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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le jeudi 2 juin 1977 - Vol. 19 N° 103

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales


Journal des débats

 

Étude des crédits du ministère des Affaires sociales

(Dix heures vingt-deux minutes)

Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente des affaires sociales est réunie pour poursuivre l'étude des crédits budgétaires du ministère des Affaires sociales.

Les membres de la commission sont: M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Charron (Saint-Jacques), M. Clair (Drummond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte), M. Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), M. Paquette (Rosemont), M. Saindon (Argenteuil), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Shaw (Pointe-Claire).

Nous en étions à l'étude du programme 8. Le député de Saint-Laurent.

Réadaptation de l'enfance et des adultes

M. Forget: M. le Président, toujours sur l'élément 1 du programme 8, j'aimerais poser une série de questions au ministre relativement au mandat qu'il a confié au Comité de la santé mentale relativement à la question de la mésadaptation sociale. D'abord, j'aimerais savoir si la composition du Comité de la santé mentale est la même ou s'il y a eu des modifications depuis quelques mois dans la composition du comité.

M. Lazure: La question est posée?

M. Forget: Elle est posée. Je m'excuse de sa brièveté. On peut vous donner quelque délai, si vous voulez.

M. Lazure: Bien oui, je suis tout étonné; c'est très laconique, très incisif comme question. Alors, M. le sous-ministre.

Oui, la question, c'est le mandat donné au Comité de la santé mentale concernant la mésadaptation sociale des jeunes.

M. Forget: La première question, c'était de savoir si la composition de ce comité avait été modifiée.

M. Lazure: Du Comité de la santé mentale? Justement, c'est ce que nous sommes en train de faire.

M. Forget: C'est de la télépathie!

M. Lazure: Oui, c'est vraiment de la télépathie. Le comité a été modifié, pas profondément, mais pour renouveler les membres. Le président a été changé; le Dr Yvon Gauthier, qui faisait partie du comité, a accepté d'en assumer la présidence et la composition a été renouvelée. Il y a plusieurs des personnes qui étaient présentes qui ont accepté de continuer. Voulez-vous avoir les noms des nouveaux membres? Enfin, il y a une infirmière psychiatrique...

M. Forget: Non.

M. Lazure:... qui a été ajoutée au groupe, Mlle Duchesne, suggérée par l'Ordre des infirmières. Alors, c'est la composition habituelle: psychologues, psychoéducateurs, psychiatres.

M. Forget: Des remplacements habituels d'individus, mais d'autres prennent leur place avec les mêmes qualifications professionnelles.

M. Lazure: C'est cela. Les mandats que nous proposons, qui ont été discutés avec le Dr Gauthier, à la dernière rencontre que j'avais eue avec l'ancien comité de la santé mentale qui terminait son mandat, c'est d'examiner le problème de la mésadaptation dans les établissements et les liens entre la psychiatrie et la mésadaptation, la psychoéducation, psychiatrie, psychologie, et d'essayer de nous aider à "opérationnaliser" ces relations.

Depuis aussi, on a pris la décision de leur demander d'étudier un rapport préliminaire qu'on a reçu sur la thérapie "behaviorale" qui présente des problèmes difficiles au point de vue éthique et au point de vue surveillance. Dans le cours de l'année qui vient, ce sera, à part des mandats qu'ils peuvent se donner eux-mêmes, de notre part, les deux principaux domaines de réflexion du comité.

M. Forget: Ne faut-il pas voir un lien entre ce mandat nouveau donné au comité de la santé mentale et la décision à peu près prise au même moment et dont nous avons discuté hier, relativement au conseil d'agrément aux services à l'enfance? C'était un des buts de développer des standards, des normes. Évidemment, il faut absolument faire de l'inspection, et on peut en faire seulement dans la mesure où on a des normes et des standards. Est-ce qu'il y a un lien entre les deux?

M. Lazure: II n'y a pas de lien d'intention. Dans les faits, cela constitue un lien.

M. Forget: C'est le même problème qu'on confie à ce comité.

M. Lazure: C'est cela, mais ce n'était pas un lien dans le sens de: On écarte cette formule parce qu'on va le faire faire par le comité? Pas dans ce sens. L'idée de donner ce mandat précis au comité découlait de préoccupations que le Dr Brunet et moi avions depuis un bon bout de temps, et surtout à la suite de visites d'institutions, de centres d'accueil très tôt au cours du mandat.

II y a un phénomène très précis qui se passe. Les centres de mésadaptation sociale, et surtout ceux qui s'occupent des cas les plus profonds, voient les psychiatres uniquement comme des thérapeutes. Ils ne les voient pas comme des partenaires dans la préparation des programmes de traitement. C'est un peu la même chose vis-à-vis des psychologues. On a l'impression que chacun fonctionne dans son centre professionnel mais qu'ils ont beaucoup de difficulté à s'asseoir ensemble et définir les programmes.

M. Forget: Est-ce que ce comité de la santé mentale a pour but de définir les programmes ou de faire l'évaluation d'approches thérapeutiques ou de théorie thérapeutique?

Tel que je le lis, la nature des programmes, mais pas nécessairement de préparer des programmes. C'est laissé à la programmation du ministère en collaboration avec les établissements. Il semble que le comité devra préciser la nature des programmes à utiliser comme moyens thérapeutiques et évaluer les différentes philosophies de traitement. Ce qui est essentiellement de donner une orientation générale et un peu théorique, mais néanmoins une orientation générale sur le genre d'approche thérapeutique à utiliser vis-à-vis des mésadaptés sociaux.

M. Lazure: Ce n'est pas dans un objectif purement d'évaluation. Ce n'est pas d'abord et avant tout de l'évaluation qu'on veut demander de faire.

M. Forget: C'est suggérer l'élaboration de standards qui pourraient servir éventuellement à l'évaluation.

M. Lazure: Et une certaine dynamique. Comment faire pour que ces gens s'assoient à la même table à toutes fins pratiques.

M. Forget: N'est-ce pas un précédent assez considérable que de confier cela au Comité de la santé mentale, qui jusqu'à maintenant, sauf erreur, ne s'était occupé que des activités en établissements psychiatriques ou au moins des activités concernant la santé mentale dans le sens traditionnel du mot? Il ne s'était jamais préoccupé de ce qui se passait dans les établissements. N'est-ce pas un précédent? Enfin c'est nouveau, c'est sûr que c'est un précédent.

M. Lazure: Ce serait peut-être un précédent qui m'apparaît très souhaitable que la santé mentale déborde la psychiatrie.

La façon dont je comprends le mandat de ce comité, c'est un mandat très large. C'est un comité consultatif auprès du ministre et du ministère. Dans la mesure où au moins deux ministres d'affilée se sont penchés sur les centres de mésadaptation sociale, les techniques de traitement, les techniques de diagnostics, le travail en équipe, il est normal de demander au comité consultatif de regarder...

Ce comité est un comité multidisciplinaire. Il comprend presque toutes les disciplines, y compris psychoéducation, qui se préoccupent de la mésadaptation sociale. Cela me paraît assez logique qu'on ait recours à ses lumières là-dessus.

M. Forget: II reste que ce comité a toujours fonctionné largement dans la périphérie de la psychiatrie dans le sens traditionnel du mot. N'est-ce pas inévitable qu'un tel comité, présidé par un psychiatre, avec des infirmières spécialisées en psychiatrie, qui s'est intéressé de tout temps aux problèmes de psychiatrie, ne formulera pas des opinions sur l'évolution ou sur les programmes ou sur la philosophie de traitement dans les établissements de mésadaptation sociale. L'approche est essentiellement psychiatrique et cela me semble une attitude assez curieuse.

M. Lazure: Écoutez! Je regarde la liste. Sur onze membres de ce comité, il y en a trois qui sont psychiatres. Tous les autres appartiennent à différentes disciplines, comme je vous le disais: service social, psychologie, psychoéducation. Enfin, je ne sais pas où vous voulez en venir.

M. Forget: Je veux en venir à ce que je disais pendant que le ministre consultait son projet d'arrêté en conseil. Essentiellement, vous avez là un groupe qui est très fortement marqué par l'approche et les attitudes qu'on trouve en milieu psychiatrique.

M. Lazure: Cela, c'est vous qui le dites.

M. Forget: Oui, certainement. Je le dis et je pense que c'est assez difficile de contredire cette affirmation à moins que le ministre m'indique qu'il n'est pas d'accord sur le fait que ces gens sont fortement identifiés à une approche psychiatrique. Je pense que cela a toujours été. Cela a été un but, d'ailleurs, de la formation du comité de santé mentale. Si on fait un peu d'histoire pendant deux minutes, on se souviendra que le comité de santé mentale a été créé vers 1971, largement à la suite de la réorganisation du ministère et de la disparition de la Direction générale de la psychiatrie et de la santé mentale. Ce comité était vu comme un moyen pour les milieux psychiatriques de ne pas rompre leurs liens traditionnellement étroits avec le ministère, et cela a été fait dans une optique psychiatrique.

D'ailleurs, tous les problèmes qui ont été soumis au comité de santé mentale depuis sa formation sont des problèmes qui ont trait aux situations, à l'organisation, aux problèmes éthiques et autres qui se posent en milieu psychiatrique.

M. Lazure: Je peux citer au moins une exception. Le comité de santé mentale a fait une étude, par exemple, du livre blanc sur l'adoption. Ce n'est quand même pas une étude sur le milieu psychiatrique.

M. Forget: Cela est récent et reflète la même préoccupation parce que le livre blanc sur l'adoption a été publié à l'automne.

M. Lazure: Non, c'était sous votre mandat, M.

le député de Saint-Laurent, une étude du livre blanc sur l'adoption.

M. Forget: Quel livre blanc?

M. Lazure: Un livre blanc qui était écrit quand je suis arrivé au ministère.

M. Forget: Mais le livre blanc, M. le ministre, il a été publié à quelle date?

M. Lazure: La date exacte, octobre 1976.

M. Forget: Vers la fin d'octobre. Je ne vois pas comment, alors que j'étais là, le comité de santé mentale a pu étudier le livre blanc, il n'y en avait pas de livre blanc.

M. Lazure: II y a eu un mandat de donné au comité. J'ai lu un rapport du comité de santé mentale qui faisait des remarques sur le livre blanc de l'adoption.

M. Forget: S'ils ont voulu étudier le livre blanc sur l'adoption, tant mieux pour eux.

M. Lazure: Sur la protection de la jeunesse aussi, il y a eu une étude par le Comité de la santé mentale. Je me demande s'il n'y en a pas eu une sur le projet de loi des handicapés, no 55 aussi, à l'époque. Cela a débordé largement, M. le député de Saint-Laurent, sous votre règne.

M. Forget: Je me rends compte, effectivement, que, du côté psychiatrique, ce n'est peut-être pas étonnant, il y avait un certain désir de s'intéresser à ces problèmes. Donc, je peux formuler ma question un peu différemment. C'est la première fois, à ma connaissance, qu'aussi formellement que le ministre l'a fait — cela a été annoncé, malgré tout, par des communiqués de presse comme étant une décision du ministre — un sujet comme celui de la mésadaptation sociale soit confié globalement, à ce comité au lieu de procéder par un projet de loi ou par un document du ministre, etc., demandant une consultation, ce qui se fait auprès de bien des milieux quant à cela, auprès des cours, auprès des juges, auprès des travailleurs sociaux. La, on lui confie un mandat d'élaborer une philosophie, une approche thérapeutique dans le milieu des centres d'accueil. C'est très différent. Je m'étonne qu'on le fasse de cette façon parce qu'il me semble qu'on veut souligner, à ce moment, de façon très nette, que le ministère, le ministre considère essentiellement les problèmes de la mésadaptation sociale comme une variété, si l'on veut, de problèmes psychiatriques.

M. Lazure: Ce n'est pas du tout le cas. Encore une fois, c'est un comité de onze personnes dont trois sont psychiatres; donc, il y en a huit qui ne sont pas psychiatres. C'est un comité non pas de soins psychiatriques, mais de santé mentale. Le diagnostic, l'évaluation, le traitement ou la réadaptation, appelez cela comme vous voudrez, des mésadaptés sociaux, c'est un problème, entre autres, de santé mentale. Ce n'est pas le seul aspect, si vous voulez, dans le tableau, mais la santé mentale des jeunes mésadaptés sociaux me préoccupe comme ministre. Donc, si je regarde autour de moi, dans le ministère, il y a un comité consultatif pour la santé mentale. Il me paraît tout à fait naturel de m'adresser à lui pour éclairer ma lanterne.

M. Forget: Oui, c'est peut-être naturel, mais, à ce titre, est-ce que le ministre proposerait, dans la même veine, de confier, par exemple, l'orientation des services aux personnes âgées au Comité de la santé mentale? C'est vrai que la santé mentale intéresse tout le monde, mais il y a un peu plus que cela. Quand on confie à un organisme qui...

M. Lazure: Ma réponse c'est; peut-être, parce qu'effectivement, dans les phénomènes de vieillissement, on s'est attardé, jusqu'ici, à la pathologie physique.

C'est important de s'attarder à la pathologie physique, mais chez les personnes âgées, il y a des problèmes d'adaptation sociale, donc il y a une espèce de fragilité au point de vue de la santé mentale, chez la personne âgée, qu'on ne retrouve pour ainsi dire pas à l'âge mûr. Peut-être qu'il serait temps d'étudier, comme certains le font ailleurs; mais dans notre milieu, il y a très peu de personnes qui s'intéressent à la santé mentale des personnes âgées. Je n'exclus pas que le comité de la santé mentale puisse étudier, à un moment donné, les problèmes de santé mentale des personnes âgées.

M. Forget: À ce moment, le mandat qui a été donné doit être interprété comme étant d'étudier les problèmes de santé mentale qui peuvent se poser à certains enfants dans les établissements pour la mésadaptation sociale, mais non pas d'étudier nécessairement l'ensemble du problème.

M. Lazure: Je voudrais essayer de refléter l'esprit qui est sous-jacent à cela. Par exemple, un des problèmes vécus très concrètement à l'intérieur des centres, c'est l'insécurité et la difficulté pour le personnel actuel, à l'intérieur des centres de mésadaptés sociaux, de faire face aux enfants qui sont en crise. Très souvent, l'isolement ou la cellule sécuritaire est le seul moyen de défense du personnel, et on sent une grande insécurité chez les psychoéducateurs ou les autres professionnels qui sont en contact avec ces enfants vis-à-vis de l'enfant en crise. On a un peu l'impression qu'ils sont aussi presque complètement démunis de moyens pour faire face à ces crises.

Une des questions qu'on pose au comité de la santé mentale, à ces gens qui sont des psychoéducateurs, des psychiatres et autres, c'est de voir quelle méthodologie peut être suivie pour permettre au personnel de faire face aux crises de façon plus dynamique, plus positive et avec moins d'insécurité. Parce qu'il y a une expérience vécue dans d'autres milieux, il y a aussi une expertise multidisciplinaire qui est là, on demande au comité de vraiment se pencher sur ce problème pour faire des recommandations fort concrètes.

L'idée n'est pas de refaire un rapport Batshaw, c'est de s'attaquer à des problèmes très concrets et très particuliers et de nous faire des recommandations précises sur ces sujets.

M. Forget: Vous ne trouvez pas qu'il y a là des problèmes importants? Je m'étonne un peu qu'on cherche du côté d'un organisme qui, malgré son nom, effectivement quand on regarde au fait, est essentiellement d'orientation psychiatrique. On se souvient combien les centres d'accueil qui ont cherché à faire appel aux centres psychiatriques dans le passé, traditionnellement, en particulier quand ils sont en face de problèmes de crise, etc., chez certains adolescents, se sont souvent fait dire: Écoutez, ce n'est pas un problème de santé mentale, c'est un problème d'organisation de votre centre et on ne veut pas s'en occuper.

Je pense que selon que cela fait l'affaire ou pas, on a une attitude qui est plus ou moins large dans la conception qu'on se fait de la santé mentale. Quand il s'agit de s'occuper d'un cas difficile, ce n'est pas de la santé mentale, mais quand il s'agit de placer sous le patronage d'un groupe essentiellement psychiatrique l'étude des problèmes des centres d'accueil, là, tout devient santé mentale.

M. Lazure: Je verrais deux faussetés dans cela. Commençant par la dernière, je répète, pour la troisième fois, que ce n'est pas un groupe essentiellement psychiatrique, c'est un groupe multidisciplinaire. Je ne sais pas combien de fois il faudra le répéter. Il y a trois psychiatres sur onze, ce n'est pas un groupe essentiellement psychiatrique.

La deuxième fausseté est quand vous dites que, si un centre d'accueil pour mésadaptés a des problèmes, le monde psychiatrique s'en lave les mains. C'est absolument faux et je sais de quoi je parle. Depuis plusieurs années, l'hôpital de Rivière-des-Prairies, d'une part, l'hôpital Sacré-Coeur, pavillon Prévost, d'autre part, ont offert des services psychiatriques à Berthelet, d'une part, et à Notre-Dame-de-Laval, d'autre part; cela peut être démontré.

M. Forget: Quand ils les appellent eux-mêmes des problèmes psychiatriques. Tout le problème réside... Le ministre dit que c'est une fausseté; il y a des demi-vérités dans cela aussi. On a eu l'expérience très réelle de cas extrêmement pénibles. Évidemment, on disait: Ce ne sont pas des cas psychiatriques; donc, on ne s'en occupait pas. C'était assez facile, on les réglait par la sémantique.

M. Lazure: On peut dire que c'était réciproque pour les centres d'accueil, si vous voulez jouer ce jeu-là; on peut dire qu'ils refusent des cas en disant: Ce ne sont pas des cas de délinquance, de mésadaptation sociale, ce sont des cas de psychiatrie; donc, on les envoie à l'hôpital psychiatrique.

M. Forget: Absolument.

M. Lazure: Bon. Il y a une certaine mentalité des deux côtés, j'en conviens.

M. Forget: C'est cela.

M. Lazure: C'est un phénomène qui dépasse les cadres d'une profession.

M. Forget: J'ai toutes sortes de raisons d'être d'accord avec le ministre là-dessus, sans aucun doute, cela dépasse les cadres d'une profession. Les faits qu'il a allégués, dont je suis conscient également, démontrent cependant qu'il est faux de prétendre qu'il y a une solution de continuité parfaite entre le milieu psychiatrique et le milieu des centres d'accueil. Au contraire, le grand problème réside dans le fait qu'on perçoit la brisure des deux côtés. De prétendre tout à coup qu'il n'y en a pas et de confier cela au Comité de la santé mentale qui, je le répète, malgré tout ce qu'on pourra dire sur sa composition multidisciplinaire, est d'orientation psychiatrique et fortement inspiré et moulé par une mentalité psychiatrique, c'est porter un jugement sur l'orientation des centres d'accueil et des activités thérapeutiques à l'intérieur des centres d'accueil.

Sur un sujet connexe, on entend parler de certaines choses de la part de gens qui sont dans le milieu des centres d'accueil.

Cette psychiatrisation de l'enfance mésadaptée aurait déjà produit certaines indications que la médication de type psychiatrique — les neuroleptiques — pourrait constituer une solution, un des moyens, non pas peut-être une solution, mais un des moyens qu'il était peut-être souhaitable de voir généraliser ou utiliser plus communément dans le milieu des centres d'accueil, comme alternative, par exemple, à l'isolement ou à des méthodes qui agissent sur le comportement plutôt que sur l'état psycho-affectif directement, tel que le font les médicaments.

Est-ce que le ministre est au courant de ces notions qui circulent dans le réseau? Quelle est sa position?

M. Lazure: D'abord, il est faux de prétendre qu'il y a une psychiatrisation des centres d'accueil, c'est charrier pas mal fort. Ce n'est pas parce que le comité de santé mentale va étudier certains problèmes au sein d'une équipe multidisciplinaire qu'on assiste à une psychiatrisation.

M. Forget: C'est une opinion personnelle?

M. Lazure: Je vous dis que vous venez d'exprimer une opinion personnelle qui n'est pas conforme à nos intentions vis-à-vis des centres d'accueil, c'est ce que je vous dis. Deuxièmement, à savoir si certains psychiatres — d'abord, il y en a très, très peu qui sont consultants dans les centres d'accueil pour mésadaptés — si ces très peu nombreux psychiatres vont prescrire des médicaments ou non, cela je ne le sais pas. Je ne pense pas que ce soit le rôle du ministre d'aller voir de quelle façon un psychiatre, un psychologue ou un travailleur social remplit ses fonctions.

