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(Onze heures vingt-huit minutes)
La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre,
s'il vous plaît! La commission de l'aménagement et des
équipements débute ses travaux. Le mandat de la commission pour
cette séance est de procéder à des consultations
particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 65, Loi
modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. M. le
secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Camden
(Lotbinière) est remplacé par M. Poulin (Chauveau); Mme Pelchat
(Vachon) est remplacée par M. MacMillan (Papineau); et M. Thérien
(Rousseau) est remplacé par Mme Bleau (Groulx).
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le
secrétaire. L'horaire pour les trois jours d'audition a
été distribué aux membres de la commission. Est-ce que
l'horaire est adopté?
Une voix: Oui, adopté. Des voix: Oui, oui, oui.
La Présidente (Mme Bélanger): L'horaire est
adopté. M. le ministre, vous avez une déclaration
préliminaire?
Déclarations d'ouverture M. Pierre
Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente. En
convoquant une commission parlementaire sur le projet de loi 65, Loi modifiant
la Loi sur la qualité de l'environnement, nous voulons, par cet exercice
démocratique, permettre aux différents intervenants
intéressés au contenu de ce projet de loi de se faire entendre et
de contribuer à la bonification du texte législatif. Au cours de
ces deux journées et demie, nous, du gouvernement, écouterons
attentivement tous les intervenants qui viendront présenter leur
position. Nous accorderons une attention spéciale aux suggestions qui
nous seront faites et qui contribueront à la réalisation de
l'objectif fondamental de ce projet de loi, soit l'application du principe
pollueur-payeur.
Avant d'aborder le contenu du projet de loi, il nous apparaît
pertinent de le situer dans un contexte historique. Comme vous le savez, les
pays industrialisés sont actuellement confrontés au
problème croissant posé par la présence de contamination
sur les terrains d'industries qui ont pu utiliser ou utilisent encore des
substances dangereuses et ainsi contaminer le terrain environnant par des
rejets liés aux opérations journalières, par des
déversements accidentels ou par de l'enfouissement pur et simple sur
leurs terrains. Au Québec, la Loi sur la qualité de
l'environnement, qui a été adoptée en 1972, constitue le
cadre légal délimitant les interventions du ministère de
l'Environnement en matière de terrains contaminés. Elle accorde
des pouvoirs au ministère pour intervenir sur des terrains
contaminés lors de situations particulières. L'article 25 permet
ainsi au ministre d'ordonner au responsable de la source de contamination de
cesser définitivement ou temporairement ou de limiter, selon les
conditions qu'il impose, l'émission, le dépôt, le
dégagement ou le rejet de ce contaminant.
D'autre part, en vertu des pouvoirs accordés dans cette loi, le
ministre ne peut ordonner aux propriétaires de terrains
contaminés de décontaminer ceux-ci que lorsque la situation est
considérée comme étant urgente et que le ministre
démontre que cela a été fait accidentellement ou
contrairement aux dispositions de la présente loi ou des
règlements du gouvernement.
Par la suite, le ministère de l'Environnement a
élaboré une politique de réhabilitation des terrains
contaminés afin de déterminer les orientations quant à la
réutilisation sécuritaire de ces terrains. Cette politique,
publiée en avril 1988, misait essentiellement sur la bonne
volonté des propriétaires de ces terrains à se conformer
aux orientations du ministère dans ce domaine. Les objectifs de cette
politique de réhabilitation se résumaient en trois points
majeurs: premièrement, empêcher que l'utilisation de terrains
contaminés ne s'effectue au détriment de la santé, de
l'environnement et des biens; deuxièmement, favoriser la
récupération des ressources en permettant et en rendant possible
le réemploi des terrains contaminés dans la mesure où le
niveau de décontamination atteint est sécuritaire pour les
usagers et l'environnement; troisièmement, s'assurer que les sols
contaminés seront gérés de façon
adéquate.
Bref, nous devons admettre que la politique de réhabilitation des
terrains contaminés ne donne que des orientations en matière de
réemploi des sols contaminés, sans obligation pour les
propriétaires de terrains contaminés de s'y conformer, alors que,
de son côté, la loi ne permet pas au ministre d'exercer un
rôle de prévention en cette matière. Récemment, les
événements qui se sont déroulés à
Saint-Jean-sur-Richelieu, mettant en cause la compagnie Balmet, qui oeuvrait
dans la récupération du plomb à partir de batteries
usées, ont mis en relief l'absence de pouvoirs coercitrfs du
ministre
pour ordonner au propriétaire d'un terrain contaminé de
réaliser des travaux de décontamination sur son terrain.
Suite à cette constatation, nous avons décidé
d'accélérer le processus de modifications législatives et
réglementaires. C'est ainsi que nous avons déposé en
février 1990, au Conseil des ministres, un mémoire
accompagné d'un projet de loi et c'est le 10 mai dernier que le projet
de loi 65, intitulé Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement, était déposé à l'Assemblée
nationale. À cette occasion, j'avais mentionné que peu de pays
occidentaux pouvaient compter sur une telle structure législative,
quelques rares pays ayant adopté une législation visant à
se protéger contre la contamination des sols.
Nous rappellerons brièvement que les Pays-Bas ont adopté
en 1983 une loi sur la décontamination des sols qui oblige tout
promoteur à caractériser le sol et l'eau souterraine avant toute
construction et/ou réutilisation du sol. Notons aussi que, depuis
janvier 1988, les entreprises doivent également caractériser les
terrains avant de s'y installer et effectuer une nouvelle
caractérisation au moment où elles désirent modifier ou
vendre leurs installations afin de vérifier si les terrains sont dans le
même état qu'au moment de l'acquisition. Dans la négative,
les entreprises doivent réaliser des travaux de
décontamination.
Dans ce même ordre d'idées, des mesures législatives
similaires ont été adoptées par l'État du New
Jersey, aux États-Unis, en 1984, afin de permettre au gouvernement de
cet État d'intervenir auprès des industries susceptibles de
contaminer les sols. Cette loi, The Environmental Cleaning Responsibility Act,
vise près de 23 000 compagnies. Ces industries doivent
caractériser leurs terrains au niveau des sols et de l'eau souterraine.
Par le fait même, les résultats obtenus sont comparés
à des critères préétablis et, lorsqu'il y a
présence de contaminants à des concentrations excédant le
niveau naturel, il peut devenir nécessaire de procéder à
des travaux correctifs.
Mentionnons que plusieurs pays européens, telles la France, la
Belgique et la République fédérale allemande,
réfléchissent sur la possibilité d'adopter une telle
législation. Nous pouvons d'ores et déjà remarquer que le
Québec sera la première province canadienne à se munir
d'outils réglementaires visant la décontamination et la
restauration des sols.
Ainsi, en déposant ce projet de loi, nous voulons principalement
corriger deux lacunes dans la législation actuelle, soit de nous
permettre d'agir plus efficacement et de renforcer l'application du principe
pollueur-payeur. En effet, l'objet du projet de loi est donc de s'assurer que
toute activité de contamination de l'environnement puisse conduire,
lorsqu'elle dépasse certains niveaux, à une intervention du
ministre en vue d'exiger une étude de caractérisation et une
décontamination des sols.
Par ailleurs, il nous apparaît légitime et souhaitable que
celui qui est à l'origine de la contamination soit tenu responsable de
la décontamination. Or, comme je l'indiquais précédemment,
la Loi sur la qualité de l'environnement ne permet pas actuellement au
ministre d'ordonner la décontamination, sauf en cas d'urgence ou
à moins de faire la preuve d'une contamination des terrains adjacents.
Ainsi, cette absence de pouvoir d'ordonnance restreint le champ d'intervention
du ministre dans ce domaine, ce qui limite considérablement
l'application du principe pollueur-payeur.
Ce qu'il faut retenir, c'est que le projet de loi 65 a été
élaboré dans le but de doter le ministère des outils
légaux et réglementaires lui permettant de remplir son mandat de
façon plus adéquate et plus efficace qu'il ne le fait
actuellement. Les nombreuses situations auxquelles il a dû faire face
depuis le milieu des années quatre-vingt ont contribué à
préciser les besoins du ministère en matière de pouvoirs
légaux.
Devant les différentes expériences trop souvent
décevantes que nous avons vécues dans le passé, nous avons
à faire face à deux situations dans les cas de contamination de
sols. Dans un premier cas, l'entreprise responsable de la contamination est
toujours en opération et facilement identifiable, alors que, dans le
second cas, la source de la contamination est difficile à identifier,
l'entreprise ayant cessé ses activités. Ces expériences
passées nous ont amenés à proposer des orientations et des
mesures législatives différentes selon les deux cas. Ainsi,
lorsque le responsable de la contamination est identifiable, nous
désirons doter le gouvernement de pouvoirs lui permettant d'ordonner la
décontamination de l'environnement lorsque la situation le commande.
Nous voulons exiger la décontamination de l'environnement de celui ou de
celle qui l'a contaminé. C'est pourquoi le projet de loi prévoit
des dispositions très claires à ce sujet. Si les principes du
projet de loi sont approuvés par l'Assemblée nationale, le
ministre aura le pouvoir d'ordonner au responsable de la contamination la
caractérisation puis la décontamination de l'environnement
lorsque le niveau de contamination le commandera. L'approbation du projet de
loi aurait ainsi pour effet d'éviter qu'une entreprise qui a
contaminé son terrain puisse, sous prétexte qu'il n'y a pas
d'urgence, ne procéder à aucuns travaux correctifs.
D'autre part, le projet de loi 65 prévoit une certaine souplesse
quant aux mesures que nous pourrions ordonner aux propriétaires de
terrains contaminés alors qu'ils n'ont pas été
responsables de la contamination À titre d'exemple, nous n'avons
qu'à penser au très grand nombre de terrains qui ont
été contaminés dans le passé par des entreprises
ayant cessé leurs activités. Ces terrains, localisés
principalement dans les régions
urbaines, sont habituellement la propriété de personnes ou
de municipalités et assurent un bon potentiel de réutilisation
à des fins résidentielles, commerciales ou autres.
Par ailleurs, on peut penser aux propriétaires de terrains qui ne
sont pas nécessairement informés des activités qui se sont
déroulées dans le passé sur ces terrains et qui ignorent
probablement le degré de contamination de ceux-ci. Dans ces cas, nous
nous devions de nous assurer qu'aucune réutilisation de ces terrains ne
se fasse sans une décontamination préalable de manière
à éviter que la présence de contamination ne puisse porter
atteinte à la santé publique. Pour ce faire, nous proposons deux
mesures dans le projet de loi 65, mesures qui s'adressent aux
propriétaires de sols contaminés sans qu'ils aient
été responsables de la source de la contamination:
premièrement, le ministre peut signifier au propriétaire un avis
l'informant que son terrain est contaminé au-delà d'un certain
niveau et cet avis est inscrit au bureau d'enregistrement; deuxièmement,
le ministre exige, de la part du propriétaire d'un terrain
contaminé, une demande d'autorisation avant que celui-ci ne
procède à une modification d'usage de son terrain.
Par ailleurs, pour ce qui est de l'entreprise qui
démantèle ses installations, des dispositions sont prévues
dans le projet de loi afin de soumettre le démantèlement à
diverses exigences lorsqu'il concerne certaines activités reconnues
polluantes pour les sols. Ainsi, le propriétaire du terrain devra
obtenir l'autorisation du ministre avant de procéder au
démantèlement. Nous pourrons alors nous assurer que le
démantèlement d'équipements et de bâtiments sera
accompagné d'une caractérisation et, éventuellement, d'une
décontamination du terrain. Le principe du pollueur-payeur sera donc
appliqué en intervenant dès le démantèlement,
évitant ainsi que le terrain demeure contaminé par la suite. Une
entreprise qui aura contaminé son terrain suite à ses
activités sera donc obligée de le décontaminer, alors
qu'actuellement de grandes entreprises ont fermé leurs portes sans avoir
complété la décontamination de leurs terrains.
D'autre part, grâce à des nouveaux pouvoirs d'ordonnance
contenus dans le projet de loi 65, le ministère de l'Environnement
pourra obtenir le rang de créancier privilégié sur les
biens meubles et immeubles de tout contrevenant à une ordonnance de
décontamination des sols. D'ailleurs, advenant le non-respect par une
entreprise d'une ordonnance ministérielle dans le cas d'une seconde
infraction, il est prévu dans le texte législatif que les
sanctions seront plus élevées passant de 12 000 $ à 500
000 $ comme montant minimal et de 500 000 $ à 1 000 000 $ pour les
amendes maximales.
En conclusion, et je terminerai là-dessus, en rappelant que
l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires aura
pour effet, du moins c'est l'objectif que nous nous fixons, de renforcer
l'application du principe pollueur-payeur dans la décontamination des
sols pollués.
Comme je vous le mentionnais précédemment, cette
commission parlementaire qui débute permettra un débat public sur
le sort que l'on doit réserver, au Québec, aux nombreux sols
contaminés. J'invite bien cordialement tous les intervenants à
venir nous présenter les ajustements qu'ils jugent appropriés,
car, au risque de me répéter, je demeure ouvert à des
modifications qui visent la bonification du projet de loi 65. D'ailleurs, au
terme de cette commission parlementaire, je présenterai au Conseil des
ministres les modifications qui se seront avérées pertinentes en
fonction des objectifs de cette législation et ce, à la
lumière de cet exercice démocratique. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le
ministre. M. le député de La Prairie.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais tout de
suite informer cette commission que l'Opposition est d'accord avec le principe
qui sous-tend le projet de loi qui est devant nous, à savoir le principe
pollueur-payeur. Ceci étant dit, il faut se poser la question: Est-ce
qu'on a devant nous le projet de loi qui reflète le sentiment, la
décision du Conseil des ministres, ou si on a devant nous le projet de
loi qui reflète les intentions du ministre? Il y une différence
considérable. La Presse canadienne, suite à une conversation avec
le ministre, nous dit ce matin que le ministre se voit dans l'obligation de
retourner au Conseil des ministres avant même l'adoption du principe de
la loi. Je trouve que c'est sérieux. Mme la Présidente, est-ce
qu'on fait venir des groupes ici pour audiences pour avoir leurs opinions sur
ce qu'est un brouillon, le brouillon d'un projet de loi qui reflète les
orientations du ministre et de quelques ministres, ou bien si on peut
l'étudier comme un projet qui est une intention sérieuse du
Conseil des ministres? Alors, on peut en douter. D'après les paroles
mêmes du ministre ce matin, s'il est bien cité, il dit qu'il doit
retourner au Conseil des ministres avant même l'adoption du principe du
projet de loi. Alors, au fond, le ministre, bon, il y a une certaine candeur
admirable chez lui, parce que...
Des voix:...
M. Lazure: ...il nous dévoile au grand jour des chicanes
épouvantables qui se passent à l'intérieur de son Conseil
des ministres. Il nous l'a laissé entendre avec l'article 2n qui
soustrait aux audiences publiques, comme vous le savez, Mme la
Présidente, les grands projets industriels. Lui, le ministre, il dit
toujours qu'il est prêt à
mettre ça en application. Mais on sait que plusieurs de ses
collègues ministres ne sont pas prêts. Alors, là, il a
trouvé une bonne porte de sortie. Il dit: Bien, je vais négocier
avec l'Ontario pour être sûr qu'au plan des investissements et des
entreprises on sera sur la même longueur d'onde, les deux voisins. Il n'y
a rien de mal à ça, sauf que ça va paralyser encore des
mois et des mois. La question qu'on peut se poser avec le projet de loi 65:
Est-ce qu'il va aller négocier avec l'Ontario sur ce projet de loi
là aussi quand il aura fini de négocier avec son Conseil des
ministres? Là, ce n'est plus le gros projet de loi dont il parlait le 11
mai: Québec fera payer les pollueurs; Québec va être
à l'avant-garde, la première province, presque le premier
État au monde à avoir une loi si sévère. Mais on
n'est pas sûrs qu'elle sera aussi sévère que ça. On
ne sait pas au juste quelle sorte de projet de loi on aura dans quelques
semaines ou dans quelques mois.
Ceci étant dit, j'ajouterai que le gouvernement réagit aux
crises. Et, au lieu de prendre son temps et de préparer un projet de loi
avec beaucoup de consultations, il travaille en panique suite aux crises de
Saint-Basile, de la Balmet, de l'est de Montréal, et d'autres crises. On
passe pratiquement de a à z, parce que la loi actuelle, elle donne
beaucoup de pouvoirs au ministre. Moi, je répète, Mme la
Présidente, que le ministre ne s'est pas servi des pouvoirs
considérables que lui donne l'article 25. Ça me laisse un peu
sceptique, moi, tout en étant en faveur du principe pollueur-payeur. Si
le ministre et son ministère n'ont pas été capables
d'appliquer la loi telle qu'elle existe, étant moins
sévère, je me demande si ce n'est pas un peu de la poudre aux
yeux de nous faire croire que le Québec va devenir un modèle
antipollution dans quelque temps. Parce que, pour faire appliquer une loi comme
celle-là, ça prend du personnel, ça prend de l'argent, des
budgets, le nerf de la guerre. Mais ce gouvernement-ci a fait la preuve depuis
1985 qu'il ne croit pas à l'environnement. En 1985, le budget de
fonctionnement du ministère de l'Environnement, Mme la
Présidente, était de 87 800 000 $. Et, si le ministre veut
m'écouter, je vais lui faire remarquer que le budget de
l'Environnement...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je saluais le changement de
présidence...
M. Lazure: Ah bon! Bien, je salue mon président bien
humblement...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...en remerciant la
présidente qui a bien... (11 h 45)
M. Lazure: ...en remerciant la présidente. Je salue
l'arrivée du député de Lévis, président de
la commission. J'étais en train, M. le Président, d'expliquer que
c'est bien beau d'avoir un projet de loi qui va avoir des dents pour les
pollueurs, mais le gouvernement libéral a démontré depuis
1985 qu'il n'y croyait pas vraiment. En 1985-1986, l'année où le
Parti québécois était au pouvoir, le budget
d'opération était de 87 800 000 $. L'année suivante,
tenez-vous bien, il tombe à 70 400 000 $, une diminution de 24 %. Le
ministre n'a jamais nié ça. Les chiffres sont là, ce sont
les chiffres qui nous ont été fournis par le ministre.
Alors, un gouvernement qui se dit très vert a eu le culot de
diminuer de 24 % le budget d'opération et, en période
électorale, là le gouvernement y croit à l'environnement,
si bien que le chef de leur parti promet 50 000 000 $ dès la
première année fiscale. On sait que c'a été
dégonflé ce gros ballon là et que c'est à peine un
tiers, même pas un tiers qui a été donné: 15 000 000
$, même pas un tiers. Ce n'est même pas réparer l'outrage
qui a été fait de moins 24 % en 1986-1987.
Alors, M. le Président, il faut déplorer, encore une fois,
le double langage du gouvernement actuel. Je conviens que le ministre actuel de
l'Environnement fait son possible, mais il est isolé dans son Conseil
des ministres. Il me fait penser à M. Clyde Wells et à M. Fil
mon, il est complètement isolé. Dans le cas de son Conseil des
ministres, les dissidents, ce n'est pas quelques personnes, c'est la
majorité de ses collègues ministres qui sont dissidents par
rapport à l'environnement. Alors, je comprends son problème,
mais, à un moment donné, il va falloir qu'il fasse le choix entre
ses convictions personnelles et sa solidarité avec ses collègues
du Conseil.
Je doute qu'il y ait eu des consultations valables avec les
municipalités, avec les groupes environnementaux, avec les individus, le
milieu patronal. J'en doute. Peut-être que le ministre pourra nous
expliquer quelle sorte de consultations il y a eu a date là-dessus.
Heureusement qu'on va avoir ces consultations-là aujourd'hui et demain.
Mais je rappelle qu'une des façons de faire de la prévention, la
prévention de la pollution et la prévention de la contamination,
c'est de faire en sorte que le Bureau d'audiences publiques joue vraiment son
rôle. Il ne joue pas son rôle actuellement. Je le
répète, c'est scandaleux, après 10 ans, l'article n, les
articles pertinents ne sont pas encore en vigueur.
Je pense que ie ministre a des problèmes sérieux, parce
que son sous-ministre qui est affecté au développement durable -
c'était un beau geste de M. le ministre - Harvey Mead, l'ancien
président de l'Union québécoise pour la conservation de la
nature, qui a beaucoup de crédibilité, a dit il n'y a pas
longtemps, le 27 mai, et je cite: "M. Harvey Mead a dénoncé ce
qu'il croit être un manque de volonté politique du gouvernement
actuel sur la question du développement durable et, partant, la
paralysie partielle de son ministère. Le haut fonctionnaire s'est
élevé, entre autres, contre le fait que des
audiences publiques en bonne et due forme sur l'impact écologique
ne précèdent pas systématiquement des implantations
majeures comme des alumineries, " etc. Alors, la personne que M. le ministre
est allé chercher pour rehausser la crédibilité du
ministère dit, à peine quelques mois après son
entrée au ministère, que le ministère n'est pas
sérieux, que le gouvernement n'est pas sérieux. Alors, ce n'est
pas seulement l'Opposition qui le dit. Parce qu'il va falloir augmenter le
nombre des inspecteurs. Moi, je pense qu'il faut prendre avec un grain de sel
les intentions très fermes du ministre de punir les pollueurs-payeurs.
S'il n'y a pas de personnel suffisant pour l'inspection et les enquêtes,
c'est, encore une fois, de la poudre aux yeux. Alors, la volonté
politique est loin d'être là. Les pouvoirs actuels de la loi sont
très larges.
Combien de temps me reste-t-il, M. le Président?
Le Président (M. Garon): Dix minutes.
M. Lazure: Dix minutes. Les pouvoirs sont très larges et
on sent que le gouvernement a hésité et a attendu longtemps. Il
attendait que ça éclate, qu'un journaliste qui fait bien son
travail révèle des problèmes de plomb dans l'est de
Montréal ou ailleurs, fasse une révélation. Puis,
là, on intervient. Si on excepte cette augmentation des amendes et les
pouvoirs accrus pour imposer la décontamination, il me semble qu'on n'a
pas tellement de garanties que ce beau principe pollueur-payeur sera
appliqué.
Il y a d'autres façons de faire en sorte que les
propriétaires contribuent à la décontamination, que ce
soit par des fonds, que ce soit par des assurances ou par des cautionnements,
comme ça existe. Les agences de voyages donne des cautionnements
importants pour être en affaires de sorte que, si elles font faillite, au
moins le cautionnement peut être saisi. Alors, c'est une formule. Il y a
plusieurs formules. Il faut faire attention que le ministre ne se
réfugie pas dans une espèce de magie. Pollueur-payeur, ma loi dit
que ça va jusqu'à 1 000 000 $; là, je leur fais peur et,
là, ils vont arrêter de polluer. Ce n'est pas vrai. Il va encore y
avoir des faillites plus ou moins frauduleuses et il va encore y avoir des
petits malins qui vont utiliser les entourloupettes du droit que le ministre
connaît bien, étant avocat. Ils vont utiliser ces
entourloupettes-là et, finalement, le principe pollueur-payeur ne sera
pas appliqué.
Alors, je demanderais au ministre d'être un peu plus ouvert et
d'envisager d'autres possibilités. Je sais qu'il y a des groupes qui
vont faire des propositions, même le groupe dont je viens de regarder le
mémoire rapidement, le groupe des départements de santé
communautaire. Mais il ne faut pas croire que ce principe pollueur-payeur va
tout régler, loin de là.
Je finirai là-dessus. Qu'on appelle ça une assurance genre
cotisation des entreprises comme dans le cas de la CSST, la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, qu'on appelle
ça un fonds mutuel, qu'on appelle ça comme on voudra, une chose
est certaine, c'est qu'indépendamment de la loi, indépendamment
des pollueurs-payeurs il faut que le gouvernement consacre des montants
importants à la décontamination des sols contaminés connus
actuellement, M. le Président. Il y a au moins une soixantaine de sites
qui sont connus comme étant dangereux. Ce que je déplore, c'est
que le ministre ne nous ait pas présenté de plan d'ensemble:
Voici où je m'en vais; le gouvernement me donne 20 000 000 $, 30 000 000
$, 40 000 000 $. Il a dépensé 50 000 000 $ à Saint-Basile,
votre gouvernement; il peut bien consacrer le même montant sur, mettons,
quelques années, mais qu'au moins il y ait un plan de deux ans, trois
ans, et qu'on dise: C'est là où on s'en va; il existe tant de
sites contaminés au Québec; on va procéder avec les plus
urgents; voici lesquels vont être faits en premier. Mais on n'a pas de
plan comme ça et, aussi longtemps qu'on n'aura pas de plan comme
ça, le ministre aura beau nous présenter de beaux projets de loi,
c'est de la poudre aux yeux.
Alors, en conclusion, M. le Président, nous sommes pour ce beau
principe, mais nous disons: Ce n'est pas suffisant. Il faut que le ministre,
tout avocat qu'il soit, arrête de penser en avocat et dise: J'ai besoin
de pouvoirs plus grands, j'ai besoin d'une loi plus claire. Mais qu'il se
souvienne qu'il a surtout besoin de bons budgets, qu'il a surtout besoin de la
collaboration de ses collègues au Conseil des ministres, qu'il a surtout
besoin d'un coup de pouce de son chef. J'espère que son chef va
l'appuyer et j'espère aussi qu'il va rendre public, le plus tôt
possible, un plan de décontamination progressif, avec le montant
d'argent qui sera affecté à ce plan de décontamination.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Garon): M. le député de
D'Arcy-McGee.
M. Robert Libman
M. Libman: Merci, M. le Président. Effectivement, notre
formation politique est aussi satisfaite de la véritable intention de
cette loi, surtout qu'elle veut accorder au ministre de l'Environnement les
pouvoirs nécessaires afin qu'il puisse intervenir rapidement dans des
dossiers à caractère urgent. Non seulement pourra-t-il intervenir
lorsque nécessaire, mais, également, le ministre lui-même
devra-t-il accepter une plus grande partie de la responsabilité lorsque
les choses tournent mal. Donc, la personne qui sera directement tenue
responsable aura tendance à porter plus d'attention aux situations
potentiellement périlleuses. Pourra-t-on éviter des
désastres écologiques tels que Saint-
Basile ou Saint-Jean-sur-Richelieu? Probablement pas
complètement, sauf qu'il faut permettre au public de pointer du doigt,
si on veut vraiment accorder de l'importance à notre environnement.
Ceci étant dit, ma préoccupation touche également
les événements passés, M. le Président. On ne peut,
par exemple, laisser tomber l'affaire de Saint-Basile-le-Grand. Mark Levy doit
prendre sa part de responsabilité et j'associe ma voix aux citoyens qui
exigent qu'on le ramène au Canada afin qu'il puisse répondre aux
accusations portées contre lui. En portant des accusations d'ordre
criminel contre M. Levy, non seulement on pourrait le ramener, mais cela
enverrait un message clair à tous ceux pouvant se retrouver dans des
circonstances similaires. Même si M. Levy arrivait à repousser les
accusations portées contre lui, le gouvernement pourrait, du moins,
concrétiser des poursuites d'ordre civil pour au moins
récupérer une partie des coûts qui ont
découlé de cette affaire. Donc, M. le Président, l'ultime
but sera d'amener M. Levy sur le territoire canadien pour faire en sorte que la
justice soit rendue, au moins en partie.
Finalement, en conclusion, j'aimerais faire savoir que les montants
fixés au deuxième alinéa de l'article 31.51.8 sont trop
minimes. Lorsqu'on parle d'une deuxième infraction, c'est souvent le cas
où la personne n'a pas compris la sévérité de son
geste la première fois. Fixer le montant maximal à 1 000 000 $
pourrait potentiellement nous lier à un montant qui, dans certains cas,
ne paierait qu'une fraction des dommages. N'oublions pas le cas potentiel
où payer des amendes serait monétairement plus avantageux que de
ne pas déverser les contaminants. Pour cette raison, je crois que le
montant de l'amende maximale imposée pour une infraction
subséquente ne devrait pas avoir de plafond. Les tribunaux seraient
libres de déterminer le montant des dommages en tenant compte de
l'aspect d'une infraction répétée.
Alors, juste en conclusion, M. le Président, nous sommes en
accord avec le député de La Prairie qui dit que l'intention de ce
projet de loi est bon, mais nous espérons que le ministre va amener avec
lui une plus grande responsabilité au Conseil des ministres pour
vraiment montrer l'importance, aujourd'hui, de l'environnement et pour vraiment
montrer ses intentions au public. Merci.
Le Président (M. Garon): Merci, M. le député
de D'Arcy-McGee. Alors, j'aimerais, avant d'entendre le premier groupe, faire
le dépôt d'un document. J'ai reçu une lettre, hier,
signée par M. Al ban D'Amours, de la Confédération des
caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec, qui dit:
"Nous avons pris connaissance du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la
qualité de l'environnement, et souhaiterions que la commission de
l'aménagement et des équipements dont vous êtes le
président envisage certaines modifications à ce projet de loi."
Alors, je vais faire distribuer à chacun des membres de la commission
une copie de la lettre de M. D'Amours.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): m. le président, est-ce que
vous me permettriez une brève réaction de deux minutes aux propos
de l'opposition officielle ainsi que du parti égalité?
M. Lazure: Le temps égal ensuite.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est strictement, je n'ai
pas le goût... Ce n'est pas pour partir un débat, c'est pour
soulever ou reprendre les principaux arguments avec un bref commentaire. Je
n'ai pas pris tout mon temps tantôt.
M. Lazure: Oui, oui.
Le Président (M. Garon): Jusqu'à midi? M. Pierre
Paradis (réplique)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Deux minutes, peut-être cinq
minutes au maximum. L'Opposition officielle mentionne son accord quant au
principe. Je tiens à rassurer l'Opposition officielle, il ne s'agit pas
là d'un brouillon de projet de loi. Le projet de loi, M. le
député de La Prairie, a franchi toutes les étapes:
Comité interministériel de développement régional
et de l'environnement, Comité interministériel du
développement économique, Conseil du trésor, Conseil des
ministres et, comme vous êtes familier avec ces procédures,
également le Comité de législation qui a - et je tiens
à le souligner - travaillé de façon très ardue pour
fixer le libellé du projet de loi qui touche à des domaines de
droit sur les plans civil et pénal qui sont quand même, dans
certains cas, de droit nouveau, de façon à s'assurer que ce soit
conforme aux chartes. Donc, dans ce sens-là, il s'agit d'un projet de
loi qui a fait l'objet de beaucoup de préparation. On ne dit pas qu'il
n'est pas bonifiable. Au contraire, nous avons indiqué notre ouverture,
mais il ne s'agit pas non plus d'un brouillon de projet de loi. (12 heures)
Vous avez parlé tantôt des pouvoirs qui sont contenus
à l'article 25 de l'actuelle loi. Le ministre est bien conscient de ces
pouvoirs. Ce que je vous indique, c'est que dans les cas que nous avons
vécus, comme la Balmet qui a fait l'objet d'un reportage public, de
discussions sur la place publique, les pouvoirs contenus à cet article
n'étaient pas suffisants pour permettre au ministre de l'Environnement
d'intervenir de façon efficace. Si vous détenez des avis
juridiques qui vont dans le sens contraire, nous vous saurions gré de
nous les communiquer.
Vous parlez d'une possible difficulté du
ministre. Vous dites: Le ministre est isolé, et vous avez fait
une comparaison avec ce qui se passait dans le cadre du débat
constitutionnel du lac Meech, aujourd'hui, à Ottawa, et vous m'avez
comparé à M. Wells ou à M. Filmon. Ça ne s'applique
pas, le ministre n'est pas isolé. Je vous ai fait tantôt la
nomenclature des comités traversés par ce projet de loi. Si j'ai
été isolé, je me réjouis de retrouver à
cette table le critique de l'Opposition officielle, votre équivalent au
Manitoba, Mme Carstairs, peut-être M. Doer, et, comme tout le monde est
d'accord, le ministre sort automatiquement de son isolement, au moins en ce qui
concerne le principe du projet de loi.
Vous avez souligné et, je tiens à le dire, à juste
titre, que, souvent, la meilleure façon d'agir en environnement, c'est
la prévention, et vous avez rappelé l'importance de mettre en
vigueur l'article 2n sur les évaluations environnementales. Je pense que
les gens qui viennent nous faire des suggestions - en tout cas, je les invite
publiquement à le faire - pourraient nous parler de la prévention
versus l'aspect curatif. Il s'agit là d'une veine que nous tenterons
d'exploiter au cours de cette commission parlementaire.
En ce qui concerne l'approche légaliste, je partage votre point
de vue, les gens vont s'appliquer à tenter de déjouer le projet
de loi. C'est donc important que nous puissions bénéficier de
l'éclairage de tous les parlementaires autour de cette table, de
l'Opposition officielle, du Parti Égalité, de façon
à le tricoter le plus serré possible, de façon que,
justement, ce soit le plus difficile possible.
Vous préconisez également d'autres approches, constitution
d'un fonds, etc. Le gouvernement n'est pas fermé à ces approches.
En matière environnementale, il n'y a pas d'approche dogmatique qui
consiste à avoir trouvé la solution, c'est la combinaison de
plusieurs solutions qui font en sorte qu'on en arrive à régler
des problèmes environnementaux. D'ailleurs, nous nous sommes
déjà associés avec le gouvernement fédéral
à la création d'un fonds pour les sites orphelins, de 250 000 000
$ sur une période de cinq ans. Il y a davantage à faire et c'est
dans cet esprit-là que nous entendrons les suggestions des personnes qui
participent à cette commission parlementaire.
Quant au député de D'Arcy-McGee, II a repris quelques-uns
de vos propos. Il a reparlé - je pense que le sujet méritait
d'être "retraité" - du cas de Mark Levy. J'indiquerai au
député que le ministère de l'Environnement du
Québec conserve toujours les plaintes autant civiles que pénales
portées contre Mark Levy, au nombre de plus de 45. Il y a un mandat
d'arrestation d'émis par un juge contre Mark Levy.
Maintenant, en ce qui concerne les procédures d'extradition, vous
avez raison de le souligner, ça nécessite des procédures
d'ordre criminel. Le gouvernement fédéral a décidé,
à un moment donné, sur le plan du droit criminel, de traiter les
trafiquants de drogue avec plus de sévérité. Ça n'a
pas été fait sur le plan des modifications au Code criminel quant
aux gens qui enfreignent la loi, la réglementation ou qui portent des
préjudices à l'environnement, tant et si bien que, avec le
dossier qu'il avait, le ministre de la Justice en est venu à la
conclusion... Je ne suis pas à même de questionner - je n'ai pas
eu accès au dossier et je ne pense pas que le député de
D'Arcy-McGee l'ait non plus - la décision du ministre de la Justice.
Tout comme lui, j'aurais souhaité, comme ministre de l'Environnement,
que le droit criminel et son application fassent en sorte que nous puissions
sévir dans des cas comme ceux-là, et je le remercie d'avoir
ramené le sujet. Je pense que c'est en ramenant ces sujets qu'on fait en
sorte qu'ils ne tombent pas dans l'oubli et qu'on poursuit les démarches
dans le but de renforcer le droit criminel au pays et son application par les
tribunaux.
C'était là, M. le Président, les brèves
répliques que j'avais à faire. Merci.
Auditions
Comité de santé environnementale des DSC
du Québec
Le Président (M. Garon): J'appelle le premier groupe, le
Comité de santé environnementale des départements de
santé communautaire du Québec, à prendre place à la
table des témoins. Le comité est représenté, selon
la liste que j'ai ici, par M- Pierre Gosselin, médecin,
président. Vous êtes bien M. Gosselin?
M. Gosselin (Pierre): Oui, M. Garon.
Le Président (M. Garon): Est-ce que vous êtes
accompagné d'autres personnes?
M. Gosselin: Je suis seul.
Le Président (M. Garon): Alors, si je veux rappeler la
procédure, tout simplement, on a une heure, jusqu'à 13 heures.
Les 20 premières minutes, vous avez 20 minutes pour expliquer votre
position, il y aura 20 minutes, après ça, au côté
ministériel, au ministre ou à ses collègues, pour poser
des questions et, ensuite, 20 minutes à l'Opposition officielle. Comme
j'ai eu à subir souvent dans le passé le fait qu'on zigonnait
avec ça, j'ai l'intention d'appliquer ça strictement pour que ce
soit 20 minutes, 20 minutes, 20 minutes. Maintenant, si vous prenez plus de 20
minutes, vous avez le droit, à ce moment-là, mais c'est autant de
temps qu'auront de moins, de part et d'autre, les deux partis pour questionner.
Si vous prenez 30 minutes, il leur restera 15 minutes chacun. Si vous prenez 40
minutes, il
leur restera 10 minutes chacun. Si vous prenez 60 minutes, ils n'auront
pas de minute, chacun.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Garon): Alors, allez-y.
M. Gosselin: Si je comprends bien, il y a moyen de ne pas avoir
de question, si on parle beaucoup.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gosselin: D'abord, M. le Président, messieurs,
mesdames, on tient à vous remercier de l'invitation à participer
Ici à la consultation. Le commentaire général qu'on a par
rapport à ce projet de loi, c'est que ça ne nous semble pas aller
assez loin, en termes de moyens que le ministre de l'Environnement aurait pour
exercer un contrôle adéquat sur les cas de contamination de sols,
dont il est question.
Un premier point qu'on s'est posé, à la lecture de
ça... En fait, on a plusieurs questions qu'on amène ici, qu'on
soulève. Nous ne sommes pas juristes, nous ne sommes pas, non plus,
politiciens, nous ne faisons pas de loi, nous sommes, en général,
des médecins, des environnementalistes. Au point de vue
définition, il y a un problème que nous pensons soulever, ici, en
termes de définition de sols contaminés, qui nous semble
apparaître dans la loi et dans le règlement qu'on nous a
proposés et la définition de déchets dangereux, telle
qu'elle apparaît déjà dans le Règlement sur les
déchets dangereux. En ce sens qu'il y a une procédure pour
déclarer un déchet dangereux, qui apparaît au
Règlement sur les déchets dangereux, soit qu'il est listé
à l'annexe I, soit que c'est un résidu, qui passe à
travers une procédure de l'annexe II, qui est déclaré
déchet dangereux. Mais, pour être déclaré un
déchet dangereux, nous semble-t-il, il faut d'abord être un
déchet.
On se demande si les sols contaminés, qu'on définit par
cette loi et ce règlement, qui sont à l'état de projet,
ça n'exclut pas de facto qu'un sol contaminé puisse être
déclaré un déchet dangereux. Alors, c'est une question
qu'on se pose, d'autant plus qu'avec l'exemple qu'on a eu à
Montréal-Est, où il y avait des concentrations dans le sol qui
étaient de 5 % à 6 %, en moyenne, 50 000, 60 000 ppm et
jusqu'à 330 000 ppm, c'est du 33 % de plomb dans le sol. Ce n'est pas un
sol contaminé à un bas niveau. Ça nous semble important de
pouvoir considérer certains sols contaminés comme des
déchets, de les traiter comme des déchets dangereux. D'autant
plus que ce sont les mêmes contaminants, dans la plupart des cas, qu'on
va retrouver dans les sols contaminés ou dans les déchets
dangereux. La seule différence est une différence de
concentration et une différence de lieu de production ou d'endroit
où on retrouve ces sols-là.
Si on met un gros volume de sols contaminés à faible
concentration, ça peut devenir, en termes de risques à la
santé publique, l'équivalent d'un déchet dangereux de
moindre volume. Alors, il n'y a pas de logique qui nous permettrait de traiter
différemment un sol d'un déchet. Ça va dépendre
beaucoup des concentrations. Comme on fixe des concentrations minimales, dans
le projet de règlement qu'on nous soumet, il nous semble y avoir un
danger de définition inhérent dans le projet de loi actuel. Je
vous laisse cette question.
À l'article 31. 51c, qui nous a fait arrêter un petit peu
à la lecture, on voit que le gouvernement se donne la possibilité
de déterminer les normes de localisation, d'exploitation et d'entretien
des sites d'enfouissement et des usines de traitement. On comprend, s'il y a
des normes prévues, qu'il n'y aura pas d'examen public de ces projets de
site, ou ces projets d'usine. Peut-être qu'on comprend mal, mais c'est
notre interprétation. On aimerait ça être
éclairés là-dessus.
Nous répétons, un peu dans le sens des commentaires
précédents, à la fois de M. le ministre et du
représentant de l'Opposition officielle, notre intérêt
à voir l'évaluation publique se généraliser et
s'appliquer à cause de sa rigueur et à cause de sa force de
changement social possible. Que les examens d'impact publics soient
appliqués le plus généralement possible, mais aussi, dans
les projets de sols contaminés, compte tenu qu'il s'agit des mêmes
contaminants et que, pour nous, dans une optique de santé publique, il
peut y avoir les mêmes problèmes si le volume de sols
contaminés est suffisant d'autant plus que les technologies pour traiter
ça sont les mêmes. Stablex-Chem Security, dans leur projet de
Valleyfield, ils ont déclaré à la commission Charbonneau
qu'ils étaient très prêts à traiter les sols
contaminés tout autant que des déchets dangereux. Alors, on se
demande, s'il n'y a pas d'examen public et si c'est par règlement que
ça se passe tout simplement et, donc, par certificat d'autorisation, si
le MENVIQ ne pourra pas autoriser tout un réseau d'usines et de lieux
d'enfouissement qui arriveraient au Québec et qui,
éventuellement, pourraient devenir, par la bande ou encore par nouveau
certificat d'autorisation modifié, des usines de traitement de
déchets dangereux. Alors, soit qu'il y aurait audience publique ou qu'il
n'y en aurait pas, on ne le sait pas à l'heure actuelle, mais même
s'il y en a, à partir du moment où on a des usines
implantées qui peuvent traiter des déchets dangereux, on se
retrouve avec une influence dans la prise de décisions majeures pour
l'implantation des usines de traitement de déchets dangereux. Alors,
c'est un point qui nous semble important et qu'on aimerait voir préciser
aussi.
Enfin, pour ce qui est des articles 31. 45 à 31. 50, on voit
apparaître là une autre catégorie
d'obligations, en fait, de possibilités pour le ministre de
déclarer un sol contaminé et de l'inscrire au registre. Depuis
longtemps, les groupes environnementaux et nous, dans les départements
de santé communautaire, lors de réprésentations
antérieures, nous avons suggéré de créer quelques
obligations au ministre. Je pense que ce serait de nature,
éventuellement, à rehausser la crédibilité qui
s'effrite de plusieurs ministères de l'Environnement à travers le
monde concernant la façon dont sont gérés ces
problèmes-là à l'heure actuelle. La confiance que les gens
ont dans les pouvoirs discrétionnaires et leur application par les
gestionnaires du gouvernement quant à la déclaration des sols
contaminés, c'est beaucoup remis en doute. Alors, on pense qu'une
obligation qui serait créée pour le ministre de déclarer -
ce n'est pas aller très loin, je pense - c'est de faire circuler
l'information, d'en avertir les gens et, au point suivant, on dira d'en avertir
les autorités de santé publique et les municipalités. Que
ce soit une obligation nous semble un point de bonification
éventuelle.
Un des éléments principaux qui, je pense, M. le ministre -
vous l'avez dit tout à l'heure - vous font proposer ce projet de loi,
c'est la protection de la santé publique, un des trois points que vous
avez cités. Nous pensons que l'information dont il est question ici,
soit la présence de sols contaminés et à quel niveau,
cette information-là devrait être accessible de façon
automatique aux autorités de santé publique. Ça nous
permettrait dans plusieurs cas de faire des liens entre des plaintes que nous
recevons. Nous recevons régulièrement des plaintes sur l'air
intérieur, et on en a encore eu ces derniers mois, ici, dans la
région de Charlesbourg, de propriétaires de maisons, de cottages,
de bungalows qui se retrouvent avec des problèmes d'air intérieur
et on découvre par hasard qu'ils sont construits sur des sites de
déchets. Nous, ça nous a pris environ deux à trois mois
pour déterminer qu'il y avait des déchets là. La ville
elle-même doutait, n'était pas au courant. Alors, c'est une
situation où il faut nous-mêmes, comme département de
santé communautaire, investiguer où sont les sols
contaminés. Nous n'avons pas l'information en main. Alors, on propose
qu'une obligation de déclarer soit faite au ministre pour les articles
31.45, 31.46, 31.48 et 31.50 en rapport avec le chef du DSC du territoire
concerné. (12 h 15)
Le point majeur, je pense, c'est le prochain point que nous abordons,
c'est celui des moyens financiers, des budgets qui vont être disponibles
éventuellement au ministre de l'Environnement pour l'application du
principe pollueur-payeur. Il nous semble, après en avoir parlé
avec certaines personnes touchées par ça, des individus ou
certaines corporations ou certaines municipalités, pour les cas
où la source du contaminant n'est pas connue, que, dans le projet de loi
actuel, il peut y avoir un problème majeur en transformant le
propriétaire en propriétaire-payeur. Ça ne nous semble pas
une façon équitable, éventuellement, de régler le
problème.
Il nous semble y avoir un problème potentiel aussi dans les cas
de contamination de nappes phréatiques, quand on sait ce que ça
peut représenter: de 15 à 20 ans de traitement plus ou moins
efficace. Le ministère de l'Environnement en sait quelque chose avec le
problème de la ville de Mercier, et ces cas-là sont de plus en
plus fréquents aux États-Unis. Dans une situation où les
autres surfaces se dégradent de plus en plus, où il va falloir
faire appel aux nappes phréatiques, aux sources souterraines, de plus en
plus dans l'avenir, il est essentiel de les protéger de façon
très rigoureuse et ça ne semble pas présent comme
préoccupation dans l'actuel projet de loi. On propose donc - et je ne
pense pas que ce soit d'aller contre le principe du pollueur-payeur - une
mutuelle d'assurances de quelque forme que ce soit; ça nous semble une
nécessité de se donner les moyens d'appliquer le principe
pollueur-payeur. Ça nous semble plus équitable de faire payer les
entreprises, de les cotiser, de les cotiser selon le risque et la
catégorie d'établissement, et selon leur comportement
précis, dans certains cas, ce qui n'empêche pas d'avoir des
primes, des déductibles, comme on dit dans le langage courant, qu'un
projet en bas de 1 000 000 $ ou 2 000 000 $ soit assumé directement par
l'entreprise, mais, pour les cas plus graves où la compagnie
déclarerait faillite, sur la simple base d'un raisonnement
économique, ou pour les propriétaires individuels qui se
retrouveraient avec une maison, où ils ont mis toutes leurs
économies, bâtie sur un site contaminé, invendable, et avec
une obligation éventuelle de décontaminer, qui se retrouveraient
dans la rue et qui déclareraient faillite eux aussi. Alors, des cas
comme ça. Et, en plus, je pense, une éventuelle mutuelle
d'assurances comme ça permettrait, pour les cas graves, même si le
pollueur est connu, d'agir de façon efficace parce que, quand le
pollueur est connu, si ça coûte trop cher, on déclare
faillite, c'est tout, ou il y a tout le problème du voile corporatif,
des changements de compagnies à numéro, qui peut se produire.
Alors, je ne pense pas que ce soit nier le principe. C'est, je pense,
donner au gouvernement les moyens d'appliquer le principe pollueur-payeur et
d'ajouter de l'argent. Il faut en ajouter, ce n'est pas compliqué. On a
des mutuelles d'assurances pour les automobiles quand il y a des accidents,
pour le milieu du travail quand il y a des accidents, pour nos habitations
quand il y a des feux, pour à peu près tout, mais on n'en a pas
en environnement ou à peu près pas. Et je ne pense pas non plus
que la mise sur pied d'une mutuelle d'assurances soit un problème au
point de vue de la compétitivité. Ces cho-
ses-là s'en viennent partout, elles sont déjà
commencées à plusieurs endroits aux États-Unis. Ce n'est
pas non plus remettre en question le bien-être économique des
entreprises, on ne parle pas d'augmentation faramineuse de leurs charges,
probablement de l'ordre d'un point de pourcentage, ce ne sont pas des montants
qui vont les jeter dans la rue.
