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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 12 décembre 1990 - Vol. 31 N° 48

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et de placement du Québec


Étude détaillée du projet de loi n° 112, Loi modifiant la Loi sur les assurances et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Farrah): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux ce matin. Je rappelle le mandat de la commission qui est le suivant: la commission du budget et de l'administration est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 112, Loi modifiant la Loi sur les assurances et d'autres dispositions législatives. Je dois indiquer aussi qu'on a eu le mandat d'étudier la loi 109 qu'on fera immédiatement après l'autre. Oui, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Juste pour vérifier, M. le Président, parce que je ne suis pas familier avec les procédures. Je sais, par exemple, qu'il y a un ordre de la Chambre qui détermine un certain nombre d'heures pour étudier le projet de loi. L'ordre de la Chambre nous donne de 10 heures à midi. Et si on n'a pas terminé à midi, il y aura, je présume, un autre ordre de la Chambre qui va...

Le Président (M. Farrah): Alors, il faut attendre l'autre ordre de la Chambre pour reprendre les travaux.

M. Boisclair: II faut attendre l'autre ordre de la Chambre pour reprendre les travaux.

Le Président (M. Farrah): C'est 12 h 30. M. Boisclair: C'est 12 h 30. Oui, ça va.

Le Président (M. Farrah): O. K. Alors, là, il faut attendre l'ordre du leader...

M. Boisclair: Jusqu'à 12 h 30. Et après ça, il y aura un autre...

Le Président (M. Farrah):... pour savoir les coordonnées pour reprendre les travaux par la suite.

M. Boisclair: O. K.

Le Président (M. Farrah): Ça va?

M. Boisclair: Donc, ce n'est pas limitatif.

Le Président (M. Farrah): Non.

M. Boisclair: C'est ça que je comprends.

Étude détaillée du projet de loi 112 (suite)

Loi sur les assurances (suite)

Contrôle de l'assurance privée (suite)

Placements (suite)

Le Président (M. Farrah): O. K. Si ma mémoire est fidèle, vous étiez rendu à l'article 25. L'amendement avait été adopté et nous pariions de l'article 25 globalement. Alors, M. le député de Gouin, est-ce que vous avez d'autres commentaires eu égard à l'article 25?

M. Boisclair: Oui. Je pense qu'il y a, il faut bien l'avouer, désaccord quant au fond de la question et quant à la pertinence de l'article 25. J'aimerais peut-être demander, sur une discussion que nous avions commencée...

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, je m'excuse. J'ai fait une petite faute. C'est que j'ai oublié de demander à la secrétaire d'indiquer les remplacements pour ce matin.

M. Boisclair: Ah, bien...

Le Président (M. Farrah): Alors, je m'excuse infiniment de vous interrompre.

M. Boisclair: Oui, il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Farrah): Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements pour ce matin?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Les remplacements sont les suivants: Mme Bégin (Bellechasse) par M. Lafrance (Iberville), M. Chagnon (Saint-Louis) par M. Bordeleau (Acadie), M. Lemieux (Vanier) par M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon).

Le Président (M. Farrah): C'est tout? La Secrétaire: Oui.

Le Président (M. Farrah): Alors, je vous remercie beaucoup, Mme la secrétaire. Allez-y, M. le député de Gouin. Je m'excuse encore une fois.

M. Boisclair: M. le Président, ce que j'aimerais demander à la ministre et on avait commencé à discuter hier soir aux heures tardives, vers 11 h 30, de la définition des

principales activités connexes, soit la vente ou la location d'immeubles, la participation à un portefeuille de placements, prêt et placement, l'affacturage, le crédit-bail, l'offre de services informatiques, d'actuaire-conseil ou d'assistance-voyage ou toute autre activité principale déterminée par règlements. Ce que je voulais demander à la ministre, c'est: En fonction de quels critères quel genre de consultations... Est-ce qu'il y a des consultations qui ont été faites avec les gens de l'industrie sur cette définition d'activités connexes.

Mme Robic: Alors, M. le Président, je pense que juste avant d'ajourner hier soir, j'ai répondu à cette question-là en disant que nous avions examiné les activités qui pouvaient être intéressantes pour une compagnie d'assurances. Et c'est à partir de ça que nous avons mis dans notre loi un certain nombre de filiales qui pourraient faire partie de l'ensemble d'une compagnie d'assurances. C'est tout simplement ça. il y avait une liste de possibilités de filiales connexes et accessoires et on les a jugées d'après l'intérêt pour une compagnie d'assurances d'avoir une filiale dans ce domaine-là.

M. Boisclair: Ça va.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, ça va?

M. Boisclair: Je comprends alors que la liste a été élaborée par la ministre et les hauts fonctionnaires du ministère, mais que d'aucune façon les gens et les entreprises ont été consultés sur le contenu de cette liste.

Mme Robic: Consultés officiellement, je vous dirais que non, mais vous comprendrez que, constamment, que ce soit au bureau de l'Inspecteur général ou à mon bureau, on parle à ces gens-là, on regarde ce qu'ils font et on croit que cette liste-là va répondre à leurs besoins.

M. Boisclair: Je vois mal comment vous allez pouvoir répondre à leurs besoins, puisque la majorité d'entre eux s'y sont opposés.

Mme Robic: À cette liste-là? Non, je ne crois pas.

M. Boisclair: Se sont opposés au fond de l'article, que ce soit...

Mme Robic: Ahf ça, c'est un autre débat, mais vous avez raison, pour plusieurs, ils auraient voulu, surtout dans les deux mémoires que vous citez constamment, qu'on conserve les liens en aval. La décision a été que peut-être il faudrait réorganiser les liens commerciaux et nous l'avons fait en allant en amont.

M. Boisclair: Oui, mais en allant en amont, pour les mutuelles d'assurances, c'est un peu difficile. Est-ce que la ministre peut nous donner l'assurance que les mêmes arguments qui ont valu pour inclure une liste semblable à celle présentée à l'article 25 du projet de loi, limitant la possibilité pour les entreprises de faire des acquisitions en aval, ne se retrouveront pas dans une future loi ou dans fa loi qui sera bientôt à réviser, celle des caisses, qui devra être révisée en 1992?

Mme Robic: Ce n'est pas du tout le même problème qui se présente au niveau des caisses. Les caisses ont un portefeuille en amont. Elles peuvent faire des acquisitions dans des sociétés commerciales ou industrielles, ou dans des entreprises commerciales ou industrielles. La compagnie d'assurances Desjardins n'a pas de liens commerciaux en aval.

M. Boisclair. Bien, elle en a...

Mme Robic: Non. La société de portefeuille est au même niveau que la société de portefeuille qui détient la compagnie d'assurances.

M, Boisclair: Oui, c'est vrai.

Mme Robic: Pour nous, c'est une compagnie de portefeuille qui est en amont du Mouvement et non pas de la Confédération.

M. Boisclair: Je pense qu'on a fait le tour de la question de l'article 25. Je veux juste vérifier le libellé de 4° h.

Le Président (M. Farrah): Allez-y, M. le député.

Mme Robic: 4° h, oui. Là, il y a...

M. Boisclair: Dans la mesure... C'est ça là: Investir plus de 50 % de son actif dans l'ensemble des placements visés aux paragraphes c, d. 1. C'est parce que c'est difficile de... Ce sont les immeubles, ça?

Mme Robic: Regardez de l'autre côté de la page: Loi sur les assurances.

M. Boisclair: Oui.

Mme Robic: Vous avez l'article 245c.

M. Boisclair: Ah! c'est les immeubles.

Mme Robic: Investir plus de 4 % de son actif dans un seul immeuble à des fins de revenus et plus de 15 % de son actif pour l'ensemble de ses immeubles. D'accord?

M. Boisclair: Oui, ça va.

Mme Robic: Si c'est là, c'est encore une fois expressément demandé par les compagnies qui nous ont dit que 50 %, c'était beaucoup trop élevé. C'est elles-mêmes qui nous ont enjoints de réduire ça à 25 %. C'a été une demande constante dans nos consultations. (10 h 15)

M. Boisclair: "Le placement effectué contrairement au paragraphe d est nul de nullité absolue." J'aimerais ça tout simplement qu'on m'informe. Quel genre de vérifications sont faites? Est-ce que c'est dans le cadre du rapport annuel? Est-ce qu'il y a des rapports qui doivent être déposés au bureau de l'Inspecteur général? Est-ce qu'on peut. juste m'expliquer le processus pour...

Mme Robic: Oui. M. Bouchard, s'il vous plaît.

M. Bouchard (Jean-Marie): Les compagnies d'assurances doivent fournir, en plus des états financiers, ce qu'on appelle des états statutaires qui nous permettent de détailler beaucoup plus les renseignements dont nous avons besoin pour bien s'assurer du respect des lois Alors, les compagnies d'assurances doivent ventiler leur portefeuille, et ventiler non seulement le portefeuille, mais le pourcentage qu'elles détiennent. En plus, mes inspecteurs font l'inspection des compagnies d'assurances et vont vérifier dans les livres des compagnies, de telle sorte qu'il arrive parfois très souvent qu'on dise: Avec tel placement, plus tel autre placement que vous avez fait - parce qu'on oublie parfois de concilier - vous excédez la marge des 4 %, ou vous excédez le...

M. Boisclair: Ça se fait une fois par année, ça?

M. Bouchard: Les rapports? Oui, une fois par année.

M. Boisclair: Les rapports se font une fois par année.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, d'autres commentaires sur l'article 25?

M. Boisclair: Non. Là, il y a l'amendement qu'on a apporté à l'article 5. Est-ce que l'article amendé doit...

Mme Robic:...

M. Boisclair: ...va s'appliquer - oui, 25 -mais je parle au cinquièmement.

Mme Robic: Ah oui!

M. Boisclair: Sur un peu la clause grand-père qui... Je ne sais pas si on peut l'appeler comme ça parce que, dans le fond, elle va être permanente, mais...

M. Bouchard: C'est le papillon qu'on a apporté hier qui va faire état.

M. Boisclair: C'est ça. C'est le papillon qu'on a apporté hier. Est-ce que cette disposition va s'appliquer à beaucoup d'entreprises?

Mme Robic: Non, à deux, je crois, M. l'Inspecteur, si je ne me trompe pas.

M. Boisclair: Les cas qui sont?

M. Bouchard: Dans un cas donné, par exemple, j'ai une compagnie d'assurances qui a investi dans un club de hockey bien connu.

Une voix: Québec?

M. Bouchard: Enfin! Québec. Je ne peux pas dire que c'était un des placements qui me plaisait le plus, mais, enfin, c'était prévu par, justement, les fameux 4 %. Ensuite, il y a une compagnie d'assurances qui a un garage...

M. Boisclair: Un garage...

M. Bouchard: ...et, enfin, une autre compagnie d'assurances qui a une société en commandite dans l'immobilier.

Le Président (M. Farrah): Alors, est-ce que l'article 25 tel qu'amendé est adoptée?

M. Boisclair: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Sur division. J'appelle maintenant l'article 26, qui se lit comme suit: "Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 245, du suivant: "245.0.1 La limite prévue au paragraphe a du premier alinéa de l'article 245 ne s'applique pas: "a) aux titres garantis par le gouvernement du Canada, d'une province ou d'un territoire du Canada, ainsi qu'aux titres émis ou garantis par un de leurs organismes ou par une corporation municipale située au Canada; "b) aux titres dont le paiement en capital et intérêts est garanti par la cession d'une subvention du gouvernement du Québec payable à même les deniers à être votés annuellement à cette fin par l'Assemblée nationale du Québec; "c) aux dépôts bancaires et aux titres d'emprunt dont le paiement est garanti par une banque; "d) aux titres d'emprunt émis ou garantis par une institution inscrite à la Régie de l'as-surance-dépôts du Québec ou membre de la Société d'assurance-dépôts du Canada et aux dépôts faits auprès de ces institutions;

ue) aux autres investissements déterminés par les règlements."

Des commentaires à l'article 26? Mme la ministre, avez-vous des commentaires sur l'article 26?

Mme Robic: Oui, M. le Président. C'est tout simplement pour ne pas assujettir certains des investissements à la limite des 4 % de l'actif prévus dans l'article 245. Les titres garantis n'ont pas à subir des restrictions qui apparaissent à l'article 245.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouln.

M. Bolsclair: C'est la même disposition dans la Loi sur tes sociétés de fiducie.

Mme Robic: C'est ça.

Le Président (M. Farrah): Dois-je comprendre que l'article 26 est adopté?

M. Boisclair: "Les autres investissements déterminés parles règlements."

Mme Robic: M. Bouchard, où voyez-vous ça là? Les autres... Ah oui! En bas Ici.

M. Boisclair: e).

Mme Robic: "e) aux autres investissements déterminés par les règlements". M. Bouchard, est-ce que vous pourriez nous éclairer sur ce que ça pourrait représenter, ces investissements-là?

M. Bouchard: Ce sont des investissements de la même nature que ceux qui précèdent, c'est-à-dire des investissements qui sont considérés comme véritablement - si c'étaient des actions, je dirais que ce sont des "blue chips", là - des investissements vraiment de toute sécurité qui, normalement, par exemple, seraient des investissements que l'on accepterait pour des normes de liquidité. Alors, pour le moment, ce sont ceux-là que l'industrie nous a demandés, mais au fur et à mesure du développement du marché qui prévoirait, par exemple, des titres de même nature, plutôt que d'avoir à amender la loi, permettre au gouvernement d'élargir par règlement des dispositions de même nature, mais "autres investissements", vous savez que par règle d'interprétation, la fameuse règle de ejusdem generis, il faudrait que j'aie des choses qui soient à peu près de même nature que ce qui précède, sinon on ne pourrait pas l'adopter.

M. Boisclair:...

M. Bouchard: C'est ça.

M. Boisclair: Vous me rappelez mon cours d'interprétation des lois.

M. Bouchard: C'est ça.

M. Boisclair: Ça va, M. le Président

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 26 est adopté. J'appelle maintenant l'article 27 qui se lit comme suit: "L'article 247 de cette loi est modifié: 1° par le remplacement, dans la première ligne du premier alinéa, des mots "les paragraphes d et e" par les mots "le paragraphe d"; "2° par le remplacement, dans la troisième ligne du premier alinéa, de "50 %" par "25 %"; 3° par l'insertion, dans la deuxième ligne du deuxième alinéa et après le mot "chapitre" des mots "et du chapitre III. 1"; "4° par l'addition, à la fin, de l'alinéa suivant: "L'assureur qui le (indiquer ici la date d'entrée en vigueur du présent article) a investi plus de 25 % de son actif dans un holding en aval peut conserver cet investissement." Mme la ministre, des commentaires à l'article 27.

Mme Robic: Oui, M. le Président. Ce sont tout simplement des modifications de concordance et quant au paragraphe 4°, ce sont des droits acquis.

M. Boisclair: L'article 27, en ce qui concerne les droits acquis, c'est un peu la même disposition qu'on retrouvait à l'article 25.

Mme Robic: C'est ça.

M. Boisclair: Cependant, est-ce que vous vous faites la même réserve pour des investissements qui seraient non conformes?

M. Bouchard: Non, parce qu'il n'y en a pas. L'assureur qui est le plus près des 25 % a 22 %. Il n'y a personne qui dépasse les 25 %.

M. Boisciair: Tous les investissements sont conformes. On n'a pas besoin de faire la même distinction qu'on a faite pour les acquisitions en aval.

Mme Robic: C'est juste.

M. Boisclair: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): L'article 27 est adopté. J'appelle maintenant l'article 28. "L'article 248 de cette loi est modifié par l'addition, à la fin du premier alinéa et après le mot "financiers", des mots suivants: "et la diversification des placements". Mme la ministre.

Mme Robic: Alors, l'article, M. le Président, établit la politique de placements de tout

assureur qui doit comprendre la diversification de ces placements. C'est un élément de sécurité, alors...

Le Président (M. Farrah): Ça va, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Oui, mais juste rapidement. Le Président (M. Farrah): Allez-y.

M. Boisclair: L'ancien article disait... D'ailleurs, les assureurs sont obligés de se doter d'une politique de placements adoptée par le conseil d'administration. Quelle interprétation faut-il donner à "diversification" en termes de l'interprétation qui sera faite par les entreprises? Qu'est-ce qu'on doit conclure, là? Parce que "diversification", c'est en fonction de la sécurité du risque des titres, en fonction du genre de titres, si c'est de l'immobilier, si c'est des obligations, sur les échéances...

Mme Robic: M. Bouchard, c'est à peu près tout ça?

M. Bouchard: Si on adoptait une interprétation purement littérale de l'article 248 - qui n'était pas le but, remarquez, du 248 primaire en 1984 - ça pourrait signifier que, dès le moment qu'un conseil d'administration prévoit l'apparie-ment, ce serait suffisant. Mais, à la pratique, on dit: Bien, c'est plus que ça que ça prend. Ça prend une véritable politique de placements, diversification de risques, diversification de portefeuille, pas de concentration uniquement dans les mêmes titres. Par exemple, prévoir un certain pourcentage par strates d'activité économique pour diversifier les risques.

M. Boisclair: Et le recours, parce qu'il y a quand même une évaluation que vous allez faire annuellement sur le rendement de la politique de placements. Le jugement, vous le porterez en fonction de...

M. Bouchard: On va le porter sur le résultat global de l'administration de la compagnie, parce qu'un principe de base de la législation en 1984, c'était de responsabiliser les conseils d'administration. Et en remplaçant les règles de critères qualitatifs par des critères quantitatifs, ça venait compléter une feuille de route de responsabilités du conseil d'administration en disant: Vous devez, en plus de bien gérer et en plus de bien placer, vous assurer que vos placements, même s'ils sont conformes - vous avez une disposition plus loin qui le prévoit - même s'ils sont techniquement conformes, si, dans les circonstances, c'est un mauvais placement, comme gestionnaire, vous êtes responsable d'avoir fait un placement qui, par ailleurs, pourrait être conforme à la loi.

M. Boisclair: Et le recours se retrouve dans la loi, aux articles...

M. Bouchard: La responsabilité personnelle des administrateurs.

Le Président (M. Farrah): L'article 28 est adopté...

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): ...M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Oui. L'article 29 aussi.

Le Président (M. Farrah): Adopté? Alors, l'article 28 est adopté. J'appelle maintenant l'article 29 qui se lit comme suit: "L'article 249 de cette loi est abrogé."

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): Je ne pense pas que ça donne lieu à un débat. Alors, adopté également. L'article 30: "Les articles 259 à 265 de cette loi sont abrogés."

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): Adopté également. L'article 31 qui se lit comme suit: "L'article 268 de cette loi est modifié par le remplacement, dans la quatrième ligne, de "aux articles 244 à 265" par "aux règles de placements prévues par la présente loi".

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): Adopté. L'article 32. "L'article 270 de cette loi est remplacé par le suivant: "270. Un assureur doit effectuer ses dépôts, ses prêts et ses placements sous sa raison sociale à moins qu'ils ne soient effectués par l'entremise d'une chambre de compensation reconnue par l'Inspecteur général ou, qu'à la demande de l'assureur, l'Inspecteur général ne l'exempte de cette obligation dans les cas et aux conditions qu'il peut déterminer suivant les circonstances."

Mme Robic: C'est tout simplement que la présente règle pose de grande difficultés d'application en raison de son manque de flexibilité. Alors, on a réécrit l'article pour qu'il soit plus clair dans son libellé.

M. Boisclair: Non seulement il est plus clair, mais vous l'avez modifié de façon substantielle. Quel genre de difficultés avez-vous rencontré dans l'application de l'article 270?

Mme Robic: M. Bouchard, l'article 270...

M. Boisclair: Non. Juste, M. Bouchard...

Mme Robic: ...nous l'avons remplacé, à cause de son manque de flexibilité... Quels étaient les problèmes que vous avez rencontrés avec l'article, tel que libellé présentement?

M. Bouchard: Ah! Des problèmes très graves. Vous savez que le marché évolue tellement que, de plus en plus, surtout avec le CDS, le centre de compensation, il y a des marchés nouveaux. Par exemple, on va prendre l'expression consacrée en Grèce, les "strip bounds" et d'autres valeurs, titres semblables. Le principe de base, c'est que toute valeur quelconque, que ce soient des actions, des titres, des obligations, doit être enregistrée au nom de la compagnie d'assurances. Or, le marché, maintenant, ne se prête plus à ça. Vous avez des titres au porteur, de plus en plus, de différentes natures. Et ce qui vient encore une fois compliquer le système, mais aussi le faciliter considérablement pour la mise en marché, c'est cette chambre de compensation de la corporation canadienne de... Alors, avec l'article 270, les compagnies d'assurances se voyaient complètement interdites de pouvoir bénéficier de la CDS.

M. Boisclair: D'où la référence à l'article 270...

M. Bouchard: C'est ça.

M. Boisclair: ...à la chambre de compensa tion.

Le Président (M. Farrah): L'article 32 est-il adopté?

M. Boisclair: Non. Juste, M. le Président... "...l'Inspecteur général ne l'exempte de cette obligation dans les cas et aux conditions qu'il peut déterminer suivant les circonstances." Quel genre de circonstances, par exemple, pourrait vous amener à exempter une compagnie d'assurances de cette obligation?

M. Bouchard: Ce qui arrive, par exemple, dans des cas particuliers, les assureurs écrivent. Ils nous expliquent le genre de placements qu'ils veulent faire. Un exemple concret. Je suppose qu'une compagnie d'assurances veut céder un bloc de son portefeuille de prêts hypothécaires. Elle peut le faire. Elle cède en bloc un portefeuille de prêts hypothécaires, sous gestion, par une compagnie de fiducie qui s'occupe de percevoir les intérêts, vois en cas de défaut et ainsi de suite. La question qui se pose: Au nom de qui le placement est-il fait, par suite de la cession de créance? Voyez-vous, le genre de problème comme ça. Les assureurs m'écrivent. Je suis obligé de leur dire: Non, vous ne pouvez pas, vous n'avez pas le droit de le faire. Mais, au fond, ce sont leurs placements. M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 32 est adopté. J'appelle l'article 33 qui se lit comme suit: "L'article 271 de cette loi est remplacé par le suivant: "271. Les administrateurs ou les dirigeants d'un assureur qui donnent leur assentiment à un prêt ou placement en contravention de la présente loi sont tenus solidairement responsables des pertes qui en résultent pour l'assureur." Mme la ministre. (10 h 30)

Mme Robic: Alors, cet article-là, M. le Président, reprend la règle présente au paragraphe 2° de l'actuel article 272 de la loi, en l'étendant aux dirigeants d'un assureur.

M. Boisclair: On reprend la même définition qu'on avait au début.

Le Président (M. Farrah): Est-ce que l'article 33 est adopté?

M. Boisclair: Juste un instant, M. le Président. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Adopté. J'appelle l'article 34, qui se lit comme suit. "L'article 272 de cette loi est remplacé par le suivant: "272. Le seul fait que les prêts ou les placements d'un assureur soient conformes à ta présente loi ne dégage pas ses administrateurs et ses dirigeants des responsabilités qui leur incombent".

Mme Robic: Alors, là également, on étend la responsabilité aux dirigeants.

M. Boisclair: Ça va.

Le Président (M. Farrah): L'article 34 est adopté. À l'article 35, nous avons un amendement. Dans un premier temps, je lis l'amendement, qui se lit comme suit: "Modifier l'article 35 par l'insertion, dans la huitième ligne et après le mot "permises", des mots "par l'un ou l'autre des articles 245 et 247"." Est-ce qu'il y a des commentaires concernant l'amendement, Mme la ministre?

Mme Robic: Non, M. le Président, je pense que c'est clair.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Alors, l'amendement à l'article 35 est adopté. L'article 35, maintenant, qui se lit comme suit:

"L'article 273 de cette loi est modifié par le remplacement, dans les première, deuxième et troisième lignes, des mots "Aucun placement non conforme aux dispositions de la présente loi ne doit être reconnu comme élément d'actif d'un assureur, sauf s'il" par les mots "Sous réserve du troisième alinéa de l'article 245 et du cinquième alinéa de l'article 247, un placement non conforme au paragraphe d du premier alinéa de l'article 245 ou un montant qui excède les limites permises ne doit pas être reconnu par l'Inspecteur général et doit être déduit de l'actif aux fins de ses analyses financières, sauf si le placement en cause".

Mme Robic: Alors, c'est un article de concordance, M. le Président.

M. Boisclair: Sous réserve du troisième alinéa, le troisième alinéa fait référence à la clause grand-père.

M. Bouchard: C'est ça.

M. Boisclair: C'est quoi? "Sauf si le placement en cause..." "...doit être déduit de l'actif aux fins de ses analyses financières" aucun problème. "Sauf si le placement en cause". Je veux juste essayer de ie replacer dans son contexte.

M. Bouchard: Sauf si le placement en cause a été effectué avant le 20 juin 1984 et ainsi reconnu par l'Inspecteur général, pendant la période et aux conditions qu'il détermine.

Mme Robic: Je regardais à l'autre page, vous le retrouvez là.

Le Président (M. Farrah): Pardon, Mme la ministre?

Mme Robic: M. le Président, si on regarde l'article 35, à la page...

Le Président (M. Farrah): O.K. Parfait. Mme Robic: D'accord?

Le Président (M. Farrah): Alors, est-ce que l'article 35 tel qu'amendé est adopté?

M. Boisclair: Oui. Adopté.

Le Président (M. Farrah): Alors, adopté. J'appelle l'article 36. "Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 275, de l'article suivant: "275.0.1 Les administrateurs sont solidairement tenus responsables de toute somme versée à un actionnaire ou à un administrateur lorsque, par le versement de cette somme, l'assureur contrevient à l'article 275."

Mme Robic: Alors, M. le Président, cet article touche la responsabilité des administrateurs en regard de l'exigence du maintien d'un excédent d'actifs.

Le Président (M. Farrah): Ça va, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: La méthode fixée par règlement du surplus des actifs... L'article 275 nous indique la méthode qui est fixée par règlement: "Nonobstant tout règlement adopté en vertu du deuxième alinéa, l'Inspecteur général peut donner des directives écrites à un assureur pour qu'il maintienne un excédent supérieur à celui résultant de la méthode fixée par règlement." La méthode fixée par règlement à l'heure actuelle, c'est...

Le Président (M. Farrah): M. Bouchard.

M. Bouchard: Oui. L'article 275 prévoit... L'article 275, en réalité, c'est ce qu'on appelle le capital minimum requis.

M. Boisclair: Oui.

M. Bouchard: Et rendu là à 275, ça veut dire que la compagnie, c'est grave. C'est qu'avant 275, nous avons beaucoup de tests préventifs. Le système au Québec, comme vous savez, c'est un système qui est à base de prévention. Il ne faut pas arriver à l'article 275 parce que l'article 275, ça veut dire qu'on a suffisamment d'actifs pour payer les gens compte tenu de la liquidation dans une situation presque désespérée. Donc, la méthode qui est déterminée, c'est une méthode qui est déterminée surtout pour les compagnies d'assurances générales. Mais tout le système des normes de capitalisation et surtout des normes de prévention est actuellement en révision, sur le plan canadien. Nous négocions jusqu'à maintenant avec le gouvernement canadien et certaines provinces, surtout l'industrie canadienne des compagnies d'assurances de personnes, pour essayer de s'entendre sur ce que devraient être les normes de capitalisation des compagnies d'assurance-vie. Le problème se complique du fait, comme je vous ai expliqué hier, que maintenant, dorénavant, nous devons le faire en fonction d'un critère nouveau qui est la pondération des risques de l'actif. Comment transposer un système, qui est bien conçu pour une institution de dépôts, dans un système d'assurance et surtout d'assurance de dommages où, si ça ne fonctionne pas du tout et où l'industrie n'est pas du tout d'accord, à juste titre je crois, à ce qu'on transpose un système semblable? Donc, pour répondre à votre question, c'est que l'idée à la base de 275, c'est qu'il va y avoir sûrement un règlement qui va être déter-

miné. En l'absence de règlement, ce seront des directives de l'Inspecteur général parce qu'il ne faut pas qu'il y ait de vide. Donc, ce sont des directives que nous appliquons, des tests sur l'actif, des tests sur le capital, des tests sur le passif, des tests sur le pourcentage de perception de primes par rapport à... Ainsi de suite, il y en a à peu près 75 tests de prévention. Et l'idée de 275 - et on a la même chose aussi dans la loi sur les fiducies et la même chose au niveau des lois fédérales, - c'est que, même si une loi fédérale établit une norme applicable pour toute l'industrie, il peut très bien arriver que, dans des circonstances données, ce capital-là ne soit pas suffisant pour une compagnie donnée qui est dans une mauvaise passe, d'où cette nécessité pour l'Inspecteur de dire que, nonobstant le règlement qui dirait, par exemple, que le test est 10 % de l'actif, compte tenu de ce que vous avez fait, compte tenu des risques que vous avez assumés, compte tenu d'un tas de circonstances, on vous demande d'augmenter votre capital parce que vous êtes une compagnie à risque, ce que nous ne pourrions pas faire si j'étais limité à ce que le règlement nous indique comme barème.

M. Boisclair: Ça va. La Loi sur les sociétés de fiducie fait essentiellement référence au test du ratio d'endettement.

M. Bouchard: C'est ça. Parce que dans le cas des institutions de dépôts, comme vous le savez, les normes de solvabilité se font à partir d'un ratio du capital sur le passif...

M. Boisclair: Le ratio d'endettement.

M. Bouchard: ...qu'on peut transposer, en termes de pourcentage de l'actif bien sûr, 5 % de l'actif ou 20 % du dépôt, pour moi, c'est la même chose. Mais le critère est un peu plus facile, s'il se fait en fonction du passif dépôt. Dans le cas d'une compagnie d'assurances générales, ce n'est pas ça et l'assurance-vie, ce n'est pas ça non plus, dû au fait que, dans le cas des compagnies d'assurances, l'élément dont 11 faut tenir compte avec autant d'importance que le capital qui apparaît supposément comme tel, comme sauvegarde, pour l'institution financière, ce sont les provisions. Et c'est la raison pour laquelle, en 1984, une des réformes majeures sur le plan administratif qu'on a faite, c'est d'imposer, pour les compagnies d'assurance générale, la vérification des réserves par un actuaire. Ce qui n'était pas le cas et ce qui a créé une distorsion au Canada parce qu'on était la seule juridiction à le faire, à l'imposer à toutes les compagnies, les compagnies étrangères et les compagnies des autres États, des autres pays. On obligeait au Québec qu'elles nous certifient, par un actuaire, des réserves et c'était la première fois. Donc, c'est important, la réserve, pour les compagnies d'assurances et même chose pour les compagnies d'assurance-vie. Dans l'assurance-vie, une tradition depuis toujours qui faisait que les réserves existaient puis que les provisions étaient certifiées par des vérificateurs, par des actuaires, ce qui n'était pas le cas.

Une voix: Ça va.

Le Président (M. Farrah): C'est adopté.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Farrah): Alors l'article 36 est adopté. J'appelle l'article 37. "L'article 275.2 de cette loi est modifié par la suppression, dans la première ligne, des mots "qui pratique les assurances de dommages."

Mme Robic: Alors, encore là, ça touche des responsabilités des administrateurs, M. le Président. C'est la même chose...

M. Boisclair: Adopté.

Cession de l'entreprise

Le Président (M. Farrah): L'article 37 adopté. L'article 38 qui se lit comme suit: "Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 275.3, de ce qui suit: "275.4. Sauf préavis de 45 jours à l'Inspecteur général, un assureur ne peut céder la totalité ou une partie de son entreprise. Le préavis doit indiquer les raison sociale et adresse du siège social des parties. De plus, ce préavis doit être accompagné du projet de contrat que les parties ont l'intention de signer. "275.5. L'Inspecteur général peut interdire la transaction ou imposer certaines conditions à sa réalisation s'il l'estime opportun dans l'intérêt des assurés ou dans l'intérêt de l'une ou l'autre des parties. "Si l'Inspecteur général est d'avis que le délai qui lui est imparti est insuffisant pour qu'une étude adéquate de la transaction puisse être effectuée, il peut prolonger ce délai pour une période additionnelle de 45 jours. "Inspecteur général doit aviser les parties de toute prolongation de délai au moins cinq jours avant l'expiration de tout délai de 45 jours." Mme la ministre.

Mme Robic: Alors, je pense, M. le Président, que l'article est très clair. C'est pour s'assurer qu'un assureur avise l'Inspecteur général s'il doit y avoir cession de la totalité ou d'une partie de son entreprise et que si la transaction est conclue sans ce préavis, la transaction pourrait être annulée en vertu de l'article 325.7. Et l'article 275.5, M. le Président, détermine le pouvoir de l'Inspecteur général.

C'est un pouvoir essentiellement d'intervention.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, l'article 38.

M. Boisclair: Mme la ministre, peut-être juste pour vérifier... Céder la totalité ou une partie de l'entreprise. On reprend une disposition qui... Bien sûr, l'article 4 du projet de loi ne s'applique pas dans les cas particuliers, parce qu'on... Mais, juste pour comprendre où on en est dans la cohérence, dans le cadre du projet de loi. On est à la section III, sur les actifs, si je ne me trompe pas, 275.

Mme Robic: C'est la section 111. 1.

M. Boisclair: J'essaie de comprendre tout simplement la...

Mme Robic: Alors, M. Bouchard, s'il vous plaît.

M. Bouchard: L'article proposé veut combler une carence énorme dans la législation des assurances. Aux articles 4 et suivants, 43, 44, 45, si vous vous rappelez, on a étudié l'approbation nécessaire par le ministre de transfert d'actions et de transfert de contrôle, parce que c'est important, c'est un privilège et les gens doivent reconnaître ça. Or, une des façons de contourner le transfert, soit d'intérêts dans une compagnie d'assurances ou le contrôle d'une compagnie d'assurances, ce sera de procéder par transfert de fonds de commerce. Et c'est tout ça qui est prévu ici. On applique exactement le même principe à l'article 43 que vous avez ici pour le fonds de commerce. Alors, une entreprise qui voudrait se départir d'une partie de son portefeuille d'assurances pour le céder à une autre entreprise, ça nous échappe à l'heure actuelle. (10 h 45)

Est-ce que c'est fait à la bonne valeur, est-ce que les intérêts des assurés sont protégés? Est-ce qu'un portefeuille qui est vendu 15 000 000 $ ne vaut pas 25 000 000 $ en réalité? Ça, on va dire ici non, vous allez me donner les évaluations, je vais avoir les rapports pertinents, sinon on n'approuve pas la transaction.

Deuxièmement, la compagnie qui achète, peut-elle acheter? Est-elle en mesure de payer? Est-ce qu'on ne vient pas handicaper, alourdir cette compagnie-là? Et c'est pour ça qu'on dit "dans l'intérêt des deux parties".

M. Boisclair: C'est une disposition qui se retrouve dans d'autres législations canadiennes?

M. Bouchard: Ça existe au fédéral. Nous ne l'avons pas, nous.

M. Boisclair: Elle existe à l'heure actuelle?

Et on n'a pas cru bon, dans le libellé de l'article, de retenir les mêmes dispositions de l'article 4, qu'on a adopté hier soir, sur le rapport à la ministre, l'avis qui est fait à la ministre.

M. Bouchard: Sauf qu'ici c'est l'Inspecteur, ce n'est pas le ministre.

M. Boisclair: C'est ça, on n'a pas cru bon retenir ces mêmes dispositions qu'à l'article 4.

Le Président (M. Farrah): Mme la ministre.

Mme Robic: Non, M. le Président. On s'assure que s'il y avait ce genre de transfert qui se faisait, il est important qu'on en soit avisé, et que l'Inspecteur en soit avisé pour qu'il puisse juger de la pertinence de transfert.

M. Boisclair: Mais je peux comprendre la crainte que vous avez, qu'effectivement, au lieu de céder les actions, on cède ce qui est l'équivalent du fonds de commerce, qu'on cède une partie du portefeuille, ce qui...

Mme Robic: On peut démanteler une compagnie de cette façon-là hein.

M. Boisclair:... revient à la même chose.

Mme Robic: On pourrait démanteler une compagnie de cette façon-là.

M. Boisclair: Ça, c'est clair. Mais, dans le cas des transferts de blocs d'actions, des actions avec droit de vote, on avait défini un certain pourcentage, une certaine proportion, où il fallait une autorisation écrite. Dans ce cas-ci, je ne sais pas, parce que là, c'est dans tous les cas, une totalité ou une partie, si mince soit-elle. Est-ce que c'est des transactions qui sont fréquentes, qui se font...

Mme Robic: M. l'inspecteur.

M. Bouchard: Bien, je ne dirais pas que c'est journalier là, mais on le voit assez fréquemment, et c'est une chose qui se fait d'une façon très subtile. Et c'est pour ça que c'est un aspect technique ici. Remarquez qu'on ne le voit pas comme étant un transfert de changement de contrôle. Ce n'est pas dans ce sens-là. On dit "tout ou partie", parce qu'une législation doit être un peu bien rédigée là, mais ce qui se passe en réalité, c'est ceci, de façon assez régulière. Sous couvert de réassurance, et surtout en fin d'année, pour essayer de bonifier une situation qui ne serait pas très bien vue des autorités de contrôle, parce que les tests ne seraient peut-être pas respectés, on fait de la réassurance. On fait la réassurance, sans, en réalité, se tenir à de la réassurance pure. Et la réassurance en

question équivaut à une cession d'une partie de l'entreprise, parce qu'on cède une partie du passif et une partie de l'actif. Et ça nous échappe complètement, parce qu'ils nous disent: J'ai fait de fa réassurance. On va dire: Bien, écoutez, la réassurance, si vous voulez la faire en vertu de votre contrat de quote-part, ou en vertu de la clause de coassurance, normalement c'est pour l'avenir. C'est pour les risques que j'assume et les risques que j'assumerai, partage de responsabilités d'assureurs.

Mais, lorsque Je le fais en fin d'armée ou en cours d'année, et que supposément je réassure un portefeuille que j'ai déjà assumé comme risque, pour moi, ce n'est pas de la réassurance, c'est une cession d'une partie de ma responsabilité d'assureur. La raison pour laquelle on dit qu'on l'approuve, c'est que c'est une question qui est technique. Et ce n'est pas une question de contrôle ou de décider par exemple la validité, ou la pertinence de l'acquéreur de l'acquérir. Ce n'est pas comme pour un transfert d'actions pour (a ministre.

M. Boisclair: Je comprends très bien.

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 38 dans son ensemble est adopté?

M. Boisclair: Oui.

Éthique et conflits d'intérêts Application

Le Président (M. Farrah): Adopté. L'article 39, il y a un amendement qui se lit comme suit: "À l'article 39, modifier l'article 285. 23, par la suppression, dans la deuxième ligne, du cinquième alinéa, des mots "ou sa filiale"...

Une voix: Avez-vous des copies, M. le Président. Ce n'est pas dans votre paquet.

Le Président (M. Farrah): O. K. Ça va. Alors, rendu à l'article 285. 23...

Mme Robic: Non. C'est parce que l'amendement est à l'article 285. 23. Ce n'est pas à l'article 285. 1.

Le Président (M. Farrah): Ça va. À l'article 285. 23, on l'introduira, pas de problèmes. Alors, O. K. Si on peut aller numéro par numéro. Article 285. 1? Ça vous va comme ça? Je pense que ça sera plus simple.

Mme Robic: Ça c'est tout le chapitre, M. le Président, de l'éthique et des conflits d'intérêts.

Alors, ça va de la page 68 à 95, cet article-là, hein?

Le Président (M. Farrah): Alors, je vous ferai grâce de la lecture de tous ces articles-là dans un même bloc. Alors, on va appeler l'article 285. 1.

Mme Robic: D'accord.

Le Président (M. Farrah): C'est pour votre bien, pas le mien, c'est pour votre bien que je fais ça, là.

M. Boisdair: Le libellé de l'article 285. 1 reprend pratiquement la même chose que pour l'actuel article 243, si ce n'est pour l'exception: "une société de secours mutuels qui n'émet pas de polices ou de certificats garantissant pour leur durée le montant de secours mutuels et des cotisations qui y est fixé ni à une compagnie d'assurance funéraire". Les compagnies de secours mutuels, il y en a très peu, c'est tout petit, c'est pas...

Mme Robic: Très peu. Une centaine, même pas.

De» voix: Non, non.

Mme Robic: Une dizaine. Oui. Une dizaine.

Le Président (M. Farrah): Ça va l'article 285. 1?

M. Boisdair: Oui, ça va.

Administrateur» et dirigeants

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 285. 1 est adopté. Article 285. 2. "Un administrateur ou un dirigeant d'un assureur doit agir avec soin, prudence, diligence et compétence comme le ferait en pareilles circonstances une personne raisonnable. "Il doit aussi agir avec honnêteté et loyauté dans l'intérêt de l'assureur. À cette fin, il doit tenir compte de l'intérêt des assurés, des actionnaires ou des membres et éviter de se placer dans une situation de conflit entre son intérêt personnel et ses obligations". On ne peut pas être contre la vertu.

Mme Robic: C'est ça. Il agit en bon père de famille.

Le Président (M. Farrah): L'article 285. 2...

M. Boisclair: Les dispositions... Juste pour vérifier.

Le Président (M. Farrah): Allez-y, M. le député de Gouin, je m'excuse.

M. Boisdair: Si jamais il y avait des agissements contraires aux dispositions de l'article

285.2, on les trouve plus loin, hein?

Mme Robic: Plus loin. Les sanctions. Le Président (M. Farrah): Adopté? M. Boisclair: Oui.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.2 est adopté. Article 285.3. "Un administrateur ou un dirigeant est présumé avoir agi avec soin, prudence, diligence et compétence comme l'aurait fait une personne raisonnable s'il agit de bonne foi, en se fondant sur l'opinion ou le rapport d'un expert."

M. Boisclair: Ça va.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.3 est adopté. L'article 285.4. "Un administrateur ou un dirigeant d'un assureur ne peut être administrateur d'un autre assureur sauf si l'un des assureurs est un assureur qui pratique l'assurance de personnes et l'autre un assureur qui pratique l'assurance de dommages ou si les assureurs en cause sont affiliés".

M. Boisclair: On va le relire, celui-là.

Mme Robic: Alors, M. le Président, cet article vise à étendre la règle déjà présente à l'actuel article 61 de la loi à tous les assureurs constitués au Québec.

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.4 est adopté. J'appelle l'article 285.5. "Le vote d'un administrateur qui ne possède pas les qualités requises en vertu de la présente loi ne peut être déterminant".

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.5 est adopté. Article 285.6. "Un administrateur ou un dirigeant d'un assureur doit, lorsqu'il communique un renseignement concernant l'assureur ou ses assurés, respecter les règlements et, le cas échéant, les règles adoptées par le comité de déontologie".

M. Boisclair: À quel genre de renseignements fait-on référence?

Mme Robic: M. Bouchard?

M. Bouchard: C'est pour la protection. Vous allez voir plus loin, on est très sévères sur la protection des renseignements personnels. C'est pour éviter qu'on s'échange des renseignements. Alors, par réglementation, il y a des dispositions qui sont prévues, le gouvernement va prévoir ce qui peut être transmis pour le respect des renseignements personnels. Alors, ici, un assureur ne peut pas... Un administrateur qui profiterait de ses connaissances au sein du conseil d'administration et comme un assureur peut maintenant faire partie de plus d'un conseil d'administration de compagnie d'assurances d'un même groupe, ça serait facile pour lui de transmettre ces renseignements à un autre... Un assureur d'assurance de dommages qui transmettrait des renseignements pour vendre de l'assurance-vie, vice versa.

M. Boisclair: J'aimerais qu'on prenne quelques instants pour aborder cette question-là de protection des renseignements personnels. Où se retrouvent les autres dispositions?

M. Bouchard: Par règlement, à l'article 420, à la fin là, vous allez voir qu'on a un pouvoir de réglementation...

M. Boisclair: Ça, ça m'intéresse grandement.

M. Bouchard: Bon. Vous avez d'abord l'article 50 comme tel et comme ce n'était pas suffisant, vous avez un papillon qu'on vous a déposé, qui est encore plus sévère, sur l'article 50. Ce qui fait que par papillon, vous avez ap et aq.

M. Boisclair: Là, vous me dites que c'est par règlements qu'on retrouve ces dispositions sur la protection des renseignements personnels.

Mme Montminy (Danièle): C'est par règlements qu'on va déterminer les normes concernant la circulation de l'information et la protection de l'information.

M. Boisclair: II n'en existe pas. Est-ce qu'il en existe à l'heure actuelle?

Le Président (M. Farrah): Pour le bénéfice du Journal des débats, est-ce que vous pouvez vous identifier, s'il vous plaît?

Mme Montminy: Oui. Danièle Montminy, service juridique de l'Inspecteur général. Effectivement, actuellement, ce pouvoir-là n'existe pas dans la Loi sur les assurances. Alors, on introduit maintenant la possibilité, par règlements du gouvernement, de déterminer des normes quant à l'usage de l'information que les assureurs vont détenir. Alors, c'est une réglementation qui est à élaborer.

M. Boisclair: Ça m'intéresse grandement, cette question. On touche d'une part les renseignements qui seront détenus par l'assureur où, dans les articles à venir, dans les règlements surtout, on va établir un certain nombre de paramètres qui vont permettre l'utilisation de ces

renseignements-là. La réglementation, vous me dites, n'est pas prête à ce... Les règlements ne sont pas prêts, ils ne sont pas rédigés, à l'heure actuelle?