M. Forget: Le ministre va être appelé à le faire quand les recommandations du comité de santé mentale lui seront faites, puisque cela va s'adresser à lui comme recommandations.

M. Lazure: II faut distinguer — ne jouons pas au fin fin — entre les actes de l'individu, médecin ou psychologue... Ce n'est pas à un ministre d'aller évaluer cela. Un ministre doit évaluer l'ensemble des opérations, l'ensemble des programmes d'un établissement, d'accord, mais c'est aux corporations professionnelles d'examiner le comportement de tel ou tel professionnel.

M. Forget: Est-ce que je dois comprendre que le ministre dit qu'il n'a fait aucune intervention privée ou officielle relativement à l'utilisation de la médication dans les centres d'accueil?

M. Lazure: C'est ce que vous devez comprendre, M. le député.

M. Forget: Auprès de quelque organisme ou auprès de quelque groupe de professionnels que ce soit?

M. Lazure: Quelque groupe que ce soit.

M. Forget: Personnellement, est-ce que malgré tout, tout en n'ayant pas de vue officielle, n'ayant pas exprimé officiellement de vue là-dessus, ce genre d'approche vous paraît acceptable ou susceptible d'être encouragé, ou si c'est le contraire?

M. Lazure: Si vous me demandiez si c'est acceptable de prescrire un antibiotique pour un patient qui a une infection, je dirais: parfois oui, parfois non. Je ne peux pas vous répondre de façon plus précise. C'est une question tellement théorique, tellement hypothétique que je peux vous répondre simplement en disant: Parfois oui, parfois non.

M. Forget: Donc, le fait que l'utilisation de la médication serait constatée sur une échelle, disons, plus qu'occasionnelle et exceptionnelle dans les centres d'accueil d'enfance mésadaptée ne préoccuperait pas le ministre. Il dirait que c'est probablement des décisions individuelles.

M. Lazure: C'est une conclusion complètement farfelue que le député de Saint-Laurent fait là. Il n'y a pas à tirer cette conclusion. C'est évident que s'il y avait une surconsommation de médicaments psychotropiques en milieu de centre d'accueil...

M. Forget: La surconsommation, c'est trop facile, tout le monde est contre, mais la consommation?

M. Lazure: Ou la consommation, cela me préoccuperait si cela devenait, si cela semblait excessif, mais je n'ai aucune indication que ce soit le cas actuellement.

Ces centres d'accueil ont presque tous, depuis longtemps, les services d'un médecin omnipraticien. Je ferai remarquer aussi que ces médecins omnipraticiens ont la compétence — ils l'ont fait dans le passé et le font encore — de prescrire des tranquillisants et que ce n'est pas l'apanage exclusif d'un psychiatre. Je ne sais pas si l'ex-ministre des Affaires sociales s'est préoccupé du nombre de prescriptions de tranquillisants que les omnipraticiens faisaient, par exemple, à Berthelet. Est-ce que vous vous en êtes occupé? Je sais qu'il s'en prescrivait.

M. Forget: Quand même le ministre me retournerait la question, après avoir plus ou moins refusé de répondre à la mienne, ce n'est pas cela qui éclairera la commission.

M. Lazure: Je n'ai pas refusé de répondre.

M. Forget: Vous répondez d'une façon un peu évasive.

M. Lazure: Vous posez des questions qui s'adresseraient à une corporation professionnelle, à un ordre professionnel.

M. Forget: Je pense que, malgré tout, le ministre devra reconnaître que cela soulève des questions s'il exprime une opinion ou s'il indique des préférences dans certaines situations où des choix se posent. En effet, il y a parfois des choix thérapeutiques qui se posent. Tout n'est pas décidé par la science en médecine et encore moins dans des situations où il y a un problème de contrôler le comportement de jeunes dans un centre d'accueil. Il y a plusieurs possibilités qui sont ouvertes au milieu thérapeutique. Il y a plusieurs choix possibles. Différents professionnels vont opter pour différentes solutions, placés devant les mêmes circonstances. Donc, il ne faut pas trop facilement, sous prétexte que la commission n'est pas constituée d'experts médicaux, renvoyer tout le monde à ses préoccupations, en disant: C'est un choix scientifique, un choix médical. Je suis loin d'accepter cette proposition.

Dans la décision qui se prend en choisissant entre différentes méthodes, le ministère, le ministre lui-même a un rôle à jouer. Est-ce qu'on a encouragé ou facilité la conclusion de contrats de service, depuis novembre, entre des centres d'accueil et des centres psychiatriques, en favorisant l'engagement, par des centres d'accueil et de mésadaptation sociale, de psychiatres consultants? Est-ce qu'on a donné un appui à cela?

M. Lazure: C'est une pratique qui existait depuis un bon nombre d'années. On l'a encouragée et on l'encourage encore.

M. Forget: Est-ce qu'on lui a donné une impulsion nouvelle?

M. Lazure: L'impulsion, c'est un bien gros mot. Dans le cas de deux centres d'accueil, on leur a conseillé d'avoir, justement, une articulation avec deux hôpitaux psychiatriques différents.

M. Forget: De quels centres d'accueil s'agit-il?

M. Lazure: Le centre d'accueil Berthelet avec l'hôpital Rivière-des-Prairies, le centre d'accueil Laval avec l'hôpital Sacré-Coeur, pavillon Prévost.

M. Forget: De quelle façon ces liaisons sont-elles nouvelles? Est-ce que c'était pour améliorer la coordination? Est-ce qu'il n'y avait pas des relations avant?

M. Lazure: II y en avait, ce que j'ai dit tantôt. Les deux hôpitaux psychiatriques — je sais de quoi je parle, puisque j'étais à un de ces deux hôpitaux — même s'ils offraient des services de consultation à l'intérieur d'une équipe multidisciplinaire, on recourait très peu souvent à ces services. On voyait plutôt l'hôpital psychiatrique comme un endroit où on pouvait envoyer un jeune qui était en difficulté, qui causait des difficultés.

On a constaté qu'il n'y avait pas de consultation, de dialogue véritable et valable entre Berthelet et Rivière-des-Prairies, si on veut être plus précis. Depuis quelque temps, le sous-ministre s'en est occupé personnellement et le dialogue s'est grandement amélioré, autant entre ces deux établissements qu'entre Albert-Prévost et Notre-Dame-de-Laval.

M. Forget: Vous faites entendre que ce n'est pas formalisé sous forme de contrats de service. Les termes de ces contrats de service impliquent non seulement un échange de bons procédés pour accepter des jeunes en provenance de l'autre institution par chacune d'entre elles, mais elles impliquent également la mise à la disposition du personnel du centre Berthelet et de Rivière-des-Prairies des consultants ou des thérapeutes.

M. Lazure: Ce sont des objectifs. Ces deux centres avaient, au moins un, un genre de contrat de service. Par exemple, entre Rivière-des-Prairies et Berthelet, il y avait un contrat de service, mais qui consistait uniquement à des transferts ou à des consultations de nature psychiatrique. Nous avons demandé à ces centres — c'est dans l'optique de ce que j'ai essayé d'expliquer tout à l'heure — d'examiner comment arriver à ce que, à l'intérieur — c'est un peu dans le sens du mandat du comité de la santé mentale — comment arriver à essayer de rassurer le personnel et à donner des moyens au personnel afin de faire face aux crises auxquelles il est exposé. Si vous visitez ces centres, malgré le rapport Batshaw, malgré les efforts qui ont été faits par le ministère, c'est assez frappant de voir que l'isolement demeure une méthode qui est utilisée encore assez souvent. On est complètement démuni vis-à-vis des crises des jeunes.

Il y a aussi des méthodes d'isolement à l'arrivée qui persistent dans certains de ces milieux. Elles sont d'une rigidité assez extraordinaire sur la discipline, du type de celle qu'on retrouvait dans nos bons collèges classiques d'il y a trente ans, mais qui sont difficilement tolérables, même par des jeunes non-délinquants, soit de marcher en li- gne droite d'un côté du corridor de telle heure à telle heure, il y a des affiches sur les murs, etc.

L'objectif poursuivi a été de demander aux psychiatres d'établir des liens qui sont plus que des liens qui consistent uniquement à dire que si un cas apparaît franchement psychiatrique, on le transfère ou il a une thérapie, mais de s'asseoir ensemble pour regarder les moyens à prendre pour améliorer les programmes thérapeutiques. C'est dans cette optique que cela a été fait. J'ai personnellement, à la demande du ministre, rencontré les directeurs généraux des deux établissements de Notre-Dame-de-Laval et de Berthelet. J'ai rencontré les psychiatres concernés. Il n'a jamais été dans l'intention, ni la mienne, ni celle du ministre, de psychiatriser ces centres d'accueil, mais simplement d'apporter une aide plus grande pour le bien-être des enfants.

Le Président (M. Marcoux): Sur le même sujet, le député de...

M. Forget: II n'a pas terminé.

M. Lazure: II y a une grande résistance — vous le savez, on pourrait s'étendre longtemps sur les difficuItés d'asseoir ensemble les psychiatres et les psychoéducateurs. On en est très conscient. Les résistances existent. Elles sont plus marquées à Berthelet qu'à Notre-Dame-de-Laval. Pour ce qui est de la médicalisation, il n'y a eu aucune indication ou orientation du ministère ou de ces psychiatres, à ma connaissance, de médicaliser ces gens qui sont dans ces centres d'accueil ou d'utiliser de façon régulière des tranquillisants.

À ma connaissance, il n'y a eu aucune indication de fournie ni par le ministère ni par les psychiatres consultants dans ce sens, que je sache.

M. Forget: Ce n'est peut-être pas nécessaire. M. le Président, je regrette, mais je n'ai pas terminé sur le même sujet.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Sur la question des centres d'accueil. Je crois qu'on isole un peu trop la discussion sur la question des soins internes et des soins psychiatriques possibles.

M. Forget: On veut parler, si je comprends bien, M. le député de Sherbrooke...

M. Gosselin: C'est-à-dire que j'ai une autre question à poser là-dessus.

M. Forget: On veut faire un contraste avec les services externes, j'imagine.

M. Gosselin: C'est-à-dire que je veux parler fondamentalement de la part relative qui est apportée dans les orientations du ministère, en dehors des centres d'accueil, sur l'information du public.

M. Forget: M. le Président, point de règlement, ce n'est pas le même sujet. Je n'ai aucune objection à ce que le député de Sherbrooke passe deux heures sur le sujet, qui est intéressant, mais il y a un point que j'aimerais clarifier avant de passer à autre chose. Après, il me fera plaisir de céder la parole à notre collègue de l'autre comté.

M. Lazure: M. le Président, sur le point de règlement aussi. Je ferai remarquer que le député de Saint-Laurent déborde des centres d'accueil puisqu'il parle des hôpitaux psychiatriques depuis une demi-heure ou 20 minutes. Si le député de Sherbrooke veut parler des centres d'accueil en débordant vers le public, je pense que c'est tout à fait dans la suite...

M. Forget: M. le Président, je ne parle pas des hôpitaux psychiatriques, je cite une circulaire administrative du ministère qui donne en quelque sorte sur un plateau d'argent, au Comité de la santé mentale, le soin de déterminer les politiques et les orientations thérapeutiques des centres d'accueil de mésadaptation sociale.

M. Lazure: Un comité consultatif ne détermine pas des politiques, un comité consultatif donne des avis au ministre.

M. Forget: II les suggère au ministre. Comme le ministre a dit que ce n'était pas à lui de décider, qu'il prendrait l'avis des experts, cela va devenir une politique officielle.

M. Lazure: Ou bien vous êtes de mauvaise foi ou bien vous ne comprenez pas quand on parle. Vous êtes tellement préoccupé de faire votre monologue que vous n'écoutez pas, je pense, quand on vous répond.

M. Forget: J'ai très bien compris qu'on a confié à un comité de santé mentale d'orientation psychiatrique le soin de préparer des conseils que le ministre refusera peut-être mais qu'il acceptera peut-être relativement à l'orientation des centres d'accueil de mésadaptation sociale. C'est sur ce point que j'aimerais encore poser quelques questions. Après quoi, je n'ai pas d'objection à reporter à plus tard durant la journée d'autres aspects du même élément de programme.

M. Gosselin: Sur la question soulevée, mon intervention s'inscrivait en plein dans le type de discussion qu'on avait. La question des soins internes délivrés dans les centres d'accueil est justement rattachée — et c'est là-dessus que je voudrais amener le ministre à certaines précisions — aux modes de contrôle démocratique qui sont apportés dans les institutions actuellement par le biais de la participation du public. Je voulais demander au ministre s'il lui paraissait que les modes de contrôle démocratique étaient satisfaisants — j'entends les conseils d'administration — et quant à l'information du public...

M. Forget: M. le Président, je regrette, mais ce n'est pas le même sujet. Le mode de contrôle démocratique et le contrôle psychiatrique sur la thérapie c'est peut-être, à l'occasion, des sujets qui peuvent se rapprocher mais, je ne voudrais pas faire de mauvaises plaisanteries, il reste que...

M. Gosselin: Je voudrais faire remarquer... M. Lazure: Vous en faites!

M. Forget: ...ce n'est pas le sujet dont nous discutions.

M. Gosselin: Je voudrais faire remarquer au député de Saint-Laurent que la question s'y rattache drôlement. Précisément, les cas que vous pouvez vouloir signaler sont finalement rattachés au fait de savoir s'il existe des contrôles au niveau de ces endroits, si, effectivement, le public est en mesure, par le biais de ces conseils d'administration et autres, de suivre l'évolution des soins. C'est dans ce sens que ma question s'y rattache très bien.

M. Forget: Je ne vois pas ce que cela vient faire dans le débat que nous avions. Je pense que c'est une idée importante que le public sache ce qui se passe dans les établissements mais, qu'il le sache ou non, l'orientation du ministère vis-à-vis de la psychiatrisation ou la non-psychiatrisation des services à l'enfance inadaptée, cela ne changera pas pour autant.

Le Président (M. Marcoux): Vous avez soulevé une question de règlement. On parlait des centres d'accueil. La question du député de Sherbrooke touchait les centres d'accueil. Si le ministre désire répondre, il peut répondre. S'il considère que cela ne touche pas le programme ou le sujet abordé, il n'a qu'à ne pas répondre, mais le député de Sherbrooke a le droit de soulever sa question puisqu'on est en plein dans la question des centres d'accueil.

M. Lazure: Les conseils d'administration des centres d'accueil sont composés selon ce qui est prévu dans le chapitre 48, la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Il y a des représentants des groupes socio-économiques, évidemment, il y a des représentants des parents, aussi, des représentants du personnel.

M. Gosselin: Cela vous apparaît-il satisfaisant à ce moment-ci?

M. Lazure: Je pense qu'on...

M. Gosselin: Je sais qu'il y a une difficulté très particulière à l'égard des centres d'accueil parce que les usagers ou les bénéficiaires sont souvent des gens qui ne participent pas directement. C'est un peu différent, par exemple, des centres locaux de services communautaires. On a là un type de participation beaucoup plus raccroché aux bénéficiaires ou aux usagers.

M. Lazure: On pourrait améliorer la participation des usagers, dans le cas qui nous concerne; il s'agirait de mésadaptés sociaux, adolescents, en grande partie. Je pense qu'il y aurait intérêt à ce que les conseils d'administration de ces centres, par le biais d'un comité consultatif de pensionnaires du centre, puissent avoir accès aux opinions de ceux qui utilisent les services.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, nous étions donc à écouter le sous-ministre qui, parlant au nom du ministre, disait que cette entente de services entre, par exemple, Berthelet et Rivière-des-Prairies avait pour but d'aider le centre Berthelet à développer une approche plus dynamique, plus appropriée pour l'organisation de ses programmes d'activités et de réadaptation. Quelle est la position du directeur des services professionnels d'un centre d'accueil dans le contexte où un contrat de services suppose qu'il bénéficie d'une orientation d'un autre établissement quant à, justement, ce qui fait l'essentiel de ses activités comme directeur des services professionnels? Est-ce que c'est simplement à titre de consultant que les professionnels de Rivière-des-Prairies interviennent ou s'ils interviennent directement au niveau de la programmation, si l'on veut, des activités du centre d'accueil?

M. Lazure: C'est vraiment à titre de consultant auprès du directeur général et, évidemment, du directeur des services professionnels. Il n'y a pas de contrat de signé; à mon avis, il y a des approches, des discussions qui sont encore en cours. C'est une approche où c'est un individu, ce n'est pas le département de psychiatrie, ce n'est pas le centre... Je veux dire que c'est un membre qui agirait comme consultant auprès du directeur général et du directeur des services professionnels et qui servirait beaucoup plus à discuter des problèmes, à essayer de s'entendre sur des orientations. Il n'est pas du tout question d'imposer ou de mettre en tutelle le directeur général ou le directeur des services professionnels du centre.

M. Forget: Si, effectivement, un des impacts ou le sens des conseils ainsi donnés par les professionnels de Rivière-des-Prairies au centre d'accueil de Berthelet consistait à suggérer une utilisation plus systématique de la médication, par exemple, il est évident que le ministère n'en serait pas, pour autant, informé et que cela n'irait à l'encontre d'aucune directive, d'aucune condition ou d'aucune réserve de la part du ministère quant au genre de services offerts.

M. Lazure: J'oserais dire que, selon toute probabilité, on en serait informé parce qu'il y aurait sûrement de la résistance à l'intérieur et on en serait sûrement informé. Tout ce que je peux dire c'est que, personnellement, si cela devenait une utilisation régulière ou qui apparaîtrait exagérée, une médicalisation de la clientèle du centre, le ministère en serait préoccupé sérieusement.

M. Forget: Pourvu que quelqu'un, à l'intérieur du centre, s'y objecte. Si on réussissait à leur faire accepter cela, tout irait bien.

M. Lazure: II y a aussi qu'on a parlé, hier, un peu du service d'agréments. Je veux dire qu'on a essayé surtout, dans ce domaine, d'avoir des gens plus préoccupés des programmes et des activités. Il est certain qu'on demandera d'accorder une attention particulière à ce problème dans la révision des dossiers et dans les inspections qui auront lieu dans ces centres. Ce n'est sûrement pas notre objectif de médicaliser à outrance ces milieux ou de les rendre médicalisés. L'objectif, c'est d'atteindre un équilibre de la contention ou de l'isolement et de la panique...

M. Forget: Le problème qui se pose, c'est de savoir où, dans l'opinion du ministère se trouve l'équilibre en question. Le ministère n'a pas caché, dans le passé, sa position assez ferme quant aux circonstances et aux précautions qui doivent entourer l'utilisation de la contention et même de l'isolement.

M. Lazure: Avec des succès mitigés, parce que justement les alternatives ne sont pas disponibles ou qu'il ne semble pas y avoir d'alternatives.

M. Forget: Justement.

M. Lazure: C'est l'objectif poursuivi d'essayer de faire en sorte que ces gens s'assoient ensemble pour trouver des alternatives valables. On considère, à tort ou à raison, que la présence d'un psychiatre n'est pas synonyme de médicalisation à outrance ou que c'est la seule solution.

Je pourrais ajouter sur cette réponse, M. le Président, que c'est très simpliste de faire l'équation psychiatre égale médicalisation ou usage de médicaments. C'est très simpliste, surtout dans le cas de psychiatres qui oeuvrent avec des enfants ou avec des adolescents en équipe avec d'autres disciplines. Il y a une tradition assez longuement établie qui fait que ces psychiatres ont développé des techniques, avec les autres disciplines, pour rendre un milieu plus thérapeutique sans utiliser de médicaments. Je pense que c'est une vue simpliste de regarder cela de l'extérieur et de dire: Si c'est un psychiatre qui oeuvre dans ce milieu, tout ce qu'il fait, c'est utiliser des médicaments. Il y a des techniques de thérapeutisation du milieu, si vous voulez, qui sont connues et qui sont utilisées avec succès dans plusieurs milieux psychiatriques. Je pense qu'il y a certains centres d'accueil pour mésadaptés sociaux qui pourraient profiter d'une telle approche.

M. Forget: M. le Président, je suis peut-être simpliste, mais effectivement, dans le contexte qui est celui des centres d'accueil, le ministère donne des directives quant à l'utilisation, par exemple, de la contention et de l'isolement, mais n'en a aucune relativement à l'utilisation de la médication.