Par ailleurs, qu'on pense à la contamination dans la chaîne
alimentaire et à la protection des nappes phréatiques. M. le
ministre en sait quelque chose, quant au coût de décontamination
de la baie des Anglais, ce que ça peut représenter, et c'est un
cas. Est-ce qu'on va mettre le Québec dans la rue pour
décontaminer une baie? Alors, je pense que ce sont des réflexions
qu'il faut faire et ça permettrait un peu plus d'autodiscipline. Moi,
j'ai été personnellement révolté par un article,
s'il est exact, du Devoir du 31 mai: Déclaration de l'Association des
mines du Québec à la commission Charbonneau sur les
déchets dangeureux, disant qu'il n'y a pas de besoin de
règlement, qu'on est bien avec la directive du MENVIQ, qu'il n'y a pas
de besoin d'évaluation publique, que les propriétaires actuels de
mines n'ont pas à assumer leurs responsabilités pour les terrains
achetés et pollués par d'anciens propriétaires, qu'il n'y
a aucune nécessité de superfonds pour les sites orphelins. C'est
vraiment trop gros et, je pense, une insulte à l'intelligence du public,
quand on sait que, dès 1975, les premiers rapports du Bureau
d'étude sur les substances toxiques du gouvernement du Québec
déclaraient que l'Abitibi était une région
sinistrée et que ça s'est redit encore récemment et qu'il
ne s'est à peu près rien fait. Que l'Association des mines dise
ça, bien, elle n'est pas rendue loin, puis je pense qu'il faut commencer
à la faire bouger un peu.
Je ne suis pas partisan non plus des amendes élevées que
vous proposez dans votre... Nous ne sommes pas, en fait - je représente
un ensemble de départements de santé communautaire - partisans
des amendes élevées pour la bonne raison que les recherches
scientifiques faites là-dessus montrent que, quand les amendes sont trop
élevées, les juges ne les appliquent pas et ne sont pas
portés à condamner des gens qui, par ailleurs, sont souvent
connus d'eux-mêmes parce que président de compagnie ou de
corporation, de la même classe sociale, du même monde avec qui ils
sont allés à l'école souvent. C'est une réaction
bien humaine, qui est compréhensible et qui est démontrée
par les études scientifiques dans le domaine du droit.
On propose ensuite quelques modifications d'articles qui sont quelques
questions, en fait, qui nous viennent. Concernant 31.43, pour les situations de
déversement, on se demande si ça pose problème. Est-ce que
des manoeuvres de labourage ou de terrassement des sols ne dilueraient pas la
concentration éventuelle d'un contaminant? Et quelques modifications
mineures à 31.51b et à divers articles. Un ajout à
l'article 10, que les municipalités puissent demander, en vertu de 117
de la Loi sur la qualité de l'environnement, de faire enquête,
demander au ministre de faire enquête et de proposer que, les dommages
à la santé, on n'attende pas qu'ils soient présents, comme
le dit l'article 117, mais que la présence de risques puisse être
suffisante.
On a survolé aussi le projet de règlement qui nous a
été envoyé par le sous-ministre du ministère de
l'Environnement. On a quelques questions que nous nous demandons, des
diminutions de critères par rapport à la politique de 1988. Le
plomb, par exemple, qui augmente à 500 ppm. Même si la plupart des
études médicales aujourd'hui nous disent que de très
petites concentrations ont des effets sur le développement psychologique
et moteur des enfants, on enlève six métaux de la liste, trois
d'entre eux ont des propriétés toxiques reconnues, quand on pense
au molybdène, au cobalt, des choses comme ça. Ça nous
semble difficile à expliquer scientifiquement. On aimerait ça
éventuellement que le ministère de l'Environnement se prononce
là-dessus. Il n'y a pas non plus de normes dans les produits
chlorés. Il n'y a pas de normes ou de critères d'action
concernant les dioxines et les furannes. Alors on aimerait ça savoir si
le ministère a l'intention éventuellement de proposer un
critère d'action pour les dioxines et les furannes.
Pendant qu'on est ici - on est un groupe qui est souvent consulté
sur les projets de règlement et à l'occasion sur les projets de
loi - j'aimerais faire part au ministre de l'Environnement d'un problème
que nous avons souvent et qui, je pense, est chronique au ministère de
l'Environnement, remarquez que ça peut exister ailleurs aussi, mais
c'est qu'il n'y a jamais de document explicatif qui justifierait la logique
derrière les propositions qui sont faites, propositions de
règlement. Il n'y a jamais de logique scientifique d'exposée par
rapport aux propositions qui sont faites et c'est encore le cas cette semaine.
La semaine dernière, le 30 mai, on recevait le projet de
règlement de M. Trudeau, votre sous-ministre, disant que ça
devrait nous aider, ce projet de règlement là, à
préparer notre intervention d'aujourd'hui. Ça nous aide mais
ça nous soulève davantage de questions, en ce sens qu'on ne
comprend pas les points que je vous ai soulevés et qui pourraient
être très bien... Il faut, à un moment donné, qu'il
se fasse une réflexion dans un ministère et il serait
intéressant qu'elle soit rendue publique pour les gens qui ont à
se prononcer là-dessus, la logique interne de ces projets de
règlement là. Un peu comme le fédéral l'a fait en
publiant sa justification pour la dioxine dernièrement; il explique
comment il en vient à ça. Comme le gouvernement américain
fait, et ce serait une
pratique, je pense, intéressante dans le cas du domaine des
normes environnementales aussi.
Alors on a beaucoup de questionnement, en résumé, par
rapport à ce projet de loi là. On pense que les moyens que le
ministre aurait ne nous semblent pas suffisants, ne nous semblent pas
nécessairement adéquats non plus pour régler le
problème et on apprécierait avoir réponse à
certaines interrogations, et on a suggéré quelques
améliorations. Merci beaucoup.
Le Président (M. Garon): M. le ministre, vous avez 20
minutes pour questionner le Dr Gosselin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
veux remercier le Dr Gosselin de sa présentation, ainsi que le
Comité de santé environnementale des DSC du Québec. En
matière environnementale, il s'agit, pour le ministère de
l'Environnement, d'un partenaire, en tout cas en période de crise. Il
serait souhaitable que ce soit également un partenaire en période
de prévention des crises.
Je vais tenter, dans un échange, de vous donner les
premières réactions. Nous avons pris connaissance de votre
document ce matin. Vous soulevez des points techniques qui vont nous demander
une réflexion à l'interne sur laquelle nous pourrons vous revenir
ultérieurement. Les premières réactions au paragraphe ou
au chapitre 2, la confusion dans les définitions; sols contaminés
versus déchets dangereux. Il n'était pas de l'intention du
législateur de considérer les sols contaminés comme
déchets dangereux malgré les hautes concentrations auxquelles
vous avez fait référence, comme dans le cas de l'est de
Montréal.
La politique du fait accompli, au chapitre 3: Les pouvoirs
réglementaires prévus à l'article 31.51c donneraient au
gouvernement la possibilité de déterminer les normes de
localisation, d'exploitation et d'entretien des sites d'enfouissement, etc.,
sans audiences publiques, même si ça nécessite, comme vous
le soulignez à juste titre, un certificat d'autorisation. Il n'y a rien
dans cet article qui modifie la pratique actuelle quant à la tenue
d'audiences publiques ou pas. Cet article-là n'affecte pas tout cet
aspect important que vous soulevez de l'installation de sites de destruction ou
de sites d'enfouissement. Les évaluations environnementales ne sont pas
affectées quant aux règles du jeu par l'adoption
del'artice31.51.
Quatrième chapitre, l'absence d'obligation du ministre de
déclarer. Vous avez raison, l'article de loi se lit: "Le ministre peut",
et non pas: "le ministre doit". Il s'agit d'un pas qui est fait. Le ministre ne
le faisait pas avant. C'est un nouveau pouvoir qui est ajouté. Est-ce
qu'on devrait modifier le pouvoir en obligation? Vous êtes dans une
situation d'analyse, de balance d'inconvénients. Si le ministre doit, et
que le ministre a une responsabilité absolue quant aux sols
contaminés de l'ensemble du territoire du Québec, quel que soit
le ministre, quels que soient les outils qui soient mis à sa
disposition, il s'agit quasiment d'une mission impossible que d'identifier tous
les sols contaminés, de quelque catégorie que ce soit et de
quelque niveau de contamination que ce soit, dans l'ensemble de la province de
Québec, à moins qu'on puisse m'indiquer une façon pratique
et technique par laquelle un ministre de l'Environnement pourrait assurer cette
obligation. Maintenant, le fait d'accorder un nouveau pouvoir fait en sorte que
le ministre va pouvoir l'utiliser là où il le sait. Il y a
peut-être entre les deux, entre le "peut" et le "doit", un chemin mitoyen
qui pourrait être rencontré. Mais en faire une obligation absolue
pour quelque ministre que ce soit, ce serait tenter de convertir un pas dans la
bonne direction en un saut dans, possiblement, un précipice.
M. Lazure: Ça prend de l'audace.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ça prend de l'audace, mais,
lorsque vous connaissez la profondeur du précipice, des fois l'audace
peut se transformer en...
M. Lazure: Le précipice de vos collègues. Le
Président (M. Garon): En témérité.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...témérité
suicidaire, M. le Président. L'absence des autorités de
santé publique, au chapitre 5, vous touchez là un point qui nous
apparaît essentiel. La seule question que je vous réadresserais:
Est-ce qu'on se devrait de limiter le souhait que vous manifestez de voir
incorporer une obligation dans la loi pour le ministère de
l'Environnement de communiquer des renseignements aux autorités en
matière de santé? Est-ce qu'on devrait le limiter aux sols
contaminés ou si ça ne devrait pas exister pour l'ensemble des
situations où il y a des substances dangereuses? Et là, je vous
pose bien humblement la question.
M. Gosselin: Vous voulez une réponse tout de suite?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bof! Vous pouvez prendre
note...
M. Gosselin: Je préférerais peut-être
attendre tous vos commentaires...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.
M. Gosselin: ...et répondre à quelques autres
points en même temps.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
Le Président (M. Garon): Oui, mais vous prenez un
risque.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gosselin: O.K. Lui, il est là pour m'ai-der. (12 h
30)
Le Président (M. Garon): C'est parce que, au bout de 20
minutes, je suis obligé de changer de côté.
M. Gosselin: O.K. Je suis d'accord avec vous, c'est uniquement
qu'il s'agit du projet de loi sur les sols contaminés. On commence par
là et, éventuellement, ça devrait s'appliquer à
d'autres situations, que ce soient les déchets dangereux ou d'autres
substances ou centres de transfert. Je suis entièrement d'accord avec
vous que l'obligation de déclarer s'applique à d'autres
substances. Je voudrais préciser que, dans notre tête,
l'obligation de déclarer ne porterait que sur les cas dont le ministre a
connaissance. On ne demande pas au ministre de faire un échantillonnage
de tous les sols du Québec pour déterminer s'ils sont
contaminés ou pas. C'est vraiment ceux dont il a connaissance, a
l'occasion d'un événement, d'une reconversion de quoi que ce
soit.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Je tiendrais peut-être
à préciser là-dessus que, sans que ce soit une obligation
légale - je n'ai pas d'objection, au contraire, c'est une proposition
sur laquelle on va se pencher très attentivement - sans que ce soit
prévu de façon obligatoire dans la loi, le gouvernement du
Québec, depuis 1988, publie la liste de tous les sites de déchets
dangereux qu'il a identifiés dans la province de Québec, de
catégorie 1. Comme le faisait remarquer le député de La
Prairie dans ses notes préliminaires, vous en avez plus d'une
soixantaine, 67 ou 68, qui sont identifiés comme étant dangereux.
Nous sommes à remettre à jour cette liste. Elle devrait
être remise à jour d'ici à la fin de la session.
Ce qu'il faut comprendre également, et nous l'avons
peut-être vécu partiellement dans le cas de l'est de
Montréal, il n'est pas facile de changer une façon d'agir d'un
ministère qui avait comme tendance de garder des choses secrètes
en un ministère qui les communique, finalement, aux autres
ministères et à la population. J'avais attiré, la semaine
dernière, en commission parlementaire, l'attention du
député de La Prairie sur des déclarations d'un de mes
prédécesseurs, qui, sans doute, reflétait la
mentalité de l'époque, à qui celle qui m'a
précédé, Mme Bacon, demandait que soit communiquée
la liste des sites contaminés, et le ministre de répondre en
Chambre: Nous faisons effectivement le type de relevés dont parle Mme la
députée de Chomedey, excepté que nous ne les rendons pas
nécessairement publics pour éviter d'ameuter la population.
Je pense que cette façon de procéder qui existait en 1983
au ministère de l'Environnement du Québec a évolué
vers peut-être une plus grande ouverture, mais qui n'est peut-être
pas encore suffisante. Et si on peut, en incorporant dans la loi des
obligations légales, contribuer à modifier ces mentalités,
nous retiendrons ce type de suggestion.
L'absence de mécanisme fiable de paiement. Là, vous
soulevez toute la question de l'application du principe pollueur-payeur et des
diverses méthodes d'intervention que nous pourrions avoir. J'ai
indiqué tantôt que nous avions déjà une entente avec
le gouvernement fédéral de 250 000 000 $ sur cinq ans pour les
sites dits orphelins. Mais H faut être conscients qu'on ne souhaite pas
que tous les sites deviennent orphelins, c'est-à-dire que les parents
s'en départissent de façon volontaire dans des compagnies
à numéro de façon que ce soit l'argent des contribuables
qui serve à défrayer. À partir du moment où vous
pouvez faire le lien avec le responsable de la source de contamination, vous
lui créez l'obligation de décontaminer; vous avez une application
pure, à ce moment-là, du principe pollueur-payeur. Du moment
où vous demandez à celui qui est propriétaire d'un terrain
contaminé, mais sur lequel vous ne pouvez pas faire la preuve que la
contamination découle de ce propriétaire, vous entrez dans une
autre catégorie. Là, nous sommes d'accord avec vous qu'il vaut la
peine d'évaluer quelles sont nos méthodes d'intervention. Mais si
on s'éloigne du libellé actuel du projet de loi, et c'est
là la crainte que je vous exprime et j'aimerais vous entendre
là-dessus, est-ce que vous ne craignez pas qu'on assiste à
beaucoup de transactions? Si on crée un fonds de décontamination
payé, et je n'exclus pas la possibilité de le faire, mais la
personne qui sait qu'elle l'a contaminé, présentement, vous ne
pensez pas qu'elle peut être...
M. Gosselin: C'est que, dans notre idée, de toute
façon, s'il y a un terrain très contaminé et que ça
peut coûter très cher à la compagnie, dans sa logique, tout
simplement, si ça coûte trop cher, elle va déclarer
faillite et s'en départir après avoir vidé la place de son
mieux. Je pense que n'importe qui qui a des biens va essayer de faire
ça. Le ministère se retrouverait éventuellement le
créancier privilégié d'une usine vide avec une facture de
plusieurs millions pour décontaminer le site en question. Alors,
ça peut être rentable de le faire dans le centre-ville de
Montréal éventuellement, parce que le terrain vaut très
cher, mais dans une optique de santé publique je ne pense pas que ce
soit intéressant de le faire un peu partout, ou aux alentours de
Montréal, sur la rive sud ou même à d'autres endroits comme
à Montréal-Est, où on se retrouverait dans des situations
où ce ne serait plus une compagnie qui serait en faillite, mais une
municipalité, éventuellement.
Alors, si on veut avoir les moyens pour tous les cas où il y a un
problème de santé publique éventuel et pour tous les cas
où les nappes phréatiques sont menacées, et là, je
pense que c'est un point très important... Des nappes phréatiques
- une fois que c'est contaminé - ce n'est pas une rivière, c'est
quasiment impossible à polluer de façon pratique à moins
d'y mettre 20 à 30 ans et c'est des coûts énormes. Si on ne
les protège pas, c'est malheureux, on ne peut pas les soigner
après. Comme en sont rendus nos cours d'eau et nos sédiments des
eaux de surface à l'heure actuelle, on n'a pas tellement le choix que de
les protéger de façon efficace, d'où notre proposition
d'un fonds d'assurance et la proposition incidente de tout à l'heure
à l'effet d'avoir un déductible, en quelque sorte, qui ferait en
sorte que les compagnies ne seraient pas nécessairement incitées
à déclarer faillite.
De toute façon, il va y avoir beaucoup de transactions et je
pense que le ministre est mieux d'avoir une caisse avec des fonds dedans qu'un
ensemble de compagnies en faillite avec des usines vides. C'est ça qui
va arriver.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Déjà, votre
suggestion est en partie retenue avec le fonds
fédéral-provincial. Vous avez une loi en additionnel et ces
mouvements-là, comme je l'ai dit tantôt, ce n'est pas une approche
qui est dogmatique: une loi et ça règle tout. Le fonds qui a
été créé va faire oeuvre utile. La loi devrait
normalement faire oeuvre utile et possiblement que nous devons avoir d'autres
moyens également, comme vous le mentionnez.
Vous faites des propositions très spécifiques quant
à certains articles au chapitre 7. Rapidement, une réaction
à l'article 10 où vous dites: "Ajouter "ou une
municipalité": elles ne peuvent, à l'article 117, demander une
enquête au ministre", etc. Celle-ci, au premier abord, nous
apparaît très intéressante. Les autres, nous prendrons le
temps de les évaluer.
Vous intervenez en parlant, aux chapitres 8 et 9, à la fin de
votre mémoire, de toute la procédure de consultation. Souvent,
les commissions parlementaires de l'Assemblée nationale sont saisies de
projets de loi sans que les règlements accompagnent les projets de loi.
Nous avons fait des efforts - et je vous le dis - pour que cette
étape-là soit franchie dans le cas du projet de loi qui est
devant nous. Vous nous invitez à faire des efforts additionnels en
matière environnementale, parce que nous sommes dans des domaines
très techniques, scientifiques, qui font appel à plusieurs
notions, pour produire un document explicatif qui sous-tend notre logique
réglementaire. Je pense qu'à cause de la complexité du
domaine vous avez raison de le demander au ministère de l'Environnement.
Ce que je dis, c'est que nous avons fait un pas en vous produisant les
règlements. Je pense qu'il serait souhaitable que nous vous produisions
également la logique qui sous-tend toute la réflexion qui est
faite à l'interne, au ministère de l'Environnement du
Québec, et nous vous remercions d'avoir soulevé ce point. C'est
tout pour l'instant, M. le Président.
M. Gosselin: Merci.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie, au nom de l'Opposition officielle.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je me réjouis
d'avoir proposé au ministre de l'Environnement d'inviter les
représentants des départements de santé communautaire,
parce que leur mémoire est rempli de bonnes suggestions, de commentaires
pertinents, surtout si on se rend compte qu'ils ont eu à peine quatre ou
cinq jours pour préparer leur mémoire. J'espère que le
ministre va donner des directives bien claires dans son ministère pour
que les suggestions qui sont rattachées au mode de fonctionnement des
consultations, ce soit modifié le plus tôt possible. À cet
égard, j'aimerais aussi, M. le Président, que le ministre
dépose à la commission les textes de projets de règlement.
Il y en a un, deux ou trois?
Une voix: II y en a un, un seul, oui.
M. Lazure: Un seul à date? Il va y en avoir combien?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, selon le nombre de
suggestions positives qui nous seront faites, s'il y a moyen de bonifier le
projet de règlement, nous le bonifierons, mais pour le moment le
ministère a préparé un projet de règlement qu'il a
fait parvenir aux parties. On s'excuse, M. le député de
l'Opposition.
M. Lazure: On n'en a pas eu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On plaide coupable et on plaidera
sur la sentence tantôt.
M. Lazure: On est encore plus mal partagés que vous, chers
collègues médecins. L'Opposition va...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est un oubli impardonnable,
docteur.
M. Lazure: Merci.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et une copie pour M. Libman
également.
M. Lazure: Bon. Je vais réagir à certaines des
suggestions. D'abord, juste une autre remarque préliminaire et j'en
viens ensuite aux suggestions. Le ministre nous parle encore d'un de ses
prédécesseurs qui aurait dit en 1983: II ne
faut pas renseigner le public. Mais je lui donne une
référence encore plus récente que ça. C'est en 1989
que le président du Bureau d'audiences publiques, le BAPE, le bon Dr
Goldbloom...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous faites de la politique,
là.
M. Lazure: Non, je vous mets à date, parce que c'est en
1989 que le Dr Goldbloom, exministre libéral, avait dit publiquement: II
ne faut pas donner trop de renseignements à la population en
matière d'environnement; il ne faut pas l'inquiéter.
Heureusement, sa collègue, à l'époque, l'a
congédié de façon assez radicale, assez rapide.
Ceci étant dit, revenons aux bonnes suggestions des
départements de santé communautaire. La question de ce qui doit
être considéré comme déchets dangereux, qui est
soulevée par les DSC, les sols contaminés, je pense que c'est
tout à fait pertinent et il faudrait, à cet égard, qu'on
puisse augmenter le nombre des substances qui sont assujetties au
règlement sur les déchets dangereux.
Maintenant, les sites et les usines aussi, nous pensons que les
départements de santé communautaire ont tout à fait
raison, il faudrait que ce soit soumis aux examens publics. L'obligation du
ministre d'aviser les autorités médicales, ça me
paraît fondamental, parce qu'en réponse à des questions
à l'Assemblée nationale, souvent, le ministre - c'est un peu
confus - dit: Ce n'est pas à nous de faire ça; c'est aux
autorités médicales à faire ça. Si le ministre,
dans la loi actuelle - et il faut le faire, puisqu'il s'agit d'une nouvelle
loi; il faut nettement que le ministre ait l'obligation de déclarer aux
départements de santé communautaire, je dirais aux
autorités médicales et aux autorités municipales, ces
situations-là - si ça avait existé dans la loi actuelle,
le ministre aurait été saisi, par exemple, du rapport de
caractérisation qui avait été commandé par la
Défense nationale, et que son ministère avait depuis janvier
dernier, sur les sites contaminés au plomb dans l'est de Montréal
et lequel rapport n'a pas été communiqué au
département de santé communautaire à venir jusqu'à
ces jours derniers. Le ministre, apparemment, n'était pas au courant de
ce rapport-là. Apparemment. Mais si la loi lui faisait obligation de le
communiquer, à plus forte raison, ses fonctionnaires se sentiraient
obligés de le communiquer à lui. Alors, on rendrait service au
ministre si on lui donnait cette obligation-là.
Les nappes phréatiques. Il va falloir trouver une façon
d'inclure les nappes phréatiques dans l'objet de ces nouvelles
obligations. Quant aux nonnes qui semblent vouloir être visées
dans le projet de règlement qu'on n'a pas encore étudié -
on va le regarder - celles qui touchent le plomb, ça saute aux yeux, je
ne sais pas si le ministre avait vu ce changement-là, mais ça
paraît complètement contraire aux tendances actuelles. Dr Gosselin
nous l'a dit tantôt, la tendance actuelle est non pas d'augmenter la
quantité de plomb, mais de diminuer la quantité au-delà de
laquelle ça devient dangereux.
Sur la question du fonds d'assurance, le ministre répond: Oui, il
y a déjà un début avec le fonds
fédéral-provincial. Mais le fonds
fédéral-provincial pour la décontamination des sites
orphelins, ce n'est pas ce dont parlent les départements de santé
communautaire. C'est autre chose. Le fonds fédéral-provincial,
c'est notre argent, l'argent des contribuables, ça. (12 h 45)
Alors, le fonds d'assurance qui est proposé par les DSC, c'est
plutôt des fonds perçus auprès des entreprises qui sont
susceptibles de polluer l'environnement. Et il me paraît qu'il faut
vraiment introduire ce principe dans la loi, même si ça doit
retarder l'adoption du projet de loi. De toute façon, on sait
maintenant, par les journaux de ce matin, que le ministre va avoir de la
misère à faire adopter son projet de loi au Conseil des
ministres. Le principe n'est pas accepté encore par l'ensemble du
Conseil des ministres. Alors, on peut lui suggérer, comme vous le
faites, les départements de santé communautaire, d'introduire le
mécanisme d'un fonds d'assurance et des sommes d'argent perçues
auprès des entreprises qui sont polluantes pour l'environnement. Sinon,
bien, ce sont les fonds publics qui seront toujours en cause et, quand un
gouvernement ne met pas la priorité véritable sur
l'environnement, ces fonds publics se font attendre.
Alors, M. le Président, je crois que les représentants des
départements de santé communautaire nous présentent un
mémoire que l'Opposition serait prête à endosser presque
intégralement. Nous pensons que les autorités de la santé
doivent être constamment impliquées. Le ministre disait
tantôt: Nous collaborons avec les départements de santé
communautaire dans les cas de crise. C'est vrai et c'est eux, finalement, qui
jouent un grand rôle dans ces situations de crise, mais il va falloir que
ces experts - ils en font la preuve ce matin - soient consultés beaucoup
plus régulièrement par le ministère de l'Environnement. Il
va falloir que le ministre fasse un gros travail auprès de ses
fonctionnaires pour qu'arrête cette division entre Environnement d'un
côté et Santé de l'autre côté. Il y a encore
des vieilles batailles de clocher qui se font depuis des années entre
les ministères, entre les fonctionnaires de ces deux ministères.
Je pense que le pont idéal - ils ont fait leurs preuves maintenant,
depuis quelques années -pour faire rejoindre ces deux
ministères-là, ce sont vraiment les départements de
santé communautaire. Moi, je veux remercier les représentants des
départements de santé communautaire et les féliciter pour
leur excellent mémoire. Merci, M. le Président.
Juste une petite... Il me reste encore du temps. L'article 31. 51,
à la page 5 du mémoire: Le règlement devrait
déterminer les activités dont l'exercice est susceptible de
contaminer le sol. Je n'ai pas entendu le ministre réagir à
ça. Ça me paraît bien important. Moi, j'endosse ça.
Cet élargissement qui est proposé, est-ce que le ministre est
sympathique à cette idée? Même chose pour l'article 10,
toujours à la même page, ajouter "ou une municipalité". Ce
sont deux ajouts très ponctuels qui m'apparaissent importants. Est-ce
que le ministre pourrait... Je lui donne une partie de mon temps pour
réagir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est trop de
générosité. J'ai déjà réagi quant
à l'article 10 en vous indiquant qu'au premier abord, il semble s'agir
d'une proposition intéressante. Quant à l'article 31. 51b, vous
avez une réflexion à savoir si vous déterminez les
activités dont l'exercice est susceptible de contaminer le sol ou si
vous fixez des normes de contamination du sol, quelles que soient les
activités qui y sont conduites. Votre recherchiste m'indique...
M. Gosselin: M. le Président, là-dessus, c'est tout
simplement que l'article actuel dit: Des activités qui contaminent le
sol. Ça nous semble un peu présomptueux de déterminer
qu'une activité contamine directement, à tout moment et en tout
temps le sol. Alors, on proposerait tout simplement de dire: Est susceptible
de.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez! Est-ce que vous voulez
répéter la fin, s'il vous plaît? Vous proposeriez...
M. Gosselin: C'est que la formulation actuelle, si je ne me
trompe pas, dit: Qui contamine le sol.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dont l'exercice contamine le
sol.
M. Gosselin: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O. K.
M. Gosselin: Alors, si une entreprise se comporte bien et fait
attention, elle ne contaminera pas nécessairement le sol.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O. K.
M. Gosselin: C'était tout simplement...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.
M. Gosselin:... dans ce sens-là.
M. Lazure: Elle contamine, mais est susceptible de contaminer,
finalement, les deux.
M. Gosselin: Bien sûr.
Le Président (M. Garon): Alors, vous avez
terminé.
M. Lazure: J'ai terminé, M. le Président.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'ailleurs, peut-être une
précision à l'article 31. 51. Le règlement comme tel, il y
a un ajustement à faire entre la loi et le règlement parce que le
règlement, à son article 3, dit: Pour les fins de l'application
du deuxième alinéa de l'article 31. Les activités
suivantes sont considérées comme susceptibles de contaminer le
sol. Il y a peut-être un ajustement, une précision à
apporter sur le plan de la rédaction.
M. Lazure: En fait, juste une question, M. le Président.
Dans cette optique de "susceptible de", je demande au ministre et aux
représentants des départements de santé communautaire
peut-être de réagir. Est-ce qu'une accumulation de pneus, genre
Saint-Amable ou Franklin, ça peut devenir quelque chose susceptible de
contaminer? Il paraîtrait que oui.
M. Gosselin: L'expérience du dernier incendie a
montré que ça contamine le sol quand ça brûle, oui.
Ça me semble une évidence.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dès qu'ils sont
déposés sur le sol, sans être l'objet d'un incendie, le
ministère n'a pas découvert de contamination ni du sol, ni de la
nappe phréatique. À partir du moment où vous avez un
incendie et qu'il se dégage, par le procédé de la
pyrolyse, des huiles qui sont rejetées sur le sol, il y a contamination
du sol et, si vous êtes dans un endroit qui est propice à la
contamination de la nappe phréatique, vous aurez également une
contamination de la nappe phréatique.
M. Gosselin: Si je peux me permettre, je veux rappeler que le
règlement réglemente les activités et non pas les objets.
si on dit que l'activité qui consiste à stocker des pneus est
susceptible de contaminer le sol à cause d'une situation, ça
devrait être couvert, à ce moment-là.
Le Président (M. Garon): M. le député de
D'Arcy-McGee.
M. Libman: J'aurais une question à poser au Dr Gosselin.
Sur le détail de fixer un plafond sur les montants accordés dans
la loi pour les infractions commises, et particulièrement contre une
infraction subséquente, quels sont vos commentaires là-dessus,
sur le fait de fixer un plafond pour le montant?
M. Gosselin: Je pense que de fixer un
plafond peut ne pas respecter la capacité d'une entreprise de
payer une amende. Dans ce sens-là, c'est un peu se tirer dans le pied
que de fixer un plafond. Il y a peut-être des considérations dont
je ne suis pas conscient qui amènent à fixer ça, c'est
peut-être des habitudes. Je répète que je n'ai pas une
confiance très grande dans les amendes et dans la police, c'est
plutôt dans un mouvement de société qui vise à faire
payer aux entreprises le coût réel que je trouve une solution de
ce problème-là.
M. Lazure: m. le président, pourquoi le ministre
change-t-il la norme sur le plomb dans sa nouvelle liste? il met 500
milligrammes par 1 kilo.
Le Président (M. Garon): Votre question s'adresse à
qui?
M. Lazure: Au ministre.
Le Président (M. Garon): M. le ministre, vous avez la
parole.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'explication qu'on me donne,
à partir de la Direction des substances dangereuses du ministère
de l'Environnement, on dit: Norme pour le plomb: Nous avons modifié la
norme suite à l'expérience de la Balmet et suite aux conclusions
de la commission royale d'enquête sur le plomb qui fixe la norme à
500 parties par million. D'ailleurs, le DSC du Haut-Richelieu et le Centre de
toxicologie du Québec sont en faveur de cette modification.
M. Gosselin: Je peux vous dire que d'autres DSC
présentement touchés par de telles contaminations ne sont pas en
faveur de ça.
M. Lazure: Ça prendrait peut-être d'autres
consultations.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est pour ça que la
commission tient des consultations.
M. Lazure: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous lis la note que la
Direction des substances dangereuses m'a communiquée.
J'aurais peut-être une question, justement, qui touche le
fonctionnement de divers DSC. On sait que les DSC fonctionnent de façon
autonome, si je peux utiliser l'expression. Dans le cas de l'expérience
vécue à la Balmet à Saint-Jean-sur-Richelieu, nous avons,
au ministère de l'Environnement, procédé à la
caractérisation de l'échantillonnage, etc., et, pendant que nous
procédions à cette caractérisation et à cet
échantillonnage, le DSC de Saint-Jean-sur-Richelieu a
procédé à des tests de sang qui ont
révélé, d'ailleurs, des taux de plombémie assez
élevés chez les enfants. C'est une expérience, on ne peut
jamais dire identique, mais qui a affaire à la même substance.
Dans l'est de Montréal, le DSC demande au ministère de
l'Environnement de procéder à de l'échantillonnage de
terrain, il s'agit du DSC Hochelaga-Maisonneuve, dans ce cas-là. Il
décide d'attendre le résultat des analyses du ministère de
l'Environnement avant de procéder aux prises de sang comme telles chez
des clientèles qui sont plus à risque. Je ne sais pas si vous
connaissez suffisamment bien les éléments contenus aux deux
dossiers pour expliquer des décisions qui peuvent apparaître, qui
ne le sont peut-être pas, mais qui peuvent apparaître divergentes
à quelqu'un qui n'est pas médecin.
M. Gosselin: II peut y avoir quelques raisons. La
première, c'est la proximité avec les terrains contaminés.
Je pense qu'à Saint-Jean c'était évident qu'il y avait
proximité immédiate, alors que ce n'est pas évident
à Montréal-Est. L'autre chose, c'est la durée
d'intoxication éventuelle. À Montréal-Est, on ne peut pas
dire que ce soit une urgence, non plus. Ça fait probablement au-dessus
de 10 ans que la contamination est arrêtée, si mes informations
sont exactes, Balast Canada Metal. Alors, on peut réagir
différemment qu'avec une entreprise où il y a plein d'enfants et
que ça date de deux ans. Le troisième, je pense que c'est le
contexte électoral qui peut amener à des décisions
différentes pour des raisons politiques.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): En fonction des DSC?
M. Gosselin: en fonction du ministère de la santé
qui, je vous le rappelle, était impliqué dans ce
dossier-là, aussi, et qui peut suggérer aux dsc de prendre
certaines décisions plus préventives.
M. Lazure: M. le Président...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais je maintiens la
question, là, moi. Vous me dites que le DSC, parce que c'est important
comme décision - je me place un petit peu dans la position,
peut-être, de façon théorique, d'un parent qui demeurerait
à proximité ou qui aurait un enfant qui fréquenterait
l'école, que ce soit à Saint-Jean-sur-Richelieu ou que ce soit
dans l'est de Montréal - que la décision médicale serait
différente si vous étiez en campagne électorale ou si vous
n'étiez pas en campagne électorale...
M. Gosselin: Non, la décision va être la même,
mais la rapidité d'application de la prise de sang pourra être
différente. C'est en ce sens qu'à Saint-Jean-sur-Richelieu,
étant donné qu'on était en pleine campagne
électorale, on a décidé de procéder
immédiatement, quitte à élargir les
zones d'investigation en cours de route, ce qu'on a fait. Alors
qu'à Montréal-Est on pourra se retrouver à
déterminer, d'ici quelques semaines, la grandeur des zones
d'investigation, suite aux résultats qu'il y a dans le sol.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que vous me dites, et
corrigez-moi si ce n'est pas exact, j'interprète a contrario vos
paroles, si nous étions en campagne électorale, le DSC
Hochela-ga-Maisonneuve procéderait à des prises de sang
présentement dans l'est de Montréal?
M. Gosselin: M. le ministre, je pense que ce n'est pas... Ce que
je vous ai dit tout à l'heure, tout simplement, c'est qu'il n'y a pas
une urgence à procéder à ça, ça peut
attendre quelques jours ou quelques semaines, afin de faire une bonne
enquête épidémiologique, c'est le cas, et que, tout
simplement, il a pu y avoir de ces éléments-là, comme
troisième facteur possible.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que vous me dites, c'est que,
médicalement, vous ne trouviez pas d'urgence, ni à Saint-Jean, ni
dans l'est de Montréal.
M. Gosselin: Je n'ai pas dit ça du tout.
M. Paradis (Brome-Missisquoi)' J'essaie de
déterminer...
M. Gosselin: Je vous ai dit, tout simplement, que, pour
préparer un plan d'enquête épidémiologique, on peut
prendre le temps d'avoir des données de sols, près des
résidences, pour essayer d'évaluer le risque et quelles
résidences sont à risque, donc, déterminer chez qui on va
faire des prélèvements, à Montréal-Est. C'est
ça qui est en train de se faire à l'heure actuelle.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais, moi, j'essaie de
décoder une de vos réponses, et je ne veux pas, là, vous
faire dire des choses que vous n'avez pas dites, ni prêter d'intention,
je tente de bien comprendre ce que vous nous dites, à cette commission
parlementaire. Si j'ai soulevé la question, comme ministre, c'est parce
que la réaction m'est apparue de loin, et sans être médecin
moi-même, différente dans le cas du DSC Saint-Jean-sur-Richelieu
et dans le cas du DSC Hochelaga-Maisonneuve. Parce qu'à
Saint-Jean-sur-Richelieu on a décidé de procéder sans
attendre les résultats de caractérisation et
d'échantillonnage du ministère de l'Environnement du
Québec, on a décidé de prendre des tests de sang chez les
enfants, qui ont révélé des taux de plombémie, et
on a décidé d'agir de façon, ce qui m'est apparu, urgente.
Dans le cas de Montréal-Est, qu'est-ce qui justifie, ou qui semble
justifier ce qui m'apparaît être une procédure
différente, c'est-à-dire que, dans ce cas-là, on attend
que le ministère de l'Environnement ait terminé
l'échantillonnage et la caractérisation avant de procéder?
Moi, juste comme député, comme humain, il m'apparaît que la
première préoccupation, c'est important de savoir si les terrains
sont contaminés. C'est également plus important de savoir, dans
un premier temps, et le plus rapidement possible, si les enfants ont du plomb
dans le sang. Il me semble que c'est la priorité des priorités
dans ces circonstances-là.
M. Gosselin: Ça fait référence, M. le
ministre, tout simplement, au fait que le plomb s'absorbe principalement chez
les enfants qui sont exposés à des poussières et qui se
mettent de la terre dans la bouche en jouant sur des sols. C'est le mode
principal. Dans la situation de la Balmet, on avait, directement à
côté, des enfants qui jouaient sur des terrains contaminés
et on pouvait déterminer d'emblée que ces enfants-là
étaient probablement contaminés, à cause
d'expériences similaires vécues ailleurs. Donc, on a pu
procéder directement aux prises de sang.
Je vous rappelle qu'il s'agit d'une intoxication chronique, suite
à des expositions sur de longues durées. Alors, tout ce que j'ai
dit et qui vous a fait sursauter, c'est qu'un délai de quelques jours ou
de quelques semaines ne changera pas beaucoup de choses au dossier et qu'il
peut être normal, en dehors d'un contexte électoral, de prendre un
peu plus de temps pour prendre la décision. C'est ça que je vous
ai dit comme facteur possible de décision. Je ne le sais pas si c'a
joué, je n'étais pas là. Je vous ai dit: comme facteur
possible, ça peut très bien jouer. Il ne faut pas être
naïf. Il y a beaucoup d'examens qui peuvent se décider parce qu'il
y a une pression politique. Ça se fart couramment. Je ne vous apprends
rien de nouveau ce matin. Je ne pense pas.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: M. le Président, j'ai écouté les
questions du ministre et les réponses du représentant des
départements de santé communautaire et je comprends très
bien les réponses. Le ministre a un mauvais départ quand il dit:
Les départements de santé communautaire sont complètement
autonomes. Ce n'est pas exact. Les départements de santé
communautaire sont d'abord dans un hôpital et un hôpital, ça
reçoit son budget du ministère de la Santé et des Services
sociaux et ça a un lien de subordination au ministère de la
Santé et des Services sociaux qui est tout à fait normal. Alors,
c'est bien évident qu'en campagne électorale le ou la ministre de
la Santé, s'il y a une situation explosive comme la Balmet à
Saint-Jean, c'est bien évident qu'on puisse supposer que le ou la
ministre de la Santé intervienne directement ou indirectement
auprès du DSC et dise: Vite, vite, des examens. Ça, ça me
paraît tout à fait normal et je n'ai rien contre ça. Mais
en dehors des campagnes électorales, il reste que la procédure
que semble vouloir suivre le département de santé communautaire
Maisonneuve-Rosemont, à savoir que les examens du sang des enfants vont
se faire aussitôt que les examens du sol seront faits, ça me
paraît assez logique. Ça me paraît assez logique.
Maintenant, si le ministre pense que c'est urgent plus que ça, il
devrait accélérer son processus pour l'échantillonnage des
sols. Il ne nous a pas dit hier... Je lui ai posé la question hier
à l'Assemblée nationale et il n'a pas répondu. Combien de
temps il va mettre encore pour échantillonner les sols à
Montréal-Est contaminés au plomb? Ça peut se faire dans
dix jours, ça, s'il veut agir rapidement. Et aussitôt que les
résultats seront... Oui, dix jours, dix jours. Et aussitôt que
ça sera fait, aussitôt que ça sera fait... Dix jours, deux
semaines au maximum, selon les experts que j'ai consultés, M. le
ministre. J'en ai moi aussi des experts.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dites-moi qui, parce que les gens
chez nous me disent que c'est plus long que ça.
M. Lazure: Mais vos gens chez vous, ils sont mal branchés
parce que ça se fait en deux semaines. Ça se fait en deux
semaines. Et aussitôt que vous aurez les résultats au bout de deux
semaines, si vous les communiquez au département de santé
communautaire, lui pourra procéder aux analyses de sang chez les enfants
ou chez les personnes appropriées, mais encore faut-il que votre
ministère mette la chose en branle, ce qui n'est pas fait actuellement.
Si, d'autre part, vous jugez que c'est plus utile de faire des examens sanguins
immédiatement, vous n'avez qu'à parler à votre
collègue de la Santé et il interviendra auprès du DSC
Maisonneuve-Rosemont pour que les examens sanguins se fassent tout de suite.
Mais ce qui est urgent, c'est que les échantillonnages se fassent tout
de suite et ça, ça relève de vous.
Le Président (M. Garon): Vous avez terminé votre
intervention?
M. Lazure: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Garon): Alors, je donnerai la parole
à M. Gosselin pour les mots de conclusion puisque le...
M. Gosselin: Je vous remercie. Je suis content que les diverses
propositions qu'on a faites puissent être retenues en tout ou en partie.
J'aimerais vous rappeler, en terminant, un point qui m'a semblé
échapper à votre filtre, c'est celui de la définition de
sols contaminés, qu'il soit possible de les déclarer comme
déchets dangereux dans certaines circonstances, ce qui me semble
important et l'outil existe déjà, c'est de le passer aux
critères prévus à l'annexe 2 du règlement. Il
s'agirait de prévoir une procédure dans le projet de loi actuel
qui permette ça. Merci.
Le Président (M. Garon): M. le ministre, en
conclusion.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
tiens à remercier le Comité de santé environnementale des
DSC du Québec et le Dr Gosselin pour sa présentation. Comme je
l'ai indiqué tantôt, des recommandations déjà vont
être retenues. Maintenant, quant à l'affirmation qui a
soulevé l'échange en fin de débat, je ne suis pas
satisfait des réponses que j'ai obtenues. Je tiens à l'indiquer.
Si on peut avoir la chance de continuer notre discussion... Je suis très
inquiet, même.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Je veux remercier le Dr Gosselin et son groupe pour
l'excellent travail qu'ils ont fait en si peu de temps. J'espère que le
ministre va donner une suite favorable aux suggestions qui sont contenues dans
le mémoire. Merci.
Le Président (M. Garon): Je vous remercie. La commission
parlementaire de l'aménagement et des équipements est suspendue
jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 5)
(Reprise à 15 h 5)
Le Président (M. Garon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Alors, je déclare la séance de la commission de
l'aménagement et des équipements ouverte. Je rappelle le mandat
de la commission qui est d'étudier et de procéder à des
consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de
loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. Comme
groupe, nous devons entendre aujourd'hui à 15 heures la Fondation
québécoise en environnement, représentée ici par M.
Louis Archambault, président du comité exécutif. C'est
bien ça? Alors, je vais vous demander de présenter les gens qui
vous accompagnent et en vous disant au début que les règles du
jeu, au fond, c'est qu'on a une heure, entre 15 heures et 16 heures: 20 minutes
pour faire votre exposé, 20 minutes pour la partie ministérielle,
20 pour l'Opposition officielle. Maintenant, s'il arrive que vous preniez moins
que vos 20 minutes, ça va être réparti également
de chaque côté de la table. Si vous prenez plus, bien, tout
le temps que vous allez prendre en plus, c'est du temps de moins qu'aura le
ministre ou le critique de l'Opposition officielle. Théoriquement, si
vous allez à 30 minutes, il leur restera 15 minutes chacun et, si vous
prenez 60 minutes, il ne leur restera plus rien. Alors, c'est vous qui
décidez parce que c'est vous qu'on entend. Alors, c'est vous qui
décidez.
Fondation québécoise en
environnement
M. Archambault (Louis): Bon, bien, on va essayer de faire en
sorte que vous puissiez poser des questions. Mon nom est Louis Archambault. Je
suis président du comité exécutif de la Fondation
québécoise en environnement. Je suis accompagné à
ma gauche par Me Nathalie Pouliot, qui est attachée chez Martineau,
Walker; à ma droite, M. André Prévost, qui est chez
McCarthy, Tétreault, et, à l'extrême droite, Me Robert
Dubé qui est notre directeur général à la Fondation
québécoise en environnement.
Le mémoire. Au départ, la Fondation est un organisme qui
regroupe à l'heure actuelle au Québec 40 000 membres et amis. Ce
mémoire-là a été rédigé sous la
responsabilité du comité exécutif de même que du
comité de droit en environnement de la Fondation dont les personnes ici
présentes font partie. Je vais lire intégralement le
mémoire, comme il n'a pas été déposé
préalablement, par manque de temps essentiellement. Par contre, le
mémoire est relativement court. Je crois qu'on pourrait faire ça
facilement dans une dizaine de minutes.
Alors, de par sa propre mission, c'est d'un oeil très positif que
la Fondation québécoise en environnement constate la venue du
projet de loi 65 intitulé Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement, lequel a été récemment
déposé par le ministre de l'Environnement, M. Pierre Paradis.
Forte des questions environnementales, la Fondation estime que le projet de loi
65 saura répondre aux nouvelles attentes de la société,
cette dernière ayant dû constater souvent à ses propres
dépens l'urgence à se préoccuper sérieusement de la
sauvegarde de l'environnement. La nouvelle philosophie qui sous-tend le projet
de loi 65 demeure elle aussi fort louable. En effet, le principe de
pollueur-payeur s'intégrera désormais davantage à la Loi
sur la qualité de l'environnement.
Les terrains contaminés se retrouvant sur le territoire
québécois sont en nombre fort important. Un inventaire
récent non exhaustif laisse entendre qu'il en existerait environ 350,
ceci, bien sûr, en ne tenant compte que des terrains où la
contamination est aujourd'hui connue. Étant donné que les
coûts reliés à la décontamination de ces sites
représentent des sommes considérables, il devient
nécessaire de prévoir des mesures visant à réduire
le nombre de terrains contaminés et à prévenir
l'accroissement en nombre de ces derniers. Puisque le projet de loi 65
s'inscrit dans la foulée de ces nouveaux objectifs, la Fondation,
soucieuse de préserver la santé écologique de notre
environnement, se déclare en accord avec l'initiative du ministre de
l'Environnement. Pour ces raisons, la Fondation est fière de participer
à la tenue de la présente commission parlementaire et, par la
même occasion, de transmettre aux artisans du projet de loi 65 ses vues
et commentaires.