Mme Montminy: La réglementation n'est pas encore rédigée.

M. Boisclair: Est-ce que vous avez l'intention de... Parce que ce n'est pas simple, vous savez qu'il y a tout un autre débat qui concerne l'extension de la loi d'accès au secteur privé. Bien des gens voudraient voir étendre la portée de la loi sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels au secteur privé. D'ailleurs, un rapport de la Commission d'accès suggérait que le secteur des banques et des compagnies d'assurances soit un des premiers secteurs auxquels on étendrait la portée de la loi sur l'accès à l'information.

Et là, s'il y a un domaine qui est sensible, c'est bien celui-là. Certains, bien sûr, invoqueront la protection des renseignements personnels, la protection de la vie privée. Au-delà de cela, il s'agit d'avoir travaillé dans une institution financière pour voir comment c'est facile d'avoir accès aux renseignements, comment souvent les employés, au sein d'une même institution, sont liés, dans leur contrat d'embauché, par une clause de secret professionnel, mais que c'est très facile d'avoir accès aux informations, par exemple, dans une institution bancaire. Ça doit être la même chose dans une compagnie d'assurances, à tous les clients, les portefeuilles, des choses semblables, qui sont détenus.

Moi, j'aimerais entendre votre réflexion, Mme la ministre, sur ces préoccupations-là et si on pouvait m'expliquer de façon générale, dans son ensemble, ce qu'il en est de cette probléma-tique-là. Parce que là, on parle d'un administrateur ou un dirigeant d'un assureur, donc ça, ce sont les deux notions qui ont été reprises précédemment dans le projet de loi. "Lorsqu'il communique un renseignement concernant l'assureur ou ses assurés, respecter les règlements et, le cas échéant, les règles adoptées par le comité de déontologie." On parle d'un administrateur ou d'un dirigeant. Quelle réflexion faites-vous? Parce que là, on peut aussi aborder la question des conflits d'intérêts. Dans le milieu des institutions financières, particulièrement les banques, souvent on voit des banques qui transmettent le nom de leurs clients à la société de portefeuille. C'est sûr que la main droite ne regarde pas la main gauche, mais ça se fait de façon courante. (11 heures)

Mme Robic: C'est une question très sérieuse et délicate. Il faut absolument protéger le client et s'assurer que ses dossiers confidentiels demeurent confidentiels. Et d'un autre côté, on dit qu'on veut créer des conglomérats, on dit que ça crée une synergie, pour créer des synergies... Donc, ce n'est certainement pas facile, à régler, ça demande beaucoup de réflexion là-dessus. Jusqu'où peut-on se permettre de passer des renseignements? Certainement pas sur la vie privée, certainement pas sur les avoirs des clients, ça, c'est bien entendu. Est-ce qu'il est possible cependant que... Et vous avez raison, il ne faut pas se leurrer, il ne faut pas se conter d'histoires, les gens se parlent. Donc, j'aimerais passer la parole à l'Inspecteur là-dessus parce que c'est réellement à ce niveau-là que la réflexion se fait, à savoir comment on peut circonscrire ça dans un règlement et s'assurer qu'il y ait la protection voulue des dossiers.

M. Bouchard: Oui, c'est exact, c'est une question qui est très difficile. Dans le secteur des valeurs mobilières, comme vous le savez, les commissions se sont entendues, sur le plan canadien, sur des normes minimales qui ne sont pas très sévères en réalité, au fond, sur ce qui concerne la transmission des renseignements, dû au fait maintenant que les banques...

M. Boisclair: Les recours sont pratiquements inexistants.

M. Bouchard: Pardon?

M. Boisclair: Les recours sont pratiquement inexistants.

M. Bouchard: C'est ça. Alors, mais c'est un peu saupoudré, si vous me permettez l'expression, au moins il y a quelque chose pour dire: Bon, il y a un effort de réflexion qui a été fait. Dans le secteur des institutions financières où on parte maintenant de conglomérats, parce qu'il faut le faire en termes de conglomérats des institutions financières isolées, il n'y en a presque plus, sauf les petites sociétés de secours mutuels ou des choses semblables. Le principe qui a été retenu ici, c'est le même que pour l'administration de la Loi sur les assurances. Responsabilité partagée entre l'institution financière et l'autorité gouvernementale. Et vous allez voir plus tard dans le mandat du comité de déontologie...

M. Boisclair: Oui.

M. Bouchard: ...composé majoritairement de personnes qui ne sont pas des employés mais qui sont toutes des administrateurs... Devront, entre autres, édicter des règles sur la protection des renseignements à caractère confidentiel dont l'assureur dispose sur ses assurés, 285.14. Et, une disposition très forte, pour être bien certain que ce comité-là a rempli adéquatement sa mission: les règles édictées par le comité de déontologie lient le conseil d'administration et lient l'assureur, n'ont pas à être approuvées ou ne peuvent pas être renversées par le conseil

d'administration. Premier palier. Deuxième palier, le gouvernement, par sa réglementation. En pratique, comment ça fonctionne? Déjà, on peut prendre l'expérience du secteur des fiducies. Le secteur des fiducies, depuis deux ans, vit un système comme celui-là et doit transmettre à l'Inspecteur général annuellement les règles qu'il se donne. Deuxième exemple, le Mouvement Desjardins. Le Mouvement Desjardins, depuis sa loi, est dans l'obligation d'avoir un comité de déontologie au niveau de chaque fédération, selon les grands paramètres, les grands principes élaborés par la confédération. Et ces règles, ensuite, sont appliquées par chaque conseil de surveillance dans les caisses. Donc, il y a toujours le même principe de responsabilisation du milieu dans l'élaboration, en ce qui concerne la protection, non seulement des renseignements confidentiels sur les assurés, mais également, comme il est prévu ici l'article 285.6, des renseignements qui concernent l'assureur ou ses assurés.

M. Boisclair: On reviendra. Je veux juste voir quelque chose. Vous en faisiez mention dans votre Rapport quinquennal, des comités de déontologie?

Mme Robic: Oui. Vous allez le retrouver ici.

M. Boisclair: On pourrait reprendre la discussion lorsqu'on discutera de l'article 39, plus loin, l'article 285.13...

Mme Robic: Si vous regardez à l'article 285.13, on touche au comité de déontologie. D'accord?

Le Président (M. Farrah): L'article 285.6, adopté?

M. Boisclair: Oui. Là, on est dans quelle section? Je comprends qu'il y a une section nouvelle qu'on ajoute sur le comité de déontologie.

Le Président (M. Farrah): Ethique et conflits d'intérêts, section II, administrateurs et dirigeants.

M. Boisclair: Éthique et conflits d'intérêts.

Le Président (M. Farrah): La section 11 de ce chapitre-là, administrateurs et dirigeants. Sur le comité de déontologie, la section IV.

M. Boisclair: Oui, je comprends très bien. Ces règlements-là vont être disponibles quand, Mme la ministre?

Mme Robic: M. l'Inspecteur.

M. Boisclair: Mon collègue, le député de La

Prairie, n'était pas dans l'erreur lorsqu'il demandait la réglementation

Mme Robic: Non, on n'a pas besoin de ça pour vivre avec le projet de loi, là. Oui, c'est ça.

M. Boisclair: Je comprends très bien. Mais je suis heureux de voir que vous êtes sensible à cette préoccupation là, de la façon dont on... Vous le savez, il s'agit d'avoir travaillé dans une institution pour voir de quelle façon les informations circulent, de quelle façon les banques de données même se promènent d'une façon... Est-ce que la ministre verrait d'un bon oeil que la loi d'accès s'applique, soit étendue au secteur des institutions financières?

Mme Robic: Mais vous savez, le gouvernement se penche sur cette question-là, le ministre de la Justice, le ministre des Communications. C'est quelque chose qui nous inquiète au plus haut point et c'est une question qui ne se règle pas facilement avec toutes les possibilités qu'on a aujourd'hui d'obtenir de l'information. On peut s'asseoir devant un ordinateur pour obtenir toutes sortes d'informations.

M. Boisclair: Non, mais c'est parce que...

Mme Robic: Alors, tout ce domaine-là de la transmission de l'information doit être regardé. Et c'est ce qu'on tente de faire ici. C'est ce que le Bureau de l'Inspecteur tente de faire. Et on va sans doute s'inspirer de la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit et de la loi sur les sociétés. Il existe des choses là-dedans, mais, encore une fois, c'est une grande préoccupation chez nous et ailleurs. Je vous avoue qu'en ce moment je ne pourrais pas vous donner une réponse concrète. Je pense qu'il faut avoir le temps d'y réfléchir et de s'assurer qu'on peut protéger les consommateurs le plus possible.

M. Boisclair: Puisque cet article fait partie de la section II sur les administrateurs et les dirigeants, dans la mesure où un administrateur ou un dirigeant ne se conformerait pas aux dispositions de l'article 285.6, il y a des pénalités.

Mme Robic: Nous avons un chapitre sur les sanctions. Allez voir...

M. Boisclair: C'est à l'article 39?

Mme Robic: Les sanctions se retrouvent...

Une voix: À l'article 48.

Mme Robic: ...à l'article 48.

M. Boisclair: Oui, mais est-ce que l'article

48 s'applique à l'article 285.6?

Mme Robic: L'article 406, paragraphe p. Vous avez ça... :

M. Boisclair: Ah! qui est déjà... i

I

Mme Robic: On a déjà une clause générale.

M. Boisclair: O.K. Ça va, adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.6 est adopté. J'appelle maintenant l'article 285.7 qui se lit comme suit: Tout administrateur qui résigne ; ses fonctions pour des motifs reliés à la conduite des affaires de l'assureur doit déclarer ses motifs à l'assureur et à l'Inspecteur général: "1° lorsqu'il a des raisons de croire que cette conduite est contraire à une disposition de la présente loi ou de ses règlements, à une disposition de toute autre loi, à une ordonnace de l'Inspecteur général ou au Code criminel; "2° lorsqu'il a des raisons de croire que cette conduite a pour effet de détériorer la situation financière de l'assureur. "L'administrateur qui de bonne foi produit une telle déclaration n'encourt aucune responsabilité civile de ce fait." Mme la ministre.

Mme Robic: Cet article, M. le Président, est inspiré des articles de la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit et de la Loi sur les sociétés de fiducie.

M. Boisclair: Adopté.

Obligations de divulgation

Le Président (M. Farrah): L'article 285.7 est adopté. Maintenant, section III, obligations de divulgation. L'article 285.8. Tout administrateur d'un assureur qui a un intértêt qui est en conflit avec celui de l'assureur doit, sous peine de destitution de ses fonctions, dénoncer son intérêt, s'abstenir de voter sur toute question reliée à cet intérêt et éviter d'influencer la décision s'y rapportant. Il doit également se retirer de la réunion pour la durée des délibérations et du vote relatifs à cette question."

Toute autre personne qui occupe des fonctions de dirigeant et qui a un tel intérêt doit, sous peine de destitution de ses fonctions, dénoncer par écrit son intérêt à l'assureur. En outre, elle ne doit en aucune façon tenter d'influencer la décision des administrateurs." Mme la ministre.

Mme Robic: C'est...

M. Boisclair: Oui.

Le Président (M. Farrah): Ça vous va?

Mme Robic: Oui.

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 285.8 est adopté. J'appelle l'article 285.9. "Un administrateur ou un dirigeant est réputé avoir le même intérêt que celui d'une personne qui lui est liée."

M. Boisclair: Ça va.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.9 est adopté. "285.10 Toute personne destituée de ses fonctions pour avoir contrevenu à l'article 285.8 ou qui démissionne après avoir contrevenu à cet article devient inhabile à siéger comme administrateur de tout assureur pendant une période de cinq ans à compter de sa destitution ou de sa démission."

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): Ça va. L'article 285.10 est adopté. "285.11 Lorsqu'un administrateur ou un dirigeant contrevient à l'article 285.8, le tribunal, à la demande de l'assureur, d'un actionnaire ou d'un membre, d'un assuré ou de l'Inspecteur général, peut, entre autres mesures, ordonner à cet administrateur ou à ce dirigeant de rendre compte et, le cas échéant, de remettre à l'assureur le profit réalisé."

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.11 est adopté. "285.12 Un administrateur ou un dirigeant d'un assureur doit, dans les trois mois de sa nomination ou de son élection et par la suite annuellement, déclarer au conseil d'administration de l'assureur, par écrit et sous serment, ses intérêts dans toute entreprise. "Un administrateur ou un dirigeant ne peut exercer ses fonctions tant qu'il est en défaut d'exécuter cette obligation. Le vote d'un administrateur qui malgré cette interdiction exerce ses fonctions, ne peut être déterminant. "Toutefois, aucune déclaration d'intérêt n'est requise pour la détention, par une personne et celles qui lui sont liées au sens de l'article 49, de moins de 10 % des actions émises par une corporation ou des droits de vote rattachés à de telles actions." M. le député de Gouin.

M. Boisclair: La présente loi est muette à ce sujet d'obligation de divulgation; c'est un nouvel article qu'on ajoute. Est-ce qu'on prévoit des dispositions parce qu'au moment de l'entrée en vigueur de la loi toute la période de trois mois va s'appliquer et qu'il y a des dispositions transitoires ou des...

Mme Robic: M. Bouchard.

M. Bouchard: Ça ne crée pas de problème

parce qu'il n'y a pas de rétroactivité. On dit: Dans les trois mois de sa nomination.

M. Boisclair: Oui, justement.

M. Bouchard: Alors, lors de la prochaine assemblée, ils devront se conformer.

M. Boisclair: C'est à partir de la prochaine assemblée qu'ils vont devoir s'y conformer, l'assemblée générale. Adopté.

Comité de déontologie

Le Président (M. Farrah): Ça va. L'article 285. 12 est adopté. Section IV, comité de déontologie. "285. 13 Un assureur doit former un comité de déontologie au sein de son conseil d'administration. "Ce comité se compose d'au moins trois administrateurs dont la majorité n'est pas constituée: "1° de dirigeants et employés de l'assureur; "2" de membres d'un autre comité du conseil d'administration; "3° d'administrateurs, dirigeants, autres mandataires et employés d'une corporation affiliée à l'assureur; "4° si l'assureur est une société mutuelle d'assurance, d'administrateurs, dirigeants et autres mandataires de la fédération à laquelle elle est affiliée, de la corporation de fonds de garantie dont elle est membre ou d'une corporation faisant partie du même groupe que cette fédération; (11 h 15) "5° d'actionnaires qui détiennent 10 % ou plus des droits de vote rattachés aux actions émises par l'assureur ou par une corporation affiliée à l'assureur ou 10 % ou plus de telles actions. "L'Inspecteur général peut autoriser la formation d'un comité dont la composition ne répond pas aux prescriptions du deuxième alinéa lorsqu'il estime que les circonstances le justifient. "

À l'article 285. 13, Mme la ministre, avez-vous des commentaires?

Mme Robic: Oui, M. le Président. L'article détermine des règles quant à la composition du comité de déontologie et confère à l'Inspecteur général le pouvoir d'autoriser une autre composition lorsqu'il estime que les circonstances le justifient. Pour une petite compagnie, par exemple, où ce serait difficile d'avoir plusieurs comités, l'Inspecteur pourrait juger que les mêmes personnes pourraient servir sur plusieurs comités. On va le voir à l'article 285. 14. Elles pourraient cumuler des responsabilités si l'Inspecteur général le jugeait approprié.

M. Boisclair: Là, on pourrait étudier dans un bloc les articles 285. 13 à 285. 16. Mme Robic: C'est juste.

Le Président (M. Farrah): 13, 14, 15, 16.

M. Boisclair: 13, 14, 15 et 16.

Le Président (M. Farrah): Ils sont tous interreliés, il n'y a pas de problème.

Mme Robic: C'est ça.

Le Président (M. Farrah): Alors, s'il y a consentement, moi, je n'ai aucune objection.

M. Boisclair: Le comité de déontologie adopte des règles pour l'application à l'assureur... il doit veiller à l'application de ces règles et aviser sans délai le conseil d'administration de tout manquement grave à l'une de ces règles.

Ces règles portent notamment sur la conduite de l'assureur avec des personnes qui lui sont intéressées ou avec des personnes qui sont liées à ses administrateurs ou à ses dirigeants, sur les formalités et conditions des contrats avec des personnes intéressées... Là, on continue.

Je comprends qu'on insiste sur l'importance de la composition du comité de déontologie avec un certain nombre de règles, mais outre l'article 285. 14 au deuxième paragraphe, sur quoi le comité de déontologie va-t-il devoir statuer?

Mme Robic: M. Bouchard.

M. Boisclair: Sur quoi les règles vont-elles devoir porter? Je veux juste essayer de comprendre. Le comité de déontologie, on définit sa composition, mais quelles sont tes obligations du comité de déontologie? Il doit statuer sur... L'article 285. 14 en fait mention, mais la conduite de l'assureur avec des personnes qui lui sont intéressées ou avec les personnes qui sont liées à ses administrateurs ou à ses dirigeants, sur les formalités et conditions des contrats avec des personnes intéressées et sur la protection des renseignements à caractère confidentiel dont l'assureur dispose sur ses assurés. Ce sont les quatre éléments que vous définissez sur lesquels le comité de déontologie devra adopter des règlements. Vous vous êtes inspirée de ce qui se passe dans les sociétés de fiducie. Est-ce qu'on a l'expérience d'autres provinces où il existe des comités de déontologie semblables à ceux-là?

M. Bouchard: Le fédéral vient de proposer un comité qui s'appelle le comité de révision, mais c'est l'équivalent de notre comité de déontologie comme tel. D'abord, je vais répondre à votre question sur l'article 285. 14 et ensuite l'expérience vécue dans les fiducies. Le principe à la base de toute cette section, c'est un principe qui prévoit que les transactions avec les

personnes intéressées ne sont pas interdites, sauf quelques cas d'exception qui sont prohibées. Donc, c'est le principe du régime permissif.

Le régime permissif, la loi prévoit: à la condition que les transactions se fassent à la juste valeur marchande pour ne pas, justement, pénaliser l'institution financière comme telle. Mais une fois qu'on a dit ça, l'industrie doit se donner des règles pour que le système fonctionne suivant ces principes-là. Alors, prévoir, par exemple, que les personnes intéressées... Vous allez voir un peu plus loin quelles sont les personnes intéressées. Donc, de se donner des règles de structure interne, de contrôle interne, de mécanisme d'application, de faire en sorte que lorsque l'institution, à quelque niveau que ce soit, transige avec une personne dite intéressée, de ne pas oublier de suivre les règles fondamentales prévues et de se donner des procédures d'observance de ces règles qui porteraient sur tous ces points-là. En pratique, c'est ce que les compagnies de fiducie ont fait et c'est ce que Desjardins a fait. Il a dit à ses employés: N'oubliez pas les principes suivants lorsque vous faites affaire avec telle personne, telle personne ou telle personne. Et il énumère les critères qua l'employé doit suivre pour bien s'assurer que les règles sont faites. Vous allez voir également que, dans certains cas, le comité de déontologie va pouvoir déterminer ce qu'on appelle des transactions pour des sommes minimes. Il ne faut quand même pas exagérer non plus dans les transactions intéressées quand ça porte sur des sommes minimes. Le comité de déontologie va pouvoir statuer ce qui peut être considéré comme somme minime.

Donc, au fond, c'est ce que j'appellerais la grande charte que l'institution se donne pour appliquer chez elle ces règles de déontologie. On doit les recevoir. On ne doit pas nécessairement se substituer à eux; au contraire, c'est un partenariat qui existe entre la responsabilité partagée par l'industrie et par l'autorité de contrôle.

On doit les recevoir, on en prend acte, on les étudie et lorsqu'on trouve que vraiment tout ce qu'ils ont fait, c'est un peu dessiner à très larges traits un portrait qui mériterait d'être beaucoup plus précisé, eh bien, on leur dit: II me semble que vous n'avez pas fait votre devoir, que vous devriez resserrer davantage les liens, sans pour autant leur donner les directives comme telles. Quoique maintenant, avec la modification qui est apportée ici dans la Loi sur les assurances qui n'existait pas avant, l'Inspecteur général a un certain pouvoir de directive qui n'est pas contraignant, qui n'est pas celui qui se compare à "ordonnances" à l'article 46, à l'article 325.1. Ce ne sont pas des directives, au sens de la Commission des valeurs mobilières comme telle. Il ne faudra pas mélanger les termes, mais c'est une espèce de pouvoir d'ordonnance de l'Inspecteur qui est sanctionné par une injonction. En cas de contravention, l'Inspecteur pourra présenter une requête à la Cour supérieure pour obtenir une injonction, rendre exécutoire par le tribunal et non par un simple dépôt de l'ordonnance de l'Inspecteur général au greffe de la Cour supérieure.

Donc, au fond, à l'article 285.4, on donne la mission au comité en lui disant: Vous devez vous doter d'une charte de droits et libertés pour faire en sorte que les règles des transactions intéressées qui sont prévues dans la loi fonctionnent.

M. Boisclair: Mais, est-ce qu'il y a une obligation expresse qui est faite à l'assureur de déposer sa charte à l'Inspecteur général?

M. Bouchard: Vous avez l'article 285.15: Une copie de ces règles est également transmise à l'Inspecteur général.

M. Boisclair: Mais on ne fait pas mention, si ce n'est que lorsque...

M. Bouchard: Mais on ne les approuve pas, on ne sanctionne pas ces règles-là, on les reçoit. On les évalue. Ça ne nous empêche pas de parler, mais on ne peut pas dire: Vos règles sont inadéquates et on ne les accepte pas.

M. Boisclair: Pourquoi?

M. Bouchard: Parce que le gouvernement décide qu'il y a un partage. Autrement, on mettrait le comité de déontologie en tutelle. Est-ce qu'on prévoirait une espèce de tutelle ou un désaveu, un droit de désaveu?

M. Boisclair: Non, mais sans mettre un droit de désaveu, il pourrait rendre des recommandations qui pourraient être publiques.

M. Bouchard: Qui pourraient?

M. Boisclair: Qui pourraient être publiques. Vous n'êtes pas obligé d'ordonner à l'assureur de réviser son code de déontologie, mais, à tout le moins, vous pouvez rendre... Souvent, on voit ça dans le milieu de l'éducation, dans bien d'autres secteurs. Un exemple me vient en tête: Chaque institution d'éducation est obligée d'adopter une politique institutionnelle d'évaluation et d'apprentissage.

Mme Robic: Vous n'êtes pas dans le privé, là.

M. Boisclair: Je comprends tout à fait. Je prends un tout autre secteur.

Mme Robic: M. le Président, connaissant notre Inspecteur général des institutions financières, si un comité de déontologie lui transmet-

tait ses règles et qu'elles n'étaient tout à fait pas sérieuses, je pense bien qu'il y a des appels téléphoniques et des conversations qui se feraient.

M. Boisclair: Mais, cependant...

Mme Robic: À ce moment-là, on tente de responsabiliser les administrateurs, on les oblige à créer un comité de déontologie. Je pense bien qu'il faut leur faire confiance. Ce sont des gens qui sont sérieux, des gens qui veulent faire un bon travail. Si on les responsabilise, vous avez vu que je serais tentée de dire que l'on ne leur rend pas nécessairement la vie plus facile, avec ce projet de loi-là. Et juste le fait de dire que copie de ces règles d'ordre doivent aller à l'Inspecteur, ils font faire un travail sérieux, je n'en doute pas. Sinon, je pense bien qu'on peut réagir.

M. Boisclair: Dans le fond, c'est beau créer des comités de déontologie, on peut tenir de beaux discours sur la protection de l'épargnant, mais c'est vraiment là le coeur du problème. Concrètement, et après l'application de la loi, les compagnies seront dans l'obligation de se doter d'un comité de déontologie. Est-ce qu'il y a, par exemple, un délai, ou vous vous attendez à ce que ce comité de déontologie soit créé... Je ne sais pas si, dans les dispositions transitoires, là, il y a...

M. Bouchard: Non, je comprends votre question, c'est que vous avez à la fin, concernant... Attendez un petit peu que je vous la trouve, 300... Bon, c'est une obligation, à 285.14, vous avez une obligation, c'est impératif. C'est vrai qu'il n'y a pas de délai, on ne dit pas "doit, dans les trois mois, ou à la fin de l'année, etc." Vous avez une obligation de constituer un comité de déontologie. Or, ça devient une responsabilité de l'assureur.

M. Boisclair: Oui.

M. Bouchard: Et si l'assureur ne s'y conforme pas, l'Inspecteur général va recourir à l'article 325.1, qui est son ordonnance...

M. Boisclair: Oui.

M. Bouchard: ...et si l'ordonnance n'est pas respectée - on a modifié l'article de pénalité - ça devient une infraction pour l'assureur comme tel, et si ce n'est pas suffisant, l'Inspecteur général peut recourir à 325.5, pour demander une injonction et forcer l'assureur à créer son comité de déontologie.

M. Boisclair: Quelle attitude, entendez-vous prendre... Vous vous attendez à quoi, comme délai?

M. Bouchard: Le délai ne sera pas là. Si je me fie, M. le député, à l'expérience des compagnies de fiducie, où là on démarrait, c'était vraiment du neuf, on a vraiment pris le milieu, je ne dirais pas au dépourvu, mais c'était pour lui un chambardement majeur et, en passant, juste pour vous reprendre une affirmation que Mme la ministre a faite tout à l'heure, vous n'avez pas idée jusqu'à quel point ça paraît insignifiant, mais c'est plus que psychologique, le simple fait de dire qu'une copie des règles est transmise à l'Inspecteur général, vous n'avez pas d'idée jusqu'à quel point ça les fatigue. Ça les fatigue, parce que même dans le cas des fiducies, parce que j'ai une obligation semblable, on court après les copies, puis on dit: On n'a pas reçu vos copies, comment se fait-il que vous êtes en retard, et combien de temps et pourquoi vous ne l'avez pas fait? Ça les fatigue. Je n'ai pas besoin d'un pouvoir coercitif épouvantable. Vous devez transmettre un rapport, vous ne l'avez pas fourni, pourquoi? Or, dans le milieu des institutions financières que vous connaissez bien, il y a des exceptions comme partout ailleurs, bien sûr, mais il y a aussi du professionnalisme, et les institutions financières sont dirigées par d©s personnes professionnelles, pour qui le respect de la loi est primordial. Donc, se faire dire qu'elles sont en infraction, c'est la pire des injures.

Je pourrais vous donner un exemple très rapide là-dessus. Une institution étrangère - je prends ce petit exemple-là pour vous démontrer jusqu'à quel point l'épiderme est sensible - une institution étrangère qui n'avait pas fait ses dépôts requis pour ses états financiers, on lui a fait deux rappels. Et le respect des échéances, vous savez que c'est primordial dans les méthodes de prévention, si les échéances ne sont pas respectées, ça ne veut plus rien dire, notre système tombe. Et comme ils ne l'ont pas fait, j'ai intenté des procédures en Cour des sessions de la paix contre cette compagnie-là, pour une amende minime; 600 $, je sais très bien que ce n'est pas 100 $. Mais j'ai reçu un téléphone du président de New York, qui me suppliait de retirer la demande, qu'il était prêt à payer 5000 $ s'il fallait, pour payer les avocats et les procureurs. J'ai dit: Non, l'amende est là, vous allez être condamné. Il ne voulait pas être condamné, parce que, pour lui, que la Cour des sessions de la paix condamne sa compagnie, c'était épouvantable. C'est un exemple que je vous donne pour vous dire que ça l'air de rien de dire qu'une copie est transmise à l'Inspecteur général, mais ça les fatigue. Alors, on va les réviser, bien sûr. (11 h 30)

M. Boisclair: Est-ce que, par exemple, dans votre rapport annuel, vous pourriez faire mention du nombre de... Reprenons la question, dans le cas des sociétés de fiducie, toutes les compagnies se sont dotées de comités de déontologie dans

des délais relativement acceptables.

M. Bouchard: Oui, oui. Il y en a qui se sont fait tirer l'oreille. Elles me donnaient des raisons, c'était un conseil d'administration qui était gros, Immense, avec des gens, enfin en conciliation d'intérêt, mais comme c'était le premier et qu'on Innovait, il ne fallait pas non plus être intransigeant, il fallait leur faire comprendre en quoi ça consistait. On bouleversait tellement les habitudes, c'étaient encore, vous savez, les sempiternels arguments: structurite, comité de trop, pas nécessaire, on l'a déjà, on a tout ce qu'il faut à l'interne, enfin tout ce genre d'argument qu'on peut entendre. On a eu la même chose dans le cas de Desjardins, ils ne l'ont pas accepté de gaieté de coeur non plus, le comité de déontologie, au niveau des fédérations. C'était épouvantable, des conseils de surveillance, elles n'avaient pas besoin de ça et ainsi de suite. Je ne suis pas si certain que ça qu'elles n'en avaient pas besoin. La preuve, c'est que là, elles vivent avec le système et puis, on les suit et on reçoit les plaintes du public, on sait où les référer. Ici, dans le cas des compagnies d'assurances, elles vont respecter la création du comité. La preuve, c'est que les préoccupations dont vous faisiez état hier, par exemple: Est-ce qu'il y a trop de comités? Est-ce que ça va devenir trop onéreux? C'est ça, la préoccupation et surtout pour les petites. C'est pour ça qu'il y a deux provisions aux articles 14 et 15 pour faire en sorte que le système, sans l'alourdir, puisse fonctionner en cumulant des responsabilités pour un même comité.

Mme Robic: Vous savez, M. le Président, c'est très grave. Si vous regardez tous nos articles, entre autres, l'article 285. 7 sur les obligations d'un administrateur qui démissionne, d'être obligé de faire rapport au conseil et à l'Inspecteur général. Vous savez, il y a des réputations qui sont en cause aussi. Les entreprises financières, vous savez comment c'est sensible et comment c'est important de conserver leur image au niveau du public et la confiance du public. Je pense que là-dedans, on a des articles qui font que, pour un administrateur, ça devient excessivement grave de manquer à ses obligations, telles que décrites dans le projet de loi.

M. Boisclair: Ça, je n'en disconviens pas, Mme la ministre. Il y a un élément plus important. On dit que les règles du comité de déontologie devront, entre autres, porter sur la protection des renseignements à caractère confidentiel dont l'assureur dispose sur ses assurés. Cette disposition, à moins que je ne me trompe, fait aussi partie de la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne. L'Inspecteur général formulera, suite à la réception du code des normes applicables pour le code de déontologie, un certain nombre de commentaires. À quoi vous attendez-vous sur cette question de protection des renseignements personnels?

Le Président (M. Farrah): M. Bouchard. M. Bouchard: Je m'attends...

M. Boisclair: Vous allez l'analyser on fonction d'un certain nombre de critères. Où se situe votre préoccupation à ce niveau-là? Qu'est-ce qui vous semble fondamental sur cette protection des renseignements personnels?

M. Bouchard: D'abord, le respect fondamental des renseignements nominatifs et surtout les ventes liées. Au fond, tout tourne à ça. Faire en sorte que moi, je me serve des renseignements que je peux posséder sur un client et transférer cette information-là à une autre personne du groupe...

M. Boisclair:... à une filiale.

M. Bouchard: Pardon?

M. Boisclair À une filiale ou à...

M. Bouchard: À une filiale quelconque ou à une autre personne du groupe pour faire une vente, sinon à pression, du moins faire une vente quasi liée, de telle sorte que le consommateur se voie dans une espèce de système de compression pour acheter des produits d'un seul conglomérat. Et ça, remarquez, c'est l'objectif, je ne vous dis pas qu'on va l'atteindre dans un an, dans deux ans. C'est un travail de longue haleine, ça. Mais au moins, la préoccupation, il faut qu'elle soit là, le problème, il est là pour le consommateur. Les institutions veulent développer des produits, elles veulent vendre, bien sûr. Le consommateur, lui, il faut le protéger. Il ne faut pas que le consommateur soit pris en souricière dans un système que, par ailleurs, on veut développer. Il y a deux éléments qui semblent en contradiction, mais qui, au fond, doivent être respectés avec autant d'importance.

M. Boisclair: Mais est-ce que vous attendez, entre autres... Parce que je n'ai jamais consulté ces codes de déontologie. Est-ce qu'ils seront publics?

M. Bouchard: Non. Ils ne seront pas publics. Les institutions ne veulent pas les rendre publics.

M. Boisclair: Donc, d'aucune façon, si un consommateur, par exemple, veut adresser une plainte au comité de déontologie, puisqu'il serait en droit - le comité de déontologie sera celui qui recevra les plaintes - il ne sera pas au

courant des dispositions - prenons l'exemple de la protection des renseignements personnels -qui s'appliquent.

M. Bouchard: Oui. Une des règles du comité de déontologie, c'est de faire en sorte qu'on indique que le consommateur, d'une certaine façon, est protégé. Mais la meilleure sauvegarde pour le consommateur, savez-vous où elle se trouve? C'est que j'ai une personne, presque deux personnes par année qui ne font que ça, recevoir des plaintes ou des renseignements, tant dans le secteur des fiducies, de l'assurance, que des caisses populaires. Et très souvent, le rôle de ces personnes-là, c'est de les informer, leur faire connaître leurs droits, leur faire apprendre, entre autres, que ça existe, et où s'informer. On leur demande de référer aux bonnes instances et s'ils n'ont pas satisfaction, de nous rappeler. Ça arrive très souvent d'ailleurs, même parfois la ministre reçoit des lettres de ces personnes-là qui se plaignent, et lorsque l'institution en question n'a pas adéquatement répondu, là, j'interviens officiellement auprès de l'institution pour lui dire: Tel renseignement ou pourquoi n'avez-vous pas répondu de façon satisfaisante à cette personne-là et qu'est-ce qui se passe dans le dossier?

M. Boisclair: Mais on a un droit ou on a un recours, tant et aussi longtemps qu'on est au courant qu'on a ce droit-là ou ce recours-là. Je conçois bien cette responsabilité-là...

Mme Robic: C'est vrai dans tous les domaines.

M. Boisclair: Oui, mais moi, je me demande, sur la protection des renseignements personnels, les renseignements nominatifs par exemple, si ce n'est que par les nouvelles techniques, que ce soit par le biais de l'informatique où, facilement, on peut avoir des renseignements sur la façon... Qui y a accès? Vous savez que ce n'est pas simple, la protection des renseignements personnels. Ça touche autant la responsabilité des employés, ça touche les critères de sécurité pour des gens qui ont accès à du matériel informatique qui contient des banques de données importantes. Ça touche une série de dispositions.

Mme Robic: C'est d'ailleurs ce que je disais tout à l'heure, quand on disait que le gouvernement est très sensible à cela. Que ce soit le ministre de la Justice, que ce soit le ministre des Communications, dans tous les domaines et avec la nouvelle technologie, ça nous donne la possibilité d'obtenir toutes sortes de renseignements. Comment est-ce qu'on va protéger le consommateur? Bien, il faut qu'on se penche sérieusement là-dessus. Dans le domaine des institutions financières, c'est un domaine très sensible. On veut permettre des synergies, on veut permettre la création de conglomérats, donc, on veut permettre qu'il y ait une raison économique de créer ces conglomérats. Mais en même temps, comment fait-on pour protéger le consommateur qui, lui, fait affaire avec les différentes entreprises d'un conglomérat? Et comment le protège-t-on devant l'obligation de faire une transaction liée? Comme est-ce qu'on le protège? C'est ce qu'on tente de faire ici en responsabilisant les administrateurs.

M. Boisclair: Pourquoi n'a-t-on pas précisé, dans l'article sur la protection des renseignements à caractère confidentiel, entre autres, quel genre d'utilisation des renseignements à caractère confidentiel pourrait être abusive ou contraire à ce qui vous semble opportun?

M. Bouchard: Non, remarquez, encore une fois... Je serais porté à vous répondre par une affirmation générale. C'est que le principe, à 285.14, c'est un peu comme l'article 1053 du Code civil. Je me dis: Tu ne peux pas créer dommage à autrui. Au père, on va déterminer ce que c'est. Dans une loi, je ne peux pas quand même tout prévoir, on ne peut pas tout dire.

M. Boisclair: Je comprends très bien, mais...

M. Bouchard: On s'en tient aux principes généraux. Et là, on énumère les principes qui doivent guider, en prenant le pari que le milieu va assumer cette responsabilité-là sans, par ailleurs, se sentir assumé, oui, mais pas tout à fait parce qu'en arrière, vos règles de déontologie vont être approuvées, supposons, par la ministre ou par l'Inspecteur général. Ce n'est pas ce que j'appellerais une autoparticipation dans une autodiscipline que l'on veut conférer.

Mais sans faire perdre confiance au milieu, disons que le législateur s'est conservé une prudence élémentaire. Il dit ça à l'article 285.14 et il va très loin en disant: Ce n'est même pas le conseil d'administration qui va le faire, on ne prend pas de chance. On prévoit un accroc au droit corporatif parce que vous savez, les seules délégations possibles, c'est mon comité exécutif. Et c'est le seul qui, normalement, pourrait être habilité pour avoir un pouvoir décisionnel. D'ailleurs, il a fallu qu'on le plaide, ça, au comité de législation, parce qu'ils savaient que c'était un accroc qu'on faisait. On a dit: Non, c'est important. C'est tellement important, le comité de déontologie qu'on veut créer, on veut tellement discipliner le milieu, lui donner une responsabilité très grande, qu'on en fait une émanation du conseil d'administration à l'état réduit, un groupe composé en majorité seulement d'administrateurs et composé en majorité de personnes qui ne sont pas des personnes intéressées. C'est onéreux, ça, tellement que cette compagnie dit: Écoutez, là, il va falloir trouver du monde, nous autres, parce qu'à nos conseils

d'administration, c'est pas si certain que ça qu'on... Ah! c'est votre responsabilité d'en trouver. Bon. Puis on dit: Vous devez suivre les principes de l'article 14. Et on dit: On regarde aller et on va faire confiance. Oui, mais par ailleurs, par règlements, notre filet de sécurité, il est là. Et le gouvernement, par règlements, va venir soit suppléer, soit compléter les carences qu'il pourra voir à l'article 285.14, sans par ailleurs annihiler ce qui pourra être fait par ce comité-là.

Et c'est pour ça que le papillon que vous avez, M. le député, est tellement important, il est différent de ce que vous avez dans le projet de loi. "ap) déterminer des normes quant à l'usage qu'un assureur peut faire de l'information qu'il possède sur ses assurés ou sur les clients d'une autre institution financière dont il offre les produits." C'est immense, le filet, il est là. On dit: On fait confiance, oui, vous avez ce qu'il faut pour fonctionner, mais n'oubliez pas que si vous ne le faites pas, il y a quelqu'un quelque part qui va intervenir et il va vous les imposer, les normes.

M. Boisclair: Le papillon se glisse à quel article?

Le Président (M. Farrah): Le papillon, il est à 23.

M. Boisclair: Celui dont on pariait.

Le Président (M. Farrah): Ah! je m'excuse...

M. Boisclair: C'est à l'article 50.

Le Président (M. Farrah): Je m'excuse, M. le député de Gouin. Est-ce que la discussion est terminée sur le comité de déontologie, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Sur l'article 14, oui.

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 285.13 est adopté.

Mme Robic: On est à l'article 14.

Le Président (M. Farrah): L'article 285... Non, mais c'est une discussion en bloc. L'article 285.13, c'est adopté, l'article 285.14, adopté.

Mme Robic: Excusez-moi, M. le Président.

M. Boisclair: Non, mais j'en suis à l'article 15. Une copie des règlements est transmise à l'Inspecteur général. On ne spécifie pas qu'il fera des commentaires. Juste ça, ça ne vous convainc pas... Votre expérience...

M. Bouchard: Pour les raisons que je vous ai données tantôt, seulement ça, M. le député, je vous avoue que si...

M. Boisclair: Ça les fait grimper...

M. Bouchard: ...la ministre enlevait ce bout de phrase là, elle ferait beaucoup d'heureux.

M. Boisclair: Et on n'ajoute même pas, pour...

M. Bouchard: Je ne lui conseillerais pas de le faire, par exemple.

M. Boisclair: Même pas pour évaluation ou pour... On ne spécifie pas, là... On vous fait confiance.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.15 est adopté. J'appelle l'article 285.16.

M. Boisclair: O.K. En plus de ça, à l'article 285.16, le conseil d'administration va pouvoir donner des mandats au comité de déontologie. Ces rapports d'activités là non plus ne seront pas publics. (11 h 45)

Mme Robic: Non. J'ai réellement donné le terme.

M. Boisclair: Où est-ce qu'on spécifie que ces documents-là ne seront pas publics?

Le Président (M. Farrah): Monsieur... Mme Robic: Oui, certainement.

Le Président (M. Farrah): ...pouvez-vous vous identifier, pour le Journal des débats, s'il vous plaît?

M. Boivin (Richard): Richard Boivin, Surintendant des assurances. L'article 16 de la Loi sur les assurances prévoit un pouvoir discrétionnaire à l'Inspecteur général. Alors, il peut, à sa discrétion, décider qu'un renseignement est confidentiel ou pas.

M. Boisclair: O.K.

Le Président (M. Farrah): Ça va, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Oui.

Le Président (M. Farrah): Article 285.16...

M. Boisclair: C'est quand même aussi intéressant de voir que vous ajoutez le cas où les règles adoptées par le comité n'ont pas été respectées. Donc, le comité aura l'obligation, dans le fond, de divulguer les cas où les règles du comité...

M. Boivin: Ça va avec le rôle du comité effectivement de s'assurer que les règles qu'il a approuvées soient effectivement suivies et le rapport de la supervision qu'il aura faite devra effectivement tenir compte de ces manquements aux règles de déontologie.

M. Boisclair: Est-ce que l'Inspecteur général des institutions financières va disposer de ressources supplémentaires pour exercer ces nouvelles responsabilités? Est-ce que ça va impliquer, pas une réorganisation, mais l'embauche de personnel supplémentaire? Comment l'Inspecteur général va-t-il s'acquitter de ses nouvelles responsabilités parce que ce ne sera pas une chose simple? Il y a un paquet de codes de déontologie qui vont lui arriver. Il doit analyser les rapports annuels. Il doit...

Mme Robic: M. le Président, bien des choses dont le député parle en ce moment sont déjà faites par l'Inspecteur. Il n'y a rien de nouveau là-dedans. Mais il a absolument raison, au moment où on décloisonne, au moment où on permet à des compagnies d'aller dans des champs d'activité nouveaux, il est bien sûr qu'on tente de donner plus de pouvoirs à notre Inspecteur pour protéger les épargnants et c'est certainement pour moi important de m'assurer qu'il est bien équipé pour faire son travail.

M. Boisclair: Je vais poser la question à M. Bouchard, si vous permettez. Est-ce que dans l'organisation interne chez vous, vous prévoyez l'embauche de personnel supplémentaire pour faire l'analyse, par exemple, des... Écoutez là, ce n'est pas simple, vous allez en recevoir un maudit paquet.

M. Bouchard: Si ce n'était que ça.

M. Boisclair: Ça va prendre... Ça va prendre... Ça prend quelqu'un.

M. Bouchard: Si je n'avais que ce problème-là pour des effectifs, vous m'aiderez à plaider ça au Conseil du trésor. Mme Robic connaît mes sentiments là-dessus.

Mme Robic: M. le Président, je l'ai dit publiquement que je crois qu'il est très important de bien équiper notre Inspecteur général, nos organismes, pour qu'ils puissent faire leur travail adéquatement.

M. Boisclair: Est-ce que vous estimez réaliste, avec les nouvelles obligations qui sont faites aux compagnies d'assurances, qui devront vous soumettre un code de déontologie que vous devrez analyser, qui devront vous soumettre un rapport annuel contenant un certain nombre d'informations, qui devront elles aussi être analysées... Vous devrez faire des recommanda- tions. Vous devrez faire un suivi sur les recommandations. Ce n'est pas une mince tâche dont vous héritez. Est-ce que vous vous estimez suffisamment bien équipée avec les budgets que vous avez à l'heure actuelle pour répondre à ces nouveaux besoins?

M. Bouchard: Bon, remarquez que ça, c'est vrai. Mais je ne le mettrais pas en tête de liste de mes priorités pour justifier les effectifs requis pour la supervision dorénavant du système des institutions financières dans la province de Québec. Dans le système dans lequel nous vivons, la multiplication et la prolifération des produits par institution, les difficultés de contrôle parce que vous avez différents niveaux d'institutions et de conglomérats financiers, les nouvelles règles qui s'installent dans le marché font que la surveillance et le contrôle doivent suivre des impératifs beaucoup plus rigoureux que ce qui existait il y a seulement quelques années. Ce n'est qu'une responsabilité additionnelle, une responsabilité additionnelle qui n'est pas à minimiser, loin de là, par rapport aux normes de solvabilité, par exemple, et par rapport aux pratiques financières, par exemple.