M. Boucher: M. le Président, une question de

règlement. Cela fait au-delà de trois quarts d'heure qu'on discute le sujet. Cela fait trois fois au moins que le ministre reprend ses explications sur le même sujet. Je me demande si on ne devrait pas passer à un autre élément ou à un autre sujet.

M. Forget: M. le Président, je suis entièrement libre des questions que je pose en commission parlementaire...

M. Boucher: On dit dans le règlement quand même que c'est vingt minutes sur le même sujet.

M. Forget: ... et je ne tolérerai pas des interférences. Je peux faire la louange du député de venir au secours du ministre là-dessus, mais je crois que le ministre n'a pas besoin du tout de cette assistance.

M. Boucher: Cela fait au-delà de trois quarts d'heure qu'on vous écoute.

M. Forget: II se débrouille très bien et on peut continuer sur ce sujet qui est un sujet important.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Rivière-du-Loup a soulevé une question de règlement sur laquelle je vais me prononcer. Quant à l'interprétation que vous en faites, vous avez raison; normalement, un député a le droit d'intervenir vingt minutes sur un élément d'un programme. On considère ici qu'un article constitue un élément au sens des règles de l'Assemblée nationale. On l'a toujours utilisé, lors de l'étude des crédits, d'une façon très large. Mais, sur la question de règlement comme telle, le député de Rivière-du-Loup a entièrement raison. Si les membres de la commission désirent continuer à parler du sujet, ils peuvent continuer à le faire. Mais, si on demande comme telle l'application stricte du règlement, normalement le député de Saint-Laurent a épuisé son droit de parole sur l'élément 1.

M. Forget: M. le Président, sur cette question de règlement. J'assiste, depuis des années, à des commissions parlementaires et je n'ai jamais vu le règlement invoqué de cette façon. Je comprends que ce sujet peut être désagréable et délicat pour les députés ministériels, mais...

M. Lazure: Je n'éprouve aucun sentiment désagréable à parler...

M. Forget: Tant mieux.

M. Lazure: ... de mésadaptation sociale. C'est un domaine que je connais bien.

M. Forget: J'en suis fort aise. Alors, il ne devrait pas y avoir d'objection à ce qu'on poursuive.

M. Lazure: Mais je trouve qu'il est indécent de monopoliser le temps de la commission, M. le député de Saint-Laurent, comme vous le faites depuis plusieurs jours, dans vos monologues à répétition. Je trouve cela indécent et c'est antidémo- cratique pour les autres membres de la commission.

M. Shaw: M. le Président, peut-être que nous pouvons demander au député de Saint-Laurent de résumer son point de vue sur ce sujet, pour que nous puissions continuer sur un autre sujet.

M. Forget: Je n'ai aucun point de vue à résumer. Je n'ai pas fait d'exposé; j'ai cherché à obtenir, de la part du ministre et de ses collaborateurs, une vue claire de leurs intentions dans un domaine extrêmement important. J'ai eu quelques informations, bribes par bribes sur la façon dont cette question a été abordée. C'était là ma question: II demeure qu'on a des directives sur certains moyens de contrôle des jeunes dans les centres d'accueil, comme la contention et l'isolement.

Donc, on s'insère très loin dans les jugements professionnels des thérapeutes; par contre, on n'a aucune directive, aucune réserve, aucune condition attachée à l'utilisation des médicaments. On fait maintenant appel, dans ce contexte, à une profession. On peut dire qu'elle n'entraîne pas toujours l'utilisation de médicaments, mais dans le cas de contrôle du comportement, on a à faire cette preuve. Je n'accepte pas l'affirmation que les psychiatres utilisent couramment d'autres méthodes que la médication quand il s'agit de contrôler un comportement violent.

M. Lazure: C'est parce que vous ne connaissez pas le milieu, c'est tout.

M. Forget: Oui, d'accord.

M. Lazure: La différence est que je le connais.

M. Forget: Oui, très bien. C'est une affirmation que le ministre peut faire.

M. Lazure: Oui.

M. Forget: Dans un contexte où on a des moyens différents pour une même fin, que certains moyens sont régis par des directives et que d'autres ne le sont pas, je dis que le ministère, indirectement, implicitement, peut-être à son insu — souhaitons que ce soit à son insu — favorise un de ces moyens et, en particulier, la médication. J'aimerais que le ministre nous indique s'il a l'intention d'avoir la même surveillance, le même degré de souci, par une directive à cet effet, quant à l'utilisation de la médication en milieu de centres d'accueil pour l'enface mésadaptée comme il le fait pour d'autres moyens de contrôler le comportement violent.

M. Lazure: Je n'ai pas du tout l'intention de m'immiscer dans la pratique professionnelle soit d'un psychiatre, d'un médecin omnipraticien ou d'un psychologue. Je répète encore une fois, pour l'information du député de Saint-Laurent, et ex-ministre, que dans le centre dont nous parlions tantôt, Berthelet, j'ai pu constater moi-même, parce que sous un gouvernement antérieur j'ai été

appelé à faire une étude de Berthelet, qu'un médecin omnipraticien prescrivait, comme c'est son droit de le faire — et le député de Saint-Laurent ne peut pas mettre en doute la compétence des médecins, qu'ils soient omnipraticiens ou psychiatres— prescrivait des médicaments tranquillisants. Alors, je lui demande: Pourquoi me demandez-vous maintenant de réglementer les prescriptions de médicaments? Pourquoi ne l'avez-vous pas fait vous-même?

M. Forget: C'est une réponse...

M. Lazure: Tout le monde comprend, sauf vous.

M. Forget: C'est le ministre qui parlait de monologue. Je pense que c'est un monologue qui n'est pas une réponse.

M. Lazure: C'est ce que vous dites.

M. Forget: On dit: Cela s'est déjà fait avant, cela s'est déjà fait ailleurs. Ce n'est pas une réponse à ma question.

M. Lazure: Non, je vous dis que ce n'est pas de ma juridiction d'interdire ou de contrôler la prescription de médicaments dans un centre d'accueil ou dans un hôpital. Ce n'est pas de ma juridiction.

M. Forget: Sous votre autorité, vous contrôlez l'utilisation de la contention et de l'isolement.

M. Lazure: C'est-à-dire...

M. Forget: Où est la logique?

M. Lazure: ... que dans les centres d'accueil, que ce soit Berthelet ou un autre, il y a des règles internes concernant la mise en isolement d'un sujet. Moi, depuis que je suis ministre, je n'ai pas émis de règles nouvelles sur ce sujet.

M. Forget: il en existe.

M. Lazure: Je ne le conteste pas et je trouve cela normal. Je ne sais vraiment pas à quoi vous voulez en venir.

M. Forget: S'il y a des règles dans des domaines, pourquoi n'y en a-t-il pas dans d'autres? C'est aussi simple que cela!

M. Lazure: Voulez-vous réglementer les prescriptions d'antibiotiques dans les hôpitaux généraux aussi?

M. Forget: Encore des questions en guise de réponse. Pour calmer les craintes que ce sujet soit poursuivi avec trop de ténacité, je peux avertir nos collègues de la commission que je n'ai pas l'intention de poursuivre. Je pense qu'on a eu suffisamment de réponses pour nous indiquer dans quel esprit cette question est abordée par le ministre.

J'aurai d'autres questions sur les autres éléments.

Le Président (M. Marcoux): Y a-t-il d'autres questions sur l'élément 1?

Le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Je voudrais savoir si, au point de vue du ministère, il y a assez de services disponibles pour ces gens, pour les jeunes, les délinquants qui sont jugés par les cours et qui doivent être placés dans un centre d'accueil. Prévoyez-vous qu'il y aura une période d'attente avant de placer des jeunes dans des centres d'accueil?

M. Lazure: Du côté francophone, que je connais mieux, il semble effectivement qu'il y a suffisamment de places disponibles dans l'ensemble du Québec, autant dans les grandes villes que dans les régions. Il semble que ce soit à peu près suffisant. D'autre part, il me paraît qu'il y a un problème du côté anglophone dans la région de Montréal.

Si le ministre veut ajouter.

Oui, le nombre de places idéales dans ce domaine est extrêmement difficile à déterminer selon qui s'adresse à nous, et on a vécu l'expérience depuis longtemps. Il semble que, selon un peu la philosophie de base, le nombre de places peut presque être infini ou limité, dépendant du choix qu'on fait des cas qui doivent être placés en institution comme telle.

Du côté anglophone, il y a un nombre de places relativement impressionnant avec un total de budget de fonctionnement — pour donner une idée — pour le milieu anglophone à Montréal de $10,5 millions pour les centres anglophones en mésadaptation sociale. Il y a des problèmes d'admission, de coordination entre ces divers centres. Le ministère a mis beaucoup d'efforts pour asseoir chacun des centres d'accueil les uns avec les autres pour assurer la complémentarité de l'un par rapport à l'autre. Mais, la comme ailleurs, il y a beaucoup de difficulté pour accepter par exemple de modifier les critères d'admission des jeunes pour être complémentaires aux autres centres. Le problème pour les anglophones de Montréal est encore difficile.

La situation, comme on le disait hier, est encore difficile.

M. Shaw: Est-ce que vous prévoyez qu'il y a des places peut-être pour le moment, pour les cas d'urgence? J'ai discuté cela avec le juge Brown; dans beaucoup de cas, c'est impossible de placer des jeunes dans les centres d'accueil au Québec. Est-ce que vous prévoyez les envoyer en Ontario, pour le moment? Il y a deux choses ici, la sécurité de la population et, deuxièmement, même la sécurité de l'enfant lui-même.

M. Lazure: II y a un certain nombre de centres d'accueil pour anglophones qui ont été fermés. J'en connais aussi qui n'ont pas été fermés, mais qui ont failli être fermés. Girls Cottage School, que

vous connaissez, devait être fermé, selon une décision du ministère l'été dernier.

M. Shaw: Cette décision a été renversée.

M. Lazure: La décision a été renversée comme par hasard durant la campagne électorale, suite à une proposition très forte de la population anglophone de la région. À mon avis ce centre doit rester ouvert. C'est un excellent centre que je connais depuis des années, qui a rendu d'énormes services, qui en rend encore. C'est un exemple de décision, sous l'ancien gouvernement, qui me laissait perplexe, qui me laissait un peu inquiet. On avait décidé de fermer cette institution pour jeunes délinquantes soi-disant pour la remplacer par des foyers de groupe. Encore une fois, je pense qu'on en a parlé hier, cette formule des foyers de groupe, tout en étant utile, n'est pas magique. Elle ne peut pas remplacer les institutions. Je sais qu'on a fermé aussi d'autres institutions pour anglophones à Montréal. Je ne suis pas certain qu'on n'ait pas fait des erreurs en les fermant, toujours dans cette optique d'avoir des alternatives genre foyers de groupe ou des services extérieurs qui sont valables en soi. Mais je pense qu'il ne faut pas aller trop loin dans cette tendance et pratiquement vouloir dire qu'on n'aura plus besoin d'institution.

M. Shaw: Le rapport Batshaw a prévu trois sortes d'institutions pour les juvéniles; une qui est fermée, une autre semi-fermée comme Girls Cottage School, puis celles qui sont ouvertes vraiment, des maisons privées. On voit à Montréal qu'on a de la difficulté à trouver ces dernières. Est-ce que le ministère a prévu un programme pour essayer d'augmenter le nombre de places ouvertes pour des juvéniles, pour des crimes qui ne sont pas si violents?

M. Lazure: Le ministère est d'accord pour les formules plus ouvertes. On a donné notre accord. Le problème, vous pouvez le voir par le budget, il n'y a pas de budget de développement dans les crédits de cette année, dans ce domaine. On demande aux centres d'accueil d'utiliser leurs ressources actuelles pour le développement de ressources plus légères et d'éviter l'institutionnalisation plus lourde. C'est ce qui a été demandé aussi du côté francophone et ce qui se réalise difficilement parce qu'il y a une période intermédiaire où on a des problèmes de transfert.

Mais comme il n'y a pas de budget disponible pour de l'argent additionnel ils doivent utiliser... Comme je le disais tout à l'heure, les montants sont assez considérables; $10.5 millions pour la population anglophone de Montréal dans ce secteur. Il nous apparaît qu'il faut trouver de l'argent pour développer les ressources plus légères à l'intérieur de ces sommes.

M. Shaw: Au Boys' Farm vous êtes en train de faire de nouvelles constructions. Quand prévoyez-vous que cela sera prêt pour de nouvelles admissions?

M. Lazure: Au Boys' Farm, c'est de la rénovation pour la sécurité et pour l'adaptation. Cela progresse. La date approximative serait au cours de l'été qui vient. Cela se déroule très normalement.

M. Shaw: On a parlé du groupement des foyers qui sont disponibles, peut-être que nous pourrions faire quelque chose là en rencontrant les gens responsables. Pour le moment je n'ai pas d'autres questions sur les "socially maladjusted children", sauf la question d'avoir quelque chose de plus permanent que ce qu'on a maintenant dans la banlieue ouest de Montréal avec la situation AMBCAL, où il y a seulement 6 lits qui sont presque tous les jours remplis à capacité avec un programme qui est seulement marginal, au lieu d'un programme continuel. Est-ce que vous prévoyez faire quelque chose dans ce domaine?

M. Lazure: C'est la sécurité avant la cour. Pour les unités sécuritaires, pour la sécurité avant la cour, il y a eu des rencontres dont la dernière date d'à peu près 10 jours, quand M. Savard a rencontré tout le groupe anglophone à Montréal pour essayer de trouver des solutions pour la précomparution, le dépannage précomparution et aussi pour des places sécuritaires. Actuellement, il y a une unité de dépannage sécuritaire située à Cartier en milieu francophone. Les gens responsables sont anglophones et cela pose des difficultés. Les discussions se poursuivent avec les centres d'accueil anglophones pour trouver une solution adéquate.

Je pense qu'au cours du prochain mois on devrait être capable d'arriver à une solution. À la dernière rencontre avec l'ensemble de ces groupes — M. Savard peut peut-être donner des détails — on a dit qu'on devait faire une recommandation au ministère au cours des prochaines semaines.

M. Shaw: Merci.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président, je ne voudrais pas être déplaisant, mais j'aimerais tout de même revenir sur la question des médicaments pour quelques minutes. Le ministère a déjà émis des directives ou du moins conseillé à certains centres de détention pour les jeunes ou du moins à certaines maisons de ne pas prendre cette technique pour la protection du personnel et souvent pour la protection du jeune lui-même, de ne pas les interner ni les isoler. Je suppose qu'en donnant ces directives le ministère était bien conscient du fait que ce n'était pas une façon d'aider les jeunes délinquants à se réadapter.

M. Lazure: À ma connaissance, il n'y a pas de directive qui dit au personnel d'un centre de détention: Vous ne devez jamais mettre un sujet en isolement. La directive est très claire. Elle est vieille un peu. Je ne pourrais mettre un sujet en

isolement. La directive est très claire. Elle est vieille un peu. Je ne pourrais vous en donner le texte intégral, mais elle dit qu'aucun jeune ne doit être mis en isolement ou en détention sans l'approbation du directeur des services professionnels ou du directeur général. On a demandé, pendant un certain temps, cette pratique ayant été abandonnée au cours des six ou huit derniers mois, de nous faire rapport sur les cas d'isolement.

La directive n'était pas d'empêcher de façon totale l'isolement, mais de s'assurer que cela ne devenait pas une routine de l'établissement, comme c'était le cas dans certains établissements, que d'isoler les enfants ou de menacer d'isolement les enfants qui étaient dans une unité de vie et qui présentaient des troubles légers de comportement.

Récemment, on a même eu des problèmes dans un des établissements où à un certain moment, le chef d'unité a décidé que les enfants étaient malcommodes et d'en isoler cinq pendant trois jours sans raison et sans faire rapport à ses supérieurs. Le directeur général est intervenu dès qu'il l'a appris. Le but de la directive, c'est non pas d'empêcher, dans les cas où cela est indiqué, un isolement, mais d'éviter qu'il n'y en ait de façon inutile.

M. Saint-Germain: La réponse est bien claire. Pour remplacer cette procédure d'isolement et de détention que vous admettez simplement dans les cas extrêmes et que vous n'admettez pas comme étant une façon régulière de procéder, on pourrait aussi, du moins pour la protection immédiate des jeunes et du personnel, droguer ces jeunes. En fait ce serait une autre façon.

M. Lazure: On peut tout faire. Ce sont des questions hypothétiques.

M. Saint-Germain: Non, ce ne sont pas des questions hypothétiques.

M. Lazure: Oui, mais vous posez la question: On pourrait droguer ces jeunes?

M. Saint-Germain: C'est juste. M. Lazure: On pourrait, oui.

M. Saint-Germain: Je suppose que, si on était au courant au ministère qu'on prenait cette procédure, vous émettriez des directives telles que celles que vous avez émises concernant l'isolement et la détention. Est-ce clair?

M. Lazure: S'il y avait un abus excessif, comme vous l'illustrez avec l'expression "droguer des jeunes", c'est bien sûr qu'il y aurait une intervention du ministère auprès de la direction de l'établissement. On enverrait probablement des représentants du service de l'agrément du ministère pour évaluer la situation.

M. Saint-Germain: II y a des doutes sérieux que cela arrive actuellement. Je demanderais au ministre de bien vouloir, si je ne m'abuse...

M. Lazure: Sur quoi sont fondés ces doutes sérieux?

M. Saint-Germain: ... faire enquête. Faites donc une enquête actuellement, envoyez quelqu'un

M. Lazure: Je pense que c'est grave. Vous lancez des accusations. Faire des enquêtes à quel endroit?

M. Saint-Germain: Écoutez une minute. Pour commencer une enquête, il faut du moins avoir des doutes.

M. Lazure: Je veux bien qu'on fasse des enquêtes, mais à quel endroit?

M. Saint-Germain: Allez à Berthelet entre autres. Faites donc cela.

M. Lazure: Berthelet a été enquêté à peu près six fois depuis dix ans. On peut enquêter une septième fois.

M. Saint-Germain: Je ne vous dis pas de faire une enquête royale, mais au moins d'envoyer des représentants du ministère.

M. Lazure: J'en prends note. Si vous avez des raisons sérieuses...

M. Saint-Germain: Allez sur les lieux et faites donc une petite enquête pour voir si cela ne se fait pas.

M. Lazure: D'accord.

M. Saint-Germain: Je souhaite que cela ne se fasse pas. Je n'essaie pas de vous dire que vous êtes au courant et que vous le cachez.

M. Lazure: Je l'espère.

M. Saint-Germain: Je n'ai pas cela dans l'idée, mais faites donc enquête. Peut-être que ce serait utile pour tout le monde.

M. Lazure: On en prend note.

M. Shaw: Prévoyez-vous des problèmes avec la nouvelle loi pour les jeunes? Prévoyez-vous des changements sur la question des centres d'accueil?

M. Lazure: Des changements dans quel sens?

M. Shaw: Prévoyez-vous dans cette loi que vous allez avoir plus de personnes qui vont se présenter aux centres d'accueil ou moins? Les juges peuvent-ils demander au ministère de fournir des places ouvertes ou semi-ouvertes pour détention de ces jeunes?

M. Lazure: Un des aspects nouveaux du projet de loi qui devrait être déposé d'ici quelques semaines, c'est que l'ordonnance d'un hébergement obligatoire sera limitée dans le temps. Il y aura un mécanisme de révision pour s'assurer que l'hébergement forcé n'est pas prolongé indûment. Dans ce sens, cela peut peut-être diminuer le recours à l'hébergement, à l'internement si vous voulez.

Deuxièmement, on veut soustraire, comme on l'a déjà dit publiquement, les enfants de moins de quatorze ans à la comparution devant le juge pour des infractions. Cela aussi, au départ, devrait diminuer un peu le nombre de recours à l'hébergement.

M. Shaw: En même temps, vous allez avoir une augmentation de demandes de vos "social workers", les travailleurs sociaux, pour surveiller ceux qui ne sont pas internés.

M. Lazure: Oui. Le réseau actuel de services sociaux va être plus impliqué dans la surveillance, comme vous le dites, ou dans le soin ou le traitement de mésadaptés sociaux.