Au niveau des ressources. Les nouveaux pouvoirs octroyés au
ministre s'exerceront à partir des mécanismes d'application
prévus au sein même du projet de loi 65. La Fondation
précise à cet égard qu'il sera impératif de
s'assurer d'une application rigoureuse de ces nouvelles dispositions afin d'en
tirer le maximum d'effets bénéfiques. À cette fin, il
faudra nécessairement compter sur l'appui de ressources
financières additionnelles, lesquelles permettront une application
expéditive et rigoureuse de la loi visant ainsi à lui donner la
crédibilité qui lui revient. De plus, le ministère devra
s'adjoindre le personnel additionnel nécessaire en vue de
répondre aux attentes "initiées" par le projet de loi. Ceci est
un point fort important pour la Fondation.
Au niveau des outils, on pense à la création d'un fonds de
décontamination. L'impact financier pouvant se rattacher aux diverses
ordonnances demeure certainement considérable. En ce sens, il est
souhaitable d'établir un mécanisme par le biais duquel il serait
possible d'assurer financièrement la viabilité des mesures
imposées par le ministre. Les travaux de décontamination, de
restauration d'un site ou d'un sol ainsi que les diverses études de
caractérisation peuvent s'avérer fort coûteux. Il est donc
souhaitable d'établir un mécanisme par lequel le fardeau
financier associé à la restauration générale de
notre environnement puisse être partagé entre toutes les
entités concernées. La Fondation propose ainsi la création
et la mise sur pied d'un fonds de décontamination.
Le but de ce dernier viserait essentiellement à éviter que
les ordonnances ne deviennent futiles en raison de l'inapplicabilité de
celles-ci, faute de fonds suffisants. Il faciliterait ainsi la rencontre des
objectifs visés par le projet de loi 65 en évitant de se heurter
à des situations financières précaires.
Divers modes de financement peuvent être envisagés.
À titre d'exemple, il serait possible d'articuler le financement du
fonds à partir du modèle utilisé par la Commission de la
santé et de la sécurité du travail. En effet, cette
dernière a constitué un fonds d'indemnisation pour les victimes
de lésions professionnelles et d'accidents du travail. On pourrait
s'inspirer également du fonds d'indemnisation des agences de voyages
sous la responsabilité de l'Office de la protection du consommateur. La
mécanique soutenant ces deux modes de financement pourrait fort bien
servir de fondement à la création d'un fonds de
décontamination. L'utilisation d'un tel fonds de décontamination
viserait à assurer la réalisation des travaux dans la mesure
où, à titre d'exemple, une des situations suivantes se
présentait. Un, l'auteur de la contamination demeure impossible à
retracer. Deux, le propriétaire ou toute personne visée par une
ordonnance se trouve dans l'impossibilité de procéder aux travaux
de restauration, faute de ressources financières suffisantes.
Advenant sa constitution, il serait impératif de prévoir
que les sommes versées dans ce fonds ne soient pas éventuellement
transférées au fonds consolidé de la province.
L'idée est de s'assurer que le fonds puisse demeurer une entité
distincte, de manière à ce que son utilisation ne serve
qu'à atteindre les objectifs recherchés lors de sa
création.
Cautionnement. La Fondation propose d'inclure au projet de loi un autre
outil visant à obliger les particuliers ou les corporations ayant
l'intention d'exercer des activités industrielles susceptibles
d'engendrer la contamination du sol à verser une somme d'argent à
titre de cautionnement. Ce dernier cautionnement pourrait aider à
défrayer les coûts afférents à la decontamination du
sol dans l'éventualité où celle-ci s'imposerait. À
cette fin, la Fondation suggère que les modalités de paiement
relatives à un tel cautionnement se déterminent à partir
des règlements séparant chacun des secteurs d'activité
industrielle selon leur potentiel de contamination dans l'environnement. Il y a
un parallèle évident avec la CSST, encore ici. Signalons
l'existence d'un mécanisme analogue prévu à l'article 55
de la Loi sur la qualité de l'environnement qui traite du système
de garanties exigées à l'égard de la gestion des
déchets solides.
Quant à la rétroactivité de certains articles, soit
31.42 et 31.43, l'application rétroactive de ces dispositions
soulève certaines difficultés qui préoccupent la
Fondation. D'abord, en allant chercher les responsabilités d'une
personne ou d'une municipalité pour un geste commis anté-rieument
à la sanction du projet de loi 65, on risque de punir une personne pour
des gestes commis il y a plusieurs années alors qu'ils n'étaient
pas illégaux. En d'autres termes, le ministre aurait le pouvoir de faire
subir à une entité les conséquences pour des gestes
posés plusieurs années auparavant, alors que la
collectivité les tolérait. Ceci peut apparaître fort
discutable en ce qu'on assortit d'effets punitifs des gestes qui, au
départ, n'en comportaient aucun. Cette application rétroactive de
la loi est contraire à l'article 37 de la Charte
québécoise des droits et libertés de la personne qui
stipule que l'on ne peut accuser une personne pour une action qui, au moment
où elle a été commise, ne constituait pas une violation de
la loi. De plus, les dispositions à l'étude permettent de retenir
la responsabilité d'une personne par la simple voie administrative. Le
ministre pourrait ordonner à un individu de procéder à la
décontamination d'un site, ayant lui-même établi ses
responsabilités, sans que le présumé responsable de la
contamination ait eu droit à un procès. La Fondation voit poindre
des difficultés puisque cette situation amène une
déclaration de culpabilité sans même la tenue d'un
procès, pouvant ainsi contrevenir à l'article 23 de la Charte
québécoise des droits et libertés de la personne. Il
semble que de telles dispositions battent en brèche sérieusement
le principe de la présomption d'innocence. (15 h 15)
De plus, le présumé responsable de la contamination
pourrait faire l'objet simultanément d'une ordonnance en vertu des
articles 31.42 et 31.43, ainsi que de poursuites en vertu de l'article 20 de la
Loi sur la qualité de l'environnement. Si tel était le cas, il
pourrait être amené à s'auto-incriminer en voulant faire
des représentations, à rencontre de l'ordonnance, tel que le
prévoit l'article 31.44 du projet de loi. Cette situation serait
contraire à l'article 33 de la Charte québécoise des
droits et libertés de la personne, lequel se lit ainsi:
"Présomption d'innocence. Tout accusé est présumé
innocent jusqu'à ce que la preuve de sa culpabilité ait
été établie suivant la loi."
De fait, le projet de loi 65 autorise le ministre à exercer deux
fonctions simultanément, à savoir l'exercice du pouvoir
judiciaire et du pouvoir exécutif. Une telle situation présente
des difficultés d'ordre constitutionnel, puisqu'il en découle,
peut-être, une violation de l'article 96 de la Loi constitutionnelle de
1867. Cette question risque d'être soulevée par d'éventuels
auteurs de pollution, ce qui aurait pour effet de stériliser, pour
quelques années, ces dispositions parmi les plus importantes du projet
de loi 65. Il faut retenir, dans les quelques lignes qui
précèdent, en fait, dans le dernier paragraphe, la
préoccupation majeure de la Fondation, qui croit que, possiblement,
certains auteurs de pollution pourraient, éventuellement, s'en tirer au
point de vue légal.
Les articles 31.42 et 31.43 du projet de loi prévoient que le
ministre peut enjoindre à une personne d'exécuter les travaux de
décontamination sur un site, propriété d'un autre
individu. Afin de prévenir l'avènement de difficultés dans
l'éventualité où la personne à qui appartient le
site visé par l'ordonnance entraverait la réalisation des travaux
ordonnés par le ministre, la Fondation suggère d'ajouter, au sein
du projet de loi, une disposition constitutive d'infraction. Cette disposition
aurait pour effet d'interdire à quiconque de nuire ou d'empêcher
l'exécution des travaux visés par l'ordonnance. À
défaut de respecter une telle disposition, cette personne se rendrait
coupable d'une infraction à la Loi sur la qualité de
l'environnement, laquelle serait punissable d'une amende.
En ce qui concerne le voile corporatif, la Fondation propose d'envisager
l'insertion, au sein du projet de loi 65, d'une disposition visant à
prévoir le soulèvement du voile corporatif, en vue de
déterminer l'identité réelle des auteurs de la
contamination. Une telle mesure viserait à empêcher les pollueurs
de se soustraire trop facilement à leurs obligations, en invoquant cette
protection corporative. Ainsi, il pourrait être intéressant de
prévoir un mécanisme semblable à celui recevant
application en matière de faillite, lequel est prévu dans la Loi
sur les compagnies du Québec. Aux termes de cette loi, il est possible,
suivant certaines situations, de retenir la responsabilité personnelle
des administrateurs d'une compagnie; c'est le cas, notamment, en ce qui
concerne les déclarations pour salaires impayés.
En ce qui concerne l'enregistrement des ordonnances et des avis de
décontamination, l'article 118.2, de la Loi sur la qualité de
l'environnement se lit présentement comme suit: 'Toute ordonnance
émise à l'endroit du propriétaire d'un immeuble est
enregistrée contre cet immeuble. Elle est alors opposable à tout
acquéreur dont le titre est enregistré subsé-quemment et
celui-ci est tenu d'assumer les obligations imposées à l'ancien
propriétaire aux termes de l'ordonnance."
Le projet de loi propose, par le biais des articles 31.47 et 31.48, de
modifier l'article 118.2 précité, afin de permettre
l'enregistrement, non seulement des ordonnances, mais de l'avis informant le
propriétaire du sol de la présence du contaminant au bureau de la
division d'enregistrement où est situé le lot. La Fondation
estime qu'il est nécessaire, afin d'assurer au public une connaissance
sans faille de l'état de santé des sols ou des sites, de recourir
aux avantages qu'offre l'utilisation du bureau d'enregistrement, en
enregistrant à l'index des immeubles tant les ordonnances que les avis
de décontamination.
En conclusion, à l'ère du développement durable, la
collectivité est maintenant soucieuse d'entreprendre toutes les mesures
nécessaires visant à préserver son environnement et
à en sauvegarder la qualité. Pour sa part, la Fondation
québécoise en environnement, désireuse de poursuivre son
rôle d'éducation et d'information auprès du public, entend
assurer le ministre de l'Environnement de son appui et entière
collaboration afin que les nouvelles mesures mises de l'avant par les
autorités gouvernementales puissent recevoir leur plein effet.
Malgré l'aridité de la lecture, je pense qu'on est largement en
dedans de notre période de 20 minutes.
Le Président (M. Garon): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous me
permettrez de remercier, dans un premier temps, la Fondation
québécoise en environnement pour son intervention dans le
présent dossier et, également, pour l'action qu'elle mène
sur le terrain, sur le plan, entre autres, de l'éducation de la
population québécoise en matière environnementale. De les
féliciter, également pour les risques qu'ils prennent en
matière environnementale. La Fondation est connue pour une association
de gens qui n'hésitent pas à mettre de l'avant des mesures qui
peuvent sembler, parfois, risquées sur le plan environnemental, mais qui
ne risque rien n'a rien. Et la Fondation préfère l'action
à l'inaction même si, parfois, il y a des risques. Et ça
mérite d'être souligné.
Quant à votre mémoire comme tel, j'ai l'intention de
laisser la partie la plus innovatrice du mémoire pour fins de discussion
à mon adjoint parlementaire, M. Maltais, la création de fonds, le
cautionnement, etc., ce que vous ajoutez, et de discuter immédiatement
avec vous des diverses recommandations.
Rétroactivité des articles. Tout cet aspect légal
me chicote. J'ai déjà déclaré publiquement que le
projet de loi qui est devant nous touche de façon assez délicate
des aspects du droit civil, du droit de propriété, du droit
pénal, de l'application des chartes québécoise et
canadienne des droits et libertés de la personne. Maintenant, le
Procureur général du Québec a eu à émettre
des avis de conformité aux articles tels que libellés et le fait
que le comité de droit de la Fondation attire notre attention de
façon particulière sur certaines de ces dispositions, moi,
j'aimerais vous entendre de façon plus élaborée sur votre
chapitre 3 du mémoire tout en étant convaincu que, quel que soit
le libellé final qui soit retenu, il y a quelqu'un quelque part qui, un
jour, va avoir intérêt à contester l'application de la loi.
Donc, notre rôle à tous, c'est de s'assurer que l'on resserre les
filets en gardant l'équilibre de respect des chartes nécessaire
à une saine application de la loi. Je ne sais pas à qui je dois
poser la question.
M. ArchambauK: Oui, on va laisser la parole à Me
Prévost.
M. Prévost (André): Au départ, on croyait
à la Fondation qu'il est peut-être nécessaire de projeter
à l'intérieur de la société une image
crédible au niveau de l'application d'une loi. Ce qui nous
dérangeait peut-être un peu plus, c'est qu'on se disait: En
appliquant la loi de façon rétroactive et en pouvant l'appliquer
à des cas de contamination de propriétés où il n'y
a pas du tout eu de fautes au moment où ça été
fait, au moment où la société le tolérait, au
moment où la société même l'autorisait, on trouvait
que cette partie du projet de loi pouvait constituer une injustice qui pouvait
miner à la base la crédibilité même du projet de loi
et, évidemment, amener les conséquences que ça pouvait
comporter. Au niveau de la charte elle-même, il est
bien évident - et là-dessus, M. le ministre et les membres
Ici, vous savez que, tous les jours, il sort des jugements nouveaux qui
interprètent la charte, que c'est un peu un capharnaùm
actuellement. On sait que, de façon générale, ça
s'applique en matière pénale et une des difficultés qu'on
voit, c'est que si, par hypothèse, on avait une ordonnance qui
enjoignait a quelqu'un de nettoyer dans un cas où, justement, la
contamination s'est faite sans aucune faute au moment où c'était
autorisé... C'est vrai que l'infraction de ne pas respecter l'ordonnance
serait une infraction qui est venue après la loi, mais elle ferait en
sorte de pénaliser la personne qui aurait contaminé dans le
passé alors que c'était permis. À notre avis,
indirectement, cela pourrait soulever les problèmes ou l'application de
la charte quant au procès juste et équitable et au fait qu'on
veut finalement punir les gens pour vraiment une infraction qu'ils ont commise.
Alors, on pensait que ça se faisait plutôt de façon
indirecte, c'est-à-dire que c'est vrai que l'infraction viendrait
après que la loi a été passée, mais ça
toucherait quelque chose qui était antérieur à la loi
elle-même.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La rédaction de l'article 9
du projet de loi qui stipule que l'article 109 de la loi est modifié par
l'addition à la fin de l'alinéa suivant - je vous donne le temps
de le retrouver - et je cite...
M. Prévost: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ..."Ne constitue pas une
infraction, une contravention à une disposition d'un règlement
pris en vertu des paragraphes a et b de l'article 31.52" ne met pas à
l'abri justement de cet aspect rétroactif, en tout cas, en ce qui
concerne tout le côté pénal.
M. Prévost: J'ai l'impression que ça s'applique
uniquement en disant... Premièrement, je présume que c'est
l'article 31.51 qu'on a voulu mentionner...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, exact. M. Prévost:
...et non l'article 31.52.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une faute d'impression.
M. Prévost: Oui, tout à fait. Tout ce que ça
veut dire, à mon sens à moi, c'est que, même si une
activité a été déterminée comme étant
contaminante du sol, le simple fait de l'exercer n'est pas en soi une
infraction sauf que là... Ce qu'on est en train d'entrevoir et c'est ce
à quoi on réfère dans notre mémoire, c'est si on
enjoint à quelqu'un de nettoyer quelque chose qui a été
fait dans le passé alors que c'était légal, si la personne
ne se conforme pas à l'ordonnance, ça, c'est une infraction.
Donc, l'infraction est commise après que la loi a été
sanctionnée mais, par contre, elle pénalise des actes qui sont
antérieurs à la loi, c'est-à-dire au fait que le terrain
soit contaminé. Comme je vous dis, c'est pour ça que, à
mon avis, à moi, l'application de la charte se ferait de façon
indirecte mais ouvrirait des volets qui, finalement, se trouvent à
être un appendice du fait qu'on se trouve à obliger des gens
à décontaminer alors que ça avait été fait
sans faute.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): De façon pratique, s'il
fallait... Je n'exclus pas cette possibilité. Nous allons
réévaluer et réanalyser, en fonction des commentaires que
vous faites, ces articles. Ça affaiblirait d'une certaine façon
la portée du projet de loi mais, quand même, vous avez dans
d'autres chapitres de votre mémoire des recommandations à l'effet
de renforcer la portée du projet de loi après. Avant de vous
montrer favorables à l'enregistrement des ordonnances et des avis de
contamination, vous nous suggérez la création d'une infraction
additionnelle, non pas rétroactive cette fois-ci mais prospective dans
le temps, ainsi qu'une disposition qui ferait en sorte de lever le voile
corporatif et de tenir les administrateurs responsables. Je vous dis que du
côté gouvernemental nous accueillons avec ouverture ces deux
recommandations de la Fondation québécoise en environnement.
Maintenant, en ce qui concerne... Je ne sais pas si vous voulez
appliquer la règle de l'alternance, M. le Président, mais comme
j'ai indiqué que mon adjoint parlementaire interviendrait en ce qui
concerne la création d'un fonds de décontamination ainsi que le
cautionnement, moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'il le fasse tout de
suite ou, en vertu de la règle de l'alternance, M. le critique de
l'Opposition.
Le Président (M. Garon): J'aimerais mieux, si vous voulez,
que le parti ministériel prenne ses 20 minutes et, après
ça, les autres, 20 minutes parce que, quand on alterne, après
ça il y a des réponses. Ça empiète sur... On arrive
toujours tout croche..
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est toujours bon de se garder
deux ou trois minutes.
Le Président (M. Garon): Alors c'est toujours bien, je
pense, de prendre votre temps et, après ça, l'Opposition prend
son temps. De même, on n'a pas de débat sur le temps de
chacun.
M. Maltais: D'accord. Merci, M. le Président. M.
Archambault, vous apportez vraiment quelque chose de nouveau dans votre
mémoire et je pense que ça touche un point sensible, au
Québec. On n'est sans doute pas la pire mais ni
la meilleure des provinces canadiennes et même au Canada parce
qu'au niveau de la contamination les lois canadiennes et les lois
québécoises sont très larges là-dessus en ce sens
qu'il y a très peu de dispositions que ce soit au niveau des
transporteurs ou des contaminateurs de sols, que ce soit marins, routiers. On
fait figure d'enfant pauvre là-dessus à comparer, par exemple,
aux Américains de l'autre côté de la frontière. Ce
qui est intéressant dans votre suggestion, c'est que, bien sûr,
ça s'adapte vraiment au principe du pollueur-payeur. À partir de
là, est-ce que c'est envisageable, et je vous pose la question...
J'imagine que vous y avez songé un petit peu. On sait, par exemple, que
toutes les entreprises au Québec ont besoin d'un permis pour
opérer, que ce soit de l'Environnement, de la ville, de tel
différent ministère et lorsqu'on a des usines qui opèrent,
inévitablement, il y a des déchets. Il y a des déchets
connus et il y a des déchets inconnus qui arrivent en cours de route. On
a la preuve de ce qui se passe au Québec depuis 25 ans. On parlait des
BPC et on s'aperçoit que c'est les HAP qui sont dangereux. En tout cas,
toute l'histoire est là. Alors, en cours de route, on a découvert
bien des choses.
Est-ce que, d'après vous, c'est envisageable que l'ensemble des
industries de fabrication et de transport de produits dangereux puisse
être couvert par une police d'assurances? Pourquoi le Québec
deviendrait-il une compagnie d'assurance? Je pense que ce n'est pas là
son rôle mais, maintenant, il a un rôle de protecteur. Pourquoi pas
toutes les compagnies qui détiennent un permis de transformation, de qui
émanent des déchets, ne devraient-elles pas être
obligatoirement soumises à une police d'assurance-responsabilité
pour le risque de contamination? C'est évident que, là, vous
allez me dire que ça va coûter une fortune et "c'est-u" faisable,
"c'est-u" pas faisable? Je me souviens dans un domaine précis, pour
avoir été courtier d'assurances pendant 18 ans jusqu'au temps que
je suis en politique... Rappelez-vous l'ensemble des problèmes que les
commissions scolaires vivaient au Québec dans les années
soixante, soixante-dix, où il y avait tellement eu d'incendies dans les
vieilles écoles de rang qu'il n'y avait plus aucune compagnie
d'assurances au Québec qui voulait les assurer. À partir de ce
moment-là, les compagnies d'assurances québécoises, qui
sont assez innovatrices dans le domaine, avaient formé un consortium
dont le groupe Commerce était le gestionnaire. Et je me pose la question
si, aujourd'hui, l'entreprise privée ne pourrait pas, et surtout par une
fondation comme la vôtre, mousser un peu et, bien sûr, la partie du
gouvernement aussi... s'assurer que tous ceux qui font des produits
manufacturés qui ont des déchets, qui ont un risque de
contamination, en même temps que leur permis est accroché dans
l'usine, après inspection et autorisation, qu'il y ait le certificat de
responsabilité de contamina- tion. (15 h 30)
En cas de contamination, bien sûr, on n'aurait pas à courir
Pierre, Jean, Jacques, qui doit payer la facture, ce risque-là est
couvert. Est-ce que c'est envisageable, est-ce que c'est une chose à
laquelle on peut penser? Est-ce qu'il y a des coûts qui seraient
astronomiques pour les entreprises au point de leur faire fermer les portes?
Bien sûr que ça nécessiterait sans doute des entreprises un
petit peu plus sérieuses. Ça éviterait peut-être ce
qu'on appelle les fonds de cour, des gens qui, en cas de contamination,
disparaissent dans la brume. Lorsque tu as une police
d'assurance-responsabilité payée et enregistrée au
gouvernement, c'est plus facile de courir après quelqu'un de responsable
que quelqu'un de pas responsable. Peut-être qu'on pourrait regarder
ça ensemble. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
M. Archambault: En fait, je pense que, de par certaines
recommandations qui sont partie du mémoire, la Fondation est d'avis
qu'on devrait mieux encadrer, en fait, nos entreprises. Pour répondre
plus directement à une de vos questions concernant les risques au niveau
assurances, et la possibilité que les assurances ne puissent pas
être partie prenante dans ce genre de risques, je pense que ce serait
fort déplorable, dans la mesure où, à ce que je sache
à l'heure actuelle, les compagnies d'assurances couvrent à peu
près tous les risques. Et, essentiellement, je pense que c'est possible,
par le biais... On parlait de cautionnement, par exemple. Les cautionnements
peuvent être donnés, si on se réfère, par exemple,
à l'industrie de la construction, je ne sais pas si le parallèle
est tout à fait exact ou valable, mais, au niveau de l'industrie de la
construction, les cautionnements sont soit donnés en argent - c'est un
chèque visé, finalement, qui est remis au propriétaire qui
fait exécuter les travaux - ou encore c'est également un
cautionnement par assurance. Et, à ce moment-là, les assurances
prennent un risque que l'entrepreneur, par exemple, c'est de ça que je
parle à ce moment-ci, ne réalise pas ses travaux, ou qu'il
commette une faute majeure qui fait que, en fait, la compagnie d'assurances
doive débourser des sommes qui peuvent être souvent
considérables.
Je pense que les risques environnementaux sont quantifiâmes. Le
problème est que, finalement, on n'a pas nécessairement voulu
bien encadrer tout ceci pour le quantifier, dans la mesure où,
finalement, je pense qu'il va falloir faire une démarche à partir
de zéro. Parce qu'on n'a jamais considéré ça comme
étant des risques, dans notre société, et que des
spécialistes puissent déterminer l'ampleur, en fait, du
problème environnemental que constituent tels ou tels travaux et
transférer, en fait, ce jugement professionnel aux compagnies
d'assurances, qui seront en mesure d'évaluer ça de la même
façon
que d'autres sortes de risques... le cautionnement, en fait, revient
à répondre à votre question au niveau des assurances. il y
a d'autres possibilités, aussi.
M. Maltais: Je voudrais juste revenir, parce qu'il faut bien
déterminer; une caution est un montant fixe, 10 000 $, 50 000 $, 100 000
$ ou 200 000 $, alors que, dans la contamination, je pense qu'il faut couvrir
le risque "at large", parce qu'on ne connaît pas, au moment de la
couverture, les conséquences ultérieures qui seront un risque de
contamination. Moi, la caution, ça me fait peur. Vous dites: On le fait
en construction. Par exemple les résidences c'est une caution de 50 000
$, un édifice un petit peu plus haut... Parce que, lorsqu'on a un
montant fixe, on se limite. Et vous savez, il y a des avocats, votre directeur
général est avocat, et lorsqu'on se limite dans un montant on
peut toujours aller en cour, lorsqu'on est actionné en excédent
du montant, et là prouver qu'on avait rempli les exigences primaires de
la loi, même si ces exigences-là sont dépassées. Et
cette loi-là n'est pas fafte pour six mois. Je pense que c'est une loi
nouvelle pour l'avenir. Est-ce qu'on ne doit pas prendre toutes les mesures par
une police d'assurance, qu'on appelle "umbrella", en termes bien
québécois, "umbrella", parapluie, c'est sans limite, à
partir du moment où les risques de contamination, c'est dur à
évaluer, tant que ce n'est pas arrivé. Le problème, c'est
que ce n'est pas évaluable trop trop. Il y a peu de gens qui sont
capables de dire: Si on déverse tant de gallons de X sur le terrain,
ça va coûter tant pour le décontaminer. Alors, je pense
qu'il faut se munir d'une couverture étanche des deux
côtés. Et moi, en tout cas, je ne le sais pas, on est ici pour en
discuter, je préférerais de beaucoup une couverture
illimitée a un montant limité encadré dans une loi. Et
lorsqu'on aurait satisfait aux exigences de la loi, il n'y a rien... en fait,
on serait déchargés de toute responsabilité. Et ça,
je pense que ça pourrait peut-être... Vous savez, une compagnie
qui brasse des chiffres d'affaires de 200 000 000 $ ou 300 000 000 $, je ne
sais pas, moi, payer 300 000 $ d'amende ce n'est pas la mer à boire.
Alors elle va peut-être préférer se laisser aller avec une
amende que de prendre des mesures nécessaires pour lesquelles ils ne
connaissent pas l'étendue du risque. Ils ne connaissent pas
l'étendue des primes non plus. Mais, au niveau des primes, au niveau des
couvertures, je suis convaincu que les compagnies d'assurances
québécoises sont assez ouvertes maintenant pour assumer ces
risques. Ça ne serait pas une innovation internationale, ça se
fait partout dans le monde, sauf au Canada.
M. Archambault: Je pense que, en fait, on introduit le principe.
On est tout à fait en accord avec ce que vous dites. On reconnaît
qu'effectivement la caution c'est probablement limité dans le temps et
c'est limite aussi en vertu de la compréhension qu'on a du risque
environnemental que le promoteur fait peser sur l'environnement.
Maintenant, au niveau des assurances, j'ai l'impression que vous vous y
connaissez pas mal mieux que moi. Je pense effectivement que, à l'heure
actuelle, les compagnies d'assurances peuvent couvrir les risques
environnementaux. Je pense, dans une certaine mesure, qu'ils le font, sous
toute réserve. Je pense que ça peut être une voie fort
intéressante. Il va falloir, d'une façon ou d'une autre, inclure
ça dans le cycle économique. C'est notre grand problème.
Tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas un besoin, en fait, les compagnies
d'assurances ne s'impliqueront peut-être pas, et le projet de loi 65 est
un levier très important qui va faire probablement bouger des choses
très vite. J'ai l'impression qu'il y a des gens qui vont se mettre
à y réfléchir et très vite, dont les compagnies
d'assurances.
Il y a d'autres modèles aussi. Là-dessus en fait, tout
simplement, je vais résumer en disant qu'on est tout à fait
d'accord avec vous. Il y a d'autres modèles qui nous semblent fort
intéressants et fort pertinents au niveau de la création de
fonds. Et on parlait de cautionnement dans la mesure où le cautionnement
peut être intéressant pour faire en sorte que le fonds qui serait
créé, par exemple, ne soit pas asséché constamment
par les impairs de firmes qui se baseraient sur le fonds pour payer les travaux
de décontamination. Les deux modèles sont les modèles de
la CSST où, finalement, chacune des entreprises au Québec
contribue selon le risque qui est déterminé par la CSST au niveau
de la santé et sécurité au travail. On pourrait
sûrement arriver à une formule comme ça qui serait fort
intéressante. Et ça fonctionne, et c'est un modèle avec
lequel on est tous familiers ici.
Les agences de voyages. Dans le cadre de la loi sur les agences de
voyages, il y a quelque chose de similaire encore qui est fort
intéressant. C'est un modèle québécois qui
fonctionne beaucoup mieux que celui de nos voisins en Ontario. J'ai cru voir,
il y a peut-être un mois, dans les journaux que des consommateurs
ontariens auraient été lésés par la faillite d'une
agence de voyages ontarienne, alors que nous on a des mécanismes qui
fonctionnent très bien. Et on a eu des faillites d'organismes, d'agences
de voyages, et les consommateurs, en fait, se sont trouvés beaucoup
moins lésés. Ce sont des mécanismes qui nous semblent
très intéressants, qui pourraient être inclus à
d'autres mécanismes, et notamment les assurances nous semblent
très intéressantes.
Ce qui est important aussi au niveau de la création d'un fonds,
c'est que, à l'heure actuelle, on réalise de plus en plus qu'il y
a beaucoup de gens qui opèrent des entreprises qui constituent
des risques environnementaux très importants, pour ne pas dire
majeurs, et que ces gens-là n'ont pas la capacité
financière de pouvoir faire face à la musique lorsqu'on
découvre un problème environnemental. Les seules entreprises,
à notre sens, qui peuvent faire face à la musique, ce sont les
grandes sociétés ou les multinationales qui ont un nom, qui ont
leur image corporative à protéger et qui ont les reins assez
solides, ou qui ont assez de ressources pour pouvoir payer la
décontamination. Quand on parle de décontamination on ne parle
plus par dizaines de milliers de dollars, on parle par millions. Le chiffre de
base étant probablement 1 000 000 $, et ça c'est très
conservateur, ça ne prend pas grand-chose pour qu'on parle de 1 000 000
$ en décontamination. Ce sont des dizaines de millions, souvent. Alors
on s'aperçoit qu'il y a des entreprises qui jouent, à l'heure
actuelle, pour employer un cliché qu'on a vu récemment, avec le
feu et qui n'ont pas les moyens de jouer avec le feu, carrément. Le
fonds en question... Essentiellement, on va vers la polarisation au niveau des
grandes entreprises qui ont à encourir des risques environnementaux;
ça va être soit de très grandes entreprises ou soit en
créant un fonds comme ça où tout le monde contribuerait.
Je pense qu'on pourrait garder un équilibre intéressant. On
pourrait prévenir des problèmes énormes et des
problèmes comme on a vu tout à fait récemment.
M. Maltais: Je ne sais pas s'il me reste du temps.
La Présidente (Mme Bélanger): À moins que le
ministre... Il reste quatre minutes.
M. Maltais: À moins que le ministre ait d'autre chose,
moi, je n'ai pas terminé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aurais peut-être une
petite précision. Dans ce que vous suggérez, est-ce que celui qui
a contaminé, qui est propriétaire du terrain contaminé et
avec lequel on peut établir le lien de cause à effet, demeure le
pollueur-payeur? C'est-à-dire que, dans ce cas-là, on n'a pas
recours au fonds, si j'ai bien compris, on a recours à celui qui est
responsable de ladite contamination. C'est dans le cas où quelqu'un
aurait acheté de bonne foi un terrain sans le savoir, contaminé,
etc., où l'application du principe pollueur-payeur est davantage
étirée, si je peux utiliser l'expression?
M. Archambault: En fait, oui, mais je vais laisser Me
Prévost élaborer.
La Présidente (Mme Bélanger): Me
Prévost.
M. Prévost: Effectivement, c'est le concept. Dans les cas
où il y a une responsabilité, il y a une faute, on pense que
c'est le pollueur qui doit payer et que le fonds doit être là
uniquement comme support pour compléter les cas où on n'est pas
capables de trouver suffisamment d'actifs - on en connaît - pour payer la
décontamination ou les cas où, par exemple, vous n'auriez aucune
responsabilité, ça découle d'un choix de
société, il y a 20 ou 25 ans, et pour lequel le fonds pourrait
être appelé à payer. Et juste pour... Oui? Excusez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous n'ouvrez pas une
porte à des transactions à la chaîne, à ce
moment-là, de terrains, à partir du moment où la
multinationale pourrait être tentée de vendre à une PME qui
aurait accès, elle, au fonds?
M. Prévost: Pas nécessairement. C'est pour
ça, de là l'importance... Premièrement, je ne crois pas
que la multinationale en soi soit intéressée à multiplier,
parce que, généralement, la multinationale sera celle qui voudra
protéger son image puis qui a les reins pour la supporter. Mais le gros
problème qu'on a, et c'est ce que vous souleviez tout à l'heure,
c'est le problème de la petite et de la moyenne entreprise qui, elles,
n'ont pas les reins pour la supporter, elles n'ont pas une image non plus
qu'elles tiennent à supporter autant que la multinationale, et c'est la
raison pour laquelle on sait qu'on a des limites au niveau de l'assurance qu'on
peut obtenir, on a des limites au niveau du cautionnement qu'on peut obtenir ou
qu'on peut demander à cause des coûts qui sont engendrés.
C'est la raison pour laquelle on pensait qu'en incorporant en plus le fonds on
pourrait avoir... Puis, évidemment, l'argent du fonds sera
peut-être prélevé par type d'industrie auquel cette
industrie-là contribuera. Il n'y a rien qui nous permet non plus de ne
pas penser qu'on pourrait avoir des industries qui seraient cotisées au
démérite ou au mérite, un peu comme on l'a au niveau de la
CSST, ce qui pourrait être une autre solution.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Je veux remercier les
gens de la Fondation québécoise en environnement pour leur
contribution. Je veux aussi les féliciter pour avoir souligné,
dès le chapitre 1 qu'ils appellent Ressources, à la page 5, que,
si beau soit-il, tout bon projet de loi doit être supporté par des
ressources financières gouvernementales et par des ressources en
personnel. C'est précisément la mise en garde que l'Opposition
faisait ce matin à l'ouverture de cette commission parlementaire au
ministre. Il ne s'agit pas simplement de présenter un projet de loi qui,
selon lui, va imposer les plus grosses
amendes en Amérique ou au monde, mais il faut qu'il y ait du
personnel pour surveiller les entreprises et appliquer la loi.
Moi, je vais me concentrer sur le fonds de décontamination puis
le cautionnement. Depuis quelque temps l'Opposition, justement, demande au
ministre de créer un fonds de décontamination. Moi, je suis bien
content de voir que, ce matin, vous êtes le deuxième groupe, et
les deux groupes ont parte d'une formule semblable, fonds de
décontamination, cautionnement, mutuelle. Ce sont les médecins
des départements de santé communautaire, comité de
l'environnement, qui sont passés ce matin, et eux parlaient justement de
la mise sur pied d'un fonds d'assurance devant-Une voix: CSST.
M. Lazure: Oui, genre CSST. Ils le comparaient à la CSST
comme vous le faites. Alors, un fonds d'assurance devant servir à
contrer la généralisation de la version récente
pollueur-payeur qui consiste à déclarer faillite et à
aller s'installer en Floride à l'abri des poursuites. Le projet de loi,
s'il n'inclut pas une formule comme les deux que vous proposez: cautionnement,
fonds de décontamination ou mutuelle d'assurance, s'il n'inclut pas une
de ces formules-là ou même, je dirais, les deux ou trois formules
en plus des pouvoirs très grands que le ministre se donne, puis des
amendes très fortes, mais s'il n'inclut pas ces choses-là,
à mon avis, je le répète, c'est un coup
d'épée dans l'eau, parce qu'il ne faut pas que le ministre mette
tous ses oeufs dans le même panier. (15 h 45)
C'est certain qu'en plus du principe qui est très beau de
pollueur-payeur il va falloir absolument qu'on fasse preuve d'imagination et
qu'il crée ce fonds de décontamination. Il pourrait même,
nonobstant le projet de loi, remarquer qu'un tel fonds de
décontamination devrait être créé; c'est ça
l'objet de nos demandes depuis quelque temps à l'Opposition, parce que
le ministère de l'Environnement n'a eu que 3 300 000 $ pour la
décontamination des sols, et seulement la Balmet utilisera ce
fonds-là. Le ministre lui-même a admis, encore ces jours-ci, aux
médias, que là il ne reste plus d'argent dans le fonds de
décontamination. Imaginez-vous! On vient à peine de commencer
l'année fiscale, puis il ne reste plus d'argent, dixit le ministre.
Alors, pauvre ministre! On va essayer de l'aider...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là, je vais être
méfiant.
M. Lazure: Vous faites bien! Surtout depuis hier, vous avez
appris à l'être. Oui. Mais on va esssayer de l'aider, puis une
façon de l'aider, vous le faites aujourd'hui, comme les médecins
du département de santé communautaire l'ont fait ce matin, c'est
en lui faisant cette proposition de cautionnement et de fonds de
décontamination. Le ministère devrait, je le
répète, commencer à constituer un tel fonds pour que
ça entre... Parce que c'est une question de mentalilté aussi,
ça c'est un nouveau concept, quoique le cautionnement, on le sait, vous
y avez fait allusion pour les déchets solides où c'a
déjà été appliqué, et si je comprends bien
c'a déjà été appliqué aussi pour autre chose
que des déchets solides. Dans le cas des BPC de Saint-Basile, si je ne
me trompe pas, le ministère avait un cautionnement assez important de M.
Mark Levy à un moment donné, et le ministère a cru bon de
le laisser tomber. M. Mark Levy se conformait tellement bien aux directives du
ministère, ha, ha, ha! qu'ils ont laissé tomber le
cautionnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous aviez émis le permis,
vous êtes bien au courant.
M. Lazure: Non, mais je suis surtout au courant des erreurs que
le ministère, sous le gouvernement libéral, a faites, parce qu'il
voyait venir ça, le gouvernement, il aurait dû voir venir
ça, parce que M. Levy répétait...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous êtes
prêt à régler pour un cumul d'erreurs de suite de
gouvernements dans le cas des BPC de Saint-Basile?
M. Lazure: Oui, mais étant donné que vous
êtes ministre dans ce cabinet-là depuis cinq ans, M. le ministre,
vous êtes prêt aussi à endosser les erreurs de vos
prédécesseurs, c'est sûr?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous ai fait l'offre d'admettre
publiquement qu'il y a eu un cumul d'erreurs.
M. Lazure: Oui, j'admets, j'admets, j'admets... Mais là on
va s'en tenir au passé récent qui pourrait être une
leçon pour l'avenir. Mme la Présidente, je demanderais aux gens
de la Fondation quelle différence ils font entre l'application du fonds
de décontamination, d'une part, et puis le cautionnement, d'autre part.
Ce sont deux concepts qui se rapprochent pas mal, qui peuvent être
complémentaires, je suppose, mais est-ce que vous pouvez élaborer
un peu plus sur les différences entre les deux concepts?
La Présidente (Mme Bélanger): Me
Prévost.
M. Prévost: Alors, évidemment,
généralement le cautionnement n'est pas quelque chose qui est
illimité dans le temps. Le cautionnement est généralement
une notion qui est limitée et, comme M. Archambault y
référait tout à l'heure, généralement dans
les cas de contrats de cons-
truction, dans le cas d'érection d'une bâtisse, il est
assez facile de lever un cautionnement pour la période que vont durer
les travaux. Évidemment, il est peut-être plus difficile de penser
à un cautionnement qui soit indéfini ou infini dans le temps,
pour tout le temps où l'industrie va opérer. Et c'est la raison
pour laquelle on pense plutôt à la Fondation, bien qu'on ait
utilisé le terme "cautionnement". On parle de garantie, de façon
générale, et dans le concept de la Fondation la garantie peut
être composée de plusieurs éléments, il peut y avoir
question de cautionnement au moment, non seulement de la construction d'une
nouvelle industrie qui serait polluante, mais pendant les premières
années de son opération où on peut s'apercevoir qu'il y a
des rejets de contaminants importants. Ça peut être
complété par une autre garantie qui peut être un genre
d'hypothèque prise sur certains des biens.
Évidemment, si vous avez une hypothèque sur l'usine
elle-même qui va devenir contaminée, votre hypothèque ne
vaudra peut-être pas grand-chose. Il y a peut-être moyen de penser
à des hypothèques sur d'autres biens, des biens accessoires qui
ne seraient pas pollués. Il y a moyen de penser à l'assurance
dont on parlait tout à l'heure, mais on sait que les assureurs ont
certaines limites. Alors, c'est pour ça qu'on pense qu'il y a un cumul
de garanties et le fonds sera là, et c'est là qu'on le voit, il y
a une interrelation du fonds avec ces moyens de garantie là, parce qu'on
conçoit très bien qu'une entreprise ne soit pas capable de
véhiculer 365 jours par année les garanties complètes qui
permettraient le nettoyage complet de sa propriété. On sait que
c'est un risque qui peut se produire, de là, peut-être,
l'importance d'avoir un fonds auquel cette personne-là va contribuer
comme les autres, et qui pourrait venir comme accessoire. Évidemment, on
ne veut pas rejeter dans le fonds toutes les obligations du pollueur, mais on
reconnaît quand même les limites actuelles. On est au courant,
entre autres, des difficultés que les transporteurs - il y en a
quelques-uns à la porte ici - ont lorsqu'ils traversent la
frontière avec des déchets, et où certains États
américains demandent une garantie, ou un cautionnement, ou une assurance
de 5 000 000 $, puis ils ne sont pas capables de le lever.
M. Lazure: Est-ce que vous connaissez des pays ou des
États qui ont mis sur pied un tel fonds de décontamination, ou
quelque chose qui se rapproche de ça?
M. Prévost: II y a l'expérience américaine
du "superfund", mais qui comporte quand même des distinctions. Mais je
pense que ça partait d'une philosophie semblable, et là où
on aurait peut-être un avantage sur les Américains, c'est que
ça fait 10 ans qu'ils connaissent les problèmes de leur
"superfund", ça a donné lieu à des litiges incroyables, et
je pense qu'on pourrait peut-être bénéficier un peu de
l'expérience qu'ils ont eue pour essayer de ne pas répéter
certaines de leurs erreurs.
M. Lazure: Est-ce que vous avez eu des recherches sur
l'expérience de pays européens? Les pays européens, en
particulier les pays du nord, les pays Scandinaves, ou la Hollande? Non?
M. Prévost: Malheureusement, là-dessus, en ce qui
me concerne... Je sais qu'au Danemark on élimine de façon
complète tous les déchets dans le pays lui-même, mais je ne
sais pas s'il existe... Là-dessus, je vais vous admettre mon
ignorance... Je ne sais pas s'il y a quelqu'un d'autre, à la
table...
M. Archambault: En fait, on n'a pas de dossier complet
là-dessus. On a des informations, effectivement, là-dessus, mais
on n'a pas de dossier complet. J'imagine que ces dossiers-là peuvent
être facilement montés, et également, on pourrait
s'inspirer de certains modèles qui sont en place.
M. Lazure: En général, les pays Scandinaves
gèrent assez bien leurs déchets de toutes sortes. Moi, j'ai juste
une petite réticence sur l'ensemble de votre présentation. C'est
lorsque vous dites que les grandes entreprises multinationales sont soucieuses
de leur image, donc, par conséquent, elles se comportent bien, tandis
que les PME sont moins soucieuses de leur image corporative... Je
n'achète pas ça complètement, là. Waste Management,
n° 1 au monde, la plus grande entreprise, ils ont appris à faire des
faillites, eux autres aussi, à un moment donné, avec l'ensemble
des succursales. C'est bien connu, ce vieux truc, pour les grosses entreprises,
elles créent toutes sortes de succursales, toutes sortes de filiales.
Puis s'il y a un endroit où ça va mal, celle-là, ils la
mettent en faillite. Moi, je n'ai pas tout à fait la même
perception que vous des grandes entreprises, et je pense que les PME, au
Québec en particulier, sont soucieuses de leur image corporative, qui
est assez bonne, de façon générale, puis elles sont assez
soucieuses. Je pense que j'ai provoqué une réaction,
là.
M. Archambault: En fait, je pense que... M. Lazure: Vous
en aviez provoqué une.
M. Archambault: ...toute question mérite une
réponse. Je pense qu'on est complètement en accord avec vous, M.
Lazure. On est complètement en accord avec vous et ce qu'on a dit
essentiellement, en fait, si ça a été mal
interprété ou si ça a été mal dit, on va
faire la rectification. Ce qu'on a dit, essentiellement,
c'est que ce sont souvent les très grandes corporations qui ont
une interface importante avec le public qui ont à se soucier, souvent,
d'une image corporative, mais qui, surtout, mais surtout, ont les moyens de
régler des problèmes environnementaux, telle la contamination de
sites. c'est vraiment surtout ça qui est le problème de base.
parce que c'est évident qu'il y a des pme qui sont très
soucieuses de leur image corporative et souvent nos pme survivent par leur
excellence, et c'est important. mais je voudrais aussi rappeler la nuance qu'on
a faite là-dessus, à savoir que, maintenant, il y a des gens qui
manipulent des produits dangereux, il y a des firmes, en fait, qui encourent
des risques environnementaux importants et n'ont pas la capacité
financière de jouer dans ces lignes-là, à l'heure
actuelle. alors, ça, il faut s'en rendre compte, et c'était
vraiment l'essentiel du message qu'on avait à passer. c'est une question
de capacité de payer.
M. Lazure: Je vous ai donné la chance de faire une mise au
point.
M. Archambault: c'est ce que j'avais cru remarquer, je vous
remercie.
M. Lazure: Juste en terminant, moi, je souhaite que votre
fondation, qui a des sommes importantes pour la recherche, puisse poursuivre
une recherche peut-être de façon un peu plus éclectique,
aller dans certains pays d'Europe, voir un peu comment ils ont résolu...
Ou il y a peut-être des fonctionnaires, remarquez, parce que dans les
voyages hors Québec, la semaine passée, on a vu que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On hésite à les
faire voyager. Vous êtes tellement attentif.
M. Lazure: Oui, c'est ça! Une voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: ...qu'il y avait un budget assez important, 330 000 $
pour les voyages hors Québec. Alors, l'adjoint parlementaire pourrait
faire une recherche sur les assurances, les systèmes d'assurances...
M. Dufour: Surtout pour l'étude des crédits, on
pourrait l'envoyer.
M. Lazure: Bien, sérieusement, Mme la Présidente,
moi, je souhaite que le ministre retienne et fasse travailler ses experts sur
ces formules qui nous sont présentées aujourd'hui par deux
groupes, sans concertation, j'imagine, sans aucune concertation, et qui
viennent rejoindre aussi une formule que le critique de l'Opposition fait
depuis quelque temps au ministre de l'Environnement. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le
député de La Prairie. Est-ce que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, brièvement...
La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, le
ministère de l'Environnement du Québec, comme je l'ai
indiqué tantôt, s'est déjà associé au
gouvernement fédéral dans ce qu'on appelle la création
d'un fonds pour les sites orphelins. La loi sur le pollueur-payeur
complète ou ajoute à cette démarche et je pense que les
suggestions que vous fartes, soit en matière de cautionnement,
d'assurances, etc., ajoutent également à cette démarche.
Et ça fait partie de la philosophie du ministère de
l'Environnement de ne pas mettre, comme le député de l'Opposition
l'a mentionné tantôt, tous ses oeufs dans le même panier,
pour rejoindre les objectifs, parce que les clientèles sont
différentes et il faut s'assurer que nous les rejoignions toutes.
En terminant, je retiens votre suggestion de la création d'une
infraction additionnelle au chapitre 4; elle devrait normalement être
incorporée au projet de loi. La question du voile corporatif
également. Nous vous remercions de cette suggestion plus que positive.