On s'interroge, on discute beaucoup et on met l'accent sur les normes de solvabilité. Mais est-ce qu'on songe que ce qui est aussi important, peut-être davantage, parce que ça arrive, à la fin, sur les normes de solvabilité: les pratiques financières suivies par les. institutions financières? Est-ce qu'elles ont de saines pratiques financières? Dans ce projet de loi, on a des principes partout. L'Inspecteur général doit s'assurer que les institutions financières ont de saines pratiques financières. Là, on a tout écrit, on a tout dit. Parfait, tout le monde dort tranquille. Mais comment faire, ensuite, pour assurer ça? Ça prend de la compétence, ça prend du personnel, ça prend des effectifs. C'est ce que je dis constamment à la ministre qui en est convaincue. Ce n'est pas elle que je dois convaincre, mais les organismes centraux qui ont des points de vue différents.

M. Boisclair:... le président du Conseil du trésor, mon bon ami.

Le Président (M. Forget): Alors, est-ce que l'article 285. 16 est...

Mme Robic: Non, mais, M. le Président, je voudrais dire ici que ce n'est pas une question de mauvaise volonté. C'est une question tout à fait budgétaire qui nous affecte tous. Mais, encore là, je suis fort consciente que l'institution du bureau de l'Inspecteur doit être bien équipée et avoir les ressources nécessaires pour faire son travail adéquatement.

Le Président (M. Forget): Est-ce que l'article 285. 16 est adopté dans son entier?

M. Boisclair: Un instant, M. le Président. J'en suis encore à l'article 285.16. Juste le relire une dernière fois. Est-ce qu'il n'aurait pas été opportun, par exemple, d'ajouter dans le rapport du comité de déontologie les décisions qui ont été prises par le comité? Je prends l'exemple de quelqu'un qui fait une plainte. Le comité aura à rendre une décision. On fait mention de la composition, de la teneur des mandats, des conflits d'intérêts, des transactions intéressées.

M. Bouchard: Oui. Je répondrais peut-être que ça aurait pu être utile. Mais, encore une fois, la crainte qui était à la base de la rédaction, il fallait le faire avec beaucoup de prudence aussi pour ne pas donner l'impression que le comité de déontologie, qui était censé être une émanation du conseil d'administration qui a sa responsabilité comme telle, transmettre au fond, ses décisions. C'est sa responsabilité, comme comité de déontologie, de le faire. Alors, l'Inspecteur n'a pas à se substituer aux décisions prises par le comité de déontologie, pas plus que la Cour supérieure ne va se substituer à une instance inférieure.

Donc, il y avait quand même l'idée du respect du conseil. Et [e me rappelle les discussions qu'on avait eues dans le cas des compagnies de fiducie et de Desjardins où les gens étaient très chatouilleux sur cet aspect de cette espèce d'omniprésence. Un Inspecteur général, c'est cette espèce de mal nécessaire ou de mal aimé, si vous voulez. Mais quand vous le voyez à quelque part et que vous transmettez des documents, ça prend l'allure d'une espèce de pouvoir empirique exorbitant qui fait qu'on s'immisce même dans la gestion interne, qui leur donne l'impression qu'ils n'ont plus de marge de manoeuvre, qu'ils n'ont même plus de décisions à prendre, même s'ils en prennent une, que ça doit être connu. Est-ce que c'est vraiment nécessaire dans le contexte actuel?

Mais il y a quelque chose quand même. Il y a quelque chose qui pourrait être utilisé dans des cas extrêmes. C'est comme le président des États-Unis. Il peut déclarer une guerre nucléaire, mais il ne le fait pas tous les jours. Il a le pouvoir de le faire. Avec le nouvel article qu'on a inséré, on a étendu les pouvoirs d'un Inspecteur général pour demander les renseignements. On va le voir un peu plus loin. Demander tout renseignement nécessaire pour l'application de la loi. Alors, si, à partir d'un cas d'espèce, sans vouloir généraliser, on a des plaintes, par exemple, sur un comité de déontologie et on a raison de croire que, là, il s'agit d'une pratique financière, non pas d'une pratique financière comme telle, parce que ce n'est pas nécessairement relié à des opérations financières, mais que l'assureur ne respecte pas, par l'entremise de son comité de déontologie - parce que comité de déontologie, conseil d'administration, c'est du pareil au même - l'esprit de la loi, là, on pourra se prévaloir de l'article qu'on verra un peu plus loin, l'article 316, pour demander tous les rapports que nous jugerons nécessaires sur le comité de déontologie pour juger de sa pertinence. Mais ça sera un cas extrême. On ne pourra pas dire qu'on le fait systématiquement et que tous ces rapports-là seront transmis et que là, les officiers, l'Inspecteur et le personnel rentrent dedans.

M. Boisclair: Est-ce que dans votre rapport annuel, vous ferez un survol de l'application, par exemple... Je n'ai pas pris connaissance du dernier rapport annuel qui a été déposé récemment en Chambre, si je ne me trompe pas. Est-ce que vous faites un rapport de l'application de la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit? Entre autres, est-ce que, par exemple, il serait possible de croire que, dans votre prochain rapport annuel, vous ferez état en disant: Sur x compagnies d'assurances, tant se sont dotées de comité de déontologie, tant ne l'ont pas fait, mais devraient s'y conformer dans un avenir prévisible.

M. Bouchard: Non.

M. Boisclair: Est-ce que, d'une façon ou d'une autre... Bien, un peu comme le Vérificateur général le fait sur un certain nombre de critères qu'il détermine: Voici, tant de ministères ont fait telle action. Tant se sont conformés. D'autres ne le font pas. D'autres le feront bientôt. Est-ce qu'il serait possible de croire que dans votre rapport annuel, c'est un genre de sujet que vous pourrez aborder sans, bien sûr, mentionner les noms, mais, à tout le moins, donner un survol pour informer les parlementaires de l'efficacité de ces comités de déontologie?

Mme Robic: Je pense que les parlementaires ont tous la possibilité d'obtenir cette information-là au moment de la défense des crédits où, là, vous passez en revue chacun des organismes et à ce moment-là, l'Inspecteur est en mesure de répondre à ce genre d'inquiétude que vous pourriez avoir.

M. Boisclair: L'Inspecteur doit rendre compte de ses activités une fois par année...

Mme Robic: C'est juste.

M. Boisclair: ...dans le cadre d'un rapport annuel qu'il dépose à l'Assemblée nationale. Moi, ce que je veux savoir, c'est si, dans le cadre de cette obligation qui lui est faite... Là, je ne sais pas s'il est obligé de le faire. Je lui demande. Est-ce qu'il serait possible de croire que vous pourriez faire présenter un état de la situation dans votre rapport annuel? Est-ce que, par exemple, dans votre rapport annuel, vous faites mention des plaintes que vous recevez?

M. Bouchard: Non. On n'indique pas... Vous ne l'avez pas dans le rapport annuel que l'Inspecteur fait sur les assurances. L'Inspecteur général, il fait beaucoup de rapports qui sont déposés à l'Assemblée nationale, un rapport spécifique sur les assurances, un rapport sur les caisses d'épargne et de crédit, un rapport sur la loi sur les fiducies, un rapport sur la tarification. Je n'ai pas l'impression que ce sont des best-sellers qui sont lus par tout le monde comme Anatole.

M. Boisclair: Non.

M. Bouchard: Et un rapport de l'Inspecteur général sur ses activités, sa responsabilité comme Inspecteur général. Dans ce dernier rapport, on étudie tous les services de l'Inspecteur et il est indiqué le nombre de plaintes que nous avons reçues et les renseignements que nous avons traités par division: la Direction générale des assurances, la Direction générale des institutions de dépôt et la Direction générale des intermédiaires de marché. On indique les activités du personnel. Dans le rapport qui est fait sur l'état des affaires des institutions financières, c'est un rapport financier qui ne contient pas et ne contiendra jamais des renseignements de nature confidentielle et qui portent sur les infractions ou l'observance de la loi. C'est un rapport qui vous indique les assurances...

M. Boisclair: Oui.

M. Bouchard: ...que vous connaissez, même chose sur les fiducies et même chose sur les caisses. C'est un rapport qui indique l'état de la situation, le nombre d'assureurs, les actifs, les passifs, les primes, le pourcentage, ainsi de suite. C'est un rapport statistique sur l'état des affaires. Il n'y a pas de rapport public sur l'état des compagnies ou l'état de l'observance de la loi comme telle. Ce rapport-là, les renseignements sont fournis à la ministre de façon confidentielle. (12 heures)

M. Boisclair: C'est quand même intéressant. Parce que se demander jusqu'à quel point le consommateur... Parce que c'est la aussi tout l'élément de la question. Il faut que. d'une façon ou d'une autre, le consommateur soit informé de ses droits. Et moi, je n'ai jamais vu, soit dans une compagnie d'assurances ou une institution bancaire, des gens nous faire part de l'existence de comités de déontologie ou de recours devant l'Inspecteur général ou...

Mme Robic: Mais, d'un autre côté, on sait fort bien que ceci étant un domaine sensible, le consommateur qui se sent lésé ou qui se sent mal servi ou qui pense qu'il l'a été, qui a eu un problème important avec une institution financière, je pense bien qu'il ne s'en va pas chez lui pour tenter d'oublier ça, il va agir là-dessus et c'est au niveau des officiers qu'il va agir souvent. On responsabilise nos dirigeants, on crée, on leur demande de créer des comités de déontologie. Ces gens-là sont responsables des décisions qu'ils prennent et avec possibilité de sanctions. Alors, je pense que ce que l'on fait là, c'est très important et ça protège certainement le consommateur, hein! Le consommateur qui s'en va sur la place publique, vous savez ce que ça peut représenter pour une institution financière. Alors, il a des moyens importants à sa disposition, ce consommateur-là. Mais, également, M. le Président, et je le dis: On tente de responsabiliser tous les niveaux, puis il faut responsabiliser également le consommateur. Il est d'ailleurs de plus en plus averti. Et je pense qu'il a des moyens importants à sa disposition s'il veut s'en servir, s'il n'obtient réellement pas satisfaction auprès de son institution.

M. Boisclair: Nul doute, en tout cas, que c'est un pas en avant comparativement à la loi actuelle. Ça, c'est sûr que personne ne va le contester.

Mme Robic: Mais, encore une fois, c'est révolution. Les besoins ont changé, les conditions ont changé; peut-être que ce n'était pas évident en 1984 que ces besoins étaient là. Aujourd'hui, on s'en rend compte et on essaie de bonifier, justement, la loi de 1984.

M. Boisclair: O.K. Adopté, M. le Président. Est-ce qu'on pourrait suspendre juste deux minutes?

Le Président (M. Forget): Oui, on peut suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 12 h 3)

(Reprisée 12 h 4)

Le Président (M. Forget): L'article 285.16 est adopté. J'appelle l'article 285.17. Alors, Mme la ministre, des commentaires?

Transactions avec des personnes intéressées

et avec des personnes liées aux

administrateurs et dirigeants

Mme Robic: Alors, M. le Président, c'est une nouvelle section qui traite des transactions avec des personnes intéressées et avec des personnes liées aux administrateurs et aux dirigeants. L'article détermine un principe selon lequel un assureur ou sa filiale doit transiger à distance à l'égard des personnes intéressées à l'assureur et des personnes liées aux administrateurs et dirigeants de l'assureur.

M. Boisclair: La contestation dont il fait mention... À quel genre de contestation fait-on référence?

Mme Robic: M. Bouchard.

M. Bouchard: Ah! Ça, c'est une règle, c'est un fardeau de la preuve qui est très onéreux pour l'assureur.

M. Boisclair: Bien oui, c'est ça. Il appartient à l'assureur ou à sa filiale de démontrer qu'il s'est comporté...

M. Bouchard: Exactement. Alors, comme on dit que c'est un régime... Au lieu de faire comme, par exemple, le gouvernement fédéral qui lui adopte la théorie du "ban transaction" sauf opérations permises, ici le ministre a une politique différente. C'est une...

Mme Robic: Libérale...

M. Bouchard: C'est une opération, mais à la condition que ce soit traité à distance avec responsabilité et fardeau de la preuve très lourd dont toute personne pourrait contester une décision, par exemple, un prêt ou une transaction qui interviendrait entre la compagnie d'assurances et une personne intéressée que vous allez voir plus loin, qui n'aurait pas été fait à distance et qui, à sa face même, ou suivant l'opinion de cette personne-là, confierait ou accorderait un privilège à cette personne-là, alors qu'il n'aurait pas dû, par exemple, l'actionnaire principal ou l'épouse de l'actionnaire principal. Dans un cas de contestation, c'est l'assureur qui a à démontrer qu'il a agi en traitant à distance. C'est lourd, mais ça, c'est le prix à payer avec le permissif.

Le Président (M. Forget): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Et vous pouvez autoriser, à certaines conditions... Juste rapidement, la contestation dont on fait mention, ça se fait devant qui? Quel recours? Devant les tribunaux? Elle pourrait venir de qui, par exemple?

M. Bouchard: Toute personne intéressée, suivant les règles du Code civil ou du Code de procédure civile. On l'a prévu à l'article 327, même c'est précisé à l'article 325.7: "L'inspecteur général, un assuré, un membre, un créancier.

M. Boisclair: O.K. Adopté.

Le Président (M. Forget): Adopté. L'article 285.17 est adopté. J'appelle l'article 285.18. Mme la ministre, vos commentaires.

Mme Robic: M. le Président, c'est un long article - je regarde tout ça - qui définit qui sont les personnes liées. Il y en a toute une série, M. le Président. On s'inspire là-dessus de la Loi sur tes caisses d'épargne et de la Loi sur les sociétés de fiducie.

Le Président (M. Forget): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Je veux juste prendre le temps de le lire attentivement, M. le Président.

Mme Robic: Oui.

M. Boisclair: Encore là, vous ouvrez la porte à des modifications.

Le Président (M. Forget): Mme la ministre.

M. Boisclair: Non, ça va. Encore là, vous ouvrez la porte à une modification possible à l'étendue de l'article 285 en vous réservant le pouvoir par règlements de modifier la portée de l'article. On dit bien: Toute personne déterminée par les règlements.

Mme Robic: C'est juste. Si on se rendait compte que la liste n'est pas exhaustive et qu'il y avait peut-être un nouvel arrivant sur la scène qui pourrait faire partie de ces personnes fiées, il faudrait pouvoir facilement l'inclure dans cette liste. Ou tout simplement, oui...

M. Boisclair: C'est ça...

Mme Robic: ...devant un rapport à l'Inspecteur qui pourrait juger que c'est en réalité, malgré qu'il ne fasse pas partie de ce groupe-là, une personne qui est liée.

M. Boisclair: L'article 14 est un article nouveau, qui ne s'inspire d'aucune loi existante et, à plusieurs reprises, on retrouve - à trois ou quatre reprises, on l'a vu dans l'étude du projet de loi - cette référence aux règlements. On l'a vu pour les acquisitions en aval, on le voit dans ce cas-ci et on l'a vu dans d'autres cas. C'est une préoccupation qui n'existait pas au moment de l'adoption de la loi sur les fiducies, en 1988, puisqu'on ne la retrouve pas, cette disposition-là. D'où vient cette préoccupation de ne pas tout se garder? Est-ce que c'est simplement parce qu'on veut être capable de se garder une certaine souplesse à procéder par le processus législatif?

Mme Robic: II y a ça. il y a également la réalisation avec le décloisonnement... Il y a une évolution qui se fait et on devrait... De là, la beauté d'avoir un Rapport quinquennal qui nous force à regarder, tous les cinq ans, la loi et à l'ajuster au besoin, mais il faut pouvoir agir, sans doute, rapidement à des moments donnés et c'est ce qu'on se donne. On veut avoir une loi

souple qu'on pourrait ajuster par règlements si le besoin était.

M. Boisclair: Si le besoin s'en faisait sentir. Mme Robic: C'est ça.

M. Boisclair: Je présume que vous tiendrez compte des différents règlements que vous aurez eu à adopter au cours des cinq prochaines années. Le prochain Rapport quinquennal est dû pour...

Mme Robic: 1994.

M. Boisclair: ...1994. Je présume qu'à ce moment-là vous ferez état des... De toute façon, on va spéculer, là, c'est encore loin. Oublions ça.

Mme Robic: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 285.18 est-il adopté, M. le député?

M. Boisclair: Ça ne sera pas long. Oui, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): L'article 185.18 est adopté. J'appelle maintenant l'article 285.19. "L'Inspecteur général doit aviser toute personne qu'il désigne comme étant intéressée conformément au paragraphe 15° de l'article 285.18 ainsi que l'assureur concerné par cette décision. "L'Inspecteur général peut, à la demande de la personne ainsi désignée ou de l'assureur concerné, réviser sa décision. "L'Inspecteur général doit, avant de rendre sa décision ou d'en refuser la révision, donner à la personne et à l'assureur concernés l'occasion d'être entendus."

M. Boisclair: Qu'est-ce qu'il en est? Est-ce qu'on pourrait...

Mme Robic: M. le Président, je voudrais revenir peut-être à l'article 285.18. Si vous regardez la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, vous retrouvez le même article presque: Toute autre personne dont les intérêts ou rapports avec une caisse sont, de l'avis de l'Inspecteur, susceptibles d'influencer les placements et les transactions. Alors, c'est à peu près... Ça veut dire la même chose. Alors, ici, à l'article 285.19, l'Inspecteur a une obligation d'aviser la personne qu'il désigne comme étant intéressée ou qui s'ajouterait à la liste des personnes intéressées ou liées.

M. Boisclair: Mais là, on fait une liste des personnes intéressées, à 285.18. À l'article 285.19: "L'Inspecteur général doit aviser toute personne qu'il désigne comme étant intéressée conformément au paragraphe 15°..." Le paragraphe 15°...

Mme Robic: Oui. O.K. C'est là que je vous disais que ça existe ailleurs.

Le Président (M. Farrah): Toute autre personne qui, de l'avis de l'Inspecteur général, est susceptible d'être privilégiée au détriment des intérêts de l'assureur ou de ses assurés."

M. Boisclair: Est-ce que ce processus de révision... Il y a des gens qui se sont prévalus des dispositions dans le cadre de la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, de cette possibilité, pour eux, de réviser votre demande de personnes que vous aviez désignées intéressées? (12 h 15)

M. Bouchard: Non, pas encore, parce que c'est tout récent, la loi sur les caisses. Ici, c'est le même principe que je vous ai expliqué, par exemple, pour les règles de capital qui sont déterminées par règlements, qui sont valables pour tout le monde. L'Inspecteur peut, dans un cas particulier, avoir des exigences particulières de capitalisation. Ici, ce qui est prévu à l'article 285.18 et complété par l'article 285.19, c'est par exemple un administrateur qui siège à un conseil d'administration et qui, par sa décision, favorise constamment un de ses amis. Ce n'est pas de la malice comme personne intéressée, mais on constate qu'à un moment donné, il y a une concentration de prêts toujours à la même personne. Alors, on dit: Ça commence à être dangereux, ça commence à devenir une relation privilégiée particulière. C'est l'équivalent, pour nous, d'une transaction intéressée.

M. Boisclair: À une personne intéressée.

M. Bouchard: Alors, là, l'Inspecteur va dire: Je dis que cette personne-là, c'est une personne intéressée. Par ailleurs, je ne peux tout de même pas juger comme ça sans entendre les parties. Alors, l'article 285.19 vient prévoir comment on le fait. On avise l'aviseur, on avise l'assureur. Les personnes en question font valoir leur point de vue, elles vont nous démontrer peut-être qu'on se trompe, peut-être que ce n'est pas vrai. Avant de les juger, il faut les entendre.

Le Président (M. Farrah): Est-ce que ça va, M. le député?

M. Boisclair: Comment les entendez-vous? Ça se fait par quel processus, concrètement?

M. Bouchard: On suit un peu... Enfin, remarquez qu'on ne l'a pas fait dans le cas des caisses d'épargne et de crédit, mais dans tous les cas d'audition - parce que dans toutes les lois, il y a des auditions, entre guillements, ce n'est pas une véritable audition de tribunal - c'est qu'on convoque les parties en leur donnant les raisons pour lesquelles on les convoque, donc, pour ne pas que les parties soient surprises. On donne un

délai suffisant, sauf que le délai peut être plus ou moins court, dépendant de l'urgence. Si j'ai une compagnie qui a un besoin urgent de capital et qui ne répond pas, on l'entend. On donne toutes les chances de les entendre, soit par procureur, soit directement, en respectant intégralement les règles de justice naturelle parce qu'on sait très bien que le tribunal pourrait nous renverser. Alors, il n'y a pas de chance à prendre quant aux règles de procédure. Ensuite, on prend la décision et on la transmet.

M. Boisclair: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 285. 19 est adopté. J'appelle l'article 285. 20 qui se lit comme suit: "Les opérations d'un assureur avec des personnes intéressées ou avec des personnes liées à l'un de ses administrateurs ou de ses dirigeants doivent être conformes aux dispositions de la présente loi, de ses règlements et, le cas échéant, aux règles adoptées par le comité de déontologie. ''

M. Boisclair: Là, il va donc falloir que le code de déontologie prévoie des dispositions à cet égard. Je suis convaincu que vous allez vous faire un devoir de vous assurer qu'il comporte des règles. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): L'article 285. 20 est adopté. J'appelle L'article 285. 21. "Un assureur ne peut investir dans: "1° la corporation qui le contrôle; "2° ta corporation qui lui est affiliée et qui exerce des activités autres que celles mentionnées aux paragraphes d. 1 et e du premier alinéa de l'article 245 sauf s'il s'agit d'un holding en aval; "3° la corporation qui détient directement ou indirectement 10 % ou plus des droits de vote rattachés aux actions de l'assureur ou 10 % ou plus de telles actions; *4° la corporation qui détient directement ou indirectement 10 % ou plus des droits de vote rattachés aux actions de la corporation qui le contrôle ou 10 % ou plus de telles actions; "5° la corporation qui contrôle la corporation visée au paragraphe 3°; "6° la corporation contrôlée par une personne qui détient directement ou indirectement 10 % ou plus des droits de vote rattachés aux actions de l'assureur ou 10 % ou plus de telles actions et, (e cas échéant, le conjoint de cet actionnaire, son enfant mineur et celui de son conjoint. "L'interdiction visée aux paragraphes 3° et 4° s'applique également à une personne physique, son conjoint, son enfant mineur et celui de son conjoint. "

Mme la ministre, avez-vous des commentaires?

Mme Robic: M. Bouchard, je pense que c'est très technique tout ça et j'aimerais peut-être que vous fassiez certaines remarques.

Le Président (M. Farrah): Allez-y, M. Bouchard.

M. Bouchard: L'article 285. 21, c'est le seul article qui interdit des transactions. Dans tout le système des transactions intéressées, vous avez vu au tout début, c'était permis. Ici, on vient limiter les cas où, même en traitant à distance, même en traitant à la juste valeur marchande, la transaction ne peut pas se faire. C'est vraiment limité au strict minimum, en ne partant pas de rien, mais en s'inspirant beaucoup de ce qui existait déjà à l'article 259 actuel qui interdisait tout prêt, tout investissement fait à l'actionnaire principal et en limitant, encore une fois, l'interdiction aux personnes qui sont véritablement les plus susceptibles d'influencer l'assureur ou la corporation qui la contrôle en sa faveur. Et là, c'est vraiment le "ban transaction" total.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: L'article 285. 21 vient préciser les domaines dans lesquels un assureur ne peut investir. Dans l'article 259 de la loi actuelle - là, je veux juste être bien sûr que je comprends bien - il y avait une liste restrictive avec laquelle un assureur ne pouvait consentir un prêt.

M. Bouchard: Mais, ça, c'est l'article 259 et l'article 262 qu'il faut lire ensemble, les deux articles actuels. L'article 259 porte sur les prêts et l'article 262 porte sur les titres.

M. Boisclair: C'est ça.

M. Bouchard: Donc, ils doivent être lus ensemble. Et vous voyez que la plupart de ces dispositions-là sont maintenues dans le nouvel article 285. 21, mais précisées en tenant compte d'un contexte tout nouveau de l'actionnaire principal. Non seulement celui qui contrôle, non seulement la maison mère, mais également l'actionnaire principal et les personnes liées à cet actionnaire principal là ou encore une notion très importante, par exemple, surtout dans le conglomérat financier: prenez l'exemple d'un empire comme Power Corporation, les institutions financières de Power Corporation ne peuvent pas financer le journal La Presse, puis elles ne peuvent pas financer les entreprises commerciales du groupe Des Marais. Ça, c'est interdit.

M. Boisclair Adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 285. 21 est adopté. J'appelle l'article 285. 22: "Une

transaction ayant pour objet l'acquisition par un assureur de titres émis par une personne intéressée ou le transfert d'actifs entre eux doit en outre être approuvé par le conseil d'administration de l'assureur qui, le cas échéant, prend avis du comité de déontologie. "Les mauvaises créances, les actifs improductifs ou les actifs repris d'un débiteur en défaut ne peuvent toutefois être transférés à un assureur sauf s'il s'agit d'un transfert d'actifs en bloc qui s'effectue dans le cadre d'une restructuration et que l'Inspecteur général a autorisé"." Mme la ministre.

Mme Robic: M. le Président, je pense que l'article parle par lui-même. Je n'ai pas de remarque particulière.

M. Boisclair: Ça va.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.22 est adopté. À l'article 285.23, nous avons un amendement.

Mme Robic: C'est juste.

Le Président (M. Farrah): Alors, je lis l'amendement. "À l'article 39, modifier l'article 285.23 par la suppression, dans la deuxième ligne du cinquième alinéa, des mots "ou sa filiale"."

Alors, dans un premier temps, on pourrait adopter l'amendement puis passer à l'article après. Ça vous va, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Oui, oui. Juste sur l'amendement.

Le Président (M. Farrah): Allez-y.

M. Boisclair: Quelle est la différence entre une filiale et une corporation qui lui est affiliée?

Mme Robic: M. Bouchard. Une filiale et?

M. Boisclair: Une corporation qui est affiliée à...

M. Bouchard: Affiliée, c'est ma soeur. M. Boisclair: Oui.

M. Bouchard: Tandis qu'une filiale serait en ligne descendante.

M. Boisclair: Pourquoi enlève-ton la filiale?

Mme Montminy: En fait, si je peux me permettre, c'est que le premier alinéa...

Le Président (M. Farrah): Mme Montminy, c'est ça?

Mme Montminy: Oui, c'est ça. Danièle

Montminy. Le premier alinéa introduit une règle applicable aux assureurs par rapport aux personnes intéressées, mais elle ne s'applique pas à la filiale. Alors, c'est un amendement de concordance tout simplement qu'on apporte au quatrième alinéa puisque là, c'est l'exception à la règle.

Le Président (M. Farrah): Est-ce que l'amendement à l'article 39...

M. Boisclair: Je comprends.

Mme Montminy: C'est ça. C'est à peu près une coquille finalement qui s'est glissée dans le projet.

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 285.23 est adopté tel qu'amendé?

M. Boisclair: C'est intéressant de voir que, encore là, c'est une obligation qu'on donne au comité de déontologie de juger si les sommes sont minimes. C'est donc une autre responsabilité qui s'ajoute à toutes celles qui étaient inscrites à l'article du projet de loi qui traitait de cette question. La décision du comité de déontologie à cet égard sera finale.

Mme Robic: Ici, on permet la synergie, mais à certaines conditions, hein?

M. Boisclair: Ça va être du sport dans l'application, ça, hein? Je me vois faire partie d'un comité de déontologie.

Mme Robic: Avec un conglomérat qui a des branches partout, hein?

M. Boisclair: Est-ce que vous allez fournir un support quelconque aux entreprises pour la création de ces comités de déontologie-là, pour leur faire comprendre la loi et les obligations qui sont faites aux comités de déontologie? Est-ce que vous prévoyez un certain support aux entreprises de ce côté-là?

M. Bouchard: Les compagnies communiquent avec nos professionnels constamment pour les aider même à composer le code de déontologie. Sans leur donner de modèle, on les aide à mettre sur pied le système. On leur fait comprendre comme il faut. Par exemple, pas plus tard qu'hier, j'ai reçu, en prévision de cette loi-là qui est déposée maintenant par la ministre depuis un mois, une des plus grosses compagnies du Québec qui est sur le point de nommer ses conseils d'administration. Ils sont tous sur le point d'avoir leur assemblée annuelle de la fin de janvier. Il faut bien s'assurer que tous ces conseils d'administration, partout dans les filia-

les, parce qu'on a vu tout à l'heure qu'on ne peut pas siéger à différents conseils d'administration d'assureurs dans un môme groupe, sauf si on fait partie d'un groupe. Alors, elle n'a pas pris de chance. Elle m'a envoyé trois feuilles avec des x partout de personnes qui pouvaient siéger: Est-ce que c'est correct? Si je les nomme à ces postes-là, est-ce que ça va être correct? Alors, elles sont préventives.

Le Président (M. Farrah): Ça va, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Oui.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.23 tel qu'amendé est adopté. J'appelle l'article 285.24. J'aurais peut-être une petite suggestion à vous faire, si vous permettez. Même si on dépasse la demie un peu, si on pouvait finir l'article 39 au complet, étant donné qu'on a discuté de l'ensemble des articles. C'est une suggestion tout simplement. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Boisclair: Ah oui, oui, oui! Je consens, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Est-ce qu'il y a consentement? D'accord, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Oui, oui. Je consens.

Le Président (M. Farrah): On aura fait ce bloc-là, je pense. Ce sera intéressant.

Mme Robic: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Alors, je vous remercie de votre bonne collaboration. L'article 285.24 se lit comme suit: "Un assureur ne peut consentir de prêts à une personne intéressée ou à une personne liée à l'un de ses administrateurs ou de ses dirigeants à des conditions plus avantageuses que celles qu'il consent dans le cours normal de ses opérations, sauf si cette personne est l'un de ses employés." Mme la ministre, vous avez des commentaires en regard de cet article?

Mme Robic: Non. Là, encore, l'article est clair, M. le Président. On ne défend pas, on permet, mais à certaines conditions.

M. Boisclair: Peu importe la somme impliquée?

Mme Robic: Oui. Du moment...

M. Bouchard: Sauf qu'à l'article suivant, vous allez voir qu'on a un tempérament quand même pour certaines choses, pour les administrateurs et les dirigeants, vous avez. C'est le montant de la rémunération ou le montant de la valeur de l'hypothèque. Alors, c'est garanti.

M. Boisclair: Dans bien des cas, c'était limité à 25 000 $, si je ne me trompe pas.

M. Bouchard: Oui, mais au lieu des 25 000 $ ici, on prend la rémunération. Un dirigeant qui a 150 000 $, on va lui permettre un prêt personnel de 150 000 $. Un dirigeant qui voudrait avoir un prêt hypothécaire sur sa résidence qui en vaut 200 000 $ et qui voudrait 300 000 $, ça va être interdit.

Mme Robic: Ça doit se faire aux conditions du marché.

M. Boisclair: Oui, oui. Mais pour les employés, c'est une pratique...

M. Bouchard: Pour les employés, c'est différent, parce que ...les avantages, participation aux bénéfices et ainsi de suite...

Le Président (M. Farrah): Adopté, M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.24 est adopté. J'appelle l'article 285.25. "Un assureur ne peut consentir de prêts à l'un de ses administrateurs, de ses dirigeants ou à une personne qui leur est liée pour un montant total excédant la rémunération annuelle versée par l'assureur à cet administrateur ou à ce dirigeant ou, si cet administrateur ou ce dirigeant n'est pas rémunéré, le montant déterminé selon les normes du comité de déontologie, à moins que les prêts ne soient garantis par une hypothèque de premier rang sur la résidence principale de l'emprunteur." Mme la ministre, avez-vous des commentaires?

Mme Robic: M. le Président, encore là, je pense que c'est clair. Ça ne demande pas de commentaires.

M. Boisclair: "...une hypothèque de premier rang sur la résidence principale de l'emprunteur".

Le Président (M. Farrah): Une première hypothèque.

M. Boisclair: Encore une obligation qui est faite au comité de déontologie.

Le Président (M. Farrah): En fin de compte, il est bien encadré, ce comité-là.

Mme Robic: Mais là encore, c'est à cause de notre système qui est permissif, donc il faut encadrer toutes ces activités-là à travers notre

comité de déontologie.

M. Boisclair: Alors, adopté.

Le Président (M. Farrah): L'article 285.25 est adopté. L'article 285.26. "Un assureur doit, le cas échéant, déclarer à son comité de déontologie les prêts qu'il consent à une personne intéressée ou à une personne liée à l'un de ses administrateurs ou de ses dirigeants. "Cette déclaration indique le nom de la personne intéressée ou de la personne liée, le montant du prêt, l'échéance, le taux d'intérêt et les garanties consenties.". Ça va, Mme la ministre? C'est clair.

Mme Robic: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Ces déclarations qui sont faites au comité de déontologie ne font-elles pas partie du contenu du rapport annuel du comité de déontologie qui sera déposé au Vérificateur général?

M. Bouchard: Le rapport annuel, on l'a vu tout à l'heure, ça comprend seulement les cas dont ils sont saisis. L'article qu'on a vu là, dans le rapport, c'est l'article 16.

M. Boisclair: Comment avez-vous...

M. Bouchard: La teneur des mandats et la liste des situations do conflits d'intérêts et de transactions intéressées dont le comité a pris connaissance. Mais son rôle n'est pas surtout là. Vous avez vu, il a un pouvoir de législation tellement grand pour encadrer tout ce qui se fait. Sa responsabilité première, au fond, c'est de légiférer.

M. Boisclair: O.K. Adopté.

Le Président (M. Farrah): Alors, l'article 285.26 est adopté. Est-ce que l'article 39, dans son ensemble, tel qu'amendé est adopté?

M. Boisclair: Adopté.

Le Président (M. Farrah): Adopté. Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 33)

(Reprise à 16 h 47)

Le Président (M. Audet): Alors, je constate qu'il y a quorum. Je déclare la séance ouverte et je vous rappelle le mandat de la commission du budget et de l'administration qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Mme la secrétaire, est-ce que vous pouvez annoncer les remplacements, s'il vous plaît?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Bégin (Bellechasse) sera remplacée par Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles) par Mme Caron (Terrebonne), M. Chagnon (Saint-Louis) par M. Bordeleau (Acadie), M. Lemieux (Vanier) par M. Gautrin (Verdun) et M. LeSage (Hull) par M. Audet (Beauce-Nord). C'est tout.

Le Président (M. Audet): Merci, madame. Alors, avant de débuter l'étude du projet de loi, est-ce qu'il y a des remarques préliminaires? M. le ministre, voulez-vous nous présenter votre projet de loi, s'il vous plaît?

Étude détaillée du projet de loi 109

Remarques préliminaires

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque: M. le Président, il s'agit d'un projet de loi que les membres de cette commission connaissent bien et que vous connaissez bien vous-même, un projet de loi très court d'ailleurs, qui fait certains amendements touchant essentiellement la structure de l'administration supérieure de la Caisse de dépôt et placement du Québec et qui fait en sorte de remplacer le P.-D.G. de la Caisse par la nomination d'un président du conseil d'administration et chef de direction et d'un président et chef de l'exploitation. Le projet de loi indique leurs fonctions respectives et porte également à 11 le nombre total de membres du conseil d'administration de la Caisse ayant droit de vote.

Alors, M. le Président, ce projet de loi donne suite à une décision gouvernementale annoncée déjà depuis plusieurs mois. Je vous soumets, M. le Président, le désir que nous avons de pouvoir procéder à l'étude article par article de ce projet de loi.

Le Président (M. Audet): D'accord. Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Oui, M. le député de Labelle.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: Je pense qu'il s'agit, malgré ce qu'en dit le ministre, d'un projet de loi important parce qu'il y a parfois de ces petits changements qui ont des conséquences majeures sur la suite des choses. Quant à moi, je suis d'opinion que c'est justement le cas qui nous occupe ici. Je voudrais, à titre de remarques préliminaires, faire quand même une certaine rétrospective

sur notre système financier et le rôle que la Caisse joue dans ce système. Si je fais une citation de quelqu'un que vous connaissez bien, peut-être la reconnaîtrez-vous. Je vais la lire et je suis sûr que vous allez y applaudir. À plusieurs égards, dit cette personne, notre système financier constitue une réalisation remarquable du génie économique québécois attribuable au dynamisme des dirigeants et propriétaires des institutions ainsi qu'à une législation financière maintes fols innovatrice. C'était d'un ex-collègue du ministre des Finances actuel que nous avons devant nous, qui s'appelait M. Pierre Fortier, dans sa préface du livre gris sur la réforme des institutions financières qu'il a signée en octobre 1987.

Les institutions financières jouent un rôle de toute première importance dans une économie. Non seulement elles permettent d'établir un système de paiement, à l'aide de la monnaie évidemment, mais surtout elles permettent de récolter l'épargne, d'en faire l'allocation qui est un élément indispensable à l'investissement et au développement économique. Si l'on revient en arrière, le retard économique du Québec à la fin des années cinquante n'est pas étranger aux lacunes du système financier québécois. À titre d'exemple, rappelons qu'en 1901 les grandes banques anglophones ne possédaient au Québec que 11 % de leurs succursales canadiennes, ce qui était loin d'être la part dans le Canada d'alors. Nous étions pratiquement 30 % de la population.

La situation n'a guère changé puisque, en 1987, à peine 12,6 % des succursales des cinq grandes banques anglophones étaient situées au Québec. Outre Montréal et Québec, le reste du Québec ne disposait pas d'un réseau d'institutions financières capable d'allouer efficacement l'épargne québécoise. L'absence d'institutions financières francophones puissantes limitait et entravait le développement économique du Québec, et, jusqu'à la fin des années cinquante, on disait que les institutions financières anglophones avaient le pouvoir d'ouvrir ou de fermer les cordons de la bourse et d'ainsi contrôler les politiques économiques du gouvernement du Québec.

Le manque d'intérêt des banques anglophones pour le Québec aura permis de maintenir en vie, plus longtemps que dans le reste du Canada, un certain nombre de petites banques francophones, en l'occurrence, pour la plupart en tout cas. Celles-ci n'ont toutefois jamais été en mesure de se développer suffisamment pour jouer un rôle comparable à celui des grandes banques. Le peu d'égard des grandes banques anglophones pour le Québec et l'absence de banques francophones auront permis de développer tout un réseau de caisses populaires. Aujourd'hui, le Mouvement Desjardins, avec des actifs de plus de 44 000 000 000 $, est non seulement la plus grande institution financière au Québec, mais elle se classe au sixième rang au Canada derrière les cinq grandes banques anglophones. Le Mouvement Desjardins constitue certes l'élément le plus original du système financier québécois.

La réglementation des caisses d'épargne et de crédit est de juridiction québécoise. Ce fait n'est pas étranger au refus du gouvernement fédéral d'accorder un statut juridique aux caisses populaires au début du siècle. Après des années de "lobbying" auprès d'Ottawa sans obtenir de succès, Alphonse Desjardins se tournait vers Québec où il obtenait gain de cause le 9 mars 1906 et, depuis, la législation québécoise a accordé à Desjardins une série d'avantages qui lui ont permis d'offrir des services que les banques ne pouvaient offrir. En fait, Desjardins aura été la première institution financière à bénéficier du décloisonnement. Son succès n'est sans doute pas étranger à la réforme des lois sur les institutions financières amorcée par le gouvernement du Québec au début des années quatre-vingt.

Malgré le développement remarquable du Mouvement Desjardins, cette institution concentrait encore ses efforts sur les activités de financement de ses membres par des prêts personnels, mais surtout par des hypothèques. Au début des années soixante, l'absence de grandes institutions aptes à agir comme levier économique faisait encore cruellement défaut au Québec. Ce levier économique, les Québécois se le sont donné en 1965, avec la création de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Le Québec aura cependant été obligé d'affronter le gouvernement fédéral et de faire preuve de détermination afin de pouvoir contrôler les flots d'épargne considérables générés par l'instauration des régimes de rentes universels, le Régime de rentes du Québec que nous connaissons bien. Et, depuis sa création jusqu'à aujourd'hui, le gouvernement du Québec s'est préoccupé de procurer à la Caisse de dépôt et placement du Québec une taille critique lui permettant de pleinement jouer le rôle que la loi lui donnait en 1965.

C'est ainsi qu'au Régime de rentes du Québec, des institutions comme la CARRA, la CSST et la Société de l'assurance automobile se sont ajoutées à la liste des déposants de la Caisse de dépôt. Aujourd'hui, la Caisse de dépôt dispose de plus de 37 000 000 000 $ d'actifs, ce qui en fait la septième institution financière au Canada et le plus important propriétaire d'actions canadiennes au pays. Donc, juste derrière le Mouvement Desjardins, nous trouvons la Caisse de dépôt et placement du Québec. Par ailleurs, la fusion de la Banque Provinciale et de la Banque Canadienne Nationale, survenue en 1979, procure finalement au Québec une grande banque francophone qui, avec des actifs de 30 000 000 000 $ en 1987, la Banque Nationale du Canada, maintenant la sixième plus grande banque canadienne et la huitième institution financière canadienne par la taille de ses actifs.. Donc, cette fois-là, derrière le Mouvement Desjardins et derrière la

Caisse de dépôt, nous trouvons la Banque Nationale du Canada. Donc, ces trois institutions financières constituent les trois grands piliers du système financier québécois. Et c'est grâce à ces institutions que le Québec dispose aujourd'hui d'un secteur financier diversifié et efficace qui lui permet d'affronter un monde où les affaires ne connaissent plus de frontières. À cet égard, il est bon d'indiquer que, depuis une quinzaine d'années, les institutions financières québécoises démontrent une ouverture marquée sur les marchés internationaux. Il s'agit d'un fait historique qui démontre l'émancipation du Québec depuis une trentaine d'années.

Outre ces trois grandes institutions, les Québécois ont également fait preuve d'originalité en étant les premiers au Canada à se lancer dans l'aventure du décloisonnement des institutions financières au Canada. Et c'est grâce à la réforme entreprise par le gouvernement du Parti québécois, poursuivie par l'actuel gouvernement - à tout seigneur, tout honneur, M. le ministre des Finances - que le Québec a vu croître plusieurs importants groupes financiers. On a parlé du Mouvement Desjardins, mais il faut aussi mentionner La Laurentienne, L'Entraide, Coopérants, L'Industrielle-Alliance. Et dans le milieu bancaire, on parle maintenant d'équité et on réclame d'Ottawa les avantages déjà consentis par Québec à ces institutions. Le Québec demeure encore aujourd'hui le leader en matière de législation financière.

La politique québécoise en matière d'institutions financières vise deux objectifs principaux: améliorer les services offerts aux Québécois et permettre de développer des institutions financières plus fortes et aptes à affronter la concurrence internationale. Et l'impressionnant développement du groupe La Laurentienne et de L'Industrielle-Alliance n'est pas étranger au leadership du gouvernement québécois. Donc, en 1990, le Québec dispose d'un réseau d'institutions financières diversifié, puissant, efficace qui le place en bonne position pour affronter les défis de l'avenir et assurer son autonomie. Au fil des années, le Québec a développé une expertise dans ces matières qui en font un leader au Canada. Et lorsqu'on voit les remarques de la Chambre de commerce du Québec à l'effet que le Québec ait pleine juridiction, je pense que nous y souscrivons.

M. le Président, pour résumer tout cela à ce point, nous avons trois grandes institutions financières majeures. La première, c'est le Mouvement Desjardins, la deuxième, c'est la Caisse de dépôt et placement et la troisième, c'est la Banque Nationale du Canada, toutes avec des actifs qui dépassent maintenant les 33 00 0 000 000 $, 34 000 000 000 $, 35 000 000 000 $. Donc, nous avons ici, dans ce projet de loi, une de ces deux institutions, la deuxième, finalement, au Québec dont les actifs viennent d'épargnes du Québec. C'est dans ce sens-là que n'importe quoi, n'importe quel projet de loi, n'Importe quelle décision qui va affecter la Caisse de dépôt et placement va revêtir son importance.

Alors, ce qu'on peut aussi souligner, qui l'a été abondamment dans de la littérature, dans des articles de journaux et particulièrement au cours de l'hiver, du printemps dernier, de l'été, c'était la réussite de la Caisse de dépôt et placement qui est partie, lors de sa création, en 1965, de 2 300 000 000 $ et qui en est maintenant à 37 000 000 000 $. La Caisse de dépôt et placement joue ce rôle déterminant à l'intérieur... Je l'ai située dans la grande panoplie de nos institutions financières, mais il faut dire qu'elle touche pratiquement chacun des Québécois, tous ceux qui ont des rentes. Et ça, ça veut dire que tous les travailleurs du Québec ont, d'une façon ou d'une autre, directement, mais surtout indirectement, des fonds, des épargnes à la Caisse de dépôt et placement, institution considérable. (17 heures)

Et voilà, nous avons maintenant ce projet de loi. Alors qu'on peut dire que depuis sa création, la Caisse de dépôt et placement a connu un succès extraordinaire, nous en arrivons avec des changements proposés par le gouvernement à l'heure actuelle. Personne ne s'attendait à de tels changements, parce qu'au fond, tout le monde va convenir que lorsque nous avons une combinaison gagnante, ce n'est pas le moment de changer les dispositions qui l'affectent, de changer sa structure, de changer son organigramme.