M. Shaw: Quant au nombre de clients par travailleur social, qui surveille ces cas, est-ce que les normes de ce "work load" sont acceptables?

Est-ce que c'est acceptable maintenant?

M. Lazure: Chez les délinquants, les mésadaptés sociaux, à l'extérieur?

M. Shaw: Oui, c'est cela.

M. Lazure: II y a deux mécanismes au moins, il y a les officiers de probation et il y a les travailleurs sociaux. M. Savard, est-ce que vous pouvez parler là-dessus?

Le nombre de cas par travailleur social, le ratio moyen...

M. Shaw: Est-ce que c'est satisfaisant, maintenant?

M. Lazure: C'est sûr que, dans un monde idéal, il y aura toujours la perspective de baisser ce ratio. Mais compte tenu du rôle qui s'exerce présentement à l'accueil-évaluation, aux Cours de bien-être social, et à l'usage des officiers de probation dans le suivi des cas, je dirais que c'est satisfaisant, de façon générale.

M. Shaw: S'il arrivait un changement dans la loi, est-ce que vous prévoyez, pour ceux qui sont éloignés de Montréal, sans services sociaux disponibles dans leur région, que cela va présenter une autre forme de surveillance, un autre centre d'accueil?

M. Lazure: Là-dessus, on fait tous les efforts possibles de deux façons: d'abord, que chaque région se suffise à elle-même dans toute la mesure du possible en ce qui concerne les mésadaptés sociaux, sauf pour les cas graves ou les cas ex- ceptionnels où on prévoit des centres suprarégionaux à Montréal et à Québec. Dans la majorité des cas, notre objectif c'est qu'ils soient assumés dans la région d'où ils viennent.

Le deuxième point: on veut aussi, dans toute la mesure du possible, impliquer les centres d'accueil dans le processus de réinsertion sociale des jeunes, favoriser l'implication des centres d'accueil eux-mêmes dans cette réinsertion des jeunes.

Troisièmement, nous voulons mettre à contribution les centres locaux, le personnel, les travailleurs sociaux à l'intérieur des centres locaux qui peuvent aider au niveau local. Il y a beaucoup de ces problèmes qui devraient être réglés, si possible, au niveau du quartier et non pas sur une base provinciale ou régionale à grande distance. Plus les contacts sont proches de la communauté où est l'enfant, plus les chances de succès sont grandes, et c'est pourquoi les services sociaux courants pourraient aider les familles. On aimerait que les centres locaux, à mesure qu'ils s'installent dans une communauté, assument cette partie et jouent un rôle beaucoup plus actif de prévention.

Notre espoir, avec la nouvelle loi, c'est que le nombre d'enfants qui étaient institutionnalisés diminue, que le nombre d'enfants qui vont dans les ressources lourdes diminue, et qu'on puisse mettre l'accent sur la thérapie pour les cas graves, et sur la prévention pour les cas légers.

Pour répondre plus complètement à votre question, on a distribué hier aux membres de la commission un tableau des centres de services sociaux dans lequel il y avait une statistique qui donnait l'effectif des centres de services sociaux pour les familles et pour les enfants. À l'intérieur de ces données, il y a le personnel affecté à la protection de la jeunesse plus particulièrement, ce qui est l'objet de votre question. Au total, on compte 1352 personnes qui portent leurs efforts sur la famille et l'enfance. Vous avez d'ailleurs, dans ce tableau qu'on vous a remis, la proportion pour chacun des centres de services sociaux.

Le Président (M. Marcoux): Programme 8, élément 1, adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Dans le domaine de la déficience mentale, il y a un établissement privé qui est particulièrement important par le nombre d'enfants qu'il regroupe dans 6, 7 ou 8 — je ne sais pas — établissements. Je sais que le ministre a confirmé, récemment, son désir d'intégrer dans le réseau public en particulier des centres d'accueil — du côté des centres hospitaliers, le problème ne se pose plus tellement — qui en manifesteraient le désir. Or, le ministère a déjà officiellement une demande de la corporation Anbar-Voyer, et j'aimerais savoir s'il y a eu, depuis six mois, une évolution dans ce dossier, si on est sur le point de voir l'intégration d'Anbar dans le réseau public.

M. Lazure: M. le Président, le réseau Anbar est en fait un réseau important. C'est sept ou huit établissements qui regroupent pas loin de 2000 sujets.

M. Forget: Cela a grossi? Il y en avait 1200, 1300.

M. Lazure: Aux alentours de 1300, si ma mémoire est précise, 1285 si ma mémoire est bonne. C'est sept établissements ou huit? Sept. Sept établissements, 1300 sujets, c'est assez considérable. Il y a des pourparlers qui sont engagés depuis plusieurs mois. Les propriétaires de ces établissements Anbar ont fait une offre de vente au gouvernement et les négociations sont en cours. Il y a une marge entre le montant demandé par les institutions Anbar et le montant offert par le ministère, et c'est cette négociation qui progresse, un peu lentement, mais qui progresse quand même.

M. Forget: Est-ce qu'il y a d'autres difficultés dans l'intégration au réseau public sur la question financière à laquelle on vient de faire allusion? Est-ce que quant au reste on ne prévoit pas de difficultés dès qu'on pourra régler la question financière?

M. Lazure: C'est à peu près exact. Ce sont eux qui avaient fait l'offre de vente. L'offre de vente, si on examine attentivement les dossiers, de $9 millions, ce n'est pas vraiment pour les édifices ou pour les bâtisses. Il y avait une vente du nom ou de la raison sociale, de la réputation, etc., et les discussions se poursuivent sur ce sujet. Il y a aussi le problème du trop grand nombre d'enfants dans un certain nombre des établissements ou des parties d'établissements d'Anbar.

On a imposé un gel des admissions dans ces institutions.

M. Forget: II faudrait rassurer, on ne sait jamais, les parents, les familles de ces enfants, si jamais cela devient public comme cela le risque; tout ce qui passe en commission, on ne sait jamais ce qu'il devient et ce qu'il ne devient pas, c'est assez intéressant. Cela nous indique un peu à quoi pensent les journalistes. C'est une question que sont susceptibles de se poser ces familles. Je pense bien que le ministre est disposé à indiquer que, quel que soit le statut juridique du centre d'accueil en question, ce n'est pas cela, en soi, qui va remettre en question la continuité des services et tout va continuer comme avant, à moins que, pour d'autres raisons, il y ait des changements.

M. Lazure: Absolument pas. Continuer comme avant en améliorant...

M. Forget: La demande, si je comprends bien, est de $9 millions et on négocie à la baisse à partir de ce montant.

M. Lazure: Exactement.

M. Forget: Étant donné qu'il s'agissait d'éta- blissements à but lucratif, est-ce que le ministre a une estimation de l'économie qui va découler de l'appropriation par le ministère de ces centres qui aiderait à compenser un peu pour le déboursé, peut-être pas de $9 millions, mais cela peut bien finir dans les alentours de quelques millions du moins? En contrepartie de cet investissement, est-ce qu'il va y avoir une économie substantielle, j'imagine, pour le ministère?

M. Lazure: Le but principal de l'intégration des institutions à but lucratif, que ce soit en santé ou en services sociaux, n'est pas de faire une économie. Ce n'est pas le but principal. Le but principal, par l'inverse, si vous voulez, c'est de faire en sorte que les gens ne fassent pas des profits en affaires aux dépens d'une certaine qualité de services. Donc, le but principal, en d'autres termes, c'est d'avoir un contrôle plus direct de qualité des services en intégrant des institutions à but lucratif au réseau public. Dans le cas des établissements Anbar, on l'a dit tantôt, il y en a un certain nombre où il y a un surpeuplement. Il y en a un certain nombre où il n'y a pas suffisamment de personnel. L'avantage, encore une fois, au bout de la ligne, c'est de faire en sorte qu'on ait une meilleure qualité de soins pour les déficients mentaux qui sont là. Je ne pense pas qu'il y ait d'économie, surtout pas à court terme, peut-être à long terme y a-t-il une économie?

M. Forget: De quelle nature?

M. Lazure: Je vous avoue que je n'en connais pas le chiffre.

M. Forget: Pour revenir...

M. Lazure: Je vous dis, encore une fois, que ce n'est pas l'économie matérielle qui est ma préoccupation principale, c'est l'amélioration...

M. Forget: Je comprends que c'est l'amélioration de la qualité. Étant donné cette préoccupation, et étant donné qu'il se peut que la négociation dure un certain temps, est-ce que le ministère n'a pas les moyens, par son inspection, d'exiger de l'Institut Anbar qu'il améliore les services, par exemple, qu'il ait un personnel plus nombreux, qu'il améliore ses édifices...

M. Lazure: Justement, il n'y a pas si longtemps, il y a à peine une semaine, on a envoyé des représentants du service de l'agrément visiter, à l'improviste, un des établissements Anbar.

M. Forget: Ce n'est d'ailleurs pas la première fois, mais...

M. Lazure: Non, ce n'est pas la première fois.

M. Forget: ...est-ce qu'à la suite de cela, le ministre envisage une amélioration des services, d'exiger l'accroissement des services, du personnel?

M. Lazure: Exactement, on l'envisage, oui.

M. Forget: Disons que le problème de la qualité comme telle, il voit des façons de la régler.

M. Lazure: II y a des façons mitigées de le régler. C'est plus compliqué quand on a affaire à un propriétaire d'une entreprise privée. C'est beaucoup plus compliqué.

M. Forget: Ah, bon! J'aimerais poser quelques questions sur le phénomène — je m'excuse, je me suis couché tard hier soir, et les mots me viennent difficilement — de là, ce n'est pas de la satellisation mais du pavillonnement de certaines familles d'accueil, etc. Dans le cas de la déficience mentale, l'opération, comme on sait — on y reviendra probablement plus tard — a été faite dans le contexte des services aux personnes âgées. Cependant, au cours de l'opération, il y a eu une question qui s'est posée, parce que, parmi ces foyers privés qui faisaient l'objet d'une satellisation, le mot m'échappe encore...

Une voix: De pavillonnement.

M. Forget: ...de pavillonnement, merci... on s'est rendu compte qu'il y en avait plusieurs qui avaient une clientèle mixte de personnes âgées et d'adultes déficients mentaux. Il s'est posé le problème de faire le pavillonnement également autour de centres d'accueil à vocation de déficience mentale ou psychiatrique. Enfin, là, c'est une zone frontière entre les deux. Est-ce qu'il y a eu un progrès qui a été réalisé de ce côté du pavillonnement de ces ressources et en prenant comme pôle de rattachement des centres d'accueil à vocation psychiatrique ou de déficience mentale?

M. Lazure: Je pense que, comme vous le dites, le problème du pavillonnement, on va y revenir probablement lorsqu'on atteindra le programme des personnes âgées. L'opération s'est faite conjointement au moment de l'analyse des clientèles, et il est exact qu'un certain nombre d'adultes déficients mentaux ont été dans des foyers, enfin des pavillons. Pour ces pavillons, les processus d'intégration qui ont été utilisés ont été les mêmes que pour l'opération pavillonnement, avec les mêmes difficultés ou les mêmes succès mitigés. Est-ce que vous voulez savoir le pourcentage de ceux qui ont été pavillonnés?

M. Forget: Je pense qu'au point de vue du nombre, on a un certain tableau de chasse en quelque sorte, si on peut employer l'expression.

M. Lazure: On a les données complètes sur le nombre de bénéficiaires et le nombre de ressources pavillonnés, et pavillonnables aussi, qui devaient être rattachés à des centres d'accueil publics. Je ne les ai pas avec moi, parce que je m'attendais que ce soit plutôt dans le programme 9.

M. Forget: Si vous préférez qu'on en parle plus tard... Je pensais qu'on avait peut-être fait une catégorie spéciale de pavillons pour déficients mentaux adultes à l'occasion de l'opération. Cela n'a pas été touché?

M. Lazure: On les a laissés tous ensemble, dans le fond, on ne les a pas distingués, sinon par leur rattachement. Mais on n'a pas fait de statistiques particulières.

M. Forget: Ah, bon! Mais il y a, malgré tout, des centres psychiatriques auxquels on a rattaché ces pavillons à vocation de déficience mentale.

M. Lazure: II n'y a pas de centres psychiatriques, actuellement, il y a des centres d'accueil pour déficience mentale...

M. Forget: II y a des centres d'accueil pour déficience mentale, comme le Foyer Savoie peut-être, c'est celui qui me vient à l'esprit.

M. Lazure: C'est cela. Il y en a plusieurs. Je les ai en dossier parce que je m'attendais que ce soit dans le programme 9 qu'on aborde ce sujet.

M. Forget: D'accord, on va reporter cela à plus tard.

J'aimerais poser au ministre une question qui, à mon avis, appartient peut-être à la deuxième étape, à la deuxième phase de la collaboration entre les Affaires sociales et l'Éducation.

C'est une remarque que j'ai déjà eu l'occasion de faire, mais, encore une fois, comme le ministre l'a dit hier, la première phase d'opération consistait surtout à établir des liens contractuels entre les écoles et les centres d'accueil. La deuxième phase va peut-être consister à s'interroger plus profondément sur les programmes et sur la répartition des rôles, etc., en vue d'une collaboration et d'une coordination.

Du côté de la déficience mentale, est-ce que le ministre serait d'avis qu'il serait opportun que non seulement la clientèle qui se trouve, à un moment donné, dans les centres d'accueil fasse l'objet de cette collaboration entre les deux ministères, mais également la clientèle qui ne quitte pas le réseau d'éducation et qui se retrouve dans les classes spéciales? À l'occasion des dernières négociations dans la fonction publique et parapublique, j'ai pu constater la croissance absolument fantastique de la clientèle des programmes pour l'enfance inadaptée. Quand on regarde ces chiffres, on a un peu la même impression que quand on regarde certaines statistiques de la Régie de l'assurance-maladie, c'est-à-dire qu'on se rend compte, tout à coup, que quelque chose est devenu payant. Comme c'est devenu payant, la maladie sous-jacente à l'acte qu'on considère a, tout à coup, une incidence plus forte que celle qu'on pourrait soupçonner.

L'analogie est tout à fait applicable. Je crois qu'on a une enfance inadaptée ou en difficulté d'apprentissage qui a crû à un rythme fantastique et qui, peut-être, dépasse à l'heure actuelle ce qu'une évaluation absolument objective pourrait révéler. Parce qu'on a un ratio plus élevé, parce

que cela permet d'engager plus de monde, etc., c'est très tentant pour les commissions scolaires. Cela permet une réduction des classes aussi, dans certaines circonstances, etc. Il y a une expertise indépendante qui devient nécessaire, à un moment donné. Avant d'avoir vu ces chiffres, je n'étais pas porté à le croire, mais les chiffres parlent par eux-mêmes. Quand on parle à certains professionnels qui s'occupent de l'enfance inadaptée, on se rend compte que placer un enfant qui n'est pas inadapté dans une classe spéciale, c'est assez grave, c'est assez sérieux.

Le ministère des Affaires sociales et son réseau non seulement doivent se préoccuper d'avoir une éducation optimale pour les enfants dans les centres d'accueil, mais devraient encourager le ministère de l'Éducation à rechercher une expertise extérieure au réseau scolaire pour peut-être évaluer un peu cette vague, cette mode de la classe spéciale et de l'inadaptation scolaire. Je ne sais pas si le ministre partage mon avis, mais c'est un point qui mériterait d'être regardé et d'être discuté entre les deux ministères. C'est la seule raison pour laquelle j'en parle ici. Peut-être que déjà il a précédé ma question par une intervention avec son collègue de l'Éducation.

M. Lazure: C'est une chose qui me préoccupe à cause de mes antécédents à différents postes de travail. C'est une tendance qui mérite d'être surveillée. Il y a un abus du recours à la classe spéciale, effectivement, non pas pour le déficient mental moyen tellement, mais surtout pour le déficient léger et pour le mésadapté social léger aussi.

D'autre part, il y a des handicaps plus sérieux. Je pense aux déficients mentaux moyens ou semi-éducables qui sont loin de tous être intégrés dans le réseau scolaire; il y en a encore un bon nombre qui ne sont pas intégrés et que le réseau scolaire refuse d'intégrer, autant les structures administratives que les structures pédagogiques. Je trouve cela déplorable parce que ces enfants semi-éducables, déficients mentaux, sont obligés de recourir à des institutions psychiatriques bien souvent. Ce n'est pas déplorable parce que c'est psychiatrique, mais parce qu'ils devraient être dans le milieu scolaire comme les autres enfants ou ils pourraient recourir à des écoles privées.

Donc, c'est paradoxal. Vous avez raison de dire que, pour certaines entités, pour certains enfants, il y a un recours abusif à la classe spéciale. Ces enfants, on devrait faire plus d'efforts pour les intégrer dans des classes régulières, et par contre pour d'autres entités, on les exclut même des classes spéciales.

Le phénomène généralisé de la classe spéciale pour des cas relativement légers de déficience ou de mésadaptation est relativement nouveau dans le milieu, à peine vingt ans, quinze ans, et déjà, dans d'autres milieux, on a abandonné, dans une large mesure, ces classes spéciales. J'ai eu l'occasion, avec un groupe, il y a quelques années, de faire une étude un peu partout au pays et ailleurs, qui a résulté en un rapport qui s'appelait: Un million d'enfants. Et déjà, à l'époque, cela remonte à il y a dix ans, il y avait en Ontario, par exemple, et en Colombie beaucoup de précédents où on intégrait selon un dosage judicieux, environ 10%, si vous voulez. Donc, trois enfants sur 30, dans une classe, pouvaient être soit des déficients mentaux, soit des mésadaptés sociaux, à la condition, cependant, que le personnel pédagogique soit préparé à cette intégration.

Je finis là-dessus: une des pierres d'achoppement, un des obstacles, c'est que le professeur, si vous voulez, général, titulaire dans une classe du cours élémentaire ne se voit pas comme étant habilité à intégrer un déficient mental léger. Je pense que cela, c'est dommage, et cela résulte d'une tendance excessive à la spécialisation.

M. Forget: Je pense que le ministre a tout à fait raison de souligner que les classes spéciales sont un peu trop vues comme la seule solution. Dans d'autres endroits, on a fait l'expérience d'autres méthodes. Il ne faut pas aller si loin, même à Montréal, à la Commission des écoles protestantes, on utilise les mêmes crédits qui sont disponibles à toutes les écoles mais de façon différente de ce que l'on fait dans la plupart des écoles, des commissions scolaires catholiques, non pas pour des classes spéciales mais pour ce qu'ils appellent des "free-flow teachers". Ce sont des professeurs en surnombre, qui sont spécialisés dans l'éducation spéciale, et qui viennent aider le professeur régulier dans la classe régulière. Pour ceux qui ont des difficultés d'apprentissage sans être déficient mental ou pour ceux qui ont une déficience très légère, c'est une solution qui est beaucoup plus humaine, beaucoup plus normalisante, et peut-être aussi moins lourde administrativement que la classe spéciale.

Mais encore là, il y a un problème d'évaluation. Un problème d'évaluation, quand il est fait à l'intérieur de l'école, les gens sont un peu juges et parties. Étant donné la disponibilité des services de santé et des services sociaux en milieu scolaire, c'est un peu les problèmes de définition de rôle aussi qui se posent. Du côté des services de santé, on est en train de définir des rôles de prévention au point de vue de la vue, au point de vue de l'ouïe, etc. pour ne mentionner que ces aspects, mais qui ont un impact direct sur la capacité d'apprendre des enfants.

Je pense que du côté des services sociaux, il serait probablement souhaitable de développer un peu la même approche de dépistage et d'évaluation des problèmes d'apprentissage dans un contexte où il y a une certaine distance entre le professeur et celui qui fait l'évaluation. Tout le monde est humain, et il y a une tendance très forte à ce qu'un professeur, peut-être souvent et normalement, se dise: Bien mon Dieu, peut-être que cet enfant est trop difficile. Et c'est à moitié pour se soulager et à moitié pour ce qu'il croit, probablement sincèrement, donner plus de chance à l'enfant dans une classe spéciale. Mais là, la ligne de démarcation entre les deux motifs est bien difficile à tracer. Et pour un même individu qui est juge et partie, cela risque d'être un petit peu au détriment de l'enfant.

Je vois que le ministre s'est senti visé. Je de-

mande, si, au niveau de l'évaluation, il n'y aurait pas vraiment un rôle, pour les services sociaux en milieu scolaire, d'évaluation dans le contexte des ententes de masse...