J'apprécierais recevoir - et on est toujours en position de demander, au
ministère de l'Environnement, et on demande encore une fois -
j'apprécierais recevoir un avis un peu plus détaillé, si
vous me le permettez, sur la question de la rétroactivrvité des
articles 31.42 et 31.43, parce que ça m'ap-paraîtrait, s'il
fallait les retirer complètement, être un certain affaiblissement
des dispositions du projet de loi. Mais je tiens quand même à
prendre toutes les précautions juridiques nécessaires pour que si
nous allons de l'avant, comme c'est la volonté gouvernementale de le
faire, on prête le moins possible flanc à des attaques qui
pourraient réussir. Et là-dessus, si ce n'était pas trop
demander à la Fondation québécoise - je sais que vous avez
un comité juridique formé d'éminents juristes dont on
pourrait bénéficier des conseils dans le libellé final du
projet de loi et spécifiquement sous cet aspect-là - nous
requérons vos services.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le
ministre. M. Archambault.
M. Archambault: Nous allons vous envoyer l'avis en question dans
les meilleurs délais.
M. Dufour: Je voulais juste demander au ministre, Mme la
Présidente, si l'énoncé de la présomption
d'innocence "tout accusé est présumé innocent
jusqu'à ce que la preuve de sa culpabilité ait été
établie suivant la loi", est-ce que
ça existe encore, ça?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, cette
présomption-là est non seulement dans le mémoire où
vous la retrouvez... et c'est pour ça que j'ai eu une discussion
tantôt, juste avant votre arrivée. Et je ne vous le reproche pas,
je sais que vous avez plusieurs commissions pour lesquelles vous devez vous
déplacer - le monde municipal est impliqué partout - mais
tantôt on a cité, juste avant votre arrivée, l'article 9 du
projet de loi qui mentionnait spécifiquement que ne constitue pas une
infraction une contravention à une disposition d'un règlement
pris en vertu des paragraphes a et b de l'article 31.51. On a eu cette
discussion-là et la présomption d'innocence, sur le plan
pénal, se doit d'être maintenue en tout temps, sinon les tribunaux
auront tôt fait de casser certaines dispositions.
M. Dufour: Je voulais m'en assurer, parce que je sais que vous
êtes avocat en plus, et dans la loi des assistés sociaux il me
semble que ça n'a pas été appliqué...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Elle a été
intégralement...
M. Dufour: ...par rapport à la présomption
d'innocence.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une autre commission
parlementaire que vous n'avez pas eu le temps de suivre dans son entier...
La Présidente (Mme Bélanger): Je pense que ce n'est
pas tellement pertinent, pour le moment.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Votre collègue, la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, avait adressé la
même question et les avis du Procureur général l'ont
rassurée.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, de toute
façon, ce n'est pas la pertinence du débat. Alors, Mme
Pouliot...
M. Lazure: Je veux remercier les gens de la Fondation. Je veux
rappeler au ministre qu'il ne doit pas parler au nom de la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
La Présidente (Mme Bélanger): Mais si on restait
dans la pertinence du débat? Ça n'aurait pas de...
M. Lazure: Merci beaucoup aux gens de la Fondation et,
sérieusement, j'espère que vous allez continuer d'explorer ces
formules de fonds de décontamination, de même que le
système de cautionnement, pour apporter des lumières au ministre
qui semble vouloir être assez accueillant vis-à-vis de ces
formules-là. Merci.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci beaucoup.
M. Archambault: Merci infiniment.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors Mme Pouliot, M.
Archambault, M. Dubé et M. Prévost, nous vous remercions de votre
participation et on va suspendre quelques secondes, le temps de permettre a la
Conférence des maires de s'approcher de la table des témoins.
(Suspension de la séance à 16 heures)
(Reprise à 16 h 3)
La Présidente (Mme Bélanger): La commission reprend
ses travaux. Je demanderais à la Conférence des maires de la
banlieue de Montréal de bien vouloir s'approcher, et je demanderais
à M. Michel Leduc, maire de LaSalle, de bien vouloir présenter
les personnes qui raccompagnent. Vous avez 20 minutes pour exposer votre
mémoire.
Conférence des maires de la banlieue de
Montréal
M. Leduc (Michel): Très bien, Mme la Présidente.
À ma droite, le maire Quirion, de la ville d'Anjou, et, à ma
gauche, le maire Labros-se, de Montréal-Est. Nous représentons la
Conférence des maires de banlieue.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, vous pouvez
faire votre exposé.
M. Leduc: Écoutez, mon nom est Michel Leduc; je
représente ici la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal qui regroupe, sur l'île, les 28 municipalités
autres que la ville de Montréal qui, je le sais, doit présenter
un mémoire jeudi en ces lieux.
Le fait que la ville de Montréal et la Conférence des
maires de la banlieue présentent chacune un mémoire constitue la
position de la Communauté urbaine de Montréal sur la question de
la gestion des terres contaminées puisque, à nous deux, nous en
formons toutes les composantes. La Conférence des maires de banlieue n'a
pas l'intention de présenter un mémoire très long
puisqu'il n'a pas pour but de faire une critique exhaustive du projet de loi et
de ce qu'il contient, mais plutôt de présenter une étude de
ce que le projet de loi ne contient pas.
Le pollueur-payeur. Si on se limite à la notion du
pollueur-payeur, le projet de loi, tel qu'il est rédigé, semble
très adéquatement couvrir cet aspect mais cet aspect n'est
couvert qu'en autant que le pollueur soit bien identifié et qu'il puisse
faire l'objet de recours de la part du ministère de l'Environnement.
Nous savons très
bien que dans plusieurs cas de sol contaminé le pollueur n'est
pas facile à identifier. Soit que ses opérations aient
cessé depuis un très grand nombre d'années, ou encore que
le pollueur devienne, par des mécanismes légaux, non
poursuivable, ce qui laisse les municipalités, très
fréquemment, avec des problèmes de contamination de sol où
le seul recours est le ministère de l'Environnement.
Dans ce domaine, je dois avouer qu'en ma qualité de maire de
LaSalle, étant aussi président de la Conférence des maires
de la banlieue et président de la Commission de l'environnement de la
CUM, je peux vous assurer que chez nous, où se trouve actuellement la
plus grande cellule de sols contaminés en Amérique du Nord et
où une deuxième cellule à sécurité maximale
pour les terres contaminées est actuellement en construction, nous avons
vécu de telles difficultés. Je parle donc en connaissance de
cause puisque dans les cas qui nous ont intéressés à la
ville de LaSalle, et dans certains autres cas dont nous avons connaissance, le
pollueur ne fut pas facile à identifier et encore moins à
poursuivre. Les dispositions qui peuvent être prises dans de tels cas,
nous croyons que le projet de loi, tel que rédigé, n'en contient
aucune. Il est absolument essentiel que le ministère de l'Environnement,
dans la rédaction de la loi, puisse prévoir des mécanismes
qui permettront de gérer des problèmes de sols contaminés
quand le pollueur ne peut être légalement pris à
partie.
Nous avons, à la ville de LaSalle, développé une
solution originale avec l'aide, je devrais dire, des ministères de
l'Environnement, parce que ça a chevauché deux et trois ou quatre
ministres, lorsque nous avons entrepris la décontamination de deux
terrains. Nous avons vécu deux phases de terrains contaminés.
Pour la première phase, il s'agissait d'un ancien dépotoir
municipal qui était fermé à toute opération depuis
1959, ce qui, à mon sens, représente la préhistoire au
point de vue environnemental. Pour la phase II, il s'agissait d'un terrain qui
fut contaminé par la compagnie LaSalie Coke, depuis longtemps disparue,
et racheté par la compagnie Gaz Métropolitain, pour ensuite
être revendu à un propriétaire privé.
L'originalité des solutions qui ont été
trouvées à ce moment a été possible à cause
de la très grande valeur de revente des terrains à
décontaminer, ce qui nous a favorisés, étant donné
le fait que la ville de LaSalle, et surtout le secteur bien précis
à décontaminer, soit près de la zone centrale de
Montréal, et donc avec des valeurs de terrains qui sont très
élevées. Ce n'est pas le cas à tous les endroits où
il existe des problèmes de sols contaminés.
La solution a impliqué le propriétaire du terrain qui
n'était pas le pollueur et qui a accepté, après de
très nombreuses négociations pas faciles, d'être mis
à contribution pour la décontamination, ceci uniquement à
cause, encore une fois, de la très grande valeur des terrains une fois
décontaminés. En ce qui concerne la phase qui est actuellement en
train d'être faite à LaSalle, il s'agit d'un terrain qui
était aussi contaminé par un pollueur qui ne pouvait pas
être un payeur. L'entreprise privée a été mise
à partie pour la réalisation de la décontamination.
C'est au niveau de la mise à contribution de l'entreprise
privée qu'il ne faut pas jouer à l'autruche et penser que les
très nombreux cas de sols contaminés à travers le
Québec se régleront sans que ladite entreprise privée soit
mise à contribution. Je sais pertinemment, pour l'avoir
vérifié dans d'autres dossiers touchant l'environnement, que le
ministère de l'Environnement et le gouvernement ne sont pas très
chauds à l'idée d'une politique de redevance à la ville
hôte de quelque équipement environnemental que ce soit.
Il reste cependant que dans le futur nous devrons considérer
qu'une ville qui vient à bout de contrer le syndrome "pas dans ma cour"
et accepte chez elle des équipements de nature environnementale doit y
trouver un certain profit. Ainsi, la ville de LaSalle termine actuellement, du
moins nous l'espérons, son dernier problème de terrains
contaminés, tout en acceptant chez elle des terres contaminées en
provenance d'autres municipalités du territoire de la Communauté
urbaine de Montréal. Ceci permet à la ville de régler son
dernier problème de façon tout à fait gratuite.
L'entrepreneur privé chargera, réalisant un profit substantiel
sur les terres contaminées en provenance de l'extérieur, à
même le volume excédentaire de la cellule. Le volume original est,
pour les besoins de la ville elle-même, fait de façon tout
à fait gratuite par l'entrepreneur. C'est un exemple de solution
originale.
Ainsi, qu'on me permette de donner un exemple - puis ça, c'est un
peu "touchy" ce que je fais là, mais je me le permets, vous en ferez ce
que vous voudrez, c'est un exemple - à l'extérieur du territoire
de la CUM que nous connaissons bien par les médias, l'exemple de
Saint-Basile, Saint-Amable et Saint-Jean, qui sont toutes situées dans
la Montérégie. Moi, je parlais de la ville de LaSalle qui
s'occupe des problèmes de la CUM. La Montérégie, c'est une
région ça. Si une de ces trois localités, par exemple,
acceptait d'avoir chez elle une cellule de confinement pour ses terrains
contaminés - je donne ici un exemple de technologie qui est actuellement
disponible; ça pourrait être n'importe quelle technologie - en
faisant accepter par ses citoyens que cette cellule de confinement soit plus
grande et puisse accepter les sols en provenance des deux autres sites, il
deviendrait alors sûrement facile, pour la municipalité en
question, de pouvoir négocier avec une entreprise privée pour que
ses problèmes locaux soient réglés gratuitement.
L'entrepreneur privé trouverait son
profit dans la solution des problèmes des deux autres
localités qui, elles, paieraient ou, entre parenthèses, le
gouvernement paierait, dans le cas là... C'est un exemple. On m'avait
dit de biffer ça du rapport, mais je l'ai mis pareil; c'est juste
à titre d'exemple.
Société en commandites. Il existe aussi d'autres
possibilités qui pourraient faire l'objet d'études
sérieuses dont certaines sont utilisées dans des formes à
peu près similaires dans beaucoup d'autres pays du monde. La
société en commandite, ou tout autre équivalent de
financement, pourrait assurer, selon nous, la dépollution des terrains
contaminés.
Le projet pourrait se présenter comme suit. Après qu'il y
a eu identification d'un site, une société en commandite, pour
chaque projet ou pour un ensemble de projets, pourrait être mise sur
pied. Les investisseurs y souscriraient une ou des parts à la
société, celle-ci pouvant émettre un montant minimum et/ou
un montant maximum de parts. Une fois les parts vendues et l'épargne
recueillie, la société en commandite se porterait
acquéreur d'un terrain visé par le projet, soit directement ou
par option d'achat. Cette dernière façon de procéder
permettrait à la société de disposer davantage de fonds
pour mener à terme son projet de dépollution, tout en offrant un
incitatif fiscal plus intéressant aux investisseurs. La
société affecterait les fonds recueillis à la
dépollution du terrain visé par le projet. Les fonds ainsi
affectés constitueraient une dépense pour la
société et il en résulterait une perte en fin
d'année, laquelle perte pourrait être répartie entre les
membres, au prorata de leur participation. Les membres pourraient, pour fins
fiscales, déduire cette perte a rencontre d'autres revenus, d'où
une économie d'impôt pour les investisseurs. Pour ce faire, il est
cependant essentiel, évidemment, d'obtenir des gouvernements une
modification à la loi de l'impôt sur le revenu,
fédérale et provinciale, précisant que les montants
déboursés ou encourus aux fins de dépollution peuvent
être déduits dans le calcul du revenu et non pas
capitalisés.
Il peut également être envisagé, surtout au
provincial, à l'instar de l'exploration minière et des films
certifiés québécois, d'obtenir une majoration de la
dépense de 66 2/3 %. Une fois le terrain dépollué, sa
valeur marchande s'en trouverait augmentée. Un acheteur éventuel
du terrain pourrait faire l'acquisition des parts de la société
en commandite pour un prix équivalent à la valeur marchande du
terrain. Les investisseurs réaliseraient ainsi un gain en capital
admissible à l'exonération et l'acheteur, quant à lui,
deviendrait le détenteur de l'option d'achat et pourrait la
réaliser. Il deviendrait ainsi le propriétaire du terrain. Par
contre, le prix de base réajusté du terrain, pour lui, serait
équivalent au coût de l'option, ce qui risque d'être minime,
comparativement au prix payé pour les parts.
Si l'acheteur éventuel désire conserver le terrain pour
l'établissement d'une usine, cela peut ne pas avoir d'importance;
cependant, pour permettre à l'acheteur d'avoir un PBR, soit un prix de
base réajusté, pour le terrain équivalent au prix
effectivement payé, la municipalité où se situe le terrain
pourrait, dans un premier temps, se porter acquéreur des parts de la
société et exercer l'option d'achat. Par la suite, la
municipalité vendrait le terrain à un acheteur éventuel.
La municipalité réaliserait un gain mais n'aurait pas
d'impôt à payer. Le PBR du terrain, pour l'acheteur, serait
équivalent au prix payé à la municipalité. Cette
démarche mériterait possiblement d'être envisagée et
retravaillée. Écoutez, je suis docteur, je ne suis pas comptable.
Elle contient des détours qui deviendraient inutiles si le gouvernement
acceptait les objectifs sous-ja-cents qui ont trait à la protection des
subventions fiscales.
Il pourrait peut-être exister, je le soupçonne fortement,
des difficultés philosophiques au niveau du ministère par rapport
à des initiatives du genre, mais je considère que, malgré
ces réticences philosophiques qui se feraient à l'endroit de
l'entreprise privée dans le domaine environnemental, je ne vois
réellement pas, ainsi que mes confrères des banlieues, comment
nous pouvons penser régler la question des sols contaminés sur le
territoire du Québec sans inclure la participation de l'entreprise
privée, soit par l'exemple donné plus tôt, l'exemple un peu
"cowboy", là, soit par une mécanique beaucoup plus officielle,
telles les sociétés en commandite.
En conclusion, dans tous les cas où le pollueur-payeur n'est pas
identifié et si on regarde l'expérience des dernières
années - cela a été très souvent malheureusement le
cas - les personnes qui sont obligées de payer sont soit les
municipalités, le ministère de l'Environnement et, par le fait
même, le gouvernement. Donc, dans tous ces cas, finalement, le
pollueur-payeur, ça devient le citoyen québécois, et c'est
un peu ce qu'on a voulu traiter. (16 h 15)
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le maire.
M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, vous me
permettrez de remercier la Conférence des maires de la banlieue, ses
trois représentants: le maire de LaSalle, le maire de
Montréal-Est et le maire d'Anjou. Je vais tenter d'échanger avec
vous sur le contenu de votre mémoire. Dans le premier chapitre, vous
touchez la notion du pollueur-payeur et, en haut de la page 3, comme telle,
vous faites l'affirmation suivante: "Les dispositions qui peuvent être
prises dans de tels cas - lorsqu'on parie du pollueur qui n'est pas facile
à identifier et encore moins à poursuivre - nous croyons que le
projet de loi, tel que rédigé, n'en contient aucune."
Si vous me le permettez, je mets cette affirmation-là
peut-être en corrélation, et je ne devrais peut-être pas le
faire, avec certains propos du député de La Prairie, qui
mentionnait: C'est beau d'avoir des dents, mais ça prend
également des mâchoires, c'est-à-dire des moyens pour
appliquer la loi.
Dans un premier temps, j'aimerais vous entendre... Est-ce que vous ne
pensez pas que les dispositions contenues à l'article 4 du projet de
loi, soit les dispositions que vous retrouvez à l'article 31.42 ou
à l'article 31.43, n'ajoutent pas ce que je peux appeler des
poignées, comme telles, au ministère de l'Environnement du
Québec, pour prendre ces gens-là qui ont contaminé, en
tout ou en partie, même... Toute la question... On a ajouté une
notion que la personne n'a pas besoin d'être responsable de l'ensemble de
la contamination, strictement d'une partie de la contamination. Là, nous
pouvons intervenir.
M. Leduc: Je n'ai malheureusement pas de copie du projet de loi
devant moi. Je pense que... Je ne me rappelle plus si c'est sur cet
article-là, à un moment donné, qu'il y avait une notion du
mot "corporation", qui m'a peut-être un peu échappé...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Ce n'est pas sur
celui-là. Parce qu'il arrive souvent, et je pense que c'a
été souligné à juste titre, le ministère,
parfois, a des dents et, parce qu'il n'a pas les moyens, il ne s'en sert pas.
Mais ce qui est encore plus frustrant, pour le ministère, c'est lorsque,
comme dans le cas typique de la Balmet - le député de Saint-Jean
a dû s'absenter, il préside une autre commission, mais il
était avec nous ce matin, il va être avec nous ce soir - vous avez
les effectifs, vous les concentrez sur un cas et, malgré que vous ayez
la mâchoire, vous vous apercevez que vous êtes
édenté, c'est-à-dire que vous ne pouvez pas mordre le
pollueur qui a été identifié, qui est là. Vous
consacrez tous les effectifs, tous les efforts, puis, sur le plan du
contentieux, on vous dit: On n'a pas suffisamment de moyens et on les ajoute,
à ce moment-ci. Si vous me dites qu'on ne les ajoute pas, c'est
important. Il y a quelqu'un qui ne m'a pas donné l'heure juste,
là.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le maire. Est-ce
qu'il y a un commentaire suite à la réponse du ministre?
M. Leduc: Non, je n'ai pas de commentaire. J'ai probablement mal
fait ma lecture, en tout cas. Je vous ai...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): En tout cas, revérifiez.
Moi, je vais vous demander poliment de revérifier parce que, quand c'a
été lu, tantôt, j'ai sursauté. S'il fallait que je
n'ajoute pas de dents, je serais très déçu du
libellé du projet de loi. Donc, si vous pouvez demander aux gens, chez
vous, de revérifier.
Au chapitre 2, on parle des solutions originales. Je vous dirai que vous
avez raison de mentionner que, lorsque la valeur du terrain, ce que j'appelle
la valeur résiduelle du terrain, est plus grande que les coûts de
décontamination, on arrive à peu près toujours à
trouver des solutions. Dans la région de M. le maire Labrosse, entre
autres, Petro-Canada, pour ne citer qu'un exemple, sans oublier d'autres, la
ville d'Anjou, également, lorsque ces terrains-là ont de la
valeur, les gens s'entendent sur un processus de décontamination. Vous
mentionnez même qu'avec la mise à contribution de l'entreprise
privée on peut faire des choses, et vous dites, chez vous, ce que vous
faites.
Vous nous racontez l'expérience que vous vivez. Mais lorsqu'on
lit l'expérience que vous vivez, chez vous, on se rend compte que tout
le monde en profite, que la ville de LaSalle règle un problème
qui est local, sans déboursé, que les autres maires ou
responsables des territoires sur l'île de Montréal trouvent un
endroit où disposer de leurs terrains contaminés et que
l'entreprise privée fait du profit. Vous avez une formule gagnante
où chacun des participants y gagne. Mais, encore là, c'est
possible quand tout le monde y trouve son compte. Je vous félicite de
votre formule. On a émis, au ministère de l'Environnement,
après vérification, tous les permis requis pour vous permettre
d'aller de l'avant avec votre projet.
Là où vous suscitez des questions, et je sais que mon
adjoint parlementaire ne vous aurait pas permis de l'oublier, c'est lorsque
vous parlez de la ville hôte, parce que, lui, dans le cadre des BPC de
Saint-Basile, représentant la circonscription électorale de
Saguenay, il a servi de comté hôte, pour des BPC, et il trouve
qu'il n'a pas été dédommagé, et je pense qu'il
partage l'opinion du maire de LaSalle, il ne vous aurait pas pardonné
d'avoir enlevé cette section-là de votre mémoire.
Vous nous parlez de la société en commandite et d'une
approche fiscale. Plusieurs personnes sont venues ici, nous ont dit: Le
principe pollueur-payeur, d'accord; la loi, d'accord, mais ce n'est pas la
formule qui va soigner tous les maux. Les gens nous disaient: Ça prend,
soit du cautionnement, soit des assurances, soit des permis qui sont
accompagnés de cautionnement, etc., qu'on demande aux compagnies qui
opèrent dans des types d'activité qui peuvent amener de la
contamination. Vous, vous ne parlez pas de ça. Vous dites:
société en commandite, des déductions fiscales. Est-ce
qu'on ne s'éloigne pas du principe du pollueur-payeur, lorsqu'on
embarque dans tout ce secteur de la fiscalité qui, indirectement,
avantage les gens qui y investissent? Est-ce qu'on n'abandonne pas notre
concept de pollueur-payeur que l'on retrouve à l'état pur
lorsqu'on peut identifier le pollueur et qu'on lui passe la facture de
la décontamination, qu'on retrouve en partie lorsqu'on forme un fonds,
une espèce de CSST, etc.? C'est l'argent de ceux qui polluent qui sert
à décontaminer, à ce moment-là. Est-ce que,
lorsqu'on parle de donner des avantages fiscaux à des investisseurs dans
la décontamination, on ne s'éloigne pas du principe
pollueur-payeur?
M. Leduc: Bien, évidemment, ça je l'ai un peu
établi dès le départ. Je traite un peu des cas
où... et cette solution pourrait être appliquée à
des cas où, effectivement, le pollueur-payeur n'est pas rejoignable, ou
n'est pas... où la politique ne peut pas s'appliquer, justement. Et
c'est sûr que... Écoutez, je ne suis pas un fiscaliste, cette
petite formule-là, moi, je l'aime bien, je la traîne dans mes
poches depuis une petite secousse, et je serais peut-être mal
placé pour vous donner... J'avais demandé au maire Janiszewski
qui est aussi comptable, de venir se joindre à nous, s'il y avait des
questions sur la mécanique de tout ça, parce qu'il est comptable.
Je ne pourrais pas m'embarquer dans la mécanique, mais,
philosophiquement, dans ma tête, c'est plus clair un peu, dans le sens
qu'il s'agit de terrains où, justement, la notion du pollueur-payeur ne
s'applique pas, et la formule, dans des cas comme ça, pourrait
s'appliquer. Évidemment, il faudrait faire attention. C'est bien
sûr que des compagnies qui sont des compagnies reconnues comme des
pollueurs ou qui sont plus ou moins douteuses au point de vue environnemental
ne puissent pas être des compagnies qui viennent mettre de l'argent et
réaliser des bénéfices fiscaux dans une aventure de ce
type-là. Il faudrait, évidemment, que ce soit très
très encadré, probablement, au point de vue projet de loi. Mais
moi, ça m'est apparu - et j'en ai parlé avec plusieurs personnes
- comme étant une solution possible, qui pourrait être
intéressante, qui est basée un peu sur la mécanique des
accréditives, dans le fond. Ça ressemble un peu aux
accréditives de mines, ou... Ça ne réinvente pas la roue.
Mais dans les cas où il y a un grand secteur à
décontaminer et que le pollueur n'a pas pu être identifié,
et que, bon, tout le monde est pris avec qui paye la note, cette
formule-là pourrait éventuellement être une formule
intéressante. Et c'est pour ça que je l'ai soulevée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aurais une question
additionnelle qui ne m'est pas inspirée, comme telle, par le contenu du
mémoire mais qui, possiblement, m'intrigue par son absence du
mémoire. J'ai eu l'occasion, lorsque la table
Québec-municipalités fonctionnait à plein régime,
de discuter de certaines données du projet de loi avec les membres de la
table Québec-municipalités. Et les représentants
municipaux m'avaient adressé des questions quant au fait que ledit
projet de loi, s'il était appliqué tel que rédigé,
pourrait affecter les rôles d'évaluation des municipalités.
Et on sait que les rôles d'évaluation, c'est la base de vos
systèmes de revenus municipaux. Vous avez le maire d'Anjou, le maire de
Montréal-Est, et il y a une procédure d'enregistrement public des
terrains qui est prévue au projet de loi, en ce sens que lorsque le
ministère est informé on inscrit au bureau d'enregistrement le
fait que le terrain est contaminé. Si ça devient connu,
l'évaluation du terrain n'est plus la même, ça affecte les
revenus des municipalités. Est-ce que vous avez des
représentations à nous faire quant à cet aspect municipal
de la question?
M. Leduc: Je dois vous avouer, M. le ministre, que j'ai eu
l'occasion de prendre connaissance, ce matin, de l'avant-projet - mais c'est
presque terminé - du mémoire que la ville de Montréal doit
vous présenter jeudi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
M. Leduc: Et la ville de Montréal est
particulièrement sensible à cet aspect-là, et le traite
dans son document. Je sais que pour eux c'est quelque chose de très
important, que je suis en mesure de comprendre, notez bien. Mais seulement
qu'eux vont, je pense, élaborer beaucoup sur cet aspect-là que
vous soulevez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, ça va. Je
m'inquiétais simplement du fart que ça n'avait pas
été souligné par des élus municipaux alors...
M. Leduc: Montréal va le soulever.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Montréal va le souligner.
M. Labrosse, est-ce que vous avez des...
M. Labrosse (Yvon): Non, pas de commentaire. On a eu des
expériences dans le cas de la compagnie Texaco qui, elle, avait voulu se
faire évaluer à 1 $ prétextant que c'était un
terrain pollué mais ça n'a pas eu de suite et on n'a pas
accepté non plus de l'évaluer à 1 $.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez maintenu
l'évaluation traditionnelle.
M. Labrosse: Exact.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Quirion, est-ce que vous avez
des...
M. Quirion (Richard): Moi, M. le ministre, j'aimerais, si vous me
le permettez, parce que vous avez parlé tantôt du terrain de
Petro-Canada et effectivement on parle, depuis le début, de projet de
loi avec des mâchoires et des dents. J'aimerais souligner, ici, aux
membres de
la commission qu'effectivement, comme pollueur-payeur, je pense qu'on a
un exemple concret et très clair.
BP, British Petroleum, à un moment donné, c'est devenu
Petro-Canada et ce terrain-là, pour vous situer géographiquement
parlant, est situé entre Henri-Bourassa et l'autoroute 40, entre
Montréal-Est et le parc industriel actuel de la ville d'Anjou. On parle
quand même de 20 000 000 à 22 000 000 de pieds carrés.
Là, effectivement, la compagnie Petro-Canada a dépollué
à des coûts quand même très substantiels. On parle de
25 000 000 $ d'investissement pour la dépollution du terrain, ce qui en
fait, finalement, le pollueur-payeur. Alors, elle l'a pollué et on l'a
décontaminé. Par la suite, évidemment, ce
terrain-là a pris une certaine valeur et, effectivement, elle s'en est
départie à une entreprise qui s'appelle Alexis-Ninon qui, elle, a
un projet de développement de parc d'affaires. On y a inclus, nous,
comme municipalité, et je pense que vous vous rappelez un petit peu le
dossier, M. le ministre, je vous en avais parlé, on a inclus à
travers ça, nous, un terrain de golf pour pouvoir - c'est unique au
Québec, ça - justement changer l'image de l'est de
Montréal. Ça, c'est un exemple concret de pollueur-payeur,
Petro-Canada.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais est-ce que, et c'est la
précision que je n'ai pas, c'est Petro-Canada comme telle qui avait
contaminé le terrain ou si c'était le propriétaire
antérieur ou est-ce qu'il y avait cumul de...
M. Quirion: C'était le propriétaire
antérieur parce que ça appartenait à BP à
l'époque. D'accord?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Intéressant, ça,
comme notion.
M. Quirion: Et là, BP, c'a été vendu. C'est
Petro-Canada qui a acheté ça et, par la suite, là,
évidemment récemment, elle a décidé de
dépolluer ce terrain-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Même si c'était le
propriétaire antérieur, il y a eu application du principe
pollueur-payeur non pas à partir du responsable de la source de
contamination mais à partir du propriétaire du terrain.
M. Quirion: Exactement. Mais comme on dit pollueur-payeur, elle a
décidé, effectivement, de dépolluer ce terrain-là,
sachant très bien qu'elle augmentait la valeur dudit terrain, donc, par
conséquent, pouvoir investir, si vous me permettez l'expression, dans
l'est de Montréal en disant: Voici, on va décontaminer ce
terrain-là; par contre, on va le vendre évidemment au prix qu'il
nous a coûté dans la décontamination. Par contre, la
personne qui décide d'acheter ce terrain-là sait très bien
qu'il a une valeur énorme à partir du moment où il est
décontaminé effectivement et à partir du moment où
il y a de moins en moins de terrains sur l'île de Montréal. Donc,
elle voit très bien son profit à court, moyen et long terme.
C'est la raison pour laquelle elle s'est permis d'acheter ça. Sauf que
ce qui est intéressant là-dedans, c'est qu'on a un exemple
vraiment concret d'un pollueur-payeur, étant donné qu'elle
était propriétaire du terrain, et je pense qu'on devrait
peut-être publiciser davantage cet exemple-là qui, à mon
avis, va sûrement avoir des conséquences et probablement des
effets d'entraînement concernant d'autres terrains qui sont
contaminés.
Si on est capables de décontaminer un terrain qui a
été contaminé par une pétrolière, je pense,
à ce moment-là, qu'on est sûrement capables, dans d'autres
endroits du Québec - évidemment, les terrains n'ont
peut-être pas nécessairement la même valeur - de pouvoir
arriver avec des solutions comme celle-là. Non seulement on
réussit à dépolluer ou décontaminer un terrain de
cette envergure-là mais, en plus de ça, on est capables
d'aménager à l'intérieur un terrain de golf et de
conserver un certain boisé qui est là, donc une participation de
trois paliers: CUM, la ville d'Anjou, de même que l'entreprise
privée et, ça, je pense que c'est très significatif
à l'intérieur d'un environnement sain au niveau de l'est de
Montréal. Et, au risque de me répéter, je pense que
ça va avoir des conséquences heureuses sur d'autres
régions du Québec, définitivement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maintenant, la technologie... sur
le plan technologie de décontamination utilisée. On a entendu
tantôt M. le maire de LaSalle nous parler de son enveloppe qui est
à la disposition... Est-ce que vous avez des résidus, suite
à l'opération, que vous êtes obligés d'envoyer,
traditionnellement, à Sarnia? J'étais pour dire. Dans quelque
temps... (16 h 30)
M. Quirion: On les laisse chez nous. C'est qu'il y a une partie
du terrain, 5 % du terrain, qui a été conservée, où
on envoie les terres contaminées et dans un avenir plus ou moins
rapproché, d'ici trois ans, ces terres-là seront
décontaminées via ce qu'on appelle, je pense, un
incinérateur mobile ou, en tout cas, il y a un investissement de l'ordre
de 10 000 000 $ à 12 000 000 $ fait par Pétro-Canada justement
pour régler ce problème-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais la nature...
M. Quirion: Mais elle a de deux à trois ans pour le
terminer.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais la nature de la contamination
par la pétrolière,
conjuguée à la technologie connue, vous permet
d'éviter tout type d'enfouissement.
M. Quirion:exactement, oui. bien, c'est-à-dire, tout type
d'enfouissement... ce qui a été fait jusqu'à maintenant,
c'est qu'elle a quand même réservé une partie du
terrain...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): 5 %.
M. Quirion:...5 % à l'extrémité nord-ouest.
elle l'a gardée là, et puis sa technologie va lui permettre,
effectivement, de pouvoir se débarrasser de cette terre
contaminée là. évidemment, on a reçu toutes les
lettres possibles du ministère de l'environnement à l'effet qu'on
pouvait maintenant, dans les autres 95 % du terrain, commencer la construction
d'entreprises, de même que - l'aspect loisir - il était possible
de pouvoir aménager un terrain de golf intégré à
l'intérieur d'un parc d'affaires comme celui-là.
Alors, je voulais tout simplement donner un exemple, ici, concret de ce
qu'on appelle, finalement, un pollueur-payeur. C'est une entreprise
paragouvernementale, évidemment, du fédéral. Maintenant,
est-ce que cette explication-là pourrait être donnée pour
d'autres régions du Québec? Ça, c'est une question qu'on
est en droit de se poser.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Quirion. M.
le député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Je veux
féliciter les maires pour leur présentation et souligner aussi le
travail des maires de banlieue, en particulier celui de mon collègue -
j'ai un préjugé - mon collègue médecin. La ville de
LaSalle a été à l'avant-garde de la collecte
sélective, LaSalle, Victoriaville, la Montérégie sont
à l'avant-garde de ce mouvement.
L'exemple que M. Quirion vient de nous donner, Petro-Canada,
évidemment, vous l'avez ajouté à la toute fin. Le fait que
la pétrolière en question, Petro-Canada, soit une
pétrolière qui vit de nos deniers, ça aide un peu,
j'imagine. Mais il y a aussi d'autres facteurs, c'était rentable pour
eux, ensuite...
Une voix:...
M. Lazure: Oui. Mais moi, je reviens à la page 3, lorsque
vous dites, ce qui a été repris par le ministre: "Les
dispositions qui peuvent être prises dans de tels cas, nous croyons que
le projet de loi, tel que rédigé, n'en contient aucune." Moi, je
suis d'accord avec vous. Je suis d'accord avec vous. Si je comprends bien votre
pensée, vous faites allusion aux cas nombreux, comme vous le dites dans
votre texte, de pollueurs qui, ou bien sont disparus depuis longtemps, ou bien
ne sont pas solvables. C'est là la mise en garde que j'ai faite ce matin
au ministre, que je répète encore, parce qu'il s'agit de
pollueurs qui sont disparus ou qui ne sont pas solvables. bon. on a beau avoir
dans la loi des amendes de 1 000 000 $, mais si l'individu est insolvable...
dans ce sens-là, les maires ont raison...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et que le terrain ne vaut rien,
qu'il n'est pas situé à Montréal.
M. Lazure: C'est ça, c'est ça. Dans ce
sens-là, les maires ont raison. Je vous appuie sur votre premier
paragraphe de la page 3. Il est important d'inclure, comme on le disait
tantôt, avant que vous arriviez, avant que vous fassiez votre
présentation, une ou d'autres formules. Ça peut être la
formule que vous proposez, vous, là, les formules originales, ou encore
la société en commandite, ou encore le fonds de
décontamination dont on a entendu parler par le groupe qui vous a
précédés et par les départements de santé
communautaire, ce matin, aussi, un fonds de décontamination qui serait
constitué par des prélèvements annuels, un peu encore une
fois comme le fonds de compensation de la CSST, qui serait
prélevé d'entreprises qui sont susceptibles de polluer
l'environnement, de près ou de loin, selon des échelles
fixées par le ministère, par le gouvernement, des
échelles, des taux qui varieraient selon la gravité de la
pollution appréhendée dans telle ou telle industrie. Encore une
fois, on tiendrait compte aussi du dossier de l'entreprise, comme la CSST tient
compte aussi du dossier d'une entreprise au point de vue des accidents de
travail.
Alors, dans ce sens-là, je pense que votre contribution a
été intéressante. Moi, je vous avoue que j'ai un peu de
penchant pour les autres formules, fonds, ou assurances ou mutuelles, parce
que, d'abord, votre société en commandite, l'inconvénient,
c'est qu'elle ne met pas à contribution l'ensemble du réseau de
pollueurs, tandis que le fonds de contamination, genre CSST, met à
contribution les pollueurs actuels ou potentiels. Dans ce sens-là, moi,
je serais intéressé de voir un peu vos réactions.
Ça serait quoi, votre appréciation d'un système du genre
fonds de contamination qui serait constitué de perceptions que le
ministère exercerait auprès des entreprises qui sont susceptibles
de polluer?
M. Leduc: Je ne suis pas assez familier, je dois vous avouer,
avec... J'ai écouté la présentation des gens de la
Fondation en environnement. Évidemment, c'est une solution; la
nôtre en est une autre. Je ne suis pas assez familier avec les
performances de ces fonds-là. J'ai entendu parler comme tout le monde du
"superfund" aux États-Unis, etc.; il y a des forces, il y a des
faiblesses. Je ne suis pas assez familier pour me prononcer là-dessus.
Mais nous autres, les maires
de banlieue, on est beaucoup plus que beaucoup d'autres regroupements
politiques au Québec proentreprise privée. La solution qui est
là est une solution qui, si vous voulez, fait appel à
l'entreprise privée, à une notion de profit, une notion de
bénéfice, puis une notion plus à court terme qu'un fonds
administré par, entre guillemets, une entreprise publique, si vous
voulez.
Mais je n'oserais pas m'embarquer dans une dialectique compliquée
sur les vertus de l'un par rapport à l'autre. Nous, c'est notre
solution, on trouve qu'elle implique plus le secteur privé, étant
plus limitée dans le temps, étant plus ponctuelle,
peut-être, à l'intérieur d'une structure le permettant,
donc il est possible d'en faire un peu partout, n'importe où, il n'y
aurait pas de problème. C'est une solution comme une autre, mais ce que
je répondrais à votre question, c'est peut-être un peu
anodin, mais c'est de dire: Écoutez, une solution ou une autre, mais il
faut qu'on en trouve une à un moment donné.
Parce que nous autres, à LaSalle, quand on a eu nos
problèmes, bien, écoutez, le gouvernement provincial a mis de
l'argent là-dedans, nous autres, on en a mis, on s'est
débrouillés, on a essayé de faire des espèces de
pirouettes. Ça a coûté finalement au gouvernement
provincial 8 300 000 $, si je me rappelle bien; nous autres, ça nous en
coûte à peu près 3 000 000 $ ou 4 000 000 $. Pour une
municipalité de notre grosseur, c'est quand même pas mal d'argent,
puis on est venus à bout d'impliquer l'entreprise privée. Bon, en
tout cas, ça a été une espèce de petite
expérience très locale, assez originale, mais qui n'était
pas encadrée à l'intérieur d'une loi puis qui...
M. Lazure: Évidemment, Mme la Présidente, votre
formule de société en commandite ou encore la formule que vous
avez développée à LaSalle, dont vous parlez dans votre
mémoire, ces deux formules-là ne sont pas incompatibles avec un
fonds de décontamination ou une mutuelle d'assurances. Ce n'est pas
incompatible.
M. Leduc: Non. Les deux, d'après moi, peuvent exister.
Mais, comme je vous dis, je ne pourrais pas m'embarquer.
M. Lazure: Merci. Mon collègue de Jonquière, Mme la
Présidente, aurait quelques questions.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Merci, Mme la Présidente. J'aurais aimé
revenir un peu sur l'expérience que LaSalle a vécue avec la
décontamination des sites. J'ai eu l'occasion de suivre ça. C'est
évident qu'on était en commission parlementaire, puis vous
êtes venus à une ou deux reprises, sûrement, pour parler de
la décontamination.
Quand je regarde votre mémoire, vous nous dites quelque part que
vous êtes chanceux, à LaSalle, puisque vous avez la revente des
terrains qui vous permet d'avoir trouvé une solution originale. Mais je
voulais revenir sur la participation gouvernementale et la participation
municipale. C'est environ 12 000 000 $. En quoi la vente des terrains, si vous
n'aviez pas eu cet apport-là du municipal et du gouvernement du
Québec... Comment vous auriez pu vous en tirer par rapport à
ça?
M. Leduc: Bien, il y aurait eu un énorme trou de 7 000 000
$. Ce n'est quand même pas rien. C'est parce que l'entreprise
privée... Puis pas avec la peur du pollueur-payeur, hein? Quand on lui
partait de ça, ça faisait rire son avocat, parce que, dans le
fond, d'abord, la loi n'existait pas encore, mais on la brandit depuis, cette
loi-là, on la brandit comme devant arriver un jour depuis quand
même un certain bout de temps. Ces gens-là, ils étaient les
acheteurs de gaz, c'étaient des "développeurs". C'est Westclift,
on peut le dire, Westclift Development, qui est quand même une
très grosse corporation, qui avait acheté ce terrain-là et
qui le savait, quand elle l'a acheté, qu'il était
contaminé; ces gens-là l'ont acheté en le sachant
contaminé. Ils ont fait une décontamination très
superficielle, selon les normes de l'époque, puis ils ont essayé
de bâtir dessus un centre d'achats. Là, ils se sont fait dire:
Non, non, c'est contaminé encore, puis très contaminé,
c'est un des plus contaminés au Québec. Bon. Là, ils ont
déplacé leur centre d'achats à côté, puis ils
sont restés avec ce terrain-là, qu'ils n'avaient pas payé
cher, définitivement pas cher. Et, quand on est arrivés pour les
faire contribuer, ils doivent avoir fait des calculs et dit... On demandait -
et c'était par décret - 7 000 000 $ de contribution au
propriétaire du terrain, qui n'était pas le pollueur.
La compagnie de qui ils l'avaient acheté n'était pas non
plus le pollueur. C'était LaSalle Coke, une compagnie qui était
démantelée et qui n'existait plus, à toutes fins
pratiques, depuis un bon bout de temps. Ils ont accepté, eux, de mettre
7 000 000 $ dans la décontamination. Bien, ces 7 000 000 $, c'est un
effet du Saint-Esprit et de la bonne négociation, parce qu'on ne pouvait
pas les obliger... M. Lincoln, à cette époque-là, me
disait tout le temps qu'il avait une lettre d'ordonnance dans son bureau. La
lettre d'ordonnance n'est jamais sortie de son bureau. Mais, si elle
était sortie, je me demande ce que ça aurait changé,
réellement. Vous m'excuserez d'être un peu... Je pense que, dans
cette période, bien précisément, une lettre d'ordonnance
obligeant une compagnie à numéro - O.K., c'était
Westclift, mais c'était aussi 89205 Canada Itée - tu fais un X
là-dessus le lendemain et c'est fini, bye-bye. Ils ont accepté
d'embarquer finalement pour 7 000 000 $. Bon, je ne sais pas où on
aurait pris ces 7 000 000 $; nous autres,
on n'aurait pas été capables de payer ça.
M. Dufour: Est-ce que les propriétaires de Westclrft ont
pu revendre le terrain?
M. Leduc: Actuellement, ça vient de se terminer. Ça
vient juste, juste de se terminer. Ils ont embarqué avec une autre
compagnie et ils ont un gros projet de développement à ce
niveau-là. Leur affaire va bien. Ils font un bon "deal", eux autres,
parce qu'ils avaient payé le terrain pas cher, le sachant
déjà contaminé. Si vous ajoutiez les 7 000 000 $, le prix
du terrain, au bout de la ligne, par rapport au coût des terrains par
chez nous, je dois vous avouer que ce n'était pas très,
très élevé. Donc ils font un bon "deal". C'est pour
ça qu'ils ont embarqué. Ce n'est pas par menace, en aucune
façon.
M. Dufour: Quelle était la superficie du terrain
concerné?
M. Leduc: 4 100 000 pieds carrés. Ça, c'est la
phase II, le terrain de la LaSalle Coke. On a pris 1 000 000 de pieds
carrés pour bâtir une cellule géante qui est une petite
montagne, mais qui contient aussi les terrains contaminés qui viennent
de l'ancien dépotoir municipal qui, lui, était un endroit
où il y avait des maisons de construites par-dessus. Il a fallu
démolir des maisons, envoyer du monde. Ce qu'on excavait à cet
endroit est dans la cellule, sur les terrains de la LaSalle Coke. Maintenant,
une fois la cellule enlevée, il reste 3 100 000 pieds carrés,
à huit minutes de Montréal en auto, du centre-ville de
Montréal. Donc, 3 100 000 pieds carrés, c'est quand même
intéressant comme morceau de terrain.
M. Dufour: Moi, ce que j'essaye de regarder, par rapport à
ça, c'est qu'il y a perte nette... La municipalité finira
peut-être par trouver des revenus, quand ce sera construit, etc., mais il
y a 12 000 000 $ au départ que... Je voulais essayer de rapprocher
ça avec votre société en commandite. Vous nous parlez
d'une société en commandite. Il y a 12 000 000 $, soit une
participation gouvernementale plus une participation municipale, ce qui fait 12
500 000 $ à peu près de perte nette. La compagnie West-cltft a
mis 7 000 000 $. Ça fait pas mal d'argent, d'un coup sec. Ça fait
que votre société en commandite, comment elle pourrait, elle -
j'essayais de suivre votre raisonnement là-dessus - comment elle
pourrait faire un profit ou une "opération"?
Vous avez beau me dire que vous êtes pour l'entreprise
privée, mais moi je sais qu'à Montréal il y a des
entreprises semblables qui se font par les municipalités. Ce ne sont pas
toutes des entreprises privées. Les entreprises privées, pour
autant que je sache, elles vont bien et elles ne veulent entendre parler de
personne, tant qu'elles n'ont pas de problèmes. Quand elles ont des
problèmes, elles se revirent vers le gouvernement. Je mets toujours un
bémol par rapport à ça. Je suis pour l'entreprise
privée aussi, mais à la condition qu'elle "opère" dans des
règles bien précises et qu'on ne soit pas les otages de
l'entreprise privée. Il faut que les entreprises privées puissent
s'en sortir.
La, ce que vous nous dites, c'est: Notre société en
commandite pourrait s'en sortir quelque part, c'est la différence des
montants-Comment elles pourraient se retaper? Autrement dit, ce n'est pas la
charité qui fait ça. Ça serait à même quoi?
Ça serait à même les taxes? S'il y a des profits, aller
chercher des pertes sur capital, etc., le gouvernement va refuser de reprendre
des profits? Dans une opération comme ça, une
société en commandite, j'ai de la difficulté à la
saisir. Parce que la société en commandite, dans le fond, tel
qu'il est proposé...
M. Leduc: Avec des bénéfices fiscaux, il ne faut
pas oublier...
M. Dufour: Les bénéfices fiscaux, mais, quand on
donne des bénéfices fiscaux, c'est le gouvernement qui est
perdant...
M. Leduc: Ah, bien, ça, c'est sûr.
M. Dufour: ...qui les perd. Ça fait qu'il n'y a jamais de
profit quelque part.
M. Leduc: Je ne suis pas sûr que M. Wilson et M.
Gérard D. Levesque seraient très, très heureux d'entendre
parler de société en commandite pour l'environnement. Je ne
prétends pas... On parle d'une commission parlementaire sur
l'environnement. C'est sûr qu'au bout de la ligne ce sont les
entrées de fonds qui en souffriraient. Mais, il s'agit de faire le
calcul, M. Dufour.