Mais c'est pourtant ce qu'on nous convie à faire dans le présent projet de loi. M. le Président, on nous a dit, en deuxième lecture, que les changements qui étaient proposés voulaient aligner la structure de la Caisse de dépôt et placement sur celle d'Hydro-Québec. C'a été une référence qu'on a abordée assez régulièrement. J'ai été voir dans la Loi sur Hydro-Québec, pour m'apercevoir que, finalement, parmi des dispositions pratiques, concrètes, ce qui était proposé n'était pas du tout ce qu'il y avait dans la Loi sur Hydro-Québec. Dans la Loi sur Hydro-Québec, c'est le gouvernement qui nomme les dirigeants, donc, un décret du Conseil des ministres. Dans l'actuel projet de loi, c'est l'Assemblée nationale qui nomme ces deux personnes. C'est fort différent. Un vote de l'Assemblée nationale. Moi, c'est ce que j'ai lu dans ce projet de loi, et je voudrais qu'on...

M. Levesque: ...me permet de me lire à l'endroit où il a lu ça, là.

M. Léonard: Dans le projet de loi, vous l'avez à l'article 2, il me semble bien. Ah! c'est pour la destitution que c'est l'Assemblée nationale. Oui, très bien, mais ce que ça veut dire, c'est qu'une fois qu'ils sont nommés, ils sont inamovibles. Et donc, à mon sens, ce n'est pas la

disposition qu'on retrouve dans la Loi sur HydroQuébec. En réalité, je suis content qu'on me fasse la correction maintenant, mais ces deux personnes étant nommées, elles sont en poste pour 10 ans, elles ne peuvent être destituées, ni voir leur salaire réduit. En quelque sorte, après la décision, c'est terminé pour 10 ans.

Et ce que je dois comprendre dans tout cela, c'est qu'on Introduit, à mon sens, un élément conflictuel. En réalité, lorsqu'une personne aura été nommée à ce poste, lorsque les deux personnes auront été nommées, s'H survenait un conflit, 9 me semble évident que le seul organisme qui peut trancher, ça va être finalement l'Assemblée nationale, puisque c'est ça qui va se retrouver. Il me semble qu'on vient de nommer deux têtes pour diriger un organisme.

Et la question qu'on peut poser, c'est: Pourquoi le gouvernement a-t-il décidé de procéder ainsi? Je n'ai pas vu, même dans le privé, une telle disposition, où on est obligé de revenir à l'Assemblée nationale pour nommer des gens, pour destituer des gens, dénommer des gens. Mais la disposition pratique revient au même, parce que, au fond, dénommer, en cas de conflit, c'est la chose qu'on est parfois obligé de faire. Dans les grandes corporations qu'on nous cite aussi en exemple, lorsqu'il y a conflit, évidemment, le conseil d'administration en vient à prendre ces décisions. Ce n'est pas l'assemblée des actionnaires, à mon sens, qui prend la décision. Mais surtout, ce qu'il y a d'indiqué très clairement, c'est qui est le patron de l'autre et, en cas de conflit, le supérieur a un pouvoir sur l'autre personne.

M. le Président, à un moment donné, des gens nous en ont parlé, ils nous ont référés à ce qui avait été dit par exemple dans le discours de M. l'ex-ministre de l'Énergie et des Ressources, qui était M. le député de Mont-Royal à l'époque, qui avait émis ses idées sur le principe du projet de loi 32, en 1988. Ce qu'on prétend vouloir faire, c'est assurer le bon fonctionnement de la société d'État, en la dotant d'une direction supérieure souple, adaptée à un environnement complexe. Et on a aussi donné l'exemple d'Alcan, de la Banque Royale, de Bell Canada, de Petro-Canada, de la Banque Nationale du Canada, où il y a un président du conseil et chef de la direction et, par ailleurs, un président de l'entreprise et chef de l'exploitation. Il me semble que nous ne nous retrouvons pas dans la même situation, absolument pas. L'organigramme, à mon sens, ne correspond pas à la même situation. C'est tellement vrai que lorsqu'on creuse davantage, on s'aperçoit que cette décision a été rendue publique, c'est-à-dire une décision de nommer des personnes a été rendue publique et, ensuite, on a annoncé qu'on modifierait le projet de loi constituant la Caisse de dépôt et placement. Mais cette décision a été annoncée alors qu'on n'avait pas discuté de réorientation de la Caisse à la table du conseil d'administration. Ça, ça me paraît déterminant. Ça me paraît la première chose à faire lorsqu'on veut changer une structure, lorsqu'on veut changer un organigramme. On va discuter des orientations, c'est ce que l'on cherche, ce que l'on vise et les personnes habilitées à le faire siègent au conseil d'administration ou bien ce conseil d'administration n'a plus de raison d'être. Je ne vois pas pourquoi on nomme, on désigne un conseil d'administration, si c'est pour ne pas l'informer, si, lorsqu'il s'agit de réorientation, on n'en parle pas avec lui; et, à mon sens, il fallait d'abord en parler à l'administration.

Je dirais aussi que, peut-être, on aurait pu procéder à la nomination de quelqu'un avec des Idées, certaines idées, peut-être bien, pour pouvoir en discuter avec lui. En l'occurrence, on aurait pu en discuter, par exemple, avec M. Jean-Claude Delorme, après avoir désigné possiblement - encore là, c'est selon la structure actuelle... Et à mon sens, il fallait au moins éviter de donner une décision publique, parce que c'était une indication, c'était non seulement une indication, c'était mettre le conseil d'administration en face d'une décision déjà prise, qui doit découler d'orientations déjà prises. C'est ça, c'est là que le bât blesse, parce qu'au fond il aurait fallu discuter de ces orientations, désigner une personne, peut-être bien, si le gouvernement les avait, mais il n'y a aucune directive publique qui a été rendue publique, sauf une décision émanant d'un décret, même pas, je pense, d'une annonce du bureau du premier ministre. C'est comme cela que, finalement, le conseil d'administration a regimbé, je pense que c'est inhabituel que des membres de ce conseil d'administration, qui comporte des gens très importants dans la société québécoise, aient eu à émettre leur désaccord par rapport au moins au processus. Par exemple, le président du Mouvement Desjardins, M. Claude Béland, a dit qu'il n'avait pas été consulté, qu'il trouvait très curieuse la façon de procéder. On pourrait retrouver ses expressions qui étaient, d'ailleurs, dures, à mon sens, polies mais dures; d'autres ont été plus colorées. Tout le monde se le rappelle. Le conseil d'administration qui s'est réuni pour une décision, quant à l'organigramme, en a discuté lui-même dans sa réunion du 12 juillet 1990 et il a opté pour une structure différente de ce qui avait été annoncé pour introduire une autre personne qui soit entre le président-directeur général et les vice-présidents et partager les tâches en quelque sorte. On voit tout de suite que le conseil d'administration avait l'air plutôt d'entériner une décision déjà prise, ce dont il s'est plaint. C'est ainsi que trois des cinq premiers vice-présidents, ceux de la planification et relations avec les déposants, des affaires juridiques et institutionnelles et placements immeubles, d'administration et contrôle, sont placés directement sous l'autorité du

président-directeur général qui va devenir, selon les plans, les décisions annoncées à l'époque, président du conseil d'administration et chef de la direction. C'est ce qu'on retrouve ici dans le projet de loi 109.

Le Président (M. Audet): M. le député de Labelle, si vous pouviez conclure. On a échappé un peu le temps, alors...

M. Léonard: Non, je pense que je n'ai pas dépassé mes 20 minutes.

Le Président (M. Audet): Non.

M. Léonard: En tout cas, M. le Président...

Le Président (M. Audet): C'est pour ça que je vous demande de conclure.

M. Léonard:... je pourrais... Très bien. M. le Président, en conclusion, il y a des modifications majeures entreprises sans discussion quant aux orientations et on a indiqué d'emblée, sans discussion avec les conseils d'administration, un organigramme qui devrait avoir été la conséquence plutôt d'une réflexion avancée au conseil d'administration, alors que ça n'a pas été le cas, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député de Labelle. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? M. le député de La Prairie...

M. Lazure: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Audet):... vous avez 20 minutes.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. C'est un peu triste d'avoir à exprimer notre opposition la plus féroce possible à ce projet de loi. C'est un peu triste parce que cette année on célèbre le vingt-cinquième anniversaire de la création de la Régie des rentes et de la Caisse de dépôt et placement. Parce que la Caisse de dépôt et placement a accompagné, sinon suivi de très près, la création de la Régie des rentes. Et il faut rendre hommage à des gens clairvoyants à l'époque, au début des années soixante, à l'époque où le Parti libéral était progressiste, où il y avait des éléments progressistes dans le Parti libéral, dans ce temps-là, à commencer par M. Lesage et son équipe du tonnerre. Et on est privilégié, dans un sens, au plan humain, d'avoir le ministre des Finances qui a fait partie de cette équipe du tonnerre. Au plan humain, je dis bien, mais au plan politique, on est obligé de le critiquer, parce qu'il s'est fait complice d'un geste de son chef qui est reprehensible, ce geste-là. Et moi, je suis sûr que son premier patron, M. Lesage, n'aurait pas posé un tel geste, le geste que son chef actuel a posé, il y a quelques mois, en nommant le collecteur de fonds la personne numéro deux à la Caisse de dépôt et placement. Donc, des gens clairvoyants, l'équipe du tonnerre des années soixante. Il y avait aussi l'autre Lévesque évidemment, celui qui, à un moment donné, ne pouvait plus endurer, tolérer les hésitations constitutionnelles de son chef à l'époque et de ses collègues au parti et qui a senti le besoin de sortir de cette formation et de créer le Parti québécois qui va bientôt faire avancer de façon importante le Québec vers son destin.

Donc, c'est triste parce que pas plus tard que la semaine passée, on célébrait, avec les dirigeants de la Régie des rentes, le vingt-cinquième anniversaire, comme je le disais, mais je ne pense pas que les gens à la Caisse de dépôt et placement aient le goût à la fête ces jours-ci, depuis quelque temps. Les gens de la Caisse de dépôt et placement ont très mal réagi. Ils ont observé évidemment le devoir de retenue, ils ont été discrets, mais c'est bien évident qu'ils n'étaient pas contents, comme d'ailleurs l'ensemble des éditorialistes n'étaient pas contents du tout, du tout.

Mais cette création de la Caisse de dépôt, avec la Régie des rentes, a eu des répercussions considérables sur le développement économique au Québec, la société québécoise. Ça a pris un certain nombre d'années avant qu'on en récolte les fruits, mais c'est fait. En grande partie, les fruits sont bien visibles depuis quelques années. Avec des actifs qui frôlent les 40 000 000 000 $, non seulement c'est un énorme bas de laine des épargnes des Québécois pour leur assurer une retraite convenable par le biais du Régime de rentes, mais aussi, deuxième mission de la Caisse de dépôt et placement et aussi importante que la première, c'est de stimuler le développement économique, c'est de servir de bras gouvernemental à la prise en main par les Québécois de leur économie, parce que Dieu sait que, quand on se replace il y a 25 ans, ce n'était pas large, le pan de l'économie qui appartenait aux Québécois. Ce n'était pas large, c'était un tout petit pan de mur qui était très fragile. (17 h 15)

Alors, aujourd'hui, grâce, en grande partie, au geste éclairé de la Caisse de dépôt du Québec, on a vu non seulement le développement d'institutions financières qui existaient déjà, mais aussi on a vu surtout le développement d'industries secondaires, les PME. On a vu aussi la prise de contrôle de plusieurs grandes industries primaires dans le secteur des pâtes et papiers par exemple. Et on pourrait énumérer toute une série d'entreprises, où, à cause de la sagesse de la Caisse de dépôt et placement du Québec, on a maintenant une emprise. La société québécoise a une emprise beaucoup plus considérable sur sa propre économie. Au lieu d'être une économie de

type colonial comme celle qui existait dans les années cinquante ou au début des années soixante, nous avons maintenant un type d'économie que j'appellerais semi-autonome. Un peu comme le statut politique du Québec d'ailleurs, semi-autonomie. Nous, on ne va pas se contenter politiquement de cette semi-autonomie, comme les Québécois ne veulent pas se contenter d'une semi-autonomie économique. Il faut aller vers une économie complète.

Et dans cet hommage que je rends à l'équipe des clairvoyants, il ne faut pas oublier un conseiller spécial du premier ministre Lesage à l'époque que nous, nous connaissons bien, qui est devenu notre chef, chef du Parti québécois, chef de l'Opposition et qui a été un des principaux conseillers de M. Lesage, de l'équipe du tonnerre, dans la négociation très dure avec le gouvernement fédéral à l'époque. Et il y a aussi, puisqu'on est à la période des hommages, le consort le prince consort de l'honorable Jeanne Sauvé, de ma tante Jeanne, le prince consort Maurice Sauvé qui a joué un rôle important et le ministre des Finances s'en souvient. Le ministre des Forêts à l'époque, Maurice Sauvé, a été un intermédiaire extrêmement précieux dans la négociation qui a eu lieu entre Québec et Ottawa Parce qu'il faut se rappeler qu'Ottawa voutait créer une seule Régie des rentes pour l'ensemble du Canada, y compris pour le Québec, et ç'a été un geste extrêmement heureux que le gouvernement libéral de l'époque, progressiste qu'il était dans ce temps-là, qui ne l'est plus maintenant, à l'époque, dise: Non, le Québec doit avoir sa propre Régie des rentes, son propre Régime de rentes et, par conséquent, ensuite la Caisse de dépôt et placement du Québec venait comme un complément nécessaire.

C'est une histoire de succès à répétition depuis plusieurs années, Les placements de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Et on pourrait sortir les rapports annuels et on se rendrait compte que le taux des intérêts et le taux de fructification, si on veut, du capital est toujours plus élevé que la moyenne pour des institutions semblables. Donc, on peut être fiers de cette Caisse de dépôt et placement du Québec et elle fonctionnait très bien. On peut s'étonner du fait que ce gouvernement arrive tout à coup et chambarde cette Caisse, alors que c'était une formule gagnante. Pourquoi changer une formule gagnante? Tout le monde s'est posé la question. Créer une direction à deux têtes, est-ce qu'on a une idée du genre de problèmes qu'on va susciter? Il n'y en avait pas de problème de leadership les 10 dernières années avec M. Jean Campeau, les années précédentes avec M. Cazavan. Il n'y en avait pas de problème de direction.

On savait, les gouvernements savaient, les institutions financières savaient, le public savait qu'il y avait un patron à la Caisse de dépôt et placement du Québec et qui était au-desssus de tout soupçon. Mais ce ne sera pas le cas maintenant, il va y avoir deux patrons à la Caisse de dépôt et placement du Québec. Et on sait qu'il y aura des problèmes. Et on prétend, par cette loi-là, dire: Bon, s'il y a des problèmes, l'Assemblée nationale réglera ça. Voyons donc, ça n'a pas d'allure, comme dirait la députée de Johnson. Il faut vraiment revenir aux critiques acerbes qui ont été exprimées à l'égard de cette nomination. Je cite un éditorial du journal Le Soleil: Les basses oeuvres à la Caisse. La Caisse de dépôt et placement du Québec reçoit une publicité dont elle se serait bien passée cette semaine. C'est le vendredi 1er juin 1990. Le gouvernement vient de nommer M. Jean-Claude Delorme, personnage apolitique dont nul ne remet en cause la compétence. Peut-être n'a-t-il aucune compétence des marchés financiers, mais il apprendra vite. Mais le premier ministre Bourassa le flanque du comptable Guy Savard, sans doute efficace, si on en juge par l'état de la caisse électorale du Parti libéral du Québec, mais entaché d'une mésalliance partisane inacceptable.

Que la Caisse de dépôt et placement du Québec passe à travers le collimateur du patronage politique brise une tradition d'objectivité et de sérieux fondée sur 25 ans de ce que l'on peut appeler bons et loyaux services au Québec. Le gouvernement a même décidé de modifier la législation en catastrophe pour permettre cette pirouette à tout le moins étrange au plan de l'éthique. Rentable pour les retraités québécois qui lui confient leurs régimes de rentes publics, rentable pour l'économie par son appui constant à la formation de groupes financiers et industriels contrôlés par des francophones, la Caisse de dépôt et placement du Québec ne survivra pas à une renaissance du patronage à la Gérald Martineau, celui qui détenait les clés de la caisse électorale de Maurice Duplessis. Ça va rappeler des souvenirs au ministre des Finances aussi. Parce qu'il a connu cette époque où le premier ministre Duplessis avait son grand collecteur de fonds, qui s'appelait Gérald Martineau, et qui faisait la pluie et le beau temps dans tous les organismes gouvernementaux. Il fut facile jadis de mobiliser les Québécois pour sauvegarder les pouvoirs de la Caisse contre le fameux projet de loi S-31 présenté par les libéraux fédéraux. Vue comme objet de convoitise partisane, confiée en partie à un individu qui, la semaine avant sa nomination, tentait encore d'amasser des fonds pour un politicien libéral, la Caisse aura désormais - et c'est là que c'est grave, - du mal à convaincre la population qu'elle défend les intérêts de tous hors de tout conflit d'intérêts. "L'assiette au beurre semble sous contrôle", dit Le Nouvelliste le mercredi 6 juin: "Tout récemment, la nomination à la Caisse de dépôt d'un percepteur de fonds libéral, Guy Savard, a été reprochée avec raison à M. Bourassa. On comprend mal que le premier ministre ait voulu ou qu'il ait approuvé cette nomination, lui qui

cherchait visiblement, depuis son retour en politique, à effacer l'image déplorable qu'il s'était acquise au cours des années soixante-dix". "La succession de Campeau", Le Devoir, le 1er juin: "Avant même que la loi ne soit modifiée et sans qu'un débat n'ait eu lieu à l'Assemblée nationale sur la nécessité de modifier la haute direction de la Caisse de dépôt, le gouvernement a procédé à une autre nomination qui laisse planer des doutes sur la gestion future de la Caisse de dépôt. Celle-ci a beau avoir atteint sa maturité, elle navigue encore dans un environnement économique périlleux. Son personnel est plus expérimenté, mais la Caisse aura besoin d'une équipe unie et très motivée pour passer à travers l'étape qui l'attend désormais". M. le Président, La Presse, le samedi 22 juin: "Une question de confiance". Un article de Claude Picher, il s'y connaît, c'est le chroniqueur économique à La Presse. "La Caisse de dépôt doit être au-dessus de tout soupçon. Elle se sert non seulement de ses dépôts de 40 000 000 000 $ pour financer les régimes de rentes, mais aussi comme d'un véritable levier économique. Et il est normal qu'elle entoure ses activités d'une certaine discrétion. Personne, société d'État ou non, n'a avantage à préparer une prise de contrôle, une coparticipation ou un montage financier au su et au vu de tous. Les Québécois doivent faire confiance à la Caisse et pour cela, ils ne doivent pas entretenir la moindre poussière de doute sur ses hauts dirigeants. Or, peu importent les qualités personnelles et professionnelles de M. Savard, sa nomination laisse flotter beaucoup plus qu'une poussière dans le paysage".

Finalement, M. le Président, je voudrais qu'on retienne, que les députés ministériels retiennent aussi - et ils sont libres de s'exprimer sur la question, je ne pense pas qu'ils soient bâillonnés par leur leader, leur chef - qu'il est dommage que, par la nomination de ce collecteur de fonds, la Caisse de dépôt se voie miner en partie, pas totalement, mais en partie, dans sa crédibilité. C'est un changement de structures qui, de toute évidence, a été fait sur mesure pour accommoder M. Savard, pour accommoder le premier ministre et son Conseil des ministres qui avait une dette de reconnaissance à payer envers M. Savard. Ils prennent la décision de le nommer, mais ils se rendent compte par la suite qu'il va falloir des changements à une loi. Et on va lui faire un habit sur mesure, on va lui faire une loi à sa mesure, mais on ne se préoccupe pas des répercussions, non seulement dans les milieux financiers - je viens d'y faire allusion par des commentaires d'éditorialistes - mais aussi à l'intérieur même de l'équipe de la Caisse. L'équipe de la Caisse s'identifiait bien à son grand patron - qu'il se nomme Campeau ou Cazavan, peu importe, ou Prieur, maintenant décédé - et ¦I y avait, dans cette équipe de la Caisse de dépôt, des employés de la Caisse de dépôt, du personnel, une motivation, un climat de travail particulièrement dynamique.

Il me semble, M. le Président, que le gouvernement aurait été avisé d'au moins consulter les grands patrons de la Caisse. Qui sont-ils, les grands patrons de la Caisse? Bien, c'est le conseil d'administration. Et à la courte honte du gouvernement actuel, le conseil d'administration n'a même pas été consulté, imaginez-vous/ Même pas été consulté. Ces gens-là qui, depuis 1985, se sont fait inspirer beaucoup par la philosophie Provigo, à tel point qu'on a même parlé d'État Provigo, ces gens-là n'auraient pas osé faire ça à une entreprise privée, imposer un patron à une entreprise privée, un numéro un ou un numéro deux, sans consulter le conseil d'administration; mais ils le font, ils le font pour la plus importante de nos organisations, le plus important de nos organismes publics gouvernementaux, la Caisse de dépôt et placement.

C'est grave, ce qu'ils ont fait! C'est une insulte à ces personnalités, qu'ils viennent du monde patronal ou du monde syndical ou du monde de la finance - comme Claude Béland, du Mouvement Desjardins - ces gens-là n'ont pas été consultés. Ils ont appris après le fait que M. Bourassa avait décidé qu'il allait verser une récompense quand même intéressante à M. Savard. C'est quoi, son salaire? 130 000 $ plus 60 000 $ de prime au départ, à part tous les autres comptes, évidemment, hein? Ce n'est pas une petite fiole de rien, ça. Puis ça, c'est pour 10 ans, sécurité complète pour 10 ans. On a fait fi de l'avis, on n'a pas voulu, on n'a pas osé demander l'avis du conseil d'administration de peur de se faire dire par le conseil d'administration, probablement, que non, ce n'est pas une bonne idée. Deux choses: ce n'est pas une bonne idée de changer la structure à la direction de la Caisse, parce que ça allait très bien, tout le monde convenait que ça allait très bien, on n'avait jamais entendu de critiques sur la forme de structure de la Caisse, et deuxièmement, ce n'est pas une bonne idée de nommer un "patro-neux", comme numéro deux, ou quasiment un numéro un en réalité. Où est-ce qu'il se situe? Il n'est pas tout à fait numéro deux, pas tout à fait numéro un, il est "un et demi". C'est un "un et demi" qu'on a nommé, M. Savard, alors, imaginez-vous!

Puis, M. Savard a eu le don de se mettre dans des drôles de situations. À un moment donné, il était vice-président de la SDI, la Société de développement industriel, poste gouvernemental; il était en même temps vérificateur pour une grosse firme de vérificateurs dans les Cantons de l'Est; et puis il était aussi collecteur de fonds pour le parti; triple fonction. Alors, vous avez un emploi dans une entreprise, M. Savard va vous voir, puis aujourd'hui, il porte le chapeau de vice-président de la SDI, parce que vous avez fait une demande, bon, il va vous écouter, vous avez fait une demande; mais, le

lendemain, il revient, il a ie chapeau du collecteur de fonds du Parti libéral; ah! mais là, II dit: Moi, je ne suis pas le même homme, là. Je ne suis pas le même homme. Mais, imaginez-vous, l'entrepreneur, l'employé, le cadre qui se fait demander 3000 $ par le même individu, même s'il a changé de chapeau, bien, il comprend le message, puis il va les donner, les 3000 $, et c'est comme ça que le Parti libéral collecte des sommes fantastiques: 6 000 000 $, 7 000 000 $.

M. le Président, M. Savard a eu le don de se placer dans des positions où on pouvait avoir des doutes sur le fait qu'il y ait conflit d'intérêts ou pas. Alors, pour un personnage public, comme c'est le cas maintenant avec sa fonction, il y a un vieux proverbe qui dit, M. le Président, que: "Non seulement la femme de César doit être pure mais elle doit avoir l'air pure aussi. " Alors, non seulement faut-il éviter de faire du patronage, de récompenser les collecteurs de fonds, mais en plus, et c'est ça que ce gouvernement-ci n'a pas compris, il faut éviter de poser un geste qui donne l'apparence de faire du patronage. Merci, M. le Président. (17 h 30)

Le Président (M. Audet): Merci, M. Je député de La Prairie. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? M. le député de Bertrand, vous avez 20 minutes.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je dois dire que lorsque j'ai pris connaissance des intentions du gouvernement de modifier la composition de la gestion de la Caisse de dépôt, j'ai été un peu surpris surtout de la proposition qui a été faite en raison de la conjoncture économique et financière dans laquelle elle s'intégrait. Dans un premier temps, j'ai été surpris de voir que le gouvernement avait l'intention de scinder la direction de la Caisse en deux postes distincts. Bien sûr, comme l'ont fait remarquer mes collègues et comme l'ont souligné ceux qui avaient à l'époque, en 1988, critiqué une décision semblable de la part du gouvernement quant à la structure administrative d'Hydro-Québec, cette pratique se fait dans certaines institutions financières et certaines autres grandes institutions comme Bell Canada et, entre autres, la Banque Nationale que je connais un peu mieux pour y avoir travaillé pendant presque huit ans.

On n'a pas dit cependant que cette structure, en particulier en ce qui concerne certaines institutions financières, ne diluait d'aucune façon le pouvoir de décision finale qui était entre les mains du numéro un. Il ne s'agissait pas simplement d'une question de distinctions pour des fins de protocole, mais il s'agissait également de distinctions sur le plan des prises de décisions et, en particulier, en ce qui concerne les institutions bancaires, de la prise de décision ultime en ce qui concerne les décisions de crédit et les allocations budgétaires.

C'est un modèle d'administration qui peut peut-être convenir à certaines institutions. C'est un modèle de structure administrative qui pourrait, en théorie, s'appliquer à la Caisse de dépôt et placement, sauf que le contexte dans lequel cette décision est introduite s'explique mal et surtout porte à confusion et risque d'envoyer un message un peu confus à la population du Québec et, en particulier, au milieu des affaires, non seulement québécois, mais à l'extérieur du Québec. Je m'explique. Depuis un certain temps, depuis quelques années, les milieux d'affaires et, en particulier, certains groupes de l'extérieur se sont attaqués à la Caisse de dépôt comme entité qui possédait un pouvoir d'intervention énorme sur les marchés financiers et, de façon générale, dans l'économie québécoise et canadienne. Je vous rappellerai, à ce sujet, tout le fameux débat sur le bill C-31, je crois, le bill que le gouvernement fédéral avait l'intention d'introduire il y a quelques années et qui visait à interdire à la Caisse de dépôt et placement de nommer des administrateurs à la direction du Canadien Pacifique, même si la Caisse de dépôt, en fonction de toutes les lois du capitalisme actuel et en fonction de toutes les normes qui s'appliquent aux actionnaires qui détiennent un certain nombre d'actions dans les entreprises, était tout à fait justifiée de nommer des administrateurs. Il s'ensuivit un débat qui a réveillé les élans nationalistes au Québec et qui, de surcroît, a mis te doigt sur un certain comportement double standard à l'endroit, d'une part, des entités purement privées par rapport aux entités publiques.

Suite aux diverses pressions qui avaient été exercées et suite à la conjoncture politique, le bill C-31, finalement, n'a jamais vu le jour. Mais il est quand même important de souligner cette tentative qui existait et de se rappeler que cette tentative avait été mise de l'avant sous les pressions des groupes financiers anglo-torontois qui voyaient d'un mauvais oeil la Caisse de dépôt et placement, avec les fonds énormes qu'elle avait à sa disposition, pouvoir influencer les marchés et surtout pouvoir prendre le contrôle d'un bon nombre d'entreprises anglo-canadiennes qui exerçaient un pouvoir et une influence importante sur l'économie.

Depuis ce temps-là, depuis que la Caisse dépôt a joué un rôle non seulement important au niveau de la structuration des entreprises du Québec, depuis que la Caisse de dépôt a permis à bon nombre d'entrepreneurs québécois de se forger une place enviable sur les marchés canadiens et dans l'économie canadienne, depuis cette époque où la Caisse de dépôt, au cours des dix dernières années, a permis aux Québécois de prendre en main leur propre économie, jusqu'au point où, aujourd'hui, 61 % de l'économie québécoise appartiennent aux Québécois francophones

et que 78 % de la création de nouveaux emplois au Québec sont le résultat de compagnies qui appartiennent à des Québécois francophones, c'est grâce entre autres à l'intervention de la Caisse de dépôt et placement.

Et dans ce sens, ce qui a permis à la Caisse d'avoir ce rôle si important et ce qui lui a permis d'avoir le poids qu'elle a dans l'économie au point où, comme je le rappelais tout à l'heure, le gouvernement fédéral avait jugé opportun d'introduire un bill allant à rencontre des principes les plus fondamentaux de la gestion d'entreprises, il était important de réaliser que si la caisse a pu effectuer toutes ses activités, d'ailleurs, pour lesquelles elle a reçu des louanges, non seulement de l'Opposition officielle, mais également du gouvernement et ce, à plusieurs reprises, c'est parce qu'elle avait une force unifiée, c'est parce qu'elle était dirigée par un seul dirigeant et parce qu'elle fonctionnait sur les marchés comme une entité unique, et non pas une entité morcelée.

Il y a certaines propositions qui ont été faites par des porte-parole soi-disant gouvernementaux, que le premier ministre Bourassa s'est empêché lui-même de rejeter, proposant que la Caisse de dépôt puisse être fractionnée en diverses entreprises, ce qui aurait pour effet de réduire son impact et son pouvoir d'intervention sur les places financières et soit dit en passant, ce qui ferait bien l'affaire de nombre de financiers et d'entrepreneurs anglo-canadiens, qui préféreraient voir une Caisse de dépôt faible, plutôt que de voir cette société détenue par le gouvernement du Québec jouer le rôle qu'elle a.

Et dans ce sens, l'introduction de ce projet de loi, qui voudrait bicéphaliser la Caisse de dépôt, lance un message confus, à mon avis, à la population du Québec et aux gens des milieux des affaires, message confus, dans le sens où on donne l'impression que le gouvernement a fait marche arrière face aux recommandations de scinder les activités de la Caisse, mais que, par contre, il veut donner une satisfaction à ceux qui voyaient la Caisse comme un peu trop puissante, en divisant la tête dirigeante. C'est un message confus également parce que plusieurs vont y voir l'opportunité de différends entre les deux administrateurs principaux de la Caisse, parce que certains milieux défavorables aux interventions de la Caisse vont également pouvoir jouer, un dirigeant contre l'autre, parce que, on va pouvoir affaiblir l'unité d'action que la Caisse avait. Et dans ce sens, je pense que ce projet de loi lance le message confus qu'il n'est absolument pas opportun de lancer, au moment où tous les Québécois sont en train d'examiner leur avenir constitutionnel. Et je dis cela sans présumer des conclusions de la Commission Campeau-Bélanger. Simplement, je fais allusion aux commentaires qui ont été faits par la presse en général sur la façon dont les Québécois examinaient leur avenir de façon unie jusqu'ici et sur la base d'un certain consensus. Et ce qui permet à ce consensus de s'établir et ce qui nous permet aujourd'hui de pouvoir discuter de l'avenir du Québec sur une base sereine, sur une base beaucoup plus rationnelle et beaucoup plus informée que nous l'avions fait dans les années passées, c'est que nous avons à notre disposition des moyens financiers et des moyens économiques qui nous permettent de prendre une décision politique en s'appuyant sur des moyens concrets.

La décision de vouloir scinder la direction de la Caisse de dépôt en deux et de cimenter, en quelque sorte, cette différence en plaçant les deux postes sous le contrôle de l'Assemblée nationale et, par conséquent, en rendant beaucoup plus difficile la modification des hautes structures de la Caisse de dépôt, à mon avis, est un pas vers le fractionnement des activités de la Caisse de dépôt et, dans ce sens, il me semble que cette mesure est fort déplacée et d'aucune façon elle ne peut recevoir l'assentiment de l'Opposition.

J'aimerais également souligner le fait qu'à plusieurs reprises, et non seulement en fonction de l'introduction du bill C-31, et, d'ailleurs, tout récemment, il y a à peine deux mois, les milieux d'affaires de Toronto continuaient à s'inquiéter de l'importance que prenait la Caisse qui compte, aujourd'hui, un actif d'environ 40 000 000 000 $. Attitude qui me semblait un peu tenir du pharisaïsme étant donné que si l'on regarde les actifs des grandes corporations anglo-canadiennes, dont celles de la Banque Royale et des autres grandes institutions bancaires anglo-canadiennes, elles dominent, en termes d'actifs, nos institutions québécoises, dont la Caisse de dépôt et placement. Dans ce sens, je pense qu'il est important d'envoyer non pas un message confus aux milieux d'affaires, mais un message clair et précis, à savoir que le gouvernement du Québec maintiendra la Caisse de dépôt avec toute !a force d'impact qu'elle a et maintiendra son rôle non seulement comme gestionnaire des fonds de retraite d'une grande partie des Québécois, mais également son rôle comme intervenant majeur de notre économie et surtout au moment où le gouvernement devra prendre des mesures pour relancer l'économie dans un contexte de récession.

On se plaint de plus en plus et on a entendu des commentaires à l'effet... Je rappelle, à cet effet, les commentaires d'Alain Dubuc qui, il n'y a pas tellement longtemps, dans un editorial qui paraissait hier ou avant-hier, disait que le gouvernement du Québec, dans le contexte actuel, devrait intervenir pour relancer l'économie non pas, nécessairement, à la manière dont ça s'est fait traditionnellement, c'est-à-dire en augmentant de façon faramineuse les déficits et en donnant des subventions à des compagnies casse-cou ou à des tonneaux sans fond, mais plutôt par des moyens d'intervention de style partenariat avec l'entreprise. Et c'est d'ailleurs

ce que favorise le Parti québécois. Ce n'est pas une intervention de style cadeau ou de style don offert à des entreprises, mais sous forme de partenariat. Ce partenariat que, d'ailleurs, des deux côtés de la Chambre, nous acceptons volontiers comme clé de développement de l'économie québécoise, doit s'appuyer sur des mécanismes concrets et sur des institutions capables de jouer ce rôle de partenariat. Nous en avions quelques-unes au Québec. Nous avions la Société générale de financement, nous avons la SOI et nous avons la Caisse de dépôt et placement.

Je suis convaincu que le débat sur les grandes orientations que devrait prendre la Caisse, non seulement en termes de politique de partenariat, mais également en termes d'implication avec les autres entreprises, en termes d'investissement, n'est pas terminé. Il est loin d'être terminé et, dans ce sens, il est important que la Caisse de dépôt soit dotée d'une structure unifiée. Qui nous dit, par exemple... Qui peut nous dire que - dans un, deux, trois, quatre ans, dépendant de l'évolution de la conjoncture économique et politique au Québec - le débat sur le rôle que devrait jouer la Caisse de dépôt, en tant que partenaire d'autres sociétés, en tant qu'investisseur dans notre société, ne sera pas remis en question et qu'encore une fois, puisque ç'a fait l'objet de discussions de façon périodique, quelqu'un ne proposera pas de scinder la Caisse de dépôt et placement? (17 h 45)

Bien sûr, II faudra passer par une modification de la loi organique de la Caisse votée par l'Assemblée nationale. Mais dans un débat comme celui-là, rien nous dit, si la direction de la Caisse est morcelée, que les intervenants, qui proposeront encore une fois de scinder ces activités et ce pouvoir d'Intervention de la Caisse, ne puissent jouer un des principaux administrateurs contre l'autre, et que le fait de posséder une sorte d'immunité pendant 10 ans pour ces deux personnages ne vienne en quelque sorte consacrer au sein de l'organisation leur zone d'influence et, du fait même, de paralyser l'intervention de la Caisse surtout lorsque des projets d'envergure nécessiteront une décision forte et unanime du conseil d'administration, mais également de faire le jeu de ceux qui voudraient miner de l'intérieur les activités de la Caisse. On nous propose la nomination de deux personnes dont l'une, j'en conviens, même si elle n'est pas directement puisée à même le milieu bancaire ou le milieu des institutions financières, peut s'adapter à la tâche, comme le font de nombreux banquiers qui passent de l'industrie manufacturière au secteur bancaire ou vice versa, ou des banquiers qui passent du secteur bancaire au secteur industriel, comme l'ancien vice-président de la Banque de Nouvelle-Ecosse, M. Bisson, qui est passé du secteur bancaire au secteur industriel, de la même façon que l'ancien ministre du gouvernement, M. MacDonald, a fait une démarche un peu semblable.

Mais, ceci éteint dit, il n'est pas impossible également que les intervenants qui veulent limiter les interventions de la Caisse de dépôt ne puissent s'appuyer en particulier sur la deuxième nomination qui, elle, tout en étant à l'abri de tout soupçon jusqu'ici, demeure quand même assez vulnérable aux pressions qu'elle pourrait subir, surtout en raison des activités qu'elle a eues dans le passé. Et dans ce sens, il me semble que ce qu'ont fait remarquer mes collègues est tout à fait acceptable. Je ne dis pas ça sur une base partisane. Je le dis simplement, pour avoir discuté de cette question avec mes anciens collègues du milieu des affaires, du milieu bancaire qui se sont, effectivement, étonnés de voir une personne, qui a trempé plutôt dans les milieux politiques, tout à coup parachutée à la tête de la Caisse de dépôt. Même les entreprises privées et même les institutions bancaires sont réticentes à voir des individus qui ont un rôle politique trop prédominant exercer un rôle de première envergure dans les institutions financières. Bien sûr, il y a des individus dans les banques qui sont membres de parti politique, comme je l'ai été moi-même, qui ont également participé à des campagnes de levée de fonds. Mais de là à avoir des indidivus qui étaient directement liés à la campagne de financement d'un parti politique et ce, sur une grande envergure, il y a de quoi s'étonner.

Et dans ce sens, sans reprendre les arguments qui ont été invoqués quant à la nomination de M, Savard en particulier, j'estime que le débat sur l'orientation de la Caisse de dépôt n'est pas terminé. Ce débat n'étant pas terminé, il faudrait que les deux personnes, d'abord, qu'elles soient à la tête de la Caisse, soient à l'abri de tout soupçon politique, d'une part. D'autre part, compte tenu des attaques dont la Caisse a été victime, surtout par les concurrents du milieu anglo-canadien de la finance, il serait important de maintenir et d'envoyer un message clair et précis à ces gens de même qu'à l'ensemble de la population du Québec que la Caisse de dépôt et placement va demeurer une entité unique, avec une force d'impact et une force d'intervention unique dans les milieux financiers et qu'à ce titre elle demeurera un des principaux piliers de toute action économique et de toute action de partenariat du gouvernement du Québec, particulièrement dans ces temps troublés de récession. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député de Bertrand. Est-ce qu'il y a d'autres... M. le député de Gouin, vous avez la parole pour 20 minutes.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, jamais je

n'aurais cru qu'on aurait passé autant de temps ensemble. On s'est vus tout l'avant-midi à discuter d'un autre projet de loi d'intérêt public, qui était le projet de loi 112, Loi sur les assurances. On se retrouve ce soir et sans doute jusqu'à 18 h 30, à tout le moins, et peut-être plus tard en soirée, pour discuter du projet de loi 109...

Une voix: Le projet de loi 101 demain.

M. Boisclair: Ah! le projet de loi 101 demain, effectivement. Franchement, c'est le festival des institutions financières! M. le Président, on se retrouve ici ce soir pour discuter du projet de loi 109, projet de loi qui modifie la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec. M. le Président, vous comprenez facilement qu'à titre de porte-parole de l'Opposition officielle en matière d'institutions financières, j'ai porté une attention particulière à ce projet de loi et à son contenu.

M. le Président, il y a plus de 20 ans - 25 ans exactement, en 1965 - les Québécoises et Québécois se dotaient d'un nouvel outil de développement économique: la Caisse de dépôt et placement. Aujourd'hui, la Caisse de dépôt et placement représente des actifs de plus de 37 000 000 000 $, ce qui en fait la septième institution financière d'importance au Canada. La Caisse de dépôt et placement du Québec, c'est aussi la propriétaire d'actions canadiennes la plus importante au Canada. C'est donc dire, lorsqu'on touche à la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, tout le sérieux qu'il faut accorder aux modifications proposées. On ne parle pas d'un petit dépanneur du coin, on ne parie pas d'une petite société d'État qui a des responsabilités limitées, on parle d'un des fleurons de notre économie québécoise dont l'ensemble des politiciens et politiciennes, d'ailleurs, prend toujours plaisir à vanter les succès et les retombées positives pour l'ensemble des Québécois et Québécoises.

M. le Président, j'aimerais plaider sur le fond et essayer d'éviter la discussion de la nomination de M. Savard - j'y reviendrai rapidement - mais rappeler que tout ce que les députés ministériels ont réussi à faire lorsque nous avons discuté, au moment de la deuxième lecture du projet de loi, au salon bleu de l'Assemblée nationale, l'ensemble des intervenants ministériels qui ont pris la parole sur cette question s'est limité à vanter les mérites de M. Savard, sans parler du fond de la question, qui est celui de l'administration de la Caisse.

M. le Président, il y a un certain nombre de principes fondamentaux qu'il est important d'étudier, lorsqu'on parle de l'administration de cette institution financière, la septième d'importance au Canada. Il y a un certain nombre de principes, dont deux qui, à première vue, peuvent sembler contradictoires, mais qui sont tout à fait fondamentaux dans l'administration de la Caisse. En premier lieu, M. le Président, il est important de faire en sorte que la Caisse de dépôt et placement puisse jouir, à l'égard des pouvoirs publics aussi bien qu'à celui des pouvoirs privés, de toute l'indépendance nécessaire, d'une indépendance la plus nette possible. Un organisme aussi important que la Caisse de dépôt et placement ne peut éviter d'attirer, bien sûr, un certain nombre de convoitises à la fois du secteur privé et du secteur politique ou du secteur public.

On peut comprendre, puisque la Caisse de dépôt et placement est souvent appelée à prendre les décisions dont les retombées peuvent être importantes. Il peut souvent s'agir d'une question de survie d'une entreprise. Il peut s'agir de plusieurs centaines d'emplois qui sont mis en cause ou qui peuvent être affectés par des décisions de la Caisse de placement. Vous comprenez donc toute la sensibilité des gestes et des conséquences des gestes posés par la Caisse de dépôt et placement. Ce n'est pas pour rien, M. le Président, qu'on a accordé au directeur général de la Caisse de dépôt et placement un certain nombre de précautions, qu'on a aussi accordé un certain nombre d'attentions particulières au moment de sa nomination pour justement que celui-ci puisse être à même de prendre des décisions qui apparaissent être les plus conformes aux objectifs de la Caisse de dépôt et placement.

C'est d'ailleurs pour ça, M. le Président, que le président de la Caisse de dépôt et placement est nommé par un vote à l'Assemblée nationale pour une période de 10 ans. M. le Président, vous conviendrez facilement avec moi que s'il avait fallu, par exemple, de façon arbitraire, revoir son traitement tous les ans, si, par exemple, son mandat avait été beaucoup plus court que 10 ans pour l'empêcher d'adopter des politiques à long terme, vous comprenez l'impact que cela aurait pu avoir sur tout l'exercice de la Caisse.

M. le Président, il était donc clair qu'il fallait éviter que des pressions indues s'exercent sur le président de la Caisse de dépôt et placement, par exemple, à l'occasion d'un renouvellement trop fréquent de son mandat. Une institution financière peut être révolutionnaire de par sa nature même. Elle ne se développe, cependant, qu'en acceptant une grande rigueur de principe et en soumettant son personnel à un entraînement long et laborieux. C'est dire combien est essentielle la stabilité de la direction.

C'est d'ailleurs pour ça, M. le Président, - je reviens sur ce que je disais tout à l'heure - que le président de la Caisse de dépôt et placement est nommé sur une période de 10 ans et qu'il ne pourrait être renvoyé de son poste que suite à un vote de la Chambre, de l'Assemblée nationale. M. le Président, il y a un deuxième principe aussi, qui est fondamental,

qu'il faut souligner lorsqu'on discute de l'administration de la Caisse, qui est celui de la coordination des opérations de la Caisse avec la politique générale économique de l'État. C'est par le truchement, M. le Président, du conseil d'administration que cette synchronisation se fait normalement, par le biais de la nomination d'un certain nombre de fonctionnaires au conseil d'administration.

M. le Président, maintenir un équilibre entre ces deux principes qui, à première vue, peuvent sembler contradictoires, exige à la fois que la politique de l'État veille à l'indépendance de la Caisse, veille aussi à l'intérêt de l'ensemble des Québécois et Québécoises. Cet équilibre entre les exigences de la Caisse et celles de l'État peut sembler contradictoire, mais, cependant, il est important d'adopter une voie qui puisse, une voie pas facile, mais qui puisse concilier ces deux intérêts. M. le Président, il y a des gens qui se sont succédé à la Caisse de dépôt et placement, qui ont réussi à maintenir ce juste équilibre entre, à la fois, les exigences de l'État et les exigences d'une grande indépendance de la Caisse de dépôt et placement, qui ont réussi à le faire grâce à une structure efficace, grâce à une structure qui a permis au président et à l'ensemble de ses vice-présidents qui sont sous sa responsabilité de voir à l'atteinte de ce double objectif.

M. le Président, il y a un principe bien simple qu'on m'a rapidement appris, en anglais, vous me permettrez, mais comme l'expression anglaise le veut: "When your car is not broken, you do not fix it". Quand votre auto n'est pas brisée, vous n'essayez pas de la réparer, M. le Président. Quand tout baigne dans l'huile, vous ne vous essayez pas, M. le Président, de changer des pièces. Ce principe fondamental, on devrait le rappeler au ministre des Finances...