M. Lazure: Moi, je ne suis pas satisfait des relations entre le ministère de l'Éducation et le ministère des Affaires sociales concernant l'enfance inadaptée. Je trouve que les liens ne sont pas assez étroits. Étant donné que cette espèce de comité conjoint, qui s'appelle mission MAS-MEQ, achève son travail, je pense que l'étape suivante serait de former, en prenant peut-être une partie du comité, former un comité conjoint, éducation-affaires sociales, vraiment axé sur les programmes à l'enfance inadaptée dans le milieu scolaire. Je ne dis pas que ce comité sera habilité à faire une évaluation, mais on lui demanderait au moins de nous faire des suggestions, à savoir: qui devrait faire une telle évaluation.

M. Forget: Sur la déficience mentale je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Plusieurs parents ont manifesté le désir de garder chez eux des enfants déficients mentaux. Quelle est la politique du ministère à ce sujet, compte tenu du fait qu'il en coûte $12 000 pour garder ces enfants en institution et seulement $3000 pour les laisser dans un foyer? Je sais que cela démontre une situation de surveillance, mais est-ce qu'un programme est prévu pour assister les familles qui veulent garder ces enfants chez eux?

M. Lazure: C'est un problème complexe. Pour aider les parents à garder leurs enfants handicapés mentaux et physiques il y a de plus en plus de services de jour qui sont donnés, soit en classes spéciales ou encore dans des centres de réadaptation physique ou mentale. Mais la question plus générale que vous posez, au lieu de donner $7 par jour à un foyer nourricier, à une famille d'accueil qui garde un enfant déficient mental profond, mettons, pourquoi ne pas les donner à ses parents naturels? C'est la question que vous posez.

M. Shaw: Oui.

M. Lazure: On réfléchit à cette question. Il y a de cela plusieurs années, quand j'étais fonctionnaire à temps partiel au ministère, on avait fait accepter ce principe par le ministre de la Santé à l'époque, le Dr Couturier.

M. Forget: II n'est pas mort.

M. Lazure: Non, il vit toujours. Il est un peu psychiatrisé. C'est un omnipraticien qui travaille à Robert-Giffard, mais à part d'être psychiatrisé il va très bien.

M. Forget: C'est une amélioration continuelle.

M. Lazure: Oui. Le Dr Couturier, le ministre de l'époque, l'avait autorisée, et on l'avait fait dans la région de Baie-Saint-Paul si je me rappelle, ceci pour vous dire que je crois à cette formule. Elle a été abandonnée par le ministère subséquemment. Une fois la loi pour les personnes handicapées votée, si elle est votée et je l'espère, cette loi prévoyant un office, on a l'intention de confier à l'office des personnes handicapées ce mandat d'établir des critères. C'est très complexe parce qu'à quel moment un déficient mental profond devient-il une charge additionnelle financière pour les parents?

Il y a des déficients mentaux qui ne sont pas vraiment une charge financière additionnelle et il y en a d'autres qui le sont. On parle ici des déficients mentaux, mais si on le faisait pour les déficients mentaux pourquoi ne pas le faire pour les mésadaptés sociaux graves ou pour un handicapé physique grave aussi? À quel moment dit-on à la famille: Le fait de garder votre enfant handicapé mérite une prime de l'État de $5 ou de $10 par jour? C'est un problème extrêmement délicat, extrêmement compliqué. On va l'étudier.

M. Shaw: Vous avez le même choix dans le cas d'institutions. Si vous jugez qu'un enfant doit être placé en institution vous avez besoin de normes pour établir...

M. Lazure: Je pense que c'est possible d'établir des normes. Il faudrait que ce soit selon certains degrés de sévérité et non pas ouvrir cela de façon très large à tous les handicapés. Ce ne serait pas possible.

M. Shaw: Dans la province, il y a sept centres pour les déficients mentaux; on peut démontrer facilement qu'il y a beaucoup de parents dans les régions éloignées de ces centres qui aiment mieux garder ces enfants à la maison. La situation à la maison demande toujours un surplus financier à la famille.

M. Lazure: Je suis convaincu que c'est mieux que l'enfant déficient demeure dans la famille. C'est pour cela qu'une formule d'aide financière aux parents naturels est une chose qui m'attire. Comme j'ai dit tantôt, j'y ai déjà cru et j'y crois encore. Il s'agit d'établir les critères, à qui cela devrait s'appliquer.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Rivière-du-Loup.

M. Boucher: Je ne sais pas si c'est à cet élément, mais il y a tout le problème du placement des enfants mongols où on a établi une directive au niveau des institutions de ne pas accepter de placement d'enfants mongols de zéro à quatre ans.

M. Lazure: Une directive du ministère?

M. Boucher: Oui, cela avait été accepté après étude ou recommandation...

M. Lazure: Cela m'étonnerait à première vue. C'est peut-être plutôt une directive d'une institution ou d'un centre de services sociaux. Il faudrait vérifier. Ce serait plutôt un centre de services sociaux.

M. Boucher: Les institutions qui recevaient ces enfants dès la naissance n'étaient plus autorisées de les recevoir avant quatre ans.

M. Lazure: Ce n'est sûrement pas une directive du ministère. Cela m'intéresserait d'avoir cette directive. Cela me paraît un peu absolu. Encore une fois il faut faire la distinction entre une tendance générale qui est souhaitable de ne pas placer un enfant mongol en bas âge en institution, mais de là à dire qu'il ne faut jamais placer un enfant mongol en bas âge en institution, il y a une marge.

M. Boucher: Justement, c'était à ce point. De zéro à quatre ans on n'acceptait pas dans l'institution les enfants mongols.

M. Lazure: On en prend note et si vous la trouvez, vous nous l'enverrez.

M. Boucher: Un enfant a été hospitalisé, dans un cas que je connais, dans un hôpital général parce que les parents refusaient absolument de le prendre. C'est l'Hôpital général qui l'a gardé aussi longtemps qu'on ne l'a pas accepté.

M. Lazure: Je trouve cela un peu absolu et vraiment abusif de la part de ceux qui ont émis cette directive.

Le Président (M. Marcoux): Programme 8, élément 2, adopté? Adopté. Élément 3?

M. Forget: M. le Président, dans la loi qui est devant l'Assemblée pour la modification du chapitre 48 des lois de 1971, il y a une nouvelle catégorie d'établissements qui est celle des centres de réadaptation. J'imagine que les institutions pour les handicapés sensoriels sont parmi les premières à se qualifier pour cette catégorie de handicapés physiques ou sensoriels pour les nouveaux centres de réadaptation. C'est cela qui est perçu comme devant constituer une nouvelle catégorie.

M. Lazure: II y a un dilemme qu'on n'a pas complètement résolu. Dans notre esprit, au départ, cela s'adressait principalement aux handicapés physiques, les centres tels que Cardinal-Villeneuve, le Centre de réadaptation de Québec, quelques-uns de Montréal. Le problème nous a été posé au sujet de l'Institut des sourds, au sujet des centres pour aveugles. Je dois dire qu'on est en train de regarder cela. À l'origine, cela ne visait pas ces centres. C'était vraiment pour les handicapés moteurs.

M. Forget: Je vois.

M. Lazure: II est probable que cela devrait s'adresser aux deux groupes.

M. Forget: Je n'ai pas d'opinion à exprimer sur le sujet, mais je me demandais s'il y avait eu, justement, dans le cas de ces groupes de handicapés sensoriels, une poursuite des discussions qui n'avaient probablement pas été amorcées, mais... Au moment d'une rencontre avec l'Institut des sourds, on avait au moins fait la mention de la possibilité d'un rattachement de centres de l'ouïe et de la parole dans le cadre de l'institution — présumément, du moins c'est ma perception — d'un centre de réadaptation intégré à la fois pour les bénéficiaires internes et externes, et aussi pour toute la population de l'Est du Québec.

Je me demandais s'il y avait eu un développement de ce côté; si, par exemple, le Centre de l'ouïe et de la parole avait été impliqué dans une discussion devant mener à un tel regroupement.

M. Lazure: Je dois vous avouer candidement et sincèrement que nos efforts de persuasion, d'après des informations que je possède qui ne viennent pas du ministère, mais qui sont confirmées par M. Savard, ont été non suivis de façon totale. J'ai eu l'occasion de rencontrer le directeur du Centre de l'ouïe et de la parole, il n'y a pas longtemps, lors d'une rencontre publique et de m'informer à savoir si ses relations avec l'Institut des sourds s'étaient développées de façon importante. Il me semble qu'on ne se soit pas parlé depuis un an.

M. Forget: Ni l'un ni l'autre n'a pris l'initiative de nouer des contacts. Est-ce que le ministère considère encore que c'est une chose intéressante et qu'il y a là un potentiel de développement, de croissance et d'amélioration des services?

M. Lazure: Sur l'intégration de l'un et de l'autre, il n'y a sûrement pas de décisions et d'orientations définitives prises au ministère, mais il m'apparaît personnellement que le rapprochement de l'un et de l'autre dans les traitements et dans la complémentarité des rôles est essentiel. Là-dessus, en raison du personnel qualifié au ministère dans ces dossiers, on a fait porter les efforts, comme on l'a dit l'autre jour, sur les handicapés visuels, au cours de l'année dernière, pour s'assurer qu'au moins ce programme commencerait. On peut vous assurer qu'au cours de l'année qui vient on va faire les mêmes efforts. Même pour les handicapés visuels, pour atteindre un résultat satisfaisant, il faut s'assurer de la complémentarité et de la collaboration d'un centre hospitalier avec une équipe très bien spécialisée en ophtalmologie et le centre qui sera responsable des orthèses et des prothèses. Il nous paraît essentiel que la même chose se produise au niveau des sourds et qu'il faut faire les rapprochements.

Les rapprochements sont faits, par exemple, à Québec, entre le CHUL et le centre pour les aveugles. Cela fonctionne très bien et il y a une excellente collaboration. À Montréal, on a plus de diffi-

cultés. On s'est adressé à divers intermédiaires et on a un peu de difficulté à identifier quel est le groupe spécialisé en ophtalmologie qui devra avoir des liens privilégiés avec l'établissement. Pour les sourds, le même type de problème se pose. Est-ce qu'il faut faire une intégration? En fait, l'essentiel, c'est une complémentarité et une collaboration entre les deux.

M. Forget: L'hôpital Notre-Dame, à Montréal, a un centre important de l'ouïe et de la parole. Sur le même sujet, la politique de scolarisation optimale des handicapés sensoriels semble, à mon avis, poser un certain nombre de difficultés au moins pratiques. Est-ce que les règles qui ont été développées pour les centres de mésadaptation sociale et les centres de déficience mentale ne sont pas sujettes à d'assez fortes qualifications quand on cherche à les appliquer à ce groupe? Est-ce que la politique d'intégration là-dessus on cherche à les appliquer à ce groupe? Est-ce que la politique d'intégration là-dessus est fermement arrêtée en termes d'une intégration du personnel enseignant de façon intégrale ou si la transformation dans des centres de réadaptation ne permet pas d'élargir un peu les horizons?

M. Lazure: II y a eu, à la suite de discussions assez orageuses sur ce sujet, un assouplissement important de la part du ministère des Affaires sociales et de la part du ministère de l'Éducation. Ce qui est finalement devenu l'objectif à la suite de la mission MAS-MEQ, c'est de s'assurer que les programmes sont reconnus et acceptés, que la surveillance des programmes est finalement en bout de ligne, sous l'autorité du ministère de l'Éducation, mais les modalités pratiques pouvaient être relativement souples et qu'il ne s'agissait pas nécessairement de transférer tout le monde. Il y a des endroits comme Berthelet où c'est la venue de personnel du ministère de l'Éducation à l'intérieur du centre qui va se faire. À d'autres endroits, à Rivière-des-Prairies, par exemple, il y a un mélange des deux. Ce qui nous a paru essentiel et que, finalement, le ministère de l'Éducation et les gens impliqués chez nous ont accepté avec les centres, c'est de garder l'unicité du centre dans toute la mesure du possible, mais de s'assurer que le programme d'éducation comme tel était véritablement approuvé, selon les normes, et que les gens qui donnaient l'enseignement étaient qualifiés de par le ministère de l'Éducation ou avaient des équivalences. C'est la même orientation au niveau des sourds, parce qu'il est irréaliste de s'imaginer que tous les sourds de l'Institut des sourds vont être transférés à la régionale Chauveau, mais je pense qu'il y a eu une intégration de tous ceux qui sont intégrables. Il y en a tous les ans, qui s'intègrent mais il est important de respecter les problèmes particuliers de groupes.

M. Forget: Les véritables spécialistes dans ces domaines, il n'y a rien qui s'oppose à ce qu'ils continuent à être à l'emploi des centres d'accueil spécialisés.

M. Lazure: Là-dessus, je pense que le ministre nous a bien poussés à respecter une attitude souple et nuancée dans ce domaine.

Le Président (M. Marcoux): Élément 3, adopté? Adopté. Élément 4, réadaptation des adultes.

M. Shaw: Sur cette question, c'est une augmentation de deux fois le budget. Est-ce que vous avez des circonstances? Excusez-moi. Sur l'élément 4, on voit cette année $47 millions au lieu de $18 millions, l'an passé. Est-ce qu'il y aurait...

M. Lazure: Les $18 millions...

M. Shaw: C'est augmenté presque du triple...

M. Lazure: Ce sont des transferts. C'est ce qu'on a expliqué déjà, c'est que le $18 millions est un transfert d'un programme à l'autre, c'est passé de CS généraux du programme II, probablement en majorité à ce programme-ci. Ce n'est pas une augmentation véritable des budgets, malheureusement. C'est un transfert de programme. C'est tout simplement une imputation différente.

M. Forget: Dans le domaine de la réadaptation pour les adultes, il y a le problème — je le mentionne avec beaucoup de soulagement parce que le ministre et le sous-ministre ont indiqué leur attitude souple vis-à-vis des centres de réadaptation pour handicapés physiques dans le cadre de notre politique de scolarisation optimale — je crois que la même attitude de souplesse serait fort valable et fort opportunément appliquée au problème de la réadaptation des alcooliques et toxicomanes. Je pense que cela vient, si ma mémoire est bonne, dans ce programme. Il y a eu, de ce côté, un certain flottement, pendant quelque temps, à cause de la réorientation, de l'intégration d'un réseau spécifique, d'un réseau spécialisé. Mais cette intégration impliquait le transfert des gens de l'OPTAT, en particulier, à des centres de services sociaux ou le renforcement des ressources humaines dans les centres de services spéciaux. Une espèce de dispersion des ressources.

La question se pose, à savoir si les centres d'accueil qui ont une vocation spécialisée dans le traitement de la toxicomanie ne devraient pas être de véritables centres de réadaptation comportant l'ensemble des ressources spécialisées pour ce genre de traitement. Je pense, en particulier, à la région de Montréal où il y a des difficultés de coordination de tous les agents, dans le domaine de la toxicomanie. Je ne suis pas sûr qu'elles soient encore surmontées, en tous les cas, quand j'ai quitté le ministère, elles ne l'étaient pas, c'était très visible et, depuis le mois de novembre, il m'a été donné de prendre connaissance de correspondance et de choses que l'Opposition reçoit, dans le cours normal des choses, qui démontrent qu'il y a encore énormément de tâtonnements et de divisions à l'intérieur de cela.

Est-ce qu'il y a des signes d'espoir de ce côté? Et à mon avis, ce qui serait peut-être le principal signe d'espoir: est-ce qu'il y a une orientation claire du ministère pour donner à des établissements spécialisés dans ce domaine, les centres d'accueil, qui existent, je pense à Domrémy, à Montréal, etc., et dans d'autres régions, le rôle complet de services internes pour la réadaptation, et aussi de "outreach" et de "counselling", tout ce qu'on sait qui est dispersé, à l'heure actuelle, dans un certain nombre d'agences de services sociaux?

M. Lazure: La seule chose qu'on essaie de distinguer dans cela, c'est peut-être la phase aiguë, qu'on pourrait appeler médicale, de désintoxication hospitalière. C'est cela qu'on voudrait réserver à des institutions hospitalières. On s'était efforcé, même, d'aller jusqu'à identifier des lits, à l'intérieur de certains hôpitaux, à ces fins là. Pour l'autre aspect...

M. Forget: Avant de venir à l'autre aspect, est-ce qu'on a une idée du respect avec lequel on a traité ces réserves ou ces vocations spécialisées dans certains hôpitaux?

M. Lazure: Cela varie beaucoup. Il y a des endroits où je dirais que le succès est assez grand ou assez considérable. Peut-être que la formule la plus intéressante c'est celle de Saint-François-d'Assise, à Québec, où on a accepté d'assumer, dans le fond, l'ensemble des fonctions à l'Intérieur du centre hospitalier en créant une section centre d'accueil de réadaptation pour alcooliques.

À ce moment, évidemment, faisant partie du même établissement et physiquement rapproché, je pense que cela donne des résultats fort intéressants. On avait le même programme à Saint-Luc, pour vous donner un exemple, qui ne s'est pas réalisé complètement, faute de budget, à toutes fins pratiques. Ce n'est pas tellement une résistance du milieu, parce qu'il y a une certaine ouverture à Saint-Luc. On a fait des démarches à Haute-rive. Si on veut donner l'idée, je pense, c'est de s'efforcer que le centre d'accueil de réadaptation pour alcooliques assume l'ensemble des fonctions, à l'exclusion de la phase aiguë médicale.

M. Forget: Eventuellement, même la référence à l'hôpital, que ce soit une de ses responsabilités.

M. Lazure: Et que ce soient les mêmes personnes qui soient responsables des deux. Un des problèmes qu'on voit c'est que, par exemple, l'admission à l'hôpital relève d'un certain type d'individus, de médecins. Et ceux qui sont responsables sur le plan médical, par exemple, du centre de réadaptation, ce ne sont pas les mêmes. C'est le problème qu'on a vu en allant à Hauterive. On a vécu cela très clairement. Le médecin qui s'occupe du centre de réadaptation, il n'y a pas de lien avec les médecins qui s'occupent de la désintoxication. Cela cause des problèmes presque insolubles.

C'est dans ce sens qu'à Domrémy Montréal on a établi, actuellement, une sectorisation où les gens vont être appelés à donner des services à l'extérieur de l'institution Domrémy et devront, systématiquement, couvrir les hôpitaux de ce secteur, afin de favoriser la continuité entre la désintoxication et la réadaptation au niveau d'une prise en charge, soit en externe ou soit via l'interne de Domrémy Montréal.

M. Forget: Vous mentionnez Domrémy Montréal — je l'ai fait moi-même tantôt. La distinction entre l'aspect médical, intensément médical de la désintoxication et les autres phases de réadaptation qui ne sont pas exclusivement médicales mais qui, selon les théories thérapeutiques, peuvent être exclusivement non médicales ou partiellement médicales, etc., il me semble que cette distinction n'est pas très bien comprise, ni même, ce qui est le plus important, n'est pas très bien acceptée, à l'heure actuelle, ou enfin c'était peut-être la situation l'hiver dernier. Est-ce que des efforts ont été faits pour replacer les choses, parce qu'il semblait y avoir des déchirements internes assez substantiels?

M. Lazure: II y avait un problème précis fort concret qui était à la fois de fonds et de syndicat, à toutes fins pratiques. Cela touchait surtout les infirmières au niveau de Domrémy Montréal. Dans le fond, il y a eu aussi des actions administratives fort discutables et un compromis a été trouvé; à ma connaissance, cela va mieux, actuellement. La crise est passée. On trouvait, à l'intérieur du centre, que pour les fonctions de réadaptation il y avait trop d'infirmières. Les infirmières, par ailleurs, qui étaient là étaient intéressées de continuer à oeuvrer dans ce milieu. Ce qu'on a demandé, c'est qu'on continue à les payer comme des infirmières, mais que, si leur rôle était surtout de faire de la réadaptation, qu'on élargisse leur rôle et qu'on leur donne l'ensemble des rôles et qu'on les garde. On avait décidé de les mettre à la porte, parce qu'elles étaient infirmières, même si elles voulaient faire de la réadaptation, et la réadaptation, en théorie, n'est pas le rôle de l'infirmière. Le compromis qui a été trouvé c'est de faire accepter par les infirmières et par l'administration qu'on les considère comme les deux, à toutes fins utiles. À ma connaissance, cela fonctionne, depuis quatre mois.