M. Dufour: C'est parce que moi, j'essayais de rapprocher
ça avec la profession que vous avez faite vis-à-vis de
l'entreprise privée. L'entreprise privée a des moyens mais, que
je sache, elle opère dans un cadre où elle peut faire des
profits. Les profits tels que proposés ou tels qu'on les voit, c'est
vraiment un transfert de sommes d'argent qu'elle va chercher à
même le gouvernement. Elle va le faire, mais je pense qu'il y a
peut-être d'autres moyens plus faciles. C'est peut-être là,
la différence. Acceptons donc carrément que seul le
pollueur-payeur paie. S'il ne paie pas, bien, on trouvera d'autres
méthodes. Mais moi, la société en commandite, là,
il me semble que je regarderais ça avec beaucoup de circonspection
ou...
M. Leduc: Mais les gens de la ville de Montréal vont venir
vous parler jeudi, sûrement, de tout leur secteur sud-ouest qui est le
plus vieux secteur industriel au Canada, où ils
démolissent des vieilles industries et ils veulent bâtir
des habitations à logements sociaux, etc. Ils ont plusieurs projets,
dans ce coin-là. Ils "scrépent" un peu le terrain - d'abord, ce
sont des budgets limités, ça, ce sont des habitations à
loyer modique - puis ils trouvent une pollution, et là, s'ils reculent
dans le temps, ils peuvent reculer facilement à 1867, quand ils
construisaient le chemin de fer ou je ne sais trop quoi. C'est le plus vieux
secteur industriel au Canada, quand Montréal était, à
toutes fins pratiques, la seule ville industrielle qui existait. Donc, dans un
cas comme ça, il n'y a pas moyen de retrouver le pollueur. Puis ce sont
des petits tas, je veux dire, c'est 300 mètres cubes, 1000 mètres
cubes, 400 mètres cubes, dépendant des projets. Et là, ils
sont pris à envoyer ça à Sarnia et puis ça
coûte un prix de fou. Ça coûte 800 $ ou 900 $ le
mètre cube. Écoutez, là, je m'avance sur les prix, mais je
suis à peu près dans ces...
L'entrepreneur privé, lui, qui a une cellule à
sécurité maximale, ou une autre technologie de lavage des sols
ou, je ne sais pas, en tout cas, toutes les technologies qui existent sur
planche à dessin, et qui "charge" 200 $ le mètre cube, c'est
déjà un bon "deal", plutôt que l'envoyer à Sarnia.
Mais il met déjà de l'argent dans ses poches, lui, et il
règle un paquet de petits cas qui, d'après moi... Je donne le
sud-ouest de Montréal comme exemple. Ils vont sûrement vous en
parler, les gens de Montréal. Retrouver le pollueur là-dedans,
là, c'est absolument impossible. C'est de reculer dans la
préhistoire. Il faudrait engager des gens qui font des fouilles. C'est
de reculer dans la préhistoire au point de vue environnemental. Donc,
pour ces cas-là, il s'agit d'avoir des solutions originales. Si
opérer une cellule à sécurité maximale, sur un
terrain qui est déjà contaminé, etc., ça peut
être rentable pour une entreprise privée, écoutez, je ne
veux pas réinventer la roue, mais je me dis...
La Présidente (Mme Bélanger): Alors...
M. Leduc: ...qu'il ne peut pas avoir des solutions qui vont
couvrir tous les cas mur à mur. Personnellement, je n'y crois pas. Je
crois, par exemple, que la notion de pollueur-payeur, c'est un maudit grand pas
dans la bonne direction. Ça, je me permets de le dire.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous me permettrez, en terminant,
Mme la Présidente, de remercier la Conférence des maires de la
banlieue, les représentants qui, par leur témoignage, nous aident
à bonifier le projet de loi. Je réitérerai strictement ma
question au Dr Leduc, qui touche le haut de la page 3 du mémoire: Les
dispositions qui peuvent être prises dans un tel cas, etc., d'ordre
légal... Pas que je n'aie pas confiance au diagnostic médical que
vous et le critique de l'Opposition avez porté, mais, si on pouvait le
substituer par une opinion légale, ça me réconforterait
avant de procéder plus avant dans le projet de loi. Encore une fois,
pour votre présentation ainsi que pour les autres actions en
matière environnementale que vous avez entreprises sur le territoire de
l'Ile de Montréal, merci.
M. Leduc: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Mme la Présidente, moi aussi, je veux remercier
les maires et je voudrais faire remarquer au ministre de l'Environnement que
l'opinion légale, je comprends l'utilité qu'elle puisse avoir -
pour répondre à sa question, en haut de la page 3, la remarque de
la Conférence des maires - mais je pense qu'il doit tenir compte de
l'expérience de la Conférence des maires. L'expérience
qu'on a tous vécue depuis quelques années, c'est que plus souvent
qu'autrement les pollueurs en question ne sont plus solvabies et ne sont plus
dans le paysage, ne paient pas. Alors, c'est pour ça que le ministre
nous présente un projet de loi qui est incomplet, il faudra absolument
qu'il retienne une des formules que vous, vous avez présentées et
que les deux autres groupes, aujourd'hui, ont présentées. Merci,
MM. les maires.
M. Leduc: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, MM les maires
Leduc, Quirion et Labrosse, nous vous remercions de votre participation et vous
souhaitons un bon retour. La commission de l'aménagement et des...
M. Maltais: Mme la Présidente, il est 17 heures. On
était supposés ajourner à 18 heures? Est-ce que...
La Présidente (Mme Bélanger): Les travaux
étant terminés, monsieur, si vous voulez rester ici
jusqu'à 18 heures, M. le député de Saguenay, c'est votre
choix. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 16 h 50)
(Reprise à 20 h 13)
Le Président (M. Garon): Je déclare la commission
de l'aménagement et des équipements ouverte et je voudrais
inviter le Conseil du patronat, avec M. Ghislain Dufour, président,
à présenter les membres. Auparavant, j'aimerais vous dire
simplement que, selon ce qui vous a
été dit, c'est une heure. Normalement, les
représentants, vous le savez, prennent 20 minutes, la partie
ministérielle, 20 minutes et l'Opposition, 20 minutes. Si vous en prenez
plus, vous réduisez autant le temps de chacun des deux partis. Si vous
voulez prendre les 60 minutes, bien, il ne restera pas de temps pour les
questions. Alors, vous décidez. Si vous en prenez 10, bien, 50 minutes
se divisent moitié-moitié entre les deux partis, 25 minutes
chacun.
M. Dufour (Ghislain): M. le Président, on va choisir la
dernière alternative.
Des voix: Ha, ha, ha!
Conseil du patronat du Québec
M. Dufour (Ghislain): Je voudrais vous présenter mes
collègues. A ma gauche, M. Marc Saint-Cyr, qui est le coordonnateur en
environnement chez Shell Canada et qui représente avec nous
l'Association des fabricants de produits chimiques; M. Éric Meunier, qui
est directeur, recherche et consultation, à l'Association des
manufacturiers canadiens, section Québec; Me Philippe Casgrain, du
bureau de Byers, Casgraln, qui représente l'Association des mines
d'amiante du Québec; M. Roger Laporte, qui est le président de
Nova PB; et M. Jacques Garon, qui est le directeur de la recherche au Conseil
du patronat. M. le Président, en fait, oui, ma présentation sera
d'à peu près, au maximum, 15 minutes, ce qui donnera plus de
temps pour les questions et réponses.
Je dois dire qu'au Conseil on accueille favorablement le principe qui
sous-tend le projet de loi 65, tout comme on accueille favorablement
l'initiative du ministre de le soumettre à une commission parlementaire.
Nous croyons, en effet, que les initiatives environnementales sont beaucoup
plus efficaces lorsqu'elles sont élaborées sur une base
consultative avec tous les groupes intéressés.
Ce projet de loi, cependant, a une portée considérable
puisqu'il touche la contamination non seulement des sois, mais de
l'environnement en général, qu'il s'agisse, par
conséquent, de l'air ou de l'eau. À ce titre, les dispositions
proposées sont, vues par nous, extrêmement coerdtives et ne
laissent aucune place à des mesures économiques et fiscales pour
encourager les entreprises et les particuliers à collaborer de
manière efficace avec le gouvernement.
Nous voulons d'abord, M. le Président, profiter de l'occasion qui
nous est offerte pour réitérer notre philosophie face au
problème global de l'environnement. Cette dernière met l'accent
sur les aspects fondamentaux que sont les capacités technologiques et
l'impact économique. Nous ne pouvons pas passer sous silence ces
réalités qui sont des composantes essentielles de
l'équation non seulement du problème des sols contaminés,
mais également d'une large gamme de problèmes
environnementaux.
Ainsi, on ne semble pas toujours réaliser assez que les deux
facettes de l'amélioration de la qualité de l'environnement, soit
l'assainissement et la prévention, impliquent des coûts
énormes. Pourtant, les consommateurs et les entreprises assument des
taxes municipales de plus en plus élevées dont une partie
importante est affectée au traitement des eaux usées, pour ne
citer que cet exemple. Mais, à l'avenir, la hausse des coûts de
production des entreprises qu'entraînera l'obligation d'assurer le
développement économique tout en préservant un
environnement acceptable pour tous se reflétera, bien sûr, sur le
prix des biens et des services.
Par conséquent, une meilleure prise de conscience des entreprises
face aux problèmes environnementaux doit être conjuguée
à une conscientisation de la collectivité et même des
politiciens... quant au partage des coûts d'une meilleure qualité
de l'environnement: la protection de l'environnement n'est pas la
responsabilité seulement des entreprises.
Nos commentaires généraux, dans une première
partie, sur le projet de loi 65. Même si le CPQ est d'accord avec les
fondements de ce projet de loi qui s'appuie sur le principe du pollueur-payeur,
nous croyons par ailleurs que le gouvernement doit le revoir pour y
présenter une approche plus claire et plus cohérente. Il est en
effet essentiel que (es normes et les directives soient adaptées aux
difficultés rencontrées dans la réalité. Ainsi, et
c'est un exemple précis, M. le Président, la
décontamination d'un sol est nécessaire, je suis tout à
fait d'accord avec ça, et, à cet égard, il faut
prévoir où on enverra la matière contaminée, ce qui
n'est pas le cas dans le projet de loi. Aussi faudrait-il s'attendre à
ce qu'en parallèle au projet de loi on dépose un projet de mise
sur pied d'un réseau de centres de dépôt et d'entreposage
des sols contaminés.
De plus, ce projet de loi comporte, selon notre évaluation, des
coûts énormes. Le ministère en a-t-il fait l'analyse? La
commission Charbon-neau, pour sa part, affirme qu'il est très difficile
sinon impossible de déterminer les conséquences et le coût
du traitement des déchets dangereux puisqu'on en ignore même le
volume et la nature.
Par ailleurs, le projet de loi 65 n'est pas clair sur de nombreux
points. Ainsi, on doit remédier à la définition
déficiente d'un certain nombre de termes et de mots tels que, et ce
n'est pas exhaustif: étude de caractérisation,
décontamination, restauration, certains travaux, des activités
susceptibles de contaminer, l'altération de l'usage du sol, etc. Il est
nécessaire de clarifier ces termes avant l'élaboration de la
réglementation qui suivra l'adoption du projet de loi 65. Une
interprétation sans équivoque de ces termes est essentielle pour
assurer le succès de l'application de la législation
proposée.
Ceci dit, M. le Président, regardons maintenant un certain nombre
de commentaires spécifiques. Il n'y a pas tellement d'articles. Alors,
prenons l'article 31.42. Lisons-le: "Le ministre peut, lorsqu'il a des motifs
raisonnables - c'est le mot "raisonnables" qui est important - de croire qu'un
contaminant est présent dans l'environnement (...) ordonner à
toute personne ou municipalité (...) de lui fournir une étude de
caractérisation de l'environnement, un programme de
décontamination ou de restauration de l'environnement..."
Voici les quelques commentaires que nous avons sur cet article. Les
termes "motifs raisonnables" donnent, quant à nous, au ministre des
pouvoirs très importants puisqu'il n'a pas besoin d'une preuve pour
engager des actions ou des poursuites. La législation environnementale
de l'Ontario emploie les mots "motifs raisonnables et probables", ce qui
encadre plus strictement l'exercice de ses pouvoirs. D'ailleurs,
déjà, l'article 49.1 de la loi est beaucoup plus précis et
môme l'article 31.44 qu'on retrouve ici est plus précis encore,
lorsqu'il stipule: "Le ministre peut sur la foi d'un rapport d'analyse ou
d'étude ou de tout autre rapport technique..." Donc il y a des
fondements. Ce n'est pas purement le motif raisonnable. Le ministre ne devrait
pas avoir la possibilité d'émettre un ordre sans que soit
établie au préalable la preuve qu'un contaminant est
présent dans l'environnement, en contravention à la
réglementation.
Deuxième commentaire, toujours sur le même article. On ne
définit d'aucune façon ce qu'est une étude de
caractérisation qui, pourtant, est un peu le nerf du projet de loi et de
l'article. En principe, une telle étude doit préciser, quant
à nous, la nature et la quantité de contaminants, ce qui peut
exiger que l'on recoure à des méthodes très
sophistiquées et coûteuses, selon la nature des contaminants, et
aussi impliquer de sérieuses conséquences financières pour
les individus, les entreprises et les municipalités. C'est pourquoi,
disons-nous, le projet de loi devrait spécifier ce qu'une étude
de caractérisation devrait inclure. On se réfère ici
à deux documents qui ont déjà été
publiés par le ministère de l'Environnement qui, quant à
nous, donnent des orientations et des indications très précises
quant à l'utilisation que l'on pourrait faire des termes. Je ne lirai
pas ces références, M. le ministre, vous les connaissez mieux que
nous, mais c'est la "Politique de réhabilitation des terrains
contaminés" et le "Guide standard de caractérisation de terrains
contaminés", deux documents qui émanent de votre ministère
et qui sont beaucoup plus précis, dans le fond, que ce qu'on retrouve
dans la loi. Si vous tenez toujours à ces principes-là, si vous
adhérez toujours aux éléments qu'on y retrouve afin de
dissiper toute possibilité d'interprétation, surtout par les
juristes, à ce moment-là, vous auriez tout intérêt
à reprendre éventuellement ce que l'on retrouve dans les deux
documents en question et que je ne vous lis pas.
Par ailleurs, les obligations de mener, par exemple, une étude de
caractérisation ou d'entreprendre une activité de
décontamination peuvent s'avérer très difficiles, sinon
impossibles à réaliser, si l'accès à la
propriété d'une autre personne ou d'une autre entreprise est
nécessaire. Il s'agit tout simplement de se rappeler les images qu'on a
tous vues à la télé de Balmet à Saint-Jean
où vous aviez autour toute une série de terrains, dont une
école. Vous voyez le processus dans lequel on s'embarque lorsqu'il
faudrait aller décontaminer autour où l'on a pu contaminer sans
nécessairement que soit clarifiée la responsabilité de
celui qui veut décontaminer. Alors, ça, c'est un point
très important pour nous, l'entourage, qui n'est pas précis dans
la loi.
Donc, on dit: Dans de tels cas, une personne ou une entreprise qui
reçoit un ordre de décontamination ou de restauration devrait
avoir la possibilité de présenter son cas particulier devant les
autorités concernées.
L'application de cette législation, donc toujours à
l'article dont on parle, pose un problème particulier, puisqu'on ne
précise pas comment le ministère déterminera
l'identité de la personne ou de la municipalité qui a
contaminé l'environnement. Qu'on songe - et ça, vous allez en
entendre parler lorsque vous allez recevoir les municipalités - aux
sites orphelins dont peuvent hériter les municipalités qui se
verront pénaliser sans que, d'aucune façon, leur
responsabilité ait été engagée. Peut-être
serait-il approprié de considérer la création d'un fonds
spécial pour pallier à ce problème potentiel, comme on l'a
fait aux États-Unis.
Des commentaires maintenant sur l'article 31.43 que je résume
rapidement: "Le ministre peut, lorsqu'il constate la présence d'un
contaminant dans l'environnement (...) ordonner à toute personne ou
municipalité (...) de prendre toutes les mesures qu'il lui indique pour
décontaminer ou restaurer l'environnement." Le premier commentaire,
c'est que, si le ministre constate, c'est qu'il a déjà des
données qui démontrent irréfutablement la contamination de
l'environnement et qui reposent donc sur une étude de
caractérisation. Il serait pour le moins arbitraire d'imposer aux
entreprises la réalisation d'études de caractérisation en
vertu de l'article 31.42 alors que, dans d'autres cas, le ministère les
a menées lui-même.
Deuxième commentaire. Les pouvoirs du ministre sont beaucoup trop
grands puisqu'il peut ordonner - et là, je cite un certain nombre de
pouvoirs - "de prendre toutes les mesures (...) pour décontaminer ou
restaurer l'environnement", sans paramètre, sans... Des
précisions, donc, concernant les moyens techniques et économiques
devraient être apportées ici. La méthode et les moyens
utilisés pour restaurer ou décontaminer
l'environnement devraient être laissés à la
discrétion de la personne ou de la municipalité responsable.
Ça, c'est un point important pour nous. Toutes les fois qu'on a
parlé d'environnement, M. le ministre, avec vos
prédécesseurs, on a toujours suggéré que le
législateur se donne plus la responsabilité des objectifs, des
contrôles et qu'il laisse plus aux entreprises qui ont, des fois,
certaines technologies les moyens, les façons de réaliser. On
vous demande de surveiller, il n'y a aucun problème avec ça, mais
sur la façon de réaliser... En donnant la possibilité de
choisir les moyens techniques de décontamination et de restauration, on
pense qu'on pourrait réduire les coûts, encourager l'innovation en
matière de technologie environnementale et quand même
réaliser vos objectifs.
Un dernier commentaire sur cet article-là, M. le
Président, et je ne le relirai pas. On pourra le relire ensemble tout
à l'heure. Pour nous, c'est un article qui est inacceptable parce qu'on
peut l'appliquer rétroactivement sans aucune limite de temps. Nous
estimons qu'on ne peut faire porter rétroactivement à toute
personne ou municipalité la responsabilité d'avoir
contaminé l'environnement alors même que, lorsque la contamination
est survenue, aucune loi n'était en vigueur à cet égard et
que les activités pouvaient alors être exercées en toute
légalité. Par conséquent, l'assainissement de
l'environnement nous apparaît incomber, en tout cas en grande partie,
à la collectivité tout entière.
Commentaire important aussi sur l'article 31.45. Vous save2, c'est celui
qui dit qu'on peut informer par les médias pour la possibilité de
contamination appréhendée, etc. Pourquoi est-il nécessaire
de rendre une ordonnance publique lorsque des études n'ont pas encore
confirmé s'il y a contamination ou non? L'aspect préjudiciable
d'une telle mesure est tout à fait considérable et on ne peut
accepter a priori que la réputation d'une personne, d'une entreprise,
d'une municipalité soit soumise aux aléas d'une simple
présomption qui pourrait s'avérer tout à fait
irréaliste. Cela pourrait avoir, on vous le dit carrément, un
effet désastreux pour certaines entreprises cotées en Bourse. Le
problème de l'environnement est tellement sensible, actuellement,
qu'accuser une entreprise d'un certain nombre de problèmes simplement
sur des bases de présomption non prouvée pourrait avoir un impact
important sur les actions en Bourse et sur les municipalités
également, dans certains cas.
Pouvoirs réglementaires, M. le Président. Ils sont, quant
à nous, vagues comparativement à la loi antérieure et,
surtout, les pouvoirs d'ordonnance et de réglementation sont
accordés aux gouvernements - et ça, on n'est peut-être pas
sûrs de ce qu'on avance, mais le ministre pourra nous dire ce qu'est
vraiment la proposition du projet de loi - sans préciser qu'ils seront
assujettis à la Loi sur les règlements. J'aimerais ça
qu'on entende le ministre nous donner cette garantie de prépublication
des règlements et non de publication, comme on dit; la mise en vigueur
immédiate, c'est quoi les délais, etc. Le projet de loi n'est
vraiment pas clair là-dessus. Et, bien sûr, vous ne vous
surprendrez pas que l'on vous dise que les pénalités dans ce
projet de loi là sont très sévères, au dire
même du ministre, les plus sévères au Canada.
En conclusion, le projet de loi donne des pouvoirs
discrétionnaires extraordinaires au ministre de l'Environnement. Il est
nécessaire, par ailleurs, de mieux définir de nombreux termes
utilisés dans le projet de loi et qui peuvent avoir des
conséquences sérieuses sur la santé financière des
particuliers, des entreprises et des municipalités.
Il apparaît aussi, et ça, c'est important, que le projet de
loi laisse peu de place à une collaboration efficace entre les
autorités gouvernementales et le secteur privé. Pourtant, au
moment où le gouvernement doit faire face à de nombreuses
difficultés financières, il serait opportun de canaliser les
forces du secteur privé pour mieux protéger et assainir
l'environnement; c'est ce que laissait d'ailleurs entendre le dernier discours
inaugural dont l'esprit, sinon la lettre, ne semble malheureusement pas se
retrouver dans le projet de loi au niveau des incitations fiscales.
En terminant, M. le Président, aujourd'hui, dans les journaux, on
lisait que le ministre était un peu préoccupé de la
réaction qu'il pourrait obtenir du milieu des affaires - je ne sais pas
si on le citait bien; on est tous habitués à ce genre de citation
- en disant que la réaction des entreprises pouvait être
très rigide, très forte. En tout cas, ce n'est pas du tout dans
cet esprit-là que nous, on vient vous voir. Je pense qu'ils ont dit, en
introduction: Dans le domaine de l'environnement, il faut absolument collaborer
avec le gouvernement et les entreprises; c'est purement là-dessus que se
bâtira vraiment quelque chose de valable. On a souvent l'impression, et
ça, c'est un problème politique, que le ministre connaît
des problèmes qu'il ne devrait pas connaître.
Mais aussi, du côté des entreprises, il ne faut pas penser
que toutes les entreprises sont des Balmet ou des Mark Levy. La majorité
sont des excellents citoyens corporatifs. Alors, il ne faudrait pas faire des
lois qui visent les pas bons ou les quelques citoyens corporatifs mauvais et
mettre dans des moules vraiment très restrictifs, qui ne nous conduiront
à rien, l'ensemble des entreprises. Là-dessus, M. le ministre, je
veux vous assurer de notre plus entière collaboration dans la
rédaction correcte, saine et cohérente de ce projet de loi. (20 h
30)
La Présidente (Mme Pelchat): Merci, M. Dufour. M. le
ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la
Présidente, vous me permettrez de remercier le Conseil du
patronat du Québec et ses représentants pour un mémoire
qui, à sa lecture, nous indique que le Conseil du patronat a pris le
temps voulu pour évaluer les impacts - et je pense que c'est important
que ce soit fait - de l'application possible d'un tel projet de loi. De
façon à procéder le plus rapidement possible, je
reprendrai assez rapidement les principales questions.
Le Conseil du patronat parle des considérations
économiques reliées à l'environnement. Il en parle
à l'introduction et il en parle en conclusion également. Comme
ministre de l'Environnement, j'ai toujours cherché avec le maximum
d'ouverture d'esprit l'application du principe pollueur-payeur depuis que je
suis arrivé au ministère. Sauf dans le cas de la personne qui
réside en milieu rural et qui a à payer pour sa fosse septique et
son champ d'épuration, je n'ai à peu près pas
retrouvé dans le quotidien l'application du principe pollueur-payeur.
À partir des municipalités où le gouvernement du
Québec défraie 95 % de la construction d'usines
d'épuration, jusqu'à toutes les interventions qu'on a à
faire en matière de décontamination, qu'il s'agisse de la Balmet,
de Duparquet en Abltibi, de l'est de Montréal, je me retrouve devant une
situation, et je le dis bien franchement - et, si vous en avez, je vous invite
à m'en faire part - où c'est le contribuable-payeur en
matière de décontamination ou de prévention de la
pollution. Ça, c'est à certains moments un peu difficile à
accepter, lorsqu'on se place de ce côté-ci de la table.
Commentaires généraux sur le projet de loi 65. Je pense
que vous posez une question fondamentale quand vous dites au deuxième
paragraphe: Où enverra-t-on la matière contaminée? On a
bâti des usines d'épuration, on ne s'est pas soucié
où les boues allaient, etc., la suite dans le système, qu'on
appelle. Actuellement, pour les matières considérées
dangereuses au Québec, il n'y a rien de disponible. C'est Sarnia,
Ontario, ou exportation hors pays. Le maire de LaSalie qui vous a
précédés cet après-midi nous a indiqué qu'il
y aurait des "facilités", mais pour la Communauté urbaine de
Montréal, de disponibles bientôt. Mais, à part ça,
la question mérite d'être posée.
Cependant, elle doit être posée de façon
concurrentielle avec toute la question des développements
technologiques. On a eu le maire d'Anjou qui nous a dit que Petro-Canada avait
décontaminé des superficies importantes dans sa
municipalité sans avoir recours à l'enfouissement. Donc,
l'évolution technologique, il est important qu'on s'y attarde, parce
qu'il y a moyen de faire des choses sans avoir recours à
l'enfouissement. Mais la question que vous posez est fondamentale. Comment
peut-on atteindre le bout de la chaîne sans rester pris avec le
problème, ni au point de vue gouvernemental, ni sur le plan de
l'entreprise à qui on impose des obligations? Là-dessus, il y a
des précisions à apporter de la part du gouvernement.
Commentaires spécifiques. Le ministre peut sur la foi d'un
rapport d'analyse ou d'étude ou de tout autre rapport technique... Vous
faites la comparaison avec la législation ontarienne. Je vous dirai
qu'il y a une obligation qui est contenue à l'article - et je vous le
souligne bien respectueusement - 31.44 qui parle de l'obligation que l'avis
ministériel soit accompagné d'une copie de tout rapport d'analyse
ou d'étude ou de tout autre rapport technique dont le ministre a tenu
compte. Notre prétention - et j'aimerais vous entendre tantôt
là-dessus - est à l'effet que cette obligation va même plus
loin qu'en Ontario en ce sens que la rédaction comme telle de la
législation nous impose des obligations supérieures à
celles qui sont imposées au ministère ontarien, lorsqu'on parie
de motifs raisonnables et probables. Lorsqu'on ajoute l'obligation
d'accompagner le rapport, on ajoute une obligation qui est supérieure,
d'après l'interprétation qu'on a faite de "probable".
À la page 4 de votre mémoire, vous dites: "C'est pourquoi
le projet de loi devrait spécifier ce qu'une étude de
caractérisation devrait inclure. Le ministère de l'Environnement
donne déjà des indications à cet effet dans deux documents
publiés en février 1988." Vous avez raison. Ça devrait
faire partie d'une réglementation, ce que vous soulignez. Nous le
retenons. On ne pense pas que ça doive faire partie d'une
législation, mais on pense que ça doit faire partie d'une
réglementation. Présentement, ça fait partie d'une
politique et, souvent, au ministère de l'Environnement, c'est ce qu'on
a, des politiques. Et des politiques, ce n'est pas opposable aux tiers. Ce
n'est pas opposable aux individus dans la société. En ce sens,
nous avons l'intention de répondre à votre invitation, mais de ne
pas l'incorporer dans la législation parce que les choses changent trop
rapidement, mais sur le plan de la réglementation ça nous semble
être une avenue intéressante.
À la page 5, vous traitez des "sites orphelins dont peuvent
hériter les municipalités qui se verront pénaliser sans
que d'aucune façon leur responsabilité ait été
engagée." On a entendu déjà la Conférence des
maires de la banlieue. Nous aurons l'occasion d'entendre la ville de
Montréal, les unions municipales, etc. Je vous rappellerai strictement
que, l'automne dernier, avec le gouvernement fédéral, nous avons
signé une entente fédérale-provinciale qui traitait des
sites orphelins, une entente de 250 000 000 $ sur cinq ans, pancanadienne, dont
200 000 000 $ pour la décontamination des sites comme tels. Ce n'est
peut-être pas suffisant, mais c'est peut-être un pas dans la
direction que vous nous indiquez, là, où le gouvernement prend
quand même certaines responsabilités avec l'argent des
contribuables
Concernant l'article 31.43, au bas de la page: "Par ailleurs, les
pouvoirs du ministre sont beaucoup trop grands puisqu'il peut ordonner de
"prendre toute les mesures (...) pour décontaminer ou restaurer
l'environnement." Si vous laissez les points de suspension et que vous
n'écrivez pas "qu'il lui indique" - parce que la loi crée une
obligation au ministre d'indiquer les mesures... Le reste de l'analyse est
très solide mais, lorsque vous ajoutez ce fardeau au ministre, il faut
qu'il indique les mesures. Maintenant, je retiens quand même votre
suggestion et je pense qu'elle était très constructive à
cet effet, d'indiquer peut-être les objectifs mais de laisser à
l'entreprise le choix de la façon d'atteindre les objectifs. Je pense
qu'on peut, en laissant ce choix, atteindre deux objectifs: économiser
les coûts directs et permettre de la créativité de la part
du secteur privé. Donc, à ce niveau-là, c'est une
suggestion, également, qui nous apparaît intéressante, qui
est faite par le Conseil du patronat du Québec.
Au paragraphe suivant, à la page 6: "II est inacceptable que les
articles 31.42 et 31.43 puissent être appliqués
rétroactivement sans aucune limite dans le temps." Et là j'ai
indiqué "grosse question", parce que je me la suis posée et je
vais vous la poser aussi naïvement que je me la suis adressée dans
le processus de réflexion qui a amené à la
rédaction du projet de loi. Il y a des gens qui peuvent prétendre
que le projet de loi devrait s'appliquer à partir de sa sanction par le
lieutenant-gouverneur, sa mise en vigueur. Qu'est-ce qu'on fait avec tous les
terrains qui ont déjà été contaminés au
Québec et qui en assume la décontamination? Jusqu'où
doit-on retourner dans le temps et à partir de quelles normes et de
quels critères? Je pense que vous avez touché là, au
niveau de ce paragraphe, la question qui doit sous-tendre
l'applicabilité dans le temps du projet de loi et j'aimerais vous
entendre davantage sur cet aspect.
Les pouvoirs réglementaires, je vais vous répondre
immédiatement, oui les règlements seront assujettis à la
Loi sur les règlements, c'est-à-dire qu'il y aura
prépublication, etc., les mécanismes que vous connaissez bien.
Maintenant, ce n'est pas le cas pour le pouvoir d'ordonnance. Le pouvoir
d'ordonnance est, pour autant que je le sache, exercé avec parcimonie,
de façon studieuse. Si vous pouvez m'apporter des exemples où
ça n'a pas été fait... À chaque fois que j'ai,
comme ministre, à signer une ordonnance, je vous dirai que je fais
monter tous les rapports de la machine et, quelquefois même, je prends le
téléphone pour vérifier à l'extérieur de la
machine, parce que c'est un pouvoir extraordinaire, le pouvoir d'ordonnance qui
est accordé au ministre, et il se doit d'être exercé de
façon parcimonieuse parce qu'il a des conséquences qui peuvent
être graves à la fois sur le plan environnemental et sur le plan
économique.
La conclusion: "Ce projet de loi laisse peu de place à une
collaboration efficace entre les autorités gouvernementales et le
secteur privé. Pourtant, au moment où le gouvernement doit faire
face à de nombreuses difficultés financières, il serait
opportun de canaliser les forces du secteur privé pour mieux
protéger et assainir l'environnement."
Vous avez à la fois raison ou tort, si vous me permettez un
commentaire d'ordre philosophique. En matière de décontamination,
toute la question des sites orphelins est assumée par les niveaux de
gouvernement, à partir des impôts et des taxes des contribuables.
Vous avez raison de souligner que le gouvernement, dans des situations
financières difficiles - le ministre de l'Environnement se fait
constamment critiquer, pour ne pas dire harceler par l'Opposition officielle
pour ne pas obtenir des crédits davantage importants, etc. Et, à
chaque fois, et je devrais dire, pas encore d'une façon quotidienne,
mais au moins d'une façon hebdomadaire, qu'un dossier éclate sur
le plan de la décontamination d'un site considéré
dangereux pour la population, c'est l'argent des contribuables qui est mis
à l'oeuvre pour caractériser et décontaminer. Je n'ai pas
encore un exemple à vous citer où c'est l'argent du pollueur, du
propriétaire, d'un fonds constitué par les propriétaires
ou par le pollueur; c'est, à chaque fois, l'argent du fonds
consolidé de la province de Québec qui est mis à
contribution. Donc, le partenariat est à sens unique au moment où
on se parle. Si vous parlez d'un équilibre dans le partenariat, on
pourrait peut-être être intéressé, mais, au moment
où on se parle, c'est le déséquilibre le plus total et le
plus complet. À moins que vous n'ayez des exemples à me
manifester que je ne connaisse pas, mais j'ai la prétention de suivre,
au moins depuis six mois, assez attentivement les dossiers en matière
environnementale.
C'était là l'essentiel des commentaires. Si vous avez des
réactions.
La Présidente (Mme Pelchat): M. Dufour.
M. Dufour (Ghislain): Mme la Présidente, est-ce que je
pourrais entendre le ministre réagir à notre commentaire sur
l'article 31.45?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse. La question de rendre
une ordonnance publique ou non, c'est ça?
M. Dufour (Ghislain): La question de publier, de rendre coupable
quelqu'un qui ne le sera peut-être jamais.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous ai répondu en
partie en vous indiquant la prudence qui est de mise, en tout cas que j'exerce
comme ministre de l'Environnement dans ces situations. Si je vous disais ce
soir...
M. Dufour (Ghlslain): Là, vous n'aurez pas le choix, vous
allez être obligé de le faire, là; ce n'est plus une
question de prudence.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais si je vous disais ce
soir que je me rends à votre argument et que j'endosse le principe de la
préservation de la réputation par le secret en fonction de la
règle que tout le monde est présumé innocent
jusqu'à tant qu'il soit déclaré coupable, etc., je vous
dirai qu'en matière environnementale, en 1990, la meilleure façon
de se retrouver en première page des journaux, c'est d'y apposer
l'étiquette "confidentiel".
M. Dufour (Ghislain): Mme la Présidente, il y a beaucoup
de matériel dans ce que le ministre a interrogé. En fait, il a
repris chacun de nos points; ça appelle, dans la majorité des
cas, une réplique. Alors, je vais partager avec mes collègues. Au
tout début, ça n'a rien à voir comme tel avec le projet de
loi 65, mais vous le situez en perspective et vous nous demandez, dans le fond,
si on connaît des entreprises qui ont pris action au plan
économique, au niveau du projet de loi comme tel, qui n'ont pas attendu
le projet de loi. Oui, il y en a plusieurs et, comme moi, vous le savez.
L'Association des industries forestières investit
énormément d'argent dans ce domaine-là; Petro-Canada dans
Montréal-Est; Noranda, bien sûr, vous en payez une partie, mais la
compagnie en paie une partie. Alors, on pourrait dresser toute une liste de
compagnies qui sont embarquées carrément. On donne toujours, je
ne dis pas vous, mais souvent on donne l'impression que personne ne fait rien
dans le domaine de l'environnement alors qu'il y a beaucoup de choses qui se
font et vous le savez comme moi.
La question que vous ...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Dufour, si vous me le
permettez, il y a également les pétrolières qui ont
collaboré à la réduction de soufre pour réduire les
pluies acides. Dernièrement, on a eu une bonne collaboration et je tiens
à le souligner.
M. Dufour (Ghislain): Je pense que ce n'est pas assez dit, si
vous me permettez. On met toujours en évidence les mauvais cas, les
cas-problèmes, et je comprends que le pouvoir politique est toujours
pris avec ces cas-là, mais il reste quand même qu'il se fait
beaucoup de choses au niveau des entreprises et ce n'est pas assez publicise.
(20 h 45)
La deuxième réaction que vous avez, et vous nous retournez
la question du où: Où, en fait, devrait-on disposer des sols
contaminés? Évidemment, on n'a pas de réponse à
ça, mais ce que l'on dit, c'est que le gouvernement devrait
probablement, au moment où il plonge dans ce domaine-là, avoir
des solutions parallèles: ou ce sont des centres de réception des
résidus ou c'est, comme on le fait dans le cas des BPC, avec des camions
mobiles, mais il doit y avoir quelque chose. Autrement, vous avez une loi qui
ne dira rien, parce que les gens vont décontaminer, mais ils ne sauront
pas où mettre leur sol contaminé.
Sur la question des motifs raisonnables, qui est une question de droit,
je demanderais à Me Casgrain de pousser un peu plus loin ce
dossier-là.
M. Casgrain (Philippe): Vous avez raison, M. le ministre,
qu'effectivement, à l'article 31.44, on dit bien que vous devez fournir
avec l'avis l'analyse ou l'étude ou autre rapport technique, sauf qu'il
faut quand même se rendre là pour savoir que. pour que vos motifs
soient raisonnables, il faut qu'ils soient appuyés là-dessus. Je
ne vois pas pourquoi il n'y aurait pas lieu d'amender l'article pour dire "sur
la foi de", à l'article 31.42, ce qui vous mettrait dans une situation
beaucoup moins périlleuse que celle de croire que c'est
déjà là. Il me semble que ça pourrait se faire. Je
pense qu'en Ontario on n'a pas la foi des rapports. Mais là, c'est l'un
ou l'autre ou l'un et l'autre.
Deuxième remarque, si vous me le permettez. Je ne sais pas si
c'est la rédaction ou non, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être une
réaction immédiate, parce que les choses vont rapidement. C'est
une idée intéressante que vous...
M. Casgrain: Pour vous-même.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah non! Ça va.
M. Casgrain: Ce n'est jamais bon de se mettre dans une situation
où on doit exercer uniquement son jugement sans rien pour l'appuyer.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ou pour mes successeurs. On ne
sait jamais.
M. Casgrain: Bien, j'allais... Vous me permettrez de ne pas le
dire.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Casgrain: Puis-je ajouter ceci? Dans la loi, justement,
à cet article 31.44, j'ai noté avec curiosité qu'on dit:
"rapport d'analyse ou d'étude ou de tout autre rapport technique". Si
vous regardez l'article 25 tel que rédigé actuellement, il n'est
pas rédigé comme ça du tout, parce que l'article 25 dit:
"analyse, étude ou autre rapport technique". Je ne sais pas si on veut
jouer un
tour ou non ou si on s'est trompé, mais, à l'article 25 de
la loi actuelle, on a droit à tous les rapports. Ici, il y a un choix
qui est fait. On peut donner: "d'analyse ou d'étude ou de tout autre
rapport". Moi, j'aimerais mieux que ce soit tout comme dans l'article 25. Je ne
sais pas si c'est une erreur de rédaction, mais, enfin, je vous le
souligne.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On me dit que c'est une erreur de
rédaction.
M. Casgrain: Bon. D'accord.
M. Dufour (Ghislain): Si vous me le permettez, pendant qu'on est
dans les erreurs de rédaction, on va vous en souligner d'autres.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ha, ha, ha!
Ça va.
M. Casgrain: Oui, il y en a quelques-unes sur les numéros.
Je vous dis ça en passant, rapidement. À la page 7, article 6, on
dit "31.45" et c'est 31.44, je pense.
La Présidente (Mme Pelchat): Je rappelle à M.
Dufour et à M. le ministre qu'il vous reste cinq minutes.
M. Casgrain: Rapidement, M. le ministre, très rapidement,
je vous dis ceci simplement. L'article 31.44. Moi, quand on me dit que j'ai une
possibilité de faire quelque chose, je me pose des questions
considérables. On me donne la possibilité de faire des
représentations. J'aimerais mieux avoir un droit d'en faire. On l'a ou
on ne l'a pas. C'est assez sérieux et il me semble qu'on devrait avoir
le droit de le faire. Je vous dis ça en passant.
J'ajoute autre chose qui va peut-être vous surprendre aussi. Si
vous allez à...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Rapidement. La possibilité,
c'est repris de l'article 25, hein? Concordance.
M. Casgrain: Oui, justement. Mais..
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Ça va. Vous
critiquez à la fois l'article 25. Ça va.
M. Casgrain: Oui, je le sais bien. Mais, dans l'ancienne loi,
entre nous, il y a bien des choses à faire. Pendant qu'on y est, il faut
qu'elle soit refaite en entier. Ce n'est plus possible. Elle est
polluée...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Casgrain: ...de numéros, on ne se retrouve plus dedans.
Voyez-vous? Regardez-moi cette brique. Et là il faut la...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne vous dirai pas que c'est
facile. Je ne prétendrai pas que c'est facile.
M. Casgrain: Ce n'est pas possible. Ça coûte une
fortune aux clients, hein?
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Pelchat): Pour revenir au projet de loi
65, Me Casgrain, on vous entend.
Une voix: ...vous connaissez vos tarifs; ça coûte
une fortune.
M. Casgrain: II paraît qu'ils sont polluants. Rapidement,
et je ne veux pas l'oublier, regardez ce qui se passe - et je pense que,
là aussi, c'est peut-être une erreur - au niveau de l'article
31.49. C'est ça. Ah oui! C'est qu'aux articles 31.46 et suivants vous
donnez des avis, n'est-ce pas? Il n'y a aucun appel de ces avis-là parce
que ce ne sont pas des ordonnances.
Une voix:...
M. Casgrain: Oui. On les appelle "avis". Quand c'est une
ordonnance, il y a un appel, en vertu de l'article 96.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On me dit que l'article 6 qui
amende l'article 96 fait en sorte qu'on pourrait débattre de la
situation...
M. Casgrain: Bien, je l'ai regardé aussi. Entre vous et
moi, là...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Étant donné qu'on a
cinq minutes et que je sais que vous pouvez plaider...
M. Casgrain: Je vous laisse la pensée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va.
M. Casgrain: Vous êtes avocat et vous allez comprendre
comme moi que, si vous étiez dans ma situation, vous diriez: Moi,
j'aimerais mieux être sûr que j'ai un appel plutôt que de me
demander: Est-ce que j'en ai un ou si je n'en ai pas un?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'objectif est de donner un droit
d'appel.
M. Casgrain: Dans le cas d'avis aussi? M. Paradis
(Brome-Missisquoi): Oui.
M. Casgrain: Je l'ai bien regardé, je pense qu'il faudrait
que ce soit plus clair.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
M. Casgrain: Parce que, vraiment, ça ne l'est pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À clarifier.
M. Casgrain: déjà que l'article 96 n'est pas
fortiche, hein? vous savez, fort probable, raisonnable, erreur de droit ou de
fart. c'est quasiment de l'évocation.
M. Dufour (Ghislain): Sur la question des études et de la
définition de caractérisation, je demanderais à M. Meunier
de réagir rapidement.
M. Meunier (Éric Hubert): Je dois dire d'ailleurs qu'on
accueille favorablement la suggestion du ministre de voir peut-être
à inclure les études de caractérisation,
c'est-à-dire les définir par voie de règlement, et on va
suivre avec attention la concrétisation de ce voeu.
M. Dufour (Ghislain): À condition - et j'ajoute "à
condition" - qu'on ne retrouve pas des définitions de mots dans le
règlement. Parce que, si, pour définir "caractérisation",
c'est dans le règlement qu'on attend, on a un problème, parce que
vous savez comme moi que dans bien d'autres lois... Autrement dit, les grands
termes doivent être définis dans la loi, après ça,
que, par règlement, on reprenne à peu près les principes
ou les éléments qui sont là, on n'a pas de
problème. Mais n'attendez pas dans le règlement pour
définir les mots parce qu'on va avoir un problème.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): En matière
environnementale, et je pense que vous en conviendrez, c'est un domaine qui
évolue, sur le plan scientifique, rapidement. Le danger que nous avons,
et je suis d'accord que le processus législatif comporte plus de
conséquences que le processus réglementaire, sauf que, si on
définit trop sur le plan législatif en matière
environnementale, on se bloque dans l'évolution de la technologie, de la
science, etc. La caractérisation aujourd'hui, au ministère, ils
peuvent vous donner une définition très rapide de ce que c'est,
aujourd'hui. Mais la caractérisation, à cause de
l'évolution technologique, dans 15 mois, c'est quelque chose d'autre
parce que la technologie a évolué, on peut le faire de
façon différente. Il ne faut pas se cristalliser dans ces
définitions-là. Je vous le soumets bien respectueusement. Mais,
par règlement, il faudrait le faire en suivant la prépublication,
la possibilité des associations de se faire entendre, etc.
La Présidente (Mme Pelchat): Merci, M. le ministre. M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Il y a beaucoup de
matière dans votre mémoire. Je veux féliciter les gens du
Conseil du patronat pour avoir bien fait leurs devoirs. Vous dites, dès
la page 1: "À ce titre, les dispositions proposées sont
extrêmement coercitives et ne laissent aucune place à des mesures
économiques et fiscales pour encourager les entreprises et les
particuliers à collaborer de manière efficace avec le
gouvernement." Est-ce que vous pouvez nous donner des exemples de ça,
des mesures économiques et fiscales pour encourager les entreprises
à collaborer de manière efficace?
M. Dufour (Ghislain): Dans le dernier discours inaugural, Mme la
Présidente, il y avait l'annonce, notamment par le premier ministre, que
l'on pourrait donner des crédits fiscaux - on ne demande pas des
subventions, des crédits fiscaux - pour des entreprises qui
"initieraient" de la nouvelle technologie; qu'il s'agisse de la chimie ou des
pâtes et papiers, il y a constamment de la nouvelle technologie. Alors,
on a un problème, évidemment, au Québec. C'est qu'il faut
être compétitif avec nos principaux concurrents et, souvent,
l'entreprise n'a pas les possibilités de se donner cette nouvelle
technologie. Alors, c'est par des programmes fiscaux, par la SDI ou autrement,
il y en a beaucoup de programmes d'aide aux entreprises, alors, pour nous, tout
ce qui s'appelle crédits fiscaux dans le domaine de l'environnement,
c'est positif parce que c'est créateur d'emplois souvent, c'est
"développeur" de nouvelles technologies, etc. Alors, globalement, c'est
ça. Je ne pourrais pas vous en faire une application concrète,
mais c'est ça.
M. Lazure: J'ai suivi votre discussion avec le ministre et, moi,
je dois dire au départ, vous vous en doutez un peu, M. Dufour, vous me
connaissez, que je ne trouve pas que les mesures sont trop coercitives en
général parce que le ministre s'est plaint tellement de fois
juste depuis six mois qu'il n'avait pas les pouvoirs de faire telle chose,
telle chose, telle chose pour corriger telle situation. Alors, nous, on l'a
imploré de s'en donner plus de pouvoirs. Il s'en donne là. Moi,
je pense qu'on ne peut pas reprocher à un projet de loi comme
celui-là d'être trop sévère, à la condition
qu'il soit équitable. J'ai noté à quelques reprises que
vous avez fait des suggestions qui vont rendre plus équitable
peut-être cette sévérité-là.
Là-dessus, je vous suis, mais je ne vous suis pas sur le degré de
sévérité.
À la page 2, vous...
M. Dufour (Ghislain): Est ce que je peux réagir
là-dessus?
M. Lazure: Oui, oui, oui.
M. Dufour (Ghislain): On nous a déposé, M. le
député de La Prairie, en même temps que le projet de loi,
un projet de règlement. Je ne sais pas si vous l'avez fait analyser
par...
M. Lazure: Je l'ai eu après, moi. Je l'ai eu aujourd'hui,
le projet de règlement.
M. Dufour (Ghislain): Vous avez des problèmes de poste
qu'on n'a pas.
M. Lazure: Non, non, ce n'est pas des problèmes de poste.
Mon problème, c'est que je ne suis pas dans la pensée du ministre
autant que vous l'êtes peut-être et que d'autres groupes le
sont.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II est bien placé pour le
dire, c'est mon psychiatre personnel.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: C'est ça. Je lis dans sa pensée, mais
lui ne lit pas dans la mienne. Fermons la parenthèse.
M. Dufour (Ghislain): Par exemple, nous, on a fait analyser. On
pourrait regarder le plomb, et on pourrait demander à un
spécialiste du plomb, le président de Nova PB, de voir la norme
actuelle et la norme qui est proposée dans le règlement. Alors,
cette norme proposée dans le règlement est beaucoup plus basse
que ce qui existe actuellement. Donc, ça devient beaucoup plus
coercitif.
