d'excédentaire. C'est une préoccupation qu'on aura aussi.

(17 h 20)

Mais je ne peux pas aller plus loin aujourd'hui, dans l'échange avec vous, que de vous donner des balises ou la grille avec laquelle on aura à analyser le résultat d'une négociation. Mais je pense qu'il faut... Et on ne veut pas vous demander non plus, ici, de négocier avec nous, parce que ce n'est pas du tout ce que je vous demande. Mais je vous dis simplement que, nous, comme parlementaires qui auront à se prononcer à un moment donné sur une loi sur le RREGOP, c'est deux éléments qui seront des éléments avec lesquels on regardera le résultat de l'utilisation de ce que vous allez obtenir et proposer.

M. Léonard: M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Léonard: D'abord, je voudrais rappeler une chose: que l'objet de la négociation aussi, ça sera de vérifier les excédents actuariels. L'expression que nous avons employée, ça a été «excédents actuariels constatés conjointement»: on veut dire que tout le monde va être d'accord qu'il y en a un. Donc...

M. Gautrin: ...provision excédentaire. C'est le même schème.

M. Léonard: Ou provision excédentaire. Ça va. C'est au-delà de la provision, qu'on appelle des surplus aux engagements qui prévoient le vieillissement de la population et les fluctuations économiques.

M. Gautrin: Je comprends tout ça.

M. Léonard: Là, on parle au-delà, où les excédents proviennent de la révision des paramètres du vieillissement démographique, des paramètres de l'inflation, des paramètres de l'accroissement économique, des salaires, etc.

M. Gautrin: Du taux d'intérêt.

M. Léonard: Taux d'intérêt, taux de rendement sur les placements, etc.

M. Gautrin: Le taux de rendement sur les placements, oui.

M. Léonard: Bon. C'est deux choses différentes. Donc, nous allons – supposons, nous supposons... Et puis nous avons remis à cet égard des données, des tableaux, des statistiques à nos partenaires syndicaux, et ils ont pu les vérifier, au moins les professionnels, et nous allons les constater conjointement. Ça, c'est une première chose qu'il est important de faire.

Ensuite, il y aura une loi, je suppose. Disons qu'on arrive à une entente, à une loi. Bien, là, le député ou les députés vont avoir à se prononcer sur une loi. C'est difficile, pour l'instant, de dire: Il y a un projet de loi, puis nous craignons qu'il n'y ait pas d'équité dedans. Il faudrait attendre que la loi soit sur la table avant d'en juger, puis d'en discuter et d'en débattre. Tout ce que nous savons à l'heure actuelle, c'est qu'il y a une proposition sur la table que nous voulons négocier, sur laquelle nous voulons débattre. Qu'est-ce qui arrivera, le soir du 28 février ou le matin du 1er mars? Bien, nous verrons le résultat de la négociation. Mais nous avons dit que nous voulions en discuter avec nos partenaires syndicaux en toute transparence. C'est là-dessus que nous jugerons la loi; la loi va découler. S'il y a une entente, on va voir s'il y a équité intergénérationnelle.

Il reste que les voies qui sont offertes l'ont été par deux propositions qui ont été mises sur la table: la première qui impliquait une réduction du temps de travail contre une réduction salariale compensée par ailleurs par l'utilisation des surplus, qui touchait effectivement tout le monde; par ailleurs, il y a aussi une autre voie, qui est celle de départs, de départs importants de plusieurs milliers de personnes. Cela nous amène à ne pas faire la première proposition, qui est d'utiliser ces surplus actuariels. Donc, les gens continueraient avec leur salaire actuel, bonifié de l'entente d'octobre 1995. Mais, si on ne fait pas l'une, il faut faire l'autre ou une troisième voie. On ne peut pas l'exclure non plus, peut-être qu'il y a une troisième solution. Mais on dit: Il faut en parler.

Ce que vous soulignez, en premier stade, c'est-à-dire que ça peut générer une inéquité supposée, entre guillemets, intergénérationnelle, mais, si ne pas le faire nous amène par ailleurs à réduire ou à compenser par un congé de cotisations, bien, on est revenu au même finalement. Mais je n'admets pas encore l'inéquité intergénérationnelle, parce que...

M. Gautrin: M. le Président, je comprends, mais...

M. Léonard: Ça va se jouer à la table de négociation.

M. Gautrin: M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vais répéter ce que j'ai dit, parce que c'est... Mais je voudrais quand même être bien clair et je crois que peut-être le ministre ne m'a pas compris. Je l'ai prévenu quelle était, pour nous, de la part de l'opposition, la grille d'analyse selon laquelle nous allons regarder le projet de loi. Parce que nous allons être concernés à la fin, au bout du processus, par le projet de loi. Et c'est cela...

Une voix: ...

M. Gautrin: S'il y en a un, mais, si vous touchez au RREGOP, il va probablement y en avoir un. Et, dans ces conditions-là, je dois dire que je peux exprimer des craintes. Sans nécessairement être assuré que vous le faites, je peux avoir des craintes qu'on puisse dépasser, pour atteindre les objectifs de négociations, ce que seraient les provisions excédentaires à l'intérieur du RREGOP. Je peux avoir cette crainte-là, et je pense que c'est justifié de l'avoir, cette crainte-là, et de m'assurer, au moment où nous aurons à voter le projet de loi, que l'utilisation de ce qui est l'effort qui va être demandé au RREGOP ne dépasse pas les provisions excédentaires. Premier élément.

Deuxième élément, il y a un principe d'équité entre les différents corps ou personnes qui participent au RREGOP qui va nous sembler être important lorsqu'on analysera, le cas échéant, le projet de loi. C'est ce qui a été soulevé ce matin et par le chef de l'opposition et par le député de Westmount–Saint-Louis. C'est essentiellement ce sur quoi je veux préciser notre position. Une fois que ça, c'est dit, on attend le résultat de vos négociations. Et, lorsque vous aurez à nous faire rapport devant cette Chambre, si vous présentez un projet de loi, c'est la grille selon laquelle on analysera votre performance.

Le Président (M. Pinard): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je voudrais simplement dire une chose: il n'y a pas de projet de loi, là on est dans une crainte appréhendée d'une certaine...

Une voix: ...

M. Léonard: Bien oui, mais ici on est dans l'hypothétique, c'est vraiment cela que nous faisons. Alors, s'il y a un projet de loi, il y a une crainte appréhendée qu'il puisse y avoir de l'inéquité intergénérationnelle dedans. Attendons de voir le projet de loi, puis on en débattra à ce moment-là. Tout ce qu'il y a pour l'instant, M. le Président, c'est un texte d'une page qui a été remis aux responsables syndicaux, tout le monde en débat. C'est ce texte qu'il faudrait lire et relire, et puis baser aussi, jusqu'à un certain point, ces prises de position de leur part à une table de négociation. Il faut laisser la négociation... Mais, pour l'instant, on nous parle d'un projet de loi comme s'il était d'avance inéquitable. Attendons. Attendons les négociations là-dessus.

Il y a juste une page sur la table. Il n'y a pas de projet de loi. Alors, nous sommes en plein dans l'hypothétique. M. le Président, je réponds à des questions de nature hypothétique. Il me semble que le règlement fait qu'on ne répond pas à des questions de nature hypothétique. Je veux bien être gentil envers les députés de l'opposition à l'heure actuelle qui s'inquiètent, mais c'est une crainte appréhendée. On a déjà vu ça, des mouvements d'opinion appréhendés comme ceux-là.

M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: ...je vais quand même... et on va terminer là-dessus... Je n'ai jamais dit qu'il y avait sur la table un projet de loi. Je dis: Si vous modifiez substantiellement actuellement le RREGOP, vous aurez besoin d'avoir recours à un projet de loi. Si vous le modifiez substantiellement, à ce moment-là il y aura un projet de loi. Dans ce cadre-là, il y aurait, de notre part, une crainte, et j'ai expliqué que, si vous êtes amené à devoir utiliser ce que vous qualifiez de provision excédentaire du RREGOP, il y a une possibilité d'abord de s'assurer, de notre part, que ce que vous utilisez est bien excédentaire.

Maintenant, je ne veux pas aller plus loin que ça. Je n'ai jamais dépassé l'hypothétique. Je dis: Si vous allez dans la direction où vous allez, si vous touchez au RREGOP, vous allez avoir besoin d'un projet de loi. Et, à ce moment-là, je vous ai dit comment, au préalable, nous allons étudier votre projet de loi. C'est exactement ce que j'ai dit, et vous pourrez revenir aux galées là-dessus; c'est ce qui est dit.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député.

M. Léonard: M. le Président, comme je n'ai pas vu moi-même de projet de loi sur ce sujet, c'est bien difficile d'en parler. Alors, effectivement, dans beaucoup de cas, je dirais presque régulièrement, nous venons à l'Assemblée nationale au mois de juin... au mois de décembre pour inscrire dans la loi des modifications au régime de retraite.

(17 h 30)

Alors, quand ça arrivera, si cela doit arriver, nous le ferons. Et puis nous allons légiférer, comme nous le faisons habituellement, en respectant les droits des uns et des autres. C'est dans ce contexte que nous le ferons. Mais je ne vois pas pourquoi on s'inquiète déjà, avant même qu'il y ait un projet de loi. On dit: Tout à coup il y aurait une inéquité. Bien, là, attendons que le projet de loi soit sur la table. Il s'agit là, largement, de questions hypothétiques.

M. Chagnon: M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Dans le même sens, lorsqu'on regarde l'article...

M. Léonard: ...même sujet, est-ce qu'on continue...

M. Chagnon: Mon collègue finissait sur ce sujet.

M. Léonard: O.K. Allez-y. Continuez donc.

M. Chagnon: C'est un sujet vaste. Le Conseil du trésor, c'est un sujet tellement vaste sur lequel nous prenons...

M. Léonard: Mais je vois qu'il y a une petite page qui vous intéresse beaucoup, qui est l'objet de négociations puis...

M. Chagnon: Ce qui nous intéresse, c'est l'avenir, hein?

M. Léonard: ...dans laquelle vous vous insérez sans le dire, en disant que vous ne le faites pas. Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Bof! M. le Président, ce n'est pas compliqué, je reprends le troisième paragraphe de la contre-proposition que le gouvernement a déposée aux instances syndicales et qui tient à diminuer de 15 000 postes permanents, mais sans remplacements. C'est la volonté du gouvernement. Je pense que ce n'est pas un secret et puis que ce n'est pas... Ça a été annoncé, c'est écrit, c'est distribué et c'est publié.

Comment le ministre concilie-t-il cette exigence, cette volonté du gouvernement de diminuer de 15 000 postes permanents sans remplacements... On sait quelles difficultés supplémentaires ça pose dans le domaine de l'éducation – je l'ai mentionné à quelques reprises – au primaire et au secondaire. Comment le gouvernement concilie-t-il, je dirais, l'engagement prévu de 2 800 postes pour l'enseignement au niveau de la maternelle à plein temps pour septembre 1997 avec le modèle de réduction de postes permanents auquel il cherche à recourir

Le Président (M. Pinard): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, le député doit convenir que dans un gouvernement il y a des priorités, en même temps que nous avons la volonté de rétablir l'équilibre des finances publiques. Alors, l'effort qui est demandé, c'est, disons, l'abolition de 15 000 postes, c'est-à-dire 15 000 personnes sans remplacements.

Par ailleurs, nous avons une autre priorité, qui est celle d'une politique familiale, laquelle implique l'addition de ressources, mais pas du même ordre de grandeur, pas à la même hauteur. Mais nous savons aussi que cette politique familiale devrait, disons, aider beaucoup les familles à avoir des enfants, à compenser pour les coûts que cela implique, en même temps qu'elle amène les personnes à s'insérer dans le marché du travail.

Donc, vous avez là l'expression de priorités gouvernementales, et ce n'est pas du tout contradictoire. En même temps que nous rationalisons nos opérations, que nous réduisons globalement notre personnel, il y a aussi des secteurs où nous injectons des ressources humaines et matérielles. Mais l'équilibre, à l'arrivée, en 1999-2000, doit se manifester dans les finances publiques. Alors, pour moi, ce n'est pas du tout contradictoire. En même temps que nous faisons des choses très difficiles, il y a aussi l'expression de priorités gouvernementales qui se manifeste.

M. Chagnon: Je n'ai rien contre ça, sauf qu'en principe, M. le Président, si l'objectif était de diminuer de 15 000 postes permanents et sans remplacements, le secteur public et parapublic, c'est 18 000 postes que vous devriez couper pour faire en sorte de récupérer les 2 800 postes qui vont se créer en septembre 1997 uniquement dans le réseau des maternelles, sinon votre objectif de diminution de la masse salariale ne sera pas atteint.

M. Léonard: M. le Président, il n'y a pas que ces deux postes dans les crédits du gouvernement. Il y a aussi des mesures de rationalisation ailleurs que nous faisons, qui génèrent des disponibilités, qui nous permettent d'injecter des ressources humaines et matérielles dans des priorités. Là-dessus, j'amènerai le député à relire le point 4 de notre proposition. Le gouvernement recherche une réduction récurrente des coûts de main-d'oeuvre d'un montant d'environ 1 000 000 000 $, dont 800 000 000 $ par ces mesures à être négociées avec les représentants des associations syndicales précitées. Effectivement, nous entendons réduire les coûts de main-d'oeuvre de 1 000 000 000 $ globalement. Alors, qu'il y ait par ailleurs des postes à hauteur de 2 600 à injecter dans les garderies, je pense que cela indique les priorités gouvernementales à l'heure actuelle.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, la priorité gouvernementale, c'est de baisser son niveau de masse salariale. C'est la volonté du gouvernement. Ils disent: Ça nous coûte 58 % de nos dépenses de l'ensemble du gouvernement, si on exclut le service de la dette. Bon, on en convient, mais, d'un coup, vous dites: On va diminuer de 15 000 postes sans les remplacer, puis, d'un autre côté, vous augmentez de 3 000. Moi, je pense que ce serait plus simple...

M. Léonard: C'est rendu à 3 000, là; c'était 2 600.

M. Chagnon: Deux mille huit cents, j'ai dit.

M. Léonard: Deux mille six cents, on m'a dit.

M. Chagnon: Deux mille six cents? Deux mille six cents. Je ne me chicanerai pas pour...

M. Léonard: Non, mais vous en mettiez 400 de plus; c'est déjà 12 % de plus.

M. Chagnon: Je vais vous en enlever 100 de plus: 2 500. Ça va?

M. Léonard: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Alors, le gouvernement, d'une main, dit: J'en enlève 15 000. De l'autre main, il dit: J'en ajoute 2 500. Si on voulait en enlever 15 000, il faudrait en enlever 17 500 parce qu'on va en ajouter 2 500. Et 2 500, là, c'est des emplois, moyenne de salaire, ça, en partant, qui vont être autour de 40 000 $. Vous en avez pour 100 000 000 $, là-dedans. Alors, ça m'apparait assez évident que le président du Conseil du trésor aurait intérêt à regarder ce que sa main droite fait quand la main gauche fait quelque chose.

M. Léonard: C'est exactement ce que nous faisons, M. le Président.

M. Chagnon: Bien, c'est évident que vous n'aurez pas 15 000 postes au mois de juillet de moins, permanents, si vous en ajoutez 2 500, M. le président, à moins que vous augmentiez votre montant de postes permanents qui doivent être non remplacés.

M. Léonard: Bien, M. le Président...

M. Chagnon: C'est 15 000 moins 2 500. C'est évident que vous allez arriver à 12 500.

M. Léonard: M. le Président, les ressources financières injectées dans les garderies proviennent d'économies que nous allons faire ailleurs.

M. Chagnon: Mais on ne parle pas de garderies, là, on parle de maternelles, des professeurs.

M. Léonard: Ah, maternelle.

M. Chagnon: C'est des professeurs. Cinq ans. Alors...

M. Léonard: C'est relié à la question des ressources.

M. Chagnon: Comme vous en ajoutez 1 000 au ministère du Revenu, si on veut diminuer notre nombre de postes dans la fonction publique, bien, il faut tenir compte de ceux qu'on ajoute. Pour avoir un objectif de 15 000, je devrais avoir 15 000... C'est l'objectif du gouvernement. Ce n'est pas moi qui l'ai inventé, c'est l'objectif du gouvernement. Si on veut avoir 15 000 postes net de moins, bien, il faut qu'on ait 15 000 postes net de moins plus des postes net de moins en fonction du nombre de postes qu'on veut créer, qu'ils soient dans l'Éducation, au Revenu ou ailleurs.

M. Léonard: M. le Président, ce n'est pas du tout exclu qu'il y en ait plus que 15 000 qui partent, qu'il y en ait plus, par ailleurs. Mais je dirai: La relation n'est pas aussi stricte que ce que vous dites. C'est ça que je voudrais que le député comprenne, parce que les postes qui vont aller dans les maternelles peuvent être financés de bien d'autres façons, par des économies que nous allons faire dans d'autres ministères. Alors, je ne veux pas faire une comptabilité comme celle que fait le député de Westmount–Saint-Louis. Ce n'est pas la même chose.

M. Chagnon: Est-ce que le ministre n'admet pas que, si j'ai 15 000 postes permanents de moins puis que j'en crée 2 500, le nombre de postes permanents en moins que je vais avoir au gouvernement, c'est 12 500 et non pas 15 000?

M. Léonard: M. le Président, je voudrais quand même dire au député de Westmount–Saint-Louis, juste pour élargir un peu la question, que la politique familiale se finance en très grande partie par une réallocation budgétaire et fiscale en 1997-1998. Donc, on ne parle pas des mêmes choses. Nous ne parlons pas des mêmes choses.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, M. le Président. Je pense que le gouvernement et le président du Conseil du trésor auraient intérêt...

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi. Pour que le député de Bourassa participe à nos débats, ça me prend un consentement. Ça me prend un consentement parce qu'il n'a pas été mentionné dans l'ordre qui a été donné ce matin...

M. Chagnon: Ce n'est pas d'un consentement du ministre que j'ai besoin. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Pinard): ...lors des affaires courantes. Est-ce qu'il y a consentement pour que le député de Bourassa échange?

(17 h 40)

M. Léonard: M. le Président, moi, je veux bien qu'il prenne la parole. Par ailleurs, je ne voudrais pas qu'on étende une session de négociations, comme c'est le cas depuis le début de cette séance. Je trouve que l'on joue dangereusement sur une démarcation entre les négociations et de l'information que je veux bien donner. Je n'ai pas de problème là-dessus, mais je trouve que ce que nous visons, c'est d'en arriver à une entente négociée. Et je pense que tout le monde doit se comporter en parlementaire responsable et mettre le moins possible de sable dans l'engrenage.

Le Président (M. Pinard): Alors...

M. Léonard: Alors, c'est ça...

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le président du Conseil...

M. Léonard: ...le problème que nous avons.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le...

M. Léonard: Alors, si le député de Bourassa, disons, veut être compréhensif par rapport à la situation actuelle, moi, je veux bien, j'ai...

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le président du Conseil du trésor, en ce qui me concerne...

M. Léonard: Oui, oui.

Le Président (M. Pinard): ...si vous acceptez que le député de Bourassa soit présent, je vous demanderais, si vous voyez que la ligne se rétrécit trop, tout simplement de me mentionner ici que...

M. Léonard: Non, mais il va m'accuser de censure si je...

Le Président (M. Pinard): Ha, ha, ha!

M. Léonard: ...lui retirais son... Ha, ha, ha!

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Merci, M. le Président. C'est parce que, là, à force de préambules, ils sont en train de faire mon intervention à ma place: ils vont m'accuser de ci, ils vont... Alors...

M. Léonard: Je comprends votre intervention...

M. Charbonneau (Bourassa): ...je voudrais, M. le Président, rassurer le ministre quant aux intentions réelles de mon intervention. C'est qu'il y a eu une proposition d'ordre public qui est sous examen syndical actuellement, et notre compréhension, comme celle de beaucoup d'observateurs, c'est que ça ne peut marcher que si c'est accepté par tout le monde, étant donné que ça réfère aux surplus du RREGOP. Bon. Ça, c'est une première réalité, là, c'est une première hypothèse qu'on met sur la table.

Maintenant, ça, comme ça a été discuté précédemment, je vais m'attarder à un autre aspect de la question, qui est aussi relié à la formulation de la proposition gouvernementale. Je sais que cette proposition prévoit, dans un premier temps, une récupération de 100 000 000 $ dont les modalités sont à définir. Mais, encore là, je m'interroge, moi. S'il y a certains syndicats qui acceptent, d'autres qui refusent, est-ce que le gouvernement va devoir procéder unilatéralement pour aller chercher cette ponction? Étant donné que certains sont en accord, d'autres en désaccord, qu'est-ce qui lui reste comme possibilité? Ça, c'est une première question. Et je sais que la proposition gouvernementale prévoit des négociations en janvier-février, donc je ne vais pas présumer. Le ministre a expliqué, je pense, avec intelligence, qu'on doit laisser les négociations se dérouler et que chaque secteur visé trouvera sans doute à donner l'habit approprié à son accord final. Les gens de l'enseignement, les gens de la santé, etc., s'ils trouvent à définir des modalités qui peuvent être peut-être différentes, mais pourvu que l'objectif soit atteint, du point de vue du gouvernement...

Je comprends tout ça, sauf que ce j'aimerais suggérer au ministre ou ce que j'aimerais proposer au ministre, c'est une clarification du cadre qui est sur la table actuellement, dans le sens suivant. Le ministre dit: 15 000 postes à couper sans remplacements. D'autre part, on a entendu le premier ministre dire: Notre objectif, c'est de l'ordre de 1 000 000 000 $, il faut réduire les coûts de main-d'oeuvre. Quand mon collègue de Westmount–Saint-Louis dit: Écoutez, vous êtes en train de proposer la création de 2 600 postes au niveau des maternelles, le ministre nous répond: Oui, mais c'est peut-être de l'argent qui va venir d'ailleurs, et puis il y a beaucoup de tiroirs et on va passer et on va transformer certaines sommes – apparemment, si on décode ce qu'il dit – qui sont dépensées à d'autres fins, et on va les rapatrier de ce côté-là, et on va faire de la main-d'oeuvre avec ça. Ça devient des coûts de main-d'oeuvre. Il nous explique qu'il recycle de l'argent qui a été affecté à je ne sais trop quoi, d'autres subventions ou d'autres programmes, Il recycle cet argent-là et en fait des coûts de main-d'oeuvre à hauteur de 2 600 postes.

Donc, notre question est bien fondée, je crois. Il nous dit: Nous visons à réduire de tant nos coûts de main-d'oeuvre, mettons 1 000 000 000 $, mais, en même temps, il nous dit: Je vais réaugmenter ces coûts de main-d'oeuvre de tant. Même s'ils sont financés par des argents déjà dans le circuit, ces argents-là ne seront plus ailleurs, ils vont être en coûts de main-d'oeuvre. Et l'objectif du gouvernement, c'est les coûts de main-d'oeuvre. On essaie de comprendre, de concilier ça. De deux choses l'une: ou le nombre de postes net coupés sera de 12 500 ou bien, si c'est 15 000 vraiment, ça veut dire qu'ils vont être obligés de sortir 17 500 personnes pour arriver à 15 000 net. On se comprendra bien? S'il veut préserver ses coûts de main-d'oeuvre pour ces nouveaux postes qu'il crée, il doit mettre dehors... il doit couper 17 500 pour arriver à 15 000 net, ou bien c'est 12 500 net qu'il obtiendra. Je ne vois pas comment il peut sortir de ça, à moins qu'il ne s'explique plus clairement.

Le Président (M. Pinard): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je pense qu'on est vraiment en pleine négociations et que finalement l'opposition est en train de négocier un poste budgétaire par rapport à l'autre, ce qui va apparaître dans les crédits. Les priorités du gouvernement vont se manifester dans les crédits. Nous indiquons que... La proposition indique que nous voulons réduire par ce moyen, un moyen qui est sur la table, 15 000 postes. Nous voulons, nous, point 4, réduire les coûts de main-d'oeuvre de 1 000 000 000 $, dont 800 000 000 $ qui sont en cause ici par les syndicats précités. Alors, là on glisse à un autre poste budgétaire. Je vois bien comment l'opposition glisse à un autre poste budgétaire. Après ça, on va négocier les revenus.

On est en train de négocier le budget, maintenant. Non. On a dit justement qu'il ne s'agissait pas de cela, que nous ne négocierions pas le budget et que même s'agissant de la proposition qui est sur la table, les négociations ne sont pas commencées. Il y a un cadre qui est là, qui pourrait être précisé. J'ai bien compris que le député de Bourassa voulait préciser le cadre. Ce sera fait à la table de négociation; on le fera avec nos partenaires syndicaux. C'est là que les choses vont se passer. Pour l'instant, c'est ce qui est écrit est là et c'est jugé satisfaisant pour un bon nombre des organisations syndicales pour venir en parler à une table de négociation. Je ne dis pas que c'est parfait. Ça peut changer et ça peut être amélioré. Tout peut être amélioré. Mais nous avons indiqué par ailleurs à de multiples occasions qu'il ne s'agissait pas de négocier le budget. Nous sommes d'accord qu'il y ait une consultation prébudgétaire structurée dont le format reste à déterminer, mais qui ne saurait pas conduire à la négociation du budget. Ça, ça a été dit.

Alors là, on est en train de parler de la politique familiale, d'une politique sur les maternelles et garderies, éventuellement, pour dire: Bien, ça doit être déduit. On est en train, par le biais d'une comptabilité juste de postes, de négocier le budget. Non, nous ne ferons pas cela. Nous voulons en parler, de la proposition que nous avons sur la table, dans une négociation, puis c'est là que nous allons le faire.

Alors, quant à ce qui se passera en janvier-février 1997, nous souhaitons que tous les partenaires syndicaux soient là, pour que tout le monde puisse en parler, tout le monde puisse négocier, puisse être représenté à la table et, donc, qu'on arrive à une proposition qui va faire le consensus général. Le consensus qu'on souhaite, c'est celui de tout le monde, pour qu'il y ait une solution intéressante et qui nous amène à un esprit, disons, de collaboration encore plus poussé à l'intérieur de la fonction publique et parapublique et dans les réseaux. Nous avons eu des discussions très fructueuses avec nos partenaires syndicaux jusqu'ici, qui comprennent nos problèmes de finances publiques. Il est important qu'on arrive à l'équilibre des finances publiques. Il y a différentes façons d'y parvenir, différentes politiques qui nous permettent d'y parvenir. La politique familiale, c'en est une façon d'y parvenir.

Donc, tout le monde, je pense, a intérêt à ce qu'on s'en parle, à ce qu'on dégage des revenus, puis ce qui est proposé ici, ce sont des départs volontaires. Nous avons connu une proposition, un programme, cet été, qui a... Je pense que c'est un succès. Je ne veux pas qu'on se pète les bretelles avec un programme qui a marché, mais il a marché. Donc, on est allé, on l'a fait, on l'a mis en place, puis il n'y a pas eu de révolution là-dessus. Alors, il est plus large, celui qu'on met sur la table. Il est plus large, il est possible, et il faut donner la chance aux démarches de se faire, à la négociation de s'amorcer, parce qu'elle n'est même pas encore commencée. Au lieu de semer les inquiétudes, au contraire, il faut voir ça dans une perspective positive qui est qu'on peut faire des choses si on s'entend. On peut mieux les faire si on s'entend bien. C'est cela, le sens de la proposition qui est sur la table.

(17 h 50)

Alors, moi, je pense que nous avons là des éléments positifs. Et, au bout de, maintenant, deux mois, un peu plus de deux mois, que nous avons commencé des discussions, l'avenir est plus prometteur même que ce qu'on pouvait envisager au départ. Il y a des choses possibles. Il y a beaucoup plus qu'on pense si tout le monde entend collaborer, s'asseoir pour en parler et collaborer par la suite.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, je pense que la discussion est bien entreprise. Je ne cherche pas, comme le ministre l'a bien compris, à concentrer ma discussion, mon échange avec lui sur la négociation des conditions de travail, qui seront définies par les parties appropriées en janvier et février, mais à parler des éléments du budget, de la répercussion sur le budget pour le gouvernement. Ça, je pense que ce n'est pas tellement le gouvernement employeur que nous interpellons comme le gouvernement gestionnaire de l'ensemble des dépenses de l'État, et nous lui demandons de réconcilier certaines annonces, les unes étant de l'ordre, si vous voulez, des relations de travail. Et la proposition qui est sur la table, ça ne peut pas être plus public que ça. Puis l'autre proposition de créer des postes, 2 500 postes, ça ne peut pas être plus public que ça non plus. Puis on lui dit: Bien, réconciliez ça. Il a bien compris qu'il ne s'agissait pas de négociations de conventions collectives, mais plutôt de comprendre comment le gouvernement peut soutenir cet objectif d'abolition de 15 000 postes net. Ça, ça veut dire qu'il pourrait théoriquement y en avoir plus, mais pourvu que le résultat soit équivalent à 15 000 postes net. Ça semble être l'objectif, la barre où le gouvernement a placé l'affaire.

Donc, si ça peut être plus, devons-nous comprendre qu'au moins ils vont essayer de couvrir les 2 500 qui vont être créés au niveau des maternelles? C'est un minimum d'éclairage qu'on doit nous donner à ce moment-ci. Et, puisque eux-mêmes, dans les réponses, laissent entendre que ça peut être plus – des fois même ils ont dit 25 000 – ils disent: Tant mieux s'il y en a plus, dans le sens que ça va nous donner un peu de souplesse pour gérer le remplacement. Parce qu'ils disent toujours 15 000 net sans remplacements, donc il y a l'air d'y avoir du roc, une ligne très dure de ce côté-là.

Comme il dit, d'un autre côté, ou la ministre de l'Éducation dit: On va en créer 2 500. C'est des coûts de main-d'oeuvre. On doit comprendre qu'au moins ils vont se couvrir pour 17 500, sinon c'est bien difficile de comprendre comment il va réconcilier son «bottom line», si vous me permettez l'expression.

M. Léonard: M. le Président, si, effectivement, un programme de départs assistés connaissait un grand succès et qu'il y avait 17 000 ou 18 000 personnes qui partaient, le programme est là, les gens... C'est sur une base volontaire que cela se fait, si les services au public n'en sont pas gênés... Parce qu'il y a une préoccupation aussi dans la proposition qui est bien mentionnée au point 3, paragraphe b, alors, si, si, si... Effectivement, c'est à considérer, oui. Vendredi, en commission parlementaire, d'ailleurs, je l'ai évoqué: s'il y en a 20 000...

Parce qu'au fond, compte tenu des ressources qui pourraient être disponibles – à supposer qu'elles existent parce qu'elles doivent être constatées conjointement – il pourrait y avoir plus que 15 000 personnes qui partent... Parce que le programme de l'été dernier a coûté 160 000 000 $, au total, au gouvernement. Il est parti 2 067 personnes. Alors, s'il y a 800 000 000 $ – ils ont dit que le gouvernement y mettra un montant au moins équivalent – on est, disons, hypothèse, là, à 1 600 000 000 $. Effectivement, ça pourrait toucher plus que 15 000 personnes. Oui, cette hypothèse-là, je ne la rejette pas. Cela nous permettrait de réorienter davantage le gouvernement, peut-être de faire autre chose. Si les gens sont volontaires, parce qu'il s'agit d'un programme volontaire, et qu'ils ont quitté, personne ne sera lésé, quitte toujours à sauvegarder la qualité des services à la population, la qualité du travail aussi. Mais je pense que ça fait partie des possibilités, des perspectives qu'on peut envisager. Je n'ai rien affirmé de plus que ce qu'il y a dans la proposition en disant cela.

Mais, on le sait, le gouvernement, à l'heure actuelle, a très peu de marge de manoeuvre, très, très peu, pour ainsi dire pas du tout. Il essaie d'en récupérer. Et, quand on parle de marge de manoeuvre, c'est justement le genre de chose à laquelle on pense. C'est à cela qu'on pense. Dans l'avenir, on va essayer d'en récupérer le plus possible. Une société a besoin, par son gouvernement, d'avoir une marge de manoeuvre pour établir de nouvelles politiques, pour les améliorer, pour les modifier et pour répondre aux besoins, pour, à un moment donné aussi, avoir le courage d'abolir des programmes qui sont moins nécessaires qu'ils ne l'étaient quand ils ont été créés. Alors, cela fait partie de la gestion gouvernementale.

M. Charbonneau (Bourassa): C'est intéressant d'entendre le ministre jongler avec certaines hypothèses. Ça montre...

Une voix: ...

M. Charbonneau (Bourassa): Oui. Alors, c'est intéressant de voir que le ministre jongle avec certaines hypothèses et qu'il y a un peu de souplesse possible dans la discussion, parce que le gouvernement aura à affronter une certaine réalité qui l'oblige à concilier ses engagements envers le maintien de la qualité en même temps que des coupures de postes sans remplacements.

Par exemple, quand on veut se représenter tout cela dans une école, disons, où il y aurait 100 enseignants, si on fait l'hypothèse qu'il y en a cinq qui partent, il en reste 95 qui doivent enseigner devant le même nombre d'élèves. Si, à travers les jeux de départs et d'arrivées, il y a moyen d'engager cinq jeunes qui vont remplacer les cinq qui partent à la retraite pour une économie de coût puis que tout ça compte dans la balance vers la recherche du 15 000, bien, ça a plus de bon sens que de dire 15 000 sans remplacements.

D'autre part, le ministre dit: On fait des si, etc. Et, si ça dépasse 15 000, bien, ça peut faire d'autre chose. On doit retenir que, si on veut aller chercher au moins la marge de manoeuvre en coût de main-d'oeuvre pour payer les 2 500 nouveaux employés dans les maternelles, ça veut dire que, au moins, c'est 17 500 qui doivent partir si on veut couvrir ces 2 500 là pour tomber à 15 000 net. En tout cas, c'est des coûts de main-d'oeuvre nouveaux que le gouvernement se crée, et on n'a pas dit qu'on était opposé à cela, loin de là. Mais on essaie de rééquilibrer, de comprendre les différentes affirmations, puis il y a un jour où il devra y avoir une conciliation de tout ça en termes de qualité de services et en termes de services nouveaux annoncés par la ministre de l'Éducation. Et c'est là que nous verrons exactement où est la ligne finale.

Le Président (M. Pinard): M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président...

Le Président (M. Pinard): Je vous avise, avant que vous répondiez à l'interrogation du député de Bourassa, que vos remarques finales vont débuter à 18 h 6.

M. Léonard: Ah, c'est reporté.

Le Président (M. Pinard): C'est bien ça. La réplique.

M. Léonard: Alors, M. le Président, je ne fais pas l'équation aussi automatique que le fait le député de Bourassa, mais, dans un budget gouvernemental, il y a des plus et des moins partout. Au fond, il s'agit du plan d'action de l'année du gouvernement, lequel aussi s'inscrit dans une certaine perspective de deux, trois, quatre ans, puis on espère aussi, des fois, à plus long terme. Il y a des gestes qui ont des portées de long terme. Dans des gestes qui sont pris dans une année, c'est sûr qu'on doit réorienter les choses. Et particulièrement en période comme celle que nous vivons, en période de rationalisation budgétaire, il y a des gestes difficiles qui sont posés. Et puis toute augmentation de crédits ailleurs, en tout cas, ou... augmentation de crédits ailleurs doit être très... comptée très parcimonieusement, parce que, effectivement, on prend dans des... on génère des crédits de ministères ou de programmes où on coupe davantage, globalement parlant, on peut dire comme cela.

Mais il faut voir aussi la portée de ces décisions. Pour moi, une politique familiale est un geste très important de la part d'un gouvernement, une vraie politique familiale qui va impliquer aussi des réalignements, autant des crédits fiscaux qui existent à l'heure actuelle et de toutes sortes d'autres éléments, et qui devrait amener à une plus grande équité, une plus grande solidarité sociale envers les gens qui ont des familles, qui ont des enfants.

Alors, c'est dans ce contexte que nous vivons. Mais, pour moi, cette équation, s'il y a 2 500 postes dans ce secteur, ça ne fait pas nécessairement 17 500 ici puis augmenter la barre là. Non. Parce qu'il peut y avoir aussi d'autres réductions ailleurs, pour d'autres raisons, puis qui font qu'il y aurait des économies générées de façon correspondante.

(18 heures)

Le Président (M. Pinard): Une dernière question peut-être.


Remarques finales


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: ...la fin de ces trois heures de discussion. On a eu une augmentation non budgétaire de 744 000 000 $ qui nous est proposée par le Conseil du trésor. Elle cherche à faire en sorte de modifier une convention. Suite à une modification de la convention comptable, on inscrira désormais à Dépenses les congés de maladie et vacances non payés pour les années antérieures, c'est-à-dire qu'on va rouvrir les états financiers de chacune des années, si j'ai bien compris, pour faire en sorte de redresser les dépenses passées, dans chacune des années passées, suite à la publication des modifications aux conventions comptables et de la distribution que le tableau du ministre nous a donnée. Évidemment, ça va faire en sorte qu'on va rouvrir tous les états financiers jusqu'à 25, 30 ans en arrière pour y retrouver, finalement, les congés de maladie et les vacances non payés.

C'est un exercice qui prendrait plus de signification, je dirais, qui prendrait... Moi, l'idée de revenir à la comptabilité d'exercice ne me déplaît pas. Au contraire, je trouve que c'est une orientation gouvernementale qui est intéressante. Mais la crédibilité du gouvernement serait sûrement plus forte si, tant qu'à rouvrir les états financiers pour ajouter les passifs dont on parle, ajouter et inscrire à Dépenses les montants dont on parle, on inscrivait aussi les revenus qu'on ne veut pas comptabiliser de la même façon. J'ai mentionné les revenus qui découlaient, année sur année, d'augmentations de la péréquation, par exemple. Un bel exemple, c'était l'an dernier, au moment où le gouvernement du Québec recevait 540 000 000 $ inattendus de la péréquation canadienne. Il y en avait 286 000 000 $ qui auraient dû être inscrits aux états financiers de 1995-1996 et 99 000 000 $... Si je prends la même logique que la logique qui pousse le ministre à rouvrir ses états financiers pour ajouter des dépenses, il devrait aussi ajouter les revenus en 1994-1995, il en aurait pour 99 000 000 $. Et je pourrais comptabiliser de la même façon pour les années antérieures.

Je dois aussi souligner que c'est assez important, c'est quand même 744 000 000 $, là, le total du compte congés de maladie et vacances, en millions de dollars. C'est vrai que ça ne viendra pas modifier le montant d'intérêt à payer sur la dette. On vient inscrire une dette particulière de 744 000 000 $ au compte des vacances non payées et des congés de maladie. Alors, toutefois, si on le fait, je pense qu'on devrait aussi – puis je me répète en le disant – inscrire les revenus, les revenus aux états financiers antérieurs.