Une voix:...

M. Boisclair: Ah! c'est la conclusion à laquelle je voulais arriver, M. le Président. On voulait le rappeler, M. le Président, ce principe. On voulait le rappeler au ministre des Finances. Les seuls, M. le Président, qui ne suivent pas le principe, ce sont les garagistes qui souvent essaieront de réparer une auto, même si tout fonctionne bien. Alors, est-ce que je dois conclure que le ministre des Finances est un garagiste? Ce serait peut-être sauter des étapes, mais, à tout le moins, ce que je veux tout simplement illustrer par mon propos, c'est de dire que nous avons à l'heure actuelle une structure qui a permis de concilier tes deux objectifs, à la fols de l'indépendance de l'État, et d'une certaine conciliation aussi des intérêts économiques du gouvernement du Québec.

M. le Président, ces deux objectifs et l'administration de la Caisse et la philosophie de gestion doivent faire en sorte que la direction de la Caisse puisse jouir, à l'égard des pouvoirs publics et privés, d'une indépendance la plus nette et la plus claire possible, parce qu'un organisme financier, M. le Président, aussi considérable que la Caisse de dépôt ne peut éviter d'attirer la convoitise du secteur public et du secteur privé. M. le Président, jusqu'à présent, les cinq premiers vice-présidents de la Caisse de dépôt et placement - on le voit bien lorsqu'on étudie la composition du conseil d'administration: vice-président placements à revenu fixe; vice-président placements à revenu variable; vice-président planification et relations avec les déposants; vice-président aux affaires juridiques et institutionnelles et placements immeubles; et vice-président administration et contrôle - étaient, à l'heure actuelle, tous sous la responsabilité du président et directeur général.

C'est un organigramme de type pyramidal ou un peu en forme de totem qui fait que l'ensemble de ces cinq vice-présidents sont sous la direction immédiate du président-directeur général, ce qui consacre un peu, M. le Président, un principe fondamental, qui est celui de l'unité de la direction. On a - pour un certain nombre de considérations peut-être politiques, je crois que mes collègues l'ont bien illustré, la polémique qu'a suscitée la nomination de M. Savard - proposé un certain nombre de modifications et il est intéressant de voir que la direction, l'organigramme de la haute direction décidé au mois de juillet 1990 diffère de celui qui était proposé par le gouvernement. (18 heures)

Le gouvernement proposait une formule de type pyramidal, sous forme de totem. Or, à la tête, nous avions le président du conseil d'administration et chef de la direction, en l'occurrence M. Delorme; sous sa responsabilité immédiate, le président et chef de l'exploitation, M. Savard, et sous la responsabilité de ces deux individus, l'ensemble des cinq vice-présidents, alors que l'organigramme de la haute direction, décidé le 12 juillet, est fondamentalement différent. C'est toujours le président-directeur général qui a la responsabilité de trois vice-présidents, planification et relations avec les déposants, affaires juridiques et administration et contrôle, alors qu'on confie à un vice-président exécutif la responsabilité de deux autres vice-présidents, celui du placement à revenus fixes et celui du placement à revenus variables.

M. le Président, ces modifications ne sont pas mineures. Ces dispositions, dans le fond, qui sont les conséquences du projet de loi 109, viendront modifier et viendront attaquer ce principe fondamental d'unité dans la direction. Et M. le Président, cette formule qui, pourtant, avait fait l'objet d'un consensus à l'époque et qui avait permis d'arriver à des résultats dont tous se font le plaisir de vanter les mérites, est aujourd'hui remise en question. M. le Président,

est-ce qu'il y a un malaise à la Caisse de dépôt et placement du Québec? La question, on peut maintenant se la poser. Mon collègue, le député de Bertrand, soulevait avec pertinence les critiques qui sont adressées par le Canada anglais au sujet de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Je crois qu'il faut éviter de susciter ce genre de critique, il faut éviter d'ouvrir le front à de plus amples critiques. Hélas, M. le Président, nous sommes obligés de constater que c'est ce que fait le ministre des Finances en modifiant, pour répondre à des considérations bassement partisanes, le projet de loi 109.

M. le Président, sous la gouverne de M. Campeau, la Caisse de dépôt et placement du Québec a connu des succès impressionnants. Dans de telles circonstances, M. le Président, personne au Québec ne pouvait imaginer que son remplacement amènerait aussi un changement de structure. La décision annoncée à la fin du mois de mai par le premier ministre n'a pas soulevé que des remous dans l'Opposition officielle, elle a été sévèrement critiquée par des observateurs, à la fois à l'intérieur mais aussi à l'extérieur de la politique, mais aussi par certains administrateurs de la Caisse. M. Béland, membre du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec, disait, et je cite: "On nous demande à nous d'administrer la Caisse de dépôt; alors, c'est la moindre des choses que ceux qui administrent proposent au moins un organisme qui convient à la planification qu'on s'est donnée. Alors là, il va falloir vivre avec une structure qui nous tombe du ciel. Le conseil d'administration, qui est notamment chargé d'approuver ou pas les plans stratégiques, aurait dû être consulté.

M. le Président, c'est essentiellement une décision qui a été prise sans consultation avec les différents intéressés. Il ne faut pas un grand cours de gestion des finances publiques ou d'organisation industrielle, ou d'organisation corporative pour comprendre que le conseil d'administration, une de ses premières responsabilités, c'est de définir les orientations stratégiques, de faire une planification à court, à moyen et à long termes pour une entreprise. Et vous comprenez les conséquences que ça peut avoir pour une entreprise aussi importante que la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Alors, sans même consulter les différents intervenants, on impose une nouvelle structure d'organisation aux dirigeants de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Et ce sont les dirigeants actuels eux-mêmes de la Caisse, qui disent que cette structure ne convient pas aux différentes priorités ou, à tout le moins, à la planification sur laquelle se sont entendus les membres du conseil d'administration. M. le Président, pourquoi changer une formule gagnante, comme le disait M. Béland? C'est la question que je poserais au conseil d'administration, car ce qui me surprend, c'est qu'on change la structure sans savoir si cela est nécessaire ou valable. C'est comme ça, M. le Président, que M. Béland concluait son intervention.

Il faut rappeler aussi, M. le Président, que le choix des successeurs de M. Campeau relève du premier ministre, et ça, personne ne le conteste. Et ce dernier, cependant, doit respecter certains principes. Ces principes, M. le Président, avaient été énoncés clairement par l'honorable Jean Lesage au mois de juin 1965, à l'occasion de l'étude du principe du projet de loi 51 qui créait la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec. M. Lesagè disait: il est absolument essentiel de sauvegarder deux principes en apparence contradictoires. En premier lieu, il faut faire en sorte que la direction de la Caisse puisse jouir, à l'égard du secteur privé, d'une indépendance aussi nette que possible. Un organisme financier aussi considérable que la Caisse de dépôt et placement du Québec ne peut éviter d'attirer les convoitises du secteur public comme du secteur privé. C'est ce principe que je

Le second principe qu'il faut établir, disait-il en continuant, est celui de la coordination des opérations de la Caisse et de la politique économique générale de l'État. C'est par le truchement du conseil d'administration que cette synchronisation doit normalement se faire.

Et ici, le premier ministre actuel du Québec a violé ce principe, en ne consultant pas le conseil d'administration de la Caisse. M. le Président, la Caisse de dépôt est la propriété de tous les citoyens et citoyennes du Québec. En raison de l'importance des sommes qu'elle va administrer, de l'autorité morale qu'elle doit acquérir sur les marchés financiers, elle doit se prémunir contre toute transaction qui ne serait pas justifiée par les intérêts économiques et sociaux du Québec. Elle doit être placée à l'abri de tout soupçon de favoritisme politique ou de corruption. M. le Président, l'actuel premier ministre a fait fi des remarques de l'honorable Jean Lesage au sujet du conflit d'intérêts, par la nomination de M. Guy Savard.

M. le Président, on pourrait peut-être discuter des compétences de M. Savard, mais permettez-moi tout simplement de citer un certain nombre de critiques qu'a soulevées la nomination de M. Savard à la Caisse de dépôt.

Jean-Claude Leclerc dit, dans un editorial du Le Devoir du 1er juin: "Ceci dit, il est peu opportun de recruter un "bagman" libéral, même pour un simple poste au conseil d'administration de la Caisse. Les entreprises ont beau n'avoir plus le droit de verser des fonds aux partis, plusieurs parmi elles ont trouvé les moyens d'inciter leurs gens à le faire. La Caisse de dépôt a déjà la réputation malheureuse d'intimider ceux qui ne se plient pas à ses politiques. S'il fallait que s'y ajoute le stigmate

qu'un collecteur a désormais l'oeil sur les dossiers, sa crédibilité même serait ternie". Ce n'est pas l'Opposition officielle, M. le Président, qui dit ça. Jean-Claude Leclerc, éditorialiste au Devoir.

Lysiane Gagnon, dans La Presse: "Cette nomination éminemment partisane veut, de toute évidence, calmer les rancoeurs des gens d'affaires libéraux qui reprochaient depuis longtemps au premier ministre de tolérer que la Caisse soit, comme ils disent, un nid de politiciens.

M. le Président, on pourrait continuer, Raymond Giroux, dans Le Soleil: "II ne fallait pas toucher, même de loin, à la réputation de la Caisse, surtout en cette période, où une partie de l'opinion canadienne grogne en douce contre l'interventionnisme québécois dans l'économie. "

Lysiane Gagnon aussi continuait et faisait d'autres critiques acerbes: "Voilà une nomination qui risque de démolir la crédibilité de l'organisme autour duquel tourne toute l'économie québécoise et dont le moins qu'on puisse exiger, c'est une neutralité sans failles et une compétence à toute épreuve. "

M. le Président, vous me permettrez, à cette étape-ci aussi, de parier des dispositions précises contenues dans le projet de loi 109. Faut-il rappeler... Et vous allez me donner quelques instants pour que je puisse retrouver le projet de loi.

Le Président (M. Audet): II vous reste deux minutes.

M. Bolsclair: Les articles 14 et 14. 1, qui remplacent l'article 14 de l'actuel projet de loi, modifient les rôles et les attributions donnés au président et au président et chef de l'exploitation. On y dit: "Le président du conseil d'administration et chef de la direction préside les réunions du conseil et voit à son bon fonctionnement". Alors que c'est le président et chef de l'exploitation qui agit sous la responsabilité du président du conseil d'administration et chef de la direction. "Il est principalement chargé de l'exploitation des activités de la Caisse que détermine le conseil d'administration".

Ce qu'il faut soulever, M. le Président, c'est que ce sont deux personnes, à la fois M. Delorme et M. Savard qui maintenant, ne pourront être destituées que sur une résolution de l'Assemblée nationale adoptée à cet effet. M. le Président, que le président du conseil d'administration jouisse de cette protection, soit, personne ne s'y oppose. C'est d'ailleurs le cas pour le président de la Commission d'accès à l'information. C'est le cas pour le Protecteur du citoyen. C'est le cas pour le Vérificateur général. C'est le cas aussi pour bien d'autres Intervenants qui ont un rôle important à jouer dans l'administration publique.

Mais, M. le Président, dans aucune loi existante à l'heure actuelle, on ne retrouve une pareille protection pour celui qui dirige des opérations financières, commerciales ou industrielles, au nom de l'État.

Quant à nous, M. le Président, il s'agit d'une protection qui n'a pas sa place. Qu'arriverait-il par exemple, si un conflit venait à éclater entre M. Delorme et M. Savard qui est une situation qui s'est vue dans plusieurs entreprises privées? Les deux jouiraient de la même protection.

En concluant, M. le Président, je voudrais peut-être profiter de l'occasion pour manifester notre intention d'entendre un certain nombre de personnes qui pourraient venir témoigner, un certain nombre d'experts qui pourraient venir témoigner, et faire part de leur expérience, aux membres de cette commission.

Alors, nous souhaitons pouvoir débattre tout à l'heure, peut-être après le souper, ces propositions, et je suis convaincu que mon collègue, le député de Labelle, déposera des motions. Je ne sais pas si c'est son intention de le faire, mais c'est une recommandation que je lui fais. Il me semblerait pertinent, à ce moment-ci, d'entendre peut-être M. Campeau ou d'entendre les présidents qui ont précédé M. Campeau, M. Cazavan ou d'autres membres qui ont occupé des postes dans l'administration de la Caisse de dépôt et placement.

Le Président (M. Audet): D'accord. M. Boisclair: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député de Gouin. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Ça va. Alors, M. le député de Labelle.

Motion demandant d'entendre M. Marcel Cazavan M. Jacques Léonard

M. Léonard: À moins qu'il y ait d'autres remarques préliminaires, je vais...

Le Président (M. Audet): Personne n'en a manifesté l'intention.

M. Léonard:... déposer une motion, M. le Président...

Le Président (M. Audet): Vous pouvez en faire la lecture.

M. Léonard:... qui est la suivante: "II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission permanente du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit

projet de loi et qu'à cette fin, elle entende M. Marcel Cazavan.

Le Président (M. Audet): Est-ce que vous avez une copie de la motion, s'il vous plaît? Alors, la motion est recevable. Vous avez la parole, M. le député de Labelle.

M. Léonard: M. le Président, je vois sourire le ministre des Finances, mais, quand même, il s'agit d'un sujet fort important que celui de la Caisse de dépôt et placement. Je suis sûr qu'il en est convaincu lui-même. Il sait tous les milliards qu'il y a là-dedans. C'est plus que le budget du Québec en une seule année.

M. Levesque: Vous allez arrêter de rire vous aussi, par exemple.

M. Léonard: Je crois qu'il s'agit là, donc, d'un sujet important. J'ai abordé un certain nombre de sujets plus généraux dans mes remarques préliminaires et je voudrais mentionner, ici, des cas plus précis quant à ce qui concerne le projet de loi. Je pense qu'il y a des questions qui doivent être soulevées comme telles. À mon sens, nous devons nous poser des questions quant à l'expérience des gens qui ont vécu la Caisse de dépôt et placement durant 10 ans pratiquement. Peut-être que M. Cazavan n'a pas été tout à fait 10 ans à la direction de la Caisse de dépôt et placement, mais, quand même, il en a été un bon bout de temps le président.

Je voudrais l'inviter à venir nous parler de son expérience parce que, au fond, par rapport au projet de loi qu'il y a ici, il y a une modification majeure quant à la direction de la Caisse. Je crois que le P. -D. G. - poste qu'il a assumé durant le temps où il a été là - voit modifier ses attributions. Si je lis, par exemple, l'article 5 qui modifie les articles 14 et 14. 1 du projet de loi, ou qui crée, en quelque sorte, l'article 14. 1, maintenant, ces articles vont se lire comme suit. "Le président du conseil d'administration et chef de la direction préside les réunions du conseil et voit à son bon fonctionnement. Il est responsable de l'administration et de la direction de la Caisse et assume les autres responsabilités que lui confie le conseil d'administration. Il est responsable des relations de la Caisse avec le gouvernement. "

L'article 14. 1, maintenant, se lira comme suit: "Le président et chef de l'exploitation agit sous la responsabilité du président du conseil d'administration et chef de la direction. Il est principalement chargé de l'exploitation des activités de la Caisse que détermine le conseil d'administration. Il assume les autres responsabilités que lui confie le président du conseil d'administration et chef de la direction. "

Par ailleurs, à un article précédent, à l'article 3 qui modifie l'article 8 de la loi constitutive de la Caisse de dépôt et placement, on peut lire ceci maintenant. Le nouvel article 8: "Le président du conseil d'administration et chef de la direction et le président et chef de l'exploitation sont nommés pour dix ans par le gouvernement qui fixe leur traitement, lequel ne peut être réduit. "Ils ne peuvent être destitués que par résolution de l'Assemblée nationale. "

M. le Président, au-delà des remarques, je dirais aussi, de tout ce qui s'est dit lorsque nous avons connu, dans la société québécoise, le nom des deux personnes pressenties à l'époque, au-delà de cela, je crois qu'il faut discuter de la proposition à son mérite, la proposition contenue au projet de loi, quelles que soient les personnes. C'est sur cette question que je voudrais centrer mon intervention pour vous convaincre d'entendre M. Cazavan, en l'occurrence. (18 h 15)

Alors, à mon sens, ce qu'il est important de comprendre, c'est qu'on vient ou on va créer deux postes de président: l'un chargé de ce qu'on appellerait la direction et l'autre, chargé de l'administration, tous les deux étant nommés par le gouvernement, mais ayant une garantie particulière qui est celle de l'Assemblée nationale parce que si ces personnes sont en poste sans qu'on ne puisse les révoquer mais qu'on ne puisse le faire que par l'Assemblée nationale, cela leur confère une espèce de pérennité, de garantie d'emploi qu'on ne trouve dans aucune loi.

M. le Président, au fond, on est en train de modifier complètement la direction de la Caisse. À l'origine, lorsque les nominations ont été annoncées, on pensait qu'il y aurait un aménagement, que l'une des personnes relèverait de l'autre, sans plus, et que, finalement, il y aurait un poste d'importance, un poste numéro 2 de la Caisse qui serait créé, ce qui a été effectivement le cas de M. Marcel Cazavan. En réalité, la loi qui créait la Caisse de dépôt et placement, à l'heure actuelle, était assez flexible. Il y avait un président qui avait des garanties. Lui aussi ne pouvait être destitué que par l'Assemblée nationale. Donc, il avait une garantie d'emploi à toute épreuve. Ça n'existe pas dans beaucoup de lois, ça, au gouvernement, des garanties comme celle-là, et surtout le fait que seule l'Assemblée nationale puisse le destituer.

Le chef de l'Opposition a mentionné à l'Assemblée nationale, comme exemple d'une telle clause, le cas du gouverneur de la Banque du Canada. C'en est un cas où le gouverneur de la Banque du Canada peut démissionner évidemment, mais il ne peut pas être congédié sur simple décret du gouvernement fédéral. Il doit y avoir un vote, si je comprends bien, à la Chambre des communes, entériné par le Sénat, et il est nommé pour 10 ans. Donc, c'est une garantie qui le met à l'abri d'interventions et qui lui donne finalement une grande indépendance dans l'exercice de ses fonctions. On l'a vu très bien lorsque M.

Diefenbaker a eu à traiter avec M. Coyne dans les années 1961 où il y a eu un différend quant aux directives. Finalement, M. Coyen, je crois, avait démissionné à l'époque, mais le gouvernement avait tenté de lui dire de s'en aller. Je pense qu'il y avait eu un vote aux Communes et ça avait été bloqué au Sénat. C'est juste pour vous dire que c'était une garantie considérable.

Il y a peut-être des détails dans ce que je dis qui ne sont pas tout à fait exacts, mais l'essentiel, c'est que M. Coyne avait une protection de 10 ans, que ce que le gouvernement fédéral peut lui donner, ce sont des directives, mais que le gouverneur général de la Banque du Canada n'est pas tenu de les suivre; mais s'il ne les suit pas, le gouvernement a une décision à prendre.

En quelque sorte, lorsque la loi constitutive de la Caisse de dépôt et placement a été votée, c'était l'exemple qu'on avait en tête pour donner des garanties d'indépendance au président-directeur général de la Caisse de dépôt et placement. En l'occurrence, maintenant, lorsque nous arrivons à la Caisse de dépôt et placement, la première des choses, personne n'avait soulevé cette question dans le public, et je n'ai pas entendu dire qu'il y avait des conflits avec l'actuel ministre des Finances et le président-directeur général de la Caisse de dépôt et placement, toutes les choses allaient bien. Je crois qu'on s'attendait qu'il y ait un renouvellement du poste du président au poste de président lorsque, tout à coup, on a appris qu'il y avait deux personnes.

Et ça a soulevé des questions parce que, en nommant deux personnes, la première des choses, on lui a donné une garantie de 10 ans. On veut, par la loi actuelle, donner une garantie de 10 ans à la deuxième personne. On aurait pu, par exemple, donner une garantie beaucoup moins longue. À supposer que ce soit souhaitable qu'on la destitue, par un vote de l'Assemblée nationale, on pourrait au moins lui donner une garantie moins longue, de sorte que la relation de subordination entre les deux personnes soit claire parce que s'il y en a une dont le mandat est plus court que l'autre, bien, on peut penser qu'en cas de conflit la personne dont le mandat est le plus long va avoir un mot à dire au renouvellement de l'autre personne, de la deuxième, en l'occurrence, par exemple, le président chargé de l'exploitation. Alors, ça se sont des techniques qu'on utilise dans le privé couramment, régulièrement. Le mandat d'un subordonné est plus court que celui du supérieur, de sorte que le subordonné le sait, ça se sent, c'est psychologique, je suis convaincu que mon collègue de La Prairie sait très bien ce que cela signifie...

M. Lazure: Oui.

M. Léonard:... et en psychologie industrielle que c'est très clair..

M. Lazure: Élémentaire.

M. Léonard: Oui, c'est même élémentaire. Là, on lui a donné une garantie qui, à mon sens, est exorbitante. Autant la garantie de 10 ans est exceptionnelle - et je crois qu'elle est valable dans le cas de la présidence de la Caisse de dépôt et placement - autant ça m'apparaît exorbitant qu'on donne une garantie d'emploi de même durée à une deuxième personne dans la même boîte. Simplement sur cette question, il y a beaucoup à dire et beaucoup d'interrogations et, j'y reviendrai plus loin sur les conséquences d'une telle décision.

Deuxième élément qui, à mon sens, doit être soulevé, c'est qu'on fait une distinction entre direction et exploitation. Lorsqu'on nous explique le pourquoi de la décision, on fait une comparaison avec Hydro-Québec. C'en est une qu'on a apportée en particulier et on en a apporté aussi dans les autres grandes entreprises. Mais il faut savoir de quoi on parle lorsqu'on fait une telle distinction. Dans le cas de très grandes entreprises, où on fait cette distinction, il y a 20 000 employés, 30 000 employés; à HydroQuébec, il doit y avoir à peu près 19 019 employés. On peut penser que c'est ça, c'est-à-dire que les opérations sont considérables, il y en a beaucoup et qu'il est important qu'on préserve le président-directeur général dans son rôle de direction, de planification, de stratégie; il faut qu'il ait le temps de penser à des objectifs, il faut qu'il ait le temps de consulter, disons qu'on veut le dégager du poids des opérations quotidiennes, au jour le jour. Important, ça s'entend très bien.

Mais de quoi parle t-on lorsqu'on parle de la Caisse de dépôt et placement? Il n'y a pas 20 000 employés à la Caisse de dépôt et placement, il n'y en a pas 300. Il y en a moins que ça. Ce sont des professionnels qui préparent des décisions d'investissement, donc d'une nature très différente de ce qu'on trouve à Hydro-Québec, de ce qu'on trouve à Alcan, de ce qu'on trouve à Canadien National, Labatt, dans les grandes entreprises dont nous avons parlé. C'est très différent.

Au fond, c'est quoi les opérations quotidiennes de la Caisse par rapport aux décisions de direction? À mon sens, lorsqu'on prend des décisions importantes, genre investir dans Domtar, est-ce qu'il s'agit là d'une opération quotidienne ou bien s'il s'agit là d'une grande décision stratégique de direction qui doit relever nécessairement du président qui est chargé de la direction? Et sur ce plan là, n'importe quelle décision est importante parce qu'à chaque fois elle implique des capitaux importants. La Caisse prend des décisions importantes par sa nature même. Il y a 300 personnes. Il n'y en a pas 20 000 impliquées dans les opérations. Ce sont

300 personnes qui prennent des décisions de qualité et, à mon sens, c'est très difficile de faire la distinction entre direction et exploitation, très, très difficile. À mon sens, il n'y en a pas et je ne vois pas comment on peut justifier un deuxième poste de président avec les mêmes garanties que pour la première personne. lorsqu'il s'agit de 300 personnes, qu'on ne peut pas faire la distinction entre exploitation et direction. Des décisions, à la Caisse de dépôt et placement, d'investir 50 000 000 $, 100 000 000 $, 150 000 000 $, ça se prend régulièrement, je ne dis pas à la douzaine par jour, mais ça se prend régulièrement. On décide d'acheter des obligations du gouvernement du Québec, le ministre des Finances doit savoir que ça se passe assez souvent, que ça se transige, et donc, on l'a le cas, ce sont des décisions qui sont importantes en soi et qui demandent que la direction soit impliquée parce qu'il s'agit chaque fois de traiter du niveau des opérations.

Moi, je pense, M. le Président, que ce qu'on voulait faire, c'est d'abord de garantir l'emploi du président-directeur général pour le mettre à l'abri des pressions politiques de toutes sortes. D'ailleurs, ça a été mentionné dans le discours du premier ministre du Québec d'alors, qui était M. Lesage, j'ai eu l'occasion de le citer dans le discours de' deuxième lecture. On voulait le mettre à l'abri. On lui a donné une protection.

Donc, on en est à avoir deux présidents et avec des mêmes garanties, deux personnes sur le même pied. On peut se demander, pourquoi. Ce n'est pas du tout le cas d'Hydro-Québec, absolument pas. Il n'y a pas d'opération d'une aussi grande importance. Et, en ce qui concerne la direction, à chaque fois, comme il s'agit de sommes importantes, on ne peut pas dissocier ça de la direction. Alors, je pense que la loi elle-même permettait au président de s'organiser comme il l'entendait. M. Cazavan a fonctionné, lui, avec un numéro 2 - il a vécu des années comme celles-là - toutes les années où il a été là, il a vécu avec M. Paris qui était son numéro 2 à Caisse de dépôt et placement du Québec. M. Campeau, quant à lui, a fonctionné avec une équipe de cinq vice-présidents. Donc, un modèle beaucoup plus flexible. Il a constitué une équipe en quelque sorte, alors que M. Cazavan fonctionnait avec une personne. C'est peut-être le modèle que nous avons en tête actuellement, que le gouvernement a en tête lorsqu'il veut avoir un numéro 2 à la Caisse. En l'occurrence, dans le cas de M. Cazavan, lui-même l'avait deviné, l'avait pensé comme ça, d'avoir un numéro 2, mais le gouvernement l'impose actuellement dans la loi elle-même. Il donne les mêmes garanties que le numéro 1 de la Caisse. Et, c'est là, à mon sens, que ça devient extrêmement grave. Parce qu'au fond, on peut se demander ce qui va se passer par rapport aux garanties qui sont proposées.

Supposons qu'il y a un conflit entre les deux personnes - c'est très possible, je dirais que sur dix ans, ce serait étonnant que ça n'arrive pas - qu'il se dessine des avenues très différentes. La loi dit ou dirait, si on l'adoptait telle quelle, que ces personnes ne peuvent être révoquées que par une décision de l'Assemblée nationale, donc que nous serions amenés à décider entre deux personnes dans un débat à l'Assemblée nationale. Je vous donne simplement à penser si cela peut être possible, si cela est faisable, qu'on amène un tel débat à l'Assemblée nationale qui, en fait, va porter sur des chicanes entre deux personnes, ne parlons pas de chicane, tout simplement sur des perceptions, sur des orientations que ces deux personnes verraient de façon différente. C'est ça qui risque de se produire tout bonnement disons par, l'évolution de la situation elle-même. Est-ce que le gouvernement va laisser aller les choses comme cela? Laisser aller une chicane à l'Assemblée nationale, au grand jour, ça me paraît peu probable. En réalité, ça me paraît peu probable.

Alors, qu'est-ce qu'il va arriver? Le gouvernement va tenter de concilier les choses. C'est ça qui risque d'arriver. Le gouvernement va refuser que dans un de ses dossiers les plus importants, les chicanes apparaissent en public. Alors, lui-même va tenter de les résorber. Donc, il va essayer d'arbitrer entre les deux personnes. Ça me paraît ce qui va être tenté à tout le moins. Et qu'est-ce qu'il va se développer? On peut penser qu'il y a une des deux personnes qui va s'écraser. Est-ce que c'est le numéro 1 qui va s'écraser? Je crois que, là, tout de suite, on pose la question qu'on ne veut pas soulever, mais qui est celle de l'indépendance du président-directeur général, chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Est-ce que le ministre souhaite qu'on suspende à ce stade-ci? On pourrait reprendre à 20 heures. C'est ça que sont les honoraires. Proposez-vous qu'on suspende, M. le ministre?

Une voix: Comme vous voudrez, c'est vous qui avez la parole.

M. Léonard: Je peux proposer la suspension. Je continuerai à 20 heures.

Le Président (M. Audet): Alors, étant donné qu'il est presque 18 h 30, la commission va suspendre ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 30) (Reprise à 20 h 12)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! La séance va commencer.

M. Léonard: Ce qu'on m'a dit, c'est qu'il y avait une conférence des leaders, et on pensait que c'était notre commission qui était en cause.

C'est ce qu'on m'a dit. Maintenant, est-ce que c'est bien là-dessus...

M. Levesque: II y a de l'ouvrage à faire, il n'y a pas de problème.

M. Léonard: Ça avait été convoqué à 19 h 50 et ça devait avoir lieu de 19 h 50 à 20 heures, mais je sais que Chevrette est parti 10 minutes en retard.

Une voix: Ça a commencé en retard. M. Levesque: On peut attendre.

M. Léonard: On peut attendre quelques minutes? On peut s'informer...

Le Président (M. Audet): Alors, étant donné qu'on n'a pas ouvert la séance, on va tout simplement reporter l'ouverture de la séance à une dizaine de minutes à peu près, quoi?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Audet): D'accord, ça va. (Suspension de la séance à 20 h 13) (Reprise à 20 h 37)

Le Président (M. Audet): La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat qui est de procéder à l'étude détallée du projet de loi 109. Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec. Alors, nous en étions à une motion de M. le député de Labelle.

M. Léonard: M. le Président, sur une question de règlement. Je ne sais pas à quel numéro du règlement il faut référer, mais nous apprenons qu'il y a une motion de clôture qui a été déposée, qui nous touche à l'heure actuelle et qui est actuellement débattue en Chambre. Comment peut-on continuer nos débats si, finalement, c'est une décision qui est prise d'arrêter les travaux de cette commission? Est-ce qu'on ne doit pas attendre que le débat soit terminé entre les deux leaders et le Président de l'Assemblée nationale, parce que c'est de ça qu'il s'agit actuellement?

M. Levesque: M. le Président, sur cette question de règlement.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Levesque: J'aimerais faire remarquer que si on suit les dispositions du règlement, en autant que je me rappelle, ce n'est pas le fait qu'il y ait eu une conférence des leaders et un dépôt d'une motion, ou l'annonce d'une motion, un avis de motion par le leader du gouvernement, même si ça amène des questions de règlement et des discussions à l'Assemblée nationale, que cela change en quoi que ce soit le mandat que nous avons reçu de l'Assemblée.

Le Président (M. Audet): Tant et aussi longtemps que la motion n'est pas adoptée, la commission doit poursuivre ses travaux.

M. Léonard: M. te Président, est-ce que vous pourriez requérir, par vos services ou autrement, le texte de cette motion ou le libellé de la motion d'une façon ou de l'autre, parce que...

Le Président (M. Audet): C'est fait, le texte, n'est pas disponible au moment où on se parle, mais il doit nous être remis sous peu. Alors, normalement, on doit poursuivre l'étude...

M. Léonard: M. le Président, je trouve que continuer à délibérer ici alors qu'il y a une motion de clôture qu'on vient de commencer, c'est comme si on venait de s'asseoir à...

Le Président (M. Audet): Tant et aussi longtemps qu'elle n'est pas adoptée, on a un ordre de la Chambre de procéder à l'étude détaillée du projet de loi. Alors...

M. Léonard: Je trouve ça un peu inhabituel, vous me permettrez de...

Le Président (M. Audet): Vous aviez commencé une motion.

M. Léonard: Pas juste un peu. Je n'ai jamais vu ça. Je n'ai pas été ici aussi longtemps que le ministre des Finances qui nous raconte assez souvent qu'il siège ici depuis 35 ans, je n'ai pas son expérience évidemment, mais c'est la première fois que je vois une telle chose ici, au Parlement. Je trouve...

M. Levesque: Au contraire, M. le Président, c'est la règle générale. C'est arrivé maintes et maintes fois qu'à ce stade-ci du processus parlementaire, c'est arrivé très régulièrement que les commissions continuent de siéger jusqu'au moment où la Chambre en décide autrement.

Le Président (M. Audet): Oui, à cet effet là, je voudrais simplement vous faire la lecture de l'article 251 de notre règlement qui dit ceci: Motion de clôture, article 251: "Si aucun accord n'a pu être conclu, le leader du gouvernement peut alors faire une motion indiquant le moment où la commission devra mettre fin à ses travaux et faire rapport à l'Assemblée. " Alors, à ce moment-là, la commission poursuit ses travaux et s'il y a une motion de déposée à l'effet que la commission devra avoir complété l'étude du

projet de loi demain soir, par exemple, alors pendant ce temps-là, la commission pout siéger jusqu'à demain soir. Alors, je vais vous redonner la parole, M. le député de Labelle, puisque vous étiez en train de délibérer sur la motion.

M. Léonard: II me reste combien de temps à l'heure actuelle, M. le Président?

Le Président (M. Àudet): Je pense qu'il vous restait une dizaine de minutes, 11 minutes exactement.

M. Levesque: M. le Président, j'aimerais simplement intervenir pour dire que je partage cependant l'esprit des remarques de l'honorable député de Labelle parce qu'on sent, à un moment donné, que le travail que l'on poursuit en commission, même si c'est en vertu de nos règlements, est plus ou moins, il me semble, bénéfique pour la société. Mais, enfin! Ceci étant dit, nous allons nous conformer aux règlements.

M. Léonard: M. le Président, justement, je trouve qu'on charrie, carrément. Je ne sais pas si on peut employer ce mot-là, s'il est parlementaire, mais vraiment! J'ai eu l'occasion d'exprimer mon opinion sur toute cette affaire. Je vais simplement constater que nos commissions parlementaires ne marchent plus. J'ai déjà dit, noté en particulier que, par exemple, on avait aboli le Conseil législatif en 1968; donc, nous avons, en fait, enlevé tout un pan du processus parlementaire. Dans le système britannique et comme dans la plupart des démocraties du monde, il y a deux Chambres. Ce n'est pas pour rien que ça existe. C'est que l'Assemblée nationale, qui est souveraine, en règle générale, dans la plupart des lois, il n'y a pas de problème. Le Sénat respecte les décisions de l'Assemblée nationale. Mais le Sénat constitue une deuxième Chambre où des citoyens peuvent encore intervenir et le gouvernement lui-même peut se raviser suite à des remarqués qui sont faites par des membres du Sénat qui, habituellement, constituent une partie importante d'un Conseil législatif ou d'un Sénat. Et, ils s'expriment sur des projets de loi, ils apportent des corrections, ils peaufinent, ils corrigent et, au bout d'un certain temps, généralement ça prend un mois, deux mois, la loi est mise en vigueur. Alors, là...

Le Président (M. Audet): Si vous pouvez conclure, s'il vous plaît.

M. Léonard: J'avais 11 minutes.

Le Président (M. Audet): Êtes-vous toujours sur votre motion? C'est parce que l'esprit...

M. Léonard: Bien, c'est que vous m'aviez donné la parole pour parler là-dessus, mais là franchement...

Le Président (M. Audet): Non, excusez-mot, M. le député de Labelle. C'est que votre motion est à l'effet d'entendre M. Marcel Cazavan. C'est parce que là, vous discutez de la motion de clôture, alors je veux...

M. Léonard: Oui, j'étais là-dessus, vous allez voir.

Le Président (M. Audet): Si vous revenez à votre motion comme telle, je n'ai pas d'objection. Parce que si vous voulez...

M. Léonard: Je dis que s'il y avait une deuxième Chambre, M. le Président...

Le Président (M. Audet): Laissez-moi terminer un peu. Si vous voulez parler de la motion de clôture, vous pourrez le faire en Chambre. C'est ça. D'accord?

M. Léonard: Oui. Très bien. Mais ce que je veux dire, M. le Président, c'est que s'il y avait une deuxième Chambre, je pourrais laisser aller, je pourrais être plus permissif sur le plan des traditions parlementaires, des règles parlementaires, mais surtout des traditions. Je pense qu'en l'occurrence il s'agit de traditions. En fait, les gens qui ont de l'expérience comme ceux qui ont déjà été présidents de la Caisse de dépôt et placement du Québec pourraient intervenir auprès des membres d'une deuxième Chambre pour dire: Voilà, je pense que vous faites fausse route, faites telle correction, au lieu de 10 ans, mettez 5 ans, et puis, ne lui donnez pas une permanence garantie par l'Assemblée nationale, comme il est pratiquement écrit dans le projet de loi.

Alors, on a donc aboli le Conseil législatif. Le ministre des Finances qui est devant nous a participé à cette opération, et au fond...

Le Président (M. Audet): Je vais être obligé de vous arrêter. M. le député...

M. Léonard: ...on est obligé de revenir aux commissions parlementaires. Un instant! On revient aux commissions parlementaires II n'y a pas de deuxième Chambre, mais, en contrepartie, on doit assurer le bon fonctionnement des commissions parlementaires. Et quand on dit le bon fonctionnement, il y a un minimum de règles là-dessus, en termes de délais, en termes d'étapes, et les parlementaires doivent avoir l'occasion de s'exprimer. Une de ces étapes, au début de l'étude d'un projet de loi, consiste à entendre des citoyens, entendre, par exemple, des personnes d'expérience, entendre des experts. Mais le raisonnement est sans faille sur un plan démocratique, en tout cas. Je n'ai pas l'expérience du ministre des Finances pour plaider ces choses. Il fait de grandes circonlocutions pour s'exprimer, de grands discours autour d'une idée, seulement une seule idée. Moi, j'essaie d'aller

plus au fond. Alors, les commissions parlementaires fonctionnent avec des étapes. La première, c'est d'avoir des remarques préliminaires; ensuite, d'avoir des motions particulières comme celles que nous avons, qui donnent l'occasion à des gens de venir se manifester, à des groupes de venir se manifester. Et le gouvernement entend ce que pensent les citoyens. C'est d'autant plus important de respecter ce processus-là qu'il n'y a plus de deuxième Chambre. (20 h 45)

Or, là, le gouvernement dépose des projets de loi à la dernière minute et il refuse d'entendre des gens. Il s'arrange pour que les citoyens ne prennent pas connaissance des projets de loi, qu'il n'y ait pas de débat public sur ces projets de loi. On l'a vu sur la TPS québécoise, la semaine dernière et cette semaine, même processus. Des débats fondamentaux pour la société sont escamotés. Ils ne viennent pas devant les commissions parlementaires, encore moins devant le public. C'est comme s'il avait honte de ses lois, s'il se cachait par rapport au contenu de ses lois. C'est ça qu'il essaie de faire.

Actuellement, faut-il le dire, il y a une commission parlementaire extraordinaire qui siège sur l'avenir constitutionnel du Québec. Toute l'attention de la presse se porte là-dessus et il n'y a rien sur ce qui se passe dans les commissions. Alors, le gouvernement en profite pour faire ses coups pendables; c'est ça qui arrive. Ce sont des coups pendables, en termes démocratiques. Ça n'a pas de sens. Et il pense que personne ne va s'énerver, personne ne va relever la chose. Les journalistes, évidemment, ont l'attention attirée ailleurs. Et il n'y en a pas de débat; c'est ça qui se passe. Les seuls qui élèvent la voix quelque peu, dans la mesure du possible, ce sont les gens de l'Opposition, ici, qui disent des choses. Mais, à ce qu'on voit, les décisions sont déjà prises, le processus est déjà terminé avant même qu'il ne commence, pratiquement. Parce que là, c'est ça qui nous attend, si je comprends. Même si on fait des propositions, des motions pour entendre des groupes ce soir, on ne les aura pas.

Moi, j'ai connu une autre période où, lorsqu'on avait les projets de loi, on faisait une commission parlementaire, ou, même, on faisait une consultation avant de déposer un projet de loi sur des livres d'intention, soit verts, soit blancs et, après, on s'amenait avec un projet de loi. Et encore, sur le projet de loi, on faisait des commissions parlementaires pour entendre les groupes. Parce que là, entre les intentions écrites de façon générale, sous forme de principes, dans des livres, verts ou blancs, et le projet de loi, il y a des différences majeures. Quand le projet de loi arrive, là, on sait très bien tout l'environnement juridique qu'il y a dans le projet de loi et dans les lois antérieures. J'ai connu ça, moi, lorsqu'on a passé la loi sur l'aménagement, par exemple; il y a eu beaucoup de consultations.

Aujourd'hui, on sait qu'on vit avec les MRC. Il peut y avoir des problèmes, mais, dans l'ensemble, ça s'applique parce qu'il y a eu des gens d'expérience qui sont venus ici nous dire ce qu'ils en pensaient. Nous avons apporté beaucoup d'amendements, beaucoup de corrections, et ça a été pour le mieux. Ça a été pour que la loi soit meilleure. Et c'est ça qui s'est passé, réellement. Alors - qu'est-ce que vous voulez? - ça fait une heure, une heure et demie à peine que nous sommes en commission et on vient nous dire que c'est terminé: Pas de débat. Alors, ça veut dire qu'il n'y aura personne qui va venir dire ce qu'il en pense. Quelqu'un comme M. Jean Campeau, qui a vécu une expérience considérable, très large, à la direction de la Caisse de dépôt et placement, pourrait venir nous dire ce qu'il en pense, de ce projet de loi. Il pourrait venir nous dire quels sont les récifs auxquels on risque de se heurter, comme société. Parce que la Caisse de dépôt, je le rappelle, c'est la deuxième plus grande institution au Québec, en termes de finances. Et quand on sait ce que ça représente, les finances, c'est l'expression des décisions économiques que les gens prennent qui se traduisent en monnaie et, en termes de valeurs mobilières, en actions, en pouvoirs décisionnels. C'est ça que ça représente, les institutions financières. Ce n'est pas juste une décision opérationnelle. Ce sont des décisions d'orientation qui se prennent dans des conseils de banque comme celle-là, des conseils comme celui de la Caisse de dépôt et placement. Et quand le président-directeur général prend des directions, adopte des directions ou des orienta tions. il oriente les épargnes de milliers, de millions de Québécois.

Alors, le projet de loi qu'on a sous les yeux, c'est un projet de loi qui va rompre l'unité de direction de la Caisse. Il va y avoir deux têtes, deux têtes qui vont relever du gouvernement, à toutes fins pratiques. Et puis, quand il va y avoir des chicanes à l'intérieur, il y en a qui vont être portés à appuyer tel président et d'autres qui vont être portés à appuyer tel autre président. Quand il y aura des décisions qui vont impliquer 50 000 000 $, 100 000 000 $, 150 000 000 $, je peux juste vous garantir que ça ne se passera pas comme ça. Il y a des gens qui vont essayer d'avoir les bons appuis aux bons endroits. Quand il y aura un président, exploitation ou direction, qui va dire qu'il n'est pas très favorable à un projet, qu'il émet des objections importantes, ces gens - et il faut les comprendre - vont essayer d'utiliser toute leur influence pour faire changer la direction et vont s'adresser à l'autre tête, à l'autre président, et ils vont essayer de les opposer l'une à l'autre. C'est du connu, du déjà su, du vu dans le monde des affaires et c'est inévitable que ça se passe comme ça. Alors, qu'est-ce qu'il va arriver, M. le Président? Il y a quelqu'un qui va ramasser les

options des uns et des autres et qui va vouloir trancher. Qu'est-ce que ça veut dire? C'est que le ministre des Finances qui est devant nous va avoir à trancher dans un sens ou dans l'autre parce qu'il y a aura deux têtes. Ça veut dire que le monde politique va venir s'ingérer dans l'administration quotidienne ordinaire de la Caisse, dans ses décisions d'investissement, dans ses décisions d'orientation et ça c'est la plus grande catastrophe qu'on pourrait avoir.

Là-dessus, M. Jean Lesage, qui était premier ministre du Québec, lorsqu'il a fait son discours sur la création de la Caisse de dépôt et placement du Québec, a été très clair sur cette question. Je voudrais simplement reprendre la citation - je la cherche, M. le Président - je pense que ça vaut la peine de reciter cette citation, parce qu'elle est majeure. Je vais conclure cette citation. Tiens, c'est celle-ci, le 9 juin 1965, l'honorable Jean Lesage, à l'occasion de l'étude du principe du projet de loi 51 qui créait la Caisse de dépôt et placement du Québec: "II est absolument essentiel de sauvegarder deux principes en apparence contradictoires. En premier lieu, il faut faire en sorte que la direction de la Caisse puisse jouir à l'égard du secteur privé d'une indépendance aussi nette que possible. Un organisme financier aussi considérable que la Caisse de dépôt ne peut éviter d'attirer les convoitises du secteur politique comme du secteur privé. "

Alors, le gouvernement vient de se donner un bras long justement pour faire ce que M. Jean Lesage craignait et voulait éviter que l'on fasse.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député de Labelle. M. le député de La Prairie. Vous avez 20 minutes.

M. Lazure: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Non, 10 minutes, excusez-moi.

M. Lazure: Oui, merci. Je pense que c'est honteux que le gouvernement, par son leader et avec la complicité du ministre des Finances, complicité tacite du moins, présente une motion de clôture après à peine quelques heures de débats en commission parlementaire. C'est du jamais vu. Vous me permettez un petit préambule.