M. Forget: À la satisfaction des infirmières, j'imagine. Est-ce que cela fonctionne à la satisfaction de ceux qui considèrent les objectifs du programme?

M. Lazure: En fait, si je reprends avec cette distinction de désintoxication et réadaptation, le personnel de Domrémy Montréal — ils ont un personnel médical — a diminué en nombre. À un moment donné, lorsqu'on a fait cette distinction, les médecins ont intégré les hôpitaux, mais il demeure une certaine partie du personnel qui, lui, est médical, entre autres le nursing. Mais on va utiliser ces gens au niveau de la sectorisation en les identifiant à un centre hospitalier en particulier, au niveau de la prise en charge de l'alcoolique ou du

toxicomane, lors de cette période de désintoxication. Ces infirmières vont couvrir systématiquement les hôpitaux du secteur dans lequel elles travaillent.

M. Forget: Est-ce que vous avez l'impression que ces infirmières ont reçu la formation nécessaire pour jouer le rôle comme celui-là auprès de toxicomanes? Est-ce qu'on leur a offert un recyclage quelconque?

M. Lazure: II y a des cours d'été qui se donnent à l'Université de Sherbrooke. Je pense que l'ensemble des infirmières...

M. Forget: Elles vont s'inscrire là.

M. Lazure: L'ensemble des infirmières vont suivre des cours. Mais ce sont des infirmières, pour la plupart, qui ont dix à quinze ans d'expérience dans ce domaine.

Je pense que l'apprentissage, au boulot, y est pour beaucoup. D'ailleurs, pour ces mêmes cours, on a fait un effort, l'an dernier, pour s'assurer qu'au niveau du personnel des CLSC il y ait une sensibilisation — on leur a envoyé de la documentation — des effectifs professionnels pour justement pouvoir également exercer un rôle préventif en matière de toxicomanie.

M. Forget: Maintenant, il y a un certain personnel qui travaille au sein du CSSMM, en particulier. Est-ce que ce module du CSSMM, il a été envisagé qu'on le transfère à un centre d'accueil spécialisé, de manière à pouvoir mieux coordonner les efforts de tous ceux qui travaillent dans le secteur? J'imagine que les travailleurs sociaux, par exemple, qui s'occupent de la réintégration sociale d'ex-alcooliques auraient un point d'attache privilégié s'ils étaient dans le centre d'accueil où on a fait leur réadaptation et peut-être leur désintoxication et où on les suit après avec des travailleurs sociaux. Là, ils sont dans une espèce de "no man's land", de l'autre côté de la ville, et il semble qu'ils ont trouvé très difficile de se parler dans le passé. Le ministère envisagerait-il de prendre ce module et de le transférer au centre Domrémy?

M. Lazure: On a, dans certaines régions, je pense en particulier à la région de Hull, des travailleurs sociaux du CSS qui pratiquent en milieu de réadaptation dans le centre d'accueil lui-même, au pavillon Jellinek, entre autres. On en a un certain nombre.

M. Forget: Administrativement, ils sont rattachés aux CSS, mais ils travaillent dans le milieu de la réadaptation.

M. Lazure: Oui. Je dois dire, cependant, que d'une région à l'autre c'est variable au niveau du lieu de pratique du travailleur social. Dans le cas de Hull, nous avons déjà des travailleurs sociaux, rattachés aux CSS, qui pratiquent au pavillon Jellinek lui-même.

M. Forget: Dans la région de Montréal, cette relation n'est pas faite?

M. Lazure: On a seulement deux CSS qui ont des praticiens en alcoolisme. C'est le CSSMM et le CSS Richelieu. Ce sont les deux seuls CSS qui ont des praticiens directement aux CSS.

M. Forget: Ce que je disais tantôt valait pour le CSS Richelieu dont les travailleurs sociaux travaillent en milieu de réadaptation alors que pour le CSSMM ce n'est pas le cas.

M. Lazure: Ce n'est pas le cas.

M. Forget: Des démarches ont-elles été entreprises pour les rapprocher au moins physiquement?

M. Lazure: Pas à ma connaissance. Je pense que c'est une question sur laquelle il faudra continuer la démarche que nous avons déjà entreprise dans la région de l'Outaouais. On me dit que cela a été également dans le cas du CSS Richelieu et auprès du CSSMM.

M. Forget: J'ai vu des procès-verbaux de réunions à 40 personnes où tout le monde était censé s'occuper des alcooliques et des toxicomanes et où il y avait autant d'organismes que de personnes alentour de la table. Dans la région de Montréal, à mon avis, il y a des choses à faire. Si la nouvelle loi, par la notion d'un centre de réadaptation qui permet plus de souplesse au niveau des structures, était adoptée pour Domrémy, par exemple, je crois qu'on aurait là un moyen d'améliorer l'efficacité de ces ressources. Dans le moment, malgré les efforts extraordinaires de certains individus là-dedans, auxquels on doit rendre hommage, il reste que tout le monde est un peu handicapé par la complication, la division des tâches et que personne ne comprend très bien. D'autant plus qu'il n'y a pas seulement Domrémy. Dans la région de Montréal, il y a un certain nombre de groupes extrêmement innovateurs et très dynamiques qui ont des rôles complémentaires. Il y a peut-être une façon de les faire travailler ensemble beaucoup plus étroitement.

M. Lazure: Une réaction aux remarques du député de Saint-Laurent. Moi aussi, je constate que dans la région de Montréal, en particulier, les alcooliques ne reçoivent pas les traitements qu'ils devraient recevoir. Il y a beaucoup de raisons à cela. Je dirais même que dans une certaine mesure le traitement est peut-être moins adéquat qu'il l'était il y a quelques années. Au temps où l'OPTAT, l'Office de la prévention et du traitement de l'alcoolisme et des autres toxicomanies, existait, au temps où il y avait un réseau de maisons Domrémy qui existait, c'était un traitement plus intégré. Les maisons Domrémy faisaient à la fois la désintoxication et la prise en charge de la réadaptation.

Dans cette espèce de foulée qu'on a connue au ministère des Affaires sociales, entre 1970 et

1976, où la tendance était de tout intégrer au courant régulier, si je puis dire, on a jugé bon d'abolir certaines structures telles que l'OPTAT et on a changé la vocation de Domrémy. Sur un plan théorique, cela se maintient, cela se soutient, ces choses-là, mais le moins qu'on puisse dire est que pour une période de transition, la population écope un peu.

Je ne suis pas sûr, en rétrospective, que l'abolition de certaines directions dans le ministère, telles que l'OPTAT a été un geste judicieux. Alors, moi, je pense qu'il va falloir réévaluer, surtout pour une grande région comme Montréal, s'il n'y a pas lieu de procéder à des services plus intégrés.

Dans une région telle que Hauterive, par exemple, où la population est restreinte, il y a un hôpital général, il y a un centre Domrémy. Si les médecins se parlent le moindrement, le médecin du centre d'accueil pouvant faire partie du conseil des médecins de l'hôpital, il est possible d'avoir cette séparation de la désintoxication hospitalière pendant quelques jours, puis ensuite la prise en charge par l'institution. Mais, dans une région comme Montréal, je me pose des questions.

Moi, je demeure convaincu, que la formule de Saint-François-d'Assise ou de Saint-Luc où vraiment on développe une ressource avec des liens étroits avec un centre hospitalier est probablement celle qui a le plus d'avenir. Il reste que les centres Domrémy antérieurs étaient très isolés et avaient des services qui laissaient à désirer sur le plan professionnel. Je veux dire qu'il y avait des problèmes sérieux à ce niveau. Même si on n'a pas encore trouvé les solutions idéales et satisfaisantes, à Québec, par exemple, la formule pour Saint-François-d'Assise fonctionne très bien. Si on veut la réaliser à deux ou trois endroits à Montréal, je pense qu'on peut le faire.

C'est une formule intégrée, Saint-François-d'Assise.

M. Forget: Dans la région de Montréal en particulier, il y a une chose qui m'a toujours dérangé énormément, mais le temps n'est jamais venu d'y remédier à cause de l'incapacité de former assez rapidement un noyau fort au niveau de l'alcoolisme et des toxicomanies. Mais, dans le fond, le ministère des Affaires sociales a, sans le savoir, un de ses plus gros centres d'accueil à Montréal, qui se trouve sur la rue Craig et qui officiellement s'appelle une prison. C'est l'espèce de centre de détention qui est dans une ancienne caserne de l'armée et qui sert à la détention presque pas sécuritaire de tous les alcooliques de Montréal qui sont arrêtés pour vagabondage. Ils passent en moyenne une période d'un mois à six semaines en prison pour des offenses mineures. Ils sont condamnés en Cour municipale ou ailleurs. Vous en avez des centaines qui sont des hommes en haut de 50 ans, de 55 ans. C'est une véritable tragédie, sur le plan humain, d'abord pour ces gens, parce qu'on les traite comme des criminels, alors qu'ils sont des malades, dans le fond, bien plus que des criminels. Ils sont arrêtés pour des choses sans conséquence, telles que traîner dans les rues et être en état d'ivresse, des choses comme cela.

Ce sont des gens totalement dépourvus, tellement que certains demandent de prolonger leur séjour en prison quand leur peine finit durant le milieu de l'hiver, parce qu'ils n'ont ni feu ni lieu.

Pour la société, c'est une autre tragédie, parce que finalement on sait que, malgré le coût des centres d'accueil, les prisons sont encore plus coûteuses très souvent, avec le système de garde à 24 heures par jour, etc. Dans le fond, la société dépense, à l'heure actuelle, pour un problème essentiellement d'alcoolisme, vis-à-vis d'une population flottante de peut-être 400 ou 500 personnes à Montréal, des sommes énormes qui seraient, à mon avis, beaucoup mieux dépensées si on retrouvait, dans la région de Montréal, une institution dynamique et forte qui pourrait assumer ses responsabilités. Je pense que le séjour en prison de ces gens, c'est un symptôme que la société ne s'est pas organisée de façon décente. À mon avis, c'est intolérable qu'on utilise le processus judiciaire pour ne pas régler ce problème. De toute façon, tout le monde le sait, à la fois les gardiens de la prison qui ont fait cette prison juste pour cela. Il n'y a pas de voleurs, il n'y a pas de meurtriers, il n'y a pas de voleurs d'autos là-dedans, il n'y a rien; il n'y a que des gens qui sont arrêtés pour avoir été en état d'ivresse sur la rue. Ce n'est quand même pas possible, puis il y en a quelques centaines. Je pense qu'on a là des défis à relever et je pense que cela peut se faire avec le temps.

M. Lazure: Même si ce n'est pas de notre juridiction directe, maintenant qu'on a à peu près réussi à éliminer des prisons communes ceux qui étaient sous notre juridiction directe, c'est-à-dire les adolescents, je pense effectivement qu'on va entrer en contact avec le ministère de la Justice pour regarder cette clientèle.

Je suis de l'avis du député de Saint-Laurent. C'est une clientèle qui devrait relever des Affaires sociales plutôt que de la Justice.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Boucher: M. le Président, je voudrais savoir si le ministère entend poursuivre le développement des centres de jour qui sont quand même, au niveau des centres d'accueil, des instruments de réadaptation pour adultes qui peuvent être utilisés à des coûts assez peu élevés par rapport à des centres spécialisés.

M. Lazure: La réponse c'est oui, compte tenu de nos budgets. Notre problème c'est toujours une question de disponibilité budgétaire. Comme vous le voyez, les budgets dans ces articles et dans la plupart des articles, à part des articles qui ont été identifiés comme tels, ce sont des budgets gelés, qui augmentent avec l'augmentation des conventions collectives, mais où il n'y a pas d'augmentation des ressources disponibles.

M. Boucher: II n'y a pas de développement des centres de jour actuellement dans les montants qui sont indiqués ici?

M. Lazure: Malheureusement pas. On y est favorable, et si on peut trouver de l'argent, soit par substitution ou autres façons, on est bien prêt à le faire. C'est sûrement la façon la plus douloureuse de le faire.

M. Boucher: Est-ce que vous pouvez demander aux centres d'accueil d'essayer, à l'intérieur de leur budget, de développer...

M. Lazure: Dans la mesure du possible, mais c'est extrêmement difficile pour eux aussi.

Le Président (M. Marcoux): Le programme 8, élément 4, adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Marcoux): Adopté. À la demande des membres de la commission nous ajournons sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 33)

Reprise de la séance à 17 h 3

Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, messieurs!

La commission des affaires sociales est réunie pour poursuivre l'étude des crédits budgétaires du ministère des Affaires sociales. Les membres de la commission sont M. Boucher (Rivière-du-Loup) remplacé par M. Rancourt (Saint-François); M. Charron (Saint-Jacques) ; M. Clair (Drummond) remplacé par M. Baril (Arthabaska); M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte), M. Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), M. Paquette (Rosemont), M. Saindon (Argenteuil), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Shaw (Pointe-Claire).

Nous avions complété l'étude du programme 8. Nous sommes au programme 9. M. le ministre.

Protection et hébergement

M. Lazure: Essentiellement, c'est le programme des dépenses de fonctionnement pour les familles d'accueil, les garderies et les centres d'accueil publics et privés d'hébergement. Il y a deux éléments: la protection de l'enfance, $42 millions par rapport à $41,6 millions l'an dernier, et l'élément 2, hébergement des adultes et des personnes âgées, $216 256 000 par rapport à $186 390 000. On note, évidemment, que l'augmentation se fait chez les personnes âgées surtout et je n'ai pas plus de préambule à faire. Je vais attendre les questions des membres de la commission.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais, de façon générale en abordant ces crédits de fonctionnement du réseau, demander aux gens du ministère s'il serait possible qu'ils nous donnent certaines explications. Je fais la demande pas nécessairement pour qu'ils y donnent suite immédiatement, mais pour que, peut-être à notre prochaine séance, la semaine prochaine, ils puissent nous donner ces renseignements. Nous avons observé, je crois que c'était hier, que les crédits actuels qui sont devant nous prévoient une certaine augmentation au titre des salaires pour tenir compte de l'augmentation des salaires prévue dans les conventions collectives, mais que cette augmentation n'est pas nécessairement suffisante pour combler l'ensemble des besoins financiers jusqu'à la fin de l'année, compte tenu de l'indexation qui devrait être intégrée dans les échelles salariales à partir du 1er juillet de cette année. Je pense que ce sont les éléments principaux, encore qu'il serait peut-être utile aussi qu'on rende plus explicites les différentes hypothèses qui ont été faites quant aux glissements dans les échelles, qui font que, cha-

que année, en plus de l'augmentation des échelles de salaires, il y a une année de séniorité additionnelle pour les membres du personnel du fait qu'ils ont une augmentation.

J'aimerais connaître les estimations qu'a faites le ministère relativement à ce glissement, cette estimation de coût, de même que les estimations de coût de l'indexation, le tout comparé aux sommes disponibles pour les crédits, de manière à avoir une idée du manque à gagner, en quelque sorte, qui est représenté aux différents éléments du fonctionnement du réseau. Cela s'applique au programme 4, aussi dans le fond, aux programmes 7, 8, 9, 11 et 12. Si on pouvait avoir cela sous forme d'un tableau, la semaine prochaine, cela nous aiderait à comprendre le sens des crédits. Je n'insiste pas plus sur cet élément.

J'aimerais demander, relativement à l'élément no 1 où on observe un accroissement très modeste de $41,5 millions à $42,2 millions, comment peut-on concilier la modestie de cet accroissement avec deux éléments que ces crédits comportent: le premier, ce sont les taux de paiement qui sont versés aux familles d'accueil. On s'attendrait à ce que ce taux de paiement aux familles d'accueil subisse une augmentation substantielle. Je sais qu'à partir du 1er avril, le ministère des Affaires sociales a fait un accroissement et on est frappé de constater que l'accroissement en question, en termes de pourcentage, est inférieur, même, au taux d'indexation à l'indice des rentes, etc., qui a servi, de façon générale, à indexer les banques de l'aide sociale, les allocations familiales et les rentes payées par la Régie des rentes du Québec. La différence n'est peut-être pas très substantielle, malgré tout, si on tient compte des représentations très fortes qui ont été faites par différentes associations de familles d'accueil, représentations auxquelles le gouvernement, le parti qui est maintenant au pouvoir, avait donné son appui le plus total, avait même surenchéri, dans certains cas. Je me demande ce que cela veut dire que cette retenue, dans les accroissements accordés.

On constate, par exemple, M. le Président, que pour les âges de 0 à 4 ans et de 5 à 11 ans, l'accroissement est de 7% seulement. Les taux étant passés respectivement de $3.35 à $3.60 et de $3.80 à $4.10, de même que le régime supplémentaire pour les enfants qui sont particulièrement handicapés, etc. a lui-même aussi été augmenté de 7% seulement, on se serait attendu à 8,2% pour toutes les catégories.

On a un taux inférieur à celui-là, alors je voudrais savoir quelle est la "rationnelle" de ces chiffres.

M. Lazure: M. le Président, en attendant que le fonctionnaire trouve les chiffres, je voudrais faire remarquer à la commission que la plupart des prévisions étaient assez complétées au moment où le nouveau gouvernement est arrivé au pouvoir. On a eu une marge de manoeuvre assez mince, comme tout le monde le sait. J'ai dit à plusieurs reprises que les taux des familles d'accueil me paraissaient trop bas. Il est évident qu'il va fal- loir les hausser de façon appréciable, l'an prochain. On a utilisé des crédits qui ont été trouvés finalement, une somme d'environ $175 millions pour l'ensemble des ministères. La part qui est revenue au ministère des Affaires sociales a été utilisée pour des champs qui nous paraissaient prioritaires. On en voit un exemple dans ce programme-ci, les garderies, où on a réservé une somme de $2 millions. Mais si on veut dire que les taux sont insuffisants, quant aux familles d'accueil, je suis parfaitement d'accord avec le député de Saint-Laurent.

Maintenant la conciliation des chiffres. Le premier facteur dont on doit tenir compte c'est la contribution des parents qui a été aussi elle-même indexée et qui est soustraite des revenus, ce qui explique une partie de la différence.

M. Forget: De quelle différence parle-t-on?

M. Lazure: Vous parlez de la différence entre les $42 millions de cette année par rapport aux $41 millions de l'an dernier?

M. Forget: À ce point de vue, oui, d'accord. Il ne semble pas y avoir d'accroissement proportionnel à l'accroissement des tarifs.

M. Lazure: Et une partie de cela s'explique par ce facteur.

M. Forget: Est-ce qu'on pourrait élaborer? J'essaie de suivre, mais je ne suis pas sûr de comprendre. Dans le fond, il y a deux choses, les familles d'accueil reçoivent un paiement des deux sources. Elles reçoivent un paiement, dans le fond, d'une seule source, soit du centre de services sociaux, mais le centre de services sociaux, à son tour, reçoit le paiement, d'une part, du ministère et, d'autre part, des parents eux-mêmes.

Si la somme que le centre de services sociaux doit verser aux parents s'accroît de 7% ou de 8%, comme les barèmes publiés le révèlent, pour que la proportion entre la contribution des parents et la contribution gouvernementale ne soit pas modifiée, il faudrait aussi que la contribution gouvernementale s'accroisse de 7%. Si la contribution gouvernementale s'accroît de moins de 7% ou 8%, cela veut dire que non seulement la contribution des parents a été indexée, mais qu'elle a été indexée plus que n'ont été indexées les sommes reçues par les familles d'accueil elles-mêmes.

Donc, cette année, les familles d'accueil sont financées plus par les familles naturelles, les parents naturels que c'était le cas dans le passé. Cela n'était pas apparent quand on lisait les communiqués du ministère. Ce sont des hypothèses assez vraisemblables puisque les crédits totaux ne croissent pas.

M. Lazure: Sur la croissance des crédits, je voudrais rectifier quelque chose. Dans les crédits de 1976/77, on avait inclus des montants par erreur pour les conventions collectives. On a fait une correction, une imputation par la suite; c'est ce

qui explique qu'on n'a pas de phénomène de croissance, mais...

M. Forget: Vous avez des dépenses probables qui sont inférieures, donc, des dépenses totales prévues, à ce moment-ci, parce que les comptes publics ne sont pas sortis...