Quant à la volonté gouvernementale, que nous partageons tous, de faire en sorte de voir à ce que diminuent les coûts de main-d'oeuvre, nous l'avions exprimée d'une autre façon, à l'époque. Nous l'avions exprimée par le biais de l'adoption de la loi 102 qui cherchait à réduire les coûts de main-d'oeuvre, nous avions adopté la loi 198 il y a quelques années, nous avions réussi à éviter de faire en sorte d'augmenter ces coûts de main-d'oeuvre pendant quelques années et même de les diminuer. Nous avions aussi évité... Nous croyons encore que ce fut une erreur de la part du gouvernement que d'inscrire en augmentations de salaires juste avant le référendum, ces 0,5 % qui venaient équivaloir à 1 000 000 000 $ au bout de trois années de convention, même 18 mois de convention. Nous croyons que l'exercice qui est fait par le gouvernement doit être fait. Nous estimons effectivement que les conclusions des modifications recherchées par le gouvernement aux conventions collectives doivent être faites dans le cadre d'un respect intégral des signatures, donc nous amènent en négociations pour faire des modifications choisies et recherchées par le gouvernement.

Ceci étant dit, nous exprimons certaines incompréhensions sur les objectifs recherchés par le gouvernement à l'effet de diminuer de 15 000 le nombre de postes dans le secteur public et parapublic – je dis bien diminuer le nombre de postes de façon permanente, diminuer de 15 000 le nombre de postes permanents dans la fonction publique – sans tenir compte, par exemple, des créations de nouveaux postes. C'est assez curieux que le gouvernement, d'une main, cherche à diminuer ses coûts de main-d'oeuvre en la diminuant de 15 000 postes permanents sans remplacements et, d'autre part, accepte une augmentation de ses coûts de main-d'oeuvre d'une centaine de millions pour la création de 2 500, 2 600 postes en matière d'enseignement au niveau de la maternelle. Non pas que l'objectif de l'enseignement d'un an de la maternelle nous déçoive; au contraire, nous pensions depuis longtemps que l'élargissement de l'enseignement au niveau de la maternelle était un bon choix. Mais, toutefois, il implique une augmentation des coûts de la masse monétaire, M. le Président, et nous trouvons que le gouvernement ne sait pas très bien ou ne coordonne pas ses efforts de rationalisation avec ses efforts de dépenses. Merci.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le ministre et président du Conseil du trésor, vous avez...

M. Léonard: Oui...

Le Président (M. Pinard): ...droit à une réplique de cinq minutes.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Oui. Merci, M. le Président. D'abord, quelques remarques sur ce que vient de dire le député de Westmount–Saint-Louis. Les 286 000 000 $ dont il parle, sur les paiements de transfert de péréquation, s'appliquent à l'année 1995-1996; donc, ils se sont appliqués en 1995-1996. Non. Le 99 000 000 $, lui, était, pour l'année 1994-1995, une modification qui était intervenue à la suite des dernières vérifications sur les paramètres servant à calculer la péréquation; il y a 99 000 000 $. Donc, ça réduit: ce n'est pas 540 000 000 $, c'est 99 000 000 $ dont il s'agit pour les années antérieures.

Je voudrais lui faire remarquer aussi que la loi 102 a été une loi qui a été très contestée. Elle a donné lieu à l'émission de 3 000 ou 4 000 griefs – on l'a vu en commission parlementaire vendredi – à une somme énorme de griefs. Donc, lorsqu'une telle opération se produit, c'est signe que c'est une loi très mal acceptée, et c'est ce pour quoi nous visons une entente négociée avec les organisations syndicales à l'heure actuelle. Nous allons tout faire de correct pour y arriver. Alors, tout ce qu'il nous est possible de faire, nous le ferons.

Maintenant, je voudrais revenir à ces crédits, parce que depuis... nous en avons parlé à peine une heure, même pas une heure, puis après on a parlé de toute autre chose. Mais je reviens aux crédits. Nous avons toujours la volonté d'atteindre l'objectif des dépenses cette année et nous maintenons que nous allons les atteindre, ces objectifs budgétaires. Maintenant, dans les crédits supplémentaires qui sont devant nous, il y a deux choses: une première qui comporte une modification comptable effectivement, mais qui amène beaucoup plus de transparence dans les états financiers du gouvernement parce qu'elle reconnaît une dette qui existe vraiment et qui est comptabilisée à chaque année, qui est celle de la compensation qu'on doit à nos employés pour les congés de maladie et les vacances. Donc, c'est inscrit aux livres du gouvernement. Cela est un pas de plus vers la comptabilité d'exercice, comme nous l'avions fait l'an dernier d'ailleurs, où nous avions inscrit une provision sur prêts, placements et avances de 571 000 000 $ et qui étaient inscrits aux états financiers à la dette nette du gouvernement. Et c'est dans le même esprit que nous le faisons.

Et je pense que nous allons nous retrouver, au bout de toutes ces opérations, avec des états financiers beaucoup plus proches de la réalité que ce qu'ils étaient jusqu'ici. Nous nous éloignons effectivement de la comptabilité de caisse, d'encaissements-déboursés, vers une comptabilité d'exercice, c'est-à-dire que l'on apparie davantage les dépenses et les revenus. Alors, c'est cela. Et, dans toute opération d'assainissement des finances publiques, les gouvernements qui y ont procédé, ont procédé de cette façon, ont fait de tels gestes. Alors, nous aurons donc des livres comptables plus transparents avec l'inscription des congés de maladie et des congés de vacances.

(18 h 10)

Je dois dire aussi que cela va nous amener à reconnaître davantage la bonne gestion des ministères, mais avec un cadre de gestion plus souple, où nous poursuivons toujours avec les enveloppes fermées. Et nous voyons que les crédits périmés, comme les crédits additionnels qui sont attribués, sont quand même assez rares, parce que, lorsque l'on voit ce qui se passe ici, il s'agit d'une somme de 30 000 000 $, points de crédits additionnels, avec des crédits additionnels en santé où, là, il y a une somme de 195 000 000 $, mais déjà, c'est moins important que ce qu'il y avait l'an dernier.

Donc, petit à petit, nous y venons, et je pense que ce qui est encourageant, c'est que, en 1995-1996, nous avons respecté notre objectif de dépenses, nous allons le respecter en 1996-1997 et nous voulons le respecter en 1997-1998. Nous sommes en train de confectionner les budgets et nous espérons bien que, avec l'accord de tous, avec la collaboration de tous, de tous les ministères, de tous les organismes et aussi de nos organisations syndicales, nous y arriverons. C'est le souhait que nous faisons. Nous souhaitons, encore une fois, le faire avec une entente négociée. Je le répète, je le redis. Et je crois que tout le monde se trouvera beaucoup plus heureux lorsque nous aurons assaini nos finances publiques, alors que nous allons recommencer à voir, à disposer de marges de manoeuvre pour relancer la société vers des objectifs qui lui sont communs. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le président du Conseil du trésor. La commission plénière ayant terminé cet échange, je tiens à remercier les députés de Westmount–Saint-Louis, de Bourassa et de Verdun ainsi que tous les gens de votre équipe, M. le président du Conseil du trésor, qui ont participé à ces débats.

Je suspends maintenant les travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 13)

(Reprise à 20 h 7)

Le Président (M. Brouillet): Conformément à l'ordre adopté par l'Assemblée, au cours de la prochaine heure, nous allons procéder à un échange entre M. le ministre délégué au Revenu et MM. les députés de Nelligan et de Verdun. Au cours de cet échange, une période de cinq minutes sera allouée aux députés indépendants. J'accorde maintenant la parole à M. le ministre délégué au Revenu pour ses remarques préliminaires. On peut s'entendre pour, peut-être, un sept minutes, M. le ministre?

M. Bertrand (Portneuf): Sept minutes?

Le Président (M. Brouillet): Oui.


Revenu


Remarques préliminaires


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): À votre disposition, M. le Président. Alors, j'aimerais saluer tous les membres participant à cet exercice de même que les personnes qui m'accompagnent, notamment Mme la sous-ministre, Nicole Malo.

C'est dans la suite du discours du budget que nous avons réaffirmé notre intention de lutter de la façon la plus efficace possible contre l'évasion fiscale et le travail au noir, et, à cet égard, nous avons prévu au dernier discours du budget des crédits additionnels en 1996-1997 de l'ordre de 30 000 000 $, et ceci, justement, de façon à nous permettre d'accroître les efforts en ce qui regarde la vérification, la récupération fiscale et à nous donner les outils nécessaires, notamment au niveau du traitement de l'information et donc les outils informatiques.

Nous avons également constitué le Bureau de lutte contre l'évasion fiscale, une équipe formée d'environ une cinquantaine de personnes spécialisées dans différents secteurs d'activité qui sont bien sûr autant de cibles pour notre travail. Ceci signifie – ce 30 000 000 $ là – également l'embauche d'environ 1 000 personnes pour cette année. À l'heure actuelle, les personnes ont été engagées à toutes fins pratiques à 75 %. Formation également et mise en place, donc, des ressources en conséquence sur le terrain. Et nous avons également entrepris les opérations nous permettant de nous doter de la centrale de données. Nous avons également amorcé une première tranche d'une planification de trois ans en ce qui regarde la campagne de sensibilisation, comme nous le savons, sous un thème, je pense, qui est bien connu maintenant.

Alors, tout ceci fait suite finalement à une certaine évolution au niveau du gouvernement en ce qui regarde la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir. On se rappellera que, dès 1995-1996, le gouvernement avait annoncé son intention de travailler très fort de façon à pouvoir récupérer ce qui est dû à l'ensemble de la collectivité. En février 1996, la commission du budget et de l'administration avait adopté une résolution en ce qui regarde un meilleur accès des autorités fiscales aux informations nous permettant justement de mieux lutter contre le phénomène.

(20 h 10)

En mars 1996, les crédits du gouvernement étaient déposés, le plan stratégique du ministère du Revenu était également déposé, le tout publié dans les «Renseignements supplémentaires» et le tout visant à faire connaître clairement les intentions du gouvernement et du ministère du Revenu en ce qui regarde les mesures pour faciliter l'observance fiscale, préserver la base des revenus et intensifier la lutte contre l'évasion fiscale.

De même, à la défense des crédits, nous avions eu l'occasion d'échanger sur cette question. Le discours du budget de 1996-1997 de mon collègue le ministre d'État de l'Économie et des Finances annonçait également une intensification des échanges de renseignements entre les ministères et organismes gouvernementaux et, encore une fois, la volonté claire du gouvernement de lutter contre l'évasion fiscale et le travail au noir et récupérer cette année, par les efforts additionnels, quelque 220 000 000 $.

On se rappellera également, M. le Président, l'adoption du projet de loi n° 32 en juin 1996, qui est venu finalement clarifier les rôles et les responsabilités du ministère du Revenu et de la Commission d'accès à l'information dans ce domaine et donner des balises quant à l'utilisation de renseignements additionnels nécessaires à une meilleure application des dispositions fiscales, les lois fiscales. Rappelons-nous l'obligation de rendre publique la stratégie relative à l'ensemble de l'utilisation des fichiers de renseignements, le plan d'utilisation des fichiers, de rendre tout ceci public; de tenir un registre des fichiers obtenus; d'informer annuellement et en temps utile les contribuables et mandataires que des comparaisons de fichiers de renseignements peuvent être effectuées; et de soumettre à l'Assemblée nationale un rapport d'activités.

On voit donc, M. le Président, que tout ceci se fait dans la plus grande transparence. Et nous avons effectivement, en juillet 1996, déposé notre plan d'utilisation des fichiers de renseignements auprès de la Commission d'accès à l'information, qui l'a analysé et qui a émis, le 24 septembre, un avis que, dans l'ensemble, nous considérons comme étant positif même s'il est assorti d'un certain nombre d'appels à la prudence que nous estimons, dans les circonstances, tout à fait recevables.

Alors, c'est donc en toute équité que nous cherchons la plus grande efficacité possible dans la perception des impôts, de façon à faire en sorte, M. le Président, que chacun paie sa juste part des services publics. Et nous annoncions, dès le 1er octobre 1996, le plan de lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir ainsi que la campagne de sensibilisation intitulée «En dessous de la table, jamais». Douze secteurs sont visés cette année, dont l'agriculture, l'automobile, la construction, les services personnels, les transports. Et, au total, ces 12 secteurs-là représentent 80 % des activités visées par les récupérations fiscales et donc 80 % de la perte fiscale attribuable au phénomène en question, et là-dessus, bien sûr, la construction, qui représente 25 %; le domaine de la restauration, 20 %; et celui de l'automobile, 10 %.

Alors, quatre programmes de lutte contre l'évasion fiscale ont été annoncés lors du lancement de la campagne: les services professionnels, la restauration et l'hébergement, les ressources naturelles et les pertes d'entreprises.

Le domaine de la restauration – il en a été beaucoup question publiquement – j'aimerais l'aborder brièvement. Donc, un programme de lutte qui concerne autant les entreprises – et j'insiste là-dessus – que les personnes qui y travaillent, et ce qu'on recherche finalement, c'est s'assurer l'observance des lois également dans ce secteur, comme c'est le cas dans la plupart des autres secteurs d'activité. Un projet-pilote a été initié, 120 entreprises de la région de Laval font l'objet de cette expérience-pilote. Il s'agit d'une région qui regroupe 13 000 entreprises de la sorte, et on pense que c'est un bon endroit pour faire éventuellement un test-pilote dont les enseignements nous seront fort utiles lorsqu'on étendra la vérification à l'ensemble du Québec.

Bien sûr, il a été question de travailleurs au pourboire. Nous avons demandé aux employeurs de mettre à jour les informations qu'ils possédaient parce qu'on avait constaté qu'une forte proportion d'employeurs ne fournissaient pas les informations nécessaires au ministère du Revenu et qu'on était dans l'impossibilité d'effectuer les conciliations qu'on doit effectuer dans tous les secteurs d'activité, et dans celui-là en particulier, entre les déclarations des employeurs et celles des employés. Alors, ce travail va également bien; le taux de réponse obtenu de la part des employeurs est excellent à ce moment-ci. Le ministre avait d'ailleurs, au préalable, informé l'Association des restaurateurs de cette démarche, et cette dernière, pour autant qu'on puisse comprendre, l'avait, dans l'ensemble, appuyée en informant ses membres.

Domaine des ressources naturelles: également des efforts importants qui auront été faits cette année. La cible qui concerne la forêt est en cours. Nous avons annoncé enfin, M. le Président – pour terminer cette brève introduction – le 18 novembre 1996, cinq autres programmes de lutte contre l'évasion fiscale. Alors, ces cibles également sont en marche.

Il s'agit, en terminant, d'une approche transparente. Le ministère du Revenu déposera à l'Assemblée nationale, au début de 1997, son rapport d'activité sur les échanges de renseignements, et nous avons bon espoir de pouvoir effectivement démontrer l'utilité des informations recueillies et d'apprécier les impacts des nouveaux outils à notre disposition sur nos efforts de récupération fiscale. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué au Revenu. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan pour ses remarques préliminaires. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. En entendant le ministre délégué au Revenu, il me semble qu'on vit sur deux planètes différentes, parce que je n'ai pas du tout la même évaluation de ce qui se passe dans son programme. Je voudrais juste citer, dans mes remarques préliminaires, quelques questions que j'ai ce soir, et nous allons avoir une chance, peut-être pendant les prochaines 60 minutes, de discuter ça en profondeur.

La première chose, le ministre est en train de chercher un autre 30 000 000 $ dans les poches des Québécois, de fouiller aussi dans les poches des Québécois. Mais, dans le 30 000 000 $, il y a plus de 11 000 000 $ pour la direction et l'administration. Il me semble, M. le Président, que c'est très élevé. Il cherche un autre 30 000 000 $, mais, de ce 30 000 000 $, il dépense plus de 11 000 000 $ sur la direction et l'administration, et on peut trouver ça à la page 14 des crédits supplémentaires.

Deuxième remarque, je pense que la population québécoise devrait avoir plus confiance dans le système avant son programme qui va fouiller dans les poches des petits contribuables... Il me semble que, avec le gaspillage des fonds publics que nous avons vu par ce gouvernement, particulièrement en préparation pour le référendum et après, la population québécoise a perdu toute la confiance de ce gouvernement dans la question de comment il dépense l'argent.

Troisième chose, le ministre parle avec beaucoup d'énergie du programme qu'il a lancé. Mais ce programme, selon moi, traite presque tous les Québécois et les Québécoises comme des fraudeurs. Même l'image à la télévision – et je pense que vous avez tous vu ça – le ministre pense que tout le monde travaille sous la table. Même l'image. Et on peut expliquer en détail un peu plus tard que tous les gens sont traités comme des fraudeurs.

Il y a un bon exemple de cette chasse aux sorcières d'envoyer 52 000 demandes rétroactivement pour les pourboires dans les restaurants, et, selon moi, je pense que le ministre ne parle avec les mêmes restaurateurs que moi: le monde des restaurateurs est complètement contre cette mesure. Et il me semble, M. le Président, juste en écoutant le ministre délégué ce soir, qu'il frappe encore les plus démunis, il ne frappe pas les gros secteurs. Il frappe les bas salariés. Et il me semble que c'est assez intéressant. Comme aujourd'hui, nous avons dans les manchettes que Québec fait un cadeau à Molson. La même soirée, on discute comment il peut aller chercher un autre 30 000 000 $, en fouillant dans les poches des Québécois.

Deux autres points en terminant, M. le Président, parce que le temps passe assez vite. Un, j'espère que, pendant cette soirée, nous allons avoir une discussion et que, et peut-être quelques remarques du ministre délégué, dans les 30 000 000 $, ils vont actuellement utiliser les fonds pour aider les contribuables, aider les contribuables à rendre le ministère du Revenu plus efficace. Et j'ai quelques commentaires à dire sur ça plus tard.

Le ministre a aussi parlé de la protection de la vie privée. Nous avons eu une autre commission parlementaire. Le président de la Commission d'accès à l'information n'est pas du tout du même avis que vous là-dessus. Ce n'était pas un avis positif. Ils ont soulevé beaucoup de questions, beaucoup de questions qui démontrent que la vie privée est en danger. Avec ça, j'espère qu'on peut utiliser cette soirée pour s'assurer que les dépenses sont là pour protéger les simples citoyens.

(20 h 20)

Et finalement le ministre a annoncé qu'il va engager 1 000 personnes, 1 000 personnes, alors que, dans la même semaine, les autres ministères parlent de couper 15 000 emplois. Le ministre est en train d'engager 1 000 personnes de plus, et son premier ministre est en train de parler qu'il va couper au moins 15 000 emplois. Je pense que c'est une contradiction assez évidente, M. le Président.

Avec ça, j'espère que ce soir nous allons avoir la chance – pas de démagogie – mais la chance de parler ensemble, de s'assurer que les citoyens ont un bon système fiscal et que les sommes nécessaires sont bien utilisées, mais que nous sommes tous traités comme des contribuables honnêtes. Merci, M. le Président. Peut-être que je peux commencer mes questions, maintenant?

Le Président (M. Brouillet): Là, peut-être... Il y en a eu plusieurs que j'ai... Peut-être que vous annonciez votre table des matières.

M. Williams: Oui, c'étaient mes remarques préliminaires.

Le Président (M. Brouillet): Si vous voulez en prendre une puis l'expliciter peut-être. Allez comme ça, parce que, là, il y en a plusieurs.


Discussion générale

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je pense que le député de Nelligan, bon, très correctement, ouvre plusieurs fronts. Ne serait-ce que de répondre minimalement à chacune des affirmations qu'il a faites, ça prendrait plusieurs heures. Tout ce que je regrette, c'est que le député de Nelligan n'ait pas demandé davantage de temps pour que le ministre ait le temps de répondre à l'ensemble des avancés...

M. Williams: Je vais vous donner la chance, monsieur.

M. Bertrand (Portneuf): ...par ailleurs fort surprenants.

Je ferai seulement une remarque. Le député a dit au début qu'on était sur deux planètes différentes. Je pense qu'effectivement on est sur deux planètes différentes par rapport à ce que le précédent gouvernement a fait. Si on est obligé aujourd'hui, effectivement, de travailler, là, sang et eau pour récupérer les montants qui nous échappent au niveau de la fiscalité, c'est qu'on a laissé pendant 10 ans augmenter ce phénomène-là, notamment dans le domaine de la restauration et de l'hébergement, où j'ai constaté, à mon arrivée au ministère, que les lois présentes, qui ont été adoptées pourtant il y a déjà plusieurs années, n'étaient tout simplement pas observées, et je pense que c'est au détriment des employés eux-mêmes de même que de l'ensemble des restaurateurs, qui, eux autres, respectent les règles du jeu et doivent souffrir d'une concurrence déloyale. Ce n'est qu'un exemple, M. le Président.

Le député de Nelligan dit: On est sur deux planètes. Oui. Nous avons décidé, nous, d'avoir les deux pieds sur la planète puis de lutter efficacement, effectivement, contre un phénomène qu'ils ont laissé s'accroître au cours des années.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Nelligan, si vous voulez poursuivre dans les questions que vous aviez soulevées tantôt.

M. Williams: Oui. Effectivement, c'est clair qu'avec une perte de plus de 60 000 emplois depuis l'entrée du premier ministre courant et aussi avec une baisse de 1,5 % des investissements ça va mal pour ce gouvernement, et il est en train de chercher partout.

Je voudrais, première question... Et je ne ferai pas de discours et je voudrais avoir les réponses. Premièrement, le président du Conseil du trésor, quand il a parlé de ses crédits, il a dit que les présents crédits ne constituent que les réaménagements à l'intérieur des enveloppes fermées des ministères et des organismes et n'entraînent donc pas de modifications à l'objectif des dépenses du gouvernement. Est-ce que c'est vrai, M. le Président?

M. Bertrand (Portneuf): Tout à fait parce que le 30 000 000 $ en question était déjà escompté dans les équilibres financiers gouvernementaux. Il avait été annoncé par le ministre des Finances à l'occasion du discours du budget, et donc ce 30 000 000 $ là, par les crédits supplémentaires de cet exercice, correspond tout à fait à ce qui était prévu aux équilibres.

M. Williams: M. le Président, le ministre des Finances a mentionné une figure de 40 000 000 $ pendant son budget, et je voudrais savoir: Est-ce que, effectivement, c'est un changement d'approche de ce gouvernement de baisser de 40 000 000 $ à 30 000 000 $?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, il s'agit effectivement de 30 000 000 $ pour le ministère du Revenu, et c'est ce dont il s'agit ici aujourd'hui. Quant au reste, ça concerne d'autres ministères.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député.

M. Williams: Je voudrais citer le budget: «À cette fin, je propose qu'un montant additionnel de 40 000 000 $ soit affecté, en 1996-1997, à des programmes de vérification et de perception plus performants.» Il me semble que c'est le ministère du Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): Non, ça concerne également d'autres organismes. Par exemple, dans le domaine de la construction, M. le Président, de mémoire.

M. Williams: O.K.

Le Président (M. Brouillet): Peut-être un complément de réponse.

M. Bertrand (Portneuf): Juste pour préciser de façon à pouvoir répondre adéquatement à la question du député de Nelligan. On se rappellera, par exemple, dans les mesures fiscales et budgétaires annoncées, des mesures pour enrayer le commerce illégal des boissons alcooliques – il y avait des montants pour ça – des mesures pour enrayer le travail au noir dans l'industrie de la construction. Alors, on voit donc que ça ne concerne pas uniquement le ministère du Revenu.

Le Président (M. Brouillet): Très bien, merci. Alors, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Merci, M. le Président. Est-ce que l'objectif de 313 000 000 $, l'objectif qui était annoncé dans le budget, de recouvrement des revenus supplémentaires reste encore l'objectif de ce gouvernement? Et vous en êtes rendu à quel niveau, M. le Président?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je ne saurais répondre pour le ministre des Finances en ce qui regarde l'ensemble des récupérations, mais, en ce qui regarde les récupérations qui échoient à la responsabilité du ministère du Revenu, je peux vous confirmer effectivement que nous anticipons, à ce moment-ci, rencontrer l'objectif prévu, qui est de 220 000 000 $.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Williams: 220 000 000 $ des 313 000 000 $ annoncés.

M. Bertrand (Portneuf): 220 000 000 $ sur 313 000 000 $, les autres montants étant, encore là, tout comme les crédits de tout à l'heure, imputables à d'autres mesures gouvernementales qui concernent d'autres secteurs d'activité, comme, par exemple, le secteur de la construction.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.


Crédits alloués à la direction et à l'administration

M. Williams: Merci beaucoup. M. le Président, dans mes remarques préliminaires – et je laisse au ministre la chance de répondre à ma question – à la page 14, j'ai ciblé que plus de 11 000 000 $ des 30 000 000 $ sont sous l'item 4, Direction et administration. Je voudrais avoir une explication de ce 11 000 000 $, pourquoi c'est aussi élevé dans Direction et administration et qu'on trouve moins dans Contestation et vérification.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Il s'agit effectivement de dépenses pertinentes au domaine de la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir, puisqu'on retrouve, à titre d'illustration, 2 000 000 $ pour le financement de la campagne de publicité, dont l'objectif, comme vous le savez, est de sensibiliser la population aux coûts et aux effets de l'évasion fiscale et du travail au noir.

Je vois tout de suite venir la question, éventuellement, de l'opposition: Mais oui, mais 2 000 000 $ investis en publicité, est-ce que vous ne trouvez pas que c'est des dépenses somptuaires? Absolument pas. Il est prouvé que, lorsque nous voulons avoir un impact, je dirais, un peu plus préventif que les moyens correctifs que sont la vérification et la perception, on doit intervenir un peu plus en amont du problème, comme c'est le cas dans le domaine de la santé publique. C'est maintenant très connu, je veux dire, c'est prouvé qu'en investissant des efforts et des ressources dans des campagnes de sensibilisation qui visent à modifier les comportements de la population, ça produit des effets, effectivement, et ça a pour effet qu'on est obligé, par la suite, de moins mettre d'efforts proportionnellement du côté des mesures correctrices parce qu'on aura eu, justement, cette prudence. Bon.

Un autre exemple: la mise en place du Bureau de lutte contre l'évasion fiscale qui compte pour environ 3 000 000 $; la rémunération du personnel requis pour l'embauche, la gestion et l'aménagement de l'effectif relié à l'évasion fiscale, 500 000 $. Bref, ce sont toutes, vraiment, des dépenses qui sont liées à l'effort que le ministère doit consentir dans le domaine. Ce ne sont pas des dépenses d'administration au sens d'acheter des crayons puis des effaces, là.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Williams: Est-ce que le ministre peut déposer une explication de ce 11 000 000 $? On trouve une ligne, ici, dans les crédits supplémentaires, et je trouve que le ministre essaie de répondre à mes questions, mais il me semble être... Il a parlé de transparence, je voudrais avoir ces documents si c'est possible.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je suis tout à fait disposé à rendre la liste disponible. Étant donné le temps quand même serré qu'on a, je ne voulais pas aller trop dans les détails. Mais je vais vous lister, là: financement de la campagne de publicité, 2 100 000 $; mise en place du Bureau de lutte contre l'évasion fiscale, 2 942 000 $, plus une disponibilité d'environ 1 900 000 $ qui reste à répartir; financement d'informatique inscrit à la supercatégorie Capital, 800 000 $, grosso modo; rémunération du personnel pour l'embauche, la gestion, l'aménagement de l'effectif relié à l'évasion fiscale, 414 000 $; coût de l'aménagement physique des locaux et le coût des loyers au niveau de la Société immobilière du Québec – parce que 1 000 personnes, il faut les aménager quelque part – 2 728 000 $; et coût de l'approvisionnement en matériel de bureau et télécommunications, 420 000 $.

M. Williams: Merci.

M. Bertrand (Portneuf): On vous transmettra cette liste-là.

M. Williams: Merci beaucoup, monsieur.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, M. le député.


Programme de sensibilisation à l'évasion fiscale

M. Williams: Oui. Vous avez parlé d'un 2 000 000 $ dans le programme de sensibilisation. Et vous avez déjà pensé à quelques-unes de mes questions sur ce programme. Avez-vous établi un système d'évaluation sur l'efficacité de ce programme? Parce que nous avons déjà, nous deux, parlé ce soir de ce programme de sensibilisation. Il me semble que vous êtes en train de, effectivement, gaspiller l'argent public. Vous êtes en train de dire que tous les Québécois et Québécoises sont des travailleurs et travailleuses sous la table, et c'est faux, M. le Président. Une grande partie des contribuables sont honnêtes; ils paient les sommes dues malgré les complexités de notre système de taxation et impôts. La grande partie, la grande majorité de la population québécoise paie. Et vous avez admis que vous dépensez 2 000 000 $ pour un programme qui, avec son image même, dit que tous les Québécois et Québécoises sont des travailleurs sous la table.

(20 h 30)

Avec ça, je voudrais savoir: Est-ce que vous avez inclus un système d'évaluation pour savoir si cette dépense de 2 000 000 $ est efficace pour atteindre votre objectif, qui est de réduire les évasions fiscales?

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre du Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Il me fait vraiment plaisir d'aborder cette question-là, parce que ça va me permettre de peut-être aborder ou de couvrir certains aspects des avancés de tout à l'heure, ou des affirmations du député de l'opposition, le député de Nelligan, en ce qui regarde notamment le fait que le ministère du Revenu, prétend-il, traiterait tout le monde comme des fraudeurs. Puis ça se traduirait, d'après ce que je comprends, dans la campagne de publicité.

Tous les efforts qu'on faits – et je pourrais le démontrer si on avait, bien sûr, plus de temps – justement, notamment pour avoir des informations plus ciblées sur les secteurs qui posent problème au niveau de l'évasion fiscale et le travail au noir, visent justement à nous permettre, en ayant assez d'information, d'arrêter de déranger les gens qui n'ont rien à se reprocher. Plutôt que d'y aller dans de la vérification plus ou moins, pas au hasard, mais selon des méthodes d'échantillonnage où, finalement, on tombe sur des gens qui n'ont rien à se reprocher, c'est d'aller chercher davantage d'information pour nous permettre de cibler, justement, les profils, je dirais, inexplicables ou questionnables chez certains contribuables ou chez certains mandataires et de pouvoir, donc, concentrer nos efforts sur ces gens-là plutôt que d'y aller de la façon classique.

Donc, au contraire, a priori, nous, on se dit: L'ensemble des contribuables sont des gens qui respectent leurs obligations sur le plan fiscal, et, si on veut faire en sorte de ne pas faire supporter à ces gens-là le poids additionnel que représente le fait que, à peu près, en volume, 4 % de l'activité économique nous échappe, bien, on doit, à ce moment-là, cibler davantage nos informations. Et, même là, quand on identifie un profil qui est, je dirais, aberrant ou, en tout cas, inexplicable à première vue, on ne conclut pas nécessairement à la culpabilité de qui que ce soit. On fait enquête, on vérifie et on conclut en fonction des observations que nous avons eu l'occasion de faire.

En ce qui regarde la campagne de publicité, c'est une campagne qui, mon Dieu, va certainement produire des résultats intéressants. Dans le cas de la campagne, tout comme dans le cas de l'ensemble des opérations du ministère du Revenu en ce qui regarde la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir, nous avons mis en place des programmes d'évaluation de façon à être bien sûrs de pouvoir mesurer les rendements qu'on tire des investissements – pour cette année, 30 000 000 $ – que nous faisons pour la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir. Nous avons procédé, dans un premier temps, avant que la campagne de lutte ou le programme de lutte ne soit annoncé, à des enquêtes auprès du public et on a constaté que, d'une part, 94 % des Québécoises et des Québécois étaient d'avis qu'il était très important ou assez important que le gouvernement intervienne pour diminuer la fraude fiscale. On voit donc qu'on a le support du public là-dessus.

Deuxièmement, un sondage réalisé également pour le bénéfice du ministère du Revenu entre le 22 septembre et le 1er octobre 1996 a confirmé qu'après la campagne ce niveau d'appui là était toujours présent. Puis là je donne simplement quelques éléments qui nous permettent de conclure à l'appui du public de même qu'au succès éventuellement de l'opération. Près du tiers des gens, d'après une enquête récente qu'on a faite, qui ont vu la campagne à laquelle on a fait référence tout à l'heure mentionnent qu'elle a eu beaucoup ou assez d'effet sur ce qu'ils pensaient du travail au noir et de l'évasion fiscale. Alors, ce sont autant d'indices qui nous portent à croire que ce n'est certainement pas de l'argent qui, je veux dire, est jeté à l'eau; au contraire, c'est de l'argent qui va certainement rapporter et qui va rapporter, encore une fois, en amont du problème plutôt que d'être toujours en train d'essayer de corriger le problème a posteriori.

Quant à l'image elle-même de la campagne publicitaire et de l'annonce, est-ce que je peux suggérer au député de Nelligan qu'il ne s'agit absolument pas de rendre l'idée que tout le monde travaille en dessous de la table? L'image qu'il faut retenir – et, quand j'en parle aux gens, les gens retiennent toujours la même image – c'est l'image du petit bonhomme au bout de la table qui, lui, est sur la table. Au fond, notre avenir – c'est ça, le message – est sur la table. O.K.? Si on veut garantir la pérennité notamment de nos programmes sociaux, il faut que les gens paient leurs taxes puis leurs impôts. C'est la meilleure façon d'assurer l'avenir de ce jeune-là qui, au fond, est notre avenir, d'une certaine façon. Alors, image pour image, je pense que la mienne vaut la vôtre.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. M. le député de Nelligan.


Travailleurs au pourboire

M. Williams: Merci beaucoup. L'image est de plus en plus le contraire avec la chasse aux sorcières du ministre délégué au Revenu. Je voudrais demander spécifiquement, sur quelques dossiers, c'est quoi, sa stratégie. Et est-ce qu'on trouve ça dans le 30 000 000 $? Un, c'est le fameux envoi, pour les 52 000 serveurs et serveuses, qui cherche, peut-être selon les lois actuelles, que tous les bars, restaurants et hôtels envoient rétroactivement à 1995 et, je pense, bientôt pour 1996 tous les montants des pourboires. Est-ce qu'effectivement c'est la nouvelle approche du ministère pour s'assurer qu'il a toute l'information? Parce que, n'oubliez pas, avec son projet de loi n° 32, il va avoir le pouvoir de faire le couplage de tous les dossiers et, selon la Commission d'accès à l'information, on menace de plus en plus la vie privée de la population québécoise.

Je commence avec cet exemple afin de lui laisser une chance d'expliquer si ça va être la nouvelle façon de ce gouvernement de s'assurer qu'il collecte toute l'information, comme nous l'avons vu dans l'exemple que j'ai mentionné. Et, dans le document qu'ils ont donné sur les notes explicatives, «Plan d'utilisation des fichiers de renseignement», nous avons plusieurs exemples d'utilisation de renseignements qui sont loin d'être clairs. Et, avec ça, je donne la chance au ministre de dire, quand il sera en train de collectionner, de ramasser toute cette information, ce qu'il va faire avec ça, ça va être quoi sa stratégie. Et, effectivement, dans le cas que j'ai mentionné, s'il est en train de se préparer pour un pourboire obligatoire, est-ce qu'il est en train d'y aller rétroactivement sur deux ans, trois ans, comme ils l'ont fait dans quelques autres dossiers?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, bon, je pense qu'on mêle bien des choses en même temps. Je comprends qu'on peut faire des liens entre a et b, là, mais je pense qu'on a intérêt aussi à clarifier un peu quelques affaires. En ce qui regarde les informations, le Plan d'utilisation des informations qu'a déposé le ministère du Revenu, je tiendrais à rappeler que, contrairement aux exagérations ou aux incompréhensions auxquelles j'ai pu assister à la lecture des journaux de même que des galées au cours des dernières semaines, par exemple le rapport de la commission compétente au niveau des informations – je ne me souviens pas du nom de la commission – ce n'est pas vrai que le ministère peut faire n'importe quoi en termes de comparaison de fichiers.

On parle de milliers de fichiers gouvernementaux et d'une cinquantaine ou d'une soixantaine qu'on a identifiés comme étant pertinents pour nous aider à mieux faire appliquer les lois fiscales. Et, à l'intérieur de ces dossiers-là, ce n'est pas vrai qu'on va avoir accès à n'importe quelle information, notamment, comme je l'ai lu dans L'actualité récemment, une entrevue du Protecteur du citoyen, que les points de démérite des gens nous intéressent. C'est faux. Ça n'a rien à voir. Ce qui nous intéresse, c'est uniquement les informations qui sont pertinentes à l'application d'une loi fiscale. «C'est-u» assez clair? Bon.

Il y a un projet de loi n° 32 qui a été déposé, qui a été bonifié sur la base d'un certain nombre de commentaires que nous avons eus, notamment de la Commission d'accès à l'information et du Protecteur du citoyen, deux organismes qui ont émis un avis favorable suite aux modifications qui ont été déposées, et on applique simplement ce qui a été adopté par le législateur très strictement. Alors, je veux dire, il y a des gens qui ont l'air d'avoir le goût de reprendre toujours les mêmes débats. La loi n° 32 a été adoptée. Nous en faisons une application excessivement rigoureuse pour n'utiliser que dans quelques fichiers seulement gouvernementaux les informations qui sont directement pertinentes à une meilleure application des lois fiscales. C'est de ça qu'il est question, M. le Président, et de rien d'autre.

Alors, quand on évoque des scénarios plus ou moins apocalyptiques, moi, j'inviterais les gens concernés à relire la loi de façon très rigoureuse, O.K.? puis, deuxièmement, à s'intéresser davantage à la façon dont la loi est appliquée et à en tirer des conclusions. On a voulu pendant trop longtemps, je pense, s'asseoir sur des dispositions législatives, qui d'ailleurs n'étaient pas très claires, en ce qui regarde l'accès aux informations au ministère du Revenu, O.K., empêcher le ministère du Revenu de travailler avec des outils modernes, garder le ministère du Revenu à l'âge de pierre pendant que le restant de la collectivité se développait selon les plus récentes technologies en termes de traitement de l'information. Et ça a fait qu'à un moment donné on a dû déposer un projet de loi pour clarifier les choses, puisqu'il nous semblait que les organismes compétents, peut-être, tardaient un petit peu à adapter leur façon de voir à l'évolution naturelle des technologies et à l'utilisation des informations, M. le Président.

(20 h 40)

Alors, je pense que, là-dessus, on a une approche tout à fait responsable. Nous nous donnons nous-mêmes des critères d'évaluation très rigoureux. Nous sommes disposés à offrir un premier bilan bien avant la date d'un an qui nous est impartie normalement. Nous espérons que, dès le printemps prochain, nous pourrons fournir un premier bilan de l'opération. Nous donnons, à cet égard, à la Commission d'accès à l'information toute l'information qu'elle désire, même si, à la limite, on pourrait attendre à la fin d'une première année pour le faire. Et je pense qu'on adopte là-dedans, M. le Président, une attitude tout à fait responsable.