Le Président (M. Audet): Très bref. Votre collègue l'a étiré un petit peu.

M. Lazure: II fallait le dire, il fallait le dire.

M. Léonard:... M. le Président...

Le Président (M. Audet): Oui, M. le député de Labelle.

M. Léonard:... je pense qu'on vient d'apprendre qu'il y a une motion de déposée à l'Assemblée nationale. Vous comprendrez que c'est un geste qui est officiel, qui vient, à toutes fins pratiques, déterminer nos travaux. Comment peut-on. parler, alors qu'on a ça derrière la tête tout le long?

Le Président (M. Audet): M. le député de Labelle, je veux juste reprendre un peu le début de votre intervention lorsque vous avez parlé tantôt de notre système parlementaire, alors qu'autrefois le Conseil législatif était autonome par rapport au Parlement.

M. Léonard: Ah! je suis prêt à respecter le règlement...

Le Président (M. Audet): Alors, ici nos commissions parlementaires sont quand même autonomes par rapport à l'Assemblée en haut. Alors, ce qui se passe à l'Assemblée n'affecte en aucun point les travaux de la commission ou n'est pas supposé affecter les travaux de la commission parlementaire.

M. Léonard: Mais quand vous avez un char d'assaut qui vous arrive dans le dos, je pense qu'on pourrait peut-être juste faire un saut de côté pour éviter de se faire écraser!

Le Président (M. Audet): Oui, écoutez, juste pour reprendre ce que vous avez dit tantôt. Sur la motion de clôture, le discours se tient en haut. Alors, je voudrais qu'on évite de parler de ça. Puisqu'on n'a pas ordre d'arrêter nos travaux, on doit continuer.

M. Lazure: M. le Président, vous admettez...

Le Président (M. Audet): Alors, sur la motion, à l'effet d'entendre M. Marcel Cazavan, M. le député de La Prairie, je vous écoute.

M. Léonard: Vous admettez vous même... M. Denis Lazure

M. Lazure: Oui, vous avez raison de dire que la commission doit poursuivre ses travaux, mais humainement parlant, on ne peut s'empêcher quand même d'éprouver un certain choc devant ce geste qui vient d'être posé. Alors, devant ce traumatisme, je ne peux m'empêcher de passer quelques commentaires. Mais je vais aller directement à la motion de mon confrère de Labelle, tout à fait pertinente.

Moi, j'ai aussi travailé des longues soirées comme ministre pilote de projets de loi pour écouter patiemment des groupes, des experts, des représentants de la population venir exposer leur point de vue, à l'occasion de l'étude en deuxième lecture d'un projet de loi. Ici, on vient chambar-

der, du jour au lendemain, une structure qui avait donné d'excellents résultats pendant 25 ans. On vient chambarder ça et on le fait sans solliciter d'avis de personne, ex cathedra, de façon tout à fait dogmatique. La vérité est de leur côté. Us n'en doutent pas du tout. Ils n'en doutent pas. Des commentaires du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec, ce n'est pas nécessaire. C'est un peu pour la frime, un conseil d'administration à la Caisse. Quand ça fait notre affaire, on s'en sert, quand ça ne fait pas notre affaire, on leur passe sur le corps. Des réactions et des commentaires des anciens présidents de la Caisse, comme M. Cazavan, le premier président, le pionnier, le premier président qui a mis sur pied tous les rouages de la Caisse, toute la structure de la Caisse, qui a commencé à zéro, c'est certainement une expérience qui aurait pu être profitable à notre commission. Le ministre des Finances ne nous a pas fait la preuve. Il s'est réfugié dans le silence, on va peut-être l'entendre un peu tantôt. M. le Président, à travers vous, par votre intermédiaire, je peux demander au ministre des Finances s'il a objection à ce qu'on lui pose des questions?

Le Président (M. Audet): Vous pourrez poser des questions lorsqu'on aura commencé l'étude détaillée du projet de loi. À l'étape des motions préliminaires, ça ne permet pas l'échange de... Parce que si je reconnais M. le ministre, je vais immédiatement mettre fin à votre intervention,

M. Lazure: Bon. Alors, je vais poser des questions et je vais y répondre. Connaissant bien le ministre des Finances depuis moult années, je vais y répondre. Le ministre des Finances, sérieusement...

M. Léonard: Je suis sûr que ce seront de meilleures réponses que celles qu'il vous donne...

M. Lazure: Oui. Le ministre des Finances, j'en suis convaincu, ne peut absolument pas nous faire la preuve qu'il est nécessaire de changer la structure, changer l'organisation de la Caisse. Il ne peut pas et s'il le veut, il peut m'écrire un petit message, me donner la réponse par écrit, puisqu'il ne peut pas, selon nos règles, intervenir à ce stade-ci, mais je voudrais aussi le mettre en garde contre une action intempestive. Le personnel de la Caisse de dépôt et placement du Québec a déjà accumulé, non seulement une crédibilité, mais un ensemble de traditions, de pratiques qui se sont avérées fort efficaces et là, on introduit deux autorités: l'une pour s'occuper de l'exploitation et l'autre de la direction. Dans une boîte où il y a relativement peu de personnel, environ 200 à 250 employés, on ne viendra pas me faire croire que l'exploitation d'une telle entreprise, d'un tel groupe d'employés est comparable à l'exploitation d'une grande usine, d'un grand commerce où il y a des centaines et des milliers d'employés.

Qui - et c'est ma deuxième question au ministre des Finances - va définir ce qui est exploitation et qui va définir ce qui est direction? En entendant M. Cazavan, en recevant M. Cazavan, avec toute l'expérience qu'il a eue, on aurait pu, le ministre des Finances aurait pu être éclairé là-dessus. Moi, je soupçonne que M. Cazavan, lui, aurait dit: Écoutez, dans une entreprise qui a des décisions aussi délicates, des décisions aussi lourdes de conséquences à prendre, l'expérience démontre que l'unité de direction est primordiale. Il vaut mieux faire de la prévention et une façon de prévenir les conflits, parce qu'il y a toujours l'aspect interpersonnel qui entre en jeu, et par conséquent le risque de conflits dans la haute gestion, la haute administration... Et en désignant une deuxième tête, en instituant cette direction bicéphale, on double le pourcentage de risque de conflits interpersonnels. Et ça, ça va se faire au détriment de l'efficacité de la Caisse, au détriment du moral des troupes dans la Caisse, du moral du personnel. (21 heures)

Et une autre remarque, M. le Président, ça va coûter plus cher aussi, la multiplication des cadres. Est-ce qu'on se rend compte que sur la moitié de son mandat, c'est 1 000 000 $, c'est 200 000 $ et plus par année qu'il faudra donner à M. Savard pour un rôle, à toutes fins pratiques, qui n'est pas utile, qui n'est que superflu, à moins, à moins, à moins, M. le Président, que le gouvernement du Parti libéral tienne absolument à avoir son chien de garde, expert argentier, expert collecteur de fonds, à la Caisse de dépôt, de manière que la Caisse de dépôt fasse des investissements qui vont, directement ou indirectement, favoriser les petits amis du parti. Si c'est ça, le rôle qu'on veut donner à M. Savard, bien, ayons le courage de le dire et ayons le courage d'essayer de démontrer - parce que d'autres l'ont dit, les éditorialistes l'ont dit, on en a cité plusieurs cet après-midi - de faire la preuve que ce n'est pas vrai, que ce n'est pas du patronage, que la présence d'un vice-président à l'exploitation va apporter quelque chose d'original...

Une voix: Un président à l'exploitation...

M. Lazure: ...un président à l'exploitation, c'est ça...

Une voix: C'est deux têtes.

M. Lazure: ...ce n'est pas deux bras, ce n'est pas deux vice-présidents, c'est deux têtes. Alors, un président à l'exploitation à côté d'un président - à côté ou en dessous, on le sait pas, c'est légèrement en dessous et légèrement à

côté - qu'est-ce qu'il va apporter de nouveau dans la gestion de la Caisse de dépôt? M. le Président, en refusant, comme on soupçonne que le parti ministériel va refuser notre motion, la motion de mon collègue de Labelle, le parti ministériel continue la tradition de cette session-ci: attitude antidémocratique, refus de recevoir des groupes, refus de recevoir des experts. Est-ce que c'est parce que dans l'autre commission, celle qui est très spéciale sur l'avenir du Québec, ils se rendent compte maintenant qu'en recevant des groupes, qu'en recevant des experts sur la question de l'avenir du Québec, leur thèse se trouve pour le moins négligée, mise de côté, ou mal représentée par les groupes ou par les experts, ou mal acceptée? Est-ce que c'est à cause de cette expérience-là que, tout à coup, on voit à cette session-ci, plus que jamais, cette attitude de refus de convoquer des groupes, de convoquer des experts. Alors, la motion est tout à fait dans l'ordre? Nous continuons de croire que la démocratie est mal servie lorsqu'on impose le bâillon après quelques heures de débat.

M. le Président, je répète que la communauté financière, au Québec et à l'extérieur du Québec, ne comprend pas le pourquoi du geste du gouvernement. Et il n'y a pas eu d'explications rationnelles, il n'y a pas de démonstrations par le premier ministre ou par le ministre des Finances que cette nomination d'une deuxième tête allait apporter une amélioration spectaculaire à ia gestion de la Caisse de dépôt. Au contraire, tout le monde s'entend pour dire qu'il y a un danger, un danger réel de créer de la chicane, de créer des conflits et, en mettant les choses au pire, c'est l'Assemblée nationale qui devra trancher. Ça, c'est du jamais vu. On donne à ce M. Savard, sur un plateau d'argent, non seulement un poste où l'apparence de pureté doit toujours être de mise - et elle ne l'est pas dans ce cas-ci - non seulement on lui donne ce poste sur un plateau d'argent, mais, en plus, on lui dit: Dors tranquille pendant au moins 10 ans, il n'y a personne qui pourra te déplacer de là, même si, à la prochaine élection, les mauvais péquistes arrivent au pouvoir, ils ne pourront pas te déplacer, c'est l'Assemblée nationale qui devra te déplacer.

Or, M. le Président, c'est cette déconnection avec la population, avec les groupes, avec les représentants, qui amène le gouvernement à poser des gestes autoritaires comme ça, des gestes que le gouvernement va regretter lui-même, parce qu'il va entacher l'excellente réputation qu'a développée la Caisse de dépôt à travers les ans, à travers les 25 années de son existence. Nous allons tenter, puisque vous allez refuser que M. Cazavan vienne nous faire part de son expérience, de vous faire accepter la venue d'un autre expert, qui est dans l'édifice actuellement, je crois, M. Campeau, qui a été pendant 10 ans président de la Caisse. Lui aussi aurait bien des choses à nous dire. Il a été discret au moment où le gouvernement a fait son coup d'éclat. Je pense qu'il a été un bon serviteur de l'État. Il a été discret. Mais nous allons tenter de le faire venir afin qu'il éclaire le ministre des Finances. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député de La Prairie. Est-ce qu'il y a d'autres remarques sur la motion? Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous savez, au cours des deux dernières semaines, j'ai participé aux travaux de quatre commissions parlementaires. Je dois dire qu'il y a un point commun dans ces quatre commissions parlementaires: le refus systématique d'entendre des groupes. Ce refus se traduit parfois par des réactions plus vives, comme ce à quoi nous assistons aujourd'hui, c'est-à-dire à la première motion, on ne désire même pas entendre les motions préliminaires, les motions particulières. Ou, comme dans d'autres commissions, où nous avons entendu les motions, mais où nous n'avons aucunement donné réponse à l'Opposition, on a refusé d'entendre les groupes.

Le projet de loi que nous avons devant nous, le projet de loi 109, vient modifier la composition du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Un outil aussi majeur pour l'économie du Québec, je pense qu'il faut qu'il y ait prudence avant de modifier les structures et c'est ce que nous propose ce projet de loi.

M. Marcel Cazavan, étant le pionnier, le premier président de la Caisse de dépôt et placement du Québec, serait peut-être le plus habilité à nous dire si ce changement de structure vient répondre aux objectifs premiers de la Caisse. Pour se les remémorer, on peut se référer au texte de M. Jean Lesage, en 1965, qui, lorsqu'il parlait de la philosophie générale de l'administration des fonds de la Caisse de dépôt, nous disait que l'importance, c'était la sécurité des dépôts, leur protection contre l'inflation, le développement des ressources financières du secteur public et du secteur privé. Il nous disait que, bien sûr, la Caisse de dépôt et placement était appelée à devenir l'instrument financier le plus important et le plus puissant que l'on ait eu jusqu'ici au Québec. Et c'est ce qui est arrivé, puisque, maintenant, la Caisse de dépôt et placement se retrouve avec 37 000 000 000 $ d'épargnes des Québécois et des Québécoises.

Est-ce que la nouvelle structure qu'on nous propose nous permettra de maintenir cette formule gagnante que nous avons connue au cours des 25 dernières années? M. Marcel Cazavan sera sûrement habilité à nous le dire. Lorsqu'on a fondé la Caisse de dépôt et placement, on a établi deux grands principes essen-

tiels. On disait même à ce moment-là qu'ils étaient, en apparence, contradictoires. Ce qu'on disait, c'est qu'en premier lieu, il faut faire en sorte que la direction de la caisse puisse jouir, à l'égard des pouvoirs publics aussi bien qu'à l'égard du secteur privé, d'une indépendance aussi nette que possible. Un organisme financier aussi considérable que la Caisse de dépôt et placement ne peut éviter d'attirer les convoitises du secteur politique comme du secteur privé.

On pourrait poser la question à M. Marcel Cazavan si, selon lui, la nouvelle structure qu'on nous propose vient en contradiction avec ce principe essentiel qu'il fallait sauvegarder, ce principe d'indépendance de la Caisse de dépôt et placement par rapport au secteur politique. Le deuxième principe Important qu'il fallait sauvegarder, on nous disait, dès la création de la caisse: il faut que le directeur général de la caisse soit en mesure de prendre les décisions qui, en dernier ressort, lui paraissent être les plus conformes aux objectifs de l'institution qu'il dirige. Pour cela, il faut qu'il soit à l'abri, aussi bien d'un renvoi intempestif que d'une réduction arbitraire de son traitement.

On ajoutait: D'ailleurs, une institution financière comme la Caisse de dépôt doit développer, au sein de son personnel, une tradition et une continuité qui, sans exclure l'élaboration de politiques hardies, la garantissent cependant contre celles qui sont trop hasardeuses. C'est la question qu'on doit se poser aujourd'hui. Le changement de structure qu'on nous propose, est-ce qu'il va permettre aux deux présidents, finalement - puisqu'on crée deux présidents - de prendre des décisions?

Lorsqu'il y a un seul président, un seul directeur général, il a les mains libres, avec ses vice-présidents, bien sûr, pour prendre des décisions. En ajoutant une deuxième tête, ça se complique, et quand on parlait de maintenir une tradition et une continuité puis d'éviter l'élaboration de politiques trop hasardeuses, on peut s'interroger à savoir si la nouvelle structure qu'on nous propose n'entre pas justement dans ce qu'on pourrait qualifier de structures hasardeuses qui ne nous garantit aucunement le maintien du respect des politiques qui ont été établies depuis vingt-cinq ans, à la Caisse de dépôt et placement du Québec. La naissance de ce projet de loi là, parce qu'il faut se rappeler que le tout début - je dirais même la conception, avant la naissance de ce projet de loi - la conception a eu lieu au printemps et c'a été une conception qui s'est traduite, autant dans le public que dans la presse, par beaucoup de protestations. Il y a eu un tollé de protestations, et on sait qu'à ce moment-là la crédibilité de la Caisse de dépôt et placement du Québec a été mise en doute, et ça, c'est très grave. C'est très grave, compte tenu l'importance de son rôle pour notre économie et de l'importance quelle doit jouer dans les années à venir, puisque, après l'échec du lac Meech, on se doit de repenser la constitution du Québec, et le rôle de la Caisse de dépôt et placement du Québec sera déterminant dans les années à venir.

Donc, la conception de ce projet-là s'est faite avec beaucoup de doutes, beaucoup de réactions négatives, presque unanimement négatives, beaucoup d'interrogations sur la confiance qu'on pouvait maintenir dans la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Devant ces réactions, le gouvernement a proposé une structure quelque peu différente, un poste intermédiaire de vice-président exécutif, qui permettait de faire entrer une nouvelle personne à la direction, sans changer officiellement les statuts.

La loi 109 vient donner naissance officiellement à une nouvelle structure, une nouvelle structure qui ne fait peut-être pas l'affaire des vice-présidents qui faisaient partie du conseil d'administration et qui ont eu à vivre avec cette formule-là depuis de nombreuses années. Et c'est à ce titre que M. Marcel Cazavan, serait une personne intéressante à rencontrer et à questionner parce qu'il pourrait vraiment faire les nuances et les différences entre l'ancienne structure qui nous a permis les succès que nous connaissons et la nouvelle structure que nous avons aujourd'hui devant nous. M. Cazavan, ayant été un pionnier, ayant connu les débuts qui ont sûrement été un petit peu difficiles parce que quand on commence quelque chose, il faut toujours s'ajuster, pourrait à tout le moins nous prévenir des embûches que nous risquons de rencontrer avec l'adoption de cette nouvelle structure bicéphale. Et son expertise m'apparaît d'autant plus importante, comme je le disais tantôt, M. le Président, en ce moment où la Caisse de dépôt et placement du Québec est appelée à jouer un rôle primordial. Est-ce que j'ai terminé, M. le Président?

Le Président (M. Audet): Vous pouvez conclure.

Mme Caron: Ça va? Bon. Alors, en conclusion, M. le Président, je pense que tout gouvernement qui se respecte et qui se veut un législateur efficace se doit d'entendre des groupes avant de prendre des décisions aussi importantes que celles que nous avons devant nous aujourd'hui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Est-ce qu'il y a d'autres remarques? M. le député de Bertrand, vous avez 10 minutes. (21 h 15)

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. J'écoutais tout à l'heure les commentaires de mes collègues de Labelle et de La Prairie sur la

situation qu'on est en train de vivre à l'heure actuelle. Vous me permettrez, comme parlementaire issu des milieux financiers, qui siège ici pour la première fois, de trouver quelque peu kafkaïen, l'exercice que nous sommes en train de vivre, où nous sommes en train de nous égosiller ici sur un projet de loi sur lequel l'Assemblée nationale s'apprête, dans quelques minutes, à nous imposer le bâillon. Je trouve qu'il y a quelque chose quand même d'un peu ridicule, dans cette procédure, qui fait que, alors que nous sommes ici en train d'essayer d'apporter des améliorations à un projet de loi qui nous semble déficient, à plusieurs égards, à peine une heure, ou maintenant une heure trois quarts après que nous avons commencé à étudier en commission ce projet de loi, on parle déjà de nous imposer le bâillon.

Ceci étant dit, je trouve que la proposition de mon collègue de Labelle, d'écouter M. Marcel Cazavan, est tout à fait acceptable, dans le sens où, lorsqu'on est sur le point de prendre une décision qui risque d'avoir des répercussions administratives importantes sur un organisme de l'ampleur de la Caisse de dépôt, il serait sage, à mon avis, d'écouter les commentaires de ceux qui ont présidé aux directions de cette institution pendant plusieurs années et, en particulier, d'entendre leur point de vue, sur les impacts que pourrait avoir une direction bicéphale de la Caisse de dépôt.

En discussion sur le projet de loi et au cours des remarques préliminaires, la réflexion suivante m'est venue à l'esprit, réflexion à savoir qu'un organisme, qui compte en son sein plusieurs milliers d'employés, peut bien vouloir différencier entre le chef de la direction et le chef de l'administration. Et les exemples d'entreprises qui ont adopté cette structure et qui ont été mentionnées à titre de précédents, que ce soit Hydro-Québec, ou certaines entreprises comme Bell Canada, ou la Banque Nationale, ont à leur charge plusieurs milliers d'employés. Ce n'est pas le cas de la Caisse de dépôt et placement. En ce sens, je ne vois pas ce qu'une deuxième direction, ce qu'un chef de l'exploitation pourrait ajouter aux contrôles qu'ont toujours exercés, à la fois sur les orientations et sur l'administration, les présidents qui se sont succédé à la tête de la Caisse de dépôt et placement.

M. Cazavan aurait sans doute une expérience intéressante à nous apporter, non seulement parce qu'il a dirigé pendant plusieurs années la destinée de la Caisse de dépôt, mais il serait en mesure également de nous expliquer les particularités de la gestion d'une entreprise d'État, par rapport à une entreprise strictement privée. La Caisse de dépôt ayant participé à de nombreuses transactions avec des entreprises privées, les présidents de la Caisse de dépôt, dont M. Cazavan, ayant eu l'occasion de négocier avec leur contrepartie dans les grandes entreprises privées, seraient sans doute en mesure de nous éclairer sur les impacts que pourrait avoir ce projet de loi sur l'administration de la Caisse de dépôt.

Tout à l'heure, j'ai eu l'occasion d'indiquer qu'il me semblait tout à fait inapproprié que, dans la conjoncture actuelle, on lance un message équivoque au milieu des affaires et qu'on laisse planer, de façon indirecte, ce qu'on n'a pas osé dire de façon ouverte et de façon directe.

Lorsque le premier ministre Bourassa, au cours de l'année dernière, déplorait et en fait se dissociait des propos qu'avait tenus un des représentants au conseil d'administration, qui se prétendait à l'époque représentant du premier ministre Bourassa, lorsque ce représentant avait indiqué qu'il serait peut-être approprié de fractionner la Caisse de dépôt, à ce moment-là, la réaction avait été unanime. Elle avait été unanime, au Québec, dans les milieux d'affaires. Mes collègues ont eu l'occasion de souligner les interventions du président du Mouvement Desjardins à cet effet, M. Béland. Non seulement elle a été unanime du côté du milieu des affaires, mais également du côté des intervenants politiques, que ce soit l'Opposition officielle ou le bureau du premier ministre lui-même.

Alors, c'est dans ce sens qu'il m'apparaît tout à fait étonnant qu'aujourd'hui, malgré les mises en garde, malgre les commentaires qui avaient été formulés à ce moment-là par les différents intervenants du milieu, nous en soyons encore à examiner une proposition qui viserait, à toutes fins pratiques, à scinder l'administration de la Caisse de dépôt et placement. Et, au niveau de l'efficacité de la gestion elle-même, je pense qu'on a tendance à escamoter un peu trop facilement les répercussions que, sur une base de 10 ans, une telle proposition pourrait avoir. Bien sûr, en début de mandat, la première, la deuxième, la troisième année, il est fort probable que les deux principaux gestionnaires s'entendraient entre eux, mais il n'est pas aussi évident que, sur une base de 10 ans, le même consensus puisse continuer à régner et, dans ce sens, il serait déplorable que toute modification à la structure administrative de la Caisse de dépôt et toute modification subséquente aux titulaires qui en occuperaient les postes fasse l'objet encore une fois d'un débat public à l'Assemblée nationale. Tous ces débats, à mon avis, n'ont comme résultat que d'entacher la réputation de la Caisse de dépôt, réputation qui, jusqu'ici, était à l'abri de tout soupçon et de toute critique.

Bien sûr, nous avons eu l'occasion de formuler certains commentaires quant à l'arrière-plan professionnel des personnes qui ont été proposées par le gouvernement, mais je ne pense pas que ce soit là l'objet principal de nos observations, certainement pas des miennes. Chaque individu a ses mérites et chaque individu peut, à la longue, justifier une performance

acceptable. Ceci ne nous empêche pas de constater que, sur le plan strictement de la structure, sur le plan strictement administratif, il y a quelque chose d'incohérent dans ce qui nous est proposé. Et de sans cesse rappeler que la structure a bien fonctionné chez Hydro-Québec ou dans les autres entreprises, cela fait fi de la dissimilarité qui existe entre ces organismes. La Caisse de dépôt, au fond, c'est un regroupement de professionnels, de gestionnaires expérimentés qui ont à prendre des décisions quant aux investissements des fonds de pension des Québécois et quant à l'orientation d'une institution financière de l'ordre de 40 000 000 000 $. Dans ce sens, je ne vois pas comment la distinction entre un chef de l'administration qui s'occuperait de l'intendance quotidienne des opérations pour une entreprise qui compte environ 300 employés justifie l'ampleur du salaire et l'ampleur des privilèges qui fui seront attribués en vertu de la loi. Par contre, il est tout à fait admissible que les responsabilités de gestion et d'orientation politique puissent être combinées par une seule personne comme ça a été le cas depuis la fondation de la Caisse de dépôt et placement. Des modifications à la structure administrative sont possibles. Certains présidents de la Caisse de dépôt s'entouraient d'un bras droit principal, d'autres, comme M. Campeau, se sont plutôt entourés d'un conseil de vice-présidents ayant chacun leurs responsabilités. Enfin, chacun peut s'entourer de la structure qui lui paraît la plus convenable, mais il demeure que jusqu'ici il n'y avait qu'une seule tête dirigeante qui concentrait les décisions de l'organisme et à notre avis cette structure a donné pleinement satisfaction et elle devrait continuer à être maintenue en vigueur. Je vous remercie.

Le Président (M. Després): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Gouin, la parole est à vous.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. J'interviendrai à mon tour pour appuyer la motion de mon collègue, le député de Labelle, qui, essentiellement, vise, à ce moment-ci de l'adoption du projet de loi avant d'entreprendre l'étape qu'on appelle, de façon commune, l'étude article par article du projet de loi, à faire entendre un certain nombre d'experts qui pourraient venir témoigner sur la pertinence ou non du projet de loi. Je crois que la proposition de mon collègue député de Labelle est d'autant plus pertinente qu'elle vise à faire entendre M. Cazavan, exsous-ministre des Finances nommé par l'ancien premier ministre, M. Jean Lesage, qui a occupé les fonctions de président-directeur général de la Caisse de dépôt et placement.

M. le Président, permettez-moi, sur la proposition, de rappeler le rôle que M. Cazavan a joué au cours de son mandat à la Caisse de dépôt et de placement, lui qui à Ottawa, avait mis sur pied la Corporation de développement du Canada, lui qui a succédé à M. Prieur, premier président-directeur général de la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui a fait partie du conseil d'administration de la Caisse jusqu'en 1972 et qui, faut-il le rappeler, a été le premier sous-ministre canadien-français catholique à taire partie du ministère des Finances. C'est donc dire, M. le Président, que la pertinence de la motion du député de Labelle n'est pas à démontrer. M. Cazavan, au cours de sa carrière, a su développer une longue expérience, une expertise valable de l'administration publique et aussi, par les fonctions qu'il a occupées, les fonctions fondamentales, les fonctions cruciales qu'il a occupées au sein de la Caisse de dépôt et placement du Québec, a été à même de vivre le fonctionnement de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Il a été à même, de façon quotidienne, de confronter les lacunes, les forces et les faiblesses de la structure actuelle de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Il pourrait venir témoigner de la pertinence de modifier la composition actuelle de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

M. le Président, c'est quand même assez spécial de voir que nous sommes ici ce soir - j'aimerais le dire en faisant un peu une parenthèse sur mon propos plus général - à discuter d'une proposition semblable à celle-là, alors que nous savons fort bien, nous l'avons appris après souper, M. le Président, que le gouvernement entend abuser de sa majorité parlementaire en décidant, après une heure et demie de débat, d'imposer une motion de clôture. Je suis convaincu que le ministre des Finances, qui a une longue expérience du parlementarisme à cette Assemblée nationale, qui a toujours su au cours de sa carrière se montrer respectueux de l'institution, qui, de plus, au cours de sa carrière a eu l'occasion de connaître à la fois l'Opposition, à la fois le gouvernement, qui a su apprécier aussi la pertinence des règles de procédure adoptées par l'ensemble des parlementaires, est sûrement déçu de son leader qui n'a pas su appeler à temps, ou le déposer à tout le moins, le projet de loi 109.

M. le Président, cette parenthèse étant faite, je suis convaincu que je n'ai pas besoin de plaider ma cause plus longtemps. Le ministre des Finances m'a compris et vous aussi, M. le Président. Je suis convaincu que vous partagez ce point de vue et que vous auriez préféré utiliser une façon beaucoup plus élégante, à tout le moins, pour discuter et faire adopter ce projet de loi. Mais puisque vous vous entêtez, M. le Président, à baîllonner l'Opposition, pas vous personnellement mais les membres du gouvernement... M. le Président, je suis convaincu que vous exercez votre rôle avec la plus grande neutralité et la plus grande impartialité qui est

nécessaire dans l'exercice de vos fonctions et que vous êtes même sensible aux propos qui sont tenus par l'Opposition. Vous avez été à même de nous le démontrer hier en Chambre, au salon bleu, lorsque vous êtes intervenu vous-même sur le projet de loi 109.

M. le Président, la motion de l'Opposition officielle vise à faire entendre un certain nombre d'experts qui pourraient venir témoigner de l'efficacité de la structure actuelle ou, à tout le moins, peut-être, proposer d'autres modifications qui viendraient confirmer les propos du ministre, ou qui viendraient peut-être proposer d'autres modifications.

Et, M. le Président, nous serons obligés de conclure, parce qu'il ne faut pas des grands talents de devin, nous sommes convaincus que le gouvernement utilisera encore une fois sa majorité parlementaire et fera battre cette proposition. Je ne sais pas, peut-être que les députés, après le souper, se sentent plus à l'aise, plus disposés à discuter sur le fond de la question et des modifications à apporter à la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Mais à tout le moins, M. le Président, nous serons obligés de conclure que si le gouvernement et si les députés ministériels s'entêtent à refuser ce type de motion, il y a anguille sous roche. À tout le moins, le ministre aurait peut-être pu profiter de l'occasion de faire entendre des gens qui partagent peut-être les mêmes points de vue que lui. On aurait pu lui donner la chance de faire valoir le bien-fondé de son projet de loi. M. Cazavan aurait peut-être - je ne veux pas présumer de son propos, M. le Président, je ne voudrais surtout pas parler à la place de M. Cazavan - défendu la même position que celle défendue par le ministre des Finances. Il aurait été intéressant qu'il vienne le dire. Et je vois déjà, M. le Président, le titre le lendemain dans les journaux: Cazavan apppuie le projet de loi 109... (21 h 30)

Une voix: C'eût été fort.

M. Boisclair: C'eût été fort, M. le Président. Je suis convaincu que le ministre des Finances qui s'est toujours montré soucieux de son image publique se serait fait un plaisir de rappeler l'appui que M. Cazavan aurait pu lui donner. Nous lui donnons une chance, finalement, de dire à l'Opposition qu'elle est dans l'erreur, dans la mesure, bien sûr, où M. Cazavan appuie son projet de loi. C'est un pari que nous faisons, M. le Président, et vous savez que nous faisons cette proposition avec toutes les conséquences qu'elle pourra avoir, parce que c'est un risque que nous prenons. Nous prenons le risque, M. le Président, de voir une série d'individus qui viendront témoigner en commission parlementaire et qui viendront peut-être dire que le ministre des Finances a raison. Nous prenons ce risque, M. le Président, de voir le ministre des Finances qui peut-être se plaira en rappelant l'appui que peut-être les intervenants pourraient lui donner, se moquer de l'Opposition et dire: Je vous l'avais bien dit. Vous voyez, tous les intervenants qui viennent témoigner devant cette commission appuient mon projet de loi. Nous sommes convaincus, M. le Président, que puisque nous demandons à entendre des gens, comme M. Cazavan, ou peut-être comme M. Campeau... Ce serait une suggestion que je ferais à mon collègue, le député de Labelle, tout à l'heure, qu'il fasse une motion pour entendre l'ancien président de la Caisse de dépôt et placement du Québec qui, en plus de ça, est dans la bâtisse, M. le Président, pas loin, au salon rouge. Je suis convaincu qu'il se ferait un plaisir de descendre quelques instants pour venir nous parler de la Caisse de dépôt et placement du Québec. C'est un pari que nous faisons, M. le Président, nous serons prêts à vivre avec fes conséquences. Nous demandons aux députés ministériels de relever ce même pari et d'accepter de venir entendre un certain nombre de gens qui pourraient venir témoigner sur la pertinence des modifications apportées au projet de loi.

Alors, M. le Président, s'ils refusent de faire entendre des témoins devant cette commission, nous serons donc forcés de conclure que c'est parce qu'ils ont peur que les gens qui possiblement pourraient venir témoigner en commission s'opposent au projet de loi 109, sinon c'est une belle occasion pour mettre l'Opposition devant ses contradictions si jamais ils venaient appuyer, encore une fois, la réforme proposée par le ministre. Alors, nous ne comprenons pas ce qui motive le ministre et les députés ministériels à s'entêter, à refuser d'entendre les intervenants.

M. le Président, il faut le rappeler, on ne parle pas du conseil d'administration d'un CLSC, on ne parle pas du conseil d'administration d'un hôpital, on ne parle pas du conseil d'administration d'une compagnie manufacturière, on parle du conseil d'administration de la septième institution financière la plus importante au Canada, la plus importante détentrice d'actions canadiennes. Nous parlons d'une entreprise québécoise, d'une institution financière qui a des actifs d'environ 37 000 000 000 $. On se permet, sans discussion, sans consultation, à la sauvette, à la toute dernière minute, ce projet de loi n'a été déposé, M. le Président, que tout récemment, il n'y a pas un mois que ce projet de loi a été déposé ou à peu près un mois... Nous demandons au gouvernement et nous demandons aux députés ministériels de nous appuyer dans nos démarches, eux qui sont si fiers de parler des mérites de la Caisse de dépôt et placement du Québec dans leur discours. Tout le monde se permet de vanter les mérites de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Moi aussi, M. le Président, je suis fier de cette réalisation, mais, cependant, il faut faire attention, il faut traiter cette institution

avec tout le respect qu'elle mérite. Et si nous sommes si fiers de parler de la Caisse de dépôt et placement du Québec et de ses succès, c'est parce qu'elle a su exercer un leadership fondamental sur l'économie québécoise. Et si vraiment nous respectons cette institution, si vraiment nous en sommes fiers, nous devons aussi et je termine en disant...

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Gouin, pourriez-vous conclure, bien sûr.

M. Boisclair: ...que nous devons aussi faire attention aux changements qu'on propose au conseil d'administration. Souhaitons, M. le Président, que les députés ministériels appuieront la proposition de l'Opposition officielle, sinon nous serons obligés de conclure et de croire qu'ils ont peur de se faire renverser ou peut-être de se faire critiquer par des intervenants qui pourraient venir témoigner devant cette commission.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le député.

M. Boisclair: M. le Président, j'aimerais les entendre...

Le Président (M. Gautrin): Un instant. Juste après votre intervention, je pense que, suivant le règlement, le ministre peut vous répondre. Le ministre aimerait pouvoir prendre son temps de parole et intervenir. Alors, M. le ministre des Finances, s'il vous plaît.

M. Levesque: Alors, M. le Président, à la demande générale...

Une voix: ...sur la motion.

Le Président (M. Gautrin): Un peu de sérieux... Bien sûr, avec la pertinence de l'article 211.

Une voix: Je suis convaincu, M. le Président...

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque: II me fait plaisir d'intervenir, très brièvement d'ailleurs, sur la motion du député de Labelle à l'effet d'entendre M. Marcel Cazavan. Je pense que, du moins, mes premiers mots sont pertinents et je respecte la lettre et l'esprit du règlement. Cependant, je suis un peu surpris d'entendre des gens évoquer à ce moment-ci, de l'autre côté de la table, avec une certaine stupeur et même, on a employé des termes très forts pour évoquer ce qui se passait dans un autre lieu où on discutait, où on déposait plutôt une motion de clôture. Je pense qu'il ne faut pas se surprendre de cela lorsque l'on voit les mesures dilatoires que nous vivons et dont nous sommes témoins ici depuis cet après-midi.

Il est bon de se rappeler que la commission parlementaire dont nous faisons partie a reçu de l'Assemblée nationale un mandat, le mandat de venir étudier article par article le projet de loi qui a été adopté en principe par l'Assemblée nationale. Alors, je pense que tous ceux qui ont voulu s'exprimer ont eu l'occasion de le faire à l'Assemblée nationale sur le projet de loi lui-même. Personne n'a été privé de son droit de s'exprimer et pendant des heures, on a eu l'occasion d'entendre divers intervenants exerçant leur droit de parole comme ils ont voulu le faire, le tout en vertu du règlement qui guide les travaux de l'Assemblée nationale. A la fin du débat, il y a eu un vote démocratique où l'Assemblée nationale, très majoritairement, avec l'équipe ministérielle oui, mais également avec les indépendants, ont voté pour l'adoption de ce projet de loi. Seuls les députés péquistes s'y sont opposés, mais démocratiquement, ils devront, ils doivent, à mon sens, sinon se rallier, du moins reconnaître que le processus démocratique a été suivi d'une façon impeccable. Par la suite, l'Assemblée nationale, unanimement, M. le Président, a donné le mandat à cette commission d'étudier le projet maintenant, au cas où on pourrait le bonifier article par article.

Or, M. le Président, depuis des heures, nous sommes ici et nous ne sommes pas arrivés encore à l'article 1. Nous sommes évidemment devant une volonté très ferme de la part de l'Opposition qui, même si elle a été défaite démocratiquement à l'Assemblée nationale, poursuit ici, non pas le travail qui lui a été confié par l'Assemblée nationale, mais un travail d'obstruction et, on se surprend, de l'autre côté, que dans cette Assemblée nationale qui nous a donné un tel mandat, on songe à mettre fin à un processus qui n'a aucune relation avec le mandat qui nous a été confié. Et c'est d'autant plus grave, M. le Président, que nous n'avons pas affaire ici à un projet de loi de quelques centaines d'articles comme ça arrive dans certains cas. De fait, il n'y a qu'un article dans ce projet de loi. C'est l'article 5. Les autres, ce sont des articles de concordance. Il y a à peu près huit articles dont sept de concordance. Il n'y a qu'un seul article de fond et c'est l'article 5. Le travail qu'on nous a confié, c'est justement de faire l'étude article par article. On aurait pu immédiatement passer à l'article 5, discuter sur le fond de la question et voir s'il n'y a pas lieu de faire des amendements qui seraient de nature à bonifier le projet de loi. Ce n'est pas le cas, M. le Président. Ce que l'on fait présentement, après avoir fait des discours les uns après les autres, tant qu'il y a eu des intervenants du côté de l'Opposition, là maintenant, on commence à procéder... Et ça, évidemment, on l'a déjà vu. Je n'ai pas à faire de reproches particuliers à l'Opposi-

tion sur les procédures employées parce qu'elles existent. Elles ont été employées par plusieurs partis politiques, plusieurs formations politiques dans le passé et je ne peux pas dire qu'on est surpris, qu'on est abasourdis. Mais au moins, je pense qu'on doit se rendre compte de ce qu'on fait et on est en train d'assister encore à cette procédure que l'on retrouve en fin de session, ordinairement, vis-à-vis de certains projets de loi où l'Opposition utilise le procédé du "filibuster". Bon, libre à nos amis de le faire, mais libre également à nous de mettre à nu un peu cette procédure-là afin que l'on comprenne bien ce que nous faisons.

Je reviens à mes propos du début. Nous avons reçu un mandat. Nous sommes en train présentement d'esquiver ce mandat par une procédure d'obstruction systématique. Et la dernière de ces obstructions, c'est la motion que nous avons devant nous, M. le Président, à l'effet de quoi? D'interroger M. Marcel Cazavan. Or, M. le Président, M. Marcel Cazavan est un homme que j'estime beaucoup, pour qui j'ai toujours eu des sentiments d'admiration, mais il y a au moins une douzaine d'années, je pense, que M. Cazavan occupait ces fonctions-là. Et je ne vois pas, M. le Président, la pertinence de cette motion, d'autant plus que ce que contient l'article 5, pour revenir encore là, c'est simplement un changement de structure qui coïncide avec une structure qui est adoptée maintenant presque généralement dans les grandes sociétés, autrement dit d'avoir un président chef de la direction et un président chef de l'exploitation. Il n'y a rien là. Il n'y a rien là, M. le Président.

Une voix: C'est clair.

M. Levesque: C'est clair. Ha, ha, ha! Et pourtant, on en fait un plat. Pourquoi? Parce qu'on s'attaque à une personne en particulier qui a eu simplement à se reprocher, non pas sa compétence parce que tout le monde reconnaît sa compétence... Et le chef de l'Opposition disait - et je le remercie de ce témoignage, - que lorsqu'il s'agissait de ce haut fonctionnaire, si on peut employer le mot, il s'agissait, et je cite ce qu'il a dit: C'est un homme - quel était le mot qu'il a employé - qui, à tous égards, était un homme...

Une voix: Honorable.

M. Levesque: Pas seulement honorable. C'est plus fort que ça. Ça incluait la compétence, ça incluait l'intégrité, ça incluait enfin toutes les qualités que l'on peut retrouver chez un administrateur de cette qualité et occupant de telles fonctions. Dans les circonstances, M. le Président, je ne peux que regretter la procédure employée. J'espère que ça n'entrera pas trop dans les moeurs de nos successeurs. J'espère que les jeunes députés qui sont avec nous se rappelleront ce soir, ce soir du 12 décembre 1990. Je les incite à convoquer une réunion de la commission de l'Assemblée nationale, sinon cette année, l'an prochain. Mais à un moment donné, si vous êtes encore ici et si vous en aviez encore le goût, convoquez la commission parlementaire de l'Assemblée nationale pour inciter les députés à se trouver une autre façon d'exprimer leur désaccord. Faire des discours à répétition, M. le Président, comme on en fait... Et d'ailleurs, je n'ai pas, encore une fois, à faire des reproches particuliers à l'Opposition d'aujourd'hui. L'Opposition d'aujourd'hui agit comme l'Opposition d'hier et l'Opposition d'hier agissait comme l'Opposition d'avant-hier. Mais que de paroles, que de paroles, que de temps, que d'énergie, que de dépenses de temps, d'argent! (21 h 45)

Je suis peut-être plus philosophe à i'époque où je suis dans ma carrière politique, mais j'espère que ceux qui viendront après nous ne suivront pas ces sentiers et que l'on trouvera une autre façon pour que le public, qui a le droit d'être informé, le soit d'une autre façon, que ce soit aussi bien, d'une façon aussi démocratique, ne privant personne de son droit de parole, mais enfin qu'on cesse ces nuits à se regarder d'un côté et de l'autre de la table et de répéter à satiété des discours qui ennuient autant les uns que les autres, les unes que les autres. Et tous les gens sont là, face à face, vivant leur pensum collectif et continuant ainsi la vie politique que l'on pense être revalorisante mais dont certains aspects nous laissent songeurs. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Est-ce que du côté ministériel, vous avez encore quelques remarques à faire? Alors, je pense que le temps disponible pour l'étude de cette motion est épuisé et je vais donc la mettre aux voix. Est-ce que vous demandez un appel nominal?

M. Léonard: Oui.

Vote sur la motion

Le Président (M. Gautrin): Bien sûr. Bon, je m'y attendais. Bon. Oui, je sais. M. le député, je ne commence pas comme ça. C'est parce que j'en ai pris trois. M. le député de Bertrand.

M. Beaulne: Pour la motion.

Le Président (M. Gautrin): Pour la motion. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Pour.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Pour.

Le Président (M. Gautrin): Bien, j'en ai pris trois. M. le député de La Prairie, j'aurais dû prendre votre vote, c'est ça?

M. Lazure: Est-ce que vous pourriez relire la motion, M. le Président?

Le Président (M. Gautrin): Bien sûr, c'est avec plaisir que je lirai la motion et je reprendrai le vote, parce que j'ai compris que vous vouliez absolument voter. Alors, je relis. "Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission permanente du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin, elle entende M. Michel Cazavan." Le vote a été appelé... Marcel Cazavan merci. Alors, je comprends que vous devez vous exprimer, M. le député de La Prairie, alors je reprends le vote et je vous demande: Est-ce que vous êtes pour ou contre la motion?

M. Lazure: Je suis pour la motion, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Alors, je pense que c'est une petite étoile, il faut que je demande aussi... Alors, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Je suis pour.

Le Président (M. Gautrin): Alors, je reprends. Le député de Bertrand.

M. Beaulne: Pour.

Le Président (M. Gautrin): Alors, je passe de l'autre côté. M. le député... Pardon? M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Contre la motion, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Prévost.

M. Forget: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): M. le député le Limoilou.

M. Després: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): M. le député de

Bonaventure.

M. Levesque: Contre.

Le Président (M. Gautrin): Moi, je vote aussi. M. le député de Verdun est contre aussi. Alors, ça en fait... C'est rejeté. Alors, encore une motion, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Oui, M le Président, j'aurais une autre motion à vous présenter qui est la suivante.

Le Président (M. Gautrin): Oui. Alors, je suis bien tombé.

Motion demandant d'entendre M. Jean Campeau M. Jacques Léonard

M. Léonard: "II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission permanente du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin, elle entende M. Jean Campeau."

Le Président (M. Gautrin): J'ai gagné. Et on avait tous deviné. M. le député de Labelle, vous avez donc 30 minutes, en fonction de nos règlements, pour défendre cette proposition.