M. Lazure: Mais on a des explications pour ça aussi qu'on
a entendues aujourd'hui, justement, des représentants des
départements de santé communautaire. J'ai lu aussi de la
littérature médicale. Les recherches démontrent qu'il
faut... D'ailleurs, c'a été fait ailleurs dans d'autres pays. Ils
ont modifié vers une plus grande sévérité les
normes pour le plomb.
Mais je voudrais continuer le fil, si vous permettez. A la page 2, vous
dites: "...l'assainissement et la prévention, impliquent des coûts
énormes." Je faisais valoir aujourd'hui au ministre qu'une des
façons... Parce que moi je pense que le projet est incomplet. Ce n'est
pas seulement en y mettant de grosses amendes et en donnant beaucoup de
pouvoirs au ministre qu'on va régler le problème. Je pense qu'il
faut aussi d'autres mesures. Je vais y arriver tantôt. Mais une des
façons, c'est de prévenir, d'empêcher que des industries
s'installent et se mettent à polluer volontairement ou involontairement.
Et une des façons d'empêcher ça, de faire de la
prévention, c'est d'avoir, avant que l'entreprise s'installe, des
audiences publiques, un examen de l'impact de l'installation de cette
entreprise-là, que ce soit une aluminerie, une papetière,
n'importe quoi. Moi, je voulais avoir votre position au Conseil du patronat sur
la mise en vigueur de façon plus précise de l'article n qui
permettrait les audiences publiques pour les grands projets.
M. Dufour (Ghislain): Écoutez, là vous entrez dans
tout ce qui s'appelle concurrence, dans tout ce qui s'appelle
compétition. Si vous avez des contraintes plus fortes ici que vous en
avez ailleurs, à ce moment-là, vous vous embarquez dans des
problèmes. Exactement comme vous me donnez l'exemple du plomb; parce
qu'un DSC ou un CLSC est venu vous dire ici qu'à cause de certains
problèmes il faut baisser les normes. Nous autres, on n'a pas de
problème à ce que pour le plomb, le mercure, etc. - il y en a
deux pages - les normes soient baissées. Mais qu'on ne se place pas dans
une situation où, au Québec, tout est plus bas qu'ailleurs,
où tout est mieux qu'ailleurs, etc. Si on fait ça, il faut
vraiment qu'on réalise qu'il y a un coût à payer. Mais
ça, on n'en parle jamais. Et ce coût à payer, c'est des
emplois. C'est une approche globale. On ne se refuse pas à des audiences
sur des grands projets. Remarquez bien, on l'a dit en commission parlementaire
au salon rouge, récemment, sur le dossier d'Hydro, par exemple, on est
totalement d'accord avec ça. Mais, dans tous les projets, ce n'est pas
nécessairement la plus grosse aluminerie ou ia plus grosse
papetière qui va créer des problèmes à ce
moment-là. Ça va être n'importe quelle nouvelle technologie
où on va demander, où une petite entreprise de plomb va demander
des audiences publiques. Je veux dire, à ce moment-là, vous allez
avoir des problèmes. On aime mieux que le ministre dise: Voici les
objectifs pour l'entreprise dans le plomb, mais vous avez les moyens de
réaliser ce que, nous, on vous propose comme objectif.
M. Lazure: Vous admettrez, M. Dufour, qu'il y a tout un champ qui
n'est pas exploré au Québec, à savoir la création
d'emplois rattachés à la création de nouvelles
technologies pour contrer la pollution. Ça, ça n'est pas
développé.
M. Dufour (Ghislain): Ça, on est d'accord avec ça.
Je disais "d'autres façons" tout à l'heure quand je vous parlais
des crédits fiscaux qui permettraient peut-être de se créer
ici une industrie, une méthode antipollution.
M. Lazure: Je suis l'ordre des pages pour que ce soit plus
commode. Moi, je suis d'accord avec vous qu'il faudrait qu'il y ait des centres
de dépôt et d'entreposage de sols contaminés. Je suis
d'accord avec le ministre, ce n'est pas dans un projet de loi que ça va.
Mais, là où on se rejoint, moi, je critique le ministre de ne pas
exercer assez de leadership en cette matière. Il laisse l'entreprise un
peu au hasard des intuitions
d'un entrepreneur, occuper ou pas occuper ce champ-là. Il me
semble que c'est un domaine tellement important pour la santé et la
sécurité du public; il faudrait qu'il y ait un leadership, il
faudrait qu'il y ait des orientations de données par le ministère
en cette matière. (21 heures)
II y a certains groupes qui nous ont proposé, à part des
pouvoirs du ministre, les grosses amendes, de former une espèce de fonds
de compensation. Et la comparaison a été faite par deux groupes.
La comparaison a été faite avec la Commission de la santé
et de la sécurité du travail. Selon la probabilité plus ou
moins forte qu'une entreprise va polluer, prélever une certaine
cotisation pour chaque entreprise et former ainsi un fonds de
décontamination; qu'est-ce que vous pensez de cette idée?
M. Dufour (Ghislain): Bien, sur le plan du principe comme tel
d'un fonds, on est d'accord, on le dit d'ailleurs dans notre mémoire.
Mais on...
M. Lazure: Oui, mais pas un fonds gouvernemental seulement comme
le fonds fédéral-provincial, là. On parle d'un fonds fait
comme la CSST par les entrepreneurs, si vous voulez, par les employeurs.
M. Dufour (Ghislain): Vous savez très bien que dans le
cas, par exemple, d'entreprises... Je vais prendre le cas de Balmet où
il y avait des problèmes de plomb chez les travailleurs. Ces
travailleurs-là, déjà, bénéficient d'un
fonds qui est la CSST, pour lequel les employeurs paient totalement; il n'y a
pas de cotisation des travailleurs, là. Donc, ils sont
déjà protégés, les travailleurs.
M. Lazure: Non, ce n'était pas en termes de protection du
travailleur, c'était en termes de mettre de côté des sommes
d'argent qui vont pouvoir décontaminer les terrains, qui vont pouvoir
traiter les enfants, faire des analyses de sang chez les enfants. Enfin, je ne
parle pas des employés eux-mêmes. Je parlais d'une espèce
de caisse - appelez ça une mutuelle, appelez ça n'importe
comment, il y a plusieurs termes qui ont été utilisés
aujourd'hui - un fonds qui serait constitué par des
prélèvements chez les entreprises susceptibles de polluer.
M. Dufour (Ghislain): Ce n'est pas notre approche. Je vais vous
dire, c'est trop facile de créer des fonds partout où il y a des
problèmes. On va créer des fonds finances par les entreprises, de
formation professionnelle, aux niveaux secondaire, collégial,
universitaire. On va en créer au niveau de la santé, on va en
créer partout. Je pense qu'on a toujours dit, nous, et ça
s'applique ici aussi: Les entreprises paient des impôts, sont des
citoyens corporatifs. Si on juge, au niveau gouvernemental, que les
impôts ne sont pas assez élevés, qu'on agisse là,
mais pas par la création d'un impôt. chacun va être en
demande et chaque secteur va dire: je n'en ai pas assez, il en faut plus, etc.
l'approche sectorielle, là-dedans, ne nous conduirait pas tellement
loin, de toute façon.
M. Lazure: Moi, je vous rejoins sur la question des
définitions pas claires. Il fut un temps où, dans la plupart des
projets de loi, on avait une série de définitions, au
début. Je m'aperçois qu'il n'y en a aucune ici. Je conçois
que, pour certains termes, que ce soit "carac-térisation" ou d'autres,
des choses qui évoluent très rapidement, on puisse avoir
ça ailleurs, dans un règlement. Mais, moi aussi, je pense que ce
serait commode, surtout qu'il y a un jargon dans ça qui, souvent, est
bien technique, que le projet de loi inclue un certain nombre de
définitions au début. C'est une suggestion qu'on fait au
ministre. Pardon?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que c'est un projet de
loi qui modifie une loi.
M. Lazure: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez 19 définitions au
début de la loi.
M. Lazure: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et je disais qu'il y en a
même qui définissent le ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Oui, mais on peut ajouter à ça les
définitions qui sont pertinentes à la nouvelle section.
Mme la Présidente, si ça peut rassurer le Conseil du
patronat par rapport aux grands pouvoirs que le ministre se donne dans ce
projet de loi là, premièrement, il n'est pas passe au Conseil des
ministres. Les journaux nous l'ont dit aujourd'hui et il y a l'entrevue
à la Presse canadienne du ministre qui a dit, ce matin: II va
falloir que je retourne à mon Conseil des ministres pour faire approuver
le principe. Il a de la misère. On va essayer de l'aider, mais il a de
la misère.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avec l'aide que j'ai, j'ai de la
misère.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: II y a déjà le pouvoir d'ordonnance
auquel il a fait allusion. Mais là, je pose la question au ministre,
plus particulièrement, je lui donne mon temps. Depuis six mois, est-ce
qu'il l'a utilisé souvent ce pouvoir d'ordonnance?
S'il l'a fait, ça a été très discret parce
qu'on n'en entend pas parler beaucoup. Juste pour avoir un ordre de
grandeur...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Huit fois.
M. Lazure: Huit fois en sept mois, une fois par mois.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À peu près.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Ce n'est pas beaucoup.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'en confesse.
M. Lazure: Ce n'est pas beaucoup parce que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand j'allais à la
confesse, ils disaient que c'était beaucoup.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Vous êtes quasiment trop abstinent.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'était huit fois plus que
ce qu'ils pensaient.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Parce que vous-même, M. le ministre, vous
admettiez il n'y a pas longtemps, dans cette salle, que, quasiment chaque
semaine, vous deviez aller au Conseil du trésor pour aller chercher de
l'argent pour régler une crise qui surgit dans le paysage. Alors,
peut-être que, si vous utilisiez plus souvent le pouvoir d'ordonnance que
la loi vous donne, il y aurait moins de crises; ça ferait une
espèce de prévention, dans certains cas.
Je reviens au fonds de décontamination. Que ce soit avec le
projet de loi ou indépendamment du projet de loi, on demande, du
côté de l'Opposition, au ministre depuis quelque temps, au
gouvernement, de créer un fonds spécial de décontamination
avec un plan. Je ne parie pas de la perception auprès des entreprises,
je parle d'un fonds gouvernemental. Il existe un fonds très
spécialisé fédéral-provincial pour la
décontamination de sites orphelins: 200 000 000 $ sur cinq ans, pour
tout le Canada. Ce n'est pas beaucoup, ça. Quand on sait que le ministre
avait obtenu 3 400 000 $ au chapitre Décontamination de sites pour
l'année 1990-1991. Et juste avec la Balmet il a flambé ses 3 400
000 $. Il n'a plus d'argent. Alors, je répète au ministre qu'il
devrait faire une grosse bataille pour que le gouvernement constitue,
peut-être avec l'aide du Conseil du patronat, un fonds de
décontamination, qu'il puisse, une fois pour toutes, dire au public:
Voici quels sont les sites contaminés qu'on va décontaminer dans
les mois qui viennent, dans les années qui viennent. Parce que la seule
décontamination qui se fait, c'est sous l'impératif d'une crise
aiguë. Quand une situation est révélée par un
journaliste, là on a des chances que ce soit décontaminé.
Si elle n'est pas révélée par un journaliste, oubliez
ça. Duparquet, c'est une clôture.
M. Dufour (Ghislain): Est-ce qu'on peut réagir?
La Présidente (Mme Pelchat): Oui. M. Lazure: Oui,
oui.
M. Casgrain: Si vous permettez, au niveau du fonds...
La Présidente (Mme Pelchat): II vous reste près de
six minutes pour réagir, Me Casgrain.
M. Casgrain: Au niveau du fonds, moi, si vous voulez bien faire
le fonds rétroactif et aller chercher tous ceux qui ont pollué
avant la date de la loi, vous n'aurez pas beaucoup de problème
là-dessus. On irait en 1970 à peu près, la première
fois qu'il y a eu une loi sur la pollution. C'est ça le problème
qui se pose actuellement. C'est pour ça, M. le ministre, que la
rétroactivité que vous avez dans le projet de loi, je la trouve
aberrante. C'a beau être de la pollution, il ne faut pas être
jésuitique, la fin ne justifie pas les moyens. Décider que, parce
qu'on veut nettoyer la planète aujourd'hui, on va rétroactivement
prendre tous ceux qui ont pu polluer dans le passé, je la trouve
forte.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le député de La
Prairie, je suis sur votre temps.
M. Lazure: Je vais juste réagir à ça et
ensuite je vous laisse parier. Je suis porté à vous donner raison
en bonne partie. Parce que, encore une fois, je trouve que c'est un coup
d'épée dans l'eau. On veut rétroagir indéfiniment.
On ne met même pas de date sur la rétroaction. Je pense que, de
toute façon, ces sites, leurs propriétaires ont disparu depuis
longtemps. Ils sont rendus en Floride ou ailleurs en Europe ou aux Bermudes.
C'est des écrans de fumée, finalement. Ça ne sert à
rien de mettre des choses trop sévères, massives, si on sait que
ça ne sera pas utilisé.
M. Casgrain: Je sais pertinemment que le ministère a des
cas où il aimerait bien avoir une législation rétroactive
pour poursuivre des gens. Je le sais, moi, en tout cas.
M. Lazure: À ce moment-là, II faudrait au moins
mettre une période de temps.
M. Casgrain: Oui, oui.
M. Lazure: Moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'elle soit
rétroactive, mais avec une certaine période.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous revenez au noeud de la
question que j'ai posée tantôt. Je le dis bien humblement. Vous
dites ça de votre côté de la Chambre. J'ai adressé
la question et je l'adresse en toute ouverture. J'ai posé la question:
S'il n'y a pas d'application... Le projet n'entre pas en vigueur de
façon rétroactive, mais il comprend une certaine application
rétroactive. J'ai posé la question et j'ai dit: II s'agit
là de la grosse question. J'y reviens, je suis content que vous y
reveniez également, en présence du Conseil du patronat. Est-ce
qu'on se dit que le projet de loi ne s'applique qu'à partir de sa
sanction...
M. Lazure: Non, non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi):... pour l'avenir et qu'on oublie
tout ce qui a été fait avant et que ce sont les contribuables qui
paient pour la décontamination de tout ce qui a été fait
avant? Ou on va jusqu'à 1970, je ne sais pas, moi, je pose la
question...
M. Casgrain: Votre première législation date de
1970.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai choisi la
rétroactivité sur le plan du dépôt du projet de loi
et ça a été entériné par le Conseil des
ministres. Maintenant, ces audiences ici sont utiles, sont ouvertes. Je dois
faire rapport au Conseil des ministres par la suite et j'aimerais vous entendre
sur ce point-là.
M. Dufour (Ghislain): M. le ministre, nous, dans tout ce
dossier-là et dans notre politique sur l'environnement, on a toujours
dit que l'assainissement - parce que là ce dont on parle c'est un
problème d'assainissement - devrait, de façon
générale relever de la collectivité. Parce que, pour un
paquet de raisons, on ne peut pas retracer les gens qui ont pu polluer.
Même si vous les retracez, ça ne veut rien dire. Il y a un paquet
de problèmes d'ordre concret. On le fera et on doit le faire. Ça
nous apparaît un problème de société. Là
où on vous demande de nous donner carrément des paramètres
ou des objectifs, c'est au niveau de ce qu'on appelle la protection de
l'environnement, donc, le futur.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, la position du Conseil du
patronat - et je suis sur votre temps, vous m'arrêtez, M. le
député de La
Prairie, si...
M. Lazure: Je vous donne la mienne, parce que je ne veux pas que
vous me fassiez dire des choses que je ne dis pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Est-ce que
j'interprète bien la position du Conseil du patronat en disant que le
projet de loi ne devrait couvrir que ce qui est prospectif, c'est-à-dire
à partir de la sanction, et que la collectivité est responsable
de la contamination passée?
M. Dufour (Ghislain): En principe, sur une base de principe, sous
réserve de voir l'application concrète pour chaque article,
oui.
M. Casgrain: À part du fait que vous avez un
problème de charte...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que c'est la position de
l'Opposition?
M. Casgrain: M. le ministre, vous avez un problème de
charte considérable.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce que, si j'ai comme
partenaires le Conseil du patronat et l'Opposition là-dedans, je devrais
être solide.
M. Lazure: Mme la Présidente, soyons sérieux.
M. Casgrain: Non, mais il y a un problème de charte, M. le
ministre.
M. Lazure: Soyons sérieux. La position de l'Opposition
officielle n'est pas la même que celle du patronat. Il faut pouvoir
reculer en arrière. Ça arrive de temps en temps. Mais il faut
pouvoir reculer en arrière. Jusqu'où reculer en arrière?
Me Casgrain dit jusqu'en 1970.
M. Casgrain: Non, non, je dis... Des voix: Ha, ha, ha!
M. Casgrain: La première législation, c'est en
1970. Ce n'est pas notre faute s'il n'y a pas eu de législation avant.
Ha, ha, ha!
Une voix: 1972.
M. Casgrain: Mais mon allié me fait des coups.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix:... un corps contaminé comme on peut dire.
M. Casgrain: On choisit.. Enfin... Il y a un
problème de charte considérable là-dedans, M. le
ministre. Je ne vois pas comment vous pourrez réussir dans toute
condamnation quand vous direz: Je veux que M. Untel soit accusé en vertu
d'une loi passée aujourd'hui de ce qu'il a fait dans le
passé.
M. Lazure: Non, c'est déjà arrivé,
ça. C'est déjà arrivé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Mais, sur le plan
pénal, vous avez à l'article 9 une disposition qui fait en sorte
qu'il n'y a aucune application rétroactive sur le plan pénal.
Parce que nous savons - et vous avez raison de le souligner - que ça ne
subirait pas ou franchirait pas l'épreuve de la première attaque
juridique.
M. Casgrain: Alors, vous n'avez plus de dents. Non, non, vous
n'avez plus de dents.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, sur le plan pénal,
vous n'avez aucune application rétroactive possible...
M. Casgrain: Et votre ordonnance s'applique comment?
Mépris de cour?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'ordonnance ne touche pas
d'aspect pénal, mais touche des aspects de réhabilitation de
terrain, des aspects du droit civil et du droit de propriété.
M. Casgrain: Vous n'avez plus de dents.
M. Dufour (Ghislain): Faire appliquer comment?
M. Casgrain: Vous n'avez plus de dents. Vous n'avez plus rien.
Vous n'avez plus de dents. L'article 9 vous enlève toutes les dents pour
ce qui est passé...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non...
M. Casgrain: ...parce qu'on dit que ça ne constitue pas
une infraction.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...vous rendez une ordonnance. Sur
le plan pratique, vous rendez une ordonnance ordonnant la
décontamination. Si le propriétaire ne procède pas
à la décontamination, le ministère de l'Environnement du
Québec procède à la décontamination et
récupère l'argent. Nous sommes toujours dans des domaines de
droit civil et de droit de propriété. Vous n'avez pas d'amende et
vous n'avez pas d'emprisonnement. Si vous voulez parler de ce type de dents,
vous avez raison, mais, sur le plan des coûts, vous avez des dents. Sur
le plan de l'application du droit civil, vous avez des dents parce que vous
pouvez le charger.
M. Casgrain: Et le beau problème, c'est ceux qui se sont
vendus en déclarant que... Je connais des cas où on
déclare: Je vous dis que ce terrain est contaminé et je vous le
vends comme tel. L'acheteur l'achète. Et cinq ans après, on dit
à l'acheteur: Écoutez, décontaminez. Et, après
ça, le gouvernement va au vendeur auparavant. Il y a un problème
entre les parties qui se vendent aussi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais vous avez eu un exemple.
Le maire d'Anjou, cet après-midi, nous a donné un exemple
très éloquent d'une situation - et je pense que je peux le
répéter publiquement, il est enregistré au Journal des
débats - Petro-Canada avait acheté de BP Petroleum, en
sachant que les terrains étaient contaminés, des terrains
situés dans la partie est de Montréal. Même si les
coûts de décontamination étaient importants, parce que nous
sommes sur ITIe de Montréal - je pense que les coûts de
décontamination étaient de 25 000 000 $ - il demeurait quand
même une valeur résiduelle. Petro-Canada a accepté,
volontairement - vous parliez de gens qui ont fait des efforts - de
décontaminer et a vendu les terrains par la suite à Alexis-Ninon.
Vous avez un cas où Petro-Canada n'était pas responsable de la
contamination, qu'il avait acheté un terrain et qu'il était
propriétaire et qu'il a accepté volontairement de
décontaminer.
La Présidente (Mme Pelchat): En conclusion, rapidement, il
reste 30 secondes, Me Casgrain.
M. Casgrain: Moi, la rétroactivité, ça
m'ennuie. Ça me paraît gênant. Je n'aime pas ça. Je
m'excuse. Ça me va ici, moi, la rétroactivité. Je ne suis
pas capable. Peut-être que je suis trop vieux.
La Présidente (Mme Pelchat): Ça va. On ne
conclurait pas là-dessus, Me Casgrain.
M. Dufour (Ghislain): Question de vieillesse... Mme la
Présidente, ce n'est pas une question de...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le Dr Lazure m'assure qu'il n'y a
pas une très grande différence d'âge.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dufour (Ghislain): Ce n'est pas une question de
vieillesse.
La Présidente (Mme Pelchat): Alors, pour revenir au projet
de loi 65, M. Dufour, brièvement.
M. Dufour (Ghislain): Oui, c'est une question de principe pour
nous. On n'a jamais
accepté une rétroactivité dans une loi et je pense
que le ministre le reconnaît bien. Mais ce que je voudrais signifier - je
termine là-dessus, Mme la Présidente - c'est qu'on a
démontré dans le fond que le projet de loi qu'on accepte en
principe serait difficilement vivable sur bon nombre de ses volets et qu'il
faudra sûrement le bonifier. Et, en ce qui nous concerne, on est
totalement à la disposition du ministre pour en revoir certains aspects
techniques.
La Présidente (Mme Pelchat): Alors...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, je
remercie le Conseil du patronat, ses porte-parole. Nous prenons bonne note de
l'offre que M. le président du Conseil du patronat vient de nous
adresser et nous continuerons à travailler sur la question de cet aspect
rétroactif qui est très important parce qu'il a des
conséquences économiques également importantes.
Une voix: Ce n'est pas le Barreau, ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous pouvez nous apporter des
éclaircissements, des solutions pour tout cet aspect-là, nous
demeurons ouverts. Sur le plan juridique, si les avocats du Conseil du patronat
ont des doutes sérieux quant à la légalité de
certains articles ou du libellé de certains articles, quant à
l'application des chartes, si vous désirez des précisions quant
au droit des parties d'aller en appel, de se faire entendre, les règles
de justice naturelle, nous souhaitons qu'elles soient le plus clair et le plus
limpide possible. Nous avons déjà acquiescé sur le plan
des principes à certaines des recommandations que Me Casgrain nous a
faites, entre autres. Nous demeurons ouverts à d'autres recommandations
dans le sens du respect des règles de justice naturelle.
La Présidente (Mme Pelchat): Merci, M. Dufour, MM. du
Conseil du patronat.
M. Lazure: Je veux remercier aussi, Mme la Présidente, les
représentants du Conseil du patronat pour leur contribution.
La Présidente (Mme Pelchat): Alors, merci J'appellerais
maintenant les représentants du Barreau du Québec à
s'approcher. Je suspends les travaux pour deux minutes, dix secondes.
(Suspension de la séance à 21 h 16)
(Reprise à 21 h 21)
La Présidente (Mme Pelchat): La commission reprend ses
travaux. Nous accueillons maintenant les membres du Barreau du Québec.
Messieurs, si vous voulez vous identifier.
Barreau du Québec
M. Sauvé (Marc): Me Marc Sauvé, Service de
recherche et de législation au Barreau du Québec. Vous avez,
à ma droite, Me Robert P. Godin et, à ma gauche, Me Claude
Masse.
La Présidente (Mme Pelchat): On vous écoute.
M. Sauvé: Mme la Présidente, Mmes et MM. les
députés, le Barreau du Québec a pris connaissance du
projet de loi 65 ainsi que du projet de règlement sur la contamination
de l'environnement et il souhaite faire part aux membres de cette commission de
ses préoccupations à ce sujet, à la lumière de son
mandat général de protection du public.
D'entrée de jeu, qu'il nous soit permis d'endosser les objectifs
que sous-tend le projet de loi au chapitre de la décontamination et de
la restauration de l'environnement. Nous croyons en effet que la contamination
des sols et de l'environnement constitue un problème majeur de notre
société postindustrielle et qu'il est urgent d'apporter
rapidement des solutions efficaces à cette menace pour notre
qualité de vie.
Malheureusement, la législation et la réglementation
proposées ne nous semblent pas susceptibles d'atteindre avec
efficacité les objectifs visés. Au surplus, elles constituent des
sources d'injustices graves. Alors, sans plus tarder, je vais passer la parole
à Me Claude Masse, qui exposera le point de vue du Barreau en ce qui a
trait à l'absence de la notion de risque dans le projet de loi 65 et en
ce qui concerne les infractions pénales rétroactives. Ensuite, Me
Robert P. Godin traitera principalement de la question de l'enregistrement des
ordonnances et de l'avis du ministre. Alors, Me Claude Masse.
M. Masse (Claude): Merci.
La Présidente (Mme Pelchat): Me Masse.
M. Masse: Oui.
La Présidente (Mme Pelchat): Merci.
M. Masse: D'abord, pour ce qui est de l'objectif visible
extrêmement important au plan social et au plan politique, qui est un
objectif de décontamination, il est évident que personne,
même à des coûts sociaux importants ou même au prix de
changements juridiques importants, ne peut être contre ce principe. Ce
que le projet sous-tend et ce que les déclarations du ministère
laissent entendre depuis plusieurs mois, sinon des années, c'est qu'on
se dirigera vers un principe de pollueur-payeur, alors que ce principe
de pollueur-payeur est dans la réalité battu en
brèche, inapplicable et inappliqué. Les problèmes
récents des derniers mois ou même des dernières
années, je pense à la ville de Mercier, à
Saint-Jean-d'lberville, à Saint-Basile-le-Grand, à Saint-Amable,
montrent que le principe de pollueur-payeur est inapplicable dans les faits et
que, dans le projet de loi, on s'en va plutôt du côté du
principe de propriétaire-payeur, ce qui est un autre problème. Le
problème principal quant à l'applicabilité du principe de
pollueur-payeur, ce n'est pas un problème de principe, c'est un
problème de solvabilité. Et à travers tous les
mécanismes de cloisonnement corporatif, de distanciation entre les
directions de compagnie et les faits dommageables, il sera toujours possible
dans les règles du jeu actuelles d'empêcher que le principe
pollueur-payeur s'applique. Et, en fait, on en arrive fatalement - ça a
été la position du Barreau, notamment dans le cas de Saint-Amable
récemment - à l'idée essentielle d'un fonds de
décontamination et même d'un fonds de compensation des victimes.
Et l'expérience américaine, de ce côté-là,
nous montre qu'il y a des avenues nécessaires, que notre
naïveté sociale ne peut pas résister longtemps à
l'incapacité dans laquelle on est de faire payer vraiment au
pollueur-payeur, du moins de façon directe et immédiate, la
décontamination et fa compensation des coûts. Le problème
des fonds d'indemnisation aux États-Unis surtout, et l'expérience
québécoise que l'on a, notamment en matière d'accidents
d'automobile et d'accidents du travail, c'est que, traditionnellement, on fait
subordonner au paiement d'une cotisation à une caisse de compensation
une absence de responsabilités, c'est-à-dire que le payeur, qui
paye dans le fonds de compensation traditionnellement et dans certains
systèmes, est relevé de sa responsabilité
postérieure lorsque le risque se réalise. Et c'est là que
nous semble être le principal problème; il ne nous semble pas
possible actuellement de penser à un permis de polluer qui
entraînerait, par le fait d'un paiement à une caisse de cotisation
- à tout le moins, je pense qu'il y a là un problème... Il
nous semble difficile de penser qu'on pourrait, comme ça, avoir un
permis de polluer l'environnement et être relevés de ses
responsabilités tant à l'égard du fond qu'à
l'égard des citoyens. Donc, je pense que toute la question du fonds de
décontamination et du fonds de compensation devra être
examinée à la lumière, non seulement du financement, mais
des responsabilités qui en découlent.
Pour en revenir au projet de loi, pour l'essentiel, la trame de base du
projet, le fil conducteur, c'est une approche de déclaration de risque
par voie réglementaire. Même si le Barreau du Québec est
d'accord avec les objectifs du projet de loi, cette approche de
déclaration de contamination par voie réglementaire pose toute
une série de problèmes que nous croyons fondamentalement
important de rapporter à votre attention et dont vous avez
discuté au cours de la journée.
D'abord, le projet de règlement. Il n'y a rien, dans le projet de
règlement, qui explique sa justification. Pourquoi est-ce qu'on fixe les
taux de contamination maximum au plomb à 500 mg ou parties par million?
Pourquoi n'est-ce pas 200? Pourquoi n'est-ce pas 1000? Nous croyons, de ce
côté-là, qu'on devrait aller en commission parlementaire,
en audiences publiques, et défendre d'abord les prérequis
scientifiques qui sont derrière ça à la lumière des
connaissances que le ministère en a actuellement et qu'on devrait mettre
ces critères sur la place publique et les discuter. Donc, dès le
départ, il y a un arbitraire de ce côté-là qui nous
semble difficile à défendre.
Mais le projet est extrêmement silencieux sur les
paramètres de l'échantillonnage. Le protocole
d'échantillonnage n'est pas là. On a des taux, sur combien
d'échantillons, par rapport à quelle distance, à quelle
profondeur dans le sol? Il n'y a aucune espèce d'indication
là-dessus. Qu'est-ce qui se passe lorsqu'une petite partie d'un terrain
est contaminée et que le reste ne l'est pas? Est-ce qu'on
répartit l'évaluation de la contamination sur un prorata sur
l'étendue du lot? C'est une question fondamentale à laquelle le
ministère va devoir répondre.
Il y a des facteurs de risque également qui ne sont pas pris en
compte et on pourra y revenir tantôt. Il est évident qu'on ne peut
pas, de façon absolue, considérer comme contaminé un
terrain qui est situé à 600 milles ou à 600
kilomètres d'une zone habitée et qui ne contient pas de cours
d'eau qui pourraient véhiculer des polluants, alors qu'on pourrait
placer ces terrains-là sur le même pied que les terrains qui sont
situés dans les zones urbaines. En plus, et c'est une remarque
secondaire mais qui peut avoir son importance, on parle, dans le
règlement, de taux de contamination, mais on ne parle pas de taux de
décontamination. Quel est le résultat que l'on veut viser? En
dessous de quelle norme, de quel niveau, est-ce qu'on veut considérer un
terrain comme non contaminé? Ce sont des questions à
caractère technique, mais extrêmement important.
C'est là notre position fondamentale pour la première
partie de notre mémoire. Il nous semble qu'un règlement ne
remplacera jamais un principe de décontamination fondé sur la
notion de risque. Ce que tente de faire le ministère, pour des raisons
qui nous semblent assez difficiles à comprendre, c'est de passer d'une
notion de risque qui est tout à fait reconnue par l'article 20 qui,
comme vous le savez, est la pierre angulaire de la loi, notion de risque qui
est, à toutes fins pratiques, la même à l'article 115. 1,
qui permet au ministre d'intervenir, à une situation où le
ministre aurait la possibilité d'ordonner une décontamination sur
la base de
ces seuls taux réglementaires.
Et c'est là qu'il nous semble qu'il y a quelque chose qui risque
d'être arbitraire, qui risque, vous l'avez souligné tantôt,
de changer rapidement et il nous semble fondamentalement, en termes de
légitimité législative, qu'on ne pourra jamais remplacer
une approche fondée sur le risque. Le problème que l'approche du
ministère pose actuellement, donc, est un problème de
légitimité. Le règlement n'est pas défendu à
sa face même; il n'est pas justifié à sa face même.
Il comporte des taux qui peuvent varier, dont les mesures sont
extrêmement difficiles à établir et il se peut qu'on
puisse, par voie d'arbitraires ministériels, dans certains cas,
procéder à des décontaminations, dans des cas d'absence de
risque, alors que, dans d'autres cas de risque, on n'interviendra pas. (21 h
30)
II est évident que l'aspect rétroactif du problème
est majeur. Mais l'aspect rétroactif de la question posée se pose
d'autant plus que le critère d'évaluation du risque est
arbitraire. Ce que nous soumettons, c'est que la notion de risque
s'établisse au moment où l'évaluation est faite par le
ministère. Nous ne sommes pas contre le fait d'aller rechercher des gens
qui ont contaminé un sol dans le passé. Nous sommes contre le
fait de penser que cette décontamination-là puisse être
faite sur la base de critères flous. Il nous semble suprêmement
important que le ministre puisse défendre un dossier de
décontamination sur la base d'un risque actuel.
Donc, le risque actuel, le danger qu'il cause à la
collectivité, ce n'est pas de la rétroactivité, c'est une
réalisation d'un risque présent et ce risque-là doit
être défendable, même devant les tribunaux. Encore une fois,
le problème que pose le règlement, c'est qu'il y a, bien
sûr, des mesures de risque à caractère technique, mais il
n'y a pas de possibilité d'évaluation du risque dans son
contexte.
Cette notion d'approche réglementaire pose un autre
problème: C'est la notion des vices cachés. Si le ministre, par
exemple, en date du 1er janvier 1991, déclare que tel terrain est
contaminé, si le terrain a été acheté par un
propriétaire qui n'a pas pollué le fond deux ans auparavant,
peut-il se retourner contre son vendeur en raison de la règle de
l'article 1522, la notion de vice caché? Notre réponse, c'est
non. Parce que l'établissement de l'intervention du ministre sur la voie
réglementaire ne constitue pas un vice caché au moment de la
vente. Or, la règle du vice caché au moment de la vente, c'est
une règle fondamentale reconnue par le droit civil.
Donc, si le projet de loi véhiculait plutôt une notion de
risque au même sens que l'article 20 de la loi et de l'article 115.1,
là, on pourrait établir qu'il y avait risque au moment de la
vente, donc, vice caché. Mais si la base d'établissement du
risque, c'est une seule promulga- tion à caractère
réglementaire, donc, arbitraire, les propriétaires vont avoir
énormément de difficulté à se retourner contre leur
vendeur.
Le problème du caractère absolu des infractions qui sont
mentionnées au projet est majeur. Nous avions compris que l'article 9 du
projet essayait d'éviter le problème de la
rétroactivité. L'article 9 dit: Ne constitue pas une infraction
une contravention à une disposition d'un règlement pris en vertu
des paragraphes a et b de l'article 31... on pense que c'est 31.51 et non pas
31.52. Ça règle une partie du problème puisque, comme vous
le savez, en vertu de l'article 106.1, le ministère peut poursuivre un
contrevenant à une ordonnance, et là on ne parle pas de l'article
31.51. Dans ce cas-là, on aurait l'application d'un principe à
caractère rétroactif et il est évident, à la simple
lecture de l'article 37 de la charte, que de cette manière-là on
ne donne pas plus de deux chances en Cour d'appel à ce type de
règlement pour être cassé. Il est clair qu'il s'agit
là de l'application d'un principe rétroactif par voie
pénale et même si on a l'article 9, par le biais de l'article
106.1, il nous semble que le problème n'est pas réglé.
Mettons de côté temporairement le problème de la
rétroactivité. Le projet de loi, encore une fois sur une base de
détermination réglementaire, veut imposer une
responsabilité absolue et même l'emprisonnement à des
contrevenants et cette façon de faire au plan législatif a
été déclarée inconstitutionnelle et contraire
à l'article 7 de la charte canadienne par le renvoi du Motor Vehicle
Act. M. le ministre nous signalait non tantôt. J'imagine qu'on va s'en
parler. Mais c'est notre conviction qu'il y a là un problème dont
on pense bien que le ministère l'a vu venir mais qu'il est
évident que le problème reste encore, mais je suis certain qu'on
va dialoguer là-dessus tantôt.
Ce que le projet de loi ajoute par rapport à la situation
actuelle, il nous semble assez clair que l'article 115.1 donne au ministre des
pouvoirs extrêmement importants. Cependant, ce sont des pouvoirs peu
appliqués dans des instances où le ministre aurait pu intervenir
et c'est déjà une bonne base d'intervention. Cependant, ce que le
projet de loi ajoute, à notre sens, et ce qui est utile, c'est le
pouvoir de forcer des contamina-teurs à intervenir d'eux-mêmes et
à les forcer à intervenir avant même que le
ministère soit forcé de faire une décontamination au sens
de l'article 115. Ça, ça nous apparaît comme quelque chose
de positif.
Il nous semble que la façon de réaliser les objectifs du
projet de loi, tout en respectant la justice fondamentale, ce serait
d'établir un principe de risque au même sens que l'article 115.1.
Cependant, dans le cas où des prélèvements, encore une
fois avec les remarques que l'on fait sur le protocole d'échantillonnage
en vertu du règlement... S'il est démontré qu'un
terrain ne respecte pas le règlement, on pourrait mettre en
oeuvre une présomption de risque. On pourrait, dans ce cas-là,
avoir une personne qui serait poursuivie parce qu'elle ne respecte pas une
disposition comme celle-là, et elle aurait le fardeau de la preuve, de
démontrer que le terrain ou la contamination ne présente pas de
risque.
Donc, là on aurait une responsabilité non absolue. On
aurait, pour l'intervenant qui est poursuivi, une possibilité de se
défendre et de montrer sur une base judiciaire que le terrain
contaminé ne présente pas un risque. Parce que, dans le fond,
qu'est-ce que l'on poursuit? C'est vraiment les objectifs manifestés par
l'article 20, qui est la notion de risque à la santé humaine,
à l'environnement, aux habitats fauniques et végétaux. Et
il nous semble que c'est là le fil conducteur auquel on devrait
revenir.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Masse. M. le
ministre.
M. Masse: Je m'excuse, mon collègue Godin n'est pas
intervenu encore.
Le Président (M. LeSage): Je m'excuse. M. Godin. Me
Godln.
M. Godin (Robert P.): M. le Président, on veut traiter
également d'un aspect du projet qui est très important, c'est
celui de l'opposabilité des obligations très onéreuses qui
résultent des avis et des ordonnances, opposabilité à des
propriétaires successifs des immeubles où se trouvent des sols
contaminés. Au départ, l'obligation qui est imposée par
une ordonnance ou par un avis est une obligation personnelle, et les
conséquences financières peuvent être excessivement
lourdes. Il y a également des obligations qui sont des obligations de
nature réelle, qui touchent plutôt l'utilisation ou les
modifications qui peuvent être faits à un immeuble.
Il nous semble important de bien régulariser
l'opposabilité de ces deux conséquences-là des
démarches qui sont envisagées par le projet. Le projet traite de
deux types de personnes responsables. Il y a les pollueurs, à la
première section. Et il y a les propriétaires. Et les deux,
chacun dans des sections différentes, encourent des
responsabilités personnelles. L'immeuble pollué,
évidemment, est ce qu'il est et va demeurer pollué tant qu'il
n'aura pas été décontaminé.
On a un système d'enregistrement qui fonctionne très bien,
qui possiblement va être modifié par un système avec un
registre foncier peut-être un jour avec la réforme du Code civil,
mais pour l'instant on a un système qui fonctionne très bien. Il
nous semble très important, pour la protection des tiers, que les avis
et les ordonnances soient enregistrés, et il y a deux types de
protection. La première protection, c'est qu'un tiers acquéreur
puisse être en mesure de savoir, avant d'acheter ou avant de faire une
transaction, de connaître la situation du terrain. S'il y a eu des avis,
s'il y a eu des ordonnances, il doit pouvoir en avoir une connaissance
objective. Ces avis, ces ordonnances ont un effet sur la valeur,
évidemment, sur l'utilisation. Mais, également, il est important
qu'on utilise le mécanisme de l'enregistrement pour pouvoir opposer,
c'est-à-dire rendre responsable le tiers acquéreur. Il a
connaissance et il assumera la responsabilité en toute connaissance.
Il faudrait que l'enregistrement se fasse également au moment de
la signification soit de l'avis, soit de l'ordonnance. Dans le moment,
l'enregistrement est prévu comme une faculté. Le ministre peut,
on ne sait pas quand, on ne sait pas pourquoi il le ferait ou pourquoi il ne le
ferait pas, mais il pourrait le faire à certains moments et ne pas le
faire à d'autres.
D'autre part, le projet de loi prévoit un début de
publicité. On parle de publicité, de donner une copie au
secrétaire-trésorier ou au greffier. Est-ce que ça veut
dire qu'il y a déjà une publicité? Est-ce qu'on ne sera
pas de bonne foi parce qu'on n'est pas allé voir le greffier? Est-ce que
c'est un genre de publicité? Est-ce que ça remplace
l'enregistrement? Ce n'est pas clair. Alors, il nous semble, au départ,
que tous les avis, toutes les ordonnances devraient être
enregistrés dès le moment de leur émission,
c'est-à-dire dès le moment de leur signification. Pas de
délai ou d'alternative.
Également, il nous semble qu'une fois enregistré l'avis ou
l'ordonnance ne devrait pas être affecté par des
réalisations de garanties, soit l'effet d'une clause résolutoire,
une clause de dation en paiement, soit les effets d'une vente forcée,
qui a l'effet du décret. C'est-à-dire qu'une fois
enregistré l'avis demeure sur le titre.
Ce qui nous amène à considérer le cas très
particulier du créancier et du prêteur. Aux États-Unis,
comme vous le savez, les prêteurs sont dans une situation
particulière où ils peuvent être tenus à des
responsabilités considérables lorsqu'ils réalisent des
garanties. On vous suggère, dans nos notes, de tempérer la
responsabilité du créancier ou du prêteur qui aurait pris
des sûretés réelles sur une entreprise où il y
aurait une contamination. Il nous semble que le créancier, au moment
où il décide de prendre des sûretés réelles,
devrait faire toutes les expertises nécessaires pour s'assurer que le
terrain n'est pas contaminé. Donc, vous remarquerez que la
réserve qu'on fait traite des contaminations qui ont lieu après
la prise de garanties. Pour celles qui ont lieu avant, le créancier
devra se protéger. On réalise que c'est très
onéreux, ce qu'on vous dit, et on le dit avec une certaine
réserve, mais, quand même, au point de vue pratique, on ne voit
pas comment ça peut fonctionner.
La Présidente (Mme Pelchat): En conclusion,
Me Godin, s'il vous plaît.
M. Godin (Robert P.): Également, il faudrait que le
vendeur ou le créancier hypothécaire, au moment où il
réalise ses garanties, n'ait pas le contrôle des contaminants qui
se font ou soit dans l'impossibilité légale de les
empêcher. Si lui-mâme contribue à la contamination, il
faudra qu'il en subisse les conséquences. Si j'ai bien compris,
là...
La Présidente (Mme Pelchat): À moins qu'on ait le
consentement du ministre et du député de La Prairie...
M. Lazure: Si ce n'est pas long, là, oui, oui.
M. Godin (Robert P.): Je n'ai pas grand-chose à ajouter.
La question des créanciers est fort importante. Il y a la question du
syndic, par exemple, qui, lors d'une faillite, réalise des garanties.
Quelle sera sa position? Il devrait avoir la possibilité, à un
moment, de faire un abandon d'un bien contaminé, dans le cas d'un
créancier qui s'aperçoit qu'il y a une contamination qui
dépasse, évidemment, la valeur de sa garantie. Merci.
La Présidente (Mme Pelchat): Merci, Me Godin. M. le
ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, vous me
permettrez, dans un premier temps, de remercier le Barreau du Québec
pour une présentation qui est fouillée et articulée. Le
critique de l'Opposition et les membres de la commission me permettront de
déclarer ouvertement ma situation de membre du Barreau du Québec.
Il va de soi que ce soit fait avant que nous débutions ces
échanges.
Le premier point que vous touchez est la question de l'absence de la
notion de risque, comme telle. Je vous dirai que ça a fait l'objet d'un
long débat, de longues discussions à l'interne, au
ministère, et à travers les divers comités
ministériels que nous avons dû franchir. Il y a des gens qui ont
soutenu la position du Barreau du Québec. Il y en a d'autres qui nous
ont invités à définir le risque de façon à
éviter des litiges et des plaidoyers ad nauseam quant à cette
notion de risque qui serait ouverte et non définie. Mais je vois que le
Barreau reprend le point de vue de ne pas définir le risque, de
conserver la notion ouverte. Est-ce que vous ne pensez pas qu'on prête
flanc, à ce moment-là, à une multitude de procès,
strictement quant à cette notion, si elle n'est pas définie? Je
ne dis pas qu'il n'y a pas de risque de procès lorsqu'elle est
définie, mais plus la définition est pointue, plus les plaidoyers
sont raccourcis.
M. Masse: Pourquoi, Me Paradis, adopter une notion de risque
à 115.1 et ne pas l'adopter dans le projet de loi? La deuxième
chose: On a la conviction que, sans notion de risque, la
légitimité du projet, au plan judiciaire, va être
contestée beaucoup plus facilement. Ce que nous vous suggérons,
c'est d'adopter une possibilité d'intervention de la part du ministre,
fondée sur des critères fixés par règlement -
règlement discuté publiquement auparavant - et que la personne
qui est poursuivie en vertu de l'ordonnance puisse renverser le fardeau de la
preuve et, elle, démontrer qu'il n'y a pas de risque.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce ça la
définition du risque?
M. Masse: C'est une définition du risque à
l'envers. Le ministre n'aura pas, chaque fois, à démontrer le
risque. Sauf que, si la personne à laquelle l'ordonnance est
émise n'est pas d'accord avec le jugement du ministère, elle
pourra démontrer devant le tribunal, si elle le peut, que les taux
présentés sur son terrain ou sur son fonds ne présentent
pas de risque. Mais il est clair qu'on va devoir fixer cette notion de risque
là au plan judiciaire, dans un contexte environnemental. (21 h 45)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va. La question du
voile corporatif. Vous avez mentionné dans votre exposé, à
juste titre et avec de nombreux exemples à l'appui, que, à cause
du voile corporatif, etc., on se retrouvait toujours devant des situations
où c'était l'État qui assumait la facture, parce que tout
le monde s'échappait. La Fondation québécoise en
environnement, lors de sa présentation aujourd'hui, nous a
suggéré un article qui permettrait de lever le voile corporatif
et qui se marierait très bien avec notre article 109 de la loi qui nous
permet de poursuivre les officiers d'une corporation. J'aimerais strictement -
on n'a pas le temps de le faire ce soir - obtenir l'avis du Barreau. Nous vous
ferons parvenir la suggestion de la Fondation québécoise en
environnement sur la levée de ce voile corporatif.