Moi, je souhaiterais, en tout cas, si on veut faire avancer les choses dans la société, qu'on arrête de faire des guerres de principe pour des guerres de principe, alors qu'on empêche l'ensemble de la société ou des pans importants de la société d'évoluer simplement parce qu'on est campé sur des positions qui datent déjà de quelques décennies, dans certains cas.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci beaucoup, et j'espère que nous n'allons jamais mettre de côté nos principes à la base de notre société démocratique. J'espère que le ministre ne se cachera pas en arrière de ses phrases et de ses belles paroles afin de faire des choses dont la population québécoise ne veut pas. Et la population québécoise va surveiller cette démarche comme il faut, parce que l'opposition a été bâillonnée avec le projet de loi n° 32.

Et il y a des exemples que, quand le fisc arrive et commence à fouiller partout, il cause des problèmes. L'exemple des pourboires, on en discute. Mais l'exemple des vidéopokers, c'est un bon exemple que, effectivement, vous êtes traités tous de même. Et il y a certainement quelque chose que le fisc peut faire. Mais, avec une approche aussi généralisée que ça, on peut faire des erreurs et on peut causer de graves problèmes à plusieurs citoyens honnêtes. C'est pourquoi je questionne votre approche aussi généralisée, comme on commence à le voir, M. le Président.


Achat d'ordinateurs

Sur les dépenses, je voudrais, parce que le ministre a parlé de technologies aussi... J'ai vu que, depuis plus ou moins le mois de février cette année, pour plus ou moins six mois, le ministère a dépensé presque 7 000 000 $ pour des ordinateurs, 2 003 ordinateurs, si ma mémoire est bonne. Avec ça, le ministre est en train d'acheter des ordinateurs pour partout. Est-ce qu'on trouve, encore une fois, dans le 30 000 000 $ un sprint de shopping des ordinateurs pour donner à vos employés tous les outils encore pour fouiller dans les poches québécoises? Toujours avec l'esprit que, selon moi, la population québécoise est traitée comme des mauvais payeurs de taxes avant d'être traitée comme des bons payeurs de taxes.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Bien, M. le Président, j'ai de la misère à comprendre la question exacte du député. Est-ce qu'il s'intéresse aux ordinateurs qu'on a achetés aux fins, par exemple, de permettre à nos vérificateurs de faire leur travail avec des outils modernes? On nous dit souvent: Revenu Canada est beaucoup mieux équipé.

M. Williams: Est-ce dans le 30 000 000 $?

M. Bertrand (Portneuf): Pardon? Non.

M. Williams: Est-ce qu'il y a des achats dans le 30 000 000 $?

M. Bertrand (Portneuf): Non. Pas pour la totalité, là.

M. Williams: Pardon?

(Consultation)

M. Bertrand (Portneuf): Une partie des acquisitions d'ordinateurs, depuis février dernier, est couverte par effectivement le 30 000 000 $, mais pas la totalité, bien sûr. Par voie de définition, on ne l'avait pas, le 30 000 000 $ à ce moment-là puis on était dans l'exercice financier précédent.

M. Williams: Dans la partie de... Dans mon cinquième point...

M. Bertrand (Portneuf): On m'informe que c'est 700 000 $ environ et non pas 7 000 000 $ qui a été investi dans l'achat des micro-ordinateurs.

M. Williams: Ça va être un autre 700 000 $?

M. Bertrand (Portneuf): Pour l'évasion fiscale, dans le secteur de l'évasion fiscale.

M. Williams: Ça va être un autre 700 000 $ au-dessus des 6 700 000 $ déjà dépensés?

M. Bertrand (Portneuf): Non. Ce qu'on dit, c'est 700 000 $ en micro-ordinateurs qui ont été acquis dans le cadre des programmes de lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.


Industrie du taxi

M. Williams: Merci. Nous avons parlé de la chasse aux sorcières avec les serveurs et serveuses. Je voudrais savoir, parce que, selon mon information, le ministre a parlé aussi du secteur des taxis, avec son programme: Est-ce que ce programme est en vigueur maintenant dans le secteur du taxi?

M. Bertrand (Portneuf): Le secteur du transport va faire l'objet – c'est une des 12 cibles cette année – effectivement de l'intervention du ministère du Revenu, et elle sera annoncée, quant à son détail, ultérieurement. Nous ne sommes pas encore prêts à annoncer quel pourra être le fin détail de l'intervention du ministère dans le domaine.

M. Williams: Dans ce secteur, comme exemple, la dernière fois que je suis arrivé ici de mon comté, par avion, j'ai appris que, effectivement, ils ont choisi le système de paiement de taxi, ici, à Québec: il y a des prix fixes maintenant et on n'utilise pas le «meter». Est-ce que le ministère était impliqué dans ces discussions sur un changement de la façon de payer? Si c'était un des secteurs ciblés par vous, est-ce que vous étiez impliqué dans les discussions avec la Commission de transport ici?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Non, je pense que ce n'est pas le rôle du ministère du Revenu d'être impliqué directement dans ces opérations-là. Nous avons, bien sûr, la responsabilité de récupérer les taxes et les impôts qui sont dus. Mais, en ce qui regarde la façon de tarifer, ça relève de l'industrie du taxi, à la limite, je présume, du ministère des Transports, mais certainement pas du ministère du Revenu.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Williams: Oui, merci. Parce que, selon lui, il cherche toutes les sommes dues, et j'ai pensé: Avec un changement aussi important que ça, le ministre du Revenu va avoir au moins un intérêt pour cette question. Mais j'ai compris que non, ce soir. Un troisième secteur...

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): ...je veux dire, ce n'est pas que le ministre n'a pas d'intérêt là-dedans. Mais ce secteur d'activité là, comme d'autres, se donne des règles du jeu, fonctionne d'une telle façon. On pourrait citer le cas de l'agriculture, ou le domaine de la foresterie, ou quelque autre secteur que ce soit. Le ministère du Revenu, bien sûr, s'intéresse à la façon dont les choses se passent pour lui permettre de récupérer ce qui est dû comme taxes et comme impôts, mais il y a une partie du tableau qu'il prend comme étant une donnée sur laquelle... Ça ne veut pas dire qu'on n'est pas intéressé au secteur. Ça veut dire que ce n'est pas nous qui décidons ces choses-là, c'est tout.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Nelligan.


Amélioration des services offerts aux citoyens

M. Williams: Oui, merci, M. le Président. Dans mes remarques préliminaires, j'ai mentionné que j'espérais que le ministre utilise une partie des 30 000 000 $ – j'espère, une bonne partie, franchement – pour améliorer les services pour les contribuables. Parce que, si vous parlez avec les contribuables, M. et Mme Tout-le-Monde, et dites: Est-ce qu'on paie trop de taxes? je pense que, unanimement, tout le monde le dit: On paie trop de taxes. Est-ce que nous avons du bon service au niveau du ministère du Revenu? Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de personnes qui pensent qu'il y a un bon service. Si on demande quel niveau est le plus efficace, le fédéral ou le provincial, selon nous, et c'est «relevant» comme réponse, beaucoup de personnes disent qu'effectivement c'est plus efficace, c'est plus vite au niveau du fédéral.

Je voudrais savoir, M. le Président, particulièrement compte tenu que vous avez juste reçu un rapport sur la position du ministère du Revenu en matière d'avantages fiscaux liés aux projets de recherche et développement, un rapport qui était assez sévère contre le comportement du gouvernement et le ministère, qui dit, dans les recommandations, et je ne nomme pas toutes les recommandations, à la page 5, dans le résumé, 10,2: «Que le ministère du Revenu prenne, à l'avenir, tous les moyens raisonnables pour devenir un partenaire des contribuables qui, par leurs taxes et impôts, permettent de faire fonctionner l'État et ses programmes gouvernementaux.»

M. le Président, je voudrais donner une chance, et j'espère que le ministre a une réponse, ce soir... Dans les 30 000 000 $ qu'il cherche, ce soir, afin d'avoir plus d'argent – comme j'ai dit, il vient fouiller dans les poches des Québécois – quel montant et comment le ministre va l'utiliser pour actuellement aider les contribuables, pour rendre les services plus efficaces, peut-être réduire les délais, réduire le nombre des plaintes? J'espère que vous avez aussi une longue liste des programmes que vous pouvez déposer ce soir en réponse à ma question.

M. Bertrand (Portneuf): O.K.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

(20 h 50)

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, je pense que le député de Nelligan aborde vraiment une question très, très importante, et c'est une question, en tout cas, qui m'intéresse beaucoup, sur laquelle nous travaillons très fort. Le ministère du Revenu, ça a un rôle, des fois, un peu correctif, hein? On intervient toujours en vérification, en contrôle, en perception, puis ce n'est pas toujours très populaire. Cependant, il y a aussi toute une partie de notre travail qui peut être davantage justement centrée sur la prévention et l'éducation. Déjà, quand on investit 2 000 000 $ dans une campagne de publicité, ça vise justement à faire autre chose. Comme disait mon collègue le ministre d'État de l'Économie et des Finances, ce qu'on vise à faire, ce n'est pas de pincer les gens; c'est de faire en sorte que le monde respecte d'abord et avant tout le pacte fiscal, ce qui devient beaucoup plus simple pour tout le monde. Alors donc, la campagne de sensibilisation, c'est déjà un exemple d'argent, dans le 30 000 000 $, qui sert effectivement à autre chose qu'à juste intervenir en vérification et a posteriori.

Deuxièmement, on a mis l'accent dans l'ensemble des services du ministère, notamment au niveau de la vérification, pour développer de plus en plus le rôle de guide et le rôle éducatif du ministère du Revenu, et je m'explique. Le vérificateur qui va, par exemple, faire une vérification auprès d'une nouvelle petite ou moyenne entreprise, il a dans son mandat non seulement de vérifier des choses, mais également de conseiller le nouvel ou la nouvelle entrepreneure sur les règles de l'art en ce qui regarde le respect des dispositions fiscales, et ceci, de façon à éviter qu'un entrepreneur, ou une entrepreneuse, disons, ou entrepreneure, par méconnaissance des règles de base sur le plan de la fiscalité, se mette dans une situation financière difficile.

Alors, nous insistons beaucoup sur ce rôle qu'ont les vérificateurs et vérificatrices, notamment dans une perspective davantage d'éducation. On est même à la veille d'initier un programme, je dirais, d'éducation auprès des étudiants qui sont des travailleurs et travailleuses qui seront sur le marché du travail dans quelques années sur justement l'importance finalement de l'observance fiscale et sur ce que ça veut dire, payer ses taxes et impôts, en termes de rendement qu'on en tire par ailleurs au niveau des services publics, et sur ce que ça peut impliquer comme enjeu de faire défaut de les payer parce que justement ça empêche l'État de pouvoir continuer à supporter les plus démunis dans la société ou ceux qui, dans différentes phases de leur vie, ont besoin d'un accompagnement de la part de la collectivité.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Oui, dans le même rapport que j'ai mentionné sur le comportement du gouvernement dans les projets de recherche et développement, le Protecteur du citoyen a mentionné plusieurs erreurs au ministère. Notamment, le ministère du Revenu a également semé de la confusion par la création d'un numéro d'inscription à l'abri fiscal. Le ministre du Revenu a indûment tardé à procéder aux vérifications des déclarations des contribuables concernés. Je peux continuer. Il y a une longue liste de commentaires sévères. Finalement, la recommandation la plus importante, le Protecteur du citoyen a recommandé que les autorités fiscales renoncent aux réclamations pour les investissements effectués en 1991 et 1992.

Avec ça, M. le Président, ce n'est pas l'opposition qui dit que ça va mal chez vous; c'est le Protecteur du citoyen après une longue étude sur un dossier spécifique, Et j'espère que la démarche du Protecteur du citoyen ne va pas être juste mise de côté par vous, mais que vous allez en tenir compte et peut-être utiliser une partie de ce 30 000 000 $ pour améliorer l'efficacité du ministère du Revenu.

Je voudrais savoir, M. le Président: Est-ce que, dans l'embauche des 1 000 percepteurs, enquêteurs ou travailleurs, leur seule tâche est dans l'évasion fiscale dans votre programme de lutte contre le marché noir ou est-ce que vous avez, dans les 1 000 nouvelles embauches, un pourcentage qui sont là avec un objectif d'améliorer le système au ministère du Revenu?

M. Bertrand (Portneuf): Un objectif de... J'ai manqué.

M. Williams: D'améliorer le système et de rendre ça plus efficace...

M. Bertrand (Portneuf): O.K. Oui, oui.

M. Williams: ...de réduire les délais, tel que le Protecteur du citoyen l'a mentionné. Vous avez dit que vous étiez en train d'engager 1 000 personnes, dont 75 % sont déjà engagées. Parmi ces 1 000, est-ce qu'il y a un objectif d'effectivement réduire les délais, de rendre les services plus accessibles aux contribuables?

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, j'aimerais rassurer le député de Nelligan, porte-parole de l'opposition officielle. Non seulement ce qu'on fait dans nos programmes spéciaux au niveau de l'évasion fiscale, du travail au noir va nous permettre d'être plus efficaces effectivement, je l'ai expliqué tout à l'heure, en ciblant mieux les profils auxquels on doit s'intéresser davantage et on va en tirer des enseignements en termes d'efficacité de la vérification, d'efficacité de la perception, c'est bien sûr, mais l'ensemble du ministère, je veux dire, est engagé dans cet effort constant d'amélioration des services à la population. On se rappellera les engagements que le ministère a pris, il y a à peu près un an, pour justement réduire les délais d'attente, essayer de simplifier les choses le plus possible, transmettre le cahier de déclarations au plus tard à la fin de janvier. Il y a un certain nombre d'objectifs qu'on s'est donnés justement pour améliorer le service aux citoyens.

Maintenant, j'aimerais également brièvement commenter la question de la recherche et du développement, parce que le député de Nelligan, très habilement, l'aborde, la question de la recherche-développement, mais finalement finit sur une autre piste, ce qui fait en sorte qu'on a peut-être tendance à oublier les éléments du début de sa question. Rappelons-nous, M. le Président, que ce dont on parle quand on parle du dossier de recherche et développement, c'est que 3,7 % du total des produits en recherche-développement se sont révélés poser des problèmes. Il y a 46 000 personnes, pour 97 %, 96 % à peu près des produits qui ont été achetés, qui n'ont eu aucun problème parce qu'elles ont acheté effectivement des produits qui étaient tout à fait conformes au programme lui-même puis aux dispositions fiscales pertinentes. Premièrement, ça ramène le problème à sa véritable dimension.

Deuxièmement, moi, je retiens deux choses. C'est ce jugement qu'on a eu d'un comité d'experts qui dit que l'offre était équitable. Puis ce que le comité d'experts dit, dans mes mots, c'est: On est allé, comme autorité fiscale, comme ministère du Revenu, à la limite de ce qu'il apparaissait possible et décent de faire, pour des questions également de protéger l'équité à l'égard, d'une part, de ceux qui ont acheté des bons produits puis qui ont pu se prévaloir des dispositions fiscales pertinentes, à l'égard de l'ensemble de la population également, compte tenu des efforts que chacun doit mettre à un moment donné pour payer les taxes et les impôts.

Et la deuxième phrase que je retiens de particulièrement pertinente, qui est dans le rapport du Protecteur du citoyen – et, encore là, je vais paraphraser un peu parce que je n'ai pas le libellé exact de ce qui est dit – c'est quand le Protecteur du citoyen dit: L'État n'a pas à être responsable, plus ou moins, des vices qu'on peut retrouver dans les produits mis en marché par certains promoteurs. C'est ça qu'il dit. Alors, compte tenu de l'avis du comité d'experts sur cette question de même que de cette indication très claire contenue au rapport du Protecteur du citoyen, je pense que la chose est entendue.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. Je vous fais part qu'il reste à peu près quatre minutes avant la réplique du ministre, qui durera cinq minutes. On a commencé à et huit; cinq minutes et trois, alors...

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'accepte votre décision. Juste un bref commentaire sur le fameux rapport télégraphié par le ministre. Le comité ministériel, il me semble que c'est assez évident qu'il y a eu des conflits d'intérêts dans ce comité, quand le président de la CVMQ était aussi membre de ce comité. Mais nous allons continuer cette discussion peut-être un peu plus tard, parce qu'il me semble que le point peut-être le plus important, c'est que le fisc doit être plus ouvert et raisonnable, et j'espère qu'ils vont tenir compte de ce rapport du Protecteur du citoyen.

Mais je retourne aux 1 000 personnes que le ministre est en train d'engager. Je voudrais savoir combien de ces personnes ils ont prises dans la fonction publique. Parce que vous savez que les autres ministères sont en train de faire toute une démarche pour réduire, pour sauver de l'argent. Il me semble que, avec les 60 000 employés dans la fonction publique, il y a certainement plusieurs personnes qui sont tellement compétentes pour faire ce travail. Je voudrais savoir combien de ces 1 000 personnes viennent de la fonction publique, combien il y a de personnes qui ont déjà un emploi dans la fonction publique, maintenant.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, on pourrait faire parvenir à l'opposition officielle tous les détails relativement justement à l'embauche des personnes, notamment celles qui viennent de l'intérieur de la fonction publique et celles qui ont pu être recrutées à l'extérieur. Il me semble, de mémoire, que les personnes recrutées à l'intérieur de la fonction publique sont en minorité. Les dernières données que j'avais vues là-dessus, c'est environ 10 %, je crois...

M. Williams: 10 %?

(21 heures)

M. Bertrand (Portneuf): ...10% qui étaient de l'intérieur de la fonction publique, pour des questions essentiellement de profil, mais aussi de disponibilité et d'intérêt des personnes concernées. Il faut comprendre qu'il s'agit d'un travail assez spécial, celui de la vérification; donc, ça prend à la fois une formation, ça prend des disponibilités de base, si possible une expérience également. Donc, ce n'est pas n'importe qui, là, qu'on peut affecter à un travail aussi, je dirais, délicat que celui de la vérification et aussi spécialisé aussi dans le domaine.

M. Williams: Voilà une contradiction assez claire, que vous êtes en train de penser, selon votre information, 2 700 000 $ pour l'aménagement malgré le fait qu'il y a plein de bâtisses vides, propriétés du gouvernement. Vous êtes en train d'engager 900 personnes de l'extérieur de la fonction publique malgré qu'il y a des efforts pour réduire le nombre de fonctionnaires publics. Il me semble que vous êtes complètement hors du cercle, de ce qui se passe. Et il me semble qu'on peut faire beaucoup la même chose que vous souhaitez faire mais sans dépenser le 30 000 000 $, tel que vous êtes en train de le proposer avec les crédits supplémentaires. Je trouve votre réponse loin d'être satisfaisante, sur combien de personnes viennent de la fonction publique. Il me semble qu'avec un peu plus d'efforts on peut certainement trouver des personnes compétentes, avec la formation, etc., qui puissent remplir les tâches, telles que vous cherchez.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je peux assurer le député de Nelligan qu'on a pris toutes les personnes, dans le secteur public, qui étaient disponibles et qui avaient les caractéristiques ou les compétences pour assumer ces responsabilités-là. C'était même pour nous un devoir moral de procéder de cette façon-là.

En ce qui regarde la location d'espaces, il s'agit d'espaces qui étaient déjà disponibles dans le parc d'espaces de la Société immobilière du Québec et pour lesquels nous devons, effectivement, payer loyer à la Société immobilière. Donc, je pense que c'est une utilisation tout à fait rationnelle et justifiée dans les circonstances.

Le Président (M. Brouillet): Merci. Peut-être une dernière question et, après ça, bien le ministre pourra poursuivre avec son temps de réplique.


Augmentation des crédits

M. Williams: Oui, merci beaucoup. Brièvement, je vois, parce que nous sommes en train, toute la journée, d'étudier les crédits supplémentaires des autres ministères, et il y a des augmentations assez minimes dans plusieurs autres ministères, on voit ici, dans la cotisation, une augmentation de 7,7 %, vérification, 13 %, soutien technique, c'est un petit montant, mais direction et administration, 16 % d'augmentation. En général, une augmentation, selon mes chiffres ici, de plus ou moins 6,5 %. Pourquoi vous avez haussé hors cible avec votre planification? L'année est presque aux trois quarts finie. Pourquoi vous êtes vraiment, comme j'ai dit, hors cible en comparaison des autres ministères? Pourquoi les augmentations étaient aussi élevées que ça, en pourcentage?

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, est-ce que...

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je pense qu'on a des objectifs très ambitieux en termes de récupération fiscale: 220 000 000 $, cette année, qu'on doit aller chercher, alors que les mesures que nous appliquons, finalement, commencent à porter effet une fois que l'année est très engagée. Donc, on a une obligation de moyens et de résultat. Il faut aussi se souvenir que chaque dollar investi dans la lutte contre le travail au noir et l'évasion fiscale rapporte de 8 $ à 10 $. Donc, il s'agit certainement d'un investissement et d'une augmentation dans les budgets tout à fait justifiés, puisqu'ils rapportent le rendement que vous savez, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Si vous voulez, maintenant, pour votre réplique, il vous reste au maximum cinq minutes.


Remarques finales


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Je pense que, dans ses remarques au tout début de cette heure, le député de Nelligan faisait, souhaitait en tout cas que la population développe davantage sa confiance à l'égard du gouvernement et, notamment, dans notre domaine du ministère du Revenu. Et puis-je rappeler au député de Nelligan que, selon les sondages que nous avons faits au début d'octobre, 94 %, de mémoire, des personnes interrogées étaient totalement en accord ou plutôt en accord avec les mesures que nous entendions mettre en place et à l'égard également de la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir.

Alors, si on parle d'appui et de confiance de la population pour ce que nous faisons au ministère du Revenu du Québec pour faire en sorte que les Québécoises et les Québécois payent sur une base équitable leurs taxes et leurs impôts et contribuent donc au financement des services publics, je pense que le porte-parole de l'opposition officielle trouvera, dans cette simple donnée, je pense, qui est très illustrative, une réponse tout à fait éclatante à sa préoccupation.

J'aimerais également mettre une de ses affirmations en perspective, M. le Président, lorsqu'il dit qu'on frappe les plus démunis. Le programme de lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir a été configuré de telle façon que nous abordions les secteurs qui nous apparaissaient être les plus problématiques en ce qui regarde les pertes fiscales, et ce sont des secteurs qui couvrent l'ensemble du registre des travailleurs et des travailleuses au Québec, des entrepreneurs également. On ne s'intéresse pas uniquement, je dirais, aux bas salariés, uniquement aux hauts salariés, et j'explique souvent que les autorités fiscales, c'est un peu comme le soleil: ça éclaire tout le monde; tout le monde doit payer ses taxes et ses impôts. Les personnes qui gagnent peu de revenus paient peu d'impôts, les personnes qui gagnent beaucoup de revenus paient proportionnellement et progressivement beaucoup plus d'impôts. C'est comme ça que le système fiscal est constitué, et c'est en fonction de cette règle d'or que nous fonctionnons.

Alors, dans les cibles qui ont été identifiées cette année, on s'intéresse aussi aux professionnels, M. le Président; je ne sais pas, moi, ingénieurs, avocats, médecins. On s'assure, par exemple, dans ce cas-là, que les personnes, au moins, déclarent – c'est à tout le moins une règle minimale – les revenus qu'ils reçoivent de l'État, par exemple en ce qui regarde les médecins ou les ingénieurs. Donc, on ne s'intéresse pas uniquement aux salariés, je dirais, dans des niveaux de revenus peu élevés.

De la même façon, on s'intéresse bien sûr à des secteurs d'activité où il y a autant de richesse que nécessaire. Alors, là-dessus, j'aimerais donc rassurer le député de Nelligan, le ministère du Revenu s'est vraiment préoccupé pour couvrir tous les secteurs où on retrouvait l'essentiel de l'évasion fiscale et du travail au noir, et on retrouve dans ces secteurs-là des salariés ou des personnes qui tirent des rémunérations dans tout le registre qu'on peut connaître de revenus. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): C'est terminé? Très bien. Alors, la commission plénière ayant terminé cet échange, je remercie les personnes qui y ont participé. Et, pour permettre à la commission de poursuivre sa séance, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de le faire immédiatement. Je suspends donc les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 7)

(Reprise à 21 h 11)


Ressources naturelles

Le Président (M. Brouillet): Conformément à l'ordre adopté par l'Assemblée, au cours de la prochaine heure, nous allons procéder à un échange entre M. le ministre des Ressources naturelles et MM. les députés de Montmagny-L'Islet et de Richmond. Au cours de cet échange, une période de cinq minutes sera allouée aux députés indépendants. Avant d'accorder la parole à M. le ministre, on peut s'entendre peut-être pour une intervention de cinq minutes en remarques préliminaires?

M. Chevrette: Alors, c'est cinq à six minutes, max...

Le Président (M. Brouillet): Cinq, six, sept au plus, oui.

M. Chevrette: ...puis on donnera la réciproque, s'il n'y a pas d'objections.

Le Président (M. Brouillet): C'est ça, puis il y aura une réplique de cinq minutes qu'on vous réservera pour la fin. Alors, j'accorde maintenant la parole à M. le ministre des Ressources naturelles pour ses remarques préliminaires.


Remarques préliminaires


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Comme vous le savez, en vertu de la Loi sur les forêts et de la Loi sur le ministère des Ressources naturelles, il incombe au ministre des Ressources naturelles de protéger les forêts québécoises contre le feu. Cette responsabilité a été déléguée à la Société de protection des forêts contre le feu, ce qu'on appelle la SOPFEU, en janvier 1994. Vous me permettrez de prendre quelques minutes afin que nous examinions le système québécois de protection des forêts contre le feu.

Depuis qu'il a pris conscience de l'impact économique des pertes de bois, le Québec lutte contre les feux de forêts. Déjà en 1870 le gouvernement de l'époque adoptait l'acte concernant le défrichement des terres et la protection des forêts contre les incendies. Le système actuel est donc le fruit d'une longue évolution marquée par la création d'un premier organisme de protection en 1912, tout d'abord, puis 60 ans plus tard, par la formation de sept sociétés régionales de conservation. Il y a maintenant trois ans, afin d'améliorer encore l'efficacité du système, ces sociétés étaient fusionnées pour donner naissance à la SOPFEU. Cette dernière est désormais la seule responsable de la prévention, de la détection et de la lutte contre les feux de forêts. Avec des ressources flexibles et mobiles, elle est en mesure de protéger le milieu forestier de façon efficace et économique.

Chaque année, il coûte à la société québécoise quelque 40 000 000 $ pour protéger nos forêts contre le feu; 85 % de ce budget va à la prévention et à la détection; le reste, soit 15 %, est consacré à la lutte contre les incendies proprement dits. Le ministère verse à la SOPFEU les sommes requises pour assurer la protection des petits boisés privés de moins de 800 hectares d'un seul tenant et des forêts publiques non allouées. Il paie 50 % des coûts liés à la protection des grandes forêts privées et des territoires forestiers couverts par des CAAF. L'autre moitié de la facture est assumée par les industriels et les grands propriétaires privés. Tout le territoire québécois est couvert par ce système de protection contre le feu; il est cependant divisé en deux zones d'intervention: la zone de protection intensive, dont la limite nord correspond à celle des territoires sous CAAF, et la zone de protection restreinte où la protection n'est pas organisée systématiquement, car les coûts en seraient injustifiables. Dans cette zone restreinte, la SOPFEU n'intervient que si un feu de forêt met en danger des vies humaines, menace des infrastructures de valeur ou risque de se propager aux aires communes adjacentes. Elle agit aussi en fonction des ressources humaines et matérielles requises et des coûts prévus.

Depuis deux ans, nous connaissons des saisons de feu particulièrement dévastatrices. En 1995, 180 000 ha de forêt en zone de protection intensive ont été brûlés alors que, en 1996, 1 117 incendies forestiers ont détruit 240 000 ha de forêt. À elle seule, la foudre qui s'est abattue du 11 au 13 juin 1996 a allumé 45 % des incendies de la saison, affectant environ 96 % de la superficie brûlée. Quand on y pense sérieusement, dans l'espace, à peine, de quatre jours, 45 % des feux ont été allumés par la foudre, ce qui représente 96 % de toute la surface brûlée.

Les combattants de feux de forêt, à qui je rends un hommage particulier, ont connu le 13 juin un sommet historique dans l'histoire de la protection des forêts au Québec alors que 378 feux étaient en activité. Ils ont d'ailleurs été débordés, puisque l'organisation dont nous disposons permet d'intervenir sur 125 incendies seulement à la fois. Les secteurs situés au nord-est de Matagami et au sud-est de la Chute-des-Passes ont donc été à toutes fins pratiques privés d'interventions rapides, et plusieurs incendies d'envergure se sont alors propagés en territoire peu accessible. Outre le sommet historique du 13 juin, on se rappellera de la saison 1996 comme se classant au deuxième rang au chapitre des pertes forestières. De fait, il faut remonter à 1991 avec les grands incendies forestiers tristement reconnus de la Côte-Nord pour trouver une saison plus dévastatrice alors que 380 000 ha de forêt avaient été brûlés.

Cette année, la SOPFEU a donc eu recours à l'intervention d'autres provinces ainsi qu'aux États-Unis pour venir à bout de la situation. En juin, elle a appliqué des mesures restrictives de prévention comme l'interdiction partielle ou totale de faire des feux à ciel ouvert et l'arrêt partiel ou total des opérations forestières. Je suis même intervenu pour interdire la circulation en forêt pendant une semaine dans un secteur au nord de Chibougamau et dans la région de la Chute-des-Passes. Et puis il y a eu une évacuation partielle par la sécurité civile des villages de Waswanipi et de Baie-du-Poste.

Une saison d'incendies de forêt exceptionnelle entraîne, vous vous en doutez bien, des coûts exceptionnels, bien sûr. En 1996, ils ont été quatre fois plus élevés que la moyenne, pour un total de 32 900 000 $. Notre quote-part, en vertu de la loi qui nous gouverne, s'élève à 21 100 000 $. Il nous a donc fallu demander des crédits supplémentaires de 19 300 000 $, car les sommes ministérielles réservées à l'extinction des feux de forêt ne sont que de 2 500 000 $. Je suis persuadé que les membres de cette commission ne pourront que convenir de la nécessité de ces crédits supplémentaires. Ils sont attribuables à des événements hors de notre contrôle. Les feux de forêt sont des phénomènes naturels avec lesquels il faut composer. Il en va de même avec les épidémies d'insectes qui sont, par leur nature même, difficilement prévisibles, bien qu'elles doivent absolument être combattues. Parfois, le prix à payer est élevé, mais celui auquel nous aurions à faire face en cas de non-intervention serait lui aussi astronomique. N'oublions pas que la ressource forestière est à la base de notre économie et que les régions lui doivent une bonne partie de leur santé économique.

Je m'en voudrais de terminer cette courte allocution sans rendre hommage aux hommes et aux femmes qui combattent les feux de forêt dans des conditions souvent extrêmement difficiles. Je tiens à souligner leur ténacité et leur savoir-faire. Au cours des années, ils ont développé une expertise unique qui fait l'envie de plusieurs pays. Grâce à eux, le Québec a atteint en matière de lutte contre les feux de forêt une réputation d'excellence, et je tenais à le souligner. Je vous remercie, M. le Président.

(21 h 20)

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Montmagny-L'Islet.


Discussion générale


Efficacité de la SOPFEU

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Pour les crédits supplémentaires de 19 300 000 $, je pense que le ministre a fait le tour de la situation, mais il y a un certain nombre de questions qu'on doit se poser. On sait que la foudre et les feux de forêt, surtout dans une période concentrée sur quelques jours, comme vous l'avez mentionné tantôt, je pense qu'on doit le reconnaître, ce n'est pas nécessairement facile. La question qu'on doit se poser, je sais que vous allez être en mesure de nous rassurer et que vous avez sûrement certaines réponses, c'est: Est-ce que la SOPFEU est préparée à faire face à des situations comme ça dans les régions nordiques, là où les feux de forêts ont été les plus intenses, soit la Côte-Nord et la région de Maniwaki? Et je pense qu'il y a deux autres régions au Québec où les feux de forêts ont été plus remarqués et ont fait des pertes considérables. Parce que la forêt, au Québec, c'est une richesse sur laquelle, je pense, on n'a pas élaboré très, très longtemps. Tout le monde le reconnaît, que, depuis des dizaines et des dizaines d'années, en région, elle stimule l'emploi, et je pense que c'est ce qui garde l'économie active.

Les industriels investissent beaucoup d'argent pour mettre en place des infrastructures. Des scieries, des papetières modernes dépendent de l'approvisionnement, et je pense que nous avons une responsabilité, comme société, de s'assurer justement que, quand il y a des phénomènes comme ceux-là qui se présentent, le gouvernement du Québec, par la SOPFEU, est en mesure de répondre. Et, sur l'expérience de 1995, je pense, M. le ministre, qu'on a échangé. Si je me rappelle bien, c'était au cours du mois de mars passé. On avait refait le bilan des activités de la SOPFEU en 1995 et on se posait cette question-là à savoir: Est-ce que le phénomène, en fait l'année 1995, qui a été aussi active sur le plan des feux de forêts, a apporté une expertise à la SOPFEU et est-ce que ça peut lui permettre, en 1996, d'avoir des techniques différentes, d'être mieux préparée à faire face à des situations comme celles qu'on vient de connaître, soit la foudre qui a engendré, comme vous le mentionnez, 45 % de tous les feux de forêts au cours de l'année 1996?

Je comprends que, dans l'espace de quelques jours, l'équipement ne pouvait pas être partout en même temps et les ressources humaines. On a dû faire appel à des travailleurs de l'extérieur. Ça aussi, je pense que ça doit être une expérience qui devrait servir à la SOPFEU, et j'aimerais vous entendre, quitte à y revenir pour voir. En fait, quelles réflexions SOPFEU a eues, et votre ministère, depuis ces événements? Parce que vous allez sûrement nous expliquer que le 19 000 000 $ additionnel vient s'ajouter au 15 000 000 $ qui avait été déjà prévu.

M. Chevrette: C'est 2 500 000 $...

M. Gauvin: 2 500 000 $?

M. Chevrette: ...qui est la base annuelle.

M. Gauvin: O.K.

M. Chevrette: On vient toujours en crédits supplémentaires, si ça dépasse cette somme. Mais je dois vous dire que... Vous mentionnez des endroits; est-ce qu'on avait des bases? Oui, on a des bases à Matagami, on a une base à Chibougamau, on en a à Baie-Comeau, on en a à Manic 5, puis il y a des sous-bases aussi, par exemple dans les camps forestiers d'envergure. On a Chute-des-Passes dont on parlait tantôt. Il y a des sous-bases qui nous permettent de travailler.

Le dilemme est le suivant: c'est que, si on est capable de faire face environ à 125 feux de forêts, on ne peut pas prévoir toujours être équipé en fonction d'un «peak» anormal. C'est 125 feux, pour être à l'aise dans notre travail. Mais, quand on en a 378, comme ce fut le cas le 13 juin, c'est évident qu'il faut faire appel à l'extérieur, comme on rend des services à l'externe, nous, quand on a des périodes relativement calmes puis qu'ailleurs c'est perturbé. Donc, ça, il y a des ententes, vous le savez très, très bien. S'il y a des ententes au niveau de la main-d'oeuvre, il y a des ententes également au niveau de l'équipement, et ça, je pense qu'on doit s'équiper pour une moyenne normale. Cette année, c'est quatre jours. Du 11 au 13 juin, là, ça a été dramatique, puis à cause de la foudre. Un nombre incalculable.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Gauvin: M. le...

M. Chevrette: Mais l'expérience de l'an passé...

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: ...pour répondre à votre question... Il y avait eu des critiques, effectivement, l'an passé, vous vous rappellerez. Je pense que... Je ne sais pas si c'est en commission parlementaire, je crois, qu'on a eu à s'expliquer. Il y a eu beaucoup de travail de fait, de rectificatifs d'apportés. Moi, je crois véritablement que, cette année, c'est à cause du nombre, et on ne peut pas critiquer ou servir les mêmes arguments qu'on aurait pu servir l'année précédente. Il y a eu véritablement ajustement de tir.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Gauvin: Oui. On se rappelle tous, la population avait été très critique, surtout à l'égard du feu qui avait perduré à Bonaventure et au nord de Baie-Comeau, d'une part. Sans revenir sur ça, est-ce que la SOPFEU a un système de patrouille particulier dans des périodes où la foudre est très intense? Pour avoir autant de feux de forêt sur quatre ou cinq jours, je pense que, après 24 heures, la SOPFEU a dû réagir. Est-ce qu'ils ont mis en place un système de patrouille pour détecter dans les meilleurs délais? J'imagine que oui, mais j'aimerais que vous nous expliquiez de quelle façon ils s'y prennent.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: Je pense que la meilleure explication, ce serait d'inviter mes collègues à venir visiter le centre. C'est vraiment... Ça vaut la peine. Je ne l'avais pas vu, moi, puis je me suis payé une visite avec ma collègue ministre déléguée aux Forêts, aux Terres et aux Mines, et on est allés visiter ça. Et on voit tous les points de départ. On suit même les avions, les hélicoptères qui sont en détection; on les suit même sur le terrain, à la minute près. C'est vraiment impressionnant de voir le système de détection qui existe. C'est bien sûr que, quand il se déclenche 45, 50, 60 feux dans une journée, il y a l'utilisation maximale, bien sûr, de l'équipement que l'on a. Pour certains, ça dépend où ils sont situés. Il y a des zones plus propices aux feux de forêt que d'autres. Il y a des feux qui ne demandent pas nécessairement une intervention. C'est entouré de cours d'eau ou c'est assez bloqué; on sait à peu près ce qui peut se détruire.

J'ai personnellement vécu ça, moi, quand j'étais très jeune, un feu de forêt. Je «peux-tu» vous dire que c'est impressionnant, dangereux! Quand ça part, là, ceux qui sont peureux, ils sont mieux de s'enlever de là parce que c'est énervant, affolant. Ça saute, ce n'est pas croyable. Il se crée une pression à un moment donné, puis vous pouvez voir une boule de feu facilement sauter des centaines de pieds puis se trouver avec un feu, avec une lisière de bois complètement épargnée qui aurait pu brûler – c'est les mêmes essences. Puis, tout d'un coup, le feu est rendu plus loin puis... Ce n'est pas facile, effectivement, puis il y a des endroits, je pense, entre autres... En Abitibi, là, j'ai vu des feux de forêt qui sont venus à un cheveu de raser des pourvoiries, raser des camps forestiers. À Parent, vous avez entendu parler du feu de Parent. Quand c'est à proximité de villages ou bien... c'est encore pire. On souhaite... on prie. Les chapelets sortent, puis ils veulent que le vent change de bord, c'est évident. Mais je dois vous dire qu'on est fort bien équipé. Et je dirais même plus que ça: on fait l'envie de bien des gouvernements d'avoir l'organisation que l'on a.