M. Léonard: M. le Président, j'entendais la réplique du ministre des Finances, en ce qui concerne la motion que nous venions de présenter, la dernière, et je suppose qu'il va garder à peu près les mêmes termes pour la motion qui s'en vient. Nous en sommes à la deuxième motion, M. le ministre des Finances, la deuxième, et déjà il parle d'exagération. Nous ne parlons, en l'occurrence, que des présidents de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Ce sont quand même des gens qui ont une certaine expérience. Et en ce qui concerne M. Cazavan, "il a dit que ça fait au moins une douzaine d'années qu'il est parti; M. Jean Campeau vient de terminer son mandat, ça fait 10 ans. Donc, il a remplacé M. Marcel Cazavan, ça fait peut-être 10 ans et quelques mois qu'il est parti. Et ne le faites pas remonter au déluge ni au grand-père de Jésus-Christ, ça fait 10 ans et quelques mois. Alors, c'est de ça, en l'occurrence, qu'il s'agit. Alors, une deuxième motion, qu'on ne parle pas de mesures dilatoires parce qu'il faudrait se poser la question sur le règlement 244, à quoi il sert si on ne peut pas s'en servir sans être accusés de faire des motions dilatoires, enfin, à quoi il sert? M. le Président, je suis sûr que vous me comprenez, vous avez déjà utilisé la procédure en d'autres enceintes, comme celle de l'Université

de Montréal, et vous savez que là aussi, vous en avez utilisé, de ces motions. Et puis vous savez que derrière des motions qui ont l'air des motions de forme, il se cache des problèmes de fond.

Le Président (M. Gautrin): Le bon temps. Tout à fait.

M. Léonard: Tout à fait. Alors, je pense que vous me comprenez très bien. En fait, il s'agit de consulter les intéressés, des gens d'expérience. Le ministre, lorsqu'il a répondu à la première motion, à mon sens, a minimisé, lui, la portée du projet de loi, parce que ce projet de loi porte sur la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Et je voudrais simplement lui rappeler un certain nombre de choses qu'il a entendues à l'Assemblée nationale, sûrement. Je vais lui rappeler ce qui a été dit à l'époque. Par exemple, en ce qui concerne l'administration de la Caisse, il est absolument essentiel à la Caisse de sauvegarder deux principes qui sont, en apparence, contradictoires. J'ai eu l'occasion d'assister M. Jean Lesage à l'époque de la création de la Caisse. Mais il disait aussi, en ce qui concerne le directeur: II faut que le directeur général de la Caisse soit en mesure de prendre des décisions qui, en dernier ressort, lui paraissent être les plus conformes aux objectifs de l'institution qu'il dirige et pour cela, il faut qu'il soit à l'abri aussi bien d'une renvoi intempestif que d'une réduction arbitraire de son traitement. Il faut enfin que le mandat du directeur général soit suffisamment long pour qu'il ait le temps et la possibilité d'adopter des politiques à long terme sans avoir à les remettre continuellement en cause. En effet, les pressions ne manqueraient pas de s'exercer sur lui à l'occasion de renouvellements trop fréquents de son mandat. Il faut en outre qu'une direction suffisamment stable préside au recrutement et à la formation d'un personnel hautement qualifié dont la compétence technique sera le meilleur gage d'une bonne administration. Et d'ailleurs, une institution financière comme la Caisse de dépôt et placement du Québec doit développer, au sein de son personnel, une tradition et une continuité qui, sans exclure l'élaboration de politiques hardies, la garantissent cependant contre celles qui sont trop hasardeuses.

Une institution financière peut être révolutionnaire de par sa nature même. Elle ne se développe cependant qu'en acceptant une grande rigueur de principes et en soumettant son personnel à un entraînement long et laborieux. C'est dire combien est essentielle la stabilité de la direction. Et dans ces circonstances, il a été décidé que le directeur serait nommé pour une période de 10 ans, qu'il ne pourrait être renvoyé qu'à la suite du vote de deux Chambres - dans le temps, le Conseil législatif existait - et que pendant la durée de son mandat, son salaire ne pourrait pas être réduit. Vous voyez, c'est ça, son projet de loi qu'il avait déposé et fait adopter par son gouvernement. Il sera donc possible, pour la Législature du Québec, de limoger un directeur général dont la politique serait notoirement insatisfaisante. Mais il sera alors nécessaire de provoquer un débat public et d'expliquer en détail le conflit qui oppose le gouvernement et le directeur général de la Caisse.

Il est évident que, de cette façon, on offre au gouvernement la possibilité de dénouer une crise, mais il est évident aussi que l'on a recours à une telle extrémité que dans une situation grave. On connaît, - et je l'ai rappelé tout à l'heure, - le cas du gouverneur de la Banque du Canada, M. Coyne. Ce qu'il en dit, la politique du gouvernement a finalement prévalu dans le cas du fédéral, mais il est apparu clairement qu'on n'avait pas le moindre désir de faire face à une semblable crise tous les cinq ou six ans.

Le second principe qu'il faut établir est celui de la coordination des opérations de la Caisse et de la politique économique générale de l'État. Et c'est par le truchement du conseil d'administration que cette synchronisation doit normalement se faire. Si le directeur général est en même temps président de la Caisse, le président de la Régie des rentes en est le vice-président. Et là, on parle de la composition du conseil. Mais le hic dans tout cela, c'est que le présent gouvernement a annoncé tout à coup, dans le décor, au mois de juin, il me semble bien, oui, début de juin, la nomination de deux présidents. Alors là, on peut se reposer la question sur la stabilité et la continuité de la direction.

M. le Président, c'est ça, la question de fond et quand vous dites qu'il y a un article dans le projet de loi, il y en a deux au moins très importants: l'article 3 que vous n'avez pas mentionné et l'article 5, parce que quand vous faites une comparaison avec le secteur privé et je dirais aussi avec Hydro-Québec, j'ai eu l'occasion de vous rappeler qu'il ne s'agissait pas, en l'occurrence, de la même situation, absolument pas. Lorsqu'il y a deux présidents dans une entreprise, généralement, les opérations sont très importantes et impliquent un grand nombre d'employés. On a deux postes de présidence à Hydro-Québec. Je crois que ça s'admet. Il y a 19 019 employés à Hydro-Québec. Puis vous avez Labatt, Canadien National, Alcan. Vous pouvez en trouver d'autres, mais dans toutes ces entreprises, il s'agit d'entreprises dont les opérations impliquent des dizaines de milliers d'employés. À la Caisse de dépôt et placement du Québec, il n'y en a pas 300. Et il ne s'agit pas d'opérations comme celles d'Hydro-Québec, d'opérations manuelles impliquant toute une pyramide avec des cadres et des employés ici et là. Il y a une petite pyramide - 300 personnes, c'est sûrement une petite pyramide - dont la

moitié comporte du personnel de bureau ou de soutien et le reste, une équipe de 100, 150 professionnels, mène, dirige, organise les affaires de la Caisse de dépôt et placement. C'est une petite boîte, la Caisse de dépôt et placement, mais qui gère des dizaines de milliards: 37 000 000 000 $.

La distinction dans une entreprise de ce type entre des opérations et des décisions de direction m'apparaît bien ténue. Une opération peut impliquer 100 000 000 $, 150 000 000 $. On prend une décision d'investir, on a acheté à un moment donné avec une autre entreprise le contrôle de Domtar. Est-ce une opération de direction? Je pense que le président du conseil d'administration et chef de la direction ne pourrait pas ignorer une telle opération, mais est-ce que, en l'occurrence, la décision va être prise par le président de la Caisse de dépôt et placement, responsable des opérations ou responsable de la direction? Je pense par les deux. Et là, on est vraiment dans une situation d'entreprise bicéphale où la distinction entre les deux ne pourra pas se faire. Elle n'est pratiquement pas possible dans la pratique des choses. Alors, de quoi parle-t-on finalement? D'une entreprise où il y aura deux cuisiniers à la sauce. Nécessairement, avec le temps, il va se développer des orientations différentes de l'un par rapport à l'autre. C'est évident, ça ne peut pas faire autrement et je pense qu'il n'y a personne d'exactement pareil. Même si je m'entends bien avec le ministre des Finances actuel, H va comprendre que sur une période de dix ans à travailler avec lui, j'aurai sûrement des différends, profonds même. Pourtant, c'est quelqu'un que j'estime beaucoup, mais je suis sûr que je ne pourrais pas être d'accord partout, à preuve plein de projets de loi qu'il a déposés, un discours sur le budget qu'il a fait et une façon d'amener la TVQ qui est très discutable.

Bon, bref, à ta Caisse de dépôt et placement, vous allez avoir deux hommes qui vont s'opposer de par l'évolution de la situation, de la nature des choses. Et je pense que quelqu'un comme Jean Campeau serait bien placé pour nous en parler.

Alors, ces deux hommes vont s'opposer nécessairement. Qu'est-ce qu'il va arriver? Est-ce qu'ils vont s'adresser au ministre des Finances? Possiblement, si les désaccords sont profonds, si la situation s'envenime, si elle se communique au personnel, vous allez vous sentir obligé d'intervenir, à mon sens. De quelle autorité allez-vous intervenir à la Caisse de dépôt et placement du Québec, alors que justement, l'objectif était de la tenir éloignée des décisions de type politique et des hommes politiques, c'était de donner une autonomie à ces deux présidents? Vous allez intervenir. Alors, si vous intervenez entre les deux, vous allez choisir ou bien vous allez amener possiblement un tel débat au Conseil des ministres. Est-ce que le Conseil des ministres va amener toute la question à l'Assemblée nationale? (22 heures)

En réalité, si le désaccord est profond, si vous vouiez avoir une prise sur les gens qui seront à la direction de la Caisse, vous êtes pratiquement tenu de venir à l'Assemblée nationale en dernier ressort, un débat à l'Assemblée nationale, parce que ces deux personnes sont protégées de la même façon. On ne peut pas diminuer leur salaire. On ne peut pas les destituer, sauf par un vote de l'Assemblée nationale. Imaginez que cette sanction arrive, vous allez amener ce débat à l'Assemblée nationale, M. le ministre des Finances? Ça m'étonnerait beaucoup. Parce que ça vous ferait un raffut terrible et ça amènerait l'Assemblée nationale à choisir entre deux hommes. Il y aurait des tenants de l'un et, je suppose qu'à cette époque-là, vous serez retourné dans l'Opposition, il y aurait des tenants de l'autre. Et ça vous ferait des débats passionnés sur la tête de deux hommes au détriment de deux personnes. À mon sens, vous n'y viendrez pas.

Une voix: Mais avec des motions de clôture.

M. Léonard: Avec des motions de clôture sur un tel débat, je suis convaincu. Mais si nous sommes là, je pense que l'expérience que nous avons eue, c'est que nous avons respecté plus la démocratie que ce gouvernement actuel. Alors, on n'ira pas à l'Assemblée nationale. Comment allez-vous faire pour imposer, pour essayer de trancher, pour essayer de résorber un tel conflit? Vous allez parier à ces gens directement. Vous avez vous-même les mains dans la sauce. Vous êtes devenu le troisième cuisinier à la sauce, le troisième, quotidiennement, et dans la position la pire, parce vous êtes dans un univers de chicane. Il faut voir que par l'évolution même des psychologies, les conflits vont s'envenimer. Il va y avoir une équipe pour l'un et une équipe pour l'autre, c'est évident. Je pense que le gouvernement se met dans une situation absolument intenable. Il y en a un des deux qui va devoir céder. Je pense que si on veut régler la situation, il va dévoir céder. Qu'est-ce qu'on est en train d'admettre? C'est que ça ne pourra pas marcher. Ce que vous imposez par ce projet de loi, c'est une situation conflictuelle, parce que la sanction véritable au bout...

Une voix: ...soyez pertinent.

M. Léonard: M. le député des Îles-de-la-Madeleine en appelle à la pertinence. Je ne suis pas sûr qu'il comprend le débat qu'il y a ici. Alors, je pense que...

M. Farrah: Je ne parie pas de la pertinence, monsieur. Je faisais juste référence à l'article 5 qui dit qu'il y en a un qui est quand même plus haut que l'autre.

M. Léonard: Non. Je pense que j'ai simplement démontré que par l'évolution des choses, par le fait que les deux tiennent leur mandat pratiquement directement de l'Assemblée nationale, ils le tiennent du gouvernement, mais au cas où ils ne seraient pas compétents ou qu'il y aurait des conflits, la sanction est au plan de l'Assemblée nationale. Ça ne peut pas marcher. C'est une situation conflictuelle et il faut l'admettre en partant.

Donc, quelqu'un qui pourrait beaucoup nous en parler comme ça, c'est Jean Campeau. Comment pourrait-il fonctionner dans un tel univers? Comment pourrait-il fonctionner? Je pense que ça lui serait extrêmement difficile, mais j'aimerais bien l'entendre ici pour savoir ce que lui penserait d'une telle situation. Moi, je pense que je suis tout à fait dans la pertinence du débat. J'explique comment les choses peuvent évoluer et je les vois venir comme cela. Alors, si vraiment on veut régler le conflit, on va acheter la paix ou écraser l'un plutôt que l'autre. Je ne sais pas comment on va le faire. On va acheter. On va le payer à rester chez lui. Mais à quel titre? Parce qu'au fond, on serait en train de dilapider des fonds de l'État pour quelqu'un qui ne ferait pas son travail.

M. le Président, je trouve qu'on est en train de créer une situation conflictuelle. Dans le cas, ça ne sera même pas une situation conflictuelle d'une entreprise, parce que ça peut arriver dans une entreprise où il y a deux présidents. Prenez Hydro-Québec, il peut y avoir une situation conflictuelle. Il y en a un qui s'occupe de la direction et l'autre de l'exploitation. Mais je ne pense pas que dans la situation d'Hydro-Québec, on vienne à l'Assemblée nationale, que ces gens-là soient protégés par l'Assemblée nationale. Et il y en a un dont le mandat est plus court que l'autre. Effectivement, j'ai cru voir, dans la littérature sur la question, que M. Richard Drouin est président et chef de la direction et qu'un autre est chef de l'exploitation. Mais il y en a un dont le mandat, l'engagement est plus court que l'autre, qui prend ses ordres de l'autre et d'un point de vue psychologique il est établi très clairement, sur le plan des opérations, qu'il est subordonné à l'autre. La sanction, ici, la garantie disant à l'Assemblée nationale...

Une voix:...

M. Léonard: Non, je ne pense pas. Alors...

M. Levesque: L'un est sous la responsabilité de l'autre.

M. Léonard: Non, en termes de description de fonctions, mais en termes de garanties, la révocation directement à l'Assemblée nationale, ce n'est pas pareil. La situation n'est pas pareille. C'est deux univers différents d'ailleurs. Hydro-Québec, c'est l'exploitation où il y a beaucoup de monde là-dedans. C'est une grosse entreprise, en termes d'opération, tandis que la Caisse de dépôt et placement du Québec, c'est une entreprise de décisions. Fondamentalement, c'est une entreprise de décisions d'investissement. Pourquoi y aurait-il deux patrons là-dedans? Je pense que non. O.K. C'est correct.

Le Président (M. Gautrin): Non, vous êtes parfaitement dans le temps et dans la pertinence, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Je pense qu'on ne peut pas...

Le Président (M. Gautrin): Je vous écoute avec beaucoup d'intérêt.

M. Léonard: Je pense qu'on ne peut pas voir comment ces conflits-là vont se régler. Alors, il y en a un qui va s'écraser par rapport à l'autre si on est capable de le faire s'écraser. Mais encore là, ce qui arrive, ces conflits, avant qu'on en arrive à une espèce de solution, vont éclater sur la place publique, vont venir possiblement à l'Assemblée nationale parce que j'imagine que s'il y a des chicanes à l'interne, ça peut aboutir. Si les libéraux à l'époque étaient dans l'Opposition, ils poseraient des questions au gouvernement, donc ils les mettraient sur la place publique. Les conséquences sont terribles pour une boîte comme la Caisse de dépôt et placement du Québec et il faut l'admettre. Les conséquences vont être terribles. C'est toute la crédibilité de la deuxième institution financière au Québec dont il s'agit, la deuxième institution financière au Québec.

Moi, je suis convaincu que le ministre, qui fait sans arrêt de beaux discours sur sa performance et qui est toujours très critique sur celle de l'ancien gouvernement auquel il reproche des tas de choses tout à coup qu'il a retrouvées, au fond, il devrait admettre que la structure actuelle a été bénéfique, qu'elle a rendu très bien. M. Jean Campeau - et on pourrait parler de ses prédécesseurs - a opéré dans un univers où il y avait une tête et où, lui, contrairement à son prédécesseur qui avait un bras droit qui était M. Paris, lui, il a choisi d'en avoir cinq vice-présidents. Donc, il a constitué une équipe avec différents titres. On pourrait tous les relever. Il y en a un aux affaires juridiques, il y en a un aux investissements, etc. Il a fonctionné avec une équipe de cinq vice-présidents très bien. Je pense que c'est dans l'ordre des choses. Vous nommez un président avec certaines orientations et là, lui-même a sa façon de procéder; son équipe, il l'a construite et ça a bien rendu. Je pense que M. le ministre des Finances et, à l'époque, plutôt, le président du Conseil du trésor, en commission parlementaire au mois de juin, a fait l'éloge après moi parce que j'ai été le premier à souligner le travail de Jean Campeau

qui se trouvait à l'étude des crédits des Finances et il en a fait l'éloge. Et je pense que le ministre des Finances est d'accord pour dire qu'il a fait un excellent travail dans cette structure avec une boîte qui n'a pas 300 employés, la Caisse de dépôt et placement du Québec - on n'est pas avec 20 000 employés - avec cette structure qui, à mon sens, convient le mieux. Pourrait-on entendre M. Campeau, ici, devant cette commission pour nous dire ce qu'il en pense et nous dire comment il voit le projet de loi, comment il voit cette répartition entre deux présidents, président direction, président exploitation? Comment il verrait ça? On peut suspendre si... Ça va?

Le Président (M. Gautrin): Vous pouvez continuer. Il est allé voir les disponibilités de M. Campeau.

M. Léonard: Oui, il est allé voir les disponibilités de... Alors, comment nous expliquerait-il ça? En plus d'avoir deux garanties qui sont exceptionnelles, je pense qu'au gouvernement du Québec, c'est le seul poste, mis à part les présidents, le Vérificateur général, peut-être le Directeur général des élections, le Protecteur du citoyen qu'on me dit, certains postes de type beaucoup plus politique que de type affaires, comme celui qui nous concerne. Il y a certains postes qui ont besoin d'une garantie. Mais dans le monde des affaires, le président de la SGF n'a pas cette garantie-là. Le président de la SDI n'a pas cette garantie-là. Prenez-les tous, ils n'ont pas cette garantie-là. L'Assemblée nationale a donné cette garantie à la Caisse de dépôt et placement du Québec pour la mettre à l'abri des pressions et politiques du gouvernement, du Conseil des ministres qui peut cependant s'asseoir avec le président et lui dire des choses, mais qui ne peut pas les imposer. Le ministre des Finances ne peut rien imposer au président de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Alors, dans ce secteur économique, à mon sens, c'est le seul poste où on a donné une garantie, il faut voir ce que ça implique. Cet homme va avoir, va se voir confier les épargnes de la Régie des rentes du Québec, de la Régie de l'assurance automobile, de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, pour parler de trois grands organismes, et il y en a un certain nombre d'autres. Il y a certains fonds de pension aussi, la CARRA - c'est important - qui confient les épargnes à la Caisse de dépôt et placement du Québec. C'est important et ça prenait quelqu'un à l'abri de toute pression pour ne pas être obligé d'investir de façon impromptue dans des secteurs névralgiques, en danger, où il y aurait un intérêt politique à l'obliger à agir, et à court terme, dans ces secteurs.

Moi, je pense que c'est une bonne chose, mais pourquoi deux personnes à la Caisse de dépôt et placement du Québec? Pourquoi deux?

C'est ça. C'est là que l'on crée la situation conflictuelle. Pourquoi cette personne ne serait-elle pas engagée... Peut-être qu'on pourrait trouver, si M. le président du conseil d'administration et chef de la direction à l'heure actuelle voulait un deuxième, un vice-président au-dessus des autres, comme M. Cazavan, à la façon de M. Cazavan à l'époque... Je pense que ça, c'est une recommandation que le président a faite. Et puis, à l'époque, on aurait pu adopter un projet de loi, si celui-ci n'avait pas été assez flexible, mais, en réalité, il est déjà assez flexible. Il peut procéder avec un bras droit. M. Marcel Cazavan avait procédé avec un bras droit, mais M. Campeau avait procédé avec une équipe. Donc, il avait réparti les responsabilités, fort bien. Moi, je trouve que ça s'admet, que nous pouvons être d'accord, encore faut-il savoir pourquoi, tout à coup, on procède comme ça.

Je pense que celui qui a le plus d'expérience en la matière pour nous parier, c'est encore M. Campeau. Il a une expérience toute récente. Le ministre des Finances, tout à l'heure, nous a dit que M. Cazavan avait quitté depuis de longues années. Prenons quelqu'un qui est tout près de nous, M. Jean Campeau, qui est connu, qui a réussi à la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui a eu un taux de rendement extraordinaire. Quand on critique la gestion du Parti québécois, dans le temps, le ministre des Finances pourrait au moins mettre du côté positif la nomination de M. Jean Campeau à la Caisse de dépôt et placement du Québec, excellente nomination, je suppose. Il ne le dit pas mais, au moins, il a félicité M. Campeau de ses succès à la Caisse de dépôt et placement du Québec. Je suppose qu'il va être d'accord que c'a été un bon geste, même un excellent geste. Quand il parle des déficits, il pourrait, à ce moment-là, mettre au compte, à l'encontre, les surplus réalisés par la Caisse de dépôt et placement du Québec parce qu'elle a pu justement réaliser des profits. M. Campeau pourrait venir nous en parler, il a réalisé ces surplus, cette excellente performance, lui-même, avec l'équipe qu'il s'est donnée, dans la structure qui était dans la loi à ce moment.

Moi, M. le Président, je pense qu'une boîte comme ça, ça fonctionne avec une tête, pas avec deux et que le responsable de l'exploitation, si on veut en nommer un, doit relever du président-directeur général, qui donne les bonnes directions, qui lui dit comment faire. Parce que, présentement, si je vois la répartition des tâches des deux présidents, j'en ai traité un peu tout à l'heure, j'essaie de voir la répartition des fonctions et je me dis que quelqu'un qui veut emprunter 50 000 000 $, est-ce que c'est de nature à modifier la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec? Un investissement de 150 000 000 $, est-ce que c'est de nature à modifier la direction? Est-ce que c'est juste une direction d'exploitation? (22 h 15)

Je dirais aussi, par exemple, que la décision d'investir dans des sociétés à capital de risque - ça existe, je le sais par ailleurs, la Caisse de dépôt et placement du Québec a décidé de s'impliquer dans de petites entreprises à capital de risque. Il s'est formé des sociétés à capital de risque en Estrie, à Trois-Rivières, au centre du Québec, la Mauricie et une autre ici, à Québec - est-ce que c'est une décision de direction ou une décision d'exploitation? Je pense que c'est une bonne question. Et l'on sait que dans ce domaine-là encore une fois, comme c'est une boîte décisionnelle, essentiellement décisionnelle, il me semble qu'on ne peut pas faire de distinction entre direction et exploitation. Une banque, et ce n'est d'ailleurs pas une banque, mais une société comme celle-là qui fait des investissements, je ne vois pas quelle est la distinction entre les deux. Une exploitation, est-ce que c'est le système comptable qui est l'exploitation, alors que la décision c'est la direction? Ou est-ce que la décision d'investir dans tel secteur, c'est une exploitation, alors qu'une autre décision à un coût moins élevé, c'est une direction? Là, on se rend compte qu'essayer de faire la distinction entre les deux types d'opération, ce n'est pas possible, que là, on place l'un en conflit avec l'autre presque en partant à moins de ne pas connaître ce qu'est la Caisse de dépôt et placement.

J'ai l'impression que le gouvernement s'est mis dans de mauvais draps. Il s'est fait une déclaration au mois de juin, à mon sens, dans des circonstances où on pourrait expliquer que c'est une erreur de parcours, parce que les gens et le premier ministre lui-même étaient très occupés à autre chose, à essayer de faire passer l'accord du lac Meech à tout prix et que cette décision-là a été traitée en deux temps, deux mouvements rapidement. On a dit: Oui, c'est une excellente chose. Regardez ce qui se passe à Hydro-Québec. Et on copie. Quand on regarde le projet de loi, il est copié directement d'Hydro-Québec. À ce qu'on m'a dit aussi, c'est que la description des fonctions avait été pratiquement calquée sur ce que c'était à Hydro-Québec. Alors, Hydro-Québec, à mon sens, c'est une tout autre situation. Je l'ai expliqué. Je ne veux pas revenir là-dessus, M. le Président. C'est très différent. Je ne vois pas comment ça peut s'appliquer, la Caisse de dépôt et placement.

Le Président (M. Gautrin): Votre temps semble écoulé, M. le député de Labelle. Est-ce que vous pourriez conclure, s'il vous plaît?

M. Léonard: Alors, M. le Président, il faut entendre M. Campeau. C'est la personne la plus éclairée pour nous en parler de façon objective. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le député de Labelle. M. le ministre, est-ce que vous voulez répondre? Est-ce qu'il y a quelqu'un du côté ministériel qui voudrait intervenir? Alors, comme c'est une motion de forme, d'autres personnes peuvent intervenir. Je pense que vous avez 10 minutes. C'est bien cela? Alors, M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Ça n'étonnera pas les députés ministériels ni le ministre que j'élève ma voix pour appuyer la motion de mon collègue de Labelle. Surtout qu'il s'agit d'une personnalité, M. Campeau, président de la Caisse, à venir jusqu'à tout récemment, qui laissera, dans l'histoire de la Caisse, dans l'histoire du gouvernement du Québec, un souvenir tout à fait remarquable, parce que c'est sous son règne que la Caisse a vraiment non seulement consolidé son fonctionnement, sa façon de procéder, sa façon de gérer le bas de laine des Québécois et des Québécoises, mais c'est sous son règne que la Caisse aura connu l'essor le plus intensif, le plus spectaculaire. Ce n'est pas par accident que c'est sous son règne aussi que les sociétés financières du Canada anglais, comme on l'appelle communément, aussi bien que les sociétés qui relèvent du gouvernement fédéral, que tout ce beau monde a essayé par diverses tentatives de contrer l'action de la Caisse de dépôt, de limiter ce champ d'action de la Caisse de dépôt et, par conséquent, de limiter la croissance économique du Québec.

Et rappelons-nous certains projets de loi du gouvernement fédéral, soit par le biais de la Chambre des communes ou par le biais du Sénat, qui heureusement ont fait lever un front commun ici à l'Assemblée nationale alors que le Parti québécois était au pouvoir. Il a présenté une opposition farouche à ces tentatives fédérales. Et il faut bien admettre, il faut bien reconnaître que l'Opposition libérale de l'époque a fait front commun avec le gouvernement. Donc, les actions du président Campeau, lorsqu'il était à la Caisse de dépôt et placement du Québec, ont été extrêmement fructueuses, ont suscité, je dirais même, l'envie de sociétés semblables à l'extérieur du Québec, que ce soient des sociétés d'État ou des sociétés privées. Or, comment fonctionnait-il, M. Campeau? Il fonctionnait de façon normale, traditionnelle. J'ai devant moi l'organigramme qui était en vigueur en décembre 1989, au moment où M. Campeau était encore président. Et personne n'a mis en doute l'efficacité de cet organigramme, à ce que je sache. Et c'est là que le silence du ministre des Finances, pour ne pas pas parler de son sommeil, mais tenons-nous-en à son silence, devrait devenir gênant pour ce gouvernement parce qu'il n'a pas expliqué pourquoi il fallait changer cet organigramme, ce plan de fonctionnement. Parce qu'il s'agit encore une fois - rappelons-le-nous toujours - d'une boîte où il y a environ 250 employés et non pas

d'une entreprise publique ou privée où on compterait 20 000 employés, 15 000 employés, comme c'est le cas à Hydro-Québec.

Donc, il s'agit d'une boîte modeste quant au nombre des employés. Une boite prestigieuse quant à la qualité de son action et quant aux répercussions de ses décisions de placement, d'accord, mais modeste quant au nombre d'employés, 250 employés, 260 employés. Il est normal alors qu'il y ait un seul président, un seul patron, un P.-D.G. qui a sous lui cinq bras droits, cinq vice-présidents: aux placements à revenu fixe, aux placements à revenu variable, à la planification et aux relations avec les déposants, un autre vice-président, aux affaires juridiques et institutionnelles de même que placements immeubles et le cinquième vice-président, administration et contrôle. C'est la formule classique, le bon vieil organigramme d'une institution petite en nombre, mais grande en réalisation qui est de nature à créer un climat d'équipe. Une seule direction, une seule autorité, cinq vice-présidents, de qui relevaient 30, 40, 50, 60 personnes, donc, un ensemble d'employés en nombre assez limité pour que chaque vice-président puisse pratiquement connaître chacun de ses employés, chacune de ses employées. C'est presque l'idéal, M le Prési dent.

Le ministre des Finances sait que j'ai une certaine expérience quand même en administration et une certaine formation en administration hospitalière et le président le sait aussi. Le président le sait, je le prends à témoin. Et, sans fausse modestie, j'ai été P.-D.G. d'hôpitaux qui n'avaient pas 250 employés, mais 2500 employés, 3000 employés et cette structure classique fonctionnait très bien aussi. Un directeur général qui a quatre ou cinq vice-présidents qu'on appelle directeur des finances, directeur du personnel, directrice des soins infirmiers, le parallèle, la comparaison est valable. Bon. Il ne serait jamais venu à l'esprit du conseil d'administration de qui je relevais ou du ministre de la Santé et des Services sociaux de qui je relevais indirectement à l'époque, de nommer un deuxième directeur général. Jamais! De même qu'il n'est jamais venu à l'esprit, même du gouvernement actuel, de nommer dans d'autres organismes gouvernementaux, un deuxième président. Encore une fois, je répète que le parallèle avec Hydro-Québec est absolument impertinent, inapplicable. Hydro-Québec, c'est une énorme entreprise, 15 000 à 20 000 employés et il y a effectivement une très grosse exploitation à Hydro. Alors, à la limite, il peut être acceptable qu'on ait, à Hydro-Québec, un président directeur de l'exploitation qui relève du président à la direction. Ça peut être acceptable, dans une entreprise aussi considérable, ça couvre tout le territoire du Québec et même à l'étranger, comme on le sait, une vocation internationale. Mais je mets le ministre au défi et les députés minis- tériels au défi de m'identifier un autre organisme gouvernemental ou paragouvernemental de taille modeste, en nombre d'employés, 250 employés, où on a désigné un deuxième président, une deuxième autorité. Il n'y en a pas. Il n'y en a pas, M. le Président.

Donc, on est obligé de conclure que c'est un poste qui a été improvisé, un habit fait sur mesure pour M. Savard. On était mal pris, on l'avait nommé, on s'était engagé à son égard, c'était devenu public. Puis là, il y a eu des remous, on n'avait même pas parlé au conseil d'administration. D'ailleurs, moi, je pense que, ce soir, en plus de faire venir M. Campeau, on devrait faire venir M. Béland aussi. Si je ne m'abuse, M. Béland a été président ou, en tout cas, il a été membre du conseil d'administration. Il est membre du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Je pense qu'il aurait des choses à dire sur le geste que le gouvernement a posé. D'ailleurs, il en a dit des choses, à l'époque.

Mais, M. le Président, M. Campeau a eu une expérience considérable, il a un prestige considérable. La preuve, c'est que le gouvernement, le même gouvernement qui vient de faire cette gaffe en nommant M. Savard, son collecteur de fonds, a quand même fait de bons gestes de temps en temps. Avec l'incitation du chef de l'Opposition, le chef du gouvernement a quand même nommé M. Campeau coprésident d'une commission aussi prestigieuse. Je pense que si le gouvernement refuse que M Campeau vienne nous faire part de son expérience, ce n'est pas parce qu'il n'a pas de respect pour la qualité du personnage, la compétence du personnage. Il y a d'autres raisons. Quelles sont ces raisons? Peut-être que le ministre...

Le Président (M. Gautrin): M. le député de La Prairie...

M. Lazure: ...voudra nous les donner tantôt, quand on passera au vote. Je termine en vous disant que c'est un poste improvisé donc absolument superflu pour l'organisation, inutile, même que c'est une semence de discorde qu'on fait là. Je pense, encore une fois, que le gouvernement aura à répondre de cette action-là qui vient miner la crédibilité de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Merci.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le député de La Prairie. M. le ministre, est-ce que vous avez quelques commentaires?

M. Levesque: Pas pour mot.

Le Président (M. Gautrin): MM les députés ministériels, auriez-vous quelques interventions?

Une voix: Pas pour l'instant, on va attendre...

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Terrebonne, avec le brio qu'on vous connaît.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Évidemment, il m'apparaît essentiel d'appuyer cette deuxième - il faut le rappeler, c'est seulement la deuxième - motion particulière du député de Labelle, compte tenu des compétences et de l'expérience de M. Campeau. Mais il m'apparaît important, en tout début d'intervention, M. le Président, de m'étonner que le gouvernement ait jugé bon de présumer des intentions de l'Opposition, puisque, dès le dépôt de la première motion particulière, alors même que le discours de celui qui l'a présentée n'était pas terminé, alors que son temps de parole n'était pas terminé, on a jugé bon de déposer une motion de clôture. Ça m'étonne, M. le Président, et vous allez comprendre pourquoi.

Vous avez siégé, cet après-midi, sur le projet de loi 102. Sur ce projet de loi 102, l'Opposition a présenté deux motions particulières pour entendre deux groupes, ce qui se fait normalement dans beaucoup de commissions, la plupart des commissions parlementaires auxquelles j'ai assisté. Et ce n'était pas l'intention de l'Opposition de bloquer le projet de loi 102, mais bien d'entendre deux groupes pour répondre à deux principes, deux articles qui posaient problème, c'est-à-dire celui qui regardait la Commission d'accès à l'information et l'autre article qui touchait la surveillance des dîners. Là, on se retrouve devant le projet de loi 109 où il y a deux articles qui posent problème. C'est exactement la même chose. On a deux articles qui posent problème, l'article 3 et l'article 5, et on demande à entendre - nous sommes à la deuxième motion particulière - une deuxième personne qui est compétente sur le sujet. C'est une règle de procédure tout à fait normale. Le ministre des Finances tantôt nous disait que les députés, les nouveaux députés, se souviendraient du 12 décembre. Effectivement, parce qu'on crée un précédent, celui de mettre une motion de clôture immédiatement après le dépôt d'une première motion particulière, alors que le premier intervenant n'a même pas terminé son temps de parole, c'est un précédent. (22 h 30)

Vous savez, M. Campeau, il est reconnu, ses compétences ont même été reconnues, on a eu un article du Wall Street qui reconnaissait que, durant ses deux mandats de cinq ans, le président, Jean Campeau, a transforme le rôle traditionnellement tranquille de la Caisse de dépôt et placement du Québec en une puissante entreprise d'investissement. Et c'était rapporté le 1er juin lorsque M. Campeau a quitté son poste. Au moment de son départ, M. Campeau, lorsqu'il a fait le bilan de son travail, le bilan de ses deux mandats, a insisté énormément sur le fait qu'il avait réussi grâce à la structure avec laquelle il travaillait. Et là-dessus, M. Campeau a été très clair. Lorsqu'il a déposé son bilan, lorsqu'il a fait un bilan de toutes les réalisations de ses deux mandats, il a bien spécifié et, à plusieurs occasions, que ce qui lui avait permis d'obtenir autant de résultats, c'était la structure actuelle.

Donc, si on décide immédiatement après son départ de changer de structure, on peut s'interroger et il serait bon de l'interroger lui-même. D'autant plus que le gouvernement a quand même reconnu ses compétences puisqu'on a jugé bon de le nommer coprésident de la Commission Bélan-ger-Campeau, Commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec, une commission extrêmement importante. Donc, on a jugé que M. Campeau pouvait et faisait preuve de grande neutralité. Ce qu'il pourrait faire aussi pour le sujet qui nous préoccupe, d'autant plus que c'est un sujet qu'il connaît parfaitement. Personne mieux que lui ne connaît le rouage de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Vous savez, M. le Président, ma formation politique est toujours quelque peu sceptique sur les problèmes que peut causer la dualité, la dualité à tous les niveaux, vous le savez très bien. Nous restons toujours extrêmement pertinents avec nous-mêmes. Nous nous interrogeons et d'ailleurs le Québec entier s'interroge présentement sur les problèmes de dualité. Peu importent les paliers où ils peuvent se poser. Alors, il y aurait peut-être lieu ici, devant ce projet de 101 109, de se poser des questions sur le problème de la dualité. Et si quelqu'un peut comprendre, c'est bien le gouvernement que nous avons en face de nous. Puisque, quotidiennement et régulièrement, à la période de questions, nous nous retrouvons devant des ministres qui ont des dualités d'opinion. C'est la nouvelle expression qu'on nous a apprise, M. le Président, des dualités d'opinion. Et je citerai l'exemple du dossier de Grande Baleine, présentement, qui amène certaines dualités d'opinion entre la ministre de l'Énergie et des Ressources et le ministre de l'Environnement. Nous retrouvons exactement la même dualité pour le projet de loi 102 auquel je faisais référence tantôt, entre le ministre de l'Éducation qui a des besoins d'information et le ministre des Communications qui se doit de respecter la loi d'accès à l'information.

Cette dualité-là, elle est vécue quotidiennement, autant entre ministères qu'entre paliers du gouvernement, et là, on s'apprête à voter un projet de loi qui va faire vivre cette dualité-là...

Le Président (M. Gautrin): ...au Conseil des ministres.

Mme Caron: ...à l'intérieur même de l'administration de l'outil économique le plus important du Québec, la Caisse de dépôt et placement du Québec. Et nous, nous devons accepter, sans

poser de questions, sans nous informer à qui que ce soit, sans nous informer auprès des personnes qu'on Juge les plus compétentes pour ce faire et, là-dessus, du moins, les parlementaires ministériels devraient comprendre qu'on souhaite entendre M. Jean Campeau, puisque c'est celui qui a l'expertise. Tantôt, le ministre des Finances nous disait que M. Cazavan n'était plus président depuis plusieurs années et que, peut-être, il pourrait porter un jugement moins éclairé. Nous ne partagions pas son avis évidemment, mais il ne peut nous servir ce même argument avec M. Campeau. M. Campeau vient de quitter et, physiquement, ce serait très facile à réaliser, M. le Président, puisque M. Campeau se retrouve ici même, au Parlement, et pour quelques jours. Donc, ce serait très facile d'organiser nos horaires pour nous permettre d'entendre M. Campeau.

Donc, je m'étonne que ce gouvernement décide de présumer de nos intentions, alors que nous n'avons fait que le travail régulier et que nous n'avons même pas terminé le travail régulier que nous avons fait à d'autres commissions, dont la loi 102 qui est étudiée actuellement et dont nous poursuivons l'étude dès demain matin, M. le Président.

Alors, je ne comprends pas pourquoi nous ne pourrions pas entendre des experts parier de cette nouvelle structure et poursuivre après l'étude du projet de loi article par article, comme on le fait habituellement, selon nos règles de procédure et selon notre règlement.

On peut s'interroger sur le rôle de l'article 244 pour ce gouvernement, puisque, dès la première motion, on décide d'annuler tout simplement, dans les faits, cette partie de notre règlement. Or, M. le Président, je demande aux membres de cette commission de reconsidérer leur décision et de voir s'il n'y aurait pas lieu de recevoir M. Jean Campeau. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, Mme la députée de Terrebonne. On a vu le brio de votre plaidoyer. Est-ce que quelqu'un, du côté ministériel, aurait le goût de s'exprimer sur la proposition? Pas pour l'instant. Ça viendra, n'ayez crainte. M. le député de Prévost. Non, pas pour l'instant? Alors, M. le député de Bertrand, sur la motion.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je comprends l'empressement du gouvernement à vouloir faire adopter ce projet de loi, mais compte tenu de l'importance qu'il revêt surtout pour l'avenir de la Caisse de dépôt et placement, je reviens sur les commentaires que j'ai faits tout à l'heure, en indiquant qu'il serait souhaitable qu'on entende une personne d'expérience nous parler de sa vision de la Caisse, ainsi que de l'impact que le projet de loi dont nous discutons pourrait avoir. Tout à l'heure, nous avons proposé d'entendre M. Cazavan qui a été président de la Caisse de dépôt, les collègues ministériels ont rejeté cette proposition sans nous donner véritablement de raison pour justifier leur attitude. Nous avons pensé que c'était peut-être en raison du fait que M. Cazavan avait exercé ses fonctions il y a déjà un certain temps et que peut-être le gouvernement aurait été davantage intéressé à entendre quelqu'un qui avait administré la Caisse dans une conjoncture qui ressemble un peu plus à celle que nous vivons à l'heure actuelle. Effectivement, M. Campeau est le dernier président en titre de la Caisse de dépôt et, pour avoir présidé aux destinées de la Caisse depuis les 10 dernières années, il a passé à travers des cycles économiques aussi divers que la récession du début des années quatre-vingt et les années de prospérité qui ont suivi, en fait, années de prospérité de sept ans sans interruption, période inégalée dans les annales modernes de l'histoire économique.

Ceci étant dit, il me semble que les mêmes raisons qui s'appliquaient tout à l'heure et qui justifiaient, à notre avis, la proposition d'écouter M. Cazavan sont d'autant plus valables dans le cas de M. Campeau. J'aimerais, si le gouvernement décide de rejeter encore une fois cette proposition, connaître les raisons pour lesquelles il ne la juge pas appropriée.

Vous ne pourrez pas m'empêcher, M. le Président, d'avoir la réflexion suivante sur le dilemme qui se présente à nous aujourd'hui. D'une part, nous n'avons pas d'objection, comme ça s'est fait dans le passé et comme c'est déjà prévu pour certains organismes d'État importants, que le président-directeur général de ces organismes soit nommé par le gouvernement et qu'il jouisse de la protection de l'Assemblée nationale. Dans ce cas-ci, effectivement, pour protéger en quelque sorte l'objectivité et la neutralité de la Caisse de dépôt, nous n'aurions pas d'objection à ce que le président de la Caisse ne puisse être révoqué qu'à la suite d'un vote de l'Assemblée nationale. Ce qui nous intrigue davantage, c'est le fait que deux postes doivent relever finalement de l'Assemblée nationale quant à leur révocation. Et je ne puis m'empêcher de songer que cet empressement du gouvernement de voter cette loi coïncide étrangement avec les sondages qui placent le gouvernement au désavantage par rapport à notre formation politique et que, de surplus, la personne, dont la protection de l'Assemblée nationale semble la plus controversée, est une personnalité qui a une connotation, pour ne pas dire, une couleur politique très prononcée.

Dans cette situation, j'estime qu'il semble y avoir une corrélation directe entre l'empressement du gouvernement de protéger ce poste par rapport à l'individu qui a été pressenti pour l'occuper. Vous conviendrez avec moi que ce

genre de manoeuvre vise à répondre à des objectifs partisans, j'en conviens, mais que du point de vue du public et du point de vue de la crédibilité d'un organisme de la réputation de la Caisse de dépôt, c'est une manoeuvre plutôt contestable. Et c'est ce que nous essayons justement de démontrer.

Nous n'avons pas d'objection à ce que les grandes entreprises qui relèvent de l'État soient gérées et soient conduites de la façon la moins partisane possible. D'ailleurs, c'est souhaitable. Et ici, j'aimerais amener l'analogie suivante. Je me demande ce que diraient les intervenants du milieu de même que la population du Canada si, par exemple, la Banque du Canada était gérée de la façon que le gouvernement veut gérer la Caisse de dépôt, c'est-à-dire avec deux têtes plutôt qu'un seul gouverneur qui relève du Conseil des ministres et dont la révocation doit, effectivement, passer par le Parlement. Dans ce sens, la Caisse de dépôt et placement, même si elle n'a pas la même fonction et le même rôle que la banque centrale, a développé au cours des dernières années néanmoins un volet important de ses activités qui s'apparentent beaucoup à celles d'une banque de développement, d'une banque de développement, dans le sens où les activités de la Caisse de dépôt qui s'orientent vers l'investissement en partenariat avec des petites et moyennes entreprises, investissement au niveau de l'appui...

Le Président (M. Gautrin): Monsieur, pourriez-vous vérifier s'il s'agit d'un quorum ou d'un vote? Je m'excuse, M. le député de Bertrand. On avait entendu la cloche sonner.

M. Beaulne: Oui, c'est une bonne idée.

Le Président (M. Gautrin): Poursuivez. Je suis tout ouïe à vos propos.

M. Beaulne: Bon. Alors, j'avais amené l'analogie avec...

Le Président (M. Gautrin): C'est le quorum. Merci.

M. Beaulne: ...la Banque du Canada, dans le sens où certaines activités de la Caisse de dépôt et placement, surtout au cours des dernières années, s'apparentent énormément à celles d'une banque de développement. Quand on parle d'investissement en partenariat avec des entreprises québécoises, quand on songe aux investissements récents qui ont été soulignés à maintes reprises dans les journaux, que ce soit dans le cas de Steinberg, que ce soit dans d'autres cas qui ont fait les manchettes, il est incontestable que la Caisse de dépôt est en train de développer un volet de banque de développement qu'elle n'avait pas auparavant, tout en demeurant assujettie aux règles qui concernent ses limites d'investissement dans les différents titres financiers.