M. Masse: Ce n'est pas à proprement parler
traditionnellement une levée du voile corporatif, M. le ministre, c'est
une prise en compte directe de la responsabilité personnelle des
officiers de la compagnie. Cette approche a été utilisée
à plusieurs reprises, notamment dans les lois de protection du
consommateur. Nous ne sommes pas contre, mais il est clair qu'en termes de
planification juridique ceux qui vont avoir à planifier ce genre de
situation vont s'arranger également pour que les gens comme M. Levy
soient, ou pas là, ou pas solvables. Et on a encore un problème
de ce côté-là. Nous ne nions pas la nécessité
de poursuivre et les entreprises et les directeurs personnellement. C'est
fondamental. Mais nous croyons qu'on ne pourra pas, sur la base d'un principe
de responsabilité immédiate, établir des
fonds de compensation ou des moyens de recours, d'où
l'idée qu'un fonds de compensation est inévitable. Et que ce
fonds-là soit subrogé pour les dépenses encourues par les
citoyens et par la décontamination contre les responsables, avec tous
les aléas que ça implique, les délais et les frais de
justice, ça nous semble normal. Mais ça n'est pas une solution
miracle.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez soulevé deux
points. Vous avez rappelé le cas de Mark Levy; moi je suis
personnellement de l'opinion - et ça vaut ce que ça vaut, mon
opinion personnelle - que tant et aussi longtemps qu'en matière de droit
criminel on n'aura pas transposé, en matière de droit
environnemental, les dispositions qui s'appliquent en matière de
stupéfiants et de drogues, que l'on continuera à appliquer des
sanctions pénales, ou même avec des mandats d'arrestation, il n'y
aura pas de possibilité pratique d'extradition et d'accusation
criminelle comme telle. Donc je vous rejoins dans ce sens-là. Ce n'est
pas avec ce type de projet de loi que l'on va entrer en matière de
législation criminelle. D'ailleurs ce n'est pas de juridiction, au
moment où nous nous parlons, de l'Assemblée nationale du
Québec de légiférer dans ces domaines-là. Je n'ai
pas écouté le bulletin de nouvelles à 21 heures. En ce qui
concerne un fonds, il y a déjà, et je pense que vous avez
assisté à la présentation des mémoires d'autres
groupes, j'ai déjà eu l'occasion de l'indiquer, un fonds de
décontamination pour les sites dits orphelins; et vous avez le projet de
loi qui s'inscrit dans une deuxième étape et à peu
près tous les intervenants, sauf le Conseil du patronat allié
à l'Opposition officielle, nous ont recommandé la création
d'un fonds de décontamination financé par l'entreprise, par le
biais, soit de cautionnement, de CSST, de cotisation, de contribution, d'une
sorte ou de l'autre.
Vous traitez d'infraction pénale rétroactive. Et vous
m'avez vu réagir. L'article 9 sur le plan des infractions pénales
est clair. Mais là où vous avez raison dans votre exposé,
c'est à l'effet qu'une ordonnance qui affecterait le passé et qui
ne serait pas respectée pourrait donner ouverture à des
poursuites pénales. Vous avez exprimé une opinion en citant une
cause de jurisprudence. Je ne suis pas aussi à jour que j'avais
l'habitude de l'être dans mon suivi jurisprudentiel...
M. Masse: J'ai la cause et le Barreau du Québec est
heureux de la donner à un de ses membres...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): De m'en remettre...
La Présidente (Mme Pelchat): Est-ce qu'on a le
consentement pour le dépôt? Merci.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous en remercie. j'aurai
l'occasion de vérifier s'il s'agit d'un cas d'application suite à
une ordonnance, si l'analyse des faits est tel quel. et si c'est le cas...
M. Masse: Ça ne change rien, M. le ministre.
C'était une loi de la Colombie-Britannique qui déclarait qu'une
personne qui était prise à conduire un véhicule moteur
sans permis, même si elle ne savait pas que son permis avait
été suspendu, elle était condamnée automatiquement,
et sans possibilité de défense, à l'emprisonnement. La
Cour suprême a déclaré que c'était inconstitutionnel
en vertu de l'article 7 de la charte.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comme il n'y plus d'appel au
Conseil privé, ce n'est pas de mon intention d'en appeler. Sauf que nous
nous retrouvons dans une situation de fait où il y a émission
d'une ordonnance et l'opinion du jurisconsulte du gouvernement, au moment
où nous nous parions, est à l'effet qu'il n'y aurait pas
d'application. Maintenant, on va faire des vérifications. Vous attirez
notre attention. Il est toujours plus sage d'être plus prudent que plus
imprudent dans ce type de législation. Nous allons faire une
vérification additionnelle.
Sur le plan de l'enregistrement des ordonnances, vous nous invitez
également à clarifier la question de l'environnement. Je pense
qu'il s'agit là d'une clarification que nous nous devons d'apporter pour
ne pas laisser place à interprétation. Il est encore temps de le
faire. Nous vous remercions de cette suggestion. Vous avez des propos à
ajouter?
M. Godin (Robert P.): Je veux juste ajouter que la question du
créancier est fort complexe et fort importante. On veut lier les tiers
acquéreurs mais je pense qu'il est fort important de ne pas
décourager les prêteurs en créant une responsabilité
démesurée. Ça peut affecter de façon significative
le financement d'entreprises.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous avons sur le plan pratique,
sur le terrain, des sons de cloche qui sont un peu différents de la part
de divers types de créanciers. Les créanciers dans le domaine
industriel nous incitent à un maximum de prudence. Les créanciers
plus spécialisés dans le domaine résidentiel, Mouvement
Desjardins, à titre d'exemple, appuient sensiblement le libellé
du projet de loi. La question que vous posez, vous la posez avec
précision, que le créancier accepte le risque au moment où
il autorise ces déboursés d'argent. Par la suite, on le
dégage de tout suivi environnemental et on replace la balle dans le camp
du ministère de l'Environnement. Et lorsqu'on le fait on replace la
balle dans le camp de l'ensemble des payeurs de taxes...
M. Godin (Robert P.): Oui, mais il ne faut
jamais oublier que le créancier n'est pas
propriétaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...des contribuables.
M. Godin (Robert P.): et il n'a a pas toujours les moyens
pratiques ou juridiques pour exercer un contrôle quotidien sur les
activités de son débiteur.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais il aspire à devenir
propriétaire...
M. Godin (Robert P.): Non, il ne peut pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...s'il y a défaut de
paiement...
M. Godin (Robert P.): Ah!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...davantage que le
ministère de l'Environnement du Québec. Et il est au moins aussi
bien équipé que le ministère de l'Environnement du
Québec pour faire un suivi. Dans ce sens-là, je ne dis pas que
ça ne mérite pas une analyse. Mais on n'a pas
d'intérêt financier alors que lui conserve un intérêt
financier de s'assurer que sa créance a toujours la même valeur.
Il en est de même sur le plan de l'évaluation municipale. Tous ces
aspects-là sont interreliés. Et on est conscient qu'on touche au
droit de propriété. C'est une question qui est
délicate.
M. Godin (Robert P.): Qu'est-ce qui arrive si le créancier
arrive et qu'il est trop tard?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a eu un cas - et je le
souligne - dans la région de Trois-Rivières, il y a quelques
semaines, où une institution financière avait repris possession
d'une entreprise. Elle a lu le projet de loi, bien qu'il ne soit pas
adopté et qu'il soit sujet à modification, etc., et, constatant
que le site était contaminé à un point tel, elle a remis
au client l'entreprise qu'elle avait saisie. Donc, ça incite aujourd'hui
les entreprises qui oeuvrent dans ce domaine-là à plus de
prudence.
M. Godin (Robert P.): Peut-être que, si vous le permettez,
il y avait un autre commentaire qu'on aurait aimé faire. C'est celui du
lien entre le locataire ou le possesseur et le propriétaire. En
matière industrielle, bien souvent vous avez des locataires qui sont
occupants, des baux, soit des "leaseback" ou à titre
emphytéotique, qui sont là, qui occupent l'immeuble pendant
longtemps, qui sont les pollueurs, qui sont les premiers responsables. Votre
projet de loi, dans le moment, ne semble pas traiter, faire une distinction...
Vous parlez du propriétaire, mais vous ne parlez pas de l'occupant qui
peut être...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous êtes le premier
organisme à nous souligner cet oubli dans le projet de loi. Il
m'apparaît important. Vous avez raison de le souligner. Maintenant vous
le faites très brièvement. Si vous pouviez nous développer
cette argumentation. Parce qu'elle suscite chez nous un intérêt
très particulier. C'est une pratique qui est répandue. Il y a des
conséquences juridiques. Et, si le Barreau du Québec pouvait
ajouter à cet argumentaire, nous l'apprécierions.
La Présidente (Mme Pelchat): Ça va, M. le ministre?
Ça va? M. le député de La Prairie.
M. Lazure: Merci. Je veux féliciter les
représentants du Barreau pour cette excellente présentation. Et,
quant à moi, vous m'avez convaincu que le ministre doit conserver la
notion de risque. Il me semble qu'il y a moyen d'allier les deux, et vous le
faites d'ailleurs. Vous proposez qu'on conserve à la fois la notion de
risque, mais en même temps, par règlement, les normes, et une
présomption de danger pourrait cependant être établie
lorsque la concentration de contaminants prévue par règlement est
dépassée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour qu'on se comprenne bien, je
pense qu'on est dans un élément important. Vous souhaiteriez que
l'on conserve la définition de risque tout en définissant le
risque, mais en incorporant une présomption.
M. Lazure: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
M. Lazure: La suggestion que le Barreau fait...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va.
M. Lazure: ...je l'accepte intégralement. Je la trouve
extrêmement facile de compréhension et il me semble qu'elle donne
un outil plus complet au ministre, à la loi. D'ailleurs, je n'ai jamais
compris pourquoi le ministre n'utilisait pas plus souvent les articles 20 et
115.1. Je veux profiter de la présence des représentants du
Barreau pour leur demander bien franchement: Qu'est-ce que le projet de loi
actuel ajoute comme pouvoir, au ministre, qui n'est pas déjà
inclus dans l'article 115.1 ou dans 20? Là, je ne parle pas des amendes.
Mais, en gros, les pouvoirs d'intervention du ministre, est-ce qu'ils sont
vraiment beaucoup plus grands dans le nouveau projet de loi qu'ils ne le sont
dans 20 et dans 115.1?
M. Masse: M. le député, le Barreau s'est fait
déposer il y a maintenant deux ans un
projet complet de modifications de plus de 2000 articles au Code civil
sans aucune note explicative. Ce n'est donc pas nous qui allons accuser le
ministre Paradis de faire pire que le ministère de la Justice, mais
cependant il est clair qu'il n'y a pas eu de présentation, à
notre connaissance, des véritables justifications, non seulement du
bien-fondé du projet... Il est évident que le projet
lui-même, on doit le traiter, on doit intervenir, mais, sur la technique
d'intervention, il est clair qu'il y a là un manque de transparence qui
nous pose des problèmes. Et...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse. S'il y avait des
questions de règlement... Je ne peux pas laisser passer ça, parce
quelqu'un n'a pas suivi l'actualité québécoise au cours
des six derniers mois et surtout pas la période de questions à
l'Assemblée nationale où vous avez adressé combien de
questions auxquelles on a eu l'occasion de répondre. Moi,
là...
M. Lazure: Mme la Présidente, je reprends mon temps de
parole.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne vous en tiens pas rigueur,
ce n'est pas l'émission la plus intéressante à la
télévision.
M. Masse: Je vous la pose la question, M. Paradis.
M. Lazure: Non, je...
M. Masse: pourquoi est-ce que, sur 115. 1, vous avez une approche
fondée sur le risque alors que dans toute votre approche sur la
décontamination, qu'on voit dans le projet, vous mettez de
côté complètement cette approche-là? dites-nous le,
on va le savoir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous changez la question. La
question sur laquelle vous vous êtes prononcés, c'est de dire
qu'il n'y a pas de justification en arrière du projet de loi, il n'y a
pas...
M. Masse: Non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi):... de ratio d'intervention...
M. Masse:... sur la nécessité d'intervenir sur les
terrains contaminés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le ratio d'intervention est le
suivant, je tiens à vous le souligner...
M. Masse: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi):... j'ai été, comme
ministre de l'Environnement, pris dans des cas où j'avais les ressources
parce que je les ai concentrées là dans le cas de Balmet à
Saint-Jean-sur-Richelieu - et le député est ici à la table
ce soir - où, en vertu de tous les pouvoirs que nous avions dans la loi,
nous étions menottes sur le plan de l'intervention de façon
à protéger la santé et la sécurité de la
population. Si vous n'avez pas suivi ce dossier-là, celui de Duparquet
en Abitibi n'a pas dû vous échapper, celui de l'est de
Montréal... À chaque fois que nous voulons intervenir, nous
n'avons pas les outils législatifs nécessaires.
M. Lazure: Mme la Présidente, je reprends mon...
M. Masse: Prenons l'exemple de Saint-Jean, M. le
député...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est épouvantable de se
faire dire ça, ce soir.
La Présidente (Mme Pelchat): À l'ordre, s'il vous
plaît! Juste un instant, monsieur. Je pense qu'il y a...
M. Lazure: Mme la Présidente, j'aimerais reprendre mon
droit de parole, Mme la Présidente.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez-moi. Vous avez raison,
c'est...
Une voix: II reste quatre minutes.
M. Lazure: Reprenant mon droit de parole, je m'explique. Moi, je
pense que, contrairement à ce que le ministre a dit, les
problèmes auxquels il fait face depuis six ou sept mois ne sont pas dus
surtout ou seulement au fait que l'article 115. 1 n'est pas assez fort. Moi, je
pense que l'article 115. 1 est fort, mais il ne s'en est pas servi. L'article
115. 1 permet d'intervenir...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais au Conseil du
trésor toutes les semaines.
M. Lazure: Oui, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Toutes les semaines, et au Conseil
des ministres, pour payer avec l'argent du peuple.
M. Lazure: Oui, mais l'article 115. 1 vous permet la
réclamation des frais: "Le ministre peut, en la manière de toute
dette", etc. Vous pouvez réclamer-Une voix: Après. M.
Lazure: Après. Bon. M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais je
ne
suis pas créancier privilégié.
M. Lazure: Enfin, je pense que ça serait un débat
trop long.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais je paie avec l'argent du
peuple, toutes les semaines.
M. Lazure: Mais je reviens au fil de mes idées. Moi, je
pense en tout cas que la suggestion que le Barreau nous fait, M. le ministre,
est extrêmement valable, quant à moi. Il ne faut pas que vos
pouvoirs soient fondés simplement sur des normes, des chiffres. Il ne
faut pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça, là-dessus... (22
heures)
M. Lazure: Je pense qu'il faut que la notion de risque soit
conservée, c'est une bonne notion. Moi, j'aime beaucoup aussi les
remarques préliminaires que vous avez faites concernant la
non-solvabilité. Le représentant du Barreau a dit en somme ce
qu'on dit depuis un bon bout de temps. Que cette loi-là, même si
elle a beaucoup de dents, elle ne va pas régler la plupart des
problèmes où les propriétaires, des petits malins vont
utiliser toutes sortes de trucs pour devenir insolvables dans la cause qui va
vous occuper à ce moment-là. Et, par conséquent, il y a un
danger que cette loi-là donne l'illusion au monde que dorénavant
les pollueurs vont être les payeurs. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas
vrai. D'où l'importance du fonds de compensation et là je partage
entièrement aussi la suggestion du Barreau et j'aimerais leur demander
s'ils font une différence, parce que vous en avez parlé, entre un
fonds de compensation et un fonds de décontamination. Est-ce que vous
pourriez élaborer un petit peu sur la distinction entre les deux?
M. Masse: Dans le cas de Saint-Basile, M. le
député, on a été chanceux. C'est le bon
côté de l'entrepôt qui a passé au feu. Si l'autre
côté de l'entrepôt était passé au feu et qu'on
avait été obligés d'évacuer pour une très
longue période 2000 personnes, quelle aurait été la
facture pour ces familles-là? Dans le cas de Saint-Amable, on a
été chanceux. Le vent était dans l'autre sens où il
est d'habitude. Mais, si on avait dû évacuer la population de
Saint-Amable pendant deux semaines, qui aurait compensé ces
gens-là sur une autre base que la Loi sur la protection civile qui
comprend des dommages extrêmement limités? Dans le cas de ces
problèmes-là de contamination, qui vont se produire fatalement,
je vous laisse penser ce qui se produirait si l'Union Carbide à
Montréal-Est, qui est une copie fidèle et conforme de ce qui se
passe à Bhopâl, présentait les mêmes
problèmes. Qui paierait pour ces dommages-là? Les fonds publics?
Peut-être! Mais on pense qu'on doit non seulement penser à
constituer un fonds pour décontaminer les sols, mais on doit penser
à compenser des gens qui sont des victimes innocentes. Dans le cas de
Saint-Jean-sur-Richelieu le ministère intervient, mais la santé
de ces enfants-là, le ministère ne compensera pas
vraisemblablement ces gens-là. Quant a nous, on estime, s'il y a
nécessité de décontaminer un grand pourtour à
Saint-Jean-sur-Richelieu, qu'il faut penser à l'avenir de ces
gens-là aussi, ça compte.
M. Lazure: Est-ce que vous avez songé à une formule
qui pourrait être applicable à ces deux fonds-là? Je
comprends très bien votre distinction, compensation et...
M. Masse: Comme je vous ai dit tantôt le problème
des fonds de compensation, autant ceux administrés par la CSST que ceux
administrés en matière d'automobiles, par exemple, et encore
là... On est en présence de deux types de risque. On parle ici
d'un autre type de risque. Ce sont des fonds qui entraînent une
irresponsabilité de la part de ceux qui cotisent. Et en matière
environnementale, c'est ce qu'on disait tantôt, il nous semble difficile
de penser que ceux qui contribueraient à constituer ces fonds-là
pourraient s'en tirer sans aucune responsabilité. Donc, il y a un examen
- et je pense qu'on pourrait continuer le dialogue avec le ministère -
à faire de ce type de fonds, il y a l'expérience
américaine; il y a plusieurs types de fonds aux États-Unis qui
ont fonctionné et on pourrait s'inspirer de certains exemples
européens également. Je pense qu'on va devoir comme
société arriver à une situation où on va avoir des
moyens de compenser des catastrophes à caractère technique.
M. Lazure: Mme la Présidente, le ministre a parlé
tantôt de la nécessité d'appliquer à l'environnement
les dispositions - je parle du Code criminel - qui s'appliquent aux trafiquants
de drogues, de les appliquer à l'environnement. Ma question toute simple
au ministre: Est-ce qu'il a fait par les voies normales de son gouvernement une
requête au gouvernement fédéral, au ministère de la
Justice, pour qu'ils amendent le Code criminel à cet effet? Ou, s'il ne
l'a pas fait, est-ce qu'il a l'intention d'en faire une? Je suis
sérieux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, quand vous
traitez les infractions qui découlent de la Loi sur la qualité de
l'environnement, nous avons au ministère de l'Environnement, comme vous
le savez, déposé 46 chefs d'accusation au pénal, au civil
contre Mark Levy, même un mandat d'arrestation a été...
M. Lazure: Ce n'est pas ça ma question.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, j'essaie
de vous la placer dans le contexte...
M. Lazure: Je connais bien le contexte, oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...émis. Nous nous rendons
compte - et on se devait d'attendre la décision du ministère de
la Justice qui a été rendue la semaine dernière - que les
dispositions actuelles du Code criminel dans un cas comme celui-là ne
donnent pas ouverture à dépôt, suivant la décision
rendue par le ministre de la Justice, de plaintes criminelles, donc
impossibilité d'entreprendre des procédures d'extradition, etc.
Dans ce contexte, j'ai l'intention de demander au gouvernement
fédéral, mais je souhaiterais le faire en collaboration avec mes
collègues des autres provinces canadiennes dans le cadre de la prochaine
réunion du Conseil consultatif des ministres de l'Environnement...
Lorsque nous sortons de ce conseil consultatif avec une résolution
unanime, habituellement, le gouvernement fédéral se sent
pressé de passer à l'action.
La Présidente (Mme Pelchat): M. le
député.
M. Lazure: Oui. En conclusion, la dernière suggestion du
Barreau que je retiens, c'est celle de soumettre à une commission
parlementaire, peut-être restreinte comme celle-ci, mais, en tout cas,
une certaine forme de consultation, les normes contenues dans le
règlement. Je pense que c'est assez important pour que ce soit
débattu pendant quelques heures ou quelques jours, ces normes-là.
Il y a des opinions scientifiques qui varient et, à plus forte raison,
des opinions non scientifiques qui varient encore plus.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ha, ha, ha!
Moins elles sont scientifiques, plus elles varient!
M. Lazure: C'est ça. Merci, Mme la Présidente, j'ai
fini.
La Présidente (Mme Pelchat): Merci, M. le
député. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Mme la Présidente,
assez rapidement, quant à un fonds de compensation comme tel, je ne
pense pas que les gens l'aient qualifié comme tel. Les
départements de santé communautaire, la Fondation
québécoise en environnement, divers intervenants nous ont
suggéré d'établir un fonds de décontamination.
Lorsqu'on parle d'un fonds de compensation - et vous êtes les
premiers à faire la suggestion; je sais que vous l'aviez faite
publiquement à l'occasion de ce qui est arrivé à
Saint-Amable - ça touche une notion d'assurance qui dépasse,
à première vue - je vous le soumets bien respectueusement - le
mandat, la responsabilité du ministère de l'Environnement du
Québec. Lorsque nous intervenons en matière d'environnement, et
nous tentons d'avoir un message qui soit uniforme sur le plan de la population,
nous avons besoin du Barreau du Québec pour communiquer ce
message-là à l'ensemble de la population également et,
surtout, à ses membres qui interviennent.
Certaines gens pensent que le ministère de l'Environnement est
responsable en matière d'alimentation, de santé, de
sécurité publique, de communication, etc. Le ministère de
l'Environnement du Québec tente d'assumer ses responsabilités en
fonction des 12 lois qu'il a la responsabilité d'assumer, et de laisser
aux autres ministères, en collaboration avec le ministère de
l'Environnement, toute la place qui leur revient. Lors d'un sinistre comme
Saint-Amable, pour vous donner un exemple, il y a des gens qui disent: C'est le
ministre de l'Environnement qui est responsable de tout, qui devrait prendre la
responsabilité de tout, alors que le plan d'intervention gouvernementale
- il est important que vous en soyez informés - prévoit
qu'à partir de Québec c'est le ministre de la
Sécurité publique, qui est responsable de la Sûreté
du Québec, des forces incendie, etc., qui prend le contrôle des
opérations. Sur le plan local, au niveau du terrain, c'est la
municipalité qui parle par la voix de son maire. Le ministère de
l'Environnement du Québec occupe un rôle de conseil, autant
auprès du ministre de la Sécurité publique
qu'auprès du maire, tout comme le fait le ministre de la Santé et
des Services sociaux quant à la santé des individus, tout comme
le fait le ministre de l'Agriculture quant à l'alimentation des
population et à la qualité alimentaire des produits, tout comme
le fait la ministre des Communications quant aux communiqués, etc.
C'est important que le Barreau du Québec aide à
véhiculer cette compréhension d'intervention en période de
crise parce que plus la population comprend le rôle de chacun des
ministères, plus la population réagit de façon
éclairée et mieux renseignée à l'occasion de ces
sinistres. Donc, quand vous réclamez un fonds de compensation par le
ministère de l'Environnement, l'impression que ça nous laisse,
encore une fois, c'est que ça a renforcé cette impression que
c'est le ministère de l'Environnement du Québec qui est expert au
gouvernement du Québec en matière de santé et de services
sociaux, alors que nous n'avons aucun médecin à l'emploi du
ministère de l'Environnement du Québec.
M. Lazure: Vous devriez en avoir. Une voix: Ce serait une
bonne idée.
La Présidente (Mme Pelchat): Est-ce que vous cherchez un
emploi, Dr Lazure?
M. Lazure: On ne sait jamais. C'est ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a deux façons de
procéder. Le Dr Lazure dit: Peut-être qu'on devrait en avoir. On
pense qu'il y a des ressources au gouvernement qui sont
spécialisées dans ce domaine-là et qu'elles sont les plus
habilitées à donner à celui qui est responsable de
l'opération, le ministre de la Sécurité publique, les
conseils en matière de santé. On n'a pas non plus, en
matière d'alimentation, de spécialiste; c'est le ministère
de l'Agriculture qui s'acquitte de cette fonction.
Donc, lorsqu'on parle d'un fonds de compensation comme tel, c'est
peut-être au ministère de la Justice, au ministère de la
Sécurité publique, mais le ministère de l'Environnement a
tellement de difficulté à date à s'acquitter des
responsabilités qui sont les siennes en vertu des 12 législations
dont il a l'application qu'il n'est pas de son intention, dans un avenir
prévisible, de créer - et je le dis très très
honnêtement au Barreau - un fonds d'indemnisation ou de compensation des
victimes suite à une explosion dans une industrie. On pense que, si le
gouvernement devait emprunter cette voie, c'est au ministère qui
s'occupe généralement des catastrophes, le ministère de la
Sécurité publique, à intervenir dans ce
domaine-là.
Maintenant, si on parle de décontamination et d'un fonds de
décontamination, comme on a eu l'occasion de parler, oui, on pense qu'il
s'agit là d'une responsabilité sur laquelle devrait se pencher le
ministère de l'Environnement du Québec.
La Présidente (Mme Pelchat): Me Masse.
M. Masse: M. le ministre, l'article 20 de la loi, quand il parle
de protection d'environnement, déclare qu'on ne peut pas porter atteinte
à la vie, à la santé, à la sécurité,
au bien-être et au confort de l'être humain. On parle de
l'être humain comme une partie d'un environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez la faune et la flore
aussi plus loin dans la loi.
M. Masse: C'est ça. Mais on pense que l'être humain
est plus important que la faune et la flore.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est le premier intervenant.
D'ailleurs, on a eu une discussion ce matin avec les DSC qui
prétendaient que le ministère de l'Environnement devait
procéder à des tests de sol avant de procéder à des
examens sanguins. J'ai tenu exactement le même langage que vous tenez ce
soir.
M. Masse: La deuxième chose. La Régie de
l'assurance automobile du Québec compense des victimes, bien souvent
innocentes, pour un risque automobile et, à ce que je sache, la
Régie de l'assurance automobile du Québec ne relève pas du
ministère de la Santé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. La Régie...
M. Masse: Et ici, on parle de compensation des victimes de
dommages environnementaux. On pense que, que ce soit au ministère de la
Sécurité publique ou au ministère de l'Environnement, il
va devoir y avoir un fonds qui s'occupe non seulement de décontaminer le
sol, mais qui va s'occuper... Notamment, il y a une petite fille que vous
connaissez sans doute, à Saint-Jean, qui a un taux de contamination au
plomb très élevé. Si, dans l'avenir, il s'avère que
son avenir immédiat est affecté, quel recours elle a dans la vie?
Qu'est-ce qu'on fait avec elle? Vous avez consacré 3 500 000 $ à
décontaminer les sols, parfait. Mais qu'est-ce qu'on fait des enfants
dans ce genre de situation ou des personnes âgées? Ils font partie
de l'environnement, eux autres aussi.
La Présidente (Mme Pelchat): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne dis pas, non... Si je suis
votre langage, vous dites que tout le monde fait partie de l'environnement. Je
suis d'accord avec vous, mais le ministère de l'Environnement, ce n'est
pas le ministère qui s'occupe de tout au gouvernement. C'est un peu le
message que j'ai tenté de vous livrer. Il y a des responsabilités
en matière environnementale et il y a d'autres ministères qui ont
des responsabilités en matière de catastrophe. Lorsque vous avez
des inondations, il y a des gens qui sont affectés sur le plan de leur
santé, de leur bien-être, etc., et c'est le ministère de la
Sécurité publique. Je tente de vous expliquer le fonctionnement
de l'appareil gouvernemental et il y a un ministère des catastrophes.
Lorsqu'il y a des inondations à Montréal, comme il y a eu un
certain 14 juillet, vous avez des gens qui ont été
affectés sur le plan de leur intégrité physique et il y a
de la compensation qui a été versée, peut-être pas
suffisante, mais par un ministère qui administre... Au niveau du
gouvernement fédéral, vous avez un programme qui est
administré également par ce même type de ministère.
Ce n'est pas le ministère de l'Environnement. Dans d'autres
sociétés auxquelles on peut se comparer, les caisses de
compensation ne sont pas administrées par le ministère de
l'Environnement. Ce n'est pas parce que je ne veux pas administrer, moi, une
caisse d'assurance de tant de millions. Ça pourrait donner du prestige
à un ministre de l'Environnement. Mais ce n'est pas administré
par des ministères de l'Environnement. C'est le message que je tente de
véhiculer au
Barreau.
On a une demande d'à peu près tous les groupes, et c'est
là-dessus que j'aimerais vous entendre. On parle d'un fonds de
décontamination. Est-ce que vous seriez en faveur de la création
d'un fonds de décontamination tout en demeurant en faveur d'un fonds de
compensation qui devrait être administré par une autorité
gouvernementale qui est en charge des catastrophes et des sinistres?
M. Masse: M. le ministre...
La Présidente (Mme Pelchat): Je m'excuse, Me Masse. Je
dois d'abord demander le consentement de M. Lazure...
M. Lazure: Oui, oui. Je consens. Mais il l'a dit tantôt, Me
Masse, qu'il était en faveur.
La Présidente (Mme Pelchat): ...parce que le temps du
ministre est expiré. Alors, vous allez parler maintenant sur le temps du
député de La Prairie.
M. Lazure: La réponse, c'est oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien, je ne le sais pas, je ne
l'ai pas entendu.
M. Lazure: Bien oui, il l'a dit tantôt. Vous pouvez le
répéter.
M. Masse: Mais, M. le ministre, peu importe que ce soit vous qui
administriez ce fonds d'indemnisation des victimes de dommages
environnementaux, si le ministre de l'Environnement, qui est quand même
d'abord membre d'un gouvernement avant d'être ministre de
l'Environnement...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Député avant.
M. Masse: ...fait des pressions dans le sens de cette
idée-là, peut-être qu'on pourrait faire du chemin. on ne se
chicanera pas sur les modalités.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je voudrais qu'on s'entende
correctement. Il y a des gens - et c'est difficile pour le ministère de
l'Environnement - lorsqu'ils voyaient de la fumée autrefois, il y a 20
ans, ils appelaient les pompiers. Aujourd'hui, les gens appellent le
ministère de l'Environnement et nous sommes devenus, à cause
d'une certaine perception qui est véhiculée, sans mauvaise foi,
par différents intervenants, les intervenants de première ligne
en cas de catastrophe alors que nous n'avons pas les effectifs, et ça
retarde une intervention rapide et efficace pour garantir la santé et la
sécurité de la population du gouvernement. Ce à quoi je
m'attends du Barreau du Québec, c'est que, étant maintenant
informé que c'est le ministère de la Sécurité
publique qui est l'intervenant de première ligne dans le plan d'urgence
du gouvernement, fort de cette information, il la véhicule auprès
de ses membres, parce que ses membres contactent beaucoup d'intervenants dans
la population et, en cas de catastrophe, sont des intervenants de
première ligne souvent.
La Présidente (Mme Pelchat): M. le député de
La Prairie.
M. Lazure: Bon. Vous me permettez, Mme la Présidente, de
prendre quelques minutes quand même pour exprimer l'opinion de
l'Opposition là-dessus. Que le ministre de l'Environnement le fasse
directement, lui-même, ou qu'il s'assure que ce soit fait, peu importe,
l'important, comme Me Masse l'a dit, c'est qu'il assure cette commission
parlementaire qu'il va faire des pressions énormes auprès de ses
collègues pour qu'il y ait la création d'un fonds de
compensation. Parce que Me Masse a absolument raison. Actuellement, il n'y a
rien de prévu pour un enfant dont la santé pourrait être
handicapée, et on commencera à s'en apercevoir dans les quelques
années qui s'en viennent, à cause de contamination au plomb. Il a
parfaitement raison.
Et de toute façon, j'ai noté depuis quelque temps que vous
avez tendance à vous dissocier de vos responsabilités en
matière de santé qui vous sont imparties de par la loi. Me Masse
les a cités tantôt, autant l'article 20 que l'article 115.1, les
deux disent clairement que, quand la santé de l'homme est en danger,
vous devez intervenir. Bon. De l'humain. Alors, que vous le fassiez faire par
les départements de santé communautaire, par le biais de votre
collègue, il n'y a pas de problème. Mais vous devez vous sentir
responsable quand même et ne pas faire comme vous faites depuis quelque
temps, de porter la responsabilité, de temps en temps à la
Sécurité publique, de temps en temps au ministre de la
Santé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): De ne pas communiquer
l'information, c'est encore pire.
M. Lazure: Oui. Lorsque vous avez de l'information, la
communiquer...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La communiquer.
M. Lazure: ...aux gens de la santé, contrairement à
ce qui est arrivé dans l'est de Montréal où vous ne l'avez
pas communiquée aux gens de la santé. Oui, oui, oui. Les
données de la caractérisation faite par la Défense
nationale étaient à votre ministère depuis janvier dernier
et elles n'ont pas été communiquées au département
de santé communautaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Elles l'ont été
là.
M. Lazure: II y a deux jours, trois jours, quatre jours, une
semaine.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le 29.
M. Lazure: Ça a pris six mois avant qu'elles soient
communiquées.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le 29.
M. Lazure: Ça a pris six mois, d'accord?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Trop long. Ah oui, vous avez
complètement raison. Il n'y a pas de réflexe, suite à
certains propos tenus par des ministres antérieurement, de garder des
choses secrètes...
M. Lazure: Tantôt, là, je vous disais que ce ne
serait peut-être pas une mauvaise chose qu'il y ait un médecin
dans votre ministère. Sans monter un service médical, que vous
ayez un conseiller proche de vous qui soit médecin spécialiste en
environnement, ce serait peut-être une bonne chose. Ce serait
peut-être une bonne chose.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'en ai un. M. Lazure: Bon,
on peut le connaître?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Le critique de l'Opposition
officielle.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Là, vous m'avez. Il est 22 h 20. Là, je
ne vous ai pas vu venir. Alors, moi, je veux encore une fois féliciter
le Barreau et le Barreau peut âtre assuré que, quant à nous
de l'Opposition, on va talonner le ministre pour s'assurer qu'il y ait un fonds
de compensation, mais aussi - parce que la deuxième chose, c'est dans
ses pouvoirs - qu'il mette dans son projet de loi un fonds de
décontamination. Et qu'il garde aussi la notion de risque. Merci.
La Présidente (Mme Pelchat): Merci, M. le
député de La Prairie. M. le ministre, en conclusion,
brièvement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mes remerciements au Barreau. La
demande de précision qui a été adressée sur la
notion de locataire demeure. Si vous pouviez nous accommoder, nous vous en
saurions gré. Quant au fonds de compensation, je dirai à Me
Masse: Si vous adressez votre demande au ministère de la
Sécurité publique, s'il vous plaît, n'oubliez pas de m'en
envoyer une copie de façon à ce que je puisse l'appuyer.
La Présidente (Mme Pelchat): Alors, merci, Me
Sauvé, Me Masse et Me Godin. Nous allons maintenant passer à
l'Association minière du Québec. Nous suspendons nos travaux pour
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 19)
(Reprise à 22 h 23)
Le Président (M. Garon): Nous reprenons nos travaux et je
demanderais à l'Association minière du Québec, par la voix
de son représentant, M. Jacques Duval, président du comité
environnement de l'Association minière du Québec, de nous
présenter les gens qui l'accompagnent, en vous disant que vous avez 20
minutes pour faire vos représentations, 20 minutes du côté
ministériel, 20 minutes à l'Opposition. Si vous en prenez plus,
vous réduisez le temps de chacun d'autant. Si vous en prenez moins, vous
augmentez leur temps d'autant, temps qu'ils ne sont pas obligés de
prendre. Et, si vous prenez tout le temps, bien, ils n'en auront pas.
Association minière du Québec
M. Drouin (Claude): Alors, je me présente-Le
Président (M. Garon): Sur une base de 60 minutes.
M. Drouin: Je suis Claude Drouin, directeur général
de l'Association minière du Québec. Je vais vous présenter
les gens qui m'accompagnent. À l'extrême droite, M. Dan Tolgyesi,
qui est directeur général de Minova inc., responsable de trois
opérations au Québec; M. Jacques Duval, qui est directeur de
l'environnement et président de la compagnie minière
Québec-Cartier, il est aussi président du comité de
l'environnement de l'Association; à ma droite, c'est Me Jean Rober-ge,
qui est mon adjoint; à mon extrême gauche, Mme Ghobrial, qui est
une consultante pour Inco qui opère une mine d'or ici, au Québec,
et, immédiatement à ma droite, M. Pat Cayouette, qui est
directeur général de Mines Gaspé.
Alors, je crois que ce n'est pas nécessaire de vous dire qui est
l'Association minière du Québec. Nous regroupons la presque
totalité des producteurs miniers, à l'exception des mines
d'amiante et des carrières. Nous employons environ 15 000 personnes.
Nous avons une production de l'ordre de 1 800 000 000 $ par année et
nous sommes situés principalement en région, toujours assez loin
des grands centres.
La loi qui nous a été soumise pour discussion, en tant que
contribuables, nous inquiète beaucoup et pour toutes sortes de raisons.
La
raison première, d'abord, c'est que nous avons eu très peu
de temps pour réfléchir, très peu de temps pour l'analyser
et très peu de temps pour consulter parce que vous savez que tous les
printemps, c'est la grande fièvre du printemps, tout nous accable, tout
nous tombe dessus de tous les côtés. Pour cette raison, on a
préparé un mémoire qui est très long parce qu'on
n'a pas eu le temps d'en faire un court; c'est peut-être ça qui
est le problème. Il est tout de même assez étoffé.
Me Roberge en est le principal artisan, évidemment. On n'en fera pas la
lecture, on fera la présentation des grandes lignes.
Nous allons vous parler évidemment de la notion de
pollueur-payeur que nous croyons qui est regardée d'une façon un
peu trop simple parce que, en fait, on l'associe uniquement, on fait une
espèce de rapprochement trop étroit entre pollueur et producteur.
Et c'est cette notion-là, je crois, qui mérite d'être
regardée. On va en reparler dans le mémoire. On va parler aussi
du pouvoir qui est donné au ministre d'émettre des ordonnances
à partir de perceptions, à partir de pressentiments. On n'est pas
nécessairement très heureux de cette politique, alors on va en
parler. On va s'interroger aussi sur la nécessité de donner de
nouveaux pouvoirs au ministre parce que, nécessairement, on se demande
s'il n'y pas déjà tout ça qu'on retrouve dans la loi. Nous
allons parler de sols contaminés et, pour le milieu minier, c'est
extrêmement important parce que, en fonction du projet de
règlement que nous avons reçu, automatiquement, une mine devient
naturellement un site contaminé. Si c'est une mine de cuivre ou une mine
de zinc, c'est clair qu'on dépasse... Le fait même d'être
sur le site, on est contaminés parce que les normes sont
nécessairement dépassées automatiquement; notre
Créateur a fait ça comme ça. Et, finalement, je crois que
nous allons faire un retour en arrière sur les choses du passé.
Alors, sans plus de préambule, je passe la parole à Me Roberge,
qui va passer en revue les grandes lignes du mémoire que nous vous avons
déposé. Je crois que vous l'avez reçu le mémoire,
M. le Président.
Une voix: Oui.
M. Drouin: Alors, je passe la parole à Me Roberge.
M. Roberge (Jean): Bonsoir. Merci beaucoup de nous avoir
invités à la commission parlementaire sur ce sujet qui est
très important. Très important d'abord parce qu'il couvre un
sujet qui est de la première importance et très important aussi
parce qu'il peut aller trop loin, comme on pourra vous l'expliquer dans notre
mémoire.
D'abord, on considère que le projet de loi mériterait une
étude beaucoup plus approfondie sur les conséquences sociales,
économiques et même environnementales. Des études beaucoup
plus poussées devraient être faites avant de présenter le
projet de loi comme il l'a été. On est de cet avis parce que,
aussi, plusieurs chantiers environnementaux sont en marche: la commission
Charbonneau, par exemple, ceux du Conseil de la conservation et de
l'environnement, la révision du règlement sur les déchets
dangereux, la réorganisation du ministère, l'implantation du
programme de réduction des rejets industriels.
Le principe pollueur-payeur a une connotation très
environnementale. Cependant l'application n'est pas aussi simple qu'on puisse
le penser. Une personne, une entreprise, une municipalité occasionnant
une contamination ou une pollution se doit de corriger la situation. C'est bien
clair. Ce qu'il faut réaliser cependant, c'est le fait qu'une multitude
d'activités et de situations de fait sont là parce qu'elles
étaient rendues nécessaires et demandées par la
société. De plus, cette même société les a
autorisées et réglementées selon les connaissances du
moment. Aujourd'hui, plus consciente et avertie, la société,
représentée par le gouvernement, considère qu'il aurait
peut-être été préférable d'agir autrement si
elle avait su. Par exemple, les BPC n'auraient peut-être pas vu le jour
ou n'auraient pas été utilisés si on les inventait
aujourd'hui. Il en sera peut-être de même avec l'avancement des
connaissances en ce qui a trait au pétrole, aux additifs à la
nourriture, aux produits de traitement pour l'eau potable, au transport et
à l'usage de l'électricité.
Des changements importants sont survenus en matière
d'environnement et il faut que chacun fasse sa part et ajuste ses pratiques.
Cependant, on ne peut, du jour au lendemain, tout remettre en question et
qualifier de contaminées ou contaminantes des situations
autorisées et réglementées et pour lesquelles
l'État, les connaissances et les techniques disponibles ne rencontrent
pas nécessairement toutes les ambitions environnementales.
Le concept pollueur-payeur ce n'est pas imputer à une seule
personne toute la responsabilité environnementale que l'on peut imaginer
ou attribuer à un produit. On ne peut permettre et souhaiter qu'une
activité soit, tout en lui reprochant qu'elle existe. La gestion du
concept pollueur-payeur c'est plutôt un agencement et une application de
différentes lois, règlements, directives, incitatifs, taxes,
subventions, politiques et autres, autant à l'égard des
intervenants qu'à l'égard de ceux qui utilisent ces mêmes
produits. Par exemple, dans le cas du pétrole, est-ce qu'on doit rendre
responsable l'usager de l'automobile, la raffinerie, le producteur du
pétrole ou le Créateur? D'après nous, il est
préférable d'adopter et articuler un ensemble d'interventions et
susciter un changement d'attitude plutôt que de condamner.
La présentation de l'actuel projet de loi est quant à nous
trop précipitée et l'évaluation de
son impact social, environnemental et économique est à
évaluer. Pour le secteur mines, par exemple, l'industrie minière
que nous représentons ne doit pas être visée par
l'application de l'actuel projet de loi et ceci pour diverses raisons. En
matière d'environnement, les sites miniers font parler d'eux à
cause des parcs de résidus miniers. Un inventaire mentionne 107 parcs de
résidus miniers, dont 12 sont rétrocédés à
la couronne, 60 sont inutilisés, mais sous la responsabilité
d'une entreprise existante, tandis qu'il y en a 35 utilisés par
l'industrie que nous représentons. Les résidus
générés a partir d'activité minière ne sont
pas abandonnés dans la nature, ils sont déposés,
après autorisation du gouvernement, sur un site aménagé
à cette fin, pour fins de contrôle, d'analyse et de traitement,
selon les technologies actuellement connues et selon les normes
applicables.
La connotation de dangerosité attribuée aux parcs de
résidus miniers origine malheureusement des travaux du groupe de travail
GERLED mis sur pied pour identifier et répertorier tous les sites
potentiellement dangereux pour l'environnement et le public. Dans cadre de ses
activités, le GERLED n'a pas eu le temps ni les ressources pour visiter
les sites miniers, ni procéder à des analyses ou
caractérisations. Il a qualifié les sites selon les informations
qu'il pouvait avoir dans ses dossiers sans les vérifier ou les valider
d'une quelconque façon. Suite aux travaux de ce groupe, les
interlocuteurs en ont conclu que tous les endroits et sites mentionnés
dans la documentation produite par ce groupe constituaient des sites dangereux
pour la santé ou l'environnement. Cette perception des choses a
été faite et persiste sans considérer les nuances que le
GERLED a pourtant indiquées lui-même dans son document. Et je vous
cite un extrait: "Par souci de prudence, l'évaluation du risque
potentiel s'est faite, dans tous les cas, de façon conservatrice,
c'est-à-dire que dans les cas où certaines informations
étaient déficientes le ministère a
préféré surévaluer le risque potentiel quitte
à revoir la classification à la baisse une fois que le lieu
concerné serait mieux connu."
Les parcs de résidus miniers ne constituent pas une disposition
finale de ces matériaux. Ces parcs sont un lieu de traitement et de
contrôle à la sortie desquels un effluent sert d'exutoire, et des
normes fédérales et provinciales s'y appliquent. Ceci ne veut pas
dire que tous les parcs de résidus miniers ne constituent aucun
problème pour l'environnement. En effet, des parcs abandonnés et
sans surveillance, générateurs d'acidité dans certains
cas, sont un problème pour l'environnement. À cet égard,
des mesures pour sécuriser et contrôler les lieux sont prises.
Aucune entreprise minière existante n'est intéressée
à causer des torts environnementaux, et aussi des mesures sont prises
pour les éviter.
Un parc de résidus miniers, ce n'est pas jeter des résidus
à la nature. Il s'agit d'une façon de les entasser afin de les
contrôler et d'apporter les traitements nécessaires. Quant
à l'amélioration du traitement et de la surveillance des parcs,
la recherche et les travaux se continuent par les entreprises et les
associations principalement à travers le projet NEDEM et par
l'engagement de spécialistes dans des entreprises minières. Le
projet NEDEM est un programme d'investissement de plus de 14 000 000 $ en
recherche sur le traitement, le contrôle et la restauration des sites.
Pour la restauration finale d'un site minier, plusieurs parcs de résidus
miniers ont été restaurés au fil des ans. Les entreprises
minières entendent continuer cette restauration au fur et à
mesure des besoins. Je pourrais vous souligner d'ailleurs que l'Association
elle-même a financé la restauration d'un parc l'année
dernière et quatre entreprises minières ont contribué avec
Canards illimités pour la restauration d'un parc orphelin. il faut
ajouter a ce propos que les entreprises minières du canada, par la voie
de leur association, tant au niveau national que provincial, ont mis de l'avant
une politique environnementale et un protocole de restauration des sites.
depuis plus de deux ans, l'industrie minière a recommandé aux
ministères des mines de toutes les provinces d'adopter les dispositions
législatives précises à ce sujet. les ministères
des mines y travaillent à travers un groupe de travail
intergouvernemental qui examine aussi le volet fiscal des coûts de
décontamination et de restauration aussi.
Lors de la refonte de la Loi sur les mines en 1987, des dispositions ont
justement été adoptées afin qu'il n'y ait pas d'abandon de
droits miniers sans l'autorisation du ministre des mines qui doit consulter le
ministre de l'Environnement à cet égard. Dans les faits, c'est
depuis 1975 que le ministère des mines n'accepte plus de
rétrocession sans considérer l'aspect environnemental.
De plus, la Loi sur les mines prévoit l'enlèvement des
installations et du minerai extrait à la fin des activités. Les
certificats d'autorisation, pour leur part, émis en vertu de la Loi sur
la qualité de l'environnement en traitent. Nous croyons donc que cette
approche doit être suivie. SI les dispositions actuelles de la Loi sur
les mines ne vont pas assez loin, des amendements pourraient être
apportés pour articuler davantage sur l'aspect environnemental. En tant
que gestionnaire des titres et des droits miniers et responsable du secteur, il
nous paraîtrait tout à fait normal et plus valable que la
préoccupation environnementale soit intégrée au volet
économique du ministère. D'autant plus que la Loi sur la
qualité de l'environnement de même que la Loi sur les mines
s'appliquent toutes deux à la couronne et aux ministères.
La gestion des résidus miniers et la restauration des sites
miniers doivent relever du ministère des mines aussi pour la raison que
des
titres miniers peuvent être accordés pour une exploitation
ultérieure des résidus. Une autre raison extrêmement
sérieuse dont vous devez tenir compte devrait vous amener à
conclure que les actuels amendements ne devraient pas s'appliquer au secteur
minier. En effet, la définition du mot "sol", à la Loi sur la
qualité de l'environnement, inclut le sous-sol. Aussi, l'exploitation
d'une mine se faisant en milieu minéralisé, l'industrie
minière se retrouvera en dépassement des normes concernant les
sols contaminés, simplement du fait de leur travail. D'autre part, dans
un projet de règlement qui nous a été acheminé en
vue de nous aider à faire les présents commentaires, on
déclare un ensemble d'activités industrielles, dont la
nôtre, comme susceptibles de contaminer le sol. Ces activités
seront considérées en infraction en regard de l'article 20 de la
Loi sur la qualité de l'environnement puisqu'il est formellement
interdit d'exercer une activité susceptible de contaminer le sol.