M. Gauvin: Juste une question, M. le ministre...

Le Président (M. Brouillet): Oui, M. le député.

M. Gauvin: ...avant de passer la parole à mon collègue. Donc, ce qu'on doit retenir, c'est qu'il y avait déjà 2 500 000 $ de prévus au programme 2, élément 2, et le 19 000 000 $ s'ajoute à ce montant-là?

M. Chevrette: Notre quote-part, cette année, sera de 21 000 000 $.

M. Gauvin: S'établit à ce montant-là.

M. Chevrette: Oui, et c'est pour ça qu'il y a les crédits. C'est assez juste, ça, comme crédits. On met l'argent qui manque.

M. Gauvin: Toujours en restant dans ce domaine-là, les secteurs qui ont été brûlés, est-ce qu'il y a un programme de récupération qui se fait, déjà en place?

M. Chevrette: Oui, on va vous donner ça.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: Je vais vous donner ça. La récupération, tout d'abord, il y a 240 000 ha d'affectés, 50 % récupérables selon les évaluations du ministère, donc 120 000 ha; 240 000, 50 %, 120 000 ha. Les taux de boisement sont à 100 m³ à l'hectare. Donc, si c'est 100 m³ à l'hectare, ça fait 12 000 000 m³, ce qui fait 5 200 000 m³ en récupération. Donc, la moyenne sera de 43 %.

M. Gauvin: Ça se fait avec la complicité des industriels de chacune des régions?

M. Chevrette: Ça se fait non pas avec la complicité mais avec la participation.

M. Gauvin: Participation.

M. Chevrette: Le mot «complicité» peut être un peu fort ou pas assez fort. Il n'y a pas de cachette qu'on cherche à aller chercher le maximum, d'autant plus que le bois... Ce n'est pas toujours propre de travailler dans un bois qui a connu un incendie de forêt. Mais je dois vous dire que c'est une excellente qualité, et on donne un peu d'incitatifs. Il n'y a pas de cachette. Il y a des crédits sur la coupe.

M. Gauvin: Oui.

M. Chevrette: Sur les droits de coupe.

Le Président (M. Brouillet): Maintenant, M. le député de Richmond aimerait intervenir.

(21 h 30)

M. Vallières: Peut-être une petite vite avant une suivante. Le ministre a parlé tantôt de certains services qu'on rend à l'extérieur du territoire québécois dans des périodes un peu plus tranquilles au Québec. C'est ce qu'on souhaite toujours, que ce soit tranquille dans les feux de forêts. On loue ces services-là, j'imagine? C'est sur quelle base, et ça peut représenter quelle proportion du budget de la SOPFEU? Est-ce que c'est fréquent? Est-ce que, bon an mal an, on rend des services? Et comment on calcule la facture qu'on envoie à nos partenaires, aux gens qu'on va aider?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: C'est par ententes, des ententes de collaboration, avec la Californie en particulier. À part de ça, c'est une belle vitrine, entre nous, pour nos CF-415; on peut en vendre, en plus. Et je dois vous dire que notre expertise est très bien reconnue, de sorte qu'on n'a aucune difficulté à conclure des ententes de collaboration avec la Californie, par exemple. Il y en a eu également avec quelques provinces canadiennes, en ce qui regarde l'équipement aérien en particulier.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Vallières: Donc, c'est de l'échange de services, ce n'est pas des coûts, là. Ils n'ont pas une facture...

M. Chevrette: On fait des échanges, mais il peut y avoir aussi des forfaits de prévus, à l'heure ou à... dans l'entente de collaboration. Si on prend x équipements, on les paie à tant de l'heure, on les paie à tant par jour. Il y a ce genre de contrat de signé ou des ententes qui prévoient déjà les taux.

M. Vallières: L'année qui vient de se terminer, ça peut représenter combien...

M. Chevrette: En échanges?

M. Vallières: ...en échanges? Oui.

M. Chevrette: Le montant précis, est-ce qu'on l'a? On vous fera parvenir les montants précis, combien ça représente en termes de collaboration. La comptabilité n'est pas terminée là-dessus.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Vallières: C'est au profit du ministère ou de SOPFEU? C'est SOPFEU, j'imagine, qui...

M. Chevrette: C'est SOPFEU qui conclut les ententes de collaboration, mais, nous, quand le bilan est fait, on sait quelle partie on a à payer puis que l'industrie a à payer. Et c'est ce qui fait que notre quote-part sera de 21 500 000 $.


Utilisation et régénération de la ressource forestière

M. Vallières: Mon collègue de Montmagny-L'Islet tantôt parlait de récupération du bois, c'est un secteur intéressant, mais il y a aussi toute la question de la régénération. Est-ce que quelqu'un est en mesure de nous expliquer comment vous procédez? On sait que dans le cas, par exemple, des détenteurs de CAAF, qui doivent pratiquer, eux autres, c'est des exigences du ministère, la coupe avec protection de la régénération et des sols, est-ce qu'on apparente cette méthode-là pour le suivi des feux dans les endroits où il y a eu des feux? Est-ce que le ministre peut nous expliquer comment on procède pour la régénération de ces coupes-là qui ont été détruites?

M. Chevrette: Au global, on prétend que, sur 240 000 ha, il y aura 20 % qui requerront des remises en production. Il faudra donc obtenir les plants, ce qui nous coûte à peu près 140 $ pour produire le plant à l'hectare; il y a la mise en terre, 360 $ de l'hectare; l'entretien, 500 $ de l'hectare; ce qui nous coûte environ 1 000 $ de l'hectare. Donc, si vous mettez 20 % de 240 000 ha, ça veut dire 48 000 ha à 1 000 $, ça nous coûtera 48 000 000 $ sur une période de cinq à 10 ans.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Vallières: Et ça, ça va être budgété à l'intérieur de...

M. Chevrette: Ça va être projeté, ça, dans les plans d'aménagement. Chaque année, on va mettre des argents pour ça.

M. Vallières: Donc, à l'intérieur du budget du ministère comme tel.

M. Chevrette: Bien, du ministère, mais on sait qu'il y a une partie de payée par l'industrie, parce qu'il y a un partenariat entre l'industrie et le ministère.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

M. Vallières: Peut-être une question au ministre, puisqu'on parle de régénération. Ça peut paraître un peu loin par rapport au sujet qu'on aborde, mais je suis sûr que ça va beaucoup intéresser le ministre, parce que, récemment, en Europe, j'avais l'occasion de rencontrer des gens qui, entre autres, avaient été largement alimentés par les Cris qui avaient tenu à Bruxelles une conférence de presse où on se plaisait surtout à décrier la façon dont le Québec se comporte vis-à-vis de la régénération, vis-à-vis du gaspillage, carrément, de cette ressource qu'est la forêt. Et c'est juste une parenthèse, parce que je sais que ce n'est pas l'objet direct de notre débat de ce soir. Mais ça nous fait mal un peu quand on est en Europe puis qu'on entend parler presque à sens unique de ce qui se passe, et de la violation de certains principes élémentaires de régénération de nos forêts, et d'usage comme tel de la forêt.

Est-ce que le ministre peut nous indiquer s'il aurait été sollicité par la délégation du Québec en France, ou en Belgique, ou ailleurs en Europe, pour qu'on puisse se donner une stratégie d'intervention pour faire contrepoids à ces attaques constantes que nous vivons et qui, à mon humble avis, ne correspondent nullement à la réalité québécoise? Et je ne saurais trop insister sur cette fausse réputation, mauvaise réputation qui est faite au Québec, alors qu'on mériterait beaucoup mieux que ça, au niveau de l'Europe plus particulièrement.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: Vous avez raison de soulever la question. Et je suis content et je vous remercie que vous la souleviez. D'abord, effectivement, quand on lit le document qui a été présenté par la communauté crie, ça se réfute à 100 %, des points qu'il y a là-dedans. Au contraire, le Québec n'est pas le dernier sur la mappe, là, de l'aménagement forestier puis de la discipline qu'on a en forêt, avec les RNI. On est à revoir, même, notre régime forestier.

Vous savez qu'on reboise de moins en moins mais qu'on laisse surtout les repousses par nos plans de coupe, où il y a une rentabilité, jusqu'à cinq à six, sept ans dans certaines essences, si on fait attention dans la façon dont on coupe notre bois pour que sa régénération soit plus rapide. Sauf qu'on a constaté effectivement qu'il nous fallait un plan d'action pour être proactif et non pas en réaction. Et il y a tout un plan sur papier présentement, là. On va utiliser, soit par nos délégations, mais soit aussi par certaines missions, on va utiliser des argents pour faire la promotion, carrément, de notre savoir-faire en forêt.

Je trouve ça dommage que certaines communautés ou certains groupes contribuent à ternir l'image du Québec à l'extérieur. Mais la même communauté crie, je ne me cacherai pas de vous dire qu'ils sont venus en commission parlementaire dans le domaine de l'énergie la semaine passée; ils ne veulent pas qu'on harnache aucun cours d'eau, mais ils sont prêts à importer de l'électricité faite au charbon polluant d'ailleurs, par exemple. Il va falloir qu'on ait une cohérence, une logique, quel que soit le groupe qui parle. Il va falloir qu'on soit proactif, capable de démontrer notre savoir-faire sur le plan technologique, sur le plan scientifique, de la façon dont on procède. Parce qu'on pourrait bien avoir une forêt complètement reboisée artificiellement, là. Mais je pense qu'on a évolué beaucoup au Québec; on a des méthodes de faire. Je ne vous dis pas qu'on est parfait. Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas des industriels qui ne commettent pas des fautes. Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas qui ne respectent pas, de temps en temps, les plans de coupe. Ça, c'est clair, on en a. On n'est pas une société parfaite. Mais, dans l'ensemble, on doit dire qu'on a franchi de grands pas.

Et, cette année, ce sera l'année de la révision du régime forestier. On va avoir à se pencher précisément sur plusieurs dimensions, plusieurs facettes de notre régime forestier. Puis on va continuer à évoluer. Puis ça, je pense que tous les gouvernements qui se sont succédé depuis des années ont fait beaucoup attention à l'amélioration du régime forestier. Puis je pense qu'avec la notion de développement durable qu'on a introduite dans la forêt – je sais que le député de Montmagny-L'Islet y a contribué; on a même introduit cette notion de développement durable dans l'avant-propos ou le préambule du projet de loi. Mais je pense qu'on évolue, on évolue grandement, et je pense qu'on va y arriver.

Mais je retiens non seulement que la question est importante, mais il nous faut être proactif à l'extérieur. On a des ressources externes, on peut avoir des missions aussi, puis on peut aussi inviter des gens à venir voir sur place puis à comparer.

M. Vallières: Ce serait intéressant, M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Richmond.

M. Vallières: ...d'entendre le ministre là-dessus. Parce qu'on s'adresse ici à une ressource naturelle du Québec. On sait qu'on en a une, là, en Europe – puis je vois Mme la ministre des Mines qui est là – vis-à-vis le sort qui est réservé à un minerai qui est l'amiante, où on se donne un plan d'action, où on se donne le devoir d'être proactif. Alors, j'espère que, dans le domaine de la forêt, ce plan d'action là... D'abord, j'aimerais savoir si le ministre a un échéancier, s'il peut me dire sur combien d'années, sur quelle période il a l'intention d'étendre ce programme? Et est-ce que ça coûte de l'argent? Est-ce qu'il y a des sommes d'argent qui vont être prévues à cet effet-là?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

(21 h 40)

M. Chevrette: D'abord, oui, il y a des sous dans les programmes actuels. Mais je dois vous dire qu'on commence. Ce n'est pas toujours de l'argent. Par exemple, quand on a invité des journalistes puis qu'il y a eu un article dans le journal Libération , journal de Paris, 28 novembre – je vous l'enverrai, d'ailleurs... Écoutez, ils sont venus ici, ils ont pu visiter. Et qu'est-ce qu'ils ont dit dans cet article? C'est que le Québec a une stratégie extraordinaire, c'est excellent. Ils vantent les technologies québécoises. On dit qu'on ne fait plus de coupe; on jardine, on fait du jardinage. Et on va vous l'envoyer. Un petit coup d'encensoir, c'est mieux qu'une rebuffade.

M. Gauvin: M. le ministre...

M. Chevrette: Mais il faut utiliser aussi les délégations du Québec, effectivement, à l'étranger partout quand on le peut et, au besoin, il y a des budgets effectivement pour être proactif.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: M. le ministre, vous avez fait allusion tantôt – je pense que j'aimerais y revenir – aux méthodes de coupe, et l'atmosphère s'y prête bien. On reviendrait sur les présentations qui ont été faites au Sommet sur l'économie et l'emploi par le groupe des coopératives, la Conférence des coopératives forestières. Ils ont présenté deux projets, dont un cadre très bien. Un, surtout, était... Je pense que le projet principal était au niveau des coupes d'éclaircies commerciales, puis le deuxième était non moins important, l'aménagement forestier. Est-ce que vous sentez qu'il y aura des suites à ces projets qui ont été présentés? Est-ce que ça cadre bien dans vos plans d'action?

M. Chevrette: Bien, les discussions sont entamées...

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: ...avec la Conférence des coops...

M. Gauvin: Oui.

M. Chevrette: ...c'est pour les éclaircies commerciales, puis il y a un plan de travail également de prévu et on devrait aboutir. Nous, on était prêts en tous points, sur les principes, sur l'acceptation, lorsque le Sommet s'est déclenché. On avait négocié cela avant le sommet économique. Donc, là, il s'agit d'établir des modalités, maintenant, de fonctionnement. Mais les tâches seront partagées dans la préparation de tout cela, mais ça devrait fonctionner, parce qu'il y a certaines régions qui, entre vous et moi, comptent énormément sur ces deux projets-là pour des emplois intéressants.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Je sais qu'on s'éloigne un petit peu du plan de protection des incendies, là, mais vous y avez fait aussi allusion et j'en profite. Suite au projet de loi passé qui a mis en place des comités de gestion pour des plans de forêt durable et, surtout, le projet de loi qui a été passé il y a quelques mois, comment est-ce que les gens se sont positionnés dans la mise en place des comités de gestion puis de l'application?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: Oui, ce sont les agences «De forêt en forêt».

M. Gauvin: Oui.

M. Chevrette: Les agences, il y en a 12 qui sont officiellement en opération, instituées. J'ai même signé les lettres patentes. J'en ai signé une autre aujourd'hui. Il en reste sept ou huit, je crois, à finaliser, maximum; sept, je crois. Ça va assez bien, merci. Il y a quelques petits problèmes d'ajustement. Au niveau, par exemple, du financement, il y en a qui disent: Bon, bien, on aurait pu prendre un moyen de financement différent. Mais, pour la première année, on a dit: on s'engage à le réviser au besoin, cela. Mais, dans l'ensemble, c'est bien, ça va même très bien.

Et là vous savez qu'on a à la fois les producteurs privés qui acceptent de faire partie de ces agences-là. C'est assez extraordinaire qu'au Québec on ait réussi à intéresser les propriétaires privés à la gestion, à l'aménagement des forêts. On sait que c'est une source, par contre, d'approvisionnement intéressante, la forêt privée au Québec. Puis l'industrie en général participe, le monde municipal participe. Le gouvernement paie une large part des agences: pour partir, c'est 60 %; après ça, c'est 20 %-20 %, l'industrie et les propriétaires. Donc, dans l'ensemble, c'est assez unique, ce qu'on fait là.

Puis on va sans doute arriver très prochainement avec un cran additionnel au niveau de la forêt. On a la forêt publique, la forêt privée, les agences, et on s'en vient avec une politique de forêt habitée, où on consultera après les Fêtes dans chacune des régions du Québec pour marier les différentes utilisations dans la forêt.

M. Gauvin: Ça va.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Pour revenir aux secteurs où il y a eu des feux de forêts, les secteurs où il y a eu des pertes d'approvisionnement, est-ce que ça aura un impact sur l'approvisionnement de certaines industries? Est-ce que le plan d'approvisionnement... les pertes qu'il y a eu l'an passé à l'occasion des feux de forêts, est-ce que ça change le plan ou les permis de coupe au niveau des CAAF et le plan d'approvisionnement, par exemple pour les cinq prochaines années? Et, si oui, dans quels secteurs vous allez devoir revoir la planification des permis de coupe?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: Bien, les feux étaient très au nord. Donc, l'impact, est-ce qu'il est majeur? Non. Est-ce que ça obligera à quelque réaménagement pour quelques industriels? Peut-être. Mais, règle générale, il n'y a pas un débalancement, là, on n'a pas à faire face à un grand débalancement. Puis ça n'affecte pas la possibilité globale. Et, avec une stratégie d'aménagement, on peut faire les ajustements qui s'imposent.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Montmagny-l'Islet.


Commerce du bois avec les États-Unis

M. Gauvin: Est-ce qu'on peut, M. le ministre, profiter que vous êtes là et avoir vos commentaires sur le phénomène... le référendum qu'il y a eu le lendemain, l'année passée? Vous savez, je représente une région où les gens, les industriels étaient très inquiets, et on sait que ce n'est que partie remise. Quelle est la position du ministère pour supporter, je dirais, tout près d'une vingtaine d'industriels qui s'approvisionnent dans le Maine, dans l'État de New Hampshire, avec des volumes très importants, jusqu'à 80 % du volume d'approvisionnement? De quelle façon le ministère se prépare à supporter ces industriels-là?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: Bien, je vais vous dire carrément ce que je pense. Les Américains sont les champions du libre-échange. C'est eux qui ont présenté la signature d'un traité de libre-échange au Canada. C'est le Québec qui a supporté le Canada à l'intérieur de ce marché de libre-échange. Rappelez-vous, à l'époque, n'eut été du Québec, je ne suis pas certain que le traité de libre-échange Canada–États-Unis se serait signé. Vous vous rappellerez toute la réticence qu'avait l'Ontario en particulier pour ses vins et pour autre chose.

Donc, moi, personnellement, je pense qu'il va falloir qu'on explique très clairement à nos amis américains qu'un traité de libre-échange, c'est un traité de libre-échange. Personnellement, vous savez que j'avais même des réticences avec l'imposition des quotas dans le bois d'oeuvre qui a eu lieu l'an passé. Je ne me suis jamais caché pour le dire: On signe un traité de libre-échange ou on ne le signe pas. Et quand on a signé un traité de libre-échange puis qu'on veut imposer des quotas, des quotas, c'est complètement à l'encontre de l'esprit d'un traité de libre-échange. Que le gouvernement américain soit en élection ou pas, le traité de libre-échange, la nature n'est pas changée parce qu'il y a une élection aux États-Unis.

Sauf que je crois que le Canada, comme tel, et plus particulièrement la Colombie-Britannique, n'a pas aidé au fait qu'on se soit fait imposer des quotas. Bien, imposer, c'est une façon de parler, parce que ça a été négocié. Personnellement, je pense que la Colombie-Britannique n'avait pas la force politique pour mettre de l'ordre dans sa forêt, donc elle s'est servi des États-Unis pour faire imposer des quotas et faire en sorte qu'on soit tous pénalisés.

Et, actuellement, au moment où on vit, là, il y a des problèmes avec cela. Il y a des industries – vous en avez sans doute entendu parler vous autres mêmes – qui sont pénalisées parce qu'elles vendaient leur bois à une entreprise qui, elle, n'a pas déclaré nécessairement le nombre de p.m.p. qu'elle a envoyés aux États-Unis, puis elle se voit attribuer des quotas à l'exportation, compte tenu du fait qu'il y a maintenant une taxe à l'exportation si tu dépasses tel quota. Et ça crée un malaise assez profond dans l'industrie du bois d'oeuvre, entre autres. Je pense qu'il va falloir qu'on revienne à la charge, qu'on demande au Canada d'abord de faire respecter le traité de libre-échange dans la lettre et dans l'esprit et qu'on n'ait pas peur d'appuyer l'entreprise forestière québécoise. Parce que la notion de libre-échange, de libre circulation des biens et des personnes, ça ne peut pas, à mon point de vue, permettre, pas plus à une province de l'ensemble canadien qu'à un État américain, d'imposer ses volontés. C'est de pays à pays.

Le Président (M. Brouillet): M. le député.

(21 h 50)

M. Gauvin: M. le ministre, le ministère des Ressources naturelles était très présent à l'occasion des négociations au niveau des quotas avec le gouvernement d'Ottawa, et le ministre et le ministère ont accepté finalement l'issue des négociations. Aujourd'hui, on réalise que ça ne donne pas tout à fait ce à quoi les industriels s'attendaient, ça crée des problèmes à certaines industries, d'une part. Est-ce qu'il y a une possibilité de revoir ça? Est-ce qu'il y a encore – on le sait que ce n'est pas finalisé, je pense – des décisions encore à être rendues? Est-ce qu'il y a des dates, des échéances?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Chevrette: Tout d'abord, je voudrais corriger un petit point. Ce n'est pas le ministère qui a accepté la négociation. Je peux vous dire que M. Landry, le ministre des Finances, et moi avons eu des réticences jusqu'à la toute dernière minute, que nos fonctionnaires ne nous conseillaient pas cette entente-là. Et celui qui est à ma gauche, M. Robitaille, était directement dans la négociation. Mais les industriels négociaient, ils étaient là. Ce sont eux qui ont décidé, en fin de compte, de l'accepter, le fruit de ces négos-là. On s'est tout simplement rendus à la volonté de l'industrie. Puis ils ont dit: Bah! peut-être qu'on est mieux d'accepter ça plutôt que d'avoir des troubles puis... Ils ont accepté. On a suivi, effectivement.

Mais on avait prévu à peu près les troubles qu'il y a présentement. Rappelez-vous, on voulait, dès le départ, nous, que ce ne soit pas global, cette histoire-là, puis qu'on puisse identifier au moins pour chacune des entreprises pour ne pas que la situation bordélique prenne, puis on est dedans. Et je pense que notre industrie reconnaît à ce moment-ci... Je les ai rencontrés, les deux groupes, l'AIFQ et l'AMBSQ, tout dernièrement. On a discuté avec eux autres. On demande d'ailleurs au gouvernement canadien de faire son lit puis de corriger les injustices flagrantes qui sautent aux yeux présentement pour plusieurs industries québécoises. Et je suis convaincu qu'il faut revoir la méthode, c'est évident. Il faut revoir la méthode. On savait que ça ne marcherait pas, puis ça ne marche pas. Puis on risque d'avoir des entreprises qui, même, très tôt après les Fêtes, seront sans doute obligées de fermer. Puis il y en a qui ont commencé, me dit-on, au moment où on se parle. Et cela, je pense qu'on est... Au niveau de l'industrie, il y a un excellent dialogue là-dessus avec le ministère. On va intervenir en temps et lieu. On a un plan de stratégie ensemble. On sait qu'à tel moment c'est l'industrie qui va intervenir auprès du gouvernement fédéral pour demander des choses précises. Nous, comme ministère, on va les supporter dans leur démarche visant à apporter des correctifs à cela.

Mais je pense qu'on doit assumer – ce n'est pas le temps... Je donne les faits tels qu'ils se sont déroulés. Ce n'est pas dans le but de lancer une pierre dans la cour de nos industriels. Je pense que, sur le coup, ils ont évalué que c'était la bonne façon. Il faut dire qu'on avait eu deux décisions favorables antérieures, et peut-être qu'ils craignaient que de retourner devant le comité d'arbitrage, ça pouvait être... présenter certains dossiers. Moi, j'arrivais comme ministre à l'époque. Vous vous rappellerez, c'était en février, mars. Puis j'ai toujours eu de la réticence. Moi, j'en avais sur une question de principe, de la réticence. Quand tu signes un traité de libre-échange, tu ne t'en vas pas signer des quotas. C'est clair. C'est la qualité de ton bois qui fait que tu peux percer le marché. C'est de la valeur ajoutée à ton produit qui va te permettre de pénétrer le marché.

Mais, moi, ça m'a fait découvrir qu'on était dans un marché captif, puis qu'il faut travailler sur d'autres marchés, puis qu'il faut travailler sur d'autres projets de produits à valeur ajoutée qui vont nous permettre précisément d'avoir une industrie forestière florissante et puis qui vont nous permettre de percer les marchés asiatiques, les marchés européens. Mais on travaille dans ce sens-là, c'est dans ce sens-là qu'on travaille avec l'industrie, qu'on travaille sur les marchés extérieurs.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. M. le député de Richmond.

M. Vallières: J'aurais peut-être une question au ministre. Même si tantôt il nous a dit que, finalement, au niveau de l'approvisionnement en bois, étant donné que ça se situe au nord, très au nord, l'effet ou l'impact ne serait pas trop senti, en tout cas à court terme, est-ce que le ministre peut nous indiquer s'il y a quelqu'un au ministère qui a pu évaluer quel était l'impact à très court terme sur l'emploi de ces feux que nous avons connus et, également, les incidences à plus long terme sur l'emploi dans ces régions-là? On a parlé tantôt de régénération, de récupération du bois. Est-ce qu'on a pu tenir un bilan de l'impact senti, là, au niveau de l'emploi? On ne souhaite jamais que ça arrive, mais là il y a eu des feux. Est-ce que ça crée des emplois, dans le fond, à court puis à moyen terme?

M. Chevrette: Les feux n'occasionnent pas de pertes d'emplois. Au contraire, la récupération demande un peu plus d'emplois. Donc, en termes de bilan, il n'y a pas d'impact sur la perte d'emplois. Les quotas peuvent en avoir beaucoup plus, par exemple. Parce que, si t'es plus capable de liquider ton bois sur le marché américain parce que t'as atteint tes quotas ou que le coût n'est tellement pas bon, à un moment donné, parce qu'il y a des dents de scie dans cela, puis que payer ton 125 $, 130 $ de taxe à l'exportation, bien, là, tu peux avoir beaucoup plus de pertes d'emplois parce qu'ils vont arrêter de produire. Ça, c'est plus négatif. C'est pour ça qu'on se débat présentement avec l'industrie pour essayer de minimiser l'impact de cela, minimiser au maximum.

M. Vallières: Est-ce que ça a été évalué, le 50 % récupérable, combien d'emplois que ça va requérir sur la base d'une certaine période de temps?

M. Chevrette: Oui, mais, quand vous dites qu'il y a 50 % récupérable sur le nombre d'hectares brûlés, ça ne veut pas dire que, en forêt, ça ne continue pas, l'activité économique. On concentre l'activité là où ça a brûlé, mais ça remplace une activité qui se serait faite ailleurs.

M. Vallières: O.K., ailleurs, oui.

M. Chevrette: Donc, dans l'ensemble, ça n'a pas d'impact sur l'emploi.

Le Président (M. Brouillet): Alors, est-ce qu'il y aurait d'autres questions?

M. Vallières: C'est le même phénomène, récupération et régénération. J'imagine que, si c'est coupé ailleurs, on régénère également. Donc, si on régénère en forêt qui a brûlé, c'est encore du déplacement d'emplois, dans le fond. Donc, on a peut-être un bilan qui est un peu nul à ce niveau-là. Donc, ça revient à dire un peu ce que le ministre disait, c'est que les...

M. Chevrette: Ça fait un petit peu plus à faire.

M. Vallières: Un petit peu plus.

M. Chevrette: Sur le plan de l'aménagement, vous avez raison, ça en fait un peu plus.

M. Gauvin: C'était ma question. Parce que, évidemment...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: ...ils auront à devancer, à certains moments, des volumes de coupe pour aller faire la récupération dans des délais prescrits, là. Je pense que c'est deux ou trois ans, la possibilité...

M. Chevrette: Deux ans, max.

M. Gauvin: Deux ans.

M. Chevrette: Si on veut que le bois soit de qualité minimale, là.

M. Gauvin: Ça va.

M. Chevrette: Alors, merci.

Le Président (M. Brouillet): Alors, on vous remercie. M. le ministre, est-ce que vous avez quelques...

M. Chevrette: Non, je remercie l'opposition pour ses questions. Je pense que c'est intéressant pour le public également en général de connaître ces différentes facettes, parce qu'on n'a pas la chance de parler de cela sur une base régulière. Je remercie les fonctionnaires et mes attachés politiques qui m'ont accompagné, ainsi que ma collègue, et je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Alors, la commission plénière ayant terminé cet échange, je remercie les personnes qui y ont participé. Pour permettre à la commission de poursuivre sa séance, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de le faire immédiatement. Alors, je suspends donc les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 59)

(Reprise à 22 h 10)


Éducation

Le Président (M. Pinard): Alors, conformément à l'ordre adopté par l'Assemblée, au cours de la prochaine heure, nous allons procéder à un échange entre Mme la ministre de l'Éducation et MM. les députés de Verdun et de Nelligan. Au cours de cet échange, une période de cinq minutes sera allouée aux députés indépendants. J'accorde immédiatement la parole à Mme la ministre de l'Éducation pour ses remarques préliminaires. Et, madame, je tiens à vous mentionner que vous avez cinq minutes pour vos remarques préliminaires et qu'à la toute fin vous avez également cinq minutes de réplique. Alors, Mme la ministre de l'Éducation.


Remarques préliminaires


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Il n'y a pas de problème, M. le Président. Alors, je vous remercie. Je vais simplement expliciter ce dont il s'agit, et on pourra ensuite commencer nos échanges. Alors, ce sont des crédits, c'est un budget supplémentaire de l'ordre de 40 000 000 $, et ces crédits sont requis à la supercatégorie Prêts, placements et avances, ceci pour faire suite à l'augmentation des réclamations des institutions financières relativement aux prêts non remboursés par les étudiants. J'aimerais rappeler, à ce moment-ci, M. le Président, les facteurs d'augmentation qui viennent expliquer cette hausse à la catégorie financière précitée.

Alors, le premier facteur d'augmentation, c'est d'abord, bien sûr, la conjoncture économique, qui continue d'être défavorable pour les jeunes emprunteurs. En effet, ceux-ci ont de plus en plus de difficultés à honorer leurs dettes, et ce, malgré les efforts des établissements financiers pour faciliter les moyens de remboursement. Je voudrais que l'on note toutefois que, malgré la forte croissance des réclamations, un pourcentage considérable d'emprunteurs honorent leurs dettes. Ce pourcentage se maintient actuellement, et c'est important de le noter, M. le Président, pour ne pas jeter, je dirais, ou pour ne pas semer la crainte auprès de jeunes qui pourraient s'imaginer concernés. Et heureusement qu'ils ne le sont pas. En fait, 90 % des jeunes réussissent à respecter leurs obligations, et ce, malgré que le nombre de faillites chez les jeunes augmente à un rythme accéléré.

Alors, le deuxième facteur, par ailleurs, qui vient expliquer la croissance du nombre et du montant des réclamations est la hausse observée dans les volumes de prêts alloués. La croissance de ces emprunts a été de 88,7 % entre 1990-1991 et 1995-1996.

Le troisième facteur explicatif est imputable au phénomène des faillites. En effet, on observe une évolution dans la nature des réclamations à la suite d'une hausse du nombre et du montant des faillites. On se rappellera que la Loi sur la faillite et l'insolvabilité a fait en sorte que ne sont plus des créances de premier rang ou ne sont plus garantis les prêts étudiants. Et, en ce sens et allié aux deux autres facteurs, le volume de prêts qui a augmenté, la conjoncture économique qui reste difficile pour les jeunes, on a constaté un nombre important de faillites. En effet, les étudiants recourent à cette Loi sur la faillite et l'insolvabilité, qui est une loi fédérale, de telle sorte qu'ils puissent se libérer de leurs dettes d'études et que les réclamations en raison de faillites soient remboursées aux établissements financiers de notre part, par le ministère, sans possibilité, par contre, d'intervention du ministère. On pourrait s'attendre d'ailleurs, M. le Président, si aucun changement ne vient, à une hausse du volume à ce chapitre dans les années qui viennent.

Alors, c'est l'essentiel des éléments que l'on retrouve au budget supplémentaire.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Vous avez terminé. C'est bien. Alors, M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie. Je pense qu'on va avoir des échanges qui vont être centrés essentiellement sur la Loi sur l'aide financière aux étudiants. Nous avons, de ce côté-ci, un certain nombre de questions à poser suite aux indicateurs qui sont soulevés par la ministre et aux inquiétudes que l'on peut avoir suite à cet endettement important chez les étudiants.

Deuxièmement, j'aimerais pouvoir profiter de l'échange que nous avons pour aborder quelques éléments du projet de loi n° 85, qui a été déposé par la ministre mais qui, compte tenu de notre règlement, va être adopté mais peut-être avec une procédure un peu exceptionnelle, et j'aimerais pouvoir échanger sur certains éléments de la Loi sur l'aide financière.

Je voudrais d'emblée comprendre la réalité des chiffres à l'heure actuelle. Vous demandez des crédits supplémentaires de 40 000 000 $ qui viennent s'ajouter évidemment à l'élément 2 du programme 3 sur l'aide financière aux étudiants. C'est bien de ça qu'on parle? Je répète: Vous demandez des crédits de 40 000 000 $ qui viennent s'ajouter à l'élément 2...

Mme Marois: Oui, oui, c'est ça. Pour la catégorie Prêts, placements et avances qui sont à l'élément 2. Tout à fait.

M. Gautrin: Parfait. Alors, l'élément 2, si je comprends bien, il était de 187 000 000 $ en 1995-1996, 213 000 000 $ en 1996-1997, et là, on va l'augmenter de 40 000 000 $. Il se décomposait, cet élément – et on va voir si on est d'accord sur les chiffres ensemble – ainsi: 117 000 000 $ en 1995-1996 étaient des paiements de transfert, 30 000 000 $ pour les provisions pour créances douteuses et 40 000 000 $ sur les prêts, placements et avances. En 1996-1997, toujours selon les chiffres que vous nous avez communiqués il y a un moment, les paiements de transfert avaient chuté de 9 000 000 $ et, pour se rendre à 106 000 000 $, les provisions pour créances douteuses étaient montées de 17 000 000 $ à 47 000 000 $ et les prêts et avances étaient montés à 60 000 000 $, soit une augmentation de 20 000 000 $. Et c'est sur ce dernier item que vous passez de 60 000 000 $... vous rajoutez encore un autre 40 000 000 $, et il va donc se porter cette fois-ci à 100 000 000 $. Est-ce que c'est exact?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Jusqu'à maintenant, vos chiffres sont rigoureusement exacts.

M. Gautrin: On concorde sur les chiffres. Merci. Donc, c'est les chiffres qu'on a à la fin, les uns et les autres, du ministère de l'Éducation.

Il faut quand même être conscients que, si je reviens à 1995-1996, où cet item-là dans le budget était à 40 000 000 $, lorsqu'on aura voté à la fin les crédits supplémentaires, ils vont se trouver à 100 000 000 $, c'est-à-dire que c'est une augmentation exactement de 150 %, ce qui est énorme, ce qui est énorme. Je sais bien que ce n'est pas une décision politique, puisque c'est un item budgétaire qui est ouvert en quelque sorte, ce n'est pas un item budgétaire qui est soumis à une décision dans les enveloppes fermées. Je ne reviendrai pas au débat que nous avions eu sur les enveloppes fermées au moment des crédits il y a un an. Mais c'est extrêmement inquiétant de voir, à l'heure actuelle, l'augmentation de cet item budgétaire.


Discussion générale


Augmentation du nombre de faillites chez les étudiants

Alors, ma première question est la suivante: Est-ce que vous avez une idée de l'augmentation du nombre des faillites? Parce qu'il y a un lien direct, bien sûr, comme vous l'avez fait remarquer, entre cette augmentation de 150 % et l'augmentation du nombre de faillites.

Mme Marois: Effectivement, et c'est ce qui est catastrophique dans le fond, c'est un peu ce que j'expliquais tout à l'heure dans mes propos préliminaires, le nombre de faillites est passé de 938 en 1994-1995 à 2 190 en 1995-1996 et à 3 850...

M. Gautrin: ...s'il vous plaît.

Mme Marois: Oui, certainement. Alors, en 1994-1995, on avait, bon, une augmentation. On voyait bien, là, qu'il y avait une augmentation qui apparaissait dans les chiffres. Mais prenons 1990-1991, on était à 461 faillites. Après ça, on est monté à 716, 654. Mais prenons les trois dernières années: 1994-1995, 938 faillites; 1995-1996, 2 190 faillites, alors on a plus que doublé; et, en 1996-1997, on a encore, en fait on a presque triplé, pas tout à fait, mais une fois et demie, 3 850 faillites.

M. Gautrin: Est-ce que ce nombre de faillites est lié en termes relatifs, c'est-à-dire par rapport aux personnes qui seraient susceptibles de devoir rendre leurs prêts, est-ce qu'il va aussi en croissant? Parce que, s'il y a plus de gens qui remettent leurs prêts, c'est peut-être plus normal qu'il y ait une augmentation des faillites. Mais je crois qu'il n'y a pas...

(22 h 20)

Mme Marois: Excusez-moi, je n'ai pas compris, M. le Président, le début de la question.

M. Gautrin: Alors, voici. Ma question est une question relative quand vous me donnez les chiffres absolus. Mais le problème qu'on se pose, c'est: Parmi les personnes appelées à devoir rembourser leurs prêts étudiants, le pourcentage d'étudiants qui le font... qui déclarent faillite à ce moment-là va-t-il aussi en croissant? Autrement dit, est-ce que cette augmentation du nombre de faillis n'est pas seulement liée à une augmentation de gens qui auraient bénéficié des prêts et bourses? Alors, s'il y a plus de gens qui bénéficient des prêts et bourses, il y a peut-être possibilité qu'il y ait plus de gens qui soient faillis. Par contre, si on a un nombre constant, là on a réellement un problème qui est un problème extrêmement grave.

Mme Marois: Je vérifie là, on vérifie dans les données si on a avec nous ces données. Mais, quand on regarde juste un indicateur ici qui est intéressant pour un peu relativiser tout ça, là, le pourcentage des faillites par rapport aux prêts en voie de remboursement était de 0,33 % en 1990-1991, 0,57 %, 0,61 %, 0,65 %. Donc, c'est un tout petit pourcentage, là, on se comprend bien. Et il y a eu une hausse de pourcentage importante: de 0,93 % que cela était en 1994-1995 à 1,93 % en 1995-1996. Mais ça reste quand même des...

M. Gautrin: Et en 1996-1997?

Mme Marois: Je n'ai pas le pourcentage parce qu'il n'a pas été calculé, tout simplement.