M. Lazure: C'est cela.

M. Forget: ...qui sont largement inférieures à $41,6 millions.

M. Lazure: Oui, il y avait à peu près $3 millions de crédits qui avaient été imputés à cet élément de programme et qui, en définitive...

M. Forget: Qui ont été périmés à la fin de l'année.

M. Lazure: Ils n'ont pas été nécessairement périmés, ils ont peut-être été transférés au programme 2, par exemple, ou à d'autres programmes.

M. Forget: Je vois. Donc, il n'y a pas de problème de comptabilité, c'est simplement une illusion d'optique.

M. Lazure: C'est une illusion d'optique. M. Forget: Bon.

M. Lazure: Si on enlève cela, évidemment, il y a effectivement croissance des coûts.

M. Forget: Bon. Il y a une croissance des coûts pour le ministère. On peut présumer que la croissance des coûts, pour ce programme, est égale à l'accroissement moyen des taux payés aux familles d'accueil, ou s'il y a eu une augmentation plus que proportionnelle de la part des parents?

M. Lazure: L'augmentation pour les parents est à peu près de même nature, elle est proportionnelle. Il n'y a pas eu de prévision d'augmentation de clientèle non plus.

M. Forget: Je vois. C'est le premier écart, je pense que c'est très clair, je vous remercie. La deuxième question — dans le fond, c'était la première que j'avais posée, mais il fallait peut-être clarifier celle-là en premier — est: Comment se fait-il qu'on ait utilisé une majoration de 7% et 8% dans ce programme alors que, selon mon expérience, il est coutumier d'utiliser l'indice des rentes pour toutes les indexations? Il me semble que c'est la première fois qu'on utilise moins que l'indice des rentes.

M. Lazure: Sur la façon dont l'augmentation est établie, évidemment je n'ai pas le détail ici du calcul. Je vais en prendre note pour la prochaine séance.

M. Forget: Enfin, ce n'est sûrement pas une raison technique; on n'a certainement pas oublié qu'il y avait un indice des rentes. On est parti du montant disponible, puis on a essayé de déterminer combien on pouvait accorder aux familles d'accueil à partir de cela; peut-être?

M. Lazure: Je ne comprends pas pourquoi c'est comme cela. Je vais vérifier et on pourra peut-être même vous le dire d'ici à la fin de la séance, parce qu'à ma connaissance c'est censé être le même indice qu'on utilise pour nous autres.

M. Forget: Alors, si on passe la deuxième composante de l'élément 1, qui est constituée par les paiements aux garderies, plutôt que de regarder les crédits parce qu'on vient de se rendre compte que les crédits, évidemment, c'est une indication, mais pas nécessairement la plus fiable, est-ce que vous pourriez nous donner le montant, sujet à vérification par le Vérificateur général, des dépenses réelles effectuées en 1976/77 au titre des garderies?

M. Lazure: On a des chiffres. Est-ce qu'on n'a pas distribué le document?

M. Forget: II y en a un juste devant moi.

M. Lazure: Bon, on est en train de faire faire les copies; vous allez l'avoir tantôt. En 1976/77, on a accordé 54 subventions d'aménagement, pour un total de $145 000, puis 64 subventions d'équipement, pour un total de $254 000 et un grand total de $400 000, soit le budget qui avait été alloué.

M. Forget: Pour les subventions d'aménagement?

M. Lazure: C'est cela. Pour l'aide financière aux familles, la somme totale accordée a été de $3 580 000, sur un budget prévu de $4,2 millions. Alors, environ 2500 familles ayant 3000 enfants en garderie ont profité de ce programme d'aide financière.

M. Forget: À quoi peut-on attribuer l'écart entre les crédits alloués et la somme dépensée? Est-ce qu'on a une analyse de cela?

M. Lazure: Oui, on a fait une analyse; il y a eu divers facteurs. Il y a eu les délais à obtenir, par exemple, les permis d'exploitation. Pour exploiter une garderie, on exige un permis du ministère qui exige en contrepartie un permis du ministère du Travail et souvent des municipalités, ce qui entraîne souvent des délais dans la mise en marche et dans l'opérationnalisation des garderies.

Il y a aussi un phénomène par lequel les personnes qui ont un revenu sur la marge ou la limite pour bénéficier d'une subvention souvent n'y font pas appel si le montant est minime ou représente moins de 25%. Les derniers 25%, les gens ne les réclament pas.

Il y a un facteur de nombre d'enfants, de mise en place de garderies, des gens qui ne réclament pas, et il y a eu le phénomène, aussi, au début de

l'année, de la disparition d'un certain nombre de garderies qui ont été remplacées par des garderies sans but lucratif, mais avec ce délai. La croissance des garderies s'est accélérée de façon significative. On a accéléré les processus au niveau du ministère, et aussi, la mécanique est mieux connue des gens qui sont intéressés à mettre en place des garderies. On peut voir, par les projets en cours ou en discussion, que la machine est lancée, à toutes fins pratiques.

M. Forget: Ce qui me frappe, dans les réponses qui me sont données là-dessus, c'est qu'on cite plusieurs raisons: les délais dans l'approbation, les problèmes de fermeture et d'ouverture etc., mais on n'a pas cité les problèmes de limitation dus aux critères d'attribution comme tels.

M. Lazure: J'allais y venir. À mon avis, l'échelle n'était pas assez longue. C'est un document public maintenant. Dans les nouvelles règles du jeu qui viennent tout juste d'être publiées et qui seront en vigueur le 15 juin, je crois, oui, c'est cela le 15 juin, d'une part l'aide financière aux familles est augmentée de $2 par jour, ce qui porte l'aide de $6 à $8 plus le $1 que chaque parent paie obligatoirement.

Ce qui est pertinent ici à la discussion, c'est que le niveau de revenu à partir duquel le montant d'aide financière commence à diminuer est augmenté de 20%, donc on allonge l'échelle. Dans l'ancienne échelle, deux parents recevant le salaire minimum seulement n'avaient pas droit aux subventions accordées aux parents. C'est dans ce sens que l'échelle était trop courte. Alors nous l'allongeons et, de cette façon, on va rejoindre un plus grand nombre de personnes.

Je pense que c'était un défaut important de l'ancienne échelle. C'est une des raisons pour lesquelles tous les crédits n'ont pas été touchés par les bénéficiaires.

M. Forget: Sauf que les crédits étaient basés sur un calcul de la clientèle possible, étant donné les critères.

M. Lazure: Oui, mais dans un domaine aussi nouveau que celui des garderies quasi publiques, je pense que c'est assez normal qu'il y ait un écart entre la prévision et la dépense réelle. L'écart est d'environ $600 000.

M. Forget: À quelle date les critères antérieurs avaient-ils été rendus effectifs? De mémoire je ne peux pas me souvenir.

M. Lazure: Environ un an et demi.

M. Forget: Environ 18 mois. Il me semble que c'était en juin 1975. il me semble que c'était l'ordre de grandeur. Ils n'avaient pas été changés durant 1976.

M. Lazure: Non. Les nouveaux commencent le 6 juin. Il y a une correction parce que j'avais dit le 15 tantôt. C'est le 6 juin.

M. Forget: Le 6 juin. Ce qui veut dire qu'on fait un ajustement après une période de deux ans. Fait-on un ajustement d'environ 20% à la hausse dans les critères de revenus?

M. Lazure: Oui, dans les critères de revenus. On augmente le montant versé aux familles de $2.

M. Forget: Je vois. Au niveau de l'admissibilité, une des choses qu'on peut dire sans être très loin de la vérité, c'est que cet ajustement de 20% à la hausse sur une période de 24 mois, étant donné l'inflation que nous avons connue, est essentiellement une indexation qui replace le programme au point de vue de l'admissibilité dans une situation où il se trouvait en juin 1975, au point de vue du pourcentage des familles au Québec qui y ont accès. C'est à peu près de l'ordre de 12%, l'augmentation des salaires par année. C'est peut-être un peu supérieur à 20% comme augmentation cumulative sur deux ans.

Pour ce qui est de l'augmentation de $2, c'est un peu supérieur. Pour ceux qui sont déjà ou qui étaient déjà admissibles il y a deux ans, ils continuent de l'être, mais ils bénéficient d'une aide accrue. C'est probablement le sens qu'il faudrait donner à ces modifications.

M. Lazure: II y a aussi des augmentations dans les frais d'aménagement.

M. Forget: Quel était le montant moyen de la subvention d'aménagement? Cela pourrait se calculer rapidement si on avait une calculatrice. 54 subventions pour $145 000, ce qui me donne grosso modo à peu près $2700 en moyenne par subvention d'aménagement. Quel était le maximum permis pour les subventions d'aménagement?

M. Lazure: C'était $3000.

M. Lazure: Et l'équipement $5000, pour un total de $8000. C'est ce total qui passe à $12 000 le 6 juin.

M. Forget: La raison pour laquelle je fais cette remarque, c'est qu'il ne semble pas à première vue, étant donné que la moyenne se situe à quelques centaines de dollars en dessous des maximums permis, que le plafond ait été très contraignant pour un grand nombre de garderies.

M. Lazure: Si la capacité était inférieure au chiffre 30, elles n'avaient pas droit au maximum d'allocation.

M. Forget: Elles y auront droit maintenant, quelle que soit la capacité?

M. Lazure: La capacité a toujours été un facteur déterminant vers le bas mais pas vers le haut. Lorsqu'on a indexé, c'était vers le haut. Maintenant, au lieu de bloquer à 30 comme étant la limite à partir de laquelle la subvention est la même pour tout le monde, on l'a portée à 65.

M. Forget: La subvention est d'autant plus grande que la capacité est grande.

M. Lazure: Oui, jusqu'à un maximum de 65 places où cela plafonne.

M. Forget: Par exemple, une garderie qui a une capacité de 25 n'est toujours pas admissible pour une subvention d'équipement.

M. Lazure: C'est 25/30 de la subvention.

M. Forget: Et la même chose, les 30/60, si c'est 30 par rapport au maximum de 60.

M. Lazure: C'est-à-dire qu'à 30 places, on reste avec la même subvention.

M. Forget: Le même maximum possible de 30 places est acquis.

M. Lazure: C'est cela. À mesure qu'on augmente cette capacité par tranche de cinq places, on ajoute un montant qui varie selon qu'on parle d'aménagement ou d'équipement.

M. Forget: Bon.

M. Lazure: II faudrait peut-être noter comme élément nouveau dans le programme d'aide aux garderies, dans le but d'intégrer les enfants handicapés — on parlait un peu de l'enfance inadaptée ce matin — d'âge préscolaire, qu'on accorde, pour chaque place autorisée au permis, $250 par année si la garderie inclut 10% à 15% d'enfants handicapés. Si elle inclut jusqu'à 25% de handicapés, on accorde $500 par place autorisée au permis. En d'autres termes, si vous avez une garderie de 40 sujets, 25%, cela ferait 10 sujets, et pour ces 10 sujets handicapés, vous auriez droit à $500 multipliés par 40 pour permettre d'engager du personne) additionnel.

M. Forget: Je constate que le mécanisme de financement est sujet à certaines modifications. D'ailleurs, ce ne sont pas les premières, il y en a eu à deux ou trois reprises, je pense. Le mécanisme fondamental de financement via les parents plutôt qu'un financement institutionnel est conservé par le ministre. Est-ce qu'il voit cela comme une mesure transitoire ou comme pour l'avenir prévisible, le mécanisme qu'il retient?

M. Lazure: Non, c'est temporaire, c'est transitoire. Le temps ne nous permettait pas d'arrêter vraiment une politique globale, si on peut dire, de la petite enfance, de zéro à six ans. Nous mettons sur pied un comité interministériel de l'Éducation, des Affaires sociales et du Conseil du statut de la femme, avec un mandat de nous produire pour l'automne prochain une politique, si vous voulez, de cette clientèle de zéro à six ans. Cela va inclure un mode de financement d'un réseau de garderies. Pour nous, c'est une amélioration assez importante du mode de financement qui existait, mais ce mode de financement en tout cas pour moi, n'est pas satisfaisant, à moyen terme ou à long terme. Il faut penser à un autre.

M. Forget: II n'est pas satisfaisant à quel égard?

M. Lazure: II est difficile de compréhension de la part du public d'abord, surtout dans les quartiers défavorisés. Je pense que dans un futur mode de financement, il devrait y avoir une somme, qu'il resterait à déterminer, par place — est-ce que ce serait $1, $2, $3? — qui irait directement à la garderie pour assurer une stabilité financière surtout aux nouvelles garderies, et surtout en regard des fluctuations qu'on retrouve à certaines saisons ou à certaines périodes de l'année.

M. Forget: Je voudrais demander au ministre comment il voit la coordination d'un régime d'aide pour la garde des enfants avec les mesures de sécurité de revenu. Est-ce qu'il y voit un problème ou si, à son avis, ce sont des choses qui doivent être considérées dans des comportements assez distincts?

M. Lazure: À première vue, je les considérerais distincts. Cela se rejoint sûrement à un moment, mais je pense qu'on va attendre l'étude de ce comité interministériel, l'automne prochain, et qu'on va lui demander de tenir compte de cet élément du revenu annuel garanti hypothétique.

M. Forget: Le problème qui se pose, c'est le suivant. Vous avez des familles qui ont le même revenu. Dans le cas où ce revenu est produit par un seul des deux conjoints, les règles actuelles d'admissibilité en garderie et la limitation quant au nombre de places peuvent rendre impossible l'accès à une garderie, certainement le financement public. Une autre famille qui a le même revenu où les deux conjoints travaillent va, évidemment, à ce moment, bénéficier, sous forme de subvention pour la garderie, d'une subvention totale qui va probablement très rapidement dépasser le montant total payé en impôts par ce ménage. Il y a un problème de redistribution assez considérable.

D'autre part, certains ménages à différents niveaux de revenus, dans certains cas, ne feront pas usage des garderies et vont s'occuper de leurs enfants d'une autre façon, alors que des ménages avec un revenu qui peut être le double, mais bénéficiant d'un régime de garderie, vont retirer un avantage monétaire direct qui, en somme, fait une redistribution en faveur, par exemple, de ménages à revenus modestes qui se trouvent à ne pas utiliser la garderie et en faveur de ménages à revenus élevés où les deux conjoints travaillent et utilisent la garderie. Ce genre de problème d'équité verticale et horizontale est probablement ce qu'il y a de plus difficile à faire comprendre aux gens qui n'utilisent pas la garderie en premier lieu, parce qu'ils se disent: Comment expliquer ce phénomène, étant donné surtout l'absence d'unanimité

dans la population quant au caractère désirable ou non du recours à la garderie pendant le jeune âge des enfants. Parce qu'il y a des éléments économiques qui, évidemment, dictent l'appartenance au marché du travail pour les deux conjoints, mais il y a aussi des échelles de valeurs, des priorités que les gens placent dans l'organisation de leur existence. Étant donné que l'opinion est très divisée là-dessus, les problèmes d'équité prennent un relief très particulier. Les gens sont spontanément amenés à se poser ces questions. C'est la raison pour laquelle je le soulève et je crois que le grand problème de la garderie, ce n'est pas le principe, évidemment, ni l'idée de favoriser la participation au marché du travail pour les deux conjoints, mais ces problèmes d'équité horizontale et verticale qui sont presque insolubles en dehors d'un régime de sécurité du revenu beaucoup plus cohérent et étendu que celui que nous connaissons dans le moment. Enfin, ce n'est qu'une observation, en passant, M. le Président.

M. Lazure: Je pense qu'elle est pertinente, l'observation. J'ajouterais, cependant, que quand on va écrire le mandat pour ce comité interministériel, il est bien clair qu'il ne s'agit pas simplement d'un mandat sur les garderies, c'est sur toutes les formes de soins de garde. Cela peut inclure aussi la garde d'un enfant entre zéro et six ans à un domicile chez une famille du voisinage, pas nécessairement dans une garderie de 30 enfants. Il y a diverses modalités qu'il faudrait étudier.

M. Forget: Ces remarques que le ministre a faites, ce matin, relativement aux foyers de groupes — auxquels on pourra revenir dans deux minutes, peut-être — relativement à une tendance à la professionnalisation excessive, sont également appropriées dans le contexte.

M. Lazure: Absolument, oui.

M. Forget: On veut très souvent, dans certains milieux, en faire des établissements d'éducation préscolaire...

M. Lazure: Exactement.

M. Forget: ...ce qui tend à pousser les coûts au-delà de $10 par jour par enfant, ce qui, évidemment quand on a un million d'enfants d'âge scolaire, et peut-être quelques centaines de milliers en bas de six ans, devient une gageure impossible à tenir.

Toujours sur l'élément 1 — et ce sera ma dernière question là-dessus — on a parlé, ce matin, des foyers de groupes comme alternative à l'institutionnalisation. Il y a évidemment une autre façon de considérer le foyer de groupes, c'est comme alternative à la famille d'accueil. On sait que, depuis quelques années, le recrutement des familles d'accueil est très difficile, particulièrement pour les enfants de 14 ans et plus, et particulièrement pour ceux qui ont un passé un peu chargé, même sans en faire des êtres déviant complètement, malgré tout, ceux qui ont eu quelques séjours successifs soit en établissement, soit dans des familles d'accueil, qui ont parfois été des échecs, pour toutes sortes de raisons. L'enfant n'est pas souvent à blâmer, mais il reste que ce sont des échecs et on se retrouve devant des situations où il est très difficile de recruter des familles d'accueil.

Il avait été question, au cours de l'année dernière, d'encourager l'utilisation de foyers de groupes non pas à même les crédits des institutions, le crédit 8, mais des foyers d'hébergement, dans le fond, pas des foyers de groupes de réadaptation, des foyers de groupes d'hébergement — je me corrige — à même les crédits des familles d'accueil, à cause précisément de la grande difficulté qu'ont certains centres de services sociaux de recruter les familles d'accueil pour cette clientèle, des adolescents, des "tough" ou ceux qui sont perçus comme tels dans leur collectivité. Je me demande si cela a pu démarrer avec le Centre de services sociaux du Montréal métropolitain en particulier?

M. Lazure: En fait, on a été relativement prudent vis-à-vis de ce projet. On l'a fait sur une base de projet pilote avec le Centre de services sociaux du Montréal métropolitain et avec celui de Québec où on a autorisé la mise en place — je pense que c'est trois ou quatre à Montréal, deux ou trois à Québec — de foyers de groupes pour jeunes adultes, mésadaptés sociaux ou autres, pour répondre à des besoins pressants des centres de services sociaux, soit comme attente ou soit comme solution définitive. Ces expériences sont en cours et doivent être réévaluées en cours d'année.

M. Forget: Vous n'avez pas d'impressions préliminaires, si ce sont des succès, de la part des centres de services sociaux?

M. Lazure: Les centres de services sociaux sont très heureux de cette expérience, à ce jour, à ma connaissance. Ils semblent très satisfaits. Il n'y a pas eu d'évaluation du ministère ou d'évaluation externe de la chose.

M. Forget: La fameuse question des enfants ping-pong, dont on se souvient, était basée sur une tentative peut-être un peu maladroite des centres de services sociaux d'utiliser la famille d'accueil ou quelque chose d'équivalent pour régler les problèmes qui ne pouvaient pas l'être dans ce cadre, effectivement. Je suis heureux d'apprendre qu'il y a eu ces expériences pilotes. C'est probablement la seule réponse, qu'on connaît dans le moment, qui peut apporter une solution de cette question.

M. Lazure: Pour ce qui est des taux des familles d'accueil, votre question préalable, c'est bien 8,2% qui ont été appliqués, arrondis au plus proche chiffre. Maintenant, j'ai l'arrêté en conseil; je ne sais pas si les chiffres que vous avez correspondent à l'arrêté en conseil.

M. Forget: Au taux par jour?

M. Lazure: Oui.

M. Forget: Est-ce que, pour de 0 à 4 ans, c'est bien $3.60?

M. Lazure: Oui.

M. Forget: Et $4.10 pour de 5 à 11 ans?

M. Lazure: Oui.

M. Forget: Dans le cas du premier, c'était $3.35, antérieurement, ce qui fait $0.25 d'accroissement, divisé par $3.35. Cela devrait être $3.72.