Le pouvoir habilitant de l'article 31.51, alinéa b, et la
réglementation prévue constituent un avis de fermeture à
plus ou moins brève échéance. C'est impensable, quant
à nous.
En deuxième partie du mémoire, vous retrouverez des
commentaires article par article. Compte tenu que le temps passe, je vais
plutôt vous parler à partir du résumé.
Les nouveaux pouvoirs que le ministre de l'Environnement réclame
par les amendements, quant à nous, ils existent en grande partie, par
exemple, avec les articles 25, 26, 27 et 118.2 qui permettent l'enregistrement
d'une ordonnance. La seule différence et la très grosse
différence, c'est que, avec les amendements, le pouvoir d'émettre
une ordonnance ou des avis d'ordonnance se fera uniquement sur des motifs
raisonnables. À notre sens, le ministère de l'Environnement et le
gouvernement, en somme, en matière d'environnement ne devraient pas agir
sur des motifs raisonnables. Quels seront-ils, ces motifs? Est-ce que ça
va être la personne, le bon père de famille ou est-ce que
ça va être une motivation raisonnable ou est-ce que ça va
être des rumeurs persistantes? Les motifs raisonnables ne sont nullement
décrits, sans critère.
Alors, ce serait important que ce genre de pouvoirs sur des motifs
raisonnables soient modifiés. Important pour différents points de
vue. Si un terrain, pour des motifs raisonnables, est considéré
comme contaminé, mais, avec la preuve, il n'est pas contaminé,
alors quel sera l'impact financier sur le terrain - c'est une chose - mais
aussi sur le voisinage ou sur le réel propriétaire du terrain qui
sera, dans certains cas, la municipalité ou, dans d'autres cas, la
couronne provinciale ou la couronne fédérale? Quel va être
l'impact d'agir ou d'émettre une ordonnance qui va être en soi une
hypothèque environnementale sur un terrain, sur uniquement des motifs
raisonnables?
Dans le travail du GERLED qui, dans le cas des mines, constitue un
travail non validé et non vérifié, ça va constituer
des hypothèques environnementales importantes sur lesquelles il va
falloir contester la détermination de ce qu'on veut faire,
émettre une ordonnance, par exemple. On a vécu un exemple comme
ça où le ministère croyait, sur la foi d'un renseignement
qu'il avait à son dossier, que des produits pétroliers avaient
été déversés dans le parc de résidus
miniers. L'entreprise a dû dépenser beaucoup d'argent pour prouver
justement que ce n'était pas vrai. On ne peut pas se retrouver, du jour
au lendemain, à agir dans le domaine de l'environnement principalement,
uniquement sur des motifs raisonnables.
Ensuite, concernant la radiation des avis dont on parle, on devrait
spécifier dans la loi que ces délais de radiation devraient venir
d'une façon assez courte et peut-être que même la radiation
des avis devrait se faire, elle aussi, sur des motifs raisonnables.
Concernant la politique des sols contaminés, c'est une politique
qui a été adoptée suite à l'exemple
réalisé en Hollande où on vit une situation assez
différente d'ici. Et la politique de décontamination ou la
politique des sols contaminés contient des normes en trois plages:
plages a, b, c. Mais, avec la nouvelle réglementation proposée,
on ne se sert plus du tout de la troisième plage, et on va
considérer pour la contamination la norme qui est cinq à six fois
plus exigeante. Et cette modification-là n'est accompagnée
d'aucune rationalité scientifique ni explication. En plus, la politique
avait été déterminée justement pour indiquer
qu'à la plage c il fallait faire des études un peu plus
poussées. À ce moment-ci, cinq à six fois plus
sévère, on va déterminer qu'un sol est contaminé
avec tous les impacts que cela va avoir sur le terrain, sur les
créanciers, sur les créanciers soit hypothécaires ou par
nantissement, sur le voisinage aussi, qui va certainement demander au
ministère de prouver que ce qu'il a dit pour le terrain 10, ce n'est pas
vrai pour le terrain 11, parce que ça peut être important pour les
voisins, surtout pour les voisins. Dans la loi non plus, on n'indique pas la
distinction entre le verbe "peut" ou "doit". Dans l'interprétation, le
mot "peut" signifie à l'occasion "dort", signifie un devoir. Ce serait
important, dans les pouvoirs qu'on se donne, qu'on indique si c'est vraiment
"peut", une possibilité, ou si c'est vraiment "doit", parce qu'il y a
une grosse différence.
Quant à nous, les pouvoirs qui existent actuellement sont
très suffisants et nous l'avons expliqué à la commission
Charbonneau la semaine dernière. Le ministère devrait user de
plus d'opportunisme dans l'exercice des pouvoirs qu'elle a en vertu de
l'article 25 par exemple ou dans l'application de l'article 20.
Dans la question des ordonnances pour ramasser et enlever des
résidus ou des déchets
ou des decontaminations, on devrait envisager aussi la
possibilité d'ordonner, de sécuriser, de contrôler par
exemple le plomb ou le mercure dans le sol. Il y a des endroits où ils
permettent le recouvrement par de l'asphalte, et utiliser comme parc de
stationnement peut-être un terrain qui serait contaminé. Ça
neutralise la contamination. Dans la publicisation des divers avis, on remarque
que, d'une part, il y a des ordonnances qui peuvent être émises
sur des motifs raisonnables et quand il y a des avis à être
publiés, les motifs on ne les qualifie pas de raisonnables. Ça
peut être tout motif; alors là, il y a une distinction qu'on
s'explique difficilement.
À propos de réglementation parlant de quantité de
contaminants ou de concentration de contaminants, on fait remarquer qu'il
s'agit de deux concepts différents. Une livre de contaminants qui est
à concentration très faible, c'est différent. Alors, il
faudrait choisir entre ces deux concepts qui sont différents. D'autre
part, dans la réglementation, on ne parle pas de méthodologie non
plus. Est-ce un pouce de sol contaminé ou dix pouces de sol? On n'en
traite pas.
Les changements d'usage. On devrait considérer aussi les usages
réels ou les usages envisagés par un sol. On pourrait envisager
aussi, comme il est dit dans le règlement, je crois, sur les
déchets solides, un non-usage d'un terrain pendant un certain temps afin
de laisser le traitement s'effectuer. Ensuite, on devra penser, dans les
changements d'usage, à simplement sécuriser ou contrôler.
Dans le choix des technologies, nous supportons que c'est l'industrie qui
devrait être maître d'oeuvre en ce qui a trait au choix des
technologies et le gouvernement se devrait de fixer des objectifs.
Quant aux demandes d'enquête et d'information qui vont
s'élargir sur la simple impression qu'il y a un contaminant dans
l'environnement pour un citoyen ou pour plusieurs citoyens, on trouve que c'est
un élargissement assez important et dangereux, en ce sens qu'on va
créer des attentes importantes chez les citoyens où une personne
peut avoir l'impression qu'il y a un contaminant dans l'environnement pour
demander une enquête, pour demander des documents. Avant, la demande
d'enquête et d'information ne se faisait que pour la constatation par un
citoyen d'un déversement ou d'un problème environnemental;
maintenant, on va jusqu'à permettre à un citoyen d'avoir
l'impression qu'il y a un contaminant dans l'environnement et de demander une
enquête. Alors, certainement que vous allez avoir une avalanche
d'enquêtes. L'article 9, moi, dans mon projet de loi, se
référait à l'article 31.52 qui n'existe pas. Alors, je
n'ai pas fait de commentaire.
En somme, globalement, le projet de loi, quant à nous, est trop
rapide. Quand on pense par exemple à la criminalité qui blesse et
qui tue des personnes, on devrait mettre autant d'efforts pour ces
personnes-là, pour ces victimes, alors qu'ici, sans même en tenir
compte, on parlait de rétroactivité. J'étais ici,
j'entendais le CPQ par exemple vous parler de la rétroactivité.
C'est un sujet important, mais, quant à nous, le principe du pollueur ou
l'action du gouvernement devrait s'attarder à ceux qui sont dans
l'illégalité. Si une personne a pollué en étant
illégale, c'est normal qu'on lui applique les sanctions voulues. Mais,
si les entreprises ou si les activités ont été
réalisées sous la réglementation à laquelle elles
étaient soumises, qu'elles étaient dans la
légalité, on devrait respecter cette légalité sinon
quelle entreprise va avoir confiance en un gouvernement qui adopte des
règlements et, à un moment donné, les échange ou
change la couleur du temps? Ce serait, quant à nous, inadmissible d'agir
sur des situations qui ont été exercées d'une
manière légale.
Le Président (M. Garon): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je
remercie l'Association minière du Québec pour son mémoire
auquel elle a joint une étude détaillée article par
article du projet de loi qui va être utile au ministère de
l'Environnement du Québec.
J'aimerais retoucher quelques grands principes. Votre approche est la
suivante, et je peux me tromper en la résumant peut-être trop
rapidement. Le ministère de l'Environnement possède tous les
pouvoirs en matière d'intervention de mines, notre activité comme
telle peut être une activité de contamination. Ça devrait
être laissé au ministère de l'Énergie et des
Ressources, section Mines. Tout va très bien. Jusque-là, on peut
tenter de vous suivre, sauf que, lorsqu'on regarde la liste des sites
contaminés auxquels vous faites référence, on se rend
compte que, sur 67 sites considérés de catégorie 1, soit
potentiellement dangereux pour la santé ou l'environnement, il y en a
une trentaine en Abitibi. Je présume que ce n'est pas d'autres types
d'activité, dans plusieurs cas, que l'activité minière.
(22 h 45)
Vous dites: Ce n'est bon à rien ce que vous avez entre les mains.
C'est un fouillis d'informations qu'on a colligées pour dresser cette
liste, les gens de l'Environnement ne se sont pas rendus sur les lieux, etc. Je
me retourne de bord et je demande... Les gens de l'Environnement me disent:
C'est faux. On s'est rendus sur les lieux et la liste est bonne. Moi, je suis
ministre et je dois faire de quoi. Si vous avez raison, que tout est en ordre
en Abitibi, qu'il n'y a aucun danger dans les sites miniers pour la
santé, que tout est réglé, moi, je ne demande pas mieux,
comme ministre de l'Environnement, que de vous décerner un certificat
honorifique, sauf que, si ce que mes gens publient là-dedans est exact,
je ne demande pas mieux que de passer une loi qui
vise à corriger la situation. Qui dit vrai?
M. Roberge: Ça me fait plaisir que vous souleviez le
point. Quand la documentation du GERLED est sortie, on l'a expliquée au
ministère, et, quand le projet de loi est venu, on l'a expliqué
à nouveau au ministère sommairement, mais ça me fait
plaisir de vous en reparler. Quand on a vu la documentation du GERLED, on a
communiqué immédiatement avec tous les membres pour leur
demander: Qu'est-ce que vous en pensez? Qu'est-ce que c'est?
Généralement, les personnes m'ont dit qu'elles n'ont pas vu de
fonctionnaire de l'Environnement depuis un an et, généralement,
deux ans. Ensuite au ministère, j'ai demandé: Êtes-vous
allés sur les lieux? Avez-vous pris des analyses, des
échantillons? Ils m'ont dit: Non. Quand ils ont eu à
réaliser la liste des sites miniers, ils se sont rendu compte, en
réalisant l'inventaire des sites industriels, et ils ont dit: Ah! C'est
vrai, on a oublié le milieu minier. Alors, ils ont pris une liste de
sites miniers; ils ont des informations environnementales dans leurs dossiers
et ils ont apprécié, dans leur inventaire, a, b ou c, 1, 2 ou 3,
sur la foi des renseignements qu'ils avaient, mais ce n'est pas des
renseignements qui ont été vérifiés.
Je vous donne deux exemples.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On me dit, de toute façon,
que ce contentieux perdure depuis 1983 et qu'on serait surpris qu'on ait la
capacité, malgré les grandes habiletés qui sont les
nôtres, de le régler ce soir.
M. Roberge: Ah!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): prenons pour acquis que vous avez
raison. si vous avez raison, le projet de loi en soi, dans son application, ne
vous affectera pas.
M. Roberge: Bien, on a vu le projet de réglementation
où on indique clairement que le secteur mines, quel qu'il soit, c'est un
secteur susceptible de contaminer. Mais je vais vous donner des chiffres, par
exemple, qui nous viennent du fédéral. En 1987, les entreprises
minières ont réalisé 1566 analyses de l'effluent minier,
1566 occasions d'être en dépassement, et, là-dessus, il y a
eu 81 dépassements, ce qui veut dire 5,5 % de dépassements.
En ce qui concerne le travail du GERLED, il y a eu des exemples
où, par exemple, dans une galerie, une galerie a été
cimentée avec le minerai qui s'y trouvait. Il y avait un transformateur
qui avait été échappé. Il y avait des BPC dans les
huiles qui sont dans le transformateur. Pas sur les recommandations des
ministères, mais ils ont avisé le fédéral et le
provincial. Ils ont dit: Ce qu'on a l'intention de faire, c'est à
quelque 1000 pieds sous terre, on va cimenter la galerie, on va bloquer
ça là et ça va rester en sécurité. Tout le
monde a dit oui, c'est correct. Sauf que le site est classifié 1. Bon,
là, qu'est-ce qu'on fait?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, je ne les connais pas, les
sites classifies 1, personnellement. Je ne les ai pas visités,
personnellement. Sauf que j'ai eu à intervenir de façon urgente,
il y a à peu près deux semaines, dans un des sites classifies 1
parce qu'on m'a montré des photos - j'imagine que le photographe, au
moins, s'est déplacé pour aller sur les lieux - d'une situation
où il y avait 1500 barils d'arsenic à quelques pieds d'une cour
d'école. Plusieurs de ces barils coulaient. C'était
évident sur les photos. Je ne dis pas que chacun des 30 sites est dans
un état comparable en Abitibi, mais ça, c'est celui qui est venu
sur mon bureau, il y a 15 jours. Vous me dites: Ferme-toi les yeux, remets tout
ça au ministère des mines, tout va bien, tu n'en auras plus
d'autres.
M. Roberge: Vous parlez de Eldorado dont les journaux ont
parlé, mais Eldorado, c'est une entreprise minière fermée
depuis 1956. Je ne pense pas qu'en 1956, la préoccupation
environnementale était celle d'aujourd'hui. L'endroit est connu du
ministère depuis un certain nombre d'années et ce n'est pas du
minerai ni un parc de résidus miniers. C'est des barils qui contiennent
de l'arsenic qui sont là. C'est évident que ça ne peut pas
rester comme ça. On ne parle pas du tout de la même chose. Les
entreprises minières...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II n'y a pas seulement des barils.
Il y a l'équivalent également de 10 000 barils qui ne sont pas en
baril dans des réservoirs sous terre qui ont été
laissés là. Qui va payer pour ça? Le contribuable?
M. Roberge: Le ministre des mines a rencontré les
propriétaires la semaine dernière et ils ont l'intention de faire
des travaux. Je n'ai pas les détails de ça, mais les...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais moi, j'ai rencontré le
ministre des mines aussi et j'ai de la difficulté à obtenir des
chiffres. Pour le moment, c'est le ministère de l'Environnement qui
défraie pour déplacer les barils, mais la clôture, la
compagnie aurait accepté de la payer. Sous réserve, le ministre
des mines m'a dit ça. La clôture, mais le reste, c'est le
ministère de l'Environnement qui défraie ça à
partir de l'argent des contribuables.
M. Roberge: Bien, pourquoi? Vous avez une entreprise qui est
existante. Vous avez un site qui est contaminé, qui a du trioxyde
d'arsenic. Bien, pourquoi dépenser des fonds publics, à moins de
les dépenser et de les réclamer par 115.1?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce que je ne pouvais pas
attendre plus longtemps que la compagnie se décide à le
faire.
M. Roberge: Alors, il va falloir les réclamer de
l'entreprise. 115.1. C'est aussi simple que ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avec l'argent des contribuables,
le Conseil du trésor. Je suis allé. Le Conseil des ministres.
M. Lazure: ...plus vite.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Cayouette (Patrice): M. le Président, je n'aime pas ce
discours-là, moi. Parce que, d'abord, j'aimerais vous dire qu'Eldorado
n'est pas une mine. Ça s'appelle Mines Eldorado, mais ce n'est pas une
mine. C'est une activité qui se passe sur le site d'une ancienne mine.
Ce n'est pas la même chose du tout. Et ce sont des gens qui exploitaient,
qui achetaient des résidus de je ne sais pas où et ça a
fermé en 1956. Alors, qu'est-ce qui se passe là-dedans? Ils ne
sont pas membres chez nous, de toute façon, mais qu'est-ce qu'ils font?
Apparemment, ils transformaient ces résidus-là pour faire du
traitement de bois. Mais, dans le cas d'une mine, une opération comme
ça où il y a un propriétaire, je ne vois aucune raison
pour laquelle on demande au voisin de payer. Il y en a un propriétaire,
c'est une dame de 59 ans qui est quelque part en Colombie-Britannique.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Deux dames.
M. Cayouette: Deux dames? Ça m'est égal. Deux
payeurs plutôt qu'un dans ce cas-là. On n'a aucune espèce
d'objection à ce que quand il y a un propriétaire on s'occupe de
traiter le propriétaire comme il nous traite.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Maintenant, il y a plusieurs
mines qui ont fermé et qui ont laissé des résidus sur les
terrains. Les terrains sont aujourd'hui propriété de la couronne.
Ce sont des terrains de la couronne. Je suis en négociation
présentement avec le gouvernement fédéral en vertu de
l'entente sur les sites orphelins, à savoir si on va pouvoir passer dans
la définition de site orphelin les résidus miniers qui ont
été laissés sur des terrains qui sont
propriété de la couronne par le biais du ministère de
l'Énergie et des Ressources. Encore une fois, c'est le contribuable qui
va payer.
M. Cayouette: Non. Pas du tout, M. le ministre. Si vous regardez
en haut de la page 4 de notre mémoire, on dit qu'il y a 107 parcs de
résidus miniers dont seulement 12 sont rétrocédés
à la couronne. Donc 107 moins 12, ça fait 95. Il y en a 95. Sur
les 95, il y en a 60 qui appartiennent à des propriétaires qui
n'opèrent plus une mine, mais des propriétaires encore connus. Je
ne vois pas pour quelle raison on ne fait pas des demandes aux
propriétaires qui sont là de venir s'occuper de leurs
problèmes. Dans les 35 mines actives, il n'y a aucun problème.
Plus loin, dans le mémoire, à la page 6...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Qu'on se comprenne bien
là. Les 12 rétrocédés à la couronne,
ça va. On voit s'ils rentrent dans la définition d'orphelin. 60
sont inutilisés, mais sous la responsabilité d'une entreprise
existante.
M. Cayouette: D'un propriétaire connu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que vous me dites, c'est que du
point de vue de l'association, s'il y a de la decontamination à faire,
ça ne pose pas de problème parce que les entreprises vont le
faire. Il y en a 35 qui sont utilisées par l'industrie. Ça ne
pose pas de problème non plus.
M. Cayouette: C'est-à-dire qu'ils sont actifs eux
autres.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On pourrait s'entendre avec
l'Association minière pour que, sur une base volontaire...
M. Cayouette: On peut faire mieux que ça, M. le ministre.
Parce que l'an passé, à la conférence des ministres des
Mines, l'ensemble des associations minières ont proposé au
gouvernement fédéral et à tous les gouvernements
provinciaux que chaque mine se constitue un fonds privé pour s'assurer
qu'au moment de la fermeture elle aura l'argent nécessaire pour
restaurer une mine de façon convenable et la retourner à la
nature de façon convenable, ou encore de la traiter à
perpétuité au cas où on n'aurait pas la technologie en
place. Ça, c'est une proposition faite en bonne et due forme
l'année passée au mois d'août, à la
conférence des ministres des Mines.
Et puis d'ailleurs, à l'heure actuelle les démarches sont
commencées ici au Québec. Elles sont commencées en
Ontario. Elles sont commencées en Colombie-Britannique aussi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous seriez d'accord -
je tente de saisir - avec la mise sur pied d'un fonds de
décontamination? Vous avez parlé de chaque entreprise, son
fonds.
M. Cayouette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'un fonds global de
décontamination?
M. Cayouette: On n'est pas d'accord du tout
à payer pour ce qui s'est fait avant suivant un modèle de
l'ancien temps. En d'autres mots, chaque mine d'aujourd'hui, chaque mine future
est capable de s'occuper de son passé. Mais je ne vois pas, par exemple,
pour quelle raison si, dans le passé, il y a un nommé Paradis qui
a fait un accroc quelconque à la société, et puis parce
que tout à coup ce M. Paradis-là disparaît de
l'environnement, ce sont tous les Paradis du Québec qui vont payer pour
ça. Je ne vois pas de raison de faire ça, moi. Parce que
ça s'appelle une mine, parce que c'est une activité
minière, on n'a pas de raison tout à coup de charger rien que les
mines pour ça. Ça s'est fait conformément à des
politiques, à des règlements, à des lois.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais c'est la même
question de fond qu'on a adressée au Conseil du patronat, en fin de
compte...
M. Cayouette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui revient à la
surface. Est-ce que votre position est à l'effet que la loi ne devrait
s'appliquer que pour le futur, c'est-à-dire à partir du moment de
sa sanction...
M. Cayouette: Pour le présent et le futur.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et qu'il ne devrait y avoir
aucune application pour le passé, que, pour le passé, c'est
l'ensemble de la société qui devrait...
M. Cayouette: C'est l'ensemble de la société parce
que l'ensemble de la société en a payé quand même,
de toute façon. Elle en a profité de ça, l'ensemble de la
société, aussi. Il y avait plus de profits pour les compagnies,
donc il y avait plus de taxes versées a l'État. C'est la
même chose, ça. On marchait, en 1940, en fonction de ce qu'on
savait en 1940. En 1960, c'était en 1960. En 1990, on est rendu
là. Mais je crois qu'on peut dire aujourd'hui que l'industrie
minière n'a pas raison d'avoir les accrocs qu'on a eus dans le
passé. Mais ce ne sont pas des accrocs qu'on a eus dans le passé.
Il y a eu des accrocs, mais ce n'est pas une majorité d'accrocs.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être une question que
je n'ai pas adressée au Conseil du patronat ni à d'autres
intervenants avant vous, mais il n'est jamais trop tard pour l'adresser. Est-ce
que le fonds de décontamination pourrait être d'une telle
importance qu'il pourrait tenir compte des problèmes passés?
M. Roberge: La possibilité qu'on...
La Présidente (Mme Pelchat): Me Roberge.
M. Roberge: La possibilité qu'il y a, c'est que pour
restaurer il faut prendre en main des sites et des parcs de résidus
miniers qui contiennent, dans certains cas, des métaux ou des
minéraux utilisables ou ayant une valeur économique. Alors, si on
traite, qu'on restaure des lieux et qu'on récupère en même
temps les métaux de ces parcs-là, l'argent qui en sera
retiré va probablement pouvoir servir à faire autre chose.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais, si l'activité
est rentable, c'est comme les terrains de Montréal, à un moment
donné, tu trouves toujours une solution économique. Lorsqu'il
reste une plus-value, c'est-à-dire que la contamination coûte
moins cher que ce qui en ressort, on finit toujours par trouver une solution,
tout le monde y trouve son compte. Là où on a de la
difficulté, c'est quand on a une moins-value plutôt qu'une
plus-value et on se demande qui paie la facture.
M. Roberge: Justement, c'est ça, le concept
pollueur-payeur. C'est un ensemble de directives, de changements d'attitudes,
d'incitatifs. C'est un ensemble de choses qui fait qu'on atteint des objectifs.
Mais on ne peut pas, du jour au lendemain, dire: Bon, vous avez fait ça
ou vos voisins ont fait ça, payez pour l'ensemble ou payez pour le
siècle qu'on vient de passer. Ça fait...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien là, j'ai saisi votre
réponse. Votre réponse, c'est: Pour l'avenir, ça va.
Maintenant, je tente peut-être de vous faire préciser en disant:
Pour le passé, est-ce que c'est la société en
général ou si la constitution du fonds pourrait être
à un niveau assez important que ce seraient les contributeurs du fonds
qui sont dans ce domaine d'activité là qui paieraient pour le
passé?
M. Cayouette: Quant au fonds, on n'est pas d'accord du tout qu'il
y ait un fonds. Non, il n'est pas question de fonds, excepté s'il est
personnel. Le genre de formule qu'on a proposée, c'est ce qu'on appelle
un régime enregistré d'épargne-environnement. C'est plus
ou moins cela qu'on propose là-dedans. On ne voit pas de raison pour
laquelle tous les Paradis doivent payer pour le péché d'un
Paradis. C'est la même chose. Parce qu'il y a eu des mines dans le
passé, que ce soit seulement le monde des mines qui paye, ce n'est pas
normal. Par exemple, s'il y a un édifice qui tombe à
Québec ici, est-ce que ça va être tous les entrepreneurs en
construction qui vont être chargés seulement pour réparer
ces bâtisses-là? Pourquoi, pour une mine, est-ce différent?
Une bâtisse qui fait défaut à Québec, ça ne
sera pas tous les employeurs de la construction qui vont payer.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Faites-moi la comparaison avec la
CSST... J'aimerais vous entendre sur une comparaison avec la CSST. Vous avez
des taux dans le secteur minier parce qu'il y a des accidents dans le secteur
minier...
M. Cayouette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui s'appliquent au secteur
minier.
M. Cayouette: On peut en parler de la CSST encore une fois pour
vous montrer jusqu'à quel point ce n'est pas toujours très bon,
la CSST. On peut parler peut-être de l'exemple des maux de dos, des
douleurs. Moi, je suis rentré dans les mines, ce n'est pas hier, en
1950, j'étais la-dedans. Je me rappelle qu'en 1950, je n'ai jamais vu
ça sur une liste d'accidents, un mal de dos. Ça n'existait pas.
Ce n'était ni des douleurs, ni des enflures... Ça n'existait pas
ça. Il n'y avait pas de réclamation là-dessus. En 1970,
environ 13 % des réclamations étaient pour des maux de dos et des
douleurs et des affaires dans ce genre-là. Quand est arrivée la
loi 114 en 1978, c'est passé à 23 %. Là, depuis qu'on est
rendus avec la belle loi 17, avec les 14 jours payés par l'employeur, le
mois passé, 47 % de nos accidents étaient pour des maux de dos,
des douleurs, des choses... Alors, des lois comme ça, la CSST et ce
qu'on veut faire avec l'environnement, déresponsabiliser la population,
c'est ça que ça va faire. Si on veut responsabiliser les gens, il
faut les faire payer seulement pour ce dont ils sont responsables. On les
déresponsabilise autrement. Un fonds général va
déresponsabiliser les employeurs.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et ils vont polluer davantage.
C'est votre...
M. Cayouette: Oh! non. Jamais de la vie. (23 heures)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non?
M. Roberge: Votre exemple de la CSST, d'ailleurs, l'année
dernière... Ils changent la tarification pour personnaliser davantage,
aussi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour responsabiliser
davantage.
M. Roberge: J'ai l'impression que ça va compter. Oui,
ça va compter. Quant à nous, la création d'un fonds, si
c'est environnemental, ça déresponsabilise les personnes, un peu
dans le genre du "superfund" où le monde est amené à
contribuer. Beaucoup d'entreprises vont contribuer, puis ne s'en occuperont
pas, alors que, si on est responsable et qu'on s'occupe soi-même de ces
choses, on va régler les problèmes et on va être
incité à régler ses problèmes plus à la
source que de passer de l'argent à un tiers qui va s'en occuper, quand
et comment? on ne le sait pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Qu'est-ce qui explique que
présentement tout le monde est bien responsabilisé, que tout le
monde est laissé sur une base individuelle, que nous, on hérite
sur le plan collectif des problèmes qui montent jusqu'au bureau du
ministre?
M. Cayouette: On est simplement rendus là dans la
société. C'est ce qui explique ça. On est rendus
là. On vient de s'apercevoir que c'est terrible. Les fonds dont je vous
parle, il y en a dans plusieurs compagnies. Vous savez comment c'est, elles se
mettent de l'argent de côté depuis déjà quelques
années pour être certaines d'en avoir quand elles vont finir.
C'est déjà commencé, puis il n'y a pas de loi. Je connais
des mines qui mettent 2 $ par tonne de côté pour leur fonds quand
la mine va fermer.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce qu'il y a des mines qui ont
commencé le travail sur le terrain?
M. Cayouette: Ça fait longtemps! De la
"revégétation", il y en a chez eux et, chez vous, vous
n'êtes pas encore fermés, vous autres; vous en avez une
quantité de faite.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand vous dites que ça
fait longtemps, c'est depuis combien d'années à peu
près?
M. Cayouette: J'ai vu les premiers travaux de
"revégétation" en 1971. Je crois que le travail fait par
l'Université Guelph à Noranda date... C'était en cours
quand je suis arrivé à l'Association, en 1971. Ça fait au
moins 20 ans qu'on s'occupe de ça. On a un comité de
l'environnement dans l'Association depuis 1968. Alors, ce n'est pas d'hier
qu'on parle d'environnement. On n'a pas commencé hier.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va
La Présidente (Mme Pelchat): M. le député de
La Prairie.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Pour des gens qui,
à bon droit, se plaignent de ne pas avoir eu beaucoup de temps pour
préparer leur mémoire, vous êtes drôlement bien
préparés. Qu'est-ce que ça aurait été si
vous aviez eu plus de temps? Pauvre ministre!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Mais vous allez avoir l'occasion de vous reprendre
parce que je ne pense pas qu'il passe le projet de loi la semaine
prochaine.
Ça m'étonnerait. Je suis en faveur du principe
pollueur-payeur, parfaitement en faveur, mais le projet de loi est incomplet,
il y a des choses qui manquent dedans, par exemple le fonds de
décontamination, la notion de risque, si vous étiez ici
tantôt quand les gens du Barreau ont parié. Mais vous avez
évoqué la question des normes et moi je crois que vous avez
raison de demander, comme d'autres l'ont fait avant vous, que le
règlement, qui, en somme, est une liste de chiffres, de normes, de
pourcentages, de quantités, soit discuté en commission
parlementaire. Je vois que le ministre n'est pas contre.
GERLED. Ça m'inquiète beaucoup de voir qu'il y a deux
versions aussi contradictoires, parce que GERLED, c'est un peu la bible pour le
ministère et, à vous entendre, en tout cas pour ce qui est de la
partie des sites miniers, qui est quand même 50 % des 66 sites
considérés comme dangereux, on a l'impression que le travail n'a
pas été fait de façon particulièrement minutieuse,
disons. C'est le moins qu'on puisse dire.
Mais la question que je vous pose, c'est: Si le ministre demandait
à ses fonctionnaires de faire un travail de relance sur la trentaine de
sites miniers considérés comme dangereux, est-ce que votre
Association serait prête à collaborer avec les fonctionnaires?
J'imagine que oui.
M. Roberge: Ça dépend de quoi on parle. Si vous
remarquez, dans la méthodologie, dans l'introduction de GERLED, c'est un
inventaire de sites ayant un risque potentiel. Alors, ce n'est même pas
une menace probable ou réelle, c'est un risque qui est existant ou pas
et qui est potentiel, qui n'est pas prouvé, qui est peut-être
inexistant et peut-être existant. Il me semble que, quand on veut
hypothéquer des propriétés et enclencher des coûts
énormes juste pour prouver si le risque est réel, si
l'évaluation du risque a été faite selon les normes, on va
loin. On devrait au moins les analyser et prouver le risque.
En matière d'évaluation de risque, les experts ne
s'entendent même pas. En matière d'évaluation de risque ou
de sites contaminés, vous avez la politique que j'ai ici, par exemple,
où on mentionne que pour le baryum, on devrait intervenir à 2000
ppm, sauf que le règlement est à 500. C'est quatre fois plus
sévère. Pourquoi? Est-ce qu'il y a un scientifique qui a fait une
thèse là-dessus et qui a déterminé que c'est mieux
500 au Québec? Et ces normes nous viennent de Hollande où le
niveau de l'eau est un peu plus élevé qu'ici. Ensuite, pour les
autres, c'est la même chose. On prend le zinc, par exemple. Au lieu de
1500 pour dire que c'est le moment d'identifier l'intervention,
c'est-à-dire d'aller plus en profondeur et de faire une recherche plus
systématique - pas d'intervenir, ni de classifier les
"contaminés", juste de dire: On va s'inquiéter un peu plus -
bien, on a mis ça à 500 dans le règlement.
Alors, pourquoi et qu'est-ce qui fait que, tout d'un coup, les normes
ont changé? Est-ce qu'il y a des Hollandais qui sont venus faire un tour
au Québec et dire: C'est changé? La notion de risque, vous
regarderez les experts, comment ils font pour l'évaluer. Est-ce que
c'est une chance sur 1 000 000? Comme tout citoyen, je ne veux pas avoir
à souffrir cette chance sur 1 000 000. C'est bien normal. Mais le
gouvernement - et le ministère - dans sa responsabilité, a
à dire: II va falloir calculer le risque pour dire: C'est telle chose
qu'on fait ou tel risque qu'on accepte. C'est difficile de le faire, c'est
certain. Mais on ne peut pas arriver et prendre des normes comme ça et
les choisir, ce qui me semble être le cas, au hasard.
M. Lazure: Autrement dit, si je vous comprends bien, vous seriez
prêts à collaborer avec les fonctionnaires dans une espèce
de réévaluation de cette trentaine de sites là, à
condition que vous puissiez aussi remettre en cause les normes qu'ils nous
présentent avec le projet de règlement.
M. Roberge: Oui, mais il faut aller plus loin que ça. Si,
par exemple, mon voisin, je le vois se promener avec un bidon et je vois que
c'est du pétrole, il y a un risque potentiel que ça explose. Je
n'appelle pas la police. Mais ce que l'inventaire GERLED a fait, c'est de voir
qu'il y a un risque potentiel, parce qu'il y a toutes sortes
d'éléments possibles qui sont là. Mais est-ce que ce
risque-là est probable? Est-ce que, effectivement, il va y avoir un
problème? Vous regarderez la loi fédérale sur
l'environnement, par exemple, sur la définition de "toxique". Elle ne
parle pas de "possible", elle parle d"1 effectif et de probable"
comme toxicité, parce qu'on ne peut pas tout simplement, soit sur des
motifs raisonnables ou plus que raisonnables, dire: La bouteille d'aspirines,
c'est un risque. Bien oui, mais elle est fermée, la bouteille
d'aspirines. C'est contrôlé. C'est surveillé.
À propos des parcs de résidus miniers, les rapports
mensuels s'en vont au ministère. Il y a une surveillance et il y a du
traitement qui est apporté. Quand on parle de risques, tout est un
risque. La circulation en voiture est un risque, sauf que c'est
géré d'une façon que le risque n'éclate pas dans la
figure de tout le monde, au passage. C'est une distinction très
importante.
Des scientifiques ou des philosophes peuvent palabrer longtemps sur la
notion de risques et en voir, des risques. Mais, quand il s'agit de
propriété ou quand il s'agit de valeurs commerciales importantes,
on ne peut pas, juste sur la simple possibilité qu'il y a un risque
qu'il survienne quelque chose, faire déclarer un terrain
contaminé ou y faire une hypothèque environnementale. Il faut que
le risque soit une menace. Il ne faut pas que ce soit un risque
potentiel, il faut que ce soit un risque menaçant, en état
de menacer.
M. Lazure: Tantôt, vous avez parlé du fonds de
décontamination ou de restauration que plusieurs de vos membres ont
commencé à créer et à former. Vous dites: C'est une
chose qu'on encourage pour l'ensemble de nos membres. Est-ce que vos membres
seraient prêts à participer à un tel fonds de contamination
qui ne serait pas seulement pour les mines, mais pour l'ensemble des industries
qui sont susceptibles de polluer, encore une fois - peut-être que vous
n'aimez pas l'expression "susceptibles de polluer" - ou qui sont polluantes,
carrément polluantes, à des degrés divers?
Autrement dit, à part le fonds qui semble se constituer à
l'intérieur de vos membres, est-ce que vos membres seraient prêts
à entrer dans un fonds plus vaste d'un certain nombre d'autres
industries?
M. Cayouette: Je crois qu'il faudrait faire attention, encore une
fois. En principe, c'est non, parce qu'on ne voit pas pour quelle raison notre
industrie serait obligée de participer plus qu'une autre dans un autre
fonds. Mais, sur une base volontaire, ça se fait et ça va se
faire encore. Par exemple, on s'est associés avec le groupe Canards
illimités pour transformer un site de résidus miniers qui allait
bien, pour le transformer et pour le rendre plus propice à la
nidification de la sauvagine. Alors, on le fait. Si on est capables de le faire
sur une base volontaire, on le fait.
Mais, parmi les 60 autres sites qui sont fermés, j'aimerais vous
parler des sites où des compagnies sont encore en place, mais qui sont
tout de même entretenus par les entreprises. Je vais prendre le groupe
Noranda en particulier. Il y a plusieurs mines dans la région de Noranda
qui ont déjà appartenu au groupe Noranda, mais qui sont
fermées. Noranda s'occupe de l'entretien de ces sites-là comme si
c'était les siens, à l'heure actuelle. Elle le fait à la
Normétal, à Noranda, à Matagami, à la Northern,
partout. Alors, on le fait un peu partout et il y a plusieurs mines qui le
font. Mais, de là à prendre un site tout à fait orphelin,
il faudrait une raison particulière pour le faire. On ne voit pas de
raison motivante pour en faire plus que ça.
M. Lazure: Non, je ne parlais pas de sites orphelins. Je parle de
sites actuels, actifs.
M. Cayouette: Pour les sites actifs, aucun problème.
M. Lazure: Mais de s'associer à d'autres industries.
M. Cayouette: Sur une base volontaire.
M. Lazure: Sur une base volontaire. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Pelchat): Merci, M. le
député de La Prairie. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Tout l'aspect des ordonnances
qui a été soulevé, le caractère arbitraire desdites
ordonnances. À la page 19 de votre mémoire, vous mentionnez: "Cet
aspect est très important puisque, lorsque le ministre exercera le
pouvoir d'ordonnance basé sur des motifs raisonnables par exemple, il
enlève au citoyen ou à la corporation ou à la
municipalité le pouvoir de contre-interroger ou d'interroger ceux qui
auront confectionné ou rédigé les rapports sur lesquels le
ministre se serait inspiré pour émettre une ordonnance." On a une
situation actuelle qu'on vit en termes d'ordonnance. On a eu l'occasion d'en
discuter avec des gens qui vous ont précédés. Chaque
ordonnance émise est précédée d'un préavis
qui donne, de mémoire, 15 jours aux parties pour faire valoir au
ministre leurs représentations et chaque ordonnance est sujette à
appel devant la Commission municipale du Québec dans les 30 jours - de
mémoire encore une fois - de l'émission de l'ordonnance. J'ai de
la difficulté à bien saisir cet aspect-là lorsque je
l'applique. Je l'ai indiqué au député de La Prairie
à huit reprises, depuis que je suis ministre, et j'ai reçu des
représentations des gens chaque fois qu'il y a eu appel devant la
Commission municipale, qu'il y a eu audience avec respect des règles,
audi alte-ram partem, interrogatoire, contre-interrogatoire, etc., qui ont
précédé l'exécution comme telle de l'ordonnance.
Est-ce que ce serait différent dans le cas des mines?
M. Roberge: Non, ce n'est pas différent dans le cas des
mines. C'est qu'une ordonnance qui serait émise,
précédée d'avis et d'avis préalables, ne permet pas
aux entreprises d'interroger ou de contre-interroger les personnes qui ont
rédigé les rapports pour le ministère ou qui les ont
confectionnés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, ça va.
M. Roberge: Ces ordonnances ou les avis devraient tous nous
pousser à aller en appel ou devant les tribunaux pour qu'on puisse
interroger et contre-interroger les personnes ou les experts.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais il appartient à la
personne ou à la compagnie visée dans l'ordonnance de
décider d'aller en appel devant la Commission municipale et ce droit
d'appel est assez simple, si je peux utiliser l'expression. C'est un tribunal
quasi judiciaire et les règles de justice naturelle s'appliquent,
à ce moment-là, sur le plan des contre-interrogatoires
et tout ça, non?
M. Roberge: Oui. Mais l'appel actuel à la Commission
municipale devrait être modifié pour aller à la Cour
supérieure, d'après nous, parce que les droits sont tellement
importants. Des ordonnances vont certainement faire perdre des droits
importants, si on laisse ça à la Commission municipale.
D'après nous, ça devrait aller à la Cour
supérieure, au moins.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a des cas. Vous avez raison de
souligner que c'est important. Moi, j'ai le cas où une ordonnance
ratifiée par la Cour municipale a occasionné la fermeture d'une
usine de plus de 100 employés dans la région de
Trois-Rivières. Vous avez raison, les ordonnances sont importantes, mais
je n'ai pas eu de plainte de la compagnie à l'effet que le processus de
justice naturelle n'a pas été suivi. Il n'y a pas eu
d'évocation non plus devant la Cour supérieure, parce que,
lorsque ces règles-là ne sont pas suivies, il y a toujours une
possibilité d'évocation. Au contraire, les gens ont dit: Bon, ce
sont les règles du jeu, les règles de justice naturelle sont
suivies. On perd; on perd. On gagne; on gagne. C'est parce que je n'ai eu cette
argumentation, à date, d'aucun intervenant et, si c'est vrai que les
règles de justice naturelle, c'est la base de notre système de
séparation des pouvoirs et de démocratie, c'est important que ce
soit appliqué. J'ai une espèce de dénonciation de
l'Association des mines là-dessus qui m'inquiète.
M. Roberge: Oui. Regardez, concernant les avis que le projet de
loi prévoit et les ordonnances sur des motifs raisonnables - et,
à d'autres endroits, c'est sur des motifs, sans les qualifier de
raisonnables - si la personne qui travaille chez vous nous dit: C'est parce
qu'on pense qu'il y a un problème, on a des motifs raisonnables de
penser qu'il y a un problème, ce n'est pas une réponse
satisfaisante beaucoup, ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, mais on doit joindre des
rapports.
M. Roberge: Des rapports.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On dit: Cet avis est
accompagné de tout rapport d'analyse ou d'étude et de tout autre
rapport technique dont le ministre a tenu compte. Donc, ce n'est pas juste: Je
me suis levé un matin et j'ai pensé que.
M. Roberge: Non, mais je vais vous donner une situation où
ça peut arriver. Vous vous levez un matin, vous lisez le rapport GERLED
et vous dites: J'émets une ordonnance sur ces 300. Nous, dans notre cas,
les industries minières, on sait que GERLED n'est pas venu analyser,
n'est pas venu faire de visite et n'a pas prouvé les avancés
qu'il a mis sur la table à ce moment-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui et à partir de ce
moment-là j'imagine que, comme conseiller juridique à une de ces
compagnies, vous lui conseilleriez d'aller en appel immédiatement devant
la Commission municipale, vous contre-interrogeriez ce rapport GERLED qui
accompagnait ça, vous feriez votre preuve et tout serait cassé,
non?
M. Roberge: Bien, je pense à la Cour supérieure
plutôt qu'à la Commission municipale.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que je n'ai pas eu
de... Est-ce qu'il y a quelque chose sur le plan de la Commission municipale,
des précédents, tout en respectant la juridiction quasi
judiciaire de la cour, qui nous indiquent qu'il y a un manque de
compétence, qu'il y a des pouvoirs trop importants qui ont
été confiés à cet organisme-là? Parce que je
n'ai jamais eu ce type, ni formellement ni informellement, de plainte
adressée contre la Commission municipale.
M. Roberge: Oui. Mais ce serait intéressant,
peut-être, de demander au Barreau d'examiner les pouvoirs des
commissaires de la Commission municipale eu égard à la
constitution, l'article 96 qui permet la nomination de juges de la Cour
supérieure par le fédéral et par le provincial. C'est
à ce niveau-là qu'il faudrait le regarder aussi, j'imagine.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce qu'elle aurait des pouvoirs
quasi d'injonction, des choses du genre?
M. Roberge: Bien oui, évidemment. Une ordonnance qui
indique qu'un endroit est contaminé et qu'il faut fermer un endroit,
ça équivaut à une injonction, surtout sur des motifs
raisonnables. Si, un mois ou deux après les expertises, on constate que
les motifs étaient raisonnables mais étaient erronés, il y
a des droits importants qui ont été discutés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que le Barreau s'est
prononcé sur ce qu'on appelle la réforme des tribunaux
administratifs...
M. Roberge: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui est un document majeur au
sein de l'appareil gouvernemental, et le Barreau a fait certaines
recommandations, possiblement, quant à certains pouvoirs de la Cour
municipale à être transférés à un organisme
plus central. Mais il ne nous a pas parlé - j'y vais de mémoire -
de les envoyer à la Cour supérieure, de les transférer
à un autre organisme administratif, et c'est ça qui...
M. Roberge: Oui, bien, peut-être...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai l'impression que le Barreau
s'est déjà prononcé.
M. Roberge: ...qu'à l'examen ça va être la
Cour du Québec, la Cour supérieure ou une autre. Dans des
discussions on se dit que probablement un jour il faudra avoir un tribunal
environnemental. Les situations sont complexes.
La Présidente (Mme Pelchat): Alors là-dessus...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et vous seriez disponible pour
être juge.
M. Roberge: Non.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Pelchat): Là-dessus...
M. Lazure: C'est une demande du Parti québécois,
ça, le tribunal environnemental.
M. Roberge: Ah bon! Bien, là, en tout cas, prenez ce que
vous voulez. Concernant la question-La Présidente (Mme Pelchat):
En conclusion,
Me Roberge, le temps est écoulé, si vous me permettez.
M. Roberge: Oui, en conclusion, c'est ce que je voulais
faire.
La Présidente (Mme Pelchat): Brièvement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et le monde municipal serait
choqué que la Commission municipale perde cette juridiction.
M. Roberge: Je vous en reparlerai à un autre moment.
Finalement, concernant la question du fonds global pour des sites orphelins, je
crois que les citoyens disent qu'ils sont prêts à mettre des sous
pour restaurer ou protéger l'environnement. Probablement que les fonds
publics, justement, devraient contribuer à réparer l'histoire qui
a été réalisée selon les connaissances du moment,
mais on est aujourd'hui en 1990 et les situations du passé pour les
sites orphelins, ce serait justement la contribution que tous et chacun sont
prêts à verser, à ce qu'ils disent.
La Présidente (Mme Pelchat): Alors, M. le ministre,
brièvement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je vais remercier
l'Association minière. Nous allons poursuivre l'analyse article par
article que vous nous avez soumise. Immédiatement je vous indique, en ce
qui concerne l'article 31.50, que créer une obligation quant à la
radiation au ministère, c'est une suggestion que nous retenons
immédiatement. Quant aux autres, nous en ferons une analyse approfondie
et, si nous avons besoin d'éclaircissements, je pense qu'on peut compter
sur votre collaboration pour les obtenir.
M. Roberge: Oui, certainement.
La Présidente (Mme Pelchat): M. le député de
La Prairie.
M. Lazure: au nom de l'opposition, je veux simplement remercier
les représentants de l'association minière pour leur
présentation. merci.
La Présidente (Mme Pelchat): Alors, messieurs, on vous
remercie. La commission ajourne ses travaux à demain, 11 heures.
(Fin de la séance à 23 h 19)