M. Gautrin: Bien, ça reste quand même aux alentours de 2 % ou 3 % à peu près, si je comprends bien.

Mme Marois: Il y a effectivement des prêts échus, là, parce qu'on dit, dans le fond: Si le volume de prêts grossit, en conséquence, ça peut avoir... ou grossit de façon plus significative, évidemment le reste peut s'expliquer. Alors, si on regarde les prêts échus cumulés, on est parti, en 1990-1991, à 627 000 000 $ pour être à 1 023 000 000 $ en 1994-1995. Je m'excuse, je vais juste vérifier ici. Je n'ai pas avec moi cette donnée-là. On va essayer de voir si on ne peut pas la trouver. On ne l'a pas avec nous; on pourra vous la fournir cependant.

M. Gautrin: Ce serait important. Peut-être que vous pourriez nous la donner, parce que j'ai d'autres questions à vous poser aussi, de nature statistique, tout en étant conscient que, peut-être, vous allez me les transmettre plus tard.

Mme Marois: Tout ce qu'on pourra retenir comme question.

M. Gautrin: Vous comprenez bien qu'on a deux questions. C'est un problème inquiétant. Je ne suis pas en train de crier haro sur les étudiants; c'est encore une proportion relativement faible du pourcentage étudiant. Néanmoins, c'est une augmentation qui est inquiétante et c'est des montants qui ne sont quand même pas négligeables. Écoutez, on est en train ici de débattre de 40 000 000 $, ce n'est pas rien, hein?

Est-ce que vous avez – deux éléments – essayé de faire une analyse au niveau sectoriel, c'est-à-dire de dire: Est-ce qu'il y a des secteurs et des niveaux de diplomation où les gens font plus faillite, sont plus amenés à avoir une incapacité de rembourser que d'autres secteurs, ou est-ce que c'est un phénomène qui est uniforme? Autrement dit, est-ce qu'on a des secteurs où il y a des difficultés à rembourser?

Mme Marois: Oui. Vous savez qu'il est prévu que, à compter du début de l'année prochaine, on aura un groupe qui se penchera sur la dette des étudiants, sur les modalités de remboursement ou sur les modalités de prise en considération par l'État de cette dette et de la façon dont on la traitera. Pour ce qui est des individus, il y a toutes sortes de formules qui ont été souhaitées par les étudiants, et qui méritent une attention particulière, et pour lesquelles nous allons mettre sur pied un groupe de travail qui va étudier ces formules potentielles pour, éventuellement, essayer de voir comment on peut mieux encadrer toutes ces situations. Donc, un certain nombre de données seront, à ce moment-là bien sûr, creusées.

Cependant, ce qu'on nous dit, c'est que la seule corrélation qu'on a pu faire jusqu'à maintenant avec des groupes en particulier, c'est que, dans le cas des cours en technique ou professionnel dans des écoles privées, là il y a un comportement qui est excentrique, statistiquement parlant, dans le sens où on constate un plus grand nombre de faillites. Mais sinon, si je comprends bien, ni entre le professionnel, ni entre le technique, ni entre le général, ni entre le préuniversitaire ou l'universitaire, il n'y a vraiment de différences significatives.

D'ailleurs, il faut comprendre justement, si on fait une relation avec d'autres décisions que j'ai prises, à savoir de plafonner, par exemple, le niveau d'endettement, que cela visait particulièrement cette clientèle qui est en institutions privées, où les sommes demandées aux étudiants sont très élevées pour s'inscrire, pour suivre les cours et où le niveau d'endettement est conséquent à cela. Et, si évidemment, en plus, le jeune ou l'adulte n'a pas le diplôme en bout de piste ou à la fin du parcours, bien il est endetté plus que les autres parce que les coûts ont été plus élevés et, d'autre part, il n'a pas le diplôme pour aller chercher ensuite un revenu qui va lui permettre de rembourser son prêt. Et c'est là qu'on a peut-être un plus grand nombre.


Fixation d'un niveau maximal d'endettement permis aux étudiants

M. Gautrin: Alors, vous m'ouvrez la porte sur un des questionnements que je voulais avoir avec vous. La loi n° 85, qui n'est pas encore adoptée mais qui a été déposée ici, en cette Chambre, qui va peut-être être adoptée – sans débat malheureusement, mais ça, on pourra revenir là-dessus – vous donne le pouvoir, par décret, de déterminer un montant maximal d'endettement mais ne fixe pas, dans la loi, ce niveau maximal d'endettement. Alors, je vais profiter des quelques minutes d'échange avec vous pour savoir quelles sont vos intentions une fois que le pouvoir va vous être donné, c'est-à-dire le pouvoir de décréter un niveau maximal d'endettement, ce que vous allez en faire et comment vous allez appliquer ce décret-là.

Pour être plus précis, la loi n° 85 ne fixe pas un niveau maximal d'endettement mais dit: Le ministre pourra... Alors, est-ce qu'il s'agit d'un niveau maximal qui pourrait être sectoriel? Pourrait-il être de niveau? Parce qu'il est évident que l'endettement pour un étudiant qui veut finir des études, je dirais, de médecine peut être important, mais son potentiel de remboursement est beaucoup plus... sa probabilité de pouvoir rembourser est différente de celui qui termine, avec le même endettement, un Diplôme d'études collégiales. Alors, est-ce que vous pouvez, sans dévoiler vos intentions, puisque la loi n'est pas encore adoptée... Si vous aviez – je le fais d'une manière hypothétique, M. le Président – si la ministre avait le pouvoir de décret qui pourrait lui être conféré si la loi était passée, quelles seraient ses intentions quant au niveau maximal d'endettement et qu'est-ce que cela signifie?

Mme Marois: Alors, à une question hypothétique, je conviens avec le député...

M. Gautrin: Il y a quand même un projet de loi qui a été déposé ici par la ministre. Je ne veux pas préjuger évidemment de la décision de la Chambre, mais, des fois, il y a des projets de loi qui, une fois qu'ils sont déposés par le gouvernement, ont une certaine probabilité d'être adoptés.

Mme Marois: Je conviens avec le député de Verdun de la pertinence de sa question, compte tenu qu'il y a un projet de loi qui est devant nous et que je souhaiterais, tout comme lui, étudier, mais il semble qu'il y ait des travaux plus importants qui sont traités dans d'autres...

M. Gautrin: ...le leader, ma chère amie, à débattre de vos crédits à 22 h 30.

Mme Marois: Je ne jugerai pas des travaux de mon leader ici, M. le Président. Mais, cela étant, d'autres collègues députés semblent vouloir accorder plus d'importance à d'autres lois qui prennent un peu de temps, semble-t-il, en commission parlementaire. Bon.

(22 h 30)

Alors, si cette loi que j'ai déposée était adoptée, cela me donnerait un pouvoir réglementaire de plafonner l'endettement des étudiants. J'ai l'intention, M. le Président, et je vais être bien claire, effectivement de faire des distinctions entre les différents ordres d'enseignement et les différents cycles d'enseignement, alors soit entre le professionnel, le technique, le général et entre le professionnel, le technique et l'universitaire. Cependant, mon intention n'est pas d'empêcher quelqu'un qui suit, je dirais, un curriculum normal ou même qui doit, à l'occasion, voir son curriculum allonger de quelques semestres de pouvoir le faire tout en bénéficiant du régime d'aide financière à l'intérieur d'une limite que je fixerais, mais qui lui permettrait de ne pas être contraint, d'aucune espèce de façon, par le plafond d'endettement.

Alors, si cette loi était adoptée, il y aurait un plafond d'endettement différencié. Cependant, on se comprend, l'objectif n'est pas de limiter ou de faire en sorte que, par exemple, on prenne le maximum qu'un jeune ou un adulte puisse avoir s'il bénéficie du régime de prêts et bourses, et dire: Mettons qu'en trois ans, s'il a le maximum, il a 10 000 $ d'endettement – je prends un exemple tout à fait hypothétique, qui n'a rien à voir avec la réalité, puis je dis: Bon, bien, c'est ça, le maximum – il a droit à pas plus. Alors, ce n'est pas mon intention. Mon intention, c'est qu'on fixe une marge qui permette à quelqu'un qui connaît une circonstance particulière de ne pas être limité strictement aux trois ans qui sont prévus, par exemple, pour un baccalauréat à l'université, ou un cours de cégep de deux ans ou de trois ans si on est au technique, mais, par contre, de mettre un plafond, parce que l'on a constaté qu'effectivement soit des gens font des cours à répétition, soit des gens allongent les périodes. Bon, évidemment, on sait maintenant qu'on a certaines limites de ce côté-là.

Et, d'autre part, il y a ce que je viens de mentionner au député dans ma réponse précédente, à savoir que certaines écoles privées offrent des cours à des coûts très élevés, beaucoup plus élevés évidemment que ce que peut permettre même le régime de prêts et bourses, et là on va au maximum chaque fois pendant quelques années et là on se retrouve avec des niveaux d'endettement qui font qu'on met un jeune, ou un jeune adulte, ou un adulte dans une situation avec des obligations auxquelles il ne pourra jamais faire face. Et ça amène ces jeunes à déclarer faillite parce qu'ils voient bien que c'est impossible. Donc, on se dit qu'en plafonnant les prêts, en respectant cependant les niveaux d'enseignement, les curriculums et les temps prévus pour le faire, on sera équitable.

M. Gautrin: Bien, disons qu'on verra le décret quand vous le promulguerez, si jamais vous avez le pouvoir de le promulguer, si l'Assemblée nationale adopte la loi. J'espère qu'il y aura quand même un pouvoir dérogatoire qui sera réservé au ministre pour éviter qu'on se trouve à avoir une application mécanique et qu'on gêne certaines personnes, qui sont des payeurs tout à fait honnêtes, au point de pouvoir être privées de prêts-bourses.

Mme Marois: M. le Président, si vous permettez...

Une voix: C'est dans la loi.

Mme Marois: Oui, c'est ça. Si vous me permettez, M. le Président, c'est dans la loi, je crois, qu'il y a une possibilité, pour une personne qui est au régime d'aide financière et qui se voit appliquer l'une ou l'autre des mesures qui seraient adoptées par la loi si elle était adoptée, de pouvoir contester, en fait, cette mesure dans son cas particulier, de telle sorte qu'on puisse agir autrement s'il y avait lieu de le faire.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Gautrin: Je voudrais intervenir maintenant... Si on avait la chance de pouvoir débattre du projet de loi, on pourrait arriver à le débattre article par article, mais enfin, on devra échanger sur cette procédure demain; du moins j'espère que non, mais... Je voudrais revenir sur le 40 000 000 $ que vous demandez évidemment pour payer les mauvaises créances, mais aussi en fonction du remboursement de taux d'intérêt, des intérêts que vous devez payer sur certains prêts. Alors, votre prédécesseur, le député de Lévis, avait établi une politique quant au taux d'intérêt, c'est-à-dire qu'il avait négocié avec les institutions bancaires pour obtenir un taux d'intérêt le plus privilégié possible. Qu'en est-il, à l'heure actuelle, de la situation des taux d'intérêt sur les remboursements de prêts, les garanties de prêts aux étudiants?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

M. Gautrin: Et je vous rappellerai que le taux d'intérêt négocié par le député de Lévis était inférieur à ce qu'on a appelé le «prime rate» dans le langage. Est-ce que vous avez toujours réussi à obtenir ce même avantage?

Le Président (M. Pinard): Inférieur au «prime rate»?

Mme Marois: M. le Président, en fait, c'était le taux d'acceptation bancaire mensuel plus 80 points de base, ce qui nous amène actuellement à un taux très bas de 3,97 %. Évidemment, les 80 points de base, là, c'est toujours des centièmes, on s'entend.

M. Gautrin: Ça marche. Mais est-ce que vous l'avez toujours?

Mme Marois: Oui, nous l'avons toujours.

M. Gautrin: Donc, le principe est resté maintenu...

Mme Marois: Oui.

M. Gautrin: ...au sujet du taux tout à fait préférentiel que vous aviez négocié avec les institutions financières?

Mme Marois: Oui. Et je crois qu'il faut souligner d'ailleurs, à cet égard, l'idée, je pense, très intéressante qu'avait eue mon collègue le député de Lévis et qu'il avait appliquée. Non seulement il avait eu l'idée, mais il l'avait appliquée. Je pense que c'était très intéressant, parce que évidemment le gouvernement avait cette capacité-là d'amener à négocier, dans le fond, un taux qui soit le meilleur. Qu'est-ce que vous voulez, on a toutes les garanties, là. On les a. D'ailleurs, la preuve, c'est que, quand un jeune ou un adulte fait faillite et qu'il a un prêt étudiant, nous, on rembourse.

M. Gautrin: Une fois qu'on a réglé cette question... Je voulais seulement savoir si c'était maintenu. Je suis d'accord avec vous que c'était une mesure intéressante qui avait été mise de l'avant, qui a dû faire économiser quelques millions, je crois, au gouvernement, si je ne m'abuse, 1 000 000 $ ou 2 000 000 $, mais, déjà, au moment où on est, on les cherche.

Vous avez diminué le nombre de périodes d'admissibilité au régime de prêts... Pardon?

Mme Marois: Par rapport à la question que le député a soulevée, qui était tout à fait pertinente, quant à la possibilité de voir des décisions révisées par la ministre ou par le ministre – les lois parlent du ministre, toujours au masculin, malheureusement, encore – à l'article 8 du projet de loi que nous pourrions éventuellement adopter, on retrouve cette possibilité de révision, entre autres. On dit: «Tout étudiant visé par une décision du ministre sur l'admissibilité des étudiants à l'aide financière ou sur le montant de cette aide peut, par écrit, dans les 30 jours de la date à laquelle l'étudiant en a été avisé, en demander la révision.» Bon, on explicite ensuite comment on peut procéder. Donc, c'est quand même prévu à la loi.

M. Gautrin: Oui. Si j'étais en commission pour débattre du projet de loi, je critiquerais vertement la rédaction du projet de loi à cause du mot «fonctionnaire». J'aurais préféré qu'il s'adresse directement à la ministre, quitte à ce qu'elle demande l'avis d'un fonctionnaire, mais enfin, ça, c'est un détail. Si jamais on a la chance de faire un débat article par article, on aura à échanger là-dessus.

La diminution des périodes d'admissibilité...

Mme Marois: Oui.

M. Gautrin: ...est-ce que ça a, d'abord, fait économiser de l'argent dans le régime des prêts et bourses? La réponse va être oui. Combien? Ça, je ne le sais pas. Et, troisième chose, est-ce que cette diminution des périodes d'admissibilité au régime des prêts et bourses a eu un effet sur l'endettement des étudiants? Autrement dit, s'ils peuvent avoir un prêt-bourse pendant moins de temps, est-ce que ça a un effet sur l'endettement et sur le nombre de faillites puisque, dans le fond, on discute ici des gens qui sont des mauvais payeurs?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Il faudrait reprendre la deuxième partie de la question.

M. Gautrin: Alors, première question. Donc, vous avez diminué, l'année dernière, les périodes d'admissibilité...

Mme Marois: Oui.

M. Gautrin: ...au régime de prêts et bourses. Ma question, c'est: Cette diminution des périodes d'admissibilité, est-ce que ça a eu des effets sur des économies pour le gouvernement dans le régime de prêts-bourses? Deuxièmement, est-ce que la diminution des périodes d'admissibilité a eu des effets sur l'endettement général des étudiants? Et est-ce que ça pourrait être une des sources potentielles de l'augmentation des faillites? Est-ce qu'il y a un lien entre les deux?

Mme Marois: Non. D'abord, oui, il y a eu une économie cette année, pour 1996-1997, de l'ordre de 18 000 000 $. Bon. Mais, au total, on se comprend bien, le régime lui-même n'a pas subi de réduction parce que évidemment on a assumé, dans le fond, la progression du régime, particulièrement au secondaire et professionnel. Et c'est cette année, en 1996-1997, qu'on aura un 18 000 000 $ d'économie. C'est ça, cette année, 1996-1997, on aura une économie de 18 000 000 $. Pour l'instant, on ne peut pas évaluer évidemment s'il y a corrélation, puisque c'est cette année que ça s'applique.

(22 h 40)

M. Gautrin: Bien, je prends note des 18 000 000 $, mais... O.K. Ça marche. Je continue à faire avec vous la revue, en quelque sorte, de ce que vous proposez ou de ce qui est inclus dans la loi n° 85. Dans la loi n° 85, vous proposez de devancer d'un mois la prise en charge des emprunts, hein? Vous devancez d'un mois. Vous voyez les articles auxquels je fais référence? Ce que j'appelle devancer la... Autrement dit, vous réduisez la période d'exemption.

Mme Marois: Je m'excuse, hein? Probablement que c'est l'heure tardive. C'est le fait que nous avons travaillé depuis un long moment...

M. Gautrin: Bon, alors, écoutez, je reviens...

Mme Marois: Vous n'avez pas participé à tous nos travaux, malheureusement.

M. Gautrin: Non, non.

Mme Marois: D'ailleurs...

M. Gautrin: Non, non. Regardez, je fais référence à l'article 5 du projet de loi n° 85 qui modifie l'article 23 de la Loi sur l'aide financière aux étudiants. Et vous voyez que vous devancez d'un mois, si vous voulez, ce qu'on appelle les périodes d'exemption. Vous remplacez «avril» par «mars», «août» par «juillet», «janvier» par «décembre», à l'article 23. Alors, ma question: Ça a quoi comme effet budgétaire, cet élément-là? Ça va avoir quoi comme... Est-ce que vous avez essayé de planifier un peu le type d'effet sur l'endettement?

Mme Marois: Effectivement, cet article a un impact sur les économies. Nous avons une économie de 3 000 000 $. Alors, dans le fond, c'est simple, hein? C'est que les étudiants vont prendre en charge un mois plus tôt le remboursement de leur dette. On se comprend bien?

M. Gautrin: Oui, ça, j'ai compris ce que ça voulait dire, là.

Mme Marois: Donc, de toute façon, ils...

M. Gautrin: C'est-à-dire que vous diminuez ce qu'on appelle la période d'exemption...

Mme Marois: C'est ça.

M. Gautrin: ...c'est-à-dire la période entre la fin des études et le début du remboursement de la dette qui, je crois, était de six mois actuellement, et vous la ramenez à cinq mois.

Mme Marois: Non, elle était de sept mois.

M. Gautrin: Elle était de sept mois et vous la ramenez à six mois. Bon, enfin.

Mme Marois: Oui, on la ramène à six mois. Et, cela étant dit, M. le Président, c'était une recommandation du Groupe de travail sur l'aide financière aux étudiants. Vous savez, ce fameux groupe, le groupe MacDonald, qui avait étudié l'ensemble de l'aide financière aux étudiants et qui avait fait un certain nombre de recommandations, dont celle-ci qui a été retenue.

En fait, ce qu'on constate, ce qu'il faut bien voir, c'est que la majorité des étudiants se trouvent un emploi dans les premiers mois qui suivent la fin de leurs études et ils sont donc, bien sûr, en mesure d'assumer plus tôt leur remboursement. Et, dans un sens, je me dis que c'est, dans le fond, responsabiliser les gens et c'est normal. Par contre, il y a des règles qui prévoient que, lorsqu'on n'a pas d'emploi, on peut faire un remboursement différé. Donc, on ne pénalise pas ceux et celles qui n'ont pas d'emploi, qui continuent de se voir appliquer d'autres règles.

M. Gautrin: La longueur du remboursement différé n'est pas touchée par cette mesure?

Mme Marois: Voilà.

M. Gautrin: C'est simplement une possibilité, pour ceux qui trouvent rapidement un emploi, d'accélérer d'un mois leur...

Mme Marois: Leur remboursement.

M. Gautrin: Parce que les chiffres que j'ai ne correspondent pas à ce que vous avez affirmé. Au contraire, j'ai l'impression que l'insertion sur le marché du travail est relativement difficile et que bien des diplômés ne trouvent pas un emploi dans le délai de six mois après leur diplomation. Ils doivent souvent attendre une période de temps voisinant une année, d'après les chiffres que j'avais à ce moment-là.

Mme Marois: Non. M. le Président, c'est intéressant, ce que soulève le député de Verdun, et c'est vraiment, je vous dirais, de l'ordre des impressions, souvent. Les jeunes ou les adultes qui sortent de nos établissements d'enseignement se trouvent à une hauteur très élevée en termes de statistiques des emplois. Bon. Et puis là on peut refaire la nomenclature, on la connaît bien. Si on a sa maîtrise, plus rapidement on a un emploi, et le taux de chômage est plus bas chez ces personnes. Après ça, on retrouve les gens qui sont au bac universitaire, les gens qui sont au technique, au professionnel. Au général, cégep, on les retrouve parmi les avant-derniers rangs évidemment; ensuite, le secondaire V sans spécialité et ceux qui n'ont pas de diplôme. Bon. Ça, ça va.

La perception que l'on a que ces jeunes ne se trouvent pas d'emploi est fausse. Ils se trouvent des emplois ou ces adultes se trouvent des emplois. Cependant, ils ne se trouvent pas toujours des emplois dans un poste pour lequel ils ont été formés. Un étudiant en littérature ne se retrouve pas nécessairement le lendemain dans une profession qui traite, ou s'occupe, ou parle de littérature, ou qui lui permet de pratiquer ce qu'il a appris, de mettre à profit ce qu'il a appris. Mais il peut mettre à profit une partie de ce qu'il a appris parfois dans une profession ou dans un métier soit qui s'en rapproche, connexe, ou qui en est très éloigné, mais qui lui permet quand même de gagner un revenu décent. Et donc, ces personnes peuvent commencer à rembourser leurs dettes, n'ont pas de contraintes au remboursement. Donc, c'est une impression qu'on a à cet égard-là. C'est vrai que cela prend quelque temps, mais souvent on se trouve un emploi. Il n'est pas en ligne directe avec ce qu'on a comme formation, mais il permet quand même d'aller chercher un revenu.

Ce serait intéressant d'ailleurs, M. le Président – je me permettrai de souligner ceci à mon collègue de Verdun – qu'un jour on regarde ça, toutes ces données. Et peut-être même que la commission pourrait avoir un mandat d'initiative pour essayer de voir les causes qui expliquent que certains jeunes ou certains types de professions – on peut en déduire certaines choses, bien sûr, dès maintenant, à l'observation – ne trouvent pas rapidement des emplois, mais en trouvent quand même et reviennent plus tard dans leur formation de base. Mais ce serait peut-être intéressant de regarder ces données-là. Nos enquêtes de relance, qui sont très bien faites soit dit en passant à l'Éducation, nous fournissent un éclairage très intéressant à cet égard.

M. Gautrin: M. le Président, je ne voudrais pas ici faire le débat sur les chiffres. Les informations dont je faisais état sont celles qui sont fournies par l'ensemble des universités dans les rapports annuels que vous avez déposés et que la commission de l'éducation aura le plaisir d'étudier, je crois, au mois de février ou au mois de mars, comme elle le fait à tous les ans. Ça dépend des secteurs; vous avez des secteurs où, même au bout d'un an, vous avez moins de 50 % des gens qui se sont trouvé un emploi, indépendamment... Et ils font bien, dans cette analyse-là, la distinction entre emploi à l'intérieur de la spécialité et emploi à l'extérieur de la spécialité. Bon, il y aurait lieu de réfléchir peut-être même à savoir s'il va falloir différencier le régime de prêts et bourses pour orienter les étudiants dans les endroits où il y a un peu plus d'emplois. Ça, c'est un débat qui est ouvert et sur lequel on aura probablement à réfléchir, de part et d'autre.


Aide financière aux étudiants hors Québec

J'en arrive à la question des étudiants hors Québec; vous avez retiré partiellement l'aide financière aux étudiants hors Québec. Après la décision que vous avez prise – je reste toujours sur l'aide financière – est-ce que ça a amené des économies importantes?

Mme Marois: Dans les faits, nous avons certaines estimations, actuellement, des économies que nous pourrions faire à cet égard; nous avons donc des ordres de grandeur. Cependant, les décisions n'ont pas été prises. Donc, je ne pourrais pas informer les membres de cette Assemblée, puisqu'il y a encore certaines étapes à franchir pour arriver à ce que ces décisions se prennent. Mais c'est évident que l'objectif que nous avons en resserrant nos règles, c'est d'aller chercher des économies ou des sommes nouvelles qui nous permettent de moins subventionner certaines universités, puisqu'on le fait au net, on tient compte de la contribution des étudiants. On a voulu le faire en toute équité, M. le Président, et en préservant toutes les ententes que nous avons avec l'ensemble des pays avec lesquels nous en avons. Vous savez que nous avons des ententes avec 54 pays différents... C'est-à-dire que c'est 54, je crois, ou si c'est 54 %? On a des ententes avec environ 54 pays différents, des ententes de réciprocité, bon, etc., et de tout ordre.

(22 h 50)

Nous avons aussi des ententes avec certains États où il y a une forme d'aide, si on veut; je pense à des pays en développement, je pense à des pays de la francophonie où il n'y a pas de frais qui sont demandés ou minimes. Bon, alors, il y a donc toute espèce d'ententes comme celles-là et que l'on ne touche pas. On se comprend bien, hein? Ce sont tous les étudiants étrangers qui n'entrent pas dans l'une ou l'autre de ces ententes, en vertu de signatures auxquelles nous avons procédé avec d'autres États. On se comprend bien.

M. Gautrin: Ce n'était pas l'objet de ma question. Je comprends votre réponse, d'accord. Moi, j'entendais les étudiants qui allaient étudier hors Québec, c'est-à-dire la mesure qui se terminait pour ceux qui allaient déposer leur demande après le 30 juin 1996. Peut-être que je n'ai pas été assez clair, mais, puisque vous touchez la question... Essentiellement, ce que vous touchez, c'est la question des frais de scolarité, à ce moment-là. Alors, moi, j'ai une question à vous poser à ce sujet-là: Pour les étudiants canadiens qui vont venir étudier ici, au Québec, à partir de quel moment vont-ils devenir des Québécois?

Mme Marois: C'est une question tout à fait pertinente. D'abord, pour ce qui est des étudiants étrangers, ça va assez bien, ils n'ont pas la citoyenneté.

M. Gautrin: Non, non, ça, je comprends ça, mais...

Mme Marois: Donc, ça, ça va. Par contre, on a, dans notre régime de prêts et bourses, un certain nombre de critères qui prévoient qu'il y a la résidence au Québec. Il y a des critères aussi de lien parental, si on veut, dont on tient compte pour notre régime d'aide financière et à bien des égards. Alors, ce sont ces mêmes critères que l'on appliquera pour les étudiants hors Québec.

M. Gautrin: Bon, en fait, M. le Président, est-ce que la ministre serait assez aimable, à ce moment-là, de déposer à la commission ces critères? Si je comprends bien, vous nous dites: Il existe des critères dans le régime d'aide financière aux étudiants.

Mme Marois: C'est ça.

M. Gautrin: Ce n'est pas dans la loi, mais j'imagine que c'est dans les règlements. Et vous allez appliquer les mêmes critères pour déterminer qui seront des étudiants canadiens non québécois, dans la mesure des frais de scolarité dans les universités. Bon, je ne débats pas ici sur la valeur ou la pertinence de votre décision, mais sur la manière dont elle peut se mettre en marche, en place. Et vous dites: Pour la mise en place de cette décision – décision que je trouve non pertinente, mais enfin, on pourrait en débattre ici, et ce serait inutile, à mon sens – vous allez utiliser le même critère que dans le régime des prêts et bourses. C'est ça que vous nous dites. Est-ce que le critère du régime des prêts et bourses, vous pourriez nous le faire parvenir...

Mme Marois: Oui, certainement.

M. Gautrin: ...ou le déposer à la commission, parce que c'est un critère que je connais mal, en tout cas?

Mme Marois: Je prends avis, M. le Président. On va déposer tout ça.

M. Gautrin: Et il me semble, une fois qu'on l'aura étudié, que je pourrai revenir en questions avec vous là-dessus parce que ça peut, à mon sens, avoir des effets extrêmement pernicieux.

Le temps file, M. le Président. Je voulais aborder un autre sujet, si vous le permettez, dans le mécanisme toujours de l'aide financière aux étudiants. Et vous remarquerez qu'on aurait pu, vu qu'on parle d'éducation, déborder certainement du sujet, mais j'essaie de me concentrer aujourd'hui sur le programme d'aide financière aux étudiants, puisque les crédits ne font que modifier l'aide financière aux étudiants.


Suppression du programme de remise de dette aux étudiants de deuxième et troisième cycle

Dans le projet de loi n° 85, vous proposez de supprimer le programme de remise partielle de dette pour les étudiants de deuxième et troisième cycles qui auront terminé leurs études dans ce qu'on appelle les délais impartis, qui sont, si je ne m'abuse, deux ans pour la maîtrise et trois ans pour le doctorat, à moins que je ne me trompe. La question, c'est: Bon, pourquoi faire une telle mesure? Si c'est pour des raisons budgétaires, vous comptez économiser combien? C'est-à-dire combien d'étudiants se sont prévalus de la mesure l'année dernière, premièrement?

Deuxièmement, il y a des étudiants qui sont entrés dans un régime d'études qu'on appelle postgraduées ou graduées, si vous voulez – comme le terme est un peu barbare – pensant qu'ils pouvaient avoir une remise de dette. Est-ce que vous allez considérer une clause grand-père dans l'application d'une telle décision, de manière que ceux qui sont déjà en course dans le processus soient exemptés de l'application de la mesure et puissent continuer à avoir droit au remboursement partiel de leurs dettes?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président.

M. Gautrin: Donc, deux questions ou trois questions.

Mme Marois: Oui, c'est ça, on va prendre les questions les unes après les autres. Évidemment, si le projet de loi est adopté...

M. Gautrin: Je suis bien d'accord avec vous, et on pourrait...

Mme Marois: ...et je pense que, sur ça, on s'entend. Bon, alors, d'abord...

M. Gautrin: Je vais vous dire que nous ne serions pas d'accord avec cette mesure, je vous le dis tout de suite.

Mme Marois: J'ai cru comprendre cela déjà, M. le Président. Bon, écoutez, je pense qu'il y a beaucoup de choses que l'on fait actuellement au gouvernement, de mesures que nous implantons que nous ne souhaiterions pas implanter, il faut bien le dire, puis je pense que je ne cache rien à personne et je n'annonce rien à personne en disant cela. Mais, devant des efforts à faire de rationalisation pour nous permettre de consolider, si on veut, le déficit pour, ensuite, le réduire – et, cette année, nous le réduirons d'une façon assez significative pour mieux, ensuite, préserver nos programmes – nous retenons un certain nombre de mesures qui, à leur face même, sont des mesures intéressantes, je n'en disconviens pas.

Alors, prenons celle-ci, maintenant, à laquelle M. le député de Verdun fait référence. C'était une mesure qui permettait...

M. Gautrin: Vous permettez?

Mme Marois: ...une remise de dette.

M. Gautrin: Une remise de dette partielle...

Mme Marois: Voilà!

M. Gautrin: ...pouvant aller jusqu'à 25 % pour les étudiants...

Mme Marois: C'est ça.

M. Gautrin: ...qui terminaient une maîtrise ou un doctorat dans les délais impartis.

Mme Marois: Dans les délais impartis. Voilà! Alors, aux questions soulevées par le député, l'objectif, c'était de faire en sorte que plus de gens terminent dans les temps impartis. Or, ce qu'on a constaté, c'est que ce programme, qui a été implanté en 1991 – donc six ans plus tard quand même – six ans plus tard, c'est ça, n'a pas modifié vraiment le taux de diplomation dans les délais prescrits, puisqu'on parlait de 29,3 % et qu'on parle maintenant de 30,7 %. Alors, normalement, parce que ça s'appliquait aux cohortes qui étaient déjà là, si je ne m'abuse, on aurait dû constater une différence assez significative, ce qu'on ne constate pas. Bon.

Maintenant, combien de personnes seront concernées? On parle de 1 520 étudiants. C'est une économie de l'ordre de 3 200 000 $, si la loi est adoptée et que nous appliquons ce règlement. D'autre part, il n'y aura pas de clause grand-mère ou grand-père, et c'est le cas de beaucoup d'autres mesures aussi que nous appliquons à partir du moment où nous les avons annoncées d'une part, mais surtout à partir du moment où la loi serait adoptée. Les personnes qui étaient dans le système et qui ont terminé leur cours avant que la loi ne soit adoptée évidemment ne sont pas concernées et les autres le seront. Il n'y a donc pas de clause grand-père ou grand-mère, selon.

M. Gautrin: Mais vous percevez certainement – il nous reste cinq minutes simplement – le côté que je trouve assez injuste de votre mesure. Vous allez, par ce biais-là, pénaliser ceux parmi les étudiants qui ont fait des efforts souvent importants pour finir rapidement leurs études, peut-être en se privant d'autres sources de revenus pour pouvoir terminer plus vite. J'ai l'impression que c'est réellement un geste que je qualifierais d'inique, sans vouloir ici faire un débat de mots.

(23 heures)

Je voudrais plaider, et j'aurais pu le faire si on avait pu débattre la loi article par article ou si, par hasard, nos chers leaders nous permettaient de débattre article par article pour qu'on supprime un tel article. Il y a d'autres moyens d'aller chercher 3 000 000 $. Il y a d'autres moyens d'aller chercher 3 000 000 $ que de pénaliser les plus performants. Et je trouve assez grave comme signal dans une société qu'on aille pénaliser, parce que, dans le fond, c'est ça qu'on fait en retirant la remise de dette. Ceux d'entre eux, nos jeunes étudiants, qui ont été les plus performants, au lieu de les stimuler ou de stimuler le travail et la croissance, on s'en va, par la mesure que vous mettez de l'avant, les pénaliser, et je trouve un message ou une indication assez mauvaise.

Si on a la chance de débattre la loi n° 85 article par article, soyez assurée que cette mesure, je tâcherai de vous convaincre fortement de la laisser tomber. Il y avait d'autres moyens, des mesures paramétriques par exemple, pour pouvoir obtenir, et je comprends aussi les contraintes budgétaires dans lesquelles nous nous trouvons tous... Mais le choix que vous faites actuellement d'abolir cette mesure, qui était un incitatif important pour les étudiants de terminer dans les temps, me semble assez pénible.

M. le Président, vous nous signalez la limite de temps. Après cette question-là, est-ce qu'on pourra avoir après... est-ce qu'il y aura un cinq minutes pour conclure ou pas?

Le Président (M. Pinard): Il vous reste trois minutes, au temps imparti à l'opposition et, ensuite de ça, la réplique de cinq minutes de la part de la ministre.

M. Gautrin: Bon, alors, j'arrête ici pour pouvoir prendre mes trois minutes pour conclure.

Mme Marois: Alors, il me reste cinq minutes, M. le Président, c'est ça?

Le Président (M. Pinard): Vous avez une réplique de cinq minutes.

Mme Marois: D'accord.

Le Président (M. Pinard): Mais, d'ici à ce qu'on arrive aux cinq minutes, le temps est imparti à l'opposition.

Mme Marois: Il lui reste trois minutes.

M. Gautrin: Alors, moi, je pourrais prendre mes trois minutes ...

Le Président (M. Pinard): Vous pouvez prendre vos trois minutes.

Mme Marois: Il peut prendre ses trois minutes, M. le Président, mon collègue.

M. Gautrin: Mais pouvez-vous répondre à ma question quand même?

Mme Marois: Alors, il faut bien voir, M. le Président, que c'était un privilège, n'est-ce pas? Il reste que c'était un privilège qu'on avait introduit, parce que, dans le fond, l'ensemble des étudiants dans le régime empruntent, utilisent le régime d'aide financière et, ensuite, doivent rembourser. Quelqu'un qui faisait son cours en formation professionnelle, ou en formation technique, ou en premier cycle n'avait pas ce privilège de se voir rembourser son prêt même s'il faisait ses études dans les temps qui étaient impartis, donc ça reste un privilège.

Et ce qu'on constate, et je ne reviendrai pas sur les données... enfin, je n'ai pas cité de chiffres, mais sur les conclusions que je tirais de données que nous connaissons au ministère. On sait que ceux et celles qui se trouvent le plus rapidement un emploi et qui ont les taux de chômage les plus bas, même les plus bas de tous les taux de chômage, finalement, au Québec, ce sont ceux et celles qui ont des maîtrises et des doctorats et, donc, qui se trouvent un emploi, généralement assez rapidement, et qui peuvent donc faire face à leur endettement.

Donc, c'était un privilège. Nous avions cru que ce privilège aurait accentué ou augmenté le niveau de diplomation. On constate que ce n'est pas le cas. Et nous avions le choix, comme le député de Verdun le soulignait, d'aller vers des mesures paramétriques, mais, évidemment, à ce moment-là, ça augmente l'endettement de tous. Et, souvent, qui ça vient pénaliser? Les plus démunis, puisque ce sont eux et ce sont elles qui, dans le fond, ont le plus, vont au maximum de l'aide financière ou utilisent au maximum l'aide financière, alors c'est souvent ces gens que l'on risque de pénaliser. Je ne dis pas que ce sont eux toujours qu'on pénalise, ce sont eux qu'on risque de pénaliser.

Alors, c'est le choix que nous avons fait. Ce sont des mesures sélectives, ce ne sont pas des mesures paramétriques. D'ailleurs, le projet de loi n° 85 a quelques mesures qui s'adressent à toute la population étudiante qui utilise le régime d'aide financière, mais ce sont plus généralement des mesures que nous avons souhaité plus fines.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Verdun...

M. Gautrin: Alors, en conclusion, je ne poursuivrai pas...

Le Président (M. Pinard): ...30 secondes pour conclure.


Remarques finales


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Rapidement, pour conclure, M. le Président. Je ne poursuivrai pas le débat. Pour moi, ce n'était pas un privilège mais c'était une incitation à la performance. C'est évidemment un point de vue différent de dire un privilège quand on parle d'incitation à la performance.

Je terminerai, M. le Président, en revenant sur ce qui a été l'objet initial de notre débat: l'énorme inquiétude que l'on a en votant ces 40 000 000 $ de crédits supplémentaires que nous devons voter – et j'en suis bien conscient – et que nous votons aujourd'hui parce que l'endettement des étudiants bénéficiant des prêts et bourses va en croissant. Autrement dit, cet item budgétaire a augmenté de 150 % en deux ans. C'est une augmentation importante qui génère une inquiétude de notre part et il me semble urgent, très urgent, que de part et d'autre on ait une réflexion approfondie sur l'endettement des étudiants actuellement bénéficiant du régime de prêts et bourses. Je pense que nous allons nous y atteler le plus rapidement possible. Merci, M. le Président.

Je voudrais en terminant remercier les personnes qui m'ont assisté: Véronique Hivon et Manon Lavoie, qui travaillent au bureau de recherche.