M. Lazure: Cela ferait $3.62, cela a été arrondi, oui.

M. Forget: Oui, en tout cas.

M. Lazure: Cela fait $3.62, on l'a calculé tout à l'heure à 8,2%. C'est le chiffre de 8% qui a été appliqué.

M. Forget: J'avais un tableau, ici, avec des pourcentages différents. Je n'ai pas pris sur moi de refaire les calculs.

M. Lazure: On ne les a pas tous recalculés non plus. On va vérifier. Peut-être qu'il serait bon... Ce sont les mêmes chiffres que vous avez: $5.35, $5.80...

M. Forget: $5.05, $4.10 et $3.60.

M. Lazure: On va les recalculer, juste pour être sûr.

M. Forget: Moi, j'avais 7% pour les deux premiers groupes d'âge et 8% pour les autres. Et 7% pour l'allocation de $2.20 par jour pour les cas spéciaux. Maintenant, j'avoue ne pas avoir recalculé les pourcentages. Je me suis fié à la source où je les ai trouvés et ce sont des pourcentages inférieurs à 8,2%.

M. Lazure: La décision politique en était une de 8,2%, en tout cas.

M. Forget: Le ministre sera en mesure de vérifier qu'entre la volonté politique et l'exécution il y a parfois des erreurs et des...

M. Lazure: II peut y avoir des décimales d'écart, oui.

M. Forget: ...décimales d'écart, oui. Quand ce ne sont que des décimales d'écart, on peut quand même se montrer satisfait.

M. Lazure: Personne n'avait pour objectif de diminuer leur indexation. Il y a peut-être eu une erreur, on va vérifier.

M. Forget: Pour l'élément 1, la protection de l'enfance, on a parlé des foyers nourriciers et des garderies. Je crois que ce sont les deux composantes de ces crédits. Je n'ai pas d'autres questions sur l'élément 1.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: J'aurais seulement une question qui se rapporte aux sommes dépensées par ceux qui n'ont pas accès aux garderies. Le ministre va-t-il faire des pressions auprès de son collègue du ministère des Finances pour aider ces gens?

M. Lazure: Ceux dont les revenus sont trop élevés pour qu'ils soient admissibles aux subventions?

M. Shaw: Non, non, ceux qui n'ont pas de garderie disponible chez eux.

M. Lazure: Ah! Dans la nouvelle politique, il y a des subventions de démarrage pour les garderies, des subventions spéciales. On a parlé, tout à l'heure, des subventions pour l'équipement et l'aménagement qui sont de $12 000, mais il y aura aussi un certain nombre de subventions de $6000 par année. Combien, M. Angers?

Pour les garderies en milieu défavorisé, il est difficile de citer un chiffre, mais il y a environ une dizaine de garderies en milieu défavorisé pour lesquelles on a prévu un montant de $60 000 environ, à raison de $6000 chacune pour le démarrage. Mais en plus de ces garderies en milieu défavorisé, il est bien entendu qu'on poursuit l'implantation de garderies dans les autres villes, dans les autres quartiers. On prévoit que pour l'année le chiffre qu'on va atteindre serait d'environ 45 à 50 garderies nouvelles qui vont s'ouvrir. C'est peut-être le sens de votre question?

M. Shaw: Un deuxième sens. Est-ce que le ministère donne des directives dans certains endroits où il n'y a pas de gens qui peuvent répondre à ce besoin?

M. Lazure: On fait une incitation aux établissements du réseau, certainement du réseau des Affaires sociales, et on demande aux autres ministères de faire la même chose, pour faciliter la mise sur pied de garderies en milieu de travail, là où cela n'existe pas, en louant à un prix nominal des locaux. Cela peut être dans un hôpital, dans un centre d'accueil, et on espère que les autres ministères, en particulier le ministère de l'Éducation, le feront pour des locaux qui seraient libres actuellement.

M. Shaw: Est-ce que vous pensez dans le même sens appliquer ce module dans les industries aussi?

M. Lazure: Oui, on n'a pas encore commencé les démarches, mais il est certain qu'on va inciter les entreprises privées de la même façon, et les subventions d'aménagement seront disponibles

de la même façon que pour des entreprises du secteur parapublic ou public.

M. Shaw: Est-ce que vous voyez une augmentation du nombre, un accroissement du nombre de parents qui cherchent des garderies pour les enfants? Est-ce que vous avez des pressions de la population?

M. Lazure: Oui, le directeur du service peut en parler. M. Angers.

En fait, à chaque jour pratiquement on examine de nouveaux projets qui résultent souvent d'une demande de la population locale. C'est d'abord la population qui ressent son besoin de services de garde et qui prend sur elle-même de l'organiser. Les garderies ne sont pas des garderies établies par le ministère, mais elles répondent à un besoin qu'une collectivité ressent et auquel on veut apporter une solution. Il ne faut pas non plus penser qu'on est tout à fait dépourvu en ressources. Bien sûr, à mesure qu'on rend la garderie plus facile d'accès du point de vue financier, on accroît la demande pour le nombre de places dont on aurait besoin, mais je pense qu'à l'heure actuelle on a quand même un embryon de réseau qui est passablement ramifié, qui s'étend dans toutes les villes d'importance à peu d'exceptions près. J'entends, par villes d'importance, les villes qui ont plus de 10 000 habitants, parce qu'en deçà de 10000 il est assez difficile d'assurer la survie de la garderie. Je ne crois pas non plus qu'il faille exagérer la demande et penser que, compte tenu du coût que représente la garde, quand même, pour les familles qui ne sont pas éligibles à l'aide du ministère, on est entièrement dépourvu ou qu'on ne parvient pas à répondre raisonnablement aux besoins.

Je ne dis pas que dans certains quartiers ou dans certains endroits on ne puisse pas trouver facilement une garderie, mais il reste que je pense qu'il y a quand même un point de départ.

Au 31 mars 1977, on a 11 030 places de garderie distribuées dans 258 garderies. Vous l'avez sur votre tableau. Il est à noter que 4000 de ces 11 000 places sont dans les garderies à but lucratif; donc, 7000 à but non lucratif. Durant l'année qui vient de finir, on a reçu 166 projets de garderies; 44 ont reçu leur permis et 80 sont encore à l'étude, mais 32 ont été acceptés en principe.

Il y a une arrivée assez impressionnante de demandes, mais on espère que cela va augmenter, parce qu'au fond 11 000 places, c'est à peu près 10% du nombre d'enfants dont la mère est au travail.

M. Shaw: Sur la question des maternelles, le ministère a changé la politique des maternelles l'année passée et cela a été changé après encore une fois. Est-ce que vous prévoyez un autre changement de la politique des maternelles?

M. Lazure: C'est un des points épineux où on espère que le comité interministériel Éducation, Affaires sociales et Conseil du statut de la femme va trouver une solution permanente. On va de so- lution temporaire en solution temporaire. Le ministère des Affaires sociales conserve un droit de délivrance de permis pour ces institutions; on ne leur donne pas d'argent.

M. Shaw: II n'y a pas de coûts pour le gouvernement.

M. Lazure: On n'a pas prévu de coûts. Ce n'est pas financé d'ailleurs. C'est la tradition de ne pas les financer. Ce sont les prématernelles qui, d'après nous, devraient relever du ministère de l'Éducation. Devant les difficultés de faire accepter à court terme cette responsabilité au ministère de l'Éducation qui n'est pas jusqu'à maintenant impliqué, le ministère, comme vous le dites, a changé sa façon de voir et a décidé de maintenir le statu quo tant que le comité interministériel n'aurait pas statué.

Tout ce que nous faisons, c'est émettre un permis pour assurer la protection des enfants. On pourrait souhaiter que le ministère de l'Éducation accorde autant d'intérêt à la population préscolaire qu'il en accorde depuis quelques années à la population collégiale ou universitaire. Il y a une disproportion entre l'intérêt très restreint vis-à-vis de la population préscolaire.

M. Shaw: Est-ce que vous prévoyez, si cette responsabilité est assumée par le ministère de l'Éducation, que l'implication des coûts va peut-être causer un gros changement dans la politique des maternelles maintenant? Nous avons un surplus d'enseignants. Ceux qui s'occupent des maternelles ont une formation spéciale. Ils ont un peu peur s'il y a des pressions vers le ministère de l'Éducation, de perdre leur place dans ces maternelles.

M. Lazure: Je ne le sais vraiment pas. On ne peut pas présumer des recommandations de ce comité interministériel.

M. Shaw: Presque toutes les autres provinces qui s'occupent des maternelles le font par le ministère des Affaires sociales pour presque la même raison.

M. Lazure: II reste qu'au Québec il y a tout un programme de prématernelle qui est intégré aux activités du ministère de l'Éducation dans les milieux défavorisés. C'est là qu'on retrouve la difficulté.

C'est important que la discussion se fasse avec le ministère de l'Éducation pour déterminer qui est responsable. Ce sont des prématernelles pour enfants de quatre ou cinq ans et même trois ans en milieu défavorisé. C'est un programme du ministère de l'Éducation, II faut absolument assurer la cohérence entre les deux programmes et les programmes de garderies. Malgré tout, nos programmes de garderies ont des objectifs différents de ceux des prématernelles.

M. Shaw: Est-ce que cela peut marcher à l'avantage de ces maternelles qui sont déjà en

place et qui ne sont pas un coût du gouvernement?

M. Lazure: Je n'ai pas de réponse. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, nous avons décidé de maintenir tout simplement l'émission de permis. C'est autant à leur demande qu'à notre demande. Quand le comité interministériel fera son rapport, on pourra en discuter à nouveau.

Nous pensons que ces prématernelles sont valables. C'est pour cela qu'on a demandé l'extension du permis. C'est pour cela qu'on a accepté de couvrir, avec notre juridiction, leur existence. On pense que c'est valable. Je ne dis pas que cela doit nécessairement être assumé par l'Éducation. Ce n'est pas cela.

M. Shaw: C'est tout pour moi.

Le Président (M. Marcoux): Programme 9, élément 1 adopté? Adopté. Élément 2.

Hébergement des adultes et des personnes âgées

M. Forget: M. le Président, dans les crédits pour l'année en cours, il y a une somme de $5 millions qui est prévue pour l'ouverture de 1600 lits d'hébergement. J'imagine qu'il s'agit du résultat de l'impact sur les dépenses de fonctionnement, de l'exécution des premières phases, de la dernière année du programme triennal de 1973/76 et de la première phase du programme quinquennal de 1976/81 dans le domaine des centres d'hébergement. Serait-il possible d'avoir une ventilation, par centre d'accueil, de cette somme additionnelle de $5 millions pour les 1600 lits nouveaux?

M. Lazure: II s'agit d'un nombre maximum, 1600 lits pour une somme de $5 043 000. Il y a une série de nouveaux centres d'accueil qui doivent ouvrir, au cours de l'année financière. Cela totalise 938 lits. Il y a ensuite une deuxième série, 119 lits qui sont des lits ajoutés à des centres existants. Le troisième groupe, c'est l'intégration de ressources privées existantes qui s'intègrent au réseau public. Ceci nous donne un total de 1385 lits. Le reste de l'argent, à l'intérieur de ces $5 millions, sera utilisé pour embaucher plus de personnel dans les centres d'accueil existants parce qu'on leur demande de plus en plus de prendre des cas lourds, A-3, A-4, des cas difficiles. Je n'ai pas d'objection à distribuer ce tableau.

Il peut y avoir, je pense, le nombre de lits et la date d'ouverture qui est indiquée à côté de chaque centre d'accueil nouveau, cela reste sujet, évidemment, à certaines modifications mineures selon les travaux des entrepreneurs ou des professionnels.

M. Forget: Est-ce que cela est en termes annualisés, ces crédits?

M. Lazure: Non. On m'a dit que ce sont $7 millions annualisés.

M. Forget: II y a des choses que je ne m'explique pas dans l'évolution extrêmement rapide à la baisse des prévisions de développement dans ce secteur. Comme le ministre a tantôt fait allusion aux prévisions du gouvernement précédent quant au budget 1977/78, ce que je n'avais pas fait jusqu'à maintenant, mais comme il a lui-même fait allusion à ces projets, je pense qu'il n'a pas d'objections à ce qu'on en parle.

Effectivement, en septembre dernier, le gouvernement précédent, sur la base des estimations faites par le ministère à l'époque, prévoyait avoir besoin pour l'exercice 1977/78 d'une somme, pour l'hébergement toujours — pour la réadaptation, on n'en a pas parlé mais on prévoyait aussi $5 millions, et on a vu ce matin qu'il n'y aurait rien du tout — mais pour l'hébergement on prévoyait avoir besoin de $13 650 000.

M. Lazure: Vous aviez prévu un tas de choses mais vous ne nous avez rien laissé dans les caisses, c'est le problème.

M. Forget: Sauf le surplus de l'assurance-maladie que vous avez transmis à votre collègue des Finances. Évidemment, avec cela, vous auriez pu faire fonctionner les centres d'hébergement.

M. Lazure: Vous aviez commencé à vous en servir.

M. Forget: Bien non! Ce sont les crédits de cette année.

M. Lazure: La Caisse de dépôt, par exemple. L'argent de la régie à la Caisse de dépôt, cela fait quelques années que ça dure.

M. Forget: On n'a pas pu se servir des sommes que vous utilisez cette année. À moins d'être un magicien, vous ne pouvez certainement pas utiliser deux fois les mêmes sommes. Il reste qu'il y avait $13 650 000 et même une liste de projets. J'aimerais avoir la liste des projets qui sont désormais envisagés avec ces crédits réduits de manière à voir où le ministre a établi des coupures.

M. Lazure: Elle s'en vient la liste. Je dois dire, aussi, que le ministre n'a pas pu réaliser beaucoup des coupures dans ce domaine parce que c'est le processus budgétaire normal qui s'est poursuivi, à toutes fins pratiques.

M. Forget: II comporte, comme on sait, des coupures. Il consiste à couper les estimations initiales.

M. Lazure: Cela a été surtout réalisé en fonction de deux facteurs, la réalisation ou le stade de réalisation des projets en cours où il y a souvent des retards, des projets qui devaient démarrer, mais qui n'ont pas démarré. Je veux dire que les sommes finales accordées par le Conseil du trésor l'ont été sur une base de ce qui semblait réaliste, compte tenu de l'état de réalisation des travaux.

Deuxièmement, il y a encore dans nos alloca-

tions des ressources, actuellement, un certain nombre de lits qui seront prêts à ouvrir en fin d'année financière et qui seront retardés pour faire face à la pression de l'alourdissement de la clientèle qui est très sérieux dans plusieurs centres d'accueil. Des projets n'ont été modifiés ou retardés d'aucune façon et il n'est pas prévu que des projets demeurent non ouverts de façon volontaire.

M. Forget: On avait prévu, en octobre 1976, l'ouverture de 2100 lits d'hébergement. Je vois qu'on prévoit maintenant l'ouverture de 1600 lits. C'est une différence de 500, et une différence de 500 pour des projets qui, nécessairement, puisqu'on les prévoyait en dedans d'un court délai, devraient déjà être commencés. Parce que si un projet n'était pas commencé en octobre 1976, il est, comme on sait, physiquement impossible qu'il commence à fonctionner avant le 1er avril 1978, qui est la limite qu'on considère dans les crédits de cette année. Évidemment, il y a bien des choses qu'on peut faire. Je n'apprends rien à personne en disant que c'est une technique budgétaire qui a été utilisée souvent, dans le passé, que de ralentir la réalisation des projets ou de différer l'ouverture des projets. Je pense qu'on pourrait utilement passer un certain temps pour identifier les cas de ralentissement ou d'ouvertures différées. Dès qu'on aura les documents comparatifs, il me fera plaisir...

M. Lazure: De quelle époque parlez-vous, pour les projets dont l'ouverture a été différée? Avant le 15 novembre 1976 ou après?

M. Forget: Je vais recommencer mon explication, M. le ministre. Il y avait 2100 lits qui étaient prévus.

M. Lazure: J'ai compris l'explication. M. Forget: Vous avez la réponse?

M. Lazure: Non, parce que vous dites... Tout le monde sait que c'est un jeu d'enfants de différer des ouvertures de projets. Je vous pose la question, à travers la présidence de la commission: Est-ce que vous faites allusion à l'époque postérieure au nouveau gouvernement?

M. Forget: Le problème ne s'est pas posé avant.

M. Lazure: C'est parce qu'on peut en parler dans les deux hypothèses, vous savez. Il y a quand même plusieurs projets dont l'ouverture a été différée sous le gouvernement antérieur.

M. Forget: C'est sûr, c'est pour cela que je vous en parle. Je sais que cela existe. Je veux que vous identifiez ceux que vous avez différés. Je ne dis pas que cela n'existe pas, je ne dis pas que d'autres ne l'ont pas fait dans le passé.

M. Lazure: Ensuite, on va identifier ceux que vous avez différés.

M. Forget: J'espère que vous n'avez pas d'objection.

M. Lazure: On en a différé pour étude plus approfondie.

M. Forget: Alors, là, vous n'avez pas compris ma question. Ceux qui ont été différés et qui ont un impact sur l'année budgétaire en cours, ce ne sont pas des projets que l'on peut étudier, parce que ces projets, comme on en prévoyait l'ouverture dans la période qui va du 1er avril 1977 au 31 mars 1978, ils n'étaient plus nécessairement à l'état de projets.

M. Lazure: J'ai bien compris ce que vous venez de dire.

M. Forget: Ils étaient à l'étape de réalisation.

M. Lazure: Je vous fais remarquer simplement que, si vous voulez...

M. Forget: Donc, on ne peut pas étudier des choses qui sont en train de se réaliser.

M. Lazure: ...aborder cette étude...

M. Forget: On ne peut que retarder leur réalisation.

M. Lazure: ...on pourra faire la contrepartie aussi.

M. Forget: Malheureusement, M. le ministre, on ne regarde pas actuellement les crédits des années antérieures, on regarde les crédits de l'année en cours. Comme vous avez fait allusion à des prévisions, je me permets de vous demander...

M. Lazure: Cela touche les crédits en cours.

M. Forget: ...les raisons qui font que les prévisions, qui envisageaient l'ouverture de 2100 lits au 1er octobre ou à la fin de septembre, sont devenues des prévisions de 1600 rendu au mois de mai, puis même plus tôt que le mois de mai, parce que ces chiffres ont été préparés, j'imagine, dans les semaines qui ont précédé leur dépôt à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire en janvier. C'est ordinairement la date où on finalise les budgets.

M. Lazure: Tout ce que je peux répondre — on pourra essayer de faire la conciliation précise, M. Forget — c'est qu'il n'y a eu aucun arrêt volontaire ou retard volontaire ou involontaire de projets qui avaient été amorcés ou de réalisation de centres d'accueil d'hébergement. Il y a deux opérations de diminution. Il y a eu une diminution des crédits accordés par rapport à ce qui avait été demandé à l'origine pour tenir compte de la réalité à ce mo-

ment. Là, il y en a une deuxième pour tenir compte de la réalité actuelle.

M. Forget: Et qui est encore inférieure à celle-ci.

M. Lazure: Qui est celle que je vous ai donnée tout à l'heure, mais qui est, en fait, un peu inférieure aux 1600. C'est rendu à 1300, à toutes fins pratiques, avec un report de 802 lits qui seront ouverts dès le début de l'année suivante.

M. Forget: Là, je vois qu'il est six heures. On vient de nous distribuer les nouveaux lits d'hébergement. Si je comprends bien le sens de ce document, ce sont les ouvertures prévues pour cette année.

M. Lazure: Si tout va bien dans les travaux.

M. Forget: Les débuts de fonctionnement, d'accord. S'il n'y a pas de grève de la construction, etc.

M. Lazure: C'est cela.

M. Forget: Alors, je vais comparer et je pense que je pourrai poser des questions plus spécifiques à la reprise de nos travaux.

M. Lazure: Excellente idée.

M. Gagnon: Est-ce qu'on va en finir de poser les mêmes questions, à un moment donné?

M. Forget: Je suggérerais aux membres de la commission qui se croient lésés dans leur droit de parole d'arriver à l'heure, de façon que la commission soit présente, et d'être présents en nombre suffisant pour qu'on ait le caucus à tout moment. À ce moment-là, tout le monde va avoir le droit de parole. Mais, comme on a été ici à attendre pendant une demi-heure que se présentent suffisamment de députés ministériels pour pouvoir commencer nos travaux, je pense que vraiment personne n'a le droit de se plaindre.

Le Président (M. Marcoux): La commission des affaires sociales ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 1 )

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