Et dans ce sens, il m'apparaît que l'analogie avec la Banque du Canada est quelque peu pertinente. Personne autour de cette table, ni même à l'Assemblée nationale, ni même au Conseil des ministres ne pourrait concevoir que la Banque du Canada et que, d'ailleurs, toute autre institution financière centrale puissent être dirigées par deux personnes dont la révocation exigerait un vote du Parlement, de l'Assemblée nationale, de la Chambre des communes, enfin, du corps des élus. Pourquoi, tout à coup, introduire cette dimension, dans le cas de la Caisse de dépôt et placement? Et c'est particulièrement, comme je l'ai souligné tout à l'heure, la conjoncture politique. Même si ça peut n'être que temporairement, il demeure qu'au moment où nous discutons ce projet de loi, les sondages ne favorisent guère le gouvernement pour le moment et le fait de vouloir garantir le poste d'une personnalité politique jette, à mon avis, quelque peu de discrédit sur la manoeuvre qui a été introduite. (22 h 45)

Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais également revenir sur la proposition d'inviter M. Campeau. Non seulement M. Campeau a l'expérience d'une gestion de 10 ans à la Caisse de dépôt, mais également et ceci est important, il me semble, à l'aube d'un ralentissement ou d'une récession économique, d'écouter le point de vue de quelqu'un qui a eu une expérience diversifiée et variée de conduire les opérations de la Caisse à partir d'actifs qui étaient beaucoup moins importants que ceux qu'elle connaît à l'heure actuelle, et qui a dû s'ajuster aux politiques de partenariat et d'intervention des gouvernements successifs en matière de relance économique, en matière de partenariat québécois des entreprises et en matière de conserver chez nous le contrôle de certains secteurs-clés de notre économie. Et j'aimerais également, j'apprécierais écouter les commentaires de M. Campeau sur les problèmes que peuvent poser pour un gestionnaire de calibre important et de la trempe de ceux qui sont proposés ici, sur un débat public concernant leur révocation advenant une mise en tutelle ou advenant un conflit de personnalités ou d'idéologies de gestion entre les principaux dirigeants de l'entreprise. Et dans ce sens, j'estime que M. Campeau serait une personne tout à fait appropriée dans le contexte actuel.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le député de Bertrand. Est-ce qu'un député ministériel voudrait intervenir?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Gautrin): De ce côté-ci? Un jeune député futur ministériel, si j'ai bien

compris, le député de Gouin.

M. Boisclair: Ah, bien là, M. le Président, si, si... C'est justement.

Le Président (M. Gautrin): Lorsqu'il aura vu la lumière, il aura compris.

M. Boisclair: Oui, de toute façon, ce serait inscrit au Journal des débats pour la postérité.

M. Farrah:... l'objectivité, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Alors, M. le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci. Alors, il me fait plaisir, M. le Président, à mon tour, d'intervenir sur la motion de mon collègue, le député de Labelle, qui vise à faire entendre, devant les membres de cette commission, l'ex-président de la Caisse de dépôt et placement, qui a dirigé cette institution pendant les 10 dernières années. M. Campeau est certes un homme qui a su prendre une large expérience de la gestion de cette noble institution et qui serait sûrement à même de nous conseiller sur des modifications aux structures, qui pourraient être à même de préserver le Juste équilibre dont plusieurs de mes collègues m'ont fait mention tout à l'heure, à savoir cet équilibre entre le besoin d'autonomie de la Caisse de dépôt et le besoin pour l'État de contrôler et d'orienter les grandes décisions économiques.

M. le Président, le ministre avait raison tout à l'heure lorsqu'il disait qu'essentiellement, c'est l'article 5 qui viendra modifier la composition ou la structure de l'organigramme et la composition de l'administration de ta Caisse de dépôt et placement. Et c'est là que M. Campeau pourrait intervenir et nous conseiller sur cet article, puisque l'article 14 de l'actuelle loi sur la Caisse de dépôt serait remplacé. On créerait un poste de président du conseil d'administration et chef de la direction qui présiderait les réunions du conseil et qui verrait à son bon fonctionnement. Ce même président serait responsable de l'administration et de la direction de la Caisse et assumerait les autres responsabilités que lui confie le conseil d'administration. Il serait responsable des relations de la Caisse avec le gouvernement. Le deuxième poste, M. le Président, serait le poste de président et chef de l'exploitation qui agirait sous la responsabilité du président du conseil d'administration et chef de la direction, qui serait principalement chargé de l'exploitation des activités de la Caisse que détermine le conseil d'administration; il assume les autres responsabilités que lui confie le président du conseil d'administration et chef de la direction.

M. le Président, vous comprenez que, comme parlementaire nouvellement élu en cette Chambre, il est bien sûr que j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les propos qu'a tenus le ministre des Finances, qui nous a parlé du fonctionnement du conseil d'administration à la Caisse de dépôt et placement et qui faisait un parallèle avec ce qui se passait à Hydro-Québec.

Cependant, j'ai aussi retenu du propos du ministre des Finances qu'il a rejeté la proposition tout à l'heure qui consistait à faire entendre M. Cazavan devant cette commission, à lui demander de venir témoigner devant cette commission. Le ministre disait: Bien, vous savez, M. Cazavan, malgré tout le respect que j'ai pour ce noble individu...

Est-ce qu'on nous appelle pour voter, M. le Président?

Le Président (M. Gautrin): Non, non, pas du tout. C'est la confirmation de la disponibilité de M. Campeau.

M. Boisclair: Ah, bien là, on peut attendre, M. le Président, de voir quelle sera la... Est-ce que M. Campeau est disponible?

Le Président (M. Gautrin): Vous pouvez poursuivre, M. le député.

M. Boisclair: Ce que je disais, M. le Président, je reprenais les propos du ministre des Finances qui disait, en parlant de son bon ami, l'ex-président de la Caisse de dépôt et placement, M. Cazavan: Malgré tout le respect que j'ai pour cet individu, qui a dirigé les destinées de la Caisse de dépôt et placement avec beaucoup de brio et beaucoup de doigté, ça fait quand même plus d'une dizaine d'années qu'il n'est plus à la présidence, et malgré tout le respect que nous avons pour les connaissances qu'il a et pour son expérience, il n'est peut-être pas l'individu le plus approprié pour venir témoigner sur les modifications que le gouvernement, que le ministre propose.

Alors, nous nous sommes rendus à ses arguments, M. le Président, peut-être que l'Opposition avait tort de faire une proposition demandant d'entendre M. Cazavan. Nous avons décidé de prendre bonne note des commentaires du ministre, pour essayer de faciliter tout simplement le processus ici ce soir, pour éviter qu'on ait à débattre pendant des heures et des heures de motions préliminaires. On s'est dit: Bien voilà, nous allons demander à M. Campeau, qui dirigeait jusqu'à tout récemment les destinées de la Caisse de dépôt et placement.

Alors, nous sommes donc convaincus, M. le Président, que le ministre acceptera d'entendre M. Campeau, d'autant plus que, vous comprendrez comme moi aisément, ça pourrait se faire sans tenir compte de délais importants, puisque M. Campeau, me dit-on, est dans l'immeuble. Il est au salon rouge. Je suis convaincu que votre bon

ami, M. Bélanger, se ferait un plaisir de le remplacer quelques instants, à la présidence de la Commission. Je sais que vous vous sentez en sécurité lorsque M. Bélanger préside, M. le Président, et que vous vous reconnaissez, d'ailleurs, dans ce grand défenseur des intérêts des Québécois et Québécoises.

Mais, M. le Président, je suis convaincu que M. Campeau se ferait un grand plaisir de venir témoigner quelques instants pour nous parler de la pertinence des modifications à apporter au fonctionnement et à la composition de l'organigramme du conseil d'administration.

Ce que nous voulons aussi peut-être mettre en évidence et ce que M. Campeau pourrait venir nous expliquer, c'est de quelle façon les membres du conseil d'administration ont été consultés sur cette modification proposée par le ministre des Finances. Vous comprendrez, M. le Président, que n'importe quel gouvernement, qui est le moindrement respectueux d'une institution aussi importante que celle de la Caisse de dépôt et placement, rappelons-le, M. le Président, plus de 37 000 000 000 $ d'actif...

Comme je l'ai dit tout à l'heure, dans une intervention précédente, on ne parle pas d'un dépanneur du coin là, ou d'un hôpital, ou d'un CLSC, on parle de la septième institution financière la plus importante au Canada. Alors, M. Campeau, pourrait venir témoigner des consultations qu'il a eues ou pas avec le ministre responsable de l'application de la Loi sur la Caisse de dépôt et placement, en l'occurrence, ie ministre des Finances, et faire part des réflexions des membres du conseil d'administration devant la proposition de modification suggérée par le ministre des Finances.

M. le Président, à lire les journaux et à entendre les commentaires qui ont été formulés, soit par M. Louis Laberge, vous comprendrez que je n'oserai pas les répéter devant vous, parce que je suis convaincu que vous me rappelleriez à l'ordre, puisque vous conviendriez avec moi que ces propos seraient sûrement antiparlementaires.

Le Président (M. Gautrin): Disons qu'il a un langage coloré.

M. Boisclair: il a un langage coloré, M. le Président, c'est le moins qu'on puisse dire. Mais il serait intéressant, puisque nous avons eu vent d'un certain nombre de discussions assez soutenues entre les membres du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec... M. Laberge, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, a publiquement affirmé qu'aucune consultation n'avait eu Heu avant de proposer une modification à la structure du conseil d'administration.

Donc, M. Campeau pourrait venir peut-être confirmer ou infirmer ces faits. De plus, M. le Président, non seulement M. Laberge a fait connaître publiquement, non pas son opinion, mais, à sa connaissance, à tout le moins, les consultations qui ont eu lieu ou qui n'ont pas eu lieu, mais le président du Mouvement Desjardins et actuel membre du conseil d'administration de Caisse de dépôt et placement semblait dire, et là, je ne voudrais pas déformer sa pensée, mais vous permettrez, à ma façon, de résumer son propos. M. Béland disait qu'il était inconcevable qu'un conseil d'administration - oui, je vous remercie M. le Président, de me faire signe qu'il me reste deux minutes - M. Béland semblait indiquer que le conseil d'administration qui, lui, a la responsabilité de définir les orientations, de faire une planification stratégique, n'avait pas été consulté sur la proposition de modification proposée par le ministre des Finances et qu'en ce sens, si l'on considère uniquement la décision d'affaires prise par le ministre des Finances, le moins qu'on puisse dire, c'est que cette décision, au dire de M. Béland, n'était pas appropriée. Alors, M. Campeau pourrait venir témoigner, hors de tout doute, de ces discussions qui ont eu lieu au conseil d'administration.

Un autre élément, M. le Président, et je l'aborderai rapidement, puisqu'il doit me rester environ une minute, une minute trente...

Le Président (M. Gautrin): Seulement une minute.

M. Boisclair: ...qui est la question de l'unité dans la gestion et l'administration de la Caisse de dépôt et placement. Vous comprenez, M. le Président, que ce n'est pas pour rien que l'actuelle loi prévoit un certain nombre de garanties dans ces dispositions, pour faire en sorte que le président ou la présidente - peut-être un jour, souhaitons-le - de la Caisse de dépôt et placement ne soit pas soumis à différentes pressions privées ou publiques. C'est d'ailleurs pour ça qu'il est nommé pour une période de 10 ans, qu'il reçoit même la bénédiction des membres de cette Assemblée nationale et, de la même façon qu'il est soustrait à toute décision arbitraire d'un gouvernement ou qu'il est à tout le moins mis à l'abri de l'humeur des différents gouvernements successifs, en étant en poste plutôt pour une période de 10 ans.

M. le Président, nous sommes inquiets, et je crois que M. Campeau pourrait juste - et je termine là-dessus - venir nous renseigner jusqu'à quel point il est pertinent de donner cette même garantie pour le président et chef de l'exploitation. J'aimerais bien entendre M. Campeau venir nous dire ce qu'il arriverait dans une situation, par exemple, où il y aurait un conflit important entre le président du conseil d'administration et le président et chef de l'exploitation, conflit qui pourrait se répercuter au sein même de l'entreprise, cette petite entreprise d'environ 300 employés. Alors, M. le Président, pour ces raisons, je crois qu'il serait opportun d'entendre M. Campeau qui pourrait venir nous donner, à

tout le moins, son point de vue.

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie, M. le député de Gouin. Est-ce que quelqu'un du côté ministériel voudrait intervenir?

M. Boisclair: J'en conclus que mes arguments ont laissé le ministre béat.

Vote sur la motion

Le Président (M. Gautrin): C'est ce que je crois. Donc, on va passer au vote sur la motion suivante: "II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission permanente du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin, elle entende M. Jean Campeau." Mme la secrétaire, pourriez-vous appeler les députés sur le vote.

La Secrétaire: Bien, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Compte tenu que j'ai fait une erreur tout à l'heure.

La Secrétaire: M. le député de La Prairie, pour ou contre?

M. Lazure: Pour la motion.

La Secrétaire: M. le député de Gouin?

M. Boisclair: Pour.

La Secrétaire: M. le député de Bertrand?

M. Beaulne: Pour.

La Secrétaire: M. le député de Limoilou?

M. Després: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Prévost?

M. Forget: Contre.

La Secrétaire: M. le ministre des Finances?

M. Levesque: Contre.

La Secrétaire: M. le député de Verdun?

M. Gautrin: Contre.

La Secrétaire: La motion est rejetée.

Le Président (M. Gautrin): La motion est rejetée. C'est malheureux.

M. Boisclair: Est-ce que vous pouvez nous rappeler le résultat du vote, M. le Président?

Le Président (M. Gautrin): Oui, certaine ment, la secrétaire va certainement vous le dire.

La Secrétaire: Trois: pour. Quatre : contre.

Le Président (M. Gautrin): Trois pour, quatre contre. La motion est donc rejetée. (23 heures)

M. Boisclair: Je pense que ça vaut la peine qu'on en essaie une dernière, M. le Président. On est sur la bonne voie.

Le Président (M. Gautrin): Bon. M. le député de La Prairie.

Motion demandant d'entendre M. Claude Béland M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, je suis heureux de prendre la relève de mon collègue de Labelle, qui est responsable du dossier, comme vous le savez, mais qui est retenu à l'Assemblée, en Chambre, pour défendre les prises de vue, les prises de position de notre parti, du parti de l'Opposition, en regard de quelques projets de loi dont il est le critique. Alors, je présente la motion suivante: "II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission permanente du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin, elle entende - devinez qui? - M. Claude Béland."

Le Président (M. Gautrin): On aurait presque deviné, M. le député de La Prairie. Alors, je pense que c'est une motion de forme et qu'en fonction des règles de procédure, vous pouvez vous exprimer durant 30 minutes.

M. Levesque: Mais si le député avait présenté sa motion antérieurement, ça aurait peut-être été plus facile. Je viens de rencontrer M. Béland, il y a cinq minutes, et il quittait pour ailleurs. Il me semble qu'on aurait dû me prévenir de cette motion-là.

M. Lazure: M. le Président, nos ondes, les ondes du ministre des Finances et mes ondes convergent vers M. Béland. Il y a exactement sept ou huit minutes, avant de revenir dans cette salle, j'ai moi aussi rencontré M Claude Béland qui sortait de la Commission.

Le Président (M. Gautrin): Les grand esprits se rencontrent ici, au Parlement.

M. Lazure: Et M. Claude Béland s'est réjoui de cette initiative que j'allais prendre, parce que je l'en ai informé, j'ai pris la précaution de m'assurer qu'il serait disponible. Et il est disponible. Pour une chose aussi importante, je me rends disponible, dit-il, même s'il avait le manteau sur le dos.

Le Président (M. Gautrin): Alors, plaidez, mon cher ami, plaidez.

M. Lazure: J'y arrive, M. le Président. M. Béland est membre du conseil d'administration depuis trois ou quatre ans, membre du conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Il est, comme on le sait, président du Mouvement Desjardins qui a des actifs légèrement supérieurs à ceux de la Caisse de dépôt et placement du Québec, légèrement supérieurs, parce que le Mouvement Desjardins est le numéro un actuellement, au point de vue des actifs, au Québec.

Et il s'agit d'une personne, là aussi, qui a obtenu des deux grands partis politiques du Québec toutes sortes de marques de confiance. Le gouvernement, avec l'accord du chef de l'Opposition, l'a nommé membre de la Commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec, c'est ce qui explique qu'il est dans le Parlement à cette heure-ci. Le Québec, dans l'ensemble de ses institutions, a reconnu la compétence de M. Béland depuis qu'il a fait ses preuves à la tête du Mouvement Desjardins. M. Béland, donc, a toute la crédibilité qu'il faut, en plus d'avoir l'expérience au conseil d'administration depuis trois ans et demi, pour venir éclairer les membres de cette commission. Remarquez, M. le Président, que j'aurais pu aussi proposer M. Laberge, M. Louis Laberge...

Le Président (M. Gautrin): Alors, c'est ce qu'on pensait être le quatrième.

M. Lazure: M. Louis Laberge, à qui je suis redevable à bien des égards puisqu'il a été mon parrain en politique. A une certaine époque qui va vous rappeler des souvenirs, M. le Président, au Nouveau Parti démocratique...

Le Président (M. Gautrin): Où nous oeuvrions dans le même parti.

M. Lazure: ...alors que vous aviez encore certaines convictions sociales-démocrates Que vous avez, hélas, perdues en cours de route.

Le Président (M. Gautrin): Mais vous étiez fédéraliste, à l'époque, mon ami.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: J'étais nationaliste. Il n'existait pas encore, malheureusement, de parti politique souverainiste et vous êtes bien au courant qu'aussitôt qu'il a été créé, ce parti souverainiste, j'ai délaissé rapidement le NPD pour me joindre au Parti québécois, alors que vous, vous êtes resté, vous avez langui quelques années encore au NPD avant d'être récupéré par le Parti libéral. Bref, je ferme la parenthèse.

Le Président (M. Gautrin): Ha, ha, ha! Cela manque de pertinence, quand même.

M. Lazure: Donc, M. Louis Laberge qui, lui, a plus d'ancienneté au conseil d'administration de la Caisse. Je pense qu'il est là depuis au moins 7 ou 8 ans, sinon 10 ans. Il fait un bon boulot à la Caisse, il surveille, il est là pour représenter le syndicalisme, comme on disait autrefois, la classe ouvrière, alors qu'une autre personne représente la classe patronale. Ça aurait pu être M. Louis Laberge. Ça aurait pu être aussi M. Claude Legault, qui est président de la Régie des rentes, justement, dont j'ai parlé au début de la soirée et dont on a fêté le 25e anniversaire tout récemment. M. Legault aussi aurait eu toute la compétence voulue pour venir nous éclairer, parce que M. Legault, avant d'être nommé par le gouvernement du Parti québécois à la tête de la Régie des rentes, avait été à la tête du deuxième plus gros organisme de gestion de fonds de pension au Québec, à savoir celui de la Fraternité des policiers de Montréal. M. Legault a fait ses preuves aussi comme gestionnaire. C'est un homme éclairé, pondéré, raisonnable et plein d'initiatives. Rappelons-nous son action à Corvée-habitation. Il a présidé Corvée-habitation. Corvée-habitation, c'était un projet extrêmement dynamique, qui a mobilisé les forces patronales, syndicales, communautaires, à une époque où le Québec était en crise économique, comme tout le monde occidental. Et beaucoup de monde a la nostalgie d'un programme tel que Corvée-habitation, beaucoup de gens au Québec se disent: Où sont les programmes qui vont nous faire sortir de la crise le plus rapidement possible? Des programmes du genre Corvée-habitation? Alors, c'était le choix douloureux que j'avais à faire. M. Béland, M. Laberge, M. Claude Legault, et je pourrais en nommer d'autres. Mais le choix de l'Opposition s'est arrêté sur M. Béland.

Alors, je vais vous parler un peu aussi des commentaires que M. Béiand a faits suite à l'annonce faite par votre chef, M. Bourassa, le samedi 2 juin, dans Le Soleil: "Le changement de structure déplaît à Claude Béland." Et je me permets d'en citer quelques paragraphes: "Le président du Mouvement Desjardins, M. Claude Béland, estime que la décision du gouvernement Bourassa de scinder le poste de président de la Caisse de dépôt est une erreur qui aura pour effet de démotiver les vice-présidents de la société d'État. M. Béland, qui est membre du conseil de la Caisse depuis trois ans, trouve surtout regrettable que le conseil n'ait pas été

consulté sur ce changement de structure et entend soulever la question lors de la prochaine réunion. Il est cité ici: "On nous demande à nous d'administrer la Caisse de dépôt, alors c'est ta moindre des choses que ceux qui administrent proposent au moins un organigramme qui convient à la planification qu'on s'est donnée. Alors là, il va faSoir vivre avec des structures qui nous tombent du ciel. " Le ciel, c'est beaucoup dire pour un gouvernement du Parti libéral. Ce n'est pas tout à fait le ciel, quand même!

Quant aux nominations de Jean-Guy Delorme et de Guy Savard, qu'il dit avoir apprises dans les journaux, comme tout le monde, il ne faut pas les mettre dans le même sac. M. Delorme est un homme qui a fait ses preuves et c'est sûrement une nomination valable. Le président de Desjardins ne connaît pas M. Guy Savard. Il ne s'Inquiète pas de ses liens avec le parti au pouvoir. J'imagine qu'il a toute la compétence requise, en ajoutant toutefois que l'expérience des marchés financiers, que ni M. Delorme, ni M. Savard semblent avoir, lui apparaissait comme un minimum pour occuper ces fonctions. Selon lui, la nomination de M. Savard est une erreur, parce qu'elle a pour effet de faire baisser d'un cran les vice-présidents de la Caisse dans la hiérarchie. Ces vice-présidents, d'une compétence rare, ont fait un travail remarquable, estime M. Béland. Pourquoi changer une équipe gagnante? Pourquoi changer une structure gagnante? C'est ia question que j'ai l'intention de poser, dit-il, il ne croit pas à la division des tâches de direction à la Caisse de dépôt, dont le président doit être proche de ses dossiers. J'ai toujours été favorable à un président de la Caisse qui est en même temps chef des opérations.

Et quelques semaines plus tard, effectivement, en juillet, le conseil d'administration de la Caisse tenait sa réunion. Voici ce que Le Soleil du 13 juillet rapporte des commentaires de certaines personnes, suite à leur réunion. "Malgré le tollé que cette nomination avait suscité, celle de M. Guy Savard, le conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement du Québec a accepté hier de créer un nouveau poste de vice-président exécutif et de le confier à M. Guy Savard, ancien collecteur de fonds du Parti libéral. " Ils n'avaient pas le choix, les pauvres gens au conseil d'administration, hein! Le gouvernement leur dit: C'est fait, c'est fait, puis trouvez-lui une niche. "Après trois heures de discussion, le conseil de la Caisse est arrivé à un compromis qui satisfait tout le monde, a expliqué M. Béland, qui s'était opposé publiquement à un tel changement de structure à la Caisse. Ce compromis devrait éviter l'empoisonnement du climat à l'interne et permettre à la Caisse de continuer à bien performer avec sa structure bicéphale, malgré sa structure bicéphale, espère M. Béland. 11

Le président de Desjardins s'était aussi offusqué du fait que le premier ministre avait décidé unilatéralement de modifier la structure de la Caisse sans consulter le conseil d'administration qui, pourtant, a le mandat de gérer la société d'État. M. Béland a fait savoir hier que les membres du conseil avaient unanimement condamné cette façon de faire du premier ministre. Ce genre de nomination téléguidée, dit-il, ce n'est pas très bon pour l'image de la Caisse, mais maintenant que le mal est fait, notre message est qu'il ne faut pas que ça se produise de nouveau.

M. le Président, il s'agit là de commentaires extrêmement durs de la part d'un membre d'un conseil d'administration d'une société d'État, à toutes fins pratiques, d'un organisme public, gouvernemental, la Caisse de dépôt et placement du Québec. Moi, j'ai rarement vu, depuis que je suis assidûment la politique, pas tout à fait depuis aussi longtemps que mon aîné, le ministre des Finances, député de Bonaventure, mais depuis quand même un bon nombre d'années, jamais, je ne pense avoir vu un blâme aussi sévère de la part d'une personne nommée par le gouvernement comme membre d'un conseil d'administration, blâme aussi sévère à l'égard du gouvernement. Évidemment, il a raison, il a raison.

Et on n'a qu'à regarder l'article 5 du projet de loi justement, il dit bien clairement: "Le président du conseil d'administration et chef de la direction... il est responsable de l'administration et de ia direction de la Caisse... " Bon ça va. Et quand on passe au paragraphe suivant, là, il s'agit de M. Savard... Le président et chef de l'exploitation agit sous la responsabilité du préskient du conseil d'administration et chef de la direction. Il est principalement chargé de l'exploitation des activités de la Caisse que détermine le conseil d'administration. Il assume les autres responsabilités que lui confie le président du conseil d'administration et chef de la direction. "

Votre propre loi, M. le ministre des Finances, dit clairement que c'est le conseil d'administration qui doit déterminer les tâches de ce président et chef de l'exploitation, de ce M. Savard. À ce moment-là, comment comprendre que le gouvernement ait le culot, l'audace, l'indécence de nommer un individu sans même en parler à ce conseil d'administration auquel il semble attacher tellement d'importance puisque, dans son projet de loi, il en fait l'organisme - ce conseil d'administration - qui est responsable pour la définition des tâches de M. Savard?

Un peu plus tôt ce soir, j'ai eu l'occasion, M. le Président, de vous parler de l'organigramme qui existait avant cet ouragan de nominations intempestives et mal éclairées. C'était un organigramme classique, un président-directeur général, qui était M. Campeau, à l'époque, il n'y a pas si longtemps, et il avait cinq vice-présidents sous lui avec des tâches bien définies. Maintenant, le nouvel organigramme découle des décisions que le conseil d'administration a

finalement prises. Placé devant le fait accompli, celui-ci avait la commande du gouvernement: On a nommé M. Savard, notre collecteur de fonds et il faut absolument que vous lui trouviez une niche, il faut que lui définissiez des fonctions. Ça donne cet organigramme bâtard qui place M. Delorme un tout petit peu plus haut que M. Savard, parce qu'ils ont quand même tous les deux le titre de président. Alors, M. Delorme est un petit peu plus haut avec le titre de président et de directeur général, patron de la direction, si on veut, et l'autre est un petit peu plus bas, président et chef de l'exploitation. (23 h 15)

Là, on vient de briser l'unité de direction parce qu'il faut bien l'occuper ce M. Savard. Qu'est-ce qu'on lui donne comme responsabilités? On lui donne deux boîtes sur cinq, deux cases sur cinq cases. Il va être responsable de deux vice-présidents, mais pas les moindres, M. le Président. Quand on regarde les responsabilités des deux vice-présidents, M. Ferland et M. Paillé, l'un est responsable des placements à revenu fixe, l'autre est responsable des placements à revenu variable. Dans ces deux vice-présidences, ou dans les mains de ces deux vice-présidents réside, à toutes fins pratiques, l'ensemble, la partie importante, la majeure partie des investissements, des placements de la Caisse de dépôt. On voit à quel point ce M. Savard est placé à un carrefour névralgique. C'est lui maintenant qui contrôle, chef de l'exploitation, qui est le patron des deux vice-présidents qui sont en charge des placements, l'un à revenu fixe, l'autre à revenu variable.

La nature humaine étant ce qu'elle est, nous pensons, l'Opposition, que c'est imposer un niveau de tentation trop élevé pour M. Savard. Il sera tenté, dans ses démarches de placements, dans ses décisions de placements, de se rappeler les grandes bontés d'individus du monde de la finance, du monde des affaires, qu'il allait voir lorsqu'il était collecteur de fonds pour le Parti libéral, qui répondaient généreusement à son appel. Il sera tenté de se rappeler ça et lorsqu'il aura à prendre des décisions: Est-ce que ces 50 000 000 $, on les place dans l'entreprise A ou dans l'entreprise B? Et si les dirigeants de l'entreprise A étaient ses donateurs assidus lorsqu'il allait les voir comme collecteur du Parti libéral, comment ne pas comprendre, quand on connaît le moindrement la nature humaine, qu'il serait tenté, de façon presque irrésistible, d'aller du côté de l'entreprise A? M. le Président, je pense qu'on vient de placer le loup dans la bergerie.

L'autre partie, les trois autres vice-présidents, dorénavant, vont relever de M. Delorme, vice-président à la planification, les relations avec les déposants, l'autre, affaires juridiques et institutionnelles, placements immeubles et le dernier, administration et contrôle. On vient de créer, M. le Président, deux sortes de vice- président. Un type de vice-président, les trois derniers que je viens de nommer qui, eux, relèvent directement du grand patron. Un autre type de vice-président qui relève de celui qui n'est pas tout à fait grand patron. Il est plus que vice-président, il n'est pas grand patron. Il est dans un "no man's land", il est dans une zone grise, il est dans une zone très ombragée. Ça, ça n'augure pas bien, surtout quand il s'agit d'un ancien collecteur de fonds du parti politique. Mais nous aurons, à l'intérieur de cette petite équipe de gestion, qui était composée avant, lorsque M. Campeau était là, de six personnes, un seul patron, cinq adjoints, comme on voit normalement dans une petite boîte où il y a 260 employés, deux sortes, deux catégories de vice-président, une catégorie qui a le privilège de relever directement du grand patron et l'autre qui a un privilège plus douteux de relever de M. Savard. La force de la Caisse jusqu'ici a été de fonctionner de façon extrêmement efficace avec un minimum de tension interne, un minimum tellement bas que, de l'extérieur, on n'a pas perçu ces tensions-là. Il y a en eu sûrement comme dans n'importe quelle organisation humaine. Il y en a sûrement eu. Mais le président, avec une autorité qui était si évidente et avec des canaux de communication qui étaient si clairs, avec ses cinq vice-présidents, pouvait résoudre, à l'intérieur de cette boîte modeste quant au nombre d'employés, des problèmes sans qu'il soit nécessaire d'aller sur la place publique ou de venir à l'Assemblée nationale, comme le projet de loi le propose.

Je m'interromps moi-même, M. le Président. Est-ce qu'il s'agit d'un appel au vote?

Le Président (M. Gautrin): On va demander. Ils en appellent au quorum. Bon, alors...

M. Lazure: On peut suspendre quelques secondes.

Le Président (M. Gautrin): C'est un vote actuellement? Il s'agit d'un vote. Excusez-moi.

M. Lazure: C'est possible qu'il y ait un vote.

Le Président (M. Gautrin): Donc, on va suspendre actuellement nos travaux pour aller en Chambre. Il s'agit d'un vote.

(Suspension de la séance à 23 h 22) (Reprise à 23 h 42)

Le Président (M. Gautrin): À l'ordre, s'il vous plaît!

Suite à la suspension de la séance, la commission reprend ses travaux pour étudier le projet de loi 109. Actuellement, M. le député de La Prairie, je pense qu'il vous reste 10 minutes

pour nous convaincre de l'importance d'écouter M. Béland.

M. Lazure: Oui, M. le Président. Merci. Alors, je reviens à mon propos. M. Béland, ayant été membre de ce conseil d'administration pendant plus de trois ans, pourrait nous renseigner sur les répercussions de ce changement radical dans l'organigramme, dans l'organisation, la structure de la Caisse de dépôt. D'ailleurs, je vous al lu un peu plus tôt quelques-unes de ses déclarations. Il s'en était inquiété. Il avait dit carrément: Ça me déplaît cette nouvelle structure-là. Ça me déplaît, parce que c'est de nature à vicier le climat à l'intérieur de la boîte, le moral des troupes. Alors qu'avec l'organisation précédente, il y avait une petite équipe compacte, un patron avec cinq adjoints, là, on va avoir un grand patron, un autre qui n'est ni grand patron, ni vice-président, avec ce statut bâtard, qui lui aura une partie des vice-présidents, deux vice-présidents et les trois autres demeurant sous l'autorité directe du grand patron.

Je pense que le gouvernement actuel devra être très vigilant s'il veut racheter sa faute jusqu'à un certain point. Toute faute est, jusqu'à un certain point, rachetable. Et il va falloir qu'il multiplie les contacts avec le conseil d'administration, non seulement M. Claude Béland, mais M. Louis Laberge. Je comprends que le ministre des Finances et son gouvernement, ses autres collègues ministres, ne soient pas tellement enclins à multiplier les contacts avec M. Laberge.

M. Levesque: M. Laberge est un de mes bons amis. Détrompez-vous.

M. Lazure: M. le Président, lorsque arrivent des moments importants dans l'histoire, on a vu des amitiés mal résister à des luttes politiques...

Une voix: Se dissoudre.

M. Lazure: ...se dissoudre, fondre même au soleil de l'ardeur des troupes qui sont en train de bâtir un pays. Au soleil de l'ardeur, à la lumière de l'ardeur...

Une voix: C'est poétique.

M. Lazure: ...à la chaleur de l'ardeur. M. Béland pourrait, au nom de ses collègues du conseil d'administration, parce que quand on regarde les journaux, on se rend compte qu'il y a peu de membres du conseil d'administration qui ont fait des déclarations publiques, à part M. Béland... Ça se comprend un peu, parce que M. Béland a un leadership naturel, si on veut, et étant à la tête du Mouvement Desjardins, je répète, le mouvement financier, l'organisme financier le plus important au Québec, il est normal qu'il exerce un leadership naturel et que ses collègues du conseil se reconnaissent en lui. C'est une des raisons pour lesquelles d'ailleurs l'Opposition, après mûre réflexion, a choisi de proposer M. Claude Béland, au lieu d'un autre membre du conseil d'administration

Nous pensons qu'il est important de se faire dire par les membres du conseil pourquoi le changement, la décision du gouvernement plutôt, va chambarder cette structure qui allait si bien et quels en seront les effets à moyen et long termes. Je vois que le ministre des Finances refuse de se le faire dire, mais j'espère qu'il va au moins avoir des contacts avec M. Béland et les autres membres du conseil d'administration, comme je le disais tantôt. Il ne s'agit pas d'aller leur dire quoi faire, mais il s'agit d'aller écouter ce qu'ils ont à dire. C'est un gouvernement qui n'a pas l'habitude d'écouter. On commence l'étude d'un projet de loi, puis au bout d'une heure, deux heures, trois heures, on dit: Assez! On vous a assez entendus. On essaie durant ces quelques heures de proposer au gouvernement de rencontrer des experts ou des groupes, des représentants de la population qui sont touchés par le projet de loi en question. On dit: Non, ce n'est pas nécessaire. Nous, on sait ce qui est bon. Alors, ce n'est pas surprenant qu'ils aient pris cette décision-là sans consulter le conseil d'administration qu'ils chargent eux-mêmes dans leur loi d'énumérer, de définir toutes les fonctions aux postes de direction de la Caisse de dépôt.

Or, M. le Président, je trouve qu'il est essentiel... Si le choix de M. Béland déplaît au ministre des Finances, j'en doute, je ne vois pas pourquoi ça lui déplairait, mais on pourra, dans une autre tentative de compromis, lui proposer, soit M. Laberge, soit M. Claude Legault, ou d'autres qui sont à la Caisse de dépôt. Mais j'espère que le refus de la partie gouvernementale d'entendre M. Claude Béland, ce n'est pas une espèce de prolongement de l'attitude arrogante, pour ne pas dire plus, qu'elle a eue envers le conseil d'administration en ne le consultant pas avant de nommer M. Savard.

M. le Président, je sais que vous n'êtes pas partie à cette décision-là. Ce sont vos collègues du Conseil des ministres qui ont pris la décision, après discussion ou pas, je ne le sais pas. Ce n'est pas impossible que le Conseil des ministres ait été ignoré comme le conseil d'administration a été ignoré - ce n'est pas impossible, ça - et que la décision ait été téléguidée du bunker. Ça, c'est possible, M. le Président. On aurait pu profiter des connaissances, de l'expertise de M. Béland en matière de gestion de grandes entreprises. Et je pense que là aussi, c'est regrettable, le parti ministériel aura à vivre avec ça.

Quand viendra le temps de voter, il semble bien que notre motion sera défaite et je pense que ce sera une autre façon qu'aura le gouver-

nement de dire: Laissez-nous gouverner tout seuls, nous savons ce qui est bon. On appelle ça de l'arrogance et souvent c'est un signe prémonitoire d'une fin de régime. Merci.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le député de La Prairie. M. le ministre, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Levesque:...

Le Président (M. Gautrin): Non. Attendez un instant! M. le député de Prévost, oui. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Très brièvement, cependant, pour donner la chance à Mme la députée.

Le Président (M. Gautrin): Elle a déjà fait de très bonnes performances aujourd'hui.

M. Georges Farrah

M. Farrah: M. le Président, j'aurais aimé entendre davantage nos collègues de l'Opposition, article par article, pour travailler vraiment au coeur du projet de loi comme tel et peut-être, M. le Président, s'il y a lieu, le bonifier. On n'a pas la prétention d'être parfaits. Seulement pour un article, je pense qu'on aurait pu avoir une discussion fort intéressante. Dans ce sens-là, c'est avec beaucoup de regret quand même que je constate et que je vois l'attitude de l'Opposition qui, à mon point de vue, manque à son boulot en contournant le fond de la question en appelant des consultations, M. le Président, avec des motions préliminaires pour inviter MM. Béland, Cazavan et Campeau.

Je pense qu'il faut aussi relever certains faits, M. le Président. Et pour relever ces faits-là, je pense que je vais lire l'article 5 parce qu'on a laissé sous-entendre que la nomination de ces deux personnes-là au sein de la Caisse de dépôt, au niveau de la nouvelle structure orga-nisationnelle, faisait en sorte qu'il pouvait y avoir un conflit entre ces deux personnes. Je pense que l'article 5 nous démontre clairement que ces deux postes, il y en a un qui est au-dessus de l'autre au niveau de la structure hiérarchique. C'est important, justement, pour qu'à ce moment-là il y ait une ligne de conduite qui soit . introduite et qui soit respectée au niveau de l'organisation.

M. le Président, si vous voulez bien, je vais vous lire l'article 5.

Le Président (M. Gautrin): Avec plaisir

M. Farrah: Parce que c'est le coeur du projet de loi, l'article 5.

Le Président (M. Gautrin): Bien sûr, ce serait...

M. Farrah: Et je pense que c'est tout à fait normal de le lire.

Le Président (M. Gautrin): Oui.

M. Farrah: L'article 5 se lit comme suit, M. le Président: "5. L'article 14 de cette loi est remplacé par les suivants: "14. Le président du conseil d'administration et chef de la direction préside les réunions du conseil et voit à son bon fonctionnement. Il est responsable de l'administration et de la direction de la Caisse et assume les autres responsabilités que lui confie le conseil d'administration. Il est responsable des relations de la Caisse avec le gouvernement.

L'article 14.1, M. le Président, qui fait toujours partie du nouvel article 5, se lit comme suit. Et c'est très important, c'est là qu'on constate vraiment la différence au niveau des deux postes comme tels. Je lis, M. le Président: "14.1 Le président et chef de l'exploitation agit sous la responsabilité du président du conseil d'administration et chef de la direction." Agit sous la responsabilité, je ne vois pas là de conflit majeur, M. le Président. On sait qui est le maître à bord. C'est important qu'il soit désigné, j'en conviens, mais je pense que c'est très clair dans cet article-là, M. le Président. Et je poursuis. "Il est principalement chargé de l'exploitation des activités de la Caisse que détermine le conseil d'administration. Il assume les autres responsabilités que lui confie le président du conseil d'administration et chef de la direction."

M. le Président, je ne vois pas de conflit de direction à ce niveau-là, compte tenu que c'est indiqué très clairement au niveau de la loi, qui doit et qui va mener au niveau de la Caisse de dépôt. Je pense que c'était important de soulever l'article 5, M. le Président, qui est vraiment le coeur du projet de loi et qui démontre nettement que les possibilités de conflit sont minimes, compte tenu de la clarté de cet article-là et l'assumation des responsabilités de chacun, M. le Président.

Ce que j'ai pu remarquer aussi, au niveau des remarques de nos collègues d'en face, c'est qu'on faisait allusion à Hydro-Québec alors qu'on a changé la structure; on a amené une direction bicéphale, comme on l'a appelée. Si ma mémoire est fidèle, M. le Président, et vous me corrigerez si j'ai tort...

Le Président (M. Gautrin): Oui, bien sûr.

M. Farrah: ...jamais l'Opposition, lors de l'introduction de cette nouvelle façon de voir les choses, cette nouvelle direction à Hydro-Québec, a fait un tollé épouvantable à cette époque-là. Je pense quand même qu'Hydro-Québec est une entreprise très, très importante, une entreprise

majeure au Québec et une entreprise gigantesque. À ce moment-ci, je pense que je peux un peu cerner la stratégie de l'Opposition, c'est qu'on veut viser plus la personne qui occupe les postes indirectement, en contestant le projet de loi parce qu'ils sont mal à l'aise en contestant l'individu qui est là. Moi, je dis, M. le Président, que l'important au niveau de ce projet de loi, c'est que les responsabilités de chacun sont délimitées de façon très, très précise, très, très claire.

Môme si on invitait ces gens ici, qui sont de très bons gestionnaires... On a parlé de M. Campeau, on n'a jamais dénigré M. Campeau, loin de là. M. Campeau a fait un travail exceptionnel à la Caisse de dépôt et on n'a jamais dénigré non plus la Caisse de dépôt. On a toujours dit que c'était un fleuron. Et ce projet de loi ne fait pas en sorte non plus de dénigrer la Caisse de dépôt, au contraire, M. le Président. Avec les nouveaux défis qui nous attendent, je pense que c'est tout à fait utile, c'est tout à fait opportun de revoir une structure pour s'assurer qu'elle soft aussi efficace que dans le passé. Compte tenu qu'elle a pris une ampleur considérable au fil des années, je pense que c'est de prévoir justement pour s'assurer que cette entreprise4à puisse croître comme elle a crû au cours des dernières années. Alors, M. le Président, je ne comprends vraiment pas l'attitude de l'Opposition officielle avec ses motions préliminaires sans fin. J'aurais préféré, et je pense que l'Opposition aurait eu à gagner quand même à au moins s'attarder au niveau de l'étude article par article. J'aurais préféré attendre. C'est parce qu'on n'a pas eu non plus de la part de l'Opposition des mesures alternatives, à ma connaissance. J'aurais aimé entendre les gens de l'Opposition dire ce qu'ils avaient à proposer, eux, au niveau de la Caisse de dépôt et placement du Québec eu égard au projet de loi présenté. Je n'ai pas entendu de mesures alternatives ou d'amendements qui auraient pu être apportés, en tout cas, au cours de cette discussion.

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, je pense qu'il est important de faire le point un peu à la fin de cette commission parlementaire. J'espère que la nuit portera conseil à nos collègues de l'Opposition afin qu'ils puissent faire leur devoir de façon peut-être plus efficace. Par galanterie, comme m'invitait à le faire M. te député de La Prairie, je vais même laisser quelques minutes à la députée de Ter-rebonne. Peut-être que je l'aurai convaincue, je l'espère, et peut-être qu'on appellera l'article 5, que sais-je! Pour toutes ces raisons, je donne une dernière chance à Mme la députée de Terrebonne de se racheter.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Terrebonne, vous avez encore peu de temps parce que l'ordre de la Chambre finit à minuit comme...

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, je vais d'abord commencer par répondre à certaines interrogations du député des Îles-de-la-Madeleine et l'assurer que lors de la proposition de la nouvelle structure d'Hydro-Québec, l'Opposition officielle avait dénoncé cette mesure en 1988. Elle s'était opposée, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Alors, vous n'étiez pas sûr si nous nous étions opposés, je vous confirme que nous nous étions opposés a cette structure-là et nous nous opposons davantage puisque, effectivement, la Caisse de dépôt et placement du Québec a beaucoup moins d'employés qu'Hydro-Québec; on ne parle pas du tout du même type de structure.

Si le député des Îles-de-la-Madeleine n'a pas compris que durant la présentation des trois motions particulières, nous avons parlé du fond, eh bien, c'est qu'il ne nous a pas écoutés, M. le Président, parce qu'à chacune de nos motions, nous avons effectivement parlé du fond, amplement et régulièrement.

Ce qu'il y a d'intéressant dans la formule et si le député des Îles-de-la-Madeleine n'a pas compris ce que nous proposions, je lui répète parce que nous l'avons dit dans tous nos discours en Chambre et ici même, nous voulons le maintien de la structure actuelle et nous voulons, s'il y a d'autres choses à proposer, entendre les experts qui s'y connaissent pour qu'ils nous fassent d'autres propositions et non l'Opposition, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Terrebonne, le temps étant fini, CendriHon fée superbe redevient citrouille...

Une voix: C'est une belle fée!

Le Président (M. Gautrin):... après minuit et à ce moment-là, je m'excuse on va donc ajourner la commission sine die. Mais attendez un instant, il y a un débat actuellement, à savoir s'il reste une minute ou pas, mais en tout cas... Mais vous auriez votre temps de parole certainement, mais le carrosse est redevenu citrouille.

M. Léonard: Merci.

Le Président (M. Gautrin): Alors, chers amis, la commission du budget et de l'administration est ajournée sine die.

(Fin de la séance à 23 h 59)

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