Le Président (M. Pinard): Merci. Mme la ministre, vous avez droit à une réplique de cinq minutes.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. D'abord, peut-être que ce n'est pas inutile de rappeler qu'à un certain moment l'opposition, qui formait le gouvernement, avait jugé bon d'augmenter les frais de scolarité de plus de 150 % sans par contre adopter ou retenir de clause grand-père ou de clause grand-mère. Alors, j'imagine que l'opposition, qui a déjà formé le gouvernement, peut comprendre la situation dans laquelle je me retrouve quant à certaines mesures que je propose par le projet de loi et qui ne comportent pas de clause de ce type, mais qui sont annoncées suffisamment à l'avance pour que les gens puissent voir venir et puissent savoir exactement ce que cela aura comme impact sur leur budget.

La préoccupation que j'ai à l'égard de l'ensemble de l'aide financière aux étudiants et aux étudiantes, c'est que d'abord et avant tout cette aide soit disponible et serve à ceux et à celles évidemment qui en ont le plus besoin, sans abus, et c'est ce qu'on a essayé de resserrer depuis quelques années. Je pense, autant les gens qui nous ont précédés que nous-mêmes, on a resserré certains critères pour éviter qu'il n'y ait des abus.

Et là on constate un phénomène qui, effectivement, est inquiétant. Le député de Verdun a raison, le phénomène est inquiétant, c'est celui du niveau d'endettement des étudiantes et des étudiants, des jeunes travailleurs, des jeunes travailleuses. Je crois que toute société qui voit ce phénomène-là doit s'en inquiéter. Et, en ce sens, vous savez que j'ai proposé qu'un groupe de travail puisse rapidement se mettre en marche, se mettre à l'étude pour qu'on regarde les façons de traiter des modes de remboursement de l'aide financière qui est accordée aux étudiants sous forme de prêts. Et ce groupe pourrait aussi imaginer un certain nombres de balises quant à la façon dont on pourrait encadrer les modifications à apporter éventuellement au régime. On parle d'une loi-cadre dans ce contexte.

Et je pense qu'à ce moment-là le député de Verdun, d'autres collègues à l'Assemblée nationale, préoccupés par ces questions, pourront prendre connaissance du résultat de ce groupe qui devrait rapidement être à l'ouvrage, comme je le mentionnais, et nous donner des résultats pour la fin du printemps. Ces résultats pourraient être transmis d'ailleurs à la commission parlementaire, faire l'objet d'un débat et, par la suite, se traduire soit en règlement, ou soit en loi, ou soit en modification comme telle du régime de telle sorte qu'on évite cet aspect qui nous inquiète.

Mais, en même temps, évidemment, on souhaite soutenir les étudiants qui veulent aller de plus en plus loin dans leur formation, qui le font. Cela coûte cher. Alors, mieux vaut parfois aussi que des gens aient accès à des ressources, connaissent un certain niveau d'endettement en autant qu'on puisse ensuite s'assurer que selon les revenus gagnés ces personnes pourront assumer leurs responsabilités et rembourser la dette. Je pense que ça, ça va de soi, parce que c'est ainsi des sommes que l'on garde dans les coffres pour d'autres personnes qui peuvent s'en prévaloir, plus le fait qu'évidemment les gens, je dirais, se responsabilisent vis-à-vis des engagements pris. Parce que, si l'endettement est trop élevé, on se décourage, on fait faillite, ce qu'on connaît maintenant, ce qui n'est pas non plus très agréable quand on commence dans la vie. On sait qu'à une certaine époque faire faillite non seulement n'était pas très facile, mais, je dirais, n'était pas bienvenu ou était très critiqué, si on veut. Alors, c'est devenu un geste peut-être un peu trop facile aussi. Devrons-nous sans doute nous questionner sur des balises à cet égard-là? C'est la loi fédérale qui est concernée. On pourra voir s'il y a lieu de faire des recommandations.

(23 h 10)

Mais, au-delà de ça, je dirais, c'est de voir comment traiter cette question d'endettement, faire en sorte que nos gens qui sortent de nos collèges, de nos universités, de nos cégeps puissent avoir la capacité de rembourser ce pour quoi ils se sont endettés, qui en valait sûrement le coût. Les niveaux sont peut-être trop élevés, les risques de faillite sont actuellement trop grands. Comment faire en sorte qu'on balise tout ça pour le mieux-être des personnes qui sont concernées par de tels régimes d'aide aux personnes? Alors, les crédits supplémentaires que nous annonçons aujourd'hui évidemment nous permettront de respecter les engagements à l'égard du régime d'aide financière aux étudiants.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. Alors, la commission plénière ayant terminé cet échange, je remercie les personnes qui y ont participé, notamment le député de Verdun, Mme la ministre de l'Éducation, son adjoint parlementaire le député de Lotbinière ainsi que tous les gens qui vous ont accompagnés ce soir.

Mme Marois: M. le Président, vous me permettrez de remercier mon équipe, les gens qui m'ont accompagnée, qui m'ont aidée et aidé les membres de la commission dans l'accomplissement de nos travaux.

Le Président (M. Pinard): Alors, ceci met donc fin à l'étude des crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1997.


Adoption des crédits

Je dois maintenant mettre aux voix les crédits qui sont à voter. Premièrement, est-ce que les crédits du Conseil du trésor, de l'Administration et de la Fonction publique sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Deuxièmement, est-ce que les crédits du ministère de l'Éducation sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Troisièmement, est-ce que les crédits du ministère du Revenu sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Quatrièmement, est-ce que l'ensemble des crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1997 sont adoptés?

Des voix: Adopté.

M. Gautrin: Sur division.

Le Président (M. Pinard): En conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. La commission plénière ayant accompli son mandat, je remercie les personnes qui y ont participé et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de le faire immédiatement. Je suspends donc les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 23 h 13)

(Reprise à 23 h 16)

Le Vice-Président (M. Pinard): Veuillez vous asseoir. Alors, M. le président de la commission plénière.

M. Gaulin (président de la commission plénière): M. le Président, je fais rapport que la commission plénière a étudié les crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1997 et qu'elle les a adoptés sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Projet de loi n° 80


Présentation, adoption du principe et adoption

En conséquence, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 80, Loi n° 3 sur les crédits 1996-1997, qu'elle en adopte le principe et qu'elle adopte le projet de loi proprement dit. Cette motion est-elle adoptée?

M. Lefebvre: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît! Nous allons suspendre pour quelques instants.

(23 h 17 – 23 h 26)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous reprenons nos travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Merci.

Alors, nous allons mettre aux voix le projet de loi n° 80, Loi n° 3 sur les crédits 1996-1997.


Mise aux voix

Que les députés qui sont en faveur veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que les députés qui sont contre veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vaive (Chapleau).

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a des abstentions? Non. Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je demanderais le consentement de cette Chambre pour que le vote du ministre d'État des Ressources naturelles, le vote de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, le vote du ministre délégué aux Relations avec les citoyens soient ajoutés au vote ministériel, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

(23 h 30)

M. Paradis: Oui, est-ce qu'on demande un consentement en vrac ou un par un?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement? J'ai compris qu'il y a consentement, individuel ou en vrac, mais il y a consentement. Alors, maintenant, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:49

Contre:33

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je déclare donc le projet de loi n° 80, Loi n° 3 sur les crédits 1996-1997, adopté. M. le leader du gouvernement, pour la poursuite des travaux.

Une voix: Mme la leader adjointe.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi. Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 6 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 69

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 6, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 10 décembre dernier sur l'adoption du principe du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit. Mme la leader adjointe du gouvernement avait demandé l'ajournement du débat. Le dernier intervenant a été le député de Saint-Laurent, qui avait terminé son intervention. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 69? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. On sait que le débat sur l'adoption du principe a été interrompu pour permettre à divers intéressés par ce projet de loi de se faire entendre en commission parlementaire. Et, à ce moment-ci, si le ministre pouvait informer l'opposition des amendements qu'il entend proposer, nous serions à même d'indiquer très clairement s'il y aura ou non d'autres intervenants sur le projet de loi. À défaut de connaître les amendements, certains députés de ce côté-ci désireraient s'exprimer.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Oui, M. le Président, avec plaisir. Je croyais m'en être expliqué avec notre collègue le député de Laporte, mais je vais le refaire volontiers pour l'Assemblée.

Les intervenants auxquels vous faites allusion avaient manifesté quelques inquiétudes, effectivement. Ils sont venus à Québec, se tenant prêts à être entendus. Mais, pendant cette attente, diverses négociations ont fait qu'ils ont été rassurés et qu'ils ont renoncé à toutes fins pratiques à leur prestation devant la commission, puisque leurs inquiétudes étaient calmées de la façon suivante: non pas par une série d'amendements, mais particulièrement par la non-proclamation par décret d'un certain nombre d'articles, ce à quoi le gouvernement s'est engagé par écrit. Et, d'ici à ce que ces articles soient proclamés, des discussions auront lieu entre les diverses parties pour établir, par convention ou autrement, un modus vivendi qui rassure tout le monde. Alors, je crois honnêtement que l'opposition a fait son travail, a représenté les gens qui étaient inquiets. Ils ne le sont plus, et l'opposition ne devrait plus l'être non plus.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement une question de précision, là. Je ne veux pas l'être à la place des divers intéressés au premier plan, mais, si je comprends bien la réponse du ministre des Finances, c'est que, le projet de loi ne subissant aucun amendement, ce qui a été garanti aux divers intervenants, c'est que la loi va être adoptée sans amendement, telle que déposée, et que le gouvernement se serait engagé à ne pas proclamer par décret gouvernemental les articles qui les visent plus directement pour donner la chance à une négociation d'aboutir entre les parties.

Maintenant, ces gens-là nous ont contactés, je le dis très ouvertement, officiellement, par écrit, par téléphone, avant; ils ne nous ont pas recontactés pour nous indiquer qu'ils souhaitaient négocier dans le cadre d'une législation déjà adoptée et qui peut être décidée par simple décret gouvernemental. Ces gens-là ne bénéficient plus, à ce moment-là, de la même situation de rapport de force, si je peux utiliser l'expression, la loi ayant été adoptée par l'Assemblée nationale. Moi, si ces gens-là nous disent: On est satisfaits, on a une entente avec la fédération du Mouvement Desjardins, je n'ai pas d'intervention à faire. Mais si ces gens-là ne nous contactent pas pour nous en faire part et pour nous le dire, à ce moment-là, pourquoi ne pas suspendre les articles qui intéressent ces gens-là, donner le temps à la négociation de se poursuivre et revenir, à la session du printemps, avec les modifications qui ratifieront législativement l'entente à laquelle les parties en seront arrivées? Ça me semblerait plus prudent comme attitude, à moins de recevoir dans la même forme les garanties des divers intervenants.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous aimeriez mieux suspendre?

M. Landry (Verchères): Pour le bénéfice du leader de l'opposition, je crois que ces gens-là, de bonne foi, ont cru que, nous ayant donné le feu vert pour procéder, le fait qu'on vous le communique vous rassurerait complètement. Ils nous ont pris comme intermédiaires, c'est ce que je présume.

Et, en plus, j'ai fait allusion au fait que nous allions ne pas proclamer certains articles, c'est ce que je leur ai garanti par lettre, plus une série d'amendements qui, eux, seront soumis suivant la procédure habituelle. Une dizaine, je crois. Et nous avons fait ces deux choses-là, la lettre et les amendements, pour calmer les inquiétudes des gens qui vous ont parlé.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce que je pourrais proposer à ce moment-ci au leader du gouvernement, compte tenu du fait que ces éléments-là... Et c'est malheureusement habituel, en fin de session, qu'on en arrive à des règlements de dernière minute, c'est la fin de session qui provoque ces règlements de dernière minute. On a encore quatre jours de prévus pour siéger à l'Assemblée nationale. Qu'on prenne le temps de nous communiquer ces amendements comme tels et également la position des parties et, à ce moment-là, on pourrait éviter de discourir sur un projet de loi qui n'est plus le même que ce qu'on a dans nos cahiers, comme tel, parce que la commission parlementaire aura porté ses fruits. Il s'agit d'un délai. Je ne sais pas s'il y a des impossibilités dans le calendrier que connaît le leader du gouvernement. Ce serait plus facile de procéder ainsi; sinon, bien, on procédera selon la manière habituelle.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. Moi, ce que j'allais suggérer au leader de l'opposition, afin que chaque parlementaire soit bien rassuré sur la démarche, c'est qu'à ce moment-là on pourrait procéder au principe, mais lors de l'étude article par article, à ce moment-là, toutes les garanties exprimées par le ministre des Finances pourraient être données à l'opposition officielle relativement à ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. C'est une méthode qui est très acceptable, sauf qu'à ce moment-ci, faute de les avoir, sur le plan du principe, on en demeure au même point où on était avant la commission parlementaire, et les représentations qu'on a à faire pour s'assurer qu'elles pénètrent bien, les droits de parole vont être utilisés, M. le Président. C'est la seule raison, c'est par économie des droits de parole au niveau du principe.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je peux même aller un peu plus loin, M. le Président, je peux garantir pour demain que les amendements seraient déposés, seraient présentés à ce moment-là à l'opposition officielle. Alors, à ce moment-là on pourrait être certain, avant que le projet de loi franchisse une étape ultérieure à celle d'aujourd'hui, que tout soit correct, de part et d'autre.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

(23 h 40)

M. Paradis: Est-ce que je comprends correctement, que les amendements vont être transmis à l'opposition, nous allons en prendre connaissance et, s'ils vont – et je n'ai aucune raison d'en douter – dans le sens des propos du ministre des Finances, on pourrait reprendre le principe, à ce moment-là, si ça satisfait, au niveau de la réplique du ministre des Finances? Et, sur le plan des délais, je tiens à rassurer le leader du gouvernement, on pourrait renoncer à la journée de carence entre les deux pour que nos travaux roulent de façon plus facile pour le leader.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, ce que j'allais suggérer... Je pense que déjà on fait preuve d'une grande ouverture en disant que demain matin, donc, tous les amendements vont être soumis à l'opposition officielle. De toute façon, c'est le principe. Si, pour une raison ou pour une autre, l'opposition officielle décide, au niveau de la prise en considération ou à l'étude détaillée, de dire: Non, on n'est pas d'accord, le projet de loi n'ira pas plus loin que là. Alors, c'est pour ça que, moi, ce que je suggère, c'est: faisons le principe ce soir et, si l'opposition officielle, demain, n'est pas satisfaite des amendements qui sont présentés, à ce moment-là, ça n'ira pas plus loin que l'étude détaillée du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. On se comprend très bien, sauf que je vais être obligé, dans les circonstances, de ne pas renoncer à mon droit de parole, entre autres – il y en a d'autres également de ce côté-ci – sur le principe et de vous affubler de discours qui ne tiendront pas compte des travaux qui ont été faits en commission parlementaire par tous les représentants. Moi, si le leader du gouvernement insiste pour m'entendre, je suis prêt à procéder.

M. Bélanger: Je vous demanderais de suspendre quelques instants, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous suspendons nos travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 41)

(Reprise à 23 h 48)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, pour faire suite, bon, à l'échange que nous avons eu pendant l'ajournement de nos travaux, j'aimerais déposer la lettre envoyée par le vice-premier ministre à M. Michel Parent, président de la Fédération des caisses d'économie Desjardins du Québec, lettre datée du 16 décembre 1996, dans laquelle le vice-premier ministre mentionne quelles sont ses intentions relativement aux amendements proposés, aux amendements ou aux modifications proposés relativement au projet de loi. Alors, j'aimerais déposer cette lettre, M. le Président.


Document déposé

Le Vice-Président (M. Pinard): Votre lettre est déposée. Consentement pour le dépôt de la lettre?

Une voix: Consentement.


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement.

Alors, nous allons reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit. Le dernier intervenant concernant l'adoption du principe a été le député de Saint-Laurent, qui avait terminé son allocution. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 69? M. le leader de l'opposition.

(23 h 50)


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je viens de prendre connaissance, en diagonale, d'une lettre qui a été déposée par le leader du gouvernement au nom du ministre d'État de l'Économie et des Finances. Moi, je voudrais être convaincu, là, que le contenu de cette lettre-là rencontre bien la volonté des diverses parties qui sont impliquées au dossier. Vous avez eu, M. le Président, le bénéfice d'entendre divers porte-parole, surtout de l'opposition, quant au contenu comme tel du projet de loi. Il y a un principe, M. le Président, qui nous tient à coeur de ce côté-ci, c'est le principe de respect des ententes qui ont été signées.

Au sein du Mouvement Desjardins, vous avez le réseau des caisses d'économie, comme tel, qui ont eu l'avantage de se faire entendre en commission parlementaire pour faire valoir leur point de vue. Ce point de vue, M. le Président, il est exprimé dans un mémoire que ces gens-là ont soumis à la commission parlementaire. Et il faut être certains à ce moment-ci, parce qu'il s'agit d'un des principes les plus importants qui sous-tendent cette législation, que leurs revendications ont non seulement été écoutées par les parlementaires des deux côtés, mais que leurs revendications ont été entendues, comprises, et que la lettre du 16 décembre, d'aujourd'hui, qui a été transmise à M. Michel Parent, le président de la Fédération des caisses d'économie Desjardins, répond de façon certaine aux appréhensions que ces gens ont manifestées publiquement.

M. le Président, c'est d'autant plus important que la Fédération des caisses d'économie regroupe 121 caisses d'économie au service de quelque 300 000 membres dans 700 organismes et entreprises au Québec. Elle cumule un important actif de 2 300 000 000 $, ce qui la situe, dans l'ensemble du Mouvement Desjardins, au cinquième rang parmi les fédérations. Ses performances financières sont dignes de mention; elles sont au-dessus de la moyenne des autres établissements Desjardins. Il faut rappeler que ces caisses forment une espèce – et je pense que c'est le député de Verdun qui l'a bien traduit – de société distincte au sein de La Confédération du Mouvement Desjardins. Cette société distincte ou ses droits d'être distincte furent reconnus en 1979, il y a quasiment 20 ans, au sein d'un protocole d'entente qui a été signé entre le Mouvement Desjardins et cette nouvelle société distincte.

M. le Président, lorsqu'on intervient dans le cadre d'une entente, il s'agit d'être certain, sur le plan législatif, que les droits des parties ne sont en aucun cas bafoués. Moi, j'ai été un petit peu rassuré et un petit peu inquiété des propos du ministre des Finances lorsque le ministre des Finances a indiqué – et il me corrigera dans sa réplique si ce n'est pas exact – que la loi va être adoptée, mais qu'il y des assurances de données aux parties que certains articles – et je pense que ce sont ceux qui touchent directement le sujet dont nous discutons ce soir – ne seront pas mis en vigueur tant qu'une négociation n'aura pas abouti.

Pour ceux et celles qui sont plus familiers avec le processus gouvernemental, c'est facile de comprendre dans quelle situation va être placée une des parties qui aura à négocier. Les gens du réseau n'auront plus la sécurité de leur entente de 1979, n'auront plus de sécurité législative, n'auront qu'une garantie exécutive, M. le Président, qui peut être exercée à tout moment. Ça, c'est placer une partie dans un contexte de négociation où ce n'est plus vrai que les gens qui ont acquis le statut de société distincte au sein de la confédération du Mouvement Desjardins vont pouvoir négocier d'égal à égal; c'est de laisser à la merci d'une simple décision de cabinet une négociation qui porte sur 2 300 000 000 $, qui touche 300 000 membres, qui touche une quatre-vingtaine d'entreprises. Et ce n'est pas n'importe quelle entreprise, M. le Président, ce sont des acteurs sociaux et économiques majeurs dans la société québécoise.

M. le Président, le président de la CSN, M. Gérald Larose, le président de la FTQ, M. Clément Godbout, la présidente de la Centrale des enseignants du Québec, Lorraine Pagé, écrivaient à tous les députés le 9 décembre dernier pour leur dire: «Tenant compte des graves lacunes de ce projet de loi, nous vous demandons instamment de surseoir à son adoption – pas à l'adoption d'un décret, M. le Président, ces gens-là nous demandaient de surseoir à l'adoption d'un projet de loi, parce qu'ils ont encore confiance au législateur – d'autant plus qu'il a été déposé sous le couvert de modifications techniques – ça n'a pas été fait, M. le Président, dans leur langage, en plein jour, en pleine clarté – alors qu'en réalité il transforme profondément la structure coopérative et décisionnelle du Mouvement des caisses Desjardins, menaçant ainsi directement le réseau des caisses d'économie.»

Moi, là, je veux être certain que ces trois et acteurs-là, qui sont majeurs au Québec, sont satisfaits de ne plus avoir de processus législatif qui leur garantisse un débat éclairé et serein. S'ils en sont satisfaits, M. le Président, nous en serons satisfaits, ce sont les premiers intéressés, mais il faut qu'ils nous le disent, que c'est ça qu'ils voulaient, que ce n'était pas... Le contenu de la lettre du 9 décembre, ça a changé, ce qu'ils souhaitaient, M. le Président.

Il y en a d'autres, M. le Président, qui sont intervenus directement. Michel Parent, à qui la lettre est adressée, écrivait à tous les députés. Celle que j'ai entre les mains est une copie de celle qui a été adressée au député d'Arthabaska, elle se lit comme suit: «Si le projet de loi était adopté intégralement, cela ferait du législateur l'instrument de la Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec dans le différend qui l'oppose à notre Fédération. En effet, le projet de loi contient des dispositions qui auront pour conséquence de permettre à la Confédération de redéfinir unilatéralement nos relations contractuelles.»

Si on comprend bien, encore une fois, ces gens-là ne voulaient pas se placer dans une situation où un des partenaires pourrait redéfinir unilatéralement un contrat bilatéral au sein de la Confédération, mais qu'il leur accordait le statut de société distincte. Si on adopte le projet de loi tel qu'il est, ces gens-là seront, encore une fois, à la merci d'un décret gouvernemental, et le pouvoir du législateur d'intervenir sera devenu quelque chose du passé. On n'aura plus la possibilité de représenter ces gens-là dans aucun débat. C'est le Conseil des ministres, un mercredi, qui va dire: Bon bien, ces articles-là sont en vigueur, la négociation est finie, c'est réglé, bonjour.

Est-ce que ces gens-là sont satisfaits de cette position de faiblesse dans laquelle on veut les placer pour fins de renégociation? Et, s'ils le sont, M. le Président, ils n'ont qu'à nous en faire part, aux parlementaires des deux côtés de la Chambre, de la même façon qu'ils nous ont fait part de leurs craintes. Ils n'ont qu'à nous dire que la lettre d'aujourd'hui du ministre des Finances les rassure complètement, qu'ils sont dans une situation où ils pourront négocier avec un rapport de force d'égal à égal et qu'il n'y a rien de brisé au consensualisme contractuel qui les a amenés à l'entente de 1979.

Vous aviez également un autre groupe fort important, le Regroupement des associations de pompiers du Québec, qui, le 10 décembre, s'adressait au ministre des Finances en ces termes: «Il va de soi que nous ne pouvons que nous objecter avec force – avec force, M. le Président – contre un tel projet qui menace directement la survie d'un réseau de 121 caisses d'économie créé et développé depuis plusieurs dizaines d'années par des travailleuses et des travailleurs du Québec. Nous sommes actuellement plus de 300 000 membres répartis dans plus de 700 entreprises et institutions du Québec.» Est-ce que le Regroupement des associations de pompiers du Québec souhaite voir adopter la loi et souhaite se retrouver à la merci d'un simple décret du Conseil des ministres pour statuer sur leurs droits et leurs obligations qu'ils ont librement négociés en 1979?

M. le Président, l'Union des artistes nous écrivait le 10 décembre 1996 et s'exprimait en ces termes: «Une adoption intégrale des dispositions du projet de loi entraînerait inévitablement l'élimination du seul réseau de caisses de travailleuses et de travailleurs du Québec.» Est-ce que ces gens-là sont rassurés par la lettre qui leur a été adressée aujourd'hui par le ministre des Finances à l'effet qu'ils conservent tous leurs pouvoirs de négociation pour mettre fin à leur statut de société distincte ou est-ce qu'ils souhaitent conserver ce statut de société distincte?

(minuit)

Vous comprendrez que, la lettre du ministre des Finances portant la date de ce jour, ces gens n'aient pas encore eu, ni leurs conseillers, la possibilité de répondre clairement et de dire: Oui, le processus législatif, nous considérons qu'il a fait son travail, nous considérons qu'on n'a plus besoin de la protection de l'Assemblée nationale, qu'on se remet pieds et poings liés entre les mains d'un décret gouvernemental.

Si c'est ça que les parties voulaient, si c'est ça qu'elles ont exprimé clairement, si c'est ça la réponse à la lettre du ministre des Finances, M. le Président, nous concourrons avec eux. Mais leur lettre datée d'à peine une semaine n'est pas du tout du même langage, du même ton. Au contraire, ces gens-là demandent de conserver leur possibilité de négociations sans avoir à négocier avec un pistolet sur la tempe ou un couteau sur la gorge. Ils veulent négocier d'égal à égal avec la Confédération.

La Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Québec, le 10 décembre dernier – nous sommes le 17, M. le Président – s'exprimait ainsi: «M. le ministre – une lettre adressée au ministre des Finances – je suis très surpris d'apprendre que le gouvernement du Québec s'apprête à donner au Mouvement Desjardins les outils pour faire disparaître le réseau des caisses d'économie du Québec.» Est-ce que la lettre d'aujourd'hui du ministre des Finances règle ce problème aux yeux de la Fraternité des policiers et policières du Québec?

La lettre continue, elle est signée du président Yves Prud'homme, M. le Président: «Le projet de loi 69, actuellement à l'étude et modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, comporte des dispositions tout à fait inacceptables. Déposé sous des prétextes de modifications techniques, ce projet de loi propose en fait une modification profonde du fonctionnement coopératif chez Desjardins, laquelle pourrait mener à une élimination du seul et unique réseau des caisses des travailleuses et travailleurs du Québec. Pourquoi le gouvernement voudrait-il anéantir des années d'implication et d'acharnement? Les coopérateurs ont en effet su créer dans leur milieu de travail des coopératives de services financiers qui, au fil des ans, sont devenues de véritables instruments de développement économique. Est-il utile de dire que ces caisses d'économie sont aussi, pour tous leurs membres, une grande source de fierté? Bref, nous avons la ferme intention de combattre avec vigueur cette menace qui pèse sur notre réseau.»

Est-ce que la lettre d'aujourd'hui du ministre des Finances rassure complètement la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal, compte tenu du vocabulaire qui est utilisé, de la terminologie qui est utilisée et des arguments de fond, M. le Président? «Aussi, en mon nom et en celui de mes confrères et consoeurs membres des coopératives, j'apprécierais, vu l'urgence de la situation, l'étude du projet de loi devant avoir lieu cette semaine, que vous preniez les moyens nécessaires pour surseoir à l'adoption du projet de loi n° 69. Vous remerciant d'avance...»

M. le Président, ces lettres témoignent d'une profonde inquiétude, d'une légitime inquiétude de la part de gens qui ont bâti un mouvement coopératif pour répondre à des fins spécifiques. Au moment où nous nous parlons, ils ont eu le bénéfice de se faire entendre en commission parlementaire et, aujourd'hui, ils ont le bénéfice, suite à cette commission parlementaire où ils ont été entendus, d'une lettre du ministre des Finances qui apporte certains amendements qui apportent certaines modifications.

M. le Président, est-ce que ces modifications apportées répondent clairement, complètement et à leur satisfaction, à ces divers intervenants? La question n'est pas tellement compliquée, mais tout le monde comprendra la différence entre négocier dans une situation libre de tout carcan et négocier dans une situation où vous avez un décret gouvernemental qui vous pend au-dessus de la tête après qu'une loi a été adoptée par l'Assemblée nationale.

Ce qu'on nous demande de faire à ce moment-ci, sans avoir donné le temps aux divers intervenants d'analyser les implications juridiques de la réponse du ministre des Finances qui, peut-être répond à quelques points, peut-être répond à l'ensemble des points, sans le bénéfice de cette argumentation, c'est d'adopter un principe qui va faire en sorte que nous allons, nous, comme législateurs, fournir l'outil au gouvernement qui est l'épée de Damoclès qui va pendre au-dessus d'une des parties en cours de négociations.

M. le Président, c'est peut-être habile comme stratégie, mais est-ce que c'est juste et est-ce que c'est équitable envers ces 300 000 travailleurs et travailleuses qui ont bâti, chacun dans leur milieu, un mouvement coopératif qui est fort? Moi, je pense que ces gens-là méritent notre respect, méritent qu'ils soient traités comme nous les avons traités depuis le début de ce débat. Quand on s'est rendu compte qu'on brusquait les choses, que ce n'était pas limpide, que ce n'était pas transparent, on a convenu, des deux côtés de la Chambre, d'une commission parlementaire à l'étude du principe. On a permis à ces gens-là de venir jeter de la lumière sur nos débats, M. le Président, puis ça n'a pas abouti à rien. Ça a abouti à des amendements, là. Ça a abouti à une lettre du ministre des Finances qui dit: Écoutez, je vous ai entendus et voici, suite à ce qu'on s'est dit, aux échanges qu'on a eus, les modifications que je suis prêt à apporter. Tant mieux si ces modifications vont dans la bonne direction. Tant mieux si elles répondent à des problèmes soulevés par les divers intervenants.

Ma question n'est pas compliquée à ce niveau-ci: Avant de dire oui au principe d'un tel projet de loi, peut-on donner le temps – on n'arrête pas de siéger, là, ce soir, M. le Président; normalement, on siège jusqu'à vendredi soir, minuit – aux gens de recevoir la lettre, de répondre par écrit: Vous avez répondu à tel argument que nous avons soulevé, vous avez répondu à tel autre, mais ne nous demandez pas de négocier avec une épée de Damoclès pendue sur notre tête? Ne devenez pas les gens qui nous placent dans une situation de négociation où on ne sera plus d'égal à égal. Ne nous placez pas dans une situation de négociation où on n'aura d'autre choix, sous la menace de mise en vigueur, par simple décret gouvernemental, des articles d'une loi adoptée par l'Assemblée nationale, que de plier dans la négociation, que de bafouer des droits qu'on a construits au fil des années avec les centaines de milliers de personnes qu'on a embarquées dans notre mouvement coopératif et qui y croient encore à cette démocratie coopérative.

Tout ce qu'on demande finalement, M. le Président, c'est que, de ce côté-ci de la Chambre comme de l'autre côté, on ait autant de respect pour la démocratie que les gens du mouvement coopératif en ont. Et, à ce moment-là, ce qui s'impose, c'est simplement, de la part du leader du gouvernement, de dire: Bon, sur le principe, ça va. On va retourner, on va donner le temps aux gens de recevoir la lettre, on va attendre les réponses, et les gens vont nous répondre si c'est ça qu'ils veulent négocier dans ce cadre-là, si la lettre répond aux arguments qui ont été soulevés. Et, si c'est le cas, le principe va être adopté, la commission parlementaire va procéder rondement, et il n'y aura pas de problème sur le plan législatif. Mais, si on tente de bousculer, de procéder sans que les gens aient le temps de réagir, on va revenir aux premiers propos de la lettre, une drôle de façon de procéder en catimini, à minuit et dix le soir, en pleine nuit. Ce n'est pas la façon dont on doit traiter ces gens-là, je le soumets respectueusement.

M. le Président, en terminant, je tiens à remercier, moi, tout le monde qui a collaboré à la commission parlementaire, les gens qui sont venus se faire entendre, les gens qui ont répondu à certains des arguments, parce que je suis certain que la lettre répond à certains des arguments comme tels. Mais je demande que, dans ce même processus, on donne le temps nécessaire aux divers intervenants de répliquer. Notre ministre a une réplique dans le cadre de notre débat. Est-ce que les principaux intéressés peuvent avoir le temps de répliquer par écrit? Ces gens-là sont venus voir les députés, ils ont fait des représentations sérieuses et valables en commission parlementaire et individuellement, auprès des membres de l'Assemblée nationale. Si on prétend répondre à leur demande, bien on va leur laisser le temps de réagir. Si on ne répond pas à leur demande complètement, on va bousculer l'Assemblée nationale et forcer un vote sur l'adoption du principe dès ce soir. Merci, M. le Président.

(0 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, nous cédons maintenant la parole au député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. En effet, le projet de loi n° 69 est un projet de loi qui est assez fondamental pour les travailleurs et les travailleuses, au-delà de 300 000 travailleurs et travailleuses québécois et québécoises qui ont, au fil des années, des décennies, bâti ces caisses d'économie que nous connaissons au Québec, réseau distinct du Mouvement Desjardins. Et, comme société, comme organisation au Québec, nous ne pouvons que constater qu'il y a là quelque chose qui est particulier et qu'on retrouve dans peu de pays à travers le monde. En effet, des travailleurs et des travailleuses qui s'unissent ensemble décident de mettre en commun des ressources financières, de créer un fonds, un capital et de l'utiliser au bien-être de leur organisation ou de la société. Et, M. le Président, nous ne pouvons, nous, comme Québécois, anciens et néo-Québécois, qu'être en admiration devant ce fait, devant ces choses, car, en effet, une des caractéristiques du peuple québécois, au Québec, est d'avoir été capable de cette solidarité, d'avoir été capable de se réunir, de mettre en commun des ressources pour participer au mieux-être et au développement non seulement des travailleurs, mais aussi de la collectivité tout entière.

Aussi, le projet de loi n° 69, M. le Président, qui vise à réformer d'une manière drastique ce système, cette organisation, ceci peut être à l'avantage du Mouvement Desjardins. On sait que le Mouvement Desjardins, actuellement, contrairement à d'autres organisations financières comme les banques, a des difficultés au niveau de son administration ou de ses profits. Mais est-ce que c'est là un exemple que l'on doit prendre pour faire en sorte, par un projet de loi, d'assimiler des organismes qui fonctionnent bien? En effet, les caisses d'économie fonctionnent bien au Québec. Il ne suffit que de prendre l'exemple de la Caisse d'économie des policiers de la Communauté urbaine de Montréal. J'avais l'occasion, la semaine dernière, de parler avec le président de la Fraternité des policiers, M. Yves Prud'Homme, qui me traçait un bilan des activités de cette caisse des policiers et des policières qui ont décidé de faire affaire avec cette organisation plutôt qu'avec une banque ou avec une caisse populaire. Et, lorsqu'on voit tout ce qui a été accompli par cette Caisse, on ne peut qu'imaginer ce qui se fait dans d'autres caisses, un réseau unique au Québec, un réseau qui garde son indépendance, qui garde sa spécificité, proche de ses cotisants, proche de ses sociétaires.

Alors, M. le Président, là on veut amener un projet de loi qui va changer radicalement les règles du jeu. Est-ce qu'on doit procéder à la vapeur, comme semble vouloir le faire le gouvernement? Il est 0 h 13 ou 0 h 14, M. le Président, et on apporte un projet de loi sur un principe aussi fondamental que celui-là, qui va toucher, qui va avoir un effet sur la manière de fonctionner de dizaines de milliers, centaines de milliers – on parle de 300 000 citoyens – de Québécois et Québécoises. Pourquoi ne pas le faire en plein jour, premièrement? Pourquoi l'amener à cette heure-ci? Qu'est-ce qui empêche le ministre de l'amener demain, après la période de questions, après les affaires courantes, qui a lieu à 10 heures, l'amener vers 11 heures, 11 h 30?

Il me semble qu'un projet de loi qui touche des organisations financières, où sont placés non seulement les salaires mais les économies et les hypothèques, enfin, l'administration financière d'un grand nombre de concitoyens, ne saurait souffrir d'attendre quelques heures et d'être discuté demain matin. D'autant plus que M. le ministre nous dit que, suite à la commission parlementaire, il a une lettre dans laquelle il explique un peu ce qu'il veut faire; pourquoi ne pas la soumettre à ce moment-là, non pas seulement au leader de l'opposition – et on sait que le leader de l'opposition défend ardemment les positions des travailleurs et travailleuses du Québec – mais pourquoi ne pas la soumettre directement aux représentants des caisses d'économie? Pourquoi ne pas appeler M. Yves Prud'Homme, président de la Caisse d'économie de la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal, et lui dire: Il nous ferait plaisir de vous entendre sur cette lettre, ce qui annonce nos intentions quant aux changements que nous entendons apporter par rapport au projet de loi que nous avons soumis et avec lequel vous n'êtes pas d'accord? Pourquoi ne pas faire cela? Pourquoi vouloir adopter en catimini cette mesure, un peu comme on va adopter dans ce gouvernement d'autres lois en catimini?

Il me suffit de citer, M. le Président, à titre d'exemple – on est sur le principe, on peut élargir pour prendre des exemples – le projet de loi n° 74 qui parle de la réforme de la taxation de la CSST, où nous avons tenu une commission parlementaire, où les députés gouvernementaux et de l'opposition étaient présents et où nous avons fait certaines discussions pour apprendre que le gouvernement s'apprête à apporter à ce projet de loi un papillon dans lequel il va transférer l'inspection – et là je dis bien «l'inspection» – de la sécurité au Québec sur la santé des travailleurs, une somme de 15 000 000 $ qui était auparavant payée par le gouvernement et qui sera maintenant payée par les employeurs et par, bien sûr, les travailleurs, parce que, lorsque c'est pris dans les employeurs, il ne faut pas se compter d'histoire, si elle fait partie de la masse salariale, ça fait partie des taxes cachées que l'on met sur la taxe et sur les salaires des travailleurs.

M. le Président, c'est le même principe, un gouvernement cachottier qui légifère la nuit, qui ne tient pas compte des opinions des concitoyens québécois qu'ils sont censés servir et qu'ils ont promis de servir. Tout ce qu'ils tiennent compte, M. le Président, c'est d'une logique budgétaire. Il n'y a plus de sentiment, il n'y a plus de principe dans ce gouvernement, mais simplement la faucheuse qui passe. Il faut couper partout et on coupe aveuglément. On passe des projets de loi aussi pour faire plaisir aux amis, faire plaisir aux alliés. Il y a des «deals» qui sont faits, nous dit-on, parmi les centrales syndicales, parmi les patrons, avec le gouvernement sur différents projets. Et on essaie de les amener tant bien que mal, et cela, sans tenir compte de l'intérêt des Québécois et des Québécoises, sans tenir compte des citoyens.

La marque de commerce de ce gouvernement est l'absence totale de sensibilité envers les citoyens concernés par les projets de loi. On ne fait que livrer des promesses à des groupes d'intérêts de gauche ou de droite, selon, M. le Président, la conjoncture. Et ça, on ne peut pas l'accepter; et ça, je ne l'accepte pas. Et on retrouve encore cette philosophie-là dans le projet de loi du ministre, car qu'est-ce qu'on va toucher là? On va toucher des caisses d'économie. On touche des citoyens qui ne sont pas d'accord avec le projet de loi du ministre, des gens qui font des recommandations, ou des réflexions auprès de l'opposition, ou des objections parce qu'ils disent: Nous ne sommes pas d'accord, nous ne sommes pas impliqués, nous ne voulons pas l'être dans cette réforme.

Mais peut-être que le gouvernement a d'autres engagements envers d'autres groupes et qu'il se doit, parce qu'ils ont collaboré à certaines stratégies référendaires ou autres, de livrer une certaine marchandise. Est-ce qu'on doit le tolérer ici en cette Chambre? Nous devons accepter que, à minuit et quelque chose, 0 h 15, 0 h 17, nous soyons complices de ces mesures? Je ne le crois pas. Je ne crois pas que les Québécois nous demandent cela, M. le Président. Ce que les Québécois s'attendaient du gouvernement, c'est une nouvelle façon de gouverner – c'est ce qu'ils avaient dit – mais la bonne façon de gouverner, pas une façon de nuire, pas une façon de couper sans consulter les gens, pas une façon, M. le Président, de changer les règles du jeu, comme on le voit dans ce projet de loi là.

Aussi, M. le Président, pourquoi s'étonner de voir aujourd'hui des gens dans la rue mécontents, des gens qui dénoncent de pseudo-ententes? On le voit encore avec les gens qui négocient dans le secteur public où, de plus en plus, au fur et à mesure que les militants de la base, les travailleuses et travailleurs québécois de la fonction publique découvrent la manière dont on essaie de les embarquer, de les emmener pour qu'ils quittent leurs emplois, qu'ils quittent leur jobs et qu'ils assument une part de la mauvaise administration publique du gouvernement qui ne crée pas d'emplois... De plus en plus, M. le Président, on le voit que les gens se réveillent. Les gens disent: Non, ça suffit! Nous ne sommes pas d'accord. Ce n'est pas pour ça que vous avez été élus et ce n'est pas pour ça que nous avons voté pour vous. C'est ça, la réalité.

M. le Président, il serait souhaitable que M. le ministre sursoie à son projet, le retarde, prenne le temps. Nous sommes seulement à l'adoption de principe et il est de tradition, lorsque nous sommes à l'adoption de principe, que nous prenions le temps de consulter les gens, de les écouter, de soumettre nos projets sérieusement, sans rire. Peut-être que certains députés en cette Chambre trouvent ça amusant, bien, les gens qui vivent les effets de ces lois et qui ne sont pas d'accord, les 300 000 Québécois et Québécoises des caisses d'économie, ils ne rient pas, ça ne les amuse pas. Et ceux qui rient un jour seront jugés sur le travail qu'ils font et sur les railleries qu'ils font aussi.

(0 h 20)

M. le Président, en tout temps, en cette Chambre, quel que soit le gouvernement, le travail de l'opposition a été d'être le porte-parole des citoyens et des citoyennes du Québec, et n'en déplaise aux députés qui ne comprennent pas ça. Nous n'avons pas été élus députés en cette Chambre pour être les porte-parole du gouvernement vers les citoyens, nous sommes élus pour être les porte-parole du public, des citoyens envers le gouvernement. Et ceux qui ne comprennent pas seront jugés et méritent d'être jugés parce qu'ils n'assument pas le mandat pour lequel ils ont été élus. N'en déplaise aux ministres, aux savants ministres de quel que soit le gouvernement, il est temps de redonner à la population les représentants qu'ils ont élus pour les défendre.

M. le Président, trop souvent, on dit dans des études d'opinion publique que les hommes politiques perdent de la crédibilité. Certes, lorsque je vois ce qui se passe dans ce gouvernement, je le comprends et je le déplore, croyez-moi. Et je souhaite que les députés d'en face se réveillent et disent aux ministres, à leurs ministres: Attention, arrêter d'imposer aux gens des choses qui ne font pas leur affaire, pour lesquelles nous n'avons pas de mandat. Le mandat que vous êtes allés chercher auprès de la population, c'est de bien gouverner. Ce n'est pas de les taxer, ce n'est pas de chambouler, de bouleverser les structures sans les consulter. Le mandat était de les consulter, de travailler avec eux, en collaboration, en consensus. Et force m'est de constater que c'est tout à fait le contraire qui se produit.

Aussi, M. le Président, je ne peux que rappeler au ministre, l'appeler au bon sens, le rappeler à plus d'humilité afin qu'il fasse preuve d'ouverture, de concertation, qu'il puisse, dès demain, appeler les représentants des différentes organisations qui représentent les caisses d'économie, leur soumettre les changements qu'il veut apporter à ce projet de loi et leur dire: Êtes-vous d'accord? Êtes-vous capables d'aller voir les 300 000 travailleurs, les 300 000 sociétaires que vous représentez pour savoir s'ils sont d'accord avec vous, pour savoir s'ils abondent dans le sens que nous voulons aller? Car c'est important pour eux. C'est important, les changements que nous allons faire, ça va toucher le fonctionnement d'un instrument ou d'instruments, ou de systèmes, d'organisations qu'ils ont fondés, pour lesquels ils croient, pour lesquels ils sont prêts à passer du temps, à faire des sacrifices. Voilà, M. le Président, ce que nous demandons au ministre.

Point n'est besoin d'être longtemps en cette Chambre, même si après 11 ans de vie parlementaire je vois que certains députés comprennent un peu tout ce qui se passe dans la Chambre... On sait que le gouvernement décide sans tenir compte toujours de ses députés. Mais point n'est besoin non plus de comprendre qu'en négociation et qu'en changement il vaut mieux avoir les gens avec soi pour aller dans la même direction que de les avoir contre soi, pour rappeler au ministre qu'il devrait le faire.

M. le Président, au fil des années, le mouvement coopératif québécois a su faire sa marque, je le disais. Il a fait une marque particulière. En Amérique du Nord, il y a peu d'endroit où nous retrouvons cette implication, cet attachement des gens au mouvement coopératif. Et pourquoi? Parce que ça leur permet de prendre charge de leurs affaires. Et, s'il y a une chose que les Québécois et les Québécoises aiment, c'est s'occuper de leurs affaires, particulièrement lorsqu'il s'agit de finances. Et là on se trouve devant un gouvernement qui va s'occuper de leurs affaires sans avoir leur accord et je pense qu'ils font bien de ne pas l'accepter. Non seulement ils font bien mais, en plus, un jour, ils jugeront le gouvernement, ce gouvernement qui, de plus en plus, s'éloigne des citoyens, de leurs préoccupations, de la base, et qui devra rendre des comptes un jour. Et qui les rendra. Ça viendra. Le temps viendra, M. le Président. On peut railler, on peut avoir une espèce d'insensibilité. Je peux vous assurer, M. le Président, qu'un jour le peuple du Québec, les travailleurs du Québec vont se lever et vont dire à ce gouvernement: Assez! C'est assez! Assez d'insensibilité, assez de dirigisme et assez de situations avec lesquelles nous ne sommes pas d'accord.

Alors, en terminant, M. le Président, ce que j'aimerais vous dire, ce que j'aimerais souhaiter, c'est que M. le ministre des Finances, qui, dans d'autres dossiers, a su faire preuve d'ouverture, décide de rencontrer, une dernière fois, les gens qui sont touchés, qui sont concernés par ce projet de loi, de leur soumettre les changements ou les directions qu'il veut donner à son projet suite aux commissions parlementaires, de discuter avec eux, de rencontrer M. Prud'homme en particulier, le président de la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal, et de s'entendre avec eux afin qu'ils nous disent à nous, l'opposition: Oui, nous sommes satisfaits, le gouvernement nous a rencontrés, nous a consultés et nous sommes prêts à fonctionner dans cette direction-là, ou alors qu'ils nous disent: Nous ne sommes pas prêts, nous ne sommes pas d'accord.

Mais je pense, M. le Président, que la moindre des décences, la moindre politesse envers les membres des caisses d'économie en particulier, des 300 000 Québécois, travailleurs et travailleuses du Québec, qui en sont membres... mériteraient un peu d'attention de ce gouvernement. À moins qu'il ait perdu définitivement toute sensibilité et tout respect des travailleurs et des travailleuses et des citoyens de notre province.

Alors, M. le Président, malheureusement, je ne peux pas être très en accord avec ce projet de loi là, et je vais souhaiter que le ministre accède à nos demandes, celle du leader de l'opposition qui a brillamment expliqué la situation et la mienne, bien sûr, M. le Président, au nom des gens de la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. député de LaFontaine. Alors, y a-t-il d'autres intervenants? Non. Alors, je vais céder la parole à M. le ministre pour son droit de réplique. M. le ministre.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry (Verchères): M. le Président, on a tous et toutes compris que l'opposition n'était mue que par désir de faire entendre en cette Chambre la puissante voix du peuple et on a tous compris aussi que, si la confiance règne dans certains milieux, elle est plus raréfiée dans certains autres. La vérité, c'est ceci, c'est que les intervenants, au nom desquels l'opposition s'est élevée avec tant de vigueur et de sincérité apparente, nous ont rendu visite la semaine dernière et, dans les circonstances que j'ai rapportées en début de séance, ils se sont entendus entre eux et avec nous avant même d'accepter l'offre que nous leur avons faite de s'adresser aux parlementaires en commission. C'est donc dire que, à ce moment-là et jusqu'à maintenant d'ailleurs, la confiance régnait et règne entre ces intervenants et le gouvernement. J'ai eu l'occasion de converser au téléphone avec un certain nombre d'entre eux, j'ai écrit à certains autres, mon personnel en a fait autant, et le fond des choses, c'est qu'ils auront de la difficulté à imaginer que l'opposition a été moins rassurée qu'ils ne l'ont été eux-mêmes, si vous voyez ce que je veux dire.

C'est vrai que l'opposition a une défiance naturelle et méfiance innée envers le gouvernement, c'est son rôle et c'est son métier. Mais le gens que nous sommes chargés de représenter, le peuple, comme l'a dit le député, le peuple, il a confiance au gouvernement, puis il est très content, il dort ce soir sur ses deux oreilles. Si on travaille ça la nuit, bien, ce n'est pas nous qui avons inventé la procédure parlementaire britannique, mais ça tombe bien, encore une fois, puisque la confiance avait été solidement établie et que...

(0 h 30)

L'opposition pourrait toujours vérifier demain et faire ce que nous avons fait nous-mêmes, prendre la peine de décrocher le téléphone puis de parler aux intervenants. S'ils ne veulent pas prendre notre parole, ils pourront au moins, en direct, converser avec ceux dont ils prétendent répercuter les accents angoissés, alors que cette angoisse n'existe plus, qu'elle est, pour l'heure, purement factice, si elle n'a jamais eu quelque raison d'exister. Et il est possible qu'elle ait eu quelque raison d'exister à cause d'un malentendu initial sur le texte. Le gouvernement, M. le Président, n'en disconvient pas, c'est la raison pour laquelle les amendements que nous avons conçus et proposerons demain ont été conçus et seront proposés et c'est la raison aussi pour laquelle la lettre que nous avons remise entre les mains du leader de l'opposition a été rédigée et expédiée.

Cela dit, revenons un peu au fond des choses. Le projet de loi, comme il fut souligné, apporte des modifications qui répondent à des besoins importants d'un secteur non moins important. C'est une des marques profondes et distinctives de l'économie québécoise que d'avoir un tel volume d'activités administrées à travers la formule coopérative. Toutes proportions gardées, je ne crois pas qu'il y ait un pays occidental développé qui ait utilisé à un tel niveau la formule coopérative, pour l'épargne, pour le crédit, pour l'activité agricole et un certain nombre d'autres activités. Mais, pour l'épargne et le crédit, à toutes fins pratiques, c'est la moitié du commerce bancaire, au Québec, qui est effectué par des coopératives regroupées, comme on le sait, en fédérations, en mouvements, mais des unités suivant la doctrine coopérative.

Ce secteur a été bâti petit à petit par des Québécois et des Québécoises parmi les plus humbles et les plus modestes, parce que c'était pour gérer l'épargne des gens qui n'en avaient guère et pour administrer au mieux l'argent des couches de la population dont les grands circuits traditionnels et classiques de l'économie capitaliste de marché n'étaient pas les plus ardents défenseurs. C'était de l'entraide en fait, et ça a commencé très modestement. Et l'Église catholique, qui a joué un grand rôle dans l'histoire du Québec, a joué aussi, dans l'histoire du mouvement coopératif, un rôle important. Souvent, c'était autour des paroisses, ça se faisait dans les sous-sols d'église.

J'ai vu moi-même une caisse populaire très modeste naître dans le village où je suis né. J'y ai fait, dès que j'ai été en mesure de savoir ce qu'était vaguement un dépôt, porter quelques économies qui ont été inscrites à la main dans un petit livret, d'une façon très consciencieuse. Et d'ailleurs, le gérant m'a raconté plusieurs années plus tard qu'un des grands problèmes qu'il avait eus au début de la caisse, c'était d'expliquer aux gens comment il ferait pour reconnaître leur argent pour le leur remettre. Parce que les gens allaient déposer des billets, ils voyaient enfouir ça dans un tiroir avec les billets des autres. Qu'est-ce qu'il va faire pour les retrouver?

Alors, on part de loin. On est aujourd'hui dans les milliards, on est aujourd'hui dans les centaines de milliers de membres, dans les millions de membres, mais ça a commencé par des inscriptions à la main dans de petits carnets, avec des gens qui devaient être rassurés sur le moindre mouvement de leurs fonds. Mais tout ça a changé, et la taille a changé. Et, confrontées aujourd'hui aux contraintes inhérentes à leur taille, les caisses se sont regroupées, d'abord au sein de fédérations, puis d'une confédération, pour surmonter ces limites. Les petites caisses de village se sont donné les moyens de voir grand et de faire de grandes choses tout en restant relativement petites. Elles ont, par le principe de la coopération qui leur a donné naissance, atteint le statut de principale institution financière du Québec.

Aujourd'hui, le secteur des caisses fait face à d'importants défis, comme leurs concurrents d'ailleurs. Elles doivent cependant faire preuve de beaucoup plus d'imagination que ces concurrents pour relever ces défis en raison de la complexité même de leur structure. Et il appartient à cette Assemblée, M. le Président, de s'assurer que les moyens nécessaires sont mis à leur disposition pour mettre cette structure dans le contexte contemporain d'une vive concurrence bancaire et entre institutions financières.

Je crois donc fermement que le projet de loi que nous étudions donne au secteur des caisses d'épargne et de crédit les outils nécessaires à son développement. Les modifications qu'apporterait le projet de loi n° 69 moderniseraient la structure administrative des caisses et des fédérations, ce qui leur permettrait de gérer plus efficacement leurs affaires. Le projet de loi propose aussi des devoirs de surveillance et des pouvoirs d'intervention adaptés au milieu des caisses d'épargne et de crédit. Ces devoirs et pouvoirs seraient confiés, en premier lieu, à la caisse. En effet, le conseil de surveillance, désormais appelé «conseil de vérification et de déontologie», jouerait un important rôle de surveillance et d'intervention en s'assurant du respect par la caisse des règles de déontologie et de saine gestion. Les devoirs de surveillance et les pouvoirs d'intervention seraient aussi renforcés au niveau d'une fédération et d'une confédération, et ce, d'abord et avant tout pour protéger les intérêts de chaque caisse membre du réseau, car ce sont ces caisses qui sont financièrement mises à contribution quand une des leurs connaît des difficultés.

Le projet de loi suppléerait grandement au mode d'adoption des règles applicables aux caisses. En effet, en confiant au conseil d'administration plutôt qu'à l'assemblée générale l'adoption des règles, on permet au réseau d'adopter rapidement des règles de gestion.

Autre innovation importante proposée par le projet de loi n° 69, l'intérêt du réseau qui sera désormais pris en considération dans l'élaboration de règles de gestion saines. En effet, la Fédération devra concevoir des règles en prenant en considération l'intérêt de l'ensemble des caisses qui lui sont affiliées. De même, une confédération pourra établir des règles de gestion requises dans l'intérêt de tout le Mouvement.

Il a été porté, abondamment d'ailleurs, à l'attention de cette Assemblée que certains intervenants s'étaient déclarés inquiets des effets qu'ils percevaient comme leur étant possiblement néfastes de certaines modifications législatives apportées par le projet de loi. Sachez, M. le Président, que ces inquiétudes, premièrement, ne visent aucunement le principe de la loi et, d'autre part, que nous envisageons, comme il fut mentionné, de proposer quelques amendements qui sauront répondre, j'en suis convaincu, aux préoccupations de ces intervenants.

Autres outils importants proposés par le projet de loi n° 69, la capacité qu'aura une confédération de participer à l'offre centralisée de produits et services et la possibilité pour les caisses de s'unir pour investir dans une même entreprise. Grâce à la participation de La Confédération, les caisses pourront plus aisément utiliser les nouveaux modes de distribution de produits et services financiers permis notamment par l'informatique moderne et les télécommunications. Ces outils, utilisés à bon escient par un mouvement fondé sur des principes de démocratie, permettront au secteur des caisses d'épargne et de crédit de continuer à contribuer au développement du Québec et au mieux-être de tous les Québécois et de toutes les Québécoises.

Quand on parle de la nécessité d'adopter cette législation avant la fin de la présente année, donc de la présente session de notre Assemblée, je crois que l'on tient simplement compte du fait que les choses changent vite en matière de concurrence bancaire. Les choses changent vite en matière d'institutions financières. Les intervenants du grand mouvement coopératif, de tous les horizons qu'ils viennent, quelle que soit leur taille, sont d'accord sur le fait que nous devons procéder rapidement. Les inquiétudes auxquelles nous avons fait allusion – et auxquelles nous avons donné réponse – ne portent nullement, encore une fois, sur le fond des choses et ne mettent nullement en question le fait que ces amendements doivent être apportés le plus rapidement possible pour que, dès la prochaine année, le grand Mouvement des caisses soit à pied d'oeuvre pour faire face à la concurrence interne, mais aussi, à cause de la globalisation des marchés et de la libre circulation des capitaux, à la concurrence mondiale.

Car, en effet, ces institutions nées modestement dans des sous-sols d'église participent maintenant au grand mouvement et au grand concert de transport instantané des capitaux d'un endroit du monde à l'autre. Et, pour ces raisons, elles peuvent et doivent compter sur une législation moderne que notre Assemblée nationale leur donnera sans délai.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances. Le principe du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission du budget et de l'administration

Mme Caron: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

(0 h 40)

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 33 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 12


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et de l'amendement transmis

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 33, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 12, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives, ainsi que l'amendement transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le député de Pontiac. Cet amendement est déclaré recevable.

Alors, je suis prêt à entendre le premier intervenant. M. le député de Pontiac, je vous cède la parole.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Oui, nous sommes à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission sur le projet de loi n° 12, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives. C'est un peu ironique que ce soit à cette heure de la nuit que nous étudiions la prise en considération du rapport sur ce projet de loi très important, un projet de loi, M. le Président, comme vous le savez, que... c'est pour améliorer notre bilan routier, c'est dans le but de s'assurer que les jeunes qui vont devenir des conducteurs dans l'avenir aient la meilleure formation. Et surtout, le problème, c'est plutôt un problème de comportement et d'attitude.

C'était un projet de loi qui était tellement important, M. le Président, qu'on a eu une consultation générale où on a entendu 60 mémoires. On a passé 45 heures en commission parlementaire où tous les gens concernés, que ce soient les jeunes qui vont être le plus touchés dans leur période de permis d'apprenti, de temps de permis probatoire, zéro alcoolémie... M. le Président, il y a eu d'autres sujets, comme le port du casque en vélo, le virage à droite sur un feu rouge. Et, comme je vous disais, on a passé 45 heures en commission parlementaire, ensuite, article par article. Sur un projet de 130 articles, on a eu 80 amendements. Donc, c'est pour ça que je suis un peu surpris qu'on fasse ça ce soir, parce que, comme on dit, le problème de notre bilan routier, c'est toujours entre minuit et 3 heures qu'on a le plus d'accidents dus à des conducteurs avec les facultés affaiblies. Donc, j'espère qu'il n'y a aucun lien avec ça, de vouloir nous faire passer ça durant la nuit, pour que les gens ne soient pas conscients de ce qu'on est en train de faire.

Toutefois, M. le Président, une autre chose qui a été faite dans tout ça – c'est ça qui m'a un peu étonné et c'est ça, l'amendement que j'ai soumis – c'est qu'on abolit les cours de conduite obligatoires. Et pendant qu'on discutait de ça, le 3 décembre, durant la commission parlementaire, j'ai posé la question au ministre, j'ai dit: Vu que nous allons abolir l'obligation de prendre des cours de conduite, quelle va être la période de temps pour donner aux écoles de conduite une période d'ajustement? Il m'a indiqué – c'était le 3 décembre – que ce serait le 1er décembre 1997. Donc, j'ai dit: D'accord, ça peut donner à peu près un an, une période d'un an pour s'ajuster. Parce qu'il y a un problème dans tout ça, c'est que maintenant qu'on va abolir l'obligation de prendre des cours de conduite, toutefois, ça va prendre un organisme pour accréditer ces écoles de conduite. Au tout début, c'était l'Association des écoles de conduite du Québec, l'AECQ, qu'on appelle, qui avait été choisie. Elle avait été choisie pour chapeauter et elle avait comme mandataire le CAA. Toutefois, en cours de route, parce que l'Association voulait maintenir l'obligation d'avoir des cours de conduite, ils ont été un peu tassés par la Société de l'assurance automobile du Québec. Et ce n'est pas surprenant de voir que c'est le CAA, le Club automobile du Québec, qui est maintenant, aujourd'hui, qui a été le premier à être choisi pour accréditer les écoles de conduite, et aussi la Ligue de sécurité.

M. le Président, à ma surprise – et c'est pour ça que j'ai apporté un amendement – le 5 décembre, au moment où on était en train de terminer le projet de loi, nous arrivions au dernier article, 130, et le ministre nous a soumis un amendement qui dit que ça va être le 30 juin ou le 1er juillet 1997 et non pas le 1er décembre 1997, ce qui donne seulement une période d'à peu près cinq mois aux écoles pour s'ajuster.

J'ai ici, M. le Président, et à ma surprise, un communiqué qui est daté de novembre 1996, produit par ConduiPRO, une école de conduite, dans lequel on indiquait que la date limite pour déposer sa demande au CAA Québec: 15 décembre 1996. Ça, c'était hier, M. le Président. C'était avant-hier, nous sommes aujourd'hui le 17 décembre. Comment, M. le Président, avant que le projet de loi soit adopté, on a déjà établi que la date, c'était le 15 décembre 1996? Et on dit: La date limite pourrait être recommandée au CAA, le 31 mars 1997, et date probable de la mise en opération de la nouvelle réglementation découlant du projet de loi n° 12: 1er juillet 1997.

Donc, M. le Président, le 3 décembre, il semblerait que le CAA et les écoles de conduite étaient déjà au courant que la date était le 1er juillet 1997. Donc, il y a un problème. On nous a indiqué, aux parlementaires, durant la commission parlementaire, que c'était décembre 1997, lorsque, dans le milieu, c'était déjà connu que c'était le 1er juillet 1997. Je ne sais pas de quelle façon on peut faire corriger ça, M. le Président, parce que j'ai l'impression que les membres de la commission ont été induits en erreur par le ministre. Volontairement ou non, ça a été fait, M. le Président.

Mme Caron: M. le Président, on ne peut évidemment, en vertu de 35.6, imputer des motifs indignes à un député.

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est une question de règlement, Mme la leader adjointe?

Mme Caron: Oui, M. le Président. Évidemment, en vertu de 35.6°, on ne peut imputer des motifs indignes à un député, donc de dire que le ministre aurait pu volontairement induire les parlementaires en erreur est contraire à notre règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je suppose que vous vouliez dire surtout «involontairement». Vous l'avez dit, d'ailleurs, l'un ou l'autre. Alors, il faut s'en tenir... Alors, M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Sauf que, M. le Président, on pourra certainement sortir le «transcript» de la commission où, le 3 décembre, lorsque j'ai posé la question au ministre, il m'a bien répondu que ce serait décembre 1997. Ça, je peux vous présenter ça. Je peux vous indiquer aussi que, dans l'amendement qui a été proposé le 5 décembre, la date est le 30 juin 1997. Donc, M. le Président, il y a une contradiction. Mais j'ai entre les mains aussi... C'est les écoles de conduite, là. Ça là, c'est novembre 1996, bien avant le 3 et le 5 décembre 1996, M. le Président, dans lequel on a déjà ici... C'est indiqué. C'est indiqué que c'est le 1er juillet 1997. On dit qu'il faut déposer sa demande au CAA avant le 15 décembre 1996. Donc, le projet de loi n'est même pas encore adopté, M. le Président, et on a déjà commencé à procéder de cette façon-là. Et je ne dis pas que c'est un document qui est officiel, là, mais c'est des écoles de conduite, c'est des gens dans le milieu.

(0 h 50)

Et j'espère, M. le Président, que ça va être à l'adoption qu'on pourra avoir des éclaircissements sur cette partie-là. Le problème, c'est que, si on m'avait indiqué, moi, le 3 décembre, au moment où on était en train d'étudier les articles, que ce n'était pas le mois de décembre 1997 mais bien juin 1997, je me serais objecté, M. le Président, parce qu'il me semble que les membres de l'Association des écoles de conduite du Québec ont autant le droit que le Club automobile, que la Ligue de la sécurité du Québec, de devenir eux aussi mandataires pour la Société de l'assurance automobile du Québec pour accréditer les écoles de conduite. Et c'est exactement ce que j'avais dit au ministre, j'ai dit: Le fait que la Société de l'assurance automobile du Québec a accordé au Club automobile, au mois de février 1996 – ils ont été nommés comme les mandataires – vous leur avez donné une longueur d'avance. Et c'est très clair ici, et je vais lire un peu ce que ça dit. Lorsque les écoles ConduiPRO parlent à leurs membres, ils disent: «Vous comprendrez, chers membres, l'importance d'être recommandés avant la date limite du 31 mars 1997. Nous avons un grand pas d'avance sur les autres écoles et regroupements. Nous serons sous peu tous recommandés. Nous sommes présents partout dans le Québec.» Donc, M. le Président, c'est exactement la crainte que j'avais, qu'en procédant de cette façon-là on a favorisé. Intentionnellement ou non, on l'a fait et il y a des conséquences à ça. M. le Président, j'espère qu'on pourra trouver une façon de rectifier la situation.

M. le Président, j'espère qu'au moment de la l'adoption – je m'y attendais au moment de la commission – le ministre pourra nous indiquer son orientation sur le port du casque en vélo. Je dois vous dire que la commission a été saisie de plusieurs témoignages. Je pense que tout le monde réalise, M. le Président, que ce n'est pas le fait de porter un casque de vélo qui va empêcher les gens d'avoir des accidents. C'est certain qu'il faut sensibiliser les gens au Code de la sécurité routière, il faut avoir des campagnes de sensibilisation, d'éducation et tenter de prévenir, dans la mesure du possible, les accidents. Si on pouvait être assurés d'accident zéro, comme déficit zéro, M. le Président, on pourrait certainement indiquer que ce n'est pas nécessaire de porter un casque de vélo. Mais il y a eu tellement de témoignages qui nous ont indiqué les conséquences malheureuses de ceux qui ont des chutes en vélo et qui, malheureusement, n'ont pas le casque, des décès, mais aussi des traumatismes et des séquelles, M. le Président, des séquelles qui demeurent des séquelles permanentes.

Donc, M. le Président, c'est un autre élément qui ne fait pas partie du projet de loi, mais je crois qu'il y a eu tellement de représentations dans ce sens que c'est une décision qui devrait être prise dans l'intérêt de la collectivité. Je comprends, M. le Président, que, si on était dans un monde totalement capitaliste, là, où chacun paie pour ses erreurs ou ses entêtements, à ce moment-là, cette liberté pourrait être laissée à l'individu, mais nous avons choisi, comme société, d'avoir un régime d'assurance-maladie et, donc, c'est la société qui assume ces coûts-là..

Donc, M. le Président, j'espère sincèrement qu'au moment de l'adoption on pourra décider sur l'amendement que j'ai soumis, à voir est-ce que le ministre va être d'accord à ce que... Et cet amendement est exactement de dire, concernant l'article 11 qui abolit les cours obligatoires de conduite, que, ça, au lieu d'être effectif le 30 juin, ça soit remis au 1er décembre 1997 pour donner une chance à l'Association des écoles de conduite, elle aussi, de devenir accréditeur pour les écoles de conduite dans l'avenir.

Je dois vous dire, M. le Président, que ça a été une commission parlementaire qui aussi va responsabiliser les camionneurs, dans le sens où les gens, au lieu d'être obligés d'avoir des inspections, vont s'autodiscipliner; et, selon leur comportement, les points d'inaptitude perdus, leur façon de conduire, ils pourront à ce moment-là, M. le Président, avoir un code qui va enlever les tracasseries administratives qui font perdre beaucoup de temps à ces camionneurs-là, toutefois, M. le Président, sans pour autant réduire la nécessité de cette sécurité sur nos routes.

Quant aux jeunes, M. le Président, c'est un peu ça, le problème ou le grand débat qu'on a eu sur les écoles de conduite. Est-ce que le Québec, c'était la seule province où c'était obligatoire? Ça a été rendu obligatoire en 1983 par le gouvernement qui est ici présentement, et c'est eux qui aujourd'hui veulent l'enlever. Je n'ai jamais pu savoir, de la part de la Société de l'assurance automobile, quel avait été l'apport du fait que tous les gens étaient obligés de prendre des cours de conduite, ici, au Québec. Quel a été l'apport sur notre bilan routier? Est-ce qu'il s'est amélioré depuis ce temps-là? La seule réponse qu'on pouvait nous dire: Bien, il y a eu tellement d'autres choses qui ont été faites que, malheureusement, on ne peut pas vous indiquer quel a été l'apport des cours de conduite. On a critiqué aussi, peut-être, la qualité des cours de conduite, parce qu'on dit: Ah, c'est le comportement. Il me semble, M. le Président, que, si on veut réellement améliorer notre bilan routier, on doit prendre les moyens, et il doit y avoir des moyens, des genres de formation qui auraient comme objectif de s'assurer que le comportement des nouveaux conducteurs... Et c'est surtout chez les jeunes – et ça, les statistiques ne manquent pas, M. le Président – certainement dans cette catégorie, les jeunes, où on a le plus souvent des accidents.

Donc, M. le Président, j'attendrai au moment de l'adoption, où le ministre pourra nous indiquer ce qu'il fait pour les casques de vélo, quel amendement, s'il est prêt à l'amendement, ou nous donner une explication pourquoi, le 3 décembre, on parlait du 1er décembre 1997 et maintenant, après l'amendement, on parle du 1er juillet 1997.

Est-ce qu'il a aussi rencontré l'Association des écoles de conduite du Québec, qui, eux, avaient depuis longtemps... Je suis convaincu que nos collègues de l'autre côté, ils ont aussi reçu des lettres de la part des écoles de conduite qui leur disaient: Regardez, on voudrait, nous autres aussi, avoir l'occasion de discuter avec le ministre concernant l'obligation d'avoir des cours de conduite ou non.

Lorsque je parle de l'obligation des cours de conduite, le ministre semblait, lui, s'y objecter, surtout parce qu'il disait: C'est un marché captif pour les écoles de conduite. Mais ce n'est pas dans ce sens-là. Moi, il me semble que toute formation, tout cours qui est donné à des individus, à des personnes, a comme objectif d'améliorer leurs capacités, d'améliorer leur... et je suis convaincu qu'on pourrait certainement aussi améliorer leur comportement.

Donc, M. le Président, je pense que c'est une pièce très importante. Nous voulons tous nous assurer que les gestes que nous allons poser vont améliorer notre bilan routier. L'important, c'est de le faire peut-être le plus tôt possible, parce que c'est peut-être à tous les huit ou 10 ans qu'on apporte des amendements au Code de la sécurité routière.

Entre autres, M. le Président, on va en soulever un autre, c'est que, avec le transfert du réseau routier aux municipalités, il y a plusieurs municipalités qui ont passé des règlements qui empêchent la circulation de véhicules qui dépassent un certain poids. Mais ces chemins-là se situent en région où on pratique l'agriculture ou la foresterie, et il y a des camions qui doivent, pour livrer ou cueillir, soit cueillir le lait, cueillir des animaux ou transporter du bois... Malheureusement, avec le transfert du réseau routier, il y en a qui ont des problèmes, on leur a défendu d'utiliser ces routes-là.

J'espère qu'on pourra en discuter avec le ministre au stade de l'adoption, parce qu'il y a des cas qui nous ont été soumis, et qu'on puisse, M. le Président... Et ça serait le temps de le faire, parce que je ne crois pas qu'on puisse empêcher ou qu'on devrait empêcher nos agriculteurs de recevoir des livraisons ou que quelqu'un aille cueillir, sur leur ferme ou sur leur boisé, la matière première qui assure leur gagne-pain.

Donc, M. le Président, sur ce, je vais attendre que nous soyons rendus au moment de l'adoption de ce projet de loi et voir dans quelle direction le ministre a décidé d'aller sur les sujets à propos desquels nous n'avons pas eu de réponse encore. Merci, M. le Président.

(1 heure)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Pontiac. Il n'y a plus d'autres intervenants? Non. Alors, je dois mettre aux voix l'amendement proposé par M. le député de Pontiac.


Mise aux voix de l'amendement transmis

L'amendement proposé par M. le député de Pontiac est-il adopté?

Des voix: Rejeté.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rejeté. Le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi n° 12, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 34 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 30


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 34, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec. Je cède la parole à M. le ministre des Affaires municipales. M. le ministre.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, nous sommes donc à la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a étudié le projet de loi n° 30 portant sur les modifications à la Société d'habitation du Québec. J'espère que j'aurai des propos suffisamment rafraîchissants, à l'heure qu'il est actuellement, près de 1 heure, pour que nous puissions aller rapidement dans l'analyse de ce rapport de la commission de l'aménagement et des équipements.

Effectivement, M. le Président, c'est un projet de loi qui avait été introduit ici, à l'Assemblée nationale, en juin dernier. Ce projet de loi a fait l'objet de beaucoup de discussions, puisque essentiellement il vise à une modification générale de la Loi sur la Société d'habitation du Québec pour donner des assises légales à la possibilité de placer un organisme d'habitation sous administration provisoire.

M. le Président, la Société d'habitation du Québec a des ententes avec près de 1 000 organismes sans but lucratif, et ces organismes dépensent annuellement environ 250 000 000 $. Nous voulons que cet argent soit placé sous le contrôle des élus de l'Assemblée nationale et que, à défaut, nous puissions mettre ces administrations sous tutelle, les mettre sous administration provisoire par décision du Conseil des ministres pour un maximum de 120 jours et une période de 90 jours supplémentaires à chaque fois renouvelée par décision du Conseil s'il y a des motifs suffisants après la première période de 120 jours.

Nous avons étudié en détail chacun des articles de ce projet de loi en commission parlementaire. Nous y avons ajouté un amendement qui vise à ce que le projet de loi ne touche pas les causes pendantes, enfin la cause pendante devant les tribunaux, la cause pendante qui a été introduite par la Société d'habitation du Québec. Et c'est pourquoi nous sommes tout disposés, M. le Président, à passer à la prochaine étape, qui sera celle de l'adoption du projet de loi, pour que nous ayons les moyens de contrôler efficacement les 250 000 000 $ que nous consacrons à l'habitation au Québec dans toutes les régions du Québec avec les 1 000 organismes sans but lucratif qui oeuvrent dans ce secteur. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de Hull, je vous cède la parole.


M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Comme le ministre le mentionnait, nous avons procédé à l'étude article par article du projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec. Nous nous sommes retrouvés en commission parlementaire à quatre reprises; durant les trois premières sessions en commission parlementaire, l'opposition libérale a demandé que le ministre apporte certaines modifications au projet de loi. Entre autres, lorsque le projet de loi a été déposé devant nous dans sa version originale, nous trouvions que le ministre demandait à la Législature provinciale de lui accorder des pouvoirs extraordinaires, le pouvoir de suspendre des administrations, le pouvoir de changer, de substituer et, sans tenir compte du fait qu'il y avait une cause pendante devant le tribunal, il pouvait même tenir compte de faits et gestes posés avant l'adoption du projet de loi. Il nous semblait, M. le Président, à ce moment-là, que ça n'avait pas de bon sens, les pouvoirs que le ministre demandait à la Législature provinciale.

D'ailleurs, le Protecteur du citoyen nous a fait part de ses commentaires, l'UMQ nous a fait part de ses commentaires, le Barreau également nous a fait part de ses commentaires. Et, M. le Président, je pense que finalement le ministre a compris que nous avions raison. La preuve, c'est qu'il a accepté, à un moment donné, d'apporter ou de proposer un amendement à son projet de loi pour indiquer qu'il ne pourrait pas tenir compte des faits et gestes ou des causes qui seraient pendantes devant un tribunal. Parce que le projet de loi tel qu'il nous avait été déposé ressemblait étrangement à une cause qui était pendante devant le tribunal.

M. le Président, je me dois, je pense... Parce que le Barreau, on savait qu'il s'objectait. L'UMQ, on le savait. Mais, curieusement, la lettre du Barreau, qui est datée du 25 novembre – ça fait quand même presque un mois – m'est parvenue seulement la semaine dernière et, curieusement, m'est parvenue le lendemain de la fin de la dernière session de l'étude article par article de la commission de l'aménagement et des équipements. Et cette lettre est datée du 25 novembre 1996 et est adressée au ministre des Affaires municipales. Je ne nommerai pas son nom.

«Objet: Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec, projet de loi n° 30.

«M. le ministre – pour vous indiquer, M. le Président, jusqu'à quel point l'opposition a été vigilante dans ce dossier – nous avons pris connaissance des modifications que vous entendez proposer en commission parlementaire concernant le projet de loi n° 30. Comme nous l'avons mentionné dans notre lettre du 18 juin dernier, nous sommes d'avis que les tribunaux constituent le forum le plus approprié pour évaluer et sanctionner, selon les règles de preuve adéquates et dans le respect de garanties procédurales suffisantes, les inconduites, fautes ou malversations d'administrateurs. La sanction de ces inconduites doit continuer de relever des tribunaux et des autorités déjà habilitées à agir dans le domaine du droit des compagnies, du droit civil et du droit pénal.

«On ne peut, par ailleurs, passer sous silence l'existence d'une cause pendante en Cour supérieure portant précisément sur l'administration d'un organisme d'habitation subventionné. Il s'agit, pour l'essentiel, d'une requête déposée par la Société d'habitation du Québec pour la mise en tutelle d'un tel organisme avec contestation et demande reconventionnelle. Selon toute vraisemblance, ce litige est à l'origine du projet de loi n° 30 déposé en mai dernier à l'Assemblée nationale. À la lumière de ces faits, certains peuvent penser que le gouvernement cherche à régler par voie législative une cause pendante devant le tribunal. À tout événement, les modifications proposées au projet de loi initial comportent certaines améliorations, notamment en ce qui concerne les droits des tiers contractants.

«Nous nous interrogeons cependant sur le contenu de l'avis prévu à l'article 85.2 tel qu'amendé. Cet avis serait-il de nature à identifier publiquement les personnes qui, selon le ministre, auraient commis des inconduites? Inutile d'insister sur les conséquences graves qu'une telle publication pourrait entraîner pour les personnes concernées, le tout sans procès ni débat contradictoire devant une cour de justice.

«Par ailleurs, l'article 85.10 soustrait toujours les administrateurs de l'application de tout recours extraordinaire ou injonction qui pourraient être exercés contre eux. Par le jeu d'une telle disposition, les administrateurs provisoires risquent de n'être soumis qu'au seul contrôle du ministre. Nous comprenons le désir du gouvernement d'assurer une saine gestion des fonds publics, mais un tel objectif ne doit cependant pas se réaliser au détriment des droits des personnes et organismes intéressés et sans tenir suffisamment compte des principes de justice reconnus.

«Je suis confiant que vous prendrez bonne note de ces commentaires et je vous prie d'agréer, M. le ministre, l'expression de mes sentiments les meilleurs.» Le vice-président.

M. le Président, cette lettre, comme je vous le mentionnais, est datée du 25 novembre. Nous avons commencé à étudier le projet il y a plusieurs mois et nous savions qu'il y avait quelque chose qui n'était pas correct. Nous savions que l'Assemblée nationale n'était pas une cour de justice et que l'Assemblée nationale ne devait pas, et n'a pas le droit finalement de se substituer à une cour de justice. Lorsqu'il y a une cause qui est pendante devant le tribunal, on doit respecter et attendre la décision du tribunal. S'il y a une cause devant un tribunal, c'est parce qu'il y avait des droits reconnus à un organisme quelconque d'aller devant le tribunal et de demander justice à ce tribunal. Ce n'est pas à nous de faire l'inverse et de dire au tribunal: On n'attend plus ta décision; nous allons légiférer, nous allons nous faire justice. Ce n'est pas une pratique qui est acceptable. Et le ministre a reconnu ce fait: il a déposé un amendement, et j'en suis très fier, M. le Président.

(1 h 10)

Cependant, je veux quand même assurer le ministre que ce n'est pas notre intention, au contraire, de mettre des bois dans les roues de ce projet de loi là. Il y a quand même du bon, parce que je pense que le gouvernement se doit, lorsqu'il donne des subventions à des organismes quelconques, peu importent les organismes, d'avoir un certain contrôle. Et il semble, en tout cas, d'après ce que le ministre a pu nous expliquer et les personnes qui l'accompagnaient de la Société d'habitation du Québec, qu'il y avait des argents qui étaient donnés sous forme de subventions à différents organismes et pour lesquels il n'y avait aucun contrôle. M. le Président, c'est une pratique qui est inadmissible, et je pense que le projet de loi finalement va donner une poigne, une façon à la Société d'habitation du Québec de contrôler les argents qu'elle devrait contrôler.

Alors, M. le Président, je pense finalement que les quelques exemples que j'ai pu vous mentionner, je me devais de le faire. J'aurais eu certainement plusieurs commentaires à faire sur certains autres articles, mais je pense que l'essentiel, le ministre y a touché, et j'y ai touché également. Mais je vais quand même vous dire, M. le Président, que nous allons être, pas dissidents, mais contre ce projet de loi parce qu'il confère encore au ministre certains pouvoirs qui me semblent extraordinaires. Il y a des évaluations, il y a des critères qui seront établis par le ministre, et pour lesquels critères le ministre pourra quand même suspendre des organisations, des membres de certains organismes. On a quand même réussi à indiquer, à l'intérieur du projet de loi, que ces suspensions seraient limitées dans le temps. Cependant, il reste encore que c'est un pouvoir discrétionnaire qui est accordé au ministre et, dans ce sens-là, M. le Président, nous serons contre le projet de loi. Je vous remercie.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Hull. Il n'y a pas d'autres intervenants? Le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 35 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 59


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 35, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 59, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Y a-t-il des intervenants? Alors, il y a M. le député d'Orford. Je vous cède la parole.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, M. le Président. Il est 1 h 15 ce matin; alors, je serai bref. Ce projet de loi, c'est la Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Alors, l'essence de ce projet de loi, M. le Président, c'était de donner de nouvelles responsabilités aux adjoints ou aux assistants-gardes-chasses. Le problème que l'opposition y voyait... Et nous avons demandé, à ce moment-là, de rencontrer des groupes, et le ministre s'est prêté à notre demande, et je dois avouer qu'on a fait avancer allégrement le projet de loi.

Alors, on a entendu un certain nombre de groupes, entre autres, les gardes-chasses, parce qu'on était prêt à prendre des responsabilités qui étaient partie prenante aux gardes-chasses et maintenant à les donner, en partie, à des adjoints ou à des assistants. Alors, on a demandé à étudier tout cet aspect-là de ce projet de loi. Alors, on a écouté les gardes-chasses, les propriétaires de pourvoirie, les gestionnaires de zec, la Fédération du saumon atlantique et d'autres groupes, des clubs privés, bien sûr, et nous sommes arrivés à la conclusion, M. le Président, qu'il y avait quatre problèmes précis avec le projet de loi.

D'abord, en ce qui a trait aux assistants à la conservation de la faune, il y avait aussi dans le projet de loi ce qu'on appelle les gardiens de territoire; c'était l'article 13.2 où, là, il y avait un pouvoir d'arrestation, un pouvoir d'immobilisation des véhicules. Et on peut s'imaginer le problème que ça pouvait causer au moment où une personne non identifiée, ni avec un habit, ni avec une voiture, pouvait arrêter quelqu'un sur le bord de la route. Ce n'est pas l'esprit des lois du Québec ou du Canada d'obliger à l'immobilisation de véhicules sans être... Alors, on a demandé au ministre de travailler avec nous sur toute la connotation d'identification de ces gens-là, de la formation, de la nomination et des conflits d'intérêts.

Alors, je voudrais juste y revenir. Dans le cas de l'identification, on avait des études sur lesquelles l'opposition avait mis la main, qui venaient du ministère, qui nous expliquaient comment les gyrophares jaunes n'étaient pas effectifs, n'étaient pas efficaces, etc., etc. Alors, le ministre a consenti, plutôt que d'essayer de trouver un moyen précis pour identifier les véhicules, à prendre une description de la Cour suprême dans un jugement qui dit qu'effectivement quelqu'un qu'on immobilise doit vite réaliser qu'il y a une situation d'autorité et qu'il y a... Mais c'est la personne qui immobilise l'individu qui doit démontrer hors de tout doute qu'elle a la permission de le faire, et elle doit être identifiée en conséquence, autant au niveau de sa personne avec un habit, etc. Alors, le ministre en est arrivé à accepter ce point de vue là, et je pense qu'à cet égard-là l'opposition a fait avancer le projet de loi.

Au niveau de la formation, c'était très flou dans la tête du ministre, et je pense que son intention, c'était finalement d'aller bien vite avec la formation. On lui a démontré, entre autres, que les pharmacies Jean Coutu formaient des agents pendant sept jours, alors qu'eux travaillent dans un environnement tout à fait contrôlé. Là, ici, nous, en forêt, on parle de gens qui, souvent, ont pris un petit verre de boisson, qui ont des armes, souvent il fait noir. Alors, on a maintenant l'assurance, de la part du ministre – il y a eu un cheminement – qu'il y aura au moins une formation de 50 heures.

En ce qui a trait à la nomination de ces gens-là, les gardes-chasses seront impliqués dans la sélection de ces gens-là, et on nous assure qu'il y aura un processus suivi, enquête, etc. Alors, ça aussi, ça nous a donné satisfaction, et c'était loin d'être évident au moment du début du projet de loi.

Le seul point qui reste pas très clair pour nous, M. le Président, mais je pense qu'il faut faire confiance aux gens qui sont venus en commission, en la bonne volonté qu'ils ont démontrée, c'est le conflit d'intérêts. Parce qu'il faut voir maintenant que, dans des zecs, dans des clubs de chasse, souvent, cet adjoint au garde-chasse, cet assistant-garde-chasse va aussi être un guide. Et là son salaire est payé par la zec ou par la pourvoirie; il est guide. Comment va-t-il arrêter un client de pêcher trop de poissons, etc., etc.?

Maintenant, après avoir écouté tout ce beau monde là, on est arrivés à la conclusion qu'autant les pourvoiries que d'autres groupes de clubs privés pourraient perdre leur permis s'ils ne se comportent pas à l'intérieur des normes acceptables. Alors, on pense qu'il y a là matière à problème, mais on pense que la loi est assez forte pour les prévenir éventuellement.

Alors, on ressort de cette commission, nous, de l'opposition, avec la ferme conviction qu'on a fait avancer positivement le ministre. On a l'impression que le public sera mieux assuré après cette commission où on a demandé à écouter des gens. On a l'impression aussi que la clientèle, les chasseurs, les pêcheurs seront mieux protégés et, bien sûr, que les animaux de la forêt et des lacs seront aussi mieux protégés par ce projet de loi là, et, ici, on espère que les braconniers, eux, seront un peu plus en difficulté. Je pense que, oui, ce projet de loi là, c'est une meilleure solution à un meilleur coût non seulement pour la société, mais aussi pour toutes les espèces qui vivent dans nos lacs et dans nos forêts.

Maintenant, j'ai fini ce projet de loi en invitant le ministre – parce que, là, il y aura des changements de coutumes, il y aura des changements d'habitudes – à impliquer les gardes-chasses dans tout ce processus-là. J'ai été grandement préoccupé... Je dois avouer que je ne suis pas quelqu'un qui connaît particulièrement la chasse et j'ai dû converser avec le Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec. J'ai été très impressionné, M. le Président, par la compétence de ces gens-là, par le professionnalisme de ces gens-là, par leur volonté d'aider.

Ils réalisent comment ils ont été «stampedés» dans le système dans les dernières années; finalement, il y a à peu près la moitié des gardes-chasses au Québec qu'il y avait il y a quelques années. Mais, même à ça, ils réalisent... Et j'ai aussi pu apprécier comment les clientèles aiment ces gens-là, comment ils ont été près de leur clientèle sur le territoire et comment ils ont un ouvrage très ingrat: en forêt, la nuit, à des mille kilomètres de distance et – on nous expliquait – dans des voitures, en ce moment, qui sont dans un état de délabrement pitoyable.

(1 h 20)

Alors, j'ai invité le ministre et je le refais ce soir ici; ce seront mes dernières paroles sur le projet de loi n° 59: Que le ministre et ses fonctionnaires n'essaient pas de «stampeder» cet amendement qu'il veut apporter au projet de loi sans associer de très près le Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec. Ce sont des gens de bonne volonté et qui ne veulent rien d'autre que la sécurité du public, l'amélioration des habitats fauniques. À cet égard-là, ils ont démontré, au moment de la commission parlementaire, qu'ils pouvaient apporter énormément au débat qui aura lieu dans les prochains mois.

Alors, avec tous ces arguments, je veux remercier le ministre. Il a écouté nos points de vue, il a écouté les points de vue des gens qui sont venus en commission. Et nous voterons en faveur du projet de loi, M. le Président.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur projet de loi n° 59, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 4 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 56


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 4, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 26 novembre dernier, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 56, Loi modifiant la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. Alors, y a-t-il des intervenants sur ce projet de loi? M. le député d'Orford.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Merci, M. le Président. Alors, on en est à la toute première étape d'un projet de loi. Le critique de l'opposition aurait une heure à sa disposition. Vous comprendrez qu'il est 1 h 20 cette nuit. Je ne prendrai pas une heure, mais je dois remettre quelques faits en place, M. le Président, parce que notre bon ministre de l'Environnement y est allé allégrement, il y a quelques jours, et a fait des énoncés complètement démesurés. Alors, autant j'ai été gentil dans le dernier projet de loi, c'était pour mieux me préparer, M. le Président, à peut-être lui donner quelques vérités maintenant.

Le projet de loi n° 59, c'est pour protéger un certain nombre d'espèces menacées ou vulnérables au Québec. On parle de quelques articles, six articles, M. le Président, et ça fait contraste avec le programme du Parti québécois. J'en parle souvent parce qu'on voit maintenant comment les politiciens sont tenus aux engagements qu'ils ont pris à Ottawa, comment des gens ont été obligés de retourner en élection et comment il semble qu'au Québec on puisse dire n'importe quoi dans un programme électoral et ne pas l'appliquer ensuite.

M. le Président, le plus beau cas, c'est le chapitre sur l'environnement et, d'une façon particulière, le chapitre qui porte, à la page 41, sur la faune, la préservation de la faune, la protection des espèces naturelles. C'est extraordinaire quand on lit ça, M. le Président. Il y en a une page et demie. Il n'y a rien qu'on ne promet pas là-dedans. Après deux ans, ce qu'on va faire ce soir, c'est un projet de loi de six articles. Écoutez-moi bien, M. le Président, six articles où on va permettre à l'ail des bois de rester dans l'entrepôt non pas 90 jours, mais 160 jours. Après deux ans et quelques mois, et deux pages et demie dans le programme sur les chevreuils, les poissons, la nature, c'est ça qu'on va faire: un projet de loi de six articles. On va pouvoir prendre l'ail des bois et le mettre dans un entrepôt un petit peu plus longtemps qu'on pouvait le faire.

Alors, ce gouvernement-là, M. le Président, n'a aucune forme de morale quand on parle de son programme électoral. Plus souvent qu'autrement... J'ai parlé d'environnement, mais, là, sur la faune, ça dépasse la limite et, malheureusement... J'espère que le ministre nous écoute ce soir et qu'il va relire son programme électoral. Après tout, ses principaux conseillers maintenant sont les gens qui ont écrit ça à l'époque. C'est immoral que ces gens-là, après deux ans, n'aient rien fait encore, sauf un projet de loi de six articles qui ne dit à peu près rien, M. le Président.

Alors, maintenant, il fallait bien que le ministre fasse quelque chose, d'abord avec le programme électoral et, deuxièmement... Vous savez qu'il y a un organisme au monde, le WWF; c'est le grand organisme qui fait la cotation des pays à travers le monde et les efforts qu'ils ont faits pour protéger toutes les espèces dans la nature, M. le Président. Alors, dans le rapport 1995-1996 – donc, depuis que le PQ est là – le WWF dit que le Québec, c'est C-; alors, on est dans les plus basses cotations, à C-, des provinces et des pays en ce qui a trait à la préservation des espèces.

Je veux juste vous lire trois phrases du Fonds mondial pour la nature; c'est le président qui dit: «Protéger la nature, c'est une mission qui normalement vient du coeur.» Il finit en disant: «Les sondages révèlent que la cote de popularité de l'environnement n'a pas diminué, que cet intérêt persiste chez les Canadiens et les Canadiennes. Quand vient le temps de protéger les espèces en danger du Canada, notre défi est de faire passer ces intérêts persistants du coeur à l'action.»

Eh bien, M. le Président, peut-être que ce ministre a du coeur, mais il n'a certainement pas eu d'action. Et ça, c'est le Fonds mondial pour la nature, c'est ce grand organisme mondialement reconnu qui, tous les ans, donne une cote, autant à tous les États américains qu'aux provinces canadiennes. Et le Québec se situe très loin en arrière en ce qui a trait à la préservation.

Vous savez, M. le Président, quand on parle de préservation de la nature, il y a différents niveaux auxquels on le fait, et je veux rappeler aux auditeurs qu'il y a 276 espèces identifiées en ce moment, et 52 se retrouvent au Québec, qui sont en voie de perdition. Au Québec, la liste des espèces en péril est plus longue avec 450 inscriptions, puisque certaines espèces peuvent être relativement abondantes à une grande échelle, mais subir des menaces particulières sur le territoire québécois. Alors, il y a trois catégories: d'abord, on parle des espèces en danger de disparition, espèces qui risquent l'extinction; ensuite, on parle des espèces menacées, espèces qui peuvent devenir en danger de disparition; et, finalement, les espèces vulnérables, espèces particulièrement fragiles à cause de leur nombre insuffisant.

M. le Président, c'était la première partie de cette présentation. Elle peut expliquer où on en est dans le merveilleux monde de la préservation. Et il y a des secteurs qui vont en s'améliorant, d'autre part, au Québec. Il ne faut pas penser que tout est négatif. Je pense aux bélugas dans le fleuve Saint-Laurent, c'est une des espèces qui, en ce moment, grâce, entre autres, au fédéral qui, avec les gens de l'Ontario et des États américains, a commencé à nettoyer... On sait qu'il y a 60 000 produits chimiques différents dans le fleuve Saint-Laurent. Tranquillement, on est après améliorer cette situation-là et on pense que le béluga est en voie de rétablissement. Donc, tout n'est pas positif pour autant, M. le Président.

Alors, dans sa présentation au moment du dépôt du projet de loi n° 56 – et je le cite au texte; je pense que c'est important qu'on remette les choses dans leur juste contexte – le ministre disait: «Je reviens au fédéral – c'est lui qui parle – parce que, avec leurs gros sabots qui ne sont pas les sabots ongulés de notre caribou, mais les gros sabots d'une juridiction qui fait fi des juridictions québécoises, il vient de déposer en Chambre des communes un projet de loi qui est inquiétant pour le Québec.» Et un peu plus loin, il dira: «C'est une intervention inconcevable, irrecevable et inacceptable de la juridiction canadienne dans nos juridictions.»

Bien, M. le Président, je veux dire au ministre de l'Environnement que ce n'est pas tout le monde qui voit comme lui cette situation-là au Québec. Et je vais lui citer ici le plus grand environnementaliste du Québec, Pierre Dansereau. Ça, c'est le plus grand des grands, c'est le père de tous les environnementalistes. Il est enseignant à l'Université du Québec. C'est maintenant – j'étais pour dire un vieillard – un très vieil homme, M. Dansereau, qui a acquis ses lettres de noblesse à travers le monde.

Alors, M. Dansereau, il s'est joint à une pétition de 177 universitaires, recherchistes, qui disait: «Le vice-président de cette importante fédération environnementale québécoise, André Desrochers, l'a aussi désigné en tant que chercheur de l'Université Laval. Outre Pierre Dansereau et André Desrochers, on retrouve sur cette pétition les noms des scientifiques francophones des universités de Sherbrooke, Québec, Trois-Rivières, Montréal, l'Université du Québec, l'UQAM, ainsi que 14 noms de l'Université McGill.

«Puisque les espèces menacées étant en danger ne connaissent pas les frontières politiques, poursuit la lettre, il nous faut agir.» Et ces gens-là demandaient au fédéral d'agir. M. Desrochers, le vice-président de l'UQCN, va plus loin: «À la limite, dit-il, si quelqu'un a le pouvoir de défendre mes espèces menacées, je me fous de la couleur politique de ses "bobettes", et l'UQCN aussi. C'est pourquoi je ne crains pas une intervention fédérale dans ce domaine s'il en résulte une défense accrue au plan environnemental.» Et il y en a 177, dont M. Dansereau.

(1 h 30)

Et ce qu'ils disent finalement au ministre de l'Environnement du Québec: Écoutez, M. le ministre, si vous bougez, on n'a pas de problème avec ça, mais, si vous ne bougez pas, nous, on vous le dit, on va demander au fédéral de bouger là-dedans. Et de Dansereau on dira: «Quant au professeur Dansereau, il reconnaît d'emblée la responsabilité première du Québec en matière de protection des espèces menacées, mais il n'accorde pas spontanément d'importance aux questions constitutionnelles dans les dossiers qu'il étudie parce qu'il privilégie, dit-il, l'examen des aspects environnementaux.»

D'ailleurs, je vous rappellerai, M. le Président, qu'au référendum un attaché politique, qui est maintenant au bureau de notre bon ministre de l'Environnement, disait partout – il avait créé la coalition des environnementalistes pour le oui... J'ai toujours pensé qu'il y avait un environnementaliste pour le oui dans la coalition, une coalition de un, et je vais vous dire pourquoi. Parce que les environnementalistes au Canada et au Québec réalisent que l'environnement ne commence pas et ne finit pas avec le Québec. Le plus beau cas, c'est les bélugas, M. le Président; seuls, on n'y arrivera pas. Les pluies acides, on n'a pas pu y arriver tout seuls, etc., etc. Le problème des mers en ce moment, on ne peut pas y arriver seuls. Or, c'était un peu euphorique quand je voyais ça au référendum. Et il y avait eu un colloque, d'ailleurs. Il y avait eu un colloque, au référendum, sur l'environnement et le oui. Et il était assez agréable de voir, en tout cas de notre côté de la salle, qu'il n'y avait pas grand monde du oui dans ce comité, au référendum, des environnementalistes. Les environnementalistes se retrouvaient en beaucoup plus grande quantité du côté du non.

D'ailleurs, c'est M. Redford, ce grand acteur, M. le Président, ce grand acteur, celui qui a fait ce film «A river runs through it», qui a été filmé au Québec, M. Redford qui dit, à chaque fois qu'il parle d'environnement: S'il y a un endroit où on peut être intolérant, c'est quand on parle de l'environnement. S'il y a un endroit où on peut être intolérant, c'est quand on parle de l'environnement. Et si notre ministre de l'Environnement ne veut pas aller de l'avant avec des projets de loi, si, après deux ans, même avec un programme très important, il n'est capable que de faire six articles pour permettre à l'ail des bois d'être storé 460 jours plutôt que 90 jours, ce qui est l'essence de son projet de loi, bien, je dis au ministre: Surprenez-vous pas; nous, les environnementalistes, on pense qu'Ottawa là-dedans a des responsabilités à prendre; et prenez-les vos responsabilités, vous, M. le ministre; si vous ne les prenez pas, bien, le projet de loi 45 du fédéral semble faire une approbation très large, très large, dans le milieu de l'environnement, M. le Président. D'ailleurs, quand on lit ce projet de loi là, on s'aperçoit que, franchement, l'esprit même du projet de loi du fédéral, c'était de protéger les espèces. C'était de protéger les espèces. Et, encore une fois, que le ministre aille de l'avant et on n'aura pas de problème.

D'ailleurs, si le ministre veut aller de l'avant, je vais lui soumettre un dossier ici d'une façon particulière, celui de la Station de recherche des îles de Mingan, où là il y a un problème avec les baleines, M. le Président. Et je vous lis quelques petits passages de la lettre que ces gens-là ont envoyée au ministre pour vous montrer comment il y a problème en la demeure. Alors, ils disent au ministre, le 14 novembre: «Des objectifs politiques en financement, entre autres, des actions de lobbying au niveau national et international, nous déplorons encore plus le laxisme du gouvernement du Québec dans sa façon de traiter les gens de terrain.» Alors, ce n'est pas moi qui dis ça. Et un peu plus loin, M. le Président, ils disent: «Je ne sais pas dans quelle mesure le gouvernement peut nous aider, mais on a décidé d'en parler à l'opposition parce que, franchement, ça ne bouge pas avec le gouvernement.» Et un peu plus loin, je vois dans une autre lettre qu'ils écrivent au premier ministre, ils disent: «Suite à une lettre envoyée le 31 juillet 1996 qui est demeurée sans réponse...»

Alors, ça, c'est des gens qui essaient de sauver l'espèce aux îles de Mingan, M. le Président. D'ailleurs, je me propose d'aller les voir au printemps dans ma tournée d'environnement. Je veux aller saluer ces gens-là là-bas. Alors, eux, ils disent: Écoutez, arrêtez de faire des grands discours, les gens du PQ, arrêtez d'écrire des gros programmes électoraux, puis aidez-nous donc, nous autres, à Mingan, on fait quelque chose pour l'espèce là-bas et on n'a vraiment pas votre aide. On n'a vraiment pas votre aide.

Alors, je finirai en répétant, M. le Président, qu'il y a à travers le monde, parce que, encore une fois, je pense que non seulement il faut être Canadien dans un débat comme ça, mais il faut être international... Il y a plus de 5 000 espèces menacées à travers le monde; 5 000 espèces, oui, vous m'aviez bien compris. Et la question des plantes inquiète énormément. On a recensé plus de 30 000 plantes menacées, une situation alarmante quand on pense que 80 % des médicaments sont faits à base de ces plantes et probablement qu'un certain nombre de ces plantes en voie de disparition pourraient éventuellement être productrices de médicaments.

M. le Président, je finirai en vous disant qu'il y a un grand débat qui s'amorce au Québec, et j'avise tout de suite le ministre de nos couleurs, c'est celui de l'éthanol. Et je finirai avec ça, M. le Président. Le ministre est après se projeter par en avant dans un débat. Encore une fois, on a l'impression que bien du monde lui a passé sur le corps dans cette histoire-là, parce que les avis du ministère de l'Environnement sur l'éthanol, comme la production porcine, c'était: Non, allez-y lentement, ne touchez pas à ça. Et on s'aperçoit que la plus grande agence d'environnement aux États-Unis, qui s'appelle l'EPA, dit, et je vous cite une phrase: «Le recours à l'éthanol est plus destiné à aider les producteurs de maïs qu'à lutter contre la pollution.»

Alors, s'il y a encore des gens qui pensent, M. le Président, qu'en allant vers l'éthanol on va aider la lutte contre la pollution, la plus grande agence d'environnement aux États-Unis, lors du grand congrès à Tours, en France, a cité, disant: «Le recours à l'éthanol est plus destiné à aider les producteurs de maïs qu'à lutter contre la pollution.»

D'ailleurs on s'aperçoit que la commission de l'environnement du PQ a posé des questions sévères à son parti. Ils ont exigé de voir les études, ils sont allés aussi loin que de dire, et je le cite au texte: «L'essence verte, c'est de la fausse représentation auprès de la population.» Et ça, c'est le président Gilles Lavoie, qui vient tout juste, le 19 novembre, de dire au PQ: «Écoutez, ce que vous êtes après faire, ce n'est pas une mesure d'environnement.» Ça, c'est le président de la commission de l'environnement au PQ qui dit ça à ce gouvernement-là.

On a l'EPA, ici. On sait qu'au ministère, dans l'étude sur laquelle, bien sûr, j'ai pu mettre la main, éventuellement, cette étude supposément secrète – parce qu'il faut bien comprendre qu'il n'y a pas grand-chose de secret dans les États – cette étude-là, même si, supposément, elle est secrète, elle n'est probablement pas secrète parce qu'on l'a en notre possession. Ce qu'elle dit, cette étude-là, c'est: Oui, oui à la production d'éthanol quand il y a des surplus de maïs; mais, dans le cas présent au Québec, il n'y a pas de surplus de maïs, alors...

Moi, ce que je dis au ministre là, c'est que tout ça devrait aller en audience publique devant le BAPE. Il a manqué la première manche là. Il a manqué, c'est bien sûr, sur la glace, il s'est fait «scorer». Alors là, ça s'en va devant le BAPE. Et moi je veux inviter les groupes de l'environnement à aller devant le BAPE, M. le Président, et à défendre avec vigueur le point de vue que l'éthanol, ce n'est peut-être pas aussi environnemental, si on prend du début jusqu'à la fin de la production, jusqu'à sa consommation. On s'aperçoit que ce n'est pas une mesure très environnementaliste, en tout cas, aux dires des grands experts. Et je pense qu'on devra le démontrer au BAPE.

Alors, devant toutes ces mesures, M. le Président, on va aller en commission parlementaire, on va regarder ça article par article et on va poser énormément de questions, quoique le projet de loi est plutôt simple, et on reviendra en Chambre, ici, éventuellement. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Il n'y a plus d'autres intervenants. Le principe du projet de loi n° 56, Loi modifiant la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je fais motion...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député d'Orford, adopté, le projet de loi?

M. Benoit: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Sur division? Sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

Mme Caron: Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 37 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 68


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 37, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 68, Loi modifiant le Code civil du Québec et le Code de procédure civile relativement à la fixation des pensions alimentaires pour enfants. Il y a des intervenants? Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous cède la parole.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. C'est au nom de ma collègue, la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne et porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité du revenu et de condition féminine, que je prends la parole ce matin. Mme la députée est retenue à Montréal, dans son comté. Il est 1 h 40, M. le Président, et on franchit une étape, on franchit une étape assez importante d'un projet de loi qui est très important, c'est l'étape de la prise en considération du rapport de la commission parlementaire des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 68, Loi modifiant le Code civil du Québec et le Code de procédure civile relativement à la fixation des pensions alimentaires pour enfants. Bill 68, Mr. Speaker, An Act to amend the Civil Code of Québec and the Code of Civil Procedure as regards the determination of child support payments.

(1 h 40)

Comme nous le rappelions lors de l'adoption du principe du projet de loi n° 68, M. le Président, le gouvernement fédéral déposait en mai dernier un projet de loi modifiant la Loi sur le divorce, qui prévoit les lignes directrices pour fixer le montant de la pension alimentaire pour enfants. Toutefois, le gouvernement fédéral a laissé toute la latitude aux provinces qui désiraient adopter leurs propres règles de fixation des pensions alimentaires, et c'est ce que le gouvernement du Québec a choisi de faire.

Encore une fois, M. le Président, comme je l'ai souligné au moment de l'adoption du principe du projet de loi, il s'agit d'une autre démonstration très claire, quant à moi, du fait que le principe et le fonctionnement du fédéralisme canadien fonctionnent très bien. Le gouvernement fédéral, oui, a proposé une grille de fixation uniforme pour les pensions alimentaires, mais, dans le projet de loi du fédéral, on prévoyait la possibilité que des provinces se substituent à cette grille de fixation et adoptent des règles de procédure qui leur sont propres. Et c'est un des plus beaux exemples, quant à moi, du fait que le système fédéral est assez flexible pour permettre au Québec de refléter des particularités et d'adopter un modèle de fixation des pensions alimentaires qui nous est propre.

À ce jour, il n'existe aucune règle en droit, aucune loi, je devrais dire, qui encadre le montant qui est alloué aux parents gardiens. Il est vrai qu'au cours des ans un certain nombre de principes se sont dégagés de la jurisprudence, mais ces principes se sont appliqués de façon générale. C'est ce qui explique qu'on se retrouve avec des contributions alimentaires qui sont parfois inadéquates par rapport au coût réel lié aux besoins des enfants ou des montants inadéquats par rapport à la capacité de payer des parents. De plus, M. le Président, des montants complètement différents pouvaient être accordés pour des situations similaires par différents juges.

Les principes soutenus dans le projet de loi n° 68 visent à reconnaître la responsabilité commune des parents à l'égard de l'entretien et de l'éducation des enfants et que ce partage de responsabilité sera en proportion avec les revenus respectifs. Principe également fort important, M. le Président, le projet de loi maintient la discrétion judiciaire pour tenir compte des difficultés excessives des parents.

Ce projet de loi laisse également la liberté aux parents de convenir d'un montant différent de celui prévu par le règlement en autant que le montant fixé suite à une entente pourvoie suffisamment aux besoins de l'enfant. De plus, le tribunal aura l'obligation de vérifier et de s'assurer que ce montant est suffisant. C'est une procédure très bien développée, je pense, car les parents peuvent s'entendre que la cour ait un droit de regard sur le montant déterminé par l'entente pour s'assurer qu'il n'y a pas d'influence indue d'une partie ou de l'autre, pour s'assurer que les besoins des parents sont respectés avec l'entente sur les pensions alimentaires. La contribution alimentaire de base des deux parents sera établie non seulement en fonction de leur revenu disponible et du nombre de leurs enfants, mais également au prorata du temps de garde. À cet égard, la ministre a d'ailleurs apporté un amendement visant à préciser clairement que le montant de la pension alimentaire à payer doit tenir compte du temps de garde assumé par chaque parent plutôt que de tenir compte de la nature de celle-ci.

La ministre a également, en commission parlementaire, modifié l'article 587.2 du Code civil du Québec qui stipule que le tribunal peut augmenter ou réduire la valeur de ces aliments s'il estime que son maintien entraînerait pour l'un ou l'autre des parents des difficultés excessives. À notre demande, une modification vient clarifier la notion au niveau des ressources dont dispose l'enfant. C'est un ajout, quant à nous, assez important, M. le Président, parce que, effectivement, il y a des enfants qui peuvent avoir des ressources assez importantes, et donc ces ressources peuvent avoir un impact sur le montant alloué en fonction de la grille de fixation.

L'étude détaillée en commission parlementaire a été très constructive, M. le Président, et a été faite en toute collaboration. Toutefois, je dois malgré tout avouer qu'il y a deux points sur lesquels des inquiétudes subsistent, soit la complexité du formulaire qui détermine les montants disponibles, les revenus disponibles des parents et la notion des droits de visite et de sortie prolongés introduite. Tout comme la députée ministérielle de Blainville, nous aurions préféré que le formulaire soit beaucoup plus simple à remplir. Ce formulaire ressemble, à peu de chose près, à un rapport d'impôt. Il n'est donc pas à la portée de tous. Nous pensons notamment aux gens ordinaires qui n'ont pas la possibilité de consulter un comptable ou un expert. M. le Président, effectivement, ce formulaire, qui est en annexe du projet de loi, est très complexe. Il y a à peu près cinq, six sections étoffées à remplir, incluant la notion de garde prolongée et de droit de sortie. Et les commentaires de la députée de Blainville dans le dossier étaient très perspicaces, je pense, quant à la complexité de celui-ci.

L'autre point concerne la notion des droits de visite et de sortie prolongés introduite dans le règlement et qui est une notion de droit nouveau en matière de droit familial. Ce droit de visite et de sortie représente entre 20 % et 30 % du temps de garde, soit à peu près l'équivalent du droit d'accès normal, c'est-à-dire les fins de semaine, une semaine dans le temps des Fêtes, à Pâques et les vacances estivales. Il viendra réduire le montant de la contribution alimentaire versée à l'enfant. M. le Président, certains groupes ont fait valoir, lors de la consultation, leur vive inquiétude face à ce droit de visite et de sortie prolongé en alléguant que le parent non gardien serait tenté d'augmenter le nombre des journées de son droit d'accès de garde normale afin de bénéficier d'une diminution du montant de la pension alimentaire. Nous avons fait valoir à la ministre que ce droit de visite et de sortie prolongé pourrait devenir un outil de marchandage pour obtenir une diminution de la contribution alimentaire. Nous aurions aimé que la ministre retire ce nouveau type de garde de son projet de loi. Il ne faut pas, M. le Président, que l'utilisation, le respect ou le non-respect du temps de garde devienne une charge pour le parent gardien. On peut concevoir une situation où le parent non gardien tente d'augmenter son droit d'accès pour baisser sa pension alimentaire et, par la suite, que ce parent non gardien ne respecte pas nécessairement ses droits d'accès qui pourraient avoir un effet sur les dépenses du parent gardien. C'est une inquiétude qui demeure toujours dans le projet de loi et qui est partagée par beaucoup d'intervenants.

Le fait que le parent non gardien ait quelques jours de plus la garde de son enfant ne diminue en rien les frais fixes comme le logement, les vêtements, etc. Donc, nous croyons qu'en voulant responsabiliser les parents non gardiens il y a un risque qu'on pénalise les parents gardiens, qui sont majoritairement des femmes. De plus, dans le cas où le parent non gardien ne respecte pas ce droit de visite ou de sortie prolongé, les femmes devront se retourner à nouveau vers les tribunaux pour faire réajuster à la hausse la contribution alimentaire de leur enfant.

M. le Président, j'ai compris le message. Que les ministériels patientent un tout petit peu, ça ne sera pas bien long. C'est un important projet de loi qui a des impacts importants sur les enfants du Québec. Je comprends qu'il est 1 h 50, mais je pense qu'il faut prendre le temps qu'il faut pour vraiment s'assurer que le projet de loi qui est devant la Chambre sorte de son processus législatif le mieux possible.

(1 h 50)

M. le Président, j'espère que nos craintes ne se produiront pas et, comme nous le mentionnions à la ministre lors de l'étude détaillée en commission, nous espérons que c'est elle qui aura raison et que nous n'aurons pas tort, parce que ce seront les femmes, finalement, qui subiront les conséquences de cette nouvelle notion de garde.

M. le Président, juste là-dessus, quelques mots sur le processus. Le Barreau du Québec, en l'occurrence le bâtonnier lui-même, a écrit à la ministre de la Sécurité du revenu, la jeunesse, la famille et l'action communautaire, ministre d'État à l'Emploi et à la Solidarité. Ces temps-ci, semble-t-il, le Barreau écrit souvent aux ministres du gouvernement. Ils ont écrit le 12 décembre, après l'étude détaillée en commission parlementaire, pour faire valoir leur point de vue sur le projet de loi. Ces commentaires donnent lieu à huit suggestions d'amendement de la part du Barreau, et nous espérons fortement que, lors de l'adoption finale du projet de loi, la ministre tienne compte de certaines suggestions du Barreau.

Il y en a une en particulier, M. le Président, qui traite de la question de certains délais de production de formules. Le projet de loi contient une suggestion que, avec un délai d'un jour franc, une autre partie doit être obligée de signaler, par production de formules et d'informations, une réponse. Le Barreau fait le point très important, je crois, qu'un jour franc n'est pas suffisant pour produire des documents importants lors d'une discussion de pension alimentaire. Alors, la suggestion du Barreau, c'est qu'on retienne trois jours francs. J'espère que la ministre va en tenir compte, va proposer des amendements au projet de loi à l'adoption finale.

M. le Président, nous saurons les conséquences de cette loi dans trois ans, puisque le projet de loi pourrait voir une clause crépusculaire, clause qui oblige le ministre de la Justice à faire rapport, d'ici trois ans, au gouvernement sur la mise en oeuvre des dispositions de la présente loi et sur l'opportunité, le cas échéant, de les modifier. C'est souvent dans son application dans la vie de tous les jours qu'on décèle les irritants ou les effets pervers d'un projet de loi. J'espère que nos inquiétudes et nos préoccupations, notamment au niveau du droit de visite et de sortie prolongé, seront non fondées, et ce, pour le plus grand bien des femmes et des enfants du Québec.

M. le Président, à date, l'opposition officielle a voté pour le principe du projet de loi n° 68, on a voté pour avec certaines suggestions d'amendement en commission parlementaire. Nous allons voter pour, en faveur de la prise en considération du rapport en souhaitant quand même que la ministre porte attention aux commentaires du Barreau pour améliorer le projet de loi n° 68 pour le bénéfice de tous les enfants du Québec. Merci, M. le Président.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 68, Loi modifiant le Code civil du Québec et le Code de procédure civile relativement à la fixation des pensions alimentaires pour enfants, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à ce matin, mardi 17 décembre, 10 heures.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est adoptée? Adopté. Alors, nous ajournons nos travaux à ce matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 1 h 54)